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Tout est plus doux au Japon

Roland Jaccard
Tous les essais inspirés par le Japon sont bons, à l’exception de L’Empire des
signes de Roland Barthes. Le dernier en date est intitulé : Au Japon ceux qui
s’aiment ne disent pas je t’aime d’Elena Janvier (Arléa). Mais que disent-ils
alors ? Quelque chose de plus doux, de plus subtil : « Il y a de l’amour ». On ne
dira pas non plus : « Tu me manques », mais : « Il y a de la tristesse sans ta
présence, de l’abandon. » Ce n’est pas l’empire des signes, mais celui des
sentiments. Ce qui importe n’est pas ce qui est dit, mais ce qui est tu : la
télépathie comme forme raffinée de l’échange, comme exercice spirituel.

L’âme japonaise d’Adamo

Salvatore Adamo est plus proche de l’âme japonaise que n’importe quel intellectuel parisien.
« Tombe la neige », vous l’entendrez dans ces taxis où les chauffeurs portent des gants blancs
et des casquettes de capitaine. Ils vous emportent dans la nuit tokyiote sans dire un mot, mais
sur les mélodies les plus poignantes.

C’est en l’an 1585 que le père jésuite portugais Luis Frois publie un essai intitulé : Européens
et Japonais, traité sur les contradictions et différences des mœurs. Bien des remarques et
étonnements du père Frois demeurent inchangés depuis 1585. Ainsi, cette phrase du jésuite
que j’ai mis des années à comprendre : « Là où s’achèvent les dernières pages de nos livres
commencent les leurs. » Ou encore : « Nous succombons volontiers à la colère et ne
dominons que rarement nos impatiences. Eux, de manière étrange, restent toujours en cela
très modérés et réservés. »

Des explosions de violence

Exemple actuel observé par Elena Janvier : « Pendant les matchs de foot, les supporters
japonais chantent pour encourager leur équipe. Ça met de l’ambiance. En France, non
seulement les supporters chantent, mais en plus ils essaient de mettre le feu à la pelouse ou
pourquoi pas aux joueurs eux-mêmes. Ça met de l’ambiance aussi. »
N’insistons pas : il y a aussi des explosions de violence au Japon, des otakus et la pendaison
pour les criminels. En latin, on dit que l’erreur est humaine. En japonais que les singes eux-
mêmes parfois tombent des arbres. Il peut arriver qu’un gaijin (l’étranger) se heurte à un
Japonais qui ne fait qu’un avec sa règle de travail. L’amour pour le Japon se change alors en
haine.

Le charme du kimono vide

Je ne l’ai jamais éprouvée, mais j’ai retenu de mes séjours que le fin du fin n’est pas de
soigner les apparences, mais ce qui n’apparaît pas. Un kimono sobre, voire insignifiant,
doublé d’une soie rare… Quant au kimono vide, il symbolise ce qu’il y a de plus précieux
dans la femme aimée : son absence.

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