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Monsieur le Préfet,
Mesdames et messieurs les élu(e)s,
Mesdames, Messieurs,
Pouvoir retrouver, chaque début d’année, tous ceux qui contribuent à faire vivre
la ville, qui s’investissent pour que Tremblay-en-France soit une ville humaine,
débordante d’activités, en bref une ville à vivre, est un moment privilégié.
Cette rencontre n’a, pour moi, rien de formel, ni d’obligé. Le passage d’une
année à l’autre est un moment où l’on se plaît tous à espérer la réalisation de
nos souhaits, où l’on aspire à mener à bien nos objectifs de vie individuelle et
commune. C’est avec beaucoup de sincérité que je souhaite que cette année
2011 vous soit bonne, fertile en projets, fructueuse pour vous et vos proches.
C’est vous qui la façonnez au quotidien par votre travail et votre dévouement.
C’est vous qui la faites vivre, qui la faites battre au rythme d’une vie sportive,
culturelle, économique et citoyenne extrêmement riche. Par la diversité de vos
engagements respectifs, vous êtes la plus belle preuve que la banlieue peut se
conjuguer à tous les temps de l’excellence.
Ce mépris trop souvent affiché à l’égard des banlieues trouve sa source dans une
longue histoire de relégation des couches populaires et de spécialisation à
outrance des territoires.
Le mot même de banlieue renvoie à des zones mises au ban de la vraie ville, des
zones exclues. Ne les a-t-on pas d’ailleurs longtemps affublées de termes tels
que « la zone » ? Ou encore désigné ses habitants de « banlieusards » à la fin du
19ème siècle, au cours d’un débat houleux entre élus parisiens ?
Depuis longtemps le peuple est affublé de noms offensants : les vilains ou les
gueux au Moyen-âge, la canaille ensuite, les communards en 1871, les salopards
en 1936. Mais certains mots finissent par perdre leur connotation péjorative,
particulièrement pour ceux-là mêmes qu’ils définissent.
Il en est des banlieusards comme des communards, dénommés ainsi par la
bourgeoisie méprisante de 1871 pour leur participation à la Commune de Paris
dont nous célèbrerons le 140e anniversaire cette année.
Ces sobriquets qui marquent la volonté de blesser, finissent ainsi par devenir des
mots tout à fait estimables.
Pourtant combien croient encore que notre département n’a pas d’histoire, alors
que de nombreux sites du département sont occupés depuis le paléolithique
inférieur ! Nous le savons bien à Tremblay quand des travaux doivent être
entrepris au Vieux Pays, où les vestiges historiques sont nombreux. Ces vestiges
non seulement attestent de la présence humaine depuis longtemps, mais
contribuent sans conteste à enrichir notre patrimoine historique national.
Ce que quasiment personne ne dit, c’est que les banlieues ont gagné depuis
longtemps leur autonomie et se sont construit une identité propre indépendante.
Elles ont conquis une véritable urbanité qui en fait des villes à part entière. Des
villes qui offrent à leurs habitants loisirs, culture, sport, éducation, espaces verts,
promenade, témoignage de l’histoire…
Comment penser qu’une ville comme Saint-Denis qui vient de dépasser les
100 000 habitants, bien plus que de nombreuses capitales régionales, n’a pas
d’histoire ? Au-delà, du rôle joué par l’abbaye depuis le Moyen-âge dans tout le
nord de Paris, sa basilique est la première église au monde à avoir été construite
en style gothique. Elle abrite la dépouille des rois de France, depuis « ce bon
roi » Dagobert comme dit la chanson enfantine. Cette ville dont mon ami, le
poète de la Résistance Jean Marcenac, disait qu’elle était « la ville des rois
couchés et du peuple debout ». Et c’est sans doute ce paradoxe qui dérange.
Comment croire qu’une ville comme Aubervilliers n’a pas de passé alors qu’elle
a vu défiler du 7e au 18e siècle, les quelques mille marchands venus de toute
l’Europe et de Byzance pour se rendre à la célèbre foire du Lendit, mot qui
signifie à l’origine « lieux de rencontre ».
Sans parler des châteaux, manoirs et maisons-fortes qui jalonnent nos villes : la
forteresse de Drancy du 13e et 15e siècle, le château de Villemomble…
Même l’architecture industrielle, qui a tant marqué nos villes, entre aujourd’hui
au patrimoine historique comme la Maison des Arbalétriers à Saint-Denis, la
parfumerie Bourgeois à Pantin, la Manufacture des Allumettes à Aubervilliers,
l’usine Babcock de La Courneuve.
Dès les années trente, les villes de Seine-Saint-Denis sont le lieu des innovations
architecturales comme au Blanc-Mesnil ou à Montreuil par exemple. Et plus
près de nous l’architecture Renaudie à Saint-Denis ou Aubervilliers.
Mais les villes de ce département n’ont pas seulement une histoire. Elles ont un
présent qui en fait des villes où l’innovation, l’originalité, l’audace ont toute leur
place dans la création.
Comment ne pas évoquer ses théâtres prestigieux qui dès 1960 singularisent la
création dans ce domaine. Je pense bien sûr au théâtre Gérard Philippe de Saint-
Denis ou au Théâtre de la Commune d’Aubervilliers où des artistes comme
Daniel Mesguich, Gabriel Garant ou Alfredo Arias ont pu créer en toute liberté
et contribuer au prestige culturel de la France.
N’oublions pas non plus l’activité de la vingtaine de cinémas qui, comme celui
de Tremblay, le cinéma Jacques Tati, offrent une programmation qui allie la
qualité et le plus grand choix.
C’est d’ailleurs à Montreuil que, depuis 27 ans, se tient le salon du livre pour
enfants.
Ces lieux de création multiples et ouverts ne sont pas figés. Sans cesse, des
villes innovent pour offrir à chacun le meilleur de la culture d’aujourd’hui.
Ainsi, la connivence entre Jack Ralite sénateur de Seine-Saint-Denis et le
professeur Carlo Ossola, a donné naissance aux « Lundis du Collège de France »
à Aubervilliers. Depuis 2006, quelques-uns des enseignements du prestigieux
Collège sont délocalisées sous forme de conférences thématiques ouvertes à
tous.
Cette identité-là est inscrite dans l’histoire de cette banlieue-là. Le fait d’être
constitué de nombreuses villes populaires, très urbanisées n’empêche pas d’être
des pionniers de la création. C’est cela qui rend nos territoires vivants.
Non décidément, les banlieusards ne sont pas des citoyens à la remorque de qui
que ce soit. Ils grandissent et vivent dans des villes qui ont conquis depuis
longtemps leur statut de villes à part entière.
Est-ce à dire que tout serait merveilleux ? Bien sûr que non.
Dans tous les domaines : transports publics, éducation, emploi, justice, santé,
culture… la banlieue est encore victime de discriminations.
C’est pourquoi je le dis ici avec force conviction : je travaillerai, comme je l’ai
fait jusqu’à présent, avec les services de l’État, pour que les lois de la
République s’appliquent pour tous.
De la même façon, je ne peux accepter sans rien dire que certains tentent
d’évacuer le problème en proposant une dépénalisation du cannabis. De telles
propositions, sont à mon sens d’une légèreté dangereuse. Quelle autorité reste-t-
il alors aux parents, aux enseignants, aux personnels soignants, aux associations
pour lutter contre ce fléau sanitaire ?
Il faut lancer un vrai débat sur cette question de la drogue, de ses effets sur la
santé, sur la relégation des jeunes qui la consomment et n’ont plus la force de
résister, de se battre pour construire leur vie.
Des campagnes sanitaires dignes de ce nom doivent être lancées sur les méfaits
de la consommation de toutes les drogues.
Mais, il est aussi nécessaire que plus de moyens soient donnés aux villes
populaires pour offrir à leurs habitants les mêmes chances qu’aux autres. La
République doit être au service de tous.
C’est dans cet esprit que j’ai soumis à l’Assemblée nationale une proposition de
loi inscrivant dans le code pénal la discrimination territoriale. Je souhaite que
cette proposition soit discutée. Cette discrimination doit être punie au même titre
que les 18 autres inscrites dans la loi.
C’est aussi ce qui m’a amené, avec d’autres, à lancer l’Académie des banlieues.
Cette association, composée de collectivités territoriales, se fixe pour objectif de
changer les idées reçues sur la banlieue. Elle constitue un lieu de recherches, de
réflexion, de propositions et d’actions destinées à comprendre et à combattre les
mécanismes de stigmatisation des banlieues populaires et de leurs habitants. Je
remercie les nombreux Tremblaysiens qui l’ont soutenue en juin dernier en
participant à son initiative de remise d’un prix de la manipulation à TF1.
Les cadres, les ingénieurs, les techniciens qui travaillent sur la plate-forme
aéroportuaire doivent pouvoir devenir des citoyens de nos villes. Cela suppose
de poursuivre l’aménagement de ces villes dans tous les domaines : loisirs,
cultures, transports, éducation, espaces de détente.
Il ne me reste plus qu’à vous renouveler tous mes vœux pour cette année 2011,
en souhaitant que vos souhaits les plus chers trouvent leur aboutissement.
J’espère pour chacun d’entre vous, mais aussi pour nous tous collectivement,
que l’année qui s’ouvre voit enfin l’avancée significative de nos projets.