Vous êtes sur la page 1sur 7

Sorbonne Université Licence de Mathématiques L3

UE LU3MA263 – Intégration Année 2019–20

Exercices corrigés en vrac

Exercice 1. Soit µ une probabilité sur un ensemble mesurable (X, A). On se donne une
fonction mesurable f : X → R tel que |f | ≤ 1 µ-presque partout. La suite
Z
|f (x)|n dµ(x)

a-t-elle une limite ?

Solution de l’exercice 1. Pour x fixé, si |f (x)| < 1 alors |f (x)|n → 0. On commence donc par
écrire
Z Z Z
n n
|f (x)| dµ(x) = |f (x)| dµ(x) + |f (x)|n dµ(x)
{|f |=1} {|f |<1}
Z
= µ({|f | = 1}) + 1{|f |<1} |f (x)|n dµ(x).

D’après ce qu’on a dit, 1{|f |<1} |f |n converge simplement vers 0. De plus,

∀n ≥ 1, |1{|f |<1} |f |n | ≤ 1

or les fonctions constantes sont µ intégrables car µ est de masse finie. Le théorème de conver-
gence dominée nous permet donc d’écrire
Z
1{|f |<1} |f (x)|n dµ(x) → 0

et donc Z
|f (x)|n dµ(x) → µ({|f | = 1}).

Exercice 2. Soit (X, A, µ) un espace mesuré. On considérera sur X des fonctions à valeurs
réelles et l’on équipera R de la tribu borélienne.
a) Soit (gn )n≥0 une suite de fonctions mesurables sur X et f une fonction mesurable sur X.
Montrer que l’ensemble A := {x ∈ X ; limn gn (x) = f (x)} est un ensemble mesurable
(éventuellement vide, bien sûr).
b) Soit (fn )n≥0 une suite de fonctions mesurables qui converge µ-presque partout sur X
vers une fonction f . On suppose que, pour chaque n ≥ 0 fixé, on a fn ≥ 0 µ-presque
partout. Montrer que f ≥ 0 µ-presque partout.
Indication : on pourra considérer un ensemble provenant de la question a) et une union
dénombrable bien choisie d’ensembles de mesure nulle.
Solution de l’exercice 2. a) On peut écrire
\ [ \ \ [ \ 1 1
A= {x ∈ X; |gn (x) − f (x)| ≤ 1/k} = (gn − f )−1 ([− , ]).
k≥1 N ≥1 n≥N k≥1 N ≥1 n≥N
k k

b) Soit A la partie mesurable obtenue à la question précédente, dans le cas ”gn = fn et f = f ”.


Par hypothèse, µ(X r A) = 0. Comme fn est presque-partout positive, il existe Bn ∈ A avec
µ(Bn ) = 0 tel que fn (x) pour tout x ∈ X r Bn . Posons
[ 
B = (X A) ∪
r Bn .
n≥0
T
Alors pour x ∈ X r B = A ∩ ( n (X r Bn )) fixé, on a fn (x) ≥ 0 pour tout n et fn (x) → f (x),
donc f (x) ≥ 0. Mais B est de mesure nulle comme union dénombrable d’ensemble de mesure
nulle.

Exercice 3. Soit (X, A, µ) un espace mesuré.


a) Pourriez-vous donner deux exemples de fonctions sur X intégrables ?
b) Même question si on suppose de plus que µ(X) < +∞ (par exemple µ proba).

Solution de l’exercice 3. a) Il y a toujours la fonction nulle (µ-pp) qui est intégrable. Mais sans
autre information sur (X, A, µ), on ne peut pas en donner une autre. En effet, si on prend
A = {∅, X} et µ(X) = +∞, seules les fonctions constantes sont mesurables et parmi celles-ci,
seule celle identiquement nulle est intégrable.
b) Si µ est de masse finie, alors toutes les fonctions mesurables bornées (ou plus généralement
essentiellement bornées) sont intégrables. En particulier toutes les fonctions constantes sont
intégrables.

Exercice 4.
a) Montrer que P(N) ⊗ P(N) = P(N2 ).
b) Soit µ la mesure de comptage de N. Montrer que µ ⊗ µ est la mesure de comptage de N2 .

Solution de l’exercice 4. a) Tout d’abord P(N2 ) est une tribu qui contient les A × B où
A, B ∈ P(N) donc contient leur tribu engendrée P(N) ⊗ P(N). Inversement, comme N2 est
dénombrable, toute partie de N2 est la réunion disjointe au plus dénombrable de singletons. Or
tout singleton de N2 s’écrit {m} × {n} et appartient donc à la tribu P(N) ⊗ P(N), qui est
stable par union dénombrable. On en déduit P(N2 ) ⊆ P(N) ⊗ P(N).
b) De nouveau, comme toute partie de N2 est la réunion disjointe au plus dénombrable de
singletons, par σ-additivité des mesures il suffit de vérifier que µ ⊗ µ coı̈ncide sur les singletons
avec la mesure de comptage. Or µ ⊗ µ({(m, n)}) = µ({m}) µ({n}) = 1 × 1 = 1, d’où le résultat.

Exercice 5. Montrer que le graphe d’une fonction borélienne de Rd dans R est de mesure nulle.

Solution de l’exercice 5. Soit f : Rd → R une fonction borélienne. L’application (Rd ×R, B(Rd ×
R)) → (Rd , B(Rd )), (x, t) 7→ x est mesurable (puisque continue) et l’application f est B(Rd )-
mesurable, donc par composition (x, t) 7→ f (x) est B(Rd × R)-mesurable. Par ailleurs, l’appli-
cation (x, t) 7→ t est continue donc B(Rd × R)-mesurable. Par conséquent G = {(x, t) ∈ Rd × R :

2
f (x) = t} est un ensemble B(Rd × R)-mesurable, autrement dit la fonction (x, t) 7→ 1f (x)=t est
borélienne positive sur Rd × R. Donc par le théorème de Fubini
Z Z Z  Z
1t=f (x) dλd (x) dλ1 (t) = 1t=f (x) dλ1 (t) dλd (x) = 0 dλd (x) = 0.
Rd ×R Rd R Rd

Exercice 6.
Z +∞
sin x X 1
a) Montrer que : dx = .
0 ex − 1 n≥1
n 2+1

b) Soit f : R → R une fonction borélienne telle que Zpour tout a ∈ R, la fonction x 7→


X zn Z
eax f (x) est intégrable. Montrer que pour tout z ∈ C, ezx f (x)dx = xn f (x)dx.
R n≥0
n! R

Solution de l’exercice 6.
a) On a pour x > 0

sin x sin x e−x −x


X
−nx
X
= = sin x e e = sin x e−nx .
ex − 1 1 − e−x n≥0 n≥1

| sin x|
| sin x e−nx | = x
P
Comme n≥1 ex −1
≤ ex −1
est intégrable sur ]0, +∞[, on peut écrire
Z +∞ Z +∞
sin x X
= sin x e−nx dx.
0 ex − 1 n≥1 0

De plus, en utilisant sin x = Im (eix ), on a


Z +∞ X Z +∞
sin x (i−n)x
X 1 X 1
dx = Im e dx = Im = .
0 ex − 1 n≥1 0 n≥1
n − i n≥1 n2 + 1

n n |z|n xn |z|x
b) La fonction n≥0 | z n!x f (x)| = n≥0
P P
R n!P|f (x)| = e |f (x)| est intégrable sur R par
hypothèse. On peut donc permuter et .

Exercice 7. On travaille sur Rd muni de sa tribu borélienne et de la mesure de Lebesgue


qu’on notera simplement λ. On considère l’application (linéaire inversible) ϕ : Rd → Rd définie
par
ϕ(x) = ϕ(x1 , . . . , xd ) := (α1 x1 , . . . , αd xd )
Q
où α1 , . . . , αd sont des réels non-nuls fixés. On notera α := i≤d |αi | > 0. Pour tout borélien
A ⊂ Rd on pose
1
ν(A) := λ(ϕ(A)).
α
a) Montrer que ν est une mesure sur les boréliens de Rd .
b) Montrer que ν est invariante par translation.

3
c) Montrer que pour tout borélien A on a
λ(ϕ(A)) = αλ(A).

d) Comment en déduiriez-vous que pour une fonction mesurable f , qui est positive ou
intégrable sur Rd , on a Z Z
f (x) dx = α f (ϕ(y)) dy ?
Rd Rd

Solution de l’exercice 7. a) Remarquons d’abord que ν est bien définie. Pour cela, il faut vérifier
que ϕ(A) = {y ∈ Rd ; ∃x ∈ A t.q. ϕ(x) = y} est bien un borélien, pour pouvoir en prendre
la mesure λ. En général, l’image d’un borélien, même par une application continue, n’est pas
forcément un borélien. Néanmoins, quand l’application est de plus inversible d’inverse continue,
c’est le cas. Ici on peut écrire ϕ(A) = (ϕ−1 )−1 (A), qui est donc borélien comme image réciproque
du borélien A par l’application continue ϕ−1 . Ensuite, on remarque que ν(∅) = α1 λ(ϕ(∅)) =
1
α
λ(∅) = 0. Enfin, si on a une suite de parties boréliennes (An ) deux à deux disjointes on a
1 1
ν(∪An ) = λ(ϕ(∪An )) = λ(∪ϕ(An )
α α
et pour conclure on remarque que les (ϕ(An ))n sont aussi deux à deux disjointes (on peut le
vérifier en utilisant que ϕ est injective, par exemple). Notez que l’on a pas encore utilisé que ϕ
est application linéaire.
b) Pour l’invariance par translations, on utilise que pour v0 ∈ Rd et une partie A on a ϕ(A+v0 ) =
ϕ(A) + v0 (par définition de l’image et du fait que ϕ est linéaire).
c) On veut montrer que ν = λ. Par les questions précédentes et par un théorème du cours, il
suffit de montrer que ν([0, 1]d ) = 1. On remarque que ϕ([0, 1]d ) = [0, α1 ] × . . . × [0, αd ], et donc
ν([0, 1]d ) = α1 λ([0, α1 ] × . . . × [0, αd ]) = α1 × α = 1.
Z +∞
1 − cos x
Exercice 8. Soit ϕ la fonction définie sur ]0, +∞[ par : ϕ(t) = e−xt dx.
0 x
a) Montrer que ϕ est continue sur ]0, +∞[.
b) Montrer que ϕ est dérivable sur ]0, +∞[ et calculer explicitement sa dérivée.
c) Calculer la limite de ϕ(t) quand t → +∞. En déduire la valeur de ϕ(t).

Solution de l’exercice 8.
a) On pose pour t, x > 0, f (t, x) = e−xt 1−cos
x
x
. Pour montrer que ϕ est continue sur ]0, +∞[
il suffit de montrer que ϕ est continue sur [a, +∞[ pour tout a > 0. Soit donc a > 0. On
vérifie les hypothèses du théorème de continuité sous le signe intégrale pour t ∈ [a, +∞[ :
— A t fixé, x 7→ f (t, x) est mesurable de (R, B(R)) vers (R, B(R)).
— A x > 0 fixé, la fonction t 7→ f (t, x) est continue car t 7→ e−tx est continue.
— Comme e−tx ≤ e−ax pour t ≥ a,
1 − cos x
f (t, x) ≤ e−xa
| {z x }
:=ha (x),indépendante de t

Etudions la fonction ha indépendante de t du second membre. Elle est continue sur


R∗+ et :

4
x 2
1 − cos x 2
+ o(x2 ) 1
— au voisinage de 0 : = = x + o(x)
x x 2 −xa
— au voisinage de +∞, on majore brutalement : |ha (x)| ≤ 2e x et la fonction à
droite est intégrable au voisinage de +∞.
Donc ha est intégrable.
Alors par le théorème de continuité sous le signe intégral, la fonction ϕ est définie et
continue sur [a, +∞[. Ceci est vrai pour tout a > 0, donc ϕ est continue sur R∗+ .
b) Montrons que f est dérivable sur R∗+ . On vérifie pour cela les hypothèses du théorème
de dérivation sous le signe intégral :
— pour tout t > 0, f (t, .) : x 7→ f (t, x) est intégrable.
— Pour tout x ∈ R∗+ (donc λ − p.p.), t 7→ f (t, x) est dérivable sur tout R∗+ . Calculons
la dérivée partielle de f par rapport à t :
∂f
= −e−xt (1 − cos x)
∂t
On se place de nouveau sur un intervalle ]a, +∞[, a > 0

∂f
(t, x) = |e−xt (1 − cos x)| ≤ 2e−xa , avec a > 0.
∂t

La fonction x 7→ 2e−xa étant intégrable, l’hypothèse de domination est vérifiée.


D’après le théorème de dérivation sous le signe intégral, ϕ est dérivable sur ]a, +∞[ de
dérivée :
Z +∞ Z +∞ Z +∞
0 −xt −xt
ϕ (t) = −e (1 − cos x) dx = −e dx + e−xt cos x dx
0 0 0
+∞
e−xt

1
La première intégrale se calcule directement : I1 = = − . Pour la seconde
t x=0 t
ix
intégrale, on pourrait exprimer cos x comme la partie réelle de e . On peut aussi la
calculer par intégration par parties :
Z +∞ Z +∞ Z +∞
−xt
 −xt +∞ −xt
e cos x dx = e sin x x=0 + t e sin x dx = t e−xt sin x dx.
0 0 0

Une deuxième intégration par parties donne


Z +∞ Z +∞ Z +∞
−xt
 −xt +∞ −xt
e sin x dx = −e cos x x=0 − t e cos x dx = 1 − t e−xt cos x dx.
0 0 0

R +∞ R +∞ R +∞
On a donc 0 e−xt cos x dx = t − t2 0 e−xt cos x dx d’où 0 e−xt cos x dx = t
1+t2
.
Finalement ϕ0 (t) = − 1t + 1+t
t
2.

c) D’une part, on remarque que | 1−cos(x)


x
| ≤ 1 par l’inégalité des accroissements finis. Donc
−xt 1−cos(x)
|e x
| ≤ e pour tous t ≥ 1, x > 0, et e−x est intégrable sur R∗+ . On a de plus
−x

limt→+∞ e−xt 1−cos(x)


x
= 0 pour tout x > 0. Le théorème de continuité (de limite) sous le
signe intégral entraı̂ne que limt→+∞ ϕ(t) = 0.

5
D’autre part, si on intègre l’expression de ϕ0 (t) trouvée à la question précédente, on
obtient √
1 2 1 + t2
ϕ(t) = − ln t + ln(1 + t ) + C = ln( )+C
2 t
Il reste à déterminer la constante C. Pour cela, on fait tendre t vers +∞ dans l’expression
précédente : ϕ(t) −−−−→ C. Donc C = 0 et ∀t ∈ R∗+ , ϕ(t) = − ln t + 21 ln(1 + t2 ).
x→+∞

Exercice 9. Soit Γ la fonction définie sur R∗+ par


Z +∞
Γ(t) = xt−1 e−x dx.
0

a) Montrer que Γ est de classe C ∞ sur R∗+ .


b) Montrer que, pour tout n ∈ N∗ , Γ(n + 1) = n!.

Solution de l’exercice 9.
a) Remarquons tout d’abord que Γ est bien définie lorsque x > 0. Nous allons démontrer
que la fonction Γ est de classe C ∞ et que :
Z +∞
∀p ∈ N, ∀x > 0, (p)
Γ (t) = (ln x)p e−x xt−1 dx (∗).
0

On introduit la fonction γ(t, x) := xt−1 e−x = e(t−1) ln x e−x . A x > 0 fixé, elle est C ∞ en t
de dérivée p-ième :
∂ pγ
p
(t, x) = (ln x)p e(t−1) ln x e−x = (ln x)p xt−1 e−x
∂t
Comme dans l’exercice précédent, nous allons procéder en découpant l’intervalle d’intégration.
p
Lorsque t est dans un segment [a, b] ⊂]0, +∞[, ∂∂tpγ vérifie :
(
∂ pγ | ln x|p xa−1 si x ∈]0, 1],
p
(t, x) ≤ ϕ p (x), ϕ p (x) = p b−1 −x
∂t (ln x) x e si x > 1.

La fonction ϕp est intégrable sur ]0, +∞[ puisque lorsque x → 0+ , on a ϕp (x) = o(xa/2−1 )
(car | ln(x)|p = o(x−a/2 ) en 0) et ϕp (x) = O(e−x/2 ) lorsque x → +∞. Nous allons montrer
par récurrence que Γ est de classe C p sur [a, b] et que Γ(p) vérifie la relation (∗) sur cet
intervalle. Comme ceci sera vrai pour tout segment inclus dans ]0, +∞[, on aura prouvé
le résultat sur ]0, +∞[ tout entier.
Pour p = 0, il s’agit de montrer que Γ est continue sur [a, b]. La majoration |xt−1 e−x | ≤
ϕ0 (x) avec ϕ0 intégrable sur ]0, +∞[ assure que l’hypothèse de domination du théorème
de continuité sous le signe intégral est bien vérifiée. Comme t 7→ γ(t, x) est continue,
ceci assure la continuité de Γ sur [a, b].
Supposons maintenant l’hypothèse de récurrence vraie au rang p et montrons-la au rang
p
p + 1. La fonction (t, x) 7→ ∂∂tpγ (t, x) est bien continûment dérivable par rapport à t
p+1 p+1
et sa dérivée est égale à ∂∂tp+1γ . Grâce à la majoration | ∂∂tp+1γ (t, x)| ≤ ϕp+1 (x) lorsque
t ∈ [a, b], avec intégrable, on peut appliquer le théorème de dérivation sous le signe
intégral qui nous assure que Γ(p) est de classe C 1 sur [a, b] et que sa dérivée est égale à
R ∂ p+1 γ
R∗+ ∂tp+1
(t, x)dx. Ainsi, l’hypothèse de récurrence est vraie au rang p + 1. Ceci assure
bien que Γ est de classe C ∞ .

6
b) Nous allons commencer par montrer :

∀t > 0, Γ(t + 1) = tΓ(t).

On procède par intégration par parties.


Z +∞ Z +∞
t −x t −x +∞
Γ(t + 1) = x e dx = [−x e ]0 + txt−1 e−x dx = tΓ(t).
0 0
R +∞
La formule s’en déduit par récurrence sur n ∈ N, en utilisant Γ(1) = 0
e−t dt = 1.

Vous aimerez peut-être aussi