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IMPACT DE LA TRANSITION ECONOMIQUE SUR LES RAPPORTS DE

GENRE DANS UNE METROPOLE DU VIETNAM

Thai thi Ngoc Du


Responsable de la section « Genre et Développement »
Département de Sociologie – Université Ouverte de Ho Chi Minh Ville- Vietnam

Ho Chi Minh Ville (HCMV) est la plus grande métropole du Vietnam, sa


population s‟élève à plus de 6 millions d‟habitants, 5,1 millions d‟entre eux vivent dans
les 19 districts urbains de la ville. Ville cosmopolite, un pont qui relie le monde et le
pays, sa société urbaine connaît une évolution rapide et complexe.

Après une période de difficultés économiques depuis la fin de la guerre en 1975,


la transition économique déclenchée en 1986 a accéléré la vitesse d‟urbanisation des
métropoles du Vietnam dont HCMV. Centre d‟attraction des investissements
internationaux et domestiques, HCMV est devenue un bassin d‟emplois qui attire une
main d‟œuvre immigrante de toutes les régions du pays. Le niveau de vie des citadins
s‟est élevé, l‟écart entre la métropole et les régions rurales s‟est élargi ; ces facteurs sont
à l‟origine des flux migratoires des ruraux pauvres. La présence d‟un grand secteur
informel aide à résorber les nouveaux migrants dont les femmes représentent la majorité.

Développement économique de Ho Chi Minh Ville

Le Bureau des statistiques de HCMV a recensé une croissance démographique


rapide depuis les années 1990.

Entre 1999 et 2004, la croissance moyenne annuelle de la population de HCMV


dans l‟ensemble, districts urbains et ruraux confondus, est de 3,6%, donc à une vitesse
plus rapide que la période précédente. Si l‟on ne considère que les districts urbains, la
croissance démographique de cette période est bien plus élevée : de 4,3 %, par rapport à
2,1 % pour la période de 1989 – 1999 . Les migrations contribuent la principale partie à
cette croissance. On estime que HCMV a accueilli plus de 500.000 immigrants entre
1996 et 2001. 1

Sur le plan du développement économique, HCMV joue le rôle moteur de la


région-clé de développement dans le Sud du Vietnam, la ville assume régulièrement des
taux de croissance économique élevés. Les taux de croissance annuels du PIB sont de
10,2% pour la période 1996-2000 et de 11% pour 2001 – 2005. La prévision pour 2006
-2010 sera de 13%.
Le PIB par tête d‟habitants s‟améliore de façon remarquable d‟année en année:
2000 : 1.350 USD
2005 : 1.980 USD
Prévision pour 2010 : 3.100 USD.
La contribution du secteur privé à la croissance du PIB est importante, voici la structure
du PIB en 2004 :

1
Selon Ha thi Phuong Tien, les chiffres réels d‟immigrants dépassent largement 500.000 personnes

1
Secteur d‟Etat: 39,2%
Secteur privé : 42,1%
Investissement étranger : 18,7%

Ho Chi Minh Villes est le plus grand centre économique du pays : sa population
représente 6,6% de la population totale du Vietnam, mais son PIB représente 17,6% du
PIB national et sa contribution représente 37,8% du budget national.
Le taux de croissance du PIB de la ville entre 2003 et 2004 est de 111,6%, le
secteur privé a une vitesse de croissance plus grande que le secteur d‟Etat.
- Secteur d‟Etat 108,8%
- Secteur privé 114,5%
- Secteur d‟investissement étranger 112,0%

La métropole de HCMV a une longue tradition urbaine parmi les villes


vietnamiennes. Les femmes sont surtout attirées par une atmosphère culturelle plus
libérale de la métropole, elles se sentent libérées de la pression des meurs et coutumes
traditionnelles qui pèsent sur leur vie à la campagne. Une indifférence agréable à l‟égard
de la vie privée des autres est très appréciée par les femmes.

La transition économique, en acceptant le développement du secteur privé au sein


d‟une économie dite « multi-sectorielle » et l‟intégration du pays à l „économie mondiale,
a rendu l‟économie moderne plus accessible aux femmes. Une classe de femmes
dirigeantes d‟entreprise jeunes et dynamiques s‟accroît rapidement.

Femmes dirigeantes d’entreprise: choix et défis

Selon différentes sources statistiques, les femmes dirigent 25 – 30% des 140.000
entreprises et 60% des entreprises familiales dans tout le Vietnam

Le Mekong Private Sector Development Facility (MPDF) dépendant de


« International Finance Corporation” (IFC) a mené une enquête auprès de 500 femmes
dirigeantes d‟entreprise. L‟objectif de cette enquête est d‟identifier les besoins des
femmes dirigeantes d‟entreprise afin de formuler des propositions au gouvernement en ce
qui concerne ses politiques d‟appui.

Les résultats ont montré que 40% d‟entre elles dirigent leurs entreprises depuis
plus de dix ans. Les entreprises ont en moyenne 70 travailleurs contractuels (de longue
durée) et 25 employés de courte durée.

Gérer le petit commerce au marché, les petites boutiques familiales à domicile est
un domaine spécifiquement féminin. C‟est ainsi que les femmes vietnamiennes depuis
longtemps ont fait leur apparition dans l‟espace public. Cette tradition est favorable à la
participation des femmes aux activités commerciales et de service modernes, mais vu du
côté des femmes seulement. Au regard de la société, les femmes dirigeantes d‟entreprise
subissent encore les préjugés d‟ordre culturel. Cette remarque provient des femmes et
aussi des hommes.

2
Les femmes ont soulevé deux obstacles majeurs dans leurs activités
professionnelles. D‟un niveau d‟éducation moyen, elles constatent qu‟il leur manque de
formation professionnelle et des connaissances du marché international. Les règlements
officiels font obstacle au développement économique et au maintien de la main d‟oeuvre
qualifiée.
Nous pouvons remarquer que ce ne sont pas des obstacles spécifiques des
femmes, les hommes rencontrent aussi ces difficultés. En revanche, les femmes font face
à des obstacles plus spécifiques, elles ont mentionné les préjugés à l „égard des femmes
dans le monde des affaires. La famille ne les soutient pas. Malgré ces obstacles, plusieurs
femmes dirigeantes d‟entreprises ont constaté que ces difficultés se sont amenuisées dans
la mesure que les femmes sont devenues le pilier économique de la famille. Leur statut
est renforcé dans la famille.
En ce qui concerne les contraintes, plusieurs femmes considèrent que concilier
les deux tâches, travail et tâches familiales selon les points de vue traditionnels leur
cause des pressions. Les préjugés à l‟égard des femmes réussies dans les affaires
s‟expriment de manière suivante: les femmes négligent la famille, étant trop occupées
par le travail et par leur aspiration à un succès de plus en plus grand. Si la famille ou les
enfants ont des problèmes, ce sont les femmes qui en sont accusées les premières. En
bref, si la famille a des problèmes, c‟est la faute de la femme.
Deux faits révélateurs de l‟attitude de culpabiliser les femmes :
- lors des formations dans le domaine du genre, que ce soit pour les étudiants ou pour
les employés et cadres, que ce soit pour les hommes ou pour les femmes, les discussions
sur l‟égalité des genres, sur la participation des femmes aux activités économiques ainsi
que sur leurs réussites professionnelles font toujours ressortir des opinions de mise en
garde à leur égard. Les arguments de référence sont :
 Il faut faire attention : si les femmes sont trop occupées et passionnées par leurs
activités professionnelles, elles négligent les soins pour leurs maris et enfants,
faute de temps. Cette situation porte en elle des risques pour la famille : les
enfants auront des problèmes dans leurs études, ils peuvent tomber dans la
détresse ou dans de mauvaises pistes, leurs maris pourront abandonner le foyer
pour une autre femme. Donc, les femmes doivent préserver en priorité la stabilité2
de la famille, s‟il y a une contradiction entre la préservation de la famille et la
réussite dans le travail, il faut sacrifier le travail pour la famille. Ainsi, les
opinions courantes opposent travail et famille seulement pour les femmes. On
considère que ces deux parties sont difficilement réconciliable dans le contexte
contemporain où les risques et menaces pour la famille se sont accrus.
 Les magazines pour femmes ont une rubrique de consultation réservée aux
problèmes de famille ou affaires sentimentales en terme plus général. Les femmes
exposent sous forme de correspondance leurs problèmes (conflits avec le mari, le
mari a une autre femme, conflits avec la famille du mari, les enfants quittent le
foyer...) et demandent conseil au groupe de consultants (tes) du magazine. On
rencontre souvent des conseils du type suivant : Vous (la femme) devriez voir
quelle est la part de vos erreurs/ fautes. Est-ce que vous avez négligé votre
famille à cause du travail ? Vous devriez ajuster vos attitudes et activités pour

2
On entend par “stabilité de la famille” préserver le statut légal de la famille, éviter le divorce à tout prix, et
souvent au prix des souffrances ou de l‟endurance de la femme.

3
faire plaisir à votre mari. Vous devriez soigner votre beauté, votre apparence
physique. Vous devriez vous montrer douce à l‟égard de votre mari quelle que
soit son attitude.
La vice -directrice d‟une entreprise privée spécialisée en broderie3 a affirmé : « Pour
nous autres femmes, il nous est inadmissible qu’on néglige la famille à cause de notre
passion pour le travail à l’entreprise. D’ailleurs, dans ce cas, les désavantages seront du
côté des femmes, elles sont perdantes plutôt que gagnantes ».
Sous la pression de l‟idéologie patriarcale de la société, les femmes ont des difficultés de
sortir du carcan du stéréotype des rôles masculin/féminin.

- Une autre contrainte perçue par les femmes dirigeantes est que les
pratiques festives des hommes dans les relations publiques ne conviennent pas aux
femmes. Les hommes du monde de l‟entreprise en cette phase de transition ont l‟habitude
de régler les affaires, les contrats à table. Il faut savoir boire , et boire beaucoup de bière
et de vin. Cette culture des arrivistes qui prédomine actuellement dans la société gêne
vraiment les femmes. Devant cette situation, certaines femmes dirigeantes d‟entreprise
doivent faire un compromis en adoptant le comportement des hommes. Ce compromis à
son tour peut causer des ennuis dans les relations avec leurs maris. Une femme a
révélé que pendant une négociation pour signer un contrat, ses partenaires ont insisté
qu‟elle se joigne à eux pour une partie de bière. Elle a été obligée d‟accepter leur
proposition afin que le contrat soit signé. Elle a dit : « Ce soir là, bien que j’aie atteint
mon objectif qui est la signature du contrat pour l’entreprise, mon mari a été mécontent
parce que je suis rentrée tard, à 10 heures du soir ».4

Les femmes dirigeantes d‟entreprise ont exprimé leurs points de vue sur les
aspects de relations de genre :
- Les femmes doivent faire des efforts continus parce qu‟il est plus difficile pour les
femmes que pour les hommes de diriger une entreprise, à cause des contraintes et des
préjugés de la société. Mais grâce à l‟économie de marché, les femmes ont plus
d‟opportunités de déployer leurs capacités. Pour être reconnues, les femmes doivent
travailler beaucoup plus que les hommes.
- Il faut bien gérer le temps pour assurer et concilier les deux tâches : travail et
famille.

Elles ont aussi exprimé leurs besoins :


- Formation à la gestion d‟entreprise, particulièrement la gestion financière.
- Acquérir des connaissances du marché international et des méthodes d‟accès à ce
marché.
- Facilités d‟accès au capital.
- Les politiques d‟appui aux femmes dirigeantes d‟entreprise de la part du
gouvernement sont indispensables pour une meilleure promotion des femmes à la
direction des entreprises.

Un certain nombre de femmes se sentent plus en difficulté dans la gestion et dans les
relations avec le personnel et les clients.

3
Entrtepsise Hiep Hung
4
Ha Vy, 2005, Les femmes dirigeantes d’entreprise face aux nouveaux opportunités et défis, VN express.

4
Le comité des femmes d‟entreprises de la Chambre de commerce et de l‟industrie du
VN (VWEC-VCCI) a été établi en 2001. Il réunit les femmes dirigeantes ou
gestionnaires d‟entreprise de tous les secteurs, étatiques aussi bien que privés. A présent,
1000 femmes ont adhéré au comité et plus de 40 cercles se sont formés dans différents
lieux du pays.

Il a pour fonctions : appuyer et protéger les droits des femmes dirigeantes


d‟entreprise à l‟intérieur au Vietnam et à l‟étranger, aider à développer les échanges
commerciaux, les investissements et le transfert des technologies.

Le comité mène les activités suivantes :


- réunir et étudier les opinions des femmes dirigeantes d‟entreprise afin de formuler
des propositions à la CCIV et au gouvernement au niveau des politiques d‟appui à
un environnement favorable aux femmes dirigeantes d‟entreprise.
- Organiser la formation, le transfert de technologies, diffuser l‟information,
développer les marchés, les capitaux afin de renforcer la compétitivité des
entreprises dirigées par les femmes.
- Sensibiliser les femmes dirigeantes d‟entreprises à respecter les lois, à participer
aux activités sociales et à la protection de l‟environnement afin de renforcer la
position sociale des femmes dirigeantes d‟entreprise.
- Coopérer avec l‟Union des Femmes du Vietnam et avec d‟autres organisations
pour soutenir les femmes dans leurs projets économiques de création d‟emplois et
de réduction de la pauvreté.

De son côté, l‟Union des femmes de Ho Chi Minh Ville elle-même organise 13
cercles de femmes dirigeantes d‟entreprise qui réunissent plus de 400 membres. Ces
cercles organisent des formations, foires, expositions et séminaires. L‟union gère en plus
de 100.000 petites commerçantes dans 200 marchés dans Ho Chi Minh Ville.

Portrait des femmes dirigeantes d’entreprise

Selon les résultats de l‟enquête menée par IFC et MPDF, elles sont relativement
jeunes, 85% d‟entre elles ont entre 25 et 55 ans dont 45% ont moins de 45 ans . Leurs
niveau d‟éducation et capacités professionnelles sont plus élevés que ceux des femmes
petites commerçantes, 80% ont fini les études secondaires et supérieures, et 28% d‟entre
elles ont un diplôme universitaire. Elles sont présentes dans tous les secteurs
économiques, l‟agriculture et l‟agroalimentaire, l‟industrie, l‟éducation, les services, les
arts.

Dynamiques, les femmes d‟affaires sont le pilier économique de leurs familles. 80%
d‟entre elles vivent en couple, 6% de divorcées et 7% de célibataires.

Leurs perceptions de la famille sont variées. Pour les femmes mariées, l‟appui de
la famille et du mari est très important pour leur réussite professionnelle. Les autres ont
une perception plus libérale de ce qu‟on appelle « bonheur familial » : la famille, les
enfants sont importants mais les femmes peuvent vivre en bonheur et en sérénité sans être
dépendantes d‟un homme. Leurs capacités, réussite, sentiment d‟être utiles à la famille

5
et à la société, la vie professionnelle répondent à un idéal de bonheur plus large que le
bonheur « traditionnel » dépendant du mari et des enfants.

Secteur informel : intégration ou exclusion ?

Avec la reconnaissance du secteur privé, le rôle de l‟économie familiale s‟est


renforcé. Les métropoles sont les premiers lieux qui bénéficient les résultats de la
transition économique. Des commerces et de services de toutes les gammes pullulent
dans les grandes villes, se trouvent parmi eux les marchands ambulants et les commerces
du trottoir. Le niveau de vie moyen de toutes les couches de la population s‟est amélioré
mais l‟écart riches-pauvres s‟agrandit aussi. Les régions rurales se sont enrichies, mais les
contrastes entre les riches et les pauvres y sont très aigus. Les paysans et paysannes
pauvres quittent leurs villages pour rechercher un moyen de survivre dans les grandes
villes. Ainsi, Ho Chi Minh Ville accueille beaucoup d‟immigrants qui travaillent dans le
secteur informel.

A Ho Chi Minh Ville, selon les statistiques, le pourcentage de femmes


immigrantes est plus élevé que celui des hommes. Le recensement de la population et du
logement à Ho Chi Minh Ville a montré qu‟il y a 415.387 immigrants pendant la période
de 1994 – 1999. Les femmes représentent 54% des immigrants. Ces chiffres reflètent une
réalité à Ho Chi Minh Ville : les secteurs économiques qui acceptent d‟employer la main
d‟œuvre immigrante sont des secteurs traditionnellement féminins : textile, confection,
transformation alimentaire. Les femmes prédominent aussi dans le petit commerce et les
services de bas de gamme.
Malgré son caractère de métropole qui relie le Vietnam au système économique
mondial, Ho Chi Minh Ville fonctionne encore dans une économie dualiste où coexistent
d‟un côté un secteur d‟économie moderne consistant des emplois de qualité, à coûts
élevés et peu flexibles, et de l‟autre, un large secteur informel à faible productivité mais
bien plus flexible. Ce secteur peut faire vivre plusieurs personnes moyennant un bas
revenu. Des études sur le niveau de vie ainsi que des études économiques à Ho Chi Minh
Ville ont montré qu‟en moyenne de 40% à 50% de la population urbaine vit de ou avec le
secteur informel. Ce pourcentage est significatif pour une grande ville de plus de 6
millions d‟habitants comme HCMV, il concerne une population suffisamment grande qui
est capable de créer par elle-même un environnement économique plus ou moins
autonome. Dans la société traditionnelle du Vietnam, les femmes occupent presque à
100% le petit commerce et services destinés aux consommateurs de conditions
financières modestes. Les femmes rurales immigrantes trouvent sans difficulté un moyen
de vivre dans ce secteur, elles ne rencontrent pas de contrainte comme dans les sociétés
où l‟homme assure le petit commerce (ex : l‟Inde, la Turquie...).
On peut esquisser le portrait des femmes rurales immigrantes avec les
caractéristiques suivantes. Elles assurent le soutien économique et moral à leurs familles,
que ces dernières soient en ville ou à la campagne. Elles sont principales responsables de
la survie de leurs familles. Le rôle de leurs maris est flou. Conscientes de leur
responsabilité envers leurs familles, surtout l‟avenir de leurs enfants, les femmes rurales
immigrantes ont une très forte volonté de sortir de la pauvreté. Cette volonté les aide à
surmonter les difficultés et à s‟adapter à la vie urbaine tellement complexe et à faire face
avec courage aux risques et dangers. Elles sont attachées aux valeurs morales
traditionnelles, s‟attachent à gagner la vie par des métiers honnêtes. Elles considèrent que

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leur honnêteté constitue un point fort apprécié par les autorités municipales. Elles
s‟attachent à la famille, à l‟éducation de leurs enfants et à la communauté. Ces femmes
ont un fort sens de sacrifice d‟elles-mêmes, une valeur traditionnelle des femmes
vietnamiennes. L‟estime de soi-même constitue aussi une caractéristique de ces femmes.
Elles ont une grande capacité d‟adaptation à la vie de la grande ville, justement grâce au
secteur informel. Elles aspirent à acquérir des expériences de leurs prédécesseurs pour
mieux s‟adapter au mode de vie urbain.
Le secteur informel joue un rôle important pour les femmes migrantes pauvres
pendant tout le processus de migration, du départ à l‟installation temporaire ou définitive
des migrantes. Le réseau informel des relations et communautés accompagne les
migrantes tout le long du processus : premier point de chute à leur arrivée à HCM Ville,
trouver un emploi, un logement, prestation de crédit, soins de maladie, remise de l‟argent
à la famille. Le secteur informel, à ce stade de développement de la ville, constitue un
environnement de transition qui accueille les immigrantes pauvres et facilite leur
intégration progressive à la vie urbaine. Ainsi, sur le plan social, dans le contexte où
existe encore une grand écart entre la métropole et les régions rurales pauvres, devant des
flux massifs d‟immigrants ruraux-urbains, le secteur informel est un milieu de transition
qui aide à atténuer les tensions et exclusions pour les migrantes pauvres. Les femmes
rurales migrantes ne se sentent pas exclues, au contraire, elles regardent vers la métropole
comme une opportunité de réduction de la pauvreté pour leurs familles.

Sensibilisation aux questions du genre


L‟environnement économique et culturel favorable au renforcement de la position
des femmes est valorisé par une politique active de l‟égalité des genres de la part du
gouvernement. L‟apport des mouvements sociaux et des chercheurs dans le domaine du
genre est considérable. Des cours sur le genre et développement ont été introduits dans
les programmes de sociologie des universités. La dimension « genre » est obligatoire
dans les projets d‟aménagement urbain financés par les organismes internationaux. Les
ONG implantent plusieurs catégories de projets de développement communautaire axés
sur le renforcement des moyens d‟action des femmes et l‟égalité des genres. Toutes ces
politiques et actions convergent à une plus grande conscience de genre dans la société
urbaine.

Les défis à l‟égalité des genres sont pourtant nombreux et certains ne sont pas
faciles à lever parce que la plupart d‟entre eux sont d‟ordre culturel, donc au niveau de
mentalités, d‟attitudes. Elles commandent les comportements et actions aux dépens des
femmes.
L‟effet du plafond de verre se fait sentir dans la promotion des femmes aux
postes de direction dans l‟appareil du secteur public, dans l‟éducation et la recherche.
La première phase d‟industrialisation de la métropole et la mondialisation
entraînent avec elles des problèmes sociaux auxquels la société urbaine et ses
gestionnaires ne sont pas prêts à faire face. Les problèmes qui affectent le plus les
rapports sociaux hommes – femmes ainsi que le statut des femmes sont ceux qui relèvent
de la santé en matière de reproduction : avortement chez les adolescentes, VIH/ SIDA,
prostitution, trafic des femmes, manque de connaissances d‟approche de genre de la
contraception, abandon de l‟école des élèves-filles.

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Plus invisible est la persistance du patriarcat et des anciennes normes de valeur,
présents non seulement chez les hommes mais aussi chez les femmes. Des valeurs telles
que le bonheur familial lié au critère d‟avoir un mari et des enfants, la féminité liée
simplement à la beauté féminine, le devoir de faire plaisir aux hommes continuent à nuire
à l‟égalité des genres.

Une plus forte sensibilisation à l‟égalité des genres et à ses valeurs, l‟implantation des
projets d‟encouragement des femmes à l‟éducation et à la participation aux instances de
décision économique et politique, un combat contre les discriminations à l‟égard des
femmes s‟avèrent nécessaires encore pour plusieurs années à venir.

Octobre 2005

REFERENCES
CCIV, 2005, Aperçu du Comité des femmes dirigeantes d’entreprise (VWEC).
Ha Vy, 2005, Les femmes dirigeantes d’entreprise face aux nouveaux opportunités et
défis, VN express.
HA thi Phuong Tien, Ha Quang Ngoc, 2001, Female Labour Migration : Rural-Urban,
Women‟s Publishing House, Ha Noi.
Hong Phuc, 2005, Les femmes dirigeantes d’entreprise manquent du savoir-faire dans la
gestion des affaires, Vietnam Net.
Hong Phuc, 2005, Les femmes dirigeantes d’entreprise américaines cherchent des
partenaires au Vietnam, Vietnam Net.
Luu Huong, 2005, Première enquête sur les femmes dirigeantes d’entreprise au Vietnam-
Renforcement les moyens d’action pour les femmes dans le domaine économique, CCIV.
Thai thi Ngoc Du, 1998, Le secteur informel à Ho Chi Minh Ville, publiée par
l‟Université Ouverte de Ho Chi Minh Ville.
Thai thi Ngoc Du, Nguyen Xuan Nghia, 2002, Female rural migrant workers in the
informal sector in Ho Chi Minh City. Research report, Open University of Ho Chi Minh
City.

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