Actualités pharmaceutiques Ř n° 512 Ř Janvier 2012
pratique
42 ordonnance commentée
Un diabétique insulinodépendant
avant son départ en voyage
Le diabète est une maladie
évolutive chronique lourde
de conséquences en raison
de ses multiples complications.
Partir en voyage dans
ce contexte n’est pas toujours
simple. Comment adapter
ses traitements, mais aussi
bien surveiller ses pieds
et ses yeux ? Autant de conseils
importants à prodiguer
au comptoir.
Profil du patient
Le patient est un homme de 68 ans, mesu-
rant 1,75 m pour 85 kg, marié, père d’un
enfant et ancien contrôleur de bus.
Son pancréas a arrêté de fonctionner
brutalement, à la suite de deux événe-
ments : le décès de son père, survenu
dans ses bras, et une agression subie,
peu après, dans un bus.
Diabétique depuis 26 ans, il effectue
lui-même ses injections. Il est, par
ailleurs, suivi depuis 10 ans pour une
hypertension artérielle et une hyper-
cholestérolémie.
Recevabilité de l’ordonnance
L’ordonnance présentée émane d’un
médecin généraliste. Elle est datée,
signée, sécurisée, etc. (figure 1). Elle est
donc recevable. Le diabétologue qui suit
ce patient ne souhaite qu’aucun générique
ne lui soit dispensé du fait de la présence,
dans certains d’entre eux, de lactose.
Questions préalables
indispensables
Ř « Prenez-vous d’autres médicaments,
notamment en automédication ? »
Réponse : « Non. »
Ř « Avez-vous un terrain allergique ? »
(bêtabloquant). Réponse : « Non. »
Ř « Un acte chirurgical avec anesthésie est-
il prévu prochainement ? » (Lopressor®).
Réponse : « Non, mais je pars en Martinique
bientôt pour 15 jours ; comment devrai-je
gérer mes injections ? »
Ř « Concernant celles qui sont prévues
avant le repas, vous devez toujours
les effectuer avant les trois principaux
repas et réaliser, à chaque repas (avant
et après), des autocontrôles glycémi-
ques. Concernant l’injection quotidienne
de Lantus®, l’idéal serait de conserver
l’heure française de 22 h recalculée en
fonction du décalage horaire (- 5 heures
en hiver) ; vous devrez donc la réalise
réaliser
à 17 h. »
Ř Figure 1.
Analyse du traitement
Ř Tahor® 40 mg : l’atorvastatine est un
hypocholestérolémiant inhibiteur sélectif
et compétitif de l’HMG-CoA réductase.
Ř Lopressor® 100 mg : le métoprolol
possède une activité bêtabloquante bêta
1-cardiosélective et un effet anti-arythmique
sans activité sympathomimétique intrinsè-
que ou agoniste partiel.
Ř Novorapid Flexpen® 100 U/mL (insuline
aspartate) : analogue de l’insuline, d’action
rapide, en stylo prérempli, ce médicament
commence à agir dans les 10 à 20 minutes
qui suivent son injection. Son effet maximal
apparaît 1 à 3 heures après et son action se
prolonge 3 à 5 heures.
Ř Lantus Solostar® 100 U/mL (insuline
glargine) : analogue de l’insuline d’action
prolongée administré comme insuline
basale dans un schéma d’insulino-
thérapie dit “basal-bolus”, ce médica-
ment commence à agir 1 heure 30 après
l’injection et son action se prolon ge
24 heures.
Effets indésirables
Ř Tahor® 40 mg : constipation, diarrhée,
gaz, douleurs abdominales, nausées, maux
de tête, fatigue, troubles du sommeil, verti-
ges, fourmillements, allergies cutanées,
troubles sexuels, troubles hépatiques,
pancréatiques, hyper- ou hypoglycémie.
Certains effets nécessitent l’arrêt du trai-
tement : douleurs musculaires ou des
tendons, crampes, élévation des enzy-
mes CPK (créatine phosphokinase)
musculaires.
Ř Lopressor® 100 mg : fatigue, vertiges,
ralentissement du rythme cardiaque,
douleurs digestives, nausées, diarrhées
(présence d’huile de ricin) et hypoglycé-
mies. Une prise le soir est susceptible de
provoquer des troubles du sommeil, des
cauchemars et une hypotension artérielle.
Les signes annonciateurs d’une hypo-
glycémie (tachycardie, palpitations et
sueur notamment), peuvent être masqués
par la prise de métoprolol.
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Ř Insulines : hypoglycémie, prise de poids
et lipodystrophie au point d’injection.
Signes d’alerte
Le patient doit être orienté vers son
médecin traitant dans le cas où il évoque
certains symptômes nouveaux.
Ř Une hypotension orthostatique (méto-
prolol) : vertiges, notamment en se levant le
matin ou en se relevant après s’être baissé,
faiblesse, étourdissements, palpitations et,
parfois, malaise avec évanouissement.
Ř Une hypoglycémie (insulines, méto-
prolol) qui survient lorsque la dose
d’insuline est trop importante par rapport
aux besoins : sensation de fatigue, pâleur,
sueurs, tremblements et troubles visuels.
L’hypoglycémie sévère peut entraîner une
perte de connaissance et/ou des convul-
sions, et générer une altération transitoire
ou définitive des fonctions cérébrales, voire
le décès de la personne.
L’hypoglycémie en pratique
En cas d’hypoglycémie, il est conseillé
d’avaler un morceau de sucre ou 1 cuillère
à café de confiture pour 20 kg de poids,
puis de consommer des sucres complexes
(pain complet, biscottes...).
En cas de perte de conscience ou
de convulsions, l’hospitalisation est requise.
Le malaise sévère hypoglycémique peut
ressembler à un accident vasculaire cérébral.
Ř Une rhabdomyolyse (pravastatine) :
douleurs musculaires, crampes et faiblesse
musculaire.
Suivi du traitement
Ř Poids, indice de masse corporelle,
pression artérielle (diabète).
Ř Glycémie, hémoglobine glyquée
(diabète).
Ř Bilan lipidique : cholestérolémie totale,
HDL, LDL et triglycérides (Tahor®).
Ř Créatinémie et calcul de la clairance
de la créatinine, kaliémie, natrémie,
calcémie (hypertension).
Ř Enzymes hépatiques : transaminases
(statine).
Ř Protéinurie (hypertension, diabète).
ordonnance commentée
Ř Examen des pieds (diabète) tous les
3-4 mois.
Ř Examen ophtalmologique annuel
(diabète).
ŘSuivi très régulier des fonctions
pancréa ti ques et rénales (insuline,
Tahor®), hépatiques (Tahor®) et muscu-
laires : CPK (Tahor®).
Interactions
médicamenteuses
Les bêtabloquants (métoprolol) peuvent
masquer certains symptômes de l’hypo-
glycémie, tels tremblements et tachycar-
die. Chez un patient diabétique, l’auto-
surveillance glycémique doit donc être
renforcée, surtout en début de traitement.
Médicaments
d’automédication à proscrire
Ř Tout produit conseil à base d’anti-
coagulants coumariniques pouvant
entraîner des hyperglycémies ou, plus
rarement, des hypoglycémies, particu-
lièrement le mélilot, mais aussi la vigne
rouge, le marron d’Inde, le petit houx,
toutes les huiles essentielles d’agrumes
à forte dose, d’angélique ou de khella.
Ř Les anti-acides H2 en automédication,
tels que cimétidine (Stomedine®) et famo-
tidine (Pepciduo®, Pepcidac®), suscepti-
bles de provoquer une hyperglycémie et
d’entraîner une diminution de l’absorption
digestive du métoprolol.
Ř Tout médicament contenant du sucre
ou de l’alcool sous quelque forme physi-
que ou chimique que ce soit.
Ř Tout traitement (même homéopathi-
que au-delà de 4 CH) à base de milleper-
tuis, inducteur enzymatique qui réduira, au
bout d’une dizaine de jours, l’efficacité de
l’ensemble des traitements du patient.
Ř Les topiques gastro-intestinaux
doivent être pris à distance de Lopressor®
(plus de 2 heures si possible).
Ř Le jus de pamplemousse et l’extrait
de pépin de pamplemousse, inhibi-
teurs de l’isoenzyme CYP 3A4 du cyto-
chrome P450, sont fortement déconseillés
lors de la prise de Tahor®.
Chronobiologie du traitement
Ř Tahor® 40 mg : une prise par jour, de
préférence le soir, pendant ou en dehors
pratique
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du repas (avec un peu d’eau), même en
cas de décalage horaire.
Ř Lopressor® 100 mg : une prise unique le
matin, même en cas de décalage horaire,
avec des aliments un peu gras (le métopro-
lol est le plus lipophile des bêtabloquants) ;
une prise le soir, après 18 h, risquerait
d’engendrer des cauchemars.
Ř Novorapid Flexpen® 100 U/mL : l’insu-
line rapide a pour but de déclencher le
pic d’insuline nécessaire au contrôle de
la glycémie après le repas. Elle doit être
administrée immédiatement avant ou après
un repas. Ici, l’injection s’effectuera immé-
diatement avant chaque repas. En cas de
décalage horaire, les injections doivent
toujours être réalisées avant les trois repas
quotidiens, quelle que soit l’heure.
Ř Lantus Solostar® 100 U/mL : une injec-
tion par jour, toujours à la même heure. Dans
le cas de ce patient, l’injection se réalise le
soir au coucher, afin d’obtenir une action
prolongée sur 24 heures. En cas d’oubli, il
ne faut pas doubler la dose mais contacter
le médecin traitant. Ce produit ne doit pas
être mélangé à une autre insuline, ni être
dilué : un mélange ou une dilution risque-
rait de modifier le profil d’action en fonction
du temps ; un mélange pourrait également
provoquer une précipitation. En cas de
décalage horaire, l’idéal, s’il s’agit d’un
voyage court, est de calculer l’heure locale
correspondant à celle respectée habituel-
lement (22 h) afin de réaliser l’injection à ce
moment (17 h en Martinique).
Ce qu’il ne faut surtout pas
oublier de dire au patient
Ř Les yeux doivent être protégés avec
de bonnes lunettes et les pieds gardés des
coups de soleil, de toute plaie, blessure,
ampoule, etc. (en cas de souci plantaire,
une consultation immédiate est requise).
Ř Un kit de glucagon injectable, qui peut
se conserver entre 15 et 30 °C avant recons-
titution, doit être emporté en vacances.
ŘLes stylos d’insuline entamés ne
doivent pas être exposés à une tempé-
rature supérieure à 30 °C. Ils doivent être
jetés après 28 jours d’utilisation, les stylos
non entamés étant, quant à eux, conser-
vés au réfrigérateur entre + 2 et + 8 °C.
L’extérieur des stylos se nettoie à l’aide
d’une compresse antiseptique.

pratique
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ŘIl est important d’avoir sur soi des
produits sucrés (trois morceaux de sucre,
125 mL de jus de fruits sucré), à prendre
en cas d’hypoglycémie.
ŘLe traitement doit être respecté
(ne jamais oublier les prises ou arrêter
sans avis médical) et le calendrier des
examens biologiques et cliniques, suivi.
ŘEn cas d’intervention chirurgicale
avec anesthésie générale, il est impor-
tant de signaler à l’anesthésiste la prise
de Lopressor®.
ŘDes risques de chute, liés à l’hypo-
tension orthostatique, existent. Le patient
doit se lever lentement, rester assis au
bord du lit 1 à 2 minutes avant de se
redresser et ne pas rester en position
allongée trop longtemps. La conduite doit
être évitée en cas de symptômes. 
Françoise Couic-Marinier
Docteur en pharmacie, Nancy (54)
marinier.francoise@wanadoo.fr
Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de
conflits d’intérêts en relation avec cet article.
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Si le diabète est équilibré, un contrôle glycémique
effectué une fois par semaine, à jeun et après
le repas, suffit, sauf en voyage.
Le patient doit respecter au moins trois à quatre
repas par jour.
Il doit savoir repérer, sur les étiquettes des produits
alimentaires, la présence de sucres rapides
cachés comme celle de dextrose, utilisé pour rosir
les jambons blancs, de sirop de glucose ou de blé,
présents dans la plupart des plats cuisinés.
Les pieds et les yeux doivent être surveillés
quotidiennement. Les pieds seront lavés tous les
jours, bien séchés entre les orteils, nourris avec
des crèmes hydratantes, les ongles étant coupés
et limés régulièrement.
Le pharmacien peut conseiller des ciseaux adaptés
à la coupe des ongles ou orienter le patient vers
un podologue. Les chaussures et les chaussons
doivent être confortables et fermés.
Actualités pharmaceutiques Ř n° 512 Ř Janvier 2012
Le stress, un traumatisme, de la fièvre, une
infection ou une intervention chirurgicale peuvent
modifier la glycémie.
Enfin, l’alcool doit être évité (2 verres de vin/jour
ou équivalent au maximum), ainsi que le tabac
et les sucres rapides.
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Le patient hypertendu doit éviter l’alcool, le sel
(pas plus de 5 g par jour), les sels de régime contenant
du potassium, les eaux gazeuses (autres que Salvetat®
et Perrier®) et les formes effervescentes
des médicaments (fortes teneurs en sodium).
Il lui est conseillé de pratiquer chaque jour
au minimum 30 minutes d’exercice physique
d’intensité modérée, comme la marche rapide,
et de privilégier un régime alimentaire riche
en légumes et en fruits.
Afin d’adapter le traitement au besoin, la tension
doit être contrôlée régulièrement chez le médecin
traitant, le pharmacien ou à domicile à l’aide
d’un appareil d’automesure.