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Comment
appréhender et
exploiter les
primes de risque
sur les marchés
financiers
L’auteur
Sommaire
Introduction
Les primes de risque des marchés risque sont capricieuses par nature puisqu’elles varient
financiers représentent un véritable au fil du temps. En conséquence, capturer les primes
de risque dans un environnement globalisé n’est pas une
défi pour ceux qui souhaitent les tâche facile. D’une part, cela nécessite une solide com-
exploiter. En effet, les marchés sont préhension des sources de risque et de la dynamique des
de plus en plus interconnectés et rendements associés. D’autre part, il faut savoir utiliser
à bon escient les outils quantitatifs dans un processus de
efficients dans le transfert des risques, mise en œuvre du portefeuille pour pouvoir tirer parti
ce qui érode progressivement la prime des primes de risque. Dans ce contexte, la question qui
moyenne récompensant la prise de se pose est la suivante : que savons-nous des primes
de risque sur les marchés financiers ?
risque des investisseurs. Dans les faits,
les primes de risque sont réparties Avant d’entrer dans le vif du sujet, soulignons que nous
sur un nombre croissant d’acteurs ne sommes pas encore en mesure de définir précisément
les sources de risque systématique et les déterminants
opérant sur les marchés mondiaux. des primes de risque sur les marchés financiers. En
Par conséquent, il est devenu difficile tant qu’investisseurs, nous constatons que les prix des
de les exploiter dans le but d’obtenir actifs sont influencés par divers événements imprévus
dont certains ont des répercussions plus importantes
des rendements adéquats. que d’autres. Les études scientifiques concernant
les moteurs de rendement sur les marchés financiers
À long terme, le rendement attendu de toute stratégie partent du principe qu’il existe des variables latentes
d’investissement est lié à son exposition au risque ayant un impact systématique sur l’évaluation du prix
systématique et non diversifiable. Ce concept d’évalua- des actifs par les acteurs du marché. Les variables
tion fondamentale est largement admis en théorie comme latentes ne sont pas observables mais déduites d’autres
en pratique depuis que le Capital Asset Pricing Model variables qui peuvent être mesurées directement. Il
(CAPM), ou modèle d’évaluation des actifs financiers, a semble que le comouvement observable des prix des
été introduit en tant que modèle d’équilibre des rende- actifs corresponde à la présence de forces exogènes
ments au sein du schéma moyenne-variance de Harry communes d’ordre macroéconomique. Toutefois, nous
Markowitz, également appelé théorie moderne du constatons que cette relation fonctionne aussi bien dans
portefeuille (Modern Portfolio Theory, MPT). À l’heure le sens inverse puisque les marchés financiers peuvent
actuelle, on considère que les rendements attendus sont influencer les développements macroéconomiques. Ainsi,
liés à diverses sources de risque systématique. En outre, toutes les variables économiques et tous les prix des
nous nous sommes habitués à l’idée que les primes de actifs font partie d’une relation qui se renforce mutuelle-
4
5
Explorer la prime de
risque des actions
Le rendement attendu est lié L’énigme des anomalies de
au risque systématique rendement contredit le CAPM
Les travaux de recherche sur les marchés des actions Pendant que le CAPM était soumis à divers tests, les
débutent en 1900, lorsque le mathématicien français chercheurs se sont mis en quête d’autres explications
Louis Bachelier utilise un processus stochastique égale- pour les rendements des actions. Pour cela, ils ont utilisé
ment appelé « mouvement brownien » pour décrire la des informations spécifiques aux entreprises telles que la
variation des prix des actions comme une marche aléa- capitalisation boursière et les ratios dividend-to-price
toire. Le concept de prime de risque des actions apparaît (D/P), earnings-to-price (E/P) ou book-to-price (B/P)
pour la première fois en 1924 quand Edgar Lawrence comme variables explicatives en plus du bêta de marché
Smith démontre dans un ouvrage fondateur que les d’une entreprise. Ces études ont fortement étayé l’hypo-
actions représentent un meilleur investissement à long thèse selon laquelle ces facteurs fondamentaux captent
terme que les obligations. Les travaux de Smith ont eu une part significative de la variation des rendements des
une telle influence qu’on leur attribue en partie le boom actions après la prise en compte du bêta. Les résultats,
des années 1920 sur les marchés des actions. Mais la qui contredisent le CAPM, sont en conséquence appelés
première théorie véritablement cohérente sur la relation « anomalies de rendement ». Les deux principales ano-
entre risque et rendement sur les marchés des actions malies de rendement sont l’effet taille et l’effet valeur.
est le modèle CAPM créé par William Sharpe, John La première, découverte par Rolf Banz en 1981, part du
Lintner et Jan Mossin vers 1965. Il introduit le facteur constat que les entreprises ayant une faible capitalisation
marché comme la seule source de risque systématique boursière tendent à surperformer les entreprises à forte
et établit un rapport linéaire entre le rendement attendu capitalisation boursière après un ajustement du risque
d’un actif et sa covariance avec le rendement du marché. systématique basé sur le CAPM. La seconde est liée
Le CAPM est une théorie d’équilibre fondée sur le à la valorisation d’une entreprise sur le marché financier
schéma moyenne-variance développé par Harry Marko- en comparaison avec les paramètres comptables du
witz. Toutefois, l’efficience du portefeuille (de tangence) flux de trésorerie ou de la valeur comptable au bilan de
du marché au sein du cadre moyenne-variance et la l’entreprise. Les analyses empiriques montrent que les
validité du CAPM dépendent l’un de l’autre. Ce lien entre entreprises ayant une valeur intrinsèque élevée, telle que
le « vrai » portefeuille du marché inobservable et le reflétée dans un ratio E/P, B/P ou D/P élevé, dégagent
modèle d’équilibre des rendements d’actifs rend le CAPM des rendements plus élevés (après prise en compte
– à proprement parler – invérifiable. Ce gros dilemme du bêta de marché) que les entreprises ayant une faible
est appelé le problème des hypothèses jointes. valeur intrinsèque. Dès 1934, Benjamin Graham et David
Dodd ont été les premiers à encourager la poursuite des
Les tests empiriques du CAPM suite à l’étude fondatrice stratégies d’investissement basées sur la valeur avant
d’Eugene Fama et James MacBeth publiée en 1973 même l’invention du CAPM. Parmi les pionniers de l’effet
utilisent les indices de marché comme variables indica- valeur dans le contexte du CAPM, on citera notamment
tives pour le portefeuille du marché théorique, ce qui Sanjoy Basu, Ray Ball et Marc Reinganum.
est en principe une approche acceptable. Toutefois, les
résultats de ces tests empiriques sont globalement déce- L’exploration des diverses anomalies de rendement a
vants. Dans de nombreux cas, le rapport linéaire positif dominé la recherche empirique sur les marchés des
établi entre bêta du marché et rendement moyen, tel que actions tout au long des années 1980. En 1992, Eugene
spécifié par la Security Market Line (SML) du CAPM, Fama et Kenneth French mettent à profit les résultats
n’est pas reflété dans les données. À certaines périodes, convaincants fournis par les études académiques et
la SML empirique semble plate ou même descendante. introduisent un modèle à trois facteurs comme extension
De nombreuses études empiriques des années 1970 et du CAPM pour décrire le comportement de série tempo-
1980 ont démontré que le CAPM n’expliquait pas de relle des rendements des actions. Ils y intègrent des
façon suffisante les rendements attendus des actions, portefeuilles fictifs pour les facteurs de taille et de valeur
une mauvaise nouvelle pour la seule théorie qui existait (ratio B/P) en plus du facteur de marché basé sur le
à cette époque pour évaluer les actifs financiers. CAPM pour modéliser la relation entre risque systéma-
7
tique et rendement sur les marchés des actions. Leurs également qualifié d’anomalie de rendement, est
résultats montrent que les facteurs de taille et de valeur communément considéré comme le résultat de biais
captent une part importante de la variation transversale comportementaux des acteurs du marché qui tendent
des rendements, impliquant que ces deux facteurs fon- à sous-réagir aux nouvelles publiées sur un « winner »,
damentaux représentent des sources de risque addition- telles que les annonces de bénéfices. En même temps,
nelles que le CAPM ne prenait pas en compte. Depuis il reste difficile d’attribuer l’effet momentum à des
lors, le modèle Fama-French (FF) a été communément risques tangibles supportés par les investisseurs,
admis comme point de départ de la recherche en matière comme c’est le cas des facteurs taille et valeur.
d’évaluation du prix des actions.
Dès qu’elles ont été découvertes, ces diverses anomalies
Pour de nombreux acteurs du marché et chercheurs, il de rendement ont stimulé le développement de nouvelles
n’a pas été facile d’accepter la proposition du modèle stratégies d’investissement qui ont rapidement débouché
FF à trois facteurs selon laquelle la prime de risque sur l’adoption par l’ensemble du marché des stratégies
du marché n’est pas le seul moteur de rendement des small cap, value et momentum. Elles sont devenues un
actions. La taille et la valeur de l’entreprise sont essentiel- moyen répandu d’exploiter les primes de risque sur les
lement des risques idiosyncratiques au sujet desquels marchés financiers, attirant des investissements de plu-
la recherche financière admet communément qu’ils sieurs milliards au fil du temps. Un peu à l’écart de cette
peuvent être écartés par la diversification. Ils ne devraient agitation générale, la prime dite de qualité a fait son
donc pas être compensés à long terme. Dans les années apparition dans les milieux académiques.
1990, ce problème a fait l’objet de nombreuses études Devenue très populaire parmi les professionnels, elle a
pour tenter de trouver les raisons économiques de l’in- finalement été reconnue par Eugene Fama et Kenneth
fluence systématique des deux facteurs sur les rende- French qui, en 2015, ont accepté d’élargir leur modèle
ments des actions. Bien que les données empiriques classique à trois facteurs avec deux facteurs supplémen-
aient révélé que les primes de rendement basées sur la taires indicatifs de la « qualité » d’une action. Ce
taille et la valeur varient considérablement au fil du temps, faisant, Fama et French ont validé les études empiriques
les résultats des travaux de recherche ont convergé de plus en plus nombreuses prouvant que la variation des
vers l’interprétation selon laquelle la prime de valeur est rendements moyens des actions est liée aux bénéfices
probablement une compensation du risque de détresse futurs attendus d’une entreprise ainsi qu’à ses
financière d’une entreprise tandis que la prime de taille activités d’investissement. Ils ont utilisé le modèle d’ac-
récompense l’investisseur pour avoir accepté les risques tualisation des dividendes comme point de départ
liés à la faible liquidité d’une action d’entreprise faible- conceptuel de leur argumentation, ajoutant deux facteurs
ment capitalisée. – la rentabilité et les investissements – à leur
spécification. Le modèle à cinq facteurs qui en a résulté
est la contribution la plus récente des deux célèbres
Les modèles multifactoriels chercheurs à l’explication des primes de risque sur les
marchés des actions. Il a déjà suscité un vif débat parmi
prennent le relais du CAPM les universitaires, mais aussi les professionnels de l’inves-
En 1997, Mark Carhart complète le modèle FF avec le tissement concernant la spécification des nouveaux
facteur momentum du prix de l’action. Ce modèle à facteurs et en particulier leur conception empirique.
quatre facteurs intègre le constat empirique selon lequel
les tendances des cours des actions sont, dans une En plus des primes de risque des marchés financiers
certaine mesure, stables et prévisibles. De cette manière, associées à la taille, la valeur, le momentum, la rentabilité
Mark Carhart rend hommage aux travaux de Narasimhan et les investissements, le concept de la prime associée
Jegadeesh et Sheridan Titman, publiés en 1993, qui au risque faible a été introduit en 2006 par Andrew Ang,
démontrent que les actions ayant surperformé par le Robert Hodrick, Yuhang Xing et Xiaoyan Zhang avec
passé sont susceptibles de faire de même dans le futur. leur étude sur l’évaluation du risque de volatilité dans
Dans les milieux académiques, l’effet momentum, l’éventail des rendements des actions. L’investissement
8
Risque faible
Momentum
Qualité
Valeur
Taille
quatre décennies de recherche
En résumé, notre compréhension actuelle des forces
systématiques à l’œuvre sur les marchés des actions Les données se basent sur les données allant du 31.12.1998 au 31.12.2017
internationaux est façonnée par les innombrables travaux des indices MSCI suivants: MSCI World Index Net TR USD, MSCI World Minimum
Volatility Daily Net TR USD, MSCI World Momentum Net TR USD, MSCI World
de recherche de ces quatre dernières décennies qui ont Quality Net TR USD, MSCI World Value Net TR USD, MSCI World Small Cap Net
tenté de percer le secret de la variation des rendements TR USD. Les coûts ne sont pas pris en compte. La performance passée n’est
pas un indicateur fiable de la performance actuelle ou future.
des actions par le prisme du CAPM et de ses diverses
extensions multifactorielles. Les approches « bottom- Source : Bloomberg / calculs Vescore
attendus des actifs à leur sensibilité aux changements Les primes de risque des marchés
économiques, leurs résultats empiriques indiquent que obligataires sont influencées par
les variations des primes de risque sont captées par de
les mêmes facteurs macroéconomiques
telles variables, censées refléter les informations que
les acteurs du marché utilisent dans leurs décisions que celles des actions
d’investissement. En outre, Ferson et Harvey ont décou- Jusqu’ici, nous nous sommes principalement intéressés
vert que la variation conditionnelle des primes de risque aux primes de risque des actions, car toute l’histoire des
est la première source de prévisibilité des rendements connaissances sur la relation entre risque et rendement
d’actifs au niveau du portefeuille, davantage que le com- débute avec le concept CAPM selon lequel le risque
portement de série temporelle des bêtas mis en avant par systématique est reflété par le marché. Au sens le plus
d’autres études. Surtout, cette étude de Ferson et Harvey strict, les obligations ne font pas partie de l’univers des
joue un rôle fondamental dans notre compréhension actifs risqués puisque la somme des obligations déte-
selon laquelle la prévisibilité sur les marchés financiers nues dans le monde s’établit à zéro. Par conséquent, il n’y
est en accord avec l’hypothèse des marchés efficients. a pas d’agrégat représentant le risque systématique dans
les obligations. Néanmoins, les emprunts d’État et d’en-
Leur approche a incité des chercheurs universitaires treprises forment la « classe d’actifs » la plus vaste dans
du monde entier à étudier les prix des actifs au sein les portefeuilles institutionnels. Des recherches empi-
d’un système conditionnel rassemblant des données riques exhaustives montrent que les fluctuations des
fiables sur les sources de risque évaluées et les instru- prix obligataires jusqu’à leur maturité sont également
ments qui captent la variation des primes de risque. liées au cycle économique et influencées par les mêmes
Dès lors, les modèles conditionnels d’évaluation des facteurs macro que les marchés des actions. En 1995,
actifs sont devenus des outils de pointe dans le domaine Antti Ilmanen a réalisé une étude qui a fait date sur la
financier et le sont restés depuis. Sur les 20 dernières variation des rendements attendus au fil du temps sur les
années, la modélisation conditionnelle des primes de marchés obligataires internationaux. Dans ce contexte,
risque pour générer des rendements au niveau des caté- la structure de la courbe des taux d’intérêt joue un rôle
gories d’actifs s’est développée comme une compétence central dans l’intégration des changements prévus de
clé pour la construction de portefeuille, l’allocation la conjoncture dans les prix obligataires, en plus des
tactique d’actifs et la gestion du risque de marché. La primes de risque observables sur les marchés du crédit.
variation prévisible des primes de risque est l’un des Il en résulte qu’au niveau de l’allocation d’actifs, les
éléments permettant de générer des rendements actifs mêmes modèles économiques multifactoriels peuvent
sur nos marchés financiers généralement efficients. Les être appliqués pour gérer les risques d’un portefeuille
principaux ratios d’évaluation observés sur les marchés balancé.
des actions ou les écarts de taux d’intérêt mesurés sur
les marchés obligataires peuvent être utilisés pour prévoir
dans une certaine mesure la dérive à long terme dans
les prix des actifs risqués. Les processus d’allocation
modernes d’actifs exploitent cette prévisibilité.
12
Comment identifier et
exploiter les primes de risque
Tout est dans la gestion du de capacité, les taux de change et certains prix de
risque conjoncturel global matières premières ont été identifiés comme des
Notre connaissance des moteurs de rendement des variables indicatives adéquates pour l’environnement
actifs, des sources de risque systématique et de la dyna- macroéconomique actuel. Les principaux ratios d’évalua-
mique des primes de risque a beaucoup avancé ces tion des actions ainsi que la courbe des taux d’intérêt
30 dernières années grâce aux centaines d’études réali- et les écarts de crédit semblent refléter les anticipations
sées dans des universités de premier plan du monde économiques des investisseurs et l’état d’esprit qui
entier. C’est au début des années 1970 que des cher- domine leurs décisions d’investissement. En résumé, les
cheurs universitaires ont commencé à étudier systémati- recherches de pointe dans le domaine de la finance ont
quement l’identité des variables d’état, dites latentes, qui généré des modèles conditionnels d’évaluation des actifs
influent l’évaluation des actifs par les acteurs du marché. et des résultats empiriques exhaustifs sur les moteurs
En résumé, ces nombreuses études nous ramènent à des rendements effectifs et attendus, ce qui enrichit
la compréhension commune selon laquelle, le risque d’in- notre boîte à outils pour la création de valeur dans la ges-
vestissement systématique est plus ou moins égal au tion d’actifs. Bien que certains biais comportementaux
risque conjoncturel global. Nous pouvons nous appuyer soient parfois considérés comme des points de repère
sur un ensemble de données empiriques démontrant que pour les stratégies d’investissement, exploiter les primes
les marchés financiers évaluent les sources multiples de de risque signifie en premier lieu gérer l’exposition du
risque macroéconomique au moyen des primes de risque placement au risque conjoncturel global au niveau des
qui varient au gré de l’appétit des investisseurs pour le classes d’actifs ou en adoptant un style ou une stratégie
risque. Les taux d’intérêt, les taux d’inflation, les mesures d’investissement spécifique (voir graphique 2).
GRAPHIQUE 2
La gestion du risque conjoncturel global passe par l’exposition à des facteurs macro
dans l’allocation d’actifs ou de styles d’investissement sur les marchés des actions
gique et tactiq
até
str ue
d
on Adoption d’une exposition à
es
i
at
systématiques au niveau de
tifs
All
l’allocation d’actifs.
Risque
conjonc- Adoption d’une exposition à
Taille turel Momentum des sources de rendement
systématiques par la mise en
œuvre de styles d’investissement
sur les marchés des actions.
Valeur Risque
faible Source: Vescore
Croissance Qualité
13
Exploiter les primes de risque exige est un exemple de modèle conditionnel d’évaluation
des actifs qui est mis en pratique avec succès depuis
des manœuvres tactiques 20 ans pour gérer tactiquement la quote-part en actions
L’allocation stratégique d’actifs détermine la participation dans un portefeuille diversifié à l’échelle mondiale. Le
à long terme d’un investisseur dans la croissance graphique 3 montre comment l’allocation en actions
économique mondiale. Les décisions stratégiques sur GLOCAP a évolué au fil du temps en réponse aux
la quote-part en actions d’un portefeuille, l’allocation principales variables économiques composant l’envi-
géographique et sectorielle sur les marchés des actions, ronnement de marché en vigueur à cette période.
l’allocation en titres à revenu fixe, la duration et la qualité
de crédit des placements obligataires ainsi que l’alloca- Tandis que la gestion de portefeuille active au niveau
tion en devises constituent le terrain de jeu de l’inves- de l’allocation d’actifs, avec pour objectif de contrôler
tisseur pour exploiter les primes des classes d’actifs liées l’exposition au cycle économique, représente une
à l’évolution à long terme de l’économie globale. Toute- approche top-down pour récolter les primes de risque,
fois, il est bien connu que la croissance économique l’investissement dans un style ou une stratégie de place-
révèle des cycles et des frictions qui font considérable- ment en actions spécifique représente une approche
ment varier les primes de risque au fil du temps. Si bottom-up qui s’expose aux mêmes sources de risque
l’horizon de placement est assez long, par exemple systématique et donc de rendement attendu. Le parti
30 ans, ces variations ne devraient pas réduire l’effectivité pris d’un portefeuille d’actions pour des facteurs scien-
d’une allocation stratégique d’actifs à long terme. tifiquement validés tels que la taille, la valeur, la qualité,
L’horizon de placement est néanmoins beaucoup plus le momentum ou le risque faible détermine son exposition
court dans bien des cas, ce qui requiert des éléments au risque conjoncturel et aux primes qui en découlent.
tactiques dans le processus de placement pour lisser Comme nous savons que les primes de risque varient
la courbe de performance générée par l’investissement en fonction des attentes économiques des acteurs du
dans les primes des classes d’actifs. Les modèles marché et de leur appétit pour des stratégies d’inves-
conditionnels d’évaluation des actifs et les recherches tissement exploitant les primes de risque au niveau de
empiriques qui les étayent permettent aux procédures l’allocation d’actifs et sur les marchés des actions, ces
de mise en œuvre de l’allocation tactique d’actifs de stratégies doivent inclure des capacités tactiques pour
soutenir le timing de l’exposition dans les classes d’actifs. lisser la performance sur des horizons de placement
Leur objectif est de stabiliser les résultats des stratégies à plus court terme (voir graphique 4).
d’investissement qui exploitent les primes de risque
sur la place de marché. Le modèle GLOCAP de Vescore
GRAPHIQUE 3
La quote-part en actions GLOCAP s’adapte tactiquement au fil du temps en réponse à l’évolution
des variables économiques fondamentales.
150 %
125 %
100 %
75 %
50 %
25 %
0%
–25 %
–50 %
–75 %
–100 %
1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018
Anticipations économiques
Préférences de liquidité
Confiance dans les entreprises
Fundamental valuation
Allocation en actions
Le graphique illustre l’évolution de l’allocation tactique d’actifs déterminée par le modèle GLOCAP de Vescore sur un horizon de 20 ans qui débute en
janvier 1998. La quote-part tactique en actions varie entre 0 et 100 % (ligne grise) et se base sur les variables instrumentales décrivant les anticipations
économiques des participants (pente de la courbe des taux d’intérêt), les préférences en termes de liquidité à l’échelle du marché (TED spread), la
confiance des investisseurs dans les entreprises (écarts de crédit) et l’évaluation fondamentale des actions (rendement sur dividende). Avec comme
point de départ une quote-part en actions neutre de 50 % dans un portefeuille équilibré, ces quatre variables reflètent l’évolution de l’environnement
de marché. La contribution de chacune d’elles à la quote-part en actions finale peut être positive ou négative et d'ampleur très variable. En résumé,
GLOCAP ajuste la quote-part en actions au sentiment général du marché à l’égard du risque systématique.
La performance passée ne constitue pas un indicateur fiable de la performance actuelle ou future.
Source : Vescore
14
GRAPHIQUE 4
Les primes factorielles varient au fil du temps
60 %
50 %
40 %
30 %
20 %
10 %
0
–10 %
–20 %
–30 %
–40 %
1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 2017
Taille
Valeur
Qualité
Momentum
Volatilité minimum
Le graphique illustre les écarts de rendement en année glissante entre les indices factoriels MSCI et MSCI World du 31.12.1999 au 31.12.2017.
La performance passée ne constitue pas un indicateur fiable de la performance actuelle ou future.
L’évolution des connaissances académiques sur les –– Primes de risque sur les marchés des matières
primes de risque des marchés financiers forge la philoso- premières : nous exploitons les primes de risque
phie d’investissement de Vescore depuis 20 ans. Nous sur les marchés à terme des matières premières en
recherchons et exploitons les primes de risque dans les prenant des positions tactiques sur des contrats à
actions, devises, contrats à terme sur matières premières terme. Pour ce faire, nous nous appuyons sur la dyna-
et marchés des options en fondant nos décisions d’inves- mique de la courbe à terme des matières premières
tissement sur des modèles quantitatifs. Nous sommes qui peut être en backwardation ou en contango. Notre
convaincus que des primes de risque économiquement processus d’investissement aboutit à un porte-feuille
saines sont les sources de rendement les plus fiables. diversifié de contrats à terme sur matières premières
En parallèle, nous savons que les primes de risque varient dont la courbe affiche une forte backwardation.
en fonction des attentes des investisseurs à l’égard du De cette manière, nous prenons systématiquement
cycle conjoncturel et du sentiment général du marché, le risque de changements imprévus dans les prix des
ce qui requiert des méthodes conditionnelles d’évaluation matières premières. Ces risques peuvent venir des
et d’allocation susceptibles de saisir et d’exploiter cette producteurs et des consommateurs dans un environ-
dynamique. Notre champ d’action pour exploiter les nement complexe faisant intervenir de nombreux
primes de risque englobe cinq segments de marché : facteurs tels que les pénuries, la météorologie, les
cycles économiques et l’évolution technologique.
–– Primes de risque sur les marchés des actions : nous –– Primes de risque sur les marchés des options : nous
exploitons la prime de risque globale des actions exploitons les primes de risque sur les marchés
dans un portefeuille diversifié en gérant tactiquement des options qui découlent du besoin des acteurs
la quote-part investie sur les marchés internationaux du marché de couvrir les risques de baisse de leurs
par rapport aux positions en titres à revenu fixe. Le portefeuilles d’actions. Notre processus d’inves-
cœur de notre processus d’allocation est un modèle tissement prend des positions à découvert sur les
conditionnel d’évaluation des actifs liant les prix des volatilités des principaux marchés des actions au
actions à des variables d’état macroéconomiques moyen de swaps de variance qui négocient la volatilité
et à des instruments qui reflètent l’appétit des acteurs réalisée future en contrepartie de la volatilité implicite
du marché pour le risque systématique. Sur les actuelle, ainsi que des positions relatives dans des
marchés des actions, nous exploitons des données swaps de variance répliqués sur les marchés des
empiriques approfondies sur les principaux facteurs actions. D’un point de vue économique, cette straté-
de rendement en choisissant des expositions gie d’investissement fournit une assurance pour le
tactiques (« smart beta ») pour lisser la performance portefeuille avec le gain d’une prime d’assurance.
du portefeuille. –– Primes de risque sur les marchés des devises : nous
–– Primes de risque sur les marchés obligataires : nous exploitons les primes de risque sur les marchés
exploitons les primes de risque sur les marchés des devises qui résultent des cycles économiques
obligataires en rapport avec les changements impré- divergents entre les zones monétaires, une situation
vus dans la structure à terme des taux d’intérêt induits qui se reflète essentiellement dans la dynamique
par l’inflation et la préférence des acteurs du marché des différentiels de taux d’intérêt, mais aussi dans les
pour le lissage intertemporel de la consommation. écarts par rapport aux parités de pouvoir d’achat
Notre processus d’investissement décompose les (PPA) et l’évolution à court terme des taux de change.
courbes de rendement dans les principales devises Notre processus d’investissement exploite ces forces
selon des moteurs de valeur fondamentaux incluant systématiques sur les marchés des devises par
le carry, le retour à la moyenne et le momentum l’allocation tactique de positions longues et à décou-
dans les taux d’intérêt. Les positions tactiques au vert à des devises dans un portefeuille-zéro, tout
niveau de la duration sur les marchés obligataires en gérant de manière rigoureuse les risques de
internationaux reflètent ces forces intrinsèques. volatilité sur ces marchés.
Dans le même temps, elles sont subordonnées
à l’état mesurable de l’économie mondiale.
16
En bref
1. Seul le risque systématique est évalué par les 7. Les modèles conditionnels d’évaluation des actifs
marchés financiers. captent au moins une partie de la variation temporelle
des primes de risque à l’aide d’instruments décrivant
2. Plus le risque systématique d’un actif est élevé, le comportement des acteurs du marché à l’égard
plus son rendement attendu à long terme sera élevé : du risque tel que reflété dans les différentiels de taux
c’est le concept fondamental du Capital Asset d’intérêt et les principaux ratios agrégés d’évaluation.
Pricing Model (CAPM).
8. Les primes de risque peuvent être exploitées selon
3. L’étude scientifique des moteurs de rendement sur une approche « top-down » par l’exposition au risque
les marchés financiers part de l’hypothèse qu’il conjoncturel au niveau de l’allocation d’actifs, ou«
existe des variables d’état latentes ayant un impact bottom-up » par la mise en œuvre de styles d’investis-
systématique sur l’évaluation des actifs par les sement spécifiques tels que la taille, la valeur, la
participants au marché. rentabilité, la qualité, le momentum ou le risque faible
sur les marchés des actions – les principales sources
4. Les modèles d’évaluation rationnels affirment que de rendement sont les mêmes.
le risque systématique d’un actif se reflète dans
sa sensibilité aux évolutions de l’économie globale. 9. Toute stratégie visant à exploiter les primes de risque
En d’autres termes, le risque systématique équivaut doit inclure des compétences tactiques pour lisser
au risque conjoncturel. la performance sur des horizons de placement plus
courts.
5. Les modèles multifactoriels d’évaluation des actifs
dans l’esprit de l’Arbitrage Pricing Theory (APT) 10. Dans la mesure où l’exploitation des primes de
décrivent l’état de l’économie globale à l’aide de risque implique d’exposer l’investissement au cycle
variables observables telles que les taux d’intérêt, conjoncturel global, elle est consistante avec la
les taux d’inflation, les mesures de capacité ou croyance selon laquelle les prix des actifs sur les
les prix des matières premières en plus des données marchés financiers sont dans une large mesure
agrégées concernant l’évaluation des actifs sur informationnellement efficientes.
les marchés financiers.
6. L
es primes de risque varient au fil du temps en
fonction de l’idée que les acteurs du marché se
font de la situation économique globale et de
leur appétit de risque.
18
Références bibliographiques
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