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Editions Dalloz

Après le déluge. La reconstruction de l'État de droit et de la démocratie en Allemagne de


l'Ouest après la seconde guerre mondiale
Author(s): Michael Stolleis
Source: Revue historique de droit français et étranger (1922-), Vol. 81, No. 3 (JUILLET-
SEPTEMBRE 2003), pp. 353-366
Published by: Editions Dalloz
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/43851436
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droit français et étranger (1922-)

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Après le déluge.
r

La reconstruction de l'Etat de droit


et de la démocratie

en Allemagne de l'Ouest
après la seconde guerre mondiale *

Résumé. - La reconstruction de l'État de droit en en Allemagne de l'Ouest


après 1945 peut être rattachée à une longue tradition. Tous ses éléments
constitutitifs ont été développés au cours du xixe siècle; le mot même
« Rechtsstaat » est attesté depuis 1802. En revanche, l'histoire de la démo-
cratie en Allemagne était traumatisée par de multiples échecs. Toutefois,
la mise en œuvre du projet réussit rapidement et s'est fortifiée d'une éton-
nante continuité. Les raisons de cette réussite appellent l'intérêt de l'histoire
constitutionnelle et de la science politique.
Mots-clés : Etat de droit ; démocratie, Allemagne

Il y a un an, j'ai passé le mois de mai à Paris. Le 8 mai, j'ai pu assister, sur
les Champs Élysées, au traditionnel Grand Défilé pour commémorer la capi-
tulation allemande. De beaux chevaux, de beaux uniformes, peu de spectateurs.
Quatre jours plus tard j'ai pu par hasard observer à Londres la parade des
Vétérans dans la Horse Guard Road à l'entrée du parc de St James. De vieux
hommes portant des décorations, marchant au pas. Ici aussi, il y avait peu de
spectateurs. Dans les deux cas, un « lieu de mémoire », un rituel pour le 8 mai
1945, avec lequel s'associent tant de souvenirs : le soulagement, la fin des
massacres, la libération, des sentiments dépressifs et un deuil qui ne faisait
que commencer, et la misère au quotidien. Soudain s'abat un grand calme.
* Cet article reprend le texte d'une communication présentée à Paris, à la Société d'histoire
du droit, le 22 mars 2003. Traduction : Dr. Sylvie Hürstel.

[p. 353-366] M. STOLLEIS Rev. hist droit, 81 (3) juill.-sept. 2003

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354 Michael Stolleis

Thomas Mann écrit


conditions. À six heu
l'écoutant, je contemp
L'horreur est termin
Les soucis quotidiens
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pour la vie intellectu
le jazz était à la fete,
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d'un « retour vers l'
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État - quel qu'il pût
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Le législateur avait s
éléments essentiels d
complètement les ga
« étrangers au peuple
part entière ce qui re
1934 4. Il avait créé l
nombreuses autres di
« lois » et de surcroît créé des millions de fois des situations de non-droit sans
l'aide de lois, sans parler du génocide de l'holocauste mené par des « bataillons
de police », par les SS et, malheureusement aussi par les troupes régulières 5.

1. « Dies war der Tag. Der 8. Mai 1945 : Panik und Idylle in einer Zerstörten Welt - Erin-
nerungen, fünfzig Jahre nach der deutschen Kapitulation », in : Frankfurter Allgemeine Zeitung
v. 6. Mai 1995, Beilage : Bilder und Zeiten , Nr. 105.
2. «Als der Krieg zu Ende war». Literarisch-politische Publizistik 1945-1950, Katalog der
Ausstellung des Deutschen Literaturarchivs im Schiller-Nationalmuseum Marbach a. M. 1973.
3. Verordnung des Reichspräsidenten zum Schutz von Volk und Staat vom 28. rebruar 1933,
RGBl I, 83.
4. Ch. Bloch, La Nuit des longs couteaux , Pans 1967 (edition allemande revisee Frankfurt
1970).
5. D. Majer, « Fremdvölkische » im Dritten Reich , Boppard 1981.

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L'État de droit en Allemagne 355
Un contrôle de ce non-droit par les tribunaux était encor
jusqu'en 1936 ; à partir de là, toutes les actions déclaré
rent sans aucun contrôle. Durant la guerre, les tribunaux a
plus que les ombres d'eux-mêmes6. Les autres tribuna
pénaux, financiers et pendant la guerre ensuite les « tribu
la population et les tribunaux de guerre pour les milita
image dans laquelle tout était possible : l'application rap
tives, l'hésitation et la modération, et même une sourd
sans aucun doute des « juges sanguinaires », et le nomb
à mort de ces années dépassait tout ce qu'on pouvait s
avait surtout le citoyen moyen, et une résistance silenc
dans les instances inférieures. Ceci était aussi la raison
nente de Hitler envers les « fonctionnaires » et les « ju
nourrissait un profond ressentiment à l'égard des juris
polémiqua devant le Reichstag surtout contre les juge
pleins-pouvoirs pour pouvoir destituer un juge sans c
ministre de la justice (Otto Thierack), un ignorant bru
guerre de remettre les juges sur le droit chemin à travers
juges » (Richterbriefe) 8.
Tout cela n'était pas encore devenu de l'histoire aprè
un passé très récent. Les tombes étaient encore fraîch
mot d'ordre de « l'État de droit » correspondait à un
Personne ne le contredisait, et ce que « l'Etat de droit
clair à tout le monde. On avait le sentiment de pou
l'existence effective de principes et de règles juridiqu
qui avaient grandi avant 1914, le souvenir s'étendai
le grand siècle de la jurisprudence universitaire. Et la
précisait ce que devait être un « État de droit » remo
xviii6 siècle.

Il y avait donc, à propos de l'État de droit, quelques évidences. Pour


comprendre ce qui se cache derrière ces évidences, on doit remonter plus loin
dans l'histoire du Droit. Le terme d'« État de droit » remonte aux alentours de
1800 9. On en trouve la première occurrence en 1802. Mais à ce mot est associé
une longue préhistoire de la culture juridique. Je vais tout au moins l'esquisser
ici à grands traits.
Sous le terme de « culture juridique » j'entends des mentalités développées
sur de grands espaces temporels, ou plus précisément : le contexte des attentes
que les gens associent au complexe du droit et du non-droit, des tribunaux
et des juristes, de la loi et du jugement. Ces dernières sont difficiles à saisir.

6. M. Stolleis, « Administrative Jurisdiction under National Socialism », in : M. Stolleis, The


Law under the Swastika. Studies on Legal History in Nazi Germany , Chicago 1998, p. 127-144.
7. R. J. Evans, Rituals of Retribution. Capital punishment in Germany 1600-1987 , Oxford
- New York 1996.
8. H. Boberach (éd.), Richterbriefe , Boppard 1975. Voir aussi Majer (supra, note 5) p. 643 sq.
9. M. Stolleis, « Rechtsstaat », in Erler-Kaufmann (éd.), Handwörterbuch zur Deutschen
Rechtsgeschichte , vol. IV, Berlin 1990, 367-375. La source de 1802 vient de Ludwig Harscher
von Almendingen, dans Grolmanns Magazin für die Philosophie und Geschichte des Rechts und
der Gesetzgebung , Gießen und Darmstadt 1800, vol. II, p. 63 sq.

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356 Michael Stolleis

Mais on peut tout au


politiques et juridiqu
L'Allemagne est com
la fin du xixe siècle q
histoire particulièrem
ont vécu sous la dom
barons, et dans des vil
idéale que réelle. L'Em
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impérial à Spire, et
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juridique fonctionnait
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ritoires. Il y avait avan
les juristes, ainsi qu'u
tout s'adonnaient à la
de la justice. Elles écri
sur des cas qui passaien
Cela aussi doit être c
droit : les parties d'u
chercher de l'aide po
pendantes ».
La deuxième expérience centrale des Allemands dans l'ancien Empire était
le manque d'un « Etat national ». Ils vivaient, comme je l'ai dit, dans de petites
unités territoriales éloignées de la grande politique. Ce qui les préoccupait
relevait des problèmes locaux à la campagne, des questions qui se posaient à
leur propre ville et de celles qui concernaient l'administration du territoire.
C'est pourquoi il est aussi caractéristique que l'Allemagne - à la différence
de la France et de l'Angleterre - n'ait pas engendré de grande philosophie à

10. H. Plessner, Die verspätete Nation. Über die politische Verfiihrbarkeit bürgerlichen
Geistes , 5e éd., Frankfurt 1994.
1 1. F. Battenberg, « Reichskammergericht und Archivwesen - Zum Stand der Erschließung
der Reichskammergerichtsakten », in Das Reichskammergericht in der Deutschen Geschichte ,
Wien 1989, p. 173 sq.
12. L'étude classique est celle de R. Smend, Das Reichskammergericht. Geschichte und Ver-
fassung , 1911 (réimpr. 1965); une introduction moderne se trouve chez B. Diestelkamp,
Rechtsfälle aus dem Alten Reich. Denkwürdige Prozesse vor dem Reichskammergericht , München
1995, p. 11-38.
13. G. Buchda, « Aktenversendung », in : Handwörterbuch ( supra note 9), vol. I, Berlin 1971,
p. 84-87 ; P. Conring, « Spruchtätigkeit (der Fakultäten) », ibid., vol. IV, Berlin 1990, 1787-1791.

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L'État de droit en Allemagne 357
propos de l'État qui soit comparable à Bodin, Hobbes,
ou Rousseau. En revanche, il y eut de nombreux et d'i
de l'administration 14.
On peut résumer ces deux expériences. Les paysans
n'avaient guère de chance de faire l'expérience de la gr
plutôt subi la politique qu'ils ne l'ont façonnée eux-m
leurs aspirations étaient plus limitées. Dans leur vie, l'imp
ordre juridique et une bonne administration, surtout
s'est poursuivi ensuite au xixe siècle. De manière carac
des plus importantes revendications du mouvement consti
de la protection juridique, les libertés fondamentales «
garantie d'une autogestion communale. Cela paraissait
participation politique du tiers-État.
Cette dernière a naturellement aussi été revendiquée,
lutions de 1830 et particulièrement en 1848/49, tout
français. Mais lorsque cette tentative pour créer un Eta
les libertés échoua à Francfort, la bourgeoisie déçue pa
pour « l'État de droit » (d'une certaine manière comm
pour l'« autogestion » au niveau local. L'État de droit d
tection de la propriété et de la liberté personnelle, mê
liberté politique. L'autogestion garantissait dans le dom
autonomie citoyenne. C'est ainsi que l'« État de droit
devinrent les deux mots-clé dans la seconde moitié du xixe siècle. L'influent
juriste Rudolf von Gneist allia les deux dans son concept d'une juridiction
administrative, qui a été réalisée en Prusse à partir de 1875 15.
Pour l'autogestion, c'était le « selfgovernment » anglais qui donna le
modèle, pour les tribunaux administratifs la justice administrative française,
les Conseils de préfecture et le Conseil d'État, dont la tâche était de clarifier
les contentieux entre les citoyens et l'administration, le contentieux adminis-
tratif. C'est ainsi qu'au xixe siècle on parlait également en Allemagne des
affaires « contentieuses » de l'administration. Les détails de l'apparition des
tribunaux administratifs en Prusse et dans les autres États allemands n'est
pas notre objet ici. En tous cas, mis à part quelques petits Etats, il existait
déjà avant la première guerre mondiale une juridiction administrative libérale
connue pour respecter les principes de l'État de droit. Durant la République
de Weimar, cela se perpétua. Les tribunaux administratifs travaillaient peut-
être d'un point de vue actuel de manière encore imparfaite, et il n'existait
pas non plus de tribunal central à sa tête, mais ce qui importe pour notre
développement c'est cette confiance portée à l'État de droit par l'intermédiaire
de ces tribunaux 16.
C'est seulement avec le national-socialisme que cette confiance a été ébran-
lée. Mais les gens n'ont apparemment pas analysé l'instrumentalisation de la
justice par le national-socialisme comme une « crise de la justice » ; ils étaient

14. H. Maier, Die altere deutsche Staats- und Verwaltungslehre , 2e éd. München 1980.
15. O. Bähr, Der Rechtsstaat , 1864 ; R.v. Gneist, Der Rechtsstaat, 1872 (2 ed. sous le titre
Der Rechtsstaat und die Verwaltungsgerichte in Deutschland , 1879).
16. W. Kohl, Das Reichsverwaltungsgericht , Tübingen 1991.

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358 Michael Stolleis

plutôt enclins à cons


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Ce qui signifiait : un
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introduit au xixe siècl
et finalement pour l
qui protègent contre l
les tribunaux spéciau
considérés comme
anglaise et française.

II

La réalisation de ce programme s'est déroulée, si l'on y repense, de manière


étonnamment facile. Pour le retour à l'État de droit et la reconstruction d'une
justice indépendante, il y avait en comparaison avec de nombreux autres thèmes
difficiles un programme clair. Mais les détails sont du plus grand intérêt ; car
on peut voir qu'en l'occurrence ce ne sont pas seulement les postulats de la
bonne vieille tradition et de l'éthique qui devaient être transposés, mais qu'il
fallait combiner de l'ancien avec du nouveau. En outre, il y avait beaucoup
d'intérêts publics ou cachés, des problèmes de personnes, beaucoup de juges
et d'avocats avaient fui des territoires de l'est et voulaient à présent un poste
dans la justice ou bien ouvrir un cabinet.
Tout d'abord le personnel. Tous les juges durent se soumettre au processus
de « denazification ». Beaucoup d'entre eux avaient été membres du NSDAP,
mais peu s'étaient montrés des activistes. Le processus de denazification prit
fin en 1948, et presque tous les juges en ressortirent blanchis. La plupart d'entre

17. P. Collin, « Wächter der Gesetze » oder « Organ der Staatsregierung » ? Konzipierung,
Einrichtung und Anleitung der Staatsanwaltschaft durch das preußische Justizministerium. Von
den Anfängen bis 1860 , Frankfurt 2000.

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L'État de droit en Allemagne 359
eux entrèrent au service de la justice dans les nouveaux Lä
inverse à ce qui se passait en zone soviétique. C'est ain
qu'avant même la fondation de la République fédérale l
Länder était plus ou moins au complet sur le plan du
procureurs et avocats étaient aussi membres des leurs
professionnelles. Les revues juridiques paraissaient à
fonctionnait, d'abord simplement sur la base des lois qui
avant 1933.

C'est pourquoi on pouvait aussi s'attendre à ce que ce système soit repris


également dans la nouvelle République fédérale. Dans les faits, c'est ce qui
arriva, mais non sans changements et avec quelques nouveautés importantes.
Durant les consultations pour la constitution, qu'on a nommée « Loi fonda-
mentale » pour souligner son caractère provisoire, les grandes lignes du pro-
gramme de l'État de droit ont été fixées par écrit. En première place la recon-
naissance de la valeur la plus élevée de la constitution, la « dignité humaine »,
qui doit être également protégée et respectée par la justice (art. 1, § 1 Loi
fondamentale (GG)), puis celle des droits fondamentaux correspondant à la
tradition européenne, y compris les droits fondamentaux concernant la justice :
« Les tribunaux d'exception sont interdits. Nul ne doit être soustrait à son juge
légal. » (art. 101 GG), « La peine de mort est abolie » (art. 102 GG), « Devant
les tribunaux chacun a le droit d'être entendu. Un acte n'est passible d'une
peine que s'il était punissable selon la loi en vigueur avant qu'il ait été commis.
Nul ne peut être puni plusieurs fois pour le même acte en vertu du droit pénal
commun» (art. 103 GG). Enfin la garantie de la liberté de la personne, la
protection contre la détention arbitraire et les limites des forces de police
(art. 104 GG).
La Loi fondamentale ajoutait : « Les juges sont indépendants et ne sont
soumis qu'à la loi » (art. 97, § 1 GG), et esquissait l'édifice de la justice en
cinq branches principales. En règle générale, il devait y avoir au niveau des
Länder deux instances et au-dessus l'instance fédérale. Tout cela était bien
connu depuis l'époque de Weimar. Où se situaient donc les nouveautés ?
La nouveauté la plus importante était la création d'un Tribunal constitutionnel
central, le Bundesverfassungsgericht à Karlsruhe. Préparé depuis longtemps
dans les débats scientifiques et politico-juridiques de la République de Weimar
et mis en pratique avec succès depuis 1920 déjà en Autriche, de grands espoirs
s'attachaient depuis le début à ce tribunal. Il reçut une double fonction, en tant
que « tribunal » d'une part et qu'« organe constitutionnel » d'autre part. Il obtint
de larges compétences pour régler tous les contentieux juridiques importants de
l'État, il devait ensuite contrôler que le droit légal soit bien en conformité avec
la constitution, mais avant tout il reçut une nouvelle compétence centrale :
chaque citoyen pouvait faire appel à ce tribunal dès qu'il estimait que les pou-
voirs publics l'avaient lésé dans un de ses droits fondamentaux. Cette plainte
déposée auprès du tribunal constitutionnel est devenue l'un des symboles les
plus importants de l'État de droit en République fédérale. De nos jours, 4 000
18. J. R. Wenzlau, Der Wiederaufbau der Justiz in Nordwestdeutschland, 1945-1949 , 1979 ;
M. Stolleis, « Rechtsordnung und Justizpolitik 1945-1949 » in : Europäisches Rechtsdenken in
Geschichte und Gegenwart. Festschrift für Helmut Coing , vol. I, München 1982, 383 sq.

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360 Michael Stolleis

à 5 000 plaintes sont ai


tionnel. Les décisions d
revues spécialisées, sou
« dernier mot ». Cela ne
des décisions juridique
limites. Les juges sont
le procès de sélection, et
de neutralisation. La p
de personnes au passé ir
et qui pour beaucoup a
Il ne pouvait pas en all
une opposition latente a
les juges qui y étaient
Tribunal du Reich et ava
La deuxième nouveaut
trancher les contentieux relevant du domaine de la sécurité sociale. Cette
juridiction avait certes une tradition qui remontait à 1884, mais n'avait pas été
une juridiction véritablement indépendante. Cette indépendance était à présent
garantie. C'est ainsi qu'il y eut (et qu'il y a toujours) cinq juridictions distinctes
réparties par domaines de compétences : la justice pour les affaires pénales et
civiles, la justice pour le droit du travail, pour le droit social, pour le droit
administratif et pour le droit financier.
Le perfectionnement de l'État de droit (des critiques ont pu parler d'« État
judiciaire » ou bien d'« État procédurier ») 19 a été atteint dans la constitution
par l'article 19, § 4 suivant : « Quiconque est lésé dans ses droits par la
puissance publique dispose d'un recours juridictionnel. » Puisque les cinq
voies nommées ci-dessus sont suffisamment ouvertes, cet article n'a qu'une
signification symbolique. Mais le symbole a été perçu comme important autre-
fois, et ce n'est pas un hasard si le premier colloque des professeurs de droit
public après le national-socialisme a justement été consacré à cet article en
particulier 20 . On a parlé d'un « article royal » (W. Jellinek) et d'un « couron-
nement de l'Idée de l'État de droit » (F. Klein) ; ces petites expressions du
domaine monarchique sont intéressantes du point de vue sémantique. Après la
disparition de la tyrannie, l'État de droit a été « intronisé » et « couronné » par
cet article de la constitution.

III

Je n'ai pas assez de temps pour décrire ici comment le nouveau monarque
«État de droit» s'est développé dans les cinquante années de sa régence,

19. Critique exemplaire K. A. Bettermann, Der totale Rechtsstaat. Zwei kritische Vorträge ,
Hamburg 1986.
20. F. Klein-H. Herrf ahrdt, Tragweite der Ueneralklausel im Art. 7 V Abs. 4 des Bonner
Grundgesetzes y Veröffentlichungen der Vereinigung der Deutschen Staatsrechtslehrer, vol. 8,
Berlin 1950.

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L'État de droit en Allemagne 361
comment il s'est modifié et a continué à s'étendre 21. Il me
tant de retourner une fois de plus vers les premières année
s'est déroulé la reconstruction de la démocratie.

La démocratisation de l'Allemagne vaincue était une tâche bien plus difficile


que de reconstruire l'État de droit. L'État de droit était une évidence bienvenue,
l'héritage d'une bonne tradition. Il était très abîmé en 1945, cela ne fait pas
de doute, mais l'institution était réparable et la confiance en la justice était,
même si cette vérité nous dérange aujourd'hui, plus ou moins intacte.
En revanche, la démocratie faisait partie des éléments difficiles. Là, il n'y
avait pas seulement des institutions à reconstruire, mais il manquait apparem-
ment une culture démocratique qui se soit développée sur la longue durée. Il
y avait sans cesse des ruptures. En 1848 le brusque passage à un système
parlementaire moderne avait échoué. Avec la Confédération de l'Allemagne
du Nord et la Constitution de l'Empire en 1 87 1 , le suffrage universel (masculin)
fit certes son apparition et les partis modernes apparurent, mais Bismarck se
voulait aux antipodes des partis et du parlement (Reichstag). Bismarck n'était
pas un démocrate, c'est une évidence, mais, ce qui est plus important, c'est
qu'il a par sa politique engendré chez les conservateurs des ressentiments
antiparlementaires, qui restèrent vivaces jusqu'au cœur du xxe siècle. Ce n'est
pas le parlement qui devint le centre de la politique, mais le gouvernement et
son chancelier. Et il y a une suite à cela : l'Empereur Guillaume II, l'un des
personnages tristement célèbres de notre histoire, qualifiait le parlement de
« cage de singes » (Affenhaus) avec la vive approbation de tous les monar-
chistes. Ce n'est qu'avec la constitution de Weimar que cela a semblé changer,
mais les convictions antiparlementaires étaient bien ancrées. Jamais on n'a
autant polémiqué contre le modèle occidental de la démocratie parlementaire
que pendant la République de Weimar 22 . De la droite comme de la gauche,
on a entendu prédire mille fois la fin du libéralisme et de la démocratie. La
plupart des professeurs de droit public étaient eux-mêmes de cet avis. Lorsque
Carl Schmitt était en train d'écrire sa « théorie de la constitution », il écrivit
au juriste de droit public Rudolf Smend qu'il était en train « de retirer au
libéralisme son masque mortuaire » 23 . Le libéralisme, la démocratie, le parle-
mentarisme, les partis, le pluralisme - c'étaient là les symboles haïs de l'Occi-
dent ou, plus précisément, du Traité de Versailles. En fin de compte, ce sont
les forces antiparlementaires qui ont eu raison de la République.
Durant le national-socialisme, cette polémique prit un tour fanatique, et on
peut même affirmer que toute l'idéologie du national-socialisme, qui en dehors
d'un antisémitisme biologisé de manière irrationnelle ne comporte guère d'élé-
ment consistant, peut dans son essence seulement être qualifiée de manière
négative, comme une position « contre ». La démocratie, comme on l'ensei-
gnait aux écoliers, n'était « pas compatible avec le génie allemand ».

21. Les données statistiques se trouvent dans P. Badura-Dreier (éd.), 50 Jahre Bundesverfas-
sungsgericht , Tübingen 2002, vol. 2.
22. K. Sontheimer, Antidemokratisches Denken in der Weimarer Republik (1962), München
1968.
23. M. Stolleis, Geschichte des öffentlichen Rechts in Deutschland , vol. III, 1914-1945,
München 1999, p. 179.

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362 Michael Stolleis

Que pouvait-on donc


lorsque tout fut anéant
cratique depuis plus d
de manière autoritair
handicap supplémenta
comme dans les 14 po
de la part des vainque
un remède qu'elle ne
c'étaient les commun
confiance en la démoc
mortuaire intitulée «
prouve 24. Et enfin, m
démocratie puisse conve
risme dans cette vieill
Si on récapitule tous
presque miraculeux qu
et des femmes de l'ép
truire les principales
insuffler une vie nouve
avant 1900. Elle avai
Weimar, puis elle ava
cette génération avait
de la vie en politique
(1876-1967), qui était
Weimar. C'était un ca
mes, un prussien au s
un pragmatique conse
pouvoir. Son adversai
(1895-1952), un homm
qui avait été détenu e
années, un anticommu
cratique. Le troisième
Theodor Heuss (1884-1
lors de la confection d
premier Président de
et humain. Lui aussi a
démocratie.
Les détails de la reconstruction de la démocratie furent fixés lors de débats
intenses entre 1947 et 1949. Une première esquisse a vu le jour au Chiemsee
en Bavière. Au sein du « conseil parlementaire » (1948), les premiers points

24. Titre allemand : Der anachronistische Zug oder Freiheit und Democracy.
25. Avant tout, c'étaient Konrad Adenauer (CDU) et Theodor Heuss (FDP). Les noms les
plus importants de la SPD sont Kurt Schumacher, Carlo Schmid, Ernst Reuter, Otto Suhr, Max
Brauer, Georg August Zinn, Elisabeth Seibert, Wilhelm Hoegner, Hinrich Wilhelm Kopf, Wal-
demar von Knoeringen, Fritz Erler, Herbert Wehner et Willy Brandt. De la CDU on peut nommer
Peter Altmeier, Gebhard Müller, Karl Arnold, Eugen Gerstenmaier, Hermann Ehlers, Ludwig
Erhard, Elisabeth Schwarzhaupt, Richard von Weizsäcker et autres, de la FDP Reinhold Maier,
Thomas Dehler, de la CSU Hans Ehard et Franz Josef Strauss.

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L'État de droit en Allemagne 363
essentiels furent discutés. On opta - en réaction faces a
supposées de la constitution de Weimar - pour les lignes dir
La forme de l'État de la République démocratique d
manière telle que même des majorités qualifiées ne pui
soi-disant garantie d'éternité, art. 20, 79 § 3 GG). L
politiques fut reconnue officiellement par la constitut
Länder et les communes devaient également être régis de m
(art. 28 GG). Par peur de la démagogie on se décida p
purement représentative. Encore aujourd'hui il y a des
des formes de la démocratie directe, formes qui ne sont bie
prisées par les partis. Le droit électoral combinait des él
ritaire avec ceux du vote proportionnel. On s'est prém
partis par une clause des 5 %. Lorsque le Parlement renvers
il ne peut le faire que si il y a un nouveau gouvernem
soutenu par une majorité (art. 67 GG). C'est le « vote de déf
Et enfin : les fonctions du chef de gouvernement qui m
président de l'État sont séparées. Le président de l'État
fonctions représentatives.
Tout cela a maintenant fonctionné avec une étonnante
quante ans. La démocratie parlementaire est à présent é
deux grands partis populaires, dont chacun possède (en c
naire plus petit que lui. Les partis extrémistes de droite
(en ce moment) aucune chance. Depuis plusieurs années
de 1 % des voix des électeurs. Lorsque la réunification a
à fait hors de doute que les Allemands souhaitent conserver
C'est ainsi que d'une esquisse intelligente et courageuse
provisoire de la « Loi fondamentale » est devenu entre-te
démocratique vivante.

IV

1. L'historien qui chercherait à expliquer l'histoire éto


sait par expérience, qu'il n'existe pas de causalités simpl
processus de réactions très complexes. En les décrivant d
tive, nous ne faisons que les simplifier à nouveau. Je te
résumer encore une fois les aspects essentiels. En même
rence aux débats sur ces questions qui ont été particuliè
dernières années dans l'historiographie allemande.
Tous tombent d'accord pour affirmer que l'Allemagne
dans les premières années après l'effondrement factuel du
de manière différente à l'Ouest et à l'Est. Si nous nous l
de l'État de droit et de la démocratie, nous pouvons co
retour aux institutions et aux principes juridiques de la Rép
mais en même temps des innovations de fond : l'État de dr
sur des droits fondamentaux actifs, la séparation des pouvo
née et l'idée de l'État de droit ne se concentre pas sur la

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364 Michael Stolleis

nistration, mais totale


juridique totale (art.
confiée au nouveau T
de larges compétenc
institution dominante
La reconstruction d
d'anciens et de nouv
d'anciennes et de nouvelles institutions. Et enfin : d'anciens et de nouveaux
juges. La plupart des anciens juges ont été repris par le nouveau système, mais
dans le tribunal constitutionnel, il y avait de nouveaux juges, sans passé nazi.
Cela a mené à de fortes tensions entre le nouveau tribunal constitutionnel et
le plus haut tribunal de la juridiction civile et pénale, la Cour de justice fédérale,
qui perpétuait la tradition du Tribunal du Reich, du Reichsgericht.
Il n'y eut pas de reconstruction de l'État de droit à l'Est. La zone occupée
par les soviétiques fut façonnée dans le sens stalinien, sitôt que les communistes
tinrent les rênes du pouvoir, c'est à dire environ à partir de 1948. La séparation
des pouvoirs, l'indépendance des juges, la garantie de la protection juridique
n'existèrent bientôt plus. Les tribunaux administratifs disparurent 26 . La justice
dégénéra jusqu'à la fonction politique du pouvoir d'État dictatorial. Jusqu'à la
fin de la RDA, même s'il y a eu certains assouplissements, cette situation n'a
pas changé 27 .
La reconstruction de la démocratie à l'Ouest était beaucoup plus difficile
pour des raisons historiques. Beaucoup d'indices allaient dans le sens d'une
continuité dans une pensée autoritaire et antiparlementaire. Mais c'est le
contraire qui s'est produit. Les institutions et le droit électoral fonctionnaient
très bien. Le système parlementaire a été accepté certainement aussi parce
qu'il avait dans le système fédératif onze théâtres régionaux différents. Les
partis radicaux de droite et de gauche ont disparu. Deux grands partis popu-
laires ont absorbé beaucoup de petits partis. Entre eux deux ne subsistait que
les libéraux, qui ont durant les vingt premières années de la République
fonctionné comme le petit partenaire national et conservateur de la Démo-
cratie chrétienne (CDU).
2. Depuis à peu près une dizaine d'années, on discute intensément dans
l'historiographie allemande des débuts de la République fédérale. La génération
plus ancienne des historiens, qui a tout vécu, tend visiblement plutôt à consi-
dérer ces processus comme une « arrivée dans le système occidental ». La
brillante Histoire allemande (2000) de Heinrich August Winkler porte le titre
« La longue route vers l'Ouest » 28. Les réflexions politiques de Jürgen Haber-
mas tournent autour du « projet des Lumières », de l'implantation des idéaux
constitutionnels occidentaux. Les deux termes qui sont venus prendre la place
de l'ancien patriotisme du xixe siècle et de la société marquée par l'autorité

26. Th. Heil, Die Verwaltungsgerichtsbarkeit in Thüringen 1945-1952 , Tübingen 1996.


27. Voir la documentation de la commission d enquete « Auiaroeitung von uescnicnte und
Folgen der SED-Diktatur in Deutschland », vol. IV : Recht, Justiz und Polizei im SED-Staat ,
Baden-Baden 1995.
28. H. A. Winkler, Der lange Weg nach Westen. Deutsche beschichte, ¿ vol. Muncnen zuuu.

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L'État de droit en Allemagne 365
sont le « patriotisme constitutionnel » et la « société civile
représentation est toujours déterminée par la thèse d'une «
allemande » (deutscher Sonderweg) depuis le xvine siècle
d'aberration qui n'a pu être dépassée que grâce à l'aide
cette thèse n'est déjà plus convaincante en tous ses point
des historiens ne nie naturellement pas qu'il y ait eu une
vers l'Ouest avec de nombreuses conséquences, mais elle
deux idées : l'Allemagne n'est pas seulement allée « ver
d'ailleurs il n'est pas clair de savoir si c'est vers la Fran
surtout les États-Unis !), mais les nations d'Europe occ
ont changé de manière intense durant ces années : la so
ébranlée par la guerre, le régime de Vichy et la résistance,
lentement de son passé colonial, notamment en Algérie
s'est lentement stabilisée autour de la Democrazia cristiana et d'un commu-
nisme ancré localement et spécifiquement italien (Qu'on se rappelle les joyeu-
ses histoires de Guareschi autour de Don Camillo et de Peppone, filmées avec
Fernandel, qui montrent un peu cette atmosphère). L'Angleterre gouvernée par
le Labour a eu au début de grandes difficultés économiques et a dû, dans une
plus large mesure encore que la France, se séparer de son empire colonial.
Dans ce contexte, la métaphore d'une « route vers l'Ouest » pour l'Allemagne
occidentale est trop simplificatrice. Deux projets de recherche, l'un à Tübingen
(Anselm Doering-Manteuffel) et l'autre à Fribourg (Ulrich Herbert) montrent
aujourd'hui les interactions entre les sociétés occidentales et leur politique de
manière beaucoup plus différenciée 30. Il n'est pas de question qui agite plus
les jeunes auteurs allemands de « l'histoire contemporaine » que la constitution
intérieure des deux États allemands après 1945 et le changement qu'ont connu
ces deux sociétés (le livre le plus important sur le sujet est toutefois relative-
ment ancien : Ralf Dahrendorf, Société et démocratie en Allemagne , Munich
1965).
Cela n'est pas dur à comprendre. L'Allemagne va encore avoir besoin d'une
génération jusqu'à ce qu'à l'Ouest comme à l'Est « soit enfin réuni ce qui va
ensemble », comme l'a dit Willy Brandt. Pour comprendre pourquoi ce pro-
cessus est si lent, nous devons étudier les histoires des Allemagnes de l'Ouest
et de l'Est. Pour l'Histoire du Droit et sa nouvelle discipline, l'« histoire
juridique contemporaine » 31 il reste encore beaucoup à faire en ce sens. De
nombreuses sources ne sont pas encore accessibles, mais le problème principal
est à l'inverse la masse des documents déjà à disposition; Et surtout, les
hypothèses de recherche demandent à être déterminées plus précisément. On

29. J. Habermas, Philosophisch-politische Profile , Frankfurt 1971 ; Idem, Faktizität und Gel-
tung. Beiträge zur Diskurstheorie des Rechts und des demokratischen Rechtsstaats , Frankfurt
1992, 399 sq. - Pour le contexte intellectuel voir aussi A. Honneth (éd.), Zwischenbetrachtungen
im Prozeß aer Aufklärung, Frankfurt 1989, avec les contributions de E. Denninger, I. Fetscner,
G. Frankenberg et R. Wiethölter.
30. A. Doering-Manteuffel, Wie westlich sind die Deutschen ? Amerikanisierung und Wes-
ternisierung im 20. Jahrhundert , Göttingen 1999; A. Schildt, Ankunft im Westen. Ein Essay
zur Erfolgsgeschichte der Bundesrepublik , Frankfurt 1999 ; A. Schildt - A. Sywottek (éd.),
Modernisierung im Wiederaufbau. Die westdeutsche Gesellschaft der 50er Jahre , Bonn 1998 ;
U. Herbert (éd.), Wandlungsprozesse in Westdeutschland. Belastung, Integration, Liberalisie-
rung 1945-1980 , Göttingen 2Ö02 (avec bibliographie étendue).
31. M. Stolleis (ed.), Juristische Zeitgeschichte - ein neues Fach?, Baden-Baden 1993.

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366 Michael Stolleis

doit travailler en com


ser son contexte natio
justement orientée ve
aux domaines classiqu
ouvert à une étude co

Michael Stolleis
Max-Planck-Institut fur Europäische Rechtsgeschichte
Francfort / Main

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