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Cours de droit civil, Introduction au droit, Les obligations

INP HB de Yamoussoukro Année académique 2016-2017


Ecole préparatoire : ECS 2e année
Enseignante : Bégnara M'BRA

DEUXIÈME PARTIE - LES OBLIGATIONS


Sources :
 COULIBALY (C. J.), Droit civil, Les obligations, Les éditions ABC, Abidjan, 2015.
 BONY (R.S.), Droit des obligations, 4e éd., Les éditions ABC, Abidjan, 2013.
 BIRH (Ph.), Droit civil général, 17e éd., Dalloz, Paris, 2008.
 FABRE-MAGNAN (M.), Droit des obligations, t. 1 - Contrat et engagement unilatéral, 2e éd., PUF,
2010, et t. 2 - Responsabilité civile et quasi-contrat, 2e éd., PUF, 2008.
 DELEBECQUE (Ph.), PANSIER (F.-J.), Droit des obligations, 1. Contrat et quasi-contrat, 4e éd.,
LexisNexis, Paris, 2006.

Introduction

L'importance du droit des obligations. Le droit des obligations est l'ensemble des
règles régissant les liens de droit par lesquels les membres de la société sont tenus les uns
envers les autres. Comme l'a relevé un auteur (Climanlo COULIBALY), le droit des
obligations revêt une importance considérable à la fois pratique et théorique.
L'importance pratique de la matière est évidente, car la théorie des obligations constitue
la base de la vie juridique. Par ailleurs, le droit des obligations n'est pas autre chose que la
mise en oeuvre des rapports économiques entre les hommes.
Au plan théorique, ce droit, ce droit a toujours retenu l'attention des juristes, car il revêt
un capital scientifique considérable.
Mais, indépendamment de ce droit, les principes du droit des obligations ont envahi tous
les domaines du droit, non seulement toutes les branches du droit civil, mais les branches du
droit du travail, et aussi le droit public (droit administratif...).

Les sources du droit des obligations. Il convient de noter ici qu'à la différence du droit
de la famille, le droit ivoirien des obligations ne présente aucune spécificité par rapport au
droit français, pour deux raisons :

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1° Les droits traditionnels, s'ils n'ignorent pas la notion de contrat, ne l'ont toutefois pas
systématisée comme dans les droits occidentaux.
2° Après l'accession à l'indépendance, le législateur ivoirien n'a pas jugé nécessaire d'adopter
une législation spécifique comme il l'a fait en droit de la famille : il a décidé de reconduire le
droit français. Cette position qui est celle de la majorité des législateurs africains a été écartée
par le législateur sénégalais.

Il faut enfin noter que les sources du droit des obligations sont le Code civil français dans
son état en vigueur avant 1960; la jurisprudence française et la jurisprudence ivoirienne, ainsi
que la doctrine.

Annonce du plan. L'étude des obligations que nous entamons aujourd'hui comprendra
trois chapitres :
Ch. 1. - La notion d'obligation
Ch. 2. - Les sources des obligations
Ch. 3. - La responsabilité civile.

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CHAPITRE 1 – La notion d'obligation


Annonce du plan.
Section 1. - La définition de l'obligation
Section 2. - Les caractères de l'obligation
Section 3. - La classification des obligations

Section 1. – La définition de l'obligation

Dans le langage courant, le verbe "obliger" signifie directement "contraindre, forcer à ".
Est obligé celui qui est contraint de faire quelque chose même s'il ne le veut pas ou ne le veut
plus. Quelque chose est obligatoire lorsque l'on ne peut s'y soustraire sans conséquences, et en
particulier sans engager sa responsabilité.
Exemple : chaque citoyen a l’obligation de payer ses impôts.

Etymologiquement, le terme "obligation", qui vient du latin obligare (ligare : lier) – le


débiteur est lié au créancier –, contient deux idées :
- dans l'obligation s'exprime la dette du débiteur ;
- figure aussi la créance dont jouit le créancier, à laquelle s'adjoint un pouvoir de contrainte.

En droit, une obligation est définie plus précisément comme un lien entre deux ou
plusieurs personnes, en vertu duquel l'une d'entre elles est tenue envers une ou plusieurs
autres de faire quelque chose. Une obligation implique dès lors au moins deux personnes,
celui qui doit (le débiteur, tenu d'une dette), et celui à qui l'on doit (le créancier, titulaire d'une
créance).
Le lien d'obligation a ainsi un double aspect : vu du côté passif, l'obligation est appelée
dette ; vu du côté actif, on l'appelle créance ; mais il s'agit des deux aspects de la même
obligation.
Exemple 1 : Akissi emprunte 10 000 F CFA à Aya ; Akissi a l’obligation de rembourser
à Aya les 10 000 F CFA qu'elle lui a prêtés. Akissi est débiteur envers Aya (elle a une dette
envers Aya). En revanche, Aya est son créancier ; elle est titulaire d’une créance envers
Akissi. Dans l’exemple ici, l’obligation prend sa source dans un contrat de prêt qui a été
conclu entre Aya et Akissi.

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Exemple 2 : un automobiliste renverse un piéton et le blesse légèrement. L'automobiliste


a l’obligation de réparer le dommage qu'il a fait subir à cette personne ; lui rembourser les
frais médicaux, les sommes qu’elle a perdues en n’allant pas au travail. Dans cet exemple,
l'automobiliste est le débiteur et le blessé son créancier ; mais à la différence de l’exemple
précédent, l’obligation n’a pas pris naissance dans un contrat ; elle est née à la suite d’un fait
juridique (un accident de la route).

Remarque : originairement on appelait obligation la prestation du débiteur, la dette qui


s'opposait à la créance, représentant le droit du créancier, mais aujourd'hui, on tend à
confondre obligation et droit personnel.

Section 2. – Les caractères de l’obligation

Il suffit de reprendre la définition de l’obligation qui a été donnée plus haut (lien de droit
existant entre deux personnes en vertu duquel l’une, le créancier, est en droit d'exiger de
l’autre, le débiteur, quelque chose), pour pouvoir affirmer que l’obligation à trois caractères :

§ 1. – L’obligation est un lien de droit


Dire que l'obligation est un lien de droit signifie que l'obligation est juridiquement
sanctionnée. Le créancier doit pouvoir obtenir, au besoin devant les tribunaux, l'exécution de
l'obligation de son débiteur.
Il en résulte que l’obligation se compose de deux éléments : la dette d’une part, et la
créance et la contrainte d’autre part. La contrainte, c’est ce qui permet au créancier en cas
d’inexécution par le débiteur de recourir à l’exécution forcée.
Il existe des hypothèses de dissociation de ces deux éléments : il existe des dettes sans
contrainte et inversement des contraintes sans dettes.

― Dette sans contrainte


Il s’agit de l’obligation naturelle : c’est, comme son nom l’indique, une obligation, mais
elle n’est assortie que d’une exécution volontaire, c’est-à-dire que vous avez le devoir de faire
quelque chose, mais si vous ne la faites pas, votre créancier ne pourra pas vous poursuivre en
justice.
Concrètement, l’on trouve deux catégories d’obligations naturelles :

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La première catégorie est constituée par les obligations naturelles qui ont succédé aux
obligations civiles ; la seconde catégorie est constituée par les obligations naturelles
indépendantes de toutes obligations civiles.

Exemple : en droit de la famille, chaque parent est tenu d’une obligation alimentaire
envers ses enfants, s’il s’agit d’enfant légitime ou reconnu : l’obligation alimentaire est une
obligation civile. L’enfant peut saisir la justice pour ses droits. Mais si l’enfant est adultérin
non reconnu, il n’y a pas de droit entre l’enfant et le parent. Le parent a l’obligation de fournir
des aliments à l’enfant, c’est une obligation morale. Si le parent ne s’exécute pas, l’enfant ne
pourra exiger le payement d’une pension.

― Contrainte sans dette


Cela veut dire que des personnes peuvent être poursuivies pour le paiement de quelque
chose alors qu’elles ne sont pas personnellement débitrices.
Exemple : le cautionnement : « contrat par lequel la caution s’engage, envers le
créancier qui accepte, à exécuter une obligation présente ou future contractée par le débiteur,
si celui-ci n’y satisfait pas lui-même » (art. 13, al. 1er Acte uniforme OHADA portant
organisation des sûretés). Dans ce cas, une personne, la caution pourra être poursuivie pour
payer le créancier si le débiteur principal n’exécute pas l’obligation qui lui incombe.

§ 2. – L’obligation est un lien de droit de nature pécuniaire


Lien de droit de nature pécuniaire signifie que l’obligation peut être évaluée en argent.
Toute obligation peut être ramenée à une valeur pécuniaire.
Dans la mesure où l’obligation peut être évaluée en argent, l’obligation est un droit
patrimonial, cela signifie qu’elle est un élément du patrimoine de la personne, et elle pourra
être transmise avec l’ensemble du patrimoine au décès de cette personne.

§ 3. – L’obligation est un lien de droit entre deux personnes


Étant un lien de droit entre deux personnes, l’on dit que l’obligation est un droit
personnel, droit personnel que l’on oppose au droit réel.
Cette opposition est fondamentale et constitue la summadivisio du droit patrimonial.
Le droit réel est le pouvoir juridique reconnu par le droit objectif à une personne qui
porte directement sur une chose. L’exemple caractéristique du droit réel, c’est le droit de
propriété.

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Au contraire, le droit personnel que l’on appelle également droit de créance, est le
pouvoir juridique qu’a une personne d’exiger d’une autre personne, de donner, de faire ou de
ne pas faire quelque chose.

Différences avec les droits réels :

1° - Ils diffèrent quant à leur origine et quant à leur transmission entre vifs.(entre personnes
vivantes)

Elle est aisée pour les droits réels, beaucoup plus difficile pour les droits personnels : la
cession de créance est possible, certes, mais nécessite un certain formalisme (v. Droit civil.
Les obligations) ; quant à la cession de dette, elle est en principe impossible.

Par contre, la transmission à cause de mort est toujours possible : l'héritier qui accepte
la succession reçoit les dettes comme les créances de son auteur.

2° - Ils diffèrent quant à leur opposabilité aux tiers.

Le droit réel est opposable à tous, à la seule condition que certaines formalités de
publicité soient dans certains cas respectées. Cela signifie que les tiers doivent respecter le
droit réel mais que son titulaire ne peut ne peut rien exiger d'eux.

Le droit personnel, en revanche, n'est opposable qu'au débiteur qui est, en principe,
seul tenu d'exécuter soit un fait positif : donner une chose ou faire quelque chose, soit un fait
négatif : s'abstenir de faire quelque chose. C'est pourquoi on dit que le droit personnel a un
effet relatif, c'est-à-dire qu'il ne concerne que les deux parties en présence.

3° - Ils diffèrent quant à leur effet sur le patrimoine de leur titulaire.

Le droit réel constitue uniquement un élément d'actif dans le patrimoine de son titulaire,
alors que le droit personnel se dédouble : il est un élément de l'actif dans le patrimoine du
créancier, élément du passif dans le patrimoine du débiteur.

4° - Ils diffèrent, enfin, quant aux prérogatives qu'ils confèrent à leur titulaire.

Alors que le droit réel comporte un droit de suite (le droit de suite lui permet de faire
saisir et vendre le bien, même s'il se trouve entre les mains de quelqu'un d'autres) et un droit
de préférence (le droit de préférence lui permet de se faire payer en priorité, avant les autres
créanciers), le droit personnel ne confère aucune de ses prérogatives, il ne confère au
créancier chirographaire qu'un droit général sur l'ensemble du patrimoine de son
débiteur (C. civ., art. 2285) et c'est pourquoi le créancier, qui veut être sûr d'être remboursé,

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doit garantir son droit en prenant une sûreté, c'est-à-dire un droit réel de garantie qui lui
conférera le droit de suite et le droit de préférence ; de simplement chirographaire, le
créancier deviendra hypothécaire, gagiste ou nanti.

Section 3. – La classification des obligations

Les obligations sont très variées. On ne peut les énumérer mais seulement les classer
généralement en fonction de leur source, de leur objet ou de leur force.

§ 1. – La classification des obligations d'après leur source

On appelle source d'une obligation le facteur qui lui donne naissance. Nous distinguerons
les classifications du Code civil (A) et celles de la doctrine (B).

A. – L’énumération des sources dans le Code civil


Le Code civil énumère cinq sources d'obligations : le contrat (art. 1101), le quasi-
contrat, le délit, le quasi-délit et la loi (C. civ., art. 1370).
Le délit et le quasi-délit (faits illicites) seront étudiés ensemble.

1 – Le contrat
Le contrat est source d'obligations. Dans une première approche, un contrat est un accord
de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer des obligations [ou ayant pour
effet de créer des obligations ou en vue de créer des obligations]. Les contrats sont multiples
et variés. Exemple : le prêt, la vente, le bail, le contrat de travail, etc. Le droit des obligations
étudie plus précisément le droit commun des contrats, c'est-à-dire l'ensemble des règles
communes applicables à tous les types de contrat. Les contrats concrets sont ensuite étudiés
dans le droit des contrats dits "spéciaux" (appelé parfois le droit des contrats civils et
commerciaux) qui détaille les autres règles applicables à chaque contrat précis en plus du
droit commun des contrats.

2 – Le quasi-contrat
Un quasi-contrat est un fait volontaire de l'homme dont il va résulter des obligations
similaires à celles qui seraient nées d'un contrat, mais sans qu'on puisse caractériser un contrat
dans la mesure où ces obligations n'ont pas leur source dans un échange de consentements.

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L’article 1371 du Code civil donne des quasi-contrats la définition suivante : « les quasi-
contrats sont les faits purement volontaires de l’homme, dont il résulte un engagement
quelconque envers un tiers, et quelques fois un engagement réciproque des deux parties ».

Les quasi-contrats, ainsi définis et complétés par la jurisprudence, comprennent trois faits
juridiques bien distincts. Ce sont : la gestion d’affaire (art. 1372 du Code civil), le paiement
de l’indu (art. 1376 du Code civil) et l’enrichissement sans cause (origine jurisprudentielle).

Il est à noter toutefois, concernant les quasi-contrats, que si les faits qui sont à leur
origine sont sont voulus par les auteurs, les obligations qui en résultent sont en revanche
involontaires. Elles sont imposées par la loi. Ainsi, c'est la loi qui par exemple prescrit la
répétition de l'indu à laquelle s'expose celui qui a reçu par erreur ou même sciemment une
prestation qui ne lui était pas due (cf. art. 1376 du C. civ.).
De même, en matière de gestion d'affaires, les obligations réciproques qui pèsent sur lé
gérant et le géré ne résultent pas de l'accord de volonté de ces personnes ; elles sont prescrites
par la loi (cf. art. 1372 à 1375 du C. civ.).

3 – Le délit et le quasi-délit
Un délit, au sens du droit civil, est le fait de causer un dommage à autrui
intentionnellement. L'auteur de cet acte sera tenu d'une obligation de réparer ce dommage. Le
délit au sens civil du terme est différent du sens pénal où le délit est, au sens général,
synonyme d'infraction, et, dans un sens plus précis, vise la catégorie d'infractions
intermédiaire entre les contraventions et les crimes.
Un quasi-délit est un fait illicite mais non intentionnel, c'est-à-dire commis sans
l'intention de causer le dommage mais uniquement par imprudence ou négligence. Exemple :
un accident de la circulation dû à une inondation.

Prévus par les articles 1382 et s. du Code civil, les délits et quasi-délits sont des faits
qui, ayant causé un dommage à autrui, obligent son auteur à le réparer. Le droit des délits et
des quasi-délits constitue ce que l'on appelle le droit de la responsabilité civile (voir chapitre 3
de la deuxième partie.

Il y a lieu de préciser que la différence entre le délit et le quasi-délit réside dans le fait
que le délit est intentionnel dans sa genèse (on a voulu causer le dommage) alors que le quasi-
délit procède d'un fait non intentionnel (on a causé le dommage par imprudence ou par
négligence).

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4 – La loi
La loi est bien évidemment source d'obligations. Exemple : les obligations légales qui
naissent entre propriétaires voisins, ou les obligations du tuteur. L'obligation naît ici non pas
de la volonté, mais de la loi. Mais étudier toutes les hypothèses où la loi oblige à faire quelque
chose, reviendrait à étudier toutes les branches du droit : le droit civil, le droit du travail, le
droit pénal, ou encore le droit administratif contiennent des obligations mises à la charge des
particuliers. Les obligations légales seront laissées de côté dans la mesure où elles sont
étudiées dans toutes les matières du droit.

Remarque : Cette présentation des sources des obligations par le Code civil a été
critiquée par la doctrine qui a proposé une autre classification.

B. – Les classifications doctrinales


La doctrine contemporaine a distingué deux grandes sources d'obligations : l'acte
juridique et le fait juridique.
L’acte juridique est une manifestation de volonté destinée à produire des effets de droit.
Il peut être l’œuvre d’une seule personne (c’est alors un acte juridique unilatéral), ou résulter
de l’accord de deux ou plusieurs personnes (c’est alors une convention ou un contrat).
Il en va ainsi du testament, qui est la volonté d’une personne de transmettre à sa mort
ses biens à ses héritiers. Il en va de même du contrat de vente, qui est un accord de volontés
entraînant des obligations : celles du vendeur de livrer la marchandise et celle de l’acheteur de
s’acquitter du prix.
Au contraire, le fait juridique est un événement matériel d’où découle des effets de
droit. On y mettra les délits et quasi-délits, les quasi-contrats et éventuellement la loi.

Remarque : le fait juridique est un événement d'où découlent des conséquences de droit,
sans que celles-ci aient été directement voulues. C'est la loi qui attache de tels effets à
certaines circonstances qu'elle détermine.

Ce qui caractérise le fait juridique, c'est l'effacement total du rôle de la volonté quant aux
effets de droit déclenchés par l'événement considéré. Mais peu importe que cet événement lui-
même soit volontaire ou non.

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§ 2. – La classification des obligations d'après leur objet


L'objet de l'obligation désigne ce à quoi le débiteur est tenu à l'égard du créancier. On
distinguera la classification du Code civil des classifications doctrinales.

A. – La classification du Code civil

Le Code civil détermine trois sortes d'obligations en fonction de leur objet :

1° – L'obligation de donner ou obligation de dare est celle qui impose au débiteur de


transférer la propriété d'une chose (vendue ou échangée) (art. 1136 à 1141 du C. civ.) ; elle
s'opère en principe par le seul effet du consentement. Ce qui importe, ce n'est pas le fait
matériel de la livraison ou de la remise (matérialité) du bien, mais l'aspect juridique : le
transfert de propriété (dare).
Exemple : dans le contrat de vente, le vendeur a l’obligation de transférer à l’acheteur la
propriété de la chose vendue. L’obligation de délivrance qui suit le transfert de propriété est,
elle, une obligation de faire.

2° – L'obligation de faire est celle qui astreint le débiteur à accomplir une prestation
positive en faveur du créancier (art. 1142 à 1144 du C. civ.). Il en va ainsi de l'obligation du
vendeur de livrer la marchandise à l'acheteur ; du médeçin de soigner le malade ; de l'avocat
de défendre son client.

3° – L'obligation de ne pas faire est une prestation passive, consistant en une abstention
(art. 1142, 1143 et 1145 du C. civ.). Le débiteur s'engage vis-à-vis du créancier à ne pas agir,
à ne pas accomplir d'actes.

Il en va ainsi de la clause d'exclusivité, par laquelle l'une des parties au contrat s'engage
à ne pas accorder d'avantages ou de privilèges identiques à des tiers.

Il en va de même de la clause de non concurrence, par laquelle l'une des parties au


contrat s'engage, dans les limites de temps et de lieu, à ne pas exercer d'activité
professionnelle susceptible de faire concurrence à l'autre. Fréquente dans les contrats de
travail, cette clause reçoit application lorsque le contrat est échu ou résilié ; elle doit être
limitée dans le temps et dans l'espace.

Remarque : les obligations de faire et de ne pas faire ne sont pas susceptibles


d’exécution forcée : leur sanction se résout en dommages et intérêts (article 1142 du Code
civil). Quant à l’obligation de donner, elle est susceptible d’exécution forcée.

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B. – Les classifications doctrinales

La doctrine propose une double classification : obligation de moyens/obligation de


résultat (1) et obligation en argent et obligation en nature (2).

1 – Obligation de moyens et de résultat

Une première classification doctrinale consiste à opposer les obligations de moyens aux
obligations de résultat.

L'obligation de résultat est celle en vertu de laquelle le débiteur est tenu d'obtenir un
résultat précis, bien déterminé.

Exemple : dans un contrat de transport, le transporteur a l’obligation de transporter le


voyageur sain et sauf à destination ou de livrer intacte la marchandise au destinataire.

Au contraire, l'obligation de moyens est celle en vertu de laquelle le débiteur est tenu,
non plus d'obtenir un résultat, mais de tout mettre en oeuvre pour atteindre celui-ci.

L'exemple type est celui du médecin. Il n'est pas tenu d'obtenir la guérison du malade,
mais de le soigner en vue de la guérison en mettant en oeuvre tous les moyens et toute sa
diligence. Il en va de même de l'avocat, qui ne promet pas à son client de gagner le procès,
mais de faire de son mieux pour obtenir ce résultat.

L’intérêt de la distinction réside dans la condition de mise en œuvre de leur


responsabilité. Dans l'obligation de moyens : la responsabilité du débiteur est subordonnée à
l'existence d'une faute prouvée par le créancier ;
Exemple : pour mettre en œuvre la responsabilité du médecin, le malade doit prouver
une faute de ce dernier : il ne peut se contenter d’établir l’absence de guérison, puisque
l’obligation du praticien ne portait pas sur la guérison, mais seulement sur les moyens d’y
parvenir.

Dans l’obligation de résultat, la responsabilité du débiteur est engagée si l'obligation


reste inexécutée (résultat non obtenu), sauf cas de force majeure.

Exemple : dans un contrat de transport, la simple constatation que le voyageur n'est pas
arrivé à destination ou que la marchandise n'a pas été livrée ou l'a été, mais en mauvais état
suffit à engager la responsabilité du transporteur. Ce dernier reste tenu de l’inexécution, s’il

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ne parvient pas à établir une cause étrangère (un cas de force majeure) l’exonérant de sa
responsabilité.

2 – Obligation en argent et obligation en nature

Les obligations en nature sont des prestations en nature fournies par le débiteur. Il en va
ainsi du travail à effectuer ; de l'obligation du peintre de faire un tableau. L'on recourt à cette
forme d'obligation pour contourner la dépréciation monétaire susceptible d'affecter les droits
de créance.

Les obligations de sommes d'argent ou obligations monétaires : ce sont également des


prestations, mais en argent. Ainsi, l'acheteur est tenu de payer le prix convenu en somme
d'argent. Le paiement s'effectue en billet de banque (franc CFA) ou par chèque ou virement
(monnaie scripturale).

Remarque : les deux formes d'obligations ne s'excluent pas et peuvent coexister ou


s'échanger. Ainsi, le secours fourni par le débiteur de l'obligation alimentaire se fait
principalement en argent et exceptionnellement en nature. Et, d'une manière générale, les
contrats renfermant des obligations en nature (contruction, transport) en contrepartie
d'obligations de somme d'argent en constituent des exemples. Enfin, la substitution
d'obligations est possible. L'exemple type est la dation en paiement (datio in solutum) : le
débiteur peut, avec l'accord du créancier, fournir des marchandises à la place d'une somme
d'argent.

§ 3. – La classification des obligations d'après leur force


Les obligations varient dans leur intensité. Le lien d'obligation est plus ou moins
contraignant selon le type d'obligation. On distinguera à cet égard les obligations juridiques
des obligations simplement morales. Entre les deux existent des obligations dites "naturelles".

A. – Les obligations juridiques


Dans les obligations juridiques, le lien qui unit le créancier et le débiteur est un lien de
droit, ce qui signifie que le créancier peut en réclamer l'exécution forcée devant les tribunaux.
Si le débiteur n'exécute pas spontanément ses obligations, les juges pourront le
condamner, soit à exécuter de force l'obligation convenue, soit à verser au créancier des
dommages et intérêts,c'est-à-dire une somme d'argent destinée à compenser le préjudice qu'il
subit du fait du non respect par le débiteur de ses obligations.

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B. – Les obligations morales


Les obligations morales sont celles qui relèvent du for intérieur, de la conscience
individuelle, et dont l'exécution forcée ne peut être obtenue devant les tribunaux. On emploie
alors parfois le terme de "devoir" plutôt que celui d'"obligation" pour marquer l'absence de
sanction juridique.
L'obligation morale n'a pas de portée juridique, sauf dans quelques cas particuliers : si
l'obligation est exécutée, elle est considérée comme parfaitement valable, l'obligation morale
se novant, en une obligation civile juridiquement efficace.

C. – Les obligations naturelles


"Il peut s'agir tout d'abord d'une obligation morale ayant une consistance particulière et
qui peut dès lors accéder au moins partiellement à la vie juridique (exemple : un devoir
moral de subvenir aux besoins d'une personne en dehors des cas d'obligation alimentaire
prévus par la loi, entre frères et soeurs par exemple), ou au contraire d'une obligation à
l'origine juridique mais qui ne l'est plus car elle est éteinte pour une raison ou pour une autre
(parce qu'elle est prescrite, ou encore parce qu'elle a été annulée pour une raison purement
technique). Le point commun de toutes ces hypothèses est que, si le débiteur n'est pas
juridiquement lié, il doit, en conscience, se sentir obligé.
L'obligation naturelle n'est pas une obligation juridique si bien que le créancier ne peut en
demander l'exécution forcée devant les tribunaux : il ne dispose donc d'aucune action en
justice pour réclamer paiement d'une obligation naturelle. Ainsi, la dette une fois prescrite, le
créancier ne peut plus poursuivre le débiteur devant les tribunaux pour en obtenir le paiement
forcé.
Le devoir moral que l'obligation naturelle manifeste peut cependant accéder à la vie
juridique dans deux hypothèses.
1° Tout d'abord en cas de paiement volontaire, c'est-à-dire d'exécution volontaire par le
débiteur, il n'y a pas de répétition (= restitution) possible. Le terme "volontaire" signifie qu'il
n'y a eu aucune erreur du solvens (celui qui a payé, au sens large d'exécuter quelque chose) :
celui-ci savait qu'il n'était pas juridiquement tenu, qu'on n'aurait pas pu le poursuivre devant
les tribunaux, mais il paye tout de même spontanément, mû par un sentiment de devoir (et
non pas par une intention libérale : il n'y a pas donation mais paiement). Ainsi, celui qui
paye volontairement une dette prescrite ne pourra ensuite en réclamer la restitution. Le droit
reconnaît donc une certaine valeur juridique à l'obligation, puisque le paiement de celle-ci ne

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peut être restitué : il n'y a pas paiement indu et nulle action en répétition de l'indu n'est donc
possible.
2° En second lieu, s'il y a engagement de payer sa dette par le débiteur (même
purement oral, dès lors que le créancier arrive à en faire la preuve), toujours de façon
volontaire et consciente, cet engagement transforme l'obligation naturelle en une obligation
juridique qui est donc désormais exécutoire devant les tribunaux. Selon la formule de la Cour
de cassation, "l'engagement unilartéral pris en connaissance de cause d'exécuter une
obligation naturelle [transforme] celle-ci en obligation civile". Si par exemple deux
concubins de longue date se séparent, et que l'un prend l(engagement de verser à l'autre une
pension mensuelle, les tribunaux pourront le forcer à payer s'il revient sur sa promesse : celle-
ci aura transformé l'obligation naturelle en obligation juridique. De même, un père biologique
qui s'engage volontairement à verser à son fils, une somme mensuelle jusqu'à la fin de ses
études, a pu vouloir exécuter un devoir de conscience et transformé une obligation
naturelle en une obligation civile. Il faut cependant qu'un véritable engagement ait pu être
caractérisé.

L'engagement de payer trouve sa cause dans l'obligation naturelle préexistante (celle-ci a


donc une certaine consistance juridique), ce qui suffit à justifier civilement la nouvelle
obligation. Il n'y a pas à proprement parler novation, au sens technique du terme, car celle-ci
exige qu'une obligation civile prenne la place d'une autre obligation civile, alors qu'en l'espèce
l'obligation civile née de l'engagement volontaire de payer prend la place d'une obligation
naturelle dépourvue de caractère exécutoire".

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