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INTRODUCTION
Les déficiences et les incapacités reliées à la sphère orofaciale en dystrophie myotonique (DM)
sont multiples. Mais on connait peu l’évolution naturelle de la maladie de ce point de vue.
Du point de vue fonctionnel, la faiblesse influence les habitudes de vie que ce soit au niveau de la
posture, de la parole, l’alimentation, la santé ou des relations sociales. Les exercices sont un
moyen privilégié d’intervention mais comment choisir les plus pertinents et évaluer leur impact?
Dr Jeanne Nicole Faille, orthodontiste à la clinique cranmio faciale du CHU Ste Justine
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2. PRODUCTION DE LA PAROLE CHEZ DES SUJETS ATTEINTS DE LA FORME JUVENILE ET CONGENITALE DE
DYSTROPHIE MYOTONIQUE DE TYPE 1 (DM1)
Neuf jeunes atteints de DM1 (ainsi que des participants sains appariés en âge) ont participé à une
tâche de production de parole lors de laquelle ils devaient nommer des images en différentes
conditions (débit rapide, parole claire,…). Les mouvements des lèvres, de la mâchoire et de la
langue étaient enregistrés à l’aide d’un système de capture de mouvement par caméra infrarouge
(Optotrak) et d’un échographe (voir Figure 1). Diverses analyses ont été menées afin de faire
ressortir les profils articulatoires et acoustiques reliés aux scores d’intelligibilité de la parole.
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Les manifestations de la forme infantile sont généralement moins sévères que pour la forme
congénitale.
Importance du suivi longitudinal de cette clientèle pour suivre l’évolution de la maladie afin de
mieux cerner les étapes charnières d’intervention.
Posture
Le contexte des cliniques oro-faciales a permis de commencer à faire une prise de photo posturale
systématique. Ces photos sont prises pour tenter d’objectiver davantage les changements de
posture. Jusqu’à maintenant, les observations se basent sur ce que l’on peut observer sur les
photos. Un logiciel permettant de calculer des angles et des distances à partir de repères
anatomiques identifiés pourrait éventuellement permettre d’objectiver davantage les observations.
Avec le temps, cela pourrait permettre la construction d’une base de données permettant de voir si
des tendances sont présentes chez cette clientèle. Si des tendances sont identifiées et se
confirment, cela pourrait éventuellement permettre de déceler les clients plus à risque de
développer des déviations posturales dans le futur et travailler davantage en prévention.
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D’autres mesures sont prises lors des évaluations. Les points ou des déficiences sont plus souvent
décelés chez cette clientèle ont été ciblées :
La force des abdominaux et des fléchisseurs du cou
«screening» pour scoliose (recherche et mesure de la gibbosité en flexion antérieure)
mesure de souplesse aux chevilles a été récemment ajoutée.
La banque de donnée est encore petite et nous manquons donc d’informations pour tirer des
conclusions plus fermes.
Nous avons tout de même identifié, à partir des évaluations faites jusqu’à maintenant, des
tendances à surveiller :
Faiblesse des fléchisseurs du cou entraînent une posture antérieure de la tête
Faiblesses des abdominaux entraînent une hyperlordose lombaire et/ou une flexion
antérieure du tronc.
Limitations de souplesse au niveau des chevilles pendant l’enfance pourrait accentuer le
risque de déviations posturales plus tard dans l’adolescence.
Le maintien d’une bonne souplesse aux membres inférieurs aiderait à limiter les impacts
sur la posture générale
Une tendance à utiliser les structures passives (ex hyperextension des genoux) pour
limiter l’effort musculaire ne va pas nécessairement s’accentuer avec le temps.
Travail postural :
Malgré problématique d’opposition et de déficience intellectuelle souvent présente chez cette
clientèle, un travail de thérapie posturale est possible. L’approche en rééducation posturale globale
(RPG) est particulièrement utilisée. Le travail avec une approche RPG nous a permis de voir chez
certains jeunes une bonification du renforcement des abdominaux et des fléchisseurs du cou.
Nous avons attribué cela à l’optimisation de l’alignement des différents segments.
Pour ceux qui développent une scoliose, le corset peut également être employé. Comme les
faiblesses sont souvent plus importantes en distal, ils arrivent généralement à fonctionner assez
bien avec un corset dans leur quotidien.
Par contre, le port inconstant des orthèses, le manque d’assuidité aux exercices et à la thérapie
restent des obstacles à surmonter dans la prise en charge des problèmes posturaux.
Santé corporelle
Difficultés au niveau:
Capacité à se moucher : tendance à s’essuyer plutôt que souffler. Risque d’infections plus
élevés lors d’un rhume…
Brossage de dents: caries et cie. Séquence de brossage de dents peut être difficile à intégrer
dans la routine (brossage incomplet). Risque plus élevé de caries. Difficulté marquée à utiliser
la soie dentaire. Aliments collent au palais et dans les sulcus : risque d’étouffements si
brossage mal complété.
Alimentation
Les faiblesses et déformations ont un impact direct sur la prise des repas et sur les capacités de
croquer, de mastiquer et déglutir.
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Quand la faiblesse des joues et des lèvres est présente, plusieurs observations sont faites :
Écoulement salivaire pendant les repas,
Capacité à croquer à l’avant,
Mastication relativement efficace (ou écrase aliments avec la langue au palais),
Cumulation d’aliments dans les sulcus,
Prise d’un liquide avec la paille difficile,
Mange avec la bouche ouverte
Quand on observe une faiblesse de la langue, la latéralisation des aliments pour mastication est
plus difficile, le jeune a tendance à écraser les aliments sur le palais.
La longueur des repas et un des principaux problèmes rapportés par les parents. La durée en
moyenne est deux fois plus longue que pour la population générale (1h). La fatigue limite la prise
complète des repas. Le jeune est souvent isolé pour mieux se concentrer sur son repas. Donc, les
repas sont plus longs, isolés et incomplets.
On observe aussi une « Sélectivité alimentaire » en lien avec la DM : la faiblesse vient limiter les
choix d’aliments, le jeune préfère souvent les solides mous, afin de pouvoir les mastiquer plus
efficacement ou les écraser avec la langue sur les dents antérieures ou le palais.
Faiblesse péri-orale et malocclusion entraînent des difficultés à croquer. On observe que certains
jeunes s’aident de la main ou de la tête pour croquer en antérieur. Le jeune va souvent croquer
avec ses pré-molaires, briser l’aliment avec sa main. La malocclusion rend difficile la mastication et
la capacité de manger la bouche fermée (principal irritant des parents au niveau des repas). Il
s’ensuit des difficultés au niveau social en lien avec la parole et l’alimentation.
Parole
Clientèle qui présente une hypotonie au niveau des lèvres (incompétence labiale), de la langue et
du voile du palais (incompétence vélopharyngée).
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Langage
Clientèle qui présente souvent un retard langagier en bas âge (souvent inscrit à l’intérieur d’un
retard global de développement, surtout dans la forme congénitale).
Difficultés réceptives souvent relevées:
o Attention limitée
o Peuvent avoir une bonne mémoire associée avec rigidité (force à exploiter)
o Difficultés de compréhension sans support visuel ou exemples concrets.
o Difficultés de compréhension si beaucoup d’informations à traiter
Difficultés expressives souvent relevées:
o Retard sur le plan phonologique en bas âge
o Difficultés morphosyntaxiques (erreurs dans la formulation de phrases)
o Pauvre vocabulaire
o Difficultés au niveau de la régie de l’échange (peu de contact visuel, ne tiennent
pas compte du contexte ou de l’interlocuteur, ne tiennent pas compte du savoir
partagé)
o Difficultés discursives.
L’impact des difficultés observées se répercutent tant sur les plans de la posture, de la
santé corporelle, de l’alimentation, de la communication sur les relations sociales.
Dans l’avenir
Poursuite du projet en cours pour collecte de données longitudinales
Validation de nos outils / mesures :
Photos (prise de vue)
Utilisation d’un dynamomètre pour mesurer la force labiale
Chewy tube outil « Mastica » à venir
Questionnaire alimentation
Intégration des données obtenues (mesures quantitatives) obtenues par Lucie Ménard et
Marie Bellavance)
Maintien de la participation et de l’intérêt de la clientèle pour le projet
Suivre l’impact de nos interventions en fonction, entre autres, de l’implication de la famille,
milieux de vie, partenaires.
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4. LES ADULTES ATTEINTS DE DM
Nicole Arsenault est orthophoniste au CRLB depuis presque 22 ans. Elle a fait son baccalauréat et
sa maîtrise à l’École d’orthophonie de la Faculté de médecine de l’université de Montréal. Elle a
de plus un baccalauréat en psychologie et un certificat en gérontologie de l’Université de Montréal.
Elle a toujours travaillé auprès de personnes atteintes de maladies dégénératives. Elle est
orthophoniste à la clinique MNM du programme des maladies évolutives du CRLB.
3 paramètres les plus atteints souvent observés chez l’adulte de forme congénitale ou de
forme infantile
L’hypernasalité (3)
• Diminution de l’intelligibilité de la parole en raison des pertes d’air par les voies nasales.
• Ce défaut d’occlusion vélo-pharyngée, due à une faiblesse du voile du palais s’accompagne
parfois de régurgitations nasales d’aliments ou de liquides durant les repas.
• Sévérité variable : hypernasalité plus accentuée dans la forme congénitale.
La dysarthrie flasque est décrite dans la maladie de Steinert par tous les grands auteurs en
dysarthrie, ainsi que la dysphagie oro-pharyngée.
• Une hypothèse de dysarthrie mixte (flasque et hypokinétique) est probable.
Explications :
• La présence de fréquentes accélérations subites du débit de la parole avec intelligibilité
très réduite ne correspond pas à la définition d’une dysarthrie flasque où on retrouve
plutôt un débit variable, mais sans accélération de la vitesse. Ces accélérations du débit
sont donc atypiques d’une dysarthrie flasque.
• Effet positif de l’appareil de rétroaction auditive sur l’intelligibilité de la parole expérimenté
depuis plus de 3 ans contredit également une atteinte uniquement flasque puisque, en
principe, l’appareil n’est pas efficace et n’est pas recommandé pour une dysarthrie
flasque.
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• Les ganglions de la base jouent un rôle dans l’organisation temporelle de la parole. Une
atteinte des noyaux gris centraux donne une dysarthrie hypokinétique. Y aurait-il un lien
entre les fréquentes accélérations subites du débit de la parole et la moins bonne
irrigation des ganglions de la base (noyaux gris centraux) rapportée par Meola & al.
(1999) ?
4 Pistes d’intervention
Il existe des liens étroits entre la rééducation de la voix et de la parole et celle des différentes
phases de la déglutition.
4) Amplificateur de voix pour améliorer le faible volume vocal dans les cas de dysphonie
hypofonctionnelle modérée ou sévère :
CONCLUSION
Sans aucun doute nous vous avons démontré l’aspect complexe de sphère oro faciale et l’impact
significatif dans toutes les habitudes de vie. L’intervention auprès des jeunes demeure un défi car
elle requiert la mobilisation des jeunes et de leur famille pour une longue période. Nous sommes
en train de bâtir la connaissance sur les meilleures pratiques. Nous espérons que cette
sensibilisation va permettre d’unir nos efforts pour aider la clientèle sans nuire.
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