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processus de vision par ordinateur que nous avons implémenté qui permet d’extraire Les études axées sur l’utilisation des
des points correspondant aux fruits d’agrumes du nuage de points de l’arbre technologies géospatiales, UAV et TLS,
entier et de modéliser géométriquement en 3D les fruits individuels (4) estimation ont concerné deux types de cultures : les
arbres fruitiers et les grandes cultures.
du rendement de l’arbre et distribution statistique de la taille des fruits en liant
Les expériences entreprises [1]-[9]
statistiquement les propriétés géométriques obtenues du nuage de points au poids vont de l’extraction automatique de la
du fruit (5) estimation du rendement total du verger sur la base d'un modèle de couronne des arbres, à la surveillance
régression liant les caractéristiques géométriques dérivées du MNS du verger et de l’état de santé des plantes, l’estima-
du rendement estimé par arbre via TLS. Nous avons réalisé plusieurs missions pour tion de leurs paramètres physiologiques
collecter les données par drones et TLS dans des vergers d'agrumes de différentes (notamment la hauteur et le volume
des couronnes), jusqu’à l’estimation
variétés en testant plusieurs paramètres d'acquisition de données (hauteur de vol,
du rendement. Dans le cas des cultures
recouvrement des images, type de missions de vol). L'exactitude des résultats de annuelles, la majorité des études telles
l'estimation du rendement varie de 65 % à 94 %, principalement en fonction du que [1] et [2] s’intéressaient à l’estima-
stade phénologique auquel nous avons collecté les données. L'approche proposée tion du rendement par le biais d’une
démontre son fort potentiel d'estimation précoce de la production d'agrumes corrélation avec la hauteur de la plante.
et la possibilité de son extension à d'autres arbres fruitiers. Cette dernière est calculée à partir du
nuage de points issu du TLS ou dérivé
Introduction comme étant l’agriculture de précision
des images UAV. Dans l’étude [3], les
auteurs ont appliqué une approche
La population mondiale est en crois- (AP). La Chambre des représentants
de classification basée pixels sur des
sance, ce qui augmente la demande sur des États-Unis a présenté l’une des
images acquises par UAV pour détec-
les produits agricoles. Un fait qui met la premières définitions de AP comme
ter et compter automatiquement les
pression sur le secteur agricole conven- “un système agricole intégré basé sur
tomates dans une perspective d’estimer
tionnel et nécessite des méthodes de l’information qui vise à accroître l’effi-
le rendement.
gestion améliorées. Depuis les années cacité, la productivité et la rentabilité
1990, des méthodes basées sur les à long terme tout en minimisant les Concernant les recherches qui se sont
données pour améliorer les rendements impacts non intentionnels sur l’envi- axées sur l’étude des arbres fruitiers,
ont vu le jour et peuvent être résumées ronnement” [1]. elles se sont concentrées sur deux
q
Revue XYZ • N° 162 – 1er trimestre 2020 45
TÉLÉDÉTECTION
q niveaux de détail : l’arbre et le fruit. À Les résultats obtenus par les deux Matériel et logiciels
l’échelle de l’arbre, les études, comme approches sont prometteurs. La métho-
déployés
dans le cas [4] - [6], visaient à estimer dologie proposée par [8] a atteint une
des paramètres géométriques, entre exactitude de comptage de 91 % par Pendant la phase de collecte des
autres la hauteur de l’arbre, ainsi que le rapport aux données de comptage sur données, nous avons utilisé le TLS
volume et la superficie de la couronne, terrain. Pour celle proposée par [9], le Trimble TX6 qui fait partie de la famille
à l’aide des données TLS ou UAV. Pour comptage par l’approche automatique des LiDAR à temps de vol. Ce dernier
le cas de l’étude [7], les auteurs étaient et le comptage par la vision humaine se caractérise par un champ de vision
également intéressés par l’estimation sur les images d’entrée s’alignent à panoramique de 360° (dans le plan hori-
de ces paramètres physiologiques. 93 % près. zontal) x 317° (dans le plan vertical) et est
Mais en intégrant l’indice de végétation Suite à ce travail de benchmarking, équipé d’une caméra RVB panoramique
NDVI, ils ont trouvé des corrélations l’état de l’art d’utilisation des techno- ayant une résolution de 10 mégapixels.
avec le rendement des pommiers logies géospatiales, notamment le Son émetteur laser émet un faisceau
allant de 40 à 96 %. drone et le TLS, est présenté et ouvre dans le domaine du proche infrarouge
ainsi de nouvelles pistes de recherche (favorable pour balayer une scène
Les études [8] et [9] se sont intéressées agricole), et a une erreur de mesure de dis-
non encore abordées. Dans ce sens,
à développer des approches basées sur tance inférieure à 2 mm pour des dis-
notre travail de recherche propose une
le traitement numérique des images tances comprises entre 1.5 m et 100 m,
méthodologie basée à la fois sur les
pour l’extraction et le comptage auto- une portée de 60 cm à 80 m et une
données issues du drone et du TLS,
matiques des fruits d’agrumes. Au vitesse de balayage de 500 000 points
à l’échelle du fruit et de l’arbre dans
niveau de ces deux études, les métho- par seconde. Pour la manipulation des
un but d’estimer la production des
dologies proposées ont été testées nuages de points, nous avons utilisé le
agrumes.
sur des images RVB terrestres qui logiciel Trimble RealWorks.
sont au nombre de 83 images d’arbres Dans ce qui suit, nous exposons d’abord
Nous avons également fait usage de
au niveau de la première étude et la zone d’étude. Deuxièmement, les
deux types de drones : un drone à
de 84 images prises pour 21 arbres caractéristiques du matériel et des logi-
voilure fixe et un quadricoptère. Pour
d’agrumes (soient 4 images prises des ciels déployés sont exposées. Dans la
la catégorie à voilure fixe, nous avons
différents côtés pour chaque arbre) au quatrième section, la méthodologie
utilisé le drone eBee de Sensefly embar-
niveau de la deuxième étude. proposée avec une description détaillée
quant la caméra RVB (WX RGB). Cette
Les deux études reportent que les de ses différentes étapes est présentée.
dernière a une résolution de 18.2 méga-
conditions d’ensoleillement ont un Dans la dernière partie, les résultats
pixels équivalente à une empreinte
grand effet sur les images et par obtenus sont présentés et discutés.
au sol (GSD ou Ground Sampling
conséquent sur leur traitement. De
Distance) de 2 cm à 70 m de hauteur.
forts rayonnements solaires causent
Zone d’étude Concernant le quadricoptère Inspire1
une saturation de la couleur des fruits,
RAW de DJI, il a également été utilisé
alors qu’un faible ensoleillement crée
Notre étude a concerné deux sites avec une caméra RVB de type Zenmuse
des zones d’ombre. Pour réduire l’ef-
d’expérimentation. L’un est situé dans X5R ayant une résolution de 16 méga-
fet de l’ombre, les auteurs de l’étude
la préfecture de Témara (à 15 km de pixels permettant un GSD de 4 mm à
[8] ont converti les images RVB dans
Rabat) et l’autre à Marrakech. La loca- 10 m de hauteur, avec un degré de
l’espace L*a*b*, augmenté la lumi-
lisation des deux zones d’étude, SA1 liberté de +30° à -90° (dans le plan verti-
nosité de l’image avant de reconvertir
et SA2, est présentée sur la Figure 1. cal) et 320° (dans le plan horizontal).
l’image dans l’espace RVB. Pour [9], les
Au niveau de SA1, les données ont été Ce drone peut être contrôlé en mode
images ont été acquises dans un jour
recueillies sur des arbres de la variété manuel ou automatique. Le contrôle
partiellement nuageux afin de garan-
Citrus aurantium. Alors que dans SA2, manuel est effectué via l’application
tir la diffusion des rayons solaires et
la variété étudiée était Citrus sinensis. mobile DJI GO. En ce qui concerne le
réduire les effets des conditions d’en-
soleillement.
Figure 1. Zone d’étude
Après l’étape de réduction de l’ombre,
l’approche développée par [8] propose
une segmentation par l’algorithme
k-means. Pour [9], l’arrière-plan est
soustrait de l’image d’entrée. Ensuite,
l’image est convertie dans l’espace
HSV. Par la suite un seuillage est appli-
qué pour détecter la couleur orange.
Enfin, les bruits sont supprimés et la
segmentation et le comptage sont
réalisés.
b - Plateforme TLS
q Grâce à son champ de vision panora-
mique, le TLS permet d’acquérir des
nuages de points suffisamment denses.
Pour assurer que la scène soit systé-
matiquement balayée, une planification
préalable doit avoir lieu. C’est pourquoi,
avant de commencer le levé, nous effec-
tuons une reconnaissance sur le terrain,
afin de dresser un croquis des posi-
tions approximatives des stations de
balayage. À chaque station de balayage,
nous vérifions la visibilité des cibles
utilisées pour la consolidation entre les
différentes stations.
Pour assurer la qualité des images RVB
acquises par la caméra interne au TLS,
le sens de déplacement des stations de
numérisation est choisi en fonction de
la position du soleil et de l’orientation
de son déplacement pendant la jour-
Ensuite, ce nuage de points est densifié Figure 3. Processus de prétraitement
née. Lors de l’acquisition des données,
au stade de densification du nuage de des images UAV
nous avons effectué cinq missions de
points (Figure 4 (b)). À la dernière étape,
balayage par TLS. Les caractéristiques
le nuage de points densifié est trans-
de ces missions sont résumées sur le
formé en un format raster pour former
tableau 2.
un MNS (Figure 4 (c)).
Nombre de stations 9 – 52
Nous avons expérimenté deux logi-
Taille des données 3.7 – 21.6 Go ciels de traitement : Pix4DMapper et
Durée 7 min / station PrecisionMapper. Dans PrecisionMapper,
Résolution 11 mm @ 30 m la configuration est limitée à l’impor-
tation des images alors que dans
Tableau 2. Paramètres des missions
Pix4DMapper, le paramétrage est ouvert
de balayage par TLS
à l’utilisateur au cas où la qualité des
produits n’est pas satisfaisante suite à
c - Données de validation
l’utilisation des paramètres par défaut.
Les données de validation sont le
résultat de la récolte manuelle et de la b - Données TLS
pesée de la production des arbres. Pour Le prétraitement des données TLS
certains jeux de données, l’information comprend deux étapes : la décompres-
disponible était la production, tandis sion et la consolidation du nuage de
que pour d’autres, c'était le nombre de points. Le micrologiciel du TLS utilisé
fruits par arbre. (Trimble TX6) stocke les nuages de
points et les images RVB acquis sur le
Prétraitement des données
support de stockage (clé USB) dans un
a - Images UAV
format compressé. Avant toute mani-
L’objectif derrière cette étape est de
pulation du nuage de points, le logiciel
générer le MNS à partir des images
Trimble RealWorks le décompresse.
acquises par drone.
Sur ce même logiciel, l’opération de
Le processus de prétraitement peut être
consolidation entre les stations est
divisé en trois phases : (1) le traitement
automatisée via l’extraction auto-
initial, (2) la densification du nuage
matique des cibles. Cependant, une
de points et (3) la génération du MNS
validation manuelle des résultats de
(Figure 3). La phase de traitement initiale
consolidation reste à effectuer.
consiste à rétablir la position et l'orien-
tation de chaque image telle qu’elle Traitement des données Figure 4. Les produits intermédiaires
a été au moment de la prise de vues Le TLS fournit, en plus du nuage de des étapes de prétraitement des images UAV :
(Figure 4 (a)). A cette phase, un nuage de points, des images RVB et d’intensité. Le (a) traitement initial, (b) densification du
points de très faible densité est généré. but de cette étape est de rehausser ces nuage de points, and (c) génération du MNS
arrondie. Après avoir effectué plusieurs Afin de pouvoir texturer le nuage de Compte tenu de leur forme géomé-
q tests, nous avons fixé le rayon du disque points avec des couleurs RVB natu- trique, les agrumes peuvent être
à 3 true-pixels. Le produit résultant de relles, nous affectons au masque modélisés par des sphères. Pour mieux
cette opération d’érosion est un masque binaire résultant de l’opération de approximer la courbure des fruits, les
binaire de fruits (Figure 10). l’érosion une couleur orange en lui attri- paramètres géométriques (centre et
Pour filtrer le bruit résiduel après buant dans chacune des bandes rouge, rayon) de la sphère sont déterminés
l’opération d’érosion, deux critères mor- verte et bleue les valeurs correspondant selon un processus d’ajustement par
phologiques sont appliqués : la surface à l’orange. les moindres carrés des différences
et l’indice géométrique de solidité. entre la sphère et le nuage de points
En général, les bruits résiduels ont Estimation du rendement à modéliser.
de petites surfaces et un faible indice a - Estimation du rendement par arbre À partir de l’étape de la modélisation
de solidité. Ensuite, nous superpo- Extraction et modélisation du nuage 3D, deux propriétés géométriques
sons le masque binaire à l'image RVB. des fruits. Pour atteindre cet objectif, sont retenues : les coordonnées 3D du
L'objectif de cette opération est de nous avons conçu et implémenté une centre et le rayon de chaque sphère. La
texturer le nuage de points avec l’image chaîne de traitement telle que résumée propriété “rayon” est transformée en
RVB rehaussée. dans la Figure 11. “diamètre” et sert à filtrer les sphères
Figure 9. Image résultante suite à l’application du gradient Figure 10. Image résultante de l’application de l’opérateur
à une image d’intensité rehaussée d’érosion
Résultats et discussion
n Estimation du rendement
Estimation du rendement par arbre
La précision de l’estimation du rende-
ment à l’aide des données TLS varie de
65 % à 94 % (Tableau 3).
Dans le cas de l’arbre #3, la faible
Figure 14. Processus de calcul du volume des couronnes en utilisant le MNS dérivé
précision est principalement due à l’ina-
des images UAV.
déquation de la période au cours de
laquelle nous avons effectué la collecte Estimation du rendement à l’échelle du volume est élevé, plus la production
de données : pour le cas de la parcelle verger diminue).
où se trouvait cet arbre, les fruits ont été Afin d’estimer le rendement à l’échelle La faible précision du modèle est due
laissés exceptionnellement sur l’arbre du champ, nous avons établi un modèle principalement à : (1) le nombre d’ob-
jusqu’à ce que l’arbre ait entamé un de régression établissant un lien servations prises pour l’établissement
nouveau cycle phénologique. Nous entre les volumes estimés à partir du du modèle est faible, et (2) le volume
avons effectué la mission de collecte de DSM (Digital Surface Model) dérivés de l’arbre ne peut pas à lui seul expli-
données après le développement d’une d’images d’UAV et la production esti- quer le rendement de l'arbre, il est
nouvelle poussée de feuillage, ce qui mée à partir de données TLS. donc nécessaire d’intégrer d’autres
a fait que certains fruits sont partielle- Nous avons utilisé un ensemble de caractéristiques liées à la santé et l’envi-
ment ou totalement masqués. De plus, données consistant en un DSM d’une ronnement de l’arbre.
pendant cette période, les brises (les parcelle de 11 arbres. Parmi ces arbres, Les arbres utilisés dans le test ont des
vents alternants qui caractérisent le les rendements de certains ont été couronnes de gros volumes qui inter-
printemps) avaient un effet négatif sur estimés à partir des données TLS. Le fèrent parfois dans le cas des arbres
la qualité du nuage de points en raison modèle de régression établi a un coef- adjacents (Figure 14). Cette confi-
du mouvement des feuilles lors du ficient de détermination R² = 66% et est guration impacte négativement la
balayage laser. donné par l’équation suivante : production de ces arbres à cause de
La distribution des calibres des fruits Rendements (kg)=159.9e-(0.001xVolume_Couronne)(3) la mauvaise pénétration de l'air et du
par arbre peut être aussi générée Le modèle établi a une précision soleil. D'où la tendance décroissante du
(Figure 15). Par exemple, dans le cas de relativement faible et une tendance modèle établi.
l’arbre #1, le nombre de fruits ayant un décroissante (c’est-à-dire que plus le Afin d'assurer leur productivité à long
diamètre compris entre 70 et 76 mm est
de 36 fruits. Il est également possible de
générer une distribution de la produc-
tion par calibre de fruits.
Zone
Id Exactitude
d’étude
Arbre #1 94%
SA 1
Arbre #2 93%
Arbre #3 SA 2 65%
Figure 15. Comparaison de la distribution des calibres des fruits de l’arbre #1 estimée par
Tableau 3. Résultats d’estimation du ren- données TLS avec la distribution de référence générée à partir des données de cueillette
dement par arbre manuelle des fruits