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UE2: MEDECINE TRADITIONNELLE

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Médecine traditionnelle
OBJECTIFS DU COURS

Objectif général.

Connaitre le bienfondé et les limites de la médecine traditionnelle en vue d’une


meilleure orientation relative à la prise en charge des patients

Objectifs spécifiques

1/ Définir la médecine traditionnelle en ses propres termes sans en altérer le


sens en donnant sa spécificité par rapport à la médecine moderne ou
conventionnelle

2/ Donner l’importance de la médecine traditionnelle en précisant sa


contribution dans l’amélioration de la sante de la population

3/Enumérer les différentes types de thérapies en médecines traditionnelles

4/Connaitre les phénomènes culturels, sociologiques et anthropologiques au sein


d’une communauté en spécifiant les concepts cosmogonie, valeurs
traditionnelles, ethnomédecine, ethno- pharmacie, ethno- psychiatrie.

5/ Identifier les pratiques les plus courantes en milieu traditionnel en précisant


d’autres types de recours.

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Médecine traditionnelle
I- GENERALITES

Définition

Selon la définition officielle de l'OMS, la médecine traditionnelle « se rapporte


aux pratiques, méthodes, savoirs et croyances en matière de santé qui impliquent
l’usage à des fins médicales de plantes, de parties d’animaux et de minéraux, de
thérapies spirituelles, de techniques et d’exercices ...

La médecine traditionnelle africaine se transmet par voie orale ou par écrits


ésotériques, de générations en générations. Il s’agit en Afrique d’une science
initiatique n’étant pas ouverte à tous.

Comme toute médecine traditionnelle elle a pour but de guérir à l’aide de


plantes, minéraux, thérapies spirituelle etc. Contrairement à la médecine dite
"moderne", le processus de guérison ne concerne pas seulement "l’organe
malade", mais aussi, le corps, l’âme et l’esprit.

Dans la médecine traditionnelle africaine, le corps se divise en trois parties :

Le corps physique, l’équilibre dans le fonctionnement du corps.

Le corps mental, le dialogue avec soi-même, pour soi-même, là où l’on pense


situer le rapport avec les autres. Selon la tradition Africaine, chacun possède une
clé en lui, qui est garante de son unicité et qui ouvre une porte derrière laquelle
se trouve un trésor pour l’humanité. Cela veut dire que chacun de nous est un
trésor pour l’humanité, dans son unicité car, chacun de nous est unique et
personne ne peut prétendre être ce qu’un autre est.

Le corps spirituel, celui qui communique avec l’être supérieur. Être supérieur
qui est représenté par la Femme Noire car, elle procrée et continue la création.

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Médecine traditionnelle
Elle représente ainsi le pôle positif cherchant à équilibrer le pôle négatif pour
sauvegarder l’espèce humaine.

Chose à ne pas oublier, le silence ! Celui-ci permet la méditation pour


l’élévation spirituelle.

Dans la médecine traditionnelle africaine, le massage occupe une place très


importante. Dans les ethnies Peuls, Touareg, etc., le massage est appelé Daamp.
Celui-ci est très souvent pratiqué chez les nouveaux nés, comme le font chez les
blancs les prêtres catholiques.

Il existe plusieurs types de guérisseurs. Chaque ethnie a les siens. Par exemple,
en Afrique australe en Pays Nguni (Zulu, Swati, Xhosa, Ndebele) vous pourrez
trouver :

o Les Inyanga (herboristes et homéo thérapeutes)


o Les Sangoma (des devins qui ont le pouvoir de communiquer avec
les ancêtres)
o Les Ababelekisi (sages-femmes)
o Les Ingcibi (chirurgiens spécialistes de la circoncision des petits
garçons et de l’excision et de l’infibulation des petites filles)
o Les Khamsis et les megnisis (uniquement des femmes) chez les
Bamiléké

CONCEPTION COSMOGONIQUE ET VALEURS TRADITIONNELLES

La cosmogonie (du grec cosmo- « monde » et gon- « engendrer ») est un récit


mythologique qui décrit ou explique la formation du Monde. Elle se distingue de
la cosmologie, qui est la «qui est l'étude scientifique relative à l'origine du
monde et de l'univers et surtout aux lois qui les gouvernent».

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Des récits oraux de cosmogonie fondent presque toutes les religions et sociétés
traditionnelles, mais de nombreux traités sur les origines possibles de l'univers
ont aussi été écrits par des philosophes ou des penseurs scientifiques (ex :
Cosmogonie d'Hésiode, Cosmogonie de Buffon).

Des milliers de légendes de création du monde et de récits cosmogoniques


traditionnels relatifs aux origines du monde, des dieux ou des institutions,
appartiennent à la catégorie des mythes fondateurs. Les figures idéales et les
modèles intemporels y ont donc une place importante.

La variété des récits de création du monde, à travers leurs théories des origines,
semble aussi exprimer le besoin immuable de décrire et peut-être justifier les
transformations radicales du monde observable, de la Terre et de la société
humaine.

Constances dans les schémas de l'imaginaire humain

La plupart de ces mythes (chinois, égyptien, hindou, japonais, celtique, malinké)


recèlent des concepts, symboles et paradoxes communs :

L'être et/ou le néant

Les mythes offrent diverses versions de la création de l'univers actuel ; certains


le décrivent comme né du néant, d'autres pensent qu'il a toujours existé et
d'autres encore disent que ce serait un être intemporel qui aurait rêvé ou créé
notre monde - sans témoins humains - en un instant, en six jours selon la Bible,
ou en une longue suite d'événements.

Le chaos primordial

La naissance d'un monde (parfois harmonieux voire paradisiaque) est souvent la


résultante de conflits entre forces antagonistes, l'ordre et le désordre, la lumière

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et les ténèbres, etc. Cependant, comme dans la Cosmogonie d'Hésiode, le chaos
originel préexistant à l'Univers est parfois présenté non comme un néant ou un
ensemble en conflit avec l'ordre, mais plutôt comme entité renfermant
l'ensemble des éléments à venir, mais mélangés.

Luttes et sacrifice

Carl Gustav Jung note que les notions de sacrifice et de combat sont souvent
associées à la création mythique des mondes et de l'univers. L'énergie
primordiale se sacrifie pour former l'univers. De nombreuses cosmogonies
décrivent des luttes (combats de dieux, d'ancêtres primordiaux, de héros,
gigantomachies et autres combats extraordinaires). L'opposition de contraires
dans les jumeaux, être à deux faces ou couples primordiaux sexués pourrait donc
aussi représenter les contraires qui s'affrontent en l'homme.

L'œuf cosmique

Il est souvent représenté comme le germe contenant l'univers en puissance, par


exemple pour l'orphisme. Il symbolise la rénovation périodique de la nature, la
possibilité de renaissance du monde. L'éclosion de l'œuf donne naissance à
l'Univers (Pan Gu en Chine, Partholon chez les Celtes, Puruska en Inde,
Nommo au Mali).

L'eau

Symbole de vie et de pureté, l'eau intervient comme élément primordial chez le


présocratique Thalès et aussi comme élément rénovateur, par le biais du Déluge
évoqué par plusieurs mythes fondateurs et cosmogonies. Il rappelle à l'homme sa
faiblesse face aux puissances célestes et permet le renouvellement du monde
grâce aux meilleurs des humains (le roi Manu, sauvé par Vishnou et transformé
en poisson, Noé et son arche).

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L'arbre

Dans de nombreux mythes, un arbre (arbre de vie) ou une plante divine,


magique ou sacrée joue un rôle (qu'on retrouve peut-être avec l'arbre au fruit
défendu, du jardin d'Éden dans la Bible). L'arc-en-ciel (passage ou pont entre
ciel et terre, ou entre deux points de la grande forêt en Amazonie) leur est
parfois associé.

Autres

Dans la majorité des cosmogonies traditionnelles, les créateurs sont un ou des


dieux anthropomorphes qui engendrent l'Univers et l'Homme par la volonté d'un
esprit, par la parole, le geste, le souffle, un membre, des sécrétions...

De nombreux animaux (poisson, serpent, oiseaux, lion..) jouent un rôle majeur


dans les mythes des continents où ils sont présents.

II- L’ETHNOMEDECINE

Médecine relative aux ethnies, elle se rapporte aux méthodes ancestrales et


traditionnelles utilisées par certaines ethnies.

Exemple : L'ethnomédecine est une approche de soins qui conjugue la


sociologie, l'ethnologie, la médecine...etc.

Définition

L’ethnomédecine pourrait être définie comme l’ethnoscience qui a pour finalité


la compréhension des pratiques et des représentations relatives à la santé et à la
maladie dans les différentes cultures (>civilisations) principalement à travers
l’étude des médecines traditionnelles contemporaines (=terrain)

L’ethnomédecine se préoccupe :

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- des classifications et des connaissances,

- des pharmacopées indigènes,

- des thérapeutiques, des corps de représentations, empirique et symbolique.

Elle permet :

- de repenser les notions de maladie et de santé,

- de comprendre, une fois admise la compénétration du social et du fait


biomédical, les relations entre les modes d’existence et les pathologies,

- de travailler selon une méthode pluridisciplinaire qui prend en compte


les recherches nutritionnelles, épidémiologiques, génétiques.

Sous l’angle d’une anthropologie de la maladie, elle renvoie à :

- des représentations telles que l’étiologie,

- les conceptions du monde,

- du corps,

- de l’infortune

- et à une efficacité où l’ordre symbolique et l’ordre social se conjuguent


dans une articulation spécifique qui fait la logique de la société.

III- L’ETHNO-PHARMACOLOGIE

L’ethnopharmacologie est une discipline qui s’intéresse aux médecines


traditionnelle et aux remèdes constituants les pharmacopées traditionnelles.

Un travail d'ethnopharmacologie comprend plusieurs étapes :

- un recensement des savoirs thérapeutiques locaux, grâce à une enquête de


terrain. Certains remèdes se transmettent par une longue tradition orale ;

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- des tests en laboratoire pour évaluer l'efficacité thérapeutique des remèdes
traditionnels ;

- un programme de développement de médicaments traditionnels préparés avec


des plantes cultivées ou récoltées localement.

Cette discipline se situe donc au carrefour entre l'ethnologie, la biologie, la


pharmacologie, la chimie, la botanique, histoire, Le droit, l’agronomie et la
pharmacie galénique. Si l’ethnopharmacologie puise son ancrage dans les
traditions du passé, ses perspectives s’ouvrent résolument vers l’avenir.

Elle est utile pour :

- Développer un conservatoire des savoirs et des espèces végétales: le voyage


des plantes dans les civilisations

- Développer une phytothérapie efficace, moins iatrogène

- Développer des médicaments à base de plantes issues des ressources locales


pour les pays moins développés

Exemples d’applications de l’ethnopharmacologie

Voici deux exemples, parmi d'autres, de recherches d'ethnopharmacologie :

 Artemesia annua, contre le paludisme : cette plante chinoise, aussi


appelée qing-hao, était utilisée contre la fièvre et le paludisme dans la
médecine ancestrale. En 1972, Youyou Tu, a isolé une molécule de cette
plante : l'artémisinine, qui est aujourd'hui un traitement antipaludéen
reconnu. En 2015, la chercheuse chinoise a reçu le prix Nobel de
médecine pour cette découverte.

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 le padouk (Ptérocarpus soyauxii) : ce grand arbre d'Afrique équatoriale,
présent au Gabon, possède des propriétés médicinales exploitées en
médecine traditionnelle. En faisant macérer des copeaux de bois, il est
possible d'obtenir un extrait aux propriétés antifongiques. Une substance
de la famille des phytoaléxines y a été identifiée.

IV- L’ETHNOPSYCHIATRIE

Définition

L'ethnopsychiatrie est une méthode d'investigation qui s'efforce de comprendre


la dimension ethnique des troubles mentaux et celle, psychiatrique, de la culture.
La classification des maladies est différente d'une culture à l'autre. Le "Shaman"
a un rôle de "psychanalyste autochtone" faisant appel à des mythes sociaux.
C'est quelqu'un de déviant, catalyseur de la communication vers le savoir sacré,
interprète du divin auprès du commun des mortels. L'ethnopsychiatrie se donne
pour but de donner un sens culturel à la folie.

La culture est l'ensemble des matériaux dans lesquels nous (individus et société)
puisons pour élaborer nos expériences. La nature c'est l'expérience, et la culture
c'est l'élaboration de cette expérience. Cette élaboration se fait selon une
organisation, une structure, un ensemble de règles et de signifiants propres à
chaque ethnie. Ces règles et ces signifiants sont à la fois relatifs et universels
(une ethnie est un groupe qui partage les mêmes signifiants culturels). Une
culture donnée imprègne les individus, et ces derniers transforment à leur tour
leur culture. L'individu doit intérioriser la culture du groupe dans lequel il est né,
et s'y tailler une place. Le groupe quant à lui, doit l'intégrer en lui donnant
l'exercice d'un rôle, d'une fonction, et transmettre sa culture par l'éducation.

L'ethnopsychiatrie peut aussi se définir comme étant l'étude du rapport entre: un


comportement psychopathologique, des services thérapeutiques et les cultures
d'origine du patient et de son thérapeute. Une telle analyse doit alors reposer sur
une série de postulats concernant la culture et la personnalité. Ces choix de

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départ guideront la façon dont on définira le champ des questions et des
problèmes.

Personnalité et culture

La culture façonne la personnalité dans son développement "normal" aussi bien


que pathologique. C'est au cours de la petite enfance que la personnalité acquiert
les principaux éléments de sa structure de l'état adulte. Une grande importance
est accordée au processus de socialisation qui régit cette période.

Maladie mentale et culture

On distingue 2 sortes de cultures : la culture qui "avale" ses déviants et leur


accorde un statut juridique (sorciers, prêtres, bouffons, artistes...) et celle qui a
tendance à se débarrasser de ses déviants en les "vomissant" dans des institutions
construites pour cela.

· Les sociétés qui avalent leurs déviants sont traditionnelles, fonctionnant sur le
modèle des clans, souvent autarciques et peu étendues. La relation de l'individu
au groupe est fusionnelle. L'individuel est pris en charge par le collectif;

· Les sociétés qui refusent leurs déviants ont vu naître un conflit entre la
soumission aux normes ancestrales et l'acceptation de valeurs nouvelles (ce
conflit peut agir comme un stress). Elles ont alors établi 3 modes de relations
avec les individus déviants:

1. la culture fournit des moyens de protection insuffisants au niveau


symbolique (art sacré et langage);
2. les individus sont impuissants à se conformer aux normes culturelles, soit
par fragilisation dans la première enfance, soit par disposition innée. Ils
deviennent étrangers à leur culture, et sont rejetés;

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Médecine traditionnelle
3. l'individu entre en contact avec une culture différente, c'est un migrant
(rural par rapport à urbain par exemple). Les conduites sont vides de sens,
inadaptées. Mise en place de rituels névrotiques.

Les croyances culturelles influencent dans une certaine mesure le choix du


comportement pathologique. En général, on attribue plus souvent l'origine des
maladies à des causes exogènes (comme la sorcellerie, la transgression d'un
interdit, un accident...) qu'à des causes endogènes. Et l'attribution de ces causes
est un processus rarement accompagné d'une analyse minutieuse des faits (le
processus d'anamnèse est souvent des plus succincts!). Les symptômes,
névrotiques ou psychotiques, sont des constructions collectives qui évoluent et
se transforment avec l'évolution du groupe. Nous empruntons nos symptômes à
notre culture. Ce qui est permanent, ce sont les lois de la dépersonnalisation car
dans toute culture existent de telles lois. C'est uniquement leur manifestation qui
diffère.

V- LES PRATIQUES EN MILIEU TRADITIONNEL.

Rites d'initiation et mutilation génitale des filles.

Les données de l’ethnologie

Les rites d’initiation accompagnent l’admission des individus d’un groupe à un


autre, et d’abord du groupe des enfants à celui des adultes; dans une société à
groupes d’âge, il s’agira par exemple du passage du groupe des guerriers à celui
des chefs, et, lorsque la société est différenciée, de l’introduction dans une

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confrérie religieuse spécialisée ou dans une société secrète. Bref, ils marquent
toujours un changement de statut social. Mais, de tous ces rites, les plus
importants sont incontestablement ceux qui font accéder l’enfant au statut
d’adolescent.

Les initiations tribales

Les rites de passage de l’enfance à l’âge adulte n’existent pas partout, du moins
pas pour les deux sexes. Ici, il n’y a que les garçons qui les subissent; là, les
filles seulement; ailleurs, les deux. Comme le montre A. Van Gennep,
l’initiation est un «rite de passage» qui prend place dans tout un ensemble
organisé, allant des rites de la naissance à ceux de la mort; c’est pourquoi les
cérémonies d’initiation ne peuvent se comprendre que si on les situe dans cette
totalité: l’enfant ne devient homme que peu à peu, il change au moins deux fois
de statut, d’abord lors de son appellation (le nom qui lui est donné le fait passer
de la nature à la culture), ensuite au moment de l’initiation tribale (qui l’arrache
à l’éducation familiale et au groupe des femmes pour le faire accéder à celui des
adultes); parfois la séquence est même plus longue (perforation des oreilles, de
la lèvre, etc., marquant diverses étapes dans la formation de la personnalité).
L’initiation à son tour, même si la puberté sociale ne se confond pas avec la
puberté biologique (elle peut se faire avant ou après), rend possible le mariage,
autre rite de passage qui consacre définitivement l’entrée dans le monde adulte.
Cet inventaire des diverses possibilités explique que l’on trouve tant de
différences entre les peuples: ainsi, en Polynésie, il n’existe pas en général de
rites de puberté, l’enfant devient progressivement adolescent, ce n’est que par le
mariage qu’il passe à l’état adulte et ce sont ici les cérémonies du mariage qui
sont prépondérantes; par contre, en Mélanésie, c’est le passage de l’enfance à
l’adolescence qui est abrupt, et les rites de mariage n’ont plus la même
importance. Ce ne sont pas les seules variations que l’on puisse constater. Là où
existe une initiation féminine, la puberté sociale se confond avec la puberté

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biologique, elle a lieu lors de la première menstruation; pour les garçons, l’âge
est variable, et non seulement l’âge, mais encore la durée des cérémonies, qui
peut aller de quelques semaines à quelques mois, parfois quelques années. Elle
peut être, alors, comme chez les Bambara, divisée en séries successives, qui
s’échelonnent de la tendre enfance à l’âge mûr: le n’domo , avant la circoncision
(qui déblaie la route de l’enfant vers le savoir), le komo , après la circoncision
(introduction au savoir), le nama (enseignement de ce que l’on pourrait appeler
la connaissance sociologique), le kono (la connaissance psychologique), le
tyiwara (la connaissance cosmologique) et le kore (où l’on aboutit à la divinité
qui fonde définitivement l’être humain). On comprend, dans ces conditions,
combien il est difficile de dire ce qui est commun à toutes ces cérémonies
initiatoires si l’on veut les aborder par leurs contenus; il est par contre possible
de trouver entre elles des similitudes formelles et des fonctions communes qui
permettent de les traiter malgré tout comme un seul bloc.

Les cérémonies d’initiation tribales comprennent, comme tous les cérémonials


de passage, des rites de séparation, de marge et d’agrégation.

Rites de séparation

Tout d’abord, l’enfant est séparé du groupe des femmes; élevé jusqu’ici par sa
mère, on le lui arrache souvent sous la forme d’un rapt violent. Les mères se
lamentent, comme si leur enfant était mort. Il s’agit bien en fait d’une mort
symbolique: le futur initié est censé avoir été avalé par un monstre, qui le
dégorgera ensuite, ou tué par lui; la grotte où il est conduit est la bouche du
monstre; la hutte où il sera initié dans la brousse a l’apparence du monstre
mythique (Nouvelle-Guinée); cette opération prend aussi la forme d’une
purification: bains, destruction des anciens vêtements, changement de nom. À la
fin, l’enfant renaîtra; chez les Kikuyu africains, la nouvelle naissance est
marquée par la mise en position de l’enfant entre les jambes de sa mère à

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laquelle il est attaché par un boyau de mouton, symbolisant le cordon ombilical;
en Inde, il gît replié en position fœtale dans une peau; ailleurs, il est couvert
d’un drap. Dans une certaine mesure, les mutilations corporelles (circoncision,
arrachage de certaines dents, scarification, tatouage des signes tribaux)
constituent les marques apparentes de cet arrachement au monde des femmes
pour l’entrée dans celui des hommes.

Rites de marge

Les rites de marge, de durée variable, comprennent tout un ensemble de


brimades. Les enfants sont fouettés, ils doivent supporter la piqûre de fourmis
venimeuses, ou de guêpes, se plonger dans l’eau glaciale, etc. On a donné des
interprétations différentes de ces sévices, dont il reste encore des traces dans la
société contemporaine (dans l’armée, pour les «bleus», ou dans les universités):
c’est une école de souffrances permettant au garçon de prouver qu’il est plus fort
que la nature, que l’initiation lui a donné une puissance «magique» ou
«mystique» capable de transcender le réel; c’est une méthode de dressage qui
fait passer l’enfant de l’autorité des femmes à l’autorité des hommes, plus
particulièrement des vieux, et qui assurera ainsi la conservation des coutumes
ancestrales comme le contrôle social des anciennes générations sur les nouvelles
(É. Durkheim).

À côté des sévices, dans cette même période de marge, il y a toute une
resocialisation de l’enfant, ce qui a fait appeler les maisons ou les enclos
d’initiation des «écoles de la brousse» a beaucoup insisté sur ce caractère
d’instruction, de transmission de connaissances, comme d’éducation morale (le
contrôle de soi-même appris à travers les souffrances physiques et la
circoncision, stoïquement supportée; la fraternité entre les candidats qui vivent
ensemble et subissent les mêmes épreuves); parfois même, le candidat formé
professionnellement devra par exemple se nourrir lui-même par la chasse ou la

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Médecine traditionnelle
pêche ou bien apprendre les secrets d’un métier, comme celui de berger chez les
éleveurs peul, ou celui de forgeron en Afrique de l’Ouest. Les sacra de la tribu
sont présentés et expliqués: la voix du dieu ou des ancêtres n’est que le son du
bull-roarer , parfois d’un tambour secret; les esprits qui effraient les femmes et
les enfants ne sont que des masques; il ne s’agit pas en fait, comme on pourrait
le croire, de «démystifier» les croyances religieuses ; il s’agit plus simplement
de séparer une religion des hommes de la religion des femmes, de distinguer des
niveaux superposés de significations des symboles mystiques, bref de faire
passer la religion de l’exotérisme à l’ésotérisme. Les anciennes théories de
l’initiation n’insistaient que sur les aspects moteurs des rites; tout au plus
signalaient-elles qu’au cours de cette période de marge on apprenait souvent une
langue secrète aux candidats (nouveau signe pour eux de reconnaissance) et le
trésor des mythes, des légendes de l’ethnie; aujourd’hui, surtout après les
travaux de Marcel Griaule pour l’Afrique et des anthropologues nord-américains
pour les Indiens, on est amené à insister sur l’importance de cette connaissance
ésotérique de la religion tribale, voire sur les procédés pédagogiques mis en
place pour en faciliter l’apprentissage: dessins chez les Indiens, par exemple,
présentation de parcelles d’objets réels dont on explique le sens caché chez les
Bambara, apprentissage de proverbes ou de la résolution d’énigmes
métaphysiques, qui donnent à ces écoles de la brousse l’allure de véritables
universités audiovisuelles où l’on mémorise tout un système de correspondances
mystiques, d’une cosmologie savante où l’on passe graduellement du concret
aux degrés les plus élevés de l’abstrait et du spirituel.

Il faut ajouter, pour être complet, qu’au cours de cette période de marge les
candidats ont échappé à un monde sans être encore intégrés dans un autre et se
trouvent donc particulièrement «vulnérables» dans leurs corps meurtris par la
circoncision ou les sévices, comme dans leurs âmes qui risquent d’être la proie
des esprits de la brousse; les adultes et les vieux qui dirigent les cérémonies

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doivent veiller sur leurs nouveaux enfants en train de renaître; s’ils les font
souffrir d’un côté, ils les protègent et les aident de l’autre (par exemple en
simulant des combats contre les masques). Les candidats ont de même échappé
aux contraintes de l’éducation enfantine sans être encore intégrés aux normes de
la société des adultes; ils peuvent connaître une période de licence: vols, liberté
sexuelle, droit à injurier autrui.

Initiations féminines

Les initiations féminines sont relativement plus rares. Elles ont lieu
généralement lors de la première menstruation, considérée comme le signe d’un
changement de statut. La jeune fille est alors séparée de sa famille, recluse soit
dans une pièce de la maison, soit dans une hutte construite au-dehors, où elle
peut rester de quelques jours à plusieurs mois; elle est soumise, durant cette
période de réclusion, à des interdits alimentaires, parfois à des épreuves
physiques (incisions sur le corps, scarification, piqûres de fourmis ou d’abeilles,
perforations des lèvres ); elle est parfois aussi déflorée avec le doigt par un
ancien ou soumise à l’excision du clitoris et des petites lèvres; mais, qu’elle
subisse ou non des sévices, elle reçoit toujours une éducation de la part de sa
mère ou d’autres parents, éducation sexuelle et morale qui l’introduit à sa future
vie de famille. Comme le garçon, elle est au cours de cette période
particulièrement vulnérable; des danses peuvent avoir lieu mimant la lutte de la
société contre les périls surnaturels qui menacent la jeune menstruée; il arrive
aussi quelquefois que ces néophytes bénéficient alors d’une période de licence
sexuelle. Des purifications (par le moyen de bains dans la rivière ou par des
fumigations de tout le corps), des danses et des chants terminent le cérémonial et
marquent le retour à la vie quotidienne.

Comme pour l’initiation masculine, le symbolisme de l’initiation féminine, tout


au moins en Afrique, est un symbolisme de destruction de l’ancienne

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personnalité et de nouvelle naissance. Par exemple, chez les Venda, la fille est
mise dans le khomba en position fœtale sous une couverture (placenta) ou dans
un trou d’eau (eau matricielle), puis elle apprend les gestes de la vie et les
danses des femmes, mais elle reste encore muette; elle n’apprendra à parler et
chanter qu’après. C’est d’ailleurs là que les filles retrouvent les garçons, initiés
de leur côté; mais eux l’ont été dans la brousse, alors que les filles l’ont été dans
leur village parental. Cette distinction est capitale, et semble valoir pour presque
toutes les initiations féminines par opposition aux initiations masculines: les
hommes naissent pour la vie civique alors que les filles ne naissent que pour la
vie familiale ou, tout au plus, villageoise

Forces surnaturelles, esprits malins, sorcellerie et autres pratiques


Dans un certain nombre de pays d'Afrique et dans beaucoup d'autres parties du
monde, des pratiques comme la magie noire, le fétichisme, la sorcellerie et le
vaudou, et la croyance que ces forces et ceux qui s'en servent peuvent exercer
une influence néfaste sur la vie d'une personne font fréquemment partie des
cultures traditionnelles.

Le surnaturel est l'ensemble des phénomènes qui ne sont pas explicables par
les lois de la nature, de façon rationnelle, ou bien qui sont réputés provenir
d'une source divine1. Le surnaturel ne peut pas être étudié par la méthode
scientifique, ou par la méthode expérimentale. En l'absence d'explications, les
phénomènes dits surnaturels sont parfois attribués à des interventions divines
(par exemple les miracles) ou démoniaques, ou d'esprits (fantômes,
possession), ou de pratiques « magiques ». Certains auteurs réservent ce mot
aux phénomènes supposément produits par une cause spirituelle ou divine tel
les miracles, le refusant aux phénomènes issus de causes mal connues mais
appartenant au monde naturel comme le psychisme, la parapsychologie, la
sorcellerie ou le spiritisme2. Le surnaturel est employé dans ce sens par l'Église

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Médecine traditionnelle
catholique. Cependant, certains phénomènes considérés comme surnaturels
autrefois ne sont plus considérés comme tel par exemple les catastrophes
naturelles.

On observe ces phénomènes dans beaucoup d'endroits du monde...


.. Des forces du mal peuvent bien prendre le contrôle de votre vie, mais il est de
notre pouvoir de nous en libérer et de ne pas les laisser nous assujettir.

.La sorcellerie désigne, à proprement parler1, l'art d'interroger le sort (hasard,


destin), et par extension d'en modifier le cours.

Le mot désigne plus généralement la pratique d'une certaine forme de magie,


dans laquelle le sorcier travaille avec des forces surnaturelles, des entités
maléfiques, et parfois aussi des forces naturelles mal connues comme celles des
plantes, des cycles lunaires, des ondes, des suggestions. Selon les lieux et les
époques, la sorcellerie fut considérée avec des degrés variables de faveur ou
d'hostilité, parfois avec ambivalence. Dans la Grèce antique et à Rome, la
divination était une pratique admise, liée à certains sanctuaires et à la prise
officielle de décisions. Le christianisme condamne toute forme de divination et
de magie.

La sorcellerie est un terme controversé et son histoire est complexe. Selon le


contexte et le milieu culturel dans lequel ce mot est employé, il désigne des
idées différentes, voire opposées. Chaque société possède ses propres
conceptions en matière de tradition, de croyance, de religion, de rites, de rapport
à l'au-delà et à la mort et d'esprits bons ou mauvais ; il est parfois impossible de
trouver un équivalent d’une culture à l’autre.

Ce terme est également employé de façon péjorative en référence à la pratique


de la magie. La sorcellerie est alors, dans cette acception, l'accusation portée à
l'encontre de ceux qui utilisent des moyens surnaturels pour un usage réprouvé

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par une majorité de la société. Les croyances en ce type de praticiens de la
magie se sont rencontrées dans la plupart des sociétés humaines. De telles
accusations ont parfois mené à des chasses aux sorcières. Dans d'autres sociétés,
les chamans ou les griots étaient non seulement bien acceptés en tant que
praticiens des rituels traditionnels et d'intercesseurs avec les forces et les
énergies de l'invisible, mais respectées, parfois craints, et souvent placés en
positions socialement dominantes.

Pour les religions monothéistes (principalement le judaïsme, le christianisme et


l'islam), la sorcellerie fut souvent condamnée et considérée comme une hérésie.
La notion de sorcellerie prit une certaine importance pour les chrétiens à partir
des XIVe – XVe siècles, l'apogée des chasses aux sorcières ayant eu lieu au
XVIIe siècle. À cette époque la sorcellerie a progressivement été assimilée à une
forme de culte du Diable. Des accusations de sorcellerie ont alors été
fréquemment combinées à d'autres charges d'hérésie contre des groupes tels que
les Cathares et les Vaudois. Certains groupes anciens ou modernes se sont
parfois plus ou moins ouvertement réclamés d'un culte "sataniste" dédié au mal.

Sorcellerie africaine

Le continent africain connaît un large éventail de pratiques et de représentations


sorcellaires. Le terme de guérisseur, souvent proposé pour traduire différents
termes vernaculaires tels que inyanga, nganga, tradipraticien, etc., fait souvent
l'objet de surinterprétation pour devenir « celui qui soigne en ayant recours à la
magie », loin de son sens strict de « celui qui diagnostique et soigne les maux
causés par la magie ». Les combinaisons de représentations et de pratiques
diffusées par l’Église catholique romaine et des traditions et pratiques
religieuses ouest-africaines ont directement contribué à l’émergence de certaines
formes de syncrétisme religieux que l’on remarque en Amérique latine, avec des
pratiques, entre autres, comme le Vaudou, l’Obeah, le Famlah ou le Konn.

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Médecine traditionnelle
Dans les traditions sud-africaines, il y a trois différents types de personnes qui
pratiquent la magie. La thakatha est habituellement traduit comme la « sorcière
», et est considérée comme un personnage malveillant qui pratique secrètement
afin de nuire à autrui. Le sangoma est un devin, parfois un diseur de bonne
aventure, dont les services sont requis pour détecter la maladie, prédire l'avenir,
voire identifier le coupable d’un méfait. Il a également quelques notions de
médecine. Enfin, l'inyanga est souvent traduit par le terme guérisseur (bien que
de nombreux Sud-Africains remettent en cause cette traduction, puisqu’elle
perpétue l'idée erronée d’un guérisseur recourant à la magie). La tâche de
l'inyanga est de conjurer le mauvais sort et de fournir à ses clients les gris-gris
nécessaires. Parmi ces trois personnages, la thakatha et le sangoma sont
habituellement une femme, tandis que l'inyanga est presque toujours un homme.

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Médecine traditionnelle

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