Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
- page 2 -
C’est alors que j’ai eu une idée. Je pris plusieurs cliché de l’arbre pour les montrer à Walter, les photos
le sortiraient surement de son état d’indifférence. J’ouvris l’objectif de mon appareil et pris une demi
douzaine de clichés de l’arbre. Je le remis dans ma sacoche et me rassis au pied de l’arbre. Je regardai
une fois de plus les feuilles et ferma les yeux. Une brise légère fit bouger les branches de l’arbre,
produisant une musique … ou plutôt des murmures. C’est alors que je me suis retrouvé à nouveau
dans le monde aux trois soleils. Je pouvais à nouveau contempler l’énorme temple, je ne comprenais
pas comment je m’y étais à nouveau retrouvé et cela me terrorisait. J’étais attiré par les ténèbres des
lieux. Je vis l’abime, une chose que l’on ne peut décrire avec des mots ; un puits noir, sans fond,
remplis de créatures qu’on ne pourrait décrire. Mon âme était attirée par le puits, je ne pouvais rien
faire hormis crier. Lorsque j’ouvris les yeux, je n’étais plus sous l’arbre mais je me trouvais, les
vêtements sales et déchirés, à l’endroit à partir du quel j’avais contemplé la colline pour la première
fois. Je m’y étais surement dirigé inconsciemment. J’avais tout le derrière de mon pantalon plein de
terre comme si l’on m’avait tiré une partie du chemin. J’ai regardé la position du soleil et il était
presque en train de se coucher ! Où avaisje donc passé tout ce temps ? Je regardais ma montre, il
était 18 :18… presque l’heure de mon rendezvous avec Walter…
- page 3 -
Cela s’est passé dans le cimetière. Il s’y trouvait entouré par les mauvaises herbes, la pourriture et des
plantes étranges d’où émanait une puanteur atroce que mon imagination associa aux pierres
tombales. Le cimetière semblait abandonné depuis longtemps. Ma première impression fut d’être dans
une nécropole dans laquelle j’étais prisonnier et Walter était devant une tombe en ruine sur laquelle
était inscrit son nom. Nous ne parlions pas, Walter était plongé dans ses pensées. On distinguait
vaguement dans la tombe une sorte d’ouverture noire d’où jaillissaient les émanations si
nauséabondes.
Après quelques minutes, me rapprochant du trou, l’air devint un peu plus supportable. Ma lanterne
dévoila des murs recouverts de salpêtre et des escaliers en pierre recouverts d’une substance
immonde provenant des entrailles de la terre. C’est alors que Walter me dit de sa voix de ténor; une
voix trop calme pour l’atmosphère qui nous entourait:
Je suis navré de te demander d’attendre dehors, mais se serait un crime de te permettre de descendre alors que tu es si
nerveux. Tu ne peux imaginer, malgré tout ce que tu as lu et ce que je t’ai raconté, les choses que je vais devoir affronter. C’est
un travail malsain et je doute qu’une personne n’ayant pas une volonté de fer puisse y aller et en ressortir vivant et sain
d’esprit. Je ne veux pas que tu le prennes mal mais il en est de ma responsabilité.
Je n’ai pas pu répondre. Je ne pouvais qu’attendre. Je finis par entendre d’autres paroles totalement
frénétiques :
C’est terrible…, monstrueux…, incroyable !
Je l’entendais mais je ne pouvais rien faire d’autre sinon reposer mes questions. J’étais entouré de
tombes et il y avait en dessous de moi, une chose terrifiante qui défiait l’imagination humaine, la peur
commençait à s’emparer de moi, je me sentis si mal qu’il puisse penser que je l’abandonnerais ainsi.
- page 4 -
C’est alors que j’ai entendu les cris de Walter :
Enfuistoi! Pour l’amour de Dieu, enfuistoi!
Cette dernière phrase de Walter me redonna la capacité de penser et je pris une décision et lui cria :
Walter ! J’arrive !
Le ton de sa voix changea à nouveau ; elle était plus douce comme s’il s’était résigné à quelque chose.
Vite… avant qu’il ne soit trop tard !
J’ai essayé de ne pas l’écouter, de contrer la peur qui m’empêchait de venir à son aide mais sa voix
résonna à nouveau.
Vaten ! C’est inutile… tu dois y aller… il vaut mieux que ce soit moi seul plutôt que nous deux…
C’est alors que j’entendis Walter crier ; un cri qui se transforma petit à petit en un hurlement emplis de
terreur…
Maudites soient ces créatures infernales…elles sont légion ! Vaten !
Ensuite, le silence. Je ne sais pas combien de temps je suis resté sur place, stupéfié, murmurant,
susurrant, je l’ai appelé et j’ai crié :
Walter ! Où estu?
Et la pire des horreurs arriva jusqu’à moi, incroyable, impensable et impossible à expliquer. Le temps
semblait être arrêté, seuls mes cris pouvaient rompre ce silence mais au bout d’un certain moment, il y
eut un autre bruit, je tendis l’oreille pour mieux l’écouter et je l’ai appelé à nouveau :
Walter ! Estu là ?
Et pour réponse, j’entendis ce qui provoqua les ténèbres dans mon esprit. Je n’essaierai pas d’expliquer
cette chose, cette voix, et encore moins de la décrire en détail. Les premières paroles me laissèrent
inconscient et provoquèrent un trou dans ma mémoire que je n’ai pu combler que maintenant. Vous
aije dit que la voix était profonde, creuse, inhumaine et spectrale ? Que doisje dire ? Ce fut la fin de
mon expérience et aussi de mon histoire. J’ai entendu la voix et rien de plus… J'ai entendu une voix
provenant des profondeurs de la tombe éventrée alors que tout autour de moi je pouvais voir les
ombres amorphes des nécrophages. Et voici ce qu'elle dit:
"Imbécile, Walter est déjà MORT!"
- page 5 -
La Chose au Clair de Lune
Après la réussite de la semaine passée, mes rêves au sujet de l’Arbre de la colline et la disparition de
Gilman, sa réapparition – où du moins ce que je pensais l’être et pour finir sa disparition définitive
m’ont forcé à me retirer dans ma maison au 66 Rue du Collège à Providence. J’étais sur le point de la
Pension de Ma lorsque j’entendis le facteur prononcé mon nom à la propriétaire. Je m’approchai la
peur au ventre… Une lettre pour moi ? Qui pouvait savoir que j’étais à Arkham ? Sans attendre, j’ouvris
la lettre qui provenait de Kingsport tout en m’installant confortablement sur une des chaises de la salle
à manger. Je reconnus tout de suite l’écriture de Morgan Fischer, un collègue de l’université. Je ne
savais pas comment il avait pu apprendre que j’étais à Arkham et surtout où je logeais. La lettre disait :
« Cher W., le 24 Novembre de 1927 –je ne sais même pas en quelle année nous sommes je me suis endormi et j’ai eu un rêve ;
depuis ce jourlà, je ne peux plus me réveiller.
Mon rêve commença dans un endroit humide, marécageux. Le ciel était gris et automnal et au nord se trouvait une sorte de
montagne. Poussé par ma curiosité, j’escaladai les rochers et c’est alors que je pus voir que ce qui m’entourait. Il y avait des
centaines de tunnels qui semblaient s’enfoncer dans les profondeurs de la terre.
La plupart des entrées de ces tunnels étaient étroites et difficiles d’accès; l’obscurité était extraordinaire et je ne pouvais plus
voir les corridors qu’il pouvait y avoir. La peur commençait à prendre le contrôle de mon esprit comme si elle voulait prendre
possession de mon corps.
C’est alors que je trouvai la sortie, illuminée par la lumière de la lune. Je regardai autour de moi mais il n’y avait aucun être
vivant ; mais je sentis une sorte de mouvement, quelque chose provenant des souterrains que je venais de quitter.
Après avoir marché un bon moment, je me cognai le pied contre des barres d’acier… qui semblaient être celles d’un tramway.
Je les suivis et je vis une voiture jaune portant le numéro 1852, c’était un double wagon dans le style des années 19001910.
Il était vide mais on aurait dit qu’il était sur le point de partir ; il avait son trolley collé aux câbles et son frein à air soufflait
de temps en temps. Je sentais que je devais y monter et je cherchais désespérément un interrupteur… c’est alors que je
remarquai qu’il manquait le levier de commande, ce qui indiquait l’absence du conducteur.
Je me suis assis sur un des sièges. C’est alors que j’entendis un bruit provenant de la gauche et je vis les silhouettes obscures de
deux hommes. Ils portaient les casquettes de la compagnie et ne pouvaient donc être que le conducteur et son contrôleur. Mais
l’un d’eux commença à humer l’air et il leva ensuite la tête vers la lune et se mit à hurler tandis que l’autre se mettait à quatre
pattes, prêt à courir vers le wagon.
Je me suis directement levé de mon siège et je courus le plus loin et vite possible de ce lieu poussant mon corps à sa limite… Je
me suis mis à fuir non pas parce que l’un d’eux s’était mis à quatre pattes mais parce que le visage du conducteur était une
sorte de cône blanc duquel sortait un tentacule rouge sang.
Je me rendis compte qu’il ne s’agissait que d’un rêve ; mais cela ne me soulagea point.
Depuis cette terrible nuit, la seule chose que je désire est de me réveiller… mais je ne l’ai pas encore fait !
Que du contraire, j’ai découvert que je suis un habitant de cet affreux monde onirique! La nuit se termina et vint le jour,
j’errais sans but dans ces terres marécageuses. Je n’attendais qu’une chose …me réveiller mais ce n’était pas possible. Vint
alors la nuit et c’est alors que je le vis … le vieux tramway et à coté de lui, une créature hideuse éclairée par la lumière de la
lune !
Les jours passaient mais ils étaient tous semblables. La nuit me ramenait toujours au même endroit. J’ai essayé de ne pas
bouger mais la peur m’en empêche… cette créature m’en empêche. Mais aujourd’hui, j’ai pu trouver un bureau de poste
abandonné, j’espère que cette lettre saura te trouver mais je ne veux pas savoir qui ou plutôt quoi te la remettra.
Mon Dieu ! Quand pourraisje me réveiller ?
Aidemoi W. !
Morgan F. »
Voilà ce que disait la lettre de Morgan. Je devais aller à Kingsport mais j’ai peur de ce que je pourrai y
trouver.
- page 6 -
Venant des Ténèbres
Je ne peux parler de Morgan Fischer, un ami d’université, sans une certaine crainte. Une peur qui n’est
pas uniquement due à la forme sinistre à cause de laquelle il a disparu mais sinon la nature de son
travail, ses recherches qui devinrent plus terrifiantes lors de notre troisième année de cours à la Faculté
de Médecine de l’Université Miskatonic d’Arkham. Lorsque nous étions ensemble, le coté diabolique et
prestigieux de ses expériences me fascinait totalement. Mais, maintenant qu’il a disparu dans la brume
de ses rêves, le charme est rompu et j’en ai encore plus peur. Les souvenirs et les possibilités sont
toujours plus terribles que la réalité.
L’horrible incident se déroula lors de notre amitié et il m’est encore difficile d’en parler aujourd’hui. Cela
se passa, comme je l’ai dit, lorsque nous étions à la Faculté de Médecine, où Fischer s’était rendu
célèbre grâce à ses folles théories sur la nature de la mort et la possibilité de la vaincre artificiellement.
Ses arguments tournaient autour de la nature mécanique de la vie et que l’on pourrait réactionner ce
mécanisme grâce à une substance chimique bien précise mais uniquement après la mort du patient.
Afin de prouver ses théories, il tua de nombreux lapins, cobayes, chats, chiens et singes et il finit par se
transformer en la personne la plus ennuyeuse de la Faculté. Il avait obtenu, à plusieurs reprises,
certains signes de vie sur les cadavres de ces animaux ; même parfois des preuves violentes de vie… Je
me suis toujours montré fort tolérant envers ses travaux. Mon ami croyait que le succès de la
réanimation artificielle ne dépendait que de l’état des tissus ; et que seuls les cadavres dans un état de
décomposition peu avancé pouvaient être réceptifs à son traitement.
Lorsque nous étions étudiants, nous n’avons jamais du nous soucier de comment récupérer des
échantillons pour nos expériences. Deux noirs de la communauté s’occupaient de renflouer les
réserves. Ils ne posaient jamais de questions. Fischer était à ce moment là, jeune, mince et portait des
lunettes, il avait une santé fragile, les cheveux blond, des yeux bleu pale et une voix douce ; c’était
assez étrange de l’entendre dire que les fosses communes étaient relativement plus intéressantes que
le cimetière de l’Eglise du Christ car la plupart de ses cadavres étaient embaumées et donc inutiles à
ces recherches.
La grange désinfectée de Chapman, de l’autre coté de Meadow Hill fut mon idée ; c’est là que nous
avons aménagé une pièce du rezdechaussée comme salle d’opération et une autre comme
laboratoire. Les deux sales avaient d’épais rideaux à leurs fenêtres afin de ne pas divulguer nos
recherches mais si jamais ils devaient nous découvrir, nous nous étions mis d’accord pour dire qu’il
s’agissait d’un labo chimique.
Nous gardions un oeil sur la section nécrologique locale tels des vampires puisque nous avions besoin
de corps bien spécifiques. Des corps enterrés il y a peu de temps n’ayant subi aucun moyen de
préservation artificiel ; préférablement sans aucune malformation et surtout avec leurs organes au
complet. Nous préférions les corps de victime d’accident. Et un jour, la mort nous sourit puisqu’on
avait enterré dans la fosse commune un corps presqu’idéal : un jeune ouvrier robuste qui s’était noyé
la veille dans l’étant de Summer.
Trouvez l’endroit du cadavre fut facile mais l’en sortir était quelque chose de vraiment répugnant et à
l'époque, je n’avais pas peur des cimetières mais je peux dire que cette nuit là, je pouvais sentir une
sueur froide couler le long de la colonne.
C’est sur une table de dissection improvisée, installée dans la vieille grange, à la lumière d’une lampe à
acétylène, que nous avons posé le corps, il avait un aspect spectral. C’était bien un jeune robuste et en
bonne santé. Les yeux fermés, il semblait plus endormi que mort. Nous avions finalement ce que
- page 7 -
Fischer désirait : un mort parfait, apte à la solution que nous avions méticuleusement calculée. La
tension était énorme. Nous savions que nos chances de réussites étaient faibles mais nous ne
pouvions renoncer à notre rêve. Mais si nous y arrivions, que penserait l’esprit de cette créature, ses
cellules cérébrales auraient pu être trop endommagées. Selon moi, je pensais que le corps conservait
encore une sorte d’ « âme » et j’avais un peu peur des secrets que pouvait offrir quelqu’un revenant du
royaume des morts. Je me demandais qu'avait bien pu voir ce jeune homme lors de son séjour chez
les morts. Fischer semblait plus calme que moi lorsqu’on lui injecta une dose du fluide dans une des
veines du bras du cadavre.
L’attente était épouvantable mais Fischer ne perdait pas espoir. De temps en temps, il plaçait son
stéthoscope sur la cage thoracique du cadavre afin de détecter un souffle ou un battement de cœur.
Mais après plus d’une heure, déçus, nous nous pensions que la formule n’était pas adaptée mais il ne
voulait pas se défaire du cadavre sans tester une autre modification de la formule. Nous avons pris la
lampe et laissé le cadavre dans l’obscurité la plus totale et nous mirent à travailler sur une nouvelle
formule.
Le succès fut totalement inespéré. De la salle plongée dans l'obscurité que nous venions de quitter
nous parvint une succession de cris des plus démoniaques et terrifiants que nous n'ayons jamais
entendus. Même le chaos du son infernal venant de l'enfer, relâchant l'agonie des damnés, n'aurait été
plus indicible. Car toute la terreur surnaturelle et le désespoir contre nature de la nature animée se
rejoignaient dans une cacophonie inconcevable.… c’est alors que nous nous précipitâmes vers la
fenêtre la plus proche pour fuir, tels des animaux apeurés, faisant tombés des tubes et les lampes.
Nous ne nous séparions pas, nous nous étions réfugiés dans la chambre de Fischer, nous y avons parlé
la lumière allumée jusqu’au petit matin. Nous avions élaboré des théories plausibles et scientifiques
afin de nous rassurer, stipulant que la durée de vie de cette chosene devait pas être longue...dans le
seul et unique but de pouvoir dormir durant la journée. Mais en lisant le journal, deux articles nous
quittèrent le sommeil. La vielle maison inhabitée de Chapman avait inexplicablement pris feu et n’était
désormais plus qu’un tas de cendres ; c’était normal, cela était surement du à notre fuite et aux lampes
à acétylène.
L’autre article parlait du fait que des personnes auraient essayé d’ouvrir sauvagement et sans outils la
nouvelle tombe de la fosse commune. Ce qui était étrange puisque nous avions replacé
soigneusement la terre à sa place.
Les seize années suivantes, Fischer vécut en regardant toujours pardessus son épaule, se plaignant
d’entendre des bruits de pas derrière lui. Et aujourd’hui, il a disparu.
- page 8 -
cadavre était bien mort et malgré cela, il était revenu à la vie mais ce n’était plus humain, ce souvenir
transforma à tout jamais l’âme du pauvre Fischer … il était vide et froid dont le seul but était
d’observer la nature humain et insensible au reste du monde.
Mais en réalité, Fischer avait peur ; ses abominables expériences l’avaient conduit à se cacher et
sursauter au moindre son. La police était en partie responsable de cette peur mais parfois, sa nervosité
était plus profonde et étrange que jamais et surement liée aux abominations indescriptibles qu’il avait
fait subir à ces cadavre. En général, il finissait ses expériences pistolet au poing mais il n’était pas
toujours assez rapide. C’est ce qui se passa avec le premier exemplaire où l’on retrouva sa tombe
saccagée et griffées de part en part. Ou encore ce qui se passa avec le cadavre d’un professeur
d’Arkham qui commit de nombreux actes de cannibalisme avant d’être capturé et enfermé dans une
cellule capitonnée de Sefton où il se frappa la tête contre les murs durant six longues années. Il était
difficile de parler de la plupart des exemplaires qui n’avaient pas été détruits puisque ces dernières
années le génie scientifique de Fischer s’était transformé en obsession insane et fantastique et ne
s’était pas uniquement consacré à réanimer des cadavres sinon des parties de corps.
Je ne peux dire si Fischer avait peur ou non de ses « expériences » qu’il n’avait pas pu éliminer. Il devait
tout de même y penser, il savait que ces monstres existaient quelque part. La disparition de ces
créatures était fort inquiétante : Fischer ne connaissait le refuge que d’une celle de ses créatures, la
cellule capitonnée de l’asile de Sefton.
Dans sa dernière demeure, il installa un laboratoire souterrain qu’il construisit dans le plus secret par
des ouvriers d’autres régions dans lequel il y avait un grand incinérateur afin de pouvoir éliminer en
toute discrétion les cadavres, morceaux et fragments synthétiques des corps qui avaient servi à ses
expériences… ou devraisje dire atténuer ses pulsions morbides.
Lors de la création de son laboratoire, les ouvriers découvrirent des fondations très anciennes ; sans
doute liées au vieux cimetière bien qu’elles soient trop profondément enfoncées dans le sol pour
déboucher sur une sépulture récente. Après de nombreux calculs, Fischer conclut qu’il devait y avoir
une chambre secrète sous les tombes d’Averill dont le dernier enterrement remontait à 1768.
Il étudia les parois qu’avaient découvertes les pioches des ouvriers et se préparait mentalement à ce
qu’il pourrait découvrir. Car il ne doutait pas une seule seconde qu’il allait découvrir des secrets
séculiers mais pour la première fois, sa timidité ou sa crainte le poussèrent à laisser intactes les
fondations qu’il venait de découvrir et de les recouvrir à nouveau. Et cela resta ainsi jusqu’à ce qu’il se
réveille de son cauchemar.
Fischer s’aperçut qu’une partie d’un des murs de son laboratoire était en train de s’effondrer, c’était
l’endroit exact où il avait découvert les anciennes fondations. Il s’en approcha et vit une petite
ouverture noire, il ressentit un courant d’air émanant de l’orifice, un vent froid et humide et l’odeur des
entrailles pestiférées d’un corps en putréfaction. A ce moment précis s’éteignirent les lumières et vit
des créatures fluorescentes surgir du monde inférieur, une horde silencieuse surgit de sa folie ou pire
… Leurs silhouettes étaient humaines, ils retiraient les pierres silencieusement du mur une à une.
Lorsque la brèche fut suffisament grande, ils pénétrèrent dans le laboratoire en file indienne. Une sorte
de monstruosité aux yeux exorbités attrapa Morgan Fischer. Fischer ne résistait pas ni ne criait. Ils se
penchèrent ensuite tous au dessus de lui et commencèrent à le démembrer, pour finir par emmener
ses restes dans la crypte souterraine de ces fabuleuses abominations. En disparaissant, ses yeux bleus,
derrière ses lunettes, bougeaient frénétiquement, révélant pour la première fois depuis des années une
émotion frénétique.
- page 9 -
Fischer avait disparu. L’incinérateur contenait uniquement des cendres inidentifiables. Les détectives
m’interrogeaient mais que pouvaisje dire ? Ils ne retrouveraient surement pas Fischer avec les
informations que j’avais. J’ai parlé de ses rêves mais ils se moquèrent de moi. Ils faisaient sous
entendre que j’étais fou ou un assassin…je suis probablement fou. Mais il se peut que se ne soit pas le
cas, si seulement ces légions des tombes n’étaient pas si silencieuses.
Koth d'Hyborie
Au retour de mes terribles expériences de mon passé commun avec Fischer j'ai vu,dans un rêve, la ville
de la vallée et la côte qui s’étendait à n’en plus finir. Il était aussi dans un rêve, la ville se nommait
Koth, chaque fois que j’en rêvais elle portait un autre nom. Etaitce peutêtre plus facile pour moi de
l’accepter si elle changeait de nom à chaque instant.
Au plus je me retirais du monde réel au plus mes rêves devenaient merveilleux et je dois dire qu’il
m’aurait été totalement impossible de les retranscrire sur du papier. Certains d’entre nous, nous
réveillons pendant la nuit avec, encore en tête, des images de jardins extraordinaires, de fontaine qui
chantent et d’animaux qui parlent, un monde merveilleux qui nous fait atteindre la joie et où la
tristesse ne réside pas.
Koth semblait très vieille. Je me demandais si la ville me cachait des choses, je n’avais jamais vu de
morts ou de personnes endormies. Certains quartiers étaient envahis par les mauvaises herbes et les
fenêtres étaient cassées un peu partout. Un jour, mon regard fut attiré par un vieux chemin menant
hors de la ville, lorsque j’arrivai au bout, je vis qu’il tombait dans le vide, un vide sans fin. Quelque
chose en moi me disait de continuer d’avancer, de me laisser tomber dans cette absence de matière,
m’abandonner à cet abysse afin d’y flotter à tout jamais. Mais un son ténébreux m’en empêcha… je
repartis à l’aventure et découvrit une immense construction de pierre brute, entouré de jardins
exotiques et de cerisiers. Ce bâtiment était rustre et à la fois magnifique, une véritable œuvre d’art
massive… mes sens étaient envahis de nouvelles sensations… tellement de joie que j’ai oublié de me
réveiller.
C'est ainsi que j'ai cherché inutilement mon chemin pour rentrer à la maison, contemplant
d'innombrables merveilles et m'échappant miraculeusement du grand prêtre au masque de cire jaune
qui vivait reclus dans son monastère préhistorique de pierre.
Il est temps de se réveiller !
- page 10 -
Le puritanisme qui imbibait Arkham avait formellement interdit la boxe, ce qui provoquait surement les
conflits entre ouvriers. Une nuit d’hiver, ils avaient décidé d’organiser un combat qui eut comme vous
vous en doutez des conséquences désastreuses. Deux polonais vinrent me chercher, ils étaient terrifiés,
ils me supplièrent dans une langue totalement inconnue de les accompagner, je ne compris pas un
mot mais je lisais le désespoir dans leurs yeux. Lors du combat, Kid O’Brien (un jeune homme avec un
nez crochu fort peu irlandais) et Adbul Alijalatt, « La Bête du Caire ». Le noir avait été mis KO et après
l’avoir examiné, je pus constater qu’il ne s’en remettrait pas. C’était une personne répugnante avec un
air de gorille, des bras anormalement longs et une figure qui vous ferait obligatoirement penser aux
secrets Egyptien enfouis sous une pyramide. Ces ouvriers étaient pour la plupart des étrangers et ils
furent soulager lorsque je leur proposa de me débarrasser du corps en secret.
La lune était magnifique et illuminait le paysage sans neige, je pris ensuite le cadavre et l’emmena au
cimetière avec l’aide de quelques polonais. Nous nous déplacions par des petites ruelles car après
tout, si la police nous tombait dessus, nous serions dans de beaux draps ! Une fois arrivé au cimetière,
nous fîmes attention de ne pas se faire remarquer par le gardien qui faisait sa ronde. Comme le lever
du soleil s’approchait dangereusement, nous tirâmes le corps le long du sentier du bois afin de
l’enterrer dans la zone anonyme. La fosse n’était pas profonde. Nous couvrîmes son corps de feuilles et
de branches sèches afin d’être certains que la police ne le trouve jamais !
Le lendemain, un patient vint me compter que la police suspectait certains ouvriers d’avoir organisé un
combat de rue et que l’un des combattants était mort. La police me convoqua l’aprèsmidi pour que je
les aide sur une affaire étrange. Une italienne était devenue hystérique parce que son enfant, un petit
de cinq ans, était parti dans la matinée et n’était pas revenu pour manger alors qu’il lui fallait des soins
médicaux journaliers pour son cœur. Cela me semblait totalement stupide car l’enfant c’était déjà
enfuit plusieurs fois mais les paysans italiens sont extraordinairement superstitieux. Vers sept heure du
soir, la femme mourut et son mari monta un scandale incroyable, me menaçant de me tuer, me
blâmant pour la mort de sa femme. Ses amis le saisirent lorsqu’ils le virent prendre un couteau et
lorsque je partis, je pouvais l’entendre me maudire et jurer qu’il se vengerait. Dans sa peine, l’homme
semblait avoir oublié la disparition de son fils. Alors que la nuit tombait, on pensait organiser des
battues dans le bois mais la plupart des amis de la famille devaient s’occuper de la défunte et de son
mari. La pression qu’il y avait sur mes épaules était incroyable, entre la police et l’italien, je ne savais
plus où donner de la tête.
Je suis allé me reposer vers onze heures mais je ne dormis pas bien. Arkham avait des policiers très
efficaces et je ne pouvais m’empêcher de penser au scandale que cela provoquerait si on découvrait ce
que j’avais fait la nuit précédente. Cela pouvait signifier la fin de mon travail dans cette région … voire
même la prison. Les rumeurs sur les combats de boxe m’inquiétaient. Vers trois heures, la lueur de la
lune me frappait les yeux mais j’ai préféré me retourner plutôt que de fermer les volets. Ensuite,
j’entendis quelqu’un frapper à ma porte. Je pris mon arme et ma torche électrique, il devait s’agir de
l’italien et non de la police.
Il vaudrait mieux que je descende, me disje à moimême. Ce ne serait pas correct de ne pas répondre
; il se peut que cela soit un patient… ce serait typique des ces imbéciles de frapper à la porte de
derrière.
Je descendis donc silencieusement, la peur au ventre à cause des derniers évènements, on frappa à la
porte une autre fois mais plus fort. La porte était là, devant moi, j’en pris la clenche et commença à la
tourner doucement. La lumière de la lune dévoila le visage de mon visiteur et sans aucune crainte je
- page 11 -
vidai mon chargeur sur ce dernier, je n’avais pas peur d’attirer la police grâce à l’isolement de ma
maison. Il ne s’agissait pas de l’italien ni de la police. C’était un être gigantesque difforme qui ne
pouvait exister que dans les cauchemars.
C'était une apparition composée d'yeux vitreux, noire, et qui se tenait presque à quatre pattes, couverte
de feuilles, de branches et de boue, et salie par du sang coagulé. Elle laissait apparaître entre ses dents
reluisantes une chose cylindrique, terrible, blanche comme la neige, qui se terminait par une main
atrophiée...
La caverne
L’horrible conclusion qui s’était formée petit à petit dans mon esprit commençait à devenir une
certitude. J’étais perdu pour de bon, perdu et sans espoir de sortir de ce labyrinthe caverneux. Le
dernier visage humain que j’avais vu était celui de l’italien jurant de se venger mais c’était avant de me
réveiller en ces lieux. Au final, je ne sais pas si me libérer de mes liens et sortir de la petite pièce dans
laquelle je me trouvais était une bonne idée… mais je ne voulais pas attendre le retour de ce fou ! C’est
pourquoi j’ai pris tout ce qui pouvait m’être utile et que je suis parti à la recherche de la sortie. J’avais
beau regarder partout, je ne trouvais aucun point qui aurait pu me servir de référence. L’espoir s’était
évanoui. De plus, après toutes ces années d’études, la seule chose que je savais était ce qui arrivait aux
personnes dans la même situation que moi … la frénésie… Mais je devais éviter cela à tout prix ! Je
pensais qu’au final j’avais très bien pu laisser passer la sortie mais en fin de compte, si je devais mourir,
ce lieu me semblait parfait car ce lieu était plus calme et moins démoralisant que le cimetière.
Ma torche commençait à s’éteindre et bientôt les ténèbres m’engloberaient. Dans un dernier effort,
j’explorais la caverne, retournant la moindre pierre, touchant toutes les parois et ce jusqu’au dernier
rayon de lumière. Il ne me restait plus qu’une solution, crier de toutes mes forces afin d’attirer
l’attention de quelqu’un. Quelqu’un m’entendrait car les innombrables parois et l’hauteur du plafond
permettait à mes cris de résonner et prendre de l’ampleur. C’est alors que je vis quelque chose au
loin… étaitce fini ? Quelqu’un venaitil enfin à mon aide … ou étaitce le fou qui revenait pour assouvir
sa vengeance. La seule chose que je pouvais entendre était des bruits de pas… lourds et lents, mon
esprit confus me disait que ce qui s’approchait n’était pas humain mais il fallait en être sur et c’est
alors que j’entendis des bruits beaucoup plus inquiétant que les pas.
Mes cris avaient surement dû réveiller une bête féroce. Étaitil possible que le Tout Puissant avait choisi
une mort plus rapide et douloureuse que celle de la faim ; cependant, mon instinct de survie, qui ne
dort jamais vraiment, s’agita, me disant de m’échapper de la créature, de partir loin afin de retarder
mon inévitable fin ! Mais je devais réfléchir, si je partais en courant, on m’entendrait et il serait facile de
me poursuivre mais il se pouvait que la chose qui arrivait vers moi soit tout aussi désorientée dans ces
ténèbres et qu’au finale, passe à coté de moi sans me remarquer.
Mais en réalité, la créature utilisait son odorat, un sens puissant qu’elle pouvait utiliser sur des
kilomètres, ignorant totalement toutes autres odeurs dérangeant sa chasse. Il fallait que je m’arme afin
de me protéger. Je me mis à la recherche des plus gros débris de rochers jusqu’à tenir en main deux
gros rochers capables de fracturer d’un coup le crâne humain. C’est alors que j’aperçus des empreintes
qui devaient certainement appartenir à la créature, ce qui était étrange c’est qu’on pouvait voir des
empreintes d’un quadripède cependant, ses mouvements étaient irréguliers comme si les pattes
antérieurs et postérieurs manquaient de coordination mais on pouvait voir que par moment, la
créature se mettait étrangement sur deux pattes et continuait sa route de cette manière… c’était plus
- page 12 -
qu’étrange. Je me mis à scruter les ténèbres à la recherche de cette chose mais mon esprit me jouait
des tours, je voyais des formes hideuses et terrifiantes dans l’obscurité, elles m’entouraient, elles
semblaient s’approcher de moi. J’étais sur le point de pousser un cri de terreur mais je ne voulais pas
commettre cette erreur qui aurait certainement indiqué à la chose qui rodait dans la caverne mon
emplacement. J’étais pétrifié de peur, je me demandais où pouvait bien être cette chose et surtout
quand arriveraitelle à me découvrir. Les bruits des pas étaient désormais très proches. J’entendais les
gargouillis de la chose. Le charme se rompit et je lançai de toutes mes forces l’une des pierres vers la
zone d’où provenaient les bruits. Je lançai le deuxième en ajustant le tir et entendit un cri inhumain. Je
me suis collé à la paroi. On pouvait encore entendre les bruits de la créature et mon envie de
l’examiner disparu. Un peur irrationnelle et superstitieuse me prenait le corps, m’empêchant de lui
lancer d’autres pierres. Je me mis à courir à toute vitesse. D’autres bruits se firent entendre, un cliquetis
métallique, il n’y avait plus aucun doute, il s’agissait bien d’une personne. On pouvait voir au loin une
torche qui illuminait le plafond, une fois arrivé vers la lumière je me jetai aux pieds de l’italien, lui
besant les bottes en essayant de lui expliquer ce qui arrivait. L’italien semblait effrayé et était revenu
me chercher afin de se repentir de ce qu’il m’avait fait. Je lui ai donné la raison de ma peur et grâce à
sa torche et à sa présence je pus enfin me mettre à raisonner correctement. Je devais savoir quelle
sorte de créature m’avait pourchassé.
Je lui pris des mains la torche et revint sur mes pas jusqu’à trouver le corps de la plus étrange créature
que nous n’avions jamais vu ! Elle avait la taille d’un éléphant ayant la forme d’un arbre tentaculaire, on
aurait dit que les nombreuses bouches qui recouvraient son corps semblaient affamées. Les tentacules
lui étaient inutiles et semblaient être la cause de son problème de mobilité et les quatre jambes de la
créature se terminaient par des sabots comme ceux d’une chèvre.
La créature semblait incapable de nous rejoindre puisque nous étions dans une zone ou le plafond était
plus bas que dans le reste de la caverne. M’enfuir m’avait sauvé la vie, si je ne l’avais pas fait j’aurais
surement fini écraser sous les sabots de la créature ou pire…dévoré. L’italien sortit son pistolet avec la
ferme intention de faire feu sur la créature mais subitement, une des tentacules de la chose se mit à
bouger frénétiquement comme pris de spasmes et transperça le corps du pauvre malheureux. La
tentacule approcha le corps de l’italien vers l’une de ses nombreuses bouches, on pouvait entendre le
bruit de sa mastication mais ce qu’on entendit ensuite était encore plus affreux, l’italien criait alors qu’il
se faisait dévorer vivant. Je ne pouvais pas bouger, j’étais tétanisé. L’italien me regardait avec des yeux
emplis de terreur, il était juste devant moi, la seule chose que je pouvais encore faire était courir,
torche à la main vers la sortie.
L'étreinte de l'opium
Rares sont ceux qui ont été dans l’audelà et encore plus ceux qui en sont revenus mais quand ils le
font, ils le gardent secret où sont atteints par la folie. Je consomme désormais de l’opium afin de me
soulager de souffrances qui ne peuvent être guéries. Lorsque je la prends, la douleur et les bruits dans
me tête se font inaudibles. Plus rien n’est import ni le futur, ni fuir, le bien ou le mal, la mort ou la vie.
Je suis en train de délirer, c’est pour cela que c’est difficile de connaitre le moment exact de la
transition mais je pense que l’effet commencera un peu avant que les palpitations cessent d’être
douloureuses. Il s’agit d’une overdose ; c’est pour cette raison que mes réactions seront certainement
anormales. Cette sensation de chute étrange mais relaxante malgré cette impression d’être entouré
par des foules innombrables et invisibles, une accumulation de personnes différentes mais qui dans un
- page 13 -
certain sens sont liées entre elles et surtout à moi. La douleur cesse pour de bon et je commence à
associer le battement de mon cœur comme quelque chose provenant non plus de l’intérieur mais de
l’extérieur. Ma chute s’est également arrêtée et a fait place à une sensation de repos éphémère et
calme mais lorsque j’écoute attentivement, j’ai l’impression que les battements proviennent d’une mer
lointaine et infinie, comme si les vagues sinistres et colossales se fracassaient contre une plage désolée
après une tempête d’une force titanesque. C’est alors que j’ouvre les yeux.
Pendant un instant, j’étais confus, tout était flou comme si on n’avait pas fait la mise au point de l’image
mais petit à petit je voyais une pièce étrange, pleine de lumière grâce aux nombreuses fenêtres. Mes
sens ne pouvaient pas me donner d’autres indications sur ce lieu, j’étais encore vaseux, je pouvais voir
différentes couleurs, un tapis et des décorations qui m’indiquaient que le lieu était exotique.
Mais le désir de connaitre l’endroit fit place à la peur … la peur de l’inconnu, une peur si grande que je
ne pouvais l’analyser, une menace furtive qui s’approchait…ce n’était pas la mort mais quelque chose
sans nom, un être plus sournois et vile.
Je contemplais une chose que je n’avais encore jamais vu et aucune autre personne encore vivante
n’aurait pu la voir sauf dans les délires provoqué par la fièvre ou l’enfer de l’opium. C’était un jeune
homme d’une beauté incroyable, il avait un air de faune ou demidieu. Il souriait, ses mains croisées,
mais avant même de pouvoir lui adresser la parole j’entendis une mélodie … ou un chant ; des notes
graves et aigues voletant en harmonie dans les airs. Le soleil avait disparu de l’horizon et on pouvait
voir une auréole de couleur entouré la tête du garçon. C’est alors qu’il s’adressa à moi avec un accent
argentin.
C’est la fin, ils sont venus des étoiles. Tout est calme et tout ce qui est audelà mouriront heureux sur Teloe.
Alors que l’enfant parlait, je vis une lueure douce et tendre provenant de derrière lui, il saluait deux
êtres qui devaient surement être les personnes que j’avais entendu chanter. C’était surement un dieu
et une déesse car leur beauté n’était pas mortelle. Ils prirent mes mains et me dirent :
Tu as entendu les voix et tout va bien. A Teloe, audelà de la Voie Lactée et des courants existent des villes d’ambre et de
calcédoine. Et sur leurs coupoles se trouvent le reflet d’innombrables étoiles. Sous les ponts de marbres de Teloe coulent des
rivières d’or portant des embarcations vers les Sept Soleils. Sur Teloe et Cytarion, la jeunesse, la beauté et le plaisir sont des
mots qui n’existent pas puisqu’on ne connait rien d’autres que les rires, les chansons et le luth. Les uniques personnes pouvant
vivre sur Teloe sont les dieux mais toi, tu habiteras parmi eux.
Alors que je les écoutais parler, je m’aperçus du changement de la pièce. Je flottais dans l’atmosphère ;
accompagné non seulement du garçon et du couple radieux mais aussi par tout un tas de personnes
jeunes, belles et souriantes. Nous nous envolions doucement telle une brise voletant dans les airs.
Tous chantaient ensemble accompagnés de la musique de leurs luths, je me sentais enveloppé par un
sentiment de paix et de bonheur mais un son perturba le voyage de mon âme, j’entendais les bruits du
battement des vagues. Et c’est alors que leur message vint à mes oreilles, j’oubliai les paroles du
garçon et regardai vers le bas, vers le paysage auquel je pensais avoir échappé.
Dans les profondeurs de l’être, je pouvais voir la terre tourner, encore et toujours, la tempête faisait
rage. Et sous une lune incroyablement belle j’eus une vision qui ne peut être expliqué avec des mots
mais que je n’oublierai jamais : des déserts de boue cadavérique, des jungles de ruine et la décadence
de l’endroit où j’avais jadis grandi. Il n’y avait plus que des temples imposants. L’eau du Pôle Nord était
en ébullition, l’odeur du souffre était partout, on aurait dit que l’enfer venait d’apparaitre sur Terre.
- page 14 -
Le monde n’était plus comme avant ou alors était un autre monde ? Je ne pouvais plus le dire mais
j’avais une étrange sensation, comme si cette planète était la mienne mais à une autre époque, à un
moment avant le temps, les dieux, l’homme…
Le sol était ébréché et une vapeur opaque en émanait, cachant le monde alors que cette vapeur
devenait de plus en plus épaisse. Je mis mes mains sur mon visage et lorsque je voulus regarder le
jeune garçon et les autres, ils avaient disparu. Puis, subitement, tout termina. Je me suis réveillé sur un
lit de convalescence. Je me réveillais d’un long sommeil et la douleur regagnait du terrain.
Un éclair et des explosions délirantes ; un sèchecheveux, un encensoir plein de feu, de la fumée et le
tonnerre qui faisait fondre la lune blanche alors que le vide en absorbait sa substance.
Et lorsque la fumée se disperse et que j’essaie de voir la terre, je ne peux contempler que de
nombreuses étoiles et le soleil mais également d’autres planètes qui comme moi la recherchait.
Crépuscule à Arkham
Et cela arriva! Un grand portail apparut en plein centre de ce qui était Arkham. Le portail était obscur,
un noir quasi immatériel. Du gouffre immatériel jaillit un nuage de fumée qui s’éleva et obscurcit les
cieux. L’odeur qui l’accompagnait était horrible et insoutenable mais c’est alors que nous avons
entendu un bruit étrange émanant du portail. Nous étions tous en train de guetter l’origine du bruit
lorsque le monstre jaillit de l’abysse. Une créature verte immense et gélatineuse se dressa dans l’air
vicié de la ville.
Nombreux étaient ceux qui ne sortiraient jamais de ces rues, deux moururent de peur en voyant la
créature. Le monstre ne pouvait être décrit avec des mots. Rien dans notre langage ne pouvait être
appliqué à cette chose, elle contredisait toutes les lois de la matière, forces et de l’ordre cosmique. Une
montagne qui marchait. Dieux ! Le monstre des idoles, le démon vert et visqueux des astres s’était
réveillé pour réclamer ses droits. Après moult éons le grand Cthulhu était à nouveau libre.
Trois autres personnes furent écrasées par les pattes membraneuses avant d’avoir le temps de s’enfuir.
Qu’ils reposent en paix, s’il y a réellement un tel lieu dans l’univers. Les trois survivants restants se
précipitèrent frénétiquement vers les bâtiments en ruines.
L’automobile était encore en marche et personne n’était à l’intérieur, ils en profitèrent pour se lancer
dans sa direction et y monter. La voiture se mit à bouger lentement dans cette scène de destruction
totale. Pendant ce temps, le monstre piétinait des quartiers que les survivants connaissaient bien, il ne
détruisait pas seulement les bâtiments ou les individus qui pouvaient s’y trouver mais également les
souvenirs que pouvaient avoir ces personnes. C’est alors que la créature poussa un cri inaudible
comme Polyphème lorsqu’il maudit le navire d’Ulysse. Ensuite, avec plus d’audace que les cyclopes de
la légende, le grand Cthulhu extirpa une autre partie de son corps du portail ce qui détruisit d’autres
bâtiments. Lorsque je me suis retourné pour le voir, je pensais être devenu complètement fou !
Mais je n’avais pas abandonné la partie. Sachant que le monstre arriverait surement à me rattraper
avant d’avoir la chance de fuir, j’essayai quelque chose de désespéré, je poussai la voiture à sa vitesse
maximale et fit tourner brusquement le volant. La rue était pleine de poussière et alors que j’accélérais,
je décidai d’aller ver la montagne gélatineuse qui semblait arriver aux ruines. L’affreuse tête de poulpe,
- page 15 -
couverte de tentacules, était à la hauteur du plus haut bâtiment de la ville … mais je n’allais pas
changer d’avis!
L’effet fut le même qu’un ballon qui se dégonfle, un liquide immonde surgit du corps ainsi qu’une
odeur immonde que je ne peux décrire. Durant un bref instant, un nuage vert, âcre et aveuglant se
propagea dans les rues, une chaleur maligne semblait y flotter. Et ce que je vis était affreux… le
monstre semblait se reconstituer pour reprendre sa forme primitive alors que nous nous enfuyons à
toute vitesse.
- page 16 -