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Il était une fois une fillette qui s’appelait Anoushka.

Elle vivait

seule avec son père, qui avait perdu sa femme. Après quelques

années, le père d’Anoushka se remaria. Mais la marâtre était

malintentionnée : elle maltraitait l’enfant et souhaitait

secrètement s’en débarrasser.

Un jour, le père dut voyager et laissa donc la petite Anoushka avec

sa femme. Profitant de l’absence de son mari, la belle-mère dit à

l’enfant :

- Va chez ma sœur et demande-lui une aiguille et du fil pour te

coudre une chemise.


Anoushka comprit que c’était un piège : la sœur de sa belle-mère

n’était autre que la Baba-Yaga, une terrible sorcière mangeuse

d’enfants, qui se déplaçait dans un mortier en plantant un pilon

dans le sol et qui effaçait ensuite ses traces avec un balai.

Sans tarder, Anoushka courut demander conseil à sa tante, la

sœur de sa mère, qui l’adorait.

Alarmée, celle-ci lui expliqua comment échapper à la sorcière :

- Ma nièce, là-bas, quand le chat s’approchera de toi pour

t’arracher les yeux, donne-lui un morceau de lard.

Là-bas, quand le portail grincera pour donner l’alerte, verse

quelques gouttes d’huile sur ses gonds.

Là-bas, quand les chiens voudront te dévorer, jette-leur un

morceau de pain.

Là-bas, quand le bouleau tentera de te fouetter les yeux, attache

ses branches avec un ruban.


Anoushka embrassa sa tante, puis elle glissa du lard, du pain, de

l’huile et un ruban dans ses poches. Et, le cœur battant, elle se mit

en route pour la demeure de la Baba-Yaga.

La sorcière tissait quand l’enfant la salua.

- Bonjour ! dit Anoushka. Ma belle-mère m’envoie te demander

une aiguille et du fil pour me coudre une chemise.

-Ah ! Tisse donc à ma place pendant que je cherche ! s’exclama la

vieille qui se léchait déjà les babines.


Pendant que la fillette s’asseyait au métier à tisser, la Baba-Yaga

alla trouver sa servante et lui ordonna :

- Fais chauffer de l’eau et lave bien l’enfant. Ainsi, je pourrai la

manger.

Anoushka avait tout entendu. Elle était si terrifiée que, lorsque la

servante approcha, elle se jeta à ses pieds :

-Je t’en prie, quand tu allumeras le feu, arrose abondamment les

bûches pour qu’elles ne brûlent pas. Et, encore sanglotante,

Anoushka lui fit cadeau de son mouchoir. La servante, émue, la

prit en pitié et promit. De son côté, la Baba-Yaga faisait mine de

toujours chercher le fil et l’aiguille. En vérité, elle attendait que le

feu prenne.
Le chat de la maison s’avança vers Anoushka en crachant, la

fourrure et la queue hérissées.

Comme le lui avait conseillé sa tante, la fillette lui offrit le

morceau de lard. Il se mit aussitôt à ronronner, et Anoushka lui

demanda :

- Comment puis-je faire pour m’échapper d’ici ?

- Vois-tu cette serviette et ce peigne ? répondit le chat. Prends-les

et va-t’en. La Baba-Yaga te pourchassera. Dès que tu l’entendras

s’approcher, jette la serviette derrière toi : elle se transformera en

une immense rivière. Si la Baba-Yaga continue de te poursuivre,

lance le peigne par terre : une forêt surgira du sol, si dense qu’elle

ne pourra s’y frayer aucun chemin.


Ni une ni deux, Anoushka prit la serviette et le peigne et s’enfuit.

Comme le lui avait expliqué sa tante, lorsque les chiens voulurent

la dévorer, elle leur lança du pain, et ils la laissèrent passer.

Lorsque le portail commença à grincer, elle versa de l’huile sur les

gonds, et il la laissa passer. Lorsque le bouleau voulut lui fouetter

les yeux, elle attacha ses branches avec un ruban, et il la laissa

passer.
Quant au chat, il se mit au métier. Il tissa si bien qu’il emmêla tous

les fils … Au bout d’un moment, la vieille s’approcha et demanda :

- Tu tisses toujours, ma nièce ?

- Mais oui, je tisse, miaula le chat.

La Baba-Yaga comprit qu’on l’avait trompée.

Elle bondit à l’intérieur de la pièce et se mit à battre le chat qui lui

avait joué ce vilain tour.

- Depuis que je te sers, lui dit le chat, jamais tu ne m’as donné le

moindre petit os.

L’enfant, elle, m’a donné du lard !

Furieuse, la sorcière s’élança pour rattraper Anoushka.


La Baba-Yaga passa près des chiens, qui n’avaient pas sauté sur la

fillette, et les frappa. Ils lui dirent :

- Jamais tu ne nous as donné le moindre croûton, même brûlé.

Elle nous a donné du pain !

La Baba-Yaga passa près du portail, qui n’avait pas grincé, et le

brutalisa. Il lui expliqua :

- Jamais tu n’as versé la moindre goutte d’eau sur mes gonds. Elle

y a versé de l’huile !

La Baba-Yaga passa près du bouleau, qui n’avait pas fouetté les

yeux de l’enfant, et le secoua. Il ajouta :

- Jamais tu n’as attaché mes branches avec le moindre fil.

Elle les a attachées avec un ruban !

Puis la servante, qui avait rejoint la sorcière, conclut :

- Jamais tu ne m’as offert le moindre chiffon. Elle m’a offert un

mouchoir !
Alors, la Baba-Yaga les laissa là, et repartit à la poursuite de la

fillette. Anoushka, elle, continuait de fuir. Lorsqu’elle entendit la

vieille s’approcher, elle lança la serviette au sol comme le lui avait

conseillé le chat.

Aussitôt, une immense rivière jaillit de la terre. La Baba-Yaga

grinça des dents de colère. Elle retourna chez elle et ramena des

taureaux qui burent toute l’eau de la rivière.

Puis elle reprit sa course folle.


Très vite, elle rejoignit Anoushka. Mais celle-ci l’avait entendue

arriver et elle jeta le peigne par terre.

Une forêt très épaisse poussa d’un coup, se refermant derrière

elle. La Baba-Yaga voulut ronger les arbres un par un pour se

frayer un passage, mais elle n’y parvint pas. Leur bois était trop

dur et la forêt trop dense.

Dépitée, la sorcière abandonna et rebroussa chemin.


Lorsque Anoushka rentra à la maison essoufflée et apeurée, son

père était rentré. Il l’interrogea, inquiet :

- Que faisais-tu ?

- Mon cher papa … Ma belle-mère m’a envoyée chez sa sœur.

Mais sa sœur, c’est la Baba-Yaga ! Et elle a voulu me dévorer.

Anoushka lui conta alors toute son aventure. Quand son père sut

tout, il entra dans une fureur noire et il chasse sa femme.

A partir de ce jour, lui et sa fille vécurent heureux, offrant

généreusement le gîte aux gens de passage.

Sur leur table, la nourriture était toujours abondante et les verres

remplis. Et, jusque tard le soir, les rires de la maisonnée

résonnaient partout aux alentours.

FIN

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