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de la Méditerranée
Février P.A. Approches récentes de l'Afrique Byzantine. In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, n°35, 1983.
pp. 25-53;
doi : https://doi.org/10.3406/remmm.1983.1980
https://www.persee.fr/doc/remmm_0035-1474_1983_num_35_1_1980
Résumé
Résumé Trois travaux récents de Denys Pringle, Jean Lassus et Jean Durliat invitent à revoir, à partir
de la documentation archéologique — monuments et inscriptions — les conclusions auxquelles était
parvenu, à la fin du siècle dernier, Charles Diehl. Parmi les problèmes soulevés, il y a d'abord celui des
forteresses byzantines et des enceintes de plus ou moins grande ampleur qui ont inclus de larges
quartiers habités sous le Haut-Empire : que peut-on en tirer pour l'histoire de la ville, de sa topographie
comme des institutions ? Par ailleurs, sont de mieux en mieux connus les lieux de culte des Ve - VIe
voire VIIe siècles et à travers les constructions ou embellissements s'esquisse une histoire des
échanges avec le reste de la Méditerranée. L'analyse de céramiques trouvées en divers sites du littoral
force, de la même façon, à s'interroger sur l'ampleur de ces relations. Autant de pistes qui incitent à
mieux percevoir que la ville du Maghreb à l'époque byzantine ne connaît peut-être pas la profonde
récession que l'on imagine trop aisément.
Revue de l'Occident Musulman et de la Méditerranée, 35, 1983-1.
Une barre de calcaire par dessus les ruines d'un forum, un rectangle de pierres
qui s'inscrit au loin sur un arrière-plan de monts enneigés, un jeu de tours crénelées à
la limite de la steppe et d'un massif montagneux aux parois dénudées, parfois— plus
modestement — des blocs alignés, noyés par les terres accumulées mais révélés par le
monticule qu'elles forment en plein milieu d'une plaine, telle est l'Afrique du milieu
du Vie siècle, telle qu'elle se révèle dans le sol, que ce soit à Madauros, Thamugadi
ou Ksar Lemsa comme dans le Belezma ou au sud de l'actuelle Barika. Quelques
inscriptions placées dans ces murs ou la lecture de Procope et Corippe — des récits de
combats, agencés pour exalter le héros de l'histoire ou les résultats d'une politique —
complètent une information purement archéologique. Et cela pouvait paraître
donner une image exacte et assez complète des provinces reconquises à partir de 533
et chèrement pacifiées. Mais, dès le départ, il était clair que les étapes ultérieures de
la présence byzantine risquaient de rester quelque peu dans l'ombre. Le livre de
Charles Diehl, paru en 1896, en apporte la preuve, ne serait-ce que du fait de la part
qui est donnée à Justinien et à son oeuvre (1).
Cette abondance de documentation ne pouvait manquer de créer un
déséquilibre, tant pour le devenir de l'Afrique que pour le siècle qui précède la conquête. Car,
face à cette richesse de textes et monuments, on ne pouvait mettre en balance que
l'ampleur du discours augustinien. Et le «dernier reflet de la civilisation romaine»,
comme dit Charles Diehl dans sa conclusion, n'apparaissait dès lors que comme un
répit entre le royaume vandale «si faible», qui «eût bien vite cédé la place à la
sauvagerie berbère», et une arrivée des Arabes, «catastrophe qui a fait disparaître les
derniers vestiges de la culture romaine». Les introductions comme les conclusions,
parfois aussi des remarques incidentes, font souvent apparaître les présupposés
idéologiques des historiens, car il n'est pas de recherche neutre. Mais on ne prend pas
garde, souvent, au fait que l'interprétation même des monuments les plus
prestigieux d'une époque risque de pâtir autant d'une analyse que du regard porté sur un
passé ou un futur dont on n'a pas su reconnaître tant la richesse que ce qu'il doit à
une tradition. Et dans le cas de la reconquête byzantine de l'Afrique —j'aurai
l'occasion de le suggérer et peut-être de le démontrer—, cela est particulièrement
net, d'autant que les travaux de Christian Courtois, s'ils sont parvenus à détruire des
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mythes (2), n'ont pas fait le tour de tous les documents qui pouvaient étayer sa
thèse (3) et sont antérieurs à diverses recherches qui contribuent à mieux évaluer ce
siècle de présence barbare (4) ou l'émergence des principautés berbères dans la
partie occidentale de l'ancienne Maurétanie (5). Il ne me semble pas davantage que
l'on ait cherché à savoir ce qui, du passé antique, faisait partie de la civilisation
islamique.
Aussi est-il important de mieux regarder — c'est-à-dire d'analyser de façon plus
précise, mais aussi de repenser— les documents sur lesquels Charles Diehl s'est
fondé. Trois études récentes, toutes trois relatives aux fortifications byzantines,
pourront servir de point de départ à une réflexion; Mais — il me faut le dire dès le
début — ce serait mutiler l'information et fausser l'interprétation de cette période
que de réduire le champ d'observation à de tels documents. Aussi m'efforcerai -je de
présenter les résultats d'enquêtes parfois partielles, parfois plus élaborées, faites à
partir d'autres séries de documents archéologiques. Il manquera une réflexion sur les
textes littéraires eux-mêmes : elle n'a pas été menée et, dans un article qui ne veut
être qu'un bilan critique et raisonné, il n'est pas possible d'aborder cet aspect des
sources.
DE QUELQUES TRAVAUXRÉCENTS
en cause la recherche de Deny s Pringle qui n'a p"as pu toujours être ce qu'il aurait
souhaité, mais pour que le lecteur qui ne connaît pas les monuments dont il sera
question ou qui n'a pas l'usage des techniques archéologiques perçoive certaines
limites de cette enquête, comme de bien d'autres — à commencer par celles que je
pourrais faire.
L'ouvrage de Pringle se scinde en deux volumes. Le premier contient un
chapitre d'histoire militaire, que suit un deuxième sur l'organisation de l'armée : y est
abordé le problème des fortifications, vu par le biais de la stratégie. En conclusion de
ces chapitres, vient une réflexion plus large sur le contexte de cette activité :
«refortification and renovation». Suit un chapitre sur les techniques de construction. A ces
synthèses, sont jointes des listes et surtout des monographies de forteresses du Vie
siècle, de celles qui ne sont peut-être pas des fortifications officielles (ou
d'interprétation douteuse), ou encore de celles qui n'appartiennent pas au Vie siècle. Est joint un
corpus des inscriptions relatives aux fortifications et aux militaires. Un second
volume regroupe les notes, une riche bibliographie, des plans, mais que je regrette de
trouver redessinés et non mis à des échelles identiques, enfin des photographies. La
matière est donc riche.
Tout différent est le volume que, la même année 1981, vient de donner Jean
Durliat (9). C'est là une partie de sa thèse de Ille cycle (10) et, de façon judicieuse,
ont été extraites les dédicaces d'ouvrages de défense qui sont présentées avec une
illustration, une lecture et un commentaire. Suivent des pages sur les mécanismes
administratifs et sur la vie sociale que ces documents laissent entrevoir : à l'arrière de
cette réflexion se place une connaissance des textes relatifs à l'Orient byzantin, et
aussi aux territoires récupérés dans la péninsule italique, voire sur le littoral des
Espagne. Expérience qui est essentielle, car s'il est vrai qu'il faut toujours être
sensible aux spécificités africaines, il est vrai aussi qu'il est dangereux — tant pour les VI-
Vlle siècles que pour d'autres moments — de négliger ce qui découle de l'insertion
de ces provinces dans un ensemble plus vaste, voire dans la longue durée. La prise en
compte de ces données différentes, parfois même antagoniques, peut susciter des
discussions ; mais cela a l'avantage de faire progresser la connaissance, dans un
domaine où les certitudes acquises sont encore éparses.
De 1981 aussi est datée la publication de Jean Lassus qui a examiné la
forteres e byzantine de Thamugadi (11). Ouvrage d'autant plus méritoire que l'auteur n'a
pas suivi les dégagements commencés en 1938 (ou 1939) et achevés à la veille de la
guerre d'indépendance, non plus que les quelques travaux complémentaires
ultérieurs. Les nombreuses visites de celui qui a été le directeur des Antiquités de
l'Algérie jusqu'en 1964, l'intérêt qu'il n'a cessé de porter à ce site et à ce monument,
l'examen minutieux des constructions visibles comme des rares photographies
anciennes et des comptes rendus sommaires des travaux menés par Charles Godet,
ne peuvent faire oublier les conditions déplorables dans lesquelles le travail a été
mené, sous la responsabilité de l'architecte en chef des Monuments historiques, et
par des hommes, certes très dévoués, mais non rompus aux techniques d'une fouille
rigoureuse. Cela doit être rappelé, même si pareille situation était courante sur
l'ensemble des bords de la Méditerranée, ne serait-ce que pour faire mesurer
certaines des difficultés auxquelles Jean Lassus s'est trouvé confronté et les limites d'une
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interprétation. Les deux séjours passés à Timgad en 1967 et 1975 ont permis de
préciser les descriptions, de prendre de bonnes photographies et surtout de faire effectuer
des relevés précis qui font regretter que l'on ne dispose pas —sinon rarement —
ailleurs de documents aussi sûrs.
rectangulaire, à tours d'angles, sont d'aspect semblable, mais elles n'ont pas, à ce
jour, donné d'inscription, ou sont plus tardives, comme Anastasiana bâtie sous le
règne de Tibère II (578-582). Mais dans aucun cas on ne sait comment restituer le
plan intérieur ni donc la fonction.
La construction de Thamugadi a été implantée, loin du centre de la ville, bien
au sud, à l'emplacement d'un sanctuaire des eaux et donc d'une source qui a pu
guider le choix, et sans doute à la limite septentrionale de la nécropole sud, soit à plus
d'un demi-kilomètre à vol d'oiseau du forum. Nous avons une très grande difficulté,
du fait de l'ancienneté des fouilles, des restaurations aussi qui ont — c'est leur côté
positif— conservé quelque chose de l'aspect de l'habitat, mais ont modifié bien des
détails, du fait aussi de l'absence d'études récentes sur la plupart des monuments, en
particulier chrétiens, de la ville, pour restituer la vie, tant au Ve qu'aux Vie ou Vile
siècles. Nous ne sommes pas aidés par les inscriptions, curieusement absentes à une
époque tardive (27) ; cette rareté des funéraires contraste avec le grand nombre de
lieux de culte, voire de nécropoles prospectées. En ville même, plusieurs basiliques
ont été dégagées ou sont reconnaissables, chacune avec son baptistère, que ce soit la
basilique du quartier nord-ouest, celle implantée sur deux îlots et une rue au nord du
forum, celle que l'on a souvent appelée, à tort, du monastère occidental, ou encore
celle qui s'appuie contre la colline voisine du capitule et qui a beaucoup souffert du
passage d'un oued. A quoi s'ajouterait, mais pour d'autres fonctions, les basiliques
cémétériales, parmi lesquelles celle du duc de Tigisis, Jean. A l'exception de cette
dernière, aucun lieu de culte n'est daté ; et les remaniements possibles n'ont pas fait
l'objet d'un examen. Situation d'autant plus regrettable que le décor sculpté, très
modeste, de ces lieux de culte — comme ceux d'une très large région de la
Numidie — n'a guère permis d'observations comparables à celles qui ont été
proposées pour Theveste, Thelepte ou Sufetula ; et à la différence d'une ville comme
Cuicul, il n'est pas possible d'étudier la mosaïque tardive. Aussi, tant pour l'habitat
que pour les lieux de culte, en est-on réduit à des hypothèses fragiles. Il y a donc une
spécificité régionale qui masque — en l'absence de fouilles — une vie qui ne peut
avoir manqué d'exister, mais qui s'est organisée et manifestée différemment par
rapport à d'autres villes. Le silence des textes ou de certains documents ne peut être
invoqué — j'insiste sur ce point, parce que trop souvent on l'oublie — contre un
devenir urbain ou, à plus forte raison, rural. Les documents épigraphiques ou
archéologiques obéissent à des lois que, très souvent, nous ignorons.
Ceci n'est pas un plaidoyer pour tricher avec une réalité et tenter de justifier à
tout prix le rôle de la ville, d'une ville que Solomon aurait trouvée déserte (28) et
qu'il aurait reconstruite : edificata est afundamentis, comme répètent les inscriptions
de la forteresse. Ce qui a entrainé Charles Diehl (29), sur la foi des premiers rapports
de travaux, à présenter une image des reconstructions qui n'a guère de chances d'être
correcte, mais qui a eu longue vie et que l'on retrouve jusque dans le plus récent des
guides. Le remploi dans la forteresse byzantine d'inscriptions — voire parfois
d'éléments architecturaux — ne signifie pas que l'agglomération ait été livrée au pillage.
C'est là un fait de tous les temps — et je n'en donnerai pour preuve que, dans cette
ville même, les matériaux de remploi qui ont servi pour la gravure de l'album des
décurions, clerici et milites ; ou les textes du code théodosien.
APPROCHES RÉCENTES DE L'AFRIQUE BYZANTINE 33
La pauvreté de nos sources ne peut donc être interprétée, pour le Vie siècle,
comme un signe du déclin, non plus que pour le Ve ou le IVe. En fait, l'interprétation
des documents archéologiques, très rares, est des plus malaisées ; et je voudrais le
montrer en reprenant le cas d'une autre forteresse de Solomon, celle de Madauros, à
laquelle j'ai déjà consacré quelques lignes (30). Depuis les travaux menés sur le site
par l'architecte Charles Joly et l'étude qu'en a donnée Stéphane Gsell (31) — il ne
faut pas oublier cette réalité de la recherche en Algérie : une fouille contrôlée par le
haut personnage qu'était l'architecte des Monuments historiques et le travail
scientifique que devait faire après, non sans difficulté, le savant —, on sait qu'une forteresse
a été commencée par Solomon. Son mur de façade, tourné au sud-est, se dresse sur le
forum dont il coupe près d'un tiers et sur une rue qui y débouchait. Le mur sud-ouest
a été partiellement réalisé jusqu'au niveau du théâtre qui devait être englobé ; mais
ce mur n'a pas été achevé, car l'on n'a retrouvé que les fondations de l'angle ouest et
rien n'a été bâti vers le nord. Le projet initial a donc été abandonné et ultérieurement
seul le théâtre a été inclus dans une muraille, son mur extérieur servant de limite à la
défense.
Pour Stéphane Gsell, ce changement de parti est expliqué par une «situation
militaire inquiétante, qui put même devenir critique», ce qui «exigeait sans doute le
prompt achèvement de cet ouvrage défensif». Cela ne peut être qu'une hypothèse,
qui me gêne d'autant que je me méfie systématiquement de ces constructions que
l'on dit souvent faites à la hâte, pour faire face à un danger. Se posent pour Madauros
plusieurs problèmes : celui de la date précise, celui du coût, celui du mode de
financement de telles oeuvres, celui enfin de sa fonction. Toutes questions qui sont posées
et restent sans réponse précise. Pour Charles Diehl, au lendemain de la reconquête
byzantine, n'était contrôlée que la partie septentrionale du Constantinois : Tigisis,
Gadiaufala, Madauros, Tipasa, Thagura constituant une ligne de places fortes, un
front face aux Berbères insoumis des hautes Plaines et de l'Aurès (32). Jean Durliat a
montré qu'épigraphiquement on ne pouvait rattacher les inscriptions que nous
connaissons à la premièreThamugadi'préfecture du prétoire de Solomon, en particulier à cause
de nos inscriptions de (33). Donc une part de l'argumentation qui
pouvait sous-tendre l'opinion de Gsell tombe.
Je me pose d'autres questions. Je constate d'abord que la ville, au moins du
nord au sud, à en juger par les mausolées conservés, était peu étendue, et le champ
de ruines vu par photographie aérienne n'infirme pas cela. Stéphane Gsell a été très
surpris des faibles dimensions du théâtre et il a noté que le forum est bien moins
étendu que celui de Thamugadi — et cela est vrai aussi si l'on fait la comparaison avec
celui d'Hippo Regius. La ville, illustrée par ses écoles, par sa culture que révèlent
autant les inscriptions métriques que le renom d'Apulée, était donc une
agglomération d'importance secondaire sous le Haut Empire. Cela n'expliquerait-il pas,
partiellement au moins, que la cité ait pu faire face avec difficulté à la demande
impériale d'une fortification. Les murailles de l'époque de Solomon ont été bâties
sur le forum ; mais une large partie de l'espace découvert est resté libre, tout comme
les galeries sud-est et nord-est, sur lesquelles s'ouvrent une basilique, la curie et une
autre salle. Les bases des portiques ont été retrouvées en place, comme le montrent
et le plan de Joly et quelques photographies anciennes, sauf aux abords immédiats
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Quoi qu'il en soit, un cas comme celui de Madauros où le théâtre semble bien
être resté intact, ou celui de Thugga qui a gardé un temple fort peu adapté à des
casernements du type de ceux de Thamugadi, ou encore la forteresse de Tubernuc à
laquelle Pringle pense pouvoir rattacher une inscription du règne de Tibère (578-
582) (38) et où se trouvent incluses trois cellae (ou plus) d'un temple, ainsi que
nécessairement la cour qui les précédait, montrent que ces constructions byzantines
ne répondent pas du tout au schéma intérieur qui est révélé à Thamugadi. Ce qui me
paraît donc devoir être un élément essentiel pour l'interprétation.
Très différente aussi est la petite forteresse de Ksar Lemsa, dégagée par Khaled
Belkhodja (39) à partir de 1966 : de part et d'autre d'une allée centrale, ont été
disposées des pièces diverses qui elles, sont toutes postérieures — semble-t-il — à la
construction des courtines et qui sont en matériau différent (murs en moellons
scandés par des hastes de pierre). L'ensemble s'est bien appuyé sur une construction plus
ancienne, dont subsiste la vaste citerne maintenant dégagée au pied du mur oriental.
Etait-elle visible au Vie siècle ? Je le pense d'autant plus volontiers qu'une
adduction d'eau — venant sans doute d'un captage éloigné — contourne la tour nord-est. La
fonction défensive de l'ensemble en est renforcée, du moins vers l'est ; mais, dans le
même temps, il faut bien constater que la forteresse pouvait être aisément privée
d'eau.
Pringle pense que cette oeuvre pourrait avoir été réalisée sous l'empereur
Maurice (582 -602), à cause d'une inscription trouvée «à un kilomètre à l'est d'Aïn
Lemsa, à peu de distance de Ksar Boudja», c'est-à-dire de notre forteresse (40). Mais
la chose reste très douteuse ; Belkhodja n'avait pas envisagé cette possibilité, et Jean
Durliat, en restituant le singulier turr(im), se montre aussi dubitatif.
Il existe deux sites pour lesquels il est indubitable que l'époque byzantine
marque une rupture radicale dans l'organisation de la partie de l'espace urbain consacré
traditionnellement à la vie municipale. Le premier est celui de Diana Veteranorum,
où le fort byzantin — non daté et non fouillé, sinon en quelques points de sa
périphérie — est placé au voisinage immédiat du forum. Au centre de celui-ci — de façon très
cohérente avec le paysage ancien —, a été construite une basilique chrétienne que
l'on s'accorde à considérer comme tardive, bien qu'elle soit occidentée (41). Les
rapports — très sommaires — des dégagements faits vers 1930 (42) montrent que des
constructions où entraient des inscriptions en remploi ont été retrouvées, et en
particulier que les dallages des portiques du forum ont été refaits à basse époque. Mais
cela reste très vague et surtout mal daté. Plus intéressantes sont les observations
faites par Roger Guéry sur le forum d'une localité sise entre Thysdrus et Usila, à Bararus
(Rougga) (43). Le Forum de cette petite agglomération a été partiellement envahi par
des "constructions que la stratigraphie tendait à placer au plus tôt à la fin du Vie
siècle. Et de cette zone vient un trésor de monnaies dont les plus récentes ont été
frappées à Carthage en 647.
Ce rapide bilan — résumé trop technique, j'en conviens, mais indispensable
pour faire percevoir la difficulté des explications — montre que l'historien n'est pas à
son aise pour interpréter des recherches anciennes et quelques travaux récents, pour
donner un sens à des documents aussi épars et aussi mal datés. Les différences —
vues sous l'angle de la topographie — sont nettes entre deux villes pourtant relative-
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ment proches, telles Diana Veteranorum et Thamugadi. Que dire lorsque l'on ne sait
précisément où situer la forteresse par rapport aux bâtiments publics de la ville
antique ? Ou lorsque les édifices tardifs offrent tant de différences de structure interne ?
Derrière la curie, entre celle-ci et la mer, une autre basilique, du Vie siècle, a
été construite. Si l'on ajoute à cela le temple de l'époque antonine et un autre temple
à cour qui lui fait face, on s'aperçoit que la moitié environ de l'espace enclos de mur
était occupé par des édifices publics. Et encore tout n'est-il pas fouillé, ni publié... Y
avait-il donc la place à l'intérieur de ces murs pour un habitat ? Sans aucun doute.
Mais pour la totalité de l'habitat ? J'en doute, surtout lorsque je vois un groupe de
basiliques chrétiennes, à l'est de la muraille, mais dans un quartier proche de la mer.
La présence de baptistères et la complexité de cet ensemble aide à aller dans ce sens,
et les inscriptions funéraires ou tombes qui ont été trouvées, ici ou là, ne peuvent
suffire, comme je viens de le montrer, à écarter la suggestion.
Lepcis Magna offre une situation voisine. La difficulté réside dans l'existence
de deux tracés d'enceinte, non datés, et dans les conditions de dégagement des
ruines. On dispose d'un passage de Procope qui attribue des dommages causés à la ville
tant au sable qu'aux tribus indigènes (53), et qui fait l'éloge de la construction de
murs par Justinien. Pringle pense que la muraille la plus vaste, longue de 4 km,
tracée d'un point du rivage à l'autre de façon à inclure le port, est la plus ancienne,
mais que l'autre, aussi d'époque byzantine, n'en est pas très éloignée dans le temps,
du fait de sa technique de construction. Cette dernière n'a que 2,5 km environ.,
Pringle propose donc une surface de 44 ha pour la première et de 28 pour la seconde,
ce dont il faut, semble-t-il, exclure le port lui-même, si mes calculs sont exacts. Il est
à noter que la dernière enceinte est conçue pour isoler d'une part le vieux forum,
centre de la vie municipale avec la basilique et la curie, et les temples les plus
anciens, toujours important aux Ille et IVe siècles, même si le forum sévérien a
conservé davantage de textes épigraphiques, et d'autre part ce même forum sévérien
et la basilique transformée en lieu de culte chrétien. Près du forum ancien, une
basilique a été construite qui ne peut être antérieure au Vie siècle. La situation est ici
particulièrement intéressante parce que dans l'axe de cette basilique, en plein milieu
du forum, isolé, a été dressé le baptistère, qui s'intercale donc entre la basilique
civile et les temples. Ici aussi des tombes ont trouvé place aux abords de ces lieux de
culte, particulièrement dans le dallage du forum. Mais ce dallage n'a pas été ruiné,
car les dalles avec épitaphes s'y sont insérées comme dans le pavement d'une
basilique (54).
A Lepcis donc et à Sabratha, une grande part de la muraille sert à protéger ou
isoler des édifices publics, à usage profane ou religieux, voire à fonction
économique, comme le port de Lepcis. La résidence du dux limitis Tripolitanae provinciae
(55), attestée dès 534, et l'autre ville de la province présentent donc une organisation
de l'espace comparable et elles posent les mêmes problèmes relatifs à l'habitat,
actuellement insolubles, faute de fouilles.
Ce constat amène à s'interroger sur d'autres enceintes assez vastes, parfois
irrégulières. Parmi elles, celle de Theveste qui n'a pas moins de 7,5 ha et qui inclut des
bâtiments publics, dont le temple toujours debout, dit de Minerve, et sans doute le
forum. Ou encore telle d'Ammaedara qui, elle, n'a que 2 ha et demi.
Cette dernière ville est intéressante puisque plusieurs de ses monuments
viennent d'être étudiés par Noël Duval (56). Je note deux choses. La première est que
dans l'enceinte même, accolée à elle, est une petite basilique à tribunes : elle doit
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te, ce qui me paraît très plausible. Une seule fouille récente a été tentée dans cette
surface ainsi délimitée. A partir de 1965, le Service des Antiquités a commencé de
dégager un amphithéâtre, et nous avons eu la bonne fortune de constater que l'arène
avait été habitée (61). La plus ancienne occupation n'est datable que par une phase
d'abandon postérieure au début du Vie siècle. Ce niveau de destruction était
recouvert par une épaisse couche de terre cendreuse, qui pourrait correspondre à une
occupation par des nomades ou semi-sédentaires, qui n'ont pas laissé de murs bâtis.
L'analyse des fragments carbonisés a donné la date 900 + ou - 150. Quoiqu'il en soit
donc de la date de construction de la vaste muraille, il est certain que l'amphithéâtre,
rendu difficile d'accès par la fermeture de deux galeries du grand axe, était un lieu
habité entre le Vie et le Xe siècle.
La situation de Theveste n'est pas sans rappeler celle que décrit El Bekri, en
faisant référence à Mohammed ibn Youçof (62) : «Le château de Tobna, énorme édifice
de construction ancienne, est bâti en pierre et couronné par un grand nombre de
chambre voûtées ; il sert de logement aux officiers de la province et touche au côté
méridional du mur de la ville» ; celui-ci est décrit comme étant fait de briques. Je me
demande si on ne pourrait pas rapprocher ces fortifications des indices relevés au
début de la colonisation à Calama (63). Je sais bien que l'archéologie ou la
photographie aérienne font apparaître des enceintes vastes et assez anciennes ; mais l'idée
peut être lancée. Il est urgent, en effet, de rechercher les liens qui ont existé entre la
ville antique et la ville médiévale.
J'ajouterai une dernière remarque à propos de la topographie de ces villes — en
laissant à plus tard le moment de parler d'autres constructions, prises en compte par
Pringle ou par d'autres, comme les fortins byzantins. Toutes les villes n'ont pas eu de
forteresse byzantine, ni de l'époque de Solomon, ni des règnes qui ont suivi celui de
Justinien. C'est le cas de Sufetula, où ce qui a été pris pour une muraille tardive n'est
qu'un remaniement du mur périmétral de l'area du capitole, et où les constructions
de lieux de culte, en ville et dans la nécropole, au Vie voire au Vile siècle, ne
manquent pas — que ce soit la basilique des saints Gervais, Protais et Tryphon ou
celle des saints Sylvain et Fortunatus (63). Bulla Regia n'a pas non plus de forteresse
reconnue, et pourtant les deux basiliques du groupe episcopal doivent être placées à
l'époque byzantine.
Les études récentes consacrées à des lieux de culte chrétien ont permis
d'enlever à l'époque byzantine un certain .nombre de constructions — c'est le cas de la
basilique martyrologique de pèlerinage de Theveste, que Jurgen Christern et moi
nous accordons à placer au début du Ve siècle — ou de mieux en situer d'autres
pendant la période vandale, ce qui a paru longtemps impensable, et force donc à une
révision des conditions de la création artistique, comme dans d'autres régions
soumises aux Barbares et à des Ariens.
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Des mosaïques des lieux de culte, je suis tenté de passer au décor d'autres
édifices publics, et surtout à celui de la maison. La très récente publication des mosaïques
de Thuburbo maius montre que la basilique du marché a subi des remaniements,
postérieurs aux années 420/430 peut-être de plusieurs décades : de nouvelles
mosaïques ont été placées sur un remblai qui contenait des monnaies vandales et de la
sigillée D du Ve siècle. Sous une mosaïque de la basilique du forum de Caesarea, une
monnaie force aussi à situer des remaniements après la première décade du Ve
siècle (76). Cela est peu, mais si l'on pense que, voici une vingtaine d'années, rares
étaient ceux qui osaient proposer des dates avancées dans le IVe siècle et combien
fortes étaient les résistances, on mesure le chemin parcouru. Aussi suis-je sûr,
malgré ce que je peux lire encore dans la compilation de Katherine Dunbabin (77),
frileusement attachée à une vulgate qui passe de mode, qu'il sera bientôt possible de
situer des décors de maisons, non seulement dans le Ve — ce qui se fait déjà — mais
dans le Vie siècle.
Il y a, heureusement, un secteur de la documentation archéologique où l'audace
s'est révélée payante et où des certitudes s'ébauchent. Aux trois livres de Denys
Pringle, Jean Lassus et Jean Durliat, il faut joindre celui de Nourredine Harrazi (78).
Après une étude des chapiteaux de la Zitouna de Tunis, ce chercheur a fait
l'inventaire sérieux des chapiteaux de la grande mosquée de Kairouan. Dans cette arche
admirable, étalée depuis la première moitié du IXe siècle dans la steppe, la plus
grande part du décor taillé dans le marbre est antique, et près de la moitié des chapiteaux
réemployés — qu'il s'agisse de ceux composites ou corinthisants à feuilles
d'acanthes, épineuses ou dentelées, de ceux à acanthes gonflées par le vent ou encore à
figures animales, de chapiteaux-impostes — trouve son répondant ou son équivalent
dans l'Orient, où bien là où les ateliers de Constantinople ont exporté. Ces oeuvres
importées se placent soit vers la fin de l'époque vandale, soit lorsque Byzance étend sa
domination sur l'Afrique. Si bien qu'avec Harrazi on ne parvient pas à saisir une
rupture en 533. Cela tient pour une part à la tendance de nombreux archéologues
qui, avec raison, se refusent à des datations trop précises, ou tirent des conclusions
arbitraires de faits historiques d'une histoire événementielle. Cela doit tenir aussi au
fait qu'il y a un long courant d'échanges sur les rives de la Méditerranée, une
Méditerranée qui n'est ni coupée par l'empire maritime vandale, ni scindée entre
deux mondes, celui des Barbares et celui de la nouvelle Rome. M. Fulford (79) a
souligné, à partir d'observations faites sur le site de Carthage, le poids que
représentent les amphores venues d'Orient sur le site, à partir de la fin du Ve et dans la
première moitié du Vie siècle. Le phénomène n'est pas propre au Maghreb, puisque
Françoise Villedieu, argumentant à partir de fouilles et de comptages de céramiques
faits pour le site de Porto Torres en Sardaigne (Turris Lisibonis) (80), a suivi la même
42 • P.A. FEVRIER
européenne. Plus difficile est l'utilisation des lampes d'origine africaine (88). Leur
présence est assurée, mais est-ce au Ve ou au Vie ? et dans quelle quantité ?
Ces résultats précis, qui vont permettre de mesurer l'importance et les limites
du travail de Hayes (89), se multiplieront certainement dans les années à venir.
L'étude de cette vaisselle de table devra être reliée à celle des amphores — et à celle
de leurs concurrentes orientales — et c'est là la seule voie qui nous permettra de
juger de la vitalité de l'Afrique byzantine. Encore faudra-t-il qu'à ces enquêtes
menées en Europe ou en Orient viennent s'ajouter des fouilles faites au Maghreb.
Nous commençons d'entrevoir la situation dans certains quartiers de Carthage,
comme ceux fouillés à la périphérie de la ville antique, tout près de la vaste nécropole
septentrionale et de la basilique de Damous el-Karita. La fouille italienne fait voir un
abandon relativement généralisé des îlots jusqu'alors habités — ou du moins habités
depuis le Ile siècle — à partir de la reconquête, l'implantation de tombes, en même
temps que la restauration de l'enceinte de Théodose (90). Par contre, près du rivage,
l'équipe allemande a montré les nombreux remaniements des Vie - Vile siècles, qui
n'altèrent pas le quadrillage colonial, et ce malgré les bouleversements des couches
supérieures (91). L'îlot de l'Amirauté, au centre du port circulaire (92), a connu lui
aussi des remaniements, que Henry Hurst a proposé de placer à l'époque de Justi-
nien, voire plus tard ; reste à interpréter la présence de tombes dans cette zone. Ces
rapports préliminaires devront être regroupés et il faudra du temps avant que l'on
puisse vraiment passer à l'interprétation historique du devenir de la ville, à une
époque tardive. D'expérience, je sais combien il est difficile, même sur des sites
moins étendus, de parvenir à une lecture cohérente (ou encore à des lectures
différentes) d'un site urbain où les couches de la fin de l'Antiquité comme du Haut Moyen
Âge sont rarement protégées par des strates ultérieures et ont subi de très graves
dommages. Cela me semble vrai aussi pour Carthage, à en juger par les discussions —
trop partielles, il est vrai — que j'ai pu avoir avec des fouilleurs. Je viens de voir, en
peu d'années, se modifier fondamentalement la vision d'un port important comme
celui de Marseille ou d'autres villes plus modestes, et ma prudence — souvent
critiquée — devant des reconstructions trop belles — a tendance à se renforcer. Je sais
aussi que les céramiques ou certains matériaux qui se conservent aisément ne
peuvent être les seules sources d'une connaissance du milieu.
Il y a, je pense, une autre raison à cette prudence d'un historien qui essaie,
depuis des années maintenant, de suivre la trace des traditions antiques et qui nie le
concept de décadence — fidèle en cela à la leçon reçue de son maître (93) — : j'ai vu
reculer les limites de nos connaissances et j'ai vu confirmer les hypothèses que je
présentais, au milieu des réticences de beaucoup, sur le IVe et le début du Ve siècle.
Aussi voudrais-je que l'on évite de faire maintenant de l'époque byzantine en
Afrique une fin.
DE QUELQUES TRANSFORMATIONS
DANS L'HABITAT URBAIN ET RURAL
le devenir de ces villes. L'interrogation qui vient obligatoirement à l'esprit est celle
qui ne cesse de préoccuper les historiens depuis de nombreuses décades : que sont
devenues ces villes avec la conquête arabe ? Dans quel état se trouvaient-elles au
moment où les premiers arrivants se présentèrent devant elles ? Qu'en firent-ils ?
A lire, il est vrai, avec un certain nombre de présupposés, nés d'une analyse
d'historiens médiévaux ou de l'Antiquité, les géographes arabes dans les traductions
qui me les font connaître, j'ai toujours eu l'impression qu'ils ne nous révélaient de la
ville qu'ils avaient vue, quelques siècles après la conquête, ou que des descriptions
leur faisaient connaître, qu'une image typée et réductrice. Qu'ils étaient obligés de
laisser de côté bien des sites. Mais aussi qu'ils sentaient bien — sauf exceptions
parfois relevées— l'héritage du passé antique.
Autre chose est la continuité d'occupation d'un espace ; autre chose est la façon
de l'organiser. Et lorsque l'on ne dispose pas de fouilles stratigraphiques et lorsque la
documentation est très éparse, il reste la possibilité de dégager quelques aspects
d'une typologie. Nous avons déjà vu apparaître un des aspects de la ville : la présence
du rempart, d'époque toujours indéterminée, que ce soit à Sitifis, Calama ou
Theveste, et à Tubunae. Peut-être aussi sa non-existence : à Sufetula ou Ammaedara.
Essayons maintenant d'entrer dans l'habitat lui-même.
A Sufetula, en bordure de la rue antique qui conduit du centre vers l'arc
d'époque tétrarchique, non loin de la basilique des Saints Gervais, Protais et Tryphon et de
thermes très tardifs, sont trois constructions rectangulaires, appelées communément
fortins. Dans les deux dont Noël Duval a donné le plan (94), on distingue chaque
fois deux structures dissemblables : un noyau médian avec un puits de lumière et
des pièces disposées autour, et une enveloppe de pierres de taille sans ouverture, ce
qui conduit à restituer un escalier qui conduisait à l'étage. Deux étapes dans la
construction — ce que suggère la ressemblance des organisations spaciales — ou deux
périodes ? Peu importe, dans la mesure où l'on n'a pu donner d'arguments
stratigraphiques pour une date. Des constructions semblables — du moins par leur aspect
extérieur — Gnt été signalées à maintes reprises par le passé, ou restent encore
visibles, dans l'attente d'une fouille. Cela a été noté en d'autres secteurs à Sufetula, mais
toujours à une certaine distance de l'arc de triomphe, et aussi à Ammaedara ou à
Bulla Regia. Dans ce dernier cas, Denys Pringle reste très dubitatif. Gsell a signalé
des constructions identiques, parmi lesquelles le «fort» d'Aquae Caesaris avoisinant
la source thermale (95) : c'est un carré de 14 m de côté qui regroupe huit pièces,
autour d'un neuvième espace qui pourrait être à ciel ouvert. Les constructions de
Sufetula ont 24/20 m ou 22/22.
Jean Lassus, en publiant le fort de Thamugadi, n'a pas voulu laisser de côté une
construction en grand appareil de 29 m sur 25, faite de deux espaces accolés — 29/11
et 21/13, 5 - coupés par des murs de refend, de techniques différentes. Au voisinage
est une fontaine, faite de remplois. Je n'ai jamais vu de raison de rattacher cet
ensemble au fort de Solomon. J'y ai toujours vu une maison, ce qui n'est pas l'opinion de
Jean Lassus, qui y voit une dépendance de la citadelle. Le texte qui nous est donné
n'apporte pas de preuve et je maintiens ma première lecture.
Les découvertes d'Ammar Mahjoubi à Henchir el-Faouar (Belalis maior) (96)
me confortent dans cette vue. Dans la partie nord du site, la grande basilique a cédé
APPROCHES RÉCENTES DE L'AFRIQUE BYZANTINE 45
quelques paysans groupés sous l'autorité d'un gradé. Quant au Focas — Focas magis-
ter fecit — , Durliat en fait le lapicide ou le maçon ou plutôt le maître d'oeuvre. Je ne
puis m'empêcher de penser au titre si souvent utilisé sous l'empire, en Afrique, pour
désigner le responsable d'une entité administrative, par exemple dans les castella de
la confédération cirtéenne.
Jean Durliat a noté que le terme de turris — qui mériterait une étude plus ample
dans le contexte du Maghreb antique, voire en dehors — s'applique à autre chose
qu'une fortification ou à une partie d'une défense. De même le mot castrum ne
recouvre pas obligatoirement un poste militaire. Et je suis dès lors amené à penser
à une construction, comme celle qui est mentionnée, dans la confédération
cirtéenne, dans une région très urbanisée et où la campagne ne semble pas être menacée.
Une dame Caelia Maxima, clarissima femina, a chargé un actor de rang servile de
construire turres salutem saltus (100). Une autre turris perfecta a été élevée dans un
domaine du Sud tunisien (101). Je pense aussi à l'allure fortifiée que le propriétaire
de la ferme du Nador, entre Tipasa et Caesarea, le flamine perpétuel, M. Cincius
Hilarianus, a cru devoir donner à la façade septentrionale de sa résidence
rurale (102). J'y adjoindrai l'inscription que le perfectissime M. Aurélius Vasefan (?)
a fait placer dans ses domaines: castrant ...laboribus suis ... perfecit (103).
Il y a là une continuité dans le vocabulaire qui paraît traduire une similitude de
situation, à laquelle il faudrait être attentif, car j'ai toujours été méfiant devant le
terme de ferme fortifiée ou de fortin, qui sert à désigner quantité de constructions de la
région de Tbessa (104). Mais revenons-en à la ville tardive.
Je veux verser au dossier un dernier document qui révèle des modifications
différentes de celles qui ont été précédemment envisagées. Dans les premières
années de ses interventions à Tipasa, Jean Baradez (105) a constaté que l'esplanade
du temple situé en contre-bas de la colline du forum et en bordure du décumanus
principal avait subi de nombreux remaniements. Les plans alors dressés n'ont pas été
publiés et sont restés dans les archives du Service des Antiquités. On s'aperçoit que
à'
Varea du temple a cédé la place une basilique chrétienne à trois nefs (106). Puis,
des murs sont venus couper tout cet espace, en débordant même sur la voie. La
basilique a été cancellée et si certains éléments, comme des piliers, sont restés en
place — tout comme le sont restés les murs du péribole du temple —, un habitat a pris
le relai. Habitat non daté, mais qu'il est difficile de situer avant le Vile siècle. On
aurait donc une situation comparable à celle d'Henchir el-Faouar — destruction
d'une basilique chrétienne —, mais la structure même du quartier n'en paraît pas
modifiée sensiblement : les deux rues qui se coupent à angle droit semblent toujours
exister dans cette dernière phase, non datée stratigraphiquement. Et de l'autre côté
de la rue nord-sud, il semble possible de voir des remaniements aussi importants, à
l'intérieur d'un autre îlot. Ainsi donc, dans une ville où la céramique byzantine
tardive ne paraît pas manquer, à en juger du moins d'après les quelques pièces
conservées dans le musée, mais où l'on ne savait rien d'une occupation plus récente,
ces remaniements doivent pris en compte.
Partant des restes les plus spectaculaires de la présence byzantine en Afrique,
j'ai été conduit à considérer d'autres espaces de cette histoire. Mais il aura été clair
que l'enquête n'en est encore qu'à ses débuts. Certes, une archéologie fondée sur les
APPROCHES RÉCENTES DE L'AFRIQUE BYZANTINE 47
monuments peut apporter beaucoup, mais elle doit être complétée par d'autres
recherches. Elle est aussi insuffisante qu'une archéologie qui entend souvent
aujourd'hui faire fi des monuments les plus prestigieux ou de leur décor, soit encore
des textes. Pour approcher une réalité où nos sources sont si pauvres, et où les
schémas d'interprétation sont remis en cause, il importe de se servir de tout ce qui
peut tomber sous la main. A la condition de bien percevoir le degré de validité de ces
séries documentaires hétérogènes.
Ce qui vient d'être dit vaut essentiellement pour la ville, unique objet — par
force — de bien des analyses. Or cette ville est vue par les auteurs anciens ou
modernes à partir de certains a priori qui ne sont dangereux que si on oublie qu'ils existent.
Or, notre vision de l'Afrique byzantine — et particulièrement des villes, lieux de
l'exercice du pouvoir et de sa manifestation nécessaire — a été fortement marquée
par le traité de Procope sur les Edifices, et par ses récits de guerre, comme par la
Johannide de Corippe. L'Afrique découverte par Procope de Césarée, après les
campagnes auxquelles il a participé contre les Perses, est une réalité qui lui était
étrangère. Sa position auprès de Bélisaire, puis de Solomon, ont fait de ce lettré un
observateur indispensable. Mais il a certainement été surpris, lui qui venait du front
oriental, de l'absence de murailles dans les villes. Et il lui faut donc attribuer cela
aux Vandales (107) soucieux de tenir le pays, alors que bien des agglomérations
devaient leur aspect de ville ouverte à leur extension ancienne. Si elles avaient
parfois gardé un rempart — signe de leur importance et de leur fonction — cela était
dû à l'ampleur des programmes d'un moment, car souvent les murs primitifs avaient
disparu sous des remaniements. Avoir une muraille, avoir une défense, exister, cela
était tout un pour ce nouveau venu, à la fois parce qu'il était l'héritier d'une tradition
classique et parce que la vie auprès des militaires lui était devenue naturelle. Sa
vision de la ville est donc une vision déterminée par une stratégie du pouvoir comme
de la défense.
Il serait intéressant de cerner aussi la façon dont Charles Diehl a compris son
travail. Denys Pringle a bien vu l'intérêt d'une telle approche ; mais une étude des
sources de Diehl lui-même et des contacts qu'il a eus reste à faire. Je note l'intérêt
qu'il a pris aux observations d'un officier du Génie installé à Tbessa, le capitaine
Moll (108), dont il cite un long passage, celui précisément relatif au «réseau des
fortifications byzantines établies de tous côtés» et à la politique de Solomon. Or Moll
publiait ces pages en 1860 - 1861, trente ans avant Diehl. L'oeuvre de Diehl elle-
même a été possible par la soumission de la Tunisie : une dizaine d'années à peine
s'est écoulée lorsqu'il se met à parcourir le terrain en demandant l'aide des
administrateurs et des militaires. Il faudrait s'interroger sur l'effet de cette tournée des
popotes. Tout aussi important est l'impact de l'amitié — il y fait allusion dans son
introduction — de René Coudray La Blanchère qui, mettant à profit son expérience
algérienne, tout comme le faisaient, à leur façon, les officiers envoyés de l'autre côté
de la frontière, écrivait une histoire de l'hydraulique fort opportunément tournée
vers l'Enfida — et donc vers la société franco-africaine qui commençait à la mettre en
valeur. Les discussions n'ont pas dû manquer avec René Cagnat qui, en 1893,
faisaient sortir des presses son Armée romaine de l'Afrique. Diehl a été sensible à la
différence entre cette oeuvre des 1er - Ile - IHe siècles et ce qu'il était amené à res-
48 P.A. FEVRIER _
NOTES
(1) Ch. Diehl, L'Afrique byzantine, histoire de la domination byzantine en Afrique (533 • 709)
Paris, 1896.
(2) Chr. Courtois, Les Vandales et l'Afrique, Paris, 1955.
(3) Je ne citerai, en m'inspirant d'une remarque d'H.-I. Marrou, que la mise à l'écart de textes
de l'Anthologie latine. Or ces documents sont d'une importance capitale pour restituer la culture
classique à la cour des derniers souverains vandales. Des collègues historiens et latinistes de Montpellier
préparent une étude de certains de ces textes, dont ils m'ont fait part oralement.
(4) L'article de Noel Duval, «Observations sur l'urbanisme tardif de Sufetula», dans Les cahiers
de Tunisie, t. 12, 1964, p. 87 - 103, marque une étape dans la réflexion archéologique pour cette
période. On aura recours aux ouvrages qu'il a écrits ultérieurement, et dont je citerai certains plus loin. Sur
les institutions, voir A. Chastagnol et N. Duval, «Les survivances du.culte impérial dans l'Afrique du
Nord à l'époque vandale», dans Melanges d'histoire ancienne offerts à William Seston, Pans, 1974
p. 87-118.
(5) A l'article de J. Carcopino, dans Rev. des et. anc. , t. 46, 1944, p. 94 - 120 et au livre de Chr.
Courtois, s'ajoutent les observations que l'on peut tirer de J. Marcillet-Jaubert, Les inscriptions d'Alta-
va, Aix -en-Provence, 1968 et la thèse de Fatima Kadra, Les Djedars, monuments funéraires berbères de
APPROCHES RÉCENTES DE L'AFRIQUE BYZANTINE 49
la région de Frenda (wilaya de Tiaret, Algérie occidentale), soutenue à Aix (Université de Provence), et
dont il faut espérer que l'impression en cours sera menée à bonne fin.
(6) Ch. Diehl, «Rapport sur deux missions dans l'Afrique du Nord (avril -juin 1892 et mars -
mai 1893)», dans Nouv. arch, des missions, t. 4, 1893, p. 285-434.
(7) D. Pringle, The Defence of Byzantine Africa from Justinian to the Arab Conquest. An account
of the military history and archaeology of the African provinces in the sixth and seventh centuries, Oxford
( = BAR int. 99), 1981.
(8) St. Gsell, Les monuments antiques de l'Algérie, t. H, Paris, 1901, p. 344-395. .
(9) J. Durhat, Les dédicaces d'ouvrages de défense dans l'Afrique byzantine, Rome, 1981. Ce qui
dispense d'utiliser le relevé de Pringle.
(10) En a été extrait J. Durhat, «La lettre L dans les inscriptions byzantines d'Afrique» dans
Byzantion, t. 49, 1979, p. 156 - 174. Ce qui a suscité un article très sévère de N. Duval, «Comment
distinguer les inscriptions byzantines d'Afrique, un problème de méthode», dans Byzantion, t. 51,
1981, p. 511 -532. Voir aussi J. Durliat, «Écritures écrites et écritures épigraphiques, le dossier des
inscriptions byzantines d'Afrique», dans Studi medievali, 3e s., t. 21, 1980, p. 19-46.
(11) J. Lassus, La forteresse byzantine de Thamugadi, fouilles à Timgad 1938-1956, I, Pans,
1981. Le tome II, confié à M. Le Glay, donnera les inscriptions et la description du temple.
(12) Sur ces poternes, partiellement bouchées ou fermées, voir des photographies données par
J. Lassus, p. 92 - 93, fig. 61-63. Mais on rapprochera utilement, par exemple cette fig. 63 du plan de la
page 25, fig. 9, qui doit être daté après 1946 - 1947, parce que je possède la photographie d'un état des
constructions adventices situées à l'ouest des pièces 63 et 67 des «casernements» de Jean Lassus. Or
ce plan de la p. 25 est réutilisé pour donner le plan hors-texte et donc faire figurer des murs qui
n'existent plus (ou n'ont jamais existé ?) : voir fig. 24 p. 63 et fig. 63, p. 93. La raison de mon doute est la
suivante : figure en amorce, dans les fondations, un mur sous la poterne. Un exemple à ajouter aux
difficultés d'interprétation. Un autre : l'escalier de la fig. 44 p. 77 a de fortes chances d'être moderne : c'est
l'accès au point le plus élevé du monument.
(13) Je me sépare en cela de J. Lassus, p. 156, car je ne puis penser que l'on rebaptisait les
hérétiques au Vie siècle en Afrique, après tant de querelles sur le dit-point, après 312 et avant.
(14) A. Berthier, «Établissements agricoles antiques d'Oued Athmenia», dans Bull, d'arch.
alg., t. I. 1962 - 1965, p. 7 - 12. J'ai vu moi-même le site.
(15) J. Chnstern, Dasfrùhchnsthche Pilgerheiligtum von Tebessa, Wiesbaden, 1976, p. 90-94.
On lira avec intérêt les remarques de N. Duval et J.-C. Golvin, «Haidra à l'époque chrétienne IV : les
monuments à auges et les bâtiments similaires» dans CRAI 1972, p. 133 - 172 et particulièrement p.
168 ; voir aussi dans MEFRA, «Antiquité», t. 84, 1972, p. 675 - 719 (avec Y. Duval) et t. 88, 1976, p.
929-959.
(16) J. Durliat, Les dédicaces..., p. 47-53, numéro 19.
(17) Description de l'Afrique septentrionale, trad. Mac Guckin De Slane, rééd. 1965 qui reprend
celle d'Alger, 1911-1913, p. 108, numéro 124.
(18) Gesta apud Zenophilum, éd. C. Ziwsa, CSEL, t. 26, p. 185 - 197.
(19) H.-G. Pflaum, Les carrières procuratonennes équestres sous le Haut-Empire romain, Paris,
1961, t. III, p. 1094 (CIL VIII, 2757) ; penser aussi au P. Iulius Liberahs, étudié par J. Gascou dans
Ant. afr., t. 14, 1979, p. 189-196.
(20) A. Chastagnol, L'album municipal de Timgad, Bonn, 1978, p. 33 -39. Je me sépare des
interprétations sur les clenci à cause des textes conciliaires de même époque, en particulier c. 5 et 10
du Concile de Carthage de 345-348, éd. C. Munier, CC, t. 149, p. 6 et 8.
(21) J. Durliat, Les dédicaces, numéro 2, p. 9-11 ; numéro 6, p. 18-21 ; numéro 10, p. 25-26 ;
numéro 14, p. 35 -37.
(22) Ibid., numéros 12 et 13, p. 25-35 ; numéro 24, p. 57-59.
(23) Ibid. , numéro 23, p. 55 - 57. J'ai revu la pierre et fait la photographie donnée à la page 56,
tout comme les autres photographies du même recueil qui proviennent d'Algérie.
(24) Ibid., numéro 10, p. 26.
(25) Ibid., numéro 15, p. 37-42.
(26) St. Gsell, Les monuments..., t. II, p. 369.
(27) Ce problème m'a déjà préoccupé : «Évolution des formes de l'écrit en Afrique du Nord à la
fin de l'Antiquité et durant le Haut Moyen Âge», dans Tardo antico e Alto Medioevo, Rome, 1968, p.
50 P.A. FEVRIER
204 - 206 ( = Ace. naz. dei Lmcei, anno CCCLXV, quaderno numéro 105). Je suis surpris de la
disparition, avec la fin du IVe siècle, de toute une série de documents qui abondaient sur les places publiques
ou les monuments d'Afrique. Je ne pense pas que cela signifie rupture dans les constructions ou dans
la vie municipale ; cela indique plutôt une modification dans les conditions de transmission de l'écrit
ou dans la manière de le concevoir. J'ai essayé de le suggérer dans une communication restée
dactylographiée lors du Colloque de l'Institut Gramsci, qui a eu heu à Naples en octobre 1982. Je pense en
particulier que l'importance prise par le décor en mosaïque — sur le sol et les parois — est un élément à
prendre en compte.
(28) Procope, De aed. , VI, 7. Sur ce texte J. Desanges, «Un témoignage peu connu de Procope
sur la Numidie vandale et byzantine», dans Byzantion, t. 33, 1963, p. 41 -69.
(29) L'Afrique..., p. 382-383.
(30) «Permanence et héritages de l'Antiquité dans la topographie des villes de l'Occident
durant le Haut Moyen Âge», dans Sett, di studio del centro it. di studi sull'alto medioevo, XXI, Topogra-
fia urbana e vita cittadina sull'alto medio evo m Ocadente, Spoleto, 26 aprile - 1 maggio 1973, Spolète,
1974, p. 107, article absent de la bibliographie, pourtant très abondante, de Pnngle.
(31) St. Gsell et Ch. A. Joly, Khamissa, Mdaourouch, Announa, seconde partie, Mdaourouch,
Pans, 1922, p. 126-132.
(32) L'Afrique..., p. 73-74.
(33) Les dédicaces..., p. 97, note 13.
(34) Elle apparaît même bouchée sur une vieille photographie donnée par St. Gsell, pi. III, 2,
alors qu'actuellement l'ouverture existe. J'ai pensé un instant que le niveau du sol du théâtre avait pu
être surélevé par des remblais, mais se poserait toujours le problème du passage entre l'ancien forum
et un terrassement qui serait alors en contre-haut.
(35) Cl. Poinssot, Les ruines de Dougga, Tunis, 1958, p. 40 - 41 ; voir pourtant sa photographie
aérienne pi. VI et les vues données par D. Pnngle, pi. Lib, Lllb et LlIIb.
(36) A. Chastagnol et N. Duval, «Les survivances du culte impérial dans l'Afrique du Nord à
l'époque vandale», dans Mélanges. . . W. Seston, p. 97 - 100 ; N. Duval et Fr. Prévôt, Recherches
archéologiques à Haidra, I, Les inscriptions chrétiennes, Rome, 1975, p. 273-277, numéro 413.
(37) P.-A. Février, A. Gaspary, R. Guéry, Fouilles de Sétif (1959 - 1966). Quartier nord-ouest,
rempart et cirque, Alger, 1970, p. 85, et plan de Ravoisié, p. 84, dit par erreur de Delamare. Ce dernier a
donné le même plan mais sans datation pour cette muraille.
(38) J. Durliat, Les dédicaces..., p. 87-88, numéro 37.
(39) Kh. Belkhodja, «Ksar Lemsa», dans Africa, t. II, p. 313-348.
(40) J. Durliat, Les dédicaces..., p. 77-78, numéro 30.
(41) N. Duval, «Études d'architecture chrétienne nord-africaine. V. La «basilique de Zana»,
dans MEFRA, t. 89, 1977, p. 849 -873.
(42) M. Christofle, «Rapport sur les travaux de fouilles et consolidations effectuées en 1927,
1928 et 1929 par le Service des Monuments Historiques de l'Algérie», Alger, 1930, p. 79 - 84.
(43) R. Guéry, C. Mornsson, H. Slim, Recherches archéologiques franco-tunisiennes à Rougga,
III, Le trésor de monnaies d'or byzantines, Rome, 1982 ; R. Guéry, «L'occupation de Rougga (Bararus)
d'après la stratigraphie du forum», communication au congrès de Perpignan des sociétés savantes tenu
en 1981, à paraître.
(44) Dernier bilan : N. Duval, Les églises africaines à deux absides. Recherches archéologiques
sur la liturgie chrétienne en Afrique du Nord, t. H, Inventaire des monuments-interprétation, Pans, 1973,
p. 275 - 278. Voir aussi J.-B. Ward-Perkins et R G. Goodchild, «The Christian Antiquities of Tripohta-
nia», dans Archaeologia, t. 95, 1953, p. 7-15.
(45) R. Bartocini, «II tempio Antoniniano di Sabratha», dans Libya ant., t. I, 1964, p. 37 - 40.
On notera la présence de graffites grecs et arabes sur les parois de la cella, ce qui laisse supposer que le
monument était bien debout jusqu'à une époque avancée dans le temps.
(46) Comme l'a noté N. Duval dans le texte cité note 41. «The Inscriptions of Roman Tripolita-
nia», numéros 196-204, 207-208, 210-213, 218, 220, 223.
(47) J. Bayet, dans Libyca, t. 3, 1955, p. 104 - 105 = A. Ep. 1956, numéro 122.
(48) P.-A. Février, Fouilles de Setif. Les basiliques chrétiennes du quartier nord-ouest, Paris,
1965, p. 78 et 105.
APPROCHES RÉCENTES DE L'AFRIQUE BYZANTINE 51
(49) Après E. Marec, Monuments chrétiens d'Hippone, Paris, 1958, p. 51 - 95 ; sur la datation, P.-
A. Février, «Les sources épigraphiques et archéologiques et l'histoire religieuse des provinces
orientales de l'Afrique antique», dans Corsi di cultura sull'arte ravennate e bizantma, Ravenna, 1972, p. 146 -
150 et N. Duval, La mosaïque funéraire dans l'art paléochrétien, Ravenne, 1976.
(50) N. Duval, Les églises africaines à deux absides. . . Recherches archéologiques à Sbeitla, I,
Les basiliques de Sbeitla à deux sanctuaires opposés, Paris, 1971, p. 222-238.
(51) Voir l'ouvrage cité à la note 36.
(52) J'ai abordé ce point dans l'article cité note 30, p. 121 -123.
(53) De Aed., VI, 4.
(54) On en trouve une bonne illustration dans R. Blanchi Bandinelli, et G. Caputo et E.
Vergara Caffarelli, Leptis magna, Rome, 1963, fig. 96.
(55) Cod. just. , I, 27, 20.
(56) Aux ouvrages déjà cités, ajouter le guide réalisé avec Fr. Baratte, Haidra, les ruines
d'Ammaedara, Tunis, 1974.
(57) Description..., p. 154-155.
(58) Cité note 37.
(59) A. Mohamedi, «Informations sur les découvertes récentes en céramique médiévale
effectuées à Sétif (Algérie)», dans La céramique médiévale en Méditerranée occidentale, Pans, 1980, p. 219 -
220.
(60) Atlas archéologique de l'Algérie, Paris, 1911, feuille 29, p. 6-7.
(61) R. Lequément, Fouilles à l'amphithéâtre de Tébessa (1965 - 1968), Alger, 1979.
(62) Cité note 17.
(63) Atlas archéologique de l'Algérie, feuille numéro 8, p. 18 - 19 : ce rempart paraît se rattacher,
comme celui de Sitifis, à la forteresse. A propos de celle-ci, je noterai qu'elle contenait, dans un de ses
angles, de grands thermes qui ne devaient pas être détruits et qui paraissent avoir déterminé un
changement de parti au cours de la construction, si l'on accepte, avec Pringle, que l'ensemble de la
muraille est de même époque. De ces thermes, il est sans doute fait état dans l'inscription de Solomon
(J. Durliat, Les dédicaces..., p. 11 - 14, numéro 13) et il est question d'une poterne en ce lieu, ce qui
laisserait supposer que là se trouvait un accès à ces bains.
(64) N. Duval et Fr. Baratte, les ruines de Sufetula, Sbeitla, Tunis, 1973, p. 99 - 101 et 104 - 108.
(65) N. Duval, «Études d'architecture nord-africaine», dans MEFR Antiquité, t. 84, 1972, p.
1072-1125.
(66) W. Baïram-Ben Osman et L. Ennabli, «Note sur la topographie chrétienne de Carthage :
les mosaïques du monastère de Bigua», dans Revue des et. aug., t. 28, 1982, p. 3 - 18.
(67) L. Ennabli, «Rapport sur la fouille du monument jouxtant la maison des auriges grecs à
Carthage», dans CEDAC Carthage, bull. 4, nov. 1981, p. 29-45.
(68) J. Christern, «Emporenkirchen in NordAfrika», dans Akten des VII intern. Kongresses fur
christliche archàologie, Trier, S -II September 1965, Rome - Berlin, t. I, p. 407-425.
(69) J. Christern, «Ostrômische Kirchen in NordAfrika», dans Byzantimsche Zeitschrift, t. 62,
1969, p. 287-290.
(70) N. Duval, «Les églises d'Haidra. Les églises dites de Melleus, de Candidus et la «chapelle
vandale», dans CRAI, 1969, p. 419-429.
(71) N. Duval, «Les églises d'Haïdra.III. L'église de la citadelle et l'architecture byzantine en
Afrique», dans CRAI, 1971, p. 136 - 166.
(72) N. Duval, «Les baptistères d'Acholla (Tunisie) et l'origine des baptistères polylobés en
Afrique du Nord», dans Ant. afr., t. 15, 1980, p. 329-343.
(73) N. Duval, La mosaïque funéraire dans l'art paléochrétien, Ravenne, 1976. N. Duval et P.-A.
Février, «Le décor des monuments chrétiens d'Afrique», dans Actas del VIII congreso intern, de
arqueologia cristiana, Barcelona, 5 - II octubre 1969, Barcelone-Rome, 1972, p. 26-30 ; D. Parrish,
«The mosaic of Theodoulos from Sousse», dans Ant. afr., t. 16, 1980, p. 229-239.
(74) E. Alfbldi-Rosenbaum et J. Ward-Perkins, «Justinianic Mosaic Pavements, dans Cyrenai-
can Churches, Rome, s.d..
(75) P.-A. Février, «Remarques sur les mosaïques de basse époque à Djemila», dans Bull, de la
soc. nat. des ant. de France, 1965, p. 85 - 92.
52 P.A. FEVRIER
(76) Corpus des mosaïques de Tunisie, Thuburbo majus, les mosaïques de la région du forum,
Tunis, 1980, p. 15 - 19. Information fournie à S. Ferdi, Inventaire des mosaïques de Cherche! (Algérie),
thèse de doctorat de Ille cycle, Aix, 1982, p. 295 - 296.
(77) K. Dunbabin, The mosaics of Roman North Africa, Oxford, 1978.
(78) N. Harrazi, Les chapiteaux de la grande mosquée de Kairouan, (thèse de Ille cycle, Aix,
1979), Tunis, 1982.
(79) M. Fulford, «Carthage : Overseas Trade and the Political Economy, c. AD 400 - 700», dans
Reading Medieval Studies, t. 6, 1980, p. 68 - 80. Ce chercheur m'a passé, en juin 1982, un texte
dactylographié : «Pottery Imports of Carthage : the long term view c. 200 BC - AD 650».
(80) Fr. Villedieu, La fouille de l'enceinte romaine tardive de Turns Lisiboms et les structures
antérieures, thèse de Ille cycle, Aix, 1982.
(81) Je dois à l'amitié de Clementina Panella et d'Andréa Carandini d'avoir un premier
inventaire de cette céramique présentée lors du colloque de Naples de l'Institut Gramsci (octobre 1982).
Grâce à eux, j'ai pu de même connaître divers rapports parallèles sur d'autres sites.
(82) Anthologia latina, t. 1.1, éd. A. Riese, Leipzig, 1894, c. 376, v. 10 - 12, p. 288. J'utilise la
traduction de mes collègues de Montpellier déjà citée. Ce texte avait retenu mon attention : voir
l'article cité note 27 p. 3, et une contribution à l'histoire de l'Afrique vandale qui n'a jamais paru ...
' (83) A. Carandini, «Produzione agncola e produzione ceramica nell' Africa di età impériale»,
dans Studi mise, numéro 15, Rome, 1969-1970, p. 97- 119.
(84) R. Lequément, «Le vin d'Afrique à l'époque impériale», dans Ant. afr., t. 16, 1980,
p. 185-193.
(85) M. Bonifay, «Fouilles récentes sur le chantier de la Bourse : niveaux de l'Antiquité tardive
et du Haut Moyen Âge», dans Lettre d'information du Centre de Recherches Archéologiques,
Archéologie du Midi méditerranéen, 3, 1981, p. 37-48.
(86) Cité note 80.
(87) L. Sagui, «Ceramica afncana dalla villa diTibenoaSperlonga», dans MEFR Antiquité, t. 92,
1980, p. 471-525.
(88) Un état des questions et un inventaire par A. Ennabli, Lampes chrétiennes de Tunisie
(musées du Bardo et de Carthage), Paris, 1976. Une analyse globale a été présentée par L. Anselmino et
C. Pavolini, lors du colloque déjà cité de Naples.
(89) J. Hayes, Late Roman Pottery, Londres, 1972 ; id., A. Supplement ..., Londres, 1980, que
l'on complétera lorsque sera diffusé le volume supplément à VEnciclopedia dell'arte antica, sorti en
juin 1982.
(90) «Scavi a Cartagine : rapporto prehminare délie campagne 1973 - 1977», à paraître dans
Studi mise.
(91) Fr. Rakob, dans CEDAC, Carthage, bull. 2, juin 1979, p. 21 -29 ; id., «Deutsche Ausgra-
bungen in Karthago», dans 150 Jahre deutsches archàologisches Institut, 1829 - 1979, Mayence,
p. 121-132.
(92) H. Hurst, dans The Antiquaries Journal, t. 55, 1975, p. 1 1 - 40 ; t. 56, 1976, p. 177 - 197 ; t.
57, 1977, p. 232-261 ; t. 59, 1979, p. 19-49. Voir aussi les bulletins parus du CEDAC Carthage.
(93) H. I. Marrou, dans Christiana tempora, Rome, 1978, p. 3 - 47.
(94) N. Duval et Fr. Baratte, Les ruines de Sufetula, p. 92 - 98.
(95) St. Gsell, Les monuments..., t. II, p. 388-389.
(96) A. Mahjoubi, Recherches d'histoire et d'archéologie à Henchir el-Faouar (Tunisie), Tunis,
1978, p. 371-387 et 451.
(97) J. Durhat, Les dédicaces. . . , p. 77 - 78, numéro 30.
(98) Ibid., p. 80 - 83, numéro 32.
(99) Ibid. , p. 70 - 77, numéro 29.
(100) CIL VIII, 19328.
(101) CIL VIII, 22774.
(102> CIL VIII, 20924.
(103) CIL VIII, 21531 (en 339).
(104) P.-A. Février, «Conditions économiques et sociales de la création artistique en Afrique à
la fin de l'Antiquité», dans Corso di cultura sull'arte ravennate e bizantina, Ravenna, 1970, p. 166 - 168
avec une photographie de ces fermes.
APPROCHES RÉCENTES DE L'AFRIQUE BYZANTINE 53
Résumé
Trois travaux récents de Denys Pringle, Jean Lassus et Jean Durliat invitent à revoir, à partir de
la documentation archéologique — monuments et inscriptions — les conclusions auxquelles était
parvenu, à la fin du siècle dernier, Charles Diehl. Parmi les problèmes soulevés, il y a d'abord celui des
forteresses byzantines et des enceintes de plus ou moins grande ampleur qui ont inclus de larges
quartiers habités sous le Haut-Empire : que peut-on en tirer pour l'histoire de la ville, de sa
topographie comme des institutions ? Par ailleurs, sont de mieux en mieux connus les lieux de culte des Ve -
Vie voire Vile siècles et à travers les constructions ou embellissements s'esquisse une histoire des
échanges avec le reste de la Méditerranée. L'analyse de céramiques trouvées en divers sites du littoral
force, de la même façon, à s'interroger sur l'ampleur de ces relations. Autant de pistes qui incitent à
mieux percevoir que la ville du Maghreb à l'époque byzantine ne connaît peut-être pas la profonde
récession que l'on imagine trop aisément.
Abstract
Three recent works by Denys Pringle, Jean Lassus and Jean Durliat lead one to reconsider,
using archeological documentation — monuments and inscriptions — the conclusions that were
reached at the end of the last century, by Charles Diehl. Among the problems that are raised, there is
firstly the question of the Byzantine fortresses and enclosures of more or less great size that included
large inhabited quarters under the Early Roman Empire : what can one infer from them regarding the
history of the town, its topography and its institutions ? Moreover, the places of worship of the 5th and
6th, and even 7th, centuries are more and more well-known, and through the constructions or
embellishments a history of exchanges with other parts of the Mediterranean is outlined. In the same
way, the analysis of pottery found in various coastal sites, compels one to ponder the extent of these
relations. All these elements lead one to perceive more clearly that the town of the Maghrib in the
Byzantine era did not perhaps experience the deep recession which was often too easily imagined.