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Cours de Commerce

international
Licence 3 option Economie
Internationale
 Année 2018-2018
 Pr KONÉ Salif
 Universitaire Félix Houphouët Boigny (UFHB)
 E-mail : salifkon@yahoo.fr
Introduction
 Le commerce international, telle que nous l’avons présenté dans
notre cours sur la spécialisation internationale repose sur le
postulat de concurrence pure et parfaite. Ce postulat qui est
sous-tendu par des hypothèses fortes ne permet pas de prendre
en compte dans l’explication du commerce international deux
réalités inhérentes à celle-ci :
 1) les économies d’échelle et la différentiation des biens et,
2) la pratique des pays imposant diverses restrictions à la liberté
de mouvement des biens et services.
 La première réalité renvoie à l’ensemble des analyses du
commerce international prenant en compte toute source
d’imperfection de la concurrence (nouvelles théories du commerce
international).
 La seconde réalité renvoie aux pratiques des pays participant au
commerce international (les politiques commerciales).
 Ce cours a pour objet la prise en compte de ces deux réalités.
Notre objectif étant de familiariser les étudiants de la licence 3
d’économie internationale avec les concepts et notions de
base des nouvelles théories du commerce international d’une
part et les concepts et notions de base des politiques
commerciales d’autre part.
 Ainsi, ce cours comprend deux parties appelées ECUE. Le plan de
ce cours est comme donné de la manière suivante.
Plan du cours
 ECUE 1 : Les Nouvelles Théories de la spécialisation
internationale ou les modèles de concurrence imparfaite.

 ECUE 2 : Les Politiques commerciales


LES NOUVELLES THÉORIES DE LA
SPÉCIALISATION INTERNATIONALE
OU LES MODÈLES DE CONCURRENCE
IMPARFAITE
Introduction : Généralités et concepts de
base
I. Généralités
 La notion d'avantage comparatif est l'élément central des deux modèles
de base de la théorie du commerce international que sont le modèle de
RICARDO et celui d'HECKSCHER-OHLIN.

 Dans le modèle de RICARDO, l'avantage comparatif découle des


différences de technologies entre les pays et ces différences sont
considérées comme exogènes.

 Dans le modèle HOS, l'avantage comparatif s'explique par des


différences de dotations (relatives) en facteurs de production.
 Dans les deux cas, les déterminants de l'échange international
reposent sur des différences entre pays.

 Cependant, tout le commerce international ne s'explique pas par la


notion d'avantage comparatif. En effet, certains types de commerce
sont difficiles à expliquer par des différences de coûts (principe de
l’avantage comparatif selon Ricardo) ou par des différences de
dotation (principe de l’avantage comparatif selon HOS).
Depuis la fin des années 1970, de nouveaux modèles se
développent, sur la base de deux principales observations dans
les échanges internationaux.

 Premièrement, à l’observation de l’évolution des pays, l’on constate


un nivellement des différences entre pays. En effet, la croissance
économique et l'échange international ont entraîné un nivellement des
pays. Les différences de technologies s'atténuent, notamment entre
les pays développés. Dès lors, le poids de l'explication ricardienne
des échanges se réduit. De même, les différences de dotation de
facteurs entre pays ne sont plus prépondérantes et devraient même
disparaître progressivement à mesure que la mobilité internationale
des facteurs de production augmente.
 Parallèlement, une part croissante des échanges internationaux a lieu
entre pays dont les technologies, les dotations de facteurs et les
préférences sont quasiment identiques. Il semble donc que l'absence de
différences (et donc d'avantages comparatifs) n'empêche pas l'échange
international et son corollaire, la spécialisation. C'est pour cette raison que
les économistes se sont tournés vers l'étude de modèles dans lesquels les
pays sont supposés identiques. En d'autres termes, ils ont cherché à
mettre en lumière les conditions de l'échange en l'absence
d'avantages comparatifs.
Tableau 5: Les dix principaux exportateurs de quelques produits, 2016 Sources : OMC
(2017), calculs de l’auteur

Produits Industrie Produits Produits Produits Fer et acier


Rubriques chimiques extractive alimentaires automobiles manufacturés
Exportateurs
Union européenne (28) Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Japon Oui Non Non Oui Oui Oui
États-Unis d'Amérique Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Mexique a Oui Non Oui Oui Oui Non
Canada Oui Oui Oui Oui Oui Non
Corée, République de Oui Non Non Oui Oui Oui
Chine a Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Australie Non Non Non Non Non Non
Turquie Non Non Non Oui Non Non
Inde Oui Non Oui Oui Non Oui
Fédération de Russie Non Oui Non Non Non Oui
Afrique du Sud Non Non Non Non Non Non
Brésil Non Non Oui Non Non Oui
Tableau 6 : Les dix principaux importateurs de quelques produits, 2016 Sources :
OMC (2017), calculs de l’auteur
Produits Industrie Produits Produits Produits Fer et acier
Rubriques chimiques extractive alimentaires automobiles manufacturés
Importateurs
Union européenne (28) Oui Oui Oui Oui Oui Oui
États-Unis d'Amérique Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Chine a Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Canada b Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Mexique a,b Oui Non Oui Oui Non Oui
Australie b Non Non Non Oui Non Non
Japon Oui Oui Oui Oui Oui Non
Turquie Non Oui Non Oui Non Oui
Inde Oui Oui Oui Non Oui Oui
Corée, République de Oui Oui Oui Non Oui Non
Fédération de Russie Non Non Oui Non Non Non
Afrique du Sud Non Non Non Non Non Non
Brésil Oui Non Non Non Non Non
Troisièmement, Le commerce mondial se fait de plus en plus à l’intérieur de
regroupements régionaux, mais également il est organisé autour de trois
principaux pôles régionaux
Le Graphique suivant illustre ce fait.
Figure 2: Echange mondiaux par origine et destination pour quelques
régions en valeur, 2015; Source : CEPII (2018) : base de données Chelem-
Commerce international et calculs de l’auteur
 Deuxièmement, à l’observation, les échanges de produits similaires
entre pays développés sont plus importants que leurs échanges de
produits différents.
 L'exemple du commerce franco-allemand est typique de cette tendance.
La France exporte davantage de produits agricoles vers l'Allemagne que
l'Allemagne n'en exporte vers la France. Réciproquement, l'Allemagne
exporte plus de machines-outils vers la France que la France n'en
exporte vers l'Allemagne. Il s'agit là d'une spécialisation classique qui
peut éventuellement s'expliquer par des avantages comparatifs fondés
sur des différences de technologies et/ou de dotation de facteurs.
 La France aurait un avantage comparatif vis-à-vis de l'Allemagne dans
les produits agricoles tandis que l'Allemagne aurait un avantage
comparatif vis-à-vis de la France dans les machines-outils. À côté de
ces spécialisations fondées sur la notion d'avantage comparatif, dont
l'importance tend à s'atténuer, les échanges franco-allemands sont
principalement composés de produits similaires. Pour qualifier ce type
d'échanges, on parle de commerce intra branche.
 Parallèlement à ces évolutions, sur un plan théorique, les
modèles classique (ricardien) et néo-classique (HOS) raisonnent
dans le cadre de marchés nationaux et mondiaux en concurrence
pure et parfaite. Cette situation cadre difficilement avec les
observations. En effet, non seulement les marchés nationaux sont
toujours loin de la situation idéale de concurrence pure et parfaite,
mais également, le marché international.
 Quelques exemples pour vous situer. Le marché de la fabrication
et de la vente d’avion de transport civils n’est pas un marché dont
l’état peut être qualifié de situation de concurrence pure et
parfaite. De même, les marchés nationaux des pays producteurs
d’avions de transport civil sont loin également d’être en situation
de concurrence pure et parfaite.
 Autre exemple, les marchés nationaux de production de
voitures sont loin d’être des marchés en situation de
concurrence pure et parfaite. Quand bien même des petits
producteurs existeraient, les marchés américains, français,
allemands, anglais, japonais et coréens sont largement
dominés par deux ou trois constructeurs.
 Un autre élément parallèle à ces évolutions, sur un plan
purement théorique est l’hypothèse d’immobilité parfaite des
facteurs de production entre pays. Cette hypothèse apparaît
aujourd’hui plus que contestable. En effet, les Investissements
Etrangers Directs sont devenus un élément très importants du
commerce international (voir figure). De même, les échanges
mondiaux se font également à travers les filiales des
multinationales.
 Ces principaux faits ne peuvent s’expliquer que si l’on
lève l’hypothèse de fonction de production à rendements
constants (donc d’absence d’économies d’échelle) et de
perfection de la demande.
 Ainsi, les rendements d'échelle croissants (ou économies
d'échelle) interviennent aussi dans l'explication de la nature et
du sens du commerce international.
II- Concepts de base
A. Rendements d'échelle et économies d'échelle

 Le concept de rendements d'échelle est directement lié


à celui d'économies d'échelle.
 Quand les rendements d'échelle sont constants, il n'y a pas
d'économies d'échelle. En particulier, le coût moyen et le
coût marginal sont indépendants du niveau de
production parce que constants. Que ce soit dans le
modèle de RICARDO ou dans le modèle d'HECKSCHER-
OHLIN, le coût moyen et le coût marginal de production des
biens sont supposés constants.
 En revanche, quand les rendements d'échelle sont croissants,
il y a des économies d'échelle. En particulier, le coût moyen
décroît avec le niveau de production. Il se peut aussi que le
coût marginal soit décroissant, mais on suppose cependant
assez souvent qu'il est constant. L’on utilise indifféremment
les termes «rendements d'échelle croissants» et «économies
d'échelle».
 Traditionnellement, depuis Alfred MARSHALL (1842-1924),
on distingue deux sortes de rendements (ou économies)
d'échelle : externes et internes.
1. Les rendements d’échelle externes

 Les rendements d'échelle qui ont leur origine à l'extérieur de


l'entreprise, sont dits «externes». Les rendements d’échelle
externes bénéficient de la même façon à toutes les entreprises
du secteur et se manifestent avec l'augmentation de la
production de la branche. Les rendements sont alors constants au
niveau de l'entreprise mais croissants au niveau de la branche. Dans
ce cas, si une entreprise augmente sa production, son coût moyen
reste constant. Pour que le coût moyen baisse, il faut que la
production de l'ensemble de la branche augmente.
 Pourquoi l'augmentation de la production du secteur a-t-il
pour effet de diminuer le coût moyen de production de toutes
les entreprises? On l'explique généralement par la
présence d'effets externes positifs (ou «externalités
positives») : plus la production d'un secteur devient
importante, plus les infrastructures liées à cette
production sont performantes. Bien que l’on s’écarte de la
définition de MARSHALL, on ne tiendra compte ici que des
externalités qui profitent à une seule branche d’activité et non
à toute l’économie d’un pays. Un modèle d’économie
d’échelles externes sera étudié dans le chapitre 1, d’abord de
façon non formalisée, puis à l’aide d’un modèle formel inspiré
de HELPMAN (1984).
2. Les rendements d’échelle internes

 Les rendements d'échelle sont internes à l'entreprise


lorsqu'ils sont croissants avec la production de
l'entreprise elle-même. Dans ce cas, plus une entreprise
produit et plus son coût moyen baisse. La structure de marché
ne peut alors demeurer concurrentielle et dégénère en
monopole ou en oligopole.
3. Rendements d’échelle et concurrence

 Les économies d'échelle externes sont compatibles avec


la notion de concurrence car elles bénéficient de la même
façon à toutes les entreprises d'une branche donnée.
 Inversement, lorsque les économies d'échelle sont propres
à une entreprise donnée (c'est-à-dire lorsqu'elles sont
internes), cette entreprise a intérêt à augmenter sa production
et peut alors s'emparer progressivement de tout le marché. Si
plusieurs entreprises bénéficient d'économies d'échelle, c'est
celle qui a la chance d'arriver la première sur le marché qui
devient un monopole.
 Lorsque le marché est trop important pour être alimenté par
une seule entreprise, ou lorsque les économies d'échelle
internes sont progressivement annulées par des
«déséconomies» d'échelle internes liées au gigantisme, la
structure de marché peut se stabiliser en oligopole. Ces deux
cas, ainsi que celui de la concurrence dite «monopolistique»
seront étudiés respectivement dans le chapitre 2.
 En somme, pour ces modèles, l'ouverture à l'échange
international permet aux pays d'exploiter plus
massivement les rendements d'échelle croissants.
III-Principaux Apports

Quels sont les changements apportés par la


prise en compte de l’imperfection de la
concurrence dans l’explication du commerce
international?
 Les conclusions des modèles qui tiennent compte des rendements d'échelle croissants
présentent quatre différences essentielles par rapport aux modèles basés sur l'avantage
comparatif.
1. Possibilité de l’échange entre des pays «identiques». Lorsqu'il y a des
rendements d'échelle, l'échange entre pays est possible et profitable même si les
deux pays sont strictement identiques. La spécialisation et les bénéfices qui découlent
de l'échange reposent alors sur l'exploitation plus intensive de ces économies
d’échelle.
2. Concentration «géographique» aléatoire des productions. Lorsqu'il y a des
rendements d'échelle, la spécialisation peut entraîner une concentration de la
production dans certains pays. Mais le choix du pays producteur est indéterminé.
Dans le cas d'un modèle à deux pays et deux biens, les spécialisations sont
interchangeables : l’un et l’autre peut se spécialiser dans la production et l'exportation
de l’un ou l’autre des deux biens. En effet, les déterminants de l'échange, c'est-à-dire
les économies d'échelle, sont exploitables aussi bien par l’un que par l’autre pays.
Tout ce que cela implique, c'est une spécialisation arbitraire de chaque pays dans
un bien.
3. L'échange international accroît la diversité des produits
disponibles. Dans les modèles de RICARDO et HOS, le nombre de
produits est donné au départ et ne change donc pas du fait de
l'échange. En revanche, dans les modèles avec rendements croissants
(exemple du modèle de concurrence monopolistique), l’ouverture à
l’échange a pour effet d’augmenter le nombre de produits disponibles.
4. Un effet pro-concurrentiel de l'échange international. Cet effet était mal
cerné par les modèles traditionnels. Par exemple, l'une des hypothèses de
base du modèle HOS, est que les marchés sont parfaitement
concurrentiels. Par conséquent, l'échange international ne peut pas avoir
pour effet d'augmenter la concurrence puisque celle-ci est postulée au
départ. Ainsi, dans ce modèle, la modification du prix relatif des biens
entraîne juste une réallocation des ressources (capital et travail) en faveur
du secteur qui utilise de façon relativement intensive le facteur relativement
abondant. Et il s'ensuit un ajustement du prix relatif des facteurs de
production (théorème de STOLPER-SAMUELSON). En revanche, dans
certains modèles avec rendements croissants, l'échange a un effet pro-
concurrentiel. On montre par exemple que l'échange international a pour
effet de réduire le pouvoir de marché des monopoles et des oligopoles.
Plan ECUE1
 La suite de cette partie comporte deux chapitres:
 Chapitre 1: Imperfections de la demande, économies d’échelle
externes et commerce international,
 Section 1: Imperfections de la demande et commerce
international
 Section 2: Economies d’échelles externes et commerce
international
 Chapitre 2: Economies d'échelle internes et commerce international
 Section 1: Monopole et oligopole purs et, commerce international
Section 2: Concurrence monopolistique et commerce
international

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