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Fondations superficielles. Magnan et Droniuc (ed.

) 2003, Presses de l’ENPC/LCPC, Paris

ÉTUDE SELON L’EUROCODE 7 DE FONDATIONS SUPERFICIELLES DE


MURS DE SOUTÈNEMENT ÉTABLIES SUR SOL FROTTANT

DESIGN WITH EUROCODE 7 OF SHALLOW FOUNDATIONS OF RETAINING WALLS ON


NON COHESIVE SOILS

Yves CANEPA1, Roger FRANK2


1
Laboratoire Régional de l’Est Parisien, Melun, France
2
CERMES (ENPC-LCPC), Champs sur Marne, France

RÉSUMÉ – Cet article traite du calcul géotechnique de fondations superficielles de murs de


soutènement selon la méthode des coefficients partiels de sécurité. On confronte entre elles
les différentes approches de calcul à l’état limite ultime (ELU) permises par l’Eurocode 7. On
compare ensuite, pour deux cas de murs, les largeurs optimales découlant de l’approche de
calcul 2 avec celles issues d’un calcul à l’état limite de service (ELS) en considérant un
coefficient de sécurité de 2,5 sur la capacité portante du sol d’assise. Ces résultats sont enfin
confrontés avec les largeurs retenues dans la pratique française actuelle.

ABSTRACT – This paper is devoted to the geotechnical design of shallow foundations of stem
gravity walls with the method of partial factors of safety. First, the different approaches allowed
by Eurocode 7 for ultimate limit state (ULS) are compared. The results obtained by ULS
approach 2 are then compared for bearing resistance to those given by a serviceability state
(SLS) design where a safety factor equal to 2,5 has been applied. Finally, a comparison is
made with the results obtained with the traditional French practice.

1. Introduction

La normalisation européenne concernant le calcul et la conception des ouvrages est


actuellement en cours d'élaboration. Connue sous le nom d'Eurocodes, cette normalisation est
traitée à travers plusieurs textes regroupés par type d'ouvrages (béton, acier mixte, bois,
géotechnique...) mais reposant tous sur la même démarche générale de vérification des
ouvrages, la démarche semi-probabiliste, codifiée dans l’Eurocode EN 1990 (NF EN 1990,
2003), et qui consiste à définir les états-limites ou les situations que l'on veut éviter, et à choisir
pour la construction des dispositions telles que la probabilité de chaque état-limite soit
suffisamment petite pour être acceptable compte-tenu des risques qui sont associés à cet état-
limite.
Cette démarche se traduit par des règles introduisant la sécurité au moyen de valeurs
représentatives des actions et des résistances et de coefficients partiels de sécurité γ introduits
dans les modèles de calcul utilisés. La justification des ouvrages aux états limites ultimes -
notés ELU dans ce qui suit - consiste alors à s'assurer, pour un certain nombre d'éléments et
de sections d'une construction donnée, que :
Χ 
E d = γ sd . E (γ f . Fk ...) ≤ R d = R  k ... / γ Rd (1)
 γm 
où :
Ed est la valeur de calcul de l'effet des actions,
Rd est la résistance de calcul.
On peut légitimement se poser la question des évolutions qu’implique, par rapport aux
pratiques nationales actuelles, en termes de sécurité et de dimensionnement des ouvrages,

127
l’approche des Eurocodes et, en particulier, l’adoption des coefficients partiels recommandés
par l’Eurocode 7 (prEN 1997-1, 2002) qui traite de la justification des ouvrages géotechniques.
L’objet de cet article est de comparer, pour un type d’ouvrage particulier (les murs de
soutènements), les largeurs de fondations découlant des différentes approches de calcul aux
ELU permises par l’Eurocode 7 et, pour l’une d’entre elles - l’approche de calcul 2 - de
confronter les résultats qu’elle donne avec les géométries couramment retenues actuellement
en France.

2. Hypothèses d’études

Il importe de préciser dans un premier temps le cadre de l'étude effectuée et les règles et
hypothèses adoptées pour déterminer les largeurs optimales de fondation.

2.1 Problème étudié et notations

On considère dans cet article le cas de fondations de murs de soutènement en T renversé


retenant un massif de sol homogène d’angle de frottement ϕ'r. La fondation de largeur B
repose sur une couche de sol purement frottant (c’ = 0), d’angle de frottement interne ϕ ou sur
un sable de pression limite pressiométrique équivalente ple*. L’étude suppose les terrains
(remblai et sol d’assise) hors nappe. La figure 1 regroupe les principales notations adoptées
pour le mur, les actions et leur résultante.

H : hauteur totale du mur,


B : largeur de la fondation,
b : largeur du patin de la fondation,
T : largeur du talon de la fondation,
D : encastrement de la fondation,
λ : inclinaison du parement (ici, λ = 0),
β : inclinaison du talus,
q : surcharge en arrière du mur (lorsque β = 0),
ϕr : angle de frottement du remblai (ϕr = 30 deg),
ϕ : angle de frottement du sol support,
γ : poids volumique des sols et remblais,
Wm : poids du mur,
Ws : poids du remblai sur le talon,
Ps : poussée des terres,
Pq : poussée due à la surcharge.

a - Mur de soutènement et actions


Α : aire de la fondation (A = B.L),
L : longueur de la fondation,
δ : inclinaison de la résultante,
e : excentricité de la résultante,
Vd : valeur de calcul de la composante verticale
de la résultante,
Hd : valeur de calcul de la composante
horizontale de la résultante.
b - Fondations et résultante des actions

Figure 1. Notations adoptées

128
2.2. Capacité portante

2.2.1 Modèle de calcul basé sur les essais de cisaillement


Pour déterminer la capacité portante des sols à partir de leur résistance au cisaillement (NF
P94-071-1, 1994 ; NF P94-074, 1994) mesurée en laboratoire, le modèle de calcul en
conditions drainées défini dans l’annexe D4 de l’Eurocode 7 - Partie 1 a été utilisé. Pour un sol
purement frottant et une fondation à base horizontale, on a donc :
R
= q.Nq .sq .iq + 0,5.γ.B' .Nγ .s γ .iγ . (2)
A'
2.2.2 Modèle de calcul basé sur la pression limite pressiométrique
Pour déterminer la capacité portante à partir des paramètres de sol mesurés au moyen
d’essais pressiométriques Ménard (NF P94-110-1, 2001), la formule suivante a été utilisée :
R
= k p .p*le .ie .iδ . (3)
A
Les valeurs adoptées pour le facteur de portance kp et le facteur de réduction de portance iδ
due à l’inclinaison des charges, sont celles définies respectivement dans les annexes B1 et F1
du fascicule 62 titre V des Cahiers des Clauses Techniques Générales de l’administration
française (Fascicule 62, 1993). Le facteur de réduction de portance ie due à l’excentricité de la
charge a, quant à lui, été calculé à partir de la fonction :
e
ie = 1 − 2 . (4)
B

2.3 Glissement

La justification des fondations vis-à-vis du glissement a été faite conformément au principe


défini dans l’Eurocode 7, en négligeant la butée des terres en aval de la fondation et en
considérant comme angle d’adhérence à l’interface sol-fondation une valeur égale à l’angle de
frottement interne du sol ϕ. On a, dans ce cas :
Hd ≤ Vd . tan ϕ (5)

2.4 Renversement et décompression du sol

Les stabilités vis-à-vis du renversement à l’état limite ultime (ELU) et vis-à-vis de la


décompression du sol à l’état limite de service (ELS) ont été traitées en se fixant des critères
d’excentricité limite e/B de la résultante des actions.
Dans le cas d'une fondation soumise à une charge excentrée dans la seule direction de B
(cas traité), une relation existe entre la surface de sol comprimé sous la fondation et
l'excentricité de la résultante des charges, lorsqu’on suppose une répartition linéaire des
contraintes sous la fondation. Le tableau I rappelle les pourcentages de sol comprimé en
fonction de l’excentricité e/B pour ce modèle de comportement.

Tableau I - Pourcentage de surface de sol comprimé (Ac) sous la fondation


e/B ≤ 1/6 1/4 1/3 7/15
% Ac 100 75 50 10
Nota : % Ac = 150 x (1 - 2 e/B) lorsque e/B ≥ 1/6

2.5 - Calcul des forces de poussée

L'intensité et la direction des actions de poussée dues ou transmises par les sols ont été
calculées sur la base des hypothèses simplificatrices suivantes (voir fig. 1 pour les notations) :
• les poussées s'exercent sur un plan fictif vertical, passant par l'arête du talon ;
129
• l'inclinaison δp des actions de poussée par rapport à l'horizontale est égale à 2 ϕr/3 ;
• le coefficient de poussée Kq (surcharge) est égal au coefficient de poussée Ka (des terres);
• la valeur du coefficient Ka se calcule par la formule analytique de Poncelet (avec λ = 0°)
cos 2 (ϕr − λ )
Ka = 2
(6)
 
sin (ϕr + δp ). sin (ϕr − β ) 
 
cos (λ + δp ). 1 +

   
 cos  λ + δp . cos (β − λ ) 
   

3. Vérification des états limites

Les états-limites de capacité portante (ELU) ou de mobilisation du sol (ELS), de renversement


(ELU), de décompression du sol (ELS) et de glissement de la fondation (ELU) ont seuls été
considérés (Frank, 1999). Les autres états limites (matériaux constitutifs de la fondation,
stabilité d’ensemble, déplacement) n’ont pas été pris en compte pour déterminer la largeur
optimale des fondations.

3.1 Actions et combinaisons d'actions

Dans cette étude des actions permanentes (W m, W s, Ps) et variables (Pq) ont été considérées
et deux combinaisons fondamentales d’actions ont été retenues. Dans la première (notée C1),
on considère que le poids des matériaux présente un caractère défavorable vis-à-vis de la
stabilité étudiée. Dans la seconde (notée C2), on considère que le poids des matériaux
présente un caractère favorable vis-à-vis de la stabilité étudiée. Le tableau II précise les
coefficients partiels appliqués aux différentes actions pour chacune des deux combinaisons.

Tableau II Coefficients partiels pris en compte sur les actions pour les
états limites ultimes (ELU) et les états limites de service (ELS).
Actions Combinaison C1 Combinaison C2
W s : Poids du remblai sur le talon γGmax γGmin
W m : Poids du mur γGmax γGmin
Ps : Poussée des terres γGmax γGmax
Pq : Poussée de la surcharge γQmax γQmax

3.2 Coefficients partiels de sécurité et excentricités

Pour la justification des ouvrages géotechniques, l’Eurocode 7 permet trois approches de


calcul aux ELU pour les situations durables et transitoires (combinaisons d’actions
fondamentales). Le tableau III rappelle les jeux de coefficients partiels de sécurité associés à
chacune de ces approches. Le tableau IV récapitule les valeurs des coefficients partiels qui ont
été appliquées aux actions, aux paramètres de sol et aux résistances pour déterminer les
largeurs optimales de fondations à l’ELU et à l’ELS. Les coefficients ELU sont ceux
recommandés par l’Eurocode 7 (Ils peuvent être modifiés dans les annexes nationales
d’application). Les coefficients ELS γRv et γRh sont ceux envisagés dans les travaux actuels de
la réglementation française.

130
Tableau III Coefficients de sécurité associées aux états limites
ultimes , situations durables et transitoires (prEN 1997-1, 2002)

Approche 1* Jeu 1.1 : A1 “+” M1 “+” R1


Jeu 1.2 : A2 “+” M2 “+” R1
Approche 2 Jeu 2 : A1 “+” M1 “+” R2
† ††
Approche 3 Jeu 3 : (A1 ou A2 ) “+” M2 “+” R3
où “+” signifie “à associer avec”
* on retient le jeu le plus défavorable pour l’approche 1

sur les actions structurelles
††
sur les actions géotechniques
Tableau IV Valeurs recommandées pour les ELU structuraux (STR) et
géotechniques (GEO) par l’Eurocode 7 et valeurs retenues pour les états
limites de service (ELS).
ELU (STR & GEO) ELS
Eurocode 7-1 proposés
Actions (γγF) ou effets
A1 A2
des actions (γγE)
Permanente
défavorable γGmax 1,35 1,0 1,0
favorable γGmin 1,0 1,0 1,0
Variable
défavorable γQmax 1,5 1,3 1,0
favorable γQmin 0 0 1,0
Paramètres de sol
M1 M2
(γγM)
tan ϕ' γϕ 1,0 1,25 1,0
pl γpl 1,0 1,4 1,0
sin (ϕr + δp ). sin (ϕr − β )
  γ 1,0 1 1,0
cos  λ + δp . cos (β − λ )
 
Résistance - fond. sup.
R1 R2 R3
(γγR)
Portance γRv 1,0 1,4 1,0 2,5
Glissement γRh 1,0 1,1 1,0 1,3

Comme indiqué en 2.4, la vérification des états-limites de renversement et de décompression


du sol a été effectuée en se fixant des valeurs limites de l'excentricité e/B. Le tableau V
rappelle les critères figurant dans les règlements français actuels (fascicule 62, 1993) et le
projet Eurocode 7 (prEN 1997-1, 2002) et précise les règles retenues pour cette étude.

Tableau V Recommandations existantes et règles retenues pour


l’excentricité e/B maximale de la résultante des charges
pr. EN 1997-1 Fascicule 62 retenu
ELU 1/3 † 7/15 1/3
ELS rare - 1/4 -
ELS quasi permanent - 1/6†† 1/6††

article 6.5.4 interprété de manière prudente
††
règle dite du « tiers central »

131
Enfin signalons qu’un coefficient de modèle γRd égal à 1 a été retenu pour les modèles de
calcul de capacité portante (voir ci-dessus 2.2).

4. Étude paramétrique

On présente dans cette partie, les résultats obtenus pour deux murs en T renversé. Le premier
(noté A) est un mur de hauteur H = 5 m, fondé à une profondeur D = 0,6 m, qui soutient un
remblai horizontal (β = 0 degrés) d’angle de frottement interne ϕr égal à 30 degrés, supportant
une surcharge uniforme de 10 kPa. Le second - noté F) est un mur de hauteur H = 10 m, fondé
à une profondeur D = 1,2 m, qui soutient un remblai sans surcharge (q = 0) de même
caractéristique que le premier mais taluté à β = 24 degrés. Dans les deux cas, la largeur
optimale de la fondation a été déterminée en considérant une largeur de patin b égale à 0,2 B
et des plots de longueur L égale à 6 mètres, et en faisant varier les caractéristiques de rupture
(selon le cas ϕ, ou ple*) du sol support.

4.1. Capacité portante ELU selon les trois approches de calcul de l’Eurocode 7

Les figures 2 et 3 montrent les largeurs optimales de fondation découlant des trois approches
de calcul admises par l’Eurocode 7 lorsqu’on applique les coefficients partiels de sécurité
proposés dans l’ Annexe A du document (tableaux III et IV).
Comme on peut le voir, les trois approches de calcul conduisent à des largeurs de semelles
différentes vis-à-vis des risques de rupture du sol support. On notera que, pour le mur A, de 5
m de hauteur, l’approche 1 (jeu 1.2) est la plus pessimiste. On s’aperçoit également que, pour
le mur F, de 10 m de hauteur, il n’est pas possible de justifier, avec les approches 1 et 3, des
fondations de largeur inférieure à la hauteur du mur. Des dispositions constructives (inclinaison
de la base de la semelle, par exemple) sont donc dans ce cas nécessaires.

Capacité portante Capacité portante


Mur A - H = 5 m 3,5 Mur A - H = 5 m

3,5 3 Modèle pressio


3 Sable B
B optimale (m)

2,5
B optimale (m)

2,5 Modèle ϕ 2
2 Sol frottant
1,5 Approche 1.1
1,5
Approche 1.1
1 Approche 1.2 1 Approche 1.2
0,5 Approche 2 Approche 2
0,5
0 Approche 3 Approche 3
20 25 30 35 40 45 0
0 1000 2000 3000
ϕ (°)
ple (kPa)

Figure 2 – Mur A - Capacité portante - Largeurs optimales de fondation

4.2. Glissement à l’ELU selon les trois approches de calcul de l’Eurocode 7

La figure 4 confronte les résultats issus de la justification à l’état limite ultime de glissement.
Elle montre que les trois approches de calcul permises par l’Eurocode 7 conduisent à des
largeurs de semelles très différentes, l’approche 2 étant celle qui donne les largeurs de
fondation les plus petites et l’approche 1 celle qui conduit aux largeurs de fondation les plus
grandes.

132
Capacité portante Capacité portante
8 Mur F - H = 10 m 8 Mur F - H = 10 m

7 7

6 6

B optimale (m)
B optimale (m)

5 5
Modèle ϕ
4 Modèle pressio
4
Sol frottant Sable B
3 Approche 1.1 3 Approche 1.1
2 Approche 1.2 2 Approche 1.2
Approche 2 Approche 2
1 1
Approche 3 Approche 3
0 0
20 25 30 35 40 45 50 0 2000 4000 6000
ϕ (°) ple (kPa)

Figure 3 Mur F - Capacité portante - Largeurs optimales de fondation

glissement glissement
3,5 Mur A - H = 5 m Mur F - H = 10 m
8
Modèle ϕ
3 7
Sol frottant
2,5 6
B optimale (m)

B optimale (m)

2 5

4 Modèle ϕ
1,5
Approche 1.1 Sol frottant
3 Approche 1.1
1 Approche 1.2
2 Approche 1.2
0,5 Approche 2
1 Approche 2
Approche 3
0 Approche 3
0
20 25 30 35 40 45 20 25 30 35 40 45 50 55
ϕ (°) ϕ (°)

Figure 4 Murs A et F - Stabilité au glissement - Largeurs optimales de fondation

4.3. Comparaisons des ELU de capacité portante et de glissement pour l’approche 2

Sur la figure 5, on confronte, pour le mur A et pour le mur F, respectivement, les largeurs
optimales de fondation découlant, tant de l’état limite ultime de capacité portante, que de l’état
limite ultime de glissement, pour les modèles de calcul « ϕ ».
Comme on peut le voir, pour les deux murs étudiés, l’état limite ultime de capacité portante
du sol support est dimensionnant. On notera également que pour avoir des largeurs de
fondations égale à la moitié de la hauteur du mur, le sol d’assise du mur doit avoir un angle de
frottement interne ϕ minimal de 32 degrés dans le cas du mur A, et de 42 degrés, dans le cas
du mur F.

133
Portance et glissement Portance et glissement
3,5 Mur A - H = 5 m 8 Mur F - H = 10 m

3 7
6
2,5

B optimale (m)
B optimale (m)

5
2
4 Modèle ϕ
1,5 Modèle ϕ 3 Sol frottant
1 Sol frottant 2
Portance
Portance 1
0,5
Glisse me nt Glisse me nt
0 0
20 25 30 35 40 45 20 25 30 35 40 45 50
ϕ (°) ϕ (°)

Figure 5 – Mur A - Stabilité vis-à-vis des ELU - Approche 2 - Largeurs optimales de fondation

Excentricité des charges Excentricité des charges


0,5 Mur A - H = 5 m 0,5 Mur F - H = 10 m

0,4 ELU 0,4 ELU

0,3 0,3
e/B
e/B

0,2 0,2

0,1 0,1

0 0
1 2 3 4 3 4 5 6 7 8
Β (m) Β (m)

Figure 6 – Murs de 5 m et de 10 m de hauteur – Excentricité des charges à l’ELU

4.4. Mobilisation du sol à l’ELS - Comparaison avec la capacité portante à l’ELU


(Approche 2)
La justification de ce type d’ouvrage vis-à-vis des ELS consiste à s’assurer que les
déplacements du mur sous diverses combinaisons d’actions quasi-permanentes sont
acceptables vis-à-vis de sa fonction.
En général, on ne fait pas de calcul de déplacement aux états limites de service. Les
vérifications consistent le plus souvent à effectuer les mêmes calculs de portance et
d’excentricité des charges qu’à l’ELU, mais en appliquant aux actions et matériaux des
coefficients partiels égaux à 1, et en se fixant des « coefficients globaux » de sécurité qui sont
censés assurer que les tassements et les déplacements de l’ouvrage sont acceptables.
L’Eurocode 7 ne fixe pas - ni ne recommande d’ailleurs - de valeurs en la matière, laissant le
libre choix aux différents pays. On présente sur les figures 7 et 8 les résultats obtenus à l’état
limite de service de mobilisation du sol, lorsqu’on adopte 2,5 comme coefficient global de
sécurité (règle actuellement envisagée dans le document français d’application de l’Eurocode
7), et on compare les largeurs de fondation ainsi obtenues à celles découlant de l’état limite
ultime de capacité portante (Approche 2 de l’Eurocode 7)).
Pour les deux murs examinés et les deux modèles de calcul utilisés, l’état limite
dimensionnant est l’état limite ultime de l’approche de calcul 2. On notera cependant que, dans
tous les cas, les largeurs de fondations découlant de l’ELS sont très proches de celles déduites
de l’ELU de l’approche 2.

134
Portance - ELU & ELS Portance - ELU & ELS
3,5 Mur A - H = 5 m 3,5 Mur A - H = 5 m

3 3

B optimale (m)
2,5
B optimale (m)
2,5

2 2

1,5 Modèle ϕ 1,5


Modèle pressio
Sol frottant
1 1 Sable B

0,5 ELU 0,5 ELU


ELS ELS
0 0
20 25 30 35 40 45 0 1000 2000 3000
ϕ (°) ple (kPa)

Figure 7 Mur de 5 m de hauteur - Largeurs optimales de fondation à l’ELS et à l’ELU


(Approche 2)

Portance - ELU & ELS Portance - ELU & ELS


8 8 Mur F - H = 10 m
Mur F - H = 10 m
7 7

6 6
B optimale (m)
B optimale (m)

5 5
Modèle ϕ 4
4 Modèle pressio
Sol frottant 3 Sable B
3
ELU 2 ELU
2
ELS
1 ELS
1
0 0
20 25 30 35 40 45 50 0 2000 4000 6000
ϕ (°) ple (kPa)

Figure 8 Mur de 10 m de hauteur - Largeurs optimales de fondation à l’ELS et à l’ELU


(Approche 2)

4.5. Excentricité des charges à l’ELS

La figure 9 donne, pour les deux murs étudiés, l’évolution de l’excentricité de la résultante des
actions, en fonction de la largeur de la fondation. Elle montre que, pour que la résultante
demeure dans le tiers central du plan inférieur de la fondation (e/B < 0,166), la largeur de celle-
ci ne peut être inférieure à 2,2 m pour le mur A, et inférieure à 5,5 m pour le mur F.

5. Confrontation avec des approches traditionnelles pour les murs de soutènement


5.1 Approche traditionnelle
À l’heure actuelle, en France, si l’on trouve plusieurs documents qui traitent spécifiquement du
calcul des murs de soutènement classiques comme le dossier pilote MUR 73 (SETRA, 1973)
ou le rapport du CERIB sur le calcul des actions s’exerçant sur les murs (CERIB, 1996), il
n’existe pas de fascicules du CCTG ou de normes sur ce sujet. Cette lacune devrait
normalement être comblée avec les documents - en préparation - d’accompagnement de
l’Eurocode 7, mais aujourd’hui, faute de méthodologie consensuelle, il est difficile de définir
pour un mur donné, établi sur un sol donné, une largeur de semelle de référence.

135
Excentricité des charges Excentricité des charges
0,5 Mur A - H = 5 m 0,5 Mur F - H = 10 m

0,4 ELS 0,4 ELS

0,3 0,3
e/B

e/B
0,2 0,2

0,1 0,1

0 0
1 2 3 4 5 3 4 5 6 7 8
Β (m) Β (m)

Figure 9 Murs de 5 m et de 10 m de hauteur – Excentricité des charges à l’ELS

C’est pour cette raison qu’il avait été demandé à cinq bureaux d’études de dimensionner les
fondations de murs types selon leur méthode habituelle. Les résultats obtenus (Gigan, 1996 ;
Saramito, 1996) sont donnés dans le tableau VI.

Tableau VI – Dimensionnements traditionnels d’après Gigan (1996)

Hypothèses de calcul
B (m)
MUR * †
β ϕr ϕ
††
H b q ple*
Min Max
(m) (°) (kPa) (°) (MPa) (°)
A 5 0,2 B 0 10 30 1 35 2,2 2,5
B 5 0,2 B 24 0 30 1 35 2,3 2,8
C 5 0,3 B 0 10 30 1 35 2,2 2,7
D 5 0,3 B 24 0 30 1 35 2,2 3,0
E 10 0,2 B 0 10 30 1,5 35 4,4 5
F 10 0,2 B 24 0 30 1,5 35 5,2 5,9
les cas A et F sont les cas étudiés plus haut en faisant varier ϕ’ et ple*
*

utilisé pour la justification vis-à-vis de l’état limite de capacité portante
††
utilisé pour la justification vis-à-vis de l’état limite de glissement

Ces résultats sont considérés, dans cet article, comme représentatifs des pratiques
traditionnelles françaises pour concevoir les fondations des murs en T.

5.2. Confrontation avec les résultats de l’Eurocode 7

Ont été regroupées dans le tableau VII, pour les murs A et F et les hypothèses géotechniques
de calculs figurant dans le tableau VI, les largeurs optimales découlant des différentes
approches de calcul permises par l’Eurocode 7 pour vérifier les ELU de capacité portante et les
largeurs découlant de la justification aux ELS de mobilisation du sol lorsqu’on adopte un
coefficient global de résistance γRv de 2,5.
Dans ce tableau figurent également les largeurs de semelles minimales et maximales
déterminées par les bureaux d’études français, ainsi que les largeurs tirées des abaques de
pré-dimensionnement du dossier pilote MUR 73 du SETRA.
Les valeurs consignées dans ce tableau montrent que, pour le mur A de 5 m de hauteur, les
largeurs de fondations obtenues sont toutes comprises entre H/2 et H/2,5, quelle que soit la
méthode de vérification retenue.
Elles montrent également que, pour le mur F de 10 mètres de hauteur, retenant un remblai
incliné (β = 0,8 ϕr), l’Eurocode 7 conduit à des dimensions nettement plus grandes que les

136
dimensions « traditionnelles » (ces écarts proviennent pour l’essentiel de la prise en compte
partielle, dans les errements traditionnels, de la réduction de la capacité portante liée à
l’excentricité et à l’inclinaison des charges sur la semelle).

Tableau VII – Etats limites de capacité portante (ELU) et de mobilisation du sol (ELS) -
Confrontation des largeurs de fondation obtenues à partir de différentes procédures
Eurocode 7 - ELU Bureaux d’études ††
MUR ELS MUR 73
Appr 1 † Appr 2 Appr 3 Min Max
A 2,5 m 2,2 m 2,1 m 1,9 m 2,2 m 2,5 m 2,2 m
F > 9,0 m 7,85 m > 9,0 m 6,75 m 5,2 m 5,9 m 7,9 m

le plus défavorable des jeux 1.1 et 1.2
††
en admettant une pression admissible du sol support égale à ple*/3

6. Conclusions

Bien que cette étude soit limitée à quelques cas particuliers, il en ressort plusieurs
enseignements pour le calcul selon la méthode des coefficients partiels de sécurité, des
fondations des murs de soutènement - et des fondations superficielles en général - établies sur
des sols purement frottants. Ces enseignements sont les suivants :
• la justification des états limites ultimes de capacité portante et de glissement selon
l’approche de calcul 2 de l’Eurocode 7 conduit à des largeurs de fondation raisonnables
lorsqu’on utilise les valeurs les coefficients partiels de sécurité recommandées dans l’annexe A
du document et les modèles de résistance (ϕ et pressiomètre) traditionnels ;
• l’état limite ultime de capacité portante est le plus souvent dimensionnant, lorsque
l’inclinaison ou l’excentricité de la résultante des charges est importante ;
• la justification de l’état limite de service de mobilisation du sol conduit à des largeurs de
fondations proches de celles découlant de l’approche de calcul 2 selon l’Eurocode 7, lorsqu’on
adopte 2,5 comme coefficient de sécurité « global » vis-à-vis de la portance ;
• la justification de l’état limite ultime de renversement à partir d’un critère d’excentricité
maximale e/B égal à 0,33 est en général moins pénalisante que la justification de l’état limite
de service de décompression du sol avec la règle du tiers central (e/B ≤ 1/6).

7. Références

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Technique Provisoire 010 -1996, 60 p.
Fascicule 62 - Titre V (1993), Règles techniques de conception et de calcul des fondations
des ouvrages de génie civil, Cahier des Clauses Techniques Générales applicables aux
marchés publics de travaux, Ministère de l'Équipement, du Logement et des Transports,
Textes officiels N° 93-3, 182 p.
Frank R. (1999). Calcul des fondations superficielles et profondes. Techniques de l’ingénieur &
Presses de l’ENPC, 141 p
Gigan J.P. (1996), Synthèse des réponses au test « Détermination des largeurs de semelles »,
Groupe d’évaluation de l’EC7 - Groupe Murs, documentation privée, 12 p
Norme P 11-711 (1988), DTU N°13-12, Règles pour le calcul des fondations s uperficielles,
AFNOR, 13 pages.
Norme NF P 94-071-1, (1994), Sols : Reconnaissance et essais - Essais de cisaillement
rectiligne à la boîte - Partie 1 : Cisaillement direct, AFNOR, 16 pages.
Norme NF P 94-074, (1994), Sols : Reconnaissance et essais - Essais à l'appareil triaxial de
révolution - Appareillage - Préparation des éprouvettes - Essais (UU) non consolidé non

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drainé - Essai (CU + u) consolidé non drainé avec mesure de pression interstitielle - Essai
(CD) consolidé drainé, AFNOR, 36 pages.
Norme NF EN 1990, (2003), Eurocode : Bases du calcul des structures, AFNOR, 72 p.
Norme NF P 94-110-1, (2001), Sols : Reconnaissance et essais - Essai pressiométrique
Ménard – Partie 1 : Essai sans cycle, AFNOR, 42 p.
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CEN/TC250/SC7/N364, Final draft, Comité Européen de Normalisation (CEN), Bruxelles,
155 p
Saramito F. (1996). Application des règles Eurocode 7 au calcul des murs de soutènement,
Travail de fin d’étude, Université Pierre et Marie Curie, Formation d’Ingénieurs en Sciences
et Technologies, 35 p
SETRA (1973). Ouvrages de soutènement - Mur 73 - Ministère de l'Aménagement du
Territoire, de l’Équipement, du logement et du Tourisme, Direction des Routes et de la
Circulation Routière

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