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40-190

Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-190

Cancers de l’œsophage :
voies d’abord de l’œsophage et du pharynx
A Sauvanet

Résumé. – La multiplicité des voies d’abord utilisables (abdominales, thoraciques et cervicales) est une des
spécificités de la chirurgie du cancer de l’œsophage. Ces voies d’abord sont choisies en fonction des impératifs
chirurgicaux d’exérèse et de reconstruction, mais doivent également tenir compte de leur retentissement qui
est essentiellement respiratoire. La chirurgie vidéoassistée est actuellement peu diffusée dans le traitement du
cancer de l’œsophage, ses avantages en termes de fonction respiratoire postopératoire n’apparaissant pas
encore très clairs.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : cancer de l’œsophage (épidermoïde, adénocarcinome), voie d’abord de l’œsophage,


laparotomie, laparoscopie, thoracotomie, thoracoscopie.

Introduction LAPAROTOMIE
L’installation du malade est habituellement un décubitus dorsal
Du fait du siège cervical, thoracique et abdominal de l’œsophage, la strict, le membre supérieur droit à la perpendiculaire du corps.
chirurgie du cancer de l’œsophage nécessite le plus souvent le Toutefois, cette installation peut varier selon le type d’intervention
recours à une double ou une triple voie d’abord. retenu (œsophagectomie sans thoracotomie, résection par double
Une voie d’abord abdominale est toujours nécessaire pour assurer voie simultanée ; cf infra). Chez les malades corpulents, un billot
la gastrolyse. En fonction de l’étendue de l’œsophagectomie et de la transversal peut être placé sous la pointe des omoplates pour
réalisation ou non d’un curage ganglionnaire thoracique, on y améliorer l’exposition de la région hiatale. La voie d’abord
associe une voie d’abord thoracique (habituellement droite) et/ou habituellement utilisée est une incision médiane sus-ombilicale
une voie d’abord cervicale. La multiplicité des voies d’abord éventuellement agrandie en sous-ombilical chez les malades
complique le choix de la technique chirurgicale, augmente corpulents. Une valve autostatique (type valve de Rochard) est
l’importance du retentissement respiratoire de l’intervention et indispensable pour rétracter l’auvent costal vers le haut et donner
augmente le risque des complications postopératoires. du jour sur l’étage sus-mésocolique. Cet écarteur doit si possible
pouvoir être mobilisé dans le sens latéral pour améliorer l’exposition
Ce travail expose successivement les voies d’abord de l’œsophage et sur l’hypocondre gauche lors de la section des vaisseaux courts
du pharynx et précise les éléments qui permettent d’orienter le choix gastrospléniques, et sur l’hypocondre droit lors du décollement
de ces voies d’abord et donc du type d’intervention. duodénopancréatique et de la confection de la pyloroplastie. La mise
en place d’un deuxième écarteur autostatique dans le sens
transversal (type écarteur de Ricard ou de Gosset) permet encore
Abord abdominal d’améliorer l’exposition (fig 1).
Chez les malades obèses ou dont l’auvent costal est large, une
Un abord abdominal permet la dissection de l’œsophage abdominal, incision bi-sous-costale peut être préférée. Il est alors utile de placer
l’exérèse des chaînes ganglionnaires abdominales drainant un écarteur autostatique de chaque côté pour ouvrir, en le rétractant,
l’œsophage et la préparation de l’organe remplaçant l’œsophage. Ce l’auvent costal. L’incision bi-sous-costale est réputée moins
dernier point explique que l’abord abdominal est presque toujours douloureuse et amputant moins la fonction respiratoire que
nécessaire, la seule exception étant l’intervention de Sweet faite par l’incision médiane. Cependant, à notre connaissance, cet avantage
une thoracotomie gauche associée à une phrénotomie (cf infra). En n’est démontré par aucune étude contrôlée [13].
cas de cancer du cardia ou de l’œsophage inférieur, une voie d’abord
En cas de cancer épidermoïde, même localisé au bas œsophage, la
abdominale associée à une ouverture de l’hiatus peut être utilisée
carcinose péritonéale est exceptionnelle et l’exploration abdominale
pour réséquer la tumeur et faire une anastomose dans le médiastin
doit essentiellement rechercher des métastases hépatiques ou des
inférieur ; toutefois, la section œsophagienne porte alors à proximité
adénopathies métastatiques. En cas d’adénocarcinome du cardia ou
de la tumeur et l’anastomose est souvent de réalisation difficile
du bas œsophage, il est indispensable d’examiner le péritoine de la
même en utilisant une pince à suture mécanique.
totalité de la cavité abdominale, y compris celui de l’arrière-cavité
des épiploons.
Pour obtenir un jour suffisant sur la région hiatale, il faut mobiliser
Alain Sauvanet : Professeur des Universités, praticien hospitalier, service de chirurgie digestive, hôpital
le lobe gauche du foie en le réclinant vers le haut et la droite, le plus
Beaujon, 100, boulevard du Général-Leclerc, 92110 Clichy, France. souvent après avoir sectionné le ligament falciforme, le ligament

Toute référence à cet article doit porter la mention : Sauvanet A. Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Techniques chirurgicales – Appareil digestif, 40-190, 2002, 11 p.
40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales

L’agrandissement de l’hiatus par section partielle du pilier droit plus


ou moins complétée par l’incision du bord antérieur de l’hiatus
jusqu’à la veine phrénique inférieure n’est nécessaire qu’en fin
d’intervention pour éviter une compression de la gastroplastie et de
son pédicule gastroépiploïque ;
– une œsophagectomie sans thoracotomie (ou rarement une
résection limitée à l’œsophage inférieur avec anastomose
médiastinale basse par voie abdominale) a été choisie : il faut alors
ouvrir largement l’hiatus à son bord antérieur après avoir décollé
au doigt le péricarde du diaphragme et avoir sectionné, entre deux
ligatures serties, la veine phrénique inférieure. L’ouverture ainsi
réalisée peut être maintenue ouverte par des fils tracteurs. Une
ouverture diaphragmatique de 7 à 10 cm est habituellement
suffisante pour obtenir un jour satisfaisant jusqu’au bord inférieur
des deux bronches souches. La visualisation de celles-ci nécessite
une parfaite exposition en refoulant le massif cardiaque par une
valve métallique, si possible de forme plane. Cette manœuvre est
souvent mal tolérée au plan cardiovasculaire et doit être
régulièrement interrompue pour permettre à l’opéré de récupérer
une hémodynamique satisfaisante.
En fin d’intervention, l’hiatus doit être reconstitué lâchement autour
de la gastroplastie en suturant la partie incisée du diaphragme
d’avant en arrière à points séparés de fil non résorbable. Il faut
laisser un passage pour deux doigts à frottement doux entre la
plastie et l’hiatus pour éviter de stranguler la plastie et son pédicule.
À l’inverse, une fermeture insuffisante expose au risque de hernie
diaphragmatique qui peut survenir précocement ou à distance de
l’intervention [38].
Le drainage paraît en théorie utile pour éliminer le pneumopéritoine
postopératoire et faciliter ainsi la mobilité diaphragmatique en
postopératoire. Deux drains aspiratifs de type Redon (un dans la
région sous-phrénique gauche et un dans la région sous-hépatique)
sont suffisants. Il n’est pas démontré que ce type de drainage soit
indispensable. Le drainage de la pyloroplastie, si elle est faite, est
1 Abord abdominal par médiane sus-ombilicale. Le lobe hépatique gauche a été
inutile.
récliné après section du ligament falciforme, du ligament triangulaire gauche et du
petit épiploon. L’œsophage abdominal est mis sur lacs.
LAPAROSCOPIE
triangulaire gauche et le petit épiploon (fig 1). Lors de la section du L’exploration de la cavité abdominale peut également être effectuée
ligament triangulaire gauche, il faut veiller à ne pas blesser la veine par laparoscopie qui permet la détection des petites métastases
hépatique gauche dans laquelle s’abouche habituellement la veine hépatiques (quelle que soit l’histologie de la tumeur œsophagienne)
phrénique inférieure gauche. Si le petit épiploon contient une artère et des métastases péritonéales (en cas d’adénocarcinome).
hépatique gauche, il faut palper le pédicule hépatique à la recherche L’exploration par laparoscopie est d’autant plus rentable que le bilan
d’une artère hépatique moyenne ou d’une artère hépatique droite : d’imagerie préopératoire est de qualité imparfaite, et permet d’éviter
en cas d’absence d’artère dans le pédicule hépatique (disposition de une laparotomie inutile chez 10 à 30 % des malades [4, 21]. Toutefois,
type artère hépatique gauche–foie total observée dans 1 % des cas) cette exploration méconnaît des métastases hépatiques ou
ou si l’artère palpée dans le pédicule est de très petite taille, il faut péritonéales chez environ 3 % des malades [4, 21].
préserver l’artère hépatique gauche et l’artère gastrique gauche en L’abord laparoscopique permet également la même dissection de
amont de celle-ci. Le lobe hépatique gauche doit être maintenu l’œsophage et du cardia et la même gastrolyse que la laparotomie.
récliné vers le haut et la droite par une valve solidarisée à l’écarteur Le curage ganglionnaire des chaînes gastrique gauche et cœliaque
pariétal. est sensiblement identique à celui permis par une laparotomie [11].
La dissection de l’hiatus commence par l’ouverture du péritoine à la La gastrolyse par laparoscopie nécessite la mise en place de six
face antérieure de l’œsophage. Latéralement, le péritoine est incisé trocarts abdominaux dont deux trocarts de 10 mm (n o 4 en sus-
aux bords antérieurs du pilier droit sur toute sa longueur et du pilier ombilical et no 5 en fosse iliaque gauche) servant principalement à
gauche à sa partie haute. L’espace inframédiastinal est ouvert après l’insertion de l’optique, celle-ci devant être placée en fosse iliaque
incision du ligament phrénoœsophagien. L’œsophage est disséqué gauche lors de la section des vaisseaux gastroépiploïques gauches et
au doigt et chargé avec les deux nerfs pneumogastriques. Le passage des vaisseaux courts gastrospléniques (fig 2). Un trocart opérateur
rétroœsophagien est plus aisé si on l’effectue à la partie haute des de 12 mm (no 6) est nécessaire dans l’hypocondre gauche. Les
piliers. En cas de cancer du cardia ou de l’œsophage abdominal, il trocarts de 5 mm sont placés dans la partie droite de l’abdomen
est souhaitable de laisser une collerette d’hiatus au contact de (nos 1, 2 et 3) et sont utilisés pour insérer des pinces à préhension
l’œsophage et de la tumeur en incisant les piliers dans leur exposant le champ opératoire.
épaisseur. L’œsophage est mis sur lacs avec les deux nerfs Si une intervention par voie abdominale et thoracique droite est
pneumogastriques et attiré vers le bas (fig 1). Deux cas doivent alors choisie, le temps laparoscopique est fait en premier et la tubulisation
être distingués : de l’estomac, permettant la résection des chaînes ganglionnaires de
– si l’on a choisi d’effectuer une œsophagectomie avec thoracotomie, la partie verticale de la petite courbure gastrique, est plus facilement
il n’est pas nécessaire d’agrandir davantage l’orifice hiatal pour réalisée par thoracotomie droite [11].
poursuivre la dissection vers le haut. L’abord déjà obtenu permet de Si une œsophagectomie sans thoracotomie est choisie, l’œsophage
visualiser la face postérieure du péricarde, les deux plèvres est disséqué par voie transhiatale (après agrandissement de l’hiatus
médiastinales et la face antérieure de l’aorte descendante. à son bord antérieur) jusqu’au bord inférieur des bronches souches

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2 Gastrolyse par laparo- 3 Abord de l’œsophage


scopie : position des tro- thoracique par thoracotomie
carts. postérolatérale droite. Le
membre supérieur droit est
laissé pendant vers l’avant,
ce qui ouvre l’angle entre
l’omoplate et le rachis.

où les deux nerfs pneumogastriques sont coupés [11, 15]. Le cardia est d’une bonne exposition sur le médiastin supérieur, il faut laisser le
sectionné par agrafage linéaire (type Endo GIAt), le transplant membre supérieur droit pendant vers l’avant, ce qui ouvre l’angle
gastrique étant extériorisé transitoirement au travers d’une courte entre le bord postérieur de l’omoplate et le rachis et permet de
incision située en avant du pylore. Cette incision permet la prolonger l’incision vers l’arrière jusqu’à débuter la section du
tubulisation gastrique par voie extracorporelle et la pyloroplastie. muscle rhomboïde, et inciser le cinquième espace intercostal (fig 3).
Après tubulisation, l’estomac est réintroduit dans l’abdomen, Le muscle dentelé est sectionné après ligature de son pédicule
l’incision abdominale est fermée et l’œsophagectomie est complétée vasculonerveux ou partiellement désinséré vers le bas en sectionnant
par voie cervicale gauche. Le tube gastrique est finalement ses insertions costales.
ascensionné dans le médiastin postérieur et anastomosé à Si l’on souhaite disposer préférentiellement d’une bonne exposition
l’œsophage cervical. sur le médiastin inférieur, il faut inciser le sixième espace intercostal.
Cette technique nécessite une bonne expérience de la laparoscopie. Le membre supérieur droit est laissé pendant vers l’avant ou placé
Elle est encore mal évaluée et reste discutable dans les au-dessus de la tête de l’opéré dans un berceau ou fixé à un arceau.
adénocarcinomes du cardia et du bas œsophage en raison de la Dans ce dernier cas, la section du muscle dentelé est plus facile que
manipulation tumorale directe qu’elle suppose. Pour notre part, sa désinsertion.
nous la réservons aux carcinomes épidermoïdes de l’œsophage La résection d’une côte est généralement inutile. L’écarteur
thoracique sans extension ganglionnaire cœliaque décelable en autostatique (de type Finochietto ou Lortat-Jacob) est installé avec
imagerie [11] . Le bénéfice procuré en termes de fonction et de sa crémaillère placée vers l’aide. Il faut ouvrir progressivement la
complications respiratoires est également discuté. Certains auteurs thoracotomie en désinsérant les muscles intercostaux au bord
estiment qu’elle diminue le retentissement respiratoire des supérieur de la côte inférieure sur toute la longueur de l’espace pour
œsophagectomies et permet ainsi d’opérer des malades ayant une limiter les risques de plaie des vaisseaux intercostaux et de fracture
fonction respiratoire altérée [11] . D’autres n’ont observé aucun de côte. L’exposition peut être améliorée vers le haut ou vers le bas
bénéfice fonctionnel respiratoire comparativement à la par la section du col de la côte respectivement sus- ou sous-jacente.
laparotomie [28]. Combinée à une approche thoracoscopique (lors La recherche de métastases pulmonaires est faite au mieux sur un
d’une intervention de Lewis-Santy), cette voie d’abord permettrait poumon exsufflé à l’aide d’une sonde d’intubation sélective.
une diminution du séjour hospitalier mais ne diminuerait pas le taux L’exposition complète du médiastin nécessite la section du ligament
de complications respiratoires [22]. triangulaire (qui contient une artériole dont il faut assurer
l’hémostase) et la ligature-section de la crosse de la grande veine
azygos.
Abord thoracique En l’absence de radiothérapie préopératoire, une dissection de
l’œsophage sus- et sous-tumoral n’entraîne pas d’ischémie pariétale
L’abord droit est le plus souvent choisi. En effet, par thoracotomie œsophagienne et peut constituer une manœuvre utile pour mieux
gauche, la libération de l’œsophage est rendue difficile par la apprécier la résécabilité de la tumeur. Cependant, il est préférable
présence du massif cardiaque, de la crosse de l’aorte et de l’artère de faire porter la dissection directement sur la zone où la résécabilité
sous-clavière gauche. apparaît douteuse et de procéder éventuellement à un examen
histologique extemporané. L’intervention est parfois indiquée pour
une tumeur initialement volumineuse et traitée par
THORACOTOMIE DROITE radiochimiothérapie avec une bonne réponse. Dans ce cas, si l’on
L’incision habituelle est une thoracotomie postérolatérale droite craint une extension tumorale persistante aux structures
sectionnant le muscle grand dorsal et empruntant le cinquième ou médiastinales pouvant contre-indiquer une résection, il est
le sixième espace intercostal. Le malade est alors placé en décubitus souhaitable de ne pas mobiliser de façon extensive l’œsophage sus-
latéral gauche avec un billot transversal placé à l’aplomb de la et sous-tumoral afin de ne pas dévasculariser la tumeur et d’éviter
pointe de l’omoplate. Si l’on souhaite disposer préférentiellement ainsi la nécrose de celle-ci, si elle est finalement laissée en place.

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40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales

Pour un cancer épidermoïde quelle que soit sa hauteur ou un


adénocarcinome du cardia ou de l’œsophage inférieur, la découverte 4 Abord de l’œsophage cervical par cer-
vicotomie pré-sterno-cléido-mastoïdienne
d’adénopathies médiastinales métastatiques ne contre-indique pas gauche. En pointillé : tracé de l’incision.
l’exérèse de la tumeur. Toutefois, le mauvais pronostic des La partie basse de l’incision est horizontale
adénocarcinomes du cardia ou de l’œsophage avec adénopathies 1 ou 2 cm au-dessus du manubrium ster-
récurrentielles ou latérotrachéales métastatiques [31] peut inciter à nal.
débuter l’intervention des ganglions suspects situés dans ces
territoires et récuser l’intervention si l’on souhaite éviter une
chirurgie palliative.
Avant fermeture, il est souhaitable de s’assurer d’une bonne
réexpansion pulmonaire en favorisant par la palpation douce du
parenchyme la levée des zones atélectasiées. Un double drainage
pleural est indispensable : un drain antérosupérieur est placé à
distance des vaisseaux sous-claviers, et un drain postérieur est placé
à proximité de la plastie et de l’anastomose. Un drainage médiastinal
est inutile et dangereux (risque d’ulcération digestive ou vasculaire). après œsophagectomie [8, 20, 25] ; ce résultat pourrait être, entre autres,
La fermeture est faite plan par plan au fil résorbable. Les points la conséquence de l’exclusion pulmonaire droite prolongée et d’un
rapprochant les côtes peuvent être passés au travers de la côte taux élevé de paralysies récurrentielles gauches dû à la dissection
inférieure pour éviter de traumatiser le nerf intercostal sous-jacent à cervicomédiastinale ;
l’incision. Le drainage pariétal n’a pas d’intérêt, sauf en cas de
– l’exérèse des volumineuses tumeurs semble difficile [20, 25] ;
pneumolyse difficile ayant entraîné une fuite aérienne importante
pour laquelle on craint un emphysème pariétal malgré le drainage – même si cet abord permet également une lymphadénectomie
thoracique. thoracique [33], l’exérèse des cancers thoraciques oblige à manipuler
l’œsophage en zone tumorale et doit donc faire émettre des réserves
au plan carcinologique. Pour ces raisons, cet abord reste peu utilisé
THORACOTOMIE GAUCHE
dans la chirurgie du cancer.
Deux cas sont à distinguer :
– la thoracotomie gauche est choisie en raison de l’impossibilité
d’utiliser une thoracotomie droite (antécédent de chirurgie ou de Abord cervical
tuberculose pleuropulmonaire droite) ou parce qu’il faut explorer
chirurgicalement une lésion thoracique gauche (nodule pulmonaire
par exemple) : l’incision est alors une thoracotomie postérolatérale CERVICOTOMIE LATÉRALE
gauche empruntant le cinquième ou le sixième espace intercostal. L’abord cervical usuel est une cervicotomie présterno-cléido-
L’installation de l’opéré, l’incision pariétale et sa fermeture ont les mastoïdienne. Le côté gauche est préféré parce que l’œsophage est
mêmes particularités que la thoracotomie droite. Toutefois, la légèrement dévié latéralement à gauche et parce que le nerf
mobilisation de l’œsophage (qui nécessite un décroisement avec la récurrent, situé dans l’angle dièdre trachéoœsophagien, parallèle à
crosse de l’aorte) et la confection d’une anastomose intrathoracique l’œsophage, n’est pas mis en tension par l’ouverture large de
sus-aortique (qui est gênée par la présence de la crosse de l’aorte et l’espace situé entre l’axe jugulocarotidien et l’axe viscéral. Si le côté
de l’artère sous-clavière gauche) demandent une excellente gauche n’est pas utilisable (antécédent chirurgical oto-rhino-
exposition sur le médiastin supérieur. En pratique, il est souvent laryngologique ou vasculaire), une incision droite est possible mais
plus facile, après thoracotomie gauche, de confectionner une expose à un risque accru de paralysie récurrentielle, en particulier
anastomose cervicale ; par traction excessive lors de l’exposition à la partie basse de
– la thoracotomie gauche constitue la voie d’abord exclusive pour l’incision ou si l’on étend la dissection vers le médiastin.
traiter un cancer de la jonction œsogastrique ou un adénocarcinome L’opéré est installé en décubitus dorsal, le cou en hyperextension
de l’œsophage inférieur. Il s’agit de l’intervention de Sweet (cf infra.) grâce à un billot transversal placé sous les omoplates. Chez les
malades âgés ou atteints d’arthrose cervicale, il faut éviter toute
hyperextension forcée et veiller à ce que la tête reste en appui
THORACOSCOPIE
pendant la durée de l’intervention. Le cou est tourné du côté opposé
L’abord thoracoscopique, qui n’a été rapporté que du côté droit, à l’incision sans être placé dans une position forcée qui aurait pour
nécessite une exclusion pulmonaire par intubation sélective et la inconvénient de faire recouvrir la gouttière jugulocarotidienne par
mise en place de cinq trocarts. Le trocart permettant l’introduction le muscle sterno-cléido-mastoïdien (SCM).
de la caméra doit être placé immédiatement en dessous de la pointe L’incision est oblique au bord antérieur du muscle SCM. Elle est
de l’omoplate chez un malade en décubitus latéral gauche avec le centrée par le repère de la bouche œsophagienne que constitue le
bras relevé placé en abduction. L’insufflation se fait à une pression cartilage cricoïde. La partie basse de l’incision est, soit prolongée
inférieure à 6 mmHg [2]. Le ligament triangulaire droit est sectionné dans le même axe jusqu’à la fourchette sternale, soit transversale 1 à
par coagulation et la crosse de l’azygos par une agrafeuse (type 2 cm de la fourchette sternale (fig 4). Cette dernière variante permet
Endo GIAt). Par cet abord, l’œsophage peut être disséqué, mis sur de mieux récliner l’axe trachéodigestif vers la gauche et d’améliorer
lacs, et libéré intégralement de l’orifice hiatal au défilé ainsi l’exposition sur l’œsophage cervicomédiastinal.
cervicothoracique. À cette exérèse peut être associé un curage
ganglionnaire médiastinal et un clippage du canal thoracique à son L’incision intéresse la peau, le muscle peaucier et l’aponévrose
entrée dans le médiastin. Le reste de l’intervention est mené par cervicale superficielle. La section de la veine jugulaire externe et
laparotomie (gastrolyse, gastroplastie et pyloroplastie) et d’une veine jugulaire antérieure est habituelle. L’aponévrose
cervicotomie (dissection et anastomose cervicales) [33]. Certains cervicale moyenne est incisée au ras du muscle SCM et la gouttière
auteurs associent un abord laparoscopique et réalisent en fait une est ouverte en passant en avant du muscle SCM. La branche
intervention de Lewis totalement vidéoassistée [22]. descendante du XII peut être sectionnée sans inconvénient à la partie
haute de l’incision. La section du muscle omohyoïdien, de la veine
L’abord thoracoscopique des cancers de l’œsophage a trois
thyroïdienne moyenne au ras de la veine jugulaire interne, puis de
inconvénients :
l’artère thyroïdienne inférieure est indispensable (fig 5). Il faut éviter
– à la différence de la laparoscopie, la thoracoscopie ne semble pas d’ouvrir la gaine vasculaire et de séparer la veine jugulaire interne
diminuer la fréquence et la gravité des complications respiratoires de l’artère carotide. Ceci permet ensuite de récliner de façon

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6 Abord cervical de l’œsophage par cervicotomie gauche. Exposition de l’œsophage


5 Abord de l’œsophage cervical par cervicotomie gauche. Exposition après incision cervical après ligature des vaisseaux thyroïdiens (veine thyroïdienne moyenne et artère
de l’aponévrose cervicale moyenne et refoulement du muscle sterno-cléido-mastoïdien. thyroïdienne inférieure) et extériorisation du pôle inférieur du lobe thyroïdien.
En pointillé : tracé de l’incision du plan profond avec ligature de la veine thyroïdienne
moyenne, du muscle omohyoïdien et des muscles sterno-cléido-hyoïdien et sternothy-
roïdien. Pour améliorer l’exposition à la partie basse de l’incision ou dans le
défilé cervicomédiastinal, il est possible de sectionner le chef sternal
du muscle SCM 1 cm au-dessus du sternum. Ce chef musculaire est
atraumatique l’artère carotide en chargeant la veine jugulaire et la alors reconstitué lors de la fermeture. L’exploration ganglionnaire
gaine avec l’écarteur. La section de l’artère thyroïdienne inférieure ne pose en règle pas de problème. Les deux seules difficultés sont :
doit être faite à légère distance du lobe thyroïdien pour éviter toute
lésion du nerf récurrent gauche. L’œsophage est exposé après avoir – éviter une plaie du canal thoracique ou d’une de ses racines lors
extériorisé le pôle inférieur du lobe thyroïdien, geste qui nécessite de l’exérèse d’un ganglion sus-claviculaire, surtout s’il est situé en
en règle la section au moins partielle des muscles sous-hyoïdiens arrière du confluent jugulo-sous-clavier ;
(sterno-cléido-hyoïdien et sternothyroïdien) (fig 6). Un écarteur – éviter un traumatisme du nerf récurrent gauche en réalisant
autostatique de type Beckmann est placé sur le lobe thyroïdien d’une l’exérèse d’un ganglion situé à son contact. Dans ce but, l’utilisation
part et sur la veine jugulaire interne recouverte de la gaine de la coagulation bipolaire ou de clips de petite taille peut être utile.
vasculaire et le muscle SCM d’autre part. Il est impératif d’éviter La fermeture de l’incision est faite en deux plans : muscle peaucier
d’appuyer tout écarteur dans l’angle trachéoœsophagien pour ne (surjet ou points séparés de fil résorbable 3/0) et peau (fil ou
pas léser le nerf récurrent. La section des vaisseaux thyroïdiens agrafes). On peut également reconstituer un plan plus profond en
supérieurs n’est pas nécessaire pour disposer d’un jour satisfaisant réinsérant lâchement les muscles sterno-cléido-hyoïdien et
sur la bouche œsophagienne. Si l’on souhaite s’exposer davantage sternothyroïdien à la face profonde du muscle SCM, ce qui permet
sur la paroi pharyngée postérieure, il peut être nécessaire de lier ces de couvrir partiellement le montage digestif. L’intérêt du drainage
vaisseaux en préservant soigneusement le nerf laryngé supérieur et cervical est discuté. En l’absence de drainage, il est nécessaire de
sa branche, le nerf laryngé externe, qui assurent la sensibilité du réintervenir pour drainer toute collection cervicale susceptible d’être
larynx et de la margelle pharyngolaryngée. la conséquence d’une fistule et éviter ainsi sa propagation par le
L’œsophage est abordé par son bord postérogauche. Il existe en médiastin. Si l’on choisit de drainer, une lame rétroanastomotique
arrière de l’œsophage un plan prévertébral celluleux lâche qui peut est extériorisée par une contre-incision au travers du muscle SCM
être facilement décollé au doigt jusque dans le défilé en évitant de blesser la veine jugulaire interne.
cervicomédiastinal et en arrière du pharynx. Le nerf récurrent
gauche est repéré et progressivement séparé du bord gauche de
l’œsophage. Il existe à ce niveau des artérioles tendues entre le bord CERVICOTOMIE EN U
gauche de la trachée et celui de l’œsophage dont l’hémostase est Cette incision est indiquée lorsqu’on veut procéder à un curage
facilitée par de petits clips ou une coagulation bipolaire. Il existe en ganglionnaire cervical extensif ou en cas de pharyngolaryn-
règle des rameaux collatéraux du nerf récurrent gauche assurant gectomie [35]. La tête est droite, en hyperextension grâce à un billot
l’innervation de l’œsophage. La face antérieure de l’œsophage est placé sous les épaules, mais peut être tournée facilement vers la
ensuite progressivement séparée de la membraneuse trachéale. Le droite ou la gauche. Latéralement, l’incision est située en avant de
plan séparant l’œsophage de la membraneuse est avasculaire. En chaque SCM et remonte au minimum à hauteur de l’os hyoïde. Sur
revanche, il existe le long du bord droit de petites artérioles la ligne médiane, les deux incisions sont reliées par une courte
identiques à celles présentes du côté gauche dont l’hémostase doit incision horizontale située 1 à 2 cm au-dessus de la fourchette
être faite par coagulation bipolaire ou clips. La présence de ces petits sternale (fig 7). Si l’on souhaite confectionner un trachéostome
vaisseaux, le point fixe que constitue la bouche œsophagienne, et la définitif au travers du lambeau inférieur, la partie horizontale de
proximité du nerf récurrent droit si l’on est très proche de la bouche l’incision doit être placée plus haut. Il faut décoller le lambeau
œsophagienne expliquent pourquoi le tour de l’œsophage cervical musculoaponévrotique inférieur jusqu’à la fourchette sternale et le
est plus facile au niveau du défilé cervicomédiastinal. lambeau supérieur jusqu’à 1 ou 2 cm au-dessus de l’os hyoïde (fig 8).

5
40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales

7 Abord cervical de l’œsophage par 9 Abord de l’œsophage


cervicotomie en U. En pointillé : tracé de cervicomédiastinal par cer-
l’incision. En grisé : étendue du curage vicomanubriotomie.
réalisable par cette incision.

l’envahissement d’un lobe thyroïdien ou d’un nerf récurrent à


proximité de son entrée dans le larynx ne constitue pas une
contre-indication [35].
Du fait de l’importance de la dissection cervicale, il est souhaitable
de mettre en place un drainage aspiratif de type Redon dans les
zones de décollement et de curage, ainsi qu’une lame souple
rétroanastomotique extériorisée par une contre-incision. La
fermeture cervicale est faite en deux plans (peaucier et peau). Chez
un malade ayant eu une radiothérapie préalable, une suture cutanée
par fils est préférable à l’utilisation d’agrafes. La confection du
trachéostome est faite à points séparés de fil résorbable 2/0 par
suture de son bord antérieur à la berge inférieure de l’incision et
suture de la membraneuse au lambeau supérieur de l’incision.

CERVICOMANUBRIOTOMIE
Cette incision peut être utile pour améliorer l’exposition sur
l’œsophage cervicomédiastinal (tumeur située à ce niveau,
réintervention). La cervicotomie, faite en avant du SCM gauche, est
prolongée vers le bas par une incision médiane dépassant
légèrement vers le bas les limites du manubrium (fig 9). Celui-ci est
incisé au ciseau à frapper ou à la scie oscillante après avoir décollé
au doigt les éléments du médiastin antérieur (loge thymique, tronc
veineux innominé). L’écartement est fait par un écarteur de type
8 Abord cervical de l’œsophage par cervicotomie en U. Exposition des plans muscu- Beckmann au niveau cervical et un écarteur de type Tuffier au
laires superficiels après décollement des lambeaux cutanés supérieur et inférieur. niveau sternal.
Lors de la fermeture, le manubrium est suturé par un ou deux fils
Ces deux lambeaux doivent être réclinés par un écarteur d’acier et les téguments thoraciques reconstitués en deux plans.
autostatique ou quelques points de suture temporaires chargeant les
téguments du thorax et du menton.
Choix de la voie d’abord
Il est nécessaire de mobiliser la face profonde et la face superficielle
des deux muscles SCM pour exposer de façon satisfaisante la totalité
du cou. Les creux sus-claviculaires peuvent être abordés en passant CRITÈRES DE CHOIX
en avant et/ou en arrière des muscles SCM. Pour améliorer En pratique :
l’exposition dans le défilé cervicomédiastinal, il est possible de
sectionner les deux chefs sternaux des muscles SCM et de les – un abord abdominal est presque toujours nécessaire ;
reconstituer lors de la fermeture. – un double abord abdominothoracique ou abdominocervical est
Les contre-indications à l’exérèse sont : fréquemment utilisé ;

– l’envahissement d’un axe artériel carotidien ; – un triple abord permettant l’exposition et la dissection de la
totalité de l’œsophage et des aires ganglionnaires de drainage est la
– une extension trachéale interdisant une section de la trachée en technique la plus rarement utilisée.
zone saine et la confection sans traction d’un trachéostome fixé à la Les voies d’abord, et donc finalement le type d’intervention, sont
peau au-dessus de la fourchette sternale ; choisis en fonction : du type histologique et de la hauteur du pôle
– un envahissement ganglionnaire fixé au plan postérieur ou supérieur de la tumeur, du type de curage ganglionnaire souhaité,
nécessitant le sacrifice des deux veines jugulaires internes. de l’organe utilisé pour le remplacement œsophagien, de l’état
général et de la fonction respiratoire de l’opéré.
Par ailleurs, la découverte d’adénopathies métastatiques à distance
de l’axe viscéral du cou (creux sus-claviculaires, partie haute de la
¶ Type histologique et pôle supérieur de la tumeur
chaîne jugulaire au contact du nerf spinal ou du muscle digastrique)
ne doit faire retenir l’indication de l’intervention qu’avec Pour le cancer épidermoïde, la marge à respecter varie selon
circonspection en raison du mauvais pronostic attendu. En revanche, l’extension pariétale [36] :

6
Techniques chirurgicales Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx 40-190

– en cas de cancer superficiel (limité à la muqueuse et à la sous- ceux du choix entre intervention d’Akiyama et intervention de Mac
muqueuse), la fréquence des lésions épithéliales satellites est telle Keown. Cependant, le côlon est habituellement considéré comme
que des marges de résection de 2, 4 et 6 cm in vivo exposent à un plus sensible à la radiothérapie que l’estomac : il est donc logique
risque d’envahissement de la tranche de section par un carcinome de préférer un trajet rétrosternal si une radiothérapie postopératoire
in situ de respectivement 14 %, 8 % et 3 % ; ces résultats plaident en apparaît probable.
faveur de la réalisation systématique d’une œsophagectomie
subtotale avec anastomose cervicale, ou d’une coloration vitale au ¶ État général et fonction respiratoire de l’opéré
Lugol pour localiser précisément le pôle supérieur d’une
tumeur superficielle [24] ; La plupart des auteurs réservent l’œsophagectomie sans
thoracotomie aux malades en mauvais état général [19] ou ayant une
– quelle que soit la profondeur de la tumeur, une marge de 6 cm in
insuffisance respiratoire mais d’autres utilisent systématiquement
vivo est associée à un risque d’envahissement de la recoupe
cette technique [17, 26]. Certains travaux rétrospectifs suggèrent que
proximale par des emboles lymphatiques ou vasculaires de 5 %.
l’œsophagectomie sans thoracotomie est l’intervention la mieux
À l’étage cervical, il faut essayer de conserver 2 cm d’œsophage sous tolérée et que l’œsophagectomie par triple voie d’abord est
la bouche œsophagienne pour limiter le risque de fausses routes. Le l’intervention ayant les suites opératoires les plus difficiles [5]. En
résultat en termes de survie à distance ne semble pas non plus réalité, aucun travail prospectif randomisé portant sur des effectifs
conditionné par le siège de l’anastomose [30]. Le résultat fonctionnel importants n’a confirmé ces données.
attendu ne peut également être un critère décisif car :
En pratique, l’expérience et les préférences de l’opérateur participent
– les anastomoses cervicales sont associées à une prévalence plus également largement au choix du type d’intervention.
importante des fistules [37] et des sténoses anastomotiques [14, 32] ;
– les anastomoses intrathoraciques sont associées à une prévalence DIFFÉRENTES INTERVENTIONS
plus importante du reflux gastroœsophagien [12].
Pour l’adénocarcinome, la prévalence des emboles lymphatiques ¶ Œsophagectomie par double abord abdominal
sous-muqueux est plus importante dans ce type histologique et la et thoracique droit (intervention de Lewis-Santy)
marge de résection proximale doit être comprise in vivo entre 8 et
10 cm pour obtenir un taux d’envahissement de la recoupe L’installation habituelle consiste à placer d’abord le malade en
proximale inférieur à 5 % [27, 31]. décubitus dorsal pour la réalisation du temps abdominal, puis en
décubitus latéral gauche pour le temps thoracique.
¶ Type de curage ganglionnaire En décubitus dorsal, la position du membre supérieur gauche est
L’extension ganglionnaire thoracique ne peut être appréciée indifférente, sauf si on envisage de convertir l’intervention en
précisément que par une lymphadénectomie médiastinale qui ne œsophagectomie sans thoracotomie. Il est souhaitable de préparer
peut être faite que par thoracotomie [19]. Lorsqu’une œsophagectomie un champ suffisamment large pour permettre le drainage des deux
est faite par voie thoracique droite, la plupart des auteurs cavités thoraciques si cela s’avère nécessaire (tumeur du cardia ou
s’accordent à réaliser un curage médiastinal sous-aortique, en du bas œsophage dont on commence la dissection par voie
complément du curage abdominal dans la région cœliaque (curage abdominale). Pour le temps thoracique, le malade est ensuite placé
« à deux étages »). Un curage ganglionnaire sus-aortique complet en décubitus latéral gauche avec le bras pendant. Un billot
associé à un curage cervical est proposé par certains auteurs dans le transversal est placé à hauteur de la pointe de l’omoplate, monté
but de diminuer le taux de récidives cervicomédiastinales et dès l’intervention et descendu immédiatement avant la fermeture
augmenter ainsi la survie à distance, en particulier pour les tumeurs pariétale. En cas de découverte dans le thorax d’une extension
de l’œsophage sus-aortique et cervicomédiastinal [1, 3, 6, 23]. tumorale inattendue signant le caractère palliatif de l’intervention, il
est cependant nécessaire de réaliser l’œsophagectomie et
Ce curage nécessite une bonne exposition sur le médiastin supérieur, l’anastomose œsogastrique.
une cervicotomie en U, et un drainage aspiratif cervical.
L’anastomose œsogastrique est faite dans le cou quelle que soit la Il est également possible de réaliser la même intervention en
hauteur du pôle supérieur de la tumeur. Pour cette raison, le temps installant le malade en position de double voie simultanée. Pour ce
thoracique est réalisé en premier, et suivi par le temps abdominal faire, il faut installer le malade de trois quarts sur une table
associé au temps cervical. La gastroplastie est alors montée dans le permettant un roulis de chaque côté (fig 10). Le bassin du malade
médiastin postérieur [23]. est légèrement incliné vers la gauche en mettant un coussin sous la
fesse droite. Le tronc du malade est légèrement tourné par rapport
¶ Organe utilisé pour le remplacement œsophagien au bassin afin que l’axe passant par les deux épaules soit incliné
d’environ 45° par rapport au plan de la table. Le membre supérieur
L’estomac, tubulisé ou non, est l’organe le plus souvent utilisé pour gauche est placé à plat perpendiculairement au tronc du malade, et
remplacer l’œsophage. Avec l’estomac, il est possible de faire porter le membre supérieur droit est fixé à un arceau à hauteur de la tête
l’anastomose œsogastrique dans le thorax ou dans le cou. Dans du malade. Un billot transversal est également placé et levé à
certains cas, une gastroplastie peut être impossible et une coloplastie hauteur de la pointe des omoplates. Le malade doit être calé
alors nécessaire (antécédent de gastrectomie pour ulcère ou de suffisamment pour éviter tout mouvement lors des inclinaisons
gastrostomie chirurgicale, antécédent de réfection chirurgicale des latérales de la table d’opération. L’incision abdominale est toujours
mécanismes antireflux, cancer sur œsophagite caustique avec une médiane car l’abord vers la région sous-costale gauche est
atteinte gastrique, ou plaie peropératoire des vaisseaux limité. L’œsophage est abordé par thoracotomie antérolatérale
gastroépiploïques droits). Il s’agit d’une indication de nécessité car droite. Lors du temps abdominal ou du temps thoracique, le roulis
les coloplasties sont associées à une morbidité plus importante que de la table doit être marqué dans un sens ou dans l’autre. Cette
les gastroplasties [7]. L’anastomose œsocolique doit être faite au installation permet un gain de temps, en particulier si deux
niveau cervical, en raison des conséquences plus graves d’une chirurgiens peuvent assurer simultanément les deux temps de
désunion intrathoracique [7]. Une colopastie est donc utilisée, soit au l’intervention [9, 10]. Elle permet également un bon contrôle des
cours d’une œsophagectomie par triple voie d’abord, soit au cours différents temps de l’intervention : exploration des deux étages
d’une œsophagectomie sans thoracotomie. Si l’intervention est une avant la tubulisation gastrique ou mobilisation de l’œsophage,
œsophagectomie sans thoracotomie, la coloplastie est positionnée sécurité de l’ascension de la gastroplastie dans le thorax. En
dans le médiastin postérieur. Si l’indication d’une thoracotomie a revanche, cette installation a pour inconvénient une exposition
été retenue, le trajet de la coloplastie peut être médiastinal postérieur moins bonne dans l’hypocondre gauche et sur le médiastin
ou antérieur ; les critères de choix entre les deux techniques sont postérieur en particulier à sa partie haute. Il faut donc disposer

7
40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales

11 Œsophagectomie sans
thoracotomie. Installation
de l’opéré. Le champ opéra-
toire doit être large pour
permettre le drainage des
deux cavités pleurales. En
pointillé : tracé des inci-
sions abdominale et cervi-
cale. Il est possible de pro-
longer l’incision cervicale
par une manubriotomie.

*
A *
B

10 Intervention de Lewis-Santy avec


abord simultané abdominal et thoracique
droit
A. Position de l’opéré sur la table.
B. Inclinaison latérale de la table
d’opération facilitant l’abord abdo-
minal.
C. Inclinaison latérale opposée facili-
tant l’abord thoracique.

médiastin inférieur abordé par voie transhiatale. Le champ


opératoire doit inclure latéralement la partie basse du thorax pour
que les deux plèvres puissent facilement être drainées. En effet, la
dissection médiastinale aboutit à l’ouverture d’au moins une cavité
pleurale dans 75 % des cas [26]. Si la plèvre n’a pas été ouverte, un
épanchement pleural liquidien d’apparition retardée est très
fréquent et peut, surtout s’il est bilatéral, altérer la fonction
respiratoire postopératoire. C’est la raison pour laquelle certains
*
C préfèrent ouvrir délibérément les deux cavités pleurales pour les
drainer [17]. Certains auteurs laissent également la partie antérieure
de l’hémithorax droit dans le champ opératoire dans l’hypothèse où
d’une bonne expérience en chirurgie œsophagienne pour utiliser
une thoracotomie droite urgente (hémostase de la crosse de la veine
cette installation qui semble particulièrement utile chez les malades
azygos) s’avérerait nécessaire.
peu corpulents et/ou ayant une tumeur bas située sur l’œsophage.
À l’inverse, cette technique doit à notre avis être évitée chez les L’incision abdominale est une médiane ou une bi-sous-costale selon
malades obèses et/ou préalablement opérés à l’étage le morphotype de l’opéré. L’incision cervicale est une cervicotomie
sus-mésocolique. gauche habituelle. Afin que l’intervention puisse être réalisée à deux
équipes avec un opérateur abdominal à la droite du malade et un
¶ Œsophagectomie par double abord abdominal opérateur à gauche de la région cervicale, il faut éviter d’encombrer
et cervical (œsophagectomie sans thoracotomie, le champ opératoire cervical avec la chaîne rattachant la valve
ou œsophagectomie par voie transhiatale) abdominale aux piquets de Toupet. Pour ce faire, notre habitude est
de placer le piquet gauche un peu plus près du plan de la table que
L’œsophagectomie sans thoracotomie a pour buts de procéder à le piquet droit et de tracter la valve abdominale avec le piquet
l’exérèse de la totalité de l’œsophage thoracique en minimisant le gauche uniquement lors de la section des vaisseaux
retentissement respiratoire de l’intervention. Cette intervention ne gastroépiploïques gauches et des vaisseaux courts gastrospléniques
permet un abord sous contrôle visuel que de l’œsophage sous- pour bénéficier, lors de ce temps, d’une bonne exposition sur
carénaire. La dissection de l’œsophage est aveugle du défilé l’hypocondre gauche.
cervicomédiastinal à la carène. Cette intervention ne permet
l’exérèse que des ganglions latéroœsophagiens sous-carénaires et des L’intervention commence habituellement par l’exploration
ganglions des ligaments triangulaires. L’exposition des ganglions abdominale. Dès celle-ci terminée, l’incision cervicale peut être faite
intertrachéobronchiques est très difficile et leur exérèse n’est que très et la dissection cervicomédiastinale débutée. L’exploration doit
rarement réalisable. Aucune exérèse lymphatique n’est possible à cependant être adaptée à chaque cas. En cas de tumeur de
l’étage rétroaortique ou sus-aortique. L’exérèse œsophagienne libère l’œsophage thoracique inférieur ou du cardia, il est logique de
le médiastin postérieur pour y placer la gastroplastie, mais il est vérifier que la tumeur est localement résécable avant de débuter le
également possible de placer celle-ci dans un trajet rétrosternal. temps cervical. S’il s’agit d’une tumeur cervicomédiastinale, il peut
Le malade est installé en décubitus dorsal avec le bras gauche le être préférable d’explorer d’abord la région cervicale.
long du corps (fig 11). La tête est en hyperextension et en rotation Le drainage des plèvres est plus facile avant l’ascension de la
droite. Un billot transversal est placé sous la pointe des omoplates gastroplastie. Celle-ci est le plus souvent faite dans le lit œsophagien,
et améliore à la fois l’extension cervicale et l’exposition sur le dans le médiastin postérieur (fig 12).

8
Techniques chirurgicales Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx 40-190

sont réalisées. L’œsophage est sectionné et suturé au niveau de


12 Œsophagectomie sans
l’hiatus œsophagien qui est fermé, et du défilé cervicomédiastinal.
thoracotomie et œsophagec-
tomie par triple voie Le transplant gastrique devant être ascensionné en rétrosternal, on
d’abord. Les différents tra- commence la tunnellisation à l’étage abdominal en désinsérant le
jets thoraciques de la plas- diaphragme de la face postérieure du sternum. Dans le défilé
tie. La voie présternale est cervicomédiastinal, il faut sectionner à leur partie basse le sterno-
abandonnée. 1 : voie rétros- cléido-hyoïdien et le sternothyroïdien puis emprunter le plan situé
ternale ; 2 : voie médiasti- immédiatement au contact du manubrium sternal. Les insertions
nale postérieure dans le lit latérales de ces deux muscles doivent être effondrées pour obtenir
de l’œsophage.
un tunnel suffisamment large. En effet, le tunnel rétrosternal doit
admettre quatre doigts à ses deux extrémités pour éviter toute
compression de la gastroplastie. Les deux incisions sont fermées
après ascension de la plastie, réalisation de l’anastomose, et
discussion d’une jéjunostomie d’alimentation. Le malade est alors
installé en position de thoracotomie droite. En cas de découverte
d’une extension tumorale méconnue signant le caractère palliatif de
la résection, il est possible d’arrêter l’intervention en laissant
l’œsophage exclu à condition qu’il ait été préalablement suturé à ses
deux extrémités de façon satisfaisante.
L’intervention de Mac Keown débute par le temps thoracique. Après
l’exploration, l’œsophage est mobilisé. Dans le médiastin supérieur,
il faut s’efforcer de poursuivre la dissection le plus haut possible
dans le défilé cervicothoracique pour faciliter la dissection cervicale
¶ Œsophagectomie par triple abord abdominal, ultérieure. En fin d’intervention, le drainage pleural doit être relié à
thoracique et cervical un système d’aspiration qui sera fonctionnel lors du temps
Cette intervention est celle permettant l’exérèse œsophagienne la abdominal et cervical. Le drainage médiastinal est inutile. Le malade
plus large avec le curage ganglionnaire le plus complet. Si cette est ensuite réinstallé en décubitus dorsal. En cas de découverte
intervention est décidée, il faut choisir le trajet de la plastie d’une extension tumorale méconnue lors de l’exploration
œsophagienne, ce qui équivaut à celui de l’ordre des différents abdominale ou cervicale, il est nécessaire de poursuivre
temps opératoires (fig 12). La première possibilité consiste à réaliser l’intervention car l’œsophage thoracique a été dévascularisé. La
en premier la gastroplastie, et l’ascensionner dans un trajet cervicotomie est faite au mieux dans le même temps par une
rétrosternal, et à l’anastomoser à l’œsophage cervical, puis de deuxième équipe. La confection d’une jéjunostomie d’alimentation
procéder à l’exérèse de l’œsophage et de la tumeur par une doit être discutée avant la fermeture abdominale.
thoracotomie droite (intervention d’Akiyama). La deuxième
possibilité consiste à procéder en premier à l’exérèse de l’œsophage ¶ Œso-pharyngo-laryngectomie totale
et de la tumeur par une thoracotomie droite, puis à réaliser la Cette intervention est indiquée à titre curatif pour des cancers de la
gastroplastie, et l’ascensionner dans un trajet médiastinal postérieur, bouche œsophagienne, des cancers du sinus piriforme ou de la paroi
et à l’anastomoser à l’œsophage cervical (intervention de Mac pharyngée postérieure envahissant la bouche œsophagienne, et pour
Keown). des cancers de l’œsophage cervical ne permettant pas une section
Les éléments pouvant faire préférer une intervention d’Akiyama (et de l’œsophage en zone saine. Pour permettre une conservation du
donc un trajet médiastinal antérieur) sont : pharyngolarynx, la plupart des auteurs recommandent une distance
minimale de 2 ou 3 cm entre la bouche œsophagienne et le pôle
– en cas de récidive dans le lit œsophagien, la gastroplastie est à supérieur de la tumeur [18, 35]. L’œso-pharyngo-laryngectomie totale
distance de la récidive et le risque de dysphagie a priori nul ; doit être faite à deux équipes, dont une expérimentée en chirurgie
– une irradiation du lit œsophagien est sans risque pour la cervicale. Habituellement, l’exérèse œsophagienne est faite sans
gastroplastie ; en fait, les lésions de l’estomac après irradiation thoracotomie. Seuls les cancers cervicothoraciques dont le pôle
médiastinale postérieure sont exceptionnelles. supérieur est à moins de 2 cm de la bouche œsophagienne peuvent
Les éléments pouvant faire préférer une intervention de Mac Keown justifier d’une thoracotomie droite associée qui alourdit nettement
(et donc un trajet médiastinal postérieur) sont : l’intervention.
Pour cette intervention, le malade est installé en décubitus dorsal
– ce trajet est plus court que le trajet rétrosternal [16] ;
avec les deux bras le long du corps, les épaules soulevées par un
– dans certaines équipes, le taux de fistule anastomotique cervicale billot et le cou en extension. La tête est non fixée, le thorax est dans
est inférieur à celui-ci observé après utilisation d’un trajet le champ pour un éventuel drainage pleural. L’installation doit tenir
rétrosternal [32] ; compte de la possibilité de ventiler le patient via le champ opératoire
– il pourrait permettre un meilleur confort fonctionnel car il est dès la trachée sectionnée. La jéjunostomie doit être systématique en
exempt d’angulation et, si une dilatation endoscopique de raison du risque de fistule de l’anastomose pharyngogastrique, de
l’anastomose œsogastrique est nécessaire, cette dilatation est plus fréquents troubles de la déglutition, et des difficultés possibles
facile et plus efficace [26]. Or, le taux de sténoses anastomotiques d’accès aux veines cervicales pour une nutrition parentérale.
cervicales bénignes nécessitant des dilatations endoscopiques peut
atteindre 25 à 30 % [29, 32]. ¶ Intervention de Sweet
Notre préférence va à l’intervention de Mac Keown, d’autant plus Cette intervention est rarement utilisée. Elle était réservée à l’exérèse
qu’elle est la seule vraiment adaptée aux cancers des adénocarcinomes du cardia ou du bas œsophage chez des
cervicomédiastinaux pour lesquels : malades à l’état général imparfait. On peut lui préférer actuellement
l’œsophagectomie sans thoracotomie.
– une section proche de la bouche œsophagienne est nécessaire ;
Pour l’intervention de Sweet, le malade est installé en décubitus
– une plastie médiastinale postérieure est dans le même axe que le latéral droit, un billot transversal sous la pointe de l’omoplate, et le
court segment œsophagien restant. membre supérieur étant fixé en hauteur à un arceau ou laissé
L’intervention d’Akiyama débute par le temps abdominal et le pendant vers la tête de l’opéré (fig 13). Une intubation sélective n’est
temps cervical. Après exploration, la gastrolyse et la gastroplastie pas nécessaire car seul le lobe inférieur gauche doit être récliné.

9
40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales

L’incision est une thoracotomie empruntant le 7e espace intercostal,


sectionnant le rebord chondrocostal et associé à une phrénotomie.
En arrière, il est souvent nécessaire de prolonger assez loin l’incision
en sectionnant le muscle grand dorsal pour disposer d’une bonne
exposition sur la région sous-aortique. L’exposition vers le haut peut
être améliorée par la section du col de la côte sus-jacente à l’incision.
Si la pointe de l’omoplate vient cacher la partie postérieure de la
thoracotomie, elle doit être rétractée vers le haut avec un lacs fixé à
un crochet (fig 13). La phrénotomie peut être, soit une phrénotomie
radiée ouvrant l’orifice hiatal en sectionnant le pilier gauche, soit
une phrénotomie périphérique sans section du pilier gauche qui a
l’avantage de moins traumatiser le diaphragme et les branches de
division du nerf phrénique mais complique la dissection et la
réalisation de l’anastomose au bord inférieur de la crosse de l’aorte. *
B
Si la tumeur envahit les piliers du diaphragme, une phrénotomie
radiée associée à une résection partielle des piliers est la technique
la plus adaptée. Il est souhaitable de mettre en place deux à six fils
repères résorbables sur la coupole diaphragmatique pour faciliter sa
reconstruction en fin d’intervention. Des adhérences entre la rate et
le diaphragme doivent être systématiquement recherchées et
sectionnées pour éviter une décapsulation. La palpation permet une
exploration complète de la cavité abdominale. En revanche,
l’exploration visuelle est limitée à l’étage sus-mésocolique et au foie
gauche. S’il est nécessaire d’exposer plus largement la cavité
abdominale, il faut s’agrandir en prolongeant la thoracotomie par
une incision oblique abdominale jusqu’à la ligne médiane.
Pour la fermeture, le diaphragme est reconstitué par des points *
A
séparés ou plusieurs surjets juxtaposés de fil monobrin non
13 Abord de l’œsophage thoracique inférieur par thoracotomie dans le 7e espace in-
résorbable 2/0. Il faut fixer la gastroplastie au pourtour de l’orifice tercostal gauche.
hiatal ainsi reconstitué en évitant de traumatiser ou de comprimer A. Position de l’opéré et tracé de l’incision.
les vaisseaux gastroépiploïques. Nous utilisons un drainage sous- B. Rétraction vers le haut de la pointe de l’omoplate par un lacs fixé à un crochet.
phrénique gauche de type drain de Redon. Le drainage pleural est En pointillé : section du muscle grand dorsal et du rebord chondrocostal.
sans particularité. Lors de la fermeture pariétale, il faut veiller à
réinsérer la partie antérieure de la phrénotomie à la partie la plus intervention ne permet pas d’obtenir de façon régulière une marge
antérieure de l’espace intercostal, et à réséquer suffisamment de de résection œsophagienne satisfaisante au plan carcinologique, et
rebord chondrocostal pour limiter le risque de pseudarthrose ou de entraîne souvent un reflux gastroœsophagien invalidant.
chondrite sources de douleurs postopératoires. L’œsophage sus-tumoral doit être abordé en agrandissant l’orifice
hiatal à son bord antérieur, éventuellement après section de la veine
¶ Œsogastrectomie polaire supérieure
diaphragmatique inférieure, ou par résection d’une collerette de
par voie abdominale piliers autour de la tumeur. Après réalisation de l’anastomose
Cette intervention n’est plus actuellement indiquée qu’à titre palliatif œsogastrique, il faut fixer la gastroplastie au pourtour de l’orifice
pour des adénocarcinomes du cardia sans extension œsophagienne hiatal reconstitué lâchement en évitant de traumatiser ou de
et dont l’extension gastrique est suffisamment limitée pour comprimer les vaisseaux gastroépiploïques. Le drainage médiastinal
permettre la confection d’un tube gastrique. En effet, cette nous paraît inutile. Le drainage abdominal est sans particularité.

10
Techniques chirurgicales Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx 40-190

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