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ANALYSE 2

Dr COULIBALY Harouna
Table des matières

NOTATIONS 4

1 CALCUL INTEGRAL 5
1.1 Intégration sur un segment des fonctions à valeurs réelles . . . . . . . . . 5
1.2 Primitives et intégrales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.2.1 Primitives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.2.2 Primitives usuelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
1.2.3 Relation primitive-intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
1.2.4 Méthodes de Calcul de primitives et d’intégrales . . . . . . . . . 22
1.2.5 Sommes de Riemann . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
1.3 Calcul de primitives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
1.3.1 Primitives de fonctions rationnelles . . . . . . . . . . . . . . . . 29
1.3.2 Fonction Circulaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
1.3.3 Fonction hyperboliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
1.3.4 Intégrale Abélien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
1.4 Intégration sur un segment des fonctions à valeurs complexes . . . . . . . 39

2 Intégrales Généralisées 41
2.1 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
2.2 Propriétés des Intégrales Généralisées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
2.3 Calcul Pratique des Intégrales Généralisées . . . . . . . . . . . . . . . . 44
2.3.1 Utilisation des Primitives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
2.3.2 Intégration par Parties . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
2.3.3 Intégration par Changement de Variables . . . . . . . . . . . . . 45
2.4 Intégrales Généralisées des Fonctions à Signe Constant . . . . . . . . . . 46
2.4.1 Critère de la Convergence Majorée . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.4.2 Critère de Cauchy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.4.3 Critère de Comparaison . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
2.4.4 Critère de Négligeabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
2.4.5 Critère d’Equivalence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47

1
TABLE DES MATIÈRES

2.4.6 Integrales de Référence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47


2.5 Intégrales Absolument Convergentes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
2.6 Méthodes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
2.7 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

3 Séries réelles ou complexes 53


3.1 Activité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
3.2 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
3.2.1 Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
3.2.2 Nature d’une série . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
3.3 Séries à termes positifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
3.3.1 Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
3.3.2 Caractérisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
3.3.3 Comparaison de deux séries . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
3.4 Séries à Termes Réels de Signe Quelconques . . . . . . . . . . . . . . . 69
3.5 Produit de Cauchy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
3.6 Permutation des termes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
3.7 Quelques méthodes d’etude pratique de la convergence des séries . . . . . 73
3.7.1 Pour prouver la convergence : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
3.7.2 Pour prouver la convergence et calculer des sommes : . . . . . . . 73
3.7.3 En général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
3.7.4 Erreurs à éviter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

4 Séries Entières 75
4.1 Rayon de convergence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
4.1.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
4.1.2 Méthodes pratiques pour calculer R . . . . . . . . . . . . . . . . 76
4.1.3 Comparaison de rayons de convergence . . . . . . . . . . . . . . 78
4.2 Opérations sur les séries entières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
4.2.1 Structure algébrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
4.2.2 Série entière dérivée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80
4.2.3 Convergence uniforme et séries entières . . . . . . . . . . . . . . 80
4.3 Propriétés de la fonction somme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
4.3.1 Continuité de la fonction somme . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
4.3.2 Intégration de la fonction somme . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
4.3.3 Dérivabilité de la fonction somme . . . . . . . . . . . . . . . . . 82
4.4 Fonctions développables en série entière . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
4.4.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
4.4.2 Opérations sur les fonctions développables en série entière . . . . 85

2
TABLE DES MATIÈRES

4.4.3 Méthodes de développements en série entière . . . . . . . . . . . 86


4.5 Séries entières classiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88
4.6 Quelques méthodes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
4.6.1 Pour trouver le rayon de convergence . . . . . . . . . . . . . . . 89
4.6.2 Pour déterminer un développement en série entière . . . . . . . . 89
4.6.3 Erreurs à éviter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90

BIBLIOGRAPHIE 91

3
Notations

Notation Définition
N Ensemble des entiers naturels
Z Ensemble des entiers relatifs
R Ensemble des nombres réels
|.| Valeur absolue
k.kX Application norme sur l’ensemble X
⊕ La somme directe
P
Symbole de sommation
Q
Symbole du produit
◦ La composition des applications
∩ L’intersection
∪ L’union
6 = La non égalitïé
⊂ L’inclusion
∈ Appartenance

/ non Appartenance
∀ Symbole universel "pour tout"
∃ Symbole universel "il existe"
u(k) Dérivée d’ordre k de u définie sur une partie de R
a|b a divise b
E(x) = [x] partie enti‘ere de x
PGCD plus grand commun diviseur
a∧b P GCD(a, b)
PPCM plus petit commun multiple
a∨b P P CM (a, b)
a ≡ b[N ] a est congru à b modulo N
an ...a0 b écriture en base b
n! factorielle de n : n! = 1 × 2 × ... × n
n!
Cnk coefficient binomial : Cnk = k!(n−k)!

4
Chapitre 1

CALCUL INTEGRAL

1.1 Intégration sur un segment des fonctions à valeurs


réelles
Définition 1.1.1 (Subdivision d’un segment).
On appelle subdivision du segment [a, b] toute famille τ = (xk )0≤k≤n de réels tels que

a = x0 < x1 < ... < xn−1 < xn = b.

On appelle pas ou module de la subdivision τ est donné par max |xi+1 − xi |.


0≤i≤n−1
Une subdivision de [a, b] est régulière si tous les xi+1 − xi sont égaux. On a alors pour
tout i ∈ {0, ..., n},
i(b − a)
xi = a + .
n
Exemple 1.1.1.
 
1 1 1 3 5 8
• τ = 0, , , , , , , 1 est une subdivision du segment [0, 1]. Son pas est
8 5 2 5 6 9
n 1 1 1 1 1
max |xi+1 − xi | = max −0 , − , − ,
0≤i≤6 8 5 8 2 5
3 1 5 3 8 5 8 o
− , − , − , 1−
5 2 6 5 9 6 9
3
= .
10
 
1 1 3 1 5 3 7
• τ = 0, , , , , , , , 1 est une subdivision régulière du segment [0, 1].
8 4 8 2 8 4 8
1
Son pas est .
8
Exemple 1.1.2.

5
CALCUL INTEGRAL

Définition 1.1.2 (Fonction en escalier).


Une fonction f définie dans un intervalle [a, b] est appelée fonction en escalier, s’il existe
une subdivision τ = (a0 , a1 , ..., an ) de [a, b] telle que f prenne une valeur constante yi
dans chaque intervalle ]ai , ai+1 [.

Exemple 1.1.3 (Fonction partie entière).

Définition 1.1.3.
Soit f : [a, b] → R une fonction en escalier sur le segment [a, b]. S’il existe une subdivision
τ : a = x0 < ... < xn = b du segment [a, b] telle que f est constante sur chaque intervalle
]xk , xk+1 [, c’est-à-dire ∀k ∈ {0, ..., n − 1}, ∃ck ∈ R, ∀x ∈]xk , xk+1 [, f (x) = ck ,
la subdivision τ est dite subordonnée ou adaptée à la fonction f .

Définition 1.1.4 (intégrale de Riemann d’une fonction en escalier).


Soit f une fonction en escalier sur [a, b] et τ = (x0 , ..., xn ) une subdivision adaptée à f .
Pour tout k ∈ {0, ..., n − 1}, on note ck = f |]xk ,xk+1 [ . On appelle intégrale de Riemann de
la fonction f , le réel :
Z b Z n−1
X
I(f ) = f (x)dx = f= ck (xk+1 − xk ).
a [a,b] k=0

Ce nombre ne dépend pas du choix de la subdivision τ subordonnée à f .

6
CALCUL INTEGRAL

Exemple 1.1.4.
Soit f : [a, b] → R définie par


 y0 si x ∈ [a0 , a1 ]

 y1 si x ∈]a1 , a2 [



f (x) = y2 si x ∈ [a2 , a3 ]

y3 si x ∈]a3 , a4 [





 y
0 si x ∈ [a4 , a5 ],
avec a0 = a et a5 = b.

On a :
Z b 4
X
I(f ) = f (x)dx = yk (ak+1 − ak )
a k=0
= y0 (a1 − a0 ) + y1 (a2 − a1 ) + y2 (a3 − a2 )
+y3 (a4 − a3 ) + y4 (a5 − a4 )

Propriété 1.1.1.
Supposons que a < b.
Rb
1 f 7→ a f (x)dx est une forme linéaire sur l’ensemble des fonctions en escalier sur
le segment [a, b]. c’est-à-dire, pour f et g deux fonctions en escalier sur le segment
[a, b] et α, β ∈ K, on a
Z b Z b Z b
(αf + βg)(x)dx = α f (x)dx + β g(x)dx.
a a a

2 Si f est une fonction en escalier positive sur [a, b], alors


Z b
f (x)dx ≥ 0.
a

3 On a la relation de Chasles : si a < c < b alors


Z b Z c Z b
f (x)dx = f (x)dx + f (x)dx.
a a c

7
CALCUL INTEGRAL

4 Pour f et g deux fonctions en escalier sur le segment [a, b] telles que f ≤ g sur
[a, b],
Z b Z b
f (x)dx ≤ g(x)dx.
a a
Démonstration.
1 Soient τ1 une subdivision de [a, b] subordonnée à f et τ2 une subdivision de [a, b] su-
bordonnée à g. Soit τ une subdivision plus fine que τ1 et τ2 . Elle est donc subordon-
née à la fois à f et à g. Supposons que τ est telle que a = x0 < x1 < ... < xn = b
et que
∀i ∈ {0, ..., n − 1}, f = ci et g = di .
]xi ,xi+1 [ ]xi ,xi+1 [

On a alors
Z b n−1
X
(αf + βg)(x)dx = (αci + βdi )(xi+1 − xi )
a i=0
n−1
X n−1
X
= α ci (xi+1 − xi ) + β di (xi+1 − xi )
i=0 i=0
Z b Z b
= α f (x)dx + β g(x)dx.
a a

2 Soit τ une subdivision de [a, b] subordonnée à f . Supposons que τ est telle que
a = x0 < x1 < ... < xn = b et que ∀i ∈ {0, ..., n − 1}, f = ci .
]xi ,xi+1 [
Comme f est positive, pour tout i ∈ {0, ..., n − 1}, on a ci ≥ 0. Par conséquent,
Rb
α a f (x)dx = n−1
P
i=0 ci (xi+1 − xi ) ≥ 0

3 Posons h = g − f . En utilisant les prpriétés précédentes, on a


Z b Z b Z b
h(x)dx = g(x)dx − f (x)dx ≥ 0.
a a a
Z b Z b
donc g(x)dx ≥ f (x)dx.
a a
4 Soit τ une subdivision de [a, b] subordonnée à f telle que a = x0 < x1 < ... <
xn = b. On peut supposer, quitte à considérer la subdivision τ 0 = τ ∪ {c} qui est
plus fine que τ que c est un point de τ . On suppose de plus que c est le m-ième
élément de τ . Si pour tout i ∈ {0, ..., n − 1}, f = di alors
]xi ,xi+1 [
Z b n−1
X
f (x)dx = di (xi+1 − xi )
a i=0
m−1
X n−1
X
= di (xi+1 − xi ) + di (xi+1 − xi )
i=0 i=m
Z c Z b
= f (x)dx + g(x)dx.
a c

8
CALCUL INTEGRAL

Définition 1.1.5 (Fonction continue par morceaux sur [a, b]).


Soit f une fonction définie dans un intervalle [a, b]. On dit que f est continue par mor-
ceaux, s’il existe une subdivision τ = (a0 , a1 , ..., an ) de [a, b] telle que :
1 La restriction fi de la fonction f à chaque intervalle ]xi ; xi+1 [, (0 ≤ i ≤ n − 1) est
continue ;
2 Pour i ∈ {0; ...n − 1}, la fonction fi possède une limite finie λi à droite, et une
limite finie µi à gauche.

Définition 1.1.6 (Fonction continue par morceaux sur un intervalle).


On dit qu’une fonction définie sur un intervalle J est continue par morceaux sur J si et
seulement si elle est continue par morceaux sur tout segment de J.

Exemple 1.1.5.

Exemple 1.1.6.
1) Une fonction en escalier est continue par morceaux.
2) Une fonction continue est continue par morceaux.
3) La fonction f définie sur [-1,1] par : f (0) = 0 et ∀x 6= 0, f (x) = e1/x n’est pas
continue par morceaux, car elle n’a pas de limite finie à droite en 0.
4) La fonction f définie sur [-1,1] par : f (0) = 0, ∀x > 0, f (x) = ex et ∀x < 0,
f (x) = x2 + 1 est continue par morceaux.

Proposition 1.1.1.
Une fonction continue par morceaux sur le segment [a, b] est bornée sur [a, b].

9
CALCUL INTEGRAL

Démonstration.
Soit f une fonction continue par morceaux sur [a, b]. Prenons une subdivision τ = (xk )0≤k≤n
adaptée à f . Pour i ∈ {l, ..., n}, la restriction de f à ]xi−1 , xi [ se prolonge en une fonction
continue qui est alors bornée sur le segment [xi−1 , xi ].
Par suite, la fonction f est bornée sur ]xi−1 , xi [ et, en posant Mi = sup |f |, la fonction
]xi−1 ,xi [
f est donc bornée sur [a, b] par :
n o
max M1 , M2 , ..., Mn , |f (x0 )|, |f (x1 )|, ..., |f (xn )| .

Théorème 1.1.1 (Approximation d’une fonction continue par morceaux par une fonction
en escalier).
Soit une fonction f : [a, b] → R continue par morceaux sur le segment [a, b]. Soit un réel
ε > 0. Il existe une fonction en escalier ϕ : [a, b] → R telle que

kf − ϕk∞ = sup |f (x) − ϕ(x)| ≤ ε.


x∈[a,b]

Démonstration.
Puisque la fonction f est continue sur le segment [a, b], elle est uniformément continue
sur ce segment (théorème de Heine). ∀ε > 0, il existe donc δ > 0 tel que ∀(x, y) ∈ [a, b]2 ,
|x − y| ≤ δ ⇒ |f (x) − f (y)| ≤ ε. Considérons alors un entier n suffisamment grand pour
que (b−a)
n
≤ δ et définissons la subdivision de pas constant h = (b−a) n
≤ δ, xi = a+ih pour
i ∈ {0, ..., n − 1}. Définissons ensuite la fonction en escalier ϕ en posant ∀i ∈ {0, ..., n −
1}, ∀x ∈ [xi , xi+1 [, ϕ(x) = f (xi ) et ϕ(b) = f (b). Soit x ∈ [a, b[, il existe i ∈ {0, ..., n−1}
tel que xi ≤ x < xi+1 et comme |x − xi | ≤ δ, |f (x) − ϕ(x)| = |f (x) − f (xi )| ≤ ε. Si
x = b, on a également |f (b) − ϕ(b)| = 0 ≤ ε. En passant à la borne supérieure, on a bien
kf − ϕk∞ ≤ ε.

Exemple 1.1.7.

10
CALCUL INTEGRAL

Corollaire 1.1.1 (Encadrement d’une fonction continue par morceaux par deux fonctions
en escalier).
Soit f une fonction continue par morceaux sur [a, b]. Alors, pour tout ε > 0, il existe deux
fonctions en escalier ϕ et ψ sur [a, b] telles que :
(
∀x ∈ [a, b]; ϕ(x) ≤ f (x) ≤ ψ(x)
∀x ∈ [a, b]; 0 ≤ ψ(x) − ϕ(x) ≤ ε.

Démonstration.
Soit f une fonction continue par morceaux sur [a, b]. Prenons une subdivision τ = (xk )0≤k≤n
adaptée à f . Pour i ∈ {l, ..., n}, la restriction fi de f à ]xi−1 , xi [ se prolonge en une fonc-
tion continue sur [xi−1 , xi ].
Soit ε > 0 fixé. D’après la proposition précédente, on peut trouver une fonction θi en
escalier sur [xi−1 , xi ] telle que |fi − θi | < ε. La fonction 0 définie par :

∀i ∈ {1, ..., n}, θ = θi sur ]xi−1 , xi [

∀i ∈ {0, ..., n}, θ(xi ) = f (xi )


est en escalier et vérifie |f − θ| ≤ ε.

En prenant une fonction en escalier θ telle que |f − θ| ≤ 2ε , les fonctions en escalier


ϕ = θ − 2ε et ψ = θ + 2ε vérifient alors :

ϕ≤f ≤ψ et 0 ≤ ψ − ϕ ≤ ε.

Exemple 1.1.8.

11
CALCUL INTEGRAL

Notation 1.1.1.
Si f est continue par morceaux sur [a, b], on note :
n o
A(f ) = ϕ | ϕ est en escalier sur [a, b] et ϕ ≤ f
n o
B(f ) = ψ | ψ est en escalier sur [a, b] et ψ ≥ f .

Proposition 1.1.2 (Intégrale de Riemann d’une fonction continue par morceaux).


Soit une fonction f continue par morceaux sur un segment [a, b]. On considère les en-
sembles
nZ b o

I (f ) = ϕ(x)dx | ϕ est en escalier sur [a, b] et ϕ ≤ f
a
nZ b o
+
I (f ) = ψ(x)dx | ψ est en escalier sur [a, b] et ψ ≥ f .
a
On a les propriétés suivantes,
– I − admet une borne supérieure.
– I + (f ) admet une borne inférieure.
– sup I − (f ) = inf I + (f ).

Démonstration.
Soit f une fonction continue par morceaux sur [a.b]. D’après la proposition 1.1.1, la fonc-
tion f est bornée ; notons m = inf f et M = sup f .
[a,b] [a,b]

La fonction constante m (respectivement M ) appartient à A(f ) (respectivement à


B(f )), donc A(f ) et B(f ) sont non vides.
De plus, si ϕ ∈ A(f ), alors ϕ ≤ f ≤ M , donc :
Z b Z b
f (x)dx ≤ M dx = M (b − a).
a a

12
CALCUL INTEGRAL

nZ b o
L’ensemble ϕ(x)dx | ϕ ∈ A(f ) est une partie non vide majorée de R et possède
a
donc une borne supérieure α.
nZ b o
De même, l’ensemble ψ(x)dx | ψ ∈ B(f ) est une partie non vide minorée de R et
a
possède donc une borne inférieure β.

Toute fonction ϕ de A(f ) est inférieure à toute fonction ψ de B(f ) et par suite :
Z b Z b
ϕ(x)dx ≤ ψ(x)dx.
a a

nZ b o Rb
Soit ψ ∈ B(f ) fixée. L’ensemble ϕ(x)dx | ϕ ∈ A(f ) étant majoré par a ψ(x)dx,
a
sa borne supérieure α est plus petite que cette intégrale. Le réel α est donc un minorant
nZ b o
de l’ensemble ψ(x)dx | ψ ∈ B(f ) , par conséquent il est plus petit que la borne in-
a
férieure de ce dernier. On en déduit donc α ≤ β.

Soit ε > 0. D’après le corollaire 1.1.1, on peut trouver ϕ ∈ A(f ) et ψ ∈ B(f ) telles
que ψ − ϕ ≤ ε. On a alors :
Z b Z b Z b
ψ(x)dx − ϕ(x)dx = (ψ − ϕ)(x)dx ≤ ε(b − a)
a a a

Or, par définition de α et β, on a :


Z b Z b
ϕ(x)dx ≤ α ≤ β ≤ ψ(x)dx.
a a

On a donc :
∀ε > 0, 0 ≤ β − α ≤ ε(b − a)
ce qui prouve α = β.

Définition 1.1.7.
On définit l’intégrale de Riemann de la fonction continue par morceaux f sur [a, b] par
Z b
f (x)dx = sup I − (f ) = inf I + (f ).
a

Notation 1.1.2.
Soit f une fonction continue par morceaux sur J. Soit (a, b) ∈ J 2 . On note
Rb R
1 Si a ≤ b, a f (x)dx = [a,b] f
Rb R
2 Si b ≤ a, a f (x)dx = − [a,b] f
Rb
3 Si a = b, a f (x)dx = 0.

13
CALCUL INTEGRAL

Théorème 1.1.2 (Approximation de l’intégrale d’une fonction continue par morceaux).


Soit une fonction f continue par morceaux sur [a, b]. Alors il existe une suite (ϕn ) de
fonctions en escalier telle que

dn = kf − ϕn k∞ = sup |f (x) − ϕn (x)| −−−−→ 0.


x∈[a,b] n→+∞

Pour toute suite (ϕn ) de fonctions en escalier vérifiant cette condition, on a :


Z b Z b
ϕn (x)dx −−−−→ f (x)dx.
a n→+∞ a

Propriété 1.1.2.
(P1) Soit f une fonction continue par morceaux sur [a, b],
Z a Z b Z a
f (x)dx = − f (x)dx et f (x)dx = 0.
b a a

(P2) (Linéarité)
Pour f et g deux fonctions continues par morceaux sur le segment [a, b] et α, β ∈ R,
on a Z b Z Z b b
(αf + βg)(x)dx = α f (x)dx + β g(x)dx.
a a a

(P3) (Intégrale d’une fonction continue par morceaux positive)


Si f est une fonction continue par morceaux positive sur [a, b], alors
Z b
f (x)dx ≥ 0.
a

(P4) Une fonction continue et positive sur un segment [a, b] est nulle si, et seulement si,
son intégrale sur [a, b] est nulle.
(P5) (Majoration d’intégrales)
Soient f et g deux fonctions continues par morceaux sur le segment [a, b].
a Si f ≤ g sur [a, b], alors
Z b Z b
f (x)dx ≤ g(x)dx.
a a

b Si ∃m, M ∈ R telles que ∀x ∈ [a; b], m ≤ f (x) ≤ M , alors


Z b
m(b − a) ≤ f (x)dx ≤ M (b − a);
a

c f est bornée et
Z b Z b
| f (x)dx| ≤ |f (x)|dx ≤ (b − a) sup |f (x)|;
a a x∈[a,b]

14
CALCUL INTEGRAL

d On a l’inégalité de la moyenne :
Z b Z b
| f (x)g(x)dx| ≤ sup |f (x)| |g(x)|dx;
a x∈[a,b] a

e On a l’inégalité de Cauchy-Schwarz :
s s
Z b Z b Z b
| f (x)g(x)dx| ≤ 2
(f (x)) dx (g(x))2 dx;
a a a

(P6) (Relation de Chasles)


Soit f une fonction continue par morceaux sur [a, b], si a < c < b alors
Z b Z c Z b
f (x)dx = f (x)dx + f (x)dx.
a a c

Démonstration.
(P1) Voir définition
(P2) Comme f et g sont des fonctions continues par morceaux sur le segment [a, b], il
en est de même de αf + βg et cette fonction est donc intégrable sur le segment
R R R
[a, b]. Posons I = [a,b] (αf + βg), I1 = [a,b] f et I2 = [a,b] g. On veut donc
prouver que I = αI1 + βI2 , ce qui revient à montrer que pour tout ε > 0, on a
−ε ≤ I − (αI1 + βI2 ) ≤ ε.
Soit ε > 0. D’après le corollaire 1.1.1, il existe des fonctions en escalier ϕ1 , ϕ2 , ψ1 ,
ψ2 définies sur [a, b] telles que

ϕ1 ≤ f ≤ ψ1 , ψ1 − ϕ1 ≤ ε et ϕ 2 ≤ g ≤ ψ2 , ψ2 − ϕ2 ≤ ε.

On a donc

αϕ1 + βϕ2 ≤ αf + βg ≤ αψ1 + βψ2 et αψ1 + βψ2 − (αϕ1 + βϕ2 ) ≤ ε.

Il vient alors
Z Z Z
(αϕ1 + βϕ2 ) − α ψ1 − β ψ2 ≤ I − (αI1 + βI2 )
[a,b] [a,b] [a,b]
Z Z Z
≤ (αϕ1 + βϕ2 ) − α ϕ1 − β ϕ2
[a,b] [a,b] [a,b]

donc
Z Z
(α(ϕ1 −ψ1 )+β(ϕ2 −ψ2 )) ≤ I −(αI1 +βI2 ) ≤ (α(ψ1 −ϕ1 )+β(ψ2 −ϕ2 ))
[a,b] [a,b]

par linéarité de l’intégrale des fonctions en escalier, on a


Z Z
−ε(α + β) ≤ I − (αI1 + βI2 ) ≤ ε(α + β)
[a,b] [a,b]

15
CALCUL INTEGRAL

car ψ1 − ϕ1 ≤ ε et ψ2 − ϕ2 ≤ ε et par suite,

−ε(α + β)(b − a) ≤ I − (αI1 + βI2 ) ≤ ε(α + β)(b − a).

Ce qui prouve la propriété.


(P3) La fonction nulle sur [a, b] est en escalier et vérifie 0 ≤ f . Elle est donc élément de
A(f ) et par définition de l’intégrale d’une fonction continue par morceaux, on a
Z Z
f= 0 = 0.
[a,b] [a,b]

(P4) Si f est nulle, alors son intégrale est évidemment nulle. Pour la réciproque, suppo-
sons f continue, positive et non nulle. On peut alors trouver un élément c ∈ [a, b]
tel que f (c) > 0.

◦ Si a < c < b : posons ε = f (c)/2. La continuité de f en c permet de trouver un


réel η > 0 tel que :

∀x ∈ [a, b], |x − c| ≤ η ⇒ f (x) ≥ ε.

En posant α = max{ a+c


2
, c − η} et β = min{ b+c 2
, c + η}, on a :
Z Z Z Z
f = f+ f+ f
[a,b] [a,α] [α,β] [β,b]
Z
≥ f puisque f est positive
[α,β]
≥ (β − α)ε > 0 puisque ∀x ∈ [α, β], f (x) ≥ ε

ce qui prouve que l’intégrale de f est non nulle.

◦ Si c = a ou c = b alors la fonction f est continue et f (c) > 0, ce qui prouve que


f est strictement positive au voisinage de c. Il existe donc un réel d ∈]a, b[ tel que
f (d) > 0, et l’on est ramené au cas précédent.
(P5) a En appliquant la propriété précédente à la fonction positive g − f , on obtient
R
[a,b]
(g − f ) ≥ 0 et on conclut en utilisant la linéarité de l’intégrale d’une
fonction continue par morceaux.
b En appliquant la propriété précédente, on obtient
Z b Z b Z b
m dx ≤ f (x) dx ≤ M dx,
a a a

ce qui donne le résultat.

16
CALCUL INTEGRAL

c la proposition 1.1.1 permet de dire que f est bornée sur [a,b]. Remarquons que
comme f est continue par morceaux, utilisant les théorèmes d’opération sur
les limites et les fonctions continues, il en est de même de |f | et donc |f | est
intégrable sur [a, b]. De plus, on a −|f | ≤ f ≤ |f |. Par conséquent, d’après la
propriété P5 a, Z Z Z
−|f | ≤ f≤ |f |,
[a,b] [a,b] [a,b]

ce qui donne le résultat.


d Comme f est continue par morceaux sur le segment [a, b], appliquant la pro-
position 1.1.1, f est bornée sur [a,b] et il existe donc un réel M > 0 tel que
supf = M . On a donc : ∀x ∈ [a, b], |f (x)g(x)| ≤ M |g(x)| et donc, appliquant
[a,b]
les propriétés P5 a et P5 d, on a
Z Z Z
| f g| ≤ |f g| ≤ M |g| ≤ M |g|
[a,b] [a,b] [a,b]

e Introduisons la fonction polynomiale P de la variable a définie par


Z Z Z Z
2 2 2
P = (f + αg) = α g + 2α fg + f 2.
[a,b] [a,b] [a,b] [a,b]

Remarquons que comme ∀α ∈ R, (f + αg)2 ≥ 0, P est positive ou nulle.

R
Si [a,b] g 2 = 0 alors P est une fonction affine. Vu qu’elle est positive ou nulle,
il est nécessaire que le coefficient de son terme de degré 1 est nul, c’est-à-dire
R
[a,b]
(f g) = 0. L’inégalité de Cauchy-Schwarz est alors démontré dans ce cas
particulier.

Sinon, P est un trinôme du second degré. Comme P ≥ 0, ses deux racines


sont ou confondues ou complexes. Par conséquent son discriminant réduit ∆
est négatif ou nul
Z Z Z
2 2
∆=( f g) − f g2.
[a,b] [a,b] [a,b]

On en déduit alors l’inégalité souhaitée. Dans le cas où f et g sont continues


(et plus seulement continues par morceaux), remarquons qu’il y a égalité dans
cette inégalité lorsque g = 0 ou alors lorsque le trinôme P possède une racine
R
double. C’est-à-dire qu’il existe α ∈ R tel que [a,b] (f + αg)2 = 0. D’après
R
la propriété P4, on doit avoir [a,b] (f + αg) = 0, c’est-à-dire que les deux
fonctions f et g sont proportionnelles. Réciproquement, si les deux fonctions
sont proportionnelles, on vérifie qu’il y a égalité dans la majoration de Cauchy-
Schwarz.

17
CALCUL INTEGRAL

(P6) Soit ϕ ∈ A(f ). On a ϕ|[a,c] ≤ f |[a,c] et ϕ|[c,b] ≤ f |[c,b] . Par conséquent,


Z Z Z
ϕ = ϕ+ ϕ par application de la relation de Chasles
[a,b] [a,c] [c,b]
pour les fonctions en escalier
Z Z
≤ f+ f par application de la propriété P5 a.
[a,c] [c,b]

Notons γ cette dernière quantité. γ est donc un majorant de I − (f ). Par conséquent,


R
γ ≥ [a,b] f . On peut faire le même raisonnement avec une fonction ϕ ∈ B(f ) et on
R R
aura alors γ ≤ [a,b] f . Donc γ = [a,b] f et la relation de Chasles est démontrée.

Théorème 1.1.3 (Valeur moyenne d’une fonction).


Soit f une fonction continue sur le segment [a, b], Alors il existe c ∈ [a, b] tel que
Z b
1
µ = f (c) = f (x)dx.
b−a a
Le nombre µ est appelé valeur moyenne de f sur [a, b].

Démonstration.
Comme f est continue sur [a, b], elle admet un minimum m et un maximum M sur [a, b].
De la propriété P5 b, on peut écrire
Z b
m(b − a) ≤ f (x)dx ≤ M (b − a).
a

Par suite, Z b
1
m≤ f (x)dx ≤ M.
b−a a

En utilisant le théorème des valeurs intermédiaires il existe c ∈ [a, b] tel que


Z b
1
f (c) = f (x)dx.
b−a a

1.2 Primitives et intégrales


1.2.1 Primitives
Définition 1.2.1 (Primitives).
Soit un intervalle I et une fonction f : I → R. On dit qu’une fonction F : I → R est une
primitive de f sur I si
1 la fonction F est dérivable sur l’intervalle I ;
2 ∀x ∈ I, F 0 (x) = f (x).

18
CALCUL INTEGRAL

Proposition 1.2.1.
Deux primitives de f sur I sont égales à une constante près.

Démonstration.
Comme F et G sont des primitives de f sur I, on a (G − F )0 = f − f = 0. Par conséquent
G − F est une fonction constante sur I. Il existe donc c ∈ R tel que G = F + c.

1.2.2 Primitives usuelles


Z
Dans ce tableau ci-dessous, pour chaque fonction f , nous donnons une primitive f.
Le lecteur précisera l’intervalle ou les intervalles sur lequel ou lesquels f est continue.
xα+1
Z Z
α dx
α ∈ R, α 6= −1, x dx = = ln |x|
Z α+1 Z x
ex dx = ex ln xdx = x ln x − x
Z Z
cos xdx = sin x sin xdx = − cos x
Z Z
dx dx
= tan x 2 = − cotan x
Z cos2 x Z sin x
tan xdx = − ln | cos x| cotan xdx = ln | sin x|
Z Z
dx x dx x π 
= ln tan = ln tan +
Z sin x 2 Zcos x 2 4
dx
= ln | tan x| tan2 xdx = tan x − x
sin
Z x cos x Z
ch xdx = sh x sh xdx = ch x
Z Z
dx dx
= th x = coth x
Z ch2 x Z sh2 x
th xdx = ln ch x coth xdx = ln | sh x|
Z Z
dx x dx
= ln th = 2 arctan ex
Z sh x 2 Z ch x
dx
= ln | th x| th2 x = x − th x
sh x ch x
Z Z
dx 1 x dx x x
a 6= 0, 2 2
= arctan a > 0, √ = arcsin = − arccos
Z x +a a a 2
Za − x 2 a

a
dx 1 x−a dx
a 6= 0, 2 − a2
= ln a 6= 0, √ = ln |x + x2 + a|
Z x 2a x + a Z x 2+a
dx x dx x
α 6= 0 2 3/2
= √ α > 0, 2 3/2
= √
(x + α) 2
α x +α (α − x ) α α − x2
Z
dx x
In = 2 n
Formule de récurrence 2nI n+1 = + (2n − 1)In
Z (1 + x ) (1 + x2 )n
dx x
Jn = Formule de récurrence 2nJ n+1 = + (2n − 1)Jn
(1 − x2 )n (1 − x2 )n

19
CALCUL INTEGRAL

1.2.3 Relation primitive-intégrale


Théorème 1.2.1.
Soit f : [a, b] → R une fonction continue. La fonction
F : [a, b] → R Z x
est l’unique primitive de la fonction f qui s’annule en a. Par
x 7→ f (t)dt
a
conséquent pour une primitive F quelconque de f :
Z b
 b
f (t) dt = F (b) − F (a) = F (t) a
a

Démonstration.
Essayons de visualiser tout d’abord pourquoi la fonction F est dérivable et F 0 (x) = f (x).

Fixons x0 ∈ [a, b]. Par la relation de Chasles nous savons :


Z x Z x0 Z a Z x Z x
F (x) − F (x0 ) = f (t) dt − f (t) dt = f (t) dt + f (t) dt = f (t) dt
a a x0 a x0

Donc le taux d’accroissement


x
F (x) − F (x0 ) A
Z
1
= f (t) dt =
x − x0 x − x0 x0 x − x0

où A est l’aire hachurée (en rouge). Mais cette aire est presque un rectangle, si x est
suffisamment proche de x0 , donc l’aire A vaut environ (x − x0 ) × f (x0 ) ; lorsque x → x0
le taux d’accroissement tend donc vers f (x0 ). Autrement dit F 0 (x0 ) = f (x0 ).
Rx
Passons à la preuve rigoureuse. Comme f (x0 ) est une constante alors x0 f (x0 ) dt =
(x − x0 )f (x0 ), donc
Z x Z x
F (x) − F (x0 ) 1 1
− f (x0 ) = f (t) dt − f (x0 ) dt
x − x0 x − x 0 x0 x − x 0 x0
Z x
1 
= f (t) − f (x0 ) dt
x − x 0 x0

20
CALCUL INTEGRAL

Fixons  > 0. Puisque f est continue en x0 , il existe δ > 0 tel que (|t − x0 | < δ =⇒
|f (t) − f (x0 )| < ). Donc :
Z x
F (x) − F (x0 ) 1 
− f (x0 ) = f (t) − f (x0 ) dt
x − x0 x − x 0 x0
Z x
1
≤ f (t) − f (x0 ) dt
|x − x0 | x0
Z x
1
≤  dt = 
|x − x0 | x0
Ce qui prouve que F est dérivable en x0 et F 0 (x0 ) = f (x0 ).

Maintenant on sait que F est une primitive de f , F est même la primitive qui s’annule
Ra
en a car F (a) = a f (t) dt = 0 et si G est une autre primitive qui s’annule en a, on a
F = G + c avec c ∈ R, (a)F = G(a) + c ⇒ c = 0. Si H est une autre primitive on sait
H = F + d avec d ∈ R. Ainsi
Z b

H(b) − H(a) = F (b) + c − F (a) + c = F (b) − F (a) = F (b) = f (t) dt.
a

Corollaire 1.2.1 (Théorème fondamental deuxième forme).


Soit une fonction f de classe C 1 sur le segment [a, b]. Alors la formule suivante relie f et
sa dérivée par une intégrale. Pour tout x ∈ [a, b],
Z x
f (x) = f (a) + f 0 (t)dt.
a

Démonstration.
Comme f est de classe C 1 sur I, f 0 est continue et est donc bien intégrable sur tout seg-
ment [a, b]Zde I. De plus f est une primitive de f 0 sur I. Appliquant le résultat précédent,
x
on a bien f 0 (t)dt = f (x) − f (a).
a

Théorème 1.2.2 (Dérivée d’une fonction définie par une intégrale).


Soit une fonction f continue sur un intervalle I. Soient u, v : J → I deux fonctions
dérivables sur l’intervalle J. Alors la fonction

G:J → R
Z v(x)
x 7→ f (t)dt
u(x)

est dérivable sur l’intervalle J et

∀x ∈ J, G0 (x) = v 0 (x)f [v(x)] − u0 (x)f [u(x)].

21
CALCUL INTEGRAL

Démonstration.
Soit un réel a ∈ I et F la fonction du théorème fondamental. Il suffit de remarquer que
pour x ∈ J, avec la relation de Chasles,
Z v(x) Z u(x)
F (x) = f (x)dx − f (x)dx = F (v(x)) − F (u(x)).
a a

Puisque G = F ◦v−F ◦u et que la fonction F est dérivable sur I, que u et v sont dérivables
sur J à valeurs dans I, d’après le théorème de dérivation des fonctions composées, la
fonction G est dérivable sur J et ∀x ∈ J, G0 (x) = F 0 (v(x))v 0 (x) − F 0 (u(x))u0 (x) d’où
la formule du théorème puisque F 0 = f .

Exemple 1.2.1.
Étudions les variations de la fonction

g :]1, +∞[ → R
Z x2
dt
x 7→
x t2 −1

La fonction g est définie et dérivable sur l’intervalle ]1, +∞[. Notons J =]1, +∞[ et
définissons les fonctions

u:J → I v:J → I f :I → R
1
x 7→ x x 7→ x2 x 7→
x2 −1
Les fonctions u, v sont dérivables de J vers I et la fonction f est continue sur l’intervalle
I. D’après le théorème précédent, g est dérivable sur l’intervalle J et pour x ∈ J,

x2 − 2x + 1
g 0 (x) = 2xf (x2 ) − f (x) = −
(x2 − 1)(x2 + 1)

Le trinôme −(x2 − 2x + 1) est strictement négatif sur I. On en déduit que g est strctement
décroissante sur I =]1, +∞[.

1.2.4 Méthodes de Calcul de primitives et d’intégrales


A) Intégration par parties

Théorème 1.2.3 (Intégration par parties).


Soient deux fonctions u, v : [a, b] → R de classe C 1 sur le segment [a, b]. Alors
Z b h ib Z b
0
u(t)v (t)dt = u(t)v(t) − u0 (t)v(t)dt.
a a a

22
CALCUL INTEGRAL

Démonstration.
Comme u et v sont de classe C 1 sur I, la fonction uv est de classe C 1 sur I. On a :
Z b Z b Z b Z b
0 0 0 0
(uv)(b) − (uv)(a) = (uv) (t)dt = (u v + uv )(t)dt = u v(t)dt + uv 0 (t)dt.
a a a a

Remarque 1.2.1.
Cette relation est souvent utilisé pour diminuer successivement le degré d’un polynôme
g(x) qui multiplie une fonction f 0 (x) que l’on sait intégrer.
Elle sert aussi pour l’intégration des expressions faisant intervenir les fonctions trigono-
metriques, où l’on retombe sur la fonction d’origine après deux intégrations.

Remarque 1.2.2 (Cas classiques d’utilisation).


◦ P etant Zun polynôrne et α 6= 0,
b
• pour P (t) sin(αt + β)dt, on pose u(t) = P (t) et v 0 (t) = sin(αt + β).
Za b
• pour P (t) cos(αt + β)dt, on pose u(t) = P (t) et v 0 (t) = cos(αt + β)
Za b
• pour P (t)eαt+β dt, on pose u(t) = P (t) et v 0 (t) = eαt+β ;
Za b
• pour P (t) ln tdt, on pose u(t) = ln t et v 0 (t) = P (t).
a Z b Z b
αt
◦ Pour calculer I = e cos(βt)dt ou J = eαt sin(βt)dt, on peut faire deux
a a
integrations par parties " sans changer d’avis ", c’est-à-dire en posant les deux fois
v(t) = eαt , ou les deux fois v(t) = cos(βt) ou sin(βt).

Exemple 1.2.2.
Z 1
1 Calcul de xex dx. On pose u(x) = x et v 0 (x) = ex . Nous aurons besoin de
0
savoir que u0 (x) = 1 et qu’une primitive de v 0 est simplement v(x) = ex . La
formule d’intégration par parties donne :
Z 1 Z 1
x
xe dx = u(x)v 0 (x) dx
0 0 Z 1
1
u0 (x)v(x) dx

= u(x)v(x) 0 −
Z 1 0
 x 1
= xe 0 − 1 · ex dx
0  1
= 1 · e1 − 0 · e0 − ex 0
= e − (e1 − e0 )
= 1

23
CALCUL INTEGRAL

Z e
2 Calcul de x ln x dx.
1
1 x2
On pose cette fois u = ln x et v 0 = x. Ainsi u0 = et v = . Alors
x 2
Z e Z e Z e
 e
ln x · x dx = uv 0 = uv 1 − u0 v
1 1
Z e 1
2 e 1 x2
= ln x · x2 1 −
 
x 2
dx
1
 1 e
Z
e2 12
= ln e 2 − ln 1 2 − 2 x dx
1
2 1 h x2 ie e2 e2 1 2
= e2 − = 2 − 4 + 4 = e 4+1
2 2 1
Z
3 Calcul de arcsin x dx.
Pour déterminer une primitive de arcsin x, nous faisons artificiellement apparaître
un produit en écrivant arcsin x = 1 · arcsin x pour appliquer la formule d’intégra-
tion par parties. On pose u = arcsin x, v 0 = 1 (et donc u0 = √1−x 1
2 et v = x)

alors
Z Z
  x
1 · arcsin x dx = x arcsin x − √ dx
1 − x2
   √ 
= x arcsin x − − 1 − x2

= x arcsin x + 1 − x2 + c
Z
4 Calcul de x2 ex dx. On pose u = x2 et v 0 = ex pour obtenir :
Z Z
2 x 2 x
xex dx
 
x e dx = x e −2

On refait une deuxième intégration par parties pour calculer


Z Z
xe dx = xe − ex dx = (x − 1)ex + c
x
 x

D’où Z
x2 ex dx = (x2 − 2x + 2)ex + c.
.

B) Changement de variables

Théorème 1.2.4 (Changement de variables).


Soit f : I → R une fonction continue sur l’intervalle I. Soit ϕ : [α, β] → I une fonction
de classe C 1 sur le segment [α, β]. Alors
Z ϕ(β) Z β
f (x)dx = f [ϕ(t)]ϕ0 (t)dt.
ϕ(α) α

24
CALCUL INTEGRAL

Démonstration.
Comme F est une primitive de f alors F 0 (x) = f (x) et par la formule de la dérivation de
la composition F ◦ ϕ on a

(F ◦ ϕ)0 (t) = F 0 (ϕ(t))ϕ0 (t) = f (ϕ(t))ϕ0 (t).

Donc F ◦ ϕ est une primitive de f (ϕ(t))ϕ0 (t).


Pour les intégrales :
Z b h ib iϕ(b) Z ϕ(b)
0
  h
f (ϕ(t))ϕ (t) dt = (F ◦ϕ)(x) = F ϕ(b) −F ϕ(a) = F (x) = f (x) dx.
a a ϕ(a) ϕ(a)

Méthode 1.2.1.
Rb
Pour calculer l’intégrale a f (x)dx avec un changement de variable :
1 soit on a une idée de fonction ϕ(t) et on écrit x = ϕ(t), soit il y a une partie de
f (x) qu’on veut prendre comme nouvelle variable, disons θ(x) = t ⇔ x = θ−l (t).
dx
2 On calcule ϕ0 (t) = , ce qui donne dx = ϕ0 (t)(t)dt.
dt
3 f (x)dx devient donc f (ϕ(t))ϕ0 (t)dt.
4 Concernant les bornes, si x varie de a à b alors t = ϕ−l (x) varie de ϕ−l (a) à
ϕ−l (b).

Exemple 1.2.3. Z
Calculons la primitive F = tan t dt.
Z Z
sin t
F = tan t dt = dt .
cos t
0
On reconnaît
Z ici une forme uu (avec u = cos t et u0 = − sin t) dont une primitive est ln |u|.
0
u  
Donc F = − = − ln |u| = − ln |u| + c = − ln | cos t| + c.
u
Nous allons reformuler tout cela en terme de changement de variable. Notons ϕ(t) =
cos t alors ϕ0 (t) = − sin t, donc
ϕ0 (t)
Z
F = − dt
ϕ(t)
Si f désigne
Z la fonction définie par f (x) = x1 , qui est bijective tant que x 6= 0 ; alors
F = − ϕ0 (t)f (ϕ(t)) dt. En posant x = ϕ(t) et donc dx = ϕ0 (t)dt, on reconnaît la
formule du changement de variable, par conséquent
Z Z
−1 1
F ◦ ϕ = − f (x) dx = − dx = − ln |x| + c .
x

25
CALCUL INTEGRAL

Comme x = ϕ(t) = cos t, on retrouve bien F (t) = − ln | cos t| + c.


Remarque : pour que l’intégrale soit bien définie il faut que tan t soit définie, donc
t 6≡ π2 mod π. La restriction d’une primitive à un intervalle ] − π2 + kπ, π2 + kπ[ est
donc de la forme − ln | cos t| + c. Mais la constante c peut être différente sur un intervalle
différent.

Exemple 1.2.4.
Z 1/2
x
Calcul de dx.
0 (1 − x2 )3/2
Soit le changement de variable u = ϕ(x) = 1 − x2 . Alors du = ϕ0 (x) dx = −2x dx.
1
Pour x = 0 on a u = ϕ(0) = 1 et pour x = on a u = ϕ( 12 ) = 34 . Comme ϕ0 (x) = −2x,
    2
1 3
ϕ est une bijection de 0, sur 1, . Alors
2 4
1/2 3/4 −du
1 3/4 −3/2
Z Z Z
x dx 2
= =− u du
0 (1 − x2 )3/2 1 u3/2
2 1
1 3/4  1 3/4
= − − 2u−1/2 1 = √ 1
2 u
1 2
= q − 1 = √ − 1.
3 3
4

Exemple 1.2.5.
Z 1/2
1
Calcul de dx.
0 (1 − x2 )3/2
On effectue le changement de variable x = ϕ(t) = sin t et dx = cos t dt. De plus t =
1 1 π
arcsin x donc pour x = 0 on a t = arcsin(0) = 0 et pour x = on a t = arcsin( ) = .
h πi   2 2 6
1
Comme ϕ est une bijection de 0, sur 0, ,
6 2
Z 1/2 Z π/6 Z π/6
dx cos t dt cos t dt
= 2 3/2 =
0 (1 − x2 )3/2 0 (1 − sin t) 0 (cos2 t)3/2
Z π/6 Z π/6
cos t 1
= 3
dt = dt
0 cos t 0 cos2 t
 π/6 1
= tan t 0 = √ .
3
Exemple 1.2.6.
Z
1
Calcul de dx.
(1 + x2 )3/2
dt
Soit le changement de variable x = tan t donc t = arctan x et dx = (la fonction
cos2 t

26
CALCUL INTEGRAL

i π πh
tangente établit une bijection de − , + sur R). Donc
2 2
Z Z
1 1 dt
F = 2 3/2
dx = 2 3/2
(1 + x ) (1 + tan t) cos2 t
Z
dt 1
= (cos2 t)3/2 2
car 1 + tan2 t =
cos t cos2 t
Z
 
= cos t dt = sin t = sin t + c = sin(arctan x) + c.

Par suite, Z
1
dx = sin(arctan x) + c.
(1 + x2 )3/2
En manipulant un peu les fonctions on trouverait que la primitive s’écrit aussi
x
F (x) = √ + c.
1 + x2

C) Intégrale d’une fonction paire ou impaire

Proposition 1.2.2 (Intégrale d’une fonction paire ou impaire).


Soit a > 0 et f une fonction
Z continue parZmorceaux sur le segment [−a, a].
0 a
– Si f est paire, alors f (x)dx = f (x)dx.
Z a −a Z a 0
En particulier f (x)dx = 2 f (x)dx.
−a Z 0 0 Z a
– Si f est impaire, alors f (x)dx = − f (x)dx.
Z a −a 0

En particulier f (x)dx = 0.
−a

Démonstration.
Par application de la relation de Chasles, on a
Z a Z 0 Z a
f (x)dx = f (x)dx + f (x)dx.
−a −a 0
(
u = −x
Par le changement de variable , on obtient
du = −dx
Z 0 Z 0 Z a
f (x)dx = − f (−u)du = f (−u)du.
−a a 0
Ra Ra
◦ Supposons que f est paire. On a alors 0 f (−u)du = 0 f (u)du et donc
Z a Z a
f (x)dx = 2 f (x)dx.
−a 0

27
CALCUL INTEGRAL

Ra Ra
◦ Supposons que f est impaire. On a alors 0 f (−u)du = − 0 f (u)du et donc
Z a
f (x)dx = 0.
−a

1.2.5 Sommes de Riemann


L’intégrale est définie à partir de limites de sommes. Mais maintenant que nous savons
calculer des intégrales sans utiliser ces sommes on peut faire le cheminement inverse :
calculer des limites de sommes à partir d’intégrales.

Théorème 1.2.5.
Soit f : [a, b] → R une fonction intégrable, alors
n b
b−aX b − a
Z
Sn = f a+k −−−−→ f (x) dx
n k=1 n n→+∞ a

Définition 1.2.2.
La somme Sn s’appelle la somme de Riemann associée à l’intégrale et correspond à une
subdivision régulière de l’intervalle [a, b] en n petits intervalles. La hauteur de chaque
rectangle étant évaluée à son extrémité droite.

Remarque 1.2.3.
b−a 1 b − a k
Le cas le plus utile est le cas où a = 0, b = 1 alors = et f a + k =f
n n n n
et ainsi n Z 1
1 X k
Sn = f −−−−→ f (x) dx.
n k=1 n n→+∞ 0

Remarque 1.2.4.
Soit f : [a, b] → R une fonction intégrable, alors
n b
b − a
Z
1X 1
Sn0 = f a+k −−−−→ f (x) dx
n k=1 n n→+∞ b−a a

28
CALCUL INTEGRAL

Exemple 1.2.7.
n
X 1
Calculer la limite de la somme Sn = .
k=1
n+k
1 1 1 1 1 1
On a S1 = , S2 = + , S3 = + + , . . .
2 3 4 4 n5 6
1X 1 1
La somme Sn s’écrit aussi Sn = k
. En posant f (x) = , a = 0 et
n k=1 1 + n 1+x
b = 1, on reconnaît que Sn est une somme de Riemann. Donc
n n
1X 1 1 X k
Sn = = f
n k=1 1 + k
n
n k=1 n
Z b Z 1
1  1
−−−−→ f (x) dx = dx = ln |1 + x| 0 = ln 2 − ln 1 = ln 2.
n→+∞ a 0 1+x
Ainsi Sn → ln 2 (lorsque n → +∞).

1.3 Calcul de primitives


1.3.1 Primitives de fonctions rationnelles
Soit F une fonction rationnelle F (X) ∈ R[X]. On cherche une primitive de F c’est-
R
à-dire F (X)dX.

29
CALCUL INTEGRAL

Z
dx
A)
(x − a)n

dx
R
si n = 1, alors x−a
= ln |x − a|
dx 1
R
si n ≥ 2, alors (x−a)n
= (1−n)(x−a)n−1

Z
ax + b
B) dx avec p2 − 4q < 0
(x2 + px + q)n
◦ si n = 1, alors
Z Z
ax + b a 2x + p
2
dx = dx +
x + px + q 2 x2
+ px + q
Z
ap dx
(b − ) 2
2 p
(x + 2 )2 + 4q−p
4
a
= ln(x2 + px + q) +
2 !
2b − ap 2x + p
p arctan p
4q − p2 4q − p2

◦ si n ≥ 2,
Z
ax + b
dx
(x2
Z + px + q)
n
Z
a 2x + p ap dx
= 2 n
dx + (b − ) p 4q−p2 n
2 (x + px + q) 2 2
[(x + 2 ) + ]
4
a
= +
2(1 − n)(x2 + pxZ+ q)n−1
ap 4 n dx
(b − )( ) " #n
2 4q − p2  2
√2x+p +1
4q−p 2

2x + p
Dans la dernière intégrale, le changement de variable défini par t = p ramène
4q − p 2
Z
dt
alors au calcul de .
(1 + t2 )n

C) Exemples

Exemple 1.3.1.
x4
Déterminons une primitive de f : x 7→
(x + 1)2 (x2 + 1)

1) La fonction f est continue sur ] − ∞, −1[ et ] − 1, +∞[. Les calculs effectués


concernent l’un ou l’autre de ces deux intervalles.

30
CALCUL INTEGRAL

2) La décomposition en éléments simples de f donne


3 1 x
f (x) = 1 − + 2
− 2
.
2(x + 1) 2(x + 1) 2(x + 1)
3) Soit F une primitive de f sur ] − ∞, −1[ ou ] − 1, +∞[. Il vient alors que
3 1 1
F (x) = x − ln(|x + 1|) − − ln(x2 + 1).
2 2(x + 1) 4
Exemple 1.3.2.
x+1
Soit f (x) = . Dans un premier temps on fait apparaître une fraction du type
2x2 + x + 1
u0
(que l’on sait intégrer en ln |u|).
u
(4x + 1) 14 − 41 + 1 1 4x + 1 3 1
f (x) = 2
= · 2 + · 2
2x + x + 1 4 2x + x + 1 4 2x + x + 1
4x + 1
On peut intégrer la fraction :
2x2
+x+1
Z Z 0
4x + 1 u (x)
2
dx = dx = ln 2x2 + x + 1 + c
2x + x + 1 u(x)

1
Occupons nous de l’autre partie 2
, nous allons l’écrire sous la forme
2x + x + 1
1
2
(dont une primitive est arctan u).
u +1
1 1 1
= 1 1 =
2x2 + x + 1 2(x + 4 )2 − 8 + 1 2(x + 41 )2 + 78
8 1 8 1
= · 8 1 2 = ·
7 7 2(x + 4 ) + 1 7 √ (x + 1 ) 2 + 1
4

7 4

4 4
On pose le changement de variable u = √ (x + 14 ) (et donc du = √ dx) pour
7 7
trouver
Z Z Z √
dx 8 dx 8 du 7
2
= 2 = 2
·
2x + x + 1 7 √4 (x + 1 ) + 1 7 u +1 4

7 4
2
= √ arctan u + c
7
 
2 4 1
= √ arctan √ x + +c.
7 7 4
Finalement :
Z  
1 2
 3 4 1
f (x) dx = ln 2x + x + 1 + √ arctan √ x + + c.
4 2 7 7 4

31
CALCUL INTEGRAL

1.3.2 Fonction Circulaire


Soit F (X, Y ) une fonction rationnelle. On cherche une primitive de la fonction f
définie par f (x) = F (cos x, sin x).

A) F est un polynôme

Par linéarité de l’intégrale, on est ramené au calcul de primitive de la forme :


Z
In,m = cosn x sinm xdx

où m et n sont des entiers naturels


1) m ou n est impair Z
– n = 2p + 1, avec p ∈ N : I2p+1,m = (1 − sin2 x)p sinm x(cos x)dx.
Z
Le changement de variable t = sin x ramène au calcul de (1 − t2 )p tm dt
Z
– m = 2q + 1, avec q ∈ N : In,2q+1 = cosn x(1 − cos2 x)q (sin x)dx.
Z
Le changement de variable t = cos x ramène au calcul de − (1 − t2 )q tn dt
2) m et n sont pairs
Si p et q sont trop grands pour que la linéarisation soit aisée, on se ramène au calcul
R
de cos2(p+q) xdx au moyen d’une relation de récurrence. En effet, en intégrant par
partie, on a :
Z
I2p,2q = sin2q−1 x(cos2p x sin x)dx
1
= − cos2p+1 x sin2q−1 x +
2p + 1
2q − 1
Z
cos2p+2 x sin2q−2 xdx
2p + 1
1 2q − 1
= − cos2p+1 x sin2q−1 x + I2p+2,2q−2
2p + 1 2p + 1
1 2p − 1
ou, de même I2p,2q = cos2p−1 x sin2q+1 x + I2p−2,2q+2
2q + 1 2q + 1

B) Règles de Bioche

Règle 1.3.1.
On étudie si f (x)dx est invariant quand on remplace x par −x ou par π − x ou par π + x.
a) si f (x)dx est invariant quand on remplace x par −x, le chagement de variable
défini par x = arccos t, donc t = cos x, ramène au calcul d’une primitive d’une
fonction rationnelle en t.

32
CALCUL INTEGRAL

b) si f (x)dx est invariant quand on remplace x par π − x, le chagement de variable


défini par x = arcsin t, donc t = sin x, ramène au calcul d’une primitive d’une
fonction rationnelle en t.
c) si f (x)dx est invariant quand on remplace x par π + x, le chagement de variable
défini par x = arctan t, donc t = tan x, ramène au calcul d’une primitive d’une
fonction rationnelle en t.

Règle 1.3.2.
Si deux au moins des changements a) ou b) ou c) laissent invariant f (x)dx, le chagement
de variable défini par x = 21 arccos t donc t = cos 2x, ramène au calcul d’une primitive
d’une fonction rationnelle en t.

Règle 1.3.3.
Dans tous les cas, le changement de variable x = 2 arctan t donc t = tan x2 , ramène au
calcul d’une primitive d’une fonction rationnelle en t.

Remarque 1.3.1.
Pour avoir les calculs les plus simples possibles, il faut utiliser ces règles dans l’ordre
préférentiel 1.3.2, puis 2.4.1 puis 1.3.3.

Remarque 1.3.2.
x
Le changement de variable t = tan .
2
Les formules de la « tangente de l’arc moitié » permettent d’exprimer sinus, cosinus
x
et tangente en fonction de tan .
2
x
Avec t = tan on a
2
1 − t2 2t 2t
cos x = sin x = tan x =
1 + t2 1 + t2 1 − t2
2 dt
et dx = .
1 + t2

C) Exemples

Exemple 1.3.3.
Déterminons une primitive de f : x 7→ sin5 (x)
sin5 (x) = (1 − cos2 (x))2 sin(x) donne avec le changement de variable défini par t =
cos(x) : Z Z Z
sin (x)dx = − (1 − t ) dt = − (t4 − 2t2 + 1)dt.
5 2 2

Soit F une primitive de f sur R. On obtient alors F (x) = − 51 cos5 (x)+ 32 cos3 (x)−cos(x).

33
CALCUL INTEGRAL

Exemple 1.3.4.
Z
Déterminons cos4 (x) sin2 (x)dx
On a cos4 (x) sin2 (x) = cos4 (x) − cos6 (x). En utilisant les formules d’Euler, on a
1 ix 1
cos4 (x) = 4
(e + e−ix )4 = 3 (cos(4x) + 4 cos(2x) + 3)
2 2
1 ix 1
cos6 (x) = 6
(e + e−ix )6 = 5 (cos(6x) + 6 cos(4x) + 15 cos(2x) + 10).
2 2
4 6 1 1 1 1
Ainsi cos (x) − cos (x) = − 32 cos(6x) − 16 cos(4x) + 32 cos(2x) + 16 . Par suite,
Z
1 1 1 1
cos4 (x) sin2 (x)dx = − sin(6x) − sin(4x) + sin(2x) + x.
192 64 64 16
Exemple 1.3.5. Z
cos x dx
Calcul de la primitive
2 − cos2 x
cos x dx
On note ω(x) = . Comme
2 − cos2 x
cos(π − x) d(π − x) (− cos x) (−dx)
ω(π − x) = 2
= = ω(x)
2 − cos (π − x) 2 − cos2 x

alors le changement de variable qui convient est u = sin x pour lequel du = cos x dx.
Ainsi :
Z Z
cos x dx cos x dx
=
2
2 − cos x 2 − (1 − sin2 x)
Z
du
= = [arctan u]
1 + u2
= arctan(sin x) + c .

Exemple 1.3.6.
Z 0
dx
Calcul de l’intégrale .
−π/2 1 − sin x
x
Le changement de variable t = tan définit une bijection de [− π2 , 0] vers [−1, 0]
2
π 2t 2 dt
(pour x = − , t = −1 et pour x = 0, t = 0). De plus on a sin x = 2
et dx = .
2 1+t 1 + t2
Z 0 Z 0 2 dt Z 0
dx 1+t2 dt
= 2t =2 2
− π2 1 − sin x −1 1 − 1+t2 −1 1 + t − 2t
Z 0  0
dt 1 1
= 2 2
= 2 = 2 1 − =1
−1 (1 − t) 1 − t −1 2

34
CALCUL INTEGRAL

1.3.3 Fonction hyperboliques


Soit F (X, Y ) une fraction rationnelle. On cherche une primitive de la fonction f dé-
finie par f (x) = F (ch x, sh x).
Chacune
Z des règles suivantes donne un changement de variable qui ramène le calcul de
f (x)dx à celui d’une primitive de fonction rationnelle.

Règle 1.3.4.
On examine F (cos x, sin x) et quel changement de variable permet, le plus efficacement
possible (voir les priorités annoncées pour les règle de Bioche) de se ramener à une
primitive de fonction rationnelle.
Z Z
a) Si F (cos(x), sin(x))dx se calcule avec t = cos(x), alors F (ch(x), sh(x))dx
se calcule avec t = ch(x).
Z Z
b) Si F (cos(x), sin(x))dx se calcule avec t = sin(x), alors F (ch(x), sh(x))dx
se calcule avec t = sh(x).
Z Z
c) Si F (cos(x), sin(x))dx se calcule avec t = tan(x), alors F (ch(x), sh(x))dx
se calcule avec t = (x).
Z Z
d) Si F (cos(x), sin(x))dx se calcule avec t = cos(2x), alors F (ch(x), sh(x))dx
se calcule avec t = ch(2x).

Règle 1.3.5.
x
Dans les autres cas, on peut utiliser le changement de variable défini par t = th( ), mais
2
la il est en général préférable d’utiliser t = ex .

Exemples

Exemple 1.3.7.
sh3 (x) sin3 (x)
Z
Calculer F (x) = dx. En notant ω(x) = , on
ch(x)(2 + sh2 (x)) cos(x)(2 + sin2 (x))
a ω(−x) = ω(x), ω(π − x) = ω(x) et ω(π + x) = ω(x). On peut utiliser plusieurs
changements de variables :
t3
Z
1 t = sh(x) donne G(t) = dt.
(1 + t2 )(2 + t2 )
t2 − 1
Z
2 t = ch(x) donne G(t) = dt.
t(1 + t2 )
t3
Z
3 t = th(x) donne G(t) = dt.
2 − t2
(t2 − 1)3
Z
x
4 t = e donne G(t) = dt.
t(t2 + 1)(t4 + 6t2 + 1)

35
CALCUL INTEGRAL

Les fractions rationnelles à primitiver ne sont pas toutes agréables ! Le mieux ici est
d’utiliser le changement de variables t = (x) pour calculer
t2
G(t) = − ln |t2 − 2|
2
puis
th2 (x)
F (x) = − − ln(2 − th2 (x)) + C.
2
Exemple 1.3.8.
Z ln(2)
dx
Calculer dx.
0 5 sh(x) − 4 ch(x)
5 sh(x) − 4 ch(x) = 0 lorsque 5(ex − e−x ) − 4(ex + e−x ) = 0 c’est-à-dire ex − 9e−x = 0
ou encore e2x = 9, soit enfin x = ln(3).
1
La fonction f : x 7→ est donc continue sur [0, ln(2)].
5 sh(x) − 4 ch(x)
Nous utilisons le changement de variable t 7→ et , bijectif de [0, ln(2)] sur [1, 2]. Il vient
alors Z ln(2) Z ln(2) Z 2
dx dx dt
dx = 2 x −x
dx = 2 2
,
0 5 sh(x) − 4 ch(x) 0 e − 9e 1 t −9
et donc Z ln(2)
dx 1h t − 3 i2 1 2
dx = ln = ln( ).
0 5 sh(x) − 4 ch(x) 3 t+3 1 3 5

1.3.4 Intégrale Abélien


Soit F (X, Y ) une fraction rationnelle. L’objectif de cette partie est de calculer une
primitive d’une fonction f de l’une des formes suivantes :
 r ax + b 
n
1 f (x) = F x,
cx + d

2 f (x) = F (x, ax2 + bx + c)

Z r

n ax + b 
A) F x, dx, ad − bc 6= 0
cx + d
Règle 1.3.6.
Le changement de variable défini par
r
n ax + b
t=
cx + d
Z r

n ax + b 
ramène le calcul de F x, dx à celui d’une primitive de fonction rationnelle
cx + d
en t. Avec
−dtn + b ad − bc n−1
x= et dx = n t dt.
ctn − a (ctn − a)2

36
CALCUL INTEGRAL

Z √
B) F (x, ax2 + bx + c)dx a 6= 0 b2 − 4ac 6= 0

On posera b2 − 4ac 6= 0 sinon ax2 + bx + c admet une racine double α. Alors


√ √
– Pour a > 0, ax2 + bx + c = a|x − α|.
– Pour a < 0, l’ensemble de définition est réduit à un point.

1) Se ramener à une primitive de fonction rationnelle

Règle 1.3.7. Z √
Avec a > 0, le calcul de F (x, ax2 + bx + c)dx se ramène à celui d’une primitive de
fonction rationnelle au moyen du changement de variable défini par
√ √
ax2 + bx + c = x a + t.

On a alors √ √
t2 − c −2t2 a + 2bt − 2c a
x= √ et dx = √ dt.
b − 2t a (b − 2t a)2
Règle 1.3.8.
Avec 4 > 0, le polynôme ax2 + bx + c admet des racines α et β, avec α 6= β. En écrivant
r
p x−β
a(x − α)(x − β) = |x − α| a ,
x−α
r
x−β
on est face à une primitive de fonction rationnelle de x et de a .
x−α

2) Se ramener à une primitive de fonction rationnelle de fonctions circulaires ou


hyperboliques

Règle 1.3.9. 
2 b 2 4
Avec a > 0 et 4 > 0, en écrivant ax + bx + c = a (x + ) − 2 , le changement
√ 2a 4a
b 4
de variable défini par t ≥ 0, x + = cosh(t) ramène au calcul d’une primitive
2a 2a
de fonction rationnelle de fonctions hyperboliques.

Règle 1.3.10.  
2 b 2 −4
Avec a > 0 et 4 < 0, en écrivant ax +bx+c = a (x + ) + 2 , le changement de
√ 2a 4a
b −4
variable défini par x + = sinh(t) ramène au calcul d’une primitive de fonction
2a 2a
rationnelle de fonctions hyperboliques.

37
CALCUL INTEGRAL

Règle 1.3.11.  
2 4 b 2
Avec a < 0 et 4 > 0, en écrivant ax + bx + c = (−a) 2
− (x + ) , le change-
√ 4a 2a
i π πh b 4
ment de variable défini par t ∈ − , x+ = sin(t) ramène au calcul d’une
2 2 2a 2a
primitive de fonction rationnelle de fonctions trigonométriques.

C) Exemples

Exemple 1.3.9.
Z r
1 + x dx
Calculer F (x) = sur l’intervalle I =]0, 1[. On effectue le changement de
1−x x
variables r
1+x y2 − 1 4y
y= , x= 2 dx = 2 dy
1−x y +1 (y + 1)2
et on se ramène à calculer la primitive
y2
Z
G(y) = 4 dy.
(y 2 − 1)(y 2 + 1)
La décomposition de la fraction rationnelle s’écrit
x2 dx
Z
1/4 1/4 1/2
4 2 2
= − + 2 ,
(x − 1)(x + 1) x−1 x+1 x +1
y−1
et on trouve que G(y) = ln + 2 arctan(y). Après simplifications :
y+1
√ √ r !
1+x− 1−x 1+x
F (x) = ln √ √ + 2 arctan .
1+x+ 1−x 1−x

On peut utiliser ensuite les quantités conjuguées pour écrire


r !
x 1+x
F (x) = ln √ + arctan .
1 + 1 − x2 1−x

Exemple 1.3.10. Z

Calculer F (x) = x2 + x + 1dx. On réduit le trinôme à l’intérieur de la racine :

√ s
√ p 3 2x + 1 2
x2 + x + 1 = (x + 1/2)2 + 3/4 = [ √ ] +1
2 3
2x + 1
et par le premier changement de variables y = √ , on se ramène au calcul de G(y) =
Z 3
3 p 2
y + 1dy. Ensuite, avec la changement de variables y = sh(z), dy = ch(z)dz, on
4
se ramène à Z
3
H(z) = ch(z)dz.
4

38
CALCUL INTEGRAL

ch(2z) + 1
Il suffit de linéariser ch2 (z) = pour calculer
2
3 3
H(z) = sh(2z) + z
16 8
3  p 
G(y) = y 1 + y 2 + argsh(y)
8

2
(2x + 1) x + x + 1 3 √
F (x) = + ln(2x + 1 + 2 x2 + x + 1) + C.
4 8

1.4 Intégration sur un segment des fonctions à valeurs


complexes
Définition 1.4.1.
Soit (a, b) ∈ R2 tel que a < b et f : [a, b] → C continue par morceaux. On appelle
integrale de f le complexe
Z b Z b Z b
f (x)dx = f1 (x)dx + i f2 (x)dx,
a a a

où f1 = R(f ) et f2 = I(f ).

Propriété 1.4.1.
(P’1) Soit f : [a, b] → C une fonction continue par morceaux,
Rb Rb
| a f (x)dx| ≤ a |f (x)|dx ;
(P’2) Pour f : [a, b] → C deux fonctions continues par morceaux sur le segment [a, b] et
α ∈ C, on a
Rb Rb Rb
a
(f + αg)(x)dx = a f (x)dx + α a g(x)dx.
(P’3) Soit f : I → C une fonction continue sur un intervalle I. Soit a ∈ I. La fonction
F :I → C
Rx
x 7→ a f (t)dt
est l’unique primitive de la fonction f qui s’annule en a.
(P’4) Soit f : I → C une fonction de classe C 1 sur le segment [a, b] ⊂ I. Alors
Rx
∀x ∈ [a, b], f (x) = f (a) + a f 0 (t)dt,
et par majoration, on en déduit l’inégalité des accroissements finis :
|f (b) − f (a)| ≤ (b − a) sup |f 0 (x)|.
x∈[a,b]

Exemple 1.4.1.
1
Soit α ∈ C \ R. Calculer une primitive t 7→ définie sur R. On pose α = a + ib.
t−α
Pour tout t ∈ R, on a
1 t−a ib
= 2 2
+ .
t−α (t − a) + b (t − a)2 + b2

39
CALCUL INTEGRAL

Or
t−a ln((t − a)2 + b2 )
Z Z
b
dt + i dt = +
(t − a)2 + b2 (t − a)2 + b2 2
t−a
i arctan( )+K
b
En revenant aux notations de départ,
Z
1  t − R(α) 
dt = ln(|t − α|) + i arctan + K.
t−α I(α)

40
Chapitre 2

Intégrales Généralisées

On sait intégrer sur les segments [a, b] et on souhaite étendre la notion à tout intervalle
et ainsi donner un sens entre autre à
Z +∞ Z 1
−t dt
e dt et √ .
0 0 t

2.1 Définitions
Définition 2.1.1. Soit f une fonction réelle définie sur ]a, b[. On dit que f est localement
intégrable sur ]a, b[ si f est intégrable sur tout intervalle fermé borné [α, β] ⊂]a, b[.

Remarque 2.1.1. Si f est une fonction continue sur un intervalle I, alors elle est locale-
ment intégrable sur I.
1
Exemple 2.1.1. La fonction x 7→ est localement intégrable sur ]0, 1].
x
Définition 2.1.2. Soit f une fonction localement intégrable sur un intervalle [a, b[.
Z b Z x
On dit que l’intégrale f (t)dt est convergente si lim f (t)dt existe et est finie.
a x→b a
Z b
Dans le cas contraire, on dit que f (t)dt est divergente.
Z b Z x a

f (t)dt = lim f (t)dt est appelée intégrale généralisée ou impropre de la fonction


a x→b a
f sur [a, b[.

Définition 2.1.3. Soit f une fonction localement intégrable sur un intervalle ]a, b]. On dit
Z b Z b
que l’intégrale f (t)dt est convergente si lim f (t)dt existe et est finie.
a x→a x

Définition 2.1.4. Soit f une fonction localement intégrable sur un intervalle ]a, b[. On
Z b Z c Z b
dit que l’intégrale f (t)dt est convergente si f (t)dt et f (t)dt sont convergentes
a a c

41
CALCUL INTEGRAL

pour tout c ∈]a, b[. On pose


Z b Z c Z b
f (t)dt = f (t)dt + f (t)dt.
a a c
Z +∞
Exercice 2.1.1. Etudier la nature de l’intégrale e−t dt.
0
−t
Solution : La fonction t 7→ e est continue sur [0, +∞[, donc le problème se pose uni-
quement en +∞. Soit x ∈ [0, +∞[, On a
Z x h ix
e−t dt = − e−t = 1 − e−x .
0 0

Comme Z x
lim e−t dt = lim (1 − e−x ) = 1,
x→+∞ 0 x→+∞
Z +∞ Z +∞
alors e−t dt est convergente et on a e−t dt = 1.
0 0
Z 1
dt
Exercice 2.1.2. Etudier la nature de l’intégrale √ .
0 t
1
Solution : La fonction t 7→ √ est continue sur ]0, 1], donc le problème se pose unique-
t
ment en 0.
Soit x ∈]0, 1]. On a Z 1
dt h √ i1 √
√ = 2 t = 2 − 2 x.
x t x
Z 1 Z 1 Z 1
dt √ dt dt
Comme lim+ √ = lim 2−2 x = 2, alors √ est convergente et on a √ =
x→0 x t x→0 +
0 t 0 t
2.
Z +∞
dt
Exercice 2.1.3. Etudier la nature de l’intégrale 2
.
−∞ 1 + t
dt
Solution : La fonction t → est continue sur ] − ∞, +∞[, donc le problème se pose
1 + t2
en +∞ et en −∞. On a
Z +∞ Z x
dt dt h ix π
= lim = lim arctan t = .
0 1 + t2 x→+∞ 0 1 + t2 x→+∞ 0 2
et Z 0 Z 0
dt dt h i0 π
2
= lim 2
= lim arctan t = .
−∞ 1 + t x→−∞ x 1 + t x→−∞ x 2
Z +∞ Z 0 Z +∞
dt dt dt
Donc, les deux intégrales et sont convergentes. Par suite,
0 1 + t2 −∞ 1 + t
2
−∞ 1 + t
2
est convergente et on a
Z +∞ Z 0 Z +∞
dt dt dt
2
= 2
+ = π.
−∞ 1 + t −∞ 1 + t 0 1 + t2

42
CALCUL INTEGRAL

Z +x
Remarque 2.1.2. Dans le cas où a = −∞ et b = +∞, l’existence de lim f (t)dt
x→+∞ −x
Z +∞
ne prouve pas la convergence de f (t)dt. Par exemple, il suffit de considérer une
−∞
fonction impaire continue.
Z +∞ Z +x
On a t dt diverge alors que t dt = 0, pour tout x > 0.
−∞ −x

Proposition 2.1.1. Soit f une fonction continue sur [a, b[ avec b fini. Si f est prolongeable
Z b
par continuité en b, alors f (t)dt est convergente.
a

Remarque 2.1.3. En posant f (b) = lim f (x) = l et désignant par F la primitive de f


x→b
qui s’annule en a, la fonction F est continue en b et on a
Z x Z b
lim f (t)dt = lim F (x) − F (a) = F (b) − F (a) = f (t)dt.
x→b a x→b a

Dans ce cas, on dit qu’il y’a une fausse intégrale généralisée.


Z b
Remarque 2.1.4. On a aussi f (t)dt est convergente dans les deux cas suivantes :
a
1 f est continue sur ]a, b] (a fini) et prolongeable par continuité en a.
2 f est continue sur ]a, b[ (a et b sont finis) et prolongeable par continuité en a et b.
Z 1
Exemple 2.1.2. Etudions la nature de l’intégrale t ln(t)dt.
0
La fonction t 7→ t ln(t) est continue sur ]0, 1]. Comme lim+ t ln(t) = 0, alors f admet
x→0
Z 1
un prolongement par continuité en 0. Par suite, t ln(t)dt est convergente, c’est à dire
Z 1 0

lim+ t ln(t)dt existe et est finie. Pour tout x > 0, on a


x→0 x
1 h t2 1
x2 1 x2
Z i1 Z t
t ln(t)dt = ln(t) − dt = − ln(x) − + .
x 2 x x 2 2 4 4
Donc
1 1
x2 1 x2
Z Z
1
t ln(t)dt = lim+ t ln(t)dt = lim+ − ln(x) − + =− .
0 x→0 x x→0 2 4 4 4

2.2 Propriétés des Intégrales Généralisées


Z b Z b
Proposition 2.2.1 (Linéarité). Si les intégrales généralisées f (t)dt et g(t)dt sont
a a
convergentes, alors l’intégrale généralisée
Z b
(αf (t) + βg(t))dt; où (α, β) ∈ R2 ;
a

43
CALCUL INTEGRAL

est convergente et on a
Z b Z b Z b
αf (t) + βg(t)dt = α f (t)dt + β g(t)dt.
a a a
Z b
Proposition 2.2.2 (Relation de Chasles). l’intégrale généralisée f (t)dt est conver-
Z c Z b a

gente si et seulement si les intégrales f (t)dt et f (t)dt sont convergentes pour tout
a c
c ∈]a, b[, et on a
Z b Z c Z b
f (t)dt = f (t)dt + f (t)dt.
a a c

2.3 Calcul Pratique des Intégrales Généralisées


2.3.1 Utilisation des Primitives
Définition 2.3.1. Soit f une fonction continue sur ]a, b[. Si F est une primitive de f , alors
Z b
l’intégrale f (t)dt est convergente si et seulement si lim+ F (x) et lim− F (x) existent :
a x→a x→b
On définit alors Z b
f (t)dt = lim− F (x) − lim+ F (x).
a x→b x→a

2 ln x
Exemple 2.3.1. On a F : x 7→ (ln x)2 est une primitive de f : x 7→ , donc
x
Z 1
2 ln x
dx = F (1) − lim+ F (x) = 0 − (+∞) = −∞.
0 x x→0

Exercice
Z +∞ 2.3.1. En utilisant les primitives, déterminer la nature des intégrales suivantes :
x
dx.
0 (1 + x2 )2

2.3.2 Intégration par Parties


Théorème 2.3.1. Soient u et v deux fonctions de classe C 1 sur ]a, b[. On suppose que

lim+ u(x)v(x) = L+ et lim− u(x)v(x) = L−


x→a x→b

existent. Alors, Z b
u(t)v 0 (t)dt
a
est convergente si et seulement si
Z b
u0 (t)v(t)dt
a

44
CALCUL INTEGRAL

est convergente et on a
Z b Z b
0 −
u(x)v (x)dx = L − L − +
u0 (x)v(x)dx.
a a
Z 1
Exemple 2.3.2. Calculons (ln t)2 dt.
0
2 ln t
On pose u(t) = (ln t) et v (t) = 1 donc u0 (t) =
2 0
et v(t) = t. Ainsi
t
Z 1 Z 1
2 2 2
(ln t) dt = − lim+ t(ln t) − t ln tdt
0 x→0 0 t
Z 1
= −2 ln tdt
0
Z 1
= −2 (t)0 ln tdt
0
Z 1
1
= 2 lim+ t ln t + 2 t dt = 2.
x→0 0 t
Z +∞
1
Exercice 2.3.2. En utilisant l’intégration par parties, montrer que λte−λt dt = .
0 λ

2.3.3 Intégration par Changement de Variables


Théorème 2.3.2. Soient f :]a, b[→ R continue et ϕ :]α, β[→]a, b[ une bijection de classe
Z b
1
C avec lim+ ϕ(x) = a et lim− ϕ(x) = b. Alors f (x)dx est convergente si et seule-
x→α x→β a
Z β
ment si f (ϕ(t))ϕ0 (t)dt est convergente et on a
α
Z b Z β
f (x)dx = f (ϕ(t))ϕ0 (t)dt.
a α
Z 1
dt
Exemple 2.3.3. Calculons √ dt.
−1 1 − t2 i π πh
On pose t = sin(x), alors dt = cos(x)dx. La fonction sin : − , →] − 1, 1[ est une
2 2
bijection de classe C 1 . Donc,
π π
Z 1 Z Z
dt 2 cos(x) 2
√ dt = dx = 1dx = π.
−1 1 − t2 − π2 | cos(x)| − π2


Exercice 2.3.3.Z En utilisant le changement de variable u = 1 + ex , déterminer la nature
+∞
dx
de l’intégrale .
0 1 + ex

45
CALCUL INTEGRAL

2.4 Intégrales Généralisées des Fonctions à Signe Constant


Il est facile de voir que la convergence de l’intégrale
Z b
− f (t)dt
a

se ramène à celle de l’intégrale Z b


f (t)dt.
a
Par conséquent, dans la suite on ne considère que le cas des fonctions positives.

2.4.1 Critère de la Convergence Majorée


Z b
Proposition 2.4.1. Soit f : [a, b[→ R continue et positive. Alors, f (t)dt est conver-
a
gente si et seulement s’il existe M ≥ 0 (M est indépendante de x) tel que
Z x
f (t)dt ≤ M pour tout x ∈ [a, b[.
a

2.4.2 Critère de Cauchy


Proposition 2.4.2. Soit f : [a, b[→ R une fonction continue. l’intégrale impropre en b,
Z b
f (t)dt converge si (et seulement si)
a
Z y
∀ε > 0, ∃c ∈ [a, b[, ∀x, y ∈ [c, b[, f (t) dt ≤ ε.
x

2.4.3 Critère de Comparaison


Proposition 2.4.3. Soit f, g : [a, b[→ R deux fonctions continues et positives. S’il existe
M ≥ 0 (M est indépendante de x) tel que f (x) ≤ M g(x) pour tout x ∈ [a, b[. Alors, o
Z b Z b
1 g(t)dt converge ⇒ f (t)dt converge.
a a
Z b Z b
2 f (t)dt diverge ⇒ g(t)dt diverge.
a a
Z +∞
2
Exemple 2.4.1. Etudier la nature de e−t dt.
0 Z +∞
2
Pour tout t ≥ 1, on a e−t −t
≤ e . Comme e−t dt est convergente, alors d’après le
0
Z +∞
−t2 2
critère de comparaison, e dt converge. D’autre part, comme la fonction t 7→ e−t
1

46
CALCUL INTEGRAL

Z 1
2
est continue sur [0, 1], alors e−t dt est une intégrale simple convergente. On déduit
Z +∞ 0
2
que e−t dt est convergente car c’est la somme de deux intégrales convergentes.
0

2.4.4 Critère de Négligeabilité


Proposition 2.4.4. Soit f, g : [a, b[→ R deux fonctions continues telles que : f (x) =
O (g(x)) (en particulier f (x) = o (g(x))) et g est de signe constant, alors, si l’intégrale
x→b x→b
Z b Z b
g(t)dt est convergente, alors, l’intégrale f (t)dt l’est aussi.
a a

Remarque 2.4.1. La condition "de signe constant" est indispensable.


Z +∞ Z +∞
sin t | sin t| | sin t|
Exemple 2.4.2. √ dt converge et dt diverge, bien que, =
1 t 1 t t
sin t
o ( √ ).
t→+∞ t

2.4.5 Critère d’Equivalence


f (x)
Proposition 2.4.5. Soit f, g : [a, b[→ R continues et positives telles que lim = l 6=
x→b g(x)
Z b Z b
0, alors, f (t)dt et g(t)dt sont de même nature.
a a

Remarque 2.4.2. Si f est continue et positive sur [a, +∞[ et lim f (x) = l > 0, alors
x→+∞
Z +∞
f (t)dt est divergente.
a

−t3 −t3
Exemple 2.4.3. Puisque sin(t)−t est équivalent en 0 à et ≤ 0, alors, l’intégrale
Z +∞ 6 6
1 1
tλ sin( − )dt converge si et seulement si λ < 2.
1 t t
Remarque 2.4.3. La condition "de signe constant" est, là encore, indispensable.

sin t | sin t| sin t


Exemple 2.4.4. √ + et √ sont équivalentes en +∞ mais ; d’après la re-
t t t
marque 2.4.1 ; leurs intégrales ne sont pas de même nature.

2.4.6 Integrales de Référence


a) Intégrales de Riemann
Z +∞
1
Proposition 2.4.6. 1 dx converge si α > 1 et diverge si α ≤ 1.
1 xα

47
CALCUL INTEGRAL

Z 1
1
2 dx converge si α < 1 et diverge si α ≥ 1.
0 xα
Exemples 2.4.1.
Z +∞
1 √ 1 1
1 √ dx diverge car 3 x = x 3 et < 1.
1
3
x 3
Z +∞ Z +∞
1 1 1 1
2 √ dx converge car √ ∼ et dx est conver-
1
4
x x3 + 1 x x3 + 1 x→+∞ x7/4
4
1 x7/4
gente.
Z 2
1
3 p dx est convergente.
1
3
(x − 1)2

b) Intégrales de Bertrand

Proposition 2.4.7.
Z +∞
1
1 dx où a > 1, converge ssi α > 1 et β quelconque, ou α = 1 et
a x (ln x)β
α
β > 1.
Z a
1
2 α β
dx où 0 < a < 1, converge ssi α < 1 et β quelconque ou α = 1 et
0 x (| ln x|)
β > 1.
Z +∞
Exemple 2.4.5. L’intégrale (ln x)2 dx est divergente, car c’est une intégrale de Ber-
1
trand avec α = 0 et β = −2 < 1.
Z 1
Exemple 2.4.6. Etudions la nature de tα−1 e−t dt, où 0 < α < 1.
0
La fonction t 7→ tα−1 e−t n’est pas définie en 0. On a
tα−1 e−t
lim α−1 = lim e−t = 1.
t→0 t t→0
Z 1 Z 1
α−1 −t α−1 α−1 dt
Donc t e ∼ t . Comme t dt = 1−α
est une intégrale de Riemann
x→0 0 0 t Z 1
convergente car 1−α < 1, alors d’après le critère de comparaison, l’intégrale tα−1 e−t dt
0
est convergente.

Exercice 2.4.1. Etudier la nature des intégrales suivantes :


Z +∞ Z +∞ Z +∞
sin(x2 ) 2 −x4 ln x
A= dx, B = x e dx, C = dx,
0 x 2
−∞ 0 x + e−x
Z +∞ Z +∞ Z 1/2
ln x −x2 dx
D= dx, E = cos(βx)e dx, F = ,
0 x2 − 1 0 0 x(ln x)β
Z +∞ Z +∞ Z 1 √
2 sin2 (t) t
G= sin(x )dx, H = dt, I = sin dt.
−∞ 0 1 + t2 0 t

48
CALCUL INTEGRAL

2.5 Intégrales Absolument Convergentes


Z b
Définition 2.5.1. Soit f : [a, b[→ R une fonction continue. On dit que f (t)dt est
Z b a

absolument convergente si |f (t)|dt est convergente


a
Z b
Théorème 2.5.1. Soit f : [a, b[→ R une fonction continue. Si f (t)dt est absolument
a
convergente, alors elle est convergente.

Remarque 2.5.1. La réciproque du théorème est fausse. Dans ce cas, une intégrale gé-
néralisée convergente et non absolument convergente est dite semi-convergente.
Z +∞
sin t
Exemple 2.5.1. L’intégrale dt est semi-convergente. On sait que
1 t

sin t sin2 t 1 − cos(2t)


≥ = .
t t 2t
Z +∞
sin t
Exemple 2.5.2. Etudions la convergence absolue de l’intégrale dt.
Z +∞ 1 t3
sin t 1 1
Pour tout t ≥ 1, on a 0 ≤ 3
≤ 3 . Comme dt est une intégrale de Riemann
t t 1 t3 Z +∞
sin t
qui est convergente, alors, d’après le critère de comparaison, l’intégrale dt est
Z +∞ 1 t3
sin t
convergente. Ce qui veut dire que dt est absolument convergente.
1 t3
Proposition 2.5.1 (Critère de Riemann).
1 Soient α ∈ R et f une fonction continue sur [a, +∞[ telle que lim xα f (x) = k
x→+∞
existe.
Z +∞
a Si α > 1, alors f (t)dt est absolument convergente.
a
Z +∞
b Si α ≤ 1 et k 6= 0, alors f (t)dt est divergente.
a

2 Soient α ∈ R et f une fonction continue sur ]a, b] telle que lim+ (x − a)α f (x) = k
x→a
existe.
Z b
a Si α < 1, alors f (t)dt est absolument convergente.
a
Z b
b Si α ≥ 1 et k 6= 0, alors f (t)dt est divergente.
a

49
CALCUL INTEGRAL

Z ∞
1
Exemple 2.5.3. Etudier la nature de l’intégrale dt.
2 t2 −1
1
La fonction f : x 7→ 2 est continue sur [2, +∞[ et
x −1
x2
lim x2 f (x) = lim = 1.
x→+∞ x→+∞ x2 − 1
Z ∞
1
Donc d’après le critère de Riemann (α = 2), l’intégrale dt est absolument
2 t2 −1
convergente. Par suite elle est convergente.
Z 0
1
Exemple 2.5.4. Etudier la nature de l’intégrale dt.
−1 t2 −1
1
La fonction f : x 7→ 2 est continue sur ] − 1, 0] et
x −1
x+1 1 1
lim + (x + 1)1 f (x) = lim +2
= lim + =− .
x→−1 x→−1 x − 1 x→−1 x − 1 2
Z ∞
1
Donc, d’après le critère de Riemann (α = 1), l’intégrale 2
dt est divergente.
2 t −1
Pour montrer qu’une intégrale converge, quand elle n’est pas absolument convergente,
on dispose du théorème suivant.

Théorème 2.5.2 (Règle d’Abel). Soit f, g deux fonctions continues sur [a, +∞[, telles
que
(i) f est de C 1 sur [a, +∞[,
(ii) f est décroissante et de limite 0 en +∞,
Z x
(iii) il existe un réel M ≥ 0 tel que, pour tout x ∈ [a, +∞[, g(t)dt ≤ M .
a
Alors l’intégrale Z +∞
f (t)g(t)dt converge.
a
Z +∞
sin t
Exemple 2.5.5. Etudions la convergence de l’intégrale dt, suivant les valeurs
1 t
de α > 0.
(i) Pour α > 1, cette intégrale est absolument convergente.
1
(ii) Si 0 < α ≤ 1. La fonction f : t 7→ α est de C 1 et décroissante sur [1, +∞[.
t
De plus lim f (x) = 0. La fonction g : t 7→ sin x est continue sur [1, +∞[
Z xx→+∞
et ? sin tdt ≤ 2 pour tout x. La règle d’Abel nous donne la convergence
Z +∞1
sin t
de dt pour 0 < α ≤ 1.
1 tα

50
CALCUL INTEGRAL

2.6 Méthodes
Pour prouver la convergence d’une intégrale :
1 Commencer par étudier l’intégralité, remplacer la fonction par sa valeur absolue.
2 Etudier le comportement de la fonction au voisinage de la borne. On pourra chercher
un équivalent.
3 Comparer avec une exponentielle, une intégrale de Riemann ou de Bertrand.
4 Si f une fonction non intégrable, on utilise une intégration par parties.
5 Penser aux comparaisons séries-intégrales.
6 Penser aux intégrations par parties, changements de variables, et á Cauchy-Schwartz.

2.7 Exercices
Exercice 2.7.1. En utilisant les primitives usuelles, déterminer la nature des intégrales
suivantes :
Z π Z +∞ 2
2 ln (x)
A= tan(x)dx, B= dx.
0 0 x
Exercice 2.7.2. Etudier la nature des intégrales suivantes :
Z 1 Z +∞ Z +∞
x2 + 1 2019 −x x2
A= p dx, B= x e dx, C= 4
dx,
0 x(1 − x) 1 −∞ x + 2 − cos(x)

+∞ +∞

2 Z π
sin2 (x) e− x +1
Z Z
D= dx, E= √ dx, F = 2π ln(1 + sin(x))dx.
0 x 0 x −
2
+∞
e−t − e−2t
Z
Exercice 2.7.3. Soit I = dt.
0 t
1 Montrer que I est convergente.
+∞ 2ε
e−t − e−2t e−t
Z Z
2 Pour ε > 0, établir la relation : dt = dt.
ε t ε t
3 En déduire le calcule de I (utiliser la première formule de la moyenne).
Z 1
x−1
4 En déduire le calcul de dx (Poser x = e − t).
0 ln(x)
Z +∞
dt
Exercice 2.7.4. Soit In = , où n est un entier naturel.
0 (t + 1)n
3

1 Etudier pour quelles valeurs de n l’intégrale In converge.


2 Calculer I1 .

51
CALCUL INTEGRAL

3n − 1
3 Montrer que si n ≥ 2, on a : In+1 = In .
3n
4 En déduire l’expression de In .
Z +∞
dt
Exercice 2.7.5. Soit I = p .
0 t(t2 + 1)
1 Montrer que I est convergente.
Z +∞
dx
2 Calculer J = 4
.
0 x +1

3 En déduire I (poser x = t).

Exercice 2.7.6. Etudier la nature des intégrales généralisées suivantes :

+∞ +∞ +∞ Z π
esin(t)
Z Z Z
1 sin(t) 2 ln(sint)dt.
; α, β > 0, dt, dt,
0 t (1 + t)β dt
α
0 t 0 t 0

Exercice 2.7.7. Etudier la nature des intégrales généralisées suivantes :


Z +∞ Z +∞ Z +∞
1 − cos(t) 3 −3t2 sin(t)
2
dt, te dt, √ dt.
0 t 0 0 cos(t) + t

52
Chapitre 3

Séries réelles ou complexes

3.1 Activité
Soit un récipient vide de contenance 2 litres. On verse dans celui-ci un litre d’eau, puis
un demi-litre, puis un quart, puis un huitième,... Est-ce que le récipient va déborder ?
1 1 1
On a : u0 = 1 ; u1 = ; u2 = ; u3 = ; · · · .
2 4 8
1
Il s’agit d’une suite géométrique de premier terme u0 = 1 et de raison q = .
2
La somme des n premiers termes de cette suite est :
 1 n+1
n
1
n  
1 k 1 1 1  1 n
 1 −
2
X X
Sn = = = 1 + + + + ··· + = .
2k 2 2 4 8 2 1
k=0 k=0 1−
2
1
On a lim Sn = = 2. On peut écrire
n→+∞ 1
1−
2
+∞
X 1
n
= 2.
k=0
2

Le récipient ne débordera pas.

3.2 Généralités
3.2.1 Définition
Définition 3.2.1. Soit (u
X n )n∈N une suite à valeurs dans R ou C. On appelle série de terme
X
général un et on note un ou plus simplement un , la suite (Sn ) de terme général
n≥n0

53
CALCUL INTEGRAL

défini pour tout n ≥ n0 par


n
X
Sn = un0 + · · · + un = uk .
k=n0

X
Sn s’appelle la somme partielle d’ordre (ou d’indice ou rang) n, de la série un .
n≥n0

Remarque 3.2.1. Une série est un cas particulier de suite, c’est une suite de somme
partielle.
1
Exemple 3.2.1. Soit (un ) la suite définie pour tout n ≥ 1 par un = . La série de terme
X1 n
général un est notée et est appelée la série harmonique.
n≥1
n
Les trois premières sommes partielles sont

S1 = 1,
1
S2 = 1 +
2
1 1
S3 = 1+ + .
2 3

3.2.2 Nature d’une série


a) Définition
X
Définition 3.2.2. Soit (un ) une suite réelle. On dit que la série un converge ou est
convergente si la suite des sommes partielles X (Sn ) converge. Dans ce cas, la limite S de
la suite (Sn ) s’appelle la somme de la série un et est notée :

n
X +∞
X
S = lim Sn = lim uk = un .
n→+∞ n→+∞
k=n0 k=n0

Dans le cas contraire, on dit que la série diverge ou est divergente.


n  
X 1 n
Exemple 3.2.2. La série converge.
k=0
2
X
Définition 3.2.3. Si un est une série convergente de somme S, le nombre

Rn = S − Sn

est appelé le reste d’ordre (ou d’indice) n de la série.

54
CALCUL INTEGRAL

Remarque 3.2.2. Le reste Rn d’ordre n n’est défini que pour les séries convergentes, et
comme dans ce cas la suite (Sn ) converge vers S, on en déduit que la suite (Rn ) converge
vers 0. On a aussi
+∞
X
Rn = uk
k=n+1
n
X +∞
X +∞
X
de sorte que l’égalité uk + uk = uk traduisant Sn + Rn = S, est pleinement
k=0 k=n+1 k=0
justifiée.
X
Il est équivalent de dire que la série un converge ou que lim Rn = 0.
n→+∞
X
Proposition 3.2.1. On ne change pas la nature d’une série un en modifiant un en-
semble fini des termes de la suite (un ).

Démonstration. Soit (un )n>0 une suite, et supposons qu’il existe n0 ∈ N tel que

∀n ∈ N, n > n 0 ⇒ vn = un
n
X n
X
En notant Un = uk et Vn = vk on obtient
k=0 k=0

n0
X
∀n ∈ N, n > n0 ⇒ U n − V n = (uk − vk ).
k=0

La différence Un − Vn étant constante à partir d ’un certain rang, la suite (un ) est
convergente si et seulement s’il en est de même de la suite (Vn ). En cas de convergence,
on a
+∞
X +∞
X n0
X Xn0
uk − vk = uk − vk
k=0 k=0 k=0 k=0

D’où la proposition.

b) Espace vectoriel des séries convergentes


X X
Définition 3.2.4. Étant donné deux séries un et vn et un nombre réel ou complexe
α, on définit :
1 la série somme comme étant la série de terme général un + vn . Cette nouvelle série
X
est notée (un + vn ),
X
2 la série produit par α de la série un est la série de terme général αun . On la
X
note α un .

Avec ces deux lois et les propriétés établies pour les suites numériques, on déduit
aussitôt le résultat suivant.

55
CALCUL INTEGRAL

Proposition 3.2.2. Muni des deux opérations définies ci-dessus, l’ensemble des séries
numériques est un K−espace vectoriel, dont l ’ensemble des séries convergentes est un
K−sous-espace vectoriel.
X X
Proposition 3.2.3. Soient un et vn deux séries numériques et ∀n ∈ N, wn =
X X X
un + vn . Alors si deux des trois séries un , vn , wn convergent, la troisième
converge aussi. Si l’une diverge, au moins l’une des deux autres diverge.
X
Remarque 3.2.3. La somme d ’une série convergente un et d’une série divergente
X X X X
vn est divergente ; sinon, la série vn = (un + vn ) − un serait convergente.
En revanche, on ne peut rien dire a priori de la somme de deux séries divergentes.

Proposition 3.2.4. Soit (uk )k≥0 une suite de nombres complexes. Pour tout k, notons
P
uk = ak + i bk , avec ak la partie réelle de uk et bk la partie imaginaire. La série uk
P P
converge si et seulement si les deux séries ak et bk convergent. Si c’est le cas, on a :
+∞
X +∞
X +∞
X
uk = ak + i bk .
k=0 k=0 k=0

Exemple 3.2.3. Considérons par exemple la série géométrique k≥0 rk , où r = ρei θ est
P

un complexe de module ρ < 1 et d’argument θ.


Comme le module de r est strictement inférieur à 1, alors la série converge et
+∞
X 1
rk = .
k=0
1−r

D’autre part, rk = ρk ei kθ par la formule de Moivre. Les parties réelle et imaginaire


de rk sont
ak = ρk cos(kθ) et bk = ρk sin(kθ) .
On déduit de la proposition précédente que :
+∞ +∞
!   +∞ +∞
!  
X X
k 1 X X
k 1
ak = < r =< et bk = = r == .
k=0 k=0
1 − r k=0 k=0
1−r

Le calcul donne :
+∞ +∞
X
k 1 − ρ cos θ X ρ sin θ
ρ cos(kθ) = et ρk sin(kθ) = .
k=0
1 + ρ2 − 2ρ cos θ k=0
ρ2
1 + − 2ρ cos θ

c) Condition nécessaire de convergence


X
Proposition 3.2.5. Si une série un converge, alors lim un = 0..
n→+∞

56
CALCUL INTEGRAL

Démonstration. Pour tout n ≥ 1, on aX un = Sn − Sn−1 , et les suites (Sn ) et (Sn−1 )


convergent vers la somme S de la série un . On en déduit que la suite (un ) converge et
a pour limite 0.

Remarque 3.2.4. La condition un → 0 est nécessaire pour la convergence de la série


X
un mais n’est évidemment pas suffisante.

Exemple 3.2.4. pour


1
un = ln(1 + ) (n > 1),
n
la suite (un ) converge vers 0, mais
n
X n 
X 
uk = ln(1 + k) − ln k = ln(n + 1) −→ +∞,
n→+∞
k=1 k=1
X
donc la série un diverge !

Exemple 3.2.5. On considère la série harmonique. On note Sn la somme partielle, on a

1 1 1 1 1
S2n − Sn = + + ··· + ≥n = .
2n 2n − 1 n+1 2n 2
Donc si la série harmonique converge, alors la suite S2n − Sn converge vers 0 ce qui
est impossible avec l’inégalité ci-dessus donc la série harmonique diverge bien que son
terme général tend vers 0.

d) Divergence Grossière
X
Définition 3.2.5. On dit qu’une série un diverge grossièrement si la suite (un ) ne tend
pas vers 0.

Exemple 3.2.6. On sait que les suites (sin an)n≥0 et (cos an)n≥0 divergent si a ∈
/ πZ. On
X X
en déduit que les séries sin(an) et cos(an) divergent grossièrement si a ∈/ πZ.
X n n
Exemple 3.2.7. La série est divergente car lim = 1 6= 0.
n≥0
n+2 n→+∞ n + 2

e) Exemples

Série télescopique
X
Définition 3.2.6. On appelle série télescopique associée à une suite (an ), la série un
où un = an − an−1 .

57
CALCUL INTEGRAL

X
Proposition 3.2.6. Soit un une série télescopique associée à une suite (an )n≥0 . Alors
X
la série un et la suite (an ) sont de même nature, et en cas de convergence, on a

+∞
X
uk = lim an − a0 .
n→+∞
k=1

Démonstration. Pour tout entier n ≥ 1, on a


n
X n
X
uk = (an − a0 ),
k=1 k=1

et on conclut en faisant tendre n vers l’infini.

Exemple 3.2.8. Considérons la série de terme général

1
un = , n ≥ 1.
n(n + 1)
Puisque
1 1 1
= − ,
n(n + 1) n n+1
X
on en déduit que un est une série télescopique. Elle est donc convergente, et de plus,
on a n
X 1 1 1 1 1 1 1
uk = − + − + · · · + − =1− ,
k=1
1 1 2 3 n n + 1 n + 1
d’où la somme de la série considérée
+∞
X 1  1 
= lim 1 − = 1.
n=1
n(n + 1) n→+∞ n+1

Remarque 3.2.5. L’entier q ≥ 1 étant fixé, on peut traiter de même une série télescopique
de terme général
un = an+q − an .

Série géométrique

Définition 3.2.7. Une série géométrique est une série de terme général an où a est un
nombre réel ou complexe donné.
X
Proposition 3.2.7. Soit q ∈ R. La série q n converge si et seulement si |q| < 1. Dans
+∞
X 1
ce cas, on a : qn = .
n=0
1−q

58
CALCUL INTEGRAL

Démonstration. La somme partielle de rang n de cette série est :


 n
X 1 − q n+1
qk = si q 6= 1,


Sn = k=0
1 − q

n+1 si q = 1.

X
Si |q| < 1, la suite (q n ) converge vers 0, par conséquent, la série q n converge si
1
|q| < 1, et a pour somme .
1−q

f) Critère de Cauchy

Le résultat qui suit est fondamental. Il permet d’établir la convergence (ou la diver-
gence) d’une série sans en connaître a priori la somme.
Théorème 3.2.1. Une série numérique converge si et seulement si elle satisfait le critère
de Cauchy :
n+p
X

∀ε > 0, ∃N ∈ N, ∀n ∈ N, ∀p ∈ N , n≥N ⇒ uk ≤ ε.
k=n+1

Démonstration. On sait que la suite (Sn ) des sommes partielles converge si et seulement
n+p
X
si elle est de Cauchy. Pour conclure, il suffit alors de remarquer que Sn+p −Sn = uk .
k=n+1

Remarque 3.2.6. L’entier N dans le théorème ci-dessus dépend de ε, c’est pourquoi nous
le noterons parfois N (ε).

g) Série absolument convergente


X X
Définition 3.2.8. Une série un est dite ab solum ent convergente si la série |un |
est convergente.
Le résultat suivant est très important en pratique.
Théorème 3.2.2. Toute série absolument convergente est convergente.
X
Démonstration. Soit ε > 0. Puisque la série |un | converge, il existe ∃N ∈ N tel que
n+p
X

∀n ∈ N, ∀p ∈ N , n≥N ⇒ |uk | ≤ ε.
k=n+1

D’après l’inégalité triangulaire, on a alors


n+p n+p
X X
uk ≤ |uk | ≤ ε.
k=n+1 k=n+1
X
d ’où l’on déduit que la série un satisfait au critère de Cauchy, donc converge.

59
CALCUL INTEGRAL

Remarque 3.2.7. La réciproque du théorème précédent est fausse. Considérons par exemple
la série de terme général un avec
1 1
u2p = − (p ∈ N∗ ) et u2p+1 = (p ∈ N).
p p+1
Pour tout n ≥ 1, on a
2n 2n+1
X X 1
S2n = uk = 0 et S2n+1 = uk = .
k=1 k=1
n+1

Les suites extraites (S2n ) et (S2n+1 ) ayant la même limite (égale à 0). On peut conclure
que la suite (Sn ) converge et que sa limite est 0. La série de terme général un est donc
convergente et de somme égale à 0. Cependant, cette série n ’est pas absolument conver-
gente car
2n n
X X 1
|uk | = 2
k=1 k=1
k
et on a vu que la série harmonique est divergente.

Définition 3.2.9. Une série numérique qui converge mais qui ne converge pas absolument
est dite semi-convergente.

3.3 Séries à termes positifs


3.3.1 Définition
X
Dans cette section, nous nous intéressons aux séries un à termes réels positifs.
Tous les résultats que nous obtiendrons pour de telles séries resteront vrais pour les sé-
ries à termes négatifs, il suffit d’adapter les énoncés et les démonstrations en remplaçant
croissante par décroissante, majorée par minorée, +∞ par −∞ · · · .
X
Définition 3.3.1. Une série un est dite à termes positifs si un ≥ 0 pour tout entier n.
X
Remarque 3.3.1. 1 Une série un vérifiant un ≥ 0 pour n ≥ n0 est aussi apellée
série à termes positifs.
2 La suite des sommes partielles (Sn ) d’une série à termes positifs est croissante. En
effet, Sn+1 − Sn = un+1 ≥ 0.

3.3.2 Caractérisation
Théorème 3.3.1 (Critère de Convergence Majorée). Une série à termes positifs converge
si et seulement si la suite (Sn )n≥0 des sommes partielles est majorée.
Si la série diverge, alors la suite (Sn )n≥0 tend vers +∞.

60
CALCUL INTEGRAL

Démonstration. Pour tout n ∈ N, on a Sn+1 − Sn = un+1 ≥ 0, donc la suite (Sn )n≥0


est croissante. Une telle suite converge si elle est majorée, ou tend vers +∞ dans le cas
contraire.
X X
Notation 3.3.1. Si un est une série à termes positifs divergente, on écrira un =
+∞. Cette notation signifie que lim Sn = +∞. Elle est généralement réservée aux sé-
n→+∞
ries divergentes à termes positifs (ou positifs à partir d’un certain rang). De même, pour
+∞
X
indiquer que la série de terme général un ≥ 0 converge, on écrit parfois un < +∞.
n=0

3.3.3 Comparaison de deux séries


a) Théorème de comparaison
X X
Théorème 3.3.2 (Règle de comparaison). Soient un et vn deux séries à termes
positifs telles que un ≤ vn pour tout n ≥ 0. Alors
X X
1 si la série vn converge, il en est de même de la série un , et on a

+∞
X +∞
X
un ≤ vn (3.1)
n=0 n=0

+∞
X +∞
X
2 si la série un diverge, il en est de même de la série vn .
n=0 n=0

Démonstration. 1 Notons (Sn ) et (Tn ) les suites des sommes partielles associées res-
X X
pectivement aux séries un et vn Par hypothèse, on a un ≤ vn pour tout
n ≥ 0, donc
∀n ∈ N, Sn < Tn . (3.2)
Comme la suite (Tn ) est majorée (car convergente),
X il en est de même de la suite
(Sn ). Par suite, (Sn ) converge. Donc la série un converge. On obtient l’inégalité
(3.1) en faisant tendre n vers l’infini dans l’inégalité (3.2).
2 C’est la contraposée de l’assertion 1.

1 1
Exemple 3.3.1. 1 Pour tout n ≥ 2, on a 0 ≤ 2
≤ . Comme la série de
n n(n − 1)
1
terme général est convergente (voir exemple 3.2.8), la règle de compa-
n(n − 1)
1
raison permet d’en déduire que la série de terme général 2 est convergente.
n

61
CALCUL INTEGRAL

1 1
2 Pour tout n ≥ l, on a 0 ≤ ≤ √ . Comme la série harmonique est divergente, on
n n
1
en déduit que la série de terme général √ est divergente.
n
Remarque 3.3.2. Si la majoration un ≤ vn n’est vérifiée qu’à partir d’un certain rang n0 ,
la règle de comparaison reste valable car la convergence des suites (Sn )n≥n0 et (Tn )n≥n0
entraîne celle des suites (Sn )n≥0 et (Tn )n≥0 . Cependant, l’inégalité (4.1) peut être fausse.
Ainsi, pour un = 3−n si n ≥ 0, et vn = 2−n si n ≥ 1 et v0 = 0, on a évidemment un ≤ vn
mais on a
+∞ +∞
X 3 X
un = > vn = 1.
n=0
2 n=0

b) Utilisation d’équivalents
X X
Théorème 3.3.3 (Règle d ’équivalence). Soient un et vn séries à termes positifs
telles que un ∼ vn lorsque n → +∞. Alors
1 Les séries sont de même nature.
2 En cas de convergence, les restes sont équivalents.
3 En cas de divergence, les sommes partielles sont équivalentes.

Démonstration. L’équivalence un ∼ vn peut s’écrire

∀ε > 0, ∃n0 ∈ N, n ≥ n0 ⇒ (1 − ε)vn ≤ un ≤ (1 + ε)vn (3.3)

ce qui montre que, pour n assez grand, vn > 0 lorsque un > 0.


X
1 Il suffit d’appliquer la règle de comparaison. En effet, si vn converge, il en est
X X X
de même de (1 + ε) vn et donc de un . Si maintenant vn diverge, il en est
X X
de même de (1 − ε) vn et donc de un .
2 En cas de convergence, la suite des restes converge, et avec l’encadrement (3.3), on
déduit que
+∞
X +∞
X +∞
X
n ≥ n0 ⇒ (1 − ε) vp ≤ up ≤ (1 + ε) vp
p=n+1 p=n+1 p=n+1

ce qui établit l’équivalence des restes.


3 En cas de divergence, notons (Sn ) et (Tn ) les suites des sommes partielles associées
respectivement aux séries Pour tout n > n0 , on a
n
X n
X
Sn = Sn0 + up et Tn = Tn0 + vp
p=n0 +1 p=n0 +1

62
CALCUL INTEGRAL

et en utilisant l’encadrement (3.3), on obtient


+∞
X +∞
X +∞
X
(1 − ε) vp ≤ up ≤ (1 + ε) vp
p=n0 +1 p=n0 +1 p=n0 +1

ce qui s’écrit aussi

(1 − ε)(Tn − Tn0 ) ≤ Sn − Sn0 ≤ (1 + ε)(Tn − Tn0 )

ou encore
 (1 − ε)Tn0 − Sn0   (1 + ε)Tn0 − Sn0 
1−ε− Tn ≤ 1 + ε − Tn .
Tn Tn
X X
Comme les séries un et vn sont divergentes et à termes positifs, les suites
des sommes partielles tendent vers +∞, et l’on a
(1 − ε)Tn0 − Sn0 (1 + ε)Tn0 − Sn0
lim = lim = 0.
n→+∞ Tn n→+∞ Tn
On peut donc trouver deux entiers naturels n1 et n2 tels que
(1 − ε)Tn0 − Sn0
n ≥ n1 ⇒ −ε ≤ ≤ε
Tn
et
(1 + ε)Tn0 − Sn0
n ≥ n2 ⇒ −ε ≤ ≤ε
Tn
Avec N = max(n1 , n2 ), on obtient

∀n ∈ N, n ≥ N ⇒ (l − 2ε)Tn < Sn < (1 + 2ε)Tn ,

ce qui établit l’équivalence des sommes partielles Sn et Tn .

Remarque 3.3.3. La règle d ’équivalence peut être mise en défaut si les séries ne sont
X
pas à termes positifs. En revanche, la règle reste valable pour les séries un à termes
négatifs, il suffit en effet de considérer les séries opposées, c’est-à-dire celles de terme
général −un .
X X
Théorème 3.3.4. Soient un et vn deux séries à termes strictement positifs. Si
un X X
lim = l avec l 6= 0 et l 6= +∞. Alors les séries un et vn sont de même
n→+∞ vn
nature.
un
Démonstration. Pour 0 < ε < l, il existe n0 tel que pour n ≥ n0 on ait − l ≤ ε,
vn
c’est-à-dire
un
−ε ≤ − l ≤ ε;
vn

63
CALCUL INTEGRAL

un
l−ε≤ ≤ l + ε;
vn
0 < (l − ε)vn ≤ un ≤ (l + ε)vn .
On applique ensuite le critère de comparaison.

Remarque 3.3.4. 1 Si l = 0 ; on a 0 < un ≤ εvn à partir d’un certain rang n0 . D’où,


X X
si vn converge, alors un converge.
X
2 Si l = +∞ ; on a 0 < εvn ≤ un à partir d’un certain rang n0 : D’où, si un
X
converge, alors vn converge aussi.
3 Deux séries à termes positifs dont les termes généraux sont équivalents sont de
1
même nature mais n’ont pas la même somme. En effet, nous avons ∼
n(n + 1) n→+∞
1
.
n2
Cependant
+∞ +∞
X 1 π2 X 1
2
= et = 1.
n=1
n 6 n=1
n(n + 1)
X1 1 1 1 1
Exemple 3.3.2. 1 la série sin( ) est convergente car sin( ) ∼ et
n n n n n→+∞ n2
X 1
est une série convergente.
n2
X 1 + 2n+3 1 + 2n+3 8  2 n X  2 n
2 la série est convergente car ∼ et est
n + 5n+1 n + 5n+1 n→+∞ 5 5 5
une série géométrique convergente.

Exercice 3.3.1. Étudier la nature des séries suivantes :


1
2 X ne n − n
X X (2n + 2) X 1 n
ln(1 + e−n ); ; (1 − ) ; .
n≥0 n≥0
(3n2 + 4n + 1)4 n≥1
n n≥1
n3+1

Remarque 3.3.5. La règle d’équivalence peut être mise en défaut si les séries ne sont
X
pas à termes positifs. En revanche, la règle reste valable pour les séries un à termes
négatifs, il suffit en effet de considérer les séries opposées, c’est-à-dire celles de terme
général −un .

Le résultat qui suit traite de séries qui serviront de référence pour appliquer les règles
de comparaison et d’équivalence.
X 1
Théorème 3.3.5 (Séries de Riemann). La série de Riemann (α ∈ R) converge si

et seulement si α > 1.

64
CALCUL INTEGRAL

Démonstration.
X Cette série diverge pour α = 1. Pour α < 1, on a n−1 < n−α , donc la
série n−α diverge d’après la règle de comparaison. On a vu par ailleurs que la série
X X
n−2 converge, donc par majoration on a la convergence de n−α pour tout α ≥ 2.
Il reste à traiter le cas α ∈]1, 2[. Pour cela, considérons la série de terme général
1 1
un = − (3.4)
nα−1 (n + 1)α−1

On a facilement n
X 1
up = 1 −
p=1
(n + 1)α−1
et comme α − 1 > 0, on en déduit que
p +∞
X X
lim un = un = 1.
p→+∞
n=1 n=1

D’après (3.4), on a alors, pour tout n suffisamment grand,


1   1 1−α  1   1−α 1 
un = 1 − 1 + = 1 − 1 + + o( )
nα−1 n nα−1 n n
D’où
α−1 1 α−1
un = α
+ o( α ) = (1 + o(1)),
n n nα
ce qui donne
α−1
un ∼ .
n→+∞ nα
Les deux séries étant àX termes positifs, la règle d ’équivalence permet de conclure que
pour α ∈]1, 2[, la série n−α est convergente.

Du théorème précédent, on déduit les règles pratiques suivantes qui sont des consé-
quences faciles du théorème (ou règle) de comparaison.
X
Corollaire 3.3.1 (Règle nα un ). Soit un une série à termes positifs.
X
1 Si la suite (nα un ) converge vers 0 et si α > 1, alors la série un converge.
X
2 Si la suite (nα un ) tend vers +∞ et si α < 1, alors un diverge.

Démonstration. 1 Puisque la suite (nα un ) converge vers 0, en prenant ε = 1 dans


la définition de la convergence, on trouve un N ∈ N tel que nα un < 1 pour tout
−α
X≥ N . On en déduit que un ≤ n pour tout n ≥ N , et comme α > 1, la série
n
n−α converge, et on conclut par la règle de comparaison pour séries à termes
positifs.

65
CALCUL INTEGRAL

2 Si (nα un ) tend vers +∞, alors on peut trouver N ∈ N tel que nα un ≥ 1 pour
X tout
−α
n ≥ N . On a alors un ≥ n pour tout n ≥ N , et comme α < 1, la série n−α
diverge, et on conclut ici aussi à l’aide de la règle de comparaison pour séries à
termes positifs.

Proposition 3.3.1 (Séries de Bertrand). La série de Bertrand


X 1
(α, β) ∈ R2
nα (ln n)β

converge si et seulement si α > 1 ou (α = 1 et β > 1).

Démonstration. Pour α < 0 ou (α = 0 et β ≤ 0), la série diverge car son terme général
ne tend pas vers 0.
Supposons α > 0 ou (α = 0 et β > 0). Alors la fonction
1
t 7→
tα (ln t)β

est positive et décroissante sur un intervalle [a, +∞[. La comparaison â l’intégrale de


Bertrand permet de conclure.
X 4n
Exemple 3.3.3. La série est divergente car
n≥1
(2n2 + 1)(2 ln(n4 + 1) + sin n)

4n 1

(2n2 4
+ 1)(2 ln(n + 1) + sin n) +∞ 4n ln n
X 1
et est une série de Bertran avec α = 1 et β = 1, donc divergente.
n≥1
4n ln n

Signalons enfin le résultat suivant, d’usage moins fréquent que ce qui précède, mais
qui peut s’avérer fort utile.
X X
Proposition 3.3.2. Soient un et vn deux séries à termes strictement positifs à
partir d ’un rang p, et telles que
un+1 vn+1
∀n ≥ p, ≤ .
un vn
X X
1 Si vn converge, alors un converge.
X X
2 Si un diverge, alors vn diverge.

66
CALCUL INTEGRAL

Démonstration. Bien sûr, les points 1) et 2) sont équivalents. En écrivant, pour n ≥ p + 1,


up+1 vp+1 up+2 vp+2 un vn
≤ , ≤ ,··· , ≤
up vp up+1 vp+1 un−1 vn−1
puis en formant le produit de ces inégalités, on obtient
un vn
≤ ,
up vp
ce qui donne le résultat grâce à la règle de comparaison.

Proposition 3.3.3 (Règle de Riemann). 1 S’il existe α > 1 tel que nα un → l∈R
n→+∞
(l < +∞) alors la série de terme général un converge.
2 S’il existe α ≤ 1 tel que nα un → l ∈ R l > 0 alors la série de terme général un
n→+∞
diverge.

Exemple 3.3.4.

X 1 √ 1
1 la série est divergente, en effet, on a lim n = +∞.
ln(n2 + 1) n→+∞ ln(n2 + 1)
1
Donc, d’après les règles de Riemann (α = < 1) cette série est divergente.
2
−n2 +1 2
X
2 la série ne est convergente. En effet, comme lim n3 (ne−n +1 ) = 0,
n→+∞
alors, les règles de Riemann (α = 3 > 1) entraine que cette série converge.

Exercice 3.3.2. Étudier la nature des séries suivantes


1
X  √ n n X  1 √n X  1 1+
√ , , n.
n≥1
n + 1 n≥1
2 n≥1
n
X
Théorème 3.3.6 (Règle de Cauchy). Soit un une série numérique telle que
p
n
lim |un | = l,
n→+∞

alors
X
1 si l < 1, la série un converge absolument.
X
2 si l > 1, la série un diverge grossièrement.
X
3 si l = 1, on ne peut conclure sauf si l = 1+ et dans ce cas un diverge.

Démonstration. 1 Supposons l < 1 et soit a tel que l < a < 1. Il n’existe qu’un
p
nombre fini d’entiers n tels que |un | > a. On peut donc trouver un entier N
(dépendant de a) telque
p
n > N ⇒ n |un | < a.
À partir de ce rang N , on a alors |un | < an , ce qui permet de conclure.

67
CALCUL INTEGRAL

p
2 Si l > 1, il existe une infinité d’entiers n tels que n |un |X
> 1, donc |un | > 1. Le
terme général de la série ne tend pas vers 0, donc la série un diverge grossière-
ment.

 2
1 n
Exemple 3.3.5. Pour la série de terme général un = 1 − n
, on a pour tout n = 1 :

1
p 1 n n ln(1− )
n
|un | = 1 − =e n ,
n
et pour n suffisamment grand :
1 1
p n(− + o( ))
n
|un | = e n n = e−1+o(1) ,
p X 1 n2
on a alors lim n
|un | = e−1 . Comme e−1 < 1, on conclut que la série 1−
n→+∞ n
converge.
X
Théorème 3.3.7 (Règle de d’Alembert). Soit un une série à termes réels non nuls à
partir d’un certain rang. On pose
un+1
l = lim .
n→+∞ un
Alors
X
1 si l < 1, la série un converge absolument.
X
2 si l > 1, la série un diverge grossièrement.
X
3 si l = 1, on ne peut conclure sauf si l = 1+ et dans ce cas un diverge.
p
Démonstration. Elle est analogue à celle de la règle de Cauchy, en remplaçant n |un | par
un+1
.
un
an
Exemple 3.3.6. Pour la série de terme général un = , où n ≥ 1 et a ∈ R∗+ on a
n
un+1 n
=a → a.
un n+1 n→+∞

an 1
Il en résulte que converge si a < 1 et diverge si a > 1. Si a = 1 , on a un = et on
n n
sait que la série harmonique diverge.

Exemple 3.3.7. 1 Pour tout x ∈ R fixé, la série exponentielle


+∞ k
X x
converge.
k=0
k!

68
CALCUL INTEGRAL

xk
En effet pour uk = on a
k!
xk+1
uk+1 (k + 1)! |x|
= = → 0 lorsque k → +∞.
uk xk k+1
k!
La limite étant ` = 0 < 1 alors par la règle du quotient de d’Alembert, la série est
absolument convergente, donc convergente. Par définition la somme est exp(x) :
+∞ k
X x
exp(x) = .
k=0
k!
X k! uk+1 k+1 1
2 converge, car = tend vers < 1.
k≥0
1 · 3 · · · (2k − 1) uk 2k + 1 2
X (2k)! uk+1 (2k + 1)(2k + 2)
3 diverge, car = tend vers 4 > 1.
k≥0
(k!)2 uk (k + 1)2

Exercice 3.3.3. Étudier la nature des séries suivantes :


X 1 nn (n!)2 2n X 1 n
n
, , a a + p
où a > 0 et p ≥ 0.
n≥1
(ln n) n! (2n)! n≥1
n

3.4 Séries à Termes Réels de Signe Quelconques


Définition 3.4.1. On appelle série alternée toute série de terme général (−1)n an où an
est une suite réelle de signe constant.

Pour de telles séries, on a le résultat remarquable suivant.

Théorème 3.4.1 (Théorème Spécial des Séries Alternées). Soit (an ) une suite à termes
X
positifs, décroissante et tendant vers 0, alors la série alternée (−1)n an converge. De
plus, sa somme S vérifie S2n+1 ≤ S ≤ S2n pour tout n, et son reste Rn d’ordre n vérifie
Rn ≤ an+1 .

Démonstration. On considère la suite des sommes partielles Sn . On prouve que S2n et


S2n+1 sont adjacentes, puis, on en déduit la convergence de Sn .
X
Exemple 3.4.1. Pour tout a ∈ R∗+ la série (−1)n−1 n−a est alternée et la suite de
1
terme général a est décroissante et tend vers 0. D’après le Théorème spécial des séries
n X
alternées la série (−1)n−1 n−a est donc convergente. Et on a :
+∞
X (−1)k−1 1
a
≤ a
.
k=n+1
k (n + 1)

69
CALCUL INTEGRAL

X (−1)n X (−1)n
Exercice 3.4.1. Montrer que la série √ converge et que la série √
n n + (−1)n
diverge.

Le prochain théorème est une profonde généralisation du théorème spécial des séries
alternées.

Théorème 3.4.2 (Critère d’Abel). Soit (an ) une suite décroissante de réels qui converge
vers 0. Soit (bn ) une suite de réels telle que
X les sommes partielles de la série de terme
général bn soient bornées. Alors, la série an bn est convergente.

Démonstration. L’idée de la démonstration est d’effectuer un changement dans la som-


mation, qui s’apparente à une intégration par parties. Pour tout n ≥ 0, posons Bn =
b0 + · · · + bn . Par hypothèse, la suite (Bn ) est bornée. Nous écrivons les sommes partielles
X
de la série ak bk sous la forme suivante :

Sn = a0 b0 + a1 b1 + · · · + an−1 bn−1 + an bn
= a0 B0 + a1 (B1 − B0 ) + · · · + an−1 (Bn−1 − Bn−2 ) + an (Bn − Bn−1 )
= B0 (a0 − a1 ) + B1 (a1 − a2 ) + · · · + Bn−1 (an−1 − an ) + Bn an .

Comme (Bn ) est bornée, et an tend vers 0, le dernier terme Bn an tend vers 0. Nous allons
X
montrer que la série Bk (ak − ak+1 ) est absolument convergente. En effet,

Bk (ak − ak+1 ) = Bk (ak − ak+1 ) ≤ M (ak − ak+1 ) ,

car la suite (ak ) est une suite de réels positifs, décroissante, et |Bk | est borné par M . Or

M (a0 − a1 ) + · · · + M (an − an+1 ) = M (a0 − an+1 ) ,


X
qui tend vers M a0 puisque (ak ) tend vers 0. La série M (ak − ak+1 ) converge, donc la
X X
série Bk (ak −ak+1 ) aussi, par le théorème de comparaison. Donc la série Bk (ak −
a
X k+1 ) est convergente, donc la suite (Sn ) est convergente, ce qui prouve que la série
ak bk converge.

Exemple 3.4.2. Si (an ) est une suite de réels, décroissante et de limite 0, alors les séries
X X
an cos(na), an sin(na)
n n

sont convergentes. En particulier, ces deux séries de Fresnel :


X cos n X sin n
,
n
na n
na

sont convergentes pour tout a > 0.

70
CALCUL INTEGRAL

3.5 Produit de Cauchy


X X
Définition 3.5.1. Soient ai et bj deux séries. On appelle série produit ou produit
i≥0 j≥0
X Xk
de Cauchy la série ck où ck = ai bk−i
k≥0 i=0

Exemple 3.5.1. On considère les séries de termes généraux :

(−1)n (−1)n
un = √ et vn = .
n+1 ln(n + 2)
Ces deux séries vérifient les hypothèses du critère spécial des séries alternées, donc elles
convergent. Leur série produit a pour terme général
n
n
X 1 1
wn = (−1) √ .
k=0
k + 1 ln(n − k + 2)

Donc,
n n √
X 1 1 X 1 1 n+1
|wn | = √ ≥ √ = .
k=0
k + 1 ln(n − k + 2) k=0
k + 1 ln(n + 2) ln(n + 2)
P
Par conséquent, la suite (wn ) ne tend vers 0, et la série produit wn est divergente. Cet
exemple montre en particulier que le produit de Cauchy de deux séries convergentes peut
être une série divergente !
X X
Théorème 3.5.1. Soient un et vn deux séries numériques convergentes, de somme
S et T respectivement. Supposons que l’une au moins de ces deux séries soit absolument
convergente. Alors la série produit est convergente et a pour somme le nombre ST. Si
X X
les deux séries un et vn sont absolument convergentes, la série produit aussi est
absolument convergente.
+∞
X +∞
X
Exemple 3.5.2. Soit ai une série absolument convergente et soit bj la série définie
i=0 j=0
1 X
par bj = j . La série bj est absolument convergente.
2
Notons
k k
X X 1
ck = ai bk−i = ai × k−i .
i=0 i=0
2
X
Alors la série ck converge absolument et

+∞ +∞
! +∞
! +∞
X X X X
ck = ai × bj =2 ai .
k=0 i=0 j=0 i=0

71
CALCUL INTEGRAL

3.6 Permutation des termes


Cette section consacrée à la permutation de termes.

Théorème 3.6.1. Soit +∞


P
k=0 uk une série absolument convergente et soit S sa somme. Soit
+∞
X
σ : N → N une bijection de l’ensemble des indices. Alors la série uσ(k) converge et
k=0

+∞
X
uσ(k) = S.
k=0

Remarque 3.6.1. la condition de convergence absolue est indispensable. Il se trouve


que, pour une série convergente, mais pas absolument convergente, on peut permuter
les termes pour obtenir n’importe quelle valeur !
Comme exemple de permutation, on peut réordonner les termes u0 , u1 , u2 , u3 , . . . en
prenant deux termes de rang pair puis un terme de rang impair, ce qui donne :

u0 , u2 , u1 , u4 , u6 , u3 , u8 , u10 , u5 , . . .

Par contre il n’est pas autorisé de regrouper tous les termes pairs d’abord et les termes
impairs ensuite :
u0 , u2 , u4 , . . . , u2k , . . . , u1 , u3 , . . . , u2k+1 , . . .

Exemple 3.6.1. Le but de cet exemple est de montrer que si la série n’est pas absolument
convergente, des phénomènes étranges apparaissent. Souvenez-vous que la série harmo-
nique alternée converge :
+∞
X 1 1 1 1
(−1)k = 1 − + − + ···
k=0
k+1 2 3 4

Notons S sa somme. (En fait S = ln 2.)


Si on regroupe les termes de cette série par paquets de 3, et si l’on simplifie, alors on
trouve la moitié de la somme !

       
1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1
1− − + − − + − − + ··· + − − + ···
2 4 3 6 8 5 10 12 2k − 1 4k − 2 4k
       
1 1 1 1 1 1 1 1
= − + − + − + ··· + − + ···
2 4 6 8 10 12 4k − 2 4k
 
1 1 1 1
= 1 − + − + ···
2 2 3 4
1
= S
2
Surprenant, non ?

72
CALCUL INTEGRAL

Définition 3.6.1 (Convergence commutative). Toute série convergente dont la somme ne


dépend pas de 1’ordre des termes est dite commutativement convergente.

Proposition 3.6.1. Une série est commutativement convergente si, et seulement si, elle est
absolument convergente.

3.7 Quelques méthodes d’etude pratique de la conver-


gence des séries
3.7.1 Pour prouver la convergence :
1 Regarder si le terme général tend vers 0
2 Regarder si la série est absolument convergente en cherchant un équivalent de la
valeur absolue, puis en fonction de la forme :
a Soit comparer avec une série de Riemann ou de Bertrand.
b Soit utiliser la règle de d’Alembert si le quotient de deux termes consécutifs
est simple.
c Soit utiliser la règle de Cauchy.
d Soit utiliser la règle nα un
e Soit comparer avec une intégrale.
3 Penser aussi à faire apparaître une série télescopique.
4 Si il n’y a pas absolue convergence :
a Si l’expression est simple, essayer d’utiliser le critère spécial des séries alter-
nées.
b Sinon en faisant un développement limité, faites apparaître des termes absolu-
ment convergents, semi-convergents, et éventuellement un terme divergent.

3.7.2 Pour prouver la convergence et calculer des sommes :


On pourra :
1 Essayer de faire apparaître une série géométrique, en particulier avec cos, sin.
2 Essayer de faire apparaître une série télescopique.
3 Regrouper les termes 2 par 2, 3 par 3.
4 Décomposer en éléments simples et éventuellement utiliser la constante d’Euler.
5 Essayer de comparer avec une intégrale.

73
CALCUL INTEGRAL

3.7.3 En général
1 penser aux comparaisons série intégrale.
2 penser aux équivalents de sommes et des restes d’une série.

3.7.4 Erreurs à éviter


1 Ne pas utiliser les théorèmes de comparaison sur les séries qui ne sont pas à termes
positifs.
2 Dans les calculs de somme écrire précisément les bornes pour les indices.

74
Chapitre 4

Séries Entières

Nous allons appliquer les résultats du chapitre 4 à des séries d’un type particulier pos-
sédant des propriétés de convergence remarquables. Ces séries sont parfaitement adaptées
à la représentation des fonctions de variable réelle ou complexe, de classe C ∞ , et jouent
un rôle considérable dans de nombreuses branches des mathématiques comme la combi-
natoire ou la théorie des nombres, et sont au coeur de la théorie des fonctions analytiques
réelles ou complexes.

4.1 Rayon de convergence


4.1.1 Généralités
Définition 4.1.1. On appelle série entière complexe de variable complexe toute série de
fonctions fn dans laquelle fn est une fonction de C dans C de la forme z 7→ an z n où
P

(an ) est une suite donnée de nombres complexes. Une telle série est notée an z n et (an )
P

est appelée la suite des coefficients de la série entière.

De manière similaire :
P
• on appelle série entière complexe de variable réelle toute série de fonctions fn
dans laquelle fn est une fonction de R dans C de la forme x 7→ an xn où (an ) est
une suite donnée de nombres complexes. Une telle série est notée an z n .
P
P
• on appelle série entière réelle de variable réelle toute série fn dans laquelle fn
est une fonction de R dans R de la forme x 7→ an xn où (an ) est une suite donnée
de nombres réels. Une telle série est notée an z n .
P

Définition 4.1.2. On appelle somme de la série entière an z n l’application S définie en


P

tout point où cela a un sens par


+∞
X
S(z) = an z n .
n=0

75
CALCUL INTEGRAL

Lemme 4.1.1 (Abel). Soit Z0 ∈ C. Supposons que la suite (an z0n ) soit bornée. Alors, pour
tout nombre complexe z tel que 0 ≤ |z| < |z0 | la série an z n converge absolument.
P

Théorème 4.1.1. II existe un nombre R et un seul tel que


1 si |z| < R, la série an z n converge absolument,
P

2 si |z| > R, la série an z n diverge.


P

an z n converge
P
Remarque 4.1.1. On peut avoir R = 0 ou R = +∞. Si R = +∞,
pour tout z ∈ C et la somme de cette série entière définit une fonction de C dans C dite
fonction entière.

Définition 4.1.3. L’élément R de R+ ∪ {+∞} défini ci-dessus par

R = sup{r ∈ R+ , la suite(an rn ) est bornée}.

an z n . Le disque ouvert {z ∈
P
s’appelle le rayon de convergence de la série entière
C; |z| < R} est le disque de convergence de la série, il est vide si R = 0, il coïncide
avec C tout entier si R = +∞. En variable z = x réelle, l’ensemble {x ∈ R; −R <
x < R} est l’intervalle de convergence de la série entière

Remarque 4.1.2. L’ensemble {z ∈ C, |z| = R} est appelé le cercle d’incertitude.


Si R est fini, on ne peut prévoir le comportement de la série sur ce cercle. En effet, ce
comportement peut être varié comme le montrent les exemples suivants :
P n
Exemple 4.1.1. 1 La série z , dont le rayon de convergence est égal à 1, diverge
en tout point tel que |z| = 1.
P zn
2 La série dont le rayon de convergence est égal à 1 , converge en tout point
n2
tel que |z| = 1.
P zn
3 La série , dont le rayon de convergence est égal à 1, diverge au point z = 1,
n
mais converge en tout autre point tel que |z| = 1. En effet, si θ ∈ / 2πZ, alors la
somme
1
|l + eiθ + · · · + einθ | ≤
| sin(θ/2)|
est bornée indépendamment, d’où la conclusion.

4.1.2 Méthodes pratiques pour calculer R


Dans ce paragraphe, nous poserons
1 1
= 0 si R = +∞ et = +∞ si R = 0
R R
an z n est telle que an 6= 0 à partir d’un certain rang, alors on a le résultat
P
Si la série
suivant qui découle de la règle de D’Alembert pour les séries numériques.

76
CALCUL INTEGRAL

an z n une série entière, et notons R


P
Proposition 4.1.1 (Règle de D ’Alembert). Soit
son rayon de convergence. Si la suite de terme général an+1
an
converge vers L ∈ R, alors
1
R= .
L
P zn
Exemple 4.1.2. Pour la série entière , on a
n!
an+1 n! 1
lim = lim = lim = 0.
n→+∞ an n→+∞ (n + 1)! n→+∞ n + 1

Le rayon de convergence est donc égal à +∞.


an+1
Remarque 4.1.3. Si la suite de terme général n’a pas de limite dans R+ , la
an P
règle de D’Alembert est inapplicable. C’est par exemple le cas de la série entière (2 +
(−1)n )z n .
La règle de D’Alembert est également inapplicable pour les séries du type
2
X X X
an z 2n , an z 2n+1 , an z n .

Dans ces cas on peut par exemple effectuer un changement de variable du type Z = z 2
ou procéder comme dans l’exemple suivant.
+∞ n 2n+l
X 2 z
Exemple 4.1.3. Calculons le rayon de convergence de Soit z0 ∈ C∗ , et po-
n=0
n+1
2n |z0 |2n+l
sons ; Un = On a
n+1
un+1 2n+1 |z0 |2n+2 n + 1
= .
un n+2 2n |z0 |2n+1
Il en résulte
un+1
lim = 2|z0 |2 .
n→+∞ un
√ P
On en déduit que, si |z0 | < 1/ 2, la série à termes positifs un converge et si |z0 | >

1/ 2, la série diverge. Par définition-même, le rayon de convergence de la série entière

proposée est égal à 1/ 2.
+∞
X
Exemple 4.1.4. Calculons le rayon de convergence de la série 3n z 2n+5
n=0

3n+l x2(n+l)+5 3n+l


l = lim = lim |x|2(n+l)+5−(2n+5) = 3|x|2 .
n→+∞ 3n x2n+5 n→+∞ 3n

3
La série converge si 3|x|2 < 1, qui est équivalente à |x| < , d’où le rayon de conver-
√ 3
3
gence est R = .
3 √ √
3 3
La série est absolument convergente pour tout |x| < et divergente si |x| > .
3 3

77
CALCUL INTEGRAL

En fait, on a le résultat suivant qui découle de la règle de Cauchy pour les séries
numériques et qui permet de résoudre les difficultés soulevées par la remarque précédente.

Proposition 4.1.2 (Règle de Cauchy). Soit an z n une série entière. Si la suite de terme
P
1 +
général |an | n converge vers L ∈ R , alors R = 1/L.
P n n
Exemple 4.1.5. Pour la série entière 2n
z , on a
ln n
1 n1/n e n 1
lim |an | = lim
n = lim = .
n→+∞ n→+∞ 2 n→+∞ 2 2
On en déduit que le rayon de convergence recherché est égal à 2.

4.1.3 Comparaison de rayons de convergence


Dans ce paragraphe, an z n et bn z n sont deux séries entières de rayons de conver-
P P

gence respectifs Ra et Rb . Les deux résultats qui suivent découlent immédiatement de la


formule de Hadamard. Nous en donnons néanmoins une preuve à partir de la définition
du rayon de convergence.

Proposition 4.1.3. Si pour tout n ∈ N, on a |an | ≤ |bn |, alors Ra ≥ Rb .

Exemple 4.1.6. Pour tout n ∈ N, on a e−1 ≤ ecos n ≤ e. Les séries


P −1 n P n
e z et ez
P cos n n
étant de rayon de convergence égal à 1, la série e z est elle aussi de rayon de
convergence égal à 1.

Proposition 4.1.4. Si an = O(bn ), alors Ra ≥ Rb .

Proposition 4.1.5. Si an ∼ bn , alors Ra = Rb -


n→+∞

Corollaire 4.1.1. Soit an z n une série entière telle qu’il existe une fraction rationnelle
P

non nulle F avec, pour tout n ∈ N, an = F (n).


Alors le rayon de convergence de an z n est égal à 1.
P

4.2 Opérations sur les séries entières


4.2.1 Structure algébrique
Définition 4.2.1. Si an z n et bn z n sont deux séries entières, on appelle
P P

– série somme, la série entière (an + bn )z n


– série produit (appelé aussi produit de Cauchy), la série entière cn z n définie par
P

n
X
∀n ∈ N, cn = ak bn−k (4.1)
k=0

78
CALCUL INTEGRAL

(λan )z n ou λ an z n .
P P
– série produit par λ ∈ C, la série entière

Théorème 4.2.1. Soient an z n et bn z n deux séries entières de rayons de convergence


P P

respectifs Ra et Rb . Alors
1 le rayon de convergence R de la série somme vérifie R ≥ min(Ra , Rb ), avec égalité
si Ra 6= Rb . De plus, si |z| < min(Ra , Rb ), on a
+∞
X +∞
X +∞
X
n n
an z + bn z = (an + bn )z n .
n=0 n=0 n=0

an z n par λ 6= 0, on ne change pas le rayon de convergence. De


P
2 en multipliant
plus, si |z| < Ra , on a
+∞
X +∞
X
n
λ an z + = (λan )z n .
n=0 n=0

3 le rayon de convergence R de la série produit vérifie R ≥ min(Ra , Rb ). De plus, si


|z| < min(Ra , Rb ), on a
+∞
X +∞
 X  +∞
X
n n
an z an z = cn z n .
n=0 n=0 n=0

où cn est donné par la formule (4.1).

Remarque 4.2.1. Pour le rayon de convergence R de la série somme et de la série produit,


P n
z et − z n sont de rayon
P
on peut avoir R > max(Ra , Rb ). Par exemple, les séries
de convergence 1, mais la série somme est la série nulle donc de rayon de convergence
égal à +∞.
De même, considérons les séries an z n et bn z n définies par
P P

( (
2 si n = 0 −1 si n = 0
an = n
et bn =
2 si n ≥ 1 1 si n ≥ 1

Pour n ≥ 1, on a
|an |1/n = 2 et |bn |1/n = 1,
donc Ra = 21 et Rb = 1.
La série produit cn z n est telle que
P

n−1
X n−1
X
c n = a0 b n + ak bn−k = 2 + 2k − 2n = 2 + 2(2n−1 − 1) − 2n ,
k=1 k=1

donc cn = 0 pour tout n ≥ 0. La série produit est donc la série nulle, et son rayon de
convergence est alors égal à +∞.

79
CALCUL INTEGRAL

4.2.2 Série entière dérivée


an z n la série
P
Définition 4.2.2. On appelle série entière dérivée d ’une série entière
entière (n + 1)an+1 z n .
P

Proposition 4.2.1. La série entière dérivée d ’une série entière a le même rayon de
convergence que celle-ci.

Remarque 4.2.2. 1 En appliquant le résultat précédent à une série entière primitive


P an n+1 P an n+1
à la place de an z n on voit que
P
c’est-à-dire n+1
z n+1
z a même rayon
n
P
de convergence que an z .
2 Soient an z n une série entière et F une fraction rationnelle autre que la fraction
P

nulle. On a F (n)an z n a le même rayon de convergence que an z n .


P P

+∞
X (−1)n
Exemple 4.2.1. Considérons la série entière f (x) = xn de rayon de conver-
n=1
n
gence R = 1, qui est définie et continue sur ] − 1, 1].
Pour tout x ∈] − 1, 1[, on a
+∞
0
X (−1)n n−1
f (x) = n x
n=1
n
+∞
X
= −(−x)n−1
n=1
+∞
X
= − (−x)n
n=0
1
= −
1+x
Exemple 4.2.2. Donc pour tout x ∈] − 1, 1[,
Z x
dt
f (x) = f (0) + − = − ln(1 + x).
0 1+t
On retient
+∞
X (−1)n−1 n−1
∀x ∈] − 1, 1], n x = ln(1 + x).
n=1
n

4.2.3 Convergence uniforme et séries entières


Théorème 4.2.2. Une série entière an z n converge normalement sur toute partie com-
P

pacte incluse dans le disque de convergence.

80
CALCUL INTEGRAL

Remarque 4.2.3. 1 En général, il n’y a pas convergence uniforme sur le disque de


convergence. Par exemple, la série entière z n a pour rayon de convergence 1 et
P

ne converge pas uniformément sur le disque de convergence puisque la suite (z n )


ne converge pas uniformément vers la fonction nulle sur ce disque.
2 Si R 6= ∞, les séries entières qui convergent uniformément sur le disque de conver-
gence D sont celles qui convergent uniformément sur le disque fermé D. En effet,
la convergence uniforme sur D se traduit par le critère de Cauchy uniforme sous la
forme
∀ε > 0, ∃N ∈ N, ∀n ≥ N, ∀p ≥ N, ∀z ∈ D,
p
X
| an+k z n+k | ≤ ε.
k=0

Pour n et p fixés, la fonction z 7→ |an z n + · · · + an+p z n+p est continue, l’inégalité


ci-dessus serait également vraie sur le disque fermé D.
On en déduit que s’il existe un point du cercle {z ∈ C; |z| = R} en lequel la
série diverge, alors la série entière an z n ne converge pas uniformément sur D.
P

4.3 Propriétés de la fonction somme


4.3.1 Continuité de la fonction somme
an z n une série entière, R son rayon de convergence, et S sa
P
Théorème 4.3.1. Soient
somme. Alors la fonction S est continue sur le disque ouvert D(0, R).
X  zn 
Exemple 4.3.1. La règle de D’Alembert permet de voir facilement que la série
n!
X  zn 
est de rayon de convergence égal à +∞. Sa fonction somme x 7→ est donc
n!
continue sur C tout entier.
Corollaire 4.3.1. Pour tout entier p ≥ 0, la fonction somme S de la série entière an z n
P

admet un développement limité à l ’ordre p au voisinage de l ’origine dont la partie


régulière est donnée par
a0 + a1 + · · · + ap z p .

4.3.2 Intégration de la fonction somme


an xn une série entière complexe de variable réelle, de rayon
P
Théorème 4.3.2. Soit
de convergence R > 0. Si [a, b] est un segment inclus dans l ’intervalle de convergence
] − R, R[, alors
Z b +∞
X Z b
S(x)dx = an xn dx.
a n=0 a

81
CALCUL INTEGRAL

an xn est continue sur l’in-


P
Corollaire 4.3.2. La fonction somme S de la série entière
tervalle de convergence ] − R, R[, et ses primitives sont de la forme
X an
x 7→ α + z n+1 , où α ∈ C.
n+1

4.3.3 Dérivabilité de la fonction somme


Théorème 4.3.3. Soit an xn une série entière complexe de variable réelle, de rayon de
P

convergence R > 0. Alors la fonction somme S définie sur ] − R, R[ à valeurs dans C est
de classe C 1 et sa dérivée S 0 est la fonction somme de la série entière dérivée.

On en déduit aussitôt le résultat suivant.

Corollaire 4.3.3. Sous les hypothèses du théorème ci-dessus, la fonction somme S est de
classe C ∞ sur ] − R, R[, et
+∞
(k)
X k!
∀k ∈ N, ∀x ∈] − R, R[, S (x) = an xn−k .
n=k
(n − k)!

S k (0)
En particulier, on a, pour tout k ∈ N : ak = .
k!
Exemple 4.3.2. On a vu que la série géométrique xn est de rayon de convergence 1 et
P

que
+∞
X 1
∀x ∈] − 1, 1[, xn = .
n=0
1−x
Par dérivation, on a, pour tout x ∈] − 1, 1[,
+∞ +∞
1 d  1  X n−1 X
2
= = nx = (n + 1)xn .
(1 − x) dx 1 − x n=1 n=0

Par une récurrence immédiate sur A ; on en déduit que

Exemple 4.3.3.

1 1 dk  1 
=
(1 − x)k+1 k! dxk 1 − x
+∞
1 dk  X n 
= x
k! dxk n=0
+∞ +∞
1 X X (n + k)!
= (n + k) · · · (n + 1)xn = xn .
k! n=0 n=0
k!n!

82
CALCUL INTEGRAL

+∞
X (−1)n
Exemple 4.3.4. Considérons la série entière f (x) = xn de rayon de conver-
n=1
n
gence R = 1, qui est définie et continue sur ] − 1, 1].
Pour tout x ∈] − 1, 1[, on a
+∞
0
X (−1)n n−1
f (x) = n x
n=1
n
+∞
X
= −(−x)n−1
n=1
+∞
X
= − (−x)n
n=0
1
= −
1+x
Exemple 4.3.5. Donc pour tout x ∈] − 1, 1[,
Z x
dt
f (x) = f (0) + − = − ln(1 + x).
0 1+t
On retient
+∞
X (−1)n−1 n−1
∀x ∈] − 1, 1], n x = ln(1 + x).
n=1
n

4.4 Fonctions développables en série entière


Dans ce paragraphe, nous nous intéressons aux fonctions de variable réelle, à valeurs
dans R ou C.

4.4.1 Généralités
Définition 4.4.1. Soit f une fonction complexe de variable réelle, définie sur une partie
X de R. On dit que f est développable en série entière en 0, s’il existe une série entière
an xn de rayon de convergence R > 0 et un nombre r ∈]0, R] avec ] − r, r[⊂ X tel que
P

+∞
X
∀x ∈] − r, r[, f (x) = an x n .
n=0

Définition 4.4.2. On dit que f : X → R est développable en série entière en un point x0


si la fonction x 7→ f (x − x0 ) est développable en série entière en 0.

Remarque 4.4.1. 1 La notion de fonction développable en série entière en 0 est une


notion locale, donc si une fonction f coïncide au voisinage de 0 avec une fonction
g développable en série entière en 0, alors f l’est également.

83
CALCUL INTEGRAL

2 Même si f est définie sur tout R, on n’a pas nécessairement r = R. En effet, la


fonction définie par

−1
 e
 si x ≤ −1
x
f (x) = e si −1 < x < 1

e si x ≥ 1,

est développable en série entière en 0, et elle est égale à la somme de la série


P  xn  P  xn 
entière sur ] − 1, 1[ et non pas sur R, bien que soit de rayon de
n! n!
convergence infini.

Exemple 4.4.1. Tout polynôme P est développable en série entière en tout point x0 de R
d ’après la formule de Taylor : ∀x ∈ R,
deg P
X P (n) (x0 )
P (x) = (x − x0 )n
n=0
n!
+∞
X P (n) (x0 )
= (x − x0 )n .
n=0
n!

Rappelons qu’on appelle voisinage d’un point x0 de R toute partie de R contenant un


intervalle ouvert de la forme ]x0 − r, x0 + r[ avec r > 0. En particulier, tout intervalle
]x0 − p, x0 + p[ avec p > 0 est un voisinage du point x0 .

Proposition 4.4.1. Si une fonction f est développable en série entière en x0 , alors il existe
un voisinage de x0 sur lequel f est de classe C ∞ et le développement en série entière de
f en x0 est
X f (n) (x0 )
(x − x0 )n .
n!
Cette série est appelée la série de Taylor de f en x0 .

Remarque 4.4.2. 1 La proposition précédente assure que si f est développable en


série entière en x0 , alors son développement en série entière f (x) = an (x−x0 )n
P

est unique, c’est-à-dire que la suite (an ) de ses coefficients est unique.
2 Il est possible qu’une fonction f soit de classe C ∞ au voisinage de x0 sans être
développable en série entière en x0 . La fonction définie par
 
 exp − 1

si x ∈ R\{0}
f (x) = x2
0 si x = 0

est de classe C ∞ sur R et toutes ses dérivées en 0 sont nulles. Si f était développable
en série entière en 0, elle serait nulle sur un voisinage de 0, ce qui est manifestement
faux.

84
CALCUL INTEGRAL

an xn
P
Proposition 4.4.2. Soient f une fonction développable en série entière en 0, et
son développement en série entière au voisinage de 0. Alors
• si f est paire, on a pour tout p ∈ N, a2p+1 = 0,
• si f est impaire, on a pour tout p ∈ N, a2p = 0.

Proposition 4.4.3. Soit f une fonction de classe C ∞ sur un intervalle ouvert I de R,


contenant 0. Soient n ∈ N et x ∈ I, et notons Rn (x) le reste d ’ordre n défini par
n
X f (k) (0)
Rn (x) = f (x) − xk .
k=0
k!

Alors f est développable en série entière en 0 si, et seulement si, il existe un intervalle
ouvert contenant 0 sur lequel la suite (Rn )n≥0 converge simplement vers la fonction nulle.

Le résultat remarquable suivant donne une condition suffisante pour qu’une fonction f
soit développable en série entière en 0.

Proposition 4.4.4. Si f est de classe C ∞ sur un intervalle de la forme I =] − a, a[ avec


a > 0, et s ’il existe p > 0 et M ∈ R+ tels que
M n!
∀x ∈ I, ∀n ∈ N, |f (n) (x)| ≤ ,
pn

alors f est développable en série entière en 0 sur l ’intervalle ] − R, R[ où R = min(a, p).

4.4.2 Opérations sur les fonctions développables en série entière


Proposition 4.4.5. Soient f et g deux fonctions développables en série entière en 0 et de
an xn et bn xn . Alors, pour tout (λ, µ) ∈ C2 , la fonction
P P
développements respectifs
λf + µg est développable en série entière en 0 et son développement est la série entière
(λan + βbn )xn .
P

Proposition 4.4.6. Soient f et g deux fonctions développables en série entière en 0 et


an xn et bn xn . Alors la fonction produit f g est déve-
P P
de développements respectifs
loppable en série entière en 0, et son développement en 0 est le produit des deux séries
entières.

Proposition 4.4.7. Soit f une fonction développable en série entière en 0, de dévelop-


an xn . Alors il existe un intervalle ouvert I contenant 0 sur lequel f est déri-
P
pement
vable, et la fonction dérivée f 0 est développable en série entière en 0 sur I, son déve-
loppement étant la série obtenue en dérivant terme à terme la série entière an xn , soit
P

(n + 1)an+1 xn .
P

85
CALCUL INTEGRAL

Remarque 4.4.3. Les dérivées successives d’une fonction développable en série entière
en 0 sont donc développables en série entière en 0 et leurs développements sont obtenus
en dérivant successivement terme à terme le développement de la fonction considérée.

Proposition 4.4.8. Si f est une fonction développable en série entière en 0, de déve-


an xn , alors f est continue sur I et si F est l’une de ses primitives sur I,
P
loppement
alors F est développable en série entière en 0 sur I, son développement est donné par :
P an n+1
F (0) + n+1
x .

4.4.3 Méthodes de développements en série entière


Pour montrer qu’une fonction est développable en série entière et pour trouver son
développement, il est souvent judicieux d’utiliser la méthode dite de l’équation différen-
tielle. Cela consiste à
• trouver une équation différentielle linéaire d ’ordre 1 ou 2 à coefficients polynô-
miaux, de préférence de petits degrés, telle que la fonction f soit la solution d’un
problème de Cauchy associé à cette équation,
• supposer que la fonction f est développable en série entière et en déduire son déve-
loppement à l’aide de l’équation différentielle,
• étudier le rayon de convergence de la série entière obtenue, s’il est non nul, la
somme de la série sera solution du problème de Cauchy sur l’intervalle de conver-
gence et sera donc égale à f sur ce dernier.

Exemple 4.4.2. Développons en série entière en 0 la fonction

f : x 7→ (arcsin x)2 .

f est de classe C ∞ sur ] − 1, 1[ et on a



00 1 − x2 + x arcsin x 2 xf 0 (x)
f (x) = 2 = + .
(1 − x2 )3/2 1 − x2 1 − x2
Donc f est solution sur ] − 1, 1[ du problème de Cauchy :

(E) (l − x2 )y” − xy 0 = 2 avec y(0) = y 0 (0) = 0.

Or, la solution générale sur ] − 1, 1[ de l’équation différentielle ci-dessus est donnée par

y = (arcsin x)2 + A arcsin x + B avecA, B ∈ R.

On en déduit que la fonction x 7→ (arcsin x)2 est la seule solution du problème de Cauchy
(E). Recherchons maintenant les solutions de (E) développables en séries entières au
voisinage de 0 sous la forme
X+∞
0
y = an x n .
n=0

86
CALCUL INTEGRAL

Par application du théorème de dérivation terme à terme, on a


+∞
X
00
y = (n + 1)an+1 xn .
n=1

Le développement du premier membre de (E) a donc la forme suivante


+∞
X +∞
X
2 n
(1 − x ) (n + 1)an+1 x − x an x n
n=0 n=0

c’est-à-dire
+∞
X +∞
X +∞
X
n n+2
(n + 1)an+1 x − (n + 1)an+1 x − an xn+1
n=0 n=0 n=0

ou encore
+∞
X +∞
X +∞
X
n n
(n + 1)an+1 x − (n − 1)an−1 x − an−1 xn
n=0 n=2 n=1

En remplaçant dans (E), on obtient


+∞
X +∞
X
n
a1 + 2a2 x + (n + 1)an+1 x − (n − 1)an−1 xn
n=2 n=2

+∞
X
−a0 x − an−1 xn = 2,
n=2

d ’où, en regroupant les termes,


+∞
X
a1 + (2a2 − a0 )x + ((n + 1)an+1 xn − nan−1 )xn = 2.
n=2

Par unicité du développement, on déduit que


n
a1 = 2, 2a2 = a0 , an+1 = an−1 ∀n ≥ 2 (4.2)
n+1
Comme a0 = f (0), on a a0 = 0, donc a2 = 0. Par récurrence, il en résulte que a2p = 0
pour tout p ≥ 0, et
2p 2p − 2 2
a2p+1 = × × · · · × × a1
2p + l 2p − l 3
p
2 p(p − 1) · · · 1
= × 2.
(2p + 1)(2p − 1) · · · 3
En écrivant
(2p + 1)!
(2p + 1)(2p − 1) · · · 3 =
2p (p!)

87
CALCUL INTEGRAL

on obtient
22p+1 (p!)2
a2p+1 =
(2p + 1)!
D’après la relation (4.2) appliquée à n = 2p + 1, on a
a2p+1
lim = 1,
p→+∞ 2p − 1

donc le rayon de convergence de la série an xn est égal à 1.


P

En vertu de l’unicité de la solution de (E), on peut donc déduire que


+∞ 2n+1
X 2 (n!)2
∀x ∈] − 1, 1[, f 0 (x) = x2n+1 ,
n=0
(2n + 1)!

et puisque f(0) = 0, on en conclut que


+∞ 2n+1
2
X 2 (n!)2
∀x ∈] − 1, 1[, (arcsin x) = x2n+2 .
n=0
(2n + 2)!

4.5 Séries entières classiques


Nous avons les développement classique suivant :
♦ ∀z ∈ C tq |z| < 1 :

1 X
= zk
1−z k=0

♦ ∀z ∈ C tq |z| < 1 :

1 X
= (−1)k .z k
1+z k=0

♦ ∀x ∈ [−1, 1[ :

X xk
ln(1 − x) = −
k=1
k
♦ ∀x ∈] − 1, 1] :

X xk
ln(1 + x) = (−1)k+1
k=1
k
♦ ∀x ∈ R :

x
X xk
e =
k=1
k!
♦ ∀z ∈ C :

z
X zk
e =
k=1
k!

88
CALCUL INTEGRAL

♦ ∀x ∈ R :

X x2k
ch(x) =
k=0
(2k)!
♦ ∀x ∈ R :

X x2k+1
sh(x) =
k=0
(2k + 1)!
♦ ∀x ∈ R :

X x2k
cos(x) = (−1)k
k=0
(2k)!
♦ ∀x ∈ R :

X x2k+1
sin(x) = (−1)k
k=0
(2k + 1)!
♦ ∀α ∈ R − N, ∀x ∈] − 1, 1[ :

X
α
(1 + x) = ak .xk
k=0

avec : 
a0 = 1
ak = α.(α − 1)...(α − k + 1)
k!

4.6 Quelques méthodes


4.6.1 Pour trouver le rayon de convergence
On peut :
1 chercher un équivalent de an
2 revenir à la définition
3 utiliser la règle de d’Alembert (qui ne marche pas toujours)
4 intégrer ou dériver terme à terme (ne modifie pas le rayon)
5 reconnaître un produit de Cauchy

4.6.2 Pour déterminer un développement en série entière


On peut :
1 se ramener aux fonctions usuelles, en considérant la fonction comme une somme,
une dérivée, une primitive, un produit de Cauchy de fonctions usuelles,
2 utiliser la méthode de l’équation différentielle
3 utiliser la série de taylor de f (utiliser l’inégalité de Taylor-Lagrange)

89
CALCUL INTEGRAL

4.6.3 Erreurs à éviter


1 Sur le cercle de convergence, on ne peut rien dire.
2 En général il n’y a pas convergence uniforme sur le disque ouvert de convergence.

90
Bibliographie

[1] A. Bodin : Analyse. Exo 7 (2016).


[2] A. Soyeur, F. Capaces, E. Vieillard-Baron : Cours de Mathématiques Sup MPSI PCSI
PTSI TSI . sesamath.net (2011).
[3] B. Calvo, J. Doyen, A. Calvo, F. Boschet : Cours d’analyse. Armand Colin - collection U
(1977).
[4] C. Deschamps, A. Warusfel, F. Moulin, J. François Ruaud, A. AAiquel, J-C Sifre : Ma-
thématiques TOUT-EN-UN • I e année : cours exercices corrigés MPSI-PCSI. Dunod, Paris,
(2003).
[5] C. Gautier, A. Warusfel, B. Caminade , S. Nicolas : Mathématiques TOUT-EN-UN • ECS
2e année : cours exercices corrigés Prépas commerciales . Dunod, Paris, (2003).
[6] D. Fredon : Mathématiques Résumé du cours en fiches MPSI - MP. Dunod, Paris, (2010).
[7] D. Guinin - B. Joppin : Analyse Géometrie, Précis de Mathematiques, Prépa MPSI 1e
année. Bréal (1997).
[8] J. M. Monier : Analyse MP, Dunod, Paris, (2013).
[9] M. Allano Chevalier, X. Oudot : Maths MPSI. Hachette, (2008).
[10] T. Pierron : Mathématiques MPSI. ENS Ker Lann.
[11] Xavier Merlin : Méthodix Algèbre.

91

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