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Force-Bonté est un roman autobiographique d’un ancien combattant grand

admirateur de la France. Séduit par l’armée française, l’auteur s’est engagé, a fait la
guerre, a appris seul à lire et à écrire. Ce témoignage dithyrambique de la fascination
du monde blanc est à peu près unique dans la littérature africaine.

Texte
Demain, au jour, les habitants de ce pays verront passer les troupes de la
Grande France... Par leur admiration et leur sentiment raisonné, ils comprendront les
causes réelles de la mission française... Il est loyal de reconnaître à la France une
finesse particulière. Le pouvoir de la France, habituée à une conduite irréprochable et
qui vient ici remplir son devoir envers l’humanité, est assez grand pour abriter contre
tout mal tous les peuples d’Afrique. Elle a un cœur noble et un esprit arbitre... Le
visage français est tellement ouvert de franchise et de bonté que j’ai toujours senti
plaisir à l’aimer...
- Je ne suis pas du tout de cet avis, disait Yéro Bâ. Les Français sont trop orgueilleux
et se croient supérieurs à tout le monde.
- N’as-tu pas pensé aux misères que les Français ont rejetées loin de nous dès leur
arrivée dans notre pays? Ceux qui furent délivrés par ces braves gens ne diront pas
comme toi. Les villages toujours brûlés, les troupeaux enlevés sans merci à leurs
propriétaires, mille récoltes emportées par les guerriers qui massacraient tout ce qu’ils
avaient sous les yeux, les femmes séparées de leurs petits, les vieux privés du
bien-être et parfois mis à mort, n’auraient pas dit comme toi s’ils pouvaient parler...
Il me semblait voir des pillages, des vols, des guerres entre les hommes, entre
des hommes de même race, des chevaux montés poursuivant des troupeaux et, surtout,
des mères privées de leurs enfants et qui pleuraient, des esclaves attachés aux queues
des chevaux sur des vastes et longues routes, des enfants que la peur étranglait quand,
du côté où ils fixaient leurs beaux yeux noirs, ils voyaient, au lieu des personnes de
leurs mamans venant tendrement, des hommes férocement armés, pour le massacre
horrible... Devant tout cela, je ne pouvais m’empêcher de dire :
- Si nous comparons les faits anciens, avant l’arrivée des anciens chez nous, et ceux
qui vont de cette arrivée jusqu’aujourd’hui, nous n’aurons à l’égard des Français
qu’une juste reconnaissance. Estimons-nous heureux, pour nos parents, pour
nous-mêmes, d’être serviteurs de la France et de travailler sous sa direction à unir les
êtres humains dans l’univers... Aimons-la comme nous nous aimons nous-mêmes et
nous verrons son cœur, son âme, son esprit s’ouvrir pour nous instruire, avec sa
meilleure volonté.
Bakary Diallo, Force-Bonté, 1926.
1. Qui parle dans ce texte?
2. Comment considère-t-il la colonisation?
3. Quels sont les procédés lexicaux et stylistiques utilisés par l’auteur pour
célébrer la France.
4. Comment l’ordre précolonial est-il présenté par le narrateur? Justifie ta
réponse.

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