Edition 11th Edition Mills Test Bank Visit to download the full and correct content document: https://testbankdeal.com/dow nload/educational-research-competencies-for-analysis-and-applications-global-edition -11th-edition-mills-test-bank/ Educational Research Competencies for Analysis and Applications Global Edition 11th Edition Mills Test Bank Visit to download the full and correct content document: https://testbankdeal.com/dow nload/educational-research-competencies-for-analysis-and-applications-global-edition -11th-edition-mills-test-bank/ Another random document with no related content on Scribd: commun acord et dit ensi: «Chiers sires, vous nous requerés d’une cose moult pesans, et qui trop ou 25 temps avenir poroit touchier au pays de Flandres et à nos hoirs. Voirs est que nous ne savons signeur au jour d’ui ou monde de qui nous amenons tant le pourfit et l’avancement que nous ferions de vous. Mais ceste cose nous ne poons faire de nous tant 30 seulement, se toute la communaulté de Flandres entirement ne s’i acorde. Si se retraira cescuns devers sa ville, et remousterons ceste besongne generalment [99] as hommes de nostre ville. Et là où la plus sainne partie se vorra acorder, nous l’acorderons ossi. Et serons chi arrière dedens un mois, et vous en responderons si à point que vous en serés bien contens.» 5 Li rois d’Engleterre et d’Artevelle n’en peurent adonc avoir aultre response; si le vosissent il bien avoir plus brief, se il peuist estre, mès nennil. Si respondi li rois: «A le bonne heure!» Ensi se departi cilz parlemens, et retournèrent li consaulz 10 des bonnes villes en leurs lieus. Or demora Jakemes d’Artevelle encores un petit dalés le roy d’Engleterre, pour le cause de ce que li rois se descouvroit à lui fiablement de ses besongnes. Et il li prommetoit toutdis et asseguroit qu’il le feroit 15 venir à sen entente, mès non fist, si com vous orés en avant recorder. Car il se dechut quant il demora derrière, et qu’il ne revint à Gand ossi tost que li bourgois qui avoient esté à l’Escluse au parlement envoiiet, de par tout le corps de le ville. 20 Quant li consaulz de Gand fu retournés en l’absence d’Artevelle, il fisent assambler grans et petis ens ou Marchiet. Et là remoustra li plus sages d’yaus tous par avis sur quel estat li parlemens avoit esté à l’Escluse, et quel cose li rois d’Engleterre requeroit, 25 par l’ayde et information d’Artevelle. Dont commencièrent toutes manières de gens à murmurer sus lui, et ne lor vint mies bien à plaisance ceste requeste. Et disent, se il plaisoit à Dieu, il ne seroient jà sceu ne trouvé en tel desloyauté que de voloir deshireter 30 leur naturel signeur, pour ahireter un estragne. Et se partirent tout dou Marchiet, ensi que mal content, et en grant hayne sus d’Artevelle. [100] Or regardés comment les coses aviennent: car s’il fust là ossi bien premierement venus qu’il ala à Bruges et à Ippre remoustrer et preecier le querelle dou roy d’Engleterre, il leur euist tant dit d’unes et d’autres, 5 qu’il fuissent tout acordet à sen oppinion, ensi que cil des dessus dittes villes estoient. Mais il s’affioit tant en se prospérité et grandeur, que il y pensoit bien à retourner assés à temps. Quant il eut fait son tour, il revint à Gand et entra en le ville et toute 10 se route, ensi que à heure de miedi. Chil de le ville, qui bien savoient se revenue, estoient assamblé sus le rue par où il devoit chevaucier à son hostel. Si tost qu’il le veirent, il commencièrent à murmurer et à bouter trois tiestes en un caperon, et à dire: 15 «Vechi cesti qui est trop grans mestres et qui voet ordonner de le conté de Flandres à se volenté: ce ne fait mies à souffrir.» Encores avoech tout ce, ou avoit semet parolles parmi le ville que le grant tresor de Flandres, que Jakemes d’Artevelle avoit assamblé 20 par l’espasse de neuf ans et plus qu’il avoit eu le regimen et le gouvrenement de Flandres (car des rentes dou conte il n’aleuoit nulles, mès les mettoit et avoit mises toutdis arrière et en depos; et tenoit son estat et avoit tenu le terme dessus dit sus l’amende des 25 fourfaitures de Flandres tant seulement); ce grant tresor où il avoit denierz sans nombre, il l’avoit envoiiet secretement en Engleterre. Ce fu une cose qui moult engrigni et enflama chiaus de Gand. Ensi que Jakes d’Artevelle chevauçoit parmi le 30 rue, il se perçut tantos qu’il y avoit aucune cose de nouvel et contre lui. Car cil qui se soloient encliner et oster leurs chaperons contre lui, li tournoient l’espaule [101] et rentroient en leurs maisons; si se commença à doubter. Car si tretost qu’il fu descendus à son hostel, il fist fremer et hameder[318] portes et huis et fenestres. A painnes eurent si varlet ce fait, quant 5 toute li rue où il demoroit fu toute couverte, devant et derrière, de gens, et especiaument de menues gens de mestier. Là fu ses hostelz environnés et assallis devant et derrière, et rompus par force. Bien est voirs que cil de laiens se deffendirent moult longement, 10 et en atierèrent et blecièrent pluiseurs; mès finablement il ne peurent durer, car il estoient assalli si roit que priès les trois pars de le ville estoient à cel assaut. Quant Jakemars d’Artevelle vei l’effort, et comment il estoit apressés, il vint à une fenestre 15 sus les rues, et se commença moult à humeliier et à dire par trop biau langage, et à nu chief: «Bonne gent, que vous fault? Qui vous muet? Pour quoi estes vous si troublé sur moy? En quel manière vous puis je avoir couroucié? Dittes le moy: je l’amenderai 20 plainnement à vostre volenté.» Donc respondirent il tout à une vois, voire cil qui oy l’avoient: «Nous volons avoir compte dou grant tresor de Flandres que vous avés desvoiié sans nul title de raison.» Donc respondi d’Artevelle moult doucement: «Certes, 25 signeur, ou tresor de Flandres ne pris je onques denier. Or vous retraiiés bellement en vos maisons, je vous en pri, et revenés chi demain au matin. Et je serai si pourveus de vous faire et rendre bon compte, que par raison il vous devera souffire.» 30 Donc respondirent il d’une vois: «Nennil, nennil! [102] Nous le volons tantost avoir; vous ne nous escaperés mies ensi. Nous savons de verité que vous l’avés vuidiet de pieçà, et envoiiet en Engleterre, sans nostre sceu: pour la quèle cause il vous fault morir.» 5 Quant d’Artevelle oy ce mot, il joindi ses mains et commença à plorer moult tenrement, et dist: «Signeur, tel que je sui vous m’avés fait, et me jurastes jadis que contre tous hommes vous me deffenderiés et garderiés, et maintenant vous me volés occire, 10 et sans raison! Faire le poés, se vous volés, car je ne sui que uns seulz homs contre vous tous, à point de deffense. Avisés vous pour Dieu, et retournés au temps passé. Si considerés les grasces et les grans courtoisies que de jadis vous ay faites. Vous 15 me volés rendre petit guerredon des grans biens que dou temps passé je vous ay fais! Ne savés vous comment toute marchandise estoit perie en ce pays: je le vous recouvrai. En apriès, je vous ay gouvrené en si grant pais que vous avés eu, le temps de mon 20 gouvrenement, toutes coses à volenté, blés, lainnes, avoir et toutes marcheandises, dont vous estes recouvré et en bon point.» Donc commencièrent il à criier tout d’une vois: «Descendés, et ne nous sermonnés plus de si hault, car nous volons avoir compte et 25 raison tantost dou grant tresor de Flandres que vous avés gouvrené trop longement, sans rendre compte; ce qu’il n’apertient mies à nul officiier qu’il reçoive les biens d’un signeur et d’un pays, sans compter.» Quant d’Artevelle vei que point ne se refroideroient 30 ne affreneroient, il recloy la fenestre, et s’avisa qu’il wideroit par derrière, et s’en iroit en une eglise qui joindoit priès de son hostel; mès ses hostelz estoit [103] rompus et effondrés par derrière, et y avoit plus de quatre cens personnes qui tout tiroient à lui avoir. Finablement, il fu pris entre yaus, et là occis sans merci; et li donna le cop de le mort uns teliers 5 qui s’appelloit Thumas Denis. Ensi fina d’Artevelle, qui en son temps fu si grans mestres en Flandres. Povres gens l’amontèrent premierement, et meschans gens le tuèrent en le parfin. Ces nouvelles s’espardirent tantost en pluiseurs lieus: si fu plains 10 des aucuns, et pluiseur en furent bien liet. A ce donc se tenoit li contes Loeis de Flandres à Tenremonde. Si fu moult joyans quant il oy dire que Jakemes d’Artevelle estoit occis, car il li avoit estet moult contraires en toutes ses besongnes. Non obstant ce, 15 ne s’osa il encores affiier sus chiaus de Flandres, pour revenir en le ville de Gand.
§ 238. Quant li rois d’Engleterre, qui se tenoit à
l’Escluse et estoit tenus tout le temps, attendans le relation des Flamens, entendi que cil de Gand 20 avoient occis Jakemon d’Artevelle, son grant ami et son chier compère, si en fu si sancmeuçonnés[319] et esmeus que merveilles seroit à dire. Et se parti de l’Escluse et rentra en mer, en maneçant grandement les Flamens et le pays de Flandres, et dist bien que 25 ceste mors seroit trop chierement comparée. Li consaulz des bonnes villes de Flandres, qui sentirent et entendirent bien et le imaginèrent tantost que li rois d’Engleterre estoit trop durement courouciés sus [104] yaus, s’avisèrent que de le mort d’Artevelle il se iroient excuser, especialment cil de Bruges, de Ippre, de Courtray, d’Audenarde et dou Franch de Bruges. Si envoiièrent devant en Engleterre devers le roy et 5 son conseil, pour impetrer un sauf conduit, afin que segurement il se peuissent venir excuser. Li rois, qui un petit estoit refroidiés de son aïr, leur acorda. Et vinrent gens d’estat de toutes les bonnes villes de Flandres, excepté de Gand, en Engleterre devers le 10 roy, environ le Saint Michiel, et se tenoit à Wesmoustier dehors Londres. Là se excusèrent il bellement de le mort d’Artevelle, et jurèrent solennelment que nulle cose n’en savoient. Et se il l’euissent sceu, c’estoient cil qui deffendu et gardé l’en euissent; 15 mès estoient de le mort de lui durement couroucié et desolé. Et le plaindoient et regretoient grandement, car il recognissoient bien que il leur avoit esté moult propisces et necessaires à tous leurs besoings, et avoit regné et gouvrené le pays de Flandres bellement 20 et sagement. Et se cil de Gand, par leur oultrage, l’avoient tuet, on leur feroit amender si grossement qu’il deveroit bien souffire. Et remoustrèrent encores au roy et à son conseil que, se d’Artevelle estoit mors, pour ce n’estoit il mies eslongiés de le 25 grasce et de l’amour de chiaus de Flandres, sauf et excepté qu’il n’avoit que faire de tendre à le conté de Flandres, que il le deuissent tollir au conte leur naturel signeur, com François qu’il fust, ne à son fil le droit hoir, pour lui ahireter ne son fil le prince 30 de Galles, car cil de Flandres ne s’i assentiroient nullement. «Mais, chiers sires, vous avés des biaus enfans, fils et filles. Li princes, vos ainsnés filz, ne poet [105] fallir qu’il ne soit encores grans sires durement, sans hiretage de Flandres. Et vous avés une damoiselle à fille puisnée, et nous un jone damoisiel, que nous nourissons et gardons, et qui est hiretiers de Flandres. 5 Si se poroit bien encores faire uns mariages d’yaus deux. Ensi demorroit toutdis la conté de Flandres à l’un de vos enfans.» Ces parolles et aultres raboinirent et adoucirent grandement le corage dou roy d’Engleterre. Et se tint finablement assés 10 bien contens des Flamens, et li Flamenc, de lui. Ensi fu entroubliie petit à petit li mors Jakemon d’Artevelle. Si lairons à parler de lui, des Flamens et dou roy d’Engleterre; et parlerons un petit dou conte Guillaume de Haynau et de monsigneur Jehan de 15 Haynau son oncle.
§ 239. En ce temps et en ceste meisme saison chi
dessus ditte, seoit li contes Guillaumes de Haynau, filz au conte qui morut en Valenchiènes, devant le ville d’Uttré, et sist un grant temps, pour aucuns drois 20 que il y demandoit à avoir. Si contraindi telement par siège et par assaut chiaus d’Uttrec, qu’il les eut à se volentet et les mist à raison. Assés tost après et en celle propre saison, environ le Saint Remi, au departement dou siège d’Utrec, il fist une grande 25 cueilloite et assemblée de gens d’armes, chevaliers et escuiers, de Haynau, de Flandres, de Braibant, de Hollandes, de Guerles et de Jullers. Et se partirent li contes et ces gens d’armes de le ville de Dourdresch en Hollandes, à grant fuison de naves et de vaissiaus, 30 et singlèrent devers Frise, car li contes de Haynau s’en disoit estre sires. Toutes fois, de droit, se ce [106] fuissent gens Frison que on peuist mettre à raison, li conte de Haynau y ont grant signourie. Et encores li dessus dis contes, qui fu moult entreprendans et hardis chevaliers durement, en fist adonc une partie 5 de son pooir dou calengier et requerre; mès il ne l’en chei mies bien ne à chiaus qui furent en che voiage avoecques lui. Dont ce fu damages, car il y demora, et grant fuison de bons chevaliers, Diex en ait les ames! 10 Et y fu priès demorés messires Jehans de Haynau, oncles au dit conte; et se parti trop envis dou lieu où il estoit arivés, car il n’arriva mies ou pays avoecques son neveu, mès d’autre part. Et ensi que tous foursenés, il se voloit aler combatre et [vengier[320]] 15 as Frisons, quant ses gens le prisent, qui veirent le desconfiture. Et le jettèrent, vosist ou non, en une nef, et especialment messires Robers de Glennes qui estoit adonc escuiers pour son corps, fors et legiers. Et fu li dis Robers priès mors et noiiés pour lui sauver. 20 Toutes fois, il retourna à petite mesnie tous desbaretés, et revint au Mont Sainte Gertrud en Hollande, où madame sa [nièche[321]] l’attendoit, femme qui fu au dessus dit conte, madame Jehane, ainsnée fille au duc Jehan de Braibant. La quèle dame fu 25 moult desolée et destourbée de le mort le conte son mari, ce fu bien raisons. Si se traist la ditte dame à la terre de Binch dont elle estoit doée. Ensi vaca la conté de Haynau un temps. Et le gouvrena messires [107] Jehans de Haynau, jusques à tant que madame Margherite de Haynau, mère à monsigneur le duch Aubert, se traist celle part et en prist le possession et l’iretage, comme droiturière hiretière. Et l’en fisent 5 li signeur, baron, prelat, chevalier et bonnes villes, feaulté et hommage. Ceste dame Margherite, contesse de Haynau, avoit à marit monsigneur Loeis de Baivière, empereur de Romme et roy d’Alemagne, si com il est devisé ou commencement de che livre.
10 § 240. Assés tost apriès traitta li rois Phelippes
de France et fist trettier par le conte de Blois envers monsigneur Jehan de Haynau, que il vosist estre François, et il li transporteroit sa revenue qu’il avoit en Engleterre, en France, et li assigneroit si souffissamment 15 comme il plairoit à son conseil. Li dis messires Jehans de Haynau à ce trettiet ne s’acorda mies legierement, car il avoit le fleur de se jonèce usé ou service le roy d’Engleterre, et se l’avoit toutdis li rois moult amet. Quant li contes Loeis de Blois, 20 qui avoit sa fille pour moullier et avoit trois filz, Loeis, Jehan et Gui, vei et considera qu’il n’i poroit entrer par celle voie, si trouva moiien le signeur de Fagnuelles, qui estoit compains au dit monsigneur Jehan de Haynau et li plus grans de son conseil. Si 25 fu avisé, pour retraire le dessus dit de l’oppinion des Englès, que on li fist entendant un grant temps que on ne li voloit paiier sa revenue en Engleterre. De ce se merancolia li dis messires Jehans de Haynau telement qu’il renonça as fiés, as couvenences et as 30 seelés qu’il avoit au roy d’Engleterre. Et tantost que li rois de France le sceut, il envoia devers lui souffissans [108] hommes et le retint à lui et à son conseil à certains gages, et le recompensa en son royalme de tant de revenue et plus qu’il ne tenist en Engleterre. Ensi demora li dis messires Jehans de Haynau, sires de 5 Byaumont, François tout son vivant; et le trouverons en avant en ceste hystore ens ès armées et chevaucies que li rois de France fist, loist à savoir li rois Phelippes et li rois Jehans ses filz. Or retourrons nous à le matère des guerres de Gascongne et de le 10 langue d’och.
§ 241. Bien estoit infourmés li rois Phelippes des
chevaucies et des conquès que li contes Derbi avoit fait ou dessus nommet pays de Gascongne, et comment il avoit pris villes, chités et chastiaus, et le pays 15 durement foulé et apovri: si en estoit moult courouciés. Et avoit fait un très grant et très especial mandement, que tout noble et non noble, dont on se pooit aidier au fait de bataille, fuissent en le cité d’Orliens et de Bourges, ou là environ, dedens certains 20 jours qui y furent mis, car il voloit le duch de Normendie son ainsné fil envoiier ens ès marces de Gascongne, pour resister contre le puissance des Englès. Si s’esmurent au mandement dou roy grant fuison de dus, de contes, de barons et de chevaliers 25 dou royalme, et par especial de Bourgongne et de Normendie. Et vint à Paris li dus Oedes de Bourgongne, oncles germains dou duc de Normendie, et messires Phelippes de Bourgongne ses filz, contes d’Artois et de Boulongne. Si se representèrent au dit 30 roy et en son service à mil lances. Li rois les rechut et leur sceut grant gré de ce service. Si fisent cil doy [109] signeur passer leurs gens oultre. Apriès vinrent li dus de Bourbon, messires Jakemes de Bourbon, contes de Pontieu, ses frères, ossi à grant fuison de gens d’armes. Si revint li contes d’Eu et de Ghines, connestables 5 de France, en très grant arroi, ossi li contes de Tankarville, li daufins d’Auvergne, li contes de Forès, li contes de Dammartin, li contes de Vendome, li sires de Couci, li sires de Cran, li sires de Sulli, li evesques de Beauvais, li sires de Fiennes, li 10 sires de Biaugeu, messires Jehans de Chalon, li sires de Roie, et tant de barons et de chevaliers que je ne les aroie jamais tous nommés. Si se assamblèrent cil signeur et leurs gens en le cité d’Orliens et là environ, voires cil de par de deça le Loire; et cil de delà, 15 de Poito, de Saintonge, de le Rocelle, de Quersin, de Limozin, d’Auvergne et des marces environ, ens ès marces de Thoulouse. Si passèrent toutes ces gens oultre à grant esploit par devers Roerge, et en trouvèrent grant fuison encores venus et assamblés en le 20 cité de Rodais, des marces d’Auvergne et de Prouvence. Tant fisent cil signeur et ces gens d’armes qu’il vinrent en le cité de Thoulouse ou environ. Si se logièrent, cescuns au mieulz qu’il peut, à Thoulouse et ens ès villages d’environ; car tout 25 ne se peuissent mies logier en le cité, tant estoient grant nombre, cent mille tiestes armées et plus. Che fu environ le Noel, l’an mil trois cens quarante cinq.
§ 242. Tantost apriès le feste dou Noel, li dus de
30 Normendie se parti de Thoulouse o toutes ses hos, et fist devant chevaucier ses mareschaus, le signeur de [110] Montmorensi et [le seigneur[322]] de Saint Venant. Si se traisent tantost et premierement devant le chastiel de Miremont, que li Englès avoient conquis en celle saison. Si le assallirent cil de le bataille des mareschaus 5 fortement et durement. A ce jour avoit il dedens environ cent Englès qui le gardoient, avoecques le chapitainne, un très bon escuier, qui s’appelloit Jehan de Bristo. Chilz [et] avoecques ses compagnons le deffendirent tant qu’il peurent; mais il y eut si dur assaut 10 et si fort, car messires Loeis d’Espagne estoit là avoecques grant fuison d’arbalestriers geneuois qui point ne s’espargnoient, si que cil dou chastiel ne se seurent ne peurent onques si bien deffendre que de force il ne fuissent pris, et li chastiaus conquis, et mors li 15 plus grant partie de chiaus qui dedens estoient, et meismement li chapitainne. Si le rafreschirent li doi mareschal de nouvelle gent, et puis passèrent oultre, et vinrent devant Villefrance en Aginois. Là s’arresta li hos, et l’environnèrent, et puis l’assallirent fortement. 20 A ce donc n’i estoit point li chapitainne messires Thumas Kok, mès estoit à Bourdiaus devers le conte Derbi qui l’avoit mandé. Mès toutes fois chil qui estoient dedens Villefrance à ce jour se deffendirent vaillamment, mès finablement il furent pris 25 de force, et toute li ville courute et arse sans deport, et occis li plus grant partie des saudoiiers qui le gardoient. Et quant il eurent ensi esploitié, il passèrent oultre et laissièrent le chastiel tout entier, sans garde et sans abatre: dont depuis il se repentirent. Puis 30 se traisent par devant le chité de Angouloime, et le [111] assegièrent tout au tour, car il estoient tant de gens que bien le pooient faire. Dedens avoit grant fuison de bons compagnons, de par les Englès, et un escuier à chapitainne, qui s’appelloit Jehan de Norvich. 5 § 243. Quant li contes Derbi, qui se tenoit en le cité de Bourdiaus, entendi que li dus de Normendie et chil signeur de France estoient venu à host si grant pour reconquerre villes, cités et chastiaus que conquis avoit, et jà avoient reconquis Miremont, Villefrance, 10 et toute robée et arse, hors mis le chastiel, il s’avisa d’une cose qui bonne li sambla. Il envoia tantos quatre chevaliers des siens [ès quels moult s’affioit[323],] et leur dist que il presissent jusques à soixante ou quatre vingt armeures de fier et trois 15 cens arciers, et s’en alaissent par devers Villefrance, et presissent le chastiel qui estoit demorés vuis et entiers, et le mesissent à point et les portes de le ville ossi; et se li Francois le venoient encores assallir, que il se deffendesissent bien, car il les secourroit, 20 à quel meschief que ce fust. Li chevalier li acordèrent volentiers, et se partirent de le cité de Bourdiaus, si com cargiet leur fu. Or vous nommerai les dis chevaliers: messires Estievenes de Tombi, messires Richars de Hebedon, messires Raoulz de Hastinges 25 et messires Normans de Finefrode. Apriès ce, li contes Derbi pria au conte de Pennebruch, à monsigneur Gautier de Mauni, à messire Franke de Halle, à monsigneur Thomas Kok, à monsigneur Jehan de Lille, à monsigneur Robert de [112] Nuefville, à monsigneur Thumas Biset, à monsigneur Jehan de la Souce, à monsigneur Phelippe de Biauvers, à monsigneur Richart de Roclève et à pluiseurs aultres, chevaliers et escuiers, que il volsissent aler à 5 Aguillon et garder le forterèce, car trop fort seroit courouciés, se il le reperdoient. Chil se partirent, qui estoient bien quarante chevaliers et escuiers et trois cens armeures de fier, parmi les archiers; et s’en vinrent bouter ou fort chastiel d’Aguillon. Si y trouvèrent 10 encores bien six vingt compagnons que li contes Derbi y avoit laissiés par de devant. Si pourveirent le dit chastiel de vins, de farines, de chars et de toutes aultres pourveances bien et largement. Ossi li quatre chevalier dessus nommet, ordonnet 15 pour aler à Villefrance, chevaucièrent parmi le pays, en alant celle part. Et cueillièrent grant fuison de bues, de vaches, de pors, de brebis et de moutons, de blés, d’avainnes et de farines et de toutes aultres pourveances pour vivre; et fisent tout amener devant 20 yaus et achariier dedens Villefrance. Et reprisent le chastiel et le remparèrent bien et à point, et relevèrent les murs et les portes de le ville. Et fisent tant qu’il furent plus de quinze cens hommes tous aidables, et pourveus de vivres pour vivre six 25 mois tous entiers.
§ 244. Ces nouvelles vinrent en l’ost devant le
cité d’Angouloime, comment li Englès avoient repris Villefrance, pour le cause dou chastiel qu’il avoient laissiet sans abatre. Si se repentoit trop grandement 30 li dus de che que si simplement s’en estoient parti, quant il n’avoient ars ne abatu le chastiel; mès [113] amender ne le pooit. Si se tint à siège devant le cité d’Angouloime un grant temps, et y fist par pluiseurs fois assallir; mès peu y conquist, car elle estoit bien deffendue. Quant li dus de Normendie et ses consaulz 5 veirent que par assaut il ne le poroient gaegnier, et qu’il perdoient cescun jour de leurs gens à l’assallir, il fisent commander et crier que nulz n’alast plus assallir; ançois se deslogassent et alaissent logier plus priés de le cité. Tout obeirent au commandement 10 de leur signeur, ce fu raisons. Che siège durant devant le cité de Angouloime, vint un jour au duch de Normendie li seneschaus de Biaukaire, uns vaillans chevaliers, et li dist: «Sire, je sai bien toutes les marces de ce pays. Se il vous plaisoit, 15 et vous me volsissiés prester six cens ou sept cens armeures de fier, jou iroie enventurer aval ce pays pour querre bestes et vitailles, car assés tost en arons nous deffaute.» Tout ce pleut bien au duch et à son conseil. Si prist l’endemain li dis seneschaus pluiseurs 20 chevaliers et escuiers qui se desiroient à avancier et se boutèrent desous lui: li dus de Bourbon, li contes de Pontieu ses frères, li contes de Tankarville, li contes de Ghines, li contes de Forès, li dauffins d’Auvergne, li sires de Couci, li sires d’Aubegni, 25 li sires d’Aufemont, li sires de Biaugeu, li sires de Pons, li sires de Partenai, messires Guiçars d’Angles, messires Saintré, et pluiseurs aultres chevaliers et escuiers, tant qu’il furent bien entre mil et neuf cens lances. Si montèrent à cheval sus une vesprée, 30 et chevaucièrent toute le nuit jusques au point dou jour que li aube crevoit. Et tant s’esploitièrent que il vinrent assés priès d’une grosse ville, qui estoit [114] nouvellement rendue as Englès, et l’appelloit on Anchenis. Là endroit vint une espie au dit seneschal, et li dist que dedens Anchenis avoit bien six vingt armeures de fier, Gascons que Englès, et trois cens 5 arciers qui bien deffenderoient le ville, se on les assalloit. «Mais jou ay veu, dist li espie, issir le proie hors de le ville, et y a bien sept cens ou huit cens grosses biestes, et sont par desous le ville dedens les prés.» 10 Quant li senescaus de Biaukaire oy ce, il dist as signeurs qui là estoient: «Mi signeur, je conseille que vous demorés en ceste valée couvertement, et je m’en irai à tout soixante compagnons acueillier ceste grande proie, et le vous amenrai chi endroit. 15 Et se cil Englès issent hors pour rescourre leur proie, ensi que je pense bien qu’il le feront, je les amenrai jusques à vous tout fuiant. Car, je sçai bien qu’il me caceront folement, et vous lor irés au devant hardiement: ce seront tout vostre par raison.» Cescuns 20 s’asenti à ce conseil. Adonc se parti li dessus dis seneschaus à tout soixante compagnons bien montés, et chevaucièrent par voies couvertes autour de le ville, ensi que li espie les menoit, et tant que il vinrent en ces biaus prés et larges où ces bestes paissoient. 25 Il se vont tantost espardre et remettent ces bestes ensamble, et puis cachent tout devant yaus au desous de le ville, par une aultre voie qu’il n’estoient venu. Les gardes de le porte et li gette dou chastiel, qui tout ce veoient, commencièrent à faire 30 friente, et à corner, et à esmouvoir chiaus de le ville, et les compagnons qui espoir dormoient encores, car il estoit moult matin. Sitost qu’il furent en [115] friente, il sallirent sus vistement et ensellèrent leurs chevaus, et s’assamblèrent, tout en le place. Sitost qu’il se furent recueilliet et leur chapitainne venus, uns moult appers chevaliers englès, qui s’appelloit 5 messires Estievenes de Lussi, il vuidièrent cescuns que mieus mieus; et ne demorèrent en le ville, fors que li villain, dont il fisent folie. Li Englès, qui s’estoient mis as camps pour rescourre leur proie, se hastèrent durement, en escriant as François: 10 «Vous n’en irés mies ensi.» Li senescaus et se route [commenchèrent[324]] à haster leur proie, pour venir à leur embusche; et tant fisent qu’il en furent assés priès. Quant cil signeur de France, où moult avoit de grans signeurs et de vaillans 15 hommes, qui tout estoient là venu pour querre les armes, veirent le proie approcier et leur bon seneschal cachier, cescuns sires escria son cri et fist se banière haster et passer avant. Et s’en viennent ferir de plains eslais en ces Englès qui caçoient et qui furent 20 tout esmervilliet, quant il les veirent. Et moult volentiers fuissent retourné, se il peuissent; mès il n’en eurent mies loisir, car il furent telement espars que en brief heure tout [furent[325]] ruet jus, pris et mors. Là fu pris li chapitainne et tout cil d’onneur 25 qui dalés lui estoient, et li demorans tous mors. Et puis chevaucièrent li François vistement devers le ville et entrèrent ens de saut, car elle estoit sans garde. Et la première banière qui y entra, ce fu celle dou duch de Bourbon. Si se saisirent li signeur de [116] le ville, et le rafreschirent de nouvelles gens et de chapitainne. Et puis chevaucièrent à tout leur proie et leurs prisonniers, et s’en revinrent à l’endemain devant le cité d’Angouloime où li sièges se tenoit, où 5 il furent receu à grant joie. En ceste chevaucie acquist grant grasce li seneschaus de Biaukaire, pour tant que il l’avoit mis sus, comment que il y euist eu plus grans signeurs assés qu’il ne fust.
§ 245. Ensi se tint des signeurs de France un
10 grant temps li sièges devant Angouloime. Et couroient li François sus le pays que li Englès avoient conquis, et y faisoient tamaint destourbier, et ramenoient souvent en leur host des prisonniers et grans proies, quant il les trouvoient à point. Et moult y 15 acquisent li doi frère de Bourbon grant grasce, car il estoient toutdis des premiers chevauçans. Quant Jehans de Norvich, chapitainne et souverains d’Angouloime, vei et [considera[326]] que li dus de Normendie n’avoit talent de deslogier, se il n’avoit le cité à 20 se volenté, et sentoit que les pourveances de laiens amenrissoient, et que li contes Derbi ne faisoit nul apparant de lever le siège, et ossi que cil de le ville s’enclinoient trop plus as François que d’autre part, et volentiers se fuissent il pieçà tourné, se il osassent; 25 si se doubta de trahison et que mauls ne l’en presist et ses compagnons. Si s’avisa que à toutes ces coses il pourveroit de remède, et se pourpensa d’une grant soutilleté. Droitement le nuit de le Purification Nostre Dame, [117] à l’entrée de fevrier, il vint as crestiaus de le cité tous seulz, sans soi descouvrir de cose qu’il volsist faire ne dire, à nul homme, et fist signe de son caperon que il voloit parler à qui que fust de l’host. 5 Chil qui perchurent ce signe vinrent celle part, et li demandèrent qu’il voloit. Il respondi qu’il parleroit volentiers à monsigneur le duch de Normendie, ou à l’un de ses mareschaus. Chil qui là estoient respondirent: «Demorés là un petit, et nous irons devers 10 lui, et le vous ferons venir sans faute.» Adonc se partirent il de Jehan de Norvich, et vinrent au logeis dou dit duch. Et li recordèrent que li chapitainne de Angouloime parleroit volentiers à lui ou à l’un de ses mareschaus. «Savés vous de quoi?» dist li dus. 15 Chil respondirent: «Monsigneur, nennil.» Lors s’avisa li dus et dist que il meismes il iroit. Si monta à cheval, et aucun chevalier de son hostel. Et chevaucièrent jusques as murs de le cité; si trouvèrent Jehan de Norvich qui s’apoioit as creniaus. Si tost 20 qu’il vei le duch, il osta son chaperon et le salua. Li dus adonc li demanda: «Jehan, comment va? Vous volés vous rendre?» Il respondi: «Sire, je ne sui mies de ce consilliés à faire. Mais je vous vorroie priier que, pour le reverense dou jour Nostre Dame 25 que il sera demain, vous nous acordissiés un respit à durer le jour de demain tant seulement: par quoi li nostre ne li vostre ne peuissent grever l’un l’autre, mès demorassent en pais.» Li dus, qui ne pensa que tout bien, li acorda liement et dist: «Je le voeil.» 30 Ensi demora li cité d’Angouloime en pais. Quant ce vint le jour de le Candeler au matin, Jehans de Norvich s’arma et fist armer tous ses compagnons, [118] uns et aultres, et enseller leurs chevaus, et tourser tous leurs harnois, et puis fist ouvrir le porte, et se mist dehors le cité. Quant cil de l’host veirent ces gens d’armes issir, si furent tout esmervilliet et 5 effraet. Et se commença li hos à estourmir, car il cuidièrent que li Englès les venissent courir seure. Adonc s’avança Jehans de Norvich, qui chevauçoit tout devant, et dist: «Signeur, signeur, souffrés vous. Ne faites nul mal as nostres, car nous avons triewes 10 ce jour d’ui tout entier, ensi que vous savés, acordées de par monsigneur le duch de Normendie et de nous ossi. Se vous ne le savés, si l’alés savoir, car nous poons bien aler et chevaucier sus celle triewe, quel part que nous volons.» Ces nouvelles vinrent 15 au duch, pour savoir qu’il en voloit dire et faire. Il en respondi: «Laissiés les aler de par Nostre Signeur, de quel part qu’il voelent. Nous ne les poons par raison constraindre à demorer, par bataille ne aultrement. Je leur tenrai ce que je lor ay prommis.» 20 Ensi s’en ala Jehans de Norvich et se route. Et passèrent tout parmi l’ost dou duc de Normendie, sans nul damage, et vinrent dedens Aguillon où il furent recheu à [grant[327]] joie. Si leur recorda Jehans comment il estoit partis de le cité de Angouloime et 25 avoit sauvé tout le sien et ce ossi de ses compagnons. Si disent li chevalier, qui là estoient, qu’il avoit trop bien ouvré, et qu’il s’estoit avisés d’une grant soutilleté.
§ 246. Quant ce vint à l’endemain dou jour de
[119] le Purification, li bourgois d’Angouloime se traisent ensamble, pour savoir comment il se maintenroient. Tout considéré, il eurent avis qu’il se renderoient et metteroient en l’obeissance dou duch de Normendie, 5 ensi qu’en devant. Si envoiièrent en l’ost, devers le dit duch, certains messages, qui esploitièrent si bien que li dus les prist à merci et leur pardonna son mautalent. Et entra dedens le cité et ou chastiel, et rechut le foy et l’ommage de chiaus d’Angouloime. 10 Si y establi li dus un chevalier des siens à chapitainne, qui se nommoit Anthones de Villers et cent saudoiiers avoecques lui, pour mieus garder le chité et le chastiel que dou temps passet elle n’euist esté. Apriès ces ordenances, se desloga li dus, et se trest 15 devers le chastiel de Damassen; et y sist li dus quinze jours par devant, anchois qu’il le peuist avoir. Et ne fu onques jour qu’il n’i euist assaut. Finablement, il fu conquis par force, et tout cil qui dedens estoient, Englès et Gascons, mors. Si le donna li dus et toute 20 le chastelerie à un escuier de Biausse, appert homme d’armes malement, qui s’appelloit le Borgne de Milli. En apriès, vint li dus de Normendie devant Thoni[n]s, qui siet sus le rivière de Garone. Si le trouvèrent bien pourveue d’Englès et de Gascons, qui 25 le gardèrent et deffendirent vassaument un grant temps. Et y avoit priès que tous les jours assaut ou escarmuce. Tant y fu li dus et si contraindi chiaus de dedens qu’il se rendirent par composition, salve leurs corps et leurs biens. Et les devoit li dus faire 30 conduire jusques à Bourdiaus, sus son peril. Ensi se partirent li compagnon estragne, mès cil de le ville demorèrent en l’obeissance dou duch de Normendie. [120] Et se tint là li dus et toute son host sus le rivière de Garonne jusques apriès Paskes, que il se deslogièrent et se traisent devers le Port Sainte Marie, sus ceste meisme rivière. Et là avoit environ deux cens 5 Englès et Gascons qui gardoient le ville et le passage; et l’avoient fortefiie grandement, mès il furent telement assalli que [ilz furent[328]] pris de force, et tout cil qui dedens estoient occis. Si le remparèrent de nouviel, et rafreschirent de gens d’armes. Et puis 10 s’en partirent li François, et chevaucièrent devers Aguillon.
§ 247. Tant esploitièrent cil signeur de France,
dont li dus de Normendie estoit chiés, qu’il vinrent par devant le chastiel d’Aguillon. Si se logièrent et 15 espardirent contreval ces biaus prés et larges, selonch le rivière qui porte grant navie, cescuns sires entre ses gens et çascune connestablie par lui, ensi que ordonné estoient par les mareschaus de l’host. Et devés savoir que par devant le fort chastiel d’Aguillon 20 eut le plus biel host et le plus biau siège que on ewist, grant temps avoit, veu ou dit royalme de France ne ailleurs, et dura parmi cel estet tout jusques à le Saint Remi. Et y avoit à siège bien cent mil hommes armés à cheval et à piet. Et si ne poroit on raconter, 25 par nulle hystore, à siège fait, tant de biaus fais d’armes et de grandes apertises, qu’il avinrent là d’une part et d’autre. Car onques gens assegiés ne souffrirent tant, ne ne se deffendirent si vassaument, comme cil qui furent enclos devant Aguillon, si com [121] vous orés ci après recorder. Car tous les jours les couvenoit combatre deux fois ou trois à chiaus de l’host, et le plus souvent dou matin jusques à le nuit, sans cesser. Car toutdis leur sourvenoient nouvelles 5 gens, Geneuois et aultres, qui ne les laissoient reposer. Les ordenances et manières des assaus, comment et de quoi, je les vous voel declarer et plainnement deviser.
§ 248. Quant li signeur et li baron de France
10 furent venu devant Aguillon, il regardèrent premierement et considerèrent qu’il ne pooient parvenir jusques à le forterèce, se il ne passoient le rivière qui est large, longe et parfonde. Or leur couvenoit faire un pont pour le passer. Si commanda li dus 15 que li pons fust fais, quoi qu’il coustast. Si y vinrent, pour ce pont ouvrer, plus de trois cens carpentiers, qui y ouvroient jour et nuit. Quant li chevalier qui dedens Aguillon estoient veirent que cilz pons estoit fais oultre le moiienné de le rivière, il fisent 20 apparillier trois naves et entrèrent ens, et puis cacièrent tous ces ouvriers envoiés et les gardes ossi, et puis deffisent, tantos et sans delay, tout ce qu’il avoient fait et carpenté à grant painne un temps[329]. Quant li signeur de France veirent ce, il furent durement 25 courouciet, et fisent apparillier aultres naves à l’encontre d’eulz, et misent ens grant fuison de gens