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PDF of A La Decouverte Du Roman 1St Edition Lianke Yan Full Chapter Ebook
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Lianke Yan
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n contrepoint de ses romans, le grand écrivain chinois Yan Lianke
conventionnelle que les classiques lui ont léguée. De tailler en pièces le réel
ébranler le sol où l’on marche, il faut aller chercher des causes cachées,
Stendhal ou Kafka aussi bien que Joyce ou Garcia Marquez, pour retracer
clair du rationnel.
À LA DÉCOUVERTE
DU ROMAN
Roman traduit du chinois
CHEN FENG
DU MÊME AUTEUR
La Fuite du temps
Servir le peuple
Un chant céleste
Rivage du fleuve.
Mas de Vert
B.P. 20150
www.editions-picquier.fr
J’y disais :
j’ai longuement hésité, n’étant pas sûr d’en être digne. Si j’ai fini par m’y
résigner, c’est songeant à ce que tout ce que Les Quatre Livres comprennent
pourraient constituer un présage positif pour la suite de mon œuvre. Que les
prétends pas l’avoir semé de céréales, pas plus que de jolies fleurs et de
pleines lunes, mais pas non plus des fientes de poule ou crottes de chien qui
une histoire comme j’en aurais envie. Que ce soit par le biais de divagations
Car tel est le rêve de tout littérateur un peu mûr. Jamais je ne me suis senti
aussi bien que pendant la rédaction de ces Quatre Livres. Tout convergeait
vers moi. Je n’étais plus esclave des mots mais empereur de l’écriture, adieu
qu’en traître.
a, sur l’Internet chinois, un site dédié aux enfants des années 1980 et 1990
où ils vomissent la haine que leur inspirent leurs parents. Un espace qui
les chaînes qui les brident et d’insulter allègrement père et mère. De clamer
Il m’en a parlé de manière si vivante que j’en suis resté abasourdi – sans
« A coups de couteau ! »
sont tels que j’ai dû mal à garder mon sang-froid – plus ou moins à la
sommeil parce qu’il lui reste un peu de sens moral : son pire ennemi n’est
porte en moi de rationalité littéraire m’a peu à peu fait comprendre qu’il est
couteau sur la gorge de ses géniteurs, ce qui viendrait au fils rebelle ce serait
la bonté avec laquelle ils l’ont éduqué, la peine qu’ils se sont donnée pour
lui. D’un autre côté, cet enfant cruel, tous les bienfaits du monde ne
suffiraient pas à lui faire baisser l’arme. Si bien qu’au bout du compte,
injures, errer solitaire dans la steppe déserte et désolée d’une écriture privée
de direction.
divaguer :
Réalistes…
ô mes parents,
Réalisme…
ô mon tombeau,
2. Le réel fallacieux
sans doute pas qu’il venait de poser deux des pierres angulaires de l’écriture
entente tacite entre l’auteur et le lecteur. Quant au réel, ce sont les fruits
Bien sûr, sur le chemin qui y mène, auteur et lecteur se sont mis d’accord
l’échange, devenu au fil du temps objectif en soi quand les hommes se sont
aperçus qu’il permettait d’atteindre tous les autres. D’où les invasions de
et superficiel.
vie.
niveaux. D’où il ressort que pour l’essentiel ce sont les tréteaux sur lesquels
étage, ne proposent que mots fabriqués et chants vides sont bien obligés,
pour obtenir la confiance des foules, de sauter plus ou moins à leur cœur
défendant, à la manière de ces comédiens qui descendent de scène pour
grands airs – mais familiers ! – afin que la foule ignorante en soit émue au
Plus le pouvoir dans un pays sera totalitaire, plus l’idéologie s’y exprimera
d’Hitler ait eu un art et une littérature, la fin du régime nazi a aussi signifié
du second, destin allemand couché dans les lignes d’un journal intime,
fait plus mention et ils ne sont désormais que momies enterrées sous la
explique avec la plus grande clarté dans son fameux essai Requiem pour la
Les plus beaux temples de la littérature soviétique sont ceux qui ont été
édifiés à partir du projet élaboré par Staline et Gorki pour les générations
5
futures. De style baroque, ils comprennent les Alexis Tolstoï, les Fadeïev ,
6 7
les Pavlenko , les Gladkov et bien d’autres, trop nombreux pour être
mentionnés. Même si dans ce corpus les œuvres de vile qualité, juste là pour
fallacieux – est bien le pouvoir ; ensuite, que cette littérature sous contrôle
Erofeev ne s’étend pas sur ces sujets, pour nous, écrivains et lecteurs
quelle fontaine venait l’eau que nous buvions, et la prenons pour ce qu’elle
est.
imposé ». Tout pouvoir exerce un contrôle, mais si c’est par la force, cela
quoi, d’un commun accord, les deux parties s’engagent, c’est la production
particuliers. Dans une telle fiction l’expression d’un prétendu « réel » est la
condition et le noyau, ce qui lui permet d’être, et d’être crue. Cela fait un
temps déjà, plus d’un demi-siècle, que ce genre de littérature est la forme
dominante sur le territoire chinois (soit neuf millions six cent quarante mille
que personne ne s’interroge plus à son sujet – un peu comme tous nous
jamais mais dont nous restons persuadés qu’elles relèvent d’un imaginaire si
étant la fondation sans laquelle il ne saurait exister, auteur tout autant que
de l’imaginaire pour en faire une fée qui épandrait ses fleurs, à l’existence
Pour les Chinois, le 1984 de George Orwell ne compte pas parmi les
de vue stylistique La Ferme des animaux lui est supérieur, sa renommée est
telle qu’il est devenu l’aîné, La Ferme le puîné, et ceci parce qu’en sus
répandue, le réel l’est aussi dans tous les lieux que le pouvoir tend à réguler.
Or dans le monde, le pouvoir est aussi universel que notre besoin d’air et
minutieusement érigé, lever la main contre cet air et cette eau du réel
comme si des millions d’individus avaient levé la main pour voter la mort
acceptent de décrire un réel falsifié, cela n’empêche pas qu’en même temps
aucun effort pour asservir le réel dans leurs œuvres, d’autres s’appliquent et
progressent, tranquilles et obstinés dans leur bureau, pour nous offrir des
théâtre.
3. Le réel mondain
parce qu’elle a été à l’origine d’un film aussi éblouissant qu’oscarisé, mais
points, Margaret Mitchell ne serait pas une réaliste au sens le plus noble du
mondain, celui qui s’attache à décrire le visage de la société, est une des
réalisme la plus sûre, celle qui a le plus de succès. Le risque subsiste : entre
fenêtres qui permettent toutes les allées et venues, tous les échanges. Ce à
quoi vise le réalisme vulgaire, c’est à une identification maximale, mais par
une masse définie de gens ou par une classe sociale. Le réalisme mondain se
Maugham a marché sur ses pas, et lui aussi a réussi à éviter l’écueil du
vulgaire pour rester dans le mondain. Si ses histoires ont des liens latents
avec ce qui a les faveurs du public, là où il est génial, c’est quand il sait
célébrités – et ses anecdotes sont tirées de la réalité. D’où des œuvres d’un
réalisme mondain où le réel est si bien rendu que le lecteur ne songe pas à
à effet. Que ce soit L’Envoûté, sur Vincent Van Gogh, La Ronde de l’amour,
parle de l’actrice à laquelle certain savant et lui faisaient tous deux la cour,
tous ces récits empruntent si bien aux réalités de l’existence que le lecteur,
sans avoir besoin d’y réfléchir, les ressent immédiatement comme relevant
n’est pas possible de les comparer, pourtant les deux auteurs faisant montre
pouvait faire autrement que croquer, dans des tableaux qui font penser à des
huiles, les us et les mœurs de ses contemporains. Pour aller plus loin,
tant que toile de fond de son œuvre. Peindre les usages sociaux est son
dessein, c’est aussi ce qui fait son charme. Même si, bien sûr, classer Balzac
parmi les réalistes mondains serait une absurdité, et une marque d’irrespect,
transcender cette forme de réel et à voir, autant qu’à être touchés par, la
lumière du réel vital. Il suffit de se plonger dans ses œuvres pour en trouver
la trace et comprendre que c’est elle qui imprime à ses romans leur tonalité.
9
Dans ce registre, parmi les écrivains chinois, c’est à Shen Congwen et
10
Eileen Chang que je pense. Considère-t-on leur œuvre dans son
intégralité, sans l’ombre d’un doute ils ont dépassé le réalisme mondain, se
sont approchés, voire ont atteint le réel vital, mais on est bien forcé de
regretter que leurs écrits les plus représentatifs soient constellés de réel
trivial et de réel mondain, et que ce soit là ce qui leur vaut leur célébrité. Le
société, une dérobade d’où il découle qu’il biaise aussi avec la réalité et se
Comme tous les habitants de cette région frontalière, ces filles (les
leurs amants parmi les bateliers. Les plus épris, au moment de se séparer,
d’une telle simplicité dans les relations humaines, c’est avec encore plus de
sentimental qui perdure de nos jours entre le livre et ses lecteurs. Pour
d’ouvrir le livre au hasard pour en quelques lignes s’en enivrer comme d’un
vieux vin, c’est ce qui fait son charme unique. Dans la même veine,
13
l’univers que Wang Zengqi réussit, en à peine deux ou trois nouvelles, à
génération et de celles qui ont suivi, ont l’impression de ne pas lui arriver à
ici la tendresse des lecteurs et des théoriciens chinois pour le réel mondain.
beauté raffinée.
14
Si La Cangue d’or, Un amour dévastateur, Rose rouge et Rose blanche
et de serrer au plus près le réel vital. C’est dans l’intention d’un effet de réel
des critiques, et encore plus des lecteurs, pour le réalisme mondain. Dans la
celui pour qui c’est la vie qui est la réalité, et les textes qui relèvent du genre
immortels. C’est que si d’un côté, dans la catégorie du réalisme vital, nous
15
avons une œuvre aussi grandiose que Le Rêve dans le pavillon rouge , nous
16
avons aussi Fleur en fiole d’or , illustration d’une tradition culturelle dans
la veine du réalisme mondain. Qui plus est, et c’est encore plus important,
décrire l’aspect du monde dans les villes, et Shen Congwen celui des
scène sur laquelle déambulent les personnages, dans un roman qui dépeint
social pour décrire les individus en tant qu’êtres sociaux, et leur destin en
tant qu’éléments pris dans la tourmente de la société. Si les uns et les autres
diffèrent, ils ne s’en ressemblent pas moins en tant que branches du réalisme
mondain.
e
Ce qui séparait Balzac de Victor Hugo au XIX siècle n’était pas
seconde, ils évoluent comme dans une pièce de théâtre sur la scène de la
constitue les tréteaux sur lesquels se joue leur destin. Le réel mondain
critiqué, il peut être loué, il peut avoir des associations équivoques, mais
à nos côtés. Ceux de Hugo vivent dans notre espoir et notre imagination.
J’ajouterai que ce ressenti n’est pas le seul apanage des lecteurs et des
e
écrivains chinois, les grands romans du XIX siècle sont partout appréciés,
l’accent sur la société. Quant à Mao Dun ou Ba Jin, ainsi que le note avec
18
finesse Chen Sihe dans Au bout des fleuves impétueux il faut qu’il y ait
19
une aube : « Quand on se repenche sur le parcours de M. Ba Jin, d’abord
activiste qui avait foi en la société, puis écrivain célèbre et éminent, puis
lui sied comme un gant. » Une phrase qui résume de fait l’œuvre de tous les
pour s’apercevoir que ce qui motivait leurs efforts, ce qui leur tenait à cœur,
elle n’est pas non plus à chercher dans leur association, mais dans l’œuvre
« la forme trouve rapidement ses marques », il est naturel que nos écrivains
se ruent sur cette veine. S’ils sont moins nombreux à opter pour le mondain
populaire, où les choses vont plus lentement, une fois leur choix fait souvent
ils s’y tiennent, et ce pour une raison : ces romans qui illustrent une réalité
passage des ans, les romans qui relèvent du mondain sociétal risquent de
plan social, la première n’a rien à voir avec le courant des écrivains réalistes
n’a strictement rien à voir avec les romanciers chinois du mondain sociétal.
Parlerions-nous encore d’eux s’ils avaient été chinois ? J’ai parfois des
4. Le réel vital
étage – celui du réel, justement vital, à quoi aspire tout écrivain ayant un
Victor Hugo étant les archétypes de ceux qui y sont brillamment parvenus.
En Chine, il n’y a guère que Lu Xun qu’on puisse ajouter à la liste, même si
prendre un air embarrassé. Certes, il n’a pas à son actif une œuvre aussi
mais pour son époque et par rapport à ses confrères, il a joué dans la quête
c’est toujours à cette couche plus profonde, celle du réalisme vital, qu’il
du réel par Tolstoï mérite sans doute plus que d’autres notre respect et notre
admiration. Pourquoi ? Parce tous les écrivains réalistes qui ont atteint le
réel vital ont obéi aux mêmes règles – autrement dit, ont subi la même
Autrement dit, de créer des personnages qui soient typiques de leur temps.
Plus l’accord entre les deux était parfait, et plus on trouvait l’œuvre
grandiose, plus elle se parait d’une aura universelle. S’il s’agit là d’une
convention instaurée d’un commun accord par les théoriciens, les lecteurs et
les écrivains, elle implique pour ces derniers la nécessité absolue de devenir
devait d’avoir par rapport à son temps une sensibilité à fleur de peau, par
rapport à l’esprit de ce temps la plus grande maîtrise, d’être plus que tout
laquelle il pouvait s’inventer des héros adéquats. Le terreau fertile qui lui
pic plus élancé et plus remarquable que les autres. Une base dont le défaut
signifiait que l’existence des personnages ne faisait plus sens, les montagnes
à lui que dans de telles œuvres on dépasse le réel mondain pour atteindre le
Grandet de Balzac sont devenus des modèles du genre. En tant que parfaits
vital, et s’ils ont permis à beaucoup de s’engager sur ce chemin, ils leur ont
aussi permis d’aller encore plus loin : ils ont rendu possible la création dans
le cadre du réel vital de héros si typiques qu’ils prenaient le pas sur le nom
de leur auteur.
e e
Parmi les chefs-d’œuvre du XIX et du début du XX siècle, nombreux sont
les romans dont le titre est lié aux personnages, ou comporte un message,
annonce des faits en liaison avec eux. Même en remontant plus avant, nous
etc. La liste serait longue de ces héros et des romans qui les évoquent en
personnage type. Si le réalisme vise à atteindre le réel vital, c’est parce qu’il
est l’expression de la vérité et de la profondeur des êtres humains et de leur
existence, ce qui implique qu’il va avant tout s’appuyer sur les protagonistes
pour créer le plus authentique des univers. Que c’est par la grâce de leur
vraiment grands s’il n’a pas, parmi ses créations, un héros au nom
être rayé de la liste et son étoile n’y brillerait plus. Sans Anna et son roman
de cartes soufflé par le vent aux quatre coins. Est-ce grâce à Flaubert
qu’Emma Bovary est immortelle, ou à cause d’elle qu’il vivra à jamais dans
nos cœurs et nos pensées ? Difficile à dire… Dans les cas du Père Goriot et
de leur temps et leur société que les deux œuvres en ont acquis une
Balzac sa très grande force et font de lui, parmi ses pairs, une puissance aux
voire Tchékhov, ne sont universellement connus que parce qu’ils ont été
serait pas ce qu’il est si de telles figures n’étaient, et surtout si elles n’étaient
En premier lieu, ils ont su disséquer leur époque. Plus leur analyse est
second lieu, plus leurs protagonistes sont riches et complexes, plus ils sont
dans leur lumière. Telles sont au départ les deux jambes sur lesquelles
temps-là. Tout dépend des héros et des héroïnes : qu’ils soient animés, de
ils se sont tous deux retrouvés titans, côte à côte. La littérature avait alors un
tel retentissement sur la société que Tourgueniev a même un temps été placé
plus haut que Tolstoï. Lorsque Pères et Fils a été publié en 1862, et que des
tel qu’il était en son temps et sur sa vie, l’autre se concentre sur l’être social
Karénine, Tolstoï déplorait que pour certains un être ne puisse être que bon
en aille ainsi, ce n’est pas forcément le cas : beaucoup sont tantôt l’un tantôt
l’autre. L’homme n’était pas pour lui une donnée constante, mais quelque
nous lisons que peu avant de se jeter sur les rails, voyant « une horrible
incomparable authenticité.
Oui, j’éprouve une grande inquiétude, et la raison m’a été donnée pour
m’en délivrer ; il faut donc que je m’en délivre. Pourquoi ne pas éteindre la
lumière lorsqu’il n’y a plus rien à regarder, lorsque tout vous semble
vie d’Anna. C’est elle pourtant qui va s’allonger sur les rails :
… elle se défit de son petit sac rouge, rentra la tête dans les épaules et se
jeta sous le wagon, les mains en avant ; puis d’un mouvement souple pour
se remettre debout, elle se renversa sur les genoux. A ce moment-là, elle fut
la lumière qui pour elle avait éclairé le livre de la vie avec ses angoisses,
ses trahisons et ses tourments brilla d’un éclat plus vif en projetant une
lueur sur tout ce qui jusqu’alors était resté dans l’ombre ; puis elle vacilla,
24
pâlit et s’éteignit pour toujours .
qu’il nous est donné de lire. Tandis qu’en ce qui concerne Bazarov, tout ce
aussi qu’un siècle plus tard ils forment encore le duo héroïque le plus
complexité du personnage de Julien sont telles qu’elles font de lui une des
Qu’un héros soit plus important que son réel social, forcément complexe à
y satisfaire.
aussi vivace, de chair et de sang, dans le cœur des lecteurs chinois ? Parce
qu’il a été créé pour transcender les complexités sociales et temporelles, que
pouvons encore nous contempler. Parce qu’il est le plus vivant né sous sa
moment de l’y inclure, certains bafouilleraient sans doute. On peut bien sûr
certains de nos écrivains ont assez collé aux talons de la littérature mondiale
romans. Les lecteurs ont ignoré Une Vie et Bel-Ami, certains se sont même
coudées au-dessus d’Une vie et ses trois cent mille caractères. Le réel vital
atteint dans ces personnages à une profondeur telle que la nouvelle surclasse
sans problème les romans dans lesquels l’auteur s’est efforcé de mille
perspective, à quoi bon regretter que Lu Xun ne nous ait pas laissé de
l’étage du réel vital devrait être assez pour que nous nous en glorifiions.
Non, ce dont nous devons nous plaindre, l’objet de nos lamentations, devrait
être que ceux qui lui ont succédé n’aient pas progressé sur cette voie, qu’ils
ne l’aient pas explorée plus avant, ne soient pas allés plus loin vers plus de
rétrograde dont, des dizaines d’années plus tard, tels des bœufs menés par
chinoise pour le réel social à l’intérieur du roman mondain. C’est grâce à lui
Shen Congwen son statut de classique était d’autant plus justifié qu’à peu
près toute son œuvre est signifiante au niveau du réel vital, et que toujours il
elle aussi tire sa force de l’extrême aversion des lecteurs pour notre réalisme
littérature ne serait pas bancale, comme s’il lui manquait un pied, et par là
entachée de partialité.
rationalité pour ne suivre que son humeur, d’un auteur nous tolérons en
revanche l’expression exacerbée de ses états d’âme et ses biais. Aussi est-ce
que je m’autorise ici à établir une liste de quelques grands noms : Lu Xun,
Shen Congwen, Lao She, Xiao Hong, Eileen Chang, Ba Jin, Yu Dafu, Mao
Dun.
27
Au risque d’exagérer, Frank appelle Dostoïevski « un prolétaire de la
en plus haute estime par les critiques (et mieux payés que lui à la page). Il
enviait à ces rivaux leur temps, leur loisir et les fortunes dont ils avaient
temps Athéisme, puis La Vie d’un grand pêcheur, dans l’intention de se faire
que c’était, à son avis, parce qu’il n’avait écrit aucun roman au « thème
mettrait au rang des « écrivains sérieux » ! Que nous nous penchions sur la
e
glorieuse période qu’a été le XIX siècle pour la littérature russe, ou
vous ne faites pas partie des « écrivains sérieux ». Les personnages types
Or, telle n’est pas la manière de Dostoïevski. Ses romans, certes imbriqués
dans la réalité sociale, n’ont pas un arrière-plan aussi vaste que ceux de
bien ce que Dostoïevski entend lorsqu’il parle d’« œuvre à thème majeur »
tourmentait au point qu’il lui semblait être moins habile que les autres. Ce
qu’il n’avait pas considéré, c’est que le niveau de réel qu’il atteint dans ses
écrits – le réel profond spirituel – allait en faire des modèles immortels, que
grâce à eux la littérature réaliste acquerrait une nouvelle créativité, plus de
possible.
Le réel profond spirituel est le plus haut niveau de réel dans le roman
qu’il n’est ici pas question de détails, d’une intrigue ou d’une histoire, mais
avait pour eux beaucoup d’empathie, une profonde compassion qui lui a
comme le plus imposant roman jamais écrit, on peut regretter que ce soit du
plus profond du réel – qu’il faut examiner son œuvre pour comprendre que,
sans l’ombre d’un doute, il a élevé le niveau global de restitution du réel, lui
Autrement dit, il l’a poussé dans son retranchement ultime, et par là a mis
reprendre à zéro.
pouvait plus que décliner. Pour la littérature cela n’avait rien d’une chance,
dans l’incapacité de régler son loyer il est obligé de se cacher pour sortir :
venu à fuir non pas seulement la rencontre de sa logeuse, mais tout rapport
Suite à cet étalage initial d’intériorité, on pénètre vite plus avant dans
L’obscurité était déjà complète, lorsqu’il fut réveillé par un bruit terrible.
Quelle scène affreuse se passait, mon Dieu ! C’étaient des cris, des
gémissements, des grincements de dents, des larmes, des coups, des injures,
comme il n’en avait jamais entendu ni vu. Epouvanté, il s’assit sur son lit ;
retentissement des coups frappés, les plaintes, les invectives arrivaient plus
comprendre ce qu’elle disait, mais sans doute elle demandait qu’on cessât
sorte que ses paroles étaient elles aussi inintelligibles. Soudain Raskolnikoff
Raskolnikoff tomba sans force sur le divan, mais il ne put plus fermer
l’œil ; pendant une demi-heure, il resta en proie à une épouvante telle qu’il
31
n’en avait jamais éprouvé de semblable .
qu’il n’est plus un être normal mais un assassin. C’est une manière de
la logeuse. Si bien que lorsque pour la première fois, à cause d’un accident,
commençant par les plus anciens, pour continuer par Lycurgue, Solon,
Mahomet, Napoléon, etc., que tous, sans exception, ont été des criminels,
car en donnant de nouvelles lois, ils ont par cela même violé les anciennes,
certainement ils ne reculaient pas non plus devant l’effusion du sang, dès
des chiffres dont je fais bon marché. Je crois seulement qu’au fond ma
pensée est juste. Elle revient à dire que la nature partage les hommes en
talent de faire entendre dans leur milieu un mot nouveau. Les subdivisions,
… J’ai voulu tuer sans casuistique, tuer pour moi, pour moi seul ! Même
dans une pareille affaire j’ai dédaigné de ruser avec ma conscience. Si j’ai
meurtre devait m’aider à conquérir. Non, non, tout cela était loin de mon
parasite social !… Et l’argent n’a pas été pour moi le principal mobile de
Mais voyons, comment ai-je tué ? Est-ce ainsi qu’on tue ? S’y prend-on
raconterai un jour les détails… Est-ce que j’ai tué la vieille ? Non, c’est
moi que j’ai tué, que j’ai perdu sans retour !… Quant à ma vieille, elle a été
33
tuée par le diable, et non par moi .
criminelle des âmes étincelle de leur tendre lumière. S’il arrive que la loi
soit dans l’incapacité de poursuivre un individu pour ses crimes, jamais une
âme vivante n’y sera indifférente. Tout chez Raskolnikoff découle de son
crime. C’est un assassin, c’est aussi une âme vivante, et sans doute, l’âme
est l’ennemie du crime. Pourtant elle est aussi sa complice. Pas un instant,
et de lutter pour savoir si elle sera l’ennemie du criminel ou son amie, pas
un instant elle ne le laisse en répit. Et c’est la vie, tremblante, qui finit par
triompher :
que voici ? Le mot Compagnie est écrit là : le lirai-je alors comme je le lis
assassin ! »
jusqu’à terre et baisa avec joie le sol boueux. Après s’être relevé, il
s’agenouilla de nouveau.
son assurance, et les mots : « J’ai tué », qui allaient peut-être sortir de sa
bouche, expirèrent sur ses lèvres. Les exclamations, les lazzi de la foule le
se constituer prisonnier parce que son âme a rendu son verdict : les neuf
lumière – ce n’est pas sur une âme morte qu’il s’arrête pour nous en
dévoiler le réel. Autre exemple d’âme qui respire et nous émerveille : celle
Il descendit le perron sans s’arrêter. Son âme exaltée avait soif de liberté,
la voie lactée. La nuit sereine enveloppait la terre. Les tours blanches et les
fauché, il se prosterna.
différence entre une « grande » et une « petite » âme. Par ses écrits, en
seront condamnés à n’être que brins d’herbe au pied de son arbre, où leurs
découvrir tant les organes essentiels que les appendices inutiles, et peut-être
font partie le réel mondain, qui serait la peau, le réel vital, qui serait
l’ossature, et le réel spirituel, qui serait le cœur. Tous sont nécessaires si l’on
C’est bien parce que les parois qui séparent ces différents niveaux sont
lecteurs chinois sont d’une adorable candeur face au réel littéraire, souvent
comme les enfants d’une lointaine campagne : soit ils détestent la littérature
à la manière du paysan qui détesterait la ville, soit ils en sont fous, comme
rire, à pleurer et à battre des mains, et que dans les journaux, à la télévision
brandissant bien haut les deux poings. Certains critiques – de ceux qui ont
avec les médias qui en se développant ont perdu leur conscience pour berner
histoires, qui pour les éduquer les haranguent du haut de leur piédestal,
grossièreté et font des gestes de tous les jours. Prenons par exemple ces
« nouveaux héros » dont nous abreuvent les nouvelles et les romans primés,
ou ces personnages types qui déferlent sur nos écrans : parce qu’ils ont le
juron facile et osent déclarer en termes crus leur amour à la gent féminine,
pour les auteurs, mais les pauvres lecteurs dont ils se jouent sont, eux,
humiliés et lésés.
Le réel fallacieux se faufile souvent entre les mailles de son filet pour
implorer auprès du réel vital. Parce que si le réel mondain peut l’aider à
ces auteurs qui se servent de Lu Xun pour prouver leur profondeur et leur
justesse, mais sont incapables quand ils écrivent de faire courir la plume à
sa manière.
ceux qui ont le mieux réussi dans le domaine du réalisme mondain, auprès
36
des Zhou Zuoren, Eileen Chang, Hu Lancheng et consorts. Politiquement
parlant, c’est inconcevable. Shen Congwen lui aussi pourrait leur fournir
des idées quant aux bijoux et parures susceptibles d’enjoliver leurs histoires.
évidente, il se dégonfle, ce qu’il veut à tout prix éviter. Mais s’alignant sur
le réel mondain, dont il emprunte la technique et la résilience, il
progresse…
Et l’aide qu’il consent à lui offrir permet au réel mondain d’être conforté
le soutien dont dépend son succès. Seule exception : Eileen Chang, dont le
façon, les plus gros bénéficiaires sont ceux dont l’œuvre relève de la version
sociale. Tant pis si la version populaire, indûment négligée, est plus à même
de décrire le visage du petit peuple, plus proche des réalités de la vie des
classes inférieures. Qu’on parle beauté ou laideur, bien ou mal, il lui est plus
reconnu à ces deux niveaux vous assied plus solidement et pour plus
longtemps dans la liste des classiques. Ainsi de Shen Congwen avec les
ne comprennent pas ou très peu d’éléments de réel vital, elles sont tellement
vue – qui ne regarde que moi –, ce ne sont pas ses meilleures nouvelles.
Parce qu’il leur manque trop de la qualité du vital, que pas assez de sang ne
coule dans leurs veines. Sinon, effectivement, ce sont de très beaux textes,
et dès que j’en ai le loisir, moi aussi il m’arrive de les parcourir, d’en lire en
oublié. Au bout du compte, dire de la fiction que c’est l’art du langage, c’est
user d’une formule qui va droit au cœur, mais a trop été mise en pratique. Et
ces deux nouvelles, sans l’ombre d’un doute, sont exagérément parsemées
mondaine qui ne tend pas au réel vital, au vrai visage de la vie, va forcément
finir dans la malle des produits exquis, plutôt qu’être admise parmi les
mondaine vers ce réel vital. Devenu pour lui la limite, le but à atteindre,
C’est cette capacité qui l’a propulsé au panthéon. Ceci dit, entre le réel vital
peu juste. Mais le fait qu’en dépit d’une carrière littéraire assez brève il ait
angulaire, le trépied qui fait de lui cet authentique « nec plus ultra ».
Si nous plaçons d’un côté Lu Xun, de l’autre Tolstoï et Dostoïevski sur les
plus) pencher plus d’un côté que de l’autre. D’où notre tendance à éviter ce
n’avons pas le choix, à rester sur notre quant-à-soi. Si ce n’est pas la preuve
l’amour que nous avons pour Lu Xun – lui qui aurait autant raillé de telles
saurions nier que dans son œuvre, certaines sont petites (le vieux Shuan du
39
Remède , par exemple), il nous est tout autant impossible de refuser la
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S’ils n’avaient pas la même foi, Dostoïevski et Cao Xueqin étaient de
grandes âmes, de ces âmes tendres, meilleures et plus que tout autres
Ces deux génies avaient les yeux emplis de larmes, qui fussent-elles de
des larmes d’amour et de compassion. Tous deux ont été des pics de la
littérature du monde, qui tous deux nous disent, dans leurs styles différents :
création poétique ont d’abord été l’écho, disparu, d’un grand amour enfoui
41
dans notre âme et sous nos sentiments .
Ce grand amour dont parlent ici Liu Zaifu et sa fille Jianmei pèse en gros
le poids d’une âme. C’est ce qui fait la différence entre les petites et les
réel spirituel, je ne vois pas en quoi nous devrions chercher la petite bête à
Mais peu importe : que le réel exprimé soit fallacieux, mondain, vital ou
paliers : force est d’admettre qu’ils s’appuient les uns sur les autres,
n’est jamais difficile de les identifier. Si le réel mondain est apte aux
incursions dans le vital, celui-ci peut tout à fait se risquer dans le spirituel,
tenter une pointe vers ses tréfonds. Ne nous arrive-t-il jamais lors de nos
avec celles de Lu Xun, que l’on parle de réel vital ou de réel spirituel. Et
Hong ne valent pas Lu Xun, s’il y a entre eux des différences de poids et de
Dickens, pour leur part, nous enseignent que, quelle que soit la manière
niveaux du réel sont imbriqués et s’appuient les uns sur les autres.
réalisme. Le réalisme, c’est le dessin d’après nature et les croquis sur le vif
effrayant.
Nos écrits ont deux arrière-plans : l’époque postsocialiste qui est la nôtre,
soit une donnée sur laquelle nous n’avons aucun pouvoir, mais à laquelle il
s’arrêtera-t-il ?
Congwen. Insister pour établir ces parallèles et se lamenter, c’est oublier les
gigantesques bouleversements qui se sont entretemps produits, considérer le
e
XXI siècle avec les yeux du réalisme, ou plutôt du réalisme traditionnel. Si
nous continuons de nous fonder sur ses niveaux de réel pour décider de la
moins bonne que la moderne, nos auteurs moins grands et vénérables que
l’arrière-plan social, bien réel, auquel il est confronté, et son acquis culturel,
dans le réalisme.
sur un terrain de sport : là aussi il y a des règles. Sans le stade et sans ces
c’est qu’une littérature qui accepte de se laisser imposer des limites par le
régime et le système (le terrain et les règles) n’est sans doute pas une
pour briser les frontières et les règles qu’elle a été inventée ; tandis que le
sport, lui, l’a été pour s’y conformer. Si sous un régime, à l’intérieur d’un
de réalisme devient aussi ridicule et absurde que cette histoire des singes
qui font cercle autour d’un puits pour essayer d’y pêcher la lune. Telles sont
elle est produite et écrite, se glorifiant en plus de cette porte fermée, ou mi-
années –, c’est que les conditions n’ont pas changé, il n’y a aucune
qu’aucune autre forme n’était autorisée. Tandis que dans les trente qui ont
suivi, d’autres ont été tolérées. Faire dépasser à la littérature chinoise ce réel
malheureusement les écrivains n’en ont plus guère envie. Le réel fallacieux
leur est devenu nécessaire, car il leur permet de prospérer. Beaucoup, s’ils y
courant, jouer la comédie ou n’en pouvoir mais, appelez cela comme vous
l’écrivain qui est monnaie d’échange. Le dépassement lui est devenu un défi
n’a plus qu’à faire signe pour l’appâter. Devenu nécessité commune pour le
contrevenir à cette règle qui veut qu’on n’ait pas besoin de tirer le bœuf au
bord de la rivière, ce n’est pas nécessaire, même s’il risquait d’en résulter
compter avec l’écrivain lui-même. Avec son cœur, en tant qu’être humain.
prône l’homme en tant qu’être social (et non être humain) et fuit l’analyse
sang caché dans leurs veines. Quand nous prenons la plume, que nous
affecte la manière dont nous allons décrire un caractère et déteint sur notre
une digue qui interdit d’aller plus loin. Il faudrait tout changer, la franchir –
ce qui dans le passé est arrivé – mais aujourd’hui nous stagnons, comme
aussi du fait que l’imaginaire est sous contrôle. Elle vient de l’habitude de
du réel vital.
fait été particulièrement chéri, et popularisé, par les nazis. Son roman, qui
l’auteur).
temps des nazis, éditions Wenhui pour la version chinoise, Shanghai, 2006,
p. 44 (note de l’auteur).
The political parties which are now crystallising themselves are the
result of the Liberal movement which began in the twenties, and
proceeded steadily until the beginning of the war in 1904, when the
Liberal leaders resolved, for patriotic reasons, to mark time and wait.
This cessation of hostilities did not last long, and the disasters caused
by the war produced so universal a feeling of discontent that the
liberation movement was automatically set in motion once more.
On the 19th of June, 1905, a deputation of the United Zemstva, at
the head of which was Prince S. N. Troubetzkoi, was received by the
Emperor. Prince Troubetzkoi, in a historic speech, expressed with
the utmost frankness and directness the imperative need of sweeping
reform and of the introduction of national representation. The
coalition of the Zemstva formed the first political Russian party, but
it was not until after the great strike, and the granting of the
Manifesto in October, that parties of different shades came into
existence and took definite shape. During the month which followed
the Manifesto the process of crystallisation of parties began, and is
still continuing, and they can now roughly be divided into three
categories—Right, Centre, and Left, the Right being the extreme
Conservatives, the Centre the Constitutional Monarchists, and the
Left consisting of two wings, the Constitutional Democrats on the
right and the Social Democrats and Social Revolutionaries on the
left. Of these the most important is the party of the Constitutional
Democrats, nicknamed the “Cadets.” “Cadets” means “K.D.,” the
word “Constitutional” being spelt with a “K” in Russian, and as the
letter “K” in the Russian alphabet has the same sound as it has in
French, the result is a word which sounds exactly like the French
word “Cadet.” Similarly, Social Revolutionaries are nicknamed
“S.R.’s” and the Social Democrats “S.D.’s.”
In order to understand the origin of the Constitutional Democrats
one must understand the part played by the Zemstva. In 1876 a
group of County Councillors, or Zemstvoists, under the leadership of
M. Petrunkevitch devoted themselves to the task of introducing
reforms in the economical condition of Russia. In 1894 their
representatives, headed by M. Rodichev, were summarily sent about
their business, after putting forward a few moderate demands. In
1902 these men formed with others a “League of Liberation.” M.
Schipov tried to unite these various “Zemstva” in a common
organisation, and some of the members of the Liberation League,
while co-operating with them, started a separate organisation called
the Zemstvo Constitutionalists. Among the members of this group
were names which are well known in Russia, such as Prince
Dolgoroukov, MM. Stachovitch, Kokoshkin, and Lvov. But these
“Zemstvoists” formed only a small group; what they needed, in order
to represent thinking Russia, was to be united with the professional
classes. In November, 1904, the various professions began to group
themselves together in political bodies. Various political unions were
formed, such as those of the engineers, doctors, lawyers, and
schoolmasters. Then Professor Milioukov, one of the leading
pioneers of the Liberal movement, whose name is well known in
Europe and America, united all professional unions into a great
“Union of Unions,” which represented the great mass of educated
Russia. Before the great strike in October, 1905, he created, together
with the best of his colleagues, a new political party, which united the
mass of professional opinion with the small group of Zemstvo
leaders. He had recognised the fact that the Zemstvoists were the
only men who had any political experience, and that they could do
nothing without enrolling the professional class. Therefore it is
owing to Professor Milioukov that the experienced Zemstvo leaders
in October had the whole rank and file of the middle class behind
them, and the Constitutional Democrats, as they are at present,
represent practically the whole “Intelligenzia,” or professional class,
of Russia. This party is the only one which is seriously and practically
organised. This being so, it is the most important of the political
parties.
Those of the Right have not enough followers to give them
importance, and those of the Left have announced their intention of
boycotting the elections. These various parties are now preparing for
the elections.
We are experiencing now the suspense of an entr’acte before the
curtain rises once more on the next act of the revolutionary drama.
This will probably occur when the Duma meets in April. People of all
parties seem to be agreed as to one thing, that the present state of
things cannot last. There is at present a reaction against reaction.
After the disorders here in December many people were driven to the
Right; now the reactionary conduct of the Government has driven
them back to the Left.
So many people have been arrested lately that there is no longer
room for them in prison. An influential political leader said to me
yesterday that a proof of the incompetence of the police was that they
had not foreseen the armed rising in December, whereas every one
else had foreseen it. “And now,” he said, “they have been, so to speak,
let loose on the paths of repression; old papers and old cases,
sometimes of forty years ago, are raked up, and people are arrested
for no reason except that the old machine, which is broken and
thoroughly out of order, has been set working with renewed energy.”
The following conversation is related to me—if it is not true (and I
am convinced that it is not true) it is typical—as having taken place
between a Minister and his subordinate:—
The Subordinate: There are so many people in prison that there is
no possibility of getting in another man. The prisons are packed, yet
arrests are still being made. What are we to do? Where are these
people to be put?
The Minister: We must let some of the prisoners out.
The Subordinate: How many?
The Minister: Say five thousand.
The Subordinate: Why five thousand?
The Minister: A nice even number.
The Subordinate: But how? Which? How shall we choose them?
The Minister: Let out any five thousand. What does it matter to
them? Any five thousand will be as pleased as any other to be let out.
It is interesting to note that last November the Minister of the
Interior was reported to have said that if he could be given a free
hand to arrest twenty thousand “intellectuals,” he would stop the
revolution. The twenty thousand have been arrested, but the
revolution has not been stopped.
So far, in spite of the many manifestoes, no guarantee of a
Constitution has been granted. The Emperor has, it is true, declared
that he will fulfil the promises made in his declaration of the 17th of
October, and it is true that if these promises were fulfilled, the result
would be Constitutional Government. But at the same time he
declared that his absolute power remained intact. At first sight this
appears to be a contradiction in terms; but, as the Power which
granted the Manifesto of October 17th was autocratic and unlimited,
and as it made no mention of the future limiting of itself, it is now, as
a matter of fact, not proceeding contrarily to any of its promises. The
liberties which were promised may only have been meant to be
temporary. They could be withdrawn at any moment, since the
Emperor’s autocratic power remained. The Manifesto might only
have been a sign of goodwill of the Emperor towards his people. It
promised certain things, but gave no guarantee as to the fulfilment of
these promises. The whole of Russia, it is true, understood it
otherwise. The whole of Russia understood when this Manifesto was
published that a Constitution had been promised, and that autocracy
was in future to be limited. What Count Witte understood by it, it is
difficult to say. Whether he foresaw or not that this Manifesto by its
vagueness would one day mean much less than it did then, or
whether he only realised this at the same time that he realised that
the Conservative element was much stronger than it was thought to
be, it is impossible to determine. The fact remains that the Emperor
has not withdrawn anything; he has merely not done what he never
said he would do, namely, voluntarily abdicate his autocratic power.
The Conservatives are opposed to any such proceeding; not in the
same way as the extreme reactionaries, some of whom relegated the
portrait of the Emperor to the scullery on the day of the Manifesto
from sheer Conservative principle, but because they say that if the
autocratic power is destroyed the peasant population will be
convulsed, and the danger will be immense. To this Liberals—all
liberal-minded men, not revolutionaries—reply that this supposed
danger is a delusion of the Conservatives, who have unconsciously
invented the fact to support their theory and have not based their
theory on the fact; that many peasants clearly understand and
recognise that there is to be a constitutional régime in Russia; that if
this danger does exist, the risk incurred by it must be taken; that in
any case it is the lesser of two evils, less dangerous than the
maintenance of the autocracy.
Count Witte’s opponents on the Liberal side say that the course of
events up to this moment has been deliberately brought about by
Count Witte; that he disbelieved and disbelieves in Constitutional
Government for Russia; that he provoked disorder in order to crush
the revolutionary element; that the Moderate parties played into his
hands by not meeting him with a united front; that, Duma or no
Duma, he intends everything to remain as before and the power to be
in his hands. What his supporters say I do not know, because I have
never seen one in the flesh, but I have seen many people who say that
what has happened so far has been brought about with infinite skill
and knowledge of the elements with which he had to deal. Further,
they add that Count Witte has no principles and no convictions; that
he has always accommodated himself to the situation of the moment,
and worked in harmony with the men of the moment, whatever they
were; that he has no belief in the force or the stability of any
movement in Russia; that he trusts the Russian character to simmer
down after it has violently fizzed; that he intends to outstay the
fizzing period; that he has a great advantage in the attitude of the
Moderate parties, who, although they do not trust him, play into his
hands by disagreeing on small points and not meeting him with clear
and definite opposition. They add, however, that he has
miscalculated and wrongly gauged the situation this time, because
the simmering down period will only be temporary and the fizzing
will be renewed again with increasing violence, until either the cork
flies into space or the bottle is burst. The cork is autocracy, the bottle
Russia, and the mineral water the revolution. The corkscrew was the
promise of a Constitution with which the cork was partially loosened,
only to be screwed down again by Count Witte’s powerful hand.
Among all the parties the most logical seem to be the Extreme
Conservatives and the Extreme Radicals. The Extreme Conservatives
have said all along that the talk of a Constitution was nonsensical,
and the Manifesto of October 17th a great betrayal; that the only
result of it has been disorder, riot, and bloodshed. They are firmly
based on a principle. The Extreme Radicals are equally firmly based
on a principle, namely, that the autocratic régime must be done away
with at all costs, and that until it is swept away and a Constitution
based on universal suffrage takes its place there is no hope for
Russia. Therefore the danger that the Moderate parties may
eventually be submerged and the two extremes be left face to face,
still exists. As a great quantity of the Radicals are in prison they are
for the time being less perceptible; but this era of repression cannot
last, and it has already created a reaction against itself. But then the
question arises, what will happen when it stops? What will happen
when the valve on which the police have been sitting is released?
The influential political leader with whom I dined last night, and
who is one of the leading members of the party of October 17th, said
that there was not a man in Russia who believed in Witte, that Witte
was a man who had no convictions. I asked why he himself and other
Zemstvo leaders had refused to take part in the administration
directly after the Manifesto had been issued, when posts in the
Cabinet were offered to them. He said their terms had been that the
Cabinet should be exclusively formed of Liberal leaders; but they did
not choose to serve in company with a man like Durnovo, with whom
he would refuse to shake hands.
He added that it would not have bettered their position in the
country with regard to the coming Duma, which he was convinced
would be Liberal. Talking of the Constitutional Democrats he said
they were really republicans but did not dare own it.
CHAPTER XIII
IN THE COUNTRY
When one has seen a thing which had hitherto been vaguely familiar
suddenly illuminated by a flood of light, making it real, living, and
vivid, it is difficult to recall one’s old state of mind before the inrush
of the illuminating flood; and still more difficult to discuss that thing
with people who have not had the opportunity of illumination. The
experience is similar to that which a child feels when, after having
worshipped a certain writer of novels or tales, and wondered why he
was not acknowledged by the whole world to be the greatest author
that has ever been, he grows up, and by reading other books, sees the
old favourite in a new light, the light of fresh horizons opened by
great masterpieces; in this new light the old favourite seems to be a
sorry enough impostor, his golden glamour has faded to tinsel. The
grown-up child will now with difficulty try to discover what was the
cause and secret of his old infatuation, and every now and then he
will receive a shock on hearing some fellow grown-up person talk of
the former idol in the same terms as he would have talked of him
when a child, the reason being that this second person has never got
farther; has never reached the illuminating light of new horizons. So
it is with many things; and so it is in my case with Russia. I find it
extremely difficult to recall exactly what I thought Russia was before
I had been there; and I find Russia difficult to describe to those who
have never been there. There is so much when one has been there
that becomes so soon a matter of course that it no longer strikes one,
but which to the newcomer is probably striking.
The first time I came to Russia I travelled straight to the small
village where I am now staying. What did I imagine Russia to be like?
All I can think of now is that there was a big blank in my mind. I had
read translations of Russian books, but they had left no definite
picture or landscape in my mind; I had read some books about
Russia and got from them very definite pictures of a fantastic
country, which proved to be curiously unlike Russia in every respect.
A country where feudal castles, Pevenseys and Hurstmonceuxs,
loomed in a kind of Rhine-land covered with snow, inhabited by
mute, inglorious Bismarcks, and Princesses who carried about
dynamite in their cigarette-cases and wore bombs in their tiaras;
Princesses who owed much of their being to Ouida, and some of it to
Sardou.
Then everything in these books was so gloriously managed;
everybody was so efficient, so powerful; the Bismarcks so
Machiavellian and so mighty; the Princesses so splendide mendaces.
The background was also gorgeous, barbaric, crowded with Tartars
and Circassians, blazing with scimitars, pennons, armour, and
sequins, like a scene in a Drury Lane pantomime; and every now and
then a fugitive household would gallop in the snow through a
primæval forest, throwing their children to the wolves, so as to
escape being devoured themselves. This, I think, was the impression
of Russia which I derived before I went there from reading French
and English fiction about Russia, from Jules Verne’s “Michel
Strogoff,” and from memories of many melodramas. Then came the
impressions received from reading Russian books, which were again
totally different from this melodramatic atmosphere.
From Russian novels I derived a clear idea of certain types of men
who drank tea out of a samovar and drove forty versts in a vehicle
called a Tarantass. I made the acquaintance of all kinds of people,
who were as real to me as living acquaintances; of Natascha and
Levine, and Pierre and Anna Karenine, and Basaroff, and Dolly, and
many others. But I never saw their setting clearly, I never realised
their background, and I used to see them move before a French or
German background. Then I saw the real thing, and it was utterly
and totally different from my imaginations and my expectations. But
now when I try to give the slightest sketch of what the country is
really like the old difficulty presents itself; the difficulty which arises
from talking of a thing of which one has a clear idea to people who
have a vague and probably false idea of the reality. The first thing one
can safely say is this: eliminate all notions of castles, Rhine country,
feudal keeps, and stone houses in general. Think of an endless plain,
a sheet of dazzling snow in winter, an ocean of golden corn in
summer, a tract of brown earth in autumn, and now in the earliest
days of spring an expanse of white melting snow, with great patches
of brown earth and sometimes green grass appearing at intervals,
and further patches of half-melted snow of a steely-grey colour,
sometimes blue as they catch the reflection of the dazzling sky in the
sunlight. In the distance on one side the plain stretches to infinity, on
the other you may see the delicate shapes of a brown, leafless wood,
the outlines soft in the haze. If I had to describe Russia in three
words I should say a plain, a windmill, and a church. The church is
made of wood, and is built in Byzantine style, with a small cupola
and a minaret. It is painted red and white, or white and pale-green.
Sometimes the cupola is gilt.
The plain is dotted with villages, and one village is very like
another. They consist generally of two rows of houses, forming what
does duty for a street, but the word street would be as misleading as
possible in this case. It would be more exact to say an exceedingly
broad expanse of earth: dusty in summer, and in spring and autumn
a swamp of deep soaking black mud. The houses, at irregular
intervals, sometimes huddled close together, sometimes with wide
gaps between them, succeed each other (the gaps probably caused by
the fact that the houses which were there have been burnt). They are
made of logs, thatched with straw; sometimes (but rarely) they are
made of bricks and roofed with iron. As a rule they look as if they had
been built by Robinson Crusoe. The road is strewn with straw and
rich in abundance of every kind of mess. Every now and then there is
a well of the primitive kind which we see on the banks of the Nile,
and which one imagines to be of the same pattern as those from
which the people in the Old Testament drew their water. The roads
are generally peopled with peasants driving at a leisurely walk in
winter in big wooden sledges and in summer in big wooden carts.
Often the cart is going on by itself with somebody in the extreme
distance every now and then grunting at the horse. A plain, a village,
a church, every now and then a wood of birch-trees, every now and
then a stream, a weir, and a broken-down lock. A great deal of dirt, a
great deal of moisture. An overwhelming feeling of space and
leisureliness, a sense that nothing you could say or do could possibly
hurry anybody or anything, or make the lazy, creaking wheels of life
go faster—that is, I think, the picture which arises first in my mind
when I think of the Russian country.
Then as to the people. With regard to these, there is one fact of
capital importance which must be borne in mind. The people if you
know the language and if you don’t are two separate things. The first
time I went to Russia I did not know a word of the language, and,
though certain facts were obvious with regard to the people, I found
it a vastly different thing when I could talk to them myself. So
different that I am persuaded that those who wish to study this
country and do not know the language are wasting their time, and
might with greater profit study the suburbs of London or the Isle of
Man. And here again a fresh difficulty arises. All the amusing things
one hears said in this country, all that is characteristic and smells of
the Russian land, all that is peculiarly Russian, is like everything
which is peculiarly anything, peculiarly English, Irish, Italian, or
Turkish, untranslatable, and loses all its savour and point in
translation. This is especially true with regard to the Russian
language, which is rich in peculiar phrases and locutions,
diminutives, and terms which range over a whole scale of delicate
shades of endearment and familiarity, such as “little pigeon,” “little
father,” &c., and these phrases translated into any other language
lose all their meaning. However, the main impression I received
when I first came to Russia, and the impression which I received
from the Russian soldiers with whom I mingled in Manchuria in the
war, the impression which is now the strongest with regard to them
is that of humaneness. Those who read in the newspapers of acts of
brutality and ferocity, of houses set on fire and pillaged, of huge
massacres of Jews, of ruthless executions and arbitrary
imprisonments, will rub their eyes perhaps and think that I must be
insane. It is true, nevertheless. A country which is in a state of
revolution is no more in its normal condition than a man when he is
intoxicated. If a man is soaked in alcohol and then murders his wife
and children and sets his house on fire, it does not necessarily prove
that he is not a humane member of society. He may be as gentle as a
dormouse and as timid as a hare by nature. His excitement and
demented behaviour are merely artificial. It seems to me now that
the whole of Russia at this moment is like an intoxicated man; a man
inebriated after starvation, and passing from fits of frenzy to sullen
stupor. The truth of this has been illustrated by things which have
lately occurred in the country. Peasants who have looted the spirit
stores and destroyed every house within reach have repented with
tears on the next day.
The peasants have an infinite capacity for pity and remorse, and
therefore the more violent their outbreaks of fury the more bitter is
their remorse. A peasant has been known to worry himself almost to
death, as if he had committed a terrible crime, because he had
smoked a cigarette before receiving the Blessed Sacrament. If they
can feel acute remorse for such things, much more acute will it be if
they set houses on fire or commit similar outrages. If you talk to a
peasant for two minutes you will notice that he has a fervent belief in
a great, good, and inscrutable Providence. He never accuses man of
the calamities to which flesh is heir. When the railway strike was at
its height, and we were held up at a small side station, the train
attendant repeated all day long that God had sent us a severe trial,
which He had. Yesterday I had a talk with a man who had returned
from the war; he had been a soldier and a surgeon’s assistant, and
had received the Cross of St. George for rescuing a wounded officer
under fire. I asked him if he had been wounded. He said, “No, my
clothes were not even touched; men all around me were wounded.
This was the ordinance of God. God had pity on the orphan’s tears. It
was all prearranged thus that I was to come home. So it was to be.” I
also had tea with a stonemason yesterday who said to me, “I and my
whole family have prayed for you in your absence because these are
times of trouble, and we did not know what bitter cup you might not
have to drink.” Then he gave me three new-laid eggs with which to
eat his very good health.
March 29th.
To-day I went out riding through the leafless woods and I saw one
of the most beautiful sights I have ever seen, a sight peculiarly
characteristic of Russian landscape. We passed a small river that up
to now has been frozen, but the thaw has come and with it the floods
of spring. The whole valley as seen from the higher slopes of the
woods was a sheet of shining water. Beyond it in the distance was a
line of dark-brown woods. The water was grey, with gleaming layers
in it reflecting the white clouds and the blue sky; and on it the bare
trees seemed to float and rise like delicate ghosts, casting clearly
defined brown reflections. The whole place had a look of magic and
enchantment about it, as if out of the elements of the winter, out of
the snow and the ice and the leafless boughs, the spring had devised
and evoked a silvery pageant to celebrate its resurrection.