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CHAPITRE III

MODES DE PRECONTRAINTE

1- INTRODUCTION
Depuis la découverte du béton précontraint, son utilisation dans le domaine du
génie civil s’est développée rapidement surtout à partir des années 30 et 40 du
20e siècle. Depuis lors, plusieurs techniques de réalisation ont connu le jour. Les
plus connues d’entre elles sont la pré-tension et la post-tension.
Dans ce chapitre on va décrire ces techniques de précontrainte sous forme de 3
catégories :
- la pré-tension,
- la post-tension,
- les autres techniques.

2- PRECONTRAINTE PAR PRE-TENSION


2-1 Définition
La pré-tension est la mise en tension des armatures de précontrainte avant
coulage du béton. On l’appelle aussi précontrainte par fils adhérents (PRAD).
Les poutres sont fabriquées sur un « banc de préfabrication ». Les armatures de
précontrainte sont enfilées dans des coffrages à l’intérieur des cages
d’armatures passives et sont positionnées grâce à des gabarits métalliques
percés faisant également office de coffrage d’about.
Les armatures de précontrainte (fils ou torons) sont tendues avant bétonnage,
dans des bancs de précontrainte, à l’aide de vérins entre deux massifs d’ancrage.
La longueur du banc est comprise entre 50 et 200m (fig. III-1 & III-2).
Le béton frais est coulé au contact des armatures. Lorsqu’il a acquis une
résistance suffisante (la montée en résistance peut être accélérée par
traitement thermique), on libère la tension des fils (par relâchement des vérins),
qui se transmet au béton par adhérence et engendre par réaction sa mise en
compression. Les fils détendus veulent reprendre leur longueur initiale, mais leur
adhérence au béton empêche ce raccourcissement, ce qui se traduit par un
effort de compression dans le béton.

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a- Mise en tension avant coulage du béton

b- Relâchement des armatures de précontrainte après durcissement du béton

Fig. III-1 Schéma de principe de la précontrainte par pré-tension

Fig. III-2 Banc de précontrainte en usine avec des têtes d’ancrage (1000 t)
et des moules métalliques (R,I,T)

2-2 Domaines d’utilisation de la pré-tension


La pré-tension est essentiellement utilisée pour les éléments préfabriqués
standardisés. Le bâtiment constitue le domaine d’emploi le plus courant pour ces
éléments : poutres (fig. III-3), poutrelles de planchers (fig. III-4), pré-dalles,
dalles alvéolées de planchers ou panneaux de bardage de grandes dimensions (10
à 15 m de longueur), pour bâtiments industriels, commerciaux ou agricoles.
Les poutres PRAD sont aussi utilisées dans les tabliers de ponts pour des
portées allant de 20 à 35m (fig. III-5).

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La pré-tension est également utilisée pour les poteaux de tous types ;
télégraphiques ou électriques (fig. III-6), les buses en béton, les traverses de
chemin de fer, etc.

Fig. III-3 Poutres préfabriquées par pré-tension simplement posées


sur des poteaux de bâtiment

Fig. III-4 Stockage en usine de poutrelles préfabriquées par pré-tension

a- Pose des poutres sur des appuis provisoires d’une pile de pont

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b- Différentes formes des poutres PRAD utilisées dans les ponts
Fig. III-5 Poutres de pont préfabriquées par pré-tension

Fig. III-6 Poteaux électriques en béton par pré-tension, armés


longitudinalement par des fils adhérents de précontrainte

2-3 Opérations de la pré-tension


2-3-1 Phases de la préfabrication en usine
- préparation des moules, mise en place des peignes d’about,
- mise en place des cages d’armatures passives,
- enfilage des armatures de précontrainte à travers les cages
d’armatures passives (fig. III-7),
- mise en place de la tête d’ancrage à clavette (fig. III-8),
- mise en tension des aciers de précontrainte (fig. III-9),
- réglage des aciers passifs et de l’étanchéité des coffrages,
- bétonnage des poutres (vibration externe des moules), (fig. III-10),
- mise en place de bâches isothermes (fig. III-11),
- relâchement des aciers actifs entre les moules pour mettre la poutre en
précontrainte (fig. III-12). Le relâchement est effectué par
déplacement de la tête mobile du banc, ainsi toutes les armatures sont

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relâchées simultanément, sinon les barres risqueraient de périr par
rupture sous l’effet de la surtension.
- manutention et stockage des poutres en usine (fig. III-13),

Fig. III-7 Enfilage des armatures de précontrainte à travers


la cage et le peigne d’about

a- Introduction d’une clavette dans le manchon

1- manchon 2- clavettes 3- fil de précontrainte


b- Détail d’une tête d’ancrage à clavette
Fig. III-8 Mise en place de la tête d’ancrage à clavette

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Fig. III-9 Mise en tension d’un toron de précontrainte par vérin unitaire.
Vue d’ensemble du peigne d’about permettant le positionnement des torons

a- Bétonnage et vibration externe des moules b- Bétonnage des poutrelles


Fig. III-10 Mise en place du béton dans les moules

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a- Chambre d’étuvage b- Cycle d’étuvage
Fig. III-11 Opération d’étuvage des poutres préfabriquées

Fig. III-12 Après ouverture du moule de préfabrication, les aciers actifs sont relâchés aux
extrémités du banc puis découpée entre les moules pour mettre la poutre en précontrainte

Fig. III-13 Manutention et stockages des poutres au chantier

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2-3-2 Opérations postérieures
- transport des poutres préfabriquées vers le chantier (fig. III-14),
- manutention et en place des poutres au chantier (fig. III-15),

Fig. III-14 Transport sur route ; par camion normal, extensible ou trinqueballe

a- Bâtiment b- Pont
Fig. III-15 Manutention et pose des poutres sur chantier

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2-4 Tracé des armatures de précontrainte par pré-tension
En pré-tension la mise en tension des armatures est effectuée avant bétonnage,
il n’est pas possible de leur donner un tracé désiré comme en post-tension. Du
fait que les armatures sont rectilignes, nous aurons après leur relâchement un
moment fléchissant de précontrainte pratiquement constant sur la longueur de la
poutre. Or cette poutre sera soumise en phase d’exploitation à des moments
fléchissants variables. Pour résoudre ce problème et faire varier le moment de
précontrainte le long de la poutre, on utilise trois solutions :
a- le gainage de quelques armatures : cela permettra de supprimer l’adhérence
sur la longueur où on a introduit la gaine plastique. On aura ainsi introduit
progressivement la force totale de précontrainte (fig. III-16).

Fig. III-16 Introduction progressive de la précontrainte par gainage

b- le relevage des armatures : On attache au fond du coffrage des déviateurs


métalliques, et on procède de la manière suivante (fig. III-17) :
 les armatures sont tendues partiellement,
 On augmente la tension en tirant sur l’armature entre les coffrages
d’extrémité des poutres.

c- le changement de hauteur variable du produit : On fait varier la position du


centre de gravité du produit. Les armatures étant rectilignes, elles ont donc une
excentricité variable par rapport à la fibre moyenne (fig. III-18 & fig.III-19).

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Fig. III-17 Principe de relevage des armatures

Fig. III-18 Principe d’une poutre de hauteur variable

Fig. III-19 Poutres de toiture de hauteur variable

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3- PRECONTRAINTE PAR POST-TENSION
3-1 Définition
La post-tension est la mise en tension des armatures de précontrainte après
coulage et durcissement du béton.
Sous l’action du vérin auquel il est attaché, le câble, logé dans un conduit,
s’allonge et se tend à l’effort P (figure III-20). Le vérin, s’appuyant sur le béton,
exerce sur lui un effort de compression, égal à P en vertu de la loi d’action et
réaction : P est donc l’effort de précontrainte. Le principe de fonctionnement du
vérin est indiqué dans la figure III-21.
Le câble, une fois tendu, est ancré sur le béton, ce qui assure la permanence de
la compression (fig. III-22).

Fig. III-20 Mise en tension d’un câble (post-tension)

Fig. III-21 Schéma de principe d’un vérin

La précontrainte par post-tension se présente sous deux formes :


— la précontrainte intérieure au béton (fig. III-22),
— la précontrainte extérieure à la structure en béton ou non (fig. III-23).

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Fig. III-22 Précontrainte intérieure dans une poutre de pont

a- Poutres latérales b- Poutre en caisson


Fig. III-23 Précontrainte extérieure dans des tabliers de pont

3-2 Domaines d’utilisation de la post-tension


Bien qu’elle ne représente qu’une faible part d’utilisation dans le monde si on la
compare à la pré-tension. Cependant, la post tension est indispensable pour la
réalisation des grandes structures industrielles (85 % des ponts, enceintes de
confinement de centrales nucléaires, plates-formes offshore, grands barrages,
stades, grands bâtiments, etc.).

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Fig. III-24 Post-tension dans un radier général

Fig. III-25 Poutres précontraintes par post-tension dans un parking

Fig. III-26 Post-tension dans un plancher de bâtiment

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Fig. III-27 Poutres de pont posées par lançage

Fig. III-28 Enceinte nucléaire, Fig. III-29 Tirants d’ancrage


câblage du dôme (Chine) dans un remblai

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Fig. III-30 Piles d’offshore Fig. III-31 Grands réservoirs

Fig. III-32 Ancrage des câble au niveau de la tête d’un barrage

3-3 Opérations de la post-tension


- Mise en place des armatures passives : cadres, épingles, étriers, aciers
longitudinaux, chaises de support des gaines ;
- Mise en place des gaines et fixation solide sur la cage d'armature pour éviter
tout déplacement lors du coulage du béton.
- Mise en place des plaques d'appui et des frettages adjacents aux extrémités
des gaines sous l'emplacement futur des ancrages;
- Coulage du béton;
- Pendant le durcissement du béton, enfilage des câbles:
o fil par fil ou toron par toron pour les câbles réalisés sur le chantier. On
procède alors par poussage à l'intérieur de la gaine;

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o le câble en entier, par traction au moyen d'un fil préenfilé dans la gaine
est attaché à une « chaussette » en tête de câble pour en faciliter le
glissement. Ceci suppose que les câbles sont préassemblés en atelier. Cette
méthode permet d'avoir des câbles réguliers et évite les enchevêtrements et
croisements de fils.
- Mise en place des plaques d'ancrage et des clavettes de blocage des torons (ou
fils) dans le vérin d'ancrage et dans la plaque d'ancrage.
- Mise en tension des deux côtés pour les câbles longs (un ancrage actif à chaque
extrémité).
On mesure la longueur de câble sortant derrière le vérin à chaque étape de mise
en tension (5 ou 6 étapes) pour les comparer aux valeurs calculées par le bureau
d'études et s'assurer que la mise en tension du câble tout au long de son tracé
est correcte.

Fig. III-33 Mise en place des gaines

Fig. III-34 Vérification du tracé de la gaine

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Fig. III-35 Béton coulé et durci

Fig. III-36 Enfilage des câbles à l’intérieur de la gaine

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Fig. III-37 Mise en place de la tête d’ancrage

Fig. III-38 Mise en place des clavettes

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Fig. III-39 Amenée du vérin et du nanomètre

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Fig. III-40 Mise en place d’une plaque de blocage

Fig. III-41 Mise en place des clavettes


en tête du vérin

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Fig. III-42 Sécurisation de la zone de mise en tension

Fig. III-43 Mesure de la pression et l’allongement du vérin

Fig. III-44 Mesure des pressions et allongement du vérin après retour à P1

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Fig. III-45 Tête d’ancrage après enlèvement du vérin

Fig. III-46 Déformée de la poutre après la mise en tension

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Fig. III-47 Protection des ancrages par des capots bétonnés
(cachetage) et mise en place du coulis (injection)

3-4 Quelques Détails de la précontrainte par post-tension


3-4-1 Ancrages
a-Ancrage actif : C’est l’ancrage le plus fréquemment utilisé. On peut lui
appliquer le vérin de mise en tension du câble. Selon la figure III-48, l’ancrage
actif comprend trois parties :
— la tête d’ancrage de forme cylindrique contenant des trous cylindro-coniques
parallèles ou convergents qui assurent le passage des torons et réservent le
logement des clavettes. La tête d’ancrage, première pièce capitale pour la
sécurité de l’ancrage, est généralement en acier de résistance comprise entre
500 et 1 000 MPa ; pour de petites unités, elle est parfois en fonte ductile.
— le mors métallique est une pièce tronconique en 2 ou 3 morceaux appelés
clavettes. le mors fonctionne sur le principe du coin et bloque le toron à
l’intérieur de la tête d’ancrage. C’est la deuxième pièce capitale pour la sécurité
de l’ancrage (fig. III-48 et fig. III-49).
— la pièce de transfert, appelée trompète, est destinée à faire diffuser l’effort
de précontrainte de la tête d’ancrage à la structure.
La trompète est complétée par un ferraillage capable d’équilibrer les forces de
traction qui naissent de la diffusion de la force de précontrainte.

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Le système d’ancrage comporte toujours une canalisation permettant
d’introduire le produit de protection (injection de coulis de ciment ou produit
souple) dans le conduit contenant le câble.
L’étanchéité à l’extérieur de l’ancrage est assurée par un capot (fig. III-32).
Parmi les ancrages actifs, on peut trouver les procédés : VSL ; CCL ; SEEE-FUC;
LH ; PAC ; CONA ; OVM.

Fig. III-48 Exemple d’un ancrage à plaque VSL

Fig. III-49 Mors d’ancrage : principe

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La mise en tension au niveau de l’ancrage actif se fait selon le processus montré
dans la figure III-50.
b-Ancrage passif : Il s’agit du même ancrage que celui décrit précédemment,
mais on ne prévoit pas d’y installer le vérin de mise en tension. L’ancrage ne
subira donc aucune entrée lors de la mise en tension dans l’autre extrémité. Du
fait que l’ancrage passif se trouve à l’extrémité de la pièce de béton, on peut
contrôler son bon fonctionnement.

Fig. III-50 Processus de mise en tension (ancrage actif)

c-Ancrage fixe, noyé dans le béton : C’est un ancrage d’un type particulier qui
permet d’arrêter l’effet de la force de précontrainte en un point quelconque de
la structure. Trois types d’ancrages fixes sont proposés :
 à la butée sur une tête d’ancrage ou sur une plaque métallique par
l’intermédiaire de boutons pour les fils ou de manchons pour les torons
(fig. III-51),

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 on peut également boucler les armatures, en contact direct avec le béton
sur une certaine longueur, autour d’une plaque galbée (fig. III-52),
 à l’adhérence, dans le cas des torons. Ces derniers sont alors épanouis
hors de leur conduit sur une longueur suffisante, et détoronnés à leur
extrémité pour former un bulbe (fig. III-53).

Fig. III-51 Ancrage fixe,


noyé dans le béton,
Freyssinet système
K (12 T 15)

Fig. III-52 Ancrage fixe, noyé dans


le béton, VSL à boucle (12 T 15)

Fig. III-53 Ancrage fixe, noyé dans


le béton, VSL par adhérence (12 T 15)

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d- Coupleur : Ce type de dispositif, parfois utilisé dans les ouvrages construits à
l’avancement (fig. III-54), permet d’accrocher un nouveau câble, à l’extrémité
d’un câble déjà tendu au cours de la phase de travaux ultérieurs.
Pour assurer la transmission d’efforts entre les deux câbles, il faut éviter toute
possibilité de butée directe du coupleur sur le béton coulé en dernière phase,
donc de l’en isoler par un capot (fig. III-55). L’effort P’ du nouveau câble se
transmet jusqu’à l’ancien câble et on aura : P’ = P.

Fig. III-54 Exemple d’utilisation de coupleurs C


dans une construction à l’avancement

Fig. III-55 Schéma de principe d’un coupleur

a- Coupleur SK6 b- Coupleur K


Fig. III-56 Quelques coupleurs disponibles dans le marché

3-4-2 Conduits
Ils permettent la libre circulation du câble dans la structure, afin qu’il puisse
s’allonger librement pendant la mise en tension. Les conduits prennent plusieurs
formes telles que ; le tube en acier ou matière plastique, la gaine en feuillard
métallique enroulé et agrafé en hélice (fig. III-57); cette dernière représente
au moins 90% du produit mondial.
Cependant, dans la précontrainte extérieure, les conduits doivent être
parfaitement étanches pour assurer le confinement du produit de protection,
qu’il s’agisse d’un coulis de ciment, d’une cire ou d’une graisse. Les gaines en

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feuillard ne peuvent donner satisfaction à cet égard. On utilise parfois des tubes
métalliques raccordés par emboîtement.
Dans le cas de structures soumises à des ambiances très agressives, et surtout
si le dimensionnement est fait en précontrainte partielle, on utilisera deux
modèles de gainage en PEHD actuellement développés par VSL (fig. III-58) et
Freyssinet.

Fig. III-57 Gaine en feuillard d’acier rigide cintrable à la main

Fig. III-58 Gaine (VSL)

3-4-3 Injection et cachetage


Pour assurer une bonne protection des câbles de précontrainte contre la
corrosion, on procède dans un délai maximum de deux semaines au-delà de la
mise en tension, à l'injection des câbles pour remplir le vide d'air compris
entre le câble et la gaine.
On procède auparavant à un lavage à l'eau sous pression pour chasser les corps
étrangers pouvant se trouver dans la gaine (laitance du béton...) pour enlever
l'huile soluble qui a pu être utilisée pour améliorer le glissement du câble dans

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la gaine lors de sa mise en place et lors de la mise en tension. Un soufflage à
l'air comprimé est ensuite effectué pour chasser l'eau et sécher la gaine.
Le coulis d'injection utilisé est composé d'une pâte de ciment et d'eau qui peut
avoir la composition suivante :
- ciment de classe CPA 52.5 ;
- eau dosée à 35% du poids du ciment;
- plastifiant éventuel (2% de SIKA «Y» par exemple).
La préparation de ce coulis est faite dans un malaxeur spécial disposé à côté
des câbles à injecter.
On a disposé des évents (tuyaux en plastiques) aux points hauts et aux-
extrémités de la gaine pour permettre au coulis de chasser tout l’air contenu
dans la gaine.
La plasticité du coulis doit être telle qu'il s'écoule facilement dans les gaines
(on mesure la plasticité au moyen du cône de Marsh en adoptant comme critère
qu'un litre de coulis doit s'écouler par l'orifice du cône en 15 à 25 secondes).
La pression d'injection du coulis dans les gaines est de l'ordre de 0,6 à 0,8 MPa
à l'entrée de la gaine.
Outre le rôle de protection des armatures contre la corrosion, le coulis
d'injection permet également une bonne adhérence entre les aciers et le
béton.

4- AUTRES PROCEDES DE PRECONTRAINTE


A côté des procédés classiques que nous venons d’examiner, existent des
procédés spéciaux qui sont réservés à certaine nature d’ouvrages ou qui font
appel à d’autres principes pour la mise en tension des aciers.
Parmi ceux-ci, nous citerons les suivants :
4-1 Précontrainte par enroulement
Pour les structures de section circulaire creuse soumises à une pression interne,
telles que les conduites forées et les grands réservoirs de liquides ou de gaz, la
précontrainte peut être obtenue en enroulant sur l’extérieur du cylindre de
rayon R un fil sous tension mécanique : ce fil tendu avec une force F, exerce sur
la paroi une pression radiale F/R, qui équilibre la pression interne (fig. III-61).
L’avantage de ce procédé réside dans sa simplicité, le problème des ancrages ne
se pose pratiquement plus ; il est remplacé par un problème de raboutage du fil à
l’extrémité de chaque couronne, beaucoup plus facile à résoudre. De plus, les
formes de béton sont plus simples qu’avec les procédés classiques, qui exigent
que les parois soient munies de nervures pour loger les ancrages. Cependant, le
fil après enroulement, doit être protégé de la corrosion par un revêtement qui

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constitue le point délicat du procédé : la protection est réalisée par plusieurs
couches superposées de mortier projeté, et il est très difficile d’éviter la
fissuration de l’enduit et la pénétration de l’humidité jusqu’aux armatures.
L’exécution des ouvrages qui relèvent de cette conception ne peut être confiée
qu’à des entreprises très qualifiées.

Fig. III-61 Schéma de principe de la précontrainte par enroulement

Fig. III-62 Ancrage du cerce

4-2 Précontrainte par compression externe


Dans les cas, peu fréquents, où l’on dispose de culée rigoureusement fixée, la
précontrainte d’un élément est possible au moyen de vérins plats. Ceux-ci sont
des sacs en tôle mince, de forme circulaire ou rectangulaire, à angles arrondis
que l’on gonfle en y introduisant un liquide sous pression. Un vérin de quelques
décimètres de diamètre peut ainsi développer plusieurs centaines de tonnes avec
un déplacement qui peut atteindre 25mm environ. La permanence de l’effort ainsi
appliqué est obtenue en utilisant pour gonfler le vérin un coulis de ciment qui fait
prise, et le vérin reste incorporé dans l’ouvrage (fig. III-63).

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Ces vérins sont souvent utilisés pour mobiliser de forces importantes avec de
faibles déplacements.
Quant à la précontrainte ainsi obtenue, elle ne peut être provisoire, car même en
supposant les culées parfaitement immobiles, la relaxation du béton intervient,
qui diminue très fortement sa contrainte de compression.
Il faut rappeler, en outre, que les éléments précontraints par compression
externe sont exposés au flambement sous l’action de la précontrainte.

Fig. III-63 Schéma de principe de la précontrainte par compression externe

4-3 Précontrainte par « EXPANSION » du béton


De même que le retrait du béton, dans le béton armé, entraine une mise en
traction du béton et une compression des aciers, l’emploi d’un ciment expansif
peut amener une compression du béton et une traction des aciers. Cette
précontrainte chimique a été tentée plusieurs fois au cours des dernières
décennies, mais la difficulté du procédé réside dans la nécessité d’obtenir une
expansion parfaitement déterminée à l’avance. Après des essais effectués en
France par Lossier, d’autres chercheurs ont étudié ce procédé en Union
soviétique en utilisant un mélange de ciment Portland, de ciment d’aluminate de
calcium et de plâtre, ou avec un clinker de sulfaluminate de calcium broyé.
D’autres essais ont été poursuivis en Californie, en partant de mélange analogues.
En fait, actuellement, il ne semble pas que l’on puisse arriver à une véritable
précontrainte par ce moyen, et les ambitions semblent se limiter aujourd’hui à
compenser les effets du retrait, ce qui constitue déjà un progrès notable,
surtout dans le domaine des grandes dalles de revêtement.

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