Vous êtes sur la page 1sur 694

Les contrats internationaux : étude comparative

franco-thaïlandaise
Ratchaneekorn Larpvanichar

To cite this version:


Ratchaneekorn Larpvanichar. Les contrats internationaux : étude comparative franco-thaïlandaise.
Droit. Université du Droit et de la Santé - Lille II, 2012. Français. �NNT : 2012LIL20002�. �tel-
00856584�

HAL Id: tel-00856584


https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00856584
Submitted on 2 Sep 2013

HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est


archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents
entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non,
lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de
teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires
abroad, or from public or private research centers. publics ou privés.
Thèse délivrée par

L’Université Lille 2 – Droit et Santé

N° attribué par la bibliothèque


__|__|__|__|__|__|__|__|__|__|

THÈSE
Pour obtenir le grade de Docteur en droit

Discipline : Droit international privé

Présentée et soutenue publiquement le 30 mai 2012


par
Ratchaneekorn LARPVANICHAR

Les contrats internationaux : étude comparative franco-thaïlandaise

JURY

Directeur de thèse : Madame Annie BOTTIAU,


Maître de Conférences HDR à l’Université Lille II

Membres du jury : Monsieur Éric KERCKHOVE,


Professeur à l’Université Lille II

Madame Hélène CHANTELOUP,


Professeur à l’Université de Picardie Jules Verne

Madame Sara GODECHOT-PATRIS,


Professeur à l’Université François-Rabelais de Tours

Madame Johanna GUILLAUME


Professeur à l’Université du Havre

1
2
La faculté n’entend donner aucune approbation ni improbation aux
opinions émises dans cette thèse ; ces opinions doivent être considérées
comme propres à leur auteur.

3
A mes parents

4
REMERCIEMENTS

Je voudrais, tout d’abord, exprimer mes remerciements à Madame Annie Bottiau d’avoir
accepté de diriger mes recherches et de m’avoir laissé tant d’indépendance dans la conduction
de mes travaux.

J’adresse, par avance, mes vifs remerciements aux membres du jury qui ont bien voulu
accepter d’apprécier ma thèse.

J’aimerais aussi présenter mes sentiments de reconnaissance les plus profonds à mes chers
parents ainsi qu’à mon jeune frère qui, malgré la distance qui nous sépare, sont toujours à mes
côtés depuis mon arrivée en France. Leur soutien moral et financier durant ces longues années
de doctorat m’a beaucoup encouragé et, je suis fière de le dire, m’a offert la chance et
l’opportunité de poursuivre mes études jusqu’à ce jour.

J’adresse particulièrement mes profonds remerciements à M. Sengdeuane Rattanasamay


(Khoun Loung), ancien diplomate laotien et ancien fonctionnaire du Conseil de l’Europe, qui
a patiemment suivi mon travail et la rédaction de la thèse.

Je ne peux pas oublier « Khoun Pa » Madame Khamtanh Rattanasamay, Monsieur Thanadon


Phuthanasiri, Mademoiselle Thipchanok Satayabundit ainsi que Mademoiselle Kanitta
Termtrisana qui m’ont toujours encouragée et soutenue moralement durant mon séjour en
France.

Mes remerciements vont aussi au cabinet Vovan et Associés à Bangkok qui m’a donné
l’opportunité de travailler en tant qu’avocate dans son établissement. C’était une expérience
très enrichissante qui m’a permis de comprendre la vraie situation du milieu judiciaire de mon
pays dans le domaine de droit international privé.

Grand merci également à Dr. Masato Abe, qui m’a encouragée à finir ma thèse tout en
supervisant mon stage de six mois à la Commission économique et sociale pour l’Asie et le
Pacifique des Nations Unies (CESAP) à Bangkok. Cette institution qui n’a guère de lien avec
le milieu juridique m’a pourtant appris beaucoup de choses sur la vie et la méthode de travail
d’une organisation internationale.

5
Mes remerciements s’adressent également aux amis juristes ainsi qu’aux professeurs à
l’Académie de droit international de La Haye qui m’ont inspirée et fait connaître la vraie
ambiance internationale lors de mon séjour à La Haye.

Je remercie enfin mes professeurs de la Faculté de droit de l’Université Thammasat de


Bangkok qui m’ont encouragée et grâce auxquels j’ai décidé de poursuivre mes études de
Master II ainsi que de Doctorat en France.

J’adresse enfin mes remerciements à Madame Françoise Menu et Monsieur Serge Dauchy, le
Directeur de l’École doctorale qui m’ont aidé à la fin ainsi qu’à Madame Béatrice Depoorter
qui m’a soutenu moralement.

6
TABLE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS

A. JURIDICTIONS

CA Cour d’appel
Cass. Ass. Plén. Assemblée plénière de la Cour de cassation
Cass. Ch. mixte Cour de cassation, Chambre mixte
Cass. Civ. Cour de cassation, Chambre civile
Cass. Com. Cour de cassation, Chambre commerciale
Cass. Crim. Cour de cassation, Chambre criminelle
Cass. Req. Cour de cassation, Chambre des requêtes, supprimée en 1947
Cass. Soc. Cour de cassation, Chambre sociale
CEDH Cour européenne des Droits de l’Homme
Comm. EDH Commission européenne des Droits de l’Homme
CIJ Cour international de justice
CJCE Cour de justice des Communautés européennes
CJUE Cour de justice de l’Union européenne (après l’entrée en vigueur du
traité de Lisbonne le 1er décembre 2009).
TCPICI Tribunal central de la propriété intellectuelle et du commerce
international (Thaïlande)
TGI Tribunal de grande instance
Trib. confl. Tribunal des conflits

B. ORGANISMES D’EDITION, COLLECTIONS

BDI Bibliothèque de droit international


BDIP Bibliothèque de droit international privé
BDP Bibliothèque de droit privé
LGDJ Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence
NBT Nouvelle bibliothèque de thèse
PUAM Presses Universitaires de l’Université d’Aix-Marseille
PUF Presses Universitaires de France

7
C. PERIODIQUES

AFDI Annuaire français de droit international


AJCL American Journal of Comparative Law
AJDA Actualité juridique, droit administratif
AJ fam. Actualité juridique famille
AIDI Annuaire de l’Institut de droit international
Arch. Phil. Dr. Archives de philosophie du droit

Bull. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation


Bull. CCI Bulletin de la Cour internationale d’arbitrage de la Chambre de
commerce internationale.
BYBIL British Year Book of International Law

D. Recueil Dalloz (Dalloz-Sirey, depuis 1965) ; I.R. : informations


rapides ; Pan. : Panorama de jurisprudence ; D.C. : Dalloz Critique ;
D.H. : Dalloz Hebdomadaire ; D.P. : Dalloz Périodique
DMF Droit maritime français
DP Dalloz périodique (dans le Recueil Dalloz), a disparu depuis 1941.
DPCI Droit et pratique du commerce international
Dr. & patr. Droit et patrimoine
Dr. soc. Droit social

EJCL Electronic Journal of Comparative Law

GA Grands arrêts de la jurisprudence française de droit international privé


Gaz. Pal. Gazette du Palais

ICLQ International and Comparative Law Quarterly


ILQ International Law Quarterly (1948-1951 ; remplacé par ICLQ à partir
de 1952)
IDI Institut de droit international

J-Cl. Juris-Classeur
8
JCP Semaine juridique (Jurisclasseur périodique), édition générale
JCP, éd. E. Semaine juridique, édition entreprise
JDI Journal du droit international (Clunet), « Journal du droit international
privé » de 1847 à 1941 et Journal de Droit international depuis 1941.
JO Journal officiel de la République française
JOCE Journal officiel des Communautés européennes ; C : série
Communications ; L : série Législation

R. Rapport annuel de la Cour de cassation


RBDI Revue belge de droit international
RCADI Recueil des cours de l’Académie de droit international de La Haye
RCDI Voir RCDIP
RCDIP Revue critique de droit international privé, ses appellations successives,
à savoir :
- Revue de droit international privé et de droit pénal international
(1905-1921),
- Revue de droit international privé (1922-1933),
- Revue critique de droit international (1934-1946),
- Revue critique de droit international privé (depuis 1947).
RCJB Revue critique de jurisprudence belge
Rec. Recueil des arrêts de la Cour de justice (I) et du Tribunal de première
instance (II) des Communautés européennes
Rép. D. Dr. internat. Répertoire Dalloz de droit international
Rép. Defrénois Répertoire du notariat Defrénois
Rev. arb. Revue de l’arbitrage
Rev. dr. ULB Revue de droit de l’Université Libre de Bruxelles
Rev. dr. unif Revue de droit uniforme
RDAI Revue de droit des affaires internationales
RDC Revue des contrats
RDILC Revue de droit international et de législation comparée
RDIP Voir RCDIP
RDIPP Rivista di diritto internazionale privato e processuale
RFDA Revue française de droit administratif
RIDC Revue internationale de droit comparé
9
RJDA Revue de jurisprudence de droit des affaires
RLDA Revue Lamy Droit des Affaires
RLDC Revue Lamy Droit Civil
RRJ Revue de la recherche juridique, Droit prospectif
RTD civ. Revue trimestrielle de droit civil
RTD com. Revue trimestrielle de droit commercial et de droit économique

S. Recueil Sirey, Recueil général des lois et arrêts


somm. Sommaires commenté

TCFDIP Travaux du Comité français de droit international privé

D. ABREVIATIONS DIVERSES, LOCUTIONS

& et
§ paragraphe
aff. affaire (s)
AJ Actualité jurisprudentielle
al. alinéa
art. article
ASEAN Association des Nations du Sud-est Asiatique
Ass. plén. Assemblée plénière
B.E. Buddha Era (Ère Bouddha) : elle diffère de l’ère chrétienne de 543 ans
comptée à la mort du Bouddha. Pour transformer l’année chrétienne en
l’ère bouddhisme on ajoute 543 ; l’année 2012 est B.E. 2555.
c/ contre
CCC Code civil et commercial
CCI Chambre de commerce internationale
Cf. confer
ch. chambre
chron. chronique
CIRDI Centre international pour le règlement des différends relatifs aux
investissements
CNUDCI Commission des Nations Unies pour le droit commercial international
10
coll. collection
comp. comparer
concl. conclusions
contra. en sens contraire
CVIM Convention des Nations Unies du 11 avril 1980 sur la vente
internationale de marchandises
dir. direction
e.g. exempli gratia (par exemple)
éd. édition (s)
EGBGB Einführungsgesetz zum Bürgerlichen Gesetzbuch
esp. espèce
etc. et coetera
Fasc. Fascicule
ibid. ibidem (au même endroit)
in dans
infra voir plus loin
LDIP Loi de droit international privé (Suisse)
n. note
n° numéro(s)
NCPC Nouveau Code de la procédure civile
obs. observations
op. cit. opere citato (dans l’ouvrage cité)
p. page(s)
préc. précité(e)
Req. Arrêt de la chambre des requêtes de la Cour de cassation
RUU Règles et usances uniformes relatives au crédit documentaire
s. et suivant(e)(s)
spéc. spécialement
supra voir plus haut
t. tome
TCE Traité instituant la Communauté européenne
trad. traduction
UCC Uniform Commercial Code
UE Union européenne
11
UNIDROIT Institut international pour l’unification du droit privé
vol. volume

Les ouvrages suivants seront cités sous le seul nom de leur(s) auteur(s) :

-B. Ancel et Y. Lequette, Grands arrêts de la jurisprudence française de droit international


privé, 5e éd., Paris : Dalloz, 2006, 832 p.
-B. Audit, Droit international privé, 6e éd., Corpus, Paris : Economica, 2010, 1014 p.
-H. Batiffol et P. Lagarde, Droit international privé, Paris : LGDJ, t. I, 8e éd., 1993, 656 p., t.
II, 7e éd., 1983, 692 p.
-D. Bureau et H. Muir Watt, Droit international privé, Thémis, Paris : PUF, t. I, 2e éd., 2010,
694 p., t. II, 2e éd., 556 p.
-Ph. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman, Traité de l’arbitrage commercial international,
Paris : Litec, 1996, 1225 p.
-H. Fulchiron et C. Nourissat et E. Tréppoz, Travaux dirigés de Droit international privé,
4e éd., Paris : LexisNexis, 2009, 498 p.
-D. Holleaux, J. Foyer et G. Geouffre de La Pradelle, Droit international privé, Paris,
Masson, 1987.
- J.-M. Jacquet, Ph. Delebecque et S. Corneloup, Droit du commerce international, 2e éd.,
Précis, Paris : Dalloz, 2010, 928 p.
-Y. Loussouarn et P. Bourel, Droit international privé, 8e éd., Paris : Dalloz, 2004, 979 p.
-Y. Loussouarn, P. Bourel et P. de Vareilles-Sommières, Droit international privé, 9e éd.,
Paris : Dalloz, 2007, 1025 p.
-P. Mayer et V. Heuzé, Droit international privé, 10e éd., Paris : Montchrestien, 2010, 820 p.
-M.-L. Niboyet et G. de Geouffre de La Pradelle, Droit international privé, 3e éd., Paris :
LGDJ, 2011, 875 p.

12
SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE………………………………………………………..…15

PREMIERE PARTIE : LOI APPLICABLE AUX CONTRATS A CARACTERE


INTERNATIONAL……………………..……………….………………….……………..45
Titre I : Consécration de la loi choisie par les parties.………………………………….47
Chapitre I : Le choix de la loi étrangère……………….………………………….……..…51
Chapitre II : Le choix des normes non étatiques……….………………………….…….....117
Titre II : Loi applicable en l’absence de choix…………………….…………………...173
Chapitre unique………………………………...………..….…………………………….…155
Titre III : Limites au principe de l’autonomie de la volonté…………………………..217
Chapitre I : Les lois de police et l’exception d’ordre public : deux mécanismes dintincts....219
Chapitre II : L’exception de fraude……………………………………………………….269

DEUXIEME PARTIE : REGLEMENT DES DIFFERENDS………………………...319


Titre I : Les juridictions compétentes…………………………………………………...321
Chapitre I : Le mode étatique de règlement des différends………………………………323
Chapitre II : Le mode consensuel de règlement des différends……………………........393
Titre II : Les réceptions des décisions étrangères………………………….……..……465
Chapitre I : La réception des jugements étrangers…………………………………..……467
Chapitre II : La réception des sentences arbitrales internationales……………………....533

CONCLUSION GENERALE……………………………………………………………..595
BIBLIOGRAPHIE……………………………………………….…………………….…..601
TABLE DE LA JURISPRUDENCE…………………………….…………………..……645
TABLE DES FIGURES…………………………………………………………………671
INDEX ALPHABETIQUE……………………………………….…………………….….673
TABLE DES MATIERES………………………………………….……………………...679

13
14
INTRODUCTION GENERALE

1. Si l’on admet le caractère dynamique du droit, il est nécessaire de connaître le droit


dans son aspect « comparatif ». L’étude comparative de droit s’est développée depuis si
longtemps en Europe et l’on sait que les comparatistes en 1900 sont attachés au dogme du
positivisme qui ne voulait que « rechercher, découvrir ou constater des similitudes déjà
1
existantes entre les législations et des constantes juridiques entre les systèmes » .

2. Tandis que dès l’année 1925, l’idée de rechercher et de construire un « droit mondial
e
du XX siècle » l’emportait, fondée sur une conception nouvelle de la justice, le droit comparé
a pour but de dégager l’unité d’un droit sous-jacent derrière ses expressions nationales et
2
d’uniformiser les droits diverses de chaque pays . Le temps a évolué, le droit a changé. Force
est de constater que l’étude de droit comparé ne porte plus uniquement sur le but, les
fonctions et l’objet de l’étude comme au début de XXe siècle. Au commencement du nouveau
millénaire, la discipline du droit comparé ne peut plus rester sur son passé. Aux vues de
certains comparatistes, la diversité a été « considérée presque comme une maladie que la
3
comparaison nous aiderait à guérir » . Plutôt que de rechercher le ius commune et essayer
d’effacer la diversité, un auteur a estimé à juste titre que « la science comparative devrait être
pratiquée afin de l’étudier pour elle-même, de préserver le pluralisme juridique et de réfléchir
4
à la façon d’appréhender la diversité » . Disons que, à l’emprunt de M. R. Sacco, la
comparaison qui n’a pour but que d’uniformiser du droit et de supprimer la diversité est
considérée comme une maladie dont les comparatistes du nouveau siècle devraient guérir.
Dès lors, la rénovation est indispensable en supposant que la matière de droit comparé soit
élargie ; aussi bien sur la dimension horizontale que verticale. Pour la première dimension, il

1
M. Ancel, Utilité et méthodes du droit comparé, Élément d’introduction générale à l’étude comparative des
droits, Suisse : Neuchâtel, Ides et Calendes, 1971, p. 23.
2
Ibid. ; Cf. Predee Kasemsub, Philosophie du droit, Université de Thammasat, 6e éd., 2003, p. 58. On sait que
la fin du XIXe siècle était l’époque de la paix en Europe pendant laquelle de nombreux conférences en droit
international privé et public avaient lieu à La Haye. C’était alors la période de la naissance des organisations
internationales. Celles-ci ne pourraient se faire sans l’unification internationale des règles du droit et a fortiori,
sans l’égide de droit comparé.
3
R. Sacco, « Épilogue », in L’avenir du droit comparé, Un défi pour les juristes du nouveau millénaire, Paris :
Société de législation comparée, 2000, p. 346.
4
B. Fauvarque-Cosson, « Droit comparé et droit international privé : la confrontation de deux logiques à travers
l’exemple des droits fondamentaux », RIDC.2000.797, spéc., p. 816.

15
s’agit d’autres disciplines telles que droit public, droit pénal, droit administratif, etc. En ce
qui concerne la seconde, la comparaison ne peut plus se limiter aux ordres juridiques
5
nationaux mais doit intégrer toutes les sources de droit, quelles que soient leurs origines .
Le champ de comparaison s’élargit de plus en plus. Comme l’affirma M. R. Sacco, « le
comparatiste parcourt la frontière qui délimite le droit : sur cette frontière il rencontre non
seulement le philosophe, l’historien, l’anthropologiste mais également l’éthnologiste et le
6
génétiste » . Tout cela ne veut pas à dire que nous ignorons l’importance de l’unification de
droit. Nous admettons cependant que dans certains domaines le rôle du droit uniforme se voit
indispensable, comme en droit commercial international ou de l’arbitrage international.
L’unification des règles de droit aiderait la rédaction des parties contractantes de leur contrat
et à avoir la compréhension commune de l’économie du contrat. Pour cette raison on constate
toujours les efforts d’uniformiser aussi bien les règles de droit que les règles coutumières, ou
les règles a-national. Mais, il faut bien observer que le droit comparé n’est pas toujours
nécessaire à l’unification. Dans certains cas il s’agit de l’harmonisation du droit plutôt que
7
l’unification du droit ; à titre d’exemple, la réforme du Code civil et commercial thaï. Alors,
l’opinion selon laquelle l’harmonisation est plutôt une idée de rapprochement international
8
des droits que le droit comparé est plus admissible, elle se contente d’un socle de normes
9
communes, d’un haut niveau de généralité, fixant un cadre souple .

5
B. Fauvarque-Cosson, « L’enseignement du droit comparé », RIDC.2002.293, spéc., p. 302.
6
R. Sacco, « Épilogue », op.cit., p. 347 ; Cette pensée apparue également dans le travail d’un auteur thaï,
Professeur Predee Kasemsub, qui affirme fermement, lors de son étude da la pensée de Joseph Kohler, que seule
l’étude de science juridique n’est pas suffisante pour les juristes, il faudrait tenir compte d’autres disciplines qui
sont également indispensables pour compléter nos connaissances. Toutefois les juristes ne doivent jamais ignorer
la science juridique appropriée qui est l’objet de leur étude (Cf. Predee Kasemsub, Philosophie du droit, op.cit.,
p. 282 et s.).
7
Cf. A. Jeammaud, « Unification, uniformisation, harmonisation : de quoi s’agit-il ? », in Vers un code
européen de la concurrence : codification, unification et harmonisation du droit des États membres de l’UE,
Bruxelles : Bruylant, 1998, p. 43 : selon cet auteur l’harmonisation visée une équivalence des normes dans le
respect de la pluralité des ordres juridiques ; Cf. M. Delmas-Marty, « Les processus de mondialisation du droit »,
in Le droit saisi par la mondialisation, Bruxelles : Bruylant, 2001, p. 72 : d’après cet auteur « l’unification
suppose des règles précises auxquelles les États sont tenus de se conformer à l’identique, en application d’une
stricte hiérarchie des normes, alors que l’harmonisation implique un affaiblissement de la hiérarchie, imposant
seulement un rapprochement autour de principes communs, qui ménage une sorte de droit à la différence, chaque
Etat gardant une marge pour mettre en œuvre ces principes à condition que la proximité soit suffisante pour être
jugée compatible ».
8
Cf. X. Blanc-Jouvan, « Prologue », in L’avenir du droit comparé, Un défi pour les juristes du nouveau
millénaire, Paris : Société de législation comparée, 2000, p. 12 et s. : l’auteur a fait noter la différence entre le
rapprochement du droit et le droit comparé en soutenant que la comparaison peut aider au rapprochement mais
elle n’est que l’une des conditions. Selon cet auteur, « le rapprochement suppose autant une volonté politique
affirmée qu’une conjoncture favorable ». Par ailleurs il peut être réalisé par d’autres moyens telles que la

16
Ainsi, le législateur thaï a utilisé comme loi modèle la Convention de Vienne de 1980
sur la vente internationale de marchandises pour élaborer le nouveau texte de loi à la vente et
englober aussi la vente à caractère international. Tous ces efforts conduisent à réaliser
l’espace de libre-échange pour étendre le volume du commerce international et créer une
ambiance agréable autour de l’investissement. De surcroît, dans certains cas il n’était pas
possible ou il n’y avait pas lieu de tenter d’harmoniser de manière exhaustive les différentes
démarches – par exemple le cas de l’administration de la loi étrangère – à vrai dire une telle
harmonisation n’est même pas nécessaire. Mais on peut répondre aux besoins des États en
facilitant l’accès à la loi étrangère.

3. Parler de « droit comparé », a conduit à se demander si la dénomination est correcte


ou s’il semble plus juste de parler de « l’étude comparée de droit ». Si on admet que le droit
10
comparé peut être une méthode aussi bien qu’une science , il semble que ceci ne soit plus le
souci de nos jours. Comme le dit M. O. Moréteau, « la vocation du droit comparé n’est pas de
rechercher une telle définition, mais de proposer une méthode permettant d’étudier le droit de

contrainte économique ou la simple pression exercée par la pratique. Pourtant ce constat nous conduit à penser
qu’il est moins aisé de trouver à l’heure actuelle le droit comparé proprement dit, car, ce n’est pas si simple
d’éviter la révision de lois à cause de la contrainte économique. Il semble que la raison économique devient la
raison principale pour certains pays de réformer leurs législations, tel est le cas de la Thaïlande dans toutes
époques.
9
M. Delmas-Marty, « Réinventer le droit commun », D.1995.Chr.1.
10
Quant à la question de qualification de méthode ou de science Cf. B. T. Blagojevic, « Le droit comparé :
méthode ou science », RIDC.1953.649 : il paraît plus souvent comme la méthode qui sert dans l’étude de certains
domaines des sciences juridiques. L’auteur a admis que dans certains cas le droit comparé tient sa place en tant
que « science » parmi les sciences juridiques de même que d’autres disciplines. Mais ceci n’est qu’une exception
de règle générale (le droit comparé-méthode). En effet si l’on admet la classification de sciences juridiques
selon les aspects étudiés : sciences juridiques appropriées, sciences juridiques des faits, et sciences juridiques de
la valeur, le droit comparé a été classé dans les dernières sciences (Cf. Predee Kasemsub, op.cit., p. 39 et s.).
C'est-à-dire que la question d’« être » de la science ou de la méthode du droit comparé ne résulte pas de critères
objectifs ou de propriétés séparant entre les deux, mais des « préoccupations » de chacun (Cf. R. David, Les
grands systèmes de droit contemporain, Paris, 1978, 7e éd., n° 9). V. aussi l’étude critique sur ce point de L.-J.
Constantinesco, Traité de droit comparé, t. III, p. 22 : l’auteur a fait les efforts pour justifier que le droit comparé
n’est autre qu’une discipline autonome. Dès lors, la réponse des auteurs qui soutiennent que le droit comparé
peut être aussi bien la science que la méthode donne lieu à de nouveau problème, car il y a toujours la question
de déterminer quand il est une méthode et quand il est une science.

17
11
manière scientifique » . En Thaïlande, cette discipline est connue au titre du « droit
12
comparé » .
Force est de reconnaître que l’étude comparative nous permettrait d’étudier
l’interprétation et l’application du droit dans des cultures juridiques différentes.
La terminologie juridique révèle dissemblances dans les deux ordres juridiques ; parfois il
n’existe pas le vocable correspondant. Mais pour autant on ne peut dire que telle règle ou tel
principe n’existe pas. On peut trouver le terme plus proche susceptible d’être assimilé audit
vocable. Tandis que parfois on a trouvé la conception juridique cristallisée de la culture et la
pensée orientale, il en résulte que, à titre d’exemple, pour la notion de l’ordre public et les
bonnes mœurs du peuple, « bonnes mœurs » est le vocable important qui a presque toujours
suivi le mot « ordre public ».
Par ailleurs, l’étude de droit comparé ne peut pas ignorer le phénomène d’un plan
vertical dans la mesure où les droits des sources juridiques d’origine transnationale,
supranationale ou internationale intègrent dans les systèmes juridiques nationaux. C’est la
raison pour laquelle on ne pourrait écarter, de notre étude, les aspects de droit européen qui
est aussi la source de droit commun français. Un autre exemple que l’on peut citer est la lex
mercatoria, le droit non étatique, sur laquelle chaque ordre juridique admet différemment.

4. Quant à la méthode comparative, elle peut être déterminée comme « une opération
intellectuelle par laquelle on réunit deux (ou plusieurs) objets ou idées comparables, dans un
13
même acte, afin de dégager les dissemblances des ressemblances et leurs raisons d’être » .
La comparaison les droits de systèmes juridiques différents est admise, mais il convient de
dire que la France et la Thaïlande sont tous deux pays de droit civil. Dès lors l’étude
comparative est réalisable dans la mesure où la méthode juridique (Juristic method) de régler
le problème de droit et les sources du droit sont comparables. Nous tenons ici l’opportunité
d’utiliser une « méthode fonctionnelle », qui cherche à savoir comment un problème serait

11
O. Moréteau, « Le devenir du droit comparé en France », Conclusions générales, Journée d’études organisée
par Groupement de Droit Comparé, Institut de France, 2004. V. en ce sens R. Sacco, op.cit., p. 343 : « La
comparaison est une science. Son but consiste à mesurer et comprendre les différences qui existent entre les
divers droits et découvrir toutes les données qui concernent ces différences (leur valeur, les causes, les effets) ».
12
Le droit comparé apparu en Thaïlande pour la première fois à l’époque de codification. M. René Guyon, le
chef de commission de codification siamoise, avait utilisé la méthode du droit comparé pour rechercher les lois
modèles les plus adaptées au Siam. Cf. Chanchai Sawaengsak, L’influence française à la réforme du droit thaï,
Bangkok : Nititham, 1996.
13
G. Langrod, « Quelques réflexions méthodologiques sur la comparaison en science juridique »,
RIDC.1957.353, spéc., p. 362.

18
traité dans chaque ordre juridique plutôt qu’à établir des adéquations entre règles de droit
admises. On verra néanmoins que les objets similaires ont des raisons identiques, a priori ceci
devrait produire des effets semblables mais il est possible d’envisager le résultat différent
relevant de plusieurs raisons ; par exemple une erreur commise par les juges, à cause de
mauvaises compréhension et application de règles de conflit. Ceci est une dissemblance
artificielle, car, si les juges avaient bien compris leurs lois, ils ne feraient pas une telle faute
d’application. On verra aussi que le système juridique thaïlandais a besoin d’évoluer,
notamment de reformuler la compréhension du droit international privé des contrats. Là aussi,
on peut trouver le cas où le juge thaï a traité le litige à caractère international comme un litige
purement interne, alors que la doctrine et la jurisprudence française dans ce domaine sont
développées depuis des siècles. Dès lors, nous faisons les efforts de clarifier les issues qui
donnent lieu à une mauvaise compréhension envisagée à nos jours en étudiant la doctrine et la
jurisprudence françaises.

5. Admettons qu’il n’est pas facile de procéder une recherche de droit comparé pour ne
pas être empiété dans l’étude pure et simple du droit étranger sans comparaison réelle. Certes,
nous essayons de comparer ce qui est comparable, toutefois il est arrivé que certaines
questions ne soient pas en état de comparaison, car ce genre de problème ne se présente pas
14
encore devant les juges thaïs . Mais nous étudierons le cas français pour apprendre comment
les juges français règlent ce problème, ainsi que la réflexion doctrinale qui peut être utile pour
les juges thaïs dans l’avenir. Pour cette raison nous ne pouvons écarter la comparaison dans
certaines hypothèses avec le système juridique non codifié.
On sait que dans tous les États, la politique influence plus ou moins la rédaction de loi.
Certes, nous avons fait l’effort de détacher notre étude de la politique. Cependant admettons
que dans certains cas, afin de trouver la réponse, il semble indispensable de se pencher sur
l’aspect historique et politique afin de mieux expliquer telle ou telle circonstance. Par ailleurs
on ne peut nier que le changement législatif pourrait aussi être expliqué par des évènements
économiques, sociologiques et politiques.

14
Par exemple le problème de l’anti-suit injonction.

19
I.
Le porté général de la Thaïlande : aspects juridiques et économiques.

15
6. Le système juridique thaïlandais. La Thaïlande est un pays de droit civil , depuis le
règne de Roi Rama V qui a eu l’idée de réformer le système juridique et le système judiciaire
16 17
du pays . A cette époque, le Siam retenait le principe de personnalité des droits. Chaque
individu était soumis à la loi nationale. Cependant, le sérieux problème se pose lorsque cette
personnalité des droits était également étendue aux Siamois qui étaient sous contrôle des
étrangers. Ce qui avait causé beaucoup de difficultés pour les juges dans l’exercice de leurs
fonctions au point de se demander si le pays a perdu sa souveraineté judiciaire. Pour cette
raison, le Siam devait régler les problèmes d’extraterritorialité des lois entre certains citoyens
18 19
siamois et aux étrangers qui résidaient dans le Royaume d’une part ; et les problèmes
d’extraterritorialité judiciaire d’autre part. En effet les occidentaux trouvaient que la loi
siamoise ainsi que le système judiciaire n’étaient pas assez civilisés, c’est la raison pour
laquelle ils ont refusé de s’y soumettre. Ce phénomène a commencé dans l’Asie de l’Est tels
que la Chine, le Japon, suivi par l’Asie du Sud-est. C’est pourquoi le Japon avait eu la
réforme du système juridique et a rédigé le Code de droit avant le Siam. L’ancien Siam
s’appliquait, à l’époque, le droit coutumier comme d’autres États. Au départ, le roi n’était pas
celui qui élaborait les lois. En revanche on respectait ses décisions et lorsqu’on trouvait
qu’elles étaient conformes aux bonnes mœurs et à la justice, elles prenaient alors,
progressivement, force de loi. En effet le Siam a commencé à moderniser sa législation
depuis l’époque du Roi Rama IV. Cependant ce changement n’était pas assez rapide alors que
le pays avait de plus en plus activités commerciales avec l’occident. Face à leurs partenaires
occidentaux, les Siamois se trouvent très désavantagés et souffrent cruellement faute de lois

15
En effet lorsqu’on dit la Thaïlande est un pays de droit civil, on veut dire plutôt qu’elle est du système
codifié. On verra par la suite que le système juridique thaï est composé aussi bien des droits de la famille
romaniste que des droits du groupe anglo-saxon.
16
Le Roi Rama V a constaté que le seul moyen de faire face à une menace occidentale était la réformation du
pays en utilisant le modèle des pays occidentaux. Car des raisons principales soutenaient par les Etats
colonisateurs étaient pour développer et civiliser les territoires barbares. Cf. Sawaeng Boonchalermwipas,
Histoire du droit thaï, Bangkok : Winyuchon, 2009, 308 p.
17
Le Roi Rama VI a changé le nom du pays, le Siam, pour devenir la Thaïlande, le 24 juin 1939, au
commencement de la deuxième guerre mondiale.
18
Les chrétiens siamois étaient sous le contrôle des missionnaires.
19
En particulier des pays de grandes puissances : la France, le Royaume Uni, le Pays-Bas, le Portugal,
l’Espagne.

20
appropriées pour régler les différends et les litiges. Face aux pressions des pays occidentaux,
le Gouvernement royal thaï avait conclu les traités pour trouver une issue afin de permettre
aux étrangers d’appliquer leurs lois. Toutefois, pour abroger ces traités bilatéraux, la réforme
du système juridique était l’une des conditions proposées. Ce point était fortement
20
nécessaire . La réforme a commencé sérieusement en 1897. Afin de réaliser ce projet le Roi
Rama V avait invité des experts de droits de pays européens ; M. Rolin Jaquemyns,
M. Richard Kirke-Patrick, et M. Georges Padoux. La réforme continuait jusqu’à l’époque du
Roi Rama VI, la Thaïlande a fini sa rédaction du Code de procédure civile et du Code Pénal
en 1908. Cependant la Thaïlande a pu changer et éliminer l’extraterritorialité des lois dans son
dernier traité bilatéral à l’époque du Roi Rama VIII. En ce qui concerne le Code civil et
commercial, la Thaïlande a trouvé qu’il était convenable de consulter le Code civil allemand
ou/et japonais en tant que modèle (Le Code civil japonais étant ainsi inspiré par le Code civil
allemande), pour éviter des problèmes avec les pays occidentaux. Toutefois, afin de préserver
des bonnes relations avec la France, les législateurs thaïs ont encore gardé dans ce Code civil
certaines parties rédigées par les Français. La rédaction de Code civil et commercial
a commencé en 1908 et a été complété en 1935.

7. En ce qui concerne le système juridique, dans le cas extrêmement urgent comme tel,
on n’a pas pu attendre l’évolution spontanément de droit à travers la jurisprudence comme
le système Common Law. C’est la raison pour laquelle le Roi Rama V a décidé de choisir un
21
système codifié en tant que pilier du système juridique siamois . Pour répondre aux besoins
du pays, le Roi Rama V avait envoyé les juges et les fonctionnaires pour faire les études dans
les diverses disciplines de sciences juridiques dans plusieurs pays de l’Europe occidentale.
Ce moyen est presque considéré comme une transposition de droit, mais le législateur
a fait aussi une comparaison avant la rédaction des codes. Il semble que, à l’heure actuelle,
la méthode de transposition a toujours fait appel à l’élaboration de certaines lois, sans que

20
Cf. Predee Kasemsub, Philosophie du droit, op.cit., p. 49 et s.
21
Au début, le Siam a tenté de retenir le Code Napoléon comme modèle pour les premières rédactions en 1923.
Cependant les Livre Premier et Second ont été beaucoup critiqués en l’absence d’expérience des rédacteurs.
Le Code civil et commercial thaï a été donc élaboré en prenant comme modèle le Code civil japonais, inspiré du
Code civil allemand. Ainsi en 1925 la Thaïlande avait pour la première fois le Code civil et commercial et avait
six Livres complets en 1935. Ce n’était pas la vraie rédaction, en comparant avec l’élaboration du Code civil
allemand qui a abouti après 80 ans. Par ailleurs les rédacteurs n’ont pas dissocié le Code civil du Code de
commerce car, selon eux, le commerce à l’époque n’était pas très volumineux (V. Surapol Traiwait,
Les rédactions des Codes de droit au Siam, traduit de l’anglais The Work of codification in Siam de M. René
Guyon, p. 96-97).

21
l’étude véritable de droit comparé soit accomplie, le danger est évident. Ceci a causé
beaucoup de problèmes aux individus, car une telle ou telle loi ne répond pas aux besoins
locaux. Notamment lorsque les affaires des Thaïlandais sont impliquées par la globalisation,
la loi américaine a souvent été employée comme modèle. Par exemple, la Loi thaïe sur la
faillite et l’insolvabilité.

8. Le droit international privé thaï. Dans la vie économique internationale, les conflits
en matière contractuelle sont fréquents en raison de la globalisation du commerce. Chaque
pays dispose de ses propres lois et réglementations, probablement différentes d’un pays à un
autre. Pour cette raison le procédé du choix de la loi applicable aux contrats internationaux est
plus pratique pour les parties contractantes. On sait qu’à l’époque, les contrats étaient soumis
à une loi unique : la loi du lieu de conclusion de contrat, en vertu du principe locus regit
22
actum . En Thaïlande, le problème de conflit de lois serait régi par la Loi relative au conflit
23 24
de lois B.E. 2481 (1938) ’ . Cette loi est entrée en vigueur en 1938, trois ans après l’enté en
vigueur du Code civil et commercial. Depuis l’époque de la rédaction de Loi relative au
conflit de lois, le droit international privé admet la théorie subjective ; on tient compte de la
volonté des parties ; à défaut de ce critère, il faut tenir compte de la nationalité commune des
parties. Le lieu de conclusion de contrat est le dernier critère pour déterminer la loi applicable.
Même si cette loi s’applique en Thaïlande depuis longtemps, l’application et la
compréhension de cette loi ne sont toujours pas très connues ou survies comme il aurait dû en
raison de la complexité de la matière. De surcroît le débat sur le conflit de lois n’a intéressé

22
La célèbre règle dégagée par les postglossateurs, mais à partie du XVI e siècle cette règle a été restreinte aux
seules règles de forme.
23
En effet le législateur siamois, sous recommandation de M. René GUYON, a choisi de préparer cette loi en
forme de droit spécial - Act ou Loi - au lieu de codifier dans le Code civil et commercial. Pour des raisons
pratiques aux yeux du législateur à l’époque. En particulier il est facile de trouver toutes les dispositions
cherchées dans le même endroit, en revanche la codification de chaque partie dans le code ne pourrait pas donner
l’unité de droit international privé siamois. La Commission franco-siamois, en 1919, a approuvé finalement le
projet de loi sur le droit international privé, la rédaction a été complétée en 1938 afin qu’elle puisse terminer
dans la même période que celle du Code civil et commercial qui avait ainsi six tomes. Cf. Surapol Traiwait, Les
rédactions des Codes de droit au Siam, op.cit., p. 161-164.
24
En ce qui concerne le droit international privé thaï, la Loi relative au conflit de lois B.E. 2481 comprend 6
parties : disposition générale (après avoir élaboré toutes les cinq parties de la loi, les législateurs ont eu l’idée
d’élaborer une partie générale s’agissant de l’exception d’ordre public. Afin de savoir la limite d’application et
l’interprétation cette exception par le gouvernement siamois à l’époque. Ainsi que pour répondre à des questions
à quelle situation le droit thaï pourra être appliqué) ; état et capacité de personne ; obligations ; biens ; famille ; et
successions. Ceci est comparable au Code civil et commercial thaï car ce Code est également composé de 6
tomes identiques.

22
que les universitaires. Il est sans nul doute différent de certains pays dans lesquels le débat sur
ce sujet est très avancé tels qu’en France, en Allemagne ou au Royaume Uni.

9. Le système judiciaire thaï. De même qu’en France, le système judiciaire thaï est
fondé sur les trois hiérarchies de juridictions ; juridiction de première instance, juridiction
25
d’appel et juridiction suprême (la Cour Dika) . Les tribunaux de première instance sont de
deux types : les tribunaux généraux, compétents pour les litiges civils et pénaux et le Tribunal
de la famille et de la jeunesse d’une part ; d’autre part, les tribunaux spécialisés tels que le
Tribunal de la propriété intellectuelle et du commerce international, le Tribunal de la faillite,
le Tribunal du travail, et le Tribunal des impôts.
Cependant le gouvernement thaï a approuvé depuis 2005 les projets de révision le
Code civil et commercial afin de dissocier le droit commercial du Code civil. On verra que
plus souvent les dispositions du droit civil ont été appliquées aux litiges commerciaux. Sans
dispositions applicables aux litiges à caractère international, les juges doivent appliquer les
dispositions purement internes à ces litiges. Au lieu d’élaborer le Code de commerce, cinq
Lois seraient à rédiger : la Loi portant sur la révision du Code civil et commercial ; la Loi sur
la vente internationale de marchandises ; la Loi sur la lettre de crédit ; le trust receipt et la
standby letter of credit ; la Loi sur l’affacturage (factoring) ; et la Loi sur le produit dérivé
financier. Par ailleurs, le projet vise également à rétablir et réformer le Tribunal de propriété
intellectuelle et de commerce au lieu du Tribunal de propriété intellectuelle et de commerce
international.

10. L’étendue de l’économie de la Thaïlande. La Thaïlande occupe une position de


carrefour au coeur de l’Asie du Sud-Est avec une superficie de 514.000 km2. La monarchie a
su maintenir l’indépendance du pays, échappant à la domination coloniale européenne puis
aux conflits indochinois. Sur le plan économique, les Thaïlandais ont développé une
agriculture commerciale dynamique, armé une puissance flotte de pêche et imposé leur pays
comme une destination touristique majeure, sans pour autant négliger le volet industriel.
En 2006, les trois secteurs importants de l’économie du pays (l’agriculture,
l’exportation et le tourisme) ont apporté d’importants revenus à la Thaïlande. Certes,
l’industrie exportatrice est la locomotive économique du pays ; la Thaïlande est

25
L’histoire de la Cour suprême Dika, l’étude détaillée de sa fonction et l’organisation de la Cour judiciaire
sont disponibles en anglais sur le site http://www.supremecourt.or.th/file/dika_eng.pdf

23
particulièrement compétitive dans l’industrie agroalimentaire, le tourisme et certaines
activités électroniques. Elle attire également de nombreuses multinationales qui se servent de
leur filiale thaïlandaise comme base d’exportation régionale voire mondiale. Cependant, la
forte appréciation de la monnaie locale devait peser sur la croissance économique de 2007. La
26
valeur d’exportation en 2008 ne sera pas aussi forte qu’en 2007 , en raison du ralentissement
27
de l’économie mondiale et l’augmentation du prix de pétrole du marché mondial (la
Thaïlande est un pays importateur de pétrole). Comme on le sait, l’augmentation de prix du
pétrole affecte directement le prix de marchandises et le volume d’exportation. Malgré les
soubresauts économiques et politiques, les indicateurs macroéconomiques du pays résistent.
En 2008, les exportations du pays ont modéré à cause de crise économique aux États-Unis et
28
en Europe , alors qu’en 2009 le problème politique interne a affecté l’économie du pays.
Pourtant en 2010 et au premier trimestriel de 2011, l’économie du pays a été réactivée et les
informations du Ministère du Commerce ont indiqué que le volume du commerce
international a augmenté dans le marché mondial et se réserve un avenir très prometteur.

II.
Les éléments du contrat international.

11. La notion du « contrat international ». Les définitions données en droits nationaux


sont souvent proches. Le contrat (contraho) désigne l’accord de volontés qui crée les
obligations. En droit français, le contrat est « une convention par laquelle une ou plusieurs
personnes s’obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire
29
quelque chose » . Le dictionnaire Cornu a défini le contrat ainsi : « espèce de convention

26
La valeur de 161,169 millions de dollars US (10,37%), la statistique d’expansion de l’exportation du marché
principal ; les États-Unis, l’Union Européenne et le Japon avait ralenti 4,79%.
27
Selon le rapport de FMI, en 2008 l’économie mondiale augmenterait 4,8% (contre 5,2% en 2007).
28
La crise économique en 1997 et 2008. En 1997, la Thaïlande a du faire face à une crise
économique majeure à cause de la politique de Libéralisation financière qui permettait la libre circulation
monétaire. En revanche la Banque Nationale utilise le système monétaire « fixed » dans lequel le dollar
américain joue un très grand rôle. D’ailleurs des sociétés contractaient beaucoup de prêt à bas intérêts de
l’étranger (la dette devrait être payée dans la période relativement courte), en particulier il n’y avait aucune
protection de risque d’échange monétaire. Le gouvernement thaïlandais à l’époque soutenait les banques en
difficulté puisqu’il suivait la politique selon laquelle « un établissement bancaire ne doit pas être en faillite,
sachant que cette idée n’était pas « convenable » pour le système bancaire du pays. C’est pourquoi l’économie
thaïe était de plus en plus en difficulté. V. aussi Orawan Ratanapakorn, « La structure monétaire thaïe en
macro », in, La conférence académique annuelle 2005, p.3-22 et 3-23.
29
L’article 1101 du Code civil français.

24
30
ayant pour objet de créer une obligation ou de transférer la propriété » . En droit italien, un
contrat est né dès lors que deux ou plusieurs personnes ont conclu un accord afin de
constituer, d’organiser ou de cesser entre elles un rapport juridique de nature patrimoiniale
31
(art. 1321 C. Civ.) . En droit allemand, le contrat est classé dans la catégorie des actes
32
juridiques (Rechtsgeschäft) et il se forme par l’acceptation de l’offre (art. 151 BGB) . En
droit espagnol, le contrat se forme lorsqu’une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou
33
plusieurs autres à donner ou à faire quelque chose (art. 1254 C. Civ.) . En droit anglais, le
contrat est défini comme un accord de volontés qui donne lieu à des obligations juridiquement
34
sanctionnées . Alors qu’aux États-Unis, le Restatement on Contracts a défini le contrat
comme une promesse pour la violation dont le droit accorde une réparation, ou dont
35
l’exécution est reconnue comme une obligation juridique . Force est de constater que la
définition générale du contrat comme « une obligation, à faire ou ne pas faire, qui est
juridiquement sanctionnée » est admissible dans tous les systèmes juridiques.
Cependant les différences entre les droits romano-germaniques et les droits de
Common Law sont apparemment claires : les premiers reconnaissent les contrats unilatéraux
et à titre gratuit tels que le prêt à titre gratuit et la donation ; alors que pour le Common Law,
le contrat se forme sous un marché et une contrepartie, et qu’il n’y a pas contrat sans
contrepartie : there is no contract without consideration. C’est la raison pour laquelle le
système de Common Law ne connait que les contrats ayant créé des obligations réciproques et
à titre onéreux. Dès lors, le contrat serait complété par un élément d’échange économique qui
36
clarifie et conforte la promesse . Il est vrai que le contrat unilatéral est reconnu dans le
système Common Law, mais ceci n’est pas qu’une simple promesse d’exécution car il s’est

30
G. Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, Paris : PUF, 3e éd., 2002. V. Contrat
31
« Il contratto è l’accordo di due o più parti per costituire, regolare o estinguere tra loro un rapporto
giuridico patrimoniale ».
32
« Der Vertrag kommt durch die Annahme des Antrags zustande ».
33
« El contrato existe desde que una o varias personas consienten en obligarse, respecto de otra u otras, a dar
alguna cosa o prestar algún servicio ».
34
The contract is an agreement giving rise to obligations which are enforced or recognized by law (Treitel, The
Law of Contract, London 1983, p.30, cité par S. Chatillon). Cf. S. Chatillon, Droit des affaires internationales,
4e éd., Paris : Vuibert, 2005, p.169 et s.
35
American Law Institute, Restatement on Contracts. « A contract is a promise for the breach of which the law
gives a remedy, or the performance of which the law in some way recognizes a duty ».
36
J. Schmidt, « Les lettres d’intention », RDAI.2002.259.

25
défini comme un accord duquel une personne souscrit un engagement en contrepartie de
l’exécution effective de quelque chose.
Le Code civil et commercial thaï ne définit pas expressément la notion de contrat.
Cependant lorsque l’on prend en considération dans les ouvrages gouvernant cette matière la
définition d’un acte juridique, on peut dire que « le contrat est un acte juridique qui se forme
par une acceptation d’un offre entre deux ou plusieurs parties, afin d’établir, de changer ou de
37
cesser leurs relations juridiques » . Le droit thaï exige une formalité différente selon chaque
contrat. A titre d’exemple, une promesse de vente devra avoir une preuve écrite ; pour le
contrat de prêt, il faudra avoir le transfert d’objet du contrat. Certes, les autres actes juridiques
concernant le statut personnel ; le mariage, les fiançailles, l’adoption, ou même le patrimoine
familial peuvent être aussi classés dans le régime du contrat. Cependant nous limitons notre
étude uniquement aux contrats commerciaux internationaux.
En ce qui concerne la proposition et de l’acceptation, le droit français n’a jamais
adhéré à la notion de déclaration de volonté. Il demeure imprégné de primer la volonté réelle
sur la volonté exprimée. On peut trouver cette conception lors de l’interprétation, car le Code
civil contient des règles d’interprétation du contrat, mais non des règles d’interprétation des
38
déclarations de volonté . Le droit thaï du contrat accepte les deux concepts, à savoir la
théorie de volonté réelle et la théorie d’expression de volonté. La loi admet la primauté de
volonté exprimée sur la volonté réelle, sauf dans l’hypothèse où le cocontractant savait cette
volonté réelle, auquel cas c’est la volonté réelle qui l’emporte.

12. Le caractère d’extranéité préalable. Admettons que le contrat international est un


contrat qui présente des rapports avec le droit de plusieurs États ou même le droit
international ou transnational. Nous envisageons à ce stade la qualification du contrat
international. Il convient de rechercher l’élément d’extranéité du contrat afin de savoir si un
tel ou tel contrat peut être considéré comme étranger à l’égard de l’ordre juridique du juge du
for. Deux critères peuvent être considérés : le critère géographique d’une part et le critère
économique d’autre part. Le critère géographique fut soutenu par M. Matter l’avocat général
39
dans l’affaire Pélissier Du Besset ; selon lui, le contrat est international dés lors qu’il est

37
S. Sottiphun, Actes juridiques et contrats, 11e éd., Bangkok : Winyuchon, 2006, p.233.
38
P. Rémy-Corlay, « L’existence de consentement », in, Les concepts contractuels français à l’heure des
Principes du droit européen des contrats, Dalloz, 2003, p. 28 et s.
39
Cass.1er civ., 17 mai 1927, Pélissier Du Besset , D.1928.25, concl. Matter, note H. Capitant.

26
susceptible d’entraîner un phénomène de flux et reflux de marchandises et de capitaux par
delà des frontières. Selon le critère économique, le contrat doit mettre en cause des intérêts du
40
commerce international . En effet d’autres éléments pourraient être ainsi pris en compte : la
nationalité des parties, le domicile, la résidence habituelle ou le siège social de la personne
morale, par ailleurs le lieu de conclusion ou d’exécution d’une obligation contractuelle, le lieu
de situation de l’objet du contrat peuvent être également pris en compte.
En droit international privé thaï, l’extranéité de contrat doit être considérée en vérifiant
le point de rattachement avec au moins deux pays. Quant aux critères de qualification d’une
41
situation internationale, la doctrine thaïe admet ainsi : la différence de nationalité des parties
contractantes, le lieu de conclusion du contrat à l’étranger, le lieu d’exécution du contrat à
l’étranger, l’objet du contrat se situe à l’étranger, et le domicile ou la résidence habituelle des
parties contractantes.

13. Une question peut se poser, à savoir si la seule désignation d’un tribunal étranger dans
un contrat lui confère l’internationalité ? Les opinions sont diverses sur ce point, le rapport
Schlosser s’était prononcé nettement ainsi que l’avis de MM. P. Gothot et D. Holleaux, ces
auteurs ont admis que le rapport juridique en cause doit être en lui-même international (pour
42
que les dispositions sur la clause attributive de juridiction soit applicable) . A titre
43
d’exemple, l’arrêt Cie de signaux et d’entreprises électriques de la Cour de cassation nous a
affirmé dans le même sens : « les clauses prorogeant la compétence internationale sont en
principe licites, lorsqu’il s’agit d’un litige international... ». Alors, le litige se voit
international lorsque le rapport juridique qui lui est sous-jacent présente ce caractère. Le seul
fait de choisir le tribunal d’un pays autre que celui où se concentrent tous les éléments de la
relation litigieuse ne saurait satisfaire à cette exigence. Mais le contrat en l’occurrence a été
conclu entre deux sociétés françaises devant s’exécuter en Libye, il s’agit d’un contrat à
caractère international en raison d’avoir le lieu d’exécution de contrat à l’étranger.

40
G. Cornu, op.cit., p. 484.
41
Cf. P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, Droit international privé, Bangkok : Winyuchon, 2003, p. 24-34 ; Cf.
S. Sottiphun, Actes juridiques et contrats, 11e éd., Bangkok : Winyuchon, 2006, p.455-456.
42
V. rapport n° 167. Sauf l’exception posée par l’article 48 CPC, qui n’exige pas une situation internationale
mais il faut que cette clause ait été conclu entre les commerçants. Contra. G. Droz, rapport préc. : cet auteur a
affirmé que la désignation d’un tribunal étranger confère à la clause attributive de juridiction un caractère
international, quand bien même le rapport juridique en cause serait purement interne.
43
Cass.1er civ., 17 décembre 1985, Cie de signaux et d’entreprises électriques, RCDIP.1986.537., note H.
Gaudemet-Tallon ; D.1986.265, obs. B. Audit ; GA, n°72.

27
A priori, l’internationalité peut résulter de divers facteurs : lieu d’exécution de contrat,
domiciles des parties dans différents États, mais il ne faut pas confondre avec le principe
44
admis en droit communautaire , car ceci admet que la seule différence de nationalité entre
des contractants domiciliés dans un même État ne suffit pas à rendre la situation
internationale. Il s’agit en effet de caractère d’extranéité artificiel. Les textes communautaires
ne tiennent compte que du domicile ou de la résidence habituelle des parties, non la
nationalité.

14. La qualification « international » d’un rapport juridique conduit à le soumettre à une


ou plusieurs lois. De surcroît, la présence de l’extranéité peut autoriser ou imposer le juge du
for d’appliquer la règle de conflit de lois et enfin elle peut conduire à l’application d’une loi
étrangère. En tant que branche du droit international privé, le droit du commerce international
part du même principe dans la mesure où il n’échappe pas aux droits étatiques en raison ses
liens avec le droit international privé. De ce point de vue, l’analyse de la notion du contrat
international pourrait renvoyer à la question générale en droit international privé puisque la
notion de contrat international ne demeure pas en soi, elle doit être toujours analysée sous
l’empire de droit international privé et souvent sous le même critère. Dans la pratique du
commerce international, le contrat international est toujours analysé objectivement comme
tel ; la qualification du contrat international ne se pose que dans des cas limites, l’affaire
45
Tardieu est un bon exemple.

15. Par ailleurs, le contrat international peut être articulé avec la source du droit
commercial international. Il est possible de qualifier le contrat de source du droit du
commerce international. D’après M. J.-M. Jacquet, les contrats peuvent être reconnus en tant
qu’instruments normatifs du droit commercial international, car le contrat est un procédé de

44
Règlement de CE n° 44/2001 et Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 qui s’appliquent en matière
civile et commerciale.
45
Cass.1er civ., 7 octobre 1980, Tardieu, RCDIP.1981.313, note Mestre. En l’espèce, il s’agit d’un contrat
conclu entre les contractants français domiciliés en France, la loi qui régit à ce contrat est la loi française.
Pourtant la partie a invoqué que ce contrat avait caractère international en appuyant sur le fait que l’un des
cocontractants était appelé à s’expatrier. La Cour de cassation a affirmé la décision de juridiction d’appel qui a
décidé que ce contrat ne présente pas le caractère d’extranéité, par conséquent il ne s’agit pas d’un contrat
international.

28
46
création des normes individuelles . Cet argument est fondé sur le constat selon lequel les
normes individuelles créées par la relation contractuelle internationale se trouvent bien
établies quand bien même l’ordre juridique étant apprécié leur validité n’est pas encore défini.
Force est de reconnaître la pertinence de ce constat, car, même si les parties n’ont pas choisi la
loi applicable au contrat, ceci n’affecte pas sa validité, on pourrait toujours déterminer la loi
applicable à ce rapport contractuel. Par ailleurs, selon la théorie de Kelsen à travers sa
pyramide de normes, le contrat est considéré à sa juste place comme une source du droit à part
47
entière. Il s’agit de créer des normes juridiques par un accord de volontés .

III
Consécration du principe de l’autonomie de la volonté.

16. L’autonomie de la volonté implique la liberté contractuelle. L’autonomie de la


volonté est le premier élément qu’on devrait en parler, en premier lieu, en tant qu’élément
fondamental pour une étude des actes juridiques, y compris un contrat. « L’autonomie de la
volonté » demeure un pouvoir de chaque individu de prendre en considération la limite de son
acte juridique tant en matière civile qu’en matière commerciale. Lorsqu’une personne exerce
ses droits sous le principe d’autonomie de la volonté, la loi (au sens large) affirmera un acte
de cette personne pour qu’un tel acte produise des effets. M. Gounot a affirmé ainsi « dans
l’acte juridique, la volonté est le seul élément essentiel de sa formation, et aussi la base unique
48
de son interprétation » . Il faut en déduire que la volonté apparaît comme la source et la
mesure de l’obligation. D’ailleurs le principe de l’autonomie de la volonté est impliqué dans
49
la liberté contractuelle, car celle-ci doit être basée sur l’autonomie de la volonté . « La
liberté contractuelle » est un principe qui affirme la liberté d’un individu de choisir son
cocontractant et de déterminer l’économie du contrat. L’intervention d’une autorité étatique à
l’égard des individus demeure en principe exceptionnelle.

46
J.-M. Jacquet, Droit du commerce international, 2e éd., Paris : Dalloz, 2010, p. 17 et s ; Cf. J. Ghestin, « Les
données positives du droit », RTD civ.2002.11, spéc. p. 17 et s.
47
J. Ghestin, « Les données positives du droit », loc.cit.
48
E. Gounot, Le principe de l’autonomie de la volonté en droit international privé : Contribution à l’étude
critique de l’individualisme juridique, Thèse Dijon, Rousseau, 1912, p.136.
49
S. Sottiphun, Actes juridiques et contrats, op.cit., p. 235.

29
Cependant l’autonomie de la volonté et la liberté contractuelle gardent leurs
différences. D’une part la liberté contractuelle interviendra lorsqu’il y a au moins deux parties
alors que l’autonomie de la volonté peut jouer son rôle même dans un acte juridique
unilatéral. D’autre part, la liberté contractuelle ne touchera qu’une gestion de biens des parties
contractantes (droit réel) alors que l’autonomie de la volonté peut l’être aussi en matière de
50
statut personnel (droit personnel). Le principe de l’autonomie de la volonté peut signifier
aussi la loi d’autonomie. Le droit français avait consacré ce principe, il s’agit de la faculté des
parties de désigner la loi applicable au contrat. A défaut de choix, c’est le rôle de
51
jurisprudence qui se prononçait en général en fonction de la localisation du contrat . En droit
thaï, la liberté de choix de la loi applicable au contrat a été affirmée par la jurisprudence
uniquement en matière du commerce international. Car le droit thaï ne dispose pas le texte
comme l’article 48 du CPC français.
La notion de liberté contractuelle peut être considérée en deux sens : liberté de
conclure le contrat d’une part et liberté de ne pas être intervenu une fois que le contrat était
52
conclu d’autre part . En droit thaï, la liberté de conclure le contrat s’entend comme la liberté
d’établir un contrat, c’est la liberté dans le sens positif. En revanche il existe aussi celle dans
53
le sens négatif ; c’est la liberté de cesser avant que le contrat soit conclu . Une fois que le
contrat est conclu, les parties contractantes ont la liberté de ne pas être intervenues par l’État
54
selon la théorie d’individualisme . Car l’État, à travers ses lois, a déjà affirmé la liberté
contractuelle avant que ce contrat soit conclu. Pour cette raison l’État ne doit pas intervenir
dans les termes du contrat que les contractantes ont conclu ; c’est ce qu’on appelle la force
obligatoire de contrat.

17. Caractère concret de la liberté contractuelle. On constate que le caractère concret


de la liberté contractuelle se présente en premier lieu en droit interne. Le droit français admet
le principe d’autonomie et la liberté contractuelle depuis le Code civil 1804 notamment par

50
Id., p. 241-242.
51
B. Audit, Droit international privé, 4e éd., Paris : Economica, 2006, p. 655.
52
Wilson N.S., Freedom of Contract and Adhesion Contracts, The International and Comparative Law
Quaterly, vol. 14, 1965, p.172 et s.
53
Il s’agit du principe de Culpa in contrahendo.
54
D. Thirawat, Droit de contrats : l’actualité du nouveau statut de contrat et le problème de la Unfair Contract
Terms, 2e éd., 1999, Bangkok : Université de Thammasat, p. 15-16.

30
l’article 1134 ; il permet à ceux qui contractent de régler à leur gré leurs relations juridiques,
de disposer de leur patrimoine et de créer des obligations. Pourvu qu’il y ait certaines limites ;
de la capacité qui leur est reconnue selon l’article 1123 ; et de l’ordre public selon les articles
6 et 1133.
En droit thaï, le principe de liberté contractuelle a été affirmé par l’article 151 du Code
civil et commercial thaï qui stipule que :
« Un acte quelconque qui est différent de dispositions de la loi, lorsqu’il ne s’agit pas
de loi ayant pour but de protéger ou de sauvegarder l’ordre public ou la bonne mœurs, cet
55
acte n’est pas nul » .

Selon cet article on peut constater trois points. Premièrement, la liberté contractuelle et
les éléments du contrat, c'est-à-dire que les parties sont libres de conclure un contrat avec qui
elles le souhaitent, de choisir l’objectif de contrat, de choisir un moyen ou une forme de
contrat (sous réserve des exigences de forme demandées par la loi), et de décider de conclure
ou non d’un contrat. Deuxièmement, le principe de liberté contractuelle relevant de la teneur
des obligations. C'est-à-dire que les parties sont libres de fixer des clauses et le contenu qui
assureront la réalisation de l’objet économique du contrat, bien qu’ils diffèrent de ceux
stipulés par la loi, pourvu que le contenu de contrat ne s’oppose pas aux bonnes mœurs et à
l’ordre public. Troisièmement, les parties contractantes sont libres de prévenir les effets de
contrat et la loi devrait affirmer ces effets sous le principe de pacta sunt servanda. Le
consentement est un élément essentiel ; le contrat conclu par fraude ou sans consentement
sera l’objet de nullité ou de résiliation.

18. Affirmation du principe en droit international privé. Le principe de la liberté


contractuelle vaut tant en droit interne qu’en droit international. On peut dire que la liberté
contractuelle en droit international privé n’est qu’une conséquence de la liberté contractuelle
consacrée par le législateur pour le droit interne. Par ailleurs, la volonté peut être créatrice de
droit et source du droit dans certaines conditions ; cela peut expliquer bien la force obligatoire
du contrat. La place du principe de liberté contractuelle est au cœur des contrats
internationaux, plus qu’à l’égard des contrats purement internes. Depuis XIXe siècle, les
internationalistes ont recherché une justification à exercer en droit international privé de
l’autonomie qui permet aux contractants de choisir la loi applicable au contrat. Les termes

55
มาตรา ๑๕๑ แห่ ง ประมวลกฎหมายแพ่งและพาณิ ชย์ บัญญัติว่า “ การใดเป็ นการแตกต่างกับบทบัญญัติของกฎหมาย ถ้ามิใช่กฎหมายอันเกี่ ยวกับ
ความสงบเรี ยบร้อยหรื อศีลธรรมอันดีของประชาชน การนั้นไม่เป็ นโมฆะ ”

31
d’autonomie des parties et d’autonomie de la volonté ne sont pas synonymes en droit
international privé, ils le sont en revanche lorsque l’on emploie ces termes en droit interne.
Au regard des internationalistes, certains leur attribuent un sens étroit en raison de
56
l’absorbation en droit international le concept utilisé en droit interne . Pour ces
internationalistes, l’autonomie de la volonté n’est qu’une notion purement technique… Pour
d’autres, la formulation établie par les civilistes semble plus favorable. C'est-à-dire que
l’autonomie de la volonté est définie comme le pouvoir de la volonté d’être la source et la
57
mesure des droits subjectifs, d’être un organe créateur de droit . Comme l’écrit Brocher
depuis 1883 que « l’autonomie émane de la loi (…) celle-ci doit l’accorder aussi grande que
possible ; mais ne la tient pas moins, en principe, en sa puissance : c’est elle qui fixe les
58
limites dans lesquelles la liberté concédée peut déployer » .

19. Le principe d’autonomie : la solution des conflits de lois en matière contractuelle.


Il est clair que la liberté contractuelle confère aux parties la liberté de régler dans leur contrat
59
les comportements contractuels que le rapport contractuel engendre . C'est-à-dire que les

56
F. Surville, Cours élémentaire de droit international privé, 1er éd., Paris, 1890, p. 232 et s. Cet auteur a
soutenu que « Quand l’article 1134 du Code civil déclare que : « les conventions légalement formées tiennent
lieu de loi à ceux qui les ont faites », il énonce une règle qui est aussi vraie en droit international qu’au point de
vue de la législation interne. C’est aux intéressés qu’il appartient d’indiquer la loi à laquelle ils entendent se
soumettre » ; Cf. C. Aubry, « Le domaine de l’autonomie en droit international privé », JDI.465.1896, spéc., p.
470. Cet auteur affirme qu’« on sait que le principe de l’autonomie se fonde sur l’idée générale, évidente par
elle-même, que l’article 1134 du Code civil formule ainsi : « les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les
ont faites ». Cette formule doit être prise à la lettre et signifie que les conventions font la loi des parties, non
seulement parce qu’elles peuvent régler directement leurs droits et obligations respectifs, mais aussi parce
qu’elles peuvent déterminer la loi qui réglera ces droits et obligation. Si tel est le fondement du principe de
l’autonomie (…) son domaine sera exactement celui de la liberté des conventions » ; Cf. A. Rolin, Principes de
droit international privé et applications aux diverses matières du Code civil, t. I, Paris, 1897, p. 436 et s. D’après
cet auteur, « Si les parties contractants sont capables, si leur activité juridique ne se heurte contre aucune
prohibition légale, si elles respectent les conditions de forme, l’effet de leurs conventions est régi par leur
volonté (…). C’est ce qu’on appelle l’autonomie des parties contractantes (…). L’article 1387 du Code
civil contient la reconnaissance et l’application de ce principe… » ; Cf. A. Weiss, Traité théorique et pratique de
droit international privé, t. IV, 1892-1905, p. 335. L’auteur a estimé que « A cet égard la volonté des parties est
en principe souverain, d’après l’article 1134 dit les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Le
législateur français proclame ainsi l’autonomie de la volonté ; il permet à ceux qui contractent de régler à leur
gré, dans les limites de la capacité qui leur est reconnue (…) ». Force est de constater que d’après tout ces
auteurs précités, ils ont essayé de justifier l’admission en droit international privé le principe de l’autonomie de
la volonté. Ils trouvent que ce principe se fonde dans l’article 1134 du Code civil français. On peut dire que
l’autonomie de la volonté en droit international privé n’est qu’une conséquence de l’autonomie consacrée par le
législateur en droit interne.
57
Cf. V. Ranouil, L’autonomie de la volonté, op.cit., p. 63 et s.
58
Ch. Brocher, Cours de droit international privé, Paris et Genève, 1883, p. 67 et s. Pour cet auteur la volonté
peut être créatrice de droit.
59
J.-M. Jacquet, « Le droit français des contrats et les Principes d’UNIDROIT », Rev. dr. unif. 2008, p.179-195.

32
parties, en exerçant cette liberté, aménagent leurs rapports en instillant dans le contrat lui-
même (leur volonté) des règles qui relèveraient en soi du droit régissant de contrat. La liberté
des parties de désigner la loi applicable trouve son fondement dans une norme qui exerce une
véritable fonction de rattachement de la règle de conflit… Le principe d’autonomie permet
non seulement aux parties d’opérer le choix de la loi qui leur paraîtra la mieux adaptée à
l’économie du contrat mais aussi de constituer un facteur de prévisibilité et de sécurité
juridique. Puisque les parties qui sont liées par la loi d’autonomie ne confrontent pas aux
instabilités d’un règlement ultérieur du conflit. Il est difficile de faire autrement, car ce
60
principe est commun parmi la plupart des systèmes de droit international privé .

20. L’autonomie par rapport au droit étatique. La pratique contractuelle internationale


confirme son autonomie par rapport au droit étatique dans la mesure où les praticiens
développent de nouvelles solutions ou techniques dans les limites posées par le droit étatique.
C’est la raison pour laquelle le législateur pourrait exercer cette liberté contractuelle afin de
créer de nouvelles règles sans objections. Les parties peuvent soumettre leur contrat à un droit
national favorable aux solutions envisagées sous réserve de lois de police applicables devant
le juge ou l’arbitre de contrat. Il faut souligner que les individus ont la liberté de soumettre
leurs rapports juridiques à n’importe quelle loi, même si cette loi ne présente aucun lien
significatif avec ceux-ci. De même que la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi
applicable aux obligations contractuelles (ci-après la Convention de Rome de 1980),
le Règlement CE n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi
applicable aux obligations contractuelles (ci-après le règlement Rome I) n’exige aucun lien
entre la loi choisie et le contrat, car le choix des parties est toujours l’expression de leur
intérêt commun et ne saurait être capricieux.
Par ailleurs, les parties peuvent choisir la loi étrangère applicable au contrat. On verra
ce sujet de manière plus approfondi ultérieurement. L’autonomie de la volonté pourrait régler
certains problèmes dans les contrats internationaux surtout lorsqu’il y a plusieurs pays qui
présentent les liens les plus étroits avec un contrat. Parfois les parties ont choisi la loi
étrangère qui ne présent aucun rapport avec elles ni au contrat applicable, mais cette loi

60
Cependant dans certain domaine de droit par exemple en droit cambiaire il est plus raisonnable de voir toutes
obligations résultantes d’un même titre sont soumises à une loi unique (qui est normalement la loi du lieu prévu
pour le paiement plus effectif que le lieu d’émission). On sait que le chèque ou le billet à ordre est la source
d’une obligation pour le signataire et éventuellement pour le tiré. Dans ce terrain, la loi d’autonomie est écartée,
car elle ne convient pas. En raison des difficultés de sa détermination, à ces titres dont la caractéristique est de
pouvoir circuler facilement, par endossement.

33
présente une tradition dans ce genre de contrat, par exemple la loi anglaise pour le contrat de
vente du maïs. Il est de même en Thaïlande, un contrat d’assurance maritime est régi par la loi
britannique Marine Insurance Act de 1906, même si ce contrat n’a aucun lien avec
l’Angleterre.

21. En droit international privé thaï, aux termes de l’article 13, alinéa 1er de la Loi de 1938
relative au conflit de lois : « il faut prendre en considération la volonté des parties, quant au
choix de loi qui doit être applicable au contrat ou à ses effets ». Le terme « il faut » est clair
en soi. D’ailleurs c’est l’office du juge en premier lieu de tenir compte de la volonté des
contractantes. En effet cette conception a apparu en droit thaï, dans le premier temps, dans un
61
ouvrage de droit international privé en 1931 avant l’élaboration de la loi sur le conflit des
lois. Les parties ne sont pas obligées de choisir préalablement un ordre juridique auquel serra
soumis leur contrat, bien que la loi thaïe d’autonomie (l’article 13) et la Cour elle-même
62
l’aient accepté. On note qu’il y a très peu de jurisprudence dans ce domaine à l’époque . Il y
63
a quelques décisions da la Cour suprême Dika sur le principe d’autonomie de la volonté . La
plus récente est la décision du Tribunal central de propriété intellectuelle et de commerce
64
international (TCPICI) en 2008 . En l’espèce, le contrat de vente internationale de
marchandises a été conclu entre un plaignant autrichien et un défendeur thaï. Les parties
contractantes n’ont pas opéré le choix de la loi applicable de manière certaine... Le plaignant a
invoqué l’application de la loi autrichienne ; selon lui, il a déjà transmis au défendeur les
détails de marchandises avec les conditions générales de vente dans lesquelles a été

61
Phrayasriwisarnwaja, Droit international privé, Bangkok : Sophonphipatanakorn Press, 1931, p.124.
62
En effet il y a douzaine de décisions de la Cour de cassation sur ce sujet, mais il s’agit de problème
d’application de règle de conflit des lois car la Cour a estimé dans la plupart des décisions que celle-ci ne
concerne pas au problème de conflit des lois. Donc il n’y a aucune place pour la règle conflictuelle. On constate
que c’est en fait le problème d’extranéité préalable, dans certains arrêts le caractère d’extranéité présentait
clairement mais le juge a déclaré qu’il n’applique pas la règle de conflit en estimant que le litige est né dans le
territoire thaï, car la destination de transport était en Thaïlande même si c’était la vente internationale de
marchandises. La Cour suprême a fondé sur la même base dans ses décisions n° 3401/2529 (1986) ; n°
2466/2532 et n° 2768/2532 (1989). (Il est vrai que la loi de 1938 relative au conflit de lois ne fait aucune réserve
s’agissant de la juridiction de la Cour selon le Code de la procédure civile.) Force est de constater que le critère
de lieu de naissance du litige ne doit pas être prise en compte par la Cour dans ce cas, puisque ceci est un critère
pour résoudre le problème de juridiction de la Cour. Bien que la cause du litige soit née en Thaïlande, on ne peut
pas admettre que la loi thaïe sera toujours applicable au litige.
63
Arrêt de la Cour suprême n°2930/2519, n°698/2521 et n°1958/2548 ; la décision de la Cour de propriété
intellectuelle et de commerce international comm. 88/2551.
64
TCPICI com., n° 88/2551 (2008), Berlerith GMBH & Co.KG c/ Matrix Hard Material (Thailand) Co.Ltd.
Disponible sur le site : http://www.cipitc.or.th/documents/decisionfile/IT87_51.pdf

34
mentionnée entre autres au verso, la loi applicable au contrat. Le défendeur a refusé en citant
qu’il n’a jamais accordé au plaignant le choix de loi autrichienne comme loi applicable au
contrat. D’après la loi procédurale thaïe, la Cour a estimé que lorsque le plaignant n’a pas pu
prouver qu’il existe la loi d’autonomie, l’article 13 de la Loi relative au conflit de lois est
donc en jeu. Selon le 1er alinéa de cet article, lorsque les parties n’ont pas choisi la loi
applicable et à défaut de nationalité commune des parties, la loi du lieu de conclusion du
contrat doit être applicable. Selon l’alinéa 2 du même article, « lorsque le contrat a été conclu
entre absents, le lieu de conclusion du contrat est la place où une acceptation est arrivée à la
partie qui offre ». En vertu de l’article 13 al. 2, la Cour a décidé que la loi autrichienne est
applicable au contrat.

22. En France, la distinction entre la théorie subjective et la théorie de localisation est


nette. Selon la première, la détermination de la loi applicable résulte de la volonté, expresse
ou implicite des parties. Alors que la localisation objective propose un rattachement qui aide à
déterminer, en cas de l’absence de choix, la loi applicable au contrat, certes celle qui présente
un lien étroit avec celui-ci. Cette approche est adoptée par la Convention de Rome de 1980 et
le règlement Rome I.

23. De nos jours, la liberté contractuelle est bien établie en droit interne et s’épanouira
dans l’ordre international comme la liberté de choix de la loi applicable au contrat. La volonté
des parties joue un rôle très important dans la règle de conflit de lois puisque celle-ci est
habituellement attribuée à un facteur de rattachement « objectif », comme le lieu de résidence
habituelle d’une personne. En effet, dans cette hypothèse, le point le plus important est de
chercher à connaître la volonté exacte des parties contractantes et non de résoudre le problème
conflictuel.

24. Modalités de choix. En admettant qu’il est rare qu’un contrat comporte une référence
explicite à la loi applicable, très souvent l’intention des parties n’est pas assez clairement
exprimée. Certes, le principe est favorable au choix exprès des parties, mais à savoir si le
choix de manière implicite est-il acceptable ? Chaque pays admet les diverses façons d’opérer
le choix de la loi applicable au contrat, une fois que le juge envisage le problème de la
déterminer, quels élément sont-ils utilisés pour découvrir la volonté implicite des parties ?
S’agissant du choix de plusieurs lois applicables à chaque partie du contrat ou le dépeçage,
n’est-il pas du même principe qu’en matière d’arbitrage ?
35
25. Choix tacite à l’épreuve de difficultés de l’interprétation. Le choix de droit
applicable est exprès, autrement dit les parties doivent l’insérer dans une clause de contrat. Il
suffit qu’il résulte « de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la
cause » comme stipulé l’article 3.1 de la Convention de Rome de 1980. Cette conception a été
maintenue par le nouveau Règlement CE n° 593/2008 qui stipule : « le choix est exprès ou
résulte de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause ». Aux
termes de ce texte, on peut dire qu’il s’agit d’un choix exercé par écrit mais on peut concevoir
un choix par une expression purement orale qui réserve alors des difficultés de preuve. En ce
qui concerne un choix tacite, celui-ci doit être exercé « de façon certaine », soit des
65
dispositions du contrat, soit des circonstances de la cause . Là encore, en l’absence de toute
précision expresse sur la loi applicable, lorsqu’il existe une clause attributive de juridiction
dans un contrat, celle-ci pourrait être considérée comme un indice suffisamment clair de la
volonté des parties de soumettre leur contrat à la loi du for choisi. Il peut arriver aussi le cas
où les parties ont fait références à des articles d’une certaine loi sans que cette loi ait été
66
intégralement désignée . En ce qui concerne les « circonstances de la cause », c’est le cas où
un contrat est silencieux sur la loi applicable, mais il est étroitement lié à un contrat antérieur
pour lequel il y avait eu choix exprès de la loi par les parties.
Dans le choix tacite, le juge doit d’office vérifier le caractère suffisamment « certain »
du choix. Il est clair que la Convention et le Règlement écartent toute recherche de volonté
présumée ou hypothétique. Un simple choix implicite est alors insuffisant au regard de ces
lois. La Convention de Rome de 1980 semble poser une règle plus souple que celle de la
Convention de La Haye du 15 juin 1955 sur la loi applicable aux ventes à caractère
international d’objets mobiliers corporels (ci-après La Convention de La Haye de 1955) qui
retient un système dualiste. La Convention de La Haye de 1955 dispose, dans l’article 2 alinéa
2, que « Cette désignation doit faire l’objet d’une clause expresse, ou résulter
indubitablement des dispositions du contrat ».

26. Un choix peut également résulter des dispositions du contrat ; à titre d’exemple, le
choix qui se trouve son origine de l’usage d’un contrat-type selon lequel les parties ont

65
En effet dans la proposition de 2005, l’article 3 § 1 invitait le juge de tenir compte une volonté réelle des
parties et non pas la volonté hypothétique. Donc cet article a proposé d’intégrer le terme « comportement des
parties » en plus des dispositions du contrat et des circonstances de la cause, malheureusement ce terme a été
rejeté par le nouveau règlement.
66
H. Gaudemet-Tallon, « Convention de Rome du 19 juin 1980 », J-Cl. Europe, 1996, Fasc.3201.

36
accordé d’appliquer. Lorsqu’il y a l’usage d’un contrat-type d’organisme en question, par
exemple une police d’assurance de Lloyd’s, on peut dire que les parties ont voulu appliquer
la loi du pays où se trouve le siège de l’organisme donné pour les questions non réglées par le
contrat, dans ce cas la loi anglaise. Puisque ce contrat-type a été rédigé dans un contexte de
67
cette loi .

27. Par ailleurs, il est possible de soumettre une manifestation du choix de droit applicable
vers des circonstances de la cause. Cette formule a été employée par la Cour de cassation
68
depuis l’arrêt Fourrures Renel en 1959. De même, la Convention de La Haye de 1978 sur la
loi applicable aux contrats d’intermédiaires et à la représentation est un bon exemple ; elle
propose une solution mieux adaptée à la vue réaliste de la pratique des contrats
internationaux. Dans l’article 5, alinéa 2 : « Le choix de cette loi doit être exprès ou résulté
avec une certitude raisonnable des dispositions du contrat et des circonstances de la cause ».
Pour mieux comprendre, on cite par exemple le cas où une intervention d’un officier
69
public emmène les parties à être d’accord sur le choix de la loi de son État ; un acte conclu
devant un agent consulaire qui agit hors de son pays. Ou encore un contrat faisant partie d’un
ensemble d’opérations, les parties ont choisi la loi applicable pour le contrat de base sur
lequel repose toute l’opération. En effet cette attitude libérale est accordée à la volonté des
parties quant au mode d’expression du choix de la loi applicable de telle sorte que certain
juriste français n’ont pas hésité à manifester leur inquiétude. Il convient de reprendre ici l’idée
concernant la Convention de Rome de M. Y. Loussouarn qui a souligné qu’« en autorisant le
juge à fonder ce choix soit sur une manifestation expresse de volonté soit sur de simples
circonstances propres à l’espèce - même si ce choix se trouve assorti d’une condition de
70
certitude - la Convention de Rome de 1980 accroît l’insécurité juridique en ce domaine » .
Admettant que l’appréciation d’un choix de la loi applicable en laissant au juge de rechercher
des circonstances de la cause est risquée entraîner l’insécurité juridique. Pourtant, force est
d’admettre qu’en réalité on ne peut forcer les parties contractantes de choisir de façon

67
B. Audit, Droit international privé, 6e éd., Paris : Economica, 2010, p. 658.
68
Cass.1ère civ., 6 juillet 1959, Sté des Fourrures Renel, JDI.1960.814., doss. Sialelli. ; RCDIP.1960.354., note
Loussouarn ; RTDC.1960.516., obs. Hébraud.
69
B. Audit, loc.cit.
70
Y. Loussouarn, Droit international privé, 9e éd., Paris : Dalloz, 2007, p. 461-462.

37
expresse le droit applicable. A ce stade, la prise en considération des circonstances de la cause
pourra conduire le juge à régler le problème de choix.

28. Malgré son caractère universel, les modalités de la mise en œuvre du principe de
l’autonomie sont diverses selon chaque pays. En droit international privé thaïlandais, ni la Loi
de 1938 relative au conflit de lois, ni les principes généraux du droit civil ne précisent des
règles sur les modalités du choix. On trouve que l’article 13 ne réfère que « (…) lorsque leur
volonté expresse ou implicite ne peut pas être découverte (…) ». A priori, cette disposition ne
régit que l’établissement du contrat : la volonté des parties, l’objectif du contrat et la forme
d’une part ; et les effets du contrat d’autre part. On peut conclure que la loi reste silencieuse
sur les modalités de choix. A défaut d’une clause formelle, c’est une tâche du juge qui devrait
découvrir certaines manifestations de volontés une référence implicite à la loi adoptée.
Pourtant, dans le même alinéa (art. 13) est stipulé : « lorsque le juge ne peut pas trouver la
volonté explicite ou implicite des parties (à défaut de choix), si les contractants ont la même
nationalité, c’est la loi nationale des parties qui s’applique ». Afin de découvrir la « volonté
implicite » des contractants, il faut tenir compte de tous les éléments suivants : la nationalité
71
des parties, le domicile, l’économie du contrat, la langue du contrat , le lieu de conclusion ou
72
d’exécution du contrat .
On trouve qu’il y a très peu de jugements de la Cour thaïe sur la recherche de volonté
73
implicite des parties. Cependant dans la décision de la Cour suprême Dika en 1982 , le
Tribunal du travail a eu l’opportunité de rendre une décision concernant la volonté implicite
des contractants. Malheureusement on trouve que cette décision est critiquée. En l’espèce, les
parties ayant nationalité américaine ont conclu un contrat d’embauche à Singapore. Elles
n’ont pas procédé le choix du droit applicable au contrat, puis la rupture du contrat a eu lieu
en Thaïlande dont le litige a été introduit devant le Tribunal de travail. Les juges du premier
degré ont estimé que « c’est un cas où les parties n’ont pas choisi la loi applicable au contrat.

71
Cour suprême Dika n° 999/2496 (1953). En l’espèce il s’agit du commerce maritime, la Cour a estimé qu’on
n’a pas de dispositions du droit maritime en Thaïlande, ni du droit coutumier. Vu qu’il soit convenable
d’appliquer à ce litige les principes généraux de droit aux termes de l’article 4 du CCC. Ce contrat d’assurance
maritime a été rédigé en anglais, dans ce cas la Cour estima que pour trancher le litige, la loi anglaise de
l’assurance maritime doit être applicable par analogie. Contra. B. Audit, op.cit., p. 659 : cet auteur fait une
remarque que le langage utilisé dans un contrat doit être pris en considération en tant qu’indice pour déterminer
la volonté réelle des parties. Il ne peut être employé à lui seul comme manifestant la volonté de celles-ci.
72
K. Luchai, Conflit de lois, Bangkok : Winyuchon, 2006, p. 73 ; Ch. Pachusanond, Droit international privé,
Bangkok : Winyuchon, 2006, p. 268.
73
Cour suprême Dika, n° 3223/2525 (1982).

38
Donc c’est la tâche du juge de découvrir la loi du pays auquel le contrat doit être soumis. Le
Tribunal a trouvé que le contrat a été conclu à Singapore ; dès lors il faut déduire que les
parties ont voulu soumettre leur contrat à la loi singapourienne ». Il est clair que le Tribunal
du travail a fait une erreur, car, il n’est pas nécessaire de chercher à savoir la volonté implicite
des parties ; au contraire la première phrase de l’article 13 de la Loi de 1938 précise qu’il faut
appliquer la loi nationale des parties lorsque les parties ont la nationalité commune.
Finalement le pourvoi a été formé à l’encontre cette décision devant la Cour suprême et elle
n’a pas partagé la même opinion du Tribunal du travail. En revanche la Cour a décidé que
c’est le cas où les parties ont la même nationalité. Donc la loi américaine aurait été
74
applicable .

29. Possibilité de désignation de plusieurs lois. Cette technique innove d’une conception
traditionnelle plutôt hostile au dépeçage du contrat. Il faut rappeler que la théorie de
localisation s’inscrit dans le contexte du droit international privé français, que cette théorie
devrait, logiquement, refuser le dépeçage du contrat. Car elle est rattachée à la soumission du
contrat à une loi unique. La conception traditionnelle est inspirée par le souci de respect des
75
ensembles législatifs et la crainte d’un déséquilibre entre les parties .
Le système de dépeçage d’un contrat est peu à peu délaissé en Allemagne depuis les
76
années 1960 . Alors qu’en France, la Cour de cassation a implicitement reconnu en 1959
77
dans son arrêt Fourrures Renel le dépeçage du contrat exercé par les parties. On trouve que
la possibilité de dépeçage d’un contrat résulte du principe de l’autonomie de la volonté
laquelle confère un nouveau champ d’exercice à la liberté contractuelle. Comme le souligne
M. P. Lagarde, « cette technique remplit deux fonctions utiles : elle permet le plein
78
accomplissement de la volonté des parties et est dans la logique du principe d’autonomie » .
Force est de constater que les besoins économiques jouent un rôle important au
développement du système de dépeçage du contrat : l’évolution qui se justifie par le
développement des contrats complexes, et qui rend les parties intellectuellement séparables.

74
Mais aucune des parties n’ont prouvé la teneur de cette loi étrangère dés lors il faut appliquer la loi thaïe
selon l’article 8 de la loi relative au conflit des lois.
75
P. Lagarde, « Le dépeçage dans le droit international privé des contrats », RDIPP.1975.649.
76
H. Gaudemet-Tallon, « Convention de Rome du 19 juin 1980 », op.cit., n°20.
77
V. supra note n° 68.
78
P. Lagarde, « Le dépeçage… », op.cit., p. 651.

39
Quant aux secteurs dans lesquels le dépeçage a été fortement utilisé, par exemple en matière
de crédit hypothécaire : l’opération de crédit est soumise à une loi étrangère alors que les
79
garanties sont régies par la loi française , ou contrat de fourniture d’ensemble industriel. On
peut interpréter également que le dépeçage permettrait aux contractants à détacher une
stipulation non visée de toute loi afin de choisir une loi qui a un lien plus étroit avec cette
partie du contrat.

30. Pendant les années 1970, on assistait au développement d’une opinion favorable à la
possibilité d’appliquer les diverses lois à diverses stipulations d’un même contrat. Ainsi la
Convention de La Haye du 22 décembre 1986 sur la loi applicable aux contrats de vente
internationale de marchandises reprend la formule de l’avant-projet de 1983, l’article 7, alinéa
80
1er admet le dépeçage du contrat , même si le domaine n’est limité qu’à la vente
internationale de marchandises.
Il en est de même pour la Convention de Rome de 1980 et le Règlement CE n°
593/2008 qui ne posent aucune condition restrictive à l’intervention de la volonté dans ce
domaine. Pour cette raison, la possibilité de soumettre un même contrat à des lois différentes
a finalement été admise par cette convention et puis par le règlement Rome I. Le dépeçage se
trouve aussi dans le cas de défaut de choix, pour la Convention de Rome, l’article 4 § 1
prévoit à titre exceptionnel la possibilité de désigner les lois différentes pour un même
contrat. Ceci est très critiqué, seule la détermination une loi applicable n’est pas facile, ce sera
plus difficile lorsqu’il y a possibilité de désigner plusieurs lois. Forte heureusement le
règlement Rome I l’a abandonnée.

31. Quant au dépeçage, la CJCE a eu la première occasion de l’interprétation de


Convention de Rome sur ce point en répondant aux questions préjudicielles demandées par la
Cour de cassation néerlandaise. En l’occurrence, la société belge, ICF, a demandé d’obtenir le
paiement des factures sur la base de contrat d’affrètement de marchandises à deux sociétés
néerlandaises. La société ICF a saisi la Cour néerlandaise d’une action en paiement, mais les

79
Chambre de commerce d’industrie de Lyon, Présentation du règlement (CE) N° 593/2008 du Parlement
Européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I),
Conférence du Professeur Cyril Nourissat, Faculté de Droit de l’Université Jean Moulin Lyon 3, disponible sur
le site www.lyon.cci.fr, mise à jour le 24 mars 2009.
80
L’article 7, alinéa 1er : « La vente est régie par la loi choisies par les parties. L’accord des parties sur ce
choix doit être exprès ou résulté clairement des termes du contrat et du comportement des parties, envisagés
dans leur ensemble. Ce choix peut porter sur une partie seulement du contrat ».

40
sociétés défenderesses néerlandaises ont invoqué la prescription de la créance selon le droit
néerlandais, alors que la société ICF a soulevé l’application de droit belge selon lequel la
prescription n’était pas acquise. Alors cinq questions préjudicielles ont été formées par la
Cour de cassation néerlandaise, l’une d’elles posée si la prescription devait être régie à une loi
propre, distincte de celle qui serait applicable au reste du contrat d’affrètement. La CJCE a
estimé que « la possibilité de séparer un contrat en plusieurs parties pour le soumettre à une
pluralité de lois va à l’encontre des objectifs de la convention et doit être admise uniquement
lorsque le contrat rassemble une pluralité de parties qui peuvent être considérées comme
81
autonomes l’une par rapport à l’autre » . La Cour a fait recours à l’article 10 de la
Convention qui stipule que le domaine de la loi du contrat en y incluant la prescription en
affirmant que « la loi applicable à la prescription ne saurait être déterminée séparément de la
loi applicable au contrat ».

32. En Thaïlande, par rapport à la pratique internationale, le droit international privé thaï
et la jurisprudence restent silencieux sur la question du dépeçage du contrat. Or, certains
82
auteurs admettent le système du dépeçage d’un contrat, c'est-à-dire le dépeçage résultant de
l’accord commun des parties, tel qu’il est affirmé par l’article 3 de la Convention de Rome de
1980 et par le règlement Rome I en termes suivants : « (…) les parties peuvent désigner la loi
applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat ». Pourtant cette liberté
contractuelle se limite à certains domaines prévus par la Loi 1938 relative au conflit de lois ;
en conséquence, l’état et la capacité des parties y compris la forme du contrat ne pourraient
pas être régies par la loi choisie par des parties contractantes.

33. Problématiques. Comment régler les problèmes résultant des contrats


internationaux ? Comment on a traité un contrat international dès le choix de la loi applicable
jusqu’à la fin du procès c'est-à-dire l’exécution des décisions étrangères. Si des différences
apparaissent et peuvent se comprendre, ou peut s’interroger sur les points faibles des systèmes
respectifs et envisager leur application adoptée aux systèmes thaïs et plus généralement dans
l’ASEAN.

81
CJCE, 6 octobre 2009, aff. n° C-133/08, Balkenende, D., 2010, n° 4, p. 236, note F. Jault-Seseke ;
JDI.2010.183, note C. Legros ; RLDC.2010.7, note M.-E. Ancel ; Gaz. Pal. 07/07/2010, n° 188-189, p. 24-26,
note M. Nicolella ; Europe, 01/12/2009, n° 12, p. 36, note L. Idot ; Rev. dr. transp. 2009, comm. 210, note L.
Grard. .
82
K. Luchai, Conflit de lois, op.cit., p.72 ; Ch. Pachusanond, Droit international privé, op.cit., p. 265-266.

41
34. Plan d’étude. Après avoir étudié et analysé les problèmes théoriques et pratiques
relatifs aux contrats internationaux ainsi que l’objectif poursuivi, j’ai proposé de traiter ces
questions en deux parties : la loi applicable aux contrats à caractère international pour la
première partie et ensuite et le règlement des différends pour la deuxième partie en suivant
l’attitude des parties contractantes qui pensent plus à la loi applicable qu’au règlement des
différends lors des négociations. La vie économique et les échanges internationaux devenus
de plus en plus complexes. De même que les problèmes provenant des contrats internationaux
l’objet de notre étude sont aussi de plus en plus compliqués. Chaque ordre juridique fixe sa
propre loi. Ceci provoque des conflits de lois susceptibles de compromettre l’investissement
et le commerce transfrontalier et international. Le choix de la loi applicable pourrait améliorer
la situation et modérer les conflits. La loi applicable aux contrats pose toujours le problème du
choix. Certes, le choix peut se faire au profit d’une loi étatique ainsi qu’une loi non étatique.
Les contractants peuvent choisir une loi qui ne présente aucun rapport avec leur contrat.
Ainsi, cette loi peut être la loi étrangère dont les modalités d’application relève du droit
interne de chaque État, ce qui pose beaucoup de problème à l’égard du juge étatique. A ce
stade, la tendance du juge thaï est de refuser l’application de la loi étrangère choisie par les
parties. L’article 8 de la loi de 1938 fait aussi obstacle à l’évolution de jurisprudence dans
cette matière, car il pèse la charge d’invocation et la charge de preuve à l’une des parties.
Dans l’hypothèse où les parties n’ont pas procédé à un choix, la règle de conflit de lois
conduit à la recherche de la volonté pour atteindre le résultat escompté. En l’absence de choix,
le rôle de la Loi de 1938 est plus intense. Les points de rattachements employés par la règle
conflictuelle thaïe en matière de contrat ne sont plus appropriés, c’est le cas de la nationalité.
Car, celle-ci peut être utilisée comme rattachement dans certains domaines, certes en matière
personnelle. Ce choix est obsolète et n’est pas apte à régler la question du conflit de lois dans
le commerce international. Certes, la loi désignée par la règle de conflit ou résultant du choix
des parties est loi la plus convenable pour régir le litige. Dès lors, le jeu d’ordre public
international n’est que l’exception. Dans la plupart des cas les contrats internationaux sont
entrés sous l’emprise de la lex fori en raison de l’application de manière répandue de ces
mécanismes. Cette recherche a pour objectif de faire comprendre aux juges thaïs que ces
mécanismes sont indispensables, mais il faut les utiliser prudemment (Première Partie).
Après avoir réglé le choix de la loi applicable. Les parties doivent négocier du mode
de règlement des différends. Cette partie sera traitée sous deux aspects : le mode traditionnel
par voie judiciaire et le mode alternatif par l’arbitrage international. L’objectif avoué du droit
international privé des contrats n’est que la détermination ou la désignation de la loi
42
applicable aux rapports internationaux entre parties contractantes. Quand bien même les
contractants ont essayé lors de la négociation de réduire les problèmes dans l’avenir, il faut
admettre que les difficultés peuvent intervenir dans toutes les phases contractuelles, dès la
phase précontractuelle jusqu’à l’exécution du contrat. Pour cette raison, on ne peut nier
l’importance de phase du règlement des différends dans les contrats commerciaux
internationaux. Par ailleurs, la connaissance des juridictions qui seront compétentes en cas de
litige est indispensable. Celles-ci peuvent être tant la juridiction étatique que la juridiction
arbitrale. Pour la première, chaque ordre juridique détermine la compétence territoriale et
d’attribution. Le principe de l’autonomie de la volonté trouve sa place à ce stade concernant le
choix du for. Si en France, les règles sont relativement clairement posées, ce n’est pas
forcément le cas en Thaïlande. Pour cette raison, l’arbitrage international présente plus
d’avantage que l’assignation devant la juridiction étatique notamment pour maintenir de
bonnes relations entre commerçants. Cependant il est possible que l’une des parties ait saisi le
juge étatique malgré une clause compromissoire. Ceci génère d’autres difficultés qu’il faudra
apprécier de part et d’autre. Enfin, les modalités et conditions de reconnaissance et
d’exécution des décisions étrangères sont différentes dans chaque État notamment pour le
jugement étranger. C’est la phase la plus important, car tout procès qui s’est déroulé
deviendrait inutile en l’absence de celle-ci.
Les règles de droit destinées à résoudre ces différends diffèrent selon chaque système
juridique. L’étude de droit comparé devrait permettre de mieux comprendre la situation et de
trouver la meilleure solution substantielle ou processuelle. Le droit comparé nous permettrait
d’ailleurs d’améliorer le droit interne en utilisant l’approche comparative comme un
instrument de compréhension (Deuxième Partie).

Première Partie – Loi applicable aux contrats à caractère international.

Deuxième Partie – Règlement des différends.

43
44
Première Partie

LOI APPLICABLE AUX CONTRATS A CARACTERE


INTERNATIONAL

35. En matière des contrats internationaux, les contractants ont la liberté de procéder au
choix de la loi applicable. Certes, il en résulte du principe de l’autonomie de la volonté qui est
bien établie en la matière depuis longtemps. Par ailleurs, les règles de droit que peuvent
choisir des parties sont diverses. Cependant l’ordre juridique n’admet pas de telles lacunes en
l’absence de choix des parties. Le législateur a développé les règles conflictuelles dont les
rattachements présentent un lien effectif avec chaque circonstance, afin que ces règles
puissent enfin déterminer la loi applicable au contrat.
La liberté de choix de la loi applicable n’est pas absolue. Dans certaines hypothèses,
l’intervention de mécanismes préventifs d’ordre juridique du for est indispensable. Il en est de
même en l’absence de choix, l’application de la loi étrangère désignée par la règle de conflit
ne devra pas porter atteinte aux principes fondamentaux censés être protégés par le for.
On verra tout d’abord la consécration de la loi choisie par les parties (Titre I).
Ensuite, on étudiera le cas en l’absence de choix (Titre II) et les limites au principe de
l’autonomie de la volonté (Titre III).

45
46
Titre Premier

CONSECRATION DE LA LOI CHOISIE PAR LES PARTIES.

36. Le commerce libéral se contente de la non-intervention, c'est-à-dire que les États ne


doivent pas faire obstacle au commerce international en prohibant le libre choix de la loi
applicable aux contrats à caractère international. Certes, la liberté de se contracter et de
choisir la loi applicable est admise depuis longtemps dans cette matière – ce qui permet aux
parties de prévenir leurs devoirs et obligations vis-à-vis de son cocontractant. Il en résulte du
principe d’autonomie de la volonté des contractants affirmant la possibilité de choisir
n’importe quelle loi. Le choix de la loi applicable au contrat permet de réduire des coûts d’une
opération en raison de la connaissance anticipée du résultat de l’application de la règle de
conflit, les contractants pourraient éviter les incertitudes. Grâce à ce principe, les parties
peuvent choisir la loi étrangère applicable au contrat, à ce stade, on peut envisager des
questions du moyen de preuve. Elle nous amène aux problèmes d’invocation et de répartition
de tâches entre le juge et les parties. Certaines différences paraient claires entre les systèmes
juridiques thaï et français quant à l’application de la loi étrangère. Alors que le choix du droit
non-étatique semble plus douteux. Habituellement on n’admet pas que ceci soit applicable au
contrat en tant que « droit », en revanche on accepte que le droit non-étatique s’applique en
tant que clause contractuelle. Cette doctrine a été admise tant en France qu’en Thaïlande.
C’est ce que nous vérifierons par la suite. A ce titre, nous essayons aussi d’étudier la loi
étatique (étrangère) et non-étatique approfondie dans leur statut pour connaître l’attitude des
parties dans leur choix de telle ou telle loi. Car il se peut que la pratique du juge à travers la
jurisprudence puisse orienter les contractants à choisir la loi applicable à leur contrat. Force
est de constater qu’il existe aussi certain domaine auquel le principe d’autonomie de la
volonté ne pourrait pas pénétrer ; celui des immeubles que la lex rei sitae garde toujours sa
compétence.

37. Notre étude ne serait pas complète sans avoir parlé de l’application de droit
international au contrat aussi bien du droit conventionnel que du droit coutumier. Ce qui nous
intéresse surtout à ce stade, c’est le droit écrit : la convention internationale du droit
substantiel uniforme. A notre avis, ce sujet parait un peu spécial et ne sera pas traité au même
titre que d’autres en raison de l’implication du droit international dans les contrats

47
internationaux dont le problème peut se poser différemment selon la pratique de l’ordre
juridique. Si l’État est membre de cette convention internationale et s’il l’avait adoptée en
droit interne ou son système juridique impose d’appliquer ces dispositions, tel est le cas de la
France, dans cette hypothèse, ladite convention internationale pourra produire effet à l’égard
d’un contrat international. Alors, le problème de possibilité de choix de la convention
internationale applicable au contrat ne se pose pas. Mais on se pose souvent la question de
savoir si les parties contractantes peuvent se soustraire de cette obligation imposée par la
convention internationale par un accord tacite ? Ceci est exclu de notre champ d’étude.

38. En revanche, on se demande si un État qui ne ratifie pas cette convention


internationale, peut-il l’appliquer ? Bien que la Thaïlande ne soit pas membre de la
convention internationale de droit matériel uniforme dans la matière, les juges thaïs ont eu
l’occasion de trancher les litiges pour lesquels les parties contractantes avaient choisi la
convention internationale pour régir leur contrat. Citons la décision rendue par le TCPICI et la
Cour suprême Dika concernant le transport aérien de marchandises dans laquelle les juges
reconnaissaient le choix de la Convention pour l’unification de certaines règles relatives au
transport aérien international du 12 octobre 1929 (la Convention de Varsovie). Toutefois,
pour que la convention internationale puisse être appliquée, il faut que la volonté explicite du
83
choix de cette disposition des parties contractantes soit mentionnée dans le contrat .
Il en va de même pour le cas du choix de la Convention des Nations Unies du 11 avril
1980 sur la vente internationale de marchandises (ci-après la CVIM) applicable au contrat
international. Quand bien même on attend toujours la jurisprudence sur cette issue, mais on ne
voit aucune motivation de refuser le choix de celle-ci pour régir le contrat de vente
internationale de marchandises, du moins en attendant l’élaboration de la nouvelle loi sur la
vente de marchandises. Pourtant, sur la question de la charge de preuve, pour certains, elle
pèse indubitable aux parties contractantes. A notre avis, le contenu de la convention
internationale est plus aisé à rechercher que celui du droit étranger. De surcroît, lorsque le
litige a été assigné devant le TCPICI en tant que juridiction spécialisée du litige du commerce,
les juges pourraient par eux-mêmes procéder à la recherche de sa teneur sans aucune
difficulté.

83
TCPICI com., n° 163/2542 (1999) ; n° 271/2543 (2000) ; n° 323/2543 (2000) ; Cour suprême Dika n°
3794/2543 (2000) ; n° 5133/2543 (2000).

48
Ensuite nous étudierons les lois que les parties pourraient choisir. On sait que les
contractants sont libres de procéder au choix de la loi étatique ; loi du for ou loi étrangère, soit
la loi non étatique. Les contractants ont souvent choisi la loi du for, plus précisément la loi du
juge qui a été saisi pour trancher le litige, normalement ceci n’entraîne pas beaucoup de
problème de droit international privé. Notre centre d’intérêt est dans le cas où les parties ont
opéré leurs choix de la loi étrangère (Chapitre I). Nous nous pencherons sur les normes non
étatiques choisies par les contractants par la suite (Chapitre II).

49
50
Chapitre Premier
CHOIX DE LA LOI ETRANGERE.

39. Le principe de l’autonomie de la volonté donne lieu aux parties de choisir la loi
84
applicable au contrat. Ce choix, par ailleurs, peut être celui de la loi étrangère . Lorsque les
parties ont opéré un choix, le juge doit appliquer d’office la loi choisie par les contractants en
tant que loi d’autonomie. Pourvu que ce choix ne soit pas contraire à l’exception d’ordre
public international du juge du for.

40. En France, la question de l’application de la loi étrangère est soumise au système


mixte entre facultative et mandataire alors que l’application de la loi étrangère selon le
système juridique thaï est facultative. Puisque dans la plupart des décisions de la Cour
suprême Dika, malgré le choix des parties de la loi étrangère applicable, les juges ont souvent
décidé que les éléments de la situation peuvent être localisés sur le territoire du for ; dès lors il
ne s’agit pas du conflit de lois, et qu’il n’y a aucune place pour la règle conflictuelle. C’est
comme si le rattachement avec le for fait obstacle à l’application à la loi étrangère choisie par
les contractants. C’est en fait le problème d’extranéité préalable, dans certains arrêts en
matière de vente internationale de marchandises le caractère d’extranéité présentait
expressément mais le juge a affirmé qu’il ne s’appliquait pas la règle de conflit et le traitait
85
comme un litige purement interne, en raison de la destination de transport en Thaïlande .
On peut dire que le principe de l’autonomie de la volonté n’a pas été respecté à cet égard.
Nous étudions d’abord le statut de la loi étrangère au stade de l’appréciation du juge,
car ceci affecte directement le fardeau de preuve des parties (Section I). Par ailleurs,
l’application de la loi étrangère ne signifie pas dans tous les cas que le juge devrait rechercher
la teneur de ladite loi lui-même, l’obligation d’établir le contenu de la loi étrangère incombe à

84
La loi étrangère n’est pas incorporée au système du for. Elle est appliquée en tant que loi étrangère ou
extérieure. Certes, elle n’a pas le même sens que la « loi » française ; outre le sens formel, elle reprend aussi
de « l’ensemble des solutions du droit positif étranger ». En effet cette conception peut être expliquée par une
raison logique : le juge du for étant extérieur au système juridique étranger, n’a pas de raison de s’arrêter à la
source formelle de la loi en cause. Dans ce cas le fait le plus important est que cette règle soit en vigueur dans
son pays d’origine, c’est-à-dire appliquée par les tribunaux. En pratique lorsque le juge français doit appliquer le
droit étranger, le plus simple est de se référer à une interprétation déjà existante dans cet État, notamment celles
des tribunaux.
85
Cour suprême Dika, n° 2768/2532 (1989).

51
la partie qui l’a soutenue (Section II). Nous verrons finalement la mise en œuvre de la loi
étrangère par le juge (Section III).

Section I
Affermissement de la position de la loi étrangère
au stade de l’appréciation par le juge.

41. Avant de dire qu’il faut renforcer l’application du juge de la loi étrangère en tant que
loi d’autonomie, il nous convient tout d’abord de connaître la nature de loi étrangère en
question (§ 1). Ensuite, nous étudierons si l’on peut ou non, au stade de l’appréciation,
assimiler la loi étrangère à la loi du for (§ 2).

§ 1 : Nature intrinsèque de fait de la loi étrangère.

42. La loi étrangère est-elle du fait ou du droit ? Cette question n’est pas nouvelle, mais
son importance est évidente. Si la qualification « droit » est retenue, cela signifie que le juge
est tenu à la reconnaître. Au contraire si elle est du fait, le juge n’est pas obligé de la
reconnaître sans preuves apportées par les parties. Il convient d’approfondir ce sujet pour
connaître le véritable caractère de loi étrangère. Ce qui pourrait effectuer les moyens
d’appréciation du juge de cette loi, pour l’intérêt d’exploiter ce sujet dans l’ordre juridique
thaï.
Nous étudierons d’abord la conception restrictive soutenue par la jurisprudence (A).
Ensuite, l’interprétation de formule « caractère de fait » de la loi étrangère (B).

A. L’alternative exclusive du droit étranger.

43. Le caractère véritable de loi étrangère. On admet que la loi étrangère est du droit,
car elle émane d’un État souverain ou relève de l’ordre juridique étatique. Certes, elle est de
droit à l’égard de son ordre juridique mais de même que les jugements étrangers, elle sera
traitée autrement dans d’autres ordres juridiques. Cependant d’après la jurisprudence, on
trouve que les juridictions françaises admettent depuis longtemps le statut procédural de fait
au droit étranger. Pour bien illustrer la conception restrictive envers la jurisprudence, il faut
étudier tout d’abord si l’application de la loi étrangère pose-t-elle véritablement une question
de fait ? Autrement dit, si cette loi est-elle traitée comme le fait ? Si la loi étrangère est de

52
droit, elle sera du droit étranger et de la souveraineté étrangère ; en cette qualité, elle ne sera
pas régie par la présomption de connaissance pesant sur le juge quant aux règles du droit
86
français, et son accès sera plus difficile que celui des normes françaises . En particulier le
droit français n’a pas besoin d’être prouvé. Mais la loi étrangère diffère de la loi française : la
loi étrangère n’est pas l’expression de la volonté de la souveraineté française, elle ne constitue
87
pas par elle-même « l’impératif émanant de l’autorité à laquelle le juge est soumis » , elle
n’est pas promulguée en France. Cependant la Cour de cassation a affirmé depuis l’arrêt
Coucke le statut de la règle de droit de la loi étrangère que celle-ci n’est pas un simple
88
élément de fait .

44. La nécessité procédurale de répartition des éléments de fait et de droit. Il ressort


de différence des règles auxquelles l’application de la loi française et celle de la loi étrangère
sont soumises. Par exemple en matière de preuve, puisque la loi étrangère n’est pas
promulguée en France, le juge français n’est pas censé la connaître, par conséquent son
contenu doit être prouvé. En effet il y a des différences incontestables qui séparent la loi
française de la loi étrangère. Elles ne justifient pas la thèse qui refuse à la loi étrangère le
caractère d’élément de droit et la qualifie d’élément de fait. Il faut rappeler que la dissociation
des éléments du procès en deux catégories est faite au regard de droit national. Par élément de
droit on n’entend pas la règle de droit en général, mais les règles qui réunissent des critères du
droit français positif. Dans ces conditions, force est de constater que la loi étrangère ne peut
89
entrer dans la catégorie des éléments de droit . Mais il ne l’est pas toujours que la loi
étrangère entre dans la catégorie de l’élément de fait. Cette idée est fondée sur la base de la
conclusion selon laquelle l’alternative posée par la répartition des éléments du procès en deux
catégories, dite l’élément de droit et l’élément de fait, est une alternative exclusive. C’est-à-
dire que tous les éléments qui n’entrent pas dans la première catégorie entrent nécessairement
dans la seconde. Cependant il paraît très clair qu’il y ait erreur de raisonnement, d’après M. I.

86
H. Motulsky, « L’évolution récente de la condition de la loi étrangère en France », in Mél. R. Savatier, Paris :
Dalloz, 1965, p.670.
87
H. Batiffol, Influence de la loi française sur la capacité civile des étrangers en France, Thèse, Paris, 1929,
p.384.
88
Cass. 1er civ., 13 janvier 1993, Coucke, RCDIP.1994.78, note B. Ancel.
89
I. Zajtay, Contribution à l’étude de la condition de la loi étrangère, Paris : Pedone, 1958, p.13 et s.

53
90
Zajtay , car la dissociation des éléments du procès en deux catégorie a été faite sur le plan du
droit interne, a priori, et sur ce plan la loi étrangère n’implique pas. C’est-à-dire qu’elle n’a
pas été et n’a pas pu être prise en considération à l’égard de la division en cause. En
conséquence la loi étrangère n’entre pas dans la première catégorie des éléments du procès ; le
droit, il en résulte seulement qu’elle diffère de la loi française du for. Mais on ne pourrait pas
conclure qu’elle relève de la seconde catégorie (élément de fait) et qu’elle constitue un
élément de fait. Pour cette raison, mais de manière excessive à notre avis, M. I. Zajtay a
proposé de créer pour la loi étrangère une troisième catégorie : plus précisément celle de la loi
étrangère qui n’est ni la loi française, ni élément de fait. En effet l’idée selon laquelle les
règles relatives à la loi étrangère en droit français sont les conséquences du prétendu caractère
de fait de cette loi est erronée. Un élément qui ne relève pas de la catégorie de droit, car il ne
répond pas à tous les critères de la loi française, n’est pas nécessairement un élément de fait.
Citons le cas des États-Unis, la Loi fédérale de procédure civile 44.1 stipule dans le sens que
91
l’applicabilité de la loi étrangère doit être traitée comme la question de droit . Mais il y a
aussi de certaines limites sur la charge de preuve que l’on verra par la suite.

B. L’interprétation de la formule « caractère de fait » de la loi étrangère.

45. Il reste à savoir si la formule d’après laquelle la loi étrangère est du fait en droit
français vise-t-elle la nature de la loi étrangère ou sa fonction dans l’application judiciaire du
droit ou tout simplement les règles de procédure relatives à la loi étrangère en droit français
positif ? Il s’agit, en effet, de l’interprétation selon laquelle la loi étrangère a la nature
intrinsèque du fait. Il est vrai que toute théorie concernant l’application de la loi étrangère
doive nécessairement partir de l’idée que dans son pays d’origine la loi étrangère possède la
92
nature intrinsèque de règle de droit . De même que la loi française, la loi étrangère est
impérative, abstraite et générale. A l’égard de l’ordre juridique du juge saisi, la loi étrangère
est privée de sa force obligatoire, certes, elle n’a pas et ne peut pas avoir pour le juge français

90
Ibid.
91
Rule 44.1 provides : Determining Foreign Law
“(…) The court’s determination must be treated as a ruling on a question of law”.
92
G. Marty, « Travaux : Rôle du juge dans l’interprétation des contrats », in, Travaux de l’Association Henri
Capitant pour la culture juridique française, Paris : Dalloz, 1950 p. 148 ; Cf. P. Mayer, Droit international
privé, 10e éd., Paris : Montchrestien, 2010, n° 179 : la loi étrangère est du droit, puisqu’elle est un élément d’un
ordre juridique et que son application par le juge aux individus détermine leurs droits et obligations ; mais
l’existence d’une loi étrangère d’un contenu déterminé est un fait.

54
la même autorité que la loi française. En effet, on peut assimiler ceci au jugement étranger
dans la mesure où il ne peut produire des effets de plano comme dans son État d’origine. Il est
difficile d’imaginer qu’une loi étrangère puisse changer de nature lorsque son application est
ordonnée en France. L’ordre que le législateur français adresse au juge français d’appliquer la
loi étrangère n’enlève pas de cette loi ce qu’elle possède ; son caractère de règle générale et
elle est impérative dans son pays d’origine. L’ordre du législateur français ne peut que
compléter cette loi. En effet il ajoute à la loi étrangère l’élément que celle-ci ne constitue pas ;
en principe la loi étrangère ne peut imposer au juge français, mais elle devient applicable par
93
ce dernier sur une sorte d’ordre du législateur .

46. Le caractère fiction de fait de la loi étrangère. Il reste à savoir comment


l’application du juge français de la loi étrangère privera celle-ci de sa nature de règle de
droit ? On peut constater que la loi étrangère pose un autre problème en matière de règles
procédurales. Plus précisément, l’idée selon laquelle la loi étrangère est du fait en droit
français peut viser non pas la nature intrinsèque du droit étranger mais sa position au regard
des règles de procédure. En affirmant que la loi étrangère est du fait, nous pouvons dire que
les règles relatives à la preuve et au contrôle de la Cour de cassation en matière de fait
s’appliquent également en matière de loi étrangère. En effet cette formule signifie que les
règles relatives à la preuve et au recours en cassation sont plus ou moins les mêmes en
94
matière de loi étrangère. Il s’agit d’une cause inventée pour justifier les effets . Ainsi le
caractère factuel de la loi étrangère est une fiction dont on se sert pour justifier les règles de
procédure relatives à cette dernière.
Parmi les interprétations d’après lesquelles la loi étrangère est un élément de fait en
95
droit français, d’après M. Batiffol , il existe des systèmes juridiques distincts. Admettant que
la loi étrangère est « une véritable loi sur le territoire qu’elle régit et pour les juges auxquels
elle s’adresse », alors que pour les juges français « la loi étrangère reste une règle générale à
appliquer à des cas particuliers », que « la règle étrangère en ayant perdu son caractère
impératif légal parce que le législateur étranger n’a pas autorité en France, conserve sa
nature d’être un ensemble de propositions générales coordonnées et hiérarchisées ». La loi

93
I. Zajtay, Contribution à l’étude…, op.cit., p. 19 et s.
94
Niboyet, « La loi étrangère : Qu’est-ce que la loi étrangère aux yeux des juges d’un pays déterminé ? »,
RDILC.1928.753, spéc. p.763.
95
H. Batiffol, Traité de droit international privé, t. I, Paris : LGDJ, 1993, p. 529-530.

55
étrangère, pour cet auteur, a vis-à-vis de la loi française un caractère doublement accidentel :
d’une part, le juge n’a pas la connaissance officielle, car la loi étrangère n’est ni promulguée
ni publiée en France, elle se prouve par des témoignages contingents et discutables. Elle se
modifie sans qu’un avis en soit donné au for. D’autre part, elle émane d’un législateur qui n’a
pas d’autorité sur le for. C’est là le caractère accidentel qu’on exprime en concluant que le
droit étranger a valeur de fait. En revanche, « le droit » a raison de la nécessité ; c’est ce qui
doit être et non ce qui se trouve être. La loi étrangère est un élément que le juge consulte sur
l’ordre du législateur étranger ; l’interprétation de la loi étrangère est celle qui est reçue « en
fait » à l’étranger et non celle que le juge du for estimerait nécessaire de déduire de son
96
contenu .

47. La conception selon laquelle la loi étrangère apparaît comme élément de fait explique
qu’elle doit être prouvée à la justice et interprétée en fonction de l’ensemble dans lequel elle
se trouve, car l’adage nemo censetur ignorare ius n’applique pas à la loi étrangère et que la
violation de la loi étrangère ne constitue pas à une violation du droit, car seule la loi française
97
a doté en France l’autorité du droit . Certes, cela peut expliquer la différence fondamentale
qui sépare la loi française de la loi étrangère. Mais nous remarquons que ces règles, en fait,
comportent de nombres d’exceptions et que, par conséquent, la valeur des arguments que l’on
peut en tirer est relative et limitée. Nous partageons l’idée de l’auteur selon laquelle au point
de vue du juge français la loi étrangère n’a pas le même caractère que la loi française et que la
loi étrangère ne constitue pas par elle-même l’impératif émanant de l’autorité à laquelle le
98
juge est soumis. D’après M. I. Zajtay , c’est à la loi française que le juge obéit même qu’il
applique la loi étrangère. Parce qu’il est fondé sur l’idée que tous les éléments du procès qui
ne répondent pas aux critères de la loi française positive sont des éléments de fait. Certes, la
loi étrangère ne possède pas tous les éléments de la loi française en vigueur. Mais il n’en
résulte pas que la loi étrangère constitue un élément de fait. Par ailleurs, si l’on admet que la
loi étrangère possède un caractère accidentel, contingent, au regard du juge français et que
c’est le propre des faits d’être accidentels, il n’en résulte pas que le droit étranger est du fait.
Car, les causes différentes peuvent donner les même effets, le prétendu caractère accidentel de
la loi étrangère et celui du fait peuvent résulter de deux causes différentes. Admettre que la

96
Id., p. 531 et s.
97
Ibid.
98
I. Zajtay, Contribution à l’étude…, op.cit., p. 24 et s.

56
formule selon laquelle la loi étrangère est un élément de fait en ce sens qu’elle est prouvée par
les parties et que sa violation ne donne pas ouverture à cassation est une formulation qui ne
peut être exacte que sous certaines réserves.

48. En Thaïlande, aucun article de la Loi de 1938 relative au conflit de lois ne dispose que
les dispositions de la loi étrangère sont des éléments de fait. Mais l’article 8 de cette loi
stipule que :
« Dans le cas où la loi étrangère sera applicable, à défaut de la preuve suffisante de
99
ladite loi, le juge devra appliquer la loi du for » .

100
Alors que la Cour thaïe a admis depuis 1925 avant l’entrée en vigueur de la Loi de
1938 sur le conflit de lois le caractère de fait à la loi étrangère, et selon le droit de procédure
civile il incombe à la partie de prouver le fait. Par ailleurs dans le cours de droit international
privé et celui de droit des preuves, on enseigne jusqu’à nos jours que le droit étranger n’est
qu’un fait devant la juridiction thaïe.

49. Nous observons que l’application de la loi étrangère dans la règle conflictuelle thaïe a
été influencée par le droit international privé anglais. C'est-à-dire que si le droit étranger est
101
un élément de fait selon la jurisprudence thaïe , c’est parce que l’on a fondé une base
uniquement dans le sens qu’il est prouvé par les parties. La doctrine thaïe semble orienter en
102
ce sens . Il faut rappeler que l’article 84/1 du CPC stipule que :

99
มาตรา ๘ แห่ ง พระราชบัญญัติว่าด้วยการขัดกันแห่ งกฎหมาย พ. ศ. ๒๔๘๑ บัญญัติว่า “ในกรณี ที่จะต้องใช้กฎหมายต่างประเทศบังคับ ถ้ามิได้
พิสูจน์กฎหมายนั้นให้เป็ นที่พอใจแก่ศาล ให้ใช้กฎหมายภายในแห่งประเทศสยาม”
100
Cour suprême Dika, n° 530/2468 (1925). En l’occurrence le litige porte sur les successions en Thaïlande
d’un étranger (appartenait du Royaume Uni), à l’époque où le traité sur l’extraterritorialité des droits anglais était
applicable. La Cour a estimé que « la loi étrangère applicable au litige est la loi anglaise sur les successions qui
est le problème de fait. Vu que le demandeur a défailli d’en prouver, alors la Cour suprême n’a pas pu trancher
ces problèmes ».
101
Cour suprême Dika, n° 804/2490 (1947).
102
V. Wattanakhun, Droit international privé, Cours de droit, Université de Thammasat, 1965, p. 215 ; Cf. P.
Kanchanachittra-Saisoonthorn, « La souveraineté de l’État et les relations juridiques selon le droit privé
international », Thammasat Law Journal, vol. 23, n°4, 1993, p. 731-760. (Réédité en 2003 disponible sur le site
http://www.archanwell.org/office/download.php?id=293&file=271.pdf&fol=1) ; K. Pinitpuwadol et S.
Narkwachara, « L’application de la loi étrangère : dans le cadre de la Loi sur le conflit de lois B.E. 2481 devant
le Tribunal central de propriété intellectuelle et commerce international », Journal du droit de propriété
intellectuelle et commerce international, 2004, p. 358- 373 ; Ch. Pachusanond, Droit international privé, op.cit. ;
P. Pivavatnapanich, Droit international privé, Bangkok : Université Thammasat, 2008, p. 222 et s.

57
« La partie qui a soulevé un tel fait pour soutenir sa plainte, la charge de preuve
103
incombe à ladite partie (…) » .

D’ailleurs l’article 84 du même Code dispose dans un sens qu’il n’est pas nécessaire
104
de prouver « le droit », car, en principe le juge doit le connaitre . Par conséquent il ne reste
que le « fait » que le demandeur devra le prouver. De même qu’en droit processuel français, le
droit thaï a également conduit à appliquer au droit étranger le régime procédural du fait ; par
exemple la Cour suprême a décidé que les parties ont manqué d’établir le contenu de la loi
étrangère devant la Cour. En l’occurrence, les parties ont la nationalité commune :
vietnamienne, et l’article 19 de la Loi de 1938 dispose que dans ce cas il faut appliquer la loi
nationale de conjoints, mais en l’absence de preuve du contenu de ladite loi, la Cour
105
s’applique la disposition du Code civil et commercial thaï au litige . Admettons que
le débat sur ce sujet n’est pas avancé et l’étude sur l’application de la loi étrangère devant
le juge thaï est insuffisante. Une fois que le litige constitue un élément d’extranéité,
à condition que les parties veuillent que la loi étrangère soit prise en considération, quand bien
même il s’agit le cas du choix de la loi étrangère par les parties, celles-ci sont tenues
d’invoquer un tel caractère pour que le juge puisse appliquer la règle de conflit des lois.
Ensuite ce sera la tâche des parties de rapporter la preuve du contenu de cette loi étrangère,
y compris les témoins experts.

§ 2 : Rejet du principe d’assimilation de la loi étrangère à la loi du for.

50. Il existe aussi la théorie qui soutient l’assimilation du droit étranger à la loi du for.
Cette théorie a pour l’objectif d’admettre un élément de droit à la loi étrangère. Nous nous
intéressons d’abord à l’argument d’une admission du droit étranger au statut de règle de
droit (A). En effet tous les États acceptent de réserver une certaine place aux lois étrangères,
dans ce cas, ils ne revendiquent pas une compétence exclusive et absolue. Mais on ne peut pas
en déduire cette attitude comme une acceptation que la loi étrangère est assimilée à la loi du
juge du for. En effet le principe d’assimilation de la loi étrangère à la loi du for est retenu en

103
มาตรา ๘๔/๑ แห่ งประมวลกฎหมายวิธีพิจารณาความแพ่ง บัญญัติว่า “คู่ความฝ่ ายใดกล่าวอ้างข้อเท็จจริ งเพื่อสนับสนุนคาคู่ความของตน ให้
คู่ความฝ่ ายนั้นมีภาระการพิสูจน์ขอ้ เท็จจริ งนั้น (...)”
104
Le droit est qualifié comme un fait connu généralement par tous donc les parties n’ont pas besoins de
prouver selon l’article 84 (2) du Code de procédure civile.
105
Cour suprême Dika, n° 1950/2529 (1986).

58
droit anglais, même si la Thaïlande adoptait certain nombre de règles sur le conflit de loi
britannique pourtant ce principe n’a pas été retenu en droit thaï. On verra par la suite la
conséquence du déni l’élément de droit de la loi étrangère (B).

A. L’admission de la loi étrangère au statut de règle de droit : l’argument


critiqué.

51. Pour la distinction du fait et du droit, rappelons que « l’application de la loi est
106
toujours impérative pour le juge qui statue en son nom » et le juge est « par sa désignation
107
même, chargé spécialement de la connaître » . Ceci affirme que les règles de droit ne font
pas l’objet d’une preuve des parties, et que le juge doit les rechercher lui-même. La preuve de
la loi étrangère a été pendant longtemps à la charge des parties, dans les systèmes juridiques
français et thaï, car il était admis que cette loi n’était qu’un simple fait du procès et le juge
devrait respecter la neutralité dans le procès.

52. En dépit des critiques adressées par la doctrine autorisée à l’égard de cette solution,
celle-ci a perdu son terrain pendant une longue période au mépris de considérations inhérentes
au bon règlement des conflits de lois dans l’espace. Citons l’arrêt de la Chambre civile du 13
108
janvier 1993 . Il y a une solution qui permet de saisir la loi étrangère comme un aspect
factuel du litige. En bien, avec cet arrêt, la Cour de cassation change son attitude en
démontrant le contraire que « les juges du fond appliquent et interprètent souverainement la
loi étrangère laquelle, malgré l’absence de contrôle par la Cour de cassation, est une règle
de droit qui ne relève pas des prescriptions de l’article 7 du NCPC ». Les juges du fond
détiennent ainsi un pouvoir qu’ils n’ont pas sur les faits et qui est celui d’exploiter une
109
connaissance personnelle . Il en résulte de cette nouvelle solution l’abandon de l’ancienne
conception de la loi étrangère. Puisque celle-ci présente un régime procédural particulier lié à
son caractère extranéité, la loi étrangère conserverait toujours son essence juridique. Cette

106
P. Esmein, Cours de droit civil français d’après la méthode de Zachariae, 6e éd., t. XII, Paris : Marchal et
Billard, 1958.
107
F. Gény, Méthode d’interprétation et sources en droit privé positif, 2e éd., t. I, Paris : LGDJ, 1919, p. 352.
108
Cass.1er civ., 13 janvier 1993, Coucke, préc. supra note n° 88 ; V. aussi J. Lemontey et J.-P. Ancel, André
Ponsard, un internationaliste à la Cour de cassation, in, Mél. Ponsard, Paris : Litec, 2003 p.212.
109
B. Ancel, note sous Cass.1er civ., 13 janvier 1993, Coucke, op.cit., p. 80, supra note n° 88.

59
attitude de la Cour de cassation nous fait penser que lorsque le caractère juridique est
clairement reconnu à la loi étrangère, il revient obligatoirement au juge d’en établir ex officio
la teneur, les questions de droit relevant de sa compétence exclusive. Certes, l’article 12,
1er al. du CPC, qui met l’obligation au juge d’appliquer les règles de droit appropriées au
litige, affirme cette opinion. Étant donné que la loi étrangère est du droit, le juge doit
obligatoirement l’appliquer, cela suppose un rôle du juge dans la recherche de sa teneur dès
lors que cette loi est désignée par la règle de conflit pour régir le rapport en cause. Le
manquement des juges du fond à ce devoir entraîne la censure de leur décision par la Cour de
cassation comme l’on a déjà vu plus haut.

53. Parmi les opinions admettant le statut de droit à la loi étrangère, M. P. Mayer,
cependant conteste une incidence de l’accession de la règle de droit étranger au statut de règle
de droit sur le régime de l’établissement de la loi étrangère. Son avis mérite d’être rappelé
encore, d’après cet auteur, il faut distinguer l’essence de l’existence de la règle de droit
étranger : « la loi étrangère est du droit, puisqu’elle émane d’un État et que son application
par le juge aux individus détermine leurs droits et obligations, mais l’existence d’une loi
étrangère d’un contenu déterminé est un fait. Par exemple, la règle chilienne qui interdit le
divorce est une règle de droit, mais c’est un fait susceptible d’être prouvé, que le droit chilien
prohibe le divorce. On dirait autant de la loi française ; mais son aspect factuel est masqué par
la connaissance obligatoire du juge de son contenu qui supprime les problèmes de
110
preuve » . De nos jours, il est permis d’affirmer que la qualification juridique de la loi
étrangère n’entraîne pas systématiquement une parfaite parité entre loi étrangère et loi du for
sous le rapport de la mise en œuvre du droit désigné. Certes, on peut dire que la loi étrangère
est toujours du droit mais son application envisage des difficultés lors de la mise en jeu par le
juge saisi du droit du for en raison du caractère extranéité. Il ressort que l’affirmation du
caractère juridique de la loi étrangère n’empêche point ladite loi d’être assujettie au stade de
son application à un régime particulier. Ainsi c’est dans ce sens que l’arrêt Coucke doit être
compris.

54. Le recours à l’article 12, al. 1er du CPC en tant que support de l’obligation semble en
l’occurrence impraticable. On voit que c’est le juge qui est tenu d’appliquer effectivement
toutes les règles de droit quelle que soit la nature des droits litigieux ou l’origine de la norme

110
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., p. 132 et s.

60
en question. Dès lors, aucune place n’est réservée au bon vouloir des juges lors de la mise en
jeu des dispositions juridiques. C’est-à-dire on ne voit pas pourquoi la référence à cette
111
disposition serait partielle. Le souci d’esquiver cette incohérence, estime M. E. Bostanji ,a
conduit la jurisprudence française à renoncer à ce visa lors de l’invocation de la règle de
conflit normalement appliquée au litige. Cette renonciation s’imposait du moment que
l’obligation du juge de soulever d’office la règle de conflit a été limitée par la solution de
112
l’arrêt Sté Coveco bien que les règles de conflit de lois aient un caractère de droit.

55. En droit thaï, l’article 8 de la Loi de 1938 relative au conflit de lois dispose ainsi :
« Dans le cas où la loi étrangère sera applicable, à défaut de la preuve suffisante de
113
ladite loi, le juge devra appliquer la loi du for » .

A priori, les juges thaïs traitent la loi étrangère comme un fait dont la partie qui aura
l’intérêt devrait prouver sa teneur. Admettons que la doctrine ne traite pas beaucoup sur le
statut de la loi étrangère devant la Cour thaïe, mais à notre avis, la qualification de fait de la
loi étrangère a uniquement pour l’objectif procédural, de même que le cas français.
Le législateur thaï a utilisé le terme « loi étrangère » dans l’article 8, après avoir l’analysé,
on estime que la règle étrangère de conflit des lois doit être aussi prise en compte également.
Car, les parties devraient invoquer son application et rapporter la preuve nécessaire ; le juge
n’est pas tenu d’avoir la connaissance de règle conflictuelle étrangère. Certes, rien ne conteste
le caractère de droit de la règle étrangère de conflit des lois, mais lorsque cette règle de droit
est entrée dans l’ordre juridique thaïlandais, le juge du for ne pourrait pas abandonner son
pouvoir souverain en appliquant cette loi étrangère en tant que règle de droit. Il semble que
le système juridique thaï ne retient pas la thèse de l’égalité entre les règles de droit thaï et
celles de droit étranger.

B. La conséquence du déni de l’élément de droit de la loi étrangère.

111
E. Bostanji, L’évolution du traitement réservé à la loi étrangère en matière de statut personnel, Thèse,
Dijon, 2000.
112
Cass.1er civ., 4 décembre 1990, Sté Coveco, RCDIP.1991.558, note M.-L. Niboyet-Hoegy ; JDI.1991.371,
note D. Bureau.
113
V. le texte en thaï, supra note n° 99.

61
56. L’application d’office la règle de conflit présente un rapport avec l’obligation de
rechercher d’office le contenu de la loi étrangère. Il réside dans le fait que la finalité de la loi
internationalement compétente est de recevoir application dans le rapport de droit en cause.
Mais le problème se pose si la preuve de cette loi n’est qu’une tâche des parties, celles-ci
pourraient s’entendre pour rendre l’application de la lex fori en ne pas recherchant la teneur
du droit étranger. L’arrêt Bisbal en est un exemple. C’est pourquoi la doctrine actuelle
considère que la solution d’application d’office de la loi étrangère et l’obligation reposant sur
le juge d’en établir la teneur, n’est pertinente que pour les droits dont les parties n’ont pas la
libre disposition de leurs droits, car, dans la matière de droits indisponibles, la solution
contraire « viderait de presque tout son intérêt le renversement de la jurisprudence
114
Bisbal » . Alors que dans la matière de droit disponible, les parties ont souvent exercé leur
liberté de choix de règles de droit applicable au litige d’après le principe de l’autonomie de la
volonté, donc elles doivent garder elles-mêmes leurs propres intérêts.

57. En droit thaï, le problème se pose lorsque la partie n’a pas pu présenter la preuve
devant la Cour, car le juge ne peut en aucun cas nier de trancher le litige sous prétexte qu’il
n’y a pas de loi applicable ; ce sera le déni de justice. Le juge thaï fera alors recours à la loi du
115
for . Certains pays tels que le Royaume Uni, le Canada, ont les dispositions qui présument
qu’en cas de faillite de preuve de la loi étrangère, il est présumé que cette loi étrangère ait le
même contenu que leur droit interne. La loi thaïe écarte cette présomption qui est critiquée
116
par des juristes et de même par certain auteur qui a estimé que cette méthode n’est pas
logique et difficile à comprendre puisque le juge sait que sa loi est différente de la loi
étrangère en cause. Malgré l’influence de loi britannique, le droit thaï semble ne pas admettre
la preuve de la loi analogue ou la loi plus proche appartenant au même système juridique en
cas d’impossibilité de prouver la loi étrangère en cause. On se réfère toujours la jurisprudence
de la Cour suprême.

114
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 183.
115
L’article 8 de la Loi de 1938 sur le conflit des lois, précité.
116
M. Wolff, Private International Law, Great Britain : Oxford University Press, 1945, p. 222-223.

62
Section II
Obligation d’établir le contenu de la loi étrangère.

58. Qui doit établir le contenu du droit étranger ? La jurisprudence est incertaine sur ce
point. Dans un premier temps, elle décide qu’il incombe, en principe, aux parties d’établir la
teneur de la loi étrangère. Le juge n’est pas tenu de rechercher d’office le contenu de la
117
dernière, mais seulement la faculté . Toutefois dans un second temps la Cour de cassation a
118
décidé en 2002 que c’est la tâche du juge saisi de rechercher la teneur du droit étranger
afin de trancher le litige. D’après la pratique de la Haute juridiction, un nouveau critère a été
consacré : le droit disponible ou le droit indisponible. C’est-à-dire qu’il dépend du litige
dont relève la matière où les parties ont la disponibilité de leurs droits ou non. Cela nous
amène à étudier depuis l’origine dudit critère.

Nous verrons tout d’abord les critères usagés en droit français et la différence en droit
thaï (§1). Ensuite, on verra qu’en est-il si la teneur de la loi étrangère n’a pas été établie (§2) ?

§1 : L’évolution des critères employés.

59. Il paraît que les critères retenus par le juge français est différent de ceux de la loi thaïe.
En France, le juge retient les critères des droits disponibles ou indisponibles. La difficulté
réside dans la détermination des matières où les parties ont la libre disposition de leurs droits
(A). Alors qu’en droit thaï, la solution d’établissement de la teneur de la loi étrangère a été
stipulée dans l’article 8 de la Loi de 1938 relative au conflit de lois (B).

A. La disponibilité ou l’indisponibilité de droit selon le droit français.

60. Afin d’y procéder, il faut pencher sur le rapport des critères de droits disponibles et
indisponibles avec l’application de la loi étrangère (1). Suite à la détermination de la libre
disposition des droits nous verrons la répartition de la tâche du juge et des parties résultant de
ces critères (2).

117
Cass.1er civ., 8 juin 1971, Bull.civ.I.184 ; D. 1971, som.177 ; Cass.1er civ., 22 avril 1975, Bull.civ.I.138,
RCDIP.1976.744.
118
Cass.1er civ., 18 septembre 2002, Sporting, RCDIP.2003.88, note H. Muir-Watt ; JDI.2003.107, note Péroz.

63
1) L’origine du caractère disponible ou indisponible.
a. La détermination de la libre disposition des droits.
61. En présence d’une règle de conflit bilatérale, nous serions tentés de proposer la
référence au droit français, car la loi étrangère n’est pas appliquée de sa propre initiative, mais
par l’intermédiaire de la règle française de conflit de lois. Soit on doit adopter les mêmes
critères qu’en droit interne, soit on peut exercer plus librement le droit international privé en
tenant compte de la relativité du choix des éléments de rattachement. La solution à apporter
consiste à l’idée que la faculté de renonciation des parties à l’application de la loi compétente
119
doit être possible, selon Mme D. Alexandre , nonobstant la loi compétente est la loi
française ou bien lorsqu’il s’agit d’une loi étrangère. Puisque la règle de conflit française est
obligatoire pour le juge français quelle que soit la loi qu’elle désigne, mais elle n’est
impérative que dans les matières où les parties n’ont pas la disponibilité de leurs droits.
120
D’après l’arrêt Bisbal le juge pouvait soulever d’office la règle de conflit, ensuite les
121 122
arrêts Rebouh et Schule imposent au juge de soulever d’office de la règle de conflit en
toutes matières. La Cour de cassation a finalement trouvé une solution intermédiaire dans
123
l’arrêt Sté Coveco . Dans cet arrêt, a priori, elle considère que le juge n’était tenu de
soulever d’office la règle de conflit que dans deux cas : lorsqu’il était en matière où les parties
n’ont pas la libre disposition de leurs droits d’une part, et lorsque la règle de conflit émane
d’une convention internationale d’autre part. Cependant il semble que la Cour de cassation
supprime le critère tiré de l’origine conventionnelle de la règle de conflit. En même temps,
elle consacre un nouveau critère fondé sur la disponibilité ou l’indisponibilité des droits. Mais
124
la notion n’est pas certaine .

119
D. Alexandre, « Les problèmes actuels posés par l’application des lois étrangères en droit international privé
français », in Les problèmes actuels posés par l’application des lois étrangères, Travaux de l’Institut de Droit
comparé de Strasbourg, Paris : LGDJ, 1988, p. 21.
120
Cass.1er civ., 12 mai 1959, Bisbal, RCDIP.1960.62 note H. Batiffol ; JDI.1960.810, note J.-B. Sialelli ;
D.1960.610, note Malaurie ; J.C.P.1960.II.11733, note H. Motulsky ; GA, n° 32.
121
Cass.1er civ., 11 octobre 1988, Rebouh, RCDIP.1989.368 ; V. aussi la chronique de Y. Lequette, L’abandon
de la jurisprudence Bisbal, p.277 ; JDI.1989.349, note D. Alexandre ; Gaz.Pal. 1989.I.388, note E.S. de la
Marnière ; JCP.1989.II.21327, obs. P. Courbe.
122
Cass.1er civ., 18 octobre 1988, Schule, RCDIP.1989.368 ; JDI.1989.349, note D. Alexandre ;
J.C.P.1989.II.21259, obs. J. Prévault. ; GA, n° 74-78.
123
Cass.1er civ., 4 décembre 1990, Sté Coveco., préc. supra, note n° 112.
124
H. Fulchiron et C. Nourissat, Travaux dirigés de droit international privé, 2e éd., Paris : Litec, 2003,
p. 55-70.

64
En effet la notion de libre disponibilité des droits apparue en droit interne, elle se
rapporte aux biens ou aux droits subjectifs dont les parties peuvent disposer. Plus précisément
125
le droit subjectif signifie « la faculté de disposer librement d’un tel droit » . Au plan
procédural, les parties sont libres de choisir le règlement des différends comme elles
souhaitent ; le recours devant les juridictions étatiques ou l’arbitrage. Par ailleurs le titulaire
de ce droit peut y renoncer sous quelque forme ; un accord procédural par exemple. On entend
également la notion de l’indisponibilité des droits, il s’agit de notion employée par
126
l’Assemblée plénière de la Cour de cassation afin d’exprimer le sens opposé à la
disponibilité des droits. Pour que cette notion se traduit une restriction à la liberté du titulaire
127
de tel droit .

62. En ce qui concerne les règles de conflit d’origine conventionnelle qui abondent
précisément dans ces matières, telles les obligations contractuelles et délictuelles. Certes, la
Cour de cassation française impose l’obligation de rechercher le contenu de la loi étrangère
128
désignée . Il reste à savoir quelle loi attribue aux droits litigieux le caractère disponible ou
indisponible ? La loi étrangère désignée par la règle de conflit, ou la loi du for ? Ainsi que
l’on a vu précédemment, on se réfère ici et à ce jour exclusivement à la lex fori ; les règles de
conflit d’une part, et les règles substantielles de l’autre. Les dernières étant préférées aux
premières en vertu d’une règle procédurale du for ; l’article 12, alinéa 3 du CPC. Dès lors,
c’est au sein de la lex fori que l’on devra rechercher si les parties ont la libre disposition de
leurs droits.

b. La solution critiquable.

125
B. Fauvarque-Cosson, Libre disponibilité des droits et conflits de lois, Paris : LGDJ, 1996, n° 93.
126
Ass. plén., 31 mai 1991, D. 1991, Somm. comm., p. 318, obs. J.-L. Aubert ; JCP.1991.II.21752, concl. H.
Dontenwille et note Fr. Terré ; Petites affiches, 23 octobre 1991, n°127, p. 4, note M. Gobert.
127
B. Fauvarque-Cosson, loc.cit.
128
B. Fauvarque-Cosson, « Le juge français et le droit étranger », D. 2000, Chron., p. 126-131. La mise en
œuvre de ce critère engendre des difficultés quasiment insurmontables. Les interrogations subsistent bien qu’on
tienne pour résolue la question de la loi susceptible de dire le droit disponible. La Cour de cassation devra définir
le concept et préciser si ces droits, au départ indisponibles, peuvent devenir disponibles s’ils sont d’ordre
patrimonial. Il faut rappeler que le fait que des règles impératives aient vocation à s’appliquer ne rend pas
nécessairement le droit indisponible ; dès lors il faut éviter la confusion avec la notion de règle supplétive. En
réalité, le rapprochement devrait se faire avec la notion de droit patrimonial car « il n’y a pratiquement pas de
droit patrimonial qui ne soit disponible si l’on se place au moment où le litige relatif à ce droit est né ».

65
63. L’office des juges du fond varie exclusivement selon la nature des droits litigieux.
Ainsi ce critère est devenu le fil conducteur pour la compréhension du système actuel de la
129
jurisprudence sur l’application d’office la règle de conflit. Un auteur nous a montré que
depuis les arrêts du 26 mai 1999 le principe controversé de l’absence d’obligation d’appliquer
d’office la règle de conflit de lois acquiert une vitalité qu’il n’avait jamais eue. D’ailleurs, le
recours à la libre disponibilité des droits pourrait donner lieu à certaines objections, aussi bien
sur le plan théorique que pratique. En droit interne, cette notion est sans incidence sur l’office
du juge. Il reste à savoir pour quelle raison elle l’est en droit international privé. Si la règle
conflictuelle doit obligatoirement applicable, c’est parce qu’elle est du droit.
La nature disponible des droits litigieux confère une certaine liberté aux parties quant
aux choix des règles de droits applicables. La Cour de cassation a privilégié la démarche
particularisée, d’abord utilisée pour l’accord procédural puis transposée à la recherche du
droit étranger. Cette manière de raisonner implique de délicates distinctions, lorsque le procès
porte à la fois sur les droits disponibles ou indisponibles. Cela peut expliquer que lorsque les
plaideurs invoquent l’existence d’un accord procédural, la question de la disponibilité du droit
devra être tranchée également. Il semble inévitable que la Cour de cassation exerce son
contrôle sur la notion de droit disponible, tant elle est devenue centrale dans la mise en œuvre
130
des conflits de lois .

64. Quelle est la tâche du juge qui constate que l’une des parties invoque l’applicabilité
d’une loi étrangère sans préciser suffisamment la teneur, surtout sans démontrer que le
résultat d’une application de la loi étrangère diffère de celui qui résulterait d’une application
131
de la loi française ? Dans un arrêt de la Chambre commerciale du 11 mars 2003 , certes
dans la matière où les parties ont la disponibilité de leurs droits, la Cour a refusé de
sanctionner les juges du fond qui n’avaient pas procédé à une recherche sur la teneur du droit
étranger. C’est la cohabitation entre la solution de la charge de preuve posée par l’arrêt

129
Ibid.
130
Ibid.
131
Cass.com, 11 mars 2003, Banque Worms, pourvoi n° 00-15982, Gaz.Pal., 25 juin 2003, n° 176/177, p. 33 et
la chron. M.-N. Jobard-Bachelier.

66
132 133
Amerford et Sea Land avec l’obligation rigoureuse du juge du fond de rechercher la
teneur de la loi étrangère posée par l’arrêt Lavazza.

2) La répartition des tâches entre le juge et les parties envers le critère des droits
disponibles et des droits indisponibles.
a. Les obligations du juge en cas d’indisponibilité des droits.
65. Quand bien même cette matière exclue de notre étude, mais elle mérite d’être étudiée
pour connaître la différence par rapport à la matière de droits disponibles. La Cour de
cassation considère que lorsque les parties n’ont pas la libre disposition de leurs droits, le juge
est tenu de soulever d’office la règle de conflit. Dès lors, on peut constater que dans l’arrêt
134
Mme Elkhbizi (2ème esp.), la Cour reproche à la Cour d’appel de Versailles de n’avoir pas
soulevé d’office l’application de l’article 311-14 du Code civil. Il s’agit de l’action en
recherche de paternité, les juges du fond auraient dû appliquer la loi personnelle de la mère au
jour de la naissance de l’enfant afin de vérifier si selon cette loi une telle action était possible.

66. Il convient de souligner la différence entre l’arrêt Sté Coveco et l’arrêt Mme Elkhbizi
fondée sur l’application de l’article 3 du Code civil. La Cour de cassation s’appuie sur ce
texte afin de confirmer qu’il est obligé aux juges français, pour les droits indisponibles,
d’appliquer la règle de conflit de lois. Force est de constater que la Cour affirme de façon
implicite d’application d’office de la règle conflictuelle qui désigne le droit étranger. L’article
12 alinéa 1er du CPC aux termes duquel « le juge tranche le litige conformément aux règles du
droit qui lui sont applicables ». Pour mieux respecter, on souhaite de reprendre ici les
développements de M. H. Fulchiron : « si la Cour de cassation avait persisté sur ce
fondement, elle n’aurait pas pu opérer une distinction entre les droits disponibles et les droits
indisponibles par rapport à l’office du juge, car, selon ce texte, le juge doit toujours appliquer
les règles de droit, donc les règles de conflit de lois, sans aucune distinction quant à la nature

132
Cass.com., 16 novembre 1993, Amerford, RCDIP.1994.322, note P. Lagarde ; JDI.1994.98, note J.-B.
Donnier ; GA, n° 82 ; Cass.1er civ., 11 juin 1996, Agora, RCDIP.1997.65, note Lagarde ; JDI.1996.941, note
Bureau.
133
Cass.com., 2 mars 1999, Sea Land, RCDIP.1999.305, rapport Rémery.
134
Cass.1er civ., 26 mai 1999, Mme Elkhbizi, 2ème esp., RCDIP.1999.707, note H. Muir-Watt ;
JCP.1999.II.10192, note F. Mélin ; GA, 4e éd., 2001, n°78 : la Cour de cassation reproche aux juges du fond de
n’avoir pas soulevé d’office l’élément d’extranéité. En l’espèce, Mme Elkhbizi est titulaire d’une carte de
résident, alors elle a nationalité étrangère. Mais il s’agit de matière du droit indisponible, les juges auraient dû
soulever d’office cet élément d’extranéité.

67
135
des droits » . Pour la règle procédurale, l’article 7 alinéa 2 du CPC dispose que « parmi les
éléments du débat, le juge peut prendre en considération même les faits que les parties
n’auraient pas spécialement invoqués au soutien de leurs prétentions ». Selon ce texte, les
juges ne sont pas obligés de relever les faits présents dans le débat. C’est-à-dire le juge
pourrait être tenté d’ignorer l’élément d’extranéité et enfin de ne pas appliquer la règle de
conflit. Dès lors, pour éviter le risque de n’avoir pas soulevé cet élément par le juge du fond,
la Cour de cassation se détache des textes de CPC parce qu’il s’agit d’un litige international et
136
impose au juge de soulever d’office l’élément d’extranéité . Il faut observer que l’on ne
parle jamais de la loi étrangère sans l’application d’office la règle de conflit de lois ; c’est la
règle conflictuelle que le juge ferait un appel afin de vérifier si cette loi étrangère est
compétente.
De nos jours, on peut faire la clôture du débat en matière de droits indisponibles, car
l’affirmation de la Cour de cassation est nette selon qu’il incombe au juge français, pour les
droits indisponibles, de mettre en œuvre la règle de conflit de lois et de rechercher le droit
137
désigné par cette règles .

b. Les devoirs des parties en cas de disponibilité des droits.


67. La Cour dans l’arrêt Amerford a affirmé que « le cas où les parties ont la disponibilité
de leurs droits, il incombe à la partie, qui prétend que la mise en œuvre de la loi étrangère
désignée par la règle de conflit de lois conduirait à un résultat différent de celui obtenu par
application du droit français, d’établir cette différence de contenu ; à défaut, le droit français
138 139
s’applique en raison de sa vocation subsidiaire » . Dans l’arrêt Sea Land , elle estime
par ailleurs que les juges du fond n’ont pas à se substituer à la partie qui n’a pas prouvé le
contenu qui lui serait favorable du droit étranger. C’est-à-dire que les juges n’ont pas à
procéder à une recherche, en quelque sorte complémentaire et qui leur serait propre du droit
étranger. Reste à savoir si le juge est tenu de procéder à la mise en œuvre de la loi étrangère

135
H. Fulchiron et C. Nourissat, Travaux dirigés…, loc.cit.
136
Ibid.
137
Cass. 1er civ., 3 mars 2010, pourvoi n° 09-13.723, D.2010.709, obs. I. Gallmeister
138
Cass. com., 16 novembre 1993, Amerford, op.cit., supra, note n° 132.
139
Cass. com., 2 mars 1999, Sea Land, op.cit., supra, note n° 133.

68
déclarée applicable ? La réponse est positive ; lorsqu’il a pris l’initiative de résoudre le conflit
140
de lois auquel les parties étaient restées indifférentes, en appliquant la loi étrangère .

141
68. Dans l’arrêt Sté Hannover International que la Cour de cassation est allée
beaucoup plus loin dans son raisonnement, en affirmant que l’accord pouvait désigner la loi
du for malgré l’existence d’une convention internationale. C’est-à-dire qu’on offrait la
possibilité aux parties de ne pas respecter, par un accord entre elles, des règles de conflit
d’origine conventionnelle, alors que le juge était tenu de soulever d’office l’application des
règles de conflit d’origine des conventions internationales. Il semble que l’on a laissé le choix
plus large pour les parties quant à la loi désignée. Dans l’arrêt Sté Hannover International, la
Cour de cassation limitait le choix des parties à la désignation de la loi du for dont la loi
française. Mais la Cour affirme dans l’arrêt Sté Delta Draht en 1999 que les parties peuvent
s’accorder sur l’application « d’une loi autre que celle désignée par une convention
142
internationale ou une clause contractuelle » . Cette loi n’est pas forcément la loi française.
Cependant il faut remarquer qu’en l’occurrence l’accord portait sur le droit français.

69. L’application uniquement au cas d’invocation explicite. Dans la décision de la


Chambre commerciale du 5 février 2002, la Cour de cassation a décidé que « lorsqu’aucune
demande d’application du droit étranger n’est pas explicite quant aux dispositions
éventuellement applicables, ni même expressément formulée », que seule une référence y est
faite, sans qu’en soit déduite « une conséquence juridique quant à la solution du litige,
143
différente de celle résultant de l’application de la loi française » , le juge n’est pas tenu de
se prononcer sur la loi applicable ni d’en rechercher le contenu. En effet le défaut d’allégation
suffisamment expresse en l’espèce, autorise le juge à ne pas procéder à une recherche du droit
applicable et, en conséquence, le soustrait à une recherche obligatoire du contenu de la loi
étrangère. Telle est également la position prise par la première Chambre civile dans l’arrêt du

140
Cass.1er civ., 5 octobre 1994, Demart, RCDIP.1995.60, note D. Bureau ; Cass.1er civ., 27 janvier 1998,
Ababou, JCP.1998.II.10098, note H. Muir-Watt et Calberson.
141
Cass.1er civ., 6 mai 1997, Sté Hannover International, RCDIP.1997.514, note B. Fauvarque-Cosson ;
JDI.1997.804, note D. Bureau ; JCP. (G) 1997, IV, 1326 ; GA, n° 84.
142
Cass.1er civ., 26 mai 1999, Sté Delta Draht GmbH, J.C.P.1999.IV.2324 ; Droit et patrimoine 1999, n°77,
p.92, obs. F. Monéger.
143
Cass.com., 5 février 2002, B. Jacob, pourvoi n° 97-20193, inédit.

69
144
28 janvier 2003 . Selon la Cour, « s’agissant de droits disponibles, le juge n’est tenu de
mettre en œuvre la règle de conflit adéquate et d’appliquer le droit étranger qu’elle désigne
que dans la mesure où ce droit est expressément invoqué par une partie (...), et les parties
ayant fondé leur argumentation sur ce droit(…). Mais la Cour a constaté que « la référence
faite par M. X à la loi de l’État de New York se limitant à une simple allégation concernant la
constitution de la société Jaloc, de laquelle aucune demande n’était déduite ». D’après ces
deux arrêts on peut dire que l’obligation pour le juge de mettre en œuvre la règle de conflit
rattache au fait que l’une des partie doit invoquer expressément l’application de règles de
conflits et de loi étrangère résultant de ces règles. A défaut de ceci, la loi française
s’appliquait en raison de sa vocation subsidiaire.

70. L’infirmation les critères de droits disponibles et indisponibles. On trouve que le


critère des droits disponibles et des droits indisponibles pour déterminer les devoirs respectifs
du juge et des parties afin d’établir la teneur du droit étranger n’est pas pertinent. La solution
145
des arrêts de la Cour de cassation rendus en 2002 ; on constate que la Cour de cassation
dans les derniers arrêts avait également sanctionné les juges du fond qui n’avaient pas
recherché le contenu des lois étrangères désignées par la règle française de conflit. La Cour de
cassation affirmait qu’à propos de l’opposabilité d’un changement de créancier au débiteur
146
d’une dette de loyers, donc d’une action d’« intérêt privé » qu’« il appartient au juge saisi
de l’application d’un droit étranger de procéder à sa mise en œuvre et, spécialement, d’en
147
rechercher la teneur afin de trancher le litige selon ce droit » . En effet, la solution retenue
par les juges du fond dans l’arrêt du 18 juin et du 18 septembre 2002 peut rapprocher à celle
148
de l’arrêt Amerford . C’est-à-dire que le juge s’appliquait d’office la règle de conflit

144
Cass.1er civ., 28 janvier 2003, Jaloc Associates, RCDIP.2003.462, note B. Ancel ; Droit et patrimoine,
2003, p. 95, obs. F. Monéger.
145
Cass.1er civ., 18 juin 2002 ; 18 septembre 2002 et 22 octobre 2002, RCDIP.2003.86, note H. Muir Watt ;
JDI.2003.107, note H. Peroz.
146
Le juge a encore l’obligation de procéder à la mise en œuvre de la loi étrangère déclarée applicable lorsque,
même en présence d’une action d’intérêt privé, il a pris l’initiative de résoudre le conflit de lois auquel les parties
étaient restées indifférentes, en appliquant le droit étranger (Cass.1 er civ., 5 oct 1994, RCDIP.1995.60, note
D. Bureau)
147
Cass. 1er civ., 18 septembre 2002, Sporting, op.cit., supra, note n° 118.
148
Cass. com., 16 novembre 1993, Amerford, op.cit., supra, note n° 132 : c’est à la charge de la partie qui a
invoqué l’applicabilité de la loi étrangère de prouver que le contenu de celle-ci est différente de celui de la loi
française.

70
lorsque la partie ayant intérêt pouvait rapporter la preuve que son contenu est différent de
celui de la loi française. A défaut de cette preuve, c’est la lex fori qui s’appliquait en raison de
sa vocation subsidiaire. Mais, dans l’arrêt Amerford, la Cour de cassation a expressément
référé dans sa décision au critère de la disponibilité des droits, alors cette solution n’a pas une
149
vocation universelle .
En 2005, deux arrêts de la première Chambre civile et de la Chambre commerciale du
28 juin 2005 comportent la même solution fondée sur une motivation identique. Des deux
arrêts que la motivation de cassation est la même ; « il incombe au juge français qui
reconnaît applicable un droit étranger, d’en rechercher, soit d’office soit à la demande
d’une partie qui l’invoque, la teneur, avec le concours des parties et personnellement s’il y a
lieu, et de donner à la question litigieuse une solution conforme au droit positif
150
étranger » . Certes, les deux arrêts ont été rendus à propos de matières qui relèvent des
droits disponibles, il est à noter que les deux Chambres de la Cour de cassation n’ont pas fait
référence à la nature du droit litigieux dans ses motivations. Dans cette hypothèse, il reste à
savoir si la solution constitue par les deux arrêts a le caractère universelle dans la mesure où
leurs motivations peuvent être appliquées en toutes matières ; soit disponibles soit
151
indisponibles . D’après M. J.-G. Mahinga, la Cour de cassation ne semble plus attacher de
l’importance à la distinction entre droits disponibles et indisponibles quant à l’obligation de
152
recourir à la règle de conflit . Certes, on peut s’étendre cette solution à l’obligation
d’établir la teneur de la loi étrangère. Comme on a vu que la Cour de cassation affirma que
c’est dans tous les cas l’office du juge d’établir la teneur de celle-ci, même en l’absence de
demande de cette partie. Pourtant la solution de l’arrêt Amerford (la charge de preuve

149
V. en outre J. Lemontey et J.-P. Remery, La loi étrangère dans la jurisprudence actuelle de la Cour de
cassation, in Rapport de la Cour de cassation, 1993, Paris : La Documentation française, 1994, p. 90.
150
Cass.1er civ., 28 juin 2005, Aubin ; Cass.com., 28 juin 2005, Itraco, RCDIP.2005.645, note B. Ancel et H.
Muir Watt. Dans l’arrêt Aubin, un acte notarié dressé en Allemagne était en cause. Il s’agissait de déterminer la
loi applicable à la force probante attachée aux énonciations de l’acte. Les juges du fond avaient retenu la
compétence de droit allemande que désignait la règle de conflit française. Cependant, les juges du fond ont
appliqué la loi française en ayant constaté que la partie qui avait soulevé l’application de la loi allemande
n’établissait pas la teneur de celle-ci. Dans l’arrêt Itraco, le litige portait devant la Chambre commerciale sur des
préjudices consécutifs à des dommages survenus à l’occasion d’un transport maritime. La loi australienne
Carriage of Goods by Sea Act a été désignée dans les connaissements mais les juges du fond appliqueront au
litige les règles de Hambourg de 1978 (loi du for) au motif que la société demanderesse qui se prévalait de
l’application de la loi australienne avait failli à établir sa teneur.
151
J.-G. Mahinga, « L’office du juge français en présence du droit étranger », note sous Cass. 1er civ., 28 juin
2005 et Cass.com., 28 juin 2005, Petites Affiches, 28 décembre 2005, n° 258, p. 16-23, spéc. p. 19.
152
V. aussi Cass.1er civ., 11 janvier 2005, RLDC.2005.588 ; D. 2005.2924, note J.-G. Mahinga. V. Cass. 1er
civ., 3 mars 2010, n° 09-13.723, D.2010.709, obs. I. Gallmeister.

71
incombée aux parties) se trouve sa limite en matière de droits indisponibles, la matière où
153
l’intérêt général ou l’intérêt public ne peuvent être abandonnés par les intérêts privés .

71. Les arrêts du 28 juin permettent d’interpréter que la partie impliquée peut aussi faire la
demande devant le juge du fond pour que celui-ci recherche la teneur de cette loi, bien qu’il y
ait la possibilité de l’établir elle-même. Cependant le terme employé par la Cour peut être
considéré que l’obligation du juge d’établir la teneur de la loi étrangère peut être délibérée
sous l’égide des parties. Ce constat peut réduire le souci sur ce que les juges du fond seront
trop chargés avec cette obligation. Si la preuve de ce contenu ne le satisfait pas, le juge peut
lui-même en faire une recherche.
La seule explication que nous pouvons constater est que dès lors que les juges du fond
ont admis l’application de la règle de conflit sans prendre en compte à la nature de la matière,
il semblait moins aisé de subordonner, en tenant compte de matières, l’obligation
d’application de la loi étrangère y compris d’en établir la teneur à la charge des parties. Par
ailleurs, le souci de la loyauté procédurale doit être aussi réglé, on constate que l’attachement
de la charge de preuve à l’intérêt du plaideur est apte à remédier aux inconvénients que nous
avons vu plus haut. C'est-à-dire que la partie qui a choisi d’invoquer l’applicabilité de la loi
étrangère devrait fournir aux juges du fond la preuve du contenu de celle-ci.
On verra que la directive retenue en droit français est différente de celle retenue en
droit thaï.

B. L’absence des critères in concreto retenus dans le système juridique thaï.

72. Etat des problèmes. La directive retenue par la Cour française est plus nette que celle
de la Cour thaïe concernant l’application de la règle de conflit des lois même en cas de
l’absence de choix de la loi applicable par les parties. En effet le débat français est appuyé sur
les critères utilisés pour dissocier la tâche entre le juge et les parties d’invoquer et de prouver
la teneur de la loi étrangère en question. En revanche, en Thaïlande le problème semble
différent, on trouve que le juge thaï ne tient pas compte de l’application de la loi étrangère.
Car il l’a écartée depuis l’application de la règle de conflit des lois en estimant que le litige
est né sur le territoire thaï, dès lors, ce litige relève de la compétence de l’article 4 du Code de
procédure civile, il n’y a aucune place pour faire recours à la Loi de 1938 relative au conflit

153
B. Ancel et H. Muir Watt, note sous arrêts du 28 juin 2005, op.cit., p. 653.

72
de loi ! En effet l’article 4 du Code de procédure civile a pour l’objectif de déterminer le
tribunal compétent, c'est-à-dire qu’il n’est pas obligé d’appliquer dans tous les cas la loi
substantielle thaïe au litige qui est introduit devant la juridiction thaïe. Lorsque le juge a
constaté l’élément d’extranéité du litige et que l’une des parties a invoqué l’application,
le juge devra faire jouer la Loi de 1938 relative au conflit des lois. Ensuite le juge vérifie
si les parties ont effectué la tâche qui leur incombe pour que la loi étrangère soit applicable.
Citons les principales décisions bouleversées, par exemple, la Cour suprême Dika en
154
1989 a refusé l’application de la règle de conflit au contrat à caractère international.
En l’espèce, il s’agit de transport maritime de marchandises et la subrogation d’assurance ; le
vendeur dont l’établissement se trouve au Japon a envoyé des marchandises à la compagnie
du défendeur. L’acheteur thaï a pris une assurance de marchandises avec la compagnie du
plaignant. Certaines marchandises ont été volées en cours de route. Le défendeur a invoqué
l’application de la loi de 1938 relative au conflit de lois afin de déterminer la loi applicable au
contrat, en l’absence de choix du droit applicable par les parties. La Cour suprême a estimé
qu’« entend que les marchandises, l’objet du transport, sont déchargées au port de
Thaïlande, la destination selon le connaissement ; Vu que l’acheteur et deux défendeurs sont
personnes morales qui ont les statuaires en Thaïlande ; que la cause du litige s’est produite
sur le territoire de ce pays, c’est la loi thaïe qui s’applique. Par conséquent il n’y a pas de
problème de conflit de lois qui amènera à l’application de l’article 13 de la loi de 1938
155
relative au conflit de lois comme a soulevé le défendeur » . La Cour suprême a jugé en
application de l’article 625 du CCC (transport domestique) comme si le litige est purement
interne.
156
La situation semble plus choquée lorsque la Cour a rendu plusieurs décisions en se
basant sur cette directive même si les parties ont choisi la loi applicable à leur contrat. Avec
tout le respect des décisions de la Cour suprême Dika, le juge est tenu d’appliquer au litige la
règle de conflit dès lors que les parties ont rempli les conditions… Comment l’application de
la loi étrangère serait-elle possible si le juge écartait toujours la prise en compte de la règle
conflictuelle qui est considérée comme un procès préalable ?

154
Cour suprême Dika, n°2768/2432 (1989).
155
V. en même sens Cour suprême Dika, n° 3401/2529 (1986).
156
Cour suprême Dika n° 3401/2529 (1986) ; n° 563/2532 (1989) ; n° 2768/2532 (1989) ; et n° 2466/2532
(1989) ; n° 9083/2539 (1996).

73
73. Jusqu’à présent, on peut constater l’avantage du critère de droit disponible et
indisponible, cependant le droit international privé thaï ne tient pas compte de ces critères.
Dès lors, le juge n’est pas obligé de rechercher la teneur de la loi étrangère, même si l’intérêt
de partie qui n’a pas de disponibilité de ses droits est en cause. Rappelons que, dans tous les
cas, c’est la tâche du demandeur de rapporter la preuve de la loi étrangère devant la Cour.
Faute de quoi, ce sera la loi du for qui sera appliquée.

1) L’obligation de soulever l’extranéité du litige.


74. En Thaïlande, la jurisprudence et la doctrine affirment dans la même direction qu’il
incombe à l’un des litigants de soulever le caractère d’extranéité du litige pour que le juge
applique au litige la règle de conflit de lois qui pourrait conduire à l’application de la loi
étrangère. Dans tous les cas, c’est la Loi de 1938 relative au conflit de loi qui est le premier
instrument que le juge devra consulter. Nous pouvons classer les faits que les parties devront
soulever son caractère étranger en cinq cas : la nationalité de l’une des parties ; le domicile de
l’une des parties ; le lieu de conclusion du contrat ; le lieu d’exécution du contrat ; et le lieu de
157
situation de bien . Lorsque les parties soulèvent l’un de ces faits devant le juge du fond et
peuvent prouver que leur différend présente le caractère d’extranéité, le juge a d’office
d’application les règles conflictuelles au litige. Cependant on observe que dans la plupart des
cas, les parties ont soulevé le caractère étranger du litige pour affirmer leur personnage
juridique, qu’elle est personne morale ; ou pour justifier la capacité d’assigner une instance
158
devant les juridictions thaïes . Autrement dit, elles n’ont pas l’objectif d’en soulever pour
que le juge applique à leur litige la règle de conflit de lois.

75. En France, à l’époque, on a envisagé l’argument selon lequel les règles de conflit de
lois n’ont pas un caractère d’ordre public, dans la mesure où il appartient aux parties d’en
réclamer l’application. Deux approches sont envisageables : d’une part, on oublie qu’en droit
international privé la norme substantielle n’est jamais directement applicable, elle jouera son
rôle envers la règle de conflit. En effet, le problème de l’applicabilité d’office de la loi
étrangère se pose dans les mêmes termes que celui de l’applicabilité d’office de la loi
française. Puisqu’il s’agit dans les deux cas de déterminer si le juge du fond doit appliquer

157
Fondation du Professeur K. Luchai, « Les problèmes du choix de la loi applicable aux contrats
internationaux », Colloque, Faculté des Sciences juridiques, Université de Thammasat, le 21 août 2002.
158
Cour suprême Dika, n° 1957/2500 (1957) ; n° 3401/2529 (1986) ; n° 563/2532 (1989) ; n°
2466/2532 (1989); n° 2768/2532 (1989).

74
159
d’office sa propre règle de conflit . Si l’on admet que la règle de conflit de lois du for
constitue aussi une règle du droit français au même titre que le droit interne français, nous ne
160
voyons pas pourquoi le juge français, en principe, n’est pas tenu de l’appliquer . D’autre
part, la Cour de cassation a confirmé depuis l’arrêt Bisbal le caractère impératif de la règle de
conflit lorsqu’elle donne compétence à la loi française par opposition au cas où elle donne
compétence au droit étranger. A priori, la règle conflictuelle française est toujours obligatoire
pour le juge français par application de l’article 12, 1er al. du CPC, sauf renonciation des
parties dans les matières des droits disponibles, peu importe que la loi désignée comme
161
compétente soit la loi française ou une loi étrangère .

76. En droit thaï, le Code de procédure civile ne stipule pas de la même manière que
l’article 12, 1er al. du CPC français. Le juge thaï est tenu de trancher le litige conformément
aux règles de droit selon les règles d’éthique judiciaire. Bien que ces dernières n’aient pas de
juridicité, le juge qui ne le respecte pas peut être sanctionné par la peine pénale. On peut dire
que le juge thaï a d’office de trancher le litige et rendre le jugement conforment à la règle de
conflit de lois qui est aussi la règle de droit. Mais, comme on a déjà dit, la Cour souhaitait ne
pas l’appliquer dans plusieurs cas. La Cour n’a pas affirmé le caractère obligatoire de la règle
de conflit. En revanche elle l’a refusé en recourant à l’article 4 du Code de procédure
162
civile ; le litige est né en Thaïlande, donc il faut appliquer la loi thaïe. Peut-on penser que
« la loi thaïe », selon la Cour, pourrait englober la loi de 1938 sur le conflit de lois ? Car cette
loi est aussi le droit interne thaï. C’est surprenant quand on a trouvé que la Cour a très souvent
motivé sa décision ainsi : « le litige en cause est né en Thaïlande, il faut appliquer la loi thaïe.
Vu que la question sur l’application de la règle de conflit de lois ne se pose pas en
163
l’espèce » .

159
D. Alexandre, « Les problèmes actuels… », op.cit., p. 19.
160
P. Mayer, « L’office du juge dans le règlement des conflits de lois », TCFDIP, 1975-1977, p. 123.
161
Ibid.
162
« La plainte doit être assignée devant le tribunal où le défendeur a son domicile ; ou devant le tribunal du
lieu de la naissance du litige sans tenir compte que le défendeur soit domicilié dans le Royaume ou non ».
มาตรา ๔ (๑) แห่ ง ประมวลกฎหมายวิธีพิจารณาความแพ่ง บัญญัติว่า “ คาฟ้ อง ให้เสนอต่อศาลที่จาเลยมีภูมิลาเนาอยูใ่ นเขตศาล หรื อต่อศาลที่มูลคดี
เกิดขึ้นในเขตศาลไม่วา่ จาเลยจะมีภูมิลาเนาอยูใ่ นราชอาณาจักรหรื อไม่ ”
163
V. Cour suprême Dika, n° 3401/2529 (1986) ; n° 563/2532 (1989), inédit. ; n° 2466/2532 (1989) ; n°
2768/2532 (1989).

75
a. Solutions proposées.
77. L’application d’office et l’obligation de l’invocation. Tout d’abord il faut distinguer
l’applicabilité de la loi étrangère et son application effective. En ce qui concerne
l’applicabilité d’office, en principe, le juge français est tenu d’appliquer dans tous les
domaines, car il s’agit de respecter la règle de conflit française qui a pour le juge un caractère
obligatoire. Sur ce point, les juges du fond thaïlandais devront également retenir cette
directive. Cependant on peut constater que ce principe peut être atténué. En premier lieu, il
s’agit de cas où les parties ont la disponibilité de leurs droits. Dans ce cas elles peuvent, par
un accord commun, renoncer à l’application de la loi normalement compétente. Ce que nous
étudierons par la suite. En second lieu, le caractère obligatoire de l’application d’office de la
loi étrangère est le corollaire de l’obligation de respecter les principes procéduraux du droit
français ce que nous avions déjà étudié. Force est de constater que le juge devra trancher la
question du droit applicable, que les droits soient disponibles ou non, que la compétence
d’une loi étrangère ait été revendiquée ou non, le juge devrait appliquer « la règle de conflit
164
adéquate », sous le contrôle de la Cour de cassation .

78. En effet, suite à l’arrêt Bisbal en 1959, la Cour de cassation a décidé dans son arrêt du
165
9 mars 1983 , que dans le cas où les parties n’ayant pas invoqué la compétence de la loi
étrangère « la Cour d’appel n’était pas tenue de rechercher d’office si cette loi (...) était
applicable » (conformément à l’arrêt Bisbal). Dans un deuxième temps, la Cour de cassation
166
dans les arrêts Rebouh et Schule impose au juge de soulever d’office l’application des
règles de conflit de lois en toutes matières quelle que soit la loi désignée ; loi française ou loi
étrangère. Dans un troisième temps, il semble que ce principe soit partiellement remis en
167
cause par la Cour de cassation dans l’arrêt Coveco du 4 décembre 1990 . La Cour estime
que « le juge du fond n’était pas tenu de soulever d’office l’application de la règle de conflit
de lois sauf dans deux cas : lorsqu’il s’agit d’une matière dans laquelle les parties n’ont pas

164
Cass. 1er civ., 28 janvier 2003, Jaloc Associates, RCDIP.2003.462, note B. Ancel ; Droit et patrimoine,
2003, n°119, p. 95, obs. F. Monéger.
165
Cass. 1er civ., 9 mars 1983, JCP.1984.II.20295, note P. Courbe.
166
Cass.1er civ., 11 octobre 1988, Rebouh, RCDIP.1989.368 ; chron. Y. Lequette, L’abandon de la
jurisprudence Bisbal, p. 277 ; JDI.1989.349, note D. Alexandre ; Cass. 1er civ., 18 octobre 1988, Schule,
RCDIP.1989.368 ; JDI.1989.349, note D. Alexandre ; J.C.P.1989.II.21259, obs. J. Prévault. ; GA, n° 74-78.
167
Cass.1er civ., 4 décembre 1990, Sté Coveco, préc., supra note n° 112.

76
la libre disposition de leurs droits (statut personnel) et lorsque la règle de conflit de loi
émane d’une convention internationale ».

79. Puis la Cour de cassation a de nouveau opéré un revirement de jurisprudence


168
concernant l’office du juge. Dans l’arrêt du 26 mai 1999 , Sté Mutuelle du Mans, et dans
l’arrêt de la même date Elkhbizi, la Cour de cassation considère que « seul le critère de la
disponibilité ou non des droits litigieux doit être pris en compte pour déterminer l’office du
juge » et lorsque les parties n’ont pas invoqué la compétence de loi étrangère, le juge est
obligé de mettre en œuvre d’office de la règle de conflit de lois lorsque les droits sont
indisponibles. Il semble que la jurisprudence relative au droit indisponible soit bien établie,
169
car cette formule a été réaffirmée dans l’arrêt de 2006 et le nouveau rappel a intervenu
dans les arrêts du 11 février 2009 et du 11 mars 2009 qu’« il incombe au juge français, pour
les droits indisponibles, de mettre en œuvre la règle de conflit de lois et de rechercher le droit
170
désigné par cette règle » . C'est-à-dire qu’en matière où les droits des parties sont
disponibles comme en matière du contrat, le juge n’est pas tenu l’application d’office de la
règle de conflit de lois.
En ce qui concerne la règle de conflit résulte de la convention internationale, dans
l’arrêt Marmara du 9 décembre 2003 la Cour de cassation a désapprouvé cette démarche au
motif que « la loi compétente devait être déterminée par référence à la Convention de Rome
du 19 juin 1980 » (v. infra note n° 171).

80. Cette même solution a été reprise dans un arrêt Pourcet du 31 mai 2005 pour la vente
d’avion. Les juges du fond avaient estimé que le rattachement correspondait à la commune
intention des parties, ces dernières sont Françaises et le paiement ayant été fait par un chèque
payable en France. La Cour de cassation a censuré cette décision au motif que « la loi
applicable devait être déterminée par application de la Convention de Rome ». D’après l’avis
de M. T. Azzi, la Cour de cassation dans ces deux arrêts n’a pas abandonné la jurisprudence
Mutuelle du Mans, car le juge n’est pas plus tenu qu’auparavant d’appliquer d’office de la

168
Cass.1er civ., 26 mai 1999, Mutuelle du Mans, 1er esp., RCDIP.1999.707, note H. Muir-Watt ; Gaz.Pal. 2000
n°61 et 62 p.39, obs. M.-L. Niboyet ; GA, n°77 ; Cass.1er civ., 26 mai 1999, Mme Elkhbizi, 2ème esp.,
RCDIP.1999.707, note H. Muir-Watt ; J.C.P (G) 1999.II.10192, note F. Melin ; GA, n°78.
169
Cass. 1er civ., 7 et 20 juin 2006, pourvoi n° 05-14.281, D. 2007.1710, note P. Courbe ; RCDIP.2007.383,
note B. Ancel ; AJ fam. 2006. 376, obs. Boiché.
170
Cass. 1er civ., 11 février 2009, La lettre Omnidroit, le 20 février 2009.

77
règle de conflit en matière de droits disponibles, même figurerait-elle dans la Convention de
171
Rome . Toutefois l’autorité de la règle de conflit ne s’impose que dans le cas où l’une des
parties a soulevé la question de droit applicable.
172
Cette solution a été affirmée dans un arrêt du 22 janvier 2008 . En l’espèce une
société française avait fait venir en France du matériel informatique. La marchandise,
transportée par une société anglaise, est arrivée en mauvais état. Les juges d’appel, par
l’application de droit français du for, ont condamné l’entreprise anglaise en écartant
l’application de la Convention de Genève du 19 mai 1956 relative au contrat de transport
international de marchandises par route (ci-après CMR). L’entreprise anglaise a opposé la
mise à l’écart de la CMR devant la Cour de cassation et a soulevé qu’elle avait
subsidiairement demandé que sa responsabilité contractuelle doit être jugée en vertu du droit
anglais. La Cour de cassation a sanctionné l’arrêt de la Cour d’appel au motif que « lorsque
l’une d’entre elles invoque l’application de la loi étrangère, le juge a l’obligation de
rechercher si cette loi est effectivement applicable par référence à la règle de conflit ».
La loi étrangère invoquée par la partie au litige n’est pas nécessairement d’être la loi
choisie par les parties. L’arrêt ne met pas le fait que la règle de conflit à utiliser est issue de la
173
Convention de Rome . Il faut rappeler que seule la source internationale de la règle de
conflit ne lui rend pas une autorité supérieure, dès lors, toute règle de conflit impose au juge à
condition qu’un litigant ait invoqué l’application de la loi étrangère et le litige porte sur les
174
droits disponibles. Comme avait remarqué Mme. M.-E. Ancel que cet arrêt ne répond pas
à la question concernant le cas de demande des parties d’appliquer la convention
internationale de droit matériel, à savoir si le juge devrait rechercher la loi applicable en vertu

171
Cf. T. Azzi, « L’office du juge dans la mise en œuvre de la convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi
applicable aux obligations contractuelles », in Mél. H. Gaudemet-Tallon, Vers de nouveaux équilibres entre
ordres juridiques, Dalloz, 2008, p. 652 et s. Lorsqu’on songe sur l’arrêt Mutuelle du Mans, la règle de conflit
d’origine conventionnelle est facultative, en l’absence d’invocation des plaideurs, le juge est en principe libre de
s’en remettre à la loi française en ignorant le règle de conflit, même si celle-ci résulte de la convention de Rome,
le Règlement Rome I ou d’un autre instrument international. V. également Cass. 1er civ., 9 décembre 2003,
Marmara, Bull.civ. I, n° 251 ; RDC.2004.769, obs. D. Bureau ; Cass. 1er civ. 31 mai 2005, Pourcet, Bull.civ. I, n°
231 ; RCDIP.2005.465, obs. P. Lagarde ; D. 2006.1496, obs. P. Courbe et F. Jault-Seseke ; RDC.2005.1185, obs.
D. Bureau.
172
Cass. com., 22 janvier 2008, n° 06-18.822 (non publiée au Bulletin).
173
On trouve que cet arrêt est différent des affaires Marmara et Pourcet qui ont été sanctionnées pour avoir
retenu la mauvaise règle de conflit de lois, en revanche cet arrêt concernant la CMR, une convention
internationale qui ne comporte que des règles matérielles.
174
M.-E. Ancel, « Septembre 2007-juillet 2008 : une jurisprudence en semi-liberté », Droit international privé
patrimonial, Droit et patrimoine, n° 176, 2008, p. 89-90.

78
de la règle de conflit ou s’il faut que l’application d’une loi étrangère donnée soit mise dans le
débat ? A notre avis, si le juge du for a constaté l’existence de la convention internationale de
droit substantiel applicable au problème en cause et c’est celle qui est entrée en vigueur dans
l’ordre juridique du juge saisi, le juge devra l’appliquer, car c’est l’une des exceptions du jeu
de la règle de conflit de lois. La CMR est déjà entrée en vigueur en France, mais la Cour de
cassation française a fait référence à la règle de conflit.

81. En Thaïlande, sur le plan théorique, les juristes ont motivé que le juge devait appliquer
175
d’office la règle de conflit de lois dans tous les cas où présente le caractère d’extranéité ,
sans aucune distinction le domaine du droit disponible et indisponible. Cependant, comme
nous l’avons étudié, les juges thaïs ont nié souvent l’application de la règle de conflit dans
plusieurs cas. A titre d’exeple, la décision rendue en 1996, en l’occurrence, les parties ont
choisi la loi applicable au contrat de transport de marchandises, des États-Unis vers la
Thaïlande, en concluant dans le connaissement que la loi américaine sera applicable au
contrat. La Cour a estimé que « il paraît que le plaignant a porté plainte au moment où le
défendeur est domicilié en Thaïlande, dès lors, le plaignant a eu droit d’introduire le litige
devant la Cour civile thaïe. Par ailleurs il n’est pas nécessaire de trancher le litige en
176
appliquant la loi de 1938 relative au conflit des lois » .
Il est vrai que lorsque les juges sont déterminés à appliquer la loi applicable, ils sont
présumés le devoir de l’identifier correctement. Il peut arriver que le pourvoi mène à un débat
de droit international privé mais en le plaçant sur un mauvais terrain. S’ils font un mauvais
choix de règle de conflit ou s’ils emploient une mauvaise méthode, ils commettront une
erreur. Il convient de citer une décision du Tribunal central de la propriété intellectuelle et du
commerce international. En l’occurrence, le plaignant est une société américaine Chrysler
International Co. Ltd. assigna la défenderesse une société thaïlandaise Chrysler
Manufactoring Co. Ltd. Le demandeur, pour prouver son personnage juridique devant la
Cour, a soulevé qu’il est une société de droit américain mais il n’a pas évoqué d’autre
preuve pour inviter le juge à appliquer la règle de conflit et la loi étrangère. La Cour a estimé
en premier lieu que « le litige porte sur la vente internationale de marchandises donc la Cour
a dû procéder, tout d’abord, à rechercher la loi applicable à ce contrat ». Le juge a déjà

175
K. Luchai, Conflit de lois, Bangkok : Winyuchon, 2006, p. 19-22 ; P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, Droit
international privé, 5ème éd., Bangkok : Winyuchon, 2003, p. 24-27.
176
Cour suprême Dika, n° 9083/2539 (1996).

79
appliqué la règle de conflit thaïe à ce stade. Cependant la Cour a ensuite estimé qu’« aucune
des parties n’a invoqué l’application de la loi étrangère à leur contrat, dès lors il faut
177
appliquer les dispositions du Code civil et commercial au litige » .

b. Les modalités d’invoquer l’élément d’extranéité.


82. En droit thaï, afin d’obtenir le résultat plus net, la jurisprudence a établi trois
catégories principales de modalités envisageables pour invoquer le caractère d’extranéité. La
première est à la description du statut juridique de l’une des parties. Au regard du nombre de
décisions de la Cour on trouve que c’est un moyen le plus pratiqué. Car les parties doivent
décrire leurs état et capacité dans tous les cas. Toutefois on constate que ce moyen n’est pas
clair pour juger le caractère d’extranéité du litige, a priori, en pratique presque toutes les
parties devraient décrire l’état et la capacité et que seul le fait que l’une d’elles est personne
178
morale selon le droit étranger ne peut conduire le juge à appliquer les règles conflictuelles .
La deuxième est le cas où la partie a invoqué l’élément d’extranéité sans établir la teneur de
loi étrangère en cause. Ceci affecte directement le résultat du litige (v. infra n° 89).
La dernière, lorsque la partie a décrit l’élément d’extranéité et a établi le contenu de la loi
étrangère. Dans ce cas le juge devra sans doute appliquer la loi étrangère choisie.
179
Une décision de la Cour suprême rendue en 1989 dans laquelle les parties ont
évoqué l’élément d’extranéité de manière explicite en est un exemple. Le litige a porté entre
une compagnie d’assurance, plaignante et une compagnie de transport, défenderesse. En
l’occurrence, Manoyont Parnership a passé un contrat d’achat de marchandises au vendeur
japonais Central Automotive Products. Les marchandises ont été endommagées pendant le
transport par la mer organisé par Daisae Co.Ltd., dès lors, la société Witsin Insurance Co.Ltd.,
l’assureur, a subrogé dans les droits de l’acheteur pour assigner le transporteur défendeur.
La défenderesse a évoqué la nationalité différente des parties contractantes afin de
montrer l’élément d’extranéité, ensuite elle a fait prévaloir qu’en appliquant la règle de conflit
des lois thaïe, si le juge n’avait pas pu trouver la loi d’autonomie, il faudrait appliquer la loi
japonaise. En effet nous ne trouvons pas que les parties ont explicitement opéré le choix de la
loi applicable dans ce cas et la loi japonaise que la défenderesse a invoquée résulte

177
TCPICI, com. n° 107/2542 (1999).
178
Cour suprême Dika, n° 2357/2520 (1977) ; n° 1282/2524 (1981) ; n° 3848/2531 (1988) ; n° 2768/2532
(1989) ; n° 6437/2541 (1998) ; et n° 3812/2543 (2000).
179
Cour suprême Dika, n° 2466/2532 (1989).

80
uniquement de sa volonté unilatérale. Il ne semble pas que c’était un accord de la part du
plaignant. Par ailleurs, la défenderesse a établi le contenu de la Loi japonaise de 1957 sur le
transport international de marchandises par la mer. On constate qu’elle a invoqué tous les
éléments nécessaires pour que le juge applique la loi étrangère au litige, tels que : le caractère
d’extranéité des contrats en question ; la nationalité des parties ; le lieu de conclusion du
contrat ; le lieu d’exécution du contrat ; et la preuve du contenu de loi étrangère. Ainsi, ce
jugement est un bon exemple de modalités d’invocation la loi étrangère devant la Cour.

83. Pourtant, après avoir établi le Tribunal central de la propriété intellectuelle et du


commerce international en 1997, on observe que cette nouvelle juridiction peut régler ce
problème car les juges de ce tribunal sont compétents dans ce genre du litige. Donc
l’application par ce tribunal de la règle de conflit des lois ne semble pas poser beaucoup de
180
problème . Dans la décision de 2008, le plaignant a invoqué dans sa plainte le caractère
international du litige ; les contractants n’ont pas choisi la loi applicable au contrat, mais il
paraît dans la lettre d’affirmation de la commande que la loi autrichienne régira le litige, le
défendeur n’a pas objecté au moment de la réception de ce document… Le tribunal a tranché
le litige en appliquant la loi de 1938 relative au conflit de lois pour rechercher quelle est la loi
compétente selon l’article 13.
Au vu de ces arrêts, on peut constater que la non-application de la Cour des règles de
conflit y compris de la loi étrangère résulte de plusieurs facteurs ; la négligence des parties ou
même de leurs avocats ; et dans certain cas la mauvaise connaissance du mécanisme de conflit
de lois du juge. On trouve par ailleurs dans la plupart des litiges que les parties n’ont pas
soulevé ces faits devant le juge du fond. Par conséquent il est interdit de les invoquer dans la
181
procédure d’appel devant la Cour suprême Dika , car le juge ne peut fonder sa décision sur
des faits qui ne sont pas dans le débat.

84. En France, concernant le caractère international du litige, la question peut se poser si


le juge français peut ou doit appliquer une loi étrangère lorsque les éléments d’extranéité

180
V. TCPICI, com. n° 87/2551 (2008).
181
En Thaïlande, le Tribunal Central de propriété intellectuelle et de commerce international est le tribunal au
premier degré, qui n’a compétence que pour trancher les litiges portant sur la propriété intellectuelle et le
commerce international. Après avoir obtenu une décision de celle-ci les parties peuvent faire un appel
directement devant la Cour suprême et non la Cour d’appel. C’est ce qu’on appelle la procédure de leap frog.

81
n’apparaissent pas parmi les prétentions. Car le juge ne peut fonder sa décision sur des faits
qui ne sont pas dans le débat (l’article 7 du CPC). En effet l’alinéa 2 de cet article stipule que
« parmi les éléments du débat, le juge peut prendre en considération même les faits que les
parties n’auraient pas spécialement invoqué au soutien de leurs prétentions ». L’article 7 al. 2
n’oblige pas le juge à prendre en considération les faits que les parties n’ont pas spécialement
182
invoqués. Au contraire, il lui en donne seulement la faculté . Mais il encourt la censure s’il
183
affirmait, dans les motifs de sa décision, ne pas avoir le pouvoir de le faire . L’article 8 du
CPC admet que « le juge peut inviter les parties à fournir les explications de fait qu’il estime
nécessaires à la solution du litige ». Le juge français a ainsi la possibilité de s’informer sur
l’existence d’éléments d’extranéité. En fait il n’aura pas besoin de le faire puisque le CPC
impose aux parties l’obligation d’indiquer des éléments qui constituent souvent le facteur de
184
rattachement retenu par la règle de conflit : la nationalité, le domicile ou le lieu de
conclusion du contrat qui peut montrer en soi l’extranéité du litige. Il n’existe pas, selon cet
auteur, d’arrêt de la Cour de cassation ayant fait peser sur le juge français l’obligation de
rechercher si une loi étrangère se veut compétente. De point de vue des juges du fond qui
procèdent à cette recherche, ils ne précisent pas s’ils la considéraient ou non comme
185
obligatoire. Puisqu’ils ont de toute manière la faculté d’appliquer d’office la loi étrangère .

186
85. Dans un arrêt rendu par la Chambre civile du 20 juin 2006 , la Cour de cassation a
sanctionné les juges du fond qui ont violé l’article 3 du Code civil, « Attendu qu'en statuant
ainsi, sans appliquer, au besoin d'office, la règle de conflit de lois donnant compétence en
matière de succession immobilière à la loi étrangère du lieu de situation des immeubles et
rechercher si cette loi ne renvoyait pas à la loi française du dernier domicile du défunt, la
cour d'appel a violé le texte susvisé ». Cet arrêt a été rendu dans une matière où les parties
n’ont pas la libre disponibilité de leurs droits. Le critère de la libre disponibilité des droits
n’est pas mentionné. La Cour a seulement affirmé l’obligation des juges du fond d’appliquer
la règle de conflit de lois donnant compétence en matière de succession immobilière à la loi

182
Cass.1er civ., 16 juin 1982, JCP.1982.IV.307.
183
Cass.3ème civ., 20 novembre 1985, Gaz. Pal. 1986.2, Somm.421, obs. Croze et Morel.
184
D. Alexandre, « Les problèmes actuel… », op.cit., p. 15.
185
Id., p.17
186
Cass.1er civ., 20 juin 2006, pourvoi n° 05-14281, préc. supra note n° 169.

82
étrangère du lieu de situation des immeubles. Les juges attirent l’attention sur la règle de
conflit et la nécessité de rechercher le contenu de la loi étrangère, le droit international privé
compris, puisqu’ici est posée la question du renvoi éventuel de la loi étrangère vers la loi
française. Il faut observer qu’il s’agit également de question du renvoi, la Cour a évoqué la
possibilité d’un renvoi au premier degré qui enfin permettrait au juge français d’appliquer la
loi du for en tant que loi du dernier domicile du défunt. Le renvoi s’impose au juge même si
aucune des parties ne l’avait invoqué, car dès lors que le juge a appliqué, d’office ou non, la
règle de conflit qui désigne une loi étrangère, il doit tenir compte de la règle conflictuelle de
187
celle-ci . Mais, pour que le renvoi puisse être en jeu, il faut que le juge s’applique tout
d’abord la règle de conflit du for.

Après avoir analysé le nombre de décisions prises auparavant, la Cour thaïe ne tient
pas compte au critère de disponibilité ou d’indisponibilité de droit des parties pour dissocier la
tâche de soulever l’extranéité du litige et d’établir le contenu de la loi étrangère.

2) L’obligation d’établir la teneur de la loi étrangère.


86. En ce qui concerne l’obligation d’établir la teneur de la loi étrangère, avant de
conclure que la Loi oblige dans tous les cas la partie de prouver le contenu de la loi étrangère
invoquée, nous verrons à ce stade l’article 8 de la Loi 1938 relative au conflit de lois qui
stipule que : « Dans le cas où la loi étrangère sera applicable, à défaut de la preuve
188
suffisante de ladite loi, le juge devra appliquer la loi du for » . Force est de constater qu’en
vertu de ce texte, ce n’est pas la tâche du juge d’établir le contenu de la loi étrangère. En effet,
aucune disposition de l’article 8 ne stipule le terme précis que « la partie » doit établir la
teneur de la loi étrangère. Pourtant au terme de cet article, il semble que la loi étrangère n’est
pas du droit que le juge est obligé de connaître lui-même, car il faut la prouver. Alors, on
peut interpréter que la tâche de preuve pèse sur la partie au litige.
189
Il reste à savoir pourquoi les auteurs thaïs y compris les juges admettent que la loi
étrangère n’est qu’un fait que la partie qui a soulevé devra prouver. Il ressort de disposition de
l’article 84/1 du Code de procédure civile qui stipule que :

187
I. Gallmeister, « Statut de la loi étrangère et renvoi en matière immobilière », note sous Cass. 1er civ., 20
juin 2006, n° 1025 FSP+B (Décision en ligne), disponible sur le site Dalloz actualité : http://www2.dalloz.fr/
188
V. le texte en thaï, supra note n° 99.
189
Cour suprême Dika, n° 804/2490 (1947) ; n° 3223/2525 (1982) ; TCPICI, com. n° 107/2542 (1999).

83
« La partie qui a soulevé un tel fait pour soutenir sa plainte, la charge de preuve
incombe à ladite partie (…) ».

On peut trouver la réponse dans l’article 8 de la Loi de 1938 et l’article 84/1 du CPC
thaï. Suite aux problèmes d’invocation de l’élément d’extranéité et celle de l’applicabilité de
la loi étrangère, la partie qui a invoqué l’applicabilité de la loi étrangère n’est pas forcément
celle qui devra établir le contenu de ladite loi. Alors, qui doit établir la teneur de la loi
étrangère au sens de ces deux dispositions ? Pour nous, c’est la partie qui aurait bénéficié de
l’intérêt dans l’application de cette loi. Car il n’est pas logique que cette chargée soit pesée sur
elle sans obtenir aucun intérêt en retour.

87. Reconsidération de l’article 8 de la règle de conflit thaïe. Cependant certains


190
auteurs ne sont pas d’accord avec cette interprétation. Pour eux, les juges pourront et
devront appliquer la loi étrangère au litige en employant leur propre connaissance sur la loi en
cause. Il est vrai que la Loi de 1938 stipule comme telle puisque le législateur a fondé sa
présomption sur une base qu’il n’est pas possible pour le juge d’avoir la connaissance de
toutes législations dans le monde. Pour ces auteurs, au cas où le juge connait bien cette loi
étrangère, ou même s’il désire faire des recherches par lui-même, il convient d’appliquer cette
loi afin de rendre la justice. Car la finalité du droit international privé est que le juge applique
la loi étrangère au litige qui constitue l’élément d’extranéité lorsque cette loi est la loi
191
désignée par la règle de conflit . Nous admettons que cette proposition est apte dans la
mesure où le litige est régi par la bonne règle de droit, ou par la loi qui doit être applicable. Si
on laisse aux parties de prouver la loi étrangère et qu’elle en ait failli, la loi qui sera applicable
n’est pas celle qui aurait dû être applicable en réalité. Pourtant, à notre avis, il faut distinguer
le cas où la partie a failli involontairement pour établir la teneur de la loi étrangère et le cas où
elle souhaite rester silencieuse, car le dernier cas est sa volonté. S’il s’agit du dernier cas et le
juge applique la loi étrangère en établissant lui-même son contenu, ceci peut être également
contraire à la volonté des parties, il ne faut pas oublier que dans les litiges portant sur la
matière des contrats commerciaux internationaux la volonté des parties est la primauté. Par
ailleurs, si on admet la proposition des auteurs, il est nécessaire d’établir un critère pour

190
Cf. Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, Cours de droit, Université de Thammasat, 1940, p. 85-86 ; Cf.
K. Sandhikshetrin, Droit international privé, Bangkok : Nitibanakarn, 1996, p. 246 ; Cf. Ch. Pachusanond, Droit
international privé, op.cit., p. 246.
191
Cf. Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, Bangkok : Université de Thammasat, 1984, p. 79.

84
savoir jusqu’à quel point on peut considérer que le juge dispose une bonne connaissance de la
loi étrangère en question.

88. Le Tribunal de propriété intellectuelle et de commerce international est un bon


exemple du tribunal composé par les juges qui sont très compétents dans ces domaines. En
espérant par les partisans qui souhaitent que le juge doive alors constater l’élément
d’extranéité du litige et rechercher la loi étrangère applicable au contrat y compris sa teneur.
Certes, cet argument présente aussi bien d’avantages que d’inconvénients. D’une part, on
admet que certains juges, qui ont fait leurs études à l’étranger, connaissent bien la loi
étrangère et donc savent quelle loi sera applicable au litige, malgré l’absence d’établissement
du contenu par les parties au litige. C’est pour eux une bonne occasion de servir leurs
connaissances pour régler un litige. D’autre part, on peut penser qu’en matière du contrat
international, il arrive parfois que les parties voulaient soustraire l’application de la loi
étrangère. Le droit international privé thaï ne dispose pas de présomption comme le droit
anglais et il n’y a aucune place pour l’adage iura novit curia dans l’ordre juridique thaï.
Certes, nous admettons que dans certains ordres juridiques, en matière de
reconnaissance et d’exécution de jugements étrangers, les juges du for doivent vérifier
l’application par le juge d’origine de la règle de conflit. Certes, seules l’application de la règle
de conflit et l’application de la loi étrangère conformément à la règle de conflit d’État
d’origine sont suffisantes. Nous ne partageons pas l’avis selon lequel il faut admettre la
recherche du contenu de la loi étrangère par le juge sans prétention des parties au litige.

89. Nous revenons au cas cité plus haut selon lequel l’une des parties a invoqué l’élément
d’extranéité du litige sans établir la teneur de la loi étrangère soulevée. En 1997, la Cour
suprême a établi le moyen de soulever l’extranéité du litige et la preuve de loi étrangère en
estimant que lorsque le contrat a été conclu à l’étranger, les parties n’étaient pas obligées de
se prévaloir dans un plainte si la loi étrangère sera-t-elle applicable au litige. La Cour a
affirmé que « si c’est le cas où la loi étrangère est applicable, les parties pourraient la
192
soulever durant l’instance en cours » . Mais lorsque l’une des parties a invoqué l’élément
d’extranéité du litige, il faut aussi établir la teneur de la loi étrangère applicable. En l’absence
de ceci, c’était un manquement des devoirs de cette partie d’après le TCPICI. Par conséquent,
la loi thaïe était applicable, quoique cette loi étrangère résulte du choix des parties

192
Cour suprême Dika, n° 447/2540 (1997).

85
193
contractantes . On constate que la Cour suprême thaïe n’a pas de critères bien concrets
comme ceux de la Cour de cassation française dans les arrêts que nous avons déjà étudiés.
Mais de nos jours, nous pouvons dire que les modalités d’invocation et la notion
d’établissement du contenu de la loi étrangère sont bien fondées. Au moins, les parties
peuvent savoir dans quels cas elles doivent soulever l’application de la règle de conflit et de la
loi étrangère ; la jurisprudence thaïlandaise considère la loi étrangère comme un fait, dès lors
ce sont les devoirs respectifs des parties qui l’ont invoquée d’établir sa teneur selon le droit de
preuve.

90. Conclusion du paragraphe. Après avoir étudié les critères retenus en droit français et
en droit thaï relatifs à l’établissement du contenu de la loi étrangère, on trouve que le critère
établi par la jurisprudence française semble stable surtout en matière de droit indisponible.
Quand bien même la Cour de cassation semble plus libre de nature de droit litigieux, mais
c’est trop tôt de conclure que la jurisprudence française abandonne ce critère. Par ailleurs,
c’est logiquement la tâche des parties contractantes qui doivent invoquer l’application de la
loi étrangère au litige. Alors que le droit thaï ne tient jamais les critères de la disponibilité ou
l’indisponibilité des droits. En revanche le juge thaï traite la loi étrangère comme un fait dont
la partie qui aura l’intérêt devrait dans tous les cas invoquer et prouver la teneur. Come on l’a
vu dans l’article 8 de la Loi de 1938, le litigant devrait prouver dans tous les cas la loi
étrangère qu’il souhaite d’appliquer. On constate par ailleurs que la pratique du juge thaï
amène la tâche et les dépenses à la partie qui est en charge, notamment les frais d’honoraires
194 195
des témoins, des experts , frais qui sont insupportables dans la plupart des cas .

193
TCPICI, com. n° 190, 191/2543 (2000) : en l’espèce, la société Coréenne Hyundai Corporation, le
plaignant, a assigné la défenderesse thaïe, la société Siam Chemical, devant le TCPICI. Le plaignant a fait valoir
que le défendeur n’a pas réglé le prix de pétrole, alors que le défendeur a soutenu que le plaignant n’a pas livré
ses marchandises. La société défenderesse a invoqué la clause de choix de la loi britannique applicable aux
contrats. Pourtant, lors du procès, aucune des parties n’a établi le contenu de ladite loi. Par conséquent, la Cour a
dû trancher le litige en appliquant les dispositions du Code civil et procédure thaï, conformément à l’article 8 de
la Loi de 1938 sur la règle de conflit.
194
Le Code de procédure civile thaïe accepte les témoins experts et la « cross-examination ». Pour que le juge
puisse examiner les preuves citées par les témoins experts.
195
On peut penser au litige qui porte sur le droit indisponible par exemple le statut personnel, la plupart des
parties sont personnes physiques qui se limitent par le budget, différemment de personne morale.

86
§2 : Le défaut d’établissement du contenu de la loi étrangère.

91. Il peut arriver parfois que les parties n’ont pas réussi à établir la teneur de la loi
étrangère au cours du procès. Reste à savoir si le juge peut faire recours automatiquement à la
loi du for. La réponse est nette aussi bien pour les juges français que pour les juges thaïs. Les
hésitations de la Cour de cassation sur l’application d’office et sur la charge de la preuve de la
loi étrangère rejaillissent sur les conséquences à tirer d’un défaut d’établissement de la teneur
du droit étranger applicable. Il ne s’agit pas ici du cas où le droit étranger est incertain.
L’hypothèse considérée à ce stade est celle où la teneur du droit étranger n’a pas été produite.
Les parties n’ont pu faire les frais des consultations nécessaires et le juge n’a pas été à même
d’y suppléer. En effet il n’y a aucune différence entre le défaut d’établir le contenu de la loi
étrangère choisie par les parties et celui de la loi étrangère désignée par la règle de conflit en
l’absence de choix exprès, car dans les deux cas le juge devra procéder à l’application de la
règle conflictuelle. Il faut s’interroger d’abord sur le cas où l’on admet qu’il y a véritablement
défaut d’établissement du contenu de la loi étrangère (A). On étudiera ensuite le soulagement
en droit positif (B).

A. La défaillance d’établissement du contenu de la loi étrangère.

92. Lorsque la teneur du droit étranger n’a pas été établie, dans ce cas la résolution de la
Cour de cassation est le retour à la loi du for comme la vocation subsidiaire (2). On verra tout
d’abord la notion de défaillance d’établir la loi étrangère (1).

1) La notion de l’absence d’établissement de la loi étrangère.


93. Qu’entend-on par « défaut d’établir une preuve » ? D’après la lecture tant de
jurisprudence que de commentaires des auteurs, ce terme a été employé en signifiant le cas de
l’absence de preuve du contenu, de la défaillance à établir la teneur. La Cour de cassation a
décrit une telle situation comme un défaut d’établissement de preuve du contenu de la partie
qui en a la charge de rapporter ; dans l’arrêt Banque Worms rendu en matière de droits
disponibles, la Cour de cassation a refusé de sanctionner les juges du fond qui n’avaient pas
196
procédé à une recherche sur le contenu du droit américain . La Cour a décidé que : « Il

196
Cass. com, 11 mars 2003, Banque Worms, préc. supra, note n° 131.

87
appartenait à la Banque Worms qui prétendait que le compte bancaire (...) était soumis à la
loi américaine de rapporter la preuve du contenu de la loi étrangère à laquelle aurait dû être
soumis le contrat litigieux et de ce que les dispositions de cette loi eussent abouti à un résultat
différent de celui auquel conduisaient les règles de droit français (...), la juridiction du second
degré n’avait pas à rechercher s’il convenait d’appliquer une loi étrangère dont la teneur
n’était pas précisée ».
Par ailleurs, dans l’hypothèse où le juge a constaté que les preuves fournies par les
parties étaient insuffisantes pour établir la teneur de la loi étrangère en question peut être
considérée comme le défaut d’établissement ; la Cour de cassation dans l’arrêt Aubin du 28
juin 2005 a décidé que « (…) en se bornant à constater que les preuves fournies par les
parties étaient insuffisantes pour établir la teneur du droit allemande applicable, (…) ».
Le cas où les parties sont « impuissantes ou insouciantes dans la recherche de la
197
teneur » de la loi étrangère peut aussi être considéré comme le défaut d’établissement du
contenu de celle-ci.

94. Hormis la détermination de terme « défaut d’établissement », il nous convient à ce


stade de nous pencher sur le terme de « l’invocation de preuve » pour que l’on puisse
comprendre dans quelle situation le juge considère comme défaillance de la partie qui a la
charge d’apporter la preuve. Sur cette question, il faut rappeler que la charge de preuve se
voit différente de la charge de l’allégation circonstanciée. Car la charge de l’allégation
consiste à établir devant le juge la possibilité superficielle de dériver des sources rapportées la
solution demandée et puis c’est à la charge du juge de considérer si cette allégation est
suffisante, alors que la charge de preuve est plus lourde pour la partie car celle-ci doit, elle-
même, rapporter la preuve du contenu de la loi étrangère.
En effet la Cour de cassation a tenté de distinguer entre « le défaut de preuve du droit
étranger spécialement invoqué » et « la défaillance de la loi étrangère dans son contenu
198
général » . La Haute juridiction a fondé dans le premier cas l’idée que le défaut de preuve
attribuée à la partie qui en avait la charge dont le manquement de diligence est assez suspecté
pour justifier le rejet de la prétention. Dans le second cas, la défaillance de la loi étrangère

197
Les termes employés par B. Ancel et H. Muir Watt, note sous arrêts du 28 juin 2005, op.cit., p. 650.
198
Cass.1er civ., 24 janvier 1984, Sté Thinet, RCDIP.1985.89, note P. Lagarde ; JDI.1984.874, note J-M
Bischoff ; Cass.1er civ., 22 octobre 1980, RCDIP.1981.94 2ème esp., note P. Lagarde ; D.1982.I.73, obs. B.
Audit ; Cass.1er civ., 15 juin 1982, Zagha, RCDIP.1983.300, note Bischoff ; JDI.1983.595, note Lehmann ;
Cass.1er civ., 14 juin 1983, RCDIP.1984.119, 2ème esp., note Batiffol.

88
dans son contenu général, tel est le cas où il n’y a pas de possibilité de prouver la loi
étrangère, ou l’hypothèse où les frais à exposer seraient excessifs par rapport à l’enjeu du
199
litige et il y est suppléé par l’application subsidiaire de la loi française . Pour la dernière
hypothèse, elle peut s’étendre au cas où la charge de preuve pèse sur les juges et que ceux-ci
aient envisagé cette impossibilité. Tout cela pourrait clarifier plus ou moins la notion du
défaut d’établissement le contenu de la loi étrangère.

95. En droit thaï, le texte de l’article 8 de la Loi relative au conflit de lois a fait penser que
la défaillance d’établissement de la teneur de la loi étrangère signifie le cas où la partie ayant
invoqué l’application de cette loi n’a pas pu amener la preuve suffisante devant la Cour.
Autrement dit, les juges du fond ne sont pas satisfaisant à l’égard de preuves que la partie leur
a fournies. L’impossibilité de prouver la loi étrangère fait l’obstacle à son applicabilité, par
exemple lorsque l’on envisage d’appliquer la loi d’un pays en développement ou d’un pays du
tiers monde.
S’agissant de l’invocation des parties au litige, à savoir si la loi étrangère choisie par
les parties devra être précisée ou citée nommément ? Nous prenons comme exemple le cas où
les parties ont invoqué la loi japonaise applicable. En l’espèce les parties ont bel et bien
précisé dans sa plainte que la loi japonaise en cause était la Loi de 1957 relative à la vente
internationale de marchandises par la mer. On admet que cette invocation est nette et claire.
Les parties ont par ailleurs évoqué le caractère international du litige, la nationalité différente
des parties, le lieu de conclusion et d’exécution du contrat et le nom de la loi étrangère
200
applicable au contrat . Sans doute, la Cour aurait dû appliquer cette loi choisie par les
parties. Cependant les parties doivent soulever la loi étrangère avec une grande prudence, car
si une erreur se présente au cours de la procédure, la loi invoquée sera aussitôt substituée par
la loi du for. Il convient de citer la décision du Tribunal central de propriété intellectuelle et
201
de commerce international ; les parties ont évoqué l’application de la loi anglaise au
contrat mais la Cour en a nié en raison de l’absence de preuve du contenu de la loi anglaise en
cause. On trouve que le juge a suivi la règle de conflit de lois en vérifiant si la loi étrangère

199
V. en ce sens D. Alexandre, « La loi étrangère devant les tribunaux français », Établissement du contenu de
la loi étrangère, J.-Cl. dr. int, 1997, Fasc. 539-20., p.17 et s. ; V. également des applications de la distinction
dans CA Paris, 19 décembre 1985, RCDIP.1986.680, note M. Simon-Depitre ; Cass.1er civ., 2 février et 21 juin
1988, RCDIP.1989.55, note B. Ancel ; JDI.1988.741, note D. Alexandre.
200
Cour suprême Dika, n° 2466/2532 (1989).
201
TCPICI, com. n° 190, 191/2543 (2000).

89
aurait été appliquée. Ce qui n’était pas le cas, faute de preuve suffisante. Cependant la Cour
suprême Dika en 1997 a établi les modalités d’invocation le caractère d’extranéité et le choix
de la loi étrangère applicable au contrat. Le cas en l’espèce, s’agissant du contrat de vente
internationale du riz, les parties ont choisi la loi iranienne régie au contrat. Le défendeur a
objecté que le plaignant n’avait pas décrit, dans la plainte, les détails de loi iranienne en cause.
La Cour a estimé que « il est suffisant pour le plaignant d’invoquer que le contrat a été
conclu à l’étranger, il n’est pas nécessaire de préciser dans sa plainte que la loi iranienne
soit la loi applicable. Si ladite loi est applicable, le plaignant pourrait soumettre la preuve de
202
cette loi en cours d’instance » . C'est-à-dire que la Cour thaïe a accepté des preuves soient
présentées au cours du procès et qu’il n’est pas nécessaire d’établir le contenu de loi étrangère
dans la plainte, bien que celle-ci soit la loi choisie par les parties. On peut dire que la Cour
thaïe a aussi distingué entre la charge de preuve et la charge de l’allégation circonstanciée.

96. Rappelons que la vraie existence de conflit de lois est un élément qui déclenche
l’obligation du juge de mettre en œuvre la loi étrangère. Ainsi, le juge peut nier l’existence
d’un conflit en se prévalant de l’équivalence des lois française et étrangère. Dans ce cas, il
appartiendra toujours à la partie qui se prévaudrait de l’application de la loi étrangère d’établir
l’intérêt qu’elle aurait en faisant recours à cette loi. Si le juge admet l’existence du conflit et il
lui appartient d’appliquer le droit étranger qu’il a reconnu applicable et, par conséquent, la
203
charge d’établir la preuve de sa teneur lui incombe .

2) Le retour de la loi du for.


97. Le retour de la loi du for, dans son application subsidiaire, se fonde en effet sur la
présomption d’équivalence entre la loi du for et la loi étrangère. On sait que c’est en principe
la loi du juge devant lequel les litigants ont demandé la justice qui a la vocation de
204
s’appliquer. La solution retenue par l’arrêt Amerford nous a démontré que cette application
subsidiaire de loi du for intervient non pas pour la défaillance d’établir le contenu de la loi
étrangère, mais en raison de l’absence d’un résultat différent de celui obtenu par la mise en
œuvre du droit français. Cependant, d’après les arrêts du 28 juin 2005, il semble que les juges
du fond qui appliquent la loi française en se prévalant la défaillance de l’établissement du
202
Cour suprême Dika, n° 447/2540 (1997).
203
J.-G. Mahinga, note sous Cass. 1er civ., 28 juin 2005 et Cass. com., 28 juin 2005, loc.cit.
204
Cass.com., 16 novembre 1993, Amerford, préc. supra, note n° 132.

90
contenu de la loi étrangère entraîneraient la censure de la Haute juridiction. Car, dès lors que
les juges du fond ont reconnu l’application de la loi étrangère en cause, ils sont tenus
d’établir le contenu de cette loi. Cependant les termes employés dans l’arrêt dit « avec le
concours des parties » affirma que celles-ci ne sont pas écartées totalement de cette tâche. De
surcroît, la Chambre civile avait déjà renforcé les juges du fond de « rechercher par tous les
moyens, au besoin par eux-mêmes, la solution donnée à la question litigieuse par le droit de
205
l’État concerné » .
D’après des arrêts 2003 et 2005, le rôle des parties devient secondaire. Faut de quoi,
ce sera la loi française en tant que vocation subsidiaire qui sera appliquée. Pour M. B. Ancel
et Mme H. Muir Watt, il s’agit là de la « vocation universelle ». Ces auteurs ont distingué
entre la vocation universelle en cas de droits disponibles, car la loi du for s’applique dans sa
vocation naturelle à régir tous les rapports juridiques dont sont saisis devant le juge du for et
non seulement pour sanctionner le défaut d’établissement du contenu de la loi étrangère.
Alors que, la vocation subsidiaire est employée pour la matière de droits indisponibles,
car on est dans le domaine où le juge prend le rôle principal d’établir la teneur de la loi
étrangère et dès lors qu’il est impossible pour celui-ci d’accéder à la connaissance de sa
206
teneur, la vocation subsidiaire de la loi du for est justifiée . Cependant nous employons
dans notre étude une vocation subsidiaire ou une application à titre subsidiaire de la loi du for
en raison du recours en général à ces termes par la jurisprudence française.

98. Il apparaît clairement que la mise en œuvre de la règle de conflit par le juge du fond a
pour effet de lui contraindre à appliquer la loi désignée dont il est tenu, au même titre que les
parties, d’établir la teneur par lui-même ou avec le concours de celles-ci. Alors à ce titre, la
défaillance des parties dans l’établissement de la teneur de la loi désignée ne constitue pas un
motif suffisant pour l’application de la lex fori. La charge de preuve de cette loi étrangère lui
207
revient également compte tenu de ce qu’il a préalablement admis l’application de cette loi .
En conséquence, c’est une mesure où ce juge du fond établirait l’impossibilité, tant de fait que
de droit, dans laquelle il s’est trouvé pour établir la teneur de cette loi étrangère qu’il serait
absout de l’application de la loi du for, en raison de la vocation subsidiaire. On peut dire que,

205
Cass.1er civ., 13 novembre 2003, RCDIP.2004.95, 1ère esp., note B. Ancel ; JDI.2004.520, 2ème esp., note F.
Mélin.
206
B. Ancel et H. Muir Watt, note sous arrêts du 28 juin 2005, op.cit., p. 656.
207
J-G. Mahinga, note sous Cass. 1er civ., 28 juin 2005 et Cass.com., 28 juin 2005, loc.cit.

91
208
d’après deux arrêts du 28 juin 2005 , dans le cas où le juge du fond a admis l’application de
la loi étrangère, la charge du contenu de celle-ci lui incombe.

99. Dans le système juridique thaï, a priori, l’obligation de rechercher la teneur de la loi
étrangère pèse sur la partie qui la prévaut. A défaut de l’établissement du contenu de celle-ci,
la Cour appliquera le droit thaï au litige. Dans une décision rendue en 2003, la Cour suprême
Dika a eu l’occasion d’affirmer ce principe en estimant que « le problème que la Cour doit
appliquer ou non la loi de Singapore au litige, c’est le devoir de la partie qui a prétendu son
application d’établir le contenu de cette loi (…) selon l’article 8 de la Loi 1938 relative au
209
conflit de lois » .

B. Le mécanisme palliatif en droit positif.

100. Face aux difficultés d’établir la teneur de la loi étrangère, la coopération au niveau
international peut remédier ces problèmes. La Convention européenne dans le domaine de
l’information sur le droit étranger a été élaborée au sein du Conseil de l’Europe afin
d’améliorer la situation. Si les juges peuvent accéder aisément aux dispositions de la loi
étrangère, le souci sur le travail alourdi chargé est bien réglé.

101. Le renforcement de l’application des mécanismes de renseignement du droit


étranger. Si l’adage iura novit curia s’applique aussi dans la matière de l’application de la loi
étrangère, il faut admettre que le juge est tenu d’en appliquer d’office et a également
l’obligation d’en rechercher la teneur. Il peut s’avérer particulièrement difficile de prendre
connaissance de la teneur des normes applicables. Si des instruments d’information existent,
tous ne sont pas pleinement exploités. Alors, des renseignements et des explications peuvent
être demandés à une agence compétente en charge afin de faciliter cette mission.
210
Hormis les traités bilatéraux conclus par la France et d’autres États , la Convention
211
européenne dans le domaine de l’information sur le droit étranger du 7 juin 1968 permet

208
Les arrêts précités.
209
Cour suprême Dika, n° 3537/2546 (2003) ; V. en ce sens Cour suprême Dika, n° 4027/2545 (2002) ; Cour
suprême Dika, n° 1950/2529 (1986).
210
La France a conclu 24 traités bilatéraux sur l’administration du droit étrangers. Cf. Bureau Permanent, La
Conférence de La Haye de droit international privé, « Étude de faisabilité sur l’administration du droit

92
aussi de fournir aux tribunaux un procédé permettant d’obtenir facilement des renseignements
sur les droits étrangers qui peuvent être amenés à appliquer dans les litiges internationaux en
vertu des règles de conflit de lois. Cette convention lie un grand nombre d’États membres du
212
Conseil de l’Europe et les États non membres du Conseil de l’Europe . Cependant lorsque
le juge se renseigne sur le droit étranger en recourant à cette Convention, la réponse fournie
ne constitue, dans tous les cas, qu’un simple renseignement qui ne lie pas l’autorité judiciaire
dont émane la demande. Le juge français dispose, lorsqu’il fait recours au procédé
d’information prévu par la Convention de Londres du 7 juin 1968, du même pouvoir
souverain d’appréciation qu’à l’égard d’autres preuves. Certes, comme toutes autres preuves
que le juge recherche lui-même, il faudra respecter le principe du contradictoire. C’est-à-dire
que le juge, avant d’appliquer ces éléments de preuves obtenus, devra permettre aux parties
213
d’en discuter .

102. La Convention permet au juge d’obtenir des informations particulièrement fiables, car
celles-ci sont fournies par un organe étatique. En ce qui concerne la demande, celle-ci doit
être rédigée dans la langue de l’État requis (art. 14). Afin d’éviter la question de caractère
général, la demande doit comporter l’exposé des faits indispensables à l’élaboration de la
réponse et préciser de façon plus concrète les points de droit à propos desquels il est demandé
des éclaircissements (art. 4 § 1 et 2). L’organe de réception étranger peut formuler la réponse
lui-même soit transmettre la demande à un autre organe officiel pour y répondre, il est

étranger », Tableaux et graphiques résumant certaines réponses au questionnaire, Version finale. Doc. prél. n° 9
B, mars 2008.
211
Le champ d’application de la Convention de Londres est large ; elle permet d’obtenir des informations sur
les droits des États signataires dans le domaine civil et commercial, ainsi que dans le domaine de la procédure
civile et commerciale et de l’organisation judiciaire. Son protocole additionnel a étendu le champ d’application
au droit pénal, de même à la procédure et à l’organisation judiciaire pénale. Le Protocole additionnel à la
Convention signé à Strasbourg le 15 mars 1978. La Convention est en vigueur dans 43 États, alors que son
Protocole additionnel n’est en vigueur que dans 30 États. En effet les mécanismes mis en place se voulaient
efficaces. Il suffirait à la juridiction désirant d’avoir des renseignements sur la loi d’un État contractant de saisir,
par l’organe de transmission créé dans le for, l’organe de réception créé par l’État sollicité en vue de recevoir et
de donner suite aux demandes d’information (art.5 et 6).
212
Les États signataires de la Convention de Londres jusqu’à juillet 2011 (le nom de pays en ordre
alphabétique) : Albanie, Allemagne, Andorre, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Belgique, Belarus, Bosnie-
Herzégovine, Bulgarie, Chypre, Costa-Rica, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Géorgie,
Grèce, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Lettonie, L’ex-République yougoslave de Macédoine, Liechtenstein,
Lituanie, Luxembourg, Malte, Maroc, Mexique, Moldova, Monaco, Monténégro, Norvège, Pays-Bas, Pologne,
Portugal, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Fédération de Russie, Saint-Marin, Serbie, Slovaquie,
Slovénie, Suède, Suisse, Turquie, Ukraine. Pour la liste des États liés par cette Convention, leurs déclarations et
réserves, V. les informations données sur le site internet du Conseil de l’Europe : http://conventions.coe.int
213
D. Alexandre, « La loi étrangère devant les tribunaux français », loc.cit.

93
possible de confier à un organisme privé de formuler la réponse ou un juriste qualifié en
214
mesure d’apporter des précisions utiles (art.6 § 1 et 2) . On trouve que ce mécanisme
permettrait au juge de recevoir les réponses élaborées par les experts de l’État acquis. Par
ailleurs, il permet d’en finir avec la pratique hautement critiquable des certificats de coutume
fournis par les parties au litige. Puisqu’on connaît les insuffisances de ces certificats qui ne
présentent pas toujours des garanties indiscutables de sincérité et qui apparaissent parfois
215
comme de véritables plaidoiries déguisées .
Il est regrettable que le juge ait utilisé très peu une procédure qui semble présenter
d’avantages pour les parties : la gratuité (le frais est à la charge de l’État dont émane la
216
demande), la fiabilité, la relative rapidité . Car presque quarante ans après la signature de
cette Convention, les tribunaux ne font que très rarement usage de cet instrument. En 2006, la
France n’a reçu que deux demandes de renseignements formulées par des juridictions d’États
parties et avoir transmis à l’étranger une seule requête provenant de juridictions françaises
dans le cadre de la Convention de Londres. Cependant elle a fait une critique sur les délais
pour émettre et recevoir une réponse à une demande de renseignements, car les délais de
réponse sont laissés à l’appréciation du seul pays requis sans que la juridiction requérante
puisse faire valoir un délai plus court, compte tenu des contraintes du procès dont elle est
saisie. Pour cette raison la lourdeur des mécanismes et la longueur des délais de réponse
217
dissuadent les juridictions d’utiliser cette voie d’accès au droit étranger . Cependant une
autre critique portant sur les limites particulièrement expresses dans les cas complexes en

214
Lorsque la demande est transmise à un organisme privé ou à un juriste, les frais qui résultent de l’étude sont
mis à la charge de l’État requérant (art.6 § 3).
215
F. Mélin, « La Convention européenne dans le domaine de l’information sur le droit étranger : constat d’un
échec », Petites affiches, 27 septembre 1999, n°192.
216
Quant au délai de réponses aux requêtes, en général il est relativement court. L’Office fédéral suisse de la
justice indique que sa section du droit international privé a répondu en 2006 aux demandes qui lui ont été
adressées dans un délai entre deux à six semaines. Selon le parquet de La Haye, il a répondu aux demandes dans
un délai environ d’un à deux mois. Le délai utilisé par la France était environs seize semaines, alors que
l’Allemagne a pu répondre dans trois semaines.
217
Cf. Ministère de la justice (France), Bureau de l’entraide civile et commerciale internationale, « Réponses
françaises au questionnaire du Bureau Permanent relatif à l’administration sur le droit étranger », la réponse à la
question 8, La Conférence de La Haye de droit international privé.

94
matière commerciale, car la réponse de l’État requis n’a couvert que le contenu simple de la
218
loi alors que les parties souhaitaient de connaître comment appliquer .

Domaines du droit étranger les plus couramment appliqués


par ou invoqués devant les autorités judiciaires

Source : Bureau Permanent, Conférence de La Haye de droit international privé, 2006, Doc.
Prél. N° 9B.
*fondé sur les réponses de 24 Membres des 30 ayant répondu (excluant la CE)

103. Le renforcement du juge de l’application obligatoire de cette disposition est


nécessaire, à défaut d’autres moyens de preuve, lorsque le juge aurait à rechercher lui-même
le contenu de la loi étrangère concernant un État signataire de la Convention. Depuis 2006, la
Conférence de La Haye a commencé des travaux afin d’élaborer une nouvelle Convention de
La Haye qui faciliterait l’accès aux ressources juridiques « en ligne » sur le droit étranger
y compris la coopération administrative ou judiciaire qui a pour but de traiter des demandes
de renseignements sur des questions concrètes sur l’application de la loi étrangère dans le
domaine spécifique qui se posent dans une procédure judiciaire.

218
Cf. Le Royaume-Uni, « Réponses britannique au questionnaire du Bureau Permanent relatif à
l’administration sur le droit étranger », la réponse à la question 8, La Conférence de La Haye de droit
international privé.

95
104. Les questions de l’applicabilité et l’établissement de la teneur du droit étranger semble
plus compliqués à l’égard de la loi des États fédéraux tels que les États-Unis. Car chaque État
dispose de son propre système judiciaire et de droit procédural. Nous avons cité plus haut que
pour le droit fédéral américain, la détermination de la loi étrangère est considérée comme une
question de droit. Afin de rechercher le contenu de celle-ci le juge devra procéder lui-même
219
ou à l’aide de la partie ayant invoqué son application .

105. A savoir s’il est possible d’avoir un instrument international pour tenir informés les
États hors de l’Union européenne ? Il semble que cette idée soit difficile à réaliser mais il est
peut-être possible de commencer par des groupes économiques en commençant par exemple
au sein de l’ASEAN. Hormis la possibilité de l’accès aux sources de droit thaï en ligne, l’idée
d’établir l’institut du droit comparé est aussi une bonne solution. Car la réponse aux questions
de droit ne provient pas nécessairement de l’organe public, les organismes privés pourraient
également fournir certains renseignements utiles ; par exemple The Max Planck Institute for
Comparative and International Private Law à Hambourg. En tant qu’amicus curiae, cet
Institut est très utile pour les juges allemands qui appliquent ex officio la loi étrangère selon le
Code de procédure civile.

Section III
Mise en œuvre de la loi étrangère.

106. Après avoir eu le contenu de la loi étrangère et tous les éléments de preuve, c’est la
tâche du juge d’appliquer la loi en cause au litige. Mais le juge doit tout d’abord l’interpréter
avant de l’appliquer. La question peut se poser comment le juge interprète une loi étrangère ?
Celle-ci fait-elle l’objet du champ de contrôle de la Cour de cassation ? En Thaïlande, la Cour
suprême Dika va dans la même direction que la Cour de cassation française, en présumant que
les tribunaux compétents pour le litige du commerce international connaissent bien la
méthode juridique d’interprétation. Voyons d’abord les problèmes de l’interprétation de la loi

219
Rule 44.1 provides: Determining Foreign Law
“A party who intends to raise an issue about a foreign country’s law must give notice by a pleading or
other writing. In determining foreign law, a court may consider any relevant material or source, including
testimony, whether or not submitted by a party or admissible under the Federal Rules of Evidence. The court’s
determination must be treated as a ruling on a question of law”.

96
étrangère à l’égard des juges du fond (§1), ensuite nous verrons le contrôle de la Cour de
cassation à titre d’exception dite en cas de dénaturation de la loi étrangère (§2).

§1 : Interprétation de la loi étrangère par les juges du fond.

107. Lorsque les juges du fond ont bien rempli son office au regard de l’applicabilité et de
l’application du droit étranger dans les cas évoqués ci-dessus, le juge envisage alors le
problème de l’incertitude du contenu du droit étranger en cause. Il est essentielle de savoir s’il
doit considérer que cette loi étrangère est défaillante, ou au contraire, on peut estimer que le
juge saisi peut utiliser les éléments recueillis en les traitant et interprétant comme s’il était un
juge étranger qui appliquait sa propre loi ? (A). Ce problème nous conduirait au résultat qui
est, en principe, à l’abri de toute censure par la Cour de cassation. L’interprétation qu’il aura
donné à la loi étrangère relève de son pouvoir souverain. Il est traduit par un principe
d’irrecevabilité du pourvoi fondé sur une interprétation inexacte de la loi étrangère. Nous
étudierons ensuite l’interprétation souveraine de la loi étrangère (B).

A. Le pouvoir du juge d’interprétation de la loi étrangère.

1) Présentation de l’argument.
108. Le pouvoir d’interprétation de la loi étrangère relève des juges du fond sous le
contrôle de la Cour de cassation. Celle-ci devra veiller aussi bien à la bonne application de la
loi qu’à l’uniformité de l’application. Il faut rappeler que normalement le juge a l’obligation
d’interpréter la loi lorsque le texte est obscur ou le sens est contesté par les parties. Si tels ne
220
sont pas les cas, le juge n’en aura aucune obligation . Est-ce qu’il en est de même pour la
loi étrangère ? La réponse est positive, car il s’agit de la quête d’informations que le juge
devrait procéder pour rendre la mise en œuvre de cette loi. Toutefois il est possible que les
termes de la loi étrangère soient suffisamment clairs et précis, et qu’il n’est pas nécessaire
d’être l’objet d’une interprétation particulière. Dans plusieurs cas, la question des rapports
entre traduction et interprétation pose souvent de problèmes. Il est rare que la traduction soit

220
V. en ce sens, M. van de Kerchove, « Le sens clair d’un texte : Argument de raison ou d’autorité ? », in
Arguments d’autorité et arguments de raison en droit, Études publiées par P. Vassart, Guy Haarscher et al. (dir.),
Bruxelles : Némésis, 1988, p. 300 et s. ; Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, op.cit., p. 52.

97
221
correctement comprise sans le moindre recours à l’interprétation . Cependant on ne peut
pas conclure qu’il y a défaillance de la part du juge si on tient compte du principe que le juge
doit mettre en œuvre tous les moyens de connaissance dont il dispose, puisque « chaque ordre
juridique est établi des procédés interprétatifs qui permettent au juge d’apprécier
222
juridiquement le rapport présenté en justice ». Lorsque le juge a d’office d’interpréter la
loi étrangère en raison de non existence d’une interprétation déjà fixée à l’étranger, il est
contraint de le faire lui-même : le juge devrait chercher à raisonner comme le ferait le juge
étranger, il est également tenu d’obéir aux maximes d’interprétation au même titre que le juge
223
étranger .
En effet cette thèse a été consacrée par Goldschmidt connue sous le nom de « théorie
de l’usage juridique étranger », laquelle conduit à admettre que le juge ne dispose d’aucun
pouvoir d’interprétation autonome de la loi étrangère. C'est-à-dire qu’il ne devrait pas pouvoir
prendre d’initiative pour statuer sur la base des seuls éléments recueillis. D’après
Goldschmidt, il existe de différence fondamentale entre le droit du for et le droit étranger ainsi
: « nous sommes en quelque manière ses architectes pour le premier (le droit du for). Au
contraire, le droit étranger est construit par les habitants du pays étranger, par rapport à lui,
nous sommes de simples photographes. Nous appliquons le premier ; nous observons et
224
imitons le second » . Cette théorie restreint le pouvoir d’interprétation du juge, il faut
admettre qu’il n’est pas aisé pour le juge du for de chercher à motiver sa décision comme le
ferait le juge étranger. Faute de disposer des informations, il devra considérer que

221
J.-P. Laborde, « L’interprétation de la loi étrangère par le juge français », in Interpréter et traduire, Actes du
colloque international des 25 et 26 novembre 2005, Faculté de droit de Toulon, sous la direction de J.-J. Sueur,
Centre d’études et de recherches sur les contentieux, Université du sud Toulon, Bruxelles : Bruylant, 2007, p.
274 et s.
222
Cf. P. Lamberti-Zanardi, « In tema di conoscenza del diritto straniero designato dalle norme di diritto
internazionale privato », note sous Cass. it., 29 janvier 1964, RDIPP.1964.644 citée par F. Mélin, « La
Convention européenne dans le domaine de l’information sur le droit étranger… », op.cit., p. 231-232.
223
V. en ce sens, P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n°192 ; P. Pivavatnapanich, Droit international
privé, op.cit., p. 230-231 ; Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, op.cit., p. 78 et s. ; M. Wolff, « Private
International Law », Great Britain : Clarendon Press, 1962, p.214. Le problème peut arriver lorsque le système
juridique du juge saisi est différent de celui du droit étranger. Lorsque le juge du pays de droit civil, par exemple,
le juge thaï devrait interpréter la loi anglaise, il est contraint de le faire en appliquant la méthode juridique
parallèle du juge anglais. Par exemple le juge thaï devrait interpréter la loi ‘Statute’ en interprétant littéralement
(Literal Rule). Le juge thaï ne peut pas appliquer la méthode ‘analogie’ comme interprétation du droit thaï.
Prenons un exemple en matière de responsabilité, la Cour contrôle l’existence de la faute, l’existence du lien de
causalité. Mais lorsqu’il s’agit d’une loi étrangère qui pose des règles sur la responsabilité, nous laissons ces
questions à l’appréciation souveraine des juges (Cf. A. Ponsard, La pratique judiciaire en France, in Les
problèmes actuels posés par l’application des lois étrangères, Travaux de l’Institut de Droit comparé de
Strasbourg, Paris : LGDJ, 1988, p. 34).
224
W. Goldschmidt, « Système et philosophie du droit international privé », RCDIP.1956.231.

98
l’établissement de la loi étrangère est défaillant. Sur ce point, le résultat semble contradictoire
avec un effort de renforcer le juge d’appliquer la règle de conflit de lois afin de rendre
applicable au litige la loi véritablement compétente. Car, il faut admettre qu’il n’est pas facile
pour le juge du for de connaître l’interprétation faite par le juge étranger.

2) Affirmation de l’argument.
109. La théorie de l’usage juridique étranger ne perde pas toute sa valeur à cause de sa
conception critiquable et difficile à réaliser. La solution proposée tient compte du résultat qui
doit être, en appliquant la règle de conflit. On admet généralement que le juge ne respectait
pas le droit étranger ; s’il ne tenait pas compte des principes d’interprétation utilisés par le
juge étranger et s’il ne prenait pas en considération la jurisprudence étrangère en interprétant
225
le texte de loi étrangère . MM. Mayer et Heuzé soulignent que « lorsque l’on dit qu’il doit
appliquer la loi étrangère désignée par la règle de conflit, il faut entendre le droit étranger
dans sa totalité, solutions coutumières et jurisprudentielles comprises (…). Il (le juge) doit
se contenter de constater la teneur de la règle, telle qu’elle résulte de l’ensemble des sources
226
étrangères du droit, et notamment de la jurisprudence » .
Plusieurs pays acceptent ce principe en disposant dans la même orientation tel que
l’article 2 de la loi vénézuélienne de droit international privé du 6 août 1998 qui dispose que
« le droit étranger désigné sera appliqué d’après les principes en vigueur dans les pays
227
étranger correspondant (…) » . L’article 34 de la loi tunisienne du 27 novembre 1998
portant sur le droit international privé stipule que « le juge appliquera la loi étrangère, telle
228
qu’interprétée dans l’ordre juridique dont elle relève » . L’article 23 § 1 du Code civil
portugais qui stipule que « la loi étrangère est interprétée suivant le système auquel elle
229
appartient et en accord avec les règles d’interprétation fixées par celui-ci » .
Cette règle de l’interprétation permettrait aux juges du fond de trouver le sens réel des
dispositions de la loi étrangère. Par ailleurs, on peut affirmer que le juge doit appliquer le
droit étranger en vigueur dans un tel pays. Reste à savoir si le juge du fond est lié à

225
J.-G. Sauveplanne, « L’interprétation du droit étranger par le juge national et les conséquences de
l’ignorance du contenu de ce droit », Revue hellénique de droit international, 1960, p. 7.
226
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 191.
227
RCDIP.1999.392. Informations diverses.
228
RCDIP.1999.382. Informations diverses.
229
RCDIP.1968.874. Informations diverses.

99
l’interprétation faite par l’autorité étrangère ; d’après la Cour permanente de justice
internationale, « il n’y a pas lieu d’attribuer à la loi nationale un sens autre que celui que
230
ladite jurisprudence lui attribue » . Car, ce qui importe est la réalité ou la vigueur du droit
appliqué et non l’intention du législateur étranger. Par conséquent le juge devrait respecter
l’interprétation donnée du texte étranger par les juridictions étrangères. On admet que ce
231
principe est difficilement contestable .

110. Jusque là, on peut constater que la recherche de la teneur de la loi étrangère présente
une articulation avec l’interprétation de celle-ci. Car, plus son contenu est clair, moins
l’interprétation est nécessaire. Alors l’importance de l’aide à la recherche de la teneur du droit
étranger est évidente ; si l’instrument international que nous avons étudié plus haut peut
obliger l’organe d’un État membre de répondre aux questions non seulement une simple
traduction du droit étranger mais également la jurisprudence applicable à cette question, les
juges du for pourront appliquer ladite loi étrangère en sens réel.

111. Le droit international privé thaï reste silencieux sur ce point, mais la doctrine admet
que le juge a le pouvoir d’interprétation de la loi étrangère. Les auteurs sont favorables à
l’approche selon laquelle le juge doit tenir compte de la jurisprudence de la Cour suprême de
232
tel ou tel pays et doit pouvoir prendre en considération les ouvrages juridiques de ce pays .
Il existe plusieurs méthodes d’interprétation, mais on peut regrouper en deux grandes
directives méthodologiques d’interprétation : l’interprétation littérale et l’interprétation
téléologique. Lorsque la première n’a pas pu donner un bon sens ou a donné le sens absurde,
le juge devra interpréter cette loi en utilisant la seconde directive. Normalement les deux
méthodes devront être utilisées ensemble pour que le juge puisse trouver le véritable sens de

230
CPJI, 12 juillet 1929, Emprunts serbes et brésiliens, RDIP.1929.427, note J.-P. Niboyet.
231
Contra A. Pillet, note sous Conseil privé, 17 février 1892, JDI.1894.155. Cet auteur estime que lorsque le
juge applique la loi étrangère, il rend la justice « sous sa propre responsabilité et à l’aide de ses propres lumières.
La loi étrangère devient sa propre loi lorsqu’il se voit obligé de l’appliquer, et, dès lors, il manquerait au premier
de ses devoirs s’il consacrait de son autorité une interprétation, si répandue qu’elle soit, qu’il juge contraire à la
vérité et incompatible avec la justice. Dans l’interprétation d’une loi étrangère, il n’a à obéir qu’à sa seule raison
et il en sera ainsi tant que l’on n’aura pas de Cour supérieure commune aux nations ».
232
Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, op.cit., p.79-80 ; Ch. Pachusanond, Droit international privé,
op.cit., p. 247.

100
233
la loi en question . On sait que chaque loi a son propre esprit, la loi relative au conflit des
lois a l’objectif de régler le problème de conflit des lois entre individus. Partant de la thèse
selon laquelle le même litige qui s’est traduit devant le tribunal quelconque, dans n’importe
quel pays, devrait recevoir le même résultat ou du moins les résultats proches. Afin de
atteindre cet objectif, le juge saisi devra utiliser la même directive qu’utilise le juge de telle loi
étrangère, ceci est par ailleurs conforme à l’application de la règle de conflit qui a pour but
d’éliminer la différence entre les conséquences obtenues de chaque tribunal étatique. C’est la
raison pour laquelle le juge est invité à tenir compte de la jurisprudence étrangère et le texte
déjà interprété du for de cette loi.
Il ne fait aucun doute que le juge saisi doit se conformer à la jurisprudence étrangère
reconnue formellement comme la source de droit ou le phare de l’interprétation, notamment
les décisions de la Cour suprême étrangère.

112. A savoir si le juge pouvait aller ailleurs pour rechercher lui-même le sens de norme
qui convient d’attribuer à la loi étrangère en cause lorsque le juge ne trouve aucune norme
étrangère susceptible d’appliquer au litige ? Il semble que la réponse est plutôt positive
malgré certaines hésitations de recours à la thèse de Goldschmidt. Dans la plupart des cas le
juge devra préciser le sens de la norme pour procéder une interprétation puisqu’il peut arriver
le cas où il se trouve en présence d’un nouveau texte étranger sur lequel les juges étrangers
n’ont pas encore eu l’occasion de rendre le jugement. Dès lors il est indispensable que le juge
saisi joue le rôle actif de sa part au lieu d’un simple photographe de la jurisprudence
234
étrangère .

B. L’interprétation souveraine des lois étrangères.

113. Après avoir étudié le pouvoir du juge de l’interprétation du droit étranger, afin de
renforcer l’office du juge de respecter le sens de ce droit (2), on verra tout d’abord que
l’interprétation des lois étrangères relève du pouvoir souverain des juges du fond (1).

233
F. Ost et M. van de Kerchove, « Interprétation », in Vocabulaire fondamental du droit, Archives de
philosophie du droit, t.35, Paris : Sirey, 1990, p.172-173 ; Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, op.cit., p.
52 et s.
234
C. David, La loi étrangère devant le juge du fond, Paris : Dalloz, 1965, n° 368.

101
1) Affirmation du principe.
114. Lorsque l’on admet que le juge doit interpréter la loi étrangère selon un régime
différent de l’interprétation de la loi française ; l’interprétation des lois étrangères par les
juges du fond est souveraine aussi bien pour la loi substantielle que la règle de conflit des lois
en cas du renvoi. C’est pourquoi la Cour de cassation n’exerce pas de contrôle sur celle-ci,
même si elle la contrôlerait si c’était la loi française qui était en cause. En effet c’est en raison
de l’unification de la jurisprudence qui oblige la Cour de cassation de contrôler
l’interprétation des droits français par le juge du fond, car celle-ci lui est confiée dans
235
l’élaboration du droit français . Alors que la loi étrangère ne lui confère pas, donc le
contrôle de l’interprétation par la Cour de cassation ne semble pas nécessaire. On peut penser
que l’affirmation du non contrôle de l’interprétation souveraine du droit étranger par la Cour
de cassation confirme le fait que celui-ci est bien une règle de droit et non un simple élément
de fait.

236
115. Une décision de la Cour de cassation du 17 février 1982 concernant la question de
nationalité peut illustrer bien le non contrôle par la Cour l’interprétation du droit étranger. En
l’occurrence, l’article 96 du Code de la nationalité était en cause. Selon cet article, le Français
perd la nationalité française lorsqu’il se comporte comme citoyen d’un État étranger,
autrement dit s’il a la nationalité dudit État. Certes, il appartient à l’État étranger de dire si tel
individu a oui ou non sa nationalité. Reste à savoir lorsqu’une autorité étrangère déclare qu’un
tel individu n’a pas la nationalité de cet État, si ceci lie le juge français ? (il s’agit en effet
d’un acte public étranger). Un Polonais qui prétendait ne pas pouvoir être déchu de la
nationalité française ; il avait perdu la nationalité polonaise. Comme preuves, il invoquait des
attestations, délivrées par les autorités consulaires polonaises. La Cour d’appel n’avait pas été
convaincue et avait jugé par interprétation et application de la loi polonaise que cette personne
avait bien conservée sa nationalité polonaise. Un pourvoi a été formé contre cette décision au
motif que le juge ne devait pas interpréter la loi polonaise dans un sens différent de celui
donné par les autorités polonaises. On peut observer que ce pourvoi a appuyé sur
l’interprétation de la loi polonaise faite par les autorités publiques qui ne sont pas les juges.
Ensuite, il s’agissait d’une question souverainement appréciée par les juges du fond. C'est-à-
dire que la référence aux dispositions de la loi étrangère invoquée a souverainement dégagé

235
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n°193.
236
Cass.1er civ., 17 février 1982 , RCDIP.1983.249, note H. Batiffol.

102
du sens et de la portée, son application ne relevant pas du contrôle, par la Cour de cassation,
237
de la valeur probante des documents produits . La Cour de cassation a décidé par ailleurs
qu’il n’y avait pas atteinte aux principes selon lesquels chaque État détermine librement par
ses législations ses propres nationaux, lorsque le juge français a décidé de la nationalité d’une
personne physique par application de sa loi nationale ou d’une loi étrangère.

238
116. Dans un arrêt de la Cour de cassation rendu le 26 février 2002 , la Cour n’énonce
pas un principe nouveau mais rappelle le principe du non-contrôle de la Cour de cassation en
appliquant le droit étranger en même temps que son exception. La Cour de cassation veille à
ce que les juridictions appliquent correctement la loi qui doit régir la cause après l’avoir
interprétée. En effet c’est la tâche essentielle de la Cour de cassation de censurer la non-
239
conformité aux règles de droit des décisions qui lui sont déférées (art. 604 CPC) . On sait
que le contrôle « normatif » ne joue qu’à l’égard des lois du for. Pour les lois qui sont
considérées comme l’élément de fait, si les juges du fond doivent également en tenir compte,
ils ne sauraient les violer par fausse application, ou refus d’application, ou fausse
interprétation. Dans ce cas, comme on l’a vu plus haut, la Cour de cassation estime que « les
juges appliquent et interprètent souverainement la loi étrangère laquelle est une règle de
240
droit qui ne relève pas des prescriptions de l’article 7 du NCPC » . De même que les
arrêts rendus en 2002 qui réaffirment ce principe du non contrôle de l’interprétation donnée à
241
la loi étrangère par les juges du fond : la loi ivoirienne en matière de prescription ; la loi
242
camerounaise en matière d’assurance ; la loi italienne sur les conditions d’indemnisation
243
par l’assureur de responsabilité civile . Car il faut donner à la loi étrangère son sens et sa
portée dans l’exercice de la même souveraineté que celle dont les juges disposent pour

237
A. Ponsard, « La pratique judiciaire en France », La pratique judiciaire de la Cour de cassation, in Les
problèmes actuels posés par l’application des lois étrangères, Travaux de l’Institut de Droit comparé de
Strasbourg, Paris : LGDJ, 1988, p. 36.
238
Cass. soc., 26 février 2002, pourvoi n° 99-42.573, arrêt n° 789 FS/D, inédit.
239
A. Perdriau, « La loi étrangère au regard du juge de cassation », Petites affiches, 6 juin 2002, n° 113, p. 7.
240
Cass.1er civ., 13 janvier 1993, Coucke, préc. supra, note n° 88.
241
Cass. soc., 28 février 2002, pourvoi n° 99-18.389, Bull.ch.soc.2002 : en l’espèce, la Cour de cassation a jugé
que la Cour d’appel avait appliqué à tort la loi ivoirienne en opposant une prescription de 12 mois à la demande
d’une indemnité d’expatriation.
242
Cass.1er civ., 15 mai 2002, pourvoi n° 00-17.982, inédit.
243
Cass.1er civ., 18 septembre 2002, pourvoi n°98-14.111, inédit.

103
apprécier des éléments de fait ou de preuve. La Cour de cassation affirma que « l’application
du juge de la loi étrangère, quelle qu’en soit la source, légale ou jurisprudentielle, échappe,
244
sauf dénaturation, au contrôle de la Cour de cassation » .

2) Le renforcement de l’office du juge de respecter le sens de la loi étrangère


désignée.
117. Ce principe a été affirmé depuis certains temps jusque nos jours même par des arrêts
rendus en 2002. Lorsque la recherche du contenu de la loi étrangère est accomplie, il convient
de dégager la signification de l’ensemble des éléments ainsi rassemblés afin de déterminer
comment l’ordre juridique applicable entend trancher la question litigieuse. Dès lors qu’on
pèse sur le juge l’obligation de rechercher la teneur de la loi étrangère, il faut admettre que ce
devoir ne peut être accompli que s’il a fait une recherche complète des sources du droit positif
245
étranger désigné par la règle de conflit de lois dite la dimension qualitative .
246
A cet égard nous étudions l’arrêt de la Cour de cassation Sté Lavazza , une décision
importante dans la mesure où il participe à instaurer une dimension qualitative à l’office
renforcé du juge lors de la recherche du contenu de la loi étrangère y compris le sens réel. Le
principe de cet arrêt ne distingue pas le cas où le juge prend l’initiative de l’application de la
247
loi étrangère et le cas où cette application est réclamée par les parties . D’après cet arrêt, il
est à noter que la carence des parties ne doit pas entraver la recherche par le juge du fond du
contenu de la loi étrangère tel qu’il existe réellement dans l’ordre juridique étranger appelé à
régir la relation juridique en cause. En l’espèce, la Cour de cassation censure l’arrêt attaqué
qui est fondé sur un document versé au débat attestant la teneur de l’article 461 du Code de
commerce monégasque. Un pourvoi a été formé contre le débiteur déclaré à Monaco en état
de cessation de paiement. Le motif de censure la décision d’appel est venu de la référence
exclusive au document législatif ; le juge du fond avait mis en œuvre la loi étrangère en
s’abstenant de tout effort de recherche de la portée réelle du texte de loi. Selon la Cour de

244
V. en ce sens Cass. 1er civ., 3 juin 2003, Droit et patrimoine 10/2003 p. 95, obs. F. Monéger ; JDI.2004.520,
note F. Mélin ; Gaz. Pal. 16-18 nov. 2003, p.19, obs. M.-L. Niboyet. La Cour de cassation affirma ce principe
en reconnaissant aux juges du fond le pouvoir d’interpréter souverainement la loi étrangère pour la règle
substantielle.
245
H. Muir-Watt, note sous Cass.1er civ., 16 mars 1999, RCDIP.1999.713 et s., spéc. p.718.
246
Cass.1er civ., 24 novembre 1998, Lavazza, RCDIP.1999.88, 1er esp., note B. Ancel ; D. 1999.337, note Ph.
Menjucq.
247
Ph. Menjucq, note sous Cass.1er civ., 24 novembre 1998, Lavazza, op.cit., p. 338.

104
cassation, « les juges du fond sont tenus à mener le raisonnement conflictualiste à son terme
en confrontant le document produit attestant la teneur du droit substantiel étranger à
l’ensemble des sources du droit positif étranger. En ignorant de le faire, le juge enfreint
l’injonction du système du for de se transporter de manière complète dans l’ordre juridique
248
étranger ; il viole la règle de conflit appelée à régir le rapport juridique en cause » .

118. Il semble difficile d’admettre que le certificat de coutume puisse constituer le


paramètre exclusif pour apprécier le droit étranger. On sait que le certificat de coutume est un
document établi en langue française par les autorités étrangères ou par une expertise
consultée, il présente l’état du droit positif étranger sur une question donnée. Pour la fiabilité,
normalement le certificat de coutume délivré par les premières telles que consulaires ou
diplomatiques est considéré plus faible que celui établi par l’expertise telle que le professeur
de droit ou avocat. Car les autorités étrangères ne font que la reproduction du texte en vigueur
sans explication du sens réel de ce texte. Par ailleurs, il est possible qu’un tel document ne
rend pas exactement compte de l’état du droit positif étranger soit parce qu’il ne cite pas une
jurisprudence établie en ce sens, soit parce qu’il fait une erreur, soit parce qu’il fait abstraction
249
d’une modification législative récente . C’est pourquoi la citation de certificat de coutume
peut être critiquable. Il en résulte que la teneur du droit étranger établi par le certificat de
coutume ne lie pas les juges du for, ceux-ci peuvent refuser de le suivre et écarter
l’interprétation qu’il en fournie sous la condition de s’en expliquer. A notre avis il est possible
que les juges et les avocats de l’adversaire aient l’opportunité de poser des questions à des
auteurs de certificats pour examiner la fiabilité de ces documents. En Thaïlande les avocats
des parties peuvent faire la cross-examination aux témoins experts pendant le procès, ce qui
250
permettrait au juge de se forger une opinion et vérifier l’authenticité des preuves .

248
Cass.1er civ., 24 novembre 1998, Lavazza, op.cit.
249
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 191.
250
Le principe du droit des preuves est l’interdiction d’entendre un témoin à la place d’une preuve écrite. A
l’exception de la procédure qui déroule devant certains tribunaux compétents dans les domaines spéciaux : le
Tribunal Central de faillite (l’article 12 de régulation de l’instance de faillite B.E.2542) ; le Tribunal Central
d’imposition (l’article 6 de régulation de l’instance d’imposition B.E.2544). Pour le Tribunal Central de la
propriété intellectuelle et du commerce international, les articles 4 et 27 de régulation de l’instance de propriété
intellectuelle et de commerce international B.E. 2540 dispose que les parties peuvent accorder autrement devant
le juge tel est un accord d’entendre uniquement des témoins au lieu d’autres preuves pendant le procès.

105
119. Il existe d’autres procédés de preuve dont dispose personnellement le juge. En vertu
de l’article 10 du CPC français, le juge peut notamment « ordonner d’office toutes les
mesures d’instruction légalement admissibles » et plus particulièrement il peut aussi recourir
à une consultation ou une expertise. De même qu’en droit procédural thaï, il y a deux cas où
les expertises peuvent jouer leur rôle : le premier c’est le pouvoir discrétionnaire de la Cour
251
d’établir un témoin expert . Le second c’est le cas où les parties demandent à la Cour
252
d’établir une expertise en sollicitant qu’il est nécessaire d’entendre ce témoin pour prouver
leur prétention. Cependant une décision de la Cour suprême rendue en 2003 mérite d’être
soulignée : « le problème que la Cour doit ou non appliquer la loi de Singapore au litige, y
compris la recherche de la teneur de cette loi, c’est le devoir de la partie qui demande
l’application d’amener un témoin expert devant la Cour selon l’article 8 de la Loi 1938
253
relative au conflit de lois » . Par cette décision, nous pouvons constater que l’obligation
d’établir un témoin expert incombe non plus à la Cour, mais plutôt aux parties contractantes.
Toutefois on peut comprendre ce raisonnement étant donné que le litige porte sur le
commerce international, les contractants préfèrent alors établir eux-mêmes les témoins experts
malgré les dépenses supplémentaires auxquelles elles doivent à faire face.
On admet que les témoins experts soient souvent indispensables dans le système de
254
preuve notamment pour le litige concernant le commerce international et la loi étrangère
255 256
ou même pour prouver la coutume du commerce international ou le droit international .
Quant à la procédure civile, la Loi portant sur la création du TCPICI dispose expressément
que la Cour pourrait faire un appel à une expertise pendant la procédure mais il faut prévenir
257
toutes les parties au litige et il faut également respecter le principe du contradictoire .

251
L’article 129 du Code de procédure civile thaï.
252
Les articles 88, 99, 129, 130 du Code de procédure civile thaï.
253
Cour suprême Dika, n° 3537/2546 (2003).
254
TCPICI, com. n° 62/2542 (1999) ; n° 109/2545 (2002) ; Cour suprême Dika, n° 3401/2529 (1986) ;
n° 563/2532 (1989) ; n° 2768/2532 (1989) ; n° 2446/2532 (1989).
255
Cour suprême Dika, n° 2122/2499 (1956) ; n° 1848/2505 (1962) ; n° 2546/2517 (1974) ; n° 1010/2524
(1981) ; n° 2157/2524 (1981) ; n° 775/2525 (1982) ; n° 3313/2525 (1982) ; n° 1561/2529 (1986); n° 216/2538
(1995) ; n° 3787/2543 (2000).
256
TCPICI, com. n° 163/2542 (1999); n° 271/2543 (2000) ; n° 323/2543 (2000) ; Cour suprême Dika,
n° 2043/2531 (1988) ; n° 115/2543 (2000) ; n° 533/2543 (2000) ; n° 3794/2543 (2000).
257
L’article 31 de la Loi portant sur la création du Tribunal Central de la propriété intellectuelle et du
commerce international et la procédure du litige B.E. 2539 (1996).

106
120. En France, la Cour de cassation n’hésite pas à fonder un contrôle indirect sur
l’application du droit étranger par le biais de la technique du contrôle des motifs. Cependant
au moment où la doctrine appelait à une confirmation en ce sens, la Cour de cassation a
décidé dans un arrêt du 16 mars 1999 en affirmant que « l’application que fait le juge du droit
étranger quelle que soit la source légale ou jurisprudentielle échappe, sauf dénaturation non
258
invoquée en l’espèce, au contrôle de la Cour de cassation » . Dès lors, l’obligation
consacrée par l’arrêt Lavazza a été rejetée du champ de contrôle de la Cour de cassation, le
contrôle qui devra être cantonné aux seuls cas de dénaturation de la loi étrangère. Comme on
259
a exposé précédemment, dans l’arrêt du 26 février 2002 confirmant l’arrêt du 16 mars
1999, la Cour de cassation a placé la question de l’application du droit étranger sur le terrain
de l’interprétation, et qu’elle n’exerce sur celle-ci aucun contrôle sauf cas de dénaturation de
la loi étrangère désignée.
En Thaïlande, même si la doctrine reste silencieuse sur ce point, la pratique du juge de
l’interprétation de la loi étrangère est souveraine. Le contrôle par la Cour suprême a pour but
de vérifier l’application de ladite loi conformément au sens réel employé dans son pays
d’origine.

§2 : Le contrôle disciplinaire : à titre d’exception.

121. On sait que les juges du fond déterminent souverainement le contenu du droit étranger
mais la Cour de cassation possède le pouvoir de contrôle en cas de dénaturation. Il est
possible que, problème d’ordre général, un même texte étranger soit interprété différemment
par les juridictions inférieures. La dénaturation de la loi étrangère constitue une limite au
défaut de contrôle de l’interprétation de la loi étrangère ; à vrai dire les hypothèses de
dénaturation sont très rarement constatées, car les exigences du caractère clair et précis du
260
droit étranger sont difficilement remplies . Nous étudions d’abord le pouvoir de censurer de
la Cour de cassation en cas de dénaturation (A), ensuite les répercussions du contrôle qui font
l’objet de notre étude (B).

258
Cass.1er civ., 16 mars 1999, Sté M. Moureau, RCDIP.1999.713 et s., spéc. p.718, note H. Muir-Watt.
259
Cass. soc., 26 février 2002, préc. supra, note n° 272.
260
Cass.1er civ., 1er juillet 1997, Africatours, D. 1998.104, note Menjucq ; RCDIP.1998.292, note H. Muir-
Watt ; JDI.1998.98, note Barrière-Brousse ; JCP.1998.II.10170, note Fillion-Dufouleur.

107
A. La censure de la Cour de cassation de dénaturation.

122. La notion de dénaturation avait été également forgée afin de tempérer le pouvoir
souverain d’interprétation des juges du fond. Reste à savoir ce qu’est la portée véritable du
contrôle ? S’agit-il de la dénaturation du droit étranger proprement dit ou uniquement la
dénaturation des documents produits qui ont établi le contenu du droit étranger ?
Certes, une interprétation obscure ou insuffisamment motivée pourraient encore
justifier la censure de la Cour de cassation pour violation de la loi étrangère pour un
manquement de base légale, en particulier lorsque les juges appliquent la loi étrangère sous
les conditions telles qu’elles font douter de leur bonne compréhension du risque processuel en
261
ce domaine ; l’arrêt The Arab Investment peut servir comme un bon exemple. La Cour de
cassation dans cet arrêt a censuré la juridiction d’appel qui avait négligé d’indiquer les
dispositions du droit anglais sur lesquelles elle se fondait. On voit que la Cour de cassation
admet que c’est de l’office du juge de prononcer le contenu du droit étranger.
La méthode utilisée par la Cour de cassation pour vérifier l’interprétation de la loi
étrangère donnée par les juges du fond est relative dans le temps. Au XIXe siècle, la Cour a
sanctionné la fausse interprétation du droit étranger. Par exemple dans l’arrêt du 1er février
1813, elle a cassé une décision par le motif qu’elle a « erré dans l’interprétation (...) des lois
262
du Royaume d’Italie » . Ce contrôle apparaît dans plusieurs décisions intervenues entre
263
1870 et 1880 avant d’être définitivement abandonné à partir de 1886 . Mais on peut
constater qu’il se base sur le fait que la Cour de cassation contrôlait cette interprétation du
droit étranger lorsque celui-ci était désigné par la règle de conflit écrite et non par la règle de
conflit coutumière.

123. De nos jours, le refus de la Cour de cassation de vérifier l’interprétation de la loi


étrangère est généralement approuvé. En effet ce refus de contrôler l’interprétation condamne
l’attitude des juges du fond consistant à ne pas choisir entre la loi française et la loi étrangère
lorsque celles-ci leur paraissent équivalentes et la solution du conflit de lois est
incertaine. Cependant ce principe n’empêche pas la Cour de procéder au contrôle en cas de

261
Cass.1er civ., 6 mars 2001, The Arab Investment, RCDIP.2001.335, note H. Muir-Watt ; JDI.2002.171, note
Raimon.
262
Cass. civ., 1er février 1813, S. 1830.1.113.
263
B. Ancel, obs. sous Cass.1er civ., 21 novembre 1961, Montefiore, GA, 4e éd., 2001, n° 36, p. 317.

108
264
dénaturation de la loi étrangère. Dans l’arrêt du 21 novembre 1961 , la Cour de cassation a
cassé l’arrêt d’appel au motif qu’il y avait la dénaturation de la loi belge par la
méconnaissance « du sens clair et précis » du texte en cause, les juges du fond ont violé
l’article 1134 du Code civil. Elle a ainsi depuis cet arrêt compétence pour contrôler la
265
dénaturation des contrats par les juges du fond .
Mais l’attitude de la Cour de cassation nous montre que depuis 1961 la notion de
dénaturation jouera son rôle afin de tempérer le pouvoir souverain traditionnellement reconnu
aux juges du fond dans l’interprétation des contrats.

124. En effet la Cour de cassation n’abandonne plus entièrement aux juges du fond
l’interprétation de la loi étrangère. Le développement de l’obligation du juge de se renseigner
sur le contenu de la loi étrangère entraîne l’évolution de la position de la Cour de cassation.
266
Cette évolution paraît dans un arrêt Africatours qui manifeste le souhait de la Cour de
s’accorder une certaine marge de manœuvre en la matière.
En l’espèce, la Cour de cassation a reproché la Cour d’appel de Paris d’avoir méconnu
le sens littéral de la loi sénégalaise en se prononçant non plus vers le visa de l’article 1134 du
Code civil mais celui de l’article 3. La Cour d’appel avait appliqué la loi française sous
couvert d’application de la loi sénégalaise, plus précisément elle a retenu l’interprétation
donnée par le droit interne français qui exige la faute détachable des fonctions alors que la loi
sénégalaise applicable au rapport de droit précise une responsabilité pour fautes commises
dans leurs fonctions. La Cour de cassation affirme à cet effet que la juridiction d’appel « a
méconnu le sens littéral de la loi étrangère au profit de l’interprétation donnée en droit
interne à la loi française (...), sans faire état d’aucune autre source du droit positif sénégalais
donnant à la disposition litigieuse le sens qu’elle lui attribue, la Cour d’appel a dénaturé la
267
loi étrangère » .

264
Cass.1er civ., 21 novembre 1961, Montefiore, GA, 4e éd., 2001, n°36, p.317. Contra J.-P. Laborde,
« L’interprétation de la loi étrangère », op.cit., p. 280. L’auteur estime que le problème est plutôt celui du choix
des normes étrangères applicables au litige que de leur interprétation.
265
H. Batiffol, Traité…, op.cit., p.551 et s.
266
Cass.1er civ., 1er juillet 1997, Africatours, préc. supra, note n° 260 .
267
Ibid.

109
Ainsi, d’après H. Batiffol, le sens peu compatible avec sa lettre donnée à un texte n’est
268
acceptable que s’il est convenablement motivé par l’examen de la jurisprudence étrangère .
En effet ce raisonnement permet d’élargir en pratique le contrôle de la Cour de cassation, en
intégrant dans son objet les motifs de l’arrêt d’appel. La Cour fait peser sur les juges du fond
d’office de justifier, en recourant à d’autres sources que les textes législatifs étrangers, une
interprétation divergente par rapport au sens apparent de ceux-ci. Selon cet arrêt, la Cour de
cassation a consacré l’idée que la dénaturation de la loi étrangère constitue aussi bien une
269
violation de la règle de conflit proprement dite que du texte substantiel étranger . Est-ce

que l’on peut dire que la Cour de cassation a essayé de motiver sa décision par le biais du
contrôle de dénaturation ? Le nouveau visa de la Cour de cassation signifie que la
dénaturation de la loi étrangère revient à ignorer la règle de conflit qui l’a désignée. C’est en
effet le même raisonnement pour le cas du contrôle de motivation.

125. La dénaturation de la loi étrangère face à la dénaturation de la clause


contractuelle. On a vu plus haut que le contrôle de dénaturation de la loi étrangère revêt une
originalité marquée par rapport à celui de la dénaturation du contrat, car la matière du droit
étranger porte des difficultés différentes de la matière contractuelle. En ce qui concerne la
dernière, l’article 1341 du Code civil interdit de prouver contre et outre le contenu d’un acte
écrit autrement que par un autre acte écrit. Mais il est plus facile de rechercher le contenu de
la clause contractuelle discutée, de même avec son sens qui est facile à connaître car il paraît
dans un cadre limité ; dans un contrat interne surtout rédigé en langue française. A contrario,
en matière de droit étranger il n’apparait qu’au travers des documents (certificat de coutume,
copie d’ouvrage juridique, etc.) cela est plus difficile à trouver sa teneur, car ces éléments ne
peuvent être tous identifiés. Les dispositions de la loi étrangère peuvent être trouvées dans les
sources diverses ; texte de loi, jurisprudence. Par ailleurs, ce que l’on a constaté de ces
sources peut donner un sens différent de celui qu’il apparaisse, car ces dispositions ne sont
jamais que des éléments d’un système plus étendu. De surcroît elles sont très souvent rédigées
en langue étrangère qu’il faut chaque fois traduire.

268
H. Batiffol, Traité…, op.cit., p.556 et 557.
269
D. Gutmann, Droit international privé, Paris : Dalloz, 2009, n° 113.

110
126. En effet les décisions de la Cour de cassation concernant l’admission du contrôle de
270
dénaturation du droit étranger semblent relativement diminuer , dans les derniers temps on
271
n’en trouvait que cinq . Depuis l’arrêt Africatours rendu en 1997, le reproche de
dénaturation du droit étranger dans les décisions de la Cour de cassation ne paraît que sous la
forme du contrôle des motifs ou on peut en déduire qu’il s’agit de la sanction de la
272
« dénaturation intellectuelle » . Ceci permet à la Cour de cassation de vérifier si les juges
du fond ont bien délibéré les obligations qui leur incombent ; la détermination du contenu de
la loi étrangère. Dès lors c’est le juge qui devrait exposer les motivations de rejeter ou de
retenir le droit étranger en cause. Il ne pourrait pas rester passif lorsqu’il est retenu par les
éléments de preuve présentés par les parties. Autrement dit, le juge est tenu de statuer et tout
273
mettre en œuvre pour établir le contenu exact (nos italiques) de la loi étrangère en litige .

B. Les répercussions négatives du contrôle de la dénaturation.

127. Le contrôle de dénaturation de la loi étrangère permet à la Cour de cassation de


vérifier si les recherches effectuées par les juges étaient suffisantes. Ce contrôle présente aussi
son aspect négatif… Le problème de contrôle par la Cour de cassation de l’interprétation de la
loi étrangère a fait l’objet des plus vives controverses lorsque la Cour pose une condition
d’application de la loi française ou lorsqu’elle fait appel à la règle française de conflit pour
régler le litige. Nous essaierons de nous pencher sur l’aspect négatif du contrôle de
dénaturation de la loi étrangère, qui est exclue de tout contrôle du juge de cassation sur
l’interprétation des actes juridiques obscurs.
Le contrôle de la dénaturation, constate M. J. Boré, est tout à fait « inadapté » à la
274
réalisation d’un contrôle de l’interprétation des actes obscurs . D’après cet auteur, la théorie
de la dénaturation, à l’épreuve de son succès, est un mécanisme du contrôle de

270
V. en ce sens, J.-P. Laborde, « L’interprétation de la loi étrangère par le juge français », op.cit., p. 276.
271
Cass. 1er civ. 21 novembre 1961, Montefiore, préc. supra note n° 264 ; Cass. soc. 10 mai 1972, Consorts
Bastia, RCDIP.1974.321, note Marraud ; Cass. 1er civ. 2 février 1982, Olivier, JDI.1982.690, note H. Muir
Watt ; RCDIP.1982.706, note P. Mayer ; JCP.1982, II, 19749, concl. Gulphe ; Cass. 1er civ., 19 mars 1991,
Buzyn, RCDIP.1992.88, note H. Muir Watt ; Cass. 1er civ., 1er juillet 1997, Africatours, préc.
272
Le terme utilisé par H. Muir Watt, Cass. 1er civ. 1er juillet 1997, RCDIP.1998.292, spéc. p. 300.
273
G. Lardeux, « La reconnaissance du statut de règle de droit à la règle de conflit de lois », D. 2003.1513.
274
J. Boré, « Un centenaire : La contrôle par la Cour de cassation de la dénaturation des actes », RTD. civ,
1972, p. 249 et s.

111
l’interprétation. Cependant comme on l’a vu, les cas du contrôle de l’interprétation et de la
dénaturation coexistant sont peu nombreux, puisqu’ils s’exercent dans des terrains différents ;
l’un pour les actes obscurs et l’autre, les actes clairs. Il y a le cas où le contrôle de
dénaturation n’a pas pu conduire à celui de l’interprétation, c’est le cas du droit étranger. En
effet ce n’est pas seulement dans cette matière où le contrôle de dénaturation ne peut conduire
au contrôle de l’interprétation, dans le domaine des contrats-types et des clauses de style sont
également exclus de ce sort de contrôle. Au regard de la Cour régulatrice, la loi étrangère
revêt un caractère ambigu ; d’un côté, elle est une règle obligatoire en vertu de la règle
française de conflit et elle est du droit par sa nature puisqu’elle est applicable à une généralité
de cas sans égard de la volonté des parties au procès. D’un autre côté, elle est soumise au
régime procédural des faits, puisque les juges français ne sont pas obligés de connaître
275
le contenu de la loi étrangère . Le juge français ne joue en revanche que le rôle de donner
une représentation photographique aussi fidèle que possible. On constate que c’est le même
sens qu’estime M. Goldschmidt que nous avons étudié précédemment.

128. Admettant que la clarté d’un texte de droit est plus difficile à apprécier que celle d’un
contrat, parce qu’il se rattache à tout un corps de règles qui en déterminent la portée. Cette
difficulté s’élargit lorsqu’il s’agit d’une loi étrangère dont le texte atteint le juge uniquement
à travers une traduction et par ailleurs il peut reposer sur des conceptions juridiques très
éloignées de sa connaissance. D’après M. J. Boré, ces difficultés ne doivent pas être
exagérées, car d’une part l’appréciation de la clarté du droit étranger ou de certificat de
coutume ne se fera pas d’après la seule base du texte législatif mais un ensemble de
276
dispositions ou de documents dont la Cour de cassation appréciera son adéquation .
C’est la raison pour laquelle le texte sera éclairé par des commentaires de doctrine ou de la
jurisprudence et lorsque les juges du fond attribuent à ces textes un contenu ou un sens
manifestement incompatible avec leurs termes, leurs décisions devront être censurées.
D’autre part il faut constater que la Cour de cassation n’apprécie jamais la netteté d’un écrit
qu’en l’état de la documentation produite devant elle et devant les juges du fond. On ne peut
pas dire qu’elle apprécie la clarté de la loi étrangère mais plutôt la clarté des documents qui la

275
Ibid.
276
Id., p. 297.

112
277
lui rapportent . D’ailleurs l’appréciation que la Cour de cassation aura donnée à la clarté
d’un document du procès sera absolument contingente en l’espèce et ne la liera pas
dans l’avenir si d’autres plaideurs viennent à lui fournir une information plus précise et plus
complète.

129. Reste à savoir si le juge pouvait, en exerçant un tel contrôle, tenir compte de son
expérience personnelle ? Certes, le contrôle exégétique de la dénaturation empêche la Cour de
cassation de se prononcer d’après les documentations extérieures mais on ne peut pas déduire
qu’il lui soit interdit de recourir à son expérience personnelle. Puisque l’éclairage d’un texte
s’apprécie par référence à un esprit éclairé. Il s’agit du contrôle atténué qui est impuissant à
réaliser le contrôle de l’interprétation directe de la loi étrangère, de surcroît ce genre de
contrôle risque de laisser demeurer des divergences d’interprétation de textes obscurs par les
278
juridictions inférieures . C’est pourquoi on dit plus haut qu’il s’agit d’un aspect négatif du
contrôle de dénaturation de la loi étrangère.

130. En Thaïlande, le débat sur la dénaturation de la loi étrangère devant la Cour suprême
se trouve très rarissime. Il en résulte que pour le peu de débat sur l’interprétation de la loi
étrangère, la doctrine admet que le juge interprète et applique la loi étrangère de la même
279
manière que le juge étranger qui applique sa propre loi . Il est possible que les litiges
présentés devant la Cour en matière du commerce international fassent référence à la loi
étrangère bien connue telle que Marine Insurance Act 1906, UCC américain, raison pour
laquelle nous ne trouvons pas vraiment de problème de dénaturation chez le juge thaï.

131. Conclusion du chapitre. Après avoir étudié et analysé la jurisprudence française et


thaïlandaise, on peut conclure qu’il est certain que le juge doive appliquer la loi étrangère
choisie par les parties contractantes. Cependant la tendance et la pratique française sont
différentes de celles du juge thaï. Afin de maintenir la répartition des tâches entre le juge et
les parties ; l’application de la règle de conflit de lois et l’établissement du contenu de la loi
étrangère, le juge français retient les critères de droits disponibles et indisponibles. Bien que

277
Ibid.
278
Ibid.
279
Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, op.cit., p. 79-80 ; P. Pivavatnapanich, Droit international privé,
op.cit., p. 230.

113
la Cour de cassation ne les a pas mentionnées en dernier temps, mais on sait que ces critères
servent de base dans ce domaine, et on ne peut pas dire que la Cour les a absolument
abandonnées… Alors que le juge thaï est obligé par l’article 8 de la Loi de 1938 relative au
conflit de lois, c'est-à-dire qu’il n’a pas d’office de soulever l’extranéité et l’applicabilité de la
loi étrangère. Dès lors, il incombe à la partie demanderesse, sans tenir compte de la nature du
droit litigieux, l’obligation de soulever l’extranéité du litige et d’établir la teneur de cette loi
étrangère. Certes, l’application de la loi étrangère peut entraîner les difficultés pour le juge
concernant l’établissement de sa teneur. La coopération entre les juges et les parties doit être
primordiale. Ceci pourrait éventuellement économiser le temps et les dépenses des parties.
Par ailleurs, le juge devrait donner des conseils susceptibles de faciliter la production des
preuves si jamais l’occasion se présente. On peut se demander pour quelle raison le fardeau
incombe aux juges surtout en matière des contrats internationaux où les avocats jouent un rôle
très important et indispensable. Les parties doivent également être très actives. Sous l’égide
des avocats, l’accès à la connaissance du contenu de la loi étrangère est plus facile et peut
soulager la charge alourdie des juges du fond. Sur ce point, il y a peut être l’opinion
dissidente qui se fonde sur l’objectif de droit international privé que ceci a pour but de rendre
la justice aux parties. On sait que la justice de droit international privé ne concerne pas
280
simplement les intérêts privés mais elle comporte aussi de l’intérêt général . Alors dans
certaines hypothèses au sein des droits disponibles, le rôle passif du juge est peu satisfaisant,
car le jeu des intérêts privés ne peut être toujours souverain. On peut aller jusqu’à poser une
question à savoir s’il est juste de voir les plaideurs ignorants être sanctionnés par la privation
des droits consacrés par la loi ? A notre avis, lorsque l’intéressé ignore les droits qu’il pouvait
y accéder, en particulier dans le domaine de droits disponibles, ceci ne concerne pas le respect
du principe de la contradiction. A ce stade, la proportionnalité de la charge de preuve semble
être un moyen plus apte à régler ce problème d’après la Cour de cassation, les arrêts du 28
juin 2005 ; il est à la charge du juge avec le concours des parties d’établir la teneur de la loi
étrangère.
La Cour de cassation a manifesté une réticence certaine à contrôler l’application par
les juges du fond de la loi étrangère. Quant à la Cour de cassation, elle n’est pas juge du fait,
donc elle laisse l’appréciation au pouvoir souverain des juges du fond. Si les juges du fond
n’était pas obligé d’appliquer le droit étranger, il semblerait irrationnel de lui reprocher

280
H. Batiffol, Traité…, op.cit., n° 267 ; P. Lerebours-Pigeonnière, Droit international privé, 3e éd., 1937, n°
213 et s.

114
d’avoir méconnu le véritable sens de ce droit et vice versa. La Cour de cassation a mis
l’accent sur le contrôle aux cas les plus sérieux d’erreur d’application de la loi étrangère ;
lorsqu’il y a méconnaissance du sens clair et précis d’un texte législatif versé au débat. La
Cour a emprunté le concept traditionnel de dénaturation appliqué par l’ancienne jurisprudence
aux contrats et aux pièces de procédure. On peut conclure que la notion de dénaturation
n’était envisageable qu’en présence d’un document clair et précis, le contrôle de la
dénaturation par la Cour de cassation mérite désormais une attention particulière.

115
116
Chapitre Second
CHOIX DES NORMES NON ETATIQUES.

132. La question peut se poser s’il est possible qu’un contrat international puisse échapper
à la loi nationale afin de soumettre à un système de règles substantielles non étatique. Dans la
vie économique internationale il arrive souvent que les règles de droit étatique se trouvent
inadaptées pour régler ces problèmes. Les opérateurs commerciaux préfèrent alors chercher
eux-mêmes à combler ces lacunes. Nous étudierons d’abord la question du contrat sans loi qui
est en réalité un contrat soumis à un droit commercial commun.

133. En Thaïlande la position des auteurs sur le droit a-national, plus précisément la lex
mercatoria, est claire. Ils considèrent que ceci n’a pas de valeur juridique, mais des règles
émanant des pratiques et usages commerciaux des individus. Cependant l’avis sur le « contrat
sans loi » est obscur, c’est probablement parce que la traduction officielle en thaï du terme
« contrat sans loi » n’existe pas. En effet, on constate que le terme ‘contrat sans loi’ ne figure
sur aucun ouvrage thaï. Car on n’aurait pas pu imaginer qu’un contrat ne soit soumis à aucun
droit. Le « droit » au sens de l’ensemble de droits signifie Kod Maï กฎหมาย et la « Loi » ou

Phrarajabunyat (Act of Parliament) qui est plus spécifique.


Voyons si le terme « contrat sans loi » peut nous donner des intérêts et des
explications plus précises. D’abord l’admission dans les contrats internationaux des règles
non légiférées paraît à travers la théorie de contrat dit sans loi (Section I). Ensuite
l’applicabilité de la lex mercatoria devant la juridiction étatique et la juridiction arbitrale,
certes la dernière est plus favorable à appliquer la loi marchande que la première (Section II).

Section I
Admission aux contrats internationaux des règles non légiférées :
l’affirmation du principe.

134. Le contrat sans loi a fait l’objet du débat depuis longtemps. On peut dire qu’il s’agit de
la crise des conflits de lois d’une part et le fruit du principe de l’autonomie de la volonté
d’autre part. La théorie de contrat sans loi suppose la faculté des parties contractantes
d’écarter tout rattachement à un système juridique étatique. Cette thèse est consacrée à la loi

117
des parties ou la loi d’autonomie mais non à la loi au sens du positivisme. M. Jacquet a
proposé ainsi le concept dénommé « contractualisation de la loi », c'est-à-dire il n’y a aucune
limite du choix de la loi par les parties qui peut se porter sur la loi d’un pays sans aucun lien
avec leur contrat. Les parties peuvent se référer aux dispositions de plusieurs lois et enfin
elles peuvent stipuler que le contrat ne sera soumis à aucune loi. Cette idée s’est fondée sur
une base que le contrat international vaut par lui-même non en vertu d’une loi qui lui
281
conférerait sa validité et déterminerait ses effets . On trouve très souvent le contrat sans loi
dans les contrats internationaux conclues entre les commerçants. Il arrive que cette partie
individuelle étrangère ne veuille pas se soumettre à la loi du for de son cocontractant. Ce
conflit d’intérêts les conduirait à un accord des parties contractantes de soumettre leur contrat
à la règle non légiférée. Telle est la lex mercatoria ou autres principes regroupés par les
organismes non-gouvernementaux, afin d’avoir la règle neutre gouverne au contrat. Le seul
fait de saisir un juge dans ce cas est pour lui demander de donner effet au contrat manifeste
une contradiction avec la volonté initiale des parties afin de maintenir leur convention en
dehors du droit. Cependant on trouve que le statut de contrat sans loi fait toujours l’objet du
débat dont l’admission est fragmentaire (§ 1). On verra quel est le terme plus favorable et plus
juste. Le problème de contrat sans loi pourra théoriquement être en cause et les auteurs ont
proposé les idées variées. En pratique lorsque les parties ont laissé leur contrat « sans » loi
applicable, ce n’est pas le même cas du non choix des parties de la loi applicable au contrat.
Car les parties ont choisi, dans ce contexte, le droit non légiféré au lieu du droit étatique. On
étudiera ensuite la faveur au contrat sans loi fondé sur la volonté des parties (§ 2).

§ 1 : L’admission fragmentaire du contrat sans loi.

135. Admettre qu’il est souvent de trouver les situations de contrat sans loi résultent d’un
accident de parcours dans l’application de la règle de conflit de lois. Elles pourraient résulter
aussi de la jurisprudence favorable à la liberté contractuelle ou dans certains cas c’est pour
282
éviter de prononcer la nullité d’un contrat ou d’une disposition du contrat . Cependant on
peut constater qu’il y a la diversité d’admission du contrat sans loi par les juridictions
étatiques (A) et les juridictions arbitrales (B).

281
J.-M. Jacquet, Principe d’autonomie et droit applicable aux contrats internationaux, Paris : Economica,
1983, préf. J.-M. Bischoff, p. 27 et s.
282
J.-M. Jacquet, Droit du commerce international, 2e éd., Précis, Paris : Dalloz, 2010, n° 357.

118
A. La notion de contrat sans loi selon les juridictions étatiques.

136. Le contrat sans loi donne la possibilité de se détacher de droit d’un État en se
rattachant à un droit commun autonome. La question peut se poser si un contrat international
doit nécessairement être rattaché à un ordre juridique étatique. En effet la nécessité d’un
rattachement à un droit étatique se présente ici pour affirmer que l’autonomie de la volonté
des contractants par rapport au droit étatique n’est pas absolue. Il y a des limites que nous
verrons par la suite. Il est logique que le juge étatique doive respecter la règle de conflit de
lois du for et aussi le nombre de contrats rattaché à un droit national à travers le jeu de la règle
conflictuelle. C’est valable également pour les contrats internationaux en matière de bien
immobilier lesquels devraient être rattachés toujours à la loi où se situe cet immeuble selon la
lex rei sitae. Pourtant dans certaine matière comme le contrat de vente internationale des
marchandises, le champ d’application de la loi autonomie paraît plus répandu.

283
137. Le contrat régi par les règles de droit transnational . Le terme de « contrat sans
loi » décrit la situation selon laquelle on recherche à savoir s’il existe, au-delà de droit
étatique, une autre règle ou un corps de droit qui pourrait être utilisé pour régir au contrat.
Comme l’a affirmé le doyen Batiffol que « ce n’est pas en réalité la thèse de l’absence totale
284
de guides, de règles, de directives, de systèmes juridiques qui est vraiment en cause… » .
On peut trouver son origine de la pensée fondée sur la nécessité de rattacher un contrat à un
pays déterminé, à l’époque où on a cru que seul l’État soit la source unique du véritable droit.
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris a écarté cette idée en concluant : « la société des services
contractuels des Messageries Maritimes est mal fondée à prétendre que le contrat devrait être
nécessairement rattaché à un pays déterminé… » et qu’« en matière de règlement
international, la convention d’où résulte stipulation de paiement en or, fait la loi des

283
Le problème de la qualification de droit transnational a été principalement débattu pendant les années 70. La
pensée juridique sur le droit transnational est d’origine américaine, il comprend un ensemble de règles juridiques
destinées aux relations infra-étatiques dans le domaine commercial et économique à un niveau inférieur à celui
du droit international. Ce droit a pour l’objectif de régir les relations entre des opérateurs économiques moins
prestigieux que les États, on peut dire que c’est un droit qui présente un aspect « moins contraignant ».
Néanmoins, le droit des marchands en tant que véhicule « professionnel » apportent des solutions plus
appropriées pour des opérateurs. Le droit transnational est un droit qui se situe dans les espaces soustraits à
l’emprise des États, certes, ces espaces n’existent pas en réalité, car il n’est pas possible d’en délimiter
territorialement l’aire précise. Le droit transnational est sectoriel en ce sens qu’il est spécifique à des catégories
d’agences telles que les marchands, les religieux ou les sportifs, dont un droit spécifique prétend discipliner les
relations à côté du droit étatique.
284
H. Batiffol, « Sur la signification de la loi désignée par les parties », in Choix d’articles, Paris : LGDJ, 1976,
p. 271.

119
285
parties » . Mais la Cour de cassation a estimé au sens contraire que « tout contrat
286
international est nécessairement rattaché à la loi d’un État » . A priori, le contrat sans loi
est susceptible d’être limité par l’application d’une réglementation étatique aux contrats
internationaux. Il peut expliquer une fidélité à la méthode conflictuelle de l’État et en même
temps une méfiance à l’égard du droit spontané. Comme on le sait, l’État à travers son
système juridique adopte l’application de règles de conflit qui conduit à désigner une loi
étatique pour régir le contrat en cas d’absence de choix des parties.
Pourtant, on ne peut pas nier le contrat sans loi qui est acceptable en générale dans le
commerce international en forme de « conditions générales » ou « contrat-type ». Le
développement de tels contrats peut donner naissance à une nouvelle lex mercatoria parmi les
commerçants internationaux. On trouve que ces règles portent une véritable force à
l’application pas moins que celle de loi étatique. Pour cette raison l’État souhaite observer
prudemment le développement de nouvelle lex mercatoria et la limiter dans certain cas.

138. Force est de constater la pratique diverse réservée au contrat sans loi qui est présentée
devant l’arbitre et devant le juge. La question est de savoir s’il est nécessaire de condamner le
contrat sans loi devant le juge étatique? En effet ce n’est pas aisé de l’abandonner, car
certains principes utilisés par le juge sont considérés aussi comme le droit a-national, par
exemple pour les partisans du contrat sans loi, il suffit de recourir au principe pacta sunt
servanda qui est la clé de voûte de la lex mercatoria emporte sur tout autre principe en cas de
conflit. Ce principe est également utilisé par l’arbitre lorsqu’il est appelé à trancher un litige
au regard de règles transnationales. Il y a des sentences qui insistent à satisfaction sur la
primauté du principe de la force obligatoire des contrats. Ce principe est incontestablement
une partie des règles qui se trouvent dans la plupart des systèmes juridiques.

285
CA Paris, 24 avril 1940, Messageries Maritimes, S. 1942, 2, p.29, note Niboyet. Il s’agit d’un emprunt
obligatoire émis en juin 1927 par la Société française des services contractuels des Messageries Maritimes aux
Pays-Bas et au Canada, sous la garantie de la France. Le montant de l’émission, service des intérêts et
remboursements étaient stipulés en dollars canadiens, dollar-or pour les deux dernières opérations. Le 10 avril
1937 la loi canadienne, prohibant les clauses-or pour tous les contrats régis par la loi canadienne et quel que soit
le lieu de paiement, est entrée en vigueur. La Société s’abritait derrière cette loi pour assurer le service de son
emprunt en dollars canadiens papier. Nous trouvons que la Cour d’appel avait décidé dans ce sens afin de
donner effet à la clause-or, car il est difficile, en restant sur l’application de conflit de lois, de ne pas rendre la
décision en faveur de la loi canadienne.
286
Cass.1er civ., 21 juin 1950, Messageries Maritimes, RCDIP.1950.609, note H. Batiffol ; D. 1951.749, note
Ancel ; JCP.1950.II.5812, note Lévy ; GA, n°22, 4e éd., p.199. Cette règle a déjà affirmé par la Cour Permanente
de Justice internationale, dans l’affaire des Emprunts serbes et brésiliens que « Tout contrat qui n’est pas un
contrat entre des États en tant que sujets du droit international a son fondement dans une loi nationale » (arrêt n°
14 du 22 juillet 1929, CPJI. Série A, n° 20-21, n° 15 du 12 juillet 1929, Ibid.).

120
139. Cependant l’admission de rattachement à un système juridique a-national semble
287
difficile à cause de son caractère controversé et son contenu incertain. Un auteur thaï
estime que la lex mercatoria est considérée comme un droit du commerce international
résultant de la volonté commune des commerçants de la communauté commerciale
internationale. Peut-on dire que la lex mercatoria, par exemple les Incoterms, est une coutume
internationale que les États devraient respecter ? Sur ce point il existe deux opinions
288 289
principales d’après le rapport de la conférence . Certains juristes pensent que les
Incoterms ne sont autre qu’une coutume du commerce pratiquée entre les commerçants plutôt
que le droit international coutumier qui oblige les États à respecter. Il manque à ce stade
l’opinio iuris. Si l’on cite un exemple des usages du commerce ou de la coutume
commerciale, on est dans le doute s’ils sont du droit international coutumier car d’après ces
auteurs il faut rappeler que seuls les États et organisations internationales sont sujets de droit
international. Bien que la conférence d’élaboration de droit du commerce international soit
organisée par la CNUDCI, il ne concerne pas les relations internationales entre les États
membres… C’est la raison pour laquelle un acte d’organisme privé, telle que la compilation
290
des usages du commerce ne pourrait pas être qualifiée de droit international coutumier .
Citons par exemple le cas des Incoterms, on accepte que les Incoterms soient usages du
commerce, même s’ils comportent l’élément matériel de la coutume commerciale
internationale, mais ils sont encore dépourvus de l’élément psychologique ou l’opinio iuris,
car les parties ne s’y soumettent que par leur volonté. Elles les réfèrent dans leur contrat
puisque ceux-ci ont été convenus et facilitent leur vie économique, et non pas parce qu’elles
291 292
croient qu’ils sont de droit . D’autres affirment en revanche que les Incoterms sont de
coutume internationale, car ces règles s’appliquent de manière générale et répandue parmi des
commerçants de chaque pays. Par ailleurs, en droit international contemporain, on admet que

287
P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, « Pour quelle raison est-il nécessaire d’uniformiser le droit de commerce
international ? », Thai Bar Association Journal, vol. 46, n°1, 1990, p. 97-109.
288
La Conférence d’association de droit international de Thaïlande sur « Le droit international qui peut
produire des effets en Thaïlande », le 28 novembre 2003, Bangkok, Thaïlande.
289
P. Horayangkura ; P. Kanchanachittra-Saisoonthorn ; En France : P. Mayer.
290
Cf. P. Horayangkura, La pensée juridique sur le règlement des différends du commerce, Bangkok :
Samyanwitayapatana, 1997, 79 et s.
291
Sur ce point voir F. Gény, Méthode d’interprétation er sources en droit privé positif , LGDJ, 2e éd., 1919,
t.1, n°131.
292
Le rapport n’a pas précisé les noms d’auteurs thaïs. Pour les auteurs étrangers V. B. Goldman, « La lex
mercatoria dans les contrats et l’arbitrage internationaux : réalité et perspectives », JDI.1979.475, spéc. p. 478.

121
l’individu peut être aussi le sujet de droit international. Donc il peut être considéré comme
coutume internationale que les juges étatiques connaissent par eux-mêmes sans nécessité de
prouver par les parties.

140. Quant à la pratique des juges thaïs, il est clair que les parties ne sont obligées
d’invoquer l’application des Incoterms ni de les prouver. Il semble que le rapport de la
conférence ne donne pas la réponse à l’égard d’autres règles transnationales, la conclusion
était ainsi : « on ne peut pas nier que les Incoterms soient la règlementation généralement
acceptée et pratiquée dans le commerce international par les commerçants de tous les
293
États » . Alors la réponse à cette question est toujours dans l’ombre. A notre avis, nous
hésitons d’accepter comme le droit la lex mercatoria, par exemple les Incoterms ou les RUU
500 qui n’ont pas le caractère juridique, car ils ne concernent que des usages conventionnels
qui servent à interpréter ou compléter la volonté exprimée des parties. Ils n’ont pas la force
obligatoire en soi. Tandis que les règles coutumières s’imposent à tous, elle peut déroger à
une loi impérative, par exemple en matière d’anatocisme selon laquelle la jurisprudence
294
commerciale refuse d’appliquer l’article 1154 du Code civil . Mais les usages ne peuvent
déroger qu’aux lois supplétives. La dissociation entre la coutume et l’usage est délicate à
tracer. Il est possible que les usages commerciaux puissent se transposer en véritables
295
coutumes lesquelles accèdent au rang de source formelle du droit. Dans ce cas un acte de
violation des usages constituant de véritables règles coutumières pourrait être méconnu par la
296
Cour de cassation . De surcroît, en matière de preuve, ces usages commerciaux relèvent de
la question de droit qui est normalement l’office du juge de rechercher la teneur. Cependant,
les usages qui ne constituent pas des règles coutumières sont toujours à la charge des
contractants de prouver leur contenu telle est la lex mercatoria.

293
Cf. Lukana Pobromyen, « Les effets de coutume internationale à l’égard de la Thaïlande », l’Association de
droit international de Thaïlande, Actualité juridique, le 17 janvier 2004. Disponible sur le site
http://www.archanwell.org/autopage/show_page.php?t=1&s_id=5&d_id=7
294
F. Gény, Méthode d’interprétation…, loc.cit.
295
Id., p. 418 et s. Cet auteur a proposé d’appeler usages conventionnels dans son ouvrage, il a affirmé que ces
usages conventionnels ne constituent qu’une variété de la coutume juridique. Certes, l’usage conventionnel
présente bien l’élément matériel de la coutume, puisqu’il suppose une pratique constamment et longuement
suivie. Cependant on observe qu’il ne contient pas l’opinio juris ou l’élément psychologique. Si on part de ce
point de vue, on ne peut pas accorder le caractère coutume juridique à l’usage proprement dit.
296
Cass.com., 14 octobre 1981, Sté Discount Bank c/ Téboul, D., 1982, p.301, note M. Vasseur.

122
141. En France, de même qu’en Thaïlande et d’autres pays, les dispositions issues des
297
Incoterms n’ont aucun caractère impératif . La Cour de cassation a affirmé que les
298
Incoterms résultant uniquement des usages commerciaux , par conséquent les parties
peuvent y déroger librement.

B. La notion de contrat sans loi selon les juridictions arbitrales.

142. Intervention des règles transnationales dans les contrats internationaux. La


situation est différente en matière d’arbitrage pour les contrats sans loi. Cette matière
combinée, lois étatiques et droit a-national, on observe la subsidiarité où est confiné le droit
étatique qui nous montre comment l’arbitrage favorise par nature le détachement du contrat
régi par la loi étatique et son rattachement au droit commercial international… Dès lors quand
on parle du contrat sans loi, cela signifie le contrat qui est régi par le droit non étatique choisi
par les parties.

143. En ce qui concerne le rattachement au droit a-national, bien que certains auteurs aient
exprimé que la lex mercatoria n’est qu’une manifestation de la doctrine du laissez-faire, on ne
peut pas contester que les arbitres doivent prendre en compte lorsqu’ils tranchent le litige au
regard de règles transnationales. Ce constat a été affirmé par l’article 1496 du CPC ou l’article
1511 du Décret du 13 janvier 2011 selon lequel « l’arbitre tranche le litige conformément aux
règles de droit que les parties ont choisies(…). Il tient compte, dans tous les cas, des usages
299
du commerce ». L’arbitrage international de la CCI (l’article 17 ) et les lois adoptées à titre
de la CNUDCI sur l’arbitrage commercial international ont également tenu compte des usages
du commerce dans tous les cas à savoir même lorsque les parties ont choisi le droit
300
applicable . Ainsi que la Loi de 2002 sur l’arbitrage thaïlandais, l’article 34 qui stipulent
que :

297
J.-M. Jacquet, Droit du commerce international, op.cit., n° 555.
298
Cass. com., 2 octobre 1990, DMF.1991.504.
299
Article 17.1 : « Les parties sont libres de choisir les règles de droit que le tribunal arbitral devra appliquer
au fond du litige. A défaut de choix par les parties des règles de droit applicables, l’arbitre appliquera les règles
de droit qu’il juge appropriées »; l’article 17.2 : « Dans tous les cas, le tribunal arbitral tient compte des
dispositions du contrat et des usages du commerce pertinents ».
300
P. Bernardini, « Arbitrage international et règles de droit a-nationales », Bulletin de la Cour international
d’arbitrage de la CCI, vol.15, n°2, 2e semestre, 2004, p.65.

123
« L’arbitre tranche le litige conformément au droit choisi par les parties (…) » ;
et le 2e al.
« Au cas où elles n’ont pas opté le droit pour régir au contrat, le tribunal arbitral
tranche le litige conformément au droit thaï (…) » ;
et son dernier alinéa
« L’arbitre tranche le litige en tenant compte de la convention et les usages du
301
commerce s’il concerne un différend commercial » .

144. C’est en effet à travers les clauses contractuelles qui permettent d’applicabilité directe
de la lex mercatoria ou des règles non étatiques dans cette matière. De surcroît, certains
milieux d’affaires internationaux considèrent que le droit étatique ne permet pas de faire
preuve du dynamisme et du niveau de souplesse exigent par les relations contractuelles ou
dans l’espace transnationale. Par conséquent, les parties aux contrats internationaux ont
expressément exclu l’application de toute loi étatique à leur contrat et ont choisi à appliquer
uniquement les principes généraux ou les usages du commerce international pour régler leurs
302
différends. Cette exclusion est généralement admise dans l’arbitrage international , pour
nous, c’est là la fonction de droit a-national dans le contrat sans loi. Pour cette raison on
trouve de nombreux d’exemples dans le domaine de contrats internationaux. Certes, c’est
grâce à l’autonomie de la volonté des parties de choisir ces règles de droit a-nationales
applicable. En effet la méthode des règles transnationales devrait tenir compte également à la
protection de la partie et de moralité des affaires. Dés lors on peut dire que les arbitres qui
statuent en application de principes généraux ont dégagé des conclusions selon lesquelles le
principe de la force obligatoire des contrats n’est pas la seule règle au regard de laquelle tout
303
litige en matière contractuelle doit être jugé .

301
มาตรา ๓๔ แห่ งพระราชบัญญัติอนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติว่า “ให้คณะอนุญาโตตุลาการชี้ ขาดข้อพิพาทไปตามกฎหมายที่คู่พิพาท
กาหนดให้นามาใช้บงั คับกับข้อพิพาท (...)” “ในกรณี ที่คู่พิพาทมิได้กาหนดถึงกฎหมายที่จะนามาใช้บงั คับกับข้อพิพาทไว้ ให้คณะอนุญาโตตุลาการชี้
ขาดข้อพิพาทไปตามกฎหมายไทย (...)” “การวินิจฉัยชี้ ขาดของคณะอนุญาโตตุลาการต้องเป็ นไปตามข้อสัญญาและหากเป็ นข้อพิพาททางการค้าให้
คานึงถึงธรรมเนียมปฏิบตั ิทางการค้าที่ใช้กบั ธุรกรรมนั้นด้วย”
302
B. Goldman, « La lex mercatoria dans les contrats et l’arbitrage… », op.cit., spéc. p. 479 et s.
303
En ce qui concerne la critique selon laquelle les règles transnationales seraient souvent contradictoires, elles
reposent sur une conception inexacte puisque la lex mercatoria formait une collection de règles d’origine
variable rassemblées sur le seul fondement de leur adéquation aux besoins du commerce international et que
certaines de ces règles pouvaient être puisées dans le droit des États (Cf. E. Loquin, « Où en est
la lex mercatoria ? », in Souveraineté étatique et marchés internationaux à la fin du 20ème siècle, Mél. en
l’honneur de P. KAHN, Paris : Litec, 2000, p. 25). L’on constate que les corps de règles qui se sont dégagés dans
la jurisprudence arbitrale sur cette question montrent que les règles transnationales ne jouent pas que « in
favorem validitatis ». Par exemple une règle transnationale s’est dégagée selon laquelle le contrat obtenu par la
corruption d’une partie contractante est entaché de nullité ou n’est pas susceptible d’exécution forcée. Dès lors,
le principe de la force obligatoire des contrats et les divers principes susceptibles d’en limiter l’efficacité ne sont
nullement en contradiction. Cet auteur a affirmé par ailleurs que « l’observation selon laquelle la lex mercatoria

124
145. La fonction de contrat sans loi dans le contrat entre l’État et l’entreprise
étrangère. Ainsi que dans le contrat d’État, les principes ou les règles transnationales sont
impliqués dans ces types de contrat depuis longtemps... Bien que l’on ne puisse pas
directement les appeler contrat sans loi, la preuve se révèle dans les sentences arbitrales selon
laquelle l’insertion dans le contrat une clause d’arbitrage international signé avec un État
permettrait d’assurer l’application de règles de droit a-nationales. Celle-ci est susceptible de
garantir que le contrat sera régi part une sorte de loi transnationale.
304
Dans la sentence bien connue comme l’affaire Aramco en 1958, les arbitres ont
estimé que la loi d’Arabie saoudite choisie par les parties « doit, le cas échéant, être
interprétée et complétée par les principes généraux du droit, par la coutume et la pratique du
secteur pétrolier et par des notions de pure doctrine, notamment lorsque certains droits
privés – qui doivent inévitablement être reconnus au concessionnaire pour éviter que la
concession soit privée de sa substance – ne seraient pas assurés d’une manière incontestable
par les lois en vigueur en Arabie saoudite ». Les dispositions de ce contrat ont clairement
précisé que le recours à la coutume, aux usages ou à la pratique du secteur pétrolier aurait été
fait lorsque les droits saoudiens dans ce domaine ne seraient pas assurés.

305
146. Dans la sentence Aminoil , l’État a joué un rôle actif dans l’arbitrage. Cette affaire
concernant la nationalisation par le Koweït d’une concession pétrolière accordée à Aminoil en
1948. La clause d’élection du droit applicable figurant dans le contrat signé entre les parties
en 1979 a été considérée vaque, car elle laisse supposer que les parties ne se sont pas entendus
sur un choix direct du droit applicable, ladite clause indiquait que : « la loi régissant le fond
du litige entre les deux Parties sera déterminée par le Tribunal compte tenu de la qualité des
Parties, du caractère transnational de leurs rapports, et des principes de droit et des usages
306
reconnus dans le monde contemporain » . La sentence est remarquable car le tribunal a
décidé qu’il fallait interpréter la clause du droit applicable sur la base d’une clause acceptée
dans son principe par les parties dans un projet de contrat de 1973. Cette clause faisait

contiendrait des principes contradictoires tels que pacta sunt servanda et rebus sic stantibus est inexacte ».
Puisque l’on peut trouver dans tous les ordres juridiques une dialectique de principe-conditions d’application-
exceptions (Cf. E. Gaillard, « Trente ans de Lex mercatoria : Pour une application sélective de la méthode des
principes généraux du droit », JDI.1995., spéc. p. 11-12).
304
Aramco c/ Arabie Saoudite, 23 août 1958, RCDIP.1963.272 ; AFDI.1961.300, note S. Bastid.
305
Aminoil c/ Koweït, 24 mars 1982, JDI.1982.869, note Ph. Kahn ; AFDI.1982.454, note G. Burdeau.
306
Il faut rappeler que le Tribunal avait pour la mission de statuer en droit et non pas ex aequo et bono.

125
référence à « des principes communs aux lois du Koweït et de l’État de New York » et en
l’absence de ceci, « aux principes généraux du droit reconnus par les nations civilisées ».
La sentence Aminoil a ainsi rejeté la notion de droit transnational en tant qu’ordre
autonome de droit international et national. Elle a reconnue que le fait que l’une des parties
soit un État ne justifie pas l’application exclusive du droit international public pour régir les
relations entre les parties en l’absence de choix opéré par elles. On peut constater que depuis
les années 1970, l’application exclusive du droit international public était moins admise, car
307
le cocontractant n’était pas l’État lui-même mais les entités appartenant à l’État .
D’ailleurs, le contrat devenu de plus en plus privé tels que les contrats de service, les contrats
d’assistance technique, etc. lesquels se substituaient de plus en plus aux contrats de
concession traditionnels. Affirmant par la tendance de restreindre l’application du droit
étatique par les arbitres internationaux en se référant à d’autres principes bien que les parties
aient choisi la loi étatique dans le contrat.

147. On verra par la suite lorsque les parties ont choisi des règles a-nationales applicable au
contrat, l’arbitre devra respecter leur volonté et appliquer pleinement les règles choisies sans
chercher à savoir l’appropriation de celles-ci pour régler le différend. On constaterait que
l’arbitre ou même le juge applique la lex mercatoria conformément à la volonté des parties au
contrat en tant qu’une clause contractuelle insérée dans leur contrat. Bien que le juge et
l’arbitre doivent tenir compte des usages du commerce ou la lex mercatoria, c’est pour l’objet
de compléter la loi étatique.

§ 2 : La faveur au contrat sans loi fondé sur la volonté des parties.

148. Bien que la notion de contrat sans loi ou plus précisément sans loi étatique soit
controversée et qu’elle fasse l’objet du débat depuis bien longtemps, les ordres juridiques
étatiques admettent sa fonction en droit interne étatique (B). De même, on peut toujours
envisager le choix par les parties de ces règles a-nationales pour régir leur transaction. Le
droit interne a prévu cette option afin de favoriser la volonté des contractantes. Le mode
d’admission ce contrat sans loi peut être envisagé très souvent en forme de l’incorporation de
règle non étatique dans une clause contractuelle (A). On peut dire que ce droit a-national est

307
P. Bernardini, « Arbitrage international et règles de droit a-nationales », loc.cit.

126
admis en tant que clause insérée dans un contrat et non pas en tant que droit, avec ce moyen la
question de juridicité de droit a-national ne se pose pas.

A. L’incorporation de règle non étatique : le mode d’admission de contrat « dit »


sans loi.

149. La thèse de l’incorporation de la loi dans le contrat est bien reconnue, comme l’admet
la Cour de cassation belge dans son célèbre arrêt du 24 février 1938 : « le juge du fond
n’ayant pas fait application des lois étrangères comme telles, mais des dispositions légales
étrangères invoquées et insérées par les parties dans leur convention, et devenues, par
conséquent, des dispositions conventionnelles ». Cela est dénommé par M. J.-M. Jacquet « la
308
contractualisation de la loi » , a priori, les parties peuvent se référer aux dispositions de
plusieurs lois et enfin elles peuvent stipuler que le contrat ne sera soumis à aucune loi. Si l’on
accepte la conséquence de la contractualisation de la loi proposée par M. J.-M. Jacquet, c'est-
à-dire que l’on accepte qu’un contrat international vaille par lui-même.

150. L’argument contraire fondé par M. Batiffol selon lequel la validité du contrat sans loi
est démentie par une solution positive à savoir la possibilité d’annuler un contrat au nom de la
309
loi à laquelle les parties se sont référées . Si le contrat international valait par lui-même et
la référence d’une loi n’est qu’une aide en cas d’insuffisance du contenu, on peut envisager
jusqu’au point que le juge devrait faire prévaloir la volonté réelle des parties entre les
stipulations claires du contrat et une référence à une loi dont les parties n’ont manifestement
pas perçu la portée… Par conséquent le juge doit maintenir le contrat et le compléter par la
310
recherche de leur volonté implicite . Si l’on suit M. Batiffol pour la pensée selon laquelle
311
« tout contrat international est nécessairement rattaché à la loi d’un État » , le contrat ne
pourra être soumis à une seule règle non-étatique. Cependant il est possible de compléter le
contrat régi par la loi étatique en appliquant les règles de droit non-étatique. A titre
d’exemple, en matière des contrats-types élaborés sous l’égide des organisations non

308
J.-M. Jacquet, « L’incorporation de la loi dans le contrat », TCFDIP 1993-1995, p. 23 et s.
309
Cass. Civ. 28 juin 1966, RCDIP.1967.334, note H. Batiffol.
310
H. Batiffol, « La loi appropriée au contrat », in Études offertes à Berthold Goldman, Le droit des relations
économiques internationales, Litec, 1987, p. 1-13, spéc. p. 3.
311
Ibid.

127
gouvernementales telles que la London Corn Trade Association, les RUU ou les Incoterms de
la Chambre de commerce internationale. Là aussi les besoins de règles à régir le contrat ne
doivent pas être niés, puisque la prévisibilité est un facteur indispensable pour les parties
contractantes dans le commerce international.

151. En effet lorsque les parties ont refusé de choisir le droit étatique applicable au contrat,
il est possible que cela ne signifie pas qu’elles entendent conclure un contrat sans loi, ni
même que le contrat considéré comme un ensemble de normes individuelles doivent
entièrement se suffire à lui-même. Mais on ne peut nier que les contractants ont conclu un
contrat sans loi par leur volonté puisqu’ils remarquent la nécessité de le placer dans le cadre
de normes générales et ils pensent que ces normes peuvent être trouvées dans le droit
professionnel, dans les usages ou dans les principes généraux dépassent les frontières
312
nationales .

152. Il reste à savoir que, quelle loi est la plus apte à régir le contrat étant donné le caractère
respectif des liens de la situation avec les systèmes différents. La lex mercatoria peut-elle être
la loi applicable au contrat ? Pour certains, cela dépend si elle est conçue comme un ordre
juridique digne de ce nom, c'est-à-dire elle est établie et sera sanctionnée au nom d’un milieu
économique ou commercial déterminé au besoin par des organes professionnels exerçant une
certaine autorité. Si les institutions arbitrales l’appliquent en tant que droit dont les sentences
sont respectées, la référence est de même nature que celle qui concerne la loi étatique. En
revanche si la lex mercatoria n’est que de formules contractuelles déterminées, alors on
revient au modèle de la contractualisation.

153. La soumission du contrat au droit a-national est généralement admissible dans la


procédure d’amiable composition. Là aussi l’application du droit non étatique est immédiate
et s’impose sans difficulté. Comme on le sait lorsque les parties contractantes ont inséré dans
leur convention d’arbitrage une clause de déterminer le moyen de dérouler l’arbitrage selon
laquelle les arbitres devraient trancher le litige et tenir compte à des normes mieux adaptées
autre que la loi étatique considérée comme inadaptée au litige. L’arbitre tranchera le litige en
équité, c’est le sentiment de justice qu’ont besoins des contractants. On peut dire que

312
B. Goldman, « Frontière du droit et « lex mercatoria » », Arch. Phil. Dr., 1964, p. 177-192, spéc. p. 184-
185.

128
l’amiable composition se présente bien l’idée d’un contrat détaché de tout rattachement au
droit national, et on ne peut reprocher ni à l’arbitre, ni aux parties d’en faire le recours. Il
convient de reprendre une formulation de M. Fouchard selon laquelle « les commerçants
veulent se préserver de ce qu’ils considèrent comme des archaïsmes, mais ne renoncent pas à
voir leurs relations obéir à des normes mieux adaptées aux conditions du commerce
313
international ou leur branche professionnelle » .

B. La place de règle non étatique en droit positif.

1) La prise en considération du préambule du Règlement n°593/2008 le choix de la


règle non étatique.
154. Avant l’entrée en vigueur du Règlement Rome I, les stipulations de la Convention de
Rome 1980 étaient silencieuses s’agissant du choix de la règle non étatique applicable aux
obligations contractuelles. Le débat s’est fondé sur l’application de règles telles que les
Principes UNIDROIT ou les Principes européens du droit des contrats. Sont-ils dans le même
titre que le droit national ou qu’ils sont incorporés dans le contrat dans la limite autorisée par
314
le droit étatique autrement applicable ? Force est de constater que la liberté de choix de la
loi applicable au contrat international est toujours l’objectif précieux et indispensable.
Cependant il reste à savoir si cette liberté pourrait être limitée dans une part
quelconque ? Lorsque l’on prend en compte la proposition de Règlement Rome I qui
énonce que :
« Les parties peuvent également choisir comme loi applicable des principes et règles
de droit matériel des contrats, reconnus au niveau international ou communautaire.
Toutefois, les questions concernant les matières régies par ces principes ou règles et
qui ne sont pas expressément tranchées par eux seront réglées selon les principes généraux
dont ils s’inspirent, ou, à défaut de ces principes, conformément à la loi applicable à défaut
de choix en vertu du présent règlement ».

On a trouvé que la formulation retenue viserait à autoriser le choix de ces principes ou


même d’un éventuel futur instrument communautaire optionnel. D’après M. Bureau et Mme
Muir Watt, cette proposition n’a pas admis le choix de la lex mercatoria qui est estimée
insuffisamment précise, de même que de codifications privées qui ne seraient pas

313
Ph. Fouchard, « L’arbitrage commercial international », Dalloz, 1965, p. 404.
314
Cf. G.-P. Romano, « Le choix des Principes UNIDROIT par les contractants à l’épreuve des dispositions
impératives », JDI.2007.473.

129
suffisamment reconnues par la communauté internationale. On envisage ici la difficulté de
315
déterminer des principes et des règles « au niveau international ou communautaire » .

316
155. En effet le considérant n°13 du Règlement n° 593/2008 n’interdit pas aux parties
d’intégrer par référence dans leur contrat un droit non étatique ou une convention
317
internationale . C'est-à-dire la Convention de Rome 1980 consacre les principes de
l’autonomie de la volonté alors que le règlement Rome I admet aussi cette même liberté mais
de manière plus répandue. Force est de reconnaître que les considérants ne contiennent pas de
dispositions impératives mais la valeur d’un texte ne saurait pas être définitivement écartée,
autrement dit, il ne faut pas écarter sa force obligatoire pour la seule raison qu’il soit un
préambule. C’est son contenu qui doit être pris en compte. On constate qu’il y a plusieurs
moyens d’admettre la force obligatoire à un texte ; la voie juridictionnelle est un bon exemple.

315
D. Bureau, Droit international privé, t. II, Paris : PUF, p. 304.
316
On se demande si les considérants de ce règlement sont tenus de respecter ? La réponse semble être
négative. Le caractère normatif de ceux-ci ouvre un grand débat pour les juristes. En effet l’article 249 TCE
affirme que « le règlement est obligatoire dans tous ses éléments », mais cette règle vise le seul dispositif de
l’acte dont le préambule est dénué de force contraignante. Il en va de même pour l’Accord interinstitutionnel sur
les lignes directrices communes relatives à la qualité rédactionnelle de la législation communautaire du 22
décembre 1998 qui dénie expressément tout caractère normatif aux considérants. La vocation du préambule est
différente et dépend de chaque instrument international ; dans les conventions internationales, le préambule ne
joue qu’un motif de la négociation des parties contractantes ; dans les actes communautaires, il s’agit pour les
États de veiller à ce que la démarche poursuivie par les institutions communautaires soit conforme à leurs
attributions (Cf. G. Isaac et M. Blanquet, Droit communautaire général, 9e éd., A. Colin, 2006, p. 218). On peut
donc dire que le préambule communautaire a pour objectif d’expliquer et de motiver certaines dispositions
sensibles du texte. On est d’accord qu’il ne reste que le préambule de la Constitution de la République de 1958
qui a été élevé au même rang que la loi constitutionnelle selon les décisions du Conseil d’État et du Conseil
constitutionnel. Comme le dit H. Kenfack, ceci pourrait nous conduire à penser que tous ces considérants ne sont
pas appelés à rester privés de toute force obligatoire (Cf. H. Kenfack, « Le Règlement (CE) n° 593/2008 du 17
juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles « Rome I », navire stable aux instruments efficaces
de navigation ? », JDI.2009.15). Le règlement doit trouver sa place à côté des mesures en faveur des objectifs
visés par le marché intérieur. Prenons un exemple, on sait que le législateur communautaire dispose une marge
d’appréciation pour décider si une mesure est nécessaire au bon fonctionnement du marché intérieur. Sans doute,
l’harmonisation des règles de conflits de lois en matière contractuelle est considérée comme indispensable au
bon fonctionnement de celui-ci, comme l’a indiqué le considérant 40 que « l’application des dispositions de la
loi applicable désignée par les règles du présent règlement ne devrait pas restreindre la libre circulation des biens
et des services » (Cf. H. Kenfack, « Le règlement (CE) n° 593/2008… », op.cit., p. 8 et s.). Ainsi, sommes-nous
persuadés que la prise en considération des considérants de ce nouveau règlement est indispensable, bien que
l’on n’admette pas son caractère normatif.
317
En ce qui concerne le considérant 13, qui a dit qu’il n’est pas interdit aux parties d’intégrer par référence
dans leur contrat un droit non étatique ou une convention internationale, nous pouvons dire que ceci n’est pas
nouveau, car presque tous les systèmes juridiques acceptent l’incorporation au contrat international le droit non
étatique et l’instrument international. Malheureusement, le législateur n’allait pas jusqu’à admettre la possibilité
de choisir comme loi applicable les principes et règles de droit matériel des contrats, alors que le considérant 14
préserve cette possibilité pour le futur instrument communautaire sur ces règles. On peut observer que le
préambule semble ne pas laisser aux parties d’opter pour les textes bien connus comme les Principes UNIDROIT
ou les Principes européens bien qu’ils influencent largement les droits internes européens. En revanche il reste
une place pour choisir les textes qui sont incertains à ce jour.

130
318
Le juge pourrait accorder à ceci le caractère contraignant . Dès lors, les parties devront
respecter et prendre en compte les considérants car la Cour de justice de l’Union européenne
(ci-après la CJUE) pourrait leur conférer force obligatoire. Par conséquent le juge étatique
devrait aussi suivre une telle interprétation. Le juge national pourrait aussi se référer à ces
considérants et consacrer leur force obligatoire, même si la CJUE ne se prononce pas
expressément.
Plus récemment, la CJUE a admis dans son arrêt de 2011 l’application des Incoterms
319
pour déterminer le lieu de livraison de marchandises dans le règlement Bruxelles I , alors il
s’agit de l’admission du rôle du droit non étatique dans les règles portant sur les conflits de
juridictions. A cet égard, on peut penser que la CJUE devrait aussi, par l’extension, admettre
l’application du droit non étatique aux obligations contractuelles sous le régime du règlement
Rome I, en respectant le principe du contrôle de la conformité de l’application du droit
communautaire ; les règlements communautaires doivent être interprétés dans la même
direction. Il semble que la CJUE reconnaisse implicitement la valeur juridique au considérant
n° 13 du règlement Rome I.
Par ailleurs ce principe a été affirmé à travers le choix d’un droit savant exprimé par
les Principes UNIDROIT ou les Principes européens du droit des contrats qui peuvent être
réalisés à travers l’incorporation dans le contrat.

156. Il en existe de thèses qui soutiennent la limitation du choix de droit a-national, en


particulier lorsque les parties ont soumis le règlement des différends à un droit étatique
déterminé. L’une de ces théories consiste à prétendre que les arbitres pourraient compléter, en
cas de lacune, l’application de cette loi étatique par la lex mercatoria ou les principes
généraux du droit ou droit international public. Dans le cas de contrat d’État, les principes du
droit international public pourra être pris en considération. A titre d’exemple dans une
sentence rendue au sein du CIRDI, sur le fond du 20 mai 1992, le tribunal arbitral est
constitué dans cette affaire que si ces principes devaient être retenus à titre de loi choisie par
les parties. En l’espèce, la République Arabe d’Égypte soutenait que l’application de la loi
égyptienne ne serait pas hypothèse exclusive de l’application des principes de droit
international pour en combler les éventuelles lacunes. De même que le tribunal arbitral qui

318
Cf. S. Lemaire, « Interrogations sur la portée juridique du préambule du règlement Rome I », D., 2008,
n°31, p. 2160.
319
CJUE, 9 juin 2011, aff. C-87/10, Electrosteel Europe SA, D. 2011.AJ., obs. X. Delpech, disponible sur
http://www.dalloz-actualite.fr

131
soutenait ce raisonnement en estimant que « le droit égyptien ne connaissait aucune règle sur
la détermination du dies a quo dans le calcul des intérêts et qu’il serait en conséquence
320
nécessaire de puiser la réponse à une telle question dans le droit international » .

2) L’admission de règle non étatique dans l’ordre juridique thaï.


157. En Thaïlande, la notion de contrat sans loi n’existe pas et le sens de ce terme semble
étonnant lorsqu’on l’a traduit. Mais ce n’est pas à dire qu’il n’y a pas de situation assimilée.
On peut trouver les cas où les parties ont soumis leur rapport contractuel aux règles de droit
non étatique. Les juridictions étatiques peuvent faire face aux problèmes de lacune de lois,
alors les juges font recours aux principes généraux du droit en cause. Dans ce cas certains
juristes acceptent que l’on utilise les règles uniformisées par l’organisme privé en tant que
« règle coutumière » ou « principes généraux de droit ». Citons des exemples de contrat
charte-partie et de contrat de transport maritime avec le connaissement. Il est vrai que l’article
609 du Code civil et commercial, qui régit le contrat de transport en général, ne dispose pas
des règles spécifiques pour régler ces problèmes. En 1991, c’était la première fois que la Loi
sur le transport de marchandises par voie maritime B.E. 2534 (The Carriage of Goods by Sea
Act) a été promulguée. Rappelons que cette nouvelle loi n’applique pas à tous les contrats de
transport maritime. Par ailleurs elle n’applique qu’au transport entre un port en Thaïlande et
un autre à l’étranger. C'est-à-dire que le transport des marchandises par la mer entre les ports
321
dans le Royaume de Thaïlande est exclu du champ d’application de la Loi de 1991 . Alors
le problème peut se poser ainsi : quelle loi était-elle applicable aux contrats de transport des
marchandises conclus avant l’entrée en vigueur de la Loi de 1991 ? Et quelle était la loi
applicable aux contrats de transport maritime qui n’entre pas dans le champ d’application de
la Loi de 1991 ? Pour répondre à ces questions, il convient de consulter l’article 4 al. 2 du
Code civil et commercial thaïlandais qui peut combler les lacunes :
« Lorsqu’il n’existe pas la loi applicable au litige, le juge tranche le litige
conformément à la coutume locale, à défaut, le juge tranche le litige par analogie au droit
322
plus proche, et si ce droit n’existe pas il faut appliquer les principes généraux du droit » .

320
Sentence CIRDI n°233 (1993), JDI.1994.229., spéc. p. 233, obs. E. Gaillard.
321
On peut comprendre que ce contrat n’a pas de caractère international. Cependant cette loi contient des
dispositions impératives au cas où l’une des parties a de nationalité thaïe, cette loi sera applicable au contrat.
322
มาตรา ๔ วรรค ๒ แห่ งประมวลกฎหมายแพ่งและพาณิ ชย์ บัญญัติว่า “ เมื่อไม่มีบทกฎหมายที่จะยกมาปรั บคดีได้ ให้วินิจฉัยคดีน้ นั ตามจารี ต
ประเพณี แห่งท้องถิ่น ถ้าไม่มีจารี ตประเพณี เช่นว่านั้น ให้วินิจฉัยคดีอาศัยเทียบบทกฎหมายที่ใกล้เคียงอย่างยิ่ง และถ้าบทกฎหมายเช่นนั้นก็ไม่มีดว้ ย ให้
วินิจฉัยตามหลักกฎหมายทัว่ ไป ”

132
Certes, l’application des règles uniformes ou la lex mercatoria en tant que coutume
locale ou principes généraux de droit en vertu de l’article 4 du Code civil et commercial avant
l’entrée en vigueur de la Loi de 1991 était la solution admissible par la Cour. Cependant il est
douteux sur la possibilité d’admettre la lex mercatoria comme la coutume locale ou les
323 324
principes généraux de droit . La Cour suprême Dika en 1956 a estimé qu’elle n’a pas
admis la coutume et les usages du commerce en tant que droit, elle les a admis en revanche
comme une règle résultant de la volonté des parties contractantes. Lorsque celle-ci n’oppose
pas à l’ordre public et aux bonnes mœurs du people, elle est applicable. Les jugements de la
325
même Cour en 1982 et 1983 ont été repris cette même direction . C’est en effet le principe
de contractualisation de normes non étatique.

158. En ce qui concerne le problème de lacune de droit étatique, rappelons que certains
ordres juridiques contiennent plus de lacunes que d’autres et qu’il existe en réalité des droits
insuffisamment développés pour répondre à toutes les questions du commerce international.
L’invocation des lacunes de loi permet de faire appel à un droit non étatique malgré que les
parties aient choisi de soumettre leurs différends à un droit étatique déterminé. Pourtant un
auteur thaï trouve que l’argument de lacunes de loi, notamment la référence au « droit
326
insuffisamment développé » afin d’appliquer le droit a-national ne semble pas convaincue .
On trouve toujours le discrédit des règles transnationales de même qu’en matière de
l’arbitrage international.

159. Conclusion de la section. A l’époque, l’hypothèse du choix de la lex mercatoria par


les parties contractantes en tant que droit applicable ne présente aucune utilité pratique. Car la
Convention de Rome de 1980 ne gouverne que le choix du droit étatique applicable au contrat
en raison de sa nature incapable de constituer l’objet de désignation d’une règle de conflit en

323
Pour l’opinion favorable à l’admission de la lex mercatoria, celle-ci est considérée comme la coutume du
commerce international cristallisée en droit des marchands.
324
La Cour suprême Dika n° 2122/2499 (1956).
325
La Cour suprême Dika n° 775/2525 (1982) et n° 284/2526 (1983).
326
Cf. P. Horayangkura, La pensée juridique…, op.cit. Pour cet auteur, il semble que le critère pour décider si
une telle loi étatique est insuffisamment développée ou non soit ambigu. Lorsque la majorité des arbitres dans
une composition du tribunal sont occidentaux, le critère employé reflexe souvent la pensée occidentale. L’affaire
d’Aramco peut être un bon exemple dans ce cas. Le tribunal arbitral dans cette affaire a distingué la loi
chrétienne de la loi religieuse. Pourtant, à notre avis, chaque arbitre peut être influencé par le système juridique,
la culture, y compris sa propre expérience, c’est sa motivation qui est importante.

133
l’absence de volonté des parties. Dès lors elle ne constitue qu’un droit au sens de l’article 3 de
la Convention. Quand bien même il y a une innovation dans le considérant n°13 du règlement
Rome I, mais celui-ci admet aux parties uniquement la possibilité d’intégrer par référence le
droit non étatique. C'est-à-dire que la place de droit non étatique se trouve dans une clause
contractuelle et non pas en tant que droit applicable. Comme l’admet M. Pamboukis que le
phénomène de règles transnationales ne peut pas être ignoré par le droit international privé
327
moderne . Car, les conflits modernes ne se limitent plus sur les conflits de lois, mais les
conflits de normes.

Section II
Applicabilité de la lex mercatoria.

160. La lex mercatoria formait une collection de règles d’origine variable rassemblées sur
le seul fondement de leur adéquation aux besoins du commerce international. On sait que la
lex mercatoria s’est classée comme l’une des sources du droit du commerce international, par
ailleurs, elle joue un rôle important dans un contrat sans loi. Nous pouvons dire le mieux que
le statut de la lex mercatoria est toujours « ambigu » notamment à l’égard de système
juridique étatique (§1). Il faut bien distinguer l’application de la lex mercatoria par le juge et
celle par l’arbitre en raison de leur différence organique profonde au sein de l’activité
juridictionnelle. Il convient d’interroger par la suite l’application de la lex mercatoria dans le
système juridique thaï et français (§2).

§ 1 : Statut ambigu de la lex mercatoria.

161. Après avoir étudié le statut de contrat sans loi, on constate normalement l’intervention
du droit non étatique en matière du contrat commercial international. La lex mercatoria est
indissociable des sources qui ont donné lieu aux règles constituant les principales
composantes tels que les usages, les principes généraux du commerce international. La lex
mercatoria se trouve aussi parmi les règles de droit transnational. Il est indispensable de
déterminer tout d’abord la notion de lex mercatoria (A). Les deux approches envisagées en
analysant la notion de la lex mercatoria : l’une est en faveur de la lex mercatoria tant sa

327
C. Pamboukis, « La lex mercatoria reconsidérée », in Mél. en l’honneur de Paul Lagarde, Le droit
international privé : esprit et méthodes, Dalloz, 2005, p. 655.

134
détermination que son champ d’application, alors que l’autre propose un argument
défavorable à la lex mercatoria en refusant son caractère juridique. En Thaïlande, il semble
que la seconde approche soit extrêmement soutenue par les juristes. Reste à savoir s’il existe
une autre approche susceptible de concilier les deux arguments. Une approche
« intermédiaire » semble être la solution pour expliquer la situation selon laquelle
l’application de la lex mercatoria est reconnue dans le monde du commerce international
alors que sa juridicité est toujours critiquée. On verra par la suite la position intermédiaire de
deux approches qui proposent l’application à titre subsidiaire de règles transnationales (B).

A. Détermination de la lex mercatoria : deux approches.

162. La lex mercatoria est un ascendant plus récent dans le ius mercatorum qui régissait
par-delà les coutumes, le droit écrit ou les statuts et le commerce international en Europe
328
occidentale avant l’époque moderne . Il n’est pas aisé de déterminer la notion exacte qui
peut englober ce qu’est la lex mercatoria, elle peut être définie comme « l’ensemble de règles
ou de solutions constantes que l’on constate exclusivement en matière du commerce
international et qui est déterminé par les besoins spécifiques de celui-ci. La lex mercatoria
329
constitue un droit spontané et ainsi formée d’usages professionnels codifiés » .
La nature juridique de ces règles ouvre toujours le débat, donc les deux approches
peuvent être envisagées : celle des mercatoristes qui justifient la normativité de la lex
mercatoria (1) et celle des antimercatoristes qui trouve que la lex mercatoria ne constitue pas
le pouvoir coercitive en soi (2).

1) Argument de caractère normatif de la lex mercatoria.


163. D’après les mercatoristes, les règles de la lex mercatoria sont de véritables règles de
droit, des règles d’un ordre juridique « transnational » consacrées par la

328
B. Goldman, « La lex mercatoria dans les contrats et l’arbitrage internationaux : réalité et perspectives »,
JDI.1979.475, spéc. p. 476. La lex mercatoria ou Mercantile Law se trouve son origine sous le nom de ius
mercatorum qui régissait les relations entre commerçants ressortissants de l’Europe médiévale et de l’Empire
romain ; usages issus du mouvement corporatif (corporation des marchands) ; justice consulaire adaptée aux
besoins des marchands. Cependant l’influence de la lex mercatoria est de plus en plus diminuée lors de
l’émergence du pouvoir des États et du positivisme juridique au XIX e siècle. Au début du XXe siècle l’époque de
codification, l’État a codifié certains principes du commerce international (la lex mercatoria), de même que les
pays de Common Law où le juge accepte également ces principes dans sa considération. Dès lors, on peut dire
que la lex mercatoria est impliquée au droit interne étatique.
329
Id., p. 477 et s.

135
330
« société internationale des marchands » . M. B. Goldman a mis l’accent sur le caractère
spontané et a-national de la lex mercatoria ; elle a été créée par les opérateurs du commerce
international identifiés comme les entreprises qui concluent des contrats mettant en jeu les
intérêts du commerce international, ainsi que les institutions privées qui participent à
l’organisation de ce commerce et les tribunaux arbitraux, juges privés du commerce
331
international et que certaines de ces règles soient puisées dans le droit des États. La lex
mercatoria est constituée des usages du commerce international lesquels correspondent à
« une pratique ou une habitude observée si régulièrement dans un lieu, une profession ou une
branche du commerce que l’on peut s’attendre à ce qu’elle soit observée dans la transaction en
332
question » .
333
Un auteur admet que l’évolution de la lex mercatoria va dans la direction d’un
enrichissement considérable de son contenu, elle a capacité d’absorber des normes qui
proviennent d’autres sources que le seul droit spontané créé par les opérateurs du commerce
334
international. Certains auteurs ont essayé de démontrer la construction progressive du
contenu de la lex mercatoria en systématisant son contenu et utilisant des sources variées pour
nous montrer l’existence des ensembles de règles spécifiquement applicables aux transactions
internationales. MM Jacquet et Delebecque ont pris la même position en admettant que le
droit du commerce international serait aussi autocentré et assurerait sa propre production
normative, il en résulte des sources principales de ce droit tel que le contrat et les usages qui
lui sont associées, les usages du commerce international et les principes généraux dégagés par
les arbitres. La meilleure preuve se présente réellement lorsque les règles issues de ces
sources sont reconnues et utilisées par les opérateurs du commerce international y compris les

330
Id., p. 478.
331
Ibid.
332
J.-M. Jacquet, Droit du commerce international, op.cit., n° 35 et s.
333
E. Loquin, « Où en est la lex mercatoria ? », op.cit., p. 25.
334
Cf. Klaus-Peter Berger, The Creeping Codification of the Lex mercatoria, Kluwer Law Intl., 1999 ; V. en ce
sens C. Schmitthoff, « The Unification of the Law of International Trade », J. Bus. L. 105, 1968, p. 112. Il a
défini la lex mercatoria comme un ensemble de règles sans caractère systémique, complexe et multiforme. Il a
proposé une tendance pragmatique en mettant l’accent que la lex mercatoria provient de deux origines : d’une
part, le droit international, car ces norme ont été codifiées uniformément et stipulées dans la convention
internationale ; et la coutume commerciale internationale d’autre part puisque la coutume se constitue des usages
appliquées de manière très répandue entre les commerçants internationaux comme les règles de la Chambre du
Commerce International (ci-après la CCI) (Cf. C. Schmitthof, « The Law of International Trade, Its Growth,
Formulation and Operation », in The Sources of The Law of International Trade 3, éd. Schmitthof, 1964, p. 15-
24). Cependant cet auteur ne prône pas l’autonomie de la lex mercatoria, il souligne sa spécificité au sein même
des ordres juridiques nationaux.

136
335
arbitres . Il semble qu’une conception exclusivement normativisme est bien justifiée à cet
égard.
On peut trouver la décision la Cour de cassation qui a affirmé que l’arbitre avait statué
en droit lorsqu’il font une référence à l’ensemble des règles du commerce international
336
dégagés par la pratique et ayant reçu la sanction des jurisprudences nationales .

164. Quant à la source de lex mercatoria, il reste à savoir si la pratique contractuelle peut
être l’une des sources. MM. Jacquet et Delebecque ont admis que « la pratique contractuelle
337
n’a pas véritablement trouvé sa place parmi les sources du droit » , une pratique
contractuelle ne peut générer que des normes contractuelles. Ils acceptent d’ailleurs que la
force obligatoire de la lex mercatoria contractuelle résultera du seul accord de volontés. Les
auteurs thaïs partagent aussi cette approche (v. supra n°139, 157). Si l’on peut reformuler ce
constat en disant que la pratique contractuelle s’est transformée en usage par l’opinio iuris des
commerçants, celle-ci lui conférera une force obligatoire. Comme l’affirma M. B. Goldman
que ces normes (lex mercatoria) sont devenues le droit coutumier grâce à l’accumulation de
338 339
manière générale et la répétition . Cependant pour certains , les pratiques contractuelles
ne peuvent être qualifiées d’usages du commerce même si elles sont habituellement utilisées.
Car, la coutume internationale ou même les usages internationales sont constitués par
l’accumulation et la répétition de certains faits, actes, attitudes diverses, et comportements
raisonnablement imputables aux organes des sujets de droit international tels les États et
organisations internationales. Il semble que le sujet de droit international public soit considéré
comme élément important à ce stade. Cependant pour M. B. Goldman, il a défini les usages
qu’il s’agit « des comportement des opérateurs dans les relations économiques internationales
qui ont acquis progressivement par leur généralisation dans le temps et dans l’espace, que
peut renforcer leur constatation dans la jurisprudence arbitrale, ou éventuellement étatique, la

335
J.-M. Jacquet, Droit du commerce international, op.cit., n° 95.
336
Cass. 1er civ., 22 octobre 1991, RCDIP.1992.113, note B. Oppetit ; JDI.1992.177, note B. Goldman ; RTD
com. 1992.171, obs. Dubarry et Loquin.
337
J.-M. Jacquet, Droit du commerce international, op.cit, n° 30 et s.
338
B. Goldman, note sous Civ., 22 octobre 1991, JDI.1992.177.
339
D’après MM. Dupuy et Kerbrat, seuls État et organisation international sont des sujets de droit international.
(Cf. P.-M. Dupuy et Y. Kerbrat, Droit international public, Paris : Dalloz, p. 318). Les individus entant que
sujets primaires du droit des Gens, selon G. Scelle, peuvent être à l’origine de la coutume par leur
comportement. On ne peut pas dire que ces attitudes individuelles puissent être considérées comme directement
constitutives de précédents contribuant à la formation des coutumes internationales.

137
force de véritables prescriptions qui s’appliquent sans que les intéressés aient à s’y référer dès
340
lors qu’ils n’y ont pas expressément ou clairement dérogé » . Ainsi, ces normes peuvent
aussi être un réflexe de coutume international ou les principes généraux de droit sans tenir
compte que les praticiens sont-ils les sujets de droit international ou non. L’existence de
plusieurs sorts des usages du commerce international tels que les contrats-type ; les crédits
documentaires ; les transports internationaux surtout le transport maritime dans lequel la
pratique anglaise est couramment employée entre des contractants dont aucun est anglais et
341
n’a aucun lien avec l’Angleterre .

165. La qualification d’ordre juridique autonome de lex mercatoria. Le débat doctrinal


est porté sur sa vocation à constituer un ordre juridique autonome ; un ordre juridique
transnational. Tout d’abord, il faut prendre en considération la notion d’ordre juridique,
celui-ci est défini comme « relativement à une entité (État, ou groupe d’États),
342
l’ensemble des règles de droit qui la gouvernant » . Alors que les règles de droit
désignent « toute norme juridiquement obligatoire (assortie de la contrainte étatique),
343
quelques soient sa source, son degré de généralité (…) » . Ces définitions affirment que le
point de vue traditionnel sur l’ordre juridique est toujours lié à un État. Mais, en acceptant
l’idée d’un pluralisme des ordres juridiques, il paraît certain pour les mercatoristes qu’il
existe un ordre juridique transnational propre et complet à une branche du commerce
international. Parmi les auteurs, M. B. Goldman a affirmé qu’il y a des ordres juridiques en
voie de formation par exemple la lex mercatoria, qui dans un certain stade de leur
344
développement sont elliptiques tout en étant fonctionnellement des ordres juridiques .

340
B. Goldman, note sous Civ., 22 octobre 1991, JDI.1992.177, spéc. p.184.
341
B. Goldman, note sous Civ., 22 octobre 1991, JDI.1992.177 ; V. également ibid., « La lex mercatoria dans
les contrats et l’arbitrage internationaux… », loc.cit.
342
Vocabulaire juridique, v. Ordre juridique.
343
Vocabulaire juridique, v. Règle, sens n° 1.
344
B. Goldman, « Une bataille judiciaire autour de la lex mercatoria : l’affaire Norsolor », Rev. arb. 1983, p.
379, spéc. p. 406 ; Cf. C. Leben, « L’ordre juridique », Dictionnaire de la culture juridique, PUF, 2003, p. 1113
et s : l’ordre juridique est « l’ensemble structuré en système de tous les éléments entrant dans la constitution
d’un droit régissant l’existence et le fonctionnement d’une communauté humaine. La norme n’existe pas par
elle-même mais uniquement en tant qu’elle est une norme d’un certain système qui seul peut lui procurer sa
validité, son existence en tant que norme ». D’après cette définition, on peut dire qu’elle est juste pour un ordre
juridique spécifique, visant la matière contractuelle telle que les Principes UNIDROIT ou les Principes
européens. En effet toutes les communautés juridiques sont capables d’avoir leur propre activité juridique. Elles
constituent autant d’ordres juridiques au sens institutionnel du terme mais les qualifier d’ordre juridique n’est en

138
Lorsqu’il existe un milieu fortement homogène de commerçants liés par des intérêts communs
et organisés par des institutions qui ont les moyens d’imposer des normes et de les faire
sanctionner, ce phénomène relève du droit corporatif. Pour ces raisons les mercatoristes
peuvent donner des explications sur toutes les questions quant à la force obligatoire de lex
345
mercatoria et la sanction en tant que droit .
Il est douteux que la seule revendication d’une harmonisation du cadre juridique de
l’économie globale soit suffisante à soutenir l’existence d’un ordre juridique mercatique
global. Pour M. E. Loquin, la lex mercatoria se nourrit des ordres juridiques étatiques car elle
absorbe certaines normes de ces ordres juridiques et en particulier elle utilise leur force
346
coercitive . Ce constat est indissociable de la théorie de la lex mercatoria, on ne peut nier
l’existence d’un lien entre la lex mercatoria et les ordres juridiques étatiques. Autrement dit,
les opérateurs du commerce international ont besoin de pouvoir coercitif d’un ordre juridique
étatique pour justifier la force obligatoire de la lex mercatoria. Lorsqu’on prend en
considération des opérations du commerce international relatif aux cadres généraux tels que
les contrats-types, il faut admettre que ces opérations échappent largement aux lois étatiques
sans préjuger le caractère juridique ou non des normes ou des modes de conduite qui se
substituent à elles. Comme le dit M. B. Goldman que le domaine du droit se sépare de
différentes manières de celui non-droit, on peut estimer que le droit se compose des règles du
jeu économique, il est vrai que la plupart des normes juridiques impliquent les rapports
347
économiques .

rien reconnaître leur autonomie. Il faut distinguer selon cet auteur les corps de règles ayant leur propre règle de
sanction et des règles de comportement très concrètes lesquelles correspond à l’hypothèse des Principes
UNIDROIT ou des Principes européens. Lorsque l’on constate l’idée de distinguer entre le macro-ordre juridique
et le micro-ordre juridique, il paraît que les ordres juridiques étatiques ou même l’ordre juridique communautaire
sont rattachés à un territoire contrairement au micro-ordre juridique. On peut constater aussi que les Principes
UNIDROIT trouvent leur origine dans les traditions juridiques internationales alors que les Principes européens
trouvent leur origine dans les droits nationaux européens. Pour le cas des Principes européens, ils sont libérés des
droits nationaux afin de se déplacer à l’échelle du droit européen.
345
Quant au débat de l’existence d’une societas mercatorum, le phénomène de la globalisation des marchés
peut porter une prise de conscience et d’une aspiration commune à la nécessité de dépasser le pluralisme des
ordres juridiques étatiques pourraient conduire à la création de normes commerciales universelles. Cf.
E. Loquin, « Où en est la lex mercatoria ? », op.cit., p. 27 ; Cf. Ph. Kahn, « La lex mercatoria : point de vue
français après quarante ans de controverses », Mc Gill Law Journal. 1992, vol. 37, p. 413 et s., spéc. p. 414 et s.
Cet auteur a aussi démontré l’existence d’une societatis mercatorum dans le domaine de vente internationale.
346
E. Loquin, « Où en est la lex mercatoria ? », loc.cit.
347
Force est de constater le droit intervient aussi pour protéger des intérêts affectifs ou moraux dont le
retentissement patrimonial est nul ou très indirect. Ce même auteur a affirmé que « les principes, les dispositions
de contrats-types et usages suivis dans le commerce international se situent dans le domaine économique si bien
qu’ils méritent d’être considérés comme juridiques de ce point de vu » (Cf. B. Goldman, « La lex mercatoria
dans les contrats… », loc.cit).

139
166. Une autre question peut se poser si les normes du commerce international s’agit-il de
règles édictées par une autorité étatique et comportent la sanction ? Dans ce cas il faut
constater que la difficulté d’admettre une norme sans contenu précis peut être envisagée aussi
par le juge étatique à chaque fois qu’il passe insensiblement de l’interprétation d’une règle
préexistante parfois non écrit mais certaine est connue ou du moins est admissible à
l’élaboration d’une nouvelle règle. En ce qui concerne l’objection réservée au caractère de
règles de ces normes, on trouve que même M. B. Goldman, cet auteur hésite à admettre que
des normes du commerce international soient des prescriptions car cette notion implique celle
de commandement. Puisque l’on constate que les clauses des contrats-type ou les usages
codifiés ne s’imposent aux parties qu’à travers leur volonté et celles-ci ne contraignent qu’en
348
vertu d’une loi étatique comme par exemple l’article 1134 du Code civil français .

167. Après avoir étudié les arguments en faveur de la lex mercatoria, on peut constater que
la lex mercatoria est une norme spéciale dite « transnationale », donc elle n’est pas le droit
étatique ni le droit international. La lex mercatoria trouve son origine des usages du
commerce international exercés parmi les commerçants dans la communauté commerciale
international. Les rapports entre ces commerçants sont de nature privés sans l’intervention des
rapports entre États. On peut considérer que la lex mercatoria est la règle des marchands qui
réflexe la pratique de société commerciale internationale laquelle est différente de l’état de la
société interne étatique ou internationale des États. En raison de son caractère spécial, il n’est
pas nécessaire que ces normes doivent avoir le même caractère que le droit au sens du
positivisme.

2) Argument de l’absence de caractère coercitif de la lex mercatoria .


168. Pour la doctrine thaïe qui soutient l’idée de l’absence de juridicité de la lex
mercatoria, le droit est l’ensemble de règles et normes générales de l’État qui a l’objectif de
contrôler un comportement humain, une personne qui n’a pas respecté ces règles sera
349
sanctionnée . Cette opinion se fonde sur la conception selon laquelle le droit est une
production de l’État. Il en résulte de l’École positiviste. Théorie selon laquelle on met l’accent
sur l’autorité étatique ; seul l’État souverain peut élaborer la loi. D’après les ouvrages

348
B. Goldman, « La lex mercatoria dans les contrats… », op.cit., p. 478. L’article 1134 al. 2 stipule que « elles
(les conventions) ne peuvent être évoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi
autorise ».
349
Y. Saeng-Uthai, L’introduction générale au droit, Bangkok : Prakaipruk, 1995, p. 41.

140
juridiques thaïs, le droit est défini comme « un ordre de l’État souverain, le non respect de
ceci doit être sanctionné ». De ce fait, on peut expliquer pourquoi ces juristes n’admettent pas
le caractère de droit à la lex mercatoria. On constate qu’ils ne contestent pas son existence et
son rôle très important, mais ils hésitent de lui admettre le caractère juridique. Parmi ces
350
auteurs, M. P. Horayangkura , arbitre et professeur de droit, pour qui le droit a doté la force
obligatoire tandis que la lex mercatoria est constituée par les usages du commerce
international ou par la sentence arbitrale. Autrement dit, la dernière est créée par les individus.
Pour cette raison la lex mercatoria n’a pas de force obligatoire en soi. Le seul fait que la
plupart des parties perdantes ont respecté et se sont conformées à la sentence arbitrale ne
pourrait pas rendre automatiquement à celle-ci une force obligatoire. Il faut rappeler que la
sentence aura la force obligatoire lorsqu’elle est homologuée par le juge étatique. Bien que
l’on puisse dire que la thèse Common Law selon laquelle le jugement est la source du droit,
ce n’est pas le cas pour la sentence arbitrale car l’arbitre n’a pas créé le droit par sa sentence.
D’ailleurs, le jugement est publié de manière répandue et est librement ouvert à étudier ou
bien à commenter alors que la non-divulgation est précieuse pour l’arbitrage. Cela s’est révélé
comme un obstacle de l’évolution de normes dans ce domaine car les juristes ne sont pas
totalement libres de faire une critique ou un commentaire de ces sentences. C’est
probablement le cas en Thaïlande.
Cependant en France, la situation est bien contraire sur ce dernier argument, on
constate que le droit transnational est une source ouverte et plus accessible à tous, grâce à la
publication du Clunet depuis 1974 des extraits commentés de sentences. M. B. Goldman a
affirmé que depuis 1979 l’analyse et le commentaire des sentences arbitrales internationales
se sont largement développés en France. Donc la reproche sur son échec à cause du problème
de confidentialité n’était plus justifié.

351
169. La lex mercatoria n’est que le droit idéalisme (nos italiques) et ceci ne pourra être
le droit que dans la mesure où elle est stipulée dans les Conventions internationales. Mais on
ne peut plus appeler ces règles la lex mercatoria. Malgré tout, il est encore douteux que la
sentence n’est que la source subsidiaire de droit international dont il est incomparable au droit
international coutumier ou un accord international. M. P. Horayangkura a remarqué que

350
P. Horayangkura, L’extrait des œuvres sur le règlement des différends du commerce international,
Bangkok : Chulalongkorn University, 2006, p. 58-61.
351
C’est le terme utilisé par M. Horayangkura.

141
l’idée de recours à la lex mercatoria donne l’opportunité aux grandes puissances
commerciales internationales de créer une nouvelle règle en faveur de leur commerce. Cet
argument a été aussi affirmé chez M. B. Goldman ainsi : « l’expérience concrète du
commerce international montre bien qu’en effet les petites puissances sont obligées de suivre
les règles établies par les grandes puissances. En d’autres termes, la plupart d’entreprises
devront, si elles veulent participer au commerce international, adopter les contrats-type
élaborés par les organisations professionnelles ou les entreprises les plus puissantes de leur
352
branche d’activité » .
Pour un autre auteur, Madame P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, quant à elle, la lex
mercatoria se composait d’« usages du commerce international pratiqués entre les
commerçants. Dès lors, la lex mercatoria peut être considérée comme la loi d’autonomie
353
» . C’est la lex mercatoria contractuelle comme l’admet M. J.-M. Jacquet. Pour ce même
auteur les Incoterms, une sorte de la lex mercatoria, sont constitués d’usages du commerce
354
international .

170. L’argument selon lequel la lex mercatoria ne peut pas être qualifiée de règle d’un
ordre juridique transnational se fonde sur le douteux d’existence de la société internationale
des marchands. Par ailleurs, une telle communauté internationale ne pourrait pas conférer aux
arbitres un pouvoir étatique. Admettant que le pouvoir de l’arbitre résulte de la volonté des
parties, pour M. P. Mayer l’influence qu’une sentence arbitrale peut avoir sur des arbitres
355
statuant postérieurement dans les litiges analogues n’est qu’une influence doctrinale .
A la différence d’un arrêt antérieurement jugé, celui-ci ayant l’influence sur une décision
postérieurement rendue par le juge.

352
B. Goldman, « Frontière du droit et lex mercatoria », Arch. Phil. Dr., 1964, p. 177-192, spéc. p. 188.
353
P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, Droit international privé, 5ème éd., Bangkok : Winyuchon, 2003, p. 85 ;
ibid., « Le rôle des Incoterms aux contrats de vente international », Thammasat Law Journal, vol. 24, n°4, 1994,
p. 761 et s.
354
Contra. E. Jolivet, Les Incoterms, Étude d’une norme du commerce international, avant propos de Ph.
Fouchard, préf. D. Ferrier, Paris : Litec, 2004. D’après cet auteur, ce constat peut être contesté par une étude
récente qui nous a démontré que les Incoterms de la CCI ne constituaient pas à proprement parler des usages. En
revanche les Incoterms seraient plutôt le fruit d’une codification privée qui s’est ingéniée à contempler les
pratiques et à servir les praticiens par une amélioration de ces pratiques provoquée par les règles elles-mêmes.
C'est-à-dire que c’est l’utilisation de ces règles par la pratique, et non les règles elles-mêmes, donne lieu à un
usage.
355
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 24.

142
B. Application de la lex mercatoria.

171. La plupart des pays admettent aux parties la liberté de choisir la loi régit au litige. La
question peut se poser quelle est la loi que les parties pourraient choisir ? Est-ce que les
parties peuvent soumettre leur litige soit aux usages du commerce, soit au principe ex equo et
bono ? Nous développons dans ce chapitre la fonction de droit non étatique afin d’affirmer
l’opportunité de choisir ce droit applicable au contrat. Le contrat d’arbitrage est aussi une
partie de contrat commercial international qui pourrait démontrer le rôle du droit non étatique
dans cette matière. Voyons d’abord l’admission de la lex mercatoria en droit interne (1), en
suite la reconnaissance de la lex mercatoria par le juge étatique (2).

1) L’admission de la lex mercatoria en droit domestique.


a. L’appréciation de « règles de droit » dans l’article 1511 du Décret du 13 janvier
2011.
356
172. En France, on admet dans l’article 1496 du CPC (l’article 1511 du Décret du 13
janvier 2011) le choix des parties de « règles de droit » donc on peut observer que le rédacteur
n’utilise pas le terme « loi », c'est-à-dire qu’il ne limite pas aux parties de choisir des
dispositions législatives mais les règles de droit tels que des principes généraux reconnus
comme la lex mercatoria ; des usages ; ou même le droit uniforme. L’article 1511 du Décret
du 13 janvier 2011 se pose sur les règles applicables au fond du litige, afin de rendre la
décision, par le choix des parties et aussi par le choix de l’arbitre. C’est en effet le même
principe posé dans l’article 1512 du même Décret sur l’amiable composition dans le domaine
où se constitue l’un d’objet important de l’arbitrage : le principe de l’autonomie de la volonté.
Citons un exemple de la Cour de cassation français qui a ainsi attribué aux Règles et
usances uniformes relatives aux crédits documentaires (RUU) le rang d’usage du commerce
international, ceci signifie que les juges français ont appliqué implicitement la lex
357
mercatoria .

356
L’article 1496 CPC ou l’article 1511 du décret stipule :
« L’arbitre tranche le litige conformément aux règles de droit que les parties ont choisies ; à défaut
d’un tel choix, conformément à celles qu’il estime appropriées.
Il tient compte dans tous les cas des usages du commerce ».
357
Cass. com., 14 octobre 1981, Sté Discount Bank, D. 1982.301, note M. Vasseur.

143
173. L’application de la règle de droit choisie par les parties est nécessaire. La Cour de
358
Paris a ainsi affirmé dans son arrêt du 16 janvier 2003 que le tribunal arbitral a l’obligation
d’appliquer la loi choisie par les parties. La sentence du tribunal arbitral statue sans se
conformer à la mission qui lui avait été conférée peut être annulée. Dans l’arrêt récent de la
CJUE rendu en 2011, elle affirma dans sa réponse à une question préjudicielle sur la
possibilité du recours à la lex mercatoria par les juges nationaux, d’après la Cour, le juge
national pourrait utiliser comme élément susceptible d’aider à déterminer du tribunal
compétent l’usage du commerce international, même si c’est le cas où le règlement Bruxelles
I est en jeu. La CJUE a décidé que la juridiction nationale doit aussi prendre en compte afin
de fixer le lieu de livraison « tous les termes et toutes les clauses pertinents de ce contrat qui
sont de nature à désigner de manière claire le lieu de livraison de marchandises, y compris
les termes et les clauses généralement reconnus et consacrés par les usages du commerce
359
international, tel que les Incoterms élaborés par la CCI » .

b. L’appréciation de la lex mercatoria en droit thaïlandais.


174. La situation avant l’entrée en vigueur de la Loi 2002 sur l’arbitrage. A l’époque,
l’arbitrage commercial en Thaïlande devait se conformer à la Loi 1987 sur l’arbitrage. Le
texte de loi sur l’arbitrage n’était pas clair sur l’application de la lex mercatoria. Les juristes
thaïs ont des diverses opinions ; certains pensaient que la clause d’arbitrage est une clause
contractuelle, par conséquent il faut le régir par la loi du lieu de conclusion de contrat ; le
deuxième argument propose l’application de la loi du siège de l’arbitrage ; et la dernière
opinion soutenait l’autonomie de la volonté des parties de choisir la loi applicable au contrat
d’arbitrage, à défaut, la règle conflictuelle jouera son rôle, c’est dire que la loi du lieu de la
conclusion du contrat sera applicable.
Cependant pour les juristes dominants dans le domaine du commerce international, ils
affirment que la lex mercatoria est la règle pour faciliter un mécanisme de règlement des
360
différends commerciaux internationaux . Elle constitue par ailleurs des coutumes du
commerce international et des usages du commerce international. Pour ces raisons la pratique

358
CA Paris, 16 janvier 2003, Sté Keen Loyd Resources Limited c/ Société national d’opérations pétrolières de
la Côte d’Ivoire ; CA Paris, 29 avril 2003, SA Impregilo c/ Secrétariat aux communications et transports
maritimes de la Jamahiriya Lybienne populaire et socialiste, RTD com. n°3-2003, p. 487.
359
CJUE, 9 juin 2011, aff. C-87/10, Electrosteel Europe SA, préc., supra note n° 319.
360
S. Asawaroj, Le règlement des différends commerciaux par l’arbitrage, Bangkok : Université de
Thammasat, 2000, p. 125-126.

144
de la Cour thaïe et même les opinions des auteurs édictaient dans la même direction en
estimant que la lex mercatoria n’est pas de droit. Dès lors, on ne peut pas l’appliquer au litige
sauf dans le cas où les parties ont inséré une clause de choix de la lex mercatoria dans leur
contrat. Il en résulte que la lex mercatoria n’est qu’une clause contractuelle dans un contrat
commercial international, de surcroît, le juge étatique devrait appliquer la lex mercatoria dans
ce cas là parce qu’elle est choisie par les parties selon le principe d’autonomie de la volonté.

175. Selon la décision de la Cour suprême Dika n° 2602/2533 en 1990, en l’espèce, les
parties ont procédé au choix de la loi singaporienne applicable au fond du litige et la
procédure arbitrale a déroulé à Singapore. La Cour suprême a décidé : «lorsqu’il y a clause de
choix de la loi (Singapourienne) applicable au fond et que le tribunal arbitral ait fait une
sentence conformément à cette clause, ladite sentence est valable et peut être homologuée en
361
Thaïlande ». On peut dire que le juge thaï ne pourrait pas recourir à la lex mercatoria en
l’absence du choix exprès des parties contractantes. A notre avis, ceci pour deux raisons :
d’une part, la Cour a d’office de juger le litige conformément à la loi, sauf le cas selon lequel
les parties ou la loi disposée autrement. De surcroît, aucune disposition de la Loi sur
l’arbitrage n’a admis au juge d’application la règle de droit ou les usages du commerce ou la
coutume commerciale internationale. C’est la raison pour laquelle le juge ne peut faire appel à
la lex mercatoria ni à l’usage du commerce ou la coutume du commerce international. D’autre
part, si la Loi sur l’arbitrage n’autorise pas au juge ou à l’arbitre d’appliquer la lex mercatoria
ou autre règle de même genre et si les parties n’ont pas exprimé dans leur contrat de le faire,
le juge ou l’arbitre ne pourraient pas trancher le litige en appliquant la lex mercatoria, car ce
serait une nouvelle introduction un nouvel élément dans un litige, donc un acte d’ultra petita.

176. Bien que la pratique de la Cour thaïe suive dans cette direction, lorsque l’on prend en
considération d’autres instruments juridiques internationaux en vigueur à la même époque tels
que la Convention des Nations Unies du 11 avril 1980 sur la vente internationale de
marchandises (ci-après la CVIM) ou bien la loi type de la CNUDCI, il semble que ces deux
instruments importants admettent l’application des usages lesquels elles ont consenti et par les
habitudes qui se sont établies entre elles. En particulier l’article 9 (2) de la CVIM admet la
référence dans le contrat tout usage qui est largement connu dans le commerce

361
Cour suprême Dika, n° 2602/2533 (1990).

145
362
international . Cependant on trouve que le texte ne mentionne pas le cas d’absence de choix
de la loi applicable par les parties, alors que le juge ne pourrait appliquer au litige des usages
du commerce conformément à cette disposition qu’en cas de choix des parties.
363
La loi type de la CNUDCI admet dans l’article 28 (1) la loi d’autonomie et dans (2)
le cas d’absence de choix des parties la loi applicable au fond en stipulant : « A défaut d’une
telle désignation par les parties, le tribunal arbitral applique la loi désignée par la règle de
conflit de lois qu’il juge applicable en l’espèce ». Il faut apprécier l’article 28 (2)
conformément avec l’article 28 (4) qui stipule : « Dans tous les cas, le tribunal arbitral
décide conformément aux stipulations du contrat et tient compte des usages du commerce
applicables à la transaction ». On constate finalement que cet article laisse la place à l’arbitre
à régler les différends, en cas d’absence de choix des parties, en utilisant des usages du
commerce sous réserve qu’il faut appliquer la loi désigner par la règle conflictuelle comme le
premier pilier en tenant compte des usages du commerce applicables à cette transaction.

177. La situation après l’entrée en vigueur de la Loi 2002 sur l’arbitrage. Il est vrai que
la plupart des droits modernes de l’arbitrage reconnaissent le principe de l’autonomie de la
volonté, les conventions internationales qui abordent la question de la loi applicable dans
l’arbitrage commercial international se prononcent dans le même sens. En 2002, la nouvelle
loi sur l’arbitrage a réglé ce souci en reconnaissant aux parties la liberté de déterminer la loi
applicable au fond du litige, de surcroît c’est l’office de l’arbitre de trancher le litige
364
conformément à la loi choisie par des parties . En effet on peut observer que l’article 34 de

362
«(…) celles-ci sont réputées s’être tacitement référées dans le contrat et pour sa formation à tout usage dont
elles avaient connaissance ou auraient dû avoir connaissance et qui, dans le commerce international, est
largement connu et régulièrement observé par les parties à des contrats de même type dans la branche
commerciale considérée ».
363
« 1. Le tribunal arbitral tranche le différend conformément aux règles de droit choisies par les parties
comme étant applicables au fond du différend. Toute désignation de la loi ou du système juridique d’un État
donné est considérée, sauf indication contraire expresse, comme désignant directement les règles juridiques de
fond de cet État et non ses règles de conflit de lois.
2. A défaut d’une telle désignation par les parties, le tribunal arbitral applique la loi désignée par la
règle de conflit de lois qu’il juge applicable en l’espèce.
3. Le tribunal arbitral statue ex aequo et bono ou en qualité d’amiable compositeur uniquement si les
parties l’y ont expressément autorisé.
4. Dans tous les cas, le tribunal arbitral décide conformément aux stipulations du contrat et tient
compte des usages du commerce applicables à la transaction ».
364
L’article 34 alinéa 2 de la Loi sur l’arbitrage B.E.2545 : « Au cas où les parties n’ont pas procédé au choix
du droit applicable au litige, l’arbitre tranche le litige conformément au droit thaïlandais. S’il y a conflit des
lois, l’arbitre devra tenir compte de la règle de conflit de lois qu’il trouve appropriée ». มาตรา ๓๔ วรรค ๒ แห่ ง

146
la nouvelle Loi sur l’arbitrage B.E. 2545 a été inspiré par l’article 28 de la loi-type de
CNUDCI.

178. L’arbitre peut-il trancher le différend en recourant aux usages du commerce ? En effet
les juristes thaïs acceptaient depuis longtemps ce principe à l’époque où l’ancienne loi sur
l’arbitrage avait été appliquée. Mais la nouvelle loi de 2002 affirme ce principe dans l’article
34 qui stipule que :
« L’arbitre a d’office de faire la sentence conformément à la clause contractuelle et
s’il s’agit des différends commerciaux l’arbitre devra tenir compte des usages de commerce
relatifs à cette transaction ».

On trouve que le texte de loi thaïlandaise de l’arbitrage n’est pas clair sur le choix de
la lex mercatoria comme la loi applicable au fond du litige bien que le texte admette le rôle
d’usages du commerce. Dans ce cas, la pratique de la Cour et la doctrine peuvent sans doute
donner l’explication. Nous avons déjà vu le problème de statut juridique de la lex mercatoria
sur lequel les juristes thaïs avaient des diverses opinions. Dans le texte de loi, l’article 34
utilise le terme « le droit » c'est-à-dire que seul le droit pourrait être applicable au litige et
l’autre qui n’est pas qualifié de « droit » ne peut pas jouer son rôle ici. Il dépend si l’on
qualifie la lex mercatoria dans quel statut. Si la lex mercatoria n’a pas de statut juridique,
l’arbitre ne pourrait pas l’appliquer au différend...
365
Cependant lorsque l’on prend en considération d’autres alinéas de l’article 34 , on
observe que cette loi permet à l’arbitre de trancher le différend en appliquant le principe d’ex
aequo et bono et elle permet de trancher le litige conformément aux usages du commerce,
c’est dire que cette disposition ne limite pas à l’arbitre en statuant ex aequo et bono de
choisir la lex mercatoria applicable au litige... Plus précisément, comme on le sait, la nature
de différend commercial international possède le caractère spécifique, dès lors, on ne peut nier
l’application de la loi marchande au litige né du commerce international. Pourtant, pour

พระราชบัญ ญัติ อ นุ ญ าโตตุ ล าการ บัญ ญัติ ว่ า “ ในกรณี ที่ คู่ พิ พ าทมิ ไ ด้ ก าหนดถึ ง กฎหมายที่ จ ะน ามาใช้ บ ัง คับ กับ ข้อ พิ พ าทไว้ ให้ ค ณะ
อนุญาโตตุลาการชี้ ขาดข้อพิพาทไปตามกฎหมายไทย เว้นแต่เป็ นกรณี ที่มีการขัดกันแห่ งกฎหมาย ก็ให้พิจารณาจากหลักว่าด้วยการขัดกันแห่ ง
กฎหมายที่คณะอนุญาโตตุลาการเห็นสมควรนามาปรับใช้”
365
L’article 34, al. 1er : « Lorsque la clause du choix du droit applicable n’indique pas de manière expresse
quel droit sera applicable, c’est le droit substantiel de ce pays et non la règle de conflit des lois ».
L’article 34 al. 2 : « Au cas où les parties n’ont pas procédé au choix du droit applicable au litige, l’arbitre
tranche le litige conformément au droit thaïlandais. S’il y a le conflit des lois, l’arbitre devra tenir compte de la
règle de conflit de lois qu’il trouve appropriée ».

147
certain auteur, le choix de la loi applicable telle que la lex mercatoria donne lieu aux
366
problèmes plutôt que de régler les litiges .

179. L’absence de choix des parties de la loi applicable. En effet le cas d’absence de
choix de droit applicable par les parties contractantes devant le tribunal arbitral est plutôt
spécial que devant la juridiction étatique. Il existe deux grandes tendances de la jurisprudence
arbitrale internationale pour la détermination du droit applicable, d’une part, l’application des
règles de conflit de lois intéressées au litige ; d’autre part, le recours aux principes généraux
367
du droit international privé . En droit thaïlandais, la nouvelle Loi sur l’arbitrage a adopté la
première tendance, selon l’article 34, alinéa 2 de la Loi 2002 sur l’arbitrage, en l’absence du
choix des parties de la loi applicable du fond, l’arbitre « tranche le litige conformément au
droit thaïlandais. S’il y a le conflit des lois, l’arbitre devra tenir compte de la règle de conflit
de lois qu’il trouve appropriée ». Cet article stipule en ce sens en raison de la non distinction
entre l’arbitrage interne et l’arbitrage international. On a remarqué que le législateur de cette
loi a essayé d’éviter les parties de la subjectivité de l’arbitre de choisir lui-même la loi
applicable au litige. D’un coté, l’arbitre pourrait exercer son choix en toute liberté. D’autre
coté, il est douteux si on lui laisse énormément le libre de choix. Ce qui peut porter atteint à
368
l’attente légitime des parties .

180. Certaines conventions d’arbitrage admettent dans leurs clauses le choix par l’arbitre de
la loi applicable en tenir compte de principes généraux de droit international privé, mais il
faut rappeler que la teneur du droit international privé est en effet le droit interne de chaque
État. On a bien constaté que les détails de ce droit de chaque pays peuvent être en conflit, un
auteur a demandé comment l’arbitre peut-il trouver les principes généraux du droit
international privé ? Si l’on propose de les comparer, alors combien de pays faudrait-il
comparer ? Ce constat est rationnel lorsque l’arbitre n’est pas juriste et en particulier il

366
P. Horayangkura, Le règlement des différends commerciaux, Bangkok : Chulalongkorn University, 2006,
p. 27.
367
P. Horayangkura, La pensée juridique sur le règlement des différends du commerce, op.cit., p. 69 et s.
368
Sur ce point, voir Y. Derains, « Attente légitime des parties et droit applicable au fond en matière
d’arbitrage commercial international », TCFDIP 1984-1985, p. 81 et s.

148
369
n’existe pas dans tous les cas des principes généraux de droit international privé . En effet
il faut rappeler que lorsque les parties n’ont pas opéré leur choix de la loi applicable, cela
signifie que celles-ci ont fait confiance aux arbitres de trancher le litige en appliquant la loi ou
la règle qu’ils ont choisie.

2) La reconnaissance indirecte de la lex mercatoria.


181. On sait que le juge doit trancher le litige conformément à la loi. La possibilité de
trouver le cas d’application des règles de droit non étatique semble moindre mais il n’est pas
impossible. Certes, la lex mercatoria peut être en cause. La difficulté est que ce corps de règle
n’est pas encore complet et ceci créerait la tentation pour l’arbitre ou le juge d’inventer lui-
même la règle applicable en l’attribuant à la lex mercatoria. On peut distinguer l’application
de la lex mercatoria en deux stades : l’application directe et l’application indirecte. La
première, plutôt rare à appliquer, concerne l’application en tant que droit applicable, la
seconde consiste à l’application de la lex mercatoria au cours de la reconnaissance ou du
recours en annulation d’une sentence, c’est ce que nous allons étudier.

a. A l’égard du juge français.


182. A priori, la reconnaissance indirecte paraît plus claire dans de nombreuses juridictions
étatiques européennes. On constate qu’en Angleterre, la lex mercatoria a été reconnu dans son
ordre juridique et approuvée par les sentences arbitrales selon lesquelles l’application de la lex
mercatoria était en courant. En Italie, la Cour de cassation a affirmé l’application, en tant que
lex mercatoria, de la Convention de Genève de 1961 sur l’arbitrage international laquelle
l’Italie n’a pas ratifié. En France, les affaires remarquables telles que, Fougerolles en
370 371 372
1980 , Norsolor en 1981 et Valenciana en 1988 présentent l’évolution très
intéressante.

369
Cf. P. Horayangkura, La pensée juridique…, op.cit., p. 70-71. Cet auteur a critiqué la méthodologie de
rechercher des principes généraux de droit en faisant une remarque sur l’adjectif « civilisé » ou même
« Chrétien » qui ont souvent été utilisés pour décrire les principes généraux de droit. Car ces termes peuvent être
utilisés pour la discrimination des parties. Ceci pourrait détruire aussi les bonnes relations et la confidence entre
les contractantes et détruire aussi le concept dit ‘Win-Win’ de l’arbitrage. N’est-il pas vrai que la préservation de
bonnes relations entre des parties au contrat du commerce international est le but de recourir à l’arbitrage ?
370
CA Paris, 12 juin 1980, Fougerolles, Rev. arb. 1981, p.292, 2e esp., note Couchez ; JDI.1982.931, 2e esp.,
note B. Oppetit ; sur pourvoi : Cass. 2e civ., 9 décembre 1981, Fougerolles, Rev. arb. 1982.183, 2e esp., note
Couchez ; JDI.1983.931, 2e esp., note B. Oppetit ; JCP.1983.II.19771, 2e esp., note Level.
371
TGI Paris, 4 mars 1981, Norsolor, JDI.1981.836, note Ph. Kahn ; JDI.1981.922, obs. Y. Derains ; Rev.
arb.1983.465.

149
183. Dans l’affaire Norsolor en 1981, le jugement rendu sur une opposition à ordonnance
d’exequatur d’une sentence arbitrale. Dans la première espèce les parties n’ont pas opéré le
choix de la loi applicable et n’ayant pas accordé au tribunal arbitral des pouvoirs d’amiables
compositeurs qu’ils peuvent statuer le litige en application des règles qu’ils jugent
appropriées... Le tribunal arbitral a tranché le litige par référence à la lex mercatoria en
estimant que « les arbitres ont (…) appliqué la loi désignée par la règle de conflit qu’ils ont
jugée appropriée en l’espèce, les principes généraux des obligations généralement
applicables dans le commerce international ». Alors que dans la seconde espèce, les arbitres
avaient reçu des pouvoirs d’amiables compositeurs.
Le Tribunal de commerce de Vienne affirma que « le principe de bonne foi et de
loyauté utilité conformément à une lex mercatoria par le tribunal arbitral constitue un
principe général de droit et une décision fondée sur un tel principe ne constitue pas une
décision en équité ».
La Cour d’appel de Vienne dans cette affaire a qualifié la lex mercatoria de « droit
mondial d’une validité incertaine », puis la Cour de cassation autrichienne a reconnu la
juridicité de la lex mercatoria dans le cadre du contrôle d’un recours en annulation de
sentence. Comme remarque M. Schapira : « les arbitres, amiables compositeurs ou non, sont
investis du pouvoir de trancher le conflit d’une manière appropriée à l’espèce, combinés ou
non avec un droit national, si les parties n’ont pas défini expressément le droit applicable au
373
fond » .

184. Selon M. Pamboukis, « la lex mercatoria est reconnue ainsi indirectement mais dans
le sens d’un désintéressement de l’ordre juridique concerné », il a remarqué si on accepte la
possibilité de statuer en équité, pour quelle raison on refuse l’application de règles
transnationales dès lors que les parties ont autorisé les arbitres à travers un règlement
374
d’arbitrage ? Nous remarquons ici que les juridictions étatiques n’ont pas refusé
l’application de la lex mercatoria, en revanche les juges la reconnaissent dans plusieurs arrêts.
Ce qui a été refusé est sa juridicité et non pas son applicabilité, bien qu’il ne soit qu’une
application indirecte... Cette question nous renvoie encore au débat classique s’agissant de

372
CCI n°5953 (1988), Valenciana, Rev. arb. 1990, p.702 ; JDI.1990.1056, obs. Y. Derains ; CA Paris, 13
juillet 1989, Valenciana, RCDIP.1990.305, note B. Oppetit ; JDI.1990.430, note B. Goldman.
373
Note sous la sentence CCI du 3 novembre 1977, Rev. arb. 1980, p.560.
374
C. Pamboukis, « La lex mercatoria reconsidérée », op.cit., p. 655.

150
l’impossibilité pour des organismes privés d’établir un système juridique qui pourrait aller à
l’encontre des règles impératives pour les États. Force est de reconnaître que la
reconnaissance de la lex mercatoria est limitée par le biais de la libéralisation du contrôle de
l’arbitrage international par le juge étatique… On accepte que le juge ne rend jamais une
décision au mépris des règles de l’ordre juridique étatique en faveur de la lex mercatoria. A
vrai dire, ce qui est important n’est pas la prétendue juridique de la lex mercatoria, mais
375
l’utilité que chaque arbitre voit à son application dans le cadre de sa liberté .

b. A l’égard du juge thaï.


185. En Thaïlande, la lex mercatoria pourrait jouer son rôle devant les juridictions étatiques
le plus souvent en matière de contrats de transport maritime. Les parties ont souvent inséré le
choix du règlement de l’association de transporteurs applicable aux devoirs, obligations et
responsabilités du contrat. Ce choix est-il applicable au contrat ? La Cour suprême thaïe
376
estime à travers la jurisprudence qu’elle ne refuse pas l’application de la lex mercatoria .
377
Parmi les litiges portant sur l’application de règles de droit a-national, les Incoterms et les
RUU semblent être des exemples très connus. Chaque année le TCPICI et la Cour suprême
Dika, le plus souvent, doivent les envisager. On sait qu’ils sont la compilation des usages du
commerce de la CCI bien existés et pratiqués entre des commerçants dans les contrats
internationaux. La CCI a réédité plusieurs fois les termes afin de se conformer aux usages du

375
Id., p. 656 et s.
376
Cour suprême Dika, n° 698/2521 (1978) ; Cour suprême Dika, n° 1284/2526 (1983). Cf. P. Kanchanachittra-
Saisoonthorn, « Le rôle des Incoterms aux contrats de vente international », Thammasat Law Journal, vol. 24,
n°4, 1994, p. 761. Cet auteur a admis que les Incoterms sont la lex mercatoria.
377
Comme on le sait, les parties du commerce international sont composées de différentes États et possèdent
chacun leurs droits et leurs systèmes juridiques tels les Common Law et droit civil. Chaque système juridique a
disposé les droits et obligations de manière différente, prenons un exemple du contrat de vente. Les parties
contractantes devraient faciliter leur transaction en concluant d’abord les droits et les obligations dans leur
contrat, afin d’éviter toute sorte de problème. D’ailleurs le langage utilisé entre les commerçants internationaux
est souvent différent, il est difficile d’interpréter les termes de l’échange ou Trade terms de la même direction.
En raison de la complexité du droit de chaque pays et afin d’uniformiser ces droits et obligations y compris
autres usages et coutumes utiles pour le commerce, et afin de chercher un instrument commun de régler la
différenciation de langage et de l’interprétation de Trade terms, l’organisme privé comme la CCI a regroupé ces
usages et coutumes dans la vente internationale des marchandises compilant en forme des Incoterms. Les
Incoterms ou International Commercial Terms sont des termes commerciaux dont la règlementation est édictée
par la Chambre de commerce internationale. Les termes des Incoterms définissent les responsabilités et les
obligations caractéristiques d’un vendeur et d’un acheteur dans le cadre de contrats de commerce international,
en particulier sur la prise en charge de la marchandise ; le transport ; le frais de transport ; les assurances ; et la
livraison. D’ailleurs les Incoterms a pour objet de définir le lieu de transfert des risques, les obligations de
supporter l’avarie en cas de mauvaise exécution du transport. Les Incoterms déterminent également les
obligations de livraison qui incombent au vendeur concernant le délai.

151
378
commerce actuellement pratiquées , usages qui peuvent se développer en coutume
commerciale internationale qui pourra devenir une pratique générale acceptée par les
marchands au niveau international, voire même une obligation dans la société commerciale
internationale. Ces Trade terms, existent bien depuis longtemps parmi les marchands avant
d’avoir été compilés par la CCI, et par la suite, de nos jours, la référence de ces termes est
379
devenue indispensable dans la vente internationale de marchandises par voie maritime .
Pour ces raisons, on n’hésite pas à admettre que les Incoterms sont la lex mercatoria. Certes,
en pratique, les Incoterms rendent énormément d’intérêts aux commerçants. Voyons
380
maintenant les attitudes du juge thaï vis-à-vis de ces Incoterms .

186. En se référant aux Incoterms, le juge thaï pourrait comprendre les droits et les
obligations des parties contractantes. Par conséquent il pourrait faire un jugement rapide et
réduire les erreurs de mésinterprétation des termes du commerce. Certes, le terme des
Incoterms n’est pas contraire à l’ordre public international thaï, la Cour de cassation a pris une
381
décision dans ce sens depuis 1977 . Ce qui l’amène à juger le litige conformément à ces
termes. Cependant, de même que d’autres pays, les Incoterms n’ont pas le statut juridique à
382
l’égard du juge et des juristes thaïs . En effet d’après l’opinion dominante en matière du
commerce international, le juge n’applique pas les Incoterms au litige en tant que droit mais
en tant que clause contractuelle insérée dans le contrat selon le principe d’autonomie de la

378
La première édition a été élaborée en 1936, révisée en 1953, 1967, 1976, 1980, 1990.
La dernière version des Incoterms date de 2000, la Chambre de commerce internationale délibérera la nouvelle
version qui est entrée en vigueur le 1 janvier 2011, à défaut de référence à l’année d’édition de la version que les
parties veulent utiliser, les contrats qui se réfèrent aux Incoterms depuis cette date seront gouvernés par la
version 2011.
379
D’après M. le juge J. Pukditanakul, les parties du litige ont souvent fait la référence des Incoterms dans un
contrat de transport par avion e.g. FOB airport. V. Comité du travail de l’élaboration de proposition de
répartition les litiges commerciaux des litiges civils, Le mémorandum du projet de loi sur le contrat de vente
commerciale de marchandises, le 11 janvier 2006.
380
La Proposition de la loi sur le contrat de vente commerciale de marchandises comprend une certaine
disposition sur les Incoterms dans l’article 10. En précisant si les parties contractantes sont d’accord pour utiliser
un certain Incoterm, cela impliquera obligatoirement l’utilisation d’autres contrats, sous réserve d’un accord
entre les parties. Force est de constater que cet article n’affirme pas la juridicité des Incoterms, les derniers sont
applicables au contrat de vente par incorporation.
381
Cour suprême Dika, n° 2061/2520 (1977), p.1628-1630.
382
V. La Proposition de la Loi sur le contrat de vente commerciale de marchandises, le 11 janvier 2006
(précité). Le juge J. Pukditanakul a affirmé au cours de la conférence que les Incoterms n’ont pas la juridicité, on
est toujours dans le débat d’application en tant qu’usages du commerce, soit coutume commerciale. Cf. P.
Horayangkura, La pensée juridique…, op.cit., p. 76-79.

152
383
volonté . On voit que le juge applique les Incoterms de la même façon qu’il applique la lex
mercatoria au litige.
Cependant la question peut se poser s’il y a le cas où le juge applique les Incoterms
bien que les parties ne les mentionnent pas dans leur contrat ? La réponse semble être positive
en cas d’interprétation du contrat par le juge. Le juge doit interpréter le contrat en tenir
compte de la volonté réelle des contractants plutôt que le sens littéral selon l’article 171 du
CCC qui est la disposition générale. Par ailleurs l’article 368 du CCC stipule le principe
384
d’interprétation du contrat que le juge doit l’interpréter en tenant compte, autre que la
volonté réelle des contractants, d’usages établis entre les contractants, ceci est pour l’objectif
385
de bona fide (Verkehrssitte - le droit thaï a adopté cet article du droit allemand) et afin que
l’interprétation du principe bona fide se conforme au principe de bonne foi en matière de
386
l’économie . Par conséquent, à défaut d’autre intention des parties, lorsqu’elles ne sont pas
d’accord sur tel ou tel point, mais il existe entre elles des usages bien établis, le juge peut
prévoir qu’elles souhaitaient de conclure un contrat conformément à ces usages.
Force est de reconnaître que les Incoterms sont utilisés comme usages admis parmi les
commerçants dans les contrats de vente internationale par voie maritime. Bien que les
contractants n’aient pas inséré dans leur contrat d’application de ces terms, le juge peut les
appliquer en tant qu’usages du commerce entre les parties.

383
Force est de constater le cas de l’absence du choix par les parties, c’est la règle conflictuelle qui joue le rôle
comme on a déjà étudié précédemment. Il est clair que le juge n’applique pas les Incoterms vers l’article 13 de la
loi de 1938 relative au conflit de lois. Car le terme « droit » dans cet article signifie le droit étatique qui
comprend le droit écrit et le droit coutumier. V. sur ce point K. Sandhikshetrin, Droit international privé,
Bangkok : Nitibanakarn, 1996, p.185 ; Ch. Pachusanond, Droit international privé, op.cit., p.445.
384
La Proposition de la Loi sur le contrat de vente commerciale de marchandises a une disposition sur
l’interprétation du contrat de vente. En stipulant dans l’article 11 : « Pour l’interprétation du contrat et de la loi
applicable, il sera tenu compte de (1) la nécessité de promouvoir l’uniformité de son application dans le
commerce interne et internationale ; (2) le développement durable du commerce interne et international ; (3) les
usages, les habitudes qui se sont établies entre les parties et de tout comportement ultérieur des parties ; (4)
ainsi que d’assurer le respect de la bonne foi entre les commerçants ».
385
Cf. S. Sanongchart, Le Code civil et commercial : Actes juridiques et contrats, Cours de droit, Bangkok :
Nitibannakarn, 7e éd., p. 393-394.
386
Cf. D. Thirawat, Droit de contrats : l’actualité du nouveau statut de contrat et le problème d’Unfair
Contract Terms, 2e éd., 1999, Bangkok : Université de Thammasat, p. 60.

153
187. Il est de même pour les Règles et usances uniformes relatives aux crédits
387 388
documentaires (ci-après les RUU) . Les RUU n’ont pas caractère juridique mais la Cour
389
peut l’appliquer au litige en l’absence de la volonté expresse des parties . La Thaïlande n’a
pas encore la loi qui peut régir le contrat de lettre de crédit, l’avis des juristes sont diverses sur
390
ce débat. Un auteur pense qu’il s’agit de lacunes de loi . Dans ce cas le juge thaï se
conforme à l’article 4, alinéa 2 du CCC qui stipule :

387
Comme on le sait, parmi les contrats commerciaux internationaux tels les contrats de vente constitués par
plusieurs contrats principaux indispensables, figure le contrat de paiement international. A l’époque, les
commerçants en particuliers les banques ont créé et développé des méthodes pour effectuer et faciliter le
paiement international. Depuis longtemps le crédit documentaire devient un instrument très important pour les
commerçants et les banques commerciales en particulier dans le commerce international. Certes, les usages et
les règlementations bancaires de chaque pays sont différents les uns des autres, par exemple pour la lettre de
crédit qui fixe le plafond de crédit ‘environs 1 million de Baht’, la banque A pourrait régler entre plus ou moins
10% de 1 million de Baht (entre 900,000 à 1,100,000 Baht), alors que la banque B utilise une autre règle donc
elle ne réglerait que pour le montant de plus ou moins de 5% (entre 950,000 à 1,050,000 Baht). C’est là la
différence qui peut entrainer des problèmes pour les commerçants. Afin d’éviter ces inconvénients, la CCI a
proposé en 1933 de standardiser ces règles et usages qui aboutissent aux Règles et usances uniformes relatives
aux crédits documentaires ou Uniform Custom and Practice for Documentary Credit (UCP). Elles ont été
révisées plusieurs fois car il n’y avait que quelques pays européens qui acceptaient la première édition des RUU
en 1933 dès lors la CCI avait révisé en 1951, par conséquent les banques commerciales américaines l’ont adopté.
La seconde édition des RUU a été effectuée en 1962, il semblait que le Royaume Uni et les pays Commonwealth
adoptaient cette nouvelle version des RUU, d’après cette révision RUU était adoptée par la plupart des pays dans
le monde. En 1974, la CCI a fait la révision la plus remarquable des RUU en raison de prolifération d’un
conteneur dans le transport international de marchandises. En 1983 la CCI a révisé la 4e édition, la plus
intéressante est que les RUU peut être utilisé à la lettre de crédit Standby. En 1993 RUU 500, 5 e édition, a été
délibéré et la CCI a dernière édition est RUU 600 qui a activé depuis le 1 er juillet 2007. Cf. K. Jongjakapun, Le
paiement dans le commerce international, Cours du droit ‘Les transactions dans le commerce international’,
Université de Thammasat, 2000.
388
Ceci est affirmé par le fait que lorsque le contrat L/C a mentionné que les RUU 400 s’appliquent et que la
nouvelle version de celle-ci est déjà entrée en vigueur pendant la conclusion de ce contrat, il dépend de volonté
des contractantes quelle version sera applicable au contrat. Si le juge n’a pas pu découvrir, les RUU 400
s’appliquent toujours au contrat, car elles ne sont pas la loi. Cette hypothèse peut être envisagée dans le cas où la
banque ne change pas encore la forme du contrat L/C, alors que la nouvelle version des RUU est délibérée. Il ne
faut pas confondre avec Hague Rules ou Hague-Visby Rules ou Hamburg Rules, car le langage ou le terme
appliqué peuvent conduire à une mauvaise compréhension. Normalement dans la pratique on n’appelle que les
noms sans préciser leur statut, par exemple les Règles de La Haye ou les Règles de La Haye-Visby ou les Règles
de Hambourg. Ce sont toutes les conventions internationales pour uniformiser les règles sur le connaissement.
Mais les commerçants les appellent « Rules » ou « Règles »… Le titre officiel des Règles de La Haye est
‘Convention de La Haye du 25 août 1924 pour l’unification de certaines règles en matière de connaissement
(International Convention for the Unification of Certain Rules of Law relating to Bills of Ladings 1924), amendé
en 1968 par les Visby Amendments ou les Protocoles du 23 février 1968 (Protocol to Amend the International
Convention for the Unification of Certain Rules of Law Relatincg to Bills of Lading) que l’on appelle les Règles
de La Haye-Visby en pratique. De même que les Règles de Hambourg lesquelles résulté de la ‘Convention des
Nations Unies sur le transport de marchandises par mer’ adopté à Hambourg en 1978.
389
Dans l’hypothèse que les contractantes n’ont pas fait référence aux RUU dans leur contrat de lettre de
crédit. En réalité il se trouve très rare, car les banques commerciales dans le monde entier qui sont membres de la
CCI utilisent normalement une forme ou un contrat-type qui ont précisé déjà une clause selon laquelle ce contrat
de lettre de crédit est soumis des RUU de la CCI.
390
K. Jongjakapun, Le paiement dans le commerce international, Cours du droit ‘Les transactions dans le
commerce international’, Université de Thammasat, 2000.

154
« Lorsqu’il n’y a pas de loi applicable au litige, le juge tranche le litige conformément
à la coutume locale, à défaut, le juge tranche le litige par analogie de droit plus proche, si
ledit droit n’existe pas il faut appliquer les principes généraux du droit ».

Est-ce qu’on peut appliquer les RUU en tant que coutume locale selon l’alinéa 2 de cet
article ? Un auteur a admis cette possibilité car les RUU sont pratiqués parmi les
391
commerçants depuis longtemps . On est d’accord sur ce point même si les RUU sont
392
modifiés plusieurs fois mais le principe de ces règles n’a pas changé . Par ailleurs le juge
peut aussi faire recours aux RUU en citant la non contrariété à l’ordre public, conformément
au principe de droit civil que les parties peuvent conclure un accord quelconque et il est
393
valable s’il n’est pas contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs (art. 151 du CCC) .

394
188. Il convient de citer un arrêt cassé par la Cour de cassation français en 1981 dans
cette matière qui a jugé autrement. En l’espèce, la Cour a fait référence à l’article 3 des RUU,
d’origine conventionnelle, sur le même plan que l’article 1134 du Code civil, en estimant que
« Viole les dispositions des art. 1134 du Code civil et 3 des règles et usances uniformes
395
relatives au crédit documentaire la cour d’appel… » . On peut considérer d’une part que la
Cour les a fait référence sur le même niveau qu’un article du Code civil puisque ces RUU
faisaient partie intégrante des conventions des parties. D’autre part, on peut penser que
la Cour de cassation a admis implicitement que les RUU ont caractère de véritables règles
coutumières. Toutefois, elle peut toujours, le cas échéant, sanctionner cette violation.
En attendant la jurisprudence certaine, les contractants ou leurs avocats devraient
prudemment vérifier si le contrat de lettre de crédit a bien indiqué que les RUU s’appliquent à

391
P. Watpatarakul, « Le paiement dans le contrat de vente internationale », Thammasat Law Journal, vol. 20,
n°2, 1990, p. 108.
392
Contra. M. Ch. Lusumphan, « Le devoir de banque en vue d’examiner les documents et le paiement de
lettre de crédit », Journal du droit des affaires, vol. 14, 3, 1983, p. 26. Il estime que les RUU ont été révisées
assez souvent, donc on ne peut pas admettre que ceci est la coutume.
393
TCPICI com., n° 284/2543 (2000), Bangkok Bank c. Viboolthani Tower, The Intellectual Property and
International Trade Law Forum Journal, Special Issue, 2000, p. 582-590. Le tribunal a mis l’accent sur
l’exception d’ordre public selon l’article 151 en estimant : « Un accord des parties d’appliquer à la demande
d’ouverture la Standby L/C les RUU 500 de la CCI, n’est pas contraire à l’ordre public et les bonnes mœurs du
people, par conséquent il est valable conforme à l’article 151 du Code civil et commercial ».
394
Cass. com., 14 octobre 1981, Sté Discount Bank, D. 1982, p. 301, note M. Vasseur.
395
Cette jurisprudence a été affirmée dans Cass. com., 7 octobre 1987, Sté Marseillaise de crédit, JCP (E)
1988, 15102, obs. J. Stoufflet.

155
leur contrat. Les parties peuvent par ailleurs accorder de déroger certains articles de ces
règles.

189. Conclusion du paragraphe. Il nous convient d’observer la pratique d’application de


la lex mercatoria vers la statistique de la Chambre de commerce internationale sur la loi
396
choisie par des parties .

Source : Chambre de commerce international, Rapport statistique 2003-2009.


Le nombre de parties qui n’ont choisi aucune loi applicable étaient plus grand que
celles qui ont opté pour la loi a-nationale. On ne peut pas interpréter cela comme un choix
négatif qui permet à l’arbitre d’écarter toute loi nationale en faveur de règles de droit a-
nationales. Autrement dit, le silence des parties est parfois interprété comme un signe de s’en

396
On trouve que selon les données statistiques enregistrées par les institutions arbitrales indiquent, en 2003,
que 80,4% des contrats stipulaient une loi nationale comme droit applicable et il n’y avait que huit contrats
insérés la clause d’application de règles ou principes autre que la loi étatique (Chambre de commerce
international, « Rapport statistique 2003 », Bulletin de la Cour internationale d’arbitrage de la CCI, vol.15 n°1,
1er semestre, 2004, p.7). Les chiffres semblaient se maintenir en 2004, 79,1% des cas les parties ont choisi la loi
nationale applicable au contrat. Seulement 1,3% ont opté pour des règles autres que la loi nationale (Chambre de
commerce international, « Rapport statistique 2004 », Bulletin, vol.16 n°1, 1er semestre, 2005, p.5). En 2005
79,3% ont choisi la loi nationale, alors que le reste une autre règle que la loi étatique telle que la Convention des
Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises, les principes généraux d'équité, le droit
international, le droit commercial international et la Convention de La Haye de 1978 sur la loi applicable aux
contrats d'intermédiaires et à la représentation (Chambre de commerce international, « Rapport statistique
2005 », Bulletin, vol.17 n°1, 1er semestre, 2006, p.5) Au cours d’année 2006, 2% des affaires enregistrées
avaient opté des règles autres que la loi d’un État dont 82,7% des cas les parties ont choisi la loi nationale
applicable au fond du litige (Chambre de commerce international, « Rapport statistique 2006 », Bulletin, vol.18
n°1, 1er semestre, 2007, p.5). En 2007, 79,8% des contrats litigieux ont été soumis à l’arbitrage parmi lesquels
les parties avaient précisé le droit applicable au fond. Dans tous les contrats, elles avaient choisi les droits
nationaux applicables. Seuls trois contrats optent pour l’application des règles autre que la loi nationale tels que
les Principes d’UNIDROIT, la CVIM et le droit de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des
affaires (OHADA) (Chambre de commerce international, « Rapport statistique 2007 », Bulletin, vol.19, n°1, 1er
semestre, 2008, p.5). En 2008, les parties ont choisi la loi nationale applicable aux 84% des contrats. Les parties
ont opté pour des règles de droit autre que des lois nationales 3% des contrats.

156
remettre à l’arbitre de choisir le droit national plus approprié.
Les tribunaux nationaux estiment qu’un choix de règles de droit effectué par les
parties constitue une référence à un ensemble de règles réputées incorporées dans le contrat
ou l’incorporation par référence. Cette méthode sera mise en œuvre seulement dans la mesure
où elle ne déroge pas aux dispositions impératives de la loi applicable au contrat. Alors que la
règle de conflit uniforme telle que la Convention de Rome de 1980 restait silencieuse sur ce
point, mais il faut souligner que la proposition initiale de la Commission sur Rome I tendait à
renforcer l’autonomie de la volonté des parties en autorisant celles-ci à choisir un droit non
étatique autre que la loi nationale. Il est à noter également que parmi la majorité d’États
397
membres au sein du Conseil, la France s’oppose aussi à cette proposition . Finalement le
choix de droit a-national est ainsi admis par le Règlement CE n°593/2008 dans son
Considérant n°13 qui n’interdit pas aux parties d’intégrer par référence dans leur contrat un
droit non étatique. Alors qu’en matière de l’arbitrage international, les arbitres peuvent dans
certains cas appliquer directement aux litiges la lex mercatoria même au silence des parties
sur la loi applicable. Par exemple le cas où il y a dans un contrat plusieurs lieux de
conclusions ou d’exécutions, ceci peut conduire l’arbitre de considérer que la lex mercatoria
est formée de règles objectives dont sa compétence ne relève pas de référence expressément
398
des contractants dans ce cas .
Certes, on ne peut pas conclure que le statut juridique de la lex mercatoria est
universellement reconnu, même si la Cour de cassation d’Italie a affirmé qu’il relève d’un
ordre juridique spécifique propre la lex mercatoria, qui est d’ailleurs un ensemble de règles de
399
droit. De même que la décision de la Cour d’appel de Vienne, dans l’affaire Norsolor , qui
a estimé que la lex mercatoria est du « droit mondial d’une validité incertaine ». Les
tribunaux français et thaïlandais n’admettent jamais la juridicité de la lex mercatoria. Il faut
toujours attendre l’évolution de la doctrine et de la jurisprudence internationale sur la
définition et la teneur de la lex mercatoria.
Il est vrai que d’après les chiffres de la CCI, par rapport au nombre d’affaires
soumises à l’arbitrage de la CCI, il n’y a pas très nombreux de litiges que les parties ont
choisi les règles transnationales applicables à leur litige. Pourtant, il ne faut pas oublier qu’en

397
Le Sénat, « Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la loi applicable aux
obligations contractuelles (Rome I) », 3 déc. 2007. Disponible sur le site http://www.senat.fr/ue/pac/E3039.html
398
B. Goldman, « La lex mercatoria dans les contrats et l’abitrage… », op.cit., p. 482.
399
Rev. arb. 1983, p. 383 ; JDI.1981.922, obs. Y. Derains.

157
réalité il y a de nombreux de sentence rendus par d’autres tribunaux dans le monde entier qui
ne sont pas enregistrés.

§2 : Principes généraux du commerce international.

190. Le commerce international s’est développé dans un contexte transnational comme l’on
a souligné que ceci a besoin d’un droit apte à créer le cadre juridique dont il est nécessaire de
se développer. Ce qui nous intéresse à ce stade est les principes généraux qui jouent un rôle
important parmi les règles transnationales. On sait que dans un droit en formation lequel son
contenu est incertain, les principes généraux peuvent être formulés et retirés avant les règles
concrétisant. Alors que dans le cas de droit étatique, il a un contenu fermement élaboré. On
étudiera ensuite les deux Principes : les Principes UNIDROIT et les Principes de droit
européen des contrats qui sont fondamentalement nées du même besoin ; afin d’uniformiser
les règles de droit applicables aux contrats. Cependant on constate que les règles
transnationales envisagent toujours le problème de légitimité car leur origine est dépourvue de
support étatique. Alors, dans le cas de codification des règles transnationales, ceci est une
technique qui permettrait d’avoir un fonds antérieur, un organisme rédacteur, c’est l’avantage
d’avoir sa propre légitimité.

191. Force est de reconnaître que la nature des contrats commerciaux internationaux est
différente de celle du contrat purement interne, il convient de réglementer les rapports entre
des commerçants internationaux de manière à prendre en compte les particularités et les
exigences de ces relations plutôt que d’appliquer uniquement la loi étatique. Il arrive que
certains États avancent que la loi étatique ait été élaborée pour régir la situation interne et
internationale. Mais il faut rappeler qu’il y a d’autres États qui n’ont pas les dispositions
propres aux contrats internationaux, par exemple la Thaïlande... Dès lors il faut concilier les
besoins de règles appropriées aux relations commerciales internationales avec la nécessité de
prévisibilité et de certitude dans la règlementation de ces rapports.

158
A. Principes UNIDROIT, principes uniformes pour les contrats internationaux.

400
192. Les Principes UNIDROIT sont, à première vue, des principes généraux codifiés.
Même si l’application des Principes UNIDROIT n’est pas encore considérée comme
universelle, ils ont quand même acquis une autorité indéniable. M. Fouchard soutenait qu’il
existe, dans l’arbitrage commercial international et dans des domaines plus variés, les
principes généraux relatifs à la conclusion, l’interprétation et l’exécution du contrat auxquels
se référaient les arbitres pour régler les litiges. Cet auteur a affirmé que ceux-ci sont de droit
commun des Nations, car il y avait des droits nationaux en concurrence adoptaient la même
401
attitude sur un point litigieux . Force est de constater que, d’après cet auteur, la portée de
ces principes est universelle car ceux-ci ont pour but d’éviter de prendre parti sur la loi
402
nationale compétente .

193. Comme on le sait, les Principes sont applicables lorsque les parties y ont fait référence
pour régir leur contrat ou ont accepté que leur contrat soit régi par les Principes généraux du
droit, ou la lex mercatoria ou autre formule similaire. Ils peuvent être appliqués lorsque les
parties n’ont pas choisi une loi particulière devant régir leur contrat. Ces principes proposent
aux opérateurs économiques internationaux une codification de règles traitant des questions
qui se posent le plus souvent dans les relations commerciales contractuelles y compris « des
403
règles organisées de manière cohérente et systématique ». Nous partageons l’avis de M.
Bernardini selon lequel il ne faut pas confondre les Principes UNIDROIT et la lex mercatoria,
bien que le préambule indique que les Principes peuvent être appliqués lorsque les parties
acceptent que leur contrat soit régi par la lex mercatoria, ce fait ne permet pas de les assimiler
404
à la lex mercatoria, puisqu’ils ont des caractéristiques tout à fait distinctes .

400
Chaque article constitue son propre commentaire, définit sa portée. Ces Principes contribuent à surmonter
l’imprévisibilité et les incertitudes résultant des règles insuffisamment définies qui sont considérées comme
constituant la lex mercatoria et ils écartent les raisons selon lesquelles s’appuient les critiques faites aux règles
non étatiques. Cependant les Principes UNIDROIT ne prennent pas position sur certaines questions telles que la
capacité des contractantes qui relève de la loi personnelle des contractantes désignée par la règle de conflits de
lois appliquée par l’arbitre ou le juge.
401
Ph. Fouchard, L’arbitrage commercial international, Paris : Dolloz, 1965, p. 401 et s. et p. 423 et s.
402
Id., p. 426 et s.
403
Sentence CCI n° 7110, (1999) 10 :2 Bull. CCI 40, p. 51.
404
P. Bernardini, « Arbitrage international et règles de droit a-nationales », Bulletin de la Cour international
d’arbitrage de la CCI, vol.15, n°2, 2e semestre, 2004, p. 73.

159
194. Reste à savoir si les Principes UNIDROIT sont-ils la lex mercatoria codifiée ? Il y a
405
diverses opinions sur ce point. Certains juristes affirment de manière positive, après avoir
attendu pendant les longues années, en raison du niveau d’attention et de respect vers la
pratique internationale et les sentences arbitrales dans le monde entier. Pour M. Mayer, les
Principes UNIDROIT pourraient devenir une partie de la lex mercatoria s’ils étaient référés
aux opérateurs du commerce international, aux contrats internationaux ou aux sentences
406
arbitrales . Il constate que l’on pourrait mieux considérer les Principes UNIDROIT comme
une sorte de version écrite des « principes généraux du droit » qui sont autre pilier de la lex
mercatoria. M. J.-M. Jacquet a tenu le même constat en affirmant que « les Principes puisent
manifestement leur substance dans des règles issues de différents droits nationaux,
407
jurisprudences nationales et surtout dans lex mercatoria » . Par ailleurs, on peut dire que
l’auteur admet que les Principes peuvent être considérés comme des règles transnationales
résultant d’un processus de codification.

195. La différence entre les Principes et la lex mercatoria réside en effet dans leur origine ;
les Principes UNIDROIT expriment des propositions d’origine doctrinale alors que la lex
408
mercatoria énonce des règles pratiquées par la communauté économique internationale .

D’après ces arguments, les Principes UNIDROIT ne sont que l’une des sources de la
lex mercatoria. D’ailleurs la codification de la lex mercatoria, de même que celle des
409
coutumes, « dispense de recherches longues, hasardeuses et laisse place à l’arbitraire » .
Cet auteur ne partage pas l’idée proposée par M. B. Goldman selon laquelle « la lex
mercatoria est un ordre juridique de la société des marchands internationaux, par conséquent
tout contrat international est nécessairement soumis à la lex mercatoria en tant que droit de
l’ordre juridique unique dans lequel il s’inscrit ». Pour M. P. Mayer, « il est beaucoup plus
difficile de suggérer que tout contrat international est nécessairement soumis aux Principes

405
G. Busseuil, « L’avenir des Principes UNIDROIT relatifs aux contrats du commerce international et des
Principes européen du droit du contrat: du droit mou au droit dur ? », n° 2. Disponible sur le site
www.glose.org/CEDCACE4.pdf
406
P. Mayer, « Principes UNIDROIT et lex mercatoria », in L’actualité de la pensée de Berthold Goldman,
Droit commercial international et européen, LGDJ, 2004, p. 31-36, spéc. p. 32 et s. Il affirme en citant le
Préambule : « Ils peuvent s’appliquer (…) lorsque les parties acceptent que leur contrat soit régi par la lex
mercatoria ».
407
J.-M. Jacquet, Droit du commerce international, op.cit., n° 87.
408
G. Busseuil, « L’avenir des Principes UNIDROIT… », op.cit., n° 2.
409
P. Mayer, « Principes UNIDROIT et lex mercatoria », op.cit., p. 34.

160
UNIDROIT, des règles élaborés par un cénacle de professeurs et qui n’ont pas d’autorité
410
propre » . De surcroît, les Principes UNIDROIT sont très modestes quant à leur
applicabilité. Pour ces raisons, il est défendable si l’on conçoit les Principes UNIDROIT
comme « la liste des règles » de la lex mercatoria, car il risque d’entraîner les conflits de
listes. Cependant cette inquiétude ne poserait pas à l’égard des Principes européens de droit
des contrats qui ne visent pas spécifiquement les contrats internationaux et leur vocation est
faible à leur égard.

196. On constate que les Principes émanent d’une élaboration privée en dehors d’une
mission de type législatif confiée par l’autorité compétente, l’importance de la doctrine dans
la composition du groupe de travail, l’objectif de l’unification de législations autonomes et
411
diversifiées et l’adoption du texte par les institutions compétentes . Est-ce que l’on peut
assimiler les Principes UNIDROIT comme « Restatements » américains ? Cette assimilation
est très critiquée en raison de la grande différence de technique d’élaboration des
412
Restatements, par le fait qu’il y a d’absence de force obligatoire des textes élaborés .
Cependant M. M. Bonell soutient que les Principes UNIDROIT est un Restatement du droit
des contrats à niveau international. Car ils ont pour l’objectif de réexposer le droit des contrats
413
internationaux déjà existé et non plus d’uniformiser le droit national des États . A notre

410
Ibid.
411
Ph. Kahn, « Vers l’institutionnalisation de la lex mercatoria : A propos des principes Unidroit relatifs aux
contrats du commerce international », in Liber Amicorum Commission Droit et Vie des Affaires, 40ème
Anniversaire (1957-1997), Bruxelles : Bruylant, 1998, p. 129 ; V. également M. J. Bonell, « The UNIDROIT
Principles of International Commercial Contracts and CISG : Alternatives or Complementary Instruments? »,
Rev. dr. unif.1996.26 ; « The UNIDROIT Principles of International Commercial Contracts and the Principles of
European Contract Law : Similar Rules for the Same Purposes ? », Rev. dr. unif.1996.229.
412
Pour les Restatements, ce sont les législateurs des États qui adoptent ou modifient le texte proposé par les
professeurs, les juges et les juristes. Ils sont considérés comme des sources secondaires qui cherchent à réexposer
les règles de droit constituées de common law dans chaque domaine. Par ailleurs, certains États ont adopté dans
leur droit domestique des Sections de Restatements. En effet Restatements n’ont pas la force obligatoire mais il
est à noter qu’ils sont considérés comme sources de Black Letter Law ou principles et ont été fréquemment cités
par les juges dans leurs litiges. Alors que l’effectivité des Principes UNIDROIT est plus délicate à déterminer et
on voit dans la Préambule qu’ « Ils peuvent s’appliquer (…) lorsque les parties acceptent que leur contrat soit
régi par la lex mercatoria ». Quand bien même la méthode de rédaction ou de donner explications à certaines
issues pour clarifier leurs origines peuvent assimiler les uns aux autres, c’est pourquoi certains auteurs hésitent
de conclure que l’objectif des rédacteurs des Principes UNIDROIT était d’écrire une sorte de Restatement. Car il
est plutôt de poser les règles qui leur paraissent bonnes. (V. Sentence CCI rendue dans l’affaire n° 9029 (1998),
Bull. CCI. 1999, vol.10/2, p. 91).
413
M. J. Bonell, « The UNIDROIT Principles of International Commercial Contracts and CISG: Alternatives or
Complementary Instruments? », Rev. dr. unif.1996.26., spéc. p. 30.

161
avis, hormis le problème de l’autorité qui a adopté ce texte, il semble que d’autres éléments
constituant les Principes et ceux des Restatements soient assimilés.

197. On peut estimer que le rôle et l’efficacité des Principes dans les sentences arbitrales
sont la meilleure preuve, pourtant l’application de ces règles du juge étatique n’est pas très
active. Parmi le très peu d’usage du juge, on a trouvé une décision de la juridiction française
dans laquelle la Cour a fait référence aux Principes UNIDROIT. Il s’agit de l’arrêt de la Cour
414
d’appel de Grenoble du 24 janvier 1996 , qui a été rendu à propos d’une clause de
responsabilité. La Cour a mentionné deux Principes à savoir la primauté de la clause
contractuelle sur une clause type en cas de contradiction et l’interdiction d’une clause
415
ambiguë contre celui qui l’a proposé... Ainsi que l’arrêt du 23 octobre 1996 rendu par la
même Cour qui a fait référence aux Principes et l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 5 mars
416
1998 .

198. Selon les statistiques rapportées par l’UNIDROIT, on trouve que la référence aux
417
Principes devant le juge était « en dent de scie » . En effet la référence aux Principes
UNIDROIT semble plus couramment répandue dans l’arbitrage international plutôt que
devant la juridiction étatique. Ceci n’est pas étonnant, car il faut rappeler que les Principes
sont d’origine des principes généraux utilisés par les arbitres. Il se révèle d’une façon
particulièrement nette que les contrats internationaux peuvent échapper au moins
partiellement au droit des États. Dans les contrats commerciaux internationaux, les parties
contractantes ont été normalement suggérées de choisir la loi applicable au contrat afin de
minimiser les problèmes dans l’avenir.

414
CA Grenoble, 24 janvier 1996, JDI.1997.115, note Ph. Kahn ; Rev. arb. 1997.87.
415
CA Grenoble, 23 octobre 1996, Sté Teso Ten Elsen GmbH, JDI.1998.125, note A. Huet.
416
CA Paris, 1er Civ., 5 mars 1998, Sté Mixte Franco-Kazakh CISTM, Rev.arb.1999.86.
417
La statistique nous démontre qu’au cours de l’année 1994, première année de l’UNIDROIT, les litiges
portant devant la juridiction étatique lesquels ont fait référence aux Principes UNIDROIT a touché 66,7%, or,
l’année suivante il ne reste que 16,7% et 12,5% en 1996. Dans l’année 2000 l’application des Principes devant la
juridiction étatique était le plus bas 7,7%. Malgré que la tendance d’augmentation au cours des années 2001 à
2002, moins de 50% de litiges ont fait référence aux Principes. C'est-à-dire que la juridiction arbitrale a pris à
son compte une grande part de l’application des Principes. La tendance d’application des Principes a diminué en
2007 à 2008. A l’inverse, elle a augmenté dans les années 2007 et 2008, mais a augmenté devant le juge étatique
en 2009 et 2010.

162
Source : UNILEX on UNIDROIT Principles, 1994-2010.

199. En Thaïlande avant l’année 2002, la Loi de 1987 sur l’arbitrage ne contient aucune
disposition spécifique sur la matière dont les arbitres déterminent la loi applicable au fond.
Cependant la nouvelle Loi de 2002 sur l’arbitrage stipule dans le sens que l’arbitre devra
trancher le litige conformément au droit choisi par les parties.

418
B. Principes de droit européen des contrats .

418
Les Principes de droit européen des contrats sont-ils une œuvre doctrinale financée par la Commission
européenne qui a exprimé son souhait d’harmoniser des États membres de l’Union européenne dans le domaine
des contrats internationaux relatif au commerce transnational, en raison de l’inefficacité du marché intérieur, les
divergences des règles impératives des États membres sur les transactions transfrontières, la diversité des
conditions générales de vente et même l’accès difficile des consommateurs aux transactions intra-
communautaire. Suite à ces problèmes, une autre explication de l’aspect politique semble claire sur ce sujet. On
peut observer qu’il existe la diversité entre le système des droits nationaux des États membres de la Commission
Lando. La question est de savoir de prime abord s’il est possible de construire un fonds de valeurs communes
qui, dans le respect de la diversité, auraient vocation à constituer les fondations d’un droit des contrats en
Europe. Et si les Principes européens étaient compatibles avec la réalisation d’une identité contractuelle
européenne. Il est vrai qu’il existe par ailleurs la disparité des mentalités des membres de la commission, la
pluralité de leurs modes de raisonnement et la différence dans leurs façons d’appréhender le concept même de
contrat. Les Principes européens énoncent des règles de fond lesquels sont composés de trois grands piliers tels
que ; liberté, loyauté et sécurité. D’après ces Principes, on constate que la conception du contrat est considérée
comme « le marché », et les préoccupations d’efficacité économique qui ont animé d’ailleurs les rédacteurs des
Principes européens. Ces principes exprimés et déclinés de façon souple et flexible dans le texte afin que les
États membres puissent être transposés et absorbés ce texte sans que ceux-ci perdent leur spécificité ou
renoncent à leur propre identité. Bien que les deux principes ne soient pas des instruments contraignants, on
observe cependant autre caractéristique commune de ces deux principes qu’ils sont des moyens non législatifs
d’unification ou d’harmonisation du droit et on peut dire du droit des contrats. (UNIDROIT, « Principes relatifs
aux contrats du commerce international », Rome, Institut international pour l’unification du droit privé, 1994,
viii.).

163
200. Ainsi que les Principes UNIDROIT, les Principes de droit européen des contrats (ci-
après les Principes européens) sont constitués de règles avec le caractère systémique qui a été
mis en avant pour justifier leur désignation par le Règlement « Rome I ». A la différence sur
leurs champs d’application spatiale car les Principes UNIDROIT constituent les règles
générales applicables aux contrats commerciaux à caractère international dans le monde entier
entre des commerçants et les professionnels. On constate que le champ d’application
territorial de ces Principes est universel. Alors que les Principes européens gouvernent tous
les contrats y compris les contrats entre les professionnels et les consommateurs d’une part,
les relations internationales ou intra-communautaires comme dans les relations purement
internes d’autre part. C'est-à-dire la vocation des Principes européens est plus ciblée que les
419
Principes UNIDROIT car les Principes européens visent le Marché unique européen . Les
Principes européens recueillis, de la même façon que les Principes UNIDROIT, de
nombreuses règles issues de la lex mercatoria, comme indique dans l’article 1.101 (3) qu’ils
peuvent être appliqués « lorsque les parties sont convenues que leur contrat serait régi par
les principes généraux du droit, la lex mercatoria ou une expression similaire ». Par ailleurs,
les Principes européens ont vocation à constituer progressivement la trame des contrats
internationaux et ayant trouvé leur expression également dans la jurisprudence arbitrale
internationale.

201. La question peut se demander si la force obligatoire des Principes UNIDROIT et des
Principes européens est reconnue quid des autres projets doctrinaux ? Quels critères peut-on
considérer pour désigner d’autres initiatives privées comme loi applicable ? Il existe deux
critères envisagés ; le premier est l’idée selon laquelle les principes ou règles de droit matériel
doivent être suffisamment précis, si on adopte cette idée, la lex mercatoria étant écartée en
raison de sa prétendue imprécise. Or, pour que le contenu des principes ou les règles de droit
soient certains, en utilisant le terme « codifications privées », il semble que ceci nous amène à
rejeter de tout droit « spontané », c'est-à-dire que seul un droit codifié serait ainsi accepté
comme tel. Mais il faut rappeler que la technique de codification aide à faciliter l’admission
de légitimité de règles transnationales. Le second critère consiste à la « reconnaissance » du
droit non étatique par la communauté internationale des marchands. Ce critère semble être
critiqué en raison de sa difficulté à régir, car on peut se demander qui décidera de cette

419
Cf. M. J. Bonell, « The UNIDROIT Principles of International Commercial Contracts and the Principles of
European Contract Law… », op.cit., p. 238 et s.

164
420
reconnaissance . En effet le second critère semble plus raisonnable, réaliste et plus adapté
à la situation envisagée, car la reconnaissance pourrait paraître à travers la sentence rendue
par les tribunaux arbitraux des États et par la Cour internationale d’arbitrage de la CCI.
De surcroît l’autonomie de la volonté des contractantes d’appliquer à leur contrat ces
Principes est une preuve en soi, une preuve que ceux-ci sont applicables en raison de leur
reconnaissance.

421
202. Vers la théorie de codification doctrinale. D’après M. Busseuil , les Principes
européens appartiennent à la sphère du droit en raison de son élaboration systématiquement
sous la forme d’un code de portée générale ayant vocation à l’application dans les législations
des États. Cette proposition se fond sur la même base que les Principes UNIDROIT que l’on a
422
déjà étudiée. Plus précisément, ce droit est qualifié « mou » dans la mesure où il n’a pas la
423
force obligatoire ; il est seulement proposé et non imposé . De ce point de vue, on peut
penser à la soft law de droit anglo-américain. Pour ces juristes, le caractère non obligatoire
des Principes se présentent dans l’article 1.101 (2) et (3), et ceci peut être classé dans la
catégorie de droit mou. En tant que codifications doctrinales, les Principes sont certainement
qualifiés de doctrine. On sait que la doctrine est la plus faible des sources du droit, mais on
peut admettre qu’elle a en même temps le point fort dans la mesure où elle constitue sa propre
qualité car elle ne tient pas son pouvoir ni son existence d’une norme extérieure à elle. Par
ailleurs, la doctrine éclaire les autres sources et leur sert de révélateur lorsqu’elle rapporte
424
celles-ci à l’ensemble du droit positif .

203. Dans l’ombre de la Convention de Rome de 1980, le choix des Principes codifiés
opéré par les parties dans leur contrat a été traité comme l’absence de choix de la loi
applicable. Car la Convention n’admet que le choix de droit étatique. Par conséquent, un tel
contrat était régi par l’article 4 de cette Convention. Si l’article 4 désigne la loi française, le

420
S. Nadaud, Codifier le droit civil européen, préf. d’Éric Garaud, Bruxelles : Larcier, 2008, p. 355.
421
G. Busseuil, « L’avenir des Principes UNIDROIT… », op.cit., n° 3.
422
Cf. C. Thibierge, « Le droit souple, Réflexion sur les textures du droit », RTD civ.2003.599 : l’auteur a
proposé qu’il existe le droit souple qui englobe le droit flou défini par la souplesse de son contenu ; le droit doux
qui n’a pas ou a peu de force obligatoire ; et le droit mou qui n’a pas ou a moins de force contraignante.
423
M. Fontaine, « Du droit « mou »...impératif ? », in Mél. Barthélémy MERCADAL, Paris : Lefebvre, 2002,
p.159 et s.
424
P. Jestaz et C. Jamin, La doctrine, Dalloz, 2004, p. 6.

165
425
juge appliquera ces Principes à travers l’article 1135 du Code civil . Dans ce cas là, les
codifications doctrinales sont incorporées matériellement au contrat comme une clause
contractuelle. Il nous convient de citer M. Beraudo qui a donné l’opinion favorable au libre
choix de codifications privées lors du projet de transformation de la Convention de Rome,
d’après lui, c’était « l’occasion à saisir pour abandonner l’interdiction du contrat sans loi
exprimée par la phrase qui ouvre l’article 3 (de la Convention) et d’autoriser (…) la
désignation des principes élaborés par les organisations internationales, donc, pour l’instant
426
les Principes UNIDROIT » . Finalement le règlement « Rome I » ne permet pas
directement aux parties de choisir ces Principes en tant que loi applicable au contrat. Comme
le dit M. F. Marrella que le Règlement « consacre une vision néo-conservatrice qui s’accorde
mal non seulement avec les réalités de la mondialisation de l’économie mais également avec
la vision plus ouverte qui a déjà largement produit son influence sur la législation moderne
427
ayant trait à l’arbitrage commercial international (…) » . Certains auteurs soutiennent que
428
le choix de tels ou tels Principes doit être traité au même titre qu’une loi étatique .
Rappelons que le considérant 13 du règlement permet aux parties d’intégrer par référence
dans leur contrat un droit non étatique et que l’arrêt de la CJUE a déjà admis la possibilité
d’appliquer les Incoterms pour régler le problème litigieux en question (v. supra n° 155).

204. Il reste à savoir si on pouvait faire référence aux Principes en tant que lex contractus.
Comme on a vu, le choix de ces codifications doctrinales dans un contrat peut amener celles-
ci dans le rang du statut du « droit dur » grâce à l’effet d’une clause contractuelle. C’est en
effet le considérant 14 du règlement Rome I qui permet de dire que le droit mou (les

425
L’article 1135 stipule que : « Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à
toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature ».
426
J.-P. Beraudo, « La modernisation et l’harmonisation du droit des contrats : une perspective européenne »,
in Actes du Congrés « Harmonisation mondiale du droit privé et intégration économique régionale », Rome 27-
28 septembre 2002, Rev. dr. unif. 2003.135.
427
F. Marrella, « Les nouveautés du Règlement européen (Rome I) relatif à la loi applicable aux obligations
contractuelles », Bull. de la Cour internationale d’arbitrage de la CCI, vol. 19, n° 1, 2008, p. 91-111, spéc. p.
94.
428
J.-P. Beraudo, « La modernisation et l’harmonisation du droit des contrats… », op.cit., p. 136 et s. ; K.
Boele-Woelki, « The Unidroit Principles of International Commercial and the Principles of European Contract
Law: how to apply them to international contracts », Uniform Law Review, 1996, n° 4, p. 652-678. ; B. Ancel,
« Auctoritate rationis, le droit savant du contrat international », in Clés pour le 20e siècle, Mél. de l’Université
Paris II Panthéon-Assas, 2000, p. 583-609 ; F. de LY, « Choice of Law Clauses », Unidroit Principlesof
International Commercial Contracts and Article 3 Rome Convention : the Lex mercatoria before Domestic
Courts or Arbitration Privilege ?, in Études offertes à B. Mercadal, éd. F. Lefebvre, Paris, 2002, p. 133-145.

166
Principes) peut devenir dur par la désignation des Principes comme un possible choix de loi
dans un règlement communautaire et c’est le dernier (Règlement Rome I) qui conférerait une
force contraignante aux Principes.
En effet, on peut dire que l’application de la lex mercatoria ou la lex mercatoria
codifié en tant que lex contractus a pour but de soutenir la conception de la lex comme ordre
juridique étatique. Rappelons que l’arbitre n’est pas obligé de soumettre le contrat à un tel ou
tel ordre juridique, alors que l’application de la lex mercatoria en tant que règles de droit
semble plus apte puisque la lex mercatoria constitue de l’ensemble de règles qui se sont
évoluées en dehors du cadre de droit étatique. Cependant en adoptant que le droit mou peut
devenir dur selon la législation communautaire, ceci signifie qu’en l’absence de choix de la
loi applicable, le juge devra aussi prendre en considération les Principes au même rang que les
lois étatiques.

205. La force obligatoire distincte du statut juridique. En ce qui concerne un souci de la


qualification du statut juridique des Principes européens. A vrai dire, il faut distinguer la
force obligatoire des Principes de leur statut juridique, car lorsque l’on accepte la désignation
par règle conflictuelle des Principes européens ou même les Principes UNIDROIT, force est
de constater que ces instruments deviennent « durs » par leur force obligatoire consacrée par
429
le règlement (Rome I) .

206. Conclusion du paragraphe. On peut conclure ici leur objectif commun qu’ils
entendent constituer des modèles pour les législateurs nationaux et internationaux, ils

429
V. Groupe d’étude sur la justice sociale en droit privé européen, « Manifeste pour une justice sociale en
droit européen des contrats », RTD civ. 2005, p.716. Suite à ces problèmes, une autre explication de l’aspect
politique semble claire sur ce sujet. On peut observer qu’il existe la diversité entre le système des droits
nationaux des États membres de la Commission Lando. La question est de savoir de prime abord s’il est possible
de construire un fonds de valeurs communes qui, dans le respect de la diversité, auraient vocation à constituer les
fondations d’un droit des contrats en Europe. Et si les Principes européens étaient compatibles avec la réalisation
d’une identité contractuelle européenne. Il est vrai qu’il existe par ailleurs la disparité des mentalités des
membres de la commission, la pluralité de leurs modes de raisonnement et la différence dans leurs façons
d’appréhender le concept même de contrat. Les Principes européens énoncent des règles de fond lesquels sont
composés de trois grands piliers tels que ; liberté, loyauté et sécurité. D’après ces Principes, on constate que la
conception du contrat est considérée comme « le marché », et les préoccupations d’efficacité économique qui ont
animé d’ailleurs les rédacteurs des Principes européens. Ces principes exprimés et déclinés de façon souple et
flexible dans le texte afin que les États membres puissent être transposés et absorbés ce texte sans que ceux-ci
perdent leur spécificité ou renoncent à leur propre identité. Bien que les deux principes ne soient pas des
instruments contraignants, on observe cependant autre caractéristique commune de ces deux principes qu’ils sont
des moyens non législatifs d’unification ou d’harmonisation du droit des contrats. (UNIDROIT, « Principes
relatifs aux contrats du commerce international », Rome, Institut international pour l’unification du droit privé,
1994, viii.).

167
s’annoncent également comme une formulation de la lex mercatoria. Afin de confirmer le
caractère substantiel de lex mercatoria laquelle a été absorbée par les Principes UNIDROIT et
les Principes européens, il convient de souligner ici une remarque de M. Paulsson sur le
contenu de la lex mercatoria issu des sentences arbitrales de la CCI, il a indiqué que « les
Principes en question ont été appliqués dans des arbitrages CCI sans référence au droit
430
national, constituant dès lors autant de règles matérielles de la lex mercatoria » .

430
I. Paulsson, « La lex mercatoria dans l’arbitrage CCI », Rev. arb. 1990, p. 79.

168
207. Conclusion du chapitre. La question du statut de la lex mercatoria et d’autres règles
de droit transnational est toujours délicate à tracer. De nos jours, le débat sur ce sujet n’arrive
pas encore à la conclusion. Parmi les positions diverses, la tendance est à rechercher non pas
son statut juridique mais il faut interroger à sa capacité de s’adapter aux litiges commerciaux
internationaux. Il semble qu’il n’y ait que des juristes qui intéressent à la juridicité de la lex
mercatoria. Alors que les commerçants, en revanche, ont l’habitude de choisir une telle règle
applicable aux contrats internationaux sans tenir compte à sa juridicité. De surcroît, la plupart
des commerçants respectent et déroulent leurs rapports conformément à ces règles de droit car
ils croient qu’elles ont une sanction sociale dans sa communauté ; un boycott commercial par
d’autres marchands. Nous ne sommes pas toute à fait d’accord sur le point que seul ensemble
de normes et règles créées par l’autorité étatique est le droit, il en résulte de la théorie
431
positivisme . Il faut rappeler que la conception de droit et la loi marchande existent-elles
avant une émergence de nationalisme ou le concept de souveraineté. Dès lors on peut dire que
le fruit de l’école positivisme selon lequel le droit est un ordre de l’État ne peut nous
432
convaincre . Quoi qu’il en soi, la lex mercatoria s’occupe la grande place en matière du
commerce international depuis longtemps, elle intervient dans la pratique arbitrale et on ne
peut pas nier son application devant les juridictions arbitrale et étatique.
Certes, un grand souci paraît sur le contenu incertain de la lex mercatoria, car pour
certains juristes il ne faut pas laisser la règle incertaine joue son rôle de droit. Le droit est un
ensemble de règles, prévisible et applicable généralement à toutes les personnes. Cependant
si l’on réfléchi dans un autre point de vue, on trouvera que le droit du commerce international
est un domaine spécial et qu’il y ait le droit incomplet en cours de développement. Comme
dit Prof. Berman « (Lex mercatoria) is not a complete legal system- it was never meant to be
433
completed » , il faut accepter son existence et la reconnaitre comme source de droit
434
coutumier transnational. Nous sommes d’accord avec M. Joe Verhoeven pour le fait que la

431
Cette théorie a beaucoup d’influence sur les enseignements dans les facultés thaïes en particulier la pensée
juridique de John Austin. Il croit que c’est la bonne définition de droit et il n’est pas logique de définir le droit
par une autre définition. On peut dire que la plupart des juristes thaïs sont des positivismes.
432
Cf. S. Limparangsri, « The Should-Be Roles of Lex mercatoria as a Source of Substantive Law in
International Commercial Arbitration », Thai Barrister Law Journal, vol. 58, 2002, p. 69-97. Le juge
Limparangsri a l’avis favorable à l’application de la lex mercatoria au titre subsidiaire pour combler la lacune
résultant du droit national applicable. Il pense aussi que la théorie positivisme est inopérante dans ce cas.
433
Cf. H. Berman, « The Law of International Commercial Transactions (Lex mercatoria) », 2 J. INT’L DISP
RESOL.235.1988.
434
Cf. J. Verhoeven, Droit international public, Bruxelles : Larcier, 2000, p. 19 et s.

169
souveraineté des États assure la maîtrise virtuelle de tous rapports humains, mais on ne voit
pas pourquoi l’existence du droit transnational est niée sur la seule base d’une idée de
souveraineté. D’ailleurs la pratique confirme que les États ne sont pas en mesure de « tout »
réglementer.

170
208. Conclusion du Titre. Le principe de l’autonomie de la volonté est assuré aux parties
contractantes. Certes, les contractants ont choisi souvent la loi du for mais dans plusieurs cas,
au contraire, ils ont opté pour le droit étranger. L’invocation du caractère d’extranéité du litige
aussi bien que la charge de preuve de tel droit fait obstacle, en pratique, à son application
notamment en Thaïlande, alors que la jurisprudence française devient de plus en plus
favorable à l’application de la loi étrangère en soulignant : la distinction entre la disponibilité
et l’indisponibilité des droits des parties. En Thaïlande, le texte de loi fait peser la charge de la
preuve sur la partie qui a invoqué l’application de la loi étrangère dans toutes les matières
sans aucune distinction. La liberté consacrée aux contractants ne s’arrête pas là. On sait qu’en
matière du commerce international le choix de règles de droit a-national est également
possible. Même pour la Cour de Luxembourg qui admet aussi l’application des Incoterms
pour déterminer le lieu d’exécution du contrat selon Bruxelles I. C'est-à-dire que les règles
d’origine a-national voire coutumière pourraient éventuellement trouver place dans le cadre
du règlement Rome I par l’interprétation de la CJUE.
En l’absence de choix, la recherche de volonté des parties contractantes a été
consacrée dans toutes les règles conflictuelles apparues dans les ordres juridiques du droit
commun et européen aussi que nous allons le démontrer dans le deuxième titre.

171
172
Titre Deuxième

LOI APPLICABLE EN L’ABSENCE DE CHOIX.

209. La liberté de se contracter et de choisir la loi applicable en matière du contrat est


admise depuis bien longtemps. Force est de constater que pour déterminer la loi applicable au
contrat, dans la plupart des règles de conflit de lois ou même des instruments internationaux
portant sur la règle de conflit, la volonté des parties est placée au premier rang de tous les
critères.
Nous avons précédemment étudié le principe d’autonomie de la volonté et son rôle
remarquable en droit international privé des contrats. Dans la plupart des cas les parties
contractantes, pour une raison ou pour autre, n’ont pas désigné la loi applicable au moment de
conclure leur contrat. Dans le cas où ni le choix exprès, ni le choix tacite n’a été exprimé,
quelle loi doit-on appliquer ? Dans cette hypothèse, il semble qu’une solution subsidiaire est
indispensable. En effet il s’agit de la détermination de la loi applicable au cas de l’absence de
choix des parties qui donne lieu à des réflexions sur la méthode conflictuelle ainsi que sur des
méthodes de rattachement classiques.

210. Lorsque les parties contractantes n’ont pas procédé le choix de la loi applicable au
contrat, il appartient alors au juge de la faire en recourant à la règle de conflit de lois. Il en
résulte de la règle de conflit bilatérale que la loi désignée par celle-ci peut être la loi autre que
celle du for. Mais le problème de non application de la règle de conflit par le juge est souvent
arrivé devant les juges thaïs. Dans le chapitre précédent, certains problèmes de la loi étrangère
ont été analysés, cependant il convient d’illustrer d’autres problèmes ayant la possibilité de se
poser dans ce contexte présent.

211. Les différentes solutions se présentent à travers les deux pôles de méthodes
conflictuelles ; d’une part, un rattachement unique retenu comme ayant un caractère impératif,
d’autre part, l’adoption de certains rattachements en fonction de l’estimation des intérêts des
parties ; c’est la tendance de « la hiérarchisation des rattachements » qui est affirmée en droit
435 436
international privé contemporain . D’après M. B. Audit , il semble que chaque contrat est

435
J. Foyer, Les vicissitudes contemporaines de la règle de conflit de lois, Clés pour le siècle, Université
Panthéon-Assas Paris II, Paris : Dalloz, 2000, pp. 147-175.

173
examiné compte tenu de sa propre économie, en raison de l’existence des différentes
approches retenues des droits nationaux, telles que : groupement des points de contact
(Savigny), centre de gravité, localisation, ou proper law of contract qui représente une
méthode flexible. Pour la dernière approche, des rattachements stricts comme le lieu de
conclusion ou d’exécution font l’objet d’un rejet par la méthode de proper law.

212. Force est de constater que la méthode plus objective et plus sophistiquée résulte de
l’abandon de certains rattachements traditionnels ; nationalité, lieu de conclusion ou
d’exécution du contrat. Il s’agit du principe qui rattache le contrat à un pays avec lequel le
contrat présente les liens les plus étroits, autrement dit les plus significatifs, car ce principe
des liens les plus étroits permet de déterminer une loi autre que celle du lieu d’exécution qui
rend probablement la difficulté de déterminer ; un contrat peut être exécuté dans plusieurs
États. En effet la méthode objective n’est pas révolutionnaire radicalement par rapport au
principe d’autonomie de la volonté (subjective), étant donné qu’elle n’a pas créé un nouveau
rattachement mais plutôt une nouvelle conception sur la réalisation de rattachements
traditionnels, tel que le lieu de conclusion d’un contrat ou le lieu d’exécution d’un contrat.

213. Il est convenable d’étudier la portée de la Convention de Rome de 1980 qui a été
adoptée par le Règlement Rome I laquelle présente un système dualiste de la règle de conflit :
les deux instruments reposent sur un double pilier, le principe d’autonomie et la règle de
conflit à rattachement objectif pour compléter le cas où les parties n’ont pas opéré un choix de
la loi applicable au contrat.
Nous étudierons d’abord le recours aux rattachements traditionnels (Section I), puis le
principe de liens les plus étroits qui semblent être une clé importante de nos jours pour régler
le problème des rattachements traditionnels dans la plupart des systèmes juridiques
(Section II).

436
B. Audit, Droit international privé, op.cit., p. 663 et s.

174
Chapitre unique

Section I
Recours aux rattachements traditionnels.

214. Il nous semble indispensable de recourir aux thèses subjectiviste et objectiviste. Les
rattachements traditionnels semblent être appréciés bien longtemps en matière de contrat (§1).
Cependant lorsque le nouveau critère plus pratiqué a été introduit dans ce domaine en raison
de la faiblesse des rattachements traditionnels, on peut expliquer la nécessité de l’abandon de
certains rattachements traditionnels (§2).

§1 : Insuffisance relative des rattachements traditionnels.

215. Pour la détermination de la loi qui convient le mieux au contrat, on envisage ici les
deux systèmes concurrentiels et chacun entend découvrir la loi propre du contrat. Nous
présentons d’abord la réaction des subjectivistes face aux problèmes de l’absence de choix de
la loi applicable (A). Puis nous verrons celle des objectivistes (B).

A. L’absence de choix des parties à l’épreuve de la thèse subjectiviste.

216. Lorsque les parties n’ont pas opéré leur choix de la loi applicable, le juge doit
découvrir leur volonté. Certes, il n’est pas facile de rechercher la volonté tacite ou présumée,
l’interprétation du silence des parties est la tâche très délicate. Il ne serait rien d’inconcevable
de rechercher une volonté non seulement implicite mais également hypothétique.
Partant de l’autonomie de la volonté qui possède aussi le terrain dans le cas d’absence
de choix, au début du XXe siècle, la volonté des parties fut consacrée comme rattachement
principal dans la plupart des pays européens. En France, la Cour de cassation a admis pour la
première fois en 1910 dans l’arrêt American Trading que « la loi applicable aux contrats, soit
en ce qui concerne leur formation, soit quant à leurs effets et conditions, est celle que les
437
parties ont adoptée » . Pour les partisans de la thèse subjectiviste, la loi du lieu de
conclusion du contrat portait déjà en soi la loi d’autonomie. En effet la solution proposée par

437
Cass. civ. 5 décembre 1910, American Trading, S.1911.1.129, note Lyon-Caen ; JDI.1912.1156 ;
RCDIP.1911.395.

175
cette thèse se fonde sur la pensée que ni la loi de la nationalité commune des parties, ni celle
du lieu de l’exécution, ni celle du lieu de conclusion n’ont de titre exclusif à régir les contrats
internationaux, mais l’une d’elles a un tel effet en raison de la volonté des contractants qui
permet de dire qu’une telle loi convient le mieux au contrat. Selon cette thèse le rôle du juge
semble être modéré car l’opportunité d’apprécier quelle est la loi la plus apte au contrat est
relativement diminuée.
Cependant la soumission d’un contrat à la loi du lieu de conclusion entend aussi les
exceptions : soit les parties expriment leur volonté autrement ; soit il en résulte d’un ensemble
de présomptions ordonnées qu’elles avaient entendu que leur contrat fut soumis à une autre
438
loi . Au lieu de justifier l’application d’une loi donnée par l’idée de soumission volontaire,
la volonté des parties pouvait s’exprimer directement sur la question de la loi applicable. On
constate que la volonté des parties fut reconnue à ce stade comme le principe de rattachement
du contrat à une loi ce que nous avons vu déjà.

217. En Thaïlande, depuis 1938, la loi relative au conflit de lois a adopté l’autonomie de la
volonté des contractants comme le premier rattachement qui devrait être prise en
considération. Par ailleurs, à défaut de manifestation de volonté expresse, le droit
439
international privé thaï impose de rechercher « l’intention implicite » des parties . Les
frontières entre la volonté explicite et la volonté présumée sont délicates à tracer et il peut
conduire à opposer la loi choisie à celle qui est déterminée par le juge à l’égard de la situation.
Citons par exemple une décision de la Cour allemande qui a estimé que « la volonté dite
hypothétique signifie l’appréciation objective par les juges de la situation, appréciation qui,
440
à la différence de celle de la volonté réelle, relève de sa censure » . Reste à savoir si le
juge doit conformer la volonté des parties, soit chercher à faire apparaître si elles ne l’ont pas
exprimé expressément. Lorsque l’on demande la réaction des systèmes subjectivistes en cas
de l’absence de volonté explicite des partie, la réponse peut être dans le sens qu’il faut
rechercher la volonté implicite des parties, mais toujours à l’aide des éléments du contrat.

438
J.-M. Jacquet, Principe d’autonomie et contrats internationaux, Paris : Economica, 1983, préf. J.-M.
Bischoff, p. 181.
439
L’article 13 de la Loi relatif au conflit de lois B.E. 2481 มาตรา ๑๓ แห่ งพระราชบัญญัติว่าด้วยการขัดกันแห่ งกฎหมาย “ (...)
ในกรณี ที่ไม่อาจหยัง่ ทราบเจตนาชัดแจ้งหรื อโดยปริ ยายได้ (...) ”
440
Bundesgerichtshof, le 14 avril et le 13 novembre 1953, IPRspr.1953.150 et 153, cité par E. J. Cohn, « The
Objective Practice on the Proper Law of Contracts », ICLQ, vol. 6, 1957, p. 373-391 ; le 22 septembre 1971,
RCDIP.1972.621, note Mezger.

176
Certain partisan de théorie subjectiviste et de la recherche de volonté hypothétique, M. J.
Cohn, a contesté la décision du Bundesgerichthof. Il relève que cette juridiction était en
faveur de la méthode de rechercher la prestation caractéristique du contrat dans une affaire où
elle a appliqué la loi allemande au contrat. Il s’agissait, en l’espèce, d’un contrat par lequel
une société anglaise concédait à une maison allemande d’édition le droit d’exploiter en
Allemagne la traduction d’une œuvre anglaise. Cette exécution en Allemagne a été considérée
comme le lieu de la prestation caractéristique du contrat par la méthode de localisation. Cet
auteur a même reproché au juge de retenir un caractère du contrat comme décisif au lieu de se
fonder sur la considération de l’ensemble de circonstances tel que le contrat avait été conclu
en anglais, les paiements ayant été faits en monnaie anglaise et contenait des termes
juridiques anglais. Il admet que l’intention hypothétique des parties n’est pas facile à démêler,
mais les juges devraient la déterminer en appliquant les règles du bon sens et non pas
441
uniquement les règles de droit . A notre avis, les juges du fond ont envisagé en l’espèce le
problème de l’interprétation de la volonté des parties laquelle est nécessaire de prendre en
compte tous les éléments de faits pouvant donner la conclusion objective au juge.

218. La question peut se poser si les indices d’une volonté implicite n’avaient-ils pas
montré des révélateurs égaux à une localisation objective du contrat ? La thèse subjectiviste
modérée est soutenue par M. P. Mayer afin d’attacher la subjectiviste à la réalité. Il a montré
que, dans la théorie subjectiviste, la loi n’est pas incorporée dans le contrat, en revanche c’est
le contrat qui doit être soumis à la loi ; la volonté des parties ne joue qu’un rôle de déterminer
442
à quelle loi le contrat doit être soumis . Par ailleurs, il faut observer qu’une fois que les
parties ont procédé au choix de la loi applicable au contrat, ce choix se présente presque
443
toujours un lien entre l’économie du contrat et la loi en cause . L’admission de cette thèse
nous conduit à envisager toujours la tâche de reconstituer l’intention des contractants ce qui

441
E. J. Cohn, « The Objective Practice on the Proper Law of Contracts », op.cit., p. 373-391.
442
P. Mayer, Droit international privé, 10e éd., Paris : Montchrestien, 2010, n° 698. Cet auteur défend à
l’objection de MM. Von Bar et Pillet selon laquelle un accord de volonté n’a la juridicité que si une loi en
attache une. Qu’un accord de choisir la loi applicable soit efficace parce que la règle de conflit le prévoit e.g.
l’article 3 du Règlement Rome I selon lequel « le contrat est régi par la loi choisie par les parties » ; l’article 13
de la loi thaïe de 1938 relative au conflit de lois va dans le même sens. C'est-à-dire que le choix porte
directement sur la loi lequel conforme au subjectivisme et en même temps le contrat est régi par la loi dont la
volonté des parties n’est pas toute-puissante. Une autre objection est un souci de la faculté des parties de
soustraire les dispositions impératives qui les gêne en chosant la loi étrangère applicable même si la nature du
contrat est purement interne.
443
Ph. Kahn, note sous Cass. 1er civ., 29 juin 1971, Banque commerciale africaine, JDI.1972.51, spéc. p. 54.

177
est bien hypothétique. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un procédé objectif pour rechercher la loi
du contrat, c’est en fait de le localiser.

219. L’indice privilégié de la localisation du contrat sous contrôle du juge. La règle de


conflit de lois utilise toujours le principe d’autonomie comme critère de rattachement.
Cependant lorsque la loi choisie par les parties apparait manifestement contraire à l’économie
de l’opération et porte atteinte à une loi qui est objectivement proche, la loi désignée pourrait
444
être écartée par le juge au profit de la loi objectivement proche . C'est-à-dire que la loi
désignée par les parties devient un indice privilégié de la localisation du contrat, mais cet
indice doit être opéré sous le contrôle du juge. Prenons un arrêt célèbre, American
445
Trading , la Cour de cassation a appliqué la loi française au lieu de la loi américaine du lieu
de conclusion du contrat en estimant que la volonté des parties était d’exécuter ce contrat en
France, afin de valider la clause d’exonération de responsabilité du capitaine du navire insérée
dans un contrat de charte-partie. En effet cet arrêt est un symbole de l’affirmation de la loi
d’autonomie par la Cour de cassation pour la première fois. Mais, on ne peut pas dire que
cette décision concerne totalement la volonté des parties, car la méthode employée par le Cour
présentait aussi la localisation. Car on peut constater que la Cour a également appuyé sur le
fait que « la clause devait être exécutée sur le territoire français ».
Jusque là, force est de constater qu’en l’absence de choix par les contractants de la loi
applicable, l’autonomie de la volonté des parties est un rattachement souple mais important et
indispensable à tenir compte par le juge afin de rechercher la loi applicable au contrat. En
droit international privé thaï, la règle d’autonomie se présente en premier rang parmi d’autres
446
critères de déterminer la loi applicable . Cependant il faut admettre que, dans certaines
situations, même la volonté implicite des parties ne peut pas être trouvée. Comme l’affirma
447
M. Jacquet que ceci présente la lacune qui constitue une faiblesse grave de la thèse
subjectiviste. Là aussi, il nous convient de citer un formule d’origine germanique dite « la
volonté hypothétique » ainsi : « lorsque l’interprétation du contrat ne révèle pas une volonté
concordante des parties, il appartient au juge de rechercher ce que les parties auraient, eu

444
H. Batiffol, Traité…, n°573, p. 268 et s.
445
L’arrêt précité.
446
L’article 13 de la loi de 1938 relative au conflit de lois.
447
J.-M. Jacquet, Principe d’autonomie et contrats internationaux, op.cit., p. 184.

178
448
égard aux circonstances, raisonnablement voulu si la question avait été posée » . L’article
13 de la Loi de 1938 relative au conflit de lois thaïe a admis cette thèse. En effet M. Lewald a
accepté que la volonté des contractants ne constitue que le revêtement d’une solution à
449
laquelle le juge aboutit à une analyse objective des circonstances de la cause . C’est ce
que l’on étudiera par la suite.

B. L’absence de choix des parties à l’épreuve de la thèse objectiviste.

220. La critique objectiviste objecte la solution en cas de l’absence de volonté explicite


dont la recherche de volonté implicite des contractants est artificielle. Puisque c’est une
recherche de la volonté qui n’existe pas, car les parties n’ont pas eu conscience au moment de
450
la conclusion du contrat de l’existence d’un conflit de lois . La volonté implicite - ou même
explicite – des parties se présente comme un élément psychologique que le juge devrait
démêler avec attention. On est d’accord que psychologie ne signifie pas arbitraire mais la
désignation opérée par le juge doit être aussi indicative du centre de gravité du contrat. Car en
l’absence de choix des parties, la reconstitution de la volonté qu’elles auraient dû exprimer est
hypothétique devant la divergence de leurs intérêts. On observe qu’en réalité le juge procède à
une localisation objective du contrat et d’ailleurs il ne recherche pas la loi applicable dans une
prétendue volonté tacite ou présumée des parties. Autrement dit c’est en effet la localisation
objective du contrat sous abri de la recherche de volonté implicite. Selon la thèse
transactionnelle de la localisation : « la loi applicable au contrat est déterminée par le juge,
451
selon la volonté des parties quant à la localisation du contrat ».
Rappelons que la conception de localisation objective, principalement présentée par
452
Batiffol , a commencé par la constatation de l’attitude du juge en cas de l’absence de choix
des parties. Par ailleurs, comme souligne le même auteur, il est difficile de découvrir une

448
H. Lewald, « Les obligation en droit international privé allemand », Répertoire Lapradelle-Niboyet, t.10,
1931, p. 74.
449
V. en même sens, H. Batiffol, Aspects philosophiques du droit international privé, Dalloz, 1956 (réédité par
Y. Lequette, Dalloz, 2002), p. 2465 et s.
450
Contra. E. J. Cohn, « The Objective Practice on the Proper Law of Contracts », op.cit., p. 373-391. Cet
auteur voit que la théorie objectiviste considère que les contractants n’ont pas la liberté de choisir la loi qui leur
convient, mais seulement celle du pays avec lequel le contrat présente la connexion.
451
H. Batiffol, Droit international privé, Paris : LGDJ, 1983, t.II, n° 571, p. 265.
452
H. Batiffol, « L’affirmation de la loi d’autonomie dans la Jurisprudence française », in Festschrift H.
Lewald, 1953 ; Traité de droit international privé, 5e éd., n° 572.

179
règle appropriée à la variété des contrats internationaux, en raison de leur nature spécifique de
tels contrats, il est vrai que ceux-ci se présentent « les structures beaucoup trop variées,
453
beaucoup trop différentes pour qu’une solution rigide soit applicable ».
Prenons la soumission du contrat à la loi du lieu de conclusion comme un exemple, on
trouve qu’elle a été justifiée non pas en raison des mérites propres de ce lieu mais par la
présomption que les parties avaient entendu que leur contrat fut régi par la loi du lieu où il
avait été conclu, tel est le cas de l’article 13 de la règle de conflit de lois thaïe. On trouve que
la loi applicable se déduit de l’ensemble des éléments du contrat et non pas la désignation des
parties. C’est ce que représente la thèse objectiviste. Mais la localisation est différente de
l’objectivisme pur dans la mesure où elle tient compte de la volonté éventuellement exprimée
454
par les contractants sur la loi applicable comme un élément de localisation .

221. La théorie objectiviste de la localisation présente par ailleurs une supériorité


remarquable dans les hypothèses où les contractants n’ont pas choisi la loi applicable à leur
455
contrat. Pour bien illustrer, citons un exemple classique de l’affaire des francs C.F.A. qui
était la première application jurisprudentielle de la localisation des contrats. Un immeuble
situé en Afrique occidentale française avait été vendu entre l’acheteur et le vendeur ayant eu
leurs sièges en France métropolitaine en moyennant le prix fixé payable en francs.
Ultérieurement on avait dissocié le franc métropolitain et le franc C.F.A., de ce fait, ils
n’avaient plus de même valeur. Le problème était de savoir avec quelle monnaie devait payer
l’acquéreur, des francs métropolitains ou des francs C.F.A. ?
Force est de constater que ce problème peut être réglé par la loi du contrat, car à
l’époque il n’y avait qu’une seule loi monétaire en vigueur ; les parties ne pouvaient pas
456
songer à une loi plutôt qu’à une autre afin de faire la manipulation financière . Dans ce cas,
pour savoir quelle loi était la loi applicable, il fallait tout de même localiser le contrat. En effet
on sait que les éléments de localisation ne faisaient pas défaut. Pour la localisation
métropolitaine à l’époque le juge devait retenir que le contrat avait été conclu en France

453
Le débat a opposé à ce sujet le lieu de conclusion au lieu d’exécution.
454
Il en va de même pour les clauses de choix exprès, malgré leurs termes, elles ont à interpréter comme la
volonté de localisation du contrat. Selon cette thèse, la clause de choix n’est que l’élément à aider de localiser du
contrat.
455
CA Aix, 13 juillet 1948, Francs C.F.A., RCDIP.1949.332., note Batiffol et Dehove.
456
Ph. Kahn, note sous Cass. 1er civ., 29 juin 1971, Banque commerciale africaine, op.cit., p. 52.

180
métropolitaine entre les deux sociétés qui avaient leurs sièges dans la métropole. Pourtant, la
question peut se demander s’il s’agissait de la vente d’un immeuble situé en Afrique.
La Cour d’appel a estimé que le contrat se localisait en Afrique pour deux raisons ;
d’une part, le prix était payable au siège d’une banque africaine, d’autre part, le vendeur
entendait réinvestir ses fonds par l’achat d’un autre immeuble situé en Afrique. Dès lors, la
Cour a estimé que les parties ont voulu conclure une affaire africaine et que la loi régit au
paiement du prix était la loi en antérieurement vigueur en Afrique au moment de la passation
457
du contrat, par conséquent l’acquéreur devait régler l’achat en francs C.F.A. . La Cour de
cassation avait conclu que la Cour d’appel avait « à bon droit, dégagé l’économie de
l’opération contractuelle en recherchant dans le silence du texte et de la convention,
458
l’intention présumée des parties quant à la localisation de celle-ci » .
Par ailleurs, le changement de souveraineté peut aussi entraîner le problème de
détermination de la loi applicable au contrat, si on admet que le contrat est localisé sur le
territoire concerné c'est-à-dire la souveraineté nouvelle et non de la volonté des parties. Le
459
problème peut aussi se poser, à titre d’exemple le cas de l’Algérie dans les années 70 , dans
le cas où des contrats conclus avant l’institution de l’unité monétaire du dinar et que ces
contrats étaient stipulés en « francs » sans préciser dans des dispositions du contrat la loi qui
devait être applicable : française ou algérienne ? Dans la mesure où la détermination de la
monnaie de compte dépendait de la loi du contrat, il est nécessaire de rechercher si le contrat
conclu après l’accession à l’indépendance sera soumis à quel droit : droit algérien ou droit
français ? A ce stade, on trouve que la théorie de la localisation permettait de déterminer un
centre de gravité du contrat dont il ne saurait être dépourvu, du moins on sait que le contrat
était localisé en Algérie, alors que la recherche de l’intention des parties pouvaient être
échouées car elles n’avaient eu aucune intention quant à la loi applicable et certes, elle
n’avaient pas pu prévoir sur le problème de manipulation financière. Et la seule monnaie en
vigueur à l’époque était le franc.

222. Lorsque le juge a localisé le contrat en tenant compte du lien avec la souveraineté
nouvelle, il n’est pas interdit aux parties de soutenir que leur contrat soit placé sous l’empire

457
H. Batiffol, « Problèmes des contrats privés internationaux », Cours I.H.E.I., 1961-1962, fasc. 2, p. 68-69.
458
Cass. 1ère civ. 24 avril 1952, Francs C.F.A., RCDIP.1952.502., note H. Motulsky ; S. 1952.1.185, note
Batiffol.
459
Cf. CA Aix, 2 décembre 1965, JDI.1966.108, note Bredin.

181
du système ancien. Car l’attitude des parties postérieurement à l’indépendance, par exemple
un maintien ou un transfert de leur résidence, pourrait aider le juge à en déduire leur volonté
460
de se placer sous le régime antérieurement en vigueur . De surcroît, dans certaines
hypothèses, le contrat conclu avant et après l’accession à l’indépendance peut soumettre à la
même loi en raison du caractère primitif et secondaire des contrats ; par exemple le contrat
ayant été passé en Algérie entre les parties postérieurement de l’indépendance mais qui a suivi
le contrat conclu antérieurement de l’indépendance, le second contrat est régi par la même loi
(française) que le premier en tant que la suite du premier contrat. Il ne semble pas logique de
soumettre les deux contrats en tenant compte du lieu de la conclusion du contrat (le contrat
primitif-loi française, le contrat secondaire-loi algérienne), dès lors la méthode de localisation
461
par le lieu de passation du contrat n’est pas apte à appliquer dans ce cas .
Pourtant comme nous avons cité plus haut que la localisation objective implique aussi
la recherche de volonté implicite des parties, car on peut constater que la Cour de cassation
depuis les années 60 avait commencé de ne reprendre pas la distinction entre le cas où la
volonté des parties avait exprimé et d’autres cas. L’arrêt du 29 juin 1971, le terme formulé par
la Cour de cassation est ainsi : « (…) les juges du fond apprécient souverainement les
circonstances qui déterminent la localisation d’un contrat, d’où ils déduisent la loi qui lui est
applicable (…) ». Force est de constater que l’on entend « les circonstances qui déterminent la
localisation d’un contrat » que celles-ci incluent aussi la volonté des parties. Il en résulte que
l’interprétation souveraine du juge de ces circonstances entraîne la localisation de l’ensemble
des éléments autant significatifs lequel peut rattacher le contrat à une structure spatiale que la
simple recherche de la volonté des contractants.

223. Enfin il reste à savoir si la théorie de localisation peut rendre mieux compte des
solutions que la théorie subjectiviste. Certes, rien n’indique que la dernière en tant que
méthode fondamentale doive être abandonnée, mais en admettant que seule la volonté des
parties ne puisse être un véritable critère de rattachement en matière de contrat international,
les deux méthodes viennent compléter l’une pour l’autre. En même temps on ne peut nier que
le mécanisme de la localisation est un seul moyen adéquat à rattacher le contrat à la loi qui lui
convient et qui notamment présente un lien véritable et fort à la situation. Comme l’on a vu sa

460
H. Batiffol, Droit international privé, op.cit., n° 573, p. 266 et s.
461
Cf. Ph. Kahn, note sous Cass. 1er civ., 29 juin 1971, préc. supra note n° 456.

182
technique supérieure de régler le problème dans l’affaire C.F.A., alors que le subjectivisme ne
l’a pas pu dans plusieurs cas.
L’objection formulée par les adversaires de la thèse de localisation objective se fonde
sur l’argument selon lequel cette thèse présente de l’inconvénient majeur : l’arbitraire du juge.
Car la détermination de la loi applicable en tenant compte des circonstances de l’espèce est
imprévisible. Dans ce cas, la solution trouvée est que la règle de conflit dispose des
rattachements prédéterminés qui représentent dans tous les cas l’élément plus significatif. En
droit thaï, la loi ne dispose pas des rattachements prédéterminés alors les juges doivent
prudemment motiver en quoi le lieu de conclusion était déterminant. A part le choix entre le
lieu de conclusion et d’exécution du contrat, on prend également en compte la nationalité
commune des contractants. En acceptant que ces critères soient usuels à l’époque, on verra
par la suite qu’ils ne sont ni flexibles, ni pertinents à l’heure actuelle.

§2 : La recherche nécessaire de nouveaux aspects de rattachements.

224. La complexité juridique du mécanisme de la règle de conflit de lois peut être un


obstacle du commerce international. Car les règles conflictuelles constituent certains éléments
qui rendent l’insécurité juridique aux contrats commerciaux internationaux tels que le renvoi.
On sait qu’avant l’époque de la Convention de Rome de 1980, certaines législations
européennes ont retenu les critères de la nationalité commune, le lieu de conclusion du contrat
à titre subsidiaire du principe d’autonomie de la volonté. Afin d’éliminer cet inconvénient et
de renforcer la sécurité juridique dans ce domaine, les législateurs avaient rédigé un
mécanisme qui peut répondre à tels besoins, et d’uniformiser les règles de conflit nationales ;
c’était la Convention de Rome de 1980. Cet instrument international était en jeu pendant de
longue période, pourtant son mécanisme utilisé était critiqué. Il semble que cette convention
n’était pas assez efficace pour régler le problème de l’insécurité juridique, car le juge devrait
déterminer à titre subsidiaire dans la plupart des cas les liens les plus étroits. Là aussi, un
manquement de prévisibilité paraît très clair. Un autre instrument a été rédigé et adopté pour
régler ces problèmes, c’est le Règlement CE n°593/2008. Cette fois ci les rattachements de
liens les plus étroits ont été déterminés et fixés nettement. Les contractants peuvent connaître
par avance la loi qui sera régie à leur contrat en cas de l’absence de choix de la loi applicable.

225. On peut considérer que certains rattachements rigides ne sont plus convenables en
matière du contrat international. Dès lors, la Convention de Rome de 1980 et le Règlement
183
Rome I les ont abandonnés (A) en proposant un critère des liens les plus étroits qui énonce un
principe commun à tous les contrats en tenant compte de la spécificité de certains (B).

A. L’abandon de certains rattachements traditionnels.

1) La nationalité commune (lex patriae).


226. La nationalité se trouve son origine de rattachement du statut personnel. En général,
elle joue un rôle très remarquable en raison des conséquences de droit public qu’elle entraîne,
et la preuve de la nationalité est normalement réglementée de manière plus précise que
d’autres critères. La nationalité se traduit aussi des conceptions sociales fondamentales
souvent d’origine religieuse. Cependant le rattachement du statut personnel à la loi nationale
présente d’inconvénients d’ordre politique vis-à-vis du pays d’accueil. Il se traduit souvent
par une application de lois étrangères qui sont parfois difficiles à connaître et à appliquer
fidèlement.

227. Le rattachement de nationalité à l’égard de matière contractuelle. En effet la loi


de la nationalité commune des parties est plus apte à l’égard du législateur car c’est une loi
que les cocontractants sont censés connaître ou à laquelle ils ont accordé leur confiance.
Certes, de ce point de vu, il est facile de l’appliquer. (A défaut de choix de la loi d’autonomie,
c’est la loi de la nationalité commune qui prévaut en tant que loi la plus proche des parties
contractantes !). Pour cette raison, avant l’entrée en vigueur de la Convention de Rome de
1980, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la France, la Belgique laissaient au juge de procéder à la
localisation objective du contrat afin de découvrir son centre de gravité. Le facteur de
nationalité commune est reconnu lorsque les parties ont la même nationalité. On retrouve
aussi la même hypothèse dans l’article 42 du Code civil portugais et l’article 10 du titre
préliminaire du Code civil espagnol. Pourtant, citons l’avis de M. Goldman selon lequel la
nationalité commune n’est le plus souvent qu’un facteur relativement secondaire de
462
rattachement économique comme de localisation juridique des contrats internationaux .

228. Le droit international privé thaï préserve toujours ces rattachements traditionnels dans
un ordre hiérarchisé. Selon l’article 13 de la loi de 1938 la nationalité commune des parties
est prioritaire à défaut du choix de la loi applicable par les parties. Le problème d’appliquer le

462
B. Goldman, JDI.1960.144.

184
rattachement de nationalité commune révèle qu’il est obligé tout d’abord de rechercher la
nationalité des parties. La difficulté se présente dans le cas où l’une des parties est la
compagnie étrangère ou Transnational Corporation située en Thaïlande, car la Thaïlande n’a
pas le droit interne pour déterminer la nationalité de personne morale de droit privé. En effet
la question est plutôt entrée dans le terrain de droit public interne, ce qui n’est pas notre objet
d’étude ; nous voulons démontrer que lorsque la loi thaïe attache toujours à ce critère, la
nécessité de détermination la nationalité de personne morale est toujours indispensable pour le
juge afin d’appliquer l’article 13 de règle de conflit de lois.

229. Normalement les États n’ont pas le droit écrit sur la nationalité de personne morale, en
revanche, ils fixent les indices pour déterminer la nationalité en droit écrit. Dès lors, pour
savoir si une telle personne morale a nationalité thaïe ou non, le juge devrait prendre en
compte les critères généraux retenus par la majorité des États. Il existe trois critères de
rattachement que le juge puisse tenir compte pour déterminer la nationalité d’une personne
463
morale : l’administration centrale (le siège social réel) ; la loi de constitution de personne
464
morale (le siège social de l’incorporation) ; et la personnalité des associés (la nationalité
majoritaire des dirigeants ou des actionnaires). Chaque État utilise les critères différents,
certains États tiennent compte d’un seul critère alors que deux critères doivent être pris en
considération pour les autres, par exemple les pays common law et les pays de droit civil.
465
La doctrine thaïe est variée sur ce sujet mais la jurisprudence a bien fondé les
critères de déterminer la nationalité de personne morale. C'est-à-dire que, lorsque la Cour
thaïe doit examiner la nationalité de personne morale, elle utilise le critère de lieu de

463
Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, Bangkok : Université de Thammasat, 1984, p. 114-115 ; P.
Chunha-Urai, Droit international privé, Bangkok : Nitibanakarn, 1977, p. 123-128. Pour déterminer la
nationalité de personnes morales, les auteurs ont cité les dispositions de l’article 7 de la loi relative au conflit
B.E. 2481 (1938) qui stipule ainsi : « le cas où une personne morale a plusieurs nationalités, la nationalité de
ladite personne morale est celle du pays où se trouve son siège social. Malgré l’avis contraire qui oppose que cet
article doit être appliqué uniquement dans le cas des conflits de nationalités de personnes morales, ces auteurs
ont affirmé qu’il faut tenir compte de la rigueur de ces dispositions. Ce constat permet alors de conclure qu’une
telle ou telle personne morale devrait avoir le siège social réel en Thaïlande pour qu’elle ait la nationalité
thaïlandaise.
464
Luang Pradit Manoo Tham (Pridi Phanomyong), Droit international privé, Bangkok : Aksornniti, 1931, p.
139 ; S. Attakorn et A. Patyangkul, Droit international privé, Bangkok : Akesil Printing, 1963, p. 3-4. Les
auteurs ont affirmé que la nationalité de personnes morales doit être considérée en application le critère du lieu
de siège social de l’incorporation, car l’État ne peut pas et ne doit pas refuser d’octroyer la nationalité à une
personne morale qui a été enregistrée ou constituée en vertu de ses lois. Les juristes thaïs se conforment à cette
hypothèse.
465
Cour suprême Dika n° 1318/2513 (1970) ; n° 3401/2529 (1986) ; n° 2466/2532 (1989) ; n° 2768/2532
(1989).

185
constitution de personne morale pour déterminer sa nationalité (Incorporated Theory).
Pourtant, lorsqu’une personne morale se présente plusieurs points de rattachement avec
plusieurs pays, pour déterminer la nationalité de personnes morales, les auteurs ont cité les
466
dispositions de l’article 7 de la loi relative au conflit de lois B.E. 2481 (1938) : « En cas de
conflits de nationalités d’une personne morale, la nationalité de cette personne morale est
celle du pays où se trouve son siège social ». Ce constat permet alors de conclure qu’une telle
ou telle personne morale devrait avoir le siège social réel en Thaïlande pour qu’elle ait la
nationalité thaïlandaise.
De surcroît, il faut rappeler qu’une certaine personne morale peut avoir la nationalité
thaïe selon le droit général, et peut avoir en revanche la nationalité étrangère dans certaine
467
circonstance d’après la loi spéciale (v. infra n° 470).

2) La lex loci contractus.


230. A l’époque ce rattachement traditionnel a été retenu par plusieurs pays européens.
Lorsqu’une expression de la volonté des parties fait défaut et surtout, à défaut de nationalité
commune des parties. En soumettant un contrat à la loi du lieu de passation, il présente
certains inconvénients, comme le caractère fortuit, incertain et même accidentel d’une part, et
d’autre part, l’impossibilité de déterminer la loi applicable aux contrats conclus par
correspondance ou par des moyens électroniques en particulier par l’internet. On peut dire que
la compétence de la loi du lieu de conclusion du contrat s’est révélée incompatible avec la
468
variété des situations concrètes . Par ailleurs le lieu de conclusion du contrat est souvent
purement accidentel par rapport à la localisation des intérêts permanents des parties. A titre
d’exemple, le cas où les représentants des contractants se rencontrent en un lieu distinct des
établissements des parties. De surcroît, ce rattachement se prête à une fraude qui consisterait à
passer le contrat en un lieu choisi uniquement pour bénéficier des dispositions de la loi
469
correspondant au détriment des lois plus proches et impératives du contrat .

466
K. Sandhikshetrin, Droit international privé, Bangkok : Nitibanakarn, 1996, p. 132-135.
467
P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, Droit international privé, Bangkok : Winyuchon, 2003, p. 267.
468
H. Batiffol, Aspects philosophiques du droit international privé, op.cit., p. 246.
469
B. Audit, Droit international privé, op.cit., n° 177, p. 150.

186
231. En effet l’abandon du lieu de conclusion du contrat comme la solution principale
semble adéquate en raison de son caractère trop souvent fortuit par rapport à un contrat
comme nous venons de citer. Dès lors, les instruments internationaux sur la règle de conflit et
le droit international privé contemporain ne mettent plus l’accent sur le lieu de conclusion du
contrat comme rattachement. Cependant l’article 13 de la loi thaïe précitée retient toujours ce
rattachement rigide ; en l’absence du choix exprès des parties, lorsque leur volonté n’a pas pu
être trouvée, à défaut de leur nationalité commune, c’est le jeu de la loi du lieu de la
conclusion du contrat.

3) La lex loci solutionis.


232. A l’époque, elle était retenue comme un rattachement par le droit international privé
allemand, les pays scandinaves et la Suisse. Alors qu’en France la jurisprudence ne tenait
compte du lieu d’exécution du contrat que lorsqu’il coïncidait avec le lieu d’exécution. Selon
la formule de Savigny, c’est vers l’exécution du contrat qu’est tournée l’attente des parties.
Cependant certains inconvénients résultent de ce critère : l’impossibilité de déterminer
une seule loi applicable au cas où le contrat devra être exécuté dans plusieurs pays. Ce
rattachement risque d’entraîner un dépeçage du contrat et conduit à appliquer différentes lois
à chaque partie du contrat en fonction des différents pays d’exécution. Il est plus compliqué,
lorsque l’obligation de paiement est l’obligation litigieuse mais elle n’est pas en général la
prestation caractéristique du contrat et le lieu d’exécution du paiement est souvent différent du
lieu de la résidence habituelle du débiteur de la prestation caractéristique. Ces pays ont
finalement rejeté cette solution critiquée.
C’est la raison pour laquelle les rédacteurs de la Convention de Rome 1980 et le
Règlement Rome I avaient fait efforts d’éliminer ces difficultés.
On se trouve ici face à l’argument de la nécessité de « prévisibilité » des parties et en
même temps on devra éviter une scission qui consiste à soumettre chaque partie d’un contrat à
la loi différente ; il faut s’attacher au lieu d’exécution « principal » du contrat. Ce principe a
été adopté à travers la prestation d’une partie qui caractérise l’opération par sa fonction
économique que nous verrons par la suite.

B. Le bien-fondé de rattachement de l’autonomie de la volonté en droit thaï.

233. La plupart des États retient toujours la nationalité ou le domicile en tant que
rattachement de base de règle de conflit de lois en matière d’état et de capacité des personnes.
187
En raison de la pertinence du statut avec la nationalité ou l’intégration effective à un milieu
social donné avec le domicile. En matière du contrat, a priori, dans plusieurs pays, certains
rattachements ont été éliminés puisqu’ils ne sont plus adéquats à appliquer aux contrats
internationaux de nos jours. Cependant il existe un principe général du contrat que l’on ne
peut pas éliminer notamment à l’époque contemporaine, c’est la liberté contractuelle dont
nous avons déjà étudié le rôle considérable. Dès lors, le rattachement volontariste a bien fondé
dans la règle de conflit de lois thaïe même en cas de l’absence de choix de loi applicable par
les contractants. Car la Cour devra procéder tout d’abord à la recherche de volonté implicite
des parties, comme nous l’avons cité plus haut. Par contre, la Convention de Rome du 19 juin
1980 donne l’importance au lieu avec lequel le contrat présente un lien effectif
indépendamment de la loi propre du contrat choisie par les contractants. Ce que nous allons
voir par la suite.

234. La recherche de la volonté implicite des parties en cas de l’absence de choix n’est pas
la tâche aisée. Le juge thaï ne peut éviter ce procès car celle-ci n’est pas facultative. Il faut en
tout état de cause examiner l’intention des parties. Normalement le juge devrait prendre en
considération plusieurs éléments tels que l’économie du contrat ; le langage du contrat ; la
monnaie du paiement. La recherche de volonté implicite selon l’article 13 de la loi thaïe n’est
pas facile car la doctrine et les écrits juridiques sur ce sujet ne sont pas assez avancés pour
donner la lumière aux juges. Avec tout le respect vers la Cour, un certain jugement critiquable
sur ce sujet lequel le Tribunal du travail a fait des erreurs et mal raisonné dans sa décision n°
470
3223/2525 . En l’espèce, les parties contractantes ont conclu un contrat à Singapore, l’une
des parties a fait la rupture du contrat en Thaïlande, en l’absence de choix de la loi applicable
au contrat le Tribunal du travail a estimé que le contrat a été passé au Singapore donc la loi
Singapourienne était applicable au litige. En effet le juge aurait dû appliquer d’abord
l’autonomie de la volonté des parties en démêlant la volonté implicite, et non pas appliquer la
loi du lieu de conclusion du contrat en premier ordre. Par ailleurs lorsqu’on tient compte des
471
stipulations de l’article 13 , suite à la recherche de la volonté implicite, c’est la nationalité

470
Tribunal du travail, n° 3223/2525 (1982), Fred Lee Kenner c/ Parker Drealing Co. Ltd.
471
L’article 13 al. 1er dispose ainsi : « Le problème de la loi applicable à l’essentiel du contrat ou au résultat du
contrat, il faut trancher le litige conformément à la volonté des parties ; lorsque la volonté explicite ou implicite
ne peuvent pas être démêlées, si les parties ont de nationalité commune, la loi nationale des parties sera
applicable, à défaut de la nationalité commune des parties, la loi du lieu de la conclusion du contrat sera
applicable ». มาตรา ๑๓ วรรคแรก แห่ ง พระราชบัญญัติว่าด้วยการขัดกันแห่ งกฎหมาย พ.ศ. ๒๔๘๑ บัญญัติว่า “ ปั ญหาว่าจะพึงใช้กฎหมายใด

188
commune des parties, le second rattachement qui devra jouer le rôle à défaut de la volonté
implicite des parties… Est-ce que le juge a pris une décision en ce sens en tenant compte du
lieu de conclusion du contrat comme un élément pour rechercher la volonté implicite des
parties ? Autrement dit, si les contractants ont passé leur contrat à Singapore, il faut présumer
qu’ils voulaient que la loi singapourienne soit applicable.
Le pourvoi a été formé contre la décision du Tribunal du travail devant la Cour
suprême Dika, à ce stade, elle a distingué les différends en deux points : l’une est le différend
sur la protection des travailleurs qui relève du droit public et l’autre consiste au contrat du
travail qui est régi par le CCC. Elle a décidé que : « Vu que les personnes qui résident dans le
royaume thaï doivent se soumettre à sa loi, tant le droit public que le droit privé, quoique le
contrat soit conclu à l’étranger, la loi thaïe est applicable sans tenir compte de la volonté des
472
partie » . Il semble que la Cour suprême a ignoré l’application de la règle de conflit de lois
et par ailleurs elle a raisonné qu’ « il n’est pas à bon droit d’examiner une plainte séparément
en deux litiges et d’appliquer le droit thaï uniquement au problème de la protection des
travailleurs en recourant à l’application de la loi étrangère au contrat de travail » et « même
si le contrat a été signé à Singapore, c’est la loi thaïe qui est applicable au litige ». Au vu de
cette décision, on peut comprendre que le litige a été tranché au regard de la protection des
473
travailleurs qui relève du droit public interne . A vrai dire, la Cour en l’espèce aurait dû
motiver son jugement en concluant que le choix par les parties de la loi applicable ne peut
avoir pour résultat de priver le salarié de la protection que lui assurent les dispositions
impératives de la loi qui sera applicable à défaut de choix (la loi thaï), mais le juge devait
démontrer le caractère impératif des dispositions du droit de travail.

235. Quant au sujet du contrat de travail qui est hors du régime de droit impératif, la Cour
suprême a estimé que « le contrat avait été conclu à Singapore, mais entendu que la rupture
de contrat a eu lieu en Thaïlande, en l’absence de volonté explicite (aucune preuve) et
implicite (aucune circonstance) des contractants sur la loi applicable au contrat ; seule la

บังคับสาหรับสิ่ งซึ่ งเป็ นสาระสาคัญ หรื อผลแห่งสัญญานั้น ให้วินิจฉัยตามเจตนาของคู่กรณี ในกรณี ที่ไม่อาจหยัง่ ทราบเจตนาชัดแจ้งหรื อโดยปริ ยายได้
ถ้าคู่สัญญามีสัญชาติ อนั เดี ยวกัน กฎหมายที่ จะใช้บงั คับก็ได้แก่กฎหมายสัญชาติ อนั ร่ วมกันแห่ งคู่สัญญา ถ้าคู่สัญญาไม่มีสัญชาติอนั เดียวกัน ก็ให้ใช้
กฎหมายแห่งถิ่นที่สัญญานั้นได้ทาขึ้น "
472
Cour suprême Dika, n° 3223/2525 (1982), Fred Lee Kenner c/ Parker Drealing Co. Ltd.
473
En Thaïlande, seules les dispositions sur le contrat du travail et le paiement de salaire sont stipulés dans le
CCC, alors que le reste tels que la protection des travailleurs, l’heure du travail, le pénalty, a été stipulé en forme
de lois spéciales.

189
parole du témoin de défendeur prise en compte par le Tribunal du travail n’était pas la
preuve suffisante de la volonté des parties ; vu que les deux parties étaient de nationalité
américaine, qu’il faut appliquer la loi américaine selon l’article 13 1eral. de la loi relative au
conflit de lois (...) ». La Cour suprême avait tranché ce problème en tant que litige de droit
privé en faisant référence à l’article 13 ; elle a admis le jeu de la volonté des parties aussi bien
explicite qu’implicite.

236. Une autre décision que la Cour a eu l’occasion de trancher par la solution
subjectiviste. C’est la décision n° 1645/2538 en 1995, en l’occurrence il s’agit du contrat
charte-partie d’un navire ; les parties ont choisi dans le contrat de régler leurs différends par
l’arbitrage à Londres en l’absence de choix de la loi applicable au contrat d’arbitrage. La Cour
suprême a estimé en recherchant la volonté implicite des parties selon l’article 13 de la loi de
1938 ainsi : « Dans la convention d’arbitrage, les parties ont exprimé explicitement que la
procédure d’arbitrage aura lieu à Londres, bien qu’elles n’aient pas choisi la loi applicable,
la Cour peut démêler leur volonté dans le sens qu’elles voudraient appliquer la loi anglaise
474
de l’arbitrage à leur contrat » . En effet, la méthode de recherche la volonté des parties
comme celle de subjectiviste modérée ou bien la localisation objective en utilisant la volonté
éventuellement exprimée comme un élément de localisation.

237. D’après la théorie de localisation objective, en l’absence de volonté implicite des


parties, le juge n’a pas à rechercher cette volonté inexistante mais il lui incombe de relever les
indices effectives de localisation du contrat. A savoir que ces indices ne peuvent faire défaut
car les parties ont une nationalité, un domicile, le contrat a un lieu de conclusion, un lieu
d’exécution. Si l’un de ces éléments fait défaut ou mal adapté tel que le contrat est exécuté
475
dans plusieurs pays, les autres pourront le suppléer . Par ailleurs la localisation manifeste
un moyen plus concret et adéquat à régler les problèmes en matière contractuelle. On peut
dire que la théorie du Doyen Batiffol a fait preuve de concilier entre la thèse objectiviste et
subjectiviste.
Certes, la solution retenue par la règle thaïe de conflit de lois présente les difficultés
pour les juges à démêler la loi applicable. On peut envisager le cas où les juges ont démêlé la

474
Cour suprême Dika, n° 1645/2538 (1995).
475
H. Batiffol, « Le rôle de la volonté en droit international privé », Arch. Phil. Dr., Le rôle de la volonté dans
le droit, Sirey, 1957, p.71-86, spéc. p.76.

190
volonté implicite en faisant référence au lieu de conclusion ou celui d’exécution. Enfin, pour
éviter les incertitudes sur la détermination de la loi applicable, il paraît plus logique
d’éliminer la recherche de la volonté implicite des parties qui empêcherait l’application du
rattachement légal subsidiaire. Alors, ne serait-ce pas le temps de réformer la loi sur les
règles de conflit de lois thaïe ?

Section II
Vocation concurrentielle des liens les plus étroits.

238. La Convention de Rome de 1980 et le Règlement Rome I sont des mécanismes qui
servent entre autres, à désigner la loi applicable au contrat en l’absence de choix. Selon
l’article 4 de la Convention « le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les
liens les plus étroits ». On voit que la Convention contient un rattachement souple et en
même temps objectif. Cette souplesse pouvait être un facteur d’incertitude mais elle avait été
corrigée par un jeu de présomptions, pour guider le juge, stipulées dans les paragraphes de cet
article. En revanche l’article 4 du Règlement Rome I a déjà déterminé la loi applicable pour
chaque catégorie du contrat.
La Convention de Rome de 1980 comme le règlement Rome I (art. 4 § 3 et art. 4 § 4),
ces deux instruments constituent la clause d’exception dans leurs dispositions. Cette clause
permet à écarter les rattachements rigides et conduire à appliquer la loi qui présente les liens
les plus étroits au contrat. Cette loi risque-t-elle d’amener certaines incertitudes ? Si la
réponse est positive, pour quelle raison le nouveau règlement retient cette possibilité dans sa
disposition ? Quelle est l’interprétation de la CJUE sur ce point ? C’est ce qu’on verra par la
suite. Nous verrons d’abord l’admission du principe des liens les plus étroits (§1), ensuite on
verra la détermination de notion des liens les plus étroits (§2).

§1 : L’admission du principe des liens les plus étroits.

A. Le principe de proximité dans les nouveaux rattachements.

1) Présentation de l’argument.
239. Le droit international privé français avant l’entrée en vigueur de la Convention de
Rome de 1980 était défini par la méthode de localisation consacrée par l’arrêt Sté. Fourures

191
476
Renel en 1959 selon lequel le juge a affirmé la loi d’autonomie « …à défaut de déclaration
expresse de leur part, il appartient aux juges du fond de la rechercher, d’après l’économie de
la convention et les circonstances de la cause (thèse subjective) » pour déterminer la volonté
implicite des parties grâce aux éléments du contrat (thèse objective). Même si la jurisprudence
française a abandonné un rattachement abstrait et la localisation du contrat par les juges reste
toujours subjective, mais la plupart des conventions internationales ont été inspirées par cette
conception dualiste.

240. La Cour de cassation a eu de la chance de réaffirmer le même principe dans l’arrêt


477
Mercator Press en 1980. Il s’agit d’un salarié français travaillant dans une société belge
dont le contrat s’exécute à Lille. Ce salarié avait été licencié. Le conseil de prud’hommes de
Lille lui avait accordé les indemnités mais le jeu de la règle de conflit de lois n’apparaît pas
dans la décision, car aucune des parties ne l’avait soulevée. La société Belge interjette un
appel devant la Cour d’Appel de Douai et elle a affirmé le jugement comme un arrêt de 1980.
La Cour de cassation disposait le principe selon lequel la loi applicable au contrat est la loi
désignée par les parties, et en l’absence de choix il convient de déterminer la volonté
commune implicite des parties par référence aux éléments du contrat dont le plus déterminant
est celui du lieu d’exécution du contrat. C’est pourquoi le juge a décidé d’appliquer le droit
français. La Cour manifestait sa faveur à une règle de conflit qui semblait bien conférer à la
volonté des parties la fonction d’un véritable facteur de rattachement. Elle affirma que la
localisation du contrat, fondée sur un faisceau d’éléments et destinée à écarter le rattachement
tel que le pays avec lequel le contrat présentait les liens les plus étroits, n’était utilisée qu’à
défaut de volonté des parties. Autrement dit, depuis 1980, le lieu d’exécution du contrat
devenu un critère de plus en plus retenu, car la prise en compte d’autres éléments n’est que
pour appuyer le critère du lieu d’exécution du contrat. Cependant ce critère n’est pas
éventuellement pertinent pour le cas de l’exécution d’un contrat dans plusieurs pays.

241. En droit international privé suisse de 1987 dont la disposition adopte une même
solution ; le principe de proximité joue un rôle important, il consacre « le critère de la
prestation caractéristique en tant que le meilleur des liens les plus étroits d’un contrat avec un

476
Cass.1er civ., 6 juillet 1959, Sté des Fourures Renel, RCDIP.1959.708., note H. Batiffol.; B. Ancel, GA,
n°35, p.307.
477
Cass. 1er civ., 25 mai 1980, Mercator Press, JDI.1980.650., note Kahn. ; RCDIP.1980.576., note H.
Batiffol. ; D. 1981. IR. 162.

192
478
ordre juridique » , en prévoyant l’intervention des présomptions. Toutefois, comme nous
l’avons mentionné auparavant, le critère fondé sur la prestation caractéristique fait aussi
l’objet de détermination !

242. Malgré l’entrée en vigueur du Règlement CE n°593/2008 en 2009, dont les


considérants précisent qu’il conserve toujours le principe des liens les plus étroits, notons que
l’article 4 de ce Règlement détermine déjà, en l’absence de choix, la loi applicable aux
contrats par catégorie. Là encore, il est appréciable au juge car ces rattachements
prédéterminés peuvent faciliter la tâche du juge à démêler la prestation caractéristique qui
constitue le centre de gravité de chaque contrat ; c’est le cas de résidence habituelle de la
partie laquelle est différente dans chaque catégorie. De surcroît, le Règlement Rome I propose
aussi une solution au cas où la loi applicable ne peut être déterminée en raison de
l’impossibilité de classer le contrat dans l’une des catégories définies ou le cas où le juge ne
pourra pas déterminer la résidence habituelle de la partie qui doit fournir la prestation
caractéristique du contrat. Dans ce cas là, c’est toujours la loi du pays avec lequel il présente
les liens les plus étroits par laquelle le contrat devra être régi. Afin de déterminer ce pays, il
convient de prendre en compte l’existence de liens plus étroits avec un ou plusieurs autres
contrats (Considérant 21).

2) Affirmation de la formule volontairement répandue du principe.


243. Comme nous en avons parlé, la localisation du contrat pour rechercher le centre de
gravité dispose toujours de son importance indubitable et retenue également par le Règlement
CE n°593/2008. En effet la recherche d’un pays avec lequel le contrat présente le lien plus
étroit nous oblige de « localiser » le contrat et de déterminer « le centre de gravité ». Deux
parcours peuvent être envisagés dans ce cas : d’une part, les éléments peuvent être objectifs
dans certains cas par exemple un contrat que l’un des contractants constitue le pouvoir
étatique, ceci est souvent lié à la loi d’un État partie du contrat ; d’autre part, ces éléments
sont subjectifs lorsqu’il s’agit d’intérêts que peuvent avoir des parties à ce que leur contrat
soit régit par une telle loi. D’ailleurs, afin de découvrir un État avec lequel le contrat présente
les liens les plus étroits, le juge devra apprécier des facteurs très variés : économiques,

478
P. Lagarde, « Le principe de proximité en droit international privé », RCADI.1986.9, spéc. p.41.

193
479
juridiques et même psychologiques . Quant à la structure de l’article 4 de la Convention de
Rome, il a disposé trois présomptions dont l’une est de principe et le reste est d’exception.
Alors que le Règlement Rome I, en l’absence de choix, a déjà prévu en fonction des multiples
catégories de contrat mais lorsque le contrat ne peut pas être classé dans l’une des catégories
ou lorsque ses caractéristiques le font appartenir à plusieurs des catégories, dans ce cas, la loi
de la résidence habituelle de la partie qui fournit la prestation caractéristique doit être
applicable au contrat. Et si la résidence habituelle ne peut pas être déterminée, c’est la loi du
pays lequel ce contrat présente un lien plus étroit.

244. L’admission du dépeçage effectué par le juge. En ce qui concerne la recherche


effectuée par le juge, on sait que l’article 4 § 1 de la Convention de Rome lui admet la
possibilité de dépeçage même dans l’hypothèse de l’absence de choix de la loi applicable :
« si une partie du contrat est séparable du reste du contrat et présente un lien plus étroit avec
un autre pays, il pourra être fait application, à titre exceptionnel, à cette partie du contrat de
la loi de cet autre pays ». Cette possibilité de dépeçage par le juge est critiquée car on ne peut
pas admettre volontairement qu’elle résulte directement de l’autonomie de la volonté des
parties. Quant à la légitimité du dépeçage à l’égard du principe de proximité, d’après M. P.
Lagarde, le juge applique une loi propre à telle ou telle clause du contrat lorsque la loi qui
480
régit le reste du contrat est manifestement inadaptée . Alors, pour déterminer la loi propre à
chaque clause contractuelle, le juge fera appel au principe de proximité. Cette conception est
reprise aussi dans le texte du Règlement Rome I, lorsque le contrat présente des liens
manifestement étroits avec un pays autre que celui indiqué à l’article 4 § 1 ou 4 § 2, c’est la
loi de cet autre pays qui s’applique. Afin de déterminer ce pays, là encore, l’existence de
« liens étroits » du contrat avec un ou plusieurs autres contrats devrait être prise en
considération. Pourtant un avis commun des auteurs affirme que « ce dépeçage par le juge
481
doit rester exceptionnel » , sur ce point il est clairement affirmé par le considérant n°20 du
Règlement. Il reste à savoir quel est le critère pour considérer qu’une partie du contrat peut

479
H. Gaudemet-Tallon, « Convention de Rome du 19 juin 1980 », J-Cl. Europe, Traité, 1996, Fasc.3201.
480
Cf. P. Lagarde, « Le dépeçage dans le droit international privé des contrats », RDIPP.1993.33.
481
Cf. H. Gaudemet-Tallon, « Convention de Rome du 19 juin 1980 », op.cit., p.6 ; Cf. P. Lagarde, « Le
nouveau droit international privé des contrats après l’entrée en vigueur de la Convention de Rome du 19 juin
1980 », RCDIP.1991.287., spéc. p. 307.

194
être séparée de l’économie du contrat. Dans ce cas, il faut que cette partie soit l’objet d’une
482
solution séparée et indépendante de la solution donnée aux autres éléments du contrat .

245. En Thaïlande, certain juriste commence à s’intéresser au rattachement de liens les plus
étroits. Les critères utilisés dans l’article 13 de la Loi relative au conflit de lois sont obsolètes,
notamment ils ne sont plus pratique pour les contrats internationaux, cette loi n’est jamais
révisée depuis 1938… Cet article ressemble à la loi italienne de conflit de lois à l’époque,
mais comme on le sait les pays européens sous le régime de la Convention de Rome 1980
n’utilisent plus les rattachements rigides traditionnels.

§2 : La détermination des liens les plus étroits.

246. Afin d’obtenir de la justice du résultat final, la règle de conflit doit permettre de
localiser le rapport juridique à l’endroit le plus pertinent, non plus à l’égard d’une obscure
nature du problème considéré, mais à l’égard des liens concrets entretenus par la situation
avec les pays dont les lois sont en conflit. On constate que le principe de proximité se présente
dans le texte de la Convention de Rome de 1980 à travers la disposition de l’article 4 § 2. Cet
article introduit une présomption permettant au juge de déterminer les liens les plus étroits.
Cependant le souci de la sécurité juridique repose toujours, car l’article 4 § 1 adopte le
principe des liens les plus étroits alors que son paragraphe 2 fixe le rattachement présomptif,
puis en cas d’échec de ce rattachement présomptif, c’est le jeu du paragraphe 5 qui permet
directement le recours à la vocation générale et subsidiaire du principe des liens les plus
483
étroits. C’est un effet « casse-noix » et force est de reconnaître que c’est ce chassé-croisé
qui nous conduisait à l’incertitude. Mais on peut comprendre une bonne intention du
484
législateur de régler ces lacunes. Comme l’affirme M. B. Ancel à savoir : « Comment le
principe des liens les plus étroits doit-il s’effacer devant le rattachement présomptif, et

482
Cf. P. Lagarde, « Le nouveau droit international privé… », loc.cit.
483
Cf. le terme utilisé par M. H.U. Jessurun d’Oliveira, « Characteristic Obligation », in the Draft EEC
Obligation Convention, 25 American Journal of Comparative Law, 303, 1977, spéc. p. 330.
484
Cf. B. Ancel, « La loi applicable à défaut de choix », in Le nouveau règlement européen ‘Rome I’ relatif à la
loi applicable aux obligations contractuelles, Actes de la 20e Journée de droit international privé du 14 mars
2008 à Lausanne, Institut suisse de droit comparé, éds. Eleanor Cashin Ritaine/Andrea Bonomi, Genève. Zurich.
Bâle, 2008, p. 80.

195
comment le rattachement présomptif doit-il s’effacer devant le principe des liens les plus
étroits ? ».

247. Le Règlement CE n°593/2008 a réformé l’article 4 mais le principe de proximité se


fonde toujours dans son contenu. Le paragraphe 1er affecte à chaque type du contrat en
utilisant un rattachement fixe et élimine la possibilité de rechercher d’une volonté
hypothétique des parties contractantes ou l’intention commune d’elles. Alors que son
paragraphe 2 s’épanouit ce rejet du subjectivisme, il affirme que le contrat est régi par la loi
du pays dans lequel la partie qui doit fournir une prestation caractéristique a sa résidence
habituelle. Toutefois, avec les présomptions prédéterminées, il est plus aisé de trouver la loi
du lieu où présentent les liens plus étroits avec le contrat en question. Nous étudions d’abord
le concept déclencheur pour identifier les liens les plus étroits (A). Cependant les
présomptions envisagées sont diverses selon la catégorie du contrat, par ailleurs on peut
trouver aussi les présomptions qui sont destinées à protéger certaines parties au contrat (B).
Il est possible d’envisager le cas du recours à la clause d’exception notamment lorsque le
rattachement n’est pas pertinent (C).

A. Le concept déclencheur d’identifier les liens les plus étroits.

248. En matière du contrat, on envisage souvent la difficulté à identifier le critère le plus


significatif qui conduit à s’abstenir de choisir arbitrairement un ou plusieurs rattachement(s)
déterminé(s) ; il faut rechercher la loi avec laquelle la situation présente les liens les plus
étroits. A priori, afin d’éviter de laisser le juge et les parties dans une grande incertitude, les
présomptions sont destinées à assurer un niveau élevé de sécurité juridique dans les relations
contractuelles. Alors le texte, essentiellement la convention internationale, énonce quelques
rattachements déterminés pour exprimer les liens les plus étroits avec le contrat. En effet la
notion de prestation caractéristique n’est pas très précise à cerner, car elle dépend en grandes
parties des circonstances. Il en résulte de la pensée juridique de M. Batiffol qui a proposé de
localiser l’opération en fonction de l’économie du contrat. Elle consiste à étudier la nature de
contrat afin d’identifier l’élément qui est essentiel au contrat. En l’absence du choix exprès
des parties de la loi applicable, c’est l’élément essentiel qui localise le contrat et la loi du lieu
de cet élément essentiel sera régi au contrat, autrement dit, cette loi est présumée avoir liens
plus étroits avec le contrat. Cette obligation essentielle a été définie dans le Rapport Giuliano-
Lagarde ainsi : « la prestation qui permet de donner à un contrat son caractère, qui permet de
196
le distinguer des autres et qui constitue le centre de gravité et la fonction socio-économique
485
de l’obligation contractuelle » . A titre d’exemple en matière de vente ou de bail, il est
admis que la prestation caractéristique est au vendeur de livrer la marchandise ou au bailleur
de procurer la jouissance paisible de la chose. En matière de distribution, la Cour de cassation
486
admet que la fourniture de produits est considérée comme la prestation caractéristique .

1) La prestation caractéristique : élément de localisation.


249. La technique de rattachement selon le principe de proximité peut se présenter en deux
situations. Il s’agit, pour la première, d’une directive à l’adresse du législateur afin de trouver
les critères de désignation qui définissent les liens les plus étroits entre la situation et la loi
applicable. La technique de rattachements multiples résulte aussi de cette idée, car un critère
unique ne suffit pas à localiser une catégorie de rapports de droit définie de manière abstraite.
La seconde situation consiste à une directive à l’adresse du juge pour le conduire à définir
487
concrètement la loi avec laquelle la situation est la plus étroitement corrélée . Ce principe
se trouve sa place en matière de contrat sous la forme d’un rattachement flexible qui repose
sur des présomptions de rattachement. Bien que ces présomptions établies in abstracto mais il
est possible d’être corrigées par une clause d’exception. En France, c’est l’arrêt American
488
Trading qui a consacré pour la première fois le principe de proximité en tant que
rattachement subsidiaire à défaut de choix par des parties de la loi applicable. La Cour de
489
cassation a affirmé cette idée dans un arrêt du 31 mai 1932 et elle a eu l’opportunité encore

485
Rapport Giuliano-Lagarde concernant de la Convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles,
JOCE, n° C282 du 31 octobre 1980, p. 20.
486
Cass.1er civ., 15 mai 2001, JDI.2001.1121, note A. Huet ; RCDIP.2002.86, note Lagarde ; Gaz. Pal., 12-13
déc. 2001, p.33, note M.-L. Niboyet ; Revue Lamy Droit des affaires, févr.2002, n°46, p.5 et s., note H.
Kenfack ; Cass. 1er civ. 25 novembre 2003, D. 2004.494, note H. Kenfack ; JDI.2004.1179, note M.-E. Ancel ;
RCDIP.2004.102, note P. Lagarde ; Cass. 1er civ. 23 janvier 2007, D. 2007.1575, note H. Kenfack ; Gaz. Pal. 29
avril-3 mai, n°119-123, p. 23, note M.-L. Niboyet.
487
M.-L. Niboyet, Droit international privé, Paris : LGDJ, 2009, n° 173.
488
Cass. 1er civ., 5 décembre 1910, American Trading, préc., supra note n° 437. La Cour de cassation a
formulé que : « Attendu que la loi applicable au contrat… est celle que les parties ont adoptée ; que si, entre
personnes de nationalités différentes, la loi du lieu où le contrat est intervenu est en principe celle à laquelle il
faut s’attacher, ce n’est donc qu’autant que les contractants n’ont pas manifesté une volonté contraire (…) ,
mais que cette manifestation peut s’induire des faits et circonstances de la cause, ainsi que des termes du
contrat ».
489
Cass. 1er civ., 31 mai 1932, S.,1933, 1, 17, note Niboyet ; RCDIP.1934.909 ; JDI.1933.347. La Cour a
estimé que : « La loi du lieu où le contrat est intervenu et doit être exécuté est en principe celle à laquelle il faut
s’attacher ». On trouve que la localisation des deux indices est une indication des liens du contrat avec ce pays.

197
490
dans un arrêt du 6 juillet 1959 , la Cour a toujours affirmé que « la loi applicable aux
contrats… est celle que les parties ont adoptée ; qu’à défaut de déclaration expresse de leur
part, il appartient aux juges de rechercher, d’après l’économie de la convention et les
circonstances de la cause, quelle est la loi qui doit régir les rapports des contractants ». La
renonciation à tout rattachement fixe dans cet arrêt est très remarquable, il laisse par ailleurs
la place au juge de déterminer la loi applicable. Comme souligne M. P. Lagarde, « il n’y a que
de principe pur qui conduit le juge à rechercher la loi applicable en tenant compte de
491
l’ensemble des données de l’espèce » .

250. En effet les conventions internationales conclues à l’époque ont retenu également le
principe dit des liens les plus étroits par intermédiaire de la prestation caractéristique ; la
résidence habituelle de la partie qui est chargée de fournir cette prestation caractéristique,
avec la possibilité de la preuve contraire, le cas où le contrat présente les liens plus étroits
492
avec un autre pays. Comme nous a démontré par M. P. Lagarde , une structure de l’article 4
de la Convention de Rome de 1980, il convient de reprendre ici :
1) Le contrat, à défaut de choix, est régi par la loi du pays avec lequel il présente les
liens les plus étroits.
2) Il est présumé que ce pays est celui où la partie qui doit fournir la prestation
caractéristique a sa résidence habituelle ou son établissement.
3) Cette présomption est écartée lorsqu’il résulte de l’ensemble des circonstances que le
contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays.

Malgré la mise en œuvre du principe des liens les plus étroits, il ne semble pas que les
problèmes aient été réduits. Car, les problèmes ont été posés sur les pratiques de
fonctionnement du meccano de l’article 4 de la Convention qui ont entraîné la nécessité de
réforme.

251. Le même principe a été retenu par le nouveau Règlement CE n° 593/2008 mais avec
un changement de méthode assez radical afin de répondre à l’exigence de la sécurité

490
Cass. 1er civ., 6 juillet 1959, Sté des Fourures Renel, préc. supra note n° 476.
491
P. Lagarde, « Le principe de proximité en droit international privé », RCADI.1986.9. : on voit que les termes
de liens les plus étroits ne sont pas encore apparus mais on peut trouver l’idée qui est déjà présentée dans les
arrêts au cours de l’année 1980. En effet les termes de liens les plus étroits ou la localisation n’étaient utilisés
que pour expliquer de manière répandue de la règle de conflit. V. aussi obs. sous Cass. com. 19 décembre 2006
et Cass. 1ère civ., 22 mai 2007, RCDIP.2007.592.
492
P. Lagarde, « Le principe de proximité…», op.cit., p. 42.

198
juridique, et d’éliminer des difficultés et des incertitudes. Celui-ci détermine les rattachements
principaux dans l’article 4 § 1. La structure de désignation du Rome I comprend quatre
étapes qui sont :
1) A défaut de choix, le contrat est régi par la loi prédéterminée selon la catégorie du
contrat.
2) Lorsque ces règles fixes ne sont pas applicables, soit le contrat n’est régi par aucune
d’entre elles, soit il est couvert par plusieurs d’entre elles, désignation de la loi du
lieu de résidence habituelle du débiteur de la prestation caractéristique.
3) La clause d’exception, les deux premières sont écartées en faveur de l’application de
la loi du pays avec lequel le contrat présente des liens manifestement plus étroits
résultant de l’ensemble des circonstances.
4) Lorsque les deux premières présomptions sont écartées en raison d’impossibilité de
déterminer la loi applicable sur ses bases, le contrat est régit par la loi d’un autre
État qui présente les liens les plus étroits.

Si nous acceptons que la proclamation du principe de proximité aurait dû être


supprimée et remplacée par l’adoption de règles de rattachements principaux, c’est parce que
l’application de la loi qui présente des liens les plus étroits avec le contrat est de rang
subsidiaire ou de clause d’exception ; et que la recherche d’emblée les liens les plus étroits en
tant que critère primordial disparaisse. Le nouveau règlement a fait l’effort de retenir le
principe de proximité de manière différente de la Convention de Rome. Car le Règlement
dispose la présomption de la localisation des liens les plus étroits, telle que la résidence
493
habituelle de la partie qui doit fournir une prestation caractéristique , sous forme des
rattachements fixes : l’application de la loi du lieu de résidence habituelle du vendeur pour le
contrat de vente en raison de la prestation du vendeur étant considérée comme caractéristique.

252. Pour un autre instrument international tel que la CVIM qui contient aussi les
dispositions sur le lieu d’exécution la prestation caractéristique, par exemple pour le
paiement, l’article 57 stipule que le prix est payé au domicile du vendeur. Le nombre de
494
juridictions a ainsi utilisé la CVIM pour déterminer le lieu d’exécution de l’obligation
litigieuse afin d’identifier la compétence judiciaire au sens de l’article 5 § 1 de la Convention
de Bruxelles du 27 septembre 1968.

493
S. Francq, « Le règlement « Rome I » sur la loi applicable aux obligations contractuelles », JDI.2009.57.
494
Par exemple les juridictions françaises, italiennes, suisses, allemandes, espagnoles. V. Paris 13 décembre
1995, JCP.1997.II.22772, note P. de Vareilles-Sommières ; Grenoble, 23 octobre 1996, JDI.1998.125, obs.
Huet ; Cass. 1ère civ. 23 janv. 1996, JDI.1996.670 (1er esp.), note Ph. Kahn ; Paris 14 janv. 1998, D.1998, som.
com. 288, obs. B. Audit ; Cass. 1ère civ. 22 juin 2001, D. 2001.3607 (2e esp.), note Cl. Witz ; Cour provinciale de
Barcelone, 7 juin 1999, D. 2000 som. com. 440, obs. W. Rosch ; Trib. Féd. Suisse 18 janvier 1996, D.1997, som.
com. 224, obs. Cl. Witz.

199
253. Alors que la Convention de La Haye de 1986 sur la loi applicable aux contrats de
vente internationale de marchandises, il semble que la formule du groupement des points de
contact a été retenue par cette convention. Il s’agit de l’établissement du vendeur qui a été
présumé d’être le lieu de prestation caractéristique. L’article 8 énonce de manière suivante :
« Dans la mesure où la loi applicable à la vente n’a pas été choisie par les parties
conformément aux dispositions de l’article 7, la vente est régie par la loi de l’État dans lequel
le vendeur a son établissement au moment de la conclusion du contrat ».

495
254. Plus récemment, la nouvelle loi chinoise de la règle de conflit a adopté aussi les
rattachements prédéterminés, la structure de cette loi ressemble beaucoup au règlement Rome
496
I. Puisqu’en l’absence de choix de la loi applicable (art. 41) , il faut rechercher si le contrat
répond ou non au critère de rattachements fixes (art. 5 de l’Interprétation de la Cour Populaire
Suprême de la Chine de 2007), à défaut de ceci, c’est le critère de la résidence habituelle du
débiteur de la prestation caractéristique qui est entendu comme expression du principe de
proximité (art. 41). Enfin ce même article dispose que si on peut prouver que la loi d’un autre
pays présente les liens les plus étroits avec ce contrat, ladite loi doit être applicable.

2) La convergence de points de contact.


255. Certains pays n’utilisent pas la méthode de prédéterminer les liens les plus étroits par
la législation ou à travers la jurisprudence. Mais ils adoptent une approche souple qui confère
au juge le pouvoir d’apprécier les liens les plus étroits d’un contrat avec un pays. Dans le
système common law, la Proper Law of Contract implique les liens plus étroits de la loi
applicable avec le contrat. La doctrine anglaise suppose que cette loi soit celle du lieu de
l’obligation principale ou elle peut être aussi la loi choisie par les parties pour régir leur
497
contrat . De même qu’en droit américain qui suppose que la validité du contrat devra être

495
Cf. G. Vieira da C. Cerqueira, N. Nord et D. Porcheron, « Les nouvelles règles de conflit de lois chinoises
en matière contractuelle », RLDA, n° 61, 2011, p. 52-56.
496
L’article 41 de la Loi sur l’application des lois aux relations civiles comportant des éléments d’extranéité
stipule ainsi : « à défaut de choix par les parties, le contrat est régi par la loi du lieu de la résidence habituelle
de la partie dont l’accomplissement des devoirs peut le mieux exprimer les caractéristiques du contrat ou par
toute autre loi avec laquelle le contrat présente les liens les plus étroits ». (Cf. la traduction française par W.
Chen, N. Nord et L. Bertrand, à paraître à la RCDIP). 第四十一条 “当事人可以协议选择合同适用的法律。当事人
没有选择的,适用履行义务最能体现该合同特征的一方当事人经常居所地法律或者其他与该合同有最密切联系的法律。”
497
Cf. Morris, The Conflict of Laws, 5th Ed., Sweet & Maxwell, p. 321: “The proper law of the contract is the
system of law by reference to which the contract was made, that is the law chosen by the parties, or that with
which the transaction had its closest and most real connection”. Cependant le principe de proper law

200
vérifiée selon la loi interne de l’État avec lequel ce contrat présente le caractère « plus de
parenté ». Il semble que l’on est toujours dans le débat entre le concept subjectif et le concept
objectif de l’autonomie de la volonté. A priori, l’autonomie de la volonté se traduit en droit
international privé des contrats par la liberté de choix des parties de désigner la loi applicable
à leur contrat comme nous avons déjà affirmé précédemment. En l’absence de choix des
parties, c’est le juge qui devra procéder à la détermination de la loi compétente en recherchant
la volonté implicite des parties. En cas du choix des parties de la loi applicable, la méthode de
proper law explique ce choix par le pouvoir de décision des contractants. De même qu’en cas
de silence des contractants, selon cette théorie, le juge ne procède pas à une localisation du
contrat en recherchant les éléments de rattachement les plus significatifs. En revanche, il
détermine la loi applicable en interprétant la volonté des parties. Il semble que l’on fait jouer
l’idée de localisation objective dans l’hypothèse de volonté explicite des parties… Sur ce
point, les partisans de la proper law a répondu que lorsque les parties ont choisi la loi
applicable, elles entendent bien procéder à un tel choix et non à une localisation que le juge
peut procéder si cette loi choisie ne correspond pas au centre de gravité du contrat.
D’après M. Y. Loussouarn, il suffit de concilier les deux choses, l’autonomie de la
volonté et le contrôle du juge, en admettant que la première est limitée. C'est-à-dire que les
498
parties ne pourraient pas choisir la loi qui n’a aucun lien significatif avec le contrat .
Pourtant cette approche est critiquée sur son caractère imprévisible, subjectif et arbitraire. Car
la méthode de proper law repose sur la subjectivité du juge. Alors que le principe de
proximité résultant de la théorie de la localisation de Batiffol propose des solutions
concrètes…

256. Il y a la différence entre la théorie de proper law et la localisation objective


notamment en cas de l’absence de choix des contractants. Dans ce cas, pour la localisation
objective, le juge doit procéder à localiser objectivement le contrat en tenant compte de
l’économie de ce dernier. Alors que la méthode de proper law, comme l’on a vu, le juge devra
rechercher la loi plus convenable à régir le contrat en recourant parfois à l’interprétation de
volonté des parties. Reste à savoir qu’en est-il si les parties se sont prononcées sur la
compétence législative en désignant une loi applicable ? Cette désignation ne vaut pas en tant
que telle… Car le juge épargne le pouvoir de contrôler cette localisation et de retenir d’autres

n’appliquait plus aux obligations contractuelles conclues après l’entrée en vigueur de The Contract (Applicable
Law) Act 1990.
498
Y. Loussouarn, « Cours général de droit international privé », RCADI.1973.356., t.139.

201
499
points de contacts qui lui permettent d’infirmer le choix des contractants . On constate que
la meilleure solution consiste à une approche conciliée la présomption préétablie et la proper
law résulte de la convergence des points de contact par le juge.

257. Des juristes thaïs font souvent recours à la méthode de proper law plutôt qu’au
principe de proximité. Il en résulte du fait que cette théorie anglo-saxon est plus connue en
Thaïlande. Dans un ouvrage juridique thaï un auteur a même expliqué l’article 13 de la Loi de
1938 en ce sens : « Au cas où les parties n’ont pas expressément exprimé leur volonté, mais
laissent à penser qu’elles veulent appliquer une telle ou telle loi, ou lorsqu’on trouve une loi
qui présente des liens les plus étroits avec le contrat, c’est le cas de proper law of contract, il
500
faut alors appliquer cette loi » . Il s’agit en effet de la recherche de la volonté implicite des
parties. Toutefois, au lieu de procéder à cette recherche, la Cour a souvent fait recours à la loi
du lieu de conclusion ou d’exécution du contrat. La méthode de proper law of contract ne
réside que dans la doctrine thaïe. Cependant le lieu de conclusion de contrat ne présente pas,
dans certains cas, de lien plus significatif avec un tel contrat. Comme nous avons vu un
exemple classique, les parties peuvent signer leur contrat dans un pays en prétendant que ce
contrat a été conclu dans un autre pays. Nous trouvons qu’il ne suffit pas d’avoir un seul lieu
de rattachement pour justifier l’application au contrat la loi de ce lieu ; nous proposons les
rattachements utilisés par le Règlement Rome I qui présentent, en réalité, les liens les plus
effectifs rattachés un contrat à une loi d’un État.

258. Jusque là, la Convention de Rome a concrétisé cette solution équilibrée. Dans l’article
4 § 4 par exemple, cette méthode a été utilisée pour présumer que le contrat entretient les liens
les plus étroits avec les pays dans lequel le transporteur a son établissement principal au
moment de la conclusion du contrat, lorsque ce pays est le pays de chargement ou de
déchargement, ou le pays de l’établissement principal de l’expéditeur. L’article 5 § 1 du
Règlement n°593/2008 relatif à l’application au transport de marchandises maintient la même
solution, la loi applicable à défaut de choix est celle du pays dans lequel le transporteur a sa

499
Id., p. 353.
500
Ch. Pachusanond, Droit international privé : la nationalité, 2ème éd., Bangkok : Winyuchon, 2006, p. 267 ;
Cf. Dicey, Albert Venn, Dicey and Morris on the Conflict of Laws, 7th Edition, London, Butterworths, 1965, p.
735. Cet auteur a précisé ainsi : “When the intention of the parties to a contract with regard to the law governing
the contract is not express in words, their intention is to be inferred from the terms and nature of the contract,
and from the general circumstances of the case, and such inferred intention determines the proper law of
contract.”

202
résidence habituelle à condition que le lieu de chargement, ou le lieu de livraison, ou la
résidence habituelle de l’expéditeur se situe aussi dans ce même pays. Si ce rattachement est
défaillant, la loi du pays dans lequel se situe la livraison contractuellement est applicable.
Après une présupposition concrète, le règlement admet aussi une clause dérogatoire aux
termes de son article 5 § 3 :
« S’il résulte de l’ensemble des circonstances de la cause que le contrat présente des
liens manifestement plus étroits avec un pays autre que celui visé au paragraphe 1 ou 2, la loi
de cet autre pays s’applique ».

259. En effet, la Convention de La Haye de 1986 sur la loi applicable au contrat de vente de
marchandises a aussi retenu ce critère, aux termes de son article 8 § 3, qui se révèle également
novatrice en comparant avec la Convention de La Haye de 1955, en ce sens qu’elle introduit à
titre exceptionnel la méthode de la proper law :
« A titre exceptionnel, si, en raison de l’ensemble des circonstances, par exemple de
relations d’affaires entre les parties, la vente présente des liens manifestement plus étroits
avec une loi autre que celle qui serait applicable au contrat selon les paragraphes 1 ou 2, la
vente est régie par cette autre loi ».

260. Si le droit international privé a évolué en faveur de la prévisibilité du droit applicable


pour renforcer la sécurité juridique, cette méthode peut se compromettre avec la localisation
objective, car elle réconcilie parfaitement entre la souplesse et la prévisibilité. M. W.
501
Wengler a ainsi fait une remarque sur ce point : « parfois un législateur érige tout d’abord
lui-même un seul élément de rattachement en élément déterminant tout en habilitant le juge à
ne pas utiliser cet élément lorsque la somme de tous les autres éléments de rattachement
possibles qui n’ont pas été définis de façon plus précise par le législateur et qui présentent un
lien avec un autre État est, selon l’opinion du juge, plus « forte », plus « significative » que
seul élément de rattachement retenu par la loi ». C’est dans ce sens qu’énonce l’article 4 § 5
de la Convention de Rome et l’article 4 § 3 du Règlement CE n°593/2008.

B. Le recours aux diverses présomptions.

261. Cette présomption se fonde sur deux éléments : la résidence habituelle de personne
physique ou l’administration centrale de personne morale ; et la partie contractante laquelle sa
résidence habituelle ou son établissement devra être prise en considération. Donc, selon la

501
W. Wengler, « L’évolution moderne du droit international privé et la prévisibilité du droit applicable »,
RCDIP.1990.665.

203
Convention de Rome et le Règlement Rome I, c’est la résidence habituelle du débiteur qui
doit être prise en considération. Rappelons que dans les contrats, l’une des parties effectue
une prestation sous forme monétaire comme le prix, le loyer, alors que l’autre partie est tenue
à une prestation considérée comme caractéristique du type de contrat ; celui du vendeur ou du
bailleur.

1) Les présomptions principales.


262. Afin de rejeter la référence au lieu d’exécution de la prestation caractéristique qui est
délicate à déterminer, la présomption conduira des contrats à un résultat simple à établir. La
prestation caractéristique joue un rôle très important à ce stade, l’appréciation de celle-ci est
nécessaire pour déterminer les présomptions afin d’éviter les défauts arbitraires des juges de
déterminer des liens les plus étroits du contrat avec un pays. Rien n’est plus important que la
prévisibilité des parties contractantes sur ce qu’elles envisageront en cas de litige. Pour ces
raisons les contrats commerciaux internationaux énoncent une série de présomptions sur les
liens les plus étroits du contrat. La Convention de Rome de 1980 stipule des présomptions sur
la prestation caractéristique aux termes de l’article 4 § 2 à § 4, puis elle écarte ces
présomptions dans son article 4 § 5 :
« L’application du paragraphe 2 est écartée lorsque la prestation caractéristique ne
peut être déterminée. Les présomptions des paragraphes 2, 3 et 4 sont écartées lorsqu’il
résulte de l’ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un
autre pays ».

C'est-à-dire que ces trois présomptions ne sont pas irréfragables.

263. Dans le Règlement Rome I, l’article 4 § 1 a déjà déterminé les présomptions de


prestation caractéristique pour chaque contrat de façon multiples, malgré ses rattachements
rigides il réserve toujours la flexibilité ; les liens les plus étroits. On peut distinguer les cas où
ces présomptions seront écartées en deux situations ; la première consiste au cas où il résulte
des circonstances de la cause que le contrat présente des liens manifestement plus étroits avec
un pays autre que celui visé au paragraphe 1 ou 2. Dans ce cas la loi de cet autre pays
502
s’applique . Le second est le cas où on ne peut pas déterminer la loi applicable à ce contrat
en utilisant le paragraphe 1 ou 2, dans ce cas, c’est la loi du pays avec lequel le contrat

502
L’article 4 § 3 : « Lorsqu’il résulte de l’ensemble des circonstances de la cause que le contrat présente des
liens manifestement plus étroits avec un pays autre que celui visé au paragraphe 1 ou 2, la loi de cet autre pays
s’applique ».

204
503
présente les liens les plus étroits qui s’applique . Prenons un autre exemple, l’article 6 de la
Convention, après avoir établi une présomption sur le contrat individuel de travail aux termes
de son paragraphe 2, il énonce le caractère souple de la présomption : « … à moins qu’il ne
résulte de l’ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus
étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ». Il en va de
même pour le Règlement Rome I dans son article 8 § 4 : « S’il résulte de l’ensemble des
circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays que celui visé
au paragraphe 2 ou 3, la loi de cet autre pays s’applique ».
Selon la Convention de Rome de 1980, la présomption en faveur de la loi de la résidence
habituelle du débiteur de la prestation caractéristique ne joue pas dans deux exceptions ; la
matière d’immeubles, et le contrat de transport de marchandises (l’article 4 § 4), ce qui est
différent du Règlement Rome I.

a. en matière d’immeubles.
264. On a constaté que le lieu de situation de l’immeuble est généralement celui où
s’exécute la prestation caractéristique du contrat et souvent celui de l’établissement de la
partie qui fournit cette prestation. Dès lors, il est raisonnable de présumer, dans le système
admettant la recherche de volonté implicite, que les parties ont entendu soumettre le contrat à
la loi du lieu de situation de l’immeuble (lex rei sitae). La solution est adoptée par l’article 4
de la Convention de Rome 1980 et le Règlement Rome I.
Certes, ce texte n’applique pas aux contrats ayant pour objet la construction ou la
réparation d’un immeuble, car l’objet de ce contrat n’est pas l’immeuble lui-même mais le
travail à effectuer. De même que le bail d’immeuble à une période maximale de six mois
consécutif, ce contrat est régi par la loi du pays de résidence habituelle commune du
propriétaire et du locataire. Puisque le contrat de bail ne sert pas la politique d’exploitation
donc il n’y a aucune raison d’appliquer au contrat la loi de situation des immeubles qui est
destinée à consolider la position de l’occupant ou de l’exploitation et qui constitue le but de
police.

503
L’article 4 § 4 : « Lorsque la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 1 ou 2, le
contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits ».

205
265. En droit thaï, comme nous l’avons dit, la lex rei sitae est applicable en tant que règle
principale. Or, le champ d’application de l’article 16, de la Loi de 1938, applicable aux
propriétés semble plus répandu que celui de la Convention de Rome. Selon cet article :
504
« La loi du lieu de situation de bien s’applique à un meuble et un immeuble » .

Lorsqu’il s’agit d’un contrat ou d’autres transactions porté(s) sur l’immeuble, l’article
505
9 alinéa 2 applique à la forme de ceux-ci, non pas l’article 13 alinéa 3 . Aux termes de
l’article 9 : « Cependant, la loi du lieu de situation de l’immeuble doit être applicable à la
forme nécessaire à la validité du contrat, le document, ou l’acte juridique quelconque sur
506
ledit immeuble » . C’est un principe de la lex rei sitae qui est impérativement applicable.

b. en matière du contrat de transport de marchandises.


266. Le contrat de transport de marchandises en droit français n’est pas soumis à la
présomption du paragraphe 2 de l’article 4. Certes, la Convention de Rome n’aurait dû
appliquer que dans la mesure où elle ne portait pas atteinte aux autres conventions
internationales préexistantes. Le transport de marchandises est soumis à l’article 4 § 4 qui a
507
une présomption spéciale sur « l’établissement principale » . Car la Convention présume
que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où se trouve le lieu de chargement
ou de déchargement ou l’établissement principal de l’expéditeur et en même temps ce pays
devrait être celui dans lequel le transporteur a son établissement principal au moment de la
conclusion du contrat.
L’article 5 § 1 du Règlement Rome I a rattaché la loi applicable au contrat de transport
de marchandises à « la résidence habituelle » du transporteur avec l’application subsidiaire du
lieu de chargement ou la résidence habituelle de l’expéditeur et le texte ajoute « ou le lieu de
livraison » se situe aussi dans ce pays. Il semble que la différence consiste au terme utilisé,

504
มาตรา ๑๖ วรรคแรก บัญญัติวา่ “ ให้ใช้กฎหมายแห่งถิ่นที่ทรัพย์สินตั้งอยูบ่ งั คับแก่สังหาริ มทรัพย์และอสังหาริ มทรัพย์ ”
505
L’article 13, alinéa 3 : « Le contrat n’est pas nul lorsqu’il a été conclu conformément à la forme disposée par
la loi laquelle devra être applicable aux effets du contrat ». มาตรา ๑๓ วรรค ๓ บัญญัติว่า “ สัญญาย่อมไม่เป็ นโมฆะ ถ้าได้ทา
ถูกต้องตามแบบอันกาหนดไว้ในกฎหมายซึ่ งใช้บงั คับแก่ผลแห่งสัญญานั้น ”
506
มาตรา ๙ ววรค ๒ บัญญัติวา่ “ อย่างไรก็ดี กฎหมายของประเทศที่ทรัพย์สินตั้งอยูย่ อ่ มใช้บงั คับแก่แบบที่จาเป็ นเพื่อความสมบูรณ์แห่งสัญญา
เอกสาร หรื อนิติกรรมอื่นๆ เกี่ยวกับอสังหาริ มทรัพย์ ”
507
« Dans ce contrat, si le pays dans lequel le transporteur a son établissement principal au moment de la
conclusion du contrat est aussi celui dans lequel est situé le lieu de chargement ou de déchargement ou
l’établissement principal de l’expéditeur, il est présumé que le contrat a liens les plus étroits avec ce pays ».

206
car la résidence habituelle de personne morale telle qu’une compagnie de transport,
normalement, coïncide à son établissement principal.
En effet la coïncidence entre le pays où le transporteur a son établissement principal
(Convention) ou sa résidence habituelle (Rome I) au moment de la conclusion du contrat et le
pays où se situe le lieu de chargement ou déchargement ou le lieu de livraison ou
l’établissement principal de l’expéditeur est plus significative pour le rattachement du contrat
que la seule résidence du transporteur fournisseur de la prestation caractéristique. Le
Règlement Rome I a par ailleurs ajouté « Si ces conditions ne sont pas satisfaites, la loi du
pays dans lequel se situe le lieu de livraison convenu par les parties s’applique ». Alors que
la Convention de Rome l’article 4 § 5 a aussi écarté les paragraphes 2, 3 et 4 lorsqu’il résulte
de circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays.

La CJCE a eu l’occasion pour la première fois de son interprétation de la Convention


de Rome, en estimant que le transport de marchandises qui est soumis à la Convention de
Rome comprend expressément le contrat d’affrètement ou d’autres contrats lesquels ont
508
principalement pour objet de réaliser un transport de marchandises . Pour la notion de
transporteur, il faut entendre toute partie au contrat qui s’engage à transporter les
marchandises, qu’il le fasse lui-même ou le fasse par une autre personne. Car, lorsque l’on a
pris en considération de la situation, on trouve que la liberté de dépeçage le transporteur pour
chaque partie du transport est critiquée, il ne faut pas oublier que seule la détermination de la
loi applicable à défaut de choix n’est pas aisée et la difficulté augmente dés lors qu’il y en a
plusieurs à déterminer.

267. En Thaïlande, le 2ème alinéa de l’article 16 de la Loi de 1938 parle en fait du transport
de meuble mais il n’utilise pas le terme « marchandise », c'est-à-dire que ce meuble n’est pas
censé être une marchandise :
« Cependant, lorsqu’il agit d’un transport de meuble à l’étranger, la loi nationale du
509
propriétaire sera applicable dès le moment où ce meuble a été transporté » .

C’est cet article qui règle le problème de conflit de lois en la matière. On constate que
cette loi rattache toujours la détermination de la loi applicable au contrat de transport de

508
CJCE, 6 octobre 2009, aff. C-133/08, Balkenende, préc. supra note n° 81.
509
มาตรา ๑๖ วรรค ๒ บัญญัติวา่ “ อย่างไรก็ดี ในการส่ งสังหาริ มทรั พย์ออกนอกประเทศ ให้ใช้กฎหมายสัญชาติของเจ้าของทรั พย์บงั คับแก่ทรั พย์
นั้นตั้งแต่เวลาส่ งทรัพย์ออกนอกประเทศ ”

207
meuble à la loi nationale de l’une des parties. Cependant il faut rappeler qu’il est possible que
dans certains cas le contrat litigieux sera régi immédiatement par la loi substantielle sans
passer par le mécanisme de règle de conflit, tel est le cas de la Loi relative au contrat de
transport de marchandises par voie maritime de 1991 qui applique au transport international
510
de marchandises . Les problèmes autres que précisés dans le champ d’application de cette
loi, sont régis par la Loi relative au conflit de lois de 1938. Dès lors que l’une des contractants
a la nationalité thaïe cette loi s’applique en tant que lois de police.

268. Quant au contrat qui est exclu du champ d’application de la Convention de Rome de
1980, pour certains auteurs, l’article 4 § 4 ne devrait pas appliquer au contrat d’affrètement à
511
coque nue et aux contrats d’affrètement à temps . Il en est de même en droit thaï, selon
l’article 5 de la Loi sur le contrat de transport de marchandises par voie maritime de 1991,
ceci n’applique pas au contrat d’affrètement à coque nue, sauf si un connaissement est délivré
au transporteur. On peut comprendre que normalement le contrat d’affrètement à coque nue et
d’autres contrats de même type, sont considérés comme le contrat selon lequel les
contractants sont aux pieds égaux.

c. en matière d’instruments de paiement et de crédit.


269. En pratique, il existe deux principaux instruments juridiques relatifs aux effets de
commerce : l’un est la Convention de Genève du 7 juin 1930 sur la loi uniforme des lettres de
change et des billets à ordre (ci-après la CGLU) laquelle représente le système de droit civil ;
et la Convention de Genève du 19 mars 1931 sur la loi uniforme en matière de chèque. Ces
conventions ne s’appliquent qu’entre les États membres, il en résulte que la porte est toujours
ouverte à un droit commun distinct. L’autre, ce sont les législations adoptées dans les pays de
common law, qui sont différentes des systèmes européens.

270. La Convention des Nations Unies de 1988 sur les lettres de change internationales et
les billets à ordre internationaux (ci-après la Convention CNUDCI 1988) a été élaborée, car
l’expansion des échanges internationaux sont toujours agrandies, de même que l’emploi
d’effets de commerce pour ces opérations. Elle a pour but de concilier les différentes lois

510
Si les parties dans un contrat de transport de marchandises interne le souhaitent, elles peuvent aussi insérer
dans leur contrat que cette loi soit applicable.
511
P. Lagarde, « Convention de Rome », Rép. D. Dr. comm., n°69.

208
relatives aux effets de commerce entre les pays de common law et les pays continentaux. Dès
lors, ces dispositions représentent aussi les législations adoptées par les pays de common
512
law . Pour que la méthode adoptée par cette Convention soit admissible par les pays de
common law, elle ne recherche plus une uniformité complète des lois relatives aux lettres
d’échange, mais elle vise à établir un régime unifié pour les seuls effets internationaux. En
tant que règle conflictuelle, la Convention CNUDCI 1988 laisse la place pour le principe
d’autonomie : la ratification par des États ne signifie pas que les opérateurs économiques
ressortissants soient automatiquement régis par les dispositions de cette Convention.
On constate que ces conventions internationales ont consacré une indépendance des
obligations cambiaires, cette solution a été critiquée en droit international privé français.
513
D’après M. P. Mayer , il semblerait logique que toutes les obligations afférentes à un même
titre soient soumises à une loi unique, qui pourrait être celle du lieu prévu pour le paiement,
plus significatif que le lieu d’émission.

271. Pour la Thaïlande qui ne ratifie aucune convention internationale en ces matières,
qu’en est-il si les parties n’ont pas choisi la loi applicable au contrat de paiement
international ? Les transactions relatives au paiement international seront soumises à la Loi
relative au conflit de lois de 1938 l’article 13, a priori, à défaut de choix des parties de la loi
applicable, le juge tranchera le litige en appliquant la loi nationale commune des parties ; à
défaut de la nationalité commune, la loi du lieu de conclusion du contrat sera en jeu, à défaut
de celle-ci, la loi du lieu d’exécution du contrat. Il est vrai que la Thaïlande a besoin aussi
bien d’une loi relative à la règle de conflit spécialement applicable aux contrats internationaux
qu’une loi matérielle en la matière, en particulier, de prime d’abord, le contrat de vente
internationale, le paiement international, et l’assurance internationale ; mais le législateur thaï
a commencé par le transport maritime… Bien qu’en pratique les parties puissent insérer des
clauses d’application les RUU 500 ou 600 de la CCI pour le paiement par la lettre de crédit, la
possibilité de renvoi à l’application du CCC existe toujours en l’absence de cette clause. Les
juristes thaïs trouvent que les dispositions du CCC ne sont pas convenables pour le règlement

512
En premier temps, les États-Unis et le Royaume Uni ont refusé lors de la conférence de La Haye qu’ils n’ont
pas apporté de modifications à leur législation relatives aux effets de commerce quels que soient les résultats
obtenus à la conférence. Car les pays de common law avaient déjà procédé entre eux à une certaine uniformité
suite à l’adoption en Angleterre du Bills of Exchange Act en 1882 qui a servi de base à la législation de la plupart
des pays du Common Wealth.
513
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., p. 450.

209
des différends résultant des transactions internationales. Car elles ont été élaborées pour le
seul but de régler les problèmes juridiques purement internes.

2) Les présomptions en matière de règle protectrice.


272. En réalité, lorsque le créancier est un professionnel, la plupart des contrats qu’il
conduit seront soumis à sa propre loi. Alors que le débiteur doit « prendre le risque du
commerce international et doit s’attendre à ce que ce professionnel traite ses affaires d’après
514
sa propre loi » . Dès lors, la protection assurée par les droits internes à certaines catégories
de contractants doit également être adoptée dans le contexte international. Pour cette raison la
Convention de Rome et le Règlement Rome I assurent l’application systématique de la loi la
plus proche de la partie réputée faible dans les contrats de consommation et les contrats
individuels de travail.

a. en matière de consommateur.
273. Le texte est destiné à assurer la protection du consommateur final et il semble opter
pour une conception restrictive du consommateur protégé, selon l’article 5 de la Convention
de Rome, le consommateur est « celui qui agit pour un usage pouvant être considéré comme
étranger à son activité professionnelle ». Ainsi, le professionnel qui agit pour les besoins de
son activité mais en dehors de sa spécialité n’est pas un consommateur au regard de cette
515
convention . Il en va de même dans l’article 6 du Règlement Rome I.
La Convention de Rome et le Règlement n’écartent pas la possibilité de désigner la loi
applicable au contrat selon l’article 3, le principe demeure que les parties peuvent choisir la
loi applicable. Mais en même temps ce choix ne peut priver le consommateur de la protection
que lui assurent les dispositions impératives de la loi du pays dans lequel il a sa résidence
habituelle. C'est-à-dire qu’il est possible d’avoir deux lois en concourant : les dispositions
impératives de la loi de résidence habituelle du consommateur et celles de la loi choisie par
des parties. L’interprétation la plus favorable et plus logique sur ce point est qu’il faut
apprécier la loi la plus protectrice pour le consommateur. Cependant lorsque les parties n’ont
pas opéré leur choix de la loi applicable, l’article 5 § 3 écarte l’article 4 et il faut soumettre
impérativement le contrat à la loi du lieu de la résidence habituelle du consommateur. Sous
réserve que le contrat soit conclu dans l’une des circonstances prévues par l’article 5 § 2.

514
Cf. P. Lagarde, « Le nouveau droit international privé… », op.cit., p. 308.
515
H. Gaudemet-Tallon, « Convention de Rome… », op.cit.

210
Pourtant, selon le Règlement Rome I, seul la résidence habituelle du consommateur ne suffit
pas. Il faut que l’une des deux conditions suivantes soit remplie : le professionnel exerce son
activité professionnelle dans le pays dans lequel le consommateur a sa résidence habituelle ;
ou le professionnel dirige cette activité vers ce pays ou vers plusieurs pays, dont celui-ci.

En Thaïlande, la loi applicable au contrat conclu par le consommateur est régi par la règle de
conflit de loi l’article 13 comme d’autres contrats.

b. en matière de travail.
274. De même qu’en matière de protection des consommateurs, la Convention de Rome et
le Règlement Rome I distinguent les deux hypothèses quant aux salariés : le choix de loi
applicable a été opéré par des parties et en l’absence de choix. Dans le premier cas, peu
importe la loi choisie, le travailleur ne peut être privé de la protection des dispositions
impératives les plus protectrices qui seraient applicables à défaut de choix. Dans le second
cas, la loi compétente est celle du lieu d’accomplit habituelle du travail, soit la loi
d’établissement qui l’a embauché lorsque le travailleur n’accomplit pas habituellement son
travail dans le même pays, soit la loi du pays avec lequel le contrat de travail présente des
liens plus étroits qu’avec les lieux précédents.

275. En Thaïlande, on admet le travailleur comme une partie faible dans un contrat du
travail. Nous trouvons les dispositions du droit de travail dans le Code civil et commercial
d’une part, et dans les lois spéciales d’autre part. Aucun des deux ne s’applique au litige à
caractère d’extranéité. Lorsque le litige est international, le juge applique l’article 13 de la
516
Loi de 1938 relative au conflit de lois pour localiser le contrat à défaut de la loi choisie par
les parties. Notons que le droit européen est plus avancé en raison de la politique
communautaire de la libre circulation des personnes en Europe, alors que la Thaïlande vient
de commencer le projet de répartition du Code civil du Code commercial y compris
l’élaboration la « première » loi sur la vente internationale de marchandises. Dans l’avenir si
les pays ASEAN adoptent une telle politique, la loi dans ce domaine sera alors indispensable.

516
Il y a eu un cas où le juge a tranché le litige concernant le contrat du travail international, mais le juge a nié
l’application de la règle de conflit de lois en soulevant que la cause du litige a eu lieu en Thaïlande donc la loi
thaïe est applicable.

211
C. L’absence de pertinence du rattachement rigide, le recours à la clause
d’exception.

276. Bien que la Convention de Rome utilise la méthode de présomption pour identifier la
loi applicable au contrat à défaut de choix des parties ; la prestation caractéristique, lorsque
cette présomption ne peut pas être déterminée ou lorsqu’il résulte de l’ensemble des
circonstances que le contrat présente des liens les plus étroits avec un autre pays, c’est la loi
de ce dernier qui sera la loi applicable. Le problème peut se poser sur la mise en œuvre de la
clause d’exception. Les solutions peuvent être distinguées en deux sens ; l’une consiste à
l’alternative cantonne l’article 4 § 5 dans son rôle exceptionnel pour écarter les rattachements
rigides inappropriés au cas d’espèce. L’autre, c’est la doctrine dominante en France qui repose
sur la solution : ainsi les paragraphes 2, 4 et 5 de l’article 4 n’étant pas considérés comme
517
fondés sur un même rang. Pour ces raisons la solution donnée par la Cour de cassation est
très critiquée. La question peut se poser dans le sens que si l’on peut laisser la présomption
de l’article 4 § 2 pour rechercher directement la loi qui présente les liens les plus étroits selon
l’article 4 § 5. Il semble que la réponse des juges du fond est positive malgré un certain
consensus pour condamner ce raisonnement.

277. Dans ce cas, la réponse à l’une des questions préjudicielles qui sont de l’origine d’un
arrêt de la CJCE mérite bien d’être analysée. En l’espèce, la Cour a estimé en ce sens que la
présomption de l’article 4 § 2 de la Convention sera écartée si la loi qu’elle désigne n’est pas
celle qui présente les liens les plus étroits avec le contrat bien que ladite loi présente un
518
rattachement caractérisé avec ce dernier : « l’objectif principal de l’article 4 de la
Convention consiste à faire appliquer au contrat la loi du pays avec lequel celui-ci présente
les liens les plus étroits, ledit article 4.5 permet au juge saisi d’appliquer, dans tous les cas de
figure, le critère qui permet d’établir l’exigence de tels liens, en écartant les présomptions si
celles-ci ne désignent pas le pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits ».
Par conséquent, elle a affirmé ainsi : « lorsqu’il ressort clairement de l’ensemble des
circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un pays autre que celui qui
est déterminé sur la base de l’un des critères prévus audit article 4, paragraphes 2 à 4, il

517
Cass. com., 19 décembre 2006, D. 2007. Pan.1751, obs. P. Courbe ; ibid. Pan. 2562, obs. L. d’Avout et S.
Bollée ; D. 2008.Pan.1240, obs. H. Kenfack ; RCDIP.2007.592, note P. Lagarde ; RDC.2007.467, obs. P.
Deumier ; RTD com. 2007.628, obs. P. Delebecque.
518
CJCE, 6 octobre 2009, aff. n° C-133/08, Balkenende, préc., supra note n° 81.

212
appartient au juge d’écarter ces critères et d’appliquer la loi du pays avec lequel ledit contrat
est plus étroitement lié ». C'est-à-dire que même que le juge aura déterminé la loi susceptible
d’être appliquée au recours des présomptions, il incombe toujours à celui-ci de vérifier si
ladite loi est celle qui présente les liens plus étroits au contrat. La décision de la CJCE est
surprenante, ou on peut dire regrettable, car elle a affaibli les présomptions de l’article 4,
paragraphe 2 à 4. Dans ce cas a-t-on perdu l’objectif de sécurité juridique ? En effet lorsque
l’on laisse les juges avec cette position ; la recherche de loi qui présente les liens plus étroits,
519
ils terminent fréquemment par appliquer la loi du for , comme l’affirme la ligne de
520
jurisprudence française .

278. Certes, le Règlement Rome I a modifié la formulation de Convention de Rome,


l’article 4 § 3 (R) exige désormais que le contrat présente des liens « manifestement » étroits
avec le contrat pour que la mise en œuvre d’une clause d’exception soit possible. Le terme
« manifestement » ajouté à cette disposition a pour but de renforcer le caractère exceptionnel
521
de son utilisation et de diminuer la grande latitude laissée aux juges . L’interprétation de la
Convention doit normalement être faite à la lumière du nouveau règlement qui va peu à peu
remplacer la première. Mais il semble que la CJCE a manqué d’en tenir compte.

279. Conclusion du paragraphe et de la section. A défaut du choix des parties


contractantes de la loi applicable, le juge doit la déterminer en tenant compte de la méthode
du principe des liens les plus étroits comme la vocation concurrentielle qui a été adoptée par
la Convention de Rome de 1980. Donc le schéma de trois étapes, a priori, est appliqué.
Compte tenu de la sécurité juridique, cette méthode présente un point faible sur cette issue.
Pour M. B. Audit, cette méthode a largement écarté la prévisibilité d’une solution bien qu’elle
réponde aux exigences d’une analyse fonctionnelle en désignant la loi appropriée du contrat.
La meilleure solution semble consister à une approche qui concilie la présomption préétablie
et la proper law résultant de la convergence des points de contact par le juge. Dès lors, la

519
F. Jault-Seseke, « Loi applicable au contrat : première interprétation de la Convention de Rome par la
CJCE », Note sous arrêt CJCE, 6 octobre 2009, aff. C-133/08, D., 2010, n° 4, p. 238.
520
CA Versailles, 6 février 1991, D. 1992.174, note J.-D. Mondoloni ; RCDIP.1991.745, note P. Lagarde ;
RTD civ. 1992. 387, obs. J. Mestre ; RTD eur. 1992. 529, ons. H. Gaudemet-Tallon ; JDI.1992.125, note J.
Foyer ; TGI Poitiers, 22 décembre 1999, RCDIP.2001.670, note P. Rémy-Corlay ; CA Paris, 12 octobre 2000,
D., 2002, Somm. 1394, obs. B. Audit ; Cass. com., 4 mars 2003, RCDIP.2003.285, note P. Lagarde ;
JDI.2004.197, obs. A. Huet ; Cass. soc., 23 mars 2005, RDC.2005.1181, note D. Bureau.
521
V. en ce sens S. Corneloup, JCP (G) 2008. I. 205.

213
proclamation de recherche des liens les plus étroits pour l’appréciation du principe de
proximité a été écartée par un nouveau Règlement Rome I. Elle est remplacée par l’adoption
des six rattachements fixes pour chaque catégorie du contrat. Il est difficile de conférer au
juge toutes présomptions du rattachement, par ailleurs il est impossible d’énumérer toutes les
présomptions de la prestation caractéristique. C’est la raison pour laquelle le nouveau
règlement a toujours retenu la détermination des liens les plus étroits à vocation subsidiaire.

214
280. Conclusion du chapitre. A défaut de choix de la loi applicable au contrat, la méthode
combinatoire semble répondre le mieux à la proximité de la pratique des contrats
internationaux. Car, il peut énumérer toutes les présomptions de la prestation caractéristique.
D’ailleurs, il est difficile de conférer au juge toutes présomptions du rattachement.
Parlant de la Thaïlande, comme l’on a vu, le droit international privé thaï se rattache
toujours au critère de nationalité, même en matière d’obligation contractuelle. Nous n’avons
pas encore l’occasion d’introduire le principe des liens les plus étroits dans la législation. Il
semble que le législateur ne voit aucun intérêt d’en parler. En effet il est irrationnel de garder
toujours ces rattachements traditionnels dans cette matière. Il est possible d’en déduire que
lorsque le juge ne fait pas recours à la règle de conflit de lois, c’est qu’il n’attache aucune
importance et aucun intérêt à son application. Il n’est pas très surprenant s’il n’y a pas de
terrain pour qu’une telle règle se développe. La nouvelle loi chinoise sur la règle de conflit en
matière contractuelle qui est entrée en vigueur le 1er avril 2011 a détaché radialement du
critère de nationalité. Cette loi a adopté les nouveaux rattachements couramment utilisés par
la règle conflictuelle européenne lesquels considérés plus aptes à régler les conflits de lois
dans la matière, telle que la loi du lieu de la résidence habituelle de la partie dont
l’accomplissement des obligations peut mieux exprimer les caractéristiques du contrat ou la
loi qui présente un lien les plus étroits avec le contrat. Par ailleurs, la loi chinoise dispose
aussi la règle de conflit en matière de protection des parties faibles. Alors que la tendance de
législation en Thaïlande est en faveur de l’élaboration de droit substantiel dit « spécifique »
pour chaque contrat international tel que le contrat de vente, le contrat de transport, plutôt que
de reconsidération des rattachements de la règle de conflit de lois. Est-il temps de réviser les
règles conflictuelles thaïes en matière de contrat ?
Par ailleurs, on sait que le mécanisme de règle de conflit de lois peut toujours désigner
la loi étrangère, tant celle qui résulte de législation du droit conventionnel de règle de conflit
que celle qui résulte de celle de droit commun (le droit thaï). Certes, l’application de la loi
étrangère devant les juges sera régie par la règle de droit commun que nous avons étudiée, le
renforcement de l’application de ladite loi étrangère est nécessaire. Cependant le droit français
permet aussi aux parties contractantes de soumettre leur litige à une loi autre que celle
désignée par la règle de conflit. On peut dire qu’il en résulte du principe de l’autonomie de la
volonté en droit procédural.

215
281. Conclusion du Titre. On ne peut pas nier l’importance des rattachements
traditionnels tels que la nationalité commune, le domicile des parties, le lieu d’exécution du
contrat. Cependant le rôle des rattachements traditionnels semble diminuer notamment en
matière contractuelle, la pratique démontre que ces rattachements ne sont plus suffisants pour
régler les problèmes de conflit de lois. La nationalité commune des parties peut être un bon
rattachement pour le statut personnel mais on constate que la résidence habituelle est plus apte
pour justifier les liens étroits entre le rapport contractuel et un pays donné. Par ailleurs on ne
peut pas conclure dans tous les cas que les parties contractantes de même nationalité
souhaiteront toujours faire régir leur contrat par leur droit national commun. Les nouveaux
rattachements employés dès la Convention de Rome de 1980 pris par le règlement Rome I, y
compris certains rattachements fixes, témoignent de ce changement. Hormis les problèmes de
rattachement, il y a la possibilité d’appliquer la loi étrangère désignée par la règle de conflit à
ce stade. L’absence du choix de la loi applicable ne signifie pas que cette possibilité a été pour
autant supprimée. Mais le raisonnement diffère selon qu’il y a choix exprès ou non de la loi
par les parties. Les parties ne savent pas à l’avance par quelle loi étatique régira le litige en
l’absence de choix. De surcroît elles ont l’opportunité de soustraire ladite loi en concluant un
accord procédural. Là aussi, le principe de l’autonomie de la volonté est consacré ; les parties
sont libres au stade du déroulement de procès de choisir la loi du for même si la règle de
conflit désigne la loi étrangère.
Pourtant, le principe de l’autonomie de la volonté n’est pas absolu, il envisage
également certaines limites que les juges français et thaïlandais devront respecter. C’est la
méthode créée par l’ordre juridique du for pour protéger ses valeurs fondamentales que l’on
verra par la suite.

216
Titre Troisième

LIMITES AU PRINCIPE DE L’AUTONOMIE DE LA VOLONTE

282. Lois de police et mécanismes correctifs de l’ordre juridique du for. Nous avons
étudié le principe de l’autonomie de la volonté dans le contrat international. Bien que ce
principe soit presque unanimement reconnu, tous les États se réservent encore le droit de
recourir à leurs propres lois lesquelles sont considérées comme absolument impératives
nonobstant le choix d’une autre loi par les parties, sans que le champ d’exception ne soit
autrement précisé. Il y a un autre mécanisme du for qui joue un rôle très important dans la
mesure où il écarte immédiatement le jeu de la loi étrangère sans intermédiaire de la règle de
conflit ; c’est un mécanisme de lois de police. On peut dire que lois de police sont une
exception du mécanisme de règle conflictuelle. Certes, la dissociation entre ces mécanismes
de défendre des valeurs fondamentales de l’ordre juridique est délicate puisqu’il n’est pas
facile d’identifier d’une façon précise leurs champs d’intervention respectifs et les notions
générales entre les lois de police et l’exception d’ordre public international. La différence
entre les deux notions a bien apparu au sein des ordres juridiques étatiques, chacune a fait
l’objet de réflexions particulières et a acquis un régime juridique propre, ce qui leur permet de
faire face à une véritable opposition des notions. Cependant, lorsqu’il présente de techniques
particulières, il est même possible de considérer que dans certaines circonstances l’exception
d’ordre public international et les lois de police se rassemblent et deviennent indissociables.

283. On sait que le principe de l’autonomie de la volonté n’est pas toujours absolu. Par
exemple le dépeçage du contrat que nous avons déjà étudié confronte aussi à des limites, en
droit thaï comme en droit français. Dans ce cas les lois de police rentrent en jeu, le système du
dépeçage du contrat ne peut pas s’opposer aux dispositions impératives concernant tel ou tel
élément du contrat. D’ailleurs, le respect de la cohérence du contrat est indispensable. Dans
certains cas, les éléments du contrat sont dissociables les un des autres et ils pourraient être
soumis à des lois différentes selon le choix des parties : la limitation de la responsabilité du
522
vendeur, la réserve de propriété, la garantie des vices cachés , la clause de force majeure,
ou le cas pour une convention d’arbitrage.

522
Y. Loussouarn, Droit international privé, 9e éd., Paris : Dalloz, 2007, p. 463-464.

217
De même qu’au stade de jeu normal du mécanisme de la règle de conflit, supposons
que la teneur de la loi étrangère soit établie et qu’elle ne soit pas dénaturée, son application
doive affranchir les derniers obstacles : l’ordre public international et la fraude à la loi.
En raison du caractère neutre, la règle de conflit peut désigner et désigne fréquemment une loi
étrangère. Il arrive parfois que la loi étrangère désignée contient des dispositions qui semblent
incompatibles avec les principes fondamentaux du for. Pour cette raison le for crée un
système pour défendre ses valeurs fondamentales et ses politiques législatives. La loi
étrangère normalement applicable est évincée en raison de sa contrariété à l’ordre public
international, et lorsqu’il y a fraude à la loi en cause. Force est de constater que les deux
moyens sont apparus en tant que mécanismes correctifs de la règle conflictuelle, afin de
rendre applicable la loi la plus compatible au litige puisque le for ne peut pas et ne veut pas
tolérer à ce sort de « violation » de ses principes de justice universelle qui contiennent des
valeurs internationales absolues.

284. Nous étudierons d’abord les deux mécanismes distincts par leurs fonctions : les lois de
police et l’exception d’ordre public (Chapitre I). Ensuite, un autre mécanisme correctif de
l’application de la loi étrangère consacré par le for qui jouera le rôle lorsque l’action des
individus ne s’oppose pas directement à la loi ou aux principes fondamentales mais ils ont
essayé de soustraire à son application. Le système juridique du for ferait le recours à la notion
de fraude en droit international privé (Chapitre II).

218
Chapitre Premier
LOIS DE POLICE ET L’EXCEPTION D’ORDRE PUBLIC :
DEUX MECANISMES DISTINCTS.

285. Le droit international privé ne devrait pas être un outil d’évasion du système de droit
national, dès lors toutes règles impératives étatiques doivent être respectées. Lorsque l’on
parle du « mécanisme correctif » de l’ordre juridique du for, ceci fait penser également au
mécanisme du droit international privé qui a pour l’objet de rectifier la loi choisie par les
parties ou même de limiter la volonté de celles-ci. Pour cette raison nous plaçons le
mécanisme de lois de police dans ce chapitre, bien qu’il joue le rôle comme un mécanisme
523
d’exception de règle de conflit de lois d’après certain auteur . Suite aux lois de police ou loi
d’application immédiate, un mécanisme indispensable qui joue un rôle très important dans
l’ordre juridique du for est l’exception d’ordre public en droit international privé, un
mécanisme correctif efficace du for. Il laisse jouer la règle de conflit de lois en plein droit qui
peut désigner la loi étrangère. Mais lorsque cette loi étrangère est contraire aux valeurs
fondamentales censées être sauvegardées par l’ordre juridique du for, l’exception d’ordre
public jouera son rôle afin d’écarter ladite loi étrangère.
Les conceptions de lois de police, loi d’application immédiate et l’exception d’ordre
public international sont très avancées en France car elles font partie des sujets importants
dans ce domaine depuis longtemps. En Thaïlande, le débat sur ce sujet n’est pas encore
ouvert, nous essayons d’étudier ces mécanismes sous l’égide de la pensée juridique française
et européenne. Hormis ces deux mécanismes, il nous convient de voir aussi l’intervention
d’ordre public transnational qui peut être envisagée très souvent dans les contrats
internationaux en appliquant le droit non-étatique, malgré son existence critiquable.

286. Nous verrons d’abord la distinction entre les premiers mécanismes qui font l’objet du
débat théorique : lois de police et lois d’application immédiate (Section I). Ensuite nous nous
intéressons spécifiquement à l’exception d’ordre public en droit international privé des
contrats (Section II).

523
P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, « Les conceptions fondamentales sur les contrats de droit privé à caractère
extranéité », Thammasat Law Journal, vol. 25, n°3, Sept. 1995, p. 535 et s.

219
Section I
Lois de police et lois d’application immédiate.

287. Les lois de police s’appliquent immédiatement sans tenir compte aux règles
conflictuelles, à la différence de l’ordre public international. On peut dire que les lois de
police défendent la politique du moment, et la méthode des lois de police n’est pas pour
sauvegarder les valeurs du for face à la loi étrangère inadmissible par l’ordre juridique du for,
mais elle est là pour assurer à la loi de police le domaine d’application qui lui revient en
fonction de ses objectifs.
Nous verrons d’abord l’incidence des lois de police (§ 1), ensuite celles qui jouent le
rôle considérable en droit international privé thaï et qui posent beaucoup de questions pour les
juristes (§ 2).

§ 1 : L’incidence des lois de police.

288. Position dans le système de droit international privé. Les lois de police sont en
effet des règles de droit international privé qui définissent le champ d’application
internationale de certaines règles matérielles internes, sans recourir à la méthode
524
conflictuelle . Dans certaines situations privées internationales, il paraît que l’application
de ces dispositions sera indispensable au regard du but qu’elles poursuivent. S’agissant de la
place des lois de police dans le système de droit international privé, elles ont été définies
comme lois d’application immédiate en raison de leur caractère qui s’applique
525
« immédiatement » , quelques soient les éléments d’extranéité en cause. A priori, sans tenir
compte de la règle de conflit, mais de la délimitation unilatérale de leur domaine
d’application : délimitation antérieure et indépendante de toute règle de conflit. La fonction
de lois de police présente un danger prévisible, car la possibilité de l’application de loi
désignée par le mécanisme de règle conflictuelle est radicalement bloquée. Alors,
l’interprétation selon laquelle une telle ou telle disposition est loi de police devrait être

524
M.-L. Niboyet, Droit international privé, 2e éd., Paris : LGDJ, 2009, n° 190, p. 119.
525
La notion de loi d’application immédiate est utilisée pour la première fois dans la thèse de M. Francescakis,
La théorie du renvoi et les conflits de systèmes en droit international privé, Paris, 1958, p. 11 et s. En effet
l’auteur a constaté que dans certaines circonstances le juge français appliquait la loi française sans passer par le
mécanisme de règle de conflit classique. C’est un jeu de droit français qui est « immédiate » par rapport à
l’application « médiate » qui résulte du jeu de la règle de conflit.

220
exercée très prudemment. Contrairement, l’exception d’ordre public s’applique une fois après
que la règle de conflit a joué son rôle, mais lorsque la loi étrangère a été désignée et que son
application portera atteinte aux principes fondamentaux du for, elle sera écartée par le
mécanisme de l’exception d’ordre public.

289. Certaines règles semblent être qualifiées de lois de police mais ce n’est pas pour tous
les cas ; la différence par rapport à une règle de conflit unilatérale existe. La loi de police ne
gouverne pas une institution déterminée mais uniquement un aspect d’une institution dans
certaines situations. En revanche, il faut rappeler que, la règle de conflit unilatérale est une
règle de droit international privé qui délimite le champ d’application international des règles
526
matérielles du droit du for régissant certain type de questions . Par exemple l’article 309 du
Code civil n’est pas la loi de police, ou bien les effets des règles françaises sur la possession
d’état quand l’enfant et ses parents sont domiciliés sur le territoire français. Un autre exemple
pour l’article 370-4 du Code civil qui stipule que « Les effets de l’adoption prononcée en
France sont ceux de la loi française » ; cet article doit être analysé comme une véritable règle
de conflit unilatérale.
Nous étudions tout d’abord la notion de lois de police qui est toujours l’objet du débat
(A). La question peut se poser si le juge doit respecter les lois de police du for et qu’en serait-
il pour les lois de police étrangères (B) ?

A. La notion des lois de police et lois d’application immédiate.

290. Les lois de police ont véritablement attiré l’attention depuis le milieu du XXe siècle.
On accepte qu’il ne soit pas facile de déterminer la notion définitive des lois de police. Afin
d’éviter une conception trop extensive des lois de police, nous envisageons rapidement la
détermination de notion et de critère de ces lois.

291. Identification des lois de police. Il existe des critères dits « formalistes » qui
permettent de découvrir son identité : d’une part, la volonté du législateur selon laquelle le
caractère de lois de police se présente vers une loi lorsque le législateur détermine le domaine
d’application dans l’espace de la loi qu’il édicte, il manifeste sa volonté en posant certaine

526
M.-L. Niboyet, op.cit., n° 151 et 152, p. 89 et s.

221
limite sous forme de règle unilatérale. Cependant cet argument est critiquable car ce critère
semble se reposer sur une interprétation divinatoire de la volonté du législateur. D’autre part,
lorsque le législateur non seulement prévoit expressément le champ d’application de la loi
qu’il édicte, mais lui attribue aussi un domaine plus étendu que celui qui résulterait
527
normalement d’une règle de conflit . Il nous convient d’étudier certaines lois de police
thaïlandaises lesquelles suivent la direction du seconde approche. Le problème peut se poser
comment peut-on déterminer les lois de police en l’absence de volonté expresse du
528 529
législateur ? Selon la conception de MM. De Nova et Graulich , le critère des lois
d’application immédiate doit être trouvé dans les buts exprimés par la loi du for. Autrement
dit, la volonté ne peut apparaître que dans le contenu des dispositions de la loi en question et
des objectifs que cette loi révèle.

292. Francescakis a fondé le critère des lois d’application immédiate sur « l’élément
530
d’organisation étatique qu’elles reflètent » . Cet auteur a même accepté que cette notion
s’étende à « tout élément d’organisation juridique qui intéresse directement la société
531
étatique » . Il allait jusqu’à des types d’organisation en cause, pour lui il s’agit de ceux qui
532
sont « d’importance vitale pour l’État » , c'est-à-dire d’assurer ses objectifs sociaux ou
économiques. Francescakis a même proposé une définition de ces lois, les lois de police
seraient les lois « dont l’observation est nécessaire pour la sauvegarde de l’organisation
533
politique, sociale ou économique du pays » . Il semble qu’il reste toujours sur l’idée de

527
A. Toubiana, Le domaine de la loi du contrat en droit international privé : contrats internationaux et
dirigisme étatique, Bibliothèque de droit international privé, vol. XIV, Dalloz, 1972, H. Batiffol et Ph.
Francescakis (dir.), p. 220 et s.
528
R. de Nova, « Conflits de lois et normes fixant leur propre domaine d’application », in Mél. offerts à Jacques
Maury, Paris : Dalloz, t. I, 1960, p. 382.
529
P. Graulich, « Règles de conflit et règles d’application immédiate », in Mél. en l’honneur de Jean Dabin,
Droit positif, Bruxelles : Bruylant, 1963, t.II, p. 632. Cet auteur distingue lois d’application immédiate en deux
sortes : les unes reposent sur une assimilation de la relation internationale à une relation interne en raison de la
finalité de la loi du for, les autres reposent sur le fait qu’un national est en cause. Un exemple des dernières est la
loi thaïe de 1991 relative au transport international de marchandises par voie maritime.
530
Ph. Francescakis, « Conflit de lois », Rép. D. Dr. int., n° 125.
531
Id., n° 126.
532
Id., n° 127.
533
Cf. Ph. Francescakis, « Quelques précisions sur les « lois d’application immédiate » et leurs rapports avec
les règles de conflits de lois », RCDIP.1966.1 et s. Cet auteur a affirmé que la nature des lois d’application

222
traduire les objectifs sociaux ou économiques du législateur. En effet cette définition est jugée
plus nuancée car on peut constater que dans les États modernes, toute loi tend à garantir des
intérêts économiques ou sociaux. D’après M. Y. Loussouarn, il n’y a pas de différence de
534
nature entre les lois de police et les autres lois sauf la différence de degré . Il s’agit du
critère finaliste de la théorie moderne des lois d’application immédiate.

293. Une autre critique a porté sur le critère de l’implication de l’organisation étatique qui
ne devrait pas être lié à l’intervention d’un service public. Par conséquent la notion de zone
grise, selon Francescakis, peut le remédier. Il s’agit d’une idée que l’on peut trouver une loi
535
de police dans une telle zone où le droit public et le droit privé se marient . Cependant on
peut trouver ce constat dans les travaux antérieurs comme par exemple celui de M.
536
Neumayer . Hormis ce problème, on se demande si le droit public pouvait faire partie des
lois de police ? Sur ce point, Francescakis avait affirmé dans ses écrits que les termes de lois
537
de police pouvaient être retenus en tant que coextensifs de « droit public » . Autrement dit,
538
les lois dites de droit public trouvent aussi leur place dans la méthode des lois de police .
En effet on peut trouver que les lois de police intégreraient des lois qui ne sont pas de droit
privé pur pour que celles-ci ne cantonnent pas le conflit de lois au droit privé au sens strict.
539
En ce qui concerne l’opinion de M. P. Kinsch , il avait estimé que les règles de droit public
peuvent être intégrées dans le concept plus large de lois de police. Il faut faire une répartition
entre deux normes pouvant être intégrées dans cette catégorie de loi : les lois de police
contractuelles qui sont des règles de décisions ayant pour objet d’imposer impérativement un
certain contenu au rapport contractuel ; et les règles de conduite qui ont pour but de

immédiate est révélée par leur objet, et qu’elles sont les dispositions qui résultent de la prise en charge par
l’organisation étatique des intérêts communs.
534
Y. Loussouarn, « Cours général de droit international privé », RCADI.1973.II.133.
535
Ph. Francescakis, Annuaire de l’IDI, Session de Wiesbaden, 1975, vol. 56, p. 192, spéc. p. 195.
536
Neumayer, « Autonomie de la volonté et dispositions impératives en droit international privé des
obligations », RCDIP.1957.579 et RCDIP.1958.53, spéc. p. 60 et 69.
537
Ph. Francescakis, Annuaire de l’IDI, op.cit., p. 196.
538
Ph. Francescakis, « Quelques précisions sur les lois d’application immédiate », RCDIP.1966.1, spéc. p. 15 ;
ibid., « Lois d’application immédiate et règles de conflit », RDIPP.1967.691, spéc. p. 695.
539
P. Kinsch, Le fait du prince étranger, Paris : LGDJ, 1994, préf. J.-M. Bischoff.

223
540
réglementer un comportement pouvant être d’origine contractuelle . Cette thèse paraît être
acceptée de nos jours.

294. La Convention de Rome de 1980 a adopté la définition de Francescakis dans son


article 7 § 1. Il semble inclus dans cet article les règles de droit public comme celles de droit
privé car il n’y a aucune réserve dans cet article des normes de droit public. Dès lors il est
541
possible de conclure ici que les dispositions de cet article visent ce genre de règles .
Affirmant par les écrits de M. P. Lagarde sur la Convention de Rome, cet auteur a cité des
exemples destinés à illustrer que l’article 7 § 1 sont des règles de droit public dans le sens
542
large .
Tandis que la notion de loi de police est plus spécifique que celle de loi d’application
immédiate, on peut dire que les lois d’application immédiate ne sont pas nécessaires d’être les
543
lois de police , mais il est très exceptionnel. C’est la raison pour laquelle on peut
544
considérer que ces deux expressions sont synonymes . Toutefois, on accepte l’intérêt de
distinguer les deux notions car il permet la répartition des règles intervenant de façon
545
immédiate des règles qui ne méritent pas ce statut .

295. Le dernier constat que l’on peut observer afin de déterminer les lois de police porté sur
la technique de rattachements. Les lois d’application immédiate utilisent une technique de
rattachement similaire à celle des règles de conflits ; la nationalité, la situation des biens, la

540
Id., n° 302.
541
Contra. A. Kassis, Le nouveau droit européen des contrats internationaux, Paris : LGDJ, 1993, n°442 et s.
542
P. Lagarde, « Examen de l’avant-projet de convention CEE sur la loi applicable aux obligations
contractuelles et non-contractuelle », TCFDIP 1971-1973, p. 147 et s ; ibid., « Le nouveau droit international
privé des contrats après l’entrée en vigueur de la Convention de Rome », RCDIP.1991.287.
543
V. sur ce point, P. Mayer, « Les lois de police étrangères », JDI.1981.277, spéc. n°13 et s., p. 287 et s.
D’après cet auteur il existe un lien rationnel entre le champ d’application de lois de police au sens strict et son
contenu, alors qu’un tel rapport n’existe pas pour les lois d’application immédiate non de police. Mais la
question peut se poser qui pourrait affirmer que dans une telle hypothèse il existe bien le lien rationnel et il ne
l’est pas dans une autre.
544
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 189, p. 119 ; Cf. N. Nord, Ordre public et lois de police
en droit international privé, Thèse, Strasbourg III, 2003, n°59, p. 33. Cet auteur a proposé de ne pas distinguer
entre les deux notions, les lois de police et les lois d’application immédiate et de les appliquer sous l’expression
générique de lois de police.
545
Cf. P. Mayer, « Les lois de police étrangères », op.cit., n°17, p. 291-292. Il a estimé que l’expression de lois
de police devrait être réservée aux lois d’application immédiate « dont la teneur ou le but appellent leur
application à des situations qui ne leur sont pas soumises par la règle de conflit ».

224
situation d’un marché concerné, le lieu de conclusion d’un acte ou le lieu sur lequel une
activité a été dirigée pour le domaine du commerce électronique. Force est de constater que
les situations internationales qui seraient régies par les lois de police ou les lois d’application
immédiate doivent présenter un élément prédéterminé de rattachement avec elles.

B. L’intervention de lois de police du for et lois de police étrangères.

296. A priori, les lois de police interviennent de façon immédiate sans aucune application
de la règle de conflit de lois. Certes, le juge devra appliquer ses lois de police du for, ceci est
logique, mais il reste à savoir si le juge devrait appliquer les lois de police étrangères ?

1) L’argument sur les lois de police du for.


a. Lois de police au sens de la Convention de Rome du 19 juin 1980.
297. En effet l’article 7 de la Convention de Rome n’utilise pas le terme « loi de police »,
mais « dispositions impératives » lesquelles gouvernent la notion de lois de police et d’autres
546
termes comme prévu .
On trouve que le texte de cette convention international ne définie pas la notion des
lois de police, donc chaque juge devra consulter son propre système juridique pour la
détermination des lois de police. Cependant le souci sur l’application diverse par les tribunaux
des États membres leur loi nationale de police est réglée à travers le contrôle exigé par l’ordre
communautaire. Il s’agit du contrôle de la loi nationale de police, ce contrôle fait perdre aux
lois de police leur caractère de loi d’application immédiate. Il a pour objet de contrôler la
conformité de la loi nationale qui revendique son application au principe de libre circulation.
Par conséquent, la loi nationale de police interviendra dans les hypothèses de l’absence de
champ d’application du droit communautaire dérivé.

298. Quant à la notion de lois de police au sens communautaire, la CJCE a défini dans son
arrêt Arblade du 23 novembre 1999 les lois de police comme « des dispositions nationales
dont l’observation a été jugée cruciale pour la sauvegarde de l’organisation politique,
sociale ou économique de l’État membre concerné au point d’en imposer le respect à toute
personne se trouvant sur le territoire national de cet État membre ou à tout rapport juridique

546
Pour certains auteurs la différence entre les deux termes existe, d’après M. P. Mayer il a proposé une
distinction entre lois d’application immédiate et lois autolimités. (Cf. P. Mayer, « Les lois de police étrangères »,
loc.cit.)

225
547
localisé dans celui-ci » . La Cour a en suite consacré clairement le contrôle des lois de
police en estimant dans le même arrêt : « L’appartenance de règles nationales à la catégorie
des lois de police et de sûreté, ne les soustrait pas au respect des dispositions du traité, sous
peine de méconnaître la primauté et l’application uniforme du droit communautaire. Les
motifs à la base de telles législations nationales ne peuvent être pris en considération par le
droit communautaire qu’au titre des exceptions aux libertés communautaires expressément
prévues par le traité et, le cas échéant, au titre des raisons impérieuses d’intérêt
548
général » .

299. A priori, la CJCE a le pouvoir d’interpréter les normes communautaires qui peut
conduire à considérer si telles normes ont le caractère de lois de police européennes. La
question peut se poser si toutes les règles issues de droit dérivé sont-elles les lois de police ?
Car normalement les règles de droit dérivé sont considérées comme impératives. Il nous
549
convient de citer ici l’arrêt Ingmar s’agissant du contrôle par la CJCE sur la qualification
des lois de police. En l’espèce, la CJCE a estimé que la loi anglaise de transposition de la
directive sur les agents commerciaux de 1986 devait être impérativement respectée au profit
d’un agent commercial (Ingmar) en exercice dans un État membre (le Royaume-Uni),
indépendamment du choix de la loi applicable par les parties (la loi californienne) et
indépendamment de la circonstance que le commentant était établi dans un pays tiers (la
Californie). L’idée est que tous les agents exerçant leur activité sur le territoire
communautaire doivent être soumis au même régime sous peine de conférer à certains
commettants un avantage concurrentiel indu. La CJCE a justifié l’impérativité internationale
de cette directive à travers la protection des agents commerciaux.
D’après Mme. M.-L. Niboyet, si toutes les normes communautaires visant à
rapprocher les législations de États membres pour diminuer les distorsions de concurrence
doivent être qualifiées de loi de police, il en résulte que toutes les directives doivent accéder à
550
la qualité de normes impératives . Il s’agit des « lois de police à géométrie variable » une

547
CJCE, aff. C-369/96 et C-6376/96, 23 novembre 1999, Arblade, pt. 30., JDI.2000.493, note M. Luby ;
RCDIP.2000.728, note M. Fallon.
548
L’arrêt précité.
549
CJCE, aff. C-381/98, 9 novembre 2000, Ingmar, RCDIP.2001.112, note L. Idot; JCP (E) 2001.12, obs. J.
Raynard
550
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n°198, p.126.

226
551
nouvelle catégorie de lois de police . Il semble que ce constat est plus net. On peut
constater que la directive agents commerciaux n’aurait pas eu sa place dans la loi de police
lorsque le litige avait mis en scène une relation intra-communautaire c'est-à-dire si le choix de
la loi applicable au contrat avait porté sur la loi d’un État membre ayant procédé à la
transposition de cette directive. Dès lors, une norme communautaire ne devient une loi de
police que dans les situations internationales, dans lesquelles les parties ont désigné la loi
d’un État tiers et le cas où l’agent exerce son activité sur le territoire d’un État membre.
Cependant, il est à noter que la solution de la CJCE est contraire au cas similaire jugé par la
552
Cour de cassation .

b. Lois de police au sens du Règlement (CE) n° 593/2008.


300. Ce nouveau règlement communautaire définit les lois de police dans l’article 9 § 1
ainsi : « Une disposition impérative dont le respect est jugé crucial par un pays pour la
sauvegarde de ses intérêts publics, tels que son organisation politique, sociale ou
économique, au point d’en exiger l’application à toute situation entrant dans son champ
d’application, quelle que soit par ailleurs la loi applicable au contrat d’après le présent
règlement ». En effet cette définition n’est pas nouvelle, car le règlement reprend les
éléments donnés de la jurisprudence communautaire laquelle a été inspirée par Francescakis.
553
C’est l’arrêt Arblade de la CJCE précité, qui avait pris en compte de la définition initiale
en ajoutant le terme « crucial ».
On peut dire que le règlement a adopté la notion de lois de police d’un degré plus
élevé d’impérativité. Bien que la loi applicable au contrat soit une loi désignée d’après ce
règlement, une telle loi ne produit aucun effet si elle viole la disposition de lois de police de
juge du for (art. 9 § 2) et aussi les lois de police étrangères (art. 9 § 3).

2) L’argument sur les lois de police étrangères.


301. La notion de lois de police étrangères n’est autre que celle de lois de police tierces.
Les dernières ne relève ni de la lex fori, ni de la lex causae alors que les lois de police
étrangères sont celles qui sont l’unité de la loi étrangère désignée par la règle de conflit.

551
Cf. L. Idot, « Domaine spatial du droit communautaire des affaires », TCFDIP.1992.145 ; Les conflits de
lois en droit de la concurrence, JDI.1995.321.
552
Cass. com., 28 novembre 2000, JDI.2001.511, note J.-M. Jacquet.
553
CJCE, aff. C-369/96 et C-376/96, 23 novembre 1999, Arblade, préc., pt. 30.

227
Le problème de l’intervention des lois de police étrangères se pose notamment en matière
contractuelle, car dans cette matière le principe de l’autonomie de la volonté paraît inadapté
face à certains règlements impératifs. Dans les contrats internationaux, certaines règles
doivent être respectées ; celles du pays de conclusion ; celles du pays d’exécution ainsi que
554
celles d’autres pays concernés par la situation en cause . Cet auteur nous a montré la
possibilité de déroger la règle Savignienne classique et l’inopportunité de l’autonomie de la
555
volonté dans certaines situations . Cette approche a été affirmée par W. Wengler, un
partisan du respect aux lois de police étrangères, qui a également proposé d’appliquer les
dispositions impératives du for et d’un autre État tiers qui se veulent applicables autre que la
lex contractus. Cependant l’application de ces règles devrait se soumettre à deux conditions ;
la première, les dispositions impératives tierces ne doivent pas être contraire à l’ordre public
international du for ; la seconde, c’est une exigence d’un lien étroit entre l’État dont émanent
556
la règle et la situation en cause .

302. En ce qui concerne la nécessité d’une règle de rattachement relative aux lois
étrangères, désignant les lois de police autres que celles du système juridique applicable au
contrat, on peut se demander dans quel intérêt on pourra obtenir l’application des lois de
police étrangères ? Une décision classiquement citée rendue par Hoge Raad paraît pour la
557
première fois en admettant la nécessité de façon explicite . La Cour suprême néerlandaise
avait analysé la question d’application de règles impératives belges à un contrat de transport

554
L. De Winter, « De grenzen van de contractvrijheid in het international privaatrecht », Weekblad voor
Privaatrecht, Notarisambt en Registratie, 1940, 3675 et s. Cité par N. Nord, Ordre public et lois de police…,
op.cit., p. 346.
555
Pour bien illustrer, prenons un exemple, les parties ont choisi la loi thaïlandaise applicable au contrat du
transport. Les marchandises se trouvent au Japon édictant un embargo : l’interdiction d’exportation ces
marchandises. Alors le débiteur ne peut pas exécuter ses obligations en délivrant les marchandises à l’étranger.
Le créancier a porté plainte contre le débiteur devant la Cour française. Le juge français applique la loi thaïe
choisie par les parties, mais il peut aussi prendre en considération la loi japonaise pour savoir si elle constitue un
événement de force majeure selon la lex contractus.
556
W. Wengler, Die Anknüpfung des zwingenden Schuldrechts im internationalen Privatrecht, ZvglRWiss,
1941, p. 168. Cité par N. Nord, Ordre public et lois de police…, op.cit., p. 347.
557
Hoge Raad, 13 mai 1966, Alnati, RCDIP.1967.522, note Struycken. En l’espèce, il s’agissait d’un contrat de
transport maritime des pommes de terre d’Anvers à Rio de Janeiro. La marchandise étant arrivée endommagée à
la destination. Les compagnies d’assurances qui avaient indemnisé le destinataire réclamaient au transporteur le
remboursement. Il reste à savoir quelle loi régissait à la responsabilité du transporteur et de savoir si
l’exonération du transporteur prévue dans le contrat pouvait produire un effet à la causalité du dommage. Les
parties ont choisi la loi néerlandaise applicable au contrat, cependant le tribunal de Rotterdam comme la Cour
d’appel de La Haye, même pour les motifs différents, avaient retenu la compétence de la loi belge selon laquelle
le transporteur doit prouver que le dommage résulte d’un vice caché de la nature spéciale ou d’un vice propre de
la marchandise.

228
maritime. Elle a admis l’application des lois de police étrangère en affirmant que « bien qu’en
principe les parties choisissent la loi applicable à un contrat international, il peut arriver
que, pour un État étranger, l’observation de certaines de ses règles, même en dehors de son
territoire revête une importance telle que les juges doivent en tenir compte et dès lors les
appliquer de préférence au droit d’un autre État qui aurait été choisi par les parties pour
558
régir leur contrat » .

559
303. L’arrêt récent de la Chambre commerciale en 2010 dans lequel le principe de
l’applicabilité des lois de police étrangères a été affirmé explicitement. En l’espèce, deux
sociétés françaises avaient conclu un contrat ayant pour objet l’acheminement de viande
bovine de France au Ghana. La société Faudever, chargée d’organiser le transport de la
marchandise, a assigné un transporteur maritime danois. Car, ce dernier n’a pas pu délivrer la
marchandise à cause de la loi d’embargo appliquée unilatéralement par l’État du Ghana sur la
viande bovine d’origine française. Le transporteur a décidé de rapatrier la marchandise et de
remettre à la société vendeuse, la société Viol, qui a dû la vendre en urgence. Le vendeur a
porté plainte contre le transporteur afin d’obtenir indemnisation de son préjudice. Ce
transporteur a été condamné en appel en raison de la loi étrangère imposant l’embargo qui ne
serait pas opposable en France et n’aurait pas force obligatoire à l’égard des contractants
français. La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel, au visa de l’article 7 § 1 de la Convention
de Rome, en estimant qu’il était de l’office des juges du fond d’envisager la possibilité de
donner effet à la loi ghanéenne en tant que loi de police. D’après la Cour de cassation, « lors
de l’application de la loi d’un pays déterminé, il peut être donné effet aux dispositions
impératives de la loi d’un pays avec lequel la situation présente un lien étroit, si et dans la
mesure où, selon le droit de ce dernier pays, ces dispositions sont applicables quelle que soit
la loi régissant le contrat ». Force est de reconnaître que la Cour de cassation a eu
l’opportunité d’imposer indirectement aux juges du fond une nouvelle obligation. Lorsque le

558
Cependant le Hoge Raad a estimé en l’espèce que « les règles belges ne revêtent pas un caractère tel que le
juge néerlandais serait tenu, eu égard aux intérêts belges qui sont en cause relativement à l’application de ces
règles, de leur donner la priorité sur le droit néerlandais choisi par les parties ». D’après cette décision, force
est de constater que, autre que l’application, la prise en considération des lois de police étrangère n’est pas moins
importante. Car l’intérêt de ceci se présente dans le cas où un rapport de droit manifeste un lien étroit avec un
État sans que sa loi soit désignée par la règle de conflit du for.
559
Cass. com., 16 mars 2010, Sté Ap Moller Maersk A/S, n° 08-21.511, D. 2010.824, ibid. 2323, obs. L.
d’Avout et S. Bollée ; RTD com. 2010.457, obs. P. Delebecque ; JCP (G).2010.530, note D. Bureau et L.
d’Avout ; RDC.2010.1385, note P. Deumier.

229
conflit de lois fait l’objet du débat, les juges doivent rechercher les lois de police étrangères
éventuellement applicables au litige.
560
C’est la tâche du juge d’identifier la loi de police étrangère , comme on a constaté
dans l’arrêt du 16 mars 2010 précité ; la recherche d’une volonté de la loi étrangère de
s’appliquer en raison des finalités que celle-ci poursuit. Le juge doit tenir compte
complètement des conceptions étrangères en mettant de côté celles du for. Force est de
constater qu’il n’était pas difficile pour le juge dans l’arrêt du 16 mars 2010 d’identifier la loi
de police étrangère, car il était évident que la mesure d’embargo se voulait applicable à toutes
les importations de viande bovine française.

304. Selon la Convention de Rome, l’intervention de lois de police étrangère dépend des
conditions posées dans l’article 7 § 1. Tout d’abord, la situation concernée doit avoir un lien
étroit avec cette loi. Afin d’éviter le cas où le juge confronte à une application éventuelle de
plusieurs lois de police étrangères des États différents présentant tous les liens mais non des
561
liens étroits avec le contrat . Il faut constater que les dispositions en cause doivent être
considérées dans son pays d’origine comme lois de police. Le juge doit ensuite apprécier
l’opportunité de l’application de cette loi en tenant compte de sa nature, de son objet et de ses
effets. Pour cette condition, d’après Mme Gaudemet-Tallon, le texte ne donne aucune
précision. Bien que le juge reste libre dans ce cas, il faut justifier la nature et l’objet de la
disposition étrangère du point de vue des intérêts de l’État concerné ou de celui des
562
parties . Cependant il peut arriver le cas où les finalités de la loi de police étrangère ne
conforment pas aux intérêts légitimes de l’État du for, dans ce cas la loi de police du for doit
563
emporter la loi de police étrangère . On peut rapprocher cette opinion à celle de W.
Wengler précité.

560
J. Sagot-Duvauroux, « La mise en œuvre des lois de police étrangères par le juge français », Lexbase
Hebdo, le 27 mai 2010, n° 396, éd. Privée Générale. Disponible sur le site :
http://www4.lexbase.fr/lexbase/SilverStream/Pages/homepage.html : L’auteur a observé qu’il est difficile pour le
juge du for de rechercher la volonté du législateur étranger et des objectifs qu’il poursuit à travers les
dispositions législatives. Car la finalité d’une disposition est rarement évidente sans une connaissance plus large
du contexte juridique dans le quel elle s’inscrit. Bien que le juge appelle à l’analogie, les États ne défendent pas
les mêmes politiques économiques ou sociales. Cet auteur a affirmé, par ailleurs, qu’il paraît difficile de requérir
du juge français qu’il détermine lui-même les dispositions dont l’application est nécessaire pour que la politique
d’un État auquel il n’appartient pas soit respectée.
561
H. Gaudemet-Tallon, « Convention de Rome du 19 juin 1980 », J-Cl. Europe, 1996, Fasc.3201.
562
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 200, p. 127.
563
Id., n° 201, p. 128.

230
305. Quant au règlement Rome I, il existe la différence de l’article 9 à l’article 7 de la
Convention de Rome de 1980. Car le Règlement limite la possibilité de donner effet aux lois
de police étrangères. Le Règlement ne permet d’appliquer que les lois de police de l’État dans
lequel les obligations contractuelles du contrat ont été exécutées, et seulement dans la mesure
où ces lois rendent l’exécution du contrat illégale. Alors que la Convention traitait les lois de
police étrangère au même degré que celles du for.
Comme on le sait, la désignation des lois de police étrangères ne présente de
difficultés que lorsque celles-ci ne font pas partie intégrante du système juridique applicable
au contrat. Car si elles font parties de ce système, elles seront désignées en même temps que
la loi du contrat. A contrario, il n’est pas facile de déterminer son rattachement sur le plan
international. Le Règlement est plus strict concernant une réserve par rapport à la Convention
de Rome qui laisse la place ouverte pour les États membres de formuler la réserve, alors
564
qu’aucune disposition du Règlement Rome I ne permet d’y faire. Certains auteurs trouvent
que l’article 9 § 3 du Règlement permet aux parties d’échapper à l’application des lois de
police étrangères par le choix du juge compétent. Car les parties devraient respecter des règles
prohibitives du lieu d’exécution des obligations, mais pour celles de tierces, l’article 9 du
Règlement les rend inapplicables. A notre avis, il est possible que le législateur ne voie aucun
intérêt de respecter les lois de police tierces qui ne concernent pas directement le contrat.
Cependant, s’il y a plusieurs lieux d’exécutions du contrat (tous sont obligations principales),
il faut respecter les lois de police de chaque État concerné.

565
306. La Cour de cassation dans l’arrêt du 16 mars 2010 laisse la porte ouverte aux lois
de police étrangères, mais il faut rappeler qu’il s’agissait du contrat régi par la Convention de
Rome. Qu’en est-il pour les contrats qui sont sous l’empire du Règlement Rome I ? Un
566
auteur a affirmé que « le juge doit obligatoirement considérer les critères de l’article 9 § 3
du règlement s’agissant de décider du principe de la prise en compte des lois de police
étrangères. Car le juge dispose, une fois cette obligation accomplie, d’un pouvoir

564
Cf. D. Bureau et L. D’Avout, « Les lois de police étrangères devant le juge français du contrat
international », JCP (G) 2010, n° 19-20, le 10 mai 2010, p. 998 ; Cf. L. d’Avout, « Le sort des règles
impératives dans le règlement Rome I », Le règlement n°593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux
obligations contractuelles, dit « Rome I », présentation générale par S. Bollée et S. Lemaire, D. 2008, n°31, p.
2167.
565
Cass. com., 16 mars 2010, Sté Ap Moller Maersk A/S, préc.
566
R. Freitag, IPRax 2/2009.109, p. 111 cité par D. Bureau et L. D’Avout, loc.cit.

231
discrétionnaire d’appréciation quant à leur mise en application au regard du critère de
compatibilité des lois de police étrangères avec les valeurs internes du for ».

307. L’application des lois de police étrangères ont été acceptée par la doctrine et le droit
567
positif . Elles font partie de la théorie générale de droit international privé, au même titre
que les lois de police du for. Sur le plan théorique, on ne peut contester l’application
nécessaire des lois de police étrangère qui est également le droit étranger, si le juge applique
la loi étrangère, il est plus logique d’appliquer tout système du droit étranger. Puisque
l’application une partie de ce dernier peut entraîner le résultat incohérent. Certes, on admet
que son application n’est qu’en réalité facultative pour le juge du for, comme l’écrit M.
Mayer, « l’application de la loi de police étrangère ne constitue pas une coopération au sens
568
strict du mot » . Alors, le juge décidera s’il y a lieu ou non de les mettre en œuvre. Nous
nous demandons si la théorie de M. Wengler selon laquelle la seule limite de l’application de
lois de police étrangères réside dans l’exception d’ordre public international est toujours
retenue ? En effet, lorsqu’un État trouve que la loi de police étrangère porte atteinte à l’une de
ses politiques ou à ces principes fondamentaux, l’application de cette loi sera rejetée. Car, la
liberté du juge saisi est toujours considérable ; l’application ou la non application dépendent
de l’appréciation du juge. L’argument peut se développer dans le sens qu’il n’y a aucune
place pour l’exception d’ordre public international, puisqu’elle ne jouera son rôle qu’à
l’encontre de la loi étrangère normalement compétente désignée par le mécanisme de la règle
de conflit de lois. Cependant la théorie de M. Wengler peut être admissible pour justifier la
non application des lois de police étrangères, mais on ne peut en tenir compte au sens stricte
du terme. Il est possible que le juge refuse les lois de police étrangères sous prétexte que
celles-ci sont contraires à l’ordre public international du for ou à la paix publique. Quoiqu’il
en soit, notons que le jugement rendu risquera de ne pas être exécuté dans le pays où ses lois
de police ne sont pas respectées.

567
Ceci a donné lieu à un détour inutile du concept de « prise en considération » qui ne reste qu’une technique
subsidiaire de nos jours. V. sur ce point D. Bureau et L. D’Avout, loc.cit.
568
P. Mayer, « Les lois de police étrangères », op.cit., n° 38, p. 311-312. V. aussi J. Sagot-Duvauroux, « La
mise en œuvre des lois de police… », loc.cit.

232
§ 2 : L’incidence de lois de police et lois d’application immédiate en droit international
privé thaï.

308. On sait que la plupart des lois d’application immédiate françaises sont d’origine
jurisprudentielle. Certes, il est difficile de définir les critères servant à leur identification sauf
celle de Francescakis comme on l’a déjà citée. Quoique que cette définition semble vaste pour
certains auteurs, on l’accepte comme une base pour prendre en considération du caractère de
lois de police de certaines lois. En Thaïlande comme en France, on envisage la difficulté de
répartition les lois de police des lois d’application immédiate. C’est une tâche alourdie car on
ne retrouve pas beaucoup d’écrits juridiques sur ce sujet. Nous essaierons malgré tout, de
définir la notion de ces deux règles (A). Par ailleurs nous étudierons également la pensée
juridique sur les règles protectrices de la partie faible laquelle n’est pas facile de distinguer
des lois de police au regard de son objectif (B).

A. La difficulté de dissociation lois de police et lois d’application immédiate


thaïe.

1) La notion assimilée des deux mécanismes.


309. En Thaïlande, la notion de lois de police et lois d’application immédiate restent encore
à définir. De surcroît, une classification des intérêts étatiques en matière contractuelle est très
compétitive, les opinions étant diverses sur ce point. Il en résulte que l’on ne peut pas trouver
la définition précise des lois de police en droit international privé thaï. En effet il n’est pas
aisé pour les juristes thaïs de faire une distinction nette et définitive entre les lois de police et
les lois d’application immédiate. Les termes « lois de police » dans la langue thaïe sont
parfois mêlés avec les mots « ordre public et bonnes mœurs ». Cependant les lois de police,
569
d’après un auteur , peuvent être utilisées sous deux régimes : le droit public et le droit
privé. Les lois de police sous le régime de droit public ont pour l’objet de sauvegarder
généralement l’organisation politique, économique et sociale, et pour sauvegarder la coutume
et les bonnes mœurs. Les lois de police sous le régime de droit privé ont pour l’objectif de
surveiller les bonnes relations entre des individus afin de sauvegarder l’intérêt général de la
société. Par exemple, l’article 150 du Code civil et commercial s’agissant de l’acte juridique

569
Ch. Pachusanond, « Lois d’application immédiate, la règle de conflit de lois : les effets sur la convention
internationale du droit international privé », Thammasat Law Journal, vol. 16, n°4, 1986, p. 22 et s.

233
stipule que : « Un acte quelconque ayant un objectif interdit explicitement par la loi, acte
ayant l’objectif impossible ou contraire à l’ordre public et à la bonne mœurs du peuple, est un
570
acte nul » . Cet article est confirmé par l’article 151 selon lequel « Un acte quelconque qui
a l’objectif contraire à la loi, si ladite loi n’est pas d’ordre public ou de bonne mœurs du
571
peuple, cet acte n’est pas nul » . Normalement les auteurs ont qualifié ces deux articles du
CCC d’ordre public. Mais, lorsque l’on tient compte de leur caractère impératif dans tous les
cas, on peut également admettre cette qualification de lois de police proposée par cet auteur.
A notre avis, une règle déterminant l’indemnité minimale de préavis due au travailleur
en cas de résiliation unilatérale par l’employeur est aussi la loi de police de droit privé.

310. Les lois de police sont définies comme « la loi qui est destinée à contrôler les actes
juridiques conclus dans le territoire d’un pays et d’écarter l’autonomie de la volonté des
572
individus de son rôle normal dans une telle circonstance » . D’après cet auteur ces lois sont
aussi les droits généraux dont l’application est nécessaire afin de sauvegarder l’organisation
573
économique, politique et sociale du pays . Alors la définition donnée par Francescakis a
été reprise à ce stade pour décrire la notion de lois de police thaïes.
Par ailleurs, le même auteur a proposé de regrouper les lois de police en matière de
droit privé dans deux groupes : les premières sont les lois de police dont l’application est
relative (loi applicable à l’état et la capacité, la protection du mineur) et les secondes, les lois
de police dont l’application est absolue (e.g. les conditions de mariage ; l’article 1562 du CCC
574
qui interdit à une personne d’assigner ses parents naturels ; le droit réel immobilier, le
575
droit pénal ).
Reste à savoir dans quel cas le juge thaï a l’office d’application immédiate de ses lois.

570
มาตรา ๑๕๐ แห่งประมวลกฎหมายแพ่งและพาณิ ชย์ บัญญัติวา่ “ การใดมีวตั ถุประสงค์เป็ นการต้องห้ามชัดแจ้งโดยกฎหมาย เป็ นการพ้นวิสัยหรื อ
เป็ นการขัดต่อความสงบเรี ยบร้อยหรื อศีลธรรมอันดีของประชาชนการนั้นเป็ นโมฆะ ”
571
มาตรา ๑๕๑ แห่งประมวลกฎหมายแพ่งและพาณิ ชย์ บัญญัติว่า “ การใดเป็ นการแตกต่างกับบทบัญญัติของกฎหมาย ถ้ามิใช่กฎหมายอันเกี่ ยวกับ
ความสงบเรี ยบร้อยหรื อศีลธรรมอันดีของประชาชน การนั้นไม่เป็ นโมฆะ ”
572
Ch. Pachusanond, « Lois d’application immédiate… », op.cit., p. 24.
573
Id., p. 25.
574
Mais ceci peut se faire à travers le défenseur public.
575
En Thaïlande on ne classifie pas le droit pénal dans régime de droit privé. Il est à noter que l’on a trois
régimes en général c'est-à-dire le droit privé, le droit public et le droit pénal.

234
2) La qualification de lois de police thaïlandaises.
311. L’application immédiate de certaines dispositions sont nécessaires puisque le
rattachement prévu par la règle de conflit bilatérale, en particulier le cas en matière
contractuelle, peut toujours désigner la loi étrangère qui ne peut probablement pas assurer les
intérêts économiques du for. On peut noter que de nos jours, la Thaïlande a des lois
spécifiques relatives au commerce international, telles que la Loi de 1991 portant sur le
transport international de marchandises par voie maritime ; la Loi de 2004 relative aux avaries
communes ; et la Loi de 2005 portant sur le transport multimodal international, dont certaines
d’entre elles sont les lois de police.

312. Loi applicable au contrat de transport international de marchandises par voie


maritime. En effet ce droit du transport peut être classé dans deux catégories : l’une est droit
matériel spécial ; l’autre est loi de police. Les droits et les obligations des parties contractantes
dans un contrat international du commerce maritime sont régis par la Loi de 1991 portant sur
le contrat de transport international des marchandises par voie maritime. Cette loi est entrée
en vigueur depuis l’année 1991. Les contrats internationaux conclus avant l’entrée en vigueur
de cette loi seront alors soumis à la loi applicable au contrat de transport interne du Code civil
et commercial.
Il faut constater que la Loi de 1991 ne régit que certaines matières sur le transport de
marchandises par la mer : le connaissement, les droits et les obligations des parties, les
responsabilités du transporteur, les limites de responsabilités et le calcul des indemnités. Dès
lors, les contrats internationaux portant sur ces questions pourraient être soumis soit à la Loi
de 1991, soit la Loi de 1938 relative au conflit des lois qui peut désigner la loi étrangère sous
certaines conditions. Les parties contractantes ne pourront pas éviter l’application de cette loi
lorsque les conditions d’application sont réunies. Dans ce cas, cette loi joue le rôle de loi
d’application immédiate. Voyons la dernière phrase de l’article 4, 1er alinéa :
« cette loi s’applique au contrat du transport de marchandises du port interne à la
destination étrangère, sauf dans le cas où les parties ont conclu par écrit dans leur contrat
d’application d’autre loi étrangère ou la convention internationale, il faut appliquer la loi
d’autonomie. Toutefois, lorsque l’une des parties, physique ou morale, a nationalité thaïe,
cette loi est applicable au contrat ».

L’objectif poursuivi de cette loi est de protéger la plupart des commerçants thaïs qui
n’ont pas une bonne connaissance de lois étrangères ou de conventions internationales dans ce
domaine. Le législateur trouvait que l’on ne pouvait ni laisser les contrats conclus par

235
commerçants thaïs soumettre au mécanisme de la règle conflictuelle, ni laisser jouer
l’autonomie de la volonté lorsque l’un des contractants est Thaï. Il est à noter que 90 pour
cent de transporteurs sont étrangers dans le commerce maritime thaï, et ils ont pratiquement
inséré dans leur contrat de transport la clause de choix de la loi du pays de transporteur ou la
convention internationale. Cependant nous pensons que les contractants peuvent toujours
choisir la loi applicable au contrat de transport dans la mesure où la loi choisie ne toucherait
pas trop les intérêts des parties thaïes ou l’intérêt économique de la Thaïlande. Il convient de
576
citer une remarque d’un auteur français sur les intérêts des chargeurs selon laquelle on
peut observer que la considération des intérêts des chargeurs ne répond pas au désir de
protéger les chargeurs, mais plutôt de favoriser certains intérêts économiques du pays de
chargeurs.
Lorsqu’il s’agit du contrat de transport de marchandises entre les ports en Thaïlande
même si ce contrat est conclu à l’étranger, le problème de détermination de la loi applicable
au contrat est régi par la Loi de 1938 relative au conflit de lois, près que l’hypothèse où les
parties ont choisi, par écrit, la Loi du transport maritime de 1991 applicable au contrat.

313. Lorsque l’on vise au contrat de transport combiné international de marchandises, c’est
la loi de 2005 sur le transport multimodal international qui est en jeu. La Thaïlande n’a pas
de loi spécifique sur le transport terrestre international, ni de loi sur le transport aérien
international. Le problème se pose lorsqu’on ne savait pas sur quel transport les dommages
577
ont eu lieu, donc il est difficile à rechercher la loi applicable à la situation . Dès lors, cette
loi est appréciée aux agents consignataires et aux destinataires au cas où il y a dommages car
ils pourront porter plainte contre un seul transporteur pour un seul contrat. De même que la
loi de 1991 sur le transport international de marchandises par voie maritime, la loi de 2005
n’applique qu’aux certains points du transport multimodal : le connaissement, les droits et les
obligations des consignataires et des transporteurs multimodaux, la limitation de
responsabilités du transporteur multimodal, le calcul des indemnités, et les modes de
règlement des différends. Cette loi oblige tous les transporteurs de faire enregistrer leurs
entreprises auprès les autorités publiques. Notamment les transporteurs étrangers devront
enregistrer le sous-traitant en Thaïlande pour que l’expéditeur thaï puisse porter plainte devant

576
A. Toubiana, Le domaine de la loi du contrat en droit international privé…, op.cit., p. 221 et s.
577
Cf. P. Eagjariyakorn, La loi de 2005 sur le transport multimodal international, Bangkok : Université de
Thammasat, 2007, p. 25-26.

236
la Cour thaïe. C’est pour créer un lien effectif avec le territoire thaï qui justifiera la
compétence juridictionnelle du juge thaï.
Selon cette loi, le transport combiné est le transport dont les parcours s’effectuent par
les deux modes de transport ou plus mais sous le même contrat du transport multimodal. Cette
loi s’applique au transport combiné d’un pays à la destination située dans un autre pays c'est-
à-dire le transport international. Lorsque les conditions exigées par la loi sont réunies, cette loi
sera applicable au contrat. Autrement, on observe que la loi de 2005 ne rattache pas à la
nationalité des parties, ni au lieu de conclusion du contrat comme la loi de 1991 sur le
transport international de marchandises par voie maritime. Cependant cette loi pourra être
applicable également au contrat de transport interne lorsque les parties ont procédé un choix
578
dans leur contrat .
Il reste à savoir si cette loi est la loi de police ou la loi d’application immédiate ?
Voyons qu’en l’absence de volonté expresse du législateur, la détermination des lois qui
seraient d’application immédiate semble être très délicate. Il est douteux en comparant à une
autre loi de ce genre, loi de 1991 sur le transport maritime, si la loi du transport combiné est la
loi de police ou non. On peut faire valoir que la volonté du législateur n’est pas équivoque
579
pour étendre le domaine d’application de la loi du for . Mais il faut rappeler que cette
volonté ne peut apparaître qu’au travers du contenu des dispositions en cause et des objectifs
que ce contenu révèle. L’analyse du caractère de cette loi n’est pas facile car il existe des
dispositions qui mettent en place des organes étatiques afin d’assurer la force obligatoire de
cette loi. D’après la lecture, nous trouvons que l’État a mis en place des organes étatiques
pour que la protection instaurée soit plus efficace. Donc le critère de l’organisation étatique
est bien rempli de façon plus évidente. M. Eagjariyakorn a cependant observé qu’aucune
disposition n’interdit de choisir une autre loi applicable au contrat. Par conséquent, on peut
estimer que cette loi peut être dérogée, elle n’entre pas dans la catégorie de lois de police et
non plus celle de la loi d’application immédiate. Cependant cette loi peut être considérée
comme la loi substantielle spéciale dont l’application est une exception de la règle de conflit
de lois.
Certes, cette loi ne peut pas régler tous les problèmes, dès lors tels problèmes qui sont
hors de champ d’application de cette loi seraient toujours régis par la Loi de 1938 relative au
conflit de lois.

578
Id., p. 39 et s.
579
Cf. P. Lagarde, RCDIP.1966.462, note sous Paris, 16 février 1966.

237
314. En France, cependant, l’article 16 de la loi du 18 juin 1966 relatif aux contrats
580
d’affrètement et de transports maritimes dispose que la loi française, sous réserve des
conventions internationales, s’applique à tous transports effectués au départ ou à destination
d’un port français. C'est-à-dire s’il existe une convention internationale sur ces types de
contrat, c’est cette convention qui régit à ce contrat. Dans ce cas on ne peut pas dire que la loi
du 18 juin 1966 est une loi de police, alors que la loi thaïe n’admet aucune réserve de ce
genre.
Pourtant lorsque les conditions de l’article 16 de la loi du 18 juin 1966 sont réunies,
cette loi présente le caractère d’une loi de police ou d’une loi d’application immédiate.

B. Les lois de police de protection des parties faibles en Thaïlande.

315. La pensée juridique sur la protection des parties faibles. On sait que la doctrine
thaïe sur les lois de police n’est pas très évoluée. Par ailleurs les opinions sont diverses sur la
qualification les lois protectrices de lois de police ; une loi est loi de police pour certains mais
ne l’est pas pour les autres. La jurisprudence dans cette matière n’est pas avancée non plus,
car les juges appliquent la loi protectrice sans donner la motivation qui peut éclaircir ou
affirmer le caractère de police des dispositions. Ainsi, pour analyser le caractère des règles de
droit thaï, on ne peut pas éviter de se pencher sur la pensée juridique française et européenne
afin de savoir si l’on peut inclure dans le concept de lois de police les règles protectrices des
parties faibles. Il est clair que les dispositions dans ce domaine ont pour l’objectif d’appliquer
unilatéralement certaines lois du for sans tenir compte de l’autonomie de la volonté des
contractants. Car le principe d’autonomie laisse à une partie forte l’occasion de choix d’une
loi favorable à son propre intérêt. Certes, la nécessité de protéger certaines catégories de
personnes, les parties faibles, ne peut pas être niée par l’État. Le problème réside dans la
définition que nous avons déjà vue plus haut, car elle a mis l’accent sur le critère de
l’organisation étatique, plus précisément la prédominance des intérêts communs sur les

580
Loi n° 66-420 du 18 juin 1966 sur les contrats d’affrètement et de transports maritimes, JO 24-06-1966 p.
5206-5209. Disponible également sur le site
http://www.legifrance.gouv.fr/jopdf/common/jo_pdf.jsp?numJO=0&dateJO=19660624&pageDebut=05206&pa
geFin=&pageCourante=05206; V. E. Du Pontavice, « Loi du 18 juin 1966 et décret du 31 décembre 1966 sur les
contrats d’affrètement et de transport maritime », JCP.1967.I.2063 ; M. Simon-Depitre et Cl. Legendre, « La
nouvelle législation sur les contrats d’affrètement et de transport maritime et le droit international privé »,
JDI.1967.598.

238
581
intérêts des individus. D’après la lecture des écrits de M. Ch. Pachusanond et Madame P.
582
Kanchanachittra-Saisoonthorn , on constate que ces auteur ont également considéré les
règles protectrices de la partie faible en tant que lois de police ou loi d’application immédiate.

316. D’après M.-L. Niboyet, la règle de protection de partie faible dans un contrat n’est pas
la loi de police mais elle présente le caractère très proche, l’auteur a proposé le mot
« hybride » pour expliquer son composé par d’éléments de natures différentes. « Il ne faut
pas confondre les mécanismes qui jouent en aval de la loi désignée par la règle de conflit afin
de garantir la protection de partie faible et les lois de police, car les premiers ne sont pas des
583
lois de police mais des règles « hybrides » » ou les règles de conflit spéciales ou semi-
584
substantielles . En droit français, l’article 5 de la Convention de Rome de 1980 ou l’article
6 du Règlement relatif au contrat conclu par consommateur fait penser au mécanisme des lois
de police. Puisque la protection de la partie faible dans certaines catégories de contrats a
donné lieu à l’édiction de lois de protection donc la méconnaissance serait susceptible de
porter atteinte aux intérêts étatiques. Par exemple le cas de la protection de consommateurs et
de travailleurs. Force est de constater que l’effet desdites lois implique que leur application ne
dépend pas entièrement du jeu normal de la règle de conflit et en particulier du principe
d’autonomie. En effet les articles 5 (C) et 6 (R) ne sont applicables que lorsque les deux
conditions sont remplies ; la loi choisie par les parties n’est pas suffisamment protectrice et la
loi de résidence habituelle comporte une disposition plus protectrice. Il n’a donc pas un
caractère d’application immédiate comme lois de police mais les règles de conflit spéciales.
Toutefois, on peut dire que cette analyse ne concerne que l’hypothèse de règle de conflit
communautaire en raison de la structure spéciale de la Convention et du Règlement. Alors
que les dispositions de loi thaïe de protection des parties faibles peuvent être analysées
autrement.

581
Ch. Pachusanond, « Lois d’application immédiate… », op.cit., p. 28.
582
P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, « Les conceptions fondamentales sur les contrats de droit privé à caractère
extranéité », Thammasat Law Journal, vol. 25, n° 3, 1995, p. 549.
583
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., p. 119.
584
J.-M. Jacquet, Droit du commerce international, 2e éd., Précis, Paris : Dalloz, 2010, n° 387.

239
585
317. Cependant un auteur a estimé que l’objectif premier de lois de police est certes la
sauvegarde d’intérêts privés, mais l’idée d’organisation étatique est aussi très présente. Il a
cité un exemple de la réglementation de la durée hebdomadaire du travail, ceci est destiné à
protéger le salarié contre certains abus. Il faut constater que cette réglementation a des
586
implications plus importantes et concerne la société dans son ensemble . Dès lors, il est
possible de rattacher, dans ce cas, la protection d’une catégorie de personnes à l’idée plus
générale d’organisation étatique. C’est en effet le sens présenté par Francescakis. La majorité
des juristes semblent accepter ce principe selon lequel les lois de protection d’une partie faible
peuvent être incluses dans la « catégorie large » des lois de police.

318. En Thaïlande, la protection des parties faibles dans les contrats internationaux ne
distincte pas définitivement en trois sorts de contrat comme le règlement de Rome I : le
contrat conclu par consommateur ; le contrat du travail ; et le contrat d’assurance. En effet la
Loi de 1938 relative au conflit de lois ne dispose pas ces dispositions. Par ailleurs on constate
que lorsque le juge thaï a envisagé le problème de loi applicable aux contrats internationaux
en matière de la protection d’une partie faible, il faisait recours à l’article 13 (comme dans
d’autres contrats que nous avons vus).
La source des lois dite « protectrice » de consommateurs en droit interne est
fragmentaire telles que la Loi de 1979 portant sur la protection de consommateurs (révisée en
1998), la Loi de 1999 portant sur les affaires dont leurs contrats sont contrôlés, la loi du
contrat injuste (Unfair Contract Terms) de 1997. Lesdites lois ont été qualifiées de droit
public économique en raison de leurs fonctions même si elles sont élaborées et s’est
développées par les privatistes, on admet généralement que le droit public est la loi
d’application immédiate avec le caractère de loi de police en raison de leur objet qui est pour
protéger l’intérêt des citoyens. Comme souligne Ph. Francescakis : le terrain d’élection des
lois de police était la « zone grise » où se mêlent, en des constructions instables, droit privé et
587
droit public . En raison de la source fragmentaire et la difficulté de qualification des

585
N. Nord, Ordre public et lois de police…, op.cit., n° 58, p. 31.
586
V. en ce sens P. Mayer, « La protection de la partie faible en droit international privé », in La protection de
la partie faible dans les rapports contractuels, Paris : LGDJ, Bibl. de droit privé, t. 261, 1996, p. 513, spéc. p.
539.
587
Ph. Francescakis, Annuaire de l’IDI, op.cit.

240
dispositions impératives, c’est la tâche du juge thaï de considérer quelle disposition est loi de
police.
On peut observer que ces lois ne sont traitées en tant que matières spéciales ni
stipulées précisément comme en droit international privé français (ex. Convention de Rome
ou Règlement Rome I). Par ailleurs le droit international privé thaï n’a pas de système propre
de détermination de la loi applicable aux contrats internationaux conclus par les
consommateurs. Si on admet que les lois protectrices des parties faibles sont les lois de police,
leurs dispositions appliquent au contrat sans recours à la règle de conflit. Il nous convient de
pencher sur certaines lois protectrices en Thaïlande comme la loi de 1979 portant sur la
protection des consommateurs et la loi du contrat injuste de 1997.

588
1) La Loi de 1979 relative à la protection des consommateurs .
319. Cette loi, est un droit public économique thaïlandais, ayant l’objectif de protéger
généralement les consommateurs, car ceux-ci sont considérés comme partie la plus faible au
589
contrat . Cette loi constitue les dispositions les plus protectrices que celles du CCC. On sait
que les consommateurs sont moins puissants économiquement que leurs cocontractants qui,
pratiquement, utilisent le contrat-type. La Loi de 1979 (révisée en 2001) traite les droits et les
obligations d’entrepreneurs et d’agences publicitaires envers les consommateurs.
L’organisation étatique est aussi en cause car les articles 9 et 10 de la loi établit un organe
gouvernemental qui est en charge de contrôler, d’examiner et d’appliquer. L’étude des
situations est confiée à une commission de protection du consommateur qui représente l’État.
Par ailleurs les dispositions de cette loi s’appliquent à toutes personnes qualifiées de
consommateurs qui résident en Thaïlande, quelle que soient leurs nationalités. Pour ces
raisons nous pouvons attribuer le caractère de police à cette loi.

320. En France c’est la loi du 10 janvier 1978 relative à la protection des consommateurs
laquelle a été également considérée comme des lois de police, en raison du bon
590
fonctionnement du marché . L’article L 333-3-1 du Code de la consommation peut

588
Le texte est disponible en anglais sur le site http://www.ocpb.go.th/images_news/%7B6F0712F7-66FB-
4919-9898-7CC82D91DE87%7D_Consumer%20protection%20Act.pdf Cette loi a été révisé en 2001.
589
D. Thirawat, « Consumer Protection Law in Thailand with regard to Contracts », Thai Bar Association Law
Journal, Vol. 56, n°3, 2000, p. 170.
590
Cass. 1er civ., 19 octobre 1999, JDI.2000.328, note J-B. Racine ; RCDIP.2000.29, note P. Lagarde.

241
également illustrer l’application de la technique des lois de police à la protection d’une partie
faible. Il stipule ainsi les règles figurant dans le titre relatif au traitement des situations de
surendettement qui « s’appliquent également aux débiteurs de nationalité française en
situation de surendettement domiciliés hors de France et qui ont contracté des dettes non-
professionnelles auprès de créanciers établis en France ».

2) La Loi de 1997 relative au contrat injuste.


321. Au XIXe siècle le rédacteur de droit du contrat ne considérait pas le pouvoir de
négociation en tant qu’élément pour considérer si les parties ont ou non l’intention de
conclure le contrat. Puisqu’à l’époque, on croyait que le pouvoir de négocier sur l’économie
du contrat des parties contractantes était sur un pied égal, c’est la raison pour laquelle la
puissance de négociation n’était pas un facteur capital. Cependant les parties contractantes,
dans le nouveau statut des contrats à l’heure actuelle, n’ont plus des pouvoirs égaux lors de la
conclusion de contrat. De surcroît, un tel contrat est en forme de contrat-type ou contrat
d’adhésion selon lesquels les stipulations sont déjà établies unilatéralement par un
professionnel qui possède plus de pouvoir de négociation sur l’autre partie.
Le champ d’application matérielle de la Loi de 1997 est différent de la loi sur la
protection de consommateurs, car la première est destinée à protéger les consommateurs
pendant la conclusion du contrat et après avoir porté plainte, alors que la dernière a pour but
de protéger les consommateurs avant la conclusion du contrat. La Loi de 1997 portant sur le
contrat injuste (Unfair Contract Terms B.E. 2540) ne régit que certains contrats injustes et
certains actes juridiques : le contrat conclu entre un consommateur et un professionnel ; le
contrat d’adhésion ; et le contrat de vente au droit de rachat (a sale with the right of
redemption) (l’art 4). Le champ d’application de cette loi gouverne aussi d’autres types de
clauses insérées dans un contrat quelconque telles que la clause de restriction les droits ; la
liberté de travail ; la conclusion d’un acte juridique concernant le commerce (l’art 5) ; les
clauses sur limites de la responsabilité des dommages causés ou pour un empiétement (priver
quelqu’un de son droit) (l’art 6) ; les clauses sur un dépôt de garantir (l’art 7) ; les clauses
restrictives de responsabilités délictuelles ou contractuelles (l’art 8) ; les accords de partie qui
a subi des dommages pour limiter la responsabilité délictuelle (l’art 9). Dans certain domaine
où la loi de protection des travailleurs ne régit pas, la loi de contrat injuste jouera le rôle. Par
exemple le contrat de travail constitue les clauses de non-concurrence de 2 ans, selon la Cour
suprême à l’époque ce contrat n’est pas contraire à l’ordre public. Mais après l’entrée en
vigueur de cette loi, cette stipulation peut être considérée comme une clause injuste.
242
Après avoir analysé le champ d’application et ses dispositions, cette loi est considérée
comme loi de police à notre avis.

322. En France, il s’agit des clauses abusives lesquelles, l’article L 132-1 du Code de la
consommation les a défini comme « la stipulation ayant pour objet ou pour effet de créer, au
détriment du non-professionnel, ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les
droits et les obligations des parties ». Cette loi ne met pas l’accent sur la forme du contrat
mais sur le caractère de personne qui le conclut. Lorsque l’une des parties est un non-
professionnel ou le consommateur, ce contrat sera régi par cette loi. Le législateur français a
trouvé qu’en appliquant une forme du contrat comme critère de décider si un tel contrat sera
ou non soumis à la loi de protection des consommateurs, n’est pas convenable. Puisque le
caractère de chaque contrat est actuellement difficile à déterminer définitivement. Il est à
noter que le contrat injuste peut être conclu en n’importe quelle forme sur n’importe quel
document.

3) La loi de protection des travailleurs.


323. On accepte en générale que le travailleur est une partie faible au contrat de travail. Par
ailleurs on trouve que le travailleur est en effet le fondement indispensable pour le système
économique du pays. Force est de constater que la législation de protection des travailleurs est
considérée comme nécessaire à l’organisation étatique et l’égalité dans la société. Il est à noter
que les dispositions du droit de travail ont été stipulées dans plusieurs instruments. Certains
sont lois de police.
Certes, on ne peut pas dire que tous les dispositions de droit du travail sont des lois de
police, mais la plupart d’entre elles le sont. Car un organe étatique est mis en place et la peine
pénale est aussi prévenue pour les employeurs qui ne respectent pas ces dispositions. Prenons
591
un exemple de l’article 13 de la Loi de protection de travailleurs , qui dispose que
« lorsqu’il y a un changement d’un employeur, dans une entreprise, suite au transfert ou à la
succession ou autrement, y compris dans le cas où l’employeur est une personne morale
ayant changé son statut en fusionnant avec une autre compagnie, le travailleur préserve
toujours les droits qu’il a acquis et tous les droits et obligations relatives à ce travailleur sont
transférés à son nouvel employeur ». Le caractère de police de cet article est clair car il est
déterminé de façon unilatéral de protéger des travailleurs, la partie faible au contrat.

591
La traduction en anglais est disponible sur le site http://thailaws.com/law/t_laws/tlaw0132a.pdf

243
L’organisation étatique est mise en place dans ces lois. Ces dispositions sont impératives et
s’appliquent à tous les contrats de travail exécutés en Thaïlande, les lois de police touchent
tous ceux qui habitent le territoire. Dès lors, le contrat du travail qui viole ces dispositions
sera considéré comme porté atteinte aux lois de police et entraîné la nullité du contrat. Les
dispositions relatives au salaire de base, au sanitaire du travailleur et au congé payé, les
592
dispositions portant sur l’enfant travailleur sont également les lois de police thaïes .
Les dispositions du droit de travail ne limitent pas toute l’autonomie de la volonté des
parties contractantes. La conclusion du contrat de travail est régie par le Code civil et
commercial. Les parties peuvent toujours conclure un accord qui n’a pas privé le travailleur
de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi applicable. Autrement
dit, dans un contrat de travail international, les parties peuvent choisir la loi applicable au
contrat, mais il faut prendre en considération si la loi choisie est contraire à l’objectif visé à
protéger par les lois de protection du travailleur, et la loi de 1997 portant sur le contrat injuste.
On peut observer que le travailleur pourrait obtenir la protection de la loi de 1997 portant sur
le contrat injuste dans le cas où le contrat de travail a été conclu au détriment du travailleur.

324. En France, l’article L 121-1 du Code du travail stipule ainsi « le contrat de travail
constaté par écrit et à exécuter sur le territoire français est rédigé en français ». Alors que la
loi thaïe n’a pas cette disposition, mais en pratique, afin d’éviter un problème par la suite et
d’avoir une preuve écrite, le contrat de travail est conclu par écrit. Pourtant, la loi thaïe ne
dispose pas que le contrat de travail destiné à exécuter en Thaïlande devrait être rédigé en
thaï. Si l’on trouve que le travailleur mérite d’être protégé à l’égard de ce contrat conclu en
langue étrangère que celui-ci n’a pas compris, il faut faire recours à la loi relative au contrat
injuste.

325. Conclusion du paragraphe. La règle conflictuelle peut désigner la loi étrangère qui
est contraire à certaines valeurs ou conceptions du for. Dans ce cas l’ordre juridique du for ne
peut certainement pas laisser cette loi produire son effet. Nous verrons par la suite l’exception
d’ordre public international. On peut dire que les lois de police amèneront le juge à une
application systématique des lois du for quelle que soit la loi désignée par la règle de conflit si
cette dernière aurait l’occasion d’y être appliquée. C’est pourquoi la doctrine qualifie les lois
de police de lois d’application immédiate ; elles s’appliquent « immédiatement » comme une

592
Ch. Pachusanond, « Lois d’application immédiate… », op.cit., p. 28.

244
exception du jeu de la règle de conflit. De ce point de vue, on trouve que c’est un effet proche
à celui du mécanisme d’ordre public international, mais la méthode d’intervention est
différente que l’on verra par la suite.

Section II
L’exception d’ordre public en droit international privé des contrats.

326. Il en résulte de la méthode conflictuelle bilatéralisme. On attribue la situation à une


des lois en conflit compte tenu de l’importance respective des rattachements présentés. La
règle de conflit, bilatérale ou unilatérale, fait correspondre à un rattachement une catégorie de
questions de droit. En raison de son caractère neutre, la règle de conflit bilatérale peut
désigner et désigne fréquemment une loi étrangère. Il en va de même en matière de contrat
international, lorsque les parties n’ont pas choisi la loi applicable, c’est un jeu de la règle de
conflit. Il arrive parfois que la loi étrangère désignée contient des dispositions qui semblent
incompatibles avec certains principes fondamentaux du for ou l’application de ladite loi
donne lieu au résultat choquant à l’égard du for. Mais il n’est pas question de porter un
jugement de valeur sur le contenu général des lois étrangères. L’ordre public international est
destiné à défendre les valeurs et les politiques législatives du pays, on peut dire que tout cela
donne de l’effet positif à l’ordre public international. Rappelons que l’intervention d’ordre
public international n’est qu’à titre d’exception au fonctionnement normal de la règle de
conflit, c’est ce que l’on appelle l’effet négatif : il fait obstacle au jeu normal de la règle
conflictuelle.

327. La question est à savoir si l’ordre public réellement international occupe le terrain
dans l’ordre public international. On sait que l’ordre public international ne peut être que
français et non véritablement international et les autorités françaises ont pour seule mission de
sauvegarder l’ordre public international « français », parce que ceci relève de l’ordre juridique
français. Alors que l’ordre public véritablement international est un principe d’origine
« international » qui ne lie pas les autorités françaises, il n’a pas à être défendu par l’ordre
juridique français, au moins, il ne relève pas du seul ordre juridique. Cependant nous
étudierons la notion d’ordre public réellement international afin de connaître sa fonction et
son intervention dans la matière.

245
Nous étudions d’abord le rôle indispensable d’ordre public international (§ 1). Ensuite,
le rôle d’ordre public transnational ou véritablement international en la matière (§ 2).

§ 1 : Affermissement du rôle indispensable d’ordre public international.

328. L’exception d’ordre public est admise par les instruments internationaux de droit
international privé en matière des obligations contractuelles : l’article 16 de la Convention de
Rome 1980 et l’article 21 du Règlement Rome I. Cependant on peut dire que l’ordre public
international en matière des obligations contractuelles n’a été admis pour écarter la loi
désignée par la Convention ou le Règlement que lorsque l’application d’une telle loi est
manifestement incompatible avec l’ordre public du for.
On sait que l’ordre public de proximité est l’ordre public en matière de statut
personnel, mais afin de connaître la fonction de l’ordre public en général qui sert de base aux
autres matières spécifiques, il nous sera aussi utile de le voir rapidement. Nous allons étudier
en premier lieu la prise en considération d’ordre public international (A), et par la suite la
méthode d’intervention d’ordre public en droit international privé (B).

A. La prise en considération d’ordre public international.

329. « L’exception » d’ordre public présente une exception au fonctionnement général des
règles de conflit de lois. L’ordre public international est également un élément qui perturbe le
jeu normal de ces règles. Le domaine de l’ordre public international est plus restreint que
celui de l’ordre public interne. Une règle peut être d’ordre public interne sans être d’ordre
593
public international . Mais on ne peut pas concevoir une règle qui serait simplement
supplétive en droit interne et d’ordre public sur le plan international.

593
TGI Strasbourg, 13 septembre 2001, Hypotheken Bank Hamburg, D. 2002. 2933, obs. J. Franck : la Cour a
décidé que les lois Scrivener relative à la protection du consommateur sont des lois d’ordre public au sens du
droit interne, cependant ces lois ne relèvent pas de l’ordre public international. Par ailleurs on peut trouver le cas
où une disposition de l’ordre public interne (l’art. L 132-8 du Code de commerce) applique aux contrats
internationaux, mais uniquement dans le cas où la loi française applicable en tant que loi du for. L’interprétation
restrictive de la Cour de cassation pour la qualification de lois de police (Cf. Cass. com., 13 juillet 2010,
Transbidasoa, D. 2010. 2339, obs. X. Delpech, note V. Da Silva ; ibid. 2323, obs. L. d’Avout et S. Bollée ; RTD
com. 2010.779, note B. Bouloc ; JCP (G) 2010, n° 40, p. 972, note D. Bureau et L. d’Avout ; JDI.2011.91, note
F. Jault-Seseke).

246
1) Les difficultés de détermination.
330. La notion d’ordre public international. Il n’est pas facile de définir l’ordre public
international en raison de son caractère variable dans le temps et dans l’espace. Mme Niboyet
et M. Geouffre de La Pradelle affirment qu’« il est impossible de donner une définition
594
précise de la notion d’ordre public international » . Cependant comme nous avons essayé
de le déterminer, il faut observer tout d’abord sa fonction. D’après MM. Lerebours-
Pigeonnière et Batiffol, l’ordre public international « permet d’écarter l’application des lois
étrangères désignées par le règlement normal français lorsque cette application, par suite
d’une divergence dans les buts moraux, sociaux, économiques (…) causerait à l’intérêt
français un tort grave dont la considération doit prévaloir sur celle du commerce international
595
et de la solidarité internationale » . Alors l’ordre public français en matière international
peut se définir comme « un ensemble de principes considérés en France, à un moment donné,
comme des principes fondamentaux du système français et l’exception d’ordre public comme
un correctif qui permet d’écarter la loi étrangère normalement compétente lorsque celle-ci
596
contient des dispositions inadmissibles par le tribunal saisi » . On trouve aussi la définition
chez Mme Niboyet et M. Geouffre de La Pradelle, les auteurs l’ont défini comme « un
ensemble de valeurs intangibles et supérieures qui mêle des intérêts généraux tels que les
597
intérêts moraux, économiques, politiques ou sociaux » . Après avoir analysé, on peut dire
que le noyau dur d’ordre public international est des valeurs plus contingentes exprimées dans
les politiques législatives du for. On ne peut pas nier que l’ordre public international joue le
rôle considérable en matière de statut personnel plutôt qu’en matière contractuelle. Cependant
on ne peut pas non plus ignorer son importance et surtout sa définition qui doit être clarifiée et
bien distinguée de celle des lois de police ou lois d’application immédiate.

331. Le droit français a une tradition de classer l’ordre public en deux sortes : l’ordre public
de proximité qui peut être considéré comme l’ordre public propre à statut personnel et l’ordre
public atténué. Bien que notre étude vise uniquement les contrats internationaux, il est
nécessaire de connaître certaine fonction de l’ordre public international qui se fonde sur telle

594
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit, n° 307.
595
P. Lerebours-Pigeonnière, Droit international privé, Paris : Dalloz, 8e éd., 1962, n° 379, p. 461.
596
A. Bucher, « L’ordre public et le but social des lois en droit international privé », RCADI.1993.II.19 ; V.
également P. Mayer, Droit international privé, 10e éd., Paris : Montchrestien, 2010 n° 200.
597
M.-L. Niboyet, Droit international privé, loc.cit.

247
ou telle notion. Nous savons que les lois de police sont instruments de l’ordre juridique
étatique pour défendre son propre intérêt étatique, économique et social, mais il est possible
que certaine loi étrangère peut s’infiltrer dans ces forts juridiques. Cependant il n’est pas
certain que la loi étrangère désignée par la règle de conflit peut jouer un rôle dans le for, il est
possible que son contenu est contraire aux intérêts fondamentaux de l’État du for. Dans ce
cas, c’est l’ordre public international du for qui entre en jeu…

332. En Thaïlande, la notion d’ordre public thaï reste encore floue. On n’utilise pas le terme
« ordre public international », il n’existe que « l’ordre public » ou « l’ordre public et les
bonnes mœurs ». L’article 5 de la Loi de 1938 relative au conflit de lois stipule ainsi : « Si la
loi étrangère est applicable, le juge l’applique uniquement dans les cas où elle ne porte pas
598
atteinte à l’ordre public et aux bonnes mœurs du peuple thaï » . On peut affirmer qu’en
droit international privé comme en droit commun, c’est cette notion qui sera tenu compte par
le juge. Certes, il n’est pas facile de définir la notion d’ordre public international, car il est
variable dans le temps. Selon le dictionnaire de l’Institut Royal de Thaïlande, l’ordre public et
les bonnes mœurs du peuple sont définis ainsi : « l’état de la vie du peuple dans une
599
communauté de bon ordre, de sécurité vitale et d’être propriétaire » . Les auteurs ont ainsi
défini l’ordre public et les bonnes mœurs du peuple : pour les uns, c’est « l’intérêt général de
600
l’État et de la communauté, ayant pour but de fonder un bon ordre de cet État » . Alors
c’est la tâche du juge de prendre en considération au cas par cas selon l’époque, mais on
enseigne dans les ouvrages juridiques que lorsqu’un acte porte atteinte au sentiment public,
c'est-à-dire le sentiment des gens en général, un tel acte est considéré comme contraire aux
bonnes mœurs du peuple. Alors, l’ordre public en droit international privé thaï est ainsi
interprété comme « un ensemble de principes aux fins de maintenir la coutume, la politique
législative de la Thaïlande à un moment donné et le mécanisme du for d’éviter d’appliquer la
601
loi étrangère normalement compétente » .

598
มาตรา ๕ แห่ง พระราชบัญญัติวา่ ด้วยการขัดกันแห่งกฎหมาย บัญญัติวา่ “ถ้าจะต้องใช้กฎหมายต่างประเทศบังคับ ให้ใช้กฎหมายนั้นเพียงที่ไม่ขดั
ต่อความสงบเรี ยบร้อยหรื อศีลธรรมอันดีของประชาชนแห่งประเทศสยาม”
599
Dictionnaire de l’Institut Royal de Thaïlande, 2e éd., Bangkok : Arun Printing, 2000, p. 106.
600
U. Monkolnavin, « L’ordre public et les bonnes mœurs du peuple », Thai Bar Association Journal, vol. 32,
n°1, 1975, p. 13-14.
601
Phrayasriwisarnwaja (Tianliang Hountrakoon), Droit international privé, Bangkok : Sophonphipatanakorn
Press, 1931, p. 84-85 ; Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, Bangkok : Université de Thammasat, 1984 ;
Ch. Pachusanond, « Lois d’application immédiate… », op.cit., p. 31-33.

248
333. Critères de l’intervention d’ordre public international. En principe, l’ordre public
peut tolérer une solution étrangère différente de celle préconisée par une règle de droit du for,
pourvu que le résultat de l’application du droit étranger soit encore compatible avec les
principes de base dans la mesure où ceux-ci sont importants pour l’État du for. Il faut
souligner que l’exception d’ordre public intervient pour défendre des valeurs que la Cour de
cassation appelle « des principes de justice universelle considérés dans l’opinion française
602
comme doués de valeur internationale absolue » dans l’arrêt Lautour , alors que les lois de
police défendent la politique du moment. Sachant qu’en première temps la théorie de l’ordre
public international est destinée à défendre les lois étrangères qui méconnaîtraient les
603
principes communs aux nations civilisées, ou bien contraire au droit naturel . A priori,
l’application d’un droit étranger conduisant à un résultat incompatible avec l’ordre public sera
« écartée » ou « exclue ». C’est ce qui est appelé l’effet négatif de l’ordre public. Cependant
l’ordre public ne s’oppose pas à la loi étrangère dans la mesure où cette loi pourrait aboutir à
des résultats conformes à l’ordre public du for.

334. L’intervention de l’ordre public se trouve au niveau différent, la réaction de l’ordre


public n’est pas la même. S’il s’agit de la reconnaissance des droits acquis à l’étranger,
l’ordre public interviendra alors de façon atténuée, alors que s’il s’agit de créer des droits en
France, c’est la notion d’ordre public de proximité qui sera en jeu. Nous nous intéressons
maintenant à la dernière : l’Inlandsbeziehung, car dans certains cas il illustre que la variabilité
de l’ordre public ne répond pas aux objectifs de protection du for qu’il assume normalement.
604
La pensée de variabilité est influencée par les théories allemande et suisse . Elle est fondée
sur la plus ou moins grande proximité que la situation se rapproche du for. En effet la rigueur
du contrôle au nom de l’ordre public international est relative à l’intensité de liens du litige
605
avec le for . Ainsi l’Inlandsbeziehung est perçu comme « un ensemble de circonstances,
appréciées au cas par cas, qui contribuent à rattacher au territoire du for une situation
normalement régie par une loi étrangère, et à révéler ainsi l’atteinte à l’ordre public du for

602
Cass.1er civ., 25 mai 1948, Lautour, RCDIP.1949.89, note H. Batiffol ; D. 1948.357, note P.L.-P. ;
JCP.1948.II.4532, note Vasseur ; GA n°19.
603
P. Lerebours-Pigeonnière, Droit international privé, op.cit., 8e éd., n° 379.
604
Indistinctement nommées Inlandsbeziehung et Binnenbeziehung.
605
R. Libchaber, « L’exception d’ordre public en droit international privé », in L’ordre public à la fin du XXe
siècle, Paris : Dalloz, 1996, p. 65-81, spéc. p. 73.

249
606
provoquée par l’application de cette loi étrangère » . On voit que les contours de l’ordre
public à l’encontre d’une même loi étrangère sont différents, selon qu’il s’agit de protéger le
for ou de garantir le respect international de valeurs considérées comme essentielles. A priori,
les lois étrangères contraires à l’ordre public international peuvent être accueillies en France
par la théorie de l’effet atténué de l’ordre public. C’est-à-dire que certains principes
fondamentaux du for ne sont pas tenus en compte, pour cette raison son insuffisance est de
plus en plus dénoncée en recourant à la doctrine allemande de l’Inlandsbeziehung. Cette
théorie est l’œuvre de Franz Kahn ; selon lui l’Inlandsbeziehung est un rattachement
subsidiaire qui conditionne l’application de certaines règles matérielles du for.
L’Inlandsbeziehung manifeste la relativité, interviendra avec d’autant plus de force contre une
607
loi étrangère choquante que les liens de la situation avec le for sont fortement étroits .
L’ordre public de proximité joue lorsque la situation litigieuse présente des caractères
intolérables pour le système juridique français et en raison des liens particuliers que cette
même situation entretient avec la France. Ces liens peuvent prendre la forme d’un facteur
608 609
territorial ou d’un facteur personnel . Le principe de l’ordre public de proximité

606
P. Lagarde, « La théorie de l’ordre public international face à la polygamie et à la répudiation », in Mél. F.
Rigaux, Bruxelles : Bruylant, 1993, p. 263-282, spéc. p. 270.
607
Ibid.
608
L’ordre public peut être fondé sur la proximité que la situation entretient avec le for, lorsque le contrôle
exercé au nom de l’ordre public se fait exigeant. En revanche si un Français est en cause, la conséquence aurait
changé. Si un ressortissant d’un pays où la polygamie est autorisé, contracté en France un second mariage alors
que le premier ne serait pas encore dissout, ce mariage lui sera refusé car la conception fondamentale en France
s’oppose à telles unions. En effet les conditions de fond de la loi française constituent un minimum pour le juge
français et l’ordre public international interviendra contre une loi étrangère moins sévère et plus permissive que
la loi française. Le mariage polygamique ne peut en aucun cas être valablement célébré dans le territoire
français, car l’ordre public s’oppose ainsi à la célébration en France d’une union polygamique même si elle
est admise par les lois nationales de chacun des époux, y compris le mariage célébré par les autorités consulaires.
609
Ce facteur qui met en jeu le mécanisme de l’ordre public de proximité consiste en la nationalité française de
l’un des litigants. Dès lors qu’un Français est en cause, l’ordre public va intervenir car il porte atteinte à l’ordre
juridique français, par exemple le cas du mariage polygamique. Une femme française célibataire ne peut pas non
plus contracter un mariage avec un homme déjà marié même si le statut personnel de celui-ci lui permettait la
polygamie. L’élément personnel de rattachement de la situation à l’ordre juridique français provoque la réaction
de l’ordre public international, en tant qu’ordre public de proximité. La Cour de cassation affirma dans l’arrêt
Baaziz du 6 juillet 1988 (Cass.1er civ., 6 juillet 1988, Baaziz, ) que les mariages célébrés à l’étranger ne sont pas
reconnus en France dès lors que l’intérêt d’une Française est en cause, c’est l’ordre public qui est en jeu. En
effet, une union de nature polygamique ne peut produire effet en France que si elle ne heurte pas la conception
française de l’ordre public. En l’espèce, c’est en raison de la nationalité française de la première épouse que la
demande de la seconde fut rejetée. La nationalité française de la première épouse a constitué l’Inlandsbeziehung
permettant le fonctionnement de l’exception d’ordre public (Cf. P. Lagarde, « La théorie de l’ordre public
international », loc.cit.). La situation n’est pas en soi contraire à l’ordre public puisqu’elle a valablement
contracté son mariage à l’étranger et que le statut personnel des deux époux en cause admettait la polygamie.
Mais en raison d’un lien personnel avec le for, les exigences de l’ordre public devaient être appréciées.
Cependant la polygamie se trouve en soi contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs du peuple devant la

250
présente deux avantages, d’une part, pour éviter d’offenser inutilement les États étrangers en
opposant l’ordre public à leurs lois dans des hypothèses où l’ordre juridique français n’est que
très peu intéressé par le litige ; d’autre part, pour ne pas encourager le développement d’un
610
contentieux artificiel devant les tribunaux français . Cependant les juges français ont peu à
peu écarté l’ordre public de proximité en faisant recours à la notion d’ordre public
611
d’éloignement .

335. En matière du contrat de travail, afin de protéger le salarié ayant subi le traitement
considéré injuste par son employeur, la Cour de cassation avait affirmé la décision de la Cour
d’appel qui a nié l’exception d’incompétence des juridictions françaises et fait application de
la loi française aux relations entre un employeur et son employé. En l’espèce, le contrat de
travail a été conclu au Nigéria entre le frère de la jeune fille nigérienne, le travailleur, et un
employeur britannique pour le travail au domicile de celui-ci au Nigéria, dès lors c’était
normalement la loi nigérienne qui régissait à leur contrat. Mais le travailleur, dans le cadre de
son travail, avait accompagné son employeur à Nice (France). La jeune fille a saisi le Conseil
des prud’hommes pour obtenir le paiement de salaires et d’une indemnité de travail dissimulé.
L’employeur avait contesté la compétence de juridictions françaises et l’application de la loi
française en raison de l’absence d’un rattachement fort avec la France. Certes, on sait que
ledit contrat de travail est injuste, mais il faut que la Cour trouve sa base légale pour motiver
sa décision.
La Haute juridiction a condamné l’employeur en appuyant sur l’ordre public
international ainsi : « l’ordre public international s’oppose à ce qu’un employeur puisse se
prévaloir des règles de conflit de juridictions et de lois pour décliner la compétence des
juridictions nationales et évincer l’application de la loi française dans un différend qui
présente un rattachement avec la France et qui a été élevé par un salarié placé à son service
sans manifestation personnelle de sa volonté et employé dans des conditions ayant méconnu

Cour thaïe. Comme on le sait, le contenu d’ordre public change selon époque, de nos jours la polygamie est
considérée contraire à la disposition du CCC et à la bonne morale. Sauf le cas d’application de droit de la famille
musulmane aux quatre provinces du sud de la Thaïlande, le statut personnel est régi par la loi musulmane.
610
T. Vignal, Droit international privé, Paris : Dalloz, 2005, p. 110.
611
Il s’agit de conception française de l’ordre public international qui n’interviendra que dans le cas où le litige
présente un lien plus étroit avec la France. S’il n’y a aucun lien ou ce lien est plus ténu avec le for, l’exception
d’ordre public international français n’a pas besoins d’intervenir. La Cour de cassation a estimé que la loi
algérienne qui a refusé l’établissement de la filiation légitime d’un enfant, n’ayant ni de nationalité française ni
résidant en France, n’est pas contraire à l’ordre public international (V. Cass. 1 er civ., 10 mai 2006, n° 05-10.299,
D. 2006. Jur. 2890, note Kessler et Salamé ; D. 2007. Panor. P. Courbe et F. Jault-Seseke).

251
612
sa liberté individuelle » . La Cour de cassation avait répandu son pouvoir de juridiction en
fondant sur le respect des droits fondamentaux du fait que le travailleur devait suivre son
employeur à l’étranger, en vertu du contrat, sans pouvoir rentrer dans son pays sans l’accord
de l’employeur et que son passeport a été retenu par son employeur lors de ces séjours, par
ailleurs son salaire de 25 euros pas mois n’était pas versé dès son séjour hors du Nigéria.
Alors l’ordre public international soulevé en l’occurrence était appliqué grâce à un
rattachement présenté avec la France lors du travail exécuté à Nice, même si celle-ci n’était
pas le lieu de travail habituel du travailleur en vertu du contrat. Certains auteurs ont critiqué le
recours à l’ordre public international qui semblait, en l’espèce, détacher aux mécanismes
613
classiquement associés à cette notion . Force est de constater que l’ordre public
international français en droit international privé a pour but de défendre la loi étrangère qui
heurte certains principes fondamentaux français. A notre avis, le cas en l’espèce révèle aussi
l’ordre public véritablement international qui prohibe de l’esclavage, le principe d’interdiction
de l’esclavage est reconnu et affirmé par plusieurs instruments internationaux relatifs aux
droits fondamentaux tels que la Convention de Genève du 25 septembre 1926 relative à
l’esclavage ; la Convention européenne des droits de l’Homme ; le Pacte international relatif
aux droits civils et politiques de l’ONU du 16 décembre 1966 ; Convention américaine
relative aux droits de l’Homme de 1969 ; Charte africaine des droits de l’Homme et des
peuples du 18 juin 1981, etc. De ce fait, le principe de l’interdiction de l’esclavage n’est pas le
seul principe fondamental de la France mais de la communauté internationale… Il est à noter
qu’il ne paraissait pas en l’espèce que la loi nigérienne admet ce genre de travail (comme
l’esclavage domestique), si c’était ce cas, il serait possible de décider comme contraire à
l’ordre public international français cette loi étrangère.
Cependant on peut trouver la thèse de naturalisation d’ordre public transnational par le
for (v. infra n° 343). Si l’on suit cette thèse, il est possible de motiver l’application par la
Cour de cassation en l’espèce d’ordre public international français.

2) L’office du juge face à l’exception d’ordre public.


336. En ce qui concerne l’office du juge dans ce domaine, les arrêts rendus par la Cour de
cassation en 2005 peuvent clarifier l’office du juge sur cette question. Dans son arrêt du 14

612
Cass. soc., 10 mai 2006, n° 03-46.593, D. 2006.IR.1400 ; RCDIP.2006.856, note E. Pataut et P. Hammje ;
JCP.2006.II.10121, note S. Bollée ; RDC.2006.1260, note Deumier.
613
E. Pataut et P. Hammje, note sous Cass. soc., op.cit., p. 857.

252
juin 2005, la Cour a décidé que c’était le droit de la Cour d’appel d’appliquer le droit
étranger compétent selon la règle de conflit de lois invoquée devant elle, compte tenu de la
teneur de la loi étrangère telle qu’elle l’a souverainement « à rechercher d’office si cette loi
614
était contraire à la conception française de l’ordre public international » . En l’espèce il
s’agit de la matière de responsabilité délictuelle mais sa vocation est générale, la cour d’appel
a déclaré prescrite l’action directe de la victime contre l’assureur du responsable d’un accident
de la circulation routière survenu en Grèce. La victime lui reprochait de ne pas avoir
recherché si la loi grecque n’était pas contraire à l’ordre public, instituant pour l’action de la
victime contre l’assureur un délai plus court que si elle avait agi contre l’assuré. Ce pourvoi a
été rejeté. Certes, on sait qu’en droit français les questions de prescription ne sont pas d’ordre
public et il faut constater que la décision a été prise dans le domaine de responsabilité
délictuelle.

337. L’arrêt du 6 décembre 2005 a apporté le critère des droits disponibles et indisponibles
pour justifier le cas où le juge devrait rechercher si la loi étrangère applicable au litige est
contraire à l’ordre public. La Cour de cassation estima que si les parties n’ont pas la libre
disposition de leurs droits, comme on le sait, il incombe au juge français de mettre en œuvre,
même d’office, la règle de conflits de lois, de rechercher la teneur de la loi étrangère et de
615
l’appliquer sous réserve qu’il ne soit pas contraire à l’ordre public international français .
Il est logique pour le juge de tenir d’office de rechercher ou vérifier si le contenu du droit
étranger en cause est ou n’est pas contraire à l’ordre public international. C’est en effet la
tâche principale suite à la recherche de son contenu.
Cependant la Cour estima qu’en matière des droits disponibles, il appartient aux
parties d’invoquer l’exception d’ordre public international. C'est-à-dire le juge ayant fait
l’application du droit étranger, « compte tenu de la teneur de la loi étrangère telle qu’elle l’a
souverainement définie », n’était pas à s’interroger d’office sur l’intervention de l’ordre

614
Cass.1er civ., 14 juin 2005, Bull. civ. I, n° 244.
615
Cass.1er civ., 6 décembre 2005, Bull.civ. 2005 I, n° 468 p. 395 ; D. 2006.98. Sachant que le cas est différent
lorsqu’il porte sur les droits indisponibles, par exemple l’épouse sénégalaise d’un belge avait contracté un
second mariage alors que le mari a déposé une requête en divorce. Ce mariage a été célébré au Sénégal : selon le
rite coutumier, cette union ne constituait pas un acte de bigamie. C’est la raison pour laquelle ce mariage n’était
pas contraire à l’ordre public même si la femme avait ultérieurement contracté un second mariage. Mais, selon la
cour d’appel, cette requête était irrecevable au motif que les dispositions de la loi sénégalaise qui permettent un
« état de bigamie apparent » sont contraires à l’ordre public international français. L’arrêt a été cassé.

253
616
public . Toutefois, si le juge considère que le droit étranger en cause est incompatible avec
l’ordre public international français, il pourra toujours l’évincer et appliquer la loi
française. Alors que dans le domaine des droits indisponibles, les obligations du juge portent
sur l’intégralité du mécanisme conflictuel ; il devrait appliquer la règle de conflit de lois,
rechercher le contenu de la loi étrangère, vérifier avant de l’appliquer si cette loi est contraire
ou non à l’ordre public international français.

3) L’application d’ordre public international par le juge thaïlandais.


338. Force est de constater que l’ordre public international n’est pas le rattachement pour
appliquer la loi du for, c’est un mécanisme d’exclure la loi étrangère estimant que son
application portera atteinte à la politique législative de la Thaïlande. Prenons un exemple
classique en droit thaï : les prescriptions sont aussi considérées comme l’ordre public
international auquel l’application de la loi étrangère ne peut s’y opposer. Ceci confirme la
décision de la Cour suprême en 1968, en l’espèce les parties ont conclu un accord d’appliquer
la loi étrangère, la loi danoise, au problème de prescription. Les juges ont décidé que « les
prescriptions constituent l’ordre public international thaï, par conséquent un accord entre les
parties d’appliquer au litige les prescriptions danoises est inapplicable. Il faut appliquer la
617
loi thaïe sur les délais prescriptives » .

B. L’exclusion d’ordre public international étranger.

339. A la différence des lois de police étrangères, l’ordre public international étranger ne
fait pas l’objet majeur du débat en droit international privé notamment en matière
contractuelle. Son admission est rarement abordée.
Le premier argument se fonde sur un ordre logique, autrement dit, comme on le sait
l’exception d’ordre public international est un mécanisme de protéger l’ordre juridique du for
et d’évincer la loi étrangère qui y portera atteinte. Lorsque l’ordre juridique de for est un seul
intéressé, dès lors il est normal que celui-ci détermine ses propres conditions d’acception ou
618
de rejet . On admet que l’éviction de la loi du for en faveur de la loi étrangère semble être

616
P. Courbe et F. Jault-Seseke, « Droit international privé : panorama 2005 », D. 2006.1497.
617
Cour suprême Dika, n° 1583/2511 (1968).
618
H. Batiffol, Traité de Droit international privé, Paris : LGDJ, t. I, 8e éd., 1993, n° 366, p. 589 ; P. Lagarde,
« Ordre public », Rép. D. Dr. internat., n° 59.

254
le cas normalement trouvé dans l’ordre juridique français. En particulier le cas de conflit entre
la loi du for et un traité international, cependant le cas de l’ordre public international étranger
est différent. Lorsque ceci est en cause, l’ordre juridique français n’a pas intégré les principes
étrangers en son sein, mais il le ferait en cas de la norme internationale.
On observe que l’ordre public international étranger semble pénétrer beaucoup dans la
matière conjugale.

340. Effet réflexe de l’ordre public international, l’admission de l’ordre public


étranger. Il semble que la plupart des auteurs soutiennent une approche selon laquelle l’ordre
public international étranger doit être rejeté. Cependant dans certaines circonstances, on peut
aussi prendre en considération les exigences d’un ordre public international étranger.
D’après Pillet, les effets de l’ordre public international ne peuvent jouer que dans les
limites du territoire de l’État qui l’a fait intervenir. Il a proposé que « chaque État doit
considérer comme régulières et fondées les décisions rendues à l’étranger par application du
principe de la territorialité des lois d’ordre public. Par le seul fait qu’un État reconnaît
l’existence d’États autres que lui, il reconnaît que ceux-ci doivent jouir des mêmes droits
619
essentiels, dont il prétend jouir lui-même » . Ceci est un effet réflexe de l’ordre public
international étranger. Nous trouvons qu’il ressemble à la courtoisie dans les relations
internationales. Cette pensée a été reprise dans des études et a été traitée comme une
exception au rejet du principe de l’ordre public international. Il s’agit de droit acquis à
l’étranger en vertu de l’ordre public local. Prenons un exemple classique : lorsque deux
polonais de religion différente mariés en Belgique, ceci est contraire à leur loi nationale à
l’époque qui prohibait de tels mariages. Le mariage n’était pas contraire à l’ordre public
international belge, il écartait alors la loi polonaise normalement compétente. Bien que ce
mariage soit nul au regard de la loi nationale étrangère normalement applicable. La question
est de savoir, qu’en est-il lorsque le juge français devrait se prononcer sur la validité de ce
620
mariage ? Selon les auteurs , le juge devrait le considérer comme valable, même s’il est nul

619
A. Pillet, « De l’ordre public en droit international privé », in Mél. Pillet, Paris, 1929, t. I, p. 407, spéc. p.
451 ; V. aussi le même auteur, Principes de droit international privé, Paris : Pedone/Grenoble : Allier Frères,
1903, n° 217, p. 423.
620
Niboyet, Traité de droit international privé français, t. III, 1944, n° 1048 ; H. Batiffol, Droit international
privé, t. I, op.cit., n° 366, p. 590 ; Y. Loussouarn, Droit international privé, 9e éd., Dalloz, 2007, n° 263, p. 323
et s.

255
621
d’après la loi normalement compétente . C’est là, l’ordre public qui commande la solution,
et on peut constater que l’ordre public belge n’intervient qu’à titre de moyen lié à l’ordre
public français. C’est en effet la coïncidence de l’ordre public international étranger (du lieu
de célébration) et de l’ordre public international français qui explique bien ce résultat. Il s’agit
de l’effet réflexe d’après Pillet. Certes, on ne voit pas comment le juge français pourrait
invoquer l’ordre public à l’encontre de celui similaire à la loi française. Au contraire, si ce
mariage était considéré comme porter atteinte aux principes fondamentaux français, sans
doute le juge ne l’aurait pas reconnu en France. Dans ce cas l’effet réflexe n’a pas pu jouer
son rôle systématiquement.
On peut considérer que l’intervention de l’ordre public international étranger est
exclusive du jeu de l’ordre public international du for.

§ 2 : Affermissement du rôle indispensable d’ordre public transnational en matière du


contrat.

341. On sait que le juge devrait tenir compte de l’ordre public international du for, mais
pour l’arbitre qui n’a pas de for ni de lex fori. L’arbitre n’est pas destiné à défendre l’intérêt
étatique, sa tâche diffère de celle du juge, alors tout ordre public international étatique est
complètement étranger pour lui. Devrait-il tenir compte de l’ordre public international ? Si la
réponse est positive, l’ordre public de quel(s) État(s) devrait-il en tenir compte ? Certes,
l’arbitre devrait prendre en compte de certains d’entre eux en raison de la reconnaissance et de
l’exécution de la sentence sur le territoire d’un État ; une sentence qui porte atteinte à l’ordre
public international de l’État sur lequel la sentence doit être exécutée peut entraîner
l’annulation. Mais la question pouvait être posée si l’arbitre devra respecter l’ordre public
international de tous États concernés…
Hormis tel ou tel ordre public international, force est de constater que l’on ne peut nier
le jeu considérable des lois de police en matière d’arbitrage, par rapport au jeu d’ordre public
international. Là aussi, le juge doit tenir compte des lois de police de l’État avec lequel le
contrat a des liens qui justifient son application, mais pour l’arbitre qui n’a pas de for, la
question est de savoir s’il est nécessaire de respecter les lois de police ? La situation semble
être totalement différente de celle du juge étatique, car l’arbitre ne subit pas les influences

621
Contra. E. Bartin, Principes de droit international privé selon la loi et la jurisprudence françaises, Paris :
Montchrestien, t. I, 1930, § 95. Il avait affirmé que les effets de l’ordre public international devaient être
strictement territoriaux.

256
d’un ordre juridique national, mais à notre avis il devrait respecter aussi les lois de police d’un
État dans lequel la sentence sera exécutée. Cependant nous ne traiterons pas la question des
lois de police dans ce chapitre. Nous nous intéressons à l’application des lois de police ayant
un caractère d’ordre public transnational ou véritablement international qui incombe aux
arbitres et aux juges étatiques. C'est-à-dire qu’il est possible d’envisager une loi de police qui
a le même contenu qu’un ordre public transnational. On constate que cet ordre public
transnational a été utilisé par certains arbitres et a fait l’objet d’études doctrinales.

342. Malgré le rôle très intéressant et bien considérable, de nos jours ces conceptions sont
toujours floues c'est-à-dire son caractère est polémique tels que sa notion, son existence ou
bien son contenu (A). Nous verrons ensuite les modalités d’intervention de l’ordre public
transnational qui est également discutable en raison de sa nuance susceptible de rendre
hésitation entre fonction de la loi d’application immédiate et une intervention pour éviter la
loi normalement applicable (B).

A. Caractère polémique de l’ordre public réellement international.

1) La notion nuancée de l’ordre public transnational et véritablement international.


343. L’ordre public transnational ou véritablement international peut être défini comme un
mécanisme défendant des valeurs, non pas propres à un ordre juridique national, mais
adoptées par la communauté internationale... Dès lors son champ d’application est plus large
que celui de l’ordre public international.
En effet rien ne fait obstacle à ce que l’ordre juridique français s’inspire de
conceptions plus généralement admises par la communauté internationale mais cela ne donne
622
pas de caractère transnational à son ordre public . On constate qu’il est toujours nécessaire
que les conceptions défendues devront faire l’objet d’une sorte de « naturalisation », c'est-à-
dire qu’il faut parler de l’ordre public international français même s’il peut être influencé par
623
l’ordre public transnational . En effet l’ordre public international d’un État était invoqué
pour écarter l’application de la loi étrangère, mais l’ordre public réellement international n’a
d’intérêt que s’il se distingue dans sa fonction de l’ordre public international au sens

622
D. Bureau, Les sources informelles du droit dans les relations privées internationales, Thèse, Paris II, 1992,
n° 804, p. 527.
623
N. Nord, Ordre public et lois de police…, op.cit., n° 269, p. 146.

257
traditionnel. Si les deux notions donnent le même effet négatif, on voit mal dans quelles
circonstances le juge serait à même de tenir compte de cette troisième catégorie d’ordre
624
public. Comme affirme M. B. Goldman , si le principe que l’on a reconnu à l’ordre public
international commun est identique que celui que l’on admet à l’ordre public international
français, le juge n’a nullement besoin de recourir à cette troisième notion. Mais lorsque le
principe n’est pas d’ordre public international français, alors le juge pourrait difficilement
recourir à cette notion sans condamner sa propre loi. Le juge pourrait le faire aussi s’il était
chargé de réaliser l’ordre juridique international quand le litige présente des éléments
d’extranéité. Mais ceci serait pousser à l’extrême la notion de « dédoublement
625
fonctionnel » . On trouve que ces remarques viennent affirmer que la notion d’ordre public
réellement international ne présente un intérêt que si celui-ci a une fonction différente ; une
fonction positive.

344. Il semble différent de l’arbitre international qui tranche les affaires internationales et
qui peut envisager un ordre public véritablement international détaché de l’ordre public
international auquel le juge étatique est soumis. Bien que le rôle d’ordre public transnational
soit très important, le débat sur ce sujet en Thaïlande est rarissime. La jurisprudence et la
doctrine ne parlent que du terme « ordre public et bonnes mœurs » comme nous l’avons vu
auparavant.

2) L’existence de l’ordre public transnational.


345. A priori, en matière de conflit des lois, l’ordre public intervient suite à l’application de
la règle de conflit lorsque celle-ci conduit à l’application d’une loi étrangère. En matière
d’arbitrage international, la Cour de cassation caractérise l’ordre public international comme
celui qui peut être évoqué « pour faire obstacle à une loi étrangère en matière d’arbitrage
international, la règle de droit normalement applicable, contraire à des conceptions
626
fondamentales du droit français » . Cependant le cas d’ordre public transnational semble
beaucoup plus délicat car il n’existe pas d’unanimité dans la doctrine sur la notion qui est
toujours contestée parmi les juristes.

624
B. Goldman, note sous l’arrêt Paris, 19 mars 1965, Banque Ottomane, JDI.1966.137 et s.
625
Id., p. 136.
626
Cass. ass. plén. 14 octobre 1977, D.1978.417, note P. Lagarde.

258
346. Les thèses négatrices de l’ordre public transnational sont posées à cause de son
inutilité et de son existence incertaine. Pour les uns, l’argument a été avancé qu’aucune règle
ne pouvait prétendre à l’universalité. Pour les autres, il semble impossible d’obtenir
l’unanimité afin de prétendre à l’ordre public transnational, alors il semble qu’un large
627
consensus à propos de ces règles et ces concepts est suffisant .
Un argument avancé pour nier l’existence de l’ordre public transnational se base sur la
notion qui correspond à la partie indérogeable de la lex mercatoria. L’existence de la lex
mercatoria elle-même est controversée, si l’on refuse l’existence de l’ordre juridique
transnational, il faut également nier l’existence de l’ordre public transnational. Cet argument
est avancé dans le sens selon lequel un ordre public sera « international » non seulement par
sa fonction mais aussi par sa source. La question peut se poser si l’ordre public réellement
international de la lex mercatoria devrait emporter sur l’ordre public international par son
domaine et national par sa source. D’après M. P. Mayer, la supériorité de la lex mercatoria
par rapport aux droits étatiques n’est pas évidente, car la première a ses sources des usages du
628
commerce international et les principes généraux du droit . Il ne s’agit pas de droit
international au sens propre du terme qui est supérieur aux droits étatiques mais simplement
un droit de source internationale. C’est la raison pour laquelle, faire jouer « le mécanisme de
l’ordre public au nom de cette prétendue supériorité, apparaît comme une atteinte au principe
629
du libre choix par les parties de la loi applicable » . Cependant M. P. Mayer ne refuse pas la
possibilité d’éviction de la loi normalement compétente, mais il faut reposer sur le fondement
de la volonté de l’arbitre. Selon cet argument, la question de la subjectivité de l’arbitre peut
630
être en cause car on lui laisse trop de marge d’appréciation .

347. Toutefois, il faut rappeler que l’existence d’ordre public transnational ne diffère pas
des principes généraux au sens de l’article 38 du Statut de la Cour internationale de justice,
dans la mesure où, selon M. E. Gaillard, « il s’agit de dégager de l’ensemble des droits la
tendance dominante, ce qui ne suppose évidemment pas la constatation que la règle en cause

627
J.-B. Racine, L’arbitrage commercial international et l’ordre public, Paris : LGDJ, 1999, p. 355.
628
P. Mayer, « La règle morale dans l’arbitrage international », in Études offertes à Pierre Bellet, Paris : Litec,
1991, p. 379, spéc. p. 390 et s.
629
Id., p. 392.
630
Sur ce point le même auteur a défendu que l’arbitre lui-même doive préserver sa crédibilité, surtout pour
l’institution de l’arbitrage, donc pour lui, la confiance est une chose la plus importante pour ce mode de
règlement des différends.

259
631
ait fait l’objet d’une reconnaissance unanime » . Citons une sentence de CIRDI dans
l’affaire World Duty Free de 2006, dans laquelle le tribunal arbitral a admis que « in some
countries or sectors of activities, corruption is a common practice without which the award of
a contract is difficult- or even impossible- but they always refused to condone such
practices ». L’arbitre a decidé que « bribery is contrary to the international public policy of
632
most, if not all, States or, to use another formula, to transnational public policy » . Dès
lors, il n’est pas nécessaire d’obtenir à l’unanimité de consensus pour que cette règle soit
qualifiée « transnationale ».
On trouve que l’argument selon lequel l’ordre public transnational serait inutile
lorsque les parties n’ont pas choisi la loi applicable susceptible d’être défendue. Car, l’arbitre
devrait normalement appliquer la loi qu’il juge apte au contrat et surtout celle qui ne porte pas
atteinte aux exigences fondamentales en raison de sa proximité de la situation. L’ordre public
transnational peut jouer son rôle lorsque l’arbitre devrait rendre une sentence qui n’est pas
contraire aux conceptions fondamentales acceptées par la communauté internationale. Car,
finalement cette sentence devrait été exécutée dans certains pays de la communauté
internationale. L’argument est fondé aussi sur la fonction inutile de l’ordre public
transnational en constatant que son contenu coïncide souvent à celui de l’ordre public
national. Sur ce point, nous avons déjà étudié qu’avoir influencé par l’ordre public
transnational ne transforme pas la nature d’ordre public interne à l’ordre public réellement
international. Par ailleurs l’ordre public international d’un État « est fondé sur un système de
valeurs et de principe national, plutôt qu’influencé par l’idée ou les besoins de la
633
globalisation » .

348. En pratique, il est difficile de nier l’existence de la notion d’ordre public transnational.
Par ailleurs, aucune raison théorique valable ne s’oppose à l’admission du concept d’un ordre
public transnational ou réellement international tant dans le domaine des droits de l’Homme
que celui du commerce international. Il nous convient de citer les trois représentations

631
Cf. E. Gaillard, Aspects philosophiques du droit de l’arbitrage international, Les livres de poche de
l’Académie de droit international de La Haye, Liden/Boston : Martinus Nijhoff Publishers, 2008, p. 77-78. Cet
auteur a constaté qu’en ajoutant une condition de l’unanimité de consensus n’est que pour écarter l’ordre public
transnational et recourir directement à la règle morale par l’arbitre.
632
CIRDI, 25 September 2006, World Duty Free v. Kenya, case ARB/00/7, § 157.
633
P. Lalive, « L’ordre public transnational et l’arbitre international », in Nouveaux instruments du droit
international privé, Liber Fausto Pocar, Milan : Dott. A. Giuffrè Editore S.p.A., 2009, vol. II, p. 599-611, spéc.
p. 608.

260
générales de l’arbitrage international d’après M. E. Gaillard qui a classé la première
représentation s’agissant d’un ordre juridique étatique donné en assimilant le siège d’arbitrage
avec le for du juge. La seconde représentation peut être analogie avec le modèle
westphalienne, car elle se fonde sur la pluralité des localisations dans les ordres juridiques
étatiques. Il s’agit d’un ordre juridique mondial. Enfin, la troisième représentation fondée sur
l’idée transnationale qui admet que l’arbitrage est fondé non sur un droit étatique (celui du
siège ou celui du lieu d’exécution) ni sur le droit international public mais sur un ordre
634
juridique tiers ou « ordre juridique arbitral » . Donc, l’ordre public transnational peut être
appliqué par l’arbitre qui appartient à l’ordre juridique tiers. Citons par exemple dans une
sentence CCI rendu en 1972 statuant à Genève, le litige est né d’un conflit armé entre l’Inde
et le Pakistan. L’arbitre avait appliqué des règles de l’arbitrage CCI, il n’était pas obligé de
prendre en comte de l’ordre public international d’une des parties mais il avait seulement
635
l’obligation de respecter l’ordre public réellement international .
Enfin, il paraît que, comme l’affirme M. P. Lalive, la distinction entre l’ordre public
réellement international par son contenu mais national par sa source, et l’ordre public
réellement international tant par son contenu que par sa source n’est pas nécessaire en
636
pratique .

3) La teneur de l’ordre public transnational.


349. La pratique tant judiciaire qu’arbitrale nous a montré l’existence des plusieurs points
communs entre le domaine de l’ordre public international étatique et l’ordre public
637
transnational. Un auteur a même dit l’un nourrissant l’autre et vice versa . Cependant il ne
faut pas confondre les valeurs et les intérêts fondamentaux que chaque ordre public défend,
plus précisément il ne faut pas confondre entièrement les valeurs et les intérêts fondamentaux
d’un État avec les valeurs et les intérêts fondamentaux de la communauté internationale des
commerçants. C’est pourquoi la distinction entre la notion d’ordre public international et celle
d’ordre public transnational est nécessaire.

634
E. Gaillard, Aspects philosophiques du droit de l’arbitrage international, op.cit., p. 32-92.
635
Sentence CCI, n° 1664, le 15 mars 1972, cité par J. Lew, Applicable Law in International Commercial
Arbitration : A study in Commercial Arbitration Awards, 1978, p. 545-548.
636
Cf. P. Lalive, « Ordre public transnational ou réellement international et arbitrage international », Rev.
arb.1986.329, spéc., p. 363 et s.
637
Id., p. 368.

261
350. La question peut se poser si les principes fondamentaux peuvent être inclus dans
l’ordre public transnational ? La réponse peut être positive si l’on accepte que l’arbitre ne
doive pas trancher le litige en donnant une solution immorale ou choquante. Dans ce cas, les
droits de l’Homme, les principes fondamentaux absolument essentiels qui ne sont pas propres
au commerce international joueront leur rôle. L’arbitre devrait respecter l’accès des parties
contractantes au procès équitable, il ne devrait pas consacrer dans sa sentence une
discrimination raciale ou une situation d’esclavage. On peut constater qu’il s’agit, en effet, de
la notion de ius cogens en droit international public. L’on constate aussi que le domaine du
droit des contrats commerciaux internationaux a plus de l’opportunité de trouver des cas de
reconnaissance de principes fondamentaux susceptibles de nourrir le concept d’ordre public
638
transnational. La corruption, en l’occurrence, peut être citée comme un bon exemple .
La sentence CCI rendue en 1998 a affirmé que « un contrat incitant ou favorisant la
corruption des fonctionnaires est contraire à l’ordre public transnational et que, si tel
s’avérait être l’objet d’un contrat de consultance, il n’a d’autre option que d’en constater la
639
nullité » . Il y a de nombreuses sentences qui ont fait fréquemment référence à cette même
640
règle . On peut dire que l’interdiction de la corruption est un principe d’ordre public
transnational, car il est traité comme tel par les arbitres qui n’hésitent pas à annuler des
contrats dont les parties ne respectent pas cette interdiction. En effet on trouve que dans les
sentences arbitrales la raison et les termes juridiques pour condamner les corrupteurs sont
multiples. Comme par exemple le principe général de droit reconnu par les nations civilisées ;
ou une règle matérielle d’application immédiate ; et même le recours à un ordre public
transnational.
Quels que soient les termes utilisés, c’est la même notion qui est en cause. La notion
de « bonnes mœurs » dans le commerce international est l’un des exemples. On voit qu’il
s’agit de l’ordre public français interne et même l’ordre public international tel que la plupart

638
Contra. P. Mayer, « La règle morale… », op.cit., p. 392. Pour cet auteur, la corruption n’est contraire ni à un
usage du commerce international ni à un principe général du droit donc seul « le sentiment de justice propre à
l’arbitre suffit à fonder une décision condamnant de telles pratiques ».
639
Sentence CCI n°8891 (1998), JDI.2000.1076, obs. D. Hascher.
640
Cf. Sentence CCI n°3913 (1981), extrait cité par Y. Derains, JDI.1984.920, on observe que le tribunal
arbitral n’a pas utilisé le terme « l’ordre public transnational ou véritablement international » mais « l’ordre
public international tel que la plupart des nations le reconnaît » ; la sentence CCI n°3916, 1982, JDI.1984.930,
obs. S. Jarvin. Ces sentences ont réaffirmé cette position.

262
641
des nations le reconnaissent . Il convient de citer ici une sentence CCI de 1982 relative à
une société d’Import-export dont le commerçant a fait une transaction fictive aux fins de
permettre aux entreprises yougoslaves d’obtenir un crédit en devises étrangères pour l’achat
de biens de consommation en violation des dispositions yougoslaves sur les opérations de
crédit avec l’étranger. Selon l’avis des arbitres les opérations en question étaient « contraire
non seulement à la législation yougoslave, mais encore à la morale et aux bonnes mœurs ».
642
Par conséquent ce contrat était « nul et d’une nullité absolue » . Certes, le noyau de cette
sentence qui accepte que l’ordre public international étatique pourrait devenir l’ordre public
transnational comme affirment les arbitres ainsi : « Ce principe est admis dans tous les pays et
par toutes les législations. Il constitue une règle internationale, un élément de droit commun
643
des contrats dans le domaine international» .
La prohibition du blanchissement de l’argent est un autre exemple de l’ordre public
véritablement international.

351. S’agissant de certaines solutions antagonismes adoptées par les arbitres, par exemple,
le principe « actori incumbit probatio » et « reus in excipiendo fit actor » en vertu desquels
« chaque partie devrait prouver les faits qu’elle allègue pour en déduire son droit ». Ce
644
principe a été avancé par la sentence CCI de 1981 et semble être aussi considéré comme
d’ordre public transnational. Alors que dans une sentence ancienne les arbitres n’étaient pas
tenus à appliquer d’une manière stricte des règles en matière de preuve et que les parties
645
devaient coopérer de bonne foi avec l’administration .

352. En droit thaï sur l’arbitrage, avant l’année 2002, la Loi 1987 ne mentionnait aucune
exigence du fardeau de la preuve, l’article 17 ne stipulait que : « Si cette Loi ou la convention
d’arbitrage ne stipule pas autrement, l’arbitre peut d’office conduire la procédure comme il
considère apte au litige en tenant compte de la justice ». Cependant on trouve que la nouvelle
Loi de 2002 sur l’arbitrage a le même sens que la sentence CCI de 1981 citée plus haut, dont

641
P. Lalive, « Ordre public transnational… », op.cit., n° 22.
642
Sentence CCI n°2730 (1982), JDI.1984.914., obs. Y. Derains.
643
Ibid.
644
Sentence CCI n°3344 (1981), JDI.1982.978, obs. Y. Derains.
645
Sentence CCI n°1434 (1975), JDI.1976.978, obs. Y. Derains.

263
l’article 29 stipule : « Sous réserve d’un accord des parties, la demanderesse devra prouver
les faits reprochés à la défenderesse afin de soutenir ses demandes. La défenderesse devra
défendre ses droits en donnant des preuves nécessaires et en précisant ses objections. Dans
ce cas, les parties pourront soumettre les documents concernés ou la liste des preuves ».

353. En ce qui concerne la non-application des Conventions internationales par les arbitres,
est-ce qu’elle peut être considérée comme contraire à l’ordre public transnational ? En effet il
existe certaines Conventions internationales qui obligent les arbitres à appliquer leurs
646
stipulations au litige . Dans ce cas il faut bien distinguer entre l’ordre public et
l’impérativité de la convention internationale. Car la dernière vise la protection d’intérêts
privés qui n’appellerait pas de contrôle systématique. Au contraire, il convient de poser la
question si la convention internationale en cause est indispensable au bon ordre de la
communauté internationale ? Si sa violation se heurte aux principes fondamentaux, on peut
647
dire qu’elle constitue un ordre public transnational .

354. Bien que l’on envisage la notion critiquable et le contenu nuancé de l’ordre public
transnational, on peut dire que parmi les principes généraux ou fondamentaux du droit du
commerce international, de la lex mercatoria ou d’un droit international des contrats, seuls
ceux qui apparaissent comme essentiels, appuyés par un large consensus de constituer la
valeur importante, d’une force et d’une impérativité particulières, méritent d’être considérés
648
comme l’ordre public transnational . Il est vrai que l’ordre public transnational, comme
l’ordre public international étatique, est variable dans le temps, c’est le dynamisme de l’ordre
public, son changement dépend des circonstances dans chaque époque. Il peut évoluer et
s’enrichir de principes nouveaux.

646
Par exemple, la Convention de Hambourg l’article 22 § 5 selon lequel : « Les dispositions des paragraphes
3 et 4 du présent article sont réputées inclues dans toute clause ou pacte compromissoire, et toute disposition de
la clause ou du pacte qui y serait contraire est nulle » ; et la Convention de Montréal l’article 34 § 4 selon
lequel : « Les dispositions des paragraphes 2 et 3 du présent article seront réputée faire partie de toute clause
ou de tout accord arbitral, et toute disposition contraire à telle clause ou à tel accord arbitral sera nulle et de
nul effet ».
647
Cf. C. Legros, « Le conflits de normes juridictionnelles en matière de contrats de transport internationaux de
marchandises », JDI.2007.799 et ibid., p. 1081. En effet les deux conventions internationales déjà citées ont pour
objectif de permettre une réparation des victimes des transporteurs, elles écartent toutes les clauses exonératoires
de responsabilité. Donc on peut dire qu’elles favorisent le bon ordre de la société et sauvegardent les principes de
réparation de la responsabilité civile. Pour ces raisons on peut admettre que ces deux conventions font partie à
l’ordre public transnational.
648
Cf. P. Lalive, « Ordre public transnational », op.cit., n°11, p. 334.

264
Il reste à savoir dans quelle situation, l’ordre public transnational intervient-il ?

B. L’intervention de l’ordre public transnational.

355. L’intervention de l’ordre public transnational est plutôt rare dans la situation selon
laquelle les parties ont choisi des usages du commerce international ou des principes
généraux. On peut dire qu’il n’existe pas d’usages du commerce ou des principes généraux
qui sont contraires aux conceptions fondamentales de la communauté internationale ou aux
intérêts fondamentaux du commerce international.

356. La difficulté d’intervention de l’ordre public transnational. Certes, l’application


de l’exception d’ordre public international par l’arbitre semble être un cas ordinaire. Mais le
recours à l’ordre public transnational du juge étatique est en revanche un cas très
exceptionnel, pour l’arbitre il devra tenir compte de l’ordre public de la communauté
internationale des commerçants. C’est dire qu’il faudrait tout d’abord accepter comme un
élément préalable l’existence d’une communauté et de valeurs fondamentales communes.
On accepte qu’en matière du contrat international, l’autonomie de la volonté des
parties est prédominante comme nous l’avons vue, alors l’intervention de l’ordre public
transnational n’est qu’en cas d’exception. L’arbitre ne peut pas nier d’appliquer la loi choisie
par les parties contractantes. C’est le principe fondamental en matière d’arbitrage
international. Pourtant, après avoir étudié la loi choisie par les parties, si l’arbitre trouve que
l’application de ladite loi amènerait aux résultats choquants, dans ce cas il pourrait
exceptionnellement éviter cette loi en recourant à l’ordre public transnational. C’est le
meilleur mécanisme pour motiver la sentence et d’éviter le refus de reconnaissance et
649
d’exécution de sentence par l’État concerné .

357. La Loi thaïe de 2002 sur l’arbitrage dans son article 34, alinéa 2, stipule qu’en cas
d’absence de choix des parties de la loi applicable du fond, l’arbitre peut appliquer la loi thaï
en premier lieu ; ou appliquer la règle conflictuelle en cas de conflit de lois si c’est le cas.

649
Par exemple, la sentence qui affirme que « le droit libyen est en principe applicable à tous les aspects du
litige, en ce qu’il n’est pas contraire à l’ordre public international et aux principes de bonne foi » ; Cf. P. Mayer,
« La règle morale dans l’arbitrage international », loc.cit. Selon cet auteur la corruption n’est contraire ni à un
usage du commerce international ni à un principe général du droit donc seul « le sentiment de justice propre à
l’arbitre suffit à fonder une décision condamnant de telles pratiques ».

265
« L’arbitre devra trancher le litige par l’application de la loi thaïlandaise, sauf le cas
où le conflit des lois est en cause, l’arbitre devra appliquer la règle de conflit de lois au
650
litige » .

On peut prendre en considération cette stipulation en deux situations, la première


s’agissant du cas d’application de la loi thaïlandaise ; la question peut se poser si l’arbitre
devrait prendre en considération l’ordre public transnational. En pratique cette première
situation n’aura lieu que dans l’arbitrage purement interne, et on suppose que la sentence sera
exécutée en Thaïlande ; il semble que l’ordre public transnational n’y a pas de rôle.
Cependant si l’on accepte que l’arbitre ne rende pas une décision choquante et qu’il respecte
toutes les fois la bonne morale, ou l’interdiction de corruption, ou autres principes acceptés
par la communauté internationale. Cela peut être impliqué même s’il s’agit d’arbitrage
interne. Ces principes doivent être pris en considération afin de motiver la sentence arbitrale.
C’est la preuve de difficulté de distinguer l’ordre public interne de l’ordre public international
et transnational. La seconde consiste au cas dans lequel la règle de conflit de lois est en jeu ;
c’est évident que l’arbitre devra tenir compte de l’ordre de public transnational car la sentence
devra être homologuée dans un autre État. Il faut constater qu’il est rare de trouver en réalité
le cas où la loi élue par les parties applicable au contrat soit écartée. En effet les sentences ne
font qu’affirmer ces principes sans les faire jouer réellement. Dès lors l’ordre public
651
transnational n’apparait que dans les motivations de la sentence ou des obiter dictum .
On peut trouver aussi l’intervention d’ordre public transnational dans le cas relatif à
l’arbitrabilité subjective dont la loi nationale est en cause, mais il ne concerne pas la loi
d’autonomie. Par exemple, la sentence qui affirma comme contraire à l’ordre public
transnational le compromis fait par l’établissement public, car son statut n’eût pas été apte à
compromettre.

358. Conclusion de la section. Bien que certain principe d’ordre public ne paraisse très
couramment que dans le statut personnel, le rôle de l’exception d’ordre public est
considérable pour toutes les matières de droit international privé, notamment en matière de

650
มาตรา ๓๔ วรรค ๒ แห่งพระราชบัญญัติอนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติวา่ “ ในกรณี ที่คู่พิพาทมิได้กาหนดถึงกฎหมายที่จะนามาใช้บงั คับ
กับข้อพิพาทไว้ ให้คณะอนุญาโตตุลาการชี้ขาดข้อพิพาทไปตามกฎหมายไทย เว้นแต่เป็ นกรณี ที่มีการขัดกันแห่ งกฎหมาย ก็ให้พิจารณาจากหลักว่าด้วย
การขัดกันแห่งกฎหมายที่คณะอนุญาโตตุลาการเห็นสมควรนามาปรับใช้ ”
651
Sentence n° 4761 (1984), JDI.1986.1137, obs. S. Jarvin.

266
652
contrats internationaux . L’un des caractères importants de l’exception d’ordre public est la
variabilité dans le temps, ce qui est difficile de donner la définition précise à l’ordre public.
On ne pourrait que le définir pour une certaine période et puis il peut se changer dans l’avenir,
tout dépend des circonstances économiques, politiques et sociales dans chaque époque.
En Thaïlande, quand on parle de l’ordre public, on pense généralement aux bonnes
mœurs et à la paix du peuple. C’est ce terme qui s’appliquera dans tous les litiges, aussi bien
interne qu’international. Si le mot « international » peut donner un intérêt significatif à l’ordre
public, on ne voit aucune raison de le rejeter. Cependant, de nos jours, on n’envisage pas
encore le problème causé par la non- distinction entre « l’ordre public » interne et « l’ordre
public international » dans les termes juridiques thaïs.
De même que l’ordre public réellement international, après avoir étudié la notion, le
contenu, et le mode d’intervention d’ordre public transnational dans le commerce
international en particulier le cas devant la juridiction arbitrale, on constate d’une part la
difficulté de déterminer de façon certaine son contenu. D’autre part, on ne pourrait pas nier
l’existence de règles regroupées des principes appuyés sur un consensus très large parmi les
États de la communauté internationale, comme la répression de la corruption de
fonctionnaires ou le blanchissement de l’argent qui font l’objet d’une sanction de presque
toutes les lois étatiques.
L’ordre public international étatique est en effet l’ordre public national à l’objet
international, le domaine de l’ordre public international est entièrement intérieur à celui de
l’ordre public interne. Autrement dit on ne peut pas imaginer un ordre public international qui
n’est pas un ordre public interne. Alors que l’ordre public transnational « trans » ou
s’applique entre les États et il est commun entre plusieurs États. On ne peut pas refuser que,
l’ordre public transnational est véritablement international dans la mesure où il comprend un
ordre public international à l’objet international, il peut y avoir la source internationale par
exemple le jus cogens.

652
Bien que pour certain, l’ordre public international en matière du contrat semble déjà supprimé à travers le
terme « manifestement » employé par l’article 16 de la Convention de Rome 1980, en Thaïlande, l’ordre public
et les bonnes mœurs qui sont admis équivalents à l’ordre public international jouent toujours le rôle important.

267
359. Conclusion du chapitre. Du point de vue de l’ordre juridique du for, il existe deux
mécanismes qui peuvent jouer leurs rôles pour le protéger. Il arrive souvent que les juges
français et thaïs appliquaient dans certaines circonstances leurs lois internes sans passer par
l’intermédiaire de règle conflictuelle. C'est-à-dire il n’y a aucune chance d’appliquer la loi
étrangère. Parce que les juges devraient recourir immédiatement à des lois qui sont destinées à
sauvegarder l’organisation politique, économique et sociale du pays. Alors comme nous
l’avons vu, la notion de lois d’application immédiate peut aussi être assimilée à celle de lois
de police, en raison de leur même fonction. Si les juges ne trouvent pas les lois d’application
immédiate qui peuvent être appliquées à la situation en cause, ils prennent en considération la
règle conflictuelle classique. Dans certain cas la règle conflictuelle entraîne l’application de la
loi étrangère, certes, le juge du for doit respecter la loi étrangère applicable comme nous
avons étudié dans le chapitre précédent. Mais cette loi ne doit pas violer les principes, les
valeurs fondamentales du for. Dès lors, il faut pouvoir légitimement écarter une loi étrangère
qui serait trop éloignée des conceptions de l’ordre juridique du for. Force est de constater que
les États créent des moyens de combler les lacunes de règle de conflit de lois ; l’ordre public
international. L’exception d’ordre public international apparaît comme un correctif
exceptionnel permettant d’écarter la loi étrangère normalement compétente lorsque celle-ci
contient des dispositions dont l’application est jugée inadmissible par le juge saisi.

268
Chapitre Second
EXCEPTION DE FRAUDE.

360. Même si le principe de l’autonomie de la volonté est bien consacré en droit


international privé des contrats, il n’est pas forcément vrai que dans tous les cas, cette loi
choisie peut jouer un rôle… Si elle constitue des dispositions qui se heurtent à l’ordre public
international du for, elle sera écartée. La protection de l’ordre juridique du for ne s’arrête pas
là, il existe une autre exception ; c’est l’exception de fraude à la loi. Force est de constater
que l’exception de fraude à la loi a pour l’objectif de faire échec à la prétention formulée, de
653
refuser ses effets dans le cas en cause en raison de l’intention malicieuse du sujet . La
fonction de la fraude à la loi ayant consisté à défendre la loi française contre l’application
d’une loi étrangère contraire à son autorité. Dès lors, il semble qu’un rapprochement paraît
dans l’ordre public et la fraude à la loi. Pour cette raison on peut envisager l’argument selon
lequel seule l’exception d’ordre public suffit pour écarter les effets illicites de cette
654
manipulation des règles de conflit . Toutefois, il faut observer que seul le résultat auquel les
deux exceptions aboutissent, est assimilé ; c’est l’éviction de la loi normalement compétente.
Nous ne pouvons pas nier que les fonctions et la nature des deux ordres sont différentes ;
l’ordre public s’attache au contenu de la loi étrangère régulièrement compétente qui doit être
écarté ; quant à la fraude à la loi, on penche sur l’intention frauduleuse de particulier pour
655
écarter la loi étrangère qui doit être applicable .

653
Cependant il se trouve que dans d’autres pays tels que les États-Unis ou l’Angleterre, la fraude est
sanctionnée par les moyens autres que l’exception de fraude à la loi.
654
E. Bartin, Étude de droit international privé, Paris : Chevalier-Marescq, 1899, p. 252. Cet auteur affirme
que « si le changement de la loi a été la cause finale de l’activité des parties…les dispositions de la loi nationale
prennent le caractère de dispositions d’ordre public et doivent prévaloir sur celle de la loi étrangère ».
655
Contra. M. Lepaulle, in « La fraude à la loi », communiqué par G. De la Pradelle, TCFDIP 1971-1973, p.
117-145, spéc. p. 133. Cet auteur estime que la théorie de fraude à la loi paraît en réalité comme une doctrine
pratiquement inutile en droit international privé. Il nous a rappelé qu’en d’autres pays il n’y a même pas un
chapitre spécial sur la fraude à la loi. Puisqu’il existe un autre fondement traditionnel à recourir, par exemple,
pour la prétention devant la Cour qu’on a une nationalité française mais que ce n’est pas vrai, c’est un cas de
mensonge devant le tribunal. Cela n’a rien de particulier en droit international privé. Un autre exemple en cas de
l’application de règle de conflit, lorsque l’une des parties devrait prouver son domicile devant le tribunal et
qu’elle apporte un bail fictif, la règle conflictuelle n’aurait pas été appliquée, non pas du tout parce qu’il y aura
une fraude mais simplement parce que la partie n’aurait pas pu établi son domicile. Pour cet auteur, il semble
plus convenable de faire un appel à l’ordre public ou la théorie d’abus de droit. C’est probablement la même
raison pour laquelle la fraude à la loi dans l’ordre juridique thaï ne paraît modestement qu’en doctrine.
Par ailleurs, après avoir étudié les ouvrages juridiques thaïs, nous ne trouvons presque rien sur cette théorie.
En revanche les juristes et les juges font fréquemment appel à l’abus de droit. La notion de fraude à la loi en thaï
semble être ambiguë, car c’est un terme littéralement très proche à un dol ou un vice du consentement.

269
De surcroît, la fonction d’une exception de fraude à l’égard de loi étrangère diffère de
celle d’une exception d’ordre public international dans la mesure où la sanction d’une fraude
à la loi étrangère est admissible alors que l’intervention de l’ordre public en faveur de la loi
656
étrangère n’a aucun sens . C’est la raison pour laquelle les auteurs abandonnent en général
l’assimilation de la fraude à la loi et à l’ordre public.
En droit international privé français, l’exception de fraude à la loi ne joue pas
normalement en faveur d’une loi étrangère, pour cette raison on a dit que le droit français ne
prend pas en considération la fraude à la loi étrangère. Une autre constatation est que la
jurisprudence française ne sanctionne pas normalement la fraude à la loi étrangère, bien que la
doctrine soit d’avis que celle-ci devrait être prise en considération. Alors la question est de
savoir par quel moyen la fraude à la loi étrangère sera sanctionnée. On peut dire que ce n’est
pas par l’exception de fraude que se traduira le cas échéant la sanction de la fraude à la loi
étrangère, mais par le refus d’exercer sa compétence en l’absence d’un rattachement
657
suffisant .

361. Il existe deux sortes de fraude en droit international privé. La première forme de
fraude à la loi dite stricto sensu est celle qui consiste à manipuler de manière artificieuse la
règle de conflit dont l’objectif est de se soustraire à la loi désignée normalement compétente.
Par le biais d’artifices, les particuliers visent la soustraction de la relation juridique au droit
qui lui est normalement applicable. L’intervention d’une autorité publique étrangère peut être
envisagée au cours de la fraude à la loi. Ce qui nous concerne, c’est le tribunal auprès duquel
le sujet est allé rechercher la décision qu’il ne pourrait obtenir du for normalement compétent.
On trouve que la Cour de cassation elle-même a formulé les conditions de reconnaissance des
jugements étrangers en France. Parmi celles-ci, elle a exigé ‘l’absence de fraude’, certes, cette
condition a été appliquée à la reconnaissance de tout acte public étranger. Par ailleurs, la
manipulation des critères de compétence juridictionnelle est considérée aussi comme une
sorte de fraude à la loi. C’est la seconde forme de la fraude, le forum shopping ; la fraude à la

656
H. Batiffol, Traité de Droit international privé, 8e éd., Paris : LGDJ, 1993, t. I, p.599-600. Pour MM.
Batiffol et Lagarde, l’assimilation des deux notions n’emporte aucune conséquence juridique. Car elle n’a été
suggérée que pour fortifier la théorie de la fraude à la loi contre les objections dont elle était l’objet à une époque
où la recherche des intentions était particulièrement redoutée. Cependant certains auteurs avaient l’avis que la
fraude à la loi ne fût qu’un cas particulier de l’ordre public, il s’agissait de l’application de la loi étrangère
provoquée artificieusement par les individus laquelle donnerait lieu au « trouble social ». Cf. Bartin, Études de
droit international privé, Paris : Chevalier-Marescq, 1899, p. 247 ; Cf. Niboyet, « La fraude à la loi en droit
international privé », RDILC.1926.503.
657
B. Audit, La fraude à la loi, Paris : Dalloz, 1974, préf. Y. Loussouarn, p. 11.

270
loi lato sensu, qui se caractérise par une manipulation des critères de compétence
juridictionnelle.
Dans certaine circonstance la fraude à la loi peut se marier avec le forum shopping ; le
cas d’un individu qui manipule la règle de conflit de lois et saisit un tribunal étranger. C’est
pourquoi, après avoir examiné le problème de la fraude à la loi, on ne peut pas nier une étude
du point de vue de conflit de juridictions où le forum shopping s’occupe son terrain (Section
II). Nous nous intéressons d’abord au moyen de la fraude à la loi, un bref examen des
éléments de la fraude permet de montrer leur apport constructif à la question de la fraude à la
loi et notamment à celles de la sanction de la fraude (Section I).

Section I
Prise en considération de la fraude à la loi.

362. Les idées sur la théorie de fraude à la loi sont bien structurées en France, comme
658
l’affirme M. Francescakis, il y a une définition qui est propre au droit international privé .
Il s’agit d’un autre mécanisme aboutissant à l’éviction de la loi étrangère, mais qui,
contrairement à l’ordre public, ne se fond ni sur le contenu de cette dernière ni sur les
conditions dans lesquelles elle a été déclarée applicable. En revanche, il s’agit de sanctionner
le comportement répréhensible d’une partie ou des deux, qui ont procédé à une manipulation
artificielle du facteur de rattachement afin d’obtenir l’application d’une loi qui n’était pas
normalement applicable. Afin de comprendre la nécessité d’avoir plusieurs degrés différents
pour sanctionner la fraude à la loi (§2). On verra tout d’abord le moyen de fraude à la loi (§1).

§ 1 : Au moyen de fraude à la loi.

363. Certes, la loi étrangère peut être désignée par la règle française de conflit de lois. C’est
possible qu’une des parties ait manipulé artificiellement un facteur de rattachement pour avoir
obtenu l’application de la loi étrangère autre que celle normalement compétente. Chaque fois
où le sujet tente d’interposer entre lui-même et la règle de droit qui doit s’imposer à lui une
norme moins favorable avec la première, on est amené à parler de ‘fraude à la loi’. La
jurisprudence a défini la fraude à la loi comme le cas où « les parties ont volontairement
modifié le rapport de droit dans le seul but de le soustraire à la loi normalement

658
Cf. Francescakis, in « La fraude à la loi », TCFDIP 1971-1973, op.cit., spéc. p. 136-137.

271
659
compétente » . Cependant il n’est pas forcément dit que l’éviction de toutes les lois peut
être considérée comme la fraude à la loi, il faut que cette loi fraudée soit la loi importante
660 661
du litige. Les doctrines française et thaïe ont affirmé sur ce point ; alors le juge devrait
prendre en considération au cas par cas.

364. Afin de connaître bien la notion de fraude à la loi, il est nécessaire de la dissocier
d’autres notions qui peuvent être confondues avec la première. La fraude à la loi peut se
confondre avec l’abus à la loi, en effet la première suppose que le sujet essaie d’interposer
artificiellement la situation en cause afin de rendre applicable une autre loi plus favorable que
celle normalement compétente qui le gène. Alors que l’abus est le cas où le sujet ne modifie
pas les éléments de fait, au contraire il tente d’exploiter une situation préexistante qui lui
662
permet d’aboutir à un choix ou un droit d’option . Autrement dit, il s’agit d’un exercice
d’un droit subjectif à des fins contraires au droit objectif. Le seul choix d’un droit étranger
applicable en matière contractuelle pour but d’internationaliser le contrat est visé aussi sur un
abus (e.g. l’hypothèse du contrat que ses éléments sont purement internes mais les parties ont
choisi la loi étrangère qui ne présente aucun rapport avec celui-ci). Il semble que, en droit
international privé européen, les libertés de circulation pourraient également être analysées
dans la notion d’abus de droit. Prenons un exemple des sociétés commerciales qui utilisent la
liberté d’établissement pour bénéficier dans tous les États membres du statut que leur a
conféré le droit de l’État dans lequel elles se sont constituées. Elles sont incorporées pour le
but de profiter d’une législation plus libérale ; en effet cet événement paraît dans tous les
pays, de même qu’en Thaïlande, c’est la concurrence des systèmes législatifs pour attirer les
investisseurs.

365. La fraude à la loi se distingue aussi de la simulation, la dernière a pour l’objectif de


profiter de l’application d’une règle donnée en créant un acte simulé afin de mentir sur sa
signification sans qu’aucune situation réelle ne vienne corroborer ce mensonge. Mais pour la

659
Cass. 1er civ. 17 mai 1983, Lafarge, RCDIP.1985.346, note Ancel.
660
B. Audit, « Fraude à la loi », J.-Cl. Dr. internat., 2007, Fasc.535.
661
Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, Bangkok : Université de Thammasat, 1984, p. 82 et s.
662
M.-L. Niboyet, Droit international privé, Paris : LGDJ, 2009, n° 325-1 ; Cf. F. Viangalli, « La question de
la fraude à la loi dans le droit international privé des contrats », RRJ.2000.1141, spéc. p. 1144.

272
fraude, la situation artificieuse créée existe réellement. Les parties doivent déplacer le point de
663
rattachement ce qui suppose l’accomplissement d’un acte positif .
M. B. Audit a utilisé le terme de « la violation de la loi » au même sens que la fraude à
la loi. Pour cet auteur la loi est violée lorsqu’elle n’est pas appliquée même si ses conditions
d’application sont réunies. Car les parties ont voulu soumettre une situation donnée à une
664
réglementation autre que celle qui devra la régir . En droit interne la fraude est née lorsque
les parties ont faussement qualifié leur contrat alors qu’en droit international privé, la
violation internationale de la loi signifie la non-application de la loi et s’accompagne de
l’application d’une loi étrangère à la situation qu’elle prétend régir. Pourtant il faut rappeler
que certaine violation de la loi étrangère n’entre pas dans le schéma de l’exception de fraude
en matière internationale, car la modification artificielle de la situation juridique et la
manipulation de la règle de conflit sont absentes. Il s’agit de contrats qui ont été conclus pour
but de tourner la loi étrangère, par exemple le cas de l’introduction de marchandises en
contrebande, ou le cas d’un contrat d’intermédiaire pour l’obtention d’un marché qui est
interdit par certaines législations.

366. La fraude à la loi peut se présenter dans deux situations ; la fraude à la loi du for et la
fraude à la loi étrangère. En Thaïlande comme dans d’autres pays, la fraude à la loi du for
semble attirer plus d’attention de la Cour que la fraude à la loi étrangère, notamment en
matière fiscale où la fraude est vivement activée. Par exemple dans le domaine des sociétés ;
normalement une société régit pour l’essentiel par la loi du siège social ; elle peut choisir le
lieu de son implantation en tenant compte de la règlementation impérative à laquelle elle
devra se soumettre. Certes, afin de pouvoir profiter au maximum de la législation, les sociétés
choisissent généralement le lieu où la loi locale, surtout la loi fiscale satisfait leurs intérêts.
665
Cette situation, considérée comme parfaitement licite pour certains auteurs est affirmée par
666
la décision de la CJCE . Nous étudions tout d’abord les éléments qui composent la fraude à

663
M.-L. Niboyet, Droit international privé, loc.cit.
664
B. Audit, La fraude à la loi, Thèse, loc.cit.
665
Cf. B. Goldman, in « La fraude à la loi », TCFDIP 1971-1973, op.cit., spéc. p. 138-139. Cet auteur a
développé que si l’implantation est réelle et dans l’hypothèse où cette société est multinationale qui se rattache à
plusieurs pays, donc il ne voit pas comment on peut dire qu’il y a une manipulation. Car la société peut placer
son établissement dans un pays déterminé afin de bénéficier de telle ou telle législation.
666
CJCE, 9 mars 1999, n° C-212/97, Centros Ltd., Bull. Jol. Sté, 1 juin 1999, n° 6, p. 705 ; JDI.2000.482, note
M. Luby. La Cour a estimé que le law shopping est valide. « Le fait qu’un ressortissant d’un État membre qui a

273
la loi du for (A). Ensuite, nous verrons le traitement égal de fraude à la loi du for et la fraude à
la loi étrangère (B).

A. Admission la théorie de la fraude à la loi du for.

1) Le montage artificieux constituant la fraude à la loi.


a. La règle de conflit, l’intermédiaire de fraude.
367. Le principe est que les règles de conflit ne doivent pas être utilisées par les particuliers
pour échapper aux dispositions légales de fond. On sait que la fraude à la loi se présente
envers les individus qui utilisent les règles de conflit de lois aux fins de se soustraire aux
dispositions légales de fond. Autrement dit, la fraude à la loi peut se présenter chaque fois
qu’un élément de la règle de conflit a été manipulé par la volonté des parties. Dés lors on peut
définir la fraude à la loi comme l’utilisation volontaire d’une règle de conflit, ayant pour
l’objectif d’échapper de l’application de la loi française.

368. Il est à constater que, d’après M. B. Audit, l’existence de règles de conflit dans un
système juridique donné signifie une reconnaissance de ce qu’un tel système ne prétend pas
667
appliquer ses lois de fond de façon universelle . On sait que les règles de conflit
jouent leurs rôles lorsque le litige contient l’élément d’extranéité et ces règles pourraient
conduire à l’application d’une loi étrangère. On mesure le renfort que, estime M. B. Audit,
peut apporter la violation internationale de la loi du système qui procède par règles de conflit.
Comment la règle de conflit peut être un instrument de fraude ? Chaque fois que le
rattachement adopté dépend de la volonté individuelle, celle-ci doit être précisée et restreinte.
Car, une fraude est possible lorsque l’élément de rattachement tient compte d’une déclaration
668
de volonté . La règle conflictuelle de ce sort permet au sujet une affirmation qui ne
correspond pas à la réalité et fait dépendre l’application de la loi impérative, d’une manière
plus ou moins directe, de sa déclaration de volonté. Notamment en matière des contrats, le
contenu de la règle de conflit permettrait au risque d’une fraude. Lorsque les parties sont

créé une société en choisissant de l’établir dans l’État membre dont les règles de droit des sociétés lui
paraissent les moins contraignantes et de créer des succursales dans d’autres États membres, ne saurait pas en
soi un usage abusif du droit d’établissement. Bien que la société en cause n’exerce aucune activité dans l’État
membre où se situe son siège et n’exerce ses activités que dans l’État membre de sa succursale, ceci ne suffit pas
à démontrer, selon la Cour, qu’il existe un comportement abusif et frauduleux (…) ».
667
B. Audit, La fraude à la loi, Thèse, op.cit., p. 122 et s.
668
Ibid.

274
libres de choisir la loi régie au contrat, elles peuvent écarter une loi la plus vocatrice à
s’appliquer telles que la loi présente les liens les plus étroits au contrat et soumettre leur
contrat à une autre loi plus convenable à leurs intérêts privés. Quant au changement
d’établissement à l’étranger ou de déplacer un meuble à l’étranger, en effet le domicile est un
rattachement souple qui se prête très souvent à la fraude, car il suffit de déplacer son domicile
dans un pays étranger pour se soumettre à la loi étrangère applicable. Mais il faut bien prendre
en considération d’autres éléments de fait, car, si le changement est effectif, il s’agit d’un
669
conflit mobile ordinaire qui sera régi par la loi de l’État étranger . Hormis le détournement
de rattachement, la volonté des parties est un élément constitutif de la fraude puisque la fraude
est impossible si la volonté d’un individu n’intervient pas dans la détermination du
rattachement.

b. L’élément psychologique indispensable.


369. Pour que la fraude soit possible, la volonté joue un rôle capital dans l’élément de
rattachement retenu par la règle de conflit. Si les parties ou l’une d’elles ont(a) modifié un
point de rattachement sans l’intention de manipuler la situation en cause, il n’y a pas de
fraude. Il ne faut pas confondre avec le cas où les parties ont créé volontairement, même avec
l’intention, un élément d’extranéité vrai pour éluder la loi qui aurait été applicable à leur
contrat. A titre d’exemple : normalement la loi applicable à un immeuble est la loi du lieu de
sa situation, cette règle ne présente pas la fraude puisqu’elle ne dépend pas de la volonté des
individus de situer un immeuble à leur convenance pour le soumettre à la loi qu’ils
670
préfèrent . A ce stade, on peut citer aussi l’hypothèse d’implantation de siège sociale de la
compagnie dans un État dont la loi est plus favorable à ses intérêts. On peut dire que tout
déplacement du facteur de rattachement n’est pas en soi frauduleux. Il en est de même pour le
changement de la loi applicable qui ne présente pas une fraude. Cependant cet élément donne
671
lieu à un débat de difficulté de l’identifier. D’après M. B. Audit , le comportement du
fraudeur après l’acte ayant modifié le rapport de droit nous permet d’établir si la partie qui a
accompli cet acte avait l’intention de rechercher les conséquences essentielles ou elle ne
voulait que profiter de son effet sur la loi applicable. Par conséquent, il est nécessaire de faire
recours aux éléments objectifs pour rechercher l’intention frauduleuse. On peut constater que

669
Cf. B. Audit, « Fraude à la loi », J.-Cl. Dr. internat., 2007, Fasc. 533-2.
670
Ibid.
671
B. Audit, Droit international privé, 6e éd., Paris : Economica, 2010, n° 240.

275
la recherche de l’élément phycologique est à prendre en considération au cas par cas. Citons
l’affaire de Bauffremont, si la princesse, après avoir été naturalisée, aurait attendu pendant un
certain temps avant la demande de divorce et puis aurait été remariée dans un an ou même
deux ans plus tard, ceci aurait pu changer le fait et surtout le résultat, car on ne pouvait pas
reprocher la princesse qu’elle avait eu l’intention de fraude (v. infra n° 387).

370. Pour mieux illustrer l’hypothèse où la fraude ne se prête pas à la manipulation, citons
le cas du délit, la règle de conflit soumet les délits à la loi du lieu de survenance et il ne
dépend pas de la volonté que le délit survienne dans tel lieu plutôt que dans tel autre. Donc la
seule fraude possible en la matière est le forum shopping, ce que l’on verra par la suite.
Pourtant, la fraude à la loi par utilisation de la règle de conflit serait possible en matière de
bien mobiliers car on peut transporter un meuble à l’étranger pour le soumettre à une loi plus
favorable. Il est possible également en matière de statut personnel, puisqu’il dépend de la
volonté des parties de changer de nationalité ou de domicile ou de religion. En matière d’actes
juridiques il est possible aussi d’envisager la fraude à la loi, si l’on admet la règle de conflit
672
selon laquelle la loi applicable à un contrat international est la loi désignée par les parties .
Donc la volonté des parties est toujours un élément important de constituer la fraude.

2) La fraude des éléments d’extranéité dans le contrat interne.


371. Au niveau communautaire, le principe de libre circulation des marchandises, de
services et de personnes sont bien établis, surtout on admet la liberté des opérateurs de choisir
leur lieu d’établissement dans un État membre de leur choix. Certes, le contrôle devrait mettre
673
en place au cas par cas pour éviter la fraude à la loi .

372. En France, c’est l’un des rares cas où la jurisprudence française s’est trouvée
confronter la fraude à la loi en droit international privé des contrats. L’arrêt classique de la
Chambre criminelle du 12 mai 1998 mérite d’être étudié à ce stade, en raison de sa motivation
claire et précise de la fraude à la loi en changeant volontairement le rattachement.
En l’espèce, la société française Comex était troublée par la concurrence internationale
et par le coût économique élevé selon la loi française. Alors la société a trouvé une résolution
par le licenciement économique des travailleurs en vue de l’autorisation de la Direction

672
Ibid.
673
CJCE, aff. C-212/97, 9 mars 1999, Centros, préc.

276
département du travail. Il paraît que la société suisse Sogexpat, qui est contrôlée quasi
intégralement par la société Comex, réembauchait tous les salariés licenciés par la société
Comex par le contrat de travail conclu en Suisse et régit par le droit suisse. Il faut observer
que la société suisse a embauché les travailleurs aux mêmes travaux et sur les mêmes postes
qu’auparavant. Sachant que les travailleurs étaient privés par la loi suisse de toute
rémunération minimale au cours de leur période d’inactivité, des congés payés, du bénéfice de
l’assurance-chômage, du droit de grève, et même des avantages de l’institution d’un Comité
d’entreprise. C'est-à-dire ils se trouvent privés de toute législation protectrice française en cas
674
de licenciement . Alors, les dirigeants ont été assignés devant les juridictions françaises.
La Cour d’appel n’avait pas prononcé sur le problème de droit applicable en estimant
qu’il n’entrait dans ses attributions que de répondre à la question sur l’infraction en droit
pénal. Elle a jugé que les dirigeants étaient coupables après avoir constaté que la société
suisse Sogexpat n’était qu’une ‘coquille vide’ contrôlée par la société Comex. La Cour de
cassation a jugé que « la circonstance que les contrats de travail des salariés embauchés par
la société Sogexpat aient été régulièrement soumis au droit suisse, loin d’exclure
l’application de la loi pénale, caractérise le préjudice causé à ces salariés, qui se trouvent
privés des avantages sociaux dont ils auraient bénéficié en vertu de la loi française s’ils
675
avaient été employés par la société utilisatrice » . En effet il est clair que cette opération
présente le caractère frauduleux car la société Comex avait le but de soustraire la loi française
destinée à protéger des travailleurs, elle a utilisé la technique qui n’était pas en soi illégal mais
il paraît une intention frauduleuse destinée à éluder l’application de la loi française.
Cependant on ne trouve nulle part dans cette décision le terme de fraude à la loi, force est de
constater que c’est la fraude qui emporte la culpabilité. En effet le problème en l’espèce qui
réside dans le fait que le changement du lieu de siège avait pour but de soumettre le contrat de
travaille à la nouvelle loi (suisse) moins protégée des travailleurs, qui signifie le coût réduit
pour la société.

373. En effet, ce genre de l’opération semble normalement être utilisé par la plupart des
sociétés sous le conseil des juristes d’entreprise ou les avocats. De même qu’en Thaïlande,
notamment en matière fiscale, la société peut économiser sur les frais d’impôts en utilisant

674
Les articles L 125-1 et L 125-3 du Code du travail dispose que : « toute opération à but lucratif de
fourniture de main d’œuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder
l’application de la loi, du règlement ou de la convention collective, ou marchandage, est interdit ».
675
Cass. crim., 12 mai 1998, Comex, n° H9686, 479-2936, Bull. crim., n° 160.

277
cette technique fiscale. Ce qui est acceptable et parfaitement licite. Puisque les individus
676
peuvent choisir librement le lieu d’établissement de leurs sociétés , dès lors on peut suivre
les conseils de son avocat et se soustraire à la loi non-favorable en soumettant le contrat à la
loi la plus favorable aux intérêts. Toutefois, le but poursuivi de cette opération en l’espèce
conduisait à la privation de tous les droits protecteurs des salariés de droit français que ceux-
ci en avaient auparavant ; raison pour laquelle cet acte devait être sanctionné. Si la société
avait changé son siège à un nouveau lieu pour l’objectif d’économiser les impôts mais elle
embauchait des nouveaux travailleurs, elle n’aurait pas eu l’intention d’éluder la loi protection
des travailleurs et de les soumettre aux nouveaux contrats de travail régit par la loi moins
protectrice afin d’économiser ses dépenses comme le cas en l’espèce, on pense que ceci n’est
pas la fraude à la loi.

374. Le rattachement frauduleux du contrat paraît aussi à travers le principe d’autonomie de


la volonté. Lorsque le contrat présente des liens objectifs avec le territoire dont la législation
677
est atteinte, la fraude est moyen plus facile à retenir. Parmi les cas rarissimes , l’arrêt
Muller rendu depuis 1926 nous a montré que la Cour a admis l’existence de la fraude à la loi
par le seul choix de la loi étrangère applicable au contrat passé en France entre les Français.
La Cour décida que « il n’est pas loisible aux Français, contractant en France, de soumettre
à leur gré leurs conventions au droit international pour échapper aux prohibitions du droit
678
interne en matière de clause compromissoire » . Dès lors, certains ont précisé que le choix
de la loi doit être soumis à condition que le contrat soit réellement international, car la loi

676
Cf. Tribunal de la Seine, 2e Ch., 6 juillet 1935, des Phosphates de Constantine, RCDIP.1936.771, note H.
Solus. Le tribunal a affirmé le droit des sociétés françaises de transférer leur siège sociale de la France
métropolitaine dans une colonie afin d’alléger leurs charges fiscales. Mais il exige que ce transfert doit être réel
et sincère exclusif de toute idée de fraude. Le tribunal a par ailleurs estimé que « le transfert du siège sociale ne
pourrait être considéré comme fictif que si sa fixation à l’étranger (Alger) avait été inspirée par l’intention de
faire fraude à la loi, notamment en vue d’échapper à certaines obligations imposées par la législation fiscale en
vigueur et que si la collectivité intéressée n’avait pas son établissement principal au lieu désigné comme siège
social par les nouveaux statuts ».
677
Cf. B. Audit, « Fraude à la loi », J.-Cl. Dr. internat., op.cit., spéc. n° 47. Cet auteur a estimé que l’absence
de jurisprudence sanctionnant la fraude du choix de la loi applicable peut être expliquée que le respect d’une loi
écartée par le seul choix des parties peut être assuré par les notions d’ordre public ou de loi de police.
678
CA Rennes, 26 juillet 1926, Sté Muller, DH 1926, p. 53 ; Gaz. Pal. 1927, 1, p. 59 ; RDIP.1927.523, note J.-
P. Niboyet.

278
choisie dans ce cas ne se justifie que par les nécessités du commerce international ; ou le
679
choix doit être effectué de bonne foi ; ou au moins il présente un lien avec le contrat.

3) La fraude des éléments d’extranéité dans le contrat international.


375. Parfois la fraude peut être en forme d’introduire à un contrat déjà international des
autres éléments d’extranéité supplémentaire afin de le faire échapper des dispositions de la loi
680
de police du for ; c’est la sur-internationalisation artificielle du contrat. De même que le
contrat interne, la jurisprudence qui a jugé sur la fraude des éléments d’extranéité dans le
contrat international se trouve très rare. Citons cependant la décision de la Cour de cassation
681
belge rendue le 28 juin 1979 , en l’espèce, la concession avait été conclue entre la société
belge et la société allemande et l’exclusivité portait sur le territoire belge. L’une des
stipulations contractuelles a précisé par ailleurs que l’exécution de l’obligation du concédant
devait se faire au lieu de son siège social en Allemagne. Les parties ont inséré dans leur
contrat la clause de règlement des différends par l’arbitrage siégeant à Zurich et en statuant
par les règles du droit allemand. Il paraît que le concédant avait rompu le contrat sans préavis,
deux procédures d’arbitrage ont déroulé conformément à la clause prévue dans le contrat. Les
sentences ont estimé que la rupture du contrat de concession était régulière alors aucune
indemnité n’était due. Le concessionnaire avait porté plainte devant les tribunaux belges. Le
concédant a défendu qu’il faille respecter les sentences arbitrales rendues à Zurich. Le juge du
fond et la Cour d’appel ont décidé de condamner le concédant. Alors celui-ci a formé un
pourvoi en concluant que les tribunaux belges fussent incompétents car le lieu d’exécution de
l’obligation de concédant se situe en Allemagne ; donc il n’y avait pas de place d’appliquer la
loi belge de 1961 sur les concessions de vente à durée indéterminée. Cette loi a pour l’objectif
de protection du concessionnaire en cas de rupture unilatérale de la convention par le
concédant. La concédant défendeur a fait valoir que même si la clause compromissoire n’était
pas valable, le tribunal compétent ne pouvait être que le tribunal allemand en tant que tribunal
du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande en vertu de la Convention de
Bruxelles du 28 septembre 1968. La Cour de cassation a estimé que le contrat prévoyait une

679
Vita Food Products v/ Unus Shipping Co. 1939, A.C. 277, 290 (P.C.) ; RCDI.1942.420, note Mezger. La
Cour a estimé que « les parties sont libres de choisir une loi quelconque, n’ayant éventuellement aucun lien avec
leur situation. Mais le choix de la loi doit être effectué de bonne foi ».
680
Le terme utilisé par F. Viangalli, « La question de la fraude à la loi… », op.cit., p. 1152-1153.
681
Audit NSU c/ SA Adelain Petit, 28 juin 1979, JT (1979), p. 625 ; RCJB.1981.332, note Vander Elst.

279
exclusivité pour le territoire belge, nonobstant la présence d’obligations accessoires localisées
en Allemagne. Il considère que la clause localisant le lieu d’exécution de l’obligation du
concédant en Allemagne était nulle « comme constitutive de fraude à la loi, car elle avait
pour but d’introduire un élément d’extranéité contraire à la réalité des choses » et
« d’écarter par un artifice la loi belge normalement applicable (la loi de 1961) au profit
682
d’une loi étrangère » . Ce contrat constituait déjà un élément international mais les parties
ont inséré un autre élément d’extranéité en vue d’éluder l’application de la loi belge. A
l’égard de la Cour, la procédure arbitrale qui est obligée de se dérouler hors du territoire belge
constituait également un élément de fait incontournable car elle était susceptible d’échapper à
683
l’application de la loi impérative belge .

376. En Thaïlande, rappelons que la loi applicable au contrat international est la loi choisie
par les parties, à défaut, la loi du pays de la nationalité commune des parties, ou encore, la loi
du lieu de conclusion ou enfin, la loi du lieu d’exécution du contrat. La fraude en matière de
contrat international peut être trouvée à travers les rattachements utilisés par l’article 13 de la
règle de conflit, c'est-à-dire la volonté des parties. Alors, pour qu’il y ait fraude, il suffirait de
se rendre dans un pays choisi, la conclusion ou l’exécution, à la seule fin de rendre sa loi
applicable. Cependant pour la nationalité commune des parties, ce rattachement est difficile
de se prêter par le simple changement, car il est rare de trouver en réalité notamment en
matière contractuelle le cas où l’une des parties utilise la naturalisation pour le seul but de se
soustraire à la loi normalement applicable. La fraude commise par l’autonomie de la volonté
est plus simple que ceci.

B. Affirmation du traitement égal, fraude à la loi du for et fraude à la loi


étrangère.

377. Si l’on pense que la fraude doit être réprimée parce qu’elle constitue des immoralités
juridiques et qu’elle ne peut être prise en considération que lorsqu’elle méconnaisse les règles
de droit, et si l’on considère que seule la loi française est du droit, la loi étrangère n’est
assimilée qu’à un élément de fait à l’égard du juge saisi comme on a déjà étudié, on ne voit
pas comment la répression de la fraude à la loi étrangère est-elle possible… Dès lors, si l’on

682
L’arrêt précité.
683
F. Viangalli, « La question de la fraude à la loi… », op.cit., p. 1154.

280
suit cette direction, l’éviction de loi étrangère normalement compétente avec l’intention de
l’éluder n’est pas à être sanctionnée par le for. Cette pensée semble admissible généralement
en droit international privé, au moins par la jurisprudence française et par la doctrine thaïe.
Cependant nous avons déjà étudié dans le titre précédent que la loi étrangère est bien
du droit, sauf que l’on la traite en tant que fait en droit procédural afin de ne pas trop charger
les juges du fond de rechercher dans tous les cas sa teneur.

378. Qu’en est-il lorsque la fraude s’est exercée à l’encontre de la loi étrangère ? Admettre
que la fraude à la loi étrangère est avant tout une fraude qui devrait suffire en droit commun à
684
la faire échapper à toutes les règles. Un auteur est allé plus loin en estimant que lorsque
l’on dit qu’il y a fraude à la loi, c’est la règle de droit française qui a été tournée. On est
d’accord sur ce point, car l’application de la loi étrangère désignée par la règle conflictuelle
française n’est pas possible à cause du détournement de son rattachement. Dès lors, la fraude
à la loi étrangère, c’est toujours une règle de droit française, mais du droit international privé,
qui a été méconnue. Cet auteur a affirmé « si nous donnons compétence à la loi étrangère,
685
c’est pour qu’elle soit respectée et non brimée » . M. B. Audit a même affirmé que « les
686
lois étrangères constituent un moyen permanent de fraude » .
687
La Cour de cassation avait admis depuis l’arrêt Mancini qu’il y avait une limitation
pour la fraude à la loi étrangère. De nos jours, l’évolution du droit international privé français
semble être orientée vers une prise en considération de la fraude à la loi étrangère, au moins
des hypothèses où la fraude avait consisté à éluder le droit étranger compétent au profit d’un
688
autre droit étranger . La Cour de cassation a également une tendance d’annuler les contrats
689
conclus en fraude à une loi étrangère. A titre d’exemple, l’arrêt de 1961 dans lequel la
Cour de cassation a affirmé que les juges du fond peuvent annuler le contrat conclu entre un
négociant français et une société étrangère d’importation pour payer la commission avec un

684
P. Louis-Lucas, « La fraude à la loi étrangère », RCDIP.1962.1., spéc. p. 14 et s.
685
Id., p. 15.
686
Cf. B. Audit, La fraude à la loi, Thèse, op.cit., p. 6 et s.
687
Cass. civ., 5 février 1929, S. 1930.1.181, note Audinet. En l’espèce, une Italienne qui avait obtenu la
nationalité française par la naturalisation afin d’échapper à la prohibition du divorce selon la loi italienne à
l’époque.
688
Cf. H. Batiffol, Traité…, op.cit., p. 598 ; Y. Loussouarn, Droit international privé, 9e éd., Paris : Dalloz,
2007, n° 265 ; P. Louis-Lucas, « La fraude à la loi étrangère », op.cit., p. 10.
689
Cass. com., 7 mars 1961, Bull. civ., 1961.III, p. 112.

281
taux exorbitant en vue d’obtenir l’approbation du marché par un service public de l’État
étranger. Force est de constater que la fraude se présente dans ce cas en raison de la violation
de la loi étrangère, mais ceci ne peut pas faire jouer l’exception de fraude en droit
690
international privé, car il n’y a pas eu de manipulation artificielle de la règle de conflit .
La fraude peut être constatée dans plusieurs stades, on trouve que la jurisprudence
française n’a jamais toléré la fraude à la loi étrangère, notamment sur le terrain de l’exequatur
des jugements étrangers sur lequel nous aurons l’occasion d’étudier dans la deuxième partie ;
la réception des décisions étrangères.
Qu’en est-il si le droit matériel étranger, qui est frauduleusement évincé, est contraire
à l’ordre public international du for ? Dans ce cas ce n’est pas d’une perte du temps de l’idée
de fraude, mais c’est le rôle de l’ordre public qui se révèle ici.

379. En Thaïlande, la théorie de fraude à la loi ne paraît clairement que dans les conditions
de reconnaissance et d’exécution des jugements étrangers. Les écrits juridiques particuliers
sur ce sujet, notamment en matière contractuelle, se trouvent très rares aussi, car la plupart
d’ouvrages ne précisent que la fraude à la loi est inadmissible en droit international privé.
Cependant pour la fraude à la loi étrangère, il semble que la doctrine thaïe va dans le même
sens ; il n’est pas nécessaire pour la Cour thaïe de tenir compte de cette fraude, mais il faut
691
trancher le litige selon la Loi de 1938 relative au conflit de lois . Pour ces auteurs, il n’y a
aucune raison de juger que la loi d’un pays emporte sur la loi d’un autre pays. Citons un
exemple : un couple de nationalité chinoise qui, résidant en Thaïlande, ne peut pas s’y marier
en raison de son bas âge, a changé la nationalité dans un autre pays, puis revient en Thaïlande
pour se marier. Dans ce cas les autorités thaïes ne peuvent pas les interdire de s’unir
légalement même s’il est évident que le couple a changé sa nationalité afin de rendre son
mariage possible en évitant la loi de son propre pays.
Pourtant il existe deux exceptions que le juge doit tenir compte de la fraude à la loi
étrangère. Dans le premier cas, lorsque devant le juge thaï il apparait que l’application de cette
loi tierce conformément à la volonté des parties est contraire à l’ordre public international et
aux bonnes mœurs du people thaï, la Cour devra trancher ce litige comme si c’était le cas

690
V. également CA Paris, 18 juin 1964, Gunzburg, RCDIP.1967.340, note J. Deprez ; JDI.1964.810, note J.-
D. Bredin ; Cass. 1er civ., Giroud, 11 juillet 1977, RCDIP.1978.151, note B. Audit.
691
Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, op.cit., p. 84 ; Cf. Ch. Pachusanond, Droit international privé : la
nationalité, 2ème éd., Bangkok : Winyuchon, 2006, p. 240 et s.

282
692
d’application de la loi étrangère en dépit de l’ordre public international thaï . Dans le
domaine de statut personnel, par exemple si le couple de nationalité chinoise dont la loi
nationale prohibe le mariage homosexuel, ce couple réside en Thaïlande où la Loi de 1938
dispose que les conditions de mariage doivent être conforme à la loi nationale de chacun,
alors ce couple ne pourra pas se marier en Thaïlande. Afin de se soustraire à la loi chinoise le
couple s’est fait naturaliser dans un autre pays qui permet ce genre de mariage et puis revient
en Thaïlande pour s’y marier. Il est évident que ni les autorités thaïes, ni la Cour n’acceptent
de valider ce mariage. Force est de reconnaître que la raison véritable est que ce mariage
693
homosexuel est contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs du peuple thaï . Ce n’est pas
parce que la Cour thaïe souhaite sauvegarder les valeurs de la loi chinoise.
Le second cas réside sur le fait que lorsque les parties se soustraient à une loi étrangère
en appliquant une loi tierce, selon la Loi de 1938 relative au conflit de lois, le juge devra
694
appliquer la loi étrangère fraudée . Par exemple la loi thaïe applique les conditions du
mariage la loi nationale des époux et cette loi prohibe ce mariage, mais il paraît que ceux-ci
ont changé leur domicile dans un pays où sa règle de conflit tient compte de la loi du domicile
des époux qui permet ce mariage. Dans ce cas, c’est la loi nationale des époux que la Cour
thaïe prendra en considération selon la Loi de 1938.

§ 2 : Degrés de répression de la fraude à la loi.

380. « Toute situation ne mérite la protection du droit que si elle est saine, c’est-à-dire
exacte dans sa réalité et convenable dans sa prétention. Les déformations arbitraires qui la
défigurent doivent être déjouées à concurrence de la mauvaise foi qui les inspire et des
695
injustices qu’elles causeraient » . On peut dire aussi que la fraude vicie tout ce qu’elle
touche, d’où l’adage « Fraus omnia corrumpit ». Certes, le for ne doit pas tolérer la fraude à
ses lois, ce principe devrait être appliqué aux lois étrangères également sans discrimination.

692
Y. Saeng-Uthai, op.cit., p. 84 et s.
693
Les articles 1448 et 1458 du CCC utilisent le terme « homme et femme » pour décrire le mariage. Par
ailleurs la jurisprudence thaïe définit une femme comme une personne qui peut être enceinte et avoir un enfant.
694
Y. Saeng-Uthai, loc.cit.
695
P. Louis-Lucas, « La fraude à la loi étrangère », loc.cit.

283
Cependant on admet, de nos jours, que toute fraude ne sera pas nécessairement
696
sanctionnée . On constate que la fraude à la loi en droit international est plus difficile à
sanctionner que celle du droit interne car il y a l’apparence de validité particulièrement forte
que lui confère l’intervention d’une loi étrangère. Il est vrai que la fraude est en soi un acte
utilisé pour but d’échapper à la loi normalement applicable. On accepte que la situation créée
par l’intention frauduleuse n’ait aucune valeur à préserver, pour cette raison elle doit être
sanctionnée en appliquant la loi que le fraudeur a voulu éluder et lui rendre en état
précédemment existé. Nous affirmons ici que l’objectif de sanction repose sur l’éviction du
résultat souhaité par le fraudeur. C’est la raison pour laquelle la sanction de la fraude à la loi
ne doit pas être entendue comme une mesure d’assurer le respect de la justice sociale au sens
absolu, au contraire elle doit être entendue comme un procédé de sauvegarde de droit dont
nous ayons l’obligation ; le droit français pour le juge français et le droit thaï pour le juge thaï.

381. En ce qui concerne la réaction à l’encontre de la fraude à la loi étrangère, ceci était
initialement placée en matière de la reconnaissance des jugements étrangers en France. Cette
idée a été affirmée par la Haute juridiction depuis longtemps. Citons la résolution de l’Institut
de droit international qui est dans la même directive : « il est recommandé aux États
d’adopter (...) des règles de conflit de lois fondées sur des rattachements qui conduisent, dans
les mêmes conditions, à l’application de la loi étrangère, comme à celle de la loi du for
697
(...) . Par conséquent, la fraude à la loi étrangère doit être traitée par le même degré de
sanction que la fraude à la loi du for ». Quand bien même la résolution de cet Institut n’a pas
de force obligatoire, mais au moins il nous montre la tendance de sanctionner aux pieds égaux
les fraudes à la loi du for et à la loi étrangère. Notamment si l’on accepte que toute fraude
doit être sanctionnée à cause d’une mauvaise fois de fraudeur, de ce point de vue il n’y a pas
de différence entre la sanction de la fraude à la loi du for et celle à la loi étrangère. Si la
fraude n’appuie pas sur l’autre simulation ou violation directe de la loi, la sanction est de
déclarer inopposables les actes qui ont provoqué la modification artificielle de la situation.

382. Nous verrons la répression égale entre la loi étrangère et la loi du for, bien que la
jurisprudence française traditionnelle ait été interprétée que seule la loi fraudée doit être la loi

696
B. Audit, « Fraude à la loi », J.-Cl. Dr. internat., op.cit., n° 17.
697
Résolution I. 1. a), Institut de droit international, L’égalité de traitement entre la loi du for et la loi
étrangère, Session de Saint-Jacques-de-Compostelle, vol. 63-I, 1989, p.203 - 207 ; vol 63-II, 1990, p.305 - 323.

284
française (A). Ensuite le changement de l’avis de la Haute juridiction dans cette matière. Pour
que la sanction à la fraude soit effective, il faut opposer à une exception de compétence du
droit étranger en cause (B).

A. Sanction de la fraude à la loi du for.

383. Il convient d’analyser les hypothèses de fraude avant qu’on les sanctionne. En France,
on a le moyen particulier de la sanction ; l’exception de fraude. Le juge ferait recours à celle-
ci lorsqu’il devrait maintenir un raisonnement qui lui est soumis. Certes, on sait que
l’exception de fraude n’intervient pas dans la matière où le rattachement de la situation se
prête facilement à toutes manipulations comme la volonté des parties. Mais nos études ne
seront pas complètes sans avoir étudié cette mesure particulière qui sera un exemple
intéressant, notamment pour la Thaïlande qui retient toujours la nationalité comme l’un des
rattachements en matière du contrat. Pourtant tout acte frauduleux n’est pas forcément l’objet
à sanctionner par ce moyen, lorsque le juge considère certaine fraude comme un élément de
fait, la sanction peut se traduire par l’application unilatérale de la règle de conflit.

1) L’exception de la fraude à la loi.


384. L’invocation de l’exception de fraude à la loi résulte du cas où l’opération réalisée par
les parties était parfaitement licite en elle-même mais elle était destinée d’échapper à la loi
française normalement applicable. Le caractère de ce mode de sanction repose sur l’apparition
d’une intention, autrement dit l’intention frauduleuse est un élément essentiel à considérer
698
l’exception de fraude . Car on admet en principe la validité de l’argumentation du sujet et
699
on ne peut paralyser les effets qu’en vertu de considérations subjectives . Le schéma
chronologique de la mise en œuvre de la fraude nous démontre que l’intention de fraude n’est
bien établie que lorsque le fraudeur exerce dans le ressort de la loi évincée les droits acquis en

698
Contra. R. Vander Elst, note sous Cass., 28 juin 1979, Audi-N.S.U., RCJB.1981.332, spéc. p. 357 et s. Cet
auteur a trouvé que l’utilisation de l’intention en tant qu’élément indispensable pour justifier de l’exception de
fraude semble « excessivement dangereuse » du point de vue de l’autonomie de la volonté et de la liberté
humaine. En effet l’auteur pense que le choix de non-application de la loi nationale ou la loi du for applicable au
litige est un droit des parties et ceci représente de l’autonomie de la volonté, le principe de base en matière
contractuelle qui doit être respecté. Par ailleurs il a proposé que la simulation de l’élément d’extranéité doive être
tenue compte au lieu de l’intention afin de faire un recours à la théorie de fraude à la loi. Dans ce cas là les
parties contractantes doivent respecter certaines conditions ; il ne faut pas créer des nouveaux éléments
d’extranéité pour que la loi étrangère soit applicable.
699
B. Audit, La fraude à la loi, Thèse, op.cit., n° 187, p. 142.

285
application de la loi étrangère. Force est de reconnaître que la preuve d’une intention est
toujours difficile à apporter, mais il n’est pas impossible et il faut le faire avec une grande
prudence. Comme on le sait, l’exercice par un individu dans le domaine de la loi évincée des
droits acquis en appliquant la loi étrangère constitue l’étape ultime d’une fraude à la loi de
droit international privé. Lorsque les conditions d’application d’une telle loi sont réunies, il
faut l’appliquer. La méconnaissance de celle-ci entraînerait une violation juridique. En effet,
si l’individu ne déduit pas les conséquences de sa fraude dans le domaine de droit éludé, il
vaut mieux éviter de fonder une sanction éventuelle sur son intention frauduleuse. Il faut
observer qu’il n’y a pas dans ce cas l’intention d’évincer la règle impérative, par exemple,
comme affirmé M. B. Audit, qu’il est « moins frauduleux de changer d’établissement afin de
700
changer le statut que de changer le statut sans changer d’établissement » .

385. La caractéristique d’exception de fraude se présente aussi en forme du maintien


701
l’intégrité d’un système structuré de solution des conflits de lois . On pourrait imaginer le
cas où l’on écarte toute la construction du système de la règle de conflit en raison de son
application et son caractère lesquels, dans certains cas, permettraient de faire une violation
internationale de la loi, en affirmant le domaine d’application de la loi. Ce moyen serait un
vrai dommage pour les individus. Par exemple, il est rare de trouver un Français qui a changé
sa nationalité afin de se soustraire à la loi française normalement applicable et se prévaut en
702
France de sa nouvelle loi nationale . Alors que tel n’est pas le cas de matière contractuelle
ou des actes juridiques, car le rattachement ici est la volonté des parties. Dans ce cas la
réserve de la fraude est très importante. Pour cette raison on peut dire que l’exception de la
fraude à la loi intervient dans un domaine où on trouve que le rattachement est difficile à
703
manipuler ; le changement de nationalité peut être qualifié de ce cas. En comparant au
changement de domicile, celui de nationalité est un acte très grave pour un individu qui
voulait utiliser la naturalisation uniquement pour l’objectif d’échapper la loi normalement
applicable à son rapport juridique. C'est-à-dire que lorsque le rattachement de la situation se
prête facilement à toutes manipulations, la sanction de fraude sera effectuée sans recourir à

700
Id., p. 143.
701
Le terme utilisé par B. Audit.
702
Id., n° 188, p. 143 et s.
703
Id., n° 197, p. 148.

286
l’exception de fraude, mais on utilise un autre moyen que l’on étudiera par la suite. La
sanction par une exception de fraude repose sur le moyen où le juge n’appliquera pas la loi
apparemment compétente, mais celle qui aurait été désignée si la modification frauduleuse
n’avais pas eu lieu.
L’exception de la fraude constitue les différents degrés d’intervention de sanction : la
sanction absolue et la sanction relative.

a. La sanction absolue.
386. Pour certains, l’acte invoqué devrait être considéré comme nul ; c’est la sanction qui
répond bien à la nature d’« une exception ». Lorsque la fraude se produit et c’est bien l’ordre
social qui est la victime, si l’on considère que le droit doit protéger la moralité juridique, dans
704
ce cas, la fraude devrait être sanctionnée par la nullité du contrat . Il est à noter que la
sanction absolue à l’ensemble des effets de l’acte frauduleux ne peut être appliquée que
lorsqu’il s’agit d’un acte juridique. En revanche, la volonté frauduleuse qui a été réalisée par
un acte matériel ne peut pas être sanctionnée par l’exception de fraude, car le refus des effets
juridiques frauduleux résultent de cet acte n’affecte pas son existence et n’empêche pas ses
conséquences habituelles qui n’ont aucun lien propre avec la volonté frauduleuse. Par
exemple, si un bien meublé a été transféré à l’étranger afin d’échapper à certaines dispositions
de droit français, lesdites dispositions demeureront applicables. Puis, si un dommage a été
causé à ce bien par un tiers dans ce pays étranger, la responsabilité du tiers sera soumise à la
705
loi étrangère en raison du lieu de la situation du bien et non à la loi du pays où la partie
avait l’intention d’éluder. Cependant on peut faire face à un autre raisonnement, d’après M. B.
Audit, lorsque l’intervention d’une autorité étrangère est en cause, le principe d’indépendance
des souverainetés interdit à l’autorité de l’État requis d’annuler l’acte de l’autorité
706
d’origine . La réaction qu’on peut faire est que les intéressés devraient faire proclamer la
nullité de cet acte auprès l’autorité du pays étranger.

b. La sanction relative.
387. La sanction de la fraude à la loi en droit international ne peut être la sanction
complète. Il semble que l’adage « Fraus omnia corrumpit » ne peut être appliqué qu’à la

704
B. Audit, « Fraude à la loi », J.-Cl. Dr. internat., op.cit.
705
H. Batiffol, Traité…, t. I, n° 375, p. 600 ; Y. Loussouarn, Droit international privé, op.cit., n° 269, p. 330.
706
B. Audit, « Fraude à la loi », op. cit., n° 13.

287
fraude en droit interne. Car l’État requis ne peut pas décider si un tel acte est valable dans un
État étranger où il a été accompli ; par exemple le juge saisi n’a que le pouvoir de le
considérer comme dépourvu d’effet dans son pays.
La question est de savoir quel acte devrait être inopposable, l’acte frauduleux tout
entier, ou uniquement son résultat frauduleux qui a été recherché par l’intéressé ? La doctrine
dominante est favorable à la sanction pour l’ensemble de l’acte frauduleux, car il est mieux
707
adapté à l’intéressé qui n’obtient pas finalement ce qu’il recherchait . La Cour de cassation
708
a condamné un tel artifice par l’exception de fraude à la loi dans l’affaire de Bauffremont ,
mais selon la Cour la princesse est demeurée française. La Cour n’a pas déclaré nulle la
naturalisation de l’intéressée en Allemagne car le principe de l’indépendance des
souverainetés était en jeu comme nous l’avons cité.

388. Force est de constater que l’intervention de l’exception de fraude à la loi a pour
l’objectif d’empêcher le fraudeur de profiter de son acte frauduleux ou d’obtenir le résultat
qu’il souhaiterait.

2) L’application unilatérale de la règle de conflit.


389. L’exception de fraude à la loi n’est pas une solution utilisée dans tous les cas. C’est
pourquoi on peut constater souvent les décisions dans lesquelles la Cour a sanctionné d’une
violation internationale de la loi par l’affirmation de compétence de la loi du for désignée par
709
la règle de conflit . Pourtant dans certains cas, la Cour a soulevé la fraude afin de
sanctionner une telle violation même qu’aucune des parties n’a pas modifié l’élément de
rattachement traditionnel et qu’il n’est pas possible d’admettre ladite violation comme
régulière par invocation une règle de conflit. Citons un exemple, lorsqu’un couple de
nationalité française va à l’étranger pour se marier dans un pays où sa loi n’exige pas d’âge
requis, ces époux ont violé la règle de droit français sur les conditions de mariage. On trouve

707
Id., n° 14 ; Y. Loussouarn, Droit international privé, loc.cit ; H. Batiffol, Traité…, loc.cit. Contra.
Niboyet, Traité de droit international privé français, t. III, Paris, 1944, n° 1090 : cet auteur a l’avis favorable à la
sanction partielle ; il faut écarter uniquement la conséquence frauduleuse que l’intéressé se proposait de faire
produire à l’acte. Par exemple la princesse Bauffremont est considérée comme ayant acquis la nationalité
allemande, mais on refuse de reconnaitre son divorce et son mariage car ceux-ci sont le résultat frauduleux
qu’elle recherchait.
708
Cass.1er civ., 18 mars 1878, Princesse de Bauffremont, GA, 4e éd. 2001, n°6. V. en ce sens Cass. 1er civ., 17
mai 1983, Lafarge, préc. supra note n° 659.
709
B. Audit, Droit international privé, Paris : Economica, 2010, n° 242.

288
qu’aucune règle de conflit ne se présente, qu’aucun rattachement de la situation ne soit
manipulé. Afin de sanctionner la violation de la loi française, le tribunal devra soulever que
cette réunion constituée à l’étranger par deux Français a pour l’objectif d’échapper
l’application de la loi française pour faire « fraude » à la loi… La Cour avait relevé dans sa
décision le terme de « fraude » en tant qu’élément de fait, cela est pour mieux motiver sa
solution constituée le refus de reconnaissance d’un acte public d’autorité étrangère.

390. En ce qui concerne le cas où la violation de la loi peut employer la règle de conflit, il
s’agit de cas où le juge a soulevé la fraude du sujet pour mieux justifier la qualification du
rattachement retenu selon la loi du for. Un exemple auquel nous nous intéressons ici, c’est le
cas de la règle conflictuelle qui rattache la loi applicable à la société au siège sociale de
celle-ci. Dans cette hypothèse on sait que c’est toujours les parties qui ont choisi
l’établissement de leur société. Là aussi le rôle de l’autonomie de la volonté est indispensable
comme dans d’autres matières. La situation du siège social avait été choisie parmi les pays le
plus libéral qui offre la loi plus favorable aux intérêts de cette société et souvent pour leurs
actionnaires. L’exception de fraude pourrait être invoquée par le tribunal du pays où se situe
le siège, s’il constate une fraude à la loi de son pays. Alors qu’au regard du juge français, il
n’a aucun sens de sanctionner cette situation. Si dans un litige, le juge français a prétendu que
c’était une fraude, ce n’est qu’en tant qu’élément de fait pour motiver son jugement. La
question peut se poser sur le fait que dans l’ordre juridique français, la jurisprudence affirme
le plus souvent que le siège social d’une personne morale doit être ‘réel’. Qu’en est-il, si ce
n’est pas le cas ? L’intention frauduleuse des parties d’établir le siège social a été relevée par
le juge à l’appui de sa décision. En effet, c’est le cas analogue en matière de domicile des
personnes physiques, lorsque le juge a appuyé sur la nécessité d’un lien sérieux, cela signifie
que ce lien sera exclu de fraude. On n’a pas besoin de le préciser, puisque ce n’est pas les
deux conditions totalement distinctes. Force est de constater que le recours à la notion de
710
fraude n’est qu’une question de technique juridique .

3) Le recours à la notion de bonne foi.


391. C’est la thèse subjectiviste qui inspire ce genre de sanction. Cette solution se fonde sur
l’idée selon laquelle la loi applicable au contrat est normalement la loi désignée par les parties
et chaque État connaît les dispositions impératives en matière contractuelle. Il est possible que

710
B. Audit, La fraude à la loi, Thèse, op.cit., n° 196, p. 148.

289
les parties n’aient mis en œuvre cette loi que pour l’objectif de se soustraire aux dispositions
impératives d’une loi plus compétente. Les partisans de la doctrine subjectiviste réservent
souvent les exigences de l’ordre public comme le mécanisme de s’opposer à l’application
d’une loi étrangère désignée par les parties. On peut dire que les théories subjectivistes même
les plus modérées tiennent toujours la possibilité de fraude. Bien qu’un partisan de la thèse
711
subjectiviste pense que le choix des parties n’est jamais « capricieux » , ce constat semble
être défendu. Car, lorsque les parties peuvent choisir la loi n’ayant aucun lien avec le contrat
et s’il faut entendre que ce choix n’est jamais arbitraire, les parties obéiront à un intérêt mais
d’un autre coté il faut constater qu’il existe aussi les intérêts collectifs que la loi impérative a
été destinée à protéger. Pour ces raisons, le constat selon lequel le choix de la loi applicable
par les parties n’est jamais capricieux, n’avance rien de la thèse subjectiviste. Malgré ce
constat, la plupart des auteurs admettrait de soumettre le choix de la loi par les parties à un
certain contrôle du juge pour écarter la fraude. On peut voir que le juge peut toujours
sanctionner une fraude à la loi sans mentionner la fraude, mais il affirme en revanche
l’applicabilité de la loi compétente. La notion de la bonne foi a vocation à s’appliquer dans ce
cas, les juges ont souvent ajouté que le choix de la loi applicable doit être « sérieux » ou « fait
712
de bonne foi » .
On ne peut pas nier que l’État doit protéger son ordre économique et le contrôle des
changes, donc le juge doit aussi vérifier que le choix de la loi qui n’a aucun rapport avec le
contrat n’a pas pour but d’échapper aux lois impératives dans ces domaines. La notion de
bonne foi est un moyen pour empêcher la fraude et notamment ceci rend plus acceptable la
théorie subjectiviste.

B. Sanction de la fraude à la loi étrangère.

392. Lorsque l’on confère aux parties la liberté de choisir la loi applicable à leur contrat, la
situation frauduleuse semble être envisagée plus souvent. On peut dire que la fraude à la loi
entraîne l’application de la loi étrangère qui n’a aucun lien significatif ni avec les parties, ni
avec leur rapport juridique en cause. On constate qu’il est difficile de connaître la véritable
raison des parties de choisir une telle ou telle loi étrangère applicable au contrat, d’ailleurs il

711
F. Mann, « The Proper Law of Contract: A rejoinder », (1950) 3, I.L.Q., p. 64.
712
V. Hessel E. Yntema, « « Autonomy » in Choice-of-Law », 1 AJCL., 1952, p. 353 et s.

290
n’est pas logique de déduire que le choix de cette loi est illicite alors qu’il n’est pas défendu
par le droit positif. Cependant, en matière de contrats internationaux, la Convention de Rome
de 1980 et le Règlement Rome I permettent aux parties de choisir la loi applicable bien que
celle-ci ne présente aucun lien avec le contrat.
Le rôle du juge dans le cas du choix des parties de la loi applicable est évident. Le
juge rend la décision en respectant sa loi, plus il y a de lois impératives, plus il doit être
attentif à leur violation possible. Lorsque la loi étrangère est une victime de la manipulation
frauduleuse, on peut d’abord exclure l’exception de la fraude à la loi sous prétexte que la loi
fraudée n’est pas celle du for. Pourtant on peut constater que finalement la fraude à la loi
étrangère doit être sanctionnée au même titre que la loi du for.

1) Le refus d’exercer la compétence internationale : retour à la loi du for.


393. Le juge du for pourrait refuser la compétence internationale et appliquer sa loi, ceci est
également la sanction de la fraude à la loi étrangère qu’on peut envisager. L’exception de
fraude n’est pas vocation à s’appliquer dans ce cas, puisque celle-ci repose exclusivement sur
la démonstration d’une intention frauduleuse. Cette intention frauduleuse sera établie
uniquement par l’attitude de l’intéressé postérieurement à l’intervention de l’autorité
publique. Par ailleurs, d’autre condition doit être remplie ; il doit être le cas où l’autorité
713
publique en cause a la possibilité de ne pas exercer son pouvoir .
Alors que le cas envisagé à ce stade repose sur l’exercice de compétence de l’autorité
publique, dès lors il n’y a pas de place pour l’exception de fraude. A titre d’exemple
l’application d’une loi du for entraîne la violation de telle loi étrangère et le demandeur a
l’intention de faire fraude à cette loi étrangère, l’autorité saisie peut refuser d’accéder à la
demande. Cependant afin de refuser l’application de la loi du for, il faut que la teneur de ladite
loi étrangère violée soit proche à la loi du for, car on ne peut pas accepter de prendre en
considération la loi qui constitue une conception trop éloignée de celle du for. Dans ce cas là,
le refus d’exercer la compétence internationale peut être fait au nom de l’ordre public
international du for sans aucune nécessité de relever la fraude à la loi. Prenons un exemple,
dans l’hypothèse où l’autorité publique ne refusera pas le mariage de deux étrangers dont leur
loi personnelle l’interdit pour des raisons religieuses, raciales ou homosexuelles.

713
B. Audit, Droit international privé, op.cit., n° 246.

291
2) Le refus de reconnaissance de l’acte et d’exécution du jugement étranger.
394. La fraude à la loi étrangère par application d’une loi tierce. En effet, cette solution
peut être envisagée au stade final du procès ; la reconnaissance ou l’exécution des décisions
étrangères. Lorsque la loi étrangère a été violée, qu’en est-il pour les droits acquis par la
fraude ? Dans ce cas trois ordres juridiques sont impliqués ; celui du for, celui de la loi
appliquée et celui de la loi évincée. Mais il n’y a que deux lois en concurrence ; celle du pays
étranger où les parties souhaitent l’évincer et celle qui a été appliquée par la fraude. On
envisagerait la fraude à la loi étrangère par l’application d’une loi tierce lorsque la loi du for
n’est incontestablement pas compétente, soit parce que la situation ne présente aucun lien
avec cette loi au moment où elle est née, soit parce que ce lien était insuffisant pour justifier
714
sa compétence . Autrement dit c’est une hypothèse de conflit objectif entre deux lois
étrangères lequel le juge saisi serait plus libre de le juger car aucune des deux n’est impérative
pour lui. Dans ce cas la sanction envisagée est le refus de reconnaissance de l’acte frauduleux
conclu à l’étranger par la loi fraudée, celui-ci peut être un acte de l’autorité civile ou un
jugement étranger.

395. La jurisprudence française intervient depuis une longue période pour réprimer toute
715 716
fraude à la loi étrangère . L’arrêt Gunzburg semblait être un arrêt phare en matière de
fraude à la loi. En l’espèce, les époux Gunzburg-Shrey de nationalité américaine ont intenté
un divorce par consentement mutuel au Mexique. Ils ont voulu se soustraire à la compétence
de la juridiction et de la loi de l’État de New York. Les époux n’ayant aucun domicile réel au
Mexique, ont plaidé par mandataire ; l’épouse ayant séjourné très peu de temps sur le
territoire mexicain en vue d’y obtenir un certificat de résidence, pièce tendant à prouver que le
tribunal mexicain est compétent pour statuer sur son affaire. Certes, cette manœuvre
présentait comme une voie d’échapper à la nullité catégorique que la jurisprudence des
tribunaux de New York attache aux divorces par correspondance. Ce divorce dit de
« complaisance » obtenu devant le juge mexicain avait pour but de bénéficier de l’exequatur
717
devant les juges français. La sanction par le Tribunal de grande instance de la Seine allait

714
B. Audit, La fraude à la loi, Thèse, op.cit., n° 251, p. 190 et s.
715
Cass.1er civ., 5 février 1929, Mancini, préc. supra, note n° 35.
716
TGI Seine, 14 mai 1962, de Gunzburg, D. 1962.653, note Ph. Malaurie.
717
L’arrêt de Gunzburg, préc.

292
718
trouver confirmation devant la Cour d’appel de Paris . La juridiction d’appel a affirmé que
« le refus de l’exequatur s’imposait en l’espèce avec d’autant plus de force, et que la saisine
de la Cour mexicaine constituait une fraude à la loi étrangère, une violation manifeste de la
moralité juridique internationale qui heurtait l’ordre public international français ». D’après
M. J. Deprez, le principal intérêt de l’arrêt est d’avoir admis expressément la fraude à la loi
719
étrangère . En l’espèce la fraude n’a pas été sanctionnée en tant qu’exception générale
permettant de neutraliser les manœuvres artificieuses des parties. Mais la Cour avait fait
intervenir l’ordre public au sens du droit international privé à ce stade.

396. L’admission d’une sanction générale à l’égard de toute fraude à la loi étrangère
appelait certainement des signaux plus forts pour pouvoir être entérinée. L’élément légal de la
fraude n’est plus constitué au vu de cette solution d’une seule branche, à savoir la loi
720
française. Dans l’arrêt Sté Lafarge , la Cour de cassation refusa toute discrimination en ce
sens entre la loi du for et la loi étrangère. A cet égard, elle a précisé que l’élément légal est
721
formé par « la loi normalement compétente » . Cependant aucun juge n’a essayé de
pondérer cette affirmation en soulignant qu’en l’espèce, la loi fraudée était la loi française et
que tout a été mis en œuvre par la Haute juridiction pour paralyser la fraude à la loi du for.

397. Conclusion de la section. Lorsque la volonté des individus est différente de celle de
la loi, ce n’est pas surprenant de trouver que certains ont essayé d’échapper de l’autorité de la
dernière. Notamment en matière contractuelle où les parties devraient être libres de choisir la
loi applicable aux contrats, certes lorsqu’on leur laisse le choix, elles choisiraient
naturellement la meilleure pour leur propre intérêt. Pourtant dans certains cas, lorsque la loi
normalement applicable n’est pas la loi plus favorable pour les parties et qu’elles voudraient
bien appliquer une autre en changeant frauduleusement le rattachement de la situation… Il est
possible aussi d’envisager le cas où les individus créent la situation d’un conflit de lois afin de
faire intervenir la loi étrangère dans leur rapport. Que le for ne doive pas le tolérer, on admet
que la loi est faite de règles, de normes abstraites, elle implique dans la vie de toute personne

718
CA Paris, 18 juin 1964, de Gunzburg, RCDIP.1967.340, note J. Deprez ; JCP.1964.810, note J.D.Bredin
719
J. Deprez, note sous CA Paris, 18 juin 1964, préc., p.354-355.
720
Cass.1er civ., 17 mai 1983, Sté Lafarge, RCDIP.1985.346, note B. Ancel.
721
B. Ancel, note sous Cass.1er civ., 17 mai 1983, préc., p.354.

293
car elle s’applique à tous et que pour cette raison elle est acceptée comme une norme juste. Le
fait que certains ont la possibilité d’éluder la loi compétente rend l’injustice, comme écrit M.
G. de la Pradelle, que « l’on doit reconnaître que cette loi officiellement générale, donc juste,
n’est en réalité contraignante que pour le vulgaire puisque certains, les forts, les riches, ceux
722
qui sont « conseillés », peuvent en éluder les dispositions » .
Force est de reconnaître que la fraude doit être sanctionnée dès lors que, affirme la
Cour de cassation, son instigateur vise à esquiver, de façon détournée, à la loi normalement
compétente, y compris la loi étrangère. C’est la raison pour laquelle tout traitement
723
différentiel entre la loi étrangère et la loi du for est rejeté . Les sanctions de la fraude à la
loi pourraient intervenir en temps variés ; l’une est une mesure préventive, l’autre est
d’intervenir une fois que la loi se trouve évincée. Le mode de sanction dépend de la situation
fraudée, dans certain cas on peut sanctionner en affirmant simplement l’applicabilité de la loi
évincée. Alors que dans d’autre, la technique de l’exception de fraude jouera son rôle. Celle-ci
est une figure particulière en droit français ; le système juridique thaï n’en connait pas.
Pourtant dans certain cas la violation internationale de la loi doit être sanctionnée par
l’application unilatérale de règle de conflit. Force est de constater que le rapport entre le rôle
de la fraude dans la sanction de violation internationale de la loi et la méthode de solution de
conflit de lois se présente ainsi : pour la méthode bilatéralisme, la fraude est le fondement de
la décision ; en revanche dans la méthode unilatéralisme, la fraude n’est qu’un élément de fait
pour justifier la décision.

Section II
Prise en considération la fraude à la loi lato sensu.

398. Nous étudions à ce stade la question voisine de la fraude à la loi ou la fraude à la loi
lato sensu ; le forum shopping. Il s’agit du cas où plusieurs États sont prêts à retenir leur
compétence juridictionnelle et les parties font leur choix entre toutes celles qui s’offrent. Il
paraît également en pratique qu’un litigant a « utilisé la règle de conflit de juridictions en vue
d’obtenir l’application des règles procédurales plus favorables que celles qu’appliquerait le

722
G. de la Pradelle, « La fraude à la loi », TCFDIP 1971-1973, op.cit., p. 119.
723
Cass.1er civ., 17 mai 1983, Sté Lafarge, préc. supra, note n° 659.

294
724
tribunal normalement compétent » . Tout d’abord il faut soigneusement préciser que le
choix du tribunal parmi ceux qui sont compétents est aussi défini comme le forum shopping.
Il reste à savoir si tout le forum shopping est illicite… Avant de répondre à cette question il
faut reconnaître au préalable que la mondialisation intervient aussi dans la vie juridique
725
comme les termes utilisés par les auteurs ; « la mondialisation du droit » et « un
726
supermarché mondial de la justice » . L’opportunité du choix de for donne lieu à
l’opportunité de gagner et de bénéficier certains intérêts pour son gré. Dans le monde des
affaires, il est très usuel d’entendre parler de forum shopping. Il convient de rappeler ici une
expression de Lord Simon Glaisdale dans l’affaire The Atlantic Star : « Forum shopping is a
dirty word; but it is only a pejorative way of saying that, if you offer a plaintiff a choice of
jurisdictions, he will naturally choose the one in which he thinks his case can be most
727
favorably presented: this should be a matter neither for surprise nor for indignation » .
Si on accepte la distinction entre le forum shopping régulier et irrégulier, c’est
uniquement pour répondre à la nécessité d’une étude du moyen de sanction. Les deux sortes
du forum shopping posent alors le problème tant substantiel que procédural, une étude ne sera
pas complète en l’absence de l’un d’eux. Dès lors, les clauses de prorogation de compétence
internationale sont aussi considérées comme une sorte de forum shopping qui est licite en
principe, mais nous limitons dans notre étude de cette partie uniquement dans le cadre du
forum shopping irrégulier.

399. Il n’est pas apte d’assimiler le forum shopping à la fraude à la loi, car on sait que
celui-ci porte sur les conflits de juridictions. Plus souvent, le forum shopping se réalise sans
fraude à la loi, il conduit à l’obtention d’un résultat différent de celui qui aurait été obtenu
devant une autre juridiction. Le moyen utilisé n’a pas créé ou modifié la situation qui lui
permet d’exercer l’option, par conséquent la théorie de la fraude ne peut pas intervenir. Mais
il ne faut pas oublier que la primauté d’objectif espéré par les parties du forum shopping est
un bénéfice de droit procédural le plus favorable. Dés lors, il n’est pas impossible de dire que

724
A. Nuyts, « Forum shopping et abus du forum shopping dans l’espace judiciaire européen », in Étude en
l’honneur du Professeur John Kirkpatrick, Bruxelles : Bruylant, 2003 ; Cf. F.-K. Juenger, « What’s Wrong with
Forum Shopping? », Sydney Law Review, 1994, vol. 16:5, p. 5-13, spéc. p. 9 et s.
725
E. Loquin, La mondialisation du droit, Paris : Litec, 2000.
726
P. de Vareilles-Sommières, « Le forum shopping devant les juridictions françaises », TCFDIP, 1998-2000,
p. 49 et s., spéc. p. 51.
727
F.-K. Juenger, « What’s Wrong with Forum Shopping? », op.cit., p. 12.

295
le forum shopping peut être également une violation pure et simple de la loi. Ce constat nous
laisse à penser que ces problèmes ne devraient pas avoir lieu, car l’objectif général de droit
international privé est atteint. On sait que les règles de conflit de lois, dans n’importe quel
pays, ont pour but de régler le litige par la même manière pour que le résultat obtenu ne
présente pas la grande différence dans chaque pays.

400. Le forum shopping est très actif également dans l’espace judiciaire européenne, la
question est de savoir si les parties peuvent exercer les possibilités qui leur sont offertes par
les règles de droit uniforme ou à savoir si l’application de ces règles est soumise à certaines
limitations pour éviter les excès de forum shopping. Cependant on constate d’après les
diverses variantes que la théorie de la fraude ne peut pas atteindre toutes les hypothèses de
forum shopping irrégulier.
On verra tout d’abord les limites concevables au choix du for (§1). A savoir que
chaque ordre juridique dispose sa méthode de remédier ou on peut dire la prévention d’une
telle fraude (§2).

§1 : Les limites concevables au choix du for.

401. La possibilité de choix du tribunal par les parties contractantes pour régler leur litige
est admise depuis longtemps dans les systèmes juridiques common law et les pays européens,
bien sûr sous certaines conditions. Notamment en droit interne des États fédéraux, il existe
toujours les conflits interétatiques c'est-à-dire entre les compétences de juges des États ou
cantons. En France, la liberté de choix du for n’est pas absolue surtout en matière de statut
personnel, en revanche en matière contractuelle le choix d’un système judiciaire favorable aux
intérêts du demandeur semble beaucoup plus libre. En Thaïlande, au contraire, la question de
choix du for est fortement critiquée à cause des amendements de certaines dispositions du
Code de procédure civile. Par ailleurs les écrits juridiques ainsi que la jurisprudence sur le
forum shopping sont bien rares. Comme on le sait, le forum shopping irrégulier est illicite,
donc l’irrecevabilité de celui-ci est normale dans tous les systèmes juridiques (A). Cependant
la question est de savoir comment le juge peut-il faire distinction entre le forum shopping
régulier et irrégulier ? Nous verrons par la suite quels sont les critères pour déterminer la
licéité du forum shopping (B).

296
A. Interdiction de forum shopping irrégulier.

1) Le forum shopping, la notion controversée.


402. La notion du forum shopping nécessite qu’on mesure au préalable sa pratique. Comme
nous l’avons dit auparavant, le forum shopping consiste au choix du for le plus favorable aux
intérêts d’un plaideur, afin de profiter de la procédure facilitant l’action en justice tels que les
728
class actions , le procès discovery qui permet d’obtenir l’accès aux preuves détenues par
l’adversaire, l’anti-suit injunction ; ou afin d’exploiter des règles substantielles plus
intéressantes ; ou même de profiter du coût plus bas du procès déroulant dans certain pays. Le
problème pourrait devenir plus grave surtout lorsque le tribunal frauduleusement choisi
applique ces mesures considérées comme étrangères à l’égard du pays de droit civil. On sait
que la notion du forum shopping est admise généralement dans les pays du common law, alors
en France comme en Thaïlande, on ne reconnaît pas juridiquement ce terme.

403. Un auteur a essayé de distinguer le forum shopping en deux termes ; le forum


729
shopping bonus, régulier et le forum shopping malus, irrégulier . Ceci est ouvert à un grand
débat, car pour certains, il est inutile d’introduire la différence entre les deux termes pour
décrire le forum shopping, puisqu’il ne permettrait pas d’être plus certaine la matière de
compétence judiciaire. Nous apprécions cette dissociation et par ailleurs M. P. de Vareilles-
730
Sommières admet finalement que ces notions ne sont qu’une catégorie de classement . En
effet le terme « forum shopping » signifie littéralement « le choix du tribunal », c'est-à-dire
que tout le choix du for est forum shopping, et force est de reconnaître que toute la
désignation du for n’est pas nécessaire d’être abusive en soi, alors si on n’a pas de critères,

728
Cf. D. Bureau et H. Muir Watt, Droit international privé, Partie I, spéc. n° 222, p. 214. La « class action »
s’agissant d’une action de masse exercée par un grand nombre de personnes qui ont toutes individuellement subi
le même préjudice et qui souhaitent obtenir une réparation ou un remboursement. Il s’agit d’une catégorie de
personnes ou « class » qui répond aux mêmes caractéristiques tels que les actionnaires, les consommateurs, etc.
Cette mesure se base sur l’idée qu’à titre individuel, les plaignants subis le préjudice relativement faible peuvent
ne pas avoir une réparation. Ces plaignants n’ont aucun pouvoir de dissuasion, mais s’ils ont réagi
collectivement un procès, l’ampleur de la demande leur permettra d’être pris au sérieux.
729
P. de Vareilles-Sommières, « Le forum shopping devant les juridictions françaises », loc.cit. Pour cet auteur
il y a un forum shopping malus même si aucune intention frauduleuse n’existe, comme le cas du choix d’un
tribunal étranger lorsque le tribunal français a la compétence exclusive.
730
Dès lors pour la question s’agissant de la différence entre la fraude au jugement et le forum shopping malus,
le même auteur a affirmé que la fraude au jugement est également un cas de forum shopping malus.

297
comment on peut sanctionner le choix abusif ? Force est de constater qu’aucun forum
731
shopping n’est licite, dans le sens que ceci préserverait les intérêts de celui qui l’exerce .
D’après M. P. Mayer, le forum shopping « se caractérise donc par une manipulation
732
des critères de compétence juridictionnelle » . Alors c’est l’intention frauduleuse qui
importe pour considérer si une telle situation constitue le choix abusif ou forum shopping
irrégulier ou non. A titre d’exemple la saisine d’un tribunal étranger pour l’objectif de
733
paralyser le procès se déroule en France comme dans l’affaire Akla . D’ailleurs, pour le
même auteur, « leur comportement (des litigants) est frauduleux si le jugement favorable
qu’ils espèrent, est principalement destiné à être invoqué dans un autre pays dont les
tribunaux auraient refusé de faire droit à la demande s’ils en avaient été directement
734
saisis » . C’est le cas où les parties cherchent à éluder le prononcé d’un jugement que
rendrait le for dont elles relèvent normalement. On envisagera cette hypothèse au stade de la
reconnaissance et de l’exequatur de décisions étrangères devant le juge du for. Dans cette
matière, on ne peut pas reprocher aux contractants d’avoir voulu éluder les règles de droits
normalement applicables à leur contrat, car le tribunal saisi a appliqué la loi compétente selon
ses règles de conflit.

404. En Thaïlande, avant l’année 1991, on a eu une disposition qui permettait aux parties
de choisir un tribunal favorable mais il faut que ceci présente les liens effectifs avec le litige.
Cependant il semble que cette disposition ne s’appliquait qu’au litige purement interne. Nous
allons approfondir sur ce point dans la deuxième partie. En somme, à l’heure actuelle, la
Thaïlande n’a pas de dispositions spécifiques en matière de compétence internationale
applicables au litige à caractère international. La compétence du juge thaï est basée alors sur
l’article 4 du Code de procédure civile (v. infra n° 498).

731
D. Cohen, « Contentieux d’affaires et abus de forum shopping », D. 2010. 975, spéc. p. 978 ; V. en ce sens
G. Flecheux et I. Hautot, « Le forum shopping », DPCI. 1988, t. 14, n° 3, p. 389-402, spéc. p. 389 et s. Cet
auteur a affirmé que le forum shopping dans son acception internationaliste n’est pas le choix du for, en revanche
c’est une éviction du for normalement ou naturellement compétent.
732
P. Mayer, Droit international privé, 10e éd., Paris : Montchrestien, 2010, n° 267, p. 190.
733
Cass. 1er civ., 6 juin 1990, Akla, RCDIP.1991.553, 1er esp., note P. Courbe ; D. 1990.Som.com.263, obs. B.
Audit.
734
P. Mayer, Droit international privé, loc. cit. ; Cf. B. Audit, « Fraude à la loi », J.-Cl. dr. internat, Fasc. 535.

298
2) Les juridictions françaises face au forum shopping en contentieux d’affaires.
405. L’affaire Vivendi du 28 avril 2010. En l’espèce, les actionnaires français de la
société Vivendi ont été regroupés en class action, par le juge du tribunal de New York, pour
demander une réparation du préjudice relatif à la législation boursière. La société Vivendi a
été jugé coupable d’avoir diffusé d’informations trompeuses à l’encontre de ses actionnaires.
La class action destinée à regrouper les actionnaires minoritaires français a été contestée par
Vivendi devant le TGI Paris, la société Vivendi a fait valoir que le recours des actionnaires
devant la juridiction américaine et aussi la class action constituaient d’un abus de forum
shopping en soulevant l’article 1382 du Code civil français. Le TGI Paris a refusé de
considérer que « les actionnaires français avaient commis un abus du droit d’ester en
735
justice » . De même que l’arrêt de la Cour d’appel qui a décidé que « la compétence du
juge américain ne résulte d’aucune manœuvre frauduleuse… », et que « la société Vivendi ne
peut caractériser l’abus de forum shopping qu’elle dénonce… ». Dès lors, selon la juridiction
d’appel la participation dans la class action devant le tribunal américain contre Vivendi « ne
736
peut pas être considérée comme un abus de forum shopping » , même que l’action de
groupe est une institution qui demeure inconnue en droit français.
En l’espèce, la saisine du tribunal américain peut être considérée comme abus de
forum shopping en raison de l’absence de lien significatif entre le litige et les États-Unis. Car,
afin de sanctionner la diffusion par une société d’une information financière trompeuse, le
juge américain a prononcé la foreign-cubed class action, les actions collectives, qui présente
un manquement d’un rapport effectif entre le litige et le juge américain dans la mesure où les
tribunaux américains étaient saisis par des investisseurs étrangers pour but d’assigner
l’émetteur étranger, et l’opération sur des instruments financiers ont été réalisée sur un
marché étranger. Certes, cette action et le forum shopping sont admis par l’ordre juridique
américain, mais en France un auteur a fait une remarque que la décision américaine est
737
incompatible avec le droit français .
Au point de vue du droit français, les trois conditions de l’exequatur en France ne sont
pas réunies ; la compétence indirecte du juge étranger, la conformité à l’ordre public

735
TGI Paris, 13 janvier 2010, D., 2010, AJ, obs. X. Delpech.
736
CA Paris, 28 avril 2010, Vivendi, D., 2010, AJ, obs. X. Delpech ; ibid., p. 2323, note L. d’Avout et S.
Bollée ; D. 2011.265, obs. N. Fricero ; RTD com. 2010.753, note N. Rontchevsky ; Cour suprême des États-Unis,
24 juin 2010, D. 2010.2323, 2e esp., obs. L. d’Avout et S. Bollée.
737
D. Cohen, « Contentieux d’affaires… », op.cit., p. 981 et s.

299
international de fond et de procédure, et l’absence de fraude à la loi. Cet auteur a soutenu en
premier lieu que le litige ne présente pas un lien caractéristique avec le juge américain saisi,
en revanche, le rapport caractérisé du litige conduit à la France. En second lieu, l’ordre public
international n’a pas été respecté. Car la class action ne respecte pas le principe du
contradictoire et la opt-out class action qui permet à quelques personnes de saisir le juge pour
qu’il certifie une classe de demandeurs porte atteinte fondamentalement la liberté et l’ordre
738
public international français .

B. Réserve de l’abus de droit, la qualification de licéité du forum shopping.

406. La notion d’abus de droit a été reprise plusieurs fois dans la jurisprudence de la CJCE
pour refuser de donner effet à un forum shopping irrégulier. En effet la notion d’abus de droit
est inconnue du droit international privé, sa fonction n’est pas pour admettre des droits
subjectifs aux individus. Mais le droit international privé est destiné à déterminer selon quelle
loi ces droits subjectifs seront accordés. Dés lors, lorsque les individus exercent leurs droits
subjectifs de manière abusive, il ne s’agit pas d’un abus de la règle de conflit, mais à travers le
mécanisme de la règle de conflit de lois les parties peuvent choisir la loi qui sera applicable à
leur contrat parmi celles qui sont illimitées que le droit objectif leur permet. A titre
d’exemple, le droit subjectif permet à porter plainte devant l’une quelconque des juridictions
que le droit objectif leur propose de saisir. Partant de cette situation, les parties pourraient
739
utiliser ce droit subjectif autant qu’abuser .
Cependant lorsque l’on tient compte du droit d’accès à la justice, force est de constater
que celui-ci est considéré comme un droit fonction doué d’une finalité propre et n’est pas un
droit absolu. Une fois que l’action en justice est en cause, ce droit est accordé à « son titulaire
dans le but bien précis de lui permettre d’assurer la reconnaissance de ses droits ou de se
740
défendre contre des actions qui contesteraient à tort ses droits » . Dés lors qu’une action en
justice, destinée à faire triompher le droit et la vérité, a été utilisée à d’autres fins, il s’agit

738
Id., p. 982. D’après M. D. Cohen, cette mesure est contraire à une règle constitutionnelle qui stipule ainsi :
« tout individu associé à une demande collective en justice ait été mis à même de donner son assentiment en
pleine connaissance de cause et qu’il puisse conserver la liberté de conduire personnellement la défense de ses
intérêts et de mettre un terme à cette action » (Décision n° 89-257 du 25 juillet 1989, Loi modifiant le code du
travail et relative à la prévention du licenciement économique et au droit à la conversion, JO 28 juillet, p. 9503).
739
E. Cornut, « Forum shopping et abus du choix de for en droit international privé », JDI.2007.27, spéc. p. 34.
740
P. van Ommeslaghe, « Abus de droit, fraude aux droits des tiers et fraude à la loi », RCJB.1976.302,
spéc. p. 320.

300
741
d’un abus . La CJCE admet également dans l’arrêt du 12 mai 1998 qu’une action en justice
peut constituer un abus de droit lorsqu’elle a été exercée « dans le but d’obtenir, au détriment
de l’autre partie, des avantages illégitimes et manifestement étrangers à l’objectif de ladite
742
disposition » . Bien que la réserve de l’abus de droit ne soit pas admise explicitement par
la série de conventions de Bruxelles, la CJCE a accepté de façon générale bien constant de
nos jours que « le droit communautaire n’interdit pas à un État membre d’adopter, en
l’absence d’harmonisation, des mesures destinées à éviter que les facilités créées en vertu du
743
traité soient utilisées de façon abusive et contraire à l’intérêt légitime de cet État » . Ce
constat nous permet de conclure que l’exercice des libertés communautaires se trouve aussi sa
limite. C’est la raison pour laquelle les juridictions internes des États membres devront
sanctionner l’utilisation abusive des critères de compétence retenus par ces textes
744
communautaires à travers la notion de l’abus de droit admise par la CJCE .

407. La loi applicable à l’abus de droit. Il reste à savoir si l’admission de la thèse de


l’abus de droit nous conduit à rechercher aussi la loi applicable à cet abus. Force est de
constater que la loi applicable au régime de l’abus de droit dépend de la nature de l’abus
considéré, soit la lex fori, soit la lex causae, soit la lex loci delicti, ou même la loi de l’auteur
745
de la règle de conflit qui permet le forum shopping. D’après M. E. Cornut , la réserve de
l’abus de droit est régie par la loi du for qui devra le sanctionner sans tenir compte de la loi
applicable au fond du litige. Cette thèse semble être plus logique pour régler ce problème, car
une fois que l’abus du choix de for s’est arrivé, c’est l’ordre juridique du juge saisi qui a été
atteint et également un intérêt procédural qui est en cause non pas l’intérêt substantiel du
plaideur. Alors que la question de savoir si une clause attributive de juridiction constitue une
clause abusive est une question qui relève de la loi applicable au contrat, puisqu’il s’agit d’un

741
J. Ghestin, G. Goubeaux et M. Fabre-Magnan, Droit civil : Introduction générale, LGDJ, 1994, 4e éd.,
n° 803.
742
CJCE, 12 mai 1998, aff. C-367/96, Kefalas, Rec. CJCE 1998, I, p. 2843, concl. G. Tesauro ; RTD com.
1998, p. 1000, obs. Luby ; Europe 1998, n° 225 et 247, obs. Lagondet, pt. 28.
743
CJCE, 31 mars 1993, aff. C-19/92, Kraus, Rec. CJCE 1993, I, p. 1663 ; Petites Affiches, 1993, n° 108,
p. 19-20 ; Gaz. Pal. 1995.III., p. 668-672.
744
CJCE, 27 septembre 1988, aff. C-189/87, Kalfelis, Rec. p. 5565 ; JDI.1989.457, note A. Huet ;
RCDIP.1989.117, note H. Gaudemet-Tallon ; D. 1989.254, note B. Audit. La CJCE a condamné le cas de
soustraire le codéfendeur à son for initialement compétent sur le fondement de la connexité.
745
Cf. E. Cornut, « Forum shopping et abus… », op.cit., p. 36.

301
746
cas de la désignation de compétence ressort d’une clause d’élection du for . Si la loi
applicable au contrat ignore la réserve de l’abus de droit, il est possible de faire intervenir
l’ordre public international du for pour le sanctionner. En effet le juge français devrait se
référer à la théorie de l’abus de droit telle qu’elle est conçue en droit français, cela peut être
comparé à l’hypothèse de sanction de la fraude à la loi.

§ 2 : Le palliatif de droit positif.

408. Seul le choix du for qui a pour but de se soustraire le litige du juge normalement
compétent de façon irrégulière devrait être sanctionné. Plusieurs moyens pourraient être
employés pour la répression. Alors il nous convient de distinguer le mode de sanction du
forum shopping en trois groupes pour faciliter notre étude. Le premier consiste à sanctionner
en général du forum shopping, ce mode de répression le choix abusif du for dépend de
compétence en cause (A). Le deuxième est de sanctionner de façon particulière, il en résulte
de la pratique commerciale et en particulier la tendance de jurisprudence française qui est
expérimenté de plus en plus fréquente la méthode common law d’anti-suit injunction (B).
Pour le dernier, c’est une sanction à l’appui des règles préventives, c’est en effet le moyen qui
a besoin d’une coopération du législateur d’élaborer le règlement désigné par avance dans une
situation qui constitue le risque du forum shopping la juridiction qui devrait être normalement
compétente (C).

A. Sanction générale du forum shopping irrégulier.

1) L’exception d’incompétence.
409. Lorsque la compétence directe est en cause, il s’agit d’une méthode traditionnelle de
sanctionner le forum shopping irrégulier, lorsque la compétence d’un tribunal français est en
cause, ce choix irrégulier du for peut être sanctionné directement. On peut distinguer cette
sanction en deux voies ; l’exception d’incompétence du tribunal français choisi sur la base
d’un forum shopping irrégulier ; ou l’affirmation de compétence du tribunal français en cas du
choix irrégulier d’une autre juridiction. La première solution est destinée à admettre à la partie
victime du forum shopping, dans ce cas c’est le choix du tribunal français, une exception qui

746
Cf. E. Pataut, « Clauses attributives de juridiction et clauses abusives », in Mél. J. Calais-Auloy, Dalloz,
2004, p. 807, spéc. p. 814 et s.

302
lui permet de soustraire son litige de ce tribunal. Le tribunal français devra se déclarer
747
incompétente bien que le chef de compétence soit bien établi . Cette déclaration
d’incompétence pourra être d’office ou même par une demande de partie victime. La question
est de savoir si, dans tous les cas, l’exception d’incompétence effectuera à toute partie du
litige. La jurisprudence a bien souligné qu’il n’est pas nécessaire de soustraire tout le litige au
juge français irrégulièrement saisi ; l’irrégularité partielle du choix du for n’entraîne selon la
748
Cour qu’une incompétence partielle .

410. Lorsque la compétence indirecte est en cause, c’est le refus des effets néfastes de
jugements étrangers. Il s’agit du jugement étranger qui a été demandé la reconnaissance ou
l’exécution en France. Une fois que ce jugement a été délivré sur la base du choix irrégulier
du for, le juge français devra mettre à disposition de la victime de ce choix en déclarant
l’exception d’incompétence indirecte, autrement dit par le refus de reconnaissance ou
d’exequatur en France le jugement étranger car son auteur est incompétent.

2) Le mécanisme de forum non conveniens.


411. Cette théorie trouve son origine au pays du common law ; elle permet au juge de
refuser de statuer sur le litige lorsqu’il trouve non conveniens ou inapproprié, en évoquant
qu’une autre juridiction est mieux placée. Il est vrai que la théorie de forum non conveniens
est inconnue aussi bien dans le système juridique français que dans le système juridique
thaïlandais. En Thaïlande comme en France, c’est le droit qui définit si le juge est compétent
ou non pour statuer sur un litige. Force est de constater que l’histoire juridique de la France
peut nous éclairer pourquoi on rejette cette doctrine étrangère, c’est en effet la pensée

747
Cass. 1er civ., 24 novembre 1987, Garrett, RCDIP.1988.364, note G.A.L. Droz ; JDI.1988.793, note E.
Loquin ; JCP (G) 1989. II. 21201, note P. Blondel et L. Cadiet.
748
CJCE, 7 mars 1995, Fiona Shevill, RCDIP.1996.487, note P. Lagarde ; JDI.1996.543, obs. A. Huet. Cet
arrêt a affirmé la réponse même s’il s’agit de la matière délictuelle, mais elle nous a montré que lorsque le choix
d’un tribunal saisi par le demandeur a été fait sur la base du forum shopping malus, la Cour peut sanctionner en
déclarant incompétent sur une partie du litige qui est partiellement irrégulier. En l’espèce il en résulte que le
choix du tribunal par la victime de l’un des lieux de réalisation du dommage en vue d’obtenir la réparation de
l’entier préjudice serait partiellement irrégulier en l’absence de lien caractérisé entre ce for et la totalité de la
prétention. On voit que le choix de ce tribunal n’était pas en soi irrégulier, mais le tribunal choisi doit faire jouer
l’exception d’incompétence uniquement dans le cas de la réparation du dommage causé à la victime hors du
territoire du for.

303
juridique française qui se fonde sur l’encadrement strict des pouvoirs des organes
749
judiciaires .

412. Le droit international privé français adopte aussi le principe du droit interne sur la
répartition de compétence du juge lequel la bonne administration de la justice et l’intérêt des
parties ont été prises en compte. Il reste à savoir dans quel cas le juge français peut-il refuser
750
de trancher le litige relevé devant elle ? On cite ici l’article 92 du CPC . Certes, cet article
permet au juge français de refuser de statuer sur un tel litige, mais lorsqu’on l’a bien
considéré, on trouve que c’est la règle de compétence internationale qui accorde au juge de
refuser de statuer sur ledit litige en raison d’incompétence, mais non pas parce qu’il est
compétent et il refuse de l’exercer. Par ailleurs il ne s’agit pas ici d’un pouvoir de se dessaisir
en estimant plus approprié un autre tribunal.

413. L’arrêt de la Cour d’appel, la société Boeing rendu en 2008 qui ouvre le débat sur la
réception de la théorie du forum non conveniens par le droit français peut être un bon
exemple. En l’espèce, les demandeurs ont introduit devant le TGI une demande tendant à
aboutir à une décision sur son incompétence, alors que le tribunal l’avait décidée irrecevable.
Ensuite, la Cour d’appel a estimé incompétente la juridiction française pour statuer sur ce
litige en renvoyant aux juges américains, antérieurement saisis, qui avaient considéré que le
tribunal français est plus approprié pour rendre une décision en l’espèce. Il faut observer que
les juges américains faisaient appel à la théorie forum non conveniens sous réserve que le juge
français se reconnaisse compétent… Force est de constater que le motif de la Cour d’appel de
se déclarer incompétent est remarquable, elle affirma ainsi : « le juge français, tenu par des
règles matérielles de compétence, ne peut pas déclarer qu’un tribunal étranger est plus
751
approprié » . Alors elle n’avait pas à rechercher si elle était ‘more convenient’. Par ailleurs
la saisine de la Cour d’appel français a été faite avec une demande dans un contexte judiciaire

749
Cf. H. Gaudemet-Tallon, « Les régimes relatifs au refus d’exercer la compétence juridictionnelle en matière
civile et commerciale : forum non conveniens, lis pendens », RIDC.1994.423, spéc. p. 424.
750
Article 92 dispose ainsi : L’incompétence peut être prononcée d’office en cas de violation d’une règle de
compétence d’attribution lorsque cette règle est d’ordre public ou lorsque le défendeur ne comparaît pas. Elle ne
peut l’être qu’en ces cas.
751
CA Paris, 6 mars 2008, Sté The Boeing Company, D. 2008.AJ.852, obs. I. Gallmeister ; ibid., p. 1452, note
P. Courbe ; Gaz. Pal. 2009, n° 51-52, p. 48-50, note M.-L. Niboyet.

304
752
très particulier, c'est-à-dire qu’il faut tenir compte de la décision du juge américain . Car ce
dernier oblige le juge français à prononcer sur sa compétence internationale, et si le juge
français affirme sa compétence, le juge américain n’exercera pas sa compétence.
Les sociétés défenderesses ont formés leurs pourvois. La Cour de cassation, dans
753
l’arrêt du 30 avril 2009 , a censuré la décision d’appel, en raison de l’interdiction d’une
action déclaratoire ; on ne peut pas saisir un juge uniquement pour lui demander qu’il n’est
pas compétent si une demande lui était soumise. Lorsque la Cour de cassation rend un arrêt de
cassation totale, elle affirma implicitement l’incompétence internationale des juges français.
Malheureusement la Cour reste silencieuse sur l’issue de forum non conveniens, bien que la
cassation nous ait fait revenir à la décision du TGI et à l’irrecevabilité de la demande qui avait
754
été formulée sur la base de forum non conveniens .

414. En Thaïlande, la théorie de forum non conveniens n’est pas reconnue, même le droit
positif et les écrits sont bien pauvres sur ce sujet. On trouve qu’il n’y a aucune disposition du
Code de procédure civile thaï qui permet au juge de se dessaisir une instance en appuyant à la
doctrine forum non conveniens. Par ailleurs les tribunaux thaïs n’ont jamais eu l’occasion de
755
statuer sur cette question . D’après un auteur, avoir conféré l’application du forum non
conveniens à la Cour thaïe c’est en effet d’admettre aux juges le pouvoir discrétionnaire
756
extensif, ce qui doit être fait prudemment .

B. Sanctions particulières au forum shopping irrégulier.

1) La méthode d’anti-suit injunction

752
O. Staes, « Transport aérien de personnes », note sous Cass. 2e civ., 30 avril. 2009, Rev. dr. trans., 2009,
n° 11, p. 28-29.
753
Cass. 2e civ., 30 avril 2009, Sté The Boeing Company, JCP (G) 2009, n° 31, p. 19-22, note M. Attal.
754
M. Attal, « Acculturation d’institutions procédurales étrangères : une occasion manquée », Note sous arrêt
Cass. 2e civ., 30 avril 2009, JCP (G) 2009, n° 31, p. 21.
755
P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, « Le conflit de lois sur la compétence étatique en matière du commerce
international », documents pour le cours de Certificat de droit du commerce international, le 19 avril 2002, n° 18,
p. 29.
756
Ch. Pachusanond, « Certains aspects sur le conflit de juridictions en Thaïlande à l’égard du droit
international privé », Chulalongkorn Law Journal, vol. 17, n° 1, 1997, p. 39-61.

305
757
415. Afin de sanctionner le forum shopping malus , les systèmes de Common Law a
développé l’injonction in personam dont le juge saisi pourrait interdire à l’avance au
demandeur de saisir la juridiction étatique étrangère. Cette technique est très efficace grâce
aux sanctions pécuniaires sévères en cas de violation.
L’anti-suit injunction est définie comme « une mesure, prononcée à l’encontre
d’une personne privée par une juridiction compétente à son égard, dont l’objet est
d’interdire à cette personne d’initier ou de poursuivre une procédure judiciaire devant
758
une juridiction étrangère » . Malgré l’avantage indéniable d’anéantir le forum shopping
malus, on peut dire que la mesure de l’injonction de nos jours n’est pas admise à la tradition
française. De même que devant la CJCE, qui a récemment reconnu que ladite technique
est incompatible avec les règles communautaires de compétence, de reconnaissance et
d’exécution en matière civile et commerciale ; le Règlement Bruxelles I, même si celui-ci
759
exclu la matière de l’arbitrage de son champ d’application (v. infra n° 552).
760
L’arrêt de la Cour de cassation du 14 octobre 2009 a jugé autrement, mais il faut
bien constater que la nature de litige est également différente de la première. En l’espèce, un
contrat de distribution exclusive de boissons a été conclu entre une société américaine et une
société française. Ce contrat est régi par la loi américaine et les parties ont inséré aussi une
clause attributive de compétence au tribunal américain. La société américaine ayant résilié le
contrat, la société cocontractante a porté plainte devant le tribunal français. La société
américaine a invoqué la clause attributive de juridiction en contestant la compétence du juge
français et a saisi le tribunal de son État. La juridiction américaine a prononcé l’anti-suit
injunction qui interdit au cocontractant français de poursuivre le litige engagé devant le juge
français. Afin d’avoir obtenir ce qu’on demande, cette décision (anti-suit injunction) doit être

757
Rappelons que s’il existe l’option de compétence et que le choix n’est pas frauduleux, que ce choix est
fondé sur l’une des juridictions visées par l’option, dans ce cas il n’y a pas de compétence exclusive. Dès lors
qu’il n’y a pas le choix irrégulier, il n’y a aucune place pour l’anti-suit injunction. Cf. P. de Vareilles-
Sommières, « Le forum shopping devant les juridictions françaises », op.cit., spéc. l’opinion de Mme H. Muir
Watt, p. 77. Cet auteur à affirmé que l’anti-suit injunction est une protection du forum conveniens, car l’idée du
juge qui prononce cette mesure est qu’il est le seul juge naturel du litige. Ce juge ne le fera pas s’il y a un doute,
il le fera uniquement dans le cas où il est convaincu qu’il se présente avec son pays les liens les plus effectifs.
758
S. Clavel, Le pouvoir d’injonction extraterritorial des juges pour le règlement des litiges privés
internationaux, Thèse, Paris I, 1999, n° 392.
759
CJCE, 10 février 2009, aff. C-185/07, West Tankers, D. 2009.981, note C. Kessedjian; RCDIP.2009.373,
note H. Muir Watt; JDI.2009.1281, note B. Audit; RTD civ. 2009.357, obs. P. Théry; Rev. arb. 2009. 407, note
S. Bollée.
760
Cass. 1er civ., 14 octobre 2009, In Zone Brands, JCP (G) 2009, n° 46, p. 416, obs. E. Cornut ; JCP (G) 2009,
n° 49, p. 505, note C. Legros ; Gaz. Pal. 28 nov. 2009, p. 332, note M.-L. Niboyet.

306
exécutée en France. En l’espèce, la Cour d’appel ayant accordé l’exequatur. La question est
de savoir si cette mesure porte atteinte autant à une prérogative de souveraineté de l’État
français qu’au droit d’accès au juge comme soutenu la société française. La Cour de cassation
retient dans sa décision que « eu égard à la clause attributive de compétence librement
acceptée par les parties, aucune fraude ne pouvait résulter de la saisine par la société
américaine de la juridiction expressément désignée comme compétente », et qu’il n’y a
aucune privation du droit d’accès au juge.
Pour pouvoir obtenir l’exequatur en France, il faut que trois conditions soient
remplies. La société française faisait valoir que l’anti-suit injunction américain devrait être
761
tenu contraire à l’ordre public international. La Cour de cassation considère au contraire ,
dés lors en l’absence de fraude à la loi et la juridiction étrangère est bien compétente, alors ce
jugement américain (prononcé l’anti-suit injunction) peut être reconnu dans l’ordre juridique
français. Par ailleurs, afin d’éviter de contredire la jurisprudence de la CJCE (West Tankers),
la Cour de cassation a soigneusement précisé dans son arrêt que cette solution ne vaut que
dans le cas hors du champ d’application de conventions ou du droit communautaire. D’après
cet arrêt, on peut constater que la Cour a admis l’anti-suit injunction, même si l’arrêt a été
rendu dans le cadre de l’existence de clause attributive de juridiction mais il est possible aussi
de voir la Cour française sanctionner le forum shopping irrégulier en admettant cette mesure
common law.

416. En effet l’Institut de droit international avait affirmé la licéité des injonctions : « en
particulier en cas de violation d’un accord d’élection de for ou d’arbitrage, de comportement
762
déraisonnable ou oppressif d’un demandeur devant une juridiction étrangère » .
Alors pour certain, l’injonction peut se révéler utile pour prévenir l’abus de choix de
for, en particulier pour la lutte contre le harcèlement procédural d’un plaideur et de rendre

761
On trouve que la Cour de cassation s’appuie sur l’objet de cette injonction qui consiste à sanctionner la
violation d’une obligation contractuelle préexistante, car les parties ont inséré dans leur contrat une clause
attributive de juridiction laquelle doit être respectée. C’est en effet une hypothèse de la violation d’une clause
attributive de juridiction qui est en cause et c’est aussi cette obligation qui fait reconnaître la Cour la licéité du
procédé.
762
Résolution de la session de Bruges, 2003, paragraphe 5, Le recours à la doctrine du forum non conveniens et
aux « anti-suit injunctions » : principes directeurs, in Annuaire de l’Institut de droit international, vol. 70, t. I,
2002-2003, session de Bruges, 2003, 2ème Commission.

307
763
effectif le droit d’agir du demandeur à l’injonction . Mais comme nous l’avons développé,
l’avantage de cette injonction est évident aussi du point de vue d’une partie qui bénéficie de
ladite mesure, en revanche pour l’ordre juridique dans lequel ce jugement doit être exécuté, il
semble difficile à admettre sa licéité. La question peut se poser comment le juge peut
sanctionner l’une des parties et assurer l’exécution de sa décision à l’étranger, si l’anti-suit
injunction est interdit devant son système juridique ? D’après M. P. de Vareilles-
764
Sommières , c’est l’article 33 alinéa 1er de la loi du 9 juillet 1991 et l’article 809 du CPC
qui mettraient des armes au juge, sans équivaloir à l’anti-suit injunction ; il peut ordonner une
astreinte contre une partie qui poursuivrait la procédure à l’étranger.
765
Pour d’autres , l’injonction semble être un procédé dangereux, il est vrai que le juge
n’a pas la liberté d’apprécier unilatéralement l’irrégularité de sa saisine par un juge étranger.
M. P. Mayer a montré le souci concernant l’intrusion dans le fonctionnement de la justice
étrangère saisie et dans d’autres pays car il trouve que l’idée de ceci est de régler le problème
en empêchant que la décision étrangère ne naisse. Est-ce que c’est un signe que chaque État
pourrait refuser librement la reconnaissance de jugements étrangers ?

417. Pour remédier ce souci, nous invitons de rappeler que l’anti-suit injunction du juge
français ne pourrait être prononcée que dans les hypothèses où le forum shopping à l’étranger
est irrégulier, par exemple si la compétence exclusive du juge français a été violée par la
poursuite du procès à l’étranger. Enfin cette mesure peut être prise en considération par le
tribunal étranger qui a été saisi afin d’examiner si la demande portée devant lui est
766
frauduleuse . En somme, cette mesure constitue aussi bien l’avantage que
767
l’inconvénient , donc l’anti-suit injunction est apte à introduire en droit interne ou non
dépend de points de vue de chaque système juridique. Il ne faut pas considérer qu’elle soit
une prétention scandaleuse ou connotée péjorativement cette expression. Notamment

763
M.-L. Niboyet, « La globalisation du procès civil international dans l’espace judiciaire européen et
mondial », JDI.2006.937, spéc. n° 31. Contra. S. Bollée, « La reconnaissance d’une injonction anti-suit
prononcée par un juge étranger désigné par une clause attributive de juridiction », D. 2010.177, spéc. n° 7 : cet
auteur a pensée que la Cour de cassation en l’occurrence a laissé une voie trop libérale en engageant le droit
français des conflits de juridictions concernant les conditions d’accueil des jugements étrangers.
764
P. de Vareilles-Sommières, « Le forum shopping devant les juridictions françaises », op.cit., p. 65.
765
M. P. Lagarde ; M. P. Mayer ; M. R. Carrier
766
P. de Vareilles-Sommières, « Le forum shopping… », op.cit., p. 74.
767
On peut imaginer d’un plaideur qui agit dans un État beaucoup plus rapidement que son cocontractant.

308
lorsqu’un tel système juridique reconnaît l’exequatur une injonction prononcée par le tribunal
étranger mais qu’il n’a aucune arme procédurale ni autres contre-mesures équivalentes pour
768
assurer l’exécution de son jugement de ce genre dans l’ordre juridique étranger . Sauf si on
peut considérer que la loi du 9 juillet 1991 et l’article 809 du CPC sont aussi bien efficaces
que l’anti-suit injunction.

2) L’exception de litispendance internationale.


418. Dans un pays de droit civil comme la Thaïlande où la théorie pure de forum non
conveniens n’est pas reconnue, qu’en est-il lorsque le juge est saisi d’un litige qui a déjà été
porté devant la juridiction étrangère ? L’exception de litispendance joue alors un rôle
considérable. Or, où se trouve sa place au niveau international ?
En France, ce sujet est relativement compliqué puisqu’il faut distinguer la
litispendance en droit international privé commun de celle en droit international privé
européen. Pour le premier, on sait que la jurisprudence refusait pendant longtemps de faire
jouer cette exception en droit international privé, bien qu’elle soit encouragée par la doctrine.
769
La Cour de cassation l’a finalement reconnue dans son arrêt rendu en 1974 , on peut dire
que c’est une décision phare de cette matière, car depuis cet arrêt les tribunaux français ont
admis le jeu de l’exception de litispendance internationale. Cet arrêt consacre le principe de
recevabilité de litispendance internationale en rattachant à la condition que la décision qui
devra être rendue à l’étranger doit être susceptible d’être reconnue en France. Alors, seules les
trois conditions traditionnelles ; l’identité des parties, le même objet et la même cause, ne sont
pas suffisantes. Le juge devra faire un sorte de pronostic de vérifier si ce jugement remplira
les conditions de régularité requises en droit français pour être reconnu en France, et si c’est le
cas le juge français a faculté de se dessaisir. Ce n’est pas une obligation pour le juge. La
question peut se poser si une affaire connexe à une autre portée devant le tribunal étranger, le
juge français devrait-il se dessaisir au profit dudit tribunal ? Il nous paraît que le tribunal
français ne refuse pas la recevabilité d’exception de connexité. Cette exception suppose-t-il
« l’existence entre les litiges en cours, l’un en France et l’autre à l’étranger, un lien de

768
V. P. de Vareilles-Sommières, « Le forum shopping… », op.cit., spéc. l’opinion de C. Bernard, p. 74. Il n’a
pas nié l’avantage de l’anti-suit injunction mais a proposé si on la crée en droit français il faudrait développer
aussi un moyen qui rend efficace à cette technique, car sans celui-ci cette mesure n’a aucun intérêt.
769
Cass. 1er civ., 26 novembre 1974, RCDIP.1975.491, note D. Holleaux ; JDI.1975.108, note Ponsard ; note
GA, 4e éd., n° 54. La Cour a affirmé que « l’exception de litispendance peut être reçue devant le juge français,
en vertu du droit commun français, en raison d’une instance engagée devant un tribunal étranger également
compétent ».

309
770
nature à créer une contrariété de décisions ». La connexité peut se rapprocher de la
théorie de forum non conveniens, même si limité, comme un auteur relève que l’on n’a pas
771
besoins d’introduire cette théorie dans le système juridique français .
Outre qu’en droit international privé commun, la litispendance joue le rôle plus radical
en droit européen. L’article 21 de la Convention de Bruxelles et l’article 27 du règlement
Bruxelles I obligent le tribunal saisi en second lieu à se dessaisir en faveur du tribunal premier
saisi. Lorsque le litige porte sur les mêmes parties, le même objet et la même cause, cette fois-
ci il ne s’agit pas de pouvoir discrétionnaire mais d’office du juge.

419. Force est de reconnaître qu’en Thaïlande, comme nous l’avons cité auparavant, la
théorie de forum non conveniens n’est pas reconnue par le droit positif. Aucune disposition du
Code de procédure civile ne permet au juge de rejeter le litige si ce tribunal se trouve
772
compétent , même que le juge estime que ce litige ne présente pas un lien effectif avec le
for, ce sera le déni de justice. La litispendance internationale et la connexité dans cette
773
matière méritent d’être adoptées en droit thaï ou du moins « d’être introduites » en droit
thaï pour que le juge soit discipliné et puisse appliquer ces mesures procédurales aux litiges
internationaux.

C. Règlement préventif au forum shopping abusif.

420. Le forum shopping en droit européen est défini comme « le choix d’un for en fonction
774
des avantages pouvant résulter du droit matériel (voire procédural) qui y est appliqué » .
C’est une formule dégagée par l’avocat général Colomer à l’occasion d’un recours préjudiciel

770
Cass. 1er civ., 22 juin 1999, RCDIP.2000.43, note Cuniberti. V. en même sens CA Paris, 12 juin 2003, D.
2003, Jur., note S. D. La Cour a affirmé qu’ « une situation de litispendance internationale suppose que les
juges français et étrangers soient saisi, chacun étant compétent selon sa loi et que le jugement à intervenir à
l’étranger puisse être reconnu en France ».
771
Cf. P. de Vareilles-Sommières, « Le forum shopping… », op. cit., spéc. l’opinion de Mme H. Gaudemet-
Tallon, p. 79 ; Cf. H. Gaudemet-Tallon, « Les régimes relatifs au refus d’exercer la compétence juridictionnelle
en matière civile et commerciale : forum non conveniens, lis pendens », RIDC.1994.423, spéc. p. 429 et s.
772
Ch. Pachusanond, « Certains aspects sur le conflit de juridictions… », op.cit., p. 61 ; P. Kanchanachittra-
Saisoonthorn, « Le conflit de lois sur la compétence étatique… », loc.cit.
773
Ch. Pachusanond, « Certains aspects sur le conflit de juridictions… », loc.cit.
774
CJCE, 16 mars 1999, aff. C-440/97, Groupe Concorde, JDI.2000.547, obs. J.-M. Bischoff ;
RCDIP.2000.260, note B. Ancel ; DMF.2000.66, note P. Bonassies ; DMF.2000.296, note M. Morin ; JCP (G)
2000.II.10354, note C. Bruneau.

310
relatif à l’interprétation de la Convention de Bruxelles. Comment le législateur européen
règle-t-il le problème causé par le choix abusif du for ? Les instruments européens tels que le
règlement Bruxelles I et Bruxelles II sont aussi ouverts une large possibilité pour les plaideurs
de choisir librement entre les différents tribunaux dont la compétence est prévue par les
textes. Ces règlements constituent également le forum shopping au sens large, certes, non
péjoratif. Par ailleurs les dispositions de ces règlements ont été approuvées par le législateur
que les tribunaux spécialement déterminés constituent les liens les plus caractéristiques avec
une situation en cause. Dans ce procès, tous les éléments concernés doivent être analysés tels
que la nationalité des parties ; leur résidence habituelle ; leur domicile ; le lieu
d’établissement du rapport de droit avec la société en cause ; ou le siège social. Et c’est le
juge du pays avec lequel la majorité de ces points de contact est relié qui doit être compétent.
775
Cette solution trouve une base de la doctrine du groupement des points de contact .
A titre d’exemple, hormis la fonction de l’article 2 qui permet d’attraire aux tribunaux
de l’État du domicile du demandeur, c’est l’article 5 qui, également, donne compétence aux
juges d’un autre État membre spécialement identifié lorsque le défendeur domicilié sur le
territoire d’un État membre quelconque. C'est-à-dire que le demandeur a la possibilité de
porter plainte soit devant le tribunal du domicile du défendeur, soit devant le for désigné par
les compétences spéciales. C’est ici la tâche de l’avocat qui essaie de choisir le tribunal le
plus favorable à son client. La CJCE a aussi affirmé cette possibilité dans son arrêt du 19
776
février 2002, en décidant que « le choix dépend d’une option du demandeur » .
D’après M. D. Cohen, le règlement préventif du forum shopping peut également
trouver la solution dans la notion de juge de proximité. Il la prêtait en effet du principe de
proximité en droit international privé, le juge français doit être compétent dans le litige dans
lequel les actionnaires sont de nationalité française, domiciliés en France et ayant acquis leurs
777
titres sur ce marché . La notion du juge naturel a été aussi proposée comme la
778
solution . Le terme « juge naturel » a été mentionné plusieurs fois par la jurisprudence

775
D. Cohen, « Contentieux d’affaires… », op.cit., p. 980.
776
CJCE, 19 février 2002, aff. C-256/00, Besix, Rec.2002.1699 RCDIP.2002.588, note H. Gaudemet-Tallon.
777
D. Cohen, « Contentieux d’affaires… », op.cit.
778
Malgré le doute de certains auteurs qui ont avancé qu’il est introuvable. Cf. l’opinion de Mme H.
Gaudemet-Tallon, « Le forum shopping devant les juridictions françaises », op.cit., p. 79 ; Ibid., « L’introuvable
« juge naturel » », in Mél. J. Gaudemet, PUF, 1998, p. 591.

311
779
française, même dans l’arrêt Vivendi rendu en 2010 . Citons aussi l’arrêt Garrett, par
exemple, la Cour de cassation a fait recours à la notion du juge naturel afin de sanctionner le
forum shopping abusif. En l’occurrence, les tribunaux américains ont été saisis par les
litigants américains et suisses portant sur une créance. Pendant la procédure, la société suisse
a cessé son créance à une société française qui a saisi le juge français envers l’article 15 du
Code civil en évoquant sa nationalité. Les tribunaux français ont estimé illicite la cession de
créance en raison de son objectif qui « n’avait d’autre but… que de soustraire le
recouvrement de la créance, et les droits qui y sont attachés… à ses juges naturels (le juge
780
américain) » . Force est de constater que ce juge est en effet le juge initialement saisi, alors
781
il étant considéré comme ayant une compétence naturelle pour juger ce litige . Ce constat
nous amène à conclure que le juge naturel n’est pas introuvable dans cette circonstance.

421. Conclusion de la section. Le forum shopping a pour objectif non seulement d’éluder
la loi procédurale ou règle de conflit d’un pays normalement applicable, mais aussi d’obtenir
la décision rendue dans un autre pays où les parties ont intérêt à voir fixée leur situation.
Comme écrit M. P. Mayer, « le forum shopping réalise donc une fraude au jugement qu’aurait
782
rendu le tribunal normalement compétent » . Bien que le choix abusif du tribunal
compétent mérite la sanction, la théorie de forum non conveniens ou l’anti-suit injunction, des
mesures répressions, doivent être employées prudemment en tant qu’exception plutôt que la
règle principale. Car, en matière de contrats internationaux les parties contractantes ont
normalement choisi les juridictions de l’État qui pouvaient offrir les règles procédurales plus
favorables à leur litige. Par ailleurs la volonté des parties se présente comme un rattachement
principal dans le contrat international et il n’est pas facile de considérer que le fait de saisir le
tribunal constitue une fraude. Donc la preuve de l’intention frauduleuse est indispensable dans
ce cas.
Pour le juge thaï, il devrait prudemment distinguer entre le choix du for et le forum
shopping irrégulier. En l’absence des critères clairs et précis retenus par le juge, il risque de

779
CA Paris, 28 avril 2010, Vivendi, préc, supra note n° 736.
780
Cass. 1er civ., 24 novembre 1987, Garrett, RCDIP.1988.364, note G.A.L. Droz ; JDI.1988.793, note E.
Loquin ; JCP (G) 1989. II. 21201, note P. Blondel et L. Cadiet.
781
P. de Vareilles-Sommières, « Le forum shopping… », op.cit., p. 80.
782
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 393, p. 292.

312
sanctionner à tort le choix du for complètement régulier admis dans le monde du commerce
international.

313
422. Conclusion du chapitre. L’autonomie de la volonté des parties est bien établie en
droit international privé de la plupart des États y compris la France et la Thaïlande. Comme
nous l’avons étudié dans les chapitres précédents, ce principe connaît également certaines
limites. Les parties n’ont pas une liberté totale de désigner la loi applicable à leur contrat.
Chaque État élabore ses propres règles impératives pour écarter l’application de loi étrangère
jugée contraire à certaines valeurs censées être protégées par l’ordre juridique du for. Dès
lors, l’ordre public international joue un rôle indispensable dans ce cas. Cependant il existe de
cas où le mécanisme d’ordre public ne peut pas intervenir, il s’agit de la situation dans
laquelle la loi normalement applicable selon la règle de conflit existe mais les parties
souhaitent de l’éluder. L’ordre juridique de for fonctionne avec un autre moyen de répression
destiné à assurer la sécurité juridique, c’est le recours à la notion de fraude en droit
international privé. On peut dire que même si la loi applicable résulte de l’autonomie de la
volonté des parties, pourtant la décision rendue à l’étranger ne pourrait pas avoir l’exequatur
en France si les conditions établies par la jurisprudence ne sont pas remplies et que l’une de
ces conditions soit « l’absence de fraude ».

423. Hormis la fraude à la loi, la fraude au jugement donne également lieu au problème.
Force est de constater que le forum shopping utilise la diversité de juridictions de chaque pays
tant dans la règle procédurale que la loi substantielle à fin d’obtenir le jugement que l’on
souhaiterait. Or, dans la fraude à la loi, les parties ont tenté de manipuler le rattachement de la
situation pour qu’elles aient la possibilité d’appliquer la loi plus favorable à leur propre
intérêt. C’est l’intention d’obtenir le résultat final que l’on doit en tenir compte. Cependant la
Cour elle-même devrait envisager la situation au contexte du commerce ou de
l’investissement international laquelle est bien délicate à tracer, tel est le cas de la société qui
a choisi la situation de son siège social dans un pays pour bénéficier du règlement plus libéral.
Les mesures de sanction la fraude en droit international privé ou l’exception de fraude
peuvent être envisagées ici dans tous les deux cas ; fraude à la loi et fraude du jugement, mais
pour les buts différents. Pour la première, l’exception de fraude renforce et rétablit la loi
évincée par les parties et permet de l’appliquer, alors que pour la seconde, l’exception de
fraude permet de nier l’efficacité au jugement obtenu par la fraude. La sanction peut produire
ses effets lorsque les parties voudraient exécuter ou reconnaître cette décision dans son pays
d’origine, car si elles n’en font pas, on ne pourrait la sanctionner…

314
424. Conclusion du Titre. Les limites du principe de l’autonomie de la volonté affirment
la nécessité de fixer des règles pour protéger certaines valeurs considérées comme les plus
importantes dans chaque État. Les deux mécanismes distincts, lois de police et l’ordre public
international, employés en droit international privé démontrent aussi l’incertitude et la
difficulté de les déterminer, et que l’ordre juridique étatique choisit de les laisser flexibles en
raison de son caractère variable dans le temps. Par ailleurs, l’intervention de ces mécanismes
devra être l’exception, le juge devra nécessairement tenir compte de cette règle.
Une autre limite le juge devra constater lorsque le litige présente le caractère
d’extranéité et les parties ont choisi la loi applicable, c’est l’absence de fraude (à la loi).
Affirmant que l’ordre juridique du for ne doit pas tolérer la fraude à ses lois, ce principe
devrait être appliqué aussi à la loi étrangère. La fraude est en soi un acte utilisé pour but
d’échapper à la loi normalement applicable. Puisque la situation créée par l’intention
frauduleuse n’ait aucune valeur à préserver, pour cette raison elle doit être sanctionnée en
appliquant la loi que le fraudeur a voulu éluder et lui rendre en état précédemment existé.
Cependant on sait que toute fraude ne sera pas nécessairement sanctionnée. Rappelons que
l’objectif de sanction repose sur l’éviction du résultat voulu par le fraudeur, elle doit être
entendue comme un procédé de sauvegarde de droit dont nous ayons l’obligation ; le droit
français pour le juge français et le droit thaï pour le juge thaï. En effet la condition de
l’absence de fraude est propre au droit international privé français. Car, en Thaïlande on ne
parle pas en pratique de la fraude à la loi, il n’y a que dans la doctrine influencée par le droit
français.

315
Conclusion de la Première Partie

425. Le principe de l’autonomie de la volonté est connu depuis longtemps. Aujourd’hui, le


choix peut se faire au profit d’une loi étatique. Mais la question se pose du choix d’une loi
non étatique même si les dispositions de la Convention de Rome et son successeur le
Règlement Rome I ne l’admettent pas expressément. Le choix de droit a-national est
largement admis parmi la communauté internationale des commerçants, les règles compilées
au sein de la Chambre de commerce internationale en étant le meilleur exemple. Par ailleurs,
les contractants peuvent choisir une loi qui ne présente aucun rapport avec leur contrat selon
le principe de la liberté universelle consacré par les textes européens. Ainsi cette loi peut être
la loi étrangère dont les modalités d’application relève du droit interne de chaque État
membre. Dans l’hypothèse où les parties n’ont pas procédé à un choix, c’est la recherche de la
volonté à travers la règle de conflit de lois qui permettra d’attendre le résultat escompté. Les
rattachements stipulés à titre de présomptions ont pour but de déterminer la loi applicable en
tant que méthode subsidiaire. En ce qui concerne le mécanisme propre au droit international
privé qui fait obstacle à l’application de la loi étrangère, on sait que l’ordre public
international peut intervenir après que la règle de conflit a fonctionné normalement. Plus
précisément, lorsque le juge applique la loi étrangère choisie par les parties ou désignée par la
règle de conflit, il doit vérifier la conformité de ladite loi à l’ordre public international du for.
Rappelons que le jeu d’ordre public international n’est que l’exception. Par conséquent le juge
doit prudemment le définir et l’appliquer. Il ne faut pas oublier que la loi désignée par la règle
de conflit ou résultant du choix des parties est loi la plus convenable pour régir le litige.
D’une part on croit au mécanisme de règle conflictuelle désignant la loi la plus apte ; d’autre
part on croit au principe de l’autonomie de la volonté. Hormis cette exception de l’ordre
public international, le juge français envisage aussi la condition de l’absence de fraude. La
fraude à la loi fait aussi obstacle à l’application de la loi qui aurait due été appliquée grâce à la
règle de conflit : soit la loi du for, soit la loi étrangère. Certes, la fraude mérite d’être
sanctionnée, mais de façon différente. Il faut bien distinguer la sanction de tout acte du
résultat d’une fraude.
Lorsque les problèmes de détermination de la loi applicable ont été réglés, c’est la
méthode de règlement de différends qui se pose. Il est vrai que la plupart des contractants
souhaitent régler leur litige par le recours à un mode alternatif alors que l’action d’assignation
devant le juge étatique reste ouverte. Mais la détermination de la juridiction compétente

316
présente aussi des difficultés. Il en est de même pour l’arbitrage lorsque la clause d’arbitrage
est obscure ou dans l’hypothèse où la partie contractante a saisi le juge étatique au lieu du
tribunal arbitral, et ce malgré la clause compromissoire.

317
318
Deuxième Partie

REGLEMENT DES DIFFERENDS

426. L’investissement et le commerce international sont à peine importants pour


l’économie de la Thaïlande. Afin d’avoir la confiance des commerçants et des investisseurs
thaïlandais et étrangers, les modes de règlement des différends prennent aussi une part
considérable. Autre que le mode traditionnel de règlement des différends comme le règlement
judiciaire, on connaît aussi les modes alternatifs de règlement des conflits émanant des
contrats internationaux, tels sont la négociation, la conciliation, la médiation et l’arbitrage
international. Nous nous intéresserons à ce dernier qui est très fréquent en pratique chez les
opérateurs internationaux de commerce. Les deux modes principaux de règlement des conflits
dans le commerce international sont différents, non pas dans la fonction du juge ou de
l’arbitre, mais dans la source du pouvoir de juger : source étatique pour le juge et source
contractuelle pour l’arbitre.
Cependant le mode alternatif de règlement des différends ne prive pas les juridictions
étatiques de leur importance. Ces dernières préservent toujours le pouvoir étatique de trancher
les litiges, d’une part lorsque les contractants n’ont pas conclu un accord en vue de régler leur
litige par d’autres modes, et d’autre part la clause compromissoire est manifestement nulle ou
inapplicable puisqu’alors le juge étatique est compétent.

427. Nous étudierons tout d’abord la compétence de chaque type de juridiction pour
trancher le litige (Titre I). Ensuite nous nous pencherons sur la question très importante ou la
finalité du procès que l’on a déjà étudié précédemment, à savoir des méthodes de réception
des décisions étrangères qui peuvent être différentes selon chaque État. On constatera l’utilité
de l’uniformité de règles portant sur la reconnaissance et l’exécution, aussi bien des
jugements que des sentences arbitrales (Titre II).

319
320
Titre Premier

JURIDICTIONS COMPETENTES.

Introduction

428. L’étude de la première partie nous a montré qu’il était possible de procéder au choix
de la loi applicable au contrat. Pour cela, les parties doivent tenir compte de plusieurs
facteurs. A ce stade, nous verrons qu’il y a d’autres problèmes après la naissance des conflits
qui résultent de leur rapport contractuel. Dans ce cas, quelle juridiction sera compétente pour
trancher le litige ? Le problème sur la détermination de tribunal compétent semble très
important, tant par la clause contractuelle que par la disposition de droit en général. En
France, le droit commun comme le droit européen admettent expressément la clause
d’élection de for pour le litige à caractère international, alors qu’en Thaïlande il n’y a aucune
loi qui va dans ce sens, mais on ne peut pas conclure que le juge thaï ne reconnaît pas le choix
du tribunal notamment en matière de contrats internationaux. Une fois que le jugement a été
rendu par le tribunal du for, la partie concurrente aimerait sans doute savoir comment l’autre
État va reconnaître et exécuter cette décision et comment elle pourra obtenir gain de cause.
Alors afin de répondre à ces questions, nous ferons référence au système français qui
mérite d’être traité, en deux parties : le droit commun et le droit communautaire.

429. En Thaïlande, le problème de détermination des juridictions compétentes semble plus


simple à première vue en raison de l’application unique des règles de droit international
commun. Mais ce serait trop vite de conclure qu’il ne pose pas de problème. D’une part, en
l’absence d’un instrument international applicable, le juge thaï applique les dispositions
purement internes au litige international dans plusieurs cas. Cette ambiguïté apparaît
clairement dans le cas d’une clause d’élection de for, qui donne lieu aux problèmes plus
compliqués par exemple en matière de protection de parties faibles. En l’absence de règles
précises, les dernières de peuvent bénéficier concrètement d’une telle protection. D’autre part,
la jurisprudence en la matière n’est pas constante. L’actualité montre qu’il est toujours
douteux si les parties peuvent conclure la clause d’élection de for, quelles seront des limites ?
Interdit aux contractants de passer une telle clause en vue de protéger la partie faible n’est pas
conforme à la conduite des affaires internationales, pourtant, laisser ceux-ci contracter sans

321
aucune protection risque de mener au contrat injuste. Dès lors, il faut que le législateur fixe
dans la loi les conditions nécessaires afin de protéger les parties faibles. Ceci est un problème
actuel en Thaïlande.

430. Hormis le règlement des différends par voie ‘traditionnelle’ qui nous amène aux
problèmes de détermination de la compétence juridictionnelle des tribunaux étatiques, on sait
que les contractants peuvent aussi vouloir régler le conflit résultant de leur contrat commercial
international par l’arbitrage international. Il semble que le problème posé au stade de la
détermination de compétence du tribunal arbitral est moins compliqué que celui de juridiction
étatique. Car, la compétence de tribunal arbitral relève de clause contractuelle ou accord des
parties au litige. Avant d’intervenir sur les règles de compétence de juridiction arbitrale
(Chapitre II), nous étudions tout d’abord la détermination de juridiction étatique compétente
(Chapitre I).

322
Chapitre Premier

LE MODE ETATIQUE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS.

431. Tout d’abord il ne faut pas confondre la question de la recherche de droit applicable au
litige avec celle de la juridiction compétente, puisque ces deux questions ne sont pas
entièrement soumises aux mêmes critères. La détermination de loi applicable se fonde, en
principe, sur le critère de lien le plus étroit avec le contrat. Pour la recherche du tribunal
compétent, bien qu’un lien entre le for et le litige soit requiert, le tribunal compétent n’est pas
forcément celui qui présente le rapport le plus significatif avec le litige. Plusieurs juridictions
compétentes peuvent être en concurrence dans la même instance. Certes, la coïncidence de
deux compétences peut arriver dans certaine circonstance. Ce fait nous explique pourquoi on
peut trouver les rattachements utilisés pour déterminer la loi compétente tels que le domicile,
la situation d’immeuble, qui sont aussi les critères pour fixer la compétence juridictionnelle de
tribunaux.

432. Lorsque le différend est né ou même avant qu’il soit produit, plusieurs opportunités
sont offertes aux parties pour choisir le mode de règlement de leur différend. Si elles
souhaitent de régler le litige par le mode traditionnel ; le recours au tribunal étatique
compétent, la connaissance de mécanismes de détermination de compétence juridictionnelle
est indispensable, il faut tout d’abord rechercher le tribunal compétent pour connaître un tel
litige (Section I). Nous interviendrons par la suite sur une autre opportunité admise aux
parties d’attribuer la compétence en insérant une clause de prorogation de juridiction dans leur
contrat ou même de prorogation volontaire après que le litige est né (Section II).

Section I
Les mécanismes coercitifs de détermination de la juridiction compétente.

433. Lorsqu’est né le litige ou même lors de la conclusion du contrat, les parties


contractantes devraient avoir la possibilité de savoir quelle(s) juridiction(s) pourra connaître
leur différend. Puisque cette connaissance affecterait la négociation de leur contrat ; par
exemple la fixation du lieu d’exécution de l’obligation litigieuse. Une bonne connaissance de
ceci aidera les parties d’avoir la meilleure décision pendant la négociation qui pourrait

323
économiser leurs futures dépenses. Notamment si les contractants n’ont pas conclu une clause
attributive de juridiction pour la raison quelconque ou si ladite clause n’est pas valable, la
prévisibilité du tribunal compétent semble nécessaire. La prévisibilité dans le sens que les
parties peuvent connaître en avance le tribunal selon la règle de compétence générale ou
spéciale. Chaque ordre juridique peut fixer les règles de compétence judiciaire de manière
différente même pour la même matière, plus précisément, elles se fondent sur une base
différente tels que la nationalité ; le domicile du demandeur (forum actoris) ; le domicile du
défendeur (actor sequitur forum rei) ; le lieu d’exécution de l’obligation litigieuse. Les études
de ces différences nous permettent de connaître les problèmes actuels, les difficultés résultent
de la fixation de tel ou tel critère de compétence juridictionnelle, ainsi que la tendance
jurisprudentielle qui peut nous conduire à trouver la meilleure solution. Nous intervenons
d’abord sur la compétence internationale du juge français en matière contractuelle (§ 1) et
ensuite celle du juge thaïlandais (§ 2).

§1 : La compétence internationale du juge français en matière du contrat.

434. Certes, l’étude de droit international privé français positif ne peut éviter une étude de
droit communautaire. Afin de répondre à la question sur les critères de compétence
juridictionnelle du tribunal français en matière contractuelle et leur développement, il nous
convient d’intervenir non seulement sur ceux de droit français commun (A), mais également
sur les critères employés en droit international privé européen (B).

A. Solution en droit international privé commun.

435. La détermination de compétence judiciaire du juge français sur le litige international


en matière contractuelle est fondée sur des règles de compétence territoriale interne qui sont le
principe d’une part, et on envisagera les critères de compétence relevant de règles applicables
à titre subsidiaire d’autre part.

1) La transposition des règles de compétence territoriale interne.


436. Compétence internationale ordinaire du juge français. Pour que les juges français
soient compétents sur le litige portant au contrat international, il est possible que cette
compétence résulte soit d’un simple saisi du demandeur, soit d’une clause attributive de
juridiction, soit de l’application de théorie forum non conveniens par le juge étranger. Nous
324
réservons les deux dernières hypothèses dans une étude consacrée pour tels sujets. Le droit
français ne dispose pas des règles de compétence internationale ordinaire en matière civile et
commerciale ; c'est-à-dire qu’il faut déterminer la compétence sur le litige à caractère
international en recourant aux règles de compétence territoriale applicable en droit interne.
Ainsi, la compétence internationale du juge français établie lorsqu’il apparaît l’élément de
rattachement comme le domicile en France du défendeur, par exemple.
La Cour de cassation a affirmé dans sa décision de 1985 ainsi : « en droit français, la
compétence internationale est régie par les règles internes de compétence territoriale quelles
783
que soient la loi applicable au fond et la nationalité des parties » . Alors, les règles
internes de compétence territoriale que les juges français appliqueront signifient les articles 42
à 46 du CPC. Cependant, afin de se conformer au caractère d’extranéité du litige, les juges
doivent nécessairement les appliquer avec certaines adaptations.

437. Consécration du principe actor sequitur forum rei. Il résulte de l’extension


d’application de l’article 42 du CPC à l’ordre juridique international, c'est-à-dire
la compétence du tribunal français relève du domicile en France du défendeur. Il semble que
ce principe s’est retenu dans la plupart des ordres juridiques. Le terme employé par le texte est
« le lieu où demeure le défendeur », alors la notion de ce lieu doit être déterminée selon qu’il
s’agit de personne physique ou personne morale. En ce qui concerne le premier cas, le texte
s’applique le lieu où se trouve son domicile ou à défaut, sa résidence sur le territoire français.
Pour le second, c’est le lieu où une personne morale est établie (art. 43 du CPC). On constate
que le texte laisse toujours la place à définir le terme « domicile », c’est la conception donnée
par la lex fori qui devra être entendue. Il est tout à fait logique de déterminer la notion du
domicile, critère de compétence judiciaire du juge français, en recourant au droit français du
784
for .
Concernant la personne morale, les articles 42 et 43 du CPC fondent la compétence
judiciaire des juges français au siège social réel en France d’une société au terme du quel « le
lieu où la personne morale est établie ». Cependant le litige en cause devra avoir un rapport
avec cette personne morale pour que cet article s’applique.

783
Cass. 1er civ., 13 janvier 1981, JDI.1981.360, note A. Huet ; RCDIP.1981.331, note H. Gaudemet-Tallon ;
Cass. soc., 20 octobre 1985, RCDIP.1985.99, note H. Gaudemet-Tallon.
784
H. Gaudemet-Tallon, « Compétence internationale », Rép. D. proc.civ., n° 23.

325
438. Compétence judiciaire en matière contractuelle. L’actualité juridique affirme que
des règles de compétence juridictionnelle dans le cadre de la convention internationale jouent
le rôle de plus en plus en matière contractuelle, tels sont le cas du règlement Bruxelles I et
la Convention de Lugano. Cependant on peut également envisager le cas en dehors de
ce régime. L’application de l’article 42 du CPC sera complétée par une règle spéciale déposée
dans l’article 46 du même code, ce dernier offre au demandeur une alternative. C’est à dire
que le demandeur a un choix d’introduire le litige devant la juridiction du domicile du
défendeur selon l’article 42, autre que cette possibilité, il pourra également saisir les tribunaux
des lieux fixés par l’article 46 lesquels on verra par la suite.
Il semble que le problème à régler préalablement réside dans la notion de matière
contractuelle. Certes, comme d’autres cas que le terme « contrat » a impliqué, il faut
déterminer d’abord cette notion. D’après la jurisprudence de la Cour de cassation, l’article 46
785
n’appliquera pas au quasi-contrat . Ce serait un jeu de l’article 46 du CPC qui dispose le
critère de compétence judiciaire des tribunaux français dans la matière. Le texte reconnaît
deux lieux : soit le lieu de livraison effective de la chose, soit le lieu d’exécution de la
prestation de services selon le cas. En ce qui concerne le lieu de livraison, on peut se
demander si les Incoterms peuvent être employés en vue de déterminer ce lieu. A notre avis,
ceci est possible dans l’ordre international en adoptant la position de la CJUE qui a décidé
expressément dans son arrêt rendu en 2011 que le juge peut employer les Incoterms afin de
786
déterminer le lieu de livraison de marchandise . Certaines limites du champ d’application
de l’article 46 apparaissent dans la mesure où ce texte est inapplicable au contrat d’une autre
nature. Certes, le nombre de litiges seront uniquement sous l’empire de l’article 42 ; tribunal
787
du domicile de défendeur .
Une autre question peut se poser également à propos de contrats conclus par les
consommateurs. Il reste à savoir si les litiges portant sur ces contrats seront entrés sous
l’empire du texte commun. Il semble que tels contrats relèvent très rarement du droit interne
français, en raison du champ d’application des textes européens qui s’appliquent dès lors que

785
Cass. 2e civ., 7 juin 2006, n° 04.20316, D.2006.1841 ; RTD.civ.2007.174, obs. Ph. Théry.
786
CJUE, 9 juin 2011, aff. C-87/10, Electrosteel Europe SA, préc., supra note n° 319.
787
S. Clavel, Droit international privé, Cours et Travaux dirigés, Paris : Dalloz, 2e éd., 2010, n° 985.

326
le consommateur est domicilié en France ou dans un autre État membre de l’Union
788
européen (v. Règlement Bruxelles I, art. 15 et s).

2) Règles applicables à titre subsidiaire.


439. Règle de compétence fondée sur la nationalité. Force est de constater que les
critères de compétence de détermination du tribunal compétent sont différents de ceux de la
loi applicable. Il n’y a qu’une seule loi qui sera applicable à une question selon le critère
utilisé par la règle de conflit (sous réserve des cas de pluralité de lieux d’exécution du contrat)
; la loi qui présente les liens plus significatifs avec ladite situation. Alors qu’il est possible
d’envisager le cas où la règle de compétence désigne plusieurs tribunaux compétents au même
litige. La coïncidence des critères législative et juridictionnelle sera possible pour certain
parmi eux ; la nationalité est un bel exemple en droit positif français. Les articles 14 et 15 du
Code civil affirment bien ce constat, la nationalité peut être utilisée non seulement comme le
critère de compétence législative dans le statut personnel mais également le critère de
compétence juridictionnelle, il retient sur la nationalité du défendeur ou celle du demandeur.
La question peut se poser si le critère utilisé par l’article 15 du Code civil n’a-t-il pas privé, au
cas du défendeur, celui-ci de la possibilité de se défendre à son domicile ? N’a-t-il pas
respecté le fondement privatiste de la règle actor sequitur forum rei qui est la conception
dominante ? Pour répondre à ces questions, il faut constater d’abord que l’article 15 attribue
789
la compétence fondée sur la nationalité française du défendeur uniquement en stipulant
ainsi :
« Un Français pourra être traduit devant un tribunal de France pour des obligations
par lui contractées en pays étranger même avec un étranger ».

Il suffit, pour que l’article 15 soit applicable, que l’une des parties au litige soit de
nationalité française. Pourtant, le critère du lieu de l’établissement effectif du défendeur n’est
pas totalement écarté, en revanche il est admis par la jurisprudence. Normalement le Français
assigné devant le tribunal français a aussi le domicile en France. Pour ces raisons l’invocation
de l’article 15 et le domicile en France du défendeur peuvent coïncider très souvent en
pratique.

788
H. Gaudemet-Tallon, « Compétence internationale », op.cit., n° 29.
789
Il en résulte de la théorie publiciste du « juge naturel », cet article conserve toujours le caractère d’un
privilège réservé au Français d’être jugé exclusivement devant le juge français. V. en ce sens P. Mayer, Droit
international privé, 10e éd., Paris : Montchrestien, 2010, n° 281.

327
440. Un autre privilège fondé sur le critère de nationalité se trouve dans l’article 14 du
790
Code civil , le Français demandeur, cet article permet au Français de porter plainte devant
la juridiction française contre l’étranger qui réside à l’étranger. En pratique, cette décision
française qui résulte de ce fondement sera difficile d’être exécutée dans ce pays étranger. Cet
article a été interprété de façon extensive par la Cour de cassation en adoptant le principe et
les exceptions dans sa décision, elle décida que l’article 14 « a une portée générale s’étendant
à toutes matières, à l’exclusion des actions réelles immobilières et des demandes en partage
portant sur des immeubles situés à l’étranger, ainsi que des demandes relatives à des voies
791
d’exécution pratiquées hors de France » .
Pour la critique selon laquelle la France ne doit la justice qu’aux Français, sur ce
point, le souci a été remédié en recourant à l’admission aux étrangers résidant sur le territoire
français le droit d’accès à la justice. Comme l’écrit M. P. Mayer que « la tâche du juge n’est
pas seulement de rendre service aux individus en sanctionnant leurs droits, mais également de
792
protéger la paix publique en mettant fin aux litiges » . Alors, il n’a pas tort de dire que c’est
le lieu du litige qui importe, non la nationalité des parties. La Cour de cassation affirma dans
son arrêt rendu en 1948 que les demandes formulées par des étrangers contre des étrangers
793
sont recevables . Autres que l’issue de la paix publique précitée et le risque de déni de
justice, l’action de la France à rendre la justice aux étrangers domiciliés sur son territoire
pourrait apporter le même résultat de la part de ce pays étranger en question, car la France
peut envisager les mesures de rétorsion contre cet État en appliquant la même politique aux
citoyens français résidant dans son pays.

441. La compétence fondée sur les articles 14 et 15 du Code civil est facultative pour
les parties ; le recours de l’une d’elles à ces articles n’est qu’un privilège offert par le
législateur. Alors les parties peuvent y renoncer. En revanche, c’est l’office du juge français

790
L’article 14 stipule : « L’étranger, même non résidant en France, pourra être cité devant les tribunaux
français pour l’exécution des obligations par lui contractées en France avec un Français ; il pourra être traduit
devant les tribunaux de France pour les obligations par lui contractées en pays étranger envers des Français ».
791
Cass. 1er civ., 27 mai 1970, Weiss, RCDIP.1971.113, note Batiffol, GA n° 49.
792
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 282.
793
Cass. 1er civ., 21 juin 1948, Patino, RCDIP.1949.557, note Francescakis ; S., 1949.1.121, note Niboyet. V.
en même sens Cass. 1er civ., 30 octobre 1962, Scheffel, RCDIP.1963.387, note Francescakis ; D. 1963.109, note
D. Holleaux ; GA n° 37 : la Cour a décidé que « l’extranéité des parties n’est pas une cause d’incompétence des
juridictions françaises ». Cf. P. Mayer, op.cit., n° 295. De surcroît, la notion de bonne administration de la
justice pourrait aussi être appelée pour que les parties puissent saisir les tribunaux français, comme l’affirme cet
auteur que « l’un des tribunaux parisiens peut être saisi en raison de leur situation géographique centrale ».

328
de reconnaitre sa compétence et de trancher le litige étant traduit devant lui au visa desdites
794
dispositions . Quant à la renonciation de ce privilège, la clause attributive de juridiction au
tribunal étranger ou la clause d’arbitrage écarteraient toute compétence des tribunaux français.
Dans le cas où les parties renoncent l’application des articles 14 ou 15 en accordant de les
exclure, il faut constater que seule la compétence fondée sur la nationalité des parties sera
écartée.
Quant à l’exclusivité de la compétence du tribunal français attribuée aux articles 14 et
15, la jurisprudence a admis pendant longtemps l’effet exclusif de toute autre compétence des
tribunaux étrangers. Normalement le Français défendeur pouvait évoquer cette exclusivité
devant le juge français au stade de la demande d’exécution pour avancer que le jugement
étranger rendu contre lui ait violé ces dispositions, par conséquent il ne peut pas être reconnu
en France. Mais depuis l’arrêt de la Cour de cassation rendu en 2006, elle met fin à cette
jurisprudence en décidant en revanche : « L’article 15 du Code civil ne consacre qu’une
compétence facultative de la juridiction française, impropre à exclure la compétence
795
indirecte d’un tribunal étranger (…) » . La compétence dérivant des articles 14 et 15
n’étant plus exclusive, et ne pouvant plus faire échec à la reconnaissance des jugements
étrangers, elle n’a plus d’intérêt que pour le demandeur. On verra sur ce point dans le chapitre
consacré aux effets des décisions étrangères.
Cependant le rôle de la nationalité est considéré comme subsidiaire en matière de
compétence juridictionnelle. Il semble que le domicile du défendeur joue un rôle plus
considérable de nos jours. Le critère de compétence juridictionnelle fondé sur la nationalité
est tempéré notamment au niveau de droit supranational.

442. Des règles de compétence internationale du juge français se fond également dans une
disposition de l’article 42 al. 3 au terme duquel
« Si le défendeur n’a ni domicile ni résidence connus, le demandeur peut saisir la
juridiction du lieu où il demeure ou celle de son choix s’il demeure à l’étranger ».

Le forum actoris jouera dans ce cas, certes, cet alinéa ne devrait pas être entendu
comme accorder au demandeur d’introduire le litige devant le tribunal de son domicile s’il
paraît que le défendeur a le domicile à l’étranger. Par ailleurs, les auteurs ont affirmé qu’il est

794
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 296.
795
Cass. 1er civ., 23 mai 2006, Prieur, RCDIP.2006.870, note H. Gaudemet-Tallon ; D. 2006.1880 et chron.
B. Audit, p. 1846 ; JDI.2006.1377, obs. Chalas ; Petites Affiches, 22 septembre 2006, p. 10, note P. Courbe ;
Gaz. Pal. 28 avril 2007, p. 21, obs. M.-L. Niboyet ; GA n° 87.

329
abusif d’étendre la compétence des juges français dans tous les cas où le défendeur n’a ni
domicile, ni résidence connus en France afin de conférer au demandeur le pouvoir d’assigner
devant le tribunal de son domicile même si le litige ne présenterait aucun rapport avec la
796
France . La doctrine affirma un jeu à titre subsidiaire de cet alinéa, c'est-à-dire qu’on
l’applique uniquement dans le cas où les juges français sont compétents en vertu des articles
797
14 ou 15 du Code civil .

B. Recours aux règles conventionnelles : le Règlement CE n° 44/2001.

443. Le texte communautaire change certain principe retenu pendant longtemps dans le
Code civil français. Il en résulte de la Convention concernant la compétence judiciaire et
l’exécution des décisions en matières civile et commerciale du 16 septembre 1988 (ci-après la
798
Convention de Lugano) et la Convention de Bruxelles de 1968, ces deux instruments
utilisent le critère de domicile au lieu de nationalité. Comme l’on a déjà étudié précédemment
les articles 14 et 15 du Code civil français, ces dispositions retiennent la nationalité française
comme le critère indispensable de jouissance les droits d’introduire le litige devant le tribunal
français. Nous allons étudier ici le système développé dans le règlement Bruxelles I, en
particulier les dispositions qui nous intéressent dans cette partie portent sur ceux qui ont
799 800
homologué celle de la Convention . En effet, après l’adhésion du Danemark en 2007 , la
801
Convention de Bruxelles de 1968 a été entièrement substituée par le règlement n° 44/2001 .

796
H. Gaudemet-Tallon, « Compétence internationale », Rép. D. proc.civ., n° 24.
797
V. H. Muir Watt, « Le domicile dans les rapports internationaux », J.-Cl. int., Fasc. 581-20, n° 19.
798
C’est un système parallèle à la Convention de Bruxelles de 1988, la Convention de Lugano régie le rapport
dans cette matière entre les anciens États membres de l’UE, la Pologne et les États membres de l’AELE : Suisse,
Norvège, Island, à l’exclusion de Lichtenstein. Mais la Convention de Lugano révisée en 2007 est entrée en
vigueur en Norvège et Danemark en 2010 et en Suisse en 2011. Ce qui est intéressant est que le texte révisé de
2007 permettrait aux États tiers d’adhérer à la Convention de Lugano.
799
La substitution du règlement n° 44/2001 à la Convention de Bruxelles n’a pas produit l’effet sur les
décisions antérieurement rendues par la CJCE sur l’interprétation des dispositions de la convention. Pour cette
raison les arrêts de la CJCE seront cités et doivent être compris dans le même sens pour le règlement.
800
Cependant le Danemark n’est pas lié automatiquement aux modifications du règlement Bruxelles I, en
revanche il doit les accepter selon la procédure visée dans un accord parallèle.
801
Bien qu’il y ait certains territoires où la Convention de Bruxelles continue d’appliquer, il nous convient de
les exclure de notre étude. C’est le cas de territoires visés à l’article 299 § 3 TCE ; Polynésie française,
Nouvelle-Calédonie, Wallis et Futuna, terres australes et antarctiques, Saint-Pierre et Miquelon et de Mayotte,
ainsi que d’Aruba, qui relève au régime spécial donc le règlement ne s’applique pas. V. H. Gaudemet-Tallon,
Compétence et exécution des jugements en Europe, Règlement n° 44/2001 Conventions de Bruxelles et de

330
1) La solution du droit positif : le fondement de compétence juridictionnelle sur le
domicile.
444. Après l’entrée en vigueur de ces textes communautaires, ils s’intègrent en droit
802
français, par conséquent le nouveau critère fondé sur le « domicile » remplace
éventuellement celui de nationalité dans l’article 14. C’est l’article 2, 1er al. qui attribue une
compétence générale aux tribunaux de l’État du domicile du défendeur. Donc le principe de
non-application des textes communautaires lorsque le défendeur domicilié hors du territoire
d’un État communautaire doit être respecté (art. 4 § 1) ; à titre d’exemple, le défendeur thaï
domicilié en Thaïlande ne peut être assigné devant la juridiction française par un Français en
vertu du Règlement Bruxelles I. Car, l’article 4 § 1 renvoie aux règles de compétence
judiciaire internationale du droit commun de chaque État, dans cette hypothèse c’est l’article
14 du Code civil français qui est en jeu pour affirmer la compétence des juges français sur ce
litige. Cependant il y a la possibilité que le défendeur domicilié hors de l’Union européenne
peut être assigné devant les juridictions des États membres en appliquant le texte
communautaire, c’est le cas de comparution volontaire selon l’article 24 du Règlement. Là
aussi, c’est la nécessité du défendeur étranger d’avoir une bonne connaissance de règles de
803
compétence communautaires. L’article 4 § 1 est affirmé par l’article 4 § 2 du règlement .
On peut dire que le critère de nationalité ne peut produire l’intérêt que pour le Français
domicilié hors de l’UE de porter plainte devant le tribunal en France. Ce qui nous intéresse est
de savoir si une personne n’a pas le domicile dans un État communautaire peut y introduire le
804
litige ? La réponse est positive grâce à l’option admise par le texte communautaire , certes,
il nécessite d’avoir au moins un lien avec ledit tribunal pour fonder sa compétence. Alors il se
pose ici la condition de domicile du défendeur sur le territoire de l’UE.

Lugano, 4e éd., Paris : LGDJ, 2010, n° 61 et s. Cet auteur fait quelques propositions remarquables qui
soutiennent le constat selon lequel la Convention de Bruxelles s’applique toujours.
802
En l’absence de définition autonome de droit communautaire sur le terme « domicile » de personne
physique, alors le juge saisi d’un État membre le détermine selon sa loi pour savoir si cette personne a le
domicile dans son État (art. 59-1°). Mais lorsque ladite personne n’est pas domiciliée dans le même État que le
tribunal saisi, pour savoir si elle a son domicile dans un autre État membre, le juge devra appliquer la loi de cet
État membre (art. 59-2°). Pour la notion du domicile de personne physique et personne morale, nous étudierons
par la suite.
803
L’article 4 § 2 : « Toute personne, quelle que soit sa nationalité, domiciliée sur le territoire d’un État
membre, peut, comme les nationaux, y invoquer contre ce défendeur les règles de compétence qui y sont en
vigueur et notamment celles prévues à l’annexe I ».
804
CJCE, 13 juillet 2000, aff. C-412/98, Group Josi Reinsurance Company SA, D. 2000.IR.236 ; JDI.2002.623,
obs. Leclerc.

331
445. Il en va de même pour le cas du demandeur, peu importe sa nationalité, domicilié sur
le territoire d’un État communautaire. Il peut invoquer contre le défendeur les règles
805
exorbitantes du pays où il a son domicile , même si le défendeur domicilié dans un État
806
tiers . Là aussi, on peut constater sur ce qui rend compétent au tribunal ; c’est le domicile
du demandeur. Alors que pour le défendeur, son domicile hors du territoire des États membres
l’écarte du bénéfice offert par les textes communautaires. La question peut se poser si on
revient à la règle forum actoris qui est contraire au principe du droit communautaire, on
affirme que cette règle n’est qu’une exception du principe actor sequitur forum rei.
Par ailleurs, il faut rappeler que les décisions rendues par le tribunal d’un État membre
qui se fonde sur les règles exorbitantes contre le défendeur domicilié hors du territoire
communautaire pourraient produire leurs effets et permettre la libre circulation sur tout le
territoire de l’Union européenne. Les règles de compétence judiciaires en droit
communautaire mettent l’accent sur « le domicile » dans le territoire de la Communauté de
l’un des litigants.

2) Les difficultés d’application de la règle de compétence juridictionnelle visées par


l’article 5-1°.
446. Le principe général de l’article 5 se fonde sur la proximité territoriale, autrement dit,
« l’existence d’un lien de rattachement étroit entre la contestation et le tribunal qui est appelé
807
à connaître » . Certes, le souci d’avoir donné lieu au forum shopping en vertu de l’article 5
ainsi de la Convention de Bruxelles que du règlement Bruxelles I a été mis fin après l’entrée
en vigueur de la Convention de Rome de 1980 et du règlement Rome I. Parce que la
détermination de la loi applicable sera soumise à la même règle de conflit, si l’on voit
uniquement la raison de choix du for afin de bénéficier de la loi plus favorable et non pas de
la procédure qui se déroulera devant chaque tribunal étatique.

447. L’application de l’article 5-1° requiert de prime abord, la « matière contractuelle »,


c’est une notion qui donne beaucoup de problème de qualification. En effet la CJCE n’a pas

805
Ces règles sont prévues dans le règlement Bruxelles I, pour la France, il s’agit des articles 14 et 15 du Code
civil.
806
Cf. P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 336. Cet auteur affirme que l’article 14 du Code civil peut
être invoqué non seulement par un Français, mais également par les personnes domiciliées en France sans tenir
compte de leur nationalité.
807
Cf. Rapport Jenard, p. 22.

332
donné une définition définitive mais généralement négative, c’est à dire « la matière
contractuelle ne saurait être comprise comme visant une situation dans laquelle il n’existe
808
aucun engagement librement assumé d’une partie envers une autre » . Jusqu’à nos jours la
Cour ne donne toujours pas de telle définition mais retient un élément susceptible d’être
utilisé dans d’autres cas. Par ailleurs, de même que d’autres matières du droit européen, la
809
CJCE a estimé que cette notion doit être interprétée de façon « autonome » , c'est-à-dire
doit être exclue le renvoi au droit interne de l’un ou l’autre des États membres. En l’absence
de définition exacte, chaque État peut la définir différemment, là aussi c’est un obstacle de
l’uniformité d’interprétation de texte communautaire. Citons par exemple le problème
classique, la culpa in contrahendo, le risque d’interprétation différente présente très clair
selon le tribunal étatique de chaque pays. Elle est considérée en matière délictuelle en France
mais contractuelle en Allemagne. Est-ce qu’elle est soumise à l’article 5-1° ? La CJCE a enfin
décidé dans son arrêt de 2002 que « l’action n’était pas en matière contractuelle, dans des
circonstances telles que celles de l’affaire au principal, caractérisée par l’absence
d’engagement librement assumés par une partie envers une autre à l’occasion des
810
négociations visant à la formation du contrat (…) » . C’est donc un jeu de l’article 5-3°.
Pourtant une contestation concernant l’existence du contrat est qualifiée en matière
811
contractuelle .
Afin de faciliter notre étude, nous proposons d’étudier d’abord les règles fondées sur
le point b), compétence spéciale ; et lorsque le contrat n’entre pas dans le champ d’application
de l’article 5-1° b), on reviendra ensuite à la compétence générale de l’article 5-1° a).

a. Les règles spécifiques fondées sur l’article 5-1° b).


448. Les rédacteurs du règlement Bruxelles I traitent le contrat de vente de marchandises et
celui de fourniture de services de façon plus spécifique en raison de leur fréquence, en

808
CJCE, 17 juin 1992, aff. C-26/91, Jakob Handte, RCDIP.1992.730, H. Gaudemet-Tallon.
809
CJCE, 22 mars 1983, aff. C-34/82, Martin Peters : la Cour a estimé que « les obligations ayant pour objets
le versement d’une somme d’argent et trouvant leur fondement dans le lien d’affiliation existant entre une
association et ses adhérents car l’adhésion à une association crée entre les associés des liens étroits de même
type que ceux qui s’établissent entre les parties à un contrat ». ; v. aussi CJCE, 8 mars 1988, Arcado,
RCDIP.1988.610, note H. Gaudemet-Tallon ; JDI.1989.453, obs. A. Huet ; Cf. B. Audit, « L’interprétation
autonome du droit international privé communautaire », JDI.2004.789.
810
CJCE, 17 septembre 2002, aff. C-334/00, Fonderie Officine Mecaniche Tacconi SpA, RCDIP.2003.668,
note P. Rémy-Corlay ; JDI.2003.668, obs. A. Huet ; D. 2002.2774 ; JCP (G) 2003.I.166, n°5.
811
CJCE, 4 mars 1982, aff. C-38/81, Effer, RCDIP.1982.570, note H. Gaudemet-Tallon ; JDI.1982.473, obs.
A. Huet.

333
adoptant les règles de compétence différentes dissociées de l’article 5-1°, a). En effet les
rédacteurs ont voulu éviter ces deux contrats des complications retenues sous l’empire de
l’arrêt Tessili (infra note n° 824). Hormis le tribunal du domicile du défendeur (art. 2), le
texte a accordé la possibilité d’attraire devant le tribunal du lieu où les marchandises ont été
ou auraient dû être livrées ; ou le tribunal du lieu où les services ont été ou auraient dû être
fournis. Le lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande a été déjà déterminé
spécifiquement pour ces deux contrats, alors à notre avis le terme de « l’obligation qui sert de
812
base à la demande » précisé sur le point b) de l’article 5-1° n’affecte pas son
813
application comme le souci de certain auteur. Précisément, il n’est plus nécessaire de faire
référence au caractère autonome de l’obligation qui sert de base à la demande afin de localiser
le lieu de l’exécution de la fourniture de services selon le règlement Bruxelles I.
Cependant il semble que la Cour d’appel n’a pas entendu comme telle, dans l’arrêt du
3 octobre 2006, la Cour d’appel a toujours retenu la qualification d’obligation autonome pour
se déclarer incompétente sur le paiement d’une indemnité de clientèle et de dommages-
intérêts pour rupture abusive de contrat, en décidant que cette obligation devait être exécutée
au domicile du débiteur au Portugal. La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel
en estimant que « alors que les parties étaient liées par un contrat de fourniture de services et
que les prestations de services devaient être exécutées en France, la Cour d’appel a violé
814
l’article 5-1° du règlement 44/2001 » . Pourtant on ne peut toujours pas éviter la
localisation de lieu d’exécution en cas de plusieurs lieux de livraison, nous le verrons par la
suite.

449. La qualification de contrats qui seront soumis à l’article 5-1° b) envisage aussi
certaines difficultés, notamment pour le contrat de vente à caractère spécial tels que le contrat
de distribution ; le contrat de franchise ; le contrat de concession. Certes, ces contrats sont,
entre le distributeur et les revendeurs, entrés dans le régime de contrat de vente de
marchandises au sens de l’article 5-1° b).

812
C’est la prestation caractéristique.
813
Cf. H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 187. Cet auteur a l’avis que
mêmes les obligations autonomes devraient aussi relever du for désigné par ce texte.
814
Cass. 1er civ., 3 octobre 2006, D. 2006.IR.2548 ; RDC.2007.474, obs. P. Deumier ; JCP (G).2007.II.132,
note V. Egéa et D. Martel ; RTD Com. 2007.267, note Ph. Delebecque.

334
La difficulté paraît dans la qualification d’un contrat-cadre destiné à organiser le
réseau, ceci ne peut pas être entendu comme un contrat de vente isolé car il comprend aussi le
caractère de fourniture de services. Prenons un exemple de la franchise définie comme « un
contrat de distribution selon lequel le franchiseur accorde à un ou plusieurs commerçants
indépendants (les franchisés), d’associer une entreprise, propriétaire d’une marque ou d’un
enseigne ». D’ailleurs, le franchiseur devrait mettre à la disposition du franchisé sa marque,
ses produits et/ou son enseigne, son savoir-faire et une assistance technique. De même que le
contrat de concession exclusive portant parfois sur la distribution des produits de luxe dont
explique bien son caractère spécial. L’arrêt de la Cour de cassation s’est prononcé sur un tel
815 816
contrat en 2007 et réaffirmé en 2008 , en décidant qu’il n’était ni une vente, ni une
prestation de services. Dès lors, le contrat de concession exclusive doit être régi par le point a)
de l’article 5-1° et non le point b). Cependant, il faut observer que le contrat de franchise et le
contrat de distribution sont bien distingués du contrat de prestation de services d’après le
règlement Rome I.
On peut se demander si l’article 5-1° b) sur les fournitures de services pourrait être
applicable au contrat de franchise ou de distribution ? On ne voit pas la raison d’y refuser, en
particulier lorsque l’on tient compte du règlement Rome I dans son considérant 17 qui précise
que « les contrats de franchise ou de distribution, bien qu’ils soient des contrats de services,
font l’objet de règles particulières ». Les rédacteurs ont considéré lesdits contrats comme un
contrat fourniture de services mais qu’en matière de la compétence législative ces deux
817
contrats méritent d’être soumis aux règles de conflit de lois particulières . Alors on peut
conclure que le contrat de franchise et de distribution sont fondamentalement des contrats de
fourniture de services. En effet il reste encore plusieurs contrats qui sont difficiles à qualifier
mais nous ne pouvons pas les introduire ici. En ce qui concerne l’interprétation des points a)
et b) de l’article 5-1°, nous sommes d’accord avec Mme H. Gaudemet-Tallon sur la
présomption que si l’article 5-1° b) est normalement plus facile à appliquer que la règle de 5-
1° a), le champ d’application matériel du point b) devrait être entendu assez largement

815
Cass. 1er civ., 23 janvier 2007, D. 2007.AJ 511, obs. E. Chevrier ; D. 2007.1575, note H. Kenfack ;
RDC.2007.887, obs. P. Deumier ; RCDIP.2008.661, 1er esp. ; JDI.2008.521, 1er esp., note J.-M. Jacquet.
816
Cass. 1er civ., 5 mars 2008, RCDIP.2008.661, 3e esp. ; JDI.2008.521, 4e esp., note J.-M. Jacquet ; D. 2008.
AJ 858, obs. X. Delpech ; jur. 1729, 2e esp., note H. Kenfack.
817
M.-E. Ancel, « Les contrats de distribution et la nouvelle donne du règlement Rome I », RCDIP.2008.561,
spéc., p. 576-577.

335
818
possible sous la lumière de droit communautaire . Pourtant la décision de la CJCE semble
aller au sens contraire de ceci, en vertu de l’arrêt rendu en avril 2009, elle a estimé que
l’interprétation restrictive sur la notion de fourniture de services de l’article 5-1 b)
compétence spéciale est préférable, car l’élargissement de champ d’application de celui-ci
819
affecterait l’effet utile des point a) et c) de l’article 5-1° du règlement .

450. Les difficultés de détermination le lieu d’exécution du contrat. Le problème qui se


pose ici est dans le même sens que le cas de l’article 5-1° a) ; il y a plusieurs lieux d’exécution
du contrat pour le point b). L’arrêt de la CJCE peut éclairer sur ce point, il s’agit en espèce de
plusieurs lieux de livraison prévus dans le contrat dans un même État, elle affirma que
l’article 5-1° b) jouera son rôle aussi bien dans le cas de pluralité de lieux de livraison qu’en
cas de livraison unique. La Cour a décidé que le tribunal du lieu de la livraison principale est
820
compétent car il présente les liens plus étroits avec le contrat . De surcroît, il était
impossible de dégager un lieu de livraison principal, donc le demandeur a le choix entre les
tribunaux des lieux de livraison. La solution retenue par cet arrêt donne le résultat différent
de celle de l’arrêt Shenavaï pour l’article 5-1° a). Certes, cette solution ne pourra pas
appliquer au cas de livraison multiples dans plusieurs États membres. Dans ce cas là nous
revenons systématiquement au lieu d’exécution principal, mais qu’en est-il lorsque la
détermination de ce lieu est impossible ? Un auteur a proposé de revenir au lieu d’exécution
821
principal, ou à l’article 5-1° a) , et si c’est la dernière solution qui joue, c’est aussi l’arrêt
Shenavaï qui nous attend. Cependant la CJCE a admis dans son arrêt qu’il est possible de
fixer un accord pour désigner le lieu d’exécution de l’obligation litigieuse. Cette désignation
822
du lieu d’exécution fonde la compétence du juge au sens de l’article 5-1 .

b. Les difficultés posées par l’article 5-1° a).

818
H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n°188.
819
CJCE, 23 avril 2009, aff. C-533/07, Falco Privatstiftung, D. 2009. AJ 1489 ; panor. 2390, obs. S. Bollée ;
RDC.2009.1558, note E. Treppoz ; Europe 2009, com. 263, obs. L. Idot.
820
CJCE, 3 mai 2007, aff. C-386/05, Color Drack GmbH, Europe, juillet 2007, n°196, p. 24, note L. Idot.
821
M.-E. Ancel, La prestation caractéristique du contrat, Paris : Economica, 2002, préf. L. Aynès, n° 450.
822
CJCE, 17 janvier 1980, aff. C-56/79, Zelger, RCDIP.1980.387, note E. Mezger ; JDI.1980.435, note A.
Huet.

336
451. Lorsque l’on est en matière du contrat qui ne relève pas à l’article 5-1° b), c’est le
tribunal, du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée, qui
est compétent (art. 5-1° a)). Ce développement donne le résultat plus logique que le recours
au critère de nationalité comme à l’époque, malgré certaines difficultés, on trouve que le
tribunal désigné par l’article 5-1° présente des liens effectifs avec la situation elle-même ; le
contrat.
Il semble que l’article 5-1 a) pose beaucoup de difficultés au cours de l’application,
certes, nous ne pouvons pas citer ici toutes les difficultés envisagées, alors des exemples
importants seront étudiés par la suite.

452. C’est toujours le terme de « l’obligation qui sert de base à la demande » qui pose le
problème à ce stade, de la Convention au Règlement. La CJCE a fondé le moyen de
823 824
déterminer ce terme, qui se trouve en effet l’inconvénient , dans l’arrêt Tessili . Tout
d’abord, le juge devrait rechercher la loi qui régit l’obligation litigieuse en appliquant ses
règles de conflits ; ensuite, il applique la loi résultant de ladite recherche pour déterminer le
lieu d’exécution de cette obligation qui fondera la compétence judiciaire au sens de l’article 5-
1° ; la méthode est logique mais compliquée. Un autre souci repose sur le fait que les
dispositions de la règle de conflit de lois en matière contractuelle peuvent être différentes dans
chaque pays en cause, ce qui pourrait affecter le résultat du droit applicable à la détermination
du lieu d’exécution. On peut envisager aussi le risque d’avoir le conflit de compétence.
Cependant lorsqu’il y a les textes internationaux uniformisés la règle de conflits pour
régler le problème de détermination de la loi applicable à l’obligation litigieuse, c’est ceux-ci
qui doivent être pris en compte, le Règlement Rome I est un bel et bon exemple dans ce cas.

453. En ce qui concerne le droit matériel uniforme, par exemple la CVIM, afin de savoir si
cet instrument international sera applicable au litige ou non, il est indispensable de rechercher
tout d’abord la loi applicable à l’obligation litigieuse, qui contient des dispositions sur le lieu
d’exécution des obligations contractuelles. Là aussi, le recours à l’arrêt Tessili doit être fait

823
Il faut rappeler que l’on peut envisager l’hypothèse d’une obligation litigieuse régit par les lois de police, la
loi substantielle spéciale, et en cas du dépeçage, la loi propre de chaque partie et non la loi du contrat.
824
CJCE, 6 octobre 1976, aff. C-12/76, Tessili, RCDIP.1977.751, note Gothot et Holleaux ; JDI.1977.714, obs.
J.-M. Bischoff et A. Huet ; D. 1977.616, 1er esp., note G. Droz. La Cour a décidé que le lieu où l’obligation a été
ou doit être exécutée au sens de l’article 5-1° « est déterminé conformément à la loi qui régit l’obligation
litigieuse selon les règles de conflits de la juridiction saisie ». V. aussi CJCE, 29 juin 1994, aff. C-288/92,
Custom Made Commercial Ltd RCDIP.1994.698, note H. Gaudemet-Tallon; JDI.1995.461, note A. Huet; RTD.
eur. 1995.87, note H. Tichadou.

337
soigneusement, car les règles de la CVIM ne sont pas destinées pour déterminer la
compétence juridictionnelle. On peut se demander si cette application n’est-elle pas abusive ?
Certes, cet instrument international de droit matériel ne doit pas être utilisé à cette fin, mais en
attendant la jurisprudence de la CJCE sur ce point, c’est probablement la meilleure sortie pour
régler ce problème…

825
454. L’arrêt Tessili continue d’avoir l’influence sur les décisions des juges nationaux
même si le texte du règlement Bruxelles I s’applique, car l’article 5-1° a) adopte la même
solution que celle stipulée dans la Convention.

455. Les problèmes qui nous intéressent à ce stade porte sur le cas de plusieurs obligations
826
nées d’un contrat et qui doivent être exécutées dans plusieurs pays. L’arrêt Shenavaï
a essayé de résoudre le problème de lieux d’exécution multiples, la CJCE estima que même si
les lieux d’exécution de l’obligation contractuelle sont pluriels, seul le tribunal du lieu de
l’exécution de l’obligation principale est compétent sur le litige. La Cour a décidé que la règle
de compétence du juge du lieu d’exécution de l’obligation litigieuse « ne donne pas de
solution dans le cas particulier où le litige porte sur plusieurs obligations qui découlent d’un
même contrat et qui servent de base à l’action intentée par le demandeur ». Alors dans un tel
cas « le juge saisi s’orientera pour déterminer sa compétence, sur le principe selon lequel le
secondaire suit le principal ; en d’autres termes ce sera l’obligation principale, entre
827
plusieurs obligations en cause, qui établira sa compétence » . Certes, pour que cette
solution soit applicable, il faut que les obligations litigieuses en cause soient de même nature.
Mais il semble que le terme de « l’obligation principale » nous amène à un autre problème.

825
V. aussi CJCE, 28 septembre 1999, aff. C-440/97, Groupe Concorde, RCDIP.2000.253, note B. Ancel ;
JDI.2000.547, obs. J.-M. Bischoff ; DMF.2000.66, note P. Bonassies ; DMF.2000.296, note M. Morin ; JCP (G)
2000.II.10354, note C. Bruneau. La CJCE a même affirmé les solutions utilisées dans l’arrêt Tessili dans cet
arrêt. Cf. H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 194 : cet auteur nous a
montré le fait intéressant quant à la tendance dominante dans la jurisprudence française qu’il y a des réticences à
localiser le lieu d’exécution de l’obligation litigieuse sans indiquer selon quelle loi elle procédait cette
localisation ; il est souvent qu’il s’agit d’une simple localisation de fait. Cependant l’auteur a précisé que cette
tendance a été un moment dominant dans la jurisprudence française (nos italiques).
826
CJCE, 15 janvier 1987, aff. C-266/85, Shenavaï, RCDIP.1987.793, note G. Droz ; JDI.1987.465, obs. J.-M.
Bischoff et A. Huet. En effet cet arrêt confirme la décision de la CJCE dans l’arrêt De Bloos qui a réglé le
problème d’éclater en adoptant la nouvelle catégorie dite « obligations autonomes », celles-ci sont indépendantes
de toute obligation litigieuse et sont destinées à justifier une compétence juridictionnelle.
827
Cf. la même solution des juridictions internes ; Versailles, 2 juin 1988, deux arrêts, JDI.1990.147, obs. A.
Huet ; Paris, 22 mai 1991, D. 1992.164, obs. B. Audit ; Paris, 13 septembre 1995, JDI.1997.170, obs. A. Huet ;
Paris, 21 mai 1997, JDI.1998.133, obs. A. Huet.

338
Qu’en est-il si l’une des parties a introduit le litige portant sur plusieurs demandes
devant le tribunal du lieu d’exécution de l’obligation accessoire, non celui de l’obligation
principale ? Si l’on tire une réponse de l’arrêt Shenavaï selon laquelle ce sera l’obligation
principale qui établira la compétence de la Cour, on envisage ici le risque de conflit négatif de
compétence, c'est-à-dire que chaque tribunal prononcera incompétent sur ce litige, car il est
possible que l’obligation principale ne coïncide pas à l’obligation accessoire. En revanche, si
l’on suit la décision de la Cour de cassation française qui a l’objectif d’éviter ce conflit
négatif, elle a répondu dans le sens que « le tribunal saisi de plusieurs demandes demeurait
compétent pour statuer sur une obligation litigieuse secondaire devant s’exécuter dans son
828
ressort, même s’il ne l’est pas pour obligation litigieuse principale » . Force est de
constater qu’il n’est pas aisé de dissocier l’obligation accessoire de l’obligation principale,
829
notamment si les obligations litigieuses sont équivalentes . Il semble que la dispersion de
830
fors reste toujours au fond de cette solution. Comme l’écrit Mme H. Gaudemet-Tallon que
ces arrêts sont toujours loin de donner la solution certaine pour toutes les difficultés posées
831
par la fonction de l’article 5-1° . Nous sommes d’accord que la solution employée par la
Cour de cassation française peut régler le problème de l’obligation secondaire, il faut l’utiliser
prudemment en tenant compte de la possibilité d’exécuter dans son ressort de l’obligation

828
Cass. 1er civ., 8 février 2000, Hoff, RCDIP.2001.148, 2e esp. note M.-E. Ancel ; JDI.2001.133, 5e esp. obs.
A. Huet ; D. 2002. som.com.1401, obs. B. Audit ; Cass. 1er civ., 8 février 2000, Sté W. Grant, D. 2000.741, note
G. Blanc ; Gaz. Pal. 1-3 oct. 2000, 2e esp., p. 25, note M.-L. Niboyet.
829
Cf. CJCE, 5 octobre 1999, aff. C-420/97, Leathertex Divisione Sintetici SpA, D. 1999.270 ; RCDIP.2000.76,
H. Gaudemet-Tallon : la Cour a estimé que « le même juge n’est pas compétent pour connaître de l’ensemble
d’une demande fondée sur deux obligations équivalentes découlant d’un même contrat, lorsque, selon les règles
de conflit de l’État de ce juge, ces obligations doivent être exécutées l’une dans cet État et l’autre dans un autre
État contractant ».
830
H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 186.
831
M. G. Droz a donné une observation depuis 1987 que, c’est la compétence générale de l’article 2 de la
Convention qui a toujours absorbé la moitié des cas la compétence en matière de contrats. Donc il a conclu que
l’article 5-1° était une erreur car il était inutile ou néfaste, et que le for prévu en vertu de cet article doit être
supprimé… (RCDIP.1987. spéc. p. 803.) Mais dans le règlement Bruxelles I, les deux contrats importants sont
finalement distingués pour échapper la difficulté de détermination du lieu en question. En effet lorsque l’on
prend en considération son argument, on peut penser qu’en pratique une fois qu’il y a un différend entre les
contractants, ce sont certainement leurs avocats qui décident du choix du tribunal compétent pour introduire ce
litige. La question est de savoir, comment les avocats peuvent-ils s’y connaître s’ils ne peuvent pas déterminer
eux-mêmes le lieu d’exécution de l’obligation servant de base à sa demande ? Ce serait dommage et une perte de
temps inutile pour les clients d’introduire le litige devant la mauvaise juridiction! Pourquoi ne pas faciliter leur
cas en recourant à la compétence générale de l’article 2 ; le tribunal du domicile du défendeur ? De ce point du
vue, le critère de compétence fondée sur le lieu de l’obligation litigieuse semble compliquer des choses…
A notre avis, les rédacteurs ont tenté d’offrir aux parties plusieurs options possibles pour introduire leurs
instances. On peut tirer aussi les avantages de l’article 5-1° lorsque le demandeur domicilié dans un même pays
ou même lieu que le for prévu par cet article, certes, les coûts, les honoraires seraient réduits par rapport au cas
d’introduire le litige devant le tribunal selon l’article 2 qui peut-être se situe dans un autre État.

339
litigieuse secondaire en cause. C'est-à-dire si une telle obligation accessoire ne peut pas être
exécutée dans son ressort, ce tribunal saisi n’est pas compétent et ce sera la compétence du
tribunal du lieu de l’exécution de l’obligation principale comme décidé la CJCE.

456. Le problème est d’ailleurs plus compliqué en ce qui concerne l’obligation de paiement
selon laquelle son lieu d’exécution dépend si le paiement est quérable ou portable.
Normalement ce paiement n’est pas la prestation caractéristique du contrat, alors le lieu du
paiement ne sera pas coïncident avec le lieu déterminant la loi applicable de l’article 4 du
règlement Rome I. C'est-à-dire s’il y a une convention internationale portée sur les règles
uniformes de déterminer le lieu d’exécution de telle obligation, il faut appliquer celle-ci.

§2 : La compétence internationale du juge thaï en matière contractuelle.

457. En droit thaï, la compétence juridictionnelle sur le litige à caractère international n’est
pas stipulée de façon spécifique. D’ailleurs, la Thaïlande n’est partie à aucune convention
internationale sur la compétence judiciaire dans ce domaine et on n’a pas encore le droit
uniforme au sein de l’ASEAN portant sur la compétence judiciaire et l’exécution des
jugements en matière civile et commerciale. Dès lors, les juges thaïs régleront ces problèmes
en appliquant la loi du for. Par conséquent nos études porteront uniquement sur le cadre de
droit international privé commun. C’est le tribunal civil qui est compétent sur le litige en
matière civil et commercial, sauf il y a la loi stipulée qu’un autre tribunal est spécialement
compétent dans tel ou tel cas, par exemple la loi procédurale spéciale pour le litige du
832
commerce international et la propriété intellectuelle .
Nous nous intéressons ici aux dispositions attribuant compétence juridictionnelle
internationale aux tribunaux thaïs pour le litige en matière du contrat.

A. La mise en œuvre de critères de rattachement fondés sur l’article 4 du Code


de procédure civile.

832
Comme l’on a déjà cité, le TCPICI est le tribunal au premier degré, qui n’a compétence que pour trancher
les litiges portant sur la propriété intellectuelle et le commerce international. Après avoir obtenu une décision de
ce tribunal, les parties peuvent faire un appel directement devant la Cour suprême Dika et non la Cour d’appel.

340
458. Afin de faciliter nos études, nous proposons de regrouper les règles de compétence
judiciaire en droit thaï en appliquant les critères fondamentaux : les principes de souveraineté
territoriale et personnelle.

1) Les règles de compétence générale fondées sur le principe de souveraineté


territoriale.
459. La compétence fondée sur le domicile de l’une des parties. L’article 4 du Code de
procédure civile (ci-après le CPC) rattache la compétence juridictionnelle au domicile du
défendeur, la règle actor sequitur forum rei a été donc consacrée. On trouve que la loi utilise
le terme « le domicile du défendeur dans la juridiction du tribunal », car cet article n’est pas
stipulé pour le cas du litige international, mais on entend cette disposition comme « le
domicile du défendeur en Thaïlande ». Alors quel tribunal sera le tribunal saisi ? Cela dépend
des règles de compétence judiciaire interne. Lorsque le défendeur a domicile en Thaïlande,
les tribunaux thaïs sont compétents pour saisir tout le litige dans cette matière.

460. La notion de domicile doit être considérée en vertu de droit thaï ; les articles 37 à 47
du Code civil et commercial (ci-après CCC) en cas de personnes physiques et les articles 68 et
833
69 pour le domicile de personnes morales . Le droit thaï laisse ouverte la possibilité de
déterminer le domicile en deux sens ; il s’agit de domicile de fait selon le Code civil et le
domicile présumé selon le CPC.
Le premier cas ne pose pas beaucoup de problème car les articles 37 à 47 du CCC ont
déjà donné les définitions du domicile.
Le second cas, c’est l’article 3-2° du CPC, qui a pour but de faciliter le procès
d’assigner, et de déterminer le domicile du défendeur en recourant aux présomptions :
- La première hypothèse, lorsque le défendeur n’a pas le domicile dans le
royaume thaï, mais que celui-ci y en avait deux ans avant le moment de l’assignation du litige,
la loi présume que ce lieu est le domicile du défendeur.
- La seconde hypothèse, lorsque le défendeur n’est jamais domicilié dans ce
pays, mais qu’il exerce ou ait exercé son entreprise en Thaïlande depuis deux ans, soit par le
représentant soit par lui-même, soit par le médiateur peu importe, la loi présume que le(s)

833
Le domicile de personnes morales est défini comme le lieu où se situe le principal établissement ou
l’administration centrale ou le siège statutaire (art.68 du CCC). Mais dans le cas où les personnes morales ont
plusieurs sièges sociaux ou filiales, les lieux où ces sièges ou ces branches se situent sont considérés comme le
domicile pour leurs activités exercées à ce lieu (art.69 du CCC). V. TCPICI, com. n° 91/2551 (2008), Acanay
Insurance c/ Federal Express.

341
lieu(x) utilisé(s) pour exercer ces activités ou ; le domicile du représentant ou ; celui du
834
médiateur est considéré comme le domicile du défendeur .

461. Quant à la règle forum actoris, celle-ci est aussi bien établie en droit thaï, car le
domicile du demandeur en Thaïlande est également utilisé comme l’un des critères de
fondement de la compétence juridictionnelle du tribunal, sans tenir compte de la nationalité
835
du demandeur. Il résulte de l’article 4 ter, 1er al. , même si le défendeur n’est pas domicilié
dans le royaume et le litige n’a pas eu lieu en Thaïlande, mais les législateurs acceptent ici le
lien entre l’un des litigants avec la Thaïlande.

462. La compétence fondée sur le lieu de naissance du litige. La compétence


juridictionnelle se fonde aussi sur le lieu où le litige est né, tel que le lieu de conclusion du
836
contrat, en vertu de l’article 4-1° du CPC , peu importe la nationalité ou le domicile des
parties au litige. Lorsque tel ou tel litige a eu lieu dans le royaume thaï, c’est la compétence
des tribunaux thaïlandais de saisir ce litige. Ce lieu doit être déterminé tout d’abord pour
fonder la compétence du juge thaï, donc ce lieu peut être celui de conclusion du contrat. Cette
disposition nous laisse à penser à l’article 14 du Code civil français qui applique à
« l’exécution des obligations contractées en France » sans tenir compte de la nationalité du
défendeur et son domicile, mais à la différence que les dispositions de l’article 14 exige
toujours un lien significatif avec la France ; la nationalité française du demandeur.

463. Afin de déterminer si le litige est né en Thaïlande, il faut prendre en considération de


l’économie de chaque contrat, car les éléments nécessaires pour le déterminer peuvent être
différents selon le fait. Prenons un exemple de la décision de la Cour suprême Dika en 2007,
en l’espèce il s’agit du contrat de garant ; la banque italienne BNL défenderesse domicilié en

834
V. Cour suprême Dika, n° 6437/2541 (1998) : la Cour a décidé que les défendeurs 1er et 2e sont
intermédiaires exercés les activités pour l’entreprise en Thaïlande du défendeur 1 er, présume que le domicile du
défendeur 2e qu’utilise le défendeur 1er pour les contacts est aussi le domicile de ce dernier. V. en ce sens n°
5809/2539 (1996) ; n° 4580/2542 (1999).
835
มาตรา ๔ ตรี วรรคแรก แห่ งประมวลกฎหมายวิธีพิจารณาความแพ่ง บัญญัติว่า “คาฟ้ องอื่นนอกจากที่บญ ั ญัติไว้ในมาตรา ๔ ทวิ ซึ่ งจาเลยมิได้มี
ภูมิลาเนาอยูใ่ นราชอาณาจักรและมูลคดีมิได้เกิ ดขึ้นในราชอาณาจักร ถ้าโจทก์เป็ นผูม้ ีสัญชาติไทยหรื อมีภูมิลาเนาอยูใ่ นราชอาณาจักร ให้เสนอต่อศาล
แพ่งหรื อต่อศาลที่โจทก์มีภูมิลาเนาอยูใ่ นเขตศาล”
836
มาตรา ๔ (๑) แห่งประมวลกฎหมายวิธีพิจารณาความแพ่ง บัญญัติว่า “คำฟ้อง ให้ เสนอต่อศาลที่จาเลยมีภูมิลาเนาอยูใ่ นเขตศาล หรื อต่ อศำลที่มูล
คดีเกิดขึน้ ในเขตศำลไม่วา่ จาเลยจะมีภูมิลาเนาอยูใ่ นราชอาณาจักรหรื อไม่”

342
Italie avait fait une demande de garantie, Letter of Guarantee (L/G), de la banque thaïlandaise
Krungthai demanderesse, afin de porter un garant à la joint venture italienne candidate à une
mise aux enchères de projet gouvernemental opéré par l’Électricité de Thaïlande. Faute de la
rupture du contrat par la joint venture italienne, la banque Krungthai a été demandée par
l’Électricité de Thaïlande d’exécuter le paiement de dette. La banque avait délibéré enfin
l’obligation qui lui incombe et puis a demandé à la banque italienne BNL selon le contrat de
sous-caution de régler ce montant. La dernière a refusé le paiement en invoquant l’injonction
du tribunal italien qui, selon le défendeur, souhaiterait inviter l’Électricité de Thaïlande à
régler ce litige par l’arbitrage. La banque Krungthai a assigné la BNL devant le TCPICI, le
défendeur a soulevé l’incompétence de ce tribunal.
Le TCPICI a statué d’abord qu’il était compétent, mais il a jugé en faveur de la
demande de la banque BNL. Un pourvoi a été formé par la banque Krungthai devant la Cour
suprême Dika qui affirma en premier lieu sa compétence et infirma en second lieu la décision
du TCPICI. Afin de déterminer sa compétence, elle a appuyé sur l’article 359 al. 2 du CCC
pour localiser le lieu de conclusion du contrat. La Cour estima que le contrat conclu entre le
demandeur domicilié en Thaïlande et le défendeur domicilié en Italie doit être considéré
comme le contrat à distance. Entend que la proposition faite par le défendeur transférée vers
le télex à la banque Krungthai, cette dernière ne l’a pas, dès la première fois, acceptée mais a
répondu en modifiant plusieurs clauses en y ajoutant la clause de sous-caution (counter
guarantee) entre la BNL et la banque Krungthai. D’après la Cour, ceci est considéré comme
une nouvelle offre, vu qu’après l’avoir reçue, la BNL l’a accordé sans conditions. Donc ceci
est entendu comme une affirmation qui donne lieu au contrat en vertu de l’article 361 al. 1er
du CCC. La Cour a décidé que « ce contrat a été conclu en Thaïlande et non pas en Italie ».
Bien que la Cour n’ait pas pris cette opportunité pour expliquer le fondement de sa
compétence juridictionnelle, force est de constater que les tribunaux thaïs sont compétents en
837
vertu de l’article 4-1° du Code de procédure civile, le lieu de la naissance du litige .
L’article 4-1° du CPC est la solution la plus souvent utilisée par les juges thaïs pour
fonder leur compétence sur le litige en matière de contrats internationaux. Comme l’on a déjà
étudié dans la première partie, pour écarter l’application de la règle de conflit de lois au

837
Cour suprême Dika, n° 772/2550 (2007), Krungthai Bank c/ Banca Nazionale de Lavoro : la Cour a jugé
que « il incombe au défendeur de régler le montant payé par la banque Krungthai à la demande de l’Électricité
de Thaïlande, au motif que seule l’invocation d’existence d’une injonction du tribunal italien ne peut pas
délibérer le défendeur des obligations qui lui incombent envers la banque thaïe en vertu du contrat de sous-
caution entre elles ».

343
contrat à caractère d’extranéité (v. supra n° 76), la Cour décide très souvent que « le litige est
né en Thaïlande dès lors il n’y a aucune place pour l’application des règles de conflit » !

464. En effet on peut trouver la définition de la notion du lieu du litige dans l’article 3-1°
du CPC, on trouve aussi la méthode de présomption utilisée par les rédacteurs. La loi
distingue le lieu où le litige est né dans le fait et celui où le litige est né selon la présomption.
Pour la première, c’est l’application simple de l’article 4 mais pour la seconde, il s’agit du
litige né sur le navire thaï ou sur l’aéronef thaï qui se trouve hors du territoire de la Thaïlande.
Tous les litiges relevant des deux présomptions sont dans la compétence des tribunaux thaïs.

465. La compétence fondée sur l’existence d’un bien du défendeur. Le principe de la


souveraineté territoriale donne compétence aux tribunaux du lieu où se trouve le bien meublé
838
(qui peut être exécuté) appartenant au défendeur. L’article 4 ter al. 2 du CPC est une règle
distincte de celle qui applique à la situation d’immeubles. C'est-à-dire même si le défendeur
possède un bien meublé en Thaïlande, peu import si sa possession est permanente ou
temporaire, le demandeur peut assigner devant les tribunaux thaïs. En effet cet article n’est
qu’une option offerte par l’article 4 ter, 1er al. du CPC. Afin que cet alinéa 2 soit applicable,
il faut que certaines conditions doivent préalablement être remplies ; c'est-à-dire lorsque le
demandeur a la nationalité thaïlandaise ou il a le domicile en Thaïlande, mais le défendeur
n’est pas domicilié dans ce pays et que le lieu de la naissance du litige se trouve hors du
royaume, le demandeur peut saisir les tribunaux thaïs (où se trouve le bien en cause). De
surcroît, on peut trouver une autre disposition stipulée dans le même sens que cet alinéa, c’est
l’article 4 sexies du CPC, une demande portant sur un bien, qui donne la compétence aux
juges thaïs lorsque le bien se trouve sur le territoire thaï.

466. Hormis ces rattachements, le lien entre le siège social de personnes morales et l’État
thaï donne aussi la compétence aux tribunaux thaïlandais. Lorsque le siège social d’une
personne morale se situe en Thaïlande, il est suffisant pour que la Cour thaïe soit compétente
selon l’article 4 quinquies du CPC qui porte sur la demande relative à cette personne morale

838
มาตรา ๔ ตรี วรรคสอง แห่งประมวลกฎหมายวิธีพิจารณาความแพ่ง บัญญัติว่า “คาฟ้ องตามวรรคหนึ่ ง ถ้าจาเลยมีทรัพย์สินที่อาจถูกบังคับคดีได้
อยูใ่ นราชอาณาจักร ไม่วา่ จะเป็ นการชัว่ คราวหรื อถาวร โจทก์จะเสนอคาฟ้ องต่อศาลที่ทรัพย์สินนั้นอยูใ่ นเขตศาลก็ได้”

344
839
par exemple la demande de dissolution . La loi n’exige pas que le siège social soit le siège
social réel dans ce cas, par conséquent le siège social statutaire en Thaïlande peut aussi rendre
effective l’application à cet article.

467. Quant à la matière des immeubles et de baux d’immeubles, l’article 4 bis du CPC
retient le même principe qu’en droit français, c’est la compétence exclusive du tribunal de
l’État où l’immeuble est situé sans considération de domicile des parties.

2) Les règles de compétence générale fondées sur le principe de souveraineté


personnelle.
468. Comme dans d’autres États, la nationalité est considérée comme le lien majeur pour
fonder la compétence juridictionnelle des tribunaux étatiques. L’importance de la nationalité
est considérée comme l’une des conditions de jouissance des droits. Lorsque le demandeur a
la nationalité thaïlandaise, bien que le défendeur soit domicilié hors de la Thaïlande et que le
litige ne soit pas né dans ce pays, ce dernier peut être attrait devant la Cour civile ou le
tribunal du domicile du demandeur (art. 4 ter al. 1er CPC). Force est de constater que l’article
840
4 ter, 1er al. n’est pas rédigé de la même façon que les articles 14 et 15 du Code civil
français. Il faut rappeler que les derniers donnent compétence aux tribunaux français lorsque
l’une des parties est Française, a priori, l’article 14 pour le Français demandeur et l’article 15
pour le Français défendeur. Alors que l’on ne trouve pas la règle de compétence des tribunaux
thaïs en cas où le défendeur est Thaï. Car les règles de compétence mentionnées plus haut
sont suffisantes pour protéger le défendeur concernant le droit d’accès à la justice.

469. La notion de nationalité de personnes physiques est déterminée selon le droit interne ;
la Loi sur la nationalité B.E. 2508 (1965) (texte révisé B.E. 2535 (1992)), ceci ne pose pas
beaucoup de problème. Pourtant le cas de la nationalité de personnes morales de droit privé
donne lieu à plusieurs questions délicates. La société multinationale est un bon exemple, car

839
Telles que la validité, la nullité ou la dissolution des personnes morales. Par exemple, la société import-
export n’a pas exercé ses obligations envers ses créanciers dans le contrat de vente de marchandises, mais que
son nom commercial ait été supprimé du système d’enregistrement par le Département du commerce pour la
raison quelconque. Afin que les créanciers puissent la traduire en litige cette entité doit être personne juridique,
il est alors nécessaire de faire une demande devant la Cour pour réenregistrer cette société dans le système.
840
มาตรา ๔ ตรี แห่งประมวลกฎหมายวิธีพิจารณาความแพ่ง บัญญัติวา่ “คาฟ้ องอื่นนอกจากที่บญ ั ญัติไว้ในมาตรา ๔ ทวิ ซึ่ งจาเลยมิได้มีภูมิลาเนาอยู่
ในราชอาณาจักรและมูลคดีมิได้เกิ ดขึ้นในราชอาณาจักร ถ้ ำโจทก์ เป็ นผู้มีสัญชำติไทยหรื อมีภูมิลาเนาอยูใ่ นราชอาณาจักร ให้เสนอต่อศาลแพ่งหรื อต่อ
ศาลที่โจทก์มีภูมิลาเนาอยูใ่ นเขตศาล”

345
depuis la seconde moitié du XXe siècle il paraît que ce phénomène a proliféré rapidement
dans le monde des affaires. La difficulté de déterminer la nationalité de ce genre d’entreprise
réside dans le fait qu’elle est constituée par l’ensemble de sociétés ayant les sièges dans
plusieurs pays. Il peut résulter d’une société unique qui a multiplié ses activités à l’étranger en
établissant leurs filiales locales ; ou il peut aussi rester dans la structure commune de sociétés
établies dans plusieurs pays en utilisant des accords particuliers entre ces sociétés. la question
de déterminer la nationalité de personnes morales semble indispensable pour compléter nos
études.

470. A savoir que le droit thaï n’a pas des règles écrites pour déterminer la nationalité des
personnes morales, il faut consulter des règles retenues par la pratique internationale des
États, le droit coutumier et les principes retenues par la Cour Internationale de Justice dans
841
l’affaire Barcelona Traction pour considérer ces problèmes . En somme, le système
juridique thaï accepte en général les critères de rattachement de la nationalité des personnes
842 843
morales ainsi : l’administration centrale (le siège social réel) ; la loi du pays de
844
constitution de personne morale (le siège social de l’incorporation) ; et la personnalité des
associés (la nationalité majoritaire des dirigeants ou des actionnaires). Cependant ces critères
mentionnés ne sont pas tous utilisés afin de fixer la compétence juridictionnelle de la Cour
thaïe. Seul le siège social de l’incorporation sera pris en considération pour justifier la
compétence du tribunal, plus précisément lorsqu’une personne morale est constituée selon le

841
CIJ, 5 février 1970, Barcelona Traction, Light and Power Co.Ltd., Belgique c/ Espagne. Disponible sur le
site http://www.icj-cij.org/docket/files/50/5387.pdf
842
P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, Droit international privé, 5e éd., Bangkok : Winyuchon, 2003, p. 265.
843
Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, Bangkok : Université de Thammasat, 1984, p. 114-115 ;
P. Chunha-Urai, Droit international privé, Bangkok : Nitibanakarn, 1977, p. 123-128. Pour déterminer la
nationalité de personnes morales, les auteurs ont cité les dispositions de l’article 7 de la loi sur les règles de
conflit B.E. 2481 (1938) qui stipule ainsi : « le cas où une personne morale a plusieurs nationalités, la
nationalité de ladite personne morale est celle du pays où se trouve son siège social ». Malgré l’avis qui oppose
que cet article doit être appliqué uniquement dans le cas des conflits de nationalités de personnes morales, ces
auteurs ont affirmé qu’il faut tenir compte de la rigueur de ces dispositions. Ce constat permet alors de conclure
qu’une telle ou telle personne morale devrait avoir le siège social réel en Thaïlande pour qu’elle ait la nationalité
thaïlandaise.
844
Luang Pradit Manoo Tham (Pridi Phanomyong), Droit international privé, Bangkok : Aksornniti, 1931, p.
139 ; S. Attakorn et A. Patyangkul, Droit international privé, Bangkok : The Thai Bar Association, 1965, p. 3-4.
Les auteurs ont affirmé que la nationalité de personnes morales doit être considérée en application le critère du
lieu de siège social de l’incorporation, car l’État ne peut pas et ne doit pas refuser d’octroyer la nationalité à une
personne morale qui a été enregistrée ou constituée en vertu de ses lois. Les juristes thaïs se conforment à cette
hypothèse.

346
845
droit thaï, ce fait lui permet de saisir le tribunal thaïlandais . De même que la jurisprudence
constante qui affirme depuis longtemps que la personne morale a nationalité de l’État qu’elle
846
est constituée . Bien qu’une société statuée en droit thaï ait son siège social réel à l’étranger
ou la majorité de ses actionnaires soit étrangère, cette entité est toujours considérée comme la
société de droit thaï. Mais il faut rappeler que ce critère ne s’applique que pour la
détermination de compétence juridictionnelle du tribunal thaï. C'est-à-dire que l’on applique
d’autres critères pour d’autres circonstances d’exceptions. On envisage beaucoup de
problèmes de ce genre de nos jours, il semble que l’établissement de la corporation
transnational devient très actif en Thaïlande comme dans d’autres pays.

471. Le même débat a été longuement discuté aussi en droit français commun, les juristes
sont finalement arrivés sur le point de conclure à ce stade que les personnes morales n’ont pas
à proprement parler de nationalité. Pourtant le terme de nationalité a été employé pour sa
commodité de désigner le lien ou le rapport de ladite personne morale avec un État déterminé
afin de recevoir la protection diplomatique, de jouissance des droits et même de rechercher la
847
loi applicable . C’est la raison pour laquelle les États n’ont pas de dispositions propres pour
déterminer la nationalité de personnes morales. Cependant nous trouvons que les critères
généraux de rattachement retenus en droit français ne sont pas différents de ceux retenus en
droit thaï. En ce qui concerne le critère de nationalité majoritaire des associés, il est normal de
faire référence à la nationalité des personnes physiques qui la compose, car c’est en général
848
ces personnes qui exercent le contrôle de la personne morale . Or, force est de reconnaître
que les titres changent habituellement et de surcroît les actionnaires eux-mêmes peuvent être
également personnes morales. Par conséquent le recours à ce critère pose beaucoup de
problème ; comment on peut découvrir les titulaires actuels d’actions au porteur ? Tout cela
nous montre les difficultés considérables à retenir ce critère dans certaines hypothèses. Il est
vrai que ce critère est apte à appliquer à l’hypothèse spéciale telle que la concurrence des

845
Il faut savoir que les deux autres critères ne s’appliquent qu’à la situation spéciale.
846
Cour suprême Dika n° 1318/2513 ; n° 3401/2529, n° 2466/2532, n° 2768/2532.
847
B. Audit, Droit international privé, 6e éd., Paris : Economica, 2010, n° 1105.
848
Contra. Y. Loussouarn, Droit international privé, 9e éd., Paris : Dalloz, 2007, n° 707. Le droit coutumier
français en matière de conflit de lois refuse de tenir compte de la nationalité majoritaire des associés, cette idée
est justifiée pour les sociétés en nom collectif par la séparation du patrimoine et l’autonomie de la personne
morale.

347
849
sociétés étrangères dans un secteur économique . C’est pourquoi même le droit thaï ne
rattache pas à ce critère l’application pour déterminer la compétence juridictionnelle des
tribunaux.

472. Sur le terrain de la théorie de l’incorporation, il est entendu que la nationalité d’une
société est celle du pays dans lequel elle a été constituée selon la loi de ce pays ; c’est la
tendance la plus libérale et convenable au commerce international. Comme on a déjà exposé
qu’il est normal d’avoir la nationalité de l’État où la personne morale a été constituée puisque
cet État ne peut pas nier son rattachement avec une entité juridique établie d’après sa loi.
Sinon, ce serait alors le déni de la force obligatoire de sa propre loi. Cependant il semble que
ce rattachement n’exige pas un lien effectif entre l’État enregistreur et la personne morale en
cause. C'est-à-dire que les fondateurs de la société pourront en toute liberté choisir le lieu
d’établissement en considérant les règles de droit applicables au fonctionnement de la société
ou les mesures fiscales les plus favorables. Ce critère s’applique en général dans le système
juridique common law telle que l’Angleterre, il a pour but d’accorder la protection
diplomatique aux sociétés de droit anglais à l’étranger. Le droit thaï utilise ce critère non
seulement pour déterminer la compétence juridictionnelle de la Cour thaïe mais aussi pour
déterminer la loi applicable conformément à la règle de conflit. En somme, la société
constituée en droit thaï a la nationalité thaïlandaise, sauf dans les cas spéciaux où le texte de la
loi a stipulé autrement. Le droit coutumier français n’a jamais accordé au libre choix du lieu

849
La Foreign Business Act B.E. 2542 utilise ce critère pour déterminer la nationalité de personne morale. En
vertu de cette loi, afin d’avoir la nationalité thaïlandaise la personne morale doit être constituée par les associés
thaïlandaises au moins 51 pour cent. C’est toujours le critère 49 : 51 qui est actuellement appliqué, malgré le
projet de réforme de cette loi. Certes, de nos jours, on fait l’effort d’attirer les capitaux étrangers et d’autres
investissements en Thaïlande, mais l’ouverture sur le grand nombre d’actionnaires étrangers semble trop risquée.
Le droit thaï essaie de disposer une telle limite en raison du souci que les sociétés thaïlandaises sous contrôle
étranger pourraient nuire l’économie du pays. Certes, dans certains secteurs, les Thaïlandais ne sont pas encore
prêts à la concurrence avec les étrangers par ailleurs il s’agit des affaires susceptibles de porter atteint à la
sécurité nationale. En effet, faute de la définition correctement de personne morale thaïe qui n’englobe pas le
pouvoir d’administration centrale, les étrangers peuvent en réalité, par cette lacune, contrôler la société thaïe à
travers les nominées. Ces derniers sont normalement les sociétés thaïes ayant prétendu d’avoir le pouvoir
véritable de contrôle, en revanche ce sont les actionnaires étrangers qui exercent ce contrôle vers les actions
privilégiées. Le projet de loi est censé de réviser les dispositions concernant le pouvoir de contrôle ainsi que les
actions privilégiées. Ce qui entraîne inévitablement la réaction négative des investisseurs étrangers. Bien qu’ils
puissent exercer leurs affaires en Thaïlande en qualité de personnes morales étrangères, les investisseurs
étrangers hésitent toujours d’utiliser ce moyen. Car, il faut solliciter une autorisation spéciale auprès des autorités
en charge qui constitue un pouvoir discrétionnaire. En droit thaï, le critère du contrôle s’applique aussi en temps
de guerre en ce qui concerne des mesures de séquestration des biens de l’ennemie. Alors qu’en droit français, la
jurisprudence montre que la Cour ne retient ce critère que dans des hypothèses exceptionnelles consécutives aux
séquestres et dommages de guerre. Cf. Y. Loussouarn, Droit international privé, op.cit., n° 710.

348
de l’incorporation d’une personne morale pour déterminer sa nationalité à cause de sa
850
fonction arbitraire .

473. Le critère de siège social réel, comme l’on a déjà vu, est utilisé couramment dans les
851
pays continentaux ou civil law , y compris la Thaïlande. En effet ce critère penche sur le
centre d’intérêts de la personne morale qui exerce ses activités économiques dans un tel pays.
Les deux critères utilisés pour rechercher le centre d’intérêts ; le siège social et le lieu
852
d’exploitation principal . Pour le premier, il est défini comme le lieu où s’exerce
principalement sa direction juridique, financière, administrative et technique de la personne
853 854
morale , celui de réunion des administrateurs ou des assemblées générales . Pour cette
raison le siège social dans cette hypothèse signifie le siège réel de la société et non le siège
statutaire. Afin de déterminer le lieu réel du siège social, plusieurs éléments ont été pris en
considération par la jurisprudence constante, tels que le lieu où se tiennent les assemblées
855
d’actionnaires et du conseil d’administration d’où émanent la direction . Quant au second,
le lieu d’exploitation principal, il s’agit de lieu où la personne morale se manifeste le plus ses
activités extérieures où elle contracte habituellement. Lorsque l’un des critères se trouve au
sein de personne morale, celle-ci a la nationalité de ce pays concerné. Cependant il n’est pas
nécessaire de trouver toutes les activités précitées dans le même pays du siège social réel, car
il est possible qu’en réalité elles peuvent être exercées dans plusieurs pays différents même
dans le pays du siège statutaire. Le lien entre ce pays et la société est important pour lui
admettre la nationalité, pour que les tiers qui sont en relations avec cette personne morale
soient régis par la loi de ce lieu. Par exemple, la banque ayant le siège social en France même
si elle a aussi d’autres sièges dans plusieurs pays, c’est la loi française qui s’applique. Alors
ce constat nous montre que ce rattachement est normalement applicable afin de déterminer la
loi qui régit le contrat. Le droit thaï fait appel à ce critère dans le cas de l’article 7 de la Loi

850
Y. Loussouarn, Droit international privé, loc.cit.
851
Cass.1er civ., 29 mai 1937, S.1937.1.365 ; DP. 1937 .1.64 ; 29 mai 1938, JCP.1939.II.1284. La Cour de
cassation a affirmé la nationalité française des sociétés en appliquant le critère de siège social.
852
Cass. 1er civ., 17 juillet 1930, Sté Graf, S. 1931.1.4 ; RCDIP.1931.128, note Caleb ; JDI.1931.654 ; DP.
1930.1.163, note Camerlynck. La Cour de cassation a décidé que la société Graf a la nationalité française en
raison d’avoir en France le siège social et le centre d’exploitation, même si elle fût constituée par des Suisses.
853
Cass. 1er civ., 7 juillet 1947, D. 1948.som.9 ; JCP.1947.II.3871, note J. L.
854
B. Audit, Droit international privé, op.cit., n° 1113 ; Y. Loussouarn, Droit international privé, loc.cit.
855
Req. 30 janvier 1882 ; DP. 1883.1.223.

349
856
relative au conflit de lois ; le conflit des nationalités de personne morale . En effet l’article
7 peut être considéré comme l’hypothèse spéciale, car on applique le critère d’incorporation
pour déterminer la nationalité de personne morale dans une circonstance ordinaire.
Force est de reconnaître qu’aucun critère n’est pertinent pour déterminer la nationalité
de personne morales. Il varie et dépend de chaque situation en cause.

B. Compétence spéciale à travers le tribunal de la propriété intellectuelle et du


commerce international.

474. Il y a, dans l’ordre juridique thaï, un tribunal spécial dont l’objectif est de trancher les
litiges relatifs au commerce international et à la propriété intellectuelle : le tribunal central de
la propriété intellectuelle et du commerce international (ci-après le TCPICI). Il convient
d’intervenir rapidement sur les critères de compétence juridictionnelle de ce tribunal. Il
semble que nous pénétrons dans la répartition de compétence interne mais lorsque l’on
considère les dispositions stipulées par la loi d’établissement, on trouvera le critère spécifique
relatif à la matière du contrat international, c’est ce qui nous intéresse.
La compétence de ce tribunal englobe les litiges en matière aussi bien civile que
857
pénale relatif au commerce. En ce qui concerne l’instance civile, les articles 7 et 8 de la
Loi portant la création du TCPICI B.E. 2539 ont consacré la compétence judiciaire de ce
tribunal aux litiges relatifs aux contrats internationaux ou aux actes juridiques internationaux.
L’article 8 de cette loi précise qu’après l’ouverture officielle de ce tribunal en 1997, tous les
litiges précités étaient sous la compétence de cette juridiction et les autres tribunaux sont
incompétents de saisir ces litiges. Autres que ces critères, la compétence juridictionnelle du

856
L’article 7 stipule ainsi : « Dans le cas des conflits de nationalités de personne morale, la nationalité de
ladite personne est celle du pays où se situe le siège social ». มาตรา ๗ แห่ ง พระราชบัญญัติว่าด้วยการขัดกันแห่ งกฎหมาย พ.ศ.
๒๔๘๑ บัญญัติว่า “ในกรณี ที่มีการขัดกันในเรื่ องสัญชาติ ของนิ ติบุคคล สัญชาติของนิ ติบุคคลนั้นได้แก่ สัญชาติ แห่ งประเทศซึ่ งนิ ติบุคคลนั้นมีถิ่นที่
สานักงานแห่งใหญ่หรื อที่ต้ งั ทาการแห่งใหญ่”
857
L’article 7-5° : l’instance civile internationale concernant la vente, les échanges, les titres monétaires, les
services, les transports, les assurances et d’autres actes juridiques concernés. มาตรา ๗ (๕) คดีแพ่งเกี่ ยวกับการซื้ อขาย
แลกเปลี่ยนสิ นค้า หรื อตราสารการเงินระหว่างประเทศ หรื อการให้บริ การระหว่างประเทศ การขนส่ งระหว่างประเทศ การประกันภัยและนิ ติ
กรรมอื่นที่เกี่ยวข้อง
L’article 7-6° : l’instance civile porte sur la lettre de crédit délivrée pour les activités de l’art. 7-5°, le
transfert de l’argent de l’étranger au royaume ou à l’inverse, le trust receipt, y compris les assurances
concernées. มาตรา ๗ (๖) คดี แพ่งเกี่ ยวกับเลตเตอร์ ออฟเครดิ ตที่ออกเกี่ ยวเนื่ องกับกิ จกรรมตาม (๕) การส่ งเงินเข้ามาในราชอาณาจักรหรื อ
ส่งออกไปนอกราชอาณาจักร ทรัสต์รีซีท รวมทั้งการประกันเกี่ยวกับกิจการดังกล่าว

350
TCPICI se fonde sur les mêmes critères que ceux de la Cour civile en vertu des dispositions
du Code de procédure civile, tels que : le domicile en Thaïlande du défendeur ou demandeur,
la nationalité du demandeur, le litige né en Thaïlande, le défendeur possède un bien qui peut
être exécuté en Thaïlande, ou la personne morale a le siège social dans ce pays. Là aussi,
malgré l’absence de lien effectif entre le contrat international en cause et la Thaïlande, mais le
TCPICI peut se baser sa compétence sur ce litige à travers l’un de ces fondements de
compétence judiciaire.

475. Conclusion de la section. On peut constater que les règles de compétence judiciaire
en matière internationale de droit thaï sont rédigées différemment des articles 14 et 15 du
Code civil français. Mais elles se fondent sur la même base en employant la nationalité du
défendeur et du demandeur comme le critère de compétence juridictionnelle des tribunaux.
Mais après l’entrée en vigueur de règles communautaires sur la compétence et l’exécution des
jugements, l’ordre juridique de chaque État membre absorbe les nouveaux principes
communautaires, donc ceux-ci se transforment en droit interne. Là c’est le point de
changement en droit français sur la compétence juridictionnelle dans cette matière. Cependant
l’application le texte communautaire a l’exception qui doit être prise en compte très
prudemment ; la non application lorsque le défendeur est domicilié hors de l’UE. Pour le
critère de domicile de défendeur, il est bien établi dans le système juridique thaï depuis la
première rédaction du Code de procédure civile thaï dans l’année 1934 (B.E. 2477). Certes, ce
principe n’a pas été modifié au cours les amendements de ce code.
Après avoir étudié les règles de compétence juridictionnelle qui s’applique au cas
général, on verra ensuite le cas où les parties peuvent écarter des règles générales en
désignant, par la clause attributive de juridiction, un tel ou tel tribunal compétent pour saisir
leur litige. Cette fois, c’est le rôle de l’autonomie de la volonté qui est en jeu.

Section II
Les mécanismes conventionnels de détermination
de la juridiction compétente.

476. Il y a toujours possibilité pour les parties d’introduire leur litige à une autre juridiction
jugée compétente, autre que celle dont les règles de compétence juridictionnelle sont
normalement applicables. C’est par la convention des parties. En effet il y a un instrument

351
international qui s’appliquera directement à tout le rapport relatif au choix du tribunal
compétent, c’est la Convention de La Haye du 30 juin 2005 sur les accords d’élection de
858
for . Rappelons que cette convention n’est pas encore en vigueur de nos jours (en 2011),
mais lorsqu’elle le sera, c’est cette convention qui régira le choix du for ou la clause
attributive de juridiction et non plus le règlement Bruxelles I, car elle a été signée par la
Communauté européenne.

477. On sait que la comparution volontaire du défendeur donne lieu également à la


prorogation de compétence. Il s’agit de l’hypothèse où le demandeur a assigné le défendeur
devant le tribunal qui n’est pas compétent sur le litige et que le défendeur ne conteste pas cette
incompétence. C’est le cas de l’article 24 du règlement Bruxelles I qui semble être interprété
dans le sens qu’il s’applique sans tenir compte du domicile du défendeur ou du demandeur
859
dans le territoire des États communautaires . Alors qu’en droit thaï, lorsque le tribunal a
examiné sa compétence et qu’il a constaté l’incompétence sur le litige, il devra rejeter cette
demande. Car, comme on a déjà étudié plus haut, en Thaïlande l’un des critères retenus par le
CPC est fondé sur le domicile du défendeur et aucune disposition de droit ne permet la
comparution volontaire du défendeur. Il faut rappeler que le critère de domicile du défendeur
est utilisé pour protéger celui-ci, si on admettrait la comparution qui est exception, il faudrait
avoir la loi précise sur cette issue.

858
L’intérêt du caractère réellement international de cette convention permettrait à autres États hors de l’UE
d’y participer, on peut voir la liberté de choix du tribunal saisi en vertu de cet instrument qui donnera lieu à la
facilité du procès de reconnaissance et d’exécution des jugements. Cependant on reconnaît que tout cela semble
être toujours loin de la réalité, car l’harmonisation en matière de compétence et d’exécution des jugements n’est
pas un travail simple, en revanche cette idée touche directement la souveraineté judiciaire de l’État. La mort-née
(terme utilisé par M. Usunier) de cette convention à cause de l’insuffisance de ratifications étatique peut être la
cause de beaucoup de soucis, l’unification de règles de compétence juridictionnelle semble moins utile que celle
de conditions de régularité internationale des jugements étrangers. Puisque la dernière pourrait aussi former
l’harmonisation entre les États, on peut dire que ceci est une bonne solution afin de rapprocher l’objectif. Par
ailleurs, il est bien dommage de voir disparaître la coopération outre-Atlantique et l’Europe, car cette convention
a été signée par les États-Unis d’Amérique et la CE et aussi adhérée par le Mexique.
859
CJCE, 13 juillet 2000, aff. C-412/98, Group Josi Reinsurance Company SA, préc. supra note n° 804.
Contra. D. Bureau et H. Muir Watt, Droit international privé, 2007, n° 180 : d’après ces auteurs, le défendeur
doit avoir le domicile sur le territoire d’un État communautaire, car l’article 4 de la Convention et du Règlement
renvoient au droit international commun des États dès lors que le défendeur est domicilié hors du territoire
communautaire. Nous sommes d’accord avec cette opinion car la Convention et le Règlement ont pour but de
protéger le défendeur en fondant la compétence du tribunal sur le rattachement de domicile du défendeur dans
l’UE. Alors, du moins, dans cette hypothèse il faut qu’un lien entre l’un des litigants soit présenté pour que la
comparution volontaire soit possible. En permettant d’assigner au tribunal dans l’État communautaire même si
aucune des parties n’est domiciliée dans l’UE, c’est ainsi l’admission tacite de forum shopping.

352
478. Nous intervenons d’abord sur les clauses d’élection du for comme la prorogation de
compétence (§ 1). Certes, ces principes peuvent aussi confronter à certaines limites,
notamment en ce qui concerne les parties faibles. Pour cela, on envisagera des règles
destinées à les protéger en interdisant, dans certains cas, la clause attributive de juridiction
(§ 2). Nous verrons par la suite les effets de la prorogation de compétence (§ 3).

§ 1 : La clause d’élection du for.

479. La loi française reconnaît depuis longtemps la prorogation internationale de


compétence notamment en matière contractuelle. La jurisprudence va également dans le sens
positif pour les clauses attributives de juridiction au tribunal étranger. L’étude de fonction des
clauses attributive de juridictions dans le système juridique français peut être distinguée en
deux cadres : le cadre du droit international privé commun et celui du droit conventionnel. En
principe lorsque le litige est introduit devant le tribunal français, c’est la loi du for qui sera la
loi applicable pour vérifier la validité de la clause attribuant de compétence. Mais il semble
être autrement dans le domaine du connaissement dans le contrat de transport maritime, ce qui
mérite d’être l’objet de notre étude. En Thaïlande, il n’y a qu’une étude relevant du droit
international privé commun dans le système juridique thaï, comme nous l’avons mentionné
que la Thaïlande n’est pas État qui fait partie de la convention internationale dans ce domaine.
Alors la richesse de jurisprudence et d’écrits juridiques français sur ce sujet mérite une
analyse approfondie. Par ailleurs cette étude nous permettrait de trouver la réponse que l’on
ne trouve pas dans certains problèmes juridiques thaïs. Pour ces raisons nous intervenons tout
d’abord sur la tendance d’admission de la clause de prorogation de compétence dans le
système juridique français (A). Ensuite nous verrons que le droit thaï n’est toujours pas clair
sur la même question, de surcroît, la Cour suprême elle-même hésite d’admettre la validité de
cette clause pour des raisons diverses (B).

A. L’admission de la clause attributive de juridiction dans le système juridique


français.

1) La prorogation de compétence à l’égard du droit international commun.


480. Normalement la clause d’élection de for a été insérée dans les contrats internationaux
afin de régler les conflits entre les parties du contrat, ou entre les dirigeants ou associés pour
la société. On sait que dans l’ordre interne, une clause attributive de juridiction est interdite
353
selon l’article 48 du CPC, sauf entre commerçants. Même en droit interne, la clause attribuant
de compétence est admise en matière du commerce, car le législateur tient compte de
l’importance de ce domaine d’une part et les professionnels ont normalement le pouvoir de
négociation aux pieds égaux d’autre part. Ceci pourrait être une bonne preuve pour affirmer la
860
possibilité de conclure ce genre de clause dans les contrats internationaux qui relèvent de
matière la plus libre que le contrat purement interne. D’ailleurs, la jurisprudence constante
estime que l’article 48 du CPC n’est pas entendu à l’ordre international et ne fait pas échec à
la licéité de clause attributive de juridiction dans les contrats internationaux.
Admettons que les conditions cumulatives sont établies par la jurisprudence
861 862
française : le caractère d’extranéité du contrat ; la clause ne doit pas faire échec à la
863
compétence territoriale impérative d’une juridiction française ; et la clause doit être
spécifiée de façon très apparente. En effet cette dernière condition de forme se trouve son
origine en droit interne (art. 48 CPC), mais il semble que la majorité de la doctrine est
favorable pour l’appliquer à l’ordre international. Ceci est bien entendu, de même qu’en
matière de choix de droit applicable ou même la convention arbitrale, les dispositions
relatives à telles clauses demandent également « le choix exprès » ou « de façon certaine ».
On trouve que ces conditions sont bien établies dans l’ordre juridique français, dès lors la
force obligatoire d’une clause attribuant de compétence à un tribunal étranger est bien
reconnue. La situation semble bien différente dans le système juridique thaï que nous verrons
par la suite.

860
Cf. A. Pillet, Traité pratique de Droit international privé, t. 1, 1923, Sirey, n° 293.
861
Cass. 1er civ., 17 décembre 1985, Cie des signaux et d’entreprises électriques, RCDIP.1986.537, note H.
Gaudemet-Tallon ; D. 1986. IR.265, obs. B. Audit ; GA, n° 72.
862
Le caractère international du litige peut résulter de plusieurs facteurs tels que le lieu d’exécution des
obligations, les domiciles des parties dans différents États. Cependant on trouve que le critère de déterminer la
notion d’internationalité doit être objectif. Dès lors, seule la nationalité différente des parties au contrat ne
rendrait pas le caractère international au litige. Il est nécessaire aussi de savoir à quel moment apprécié cet
élément extranéité, la Cour de cassation a estimé que le litige doit être international au moment où l’instance est
engagée. En effet il faut vérifier cet élément d’extranéité au moment de conclusion la clause attributive de
juridiction, car celle-ci n’est valide que dans le cas de contrat international. Si le contrat n’est pas international,
la clause de prorogation de compétence n’aurait jamais été validée. C’est la même solution retenue en droit
communautaire.
863
Il est certain que l’on ne pourra pas conclure une clause de prorogation de compétence dans certaines
matières, on revient encore à la matière où les parties n’ont pas la disponibilité de leurs droits. Il semble que le
problème ne se pose pas beaucoup en matière du commerce international. Cependant à l’heure actuelle il est
possible que les parties puissent conclure une clause attribuant de compétence relative au statut personnel
extrapatrimonial. Car le droit international privé positif semble plutôt laisser jouer la volonté de parties. V. H.
Gaudemet-Tallon, « Compétence internationale », Rép. D. proc. civ., n° 87.

354
a. Appréciation du choix tacite du tribunal compétent.
481. Le problème semble plus sérieux dans l’hypothèse d’admission implicite d’une clause
attributive de juridiction. On envisagerait les deux hypothèses, d’une part c’est le cas de
l’absence de ladite clause, lorsque l’une des parties a saisi le tribunal étranger et que l’autre
partie ne l’a pas contestée, il confère aussi la compétence exclusive au juge étranger saisi.
Force est de constater qu’il n’y a aucune place pour la théorie de forum non conveniens ici,
comme l’écrit M. P. Lagarde qu’« il y a incompatibilité fondamentale entre clause attributive
864
de juridiction et forum non conveniens » . D’autre part, il s’agit du cas de clause attribuant
de compétence trouvée dans un contrat-type tels que le contrat de transport ; le contrat de
vente internationale.
Plus souvent, les commerçants ont inséré unilatéralement une clause de choix du for
dans un contrat, sous les formes diverses par exemple ; les conditions générales d’achat, de
vente, de transport, la facture, etc. Certainement l’autre partie du contrat l’a signé sans
objection à une clause de choix du for, mais elle n’avait pas accepté expressément. En droit
international privé commun, la jurisprudence affirme la possibilité d’avoir une clause de
choix tacite, citons un arrêt du 5 mars 1991, la Cour de cassation a estimé qu’« une clause de
865
prorogation de compétence peut être tacitement acceptée » . Même lorsqu’il résulte des
866
relations d’affaires antérieurement sur la base d’un document identique . Cependant il
867
semble que la tendance de jurisprudence a changé, dans l’arrêt rendu en 1992 , la Cour de
cassation a refusé d’admettre une clause de prorogation de compétence de façon tacite bien
qu’il se présente les opérations d’affaires antérieures, le connaissement avec une telle clause
entre des parties, si le contrat n’y fait pas référence directement ou indirectement. Cette
décision a été réaffirmée dans l’arrêt du 22 juin 1993 selon lequel « l’acceptation d’une
clause attributive de juridiction opposée par un transporteur maritime ne peut être déduite de
868
l’existence de relations commerciales antérieures entre les parties… » . La question est de
savoir si l’on peut retenir cette solution pour d’autres cas qui pourrait arriver.

864
Cf. P. Lagarde, « Le principe de proximité dans le droit international privé contemporain »,
RCADI.1986.747.
865
Cass. com., 5 mars 1991, Bull. civ., IV, n° 96.
866
Cass. com., 5 mars 1991, préc.
867
Cass. 1er civ., 30 juin 1992, D., 1994, p. 169, note crit. Guez ; JCP (G) 1992, IV, n° 2510.
868
Cass. com., 22 juin 1993, Bull. Transport, 1994, p. 23.

355
482. Plus récemment, l’arrêt de 2009, en l’espèce il s’agit d’affrètement coque-nue d’un
navire destiné à effectuer un service de transport de passager entre la Turquie et Chypre. Ce
contrat coque-nue, il se produit une dissociation de la gestion du navire entre le fréteur qui est
normalement le propriétaire du navire et l’affréteur qui l’exploit. A savoir que dans ce genre
de contrat, c’est l’affréteur qu’est souscrit le contrat d’assurance et c’est lui qui doit payer les
primes, alors que le fréteur est le bénéficiaire de contrat d’assurance et qu’est désigné en vertu
d’une attestation d’assurance délivré par l’assureur. Le fréteur a porté plainte, devant le
tribunal français, contre l’assureur qui a refusé de l’indemniser après le sinistre en invoquant
l’existence d’une clause attribuant la compétence à un tribunal turque. La Cour de cassation a
exigé dans cette affaire que « la partie à laquelle la clause attributive de juridiction est
opposée devrait avoir connaissance et qu’elle l’ait acceptée au moment de la conclusion du
869
contrat » . En l’espèce, ladite clause n’est pas stipulée directement dans le contrat litigieux
mais simplement dans des conditions générales auxquelles ce document faisait référence.
C'est-à-dire que le cocontractant n’avait pas eu connaissance expressément. La Cour de
cassation n’admet pas dans sa décision la clause par référence, mais la question est de savoir
si une telle solution n’est-elle pas un permis pour la partie qui souhaiterait d’ignorer une
870
clause qui existe réellement dans ses rapports de commerce antérieures .
Certes, il en va autrement en cas du litige portant sous l’empire de droit
communautaire. On verra par la suite que la Cour semble présumer ce consentement dans une
base des usages d’affaires antérieurs des parties. Lorsqu’on est dans la matière applicable de
droit international privé commun, la jurisprudence exige un consentement exprès des parties
sur la clause attributive de juridiction.

b. Admission de clause attributive de juridiction en matière de parties faibles.


483. La question peut se poser aussi quant à la clause de prorogation de compétence dans le
contrat de travail international. On trouve que la jurisprudence dans cette matière est très
complexe et n’était pas constante en premiers temps. Elle était variée en deux sens
871
principaux ; l’avis opposable de la Chambre sociale d’une part , la tendance favorable de la

869
Cass. com., 10 mars 2009, D., Actualité 23 mars 2009, obs. X. Delpech.
870
Cf. A. Huet, « Relations habituelles d’affaires et acceptation tacite d’une clause attributive de juridiction en
Droit international privé », in Études à la mémoire du Professeur Alfred Rieg, Le rôle de la volonté dans les
actes juridiques, Bruxelles : Bruylant, 2000, p. 508.
871
Cass. soc., 18 et 19 oct. 1967, RCDIP.1968.490, 1er et 2e esp., note H. Gaudemet-Tallon ; JDI.1968.343,
note M. Simon-Depitre ; JCP. 1967.II.15293, note G. Lyon-Caen.

356
872
Chambre civile d’autre part . La Cour française gardait la diversité pendant longtemps
jusqu’à 1988, on trouve que la Chambre sociale et la Chambre civile adoptent la même
solution en admettant la validité de la clause attributive de juridiction dans les contrats de
873
travail internationaux ; les deux Chambres acceptaient le jeu de la clause attributive de
juridiction dérogeant l’article R. 517-1 du code du travail notamment lorsque ce travail
effectue hors du territoire français. Pourtant nous envisageons ici la jurisprudence en dent
de scie, en appelant que la Chambre sociale a recommencé l’action hostile à la clause
attribuant de compétence non écrite dans son arrêt du 14 février 2001, en recourant à l’article
874
R. 517-1 du code du travail . Il paraît que la clause n’est pas en forme écrite alors c’était la
protection de travailleur que l’on peut comprendre. Mais dans l’arrêt rendu en 2004, la
Chambre sociale a décidé au contraire, que la clause d’élection de for américain était
875
opposable au travailleur en raison de non contraire à l’ordre public international français .
Malgré que cette salariée fût employée à la base de l’aéroport Roissy, en France, c’est plutôt
un souci de la protection de travailleur qui est en cause.

484. Pour les contrats conclus par le consommateur, il semble que l’on suit la même
direction retenue en matière d’assurance, c'est-à-dire que la protection de consommateur est
prioritaire. Dans les règles internes, l’article L. 121-24 du Code de la consommation interdit
toute clause attribuant compétence au tribunal étranger lorsque le consommateur a domicile
en France. On peut dire que cette clause est prohibée en principe et ne serait admise qu’avec
876
réticence . C’est la notion de clause abusive de l’article L. 132-1 du Code de la
consommation qui doit être prise en compte aussi bien en droit interne qu’en droit

872
Cass. 1er civ., 9 janvier 1968, RCDIP.1969.490, 3e esp., note H. Gaudemet-Tallon ; JDI.1968.717, note M.
Simon-Depitre ; JCP.1968.II.15451, note G. Lyon-Caen.
873
Cass. 1er civ., 16 juin 1987, Cie Air Afrique, D. 1988. Somm.341, obs. B. Audit ; RCDIP.1988.78, 2e esp.,
note H. Gaudemet-Tallon ; Cass 1er civ. 8 mars 1988, Cie Air Zaïre, JDI.1988.1041, note A. Lyon-Caen ; Cass.
soc., 1er mars 1989, Dr. soc. 1989.729, note A. Jeammaud.
874
Cass. soc. 14 février 2001, inédit. (cité par M.-A. Moreau, note sous Cass. soc. 9 octobre 2001, Dr. sociétés
2002.123.
875
Cass. soc., 21 janvier 2004, D. 2004.somm.2187, obs. M.-C. Escande-Varniol ; RCDIP.2004.644, note F.
Jault-Seseke. Il s’agissait d’un contrat de travail, conclu entre la société United Airlines employeur et une
hôtesse de l’air à la base de Roissy, qui comportait la clause attribuant de compétence aux tribunaux américains.
Cette clause a été approuvée par l’employée. La Cour de cassation a affirmé la validité d’une telle clause
opposable au salarié.
876
Cf. A. Huet, « Compétence des tribunaux français à l’égard des litiges internationaux », J.-Cl. internat.,
Fasc. 581-41, n° 34.

357
international. Sauf une clause conclue postérieurement à la naissance du litige car le
consommateur a connu ce qu’il devra envisager.

485. En matière d’assurance, il est interdit en droit interne de conclure une clause de
prorogation de compétence, cependant on pourrait dire que la règle n’est probablement pas
applicable au contrat international. D’après Mme. H. Gaudmet-Tallon, la tendance est
d’admettre la possibilité de déroger la compétence en concluant une telle clause
877
postérieurement à la naissance des différends , alors que la clause insérée dans le contrat
antérieurement à la naissance de ceux-ci doit être interdite. En effet ce constat n’est pas loin
des règles trouvées en droit communautaire. Les auteurs semblent partager à cette idée
878
notamment lorsque l’assuré est domicilié à l’étranger, la clause est licite .

486. La question peut se poser, à savoir qu’en est-il si la clause attributive de juridiction
porte atteint à une compétence impérative étrangère en matière de la protection de parties
faibles ? On admet que même si l’impérativité de l’ordre juridique étrangère ne vise pas
directement la protection de l’ordre juridictionnel français, mais une fois que l’on est dans ce
régime, comme l’écrit M. B. Audit, « il ne faut pas se saisir au détriment d’une compétence
879
étrangère qui se voulait aussi impérative » .

2) Les prorogations de compétence à l’égard du droit conventionnel.


487. Le droit communautaire admet que l’autonomie de la volonté des parties peut jouer un
rôle en matière de compétence judiciaire. Les prorogations de compétence par voie
contractuelle en droit européen sont régies par l’article 17 de la Convention Bruxelles du
27 septembre 1968 et l’article 23 du Règlement 44/2001, pour le cas de désigner de façon
expresse des parties le tribunal compétent dans une clause attributive de juridiction. Alors que
l’article 18 de la Convention et l’article 24 du règlement régiront le cas de prorogation tacite
de compétence au cours de la procédure ; lorsque l’une des partie a été attraite devant un
tribunal qui n’est pas compétent et elle ne conteste pas ladite compétence.

877
Cf. H. Gaudemet-Tallon, Rép. D. Dr. Internat., n° 96.
878
H. Batiffol, Droit international privé, 8é éd., Paris : LGDJ, t. I, 1993, n° 685 ; P. Mayer, Droit international
privé, op.cit., n° 304.
879
B. Audit, Droit international privé, op.cit., n° 390 ; Obs. sous CA Paris, 14 juin 1995, D. 1996.somm.170.

358
488. Il en va de même dans le litige européen que certaines conditions, de fond et de forme,
doivent être remplies pour que la clause de prorogation de compétence soit valide. Certes,
dans le cadre conventionnel, les critères pour considérer l’application de texte communautaire
sont plus exigent que dans le cas de droit international privé commun.
De prime abord, le domicile de l’une des parties dans un État membre de l’UE est
aussi une condition qui doit être remplie. Si aucune des parties n’est domiciliée dans un État
communautaire mais la clause attribuant de compétence désigne un tribunal de l’un des États
membres, on voit qu’il n’y a aucun lien entre le contrat et le territoire communautaire pour
que la Convention ou le règlement soit applicable. Par exemple, si les deux contractants
domiciliés hors de l’Union, l’un en Thaïlande et l’autre en Chine, ont conclu une clause
attributive de juridiction aux tribunaux britanniques, l’une des parties a saisi le tribunal italien
pour juger le litige. Normalement il s’agit de cas du droit international privé commun mais les
articles 17 al. 1er de la Convention et 23 § 3 du règlement permettent aux parties de conclure
une clause de prorogation de compétence dans ce cas. Sous l’empire de ces textes, les
tribunaux d’autres États communautaires que celui désigné par la clause ne doivent pas
880
statuer au mépris de compétence de ce dernier si celui-ci n’a pas décliné sa compétence .

489. De surcroît, les textes européens pourront jouer leurs rôles aussi dans la mesure où
l’une des parties avait le domicile dans un État membre lors de la conclusion de la clause, ceci
relève du champ d’application de ce texte communautaire, bien qu’aucune des parties ne soit
881
domiciliée sur le territoire d’un État communautaire au moment de l’introduction du litige .
Nous partageons l’avis de Mme H. Gaudemet-Tallon selon lequel « la clause attributive de
juridiction est un accord entre des parties et il faut qu’elles sachent tout de suite de quel alinéa
882
du texte elle relève » . Il n’est pas tout à fait logique de conclure une telle clause si on ne
mesure pas la portée exacte dés le moment de passation un contrat et notamment si la clause

880
Cf. H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 127, p. 118. Selon rapport
Schlosser, les dispositions communautaires ont pour but de « veiller à ce que l’effet dérogatoire d’une telle
convention attributive de juridiction soit reconnu sur l’ensemble du territoire de la Communauté » (Rapport n°
177).
881
Id., n° 128, p. 118 et s ; Cf. P. Gothot et D. Holleaux, La Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, éd.
Jupiter, 1985, n° 163. Contra. G. Droz, Coll. CJCE, mars 1991, p. 272. En ce qui concerne la date
d’appréciation du domicile, cet auteur a affirmé la solution plus libérale, pour lui l’existence d’un domicile dans
la Communauté lors de la conclusion de cette clause ou lors de l’introduction d’une instance est suffisante pour
que les parties puisse bénéficier la protection que leur assure des articles 17 al. 1 er de la Convention ou 23-1° du
règlement.
882
H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 129, p. 120.

359
dépendrait du changement de domicile des parties. La prévisibilité des contractants n’est elle
pas le prime but d’une clause attribuant de compétence ? La question est de savoir si la
nationalité différente des parties contractantes peut rendre l’extranéité au litige, la réponse est
négative en droit communautaire car ce texte ne prend en considération que la différence de
domicile des parties.
La deuxième condition consiste toujours à un lien territorial avec l’Union ; la clause
doit désigner d’un tribunal ou des tribunaux d’un État communautaire. Les règles
communautaires affirment clairement dans leurs textes l’autonomie de la volonté des parties
en permettant de conclure la clause attributive de juridiction aux tribunaux des États
membres. Ce principe a été réaffirmé fermement par la CJCE dans l’arrêt Coreck Maritime
que « l’article 17 de la Convention n’exige pas que la clause attributive de juridiction soit
formulée de telle façon qu’il soit possible d’identifier la juridiction compétente par son seul
883
libellé » .
La dernière condition se penche sur le caractère international de la situation en cause.
Cette exigence ne résulte pas des articles 17 de la Convention et 23 du règlement, en revanche
il relève de la doctrine. Le rapport Schlosser a affirmé que la défaveur avec laquelle les
systèmes juridiques voient les clauses attributives de juridiction dans l’ordre interne obligerait
884
à exiger une situation internationale pour admettre ces clauses . En l’absence de la
jurisprudence de la CJCE, la doctrine actuelle est favorable à la pensée selon laquelle les
articles 17 et 23 n’interviennent qu’en cas de situation internationale. La Cour de cassation
française affirma dans l’arrêt Keller que la situation doit être internationale au moment de la
conclusion de la clause en raison de la sécurité juridique. La Cour a considéré cependant, que
la situation en l’espèce n’est pas internationale en tenant compte des autres facteurs en cause y
885
compris la volonté des parties . La doctrine dominante semble admise que le seul choix du
tribunal étranger incluant dans une clause attribuant de compétence ne confère pas le caractère

883
CJCE, 9 novembre 2000, aff. C-378/98, Coreck Maritime, D. 2000.298 ; JDI.2001.701, note J.-M.
Bischoff ; RCDIP.2001.359, note F. Bernard Fertier. V. en ce sens CJCE, 24 juin 1986, aff. C-22/85, Anterist.
La Cour a estimé qu’« en vertu de l’article 17 de Convention les parties peuvent ainsi attribuer compétence à
des tribunaux qui ne l’auraient pas en vertu de dispositions générales ou spéciales de la convention ou exclure
celle de tribunaux qui seraient normalement compétents en vertu de ces règles ».
884
V. rapport n° 174.
885
Cass. 1er civ., 4 octobre 2005, Keller, D., 2006, p. 1501, note F. Jault-Seseke ; RCDIP.2006.413, note B.
Audit ; JDI.2006.169, note J-M Jacquet ; Gaz. Pal. 24-25 mai 2006, p. 24, note M.-L. Niboyet. Cette décision
est critiquée notamment par M. B. Audit, selon cet auteur « la référence à la volonté des parties est
particulièrement inappropriée. La Cour de cassation autorise finalement les parties à qualifier par elles-mêmes la
nature de la situation ou, à tout le moins, à transformer par la force de leur volonté une situation objectivement
internationale en une situation interne ».

360
886
international au litige . C’est l’arrêt Cie des signaux et d’entreprises électriques de la Cour
887
de cassation en 1985 qui affirme comme tel, bien que cette décision concerne le droit
international privé commun, mais comme le fait remarque Mme H. Gaudemet-Tallon qu’ « il
n’y a aucune raison d’adopter une solution différente dans le cadre de textes
888
communautaires… » . Par ailleurs le principe de l’internationalité du litige a été admis
aussi par la Convention de La Haye du 30 juin 2005 sur les accords d’élection de for dans son
article 1 § 1.

490. Acceptation tacite d’une clause insérée dans un contrat de transport maritime.
En ce qui concerne la forme d’une clause, autre qu’une clause écrite ou une clause verbale
confirmée par écrit, en pratique il arrive souvent que l’une des parties par exemple le
transporteur ayant employé un contrat de transport préimprimé incluant une clause attribuant
889
de compétence et parfois inscrite au verso . Il reste à savoir si le chargeur a signé ce contrat
sans avoir contesté cette clause, est-ce que l’on peut présumer que celle-ci est valide ?
L’article 17 de la Convention et l’article 23 du règlement n’empêchent pas le juge d’admettre
une clause de juridiction présentée de rapports commerciaux courants entre les parties selon la
890
CJCE . Par ailleurs en l’absence d’un accord verbal antérieur portant expressément sur la
clause de juridiction, si le connaissement se situe dans le cadre des « rapports commerciaux
courants » entre les parties et que ces rapports sont régis par des conditions générales
comportant une clause attributive de juridiction, « il serait contraire à la bonne foi de dénier

886
Contra. G. Droz, pour cet auteur, le choix d’un tribunal étranger dans une clause attributive de juridiction
suffit à rendre le caractère international au litige et à appliquer l’article 17 de la Convention même si le rapport
juridique en cause serait purement interne. Si l’on suit de cet argument, ce serait un visa pour le forum shopping
européen.
887
L’arrêt précité, supra note n° 861.
888
H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 134, p. 126.
889
CJCE, 19 juin 1984, aff. C-71/83, Tilly Russ, JDI.1985.159, note Bischoff ; RCDIP.1985.385, note H.
Gaudemet-Tallon. Sous réserve de l’existence des rapports commerciaux courants, d’après la Cour, la seule
inscription d’une clause attributive de juridiction au verso d’un connaissement ne satisfaisait pas aux exigences
de l’article 17 de la Convention.
890
CJCE, 14 décembre 1976, aff. C-24/76, Estasis, et aff. C-25/76, Segoura, JDI.1977.734, obs. Bischoff ;
RCDIP.1977.576, note Mezger ; D., 1977, p. 349, obs. Audit. Cf. Cass. 1er civ., 7 juin 2006, n° 04-14.960, RTD
com.2007.264, Ph. Delebecque ; JCP (G) 2006.IV.2453 ; Procédures 2007, comm. 136, note C. Nourissat : la
Cour a décidé que la seule présence de la clause de prorogation de compétence dans les conditions générales de
vente ne suffit pas.

361
891
l’existence d’une prorogation de compétence » . Autrement dit, pour considérer
l’acceptation tacite, il faut tenir compte des usages que les parties avaient établis
antérieurement entre elles lorsque le juge a trouvé une clause de juridiction insérée au verso
ou aux conditions générales d’un contrat de transport maritime.

892
491. Ce principe a été repris régulièrement, même dans l’arrêt récent du 17 février 2010
rendu hors du régime de contrat de transport maritime. En l’occurrence, l’agence pour la
sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ci-après ASECNA) dont la
mission est d’assurer les services de contrôle aérien au dessus du continent africain, son siège
social est à Dakar et le siège administratif est à Paris, était en facture le coût aux compagnies
aériennes dont les avions survolent ce secteur. L’ASECNA a attrait les deux sociétés en
paiement de factures devant le tribunal de commerce de Paris en vertu d’une clause attribuant
de compétence à cette juridiction. Les deux sociétés ont contesté cette compétence en formant
un contredit lequel a été rejeté de la procédure. A savoir que l’une est la société belge qui a
siège sociale dans l’UE alors que l’autre est la société congolaise dont le siège social se trouve
en dehors des États membres de l’UE. Dès lors le texte communautaire n’applique pas à la
clause soulevée par la société congolaise, mais l’article 48 du CPC.
Certes, le texte interne semble plus strict que celui du droit communautaire. Si on suit
la jurisprudence pour chaque cas distinct, on peut dire que pour le premier cas où l’article 23
du règlement s’applique, la Cour s’appréciera comme valable la clause de compétence même
893
sans avoir une acceptation écrite . En revanche, la Cour pourra considérer dans le second
cas (la société congolaise) où l’article 48 du CPC s’applique dans la mesure où la clause
figurant sur des documents commerciaux avec la connaissance éventuelle par l’une des parties
894
ne suffit pas, même au cas d’affaires suivies par les parties, à rendre opposable . Il est

891
CJCE, 19 juin 1984, aff. C-71/83, Tilly Russ, préc. ; Cf. Cass. 1er civ., 12 décembre 2006, n° 05-21.388 en ce
qui concerne l’expression d’intention de cocontractant sur cette clause, la Cour de cassation a avancé que « la
clause de compétence faisant partie de l’économie des contrats internationaux, comme la définition du mandat
confié de celle des contrats d’agents commerciaux, (…) la signature globale du contrat constituant un écrit au
sens de l’article 17 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, suffisait à exprimer le consentement
(…) à la clause de prorogation de juridiction ».
892
Cass. 1er civ., 17 février 2010, D., 2010, AJ. 23 février 2010, obs. X. Delpech ; JCP (G) 2010, n° 16, p. 440,
note Ch. Bruneau. V. également CA Rouen, 25 septembre 2008, n° 08/01001, Mutuelles du Mans IARD.
893
Cass. 1er civ., 9 janvier 1996, RCDIP.1996.731, note H. Gaudemet-Tallon ; JDI.1997.173, note A. Huet ;
Cass. 1er civ., 7 juin 2006, n° 04-14.960, préc. supra note n° 890.
894
Cass. 1er civ., 30 juin 1992, D. 1994, p. 169, note Ph. Guez ; Pour la clause par référence Cf. Cass. 1er civ.,
16 février 1999, JCP (G) 1999, II, 10162, note B. Fillion-Dufouleur.

362
certainement gênant de retenir ces solutions distinctes pour les défendeurs de même
obligation. Comment la Cour de cassation va s’en sortir ? Elle a répondu de manière globale
que « même si la clause attributive de juridiction n’ait pas été formulée en forme écrite et
expresse, sa validité n’en est pas moins reconnue, compte tenu de son caractère notoire et
habituel dans les relations entre l’ASECNA et les deux compagnies aériennes ». Il paraît dans
le fait qu’en tenant compte de leurs relations d’affaires antérieurement avec l’ASECNA, le
nombre des factures envoyées et reçues sans contester pendant une longue période (depuis
2002), alors ces deux défendeurs ne pouvaient soutenir ignorer la clause attributive de
juridiction, reproduite sur chacune des factures adressées à ces derniers. Dès lors, les
conditions de l’article 23 du règlement Bruxelles I selon lesquelles « sous une forme qui soit
conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir
connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce
895
par les parties à des contrats du même type dans le branche commerciale considérée » ,
ont été bien remplies. Pour ces raisons la validité de la clause de prorogation de compétence
paraît s’apprécier. Le point important du raisonnement de la Cour est le fait d’avoir les
relations d’affaires depuis plusieurs années. Cette solution est convenable en matière des
contrats internationaux, car en pratique on ne peut pas demander aux parties contractantes une
acceptation rigide pour tous les contrats qui peuvent en avoir plusieurs par jour. Le principe
de prévisibilité au sens traditionnel n’est pas apte à employer dans ce cas.

B. L’ambigüité de la Cour suprême Dika à l’admission des clauses attributives


de juridiction.

492. En droit thaïlandais, la question peut se poser si les parties peuvent, par accord, choisir
un for pour régler leur litige ? Comme dans d’autres matières de nos jours (2011), la
Thaïlande n’est partie contractante d’aucune convention internationale applicable aux clauses
attributives de juridiction. Nous étudions alors sa tendance en droit international commun.

1) La tendance critiquée de droit commun : hésitation de l’appréciation de la clause


attributive de juridiction.

895
Admettant que le document lequel est inséré la clause attributive de juridiction devrait identiques dans tous
les détails à ceux qui sont employés dans les relations d’affaires antérieures des contractants et qu’il soit de
même nature que les précédents.

363
493. Les avis des juristes ne sont pas clairs sur ce point. Normalement la juridiction et la
compétence du juge sont établies par la loi, mais la prorogation de compétence surtout dans le
litige à caractère international ne paraît dans aucun texte de loi. Alors que, lorsque l’on étudie
la jurisprudence, la doctrine et même le droit des pays étrangers, on trouve qu’il est usuel en
pratique que les contractants pourraient insérer dans leur contrat international une clause
attributive de juridiction, et il est admis de manière répandue par la plupart des États. Il reste à
savoir, en l’absence de disposition de droit thaïe, si les parties contractantes peuvent conclure
une clause de prorogation de compétence ou non. Comme on le sait, que l’ancien article 7 (4)
du Code de procédure civile a stipulé ainsi :
« Si les contractants ayant conclu, par écrit, une clause attributive de
juridiction avant ou après que le litige soit né du contrat, pour introduire le litige devant un
tel tribunal de premier degré qui n’est pas compétent ou n’est probablement pas compétent
sur ledit litige selon les dispositions de présent Code, une telle clause ou tel accord est
valable. Pourtant la juridiction compétente devrait être celle à laquelle l’un des contractants
896
a domicile, soit celle où le litige est né, soit celle où se situe le bien en conflit » .

D’après cet article, il y a deux avis juridiques intéressants. D’une part, certains
897
auteurs pensent que cet article permettait aux parties contractantes de choisir le tribunal
étranger pour statuer le litige et lorsque cette disposition a été abrogée, alors on ne peut plus
soulever une clause attributive de juridiction devant la Cour thaïe. D’autre part, la majorité
898
des auteurs soutiennent le concept selon lequel les contractants peuvent librement conclure

896
มาตรา ๗ (๔) แห่ง ประมวลกฎหมายวิธีพิจารณาความแพ่ง(เดิม) บัญญัติว่า “ ถ้าได้มีการตกลงกันไว้เป็ นหนังสื อว่า คู่สัญญาได้ยินยอมกัน
ว่า บรรดาข้อพิพาทที่ได้เกิดขึ้นแล้วก็ดี หรื อข้อพิพาทที่อาจจะเกิดขึ้นจากข้อสัญญาก็ดี ให้เสนอต่อศาลชั้นต้นศาลใดศาลหนึ่ งตามที่ได้ระบุไว้ ซึ่ ง
ไม่มีหรื ออาจไม่มีเขตศาลเหนือคดีน้ นั ตามบทบัญญัติแห่ งประมวลกฎหมายนี้ วา่ ด้วยศาลที่จะรับคาฟ้ อง ข้อตกลงเช่ นนี้ ให้เป็ นอันผูกพันกันได้ แต่
ศาลที่ได้ตกลงกันไว้น้ นั จะต้องเป็ นศาลที่คู่ความฝ่ ายใดฝ่ ายหนึ่ งมีภูมิลาเนาอยูใ่ นเขตศาลนั้น หรื อมูลคดี ของเรื่ องนั้นได้เกิ ดขึ้น หรื อทรัพย์สินที่
พิพาทกันนั้นตั้งอยูภ่ ายในเขตศาลแห่ งศาลนั้นๆ”
897
Dow Praruhut, « Reconsidération sur l’accord de prorogation de compétence », Sukhothai Thammatirat Law
Journal, vol. 4, n° 1 (Juin 1993), p. 72. Cet auteur a fait valoir que l’absence de texte de loi permettrait de
conclure une clause attributive de juridiction, une telle clause insérée dans le contrat est nulle en raison de
contrariété à l’ordre public. Contra. P. Pivavatnapanich, Droit international privé, Bangkok : Université de
Thammasat, 2008, p. 94-95. Cet auteur soutient que l’article 7 (4) de l’ancien CPC ne stipulait que le cas de
choisir le juge thaï comme tribunal compétent, mais il ne prétendait pas au cas de clause attributive de juridiction
à un tribunal étranger pour statuer le litige. Dès lors, il semble douteux de conclure que les parties avaient pu
choisir le tribunal étranger au visa de cet article.
898
S. Lengthaisong , « La compétence du tribunal selon un accord : pour la compréhension », Sukhothai
Thammatirat Law Journal, vol. 5, n° 2 (Décembre 1993), p. 40-41 ; K. Luchai et P. Kanchanachittra-
Saisoonthorn, « La conception relative à la clause attributive de juridiction aux tribunaux étrangers à la fin de
déroger la compétence du juge thaï », Commentaire de décisions de la Cour suprême Dika n° 951/2539 et n°
5809/2539, in Conflit de lois, Bangkok : Winyuchon, 2006, p. 177-193, spéc. p. 181 ; S. Thaweechaikarn
Commentaire de décision de la Cour suprême Dika n° 951/2539, Dulapaha Journal du Ministère de Justice, vol.
44, n° 2, 1997, p. 211-218, spéc. p. 214 et s.

364
une clause prorogation de compétence puisqu’aucune disposition du droit positif n’interdit de
le faire. En l’absence de disposition de droit, il faut appuyer sur l’article 4 du CCC car il s’agit
du cas de lacune de loi. Pour certains, la loi qui permet de conclure cette clause est l’article 3
de la Loi 1938 relative au conflit de lois ; les principes généraux de droit international privé
qui doivent être appliqués pour combler ces lacunes. Cependant, à notre avis, cette question
ne relève pas de l’article 3 de la Loi relative au conflit de lois, car la teneur de cette Loi ne
constitue que les règles conflictuelles, et elle ne règle pas le problème du conflit de
juridiction. Alors, il n’est pas possible d’étendre son champ d’application à une compétence
juridictionnelle.

494. Admettant que la force obligatoire de cette clause se base sur les principes de la
procédure civile internationale qui sont développés étroitement avec le principe de
l’autonomie de la volonté des parties qui est un facteur essentiel pour la coopération
899
internationale en matière civile et commerciale . A notre avis, il n’y a aucune raison pour
le juge thaï de ne pas se conformer à cette pratique de droit procédural international et la
pratique du commerce international. Mais nous dans l’article 7 (4) de l’ancien CPC, le terme
« le tribunal » a été mentionné sans préciser si c’était celui de la Thaïlande ou d’autre État.
Alors, lorsque l’on prend en considération la définition donnée par l’article 1 (1) du CPC qui
stipule que : « Dans ce code, s’il ne stipule autrement, « le tribunal » signifie la Cour
900
judiciaire ou le juge qui statue le litige en matière civile » , la jurisprudence affirma dans la
même orientation que cela signifie le tribunal ou le juge thaï. On sait que dans le système
codifié, une telle ou telle disposition doit être interprétée conformément aux autres et dans la
même direction. Par conséquent, le terme « tribunal » dans l’article 7 (4) de l’ancien CPC
devait être interprété en tenant compte de lexique donnée par l’article 1 (1) du même code,
c'est-à-dire qu’il désigne uniquement les tribunaux thaïs.

495. La réflexion de la jurisprudence avant l’abrogation de l’article 7 (4). La Cour


suprême a eu l’occasion dans l’affaire du transport maritime de marchandises de trancher le
litige portant sur la clause attributive de juridiction.

899
J. Jodlowski, « Les conventions relatives à la prorogation et à la dérogation à la compétence internationale
en matière civile », RCADI.1974.483, spéc. p. 489.
900
มาตรา ๑ (๑) แห่ งประมวลกฎหมายวิธีพิจารณาความแพ่ง บัญญัติว่า “ “ศาล” หมายความว่า ศาลยุติธรรมหรื อผูพ้ ิ พากษาที่ มีอานาจพิจารณา
พิพากษาคดีแพ่ง”

365
En l’espèce, la compagnie thaïe, avait conclu un contrat de vente internationale de
marchandises avec une société étrangère. La société de droit thaï, chargeur, avait passé aussi
un contrat d’assurance du transport avec la compagnie assureur étrangère. Le dommage a été
causé pendant le transport, la compagnie assureur, ayant indemnisé le destinataire, a alors
assigné en indemnisation le transporteur au titre des avaries devant le tribunal thaïlandais. Le
transporteur défendeur a invoqué l’existence d’une clause attributive de juridiction conclue
entre le transporteur et l’acheteur thaï pour que la Cour ait rejeté le litige en raison de
compétence exclusive du tribunal britannique choisi par les parties.
L’instance a été introduite devant la Cour avant la révision du Code de procédure
civile en 1991, pour cette raison la validité de cette clause doit être régie par les dispositions
de l’ancien droit ; l’article 7 (4) du CPC. La Cour a estimé que « le tribunal anglais n’est pas
le tribunal compétent à l’égard de l’article 7 (4) du Code de procédure civile ; Vu qu’il n’est
ni le tribunal du domicile de l’une des parties, ni celui auquel le litige est né ; Considérant
que la clause de prorogation de compétence conclue par les contractants n’est pas applicable
901
dans ce cas » . Par ailleurs, la Cour est allée plus loin dans sa décision en considérant que
ladite clause était contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs du people… Dans ce cas, le
raisonnement de la Haute juridiction n’était pas convaincu. A notre avis, lorsque la volonté
des parties est intervenue de façon licite pour désigner le tribunal compétent, elle doit être
respectée. Car il résulte explicitement de l’autonomie de la volonté des parties.
D’après le cas en l’espèce, la Cour avait mentionné « le tribunal du domicile de l’une
des parties », la question peut se poser à savoir quels sont les critères employés par la Cour
pour juger que le défendeur n’est pas domicilié au Royaume Uni ? Puisqu’il est possible que
le défendeur a plusieurs domiciles à la fois, aussi bien en Thaïlande qu’en Angleterre, par
exemple. Dès lors, la Cour doit définir d’abord le domicile au sens de l’article 7 (4) qu’il
signifie le domicile de défendeur au moment de conclusion de la clause attributive de
juridiction ou bien celui au moment de porter plainte. Là aussi, il est plus logique de répondre
à cette question en tenant compte de domicile de défendeur au moment de conclusion de
ladite clause. Malheureusement, ce n’est pas le cas dans ce litige, car le défendeur a fait
valoir qu’il avait son domicile en Thaïlande sans invoquer qu’il a aussi un autre domicile en
Angleterre. Dans cette hypothèse, on ne peut pas reprocher au juge de ne pas statuer sur cette
issue.

901
Cour suprême Dika, n° 951/2539 (1996), Signa Property and Casualty Insurance Co. Ltd., c/ Vollem
Shipping ; Cf. S. Thaweechaikarn, « Commentaire de décision de la Cour suprême Dika n° 951/2539 », loc. cit.

366
496. La réflexion de jurisprudence après la révision du CPC. En 1991, l’article 7 (4) de
l’ancien CPC a été abrogé, alors le texte du CPC actuel garde toujours son silence sur cette
question. Qu’en est-il si les contractants souhaiteraient conclure une clause attributive de
juridiction à un tribunal étranger ? Un autre jugement très critiqué rendu par la Cour suprême
Dika mérite bien une analyse. Dans la décision n° 5809/2539 rendu en 1996, la même année
que la décision citée plus haut, les juges thaïs ont eu une autre occasion de trancher le litige
concernant le choix du for par une clause attributive de juridiction, c’est aussi en matière de
transport international de marchandises (les vaches) par voie maritime. Une telle clause a été
conclue par écrit dans le connaissement entre les contractants en choisissant le tribunal du
Danemark pour trancher le litige.
En l’occurrence, le sinistre étant arrivé pendant le transport, alors le transporteur avait
été attrait par les assureurs devant le juge thaï malgré l’existence de ladite clause. Le
transporteur a contesté la compétence du juge thaï en invoquant la clause attributive de
juridiction. Il faut rappeler que, dans cette affaire, le tribunal thaï a été saisi après la révision
du Code de procédure civile, c'est-à-dire qu’il n’y a plus de l’article 7 (4) dans ce débat. La
Cour suprême a estimé que « le choix du tribunal de Copenhague (Danemark) en tant que la
juridiction compétente, afin de régler le litige né du contrat de transport, par une clause
attributive de juridiction insérée dans le connaissement n’a pas, dans ce cas, lié le plaignant
902
(l’assureur) » . En l’espèce, on voit que l’assureur après avoir subrogé dans les droits du
chargeur, a porté plainte contre le transporteur mais la Cour a estimé que la clause attributive
de juridiction ne lie que les contractants du contrat de transport maritime en excluant
l’assureur.
On constate que la Cour n’a pas refusé explicitement la validité et la force obligatoire
d’une clause attributive de juridiction. Mais elle avait jugé comme telle puisqu’elle estimait
que « la subrogation de l’assureur résulte de l’article 880 du CCC c'est-à-dire la subrogation
légale et non pas la subrogation conventionnelle », alors seule la dernière peut lier un
assureur. Le raisonnement de la Cour est très critiqué, en matière d’assurance, la subrogation
de l’assureur a eu lieu dès lors qu’il a réglé les dommages-intérêts au preneur d’assurance.
C'est-à-dire que tous les droits de l’assuré sont transférés à l’assureur y compris les droits
selon le connaissement.

902
Cour suprême Dika, n° 5809/2539 (1996), Signa Property and Casualty Insurance Co. Ltd., c/ Coral Line,
Recueil de la Cour suprême Dika 1996, note P. Eagjariyakorn, p. 29-37.

367
497. L’orientation de jurisprudence nous montre l’irrecevabilité de clause attributive de
juridiction devant la Cour thaïe. Afin de rejeter une telle clause, la Cour a appuyé sur les
903
raisonnements variés : la contrariété avec l’ordre public ; le caractère de non-exclusive de
904
juridiction de la clause ; le défendeur est domicilié en Thaïlande ; le litige est né en
905
Thaïlande donc il relève de la compétence du juge thaï .

498. Alors de nos jours, c’est uniquement l’article 4 du CPC qui s’applique pour déterminer
la compétence du juge. En attendant la jurisprudence, il faut bien tenir compte du contexte du
commerce international. La plupart des pays admettent dans leurs systèmes juridiques la
possibilité de choisir le for compétent par une clause attributive de juridiction. Le silence de
droit, la nuance et aussi l’hésitation de la Cour suprême dans ses motivations de la décision
peuvent affecter la confiance des investisseurs étrangers et peuvent être un obstacle au
commerce international de la Thaïlande. En particulier si cette décision de la Cour thaïe doit
être reconnue ou obtenue l’exequatur à l’étranger, il risque que le tribunal étranger refuse la
reconnaissance ou l’exécution.
A notre avis, le principe de l’autonomie de la volonté des contractants doit être adopté
ici en tant que solution, notamment dans la matière en dehors du domaine de la protection des
parties faibles. Toutefois, il est différent en matière de contrats de transports multimodaux
internationaux.

2) Palliatif de droit positif en matière spécifique : le contrat de transports combinés.


499. Les transports internationaux de nos jours développent rapidement en parant en
formes diverses pour répondre aux besoins de clients. Dans le passé la Thaïlande a eu
beaucoup de problèmes relatifs aux transports de marchandises qui n’étaient pas le transport
simple par exemple de port à port. Il arrive très souvent en pratique que les marchandises ont
été transportées par plusieurs modes avant d’arriver à la destination dont il est difficile de

903
Cour suprême Dika, n° 951/2539 (1996). S’agissant la notion d’ordre public employé par la Cour Dika, on
sait qu’en Thaïlande les juges ne distinguent pas la notion d’ordre public et celle de lois de police. La
jurisprudence affirme que les juges thaïs ont fait un recours au terme d’ordre public même qu’il s’agit de lois de
police. Admettant que ceci peut conduire à une mauvaise compréhension. C’est la raison pour laquelle nous
essayons de montrer l’importance de la détermination des deux notions de façon distincte. Car, le moment
d’intervention des deux mécanismes est différent.
904
Cour suprême Dika, n° 2465/2532 (1989).
905
Cour suprême Dika, n° 2465/2532 (1989), préc. ; n° 951/2539 (1996) ; n° 9083/2539 (1996) ; n° 447/2540
(1997) ; n° 9524/2544 (2001).

368
prouver pendant quel transport le dommage a été causé et que la série de lois sur les transports
n’ait pas pu donner la solution juste aux parties contractantes. Car il fallait appliquer les lois
diverses à chaque contrat tels que le Code civil et commercial sur le transport terrestre et le
transport aérien, puis la loi portant sur le transport ferroviaire applique au transport de
marchandises par train tant le contrat interne que le contrat international. Alors après avoir
attendu pendant longtemps, les rédacteurs ont finalement adopté la Loi de 2005 relative aux
contrats de transports combinés. Ce qui nous intéresse, c’est l’article 65 de cette loi qui
permet aux contractants de conclure la clause attributive de juridiction, certes, cette fois-ci le
texte est clair et n’est plus l’objet du débat sur ce sujet. Est inclu aussi dans cet article le cas
de l’absence de clause d’élection de for dans le deuxième alinéa, mais c’est le premier alinéa
qui nous intéresse. L’article 65, 1er al. dispose ainsi :
« Les parties contractantes des transports combinés peuvent accorder l’attribution de
compétence au tribunal de l’État, parmi ceux qui sont compétents sur le contrat de transports
combinés ou le délit conformément à la loi de cet État, pour trancher le litige. Cette clause
peut être figurée dans le connaissement combiné ou le contrat de transports
906
multimodaux » .

En attendant la jurisprudence nous croyons que, cette fois-ci, la Cour ne pourrait plus
renoncer à l’application de cette clause quelque soit la raison, si elle est valide. La loi admet
explicitement dans son dernier alinéa la convention d’élection du for après la naissance du
litige, mais la preuve écrite est nécessaire dans ce cas. Force est de constater que dans tous
les cas de choix du for, la prorogation de compétence devrait être exercée uniquement en
faveur des tribunaux qui sont compétents sur le litige. En effet les dispositions de cette
nouvelle loi viennent affirmer la tendance positive du législateur et du juge d’admettre le jeu
de la clause de prorogation de compétence non seulement en matière de transports combinés
mais également en d’autres matières des contrats commerciaux internationaux.

§ 2 : Limites de la prorogation de compétence à l’épreuve de la protection de partie


faible.

500. Ces règles assurent des options de compétence conférées à la partie faible
demanderesse, en même temps, pour la défenderesse, le moyen d’adopter un texte permettant

906
มาตรา ๖๕ วรรคแรก แห่ ง พระราชบัญญัติการขนส่ งต่อเนื่ องหลายรู ปแบบ พ.ศ. ๒๕๔๘ บัญญัติว่า “คู่สัญญาขนส่ งต่อเนื่ องหลายรู ปแบบ
อาจตกลงกันให้ศาลในประเทศใดประเทศหนึ่ งที่มีเขตอานาจพิจารณาคดี แพ่งที่มีมูลกรณี จากสัญญาขนส่ งต่อเนื่ องหลายรู ปแบบหรื อละเมิดตาม
กฎหมายของประเทศนั้น เป็ นศาลที่มีอานาจพิจารณาพิพากษาคดี โดยระบุไว้ในใบตราส่ งต่อเนื่ องหรื อสัญญาขนส่ งต่อเนื่ องหลายรู ปแบบก็ได้”

369
que celle-ci peut être assignée devant le tribunal de son domicile. Alors que les clauses
attribuant de compétence sont spécialement réglementées en tenant compte de protection
particulière. Nous étudions tout d’abord les règles principales retenues dans cette matière (A).
Ensuite nous allons voir les exceptions admettant le retour à une clause de prorogation de
compétence (B).

A. Principes, les limites draconiennes retenues en matière de la protection de


partie faible.

501. Bien que la jurisprudence et le droit français admettent des clauses attributives de
juridiction, il comporte aussi certaines limites. Premièrement, il faut tenir compte du caractère
d’extranéité du contrat, ensuite la question est de savoir si le for choisi doit présenter les liens
effectifs avec le litige. La Cour de cassation répond dans un sens négatif dans l’arrêt Europa-
907
Carton qu’il n’exige pas des rapports sérieux entre le litige et le tribunal étranger désigné
dans une clause attributive de juridiction. Deuxièmement, la limite est fondée sur le respect à
la compétence territoriale impérative d’une juridiction française. Il s’agit de matière de bien
immeuble, de la protection des parties faibles tels que le contrat de travail, le contrat
d’assurance, le contrat du consommateur ; les parties faibles dans ces contrats sont protégées
par les règles impératives sur la juridiction compétente. C'est-à-dire qu’il est prohibé de
conclure un accord prorogative de compétence du tribunal déjà déterminé par la loi pour
attribuer compétence à une autre juridiction. Dernièrement, la limite consiste à l’interdiction
de conclure une clause attribuant de compétence à un tribunal étranger dans les litiges portant
sur l’état des personnes. Nous avons déjà étudié l’issue de caractère international du contrat
en cause, alors que la dernière limite ne nous intéresse pas ici. Nous allons étudier alors la
deuxième limite qui est consacrée et bien fondée dans le cadre de droit communautaire. En
effet les dispositions sur la protection d’acheteur sont les premiers textes destinés à protéger
une partie réputée faible lesquels sont consacrés depuis la Convention de Bruxelles de 1968.
Les droits internes étatiques ont adopté les dispositions protectrices des consommateurs entre
les années 1968 et 1978, car la Convention d’adhésion de 1978 avait pris en considération
tous les contrats conclus par les consommateurs et non pas seulement les emprunts ou les

907
Cass. com., 19 décembre 1978, Europa-Carton, JDI.1979.366, note H. Gaudemet-Tallon ;
RCDIP.1979.617, note A. Huet.

370
908
achats comme avant . Ainsi que la protection du salarié qui a été adopté finalement lors de
la Convention de Saint Sébastien en 1989. Le règlement Bruxelles I a comblé toutes les
lacunes en consacrant les règles de compétence pour les contrats d’assurance, les contrats
conclus par les consommateurs et les contrats individuels de travail. Alors trois domaines
importants des parties faibles sont bien protégés par la série de conventions de Bruxelles.
La Convention de Bruxelles et le règlement Bruxelles I limitent la validité de clause
attributive de juridiction dans certains domaines. Chaque fois que l’on constate le critère de
rattachement retenu par l’une de ces dispositions, il y a compétence exclusive des juges des
États membres. Plus précisément, la compétence d’un tribunal de l’État membre de l’Union
européenne est dotée d’une force particulière. Il s’agit des dispositions protectrices prévues
par les articles 16 de la Convention et 22 du règlement ; en matière d’assurance, de contrat de
consommateur, et de contrat de travail.

502. Lorsque l’on étudie la structure du système des règles de compétence protectrices
d’une partie faible, on constate que les solutions données par ces règles propres du Règlement
aux contrats d’assurance, contrats conclus par le consommateur, ou contrats de travail ne sont
pas identiques que celles stipulées dans l’article 5 de la Convention, pourtant le concept n’est
pas différent. La protection de partie faible doit être garantie et son domicile, notamment
lorsqu’elle est défenderesse, est le critère plus apte. Dans l’hypothèse où la partie faible est
demanderesse, le souci de lui assurer des options de compétence paraît clair. Par ailleurs, la
possibilité de conclure une clause attribuant de compétence est aussi réglementée dans ce
même souci de protection de partie faible. Force est de constater que si ces règles
communautaires ne sont pas respectées, le jugement rendu ne bénéficiera pas du système de
reconnaissance et d’exécution dans l’UE.
Afin de bien illustrer la construction des règles de protection de parties faibles, nous
proposons de traiter ces règles par le statut procédural de celle-ci à savoir la demanderesse et
la défenderesse.

503. La partie faible demanderesse. Citons le cas du consommateur demandeur. Plusieurs


possibilités sont admises par la Convention et le règlement Bruxelles I. Le consommateur
peut alors agir devant les tribunaux de l’État communautaire du domicile de son
cocontractant ; soit les tribunaux de l’État communautaire du lieu de la succursale si le

908
Cf. H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 263.

371
défendeur est domicilié dans un autre État communautaire ; soit les tribunaux de l’État où le
demandeur lui-même a son domicile. Par ailleurs si le cocontractant du consommateur est
domicilié dans un État tiers mais qu’il possède une succursale ou autre établissement dans un
État communautaire, dans ce cas le consommateur pourra l’assigner devant les tribunaux de
cet État (Section 4). Pour le contrat d’assurance, lorsque la partie faible ; le preneur
d’assurance, l’assuré ou le bénéficiaire, est demanderesse, elle se voit reconnaître plusieurs
possibilités de même que le cas précité tels que le for de son domicile ; le for du lieu du fait
dommageable ; le for de la succursale y compris le for résulte de règles de compétences
dérivées qui peuvent, en soi, conduire aux fors divers (Section 3). En ce qui concerne le
travailleur demandeur, c’est le même principe ; autre que le tribunal du domicile de son
employeur, il a possibilité d’assigner contre celui-ci devant le tribunal du dernier lieu où le
travailleur a accompli habituellement son travail ou devant le tribunal du pays où se trouve ou
se trouvait l’établissement qui a embauché le travailleur en cas où le travailleur accomplit son
travail dans plusieurs pays (Section 5). Nous observons que c’est souvent après la cessation
du travail que le litige soit né, donc il est présumé qu’il est convenable pour le salarié
d’introduire l’instance devant ce tribunal.

504. La partie faible défenderesse. Le cas de consommateur défendeur, celui-ci ne peut


être attrait que devant les tribunaux où il a son domicile. Ceci est pour assurer que la partie
faible ne sera jamais obligée d’aller se défendre hors de l’État où elle est domiciliée. Pour le
contrat d’assurance, c’est toujours les tribunaux de l’État du domicile de défendeur qui prend
en charge. Le domicile reste toujours l’argument fort pour la protection de la partie faible. En
ce qui concerne le salarié défendeur, l’employeur ne peut porter plainte contre lui que devant
les tribunaux de l’État où il a son domicile.

505. La compétence juridictionnelle du juge thaïe en matière de partie faible. On est


toujours en droit commun. En effet, le terme « partie faible » n’est pas employé par le texte de
loi thaïe. Par conséquent on ne regroupe jamais les contrats conclus par les parties faibles
comme en droit français, précisément en droit européen. Il faut rappeler qu’on applique à
chaque contrat les règles de droit spécifiques, par exemple la loi de protection de
consommateur, la loi sur le contrat d’assurance, la loi du travail et la loi sur les clauses
abusives (Unfair Contract Terms). A savoir qu’il n’y a pas de dispositions relatives à la clause
attributive de compétence dans la loi de protection de consommateur. Il en est de même pour

372
les droits du travail, la loi sur le contrat d’assurance et la loi sur les clauses abusives. Si ce
problème se pose, on fait toujours recours aux principes généraux de droit commun.

B. Exceptions, le retour à l’admission d’une clause attribuant de compétence.

506. Rappelons que ces règles sont destinées à établir la meilleure protection pour la partie
réputée « faible » dans le rapport contractuel en permettant celle-ci d’introduire une instance
contre son cocontractant devant plusieurs tribunaux dont l’un d’eux est estimé plus favorable
et convenable. C’est la raison pour laquelle une attribution de compétence à un ou plusieurs
tribunaux autres que ceux compétents en vertu de ces règles européennes, sera considérée
comme dangereuse pour la partie faible. Les rédacteurs du texte communautaire depuis 1968
avaient limité le jeu des clauses attributives de juridiction pour ne pas porter atteinte aux
intérêts de cette partie. Le principe est d’interdire des prorogations de compétence. La
question est de savoir dans quelles circonstances les parties pourront-elle conclure une clause
de prorogation de compétence ?
On peut citer en premier lieu parmi les exceptions qui se fondent sur la modalité des
clauses postérieures à la naissance du différend (arts. 13, 17, 21). Cette technique est prévue
comme la première exception admise en commun dans toutes les catégories de protection de
partie faible en raison de sa connaissance à quoi elle s’engage. Cette exception a été admise
pour tous les trois contrats dans la matière de partie faible. Force est de constater que ceci
englobe aussi la prorogation tacite des articles 18 de la Convention et 24 du Règlement. Car la
comparution du défendeur implique que le différend soit déjà né et peut être accepté plus
909
facilement que la clause attributive de juridiction . En deuxième lieu, l’exception dite
« commune » repose sur la clause permettant à une partie faible de saisir d’autres tribunaux
que ceux indiqués à chaque section concernée. Puisque les rédacteurs croient que cette clause
est favorable à la partie faible même si elle a été conclue avant la naissance du litige.
Cependant l’article 17 de la Convention n’inclue pas la clause attribuant de compétence au
tribunal d’un État tiers et ceci est réglé par l’article 21 du règlement Bruxelles I. En dernier
lieu, enfin l’exception qui peut être considérée comme la règle commune s’agissant d’une
clause portant sur la prorogation de compétence lors de la conclusion du contrat aux
tribunaux de l’État communautaire du domicile commun des parties. Par exemple lorsque la

909
H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 163 et s.

373
partie faible et l’assureur dans le contrat d’assurance ont conclu une clause lors de la
conclusion du contrat pour attribuer la compétence au tribunal de l’État communautaire où se
trouve leur domicile commun lorsque le fait dommageable se produit à l’étranger. Il ne paraît
pas dangereux pour la partie faible car elle ne concerne pas l’action directe intentée par la
victime.

507. Hormis ces trois exceptions, pour répondre aux besoins économiques, les rédacteurs
ont ajouté deux exceptions spécialement pour les contrats d’assurance s’agissant de la grande
assurance et le cas où le preneur d’assurance domicilié dans un État tiers. La première est
910
destinée à permettre aux contractants dans la grande assurance le libre choix du tribunal
compétent (art. 12-5° (C) et 13-5° (R)), car ils sont considérés aux pieds égaux. Pour le
second cas, il faut observer que le preneur d’assurance est aussi une partie faible mais en
raison du problème très particulier visé par le Royaume Uni, les rédacteurs ont dû admettre
911
cette possibilité .
912
Il en va de même pour le cas du consommateur , autres que les exceptions
communes précitées, les 15-3° (C) et 17-3° (R) autorisent par ailleurs une clause de
prorogation de compétence entre le consommateur et son cocontractant aux tribunaux de
l’État communautaire de leur domicile ou résidence habituelle commun lors de la conclusion
du contrat. Hormis la protection de consommateur, le texte n’oublie pas de protéger le
cocontractant du consommateur dans l’hypothèse où le consommateur changera son domicile
913
à un État tiers .
Pour le travailleur, les articles 17 (C) dernier alinéa et l’article 21 (R) visent le cas du
travailleur conclu une clause attributive de juridiction. Les cas d’exceptions admises par ces
articles peuvent être rapprochés à d’autres dispositions de protection d’une partie faible
précitées. Mais, on constate que les dispositions ne stipulent que deux cas d’exceptions, c'est-
à-dire qu’elles ne précisent pas le cas de domicile commun des parties dans un État

910
La notion de grande assurance englobe l’assurance de grands risques industriels ou commerciaux dans
laquelle l’entreprise assurée n’a pas le même besoin de protection que le preneur d’assurance simple particulier.
Cf. H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 267.
911
V. rapp. Schlosser, n° 137 : « les contrats d’assurance conclus avec des preneurs ayant leur domicile en
dehors de la Communauté sont d’une importance considérable pour le secteur des assurances britanniques ».
912
Cependant il est différent pour le contrat de time-share, en droit français les règles de droit sur ces contrats
sont plus strictes que le cas du contrat de consommateur en général, en raison de la nature particulière du contrat
que le consommateur a besoin d’une protection spéciale. V. l’article L 121-73 du Code de la consommation.
913
H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements.., op.cit., n° 292, p. 301.

374
communautaire qui permettrait de conclure une clause de prorogation de compétence. C’est
le cas régi par l’article 19.

§ 3 : Les effets de clauses de prorogation de compétence.

508. Nous nous intéressons tout d’abord à la question de savoir si les tribunaux choisis par
la clause seront admis et exclusivement compétents (A). Il est possible de trouver les
positions diverses selon chaque système juridique. Par ailleurs dans le cadre de textes
communautaires, nous envisageons aussi la diversité adoptée par ceux-ci, tels que la
Convention de Bruxelles et le Règlement Bruxelles I. Certes, les clauses attributives de
juridiction produisent les effets à l’égard des contractants, il reste de savoir si ces clauses
seraient susceptibles d’avoir aussi des effets à l’égard des tiers, à savoir, si ceux-ci pouvaient
être liés à ces clauses, c’est ce que nous étudierons par la suite (B).

A. L’exclusivité du tribunal édicté dans la clause attributive de compétence, les


positions diverses.

509. Certes, la compétence exclusive du tribunal peut être établie aussi bien par la loi que
par la convention. La question est de savoir si la juridiction attribuée par la clause sera une
seule exclusive ou non. En Thaïlande, les juristes tentent d’admettre que la clause attributive
914
de juridiction confère une compétence exclusive au tribunal choisi . Cependant il dépend
aussi de type d’une clause attribuant de compétence. Dans les pays de common law, la clause
attributive de juridiction en choisissant, par exemple, un seul tribunal britannique dans cette
clause rend ladite juridiction la compétence exclusive.

510. En droit français commun, parmi les cas rarissimes hors du cadre de la Convention
Bruxelles, on trouve que la jurisprudence affirme la compétence exclusive du tribunal désigné
par la clause attribuant de compétence lorsqu’elle est valide. La Cour de cassation dans son
arrêt du 30 septembre 2009 a estimé comme telle. En l’espèce il s’agit d’une clause attributive
de juridiction insérée dans un contrat international, en désignant le tribunal des doléances,
conclu entre la société de droit français Thinet International et la société de droit saoudien

914
K. Luchai et P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, « La conception relative à la clause attributive de
juridiction… », op.cit., p. 181-182.

375
Saudi Basic Industries Corporation (ci-après SBIC). Suite au problème d’exécution du
contrat, la société Thinet a assigné la société SBIC devant le tribunal saoudien conformément
à la clause. Le problème est que la juridiction d’appel saoudienne a annulé la décision de
première instance et par ailleurs s’est déclarée incompétente sur ce litige au motif que ce litige
avait caractère civil et non commercial. Il faut remarquer ici que le motif est fondé sur la
nature de litige, c'est-à-dire que la société Thinet peut traduire le litige une nouvelle fois
devant un autre tribunal saoudien. Mais la société Thinet a saisi le tribunal de commerce de
Paris qui s’est déclaré compétent en vertu de l’article 14 du Code civil. La société SBIC a
formé le contredit en contestant la compétence des juridictions françaises.
La Cour de cassation a condamné la décision d’appel « en refusant de rechercher,
comme il lui était demandé, si selon le droit saoudien applicable, une erreur des parties sur
l’identification du tribunal compétent ratione materiae était sans incidence sur la validité
d’une clause attributive de compétence qui devait produire effet comme exprimant la volonté
des parties de voir leurs différends réglés par des juridictions saoudiennes ». La Cour
a estimé que la saisine des tribunaux étrangers par une personne de nationalité française vaut
renonciation des privilèges de l’article 14 du code civil et de surcroît cette renonciation est
irrévocable. Cependant en l’espèce la Cour de cassation affirma sa compétence au motif que
la société Thinet a le lien effectif avec le territoire français, car elle a son siège social (réel) et
siège statutaire en France. Lorsque la juridiction saoudienne désignée par la clause attributive
de compétence s’est déclarée incompétente et que « la preuve n’était pas rapportée que les
juridictions de droit commun étrangères avaient été saisies par la société Thinet, la Cour
d’appel a considéré à bon droit que cette dernière pouvait saisir les tribunaux français sur le
915
fondement de l’article 14 du code civil » .
Ce constat nous montre qu’en effet la Cour de cassation reste toujours ferme à
affirmer l’exclusivité du for désigné par la clause attribuant de compétence, mais c’était le
manquement de preuve de la société SBIC, que la société Thinet avait déjà assigné une
nouvelle fois devant le tribunal général de Ryad avant la saisine de juridiction française, qui
amenait à cette conclusion. C’est une bonne occasion de démontrer aussi la solution de la
Cour de cassation sur la compétence fondée par l’article 14 du Code civil. Comme l’on a déjà
étudié, cet article n’est pas impératif. Même si la Cour a décidé que la renonciation de cet

915
Cass. 1er civ., 30 septembre 2009, Saudi Basic Industries Corporation, n° 08-17.587, D. 2009.2419, obs. I.
Gallmeister ; D. 2009. AJ 2432, obs. X. Delpech ; D. 2010. Jur. 58, note B. Audit ; RCDIP.2010.133, 1er esp.,
note H. Gaudemet –Tallon ; RTD com.2010.460, obs. Ph. Delebecque.

376
916
article est irrévocable, mais elle n’est « ni définitive, ni absolue » , puisque les tribunaux
français conservent toujours une compétence subsidiaire. Elle subordonne le droit de se
prévaloir de l’article 14 pour un Français mais à conditions strictes. La Cour de cassation a
finalement condamné la société SBIC aux dépens. Certes, il semble contraire à la nature et
l’économie du contrat qui a été rédigé en langue arabe, comportait la clause d’élection de for
saoudien, pour la construction d’immeuble à Ryad, mais devait être jugé finalement devant
une juridiction française.

511. En droit international commun, il existe aussi les cas où la clause attributive de
juridiction ne déroge pas la compétence des tribunaux français, c'est-à-dire qu’elle ne donne
pas l’exclusivité aux juridictions étrangères choisies. En premier cas, il s’agit de l’hypothèse
où une telle clause a été conclue en faveur de l’une des contractants alors que l’autre l’a
renoncée en saisissant le tribunal français. Mais il faut entendre que c’est la juridiction
917
française qui sera compétente si ladite clause n’existe pas . En second cas, c’est la
comparution volontaire du défendeur devant le tribunal français saisi par le demandeur, il en
résulte que la clause attribuant de compétence aux tribunaux étrangers ne déroge pas sa
compétence.

512. Hormis ces hypothèses, certaine convention internationale elle-même permet à écarter
l’exclusivité des tribunaux désignés par la clause attributive de juridiction, tel est le cas de
Règles de Hambourg en matière de transport de marchandises. Nonobstant la présence d’une
clause attributive de juridiction, le demandeur peut saisir les tribunaux énumérés par l’article
21 § 1, (a) à (c).

513. En droit européen, il semble que les règles sont bien différentes entre la Convention de
Bruxelles et le Règlement Bruxelles I. En vertu de la première, il est entendu dans le sens que
cette clause confère une compétence exclusive au tribunal choisi, alors que le second admet
qu’il y a la possibilité d’une « convention contraire des parties » (art. 23-1°). C'est-à-dire que
les parties pourraient manifester leur intention par un accord de ne pas donner à la clause un
effet exclusif. Pourtant en l’absence d’un accord autrement, la clause attributive de juridiction

916
X. Delpech, « Privilège de nationalité et clause attributive de juridiction », obs. op.cit.
917
Cass. 2e civ., 15 juin 1966, Gaz. Pal.1966.II.184 ; D. 1967.84. V. aussi H. Gaudemet-Tallon, « Compétence
civile et commerciale », Rép. D. Dr. internat., n° 66 et n° 88.

377
918
confère toujours la compétence exclusive au tribunal choisi . En effet l’intérêt de la clause
attributive de juridiction est de fixer à l’avance le tribunal qui sera compétent en cas de
différend, mais cette possibilité renvoie les contractants à l’insécurité juridique. Sauf si le cas
conforme aux dispositions de la comparution volontaire du défendeur, c’est une autre issue.
Une fois que la clause de prorogation de compétence se présente, elle attribue
919
seulement un tribunal compétent comme l’affirme la CJCE dans l’arrêt du 17 janvier 1980 .
Force est de constater que la compétence du juge premier saisi ne peut être établie si le second
saisi a une compétence exclusive. Pourtant dans l’arrêt critiqué rendu par la Cour de
Luxembourg, elle a décidé autrement en 2003, en l’espèce deux tribunaux des États
communautaire ont été saisis pour le même litige. Malgré que l’existence de la clause
attribuant de compétence désigne le second tribunal, la CJCE estima que le tribunal premier
920
saisi est compétent au détriment du second . Alors c’est ici le critère chronologique qu’est
pris en considération par la Cour. Cette décision laisse la porte ouverte à la partie de mauvaise
fois de saisir en premier la juridiction autre que celle désignée dans la clause pour rendre
celle-ci inapplicable. Si l’on admet que la clause attribuant de compétence visée à préserver la
sécurité juridique, cet arrêt entraîne à l’inverse. Certes, « les comportements déloyaux sont
921
largement encouragés par la primauté du critère chronologique » comme l’écrit Mme. H.
Muir Watt.

514. L’arrêt de la Cour de cassation en matière de clause attributive de juridiction qui


reprend l’idée du principe de l’autonomie de la clause d’arbitrage en estimant que ce principe
922
s’applique aussi à la clause attribuant de compétence que nous allons voir ensuite. En effet
si la Cour accepte de s’étendre un tel effet en cette matière, logiquement il est possible aussi
de s’étendre l’application du principe de compétence-compétence à la clause attributive de

918
Cass. 1er civ., 6 mars 2007, n° 06-10946, D. 2007.951, obs. E. Chevrier.
919
CJCE, 17 janvier 1980, aff. C-56/79, Zelger, RCDIP.1980.387, note E. Mezger ; JDI.1980.435, note
A. Huet.
920
CJCE, 9 décembre 2003, aff. C-116/02, Gasser, D. 2004.1046, note Ch. Bruneau ; RCDIP.2004.444, note
H. Muir Watt ; JDI.2004.641, obs. A. Huet.
921
H. Muir Watt, note préc., RCDIP.2004, spéc. p. 461.
922
Cass. 1er civ., 8 juillet 2010, n° 07-17.788, D. 2010.Panor.2323 ; D. 2010.AJ 19 juillet 2010, obs.
X. Delpech.

378
juridiction. Il en résulte des deux principes que seul le juge désigné par une telle clause qui
sera compétent sur le litige et sera le premier qui a le pouvoir de statuer sur sa compétence.

515. Quant au tribunal compétent, lorsque la clause précise clairement l’ordre


juridictionnel, le problème ne se posera pas. Par exemple ; le TGI Paris, ceci concerne la
compétence territoriale interne. Lorsque la clause a indiqué les tribunaux d’un État, il suffit de
déterminer la juridiction compétente en appliquant les règles de compétence territoriale du
pays désigné. Il en va de même dans l’ordre juridique thaï.

516. Prorogation de compétence par une clause d’arbitrage. Il reste à savoir si la clause
d’arbitrage peut produire un effet en tant que clause attribuant de compétence. La clause
compromissoire est aussi considérée comme une sorte de clause de prorogation de
923
compétence du juge étatique. La jurisprudence affirme cette idée de manière constante .
Qu’en est t-il devant la juridiction communautaire ? La réponse semble différente.
Dans l’affaire West Tankers en 2009, il s’agit de l’anti-suit injunction qui était
motivée par l’existence de la clause compromissoire. Une partie avait demandé à la juridiction
anglaise de prononcer cette injonction au tribunal italien pour qu’il se soit déclaré
incompétent en renvoyant le litige au tribunal arbitral à Londres. La question préjudicielle
posée par la House of Lords à savoir si « le fait, pour une juridiction d’un État membre,
d’adopter une décision interdisant à une personne d’engager ou de poursuivre une procédure
dans un autre État membre (l’anti-suit injunction) au motif qu’une telle procédure viole une
convention d’arbitrage est-il compatible avec le règlement n° 44/2001 ? ». La CJCE a estimé
que la convention d’arbitrage est complètement exclue du champ d’application de la
convention de Bruxelles et du Règlement ; pour cette raison la clause d’arbitrage ne devrait
pas être prise en considération et donc une anti-suit injunction en matière d’arbitrage est
incompatible avec le Règlement. C'est-à-dire que la Cour italienne était compétente au regard
924
du Règlement Bruxelles I . D’après ce constat, la CJCE ne qualifie pas la clause d’arbitrage

923
V. Cass. 1er civ., 8 juillet 2010, n° 07-17.788, préc. Cet arrêt admet qu’une clause de compétence insérée
dans un contrat n’est pas affectée par l’inefficacité de la convention principale en raison de l’autonomie de la
première. En l’espèce, il s’agit d’un contrat de compte entre une banque et une société. On trouve que ce
raisonnement est influencé du droit de l’arbitrage, car la Cour reprend dans cette décision les mêmes termes que
ceux utilisés en cas de la clause compromissoire, ce que nous envisagerons dans le chapitre suivant.
924
CJCE, 10 février 2009, aff. C-185/07, West Tankers, D. 2009. 981, note C. Kessedjian; RCDIP.2009.373,
note H. Muir Watt; JDI.2009.1281, note B. Audit; RTD civ. 2009.357, obs. P. Théry; Rev. arb. 2009. 407, note
S. Bollée.

379
de clause attributive de juridiction en appuyant sur le champ d’application matériel du
Règlement.

517. Moyen de préserver l’exclusivité de compétence du tribunal désigné par la clause


attributive de juridiction. A ce stade, nous proposons de prendre en considération l’anti-suit
injunction et la litispendance au même titre. Si la juridiction seconde saisie d’un État membre
constate la procédure parallèle dépendante devant le tribunal d’un autre État membre qui est
premier saisi, pourquoi elle ne dessaisis pas ce litige en faveur du tribunal premier saisi ?
A notre avis, à l’inverse que lorsque ce second tribunal ne fait pas ce qu’il devrait pour une
raison quelconque, un seul moyen de rendre la justice au demandeur qui a introduit le litige le
premier est d’obtenir l’anti-suit injonction. Car une fois que le tribunal second saisi ne
respecte pas les stipulations de règlement, ceci représente aussi le manquement de la
confiance mutuelle que les États membres accordent pour une bonne fonction du système
judiciaire communautaire. C’est cette même confiance mutuelle que la CJCE a appuyé dans
l’arrêt Turner pour motiver sa décision.

518. Réunion de la clause attributive de juridiction et la convention d’arbitrage.


En effet, la Cour d’appel a décidé dans l’affaire SCI que « la clause compromissoire et la
clause attributive de compétence sont manifestement contradictoires et que la dernière ne
présente aucun caractère subsidiaire par rapport à la clause compromissoire ; que les
intimés qui reconnaissent l’existence de cette contradiction n’établissant pas que la
925
commune intention des parties aurait été de se soumettre à l’arbitrage » . La Cour de
cassation n’a pas suivi cette orientation, elle infirma la décision d’appel en estimant ainsi :
« la Cour d’appel a excédé ses pouvoirs et violé les textes et principes susvisés (le principe de
compétence de la compétence), en se déterminant ainsi, sans caractériser la nullité ou
l’inapplicabilité manifeste de la clause d’arbitrage, seules de nature à faire obstacle à la
compétence arbitrale pour statuer sur l’existence, la validité et l’étendue de la clause
926
compromissoire » . On constate tout d’abord que l’existence dans un même contrat d’une
clause attributive de juridiction contraire à la clause d’arbitrage ne rend pas cette dernière

925
CA Paris, 12 décembre 2001, SCI La Chartreuse et autres, RTD com.2002.659.
926
Cass. 2e civ., 18 décembre 2003, SCI La Chartreuse et autres, D. 2004.IR.321 ; RTD Com.2004.255, note
E. Loquin. V. Cass. 1er civ., 16 décembre 2001 : autre que la nullité manifeste de la convention d’arbitrage
prévue par l’art. 1458 du CPC la Cour a ajouté l’inapplicabilité manifeste de la clause compromissoire comme
cause autorisant le juge Étatique à connaître du fond du litige même s’il existe une convention d’arbitrage.

380
manifestement nulle ou inapplicable. Ensuite, le principe de compétence-compétence a été
affirmé, c'est-à-dire que l’arbitre pourra statuer sur sa propre compétence et notamment il
devra avoir « l’occasion de se prononcer le premier sur ces questions sous le contrôle ultérieur
927
des juridictions étatiques » . Et lorsque le juge étatique trouve qu’il y a une clause
compromissoire entre les parties, il devrait déclarer incompétence et renverra le litige au
tribunal arbitral. C’est le principe compétence-compétence qui explique la primauté de la
clause compromissoire sur la clause attributive de juridiction.

928
519. L’arrêt récent de la Cour d’appel rendu en 2009 affirme aussi ce constat, en
l’espèce la société STRUCTIL a assigné Carbon Impact devant le Tribunal de commerce
d’Évry pour le paiement de créance. La société Carbon Impact a soulevé une exception
d’incompétence en faveur du tribunal arbitral selon la clause d’arbitrage insérée dans leur
contrat. Le Tribunal de commerce a rappelé que les parties étaient liées par un contrat de
coopération daté le 6 septembre 1995 dont son article 15 constitue une clause attributive de
juridiction au Tribunal de commerce d’Évry à défaut d’accord entre les parties. Le tribunal a
relevé que « les contractants avaient manifesté l’intention d’écarter la voie de recours à
l’arbitrage en s’appuyant sur le fait que ceux-ci avaient signé un accord amiable en 2001 en
vue de définir toutes les modalités relatives à l’exécution du contrat en organisant ainsi entre
eux la résolution de leur litige par la signature d’un accord », par conséquent le tribunal
d’Évry est compétent à statuer sur le fond du litige.
La Cour d’appel a infirmé cette décision en décidant qu’« une renonciation au droit de
recourir à l’arbitrage ne saurait se déduire du silence des parties et du fait qu’elles n’en ont
pas fait état en signant un accord en 2001 ». En effet la Cour a considéré que le second
document ne modifie pas l’économie du contrat initial comportant cette clause d’arbitrage.
Pour ces raisons elle a jugé que le tribunal a considéré à tort que les parties avaient renoncé à
la clause d’arbitrage.
Si la même question s’est posée devant la Cour thaïe, elle répondrait comme la
tendance dominante du droit sur l’arbitrage du commerce international ; c’est l’arbitre qui
929
peut statuer sur sa compétence en vertu du principe « compétence de la compétence » .

927
Ph. Fouchard, Traité de l’arbitrage commercial international, Litec, 1996, p. 415.
928
CA Paris, ch. 25B, 23 janvier 2009, Carbon Impact Inc., n° 06.09031.
929
De même que la jurisprudence française actuelle. V. aussi Cass. 2e civ., 18 décembre 2003, préc.

381
520. La clause attributive de juridiction face à l’impérativité de lois de police. La Cour
de cassation a eu l’occasion de trancher le litige lequel une loi de police française est en cause
étant donné que la clause attributive de juridiction apparaît en même temps. A savoir si le
juge saisi peut-il invoquer sa loi de police pour lui rendre compétent. En l’espèce, il s’agit
d’une société américaine, Monster Cable, qui a conclu un contrat de distribution exclusive de
ses produits en France avec une société française. Monster Cable a résilié ce contrat et son
cocontractant l’a assigné devant le juge français. La société Monster Cable a contesté la
compétence de ce dernier en invoquant une clause attributive de juridiction au tribunal
américain insérée dans ce contrat. Alors que la société française a intenté ce litige sur le
fondement de l’article L. 442-6 du Code de commerce. La Cour d’appel a décidé qu’il
s’agissait de l’application des dispositions impératives relevant d’ordre public économique
constitutive de loi de police. Pourtant la Cour de cassation a cassé cet arrêt en estimant que
« la clause attributive de juridiction incluse dans ce contrat visait tout le litige né du
930
contrat » . C'est-à-dire que ce litige relève de la compétence des juridictions américaines.
Ainsi, d’après cet arrêt, on peut conclure qu’une loi de police française ne peut justifier la
compétence juridictionnelle du juge français.
On peut observer que le même résultat a été adopté par la Cour de cassation en matière
d’arbitrage selon lequel « le recours à l’arbitrage n’est pas exclu du seul fait que des
931
dispositions impératives sont applicables au litige » . Ce constat affirma qu’une loi de
police ne peut priver l’arbitre de sa compétence résultant de la clause d’arbitrage. On peut se
demander comment la loi de police pourra-t-elle priver le juge, même étranger, de sa
compétence résultant de la clause attributive de juridiction ? Pour l’arrêt Monster Cable, il
est possible pour le juge français de refuser l’exequatur au stade du contrôle du jugement
étranger, lorsque le jugement rendu aux États-Unis sera soumis devant le juge français en vue
d’obtenir l’exécution en France, au motif que ce jugement est contraire à l’ordre public
international français car le juge américain n’a pas appliqué au litige la loi de police française.

521. Bien que le droit thaï reste timide face à la clause attributive de juridiction en droit
international privé et ceci donne lieu à très peu de l’opinion juridique, pour certains auteurs

930
Cass. 1er civ., 22 octobre 2008, Monster Cable, D. 2008. AJ. 2790, obs. I. Gallmeister, Pan. 1557, obs. P.
Courbe et F. Jault-Seseke ; D. 2009.2384, note L. d’Avout et S. Bollée ; RCDIP.2009.69, chron. D. Bureau et H.
Muir Watt ; RDC.2009.691, note E. Treppoz.
931
Cass. 1er civ., 8 juillet 2010, Sté Doga c/ Sté HTC, n° 09-67.013, D. 2010. 1797 ; Gaz. Pal.2010, n° 243,
p. 16-18, obs. G. Bertrou et O. Attias

382
932
cette convention rend compétence exclusive au tribunal choisi dans la clause . Cependant
dans certains cas, une clause de prorogation de compétence peut être considérée comme
l’admission de la compétence non-exclusive au tribunal précisé dans cette clause. Il faut bien
prendre sérieusement en considération cette clause. Dans certaine hypothèse les parties
contractantes peuvent insérer dans leur contrat la clause d’élection du tribunal d’un tel État en
cas de litige, mais elle n’a pas privé l’une des parties de saisir un autre tribunal d’un État tiers.
En pratique, on peut trouver dans un contrat la clause précisant ainsi :
« The borrower hereby irrevocably submits to the non-exclusive jurisdiction of the
English Courts in relation to any claim to dispute arising hereunder…».

On peut la comparer avec l’exception proposée par l’article 23-1° du Règlement


Bruxelles I. Force est de constater que cette clause est ouverte aux parties aux fins de traduire
en litige devant la Cour autre que celle indiquée dans la convention, puisque ladite clause ne
donne pas la compétence exclusive au tribunal anglais. On peut trouver ce genre de clause
plus souvent dans le contrat de prêt ou crédit syndiqué (syndicated loan), c’est une opération
qui se limite à l’apport de crédits par plusieurs établissements financiers de plusieurs pays.
Alors que leurs clients domiciliés dans un autre pays, il est possible que les banques
souhaiteraient conclure une clause attributive de juridiction non-exclusive. Puisqu’en cas de
rupture du contrat, le créancier peut envisager de porter plainte devant le tribunal plus
favorable à son intérêt.
En somme, pour répondre à la question si la clause attributive de juridiction donne lieu
à la compétence exclusive du tribunal choisi ou non, il faut prendre en considération
le caractère de cette clause et d’autres stipulations du contrat.

B. La force obligatoire de la clause attributive de juridiction à l’égard des tiers.

1) L’évolution jurisprudentielle divergente.


522. La question est de savoir si une clause attribuant de compétence peut lier un tiers,
il s’agit en effet de l’opposabilité de la clause de compétence. On sait qu’en principe, la clause
ne lie que les parties au contrat, non les tiers. Cependant il existe également des exceptions
dans chaque matière. Nous nous intéressons au contrat de transport maritime puisque nous
trouvons le même problème dans l’ordre juridique thaï, de surcroît le droit thaï reste

932
K. Luchai et P. Kanchanachittra-Saisoonthorn, « La conception relative à la clause attributive de
juridiction… », op.cit., p. 177-193.

383
silencieux sur ce point alors que la jurisprudence est ambigüe. Cette étude pourrait éclairer et
apporter une meilleure solution.
Il faut rappeler d’abord qu’aucun texte de droit maritime interne, communautaire ou
international en vigueur en France ne conteste explicitement l’opposabilité des clauses
933
attributives de juridiction, en revanche cette contestation paraît en droit commun .
Donc la question peut se poser préalablement ainsi : quelles sont les parties
considérées comme liées au contrat de transport maritime ? Dans ce contrat, il y a le
transporteur et le chargeur alors que pour le contrat de charte-partie, il concerne le fréteur et
l’affréteur. Où en est le destinataire dans ces rapports contractuels ? En effet, comme l’écrit
M. O. Cachard, le terme « destinataire » employé dans cette question est déjà un pris de parti,
934
en raison de sa qualité de partie au contrat de transport . Cependant la doctrine maritimiste
française admet que le destinataire recueille les droits et les obligations du chargeur dans la
935
mesure où le contrat de transport est considéré de nos jours comme contrat tripartite . Nous
partageons cette approche ; rappelons que le destinataire n’associe pas en addition plus tard au
contrat de transport, celui-ci est en revanche partie à cette transaction depuis le début. Voyons
que le contrat de transport est exercé directement à son propre intérêt.

523. L’opposition de la clause sous certaines conditions. En droit français commun, les
nombreux arrêts de la Première Chambre civile de la Cour de cassation ont affirmé dans la
même direction que la clause attribuant de compétence ne peut être opposable au tiers porteur
du connaissement et au destinataire que lorsqu’il l’a acceptée au plus tard au moment où la
marchandise lui a été livrée. On peut comprendre, de ce point de vue, que la jurisprudence
entend le contrat de transport comme une clause qui lie le chargeur, le transporteur et le
destinataire. Selon la Cour, « l’insertion d’une clause attributive de compétence dans un
936
contrat international fait partie de l’économie de la convention » . Comme toutes autres
clauses du contrat, la clause attributive de juridiction lie le destinataire à cet égard. Par
ailleurs, la Chambre civile a aussi adopté la solution selon laquelle lorsqu’il y a une clause

933
O. Cachard, « La force obligatoire vis-à-vis du destinataire des clauses relatives à compétence internationale
stipulées dans les connaissements : Plaidoyer pour un renouveau des considérations maritimes », in Mél. Hélène
Gaudemet-Tallon, Vers de nouveaux équilibres entre ordres juridiques, Dalloz, 2008, p. 196.
934
Id., p. 192.
935
Id., p. 201.
936
Cass. 1er civ., 25 novembre 1986, Siaci, n° 84-17.745, RCDIP.1987.396, note H. Gaudemet-Tallon.

384
d’electio juris désignant la loi étrangère applicable au contrat, une fois que cette loi tient
également le destinataire comme une partie au contrat de transport, la clause attribuant de
937
compétence stipulée dans un connaissement lie le destinataire .

524. La position contraire de la Chambre commerciale. A savoir que la jurisprudence


non favorable à l’opposabilité des clauses attributives de juridiction est connue aussi au nom
938
du particularisme du droit maritime . A notre avis, cette solution semblait discutable, car
ces décisions rendues par la Chambre qui tranche habituellement les questions de droit
commercial et de droit maritime.
939
Citons l’arrêt du 4 mars 2003 où la loi française est applicable ; la question est de
savoir si cette loi permet de transmettre la clause attributive de juridiction dans le
connaissement au tiers porteur. La Cour de cassation a suivi toujours la jurisprudence
940
constante dans cette matière depuis 1992 , en estimant qu’« il ne résulte d’aucun texte de
droit interne que le porteur du connaissement, en acceptant la livraison de la marchandise,
succède aux droits et obligations du chargeur découlant de la clause attributive de juridiction
941
acceptée par celui-ci (…) » . Dans ce même arrêt de 2003, la Chambre commerciale a
942
même fait référence à l’arrêt Coreck Maritime de la CJCE en affirmant la décision de la
juridiction d’appel que « la clause attributive de juridiction n’était pas opposable aux

937
Cass. 1er civ., 12 juillet 2001, Bonastar II, D. 2001.3246, obs. Delebecque ; Gaz. Pal. 12-13 déc. 2001, note
M. L. Niboyet ; RTD com. 2001, 1063, obs. Jacquet et Delebecque. DMF.2001.994, note Ph. Delebecque.
938
O. Cachard, « La force obligatoire vis-à-vis du destinataire… », op.cit., p. 196.
939
Cass., com., 4 mars 2003, n° 01-01.046, RCDIP.2003.285, note P. Lagarde ; JDI.2004.197, obs. A. Huet ;
JCP (G) 2003.IV.1786. V. aussi l’affirmation en ce sens dans CA Rouen, 25 septembre 2008, Mutuelles du
Mans IARD, n° 08-01001.
940
Cass. com., 26 mai 1992, RCDIP.1992.703, note H. Gaudemet-Tallon : il s’agit du transport fluvial, la Cour
de cassation décida qu’ « une clause attributive de compétence n’est opposable qu’à la partie qui en a eu
connaissance et qui l’a acceptée au moment de la formation du contrat ; que c’est donc à bon droit qu’ayant
relevé qu’il n’était pas établi que le destinataire se serait soumis au contrat conclu entre l’expéditeur et le
transporteur ».
941
V. aussi Cass. com., 29 novembre 1994, Nagasaki, DMF 1995.197 et 209, note et chr. P. Bonassies ; Cass.
com., 10 janvier 1995, JDI.1996.141, obs. A. Huet ; RCDIP.1995.610, note H. Gaudemet-Tallon ; Cass. com.,
16 janvier 1996, Chang Ping, DMF 1996.393, note P. Bonassies ; Cass. com., 15 octobre 1996, DMF 1997.705,
note P.-Y. Nicolas ; Cass. com., 27 mai 1997, Bull. civ. IV, n° 160 ; D.1997.143 ; DMF.1997.723, note P.-Y.
Nicolas ; JCP (G) 1997.IV.1525 ; Cass. com., 25 novembre 1997, RCDIP.1998.98, rapp. J.-P.
Rémery ; DMF.1999.83, obs. P. Bonassies ; Cass. com., 8 décembre 1998, Silver Sky, RCDIP.1999.536, note E.
Pataut ; DMF.1999.1007, rapp. J.-P. Rémery, note P.-Y. Nicolas ; Cass. com., 25 juin 2002, Bull. civ. IV, n°
111 ; DMF.2003.41, note Ph. Delebecque.
942
CJCE, 9 novembre 2000, aff. C-387/98, Coreck Maritime, préc., supra note n° 883.

385
assureurs subrogés dans les droits du destinataire, porteur du connaissement, faute d’avoir
été acceptée au plus tard lors de la livraison ». Autrement dit, pour que cette clause puisse
être opposable au destinataire ou porteur du connaissement, après avoir subrogé par les
assureurs, elle devra être acceptée par celui-ci au plus tard lors de la livraison. En effet, cette
conclusion n’est pas nouvelle, car il a apparu déjà dans l’arrêt de la Chambre commerciale du
943
8 décembre 1998 . Seule l’acceptation présumée par la livraison de marchandise ne suffit
pas à conclure que le destinataire a accepté d’être lié par la clause compromissoire.

525. Si l’on utilise « une acceptation » comme le critère, il est nécessaire tout d’abord de la
déterminer. En l’absence de définir la notion d’une acceptation par la Cour, il faut toujours
faire un recours au mécanisme de la présomption. La question est de savoir comment la Cour
détermine-t-elle ladite acception ? A notre avis, cette présomption se présente en soi une
approche hostile à l’opposabilité de la clause de compétence au destinataire. Car la condition
posée par la jurisprudence n’est pas susceptible d’être manifestement prouvée. Il est possible
que le destinataire n’ait même pas lu attentivement les clauses insérées dans le connaissement
au moment de la livraison de marchandises. D’ailleurs il est douteux si cette présomption se
conforme à la pratique du commerce maritime. Force est de constater que le connaissement se
transfert de main en main au cours de l’acheminement maritime puisque les ayants droit à la
marchandise peuvent être plusieurs pour le transport de ligne régulière ; alors il est ardue de
trouver les porteurs successifs apposant leur signature en marge de la clause. De surcroît,
conformément à la pratique, l’exigence de signature du connaissement par le chargeur
a même été abrogée depuis longtemps par le décret du 12 novembre 1987, on imagine mal
comment on peut prouver un acte de l’acceptation en question. En considérant toutes ces
pratiques, nous partageons l’avis d’un auteur en disant qu’aussi bien la demande d’une
acceptation spéciale du destinataire que la jurisprudence qui tient beaucoup d’attention à la
944
signature du chargeur paraît clairement contra legem .

2) La solution jurisprudentielle courante.

943
Cass. com. 8 décembre 1998, Silver Sky, préc., supra note n° 941.
944
O. Cachard, « La force obligatoire vis-à-vis du destinataire… », op.cit, p. 197.

386
526. Il paraît pendant une longue période la divergence de solutions retenues entre la
945
Chambre commerciale et la Première Chambre civile . Cependant les deux arrêts rendus à
la même date en 2008 peuvent donner la solution sur ce point, car la Chambre commerciale et
la Première chambre civile ont finalement obtenu la même solution en estimant dans leurs
décisions que : « Attendu qu’une clause attributive de juridiction convenue entre un
transporteur et un chargeur et insérée dans un connaissement, produit ses effets à l’égard du
tiers porteur du connaissement pour autant que, en l’acquérant, il ait succédé aux droits et
obligations du chargeur en vertu du droit national applicable ; que dans le cas contraire, il
convient de vérifier son consentement à la clause, au regard des exigences de l’article 23 du
946
règlement Bruxelles I » .
Il semble que la tendance de jurisprudence de la CJCE est bien admissible. Les
947 948 949
groupes d’arrêts Tilly Russ , Trasporti Castelletti et Coreck Maritime donnent la
réponse à cette question dans la mesure où « une clause attribuant de compétence, qui a été
convenue entre un transporteur et un chargeur et qui a été insérée dans un connaissement,
produit ses effets à l’égard du tiers porteur du connaissement pour autant que, en acquérant
ce connaissement, il ait succédé aux droits et obligations du chargeur en vertu du droit
national applicable. Si tel n’est pas le cas, il convient de vérifier son consentement à ladite
clause au regard des exigences de l’article 17, 1er al., de la Convention ».

945
Cass. 1er civ., 25 novembre 1986, Siaci, préc., supra note n° 936 ; Cass. 1er civ., 24 novembre 1987,
Sté Garrett, RCDIP.1988.634, note G. Droz ; Cass. 1er civ., 12 juillet 2001, Bonastar II, préc., supra note
n° 937. Selon la Première chambre civile, « la clause de juridiction étrangère dans un contrat international fait
partie de l’économie de celui-ci, de sorte qu’elle s’impose à l’assureur subrogé ». Cf. H. Gaudemet-Tallon,
Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 161.
946
Cass. 1er civ., 16 décembre 2008 et Cass. com., 16 décembre 2008, D. 2009.AJ.89, obs. X. Delpech ; ibid.
Panor. 1565, obs. F. Jault-Seseke ; RCDIP.2009.524, note F. Jault-Seseke ; RDC.2009.1193, obs. J.-B. Racine;
JCP 2009.II.10060, note H. Kenfack; Gaz. Pal. 20-21 février 2009, p. 46, note Ph. Guez.
947
CJCE, 19 juin 1984, aff. C-71/83, Tilly Russ, préc., supra note n° 889.
948
CJCE, 16 mars 1999, aff. C-159/97, Trasporti Castelletti, D. 1999.IR.100 ; RCDIP.1999.559, note
H. Gaudemet-Tallon ; DMF.2000.14, obs. Ph. Delebecque.
949
CJCE, 9 novembre 2000, aff. C-387/98, Coreck Maritime, préc., supra note n° 883. En l’espèce, des
marchandises avaient été chargées en Chine sur un navire appartenant à une société russe à destination de
Rotterdam. La société Coreck Maritime, établie à Hambourg, avait délivré le connaissement qui comportait une
clause attributive de juridiction attribuant de compétence aux juridictions du pays du lieu du principal
établissement du transporteur. Un tiers porteur du connaissement a assigné le propriétaire du navire et l’affréteur
devant le tribunal de Rotterdam, la société Coreck, affréteur, a opposé la clause de prorogation de compétence.
Au cours du procès, le Hoge Raad a interrogé la CJCE sur les questions des résultats de la clause et sur
l’incidence du domicile de certaines parties hors du territoire des États contractants. La CJCE a estimé que :
« pour droit qu’une clause attributive de juridiction insérée dans un connaissement convenue entre le
transporteur et le chargeur, produit ses effets à l’égard du tiers porteur du connaissement pour autant qu’il a
donné son consentement à ladite clause au regard des exigences de l’article 17 de la Convention de Bruxelles du
27 septembre 1968 ».

387
Ce que l’on peut tirer de ces arrêts, c’est que tous les tiers porteurs ne sont pas régis
par les mêmes règles. Car c’est le droit national qui devrait être appliqué pour déterminer les
droits et obligations des tiers. La solution n’était pas agréable, plus précisément c’est le droit
international privé du juge saisi qui serait en jeu et celui-ci permettrait de contourner certaines
dispositions protectrices de la partie faible prévues par la Convention de Bruxelles et le
950
règlement Bruxelles I . Il semble que cette jurisprudence ne peut pas régler tous les
problèmes, car elle renvoie au droit national applicable qui introduit un mécanisme conflictuel
dans la résolution d’une question de conflits de juridictions. Est-ce que l’on est toujours
951
coincé dans la règle de conflit de lois ? C'est-à-dire que la solution pour le problème de
l’opposabilité de la clause dépend de la loi du pays auquel le contrat de transport est soumis.
Il faut rappeler qu’il est très compliqué de déterminer si au sein de ladite loi le destinataire
succède aux droits et obligations du chargeur. L’application de la loi du contrat de transport
952
pour trancher cette question semble aussi critiquée .

527. Le litige porte sur le cas en dehors du régime de droit communautaire. La réponse
ne semble pas très favorable car on peut toujours envisager la jurisprudence qui exige le

950
H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 161, p. 148 et s. V. aussi P.
Lagarde, « Du rattachement d’un contrat de transport maritime et de la transmission d’une clause attributive de
juridiction par l’effet du connaissement », RCDIP.2003.285. Selon cet auteur dans les décisions antérieures, la
Chambre commerciale statuait sur l’opposabilité de la clause attributive de juridiction sans presque jamais passer
par la règle de conflit de lois.
951
La CJCE n’a pas répondu à cette question dans l’affaire Coreck Maritime, elle a estimé que « la question de
savoir quel est le droit national applicable à la définition des droits et obligations du tiers d’un connaissement
relève à la juridiction nationale à laquelle il incombe d’appliquer les règles de son droit international privé ».
Admettons qu’il est risqué de trouver les solutions différentes adoptées par les juridictions des États membres en
utilisant les rattachements divergents. Certes, il n’y a pas de problème dans le cadre du droit européen.
952
La Cour de cassation a adopté la solution identique dans les arrêts du 16 décembre 2008, elle a exigé la Cour
d’appel de faire la recherche, en recourant au droit national applicable, pour savoir si le destinataire avait
succédé aux droits et obligations du chargeur. Elle a aussi précisé que la juridiction d’appel devait déterminer la
loi applicable au contrat de transport par application de l’article 3 de la Convention de Rome. Elle a d’ailleurs
indiqué qu’elle ne pouvait pas écarter la clause de choix de loi figurant au connaissement au motif que le
destinataire des marchandises n’avait pas accepté cette clause. Et lorsque ledit droit national applicable ne peut
pas opposer la clause attribuant de compétence au destinataire car celui-ci n’a pas succédé aux droits et
obligations du chargeur, il faut rechercher si le destinataire a donné le consentement à la clause en appliquant les
articles 17 de la Convention ou 23 du Règlement. Il est vrai que l’appréciation du consentement dans le cadre du
système Bruxelles n’est pas facile. En particulier dans le domaine du droit maritime, l’usage des parties doit être
pris en compte. Cf. F. Jault-Seseke, RCDIP.2009.524, op.cit. : pour cet auteur il ne suffit pas de faire le recours
d’un usage dans un tel ou tel domaine, il faudrait encore clairement établir le sens de cet usage. Cet auteur a
écrit : « ce n’est pas parce qu’il est usuel qu’un connaissement comporte une clause d’élection de for, qu’il existe
un usage en matière de transport de véhicule opéré entre le Japon et la Libye permettant de retenir la compétence
du tribunal de commerce de Marseille ». Alors l’auteur insiste que la reconnaissance d’un usage afin d’admettre
la compétence des juridictions de l’établissement du transporteur lorsqu’elle a été prévue par une clause insérée
dans le connaissement aboutit à un résultat ubuesque (nos italiques).

388
953
consentement exprès du destinataire . En l’espèce il s’agit de deux transports des autocars
l’un à destination de Guadeloupe et l’autre à destination de Guyane. La société française
Autotrans est désignée comme destinataire au titre du connaissement pour le premier. Arrivés
à destination, les autos radio contenus dans les autocars ont été volés, les assureurs ont
indemnisé la société en charge de ces autocars et ont présenté leur réclamation au transporteur
défendeur, Hoegh Autoliner-société norvégienne, qui a refusé de les indemniser et a été
assignée devant le tribunal de commerce du Havre. Dans cette affaire la Cour a admis d’abord
comme un principe qu’une clause attributive de juridiction désignant le tribunal norvégien
peut être opposée bien que figurant au verso du connaissement et qu’il ne soit pas fait état de
son acceptation expresse. Mais pour que la prorogation de compétence soit admise, il faut
qu’elle intervienne « sous une forme conforme à un usage dont les parties avaient
connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et
régulièrement observé dans le type de commerce par les parties au contrat de même type
954
dans la branche de commerce considéré » . Alors, lorsque la Cour n’a pas entendu qu’il
existait entre les parties un courant d’affaires tel que la société Autotrans ne pouvait refuser
ladite clause, et il n’est pas soulevé que cette clause est conforme aux usages observés
notamment en matière de commerce maritime et de transport maritime. Dès lors rien ne peut
justifier que la société Autotrans connaissait la clause en question, par conséquent, la clause
de prorogation de compétence ne peut être appliquée au litige.
De même que pour le second connaissement à destination de Guyane, la Cour a estimé
que la société Autotrans qui intervient en qualité de tiers porteur du connaissement et qui
justifie agir dans les droits du destinataire, « ne pouvait pas accepter à sa place et pour son
compte la clause attributive de juridiction insérée dans un connaissement ». Lorsqu’il paraît
que le destinataire ne l’a pas acceptée, cette clause ne peut être opposée à la société
955
Autotrans . La Cour estima qu’« il n’est pas démontré qu’il y avait un courant d’affaires
entre la société Hoegh Autoliners et la société Autotrans tiers porteur du connaissement ;
qu’il ne suffit pas d’établir qu’elle avait connaissance de la clause litigieuse et l’aurait
acceptée tacitement selon un usage établi ». Force est de constater que la conformité du

953
CA Rouen, 25 septembre 2008, Mutuelles du Mans IARD, n° 08/1001, DMF.2008.1011, note P. Bonassies.
954
L’arrêt précité.
955
En l’espèce, c’est la société de transports Palmier qui est acheteur et destinataire final de marchandises
désignée au connaissement comme consignee.

389
comportement des parties à un usage du transport maritime international ne permettra que de
présumer l’existence du consentement.

528. La non-assimilation le chargeur et le destinataire aux parties faibles. Un autre


argument qui peut être envisagé à ce stade se place sur le souci de puissance négociation entre
les parties contractantes ; le transporteur d’un coté, le chargeur et le destinataire de l’autre. Il
semble que cet argument tente d’assimiler le chargeur et le destinataire au consommateur. Sur
ce point, il faut rappeler que dans la pratique du commerce maritime, le chargeur et le
destinataire sont les professionnels dans la plupart de rapports conventionnels. Par ailleurs,
ceux-ci peuvent aussi s’exercer au nom d’un commissionnaire d’organiser le transport et de
négocier le fret. Alors, de ce point de vue, on ne peut pas conclure que le chargeur et le
destinataire sont les parties faibles au contrat de transport maritime.

529. La solution retenue par la jurisprudence thaïe. La Cour suprême Dika a décidé
dans le cas relatif au contrat de transport maritime de marchandises dans le sens que
l’assureur n’est pas lié par la clause attributive de juridiction insérée dans le connaissement
956
parce qu’il est tiers du contrat . En l’espèce, l’assureur demandeur avait assigné le
transporteur défendeur devant le tribunal civil. Le transporteur avait invoqué que ce tribunal
n’est pas compétent en raison d’avoir rédigé dans le connaissement la clause attribuant de
compétence au tribunal de New York. La Cour a jugé que « la clause attributive de
juridiction est valide et opposable aux contractants du connaissement, c'est-à-dire la société
expéditrice domiciliée aux États-Unis et le transporteur défendeur ; vu que ladite clause n’est
pas opposée à l’assureur demandeur qui n’est pas partie au connaissement ». La position
retenue par la Cour est critiquée, car on sait que normalement l’assureur, après avoir subrogé
dans les droits et obligations du chargeur, pourrait réclamer les dommages-intérêts au
transporteur. Nous observons que dans cette décision, la Cour n’a pas appuyé sur le problème
de subrogation légale ou conventionnelle comme celui de la décision Signa Property
(n° 951/2539) précité. Par contre, elle admet que l’assureur n’est pas la partie du
connaissement, et que seuls le transporteur et le chargeur sont les parties au connaissement, en
conséquence les clauses insérées dans ce document ne peuvent produire les effets à l’égard du
tiers. A la différence de la jurisprudence française dans cette matière, qui a posé, dans certains

956
Cour suprême Dika, n° 9083/2539 (1996).

390
temps, la condition de l’acceptation spéciale ; ou plus récemment elle a admis favorablement
que la clause de compétence lie les tiers dans le cas où le tiers porteur en tant qu’acquérant a
succédé aux droits et obligations du chargeur, la Cour thaïe n’a exigé aucune condition sur la
subrogation. Alors nous attendons toujours une nouvelle décision pour connaître l’orientation
de la Cour thaïe sur cette question.

530. Conclusion de la section et du chapitre. La prorogation de compétence, aussi bien


par une convention que par une comparution volontaire est admise dans la plupart des
systèmes juridiques, notamment en matière du contrat commercial international. Bien que la
disposition de droit thaï sur cette clause ait été révisée et que la jurisprudence s’est orientée
dans le sens négatif dans certains cas, les juristes confirment toujours la possibilité de
conclure la clause attribuant de compétence.
Pourtant, nous ces principes sont toujours limités par le droit étatique dans le domaine
destinés à protéger les parties faibles dans le contrat. En droit français positif, lorsque le
contrat est international portant sur le domaine de partie faible et que la condition du domicile
de défendeur soit remplie, c’est le règlement Bruxelles I qui est en jeu. On trouve que la
méthode de regroupement les parties considérées ‘faibles’ dans le rapport contractuel est un
moyen apte à leur donner la protection spéciale.
Pour la Thaïlande, à l’heure actuelle, on ne peut plus refuser la nécessité d’avoir le
texte en matière de la protection de partie faible dans un contrat international, surtout dans le
contrat de travail, on emprunte le terme ‘libre circulation de travailleurs’, car beaucoup de
Thaïlandais ont conclu le contrat de travail avec les compagnies étrangères ou bien avec les
étrangers qui travaillent en Thaïlande. Ceux-ci ne reçoivent toujours pas de protection
suffisante, notamment sur les règles relatives à une clause attributive de juridiction qui
doivent être clairement stipulées. Pour que l’on puisse réduire les risques de l’insécurité
juridique qui peuvent survenir aux parties faibles domiciliés en Thaïlande, les parties
contractantes devraient être prévisibles à tous les égards. De surcroît, nous insistons que,
comme l’on a vu ci-dessus, la tendance du droit international privé français positif évolue
dans le sens d’admission de la possibilité de conclure la clause attributive de juridiction en
matière extrapatrimonial. D’ailleurs, même en cas du divorce, lorsque les époux ont la
nationalité étrangère commune, il est admissible aussi d’attribuer la compétence aux

391
957
tribunaux dont ils ont la nationalité même s’ils sont domiciliés en France . On ne voit
aucune raison pour que la clause de prorogation de compétence simple en matière du
commerce international ne soit pas admise devant la Cour thaïe.

531. Nous aurons l’opportunité d’intervenir par la suite sur une autre possibilité de
dérogation conventionnelle aux règles de compétence ; la clause d’arbitrage. Même qu’elle est
aussi l’une des formes de convention attribuant de compétence, mais en raison de son
importance considérable en matière de contrats internationaux, nous proposons de l’étudier en
tant que mode alternative de règlement des différends dans le chapitre suivant.

957
B. Audit, obs. de Cass. 1er civ, 1er avril 1981, D. 1982.IR.69, n° 396.

392
Chapitre Second
LE MODE CONSENSUEL DE REGLEMENT DES DIFFERENDS.

532. Il existe plusieurs modes alternatifs de règlements des conflits dans le commerce
international tels que la négociation, la conciliation, la médiation ou l’arbitrage international.
Chaque méthode conserve ses propres intérêts et techniques convenables à chaque différend
avec les différents niveaux de contrainte. En effet il dépend de la nature de conflit, de la
sévérité du problème et surtout de la volonté des parties contractantes de choisir l’une ou
l’autre des solutions ci-dessus pour régler leurs conflits. Très souvent les parties commencent
d’abord par les négociations, jugées moins sévères mais susceptibles de donner de meilleur
résultat. Toutefois, lorsque les négociations échouent, les contractants peuvent recourir à
d’autres choix afin de trouver une conclusion satisfaisante. Nous verrons dans ce chapitre
l’arbitrage commercial international, comme l’on a déjà dit auparavant en raison de son rôle
indispensable dans ce domaine, malgré son caractère non judiciaire, mais un mode
juridictionnel. C’est ce dernier qui distingue l’arbitrage des autres modes alternatifs de
règlement des différends.
L’arbitrage qui fait partie depuis longtemps des contrats internationaux est également
une manifestation de l’autonomie de la volonté. La plupart des contrats commerciaux
internationaux inclusent une clause d’arbitrage pour régler les futurs litiges et permettre aux
parties d’éviter les tribunaux étatiques. Par l’état et la nécessité en matière du commerce
international, les États adoptent les instruments d’arbitrage en tant que mode alternatif de
règlement des différends aussi pour les affaires internes qu’internationales et encouragent les
contractants de l’employer. On constate que la liberté de choix des contractants est plus large
dans l’arbitrage commercial international que pour le choix du tribunal étatique. Car les
parties pourraient choisir non seulement la loi applicable mais également les règles
procédurales.
On a déjà étudié dans le chapitre précédent que la jurisprudence thaïe s’est orientée
généralement vers l’acceptation de clause attributive de juridiction. La condition demandée
par la Cour suprême dans sa décision avant la révision de l’article 7-4° du Code de procédure
civile est que le tribunal choisi dans la clause attributive de juridiction doit être le tribunal du
domicile de l’une des parties au litige d’une part, soit celui du lieu de la naissance du litige

393
958
d’autre part . Puis après la révision, la Cour suprême a tranché le litige portant sur la clause
attributive de juridiction mais elle reste silencieuse sur ce point et décida en revanche dans
959
une autre issue . Certes, la jurisprudence n’est pas contraire aux pratiques internationales
car elle n’a refusé ni la validité ni l’applicabilité de cette clause devant la juridiction thaï,
pourtant la mise en œuvre de ces conditions posent un certain nombre de questions en
pratique commerciale internationale. C’est la raison pour laquelle les parties semblent hésiter
de régler leurs différends par le mode traditionnel ; l’assignation devant le tribunal,
notamment lorsque les transactions présentent un lien avec la Thaïlande. Par conséquent les
modes alternatifs de règlement des différends sont de plus en plus indispensables et
remplaceraient le mode traditionnel qui ne peut pas répondre aux besoins des parties dans le
commerce international.

533. La notion de l’arbitrage international. La question préliminaire est de savoir quel


est « l’arbitrage international » ? En effet chaque loi étatique distingue l’arbitrage interne de
l’arbitrage international pour des raisons différentes. En France, la tradition de dissocier ces
deux sortes d’arbitrage existait depuis longtemps c'est-à-dire chaque arbitrage devrait être
soumis aux dispositions différentes propres à régler le problème donné selon la nature de
différend. Alors que dans le système juridique thaïlandais, on ne sépare jamais
l’arbitrage interne de l’arbitrage international. Force est de constater que les deux modes
d’arbitrage sont régis par les mêmes dispositions. Mais cela ne veut pas à dire que la loi thaïe
n’a jamais donné la définition à l’arbitrage international. En effet dans l’ancienne Loi de
960
l’arbitrage B.E. 2530 (1987) , l’article 28 de cette loi a défini le terme de l’arbitrage
international en raison de la distinction entre la reconnaissance de la sentence arbitrale interne
et étrangère. Mais de nos jours, c’est la Loi de l’arbitrage B.E. 2545 (2002) qui s’applique et
cette nouvelle loi a abrogé les dispositions de l’ancien article 28 et ne donne aucune définition
à cette notion. C’est ce que l’on verra dans les détails par la suite. En somme, la distinction de

958
Cour suprême Dika, n° 951/2539 (1996).
959
Cour suprême Dika, n° 5809/2539 (1996).
960
En effet afin de rédiger les dispositions de la Loi B.E. 2530, le législateur a utilisé la loi anglaise de
l’arbitrage comme modèle. Le problème paraît au cours de l’application car le législateur n’a repris qu’une partie
de ladite loi qui, elle-même, est influencée par la ligne de jurisprudence anglaise bien constante. Notamment en
ce qui concerne le contrôle de sentence par le juge étatique, car l’Arbitration Act 1979 limite ce contrôle dans
trois cas qui sont considérés très importants et aptes à son pays. Alors que la Thaïlande n’envisage pas la même
nécessité, enfin la nouvelle Loi B.E. 2545 a été élaborée par l’influence de la loi modèle de CNUDCI comme
l’on a déjà cité auparavant.

394
l’arbitrage interne et international a pour l’objectif de connaître les dispositions applicables
d’une part, et de faciliter la reconnaissance de la sentence d’autre part. Puisque la
reconnaissance de la sentence étrangère sera soumise à la convention internationale que cet
État est partie contractante.

534. La question est de savoir quels critères utilisés pour déterminer le caractère
international de l’arbitrage ? En principe les États utilisent les critères principaux tels que les
961
facteurs quantitatifs et qualitatifs . Le premier se fondent sur les éléments physiques, très
souvent l’État se rattache le caractère international de l’arbitrage à la nationalité des parties, le
domicile, le siège de l’arbitrage ou même la religion. D’après ce critère, même si le différend
porte sur le commerce international, si les parties sont domiciliées dans un même pays où se
déroule l’arbitrage, cet arbitrage sera qualifié comme purement interne. La nationalité
différente des parties peuvent aussi donner l’extranéité à l’arbitrage pour certain pays. En ce
qui concerne le second facteur, qualitatif, il se base sur la loi applicable au contrat ou à
962
l’arbitrage et la nature économique du litige . Quant à la loi applicable, celle-ci est utilisée
normalement pour la reconnaissance de la sentence étrangère. Prenons un exemple d’un
procès arbitral qui se déroule à Bangkok, procès régis par la loi française. Selon ce critère
cette sentence est étrangère ; la reconnaissance en Thaïlande doit alors être soumise à la
Convention pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères (ci-après
la Convention de New York de 1958).
Ce critère peut répondre à la question de l’homologation de la sentence étrangère mais
non pas à la question de savoir quel est le véritable arbitrage international. Pour répondre à
cette question, on a besoin d’un critère pertinent qui tient compte de la nature réelle du
différend. La richesse des motivations dans l’arrêt de la Cour d’appel de Paris en 1997 mérite
d’être mentionnée ici, selon la Cour « le caractère interne ou international de l’arbitrage se
déduit exclusivement de la nature économique de l’opération ayant donné lieu à l’arbitrage,
indépendamment du lieu de celui-ci, de la loi applicable au fond ou de la nationalité des
parties. En application de ce principe, est international l’arbitrage relatif à une opération
économique impliquant un mouvement de biens, de services ou un paiement à travers les

961
A. Chantara-opakorn, Règlement de différends par l’arbitrage, Bangkok : Nititham, 1994, p. 137 et s.
962
Ibid.

395
963
frontières et mettant en cause, de ce fait, les intérêts du commerce international » .
Par conséquent, la notion de l’arbitrage international dans l’article 1492 (art. 1504 du Décret
964
du 13 janvier 2011) doit être entendue en ce sens . La Cour française a retenu le critère
qualitatif en recourant à la nature économique du différend.

535. A l’époque, l’internationalité de l’arbitrage selon la loi thaïe a conféré à la nationalité


différente des contractants et la loi applicable à l’arbitrage. Dès lors, un tel ou tel arbitrage
sera international à l’égard de la loi thaïe B.E. 2530 si le procès arbitral se déroule en totalité
ou en grande partie du procès hors du territoire de Royaume thaïlandais et que l’une des
965
parties ne soit pas Thaïe . Certes, ce critère n’est pas apte aux contrats du commerce
international, car ceux-ci sont internationaux par nature et il est risqué d’être qualifié comme
litige interne.
Nous étudions tout d’abord l’appréciation de la clause d’arbitrage (Section I). Ensuite,
on interviendra sur l’appréciation de la compétence de l’arbitre (Section II).

Section I
Appréciation de la clause d’arbitrage.

536. La convention d’arbitrage peut être rédigée dans un contrat distinct d’un contrat
principal et peut être aussi la clause ou l’une des stipulations incluse dans ledit contrat. Force
est de constater que la convention d’arbitrage est un fondement d’établir la compétence du
tribunal arbitral. Faute de la validité de cette clause, l’arbitre n’a pas de compétence pour
statuer sur le fond du litige. On verra tout d’abord la validité de la clause compromissoire
(§1), ensuite l’incidence de la convention d’arbitrage (§2).

963
CA Paris, 1er juillet 1997, Compagnie minière de l’Ogooué, Rev. arb.1998.131, note D. Hascher.
964
CA Paris, 17 janvier 2002, Hugon, Rev.arb.2002.391, note J.-B. Racine ; RTD com.2003.63 ; CA Paris, 11
avril 2002, SA Kiabi, Rev.arb.2002.781.
965
L’article 28 de la Loi sur l’arbitrage B.E. 2530. มาตรา ๒๘ แห่ ง พระราชบัญญัติอนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๓๐ บัญญัติว่า
“อนุญาโตตุลาการต่างประเทศ หมายถึง อนุญาโตตุลาการที่กระทาการพิจารณาชี้ ขาดข้อพิพาททั้งหมดหรื อโดยส่ วนใหญ่นอกราชอาณาจักรไทย และ
คู่กรณี ฝ่ายใดฝ่ ายหนึ่งมิได้มีสัญชาติไทย”

396
§ 1 : La validité de la clause compromissoire.

537. Afin de trancher la question de la validité de la convention d’arbitrage, il faut répondre


d’abord à une question importante comme la qualité des parties contractantes de se
compromettre (A). Car, si l’une d’elles n’a pas pu se compromettre, ce fait affectera sans
doute la validité de ladite clause, il s’agit ici de l’arbitrabilité. L’ordre public international
relève aussi du problème de la validité, pourtant nous faisons les réserves à ceci afin de le
traiter dans la partie de la reconnaissance et de l’exécution des décisions étrangères. Il reste à
savoir si le contrat principal n’est pas valable, ou même n’existe pas, la clause
compromissoire peut-elle produire les effets ? Nous verrons ici la tendance d’admission
fragmentaire de l’autonomie de la convention d’arbitrage entre la juridiction française et la
juridiction thaïe (B).

A. La répercussion de la qualité des parties sur l’engagement compromissoire


international.

538. Il s’agit ici de la question de l’arbitrabilité, certes, celle-ci peut poser de problème
dans les diverses parties de l’arbitrage ; le sujet de l’arbitrage ou l’objet de l’arbitrage. C’est la
limite donnée à la possibilité de substituer la juridiction arbitrale à la juridiction étatique.
Mais nous nous intéressons ici l’arbitrabilité à l’égard de personnes morales de droit public
puisque c’est une issue non seulement sensible mais elle fait l’objet du débat très intense en
Thaïlande de nos jours. La question peut se poser si la validité de la clause compromissoire en
matière d’arbitrage international est indépendante de la nature privée ou administrative du
contrat ? Cette question est compliquée en soi du point de vue juridique, et on ne peut pas
éviter le problème de politique interne étatique qui augmente la sévérité du problème. En
particulier lorsque l’intérêt public est en cause et les biens nationaux sont l’enjeu, l’argument
va jusqu’à l’abrogation de la loi autorisant les personnes morales publiques de se
compromettre dans tous les types de contrats. Ce qui semble contraire à la pratique
internationale, pourtant l’idée que l’intérêt de l’État ne devrait pas pouvoir se compromettre
est de plus en plus fort en Thaïlande.

1) L’équilibre des souverainetés étatiques et des intérêts de commerce international.


539. La question peut se poser ainsi : la compromission ou la non compromission des
personnes publiques dans le règlement de litige par l’arbitrage relève de quelle loi ?
397
A l’époque, le droit français a qualifié l’aptitude de personne publique à régler les conflits par
966
le mode arbitral comme le problème de capacité de personne . Jusqu’au cours des années
60, la jurisprudence estime que « l’interdiction faite à l’État et aux établissements publics de
recourir à l’arbitrage ne soulève pas un problème de capacité (…) cette question relève de la
967
loi du contrat et non de la loi personnelle des parties cocontractantes » . De surcroît, la
jurisprudence judiciaire reste plus ouverte en décidant que « il serait contraire aux intérêts de
l’État d’interdire à ses représentants de s’accorder sur un mode de règlement des différends
conforme aux usages du commerce international (…) pour les conventions ayant un caractère
968
international » . Au point de vue du juge judiciaire, le refus de se compromettre dans cette
hypothèse entraînerait très souvent la rupture de pourparlers. Elle estime donc que
l’interdiction de ceci doit être limitée aux contrats d’ordre interne. Nous sommes d’accord sur
ce point dès lors que le contrat est international portant sur le commerce et le représentant
étatique joue un rôle d’un cocontractant sur le pied égal de la partie privée.

969
540. L’arrêt Galakis rendu en 1966 , aboutit à la solution très frappante en matière de
l’arbitrage international. La Cour de cassation a admis un principe général de validité de
l’engagement compromissoire de l’État en matière de commerce international. La règle
de droit international privé matérielle a été consacrée par la Cour. Il s’agit du fait que les
dispositions des articles 1004 et 83 du Code de procédure civile française interdisent la clause
compromissoire conclue par les établissements publics. Cette clause insérée dans un contrat
peut être considérée comme nulle à l’égard de ces règles. La Haute juridiction estima que ces
dispositions ne s’agissent que d’une règle matérielle interne, alors que dans la situation
internationale comme en l’espèce, la nullité de la clause d’arbitrage n’est pas applicable
lorsque celle-ci est contenue dans un contrat international. Force est de constater que le
fondement de motiver cette décision met l’accent sur les deux points : la situation doit
présenter le caractère d’extranéité d’une part et le résultat prescrit ne doit pas être identique à
celui attribué par le droit interne d’autre part.

966
Trib. confl., 19 mai 1958, Rev. arb.1961.116.
967
Cass. 1er civ., 14 avril 1964, San Carlo, D. 1964.637, J. Robert ; JDI.1965.646, note B. Goldman ;
RCDIP.1966.68, note H. Batiffol.
968
CA Paris, 10 avril 1957, Myrtoon Steamship, JCP.1957.II.10078, note H. Motulsky ; D. 1958.699, note J.
Robert ; RCDIP.1958.120, note Y. Loussouarn ; JDI.1958.1002, note B. Goldman.
969
Cass. 1er civ., 2 mai 1966, Galakis, D. 1966.575, note J. Robert ; JDI.1966.648, note Level ;
JCP.1966.14798, note Ph. Ligneau ; RCDIP.1967.553, note B. Goldman.

398
541. Cependant, la tendance de Conseil d’État était d’interdire la clause compromissoire.
L’avis célèbre rendu par le Conseil d’État en 1986 affirme sa position hostile à l’arbitrage
commercial international. Le tribunal a décidé que les personnes morales de droit public
françaises ne peuvent recourir à l’arbitrage international qu’à la condition d’y être autorisées
par une convention internationale ou par une loi. Comme l’a dit M. G. Teboul qu’il s’agit là
de deux organes : un avis rendu par le Conseil d’État à titre de formation consultative, et la
970
jurisprudence d’organe judiciaire . De ce point de vue on peut se demander si la décision
pour le litige de la même cause et du même fait dépend de la juridiction administrative ou
judiciaire ? Pour répondre à cette question, il faut rechercher tout d’abord quelle juridiction
est-elle compétente sur le litige de nature commercial international, litige dans lequel l’un des
contractants est personne publique ? En principe, ce genre de litige ne relève pas des
tribunaux administratifs. C’est toujours le juge judiciaire qui contrôle les sentences arbitrales
971
internationales . A notre avis il suffit de chercher à savoir si ce contrat est un contrat
administratif ce qui permet au juge administratif d’avoir la compétence. Si la réponse est
négative, ce litige relève de la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.

542. Prise en considération du critère d’extranéité et économique de l’arbitrage.


En 2008, la juridiction judiciaire a eu l’occasion de saisir le recours en annulation de la
sentence arbitrale internationale dans le litige entre un organisme public français et la
fondation norvégienne, personne morale privée, d’où le conflit est né. En l’espèce, la
fondation avait annulé le protocole d’accord conclu avec l’Institut national de la santé et de la
972
recherche médicale (ci-après INSERM) , qui avait pour objet le financement et la
construction d’un bâtiment de l’institut de recherche dans le cadre d’un programme
scientifique commun. En somme, l’INSERM a fait le recours à l’arbitrage selon la clause
compromissoire insérée dans leur contrat en évoquant le non respect des engagements
financiers de la fondation norvégienne. Malheureusement l’arbitre a rejeté la demande
d’indemnisation de l’Institut et l’a condamné à rembourser le total de la somme versée plus
les intérêts à la fondation.

970
G. Teboul, « Arbitrage international et personnes morales de droit public », Brèves remarques sur quelques
aspects de contentieux administratifs, AJDA.1997.26.
971
Ibid.
972
L’INSERM est autorisé en 2002 à conclure la clause compromissoire avec les organismes étrangers par le
Décret n° 83-975, 10 novembre 1983 relatif à l’organisation et au fonctionnement de l’INSERM l’article 8, 9°,
modifié par Décret n° 2009-278, 11 mars 2009, l’article 7, 9°.

399
La Cour d’appel de Paris a été saisie pour la question de la validité de la sentence, elle
prend clairement position en faveur de l’arbitrabilité du contrat au sens du CPC lorsqu’il est
international, quel que soit l’objet du contrat. Bien qu’il implique une personne morale
publique, l’arbitrage est international avant d’être administratif et que le litige en cause portait
973
sur les intérêts du commerce international . Certes, cette solution ne peut toujours pas
convaincre les partisans publicistes. Ils ont même proposé de consacrer le nouveau régime
d’arbitrage destiné à régler les différends relatifs aux personnes publiques et personnes
974
morales privées étrangères .
975
Finalement la Cour de cassation, dans l’arrêt du 26 janvier 2011 , a affirmé la
décision de la Cour d’appel en faveur de la notion de l’internationalité de l’arbitrage qui est
employé comme critère pour prendre en considération si un tel litige de l’arbitrage relève de
la compétence administrative ou judiciaire. La Cour de cassation a confirmé que
« l’internationalité » de l’arbitrage fait appel à « une définition économique » et pour la
déterminer il suffit que le litige soumis à l’arbitre porte sur une opération qui ne se dénoue pas
économiquement dans un seul État. La Cour a également appuyé sur les critères classiques
tels que l’indépendance de la qualité ou de la nationalité des parties, de la loi applicable au
fond ou à l’arbitrage ou le siège de l’arbitrage. Après avoir considéré le fait et l’objet du
protocole d’accord entre les parties, la Cour de cassation a estimé que l’arbitrage en
l’occurrence est international. Il semble que, à notre avis, la Cour a tenu compte du seul fait
qu’il implique des mouvements transfrontaliers, c'est-à-dire il y avait un transfert de fonds
entre la France et la Norvège.
En ce qui concerne le Décret du 13 janvier 2011, l’article 1504 ne donne toujours
aucune solution comme dans le passé, car il a adopté la même définition de l’arbitrage
international stipulée dans l’ancienne loi : « Est international l’arbitrage qui met en cause des
intérêts du commerce international ».

973
CA Paris, 13 novembre 2008, INSERM, D .2009.Chron.2390, obs. S. Bollée et 2962, obs. T. Clay ;
Rev.arb.2009.389, note M. Audit.
974
Conseil d’État, Chambre Nationale pour l’Arbitrage Privé et Public, « L’arbitrage et les personnes morales
de droit public », Compte rendu, Colloque du le 30 sept. 2009, disponible sur le site : http://www.conseil-État
.fr/cde/node.php?articleid=1812
975
Cass. 1er civ., 26 janvier 2011, INSERM, n° 09-10.198, D. 2011, AJ. 28 janv. 2011.

400
2) La solution évoluée de droit positif thaï.
a. L’admission de l’arbitrage dans un contrat international.
543. En Thaïlande, la possibilité de compromission des personnes morales publiques n’a
pas apparu dans l’ancienne loi de l’arbitrage en 1987. La conférence de la Commission de
travail pour rédiger la nouvelle loi sur l’arbitrage a eu lieu à la même époque où la Thaïlande
976
a mis sur pied les tribunaux administratifs. Certains publicistes , certes, contestaient l’idée
que l’État ou l’établissement public peut se compromettre en soulignant les deux
raisonnements principaux ; d’une part, un État souverain ne doit pas laisser l’arbitre ou le juge
privé trancher le litige dans lequel la personne morale publique est impliquée ; d’autre part,
l’arbitre n’est pas responsable au public comme le juge administratif. Or, la majorité des
juristes ont appuyé sur le fait que la Thaïlande est partie contractante de plusieurs accords
internationaux tels que Multilateral Investment Guarantee Agency (MIGA) ; Free Trade Area
(FTA) lesquels obligent la Thaïlande à régler les différends nés du contrat par l’arbitrage
international. C’est la raison pour laquelle la nouvelle loi de l’arbitrage de 2002 adopte la
règle portant sur le règlement des différends entre la personne morale de droit public thaï et la
personne de droit privé étranger (ou thaï), l’article 15 stipule expressément que :
« Dans le contrat entre les établissements de l’État et l’individu, peu importe s’il
s’agit de contrat administratif ou non, les contractants peuvent s’engager à régler leurs
977
différends par l’arbitrage et se soumettre à cette convention arbitrale » .

On peut observer que, à la différence de droit français, cette disposition n’est pas une
exception, mais plutôt un principe général, malgré que la disposition utilise le verbe
« pouvoir » c'est-à-dire qu’il n’est pas obligé mais elle laisse la porte ouverte pour l’arbitrage.
Alors qu’en droit français, les personnes morales de droit public françaises ne consentiront à
l’arbitrage international que si un texte de loi ou de convention internationale les confère un
978
pouvoir . Et en l’absence de ce texte, elles attendront qu’un autre texte de loi leur permette

976
N. Bormanan, « Du débat sur la chaine ITV : la différence entre le juge et l’arbitre », le 15 décembre 2004,
disponible sur le site http://www.pub-law.net/publaw/view.aspx?ID=93; S. Nitikraiphot, « Interview »,
Prachachat Business le 22 mai 2006.
977
มาตรา ๑๕ พ.ร.บ. อนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติวา่ “ในสัญญาระหว่างหน่วยงานของรัฐกับเอกชนไม่วา่ เป็ นสัญญาทางปกครองหรื อไม่
ก็ตาม คู่สัญญาอาจตกลงให้ใช้วิธีการอนุญาโตตุลาการในการระงับข้อพิพาทได้ และให้สัญญาอนุญาโตตุลาการดังกล่าวมีผลผูกพันคู่สัญญา”
978
L’article 2060 al. 2 du Code civil français qui autorise un engagement compromissoire à certains
établissements publics.

401
979
d’engager dans ce mode de règlement des litiges par exemple dans l’affaire
980
Eurodisneyland .

b. Les résultats critiqués pour le contrat international administratif.


544. C’est un problème qui résulte du texte de loi précité dont le champ d’application de
l’article 15 comprend aussi les contrats d’État. C'est-à-dire même qu’une partie au contrat est
personne morale de droit public, cela ne rend pas l’inarbitrabilité au litige. En ce qui concerne
la définition du contrat administratif, la Loi sur l’arbitrage ne précise pas dans le texte mais
que l’on puisse trouver sa définition dans l’article 3 de Loi portant création des juridictions
administratives et de la procédure administrative contentieuse B.E. 2542 (1999) qui définit
ainsi : « Contrat administratif comprend également un contrat dans lequel une administration
publique ou un représentant de l’État est partie et qui revêt le caractère d’un contrat de
concession, contrat de service public, contrat de travaux public ou contrat d’exploitation de
981
ressources naturelles » . Mais lorsque l’établissement public a conclu un contrat pour son
activité commerciale internationale avec un individu, la personne morale publique sera sur le
même pied que son cocontractant et le rapport juridique en cause peut aussi soumettre au jeu
du droit international privé.

545. Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, il semble que les établissements publics
concluent pratiquement la clause compromissoire pour régler leurs litiges dans les contrats
internationaux. Le point de changement est intervenu lorsque l’État thaï a perdu dans
plusieurs cas où l’arbitrage est en cause, notamment le cas du contrat de concession de la
chaine de télévision ITV et celui de la construction d’autoroute. Bien que ces contrats soient
administratifs lesquels ne nous concernent pas directement dans nos études, nous ne pouvons
pas les écarter à ce stade car ils pourraient entraîner l’abrogation pure et simple de l’article 15
de la Loi sur l’arbitrage précité. Par ailleurs, le gouvernement a enfin délibéré la Résolution
du 28 juillet 2007 qui prohibe toutes les clauses compromissoires pour les contrats, peut
importe s’ils sont administratifs ou non, conclus entre l’établissement public thaï et l’individu
en Thaïlande ou à l’étranger, sous réserve de l’admission au cas par cas l’avis favorable du

979
G. Teboul, « Arbitrage international et personnes morales… », op.cit., p. 27.
980
CE avis, 6 mars 1986, GACE, D., 2008, n° 12, obs. D. Labetoulle. ; V. aussi le Décret du 19 août 1986.
981
L’article 3 de la Loi, disponible en français sur le site http://www.admincourt.go.th/amc_fra/04-
laws/f2act.pdf

402
gouvernement. Il en résulte que les établissements publics de nos jours suspendent, non
seulement dans un contrat administratif mais également dans d’autres contrats commerciaux
internationaux non administratif, la conclusion de toutes les conventions d’arbitrage pour
régler leurs litiges avec les personnes morales privées. Puisqu’il est trop exposé pour eux, si
leurs établissements, suite à l’arbitrage, ont perdu le procès, même s’il s’agit d’un contrat
commercial international ordinaire, ils risquent toujours d’avoir affaire avec le gouvernement.
D’ailleurs, l’arbitre ou les arbitres dans ce litige seraient convoqués par ce dernier pour lui
donner une explication de rendre la sentence comme telle. Ceci est contraire aux pratiques de
l’arbitrage selon lesquelles l’arbitre est indépendant et n’est pas obligé d’être un témoin
devant la Cour ou d’exposer ses motivations sur la sentence auprès le gouvernement.
Il semble que l’interdiction aux personnes publiques de se compromettre dans un
contrat du commerce international est considérée comme un obstacle au commerce et à
l’investissement. On sait que l’intérêt public est le plus important et nécessite une protection
spéciale. Au sens inverse on peut se demander si cette protection spéciale est nécessaire dans
le champ du commerce international où les relations contractuelles d’intérêts privés occupent
le terrain. On ne peut pas éviter de penser que la soumission de la validité d’une clause
compromissoire dans un contrat commercial international à l’existence d’une convention
internationale ou la loi spéciale laisse la porte ouverte aux personnes publiques de se déroger
aux dispositions contractuelles auxquelles elles se sont engagés en l’absence du traité bilatéral
ou de la loi spéciale. La question est de savoir s’il ne porte pas atteint aux entreprises privées
étrangères qui exercent de bonne foi leurs activités commerciales en croyant à la validité de la
clause compromissoire ? Certes, le mode alternatif de régler les litiges est l’un des facteurs
importants que les investisseurs prennent en considération. Il ne s’agit pas à ce stade de la
question de l’intérêt d’État, au contraire c’est celle de la bonne foi entre les contractants
laquelle est une base de tous les types de contrats.

546. Nous proposons, pour le gouvernement thaï, de reconsidérer cette position et nous
insistons sur la suppression du recours à l’arbitrage dans un contrat international laquelle n’est
982
pas du tout la meilleure solution . Il est possible de revenir sur le moyen selon lequel il faut

982
Au cours de la rédaction de cette thèse, l’Ordonnance est en cours de reconsidération par le gouvernement le
27 décembre 2010 suite aux problèmes de l’application. Dans cette nouvelle proposition soutenue par les juristes
et la Commission du développement économique et social révise ainsi : « Tout le contrat, peu importe s’il est
administratif ou non, conclu entre l’établissement public thaï et l’individu en Thaïlande ou à l’étranger, le litige
relatif à celui-ci pourrait être réglé par l’arbitrage ; sauf s’il y a des problèmes ou de nécessité, il faut demander
l’avis du gouvernement au cas par cas ».

403
avoir la loi spéciale permettant de se compromettre, ou même créer le nouveau régime de
règlement des différends entre personne morale publique et personne morale de droit privé
étranger par l’arbitrage commercial international.

B. L’autonomie de la convention d’arbitrage.

547. Lorsque les parties contractantes, conformément à la clause, ont saisi le tribunal
arbitral afin de régler leur litige, la question peut se poser au stade de l’exécution de la
convention d’arbitrage, à savoir si le contrat principal est nul ou n’a jamais existé, la clause
compromissoire peut-elle produire les effets ? La réponse est positive dans la doctrine et on
sait que ceci ne pose pas de problème pour la France, mais la jurisprudence thaïe semble
variée. Cette question est considérablement importante puisque la réponse en faveur de
l’autonomie de la clause compromissoire donnerait la vie à cette clause et par ailleurs, elle
accorderait non seulement la compétence à l’arbitre de trancher un tel litige mais aussi de
statuer sur la validité de ce contrat principal ; alors que la réponse négative permettrait en
revanche à la juridiction étatique de régler ledit différend sans nécessité à se déclarer
incompétent.

1) Prise en considération du principe de l’autonomie de la clause d’arbitrage par le


juge thaï.
548. La renonciation critiquée de l’autonomie de la convention arbitrale par rapport
au contrat principal. Nous étudions rapidement la tendance de la jurisprudence de la Cour
suprême Dika rendue avant l’année 1987, puis l’entrée en vigueur de la première Loi sur
l’arbitrage en 1987 et enfin l’époque de la nouvelle Loi de 2002.
Avant l’entrée en vigueur de la Loi sur l’arbitrage de 1997, il semblait que l’avis des
juristes était différent de celui de la Cour suprême Dika. Certes, la doctrine thaïe est favorable
au principe de l’autonomie de la clause d’arbitrage, alors que la jurisprudence en désignait
autrement. Par exemple la décision rendue en 1977, en l’espèce il s’agit d’un contrat de vente
internationale de marchandises, les contractants ont déjà conclu ce genre du contrat. Dans la
pratique les contrats de vente entre les parties sont en principe conclus par écrit. Cependant
pour le contrat en question, il paraît que la société vendeuse défenderesse n’avait pas signé ce
contrat envoyé par la société demanderesse. La Cour a estimé que « le contrat de vente
n’existe jamais, par conséquent la convention d’arbitrage insérée dans ledit contrat destinée
à régler les différends qui seraient nés du contrat ne peut produire aucun effet ; que la
404
sentence arbitrale rendue à Londres ne peut pas être reconnue en Thaïlande, même si la
Thaïlande et le Royaume Uni sont parties contractantes de la Convention de New York de
983
1958 » .
Il faut constater que la Cour thaïe a tenu cette position même après l’entrée en vigueur
de la première Loi sur l’arbitrage B.E. 2530 en 1987, car cette ancienne loi n’avait pris aucune
984
disposition sur ce sujet . On trouve que la position de la Cour était ferme et non favorable à
l’autonomie de la clause compromissoire. A notre avis, bien qu’il n’y ait eu aucune
disposition de loi thaïe pour régler ce problème, l’article 173 du CCC peut être la bonne
solution à ce stade. Cet article a pour but de trancher le problème d’acte juridique selon lequel
lorsqu’une stipulation du contrat est nulle, mais qu’une autre se trouve valide, cette partie
validée de ce contrat peut produire un effet. Pour cette raison nous ne sommes pas d’accord
avec une telle décision de la Cour. Il semble que celle-ci soit contraire aussi bien à la pratique
985
en matière de l’arbitrage internationale qu’à la tendance juridique d’autres pays et même
aux dispositions des conventions internationales.
Cependant parmi les décisions malheureuses, nous en trouvons aussi celle de la Cour
suprême considérée comme moderne à l’époque, rendue en 1978 qui acceptait le jeu de la
clause compromissoire. En l’espèce, il s’agissait du contrat de vente internationale de piments
sec, la Cour a admis que « vu que le contrat conclu entre les parties contractantes en stipulant
que les différends nés de ce contrat doivent être tranchés par l’arbitrage à New York, est
986
validé » . La Cour estima que cette clause résultait de la volonté des contractants était non
contraire à l’ordre public international, alors il faut appliquer la clause compromissoire.
Même si cette décision ne concerne pas directement l’autonomie de la clause d’arbitrage car il
était au stade de la demande en reconnaissance de la sentence arbitrale, mais elle nous montre
aussi la position du juge thaï d’admettre le règlement des différends nés du contrat
international par l’arbitrage international.

983
Cour suprême Dika, n° 520/2520 (1977).
984
Cour suprême Dika, n° 611/2535 (1992).
985
En droit anglais de l’arbitrage 1996, la section 7 ‘Separability of arbitration agreement’ stipule ainsi :
« Unless otherwise agreed by the parties, an arbitration agreement which forms or was intended to form part of
another agreement (whether or not in writing) shall not be regarded as invalid, non-existent or ineffective
because that other agreement is invalid, or did not come into existence or has become ineffective, and it shall for
that purpose be treated as a distinct agreement ».
986
Cour suprême Dika, n° 698/2521 (1978).

405
549. L’admission par la loi le principe de l’autonomie de la clause d’arbitrage.
Finalement, la nouvelle Loi sur l’arbitrage de 2002 met fins à ces résultats malheureux, car la
987
dernière phrase de l’article 11 affirme ainsi : « Une convention d’arbitrage peut prendre la
forme d’une clause compromissoire dans un contrat ou d’une convention séparée ». De même
que la disposition de l’article 24 qui dispose que :
« Le tribunal arbitral peut statuer sur sa propre compétence, y compris sur toute
exception relative à l’existence ; à la validité de la convention d’arbitrage ; ou à la validité
de la constitution du tribunal arbitral. A cette fin, une clause compromissoire faisant partie
d’un contrat est considérée comme une convention distincte des autres clauses du contrat. La
constatation de nullité ou inopérant du contrat principal par le tribunal arbitral n’entraîne
pas de plein droit la nullité de la clause compromissoire ».

Il est clair que le principe de l’autonomie de la clause d’arbitrage est consacré en droit
thaï à l’arbitrage, aussi bien interne qu’international. Ceci est affirmé par le second alinéa du
988
même article qui exige la convention d’arbitrage en forme écrite ou au moins avoir une
preuve écrite ; c'est-à-dire que lorsque cette convention est valide même si le contrat principal
est nul, on ne peut contester que la première pourra toujours produire son effet pour régler le
litige. La volonté du législateur est clair car il donne par ailleurs l’opportunité de prouver
l’existence de la clause compromissoire même que les parties ne l’ont pas signée, si l’une
d’elles peut prouver qu’il y a d’autres documents ou d’autres moyens de communications

987
L’article 11, 1er alinéa : « Une convention d’arbitrage est une convention par laquelle les parties décident
de soumettre à l’arbitrage tous les différends ou certains des différends qui se sont élevés ou pourraient s’élever
entre elles au sujet d’un rapport de droit déterminé, contractuel ou non contractuel. Une convention d’arbitrage
peut prendre la forme d’une clause compromissoire dans un contrat ou d’une convention séparée ». มาตรา ๑๑
วรรคแรก พ.ร.บ. อนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติว่า “สัญญาอนุญาโตตุลาการ หมายถึง สัญญาที่คู่สัญญาตกลงให้ระงับข้อพิพาททั้งหมดหรื อ
บางส่ วนที่เกิดขึ้นแล้วหรื อที่อาจเกิดขึ้นในอนาคตไม่วา่ จะเกิดจากนิติสัมพันธ์ทางสัญญาหรื อไม่ โดยวิธีอนุญาโตตุลาการ ทั้งนี้ สัญญาอนุญาโตตุลาการ
อาจเป็ นข้อสัญญาหนึ่งในสัญญาหลัก หรื อเป็ นสัญญาอนุญาโตตุลาการแยกต่างหากก็ได้”
988
L’article 11, alinéa 2 : « La convention d’arbitrage doit se présenter sous forme écrite. Une convention est
sous forme écrite si elle est consignée dans un document signé par les parties ou dans un échange de lettres, de
communications faxe, de télégrammes, de communications télex, ou de tout autre moyen de télécommunications
qui en atteste l’existence, ou encore dans l’échange d’une conclusion en demande et d’une conclusion en
réponse dans lequel l’existence d’une telle convention est alléguée par une partie et n’est pas contestée par
l’autre ». มาตรา ๑๑ วรรค ๒ พ.ร.บ. อนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติว่า สัญญาอนุญาโตตุลาการต้องมีหลักฐานเป็ นหนังสื อลงลายมือชื่ อ
คู่สัญญา เว้นแต่ถา้ ปรากฏข้อสัญญาในเอกสารที่คู่สัญญาโต้ตอบทางจดหมาย โทรสาร โทรเลข โทรพิมพ์ การแลกเปลี่ยนข้อมูลโดยมีการลงลายมือชื่อ
อิเล็กทรอนิกส์ หรื อทางอื่นซึ่ งมีการบันทึกข้อสัญญานั้นไว้ หรื อมีการกล่าวอ้างข้อสัญญาในข้อเรี ยกร้องหรื อข้อคัดค้านและคู่สัญญาฝ่ ายที่มิได้กล่าวอ้าง
ไม่ปฏิเสธ ให้ถือว่ามีสัญญาอนุญาโตตุลาการแล้ว
L’article 11, alinéa 3 : « La référence dans un contrat à un document contenant une clause
compromissoire vaut convention d’arbitrage, à condition que ledit contrat soit sous forme écrite et que la
référence soit telle qu’elle fasse de la clause une partie du contrat ». มาตรา ๑๑ วรรค ๓ พ.ร.บ. อนุญาโตตุลาการ พ.ศ.
๒๕๔๕ บัญญัติวา่ สัญญาที่มีหลักฐานเป็ นหนังสื ออันได้กล่าวถึงเอกสารใดที่มีขอ้ ตกลงให้ระงับข้อพิพาทโดยวิธีอนุญาโตตุลาการ โดยมีวตั ถุประสงค์
ให้ขอ้ ตกลงนั้นเป็ นส่ วนหนึ่งของสัญญาหลัก ให้ถือว่ามีสัญญาอนุญาโตตุลาการแล้ว

406
confirmés la présence de cette convention d’arbitrage et que celle-ci fait partie au contrat
principal ou précise qu’elle a pour but de régler le litige né de ce contrat, la loi présume
l’existence de la clause d’arbitrage.
Tout cela affirme que la clause compromissoire est complète en soi, elle peut être
séparément du contrat principal. Il ne faut pas laisser la partie de mauvaise fois conclure une
convention d’arbitrage sans la volonté réelle de régler les différends par ce moyen en
invoquant la nullité ou l’inexistence d’un contrat de fond pour rendre ladite convention
inapplicable. D’ailleurs, si l’on prend en considération la disposition concernant le principe
989
compétence-compétence, l’article 24 de la nouvelle loi admet que pour l’objectif de statuer
sur la propre compétence de l’arbitre, il est présumé que la convention d’arbitrage faisant
partie d’un contrat principal est considérée comme une clause distincte des autres clauses du
contrat. La décision de l’arbitre sur la nullité ou l’inapplicabilité de ce dernier n’affecte pas la
validité de la clause compromissoire. On peut conclure que la loi thaïe actuelle, en vertu des
articles 11 et 24, affirme l’indépendance de la clause d’arbitrage du contrat de fond.

2) L’admission fermement du juge français l’autonomie de la clause d’arbitrage.


550. En France, la situation était différente à l’époque, car la jurisprudence française admet
depuis l’arrêt Gosset en 1963 qu’« en matière d’arbitrage international, l’accord
compromissoire, qu’il soit conclu séparément ou inclus dans l’acte juridique auquel il a trait,
présente toujours, sauf circonstances exceptionnelles, qui ne sont pas alléguées en la cause,
une complète autonome juridique, excluant qu’il puisse être affecté par une éventuelle
990
invalidité de cet acte » .
Cette orientation est affirmée par la Cour de cassation dans l’arrêt Hecht en 1972,
même qu’il s’agissait d’une clause insérée dans un contrat mixte et non commercial. La Cour
décida ainsi : « il se présente le caractère international du contrat qui liait les parties et ayant

989
L’article 24, 1er al. : « Le tribunal arbitral peut statuer sur sa propre compétence, y compris sur toute
exception relative à l’existence ; à la validité de la convention d’arbitrage ; ou à la validité de la constitution du
tribunal arbitral. A cette fin, une clause compromissoire faisant partie d’un contrat est considérée comme une
convention distincte des autres clauses du contrat. La constatation de nullité ou inopérant du contrat principal
par le tribunal arbitral n’entraîne pas de plein droit la nullité de la clause compromissoire ». มาตรา ๒๔ วรรค ๑
พ.ร.บ. อนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติวา่ คณะอนุญาโตตุลาการมีอานาจวินิจฉัยขอบเขตอานาจของตนรวมถึงความมีอยูห่ รื อความสมบูรณ์ของ
สัญญาอนุญาโตตุลาการ ความสมบูรณ์ของการตั้งคณะอนุญาโตตุลาการ และประเด็นข้อพิพาทอันอยูภ่ ายในขอบเขตอานาจของคณะอนุญาโตตุลาการ
ได้ และเพื่อวัตถุประสงค์น้ ี ให้ถือว่าข้อสัญญาอนุญาโตตุลาการซึ่ งเป็ นส่ วนหนึ่ งของสัญญาหลักเป็ นข้อสัญญาแยกต่างหากจากสัญญาหลัก คาวินิจฉัย
ของคณะอนุญาโตตุลาการที่วา่ สัญญาหลักเป็ นโมฆะหรื อไม่สมบูรณ์จะไม่กระทบกระเทือนถึงข้อสัญญาอนุญาโตตุลาการ
990
Cass. 1er civ., 7 mai 1963, Gosset, D. 1963.545, note J. Robert ; RCDIP.1963.615, note H. Motulsky ; Rev.
arb. 1963.60 ; JCP.1963.II.13405, note B. Goldman ; JDI.1964.82, 1er esp., note J.-D. Bredin.

407
rappelé qu’en matière d’arbitrage international l’accord compromissoire présente une
complète autonomie, l’arrêt attaqué en a justement déduit que la clause litigieuse devait en
991
l’espèce recevoir application » . C’est une décision qui affirme l’indépendance de la
clause d’arbitrage du contrat principal y compris la loi applicable au fond de ceci et aussi de
toute loi étatique, car normalement le contrat mixte relève à l’ancien article 631, al. 2, du
Code de commerce.
Affirmant les fruits des deux arrêts dans la décision de la Cour de cassation en 1993,
la Cour estima qu’« en vertu d’une règle matérielle du droit international de l’arbitrage la
clause compromissoire est indépendante juridiquement du contrat principal qui la contient
directement ou par référence et que son existence et son efficacité s’apprécient, sous réserve
des règles impératives du droit français et de l’ordre public international, d’après la
992
commune volonté des parties sans qu’il soit nécessaire de se référer à une loi étatique » .
La Cour affirme aussi dans le sens que seule la volonté commune des parties suffit à rendre
l’efficacité et la validité de la convention et aussi à fonder l’autonomie de la clause
d’arbitrage.
La question peut se poser ailleurs, à savoir si la nullité ou l’inexistence du contrat
principal affectent-elles la clause compromissoire ? L’arrêt de la Cour de cassation rendu en
2005 donne la réponse négative en décidant que « la nullité non plus que l’inexistence du
contrat qui contient la clause d’arbitrage ne l’affectent, en application du principe de validité
993
de la convention d’arbitrage et de son autonomie en matière internationale » .

551. La ligne de la jurisprudence s’est orientée en faveur de l’indépendance de la référence


994
de toute loi étatique de la convention d’arbitrage . En somme, la question la plus

991
Cass. 1er civ., 4 juillet 1972, Hecht, JDI.1972.843, note B. Oppetit ; RCDIP.1974.82, note P. Level. V. aussi
CA Paris, 13 décembre 1975, RCDIP.1976.506, note B. Oppetit ; JDI.1977.107, note E. Loquin ;
Rev.arb.1977.147, note Ph. Fouchard.
992
Cass. 1er civ., 20 décembre 1993 ; Dalico, JDI.1994.432, note E. Gaillard ; RCDIP.1994.663, note
P. Mayer ; Rev. arb.1994.116, note H. Gaudemet-Tallon ; RTD com.1994.254, obs. E. Loquin.
993
Cass. 1er civ., 25 octobre 2005, n° 02-13.252, D. 2005.3050 et 2006.199 ; Rev.arb.2006, note J.-B. Racine.
994
V. en ce sens, Cass. 1er civ., 21 mai 1997, Jaguar, Rev.arb.1997.537, note E. Gaillard ; RCDIP.1998.87,
note V. Heuzé ; JDI.1998.969, 1er esp., note S. Poillot-Peruzzetto ; RTD com.1998.330, obs. E. Loquin. Il s’agit
d’un contrat international conclu par un consommateur pour l’achat d’un véhicule au Royaume-Uni. La Cour de
cassation affirma que « la clause compromissoire devait recevoir application en vertu de l’indépendance d’une
telle clause en droit international sous la seule réserve des règles d’ordre public international, qu’il
appartiendra à l’arbitre de mettre en œuvre, sous le contrôle du juge d’annulation, pour vérifier sa propre
compétence, spécialement en ce qui concerne l’arbitrabilité du litige ».

408
importante à ce stade est de savoir si cette clause compromissoire est-elle valable ? Quelle est
la loi applicable pour considérer sa validité ? Pour la seconde question on a déjà vu ci-dessus
que la clause d’arbitrage n’a besoins d’aucune loi pour justifier son existence, affirmons que
seule la volonté des contractants est suffisante.

552. En droit communautaire, il semble que le principe de l’autonomie de la clause


d’arbitrage n’est pas reconnu dès lors qu’elle est en concurrence avec l’application du
Règlement Bruxelles I.
Il convient d’appuyer sur la décision de la CJCE dans l’affaire West Tankers dont la
Cour Luxembourg a refusé d’apprécier la prononciation d’une anti-suit injunction pour
protéger la clause compromissoire conclue par les parties au contrat (v. supra n° 516). Car, au
point du vue de la CJCE, lorsque le litige est reconnu par le tribunal étatique compétent sur le
fond en vertu du règlement Bruxelles I, c'est-à-dire qu’il est entré dans le champ d’application
de ce règlement, c’est pourquoi la mesure anti-suit injunction est impossible.
Certes, cette décision met non seulement une incertitude à la convention d’arbitrage
mais également l’imprévisibilité du mode de règlement des différends. Puisqu’une fois que
les parties engagent dans une convention d’arbitrage, surtout pour régler le litige qui sera né
du contrat, on présume qu’elles ont l’intention de trancher leurs conflits par ce moyen et non
la longue procédure des tribunaux étatiques. L’intérêt de fixer dans un contrat les modes de
règlement des différends est que les contractants connaissent par avance à quelles obligations
ils s’engagent. D’après l’arrêt West Tankers, on peut dire que l’autonomie de la clause
d’arbitrage est rejetée par la CJCE. Bien que cette clause soit valide, c’est le juge italien qui
est compétente de statuer le litige né du contrat. A notre avis, même si la mesure d’anti-suit
injunction est impossible dans l’espace judiciaire européenne, on peut penser qu’il est
possible aussi de prononcer que la clause compromissoire est valable et doit être renvoyée au
tribunal arbitral donc ce dernier aurait pu statuer sur sa compétence.

3) L’autonomie de la clause compromissoire par rapport à l’application de règles


impératives.
553. La Cour de cassation affirma dans l’arrêt rendu en 2010 que le recours à l’arbitrage
995
n’est pas exclu du seul fait que des dispositions impératives sont applicables au litige .

995
Cass. 1er civ., 8 juillet 2010, Sté Doga c/ Sté HTC, n° 09-67.013, D. 2010. 1797 ; Gaz. Pal. 2010, n° 243, p.
16-18, obs. G. Bertrou et O. Attias.

409
En l’espèce, la société française Doga a conclu, en 1999, un contrat de distribution exclusive
en France avec la société suédoise HTC, cette dernière a résilié le contrat en 2007. La société
Doga a saisi le tribunal de commerce pour le paiement de dommages-intérêts pour la rupture
abusive du contrat en vertu de l’article L. 442-6-I-5° du code de commerce. La société HTC
a invoqué l’existence de la clause d’arbitrage devant le tribunal étatique pour qu’il se déclare
incompétent. La société Doga a appuyé sur la violation des dispositions à caractère d’ordre
public de l’article L. 442-6-I-5° du code de commerce pour contester l’application de la
clause compromissoire. Elle a fait valoir que la rupture brutale d’une relation commerciale
établie constitue un délit civil qui engage la responsabilité délictuelle de son auteur et que
l’action en réparation intentée par la victime pour voir sanctionner la méconnaissance par
996
d’autre partie d’une obligation légale ne constitue pas un lien avec le contrat , selon la
société Doga, la clause compromissoire devait être considérée comme manifestement
inapplicable au sens de l’article 1458 du CPC. La Cour de cassation a affirmé les décisions
du tribunal de commerce de Versailles et la juridiction d’appel en estimant que « le recours à
l’arbitrage n’est pas exclu du seul fait que des dispositions impératives, fussent-elles
constitutives d’une loi de police, sont applicables. La Cour d’appel en a exactement déduit
qu’il appartenait à l’arbitre de se prononcer par priorité sur sa propre compétence (…) ».
Il faut constater cependant que la question ne se pose pas ici sur le caractère de loi de
police de l’article L. 442-6-I-5° en cause, alors la Cour de cassation n’a pas statué sur ce
point. D’après MM. G. Bertrou et O. Attias, les auteurs se demandent si ledit article du code
de commerce s’applique indépendamment à la loi applicable au contrat, c'est-à-dire la loi de
police ; ou bien uniquement si la loi française est désignée par la règle de conflit, c'est-à-dire
l’ordre public international ?
Cependant un autre arrêt rendu en faveur de l’applicabilité de la clause attributive de
juridiction en présence des dispositions de l’ordre public applicable au litige, la Cour de
cassation a décidé que « l’existence de l’ordre public applicable au litige n’avait pas pour

996
V. CA Aix-en-Provence, 29 mai 2008, Gimoka SRL, n°07/16801 : la Cour a décidé que dés lors que la
convention d’arbitrage vise tous les litiges relatifs au contrat, une demande de nature délictuelle qui présente un
lien direct avec le contrat ne rend pas manifestement inapplicable la clause compromissoire. En l’espèce il s’agit
d’un contrat de distribution exclusive, la demanderesse a soulevé pour contester l’application de la clause
d’arbitrage la nature délictuelle de l’action en cause, en soutenant que sa demande de dommage-intérêts issue de
la rupture brutale d’une relation commerciale établie. Mais la juridiction d’appel, en affirmant la décision du
juge du fond, a estimé que « la généralité des termes retenus par la clause compromissoire implique que les
parties au contrat ont entendu soumettre à l’arbitrage tout litige pouvant survenir entre elles ».

410
997
effet de rendre la clause attributive de juridiction inapplicable » . Force est de constater
que l’ordre public international en cause ne peut priver les arbitres de leur compétence.
Autrement dit, il ne faut pas laisser l’une des parties simplement utiliser l’article L. 442-6-I-5°
afin de se soustraire à la clause compromissoire. On peut observer que cette décision confirme
aussi bien l’autonomie de la convention d’arbitrage que le principe de compétence-
compétence de l’arbitre.
Pourtant, à notre avis, si l’article L. 442-6-I-5° constitue de loi de police ou bien
l’ordre public international, même si il n’affecte pas à la validité de la convention d’arbitrage,
mais l’arbitre devrait aussi en tenir compte dans son procès.

§ 2 : L’incidence de la convention d’arbitrage.

554. La clause d’arbitrage peut produire des effets en plusieurs aspects ; il y a d’abord, pour
les parties faibles, certaines différences posées par la jurisprudence entre les parties réputées
faibles elles-mêmes, par exemple le travailleur et le consommateur (A). Alors que dans
l’aspect des tiers, la question de l’opposabilité de la clause d’arbitrage ouvre le débat très
vivant, en particulier dans la matière de contrat de transport maritime international (B).

A. L’arbitrage international à l’épreuve de la protection de parties faibles, les


déséquilibres manifestes.

1) Solution plus favorable en matière du contrat de travail.


555. En matière de contrats internationaux, il arrive souvent que les contractants ont conclu
dans leurs contrats la convention d’arbitrage, ce qui résulte du principe de l’autonomie de la
volonté reconnu aux parties. Il en va de même pour les contrats conclus par les parties faibles.
En effet, le souci n’est pas loin de celui constaté en matière de la clause attributive de
juridiction. Il faut bien considérer si elles sont privées de leurs protections nécessaires
accordées par la loi. L’arbitrage est considéré comme la justice privée, on peut se demander à
quel niveau de protection la loi peut-elle couvrir les parties réputées faibles ?

997
Cass. 1er civ., 22 octobre 2008, n° 07-18744, D. 2009. 200. En effet, la responsabilité selon l’article L. 442-
6 I 5° du Code de commerce n’est pas de nature contractuelle. Donc, on peut trouver les décisions qui ont décidé
que la nature extracontractuelle de cette responsabilité rend inapplicable toute clause attributive de juridiction
figurant dans le contrat en cause.

411
556. La Chambre sociale de la Cour de cassation a affirmé la protection du salarié dans son
arrêt du 28 juin 2005. En l’espèce, il s’agit d’une rupture du contrat de travail par le
travailleur ; le capitaine du navire immatriculé à l’étranger d’une part, et la société
employeuse d’autre part. Le travailleur a saisi le Conseil de prud’hommes, alors que la société
employeuse a saisi la Cour d’appel de Paris pour faire opposition à cette requête en invoquant
l’existence de la clause d’arbitrage, la juridiction d’appel a rejeté cette affaire.
Le litige a été porté devant la Chambre sociale qui a constaté aussi la clause
compromissoire insérée dans un contrat international, elle a confirmé la validité de celle-ci en
décidant que la Cour d’appel a violé le principe de validité des clauses compromissoires
lorsqu’elle l’a écartée. Car on présume que le salarié souhaite s’affranchir de la protection
accordée par la loi au moment où le litige survient. Pourtant ce n’est pas pour tous les cas
qu’il sera comme tel, il faut constater que la clause compromissoire est inopposable au
travailleur dès lors que les juridictions françaises sont internationalement compétentes.
Comme l’affirme la Cour de cassation que la clause d’arbitrage « n’est pas opposable
au salarié qui a saisi régulièrement la juridiction compétente en vertu des règles applicables,
998
peu important la loi régissant le contrat de travail » . C'est-à-dire que lorsque la partie
saisie la juridiction étatique est un travailleur, on voit que la clause compromissoire ne lui
était pas opposable.
En l’occurrence, la Chambre sociale se fonde la compétence juridictionnelle sur le
domicile en France du capitaine du navire, le travailleur, car il paraît dans le fait que celui-ci
exécute sa prestation en dehors de tout établissement. Alors on trouve dans les autres
décisions la même position de la Cour de cassation d’écarter le principe de validité de la
999
clause d’arbitrage et le principe de compétence-compétence . Cependant on peut
comprendre que, en l’espèce, la Cour a traité le contrat de travail qui inclut la clause
compromissoire comme le cas du contrat de travail qui inclut la clause attributive de
juridiction. Car au point de vue de la Cour, la clause d’arbitrage est un type de clause
prorogation de compétence du juge étatique en matière de partie faible. Et que normalement

998
Cass. soc., 28 juin 2005, n° 03-45.042, D. 2005.2035, obs. T. Clay ; JCP.2005.I.179, obs. J. Béguin.
999
V. dans ce sens Cass. soc. 16 février 1999, RCDIP.1999.745, 1er esp., note F. Jault-Seseke ;
Rev.arb.1999.290, 1er esp., note M.-A. Moreau ; Gaz. Pal. 2000.1.Somm.699, 1er esp., obs. M.-L. Niboyet ; Cass.
soc., 4 mai 1999, n° 97-41.860, D. 1999.IR.140 ; RCDIP.1999.745, 2e esp., op.cit. ; Rev.arb.1999.290, 2e esp.,
note M.-A. Moreau ; Gaz. Pal. 2000.1.Somm.699, 2e esp., op.cit. : La Cour de cassation a décidé dans le même
sens que la clause compromissoire insérée dans un contrat de travail international n’est pas opposable au salarié
qui a saisi régulièrement la juridiction française compétente en vertu des règles applicables. V. aussi Cass. soc., 9
octobre 2001, D.2001.IR.3170, obs. C. Dechristé ; Rev.arb.2002.347, note T. Clay ; Dr. soc.2002.122, note M.-
A. Moreau.

412
ladite clause ait été incluse dans un contrat type de travail international dont le salarié n’a pas
le pouvoir de négocier. Dès lors que celui-ci a saisi le juge étatique, il faut le protéger en
ignorant l’existence de la convention d’arbitrage. A notre avis, les décisions de la Cour de
cassation en ce sens a pour l’objectif de protéger le salarié réputé faible.

2) Solution critiquée en matière du contrat de consommation.


557. Cette même règle de compétence internationale de la juridiction française semble
inapplicable, d’après la Cour, en matière de contrat conclu par le consommateur. En cette
matière, la jurisprudence est favorable au principe de compétence-compétence. Dans l’affaire
très critiquable, la société Salomon Smith Barney, la Chambre civile estima qu’en l’absence
de la nullité manifeste de la clause compromissoire, il appartiendra aux arbitres de la mettre
en œuvre, sous le contrôle du juge de l’annulation !
Il s’agit en l’espèce du contrat sur les produits financiers signé par un particulier
considéré certainement comme partie faible à l’égard de cette relation contractuelle avec un
démarcheur à domicile. Si l’on examine sur le fond, on constate que le contrat avait pour
l’objet de transférer de fonds entre la France et les États-Unis pour la somme d’environ
400 000 de dollars. En l’occurrence, Mme X, le demandeur, avait donné le mandat à la société
en cause de gérer les fonds sur des marchés à risque. Ce contrat a été conclu en anglais,
langue que la consommatrice ne maîtrise pas. Suite à la disparition de ses placements, Mme X
avait saisi le TGI de Paris ; comme prévu, son cocontractant avait invoqué l’existence de la
clause compromissoire. Le TGI de Paris a décidé que le principe de compétence-compétence
doit être respecté, de même que la décision de la juridiction d’appel qui s’est orientée dans la
même position. Enfin le pourvoi formé par la consommatrice a été rejeté par la Cour de
cassation en affirmant que « la Cour d’appel a retenu le caractère international de
l’opération économique litigieuses, la convention d’ouverture de compte ayant pour effet un
transfert de fonds entre la France et les États-Unis, peu important, dans ces conditions, que
l’une des parties ne fût pas commerçant (…) ; qu’elle en a exactement déduit qu’en l’absence
de nullité manifeste, la clause compromissoire devait recevoir application en vertu de
l’indépendance d’une telle clause en droit international, sous la seule réserve des règles

413
d’ordre public international qu’il appartiendra aux arbitres de mettre en œuvre et sous le
1000
contrôle du juge de l’annulation » .

558. Les déséquilibres entre les contractants dans ce contrat de vente des instruments
financiers d’une part ; et ceux de traitements de la Cour envers les affaires du consommateur
et celles de salarié d’autre part, malgré qu’ils soient mêmes les parties réputées faibles dans
lesdits contrats.
Bien que le contrôle du juge de l’annulation reste disponible, à savoir que la
consommatrice dans cette affaire devait faire valoir ses droits dans le procès arbitral qui se
déroule aux États-Unis et surtout en anglais comme précisé dans la clause compromissoire.
En effet, on peut dire que lorsque le consommateur signe un contrat, il arrive très souvent que
celui-ci ne fasse pas attention aux clauses ou à l’économie du contrat. Certainement, lorsque
l’on conclut un contrat, les conflits avec le cocontractant sont les dernières choses dans le
monde qu’on souhaite. Quand bien même nous partageons toujours à l’avis favorable pour le
mode de règlement des différends par l’arbitrage, mais il faut que la protection des parties
faibles soit assurée. Nous croyons en la bonne fonction de l’arbitrage, pourtant dans certaines
hypothèses comme en l’occurrence, il est clair que le consommateur n’a pas reçu la protection
suffisante.

559. Certes, la Cour a admis l’application de la clause d’arbitrage dans les contrats conclus
par le consommateur en s’appuyant sur l’internationalité des contrats depuis l’affaire
1001
Jaguar . En effet la Cour, dans l’arrêt Smith Barney, a repris la même décision de l’affaire
Jaguar. Cependant les détails et notamment la nature de consommateur dans les deux affaires
sont totalement différents. L’affaire Jaguar constitue les spécificités car le consommateur a
conclu le contrat d’achat d’une voiture de Jaguar, considérée sans doute comme un placement
par son prix très élevé. En l’occurrence, l’acheteur avait fait valoir que la convention
d’arbitrage était manifestement nulle et que les règles impératives du droit français et l’ordre
public international s’opposeraient à la validité d’une clause compromissoire stipulée dans un

1000
Cass. 1er civ., 30 mars 2004, Smith Barney, D. 2004.2458, note I. Najjar ; 2005.3050, note T. Clay ; RTD
com. 2004.447, obs. E. Loquin ; Rev.arb.2005.115, 1er esp., note X. Boucobza ; JCP.2005.I.134, obs.
C. Seraglini.
1001
Cass. 1er civ., 21 mai 1997, Jaguar, 1er esp., RCDIP.1998.87, note V. Heuzé ; RTD com.1998.330, obs.
J.-C. Dubarry et E. Loquin ; 2e décision, Rev.arb.1997.537, note E. Gaillard ; JDI.1998.969, 1er esp., note
S. Poillot-Peruzzetto.

414
contrat conclu entre un professionnel et un consommateur. La Cour ayant appuyé sur les
intérêts du commerce international apparus dans l’économie du contrat et ayant estimé que
« peu importe les circonstances, l’achat fût destiné à la consommation personnelle de
l’acheteur, dès lors c’est à bon droit que les juges du fond déclarent que la clause
compromissoire doit recevoir application en vertu de l’indépendance d’une telle clause en
droit international, sous la seule réserve des règles d’ordre public international qu’il
appartient aux arbitres de mettre en œuvre sous le contrôle du juge de l’annulation (…) ».
On peut observer qu’il s’agissait du transfert de bien et de fonds entre la France et la
Grande Bretagne. Car l’acheteur, avait passé commande à Paris auprès de la société Jaguar
France d’un véhicule. Après avoir réalisé qu’il a été trompé sur les caractéristiques de ce
véhicule, il avait fait assigner les sociétés Jaguar France en annulation de la vente. Mais les
défenderesses avaient opposé à cette demande en invoquant l’existence d’une clause
d’arbitrage figurant dans le contrat qui prévoyait le déroulement de la procédure arbitrale à
Londres. A ce stade, la question est de savoir quel est le critère employé pour considérer si un
tel ou tel contrat fait l’objet d’un contrat économiquement international ? Avant de répondre
à cette question il faut rappeler que la validité de convention d’arbitrage international écarte
toute règle prohibitive du droit interne français. Alors la nullité de la clause compromissoire
selon l’article 2061 du Code civil est inopposable dans l’arbitrage international. Car la notion
de la commercialité internationale devrait être entendue de façon autonome, surtout en
matière d’arbitrage international cette notion ne se confond pas avec celle d’acte de commerce
au sens étroit du terme des droits internes. En revanche, il doit être considéré comme
commercial tout arbitrage portant sur un litige né à l’occasion d’une opération économique
internationale et mettant en cause le commerce international.
Il ne semble toujours pas clair comment l’achat d’une voiture Jaguar de la Grande
Bretagne par un particulier non professionnel a été considéré comme mettre en cause les
intérêts du commerce international ? A priori, la réponse à cette question se trouve dans la
motivation de la Cour dans l’arrêt du 13 juin 1996 selon lequel les intérêts du commerce
international résultent du seul constat que « le contrat implique un mouvement de bien, de
service, ou un paiement à travers les frontières » ; que « le caractère commercial de la
convention d’arbitrage ne dépend ni de la qualité des parties, ni de l’objet du contrat, ni du
1002
droit applicable » .

1002
CA Paris, 13 juin 1996, JDI.1997.51, note E. Loquin

415
560. Revenons à l’arrêt Smith Barney et Mme X, cette décision est plus claire dans la
mesure où la Cour a mis en avance la priorité de la clause compromissoire. On peut se
demander si cela signifie la faillite du système de protection des consommateurs ? Car, on
sait que, comme l’écrit M. C. Jarrosson, il est « nécessaire de protéger le consommateur
contre le professionnel, de ne pas faire de l’arbitrage une nouvelle arme du fort contre le
1003
faible, du spécialiste contre le profane » . Dans l’arrêt Smith Barney, l’autorisation de la
clause compromissoire dans les contrats internationaux de consommation permettrait aux
professionnels, en utilisant la simple stipulation, de se mettre définitivement à l’abri de toute
1004
réclamation de leurs clients. Ceci laisse la porte ouverte pour accueillir un déni de justice .
La raison de l’interdiction de la clause compromissoire dans les contrats
internationaux peut expliquer par la nature des accords qui conduit à priver inexorablement
les parties faibles de la possibilité de faire assurer le respect de leurs droits. A l’égard du juge,
celui-ci devrait respecter le principe de l’autonomie de la clause d’arbitrage admis
généralement dans la pratique du commerce international. Mais, ceci ne nous convainc pas, en
raison de la spécificité de la matière de parties faibles, si l’on prend en considération les
détails de l’affaire précitée, comment peut-on dire que le consommateur a reçu la justice ?
Dans cet état de cause, on peut penser à l’impossibilité d’accéder au juge chargé de statuer sur
la prétention de partie, ne serait-il pas contraire à l’ordre public international et l’article 6.1 de
la Convention EDH ? (Certes, ce n’est pas pour tous les cas, mais l’affaire Mme X c/ Sté
Barney nous a montré comme tel).

561. En Thaïlande, il semble que la jurisprudence ne tient pas compte de la protection des
parties faibles, en effet la situation est semblable à celle de la clause attributive de juridiction
que nous avons déjà étudiée. A titre d’exemple, la Cour suprême admet en faveur d’une
convention d’arbitrage dans une décision concernant le contrat de travail international : « Vu
que les parties ont conclu la clause compromissoire dans leur contrat de travail, dans la
mesure où les conflits ou les différends nés de ce contrat y compris les obligations résultantes
du contrat devraient être réglées par l’arbitrage international à New Jersey, en appliquant
les règles de l’AAA (The American Arbitration Association). Considérant que la clause
compromissoire n’est contraire ni à la loi thaïe ni à la loi de l’État de New Jersey, elle est

1003
C. Jarrosson, « La clause compromissoire », Rev.arb.1992.259.
1004
V. Heuzé, « Validité d’une clause compromissoire insérée dans un contrat de consommation », Note sous
Cass. 1er civ., 21 mai 1997, RCDIP, op.cit., p. 88.

416
donc valide et par conséquent les parties devraient d’abord régler leur litige par voie
1005
arbitrale » . De même que la décision rendue en 2007, dans le contrat de travail
international dans lequel est incluse la clause compromissoire pour régler les différends, le
salarié étranger domicilié en Thaïlande a assigné son employeur, une société thaïlandaise,
devant le tribunal du travail, ce contrat est régi par la loi canadienne. La Cour suprême a
admis qu’« entend qu’il ne paraît pas la nullité ou l’inapplicabilité qui rendait inapplicable la
convention d’arbitrage ; Vu que cette convention est opposable aux parties contractantes ;
que l’une des parties au contrat ne pouvait pas assigner l’autre partie devant le tribunal de
1006
travail, il appartenait à l’arbitre de trancher ce litige » .
Certes, on peut le considérer comme bon signe l’admission de l’arbitrage, mais on
peut se demander quel est l’objet censé être protégé par la loi, ne serait-il pas les parties
1007
réputées faibles dans le contrat international ? On peut dire qu’en première espèce,
l’hypothèse est plus facile à admettre, car le salarié est Anglais et son employeur est une
société de droit américain. Dès lors, la procédure d’arbitrage se déroule aux États-Unis, en
langue anglaise, ceci ne semble pas poser beaucoup de problèmes. Mais, si le travailleur est
un Thaïlandais qui ne maîtrise pas l’anglais, le cas deviendra plus compliqué à notre avis.
Nous proposons de protéger le travailleur en tant que partie faible au contrat sans tenir compte
de la nationalité, mais plutôt de son domicile.

B. L’opposabilité des clauses compromissoires.

562. On a déjà vu les effets de la clause attributive de juridiction insérée dans le


connaissement à l’égard des tiers dans le chapitre précédent, la même question de
l’opposabilité peut aussi se poser dans cette matière. On sait que le règlement des différends
par l’arbitrage est couramment utilisé dans les contrats internationaux. Il est logique que la
clause compromissoire lie les signataires, mais il reste à savoir si ladite clause insérée dans le
connaissement pourrait-elle être opposable au tiers porteur ou bien au destinataire ou à

1005
Cour suprême Dika, n° 1958/2548 (2005).
1006
Cour suprême Dika, n° 8627/2550 (2007).
1007
V. cependant Cour suprême Dika, n° 4038/2545 (2002) : la Cour suprême Dika a décidé que le litige
portant sur le licenciement abusif des travailleurs, donc le salarié demandeur exerce ses droits en vertu de la Loi
portant sur la constitution de tribunal du travail et ses procédures B.E. 2522, l’article 49. D’après la Cour,
ce litige ne concerne pas l’assignation relative au litige né du contrat de travail ce qui n’entre pas dans le champ
de l’article 10 de la Loi sur l’arbitrage B.E. 2530. Par conséquent, le demandeur avait le droit de porter plainte
directement devant le tribunal de travail sans nécessité de régler le litige par l’arbitrage prévu dans le contrat.

417
l’assureur, notamment les tiers qui ne l’ont pas acceptée de façon expresse ? Cette question
donne lieu à la jurisprudence divergente entre la Chambre civile et la Chambre commerciale
de la Cour de cassation en matière de la clause attributive de juridiction comme l’on a déjà
étudiée. Qu’en serait-il en matière de clause d’arbitrage ? C’est ce qu’on verra par la suite.

1) Solutions jurisprudentielles antérieures.


563. En premiers temps, la décision de la Cour de cassation rendue en 1994 déclare que
« s’agissant de la clause compromissoire prévue dans les connaissements, elle ne peut être
opposée au destinataire si elle n’a pas été portée à sa connaissance et acceptée par celui-ci
au plus tard au moment où, recevant livraison de la marchandise, il a adhéré au contrat de
1008
transport » . Cette décision a été reprise postérieurement en 1995, la Cour de cassation a
affirmé que « la Cour d’appel a énoncé à bon droit que l’acceptation par le chargeur de la
clause compromissoire insérée au connaissement ne suffisait pas pour la rendre opposable au
1009
destinataire qui ne l’avait pas lui-même acceptée » . La jurisprudence antérieure
n’affirmait pas encore la compétence de l’arbitre d’apprécier l’application du destinataire de
la clause d’arbitrage.

564. S’agissant de forme de l’acceptation, la ligne de jurisprudence constante à l’époque


nous montre que la Cour de cassation a admis depuis longtemps que l’acceptation de la clause
compromissoire par le destinataire n’a pas pu résulter d’une simple acceptation du
connaissement. Le destinataire qui a accepté un connaissement, qui avait fait référence à une
charte-partie qui comporte elle-même une clause d’arbitrage, ne peut être considéré que cette
1010
clause est acceptée .
Alors qu’en matière de la clause attributive de juridiction, sur la question de savoir si
la loi française applicable au contrat permet la transmission automatiquement au tiers porteur
de la clause attribuant de compétence insérée dans le connaissement, la jurisprudence établie

1008
Cass. com., 29 novembre 1994, Stolt Osprey, DMF.1995.209, obs. P. Bonassies ; DMF.1995.218, obs.
Y. Tassel. V. aussi CA Rouen, 8 octobre 2002, Walka Mlodych, DMF.2003.547, obs. Y. Tassel.
1009
Cass. com., 20 juin 1995, Rev.arb.1995.622.
1010
V. en ce sens CA Paris, 13 janvier 1988, DMF.1988.395 : la Cour a décidé que la référence du
connaissement aux modalités, conditions, facultés, et réserves de la charte-partie, même s’il est précisé qu’elles
sont incorporées au connaissement sans qu’elles y soient reproduites et qu’il soit établi que ce document y était
annexé, ne suffit pas à rendre certaine l’acceptation, au moment de la réception de la marchandise, de la clause
d’arbitrage par le porteur du titre. Par conséquent, la clause compromissoire de la charte-partie lui est
inopposable ; CA Aix-en-Provence, 10 décembre 1992, DMF.1994.53 ; CA Rouen, 14 octobre 1993,
DMF.1994.381 ;

418
dans cette matière joue son rôle ; la Chambre commerciale en 1998 décida que « la clause de
compétence figurant au connaissement doit faire l’objet d’une acceptation spéciale de la part
du destinataire, laquelle ne résulte pas de l’accomplissement sans réserves du
1011
connaissement » . Affirmant par une autre décision selon laquelle « il ne résulte d’aucun
texte de droit interne que le porteur du connaissement, en acceptant la livraison de la
marchandise, succède aux droits et obligations du chargeur découlant de la clause attributive
de juridiction acceptée par celui-ci (…) ». La Cour de cassation confirma la décision de la
juridiction d’appel que « la clause attributive de juridiction n’était pas opposable aux
assureurs subrogés dans les droits du destinataire, porteur du connaissement, faute d’avoir
1012
été acceptée au plus tard lors de la livraison » . Autrement dit, pour que cette clause
puisse être opposable au destinataire ou porteur du connaissement, après avoir subrogé les
droits et les obligations par les assureurs, elle devra être acceptée par ceux-ci au plus tard lors
de la livraison.
Ce constat affirme que, traditionnellement, le connaissement maritime utilisé pour la
livraison de marchandises ne vaut pas une acceptation de la clause compromissoire. Même
que certaines décisions ont été tranchées sur le fond de la clause attributive de juridiction,
mais on peut aussi l’étudier à titre comparatif pour rechercher la solution adoptée ou devrait
être adoptée en matière de la clause compromissoire. De même que pour les décisions de la
CJCE, force est de reconnaître qu’aucune règle communautaire ne s’applique à la clause
compromissoire, pour cette raison l’arrêt Coreck Maritime par exemple n’a aucun titre à
influencer le régime de la clause compromissoire.

2) Solutions adoptées par la jurisprudence actuelle.


565. Force est de reconnaître que la jurisprudence française a admis en premier temps que
la référence de la clause compromissoire dans la charte ne transmet pas automatiquement avec
le connaissement. Il semble que la ligne de jurisprudence citée ci-dessus est interruptive, ceci
peut expliquer par la tendance de la juridiction étatique qui décide fermement qu’il
appartenait aux arbitres de se prononcer en priorité sur leur compétence et sur la clause

1011
Cass. com., 8 décembre 1998, Silver Sky, préc. supra note n° 941. V. aussi Cass. com., 16 janvier 1996,
Chang-Ping, DMF.1996.393, obs. P. Bonassies ; Cass. com., 15 octobre 1996, Köln Atlantic, DMF 1997.705,
note P.-Y. Nicolas.
1012
Cass., com., 4 mars 2003, n° 01-01.046, RCDIP.2003.285, note P. Lagarde ; JDI.2004.197, obs. A. Huet ;
JCP (G) 2003.IV.1786. V. aussi l’affirmation en ce sens dans CA Rouen, 25 septembre 2008, Mutuelles du
Mans IARD, n° 08-01001.

419
compromissoire. Citons la décision de la Cour de cassation largement connue en 2001, en
l’espèce, la Cour de cassation a reproché la juridiction d’appel de ne pas prendre en
considération le principe de compétence-compétence en décidant que « seule la nullité
manifeste de la convention d’arbitrage pourrait faire obstacle au principe de compétence-
compétence ; que ce principe consacre la priorité de la compétence arbitrale pour statuer sa
1013
compétence, la validité et l’étendue de la convention d’arbitrage » . Alors, on peut dire
que c’est la juridiction arbitrale qui est seule compétente pour apprécier si la société,
destinataire au connaissement, a accepté la convention d’arbitrage.

566. L’opposabilité aux destinataires et assureur la clause d’arbitrage par référence.


Pourtant on peut constater l’arrêt de 2005 qui s’est contenté d’affirmer que la clause
d’arbitrage était opposable au destinataire même en l’absence de consentement exprès de
celui-ci et que l’exception d’arbitrage était également opposable aux assureurs qui étaient
subrogés dans ses droits. En l’espèce, il s’agissait d’un contrat de transport maritime charte-
partie avec la clause compromissoire par référence. La Cour a considéré que « la clause
d’arbitrage stipulée dans le contrat de transport maritime peut être admise, même en
l’absence de consentement exprès du destinataire dès lors qu’il est habituel qu’une clause
soit insérée dans un contrat international et que le destinataire avait pu avoir connaissance
1014
de ladite clause dès le déchargement et les expertises contradictoires » . Cette décision
est très critiquée ; on est d’accord que cette solution est raisonnable pour le contrat de
transport maritime sur lignes régulières (liner term) soumis normalement au régime des règles
de La Haye, car le connaissement est un instrument négociable qui peut circuler tout le temps
au cours du transport de marchandises. Alors l’opposabilité les clauses du connaissement au
1015
destinataire ou même aux tiers porteurs est normalement nécessaire et bien utile .

1013
Cass. 1er civ., 26 juin 2001, ABS, n° 99-17.120, RTD com. 2002.49, note E. Loquin ; DMF.2002.115.
1014
Cass. 1er civ., 22 novembre 2005, Lindos, n° 03-10.087, RCDIP.2006.606, 1er esp., note F. Jault-Seseke ;
JDI.2006.622, 1er esp., note C. Legros ; JCP.2006.II.10046, note C. Humann ; DMF.2006.16, obs. P. Bonassies.
1015
Contra. F. Jault-Seseke, « Opposabilité des clauses attributives de juridiction contenues dans des
connaissements maritimes », RCDIP.2009.524. Cet auteur est douteux sur la légitimité de l’opposabilité au
destinataire ou au tiers porteur, car ce n’est pas ce que ceux-ci s’attendaient. Alors il faut au moins donner au
destinataire la possibilité de reconnaître et de refuser la clause de compétence dont il devrait connaître son
existence. Il faut rappeler qu’à ce stade la clause s’applique urbi et orbi et qu’elle relève de la seule volonté du
transporteur et le chargeur.

420
567. La particularité du contrat charte-partie. Or, il est possible que les opérateurs
choisirent parfois la figure de l’affrètement au voyage donc c’est la charte-partie qui est un
instrument dans ce contrat et non le connaissement. La pratique de ce type de transport nous
montre que lorsque la marchandise a été embarquée à bord du navire affrété,
un connaissement de charte-partie est émis, ce document valle à la preuve de l’embarquement
de marchandise. Très souvent, ce connaissement fait référence à la charte-partie, cela explique
pourquoi la clause compromissoire y est incorporée par référence. C’est pourquoi Mme F.
Jault-Seseke a fait l’argument que « le connaissement (dans le contrat d’affrètement) n’est
stipulé que par référence », donc il n’est pas juste de conclure que la convention d’arbitrage
par référence lie le destinataire. Cependant, si on admet la particularité du contrat charte-
partie, comme l’admet M. O. Cachard, pour le contrat de charte-partie « le destinataire d’une
marchandise déplacée à bord d’un navire affrété au voyage peut agir contre le fréteur. Bien
que le fréteur ne soit pas partie à un contrat de transport, il est admis qu’il est soumis au
régime du contrat de transport lorsqu’il est assigné par le destinataire tiers porteur du
1016
connaissement de charte-partie » . Ce même auteur souligne qu’il est logique que le
fréteur au voyage invoque l’incorporation par référence au connaissement de la clause
compromissoire insérée dans la charte-partie. Afin d’affirmer cette logique, il faut prendre en
considération la pratique de charte-partie. Il faut rappeler que le connaissement ait été émis en
tant que preuve de l’embarquement de marchandises ; ce document renvoie souvent à la
charte-partie qui contient la clause compromissoire ; et c’est ce connaissement qui donne le
droit au destinataire le titre d’assigner. Pour cette raison la Première Chambre civile avait
décidé comme tel. La condition posée par la Cour est la connaissance du destinataire de cette
clause dès le déchargement (comparable dès la livraison de marchandises).

568. La solution adoptée par la Chambre commerciale n’est pas différente de celle de la
Chambre civile dans le sens qu’il appartient à l’arbitre d’apprécier si le destinataire au
connaissement a accepté ou non la clause compromissoire figurant par référence au verso du
1017
connaissement de charte-partie . Cependant la Cour présuppose que la clause

1016
O. Cachard, « La force obligatoire vis-à-vis du destinataire des clauses relatives à compétence
internationale stipulées dans les connaissements : Plaidoyer pour un renouveau des considérations maritimes »,
in Mél. en l’honneur de Hélène Gaudemet-Tallon, Vers de nouveaux équilibres entre ordres juridiques, Dalloz,
2008, p. 194.
1017
Cass. com. 21 février 2006, Navire Pella, RCDIP.2006.606, 2e esp., note F. Jault-Seseke ; JDI.2006.622,
e
2 esp., note C. Legros ; DMF.2006.379.

421
compromissoire est opposable au destinataire. Dans ce cas là, suite à la nullité ou
l’inapplicabilité de cette clause, c’est le juge étatique qui est prioritairement compétent pour
trancher le litige. Force est de constater que la décision de la Cour de cassation est bien
établie, il en va de même dans la série d’arrêts du 11 juillet 2006. Dans l’affaire Turicia, il
s’agit du contrat de charte-partie, l’arrêt d’appel relève que « le connaissement était soumis à
la charte prévoyant un arbitrage à Londres, les clauses de la charte étaient opposables aux
détenteurs successifs du connaissement comme en faisant partie intégrante et enfin que les
assureurs n’apportaient pas la preuve de la nullité manifeste de la convention d’arbitrage ».
Affirmant par l’arrêt de cassation que « la Cour d’appel en a exactement déduit que le
tribunal de commerce était incompétent pour connaître la demande (…) », en finissant par la
même formule déjà vue : « qu’il appartient à l’arbitre de statuer, par priorité, sous le
contrôle du juge de l’annulation, sur l’existence, la validité et l’étendu de la convention
1018
d’arbitrage » .

569. Si l’on prend en compte les deux arrêts simultanés, rendus de la même date par la
Chambre civile et la Chambre commerciale qui affirment les effets de la clause attributive de
juridiction incluse dans un connaissement à l’égard du tiers porteurs, on peut dire finalement
que la Cour de cassation a retenu cette position en matière de commerce maritime en estimant
ainsi : « Attendu qu’une clause attributive de juridiction convenue entre un transporteur et un
chargeur et insérée dans un connaissement, produit ses effets à l’égard du tiers porteur du
connaissement pour autant que, en l’acquérant, il ait succédé aux droits et obligations du
1019
chargeur en vertu du droit national applicable » .
A la comparaison avec le cas de la clause attributive de juridiction (v. supra n° 526),
on peut dire que la jurisprudence française se révèle plus favorable à l’opposabilité aux tiers
de la clause compromissoire que de la clause attributive de juridiction.

570. En ce qui concerne les lois spécifiques en Thaïlande, la Loi relative au transport de
marchandises par la mer B.E. 2534 (1991) admet en général le règlement des différends par
l’arbitrage dans l’article 46. Toutefois, la disposition est très timide et ne mentionne qu’un

1018
Cass. 1er civ., 11 juillet 2006, Navire Turicia, n° 05-18.681, RTD com. 2006.947, note Ph. Delebecque ;
RCDIP.2007.128, note F. Jault-Seseke.
1019
Cass. com., 16 décembre 2008 et Cass. 1er civ., 16 décembre 2008, D., 2009, AJ 89, obs. X. Delpech ;
Panor. 1565, obs. F. Jault-Seseke ; RCDIP.2009.524, note F. Jault-Seseke ; RDC.2009.1193, obs. J.-B. Racine;
JCP 2009.II.10060, note H. Kenfack; Gaz. Pal. 20-21 fév. 2009, p. 46, note Ph. Guez.

422
seul mot sur l’arbitrage ; aucune disposition ne stipule précisément sur la forme ou
1020
l’acceptation de la clause compromissoire . Il en va de même pour la Loi sur le transport
combiné B.E. 2548 (2005) qui ne stipule que dans le sens général quant à la clause
d’arbitrage, l’article 67, 1er al. : « les parties au contrat de transport combiné peuvent
1021
accorder par écrit de régler leurs litiges nés du contrat ou du délit par l’arbitrage » . La
loi utilise le terme « les parties », et que les parties au contrat de transport maritime sont le
chargeur et le transporteur. Rappelons que le connaissement est la preuve du contrat de
transport car celui-ci n’a pas de forme en droit thaï. A savoir si le destinataire ou le tiers
porteur du connaissement doit signer ou accepter de façon expresse pour que la convention
d’arbitrage lui soit opposable ? La jurisprudence thaïe n’est pas claire sur ce point, de même
qu’en matière de clause attribuant de compétence que l’on a déjà étudié.
Lorsque l’on prend en considération l’article 11 de la Loi sur l’arbitrage 2002 en tant
que règle générale, la clause compromissoire peut être insérée ou même apparue dans un
document de communication, c’est le moyen de preuve qui importe. Par ailleurs, la pratique
du commerce maritime nous montre que dans la preuve de convention d’arbitrage, la
1022
signature des contractantes n’est pas obligatoire . Pour un auteur, la clause accordée au
règlement des différends par l’arbitrage est suffisante pour opposer aux parties contractantes,
mais pour les tiers porteurs, cet auteur n’a pas affirmé expressément, elle a appuyé sur la
1023
pratique d’autres pays qui est en faveur de l’opposabilité aux tiers porteurs .
L’article 13 de la Loi sur l’arbitrage 2002 dispose ainsi : « Lorsque les obligations ou
les responsabilités sont transférées à une personne, la convention d’arbitrage portant sur une

1020
มาตรา ๔๖ แห่ง พระราชบัญญัติรับขนของทางทะเล พ.ศ. ๒๕๓๔ บัญญัติว่า “ภายใต้บงั คับมาตรา ๔๗ และ ๔๘ สิ ทธิ เรี ยกร้ องเอาค่าเสี ยหาย
เพื่ อ การสู ญ หาย เสี ย หาย หรื อส่ งมอบชัก ช้า แห่ ง ของที่ รั บ ขนตามสั ญ ญารั บ ขนของทางทะเล ถ้า ไม่ ไ ด้ฟ้ องคดี ต่ อ ศาลหรื อเสนอข้อ พิ พ าทให้
อนุญาโตตุลาการชี้ ขาดภายในหนึ่ งปี นับแต่วนั ที่ผขู ้ นส่ งได้ส่งมอบของ หรื อถ้าไม่มีการส่ งมอบนับแต่วนั ที่ล่วงเลยกาหนดส่ งมอบตามมาตรา ๔๑ (๑)
หรื อนับแต่วนั ที่ล่วงเลยกาหนดเวลาอันสมควรตามมาตรา ๔๑ (๒) ให้เป็ นอันขาดอายุความ”
1021
มาตรา ๖๗ วรรคแรก แห่ง พระราชบัญญัติการขนส่ งต่อเนื่ องหลายรู ปแบบ พ.ศ. ๒๕๔๘ บัญญัติว่า “คู่สัญญาขนส่ งต่อเนื่ องหลายรู ปแบบอาจ
ตกลงกันเป็ นหนังสื อกาหนดให้เสนอข้อพิพาทใดๆที่มีมูลกรณี จากสัญญาขนส่ งต่อเนื่องหลายรู ปแบบหรื อละเมิด ให้อนุญาโตตุลาการเป็ นผูช้ ้ ีขาดได้”
1022
Cour suprême Dika, n° 1646/2546 (2003) : Il s’agit d’un contrat de transport de marchandises laquelle le
défendeur a délivré au demandeur le connaissement en précisant qu’il est représentant du transporteur. Lorsque
le demandeur a réglé le fret qu’il lui doit, le défendeur a aussi délivré le reçu en mentionnant qu’il est
représentant du transporteur. La Cour a estimé que « même si le défendeur n’a mis ni de signature, ni de tampon
de sa compagnie sur le connaissement ; entend que, dans cette hypothèse, le défendeur est représentant de la
société transporteur et qu’il a conclu un contrat de transport avec le demandeur ». Ceci peut affirmer que l’on
n’a pas besoin d’avoir la signature de tous les concernés pour que les clauses dans le connaissement
produisent les effets.
1023
S. Asawaroj, Le règlement des différends commerciaux par l’arbitrage, Bangkok : Université de
Thammasat, p. 55-56 et 59.

423
1024
telle ou telle obligation ou responsabilité seraient transmise à cette personne » .
Compte tenu des dispositions des deux articles, on pourrait dire que la clause compromissoire
insérée dans un connaissement peut aussi transférer au destinataire et au tiers porteurs.

571. En ce qui concerne le moyen d’acceptation, nous pouvons envisager un autre


problème si nous adoptons en matière de l’arbitrage international la jurisprudence rendue en
matière de la clause attributive de juridiction. A titre d’exemple, la décision de la Cour
suprême Dika en 1996 était défavorable à l’opposabilité au tiers la clause attributive de
juridiction insérée dans un connaissement. En l’occurrence il s’agit de contrat de transport
maritime de marchandises, que la clause d’élection de for soit incluse dans le connaissement.
Après les subrogations dans les droits du destinataire, l’assureur a assigné le transporteur pour
l’indemnisation des avaries causées. Le transporteur a invoqué l’incompétence des
juridictions thaïes en raison de la clause attributive de juridiction au tribunal étranger. D’après
la Cour : « vu que le demandeur a qualité de l’assureur qui a assuré les marchandises au
cours du transport par le transporteur défendeur ; que l’assureur demandeur soit considéré
comme un tiers du contrat de transport ; entend que le connaissement est une preuve du
contrat de transport, par conséquent la clause attributive de juridiction insérée dans le
1025
connaissement n’est pas opposable à l’assureur » .
Il en va de même pour la décision de 2006, malgré la circonstance plus spécifique. En
l’espèce, le demandeur a assigné le transporteur étranger domicilié à l’étranger pour les
avaries de la perte de marchandises au cours de transport maritime entre la Thaïlande et
l’Espagne. La clause du connaissement maritime précise que « les litiges nés du contrat de
transport de marchandises par la mer devraient être tranchés devant les tribunaux de Hong
Kong ». La Cour a appuyé sur les faits que « le litige est né du contrat de transport maritime
conclu dans le Royaume Thaï ; que la loi applicable soit aussi la loi thaïe selon l’article 4 de
1026
la Loi sur le transport de marchandises par la mer B.E. 2534 (1991) ; et que la majorité
des preuves et des évidences soient trouvées en Thaïlande ». Pour ces raisons, la Cour a

1024
มาตรา ๑๓ พระราชบัญญัติอนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติวา่ “เมื่อมีการโอนสิ ทธิเรี ยกร้องหรื อความรับผิดใด สัญญาอนุญาโตตุลาการ
ที่มีอยูเ่ กี่ยวกับสิ ทธิเรี ยกร้องหรื อความรับผิดนั้นย่อมผูกพันผูร้ ับโอนด้วย”
1025
Cour suprême Dika, n° 9083/2539 (1996).
1026
En effet les parties ont conclu la clause de choix de la loi applicable, c’est la loi chinoise (Hong Kong).
Mais que l’article 4 de cette Loi est lois de police, alors ladite clause ne peut produire un effet, il faut appliquer
la Loi B.E.2534. Selon l’article 4, lorsque l’une des parties a nationalité thaïlandaise, c’est la Loi de transport de
marchandises par la mer B.E. 2534 qui s’applique au contrat.

424
décidé que c’est le Tribunal central de la propriété intellectuelle et du commerce international
qui est compétent pour saisir ce litige et la clause d’élection de for insérée dans le
1027
connaissement n’est pas opposable à l’autre partie contractante . Ceci est une hypothèse
spécifique de la clause attributive de juridiction face aux lois de police ; s’il s’agit de la clause
compromissoire, il est possible que la Cour suprême la traite de manière plus libérale. Là
aussi, on observe la position différente entre la Cour de cassation et la Cour suprême thaïe
dans la mesure où la première, a priori, a décidé que « l’existence de l’ordre public
applicable au litige n’avait pas pour effet de rendre la clause attributive de juridiction
1028
inapplicable » . A notre avis, les règles impératives ne privent pas l’existence de la clause
attributive de juridiction et la clause d’arbitrage, les juges doivent les respecter lorsqu’elles
sont valides. Pour l’article 4 de la loi de transport maritime, bien qu’il soit loi de police, nous
comprenons que cet article n’affecte pas la clause prorogative de compétence, mais le tribunal
étranger désigné par cette clause devrait appliquer ou prendre en considération de cette loi en
1029
tant que lois de police étrangères .

572. Après avoir vérifié superficiellement par le juge la validité et l’applicabilité de la


clause compromissoire, il reste à savoir qui est compétent pour examiner la compétence
arbitrale. On admet en général cette compétence à l’arbitre, cependant il y a aussi la
jurisprudence au sens divers. C’est ce que nous allons voir par la suite.

Section II
Appréciation de la compétence de l’arbitre.

573. La compétence, l’investiture : les notions confondues en matière d’arbitrage. La


notion de compétence peut être déterminée en plusieurs sens selon le domaine et le contexte.
En ce qui concerne la juridiction, « la compétence » désigne « l’ensemble des affaires dont

1027
Cour suprême Dika, n° 3882/2549 (2006).
1028
Cass. 1er civ., 22 octobre 2008, n° 07-18744, préc., supra note n° 997.
1029
Nous admettons que la Cour thaïe voulait protéger le demandeur thaï, c’est pourquoi elle a invoqué
l’article 4. Il est possible que le juge étranger ignore la loi de police thaïlandaise car l’application de celle-ci est
toujours facultative. Cependant nous avons une autre solution au stade de l’exécution du jugement étranger ;
l’invocation de non respect des dispositions impératives thaïes.

425
1030
celle-ci a vocation à connaître » , il s’agit ici de la répartition d’un champ particulier de
l’ensemble général du contentieux. Elle peut désigner aussi, plus spécifiquement, « l’aptitude
1031
à instruire et juger une affaire, à en connaître » . Le terme « compétence » est employé
dans la plupart des cas pour référer à l’ordre auquel appartient la juridiction opérée par un
État, alors pour cette raison on ne peut pas adapter cette notion de compétence à l’arbitrage.
Car il n’y a pas de répartition du contentieux entre plusieurs juridictions permanentes exerçant
le pouvoir étatique dans l’arbitrage. De surcroît, une constante s’est orientée dans le sens que
la convention d’arbitrage est la source de compétence et d’investiture de l’arbitre. Alors c’est
l’autonomie de la volonté des parties qui est la plus importante ici pour justifier le pouvoir de
l’arbitre.
Une autre notion que l’on envisagera dans cette matière est « l’investiture » ; celle-ci
désigne « l’action de conférer à quelqu’un une fonction ou un titre par élection ou
nomination ; par extension, celle de conférer à quelqu’un une mission ou une charge par
1032
convention » . Cependant il ne faut pas confondre l’investiture du juge et de l’arbitre ;
pour le juge, l’investiture est un pouvoir étatique de juger le litige. Afin de distinguer
l’habilitation ponctuelle conférée à l’arbitre, en vertu de la clause compromissoire, pour
trancher le litige, Motulsky a proposé de pencher sur « l’investiture subjective » et
« l’investiture objective ». La première est employée pour décrire la bénéficie du juge étatique
alors que l’arbitre mérite-il la seconde investiture parce qu’il se limite sur une mission
1033
déterminée .
De surcroît, ce sont les deux termes qui confèrent la dissociation la clause
compromissoire de la clause attributive de juridiction. Certes, on accepte que la première est
considérée comme une sorte de la dernière, cependant on ne peut nier la différence qui réside
dans la nature des deux clauses. En effet la clause attributive de juridiction ne fait que
modifier la répartition de compétences entre juridictions étatique investies de manière
permanente, tandis que la convention d’arbitrage confère la fonction juridictionnelle à une
personne privée, de manière occasionnelle et limitée à une mission déterminée par la clause.

1030
Vocabulaire juridique Capitant, « Compétence », sens I, 2° a/.
1031
Vocabulaire juridique Capitant, « Compétence », sens I, 2° b/.
1032
Vocabulaire juridique Capitant, « Investiture », sens 1.
1033
H. Motulsky, Écrits, Études et notes sur l’arbitrage, Paris : Dalloz, 1974, n° 9, p.15.

426
574. Bien qu’il s’agisse d’un principe admis comme bien établi dans la jurisprudence de
nos jours, il est indispensable de traiter tout d’abord la compétence de statuer et d’apprécier la
convention d’arbitrage, en raison de la divergence de l’application selon chaque juridiction
étatique saisie par la partie contractante (§ 1). Ceci serait le fondement pour répondre à la
question selon laquelle si la mesure procédurale telle que l’anti-suit injunction pourrait
produire les effets en faveur de la clause compromissoire (§ 2).

§ 1 : Le pouvoir de vérification de sa propre compétence.

575. En effet on peut également envisager cette issue au stade de l’exécution de convention
d’arbitrage, car il est très souvent que l’une des parties assigne le litige devant la juridiction
étatique au lieu du recours à l’arbitrage prévu dans leur contrat. Cependant nous trouvons
qu’il est plus convenable d’étudier ce pouvoir de l’arbitre dans l’aspect de la compétence
arbitrale qui semble directement concerné. Certes, ce problème n’est pas nouveau, mais il se
pose actuellement dans l’arbitrage international même dans le système d’arbitrage très avancé
comme celui de la France. De même qu’en droit thaïlandais, en premier temps il semblait que
le juge étatique décida en faveur de sa compétence en faisant échec à la clause d’arbitrage.
L’arbitre n’avait même pas l’occasion de trancher sur sa compétence ou la validité de ladite
convention.
Nous nous intéressons tout d’abord à l’admission divergente du principe compétence
de la compétence (A). En admettant que le principe de compétence-compétence de l’arbitre
n’est pas absolu alors nous verrons les exceptions consacrées par la jurisprudence afin
d’écarter ledit principe (B).

A. L’admission du principe jurisprudentiel « compétence-compétence ».

576. Pour certains, il est gênant d’admettre que l’arbitre est compétent de statuer sur la
validité de la clause compromissoire, n’est-il pas préalablement nécessaire de voir une telle
clause valable afin de pouvoir constituer le tribunal arbitral ? En effet, on peut penser que le
juge aussi doit se prononcer sur sa compétence mais ceci est différent, puisque le juge possède
le pouvoir étatique, quand bien même il n’est pas compétent, la délégation permanente de
l’État réside toujours chez lui. Alors que l’arbitre n’est qu’un individuel dont sa compétence
relève de la convention. Lorsque le différend des parties est introduit pour la première fois
devant le tribunal étatique, et que celui-ci le renvoie à l’arbitre et enfin que ce dernier se
427
trouve lui-même incompétent, les parties devront alors réassigner l’instance devant le juge
étatique. Cette question fait l’objet de vifs débats aussi bien en droit français qu’en droit thaï.
C’est pourquoi nous envisageons les approches diverses à ce sujet.

1) Admission diverse du principe dans l’ordre juridique thaï.


577. La jurisprudence constante de la juridiction judiciaire française confirme ce principe.
En revanche, ce n’était pas le cas en Thaïlande notamment avant l’année 1987, où sont
apparues plusieurs interprétations tendant à critiquer la convention d’arbitrage à propos du
terme « les différends ou les conflits nés du contrat ». En droit thaï, il n’y a pas de
dispositions spécifiques pour l’interprétation de la convention d’arbitrage, alors il faut faire
référence à celles du Code civil et commercial car il s’agit d’un contrat de droit civil. En ce
qui concerne le principe d’interprétation, comme d’autres contrats, il est nécessaire de prendre
en considération la volonté réelle des parties plutôt que le sens littéral de la stipulation (art.
171 du CCC). Cependant il est possible d’envisager l’hypothèse où il y a une pratique
constante entre les contractants dont il faut également tenir compte. Par exemple la vente
internationale des cotons entre les parties est normalement conclue par écrit et il ne paraît
jamais d’autres comportements, la Cour a considéré que « lorsque ce contrat de vente en
1034
cause n’a pas été passé par écrit, il faut présumer que ledit contrat n’existe jamais » .

578. Bien que le mode de règlement des différends par l’arbitrage ait été établi dans le
1035
système juridique thaï depuis le XVIe siècle (Ayutthaya époque) , il s’agissait
généralement de l’arbitrage par le juge judiciaire comme une bonne administration de la
justice, dès lors la façon de la Cour de traiter le litige qui porte sur l’arbitrage par le tiers, en
premier temps, était contraire à la pratique actuelle.
La Cour avait la tendance d’interpréter non favorable à la clause compromissoire tant
1036
dans le litige purement interne que le litige international, par exemple dans l’affaire de

1034
Cour suprême Dika, n° 520/2520 (1977).
1035
Cf. S. Asawaroj, « Le règlement des différends commerciaux par l’arbitrage », op.cit., p. 23-25.
1036
V. Cour suprême Dika, n° 2490/2518 (1975) : les parties ont accordé de régler le litige né du contrat
d’assurance par l’arbitrage en insérant cette clause compromissoire dans leur contrat. Ni le juge du fond, ni le
juge d’appel ne tenaient compte de l’existence de la convention d’arbitrage, ils ont alors tranché ce litige sans
prendre en considération la validité de ladite clause. La Cour suprême a décidé que « vu que la constitution du
tribunal arbitral serait possible si les parties ont accordé d’introduire le litige devant l’arbitre ; qu’un accident
routier a été causé et l’assuré a demandé le remboursement à la compagnie assureur mais le défendeur assureur
n’a pas invoqué la clause d’arbitrage et il n’a fait que nier sa responsabilité ». La Cour a estimé que « le

428
faillite internationale que le contrat de vente internationale de marchandises était impliquée ;
les parties ont conclu dans leur contrat que « les différends quelconques qui seront nés du
contrat, que les parties ne peuvent pas régler elles-mêmes par la conciliation, devraient être
tranchés devant le tribunal arbitral de la Chambre de commerce de la Romanie », l’une des
parties était personne publique de droit roumain. D’après l’interprétation de la Cour suprême,
elle considère que « ladite clause signifie en effet le cas où il y a un obstacle qui prive les
parties de délibérer les obligations qui lui incombent conformément au contrat, mais le cas en
cause ne s’agissant que le non paiement du prix n’est donc pas considéré comme le conflit né
1037
du contrat qui relèvera de compétence de l’arbitre » . Cette décision était scandaleuse à
l’époque et produisait le résultat très maladroit, le juge semblait être confondu entre le terme
« différend » et « obstacle » qui sont très différents. En effet le non paiement du prix de
marchandises est certainement un différend né du contrat de vente.
Prenons un autre exemple du contrat de vente internationale d’adaptateur électrique
que les contractants ont accordé de régler leur différend par l’arbitrage. La Cour a estimé que
la clause qui dispose que « lorsqu’il y a le litige concernant le contrat, les parties devront
régler leurs différends devant le tribunal arbitral », entendu que le défendeur a invoqué que
« les adaptateurs électriques ont été endommagés à cause des erreurs survenues par les
personnels de demandeur ; vu que ceci n’est pas le litige concernant le contrat de vente, par
1038
conséquent le demandeur peut assigner ce litige devant la Cour » . Là aussi, la Cour a
interprété non favorable à la convention d’arbitrage.

défendeur ne voulait pas régler ce litige par le mode d’arbitrage, pour ce motif le demandeur pouvait assigner
devant la juridiction judiciaire ». Force est de constater que la Cour n’appuyait pas sur l’arbitrabilité du litige ou
que ce litige porte sur le contrat d’assurance interne, autrement dit le régime de la protection de parties faibles.
C’était encore le résultat malheureux car la Cour a manqué de montrer son opinion sur la protection de parties
faibles, cependant on peut constater que la pensée juridique de la protection de parties faibles n’était pas
courante en Thaïlande à l’époque.
1037
Cour suprême Dika, n° 918/2521 (1978), Thimmilort Roumanie c/ Thai Veerapol Co. Ltd. V. en même
sens n° 3843/2526, Electricité de Thaïlande c/ Diau Hong Paisal : la Cour a estimé que « seul le fait que le
défendeur n’a pas délivré les marchandises dans le temps précisé dans le contrat n’implique pas qu’il y a eu le
conflit né du contrat de vente internationale lequel les parties devraient régler leurs différends par l’arbitrage.
Alors le demandeur a pu assigner le défendeur devant la juridiction judiciaire ». Là aussi, il paraît que les
parties ont conclu une clause d’arbitrage pour régler tous les litiges nés du contrat de vente, mais la Cour a
trouvé que ce n’était pas le cas prévu dans la clause compromissoire alors elle était compétente de saisir le litige.
1038
Cour suprême Dika, n° 2690/2522 (1979), Électricité de Thaïlande c/ Connel Brothers Co.Ltd. En
l’espèce, il s’agit du contrat de vente internationale entre l’Électricité de Thaïlande, personne morale publique, et
la société de droit étranger, mais malheureusement la Cour n’a pas pris l’occasion d’éclairer sur le problème de
la clause compromissoire conclu par la personne morale de droit public et l’entreprise étrangère. Cependant on
peut penser que la tendance de la Cour à l’époque semblait admettre la possibilité d’insérer la clause d’arbitrage
dans un contrat international, elle n’a pas refusé la validité de la convention d’arbitrage en raison d’être en cause
la personne morale de droit public.

429
Ces décisions de la Cour suprême nous démontrent que la convention d’arbitrage
n’était presque jamais valide au point de vue de juge étatique à l’époque, il en résulte de sa
méthode d’interprétation. Force est de reconnaître que même l’arbitrage interne est une
convention conclue par la volonté des parties, la nature contractuelle est claire, peu importe de
dire comment l’arbitrage commercial international doit être plus libéral par rapport à la
première. Alors que la doctrine et la jurisprudence française en matière d’arbitrage
international affirme depuis longtemps que « lorsque les parties inclussent une clause
d’arbitrage dans leur contrat, on doit présumer que leur intention a été d’établir un
1039
mécanisme efficace pour le règlement des litiges visés par la clause » .

579. En second temps, c’est après l’entrée en vigueur de la Loi sur l’arbitrage B.E. 2530 les
dispositions étaient plus modernes. La tendance des juges semblait de plus en plus admettre la
validité de la clause compromissoire, en particulier son interprétation est en faveur de cette
clause. Lorsque les parties ont conclu une convention d’arbitrage, et qu’elle soit valide, les
parties sont obligées par cette convention de régler leurs différends par ce mode qu’elles ont
1040
choisi et non l’assignation devant la juridiction judiciaire . Il reste à savoir s’il est d’office
du juge d’appuyer sur l’existence d’une clause d’arbitrage pour rejeter le litige, sur ce point
1041
lorsque l’on prend en considération l’article 10 de Loi sur l’arbitrage B.E. 2530, on
trouve que la loi pèse la charge de l’invocation à la partie qui voudrait que le mode alternatif
de règlement des différends soit applicable. La Cour suprême a décidé dans sa décision que
« vu que le contrat de charte-partie d’un navire n’interdit pas aux parties, dans le cas de non
recours à l’arbitrage, de saisir la Cour judiciaire si elles le souhaitent ». En effet si la Cour
s’arrête là, il n’y a pas de doute. Mais elle est allée plus loin jusqu’à conclure que la
disposition de l’article 10 signifie que « l’une des parties a le droit de porter plainte sans
nécessité de faire le recours préalable à l’arbitrage », ce qui, pour nous, laisse de doutes. La
Cour a démêlé dans sa décision que « la partie défenderesse n’a pas fait devant la Cour une
demande d’examen conformément à la loi, dès lors le demandeur a le droit d’assignation ». A

1039
CCI, JDI.1975.238.
1040
Cour suprême Dika, n° 5477/2542 (1999) ; n° 147/2543 (2000) ; n° 6933/2543 (2000) ; n° 3712/2545
(2002) ; n° 9086/2546 (2003) ; n° 7655/2548 (2005).
1041
มาตรา ๑๐ พ.ร.บ. อนุญาโตตุลาการ บัญญัติวา่ “ในกรณี ที่คู่สัญญาฝ่ ายใดฝ่ ายหนึ่งฟ้ องคดีเกี่ยวกับข้อพิพาทตามสัญญาอนุญาโตตุลาการโดยมิได้
เสนอข้อพิพาทนั้นต่ออนุญาโตตุลาการตามสัญญา คู่สัญญาฝ่ ายที่ถูกฟ้ องอาจยื่นคาร้ องต่อศาลก่อนวันสื บพยานหรื อก่อนมีคาพิพากษา ในกรณี ที่ไม่มี
การสื บพยาน ให้มีคาสั่งจาหน่ายคดี เพื่อให้คู่สัญญาดาเนินการทางอนุญาโตตุลาการก่อน (...)”

430
notre avis, c’est un raisonnement erroné, il est possible que la Cour voulait dire que la clause
compromissoire conclue par les contractants ne peut absolument pas priver ceux-ci de
l’assignation judiciaire, mais il faut que l’une des parties fasse une demande devant la Cour
afin d’examiner l’existence et la validité de cette clause.
Il paraît dans d’autres décisions selon lesquelles la Cour a admis clairement
l’obligation de l’une des parties d’évoquer l’existence d’une clause compromissoire et de
1042
demander à la Cour de l’examiner , lorsque ladite partie a délibéré la tâche qui lui
incombe, le juge devra se déclarer incompétent en raison de l’existence de la clause
d’arbitrage.
Dès lors, le fait que le défendeur a fait valoir qu’il y avait une clause d’arbitrage en
l’absence de preuves de celle-ci devant la Cour, il n’a pas défendu devant le juge du fond pour
le non examen de ce fait mais il se défend tous les autres points chargés par le demandeur. Ce
comportement tout au long de la procédure sera présumé que le défendeur ne voulait pas
1043
régler ce litige par l’arbitrage .
1044
Nous observons que dans certaines décisions , le juge a considéré comme un
problème de droit la question à savoir si la partie demanderesse peut saisir le tribunal étatique
même s’il existe la clause d’arbitrage, plus précisément, il s’agit de droit de l’assignation
selon la Cour. Lors qu’il s’agit de problème de droit, le juge étatique serait le premier qui est
compétent pour statuer sur ce problème. A notre avis, ladite solution est faite au mépris de la
compétence de l’arbitre de statuer sur sa propre compétence y compris la convention
d’arbitrage.

580. De nos jours, c’est la Loi sur l’arbitrage B.E. 2545 qui s’applique depuis l’année 2002,
l’article 24, 1er al. de cette loi dispose clairement que : « Le tribunal arbitral statue sur sa
propre compétence y compris l’existence et la validité de la clause compromissoire
1045
(…) » . La décision de la Cour s’est orientée de manière plus ferme et constante,
notamment après l’entrée en vigueur de ladite Loi, vers l’application de ce mode alternatif de

1042
Cour suprême Dika, n° 3993/2545 (2002). V. en ce sens Cour suprême Dika n° 4752/2541 (1998) ; n°
3712/2545 (2002) ; n° 3425/2545 (2002).
1043
Cour suprême Dika, n° 2668/2544 (2001).
1044
Cour suprême Dika, n° 4752/2541 (1998) ; n° 147/2543 (2000).
1045
มาตรา ๒๔ วรรคแรก แห่ ง พระราชบัญญัติอนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติว่า “คณะอนุญาโตตุลาการมีอานาจวินิจฉัยขอบเขตอานาจ
ของตนรวมถึงความมีอยูห่ รื อความสมบูรณ์ของสัญญาอนุญาโตตุลาการ (...)”

431
règlement des différends entre les contractants tant dans le litige interne que le litige
international. La Cour admet en faveur d’une convention d’arbitrage dans une décision
concernant le contrat de travail international ainsi : « Vu que les parties ont conclu la clause
compromissoire dans leur contrat de travail, dans la mesure où les conflits ou les différends
nés de ce contrat y compris les obligations dérivées du contrat devraient être réglés par
l’arbitrage international à New Jersey, en appliquant les règles de l’AAA (The American
Arbitration Association). Considérant que la clause compromissoire n’est contraire ni à la loi
thaïe ni à la loi de l’État New Jersey, elle est donc valide et par conséquent les parties
1046
devraient d’abord régler leur litige par voie arbitrale » . Il semble que le principe de
l’interprétation de la volonté commune réelle des contractants est bien établi dans le système
d’arbitrage thaï.

2) Admission fermement du principe par les juridictions françaises.


581. En droit français, compétence de la compétence est un principe jurisprudentiel bien
établi en matière de l’arbitrage international alors qu’il est inscrit dans l’article 1466 du CPC
(art. 1465 du Décret du 13 janvier 2011) pour l’arbitrage interne. On sait que ce principe
permet aux arbitres de statuer en premier sur leur compétence en interdisant au juge de se
prononcer lorsqu’il est saisi par l’une des parties, cependant il faut rappeler que la validité de
1047
la sentence serait toujours sous le contrôle ultérieur du juge étatique . La Cour de
cassation a confirmé dans l’arrêt Zanzi la validité de la convention d’arbitrage international en
appuyant sur le principe selon lequel il appartient à l’arbitre de statuer sur sa propre
1048
compétence . De même que la décision rendue en 2001, on trouve que la Cour, au visa de
ce principe, a estimé que « en se déterminant ainsi sans relever la nullité manifeste de la
convention d’arbitrage, seule de nature à faire obstacle au principe susvisé, qui consacre la
priorité de la compétence arbitrale pour statuer sur l’existence, la validité et l’étendue, de la
1049
convention d’arbitrage, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision » .
Il est de même pour la Chambre commerciale de la Cour de cassation qui a estimé
qu’« en vertu du principe compétence-compétence, lorsque la nullité ou l’inapplicabilité de la

1046
Cour suprême Dika, n° 1958/2548 (2005).
1047
Ph. Fouchard, Traité de l’arbitrage commercial international, op.cit., n° 659, p. 414 et s.
1048
Cass. 1er civ., 5 janvier 1999, M. Zanzi, RCDIP.1999.546, note D. Bureau ; JDI.1999.784, note S. Poillot-
Perruzzeto ; Rev.arb.1999.260, note Ph. Fouchard ; RTD com.1999.380, obs. E. Loquin.
1049
Cass. 1er civ., 26 juin 2001, ABS, préc., supra note n° 1013.

432
clause d’arbitrage n’était pas manifeste, les juridictions étatiques n’avaient pas à se
prononcer sur ce point ; et qu’il appartenait à l’arbitre de se prononcer sur sa
1050
compétence » .
De même que dans le célèbre arrêt INSERM étudié auparavant. Suite aux conflits entre
les parties contractantes au cours de l’année 2000, l’INSERM a saisi en premier temps la
juridiction judiciaire (TGI Paris) pour trancher ce litige et par le jugement du 12 novembre
2003 la fondation norvégienne a été condamnée à payer le montant restant. Mais la Cour
d’appel de Paris avait constaté l’existence de la clause compromissoire, dans son arrêt du 28
octobre 2005, elle a annulé le jugement du premier degré en décidant que le TGI Paris était
incompétent pour connaître ce litige et que les différends devaient être tranchés par l’arbitrage
sur le fondement de la convention arbitrale (v. supra note n° 973).

582. Le principe de compétence-compétence est fermement affirmé ici, alors que


l’exception de ce principe ne paraît que dans l’hypothèse très spécifique comme celle de
l’arrêt Andhika Lines rendu le 11 juillet 2006. En l’occurrence, les contractants ont conclu un
contrat en figurant la clause compromissoire dans les booking notes mais ces derniers
constituent également les clauses énoncées que leurs stipulations s’effaçaient devant celles
des connaissements auxquels elles renvoyaient et figurant les clauses et les conditions à leur
verso. Tandis que le connaissement comporte la clause attributive de juridiction, dans cette
hypothèse, c’est la clause attributive de juridiction insérée dans ce connaissement, et non la
clause compromissoire, qui produirait les effets, en vertu d’une nouvelle expression de la
1051
volonté des parties . C’est le juge qui est compétent.

583. En ce qui concerne la charge de l’invocation de la clause d’arbitrage, en droit français


comme en droit thaï, le juge n’a pas d’office de relever l’existence de la clause
compromissoire, c’est la tâche de la partie d’y opposer devant le juge. Affirmant par le dernier
alinéa de l’article 1458 du CPC (art. 1448 du Décret du 13 janvier 2011) stipule ainsi : « la
juridiction de l’État ne peut relever d’office son incompétence ».

1050
Cass. com., 21 février 2006, Navire Pella, préc., supra note n° 1017.
1051
Cass. 1er civ., 11 juillet 2006, Andhika, n° 03-19.838, JDI.2008.146, obs. S. Sana-Chaillé de Néré ;
RJDA.2006.1109, note N. Bouche.

433
B. L’entrave au principe de compétence-compétence.

1) Contrôle superficiel de « nullité » ou « inapplicabilité » manifeste en droit


français.
584. La jurisprudence française admet la nullité et l’inapplicabilité manifeste comme les
seules motivations de rendre l’effet négatif à la compétence arbitrale. Il s’agit d’une notion
jurisprudentielle qui vient compléter la règle sur la nullité de la clause d’arbitrage posée par
l’article 1458, al. 2 du CPC (art. 1448, 1er al. du Décret du 13 janvier 2011). Rappelons que
1052
l’inapplicabilité manifeste a été ajoutée par l’arrêt Quarto Children de la Cour de
cassation en 2001 et finalement cette notion a été adoptée et stipulée dans l’article 1448, 1er al.
du nouveau Décret. Cependant il est toujours nécessaire de l’interpréter. La jurisprudence
1053
admet aussi que le contrôle fait par le juge saisi en premier lieu doit rester sommaire .
Après avoir étudié le principe de compétence-compétence, son importance et son objectif
poursuivi, force est de constater que l’effet négatif donné au principe tels que la nullité et
l’inapplicabilité manifeste doivent être uniquement une exception. Alors, il est nécessaire de
déterminer prudemment la notion de la nullité et de l’inapplicabilité manifeste, car la certitude
est indispensable à ce stade. Comme l’écrit M. N. Bouche que « le juge étatique doit établir
avec certitude le caractère incontestable, indiscutable de la nullité ou de l’inapplicabilité de la
1054
convention d’arbitrage » . La question est de savoir s’il existe le critère du caractère
« manifeste » de la nullité ou de l’inapplicabilité d’une clause compromissoire. La réponse
semble positive, c’est le critère jurisprudentiel qui doit être pris en compte. Bien que dans
certains cas la Cour de cassation n’ait pas formulé explicitement le terme de nullité ou
inapplicabilité manifeste, on peut constater aussi la motivation en arrière sa décision.
En effet le problème ne se pose pas dans le cas où la clause compromissoire est
manifestement nulle sans nécessité de l’interpréter, par exemple le litige est manifestement
1055
non arbitrable au sens de l’article 2060 du Code civil . Mais pour d’autres cas, il semble
que l’orientation jurisprudentielle est considérablement nécessaire.

1052
Cass. 1er civ., 16 octobre 2001, Quarto Children, Rev.arb.2002.919, note D. Cohen.
1053
Cass. 1er civ., 7 juin 2006, Sté ABS, D. 2006.IR.1701, obs. Avena-Robardet ; D. 2006.Panor.3028, obs. T.
Clay ; JDI.2006.1384, note A. Mourre ; Rev.arb.2006.945, note E. Gaillard ; JCP (G) 2006.I.187, obs. C.
Seraglini.
1054
N. Bouche, « L’inapplicabilité manifeste de la convention d’arbitrage », RJDA.2006.1109, spéc. p. 1110.
1055
Cass. 1er civ., 26 juin 2001, préc., supra note n° 1013.

434
585. Concernant le cas de l’inexistence évidente des effets de la convention d’arbitrage à
l’égard de la partie à laquelle la clause était opposée, il rend aussi l’effet négatif à la
compétence arbitrale. La Cour de cassation a estimé que « Bien qu’il existe la clause
compromissoire insérée dans ces contrats, l’action en responsabilité pour soutien abusif
intentée par le liquidateur d’une entreprise contre l’un des créanciers de cette dernière
échappait à la compétence du tribunal arbitral, au motif que cette clause était étrangère au
1056
litige » . La Cour n’a pas employé expressément le terme « inapplicabilité », mais on peut
s’entendre comme tel en déduisant la motivation en arrière.

586. Lorsque la clause compromissoire ne figurait pas dans les conditions générales en
vigueur au moment de la conclusion du contrat, cela peut être aussi une motivation de juger
l’inapplicabilité manifeste par la Cour. Prenons un exemple de l’arrêt rendu en 2004, en
l’espèce il s’agissait d’un contrat constitué les conditions générales en vigueur en 1980 dans
lesquelles figurait la clause attributive de juridiction, et ces conditions auraient dû être
appliquées. Mais la Cour a constaté que la clause compromissoire ne figurait pas dans lesdites
conditions générales à l’époque (1980), elle l’a été insérée antérieurement dans l’année 1990.
Pour cette raison la Cour de cassation a estimé que « Attendu que ce sont les conditions
générales en vigueur en 1980, date de la certification du navire par le Bureau Véritas, qui
doivent s’appliquer et que celui-ci justifiait qu’à cette époque, seule une clause attributive de
juridiction figurait dans les conditions générales de vente et non une clause compromissoire
qui n’a été introduite qu’en 1990, la Cour d’appel a légalement justifié sa décision en
caractérisant ainsi l’inapplicabilité manifeste au litige de la clause d’arbitrage en
1057
question » .

1058
587. Un autre critère peut être trouvé dans l’arrêt Andhika Lines . En l’occurrence, la
convention d’arbitrage stipulée dans les cinq booking notes a été considérée comme
manifestement inapplicable en raison de l’existence de l’avant-contrat qui constitue des
réservations de fret prévoit lui-même son remplacement par les dispositions des
connaissements et que ces derniers comportent la clause attribuant de compétence au tribunal

1056
Cass. com, 14 janvier 2004, Rev.arb. 2004.591, note P. Ancel ; RJDA.2004.736.
1057
Cass. 1er civ., 27 avril 2004, Navire Estonia, JDI.2005.349, note O. Cachard ; RTD civ. 2004.770, obs. P.
Thery ; Rev.arb.2006.851.
1058
Cass. 1er civ., 11 juillet 2006, Andhika, préc., supra note n° 1051.

435
du domicile du transporteur. Dans ce cas, les juges étatiques ont pu déduire de ce
comportement que les contractants souhaitaient de régler leur litige par le recours aux
tribunaux étatiques et non le tribunal arbitral, au motif de l’inapplicabilité manifeste de la
clause compromissoire.

588. Quant à l’adjectif « manifeste » qu’ajoute la Cour de cassation pour bien éclairer les
termes nullité et inapplicabilité, en effet lorsque l’on prend en considération le terme
« manifeste », on constate que le sens est clair en soi, qu’il est décelable à la seul lecture de la
clause et qu’il ne soit pas nécessaire d’interpréter. Comment la nullité et l’inapplicabilité
peuvent être considérées comme « manifeste » si elles font l’objet d’interprétation ? C’est la
raison pour laquelle la solution plus logique est de faire disparaître de toute interprétation du
juge étatique un critère de caractère manifeste de la nullité et l’inapplicabilité de la clause
compromissoire. Comme l’affirme la Cour de cassation que dans le sens que la Cour d’appel
de Paris avait donc pu constater, sans avoir eu à procéder à une quelconque interprétation,
1059
l’inapplicabilité manifeste de la clause d’arbitrage . Par ailleurs la Cour de cassation a
affirmé dans son arrêt de 2006 qu’il en résulte de « la combinaison du principe de la validité
de la clause compromissoire et du principe compétence-compétence interdit aux juges du
fond de procéder à un examen substantiel et approfondi de la convention d’arbitrage (…), la
seule limite dans laquelle le juge peut examiner la convention d’arbitrage avant qu’il ne soit
amené à en contrôler l’existence ou la validité, dans le cadre d’un recours contre la sentence,
1060
étant celle de sa nullité ou de son inapplicabilité manifeste » .

En somme, comme le souligne M. N. Bouche, les juges étatiques ne peuvent pas


interpréter la clause compromissoire pour infirmer la compétence arbitrale, car cela signifie
qu’il n’y a pas de nullité ou d’inapplicabilité « manifeste », si elle est manifeste le juge
1061
n’aurait pas eu besoin de l’interpréter . En revanche, le juge pourrait-il interpréter la

1059
Cass. 1er civ., 11 juillet 2006, Andhika, op.cit.
1060
Cass. 1er civ., 7 juin 2006, Sté ABS, préc. supra note n° 1053 : pour un premier examen de la convention
d’arbitrage, la Cour n’autorise que celui dont le caractère superficiel ne porte pas à conséquence. Car le contrôle
plus approfondi sera exercé par la Cour lors du recours en annulation contre la sentence introduite par une partie.
1061
N. Bouche, « L’inapplicabilité manifeste… », op.cit., p. 1112. V. en ce sens E. Loquin, « Le contrôle de
l’inapplicabilité manifeste de la convention d’arbitrage », RTD com.2006.764, spéc. p. 766 et s.

436
convention d’arbitrage afin d’apprécier la compétence de l’arbitre puisqu’il s’agit de
1062
l’affirmation que la nullité ou l’inapplicabilité en cause n’est pas « manifeste » .

2) Contrôle sommaire de la clause d’arbitrage en droit thaï.


589. En droit thaïlandais, plusieurs facteurs peuvent faire obstacle à l’application de la
clause compromissoire. Ces obstacles peuvent aussi écarter l’arbitre de sa compétence. Il n’y
a pas de grande différence par rapport au droit français, il s’agit de caractères de nullité et
d’inapplicabilité de la clause d’arbitrage. C’est l’article 1458 al. 2 du CPC (art. 1448 du
Décret du 13 janvier 2011) et le principe jurisprudentielle pour l’arbitrage français, alors que
la Loi thaïe sur l’arbitrage B.E. 2545 l’article 14 incluse les trois causes qui affectent la
validité de la clause compromissoire : à savoir, la nullité, l’inapplicabilité et le non
susceptibilité d’être exécutée de la convention.

590. A titre d’exemple, la décision du TCPICI, la Cour a recouru à la notion de


l’inapplicabilité de la clause d’arbitrage. En l’espèce, il s’agit d’un contrat de représentation,
la société de droit américain demanderesse, à titre de la représentante conventionnelle, a saisi
le tribunal étatique même que la convention d’arbitrage est inclue dans ledit contrat. Les
défendeurs ont invoqué devant la Cour l’existence de la clause compromissoire, mais celle-ci
a rejeté ces demandes. En effet la Cour avait accepté en principe que « entendu que les parties
ont conclu la clause compromissoire pour régler leur litige né du contrat ; que l’action du
demandeur d’introduire le litige devant le juge étatique sans avoir constitué le tribunal
arbitral comme prévu dans le contrat est considérée comme violation de la convention
d’arbitrage et de la loi thaïe sur l’arbitrage ». Cependant elle a appuyé sur le fait que le
contrat principal a été conclu au moment où la partie défenderesse, cocontractante, n’était pas
encore personne morale, car le procès d’enregistrement de la société s’est déroulé après que le
contrat principal soit conclu. Pour cette raison « le défendeur n’avait droit de conclure aucun
acte juridique et en vertu des articles 65, 66, 67, 149, 1015 et 1111 du CCC, le défendeur

1062
Cass. 1er civ., 30 mars 2004, n° 01-17.800, D. 2005.961, note J. Raynard, RJDA.2005.1171 : le pourvoi
formé contre la décision de la Cour d’appel a été rejeté par la Cour de cassation, l’arrêt d’appel a interprété les
termes ambigus de la clause compromissoire en ayant constaté la volonté des parties de soumettre à leur
différends à l’arbitrage et en ayant appuyé qu’en l’absence de la nullité ou l’inapplicabilité manifeste, la
convention d’arbitrage devait recevoir application. V. aussi Cass. 1 er civ., 6 juillet 2005, n° 04-10.456,
RJDA.2005 : les arrêts de la Cour d’appel de Paris, ayant infirmé l’ordonnance du tribunal de commerce qui
avait déclaré de manifestement nulle la convention d’arbitrage, ont été approuvés par la Cour de cassation au
motif que cette ordonnance constitué une interprétation de certaines stipulations de la clause d’arbitrage laquelle
avait violé le principe de compétence-compétence.

437
n’était pas cocontractant ». D’après la Cour, « lorsqu’il n’existait pas de cocontractant dans
le contrat en question, la clause compromissoire inclue dans ledit contrat est inapplicable ; il
est légitime pour le demandeur d’assigner devant les tribunaux étatiques sans recourir à
1063
l’arbitrage » . A notre avis, il faut observer que la Cour utilise le terme « n’avait pas
droit » au lieu de « incapacité », il est clair que la défenderesse n’avait pas encore à ce
moment là le statut juridique. Alors, elle n’avait pas pu être la partie d’une transaction. En
effet si la Cour s’est arrêtée là, aucun problème ne se pose.
Suite au contrat de représentation, il y avait aussi le contrat de vente conclu entre la
demanderesse et les tires, la Cour a essayé de trouver la sortie pour le contrat de vente. Certes,
la Cour n’a eu l’intention de prononcer inapplicable le contrat de représentation qui affectait
ensuite le contrat de vente, juste pour la raison du manquement de statut de personne morale
de l’une des parties. Lorsque l’on penche sur les détails, la Cour a décidé valide le contrat de
représentation et le contrat de vente internationale de marchandises. La Cour n’a pas jugé que
le contrat de représentation fût « nul », mais « inapplicable » à la défenderesse. D’après la
Cour, « bien que la défenderesse ne fût pas une personne morale au moment où le contrat de
représentation a été conclu, vu qu’elle a enfin donné une ratification à ses propres actions ;
que la défenderesse a confirmé le rapport juridique en qualité de représentant avec la
demanderesse (…), le contrat de représentation est valide ». Il est douteux que le contrat
principal conclu au moment où l’une des parties n’était pas personne morale lequel est
inapplicable peut être ratifié postérieurement, alors que la convention d’arbitrage incluse dans
ce contrat est inapplicable d’une façon permanente et écarte toute la compétence de l’arbitre.
Ce constat nous laisse à penser que la Cour n’admet que la ratification aux actes de
1064
représentant mais non la clause compromissoire . La seule raison que l’on peut admettre
comme telle est que la clause d’arbitrage était jugée inapplicable dès le premier vu du juge,
sans qu’il ait besoin de se délibérer d’une interprétation quelconque. Par conséquent la Cour
avait examiné approfondi le contenu du contrat et des données factuelles du litige, et qu’elle a
trouvé que ceux-ci auraient pu être approuvés postérieurement. Par contre, il est inutile
d’approuver la clause compromissoire car le juge a déjà analysé le fond du litige…
Là aussi, si la notion « manifeste » était adoptée par la jurisprudence thaïe, elle serait
le critère de dissocier la compétence entre la juridiction étatique et le tribunal arbitral. Si ce

1063
TCPICI, com., n° 283/2543 (2000), Craftsmen Pacific Co.Ltd. c/ Rukshansa Co.Ltd.
1064
Normalement le droit thaï admet que le contrat qui a été conclu par le dol tel qu’un vice du consentement
est entaché la nullité c'est-à-dire que la partie peut soit annuler ce contrat soit donner une ratification.

438
litige présente l’inapplicabilité manifeste, c’est la compétence du TCPICI, à l’inverse, s’il
n’est pas manifestement inapplicable, la règle de compétence-compétence doit être respectée.
Cependant le terme « manifeste » n’apparaît pas dans cette décision.

591. Hormis la nullité et l’inapplicabilité, l’article 14 de la Loi thaïe de l’arbitrage admet


aussi un autre critère ayant rendu l’effet négatif à la clause d’arbitrage ; la non susceptibilité
1065
d’être exécutée de la clause compromissoire. Pour un auteur , celui-ci comprend les cas
par exemple, la clause d’arbitrage n’est pas claire ; la clause fait l’objet de l’interprétation.
Cependant, nous ne partageons pas cette opinion, car, pour nous, il s’agit de clauses
pathologiques qui entraîneront une interprétation. Rappelons que le non susceptibilité d’être
exécutée de la convention d’arbitrage au sens de l’article 14, donnera la compétence au juge
étatique de trancher sur le fond du litige, en raison de l’exception de son incompétence. Alors
que le problème de la pathologie d’une clause d’arbitrage n’est pas forcément d’entraîner
l’invalidité de cette clause qui rend le juge compétent. On accepte qu’il soit possible que
certaines clauses soient tellement pathologiques et qu’elles ne peuvent pas être sauvées,
1066
comme l’affirme M. E. Loquin . Mais il y en a certain qui peut l’être.
Il est vrai que les clauses pathologiques donneront les difficultés à la mise en œuvre de
la clause compromissoire et aussi font obstacle au déroulement de l’arbitrage. Mais on ne peut
pas conclure que la clause pathologique fait obstacle au principe de compétence-compétence
de l’arbitre. Une fois que la clause d’arbitrage n’est pas manifestement nulle ou inapplicable,
il appartient à l’arbitre de constituer et de trancher si la clause compromissoire permet de
fonder sa compétence y compris l’interprétation de la clause compromissoire
pathologiquement rédigée. Cette solution est adoptée dans les arrêts de la Cour d’appel
français qui reconnaît la compétence de l’arbitre de juger de la validité de son investiture
1067
même que sa compétence est contestée . Parce que, dès lors que le tribunal arbitral est
constitué, c’est à sa charge et exclusivement à lui seul de statuer sur son pouvoir et certes sur
la clause d’arbitrage. Là aussi, le principe de compétence-compétence s’impose. A ce stade la

1065
S. Asawaroj, Le règlement des différends commerciaux par l’arbitrage, op.cit., p. 79.
1066
E. Loquin, « Toutes les clauses d’arbitrage pathologiques ne peuvent être sauvées », RTD com. 2002.659.
1067
CA Paris, 24 mars 1994, Rev.arb.1994.515. V. aussi E. Loquin, « Le contrôle de l’inapplicabilité manifeste
de la convention d’arbitrage », RTD com. 2006.764.

439
Cour l’interpréterait en tenant compte de l’effet utile de la clause et en recherchant la volonté
1068
commune des parties plus qu’en déduisant le contenu .
Nous proposons de bien clarifier sur ce point, en admettant que la nullité ou
l’inapplicabilité de la clause compromissoire doit être « manifeste » pour rendre
incompétence à l’arbitre, en raison de la sauvegarde de la pertinence du principe de
compétence-compétence en matière de l’arbitrage international thaï.
Par ailleurs on peut observer qu’en vertu de l’article 14 de la Loi thaïe sur
1069
l’arbitrage , le juge sera compétent pour le contrôle de la validité de la clause d’arbitrage
uniquement lorsque l’une des parties à l’instance soulève devant le juge, dans le débat
contradictoire, une exception d’incompétence tiré de la convention d’arbitrage, il s’agit ici du
contrôle prima facie comme l’on a déjà étudié auparavant. Force est de constater que le juge
n’a pas d’office de le faire et notamment ce contrôle n’est que le contrôle superficiel. On
retient les mêmes principes qu’en droit français.

§ 2 : Compétence de la compétence à l’épreuve de l’anti-suit injunction.

592. L’anti-suit injunction est une mesure unilatérale, considérée comme une arme
procédurale, octroyée par le juge premier saisi afin d’empêcher l’une des parties de ce litige
de poursuivre ou d’introduire une nouvelle procédure parallèle dans un autre État (supra
n° 412). En effet, on ne peut nier l’intérêt d’un usage de cette mesure notamment en matière
de l’arbitrage lequel se présente comme un moyen efficace pour la mise en œuvre de
l’instance arbitrale. Car il s’agit de contraindre un autre tribunal étatique, le destinataire de

1068
En ce sens CA Paris, 14 février 1985, Rev.arb.1987.325, note Level : la Cour a estimé que « la clause
compromissoire faisant référence à un organisme d’arbitrage dénommé ‘tribunal de la chambre de commerce
de Paris’ attribuait compétence à la Chambre arbitrale de Paris, seul organisme habilité par la chambre de
commerce de Paris » ; CA Paris, 24 mars 1994, préc. : la Cour a décidé que « le fait que la clause
compromissoire vise la chambre de commerce de Paris au lieu de la CCI constitue une simple erreur
matérielle ».
1069
L’article 14, 1er alinéa dispose ainsi : « Lorsque l’une des parties a assigné devant le tribunal un différend
sur une question faisant l’objet d’une clause compromissoire, la partie assignée peut faire une demande au
tribunal saisi de renvoyer les parties à l’arbitrage, au plus tard lorsqu’elle soumet ses premières conclusions
quant au fond du différend, lorsque le juge ne constate pas la nullité, l’inopérante ou le non susceptibilité d’être
exécutée de ladite convention, il devrait rejeter ce litige ». มาตรา ๑๔ พ.ร.บ. อนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติว่า ในกรณี ที่
คู่สัญญาฝ่ ายใดฝ่ ายหนึ่งฟ้ องคดีเกี่ยวกับข้อพิพาทตามสัญญาอนุญาโตตุลาการโดยมิได้เสนอข้อพิพาทนั้นต่อคณะอนุญาโตตุลาการตามสัญญา คู่สัญญา
ฝ่ ายที่ถูกฟ้ องอาจยืน่ คาร้องต่อศาลที่มีเขตอานาจไม่ชา้ กว่าวันยืน่ คาให้การหรื อภายในระยะเวลาที่มีสิทธิยนื่ คาให้การตามกฎหมาย ให้มีคาสั่งจาหน่ายคดี
เพื่อให้คู่สัญญาไปดาเนินการทางอนุญาโตตุลาการ และเมื่อศาลทาการไต่สวนแล้วเห็นว่าไม่มีเหตุที่ทาให้สัญญาอนุญาโตตุลาการนั้นเป็ นโมฆะ หรื อใช้
บังคับไม่ได้ หรื อมีเหตุที่ทาให้ไม่สามารถปฏิบตั ิตามสัญญานั้นได้ ก็ให้มีคาสั่งจาหน่ายคดีน้ นั เสี ย

440
l’injonction, à renoncer à une procédure engagée au détriment d’une clause compromissoire.
De ce point de vue, on peut dire que l’anti-suit injunction est un mécanisme qui sert à
l’application du principe de compétence-compétence.
Cependant la position des juridictions semble diverse sur ce point, nous étudions
d’abord l’anti-suit injunction à l’égard du juge communautaire, la jurisprudence constante de
la CJCE nous confirme la non admission d’une telle mesure dans l’espace judiciaire européen
ce qui peut être discutée (A). Ensuite, nous verrons la possibilité d’octroyer une telle mesure
au destinataire en dehors des États membres de l’Union européenne (B).

A. Dans l’espace judiciaire européenne.

593. Il s’agit d’un problème délicat touché aussi bien la sanction unilatérale par un juge
d’un État membre que la confiance mutuelle que les juges d’un État membre doivent avoir
1070
envers leurs collègues européens . Il nous semble que l’affaire West Tankers mérite d’être
analysée à ce stade.
Il s’agit en l’espèce de l’anti-suit injunction qui était motivée par l’existence de la
clause compromissoire. Un contrat d’affrètement soumis au droit anglais et incluse la clause
compromissoire prévoyante l’arbitrage à Londres. Un navire appartenant à West Tankers et
affrété par Erg SpA est entré en collision avec un embarcadère appartenant à Erg en Italie.
Après avoir dédommagé leur client, les assureurs ont assigné West Tankers devant le tribunal
italien. West Tankers a contesté la compétence de la Cour italienne en invoquant l’existence
de clause compromissoire et il a ensuite introduit l’instance devant le tribunal anglais pour
demander qu’il soit jugé que ce litige devait être tranché par l’arbitrage.
Au cours du procès, West Tankers a demandé la High Court of Justice de prononcer
une anti-suit injunction au tribunal italien pour qu’il se soit déclaré incompétent en renvoyant
le litige au tribunal arbitral à Londres et c’est la raison pour laquelle la question de
litispendance ne se pose pas à cet égard. Finalement, la House of Lords a posé la question
préjudicielle devant la CJCE à savoir si le prononcé d’une telle injonction est contraire au
règlement CE n° 44/2001. La CJCE a estimé que « la convention d’arbitrage est
complètement exclue du champ d’application de la convention de Bruxelles et du Règlement,
pour cette raison la clause d’arbitrage ne devrait pas être prise en considération et donc une

1070
A notre avis, ce n’est pas la question de confiance mutuelle qui doit être prise en compte.

441
1071
anti-suit injunction en matière d’arbitrage est incompatible avec le règlement » . C'est-à-
dire que la Cour italienne était compétente au regard du règlement Bruxelles I. Bien que le
plaideur ait fait valoir qu’une telle injonction ne saurait être incompatible avec le règlement n°
44/2001 en raison d’exclure l’arbitrage du champ d’application de celui-ci, la Cour a estimé
qu’il faut prendre en compte l’objet censé être protégé par la procédure en question (l’anti-
suit injunction) afin de déterminer si un litige relève ou non du champ d’application du
règlement.
Quand bien même la convention d’arbitrage n’entre pas dans le champ d’application
du règlement mais qu’elle puisse avoir des conséquences qui portent atteinte à l’effet utile de
ce règlement. La Cour a appuyé alors sur le fait qu’une arme procédurale de common law est
destinée à empêcher une juridiction normalement compétente de trancher le litige qui lui
soumis et aussi à priver celle-ci de statuer sur sa propre compétence en vertu du règlement.
On sait que le règlement n° 44/2001 n’autorise pas le contrôle de la compétence d’une
juridiction d’un État membre par une juridiction d’un autre État membre. Il est clair que la
litispendance ne peut pas être recourue à ce stade, à la différence de l’affaire Gasser ou
l’affaire Turner, car il ne s’agit pas de problème à savoir quelle juridiction étatique sera
compétente pour trancher le fond du litige. En revanche ce que nous semble plus important est
que la clause compromissoire devrait être applicable dès lors qu’elle est valide…

594. Considérant comme les questions préalables la validité et l’applicabilité de la


clause d’arbitrage. D’après la CJCE, si on laisse l’anti-suit injunction écarter le tribunal
italien de vérifier la validité de la clause d’arbitrage, il risque d’envisager une partie, qui
souhaite de se soustraire la procédure et de priver son adversaire de protection juridictionnelle
à laquelle il a droit, en invoquant une exception d’une telle clause pour échapper à la
1072
juridiction étatique en question . En premier lieu que la Cour a appuyé sur le constat que
se trouve très rare en pratique, à notre avis lorsque les parties ont choisi de régler leurs
différends par l’arbitrage, on peut présumer en premier lieu qu’elles souhaiteraient ne pas
recourir au tribunal étatique. Nous regrettons d’ailleurs que la CJCE ait méconnu la vraie
nature de la convention d’arbitrage en jugeant la question de la validité ou de l’applicabilité
de la clause compromissoire comme une simple question préalable pour le litige lequel le

1071
CJCE, 10 février 2009, aff. C-185/07, West Tankers, D. 2009. 981, note C. Kessedjian; RCDIP.2009.373,
note H. Muir Watt; JDI.2009.1281, note B. Audit; RTD civ. 2009.357, obs. P. Théry; Rev. arb. 2009. 407, note
S. Bollée.
1072
L’arrêt précité.

442
fond est entré dans le champ d’application du règlement. Car, à nos opinions, il faut traiter ces
questions comme si elles étaient de questions indépendantes distinctes du fond de litige
principal. Parce que l’on admet, a priori, que la clause compromissoire est une convention
autonome du contrat principal et que l’existence de ce dernier n’affecte pas sa validité.
En second lieu, le fait que l’une des parties a saisi le juge d’un État membre pour
l’objet de demander à ce dernier de prononcer l’injonction contre son cocontractant qui porte
ou porterait plainte devant le tribunal étatique d’un autre État membre paraît en soi que le
demandeur d’une telle injonction souhaite toujours régler le litige par l’arbitrage. En laissant
les deux procédures parallèles se poursuivre, il risque d’avoir les résultats incompatibles. Par
ailleurs on ne peut pas éviter de penser que l’une des parties pourrait facilement utiliser le
recours au juge étatique comme une stratégie dilatoire de la procédure arbitrale, notamment
un simple saisi du juge d’un État communautaire éventuellement compétent en vertu du
règlement Bruxelles I. Cela signifie que la convention entre les contractants n’est pas
sincèrement tenue ; la partie contractante a conclu, par une mauvaise foi, un contrat en
sachant auparavant qu’une clause compromissoire ne produit jamais ses effets. Malgré que
l’argument puisse être dans le sens que le moyen plus approprié pour les assureurs est
d’assigner devant les tribunaux compétents en vertu de l’article 5-3° du règlement Bruxelles I
1073
le lieu où le fait dommageable s’est produit ; l’Italie en l’espèce . De ce point de vue, la
situation pour l’arbitrage devient plus grave, car la quasi-intégralité de tous les litiges
arbitrables tombe dans le champ d’application du Règlement. Dès lors, dans certains cas le
refus de l’anti-suit injunction fait obstacle au jeu de droit national des contrats. Par ailleurs,
ceci est contraire à l’objet important sur lequel le mode de règlement des litiges par l’arbitrage
commercial international se concentre ; la rapidité et la préserve de bonnes relations
commerciales. Empruntant le terme de Mme H. Muir Watt, nous ne voyons « aucun intérêt
1074
pour l’espace judiciaire européen de discréditer des clauses compromissoires » . Pour ces
raisons nous partageons une proposition des auteurs en ce qui concerne la création de
procédure de référé communautaire pour statuer sur les conflits de compétence entre plusieurs
1075
tribunaux d’États membres . Car ce procès permettrait de réduire les délais ce qui est un

1073
Contra. R. Carrier, « Anti-suit injunctions : réquisitoire pour l’abandon de leur prononcé en matière
d’arbitrage », D. 2005.2712. D’après cet auteur, les décisions anglaises démontrent que les juges n’agissent pas
réellement pour le but de l’administration d’une bonne justice, en revanche, ils ont été destinés pour protéger la
compétence des tribunaux anglais et notamment le marché londonien de l’arbitrage.
1074
H. Muir Watt, « Droit judiciaire international », Rev. gén. Procédures, n° 4, oct.-déc. 1999, p. 781 et s.
1075
Ibid. ; Cf. R. Carrier, « Anti-Suit Injunction… », op.cit., p. 2714.

443
premier souci des opérateurs du commerce international et également résoudre les litiges
ayant trait à la validité de la convention d’arbitrage.

595. Alors, qu’en est-il pour la clause compromissoire, si cette injonction ne peut produire
un tel effet ? Il faut espérer le contrôle sommaire par le tribunal italien d’une clause
compromissoire en question et que celui-ci respecte strictement le principe de compétence-
compétence en renvoyant les parties à la procédure d’arbitrage dès lors que cette convention
est valide, à l’exception de la nullité ou l’inapplicabilité manifeste. Certes, on ne nie pas la
pratique que certains contrats n’ont pas été négociés, comme l’on a déjà vu la clause
compromissoire insérée dans le connaissement maritime ou incorporée dans la charte-partie,
sur cet argument il est vrai que l’anti-suit injunction n’est qu’une simple sanction
contractuelle et non l’administration d’une bonne justice. Cependant, nous affirmons que le
contrat de transport maritime a caractère spécifique et ne peut assimiler au contrat conclu par
la partie faible car, a priori, ce genre de contrat a été conclu, plus souvent, entre le
commissionnaire et l’affréteur ou le transporteur.
Le texte de Convention de New York 1958 a été pris en compte par la CJCE : « l’anti-
suit injunction prononcée au moment que serait invoquée par le défendeur l’existence d’une
clause d’arbitrage aurait pour effet de priver un tribunal d’exercer son pouvoir d’apprécier
l’effet de la clause compromissoire sur sa compétence, que lui confère la Convention de New
York, et par voie de conséquence de priver le demandeur de la protection juridictionnelle à
1076
laquelle il a droit » . Quand bien même cette convention donne une direction pour le
tribunal saisi, mais elle n’a pas pour but de régler les conflits de compétence des tribunaux
étatiques qui saisissent le litige portant sur la question de la validité de la clause d’arbitrage.
C’est la raison pour laquelle en pratique, toutes les juridictions peuvent être saisies pour une
telle clause sans nécessité d’avoir la compétence sur le fond du litige.
D’après ce constat, nous pensons que même si la Convention de Bruxelles et le
règlement n’appliquent pas à la clause compromissoire, ce n’est pas à dire que le tribunal
destinataire de cette injonction décidera toujours non favorable à la clause d’arbitrage. Il faut
rappeler que l’anti-suit injunction n’est qu’une mesure procédurale pour l’objet de contraindre
le tribunal étatique de ne pas saisir le litige pendante devant un autre tribunal. Au contraire,

1076
CJCE, 10 février 2009, aff. C-185/07, West Tankers, préc. : il faut rappeler qu’aux termes du considérant
n°25 du règlement Bruxelles I, le respect des engagements internationaux souscrits par les États membres justifie
que le présent règlement n’affecte pas les conventions auxquelles les États membres sont parties et qui portent
sur des matières spéciales.

444
rien n’empêchera les tribunaux anglais de prendre en compte la validité de la clause
d’arbitrage et de s’opposer à la reconnaissance et l’exécution ce jugement italien qui avait
condamné West Tankers sans constater préalablement la nullité de la clause d’arbitrage.

B. Dans l’espace judiciaire international commun.

596. Cette mesure a caractère in personam, alors elle dirige uniquement à l’encontre du
plaideur. En effet si l’on prend en compte les mesures provisoires, celles-ci sont également in
personam et surtout la nature juridique des deux types d’injonctions n’est pas différente, mais
les mesures provisoires sont admises car elles sont dans l’autre étape du procès.
Pour les adversaires de l’anti-suit injunction, celle-ci est une mesure qui interdit aux
parties de poursuivre la procédure judiciaire devant la juridiction étrangère, en ce sens elle est
interférée indirectement à la souveraineté du juge étranger dans la mesure où l’injonction fait
obstacle à la saisine du litige puisque le plaideur n’a pas pu assigner devant cette
1077
juridiction . Cependant, il est vrai que les juges common law peuvent continuer d’octroyer
cette injonction à l’encontre les plaideurs pour le litige qui n’entre pas sous l’empire du
règlement n° 44/2001. A titre d’exemple, il est possible de trouver une demande de l’anti-suit
injunction auprès la Cour anglaise contre la partie thaïlandaise, mais jusqu’à maintenant nous
n’avons vu aucune décision de la Cour thaïe sur ce sujet. A notre avis, il est ardu que la
dernière admette l’anti-suit injunction quand bien même celle-ci est prononcée pour permettre
le déroulement de la procédure arbitrale ; il s’agit de question de la souveraineté judiciaire.
Pourtant on peut penser s’il existe un accord international entre États ou même pour raison de
courtoisie judiciaire internationale, ceux-ci permettraient aux juges thaïs d’accepter la mesure
procédurale étrangère en cause.
Rappelons que cette mesure procédurale est toujours prononcée avec la peine privée
1078
ou pénale. Comme l’affirme la CJCE dans l’arrêt Turner , elle constitue une ingérence
dans la compétence de la juridiction étrangère.

1077
Pourtant, dans l’affaire West Tankers il s’agit de la contrainte destinée à interdire un juge italien de statuer
au fond du litige.
1078
CJCE, 27 avril 2004, aff. C-159/02, Turner, RTD civ. 2004.549, obs. Ph. Thery ; D. 2005.Chr.2712, note
R. Carrier.

445
597. Cependant on trouve que l’Institut de droit international admet aussi la possibilité
d’octroyer cette injonction. La résolution (n° 5) adoptée au sein de l’Institut de droit
international précise que
« Les juridictions qui accordent des anti-suit injunctions devraient être sensibles aux
exigences de la comity et, en particulier, ne devraient accorder de telles injonctions que
lorsqu’il y a : a) violation d’un accord relatif au choix du tribunal ou d’un accord
d’arbitrage ; b) comportement déraisonnable ou oppressif d’un demandeur devant une
juridiction étrangère ; ou c) nécessité de protection de leur propre compétence dans des
1079
matières telles que l’administration de biens et les procédures d’insolvabilité » .

Cette résolution semble être appliquée aussi bien au prononcé par le tribunal étatique
que le tribunal arbitral de l’anti-suit injunction. Car l’arbitre dispose la compétence pour
statuer sa propre compétence y compris la mesure prononcée pour protéger ladite compétence.
Malgré que cette résolution a été adoptée, certes sans force obligatoire, mais il faut constater
que l’Institut n’a pas encouragé ou suggéré aux autres systèmes juridiques qui n’ont pas
connu l’emploi de cette injonction. Il en va de même pour la loi type de CNUDCI, l’article
17.2 b) ainsi libellé : le tribunal arbitral peut ordonner à une partie « de prendre des mesures
de natures à empêcher, ou de s’abstenir de prendre des mesures susceptibles de causer, un
préjudice immédiate ou imminent ou une atteinte au processus arbitral lui-même ».

Section III
Renforcement procédural de l’efficacité de l’arbitrage international.

598. Bien que nous limitions notre étude sur les questions en dehors de la procédure
arbitrale, il est indispensable d’étudier les mesures qui viennent renforcer une telle procédure.
Comme on le sait, l’arbitrage est un mode contractuel de règlement des litiges. Étant juge
privé, l’arbitre ne dispose de pouvoir coercitif. Ainsi dans certaines hypothèses, les règles sur
la reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale ne sont pas suffisantes pour protéger
la partie conquérante. Car il est possible aussi d’envisager le cas où cette partie a besoin,
avant l’ouverture de procédure arbitrale ou même pendant le procès, d’un remède pour le cas
d’urgence. Le raisonnement est le même que celui de la procédure devant le juge étatique.
Quand bien même l’arbitrage est un mode de règlement des litiges plus rapide que le
mode judiciaire traditionnel, mais qu’il prenne aussi un temps assez long, au moins six mois

1079
Institut de droit international, Session de Bruges, 2003, disponible sur le site http://www.idi-
iil.org/idiF/resolutionsF/2003_bru_01_fr.pdf

446
et parfois entre 18 et 24 mois selon la CCI. Pendant cette longue durée, l’une des parties peut
exercer tel ou tel acte qui peut endommager une autre partie ou rendra impossible l’exécution
de la sentence. De même qu’avant la constitution du tribunal arbitral, on peut envisager
l’hypothèse de l’ignorance d’une partie de choisir son arbitre pour but dilatoire. On constate
qu’il y a toujours possibilité pour le débiteur de déplacer ses actifs ou ses biens pour
soustraire à l’exécution de la sentence ultérieure ou même pour endommager les preuves
importantes. Dès lors, afin d’assurer l’exécution de la sentence arbitrale et de minimiser le
dommage, les mesures provisoires ou conservatoires doivent être octroyées.
On peut constater que les notions « provisoire » et « conservatoire » se trouvent
souvent ensemble, bien que ces expressions comportent des mesures différentes selon chaque
système juridique ou selon les institutions d’arbitrage et dont le droit commercial international
1080
ne définit pas les termes. Pour les auteurs , « les mesures provisoires » signifient le
caractère de mesure ; c'est-à-dire « une décision provisionnelle qui ne lie pas l’arbitre ou le
juge appelé à statuer le fond ». Alors que « les mesures conservatoires » désignent « une
décision qui a pour objet de préserver une situation, des droits ou des preuves ».
Il faut observer que la saisine du juge des référés par une partie contractante dans ce
cas ne vaut pas la dénonciation de la clause compromissoire, et surtout ne vaut pas non plus
celle de la saisine du fond du litige. Il s’agit également de la coopération entre le juge
étatique et le juge privé pour la bonne administration de la justice et le bon déroulement de
l’instance arbitrale. En admettant que cette issue soit élargie, un contrat international peut
faire l’objet des mesures propres à appliquer tel ou tel contrat, nous ne pouvons pas pencher
sur les détails de tous les contrats. Alors nous limitons notre étude sur les mesures
généralement applicables aux contrats internationaux. Donc les hypothèses citées peuvent être
celles des contrats considérés aptes pour l’étude comparative. On interviendra tout d’abord les
mesures provisoires et conservatoires en matière d’arbitrage international en France (§1).
Nous étudierons par la suite les problèmes posées dans le cadre du droit thaïlandais (§2).

§ 1 : Mesures provisoires et conservatoires en droit français de l’arbitrage international.

599. Différente des dispositions thaïes, la loi française de l’arbitrage international ne


dispose pas spécialement des règles de mesures conservatoires et provisoires. Ainsi, ces
mesures proprement parlées ont été admises dans l’ordre juridique français par la doctrine et

1080
Ph. Fouchard, Traité de l’arbitrage commercial international, Paris : Litec, 1996, n° 1303.

447
la jurisprudence. En ce qui concerne la compétence de prononcer ces mesures, la doctrine
française a affirmé le principe de compétence concurrente qui accorde également ce pouvoir
aux juges étatiques et aux arbitres.

A. Les mesures prononcées par le juge.

600. On peut constater que dans le système juridique français, il y a une différence pour
déterminer la compétence de l’arbitre et le juge étatique de prononcer les mesures provisoires
et conservatoires.
Les mesures provisoires sont ordonnées en cas d’urgence en vertu de l’article 808 du
CPC sous conditions selon lesquelles il ne faut pas avoir une contestation sérieuse ou un
différend. Ceci est différent par rapport à la loi thaïe où, pour prononcer les mesures
provisoires, il n’est pas obligé d’avoir le cas d’urgence (art. 254 du CPC thaï). Car, il existe
aussi les « mesures provisoires en cas d’urgence » (art. 266 du CPC thaï) qui sont distinctes
des mesures provisoires en général. Dès lors, pour que le juge prononce les mesures
provisoires en cas d’urgence, le demandeur doit formuler sa demande selon les articles 254 et
266.
Alors que les mesures conservatoires en droit français ont pour but de préserver les
droits des parties ou d’éviter un préjudice imminent en vertu de l’article 809 du CPC. Ces
mesures sont destinées à entraîner l’indisponibilité des biens ou des actifs saisis. Ceci
rapproche au droit thaï mais il existe aussi les différences que l’on verra par la suite.

601. La compétence du juge d’octroyer les mesures provisoires ou conservatoires donnera


certaines incidences : d’une part, le prononcé des mesures provisoires ou conservatoires par le
juge ne porte pas atteinte à la compétence de l’arbitre de trancher le litige au fond. D’autre
part, ni la clause compromissoire ni la saisine du tribunal arbitral ne font échec à la
1081
compétence du juge pour octroyer une telle mesure . La Cour de cassation a ainsi affirmé
dans son arrêt : « L’existence d’une clause d’arbitrage n’interdit pas, même après la saisine

1081
Cf. G. Robin, « Mesures conservatoires et provisoires en matière d’arbitrage international : Le rôle du juge
d’appui », RDAI.2008.319, spéc. p. 321 ; O. Cachard, « Les mesures conservatoires dans l’arbitrage maritime »,
DMF.2004.220.

448
de la juridiction arbitrale, la mise en œuvre d’une saisie conservatoire dans les conditions
1082
requises pour que cette saisie soit autorisée par la loi applicable » .

602. La saisine du juge étatique pour prononcer les mesures. Cependant une fois que le
tribunal arbitral est constitué, le saisi du juge étatique pour ordonner les mesures provisoires
ou conservatoires doit être fait en tenant compte des faits que l’arbitre ne peut pas donner une
réponse adéquate dans certaines hypothèses telles que la situation d’urgence, de péril ou de
1083
déni de justice .
On peut envisager aussi le cas après la saisine du tribunal arbitral et que le demandeur
a déjà obtenu une mesure provisoire qu’il a demandée au juge, et que le défendeur l’a
contestée devant l’arbitre, dans cette hypothèse il reste à savoir si ce dernier peut-il suspendre
une telle injonction ? Sur cette question, un auteur a soutenu que l’arbitre n’a pas compétence
d’annuler, de modifier ou de suspendre les mesures conservatoires ou provisoires octroyées
1084
par le juge étatique . Mais nous partageons l’avis que l’arbitre puisse octroyer une autre
mesure provisoire contraire s’il se trouve approprié. Car c’est l’arbitre qui connaît bien le
dossier, les détails du différend et qui finalement devrait trancher le litige au fond. De
surcroît, on peut se demander pourquoi la demanderesse qui avait déjà obtenu une telle
mesure a demandé pour une nouvelle fois devant le tribunal arbitral les mesures provisoires
ou conservatoires ? C’est parce qu’elle n’a pas obtenu la mesure souhaitée ou la circonstance
a déjà changé.

603. La question peut se poser si l’octroi de mesures provisoire ou conservatoire par le juge
des référés national en vertu de l’article 31 du règlement Bruxelles I est subordonné dans
l’hypothèse où le demandeur n’obtiendrait pas gain de cause au fond de litige. Selon le
rapport Schlosser, des mesures provisoires portant sur le fond de la procédure d’arbitrage
peuvent être octroyées sur le fondement de l’article 31 à condition que l’objet du litige entre
dans le champ d’application du Règlement. On sait que le règlement Bruxelles I est destiné à

1082
Cass. com., 8 juin 1995, n° 93-11446, Bull. IV, n° 170, p. 98.
1083
D. Hascher, « Arbitrage du commerce international », Rép. D. Dr. internat., janv. 2005, n° 43.
1084
A. Reiner, « Les mesures provisoires et conservatoires et l’arbitrage international, notamment l’arbitrage
CCI », JDI.1998.853, spéc. p. 880-881 : il faut rappeler que l’auteur n’a penché que sur l’arbitrage de CCI.
Contra. Ph. Fouchard, Traité…, op.cit., n° 1330 : ces auteurs admettent que l’arbitre pourrait ordonner aux
parties de désister d’une mesure conservatoire préalablement obtenue d’une juridiction étatique. Il pourrait aussi
octroyer une autre mesure provisoire contraire aux mesures prises par le juge étatique. En cas de conflit entre les
deux mesures, c’est celle de l’arbitre qui est compétent pour statuer sur le fond qui l’emporte.

449
déterminer la juridiction compétente, dès lors que le fond du litige ne relève pas de ce
règlement, le juge ne peut pas traiter la demande relative à ceci. Ce principe a été affirmé par
l’arrêt de la Cour d’appel de 2010, elle a estimé que « si l’arbitrage est exclu du champ
d’application du règlement Bruxelles I, son article 31 sur les mesures provisoires peut fonder
la compétence de la juridiction française dans la mesure où l’objet du litige relève du champ
1085
matériel d’application dudit règlement » .

B. Les mesures prononcées par l’arbitre.

604. De nos jours la distinction entre les deux mesures, provisoires et conservatoires, n’est
pas toujours claire, par ailleurs il n’existe pas de classification universellement acceptée sur
1086
cette issue . La CJCE les a définies comme des mesures « destinées à maintenir une
situation de fait ou de droit afin de sauvegarder des droits dont la reconnaissance est par
1087
ailleurs demandée au juge du fond » . Certes, chaque État admet différemment les critères
de détermination les mesures qui peuvent être prononcées même par le juge avant ou après la
constitution du tribunal arbitral, alors il n’y a pas d’exceptions pour l’arbitre. Le dernier
semble envisager l’hypothèse plus compliquée que le premier.

605. En ce qui concerne les mesures provisoires, on admet en général la compétence de


l’arbitre d’ordonner de telles mesures. Afin d’octroyer ces mesures, celui-ci pourrait
prononcer une sentence partielle ou intérimaire mais il faut rappeler que les parties ont pu
faire valoir leur point de vue et que ces mesures ne portent pas atteinte aux droits des tiers.
Cependant l’octroi ces mesures en forme de l’ordonnance diffère de forme de la sentence dans
la mesure où la première peut être rapportée alors que la dernière ne peut l’être, c'est-à-dire
que lorsque l’arbitre a prononcé une sentence, celle-ci ne peut pas être rejugée sur ce qui est
déjà jugé par le même arbitre dans la même instance. Il s’agit là du problème de l’autorité de
la chose arbitrée.

1085
CA Paris, Pôle 1, ch. 4, 18 juin 2010, n° 09-223.47, SA Aegean Marine Petroleum, Gaz. Pal. 7-9 nov.
2010, p. 13, note D. Bensaude.
1086
V. Règlement des litiges commerciaux- Élaboration de dispositions uniformes sur les mesures provisoire
ou conservatoires, 36e session (4-8 mars 2002, New York), CNUDCI, n° 37.
1087
CJCE, 26 mars 1992, aff. C-261/90, Mario Reichert, RCDIP.1992.720, note B. Ancel ; JDI.1993.461, note
A. Huet ; RIDP.1994.160, note P. Marchal.

450
Alors que, certaines mesures conservatoires relèvent exclusivement de la compétence
du juge étatique de se prononcer, car il est nécessaire d’avoir l’intervention de puissance
publique. En raison de manquement du pouvoir coercitif des arbitres, la mise en œuvre de
1088
l’imperium pourrait se faire uniquement par l’État .

606. En France comme en Thaïlande, aucune disposition du CPC n’accepte de façon


explicite la compétence de l’arbitre sur ce point. Mais en France, il est admis en général que
1089
l’arbitre dispose du pouvoir de prononcer les mesures provisoires et conservatoires
(il est bien différent en droit thaï). Là aussi il convient de trancher la question des mesures
conservatoires selon lesquelles il est ardu d’admettre que le juge privé pourrait ordonner de
telles mesures qui relèvent exclusivement du pouvoir de juge étatique comme on le sait.
En consultant les règlements de l’institution d’arbitrage, on trouve que dans certaine matière,
ces règlements confèrent ce pouvoir à l’arbitre, même sous les conditions variées.
1090
Par exemple le règlement d’arbitrage de la Chambre arbitrale maritime de Paris ou de la
1091
CCI . A priori, dans la pratique, la partie destinataire de ces mesures s’est conformée en
raison de la crainte que le refus à ces mesures affecterait le tranchement du litige au fond et
1092
la sentence arbitrale à la fin . Cependant, si cette partie ne se conforme pas aux mesures
conservatoires prononcées par l’arbitre, le dernier ne pourrait pas procéder l’exécution forcée
car il ne dispose pas de pouvoir de coercition. C’est la tâche du juge étatique dans cette
hypothèse.

1088
Sur l’argument du pouvoir coercitif, Cf. A. Reiner, « Les mesures provisoires et conservatoires et
l’arbitrage international, notamment l’arbitrage CCI », op.cit., p.860 et s.
1089
Cf. Ph. Fouchard, Traité de l’arbitrage commercial international, op.cit., n° 1315 ; Cf. O. Cachard, « Les
mesures conservatoires…», op.cit., p. 227. Contra. J.-F. Poudret et S. Besson, Droit comparé de l’arbitrage
international, Bruylant, LGDJ, Schulthess, 2002, n° 606. Ces auteurs ne partagent pas l’avis favorable à la
compétence de l’arbitre d’ordonner ces mesures. Quand bien même le droit comparé nous montre que les pays
qui adoptent dans leur droit interne la Loi type de la CNUDCI ont fait le consensus en admettant que l’arbitre
détienne ce pouvoir. Comme l’on a déjà étudié dans la partie de droit thaï.
1090
L’article XI : « Les arbitres pourront rendre toute sentence d’avant dire droit, ordonner toutes mesures
provisoires ou conservatoires et toutes mesures d’instruction (…) exécutoires au besoin par provision ».
1091
Le règlement d’arbitrage de la CCI, l’article 23 : Mesures conservatoires et provisoires. Cet article permet
au tribunal arbitral d’ordonner « toute mesure conservatoire ou provisoire » qu’il considère appropriée. La portée
est les éventails sont très répandus.
1092
O. Cachard, « Les mesures conservatoires… », op.cit., p. 226.

451
607. En Thaïlande, les mesures conservatoires en matière de droit maritime doivent être
prononcées uniquement par le juge du TCPICI qui est compétent sur les différends du droit
maritime et du saisi conservatoire d’un navire. Pour les mesures relatives à ce dernier cas,
elles sont régies par la Loi sur le saisi conservatoire d’un navire B.E. 2534. Mais aucune
disposition de cette loi ne permet à l’arbitre de prononcer les mesures provisoires ou
conservatoires.

608. Pour le texte international tel que la Loi type de CNUDCI adoptée en 2006, celle-ci a
restructuré les dispositions des articles 17 en les plaçant sous un nouveau chapitre dont il
mentionne les mesures provisoires et les injonctions préliminaires, le libellé « conservatoire »
1093
employé depuis la version 1985 a été supprimé . Est-ce que cela signifie que l’arbitre n’a
plus de pouvoir de prononcer les mesures conservatoires ? La réponse doit être toujours
positive pour ces mesures compte tenu des critères employés par l’article 17 (2), d’ailleurs il
ne faut pas oublier que les objectifs de la Loi type sont pour élargir l’admission de telles
mesures dans les systèmes juridiques étatiques.
L’article 17 (2) a défini une mesure provisoire comme « toute mesure temporaire de
nature à empêcher, ou de s’abstenir de prendre des mesures susceptibles de causer un
préjudice immédiat ou imminent ; de fournir un moyen de sauvegarder des biens qui pourront
servir à l’exécution d’une sentence ultérieure ou de sauvegarder les éléments de preuve qui
peuvent être pertinents et importants pour le règlement du différend ». L’interprétation au
sens contraire selon lequel le prononcé des mesures conservatoires ne relève plus de
compétence du tribunal arbitral semble incompatible avec l’évolution de pratique de
l’arbitrage commercial international. Afin de justifier nos observations, il faut prendre en
considération l’article 17 H. (1), cet article nous démontre qu’une mesure provisoire
prononcée par un tribunal arbitral est reconnue comme ayant force obligatoire et qu’elle « est
exécutée sur une demande adressée au tribunal compétent ». Ce libellé montre que la Loi type
comprend toujours les mesures conservatoires et seul le juge peut contraindre une partie à se
conformer à de telles mesures ordonnées par l’arbitre. De surcroît, ce changement au sein de
1094
la Loi type affirme que la distinction des deux mesures est inutile à cet égard .

1093
Ce changement du terme a apparu dès le Rapport du Groupe de travail sur l’arbitrage et la conciliation sur
les travaux de sa 44e session (New York, 23-27 janvier 2006), CNUDCI.
1094
V. en ce sens C. Kessedjian, « Définitions et conditions de l’octroi de mesures provisoires », in Les
mesures provisoires dans l’arbitrage commercial international : Évolutions et innovations, Colloques, J.-M.
Jacquet et E. Jolivet (dir.), Paris : Litec, 2007, p. 73. L’auteur affirme qu’en réalité la distinction entre les

452
609. Dès lors que l’arbitre est compétent d’octroyer ces mesures, les questions sur la loi
applicable peuvent se poser à ce stade : d’une part, il s’agit de la loi qui sert de base à la
compétence de l’arbitre ; d’autre part, il reste à savoir quelle est la loi applicable aux mesures
prononcées ? Pour la première, l’opinion dominante désigne la loi d’arbitrage du siège. Alors
que pour la seconde, il faut rappeler que l’arbitre n’a pas de for, par conséquent les mesures
provisoires ne relèvent pas de la lex fori. A ce stade, la qualification de nature juridique de ces
mesures peut affecter la liberté de l’arbitre dans la mesure où si on les classifie dans le régime
procédural, on est d’accord que les parties sont libres de choisir la loi applicable à la
procédure, et que l’arbitre est plus libéral de les prononcer selon la loi procédurale. Tandis
que la qualification des mesures comme le fond du litige donnera un autre résultat : elles
relèvent de la lex causae, c'est-à-dire la loi étatique affecterait le prononcé de l’arbitre de
1095
telles mesures . Bien que les nouvelles législations sur l’arbitrage adoptées dans plusieurs
pays disposent dans le sens que les parties sont libres de choisir la loi applicable à la
procédure et faute de telle convention l’arbitre peut procéder à l’arbitrage comme il le juge
approprié, à notre avis la loi du siège de l’arbitrage semble être la solution plus logique dans
ce cas. Car, dans de nombreux des cas, les mesures provisoires ou conservatoires prononcées
sont destinées à contraindre des actifs ou des personnes qui se trouvent dans l’État du siège
d’arbitrage.

§ 2 : Évolution des problèmes de prononcer les mesures provisoires et conservatoires en


Thaïlande.

610. Tout d’abord, il faut constater que la terminologie juridique employée en droit thaï est
différente de celle de droit français (par exemple l’art. 688 du CPC). Pour les notions de
mesures « provisoires » ou « conservatoires », en droit procédural thaï les rédacteurs
emploient le terme qui désigne « provisoires » en français sans préciser le libellé
« conservatoire ». Le Code de procédure civil thaï utilise une seule notion « mesure
provisoire » qui peut être la mesure provisoire au sens littéral et peut être aussi la mesure
conservatoire. Pour savoir « quand » on emploie ce terme, il est nécessaire d’étudier les
détails de la demande au cas par cas. Mais on utilise le terme « conservatoire » au stade du

mesures provisoires et conservatoires est inopérante, car chaque mesure se concentre sur un aspect des mesures
visées, un critère formel pour les mesures provisoires d’une part et un critère fonctionnel pour les mesures
conservatoires d’autre part.
1095
Cf. O. Cachard, « Les mesures conservatoires… », op.cit., p. 227.

453
procès d’exécution. Il faut rappeler que ces mesures ont caractère provisionnel dont le
prononcé ne doit ni mettre fin au litige ni permettre de préjuger le litige au fond ; c'est-à-dire
si l’examen d’une demande a conquit la demanderesse, le juge ne doit pas ordonner les
1096
mesures .
Pour la partie de droit thaï, nous traiterons par chronologie de Lois applicables à
chaque époque, nous ne pouvons pas employer le même critère comme la partie de droit
français, car dans le système thaï il est clair que l’arbitre ne peut pas prononcer ces mesures.
Nous nous intéressons d’abord à la Loi sur l’arbitrage B.E. 2530 qui rapprochait du système
de droit anglais (A). Suite aux problèmes de l’ancienne Loi, le rédacteur a élaboré une
nouvelle loi pour régler et combler les lacunes apparues, c’est la Loi sur l’arbitrage B.E. 2545
(B).

A. L’article 13 de l’ancienne Loi sur l’arbitrage B.E. 2530.

611. L’ancienne Loi B.E. 2530 (1987) présentait plusieurs problèmes concernant les
mesures provisoires. L’article 18 dispose que
« Lorsqu’il est nécessaire de demander au tribunal étatique de convoquer les témoins
ou les preuves ; la présentation des témoignages oraux sous serment ; la demande de
documents ou d’autres objets ; les mesures provisoires pour sauvegarder l’intérêt de partie
pendant la procédure ; ou une demande de tranchement préliminaire un tel problème de
droit, l’arbitre pourrait faire la demande devant le tribunal compétent pour obtenir une telle
ou telle ordonnance. Lorsque le juge constate que cette procédure est possible, il devrait
prononcer une telle mesure selon la demande. Dans ce cas, il faut appliquer à cette demande,
1097
par analogie, les dispositions du droit procédural du for » .

Les deux problèmes principaux peuvent être envisagés, en premier lieu, on observe
que la loi n’a autorisé qu’à l’arbitre de formuler une demande devant la Cour pour obtenir les
mesures provisoires. C'est-à-dire que les parties n’ont pas pu faire la demande elles-mêmes.
Le problème était que comment les parties pouvaient obtenir une telle ordonnance avant que

1096
Il en va de même en droit français. Ce principe est tenu par l’arbitre également, celui-ci refuse de prendre
des mesures provisoires qui préjugent le fond. Cf. A. Reiner, « Les mesures provisoires et conservatoires et
l’arbitrage international… », op.cit., p. 885 et s.
1097
มาตรา ๑๘ แห่งพระราชบัญญัติอนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๓๐ บัญญัติว่า “ในกรณี ที่จาต้องอาศัยอานาจในการออกหมายเรี ยกพยาน ให้พยาน
สาบานตน ให้ส่งเอกสาร หรื อวัตถุใด ใช้วิธีการชัว่ คราวเพื่อคุม้ ครองประโยชน์ของคู่กรณี ในระหว่างการพิจารณา หรื อให้ช้ ี ขาดเบื้องต้นในปั ญหาข้อ
กฎหมายใด อนุ ญาโตตุลาการคนใดคนหนึ่ งอาจยื่นคาร้ องต่อศาลที่ มีเขตอานาจให้ศาลดาเนิ นกระบวนพิ จารณาเช่ นว่านั้น ถ้าศาลเห็ นว่ากระบวน
พิจารณานั้น หากเป็ นการพิจารณาของศาลแล้วศาลทาให้ได้ ก็ให้ศาลจัดการให้ตามคาร้ องนั้น ทั้งนี้ ให้นาบทบัญญัติแห่ งประมวลกฎหมายวิธีพิจารณา
ความแพ่งในส่ วนที่เกี่ยวกับการนั้น ๆ มาใช้บงั คับโดยอนุโลม”

454
le tribunal arbitral soit constitué ? Il semblait que cette disposition ne gouverne que le cas où
la demande a été faite postérieurement de nommer les arbitres. Alors, la solution proposée
pour la partie qui est subie le préjudice était de nommer son arbitre le plus tôt possible pour
que celui-ci puisse procéder à une telle demande devant le juge. Donc on n’avait pas besoin
1098
d’attendre la constitution du tribunal arbitral . Cependant une autre question peut se
poser : qu’en est-il si la clause compromissoire exige l’arbitre unique ? Car les parties
devraient le nommer ensemble. Si l’une d’elles a refusé ou même a essayé de faire un acte
quelconque pour retarder la nomination de l’arbitre, l’autre partie ne pourrait alors obtenir les
mesures provisoires.
En second lieu, on trouve que l’article 18 ne précisait pas sur le cas de procédure
arbitrale déroulante hors du royaume Thaï. Ainsi la question était de savoir s’il y avait la
différence dans la mesure où cet article ne s’appliquait qu’à la procédure d’arbitrage siégée en
Thaïlande ? Qu’en est-il lorsque l’arbitrage se déroulait à l’étranger mais qu’il soit nécessaire
d’obtenir les mesures provisoires en Thaïlande en raison de la situation des biens ou des actifs
dans ce pays ? Pour ces questions, plusieurs justifications peuvent être envisagées ; d’abord,
le droit comparé nous montre qu’en général les autres pays acceptent que le juge puisse
1099
octroyer ces mesures sans tenir compte du lieu de l’arbitrage . Ensuite, il faut rappeler
d’ailleurs que la Loi sur l’arbitrage B.E. 2530 appliquait aussi bien à l’arbitrage interne qu’à
l’arbitrage international, c'est-à-dire que l’on pouvait appliquer l’article 18 par l’extension à la
procédure déroulante à l’étranger. Et enfin, le fait que le juge doit prendre en considération,
autres que la nécessité et le raisonnement de la demanderesse, était que l’une des parties de
l’arbitrage relevait de la compétence de juridiction étatique thaïe en vertu de l’article 55 du
Code de procédure civile. L’article 55 stipule ainsi : « Le litige relatif aux droits ou
obligations selon le droit civil ; ou la requête, doit être introduit devant le tribunal qui est

1098
Ministère de la justice (Thaïlande), « Rapport de conférence des commissionnaires du développement de
l’arbitrage », 5e/2539, le lundi 5 août 1996, p. 8-9.
1099
V. par exemple en droit allemand, le tribunal allemand compétent peut ordonner les mesures provisoires
quand bien même le siège de l’arbitrage n’est pas en Allemagne (l’article 1025 (2) ZPO) ; en droit anglais, il est
de même qu’en droit allemand, car la section 2 (3) (b) The Arbitration Act 1996 admet aussi au juge anglais
d’octroyer les mesures provisoires pour l’arbitrage déroulant à l’étranger ou même si le siège de ceci n’est pas
encore déterminé. Cf. Jan K. Schaefer, « New solutions for Interim Measures of Protection in International
Commercial Arbitration : English, German and Hong Kong Law Compared », EJCL, vol. 2.2, August 1998.
L’article 1 (2) et l’article 9 de la Loi Modèle de la CNUDCI vont aussi en ce sens.

455
1100
compétent en vertu des dispositions de droit civil et du code de procédure civile » . C'est-
à-dire que le litige doit être pendant à la procédure devant le tribunal considéré compétent
pour ordonner les mesures provisoires. Ceci ne signifie pas que la procédure arbitrale devrait
se dérouler en Thaïlande.
On verra ensuite si la nouvelle loi apporte une solution différente de ceci.

B. Les solutions adoptées en droit actuel.

1) La Loi sur l’arbitrage B.E. 2545.


612. L’étude de droit comparé nous montre qu’il existe toujours les systèmes juridiques qui
n’admettent pas la compétence de l’arbitre de prononcer les mesures aussi bien provisoires
1101
que conservatoires . Car ils se concentrent uniquement sur le fait que l’arbitre ne dispose
pas de pouvoirs coercitifs, sans tenir compte de la pratique ou de la nécessité dans certaines
hypothèses. Certes, ces opinions ne conforment pas au caractère sommaire de la procédure et
de l’examen des preuves qui sous-tendent l’adoption de mesures conservatoires. On peut
observer que seul le juge étatique est compétent pour prononcer ces mesures.

613. En Thaïlande, la nouvelle Loi sur l’arbitrage B.E. 2545, comme on le sait, a été
influencée par la Loi modèle de la CNUDCI. L’article 16, 1er al. de la Loi thaïe stipule ainsi :
« Les parties, qui ont conclu la convention d’arbitrage, peuvent formuler la
demande, avant ou au cours du déroulement de la procédure arbitrale, devant le tribunal
compétent pour obtenir l’octroi des mesures provisoires ou conservatoires. Lorsque le juge
constate que cette procédure est possible, il devrait prononcer une telle mesure selon la
demande. Dans ce cas, il faut appliquer à cette demande les dispositions du droit procédural
1102
du for » .

1100
มาตรา ๕๕ แห่งประมวลกฎหมายวิธิพิจารณาความแพ่ง บัญญัติว่า “เมื่อมีขอ้ โต้แย้งเกิ ดขึ้น เกี่ ยวกับสิ ทธิ หรื อหน้าที่ของบุตตลใดตามกฎหมาย
แพ่ง หรื อบุคคลใดจะต้องใช้สิทธิ ทางศาล บุคคลนั้นชอบที่จะเสนอคดีของตนต่อศาลส่ วนแพ่งที่มีเขตอานาจได้ ตามบทบัญญัติแห่ งกฎหมายแพ่งและ
ประมวลกฎหมายนี้”
1101
Le Code de procédure civile italienne, l’article 818 dispose que « les arbitres ne peuvent pas autoriser de
saisies ni de mesures conservatoires ». De même que la loi sur l’arbitrage de 1992 de la Finlande qui interdit au
tribunal arbitral de prendre des mesures conservatoires ou provisoires qui sont de la compétence des juridictions
étatiques finlandaises.
1102
มาตรา ๑๖ วรรคแรก แห่งพระราชบัญญัติอนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติว่า “คู่สัญญาที่ได้ทาสัญญาอนุญาโตตุลาการไว้อาจยื่นคาร้ อง
ต่อศาลที่ มีเขตอานาจให้มีคาสั่ งใช้วิ ธิการชั่วคราวเพื่ อ คุม้ ครองประโยชน์ของตนก่ อน หรื อ ขณะดาเนิ นการทางอนุ ญ าโตตุ ลาการได้ถ ้าศาลเห็ นว่า
กระบวนพิจารณานั้นหากเป็ นการพิจารณาของศาลแล้วศาลทาให้ได้ ก็ให้ศาลจัดการให้ตามคาร้ องนั้น ทั้งนี้ ให้นาบทบัญญัติแห่ งกฎหมายวิธีพิจารณา
ความของศาลในส่ วนที่เกี่ยวกับการนั้นมาใช้บงั คับโดยอนุโลม”

456
Malgré la réforme de la loi sur l’arbitrage, force est de reconnaître que le système
juridique thaï n’autorise toujours pas à l’arbitre de prononcer les mesures provisoires.
Cependant, à la différence de la loi précédemment applicable, cette nouvelle loi permettrait
1103
aux parties de formuler la demande directement devant le juge compétent . Ainsi, il n’est
plus nécessaire de nommer l’arbitre ou les arbitres pour que ceux-ci fassent la demande
1104
devant la Cour. Le problème sur la lenteur de la procédure a été réglé à ce stade .
L’article 16 a admis implicitement le non incompatibilité avec la convention
d’arbitrage la demande de partie des mesures provisoires. Pourtant il n’a pas précisé que le
tribunal compétent d’octroyer ces mesures peut être le tribunal étranger, on peut retenir la
même solution employée par l’ancienne Loi thaïe B.E. 2530 ci-dessus. En effet l’article 9 de
Loi modèle ne dispose pas expressément cette possibilité, mais il est accepté en général que la
partie peut demander une telle mesure au juge étranger sans tenir compte du siège d’arbitrage
ou même du lieu du déroulement de procédure arbitrale n’est pas encore déterminé. La Loi
1105
type version adoptée en 2006 précise clairement sur ce point . Mais, à notre avis, afin de
prononcer telles mesures il faut avoir un lien suffisant entre le for et la demande en cause, à

1103
C’est la solution plus apte pour l’arbitrage, car l’arbitre ne devrait pas exercer comme un représentant de
l’une des parties même pas pour la partie qui l’a nommé. Lors de la procédure arbitrale, non seulement les
différends entre parties seront réglés mais l’arbitre devrait rendre également la justice. Si l’arbitre doit rendre un
service à une partie par exemple faire une demande des mesures provisoires contre une autre partie à la
procédure arbitrale, comment on peut lui faire confiance qu’il tranche le litige par la justice ? Les auteurs thaïs
qui ont souvent été nommés l’arbitre dans le litige interne et international ont suggéré que l’arbitre ne doit pas
prendre partie. L’arbitre qui accepte la nomination d’une partie ne veut pas dire qu’il fait partie de son équipe.
En effet l’arbitre n’est pas et ne joue pas le même rôle qu’un avocat, donc ce n’est pas sa tâche de défendre la
partie qui l’a choisi. Alors il faut être clair pour toutes les parties que l’arbitre ou les arbitres est (sont)
indépendant(s), garant(s) de leurs différends, lesquels seront tranchés en toute justice (Prof. Kanung Luchai,
« Les solutions pour le déroulement de procédure arbitrale », TAI Journal of Arbitration, vol. 3, 2008, ADR
Office, Office of the Judiciary, p. 216-218 ; Juge Jaran Pakdeetanakoon, « Rapport de la conférence : le
développement et l’encouragement le système de l’arbitrage en Thaïlande », Office of the Judiciary, 1994, p.
50). D’ailleurs, le problème de neutralité de l’arbitrage permet à la contestation qui peut être un litige devant la
Cour pour plusieurs années, certes, les principes de mode de règlement des litiges par l’arbitrage tels que la
rapidité, l’économie de dépenses, seront détruits.
1104
En effet la Loi de l’arbitrage B.E. 2530 (1987) a été rédigée après l’application de la première version de
Loi modèle de CNUDCI. Mais il semblait que le rédacteur hésitait de suivre l’orientation de Loi modèle, c’est la
raison pour laquelle l’ancienne loi a été inspirée par la loi anglaise. Même au cours de rédaction la nouvelle loi,
le législateur ne croyait pas encore au système établi par la Loi modèle. Donc on peut toujours constater l’ombre
de l’ancienne loi vers certaines dispositions.
1105
La version adoptée par la Commission à la 39e session en 2006 de la Loi type, l’article 17 J, relatif aux
mesures provisoires octroyées par les tribunaux étatique à l’appui de l’arbitrage, dispose ainsi : « Un tribunal
dispose, pour prononcer une mesure provisoire en relation avec une procédure d’arbitrage, qu’elle ait ou non
son lieu sur le territoire du présent État, du même pouvoir que celui dont il dispose en relation avec une
procédure judiciaire. Il exerce ce pouvoir conformément à ses propres procédures en tenant compte des
particularités d’un arbitrage international ». A ce stade, force est de constater que le tribunal d’un État pourrait
ordonner ces mesures sans tenir compte si la procédure arbitrale se déroule sur son territoire ou non. V. en ce
sens CNUDCI, « Note explicative du secrétariat de la CNUDCI relative à la Loi type de la CNUDCI sur
l’arbitrage commercial international de 1985 telle qu’amendée en 2006 », n° 30.

457
titre d’exemple, les actifs destinataires de mesures se trouvent dans la juridiction dudit juge.
En pratique, comment on peut être sûr que les mesures provisoires ordonnées par le juge
étranger peuvent être exécutées sur les biens en Thaïlande ? (Sous réserve que celles-ci ont
été prononcées sous forme de sentence au sens de la Convention de New York ; ou ont été
qualifiée de sentence selon le droit thaïlandais de l’arbitrage).

614. Un autre débat qui nous intéresse est fondé sur la dernière phrase de l’article 16, 1er al.
de la Loi sur l’arbitrage, ceci nous renvoie à l’application de dispositions du Code de
procédure civile relatif aux mesures provisoires. Il paraît que les dispositions des deux lois ne
sont pas conformes. On sait que le code ne dispose pas des stipulations qui s’appliquent aux
mesures ordonnées avant l’assignation ; c'est-à-dire afin d’obtenir telles mesures il est obligé
1106
d’introduire le litige devant le tribunal étatique. Un auteur a suggéré de réviser le texte
du Code de procédure civile pour qu’il puisse être appliqué à tous les cas, car il existe une
disposition permettant de faire une telle demande devant le TCPICI mais elle se limite aux
différends relatifs au commerce international et propriété intellectuel.

615. De nos jours, la loi thaïe n’admet toujours pas la compétence de l’arbitre de prononcer
ces mesures. Comme l’on a déjà cité le raisonnement du législateur. Certes, l’arbitre ne
dispose pas de l’imperium, mais à ce stade, voyons la différence entre la question de la
compétence d’octroyer et celle de l’exécution des mesures en cause. S’agissant du souci de la
force obligatoire de mesures provisoires ordonnées par l’arbitre, les chiffres de la pratique
1107
affirme que les parties les respectent jusqu’à 95 pourcent . C’est une raison
psychologique, si cette partie refuse de se conformer, les arbitres lui donneront probablement
tort à la finale ; c’est le résultat qui la fait craindre.
En effet, par rapport au juge, l’arbitre devrait connaître bien le fond des différends, les
preuves et les témoins plutôt que le premier, si l’on admet à l’arbitre ce pouvoir, il serait plus
convenable surtout pour le cas d’urgence. Ceci permet aussi à évoluer le système d’arbitrage
pour devenir le mode de règlement autosuffisant. On peut penser par ailleurs que le prononcé
par le juge de ces mesures semble contraire au principe de l’arbitrage relatif à la

1106
N. Kijsintopchai, Les mesures provisoires dans l’arbitrage commercial international, Bangkok :
Université de Chulalongkorn, 2004, p. 181.
1107
L’avis de M. Gerold Hermann, Le secrétaire général de CNUDCI à l’occasion de discussion de table ronde
sur le projet de loi sur l’arbitrage de Thaïlande B.E. …, Ministère de la justice, septembre 1996, p. 29-30.
V. en ce sens A. Reiner, « Les mesures provisoires et conservatoires… », op.cit., p. 861.

458
1108
confidentialité des secrets commerciaux , car la demande devant le tribunal étatique
permet aux autres tels que les fonctionnaires du tribunal, d’être au courant de ces secrets.
Certes, on ne peut nier le fait que quand bien même l’arbitre peut ordonner ces
mesures, mais il est nécessaire d’obtenir l’exécution par le juge dans certains cas : des
mesures conservatoires. Alors les parties doivent décider prudemment quel tribunal, étatique
ou arbitral, est le mieux placé pour que la procédure se déroule plus rapide avec le moindre
coût afin que la protection soit plus efficace notamment en cas d’urgence.

616. En effet, la Loi type sur l’arbitrage commercial international a été restructurée dans la
partie de mesures provisoires et a été adoptée en 2006 ; elle consacre les nouveaux textes pour
la reconnaissance et l’exécution des mesures provisoires. Ces dispositions peuvent inspirer les
lois d’autres pays. A notre avis, les amendements de texte de Loi sont moins ardus que celui
du Code de procédure civile et en particulier s’agissant de compétence de l’arbitre, la phase
spéciale qui ne touche pas les dispositions du Code de procédure civile ; alors nous proposons
ici, compte tenu de la justice et de l’objectif poursuivi de l’arbitrage, il faut réviser la Loi sur
l’arbitrage en élaborant le texte relatif au pouvoir de l’arbitre d’octroyer les mesures
provisoires, y compris la reconnaissance et l’exécution. Comme le dit un auteur : « l’arbitre
est lui-même le juge du fond, alors il possède une compétence-compétence pour statuer sur
1109
toute mesure liée au fond » . Cette proposition a pour but de rendre l’autosuffisant au
système arbitral thaï. On sait que l’Institut de l’arbitrage, Ministère de justice, essaie de
promouvoir la Thaïlande à devenir le centre de l’arbitrage international dans l’Asie du Sud-
Est, mais force est de reconnaître que les conseillers juridiques s’adressent normalement aux
parties de fixer le lieu de l’arbitrage dans un pays dont le droit reconnaît à l’arbitre les
pouvoirs les plus larges en matière de mesures provisoires. N’est-il pas temps de reconsidérer
et réviser la Loi sur l’arbitrage sur cette issue ?

2) Les règles procédurales du TCPICI.


617. Le Tribunal central de la propriété intellectuelle et du commerce international est
compétent sur les différends relatifs à l’arbitrage commercial international et propriété
intellectuelle. En vertu de l’article 30 de Loi portant création du TCPICI et ses règles

1108
Sauf le cas devant le TCPICI dont ses règlements contiennent la stipulation sur la confidentialité des
secrets commerciaux entre les parties contractantes.
1109
C. Kessedjian, « Définitions et conditions de l’octroi… », op.cit., p. 79.

459
procédurales B.E. 2539, le Président du TCPICI approuvé par le Président de la Cour suprême
Dika pourrait ordonner les règles applicables aux procédures et aux écoutes des preuves
devant le TCPICI. Donc ce sont ces règles qui concernent directement les contrats
internationaux, et le terme « le droit procédural du for » au sens de l’article 16 1er al. de la loi
sur l’arbitrage signifie les règles procédurales du TCPICI à ce stade, cependant il y a aussi des
limites. A la différence du Code de procédure civile, les règlements du TCPICI permettent à
ce tribunal d’octroyer les mesures provisoires et conservatoires avant l’assignation du litige. Il
s’agit des mesures d’injonction de Common Law, mais que ces règles ne disposent pas des
mesures prononcées pendant le procès ; c'est-à-dire que les dernières relèvent toujours des
dispositions du Code de procédure civile.

618. Il faut cependant constater que les termes employés dans ces règles procédurales
(l’art. 17, 1er al.) nous montrer qu’après avoir obtenu ce que la demanderesse souhaite, si elle
n’assigne pas la défenderesse devant le tribunal dans les délais de 15 jours, les mesures
1110
provisoires ordonnées seront annulées . Par ailleurs, la défenderesse a le droit de faire une
demande contre la demanderesse devant ce tribunal pour les compensations du préjudice
causé par telles mesures. En revanche si le demandeur a assigné le défendeur, les délais de
mesures en cause seront prolongés jusqu’à ce que la Cour ordonne autrement selon
1111
la demande du premier (l’art. 18) . Alors, même si aucune disposition de droit thaï
n’admet pas expressément que la demande des mesures provisoires devant le juge étatique
ne porte pas atteinte à la convention d’arbitrage, il faut dire que la pratique de l’arbitrage thaï
n’est pas contraire à celle d’autres pays. Dès lors, on peut dire qu’il n’est pas nécessaire
d’assigner une autre partie devant le TCPICI après cette demande en question, les parties
1112
peuvent poursuivre le procès d’arbitrage comme prévu . Mais il faudrait faire une

1110
ข้อ ๑๗ วรรคแรก แห่ง ข้อกาหนดคดีทรัพย์สินทางปั ญญาและการค้าระหว่างประเทศกลาง พ.ศ. ๒๕๔๐ “ในกรณี ที่ศาลมีคาสั่งอนุญาตตามข้อ
๑๓ ถ้าผูข้ อมิได้ฟ้องคดีเกี่ยวกับคาขอที่มีคาสั่งอนุญาตนั้นภายในสิ บห้าวันนับแต่วนั ที่ศาลมีคาสั่งหรื อภายในระยะเวลาที่ศาลกาหนด ให้ถือว่าคาสั่งนั้น
เป็ นอันยกเลิกเมื่อครบกาหนดดังกล่าว”
1111
ข้อ ๑๘ แห่ง ข้อกาหนดคดีทรัพย์สินทางปั ญญาและการค้าระหว่างประเทศกลาง พ.ศ. ๒๕๔๐ “ในกรณี ที่ศาลมีคาสั่งอนุญาตตามข้อ ๑๓ ถ้าผู้
ขอฟ้ องคดีเกี่ยวกับคาขอที่มีคาสั่งอนุญาตนั้นภายในสิ บห้าวันนับแต่วนั ที่ศาลมีคาสั่งหรื อภายในระยะเวลาที่ศาลกาหนด ให้คาสั่งอนุญาตนั้น (...) มีผล
ใช้บงั คับต่อไป เว้นแต่ศาลจะมีคาสั่งตามคาขอของจาเลยให้ยกเลิกหรื อเปลี่ยนแปลงเป็ นอย่างอื่น (...)”
1112
Il faut noter qu’il n’y a pas de mesures provisoires « avant » l’assignation, alors pour la demande de ces
mesures selon le Code de procédure civile, la partie demanderesse doit assigner devant la Cour civile, comme
l’on a vu stipuler l’article 255 dans le sens que « la prise en considération d’une demande selon l’article 254
(mesures provisoires) doit être entendu d’après le juge que la demande initiale est recevable avec les moyens et
des prétentions suffisantes de demanderesse pour octroyer les mesures provisoires demandées ».

460
composition du tribunal arbitral avant le délai de 15 jours. Par ailleurs, comme on le sait,
l’article 16 de la Loi de l’arbitrage B.E. 2545 permet aux parties de demander au juge avant
ou pendant le déroulement de la procédure arbitrale les mesures provisoires.
Compte tenu de la demande des mesures en cause, les règles procédurales du TCPICI
disposent au juge d’appliquer à cette demande les dispositions relatives aux principes de
confidentialité des secrets commerciaux telles que la procédure privée devant la Cour et
1113
l’interdiction de publicité ; le procès d’examiner les témoins par vidéoconférence .

1113
ข้อ ๑๙ แห่ง ข้อกาหนดคดีทรัพย์สินทางปั ญญาและการค้าระหว่างประเทศกลาง พ.ศ. ๒๕๔๐ “ให้นาบทบัญญัติวา่ ด้วยการพิจารณาลับและการ
ห้ามโฆษณาตามข้อ ๒๔ และการสื บพยานบุคคลโดยระบบการประชุมทางจอภาพตามข้อ ๓๒ มาใช้แก่การพิจารณาตามข้อ ๑๓ และข้อ ๑๕ ถึงข้อ ๑๘
โดยอนุโลม” On peut constater que l’ordonnance du juge devra être prononcée publiquement devant la Cour.

461
619. Conclusion du chapitre. Force est de constater que l’appréciation de la compétence
arbitrale par l’ordre chronologique a pour but de donner à la clause compromissoire la plus
grande efficacité possible. Par ailleurs cette solution pourrait éviter l’ouverture du procès par
l’une des parties, à des fins dilatoires, devant le tribunal étatique. Quoiqu’il en soit, une fois
que les parties concluent la clause d’arbitrage, il faut tenir compte de la volonté réelle de se
compromettre et si la clause est valide, le juge devra se déclarer incompétent en renvoyant les
parties à la procédure arbitrale.
Après avoir étudié à titre comparé, on trouve que même si la Loi thaïe sur l’arbitrage a
été inspirée de la Loi type de CNUDCI, dit plus moderne qu’à l’époque, mais il existe
toujours certaines différences par rapport au droit français. On admet que la jurisprudence
thaïe est favorable à l’arbitrage, les principes importants dans cette matière sont reconnus
aussi dans l’ordre juridique thaï. Pour que le mode de règlement des litiges par l’arbitrage thaï
soit plus efficace et reconnu par les investisseurs étrangers, certaines règles de droit devraient
être révisées ; la règle gouvernementale relative à la personne morale de droit public et
entreprises étrangères, l’admission du prononcé par l’arbitre des mesures provisoires. On
accepte que le problème devienne plus délicat à tracer lorsque l’une des parties est la personne
de droit public, de même qu’en France, le débat sur cette issue est très animé jusqu’à nos
jours. Mais l’idée de laisser le gouvernement décider au cas par cas pourrait faire obstacle au
développement de l’arbitrage commercial international thaï et aussi le souci d’exercer le
pouvoir arbitraire.
En ce qui concerne les mesures provisoires, là aussi, on constate l’hésitation du
rédacteur thaï notamment en ce qui concerne la compétence de l’arbitre d’ordonner ces
mesures. Certainement, il n’est pas nécessaire de réviser toutes les lois thaïes pour qu’elles se
rapprochent des lois occidentales, mais si l’ignorance du changement donnera au système de
l’arbitrage thaï archaïque à l’égard des investisseurs, là encore, l’objectif de la Thaïlande de
devenir le centre de l’arbitrage commercial international dans l’Asie du Sud-est est difficile à
réaliser.

462
620. Conclusion du Titre. Les juridictions compétentes en matière contractuelles sont de
deux ordres : soit étatiques soit arbitrales. Après avoir étudié la méthode de détermination de
compétence de chaque mode, on constate que le mode consensuel de règlement des litiges
semble plus aisé que le mode judiciaire, sous réserve de difficultés de déterminer la notion de
l’inapplicabilité et de la nullité manifeste de la convention d’arbitrage. Ces notions sont
importantes pour que le juge étatique déclare incompétent lorsque l’arbitrage a été
manifestement choisi, l’arbitre ayant la compétence de sa compétence. On sait aussi que
certaines mesures procédurales ont été soulevées aussi bien devant le juge étatique que devant
l’arbitre. En ce qui concerne la juridiction étatique, plusieurs lieux qui présentent un lien avec
les parties ou la situation du litige ont été employés pour déterminer la compétence du juge.
Parmi ceux-ci, le domicile du défendeur est toujours le lieu plus commun pour assigner,
notamment le cas de parties faibles. En droit thaï, même si l’on ne consacre pas encore de
règles pour les parties faibles en matière internationale, le domicile du défendeur est
traditionnellement retenu. En espérant que le principe de protection des parties faibles dans
les règles de compétence juridictionnelle sera adopté également au sein de l’Association des
Nations du Sud-est Asiatique (ASEAN).
Après les règles de compétence directe, il convient d’étudier la question de la
réception des décisions et vice versa. En présence d’une décision étatique hors Union
européenne les règles françaises et de nature jurisprudentielle. En Thaïlande également.
Cependant pour le cas de la sentence arbitrale internationale, on verra que la réception dans
l’ordre juridique étatique est plus simple grâce à l’instrument international de simplification
les règles dans ce domaine.

463
464
Titre Second

RECEPTIONS DES DECISIONS ETRANGERES.

621. La partie relative aux effets des décisions étrangères est considérée, à notre avis,
comme la partie la plus importante. En effet, comment peut-on obtenir justice, si, finalement
le jugement ou la sentence rendu(e) ne peut pas être reconnu(e) ou exécuté(e) dans le pays où
se trouvent les biens de débiteur ? Ne serait-ce pas, au terme d’une procédure, une démarche
coûteuse et inutile ? Ce sera donc l’une des premières questions qui sera posée par les
investisseurs étrangers. Il appartient alors à des missions conseils de se pencher sérieusement
sur ce problème avant d’exposer à son client la situation que va entraîner la possibilité de
reconnaissance ou d’exécution des décisions dans un pays de son cocontractant. Il faut dire
que ce sujet est bien compliqué en raison de la différence de droit selon chaque système
juridique. Dans la plupart des pays, il n’y a pas de loi écrite pour régler ce problème, on fait
appel alors à la jurisprudence. Mais il est possible que la pratique est incertaine, il s’agit là du
problème de la sécurité juridique. On connait bien le problème de reconnaissance et
d’exécution des décisions étrangères dans chaque pays, notamment dans des pays en
développement, comme nous avons toujours affirmé, c’est la prévisibilité qui est
indispensable en matière des contrats commerciaux internationaux. Nous admettons que ce
sujet est délicat puisqu’il peut porter atteinte à la souveraineté étatique, force est de
reconnaître que ces pays ne font pas confiance aux lois étrangères, pour ne pas dire qu’ils les
ignorent complètement, en particulier la loi des pays occidentaux. A l’inverse, pour les États
développés dont les systèmes juridiques sont plus avancés, comment leurs juges peuvent
reconnaître ou exécuter la décision étrangère d’origine d’un pays où l’efficacité de la loi est
douteuse ?

622. Il semble que les conventions internationales d’unification les droits en la matière est
la meilleure solution, tel est le cas de la Convention de Bruxelles de 1968 ; la Convention de
Lugano pour les jugements judiciaires ; la Convention de La Haye sur la reconnaissance et
l’exécution des jugements étrangers en matière civile et commerciale ; et la Convention de
New York de 1958 en matière de l’arbitrage. On admet que ces instruments internationaux
sont bien utiles, car ils permettent la libre circulation des décisions étrangères mais
uniquement entre les États membres.

465
Il existe toujours les relations juridiques en dehors du cadre conventionnel ; par
exemple la Thaïlande et la France qui n’ont aucun accord international sur la reconnaissance
et l’exécution des jugements étrangers. Alors la reconnaissance ou l’exécution des jugements
français en Thaïlande, ou vice versa, doit être soumise aux règles de droit commun qui sont
assez compliquées à cause de la lenteur du procès.

623. En ce qui concerne le terme employé au titre de cette partie, afin d’englober un
jugement et une sentence arbitrale, on emploie à ce stade une « décision » au sens large. Nous
verrons que la notion de décision pourrait comprendre d’autres actes publics émanant d’une
autorité étatique. Alors qu’une sentence arbitrale est considérée comme un acte privé, mais
reconnue par l’État ; quand bien même l’arbitre est une personne privée n’ayant pas de
pouvoir étatique propre de décision, c’est à une règle étatique qui reconnait à sa sentence de
produire un effet juridique dans un État. Cependant on ne peut pas dire que la sentence
arbitrale est de même nature du jugement car elle n’a pas doté de l’autorité qui fonde la
vocation à la reconnaissance dans le conflit de juridictions. Pour cette raison, l’ordre juridique
du for applique la méthode de reconnaissance propre à chaque type de décision. On verra que
même si on classe une sentence arbitrale comme une décision, la méthode visée est celle de la
reconnaissance des situations ; la méthode de règles de conflit de lois (droit commun) ou de
règles matérielles (droit conventionnel).
Nous verrons tout d’abord la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers
(Chapitre I). On sait que dans le commerce international le mode alternatif de l’arbitrage
joue un rôle considérablement important, on verra que la reconnaissance et l’exécution des
sentences arbitrales internationales seraient plus faciles que celles des jugements étatiques.
Nous consacrerons dans le second chapitre une étude de la reconnaissance et l’exécution de la
sentence arbitrale (Chapitre II).

466
Chapitre Premier
RECEPTION DES JUGEMENTS ETRANGERS.

624. Admettons que chaque État devrait préserver de prime abord la souveraineté étatique
sur son territoire, car la souveraineté est considérée comme l’un des éléments indispensables
qui comporte un État souverain ; le territoire, le gouvernement, le peuple, et la souveraineté.
Comme on le sait, hormis le pouvoir législatif et administratif, un autre pouvoir souverain
« interne » a été exercé à travers le juge étatique, c’est un pouvoir judiciaire. Dès lors, il n’est
pas étonnant d’envisager l’opinion selon laquelle un juge d’un tel État n’est pas obligé d’être
lié par une décision d’un juge étranger. Ceci donne lieu aux difficultés de l’admission de la
reconnaissance ou l’exécution des jugements étrangers notamment en matière civile et
commerciale. Certes, l’État souverain devrait sauvegarder sa souveraineté, mais il est vrai que
cette position peut être aussi un obstacle d’une coopération dans la communauté
internationale.
Force est de constater qu’à l’heure actuelle, la nécessité d’avoir le texte sur la
reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers se manifeste de plus en plus dans tous
les pays qui souhaitent commercialiser avec d’autres pays. Alors, pour le but du commerce,
l’État est invité à limiter l’exercice de son pouvoir souverain dans certains cas en espérant la
même réaction réciproque d’autres États. Nous verrons par la suite que la reconnaissance et
l’exécution des jugements étrangers ne sont pas simples comme celles des sentences arbitrales
étrangères.
La pratique sur la reconnaissance et d’exécution des jugements étrangers admise par la
communauté internationale pourrait être classée en quatre types : le jugement étranger peut
produire l’effet dans un autre État comme le jugement du for, donc le juge du for pourrait
prononcer une décision exequatur sans assigner la nouvelle instance ; le jugement étranger
produit l’effet en plein droit dans un autre État, mais que cet État préserve le droit de
retrancher ce litige ; le jugement étranger obtiendra l’exequatur en raison de la courtoisie
internationale ; et le jugement étranger ne produit l’effet dans un autre État qu’en tant que
preuve prima facie d’une obligation, c'est-à-dire que le demandeur est obligé d’assigner un
nouveau litige devant la Cour.
On verra que l’État a liberté de choisir un moyen de reconnaissance et d’exécution qui
peut être diverse dans chaque système juridique. C’est pourquoi la reconnaissance et
l’exécution des jugements étrangers ne sont pas faciles pour les investisseurs et c’est aussi la

467
raison pour laquelle on a besoin de règles uniformes au niveau international sur cette issue.
La France est un État contractant de plusieurs conventions internationales de ce genre,
1114
alors que la Thaïlande ne participe à aucun instrument international dans ce domaine .
Nous étudierons par la suite quelles règles les juges thaïs doivent en tenir compte lorsqu’ils
envisagent la reconnaissance ou l’exécution des jugements étrangers.

625. La notion de reconnaissance est initialement distinguée de celle d’exécution, comme


on le sait, une décision étrangère peut obtenir la reconnaissance pure sans exécution dans
l’État requis, alors que l’exécution d’un jugement étranger se réalise toujours avec cette
reconnaissance. Il semble que la reconnaissance en droit commun est réservée aux jugements
déclaratifs ou relatifs à l’état et à la capacité des personnes. L’intervention de l’autorité de
l’État du for n’est pas nécessaire pour la reconnaissance. En revanche, il est indispensable
d’avoir une telle intervention pour l’exécution d’un jugement ; par exemple en France il faut
avoir l’exequatur prononcé par le juge compétent, ou en Thaïlande il faut avoir un jugement
pour l’exécution.

626. Efficacité substantielle isolée de l’autorité de chose jugée. On verra que le jugement
étranger peut produire des effets indépendamment de l’exequatur, il est nécessaire de
comprendre la distinction, son efficacité substantielle de son autorité. Autrement dit, bien que
le jugement possède lui-même l’autorité de chose jugée, son efficacité substantielle dans un
pays tiers devrait être distinguée de la première. Cela permettrait à justifier la reconnaissance
à certains jugements étrangers leurs effets de plano. D’après Mme D. Alexandre, les
jugements étrangers rendus en matière d’état et de capacité sont simplement efficaces en
France, et qu’ils n’ont pas d’autorité de chose jugée par eux-mêmes. Mais ces jugements
« n’ont qu’une certaine efficacité qui peut être contestée tant que le juge français n’a pas
1115
reconnu leur autorité de chose jugée après un contrôle de régularité » . L’auteur a affirmé
par ailleurs que cette solution pourrait également appliquer aux jugements prononcés en
d’autres matières, quel que soit leur nature du jugement : constitutive, déclarative ou

1114
Pour la Thaïlande, il y a la possibilité que le gouvernement ratifierait les conventions internationales en
matière de l’environnement maritime tel que la Convention internationale pour l’établissement d’un fond
international pour le dédommagement de la pollution de l’huile (FUND 1971) et la Convention sur la
responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (CLC 1969). Ce serait la
première fois que les relations privées internationales impliquées avec la Thaïlande seront soumises dans le cadre
conventionnel, notamment la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers.
1115
D. Alexandre, Les pouvoirs du juge de l’exequatur, Paris : LGDJ, 1970, n° 165.

468
condamnation. L’efficacité de plano doit être reconnue aussi pour les jugements étrangers en
matière patrimoniale, car il faut s’attacher uniquement à la nature des effets que l’on veut
1116
faire produire . Dans ce cas là, même s’il ne s’agit pas de l’exequatur, mais le contrôle de
régularité s’impose toujours en raison du caractère immuable de l’affirmation du juge
étranger. Selon l’auteur, seul un simple contrôle de régularité par le juge saisi pour la question
principale est suffisant pour reconnaître l’autorité de chose jugée sans nécessité de recourir au
1117
procès de l’exequatur .
Par ailleurs, on verra que les effets des jugements étrangers se distinguent aussi des
attributs qui sont parfois appelés par les auteurs effets processuels.
Nous étudions tout d’abord la reconnaissance des attributs de jugements étrangers
(Section I), avant de pencher sur la reconnaissance des effets de jugements étrangers qui font
l’objet des contrôles de régularité internationale (Section II).

Section I
Reconnaissance des attributs de jugements étrangers.

627. Force est de constater qu’un jugement étranger n’a doté de valeur normative que dans
son ordre juridique. Par conséquent afin qu’un tel jugement étranger puisse produire les
conséquences juridiques dans un pays du juge du for, il est nécessaire d’avoir l’intervention
des règles du for et certains contrôles des autorités étrangères. Il est vrai que tous les
jugements étrangers n’ont pas tous besoin d’exequatur pour être reconnus, cependant il est
nécessaire pour certains d’avoir la procédure exequatur afin de leur conférer la force
exécutoire. Une fois que ce jugement étranger a été reconnu par le juge, son efficacité
substantielle sera aussi devant ce dernier.

628. La question peut être posée si tous les jugements étrangers peuvent recevoir exequatur
en France sous les mêmes conditions ? Il nous convient tout d’abord de déterminer la notion
de jugement étranger. En effet les décisions concernées sont celles qui ont été prononcées par
une souveraineté étrangère. Par ailleurs la Cour de cassation a fermement affirmé que
« constitue une décision pouvant recevoir exequatur toute intervention du juge qui produit

1116
Id., n° 159.
1117
Id., n° 154 et s ; n° 166.

469
1118
des effets à l’égard des personnes ou sur les biens, droits ou obligations » (§1). On
interviendra ensuite les attributs de jugements étrangers (§2).

§ 1 : La détermination des décisions étrangères.

629. Après avoir étudié la notion du jugement étranger en droit français (A), nous
étudierons ensuite la notion du jugement retenue par le droit thaï (B).

A. La notion du jugement étranger en droit français.

630. Il est indispensable de commencer par la détermination de la notion du jugement,


certaines décisions ne sont pas considérées comme un jugement alors que d’autres peuvent
l’être. L’importance de cette qualification réside dans le fait qu’il y a des méthodes diverses
de reconnaissance de jugement et d’autres actes ou décisions, certes on parle ici du terme
reconnaissance au sens large. Un jugement étranger serait subordonné à la méthode de
reconnaissance de l’efficacité substantielle, tandis que d’autres actes tel qu’un acte privé serait
soumis à l’une des méthodes de conflit de lois.

631. Un jugement est « le résultat de cette action, la décision prise en tant qu’acte
juridique, désigne, en ce sens générique, toute décision de justice ; englobe toutes les
décisions de caractère juridictionnel (définitif ou avant dire droit, contentieux ou gracieux,
etc.) émanant d’un juge (au sens générique), c'est-à-dire même les arrêts de la Cour de
1119
cassation ou des cours d’appel (…) » . Dès lors, on peut dire qu’un jugement est un acte
juridique qui investit les droits aux parties du litige, autrement dit, c’est un acte qui vient
affirmer de façon concrète les droits stipulés dans la loi. Cependant la qualification de
jugement étranger n’est pas une tâche facile, beaucoup de difficultés peuvent être envisagées
car certains actes donnent lieu à plusieurs qualifications (1). Afin d’accomplir cette tâche,
nous verrons les critères qui peuvent aider à déterminer le jugement et éliminer ce qui ne l’est
pas ; ils sont fondés sur les effets produits par décisions en cause (2).

1118
Cass. 1er civ., 17 octobre 2000, Sté Barney’s Inc, JDI.2001.859, note Cuniberti ; RCDIP.2001.121, note
J.-P. Rémery et H. Muir Watt ; D. 2001.688, note J. Vallens.
1119
Vocabulaire juridique Capitant, « Jugement », sens II.

470
1) Les difficultés de qualification des jugements étrangers.
a. L’ambigüité de qualification des actes juridiques impliqués.
632. La qualification des actes est pour savoir si un tel ou tel acte est considéré comme un
jugement, il est indispensable afin de reconnaître ou d’exécuter un acte étranger dans le for.
Certes, tous les actes publics étrangers ne seraient qualifiés de jugement. Le terme employé
dans la décision de la Cour elle-même peut confondre la notion de jugement avec d’autres
notions. Certains actes sont appelés jugements, mais ils ne sont pas des jugements à
proprement parler. Il est vrai que certains actes n’ouvrent pas le débat à qualifier tels qu’un
jugement de condamnation à faire ou à donner quelque chose, un jugement d’annulation d’un
acte, etc. Pourtant, la qualification de jugement étranger n’est pas aisée car il y a plusieurs
actes qui sont difficiles à classer ; un acte public, un contrat privé, un acte quasi public ou
quasi juridictionnel, un accord conclu par les parties et homologué par le juge. Par ailleurs
certains actes donnent lieu à plusieurs qualifications. A titre d’exemple, le procès-verbal est
considéré comme un contrat judiciaire, car il constate l’existence d’un accord et qui n’est
1120
qu’un acte non juridictionnel fait par le juge et non un jugement . Le jugement de donné-
acte est aussi qualifié d’un acte public, d’après M. P. Mayer, « un juge fait par exemple un
véritable acte public lorsqu’il se borne à recevoir un acte privé, auquel il confère la validité en
1121
la forme et une force probante particulière, voire la force exécutoire » .
En ce qui concerne le contrat privé, pour certains, il est considéré comme une décision
en raison de sa structure décisionnelle, car il concerne un ordre visant une situation spéciale et
1122
concrète . Cependant on admet qu’il est dépourvu de caractère normatif puisque le contrat
pourrait produire ses effets juridiques dans un autre État à travers l’application des règles de
conflit du for donc la reconnaissance n’est pas nécessaire pour celui-ci.

633. Ce qui nous intéresse est un arrêt portant sur l’homologation de la conciliation par le
juge étranger. Cet acte est-il considéré comme un jugement étranger ou est-il simplement un
acte public ? En l’espèce, les touristes japonais ont été blessés lors d’un voyage organisé par
le Club Méditerranée (ci-après le Club Med) en Nouvelle-Calédonie. Le véhicule qui
appartient à la société Pacific Raid, était conduit par l’un de son personnel. Le mode alternatif

1120
L. Cadiet et E. Jeuland, Droit judiciaire privé, 4e éd., 2004, Litec, n° 119.
1121
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 473.
1122
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 636 ; P. Mayer, La distinction entre règles et décisions
et le droit international privé, préf. Batiffol, Paris, Dalloz, 1973, p. 48 et s.

471
de règlement des différends, la conciliation, a été organisée au Japon. A l’issue de ce procès,
les victimes ont été indemnisées par la société Axa Global Risks, l’assureur du Club Med. Le
résultat de ladite procédure a été homologué par le juge japonais. Puis, afin d’obtenir
remboursement des sommes versées aux victimes, le Club Med et son assureur Axa ont
invoqué une subrogation dans les droits des victimes envers la société GAN, assureur de la
société Pacific Raid. La société GAN a fait valoir devant la Cour de cassation française que la
conciliation au Japon a été procédée par défaut et que les juges français n’ont pas contrôlé que
le jugement japonais d’homologation avait ou non rempli des conditions de l’exequatur. Dès
lors, ce jugement homologué ayant condamné à paiement des indemnisés n’a donc aucun effet
en France.
La Cour de cassation a décidé que « l’assureur a refusé à participer aux procédures
de conciliation au Japon auxquelles il avait été invité, alors celui-ci ne pouvait pas arguer de
son défaut de comparution pour conclure à l’inopposabilité des procès-verbaux homologués
par le juge japonais d’après la procédure japonaise ». La Cour a aussi affirmé la motivation
faite par la Cour d’appel en appuyant qu’« en l’absence de toute critique exercée à l’encontre
d’une telle décision autrement que sur le montant des indemnisations allouées et alors qu’elle
n’était pas saisie de son exequatur ».
De ce fait, il faut rechercher si la décision japonaise a été sollicitée en tant que
jugement ou acte public afin de savoir à qui elle peut être opposée. Rappelons que le
jugement pourrait opposer aux tiers en tant que fait. En l’espèce le respect de la contradiction
dans la procédure déroulante au Japon fait l’objet d’un examen par la Cour de cassation. La
prise en considération de cette décision japonaise par la Cour est intéressante ; elle a appuyé
sur le fait que la société GAN a été invitée à la procédure de conciliation mais que la dernière
l’avait refusée. Par conséquent, la société GAN n’a pas pu invoquer le défaut de comparution
pour conclure que cette décision est inopposable à son égard. Il faut observer que ceci
complique la détermination de l’homologation car normalement le terme de « défaut de
comparution » est employé pour le procès judiciaire et non pour la conciliation qui est un acte
1123
privé . Nous trouvons ici le problème qui donne lieu à la qualification incertaine de cette
décision étrangère. Il faut noter que la Cour de cassation a déjà soustrait un procès-verbal

1123
Cass. 1er civ., 9 décembre 2003, AXA Corporate Solutions Assurance c./ GAN, RCDIP.2005.660, note
E. Jeuland, spéc. p. 668.

472
judiciaire de conciliation algérien au droit commun appliqué aux effets des jugements
1124
étrangers .

634. Hormis le principe du contradictoire, il y a une condition qui a été citée en premier
lieu. C’est le contrôle de la régularité de la procédure suivie devant la juridiction
étrangère. En effet ce contrôle n’est pas explicite mais on peut observer le terme selon lequel
la Cour a estimé que la société GAN a été invitée à participer à une telle procédure mais que
celle-ci a refusé. En effet ladite condition a été effacée depuis l’arrêt Bachir en 1967 mais
seulement pour le jugement étranger, alors qu’elle est toujours en vigueur pour le cas des
1125
actes publics . D’après M. E. Jeuland, la décision de la Cour peut être interprétée
comme si elle est qualifiée d’acte public l’homologation japonaise et non un jugement.
Bien que la Cour ait contrôlé la conformité au principe de la contradiction, c’est pour vérifier
si la conciliation homologuée peut ou non servir de référence à l’action récursoire pour fixer
le montant dû par la société GAN, car celle-ci estime que cette homologation ne lui est pas
1126
opposable . Pourtant, la question est de savoir si l’on peut qualifier l’homologation
japonaise d’acte réceptif puisqu’elle n’est pas de véritable décision. Car le juge japonais se
borne à recevoir et donner forme un acte juridique (la conciliation) résultant de la volonté des
parties, mais le juge n’a pas apprécié son contenu. De ce fait, son efficacité internationale
relève des règles de conflit qui applique à l’efficacité substantielle des actes et non du droit
commun régi des jugements étrangers. Cependant à la différence d’une sentence arbitrale
homologuée par le juge étranger, celle-ci est soumise au droit commun français des effets des
1127
jugements étrangers .
Si l’on écarte les termes procédurales qui nous conduit à croire que la Cour en
l’espèce qualifie cette homologation de jugement étranger, un autre facteur qui amène à
comprendre que l’homologation japonaise ne fait l’objet d’exequatur en France réside sur
l’action récursoire demandée par la société AXA, cette action se fonde sur la décision
japonaise en cause, la Cour d’appel fonde cette action sur le contrat d’assurance et le Code
des assurances. C'est-à-dire que la décision japonaise ne sert que pour déterminer le montant

1124
Cass. 2e civ., 3 octobre 1968, JCP (G) 1968.II.15693, note J.A. ; JDI.1969.674, obs. Ph. K. ; Cass. 1er civ.,
22 novembre 2005, M. L. Looky, RCDIP.2006.422, note P. Callé.
1125
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 471.
1126
E. Jeuland, Note sous Cass. 1er civ., 9 décembre 2003, préc., supra note n° 1123.
1127
Cass. 1er civ., 29 novembre 1994, RCDIP.1995.362, note D. Cohen ; Bull. civ. 1994, I, n° 347.

473
payé aux victimes par la société AXA. Pour ces raisons, un acte d’homologation en cause n’est
pas un jugement étranger à proprement parler.

635. La Cour de cassation a décidé dans son arrêt rendu dans la matière de faillite que
« constitue une décision pouvant recevoir exequatur toute intervention du juge qui produit
1128
des effets à l’égard des personnes ou sur des biens, droits ou obligations » . Il s’agit
d’une ordonnance prononcée par une juridiction américaine, l’intervention du juge sur la
déclaration de cessation de paiements ayant pour but de suspendre toute poursuite des
créanciers. La Cour de cassation reste attacher à l’intervention du juge étranger dans la
procédure américaine en question. Les auteurs ont admis cette solution, car il est clair que la
requête ne produit de conséquences que par sa présentation effective du juge. Il faut bien
1129
noter que cette intervention lui confère le caractère d’acte public au moins pour qualifier
de décision. Par ailleurs il est apte pour la Cour de cassation à accorder l’exequatur à
l’opération juridique laquelle le juge l’enregistre officiellement. Ces mêmes auteurs ont
affirmé que, dans le contexte très particulier en l’espèce, on admet qu’il n’y a pas de place
pour la simple reconnaissance des jugements étrangers de faillite, alors cette opération peut
1130
être analysée en la réception d’un acte public de nature à justifier l’exequatur .

636. Une autre difficulté envisagée est à propos de la distinction entre les décisions rendues
en application de règles, actes déclaratifs, et celles prononcées en application de règles ou
même indépendamment d’elles, actes constitutifs.

b. Les éléments caractéristiques de jugements étrangers.


637. Les critères qualificatifs de jugement étranger comportant deux éléments
caractéristiques : jugement d’origine étatique d’une part, et son caractère international d’autre
part. Pour le premier, force est de constater que son origine étatique est un élément
indispensable, comme l’on a vu, un acte non étatique ne fait l’objet d’une reconnaissance par
le juge de l’État requis. Cet élément requiert le bien fondé du pouvoir juridictionnel de
l’autorité de l’État qui l’a rendu. Normalement le pouvoir de prononcer un tel jugement est
accordé aux autorités judiciaires du pays mais il est possible dans certains cas d’admettre ce

1128
Cass. 1er civ., 17 octobre 2000, Sté Barney’s Inc, préc. supra note n° 1118.
1129
J.-P. Rémery et H. Muir Watt, Note sous Cass. 1er civ., 17 octobre 2000, RCDIP.2001.121, op.cit.
1130
Ibid.

474
1131
pouvoir aux autorités administratives ou même religieuses . En ce qui concerne la seconde
caractéristique, l’élément d’extranéité du jugement, il faut que le jugement soit rendu par
l’autorité étatique étrangère. Peu importe que l’État étranger ait ou non été reconnu par la
France, mais il est indispensable que ledit État exerce effectivement les prérogatives normales
d’un État souverain. Il ne faut pas s’attacher à son assise territoriale mais à l’allégeance
1132
nationale de l’autorité qui s’est prononcée .

638. La question est de savoir s’il est nécessaire que la juridiction qui a rendu un jugement
étranger doit-elle être uniquement une juridiction civile ? Car, seul le jugement en matière
civile et commerciale qui pourrait bénéficier du système de reconnaissance et d’exécution des
jugements étrangers est intéressé par notre étude. La réponse semble bien constante, même
si les juridictions prononcées ne sont pas de juridiction civile, mais c’est la nature de la
décision qu’il faut considérer, non la juridiction qui l’a rendue. C'est-à-dire qu’une
décision d’un tribunal administratif s’agissant de l’action civile peut aussi bénéficier du
1133
régime d’efficacité des jugements étrangers en droit commun . Ce principe a été
également retenu par les juges anglais, en affirmant que le jugement de nature pénale ou à
l’issue de droit administratif tel que le droit d’imposition, ne peut être reconnue en
1134
Angleterre .

2) Les critères fondés sur les effets produits par décisions en cause.
639. D’après certains auteurs, si un jugement produit l’effet de titre, il est soumis aux règles
de conflit de lois, en revanche, s’il s’agit d’effet décisionnel, c’est le droit commun de
l’efficacité internationale des jugements étrangers qui s’applique. C’est pourquoi ces critères
peuvent être utilisés pour qualifier le jugement au sens strict. Cependant ces critères visent
également le point faible que l’on verra par la suite.

1131
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 638 ; P. Callé, L’acte public en droit international
privé, Paris : Economica, 2004, n° 442 ; A. Huet, « Effets en France des jugements étrangers », J.-Cl. Dr.
internat., Fasc. 584-10, n°17. Il faut noter que le jugement prononcé par les autorités religieuses se trouve
souvent en droit de la famille.
1132
A. Huet, « Effets en France des jugements étrangers », op.cit., n°12.
1133
B. Audit, Droit international privé, op.cit., n° 456 ; Y. Loussouarn, Droit international privé, op.cit.,
n° 492-8.
1134
M. Wolff, Private International Law, Great Britain : Oxford University Press, 1945, n° 238, p. 261.

475
640. L’argument de l’effet de titre. « Le jugement étranger peut servir à justifier d’un
titre déclenchement les conséquences juridiques que lui attache une norme émanant d’un
1135
autre ordre juridique » . Dans ce cas là, le jugement étranger n’est pas considéré comme
un acte juridictionnel mais comme un instrumentum d’un titre privé… C'est-à-dire que ce type
de jugement étranger dépourvu d’une force exécutoire (ce qui est normal à l’égard de l’État
requis). Ce n’est pas effet normatif que l’on voulait accorder à celui-ci, mais on peut tirer de
ce jugement, à titre d’exemple, la présomption de l’existence de la créance invoquée devant
les juridictions de l’État requis. Il est en effet servi en tant que titre de créance.
L’avantage de cet effet se présente clairement dans le cas où les mesures
conservatoires ou provisoires ont été prononcées, car le requérant pourrait invoquer un
jugement étranger en tant qu’effet de titre de créance afin de contester ces mesures et de
solliciter la mainlevée de celles-ci. Cependant, il est douteux s’il est nécessaire de tenir
compte de la situation juridique créée par le jugement étranger afin que celui-ci puisse
produire l’effet de titre, n’est-il pas de même que le cas de l’efficacité substantielle du
jugement étranger ? Comme on l’a dit auparavant, la mise en cause de l’effet de titre est
soumise à l’application de règles de conflit.

641. Critère fondé sur un effet décisionnel. L’effet décisionnel de l’acte public étranger
peut être aussi un critère pour qualifier le jugement étranger. D’après M. P. Mayer, un acte
public peut produire un effet décisionnel lorsqu’il a « pour effet d’imposer un certain état de
droit indépendamment de ce qui résulterait de l’application de toute règle, quel que soit son
1136
présupposé » . Des actes décisionnels constituent de « valeur normative autonome ».
On peut dire que le jugement transforme concrètement ce qu’est disposé par la règle de droit
puisqu’une fois que le jugement a été prononcé, le droit des parties dérive directement de
celui-ci et non plus de la règle de droit, c’est pourquoi on ajoute le terme « autonome » à la
valeur normative. Dés lors que le juge a rendu une décision, peu importe s’il s’agit d’une
décision gracieuse ou contentieuse, ses jugements produisent un effet décisionnel.

1135
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 634.
1136
Cf. P. Mayer, La distinction entre règles et décisions et le droit international privé, Paris : Dalloz, 1973,
préf. de H. Batiffol, n° 76, p. 53.

476
Pour l’application de ce critère, rappelons que le principe de droit international public
1137
interdit un État de s’immiscer dans le fonctionnement des services d’autres États .
Dès lors, afin de ne pas porter atteinte à la souveraineté d’autres pays, le juge du for ne peut
annuler une norme étrangère. En revanche ce qu’il peut faire, c’est de critiquer la décision ou
le travail de l’autorité publique ou judiciaire étrangère qui est l’auteur de ladite décision.
A titre d’exemple, le juge de l’État requis pourra annuler le negotium privé, cette action du
juge ne viole pas le principe de souveraineté étatique puisque ce negotium ne résulte pas
directement du travail de l’autorité étrangère et qu’il n’a pas de valeur normative
1138
autonome , par conséquent celui-ci n’est pas qualifié de jugement. La question peut être
posée sur l’intervention de l’autorité publique, admettons que la validité de cet acte est
conditionnée par cette intervention, mais on ne peut pas conclure que cette intervention
transforme un acte public à un jugement, en revanche le negotium privé n’est que l’effet
juridique de règle de droit de l’État étranger, plus précisément il ne produit qu’un simple effet
de titre. Pour cette raison il faut bien considérer quelle est la sorte d’intervention de l’autorité
publique, si celle-ci intervient comme une simple formalité dont sa portée est requise par la
règle de droit qui régit un tel acte public, ceci n’est pas un jugement. A titre d’exemple,
l’intervention de l’officier étatique pour l’inscription de la société ne suffit pas à créer une
décision à proprement parler.
La modalité de contestation peut aussi servir comme critère de déterminer un effet
décisionnel d’une telle décision. Pour un jugement, qui produit l’effet décisionnel, il est plus
logique de contester l’appréciation qu’a eue l’autorité publique ou le juge de l’applicabilité de
la règle de droit en l’espèce. Au contraire, pour un acte public qui n’est pas qualifié de
jugement, c’est l’applicabilité de la règle de droit au cas d’espèce qui devrait être contestée.
Par exemple, afin de contester la vente notariée, ce n’est pas l’appréciation qu’a eu le notaire
de l’applicabilité de la règle de droit qui doit être critiquée. Mais il faut faire valoir que cette
vente n’a pas respecté les conditions de validité du contrat selon l’article 1108 du Code civil.

642. L’inconvénient des critères retenus. Quand bien même les deux critères majeurs
pourraient aider à qualifier de jugement étranger, mais on ne peut nier leurs points faibles qui
persistent toujours dans le sein. Parlant de l’effet décisionnel, non seulement les autorités

1137
Cf. P. Mayer, « Droit international privé et droit international public sous l’angle de la notion de
compétence », RCDIP.1979.349, spéc., p. 374 et s.
1138
P. Callé, L’acte public en droit international privé, op.cit., n° 452.

477
judiciaires peuvent prononcer un acte public produisant l’effet décisionnel, mais il est
possible d’envisager d’autres actes produisant un tel effet lesquels délibérés par une autre
autorité étatique. Alors, en recourant à ce critère, il faut soigneusement considérer la nature de
chaque acte public et non pas l’autorité qui l’a rendu, car quand bien même cette autorité n’a
qu’un faible pouvoir décisionnel, elle pourrait créer un acte public (jugement/décision) à
proprement parler. L’effet décisionnel se présente de façon expressément dans la mesure où le
requérant ayant accordé une autorisation devrait exercer la prérogative pour laquelle il a été
1139
autorisé . Citons l’hypothèse en matière de la propriété intellectuelle où le requérant a été
autorisé par une autorité publique d’enregistrer son nouveau logo, celui-ci est obligé de le
porter ; ou le cas de l’immatriculation d’une société auprès un fonctionnaire chargé de tenir le
registre des sociétés.

643. Pourtant dans notre étude, on cherche à déterminer le jugement étranger afin de savoir
quel acte public peut être exécuté dans l’État requis en tant que « jugement ».
Revenons à l’arrêt de la Cour de cassation précité qui estime que « constitue une
décision pouvant recevoir exequatur toute intervention du juge qui produit des effets à
1140
l’égard des personnes ou sur les biens, droits ou obligations » . On peut admettre cette
décision dans son contexte en l’espèce. Mais en dehors de ce cas, un acte qui n’a pas
l’intervention du juge de l’État d’origine peut également être l’objet de reconnaissance dans le
for, non par l’exequatur en tant que jugement, mais par la méthode de règle de conflit en tant
1141
que situation juridique . A notre avis, c’est l’effet décisionnel qui doit être pris en compte.

B. La notion du jugement étranger en droit thaï.

644. En Thaïlande, paraît pour la première fois en 1918 la question de reconnaissance et


d’exécution des jugements étrangers. Cependant la Cour suprême Dika n’a pas défini la
notion du « jugement étranger », et la plupart des ouvrages juridiques, malheureusement, ne
prennent pas en cause l’importance de cette notion.

1139
Id., n° 443.
1140
Cass. 1er civ., 17 octobre 2000, Sté Barney’s Inc., préc. supra note n° 1118.
1141
Pour la méthode de la reconnaissance des situations Cf. P. Mayer, « Les méthodes de la reconnaissance en
droit international privé », in Mél. Paul Lagarde, Dalloz, 2005, p. 547, spéc., p. 558 et s.

478
On ne peut trouver que la trace du regroupement des décisions qui sont exclues de la
reconnaissance et l’exécution en Thaïlande : le jugement pénal ; le jugement en matière
d’imposition ; le jugement relatif à la faillite ; le jugement non définitif ; le jugement qui est
contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs du peuple. Il convient de commencer par la
notion du jugement en droit interne, lorsque l’on voit le terme employé dans l’article 133 du
CPC ainsi « le juge doit rendre un jugement ou une ordonnance qui tranche le litige », on sait
que la Cour délibérera un jugement pour le litige contentieux et une ordonnance pour le litige
gracieux, mais compte tenu du terme de cet article on peut dire que le jugement est une
décision qui tranche le litige ; c'est-à-dire, qui tranche toutes les problèmes invoqués par le
1142
plaignant . Malheureusement le droit thaï laisse toujours aux juges la détermination de
« jugement étranger ». Lorsque l’on prend en considération le premier jugement dans ce
domaine de la Cour suprême Dika n° 585/2461, la Cour n’a pas précisé clairement la
définition de jugement étranger, mais elle affirma que celui-ci « doit être un jugement définitif
qui a tranché le litige ou le différend entre les parties ». Le mot clef employé par la Cour est
le verbe « trancher », dès lors le jugement qui peut être exécuté en Thaïlande par la méthode
de reconnaissance et d’exécution doit être le jugement qui « tranche » les différends.

645. La jurisprudence ne parle pas de caractère contentieux ou gracieux du litige, en droit


thaï, la décision pour le contentieux doit être rendue sous forme d’« un jugement », alors que
1143
la décision gracieuse sera rendue sous forme d’« une ordonnance » . Mais rien n’interdit
de conclure que le système thaïlandais de reconnaissance et d’exécution des jugements
étrangers accueillent toutes ces deux sortes de décisions. Cependant nous observons que
lorsque les auteurs ou même la jurisprudence de la Cour suprême ont mentionné de décisions
étrangères, il semble que la notion de décision dans ce contexte signifie uniquement le
« jugement » au sens strict ; la décision prononcée par le juge judiciaire. Il est possible que de
nos jours, les juges thaïs n’ont pas beaucoup d’occasion de traiter la reconnaissance ou
l’exécution d’autres actes publics étrangers. Pour cette raison, on peut dire que la doctrine
thaïe n’est pas tellement avancée concernant la catégorie des décisions judiciaires ou des actes
publics autres que le jugement.

1142
C. Leksakulchai, Droit de procédure civile, Bangkok : Thammasat, 2010, p. 213.
1143
P. Chakrangkoon, Procédure civile, Bangkok : Nitibanakarn, 2000, p. 499 et s.

479
§ 2 : Les attributs de jugements étrangers.

646. L’objectif de qualification de jugement d’un tel ou tel acte est pour savoir quelle
méthode devrait être appliquée à celui-ci. Si l’on distingue les décisions judiciaires en deux
sortes : les actes réceptifs et les véritables décisions, leur efficacité substantielle seront
gouvernés par les deux règles différentes. C'est-à-dire que la prise en considération des actes
réceptifs sera soumise à la méthode de conflit de lois, alors que les véritables décisions, quant
à elles, seraient soumises à la méthode de conflit de juridictions. Pour prendre en
considération leur efficacité substantielle, la distinction entre les actes publics qui produisent
un effet de titre et les actes gracieux produisant un effet décisionnel est nécessaire. Force est
de constater que les actes gracieux, produisant un effet décisionnel, sont considérés comme
des véritables décisions qui, par conséquent, obéissent au droit commun applicable aux
jugements étrangers. Ceci se conforme à la pratique française qui ne fait pas de distinction
selon que le jugement étranger tranche ou non un litige, le droit commun français applicable à
l’efficacité des jugements étrangers applique aussi bien aux décisions gracieuses qu’aux
1144
décisions contentieuses . Tandis que les actes publics qui produisent un effet de titre et qui
sont qualifiés d’actes réceptifs, sont soumis aux règles de conflit de lois. Là encore, en raison
de l’intérêt de la qualification de jugements étrangers, il faut rappeler que nous limitons notre
étude uniquement sur les actes publics qui sont soumis au droit commun applicable aux
jugements étrangers.

647. En ce qui concerne la distinction entre le cas de l’exequatur et le cas où il n’en est pas
nécessaire, on peut constater que les articles 2123 du Code civil et 509 du CPC posent dans le
sens que sans déclaration exécutoire par le juge français, le jugement étranger ne peut donner
lieu à aucun acte d’exécution en France. Cependant pour l’instance hors d’exequatur, on n’a
pas besoin d’avoir cette déclaration. On sait qu’il n’y a pas d’exequatur sans reconnaissance,
donc il est nécessaire d’étudier ensemble dans certains cas la reconnaissance et l’exécution.
Avant de passer aux effets indépendants de l’exequatur des jugements étrangers (B), il
nous convient tout d’abord de voir la réception que tous les jugements étrangers dotés de
l’autorité de chose jugée dans l’ordre juridique de l’État requis sous réserve de régularité
internationale (A).

1144
Cass. 1er civ., 24 octobre 1973, RCDIP.1974.365, note E. Mezger ; JDI.1974.592, note D. Holleaux.

480
A. Autorité de la chose jugée des jugements de droit privé.

648. La reconnaissance des jugements étrangers reflète la possibilité de se prévaloir de la


situation juridique des parties découlant du jugement étranger. Autrement dit, l’efficacité
substantielle d’un jugement étranger signifie en effet la modification des droits substantiels
1145
des parties qui résultent de ce jugement . Ce sont les conséquences juridiques du jugement
étranger qui font l’objet de reconnaissance ou d’exécution dans l’État requis. Sans un tel
jugement, l’état de droit des parties serait mis en cause par les dispositions de leur contrat
qu’elles devraient respecter si la règle de droit leur impose. Une fois que le jugement étranger
a été prononcé, c’est son efficacité substantielle qui sert de base à la partie bénéficiaire de ce
jugement de solliciter devant le juge du pays où elle souhaite que l’effet de ce jugement soit
produit des pouvoirs ou des droits affirmés par le juge étranger.

1) L’argument entraîné de l’autorité de la chose jugée.


a. L’aspect classique, la méconnaissance de droits des tiers.
649. La relativité de l’autorité de chose jugée. La notion de l’autorité de la chose jugée
est définie comme « ensemble des effets attachés à la décision juridictionnelle, telle la force
1146
de vérité légale » . C'est-à-dire qu’un jugement étranger constitue en soi tels effets ou telle
force dès lors qu’il a été prononcé et que cette force pourrait s’opposer à l’égard de telle ou
telle personne que l’on verra ensuite. En effet l’autorité de la chose jugée signifie en elle-
même que c’est « la chose jugée » qui a une autorité. Alors, logiquement, le jugement
possédant la chose jugée lie les parties au litige ainsi disposé dans l’article 1351 du Code
civil : « l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de celui qui a fait l’objet du
jugement ». Cependant on peut se demander si le jugement n’aura aucun effet à l’égard des
tiers ? Il est possible qu’un jugement puisse causer un préjudice aux droits des tiers par
exemple les jugements patrimoniaux.
D’après la conception de la relativité de l’autorité de chose jugée, les jugements ne
seraient pas opposables aux tiers en raison d’impossibilité de prouver contre eux, plus
précisément, le procès juridictionnel a été considéré comme le contrat judiciaire, par

1145
D. Alexandre, Les pouvoirs du juge de l’exequatur, Paris : LGDJ, 1970, n° 154.
1146
Vocabulaire juridique Capitant, « Autorité de chose jugée ».

481
1147
conséquent la chose jugée ne pourrait être ni profitable ni opposable aux tiers . Le point
faible de ce concept se présente expressément, comment explique-t-on le cas où les juges
prononcent les jugements sur la faillite ou les statuts d’une société ?

650. La conception fondée sur le caractère absolu de chose jugée. Cette thèse s’est
présentée et s’est développée au début du XIXe siècle sous la conception objective ; les droits
et intérêts des tiers avaient été toujours renoncés d’après ce concept. Car le jugement serait
opposable aux tiers mais que ceux-ci n’aient même pas l’opportunité de former une tierce
opposition contre un jugement qui leur cause préjudice. D’après cette théorie, c’est la force de
vérité objective qui donnait lieu à l’opposabilité absolue des jugements. Toutefois la
conception objective présentait aussi quelques difficultés à appliquer puisqu’il y avait deux
doctrines appréciées à l’époque.
La première doctrine avait été fondée sur la distinction entre le jugement constitutif et
le jugement déclaratif. Selon elle, seuls les jugements constitutifs ont une autorité absolue,
1148
tandis que les jugements déclaratifs ne l’ont pas .
La seconde doctrine a admis en second temps qu’il faut rechercher dans l’objet du
litige la cause de l’autorité absolue et non pas dans la nature du jugement, c'est-à-dire que le
contentieux deviendrait lui-même objectif ou subjectif et seul le contentieux objectif peut
conférer au jugement l’autorité absolue, alors que le contentieux subjectif n’a d’effet qu’à
1149
l’égard des parties à l’instance .
Les doctrines de deux pôles se trouvaient extrêmises et elles privaient les tiers de la
protection de leurs intérêts. Chaque théorie présentait l’inconvénient à appliquer : il y avait
des grandes difficultés pour la distinction entre les jugements déclaratifs et les jugements
constitutifs, comme affirma M. Mazeaud que « tout jugement déclaratif est constitutif par
certains de ses effets ». Nous admettons que lorsque le juge a décidé qu’il y a de dette entre A
et B, ce jugement a affirmé en effet une dette qui existait déjà mais en même temps le juge a

1147
Aubry et Rau, Cours de droit civil français, t. XII, 5e éd., § 769, note 26.
1148
Cette doctrine fondée par Merlin a été reprise par plusieurs auteurs. Cf. L. Mazeaud, « De la distinction des
jugements déclaratifs et des jugements constitutifs de droits », RTD civ. 1929, p. 17.
1149
L. Duguit, Traité de droit constitutionnel, t. II, 3e éd., 1928, § 30 et § 31. Cet auteur a affirmé que c’est
une erreur grave d’appliquer à tous les jugements la relativité de l’autorité de chose jugée. S’il s’agit de question
de droit subjectif, certes, il est tout logique que la décision prise est elle-même un acte subjectif, par conséquent
il produirait les effets uniquement à l’égard d’un certain nombre de personnes individuellement déterminées.
L’auteur a constaté que c’est la volonté des civilistes de rendre l’article 1351 du Code civil un principe général et
absolu et de l’appliquer à tous les jugements mêmes rendus au cas de juridiction objective. D’après cet auteur,
cette disposition ne peut s’appliquer qu’aux jugements rendus en matière de juridiction subjective.

482
créé aussi une nouvelle obligation pour le débiteur à régler non seulement sa dette mais
également les intérêts et les frais honoraires. Donc en droit positif, une doctrine récente plus
adaptée a remplacé les anciennes.

b. L’état de droit positif : de l’échec de la théorie de la relativité à l’insuffisance de


l’autorité absolue.
651. La conciliation de deux pôles de conceptions. Au milieu du XXe siècle, M. L. Boyer
a proposé la théorie qui concilie les deux thèses antérieurement apparues, car la jurisprudence
a abandonné peu à peu l’autorité relative et a également autorisé aux tiers à contester la valeur
des jugements par la tierce opposition. L’auteur a soutenu que la chose jugée est dotée d’une
autorité ou d’une force grâce à deux acceptions : d’une part, c’est une affirmation de vérité
s’attachant à l’acte juridictionnel ; d’autre part, c’est une opposabilité à chacun des effets qui
résultent du jugement, car celui-ci est un créateur d’une nouvelle situation. C’est la raison
pour laquelle ladite nouvelle situation pourrait s’imposer à chacun et c’est aussi la double
acception qui donne lieu à une opposabilité absolue au jugement.
Cet auteur a proposé la distinction entre l’effet créateur du jugement et la valeur
probatoire de chose jugée. Il a estimé ensuite « toute décision juridictionnelle possède une
fonction probatoire et une fonction créatrice, mais loin d’être indissolublement liés, ces deux
éléments doivent être soigneusement séparés (…) C’est une opposabilité absolue qui
s’attache au jugement en tant qu’acte créateur ; en tant qu’acte probatoire, au contraire, il
1150
ne lie que les parties » . Il n’y a pas que le jugement constitutif qui possède une
opposabilité, d’après cet auteur, le jugement déclaratif est également opposable car ce
1151
jugement a modifié les droits antérieurs et a créé un titre nouveau . Admettant que sous la
base de présomption légale de vérité, le jugement ne pourrait être invoqué qu’entre les parties,
car il faut éviter la perpétuation des litiges. Mais on ne peut dire que tous les jugements ne
seraient qu’une feuille de papier blanc (terme utilisé par L. Boyer) pour les tiers.
En effet cette thèse nous renvoie à reconsidérer la question du caractère du jugement,
afin de motiver l’opposabilité aux tiers il faut trancher d’abord cette question. Un jugement
est un acte fondateur d’une nouvelle situation ou modifier la situation juridique des parties au

1150
L. Boyer, « Les effets des jugements à l’égard des tiers », RTD civ.1951.163, spéc. n° 17.
1151
Id., n° 19.

483
1152
procès , alors celles-ci doivent se conformer et obéir car il a fait application la règle de
droit à des faits invoqués pour juger la prétention et pour réaliser le droit des parties en forme
concrète. Avec le pouvoir imperium du juge, on ne peut nier le caractère administratif du
jugement. Logiquement il lie les parties concernées au procès et il est opposable aux tiers, ce
dernier caractère est certainement aussi logique, même si le jugement ne lie que les parties
mais ses effets doivent être utilisés contre les tiers pour confirmer le droit des parties selon la
décision du juge. Cependant, il est possible que cette nouvelle situation créée par ce jugement
porte atteinte aux droits ou intérêts des tiers. Ceux-ci, en tant que victimes, aurait dû avoir
droit de le contester et de se défendre.

2) La notion équivalente de l’autorité de la chose jugée en droit thaï.


652. L’absence de notion de l’autorité de la chose jugée en droit thaï. A vrai dire, les
auteurs n’ont pas avancé sur ce que l’on appelle la chose jugée dans la langue française, mais
il y a la notion considérée comme équivalente. En droit thaï, on fait recours à la maxime latine
« res judicata » pour signifier un effet du jugement définitif. Afin de faciliter notre étude,
nous employons aussi le même vocable qu’en droit français. Quand bien même le droit thaï
n’utilise pas le terme qui signifie exactement « l’autorité de chose jugée », mais force est de
constater que l’article 145 du CPC dispose du même sens que l’article 1351 du Code civil
français ainsi libellé : le jugement ou l’ordonnance ne lie que les parties au procès et que le
1153
jugement ou l’ordonnance ne lie pas les tiers . Il en résulte du fait que les tiers n’ont pas
eu l’occasion de faire valoir leurs prétentions au procès, dès lors c’est injuste d’admettre que
le jugement en cause peut leur opposer. Alors il est clair que le jugement n’a aucune autorité à
l’égard des tiers, mais l’article 145 al. 2 du CPC exclut expressément les cas de jugements en
matière d’état et de capacité des personnes ; des jugements prononcés une faillite ou une
abrogation de personne morale ; des jugements prononcés le droit de propriété ; des
jugements sur l’immobilier ; des jugements sur l’obligation indissociable.

1152
Il s’agit de l’ordre catégorique, l’un des caractères du jugement ou de décision. Car le jugement se présente
trois caractères importants : il est concret ; catégorique et non-permanent. V. en ce sens L. Duguit, op.cit.,
p. 461 : il a affirmé que le jugement de condamnation est une situation juridique nouvelle qui vient substituer à
l’ancienne.
1153
Sur ce point, il y a beaucoup de décisions de la Cour suprême. Cf. la décision n° 5444/2551 (2008) : le
plaignant a porté plaint contre le défendeur afin d’obtenir un jugement d’annulation de transaction effectuée
entre le débiteur défendeur et un tiers, le plaignant a fait valoir que cette transaction lui a causée un préjudice,
considérée comme une fraude selon l’article 237 du Code civil. La Cour suprême a décidé que le créancier aurait
dû assigner les deux parties au contrat pour que le jugement puisse être opposable au tiers qui est cocontractant
avec le débiteur défendeur. Lorsque le plaignant n’a pas assigné le cocontractant de son débiteur, il en résulte
que ce jugement ne peut produire les effets à l’égard de celui-ci.

484
Il faut observer qu’on ne parle pas directement de la distinction entre le jugement
déclaratif ou constitutif. Mais on peut constater que les jugements rendus dans ces cas
d’exceptions précitées sont dotés d’opposabilité absolue à l’égard des tiers et pour le reste, le
jugement est doté d’opposabilité relative mais susceptible d’être contesté par une tierce
opposition.

653. Les effets de l’autorité de chose jugée reconnus dans l’ordre juridique thaï.
En ce qui concerne l’autorité de la chose jugée du jugement étranger devant le juge thaï, la
Cour thaïe a affirmé depuis l’année 1912 l’autorité négative de la chose jugée (ou on peut
comprendre en thaï que c’est l’effet négative du jugement) en estimant que le jugement
étranger qui peut avoir l’exequatur en Thaïlande doit être définitif et ne pourrait réassigner ni
rejuger sur la même cause, la même demande entre les mêmes parties devant les juridictions
dans le pays d’origine.
En l’espèce, la Cour a constaté que le jugement vietnamien a été rendu à défaut de
comparution de défendeur qui a enfin perdu dans ce litige. D’après la loi thaïe de la procédure
civile, « ce type de jugement n’est pas considéré comme définitif, car la partie perdante peut
faire une requête devant la Cour dans 15 jours après la date du jugement rendu pour que la
1154
Cour reconsidère et retranche à nouveau (…) » . La Cour a estimé par ailleurs que le
plaignant n’a pas pu prouver que la loi de procédure civile vietnamienne relative au procès de
déroulement en cas de non comparution de défendeur diffère ou non de la loi thaïe, alors la
Cour a présumé que « le jugement en cause n’était pas encore définitif et n’a pas doté
l’autorité de la chose jugée ». C'est-à-dire que si le plaignant aurait pu prouver que la loi
procédurale vietnamienne admet que le jugement à défaut de comparution du défendeur est
définitif et ne pourra pas être retranché sur cette même cause, même demande et mêmes
parties, et que le défendeur avait été notifié du procès déroulement devant la Cour
conformément à la loi mais qu’il s’agissait de défaut de comparution volontaire, tout cela
aurait pu convaincre la Cour thaïe. En l’absence de ces preuves, la Cour suprême rendait le
jugement comme tel.

654. Quoi qu’il en soit, l’intérêt du recours à la notion de l’autorité de chose jugée peut être
classé en deux sens ; d’une part, c’est l’intérêt à l’égard des parties au litige qui pourraient
invoquer cette autorité devant les autres juridictions. D’autre part, à l’égard des juges

1154
Cour suprême Dika, n° 585/2461 (1918).

485
postérieurement saisis afin que ceux-ci puissent en déduire le droit et ne pas rejuger ce qui a
été déjà jugé auparavant, c’est ce que l’on appelle l’autorité négative de chose jugée.

B. Effets indépendants de l’exequatur des jugements étrangers.

655. Un jugement étranger peut produire des effets différents selon que les parties
souhaitent l’invoquer simplement en tant que fait juridique ou en tant que norme juridique.
Nous nous intéressons à ce stade aux effets non juridictionnels.

656. Les effets dégagés de la régularité internationale. Il existe manifestement des


termes divers employés en droit international privé pour décrire les effets des actes judiciaires
1155
étrangers. Nous nous intéressons ici à l’efficacité substantielle et aux effets secondaires
1156
des jugements ; l’effet de fait et l’effet de titre. Ces deux termes pourraient être confondus
lors de l’application, car, comme admet Mme H. Gaudemet-Tallon l’existence de la grande
1157
incertitude terminologique . Cependant on peut constater que ces notions ont été utilisées
1158
de façon distincte chez plusieurs auteurs . Certes, dans certains cas, il est possible
d’envisager la notion de l’effet de fait a été englobée par l’effet de titre. Alors que la notion
des effets secondaires a été définie, d’après Mme D. Alexandre, comme la simple
manifestation de l’efficacité substantielle immédiate du jugement étranger. On entendra ici la
force probante au sens large, car ces effets peuvent être considérés comme la preuve de
dispositif du jugement étranger.

1155
Lorsque l’on parle de l’efficacité substantielle, il est nécessaire de savoir si on parle de celle des véritables
décisions ou celle des actes réceptifs. Car, seule l’efficacité substantielle des véritables jugements sera régie par
le droit commun applicable aux jugements étrangers.
1156
On peut entendre de plusieurs termes employés chez les auteurs pour appeler les effets secondaires tels que
l’efficacité non normative (Cf. Y. Loussouarn, Droit international privé, op.cit., n° 493-1), l’effet de fait au sens
large (Cf. B. Audit, Droit international privé, op.cit., n° 458).
1157
H. Gaudemet-Tallon, « Jugement étranger », Rép. D. proc. civ., n° 104.
1158
Cf. P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 452 et s. ; B. Audit, Droit international privé, op.cit., n°
447 et s. ; P. de Vareilles-Sommières, « Jugement étranger (Matières civiles et commerciales) », Rép. D. Dr.
internat., n° 50 et s. ; H. Batiffol, Traité…, t.II, n° 740 et s. ; D. Holleaux, J. Foyer et G. de Geouffre de La
Pradelle, Droit international privé, Paris : Masson, 1987, n° 898 et s. ; M.-L. Niboyet, Droit international privé,
op.cit., n°631 et s.

486
1) L’exclusion du régime propre aux jugements étrangers de l’effet de fait.
657. L’effet de fait désigne « les effets attachés au fait brut d’une décision judiciaire ou à
1159
son exécution » . Lorsqu’un jugement étranger a été pris en considération en tant que fait
juridique, a priori, son efficacité normative n’est pas en cause et qu’il n’a pas besoin de
contrôle de régularité car celui-ci n’est pas à être exequatur dans l’État requis. Admettant par
la décision de la Cour de cassation qu’« un jugement étranger produit en France des effets,
en tant que fait juridique, indépendamment d’une vérification de sa régularité internationale
1160
par une procédure de reconnaissance ou d’exequatur » . Par exemple le cas où
le jugement étranger constitue une contrainte que le défendeur est admis à invoquer au titre de
fait du prince ou un acte interruptif de prescription. Le jugement en cause serait considéré
comme un simple donné, c’est son existence qui est importante devant le juge de l’État requis.

658. Le recours inutile à l’effet de fait lors de la reconnaissance dans le cadre du droit
conventionnel. Une fois qu’un jugement étranger a été invoqué devant le juge de l’État
requis, c’est la question de déterminer le régime de reconnaissance applicable qui est
prioritaire. Il faut bien distinguer s’il s’agit bien de la reconnaissance selon le droit
conventionnel ou selon le droit commun. L’appel à l’effet de fait paraît bien constamment
dans la jurisprudence, malgré que l’on trouve dans certains cas l’application inutile de ceci.
Pour bien illustrer, nous citons un arrêt de la Cour de cassation du 22 janvier 2009, elle a
repris la même formule employée dans les arrêts précédents qui estiment ainsi : « un jugement
étranger produit en France des effets, en tant que fait juridique, indépendamment d’une
vérification de sa régularité internationale par une procédure de reconnaissance ou
1161
d’exequatur » . En l’espèce, les sociétés françaises de fabrication et vente de jouets ont
formé un pourvoi à l’encontre de la décision des juges du fond qui a décidé recevable la
qualité de titulaire des droits d’auteur d’un modèle de jouet d’un ressortissant belge laquelle
avait été confirmée par un arrêt définitif de la Cour d’appel de Bruxelles. Les sociétés
françaises, demanderesse, ont fait valoir que le jugement belge n’a pas été déclaré exécutoire

1159
E. Bartin, « Le jugement étranger considéré comme un fait », JDI.1924.857.
1160
Cass. com., 4 octobre 2005, RCDIP.2006.405, note H. Muir Watt ; JDI.2006.601, note G. Cuniberti ;
D. 2006.2449, note J. Sagot-Duvauroux ; Gaz.Pal. n° spécial, Contentieux judiciaire international et européen,
24-25 févr. 2006, p. 26, note M.-L. Niboyet ; Cass. 1er civ., 11 juillet 2006, Winslow Bank and Trust Company,
D.2006.IR.2211 ; RCDIP.2007.414, note H. Muir Watt ; JDI.2007.554, note E. Fohrer-Dedeurwaerder ;
D.2007.1757, obs. P. Courbe et F. Jault-Seseke.
1161
Cass. 1er civ., 22 janv. 2009, Société Gueydon et autres c./ M. de Groot et autres, RCDIP.2009.533, note
H. Muir Watt ; RDAI.2009.613.

487
en France et que ceci est dépourvu d’autorité de la chose jugée. Car la Cour belge avait
tranché le litige en opposant le défendeur à des sociétés tierces, litige relatif à des faits de
contrefaçon différents imputés à ces dernières. Autrement dit, ni les parties ni l’objet du litige
ne sont les mêmes que dans le litige qui a été tranché par la Cour d’appel de Bruxelles en
2001. Alors qu’afin d’invoquer l’effet négatif de l’autorité de chose jugée, une décision
devrait porter sur les trois faits identiques : la cause, la demande et les parties. La Cour de
cassation a rejeté ce pourvoi en appuyant sur ce que le titulaire des droit d’auteur sur le
modèle de jouet confirmé par le jugement belge, était bien établie en vertu de l’effet de fait de
la décision étrangère litigieuse, ce qui justifiait sa qualité à agir en contrefaçon. C'est-à-dire
que pour trancher la question de la recevabilité d’une action en contrefaçon, l’effet de fait du
jugement étranger est un seul facteur que la Cour devrait prendre en compte. Il semble que
cette motivation ouvre le débat, d’après un auteur, les effets produits par un jugement étranger
ne donnent pas lieu pour autant à une prise en considération de ses effets de fait, dans la
mesure où le jugement n’en produit pas moins un effet normatif, même s’il doit être interrogé
préalablement afin de trancher la question principale ; celle de la recevabilité d’une action en
1162
contrefaçon qui est le cas en l’espèce . Il est à noter que bien que la Cour ait utilisé le
terme « prendre en compte » avant de se prononcer sur la recevabilité de l’action en cause,
ceci doit être entendu que l’objet de la prise en compte à ce stade est l’effet normatif ou
l’efficacité substantielle du jugement. Par ailleurs, ce même auteur affirma qu’un tel effet
reconnu à ce jugement prononcé sur la cession de droits d’auteur est bien un effet de
1163
droit .

1164
659. En comparaison avec l’arrêt du 4 octobre 2005 , autre que l’affirmation que le
jugement étranger en cause produit en France des effets en tant que faits juridiques, la Cour a
ajouté que « dès lors que n’était pas invoquée l’autorité de chose jugée du jugement de la
juridiction de Gibraltar, et qu’aucune mesure de contrainte ou d’exécution n’était sollicitée
en France, cette décision constituait un fait juridique que les juridictions françaises devaient
prendre en considération ». Là aussi, l’arrêt nous amène à penser que le juge français devrait
prendre en considération le jugement étranger comme un fait juridique dès lors que ce

1162
H. Muir Watt, RCDIP.2009, op.cit. V. aussi Note sous Cass., 1er civ., 11 juillet 2006, précité.
1163
Ibid.
1164
Cass. com., 4 octobre 2005, préc. supra note n° 1160 : il faut noter que le second moyen qui est à titre
préalable à trancher a été décidé conformément à l’avis donné par la Première Chambre civile.

488
jugement n’est pas invoqué en France pour y produire les effets normatifs. D’après la Cour de
cassation, la vente par l’ordonnance à Gibraltar n’était que pour transférer et d’éteindre le
privilège de créancier (une créance privilégiée permettrait au créancier la saisie conservatoire
du navire qui n’appartient plus au débiteur). Le jugement étranger a été invoqué devant les
juridictions françaises en vue de soutenir l’opposabilité du transfert de propriété ordonné par
la juridiction étrangère. Alors, l’opposabilité de cette décision sur la vente judiciaire serait un
simple fait juridique et que ceci permettait à la Cour de cassation de conclure que le transfert
de la propriété du navire par l’effet de ladite vente était opposable au créancier saisissant.
Il faut demander qu’est-ce qu’on cherche ici ? Certes, on ne cherche pas à produire un
effet normatif comme l’a dit la Cour, mais qu’avant de traiter la question de possibilité de
saisir entre les mains d’un tiers acquéreur, il faut vérifier d’abord si le transfert du propriétaire
du navire à l’étranger par le jugement gibraltais avait un effet en France. S’il est vraiment
nécessaire de prendre en considération l’effet de fait de ce jugement étranger tandis que son
caractère normatif est bien exprès.

660. On ne peut contester le fait qu’un jugement étranger doté d’une valeur normative et
qu’il peut produire les effets de droit dans l’ordre juridique de l’État requis sous certaines
conditions sauf dans le cas où il bénéficie du système conventionnel ce qui est le cas de l’arrêt
du 22 janvier 2009. Il est douteux que la façon de motiver la décision de la Cour de cassation
semble compliquer les choses, ne serait-il pas que le jugement belge en cause, pour la
première espèce, a bénéficié la reconnaissance de plano en vertu du règlement Bruxelles I ? Si
la réponse est positive, il suffit à justifier que ce jugement se prononce sur la cession de droits
d’auteur sans autre procédure.
En ce qui concerne le formule « prendre en compte » employé par la Cour, la prise en
compte du jugement étranger par le droit du for a pour but de lui « faire produire des effets
non juridictionnels et indépendamment de tout caractère obligatoire reconnu à ce jugement
1165
dans l’ordre juridique du for » , ce qui n’est pas nécessaire en l’occurrence. Plus
précisément, le recours à la technique de la prise en considération du jugement étranger n’est
utile que si le jugement en cause ne peut pas déployer d’effets normatifs dans l’ordre
juridique du for, par exemple un jugement dépourvu d’efficacité substantielle : jugement
déclaratif, ou pénal, ou patrimonial. A priori, si le juge du for peut s’en servir directement le

1165
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 631.

489
jugement étranger en cause pour motiver sa décision et son raisonnement juridique, on n’en a
pas besoin de prise en considération.
Tandis que pour la seconde espèce (le jugement gibraltais), il semble que la vente en
justice ordonnée par le juge gibraltais a été prise dans le cadre de la procédure d’insolvabilité
qui est exclue du régime de la reconnaissance selon la Convention de Bruxelles de 1968.
Pourtant le refus de caractère constitutif du jugement étranger ordonnant la vente judiciaire
n’est pas facile en droit international privé commun. L’efficacité substantielle réside toujours
dans un jugement prononcé par l’autorité judiciaire étrangère, là encore, force est de constater
que celui-ci devrait déployer de plein droit une efficacité substantielle au regard de l’ordre
1166
juridique français . C’est pourquoi nous acceptons que le recours à la notion de prise en
considération fût inutile.

661. Quant à la notion de « la prise en considération », ceci peut être définie en plusieurs
sens. La première propose « un principe simple devrait permettre de toujours distinguer les
rôles impartis à la loi étrangère : appliquer une législation donnée, c’est résoudre une
question de droit concrète au moyen de normes empruntées à cette législation. (…) Compte
tenu de ce principe, il faut voir une application de la loi française dans la décision qui tient
compte de certaines règles étrangères sans obéir à leur dispositif, mais qui au contraire met
en œuvre le dispositif de règles françaises. Il s’agit alors de l’hypothèse simple de prise en
1167
considération de la loi étrangère » . Quand bien même c’est la définition donnée en
matière de loi étrangère mais on peut dire qu’il s’agit de méthode employée pour comprendre
le problème juridique en question. Lorsqu’on l’applique aux décisions étrangères, il faut tout
d’abord rappeler que lorsque celles-ci sont appréciées par un autre ordre juridique, elles n’ont
plus du caractère obligatoire. C’est là la possibilité de prendre en considération des décisions
étrangères. La prise en considération est aussi une technique de droit international privé qui
sert à neutraliser la normativité de la loi ou de décision étrangère à laquelle il est fait
incidemment appel. Dans ce cas là, le jugement étranger ne s’applique pas à proprement
parler, sa régularité internationale n’est pas importante, car on ne le demande pas à produire
des effets normatifs dans l’ordre juridique du for, alors c’est son existence qui est
considérable. Force est de constater que la prise en considération d’un jugement étranger en
tant que fait juridique ne signifie que « la prise en considération de la situation de fait

1166
Comp. H. Muir Watt, RCDIP.2006.410 et s.
1167
D. Holleaux, Droit international privé, Paris : Masson, 1987, n° 317.

490
découlant de l’exécution du jugement étranger déjà réalisée à l’étranger, et qui constitue une
1168
réalité matérielle dont les juges français devront nécessairement tenir compte » . Dès lors,
cette méthode permettrait de tirer les conséquences d’un jugement étranger lorsque son effet
1169
proprement normatif est indifférent au résultat recherché . Ceci explique pourquoi la prise
en considération est nécessaire dans le cas où un jugement étranger est irrégulier et n’est pas
susceptible de déployer des effets normatifs dans le for.

662. Pourtant une autre question peut se demander à savoir s’il n’est pas nécessaire de
prendre en considération un tel jugement étranger comme un fait juridique en raison de sa
qualité normative comme nous l’avons vue, est-il nécessaire de remplir telles ou telles
conditions pour que ceci puisse produire ses effets ?

2) Le recours à l’effet de titre du jugement étranger.


663. Il s’agit ici du concept créé par Bartin, son caractère mérite d’être analysé afin de
distinguer des notions voisines, notamment l’effet de fait.
Lorsque l’on entend parler de l’effet de titre, on pense au cas des effets substantiels
qu’une règle de droit attache à l’existence d’un titre public. Il s’agit des effets attachés à la
qualité publique de l’acte ou du jugement étranger qui est indépendant de l’exequatur.
Comme l’on a déjà étudié, pour la reconnaissance d’un jugement étranger, s’il s’agit de la
modification des droits substantiels des parties qui résulte de ce jugement, on admet qu’un tel
ou tel jugement peut produire un effet de titre dans le cas où la modification de la situation
substantielle n’est pas l’effet direct dudit jugement. M. P. Callé a fait recours à la notion
1170
d’effet décisionnel afin d’identifier les actes publics qui ne produisent qu’un effet de titre
que nous avons vu lors de la qualification de jugement étranger.

664. D’après la jurisprudence française, la Cour de cassation rattache cet effet à un tel ou
tel jugement en vue de lui permettre, par exemple, de procéder à une mesure provisoire ou
conservatoire en France sans qu’aucune autorisation judiciaire ne soit nécessaire. Plus
précisément on peut invoquer un jugement étranger pour obtenir une mesure conservatoire.

1168
D. Alexandre, « Les effets des jugements étrangers indépendants de l’exequatur », TCFDIP 1975-1977, p.
51, spéc. p. 56.
1169
P. Kinsch, Le fait du prince étranger, Paris : LGDJ, 1994, n° 240 et s.
1170
P. Callé, L’acte public en droit international privé, op.cit., n° 450.

491
Alors, il s’agit du cas selon lequel un acte public n’a pas de valeur normative autonome et il
n’est qu’un titre qui permet de modifier la situation substantielle des parties à travers les
1171
règles de droit . L’effet de titre sert par ailleurs comme preuve de l’existence de la créance
invoquée ou attache la personnalité juridique à une personne morale. Dés lors, ce que l’on
attend de ce type de jugement étranger n’est pas un titre exécutoire, par conséquent le juge du
1172
for n’a pas à examiner la régularité de ce jugement . Certes, le concept de l’effet de titre
peut être confondu avec l’efficacité substantielle du jugement, il faut rappeler que la dernière
est supposée être la régularité internationale du jugement alors que le premier n’implique pas
la reconnaissance de la dimension juridictionnelle du jugement étranger. Mais l’effet de titre
est invoqué pour la reconnaissance d’une qualité ou d’un état de droit créé par un jugement
1173
étranger .
Cependant la question peut se poser si un tel jugement étranger constitue un effet
normatif ? Si la réponse est positive, ne serait-ce pas que l’effet de titre est inutile à ce stade ?
Pour l’indifférence de l’effet de fait précité, il semble que l’invocation d’un jugement étranger
afin d’obtenir en France une mesure conservatoire indépendamment de toute autorisation
judiciaire affirme la reconnaissance son effet normatif et non pas de sa qualité de preuve de
l’existence de créance ou la qualité de créancier. Nous admettons l’opinion de Mme H. Muir
Watt que cet effet de titre n’est qu’un caractère artificiel et dés lors que l’efficacité
substantielle d’un jugement étranger était acquise de plein droit, le concept de l’effet de titre
est inutile.

C. Élément de preuve prima facie des jugements étrangers selon la Cour thaïe.

665. La Cour suprême Dika n’a pas beaucoup d’opportunité d’envisager le cas de
reconnaissance ou d’exécution des jugements étrangers sur lequel, depuis l’année 1918,
seulement quelques décisions ont été rendues. Toutefois, on considère que la première
décision de la Cour mérite amplement d’être suivie. Il s’agit de la fameuse décision Dika
n° 585/2461 dont nous ne nous penchons pas sur le fond qui tranche la question du contrôle

1171
Id., n° 445.
1172
Cf. H. Muir Watt, « Le mythe de « l’effet de titre » : le statut des jugements étrangers dans le contentieux
du provisoire » », in La procédure en tous ses états, Mél. J. Buffet, éd. P.A. 2004, p. 347.
1173
Id., p. 351.

492
de régularité internationale, mais à ce stade nous souhaitons simplement démontrer comment
la Cour suprême thaïe a apprécié au jugement étranger.

666. L’absence de règles de droit applicables à cette matière. Avant d’entrer dans les
détails, la première question peut déjà se poser : quelle est la disposition ou la règle de droit
qui donne la compétence à la Cour d’exécuter des jugements étrangers ? Force est de
constater que le droit thaï n’a aucune disposition écrite qui donne le pouvoir au juge sur ce
cas ; c’est la question de la source de droit applicable. On peut dire que les juges à l’époque
ont adopté la pensée et les modalités de reconnaissance et d’exécution des jugements
étrangers du système britannique, ce que l’on verra lors du contrôle de régularité
internationale. Pour certains, c’est l’article 3 de la Loi relative au conflit de lois B.E. 2481 qui
1174
applique à la reconnaissance ou l’exécution des jugements étrangers en Thaïlande . Car
cet article stipule que « lorsqu’il n’y a aucune disposition de cette Loi, d’autres règles de
droit thaï ne peuvent appliquer au cas de conflit de lois en l’espèce ; le juge tranche le litige
1175
en appliquant les principes généraux de droit international privé » . En effet ces auteurs
pensent que la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers sont incluses dans les
principes généraux de droit international privé, alors les juges thaïs sont compétents en vertu
1176
de l’article 3. Pourtant l’argument d’autres auteurs qui ne partagent pas cette opinion est
très intéressant et paraît à notre avis plus logique ; en effet aucune disposition de la Loi
relative au conflit de lois B.E. 2481 ne stipule sur la reconnaissance et l’exécution des
jugements étrangers. Nous sommes d’accord avec cette approche car cette Loi concerne
uniquement les questions de conflit de lois, par conséquent on ne peut étendre l’application de
l’article 3 au conflit de juridictions et à l’exécution des jugements étrangers. Alors, la
reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers sont de source jurisprudentielle.

667. Avant de passer à la suite, il nous convient de dire quelques mots sur la nécessité du
procès d’exécution. On sait que certains jugements étrangers sont dépourvus de la force

1174
S. Lengthaisong, « L’exécution des jugements étrangers en droit thaï », Thammasat Law Journal, vol. 4,
n°1, 1972, p. 79-80 ; Cf. P. Boondej, « L’effet des jugements étrangers », Thammasat Law Journal, vol. 9, n°1,
1977, p. 66.
1175
มาตรา ๓ แห่ง พระราชบัญญัติวา่ ด้วยการขัดกันแห่งกฎหมาย พ.ศ. ๒๔๘๑ บัญญัติวา่ “เมื่อใดไม่มีบทบัญญัติในพระราชบัญญัติน้ ี หรื อกฎหมาย
อื่นใดแห่งประเทศสยามที่จะยกมาปรับกับกรณี ขดั กันแห่งกฎหมายได้ ให้ใช้กฎเกณฑ์ทวั่ ไปแห่งกฎหมายระหว่างประเทศแผนกคดีบุคคล”
1176
K. Indrambarya, « L’opinion et observations sur la coopération judiciaire de reconnaissance et d’exécution
des jugements étrangers », Dulapaha Journal du Ministère de Justice, vol. 31, n° 2, 1984, p. 63 et s. ; Cf. P.
Pivavatnapanich, Droit international privé, Bangkok : Université de Thammasat, 2008, p. 316.

493
exécutoire et l’autorité de chose jugée. En France, l’objet de l’instance en exequatur est la
décision dont l’exequatur est demandé et non le litige soumis au juge étranger. En effet, seul
le juge requis possède le pouvoir de commander aux organes de contrainte sur son territoire à
l’exécution du jugement étranger. Dans le système français, le jugement étranger exequaturé
1177
par le juge français est toujours un jugement « étranger » . Il en est de même pour la
décision étrangère qui a obtenu un jugement d’exécution par la Cour thaïe, ce jugement ne
naturalise pas la première. Cependant la méthode appliquée est différente.

668. Obligation provenant du jugement, méthode retenue par la jurisprudence.


1178
En l’espèce, il s’agit d’un contrat de vente des véhicules exécuté au Vietnam en 1912 ,
l’acheteur a assigné le vendeur devant la Cour vietnamienne en invoquant que ce dernier
n’avait pas délivré l’objet de vente en cause après que le paiement du prix a été exécuté. Le
jugement est en faveur du plaignant, mais il paraît que le défendeur a déménagé en Thaïlande.
Le plaignant, par son représentant autorisé, a porté plainte devant la Cour thaïe contre le
défendeur domicilié en Thaïlande. Il faut observer que le plaignant n’a pas fait une simple
requête pour demander l’exécution du jugement vietnamien mais il a assigné une nouvelle
action afin d’obtenir la créance selon le jugement vietnamien. Le défendeur a fait valoir que
cette décision a été rendue à défaut de comparution de celui-ci, alors le principe de la
contradiction n’a pas été respecté et qu’il avait déjà délivré les véhicules en cause au
plaignant. Le juge du premier degré a décidé que le défendeur n’a pas encore délibéré ses
obligations et que le défendeur doit payer la somme et les dommages-intérêts en question. La
juridiction d’appel a affirmé ce jugement. Le défendeur a formé un pourvoi devant la Cour
suprême Dika qui a jugé que « le jugement vietnamien a été rendu par défaut de comparution
du défendeur, dès lors, ce n’est pas le jugement définitif qui peut être exécuté en Thaïlande ».
Par ailleurs, la Cour a trouvé que le plaignant n’a pas pu prouver que le défendeur vendeur n’a
pas encore exécuté la livraison de marchandises, par conséquent la Cour suprême a infirmé la
décision de la Cour d’appel.

669. Les auteurs admettent que le jugement étranger puisse produire un effet en
Thaïlande uniquement en tant que preuve de créance (on peut dire qu’il s’agit de l’effet de
titre en droit français) ; il faut dans tous les cas l’assigner devant le juge de premier degré

1177
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 410.
1178
Cour suprême Dika, n° 585/2461 (1918).

494
1179
comme un nouveau litige . Observons que les auteurs thaïs ont fait référence à la doctrine
of obligation fondée sur l’idée que le jugement rendu par le juge étranger créé une nouvelle
1180
obligation contractuelle .
La pratique affirma que les juges thaïs pouvaient exercer certains contrôles qui ont été
admis en général dans d’autres pays. Force est de constater que le jugement étranger dans
1181
cette hypothèse n’a aucune valeur normative devant la Cour thaïe . Cependant, à notre
avis, ladite méthode employée par la Cour ne puisse être considérée comme la reconnaissance
ou l’exécution des jugements stricto sensu, malgré le vocable utilisé par la Cour suprême
1182
« reconnaissance et exécution » . Car, le procès qui se déroulera devant le juge du premier
degré ne diffère pas de celui d’autres nouveaux litiges, et le plaignant peut invoquer le
jugement étranger comme une preuve dans une nouvelle action. Par ailleurs, le contrôle
exercé par les juges thaïs dans ce litige n’était pas simplement une « révision à fin du
1183
contrôle » comme en droit français en cas de vérifier la conformité à l’ordre public
international. Mais le juge thaï devrait examiner le fait évoqué par le défendeur, comme en
l’espèce, que celui-ci a ou non violé l’obligation contractuelle qui résulte du contrat de vente.
En l’occurrence, le juge du premier degré a décidé que le défendeur n’avait pas encore
délivré les véhicules au plaignant. Par conséquent le défendeur doit régler au plaignant sa
créance avec les dommage-intérêts et les honoraires d’avocat. Ce jugement a été affirmé par

1179
V. Montaporn, « Les aspects asiatiques de la coopération judiciaire et l’exécution des jugements
étrangers », Dulapaha Journal du Ministère de Justice, vol. 31, n° 2, 1984, p. 97 ; K. Sandhikshetrin, Droit
international privé, Bangkok : Nitibanakarn, 1996 ; S. Lengthaisong, « L’exécution des jugements
étrangers… », op.cit., p. 80 ; K. Indrambarya, « L’opinion et observations sur la coopération judiciaire… »,
op.cit., p. 57.
1180
M. Wolff, Private International Law, Oxford University Press, 1945, n° 232, p. 254.
1181
La question peut se poser s’il s’agit de l’effet de titre au sens de doctrine française, on sait que l’effet de
titre a pour l’objet d’accorder à un jugement étranger un certain crédit en tant que titre de créance, par
ailleurs le juge de l’exécution pourrait également apprécier, en cas de contestation du débiteur, si les
circonstances et les conditions sont réunies ou non pour la reconnaissance. Pourtant, on sait que l’effet de titre
serait reconnu par application des règles de conflit alors qu’on a trouvé en l’occurrence que les juges thaïs
avaient procédé aux contrôles de régularité internationale invoquée par le débiteur (concernant le jugement rendu
par défaut).
1182
V. cependant K. Sandhikshetrin, « La coopération judiciaire de reconnaissance et d’exécution des
jugements étrangers », Dulapaha Journal du Ministère de Justice, vol. 31, n° 2, 1984, p. 54. L’auteur a affirmé
que ceci est la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers selon la méthode employée par les juges
anglais à la première époque, c'est-à-dire il faut tenir compte du principe de réciprocité sous certaines conditions.
Pour la raison d’historique, il faut observer notamment, d’après cet auteur, que le Président des juges de ce litige
a fait des études de droit en Angleterre, du fait que ceci était le premier litige dans la matière alors il est possible
que les juges ont été influencés par le système anglais de reconnaissance et d’exécution.
1183
D. Holleaux, Droit international privé, op.cit., n° 982.

495
la Cour d’appel. La Cour suprême a estimé qu’afin d’examiner si le défendeur a ou non violé
la disposition du contrat de vente, il faut prendre en considération les preuves soulevées par
les parties devant la Cour vietnamienne.
Enfin, nous ne partageons pas l’idée de certains auteurs thaïs ayant soutenu que cette
procédure thaïe se rapproche à l’action on the judgment du système anglais, car comme l’on a
vu, ce procès n’est pas une simple invocation du jugement étranger devant la Cour thaïe.

670. L’invocation d’un jugement étranger en tant que preuve. Il convient de citer une
1184
décision de la Cour suprême rendue en 1933 , la Cour a traité un jugement étranger
comme un simple fait. En l’espèce, les défendeurs en tant que représentants du transporteur
(le transporteur n’est pas domicilié en Thaïlande), ont été assignés au remboursement de la
somme sus-paiement pour le fret de transport de marchandises du Royaume de Siam (ci-après
la Thaïlande) à Java (ci-après l’Indonésie). Mais les défendeurs ont fait valoir que la somme
réclamée avait été saisie par le créditeur du plaignant en vertu du jugement de la Cour
Surabaya (l’Indonésie). Le juge du fond a décidé que le premier défendeur, le manager de la
seconde défenderesse qui est la société représentante du transporteur, et le second défendeur
devaient rembourser la somme en question au plaignant.
Le pourvoi a été formé par les défendeurs, la Cour d’appel a infirmé ce jugement en
estimant que seule la société défenderesse qui est représentante du transporteur en Thaïlande,
devait rembourser la somme en cause, le premier défendeur (le manager) n’étant pas
personnellement responsable de cette créance.
La Cour suprême a affirmé sur ce point, mais elle a enfin jugé que la société seconde
défenderesse devait régler la somme en cause. Alors la décision de la Cour suprême était en
faveur à la demande du plaignant. En effet, il paraît que le débat sur le jugement indonésien a
été invoqué lors de la procédure d’appel, et que la Cour a infirmé le jugement du premier
degré en raison d’élément factuel apparu dans ce jugement. Cependant la Cour suprême Dika
a constaté que les modalités d’invocation du jugement étranger du défendeur n’étaient pas
recevables, car celui-ci n’a pas pu prouver l’existence officielle du jugement indonésien. C’est
la raison pour laquelle elle a infirmé la décision d’appel sur cette issue. C’était la première
fois que la Cour suprême Dika a admis l’invocation du jugement étranger en tant qu’élément

1184
Cour suprême Dika, n° 934/2476 (1933).

496
de preuve du litige, quand bien même aucune disposition de loi thaïe ne le permettait
1185
expressément .
Le jugement en cause n’était pas invoqué comme un jugement étranger. Les juges
thaïs ont pris en considération la situation juridique fixée par le dispositif sans lui attribuer un
caractère incontestable, il ne s’agit pas ici de l’autorité de chose jugée, c’est un simple fait
invoqué par les parties en tant qu’élément de preuve dans le cadre de procès nouveau afin
d’obtenir un jugement de l’exécution en Thaïlande.
Nous regrettons de ne pas avoir l’occasion de trouver la décision de la Cour suprême
thaïe relative à la reconnaissance du jugement étranger de façon distincte de l’exécution. Mais
les conditions contrôlées ne seraient pas différentes entre les deux. Quoi qu’il en soit, en
attendant la jurisprudence, on peut dire que le jugement peut prouver le droit existant à
l’étranger et que ceci est suffisant en soi, puisqu’il a créé une situation de fait opposable à
toute éventualité, peu importe que sa nature soit déclarative ou constitutive. Et là, on aura
l’opportunité d’intervenir sur l’efficacité de plein droit indépendamment du procès
d’exécution du jugement étranger.

Section II
Reconnaissance des effets des jugements étrangers.

671. La notion d’efficacité substantielle en droit international privé. On entend très


souvent le terme « efficacité » et ceci peut être confondu facilement avec « efficace ». Certes,
ces deux vocables sont très proches, il faut bien observer, selon Mme C. Bléry, que
l’efficacité signifie « qualité, action de ce qui est efficace », alors qu’efficace signifie « qui
produit l’effet qu’on en attend ». L’adjectif « substantiel » est de préciser que cette efficacité
du jugement touche le droit substantiel ou le droit du fond. Ceci est pour faire opposition au
1186
droit processuel ou au droit servant . C’est la façon de clarifier le terme couramment
employé en droit international privé. D’après C. Bléry « l’efficacité substantielle permettrait
de réduire la notion et de redonner la juste valeur à l’expression effets substantiels » et qu’elle

1185
Cette décision a été prononcée avant l’entrée en vigueur du Code de procédure civile en 1935, la question
peut se poser si cette jurisprudence est toujours actuelle. Sachant que de nos jours le Code de procédure civile
thaïe ne dispose jamais sur l’issue de jugement étranger. Alors, on peut dire qu’il y a de possibilité que les juges
thaïs se basent encore sur la règle disposée par cette décision, en particulier les modalités d’invocation des
jugements étrangers en tant que preuve devant les juridictions thaïes, il faut cependant attendre une autre
décision pour le confirmer.
1186
C. Bléry, L’efficacité substantielle des jugements civils, Paris : LGDJ, 2000, n° 125, p. 88.

497
est « employée pour définir rigoureusement « l’effet » », car le mot effet s’entend plus
1187
élargie .

672. Contrôles de la régularité internationale des jugements étrangers. Dans le système


français, comme on le sait, on distingue entre le jugement qui nécessite de prononcer
l’exequatur et le jugement dont l’efficacité est reconnue en France par une simple invocation
devant le juge de l’instance où l’état de droit consacré par ce jugement est mis en cause.
Tandis que pour l’instance particulière, il est indispensable d’avoir prononcé l’exequatur par
le juge français, ceci est pour établir l’efficacité du jugement étranger en France. Cependant
l’efficacité des jugements étrangers est soumise dans tous les cas aux mêmes conditions du
contrôle. Dans le système juridique thaï, comme on a déjà vu, pour l’exécution d’un jugement
étranger en Thaïlande, il faut assigner comme une nouvelle action et le juge vérifiera si ce
jugement remplie toutes conditions d’exécutoire.
Nous étudions tout d’abord l’efficacité substantielle des jugements dans le cadre de
droit commun (§ 1), nous verrons par la suite l’efficacité substantielle des jugements dans le
cadre de mécanisme simplifié (§ 2).

§ 1 : Efficacité substantielle des jugements dans le cadre de droit commun.

673. L’évolution de la conception de l’exequatur. On sait qu’il y a toujours de limites


pour chaque État d’admettre la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers dans
son for. En France, depuis l’année 1860 (l’arrêt Bulkley), la Haute juridiction a admis que
seuls les jugements étrangers rendus en matière d’état et de capacité des personnes seraient
reconnus de plano à condition d’être régulier et qu’ils pourraient être invoqués sans être
1188
revêtus de l’exequatur . Cependant dans d’autres matière qui nécessitent d’obtenir
l’exécution matérielle sur les biens ou la coercition sur les personnes, il est toujours obligé
d’avoir l’exequatur. Il résulte des articles 2123 du Code civil et 509 du CPC que le jugement
étranger ne peut donner lieu à aucun acte d’exécution en France sans avoir été déclaré
exécutoire par le juge français. Par ailleurs certains jugements nécessitent dans tous les cas

1187
Ibid.
1188
Il en va de même en matière de nullité du mariage, de divorce, de filiation et pour des jugements
constitutifs par exemple le jugement prononcé une faillite.

498
l’exequatur pour affirmer leur efficacité, peu importe les effets recherchés (l’exécution ou
1189
l’autorité de chose jugée), c’est le cas des jugements patrimoniaux déclaratifs .
On sait que tous les jugements étrangers doivent être procédés le contrôle de leur
régularité : les jugements étrangers d’état et de capacité pour se voir reconnaître une autorité
de la chose jugée de plano, et les autres jugements pour obtenir l’exequatur. Les conditions de
contrôle peuvent être différentes dans chaque système juridique et dépendent aussi de sa
politique législative. Cependant on peut classer les conditions de contrôle de la régularité
internationale des jugements étrangers généralement adoptées par la plupart des pays en trois
conditions : la compétence internationale du juge étranger ; la finalité ou la définitive du
jugement ; et le caractère spécifique de l’obligation ou la créance dans ce jugement. Nous
allons trouver que ces trois conditions ont été également admises aussi bien par la
jurisprudence française que thaïlandaise. De surcroît, le système anglais qui mérite d’être
étudié en tant qu’exemple de pays common law respecte aussi les mêmes conditions.

A. Contrôle de régularité internationale en droit français.

674. Évolution des conditions subordonnées. L’exécution des jugements étrangers dans
l’ordre juridique français est établie en vertu de l’article 509 CPC qui stipule ainsi :
« Les jugements rendus par les tribunaux étrangers et les actes reçus par les officiers
étrangers sont exécutoires sur le territoire de la République de la manière et dans les cas
prévus par la loi ».

Ce texte ne dispose que de façon non précise sur cette issue alors c’est la
jurisprudence qui pourrait répondre à la question.
Depuis 1860, la Cour de cassation a commencé par un recours à la conformité à
1190
l’ordre public de jugement étranger censé exequatur en France . Puis, la compétence du
juge étranger et la régularité de la procédure suivie ont été exigées par la Cour de cassation et
1191
enfin la condition de la compétence de la loi appliquée au fond . En 1964, la Cour de
cassation a estimé dans sa célèbre décision Munzer les conditions indispensables que le
jugement étranger devait remplir afin d’être exécuté en France : la compétence du tribunal

1189
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 399.
1190
Cass. 1er civ., 28 février 1860, Bulkley, S. 1860.1.210, concl. Dupin ; GA n° 4.
1191
Cass. 1er civ., 9 mai 1900, De Wrède, JDI.1900.613 ; S. 1901.1.185, note E. A. ; D. 1905.1.101, note L. S. ;
GA n° 41.

499
étranger ; la régularité de la procédure suivie devant cette juridiction ; l’application de la loi
compétente d’après les règles françaises de conflit ; la conformité à l’ordre public
1192
international et l’absence de toute fraude à la loi . Selon la Cour ces conditions devaient
être réunies en tant qu’une vérification suffisante à assurer la protection de l’ordre juridique et
des intérêts français. Elle affirma par ailleurs la limite du pouvoir de contrôle du juge français
que celui-ci ne devait pas procéder à une révision au fond de la décision. Cependant la Cour
de cassation a minimisé les champs du contrôle dans l’arrêt de 1967 dont la régularité de
compétence indirecte, l’application de la loi compétente d’après les règles conflictuelles
françaises, la conformité à l’ordre public international français et l’absence de fraude à la
1193
loi . Cependant la vérification de la conformité aux règles conflictuelles françaises de la
loi appliquée par le juge étranger a été abrogée par la jurisprudence dans le dernier temps.

1) Conditions d’ordre processuel.


a. La compétence internationale du tribunal étranger.
675. En France, à l’époque, afin de vérifier la compétence internationale du juge étranger,
le juge français avait employé des critères fondés sur les règles étrangères de compétence
1194
internationale directe d’une part ; et le critère des règles françaises de compétence
internationale directe bilatéralisées d’autre part. Selon le premier, pour qu’un jugement
étranger puisse être exécuté, la Cour devait vérifier si le juge étranger a rendu ce jugement
conformément à ses propres règles de droit. Autrement dit, cette condition exige le juge
français de prétendre examiner l’application du juge étranger ses règles de droit. Bien que
pour certains il ne soit pas logique d’exiger le juge étranger de connaître les règles de droit
français sur la compétence internationale pour que sa décision soit exécutée en France. Cet
argument n’est pas irraisonnable, mais il ne semble pas moins illogique si le juge d’exequatur
devrait prétendre comme s’il était le juge étranger qui appliquait ses propres règles de conflit.
Le second critère fondé sur le concept que la France doit poser les critères de compétence
pour prendre en considération les jugements étrangers censés être exécutés sur son

1192
Cass. 1er civ., 7 janvier 1964, Munzer, RCDIP.1964.344, note Batiffol ; JDI.1964.302, note B. Goldman ;
JCP.1964.II.13590, note Ancel ; Rép. Comm.1964.425, obs. G. Droz, GA n° 41.
1193
Cass. 1er civ., 4 octobre 1967, Bachir, GA n° 45.
1194
CA Paris, 4 février 1958, RCDIP.1958.389, note H. B. ; JDI.1958.1016, note Ponsard ; JCP.1958.II.10612,
note Francescakis.

500
1195
territoire . La méthode fonctionne par la bilatéralisation des règles de compétence directe
laquelle donne lieu aux règles de compétence internationale indirecte : si le domicile en
France du défendeur fonde la compétence des juridictions françaises, il est raisonnable et
légitime que son domicile à l’étranger fonde aussi la compétence des tribunaux de ce pays.
Citons l’arrêt De Gunzbourg (divorce et fraude au jugement), la Cour a affirmé qu’il faut
rechercher s’il existe, suivant les principes admis par le droit international privé français, un
facteur de rattachement de nature à justifier positivement la compétence internationale des
tribunaux mexicains. En l’espèce, le domicile conjugal était à New York, par conséquent
l’accord des époux sur la compétence de la Cour mexicaine n’était pas valable s’agissant de
matière qui relevait de l’état des personnes. Comme le dit M. P. Mayer qu’il est normal de
vérifier avant de donner effet en France des jugements étrangers que ceux-ci émanent d’un
1196
pays qui était bien placé pour le prononcer à l’égard de conceptions françaises .

676. Lorsque le juge du for a pris en considération la question de reconnaissance ou


d’exécution des jugements étrangers, il devrait envisager deux sorts de compétences
judiciaires ; une compétence générale et une compétence spéciale. Ceci est une condition
fondamentale admise généralement dans la plupart des États. Cependant lorsque l’on étudie la
jurisprudence thaïe, on verra que la Cour suprême Dika n’a pas exigé que le juge étranger doit
être compétent à l’égard de la règle de droit thaï sur la compétence internationale. En
revanche la Cour n’a conditionné que la compétence spéciale ; la compétence du juge étranger
conformément à sa loi procédurale.
Un autre problème peut se poser ainsi : quelles règles de droit apprécierait-elle la
compétence internationale du juge étranger ? Les règles de compétence internationale du juge
du for ou celles du juge étranger ont-elles rendu ce jugement ? En effet l’application des
premières ne pose pas beaucoup de problème, alors que les secondes posent de difficultés
particulières, c'est-à-dire qu’afin de recevoir la reconnaissance ou l’exequatur, le jugement
étranger en cause doit être rendu par la juridiction judiciaire de cet État étranger dont le
contenu des règles de compétence internationale doit être identique que celui de droit
1197
français .

1195
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 370.
1196
Ibid.
1197
Y. Loussouarn, Droit international privé, op.cit., n° 503.

501
677. La compétence exclusive des juges français. Cependant la Cour de cassation estima
1198 1199
clairement dans l’arrêt Simitch qui a été réaffirmé par l’arrêt Prieur en 2006, les
critères de vérifier la compétence internationale indirecte qui peut être classé en deux
constats ; d’une part, le cas où il s’agit d’une compétence exclusive du juge français selon la
règle française de compétence internationale directe. D’autre part, le cas où la règle française
de compétence internationale directe ne donne pas la compétence exclusive aux juges
français. Cet arrêt affirma l’existence de la conception unilatéraliste en matière de conflit de
juridictions. Pour le premier (compétence exclusive), l’exequatur devrait être refusé par le
juge français, ceci se présente comme conception unilatéraliste dite la double
1200
unilatéralité . En ce qui concerne les matières relevant de compétence exclusive du juge
français, comme l’on a déjà étudié, il s’agit de matière des immeubles ; le cas d’une clause
attributive de juridiction au juge français. Alors que pour le second (compétence facultative),
l’exequatur peut être accordé si d’autres conditions sont réunies.

678. La difficulté se pose aussi à ce stade, car la Cour n’a pas déterminé la notion
d’exclusivité dans sa décision, alors il faut la rechercher prudemment. Rappelons que
l’exclusivité du litige pourrait être fondée sur les éléments divers : telles que la compétence
exclusive de la nature du litige, la clause attributive de juridiction, la loi destinée à protéger un
1201
citoyen français (les articles 14 et 15 du Code civil) .
La doctrine de Bartin peut être rappelée à ce stade, « l’exclusivité » a été perçue
comme la manifestation de la bilatéralité des chefs de compétence directe français.
C'est-à-dire que toute règle française de compétence directe pourrait être une compétence

1198
Cass. 1er civ., 6 février 1985, Simitch, JDI.1985.460, obs. A. Huet ; RCDIP.1985.369 ; D. 1985. IR.498,
obs. Huet ; GA n° 70 : en effet la Cour de cassation a affirmé depuis l’arrêt de 5 mai 1962 le non exequatur de
jugement rendu en violence la compétence exclusive des juridictions françaises. Cf. Ph. Francescakis, « Le
contrôle ou la compétence du juge étranger après l’arrêt Simitch de la Cour de cassation », RCDIP.1985.243.
1199
Cass. 1er civ., 23 mai 2006, Prieur, RCDIP.2006.870, note H. Gaudemet-Tallon ; JDI.2006.1377, note
Chalas ; D. 2006.1846, chron. B. Audit ; D. 2006.1880, obs. Gallmeister ; JCP.2006.II.10134, note Callé ; GA n°
87.
1200
Pour une étude détaillée Cf. D. Holleaux, Compétence du juge étranger et reconnaissance des jugements,
Thèse, Paris, 1970.
1201
Dans ce cas, même si le texte stipule qu’un Français pourra être traduit devant un tribunal de France, c'est-
à-dire il n’est pas obligé et qu’il puisse renoncer à ce privilège, mais que la tendance de jurisprudence nous
montre que lorsqu’un Français est impliqué celui-ci peut opposer à l’effet en France de ce jugement étranger
prononcé contre lui. V. Cass. 1er civ., 21 janvier 1992, D. 1993.351, obs. B. Audit.

502
exclusive, et pour que ce soit, il faudrait qu’elle désigne uniquement les tribunaux
1202
français .
Une autre conception fondée sur la compétence concurrente s’explique que les
compétences françaises sont normalement concurrentes avec celles des tribunaux étrangers
selon les règles étrangères, pour cette raison si le jugement étranger doit être refusé en France,
ce n’est que pour une seule raison que le litige aurait du être tranché par un tribunal
1203
français .

679. L’absence de compétence exclusive des juges français. Cependant pour le dernier
exclusivisme, l’article 15 du Code civil français qui permet à un Français défendeur de
s’opposer à la reconnaissance ou à l’exécution des jugements étrangers contre lui, amène
beaucoup de critique des auteurs. Cette disposition pourrait protéger un Français des justices
étrangères et en même temps des jugements prononcés à l’étranger. Cet avantage peut
conduire à des mauvaises relations entre la France et d’autres pays. Il est possible que certains
pays utilisent les mesures de rétorsion contre la France telles que les injonctions ou d’autres
techniques procédurales. Pourtant, du point de vue de la France à l’époque, certains systèmes
juridiques ont la conception de justice très différente de la sienne, alors la protection d’une
partie française semble nécessaire à cet égard. Quoi qu’il en soit, ce débat a été finalement
mis fin par la Cour de cassation qui avait écarté ce privilège en décidant dans l’arrêt Prieur en
2006 que « l’article 15 du Code civil ne consacre qu’une compétence facultative de
la juridiction française, impropre à exclure la compétence indirecte d’un tribunal
1204
étranger » . Mais il faut rappeler toujours que la Cour a ajouté deux conditions ensuite
« dès lors que le litige se rattache de manière caractérisée à l’État dont la juridiction est
saisie et que le choix de la juridiction n’est pas frauduleux ».

680. La condition de lien caractérisé entre le litige et le juge saisi. Alors les liens
caractérisés entre le litige et le tribunal saisi est ici un critère indispensable, mais la Cour n’a
pas défini la notion de lien caractérisé du litige, elle a en revanche appuyé sur la méthode du
regroupement des points de contact pour justifier sa décision ; tel est le fait tiré de l’arrêt

1202
GA n° 70, p. 646.
1203
Id., p. 647.
1204
Cass. 1er civ., 23 mai 2006, Prieur, préc., supra note n° 1234.

503
1205
Simitch que la demanderesse était de nationalité anglaise et avait le domicile en
Angleterre qui est également son domicile conjugal, et où les époux s’étaient mariés. Force
est de constater que ce litige présentait les liens plus étroits avec l’Angleterre. Ceci peut
expliquer la compétence exclusive du tribunal anglais sur ce litige. Quand bien même cet arrêt
a été rendu en matière de divorce, mais que l’on pourrait retenir cette méthode généralement
posée par la Cour de cassation pour déterminer un rattachement caractérisé en d’autres
matières aussi. A titre d’exemple, le cas d’une société thaïlandaise ayant siège sociale en
Thaïlande souhaite de faire une requête en France afin d’obtenir l’exequatur d’un jugement de
la Cour thaïe, car le défendeur possède en France des biens qui peuvent être exécutés.

681. L’absence de choix frauduleux des juridictions étrangères. En effet on peut


constater que dès lors que la première condition, lien caractérisé, a été bien remplie, la saisine
frauduleuse de la juridiction étrangère serait difficile à réaliser. Il reste à savoir si le juge
d’exequatur doit-il vérifier la compétence interne ou compétence spéciale du juge étranger ?
L’approche du contrôle de compétence interne de celui-ci semble être critiquée, car pour
1206
certains se demandent comment le juge français pourrait savoir que le juge étranger
applique correctement ou non ses règles de compétence interne…
Nous sommes d’accord avec ces auteurs puisqu’il semble aussi éloigner de la
connaissance du juge français. Il faut rappeler que cette exigence comprend également la
vérification de la compétence territoriale et la compétence d’attribution des juges étrangers en
question. Autrement dit, il faut examiner les règles de compétences du droit judiciaires
compétentes qui sont le droit purement interne de cet État. Pourtant cette exigence a fait
l’objet de la suppression depuis l’arrêt Bachir.

b. L’élimination du contrôle de compétence législative indirecte.


682. En ce qui concerne la vérification d’application de la loi compétente d’après les règles
conflictuelles françaises qui était à l’époque de l’arrêt Munzer (1964) l’une des conditions,
cette condition posait en fait beaucoup de critiques et de difficultés dans l’application. Car,
afin de vérifier la compétence législative du juge étranger, il était requiert d’examiner en
référence la règle de conflit française. Plus précisément, il est exigé au juge étranger
d’appliquer les mêmes règles de conflit de lois que celles du for (pour déterminer la loi

1205
Cass. 1er civ., 6 février 1985, Simitch, préc. supra note n° 1233.
1206
Y. Loussouarn, Droit international privé, op.cit., n° 504.

504
applicable au fond), et lorsque le juge français trouvait que la règle de conflits étrangère n’est
pas analogue à celle de droit français, il pouvait refuser l’exequatur à ce jugement étranger en
cause. Dans cet esprit, on trouve que le concept traditionnel français de l’exequatur semble
incompatible avec le concept de reconnaissance du jugement étranger, car ce dernier peut
envisager les solutions diverses qui sont différentes de celles rendues par le juge français.
Pourtant, comme on le sait, après que la révision au fond de litige a été abandonnée, ceci
signifie que l’ordre juridique français admet la différence possible du jugement rendu à
l’étranger et celui rendu en France. Quand bien même le juge étranger a appliqué une
mauvaise loi, ce fait n’est pas susceptible d’entraîner un refus de reconnaissance en France
1207
dudit jugement étranger . On se demande s’il est convenable de continuer le contrôle de
1208
loi appliquée , car pour certains le contrôle est un dernier atout destiné à protéger l’ordre
juridique et les intérêts du for.
La condition du contrôle de compétence législative étrangère a disparu dans l’arrêt
Simitch (1985), mais que la jurisprudence postérieure continue à procéder au contrôle de la loi
1209
appliquée . Certes, ce contrôle est très critiqué, car il était rarissime que le contrôle de la
compétence de la loi appliquée amène à un refus d’exequatur. Il s’agit de la politique
judiciaire comme l’on a vu dans les motivations données par la Cour de cassation dans l’arrêt
Munzer disposant clairement qu’il était nécessaire d’« assurer la protection de l’ordre
juridique et des intérêts français », si le juge pourrait, par d’autres contrôles, assurer ces
protections, on trouve que ladite condition est apte à abandonner.

683. L’idée de tempérer la rigueur de ce contrôle se présente à travers la « théorie de


l’équivalence ». Cette théorie admet l’exequatur dans le cadre de la divergence des règles de

1207
Cass. 1er civ., 24 novembre 1965, RCDIP.1966.289, note P. Lagarde.
1208
V. en ce sens S. Gressot-Leger, « Faut-il supprimer le contrôle de la loi appliquée par le juge étranger lors
de l’instance en exequatur ? », JDI.2003.765, spéc. p. 777. Cet auteur constate que ce genre de contrôle a été
maintenu par la jurisprudence de manière purement artificielle après que le pouvoir de révision ait été
abandonné.
1209
P. de Vareilles-Sommières, « Jugement étranger », Rép. D. Dr. internat., op.cit., n° 149. V. CA Paris,
22 novembre 1990, Banque Internationale de l’Afrique Occidentale, D. 1992.169, obs. B. Audit ; Cass. 1er civ.,
28 janvier 2003, JDI.2003.468, note J.-M. Jacquet ; RCDIP.2004.398, note H. Muir Watt ; Cass. 1er civ., 4 juillet
2006, Enfant Viola, RCDIP.2007.413 (la condition de conformité conflictuelle) ; Cass. 2e civ., 14 février 2007,
JDI.2007.934, note B. Bourdelois. Contra. S. Gressot-Leger, « Faut-il supprimer le contrôle… », op.cit.,
p. 782 : l’auteur affirma très fermement que l’interprétation selon laquelle l’admission de la théorie de
l’équivalence représentant une atténuation considérable au principe du contrôle de la loi appliquée est erronée à
son sens.

505
1210
conflits de lois lorsqu’il paraît dans le contenu des droits internes une identité .
C'est-à-dire qu’il faut avoir une équivalence entre la loi appliquée par le juge étranger et la loi
désignée par la règle conflictuelle française. Cependant il paraît dans la jurisprudence que le
jugement étranger peut être également reconnu en France lorsque les résultats d’application
des deux lois en cause sont identiques, malgré les différences de dispositions desdites lois.
C’est la même conséquence juridique qui serait prise en compte à ce stade. De surcroît, on ne
peut pas nier que les règles de reconnaissance ou d’exécution des jugements étrangers sont
des techniques de coordination entre les systèmes juridiques qui ont pour but d’assurer la
relativité du traitement juridique des relations privées internationales malgré les différences
1211
persistantes de chaque système .

684. La disparition du contrôle de compétence législative indirecte. En 2007, la Cour de


cassation a abandonné expressément cette condition dans l’arrêt Cornelissen, la Cour décida
que « pour accorder l’exequatur hors de toute convention internationale (…) le juge de
l’exequatur n’a donc pas à vérifier que la loi appliquée par le juge étranger est celle désignée
1212
par la règle de conflit de lois française » .
Dans l’arrêt récent rendu en 2010, en matière de statut personnel mais au sens général,
la Cour de cassation a toujours fait un signe de la suppression du contrôle de la loi
1213
appliquée .
En ce qui concerne l’argument qui est en faveur de ce libéralisme, certains auteurs ont
proposé que « chaque décision étrangère exprime, sur la teneur de la situation qu’elle
tranche et quelle que soit la loi qu’elle met en œuvre, un point de vue autorisé d’un ordre
1214
juridique étranger auquel le litige se rattachait par un lien caractérisé » . C’est en effet
la confiance entre les parties sur la validité internationale qui doit être protégée, comme on a

1210
Y. Loussouarn, Droit international privé, op.cit., n° 505.
1211
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 388. Pour une étude détaillée sur la théorie de l’équivalence
Cf. Ph. Malaurie, « l’équivalence en droit international privé », D. 1962. 215. Cet auteur affirma que
l’équivalence est caractérisée lorsque « le juge estime que, malgré les différences de forme entre la règle
étrangère et la règle française, il y a une similitude de résultats ».
1212
Cass. 1er civ., 20 février 2007, Cornelissen, n° 05-14.082 ; D. 2007.1115, note L. d’Avout et S. Bollée ;
RCDIP.2007.420, note B. Ancel et H. Muir Watt.
1213
Cass. 1er civ., 4 novembre 2010, n° 09-15.302, RTD civ. 2011, p. 115, note J. Hauser.
1214
Cf. B. Ancel et H. Muir Watt, note préc., p. 426. V. aussi P. Mayer, Droit international privé, op.cit.,
n° 365 ; D. Holleaux, Compétence du juge étranger et reconnaissance des jugements, op.cit., n° 175.

506
déjà vu, les droits et les obligations de parties prévus par la règle de droit sont réalisés par un
jugement.
D’après M. P. Mayer, en ce qui concerne le problème de résoudre l’efficacité du
jugement étranger, « on peut certes y greffer celui de la loi compétente, en faisant une
condition de l’efficacité ; mais ce n’est pas logiquement obligatoire (…) Aucune raison
théorique n’impose donc le contrôle en générale de l’application par le juge étranger de la
1215
loi, étrangère ou même française, compétente » . C’est en effet le problème de prise en
considération de l’effet normatif du jugement étranger qui tendait à expliquer la
reconnaissance de celui-ci non comme une situation juridique née du jugement mais comme
un fait de son prononcé et ce même défaut d’analyse conduisait à subordonner la compétence
du juge étranger à la compétence législative attribuée par la règle de conflit du for comme si
1216
ce jugement n’était que l’application de la règle . Au fond, on constate qu’il n’est pas
logique de reprocher le juge étranger de trancher le litige relevant de sa compétence en
appliquant sa propre règle de conflit. Un auteur a même constaté que le contrôle de la loi
appliquée n’a même pas d’utilité propre qui justifierait son maintien dans le droit international
1217
privé français .
La tendance adoptée par les droits conventionnels en matière civil et commerciale
témoigne aussi ce constat, tel est le cas de Règlement Bruxelles I et la Convention de Lugano.
En effet la Convention de Bruxelles a conditionné le contrôle de loi appliquée lorsqu’il
s’agissait de question préalable relative à la matière hors du champ d’application matériel de
la convention. Alors la simple abrogation de cette condition n’est-elle pas pour réaliser la
libre circulation des jugements ?

685. Tandis que l’argument non favorable à l’ouverture aux jugements étrangers portant sur
le débat selon lequel même que l’arrêt Simitch a dégagé le contrôle de compétence législative
indirecte, mais il faut observer que l’arrêt a requiert le rattachement d’une manière

1215
P. Mayer, Droit international privé, loc.cit. : « Il est parfaitement possible, comme le confirme le droit
international privé comparé, de donner ou dénier effet au jugement sans se préoccuper de savoir au terme de
quel raisonnement et en application de quelle loi il a été rendu ».
1216
P. Mayer, « Les méthodes de la reconnaissance en droit international privé », in Mél. Paul Lagarde,
Dalloz, 2005, p. 547, spéc., p. 551. La condition de l’efficacité substantielle du jugement est différente de celle
de l’acte public non émanant d’une autorité étatique : la condition de reconnaissance de cet acte devrait
subordonner au respect de la loi applicable en vertu de la règle de conflit du for, car l’auteur dudit acte ne se
prononce pas avec autorité sur la loi applicable.
1217
S. Gressot-Leger, « Faut-il supprimer le contrôle de la loi appliquée… », op.cit., p. 787.

507
1218
caractérisée entre le litige en cause et le pays dont le juge a été saisi . Ceci était une autre
façon de maintenir le principe du contrôle de la loi appliquée, car suite à l’arrêt Simitch
l’arrêt de la Cour d’appel de Paris a aussi demandé « le contrôle du juge de l’exequatur quant
au choix de la règle de droit applicable par la juridiction étrangère doit de limiter à la
1219
vérification de l’adéquation du droit choisi à la situation litigieuse » , ce qui est
comparable à la formule employé dans l’arrêt Simitch et que selon les auteurs partisans de
cette opinion, ces formules se présentent à la vérification, c'est-à-dire la justice conflictuelle
rayonnait toujours sur le terrain de la reconnaissance du jugement étranger. Cet arrêt a
démontré aussi la réconciliation, l’objectif d’harmonie internationale des solutions et les
exigences de justice conflictuelle qui sont indispensables. Par ailleurs, bien que le contrôle de
loi appliquée ait été supprimée par l’arrêt Cornelissen, le contrôle de la conformité
conflictuelle peut être s’exprimé sous autres formes des conditions de régularité encore
1220
existantes .

686. A notre avis, la politique judiciaire de protection des valeurs promues par le système
français de conflit de lois pourrait conduire à la fin de non réception des jugements français
dans d’autres pays, en particulier dans des États dont la source de reconnaissance et
d’exécution des jugements étrangers se basent sur la courtoisie ou la réciprocité internationale
et notamment lorsque cette même condition ne fonctionne pas dans le système de ces pays.
On comprend la préoccupation fondée sur la qualité du jugement rendu ce que les
défenseurs de l’ouverture aux décisions étrangères ont développé dans leur débat. Il diffère
certainement du cas de l’exequatur en droit conventionnel, car l’abandon dudit contrôle des
conventions dites « européennes » se voit possible, en raison de leur confiance mutuelle entre
les juges des États dans l’espace communautaire. Autrement dit la décision étrangère
bénéficie d’une présomption de régularité, à l’exception d’avoir une preuve contraire. Ce
principe est propre à l’Union européenne. Alors que dans le cadre de droit commun, comment
le juge français par exemple peut faire confiance au juge étranger dans sa manière d’appliquer
la loi ? Cependant si l’on admet le contrôle de la loi appliquée, on revient certainement à
l’exigence de révision du fond antérieurement effacée, car il s’agit de rechercher la solution

1218
Dans l’arrêt Cornelissen, la Cour de cassation a admis que le tribunal américain était compétent lorsque le
litige se présente un lien caractérisé avec les États-Unis, car plusieurs éléments y étaient localisés.
1219
CA Paris, 22 novembre 1990, Banque Internationale de l’Afrique Occidentale, préc. supra note n° 1209.
1220
B. Ancel et H. Muir Watt, note sous arrêt, op.cit., p. 429.

508
découlant de celle-ci. Là aussi c’est une préoccupation sur la bonne ou la mauvaise
application des règles de droit étrangères par le juge étranger. Comme on le sait, c’était la
mise en œuvre du pouvoir de révision qui permettait au juge de l’exequatur « d’examiner la
valeur du dispositif sous le double rapport de l’appréciation des faits et de l’application des
1221
règles de droit » .
De même pour le recours à la théorie de l’équivalence, en réalité il s’agit d’un
mécanisme qui tempère la rigueur de la révision au fond. Comme l’écrit Ph. Malaurie
ainsi : « on ne peut accorder au juge de l’exequatur le pouvoir d’apprécier l’équivalence
qu’en lui accordant la révision au fond, on ne peut lui retirer le pouvoir de révision qu’en lui
1222
retirant le pouvoir de juger des équivalences » . Lorsque la révision au fond avait été
supprimée, la même disparition du contrôle de loi appliquée qui est attachée naturellement
avec la première semble logique.

687. Certes, dès l’arrêt Cornelissen, il n’y a plus de blocage à opposer à la


reconnaissance de plano du jugement étranger, car la révision au fond et le contrôle de
loi appliquée, ont été abandonnés. Cependant, dès lors que le juge du for constate que le
résultat du litige est vraiment intolérable, il suffit de faire le recours à l’exception d’ordre
public international du for. Il en va de même pour le débat développé en matière de statut
personnel que le contrôle de loi appliquée est à peine indispensable, pour que l’intérêt du for
soit protégé, le juge pourrait refuser le jugement étranger en appuyant sur la contrariété à
l’ordre public international français. Seules les trois conditions de contrôle sont suffisantes à
assurer la protection de l’intérêt du for.
1223
En Thaïlande comme en Grande Bretagne , le contrôle de loi appliquée ne se pose
pas comme une condition de l’exequatur un jugement étranger.

2) Conditions d’ordre substantiel.


a. L’absence de fraude.
688. C’est l’une des conditions du contrôle énoncée et réaffirmée plusieurs fois depuis
l’ancien arrêt Munzer. En effet le terme exact employé par la Cour est « l’absence de fraude à
la loi », même dans l’arrêt récent cette exigence y reste toujours. La question peut se poser s’il

1221
Aubry et Rau, t. XII, § 769 ter.
1222
Ph. Malaurie, « L’équivalence en droit international privé », op.cit., p. 218.
1223
Cf. l’avis de M. Wolff, Private International Law, op.cit., n° 233, p. 256.

509
y a l’articulation entre l’exigence de l’absence de la fraude à la loi et le contrôle de la loi
appliquée. La réponse est bien sûr positive comme l’écrit M. B. Audit que : « l’exigence
qu’ait été appliquée la loi étrangère désignée par la règle de conflit française a pour utilité
première de sanctionner le cas échéant une fraude à la loi, avant que de faire respecter un
1224
prétendu caractère impératif du règlement français de conflit » . Certain auteur a proposé
1225
de recourir à la notion de fraude à la loi pour remplacer le contrôle de la loi appliquée ,
mais si l’on prenait un moment de réflexion, on trouverait que ce propos semble ne pas
répondre à certaines questions que nous allons étudier par la suite.

689. Les solutions contradictoires adoptées par la jurisprudence. La décision de la Cour


de cassation dans son arrêt Cornelissen pourrait provoquer une question importante. Comme
on a étudié dans la première partie : la fraude à la loi est une fraude à l’égard de la loi
normalement applicable. Alors, il reste à savoir si l’on ne contrôle plus la loi appliquée par le
juge étranger, comment on pourrait envisager la fraude à la loi ? Autrement dit, la fraude à la
loi ne peut plus intervenir au stade des effets des jugements puisque le juge du for n’est plus à
1226
se préoccuper de la loi appliquée . Comme écrit M. P. Mayer : il s’agit là de la fraude au
1227
jugement et non de fraude à la loi . Plus précisément la fraude à la loi vise à éluder
l’application d’une loi en détournant la règle de conflit de lois, tandis que la fraude au
jugement vise à éluder le prononcé du jugement et elle se réalise à travers le libéralisme des
règles concernant l’effet des jugements.
Rappelons que dans l’hypothèse de la fraude à la loi, si la règle française de conflit de
lois aurait été respectée par le juge étranger, il faut constater que celle-ci n’a pas été
détournée, mais c’est ici le problème de méconnaissance de celle-ci. C’est en effet
l’incompétence de la loi appliquée qui devait être invoquée afin de refuser l’efficacité du
jugement étranger et non l’exception de la fraude à la loi. Mais le contrôle de la compétence

1224
B. Audit, La fraude à la loi, Paris : Dalloz, 1974, p. 205.
1225
S. Gressot-Leger, « Faut-il supprimer le contrôle de la loi appliquée… », op.cit., p. 788 et s.
1226
V. en ce sens H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit., n° 406 : ce constat a
été fait pour l’occasion du contrôle de régularité des jugements étrangers dans le cadre du système des
conventions de Bruxelles mais on peut retenir en général que lorsque le contrôle par le juge requis de la loi
appliquée a été supprimé, il n’est pas possible de refuser la reconnaissance ou l’exécution en invoquant une
fraude à la loi stricto sensu. L’auteur a estimé qu’il n’y a que la fraude au sens large concernant la manœuvre
destinée à tromper le juge qui peut être sanctionnée à ce stade.
1227
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 391 ; V. en même sens J.-M. Jacquet, Droit du commerce
international, Paris : Dalloz, 2012, n° 1015.

510
législative a été déjà supprimée dès l’arrêt Simitch de 1985, on constate ici la contrariété qui
résulte de la décision de la Cour. Cependant l’exception de fraude au jugement est la solution
pour la fraude au jugement, celle-ci permet de refuser l’efficacité du jugement obtenue par la
1228
fraude .

690. Le renforcement du recours à l’exception de fraude au jugement. Au premier


égard, le terme fraude au jugement fait penser au forum shopping. Il faut bien rappeler que la
fraude à la loi apparaît souvent avec la fraude à la juridiction tandis que le forum shopping
pourrait apparaître seul sans fraude à la loi. Certes, on ne peut pas reprocher les parties pour
frauduleux du simple fait qu’elles ont choisi un juge étranger afin de bénéficier de la loi
appliquée alors que la compétence internationale est légitime en soi. Rappelons que la partie
demanderesse a éludé la compétence des juridictions d’un État normalement compétentes afin
d’obtenir du juge d’un autre pays un jugement qui est destiné à être invoqué dans le premier
pays. Comme on l’a dit que la fraude au jugement se réalise en profitant du libéralisme des
règles relatives à l’effet des jugements. La fraude au jugement peut être classée en deux
sortes ; la fraude au jugement étranger et la fraude au jugement français. Il semble que le juge
français devrait sanctionner toutes les deux sortes de fraude.
Lorsque le juge de l’État requis a constaté une telle fraude, il devrait la sanctionner par
l’irrégularité internationale du jugement.

b. La conformité à l’ordre public international de l’État requis.


691. La condition de conformité à l’ordre public international du jugement étranger se
présente comme le couvert de plusieurs contrôles antérieurement abandonnés, il est à noter
par exemple la suppression par l’arrêt Bachir du contrôle de régularité de la procédure suivie
devant les juridictions étrangères, que cette condition devrait s’apprécier uniquement au
regard de l’ordre public international français et du respect des droits de la défense. Il est vrai
que la présomption de l’équivalence de la loi de l’État requis et celle de l’État d’origine
qu’avait fait l’ordre juridique du for aux juridictions étrangères de la façon d’appliquer la loi
ou bien la procédure déroulant devant les dernières n’est pas toujours pertinente. Car, il y a en
réalité certains pays où sa loi procédurale, tel que le droit au procès équitable, n’est pas encore
assuré de manière constante. Dès lors, sous l’égide de l’exception d’ordre public international,

1228
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 394.

511
l’ordre juridique du for pourrait assurer que les jugements étrangers accueillis ne sont pas
moins légitimes que les jugements rendus en France.
L’intervention par cette exception permettrait de contrôler et de mesurer les limites
dans lesquelles le for peut admettre ou tolérer les décisions étrangères, les injustices
processuelles commises à l’étranger seraient prises en compte à ce stade afin de refuser un tel
ou tel jugement étranger. Par ailleurs il faut noter que l’exception d’ordre public au stade de
la reconnaissance des jugements doit être entendue dans l’aspect plus large qu’en matière de
conflit de lois ; c’est dire elle comprend l’ordre public procédural et l’ordre public substantiel.

692. Lorsque l’on parle du droit au procès équitable qui est de l’origine de la Convention
européenne des droits de l’Homme. Il est à noter que, quand bien même nous sommes en
dehors du régime conventionnel de reconnaissance, mais la Cour européenne des droits de
l’Homme a exigé aux juges des États signataires la vérification de la compatibilité de
1229
la procédure suivie à l’étranger d’avoir le respect de droit au procès équitable .
C'est-à-dire que le juge français devrait examiner dans tous les cas si un jugement étranger,
faisant l’objet d’exequatur ayant d’origine de quel pays que ce soit, se conforme ou non à
cette exigence.
La CEDH a précisé par ailleurs ceux qui sont inclus au droit au procès équitable,
il s’agit du droit à une procédure contradictoire pour chaque partie de prendre connaissance et
de discuter toute pièce ou observation soumise au tribunal en vue d’influencer sa décision,
y compris le droit d’être informée de la faculté de se prévaloir de l’assistance d’un avocat.

693. En principe, la rigueur de l’ordre public international mise en jeu au stade de la


reconnaissance ou l’exequatur en France des jugements étrangers devrait buter dans le même
1230
niveau que celle appliquée au stade de l’application des lois étrangères .
Suite au débat de la suppression du contrôle de la loi appliquée, il semble que, comme
affirment les auteurs, les juges français font le recours à l’ordre public international afin de
protéger les principes de justice universelle considérés dans l’opinion française comme ayant

1229
CEDH, 20 juillet 2001, Pellegrini, RCDIP.2004.106, note L.-L. Christians ; RTD civ. 2001, p.986, obs. J.
Marguénaud : la Cour a affirmé que « lorsque la décision dont l’exequatur est demandé dans un État contractant
émane du tribunal d’un État qui n’applique pas la convention, il incombe au juge requis de procéder au contrôle
de conformité à l’article 6 et d’examiner si la procédure relative à la décision qui lui est présentée remplissait
les garanties du procès équitable » (§40).
1230
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 666.

512
1231
une valeur internationale absolue. Citions l’arrêt de la Cour de cassation rendu en 2010 ,
la Cour a affirmé expressément qu’un jugement américain en cause a porté atteinte à des
principes essentiels du droit français fondés sur l’égalité des parentes dans l’exercice de
l’autorité parentale et sur le respect de la vie privée et familiale. Cet arrêt de cassation
témoigne la nécessité de l’intervention de l’ordre public international de l’État requis, même
que le requérant a invoqué que la décision d’appel a violé le principe de non contrôle de la loi
appliquée en mettant ledit contrôle sous l’abri de l’ordre public international. C’était bien
dommage que la Cour n’a pas expressément refusé dans son arrêt que ce contrôle n’était pas
celui de la loi appliquée sous le couvert de l’ordre public international.

694. Le renforcement du recours à l’absence d’inconciliabilité avec d’autres


jugements préalablement rendus. On ne parle pas directement de cette condition car elle est
normalement incluse dans la conformité à l’ordre public international du for. Cette exigence
n’a pas été établie par l’arrêt Munzer, mais elle est affirmée par la jurisprudence postérieure.
L’appréciation de cette exception se fonde sur les conséquences des décisions et non sur leurs
1232
causes , lorsqu’il y a la différence entre l’objet et la cause des deux instances mais leurs
résultats sont incompatibles. C’est là le terrain du jeu de l’inconciliabilité.
1233
En effet une autre solution a été proposée, le recours au conflit de choses jugées ,
mais il est à noter que les deux choses jugées ayant en conflit lorsqu’il y a d’objet identique et
de cause identique, ce qui n’est pas facile à trouver, les deux jugements émanant de pays
différents. Lorsque le jugement étranger rendu en premier est contraire au jugement français
postérieurement rendu, le recours au conflit de choses jugées est favorisé au jugement français
car l’autorité de chose jugée de celui-ci efface celle de toute décision précédemment
prononcée. A l’inverse, si c’est le jugement étranger qui a été postérieurement rendu, il ne
serait pas opportun de recourir à une telle présomption en faveur du jugement étranger en
renonçant à l’exception de chose jugée en France. Dans l’hypothèse où il y a le conflit de

1231
Cass. 1er civ., 4 novembre 2010, n° 09-15.302, préc. supra note n° 1248.
1232
Id., n° 673.
1233
V. Cass. 1er civ., 15 mai 1963, Patino, 1er esp., RCDIP.1964.532, note P. Lagarde ; JDI.1963.1016, note
Malaurie ; JCP.1963.II.13365, note Motulsky. D’après la Cour, « l’existence d’un jugement français, portant
sur le même objet entre les mêmes parties, fait obstacle à toute reconnaissance en France de l’autorité d’une
décision étrangère incompatible avec lui ».

513
jugements entre un jugement étranger et un jugement de for, on peut observer que les auteurs
1234
ont généralement admis la primauté du jugement du for .
En cas de l’inconciliabilité entre deux jugements étrangers susceptible d’être reconnus
en France, l’ordre chronologique est employé comme un critère de s’apprécier. C’est la date
où le jugement initiale rendu qui sera prise en compte et non pas la date où la demande en
exequatur ou reconnaissance introduite devant le juge saisi.

B. Contrôle de régularité internationale en droit thaï.

1) Conditions établies par la décision n°585/2461, l’exécution des jugements


étrangers en Thaïlande.
695. Rappelons encore la décision guide de la Cour suprême Dika jugée depuis l’année
1235
1918 . En l’espèce, il s’agit d’un contrat de vente des véhicules exécuté au Vietnam en
1912. L’acheteur a assigné son vendeur devant la Cour vietnamienne en invoquant que celui-
ci n’avait pas exécuté ses obligations en n’ayant pas livré les véhicules achetés, alors que
le paiement de cet achat avait déjà été fait en bonne et due forme. La Cour vietnamienne
a jugé l’affaire en faveur du plaignant. Avant que le procès d’exécution du jugement ait été
exécuté au Vietnam, le défendeur avait changé son domicile pour venir s’installer en
Thaïlande. Le plaignant, par son représentant autorisé, a saisie le tribunal à Bangkok afin
d’obtenir un jugement d’exécution. Cependant il paraît en l’occurrence que le plaignant
a également porté plainte contre le défendeur pour un nouveau litige devant la Cour thaïe.
Le défendeur a fait valoir que cette décision a été rendue à défaut de comparution de celui-ci,
alors le principe de la contradiction n’a pas été respecté et qu’il avait déjà délivré les
marchandises en cause au plaignant.
Le juge du fond a jugé en faveur du plaignant, affirmé par la décision de la juridiction
d’appel. Le pourvoi a été formé par le défendeur devant la Cour suprême, celle-ci a estimé
que « selon les principes généraux de droit international privé respectés par les pays dans la
communauté internationale, la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers comme
si la créance résulte du jugement en cause est une obligation dans le for sont possible mais
que les juridictions qui rendent ce jugement doivent être compétentes sur ce litige.

1234
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 450 ; Y. Loussouarn, Droit international privé, op.cit., n°
499-4.
1235
Cour suprême Dika, n° 585/2461 (1918).

514
Par ailleurs, ledit jugement doit être définitif et a tranché les différends entre les parties ».
Il y a deux grandes conditions posées par la Cour : la vérification de compétence
internationale des juges étrangers et le caractère définitif du jugement étranger. Autres que ces
conditions, le respect de l’ordre public est également indispensable, quand bien même la Cour
suprême n’a pas décidé expressément ce principe dans sa décision, car c’est un principe
général de droit international privé admis dans tous les pays.

696. Ces deux conditions ont été réaffirmées dans la décision de la Cour suprême en
1236
2001 , cette fois-ci la Cour a ajouté une nouvelle condition s’agissant du respect de l’ordre
public procédural tel que le principe de la contradiction. La Cour a exprimé de façon
expresse concernant la modalité de reconnaissance ou d’exécution des jugements
étrangers qu’il faut assigner à nouveau et que le jugement étranger en cause n’est que la
preuve prima facie de l’obligation. Il ne faut pas confondre avec le cas où le jugement
étranger est invoqué devant le juge du for en tant que fondement de la reconnaissance ou
l’exécution. Il semble que le juge de l’exequatur pourrait examiner en fait et en droit ce même
litige déjà jugé à l’étranger. Certains auteurs ont constaté que la jurisprudence thaïe ne
dispose jamais de vérification d’application les règles de droit ni la conformité de la loi
appliquée par les juges étrangers avec les règles thaïes de conflit pour que leurs jugements
puissent être exécutés en Thaïlande. Pourtant suite à l’analyse de ces décisions, pour une
plainte qualifiée comme un nouveau litige, comment on peut dire que le juge thaï ne rejuge
pas sur le même fait déjà jugé à l’étranger, et que ce procès comprend en soi la vérification de
l’application de règles de droit par le juge étranger. Bien que nous essayions de motiver que
le juge de l’exécution a le pouvoir d’examiner les éléments de fait nécessaires afin d’exercer
le contrôle de régularité, comme admettent les auteurs français « une révision à fin de
contrôle » de la conformité du jugement à l’ordre public, la question se pose toujours si cette

1236
Cour suprême Dika, n° 6565/2544 (2001), Hungin Shipping c/ Maritrade Co.Ltd. En l’occurrence, les
parties du contrat charte-partie ont saisi le tribunal arbitral à Londres pour régler leur litige. Lors du procès de
nomination de l’arbitre, la défenderesse a saisi la High Court, the Queen’s Bench Division, pour trancher la
question de droit à titre préalable, à savoir si le plaignant lui a notifié le déroulement d’arbitrage conformément
ou non à la règle de droit thaï. Car la défenderesse est domiciliée en Thaïlande. La High Court a décidé que cette
notification est régulière et conformée à la loi thaïe, la demande de défenderesse a été rejetée. Alors la dernière
devrait régler les honoraires et les frais au lieu du plaignant. Le plaignant a fait une demande de l’exécution de
cette ordonnance anglaise en Thaïlande, la Cour suprême a décidé que « même que la procédure arbitrale
déroulant à Londres ne prononce pas encore la sentence, mais que cette question préalable n’est pas la même
question portant devant la High Court. Vu que l’ordonnance de la Cour britannique sur cette issue est
l’obligation qui sert une base à la demande du plaignant ; que le plaignant a prouvé que la Cour anglaise avait
rejeté la demande du défendeur et que ce dernier n’a opposé ni la compétence internationale du juge anglais, ni
le problème de non conformité à l’ordre public procédural, dès lors, les frais et les honoraires sont à la charge
de la défenderesse comme jugée la High Court ».

515
explication est convenable à l’hypothèse thaïlandaise. Alors, si on souhaite affirmer que
le juge thaï ne vérifie jamais le fait déjà jugé et l’application de règles de droit par le juge
étranger, il faut trouver la réponse pour une question de savoir pourquoi la jurisprudence
repose-t-elle toujours sur la modalité de l’exécution des jugements étrangers à une nouvelle
assignation devant la Cour ?
Il faut observer que cette décision vise l’exécution du jugement étranger en Thaïlande
et non la reconnaissance, même si on sait qu’il n’y a pas d’exécution sans reconnaissance
mais on préfère la décision qui traite directement cette issue.

697. En somme, on peut regrouper les modalités de reconnaissance et d’exécution des


jugements étrangers admises par la doctrine thaïe en quatre modalités ; la reconnaissance et
l’exécution en plein droit des jugements étrangers ; la reconnaissance et l’exécution un
jugement étranger par l’assignation en vue d’obtenir l’homologation dans le for ;
la reconnaissance et l’exécution par la requête devant le juge de l’exequatur sans nécessité
d’assigner un nouveau litige ; et enfin l’assignation d’un litige devant le juge du for en
employant un jugement étranger comme une preuve prima facie de l’obligation.
Pour la dernière modalité, les parties devraient porter plainte et commencer toute la procédure
comme une nouvelle action. Après avoir étudié toutes ces modalités, on peut dire que
la Thaïlande adopte la dernière qui est la modalité de l’exécution des jugements étrangers.

2) Les modalités à l’anglaise retenues par la Cour thaïe.


698. D’après la plupart des auteurs thaïs, la Cour suprême retient la méthode de
reconnaissance et d’exécution du système anglo-saxon qui mérite de soulever quelques points
importants. Le système de reconnaissance et d’exécution des jugements étrangers en Grande
Bretagne semble plus compliqué, car il faut distinguer deux systèmes : l’un est un système dit
« common law » qui s’applique aux jugements en provenance de pays qui sont hors du régime
de la Convention de Bruxelles et de Lugano tels que les pays asiatiques, les États-Unis,
certains pays de l’Europe de l’Est, etc. Plus précisément il s’agit de droit commun disposé par
la jurisprudence. Alors que, l’autre s’agissant de loi écrite telles que The Administration
of Justice Act 1920 ; The Foreign Judgments Act 1933 ; The Civil Jurisdiction and Judgment
1237
Act 1982 et enfin la série de Conventions de Bruxelles et de Lugano . Nous nous

1237
P. Pivavatnapanich, « La reconnaissance et l’exécution de jugements étrangers en Thaïlande », Rapport de
recherche de Faculté des Sciences Juridiques, Université de Thammasat, 2005, p. 8-9.

516
intéressons à ce stade à l’hypothèse hors du régime conventionnel, dont la Thaïlande, qui est
le cas de droit commun. Pour que le jugement rendu en Thaïlande soit reconnu ou exécuté en
Grande Bretagne, il faut qu’il réunisse les critères suivants : la compétence internationale des
juridictions étrangères rendues le jugement ; la définitive et la finalité de jugement ; et il faut
que le jugement porte sur la créance certaine ou l’obligation spécifique.

699. La première condition portant sur la compétence internationale du juge étranger


signifie que la juridiction qui a rendu ce jugement doit être compétente en vertu de la loi
procédurale de pays d’origine et également compétente à l’égard de règles de conflit de lois
1238
britanniques .
La condition selon laquelle le jugement étranger doit être définitif et consécutif pose
un problème à ce stade, en particulier le critère de qualification si un tel ou tel jugement est
définitif (final and conclusive), si un jugement du juge du premier degré peut être considéré
comme définitif ? Dans le système common law, la jurisprudence est bien constante sur ce
point en estimant que la décision de juge du premier degré est définitive pour la
reconnaissance et l’exécution dans l’ordre juridique britannique, quand bien même les parties
pourraient encore former un pourvoi devant la Haute juridiction. Le jugement définitif au sens
de droit anglais ne signifie que le jugement rendu par la Cour qui a saisi ce litige. Dès lors, si
un tel jugement ne peut être modifié ou abrogé par la même juridiction qui l’a rendu, celui-ci
1239
est définitif selon le principe de finality of the judgment .
En effet, le jugement définitif en droit anglais présente un grand intérêt pour le
créancier, notamment dans l’affaire portant sur le paiement international, qui souhaite que ce
jugement puisse être exécuté le plus tôt possible. Cependant, s’il paraît que le pourvoi a été
déjà formé et la procédure est en cours devant la Haute juridiction, le juge d’exequatur devrait
surseoir à statuer la demande jusqu’à ce que celle-ci délibère son jugement.

1238
Buchanan v/ Rucker (1809), 9 East 192, cité par John O’Brien, Conflict of Laws, London: Cavendish
Publishing Ltd (2nd ed.), 1999, p. 266. En l’espèce, le plaignant a fait une demande devant la Cour anglaise pour
l’exécution un jugement rendu à Tobago. Selon la Cour, il ne paraît pas que le défendeur soit domicilié dans un
tel pays, celui-ci n’est même pas entré dans la juridiction de la Cour de Tobago. Lord Ellenborough a refusé de
reconnaître et d’exécuter ce jugement en donnant une motivation que selon la jurisprudence anglaise il est
nécessaire que le défendeur est domicilié ou au moins sa présence ou il est entré dans un pays où le jugement a
été rendu pour fonder la compétence internationale de ladite juridiction sur ce litige.
1239
Cf. M. Wolff, Private International Law, op.cit., n° 242, p. 267. V. Nouvion v. Freeman (1889), 15 App.
Cas. 1, 13, HL. Dicey & Morris, p. 477 : The test of finality is the treatment of the judgment by the foreign
tribunal as res judicata… A foreign judgment which is liable to be abrogated or varied by the court which
pronounced it is not a final judgment. Cf. Cheshire & North, Private International Law, London : Butterworths,
13th ed., 1999, p. 426 : A foreign judgment does not create a valid cause of action in England unless it is res
judicata by the law of the country where it was given.

517
Enfin un jugement étranger qui serait reconnu ou exécuté par le juge anglais devrait
fixer le montant exact de la somme d’argent (la créance certaine). C'est-à-dire que l’obligation
autre que la somme d’argent y compris les injonctions ne peut pas être reconnues ou
1240
exécutées en Grande Bretagne .

700. Concernant un jugement rendu par défaut de comparution du défendeur, le juge


anglais refusa la reconnaissance ou l’exécution d’un tel jugement en raison de la contrariété
1241
au principe de la justice naturelle . En comparaison avec le droit thaï, comme on a déjà vu
plus haut, la jurisprudence thaïe affirma que la décision rendue à défaut de comparution du
défendeur devant la juridiction étrangère est contraire au principe général de droit
(procédural) et qu’elle peut être révoquée ou infirmée par la même juridiction.
Ces constats nous amènent à conclure que la jurisprudence thaïe est influencée par le
droit commun anglais à l’époque.

§ 2 : Efficacité substantielle des jugements dans le cadre du mécanisme simplifié.

701. Du côté de droit commun applicable aux jugements étrangers, il existe un autre régime
autonome pour traiter ces décisions. Toutefois ce régime ne concerne pas la Thaïlande car
1242
celle-ci n’a signé aucun traité international dans cette matière . Notre étude ne sera pas
complète sans avoir étudié l’efficacité des jugements étrangers dans le cadre de droit
conventionnel. Plus le commerce international s’est développé, plus le développement de
réseau de conventions internationales bilatérales ou multilatérales dans cette matière s’est
étendu. Certes, la coopération entre États sur l’entraide judiciaire internationale en matière
civile et commerciale est indispensable pour répondre aux besoins du commerce international.
La libre circulation des jugements entre les États peut être réalisée dans le cadre de la

1240
Id., n° 243, p. 268.
1241
Ibid.
1242
A savoir que la Thaïlande et la France ont commencé depuis l’année 1980 une négociation de coopération
judiciaire internationale en matière civile et commerciale. Ce projet englobait non seulement la procédure de
l’envoi des pièces et l’examen des preuves mais également la reconnaissance et l’exécution des jugements entre
les deux États. Après avoir étudié le projet proposé par la France, le gouvernement thaïlandais a hésité sur ce
denier point donc la Thaïlande a élaboré une autre proposition à l’exclusion de la reconnaissance et l’exécution
des jugements. Finalement la négociation a été suspendue depuis. (Cf. K. Sandhikshetrin, « La coopération
judiciaire de reconnaissance et d’exécution des jugements étrangers », op.cit., p. 24).

518
coopération entre les États membres ou contractants d’une même espace économique à
l’instar de l’Union européenne dont le succès se passe de tout commentaire.
Après avoir étudié les conditions de contrôle des jugements étrangers qui sont
relativement strictes en droit commun, on verra que seuls les États membres pouvant
bénéficier des règles conventionnels sont les plus libéraux. Nous nous intéressons à ce stade à
la reconnaissance et l’exécution dans le cadre du Règlement Bruxelles I qui occupe de nos
jours le terrain des jugements rendus en matière civil et commercial et remplace la
1243
Convention de Bruxelles de 1968 . En ce qui concerne la nouvelle Convention de Lugano
qui est un instrument analogue au système de Bruxelles, mais qui régit les relations entre
l’Union européenne et d’autres États, cette nouvelle convention de 2007 ouvre la possibilité
aux États hors de l’Europe de s’y adhérer.
Le règlement CE n° 44/2001 a distingué toujours la reconnaissance et l’exécution
comme la Convention de Bruxelles, on admet que la reconnaissance puisse se produire de
plein droit l’efficacité des jugements alors que le recours à une certaine procédure soit
nécessaire pour l’exécution. Cependant le système de reconnaissance et d’exécution des
jugements dans l’espace communautaire est fondé sur le principe de reconnaissance mutuelle,
alors le système est avancé jusqu’à la suppression du procès de l’exequatur dans l’État requis.

A. Conditions de régularité internationale simplifiées.

702. On sait que les jugements provenant d’un autre État peuvent bénéficier de la
simplification de reconnaissance dans un État requis lorsqu’ils sont réguliers au regard du
système posé par les conventions de Bruxelles.

1) Les conditions non contrôlées.


703. Les conditions de régularité des jugements étrangers sous l’empire de Convention de
Bruxelles et de Règlement Bruxelles I sont plus allégées, pour répondre à l’objectif poursuivi
de libre circulation des jugements en Europe. Pour cette raison, certaines conditions
contrôlées sont différentes de celles du droit international commun.

1243
Cf. P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 458. Quand bien même le Danemark n’était pas
initialement lié par ce règlement, mais depuis le 1er juillet 2007, le règlement s’applique à ce pays en vertu de
l’accord relatif à la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et
commerciale conclu entre la Communauté européenne et le Danemark.

519
a. Le non contrôle de la compétence indirecte.
704. Le principe retenu en droit communautaire diffère de celui imposé en droit commun
français ; c’est la prohibition du contrôle de la compétence du juge d’origine. Ce principe
résulte de l’article 35 § 3 du Règlement qui dispose dans le même sens de la Convention.
Par ailleurs les règles de compétence ne concernent pas l’ordre public visé l’article 34 § 1 (R).
Les motivations de l’interdiction de ce contrôle fondées sur l’idée que les conventions de
Bruxelles ont caractère double, c'est-à-dire que leurs règles de compétence posées sont très
strictes d’une part et qu’elles contiennent une disposition garantie le droit du défendeur
1244
défaillant d’autre part . C’est la raison pour laquelle ces conventions accordent
la suppression du contrôle de la compétence au juge étranger. De surcroît, c’est la confiance
entre les juges des États membres de l’Union européenne qui est prioritaire. Grâce à cette
confiance, le principe de non contrôle de la révision au fond peut s’étendre à la compétence
1245
du juge . Il est douteux si le juge de l’État d’origine a statué le litige en fondant sa
compétence sur une règle exorbitante comme le cas de l’article 3 du Règlement par exemple,
on peut penser au juge français et l’article 14 du Code civil, là aussi, selon Mme H.
1246
Gaudemet-Tallon, ceci n’affecte pas l’application de l’article 35 (R) . C'est-à-dire que cet
article permet de reconnaître ou d’exécuter un jugement français sur la compétence du juge
fondé sur l’article 14 du Code civil français car le défendeur est domicilié hors de l’Union
européenne. Mais il faut faire attention au cas où il y a un traité conclu entre l’État requis et
l’État tiers. Car dans cette hypothèse le juge de l’État requis peut refuser la reconnaissance et
l’exécution du jugement.

705. On peut aller plus loin en posant une question à savoir qu’en est-il lorsque
la compétence du juge d’origine ne résulte ni du Règlement ni de la Convention de
Bruxelles ? D’après Mme H. Gaudemet-Tallon, le juge de l’État requis n’est pas à contrôler
la compétence de ce juge, le jugement en question peut toujours bénéficier de la

1244
Cf. Rapport Jenard, p. 46. Ce rapport a précisé que « les règles très strictes de compétence posées au titre
II, les garanties qu’il accorde au défendeur défaillant en son article 20 ont permis de ne plus exiger, de la part du
juge (requis), une vérification de la compétence du juge d’origine ».
1245
Cf. Rapport Jenard, op.cit., p. 46. « L’absence de révision au fond implique une entière confiance dans la
juridiction de l’État d’origine : cette confiance quant au bien-fondé de la décision doit normalement s’étendre à
l’application que le juge a faite des règles de compétence de la Convention ».
1246
H. Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements…, op.cit. n° 382, p. 400.

520
1247
reconnaissance ou l’exécution du système communautaire . Puisque c’est l’idée de
confiance des juges communautaires qui explique cette solution. L’auteur a affirmé qu’il est
possible que le juge de l’État d’origine a fondé sa compétence sur son droit interne ou une
convention internationale, par exemple le cas de l’article 32 du Règlement, dans cette
hypothèse ce jugement ne fait pas l’objet du contrôle de la compétence (art. 35 § 2 (R)).

706. Les exceptions du principe. En premier lieu, lorsqu’il s’agit de compétence exclusive
posée par le Règlement, le litige portant en matière des contrats d’assurance ou de
1248
consommateur (à l’exception du cas de salariés ), le juge requis a le pouvoir de vérifier la
compétence du juge d’origine. Ceci est logique, la protection de partie faible doit toujours être
assurée.
Il faut observer qu’il y a aussi d’exceptions sous lesdites exceptions, c'est-à-dire on
revient au non contrôle par le juge de l’État requis. C’est le cas où la compétence directe du
juge d’origine fondée sur le domicile du défendeur ou sur la volonté des parties, le juge requis
fait confiance au juge étranger pour l’appréciation de sa compétence car le juge d’origine a
appliqué les règles du droit communautaire. En second lieu, lorsqu’il y a un recours contre la
« déclaration » de l’autorité du juge de l’État d’origine qui est le cas comme dans le cadre du
règlement Bruxelles I, où le juge requis doit contrôler la compétence indirecte (art. 66 § 2b).
En dernier lieu, selon l’article 35 § 1 (R), il s’agit du cas où l’État requis a conclu un traité
international avec un État tiers, l’État requis a certainement le droit de refuser la
reconnaissance et l’exécution d’un jugement émanant d’un autre État contractant lorsque la
compétence du juge de ce dernier était fondée sur une règle de compétence exorbitante dans
l’article 3 du Règlement.

b. L’interdiction de la révision au fond.


707. Comme en droit commun, le juge requis ne devrait pas vérifier l’interprétation de la
loi compétente exercée par le juge d’origine de jugement invoqué, il résulte des articles 36 (R)
et 29 (C). La CJCE a expressément interdit le contrôle de la révision au fond en jugeant
qu’une Cour d’appel « ne peut prendre en considération, dans sa décision relative à une

1247
Id., n° 381, p. 400.
1248
En effet on ne voit pas pourquoi il existe la différence entre le salarié et le consommateur ou l’assuré, et
lors de la révision de la Convention de Lugano, qui a repris les mêmes règles que le règlement Bruxelles I, le
rapport Pocar mentionne cependant sur ce point que le demandeur est très souvent le salarié et ce serait lui causer
un préjudice que de contrôler la compétence.

521
demande de sursis à statuer prise sur la base de l’article 38 de la Convention de Bruxelles,
que des moyens que la partie ayant introduit le recours n’était pas en mesure de faire valoir
1249
devant le juge d’État d’origine » . La prohibition du contrôle a été aussi étendue à
1250
appliquer au contrôle de l’exactitude des appréciations de droit ou de fait , elle a par
ailleurs prohibé le refus de la reconnaissance ou l’exécution au seul motif qu’il existe une
divergence entre la règle de droit appliquée par le juge de l’État d’origine et celle qu’aurait
1251
appliquée le juge de l’État requis s’il avait été saisi du litige .
Quand bien même la révision du fond est interdite, force est de constater qu’il faut
admettre le pouvoir de révision à fin de contrôle exercé par le juge requis comme en droit
1252
commun . Lorsqu’il y a une contestation de la reconnaissance, le juge ne peut éviter
d’examiner les éléments de fait ou de droit afin de vérifier par exemple le respect de l’ordre
public international. De surcroît, ce genre de pouvoir devrait s’étendre à la révision à fin de
vérification de l’applicabilité du Règlement Bruxelles I ou de Convention. Car il est logique
que le juge requis vérifie l’applicabilité ou non par le juge d’origine du règlement ou de la
convention.

c. Le non contrôle de la compétence législative indirecte.


708. L’absence du contrôle de la loi appliquée est un principe maintenu généralement par la
Convention de Bruxelles. On sait que ce genre de contrôle a été déjà abandonné depuis
longtemps pour l’exequatur dans le cadre du droit conventionnel. Ceci signifie que « la
différence de la justice rendue au fond n’est pas une cause suffisante de refus de
1253
reconnaissance » . Pourtant la Convention de Bruxelles elle-même a ouvert à la
possibilité de contrôle de la loi appliquée et qu’elle ne paraît plus dans le texte du règlement
Bruxelles I.

1249
CJCE, aff. C-183/90, 4 octobre 1991, Van Loon, RCDIP.1992.130, note H. Gaudemet-Tallon ;
JDI.1992.499, note A. Huet.
1250
CJCE, aff. C-7/98, 28 mars 2000, Krombach, RCDIP.2000.481, note H. Muir Watt ; JDI.2001.690, note
A. Huet et M.-L. Niboyet ; Gaz. Pal. 2000, n° 277, p. 21.
1251
CJCE, aff. C-38/98, 11 mai 2000, Maxicar, RCDIP.2000.504, note H. Gaudemet-Tallon ; JDI.2001.697,
note A. Huet ; JCP (G).2001.II.10607, obs. C. Nourissat.
1252
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 686 ; Cf. H. Gaudemet-Tallon, Compétence et
exécution des jugements…, op. cit., n° 378.
1253
B. Ancel et H. Muir Watt, « La désunion européenne : le règlement dit Bruxelles II », RCDIP.2001.403,
spéc. p. 443.

522
Comme on l’a vu en droit commun que ce contrôle a été aussi effacé ; l’arrêt
Cornelissen de 2007 (v. supra n° 684). En droit communautaire, force est de reconnaître que
ce genre de contrôle ne doit pas s’introduire sous l’abri de l’ordre public, ce constat est
1254
affirmé par le rapport Jenard , alors qu’en droit international commun ceci n’a jamais été
admis expressément par la Cour de cassation. La prohibition de ce contrôle nous conduit à
poser la même question qu’en droit commun ; comment peut-on sanctionner la fraude à la loi
si on ne contrôle plus la loi appliquée ? Ceci peut être contré par l’argument que le texte
communautaire n’impose jamais le contrôle de la fraude, comme écrit Mme M.-L. Niboyet
1255
que c’est une condition oubliée . D’après Mme H. Gaudemet-Tallon, l’auteur a fait
rappeler à un constat selon lequel la loi appliquée aux obligations contractuelles dans les États
européens est apparemment indifférente dans l’État d’origine et celle qui aurait été appliquée
par le juge de l’État requis grâce au Règlement Rome I.
On ne peut pas dire que le texte communautaire écarte tout le contrôle de la loi
appliquée. Mais nous n’allons pas jusqu’à l’exception maintenue par l’article 27-4° de la
Convention de Bruxelles concernant l’état et la capacité des personnes, question qui est
exclue de notre étude. Pourtant, cette disposition n’était plus maintenue par le règlement
Bruxelles I.

709. Le recours à la notion d’ordre public international au lieu de la fraude à la loi. Il


est admis par les auteurs que lorsque l’acte frauduleux a été commis à l’étranger avant que le
jugement soit prononcé ou lors du procès déroulant devant le juge d’origine, le juge de l’État
requis ne pourrait pas examiner sur l’appréciation faite par le juge d’origine. Car ceci est la
1256
révision au fond qui est prohibée par le droit communautaire . Pourtant, lorsque la fraude
a été découverte après le prononcé du jugement par le juge d’origine, dans ce cas la fraude
peut constituer une atteinte à l’ordre public de l’État requis selon le rapport Schlosser ; et que
le juge requis doit toujours s’interroger sur la question de savoir s’il y a encore atteinte à son
1257
ordre public . On peut constater qu’il s’agit de question de l’ordre public qu’il faut vérifier

1254
Cf. Rapport Jenard , p. 44 ; Cf. H. Gaudemet-Tallon, Compétence…, op.cit., n° 389.
1255
M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 689.
1256
H. Gaudemet-Tallon, Compétence…, op.cit., n° 406 ; G. Droz, Compétence judiciaire et effets des
jugements dans le Marché Commun, Étude de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, Dalloz, 1972,
n° 495.
1257
Cf. Rapport Schlosser, n° 192.

523
à ce stade, autrement dit, le juge requis pourrait sanctionner la fraude par le biais de
l’exception d’ordre public international du for. Cependant le juge requis ne pourrait pas
sanctionner en opposant l’exception d’ordre public au jugement étranger obtenu par la fraude
s’il paraît sur le fait qu’il existe, dans l’État d’origine, les voies de recours possibles et que les
parties ne l’ont pas encore exercées.

2) Les conditions contrôlées.

a. Le contrôle de conformité à l’ordre public.

710. Il en va de même qu’en droit international commun que la conformité à l’ordre public
est une condition nécessairement remplie afin que le jugement étranger soit reconnu dans
l’État requis. Afin d’avoir la reconnaissance ou l’exécution, il faut que les effets du jugement
en cause ne soient pas contraires à l’ordre public international de l’État requis. Le respect de
l’ordre public international a été garanti depuis la Convention de Bruxelles l’article 27-1°.
Mais l’innovation paraît dans le règlement Bruxelles I en ajoutant le terme « manifeste » pour
décrire la non-conformité à l’ordre public dans l’article 34 § 1, alors que le texte de la
1258
convention n’en a pas . On sait que la notion de l’ordre public international est en soi la
notion déterminée par le droit interne de chaque État contractant. Mais ceci est un principe
établi par la Cour de Luxembourg qu’il « n’appartient pas à la Cour de définir le contenu de
l’ordre public d’un État contractant, il lui incombe néanmoins de contrôler les limites dans le
cadre desquelles le juge d’un État contractant peut avoir recours à cette notion pour ne pas
1259
reconnaître une décision émanant d’une juridiction d’un autre État contractant » .
Cependant il semble que l’ordre public international doit être entendu au sens strict
comme l’affirme dans l’arrêt Maxicar qu’une éventuelle erreur de droit commise par le juge
d’origine ne pouvait en soi être considérée comme contraire à l’ordre public par le juge de
l’État requis. Il n’est pas facile de s’entendre dans le même sens d’ordre public par chaque
État et il est risqué d’envisager le problème d’interprétation diverse à ce stade. La Cour de
Luxembourg a ainsi tenu d’occasion dans les deux arrêts précités pour encadrer la notion de

1258
En effet la CJCE a décidé en ce sens même au cours de l’application de la convention de Bruxelles, comme
dans les arrêts Krombach et Maxicar : la Cour a estimé que « afin de respecter la prohibition de la révision au
fond de la décision étrangère, l’atteint devrait constituer une violation manifeste d’une règle de droit considérée
comme essentielle dans l’ordre juridique de l’État requis ou d’un droit reconnu comme fondamental dans cet
ordre juridique ».
1259
CJCE, aff. C-7/98, 28 mars 2000, Krombach, préc. : la formule a été reprise par C-38/98, 11 mai 2000,
Maxicar, préc.

524
l’ordre public international ; afin de refuser la reconnaissance ou l’exécution dans l’État
requis un jugement provenant de l’autre État contractant, il faut que les effets du jugement en
cause « porte atteint à un principe fondamental de manière inacceptable l’ordre juridique de
l’État requis ».

711. L’admission de l’exception d’ordre public procédural. La question est de savoir si


l’ordre public au sens de la convention et du règlement englobent ou non l’ordre public
procédural. Nous restons toujours sur l’arrêt Krombach qui pourrait donner la réponse car il
s’agit d’un jugement par défaut de comparution du défendeur. La CJCE a répondu à la
juridiction allemande dans une question préjudicielle en faveur du défendeur en estimant que
le juge allemand peut refuser la reconnaissance du jugement français sur l’action civile en
question en appuyant sur l’exception d’ordre public international. Selon la Cour, le droit de se
défendre est un droit fondamental à l’égard des traditions constitutionnelles communes aux
1260
États membres . Ce sont les articles 27-1° (C) et 34 § 1 (R) qui sont en jeu. Force est de
constater qu’il s’agit ici de droit au procès équitable au sens de l’article 6 de la CEDH, alors
l’admission d’opposer l’exception d’ordre public pour refus de reconnaître le jugement
n’ayant pas été respecté, ce principe fondamental est d’affirmer l’interprétation dans la même
direction des Cour de Luxembourg et Cour de Strasbourg. A notre avis le respect de droit au
procès équitable peut aussi être considéré comme l’ordre public communautaire, le principe
1261
fondamental, qui s’intègre dans la notion d’ordre public international français .

1260
V. par exemple Cass. 1er civ., 16 mars 1999, Pordéa, JDI.1999.773, obs. A. Huet ; RCDIP.2000.181, note
G. Droz. La Cour de cassation française a admis dans cet arrêt qu’il faut refuser la reconnaissance d’un jugement
anglais rendu dans des conditions considérées équivalentes à une privation du droit d’accès à la justice au sens
de la CEDH, selon l’article 27-1° (C).
1261
On sait que l’exception d’ordre public international a vocation pour écarter, à ce stade, tout effet du
jugement étranger considéré comme heurter profondément les conceptions de l’État requis. Par ailleurs, la
fonction naturelle de l’ordre public international étant de défendre les intérêts du for et les valeurs estimées
supérieurs. Pour cette raison l’intervention des droits fondamentaux consacrés par la CEDH à l’encontre les
effets des jugements en cause ne peut se faire que dans le cadre de cette exception. V. aussi P. Mayer, « La
Convention européenne des droits de l’Homme et l’application des normes étrangères », RCDIP.1991.651 :
l’auteur a affirmé que la Cour de cassation n’attache pas d’importance au jeu de l’exception d’ordre public, au
fait que celle-ci ait une valeur constitutionnelle ou internationale dans la mesure où elle est issue d’une
convention internationale ratifiée par la France. Cette thèse met l’accent sur la fonction de l’ordre public
international plutôt que sur son contenu. Cf. D. Cohen, « La Convention européenne des droits de l’Homme et le
droit international privé français », RCDIP.1989.451 : l’auteur a soutenu que les dispositions de la CEDH
devraient s’incorporer à l’ordre public international français et conduire au renforcement et à l’extension de
celui-ci. Donc la convention pourrait constituer à rendre l’ordre public international plus exigent.

525
712. La protection les droits de défendeur défaillant. Il s’agit de condition procédurale
spécifique lorsque le jugement de l’État d’origine a été rendu par défaut ; le défendeur a droit
d’être notifié d’une manière qu’il puisse se défendre, et notamment en temps utile (art.34 § 2),
ceci doit être examiné par le juge d’exequatur. En ce qui concerne la procédure par défaut,
1262
elle doit être entendue de notion autonome en droit communautaire .
La notification en temps utile permettrait au défendeur de bien préparer sa défense. En
droit commun, le mot clé « temps utile » n’est pas disposé, il est possible d’envisager le cas
où la Cour retient le mode de publication par exemple dans un journal d’annonces légales ou à
la Cour, ceci ne permet probablement pas au défendeur de connaître effectivement la
procédure déroulant devant le tribunal. Cependant la violation de cette exigence n’est pas à
sanctionner automatiquement par le refus de reconnaissance ou d’exécution, alors le
1263
défendeur défaillant doit l’invoquer devant le tribunal . Par ailleurs, il faut observer que,
en l’absence de condition de domicile du dépendeur défaillant, alors l’article 34 § 2 englobe
aussi le cas où le défendeur défaillant est domicilié hors de l’Union européenne en raison de
sa formule générale.
A l’égard de la Thaïlande, ce contrôle est utile pour protéger et rendre la justice au
défendeur défaillant. Nous trouvons qu’il est nécessaire de faire en sorte que les juges thaïs
tiennent compte de cette condition, même à travers l’ordre public international. Cependant il
ne faut pas que ce recours soit opéré aux fins dilatoires au détriment des demandeurs de bonne
foi.

b. L’inconciliabilité des procédures ou des jugements.


713. Cette condition contrôlée ne diffère pas de celle de droit international commun. Force
est de reconnaître que le contrôle de l’inconciliabilité des décisions est nécessaire afin d’éviter
l’invocation dans un même pays contractant l’exécution de deux jugements contradictoires.

1262
Il y a plusieurs notions techniques employées dans chaque système juridique. Cf. H. Gaudemet-Tallon,
Compétence…, op.cit., n° 410.
1263
Selon le règlement Bruxelles I, le jugement sera reconnu si le défendeur défaillant a eu connaissance de ce
jugement mais qu’il n’a pas exercé le recours à l’encontre de la décision alors qu’il était en mesure de le faire
(art.34 § 2). Il en va de même, bien que l’acte introductif d’instance n’ait pas été régulièrement signifié ou notifié
au défendeur défaillant en temps utile, si celui-ci n’a pas soulevé son défaillant et a ignoré les voies de recours
dans l’État d’origine du jugement. V. sur ce point H. Gaudemet-Tallon, n° 418. ; CJCE, aff. C-283/05, 14
décembre 2006, ASML Netherlands BV, RCDIP.2007.634, note E. Pataut : la Cour a affirmé que l’article 34 § 2
doit être compris dans le sens qu’ « il est nécessaire que le défendeur défaillant a eu connaissance du contenu de
la décision, ce qui implique que la décision a dû lui être signifié ou notifié ».

526
Cependant en droit communautaire, le motif tiré de l’inconciliabilité ne peut pas être
invoqué dans le cas du jugement rendu dans l’État d’origine et ne peut que s’opposer à une
procédure pendante et susceptible de rendre une décision inconciliable avec le jugement rendu
1264
dans l’État d’origine .
En ce qui concerne la notion d’inconciliabilité, il faut entendre ici comme le cas où les
effets de droit des deux jugements en cause sont contradictoires. C'est-à-dire qu’il n’est pas
1265
nécessaire que ces décisions portent ou non sur le même objet et la même cause ; c’est
leur conséquence et non leur cause qui doit être s’appréciée.
On peut constater les deux cas possibles ; le premier consiste à un jugement
susceptible d’être reconnu ou exécuté qui est inconciliable avec un jugement de l’État requis
rendu entre les mêmes parties ; c’est le jugement de l’État requis qui l’emporterait le premier,
sans tenir compte à la date du prononcé, il en résulte de l’arrêt Hoffmann précité. C’est le
1266
même principe retenu en droit international commun ; la primauté du jugement du for .
Cet arrêt donne lieu à un résultat critiqué, car il ouvre la porte à la réception de la primauté du
jugement de l’État requis peu importe s’ils relèvent de la même catégorie, par exemple le cas
où la Cour de cassation a admis la primauté à une ordonnance française de référé sur un
1267
jugement étranger définitif . D’après Mme M.-L. Niboyet, cette solution a donné lieu à la
saisine dilatoire du juge de référé pour l’objet de contrecarrer les effets d’un jugement
1268
étranger .
Alors que le second cas consiste à un jugement rendu dans un État communautaire qui
est inconciliable avec un jugement émanant d’un autre État membre ou d’un État tiers ; plus

1264
H. Gaudemet-Tallon, Compétence…, op.cit., n° 420.
1265
CJCE, aff. C-145/86, 4 février 1988, Hoffmann Rec.1988.645 ; RCDIP.1988.605, note H. Gaudemet-
Tallon ; JDI.1989.449, note A. Huet : selon la Cour, « afin d’établir s’il y a inconciliabilité au sens de l’article
27-3°, il convient de rechercher si les décisions en cause entraînent des conséquences juridiques qui s’excluent
mutuellement ».
1266
H. Gaudemet-Tallon, Compétence…, op.cit., n° 424 (3) : si le jugement de l’État requis a été prononcé
avant que celui émanant d’un autre État contractant ait été rendu, et que le résultat est inconciliable avec le
premier, il n’est jamais douteux que le juge requis doit refuser de reconnaissance ou d’exécution. Il reste à
savoir si la décision de l’État requis a été rendue après celle de l’autre État contractant ; il y a deux thèses sur
cette issue, la première est de refuser la reconnaissance, l’ordre chronologique n’est pas à prendre en compte à ce
stade, retenue par la CJCE dans l’arrêt Hoffmann. La seconde, au contraire, est en faveur de la reconnaissance ou
l’exécution du jugement étranger qui est antérieurement rendu (MM. Gothot et Holleaux, n° 280 ; Mme H.
Gaudemet-Tallon, n°424 (3) ; Mme M.-L. Niboyet, n° 692).
1267
Cass. 1er civ., 20 juin 2006, n° 03-14553. RCDIP.2007.164, note J.-P. Rémery ; D. 2006.1843 ; RTD civ.
2007.172, obs. P. Thery.
1268
Cf. M.-L. Niboyet, Droit international privé, op.cit., n° 692.

527
précisément le premier jugement est l’objet de reconnaissance dans l’État requis mais qu’il
n’est pas conciliable avec un jugement antérieurement rendu de l’autre État contractant ou
l’État tiers qui est susceptible d’être reconnue aussi dans l’État requis (il n’y a que le conflit
entre deux décisions étrangères à l’égard de l’État requis). Dans cette hypothèse, c’est le
premier jugement, efficace dans l’État requis, qui fait obstacle à la reconnaissance du second,
l’ordre chronologique est respecté ; sous les conditions que ladite décision portant sur un
même objet, une même cause entre les mêmes parties et qu’elle est susceptible d’être
reconnue ou exécutée dans l’État requis (art.34 (4)). Il semble que l’on peut envisager aussi,
dans le même État, les conflits entre jugements qui n’ont pas relevé de mêmes parties. Pour
cette raison l’exigence de condition fondée sur l’identité des parties est critiquée. Puisque
pour certains auteurs le droit national qui aurait vocation à s’appliquer pour régler ce
1269
problème ne sera pas la meilleure solution .

714. La question intéressant est de savoir à quel moment faut-il apprécier le temps de
l’entrée dans le territoire de l’État requis d’un jugement de l’État tiers qui n’a pas conclu un
traité avec l’État requis ? C'est-à-dire que la reconnaissance ou l’exécution de ce jugement
relève de droit international commun de l’État requis, pour l’exécution, il est nécessaire
d’avoir procédé l’exequatur. Alors que, le jugement provenant d’un autre État communautaire
bénéficierait la reconnaissance de plano dans l’État requis (art. 33 § 1). A notre avis, le
moment utilisé pour apprécier la priorité dans le temps est très important, car, si l’on tient
compte de la date où la décision a été rendue, il y a autant de possibilité que la décision de
l’État tiers serait exécutée dans l’État requis. Mais, au contraire, si on tient compte de la date
où elle est dotée d’efficacité dans l’État requis, a priori le jugement en provenance de l’État
communautaire se voit mieux placé que le jugement de l’État tiers. Nous sommes d’accord
1270
avec la thèse favorisée au moment où la décision a été rendue dans l’État tiers .

1269
P. Gothot et D. Holleaux, op.cit., n° 285. Ce serait l’article 618 du CPC, dans ce cas la Cour de cassation
ne pourrait pas annuler les décisions étrangères en cause, elle pourrait déclarer en revanche l’inopposabilité en
France l’une d’elles ou même les deux. On peut aller plus loin en demandant qu’en est-il si l’efficacité de la
décision en question résulte du traité conclu entre cet État tiers et la France (l’État requis) ? Si c’était ce
jugement qui aurait fait l’objet de l’inopposabilité… Car le problème réside sur la compatibilité avec le traité
d’une déclaration d’inopposabilité de ladite décision. D’après ces auteurs, au lieu de prévenir les difficultés
diplomatiques avec des pays tiers, la convention d’adhésion les aurait plutôt favorisées.
1270
Beraudo, « Convention de Bruxelles, Convention de Lugano et Règlement (CE) n° 44/2001 »,
Reconnaissance des décisions juridictionnelles, J.-Cl. Europe, Fasc. 3040, n° 153 ; H. Gaudemet-Tallon,
Compétence…, op.cit., n° 429 : cette thèse tire argument de la lettre des dispositions en cause y compris
l’exemple donné dans le rapport Schlosser. Contra. G. Droz, Compétence judiciaire…, op.cit., n° 524 ; P.
Gothot et D. Holleaux, La Convention de Bruxelles…, op.cit., n° 283 et 285. Les auteurs soutiennent une thèse

528
B. Renforcement de la suppression de l’exequatur, l’argument critiqué.

715. On sait que le système de reconnaissance et d’exécution des jugements par le


règlement Bruxelles I a pour but de faciliter et simplifier le procès entre les États
communautaires. Par rapport à la Convention de Bruxelles, le règlement n° 44/2001 constitue
un changement remarquable ; le texte de ce dernier ne réserve que le contrôle purement
formel. Le juge de l’État requis ne pourrait pas statuer s’il existe un motif de refus l’exécution
du jugement, il ne peut se faire que dans le cas où il y a un recours à l’encontre le jugement,
l’objet de la requête de reconnaissance ou d’exécution. Il s’agit de la procédure unilatérale,
l’idée se fonde sur l’éviction la possibilité de soustraire aux mesures d’exécution par le
défendeur, et qu’il est normal que la décision rendue dans un État communautaire s’impose
dans un autre État contractant sans le débat contradictoire à ce stade.

716. En 2009, la Commission a adopté un rapport et un livre vert sur la révision du


règlement Bruxelles I, que les questions principales portent sur l’élimination les derniers
empêchements à la libre circulation des jugements et afin de protéger des citoyens et
entreprises européennes qui sont en procès avec des parties domiciliées dans un État tiers.
Cependant le point très important qui nous concerne à ce stade est l’objectif principal proposé
par la Commission européenne sur la suppression de la procédure d’exequatur dans tous les
1271
domaines couverts par le Règlement . Selon la Commission, le motif de refuser la
reconnaissance en vertu de l’article 34 sera toujours maintenu, mais il est nécessaire de
supprimer l’exequatur en raison de l’application générale du principe de reconnaissance
mutuelle car il semble incohérent de continuer faire la distinction entre reconnaissance et
1272
exécution. Cependant cette réforme se voit très critiquée pour les auteurs . Un auteur a

qui tient compte du moment où le jugement rendu à l’État tiers est doté d’efficacité sur le territoire de l’État
requis. Force est de constater que cette thèse est favorisée à la libre circulation des jugements entre les États
contractants dans l’Union européenne.
1271
Cf. Rapport au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur
l’application du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et
l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, Bruxelles, 21 avril 2009, COM(2009) 174 final, pt.
3.1 ; Cf. Avis du Comité économique et social européen sur le « Livre vert sur la révision du règlement (CE) n°
44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et
commerciale », Bruxelles, 16 décembre 2009, COM(2009) 175 final, pt. 4.3.
1272
E. Guinchard et M. Douchy-Oudot, « Espace judiciaire civil européen », RTD eur. 2010.927. Les auteurs
ont soutenu que c’est parce que l’exequatur étant le symbole d’un droit international privé classique fondé sur la
conception de frontière qui n’a pas sa place dans le système communautaire et le Marché intérieur. Il semble
qu’afin d’harmoniser les droits nationaux dans l’Union européen, le seul argument développé par la Commission
est leur disparité. La question est de savoir s’il est la meilleure solution.

529
admis qu’il est possible de supprimer la formalité d’exequatur, mais il a affirmé que ceci
devrait être le contrôle modéré au lieu de l’abrogation radicale des chefs du contrôle associé à
l’exequatur. Autrement dit, on peut effacer la formalité d’exequatur mais sous condition qu’il
1273
faut maintenir la possibilité d’un contrôle dit « second regard » sur la décision étrangère .
Si la suppression résulte d’une inquiétude sur le coût et la durée, force est de constater
que cette proposition modérée pourrait sûrement résoudre ce problème. On sait qu’après que
la jurisprudence française a abrogé la révision au fond, c’est le contrôle associé à l’exequatur
qui filtre les jugements étrangers afin de protéger le for. Par ailleurs, nous savons que
l’objectif principal de la Convention et du Règlement Bruxelles I est de protéger le défendeur
1274
domicilié dans l’Union européenne, mais si un frein permettant de repousser ce qui avait
été manifestement mal jugé à l’étranger aurait été effacé, comment la protection du débiteur
défendeur pourrait être assurée ?

1273
L. d’Avout, « Faut-il supprimer l’exequatur dans le contentieux transfrontalière en Europe ? », Droit et
Procédures, novembre 2010, n° 10, p. 71.
1274
Le terme employé par L. d’Avout.

530
717. Conclusion du chapitre. On trouve que la reconnaissance et l’exécution des
jugements étrangers par l’État requis semblent simples dans le cadre de l’application de règles
uniformes. Observons que ces règles se fondent sur la confiance mutuelle des juges des États
membres de telle ou telle communauté économique. C'est-à-dire que la chose la plus
importante dont le groupe de la coopération économique devrait tenir compte est que chaque
membre devrait développer ses systèmes juridiques et judiciaires afin d’atteindre plus ou
moins un niveau comparable avec ceux de ses partenaires et trouver un mécanisme simplifié
acceptable par tous. Car la grande différence entre les systèmes de chaque État membre fait
obstacle au principe de confiance mutuelle.
On voit que l’Union européenne est très avancée dans ce domaine. Un projet tendant à
éliminer l’exequatur dans chaque pays est en cours en ne laissent place à l’avenir qu’au seul
contrôle formel. On croit que l’ASEAN envisagera un jour ce problème. Il est vrai que la
reconnaissance et l’exécution en droit international commun sont toujours compliquées.
Notons comme exemple la Thaïlande où la jurisprudence en la matière reste encore très
rarissime. Mais la pratique de la Haute juridiction nous affirme qu’elle n’est pas hostile à la
reconnaissance et l’exécution de jugements étrangers. Actuellement, c’est l’arrêt phare de
l’ordre juridique thaï qui prévaut.

531
532
Chapitre second
RECEPTION DES SENTENCES ARBITRALES INTERNATIONALES.

718. La reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers dans l’autre ordre juridique
sont indubitablement compliquées, en particulier entre les pays qui ne sont pas signataires des
conventions internationales y relatives. Cependant il est bien différent dans la matière de
l’arbitrage international puisque la plupart des États ont ratifié ou adopté des règles de
conventions internationales sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales. Dès
lors, une sentence arbitrale est plus facile à exécuter qu’un jugement ou une décision délibérée
par la juridiction étatique étrangère. Pourtant ce n’est pas à dire que cette libre circulation de
la sentence arbitrale ne connaisse aucune limite. Certaines conditions devraient se conformer
afin de contrôler soit le contenu soit les moyens de rendre la sentence. Certes, le juge étatique
n’intervient pas pour statuer sur la compétence des arbitres, comme on le sait, c’est le principe
de compétence-compétence qui prévaut ; le juge n’a pas le pouvoir avant que l’arbitre ne
statue lui-même sur sa compétence. On peut constater que le contrôle par l’État ne reste pas
uniquement dans l’étape du déroulement de la procédure arbitrale mais le juge étatique exerce
son pouvoir de vérifier la compétence de l’arbitre après que la sentence soit rendue. Force est
de reconnaître que l’État ne laisse jamais la justice privée d’exercer sans aucun examen.
Normalement, une sentence ferait l’objet de double contrôles ; l’un par le droit de l’État du
siège de l’arbitrage ; et l’autre par le droit de l’État où la sentence devrait être exécutée.

719. La notion de la sentence arbitrale étrangère. La plupart des lois de l’arbitrage


international ne définit pas la notion de la sentence. Le droit thaï et le droit français prennent
également la même position sur cet égard. Il en va de même pour les conventions
internationales sur l’arbitrage qui restent toujours silencieuses. Il faut observer qu’au lieu de
définir la notion de la sentence, les lois ou les règlements d’arbitrage ne précisent
normalement que les conditions de forme et le contenu de celle-ci. Force est de reconnaître
que la recherche de définition définitive de la sentence arbitrale est une tâche très délicate,
malgré l’effort de la définir, il existe toujours de nombreuses controverses. Par exemple, les
décisions du tribunal arbitral relatives aux mesures provisoires ou conservatoires ; ou les
décisions statuées sur la compétence de l’arbitre, peuvent-elles être considérées comme une
sentence ? Car, comme l’on a déjà étudié, le prononcé de telles ou telles mesures est
susceptible d’être aussi qualifié de sentence. Il semble qu’il n’y a pas de consensus même au

533
sein des rédacteurs de la Loi type sur ce point. Par ailleurs, la Convention des Nations Unies
pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères (ci-après la
Convention de New York de 1958) dispose que « on entend par sentences arbitrales non
seulement les sentences rendues par les arbitres nommés pour des cas déterminés, mais
également celles qui sont rendues par des organes d’arbitrage permanents auxquels les
parties se sont soumises ». On trouve que ceci ne répond pas à la question posée.

720. La jurisprudence française a défini la notion de sentence comme ceci : « peut être
définie, comme sentence arbitrale, les actes des arbitres qui tranchent de manière définitive,
en tout ou en partie, le litige qui leur a été soumis, que ce soit sur le fond, sur la compétence
1275
ou sur un moyen de procédure qui les conduit à mettre fin à l’instance » . Et que cette
définition semble être acceptée généralement chez les auteurs.
D’après cette définition, on peut tout d’abord considérer même que la sentence est un
acte de l’arbitre, mais ce n’est pas à dire que tous les actes peuvent être qualifiés de sentence ;
ledit acte doit « trancher » le différend. Dès lors, la simple mesure d’instruction n’est pas une
sentence car elle ne constitue que des mesures d’administration judiciaire.
Ensuite, la sentence doit être « définitive » ; on entend la définitive sur le différend
qu’elle tranche et on peut constater que le fait que les décisions soient limitées dans le temps
ne fait pas obstacle à la qualifier de sentence. Car, on trouve par exemple la sentence qui
1276
oblige la partie de souscrire à la clause de non-concurrence pour une durée limitée . C’est
la raison pour laquelle on peut classer une décision provisoire telle que les mesures
provisoires comme une sentence au sens de la Convention de New York de 1958, ce qui
donne beaucoup d’intérêt sur la reconnaissance et l’exécution dans les États membres. Mais
nous allons voir qu’il y a aussi des sentences qui n’entrent pas dans le sens de « sentence »
selon la Convention de New York de 1958.
Puis, la sentence arbitrale doit mettre fin au litige, donc la décision ou l’ordonnance de
mesures provisoires et conservatoires, même si elles ont été sous forme de la sentence,
n’entrent pas dans le sens véritable de la sentence arbitrale définie par la jurisprudence. Il faut
rappeler que seule la nature de l’acte de l’arbitre qui doit être prise en considération pour la
qualifier, sans tenir compte de terme utilisé par les arbitres.

1275
CA Paris, 25 mars 1994, Sardisud, Rev.arb.1994.391, note Ch. Jarrosson.
1276
A. Reiner, « Les mesures provisoires et conservatoires et l’arbitrage international, notamment l’arbitrage
CCI », JDI.1998.853, spéc., p. 899-900.

534
Enfin, la force obligatoire de sentence est aussi un élément indispensable, car la
sentence doit être une décision contraignante et liée les parties ; ceci peut expliquer par le
caractère juridictionnel de l’arbitrage qui diffère d’autres modes alternatifs de règlement des
litiges.
Un autre élément important pour qualifier de sentence arbitrale, affirmé par la Cour,
1277
est qu’il faut avoir la possibilité de formuler un recours à l’encontre d’une telle décision .
Autrement dit, si la décision a été prise en autre forme telle que l’ordonnance de procédure, la
porte n’est pas ouverte pour faire le recours. La Cour a estimé dans cette même décision qu’
« une décision du tribunal arbitral qui s’est définitivement prononcée sur la demande de
mesure conservatoire a pu exprimer sous forme de sentence sa décision ».

721. Il reste à savoir comment la décision partielle du litige peut être considérée comme
une sentence ? Pour répondre à cette question, il faut bien distinguer la sentence au sens de
chaque droit national de la sentence au sens de la Convention de New York de 1958. Certes,
on peut dire qu’une décision qui tranche, selon la jurisprudence française précitée, « en tout
ou en partie » le litige en cause, sera qualifiée aussi comme sentence arbitrale. Puisqu’une
décision rendue sur la compétence, la validité du contrat principal ou la responsabilité des
dommages-intérêts, tranche le litige de façon définitive et finalement met fin à celui-ci. Il
1278
n’est pas obligé que la sentence arbitrale doit trancher intégralement le litige .
Pourtant si l’arbitre a prononcé une décision procédurale, il reste à savoir si celle-ci
pourrait être qualifiée de sentence selon la Convention de New York de 1958 ? D’après A.
Reiner, l’auteur a refusé de qualifier une telle décision de sentence arbitrale au sens de la
Convention de New York, pour lui, « l’admission automatiquement un fondement contractuel
aux mesures provisoires en y accordant la qualité de sentence démontre la confusion entre la
compétence et le fond. Car, admettant à l’arbitre la compétence pour prononcer une telle

1277
CA Paris, 7 octobre 2004, Otor, JDI.2005.341, note A. Mourre ; Rev. arb.2005.737, note E. Jeuland ; JCP
2005.II.10071, note J.-M. Jacquet.
1278
Cependant il faut signaler que les auteurs suisses soutiennent la position inverse en refusant la notion de
sentence partielle dans la mesure où les décisions qui tranchent des questions de fond, comme la validité du
contrat principal, le principe de la responsabilité par opposition au quantum des dommages-intérêts, ne
constituent pas des sentences. Mais il ne s’agit que de décisions préparatoires ou préjudicielles. Par conséquent,
celles-ci ne pourraient pas faire l’objet d’une demande en annulation indépendamment de la sentence à intervenir
sur les demandes formulées par les parties. Cf. P. Lalive, J.-F. Poudret, C. Reymond, Le droit de l’arbitrage
interne et international en Suisse, Lausanne : Payot, 1989, p. 406-407.

535
mesure n’est pas à dire que les parties ont accepté dans quelle situation l’arbitre devrait
1279
utiliser ces pouvoirs » .

722. En Thaïlande, la loi reste silencieuse sur ce point mais un auteur a défini une sentence
arbitrale comme : « une décision définitive de l’arbitre rendue après avoir tranché le litige,
décision qui s’impose aux parties du litige. La sentence peut être provisionnelle mais
1280
limitée dans certain temps » . Cette définition ne mentionne pas de sentence partielle ou
intégrale. Cependant qu’en France, il est admis en matière d’arbitrage international de la
sentence partielle comme l’on a déjà cité plus haut. A notre avis, la pratique thaïe ressemble à
la doctrine française, c'est-à-dire que l’on admet aussi la décision qui tranche en manière
définitive une partie du litige en tant que sentence partielle.

723. La juridicité de sentence arbitrale internationale. Lorsque l’on parle de la juridicité


de la sentence, c’est dans le but de reconnaître et justifier l’efficacité de celle-ci. Partant de la
conception constante que l’arbitre n’a pas de for, on entend dans le sens que le siège
d’arbitrage situé dans un État n’est pas le for de l’arbitre. Alors la sentence arbitrale est
étrangère par rapport à tous ordres juridiques étatiques. Quelle est la loi applicable pour
apprécier la validité de la sentence arbitrale ? D’après M. E. Gaillard, « tous les droits
susceptibles d’entrer en contact avec l’arbitrage en question ont une vocation égale à se
prononcer sur la validité de la sentence ». C'est-à-dire que les lois du lieu d’exécution de
sentence semble être au premier rang comme ce même auteur qui a dit qu’elles sont « aussi
1281
fortes à le faire que celles du lieu du déroulement des opérations d’arbitrage » . En effet,
à notre avis, le caractère international de la sentence dépend du point de vue du juge
homologué, plus précisément, on n’a pas l’intention d’attribuer la nationalité à la sentence.
Mais on qualifie le caractère extranéité pour se dissocier de la sentence purement interne qui

1279
A. Reiner, « Les mesures provisoires et conservatoires… », op.cit., p. 901.
1280
P. Horayangkura, La pensée juridique sur le règlement des différends du commerce, Bangkok :
Samyanwitayapatana, 1997, p. 102. Après la lecture, nous observons qu’il est rare de trouver la définition de la
sentence arbitrale chez les auteurs thaïs, parfois ils commencent par élimination des décisions qui ne sont pas
qualifiées de sentence mais ils ne définissent pas exactement cette notion. V. sur ce point J. Bunnag, « Le
contrôle de droit par le juge de la sentence arbitrale », Cases and Materials on Arbitration, Bureau de la
magistrature, Ministère de la Justice, 1992, p. 84-87.
1281
E. Gaillard, « L’interférence des juridictions du siège dans le déroulement de l’arbitrage », in Liber
amicorum Claude Reymond, Autour de l’arbitrage, Paris : Litec, 2004, p. 83.

536
envisage des conditions différentes stipulées par d’autres dispositions distinctes. Pourtant on
ne peut pas refuser que la sentence conserve un lien avec le siège arbitral.
La question peut se poser si les arbitres n’ont pas de for comme le juge étatique, alors
quel droit ou quelle autorité lui rend la juridicité ? La réponse que l’on peut donner est ainsi :
d’une part, partant du fait que la procédure arbitrale peut se dérouler dans son siège car la loi
d’un État déterminé le lui permet ; d’autre part, la sentence arbitrale doit être homologuée
dans un autre État et que ceci est possible grâce à sa loi, on peut dire que la loi de cet État
1282
valide rétrospectivement le processus . Plus précisément, la sentence arbitrale diffère de
1283
jugement ou une autre décision émanant d’un État, elle n’est qu’un simple acte privé .
Dans cet esprit, c’est la règle étatique qui devrait lui faire produire un effet juridique.
La sentence arbitrale n’est pas de norme et en tant qu’un acte privé elle relève de la
méthode du conflit de lois ; alors en dehors du cadre de droit conventionnel il appartiendrait à
la loi désignée par la règle de conflit de lois de déterminer les conditions de validité et les
effets de la sentence.

724. Une fois que la sentence a été rendue, il est possible qu’une partie fasse une demande
en annulation cependant que l’autre fasse une demande d’exequatur à l’étranger presque dans
la même période. Normalement les voies de recours ouvertes pour les parties ont un délai plus
court que celui de l’exécution de la sentence qui demande une durée relativement longue,
environ trois ans en droit thaï. Alors il nous convient d’étudier tout d’abord le recours à
l’encontre de la sentence arbitrale internationale (Section I). Comme on le sait, l’arbitre est
juge privé alors la sentence rendue par celui-ci ne dispose pas de force exécutoire en soi. C’est
l’ordre étatique qui lui confère l’efficacité international, cependant ceci ne pourrait pas
exercer sans contrôle. L’objet du contrôle est certainement le contenu de la sentence et les
conditions dans lesquelles elle a été rendue. Nous étudierons par la suite la réception dans
l’ordre juridique étatique de sentence arbitrale (Section II).

1282
E. Gaillard, « Souveraineté et autonomie : réflexions sur les représentations de l’arbitrage international »,
JDI.2007.1163. spéc. p. 1173.
1283
S. Bollée, Les méthodes du droit international privé à l’épreuve des sentences arbitrales, Economica,
2004, n° 230.

537
Section I
Recours à l’encontre la sentence arbitrale internationale.

725. Avant que l’on prenne en considération les conditions du recours à l’encontre de la
sentence arbitrale, la question majeure à ce stade est de savoir quel est la juridiction
internationalement compétente en matière d’annulation ? On peut penser à la loi applicable à
la procédure mais il semble que ce critère présente une faiblesse, car normalement les parties
n’ont pas procédé leur choix. Alors que la loi du siège de l’arbitrage peut donner la réponse à
cette question, en particulier ceci est l’une des raisons qui persuade les parties de choisir le
siège de l’arbitrage en tenant compte de ses règles de droit sur l’arbitrage international.
Lorsque l’on a déjà déterminé la juridiction internationalement compétente, une autre
question plus précise peut se poser pour savoir quelle juridiction la demande en annulation
devrait-elle en relever (§1). Ensuite on verra les méthodes de recours à l’encontre de la
sentence arbitrale (§2).

§1 : La compétence juridictionnelle impliquée pour connaître la sentence.

726. Comme l’on a déjà étudié dans le chapitre précédent, il est possible d’envisager les
litiges à caractère international qui impliquent le jeu de personnes morales de droit public et
ceci peut amener à la question de juridiction compétente pour connaître le recours à l’encontre
de la sentence arbitrale internationale ou même la question de la reconnaissance ou
l’exécution de celle-ci. Comme on le sait, pour répondre à cette question il faut tout d’abord
qualifier si le contrat entre dans le cadre d’un contrat administratif ou il reste dans celui de
contrat de droit privé. Rappelons que quand bien même la personne de droit public est en
cause, ce n’est pas à dire que le contrat conclu par celle-ci doit être un contrat administratif.
Malgré son caractère administratif, il est possible aussi qu’un tel contrat relève de la
compétence de juridiction judiciaire comme décidé la Cour d’appel de Paris. La série de
décisions sur l’affaire de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (ci-après
INSERM) déjà cité auparavant peut clarifier sur ce point, car l’INSERM, personne morale
publique, a saisi toutes les voies possibles pour lui rendre la justice ; aussi bien les juridictions
judiciaires que les juridictions administratives. Cette question est très importante parce que la
réponse en faveur de telle ou telle juridiction produirait le résultat différent non seulement au
niveau de la voie de recours contre la sentence arbitrale y compris la rigueur du contrôle, mais
également de l’aspect psychologique. On trouve que lorsque l’une des parties du contrat est

538
une personne morale publique et son cocontractant est une personne morale de droit privé
étranger, on ne peut pas éviter un souci concernant l’intérêt public pour certains et l’intérêt du
commerce international pour d’autres.
Nous étudions tout d’abord la vocation de juridiction judiciaire qui, par la
jurisprudence constante, met l’accent sur le centre d’intérêt du commerce international en
s’appuyant sur le critère de l’internationalité de l’arbitrage afin de déterminer la compétence
juridictionnelle. Alors que les juridictions administratives tiennent également sa position sur
certains contrats qui devraient relever exclusivement de leur compétence (A). Ensuite, nous
étudierons le degré différent sur le contrôle effectué par chaque juridiction (B).

A. Les juridictions concurrentes pour le recours en annulation.

1) La vocation de juridiction judiciaire.


727. La compétence du juge judiciaire sur le contrat « hybride » à caractère
international. La question a porté sur le recours formé contre une sentence arbitrale rendue
en France pour le litige mettant en jeu les intérêts du commerce international entre les
contractants de nature juridique différente ; l’un est personne morale publique INSERM,
l’autre est la fondation norvégienne Letten F. Saugstad, personne morale de droit norvégien.
La validité de la sentence arbitrale a été contestée tout d’abord devant la juridiction
judiciaire en faisant valoir que le protocole d’accord était un contrat administratif conclu par
une personne morale de droit public et que ce contrat avait pour l’objectif de construction
d’un bâtiment destiné à la recherche scientifique qui consiste à une mission de service public.
Par conséquent, ce contrat relève de la compétence de la juridiction administrative et non
judiciaire. La Cour d’appel de Paris a affirmé sa compétence en décidant en 2008 que « le
recours en annulation de la sentence arbitrale international formé par un établissement
public français (INSERM), relevait de la compétence de la juridiction judiciaire, même s’il
1284
portait sur un contrat de nature administrative » .
En l’espèce, l’INSERM a fait valoir que la convention d’arbitrage est nulle selon
l’article 2060 du Code civil qui interdit le règlement des différends de personne morale
publique en concluant la clause compromissoire. D’ailleurs il ne paraît aucune loi ou
convention internationale qui autorise l’INSERM de se compromettre. La Cour a considéré, en

1284
CA Paris, 13 novembre 2008, INSERM, D. 2009.Chron.2390, obs. S. Bollée et 2962, obs. T. Clay ;
Rev.arb.2009.389, note M. Audit.

539
s’appuyant sur l’article 1505 du CPC, que le recours en annulation de la sentence arbitrale
rendue en France en matière d’arbitrage international doit être porté à juste titre devant
la Cour d’appel de Paris dans le ressort auquel la sentence a été rendue (l’article 1519 du
Décret du 13 janvier 2011 retenu toujours ce principe). C’est la raison pour laquelle la
procédure engagée devant les juridictions administratives ou le Conseil d’État est sans
incidence sur ce recours devant la juridiction judiciaire. Elle a affirmé par ailleurs que
l’interdiction pour l’établissement public de se compromettre est limitée aux contrats d’ordre
interne et que cette règle n’est pas d’ordre public international que la Cour d’appel devrait en
tenir compte. Cependant il paraît dans le fait que l’INSERM a saisi la Cour administrative
d’appel de Marseille d’un appel pour savoir si l’action introduite par cet Institut relevait ou
non de la compétence de la juridiction administrative et que le Conseil d’État a renvoyé cette
question au Tribunal des conflits.
1285
Dans la décision du 17 mai 2010 le Tribunal des conflits a jugé que la juridiction
judiciaire était compétente pour connaître le recours en annulation.
Enfin la Cour de cassation a décidé en 2011, affirmant la décision de la Cour d’appel
de Paris et celle du Tribunal des conflits selon lesquelles « la juridiction judiciaire était
1286
compétente pour connaître le recours en annulation » . La Haute juridiction a appuyé sur
la définition économique du litige afin de confirmer le caractère international de l’arbitrage
1287
qui rend compétence à la juridiction judiciaire. En effet que le rapport Labetoulle
lui-même a quasiment cédé, car le Conseiller Labetoulle a finalement admis lors du
1288
Colloque que le projet ne pourrait pas aller à l’encontre des engagements internationaux
de la France et que le juge judiciaire serait finalement plus approprié qu’un juge d’appui
administratif.

728. En ce qui concerne la question sur le comportement de l’INSERM qui a invoqué sa


qualité de personne morale publique pour refuser l’efficacité de la clause compromissoire, il

1285
Trib. confl., 17 mai 2010, req. n° 3754, INSERM, AJDA.2010.1047 ; D. 2010. Actu.1359, obs. X.
Delpech ; D. 2010. Jur.2633, note Lemaire ; JCP 24 mai 2010, n° 552, obs. T. Clay et n°585, obs. E. Gaillard ;
Rev.arb.2010.275, note M. Audit ; P. Cassia, « Les sentences arbitrales internationales : une compétence de
contrôle partagée entre les juridictions françaises : A propos de la décision INSERM », AJDA.2010.1564.
1286
Cass. 1er civ., 26 janvier 2011, n° 09-10.198, INSERM, D.2011.AJ. 28 janv. 2011, comm. X. Delpech.
1287
Rapport du groupe de travail sur l’arbitrage en matière administrative du 13 mars 2007, Rev.arb.2007.651.
1288
Conseil d’État, Chambre Nationale pour l’Arbitrage Privé et Public, « L’arbitrage et les personnes morales
de droit public », Colloque du 30 septembre 2009. Disponible sur le site :
http://www.conseil-État .fr/cde/node.php?articleid=1812

540
peut se voir comme s’il n’a pas de bonne foi lors de la conclusion du contrat, mais sur cette
issue le droit français ne tient pas compte de la contestation d’une compétence arbitrale pour
1289
suspect car il ne résulte pas forcément de mauvaise foi . Là aussi, à notre avis il faut
recourir au principe de l’interprétation de la volonté commune réelle des contractants afin de
régler le problème de compétence de l’arbitre.

729. En Thaïlande, le problème de concurrence entre les juridictions judiciaire et juridiction


administrative se pose aussi dans la pratique. Le recours contre la sentence arbitrale peut se
faire en vertu de l’article 40, cet article ne précise pas quel tribunal est compétent pour saisir
la demande mais le texte n’utilise que le terme « la juridiction étatique compétente ». C'est-à-
dire que les parties devraient déterminer elles-mêmes quelle est la juridiction compétente pour
faire le recours en annulation. Cependant, compte tenu de l’article 45, dernier alinéa, de la Loi
sur l’arbitrage B.E. 2545 qui stipule expressément que : « L’appel à l’encontre l’ordonnance
ou le jugement du tribunal étatique selon cette Loi pourra s’exercer devant la Cour suprême
1290
Dika ou la Cour administrative suprême selon le cas » , on peut en déduire que la
juridiction compétente de saisir le recours à l’encontre la sentence arbitrale internationale peut
être la Cour judiciaire ou la Cour administrative dont dépend de la nature du litige.

2) La compétence concurrente de juridiction administrative.


a. Solution critiquée.
730. Nous restons toujours dans l’affaire INSERM, mais il n’est plus la décision de la cour
judiciaire, on voit ici celle du Tribunal des conflits. Suite au jugement rendu par la Cour
d’appel en 2008, comme on l’a mentionnée plus haut, le même requérant a saisi le Conseil
d’État pour se prononcer sur la même question. Le Palais Royal avait demandé au Tribunal
des conflits qui a finalement estimé que « c’est la juridiction administrative qui est
compétente pour contrôler la régularité de la sentence arbitrale internationale lorsque le
contrat à l’origine du litige porte sur l’occupation du domaine public ou est un marché
public, une délégation de service public ou un contrat de partenariat et que la juridiction est
saisie pour juger sur la régularité de la sentence arbitrale au regard des règles impératives

1289
D. Vidal, Droit français de l’arbitrage commercial international, Paris : Gualino, 2004, n° 253.
1290
มาตรา ๔๕ วรรคท้าย แห่ ง พระราชบัญญัติอนุ ญ าโตตุล าการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติว่า “การอุ ทธรณ์คาสั่งหรื อ คาพิ พากษาของศาลตาม
พระราชบัญญัติน้ ี ให้อุทธรณ์ต่อ ศาลฎีกาหรื อศาลปกครองสู งสุ ด แล้วแต่กรณี ”

541
1291
du droit public français applicables à chacun de ces contrats » . Deux conditions peuvent
être extraites l’une consiste à la nature de litige et l’autre consiste à l’objectif de saisie. Par
ailleurs, cette décision a tempéré la compétence de la juridiction judiciaire sur le contrat de
droit public à caractère international.

731. En effet si l’on considère la jurisprudence constante ou la doctrine publiciste, on


trouve qu’elles se sont orientées en faveur du critère classique de la nature du contrat qui est
normalement applicable à l’arbitrage purement interne. Prenons un exemple de la décision du
Tribunal des conflits qui a estimé que « la compétence juridictionnelle tient non à la sentence
1292
arbitral, mais à la nature du litige » . L’avis suivi par un commissaire du gouvernement
près le Tribunal ayant conclu que « la nature administrative du contrat entraînait la
compétence de la juridiction administrative, sans qu’il soit utile de prendre en compte la
1293
dimension internationale du litige » .
Pourtant il semble que dans l’affaire INSERM, le critère de la nature administrative ou
privée du contrat n’occupe pas le terrain ; le contrat ne comportait aucun des deux critères
matériels exigés pour les contrats administratifs (v. supra n°727), par conséquent seule la
juridiction judiciaire est normalement compétente pour contrôler une sentence internationale
relative à ce contrat.
On peut dire que si le Tribunal des conflits a admis la compétence des juridictions
judiciaires dans l’affaire INSERM, ce n’est que l’hypothèse très exceptionnelle comme un
contrat à la fois international et administratif.

b. L’argument du recours au critère de l’internationalité du litige.


732. L’argument qui doit être pris en considération à ce stade est celui de M. P. Cassia
selon lequel l’internationalité du litige ne suffit pas à justifier l’exclusion de la compétence de
la juridiction administrative du recours à l’encontre des sentences arbitrales à l’origine des
contrats internationaux. Force est de reconnaître que les dispositions de l’article 1492 du

1291
Trib. confl., 17 mai 2010, INSERM, préc., supra note n° 1285.
1292
Trib. confl., 16 octobre 2006, Caisse Centrale de réassurance, AJDA.2006.2382, note C. Landais et F.
Lenica ; RFDA.2007.284, concl. J.-H. Stahl, note B. Delaunay.
1293
Trib. confl., 24 avril 2006, SCP de médecins Reichheld et Sturtzer, req. n° 3480, AJDA.2006.2456, concl.
D. Chauvaux.

542
1294
CPC n’attribuent pas la compétence exclusive aux juridictions judiciaires afin de
connaître la sentence arbitrale internationale. Ce même auteur soutient que « l’internationalité
de l’arbitrage » n’est pas le critère neutre (nos italiques) pour la détermination de compétence
juridictionnelle ayant pouvoir de contrôle de sentence arbitrale. A notre avis, quand bien
même ce critère n’est pas neutre, mais ce n’est pas à dire qu’il est arbitraire, car le caractère
d’extranéité du contrat est un critère employé généralement en droit international privé. Il est
raisonnable de dire que ce critère n’est probablement pas apte à recourir pour toutes les
hypothèses. Rappelons que dans l’affaire INSERM, la Cour d’appel et la Cour de cassation
estiment que l’internationalité de l’arbitrage fait exclusivement appel à une définition
entièrement « économique », les juridictions judiciaires s’appuient, à ce stade, sur l’article
1492 du CPC pour affirmer que le litige soumis à l’arbitrage est indépendant de la qualité des
parties, de la loi applicable au fond ou à la procédure y compris celle du siège de
l’arbitrage. Par ailleurs, les parties ont fait valoir elles-mêmes devant le président du TGI
qu’il s’agissait d’un arbitrage international, de même que dans l’acte de mission. Bien que
nous ne contestions pas l’application du critère de l’internationalité ou bien la notion
économique pour compléter la première, on ne peut pas nier que la Cour a trop sérieusement
concentré sur le transfert des fonds entre les deux États en estimant que « l’arbitrage est
commercial car il implique des mouvements de fonds au-delà des frontières ». Ceci rend
une faiblesse à leurs motivations parce que le fait nous démontre que le projet de travail en
l’espèce n’a même pas été effectué puisque le financement n’a pas intervenu. Comme le dit
M. X. Delpech qu’il faut que l’opération économique entraîne potentiellement de tels
1295
mouvements de fonds plutôt que des seuls mouvements de ceux-ci au-delà des frontières.

733. La question peut se poser ici pourquoi la Cour administrative n’est pas compétente
pour connaître la sentence arbitrale publique internationale ? Même si la Cour d’appel admet
que la juridiction judiciaire est normalement compétente pour contrôler une sentence
internationale relative à un contrat « administratif selon les critères du droit interne français »,
nous restons fidèles au critère classique de nature du contrat origine de la sentence ; la
sentence internationale du contrat administratif relève de la compétence de juridiction
administrative, en revanche c’est la juridiction judiciaire qui serait compétente pour connaître

1294
L’article 1492 stipule ainsi : « Est international l’arbitrage qui met en cause des intérêts du commerce
international ».
1295
X. Delpech, D. 2011. AJ., 28 janvier 2011, op.cit, supra note n° 1286.

543
la sentence internationale du contrat privé. Car il n’est pas convenable pour la Cour judiciaire
de contrôler la sentence d’origine de contrat administratif, malgré son caractère international,
notamment dans un pays ayant employé le système judiciaire séparant les juridictions
administratives des juridictions judiciaires. Dès lors, dans cette hypothèse, on peut envisager
que la juridiction judiciaire contrôle la sentence arbitrale internationale née du contrat de droit
privé conclu entre la personne morale publique et l’opérateur privé étranger.
En Thaïlande le litige né du contrat administratif est arbitrable, alors les juridictions
administratives ont doté aussi le pouvoir de connaître une demande à l’encontre la sentence
internationale d’origine du contrat administratif. Cependant il reste à savoir si les parties
peuvent connaître lors de la rédaction de la convention d’arbitrage quelle juridiction est
compétente pour saisir le recours à l’encontre la sentence arbitrale ? La réponse n’est pas loin
de celle émise par la France, c'est-à-dire que les parties ne pourraient pas savoir à l’avance. En
France, on pourrait envisager l’hypothèse où le juge fait le recours à la notion de la facilité
pour juger le litige, à titre d’exemple, le Tribunal des conflits a estimé qu’un tel ou tel litige
relève de la compétence de la juridiction administrative sans tenir compte de la nature du
1296
litige .
Le contrôle de la légalité est indispensable dans ce cas, car il est convenable de
vérifier si les personnes publiques respectent les règles de droit et pour assurer que celles-ci
n’échappent pas à la juridiction étatique sous abri du mode alternatif de règlement de
différends.

B. L’intensité différente du contrôle effectué par chaque compétence


juridictionnelle.

734. Il semble que les grandes différences entre le recours à l’encontre de la sentence
arbitrale internationale devant le juge judiciaire et le juge administratif persistent toujours
notamment à l’égard de l’intensité du contrôle. Les partisans publicistes la soutiennent afin de
justifier l’intérêt d’admission la compétence des juridictions administratives sur les
juridictions judiciaires.

1296
Cf. Trib. confl., 8 juillet 1963 : il s’agissait de la construction des autoroutes que le tribunal a décidé relevé
de sa compétence peu importe la qualité des parties au contrat.

544
1) Sous l’empire des juridictions judiciaires.
735. Dans ce cas, selon l’ancien droit les articles 1504 et 1505 du CPC, le recours à
l’encontre de la sentence arbitrale n’est possible que pour une demande en annulation et qu’il
porterait devant la Cour d’appel dans le ressort auquel la sentence a été rendue. Qu’en est-il
pour les dispositions du Décret du 13 janvier 2011 ? Comme on le sait, ce nouveau texte
sépare entre la sentence arbitrale internationale rendue en France et celle rendue à l’étranger.
Cependant les idées sont bien les mêmes qu’en droit antérieur en ce qui concerne les
sentences internationales rendues en France. Alors pour l’hypothèse de l’INSERM que la
sentence a été rendue en France, donc la loi donne toujours le même résultat.
Le contrôle en vertu de l’ancien article 1502 du CPC (l’art. 1520 de la nouvelle loi)
attribue sur les cinq cas stipulés, le motif qui semble possible pour un recours à l’encontre de
la sentence pour l’affaire INSERM est le respect de l’ordre public international de la sentence,
c’était le même moyen invoqué par celui-ci mais il précisait le terme de « règles impératives
du droit public français ». Il faut déterminer si ces règles sont considérées comme l’ordre
public international au sens de l’article 1502 du CPC. D’après un auteur, quand bien même
l’ordre public international englobe l’arbitrabilité des questions relatives à l’état de personnes
pour se compromettre et l’annulation d’un acte administratif unilatéral par l’arbitre, mais il est
encore douteux que les règles impératives du droit public français pourraient être considérées
1297
comme une sorte de l’ordre public international .

736. Lorsque la Cour d’appel judiciaire saisit le recours en annulation, elle ne juge que la
sentence et non le procès, c'est-à-dire elle ne contrôle ni le fond du litige, ni la procédure
arbitrale. Certes, pour garantir l’efficacité de la sentence internationale, on admet dans cette
matière le principe du contrôle minimal. Pour les partisans publicistes, le contrôle par la
juridiction judiciaire est très superficiel, à titre d’exemple dans l’arrêt SNF ; la Cour de
cassation a exigé que « la violation par l’arbitre de l’ordre public international doit être
1298
manifeste » . Alors que dans un autre arrêt, la Cour a estimé que « l’application de la
règle de droit par l’arbitre pour trancher le fond du litige échappe au contrôle du juge de
1299
l’annulation » . C’est la raison pour laquelle les publicistes démontrent leur souci.

1297
P. Cassia, « Les sentences arbitrales internationales… », op.cit. p. 1568.
1298
Cass. 1er civ., 4 juin 2008, Sté SNF SAS, JDI.2008.1107, note A. Mourre ; Rev.arb.2008.473, note
I. Fadlallah ; Gaz.Pal. 20-21 févr. 2009, p. 32, note F.-X. Train.
1299
Cass. 1er civ., 11 mars 2009, Sté Suédoise Trioplast, n° 08-12.149, D.2009. 880, obs. T. Clay.

545
Pourtant ces principes jurisprudentiels sont absolument admis dans l’arbitrage
commercial international qui n’implique pas la personne morale de droit public. Il faut
rappeler que pour se conformer à la volonté des parties qui ont décidé de ne pas régler leur
litige par le juge étatique ; il est tout à fait logique pour le juge en annulation pour le non
contrôle au fond de la sentence arbitrale.

737. En ce qui concerne l’appel-réformation, comme le droit antérieur, les articles 1518 et
1519 de la nouvelle loi 2011 qui s’appliquent aux sentences rendues en France ne permettent
que le recours en annulation devant la Cour d’appel et non l’appel-réformation.
Il en est de même pour la Loi thaïe sur l’arbitrage qui n’ouvre pas la porte audit appel,
cependant, au cours de recours en annulation il est possible de formuler une demande devant
cette même juridiction afin que la Cour reporte la prise en considération du recours et que le
tribunal arbitral puisse retrancher le litige. Ceci a pour but d’éliminer les causes du recours en
annulation. Il faut constater que cette mesure ne permet pas au juge étatique de reconsidérer le
fond de la sentence qui, au contraire, est la tâche de l’arbitre.

738. Il reste à savoir s’il y aura du changement au sein de l’arbitrage international et l’État
dans le Décret du 13 janvier 2011, il convient de répéter que le rapport au Premier ministre
1300
relatif à ce décret affirme que même s’il ne prévoie pas expressément dans le nouveau
texte, mais les principes acquis dans la jurisprudence devraient être respectés. Il s’agit de
1301
principe retenu dans l’arrêt Galakis selon lequel l’État ou ses établissements publics ne
peuvent pas invoquer son propre droit afin de s’opposer à l’application d’une convention à
laquelle il a consenti.

2) Sous l’empire des juridictions administratives.


739. Il semble que le recours à l’encontre de la sentence arbitrale internationale devant les
juges administratifs donne lieu à un contrôle plus intense. Car la sentence arbitrale peut faire
l’objet d’un recours en appel devant le Conseil d’État et que les parties ne puissent pas
renoncer au profit du recours en cassation selon les dispositions de l’article L. 321-2 du Code

1300
Rapport au Premier ministre relatif au décret n° 2011-48 du 13 janvier 2011 portant réforme de l’arbitrage,
JORF du 14 janvier 2011.
1301
Cass. 1er civ., 2 mai 1966, Galakis, n° 61-12.255. D. 1966.575, note J. Robert ; JDI.1966.648, note Level ;
JCP.1966.14798, note Ph. Ligneau ; RCDIP.1967.553, note B. Goldman.

546
1302
de justice administrative . Lorsque le recours en annulation a été introduit devant le
Conseil d’État, les juges administratifs sont saisis non seulement pour la sentence arbitrale,
mais également pour l’ensemble de litige. C'est-à-dire qu’ils pourraient juger le fond de la
sentence, car ils sont juges du procès. Le contrôle exercé par le Conseil d’État sur le bien-
fondé de la sentence internationale n’est pas superficiel, il doit tenir compte des pouvoirs
publics qui impliquent dans le litige. D’après M. P. Cassia, il est possible que le juge
administratif exige à l’arbitre d’application des lois de police françaises pour trancher le
1303
litige . Sur cet argument, l’arbitre devrait tenir compte de lois de police du siège de
l’arbitrage et du pays dans lequel la sentence devra être exécutée. Par ailleurs si les
juridictions administratives annulent une telle sentence, il faut entendre comme ils prononcent
1304
au titre de l’évocation sur l’ensemble de litige . Ce principe classique est retenu aussi par
la Cour administrative thaïe.
On trouve chez les auteurs qui soutiennent la compétence du juge administratif que la
motivation évoquée est toujours la spécificité de la partie « publique » dans le contrat
international. Certes, on ne peut nier ce fait, mais il n’est pas aisé de concilier entre les
contractants l’intérêt étatique et l’intérêt commercial international. Il existe aussi une solution
dite un partage des tâches, c'est-à-dire que la Cour d’appel est compétente pour le contrôle de
la conformité à l’ordre public international de la sentence arbitrale rendue en matière du
contrat international que l’une des parties est personne morale de droit public ; et que le
Conseil d’État serait compétent pour exercer ce contrôle au regard de règles impératives du
droit public français qui appliquent aux quatre catégories du contrat public comme avait
1305
affirmé le Tribunal des conflits .
Le critère pour déterminer la compétence juridictionnelle à ce stade relève des règles
applicables au contrat litigieux et non pas de la nature juridique du contrat. En effet, cette idée
peut donner lieu à un autre problème ; les deux juridictions peuvent contrôler une même
sentence arbitrale. En l’espèce, le problème est que le contrat conclu entre la fondation

1302
« Dans tous les cas où la loi n’en dispose pas autrement, le Conseil d’État connaît des appels formés contre
les décisions rendues en premier ressort par les autres juridictions ».
1303
P. Cassia, « Les sentences arbitrales internationales… », op.cit., p. 1569
1304
CE, 3 mars 1989, Sté AREA, Lebon 69, concl. E. Guillaume.
1305
A savoir, les contrats relatifs à l’occupation du domaine public ; ou à la commande publique (par exemple
l’interdiction aux personnes publiques de vendre des biens immobiliers appartenant au domaine public) et aux
marchés publics ; ou de délégation de service public ; ou un contrat de partenariat. V. Trib. confl., 17 mai 2010,
INSERM, préc., supra note n° 1285.

547
norvégienne et l’INSERM ne relève d’aucune catégorie des contrats disposée par le Tribunal
des conflits, c’est pourquoi le recours contre la sentence arbitrale doit être soumis à la
compétence judiciaire. Au contraire, si la juridiction administrative pouvait saisir un tel
recours, le résultat aurait été différent car le recours devant le Conseil d’État ne donne pas
l’application des dispositions du titre V (Livre IV du CPC) lesquelles obligent la Cour d’appel
à tenir compte de l’ordre public international pour considérer le bien-fondé de la sentence.
Certes, les règles impératives de droit public français sont entendues comme l’ordre public
purement interne, d’après M. P. Cassia, elles désignent aussi les lois de police françaises
relatives aux contrats mentionnés par le Tribunal des conflits, même si elles ne peuvent pas
faire l’objet d’une définition précise. Alors, le contrôle par les juridictions administratives, a
priori, serait très intense voir un plein contrôle sur le fond du litige. Plus précisément, elles
peuvent contrôler non seulement les mesures prises par le tribunal arbitral pour trancher le
différend mais également les motivations de cette sentence. Ce contrôle pourrait porter aussi
1306
sur la validité du contrat principal conclu entre les parties .

740. En droit thaï, bien que la juridiction administrative soit compétente pour connaître le
recours en annulation de la sentence arbitrale internationale, on constate que c’est toujours la
Loi sur l’arbitrage B.E. 2545 qui doit être applicable au recours à l’encontre des sentences
internationales. C'est-à-dire que les causes et les conditions d’annulation de la sentence sont
toujours les mêmes en vertu de l’article 40 de cette Loi. Ceci a été affirmé par la
jurisprudence administrative, la Cour administrative décida dans l’affaire relative au contrat
administratif que « Vu que le requérant a demandé en annulation de la sentence arbitrale et il
a aussi demandé la Cour de juger que son cocontractant devait lui effectuer le paiement du
travail avec les dommages-intérêts ; vu qu’il s’agissait de la demande pour retrancher le fond
de la sentence arbitrale qui était la tâche de l’arbitre conformément à la convention
1307
d’arbitrage ; que le moyen du requérant n’était pas recevable » . La Cour a rejeté une
telle demande en appuyant sur l’article 40 de la Loi sur l’arbitrage B.E. 2545 et l’article 72 de
la Loi de procédure administrative B.E. 2542. Cette décision a été affirmée par la Cour
administrative suprême que « cette demande n’était pas l’une des causes de l’annulation de la
sentence stipulées dans l’article 40 de ladite loi ».

1306
P. Cassia, « Les sentences arbitrales internationales… », op.cit., p. 1571.
1307
Cour administrative suprême, Ordonnance n° 487/2548 (2005), 24 août 2005.

548
On peut se demander si la Cour administrative thaïe tient compte ou non de la
spécificité de la partie « publique », la réponse est normalement positive.

741. Pourtant on trouve que le contrôle du juge judiciaire est aussi superficiel. Citons la
décision de la Cour civile dans l’affaire entre l’établissement de droit public thaï et une
société de droit civil allemande portant sur le contrat administratif international ;
l’établissement public thaï, défenderesse, a fait un recours en annulation de la sentence
arbitrale prononcée en faveur de son cocontractant. A l’époque où la Cour administrative n’a
pas encore été établie, le recours à l’encontre de la sentence arbitrale devrait se faire devant la
Cour civile. Celle-ci a décidé que le recours est irrecevable ; « la prétention invoquée par la
défenderesse, le contrat entre elle et le requérant ayant été conclu par le dol, ne peut donc
être lié aux contractants ; vu que ce contrat par le dol est entaché de nullité, et ne donne que
la possibilité d’annuler le contrat ; vu que la défenderesse n’a pas exprimé sa volonté
1308
d’annuler ledit contrat, dès lors, le contrat est valide et légal » . Tout d’abord, l’appel de
la défenderesse est un appel de fait qui est normalement interdit par la loi procédurale, mais
qu’il s’agissait de problème de l’ordre public et des bonnes mœurs du peuple. De ce fait
l’appel est recevable en vertu de l’article 45 de la Loi sur l’arbitrage B.E. 2545.
L’établissement public thaï a fait un recours en appel devant la Chambre administrative de la
Cour suprême Dika, celle-ci a estimé au contraire que « la défenderesse est une personne
morale de droit public dont le président de l’établissement en tant que représentant devrait
exercer son pouvoir uniquement dans le cadre de la loi qui lui donne le pouvoir. Lorsque
celui-ci dépasse la limite, un tel ou tel acte juridique administratif ne lie pas l’établissement
1309
public » . La décision de la Chambre administrative nous montre que la Cour a pris en
considération le principe de droit administratif en jugeant le litige, tandis que la Cour civile
n’en a pas tenu compte, appuyant en revanche sur le principe de droit civil. La Cour suprême
Dika a finalement jugé que la décision de la Cour civile, qui a accordé l’exequatur de la
sentence arbitrale en cause, est contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs du peuple.
Cependant lorsque l’on étudie les décisions, on trouve que la Cour ne décide pas
toujours en faveur de la partie publique. Comme l’on a vu dans la décision précitée, en
l’espèce la partie publique a évoqué que le différend né du contrat d’État, mais la Cour

1308
Cour suprême Dika, n° 7277/2549 (2006), BBCD c/ Expressway Authority of Thailand.
1309
Cour suprême Dika, n° 7277/2549 (2006), En effet, il paraît expressément dans ce litige les corruptions des
fonctionnaires publics, surtout le Directeur général d’Expressway Authority of Thailand à l’époque (1995) y
compris le problème d’un conflit d’intérêts.

549
administrative suprême décida que le tribunal arbitral avait déjà tranché et rendu la sentence
sur cette question et ce n’était pas l’un des cas d’annulation disposés par l’article 40, alors ce
moyen n’était pas recevable. Cette affaire nous a appris que, d’une part, le requérant dans
cette affaire n’avait pas fait valoir que le litige était inarbitrable, par conséquent il était
contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs du peuple qui est l’une des conditions
d’annulation de la sentence arbitrale. D’autre part, même si aucune partie ne s’appuie sur
l’ordre public ou l’inarbitrabilité, mais la loi permet au juge d’invoquer lui-même ces causes
dès lors qu’il les a constatées pour annuler la sentence (l’art. 40 (2)).

742. Pour le recours en appel qui devrait se faire normalement devant la Cour d’appel selon
le droit de l’arbitrage français, en Thaïlande, au contraire, l’article 45 admet un « recours en
cassation » contre la sentence arbitrale devant la Cour administrative suprême. (Selon l’article
11 (3) de Loi portant création des juridictions administratives et de la procédure
administrative contentieuse B.E. 2542 : « la Cour administrative suprême est compétente
pour connaître des litiges qui lui sont attribués par la loi »). La question est de savoir quelle
juridiction serait compétente pour saisir un tel ou tel recours ; la Cour administrative suprême
a donné la réponse dans sa décision en vertu des dispositions des articles 9 et 45 alinéa 2 de la
Loi sur l’arbitrage B.E. 2545. Bien que cette décision concerne l’arbitrage interne,
l’interprétation de méthode d’application de la loi en question par la Cour permettrait aussi
d’élargir à l’arbitrage international. Alors, d’après la Cour, pour connaître la répartition de
compétence entre les juridictions judiciaires et administratives, il faut prendre en
considération le fond ou la nature du litige afin de qualifier le caractère dudit différend. En
effet la Cour utilise le critère classique de rapport entre le fond et la compétence : « si celui-ci
est un litige de droit privé, ce sont les juridictions judiciaires qui sont compétentes ; au
contraire si le litige comporte de caractère administratif, il relève des juridictions
1310
administratives » . Par ailleurs dans sa décision, la Cour administrative suprême n’a pas
manqué de donner un principe selon lequel « l’esprit de la Loi sur l’arbitrage B.E. 2545
démontre la nécessité d’avoir plusieurs juridictions compétentes dès le commencement du
procès d’arbitrage afin de soutenir le droit d’accès à la justice des parties et de supporter le
1311
déroulement arbitral » .

1310
Cour administrative suprême, Ordonnance n° 920/2548 (2005), 29 décembre 2005.
1311
Cour administrative suprême, Ordonnance n° 510/2549 (2006), 25 août 2006.

550
§2 : Les méthodes de recours à l’encontre la sentence internationale.

A. Aspect de droit thaï.

1) L’application de l’article 40 de Loi sur l’arbitrage B. E. 2545.


743. Le recours en annulation de la sentence arbitrale étrangère peut se faire par la
demande devant la juridiction qui est compétente pour saisir cette demande en vertu des
1312
dispositions de l’article 40 de la Loi sur l’arbitrage B. E. 2545. La Loi n’a pas précisé
quelle juridiction sera-t-elle compétente dans ce cas, alors il faut s’entendre comme celle qui
sera compétente s’il n’y a pas le recours à l’arbitrage. Cet article a en effet repris la plupart
des dispositions de l’article 43 de la même Loi qui régit les cas où la Cour refuse la
reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale ; et qu’il en résulte de l’article V de la
Convention de New York de 1958.

1312
L’article 40 : « Le recours à l’encontre la sentence arbitrale est possible par une demande en annulation
devant la juridiction compétente conformément aux dispositions de cet article.
L’une des parties pourrait demander l’annulation de la sentence par la requête devant le tribunal
compétent dans un délai de 90 jours à partir de la date de réception de ladite sentence ; ou dès le jour de la
révision ou l’interprétation ou le rajoutant de la sentence selon chaque cas,
La Cour pourrait annuler la sentence dans les cas suivant :
(1) La demanderesse prouve que
(a) L’une des parties de la convention d’arbitrage est frappée d’une incapacité en vertu de la loi qui lui
applique ; ou
(b) La convention d’arbitrage n’est pas valable en vertu de la loi à laquelle les parties ont subordonnée
ou, en vertu de la loi thaïe en l’absence d’un tel choix ; ou
(c) La partie qui demande l’annulation n’a pas été légitimement informée de la désignation du tribunal
arbitral ou de la procédure d’arbitrage, ou qu’il lui a été impossible de faire valoir ses moyens pour
une autre raison ; ou
(d) La sentence porte sur un non visé dans la convention d’arbitrage ou elle dépasse les termes de la
clause d’arbitrage ; cependant, si les dispositions de la sentence qui ont trait à des questions
soumises à l’arbitrage peuvent être dissociées de celles qui ont trait à des questions non soumises à
l’arbitrage, la Cour pourrait annuler uniquement les non soumises à l’arbitrage ; ou
(e) La constitution du tribunal arbitral ou la procédure d’arbitrage n’a pas été conforme à la convention
des parties, ou, à défaut de cette convention, elle n’a pas été conforme à cette Loi sur l’arbitrage
B.E. 2545.
(2) Si la Cour constate que
(a) La sentence porte sur les différends qui n’ont pas été arbitrables d’après la loi ; ou
(b) La reconnaissance ou l’exécution de cette sentence serait contraire à l’ordre public ou aux bonnes
mœurs du peuple.
Lors de la prise en considération de la demande en annulation, si les parties invoquent et que la Cour estime
approprier, elle peut aussi surseoir à statuer ladite demande afin que le tribunal arbitral puisse retrancher soit agir
autrement pour éliminer la cause d’une demande en annulation ».

551
744. En ce qui concerne les causes qui rendent recevable la demande d’annulation de la
sentence, on peut distinguer deux grandes catégories ; d’une part, les causes demandées par
les parties, et d’autre part, les causes constatées par le juge lui-même.
Pour les premières, la loi oblige au requérant la charge de preuve pour soutenir l’une
des causes stipulées dans l’article 40 afin que sa demande soit recevable. On peut observer
que le recours en annulation selon la Loi thaïe est ouvert aussi bien pour la sentence rendue en
Thaïlande que celle rendue à l’étranger. Il en résulte de l’indissociation entre l’arbitrage
interne et international. Alors que le moyen de recours permis par le droit français dispose de
façon différente, le recours en annulation n’est ouvert que pour la sentence internationale
rendue en France (art. 1518 CPC), tandis que la sentence internationale rendue à l’étranger
peut faire l’objet d’un appel (art. 1525 CPC). Pourtant, cette différence ne s’agit que du
procès, car les causes sur lesquelles la Cour d’appel française peut appuyer pour refuser la
reconnaissance ou l’exequatur de la sentence arbitrale étrangère sont celles prévues par
l’article 1520, les mêmes causes que le recours en annulation.
Revenons à la loi thaïe, l’appel à l’encontre de l’ordonnance ou de la décision de la
Cour en vertu de la Loi sur l’arbitrage n’est ouvert que pour les cas prévus par l’article 45 de
la même Loi. Force est de constater que la sentence rendue à l’étranger n’est pas susceptible
d’appel directement en vertu de l’article 45, il faut que ladite sentence soit reconnue ou
refusée de l’exequatur par la Cour thaïe et ensuite la partie qui n’a pas obtenu gain de cause
pourrait faire appel à l’encontre de cette ordonnance ou décision. D’ailleurs il faut observer
1313
aussi que les cas prévus par l’article 45 sont différents de ceux stipulés dans l’article 40 et
43.
Pour les secondes, il s’agit des causes d’annulation constatées par le juge, l’article 40
(2) stipule que le juge compétent pourrait lui-même annuler la sentence arbitrale, sans aucune
demande de la partie, dès lors qu’il constate que la sentence relative au litige est légalement
inarbitrable ; ou que la reconnaissance ou l’exécution de cette sentence est contraire à l’ordre

1313
L’article 45 dispose ainsi : « Il est interdit d’introduire un appel à l’encontre l’ordonnance ou la décision de
la Cour en vertu de cette Loi, sauf dans les cas ainsi :
(1) La reconnaissance ou l’exécution de la sentence est contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs du
peuple ; ou
(2) L’ordonnance ou la décision est contraire à la loi portée sur l’ordre public ; ou
(3) L’ordonnance ou la décision n’est pas conformée à la sentence arbitrale ; ou
(4) Le juge qui a pris en considération de la demande avait fait une opinion dissidente dans son jugement ;
ou
(5) L’ordonnance s’agissant des mesures provisoires selon l’article 16
L’appel à l’encontre l’ordonnance ou la décision de la Cour selon cette Loi devrait introduire devant la Cour
suprême Dika ou la Cour administrative suprême selon le cas.

552
public ou aux bonnes mœurs du peuple. Il faut constater par ailleurs que le dernier paragraphe
de ce même article ouvre la porte à la reconsidération par le tribunal arbitral lorsque les
parties au litige font une demande et le juge est motivé qu’il est raisonnable, il peut surseoir à
statuer afin que les arbitres puissent retrancher le litige.

2) La notion d’ordre public et de bonnes mœurs du peuple au stade de la


reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale.
745. Nous nous intéressons en particulier à cette cause car on peut constater que la loi
dispose de façon bien précise ou assez claire sur les autres causes de l’annulation de la
sentence, alors qu’il y en a une parmi elles que la loi ne peut pas stipuler plus claire qu’il en
soit. C’est le problème de la notion de l’ordre public en droit thaï. En l’absence de définition,
la nuance entre la détermination de la notion et la circonstance applicable pourrait donner lieu
aux problèmes d’application par le juge. Sur ce point, la question peut se poser s’il faut
distinguer entre l’ordre public en droit général et l’ordre public en matière d’arbitrage, comme
l’ordre public international au sens de droit international privé et l’ordre public purement
interne ? La détermination de notion d’ordre public applicable au stade de l’annulation de la
sentence arbitrale est indispensable. Rappelons que l’objectif des parties contractantes de
choisir l’arbitrage est parce qu’elles ne souhaitent pas régler leur litige devant les juridictions
judiciaires. Alors, l’interprétation par le juge de manière très large de la notion d’ordre public
peut porter atteinte au but des parties. Toutefois, avant de reconnaître ou d’exécuter la
sentence, le juge en tant qu’organe étatique qui exerce la compétence judiciaire pour rendre la
justice à la communauté, devrait exercer certains contrôles afin d’assurer que la sentence en
question n’est pas contraire à la loi ou à certaines valeurs du for censées être protégées.
Force est de constater que l’ordre public est dynamique. Il est variable dans le temps et
dans l’espace ; son contenu peut changer à chaque époque. Pour cette raison il est difficile de
déterminer la notion exacte de l’ordre public. On ne peut le donner qu’une définition en
général, c'est-à-dire qu’il relève toujours du pouvoir discrétionnaire du juge de considérer
quel acte est contraire à l’ordre public. De surcroît, l’article 40 de la Loi sur l’arbitrage B.E.
2545, comme en d’autres lois en général, emploie le terme « l’ordre public et les bonnes
mœurs du peuple » qui peut assimiler au terme « l’ordre public international » utilisé en droit
français de l’arbitrage. Comme l’on a déjà mentionné dans notre étude de la Première partie,
le terme « l’ordre public et les bonnes mœurs » est employé aussi bien en droit international
privé qu’en droit général (v. supra n° 332), alors il n’exclue pas le droit de l’arbitrage
international. Bien que la loi et la jurisprudence utilisent toujours les deux termes ensemble,
553
la notion d’ordre public peut aussi être employée séparément de la notion de « bonnes mœurs
du peuple ». Car les deux notions ne sont pas identiques.

746. La notion d’ordre public est officiellement définie comme « l’état de la vie du peuple
1314
dans une communauté de bon ordre, de sécurité vitale et propriétaire » . On peut
distinguer plus précisément en trois matières telles que l’ordre public politique, l’ordre public
économique et l’ordre public social. Alors que les bonnes mœurs du peuple signifient la
moralité, la tradition, la pensée du peuple qui vive ensemble dans une communauté ou dans
un pays. Les auteurs ont ainsi défini l’ordre public et les bonnes mœurs du peuple : pour les
uns, c’est « l’intérêt général de l’État et de la communauté, ayant pour but de fonder un bon
1315
ordre de cet État » . L’ordre public en droit international privé thaï est ainsi défini
comme « un ensemble de principes aux fins de maintenir la coutume, la politique législative
de la Thaïlande à un moment donné et le mécanisme du for d’éviter d’appliquer la loi
1316
étrangère normalement compétente » .
Il n’est pas simple de qualifier quel acte est contraire aux bonnes mœurs du peuple, la
jurisprudence a cependant estimé que « lorsqu’un acte porte atteinte au sentiment public,
c'est-à-dire le sentiment des gens en général, un tel acte est considéré comme contraire aux
bonnes mœurs du peuple ». Pourtant, le juge ne doit utiliser comme critère son propre
sentiment, ni le sentiment fondé spécifiquement sur une telle ou telle religion. Afin de faciliter
notre étude, nous utilisons ici le terme « l’ordre public et les bonnes mœurs » comme stipulé
dans la loi en générale et nous mentionnons le terme spécifique lorsque nous souhaitons
signifier en tel sens.

747. Certains actes qui sont contraires à l’ordre public et aux bonnes mœurs ont été
disposés expressément dans la loi. Mais tel n’est pas le cas de l’arbitrage, car ni l’ancienne
Loi de l’arbitrage, ni la Loi B.E. 2545 ne stipulent la définition de ce terme, donc il est
toujours le pouvoir du juge d’apprécier la notion d’ordre public et de bonnes mœurs au cas
par cas. Il ne faut pas oublier que la Loi sur l’arbitrage B.E. 2545 applique aussi à l’arbitrage

1314
Dictionnaire de l’Institut Royal de Thaïlande, 2e éd., Bangkok : Arun Printing, 2000, p. 106.
1315
U. Monkolnavin, « L’ordre public et les bonnes mœurs du peuple », Thai Bar Association Journal, vol. 32,
n°1, 1975, p. 13-14.
1316
Phrayasriwisarnwaja (Tianliang Hountrakoon), Droit international privé, Bangkok : Sophonphipatanakorn
Press, 1931, p. 84-85 ; Y. Saeng-Uthai, Droit international privé, Bangkok : Université de Thammasat, 1984, p. ;
Ch. Pachusanond, « Lois d’application immédiate… », op.cit., p. 31-33.

554
du contrat administratif, donc le juge administratif applique l’article 40 de cette loi pour
considérer la demande en annulation de la sentence arbitrale. C'est-à-dire, en appliquant la
même Loi, il y a de possibilité que la notion d’ordre public et des bonnes mœurs appréciée par
le juge administratif est différente de celle du juge judiciaire. Il est possible que la pensée ou
l’opinion sur l’intérêt public de juge administratif diffère du juge judiciaire. La notion diverse
de l’ordre public et des bonnes mœurs peut causer l’ambiguïté aux investisseurs. Affirmé par
la tendance des juridictions étatiques, lorsque les juges devaient mentionner l’ordre public et
les bonnes mœurs, ils ont souvent répété ces deux notions sans préciser leurs motivations de
qualifier une telle cause comme l’ordre public. Un auteur estime dans le sens qu’il faut
retrouver la définition commune ou neutre ou qui peut être généralement acceptée et
largement applicable dans le commerce international, ceci est indispensable afin que le
système de l’arbitrage thaï soit internationalement admissible. Dès lors, afin de définir ce
terme, plusieurs aspects devraient être pris en considération tels que : l’aspect économique,
1317
l’intérêt public, l’aspect du commerce international .
Cette tendance est différente à celle en matière de reconnaissance ou d’exécution des
jugements étrangers. Pour les derniers, les auteurs admettent généralement qu’il n’est pas
nécessaire de définir la notion exacte d’ordre public et des bonnes mœurs, la détermination de
cette notion de façon générale est plus apte à protéger l’intérêt de l’État. Il semble que les
auteurs se contentent de laisser le pouvoir discrétionnaire au juge de définir la flexibilité de
l’ordre public et les bonnes mœurs au cas par cas.
Pour un autre auteur, il estime que l’on ne peut déterminer au sens général l’ordre
public et les bonnes mœurs, en revanche il est plus convenable et plutôt raisonnable de
prendre en considération au cas par cas. Cependant le critère plus apte est l’intérêt public ;
lorsqu’il s’agit d’un sujet qui peut porter atteinte à l’intérêt public, on considère en premier
1318
lieu qu’il s’agit de l’ordre public et des bonnes mœurs du peuple . Admettons qu’il n’est
pas possible de trouver une définition complète de cette notion, donc la meilleure solution est
d’essayer de déterminer ce terme au sens strict et propre à appliquer à l’arbitrage commercial
international. Il ne faut pas oublier que chaque pays peut définir différemment la notion
d’ordre public, alors une sentence rendue dans un État contractant de la Convention de New
York de 1958 pourrait être refusée dans un autre État contractant en raison de la contrariété à

1317
S. Limparangsri, « Où en est la frontière de l’ordre public et des bonnes mœurs du peuple dans l’exécution
de la sentence arbitrale ? », TAI Journal of Arbitration, vol. 2, 2007, ADR Office, Bureau de la magistrature, p.
14.
1318
Cf. H. Vititviriyakul, « Où en est la frontière de l’ordre public… », op.cit., p. 17.

555
l’ordre public de ce dernier. A titre d’exemple, les auteurs estiment que l’absence de
motivation de la sentence est contraire à l’ordre public thaï, la loi thaïe oblige l’arbitre de
motiver la sentence sauf dans le cas où les parties en sont décidées autrement. Alors il faut
rappeler qu’il est possible d’envisager les sentences étrangères qui n’ont pas été motivées en
1319
raison de non obligatoire par la loi qui régit la sentence .
Par ailleurs, le problème de l’ordre public et des bonnes mœurs est aussi difficile à
dissocier du problème de légitimité de la sentence. La sentence qui est légitime à l’égard du
juge n’est pas nécessairement dans tous les cas se conforme à l’ordre public. Pour mieux
illustrer nous citons à titre d’exemple le système juridique thaï actuel qui ne reconnaît pas
1320
encore les dommages-intérêts punitifs , c'est-à-dire que le juge ne pourrait apprécier que
pour les dommages-intérêts conformément au dommage réel. Alors, si l’arbitre accorde à une
partie les dommages-intérêts punitifs, ceci est considéré contraire à l’ordre public et aux
bonnes mœurs du peuple, car le principe de base du droit thaï admet que la partie
endommagée ne mérite d’être remédiée que sur ce qu’est subi le vrai dommage. Par
conséquent la sentence qui accorde les dommages-intérêts punitifs sera annulée par la Cour.
La question peut se demander si ce genre de dommages-intérêts se voit illégitime ? La
réponse est positive, un acte qui est contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs peut être
considéré comme non-légitime.

748. En effet les causes de l’annulation de la sentence stipulées dans l’article 40 de la Loi
sur l’arbitrage sont aussi considérées comme relevant de l’ordre public, par exemple, le
principe de la contradiction selon l’article 40 (1) (c), on ne peut refuser que le non respect de
ce principe ne soit pas contraire à l’ordre public mais que la loi stipule expressément. Alors
que la loi laisse la porte ouverte pour la question de l’ordre public et des bonnes mœurs dans
l’article 40 (2) (b) comme une autre cause constatée par le juge lui-même. C'est-à-dire que si
le requérant n’a pas pu prouver ou a omis de donner la preuve que le procès arbitral s’est

1319
Cf. S. Asawaroj, Le règlement des différends commerciaux par l’arbitrage, Bangkok : Université de
Thammasat, 2000, p. 177 ; Cf. J. Bunnag, « Le contrôle de droit par le juge de la sentence arbitrale », op.cit., p.
93. Si la sentence en cause est rendue sous la loi sur l’arbitrage qui n’exige pas les motivations, et qu’elle a été
demandée d’exequatur en Thaïlande, la Cour thaïe ne refuse pas d’exequatur. Comme au sens de la décision n°
7128/2540 (1997) : une sentence rendue à Londres régit par l’Arbitration Act 1979 qui n’a pas obligé l’arbitre de
motiver sa sentence. Le plaideur l’a demandé d’exequatur en Thaïlande, la défenderesse a fait valoir que la
demande n’était pas recevable en l’absence de motivation de cette sentence. La Cour a constaté que la sentence a
été rendue conformément à la loi applicable à l’époque et que la cause invoquée par la défenderesse n’est pas
l’une des causes prévues par la Loi, dès lors, la Cour n’a pas pu refuser l’exequatur de cette sentence.
1320
A. Chantara-Opakorn, « Où en est la frontière de l’ordre public… », op.cit., p. 26.

556
déroulé sans respecter du principe de la contradiction, dans cette hypothèse, le juge peut lui-
même invoqué cette cause selon l’article 40 (2) (b) pour annuler ladite sentence en raison de
contrariété à l’ordre public.

749. Le contrôle du fond à travers l’ordre public et les bonnes mœurs. Ce n’est pas
irraisonnable de dire que la demande en annulation de la sentence permettrait aux juges
d’examiner le dispositif de la sentence. D’après le principe admis généralement en droit de
l’arbitrage, le juge ne pourrait pas contrôler le fond de sentence arbitrée. Certes, les juges ne
peuvent examiner que dans le cadre stipulé par l’article 40, mais en l’absence de définition de
l’ordre public et des bonnes mœurs, pour savoir si une telle sentence est ou non contraire à
ceci, le juge n’a pas pu éviter d’examiner le fond de la sentence. La décision de Cour suprême
1321
Dika peut affirmer ce constat, le plaideur avait demandé d’exequatur de la sentence
internationale rendue à Liverpool, le juge d’exequatur a refusé cette demande, le plaideur a
1322
introduit l’appel devant la Cour d’appel qui affirmait la décision du juge d’exequatur. Le
plaideur a fait l’appel devant la Cour suprême Dika, afin de rendre une décision la Cour a pris
en considération le fond du contrat que le tribunal arbitral a déjà tranché, ceci est pour savoir
si l’arbitre a ou n’a pas tranché le litige conformément aux règlements de l’Institute, ainsi que
la méthode de calculer le prix du coton. Normalement le juge ne devrait pas examiner le fond
de sentence rendue à l’étranger, mais ce principe n’applique pas à la sentence rendue en
Thaïlande y compris la sentence internationale. Finalement la Cour a décidé que la sentence
en cause n’est pas contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs du peuple. Lorsque la
défenderesse ne pouvait pas prouver qu’il y avait l’une des causes disposées par la Loi sur
l’arbitrage selon laquelle la Cour aurait pu refuser d’exequatur, dès lors, la Cour accorde la
demande d’exequatur au plaideur.

B. Aspect de droit français.

1) Le recours en annulation en droit français.

1321
Cour suprême Dika n° 5513/2540 (1997), Coat Import SA c/ Theparuksingtor Co. LtD.
1322
Cette décision a été régit par l’ancienne Loi sur l’arbitrage B.E. 2530 dont l’appel contre la décision qui
refuse d’exequatur pouvait faire devant la Cour d’appel et on peut remarquer que le demandeur pouvait aussi
continuer son appel devant la Cour suprême Dika. C'est-à-dire que l’ancien système d’arbitrage permettait aux
parties d’introduire sa demande devant les trois juridictions comme le cas du litige normal, ceci était contraire au
principe de l’arbitrage. Mais selon la Loi de 2002, le recours à l’encontre une décision doit être introduit devant
la Cour Dika.

557
750. On commence par la disposition de l’ancien article 1504, 1er al. du CPC qui donnait
lieu aux problèmes, elle dispose ainsi : « La sentence arbitrale rendue en France en matière
d’arbitrage international peut faire l’objet d’un recours en annulation dans les cas prévus à
l’article 1502 ». Il faut constater tout d’abord que la sentence qui pourrait être connue d’un
recours en annulation devant la juridiction française selon ce texte devrait être rendue sur le
territoire français, quand bien même il paraît que cette sentence résulte d’un litige
international qui ne présente aucun rapport avec l’ordre juridique français. Théoriquement,
cette solution soutient une conception selon laquelle il faut détacher la compétence des États
impliqués d’une sentence arbitrale, car on ne peut nier le fait qu’une sentence puisse avoir des
liens avec plusieurs pays. Par ailleurs, c’est pour affirmer que l’arbitre n’a pas de for.
A l’inverse, on peut constater que les parties qui ont choisi la loi française applicable à
la procédure arbitrale déroulant hors de la France ne pourraient pas bénéficier de cet article.
Certes, cette disposition donne le résultat conformément à la thèse selon laquelle en l’absence
de choix des parties la procédure arbitrale est régie par la loi du siège de l’État dans lequel
elle se déroule. En effet la jurisprudence française a admis depuis longtemps la validité des
sentences rendues à l’étranger qui a soumis le procès d’arbitrage à la loi française, et que la
Cour ait souvent refusé le recours contre la sentence rendue en France mais que la procédure a
été régie par la loi étrangère. Mais il semble que l’article 1504 du CPC ne retient plus cette
jurisprudence.
La question est de savoir qu’en est-il pour la sentence rendue à l’étranger ? Peut-elle
faire l’objet d’une demande en annulation devant la juridiction française ? La réponse selon
l’ancienne loi était que les juridictions françaises ne sont pas compétentes pour saisir le
1323
recours à l’encontre de la sentence arbitrale rendue à l’étranger .

751. On peut observer que dans la plupart des conventions internationales et de même en
droit comparé, le critère de la loi du siège est admis plus fréquemment que celui de la loi
applicable à la procédure. A priori, c’est l’État du siège de l’arbitrage qui est seul compétent
pour connaître des recours en annulation de la sentence alors que les États destinataires de
l’homologation ou de l’exécution de la sentence ne peuvent faire qu’une acceptation ou un
refus de lui donner effet dans leur ordre juridique.
Force est de constater qu’en admettant la loi applicable à la procédure comme critère,
il est possible d’envisager le cas où la sentence déjà validée dans l’ordre juridique du siège de

1323
CA Paris, 18 février 1986, Rev.arb.1986.583, note G. Flécheux.

558
l’arbitrage ferait l’objet d’annulation dans l’ordre juridique français. C’est la raison pour
laquelle, comme l’admettent les auteurs, « l’acceptation d’un critère de compétence plus
1324
universellement reconnue tel que celui du siège était à éviter de telles difficultés » .

752. Désormais, le Décret du 13 janvier 2011 a mis la réforme dans la partie réservée aux
voies de recours dont les nouvelles dispositions permettraient de clarifier le régime du recours
en distinguant entre la voie de recours à l’encontre d’une sentence internationale rendue en
France de celle à l’encontre d’une sentence rendue à l’étranger.
La voie de recours à l’encontre de la sentence internationale rendue en France reste
toujours la même ; le recours en annulation en vertu de l’article 1518. Les parties peuvent,
par un accord exprès, renoncer au recours en annulation, mais la loi (art. 1522) préserve
toujours une possibilité d’interjeter l’appel de l’ordonnance d’exequatur pour les motifs
prévus par l’article 1520. Le principe qui interdit le recours à l’encontre d’une ordonnance qui
accorde l’exequatur reste comme dans l’ancien texte.
Alors que la sentence rendue à l’étranger peut faire l’objet d’appel (art. 1525), plus
précisément c’est une décision qui statue sur une demande de reconnaissance ou d’exequatur
de ladite sentence. La Cour peut refuser la reconnaissance et l’exequatur d’une telle sentence
uniquement pour les causes prévues à l’article 1520.

2) Les incidences de recours.


a. L’incidence d’un recours en annulation devant les juridictions françaises.
753. L’incidence suspensive de l’exécution. Ce qui est intéressant porte sur le souci de la
rapidité d’exécution des sentences arbitrales internationales, réglé par la nouvelle disposition
de l’article 1526 qui dispose dans le sens que les recours formés en matière de l’arbitrage
international ne sont pas suspensifs d’exécution (c'est-à-dire que l’on adopte le même principe
utilisé pour les juridictions administratives).
Sur cette issue, la loi thaïe sur l’arbitrage ne dispose pas expressément comme la loi
française en cas du recours en annulation de la sentence arbitrale. Il faut distinguer donc le cas
du refus d’exequatur de la sentence et le cas d’appel contre la décision qui statue sur une
demande de reconnaissance ou d’exequatur. Pour le premier cas, l’article 43 (6), la Cour peut
refuser une demande d’exequatur de la sentence internationale si la partie qui devrait être
exécutée par cette sentence pourrait prouver que ladite sentence n’est pas encore définitive en

1324
Ph. Fouchard, Traité de l’arbitrage commercial international, Paris : Litec, 1996, n° 1590.

559
raison d’un recours en annulation qui est en cours, soit en Thaïlande, soit à l’étranger ; la
Cour peut surseoir à statuer la demande d’exequatur selon le cas. Pour le second cas, l’appel à
l’encontre du jugement ayant accordé ou refusé la reconnaissance ou l’exécution de la
sentence selon l’article 45. Dans ce cas, aucune disposition ne donne la solution. Si la
question de suspension de l’exécution de la sentence doit être réglée par la loi procédurale du
juge compétent, on envisagera ici deux cas distincts, selon si l’appel relève de la compétence
de la Cour administrative ou de la Cour judiciaire. Lorsque l’appel est porté devant la Cour
suprême Dika, on prend en considération des dispositions du CPC thaï (art. 231) ; l’appel à
l’encontre d’une décision du juge judiciaire n’est pas suspensif d’exécution, mais le
demandeur pourrait faire une demande (sous réserve de caution) pour que cette décision soit
suspendue pendant la procédure d’appel. Cependant il en est différent en cas de l’appel devant
la Cour administrative suprême ; pour le recours à l’encontre une décision d’exequatur des
tribunaux administratifs de première instance, l’exécution de la décision est suspendue
1325
jusqu’à la décision définitive .

754. L’incidence de la nullité de sentence. Lorsque la Cour d’appel a rejeté la demande


en annulation, sans doute, la sentence en cause doit être exécutée immédiatement. Alors que
la conséquence de l’admission la demande en annulation sera autrement. Même si cette
question se pose de moins en moins de nos jours en raison de l’interprétation de façon
restrictive par la Cour d’appel les causes d’annulation, mais on peut trouver aussi certaines
décisions intéressantes qui annulent la sentence. Ce qui nous intéresse est l’effet de la nullité
de la sentence, car ceci peut entraîner les résultats différents selon le cas. Lorsque la Cour
d’appel a décidé d’annuler une sentence, cette décision met à néant la dernière, mais la Cour
ne peut toujours pas statuer sur le fond du litige. Il faut bien rappeler que ceci est différent de
l’arbitrage interne. D’après M. B. Moreau, l’on peut distinguer les incidences de la nullité de
la sentence en quatre catégories selon ; la nature de la sentence ; la nature de la clause
1326
d’arbitrage ; le motif de nullité et le caractère d’extranéité de la sentence . Il en résulte
que chaque cause de nullité peut entraîner des effets divers. On peut observer que pour savoir
quels sont les effets de nullité de l’arbitrage à caractère international il faut prendre en

1325
L’article 70 de Loi portant création des juridictions administratives et de la procédure administrative
contentieuse B.E. 2542 (1999), disponible en version française sur http://www.admincourt.go.th/amc_fra/04-
laws/f2act.pdf
1326
B. Moreau, « Les effets de la nullité de la sentence arbitrale », in Études Pierre Bellet, Paris : Litec, 1991,
p. 403 et s.

560
considération le type de clause d’arbitrage, c'est-à-dire s’il s’agit d’une clause
compromissoire, la nullité de la sentence renverrait les parties à une nouvelle mise en œuvre
1327
de la clause d’arbitrage . Force est de constater que la nullité de la sentence n’affecte pas
la clause compromissoire, les parties sont toujours liées par cette convention. Ceci vient
affirmer le principe de l’autonomie de la clause compromissoire à l’égard de la nullité de la
sentence arbitrale. Tandis que la nullité de la sentence d’un compromis d’arbitrage ne laisse
pas subsister ce compromis, autrement dit, le compromis est expiré et ne peut produire aucun
effet.

755. En ce qui concerne la partie qui devrait être liée par la nullité de la sentence arbitrale,
la Cour de cassation a donné la réponse dans sa décision s’agissant d’un arbitrage
multipartite. En l’espèce, la Cour d’appel a décidé nulle la sentence rendue par le tribunal
arbitral et que les parties ont formé les moyens contre cette décision. La Cour de cassation a
estimé que la nullité produirait un effet à l’encontre de toutes les personnes liées par la clause
d’arbitrage : « la sentence annulée doit l’être dans sa totalité et que l’annulation de la
sentence produit ses effets à l’égard de tous ceux qui s’en prévalent, signataire ou personne
qui ne conteste pas être liée par la clause compromissoire ». Alors on peut dire que la nullité
est indivisible. La Cour de cassation a aussi fait une distinction entre la nullité et
l’inapplicabilité de la sentence en jugeant que « bien que les condamnations ne soient pas
indivisibles et que la société Kocak admette être liée par la convention d’arbitrage, la Cour
1328
d’appel peut annuler la sentence dans sa totalité (…) » . En effet M. Kocak, un
mandataire de la société, n’était pas lié par la clause compromissoire, mais le prononcé
« nul » de la sentence ne peut être dissocié ; plus précisément la Cour ne peut pas annuler
uniquement la partie de sentence qui concerne M. Kocak.

b. L’incidence d’un recours en annulation devant les juridictions étrangères.


756. Comme l’on a dit qu’un État pourrait reconnaître normalement le recours en
annulation d’une sentence arbitrale lorsque celle-ci a été rendue sur son territoire. Le droit
comparé nous démontre aussi la tendance selon laquelle le droit moderne admet le pouvoir du
juge étatique du siège de l’arbitrage comme le critère pour déterminer si cette sentence peut
faire l’objet de ce recours devant les tribunaux de cet État. Force est de reconnaître que les

1327
Id., p. 405.
1328
Cass. 1er civ., 30 octobre 2006, n° 04-10.201, Bull. 2006.I, n° 440, p. 376.

561
termes utilisés par la loi affirment aussi ce constat, les dispositions de la loi dissocient le
recours en annulation (art. 1518 du Décret de 2011) de l’appel à l’encontre la décision (art.
1525 du Décret de 2011) pour le cas de droit français.
En droit thaï, le recours en annulation est employé pour le cas de la sentence
internationale rendue en Thaïlande (art. 40), tandis que le recours pour le refus d’exequatur de
la sentence est employé pour l’hypothèse de la sentence rendue « à n’importe quel pays »
selon le terme de la loi (art. 43). Certes, ces dispositions sont conformées à la logique, car le
juge n’a pas de pouvoir d’annuler la sentence rendue dans un autre État. Il ne peut faire que
d’accorder ou non l’exequatur de la sentence étrangère.
Lorsqu’une sentence arbitrale a été annulée par le juge étranger, il reste à savoir si elle
peut toujours produire un effet dans l’ordre juridique français. A ce stade, il est clair que la
sentence annulée par la juridiction étrangère ne pourrait bénéficier des dispositions de la
Convention de New York de 1958. En ce qui concerne la question de savoir si la sentence
annulée au lieu du siège de l’arbitrage peut être reconnue ou exécutée en France, on verra par
la suite.

757. Conclusion de la section. D’après nos études, on peut dire que la différence de
l’intensité du contrôle envers les sentences arbitrales internationales rendues en matière des
contrats hybrides est celle qui cause un vrai souci aux juristes. Il semble que dans l’ordre
juridique français, il n’est pas facile d’éviter le problème de la concurrence des juridictions
qui seraient compétentes d’apprécier le recours à l’encontre de la sentence arbitrale. Alors que
sur ce problème, la Loi thaïe sur l’arbitrage a déjà trouvé la solution et laisse aux juges le
pouvoir de détermination du litige administratif international du litige civil et commercial
international. A notre avis, il faut bien préciser dans la loi la règle de répartition de
compétence en matière internationale du juge d’exequatur, par exemple la sentence porte sur
le contrat administratif international relève de compétence des juridictions administratives, car
on peut limiter le débat sur cette issue et aussi faciliter le travail du juge et économiser le
temps des parties au litige. Tandis que les conditions de recours contre la sentence arbitrale en
droit français n’éloigne pas de celles utilisées en droit thaï, quoique, en droit thaï, la difficulté
particulière paraît dans la notion de l’ordre public et des bonnes mœurs, car on applique ce
même terme aussi bien en matière de droit interne qu’en matière de l’arbitrage international
dont la détermination devrait être appréciée par le juge au cas par cas.

562
Section II
Réception dans l’ordre juridique étatique
des sentences arbitrales internationales.

758. Il semble que la reconnaissance et l’exécution en Thaïlande et en France de la


sentence internationale rendue à l’étranger ne posent pas de difficultés spécifiques grâce à la
Convention de New York de 1958. La France est un État contractant de cette Convention et
que le système juridique français est moniste, par conséquent l’application de la convention
international est automatique conformément à l’article 55 de Constitution de la République
1329
française . Cependant, les dispositions du CPC français ont aussi adopté le texte de la
Convention de New York de 1958 concernant les conditions de reconnaissance et
d’exécution. Tandis que la Thaïlande, État signataire de ladite convention et que son système
juridique est dualiste, pour qu’une convention internationale puisse être appliquée dans ce
pays, il est nécessaire de la ratifier et élaborer la Loi transposition une telle convention en
droit interne. La Thaïlande a adhéré la Convention de New York de 1958 depuis 1959 sans
réserves. La Loi sur l’arbitrage B.E. 2530 (1987) et B.E. 2545 (2002), dans la partie portant
sur la reconnaissance et l’exécution de la sentence, a été rédigée conformément aux
dispositions de ladite convention et on peut dire que la Thaïlande a ratifié cet instrument
1330
international à travers les articles 29 et 41 desdites lois . De surcroît, les juges thaïs

1329
L’article 55 stipule ainsi : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur
publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son
application par l’autre partie ».
1330
Les conventions internationales multilatérale sur le droit de l’arbitrage adhérées par la Thaïlande sont : le
Protocol de Genève de 1923 relatif aux clauses d’arbitrage ; la Convention de Genève de 1927 pour l’exécution
des sentences arbitrales étrangères ; et la Convention pour la reconnaissance et l’exécution des sentences
arbitrales étrangères 1958 (Convention de New York de 1958).
Il reste à savoir si ces instruments internationaux peuvent produire les effets sur le système juridique
thaïlandais immédiatement. Force est de constater que le système juridique thaï est dualisme ; l’ordre juridique
interne se distingue de l’ordre juridique international par conséquent les droits qui sont d’origine de ces sources
ne sont pas classés dans un même rang, pour ces raisons le droit interne prime sur le droit international. Pour
qu’une convention internationale signée par l’État thaï puisse produire les effets, il faut qu’elle ait adoptée par la
procédure parlementaire et publiée sur le Journal officiel de Royaume Thaïlandais. Il y avait plusieurs opinions
sur l’application de la Convention de New York de 1958, la Thaïlande est un pays adhéré, pour certains, le
Parlement de Thaïlande a déjà ratifié cette convention à travers l’article 29 de la Loi sur l’arbitrage B.E. 2530
(1987). Par ailleurs, la jurisprudence a admis depuis longtemps la reconnaissance et l’exécution des sentences
arbitrales étrangères avant l’élaboration de la Loi de 1987 (v. Cour suprême Dika n° 465/2478 (1935) ; n°
1083/2522 (1979)). En effet, il est à noter que le site de CNUDCI a précisé que cette convention est entrée en
vigueur en Thaïlande en 1960. Cf. J. Pukditanakul et V. Ariyanuntaka, “Aspects of Enforcement of Foreign
Judgements and Arbitral Awards in Thailand”, Cases and Materials on Arbitration, Office of the Judiciary,
Ministry of Justice, 1992, p. 220.

563
1331
mentionnent constamment la Convention de New York de 1958 dans leurs décisions ,
alors on peut dire que la jurisprudence thaïe reconnait l’application de la convention
internationale qu’elle a adhérée depuis longtemps.
Avant que l’on étudie les problèmes de reconnaissance et d’exécution des sentences
arbitrales internationales (§2), il reste à savoir si la sentence en question a doté d’autorité
quelconque afin de produire un effet dans un État (§1).

§1 : Autorité attachée aux sentences arbitrales internationales.

759. Rappelons que le droit de l’arbitrage thaï ne distingue pas l’arbitrage interne et
l’arbitrage international ; toutes dispositions appliquent à toutes sentences arbitrales destinées
à reconnaitre ou exécuter en Thaïlande. Alors qu’en droit français s’agissant de voies de
recours, comme l’on a déjà vu, le Décret du 13 janvier 2011 dissocie la sentence arbitrale
internationale rendue en France de celle rendue à l’étranger. Toutefois, la reconnaissance et
l’exécution des sentences arbitrales sont dirigées sous le Chapitre III « rendues à l’étranger ou
en matière d’arbitrage international » qui englobe aussi la sentence internationale rendue en
France. Comme on le sait, la sentence arbitrale n’est pas titre exécutoire, dès lors afin d’être
exécutée dans un autre État, il est indispensable d’obtenir une ordonnance d’exequatur,
cependant la sentence est reconnue en soi, ceci est affirmé de nos jours dans la plupart des
règles de droit étatique sur l’arbitrage, aussi bien le droit français que le droit thaï, que la
sentence arbitrale est dotée de l’autorité de chose jugée.
On peut envisager notamment dans l’ordre juridique français que la jurisprudence
admet l’extension de la notion de l’autorité de la chose arbitrée pour que la Cour puisse exiger
l’obligation de concentrer les moyens et les demandes aux parties du litige. Certes, les
opinions sont diverses sur la question d’appréciation cette obligation requiert par la Cour de
cassation.
Il nous convient d’étudier tout d’abord la reconnaissance de la chose jugée des
sentences arbitrales internationales qui manifeste les effets de plano de la sentence (A). Nous
verrons par la suite l’élargissement de la mise en œuvre de l’autorité de chose arbitrée (B).

1331
Cour suprême Dika, n° 5513/2540 (1997) : il faut observer la formule employée par la Cour ainsi : « Vu
que la sentence en cause s’agissant de sentence internationale rendue à l’étranger donc elle relève de la
Convention de New York de 1958 dont la Thaïlande est un pays signataire ; que cette sentence peut avoir la
reconnaissance et l’exécution en Thaïlande en vertu de l’article 29 de Loi sur l’arbitrage B.E. 2530 ». La
jurisprudence constante continue utiliser cette formule jusqu’à l’heure actuelle.

564
A. Autorité de la chose jugée des sentences arbitrales.

760. Il existe aussi des différences entre l’autorité de la chose jugée en matière d’arbitrage
par rapport à l’autorité de la chose jugée des jugements étatique. On verra par la suite que
toutes les sentences arbitrales ne sont pas dotées de cette autorité.

1332
1) La caractéristique de la chose arbitrée .
761. « L’autorité de la chose jugée » signifie en soi que c’est la chose jugée qui a autorité,
on peut expliquer qu’il s’agit du prononcé de l’arbitre une sentence qui tranche le litige au
fond, par conséquent la décision portée sur ces questions de fond est dotée d’autorité de chose
arbitrée.
Avant la réforme de droit sur l’arbitrage en 1980, il semblait que les opinions étaient
1333
diverses en ce qui concerne l’autorité de la chose jugée de sentence arbitrale . La loi
actuelle est plus claire sur ce point, nous rapprochons d’abord de l’ancienne disposition de
l’article 1476 du CPC qui stipule que « la sentence arbitrale a, dès qu’elle est rendue,
l’autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu’elle tranche » (applique à la
sentence internationale en vertu de l’article 1500). Cette disposition a été exactement reprise
par le Décret du 13 janvier 2011, l’article 1484, 1er al. qui applique aussi à la sentence
arbitrale internationale.
A la différence de la partie historique, c’est affirmée dans la doctrine que dès lors que
l’arbitre tranche le litige, sa sentence est un acte juridictionnel et ne peut qu’avoir autorité de
1334
la chose jugée . La question peut se poser comment on pourrait admettre cette autorité à
une chose arbitrée, si la compétence arbitrale est d’origine « conventionnelle » ? Certes, on ne
peut nier le fait que l’arbitrage a la nature conventionnelle, alors certains auteurs défendent
que son origine conventionnelle ne puisse permettre à l’arbitrage de déboucher sur une
1335
sentence d’une nature différente. Sur cet argument, l’opinion de M. H. Vizioz nous

1332
Il semble que le législateur emprunte le terme « chose jugée » de matière des jugements étatiques, si l’on
emploie le mot « chose arbitrée » ce n’est pour rien d’autre que la distinction entre la chose jugée utilisé pour le
jugement et la chose arbitrée pour la sentence arbitrale.
1333
Les juridictions étatiques admettaient depuis longtemps l’autorité de la chose jugée de sentence arbitrale,
V. par exemple le plus ancien daté depuis 1810 : Cass. civ., 17 avril 1810 ; CA Paris, 6 juillet 1971,
Rev.arb.1971.119.
1334
Ch. Jarrosson, « L’autorité de chose jugée des sentences arbitrales », Procédures, n° 8, Août 2007, p. 2.
1335
H. Vizioz, Études de procédure, Bière éd., 1956, p. 94-96.

565
convainc ; il affirme que « l’arbitre exerce une fonction publique », c'est-à-dire celle de juger
le litige, il ne faut pas ignorer le fait que « celui-ci a reçu l’assentiment du législateur avant
même que les parties puissent exprimer leur propre volonté de recourir à l’arbitrage ».

762. Ce principe a été admis dans la plupart des droits étatiques de nos jours, soit par la
formule directe comme en droit français déjà cité, soit la notion considérée équivalente
comme en droit thaï. Pour le droit thaï, bien qu’on n’utilise pas dans la loi le terme qui
1336
signifie exactement « l’autorité de chose jugée » , lorsque l’on prend en considération
1337
l’article 41 de la Loi sur l’arbitrage en version anglaise, on trouve qu’il utilise le terme
« binding » : « an arbitral award (…) shall be recognized as binding (…) », c’est pour
exprimer le mot « autorité ». Le texte utilise aussi le mot « lie les parties » afin d’affirmer que
la sentence est obligatoire pour les parties.
En effet, le droit thaï a été influencé par le texte de la Convention de New York (art.
III), donc le terme employé en thaï dans ladite Loi ne manifeste pas de grande différence par
rapport à cette Convention. De même que la loi anglaise qui rappelle le terme
1338
« définitive » . Il en résulte de la décision de la CPJI dans l’affaire Société commerciale
de Belgique, la Cour estima que « la reconnaissance d’une sentence comme ayant l’autorité
de la chose jugée n’est que la reconnaissance du fait que le contenu des sentences
1339
arbitrales a un caractère définitif et obligatoire » .

763. Force est de constater que toute sentence arbitrale a l’autorité de chose jugée. Il faut
rappeler que la chose arbitrée est dotée de l’autorité dès lors que la sentence est définitive,
alors les hypothèses où l’autorité de chose arbitrée ne se présente pas : le cas où le délai des

1336
L’autorité négative de la chose jugée au sens du Code de procédure civile donne lieu à une action appelée
« ฟ้ องซ้ า » en thaï (l’article 148). Par ailleurs, comme l’on a vu dans le chapitre précédent, l’autorité de chose
jugée se présente aussi dans l’article 145 du CPC pour affirmer que le jugement ou l’ordonnance ne lie que les
parties du procès et qu’il n’a aucune autorité à l’égard des tiers.
1337
Version anglaise, Recognition and Enforcement of Award, Section 41 paragraph 1: “Subject to Section 42,
Section 43 and Section 44, an arbitral award, irrespective of the country in which it was made, shall be
recognized as binding and, upon application to the competent Court, shall be enforced.” Version thaïe dispose
que “ภายใต้บงั คับมาตรา ๔๒ มาตรา ๔๓ และมาตรา ๔๔ คาชี้ ขาดของคณะอนุญาโตตุลาการไม่ว่าจะได้ทาขึ้นในประเทศใดให้ผูกพันคู่พิพาท และ
เมื่อได้มีการร้องขอต่อศาลที่มีเขตอานาจย่อมบังคับได้ตามคาชี้ขาดนั้น”
1338
Effect of award, Section 58 (1): “Unless otherwise agreed by the parties, an award made by the tribunal
pursuant to an arbitration agreement is final and binding both on the parties and on any persons claiming
through or under them.”
1339
CPJI., 15 juin 1939, Sté commerciale de Belgique, Série A/B n° 78, p. 174-175 et 178.

566
recours n’est pas encore expiré ; ou la décision qui rejette le recours n’est pas encore
définitive. C'est-à-dire que l’on peut trouver aussi la sentence qui n’a pas intégralement
l’autorité de chose jugée, tel est le cas du recours en annulation partiel.
La question peut se poser si les autres décisions prononcées par l’arbitre peuvent être
dotées de cette force ? Là aussi il ne faut pas confondre entre la sentence et l’autre décision
qui peut être appelée une ordonnance car seule la première a l’autorité de chose jugée et met
fin au litige.
Le problème persiste toujours sur le libre choix accordé aux arbitres d’octroyer
certaines mesures provisoires ou conservatoires en forme de la sentence arbitrale, si celle-ci
est dotée aussi de l’autorité de la chose arbitrée ? La réponse est négative, la jurisprudence
affirme que la sentence accordée aux mesures provisoires n’est activée qu’au cours de
1340
l’instance et qu’elle ait pour but de rendre le bon déroulement de procédure arbitrale .

2) La mise en œuvre de l’autorité de chose arbitrée.


764. La reconnaissance de l’autorité de chose arbitrée signifie qu’après avoir prononcé
la sentence arbitrale, le différend sur la même cause entre les mêmes parties ne pourra
être introduit devant les juridictions françaises. Autrement dit, lorsqu’il y a des demandes
s’introduisent devant les juges d’appui concernant la chose qui a été tranchée par l’arbitrage,
ils doivent déclarer irrecevables ces demandes. Le problème peut se poser lorsque les parties
ont invoqué la deuxième fois un autre litige devant le tribunal arbitral. Afin de savoir si
la demande est recevable, il faut répondre tout d’abord la question selon laquelle si
la première sentence est dotée de l’autorité de la chose jugée ou non ? Certes, cette question
doit être tranchée par l’arbitre et non le juge d’appui. Car, il appartient aux arbitres
de trancher la question relative à sa compétence, conformément à la règle compétence-
1341
compétence . Dès lors, le juge n’a pas de rôle à ce stade mais seulement le contrôle que
nous étudierons par la suite.

1340
CA Paris, 7 octobre 2004, Otor, JDI.2005.341, note A. Mourre ; Rev.arb.2005.737, note E. Jeuland ; JCP
2005.II.10071, note J.-M. Jacquet.
1341
V. CA Paris, 26 septembre 2002, Melnik, Rev.arb.2002.1049 : la Cour a estimé que « en application de
l’article 1466 du CPC et en vertu du principe de compétence-compétence, il appartient à un tribunal arbitral
nouvellement saisi de statuer, le cas échéant, sur une fin de non-recevoir tirée de l’exception de chose jugée ou
du défaut d’intérêt d’une des parties à former une demande ».

567
765. Comme l’on a dit ci-dessus, la même question entre les mêmes parties portant sur
la même cause et le même objet ne peut être retranchée à nouveau par le deuxième tribunal
arbitral, il s’agit ici de l’effet négatif de l’autorité de chose jugée. Autrement dit, l’arbitre
devrait tenir compte de la première sentence en raison de l’autorité de chose arbitrée,
à l’exception que si les parties sont d’accord pour ne pas prendre en compte l’autorité de
la chose jugée de ladite sentence, et pour ne pas revenir à la question déjà tranchée. Rappelons
que l’on tient ici le principe selon lequel ce qui a été jugé bénéficie d’une présomption de
1342
vérité .
Toutefois, il existe aussi certaines exceptions et celles-ci permettent à l’arbitre
d’entendre et de trancher le fond de litige dans la deuxième procédure arbitrale, c’est le cas où
les parties ne sont pas identiques que dans la première instance et dans l’hypothèse où le
différend a été jugé par un autre arbitre. Qu’en est-il si les mêmes parties ont introduit une
nouvelle fois devant le nouveau tribunal arbitral les différends portant sur la même cause, le
même objet ? A notre avis, les parties sont libres de renoncer au résultat de la sentence, tout
dépend de leur volonté commune. Si toutes parties contractantes n’acceptent pas de se
conformer, rien ne peut les forcer, la sentence ne lie que les parties au litige (là aussi il faut
prudemment considérer qui sont parties au litige). Alors on peut dire que dans cette hypothèse
les parties sont libres à la renonciation de l’autorité de chose jugée de la première sentence.

766. Par ailleurs dans d’autres affaires, certes, pour les objets différents, si l’une des parties
fait prévaloir des faits, des éléments ou des questions qui ont été tranchés dans la première
sentence, l’arbitre devrait les prendre en considération en raison de la force de chose jugée.
Car l’autorité de chose jugée peut aussi manifester son effet positif affirmé par
la jurisprudence, bien qu’il y ait un souci que cet effet pourrait être confondu avec d’autres
notions voisines. Il faut faire attention sur les motivations employées par le juge pour
admettre l’effet positif de l’autorité de chose jugée.
Prenons un exemple du tribunal de commerce qui a reconnu la sentence arbitrale
internationale rendue à l’étranger, en effet le créancier a demandé de reconnaissance incidente
de la sentence pour confirmer l’existence de dette. Le tribunal de commerce admet tout
d’abord que « il n’est pas nécessaire, pour que la dette dont la société française demande le
paiement soit établie, que les sentences définitives, rendues dans les litiges opposant la
société française à la société algérienne, soient rendues exécutoires en France, mais qu’il

1342
Ch. Jarrosson, « L’autorité de chose jugée des sentences arbitrales », op.cit., n° 34, p. 12.

568
1343
suffit que leur existence y soit reconnue » . En effet ceci affirme que la sentence arbitrale
même rendue à l’étranger a en soi l’autorité de chose jugée. Pourtant, le tribunal a par ailleurs
précisé que « ladite reconnaissance confère à cette sentence l’autorité de la chose jugée
conformément à l’article 1476 du CPC et l’article 1500 du même code qui lui rend
applicable ». Il semble que cette motivation ne nous convainc pas, car l’autorité de la chose
1344
jugée existe déjà dès que la sentence soit définitive comme l’on a déjà mentionné .
Il est douteux sur la nécessité de conférer à la sentence l’autorité positive de chose
jugée, pour répondre à cette question il faut rappeler que la sentence sera prête à être soulevée
devant l’autre tribunal arbitral et les juridictions étatiques, c’est pour l’intérêt des parties et
que la sentence mérite d’être reconnue qu’elle tient la vérité dont elle ne pose plus sur le
nouveau débat entre les mêmes parties. Conformément à l’effet négatif, ce qui a été jugé doit
être entendu comme tel et ne peut être rejugé sur la même issue, alors la chose jugée devrait
être également invoquée comme une base pour trancher une autre question.
Cependant la décision du tribunal de commerce précitée donne lieu à un autre
problème comme souligne M. Ch. Jarrosson, si le cas en l’espèce s’agissant de
l’élargissement de l’effet substantiel de la sentence et non l’autorité positive de chose jugée ?
Il n’est pas impossible d’y croire car ce litige concerne une opposabilité de la sentence à un
tiers. Pour certains, le principe de la relativité est apte à appliquer à la sentence arbitrale, car
ils ont cru que l’arbitre n’est qu’un particulier ayant pour mission de trancher les différends
1345
plutôt que de dire le droit véritable .

767. En ce qui concerne le droit thaï sur l’arbitrage, le principe de l’autorité de la chose
jugée est également bien établi dans la jurisprudence. Citons la décision de l’Assemblée
plénière de la Cour suprême Dika en 2007, bien que ceci ait été jugé en matière de l’arbitrage
administratif, le principe ne doit pas être différent en matière international.
En l’espèce, la première sentence rendue en 1999 a décidé que l’Expressway Autority
of Thailand ne peut pas réclamer la somme en cause et l’a condamné à payer les dommages-
intérêts à la société demanderesse, la dernière a demandé l’exequatur et qu’elle a obtenu ce
qu’elle avait demandé. La défenderesse a saisi le second tribunal arbitral en vue d’obtenir le
remboursement de la somme qu’elle estime que le plaideur a illégitimement reçu. La

1343
T. com. Nanterre, 5e ch., 5 septembre 2001, Sté Technip France, Rev.arb.2002.455, note D. Bureau.
1344
Cf. Ch. Jarrosson, « L’autorité de chose jugée des sentences arbitrales », op.cit., n° 46, p. 14.
1345
Cf. L. Boyer, « Les effets des jugements à l’égard des tiers », RTD civ.1951.163, spéc. n° 15.

569
deuxième sentence avait été rendue et a été demandée l’exequatur devant la Cour. Le litige
1346
avait porté devant la Cour civile qui a décidé que la sentence ultérieurement rendue est
légitime. La défenderesse avait fait un recours contre cette décision devant la Cour suprême
Dika et l’Assemblée plénière a infirmé la décision de la Cour civile en jugeant que « Vu que
les deux parties ont été informées, conformément à la loi de l’arbitrage, de la sentence
arbitrale rendue le 1er décembre 1999, dès lors ladite sentence est définitive et lie les deux
parties selon l’article 22 alinéa 1er et l’article 21 alinéa 4 de la Loi sur l’arbitrage B.E. 2530
qui était applicable au moment où la sentence a été rendue ; que les parties soient obligées de
se conformer à cette sentence définitive, par conséquent elles ne pouvaient soumettre à un
nouveau tribunal arbitral les mêmes causes qui ont été tranchées dans la première
1347
sentence » . La Cour a estimé d’ailleurs que « le fait que le plaideur a introduit devant le
tribunal arbitral postérieurement constitué afin d’obtenir la sentence sur les questions qui ont
été déjà tranchées dès la première instance est considéré illégitime car la première sentence
est toujours censée lier les parties et que ceci ne respectait pas l’article 23,1eral. ». Force est
de constater que la Cour suprême ne parle pas directement de l’autorité de la chose jugée, elle
se conforme à la disposition de l’article 23 qui stipule que « la sentence arbitrale définitive lie
les parties au litige », et si les parties n’acceptent pas le résultat de la sentence définitive du
premier tribunal arbitral et si on les laisse introduire les mêmes questions aux nouveaux
arbitres, le système de l’arbitrage ne pourrait pas atteindre son objectif, car les parties vont
continuer de saisir d’autre tribunal arbitral si elles n’ont pas obtenu le résultat qui leur est
favorable.
La Cour a finalement décidé que « la recevabilité par le second tribunal arbitral de
retrancher le litige portant sur les mêmes questions déjà tranchées est considéré comme
contraire à l’ordre public et les bonnes mœurs du peuple, par conséquent la demande
1348
d’exequatur de la seconde sentence est irrecevable » .

1346
A savoir que la Loi portant sur la création de la Cour administrative a été publié dans le JO le 10 décembre
1999. Alors avant sa création ou même après pour certains litiges, la demande d’exequatur ou le recours à
l’encontre de la sentence arbitrale administrative relèvent de compétence de la Chambre administrative de la
Cour suprême Dika.
1347
Cour suprême Dika, A.P., 11102/2551 (2007), Bangkok Expressway PLC. c/ Expressway Authority of
Thailand.
1348
A.P., 6/2551 (2007), préc. Il faut noter qu’en l’espèce le plaideur a fait une demande d’exequatur de la
deuxième sentence le 5 juin 2002 après l’entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur l’arbitrage B.E. 2545, dès lors,
la Cour a pris en considération de cette demande selon l’article 44 de la nouvelle loi. L’article 44 autorise la
Cour de refuser la demande d’exequatur en raison de contrariété avec l’ordre public et les bonnes mœurs du
peuple de la sentence. มาตรา ๔๔ แห่ ง พ.ร.บ. อนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติว่า “ศาลมีอานาจทาคาสั่งปฏิเสธการขอบังคับตามคาชี้

570
B. L’élargissement de la mise en œuvre de l’autorité de la chose jugée.

768. La concentration des moyens et des demandes en matière d’arbitrage


internationale. Tout d’abord, la concentration des moyens et des demandes n’est pas un effet
de l’autorité de chose jugée, on verra en revanche que cette obligation résulte de l’extension
de notion de l’autorité de la chose jugée normalement entendue pour qu’elle puisse produire
un effet sur les moyens et les demandes dans la procédure arbitrale.

1) Le développement des arguments divers.


769. L’admission de l’obligation de concentrer les moyens et les demandes dans l’arbitrage
donne lieu à un vif débat et des opinions très diverses. Ce qui nous intéresse tout d’abord,
c’est l’argument critiqué à l’élargissement de cette obligation à l’arbitrage. La question est de
savoir si l’arbitre, dans l’hypothèse de la prise en considération des demandes introduites
postérieurement, statue sur une prétention qui ne lui aurait pas été soumise. Le débat fondé
sur l’autorité de la chose jugée qui se rattache à la sentence définitive et qui s’étend à toutes
demandes formées sur la même cause bien qu’elles n’aient pas été formées aux yeux de la
1349
Cour de cassation. C'est-à-dire que si l’arbitre tranche ces demandes, l’ultra petita
1350
entraîne l’annulation de la sentence . Selon M. Loquin, « (…) dés lors que la sentence, en
elle-même, n’est pas rendue ultra petita. La sentence ne contient aucun motif indiquant que
les arbitres ont statué ultra petita, dès lors que, par hypothèse, ceux-ci n’ont pas jugé sur ce
qui n’était pas demandé ». Ceci serait vrai si l’on n’étend pas l’application de l’autorité de
chose jugée aux demandes et aux moyens, autrement dit si l’on n’étend pas l’effet négatif de
l’autorité de chose jugée à toutes demandes fondées sur la même cause quand bien même elles
n’ont pas été formées, il n’y a aucune place pour l’ultra petita.

ขาดตามมาตรา ๔๓ ได้ ถ้าปรากฏต่อศาลว่าคาชี้ ขาดนั้นเกี่ ยวกับข้อพิพาทที่ไม่สามารถจะระงับโดยการอนุ ญาโตตุลาการได้ตามกฎหมายหรื อถ้าการ


บังคับตามคาชี้ขาดนั้นจะเป็ นการขัดต่อความสงบเรี ยบร้อยหรื อศีลธรรมอันดีของประชาชน”
1349
Afin de ne pas dépasser la limite qui est à peine de juger ultra petita, l’arbitre devrait statuer
conformément à la convention d’arbitrage et l’acte de mission dont l’un des objectifs est de définir l’étendue du
litige. Force est de constater que l’arbitre est lié par l’acte de mission, mais les parties pourraient toujours étendre
cette mission sous les limites de la clause compromissoire. Comme l’a estimé la Cour de cassation « que la
mission de l’arbitre, définie par la convention des parties, est délimitée principalement par l’objet du litige, tel
qu’il est déterminé par les prétentions des parties et qu’une cour d’appel a exactement retenu que les arbitres,
investis par une clause compromissoire, qui leur soumettait tous les litiges relatifs au présent contrat, pouvaient
statuer sur toutes les demandes qui leur étaient soumises à cet égard, sans s’attacher uniquement à l’énoncé des
questions litigieuses dans l’acte de mission ». Cass. 1er civ., 6 mars 1996, RTD com.1997.438, obs. E. Loquin ;
Rev.arb.1997.69, note J.-J. Arnaldez.
1350
G. Bolard, « Le demandeur doit présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur la même
cause », note sous Cass. 1er civ., 28 mai 2008, Sté Prodim, JCP.2008.II.10170.

571
770. Un autre argument développé dans le sens que cette obligation viole des principes
fondamentaux du droit de l’arbitrage ; le libre accès à l’arbitrage. Comme on l’a vu dans la
jurisprudence que le résultat du non-respect de l’obligation de concentrer les demandes et les
moyens est l’interdiction de l’accès à une seconde procédure arbitrale, cette sanction est
considérée comme un déni de justice selon M. E. Loquin. Cet auteur a soutenu le fait que
l’interdiction d’avoir la seconde chance de « faire juger des questions qui n’ont jamais
jusqu’à présent été demandées ni jamais débattues devant une première juridiction » est déni
1351
de justice . Certes, cet argument n’est pas irraisonnable. Il est possible qu’une demande
résulte de cause différente et pour un objet différent et que cette cause a déjà existé depuis la
première instance arbitrale, et que cette partie aurait pu faire la demande devant le tribunal
mais elle ne l’avait pas fait. D’après ce même auteur, la pratique arbitrale affirme qu’il est
difficile que les parties puissent concentrer toutes les demandes et les moyens dans les
1352
premières semaines de l’arbitrage . De ce point de vue, l’absence de demandes dès la
première instance du plaideur n’est pas forcément considérée comme l’intention dilatoire. Par
ailleurs, l’obligation de concentrer les moyens et les demandes fait obstacle à l’évolution du
litige en limitant uniquement une telle évolution au stade de l’instance arbitrale. Il en résulte
de l’absence de double degré de juridiction en matière d’arbitrage qui permet à évoluer des
1353
moyens devant la juridiction d’appel .
Les partisans de cette application soutiennent que ceci pourrait renforcer le respect du
principe de bonne foi. L’écrit de M. D. Hascher nous démontre que l’obligation de concentrer
les moyens et les demandes est nécessaire et indispensable pour l’arbitrage en estimant
qu’ « il est dans la logique de l’arbitrage international d’obliger les parties à faire connaître
toutes leurs demandes le plus tôt possible (…), la bonne foi suppose de régler le litige et tout
le litige par une sentence revêtue de l’autorité de la chose jugée, sous réserve des éventuelles

1351
E. Loquin, « De l’obligation de concentrer les moyens à celle de concentrer les demandes dans
l’arbitrage », Rev.arb.2010.201, spéc. p. 220. V. aussi R. Perrot, « Autorité de la chose jugée : sa relativité
et le principe de concentration », note sous Cass. 1er civ., 28 mai 2008, RTD civ.2008.551. D’après cet auteur la
décision de la Cour de cassation surprend sur le point que quand bien même la cause de nouvelle demande est la
même que la première instance, mais l’objet était différent, notamment l’une des trois conditions de la relativité
de la chose jugée faisait défaut.
1352
E. Loquin, « De l’obligation de concentrer les moyens… », op.cit., p. 222.
1353
A titre d’exemple, dans l’hypothèse où il y a des moyens nouveaux ou des demandes nouvelles pendant le
procès judiciaire, ceux-ci peuvent être présentés en appel sous certaines conditions. C’est pourquoi lorsqu’il y a
deux instances successives devant les juridictions étatiques, on peut dire qu’il est possible que le litige soit
évolué. Cf. E. Loquin, « De l’obligation de concentrer les moyens… », op.cit., p. 216.

572
1354
causes de révision » . Affirmé par un autre auteur qui considère ainsi « en matière de
l’arbitrage, l’application du principe de concentration a même vocation à s’y appliquer a
fortiori, le fondement conventionnel de la saisine de l’arbitre dotant d’une légitimité textuelle
l’application du nouveau mode d’emploi de l’autorité de la chose jugée et cela en raison du
1355
principe de bonne foi contractuelle » .
Certes, on ne peut reprocher, dans tous les cas, au plaideur qui a oublié, même sous
l’égide de ses avocats, de concentrer toutes les demandes et tous les moyens dès la première
instance, qu’il a tenté de dilater la procédure. Toutefois, il y a aussi la possibilité de
l’envisager et dans certains cas il n’est pas aisé de le prouver, tel est le cas que nous allons
étudier par la suite ; par exemple le plaideur avait simplement oublié de demander dans la
même instance des dommages-intérêts et qu’il l’a rattrapé dans sa deuxième instance arbitrale.
Rappelons que la bonne administration de la justice est également l’un des avantages que l’on
peut tirer de cette obligation. Car, l’une des raisons ou des intérêts du choix de ce mode de
règlement de différends est que l’arbitrage pourrait accélérer de temps du procès et
d’économiser de coût, en laissant les parties introduire leurs demandes sans limite de temps il
est risqué de détruire ces bonnes considérations de l’arbitrage. Force est de reconnaître que la
lenteur de la justice est l’injustice.
L’arrêt de 2008 oblige les parties de concentrer leurs demandes dans la même
instance, ce n’est pas à dire qu’il impose à l’arbitre de trancher sur les dommages-intérêts en
l’absence de la demande. Alors on ne peut conclure que la demande était fictivement jugée
1356
par une décision silencieuse .

771. Cependant ce qui nous rend hésitant d’admettre dans tous les cas l’extension de
l’autorité de chose jugé à la concentration des demandes est fondé sur la question de savoir si
cette chose jugée a obtenu déjà l’autorité ; d’après H. Motulsky pour avoir doté de l’autorité

1354
D. Hascher, « L’autorité de la chose jugée des sentences arbitrales », TCFDIP 2000-2002, Pedone 2004, p.
17 et s ; V. en ce sens P. Mayer, « Litispendance, connexité et chose jugée dans l’arbitrage commercial
international », in Liber amicorum Claude Reymond, Litec 2004, p. 196 : l’auteur estime que « par une
interprétation de la volonté raisonnable des parties à la convention d’arbitrage, que la partie qui saisit un
tribunal arbitral d’une certaine demande perd son droit à présenter à un autre tribunal non seulement cette
demande, telle que précisément formulée, mais aussi toute autre demande qu’elle aurait pu, et donc dû, de
bonne foi, rattacher à celle-ci au cours de la même instance ».
1355
L. Weiller, note sous Cass. 1er civ., 28 mai 2008, Sté Prodim, Rev. arb. 2008.461.
1356
Contra. G. Bolard, note sous Cass. 1er civ., 28 mai 2008, op.cit.

573
1357
de la chose jugée, il faut que la question litigieuse demandée soit véritablement tranchée .
Comment peut-on accorder que « la chose » qui n’a jamais été demandée ni tranchée aurait
doté de ladite autorité en elle-même ? A notre avis, il faut soigneusement distinguer le cas où
le plaideur est considéré avoir un but dilatoire ou une mauvaise foi de l’hypothèse où celui-ci
serait autorisé d’introduire les nouvelles demandes devant le tribunal arbitral postérieurement
constitué (c’est un exemple sous l’empire de l’ancienne loi). Pour le premier cas, le juge
pourrait décider qu’il fait l’objet de sanction pour le fait du manquement de loyauté
procédurale car il ne s’agit pas à ce stade de l’autorité de chose jugée. Alors que pour le
second cas, il y a eu une proposition d’un auteur selon laquelle « rien n’empêche le juge
d’appliquer les articles 564 et suivants du CPC pour apprécier certaines demandes nouvelles,
dès lors, tous les moyens nouveaux étant eux-mêmes recevables s’ils sont admis par l’article
1358
1502 du CPC » .
Pourtant, dès lors que la nouvelle loi de l’arbitrage 2011 est entrée en vigueur, l’article
1527 du CPC précise une limitation selon laquelle « le recours en annulation de la sentence
est formé, instruit et jugé selon les règles relatives à la procédure contentieuse prévues aux
articles 900 à 930-1 » ; c'est-à-dire que les articles 564, 566 et 567 du CPC ne peuvent être
appréciés dans ce cas. A priori, il semble que l’admission de la nouvelle demande doit être
motivée par le fait qu’aucune loi sur l’arbitrage ne l’interdit.

2) La solution jurisprudentielle.
772. En effet, un arrêt de la Cour d’appel de Paris en 2004 pourrait justifier l’élargissement
en matière d’arbitrage l’obligation de concentrer les demandes et les moyens. La Cour a
estimé que « la loyauté et la bonne foi procédurale dans l’arbitrage international imposent
bien aux parties de faire connaître leurs demandes le plus tôt possible, et notamment au stade
de l’acte de mission où sont récapitulées les prétentions sur lesquelles portera l’instruction de
manière à éviter qu’une demande qui aurait pu et dû être soulevée ne le soit par la suite dans
1359
un but purement dilatoire ou par simple négligence » .

1357
H. Motulsky, « Pour une délimitation plus précise de l’autorité de la chose jugée en matière civile »,
D.1968.chron.1. Il nous convient de reprendre ici l’opinion de Motulsky au terme exacte, cet auteur a admis que
« la faculté pour le tribunal de décider que, si effectivement le facteur invoqué dans la seconde instance n’avait
pas été discuté ni tranché dans la première, alors qu’il aurait pu être soulevé et qu’il ne l’avait pas été dans un
but dilatoire, il faisait alors partie de la matière litigieuse de la première procédure ».
1358
G. Bolard, note sous Cass. 1er civ., 28 mai 2008, op.cit., p. 4.
1359
CA Paris, 18 novembre 2004, GIE Euromissile, Rev.arb.2005.751.

574
L’arrêt de la Cour de cassation du 28 mai 2008 vient affirmer la jurisprudence
précédente. Il s’agit en l’occurrence d’un contrat de franchise entre la société G&A
Distribution, le franchisé, et la société Prodim, le franchiseur. Cette dernière avait saisi le
tribunal arbitral conformément à la clause d’arbitrage, celui-ci a rendu dans la sentence du 28
juin 1999 que la société G&A est responsable de cette rupture du contrat. Pourtant la demande
de la société Prodim tendant à la dépose de l’enseigne concurrente a été rejetée. La société
Prodim a saisi une nouvelle fois le tribunal arbitral en invoquant la violation du contrat de
franchise, cette fois-ci, uniquement pour les dommages-intérêts.
La seconde sentence a été annulée par la Cour d’appel de Caen, ses motivations sont
intéressantes, elle estima ainsi : « il résultait du dispositif de la première sentence que le
tribunal arbitral n’avait pas statué sur une demande de dommages et intérêt fondée sur un
article du contrat de franchise qui prévoyait une clause de non réaffiliation ». La décision de
la Cour d’appel de Caen a été cassée et annulée par la Cour de cassation dans l’arrêt du 8
juillet 2004. Le litige avait été renvoyé à la Cour d’appel de Versailles qui a délibéré l’arrêt du
30 janvier 2007, un pourvoi formé devant la Première Chambre Civile par la société G&A.
La Cour de cassation a décidé ainsi : « il incombe au demandeur de présenter dans la
même instance toutes les demandes fondées sur une même cause et qu’il ne peut invoquer
dans une instance postérieure un fondement juridique qu’il s’était abstenu de soulever en
1360
temps utile » . Force est de constater que l’arrêt affirme que l’obligation de concentrer les
demandes doit être retenue aussi dans l’arbitrage ; la jurisprudence nous a démontré que la
Cour n’admet pas que la demande de dommages-intérêts, même si ceci n’a pas encore été
statuée pendant la première instance arbitrale, puisse faire l’objet d’une nouvelle demande
devant le tribunal arbitral postérieurement constitué. Par conséquent la fin de non-recevoir
tirée de l’autorité de chose jugée devrait être appliquée dans cette hypothèse. Il semble que ce
motif n’est pas tout à fait logique, en particulier l’objet de la nouvelle demande devant le
second tribunal était différent de celle qui a été jugée dans la première sentence ; par
conséquent on ne constate pas l’autorité de chose jugée sur une demande de dommages-
intérêts.
Afin que l’on applique cette obligation à l’arbitrage, il faut que, a priori, la notion de
l’autorité de chose jugée soit étendue. Cependant la justification de la Cour de cassation n’est
pas assez logique, la meilleure raison que nous pouvons admettre est celle de bonne

1360
Cass. 1er civ., 28 mai 2008, Sté Prodim, n° 07-13.266, D.2008. AJ 1629, obs. X. Delpech ; Rev. arb.
2008.461, note L. Weiller ; RTD civ.2008.551, obs. R. Perrot; JCP.2008.II.10170, note G. Bolard ; RTD
com.2010.535, note E. Loquin.

575
administration de la justice. Mais comment ceci est justifié si le plaideur n’est pas de
mauvaise foi pour la demande postérieure ? Certes, en tenant compte de la rapidité de
procédure arbitrale qui est l’un des buts de ce mode de règlement des différends, disons que la
lenteur de la justice est l’injustice. Pourtant si on concentre uniquement sur la rapidité sans
tenir compte du fait, ceci peut aussi entraîner l’injustice.

773. En effet, l’obligation de concentrer les demandes doit être prise en considération
séparément de l’obligation de concentrer les moyens. Tout d’abord le Code de procédure
civile n’impose pas ces charges processuelles. C’est l’obligation jurisprudentielle qui est en
1361
jeu, partant de la concentration des moyens selon l’Assemblée plénière et puis la
concentration des demandes, que nous venons d’étudier. En ce qui concerne les moyens,
d’après l’arrêt de l’Assemblée plénière, « il incombe au demandeur de présenter dès
l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à
fonder celle-ci », c'est-à-dire tous les fondements juridiques relevant de cette demande.
Alors que l’obligation de concentrer les demandes impose qu’il faut formuler toutes
les prétentions soutenues par les mêmes fondements juridiques dans la même instance.
C'est-à-dire que pour le cas en l’occurrence, dès la première instance il faut que le demandeur
introduise toutes les demandes qu’il a souhaitées car, selon la Cour, la demande des
dommages-intérêts est aussi fondée sur la même cause présentée dans la première instance.
Cependant la juridiction d’appel confirme fermement sa position sur l’inexistence en
matière d’arbitrage international l’obligation de concentrer les demandes. Afin de rejeter le
recours en annulation à l’encontre de la sentence arbitrale, l’arrêt de la Cour d’appel de Paris
rendu en 2010 affirme qu’« aucune théorie juridique n’imposait à Jnah de brûler toutes ses
1362
munitions dans un même arbitrage » .

1361
Cass. A.P., 7 juillet 2006, D.2006.2135, note L. Weiller ; JCP.2007.II.10070, note G. Wiederkehr.
1362
CA Paris, pôle 1, ch. 1, 9 septembre 2010, Marriott International Hotels Inc. c/ Jnah Development SA,
Gaz. Pal., 8 février 2011, n° 39, p. 11. Le cas d’espèce s’agissant d’un recours en annulation formulé par
Marriott à l’encontre d’une sentence internationale rendue à Paris en 2009. La société Jnah a confié à Marriott
l’exploitation d’un hôtel à construire par cinq contrats qui contiennent une clause d’arbitrage de CCI. Marriott a
été condamné pour violation du contrat par une première sentence rendue en 2003 à payer la société Jnah des
dommages et intérêts, des facturations indues et à lui communiquer des pièces comptables. En 2005, la société
Jnah a saisi à nouveau le tribunal arbitral sur le fondement des mêmes contrats. Cette fois-ci elle a demandé les
diverses sommes pour la perte de bénéfice résultant du déclassement de l’hôtel, d’une fraude à la carte de crédit
et de charges indûment facturées. La deuxième sentence a été rendue et Marriott a fait un recours en annulation
en faisant valoir que la société Jnah a violé le principe de bonne foi et de loyauté car celle-ci était abstenue
d’invoquer dès la première instance toutes les demandes qu’elle aurait pu soumettre aux arbitres. C’était
l’autorité de la chose jugée qui s’attacherait aux questions tranchées depuis le premier arbitrage qui oblige. La
Cour d’appel, pour répondre à ces moyens, a jugé que « les questions qui lui étaient soumises ne procédaient pas

576
774. En Thaïlande, à notre connaissance, la jurisprudence en matière de l’arbitrage n’exige
pas les parties de concentrer les moyens et les demandes dès la première instance. Alors que
les décisions de la Cour suprême Dika en dehors de matière d’arbitrage dirigent dans le sens
qu’il est possible de faire la demande de dommages-intérêts dans la seconde instance, même
si le demandeur aurait pu faire au cours de l’instance ultérieure mais il ne l’avait pas fait.
A titre d’exemple, dans le deuxième litige, les parties sont identiques au premier et
que le demandeur dans la première instance a saisi la Cour dans cette instance uniquement
pour le dommages-intérêts tandis que le jugement du premier litige a été délibéré. La Cour
suprême a estimé que « la demande pour le second litige est différente de celle du premier
litige ; qu’il ne s’agit pas de même question fondée sur la même cause déjà tranchée par la
Cour dans la première instance, dès lors, il n’est pas interdit d’assigner une nouvelle fois
1363
pour obtenir les dommages-intérêts » . La Cour thaïe n’oblige pas les parties à concentrer
toutes les demandes relatives à la même cause dans la première instance, ceci est différent de
la jurisprudence française déjà citée. Bien que les décisions aient été rendues dans d’autres
matières différentes, celles-ci nous permettent de comprendre la position de la Haute
juridiction dans chaque système juridique.

§ 2 : Reconnaissance et exécution des sentences arbitrales internationales.

775. Un autre développement jurisprudentiel qui nous intéresse aussi s’agissant de la


reconnaissance en France des sentences annulées dans leur pays d’origine, la réponse à cette
question donne lieu au changement radical de conséquence, plus précisément la partie
conquérante dans une sentence annulée aurait l’opportunité d’obtenir le résultat qui lui est
favorable en faisant reconnaitre de ladite sentence dans un État qui admet la sentence annulée.
Il est vrai que la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales ne puissent
exercer sans limite, l’État souverain sauvegarde nécessairement certaines valeurs du for, c’est
pourquoi afin d’être reconnue ou d’obtenir l’exequatur, il faut que certaines conditions soient
remplies.

de mêmes causes factuelles que les demandes précédemment tranchées et qu’aucune théorie juridique
n’imposait à Jnah de brûler toutes ses munitions dans un même arbitrage ».
1363
Cour suprême Dika, n° 456/2545 (2002) ; n° 457/2545 (2002) ; n° 1584/2545 (2002).

577
A. Modalités de reconnaissance et d’exécution de sentences arbitrales
internationales.

776. Efficacité des sentences arbitrales internationales. Après avoir étudié


précédemment la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers, on sait qu’il
nécessite de dissocier la sentence arbitrale du jugement émanant de l’État. En raison de son
détachement de la sentence arbitrale par rapport aux ordres juridiques étatiques et au siège
1364
d’arbitrage. La sentence arbitrale n’est qu’un simple acte privé , afin que son efficacité
puisse se produire dans l’État requis, il faut recourir à la méthode du conflit de lois. Plus
précisément lorsqu’on est en dehors du cadre de droit conventionnel, il appartiendra à la loi
désignée par la règle de conflit de lois de déterminer les conditions de validité et les effets de
la sentence.
La question est de savoir, de même qu’en matière des jugements étrangers, comment
une sentence arbitrale étrangère pourrait-il produire des effets dans l’ordre juridique du for ?
Il faut rappeler tout d’abord que la sentence est dépourvue la force exécutoire en soi lors de
son présence dans l’État requis ou à vrai dire, elle n’a pas de force exécutoire à l’égard de tous
les ordres étatiques y compris l’État du siège de l’arbitrage, a priori la sentence arbitrale
étrangère est extranéité à tous les ordres juridiques ; une telle sentence n’est pas susceptible de
donner lieu à des mesures d’exécution forcée. Il est nécessaire que l’ordre juridique de l’État
requis lui confère ladite force, c’est pourquoi le jugement d’exequatur est indispensable. Sur
ce point, on est d’accord que ce n’est pas effet de la sentence étrangère qui est efficace dans
un État mais c’est le jugement d’exequatur. Nous avons déjà étudié dans l’étude précédente
que, comme l’admet M. P. Mayer, « le jugement étranger ne peut se voir conférer la force
exécutoire et l’autorité de chose jugée (…) Cela reviendrait à dire qu’il confère au juge
étranger un pouvoir de commandement sur le territoire français, spécialement le pouvoir de
commander aux organes de contrainte français de prêter main-forte à l’exécution
1365
forcée » . Cette analyse pourrait être étendue aux sentences arbitrales.

777. L’avantage que l’on peut tirer de l’exigence de l’exequatur réside dans l’éviction de
doute sur la conformité de la sentence arbitrale aux conditions posées par l’État requis. Car, la
force exécutoire serait accordée uniquement à la sentence pouvant passer l’épreuve du

1364
V. en ce sens P. Mayer, préface de S. Bollée Les méthodes du droit international privé…, op.cit.
1365
P. Mayer, Droit international privé, op.cit., n° 410.

578
contrôle. C’est pourquoi, M. S. Bollée, citant Mme M.-L. Niboyet, admet que « le jugement
d’exequatur n’a pas pour l’objet de « recopier » l’acte juridictionnel invoqué afin d’introduire
dans l’ordonnancement juridique une norme de contenu équivalent », en revanche il a pour
but de « concrétiser l’effet juridique de diverses règles conférant des attributs aux sentences
1366
étrangères qui pourraient remplir les conditions de l’efficacité » .
De même qu’en matière du jugement étranger, la reconnaissance des sentences
arbitrales étrangères se distingue de l’exequatur. La partie conquérante pourrait demander en
France la reconnaissance de sentence arbitrale pour débouter une autre partie sans nécessité de
l’exécution. Cependant il ne faut pas confondre la reconnaissance avec l’autorité de chose
jugée, l’invocation de cette dernière a pour but de contester le procès déroulant contre un
plaideur.

778. La demande d’exequatur de la sentence. L’article 1516 du Décret de 2011 précise


que dans le cas des sentences rendues à l’étranger, une ordonnance d’exequatur peut être
sollicitée devant le TGI de Paris. Cette idée n’est pas nouvelle, lorsque l’ancienne loi était
applicable, celle-ci n’a pas déterminé la compétence territoriale spéciale pour ce cas,
1367
il semblait avoir un souci sur le manquement d’expérience de certains tribunaux .
L’argument était que ne serait-il pas plus convenable de conférer au juge qui a suffisamment
pratiqué la compétence de traiter une demande d’exequatur des sentences rendues à
l’étranger ?
Il n’est pas nécessaire d’assigner pour la nouvelle fois afin de demander l’exequatur,
en revanche, il suffit de le faire par la voie de requête pour éviter le débat sur le fond des
griefs qui peuvent être introduits devant le juge d’exequatur, car celui-ci devrait normalement
contrôler de manière superficielle.

779. Les conditions contrôlées. Observons que la reconnaissance et l’exécution des


sentences se fondent toujours sur le principe de simplification et rapidité. Alors il n’y a que
deux points principaux de contrôle : le contrôle formel de documentation et le contrôle de
l’ordre public international. Le premier est de prouver et affirmer l’existence de la sentence en
cause. Pour le second, afin de simplifier la reconnaissance et l’exécution, l’article 1514 du
Décret 2011 retient toujours le terme « manifeste » de l’ancien article 1498 1er al. C'est-à-dire

1366
S. Bollée, Les méthodes du droit international privé à l’épreuve des sentences arbitrales, op.cit., n° 273.
1367
V. Ph. Fouchard, Traité…, op.cit., n° 1571.

579
il faut que la contrariété soit manifeste uniquement pour le refus de reconnaissance ou
exécution. Cette condition englobe aussi le respect de la contradiction.
Quant aux lois de police du for, on a déjà étudié lors de la procédure arbitrale que
l’arbitre devrait respecter et trancher le différend en tenant compte des lois de police du pays
où cette sentence aurait été reconnue ou exécutée. En toute logique, seules les sentences
internationales qui ne sont pas contraires aux lois de police de l’État requis pouvant être
reconnues ou exécutée dans cet État.

780. En droit thaï, la demande d’exequatur des sentences arbitrales, quel que soit dans
l’État où celles-ci ont été rendues, devrait exercer devant la juridiction qui est compétente.
Cependant pour les sentences rendues à l’étranger, elles sont soumises à deux conditions :
il faut que ladite sentence soit rendue sous le régime de droit conventionnel dont la Thaïlande
est signataire, mais que ceux-ci ne peuvent produire les effets que si la Thaïlande accepte d’y
1368
être liée . Pour la seconde condition, nous pensons qu’elle signifie des réserves dans le cas
où la Thaïlande en a conclu. Mais, il paraît que la Thaïlande n’a fait aucune réserve sur
la Convention de New York de 1958. La demande d’exequatur devrait être introduite par voie
de requête. Qu’en est-il si le requérant avait obtenu tout d’abord devant le juge étranger
la reconnaissance de la sentence arbitrale étrangère et ensuite il a saisi la Cour thaïe en
demandant d’exequatur d’une telle sentence ? Dans cette hypothèse, la Cour thaïe a aussi
1369
prononcé l’exequatur en tant que sentence arbitrale et non pas un jugement étranger .

B. La sentence arbitrale étrangère inconciliable avec le jugement étranger.

781. La question est de savoir qu’en est-il si le jugement étranger a été tranché sur le même
prétendu que rend la sentence arbitrale ? Certes, la sentence arbitrale doit être reconnue
automatiquement mais dans la plupart des cas celle-ci a besoin d’être exécutée. La sentence
arbitrale n’a pas en soi une force exécutoire, donc elle a besoin d’ordonnance ou de jugement
d’exequatur pour qu’elle puisse être exécutée. L’on peut envisager les deux cas différents,
d’une part, l’hypothèse où la sentence et le jugement sont contradictoires ; d’autre part, le cas
où les décisions étrangères sont non compatibles.

1368
L’article 41, préc.
1369
Cour suprême Dika, n° 698/2521 (1978).

580
782. Dans l’hypothèse où la sentence arbitrale a été rendue en France en premier et
le jugement étranger est en cours de demande d’exequatur en France, les arrêts de la Cour de
1370
cassation de 2007 sont les bons exemples. Il s’agit en l’espèce d’un contrat de
prospection pétrolière entre la société Total E&P Congo (TEP), la République du Congo, et la
société libanaise GAT, les deux questions posées devant la Cour de cassation portant sur le
caractère exécutoire d’une sentence arbitrale d’une part, et pour savoir si la sentence étrangère
rendue en France peut faire obstacle à la reconnaissance en France des jugements étrangers
d’autre part. La société TEP a été condamnée par la Cour suisse à payer une somme d’argent
à la société GAT pour des échéances de prêt consenti par la dernière. L’État Congo a estimé
que la société TEP avait trop payé dès lors il a engagé une procédure arbitrale devant la CCI
pour le remboursement des sommes déjà versées à la société GAT.
A ce stade, le tribunal arbitral a rendu deux sentences partielles : l’une a condamné la
République du Congo à régler une certaine somme de 16 millions d’euros à la société GAT ;
l’autre a ordonné à la société GAT de donner instruction à la société TEP de verser sur un
compte séquestre le montant que la dernière doit à la société GAT. Certes, la société GAT
refusa d’exécuter cette seconde sentence et demanda un recours en annulation, alors que le
juge d’exécution rejeta la demande d’astreinte pour forcer cette instruction.
La Cour d’appel a affirmé cette décision, la société GAT a formé un pourvoi qui a été
rejeté par la Cour de cassation au motif que la sentence arbitrale n’est pas exécutoire de plein
droit. Bien que le juge d’exécution puisse octroyer une astreinte en vertu de l’article 33, al. 2,
de la loi du 9 juillet 1991, il faut qu’une telle décision soit assortie de la force exécutoire en
soi. Il est douteux que la Cour de cassation a affirmé elle-même dans une autre décision que la
1371
sentence arbitrale a été qualifiée comme une décision de justice . Là aussi il ne faut pas
confondre entre les deux problèmes, quand bien même la sentence arbitrale est dotée de
l’autorité de la chose jugée comme un jugement, mais ce n’est pas à dire que celle-ci peut être
assimilée au jugement rendu par une juridiction étatique qui est reconnu de plein doit lorsqu’il
est définitif. La Cour de cassation a estimé par ailleurs que même si le règlement de
l’arbitrage en l’occurrence, la CCI, contient une disposition par laquelle les parties s’engagent

1370
Cass. 1er civ., 4 juillet 2007, n° 05-16.586 et n° 05-16.605, D.2007.AJ.2025, obs. X. Delpech ;
Rev.arb.2007.805, note S. Bollée ; JCP.2007.I.216, obs. J. Ortscheidt ; D.2008. 451, obs. T. Clay.
1371
Cass. 2e civ., 12 octobre 2006, Sté Motokov France, D.2006.IR.2627, Pan. 3026, obs. T. Clay ; RTD civ.
2007.183, obs. R. Perrot ; JCP.2007.I.139 : la Cour a affirmé que la sentence arbitrale en cause est
indépendamment de tout exequatur et qu’elle constitue un titre suffisant en soi afin de donner une autorisation à
un huissier français à exercer une mesure conservatoire. C’est en effet ce fait qui est motivation, car pour
octroyer une telle mesure, il n’est pas nécessaire que la sentence soit exécutoire. (l’article 68 de la Loi de 1991)

581
à exécuter la sentence, mais elle ne signifie que celles-ci s’engagent à exécuter la sentence, il
s’agit ici de la responsabilité, et non pas que la sentence soit exécutoire elle-même.
Pour répondre à la première question, c’est toujours l’ordonnance d’exequatur qui
joue un rôle indispensable pour rendre la sentence une force exécutoire. De surcroît la Cour a
appuyé sur le point très important que ladite ordonnance doit être « définitive » ; une telle
sentence a force exécutoire dès lors que le délai de recours est expiré. Ce principe a aussi été
retenu par le droit thaï, l’article 41, 1er al. de la Loi sur l’arbitrage B.E. 2545 affirma
expressément que « (…) la sentence arbitrale, rendue dans n’importe quel État, lie les
parties ; et elle est exécutoire dès lors que la juridiction compétente prononce l’exequatur
1372
d’après la demande d’une partie » .

783. La seconde question s’agissant de concurrence de la sentence arbitrale et le jugement


étranger. En l’espèce le GAT a obtenu, de la Cour d’appel de Versailles, l’exequatur en
France des jugements suisses qui condamnent la société TEP, alors que la République du
Congo et la société TEP ont formé un pourvoi contre ledit arrêt. Comme on le sait, ce pourvoi
a été rejeté par la Cour de cassation, les demandeurs ont fait valoir qu’il y avait une
inconciliabilité selon la Convention de Lugano entre les jugements suisses et la sentence
arbitrale rendue en France qui exige un séquestre en faveur de la société TEP (si cette
convention s’applique, la reconnaissance d’une décision étrangère doit être refusée dès lors
qu’elle est inconciliable avec une autre rendue entre les mêmes parties dans l’État requis).
La Cour décida qu’il n’y avait pas de place pour la Convention de Lugano car en
l’occurrence il s’agit de matière d’arbitrage, par conséquent les juges du fond avaient raison
1373
d’estimer que ces jugements et les sentences n’étaient pas inconciliables . Alors, d’après
la Cour de cassation, la réponse à cette question est que « les sentence arbitrales ne sont pas
susceptibles de faire obstacle à la reconnaissance de décisions rendues dans un autre État
membre ».

784. Dans l’hypothèse où il existe déjà un jugement étranger définitif étant accueilli en
France et que la sentence arbitrale est postérieurement rendue sur le même prétendu, il faut

1372
มาตรา ๔๑ วรรคแรก แห่งพระราชบัญญัติอนุญาโตตุลาการ พ.ศ. ๒๕๔๕ บัญญัติวา่ “... คาชี้ขาดของคณะอนุญาโตตุลาการไม่ว่าจะได้ทาขึ้นใน
ประเทศใดให้ผกู พันคู่พิพาท และเมื่อได้มีการร้องขอต่อศาลที่มีเขตอานาจย่อมบังคับได้ตามคาชี้ขาดนั้น”
1373
Le terme employé par la Convention est large, car la « décision » pourrait être déterminée en plusieurs
sens. Cependant d’après la jurisprudence communautaire et la jurisprudence française, il faut entendre la notion
de « décision » comme celle uniquement rendue par une juridiction étatique.

582
distinguer les deux situations suivantes : le cas où l’incompatibilité se présente entre les deux
décisions, c’est la décision antérieure qui l’emporte et la sentence postérieure sera annulée. Ce
qu’il faut retenir est que la première décision devrait être accueillie dans l’ordre juridique
français pour qu’elle puisse emporter sur la seconde décision dans cette hypothèse. Toutefois,
lorsque les deux décisions sont compatibles, la sentence postérieure ne pourra pas faire l’objet
d’une annulation.

785. En Thaïlande, il n’y a pas de convention internationale applicable à la reconnaissance


des décisions judiciaires étrangères comme l’on a déjà étudié, dès lors, tous les cas envisagés
seraient traités dans le cadre du régime de droit commun. Comme d’autres pays, à notre avis,
la Cour suprême Dika reconnaîtrait la sentence arbitrale internationale. Alors que le statut des
jugements judiciaires étrangers peut être assimilé à la sentence arbitrale dans la mesure où ils
sont dotés de l’autorité de la chose jugée, mais afin d’être exécuté en Thaïlande, il faut avoir
au préalable un jugement d’exequatur de la Cour thaïe. A ce point de vue, on peut dire que le
statut de la sentence arbitrale étrangère ne diffère pas de celui du jugement étranger. Quoi
qu’il en soit, il semble que la reconnaissance et l’exécution des sentences en Thaïlande ne
rencontrent guère de difficultés particulières, sans doute grâce à la Convention de New York
de 1958.

786. Le non contrôle de l’application par l’arbitre de la règle de droit dans l’arbitrage
français. La question est de savoir si le juge étatique pourrait examiner l’application de la
règle de droit par l’arbitre ? Qu’en est-il si l’arbitre applique à tort la loi au litige ? Ce
problème est délicat car, si l’on admet au juge le pouvoir d’examiner ou de réviser la sentence
arbitrale, l’objet de l’arbitrage sera ruiné. Il est admis de façon constante parmi les praticiens
de l’arbitrage international la décision de la Cour de cassation française qui estima que la
manière dont l’arbitre a appliqué la règle de droit pour régler le litige au fond échappe au
contrôle du juge de l’annulation. Il en résulte du choix des contractants de régler leur
différend par ce mode alternatif de règlement de différends et non pas le mode judiciaire du
juge étatique en appliquant rigoureuse des règles de droit.

787. L’étendue sur le contrôle de la sentence arbitrale étrangère entre la juridiction


administrative et judiciaire semble manifestement différente. D’un côté, pour le cas où le
litige relève de la compétence de la Cour judiciaire, en ce qui concerne du recours contre la
sentence arbitrale, on peut constater que les articles 1504 et 1505 du CPC permettraient
583
uniquement pour un recours en annulation devant la Cour d’appel dans le ressort de laquelle
la sentence a été rendue. D’autre côté, si ce même litige est introduit devant la juridiction
administrative, selon l’article L.321-2 du Code de justice administrative la sentence arbitrale
peut faire l’objet d’un recours en appel devant le Conseil d’État. Il s’agit d’un appel relevant
de l’ordre public de direction auquel les parties au contrat ne devraient pas pouvoir renoncer
au profit du recours en cassation.
En ce qui concerne du cadre d’un recours en appel, un appel devant le Conseil d’État
est considéré comme le juge du procès car celui-ci alla dans l’ensemble du litige soumis à
l’arbitrage alors que le juge judiciaire ne tient compte que la sentence arbitrale. Il semble que
cette voie de recours est bien accueillie parmi les publicistes, puisqu’ils croient en la
protection de l’intérêt général de l’État, personne morale publique, dans ce procès le Conseil
d’État devrait certainement prend en considération la spécificité de l’un des contractants.
Citons l’avis de M. P. Cassia selon lequel le contrôle par le juge administratif sur le bien-
fondé de la sentence ne peut pas être superficiel, car les pouvoirs publics ne sauraient
abandonner à de simples individuels de juger et de rendre une décision qui n’est surtout pas
1374
fait au nom du peuple français . Donc il est possible que l’on prenne le risque d’une
violation de dispositions légales.
En effet cette opinion n’est pas loin de celle de partisans thaïs et notamment les
praticiens, ceux-ci mettent l’accent sur l’idée qu’il ne faut pas laisser le destin de
1375
l’établissement public dans les mains de particuliers .
Comme l’écrit M. P. Mayer qu’en tenant compte de la spécificité de la partie
« publique » cocontractante dans le contrat international, il n’est pas justifié d’envisager que
l’arbitrage reste confiné à « la justice en soi loin des regards du public et surtout de ceux de
1376
l’appareil d’État » . Il semble que les auteurs mettent plutôt l’accent sur l’examen du
fond du litige lorsque celui-ci porte sur l’intérêt public, en particulier dans le cas où l’une des
parties est personne morale de droit public.

1374
P. Cassia, « Les sentences arbitrales internationales … », op.cit., p. 1568-1569.
1375
En Thaïlande, la pratique nous démontre qu’en général le tribunal arbitral se compose de trois arbitres
même pour le différend entre la personne publique et l’entreprise de droit privé. La loi n’exige que deux sur trois
membres pour chaque audience et il paraît que, souvent, certains arbitres ne sont venus que pour la première
séance et puis la dernière pour rendre la sentence. Ce comportement se voit péjoratif aux yeux du public et ceci
explique le sentiment des personnes qui ne voulaient pas faire confiance au procès d’arbitrage en particulier pour
ce genre de litige. Ce sujet devient de plus en plus sensible, surtout après la sentence arbitrale de la chaine de
télévision ITV en 2007.
1376
P. Mayer, préface C. Seraglini, Lois de police et justice arbitrale internationale, Paris : Dalloz, 2001.

584
788. En Thaïlande, les auteurs admettent aussi le principe de non contrôle de l’application
1377
de droit par l’arbitre, sauf si les erreurs d’application paraissent clairement devant le juge .
Bien que l’arbitre, par accord des parties, puisse trancher le litige sans recourir à la loi
étatique, la loi concernant l’ordre public et les bonnes mœurs devraient être respecté en tout
état de cause.

C. Reconnaissance des sentences annulées dans leur pays d’origine.

789. Certes, cette question ne se pose pas si la partie conquérante souhaite la


reconnaissance d’une sentence dans le pays du siège de l’arbitrage, car la sentence a été
annulée par le juge de cet État. Mais on envisagera ce problème dès lors que la partie
contractante fait une demande d’exequatur une sentence annulée devant la juridiction
étrangère. Force est de constater que la sentence annulée dans son pays d’origine ne peut
bénéficier des dispositions de la Convention de New York de 1958. Toutefois, il est possible
que ladite sentence soit reconnue et exécutée dans un autre État à travers le système de droit
commun.

790. En France, la Cour de cassation a jugé en ce sens dans son arrêt rendu en 1993 : « la
décision de suspendre le caractère exécutoire de la sentence prononcée par les juridictions de
l’État du siège de l’arbitrage ne pouvait faire obstacle à l’exécution de la sentence en France
1378
en droit commun » . Cette décision a été affirmée par l’arrêt Hilmarton en 1994, il
s’agissait de la sentence annulée en Suisse.
En effet il faut commencer par les dispositions de la Convention de New York de
1958 qui avaient adopté une réponse multilatérale sur la question de la valeur juridique de
sentence arbitrale annulée. L’article V (1) (e) de cette convention admet que la reconnaissance
et l’exécution de la sentence ne pourraient être refusées que si, entre autres, la sentence n’est
pas devenue obligatoire pour les parties ou a été annulée par une autorité compétente du pays
dans lequel ou selon la loi duquel la sentence a été rendue.
Cependant l’article VII (1) de la même convention dispose ainsi « les dispositions de
la présente Convention ne privent aucune partie intéressée du droit qu’elle pourrait avoir de

1377
S. Asawaroj, Le règlement des différends commerciaux par l’arbitrage, op.cit., p. 175.
1378
Cass. 1er civ., 10 mars 1993, Polish Ocean Line, Rev.arb.1993.255, note D.Hascher ; JDI.1993.360, 1re
esp., note Ph. Kahn.

585
se prévaloir d’une sentence arbitrale de la manière et dans la mesure admise par la
législation ou les traités du pays où la sentence est invoquée », ce texte ouvre la porte pour les
États membres qui souhaitent de préserver leurs dispositions du droit interne prévoyant sur la
reconnaissance ou l’exécution de la sentence annulée. Plus précisément, cet article laisse
appliquer le droit interne stipulé sur l’efficacité de la sentence, même annulée dans son pays
d’origine. Il faut observer que cet article ne peut jouer en l’absence de droit interne ou d’une
convention internationale ratifiée par l’État dans lequel sont visés la reconnaissance ou
l’exécution de la sentence. Le cas stipulé dans l’article V (1) (e) est bien celui de droit
français, car en 1981 la France a adopté un décret qui donnait lieu à l’article 1502 du CPC ;
c'est-à-dire que dès ce moment là la décision d’annulation d’une sentence rendue à l’étranger
n’est à l’égard du juge français qu’une information sur la loi étrangère, il n’est pas obligé de
tenir compte de la valeur de cette sentence.

791. Citons un exemple de l’arrêt Hilmarton, en l’espèce, la société anglaise Hilmarton


a engagé envers la société française O.T.V. pour une mission de donner un conseil et de
coordination pour l’obtention et l’exécution d’un marché de travaux en Algérie. Suite aux
problèmes du paiement du solde de ses honoraires, la société Hilmarton avait saisi le tribunal
arbitral de CCI selon la clause compromissoire incluse dans le contrat. La sentence a été
rendue à Genève en refusant la demande de la société Hilmarton, malgré la décision
d’annulation par la Cour de justice du canton de Genève de cette sentence, celle-ci
a finalement reçu l’exequatur en France.
La Cour de cassation a affirmé l’arrêt de la Cour d’appel de Paris (19 décembre 1991)
en estimant dans sa réponse ainsi : « était une sentence internationale qui n’était pas intégrée
dans l’ordre juridique de cet État, de sorte que son existence demeurait établir malgré son
annulation et que sa reconnaissance n’était pas contraire à l’ordre public
1379
international » .

1380
792. L’arrêt de cassation rendu en 2007 a fermement affirmé les décisions précédentes.
Il s’agit en l’occurrence d’une sentence arbitrale rendue à Londres dans l’affaire entre une

1379
Cass. 1er civ., 23 mars 1994, Hilmarton, Rev.arb.1994.327, note Ch. Jarrosson ; JDI.1994.701, note E.
Gaillard ; RCDIP.1995.359, note B. Oppetit ; RTD com. 1994.702, obs. Dubarry et Loquin ; Petites Affiches, 9
août 1996, n°96, p. 15-25, note J. Ribs.
1380
Cass. 1er civ., 29 juin 2007, Rena Holding, RTD com. 2007.682, note E. Loquin ; Cf. X. Delpech,
« Admission de l’exequatur en France d’une sentence arbitrale étrangère annulée », D.2007. AJ.

586
société française Rena Holding et une société indonésienne. Cette sentence avait été rendue le
10 avril 2001 en faveur de la partie française, mais que celle-ci a été annulée partiellement par
la Cour anglaise. Il paraît dans le fait qu’une nouvelle sentence a été rendue et qu’elle a par
conséquent substitué la première sentence annulée, il est à noter que cette seconde sentence
était au sens défavorable à la société française Rena Holding. Après que la dernière sentence a
été rendue le 21 août 2003, la partie française a sollicité l’exequatur de la première sentence
(annulée) devant le TGI de Paris le 30 septembre 2003, certes, elle a obtenu gain de cause
selon sa demande.
Nous nous demandons s’il s’agit là du problème de la loyauté procédurale, puisque
l’appel à l’encontre de cette décision par la société indonésienne a été rejeté par l’arrêt du 31
mars 2005. La société indonésienne a ensuite saisi le TGI de Paris pour une demande
d’exequatur de la seconde sentence, le TGI a prononcé l’exequatur de celle-ci, pourtant cette
ordonnance a été annulée par l’arrêt de la Cour d’appel car l’exequatur a été prononcé après
que l’arrêt du 31 mars 2005 a été rendu. La Cour de cassation a approuvé la Cour d’appel et a
utilisé la même formule en jugeant que « la sentence internationale, qui n’est rattachée à
aucun ordre juridique étatique, est une décision de justice internationale dont la régularité
est examinée au regard des règles applicables dans le pays où sa reconnaissance et son
exécution sont demandées (…) ». Avant d’affirmer qu’en appliquant l’article VII de la
Convention de New York de 1958, « (le) droit français de l’arbitrage international, qui ne
prévoit pas l’annulation de la sentence dans son pays d’origine comme cause de refus de
reconnaissance et d’exécution de la sentence rendue à l’étranger ».
Alors que dans le second arrêt, la Cour de cassation décida que l’autorité de la chose
jugée de l’arrêt de la Cour d’appel (CA Paris, 31 mars 2005), qui avait déclaré recevable la
demande de la société Rena Holding et bien fondée pour obtenir l’exécution en France de la
première sentence, faisait obstacle à l’exequatur de la seconde sentence rendue après que la
première a été annulée, et inconciliable avec celle-ci.
En effet il paraît en l’espèce que le problème de la loyauté procédurale d’une partie
contractante envers d’autre avait été soulevée, mais la Cour de cassation a manqué l’occasion
d’expliquer sur se point. Certes, il ne s’agit pas directement de l’arbitrage, or, à notre avis
cette obligation de loyauté procédurale peut être qualifiée comme l’ordre public international
qui est l’une de causes de non reconnaissance de la sentence arbitrale selon l’article 1498 du
CPC. C'est-à-dire que si le juge d’appui avait pris en compte sérieusement ce problème, elle
aurait refusé de reconnaissance en France de la sentence arbitrale annulée à l’étranger qui est
le cas en l’espèce. Il sera de même pour la Cour de cassation, car le contraire à l’ordre public
587
international constitue aussi une cause d’annulation de la sentence internationale en vertu de
l’article 1502 (5) du CPC (art. 1520 du Décret 2011).
On peut penser d’ailleurs que la partie qui voudrait profiter de la position des
juridictions françaises devra faire plus rapidement possible une demande d’exequatur de la
sentence, parmi deux ou plusieurs même annulées, celle qui lui est la plus favorable à ses
intérêts.

793. La jurisprudence constante vient affirmer la conception française de la sentence


arbitrale internationale dans la mesure où celle-ci est considérée comme un être juridique isolé
des ordres juridiques étatiques en estimant qu’elle « n’est rattachée à aucun ordre étatique »,
alors elle se voir détacher même de l’ordre juridique dans lequel elle a été rendue. Par
conséquent, elle se confère la libre circulation « absolue » dans le sens qu’elle peut obtenir
l’exequatur dans n’importe quel ordre juridique national qu’elle souhaite, si ledit ordre
juridique admet cette même théorie. Pourtant, de l’autre point de vue, la sentence arbitrale
n’est pas totalement détachée d’un ordre juridique étatique dans la mesure où elle a besoin de
loi étatique applicable dans un État afin d’effectuer sa reconnaissance ou son exécution. Force
est de reconnaître que ceci nous rapproche à la lex mercatoria, en estimant que la sentence
internationale appartient à un tiers ordre juridique dont les sujets sont les opérateurs du
commerce international. De surcroît, la formule utilisée par la Cour de cassation française
nous fait croire qu’elle place la sentence internationale à un niveau supérieur à celui d’un
jugement étranger…
1381
Certains auteurs ne partagent pas l’opinion de la Cour de cassation , car la
conclusion faite par la Haute juridiction française donne lieu aux problèmes par exemple ;
l’annulation de la sentence par le juge du lieu où la sentence a été rendue semble normale à
l’égard des parties contractantes puisque, comme l’on a dit, celles-ci ont choisi normalement
le siège de l’arbitrage dans l’État où ses lois sont mieux placées pour le déroulement. Certes,
les parties font confiance au système juridique dudit État y compris la justice post-arbitrale.
1382
Par ailleurs, comme a fait remarquer M. P. Mayer , l’article 1502 du CPC (art. 1520 du
Décret 2011) fait l’impasse sur l’existence d’un jugement étranger prononcé dans le pays

1381
V. par exemple S. Bollée, « Admission de l’exequatur en France d’une sentence arbitrale étrangère
annulée », RCDIP.2008.109, n° 14, cet auteur a trouvé qu’il est malvenu d’imposer le libéralisme du droit
français pour « sauver » la sentence annulée à l’étranger.
1382
P. Mayer, « L’insertion de la sentence dans l’ordre juridique français », in Le droit et la pratique de
l’arbitrage international en France, 1984, p. 81 et s.

588
d’origine où la sentence a été rendue et annulée par la suite. Cette disposition donne un visa
aux juges français d’ignorer les décisions d’annulation prononcées par les juges étrangers les
sentences rendues sur son propre territoire. Dans le cadre de la réciprocité et de la
collaboration entre les États dans le domaine de l’arbitrage, ceci pouvait apparaître assez
singulier. D’après M. B. Goldman, « compte tenu de l’effet dans l’État où la sentence est
invoquée de son annulation dans l’État selon la loi procédurale duquel elle a été rendue,
lorsque les parties avaient choisi de soumettre la procédure arbitrale à la loi du pays où la
sentence devait être rendue, il faut admettre que la sentence annulée dans ces conditions ne
1383
pouvait plus avoir aucune existence juridique » .

794. Après avoir étudié la tendance de la jurisprudence française, disons que la thèse qui
soutient le statut libre de la sentence internationale établie par la jurisprudence française ne
peut nous convaincre en raison de l’absence de la logicité ; on est toujours douteux qu’une
décision de reconnaissance ou d’exécution de la sentence qui a été annulée par l’autorité
judiciaire compétente dans l’État où elle avait été rendue pourrait toujours préserver sa valeur
juridique.
Cependant, au cours de la rédaction de ce chapitre, le Décret n° 2011-48 du 13 janvier
2011 portant réforme de l’arbitrage a été délibéré, le rapport au Premier ministre relatif à ce
décret a clairement affirmé l’importance du principe jurisprudentielle selon lequel une
sentence internationale n’étant rattachée à aucun ordre juridique étatique et sa régularité doit
être examinée au regard des règles applicables dans le pays où sa reconnaissance et son
1384
exécution sont demandées .

795. En droit thaï, la Loi sur l’arbitrage B.E. 2545, le Chapitre portant sur la reconnaissance
et l’exécution de la sentence arbitrale est influencé par la Convention de New York de 1958.
Alors on peut constater que l’article 43 (6) de cette loi a adopté le texte de l’article V. 1 e) de

1383
B. Goldman, Rev.arb.1983.379. Il soutient qu’il serait contraire à l’ordre public international d’accorder la
reconnaissance ou l’exécution d’une sentence qui n’existerait plus juridiquement comme anéantie dans le pays
où elle a été rendue. Et cette inexistence ne pourrait être admise si l’annulation frappait dans le pays où elle a été
rendue car une sentence internationale n’est pas intégrée dans l’ordre juridique du pays de sa localisation
géographique. V. aussi MM. Bellet et Metzger.
1384
Rapport au Premier ministre relative au décret n° 2011-48 du 13 janvier 2011 portant réforme de
l’arbitrage, JORF du 14 janvier 2011 : « Bien que le nouveau texte ne le prévoie pas expressément, il n’est pas
question de revenir sur deux principes acquis en jurisprudence, dont la consolidation en droit positif
nécessiterait l’intervention du législateur. ( …) Le second est qu’une sentence internationale n’étant rattachée à
aucun ordre juridique étatique, sa régularité doit être examinée au regard des règles applicables dans le pays
où sa reconnaissance et son exécution sont demandées (Civ. 1 er , 29 juin 2007) ».

589
la dernière en prévoyant le cas de refus de la reconnaissance et aussi de l’exécution de la
sentence arbitrale ainsi :
« La Cour est compétente de refuser la reconnaissance ou de l’exécution de la
sentence arbitrale rendue dans un pays quelconque, si la partie qui aurait du être exécutée
par la sentence peut prouver que
(6) La sentence n’est pas encore devenue obligatoire pour les parties ou a été
annulée ou suspendue par la juridiction compétente ou d’après la loi du pays lequel la
sentence a été rendue ».

En ce qui concerne les cas d’appel de la décision qui accorde la reconnaissance ou


l’exécution lesquels les requérants peuvent solliciter devant la Cour, cependant la Loi thaïe
dispose de manière différente de celle de la loi française. Car en droit thaï, le législateur
distingue les causes du refus, par le juge d’appui, de reconnaissance de la sentence arbitrale
étrangère des causes ouvertes pour une demande d’appel de la décision de reconnaissance de
la sentence. Comme l’on a vu, le refus de reconnaissance et d’exécution relevé de l’article 43,
et en particulier le point (6) précité stipule expressément que la sentence annulée peut
faire l’objet de refus sous conditions que le requérant devrait le prouver. Alors que les
dispositions de l’article 45 de la loi thaïe (l’appel à l’encontre du jugement ou d’ordonnance
du juge d’appui) ne rassemblent pas à celles de l’article 1502 (art. 1520 du Décret) du droit
français.
En effet le problème de reconnaissance de la sentence annulée à l’étranger ne se pose
pas encore devant les juridictions thaïes. On peut se demander si c’était le cas, à titre
d’exemple, le juge a prononcé l’exequatur, il est probablement qu’une autre partie ne peut
prouver que la sentence est déjà annulée (ce qui est très rare et peu de possibilité). L’article 45
interdit, en principe, de former une demande d’appel contre une décision ou un jugement de la
Cour, à l’exception des cas précisés par cet article. Cependant il n’y a aucune cause prévue
par la loi permettant de former un appel sur la décision de reconnaissance de la sentence
annulée, il est possible de se glisser vers une autre cause telles que la non conformité à l’ordre
public et aux bonnes mœurs du peuple. Il faut attendre la jurisprudence sur ce sujet pour
répondre à cette question…

590
796. Conclusion du chapitre. Jusque là, nous avons trouvé que la réception de sentence
arbitrale internationale dans l’ordre juridique est plus aisée que celle du jugement grâce au
mécanisme du droit conventionnel uniforme sur la reconnaissance et l’exécution de sentences
arbitrales. Même si chaque ordre étatique définit la sentence arbitrale de façon différente,
mais on peut conclure qu’en principe celle-ci doit être définitive et tranche le différend dans
chaque cas, sans aucune nécessité que le litige soit réglé au préalable. A la différence d’un
jugement, afin de produire un effet dans l’État requis, une sentence arbitrale en tant qu’acte
privé est soumise normalement au régime de ses règles conflictuelles. Toutefois, la
coopération internationale entre les États en la matière facilite la reconnaissance et l’exécution
des sentences arbitrales internationales, c’est, comme on le sait, le cas de la Convention de
New York de 1958.
Certes, on ne peut pas conclure qu’il n’y a plus de difficultés en matière d’exécution
de la sentence, car, l’exequatur est toujours indispensable pour exécuter la sentence dans un
tel ou tel pays. Par ailleurs, dans certains cas les juges étatiques ont motivé leurs jugements en
profitant des lacunes de dispositions de loi afin de rendre efficace la sentence déjà annulée
dans son pays d’origine. Certes, on ne peut pas faire des reproches aux juges, car cette
possibilité est prévue par les dispositions de la Convention de New York de 1958 elles-
mêmes. Mais cette situation risque d’être retenue par d’autres États membres de cette
convention, et dans ce cas, le jugement du juge du pays d’origine de la sentence n’aurait
probablement aucune valeur…

591
797. Conclusion du Titre. Lorsque l’on parle de la reconnaissance et de l’exécution des
décisions étrangères émanant du juge étatique, on pense à premier égard de la souveraineté
des États. C’est la raison pour laquelle il est ardu de recevoir l’exequatur d’un jugement plutôt
que celui de la sentence arbitrale. Par ailleurs, la difficulté réside dans les conditions fixées
par la jurisprudence de chaque pays. Sans instrument international unifié telles conditions, en
Thaïlande, c’est toujours le principe jurisprudentiel qui joue le rôle dans ce domaine. Il faut
vérifier les arrêts de la Cour suprême à chaque fois que l’on voudrait demander l’exequatur.
Pour cette raison, la saisine du juge étatique pour trancher le litige en matière commerciale
internationale n’est pas pratique pour les opérateurs internationaux. Cependant dans le cadre
du droit conventionnel, le mécanisme simplifié en matière d’exécution des jugements
étrangers fonctionne bien dans l’Union européenne. Il sera possible dans l’avenir de voir
seulement le simple contrôle formel selon la nouvelle politique législative européenne.
En ce qui concerne l’arbitrage, la sentence arbitrale constitue également la force
obligatoire liée les parties en raison de son origine conventionnelle. Le caractère
indispensable de la sentence arbitrale est qu’elle tranche le litige, c’est un point commun que
l’on trouve aussi chez la notion du jugement étranger. Le caractère définitif de sentence
arbitrale doit être aussi pris en compte. Une autre condition importante est que la sentence
arbitrale doit mettre fin au litige, dés lors, la décision ou l’ordonnance de mesures provisoires
et conservatoires, délibérées sous forme de la sentence, ne sont pas la sentence arbitrale
admise par la jurisprudence. C'est-à-dire que seule la nature de l’acte de l’arbitre doit être
prise en considération pour la qualification et non pas le terme utilisé par l’arbitre.

592
Conclusion de la Deuxième Partie

798. Jusque là, on sait que le règlement des différends par l’arbitrage présente plus
d’avantages que l’assignation devant le juge étatique, notamment pour maintenir de bonnes
relations entre commerçants. Cependant certains litiges sont exclus du procès arbitral ; la
procédure judiciaire est donc nécessaire dans cette hypothèse. La détermination du juge
compétent en droit français est notamment régie par le Règlement Bruxelles I. A défaut, il
faut recourir à la transposition des règles de procédure civile. En Thaïlande, seule cette
transposition du droit commun est possible. Force est de constater que le législateur thaï devra
bientôt réfléchir sur ce point, il ne faut pas oublier que le marché de l’Association des Nations
du Sud-est Asiatique (l’ASEAN) sera actualisé en 2015. Ceci signifie la libre circulation de
biens, de services, de capitaux et de travailleurs dans tous les États membres. Certes, le
volume du commerce et du contentieux sera de plus en plus augmenté. En l’absence de
coopération législative à l’heure actuelle, le législateur thaï devra sérieusement prendre en
compte la réforme du droit procédural thaïlandais en matière civile et commerciale afin
d’éliminer des ambiguïtés dans certains cas par exemple la clause attributive de juridiction, la
matière de protection de parties réputées faibles. En espérant que les citoyens de l’ASEAN
seront protégés aussi bien par le droit national que par le droit ASEAN.
En matière de réception des décisions étrangères, la coopération régionale en Europe
est un succès, mais au niveau international et en droit commun c’est à chaque État de
déterminer ses propres règles. On admet que la reconnaissance de jugements étrangers et celle
de leurs effets doivent être distinguées. De surcroît, lorsque l’on dit « un jugement », il est
nécessaire de le définir car il existe des actes qui ne sont pas qualifié de jugement puisque les
deux types d’actes ne sont pas soumis aux mêmes conditions selon le droit international privé.
Si le jugement étranger est subordonné à la méthode de reconnaissance de l’efficacité
substantielle, les autres actes tel qu’un acte privé seront soumis à l’une des méthodes de
conflit de lois. Dans notre étude, la détermination de notion du jugement étranger a pour but
de savoir quel acte public peut être exécuté dans le for en tant que « jugement ». Dans ce
contexte, on admet que le critère fondé sur un effet décisionnel est apte à qualifier le jugement
étranger. En Thaïlande on peut dire que le jugement est une décision qui « tranche » toutes les
questions invoquées par le plaignant. Par ailleurs il faut une décision définitive du juge
étranger pour que la reconnaissance ou l’exécution soit possible. Cependant que la

593
reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale est plus libérale grâce à la Convention
de New York de 1958 largement admise par les États.

594
CONCLUSION GENERALE

799. En arrivant au terme de notre analyse, nous espérons avoir pu convaincre que l’étude
comparative du droit international privé des contrats est nécessaire. Nous avons essayé dès le
début de démontrer le côté indispensable du principe qui est bien établi en matière de contrat
international : l’autonomie de la volonté, qui est abordée aussi bien dans le conflit de lois que
dans le conflit de juridictions, alors que le rôle véritable de la règle conflictuelle se présente
dans l’hypothèse de l’absence de choix de la loi applicable au contrat.

800. Nous insistons que l’étude des mécanismes pertubateurs de la volonté des parties tels
que les lois de police et l’ordre public international est indispensable notamment pour faire
comprendre aux juges thaïs que ses fonctions sont bien importantes, mais il faut les appliquer
prudemment afin d’éviter le recours artificiellement à la loi du for. Car, pour nous, la loi
choisie par les parties ou même désignée par la règle de conflit de lois est la loi plus
convenable à régir le contrat. C’est la raison pour laquelle la détermination de ces termes est
importante et il faudrait le faire de manière restrictive. Certes, tous les États disposent de ces
mécanismes, mais leur application devrait être uniquement faite à titre d’exception. Le rôle
des lois d’application immédiate ou de dispositions impératives intervient très souvent en
matière de contrat. Étant donné que ces règles font exception au mécanisme de la règle
conflictuelle, alors les juges doivent tout d’abord vérifier s’il existe telles ou telles
dispositions avant d’appliquer la règle de conflit. Cependant le caractère variable dans le
temps et dans l’espace de l’ordre public international donne lieu à l’incertitude quant à son
contenu dont l’interprétation semble indispensable dans certains cas. Parmi nos propositions,
l’introduction dans l’ordre juridique thaï de la conception de lois de police est primordiale.
Bien que les juges s’appliquent toujours ses droits publics ou les dispositions impératives
relèvent d’ordre public économique, on manque encore les motivations de décision.
L’admission de ce concept aidera l’évolution de doctrine thaïe ainsi que l’établissement d’une
règle d’application plus ferme des règles du droit international privé, car on peut distinguer
une loi de police des lois en générale. Ceci est à la peine indispensable en raison de la
justification de la compétence juridictionnelle des juges thaïs d’une loi de police affirmé par
la jurisprudence. Par ailleurs, nous proposons de redéfinir la notion d’ordre public
international en droit international privé de façon distincte d’ordre public et des bonnes

595
mœurs du peuple qui sont plus vaste. Car, en recourant toujours aux derniers il semble que les
juges thaïs disposent beaucoup de possibilité de s’appliquer le droit thaï.

801. La liberté de choix de la loi ou la norme applicable aux contrats résulte de ce que les
parties contractantes sont libres de procéder au choix de la règle de droit sans attacher à sa
juridicité. Hormis le droit étatique et l’instrument international, elles peuvent soumettre leur
contrat à la lex mercatoria ou aux usages du commerce international. Tandis que l’obligation
d’invocation et de preuve semblent différente entre les normes non étatiques et le droit
étranger, parfois, on peut dire qu’elle est incertaine… Ainsi, c’est la tâche des avocats ou des
conseillers juridiques qui doivent prévoir les parties de la différence de choix de chaque
règlementation pour régir leur contrat. En cas d’application de la loi étrangère devant le juge
français, les parties ont la charge d’invocation qui commence dès l’application de la règle de
conflit jusqu’à la reconnaissance du droit étranger. Une fois cette reconnaissance établie, le
juge assume la responsabilité d’en rechercher sa teneur. Les parties ont aussi l’obligation de
lui apporter leur concours dans cette recherche selon la jurisprudence récente. Tandis qu’en
droit thaï, l’article 8 de la Loi de 1938 relative au conflit de lois dispose expressément que
c’est à la charge de la partie qui a invoqué l’application de la loi étrangère de prouver son
contenu. Là aussi, il paraît les difficultés pour la partie lorsque la règle de conflit de lois thaïe
est en jeu. Certes, la charge d’invocation et la charge de preuve dans le litige portant au
contrat commercial international ne semblent pas trop alourdies pour les parties contractantes,
en basant sur la présomption que les contractants disposent des moyens pour avoir obtenir les
conseils juridiques. Pourtant, en dehors du litige portant au commerce international, certes, en
matière personnelle où se trouve généralement les parties qui ont le problème d’un
manquement du conseil, il semble trop chargé pour celles-ci d’être obligées de savoir la
technique d’invocation du caractère d’extranéité du litige y compris la preuve de la teneur de
la loi étrangère. D’après cette recherche, on constate aussi bien l’avantage des critères du droit
disponible et indisponible que les difficultés présentes dans son application dans la mesure où
la distinction entre les deux critères eux-mêmes pose toujours le problème. Admettons que les
résolutions adoptées par la Première Chambre civile et le Chambre commercial de la Cour de
cassation française en 2005 sont également admissibles ; il incombe au juge de rechercher,
avec le concours des parties au litige, la teneur de la loi étrangère. Force est de constater que
le renforcement au juge thaï d’application de la règle de conflit de lois est nécessaire afin de
ne pas perdre la crédibilité des investisseurs étrangers.

596
En ce qui concerne l’application au litige des normes non étatiques qui sont
considérées comme un fait, la charge d’invocation et la charge de preuve pèsent en général
sur la partie contractante. Nous constatons cependant dans certains cas, en France comme en
Thaïlande, le juge connaît lui-même la teneur de la lex mercatoria compilée par exemple les
Incoterms ou les RUU de la CCI.
Alors, il n’est probablement pas facile de répondre à la question de savoir quelle
réglementation est-elle la meilleure. Mais il faudrait que les parties fassent un choix de la
règle la plus appropriée à leur contrat au cas par cas. L’avantage du choix du droit étatique se
trouve dans son contenu précis, mais comme l’on a vu, il est toujours nécessaire pour le juge
saisi de l’interpréter et de l’appliquer comme le juge étranger s’applique sa loi. Il est possible
aussi de choisir le droit étatique du coté de règle de droit non étatique en vue de combler les
imparfaits l’un pour l’autre. Hormis ces problèmes, on sait que le choix de la loi « neutre »
semble nécessaire pour les contrats internationaux, mais il faut le procéder soigneusement. En
choisissant une loi que les contractants connaissent bien plutôt que celle qui est neutre dans la
mesure où aucune des parties ne le connaissent. A ce stade, le droit non étatique peut être une
meilleure solution grâce à son caractère neutre.

802. En l’absence de choix des parties de la loi régissant leur contrat, ce sera alors le jeu de
la règle de conflit dont les rattachements peuvent être différents selon chaque système
juridique. Ceci peut apporter les difficultés dans la détermination de la loi en cause et peut
conduire à l’insécurité juridique. On sait que le principe de la prévisibilité de la loi applicable
est primordial dans la matière des contrats internationaux ainsi l’intérêt de l’uniformisation
des règles de conflit de lois est indiscutable. Au sein de l’Union européenne, le problème de
rattachements divers a été réglé par le Règlement Rome I. Par ailleurs, au fond, les
rattachements employés en matière contractuelle ont été changés radicalement dès l’adoption
de Convention de Rome de 1980. Il n’y a plus de place pour la nationalité des parties dans
les contrats internationaux. Ce qui nous laisse à penser qu’il est temps de reconsidérer des
rattachements employés par la règle thaïe de conflit de lois et de l’inscrire dans le sillage des
autres systèmes du droit international privé afin de marcher au même pas que d’autres États.
Hormis la rédaction des lois spécifiques applicables au cas par cas, il serait préférable de
modifier l’article 13 de la loi de 1938 relative au conflit de lois. Nous suggérons de la
réformer en même temps que la rédaction de la nouvelle loi thaïe sur le contrat de vente
internationale. Admettant que nombreux sont les litiges lesquels les parties restent
silencieuses quant à la loi applicable, c’est pourquoi nous avons toujours besoin de texte
597
relatif à la règle de conflit afin de régler ce problème. A ce stade, les dispositions destinées à
protéger des parties faibles devraient être prises en compte. Il serait alors opportun pour le
législateur thaï de prendre en considération l’importance du critère socio-économique pour la
révision ou l’élaboration de nouvelle loi. Dans certaines hypothèses, il semble que la
discrimination positive est nécessaire afin de protéger les parties faibles.

803. Suite aux problèmes de règles de droit applicables aux contrats, du point de vue des
parties contractantes, le problème qui découle de ceux-ci est celui de règlement des
différends. En effet la question relative au mode de règlement des différends peut apparaître
lors de la conclusion d’un contrat ou bien après que les conflits sont nés. On sait que le mode
alternatif tel que l’arbitrage international est bien établi dans le commerce international de nos
jours. Force est de constater que l’arbitrage international se présente comme la source
contractuelle de règlement des conflits, alors que le mode judiciaire est de la source étatique.
Les deux modes sont à la fois concurrents et complémentaires. Certes, on peut probablement
dire que l’arbitrage international joue le rôle dominant en la matière, toutefois dans certains
cas, afin que sa mission soit accomplie, l’arbitre exerce sa compétence avec l’appui du juge,
tel est le cas des mesures provisoires et conservatoires. Il est possible que les efforts de
diminuer le rôle du juge et de renforcer celui de l’arbitre en accordant à celui-ci le pouvoir
dans cette matière soient réalisés. C’est le cas de la mesure provisoire. Cependant pour la
mesure conservatoire, ceci relève toujours du pouvoir du juge étatique, c’est le débat sur
l’absence de pouvoir étatique de l’arbitre. Admettons finalement que ces mesures ont pour but
de rendre efficace l’arbitrage international.

804. En ce qui concerne la détermination de la juridiction compétente, qui n’est pas moins
importante surtout en cas d’absence de la clause d’arbitrage, le droit thaï attache de
l’importance aussi bien au domicile du défendeur qu’au lieu de naissance du litige (art. 4-1°
du CPC), on constate que ce droit procédural a la même conception de protection des
défendeurs. Cependant, les dispositions thaïes de droit procédural ne constituent pas
concrètement des règles de compétence juridictionnelle destinées à protéger des parties
réputées faibles. Le traitement du juge thaï des litiges internationaux concernant les parties
faibles comme un litige en général a pour effet de priver celles-ci de la juridiction qui offre la
loi protectrice. Par ailleurs, en laissant le choix aux juges thaïs entre le lieu de la naissance du
litige et le domicile du défendeur, l’actualité juridique montre que dans la plupart des cas les
juges ont tendance de recourir au critère du lieu de la naissance du litige lequel conduira à nier
598
l’application de la règle de conflit de loi au litige. Pour l’ASEAN, il faut adopter un
instrument juridique en matière civile et commerciale permettant de régler le conflit de
juridictions susceptibles de se produire entre les États membres. Certes, la libre circulation
des personnes et des échanges entraîneront l’augmentation de nombre de litiges à caractère
international.

805. Enfin, lorsque le tribunal arbitral ou le tribunal étatique a prononcé sa décision, on sait
que seuls les résultats finaux qui sont importants pour les parties. Il est nécessaire que ces
décisions soient reconnues et exécutées dans d’autres États. La procédure de reconnaissance
ou d’exequatur la moins compliquée est certainement celle de la sentence arbitrale
internationale par rapport à celle de jugement étatique. En raison d’avoir les instruments
internationaux facilités ces procédures qui ont été acceptés dans la plupart des États.
Alors que la circulation des jugements étrangers est moins aisée que la sentence arbitrale,
notamment le cas en dehors du cadre de l’Union européenne. Le procès de l’exequatur des
jugements étrangers reste toujours difficile avec les règles plus strictes, en l’absence de la
jurisprudence et du texte applicables dans ce domaine. Ceci peut poser des problèmes aux
investisseurs étrangers, car il faudrait savoir en priorité comment pourra-on obtenir
l’exequatur du jugement étranger dans un État requis ? Les conditions de reconnaissance et
d’exécution sont différentes selon la jurisprudence de l’État concerné. En France,
la reconnaissance et l’exécution des décisions émanant des États non membres de l’Union
européenne se fonde aussi sur la jurisprudence. Par ailleurs, il est important de savoir si une
décision peut avoir un effet de plano ou si son exécution et plus généralement ses effets à
l’étranger supposent un exequatur. Certes, il est moins facile qu’en cas d’application du
règlement Bruxelles I. On trouve que la coopération en Europe présente un grand succès.
Alors que pour l’ASEAN, des règles de droit uniforme sont certainement nécessaires pour
atteindre l’objectif de cette coopération : la libre circulation des personnes et des travailleurs.
En espérant que la libre circulation des jugements en matière civile et commerciale au sein de
la Communauté économique de l’ASEAN sera finalement réalisable.

599
600
BIBLIOGRAPHIE

Français

I. OUVRAGES GENERAUX- TRAITES - MANUELS

A/ MANUELS ET TRAITES GENERAUX

ANCEL (B) et LEQUETTE (Y), Grands arrêts de la jurisprudence française de droit


international privé, 5e éd., Paris : Dalloz, 2006, 832 p.
AUBRY (Ch) et RAU (Ch), Cours de droit civil français d’après la méthode de Zachariae,
t. XII, 5e éd., Paris : Godde, Imprimerie et librairie générale de jurisprudence, 1922.
AUDIT (B), Droit international privé, 6e éd., Corpus, Paris : Economica, 2010, 1014 p.
BARTIN (E), Études de droit international privé, Paris : Chevalier-Marescq, 1899, 285 p.
BARTIN (E), Principes de droit international privé selon la loi et la jurisprudence
françaises, Paris, Domat – Montchrestien, t. I, 1930.
BATIFFOL (H) et LAGARDE (P), Traité de Droit international privé, 8é éd., Paris :
LGDJ, t. I, 1993, 656 p., t. II, 7e éd., 1983, 692 p.
BROCHERR (Ch.), Cours de droit international privé suivant les principes consacrés par le
droit positif français, Paris et Genève, 1883.
BUREAU (D) et MUIR WATT (H), Droit international privé, 2e éd., Thémis, Paris : PUF,
t. I, 2010, 694 p., t. II, 2e éd., 556 p.
CADIET (L) et JEULAND (E), Droit judiciaire privé, 4e éd., Paris : Litec, 2004.
CHATILLON (S), Droit des affaires internationales, 4e éd., Paris : Vuibert, 2005, 385 p.
CHATILLON (S), Le contrat international, 4e éd., Paris : Vuibert, 2011, 400 p.
CONSTANTINESCO (L.-J.), Traité de droit comparé, La science des droits comparés,
t. III, Paris : Economica, 1983, 511 p.
CLAVEL (S), Droit international privé, Cours et Travaux dirigés, sous dir. de
D. Chagnollaud et S. Guinchard, Paris : Dalloz, 2e éd., 2010, 628 p.
DAVID (R), Les grands systèmes de droit contemporain, 7e éd., Paris, 1978.

601
DUPUY (P.-M.) et KERBRAT (Y), Droit international public, 10e éd., Paris : Dalloz, 2010,
919 p.
DERRUPPE (J) et LABORDE (J.-P.), Droit international privé, 16e éd., Mémentos, Paris :
Dalloz, 2008, 188 p.
DUGUIT (L), Traité de droit constitutionnel, 3e éd., t. II, 1928.
ESMEIN (P), Cours de droit civil français d’après la méthode de Zachariae, 6e éd., t. XII,
Paris : Marchal et Billard, 1958.
FOUCHARD (Ph), GAILLARD (E) et GOLDMAN (B), Traité de l’arbitrage commercial
international, Paris : Litec, 1996, 1225 p.
FULCHIRON (H) et NOURISSAT (C), Travaux dirigés de droit international privé, 2e
éd., Paris : Litec, 2003.
GHESTIN (J), GOUBEAUX (G) et FABRE-MAGNAN (M), Droit civil : introduction
générale, 4e éd., Paris : LGDJ, 1994,
GUTMANN (D), Droit international privé, 6e éd., Cours, Paris : Dalloz, 2009, 366 p.
HOLLEAUX (D), FOYER (J) et DE GEOUFFRE DE LA PRADELLE (G), Droit
international privé, Paris : Masson, 1987.
ISAAC (G) et BLANQUET (M), Droit communautaire général, 9e éd., A. Colin, 2006.
JACQUET (J.-M.), DELEBECQUE (Ph), CORNELOUP (S), Droit du commerce
international, 2e éd., Précis, Paris : Dalloz, 2010, 928 p.
JESTAZ (P) et JAMIN (C), La doctrine, Paris : Dalloz, 2004, 314 p.
LALIVE (P), POUDRET (J.-F.) et REYMOND (Cl.), Le droit de l’arbitrage interne et
international en Suisse, Lausanne : Payot, 1989, 508 p.
LEREBOURS-PIGEONNIERE (P), Droit international privé, Paris : Dalloz, 8ème éd.,
1962.
LOUSSOUARN (Y), BOUREL (P), Droit international privé, 8e éd., Paris : Dalloz, 2004,
979 p.
LOUSSOUARN (Y), BOUREL (P), DE VAREILLES-SOMMIERES (P), Droit
international privé, 9e éd., Paris : Dalloz, 2007, 1040 p.
MAYER (P), HEUZE (V), Droit international privé, 10e éd., Paris : Montchrestien, 2010,
820 p.
MEDJAD (K), Droit international des affaires : le contrat international, Armand Colin,
Paris : Dalloz, 2005, 126 p.
NIBOYET, Traité de droit international privé français, t. III, Paris, 1944.

602
NIBOYET (M.-L.), DE GEOUFFRE DE LA PRADELLE (G), Droit international privé,
2e éd., Manuels, Paris : LGDJ, 2009, 800 p.
PILLET (A), Principes de droit international privé, Paris : Pédone/Grenoble : Allier Frères,
1903.
PILLET (A), Traité pratique de Droit international privé, t. 1, Sirey, 1923.
POUDRET (J.-F.) et BESSON (S), Droit comparé de l’arbitrage international, Bruxelles :
Bruylant, LGDJ, Schulthess, 2002.
REINHARD (Y) et THOMASSET-PIERRE (S), Droit commercial, 7e éd., Manuels, Paris :
Litec, 2008, 433 p.
ROLIN (A), Principes de droit international privé et applications aux diverses matières du
Code civil, t. I, Paris, 1897.
SAVIGNY (F.C.), Traité de droit romain, traduit de l’allemande par Ch. Guenoux, Paris :
Firmin Didot, 1851, t. VIII.
SURVILLE (F) et ARTHUYS (F), Cours élémentaire de droit international privé, 1er éd.,
Paris, 1890.
VERHOEVEN (J), Droit international public, Bruxelles : Larcier, 2000,
VIDAL (D), Droit français de l’arbitrage commercial international, Paris : Gualino, 2004,
344 p.
VIGNAL (T), Droit international privé, Armand Colin, Paris : Dalloz, 2005, 465 p.
VIZIOZ (H), Études de procédure, Bordeaux : Bière éd., 1956, 441 p.
WEISS (A), Traité théorique et pratique de droit international privé, t. IV, Paris : Sirey,
1892-1905.

B/ FASCICULES D’ENCYCLOPEDIES,
DICTIONNAIRES ET LEXIQUES

ALEXANDRE (D), « La loi étrangère devant les tribunaux français », Établissement du


contenu de la loi étrangère, J.-Cl. Dr. internat., 1997, Fasc. 539-20.
AUDIT (B), « Fraude à la loi », J-Cl. Dr. internat., 2007, Fasc.535.
BATIFFOL (H), « Problèmes des contrats privés internationaux », Cours I.H.E.I., 1961-
1962, Fasc. 2, p. 68-69.
BERAUDO (M-J) et (J-P), « Convention de Bruxelles, Convention de Lugano et Règlement
(CE) n° 44/2001 », Reconnaissance des décisions juridictionnelles, J-Cl. Europe, 2010, Fasc.
3040.
603
CORNU (G) (sous la direction de), « Vocabulaire juridique », 7e éd., Association H.
Capitant, Paris : PUF, 2005, 970 p.
DE VAREILLES-SOMMIERES (P), « Jugement étranger » (Matière civile et
commerciale), Rép. D. Dr. internat.
FRANCESCAKIS (Ph), « Conflit de lois », Rép. D. Dr. int.,
GAUDEMET-TALLON (H),
« Convention de Rome du 19 juin 1980 », J-Cl. Europe, 1996, Fasc.3201.
« Jugement étranger », Rép. D. proc. civ.
« Compétence internationale », Rép. D. proc.civ.
« Compétence civile et commerciale », Rép. D. Dr. internat.
HASCHER (D), « Arbitrage du commerce international », Rép. D. Dr. internat., janv. 2005.
HUET (A),
« Effets en France des jugements étrangers », J-Cl. Dr. internat., Fasc. 584-10.
« Compétence des tribunaux français à l’égard des litiges internationaux », J.-Cl. Dr.
internat., Fasc. 581-41.
LAGARDE (P), « Convention de Rome », Rép. D. Dr. communautaire.
LEBEN (C), « L’ordre juridique », Dictionnaire de la culture juridique, PUF, 2003
LEGROS (C), « Commerce maritime », J-Cl. Transport, 2009, Fasc.1269.
LEWALD (H), « Les obligation en droit international privé allemand », Rép. Lapradelle-
Niboyet, t.10, 1931, p.74.
MAYER (P), « Lois de police », Rép. D. Dr. internat., 1998.
MOREAU (B), « Arbitrage commercial », Rép. D. Dr. Comm., oct. 2010.
MUIR WATT (H),
« Loi étrangère », Rep. D. Dr. internat., 1998.
« Le domicile dans les rapports internationaux », J.-Cl. int., Fasc. 581-20.
ROLAND (H), « Lexique juridique : Expressions latines », 3e éd., Paris : Litec, 2004, 336 p.

II. OUVRAGES SPECIAUX- THESES – COURS- TRAVAUX


COLLECTIFS

ALEXANDRE (D), Les pouvoirs du juge de l’exequatur, Paris : LGDJ, 1970.


ANCEL (M), Utilité et méthodes du droit comparé, Élément d’introduction générale à l’étude
comparative des droits, Neuchâtel, Ides et Calendes, 1971, p. 23.

604
ANCEL (M.-E.), La prestation caractéristique du contrat, Paris : Economica, 2002, préf. L.
Aynès.
AUDIT (B), La fraude à la loi, Bibliothèque de droit international privé, Paris : Dalloz, vol.
XVIII, 1974, préf. Y. Loussouarn.
AUDIT (B),
« Le caractère fonctionnel de la règle de conflit », RCADI.1984.219, t.186.
« Le droit international privé en quête d’universalité », RCADI.2003.23, t.305.
BATIFFOL (H), Influence de la loi française sur la capacité civile des étrangers en France,
Thèse, Paris, 1929.
BATIFFOL (H), Aspects philosophiques du droit international privé, Paris : Dalloz, 1956
(réédité par Y. Lequette, Dalloz, 2002).
BATIFFOL (H), « Le pluralisme des méthodes en droit international privé »,
RCADI.1973.75, t.139.
BATIFFOL (H), Problèmes de base de philosophie du droit, Paris : LGDJ, 1979.
BESSONNET (A), LAMY (Ph.-E.), Contrats d’affaires internationaux, Paris : Village
Mondial, 2005.
BLERY (C), L’efficacité substantielle des jugements civils, Paris : LGDJ, 2000, préf. P.
Mayer.
BOLLEE (S), Les méthodes du droit international privé à l’épreuve des sentences arbitrales,
Paris : Economica, 2004, préf. P. Mayer.
BOSTANJI (E), L’évolution du traitement réservé à la loi étrangère en matière de statut
personnel, Thèse, Dijon, 2000.
BUCHER (A), « L’ordre public et le but social des lois en droit international privé »,
RCADI.1993.9, t.239.
BUREAU (D), Les sources informelles du droit dans les relations privées internationales,
Thèse, Paris II, 1992.
CALLE (P), L’acte public en droit international privé, Paris : Economica, 2004, préf. P.
Mayer.
CLAVEL (S), Le pouvoir d’injonction extraterritorial des juges pour le règlement des litiges
privés internationaux, Thèse, Paris I, 1999.
CLAY (T), L’arbitre, Nouvelle bibliothèque de thèse, Paris : Dalloz, 2001, p. 930.
DAVID (C), La loi étrangère devant le juge du fond, Paris : Dalloz, Bibliothèque de droit
international privé, 1965, préf. H. Batiffol.

605
DIJON (P), VILLELA (E), Cas pratique en droit international privé, contrats
internationaux, Paris : Ellipses 2006.
DROZ (G), Compétence judiciaire et effets des jugements dans le Marché Commun, Étude de
la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, Dalloz, 1972.
FAUVARQUE-COSSON (B), Libre disponibilité des droits et conflits de lois, Paris : LGDJ,
1996, préf. Yves Lequette.
FOHRER-DEDEURWAERDER (E), La prise en considération des normes étrangères,
Paris : LGDJ, 2008, préf. B. Audit.
FOUCHARD (Ph), L’arbitrage commercial international, Paris : Dalloz, Bibliothèque de
droit international privé, 1965.
GAILLARD (E), Aspects philosophiques du droit de l’arbitrage international, Les livres de
poche de l’Académie de droit international de La Haye, Liden/Boston : Martinus Nijhoff
Publishers, 2008.
GAUDEMET-TALLON (Hélène), « Le pluralisme en droit international privé : Richesses et
Faiblesses », RCADI.2005.376.
GAUDEMET-TALLON (Hélène), Compétence et exécution des jugements en Europe,
Règlement n° 44/2001 Conventions de Bruxelles et de Lugano, 4e éd., Paris : LGDJ, 2010.
GENY (F), Méthode d’interprétation et sources en droit privé positif, t. I, Paris : L.G.D.J,
1919, préf. Raymond Saleilles.
GOTHOT (P) et HOLLEAUX (D), La Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968,
Paris : Jupiter, 1985.
GOUNOT (E.)
« Le principe de l’autonomie de la volonté en droit international privé : Contribution à l’étude
critique de l’individualisme juridique », Thèse Dijon, Rousseau, 1912.
HEUZE (Vincent), La réglementation française des contrats internationaux, Étude critique
des méthodes, GLN, 1990, préf. Paul Lagarde.
HOLLEAUX (D), Compétence du juge étranger et reconnaissance des jugements, Thèse,
Paris, 1970.
IZORCHE (M.-L.)
« La liberté contractuelle », in, Libertés et droits fondamentaux, 14e éd., Paris : Dalloz, 2008,
860 p.
JACQUET (J.-M.), Principe d’autonomie et contrats internationaux, Droit des affaires et de
l’entreprise, Y. Guyon (dir.), Paris : Economica, 1983, préf. J.-M. Bischoff.

606
JODLOWSKI (J), « Les conventions relatives à la prorogation et à la dérogation à la
compétence internationale en matière civile », RCADI.1974.483.
JOLIVET (E.), Les Incoterms, Étude d’une norme du commerce international, avant propos
de Ph. Fouchard, préf. D. Ferrier, Paris : Litec, 2004.
KASSIS (A), Le nouveau droit européen des contrats internationaux, Paris : LGDJ
Montchrestien, 1993, 598 p.
KINSCH (P), Le fait du Prince étranger, Paris : LGDJ, Bibl. de droit privé, 1994, préf. J.- M.
Bischoff.
LAGARDE (P), « Le principe de proximité dans le droit international privé contemporain »,
RCADI.1986.747.
LAGARDE (P), « Le principe de proximité en droit international privé », RCADI.1986.9, t.
196.
LOQUIN (E), « La mondialisation du droit », Paris : Litec, 2000, E. Loquin et C. Kessedjian
(dir.).
LOUSSOUARN (Y), « Cours général de droit international privé », RCADI.1973.353., t.139.
LU (Shenghui), Contrats internationaux en droit international privé chinois : comparaison
avec le droit international privé français, Thèse, Paris II, 2001.
MAYER (P), La distinction entre règles et décisions et le droit international privé, Paris :
Dalloz, 1973, préf. H. Batiffol.
MAYER (P), « L’autonomie de l’arbitrage international dans l’appréciation de sa propre
compétence », RCADI.1989.317, t. 217.
MELIN (F), La connaissance de la loi étrangère par les juges du fond, Recherches sur
l’infériorité procédurale de la loi étrangère dans le procès civil, PUAM, 2002, préf. Pascal de
Vareilles-Sommières.
MOTULSKY (H), Écrits, Études et notes sur l’arbitrage, Paris : Dalloz, 1974, t. II, préf. B.
Goldman et Ph. Fouchard, 535 p.
NADAUD (S), Codifier le droit civil européen, Bruxelles : Larcier, 2008, préf. Eric Garaud.
NORD (N), Ordre public et lois de police en droit international privé, Thèse, Strasbourg III,
2003.
NUYTS (A), L’exception de forum non conveniens, Étude de droit international privé
comparé, Paris : LGDJ. ; Bruxelles : Bruylant, 2003, préf. Arthur T. von Mehren.
OSMAN (F), Les principes généraux de la Lex mercatoria, Paris : LGDJ, 1992, préf. Eric
Loquin.

607
RACINE (J.-B.), L’arbitrage commercial international et l’ordre public, Paris : LGDJ,
Bibliothèque de droit privé, 1999, préf. Ph. Fouchard.
RANOUIL (V), L’autonomie de la volonté : Naissance et évolution d’un concept, Paris :
PUF, 1980, préf. J.-Ph. Lévy.
REMY (B), Exception d’ordre public et mécanisme des lois de police en droit international
privé, Paris : Dalloz, Nouvelle Bibliothèque de Thèses, 2008, préf. Pierre Mayer.
SERAGLINI (C), Lois de police et justice arbitrale internationale, Paris : Dalloz, 2001, préf.
P. Mayer.
TOUBIANA (A), Le domaine de la loi du contrat en droit international privé : contrats
internationaux et dirigisme étatique, Bibliothèque de droit international privé, vol. XIV,
Dalloz, 1972, H. Batiffol et Ph. Francescakis (dir.).
ZAJTAY (I), Contribution à l’étude de la condition de la loi étrangère, Paris : Pédone, 1958.

III. ARTICLES – COMMUNICATIONS – CHRONIQUES – RAPPORTS -


CONTRIBUTIONS AUX MÉLANGES

ALEXANDRE (D),
« Les effets des jugements étrangers indépendants de l’exequatur », TCFDIP 1975-1977, p.
51- 80.
« Les problèmes actuels posés par l’application des lois étrangères en droit international privé
français », in Les problèmes actuels posés par l’application des lois étrangères, Travaux de
l’Institut de Droit comparé de Strasbourg, Paris : LGDJ, 1988, p. 11-33.
AMOUSSOU-GUENOU (R), « Perspectives des principes ASEAN (ou Asiatiques) du droit
des contrats », RDAI, n°5, 2005, p.573-592.
ANCEL (B),
« Auctoritate rationis, le droit savant du contrat international », in Clés pour le 20e siècle,
Mél. de l’Université Paris II Panthéon-Assas, 2000, p. 583-609.
« La loi applicable à défaut de choix », in Le nouveau règlement européen ‘Rome I’ relatif à
la loi applicable aux obligations contractuelles, Actes de la 20e Journée de droit international
privé du 14 mars 2008 à Lausanne, Institut suisse de droit comparé, éds. Eleanor Cashin
Ritaine/Andrea Bonomi, Genève. Zurich. Bâle, 2008, p. 77-93.
ANCEL (B) et MUIR WATT (H), « La désunion européenne : le règlement dit Bruxelles
II », RCDIP.2001.403.

608
ANCEL (J.-P.), « L’invocation d’un droit étranger et le contrôle de la Cour de cassation », in
Vers de nouveaux équilibres entre ordres juridiques, Mél. en l’honneur de Hélène Gaudemet-
Tallon, Dalloz, 2008, p. 3-10.
ANCEL (M.-E.),
« Un an de droit international privé du commerce électronique », Communication commerce
électronique, janvier 2007, n°1, p.19-25.
« Les contrats de distribution et la nouvelle donne du règlement Rome I », RCDIP.2008.561.
« Septembre 2007-juillet 2008 : une jurisprudence en semi-liberté », Droit international privé
patrimonial, Droit et patrimoine, n°176, 2008, p.88-100.
AUBRY (C), « Le domaine de l’autonomie en droit international privé », JDI.1896.465.
AUDIT (B),
« Le droit international privé à la fin du XXème siècle », in Clés pour le siècle, Droit et
science politique, information et communication, sciences économiques et de gestion, Dalloz,
2000, p.583.
« L’interprétation autonome du droit international privé communautaire », JDI.2004.789.
AZZI (T),
« La loi applicable à défaut de choix selon les articles 4 et 5 du règlement Rome I », D., 2008,
n°31, p. 2169.
« L’office du juge dans la mise en œuvre de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi
applicable aux obligations contractuelles », in Vers de nouveaux équilibres entre ordres
juridiques, Mél. en l’honneur de Hélène Gaudemet-Tallon, Dalloz, 2008, p. 647-670.
BARTIN (E), « Le jugement étranger considéré comme un fait », JDI.1924.857.
BATIFFOL (H),
« L’affirmation de la loi d’autonomie dans la jurisprudence française », in Festschrift H.
Lewald, Basel : Helbing und Lichtenhahn, 1953.
« Le rôle de la volonté en droit international privé », Arch. Phil. Dr., Le rôle de la volonté
dans le droit, Sirey, 1957, p.71-86.
« Sur la signification de la loi désignée par les parties », in Choix d’articles, Paris : LGDJ,
1976, p. 271.
« La loi appropriée au contrat », in Le droit des relations économiques internationales, Études
offertes à Berthold Goldman, Litec, 1987, p.1-13.
BAUCH-LABESSE (N), « La clause de droit applicable sous le règlement 593/2008 »,
Revue Hammonds, le 3 décembre 2008, disponible sur le site http://larevue.hammonds.fr/La-
clause-de-droit-applicable-sous-le-reglement-593-2008_a770.html
609
BERAUDO (J.-P.),
« La modernisation et l’harmonisation du droit des contrats : une perspective européenne », in
Actes du Congrés, Harmonisation mondiale du droit privé et intégration économique
régionale, Rome 27-28 septembre 2002, Rev. dr. unif. 2003.135.
« Faut-il avoir peur du contrat sans loi ? », in Le droit international privé : esprit et méthodes,
Mél. en l’honneur de Paul Lagarde, Dalloz, 2005, p.635.
BERNARDINI (P), « Arbitrage international et règles de droit a-nationales », Bull. CCI,
vol.15, n°2, 2e semestre, 2004, p. 62-74.
BLAGOJEVIC (B. T.), « Le droit comparé : méthode ou science », RIDC.1953.649.
BLANC-JOUVAN (X), « Prologue », in L’avenir du droit comparé, Un défi pour les juristes
du nouveau millénaire, Paris : Société de législation comparée, 2000, p. 7-15.
BOLLEE (S), « Admission de l’exequatur en France d’une sentence arbitrale étrangère
annulée », RCDIP.2008.109, n° 14.
BOLLEE (S) et LEMAIRE (S), « Le règlement n°593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi
applicable aux obligations contractuelles, dit « Rome I », D., 2008, n° 31, p. 2155-2174.
BORE (J), « Un centenaire : La contrôle par la Cour de cassation de la dénaturation des
actes », RTD.civ.1972.249.
BORTOLOTTI (F), « Référence aux Principes UNIDROIT dans la pratique contractuelle et
les contrats modèles », in Principes UNIDROIT : nouvelles évolutions et applications, Bull.
CCI, Supplément spécial 2005, p. 61-69.
BOUCHE (N)
« Preuve de la loi étrangère et loi applicable à la preuve », D., 2005, p. 2853.
« L’inapplicabilité manifeste de la convention d’arbitrage », RJDA.2006.1109.
BOYER (L), « Les effets des jugements à l’égard des tiers », RTD civ.1951.163.
BUREAU (D),
« L’accord procédural à l’épreuve », RCDIP.1996.588.
« La mise en chantier des travaux de rénovation de la Convention de Rome », RDC.2003.197.
BUREAU (D) et D’AVOUT (L), « Les lois de police étrangères devant le juge français du
contrat international », JCP (G) 2010, n° 19-20, le 10 mai 2010, p. 996-999.
BUSSEUIL (G), « L’avenir des Principes UNIDROIT relatifs aux contrats du commerce
international et des Principes Européens du droit du contrat : du droit mou au droit dur ? »,
disponible sur le site http://www.glose.org/CEDCACE4.pdf
CACHARD (O),
« Les mesures conservatoires dans l’arbitrage maritime », DMF.2004.220.
610
« Le contrôle de la nullité ou de l’inapplicabilité manifeste de la clause compromissoire »,
Rev.arb.2006.893.
« La force obligatoire vis-à-vis du destinataire des clauses relatives à compétence
internationale stipulées dans les connaissements : Plaidoyer pour un renouveau des
considérations maritimes », in Vers de nouveaux équilibres entre ordres juridiques, Mél. en
l’honneur de Hélène Gaudemet-Tallon, Dalloz, 2008, p. 189-208.
CARRIER (R), « Anti-suit injunctions : réquisitoire pour l’abandon de leur prononcé en
matière d’arbitrage », D. 2005.2712.
CASSIA (P), « Les sentences arbitrales internationales : une compétence de contrôle partagée
entre les juridictions françaises : A propos de la décision INSERM », AJDA.2010.1564.
CASTETS-RENARD (C), « Proposition de règlement sur la loi applicable aux obligations
contractuelles du 15 décembre 2005 (Rome I) : Conséquences pratiques sur les contrats du
commerce électronique et la propriété intellectuelle, D. 2006. 1522.
CHAMBRE DE COMMERCE D’INDUSTRIE DE LYON, « Présentation du règlement
(CE) N° 593/2008 du Parlement Européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable
aux obligations contractuelles (Rome I) », Conférence du Professeur Cyril Nourissat, Faculté
de Droit de l’Université Jean Moulin Lyon 3, disponible sur le site www.lyon.cci.fr, mise à
jour le 24 mars 2009.
CHAMBRE DE COMMERCE INTERNATIONALE,
« Rapport statistique 2003 », Bull. CCI, vol.15, n°1, 1er semestre, 2004, p.7.
« Rapport statistique 2004 », Bull. CCI, vol.16, n°1, 1er semestre, 2005, p.5.
« Rapport statistique 2005 », Bull. CCI, vol.17, n°1, 1er semestre, 2006, p.5.
« Rapport statistique 2006 », Bull. CCI, vol.18, n°1, 1er semestre, 2007, p.5.
« Rapport statistique 2007 », Bull. CCI, vol.19, n°1, 1er semestre, 2008, p.5.
« Rapport statistique 2008 », Bull. CCI, vol. 20, n° 1er, semestre, 2009, p. 6.
« Rapport statistique 2009 », Bull. CCI, vol. 21, n° 1er, semestre, 2010, p. 5
« Rapport statistique 2010 », Bull. CCI, vol. 22, n° 1er, semestre, 2011, p. 6.
CLAY (Thomas), « Arbitrage et modes alternatifs de règlement des litiges : panorama
2005 », D., 2005, p. 3050.
COHEN (D),
« La Convention européenne des droits de l’Homme et le droit international privé français »,
RCDIP.1989.451.
« Contentieux d’affaires et abus de forum shopping », D. 2010. 975.

611
COMITE ECONOMIQUE ET SOCIAL EUROPEEN (l’Avis sur), « Livre vert sur la
révision du règlement (CE) n° 44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance
et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale », Bruxelles, 16 décembre 2009,
COM(2009) 175 final.
COMMISSION DES NATIONS UNIES POUR LE DROIT COMMERCIAL
INTERNATIONAL,
« Règlement des litiges commerciaux- Élaboration de dispositions uniformes sur les mesures
provisoire ou conservatoires », 36e session (4-8 mars 2002, New York).
« Rapport du Groupe de travail sur l’arbitrage et la conciliation sur les travaux de sa quarante-
quatrième session », (New York, 23-27 janvier 2006).
« Note explicative du secrétariat de la CNUDCI relative à la Loi type de la CNUDCI sur
l’arbitrage commercial international de 1985 telle qu’amendée en 2006 », in Loi type de la
CNUDCI sur l’arbitrage commercial international 1985 avec les amendements adoptés en
2006, Nations Unies : Vienne, 2008.
CONFERENCE DE LA HAYE DE DROIT INTERNATIONAL PRIVE, Bureau
Permanent,
« Étude de faisabilité sur l’administration du droit étranger », Tableaux et graphiques
résumant certaines réponses au questionnaire, Version finale. Doc. prél. n° 9 B, mars 2008.
« Réponses françaises au questionnaire du Bureau Permanent relatif à l’administration sur le
droit étranger », la réponse à la question 8, La Conférence de La Haye de droit international
privé. Disponible sur le site http://www.hcch.net/upload/wop/genaff_pd09fr.pdf
« Réponses anglaises au questionnaire du Bureau Permanent relatif à l’administration sur le
droit étranger », la réponse à la question 8, La Conférence de La Haye de droit international
privé. Disponible sur le site http://www.hcch.net/upload/wop/genaff_pd09uk.pdf
CONSEIL D’ÉTAT, Chambre Nationale pour l’Arbitrage Privé et Public, « L’arbitrage et les
personnes morales de droit public », Compte rendu, Colloque du le 30 sept. 2009, disponible
sur le site : http://www.conseil-État .fr/cde/node.php?articleid=1812
CORNELOUP (S), « La loi applicable aux obligations contractuelles », JCP. (G), n°44, 29
oct. 2008, p. 21.
CORNUT (E), « Forum shopping et abus du choix de for en droit international privé »,
JDI.2007.27.
COURBE (P), « Ordre public et lois de police en droit des contrats internationaux », in
Études offertes à Barthélemy Mercadal, Francis Lefebvre 2002, p. 99-115.
COURBE (P) et JAULT-SESEKE (F),
612
« Droit international privé : panorama 2005 », D. 2006. Panor.1497.
« Droit international privé : panorama 2008 », D. 2009. Panor.1557.
CREMADES (B M.), « Les dommages-intérêts conventionnels prévus en cas de rupture de
contrat, les clauses pénales et les dommages-intérêts à caractère répressif dans les contrats
internationaux », RDAI.2002.329, n°3.
D’AVOUT (L), « Le sort des règles impératives dans le règlement Rome I », Le règlement
n°593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, dit « Rome
I », présentation générale par S. Bollée et S. Lemaire, D. 2008.2165.
DE LA PRADELLE (G), « La fraude à la loi », TCFDIP 1971-1973, Paris : Pedone, p. 117-
145.
DELMAS-MARTY (M),
« Réinventer le droit commun », D.1995.Chr.1.
« Les processus de mondialisation du droit », in Le droit saisi par la mondialisation, Ch.-A.
Morand (dir.), Bruxelles : Bruylant, 2001, p. 72.
DELPECH (X), « Admission de l’exequatur en France d’une sentence arbitrale étrangère
annulée », D. 2007. AJ, 4 juillet 2007.
DE LY (F), « Des juridictions économiques efficientes en concurrence, La mise en
compétition des ordres juridictionnels nationaux », Handicap ou avantage pour les opérateurs
économiques ?, Gaz. Pal., n°235-239, p. 39-45.
DE NOVA (R), « Conflits de lois et normes fixant leur propre domaine d’application », in
Mél. Maury, t. I, 1960, p. 377-401.
DERAINS (Y),
« Le statut des usages du commerce international devant les juridictions arbitrales »,
Rev. arb.1973.122.
« Attente légitime des parties et droit applicable au fond en matière d’arbitrage commercial
international », TCFDIP 1984-1985, Paris : Pedone, p. 81.
« L’ordre public et le droit applicable au fond du litige dans l’arbitrage international »,
Rev. arb.1986.375.
DEUMIER (P), « Exclusion tacite de la Convention de Vienne », RDC.2006.515.
DE VAREILLES-SOMMIERES (P), « Le forum shopping devant les juridictions
françaises », TCFDIP 1998-2000, Paris : Pedone, 2001, p. 49-82.
DE VAREILLES-SOMMIERES (P), « Le sort de la théorie des clauses spéciales
d’application des lois de police en droit des contrats internationaux de consommation »,
Nature de l’article 5 de la Convention de Rome du 19 juin 1980, D., 2006, p.2464.
613
DOISE (D), « La révision 2007 des règles et usances uniformes relatives aux crédits
documentaires (RUU 600) », Paiements et financements internationaux, RDAI. 2007.106.
DU PONTAVICE (H.), « Loi du 18 juin 1966 et décret du 31 décembre 1966 sur les contrats
d’affrètement et de transport maritime », JCP.1967.I.2063.
FAUVARQUE-COSSON (B),
« Droit comparé et droit international privé : la confrontation de deux logiques à travers
l’exemple des droits fondamentaux », RIDC.2000.797.
« Le juge français et le droit étranger », D. 2000, Chron., p. 126-131.
« L’enseignement du droit comparé », RIDC.2002.293.
« Droit européen et international des contrats : l’apport des codifications doctrinales », D.
2007.96.
FERRAND (F), « Les principes ALI/UNIDROIT de procédure civile pour les litiges
transnationaux en matière commerciale », RDAI.2006.21.
FERRARI (F),
« Forum Shopping et Droit matériel uniforme », JDI.2002.383.
« La Convention de Vienne sur la vente internationale et le droit international privé »,
JDI.2006.27.
« Quelques remarques sur le droit applicable aux obligations contractuelles en l’absence de
choix des parties (art. 4 du règlement Rome I) », RCDIP.2009.459.
FLECHEUX (G) et HAUTOT (I), « Le forum shopping », DPCI.1988, t. 14, n° 3, p. 389-
402.
FONTAINE (M), « Du droit « mou »…..impératif ? », in Mél. Barthélémy MERCADAL,
Lefebvre, 2002, p.159 et s.
FOYER (J),
« Requiem pour le renvoi ? », TCFDIP 1980-1981, p. 105-122.
« Le contrat d’electio juris à la lumière de la Convention de Rome du 19 juin 1980 », in
L’internationalisation du droit, Mél. en l’honneur de Yvon Loussouarn, Dalloz, 1994, p. 169-
179
« Les vicissitudes contemporaines de la règle de conflit de lois », in Clés pour le siècle,
Université Panthéon-Assas Paris II, Paris : Dalloz, 2000, p. 147-175.
FRANCESCAKIS (Ph.),
« Quelques précisions sur les « lois d’application immédiate » et leurs rapports avec les
règles de conflits de lois », RCDIP.1966.1.
« Lois d’application immédiate et règles de conflit », RDIPP.1967.691.
614
-Session de Wiesbaden, 1975, Annuaire de l’IDI, vol. 56, p. 192 et s.
« Le contrôle ou la compétence du juge étranger après l’arrêt Simitch de la Cour de
cassation », RCDIP.1985.243.
FRANCQ (S), « Le règlement « Rome I » sur la loi applicable aux obligations
contractuelles », JDI.2009.41.
FRISON-ROCHE (M.-A.), « Le versant juridique de la mondialisation », Revue des deux
mondes, Déc. 1997, p.45-53.
GAILLARD (E),
« L’interférence des juridictions du siège dans le déroulement de l’arbitrage », in Liber
amicorum Claude Reymond, Autour de l’arbitrage, Paris : Litec, 2004, p. 83.
« Souveraineté et autonomie : réflexions sur les représentations de l’arbitrage international »,
JDI.2007.1163. spéc. p. 1173.
GANNAGE (L),
« Le contrat sans loi en droit international privé et droit non étatique », in Rapport général
17ème congrés de la Académie internationale de droit comparé, p.1-31, http://tldb:uni-
koeln:de/static/GeneralReport.pdf
« Le contrat sans loi en droit international privé », Electronic Journal of Comparative Law,
vol.11.3, décembre 2007. Disponible sur http://www.ejcl.org/113/article113-10.pdf
GAUDEMET-TALLON (H),
« Les régimes relatifs au refus d’exercer la compétence juridictionnelle en matière civile et
commerciale : Forum non conveniens, Lis pendens », RIDC.1994.423.
« L’introuvable « juge naturel » », in Mél. J. Gaudemet, Paris : PUF, 1998, p. 591.
GHESTIN (J), « Les données positives du droit », RTD civ.2002.11.
GOLDMAN (B),
JDI.1960.144
« Frontière du droit et lex mercatoria », Arch. Phil. Dr., 1964, p. 177-192.
« La lex mercatoria dans les contrats et l’arbitrage internationaux : réalité et perspectives »,
JDI.1979.475.
« Une bataille judiciaire autour de la lex mercatoria : l’affaire Norsolor », Rev. arb. 1983.
379.
« Nouvelles réflexions sur la lex mercatoria », in Festschrift Pierre Lalive, Basel : Helbing
Lichtenhahn, 1993, p. 241-255. Disponible également sur le site www.trans-lex.org/112300
GOLDSCHMIDT (W), « Système et philosophie du droit international privé »,
RCDIP.1955.639 ; RCDIP.1956.223.
615
GRAULICH (P), « Règles de conflit et règles d’application immédiate », in Mél. Dabin,
1963, t. II, p. 629-641.
GRESSOT-LEGER (S), « Faut-il supprimer le contrôle de la loi appliquée par le juge
étranger lors de l’instance en exequatur ? », JDI.2003.765.
GROUPE d’étude sur la justice sociale en droit privé européen, « Manifeste pour une
justice sociale en droit européen des contrats », RTD civ. 2005, p.713-734.
GUINCHARD (E) et DOUCHY-OUDOT, « Espace judiciaire civil européen », RTD eur.
2010.927.
HASCHER (D), « L’autorité de la chose jugée des sentences arbitrales », TCFDIP 2000-
2002, Pedone, 2004, p. 17.
HORSMAN (G), « L’interprétation des contrats internationaux », in L’arbitrage commercial
international, L’apport de la jurisprudence arbitrale, Publication de la C.C.I., 1986, p.123-
155.
HUET (A),
« Relations habituelles d’affaires et acceptation tacite d’une clause attributive de juridiction
en droit international privé », in Études à la mémoire du Professeur Alfred Rieg : Le rôle de
la volonté dans les actes juridiques, Bruxelles : Bruylant, 2000, p. 501-516.
« Clause attributive de juridiction à un tribunal étranger et loi française de police et de sûreté
(étude du droit commun) », D. 2009.684
HUET (J), « Les contrats commerciaux internationaux et les nouveaux principes
d’UNIDROIT : une nouvelle lex mercatoria ? », Petites Affiches, 10 novembre 1995, n°135,
p. 8.
HUTTER (S), « L’arbitrage international en Thaïlande », L’arbitrage commercial
international en Asie, Bull. CCI, 1998, n°2
IDOT (L),
« Domaine spatial du droit communautaire des affaires », TCFDIP.1992.145.
« Les conflits de lois en droit de la concurrence », JDI.1995.321.
INSTITUT DE DROIT COMPARE DE STRASBOURG (Travaux de l’), « Les
problèmes actuels posés par l’application des lois étrangères, Ann. Fac. Dr. Strasbourg, tome
XXXIV, Paris : LGDJ, 1988.
INSTITUT DE DROIT INTERNATIONAL (Annuaire de l’),
« L’égalité de traitement entre la loi du for et la loi étrangère », Session de Saint-Jacques-de-
Compostelle, 1989, vol. 63-I, 1989, p.203 à 207 ; vol 63-II, 1990, p.305 à 323
Disponible sur le site http://www.idi-iil.org/idiF/resolutionsF/1989_comp_02_fr.PDF
616
« Le recours à la doctrine du forum non conveniens et aux « anti-suit injunctions » : principes
directeurs », Session de Bruges, 2003, vol. 70, t. I, 2002-2003. Disponible sur le site
http://www.idi-iil.org/idiF/resolutionsF/2003_bru_01_fr.pdf
JACQUET (J.-M.),
« L’incorporation de la loi dans le contrat », TCFDIP 1993-1995, p. 23-39.
« Le droit français des contrats et les Principes d’UNIDROIT », Rev. dr. unif. 2008, p.179-
195.
JARROSSON (Ch),
« La clause compromissoire », Rev.arb.1992.259.
« L’autorité de chose jugée des sentences arbitrales », Procédures, n° 8, Août 2007, p. 2.
JAULT-SESEKE (F),
« Inopposabilité au salarié de la clause compromissoire insérée dans un contrat de travail
international », RCDIP.2006.159.
« Opposabilité des clauses attributives de juridiction contenues dans des connaissements
maritimes », RCDIP.2009.524.
JEAMMAUD (A), « Unification, uniformisation, harmonisation : de quoi s’agit-il ? », in
Vers un code européen de la concurrence : codification, unification et harmonisation du droit
des États membres de l’UE, F. Osman (dir.), Bruxelles : Bruylant, 1998, p. 43.
KAHN (Ph),
« L’interprétation des contrats internationaux », JDI.1981.5.
« La lex mercatoria : point de vue français après quarante ans de controverses », Mc Gill Law
Journal. 1992, vol. 37, p. 413
« Vers l’institutionnalisation de la lex mercatoria : A propos des Principes Unidroit relatifs
aux contrats du commerce international », in Liber Amicorum Commission Droit et Vie des
Affaires, 40ème Anniversaire (1957-1997), Bruxelles : Bruylant, 1998, p.125-136.
« La lex mercatoria et son destin », in L’actualité de la pensée de Berthold Goldman, Droit
commercial international et européen, LGDJ, 2004, p.25-29.
KAUFMANN-KOHLER (G) et BUCHER (A), « Droit international privé », Fasc.2 Contrat
international : Droit applicale, disponible sur le site http://www.unige.ch/droit/e-
cours/documents/4864efd7ee79d.pdf, consulter le 17 févr. 2009.
KENFACK (H), « Le règlement (CE) n° 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux
obligations contractuelles (« Rome I »), navire stable aux instruments efficaces de
navigation ? », JDI.2009.3.
KESSEDJIAN (C),
617
« La reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers en France hors les Conventions de
Bruxelles et de Lugano », in Reconnaissance et exécution des jugements étrangers hors des
conventions de Bruxelles et de Lugano, Gerhard Walter et Samuel P. Baumgartner (éd.), Civil
Procedure in Europe, vol. 3, The Hague : Kluwer Law International, 2000, p. 185-217.
« Le principe de proximité vingt ans après », in Mél. en l’honneur de Paul Lagarde, Le droit
international privé : esprit et méthodes, Paris : Dalloz, 2005, p.507.
« Définitions et conditions de l’octroi de mesures provisoires », in Les mesures provisoires
dans l’arbitrage commercial international : Évolutions et innovations, Actes du colloque, J.-
M. Jacquet et E. Jolivet (dir.), Paris : Litec, 2007, p. 73.
KOHL (B), « Les clauses mettant fin au contrat et les clauses survivant au contrat »,
RDAI.2002.443.
LABORDE (J.-P.), « L’interprétation de la loi étrangère par le juge français », in Interpréter
et traduire, Actes du colloque international des 25 et 26 novembre 2005, Faculté de droit de
Toulon, J.-J. Sueur (dir.), Centre d’études et de recherches sur les contentieux, Université du
sud Toulon, Bruxelles : Bruylant, 2007, p. 273.
LACOSTE-MARY (V), « Le nouveau règlement communautaire ‘Rome I’ et les règles de
conflit de lois relatives au contrat de travail international », Droit Ouvrier, fév. 2009, n° 727,
p. 70-73.
LAGARDE (P),
« Examen de l’avant-projet de convention CEE sur la loi applicable aux obligations
contractuelles et non-contractuelle », TCFDIP 1971-1973, p. 147 et s.
« Le nouveau droit international privé des contrats après l’entrée en vigueur de la Convention
de Rome du 19 juin 1980», RCDIP.1991.287.
« La théorie de l’ordre public international face à la polygamie et à la répudiation », in Mél. F.
Rigaux, Bruxelles : Bruylant, 1993, p. 263-282.
« Le dépeçage dans le droit international privé des contrats », RDIPP.1993.33.
« Du rattachement d’un contrat de transport maritime et de la transmission d’une clause
attributive de juridiction par l’effet du connaissement », RCDIP.2003.285.
« Vers une révision de la Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations
contractuelles ? », in Aspects actuels du droit des affaires, Mél. en l’honneur de Yves Guyon,
Dalloz, 2003, p. 571-586.
« Remarques sur la proposition de règlement de la Commission européenne sur la loi
applicable aux obligations contractuelles (Rome I), RCDIP.2006.331.

618
LAHLOU (Y), MATOUSEKOVA (M), « Chronique de droit international privé appliqué
aux affaires », « Emergence d’un Droit international/Régional des affaires », RDAI.2007.255.
LALIVE (P),
« Ordre public transnational (ou réellement international) et l’arbitrage international », Rev.
arb.1986.329.
« L’apport de Berthold Goldman à l’arbitrage commercial international », in L’actualité de la
pensée de Berthold Goldman, Droit commercial international et européen, LGDJ, 2004, p.37-
46.
« L’ordre public transnational et l’arbitre international », in Nouveaux instruments du droit
international privé, Liber Fausto Pocar, Milan : Dott. A. Giuffrè Editore S.p.A., 2009, vol. II,
p. 599-611.
LANGROD (G), « Quelques réflexions méthodologiques sur la comparaison en science
juridique », RIDC.1957.353.
LARDEUX (G), « La reconnaissance du statut de règle de droit à la règle de conflit de lois »,
D., 2003, p. 1513.
LARREBOURS-PIGEONNIERE (P), « A propos du contrat international », JDI.1951.4.
LEBOULANGER (Ph), « La notion d’ ‘intérêts’ du commerce international », Rev.
arb.2005.487.
LEGROS (C), « Le conflits de normes juridictionnelles en matière de contrats de transport
internationaux de marchandises », JDI.2007.799 et ibid., p. 1081.
LEMAIRE (S), « Interrogation sur la portée juridique du préambule du règlement Rome I »,
D., 2008, n°31, p. 2160.
LEMONTEY (J) et ANCEL (J.-P.), « André Ponsard, un internationaliste à la Cour de
cassation », in Mél. Ponsard, Paris : Litec, 2003 p.212.
LEMONTEY (J) et REMERY (J.-P.), « La loi étrangère dans la jurisprudence actuelle de la
Cour de cassation », Rapport de la Cour de cassation, 1993, Paris : La Documentation
française, 1994, p. 90.
LEQUETTE (Y), « L’abandon de la jurisprudence Bisbal », (à propos des arrêts de la 1ère
Chambre civile des 11 et 18 Octobre 1988), RCDIP.1989.277.
LE TOURNEAU (Ph), « L’évolution des rapports contractuels dans les transferts de
technologie », in Aspects contemporains du droit des affaires et de l’entreprise, Mél. Pierre
Azard, Paris : Cujas, 1980, p.153-166.
LEVEL (P), « Le contrat dit sans loi », Séance du 27 mai 1966, TCFDIP 1964-1966, Paris :
Pédone, 1967, p. 209.
619
LEW (J. D. M.), « Les principes d’UNIDROIT en tant que lex contractus choisie par les
parties et sans choix exprès de droit applicable : point de vue du conseil », in Les Principes
d’UNIDROIT relatifs aux contrats du commerce international, Bull. CCI, Supplément spécial
2002, p. 89-99.
LIBCHABER (R), « L’exception d’ordre public en droit international privé », in L’ordre
public à la fin du XXe siècle, Paris : Dalloz, 1996, p. 65-81.
LOQUIN (E),
« L’application des règles a-nationales dans l’arbitrage commercial international », in
L’arbitrage commercial international : l’apport de la jurisprudence arbitrale, Institut de droit
et de pratique des affaires internationales de la CCI, Paris, Publ. CCI, 1986, p. 106.
« Où en est la lex mercatoria ? », in Souveraineté étatique et marchés internationaux à la fin
du 20ème siècle, A propos de 30 ans de recherche du CREDIMI. Mél. en l’honneur de Ph.
KAHN, Paris : Litec, 2000, p. 23-51.
« Toutes les clauses d’arbitrage pathologiques ne peuvent être sauvées », RTD com. 2002.659.
« Les rapports avec la lex mercatoria », Petites Affiches, 18 décembre 2003, n°252, p.63.
« Le contrôle de l’inapplicabilité manifeste de la convention d’arbitrage », RTD
com.2006.764.
« De l’obligation de concentrer les moyens à celle de concentrer les demandes dans
l’arbitrage », Rev.arb.2010.201.
LOUIS-LUCAS (P), « La fraude à la loi étrangère », RCDIP.1962.1.
MALAURIE (Ph), « L’équivalence en droit international privé », D. 1962.215.
MARRELLA (F), « Les nouveautés du Règlement européen (Rome I) relatif à la loi
applicable aux obligations contractuelles », Bull. de la Cour internationale d’arbitrage de la
CCI, vol. 19, n° 1, 2008, p. 91-111.
MARTY (G), « Travaux : Rôle du juge dans l’interprétation des contrats », in Travaux de
l’Association Henri Capitant pour la culture juridique française, Paris : Dalloz, 1950.
MAURY (V), « Espagne – La prise en compte des règles non étatiques à l’échelle nationale et
communautaire, le 1er août 2008, disponible sur le site http://m2bde.u-
paris10.fr/blogs/dcici/index.php/post/2008/08/01/ESPAGNE-La-prise-en-compte-des-regles-
non-etatiques-a-lechelle-nationale-et-communautaire-par-Virginie-MAURY
MAYER (P),
« L’office du juge dans le règlement des conflits de lois », TCFDIP, 1975-1977, p. 123.
« Droit international privé et droit international public sous l’angle de la notion de
compétence », RCDIP.1979.349.
620
« Les lois de police étrangères », JDI.1981.277.
« L’insertion de la sentence dans l’ordre juridique français », in Droit et la pratique de
l’arbitrage international en France, Y. Derains (dir.), Paris : Fondation pour l’étude du droit
et des usages du commerce international, 1984, p. 81.
« Les lois de police », TCFDIP, Journée du cinquantenaire, 1988, p.105.
« La Convention européenne des droits de l’Homme et l’application des normes étrangères »,
RCDIP.1991.651.
« La règle morale dans l’arbitrage international », in Études Pierre Bellet, Paris : Litec, 1991,
p.379.
« Le juge et la loi étrangère, Points de similitude du droit français avec le droit suisse », Revue
suisse de droit international et européen, Zürich Schulthess, 1991, n° 4, p. 488.
« Le principe de bonne foi devant les arbitres du commerce international », in Études de droit
international privé en l’honneur de P. Lalive, Ed. Helbing Lichtenhahn, Bâle/Francfort-sur-le-
Main, 1993, p.543.
« L’application par l’arbitre des Conventions internationales de droit privé », in
L’internationalisation du droit, Mél. en l’honneur de Yvon Loussouarn, Dalloz, 1994, p.275-
291.
« La protection de la partie faible en droit international privé », in La protection de la partie
faible dans les rapports contractuels, Comparaisons franco-belges, Paris : LGDJ, Bibl. de
droit privé, t. 261, 1996, p. 513.
« L’arbitre et la loi », in Le droit privé français à la fin du XXe siècle, Études offertes à Pierre
Catala, Paris : Litec, 2001, p.225.
« Présentation des recommandations de l’association de droit international sur le recours à
l’ordre public en tant que motif de refus de reconnaissance ou d’exécution des sentences
arbitrales, Rev. arb. 2002.1061.
« Litispendance, connexité et chose jugée dans l’arbitrage commercial international », in
Liber amicorum Claude Reymond, Litec 2004, p. 196.
« Principes UNIDROIT et lex mercatoria », in L’actualité de la pensée de Berthold Goldman,
Droit commercial international et européen, LGDJ, 2004, p. 31-36.
« Les méthodes de la reconnaissance en droit international privé », in Le droit international
privé ; esprit et méthodes, Mél. en l’honneur de Paul Lagarde, Dalloz, 2005, p. 547-573.
MAZEAUD (D),
« La bonne foi : en arrière toute ? », D. 2006.761.

621
« Un droit européen en quête d’identité. Les Principes du droit européen du contrat », D.,
Chro., 29 novembre 2007, n°42, p. 2959-2965.
MAZEAUD (L), « De la distinction des jugements déclaratifs et des jugements constitutifs de
droits », RTD civ. 1929.17.
MECARELLI (G), « A propos du caractère inévitable du Forum Shopping dans la vente
internationale de marchandises », RDAI.2003.935.
MELIN (F), « La Convention européenne dans le domaine de l’information sur le droit
étranger : constat d’un échec », Petites affiches, 27 septembre 1999, n°192.
MIGUET (J), « Réflexions sur le pouvoir des parties de lier le juge par les qualifications et
points de droit », in Mél. P. Hébraud, Toulouse, 1981, p. 578.
MOREAU (B), « Les effets de la nullité de la sentence arbitrale », in Études Pierre Bellet,
Paris : Litec, 1991, p. 403.
MORERA (R), « L’arbitrage dans le prochain futur : problèmes et réflexions », Gaz.Pal., 3
mai 2001, n° 123, p. 7.
MORETEAU (O), « Le devenir du droit comparé en France », Conclusions générales,
Journée d’études organisée par Groupement de Droit Comparé, Institut de France, 2004.
MOTULSKY (H),
« L’évolution récente de la condition de la loi étrangère en France », in Mél. R. Savatier,
Paris : Dalloz, 1965, p. 670.
« Pour une délimitation plus précise de l’autorité de la chose jugée en matière civile »,
D.1968.chron.1.
MUIR WATT (H),
« Droit judiciaire international », Rev. gén. Procédures, n° 4, oct.-déc. 1999, p. 747.
« Le mythe de « l’effet de titre » : le statut des jugements étrangers dans le contentieux du
provisoire » », in La procédure en tous ses états, Mél. en l’honneur de J. Buffet, éd. P.A.
2004, p. 347.
Compte rendu, RCDIP.2006.410.
NEUMAYER, « Autonomie de la volonté et dispositions impératives en droit international
privé des obligations », RCDIP.1957.579 et RCDIP.1958.53.
NIBOYET
« La fraude à la loi en droit international privé », RDILC.1926.503.
« La loi étrangère : Qu’est-ce que la loi étrangère aux yeux des juges d’un pays déterminé ? »,
RDILC.1928.753.

622
NIBOYET (M.-L.), « La globalisation du procès civil international dans l’espace judiciaire
européen et mondial », JDI.2006.937.
NUYTS (A), « Forum Shopping et Abus du Forum Shopping dans l’Espace Judiciaire
Européen », in Étude en l’honneur du Professeur John Kirkpatrick, Bruxelles : Bruylant,
2003.
OST (F.) et VAN DE KERCHOVE (M), « Interprétation », in Vocabulaire fondamental du
droit, Arch. Phil. Dr., t.35, Paris : Sirey, 1990, p.165-190.
PAMBOUKIS (Ch), « La lex mercatoria reconsidérée », in Le droit international privé :
esprit et méthodes, Mél. en l’honneur de Paul Lagarde, Dalloz, 2005, p. 635.
PAPANDREOU-DETERVILLE (M.-F.), « Une sentence arbitrale n'est pas contraire à
l'ordre public et ne viole pas de façon manifeste le droit de la vente internationale dès lors
qu'elle prend en compte le caractère international de la Convention de Vienne et cherche à
promouvoir l'uniformité dans son application », D. 1999.369.
PATAUT (E), « Clauses attributives de juridiction et clauses abusives », in Mél. J. Calais-
Auloy, Dalloz, 2004, p. 807.
PAULSSON (I), « La lex mercatoria dans l’arbitrage CCI », Rev. arb. 1990, p.79.
PERDRIAU (A), « La loi étrangère au regard du juge de cassation », Petites affiches, 6 juin
2002, n° 113, p. 7.
PILLET, « De l’ordre public en droit international privé », in Mél. Pillet, Paris, 1929, t. I, p.
407
PONSARD (A), « La pratique judiciaire en France », La pratique judiciaire de la Cour de
cassation, in Les problèmes actuels posés par l’application des lois étrangères, Travaux de
l’Institut de Droit comparé de Strasbourg, Paris : LGDJ, 1988, p. 36.
RANOUIL (V), « Remarques sur le droit applicable aux contrats de développement », in
« Contrats internationaux et pays en développement », Hervé CASSAN (dir.), Paris :
Economica, 1989, p.37-63.
REINER (A), « Les mesures provisoires et conservatoires et l’arbitrage international,
notamment l’arbitrage CCI », JDI.1998.853.
REMY-CORLAY (P), « L’existence de consentement », in Les concepts contractuels
français à l’heure des Principes du droit européen des contrats, Dalloz, 2003, p. 28.
ROBIN (G), « Le principe de la bonne foi dans les contrats internationaux », RDAI, n°6,
2005, p.695-727.
ROBIN (G), « Mesures conservatoires et provisoires en matière d’arbitrage international : Le
rôle du juge d’appui », RDAI.2008.319.
623
ROUILLER (N), « Devoirs précontractuels (Culpa in contrahendo) : L’identification exacte
de leur violation et ses conséquences », Droit suisse et travaux d’harmonisation
internationaux et européens, Bull. CEDIDAC n°45, Octobre 2006, p. 1-8.
SACCO (R), « Épilogue », in L’avenir du droit comparé, Un défi pour les juristes du
nouveau millénaire, Paris : Société de législation comparée, 2000, p. 346.
SAGOT-DUVAUROUX (J), « La mise en œuvre des lois de police étrangères par le juge
français », Lexbase Hebdo, le 27 mai 2010, n° 396, éd. Privée Générale. Disponible sur le
site : http://www4.lexbase.fr/lexbase/SilverStream/Pages/homepage.html
SAUVEPLANNE (J.-G.), « L’interprétation du droit étranger par le juge national et les
conséquences de l’ignorance du contenu de ce droit », Revue hellénique de droit
international, 1960, p. 7.
SCHMIDT (J), « Les lettres d’intention », RDAI.2002.259.
SIMON-DEPITRE (M) et Legendre (Cl), « La nouvelle législation sur les contrats
d’affrètement et de transport maritime et le droit international privé », JDI.1967.598.
SENAT, « Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la loi applicable
aux obligations contractuelles (Rome I) », 3 déc. 2007. Disponible sur le site
http://www.senat.fr/ue/pac/E3039.html
SERRE (Jessica), « Le droit européen des contrats », disponible sur le site
http://www.masterdroit.fr/3_Ressources_Fiches_fichiers/FICHES_PDF/FICHES_OBLIG_PD
F/2_Le_droit_europeen_des_contrats.pdf
TEBOUL (G), « Arbitrage international et personnes morales de droit public », Brèves
remarques sur quelques aspects de contentieux administratifs, AJDA.1997.26.
UGHETTO (B), « Droit international et communautaire des contrats d’affaires : l’article 3-
Liberté de choix », RLDA, n°29, juillet/août 2008, p. 63-65.
VAN DE KERCHOVE (M), « Le sens clair d’un texte : Argument de raison ou
d’autorité ? », in Arguments d’autorité et arguments de raison en droit, Études publiées par P.
Vassart, Guy Haarscher et al. (dir.), Bruxelles : Némésis, 1988, p. 291-315.
VAN OMMESLAGHE (P), « Abus de droit, fraude aux droits des tiers et fraude à la loi »,
RCJB.1976.302.
VERDOT (A), « L’applicabilité de la règle de conflit de lois d’origine conventionnelle en
question », D., 2006, p.260.
VIANGALLI (F), « La question de la fraude à la loi dans le droit international privé des
contrats », RRJ.2000.1141.

624
VIEIRA DA C. CERQUEIRA (G), NORD (N) et PORCHERON (D), « Les nouvelles
règles de conflit de lois chinoises en matière contractuelle », RLDA, n° 61, 2011, p. 52-56.
VOGENAUER (S) et WEATHERILL (S), « La compétence de la Communauté européenne
pour harmoniser le droit des contrats- une analyse empirique » RDC.2005.1215.
WATTE (N), BARBE (C), « Le nouveau droit international privé belge : Étude critique des
fondements des règles de conflit de lois », JDI.2006.851.
WENGLER (W), « L’évolution moderne du droit international privé et la prévisibilité du
droit applicable », RCDIP.1990.657.
WITZ (Cl),
« Une clause de droit applicable figurant dans un contrat de vente internationale de
marchandises n’exclue pas l’application de la Convention de Vienne sur la vente
internationale de marchandises », D. 1998.308.
« Vente internationale : l’office du juge face au pouvoir des plaideurs d’écarter le droit
uniforme et jeu combiné de la Convention de Bruxelles et de la Convention de Vienne »,
D. 2001.3607.
WOLFGANG (R), « La bonne foi est un principe général du commerce international que les
parties ne peuvent ni exclure ni modifier », D. 2000.449.
ZARATE-PEREZ (A) et GUERRIERI (S), « Le nouveau règlement « Rome I », la loi
applicable aux obligations contractuelles », La Revue Hammonds, le 24 septembre 2008,
disponible sur le site http://larevue.hammonds.fr/Le-nouveau-reglement-Rome-I-,-la-loi-
applicable-aux-obligations-contractuelles_a721.html?PHPSESSID=0c699c6151b5187c9a8
4a28a5cd270f7

RAPPORTS
(Liste chronologique)

-Rapport sur la Convention du 27 septembre 1968 sur la compétence judiciaire et l’exécution


des décisions en matière civile et commerciale (Rapport Jenard), JOCE, n° C 59/43, du 5
mars 1979.
-Rapport sur la Convention du 9 octobre 1978 relative à l’adhésion du Danemark, de l’Irlande
et du Royaume-Uni (Rapport Schlosser), JOCE, n° C 59, du 5 mars 1979.
-Rapport concernant la Convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles
(Rapport Giuliano-Lagarde), JOCE, n° C 282 du 31 octobre 1980.
625
-Rapport du groupe de travail sur l’arbitrage en matière administrative du 13 mars 2007,
Rev.arb.2007.651.
-Rapport au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur
l’application du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil concernant la compétence judiciaire,
la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, Bruxelles, 21
avril 2009, COM(2009) 174 final.
-Rapport au Premier ministre relative au décret n° 2011-48 du 13 janvier 2011 portant
réforme de l’arbitrage, JORF du 14 janvier 2011.

IV. NOTES DE JURISPRUDENCE ET OBSERVATIONS SOUS LES


ARRETS.

ANCEL (B)
note sous Cass.1er civ., 17 mai 1983, Sté Lafarge, RCDIP.1985.346.
note sous Cass.1er civ., 13 janvier 1993, Coucke, RCDIP.1994.78.
ANCEL (B) et MUIR WATT (H)
note sous Cass. 1er civ. et Cass. com., 28 juin 2005, RCDIP.2005.645.
ASTAIX (A)
« « Class action » des actionnaires étrangers aux États-Unis : la Cour suprême s’est
prononcée », obs. sur une décision du 24 juin 2010 de la Cour Suprême des États-Unis, D.
AJ., 1er juillet 2010.
ATTAL (M)
« Acculturation d’institutions procédurales étrangères : une occasion manquée », note sous
Cass. 2e civ., 30 avril 2009, JCP (G) 2009, n° 31, p. 21.
AUDIT (B)
obs. de Cass. 1er civ, 1er avril 1981, D. 1982.IR.69.
BATIFFOL (H)
note sous Cass.com., 21 juin 1982, RCDIP.1983.77
BERTROU (G) et ATTIAS (O)
« La Cour de cassation réaffirme l’autonomie de la clause compromissoire », note sous Cass.
1er civ., 8 juillet 2010, Sté Doga, Gaz. Pal. 2010 n° 243, p. 16.

626
BOLARD (G), « Le demandeur doit présenter dans la même instance toutes les demandes
fondées sur la même cause », note sous Cass. 1er civ., 28 mai 2008, Sté Prodim,
JCP.2008.II.10170.
BOLLEE (S)
« La reconnaissance d’une injonction anti-suit prononcée par un juge étranger désigné par une
clause attributive de juridiction », note sous Cass. civ. 1er, 14 octobre 2009, In Zone Brands
Inc, D. 2010.177.
BOUCHE (N)
« L’inapplicabilité manifeste de la convention d’arbitrage », note sous Cass. 1er civ., 11 juillet
2006, Andhika, RJDA.2006.1109.
CACHARD (O)
« Nouvelle application du principe « compétence-compétence » en présence d’une exception
d’incompétence soulevée face à une clause compromissoire, note sous Cass. 1er civ., 23 janv.
2007, DMF.2007.415.
DELEBECQUE (Ph)
« Connaissement de charte-partie Clause compromissoire », note sous Cass. 1er civ., 11 juill.
2006, RTD. com. 2006.947.
DELPECH (X)
-« Contrat de droit public international : recours contre la sentence arbitrale », obs. sur Cass.
D. 2010.1359.
-« Efficacité de la class action des actionnaires minoritaires français contre Vivendi », obs. sur
CA Paris, Pôle 2, ch. 2, 28 avril 2010, D. AJ, 11 mai 2010.
-« Les suites du procès Vivendi sur le sol français », obs. sur TGI Paris, 13 janvier 2010, n°
RG 09/15408, D. AJ, 3 février 2010.
-« Privilège de nationalité et clause attributive de juridiction », obs. sur Cass. 1er civ., 30
septembre 2009, n° 08-17.587, D. AJ, 9 octobre 2009 ; ibid. 2010.58.
-commentaire sur Cass. 1er civ., 26 janvier 2011, n° 09-10.198, D. AJ, 28 janv. 2011.
DEPREZ (J)
note sous CA Paris, 18 juin 1964, Gunzburg, RCDIP.1967.340.
GAILLARD (E)
obs. sur Sentence n°233, JDI.1994.229. p. 233.

627
GALLMEISTER (I)
« Statut de la loi étrangère et renvoi en matière immobilière », note sous Cass. 1er civ., 20 juin
2006, n° 1025 FSP+B (Décision en ligne), disponible sur le site Dalloz actualité :
http://www2.dalloz.fr/
GOLDMAN (B)
note sous CA Paris, 19 mars 1965, Banque Ottomane, JDI.1966.137.
note sous Civ., 22 oct. 1991, JDI.1992.177. p.184.
HEUZE (V)
« Validité d’une clause compromissoire insérée dans un contrat de consommation », note sous
Cass. 1er civ., 21 mai 1997, RCDIP.1998.87.
JAULT-SESEKE (F)
« Loi applicable au contrat : première interprétation de la Convention de Rome par la CJCE »,
note sous CJCE, 6 octobre 2009, aff. C-133/08, D. 2010.236.
KAHN (Ph)
note sous Cass. 1er civ., 29 juin 1971, Banque commerciale africaine, JDI.1972.51.
LAGARDE (P)
note sous Paris, 16 février 1966, RCDIP.1966.462.
note sous Cass. 1er civ., 24 janvier 1984, RCDIP.1985.89.
« Du rattachement d’un contrat de transport maritime et de la transmission d’une clause
attributive de juridiction par l’effet du connaissement », note sous Cass. com., 4 mars 2003,
RCDIP.2003.285.
note sous Cass. com. 19 décembre 2006 et Cass. 1ère civ., 22 mai 2007, RCDIP.2007.592.
LAMBERTI-ZANARDI (P), « In tema di conoscenza del diritto straniero designato dalle
norme di diritto internazionale privato », note sous Cass. it., 29 janvier 1964,
RDIPP.1964.644 citée par F. Mélin, « La Convention européenne dans le domaine de
l’information sur le droit étranger… », Petites Affiches, 27 septembre 1999, n°192, p. 231-
232.
LOQUIN (E)
« De la contradiction non manifeste résultant de la présence dans un même contrat d’une
clause compromissoire et d’une clause attributive de compétence à une juridiction étatique »,
note sous Cass. 2e civ., 18 déc. 2003, RTD. com. 2004.255.
MAHINGA (J.-G.), « L’office du juge français en présence du droit étranger », note sous
Cass. 1er civ., 28 juin 2005 et Cass.com., 28 juin 2005, Petites affiches, 28 décembre 2005, n°
258, p. 16-23.
628
MENJUCQ (Ph)
note sous Cass.1er civ., 24 novembre 1998, Lavazza, D. 1999.337.

MOTTE-SURANITI (D)
« La motivation de la décision de justice étrangère dans la procédure d’exequatur », D., 2009,
n°1, p.59.
MUIR WATT (H)
note sous Cass.1er civ., 16 mars 1999, RCDIP.1999.713 et s., spéc. p.718.
« Litispendance européenne et clause attributive de juridiction », note sous CJCE, 9 décembre
2003, aff. C-116/02, Gasser, RCDIP.2004.444.
note sous Cass. 1er civ., 11 juillet 2006, Winslow Bank and Trust Company, RCDIP.2007.414.
note sous Cass. 1er civ., 22 janv. 2009, Société Gueydon et autres c./ M. de Groot et autres,
RCDIP.2009.533.
PERROT (R)
« Autorité de la chose jugée : sa relativité et le principe de concentration », note sous Cass. 1er
civ., 28 mai 2008, RTD civ.2008.551.
PILLET (A)
note sous Conseil privé, 17 février 1892, JDI.1894.155.
REMERY (J.-P.) et MUIR WATT (H)
Note sous Cass. 1er civ., 17 octobre 2000, RCDIP.2001.121.
STAES (O)
« Transport aérien de personnes », note sous Cass. 2e civ., 30 avril. 2009, Rev. dr. trans.,
2009, n° 11, p. 28.
TRAIN (F.-X.)
« L’unité de la notion de nullité ou d’inapplicabilité manifeste de la convention d’arbitrage »,
note sous Cass. 1er civ., 14 nov. 2007, Rev.arb.2008.453.
VANDER ELST (R)
note sous Cass., 28 juin 1979, Audi-N.S.U., RCJB.1981.332.
WEILLER (L)
note sous Cass. 1er civ., 28 mai 2008, Sté Prodim, Rev. arb. 2008.461.

V. SITE INTERNET
Conseil de l’Europe
http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/ListeTraites.asp?CM=8&CL=FRE

629
Conférence de La Haye de Droit international privé
http://www.hcch.net/index_fr.php?act=conventions.listing
Cour suprême Dika (Thaïe)
http://www.supremecourt.or.th/file/dika_eng.pdf
UNILEX on CISG&UNIDROIT Principles, International Case Law & Bibliography
http://www.unilex.info/
The Central People’s Government of the People’s Republic of China
http://www.gov.cn/flfg/2010-10/28/content_1732970.htm

VI. TEXTES INTERNATIONAUX.

-Convention de La Haye du 15 juin 1955 sur la loi applicable aux ventes à caractère
international d'objets mobilier.
-Convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l’execution des
sentences arbitrales étrangère.
-Convention européenne sur l’arbitrage commercial international, Genève, 21 avril 1961.
-Convention de La Haye du 1er juillet 1964 portant loi uniforme sur la vente internationale des
objets mobiliers corporels.
-Convention de Rome du 9 octobre 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles.
-Convention de Vienne sur les contrats de ventes internationales de marchandises du 11 avril
1980.
-Loi-type sur l’arbitrage commercial international adoptée par la CNUDCI le 21 juin 1985.
-Convention de La Haye du 22 décembre 1986 sur la loi applicable aux contrats de vente
internationale de marchandises.
-Convention de La Haye du 30 juin 2005 sur les accords d'élection de for.

630
Thaïlandais

I. OUVRAGES GENERAUX- TRAITES - MANUELS

ARD-RAKSA (Phairoj), Le droit de protection des consommateurs, Bangkok : Winyuchon,


2000.
ASAWAROJ (Sawanee), Le règlement des différends commerciaux par l’arbitrage,
Bangkok : Université de Thammasat, 2000, 313 pages.
ATTAKORN (Suthep) et PATYANGKUL (Atta), Droit international privé, 2e éd.,
Bangkok : Akesil Printing, 1963, 54 pages.
BOONCHALERMWIPAS (Sawaeng), Histoire du droit thaï, Bangkok : Winyuchon, 2009,
308 pages.
CHAKRANGKOON (Phipat), Procédure civile, Bangkok : Nitibanakarn, 2000, 719 pages.
CHANTARA-OPAKORN (Anan), Règlement de différends par l’arbitrage, Bangkok :
Nititham, 1994, 213 pages.
CHANTIKUL (Kosol), Le commerce international : droit et pratique, 3e éd., Bangkok :
Winyuchon, 2006, 216 pages.
CHUNHA-URAI (Phasakorn), Droit international privé, Bangkok : Nitibanakarn, 1977,
283 pages.
EAGJARIYAKORN (Pathaichit), Achat-Vente, échange et don, 4e éd., Bangkok :
Winyuchon, 2006, 388 pages.
EAGJARIYAKORN (Pathaichit), Loi de 2005 relative au transport multimodal
international, Bangkok : Université de Thammasat, 2007, 280 pages.
EAGJARIYAKORN (Pathaichit) et FUKANJANANON (Nirat), Le droit de transport
combiné international et le droit de transport international de marchandises, Bangkok :
Winyuchon, 2000, 324 pages.
HORAYANGKURA (Phijaisukdi), Le règlement des différends commerciaux, Bangkok :
Chulalongkorn University, 2006, 59 pages.
INSTITUT ROYAL DE THAILANDE, Dictionnaire, 2e éd., Bangkok : Arun Printing,
2000.
JONGJAKAPUN (Kumchai), Droit du commerce international, Bangkok : Winyuchon,
2000, 224 pages.

631
KANCHANACHITTRA-SAISOONTHORN (Phunthip), Droit international privé :
Conception générale de relation juridique, 5ème éd., Bangkok : Winyuchon, 2003, 352 pages.
KASEMSUP (Preedee), Philosophie du droit, 6e éd. Bangkok : Université de Thammasat,
2003, 396 pages.
KOUMANACHAI (Supot), Droit international privé : Loi relative au conflit de lois
B.E.2481 (1938), Bangkok : Nititham, 2002, 105 pages.
LEKSAKULCHAI (Chakrapong), Droit de procédure civile, Bangkok : Thammasat, 11e
éd., 2010, 419 pages.
LUANG PRADIT MANOO THAM (Pridi Phanomyong), Droit international privé,
Bangkok : Aksornniti, 1931, 232 pages.
LUCHAI (Kanung), Conflit de lois, Bangkok : Winyuchon, 2006, 220 pages.
NINNAD (Sonjai), Droit international privé, Bangkok : Winyuchon, 2007, 161 pages.
PACHUSANOND (Chumphorn), Droit international privé : la nationalité, 2e éd.,
Bangkok : Winyuchon, 2006, 457 pages.
PHRAYASRIWISARNWAJA (Tianliang Hountrakoon), Droit international privé,
Bangkok : Sophonphipatanakorn Press, 1931, 128 pages.
PINAINITISART (Pinyo), Droit international privé, Bangkok : Faculté de Droit, Université
de Thammasat, 1990, 197 pages.
PIVAVATNAPANICH (Prasit), Droit international privé, Bangkok : Université de
Thammasat, 2008, 346 pages.
RATANAKORN (Sophon), Droit des preuves et des évidences, 4e éd., Bangkok :
Nitibanakarn, 1999, 471 pages.
SAENG-UTHAI (Youd), Droit international privé, Bangkok : Université de Thammasat,
1984, 262 pages.
SAENG-UTHAI (Youd), L’introduction générale au droit, Bangkok : Prakaipruk, 1995, 281
pages.
SANDHIKSHETRIN (Kamol), Droit international privé, Bangkok : Nitibanakarn, 1996,
405 pages.
SANONGCHART (Sak), Le Code civil et commercial : Actes juridiques et contrats, Cours
du droit, Bangkok : Nitibannakarn, 7e éd., 764 pages.
SOTTIPHUN (Sanankorn), Actes juridiques et contrats, 11e éd., Bangkok : Winyuchon,
2006, 532 pages.
SOTTIPHUN (Sanankorn), Vocabulaire juridique : actes juridiques et contrats, Bangkok :
Winyuchon, 2006, 100 pages.
632
THIRAWAT (Daraporn), Droit de contrats : l’actualité du nouveau statut de contrat et le
problème de la Unfair Contract Terms, 2e éd., Bangkok : Université de Thammasat, 1999,
177 pages.
WATTANAKHUN (Vichian), Droit international privé, Bangkok : Université de
Thammasat, 1965, 263 pages.

II. OUVRAGES SPECIAUX- THESES – COURS- TRAVAUX


COLLECTIFS

HORAYANGKURA (Phijaisukdi), La pensée juridique sur le règlement des différends du


commerce, Bangkok : Samyanwitayapatana, 1997, 115 pages.
HORAYANGKURA (Phijaisukdi), L’extrait des œuvres sur le règlement des différends du
commerce international, Bangkok : Chulalongkorn University, 2006, 96 pages.
JONGJAKAPUN (Kumchai), Le paiement dans le commerce international, Cours du droit
‘Les transactions dans le commerce international’, Université de Thammasat, 2000.
KANCHANACHITTRA-SAISOONTHORN (Phunthip), « Le conflit de lois sur la
compétence étatique en matière du commerce international », Cours de droit du commerce
international, le 19 avril 2002.
KIJSINTOPCHAI (Narumol), Les mesures provisoires dans l’arbitrage commercial
international, Bangkok : Université de Chulalongkorn, 2004.
KLAIKLERN (Phataravee), L’application de la lex mercatoria devant la Cour
thaïlandaise : le cas d’Incoterms 2000, Mémoire de Master (LL.M.), Faculté des Sciences
juridiques, Université de Chulalongkorn, Bangkok, 2001.
PROKATI (Kittisak), L’évolution du système juridique thaïlandais sous l’influence
européenne, 2e éd., Bangkok : Winyuchon, 2006.
SAENG-UTHAI (Youd), Droit international privé, Cours de droit, Université de
Thammasat, 1940.
SAWAENGSAK (Chanchai), L’influence française à la réforme du droit thaï, Bangkok :
Nititham, 1996.
SINAMNUAY (Supin), Le problème d’exécution des jugements étrangers par la Cour thaïe
pour le cas d’adhérer de Thaïlande à la Convention internationale de droit maritime,
Mémoire de Master (LL.M.), Bangkok, Faculté des Sciences juridiques, Université de
Thammasat, Bangkok, 2005.

633
SOTTIPHUN (Jumpee), Culpa in contrahendo, 3e éd., Bangkok : Winyuchon, 2005.
TRAIWAIT (Surapol), Les rédactions des Codes de droit au Siam, Bangkok : Winyuchon,
2007, traduit de l’anglais The Work of Codification in Siam de M. René Guyon, Paris :
Imprimerie Nationale, 1919.
WONGSWANGPANICH (Benya), La procédure judiciaire sur le contrat de vente
internationale de marchandises en Thaïlande, Mémoire de Master (LL.M.), Faculté des
Sciences juridiques, Université de Thammasat, Bangkok, 2003.
WONGWATANASAN (Chaiwat), Le droit de protection des consommateurs, Bangkok :
Winyuchon, 2000.

III. ARTICLES – COMMUNICATION – CHRONIQUES – RAPPORTS -


CONTRIBUTIONS AUX MÉLANGES

ARIYANANDAKA (Wichai), « Le règlement des différends du commerce international »,


Dulapaha Journal du Ministère de la Justice, vol. 44, n°3, 1997, p.105-128.
BOONDEJ (Prasopsook), « Les effets des jugements étrangers », Thammasat Law Journal,
vol. 9, n°1, 1977, p. 64-67.
BOONPEUM (Kiang), « La Cour et le règlement de différends par l’arbitrage », in Rapport
de conférence « Encouragement et développement le système d’arbitrage en Thaïlande »,
Conseil national de la recherche, le 9 mars 1994, Regent Bangkok, p.17-22.
BORMANAN (Nanthawat), « Du débat sur la chaine ITV : la différence entre le juge et
l’arbitre », le 15 décembre 2004, disponible sur le site http://www.pub-
law.net/publaw/view.aspx?ID=93;
BUNNAG (Jayavadh), « Le contrôle de droit par le juge de la sentence arbitrale », Cases
and Materials on Arbitration, Bureau de la magistrature, Ministère de la Justice, 1992, p. 84-
87.
BUREAU DE LA MAGISTRATURE (Ministère de la justice),
« Rapport de la conférence : le développement et l’encouragement le système de l’arbitrage
en Thaïlande, 1994, p. 17-69.
« Où en est la frontière de l’ordre public et des bonnes mœurs du people dans l’exécution de
la sentence arbitrale ? », TAI Journal of Arbitration, vol. 2, 2007, ADR Office, p. 10-27.
« Les solutions pour le déroulement de procédure arbitrale », TAI Journal of Arbitration, vol.
3, 2008, ADR Office, p. 215-231.

634
CHANTARA-OPAKORN (Anan),
« L’arbitrage commercial international », Sukhothai Thammathirat Law Journal, vol.4, n°1,
1992, p. 73-88.
« Où en est la frontière de l’ordre public et des bonnes mœurs du peuple dans l’exécution de
la sentence arbitrale ? », TAI Journal of Arbitration, vol. 2, 2007, ADR Office, Bureau de la
magistrature, p. 26.
« Les problèmes du privilège de droit dans l’arbitrage du commerce international : Étude de
loi étrangère et pratique », TAI Journal of Arbitration, vol.3, 2008, Bureau de la magistrature,
p. 1-49.
COMITE DU TRAVAIL DE L’ELABORATION DE PROPOSITION DE LA
REPARTITION LES LITIGES COMMERCIAUX AUX LITIGES CIVILS,
« Rapporteur de la Commission », disponible sur le site :
http://www.legalreform.go.th/m_produce/anu8/anu8-49_01/anu8_project_2549.pdf
« Le plan d’élaboration la Loi sur le contrat de vente commerciale de marchandises »,
disponible sur le site : http://www.legalreform.go.th/m_produce/anu8/anu8-
49_01/tendency_yograng.pdf
« Le mémorandum du projet de Loi sur le contrat de vente commerciale de marchandises »,
disponible sur le site : http://www.legalreform.go.th/m_produce/anu8/anu8-
49_01/rang_ecommerce.pdf
« Résumé du meeting du 11 janvier 2006 », disponible sur le site :
http://www.legalreform.go.th/m_produce/anu8/anu8-49_01/summeeting01.pdf
« Résumé du meeting du 23 janvier 2006 », disponible sur le site :
http://www.legalreform.go.th/m_produce/anu8/anu8-49_01/summeeting02.doc
« Résumé du meeting du 30 janvier 2006 », disponible sur le site :
http://www.legalreform.go.th/m_produce/anu8/anu8-49_01/summeeting03.pdf
« Résumé du meeting du 8 février 2006 », disponible sur le site :
http://www.legalreform.go.th/m_produce/anu8/anu8-49_01/summeeting04.doc
« Résumé du meeting du 2 mars 2006 », disponible sur le site :
http://www.legalreform.go.th/m_produce/anu8/anu8-49_01/summeeting05.pdf
« Résumé du meeting du 2 mars 2006 », disponible sur le site :
http://www.legalreform.go.th/m_produce/anu8/anu8-49_01/summeeting06.pdf
EAGJARIYAKORN (Pathaichit),
« Le framework d’ASEAN sur le transport multimodal », Thammasat Law Journal, vol. 28,
n°2, Juin 1998, p.282 – 316.
635
« Les problèmes de l’appropriation d’avoir une loi spécifique sur le transport aérien
international de Thaïlande », Thammasat Law Journal, vol. 30, n°2, Juin 2000, p.223 – 260.
FONDATION du Professeur Kanung LUCHAI, « Les problèmes du choix de la loi
applicable aux contrats internationaux », Colloque, Faculté des Sciences juridiques,
Université de Thammasat, le 21 août 2002.
INDRAMBARYA (Kanok), « L’opinion et observations sur la coopération judiciaire de
reconnaissance et d’exécution des jugements étrangers », Dulapaha Journal du Ministère de
Justice, vol.31, n°2, 1984, p.56-69.
JAREUNWIMOLKUL (Korbchai), « Effet lié du traité dans chaque étape de
l’élaboration », Thammasat Law Journal, vol. 20, n°3, Sept. 1990, p. 133-146.
JONGJAKAPUN (Kumchai),
« Observations sous la décision de la Cour suprême Dika n°3046/2537 et n°3651/2537 »,
Dulapaha Journal du Ministère de la Justice, vol.47, n°2, 2000, p.55-66.
« Le projet de Loi sur le contrat de vente commerciale de marchandises : le débat sur le
principe et les dispositions de loi», The Thai Bar Association Law Journal, vol. 63, n°1, 2007,
p. 31-69.
KANCHANACHITTRA-SAISOONTHORN (Phunthip),
« Les modalités d’appeler des jugements étrangers devant la Cour thaïe », Thammasat Law
Journal, vol. 20, n°3, Sept. 1990, p. 147-153.
« Les conditions de reconnaissance et d’exécution des jugements étrangers selon la Cour
thaïe », Thammasat Law Journal, vol. 20, n°4, Déc. 1990, p. 141-154.
« Pourquoi est-il nécessaire d’uniformiser le droit de commerce international ? », The Thai
Bar Association Law Journal, vol. 46, n°1, 1990, p. 97-109.
« Problème de conditions de reconnaissance et d’exécution des jugements étrangers »,
Thammasat Law Journal, vol. 22, n°2, 1992, p. 203 – 219.
« La souveraineté de l’État et les relations juridiques selon le droit privé international »,
Thammasat Law Journal, vol. 23, n°4, 1993, p. 731-760. (Réédité en 2003 disponible sur le
site http://www.archanwell.org/office/download.php?id=293&file=271.pdf&fol=1)
« Le contrat de vente internationale de marchandises : la sécurité juridique et la Thaïlande »,
Raphee Law Journal, vol. 3, n° 8, 1994, p. 25-35.
« Le rôle des Incoterms aux contrats de vente international », Thammasat Law Journal, vol.
24, n°4, 1994, p. 761-782.
« Les conceptions fondamentales sur les contrats de droit privé à caractère extranéité »,
Thammasat Law Journal, vol. 25, n°3, 1995, p. 524-563.
636
KHONGCHAN (Banlue),
« La reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers : Conférence de droit asiatique »,
Thammasat Law Journal, vol. 12, n°3, 1982, p. 101-115.
« La reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers : Conférence de droit asiatique »,
Thammasat Law Journal, vol. 12, n°4, 1982, p. 91-105.
LENGTHAISONG (Sathit),
« L’exécution des jugements étrangers en droit thaï », Thammasat Law Journal, vol. 4, n°1,
1972, p. 76-91.
« La compétence du tribunal selon un accord : pour la compréhension », Sukhothai
Thammatirat Law Journal, vol. 5, n° 2, 1993, p. 40-41.
LIMPARANGSRI (Sorawit), « Où en est la frontière de l’ordre public et des bonnes mœurs
du peuple dans l’exécution de la sentence arbitrale ? », TAI Journal of Arbitration, vol. 2,
2007, ADR Office, Bureau de la magistrature, p. 14.
LUCHAI (Kanung), HORAYANGKURA (Phijaisukdi), CHANTARA-OPAKORN
(Anan) et al., « Les solutions pour le déroulement de procédure arbitrale », TAI Journal of
Arbitration, vol. 3, ADR Office, Office of the Judiciary, 2008, p. 215-231.
LUCHAI (KANUNG), KAEWCHAROEN (Kumphee) et ARIYANUNTAKA (Vichai),
« Problèmes, obstacles et règlements pour le développement d’arbitrage », Rapport de
conférence « Renforcement et développement le système d’arbitrage en Thaïlande », Conseil
national de la recherche, le 9 mars 1994, Regent Bangkok, p. 23-46.
LUCHAI (KANUNG) et KANCHANACHITTRA-SAISOONTHORN (Phunthip), « La
conception relative à la clause attributive de juridiction aux tribunaux étrangers à la fin de
déroger la compétence du juge thaï », Commentaire de décision de la Cour suprême Dika n°
951/2539 et n° 5809/2539, « Conflit de lois », Bangkok : Winyuchon, 2006, p. 177-193.
LUSUMPHAN (Chotikorn), « Le devoir de banque en vue d’examiner les documents et le
paiement de lettre de crédit », Journal du droit des affaires, vol. 14, n° 3, 1983, p. 26.
MINISTERE DE LA JUSTICE,
« Rapport de conférence des commissionnaires du développement de l’arbitrage », 5e/2539, le
5 août 1996, p. 8-9.
« L’avis de M. Gerold Hermann, Le secrétaire général de CNUDCI à l’occasion de discussion
de table ronde sur le projet de loi de l’arbitrage de Thaïlande B.E. … », Ministère de la
justice, septembre 1996, p. 29-30.
MINISTRE DU COMMERCE, « Le commerce international de Thaïlande en 2006 »,
disponible sur le site http://www.ops.moc.go.th/MocCMS/fileupload/ETC/14381.doc
637
MONKOLNAVIN (Ukrit), « L’ordre public et les bonnes mœurs du peuple », The Thai Bar
Association Law Journal, vol. 32, n° 1, 1975, p. 13.
MONTAPORN (VITID), « Les aspects asiatiques de la coopération judiciaire et l’exécution
des jugements étrangers », Dulapaha Journal du Ministère de Justice, vol. 31, n° 2, 1984,
p.88-104.
NANDASIRIPOL (Chumpol), « L’autonomie de la clause d’arbitrage », Dulapaha Journal
du Ministère de Justice, vol. 50, n° 2, 2003, p. 92-106.
NITIKRAIPHOT (Suraphol), « Interview », Prachachat Business le 22 mai 2006.
PACHUSANOND (Chumphorn),
« Lois d’application immédiate, la règle de conflit de lois : les effets sur la convention
internationale du droit international privé », Thammasat Law Journal, vol. 16, n°4, 1986, p.
20-41.
« Certains aspects sur le conflit de juridictions en Thaïlande à l’égard du droit international
privé », Chulalongkorn Law Journal, vol. 17, n° 1, 1997, p. 39-61.
PINITPUWADOL (Kamalin), NARKWACHARA (Suwicha), « L’application de la loi
étrangère : dans le cadre de la Loi sur le conflit de lois B.E.2481 devant le Tribunal central de
propriété intellectuelle et commerce international », Journal du droit de propriété intellectuelle
et commerce international, 2004, p. 358-373.
http://www.judiciary.go.th/~library/Article/data/28-0001-01.pdf
PIVAVATNAPANICH (Prasit), « La reconnaissance et l’exécution de jugements étrangers
en Thaïlande », Rapport de recherche de Faculté des Sciences Juridiques, Université de
Thammasat, 2005, pp.42.
POBROMYEN (Lukana), « Les effets de coutume internationale à l’égard de la
Thaïlande », Association de droit international de Thaïlande, Actualité juridique, le 17 janvier
2004. Disponible sur le site
http://www.archanwell.org/autopage/show_page.php?t=1&s_id=5&d_id=7
PROKATI (Kittisak), « La Convention des Nations Unies de 1980 sur la vente
internationale de marchandises », Thammasat Law Journal, vol.17, n°4, Déc. 1987, p.109.
PUKDITANAKUL (Jaran), « Rapport de la conférence : le développement et
l’encouragement le système de l’arbitrage en Thaïlande », Bureau de la magistrature, 1994, p.
50.
RATANAPAKORN (Orawan), « La structure monétaire thaïe en macro », in, La conférence
académique annuelle 2005, p.3-22.

638
SANDHIKSHETRIN (Kamol), « La coopération judiciaire de reconnaissance et d’exécution
des jugements étrangers », Dulapaha Journal du Ministère de Justice, vol. 31, n°2, 1984, p.
19-55.
SATTABOOT (Suthabadee), « La reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers en
matière civil et commerciale », Dulapaha Journal du Ministère de Justice, vol. 31, n°2, 1984,
p.70-87.
THAWEECHAIKARN (Suthipol), « Commentaire de décision de la Cour suprême Dika n°
951/2539 », Dulapaha Journal du Ministère de Justice, vol. 44, n° 2, 1997, p. 211-218.
VITITVIRIYAKUL (Hassavut), « Où en est la frontière de l’ordre public et des bonnes
mœurs du peuple dans l’exécution de la sentence arbitrale ? », TAI Journal of Arbitration, vol.
2, 2007, ADR Office, Bureau de la magistrature, p. 17.
WATPATARAKUL (Pornchai), « Le paiement dans le contrat de vente internationale »,
Thammasat Law Journal, vol. 20, n°2, 1990, p.108.

IV. TEXTE INTERNE


Loi relative aux règles de conflit de lois B.E. 2481 (1938)
Loi relative à l’arbitrage B.E. 2545 (2002)
Loi relative au transport de marchandises par voie maritime B.E. 2534 (1991)
Code civil et commercial
Code de procédure civile

639
Anglais

I. OUVRAGES GENERAUX- TRAITES - MANUELS

BERGER (Klaus-Peter), The Creeping Codification of the Lex Mercatoria, Kluwer Law
Intl., 1999.
CHESHIRE & NORTH, Private International Law, London : Butterworths, 13th ed., 1999,
1069 pages.
D’ARCY (Leo), MURRAY (Carole) and CLEAVE (Barbara), Schmitthoff’s Export
Trade: The Law and Practice of International Trade, 10th ed., London, Sweet & Maxwell,
2000, 718 p.
DICEY & ALBERT VENN, Dicey and Morris on the Conflict of Laws, 7th ed., London,
Butterworths, 1965, p. 735.
KAHN-FREUND (O), General Problems of Private International Law, 2nd ed., The
Netherlands, Sijthoff & Noordhoff, 1980.
LEW (J), Applicable Law in International Commercial Arbitration: A study in Commercial
Arbitration Awards, D. Ferry, N.-Y., Oceana Publications Inc./Sitjthoff & Noordhoff
International Publishers BV, 1978.
MORRIS (J.H.C,) and McCLEAN (D), The Conflict of Laws, 5th Ed., Sweet & Maxwell,
2000.
O’BRIEN (John), Conflict of Laws, 2nd ed., London, Cavendish Publishing Ltd., 1999, p.
266.
WOLFF (Martin), Private International Law, Great Britain, Oxford University Press,
1945, 637 p.
ZIMMERMANN (Reinhard), The Law of Obligation: Roman Foundation of the Civilian
Tradition, Oxford, Clarendon Press, 1996, 1207 p.

II. ARTICLES – COMMUNICATIONS – CHRONIQUES – RAPPORTS -


CONTRIBUTIONS AUX MÉLANGES

AMERICAN LAW INSTITUTE, Restatement on Contracts.


BERMAN (H), « The Law of International Commercial Transactions (Lex Mercatoria) », 2 J.
Int’l Disp Resol.235.1988.
640
BOELE-WOELKI (K), « The Unidroit Principles of International Commercial and the
Principles of European Contract Law: how to apply them to international contracts? », Rev.
dr. unif. 1996.652.
BONELL (M. J.),
« The UNIDROIT Principles of International Commercial Contracts and CISG: Alternatives
or Complementary Instruments? », Rev. dr. unif. 1996.26.
« The UNIDROIT Principles of International Commercial Contracts and the Principles of
European Contract Law: Similar Rules for the Same Purposes ? », Rev. dr. unif. 1996.229.
CHANTARA-OPAKORN (Anan), « Arbitration in Thailand », International Commercial
Arbitration in Asia, 2nd Ed., USA: JurisNet, Edited by McConnaughay and Ginsburg, 2006, p.
403-444.
COHN (E. J.), « The Objective Practice on the Proper Law of Contracts », ICLQ, vol. 6
1957, p. 373-391.
DE LY (Filip),
« Choice of Law Clauses », Unidroit Principles of International Commercial Contracts and
Article 3 Rome Convention : the Lex Mercatoria before Domestic Courts or Arbitration
Privilege ?, in Études offertes à B. Mercadal, éd. F. Lefebvre, Paris, 2002, p. 133-145.
« Law and Practice of Drafting International Contracts », IBLJ, No. 3/4, 2002, p.461-473.
DIEDRICH (Frank), « Maintaining Uniformity in International Uniform Law via
Autonomous Interpretation: Software Contracts and the CISG », Pace International Law
Review, 1996, p. 303. Available on the website
http://digitalcommons.pace.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1094&context=intlaw
DORE (Isaak), « Choice of Law under the International Sales Convention: A U.S.
Perspective », American Journal of International Law, vol.77, July 1983, p. 521-540.
FARNSWORTH E. (Allan),
« Precontractual Liability and Preliminary Agreements: Fair dealing and Failed
Negotiations », Colombia Law Review, vol.87, March 1987, no.2, p. 217-294.
« The Interpretation of International Contracts and The Use of Preambles », RDAI, no.3,
2002, p. 271-279.
HONNOLD (John), « The Sales Convention in action- Uniform International Words:
Uniform Application? », Journal of Law and Commerce, vol.8, 1988, p.207-212.
JESSURUN D’OLIVEIRQ (H. U.), « Characteristic Obligation », in the Draft EEC
Obligation Convention, 25 American Journal of Comparative Law, 303, 1977, spéc. p. 330.

641
JUENGER (Friedrich K.), « What’s Wrong with Forum Shopping? », Sydney Law Review,
vol. 16:5, 1994, p. 5-13.
KESSELER (Friedrich) & FINE (Edith), « Culpa in Contrahendo, Bargaining in Good
Faith and Freedom of Contract: A Comparative Study », Harvard Law Review, vol. 77, 1964,
p.401-449.
KLEIN (John) & BACHECHI (Carla), « Precontractual Liability and the Duty of Good
Faith Negotiation in International Transactions », Houston Journal of International Law,
vol.17, 1994, p. 1-23.
LIMPARANGSRI (Sorawit), « The Should-Be Roles of Lex Mercatoria as a Source of
Substantive Law in International Commercial Arbitration », Raphee Law Journal, The Thai
Barrister Association, vol.58, 2002, p.69-97.
MANN (F), « The Proper Law of Contract: A rejoinder », ILQ, vol. 3, 1950, p. 60.
PIVAVATNAPANICH (Prasit),
« Choice of Law in Contract and Thai Private International Law: A Comparative Study »,
2002.
« Some Theoretical Remarks on Thai Private International Law Compared to the Continental
and the Common Law Traditions », 1 mars 2004.
PUKDITANAKUL (Jaran) et ARIYANUNTAKA (Vichai), « Aspects of Enforcement of
Foreign Judgements and Arbitral Awards in Thailand », Cases and Materials on Arbitration,
Bureau de la magistrature, Ministère de la Justice, 1992, p. 220.
SCHAEFER (Jan K.), « New solutions for Interim Measures of Protection in International
Commercial Arbitration: English, German and Hong Kong Law Compared », EJCL, vol. 2.2,
August 1998.
SCHMITTHOFF (Clive),
« The Law of International Trade, Its Growth, Formulation and Operation », in The Sources of
the Law of International Trade, ed. by C. Schmitthoff, London : Stevens & Sons Ltd., 1964,
p. 3-38.
« The Unification of the Law of International Trade », J. Bus. L. 105, 1968, p. 112.
SCHQEFER (Jan K.), « New solutions for Interim Measures of Protection in International
Commercial Arbitration : English, German and Hong Kong Law Compared », EJCL, vol. 2.2,
August 1998.
THIRAWAT (Daraporn), « Consumer Protection Law in Thailand with regard to
Contracts », The Thai Bar Association Law Journal, vol. 56, 2000, p.169-190.
YNTEMA (Hessel E.), « “Autonomy” in Choice-of-Law », AJCL, vol. 1, 1952, p. 353.
642
643
644
LISTE CHRONOLOGIQUE DES DECISIONS CITEES
(Les chiffres renvoient aux numéros de paragraphe,
les italiques renvoient aux notes de numéro.)

I. Juridictions communautaires et internationales.


II. Juridictions nationales et organes administratifs nationaux.
III. Sentence arbitrale international.

I.
Juridictions communautaires et internationales.

Cour de justice des Communautés européennes/ Cour de justice de l’Union


européenne.

-CJCE, 6 octobre 1976, aff. C-12/76, Tessili, RCDIP.1977.751, note Gothot et Holleaux ;
JDI.1977.714, obs. J.-M. Bischoff et A. Huet ; D. 1977.616, 1er esp., note G. Droz : 452, 454
-CJCE, 14 décembre 1976, aff. C-24/76, Estasis, JDI.1977.734, obs. Bischoff ;
RCDIP.1977.576, note Mezger ; D. 1977.349, obs. Audit : 490
-CJCE, 14 décembre 1976, aff. C-25/76, Segoura, JDI.1977.734, obs. Bischoff ;
RCDIP.1977.576, note Mezger ; D. 1977.349, obs. Audit : 490
-CJCE, 17 janvier 1980, aff. C-56/79, Zelger, RCDIP.1980.387, note E. Mezger ;
JDI.1980.435, note A. Huet : 450, 513
-CJCE, 4 mars 1982, aff. C-38/81, Effer, RCDIP.1982.570, note H. Gaudemet-Tallon ;
JDI.1982.473, obs. A. Huet : 447
-CJCE, 22 mars 1983, aff. C-34/82, Martin Peters, RCDIP.1983.667, note H. Gaudemet-
Tallon ; JDI.1983.834, note A. Huet : 447
-CJCE, 19 juin 1984, aff. C-71/83, Tilly Russ, JDI.1985.159, note Bischoff; RCDIP.1985.385,
note H. Gaudemet-Tallon ; DMF.1985.83, note Bonassies : 490, 526
-CJCE, 24 juin 1986, aff. C-22/85, Anterist, Rec.1986.1951, concl. Darmon : 489
-CJCE, 15 janvier 1987, aff. C-266/85, Shenavaï, RCDIP.1987.793, note G. Droz ;
JDI.1987.465, obs. J.-M. Bischoff et A. Huet : 450, 455

645
-CJCE, 4 février 1988, aff. C-145/86, Hoffmann, Rec.1988.645 ; RCDIP.1988.605, note H.
Gaudemet-Tallon ; JDI.1989.449, note A. Huet : 713
-CJCE, 8 mars 1988, aff. C-9/87, Arcado, RCDIP.1988.610, note H. Gaudemet-Tallon ;
JDI.1989.453, obs. A. Huet : 447
-CJCE, 27 septembre 1988, aff. C-189/87, Kalfelis, Rec. p. 5565 ; JDI.1989.457, note A.
Huet ; RCDIP.1989.117, note H. Gaudemet-Tallon ; D. 1989.254, note B. Audit : 406
-CJCE, 4 octobre 1991, aff. C-183/90, Van Loon, Rec.1991.4743 ; RCDIP.1992.128, note H.
Gaudemet-Tallon ; JDI.1992.499, note A. Huet : 707
-CJCE, 26 mars 1992, aff. C-261/90, Mario Reichert, RCDIP.1992.720, note B. Ancel ;
JDI.1993.461, note A. Huet ; RIDP.1994.160, note P. Marchal : 604
-CJCE, 17 juin 1992, aff. C-26/91, Jakob Handte, RCDIP.1992.730, H. Gaudemet-Tallon :
447
-CJCE, 31 mars 1993, aff. C-19/92, Kraus, Rec.1993.1663 ; Petites Affiches, 1993, n° 108, p.
19-20 ; Gaz. Pal. 1995.III., p. 668-672 : 406
-CJCE, 29 juin 1994, aff. C-288/92, Custom Made Commercial Ltd., Rec.1994.2913 ;
RCDIP.1994.698, note H. Gaudemet-Tallon; JDI.1995.461, note A. Huet; RTD. eur. 1995.87,
note H. Tichadou : 452
-CJCE, 7 mars 1995, aff. C-68/93, Fiona Shevill, RCDIP.1996.487, note P. Lagarde ;
JDI.1996.543, obs. A. Huet : 409
-CJCE, 12 mai 1998, aff. C-367/96, Kefalas, Rec.1998.2843, concl. G. Tesauro ; RTD com.
1998, p. 1000, obs. Luby ; Europe 1998, n° 225 et 247, obs. Lagondet, pt. 28 : 406
-CJCE, 9 mars 1999, aff. C-212/97, Centros Ltd., Bull. Jol. Sté, 1 juin 1999, n° 6, p. 705 ;
JDI.2000.482, note M. Luby : 366
-CJCE, 16 mars 1999, aff. C-159/97, Trasporti Castelletti, D. 1999.IR.100 ;
RCDIP.1999.559, note H. Gaudemet-Tallon ; DMF.2000.14, obs. Ph. Delebecque : 526
-CJCE, 28 septembre 1999, aff. C-440/97, Groupe Concorde, Rec.1998.6342 ; JDI.2000.547,
obs. J.-M. Bischoff ; RCDIP.2000.260, note B. Ancel ; DMF.2000.66, note P. Bonassies ;
DMF.2000.296, note M. Morin ; JCP (G) 2000.II.10354, note C. Bruneau : 420, 454
-CJCE, 5 octobre 1999, aff. C-420/97, Leathertex Divisione Sintetici SpA, RCDIP.2000.76,
note H. Gaudemet-Tallon ; JDI.2000.540, note F. Leclerc ; JCP (G).2000.II.10354, obs. C.
Bruneau : 455
-CJCE, 23 novembre 1999, aff. C-369/96 et C-376/96, Arblade, JDI.2000.493, note M. Luby ;
RCDIP.2000.728, note M. Fallon : 298, 300

646
-CJCE, 28 mars 2000, aff. C-7/98, Krombach, RCDIP.2000.481, note H. Muir Watt ;
JDI.2001.690, note A. Huet et M.-L. Niboyet ; RTD. civ.2000.944, note J. Raynard ; Gaz. Pal.
2000, n° 277, p. 21 : 709, 711
-CJCE, 11 mai 2000, aff. C-38/98, Maxicar, RCDIP.2000.504, note H. Gaudemet-Tallon ;
JDI.2001.697, note A. Huet ; JCP (G).2001.II.10607, obs. C. Nourissat : 707, 710
-CJCE, 13 juillet 2000, aff. C-412/98, Group Josi Reinsurance Company SA, D.
2000.IR.236 ; JDI.2002.623, obs. F. Leclerc : 444, 477
-CJCE, 9 novembre 2000, aff. C-381/98, Ingmar, RCDIP.2001.112, note L. Idot; JCP (E)
2001.12, obs. J. Raynard : 299
-CJCE, 9 novembre 2000, aff. C-387/98, Coreck Maritime, D. 2000.298 ; RCDIP.2001.359,
note F. Bernard Fertier ; JDI.2001.701, note J.-M. Bischoff ; DMF.2001.187, note Ph.
Delebecque : 489, 524, 526
- CJCE, 19 février 2002, aff. C-256/00, Besix, Rec.2002.1699 ; RCDIP.2002.588, note H.
Gaudemet-Tallon : 420
- CJCE, 17 septembre 2002, aff. C-334/00, Fonderie Officine Mecaniche Tacconi SpA,
RCDIP.2003.668, note P. Rémy-Corlay ; JDI.2003.668, obs. A. Huet ; D. 2002.2774 ; JCP
(G) 2003.I.166, n° 5 : 447
-CJCE, 9 décembre 2003, aff. C-116/02, Gasser, D. 2004.1046, note C. Bruneau ;
RCDIP.2004.444, note H. Muir Watt ; JDI.2004.641, obs. A. Huet : 513
-CJCE, 27 avril 2004, aff. C-159/02, Turner, RTD civ. 2004.549, obs. Ph. Thery ; D.
2005.Chr.2712, note R. Carrier : 596
-CJCE, 14 décembre 2006, aff. C-283/05, ASML Netherlands BV, RCDIP.2007.634, note E.
Pataut : 712
-CJCE, 3 mai 2007, aff. C-386/05, Color Drack GmbH, Europe, juillet 2007, n°196, p. 24,
note L. Idot : 450
-CJCE, 10 février 2009, aff. C-185/07, West Tankers, D. 2009. 981, note C. Kessedjian;
RCDIP.2009.373, note H. Muir Watt; JDI.2009.1281, note B. Audit; RTD civ. 2009.357, obs.
P. Théry; Rev. arb. 2009. 407, note S. Bollée : 516, 552, 593
-CJCE, 23 avril 2009, aff. C-533/07, Falco Privatstiftung, D. 2009. AJ 1489 ; panor. 2390,
obs. S. Bollée ; RDC.2009.1558, note E. Treppoz ; Europe 2009, com. 263, obs. L. Idot : 449
-CJCE, 6 octobre 2009, aff. C-133/08, Balkenende, D., 2010, n° 4, p. 236, note F. Jault-
Seseke ; JDI.2010.183, note C. Legros ; RLDC.2010.7, note M.-E. Ancel ; Gaz. Pal.
07/07/2010, n° 188-189, p. 24-26, note M. Nicolella ; Europe, 01/12/2009, n° 12, p. 36, note
L. Idot ; Rev. dr. transp. 2009, comm. 210, note L. Grard : 31, 266
647
-CJUE, 9 juin 2011, aff. C-87/10, Electrosteel Europe SA, D. actu. 2011, obs. X. Delpech,
disponible sur http://www.dalloz-actualite.fr : 155, 173, 438

Cour internationale de justice.


CIJ, 5 février 1970, Barcelona Traction, Light and Power Co.Ltd., Belgique c/ Espagne.
Disponible sur le site http://www.icj-cij.org/docket/files/50/5387.pdf : 470

Cour permanente de la justice internationale.


-CPJI, 22 juillet 1929, Emprunts serbes et brésiliens, CPJI Série A, n° 20-21, et arrêt n° 15
du 12 juillet 1929, RDIP.1929.427, note J.-P. Niboyet : 109, 137
-CPJI, 15 juin 1939, Sté commerciale de Belgique, Série A/B n° 78, p. 174-175 et 178 : 762

Cour et commission européenne des Droits de l’Homme


-CEDH, 20 juillet 2001, Pellegrini, RCDIP.2004.106, note L.-L. Christians ; RTD. civ. 2001,
p.986, obs. J. Marguénaud : 692

II.
Juridictions nationales et organes administratifs nationaux.

I. Allemagne
- Bundesgerichtshof, le 22 septembre 1971, RCDIP.1972.621, note Mezger : 217

II. Angleterre
- Vita Food Products v/ Unus Shipping Co. (1939), A.C. 277, 290 (P.C.) ; RCDI.1942.420,
note Mezger : 374
- Nouvion v. Freeman (1889), 15 App. Cas. 1, 13, HL. Dicey & Morris, p. 477 : 699

III. Belgique
- Audit NSU c/ SA Adelain Petit, JT (1979), p. 625, RCJB.1981.332, note Vander Elst : 375

648
IV. Espagne
- Cour provinciale de Barcelone, 7 juin 1999, D. 2000. Som. com. 440, obs. W. Rosch : 252

V. États-Unis d’Amérique
-Cour suprême des États-Unis, 24 juin 2010, D. 2010.2323, 2e esp., obs. L. d’Avout et S.
Bollée : 405

VI. France

Juridictions judiciaires.

Cour de cassation.

-Cass. civ., 17 avril 1810 : 761


-Cass.civ., 1er février 1813, S. 1830.1.113 : 122
-Cass. 1er civ., 28 février 1860, Bulkley, S. 1860.1.210, concl. Dupin ; GA n° 4 : 674
-Cass.1er civ., 18 mars 1878, Princesse de Bauffremont, GA, 4e éd. 2001, n°6 : 387
-Req. 30 janvier 1882, DP. 1883.1.223 : 473

1900-1950
-Cass. 1er civ., 9 mai 1900, De Wrède, JDI.1900.613 ; S. 1901.1.185, note E. A. ; D.
1905.1.101, note L. S. ; GA n° 41 : 674
-Cass. 1ère civ., 5 décembre 1910, American Trading, S., 1911, 1, 129, note Lyon-Cean ;
JDI.1912.1156 ; RCDIP.1911.395 : 216, 219, 249
-Cass.1er civ., 17 mai 1927, Pélissier Du Besset , D.1928.25, concl. Matter, note H. Capitant :
12
-Cass. civ., 5 février 1929, Mancini, S. 1930.1.181, note Audinet : 378
-Cass. 1er civ., 17 juillet 1930, Sté Graf, S. 1931.1.4 ; RCDIP.1931.128, note Caleb ;
JDI.1931.654 ; DP. 1930.1.163, note Camerlynck : 473
-Cass. 1ère civ., 31 mai 1932, S. 1933, 1, 17, note Niboyet ; RCDIP.1934.909 ; JDI.1933.347 :
249
-Cass.1er civ., 29 mai 1937, S. 1937.1.365 ; DP. 1937.1.64 : 473
-Cass. 1er civ., 7 juillet 1947, D. 1948.Somm.9 ; JCP.1947.II.3871, note J. L : 473
649
- Cass.1er civ., 25 mai 1948, Lautour, RCDIP.1949.89, note H. Batiffol ; D. 1948.357, note
P.L.-P. ; JCP.1948.II.4532, note Vasseur ; GA 4e éd., 2001, n°19 : 333
-Cass. 1er civ., 21 juin 1948, Patino, RCDIP.1949.557, note Francescakis ; S., 1949.1.121,
note Niboyet : 440
-Cass. 1er civ., 21 juin 1950, Messageries Maritimes, RCDIP.1950.609, note H. Batiffol ; D.
1951.749, note Ancel ; JCP.1950.II.5812, note Lévy ; GA, n° 22 : 137

1951-1960
-Cass. 1er civ., 24 avril 1952, Franc C.F.A., RCDIP.1952.502, note H. Motulsky ; S.
1952.1.185, note H. Batiffol : 221
-Cass.1er civ., 12 mai 1959, Bisbal, RCDIP.1960.62 note H. Batiffol ; JDI.1960.810, note J.-
B. Sialelli ; D.1960.610, note Malaurie ; J.C.P.1960.II.11733,note H. Motulsky ; GA, n° 32 :
56, 61
-Cass.1ère civ., 6 juillet 1959, Sté des Fourures Renel, RCDIP.1959.708., note H. Batiffol ; B.
Ancel, Sté des Fourrures Renel, JDI.1960.814., doss. Sialelli. ; RCDIP.1960.354., note
Loussouarn ; RTDC.1960.516., obs. Hébraud, GA, n°35 : 239, 249

1961-1970
-Cass. 1er civ. 21 novembre 1961, Montefiore, GA, 4e éd., 2001, n°36 : 122, 122, 126
-Cass. 1er civ., 30 octobre 1962, Scheffel, RCDIP.1963.387, note Francescakis ; D. 1963.109,
note D. Holleaux ; GA n° 37 : 440
-Cass. 1er civ., 7 mai 1963, Gosset, D. 1963.545, note J. Robert ; RCDIP.1963.615, note H.
Motulsky ; Rev. arb. 1963.60 ; JCP.1963.II.13405, note B. Goldman ; JDI.1964.82, 1er esp.,
note J.-D. Bredin : 550
-Cass. 1er civ., 15 mai 1963, Patino, 1er esp., JDI.1963.1016, note Malaurie ;
RCDIP.1964.532, note P. Lagarde ; JCP.1963.II.13365, note Motulsky : 694
-Cass. 1er civ., 14 avril 1964, San Carlo, D. 1964.637, J. Robert ; JDI.1965.646, note B.
Goldman ; RCDIP.1966.68, note H. Batiffol : 539
-Cass. 1er civ., 7 janvier 1964, Munzer, RCDIP.1964.344, note Batiffol ; JDI.1964.302, note
B. Goldman ; JCP.1964.II.13590, note Ancel ; Rép. Comm.1964.425, obs. G. Droz, GA n°
41 : 674, 682, 694
-Cass. 1er civ., 24 novembre 1965, RCDIP.1966.289, note P. Lagarde : 682

650
-Cass. 1er civ., 2 mai 1966, Galakis, D. 1966.575, note J. Robert ; JDI.1966.648, note Level ;
JCP.1966.14798, note Ph. Ligneau ; RCDIP.1967.553, note B. Goldman : 540, 738
-Cass. 2e civ., 15 juin 1966, Gaz. Pal.1966.II.184 ; D. 1967.84 : 511
-Cass. Civ. 28 juin 1966, RCDIP.1967.334, note H. Batiffol : 150
-Cass. 1er civ., 4 octobre 1967, Bachir, GA n° 45 : 674, 691
-Cass. 1er civ., 9 janvier 1968, RCDIP.1969.490, 3e esp., note H. Gaudemet-Tallon ;
JDI.1968.717, note M. Simon-Depitre ; JCP.1968.II.15451, note G. Lyon-Caen : 483
-Cass. 2e civ., 3 octobre 1968, JCP G 1968.II.15693, note J.A. ; JDI.1969.674, obs. Ph.
Kahn : 633
-Cass. 1er civ., 27 mai 1970, Weiss, RCDIP.1971.113, note Batiffol, GA n° 49 : 440

1971-1980
-Cass.1er civ., 8 juin 1971, Bull.civ.I.184 ; D. 1971, som.177 : 58
-Cass. soc. 10 mai 1972, Consorts Bastia, RCDIP.1974.321, note Marraud : 126
-Cass. 1er civ., 4 juillet 1972, Hecht, JDI.1972.843, note B. Oppetit ; RCDIP.1974.82, note P.
Level : 550
-Cass. 1er civ., 24 octobre 1973, RCDIP.1974.365, note E. Mezger ; JDI.1974.592, note D.
Holleaux : 646
-Cass. 1er civ., 26 novembre 1974, RCDIP.1975.491, note D. Holleaux ; JDI.1975.108, note
Ponsard ; note GA, 4e éd., n° 54 : 418
-Cass.1er civ., 22 avril 1975, Bull.civ.I.138, RCDIP.1976.744 : 58
-Cass. 1er civ., 11 juillet 1977, Giroud, RCDIP.1978.151, note B. Audit : 378
-Cass. ass. plén. 14 octobre 1977, D.1978.417, note P. Lagarde : 645
-Cass. com., 19 décembre 1978, Europa-Carton, JDI.1979.366, note H. Gaudemet-Tallon ;
RCDIP.1979.617, note A. Huet : 501
-Cass. 1ère civ., 25 mai 1980, Mercator Press, JDI.1980.650., note Kahn., RCDIP.1980.576.,
note H. Batiffol. ; D. 1981. IR. 162 : 240
-Cass.1er civ., 7 octobre 1980, Tardieu, RCDIP.1981.313, note Mestre : 14
-Cass.1er civ., 22 octobre 1980, RCDIP.1981.94 2ème esp., note P. Lagarde ; D.1982.I.73, obs.
B. Audit : 94

1981-1985
-Cass.com., 14 octobre 1981, Sté Discount Bank, D. 1982.301, note M. Vasseur : 140

651
-Cass. 1er civ., 1er avril 1981, D. 1982.IR.69, obs. B. Audit : 530
-Cass. 2e civ., 9 décembre 1981, Fougerolles, Rev. arb. 1982.183, 2e esp., note Couchez ;
JDI.1983.931, 2e esp., note B. Oppetit ; JCP.1983.II.19771, 2e esp., note Level : 182
-Cass. 1er civ. 2 février 1982, Olivier, JDI.1982.690, note H. Muir Watt ; RCDIP.1982.706,
note P. Mayer ; JCP.1982, II, 19749, concl. Gulphe : 126
-Cass.1er civ., 17 février 1982 , RCDIP.1983.249, note H. Batiffol : 115
-Cass.1er civ., 15 juin 1982, Zagha, RCDIP.1983.300, note Bischoff ; JDI.1983.595, note
Lehmann : 94
-Cass.1er civ., 16 juin 1982, JCP.1982.IV.307 : 84
-Cass. 1er civ., 9 mars 1983, JCP.1984.II.20295, note P. Courbe : 78
-Cass. 1er civ. 17 mai 1983, Lafarge, RCDIP.1985.346, note Ancel : 363, 396, 397
-Cass.1er civ., 14 juin 1983, RCDIP.1984.119, 2ème esp., note Batiffol : 94
-Cass.1er civ., 24 janvier 1984, Sté Thinet, RCDIP.1985.89, note P. Lagarde ; JDI.1984.874,
note J-M Bischoff : 94
-Cass.3ème civ., 20 novembre 1985, Gaz.pal. 1986.2, Somm.421, obs. Croze et Morel : 84
-Cass. 1er civ., 17 décembre 1985, Cie des signaux et d'entreprises électriques (C.S.E.E.),
RCDIP.1986.537, note H. Gaudemet-Tallon ; D., 1986, p. 265, obs. B. Audit ; GA, n° 72 :
489, 490
-Cass. 1er civ., 6 février 1985, Simitch, JDI.1985.460, obs. A. Huet ; RCDIP.1985.369 ; D.
1985. IR.498, obs. Huet ; GA n° 70 : 677, 680, 685

1986-1990
-Cass. 1er civ., 25 novembre 1986, Siaci, RCDIP.1987.396, note H. Gaudemet-Tallon : 523,
526
-Cass. 1er civ., 16 juin 1987, Cie Air Afrique, D. 1988. Somm.341, obs. B. Audit ;
RCDIP.1988.78, 2e esp., note H. Gaudemet-Tallon : 483
-Cass. com., 7 octobre 1987, Sté Marseillaise de crédit, JCP (E) 1988, 15102, obs. J.
Stoufflet : 188
-Cass. 1er civ., 24 novembre 1987, Sté Garrett, RCDIP.1988.634, note G. Droz ;
JDI.1988.793, note E. Loquin ; JCP (G) 1989. II. 21201, note P. Blondel et L. Cadiet : 409,
420, 526
-Cass 1er civ. 8 mars 1988, Cie Air Zaïre, JDI.1988.1041, note A. Lyon-Caen ; Cass. soc., 1er
mars 1989, Dr. soc. 1989.729, note A. Jeammaud : 483

652
-Cass.1er civ., 2 février et 21 juin 1988, RCDIP.1989.55, note B. Ancel ; JDI.1988.741, note
D. Alexandre : 94
-Cass.1er civ., 11 octobre 1988, Rebouh, RCDIP.1989.368 ; chronique de Y. Lequette,
L’abandon de la jurisprudence Bisbal, p.277 ; JDI.1989.349, note D. Alexandre ; Gaz. Pal.
1989.I.388, note E.S. de la Marnière ; JCP.1989.II.21327, obs. P. Courbe : 61, 78
-Cass.1er civ., 18 octobre 1988, Schule, RCDIP.1989.368 ; JDI.1989.349, note D. Alexandre ;
J.C.P.1989.II.21259, obs. J. Prévault. ; GA, n° 74-78 : 61, 78
-Cass. 1er civ., 6 juin 1990, Akla, RCDIP.1991.553, 1er esp., note P. Courbe ; D.
1990.Som.com.263, obs. B. Audit : 403
-Cass. com., 2 octobre 1990, DMF.1991.504 : 141
-Cass.1er civ., 4 décembre 1990, Sté Coveco, RCDIP.1991.558, note M.-L. Niboyet-Hoegy ;
JDI.1991.371, note D. Bureau : 54, 61, 66, 78

1991
-Cass. com., 5 mars 1991, Bull. civ., IV, n° 96 : 481
-Cass. 1er civ., 19 mars 1991, Buzyn, RCDIP.1992.88, note H. Muir Watt : 126
-Cass. 1er civ., 22 octobre 1991, RCDIP.1992.113, note B. Oppetit ; JDI.1992.177, note B.
Goldman ; RTD com. 1992.171, obs. Dubarry et Loquin : 163

1992
-Cass. com., 26 mai 1992, RCDIP.1992.703, note H. Gaudemet-Tallon : 524
-Cass. 1er civ., 30 juin 1992, D. 1994.169, note Ph. Guez ; JCP (G) 1992, IV, n° 2510 : 481,
491
-Cass. 1er civ., 21 janvier 1992, D. 1993.351, obs. B. Audit : 678

1993
-Cass. 1er civ., 13 janvier 1993, Coucke, RCDIP.1994.78, note B. Ancel : 45
-Cass. 1er civ., 10 mars 1993, Polish Ocean Line, Rev. arb.1993.255, note D. Hascher ;
JDI.1993.360, 1re esp., note Ph. Kahn : 790
-Cass. com., 22 juin 1993, Bull. Transport, 1994, p. 23 : 481
-Cass. com., 16 novembre 1993, Amerford, RCDIP.1994.322, note P. Lagarde ; JDI.1994.98,
note J.-B. Donnier ; GA, n° 82 : 64, 67, 70

653
-Cass. 1er civ., 20 décembre 1993 ; Dalico, JDI.1994.432, note E. Gaillard ; RCDIP.1994.663,
note P. Mayer ; Rev. arb.1994.116, note H. Gaudemet-Tallon ; RTD com.1994.254, obs. E.
Loquin : 550

1994
-Cass. 1er civ., 23 mars 1994, Hilmarton, Rev. arb.1994.327, note Ch. Jarrosson ;
JDI.1994.701, note E. Gaillard ; RCDIP.1995.359, note B. Oppetit ; RTD com. 1994.702, obs.
Dubarry et Loquin ; Petites Affiches, 9 août 1996, n°96, p. 15-25, note J. Ribs : 790, 791
-Cass.1er civ., 5 octobre 1994, Demart, RCDIP.1995.60, note D. Bureau : 67
-Cass. 1er civ., 29 novembre 1994, RCDIP.1995.362, note D. Cohen ; Bull. civ. 1994, I, n°
347 : 634
-Cass. com., 29 novembre 1994, Stolt Osprey, DMF.1995.209, obs. P. Bonassies : 563
-Cass. com., 29 novembre 1994, Nagasaki, DMF 1995.197 et 209, note et chr. P. Bonassies :
524

1995
-Cass. com., 10 janvier 1995, JDI.1996.141, obs. A. Huet ; RCDIP.1995.610, note H.
Gaudemet-Tallon : 524
-Cass. com., 8 juin 1995, n° 93-11446, Bull. IV, n° 170, p. 98 : 601
-Cass. com., 20 juin 1995, Rev. arb.1995.622 ; DMF.1994.53 : 563

1996
-Cass. 1er civ., 9 janvier 1996, RCDIP.1996.731, note H. Gaudemet-Tallon ; JDI.1997.173,
note A. Huet : 491
-Cass. com., 16 janvier 1996, Chang-Ping, DMF.1996.393, obs. P. Bonassies : 564
-Cass. 1er civ., 6 mars 1996, RTD com.1997.438, obs. E. Loquin ; Rev. arb.1997.69, note J.-J.
Arnaldez : 769
-Cass.1er civ., 11 juin 1996, Agora, RCDIP.1997.65, note Lagarde ; JDI.1996.941, note
Bureau : 64
-Cass. com., 15 octobre 1996, Köln Atlantic, DMF 1997.705, note P.-Y. Nicolas : 564

1997
-Cass.1er civ., 6 mai 1997, Sté Hannover International, RCDIP.1997.514, note B. Fauvarque-

654
Cosson ; JDI.1997.804, note D. Bureau ; JCP. (G) 1997, IV, 1326 ; GA, n° 84 : 68
-Cass. 1er civ., 21 mai 1997, Jaguar, 1er esp., RCDIP.1998.87, note V. Heuzé ; JDI.1998.969,
note S. Poillot-Peruzzetto ; RTD com.1998.330, obs. J.-C. Dubarry et E. Loquin ; 2e esp., Rev.
arb.1997.537, note E. Gaillard : 551, 559
-Cass.1er civ., 1er juillet 1997, Africatours, D. 1998.104, note Menjucq ; RCDIP.1998.292,
note H. Muir-Watt ; JDI.1998.98, note Barrière-Brousse ; J.C.P.1998.II.10170, note Fillion-
Dufouleur : 121, 124, 126
-Cass. com., 25 novembre 1997, RCDIP.1998.98, rapp. J.-P. Rémery ; DMF.1999.83, obs. P.
Bonassies : 524

1998
-Cass.1er civ., 27 janvier 1998, Ababou, JCP.1998.II.10098, note H. Muir Watt et Calberson :
67
-Cass. crim., 12 mai 1998, Comex, n° H9686, 479-2936, Bull. crim. n° 160 : 372
-Cass.1er civ., 24 novembre 1998, Lavazza, RCDIP.1999.88, 1er esp., note B. Ancel ; D.
1999.337, note Ph. Menjucq : 117
-Cass. com., 8 décembre 1998, Silver Sky, RCDIP.1999.536, note E. Pataut ; DMF.1999.1007,
rapp. J.-P. Rémery, note P.-Y. Nicolas : 524, 564

1999
-Cass. 1er civ., 5 janvier 1999, M. Zanzi, RCDIP.1999.546, note D. Bureau ; JDI.1999.784,
note S. Poillot-Perruzzeto ; Rev. arb.1999.260, note Ph. Fouchard ; RTD com.1999.380, obs.
E. Loquin : 581
-Cass. 1er civ., 16 février 1999, JCP (G) 1999, II, 10162, note B. Fillion-Dufouleur : 491
-Cass. soc. 16 février 1999, RCDIP.1999.745, 1er esp., note F. Jault-Seseke ; Rev.
arb.1999.290, 1er esp., note M.-A. Moreau ; Gaz. Pal. 2000.1.Somm.699, 1er esp., obs. M.-L.
Niboyet : 556
-Cass.com., 2 mars 1999, Sea Land, RCDIP.1999.305, rapport Rémery : 64, 67
-Cass. 1er civ., 16 mars 1999, Pordéa, JDI.1999.773, obs. A. Huet ; RCDIP.2000.181, note G.
Droz : 711
-Cass.1er civ., 16 mars 1999, Sté M. Moureau, RCDIP.1999.713, note H. Muir-Watt : 120
-Cass. soc., 4 mai 1999, n° 97-41.860, D. 1999.IR.140 ; RCDIP.1999.745, 2e esp. ; Rev.
arb.1999.290, 2e esp., note M.-A. Moreau ; Gaz. Pal. 2000.1.Somm.699, 2e esp : 556

655
-Cass. 1er civ., 26 mai 1999, Mutuelle du Mans, 1er esp., RCDIP.1999.707, note H. Muir-
Watt ; Gaz. Pal. 2000, n° 61, p. 39, obs. M.-L. Niboyet ; GA n° 77 : 79, 80
-Cass.1er civ., 26 mai 1999, Mme Elkhbizi, 2ème esp., RCDIP.1999.707, note H. Muir-Watt ;
JCP.1999.II.10192, note F. Mélin ; GA, n°78 : 65, 66, 79
-Cass.1er civ., 26 mai 1999, Sté Delta Draht GmbH, J.C.P.1999.IV.2324 ; Droit et patrimoine
1999, n°77, p.92, obs. F. Monéger : 68
-Cass. 1er civ., 22 juin 1999, RCDIP.2000.43, note Cuniberti : 418
-Cass. 1er civ., 19 octobre 1999, JDI.2000.328, note J-B. Racine ; RCDIP.2000.29, note P.
Lagarde : 320

2000
-Cass. 1er civ., 8 février 2000, Hoff, RCDIP.2001.148, 2e esp. note M.-E. Ancel ;
JDI.2001.133, 5e esp. obs. A. Huet ; D. 2002. som.com.1401, obs. B. Audit : 455
-Cass. 1er civ., 8 février 2000, Sté W. Grant, D. 2000.741, note G. Blanc ; Gaz. Pal. 1-3 oct.
2000, 2e esp., p. 25, note M.-L. Niboyet : 455
-Cass. 1er civ., 17 octobre 2000, Sté Barney’s Inc, JDI.2001.859, note Cuniberti ;
RCDIP.2001.121, note J.-P. Rémery et H. Muir Watt ; D. 2001.688, note J. Vallens : 629, 635
-Cass. 1er com., 28 novembre 2000, JDI.2001.511, note J.-M. Jacquet : 299

2001
-Cass.1er civ., 6 mars 2001, The Arab Investment, RCDIP.2001.335, note H. Muir-Watt ;
JDI.2002.171, note Raimon : 122
-Cass.1ère civ., 15 mai 2001, JDI.2001.1121, note A. Huet ; RCDIP.2002.86, note Lagarde ;
Gaz. Pal., 12-13 déc. 2001, p.33, note M.-L. Niboyet ; Revue Lamy Droit des affaires,
févr.2002, n°46, p. 5, note Kenfack : 248
-Cass. 1ère civ. 22 juin 2001, D. 2001.3607 (2e esp.), note Cl. Witz : 252
-Cass. 1er civ., 26 juin 2001, ABS, n° 99-17.120, Rev. arb.2001.529, note E. Gaillard ; RTD
com.2002.49, obs. E. Loquin ; DMF.2002.115 : 565, 581
-Cass. 1er civ., 12 juillet 2001, Bonastar II, D. 2001.3246, obs. Delebecque ; Gaz. Pal. 12-13
déc. 2001, note M. L. Niboyet ; RTD com. 2001, 1063, obs. Jacquet et Delebecque : 523, 526
-Cass. soc., 9 octobre 2001, D. 2001.IR.3170, obs. C. Dechristé ; Rev. arb.2002.347, note T.
Clay ; Dr. soc.2002.122, note M.-A. Moreau : 556
-Cass. 1er civ., 16 octobre 2001, Quarto Children, Rev. arb. 2002.919, note D. Cohen : 584

656
2002
-Cass.com., 5 février 2002, B. Jacob, pourvoi n° 97-20193, inédit : 69
-Cass. soc., 26 février 2002, pourvoi n° 99-42.573, arrêt n° 789 FS/D, inédit : 116
-Cass. soc., 28 février 2002, pourvoi n° 99-18389, Bull. soc.2002 : 116
-Cass.1er civ., 15 mai 2002, pourvoi n°00-17982, inédit : 116
-Cass.1er civ., 18 juin 2002, RCDIP.2003.86, note H. Muir-Watt ; JDI.2003.107, note H.
Peroz : 70
-Cass. com., 25 juin 2002, Bull. civ. IV, n° 111; DMF.2003.41, note Ph. Delebecque : 524
-Cass.1er civ., 18 septembre 2002, Sporting, RCDIP.2003.88, note H. Muir-Watt ;
JDI.2003.107, note Péroz : 58, 70
-Cass.1er civ., 18 septembre 2002, pourvoi n°98-14111, inédit : 116
-Cass. 1er civ., 22 octobre 2002, RCDIP.2003.86, note H. Muir-Watt ; JDI.2003.107, note H.
Peroz : 70

2003
-Cass.1er civ., 28 janvier 2003, Jaloc Associates, RCDIP.2003.462, note B. Ancel ; Droit et
patrimoine, 2003, p. 95, obs. F. Monéger : 69, 77
-Cass. 1er civ., 28 janvier 2003, JDI.2003.468, note J.-M. Jacquet ; RCDIP.2004.398, note H.
Muir Watt : 682
-Cass., com., 4 mars 2003, n° 01-01.046, RCDIP.2003.285, note P. Lagarde ; JDI.2004.197,
obs. A. Huet ; JCP (G) 2003.IV.1786 : 277, 523, 564
-Cass.com, 11 mars 2003, Banque Worms, pourvoi n° 00-15982, Gaz. Pal., 25 juin 2003, n°
176/177, p. 33 et la chron. M.-N. Jobard-Bachelier : 64, 93
-Cass. 1er civ., 3 juin 2003, Droit et patrimoine 10/2003 p. 95, obs. F. Monéger ;
JDI.2004.520, note F. Mélin ; Gaz.Pal. 16-18 nov. 2003 p.19, obs. M.-L. Niboyet : 116
-Cass.1er civ., 13 novembre 2003, RCDIP.2004.95, 1ère esp., note B. Ancel ; JDI.2004.520,
2ème esp., note F. Mélin : 97
-Cass. 1ère civ. 25 novembre 2003, D. 2004.494, note H. Kenfack ; JDI.2004.1179, note M.-E.
Ancel ; RCDIP.2004.102, note P. Lagarde : 248
-Cass. 1er civ., 9 décembre 2003, AXA Corporate Solutions Assurance c./ GAN,
RCDIP.2005.660, note E. Jeuland : 633
-Cass. 1er civ., 9 décembre 2003, Marmara, Bull.civ. I, n° 251 ; RDC.2004.769, obs. D.
Bureau : 79, 80

657
-Cass. 2e civ., 18 décembre 2003, SCI La Chartreuse et autres, D. 2004.IR.321 ; RTD
com.2004.255, note E. Loquin : 518

2004
-Cass. com, 14 janvier 2004, Rev. arb. 2004.591, note P. Ancel ; RJDA.2004.736 : 585
-Cass. soc., 21 janvier 2004, D. 2004.somm.2187, obs. M.-C. Escande-Varniol ;
RCDIP.2004.644, note F. Jault-Seseke : 483
-Cass. 1er civ., 30 mars 2004, Smith Barney, D. 2004.2458, note I. Najjar ; 2005.3050, note T.
Clay ; RTD com. 2004.447, obs. E. Loquin ; Rev. arb.2005.115, 1er esp., note X. Boucobza ;
JCP.2005.I.134, obs. C. Seraglini : 557, 560
-Cass. 1er civ., 30 mars 2004, n° 01-17.800, D. 2005.961, note J. Raynard, RJDA.2005.1171 :
588
-Cass. 1er civ., 27 avril 2004, Navire Estonia, JDI.2005.349, note O. Cachard ; RTD civ.
2004.770, obs. P. Thery ; Rev. arb.2006.851. V. aussi Cass. 1er civ., 4 juillet 2006, Sté
Recape : 586

2005
-Cass.1er civ., 11 janvier 2005, RLDC.2005.588 ; D. 2005.2924, note J.-G. Mahinga : 70
-Cass. soc., 23 mars 2005, RDC.2005.1181, note D. Bureau : 277
-Cass. 1er civ. 31 mai 2005, Pourcet, Bull.civ. I, n° 231 ; RCDIP.2005.465, obs. P. Lagarde ;
D. 2006, p. 1496, obs. P. Courbe et F. Jault-Seseke ; RDC.2005.1185, obs. D. Bureau : 80
-Cass.1er civ., 14 juin 2005, Bull. civ. I, n° 244 : 336
-Cass. soc., 28 juin 2005, n° 03-45.042, D. 2005.2035, obs. T. Clay ; JCP.2005.I.179, obs. J.
Béguin : 556
-Cass.1er civ., 28 juin 2005, Aubin, RCDIP.2005.645, note B. Ancel et H. Muir-Watt ; Petites
affiches, 28 décembre 2005, n° 258, p. 16-23, note J.-G. Mahinga : 70, 98
-Cass.com., 28 juin 2005, Itraco, RCDIP.2005.645, note B. Ancel et H. Muir-Watt ; Petites
affiches, 28 décembre 2005, n° 258, p. 16-23, note J.-G. Mahinga : 70, 98
-Cass. 1er civ., 6 juillet 2005, n° 04-10.456, RJDA.2005 : 588
-Cass. 1er civ., 4 octobre 2005, Keller, D., 2006, p. 1501, note F. Jault-Seseke ;
RCDIP.2006.413, note B. Audit ; JDI.2006.169, note J-M Jacquet ; Gaz. Pal. 24-25 mai
2006, p. 24, note M.-L. Niboyet : 489

658
-Cass. com., 4 octobre 2005, RCDIP.2006.405, note H. Muir Watt ; JDI.2006.601, note G.
Cuniberti ; D. 2006.2449, note J. Sagot-Duvauroux ; RTD com.2006.247, obs. Ph.
Delebecque ; Gaz. Pal. n° spécial, Contentieux judiciaire international et européen, 24-25
févr. 2006, p. 26, note M.-L. Niboyet : 667, 659
-Cass. 1er civ., 25 octobre 2005, n° 02-13.252, D. 2005.3050, obs. Th. Clay et 2006.199, avis
J. Sainte-Rose ; JDI.2006.937, note F.-X. Train ; Rev. arb.2006.103, note J.-B. Racine : 550
-Cass. 1er civ., 22 novembre 2005, Lindos, n° 03-10.087, RCDIP.2006.606, 1er esp., note F.
Jault-Seseke ; JDI.2006.622, 1er esp., note C. Legros ; JCP.2006.II.10046, note C. Humann ;
DMF.2006.16, obs. P. Bonassies : 566
-Cass. 1er civ., 22 novembre 2005, M. L. Looky, RCDIP.2006.422, note P. Callé : 633
-Cass.1er civ., 6 décembre 2005, Bull.civ. 2005 I, n° 468 p. 395 ; D. 2006.98 : 337

2006
-Cass. com. 21 février 2006, Navire Pella, RCDIP.2006.606, 2e esp., note F. Jault-Seseke ;
JDI.2006.622, 2e esp., note C. Legros ; DMF.2006.379 : 568, 581
-Cass. soc., 10 mai 2006, n° 03-46.593, D. 2006.IR.1400 ; RCDIP.2006.856, note E. Pataut et
P. Hammje ; JCP.2006.II.10121, note S. Bollée ; RDC.2006.1260, note Deumier : 335
-Cass. 1er civ., 23 mai 2006, Prieur, RCDIP.2006.870, note H. Gaudemet-Tallon ; D.
2006.1846, chron. B. Audit ; D. 2006.1880, obs. Gallmeister ; JDI.2006.1377, obs. Chalas ;
Petites Affiches, 22 septembre 2006, p. 10, note P. Courbe ; Gaz. Pal. 28 avril 2007, p. 21,
obs. M.-L. Niboyet ; JCP.2006.II.10134, note Callé ; GA n° 87 : 441, 677, 679, 689
-Cass. 1er civ., 7 juin 2006, n° 04-14.960, Samse, RTD com.2007.264, Ph. Delebecque ; JCP
(G) 2006.IV.2453 ; Procédures 2007, comm. 136, note C. Nourissat : 491
-Cass. 1er civ., 7 juin 2006, n° 03-12.034, Sté ABS, D. 2006.IR.1701, obs. Avena-Robardet ;
D. 2006.Panor.3028, obs. T. Clay ; JDI.2006.1384, note A. Mourre ; Rev. arb.2006.945, note
E. Gaillard ; ibid. 2006.893, obs. O. Cachard, JCP (G) 2006.I.187, obs. C. Seraglini : 584,
588
-Cass. 2e civ., 7 juin 2006, n° 04.20316, D.2006.1841 ; RTD.civ.2007.174, obs. Ph. Théry :
438
-Cass. 1er civ., 20 juin 2006, n° 03-14.553, RCDIP.2007.164, note J.-P. Rémery ; D.
2006.1843 ; RTD civ. 2007.172, obs. P. Thery : 713
-Cass. 1er civ., 20 juin 2006, pourvoi n° 05-14.281, D. 2007.1710, note P. Courbe ;
RCDIP.2007.383, note B. Ancel ; AJ fam. 2006. 376, obs. Boiché : 79, 85

659
-Cass. 1er civ., 4 juillet 2006, Enfant Viola, RCDIP.2007.413 (la condition de conformité
conflictuelle) : 682
-Cass. A.P., 7 juillet 2006, D. 2006.2135, note L. Weiller ; JCP.2007.II.10070, note G.
Wiederkehr : 773
-Cass. 1er civ., 11 juillet 2006, Winslow Bank and Trust Company, D. 2006.IR.2211 ;
RCDIP.2007.414, note H. Muir Watt ; JDI.2007.554, note E. Fohrer-Dedeurwaerder ;
D.2007.1757, obs. P. Courbe et F. Jault-Seseke : 657
-Cass. 1er civ. 11 juillet 2006, Andhika, n° 03-19.838, JDI.2008.146, obs. S. Sana-Chaillé de
Néré ; RJDA.2006.1109, note N. Bouche : 582, 587, 588
-Cass. 1er civ., 11 juillet 2006, Navire Turicia, n° 05-18.681, RTD com. 2006.947, note Ph.
Delebecque ; RCDIP.2007.128, note F. Jault-Seseke : 568
-Cass. 1er civ., 3 octobre 2006, D. 2006.IR.2548 ; RDC.2007.474, obs. P. Deumier ; JCP
(G).2007.II.132, note V. Egéa et D. Martel ; RTD com. 2007.267, note Ph. Delebecque : 448
-Cass. 2e civ., 12 octobre 2006, Sté Motokov France, D. 2006.IR.2627, Pan. 3026, obs. T.
Clay ; RTD civ. 2007.183, obs. R. Perrot ; JCP.2007.I.139 : 782
-Cass. 1er civ., 30 octobre 2006. n° 04-10.201, Bull. 2006.I, n° 440, p. 376 : 755
-Cass. 1er civ., 12 décembre 2006, n° 05-21.388 : 490
-Cass. com., 19 décembre 2006, D., 2007, Pan. 1751, obs. P. Courbe, Pan. 2562, obs. L.
d’Avout et S. Bollée ; D., 2008, Pan. 1240, obs. H. Kenfack ; RCDIP.2007.592, note P.
Lagarde ; RDC.2007.467, obs. P. Deumier ; RTD com. 2007.628, obs. P. Delebecque : 276

2007
-Cass. 1ère civ. 23 janvier 2007, D., 2007, p.1575, note H. Kenfack ; ibid. 2007.AJ 511, obs. E.
Chevrier ; RDC.2007.887, obs. P. Deumier ; RCDIP.2008.661, 1er esp. ; JDI.2008.521, 1er
esp., note J.-M. Jacquet ; Gaz. Pal. 29 avril-3 mai, n°119-123, p. 23, note M.-L. Niboyet :
248, 449
-Cass. 2e civ., 14 février 2007, JDI.2007.934, note B. Bourdelois. Contra. S. Gressot-Leger,
op.cit., p. 782 : 682
-Cass. 1er civ., 20 février 2007, Cornelissen, n° 05-14.082 ; D. 2007.1115, note L. d’Avout et
S. Bollée ; RCDIP.2007.420, note B. Ancel et H. Muir Watt : 684, 687, 689
-Cass. 1er civ., 6 mars 2007, n° 06-10946, D. 2007.951, obs. E. Chevrier : 513
-Cass. 1er civ., 29 juin 2007, Rena Holding, RTD com. 2007.682, note E. Loquin : 792

660
-Cass. 1er civ., 4 juillet 2007, n° 05-16.586 et n° 05-16.605, D. 2007.AJ.2025, obs. X.
Delpech ; Rev. arb.2007.805, note S. Bollée ; JCP.2007.I.216, obs. J. Ortscheidt ; D. 2008.
451, obs. T. Clay : 782

2008
-Cass. com., 22 janvier 2008, n° 06-18.822 (non publiée au Bulletin) : 80
-Cass. 1er civ., 5 mars 2008, RCDIP.2008.661, 3e esp. ; JDI.2008.521, 4e esp., note J.-M.
Jacquet ; D. 2008. AJ 858, obs. X. Delpech ; jp. 1729, 2e esp., note H. Kenfack : 449
-Cass. 1er civ., 28 mai 2008, Sté Prodim, n° 07-13.266, D. 2008. AJ 1629, obs. X. Delpech ;
Rev. arb. 2008.461, note L. Weiller ; RTD civ.2008.551, obs. R. Perrot; JCP.2008.II.10170,
note G. Bolard ; RTD com.2010.535, note E. Loquin : 772
-Cass. 1er civ., 4 juin 2008, Société SNF SAS, JDI.2008.1107, note A. Mourre ; Rev.
arb.2008.473, note I. Fadlallah ; Gaz. Pal. 20-21 févr. 2009, p. 32, note F.-X. Train : 736
-Cass. 1er civ., 22 octobre 2008, n° 07-18744, D. 2009. 200 : 553
-Cass. 1er civ., 22 octobre 2008, Monster Cable, n° 07-15823, D. 2008. AJ. 2790, obs.
I. Gallmeister, Pan. 1557, obs. P. Courbe et F. Jault-Seseke ; D. 2009.2384, note L. d’Avout
et S. Bollée ; RCDIP.2009.69, chron. D. Bureau et H. Muir Watt ; RDC.2009.691, note E.
Treppoz : 553
-Cass. com., 16 décembre 2008 et Cass. 1er civ., 16 décembre 2008, D. 2009.AJ.89, obs. X.
Delpech ; Panor.1565, obs. F. Jault-Seseke ; RCDIP.2009.524, note F. Jault-Seseke ;
RDC.2009.1193, obs. J.-B. Racine; JCP 2009.II.10060, note H. Kenfack; Gaz. Pal. 20-21 fév.
2009, p. 46, note Ph. Guez : 526, 569

2009
-Cass. 1er civ., 22 janv. 2009, Société Gueydon et autres c./ M. de Groot et autres,
RCDIP.2009.533, note H. Muir Watt ; RDAI.2009.613 : 658
-Cass. 1er civ., 11 février 2009, La lettre Omnidroit, le 20 février 2009 : 79
-Cass. com., 10 mars 2009, D., AJ, 23 mars 2009, obs. X. Delpech : 482
-Cass. 1er civ., 11 mars 2009, Société Suédoise Trioplast, n° 08-12.149, D. 2009. 880, obs. T.
Clay : 736
-Cass. 2e civ., 30 avril 2009, Sté The Boeing Company, JCP (G) 2009, n° 31, p. 19-22, note
M. Attal : 413

661
-Cass. 1er civ., 30 septembre 2009, Saudi Basic Industries Corporation, n° 08-17.587, D.
2009.2419, obs. I. Gallmeister ; D. 2009. AJ 2432, obs. X. Delpech ; D. 2010. Jur. 58, note B.
Audit ; RCDIP.2010.133, 1er esp., note H. Gaudemet –Tallon ; RTD com.2010.460, obs. Ph.
Delebecque : 510
-Cass. civ. 1er, 14 octobre 2009, In Zone Brands Inc, RCDIP.2010.158, note H. Muir Watt ;
D., 2010, n° 3, note S. Bollée ; JCP (G) 2009, n° 46, p. 416, obs. E. Cornut ; JCP (G) 2009,
n° 49, p. 505, note C. Legros ; Gaz. Pal. 28 nov. 2009, p. 332, note M.-L. Niboyet : 415

2010-2011
-Cass. 1er civ., 17 février 2010, D., 2010, Actualité 23 février 2010, obs. X. Delpech ; JCP (G)
2010, n° 16, p. 440, note Ch. Bruneau : 491
-Cass. 1er civ., 3 mars 2010, n° 09-13.723, D.2010.709, obs. I. Gallmeister : 66, 70
-Cass. com., 16 mars 2010, Sté Ap Moller Maersk A/S, n° 08-21.511, D. 2010.824, ibid. 2323,
obs. L. d’Avout et S. Bollée ; RTD. com. 2010.457, obs. P. Delebecque ; JCP.2010.530, note
D. Bureau et L. d’Avout ; RDC.2010.1385, note P. Deumier : 303, 306
-Cass. 1er civ., 8 juillet 2010, n° 07-17.788, D. 2010.Panor.2323 ; D. 2010.AJ 19 juillet 2010,
obs. X. Delpech : 514, 516
-Cass. 1er civ., 8 juillet 2010, Sté Doga c/ Sté HTC, n° 09-67.013, D. 2010. 1797 ; Gaz.
Pal.2010, n° 243, p. 16-18, obs. G. Bertrou et O. Attias : 553
-Cass. com., 13 juillet 2010, Transbidasoa, D. 2010. 2339, obs. X. Delpech, note V. Da
Silva ; ibid. 2323, obs. L. d’Avout et S. Bollée ; RTD. com. 2010.779, note B. Bouloc ; JCP
(G) 2010, n° 40, p. 972, note D. Bureau et L. d’Avout ; JDI.2011.91, note F. Jault-Seseke :
329
-Cass. 1er civ., 4 novembre 2010, n° 09-15.302, RTD civ. 2011, p. 115, note J. Hauser : 684
-Cass. 1er civ., 26 janvier 2011, n° 09-10.198, D. 2011.AJ. 28 janv. 2011, comm X. Delpech :
542, 727

Cour d’appel

1900-1970
-Rennes, 26 juillet 1926, Société Muller, DH 1926, p. 53 ; Gaz. Pal. 1927, 1, p. 59 ;
RDIP.1927.523, note J.-P. Niboyet : 374

662
-Paris, 24 avril 1940, Messageries Maritimes, S. 1942, p. 29, note Niboyet : 137
-Aix, 13 juillet 1948, Franc C.F.A., RCDIP.1949.332, note Batiffol et Dehove : 221
-Paris, 10 avril 1957, Myrtoon Steamship, JCP.1957.II.10078, note H. Motulsky ; D.
1958.699, note J. Robert ; RCDIP.1958.120, note Y. Loussouarn ; JDI.1958.1002, note B.
Goldman : 539
-Paris, 4 février 1958, RCDIP.1958.389, note H. B. ; JDI.1958.1016, note Ponsard ;
JCP.1958.II.10612, note Francescakis : 675
-Paris, 18 juin 1964, Gunzburg, RCDIP.1967.340, note J. Deprez ; JDI.1964.810, note J.-D.
Bredin : 378, 397

1971-1990
-Paris, 6 juillet 1971, Rev. arb.1971.119 : 761
-Paris, 13 décembre 1975, RCDIP.1976.506, note B. Oppetit ; JDI.1977.107, note E. Loquin ;
Rev. arb.1977.147, note Ph. Fouchard : 550
-Paris, 12 juin 1980, Fougerolles, Rev. arb. 1981, p.292, 2e esp., note Couchez ;
JDI.1982.931, 2e esp., note B. Oppetit : 182
-Paris, 14 février 1985, Rev. arb.1987.325, note Level : 591
-Paris 19 décembre 1985, RCDIP.1986.680, note M. Simon-Depitre : 95
-Paris, 18 février 1986, Rev. arb.1986.583, note G. Flécheux : 750
-Paris, 13 janvier 1988, DMF.1988.395 : 564
-Versailles, 2 juin 1988, deux arrêts, JDI.1990.147, obs. A. Huet : 455
-Paris, 13 juillet 1989, Valenciana, RCDIP.1990.305, note B. Oppetit ; JDI.1990.430, note B.
Goldman : 182
-Paris, 22 novembre 1990, Banque Internationale de l’Afrique Occidentale, D. 1992.169, obs.
B. Audit : 682, 685

1991-2000
-Versailles, 6 février 1991, D. 1992.174, note J.-D. Mondoloni ; RCDIP.1991.745, note P.
Lagarde ; RTD civ. 1992. 387, obs. J. Mestre ; RTD eur. 1992. 529, ons. H. Gaudemet-
Tallon ; JDI.1992.125, note J. Foyer : 277
-Paris, 22 mai 1991, D. 1992.164, obs. B. Audit : 455
-Aix-en-Provence, 10 décembre 1992, DMF.1994.53 : 564
-Rouen, 14 octobre 1993, DMF.1994.381 : 564

663
-Paris, 24 mars 1994, Rev. arb.1994.515 : 591
-Paris, 25 mars 1994, Sardisud, Rev. arb.1994.391, note Ch. Jarrosson : 720
-Paris, 14 juin 1995, D. 1996.somm.170, obs. B. Audit : 486
-Paris, 13 septembre 1995, JDI.1997.170, obs. A. Huet : 455
-Paris, 13 décembre 1995, JCP.1997.II.22772, note P. de Vareilles-Sommières : 252
-Grenoble, 24 janvier 1996, JDI.1997.115, note Ph. Kahn ; Rev. arb. 1997.87 : 197
-Paris, 13 juin 1996, JDI.1997.51, note E. Loquin : 559
-Grenoble, 23 octobre 1996, Sté Teso Ten Elsen GmbH COKG, JDI.1998.125, obs. Huet :
197, 252
-Paris, 21 mai 1997, JDI.1998.133, obs. A. Huet : 455
-Paris, 1er juillet 1997, Compagnie minière de l’Ogooué, Rev. arb.1998.131, note D. Hascher :
534
-Paris, 5 mars 1998, Sté Mixte Franco-Kazakh CISTM, Rev. arb.1999.86 : 197
-Paris, 12 octobre 2000, D. 2002.som.1394, obs. B. Audit : 277

2001-2011
-Paris, 12 décembre 2001, SCI La Chartreuse et autres, RTD com.2002.659 : 518
-Paris, 17 janvier 2002, Hugon, Rev. arb.2002.391, note J.-B. Racine ; RTD com.2003.63 :
534
-Paris, 11 avril 2002, SA Kiabi, Rev. arb.2002.781 : 534
-Paris, 26 septembre 2002, Melnik, Rev. arb.2002.1049 : 764
-Rouen, 8 octobre 2002, Walka Mlodych, DMF.2003.547, obs. Y. Tassel : 563
-Paris, 16 janvier 2003, Société Keen Loyd Resources Limited c/ Société national d’opérations
pétrolières de la Côte d’Ivoire, RTD com. n°3-2003, p. 487 : 173
-Paris, 29 avril 2003, SA Impregilo c/ Secrétariat aux communications et transports maritimes
de la Jamahiriya Lybienne populaire et socialiste, RTD com. n°3-2003, p. 487 : 173
-Paris, 12 juin 2003, D. 2003, note S.D ; AJ Famille 2004, p. 24 : 418
-Paris, 7 octobre 2004, Otor, JDI.2005.341, note A. Mourre ; Rev. arb.2005.737, note E.
Jeuland ; JCP 2005.II.10071, note J.-M. Jacquet : 620, 763
-Paris, 18 novembre 2004, GIE Euromissile, Rev. arb.2005.751: 772
-Paris, 6 mars 2008, Sté The Boeing Company, D. 2008.AJ.852, obs. I. Gallmeister ; ibid., p.
1452, note P. Courbe ; Gaz. Pal. 2009, n° 51-52, p. 48-50, note M.-L. Niboyet : 413
-Aix-en-Provence, 29 mai 2008, Gimoka SRL, n° 07-16.801 : 553

664
-Rouen, 25 septembre 2008, Mutuelles du Mans IARD, n° 08-01001, DMF.2008.1011, note P.
Bonassies : 491, 524, 527
-Paris, 13 novembre 2008, INSERM, D .2009.Chron.2390, obs. S. Bollée et 2962, obs. T.
Clay ; Rev. arb.2009.389, note M. Audit : 542, 727
-Paris, ch. 25B, 23 janvier 2009, Carbon Impact Inc., n° 06.09031 : 519
-Paris, 28 avril 2010, Vivendi, D. 2010.1224, obs. X. Delpech ; ibid., p. 2323, note L. d’Avout
et S. Bollée ; D. 2011.265, obs. N. Fricero ; RTD com.2010.753, note N. Rontchevsky : 405
-Paris, Pôle 1, ch. 4, 18 juin 2010, n° 09-223.47, SA Aegean Marine Petroleum, Gaz. Pal. 7-9
nov. 2010, p. 13, note D. Bensaude : 603
-Paris, Pôle 1, ch. 1, 9 septembre 2010, Marriott International Hotels Inc. c/ Jnah
Development SA, Gaz. Pal., 8 février 2011, n° 39, p. 11 : 773

Premier degré

-Trib. Seine, 2e Ch., 6 juillet 1935, des Phosphates de Constantine, RCDIP.1936.771, note H.
Solus : 373
-Trib. Seine, 14 mai 1962, de Gunzburg, D. 1962.653, note Ph. Malaurie : 395
-TGI Paris, 4 mars 1981, Norsolor, JDI. JDI.1981.836, note Ph. Kahn ; JDI.1981.922, obs. Y.
Derains ; Rev. arb.1983.465 : 182, 183
-Trib. com. Nanterre, 5e ch., 5 septembre 2001, Sté Technip France, Rev. arb.2002.455, note
D. Bureau : 766
-TGI Strasbourg, 13 septembre 2001, Hypotheken Bank Hamburg, D. 2002.2933, obs. J.
Franck : 329
-TGI Paris, 13 janvier 2010, Vivendi, n° RG 09/15408, D. AJ, 3 février 2010, obs. X.
Delpech : 405

Juridictions administratives

Conseil d’État

-CE, 6 mars 1986, GACE, D., 2008, n° 12, obs. D. Labetoulle : 543
-CE, 3 mars 1989, Sté AREA, Lebon 69, concl. E. Guillaume : 739

665
Tribunal des conflits

-Trib. confl., 19 mai 1958, Rev. arb.1961.116 ; AJDA.1958.449 : 539


-Trib. confl., 8 juillet 1963, Société Entreprise Peyrot, Rec. Lebon, p. 787 : 733
-Trib. confl., 24 avril 2006, SCP de médecins Reichheld et Sturtzer, req. n° 3480,
AJDA.2006.2456, concl. D. Chauvaux : 731
-Trib. confl., 16 octobre 2006, Caisse Centrale de réassurance, AJDA.2006.2382, note C.
Landais et F. Lenica ; RFDA.2007.284, concl. J.-H. Stahl, note B. Delaunay : 731
-Trib. confl., 17 mai 2010, req. n° 3754, AJDA.2010.1047 ; D. 2010. AJ.1359, obs. X.
Delpech ; ibid. 2010. Jur.2633, note Lemaire ; JCP, 24 mai 2010, n°552, obs. T. Clay et
n°585, obs. E. Gaillard ; Rev. arb.2010.275, note M. Audit : 727

VII. Pays Bas


Hoge Raad, 13 mai 1966, Alnati, RCDIP.1967.522, note Struycken : 302

VIII. Suisse
Trib. Féd. Suisse 18 janvier 1996, D. 1997, som. com. 224, obs. Cl. Witz : 252

IX. Thaïlande
En Thaïlande, on cite les décisions des tribunaux uniquement par le nom de la juridiction,
l’année et le numéro de l’affaire, mais ne nomment pas le nom des parties en litige. Les
auteurs ne font pas référence aux bibliographies pour la bonne raison que seule la Cour Dika
publie ces décisions dans son Journal officiel. Par ailleurs le RCDIP ou JDI ne sont guère très
évolués, pour ne pas dire ignorés dans ce pays. Toutefois, on peut quand même trouver dans
les périodiques les commentaires des auteurs sur certaines décisions importantes, notamment
dans deux revues qui publient certaines décisions Dika. Mais ces revues méritent-elles d’être
appelées « Revue critique » ? Leur publication étant uniquement destinée aux étudiants qui
préparent leurs concours pour devenir juges. Il est à noter également que l’on ne publie pas
les décisions des juridictions d’appel. Quant au TCPICI, tribunal de première instance, qui
publie lui-même son périodique, là on peut trouver la référence détaillée mais uniquement
pour certaines décisions sélectionnées.

666
Juridictions judiciaires.

Cour suprême Dika

1930-1950
Dika, n° 585/2461 (1918) ; Dika, n° 530/2468 (1925) ; Dika, n° 934/2476 (1933) ; Dika, n°
804/2490 (1947).

1951-1970
Dika, n° 2122/2499 (1956) ; Dika, n° 1957/2500 (1957) ; Dika, n° 1318/2513 (1970).

1971-1990
Dika, n° 2490/2518 (1975) ; Dika, n° 2930/2519 (1976) ; Dika, n° 520/2520 (1977) ;
Dika, n° 2061/2520 (1977) ; Dika, n° 2357/2520 (1977) ; Dika, n° 698/2521 (1978) ;
Dika, n° 918/2521 (1978) ; Dika, n° 2690/2522 (1979) ; Dika, n° 1282/2524 (1981) ; Dika, n°
775/2525 (1982) ; Dika, n° 3223/2525 (1982) ; Dika, n° 3843/2526 (1983) ; Dika, n°
284/2526 (1983) ; Dika, n° 1284/2526 (1983) ; Dika, n° 1950/2529 (1986) ; Dika, n°
3401/2529 (1986) ; Dika, n° 3848/2531 (1988) ; Dika n° 563/2532 (1989) ; Dika, n°
2465/2532 (1989) ; Dika, n° 2466/2532 (1989) ; Dika, n° 2768/2532 (1989) ; Dika, n°
2602/2533 (1990).

1991-2000
Dika, n° 611/2535 (1992) ; Dika, n° 7350/2537 (1994) ; Dika, n° 1645/2538 (1995) ;
Dika, n° 951/2539 (1996) ; Dika, n° 5809/2539 (1996) ; Dika, n° 9083/2539 (1996) ; Dika, n°
447/2540 (1997) ; Dika, n° 5513/2540 (1997) ; Dika, n° 6437/2541 (1998) ; Dika, n°
4752/2541 (1998) ; Dika, n° 4580/2542 (1999) ; Dika, n° 5477/2542 (1999) ; Dika, n°
147/2543 (2000) ; Dika n° 3794/2543 (2000) ; Dika n° 3812/2543 (2000) ; Dika n° 5133/2543
(2000) ; Dika, n° 6933/2543 (2000).

2001-2011
Dika, n° 2668/2544 (2001) ; Dika, n° 9524/2544 (2001) ; Dika, n° 6565/2544 (2001) ; Dika,
n° 456/2545 (2002) ; Dika, n° 457/2545 (2002) ; Dika, n° 1584/2545 (2002) ; Dika, n°
3425/2545 (2002) ; Dika, n° 3712/2545 (2002) ; Dika, n° 3993/2545 (2002) ; Dika, n°

667
4027/2545 (2002) ; Dika, n° 1646/2546 (2003) ; Dika, n° 3537/2546 (2003) ; Dika, n°
9086/2546 (2003) ; Dika, n° 1958/2548 (2005) ; Dika, n° 7655/2548 (2005) ; Dika, n°
3882/2549 (2006) ; Dika, n° 772/2550 (2007) ; Dika, n° 8627/2550 (2007) ; Dika, A.P.,
11102/2551 (2007) ; Dika n° 5444/2551 (2008).

Tribunal du travail.

Tribunal du travail, n° 3223/2525 (1982), Fred Lee Kenner c/ Parker Drealing Co. Ltd.

Tribunal central de propriété intellectuelle et de commerce international.

-TCPICI, com. n° 107/2542 (1999)


-TCPICI, com. n° 163/2542 (1999)
-TCPICI, com. n° 190, 191/2543 (2000)
-TCPICI, com. n° 271/2543 (2000)
-TCPICI, com. n° 283/2543 (2000), Craftsmen Pacific Co.Ltd. c/ Rukshansa Co.Ltd.
-TCPICI, com. n° 284/2543 (2000), Bangkok Bank c/ Viboolthani Tower.
-TCPICI, com. n° 323/2543 (2000)
-TCPICI, com. n° 219/2546 (2003)
-TCPICI, com. n° 87/2551 (2008)
-TCPICI, com. n° 91/2551 (2008), Acanay Insurance c/ Federal Express.

Juridictions administratives.

Cour administrative suprême.

-Cour administrative suprême, Ordonnance n° 487/2548 (2005), 24 août 2005.


-Cour administrative suprême, Ordonnance n° 920/2548 (2005), 29 décembre 2005.
-Cour administrative suprême, Ordonnance n° 510/2549 (2006), 25 août 2006.

668
III.
Sentence arbitrale internationale

Chambre de commerce internationale

Sentences rendues dans les affaires :


-CCI n°1434 (1975), JDI.1976.978, obs. Y. Derains : 351
-CCI n°3344 (1981), JDI.1982.978, obs. Y. Derains : 351
-CCI n°3913 (1981), extrait cité par Y. Derains, JDI.1984.920 : 350
-CCI n°2730 (1982), JDI.1984.914., obs. Y. Derains : 350
-CCI n°3916 (1982), JDI.1984.930, obs. S. Jarvin : 350
-CCI n°4761 (1984), JDI.1986.1137, obs. S. Jarvin : 357
-CCI n°5953 (1988), Rev. arb. 1990, p.702 ; JDI.1990.1056, obs. Y. Derains : 182
-CCI n°8891 (1998), JDI.2000.1076, obs. D. Hascher : 350
-CCI n°9029 (1998), Bull. CCI. 1999, vol. 10/2, p.91: 196
-CCI n° 7110 (1999), Bull. CCI. 1999, vol. 10/2, p. 51 : 193

Autres sentences arbitrales

-CIRDI, n° 233 (1993), JDI.1994.229. obs. E. Gaillard : 156


-CIRDI, 25 September 2006, World Duty Free v. Kenya, case ARB/00/7, § 157 : 347
-Aramco c/ Arabie Saoudite, 23 août 1958, RCDIP.1963.272 ; AFDI.1961.300, note S.
Bastid : 145
-Aminoil c/ Koweït, 24 mars 1982, JDI.1982.869, note Ph. Kahn ; AFDI.1982.454, note G.
Burdeau : 146

669
670
TABLE DES FIGURES
(les chiffres renvoient aux numéros de paragraphe)

Figure 1 : Domaines du droit étranger les plus couramment appliqués par ou invoqués devant
les autorités judiciaires : 102
Figure 2 : La référence aux Principes UNIDROIT, 1994-2010 : 198
Figure 3 : Statistique de la loi choisie par des parties devant la Cour internationale d’arbitrage
de la CCI, 2003 – 2009 : 189

671
672
INDEX ALPHABETIQUE
(les chiffres renvoient aux numéros de paragraphe,
les chiffres en caractère gras et italique indiquent que le mot indexé se trouve en note en bas de page)

A - effet négatif : 764 s.

Abus de droit : 364, 406 s. - effet positif : 766

Accord procédural : 61, 63 - notion : 761 s.

Actor sequitur forum rei : 437, 459 - en droit thaï : 767

American Trading : 216, 219, 249 Autorité de chose jugée : 626, 648 s.

Aminoil : 146 - en droit thaï : 652 s.

Andhika Lines : 582, 587 s. - et effet de fait : 658 s.

Anti-suit injunction
- et forum shopping : 415 s. B
- et l’arbitrage : 516 s. Banque Worms : 93
- et compétence-compétence : 592 s. Bauffremont : 369, 387
- notion : 415 Bisbal : 56, 61, 78
Aramco : 145
Arbitrabilité : 539 s., 544 s. C
Arbitrage international
Chinoise (loi 2011) : 254
- concentration des moyens et des
Class action
demandes : 768 s.
- et la CEDH : 405
- mesures provisoires et conservatoires
- notion : 402
- en droit thaï : 610 s.
- ordre public international : 405
- en droit français : 599 s.
- et arbitre : 598
Clause attributive de juridiction
- et juge étatique : 600 s.
- acceptation tacite : 481 s., 490
- et Loi type de CNUDCI : 608
- admission en droit thaï
Arblade : 298
- contrat de transports combinés :
Attributs de jugement étranger : 627, 646 s.
499
Autonomie de la clause d’arbitrage : 547 s.
- conditions de la mise en œuvre : 480
Autonomie de la volonté : 16 s.
- effets de : 508 s., 520
Autorité de chose arbitrée
- et anti-suit injunction : 415
- concentration des moyens et des
- et clause d’arbitrage : 518
demandes : 768 s., 774
- et contrat de transport maritime : 490

673
- et les tiers : 522 s. - existence de bien du défendeur :
- et lois de police : 520 465
- et parties faibles (droit commun) : 483 s. - prorogation volontaire
- et parties faibles (droit communautaire) : - clause de : 479 s., 516
487 s., 501 s., 506 s. - comparution volontaire : 506,
Clause d’arbitrage 511, 513, 633
- autonomie de : 547 s. - Règlement Rome I
- et consommateur : 557 s. - compétence générale : 451 s.
- et contrat administratif international thaï : - compétence spéciale : 448 s.
543 s. Compétence législative indirecte (non
- et les tiers : 566 s. contrôle de) : 682 s., 704 s., 708 s.
- et lois de police : 553 Consommateur
- et protection de parties faibles en - art. 5 du Règlement Rome I : 253
Thaïlande : 561 - et clause attributive de juridiction : 484,
- et travailleur : 555 s. 487 s., 501 s., 506.
- opposabilité : 562 s. - et clause d’arbitrage : 557 s.
- contrat charte-partie : 567 - lois de police thaïes : 319 s.
- validité de : 537 s. Contrat international
Compétence de la compétence - caractère d’extranéité : 12 s.
- admission de - notion : 11
- en droit français : 581 s. Contrat sans loi
- en droit thaï : 576 s. - et arbitrage international : 142 s.
- contrôle par le juge : 589 - et contrat d’État : 145 s.
- effet négatif : 584 s. - et lex mercatoria : 138 s.
- et anti-suit injunction : 592 s. - et ordre juridique transnational : 137 s.
- principe de : 576 s. - notion : 136
Compétence juridictionnelle Convention de Bruxelles du 27 septembre
- compétence exclusive : 480 s., 493 s., 1968/Règlement Bruxelles I : 418, 443 s.,
501 s., 509 s., 513, 521, 677 s. 487 s., 702 s., 707 s., 710 s.
- compétence exorbitante : 429 s. Convention de La Haye
- en droit thaï - du 15 juin 1955 sur la loi applicable aux
- domicile de partie : 459 ventes à caractère international d’objets
- lieu de naissance du litige : 462 mobiliers corporels : 25

672
- du 22 décembre 1986 relative à la loi - et la convention internationale : 30
applicable aux contrats de vente - et la Cour de justice de l’Union
internationale de marchandises : 30 européenne : 31
- du 30 juin 2005 sur les accords d’élection Dika n° 585/2461 : 644 s., 695 s.
de for : 476 Droit international
Convention de Londres dans le domaine de - application : 37 s.
l’information sur le droit étranger : 101 s.
Convention de Lugano concernant la E
compétence judiciaire et l’exécution des Élément d’extranéité v. Contrat
décisions en matière civile et international
commerciale : 443, 662 Effet atténué de l’exception d’ordre public
Convention de Rome/Règlement Rome I international v. Ordre public
sur la loi applicable aux obligations Efficacité substantielle v. Jugement
contractuelle : 20, 30, 154 s., 203 s., 225, étranger
232, 238, 242 s., 254 s., 261 s., 272 s., 278 Exception d’ordre public v. Ordre public
Convention de sauvegarde des Droits de Exequatur
l’Homme et des libertés fondamentales : - jugement étranger
692, 711 - conditions de : 674 s., 688 s., 695
Convention de Vienne sur les contrats de s., 703 s., 710 s.
vente internationale de marchandises : 38, - effets : 656 s.
176, 252, 453 - notion : 625 s.
Cornelissen : 684 s., 689 - révision au fond (interdiction de) :
707
D - suppression (droit communautaire) : 715

Dénaturation (de la loi étrangère) : 122 s., s.

127 s. - sentence arbitrale internationale : 778 s.

Déni de justice : 57, 419, 440, 560, 602, Extranéité (du litige)

770 - modalités : 82 s., 84 s.

Dépeçage du contrat - obligation de soulever : 74 s., 84 s.

- admission du principe de : 27 s.
- Convention de Rome de 1980 et F
Règlement Rome I : 30 Forum non conveniens
- en droit thaï : 32 - déni de justice : 419

673
- en droit thaï : 414 H
- théorie de : 411 s. Hannover International : 68
Forum shopping Hilmarton : 790 s.
- irrégulier
- sanction : 409 s. I
- anti-suit injunction 415 s.
Inconciliabilité
- exception de litispendance
- entre jugements : 694, 713
internationale : 418
- entre procédure et jugement : 713 s.
- forum non conveniens :
- entre sentence arbitrale et jugement : 781
411 s.
s.
- notion : 361, 398 s.
Ingmar : 299
- régulier v. Clause attributive de
Inlandsbeziehung v. Ordre public
juridiction
international de proximité
Franc C.F.A. : 221
INSERM : 542, 726 s., 732, 734, 739
In Zone Brands : 415
Fraude
- à la compétence législative
J
- du for : 366 s., 377
Jaguar : 559
- étrangère : 377, 392 s.
Jugement étranger
- à la compétence juridictionnelle v. Forum
- attributs : 627, 646 s.
shopping
- autorité de chose jugée : 626
- au jugement (notion) : 421, 689, 690
- notion d’équivalence en droit
- et non contrôle de compétence
thaï : 652
législative : 682 s., 704 s., 708 s.
- compétence législative indirecte (non
- notion : 360 s.
contrôle de) : 682 s., 704 s., 708 s.
- sanction
- en droit thaï : 687, 696 s.
- loi du for : 383 s.
- condition de régularité internationale :
- loi étrangère : 392 s.
703 s.
- effets
G
- de fait : 657 s.
Galakis : 540, 738
- de titre : 640 s.
Goldschmidt : 108
- preuve prima facie en
droit thaï : 665 s., 697

674
- efficacité substantielle - statistiques jurisprudentielles
- en droit commun : 673 s. (application) : 189
- en droit conventionnel : 701 s. - statut (juridicité) : 161, 163 s., 165
- notion : 626, 656, 671 Lex rei sitae : 264 s.
- prise en considération (notion Liberté contractuelle : 16 s.
de) : 661 s. Libre disponibilité des droits : 60 s., 65 s.
- éléments caractéristiques : 637 Localisation : 219
- et ordre public international : 691 s. Localisation objective : 220 s.
- et ordre public procédural : 711 Loi d’application immédiate v. Loi de
- exequatur v. Exequatur police
- notion Loi de police
- en droit français : 631 s. - en ordre juridique thaï : 308 s.
- en droit thaï : 644 s. - et droit communautaire : 297 s.
- qualification de : 632 - et protection de partie faible : 314 s.
- révision au fond (Interdiction de) : 674, - et règle de conflit : 282
682, 686, 704, 707 - mode d’intervention : 288 s.
- notion : 282, 300, 310
K Loi de police étrangère

Krombach : 1250, 1258, 1259 - applicabilité : 303 s.


- notion : 301 s.

L - prise en considération : 302


Loi étrangère
Lautour : 333
- caractère : 44 s.
Lex fori
- dans l’ordre juridique thaï : 48 s.
- vocation subsidiaire : 97, 98
- charge de la preuve : 56, 65
- vocation universelle : 97
- en droit thaï : 48, 55, 57
Lex mercatoria
- répartition de : 65
- définition : 162 s., 169
- critères de recherche : 59 s.
- et instruments internationaux : 162
- en droit thaï : 72 s.
- et ordre juridique étatique : 172 s., 182 s.
- défaillance d’établir : 91 s.
- en droit thaï : 174 s., 185 s.
- notion : 93
- et ordre juridique transnational : 137 ;
- effet de : 97 s.
139 s.
- en droit thaï : 95
- et loi du for (non assimilation de) : 50 s.
675
- interprétation souveraine : 113 s. - art. 41 : 762, 780
- en droit thaï : 119 - art. 43 : 795
- invocation - art. 44 : 1348
- en droit français : 60 s. - art. 45 : 741, 742, 744
- en droit thaï : 48, 55, 57
- mécanisme de renseignement v. M
Convention de Londres de 1968 Messageries Maritimes : 137
- recherche du contenu : 86 s. Mesure conservatoire v. Arbitrage
- statistiques jurisprudentielles international
(application) : 102 Mesure provisoire v. Arbitrage
Loi du 18 juin 1966 relatif aux contrats international
d’affrètement et de transports maritimes : Monster Cable : 520
314 Munzer : 674, 682
Loi thaïe de 1938 relative au conflit de lois
- art. 3: 493, 544, 666 N
- art. 5 : 332
Nationalité
- art. 7 : 473
- critère de rattachement : 227 s.
- art. 8 : 55, 86, 87, 119
- de personne morale : 229, 469 s.
- art. 9 : 265
- règle de compétence juridictionnelle
- art. 13 : 21, 28, 72, 227 s., 231, 234 s.,
(fondée sur) : 439 s., 468 s., 474
245, 257, 271, 275, 318
Norme non étatique
- art. 16 : 267
- et ordre juridique thaï : 150
Loi thaïe de 1991 sur le transport
- et Règlement CE n° 593/2008 : 154 s.
international de marchandises par voie
- incorporation : 149 s.
maritime : 312, 553 s.
- statistiques jurisprudentielles
Loi thaïe sur l’arbitrage B. E. 2545
(application) : 189
- art. 9 : 742
Norsolor : 189
- art. 11 : 549
- art. 14 : 589
O
- art. 15 : 544, 545
Ordre juridique transnational
- art. 16 : 613
- définition : 165
- art. 24 : 549
- et lex mercatoria : 165, 170
- art. 34 : 143
- et ordre public transnational : 345
- art. 40 : 740, 743, 744, 745, 747
676
Ordre public et bonnes mœurs : 745 s., 749 - détermination : 246 s.
Ordre public international Principes de droit européen des contrats :
- application par le juge thaï : 332, 338 200 s.
- de proximité : 334 Principes d’Unidroit v. UNIDROIT
- atténué : 334 Prorogation volontaire v. Compétence
- et jugement étranger (contrôle de juridictionnelle
conformité) : 691 s., 711 s. Protection des parties faibles
- et ordre public réellement international : - compétence juridictionnelle :
343 - compétence législative : 315 s.,
- et sentence arbitrale (contrôle de 319 s., 321 s., 323 s.
conformité) : 745 s., 749
- notion : 332, 330 R
Ordre public international étranger Rattachement (critère de)
- prise en considération : 339 s. - lex loci contractus : 230
Ordre public transnational (véritablement - lex loci solutionis : 232
international) - nationalité commune : 226 s.
- contenu : 345, 349 s. Règle de conflit de lois
- définition : 343 - application : 77 s.
- existence : 345 s. - invocation
- mode d’intervention : 355 s. - en droit français : 74 s.
- en droit thaï : 81 s.
P Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du
Prestation caractéristique : 217, 232, 241 22 décembre 2000 concernant la
s., 247 s., 249 s. compétence judiciaire, la reconnaissance et
Présomption (méthode de) : 249 s., 261 s. l’exécution des décisions en matière civile
Prieur : 677, 679 et commerciale (Bruxelles I) v. Convention
Principe de contradiction : 101, 119, 405, de Bruxelles
633 s., 695 s. Règlement (CE) n° 593/2008 du Conseil
Principe de proximité (liens plus étroits) du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux
- admission du : 239, 241, 244, 249 s., 254 obligations contractuelles (Rome I) v.
- et convention internationale : 246 s., 250 Convention de Rome
s., 252, 253 Rena Holding : 792 s.
- et Proper Law of Contract : 255 s. Restatement : 11, 196

677
RUU (Règles et Usances Uniformes T
relatives aux crédits documentaires) : 172, Tilly Russ : 490, 526
187 s., 271 Travailleur
- clause attributive de juridiction : 483, 501
S s.
Sécurité juridique : 224, 246, 251, 260, - clause d’arbitrage : 555 s.
489, 513, 621 - lois de police : 309
Sentence arbitrale internationale - protection de
- annulée (reconnaissance de) : 789 s. - Règlement Rome I : 274
- conditions de régularité internationale : - en droit thaï : 275
779 s., 786 s., 778
- contrôle (intensité de) U
- juridiction administrative : 739 s. UNIDROIT
- juridiction judiciaire : 735 s. - caractéristique : 192 s.
- efficacité de : 776 s. - et lex mercatoria : 195
- exequatur de : 778 s. - statistiques jurisprudentielles
- juridicité : 723 (application) : 198
- notion : 719 s., 722
- nullité de (incidence) : 754 s. V
- recours en annulation
Vivendi : 405
- en droit français : 750 s., 727 s.
Volonté hypothétique : 217, 219, 247
- en droit thaï : 743, 740
- incidence de : 753 s.
W
- jurisdiction compétence
West Tankers : 516, 552, 593
- étatique : 727 s., 735 s.
- administrative : 730 s.,
739 s.
Shenavaï : 450, 455
Signa Property and Casualty Insurance
Co. Ltd : 495, 529
Simitch : 677, 680, 685
Smith Barney : 557, 560
Subjectiviste (théorie de) : 216 s.

678
TABLE DES MATIERES
(Les chiffres indiquent les numéros de page)

REMERCIEMENTS……………………………………………………………………VII
ABREVIATIONS PRINCIPALES……………………………………………………….IX
SOMMAIRE…………………………………………………….………………….…….XIX
INTRODUCTION……………………………………………………………………15

PREMIERE PARTIE : LOI APPLICABLE AUX CONTRATS A CARACTERE


INTERNATIONAL…………………………………………………………………………45

TITRE PREMIER : CONSECRATION DE LA LOI CHOISIE PAR LES PARTIES...47

CHAPITRE PREMIER : LE CHOIX DE LA LOI ETRANGERE…………………………51

Section I : Affermissement de la position de la loi étrangère au stade de l’appréciation par


le juge………………………………………………………………………………………..52

§1 : Nature intrinsèque de fait de la loi étrangère……………………………………52

A. L’alternative exclusive du droit étranger…………………………………….52


B. L’interprétation de formule « caractère de fait » de la loi étrangère………54

§2 : Rejet du principe d’assimilation de la loi étrangère à la loi du for……………58


A. L’admission de la loi étrangère au statut de règle de droit : l’argument
critiqué………………………………………………………………………59
B. La conséquence du déni l’élément de droit de la loi étrangère…………….61

Section II : Obligation d’établir le contenu de la loi étrangère……………………………63

§1 : L’évolution des critères employés………………………………………………63

A. La disponibilité ou l’indisponibilité de droit selon le droit français………63


1) L’origine du caractère disponible ou indisponible……………………..64
a. La détermination de la libre disposition des droits………………….64
b. La solution critiquable……………………………………………….65
2) La répartition des tâches entre le juge et les parties envers le critère des
droits disponibles et droits indisponibles…………………………….....67
a. Les obligations du juge en cas d’indisponibilité des droits…………67
b. Les devoirs des parties en cas de disponibilité des droits…………..68
B. L’absence des critères in concreto retenus dans le système juridique thaï...72
1) L’obligation de soulever l’extranéité du litige……………………….…74
a. Solutions proposées………………………………………………….…76
b. Modalités d’invocation un élément d’extranéité……………………….80
2) L’obligation d’établir la teneur de la loi étrangère…………………….83

§2 : Le défaut d’établissement du contenu de la loi étrangère……………………87

671
A. La défaillance d’établissement du contenu de la loi étrangère……………87
1) La notion de l’absence d’établissement de la loi étrangère………………87
2) Le retour de la loi du for…………………………………………………90
B. Le mécanisme palliatif en droit positif……………………………………..92

Section III : La mise en œuvre de la loi étrangère…………………………………………96

§1 : Interprétation de la loi étrangère par les juges du fond………………………97

A. Le pouvoir du juge d’interprétation de la loi étrangère……………………97


1) Présentation de l’argument……………………………………………..97
2) Affirmation de l’argument..…………………………………………….99
B. L’interprétation souveraine des lois étrangères…………………………101
1) Affirmation du principe……….……………………………………102
2) Le renforcement de l’office du juge de respecter le sens de la loi étrangère
désignée………………………………………………………………104

§2 : Le contrôle disciplinaire : à titre exception……………………………..……107

A. La censure de la Cour de cassation de dénaturation………………..……108


B. Les répercussions négatives du contrôle de la dénaturation…………..…111

CHAPITRE SECOND : CHOIX DES NORMES NON ETATIQUES……………………117

Section I : Admission aux contrats internationaux des règles non légiférées : l’affirmation du
principe………………………………………………………………………………….….117

§ 1 : L’admission fragmentaire du contrat sans loi………………………………..118

A. La notion de contrat sans loi selon les juridictions


étatiques…………………………………………………………………………………… .119
B. La notion de contrat sans loi selon les juridictions arbitrales………………123

§ 2 : La faveur au contrat sans loi fondé sur la volonté des parties……………….126

A. L’incorporation de règle non étatique : le mode d’admissibilité de


contrat « dit » sans loi……………………………………………………………………..127
B. La place de règle non étatique en droit commun…………………………129
1) La prise en considération du préambule du Règlement n°593/2008 le choix
de la règle non étatique …………………………………………..………129
2) L’admission de règle non étatique dans l’ordre juridique thaï……..…132

Section II : Applicabilité de la lex mercatoria….……………………………………….…134

§ 1 : Statut ambigu de la lex mercatoria……………………………………….…134

A. Détermination de la lex mercatoria : deux approches…………………….135


1) Argument de caractère normatif de la lex mercatoria……..…………135
2) Argument de l’absence de caractère coercitif de la lex mercatoria ….140
B. Application de la lex mercatoria……………………………………………143

672
1) L’admission de la lex mercatoria en droit domestique……………….143
a. L’appréciation de « règles de droit » dans l’article 1511 du Décret du
13 janvier 2011…………………………………………………..…143
b. L’appréciation de la lex mercatoria en droit thaïlandais……..……144
2) La reconnaissance indirecte de la lex mercatoria………………..……149
a. A l’égard du juge français…………………………………….……149
b. A l’égard du juge thaï………………………………………………151

§2 : Principes généraux du commerce international……………………..………158

A. P r i n c i p e s U N I D R O I T , p r i n c i p e s u n i f o r m e s p o u r l e s c o n t r a t s
internationaux.....................................................................................159
B. Principes de droit européen des contrats………………………….………163

TITRE DEUXIEME : LOI APPLICABLE EN L’ABSENCE DE CHOIX…..………173

Chapitre unique……….…………………………………..………………………………....175

Section I : Recours aux rattachements traditionnels………………………………….……..175

§1 : Insuffisance relative des rattachements traditionnels……………….………175

A. L’absence de choix des parties à l’épreuve de la thèse subjectiviste……..175


B. L’absence de choix des parties à l’épreuve de la thèse objectiviste……....179

§2 : La recherche nécessaire de nouveaux aspects de rattachements………..….183

A. L’abandon de certains rattachements traditionnels………………………184


1) La nationalité commune (lex patriae)…………………….…………..184
2) La lex loci contractus…………………………………………………..186
3) La lex loci solutionis……………………………………………………187
B. Le bien-fondé de rattachement de l’autonomie de la volonté en droit thaï...187

Section II : Vocation concurrentielle des liens les plus étroits…………………..….…..191

§1 : L’admission du principe des liens les plus étroits…………………….……..191

A. Le principe de proximité dans les nouveaux rattachements………..……191


1) Présentation de l’argument……………………………………………191
2) Affirmation de la formule volontairement répandue du principe….193

§2 : La détermination des liens les plus étroits……………….…………………..195


A. Le concept déclencheur d’identifier les liens les plus étroits….…………196
1) La prestation caractéristique : élément de localisation…….…………197
2) La convergence de points de contact……………………..……………200
B. Le recours aux diverses présomptions………………………...…………..203
1) Les présomptions principales………………………………………….204
a. en matière d’immeubles………………………………..…………..205
b. en matière du contrat de transport de marchandises………………206

673
c. en matière d’instruments de paiement et de crédit…………….…..208
2) Les présomptions en matière de règle protectrice……………….……210
a. en matière de consommateur………………………………..…….210
b. en matière de travail………………………………………………..211
C. L’absence de pertinence du rattachement rigide, le recours à la clause
d’exception…………………………………………………………………212

TITRE TROISIEME : LIMITES AU PRINCIPE DE L’AUTONOMIE DE LA


VOLONTE………………………………………………………………………………...217

CHAPITRE PREMIER : LOIS DE POLICE ET L’EXCEPTION D’ORDRE PUBLIC :


DEUX MECANISMES DISTINCTS……………………………………………………...219

Section I : Lois de police et lois d’application immédiate………………………………...220

§ 1 : L’incidence des lois de police…………………………………………………220

A. La notion des lois de police et lois d’application immédiate……………..221


B. L’intervention de lois de police du for et lois de police étrangères……….225
1) L’argument sur les lois de police du for………………………………..225
a. Lois de police au sens de la Convention de Rome du 19 juin 1980....225
b. Lois de police au sens du Règlement (CE) n° 593/2008…………….227
2) L’argument sur les lois de police étrangères…………………………….227

§ 2 : L’incidence de lois de police et lois d’application immédiate en droit


international privé thaï…………………………………………………………….……….233

A. La difficulté de dissociation lois de police et lois d’application immédiate


thaïe……………………………………………………………………..…..233
1) La notion assimilée des deux mécanismes……………………………..233
2) La qualification de lois de police thaïlandaises…………………….……235
B. Les lois de police de protection des parties faibles en Thaïlande…….……238
1) La Loi de 1979 relative à la protection des consommateurs……….…..241
2) La Loi de 1997 relative au contrat injuste………………………………242
3) La loi de protection des travailleurs………………………………..…..243

Section II : L’exception d’ordre public en droit international privé des contrats………...245

§ 1 : Affermissement du rôle indispensable d’ordre public international…………246

A. La prise en considération d’ordre public international……………………..246


1) Les difficultés de détermination..........................................................247
2) L’office du juge face à l’exception d’ordre public……………..…….….252
3) L’application d’ordre public international par le juge thaïlandais……...254
B. L’exclusion de principe de l’ordre public international étranger………….254

§ 2 : Affermissement du rôle indispensable d’ordre public transnational en matière du


contrat…………………………………………………………………………………..….256

674
A. Caractère polémique de l’ordre public réellement international…………..257
1) La notion nuancée de l’ordre public transnational et véritablement
international…………………………………………………………….257
2) L’existence de l’ordre public transnational…………………………….258
3) La teneur de l’ordre public transnational……………………………….261
B. L’intervention de l’ordre public transnational…………………………….265

CHAPITRE SECOND : EXCEPTION DE FRAUDE…………………………….……….269

Section I : Prise en considération de la fraude à la loi……………………………………..271

§ 1 : Au moyen de fraude à la loi………………………………..………………….271

A. Admission de la fraude à la loi du for…………………………………….…274


1) Le montage artificieux constituant la fraude à la loi…..………………274
a. La règle de conflit, l’intermédiaire de fraude……….………………274
b. L’élément psychologique indispensable……………………........... 275
2) La fraude des éléments d’extranéité dans le contrat interne…………..276
3) La fraude des éléments d’extranéité dans le contrat international…….279
B. Affirmation du traitement égal, fraude à la loi du for et fraude à
la loi étrangère……………………………………………..……………….280

§ 2 : Degrés de répression de la fraude à la loi……………………….……………..283


A. Sanction de la fraude à la loi du for…………………………………………285
1) L’exception de la fraude à la loi………………………………….……..285
a. La sanction absolue………………………………………………....287
b. La sanction relative…………………………………………………288
2) L’application unilatérale de la règle de conflit………………….……....289
3) Le recours à la notion de bonne foi…………………………..…………..290
B. Sanction de la fraude à la loi étrangère…………………………….………290
1) Le refus d’exercer la compétence internationale : retour à la loi du for...291
2) L e r e f u s d e r e c o n n a i s s a n c e d e l ’ a c t e e t d ’ e x é c u t i o n d u
jugement étranger………………………………………………………292

Section II : Prise en considération la fraude à la loi lato sensu……..……………....294

§1 : Les limites concevables au choix du for…………………………………….…296

A. Interdiction de forum shopping irrégulier………………………………..…297


1) Le forum shopping, la notion controversée………………………….…297
2) Les juridictions françaises face au forum shopping en contentieux
d’affaires………………………………………………………………..299
B. Réserve de l’abus de droit, la qualification de licéité du forum shopping…..300

§ 2 : Le palliatif de droit positif……………………………………………………..302

A. Sanction générale du forum shopping irrégulier……………………………302


1) L’exception d’incompétence……………………………………………302
2) Le mécanisme de forum non conveniens……………………………….303
B. Sanction particulière du forum shopping irrégulier………………………..305

675
1) La méthode d’anti-suit injunction………………………………………305
2) L’exception de litispendance internationale…………………………..309
C. Sanction par le règlement préventif au forum shopping abusif……………310

DEUXIEME PARTIE : REGLEMENT DES DIFFERENDS………………………….319

TITRE PREMIER : JURIDICTIONS COMPETENTES………………………………321

CHAP ITRE PREMIER : LE MODE ETATIQUE DE REGLEMENT DES


DIFFERENDS………………………………………………………………………………323

Section I : Les mécanismes coercitifs de détermination de la juridiction compétente……323

§1 : La compétence internationale du juge français en matière du contrat……….324

A. Solution en droit international privé commun…………………………….324


1) La transposition des règles de compétence territoriale interne…………...324
2) Règles applicables à titre subsidiaire……………………………………..327
B. Recours aux règles conventionnelles : le Règlement CE n° 44/2001……..330
1) La solution du droit positif : le fondement de compétence juridictionnelle
sur le domicile…………………………………………………………..331
2) Les difficultés d’application de la règle de compétence juridictionnelle
visées par l’article 5-1°………………………………………………….332
a. Les règles spécifiques fondées sur l’article 5-1° b)………………....333
b. Les difficultés posées par l’article 5-1° a)…………………………..336

§2 : La compétence internationale du juge thaï en matière contractuelle…………340

A. La mise en œuvre de critères de rattachement fondés sur l’article 4 du Code de


procédure civile…………………………………………………………..…340
1) Les règles de compétence générale fondées sur le principe de souveraineté
territoriale……………………………………………………………….341
2) Les règles de compétence générale fondées sur le principe de souveraineté
personnelle……………………………………………………………..345
B. Compétence spéciale à travers le tribunal de la propriété intellectuelle et du
commerce international……………………………………………………350

Section II : Les mécanismes conventionnels de détermination de la juridiction


compétente…………………………………………………………………………………351

§ 1 : La clause d’élection du for……………………………………………………353

A. L’admission de la clause attributive de juridiction dans le système juridique


français………………………………………………………………………353
1) La prorogation de compétence à l’égard du droit international
commun…………………………………………………………………353
a. Appréciation du choix tacite du tribunal compétent………………...355

676
b. Admission de clause attributive de juridiction en matière de parties
faibles……………………………………………………………….356
2) Les prorogations de compétence à l’égard du droit conventionnel…..358
B. L’ambigüité de la Cour suprême Dika à l’admission des clauses attributives de
juridiction…………………………………………………………………..363
1) La tendance critiquée de droit commun : hésitation de l’appréciation de la
clause attributive de juridiction………………………………………..363
2) Palliatif de droit positif en matière spécifique : le contrat de transports
combinés………………………………………………………………..368

§ 2 : Limites de la prorogation de compétence à l’épreuve de la protection de partie


faible…………………………………………………………………………….………….369

A. Principes, les limites draconiennes retenues en matière de la protection de


partie faible………………………………………………………………….370
B. Exceptions, le retour à l’admission d’une clause attribuant de compétence..373

§ 3 : Les effets de clauses de prorogation de compétence…………………………375

A. L’exclusivité du tribunal édicté dans la clause attributive de compétence, les


positions diverses…………………………………………………………..375
B. La force obligatoire de la clause attributive de juridiction à l’égard des
tiers………………………………………………………………………….383
1) L’évolution jurisprudentielle divergente……………………………......383
2) La solution jurisprudentielle courante…………………………………..386

C H A P IT R E S E C O ND : LE M O D E C O N S E N S U E L D E R E G LE M E N T D E S
DIFFERENDS………………………………………………………………………………393

Section I : Appréciation de la clause d’arbitrage………………………………………….396

§ 1 : La validité de la clause compromissoire…………………………………….397


A. La répercussion de la qualité des parties sur l’engagement compromissoire
international…………………………………………………………………397
1) L’équilibre des souverainetés étatiques et des intérêts de commerce
international. …………………………………………………………..397
2) La solution évoluée de droit positif thaï………………………………..401
a. L’admission de l’arbitrage dans un contrat international………….401
b. Les résultats critiqués pour le contrat international administratif….402
B. L’autonomie de la convention d’arbitrage…………………………………404
1) Prise en considération du principe de l’autonomie de la clause d’arbitrage
par le juge thaï…………………………………………………………..404
2) L’admission fermement du juge français l’autonomie de la clause
d’arbitrage………………………………………………………………407
3) L’autonomie de la clause compromissoire par rapport à l’application de
règles impératives………………………………………………………409

§ 2 : L’incidence de la convention d’arbitrage……………………………………..411


A. L’arbitrage international à l’épreuve de la protection de parties faibles, les
déséquilibres manifestes…………………………………………………….411

677
1) Solution plus favorable en matière du contrat de travail………………411
2) Solution critiquée en matière du contrat de consommation……………413
B. L’opposabilité des clauses compromissoires……………………………….417
1) Solutions jurisprudentielles antérieures……………………………….418
2) Les solutions adoptées par la jurisprudence actuelle…………………...419

Section II : Appréciation de la compétence de l’arbitre…………………………………….425

§ 1 : Le pouvoir de vérification de sa propre compétence………………………....427

A. L’admission du principe jurisprudentiel « compétence-compétence »……427


1) Admission diverse du principe dans l’ordre juridique thaï………….…428
2) Admission fermement du principe par les juridictions françaises….…432
B. L’entrave au principe de compétence-compétence.………………..434
1) Contrôle superficiel de « nullité » ou « inapplicabilité » manifeste en droit
français………………………………………………………………….434
2) Contrôle sommaire de la clause d’arbitrage en droit thaï………………437

§ 2 : Compétence de la compétence à l’épreuve de l’anti-suit injunction…………..440

A. Dans l’espace judiciaire européenne………………………………….…….441


B. Dans l’espace judiciaire international commun……………………….……445

Section III : Renforcement procédural de l’efficacité de l’arbitrage international….……446

§ 1 : Mesures provisoires et conservatoires en droit français de l’arbitrage


international…………………………………………………………………………….…..447

A. Les mesures prononcées par le juge………………………………….…….448


B. Les mesures prononcées par l’arbitre………………………………………450

§ 2 : Évolution des problèmes de prononcer les mesures provisoires et conservatoires


en Thaïlande………………………………………………………………………………..453

A. L’article 13 de l’ancienne Loi sur l’arbitrage B.E. 2530…………….…….454


B. Les solutions prises en droit actuel………………………………….……..456
1) La Loi sur l’arbitrage B.E. 2545……………………………..…………456
2) Les règles procédurales du TCPICI………………………….…………459

TITRE SECOND : RECEPTIONS DES DECISIONS ETRANGERES……………….465

CHAPITRE PREMIER : RECEPTION DES JUGEMENTS ETRANGERS………………467

Section I : Reconnaissance des attributs de jugements étrangers…………………………469

§ 1 : La détermination des décisions étrangères……………………………………470

A. La notion du jugement étranger en droit français………………………….470


1) Les difficultés de qualification des jugements étrangers………………471

678
a. L’ambigüité de qualification des actes juridiques impliqués………..471
b. Les éléments caractéristiques de jugements étrangers…………...…474
2) Les critères fondés sur les effets produits par décisions en cause…..…475
B. La notion du jugement étranger en droit thaï……………………………..478

§ 2 : Les attributs de jugements étrangers…………………………………………480

A. Autorité de la chose jugée des jugements de droit privé…………………..481


1) L’argument entraîné de l’autorité de la chose jugée…………………..481
a. L’aspect classique, la méconnaissance de droits des tiers………….481
b. L’état de droit positif, de l’échec de la théorie de la relativité à
l’insuffisance de l’autorité absolue………………………………….483
2) La notion équivalente de l’autorité de la chose jugée en droit thaï……484
B. Effets indépendamment de l’exequatur des jugements étrangers………....486
1) L’exclusion du régime propre aux jugements étrangers de l’effet de
fait……………………………………………………………………….487
2) Le recours à l’effet de titre du jugement étranger………………….….491
C. Élément de preuve prima facie des jugements étrangers selon la Cour
thaïe…………………………………………………………………………492

Section II : Reconnaissance des effets des jugements étrangers…………………………….497

§ 1 : Efficacité substantielle des jugements dans le cadre de droit commun……..498


A. Contrôle de régularité internationale en droit français…………………….499
1) Conditions d’ordre processuel……………………………………….…500
a. La compétence internationale du tribunal étranger………………...500
b. L’élimination du contrôle de compétence législative indirecte……..504
2) Conditions d’ordre substantiel……………………………………..…..509
a. L’absence de fraude……………………………………………..….509
b. La conformité à l’ordre public international du for………………...511
B. Contrôle de régularité internationale en droit thaï……………………..….514
1) Conditions établies par la décision n°585/2461, l’exécution des jugements
étrangers en Thaïlande………………………………………………....514
2) Les modalités à l’anglaise retenues par la Cour thaïe…………………516

§ 2 : Efficacité substantielle des jugements dans le cadre du mécanisme simplifié...518

A. Conditions de régularité internationale simplifiées……………………….519


1) Les conditions non contrôlées………………………………………....519
a. Le non contrôle de la compétence indirecte………………………...520
b. L’interdiction de la révision au fond………………………………..521
c. Le non contrôle de la compétence législative indirecte……………..522
2) Les conditions contrôlées……………………………………………...524
a. Le contrôle de conformité à l’ordre public…………………………524
b. L’inconciliabilité des procédures ou des jugements…………….…526
B. Renforcement de la suppression de l’exequatur, l’argument critiqué……529

CHAP ITRE SECOND : RECEPTION DES SENTENCES ARBITRALES


INTERNATIONALES......................................................... ......................................533

679
Section I : Recours à l’encontre la sentence arbitrale internationale…………..………..538

§1 : La compétence juridictionnelle impliquée pour connaître la sentence…….538

A. Les juridictions concurrentes pour le recours en annulation…………......539


1) La vocation de juridiction judiciaire……………………………….…..539
2) La compétence concurrente de juridiction administrative……….…..541
a. Solution critiquée………………………………………………..….541
b. L’argument du recours au critère de l’internationalité du litige......542
B. L’intensité différente du contrôle effectué par chaque compétence
juridictionnelle…………………………………………………….……….544
1) Sous l’empire des juridictions judiciaires………………………………545
2) Sous l’empire des juridictions administratives…………………..…….546

§2 : Les voies de recours à l’encontre la sentence internationale……………..…..551

A. Aspect de droit thaï……………………………………………………..……551


1) L’application de l’article 40 de Loi sur l’arbitrage B. E. 2545………….551
2) La notion de l’ordre public et les bonnes mœurs du peuple au stade de la
reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale…………………553
B. Aspect de droit français…………………………………………………….557
1) Le recours en annulation en droit français………………………….….557
2) Les incidences de recours……………………………………………....559
a. L’incidence d’un recours en annulation devant les juridictions
françaises……………………………………………………………….559
b. L’incidence d’un recours en annulation devant les juridictions
étrangères………………………………………………………...…...…561

Section II : Réception dans l’ord re juridique étatique des sentences arbitrales


internationales………………………………………………………………………..…..563

§1 : Autorité attachée aux sentences arbitrales internationales…………………564

A. Autorité de la chose jugée des sentences arbitrales……………………....565


1) La caractéristique de la chose arbitrée………………………………...565
2) La mise en œuvre de l’autorité de chose arbitrée…….………………567
B. L’élargissement de la mise en œuvre de l’autorité de la chose jugée…...571
1) Le développement des arguments divers……………………………..571
2) La solution jurisprudentielle…………………………………………..574

§ 2 : Reconnaissance et exécution des sentences arbitrales internationales….…577

A. Modalités de reconnaissance et d’exécution de sentences arbitrales


internationales……………………………………………………………578
B. La sentence arbitrale étrangère inconciliable avec le jugement étranger…580
C. Reconnaissance des sentences annulées dans leur pays d’origine………..585

CONCLUSION GENERALE……………………………………………………………..595
BIBLIOGRAPHIE……………………………………………….…………………….…..601

680
TABLE DE LA JURISPRUDENCE…………………………….…………………..……645
TABLE DES FIGURES…………………………………………………………………671
INDEX ALPHABETIQUE……………………………………….…………………….….673
TABLE DES MATIERES………………………………………….……………………...679

681
682
Contrats internationaux : étude comparative franco-thaïlandaise

Résumé
Le droit international privé français des contrats est très avancé, la richesse de la jurisprudence et la
doctrine font une bonne preuve de l’évolution du droit français en la matière. Ses conceptions sont
répandues et admises par d’autres États, européens en premier lieu, puis dans le monde entier. Le
système de droit français et celui de droit communautaire sont complémentaires l’un et l’autre. Pour
cette raison l’étude de droit international privé français ne peut plus être restreinte uniquement dans le
cadre de droit international commun. Dés lors le droit international privé communautaire devrait aussi
faire l’objet de cette étude. Quant au droit international privé des contrats thaïlandais, il est en cours de
développement et a besoin de grande réformation urgent pour la coopération juridique dans l’ASEAN.
L’étude comparative en cette matière permettrait donc de trouver la bonne solution et d’apprendre
l’application de règles conflictuelles ainsi que d’autres mécanismes du droit international privé pour
régler les problèmes dans l’ordre juridique thaï. Donc les questions de la loi applicable et le règlement
des différends font l’objet principal de cette étude.

Mots clefs français : Droit international privé thaï, Droit international privé français, Droit
international privé des contrats, Conflit de lois, Conflit de juridictions, Recherche de la volonté, Choix
de la loi applicable au contrat, Choix de la loi étrangère, Choix de la norme non étatique, Ordre public
international, Lois de police, Lois de police thaïlandaises, Fraude à la loi, Forum shopping, Clause
attributive de juridictions, Forum non conveniens, Arbitrage international, Règlement des différends,
Exequatur, Reconnaissance des décisions étrangères.

International Contracts: A Comparative Study between French and Thai Systems

Abstract
The French system of Private International Law of Contract is highly developed, evidenced by a rich
jurisprudence and doctrinal system. One of the leaders in the field, many of their legal concepts were
widely accepted and adopted by other legal systems, first by European countries and then worldwide.
However, because of their complementary and intertwined nature for each other, the French legal
system cannot be studied apart from the European system. For this reason, this study covers not only
an in depth examination of French Private International Law but also a general look at European
Private International Law. The Thai system of Private International Law of Contracts, in comparison,
is developing and needs significant legal reform, as soon as possible, in order to cooperate with other
contracting States in ASEAN. Thus, this comparative study responds to the needs, and shows how to
correctly apply the conflict of laws’ rules, including their exceptions, which could solve many
problems occurring in the Thai legal system. Therefore questions on the applicable laws of contract
and the settlement of disputes which derive from international contract law are objects of this study.

Keywords : Thai Private International Law, French Private International Law, Conflict of Laws, Laws
Applicable to Contracts, Choice of Law, Choice of Foreign Law, Choice of Transnational Law,
Conflict of Jurisdictions, Choice of Forum, Public Order, Overriding Mandatory Rules, Thai
Overriding Mandatory Rules, Forum shopping, Forum non conveniens, International Arbitration,
Dispute Resolution for International Contract, Recognition and Enforcement of Foreign Judgments,
Recognition and Enforcement of International Arbitral Awards.

Unité de recherche/Research unit : Centre de Recherche Droits et Perspectives du Droit, 1 place


Déliot, 59000 Lille, http://crdp.univ-lille2.fr/
Ecole doctorale/Doctoral school : Ecole doctorale des sciences juridiques, politiques et de gestion, n°
74, 1 place Déliot, 59000 Lille, ecodoc.univ-lille2.fr, http://edoctorale74.univ-lille2.fr
Université/University : Université Lille 2, Droit et Santé, 42 rue Paul Duez, 59000 Lille,
http://www.univ-lille2.fr

683

Vous aimerez peut-être aussi