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Pour Wendy Brown, le capitalisme est entré dans une nouvelle période. Elle
analyse la réalité à partir de l’expérience des USA. Cette nouvelle étape se
caractérise par une dé-démocratisation par la rationalité politique néolibérale.
C'est-à-dire que jusqu’à maintenant, il existait une tension entre la rationalité
politique démocratique et la rationalité économique non démocratique. Cet écart
permettait des limitations au règne du tout économique. Aujourd’hui, il s’agit,
pour les néo-conservateurs, d’évacuer cette tension, de supprimer cet écart. Son
analyse est valable pour les USA, mais l’arrivée de Sarkozy au pouvoir est
typique de cette nouvelle donne, me semble-t-il.
Tout doit être envisagé sous l’angle de coûts faibles et d’une productivité élevée.
Les privatisations, ce ne sont pas des démantèlements, mais un mode de
gouvernement en phase avec la bonne gestion néolibérale. La politique sociale
est réduite le plus possible, elle coûte cher et ne rapporte pas grand-chose. La
rationalisation est toujours rapportée au modèle de la rationalité économique. Il
n’y a pas de sens, pas de morale, pas de foi, pas d’héroïsme, pas de grand
destin, au mieux c’est une rhétorique de façade, une moralisation de surface.
Les individus sont donc encouragés à être des calculateurs, à tout baser sur
l’intérêt. Si tout est centré sur l’individu, c’est sur le modèle du client et de
l’entrepreneur. Cela est valable y compris pour la vie privée, il faut gérer ! En
outre, la sécurité devient une question individuelle, il faut se protéger comme il
convient. Le pauvre, le déviant peuvent être une menace, le souci de l’autre
n’est plus nécessaire. Il n’y a pas d’exclusion, mais des places différentes. À
chacun ou chacune d’œuvrer pour réussir.
Le désintérêt pour le bien commun est conjoint d’une vison du collectif comme
étant le résultat de la somme des enrichissements personnels. La mise en avant
du chef est normale : « Il est fort ! ». La quête de spiritualité peut rencontrer le
syncrétisme new age, entre autres. Cela peut se faire selon la forme marchande,
c’est même encouragé. Par exemple, cela se déploie fréquemment sous la forme
des diverses modalités du « développement personnel » ou du « coaching ». (2)
Dans ce cadre, rencontrer des sectes comme la scientologie n’est pas un
problème. Pour cette façon de voir le monde, ce qui compte, c'est l’efficacité, le
rapport qualité/prix, le reste on s’en tape !
Que faire face à ce déferlement ? Wendy Brown propose de développer une autre
rationalité des êtres humains, une représentation différente pour la vie
économique et pour la politique contre l’aspect mortifère de cette nouvelle
logique.
- La base sociale de cette nouvelle politique est celle des retraités/ées, celle des
professions indépendantes et d’une partie du peuple d’en bas assez populiste.
Toutes ces catégories rejettent les classes supérieures, qui sont les agents réels
du capitalisme actuel. Sur ce point, j’émettrai une réserve, cette base sociale
peut être celle de l’extrême droite, elle demande du sécuritaire pas l’autogestion.
L’Europe forteresse, elle est pour.
Elle pense que l’enjeu c’est la définition même de la gauche. Il s’agit de penser et
de proposer une nouvelle philosophie politique, qui intègre ces mutations. Il faut
partir des offres néolibérales pour les sortir de leurs gonds. Si j’ai bien compris, il
faut accentuer les contradictions pour, comme au judo, faucher notre adversaire
en utilisant sa force pour le faire tomber.
Il est possible de partir de la liberté, qui existe, même si elle est minime, pour
intensifier les usages et construire un projet théorique, politique et humain. On
peut voir cela comme une nouvelle biopolitique, qui nous permettrait de définir
ce qu’est l’autogestion dans cette nouvelle époque, que je considère être le
capitalisme postmoderne.
L’analyse proposée par Wendy Brown correspond bien à ce que nous vivons en
France en ce moment. Quand on entend les mots « réforme » et
« rationalisation », il s’agit bien d’appliquer le fonctionnement des entreprises, de
chercher la rentabilité hors de toutes autres considérations. La gauche est
disqualifiée, c’est exact. Les protestations citoyennes semblent de plus en plus
inutiles et hors de propos, c’est vrai. Les anciens modèles ne fonctionnent plus,
c’est indéniable. Construire un nouveau projet, qui tienne compte des humains,
c’est le but de l’autogestion, me semble-t-il. Il faut réinventer et expérimenter
l’autogestion parce que la société a changé, parce que le capitalisme a évolué. Je
suis d’accord ! Il faut attaquer le capitalisme sur le fond pour montrer l’amplitude
de ses contradictions et le fait qu’elles sont sans issues, si on reste dans le cadre
de capitalisme. Effectivement, c’est ce que nous devons faire pour avoir une
chance que nos questions soient entendues.
http://1libertaire.free.fr/JRanciere01.html
http://www.coaching-conseils.com/rubrique35.html