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SÉANCE D'ACTUALITÉS EN DROIT DU MARCHÉ DE L'ART

Institut Art & Droit - 6 février 2020

Le 6 février dernier, la promotion du M2 Droit du marché et du patrimoine artistiques


(Université Paris 2 Panthéon-Assas) assistait au premier séminaire d’actualités juridiques
organisé à l’Institut national d’histoire de l’art par l’Institut Art & Droit, qui regroupe les
principaux professionnels et enseignants du droit du marché de l’art et du patrimoine
culturel. Des étudiants volontaires se proposent pour vous de revenir sur une sélection des
interventions qui les ont marqués lors de cette journée, et d’en livrer une synthèse.

La diffusion de ces comptes-rendus est libre sous réserve d’en mentionner l’auteur
et de n’y apporter aucune modification.

« L’effort de rationalisation du Parlement dans le cadre de la loi de finances pour 2020 en matière
de patrimoine et de création artistique » - Jacques Fingerhut
Par Adrien Béat

La seconde intervention de Me Fingerhut portait toujours sur la fiscalité, mais du point de vue politique
cette fois, avec les débats sur le budget de l’année qui s’ouvre à peine. L’avocat revient tout d’abord sur
l’abolition prévue d’un des deux dispositifs d’acquisition de trésors nationaux par des entreprises, celui
de l’achat pour leur propre compte, et explicite ensuite la récente « querelle » des deux chambres
législatives sur la taxation du Loto du patrimoine.

Les députés en séance dans l’hémicycle


Issues la loi n° 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France (art. 23 et 25), deux options sont
ouvertes aux entreprises pour contribuer, par leur achat, à la conservation ou au retour des trésors
nationaux sur le territoire. Les entreprises faisant le choix de les offrir à un musée de France bénéficient
d’une réduction d’impôt sur les sociétés de 90 % de la valeur d’acquisition (art. 238 bis-0 A du Code
général des impôts), tandis qu’en achetant un de ces biens pour leur propre compte, elles bénéficient
d’une réduction à hauteur de 40 % « seulement », et doivent consentir à son classement comme
monument historique (art. 238 bis-0 AB).

C’est uniquement cette dernière option qu’abroge la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances
pour 2020, art. 29. N’ayant en effet jamais été utilisée, le législateur en tire les conséquences attendues
et la supprime pour clarifier le paysage fiscal. Désormais, seule la conservation muséale est possible.
Notons que ce même article de la loi de finances prévoit l’extinction, à partir du 31 décembre 2022, d’un
autre dispositif fiscal qui permet quant à lui de soutenir la création contemporaine, visé à l’art. 238 bis
AB du CGI. En vertu de celui-ci, les entreprises acquérant « des œuvres originales d'artistes vivants (...)
peuvent déduire du résultat de l'exercice d'acquisition et des quatre années suivantes, par fractions
égales, une somme égale au prix d'acquisition » à condition de les exposer « dans un lieu accessible au
public ou aux salariés, à l'exception de leurs bureaux » pendant ces cinq exercices.

En matière de patrimoine historique, M e Fingerhut souligne l’adoption définitive par l'Assemblée


nationale d’un amendement du député Joël Giraud, visant à annuler l’initiative du Sénat d’exonérer le
Loto du patrimoine des prélèvements sur les jeux de loterie. La chambre haute, dénonçant des
manœuvres de la majorité, souhaitait en effet supprimer ces taxations pour que l'ensemble des revenus
aille réellement au patrimoine via la Fondation du patrimoine. Car, alors qu’en 2018 seuls 21 millions ont
effectivement été affectés à la restauration des monuments sur les 200 « rapportés » au total par le Loto,
ces taxations se sont élevées à 14 millions d’euros, dont 10 au titre des prélèvements de sécurité sociale,
et 4 en faveur de l’Agence nationale du sport, dans l’optique des JO 2024.

L’Assemblée y a coupé court, soutenue par le gouvernement qui préfère abonder en crédits la Fondation
pour compenser cette lourde fiscalité sans grever le budget de ces autres missions « d’intérêt général »
que sont le sport et la solidarité nationale. Il avait ainsi versé 21 millions d’euros à cette fin en 2018.
L’avantage de cette solution, pour M e Fingerhut, est au moins de maintenir la possibilité d’un contrôle
parlementaire sur l’action du gouvernement, ce que n’aurait plus permis l’exonération de taxation.

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