Vous êtes sur la page 1sur 19

Revue internationale de

botanique appliquée et
d'agriculture tropicale

Notes et actualités

Citer ce document / Cite this document :

Notes et actualités. In: Revue internationale de botanique appliquée et d'agriculture tropicale, 30ᵉ année, bulletin n°331-332,
Mai-juin 1950. pp. 316-333;

https://www.persee.fr/doc/jatba_0370-5412_1950_num_30_331_6323

Fichier pdf généré le 03/05/2018


NOTES & ACTUALITÉS

Réceptions
Occidentale
duFrançaise,
Prof Aug.par CHEVALIER
les Conseils généraux
en Afrique
du

Sénégal, du Soudan et du Niger français.

Le Profr A. Chevalier, en commémoration de ses premières


explorations botaniques en Afrique occidentale remontant à 51 ans
pour le Soudan français, iet aussi en souvenir des rapports
amicaux qu'il eut toujours avec les Africains et pour le remercier des
travaux qu'il poursuivit sur l'agriculture africaine en vue
d'améliorer le bien-être de ses habitants, fut invité en 1948 par les
Conseils généraux du Sénégal, du Soudan et du Niger français à venir
encore une fois en excursion dans les pays sénégalais soudanais
et nigériens.
Ce n'iest qu'à la fin de 1948 qu'il put répondre à ces invitations
et il vient de parcourir encore pendant quatre mois et sur environ
8 000 km d'itinéraires (non compris les longs voyages en avion) iet
de refaire encore quelques explorations scientifiques dont il sera
rendu compte ici ultérieurement. L'accueil qu'il a reçu dans ces
pays auxquels il a consacré une grande partie de sa vie dépasse
fout ce qu'il aurait pu attendre. Infiniment touché de l'hospitalité
si bienveillante que lui ont accordée ses amis anciens et nouveaux :
gouverneurs, administrateurs, membres de l'enseignement,
fonctionnaires des services agricoles et forestiers, etc. et de l'accueil
si cordial iet si dévoué qu'il trouva auprès des Africains de toutes
classes, et spécialement auprès des Conseillers généraux et des
instituteurs Noirs qui tinrent à lui témoigner leur affection ien des
cérémonies publiques.
Il est impossible de donner ici le détail de ces cérémonies.
Arrivé à Dakar le 2 décembre 1949, M. Chevalier employa les
premières siemaines à travailler à l'If an auprès de ses amis de
l'Institut français d'Afrique noire. Il eut le plaisir de s'y
rencontrer un jour chez M. Th. Monod avec le Profr Mangenot, revenant
de l'Institut d'Adiopodoumé (Côte d'Ivoire) où il avait séjourné
il y a deux ans. Il fit aussi quelques belles explorations nouvelles
à travers le Sénégal. _ . .
Le 23 déc. eut lieu à Saint-Louis, dans la salle des fêtes du
.

Sénégal, la réception du Profr Chevalier par le Conseil général et


toutes les personnalités éminentes du Chef-lieu. La cérémonie,,
présidée par M. le Gouverneur Camille Bailly, consista en une,
allocution extrêmement cordiale de M. le Gouverneur Bailly, puis
une causerie de M. Chevalier sur les explorations anciennes qu'if
— 317 —

avait accomplies en Afrique occidentale et spécialement au


Sénégal, remontant à 51 ans.
Il rappela aussi qu'en mai 1902, M. E. Roume, qui venait d'être
nommé gouverneur général de l'A. 0. F., avait reçu dans cette
même salle les Conseillers généraux et avait fait l'honneur de
demander à Chevalier d'iexposer ici-même les idées qu'il avait,
à la suite de sa première mission, sur les cultures d'avenir du
Sénégal. Déjà il signala l'importance qu'il fallait donner à l'Arachide,
au Coton, aux cultures fruitières, au reboisement.
A cette cérémonie prirent successivement la parole : M. Fajadet,
Inspecteur d'Académie à Saint-Louis, M. Karim Gaye, président
de la délégation du Conseil général ancien élève de l'Ecole
vétérinaire d'Alfort, M. Camara Mamadou, conseiller général et
représentant du Grand Conseil de l'A. 0. F. De belles réceptions suivirent
cette cérémonie. M. Chevalier trouva aussi un amic'al accueil de la
part d'anciens amis résidant à Saint-Louis, notamment M. Gh. Béart,
Inspecteur des Ecoles qu'il avait connu autrefois quand il
dirigeait l'Ecole Normale Ponty à Sebikoutane près Dakar, puis M. Ma-
cari, directeur de l'Agriculture, qu'il avait connu 18 ans plus tôt
au Niger. Il fit encore avec lui d'intéressantes herborisations et des
visites à Richard-Toll, au Collège d'Agriculture de Louga, au Jardin
de Sor, dirigé avec une remarquable compétence par un Ingénieur
agricole noir ayant fait ses études en France, M. Mustapha Diouf,
fils de l'ancien député du Sénégal. Il retourna aussi à l'Ecole
normale Ponty et fit une conférence aux élèves, leur conseillant de
pousser leurs études au delà de ce qu'on leur enseigne et disant
qu'on serait prêt à accueillir en France dans les Instituts spéciaux
ceux qui auraient du goût pour faire de hautes études et se
destiner à la Recherché scientifique.
Pour montrer comment les Africains sont capables d'assimiler
notre civilisation, nous reproduisons ci-après le discours que M.
Karim Gaye adressa à M. Chevalier lors de sa Réception par le
Conseil général :

Allocution adressée à M. CHEVALIER par M. KARIM GAYE.


Monsieur le Professeur,
Monsieur le Gouverneur,
Mesdames, Messieurs
II y a déjà quarante-cinq ans, le 19 juin 1904, la ville de Dom-
front fêtait le retour d'un explorateur né dans la cité normande.
La cérémonie se passait dans la chapelle du Collège; les
professeurs et les officiers du 102e régiment occupaient l'estrade; la
population entière se pressait dans la salle.
Un maître d'école M. Croisé évoqua, avec l'émotion que l'on
devine, sa fierté d'avoir discerné dès l'âge de 10 ans les dons
surprenants de l'homme auquel sa ville natale rendait un hommage
aussi vibrant.
Il s'agit, M. le Professeur, d'un nom que votre gloire aura rendu
célèbre. Je devrais dire d'un nom que vous avez aimé à associer
à votre gloire.
— 318 —

J'ai pensé, en effet, que de ces années lointaines devait se


détacher, pour vous, parmi tant de figures disparues, celle du maître
perspicace qu'avait été M. Croisé. Celui-là qui notait : « j'avais
affaire à un enfant extraordinairement bien doué » chez lequel on
rencontrait un esprit d'ordre et de méthode joint à une volonté
ferme ». Qui sait si l'on mesure à sa juste valeur ce qu'une vie
aussi prodigieusement active que la vôtre et les acquisitions de la
phytogéographie doivent au discernement de ce maître
clairvoyant.
Mais la ville et les habitants de Domfront pensaient peut-être,
en cette année de 1904, accomplir un geste à la fois symbolique
et définitif à l'égard d'un chercheur dont la mission du Tchad
devait rester le titre de gloire le plus authentique.
Ils avaient compté sans l'envoûtement de l'Afrique, sans
l'attrait qu'exerçait « la grande école d'énergie et d'action qu'était
le Soudan » sur les hommes de votre génération. Ces hommes-là
qui ont porté le deuil des désastres de Sedan et de la brutale
annexion de l'Alsace et de la Lorraine. Ces hommes qui devaient
gagner la Grande Guerre de 1914-1918.
Mais l'Afrique, chez vous, fortifiait plus qu'elle ne suscitait une
vocation. Elle offrait ses matériaux à cette passion fougueuse avec
laquelle vous aviez abordé l'étude du sol, de la flore, de la faune,
embrassant à la fois le climat et les hommes. L'Afrique offrait ses
matériaux inexploités et inexplorés à ce sens de la nature, de: ses
équilibres, de ses corrélations, à ce don merveilleux de
l'observation, à cette faculté de synthèse qui feront toujours de vous un des
pionniers de la terre d'Afrique en même temps que l'un des plus
brillants maîtres de la phytogéographie moderne.
Etrange destin, en effet, que cette carrière coloniale qui vous
arrachait déjà à ces recherches lointaines. Je veux rappeler, M. le
Professeur, vos premiers travaux sur l'anatomie systématique
des Myricàcées et qui mettaient déjà en relief, à l'époque, un
penchant évident de la prospection, votre penchant évident à la
recherche.

Mesdames, Messieurs, -
Nous sommes en 1897, le Muséum vient d'accueillir, à l'âge de
24 ans, le jeune Auguste Chevalier. Il est tout proche l'événement
qui est à l'origine de la cérémonie qui nous réunit aujourd'hui. Cet
événement se présente en 1898. Le Général de Trentinian,
Gouverneur au Soudan, constitue une mission de spécialistes. Il s'agit
d'étudier les ressources économiques et les possibilités de mise en
valeur de ce pays qui s'ouvrait à l'influence française. C'est alors
que la Direction du Muséum porte son choix sur vous parmi la
pléiade des chercheurs de la Maison renommée.
,

Un mois plus tard commençait pour vous, non plus les


excursions baignées de lumière, dans le cadre des collines normandes,
non plus les excursions à travers le Rocher de grès armoricain
ou la forêt bocaine mais c'était le Tchad, le Fouta-Djallon et la
forêt africaine. C'était pour vous l'épopée africaine mais une
épopée pacifique.
— 319 —
• Pendant 16 mois, vous aurez parcouru et exploré 16 000 km au
Soudan, récolté 5 000 numéros d'herbier, rassemblé une miné
d'observations et de matériaux relatifs aux sciences naturelles et à
l'ethnographie.
L'Exposition Universelle de 1900 livre vos collections au public
émerveillé. Désormais vous rentrez de plein-pied dans le monde
des Africanistes.
Les Missions succèdent aux missions...
1902, c'est le Congo, l'Oubangui-Chari, le Lac Tchad.
De 1905 à 1913, quatre voyages successifs vous conduisent à
travers l'A. O. F., le Gabon, le Congo belge, l'Ile de San Thomé.
En Côte d'Ivoire et au Gabon à travers les forêts vierges, par
l'étude obstinée des problèmes agro-botaniques, vous arrachez peu
à peu ses secrets à la forêt dense africaine.
Mais le savant pur, le chercheur ardent, infatigable et fécond
est en même temps doublé d'un organisateur chez vous.
Dès 1907, comme vient de le rappeler M. le Gouverneur du
Sénégal, vous mettez en garde les Pouvoirs Publics d'outre-mer contre
l'exploitation irraisonnée des forêts, contre la stérilisation des
sols mal cultivés, contre les feux de brousse, contre les pâtures
excessives, etc.. Dès 1907, vous préconisez la création de réserves
naturelles, de parcs nationaux, de jardins botaniques... derniers
refuges des espèces en voie de disparition.
Et les missions sans cesse ouvrent à votre activité des théâtres
nouveaux.
1913, c'est le départ pour l'Asie et l'Indochine. Partout et
toujours vous aurez dressé l'inventaire des ressources agricoles et
forestières, vous aurez révélé les conditions et les possibilités de
cultures que pouvaient offrir les terres d'Outre-mer.
1914, vous ramène en France, avec des matériaux nouveaux et
une collection de plus de 3 000 plantes.
Savant et chercheur inné, vous serez appelé cependant à
organiser en 1917 les services agricoles et forestiers de l'Indochine.
Vous serez appelé à accélérer les productions nécessaires au
ravitaillement de la France en guerre et pour imprimer au Territoire
asiatique la marque de vos conceptions.
Mais vous aurez également laissé une place de plus en plus
irremplaçable au sein de la Maison célèbre. Et le Muséum, dès 1919,
devait vous fixer toujours davantage aux riches collections que,
herborisant à travers le monde, vous aviez accumulées dans son
sein.
En 1927, une brève échappée de deux mois vous conduit à tra-
veTs les forêts de Kabylie et les oasis de Biskra.
1929, 1930, 1931 et le Sénégal reçoit l'Illustre Voyageur; la Côte
d'Ivoire et la Guinée aussi. Ce sont vos travaux sur la biologie de
l'Arachide. Ces travaux qui devaient faire l'objet, en 1933, de la
première monographie qui ait été jamais consacrée à cette plante
qui demeure une des richesses du Pays.
En 1944-1945, c'est un autre séjour au Sénégal où vous
présidez le Congrès International des Africanistes.
En 1946-1947, vous vous consacrez à nouveau à l'étude du
problème de la culture de l'Arachide.
— 320 —

Aujourd'hui, alors que l'année 1949 s'achève, nous entrons, avec


vous, dans cette longue suite d'explorations et de voyages qui
commencèrent il y a un demi-siècle.
Illustration combien éclatante d'une carrière féconde! Et
pourquoi aussi ne pas rechercher des origines à cette vitalité rare?...
La Normandie, votre terre natale, n'est-elle pas une terre «
d'école patiente, une terre où se forme un être vigoureux et subtil,
tout ensemble un être concentré et riche de vie ». Et je songe à la
remarque de M. Herlemont « les fatigues des kilomètres
parcourus sous l'Equateur » la longue herborisation sous les Tropiques
pouvaient-elles avoir raison de vos forces?
Et mon dernier mot sera celui-ci, je pense, avec votre exemple,
que la vigueur intellectuelle et morale engendre la résistance
physique.
A cet égard, M. le Professeur, vous êtes un messager de la
pérennité française.
Le Conseil général du Sénégal que j'ai l'honneur de représenter
vous souhaite la bienvenue en même temps qu'il s'honore de
recevoir un des savants qui illustrent la Science Française.

M. Chevalier, sa tâche accomplie au Sénégal, arrive à Bamako,


au Soudan français par avion le 12 janvier et il est reçu avec la
même cordialité qu'au Sénégal; le chef de Cabinet du Gouverneur,
les représentants du Conseil général et du Service d'Agriculture,
son ami Racine Mademba, Conseiller de la République, qu'il a
connu à Sansanding, il y a 51 ans, quand il n'avait guère que 12 ans
environ, sont là à l'attendre. Le Gouverneur p. i. du Soudan,
M. Geay (aujourd'hui Gouverneur de la Volta) est le parent de
l'explorateur-naturaliste, Geay, voyageur du Muséum, que M.
Chevalier a connu il y a une cinquantaine d'années et qui mourut
prématurément en rentrant d'un voyage au Brésil.
M. Geay lui offre la plus aimable hospitalité à Bamako, ainsi
que le gouverneur titulaire, M. Louveau qu'il connaît de vieille
date et qui arrive de France quelques jours plus tard.
M. Chevalier trouve aussi à Bamako des amis : M. Saintard,
vice-président du Conseil général du Soudan et directeur à l'Ecole
normale d'Agriculture de Katibougou qui est située à
l'emplacement de l'ancienne Station agronomique de Katibougou que fonda,
il y a 48 ans, son excellent ami J. Vuillet, alors que William Pon-
ty dirigeait le Soudan avant de devenir Gouverneur général de
l'A. 0. F., puis le botaniste Garnier, M. Thomassey, représentant
de l'Ifanj M. Fauque, ancien élève du Muséum et attaché au futur
Jardin botanique du Soudan. Au bout de quelques jours, M.
Chevalier voit le Président du Conseil général, M. Tidjani Traouré,
médecin africain et, à la demande de celui-ci, il est décidé,
d'accord avec M. le Gouverneur, que la réception de M. Chevalier
n'aura lieu que dans deux mois environ afin que la plus grande
partie des membres du Conseil général qui doit se réunir en mars,
puisse assister à la cérémonie.
M. Chevalier va donc disposer de ce temps pour poursuivre
encore ses recherches dans les principales régions du Soudan et
aller aussi au Niger. ,
— 321 —

II se rend d'abord à l'Office du Niger, qu'il n'a pas revu depuis


décembre 1938, date à laquelle il fut attaché à la Mission
parlementaire qui devait fournir au Ministre des Colonies des
éclaircissements sur l'œuvre déjà accomplie et ses possibilités d'avenir.
M. Chevalier arrive le 18 janvier à Ségou où il est accueilli par
son ami P. Viguier, directeur général de l'Office du Niger. Cinq
journées sont consacrées à visiter les installations du Niger, les
jardins, les terrains consacrés au Riz à Kokry et au Coton à Niono,
puis le barrage de Markhala. Il pousse aussi une pointe à Sansan-
ding où il visite les ruines du Tata et fait un pèlerinage aux
tombes du Fama Mademba et de son fils le commandant Abd-el-
Kader, un vaillant officier, mort en 1932, qu'il connut dans
l'intimité pendant la guerre de 1914 et qu'il revit quelques années plus
tard au Sénégal. Ses deux fils sont également aujourd'hui officiers
dans l'armée française.
A partir du 23 janvier, M. Chevalier fait une longue tournée
dans le Sud du Soudan au cours de laquelle il fait encore de belles
trouvailles botaniques et le voyage lui permet de se rendre compte
des ruines qu'ont causé depuis 50 ans les feux de brousse et le
déboisement systématique. Les sols cultivables deviennent rares;
les jachères sont de plus en plus courtes. Il remonte la vallée du
Bani, s'arrête aux villages de Bla et de San, puis au poste de Kou-
tiala qui n'existait pas encore en 1899; il visite la Station agricole
de Mpésoba où d'intéressants essais ont été faits sur la culture
du Cotonnier, mais où les déboisements montrent déjà la
disparition de l'eau en surface à la saison sèche. Il visite un curieux bois
sacré et il revient le 28 janvier à l'Office du Niger où il se rencontre
avec le Conseil d'administration de ce grand organisme. Il repart
de Ségou le 30 pour poursuivre une longue excursion encore plus
au S, traversant de nouveau le Bani, repassant par Koutiala et
allant passer deux jours à Sikasso, région importante qu'il nra pas
revue depuis 51 ans. Il visite les rochers des environs, la cascade
de Fincolo où il séjourna autrefois, s'approche du Mont Mina et de
lWcienne ferme-école de Zamblara. Le lendemain il prend la
route de Bougouni, passe à Nkourala et examine les Cotonniers
cultivés par les indigènes. On sait que c'est de ce village que
provient le Cotonnier de ce nom. Il s'arrête à Niana et y visite un très
remarquable bois sacré où il est conduit par l'instituteur noir du
village. Le 3 février, il était à Bougouni après avoir traversé des
villages qu'il avait vus autrefois en ruines, dévastés par Samory.
Il visite plusieurs petites écoles rurales de la région et arrive à
Bamako le 4 février. Il y séjourne encore une semaine employée à
des excursions dans le pays, notamment à Kati, sur les rives du
Niger et dans le lit là où l'eau ne coule presque plus.
Le 12 février M. Chevalier prend l'avion Air-France pour le
Niger et arrive à Niamey le 13. Il est reçu très aimablement par le
Chef de cabinet du Gouverneur. Celui-ci, M. Colombani
(aujourd'hui gouverneur de l'Oubangui) lui fait l'accueil le plus cordial et
M. P. Marciial, directeur de l'Agriculture, un ami de vieille date,
lui offre avec M™ Marchai, une exquise hospitalité. Il est reçu
aussi à son arrivée par M. de Puyfontaine, président du Conseil
général, Moumorin djerma Koy, le grand chef de Dosso, dont il
Rev. de Bot. Appl. 22
— 322 — »
avait connu le père en 1932, officier mutilé de la guerre de 1914
et grand ami de la France. Le premier geste de M. Chevalier fut
de se rendre au cimetière de Niamey se recueillir sur la tombe de
Jean Rogeon, son dévoué collaborateur — en 1932 à travers le
Sahara, puis le long du Niger, à Tahoua, dans l'Aïr et dans la région
de Zinder — mort à Niamey des suites d'une blessure qu'il se fit
au cours de .ses recherches botaniques.
La réception officielle par le Gouverneur et le Conseil général
ne devait avoir lieu que le 8 mars, il restait donc encore plusieurs
semaines pour faire des excursions botaniques à travers la colonie
du Niger. Un premier voyage fut pour Filingué, coupant les dallols
et suivant les curieuses crêtes des grès postéocènes du Niger s'é-
tendant peut-être jusqu'au quaternaire, couronnés par une
carapace de latérite en dislocation et éboulement. Il poussa jusqu'à
Tolcho aux confins du Sahara où Touareg, Peuls, Djermas, Haous-
sas, les uns sédentaires, les autres nomades s'interpénétrent. Un
deuxième voyage s'accomplit par Dosso pour atteindre Gaya à la
frontière du Dahomey (nouvelle étude de la flore des prairies
aquatiques du Niger). Enfin un troisième voyage se fit à Say sur la rive
gauche et dans quelques îles du Niger et les régions avoisinant le
Parc national du W, mais il fut impossible de pénétrer dans ce
parc, aucun moyen d'accès n'existant encore.
La réception officielle le 8 mars par le Conseil général, dans
sa salle des réunions, fut pleine de cordialité. M. le Gouverneur
Colomban'i présidait la cérémonie et adressa à M. Chevalier ses
souhaits de bienvenue et ses remerciements pour ses nouvelles
recherches en le présentant aux notabilités réunies dans la salle
des fêtes. Ensuite prirent successivement la parole M. de Puyfon-
taine, président du Conseil général parlant au nom de tous ses
collègues Européens et Africains.
M. le général Ingold, commandant la brigade du Niger-Dahomey,
ancien compagnon du général Leclerc dans la traversée du Sahara
et pendant la Libération, avait tenu à adresser aussi à M. Chevalier
les compliments de l'Armée coloniale se souvenant que l'invité
avait fait son apprentissage de la vie africaine avec les militaires
français du Corps d'occupation du Soudan il y a plus de 50 ans,
alors que le Général de Trentinian, successeur d'ARCHiNARD,
pacificateur du Soudan, posait les bases de l'organisation actuelle et
donnait à ces pays la paix qui n'a plus cessé.
Enfin M. A. Marchal s'étend sur l'œuvre botanique et agrpno-
mique que M. Chevalier a réalisée, spécialement en Afrique
occidentale et aussi à travers le monde. Après la libération, ajoute-t-il
« il a repris contact avec l'Afrique occidentale où l'angoissant
problème de l'usure des sols retient toute son attention. Enfin acres
sa nouvelle visite au Sénégal et au Soudan nous l'accueillons en ce
moment au Niger où infatigablement il poursuit ses recherches.
J'ai eu, il y a une quinzaine d'années, le plaisir de vous connaître
et d'être accueilli dans ce laboratoire d'Agronomie Coloniale du
Muséum et d'apprendre à connaître la végétation de l'Afrique
tropicale et ses plantes utiles ».
Après ces compliments M. Chevalier exprime toute sa
reconnaissance à ceux qui viennent de l'accueillir et l'ont vivement ému.
— 323 —

II est particulièrement reconnaissant au général Ingold, directeur


des troupes coloniales de ce pays lors de la libération et aujourd'hui
membre de l'Académie des Sciences coloniales, d'avoir bien voulu
associer l'armée coloniale à cette cérémonie. C'est en effet avec
les militaires du Soudan français et du Tchad qu'il effectua en
1898-1900 (au Soudan) et en 1902-1904 (au Tchad), et grâce à leur
concours précieux, allant souvent jusqu'à la collaboration la plus
intime, qu'il effectua ses plus belles explorations botaniques en
Afrique; c'est avec l'escorte des braves tirailleurs sénégalais,
dévoués et disciplinés qu'on lui donnait pour aller dans des pays
encore peu sûrs mais qui n'eurent jamais avec lui à faire usage de
leurs armes mais l'aidèrent au contraire à apprivoiser les
indigènes et à en faire des amis. Ensuite, M. Chevalier rappelle des
souvenirs du vieux Soudan à l'époque héroïque. Le pays était, avant
notre venue, exploité par des trafiquants d'esclaves, de véritables
négriers. L'esclavage sévissait presque partout; le peuple était très
pauvre, pas sûr du lendemain, plein de# préjugés, croyant à toutes
les extravagances que racontaient les sorciers. Tout a bien changé
aujourd'hui en mieux et la France y est pour quelque chose.
Le Prof exhorte ensuite les évolués et les élus Africains à
encourager l'instruction publique vraie, à ne pas se contenter de mots
et de discours, à donner une place éminente à l'enseignement
technique professionnel. Il faut qu'on développe non seulement la
culture contemplative et spirituelle, mais aussi qu'on aime le travail
manuel et qu'on apprenne à le bien faire. Il est aussi noble et peut-
être plus utile que celui que font les clercs, car c'est le travail
manuel bien fait, rattachement à la terre nourricière, l'amélioration
des techniques et de l'agriculture qui font la prospérité d'un pays.
« Ce que je souhaite de produire aussi à l'Afrique noire, ajoute
M. Chevalier, outre de bons dirigeants, de bons agriculteurs et de
bons ouvriers, ce sont des hommes de haute initiative et de grande
intelligence constituant ce que l'on nomme l'élite agissante d'un
pays ». La chose lui semble très possible. « On a déjà connu dans
le passé, à travers le monde, quelques Noirs dignes de ce titre, en
petit nombre il est vrai, mais un effroyable racisme entravait
autrefois leur essor».
« Je ne doute pas, ajoute-t-il, qu'il se trouvera un plus grand
nombre d'Africains dans l'avenir qui seront de bons chercheurs
scientifiques. Si nous savons diriger l'éducation et l'instruction
comme il convient dans ce pays, je suis persuadé qu'il y aura dans
l'avenir des Africains laborieux qui seront capables de devenir des
élites se dévouant à toute l'humanité et spécialement à leur pays et
qui seront aptes aussi à faire des découvertes scientifiques utiles
ou de grands techniciens capables de les mettre en application ».
Il reste encore bien des choses à apprendre et à découvrir sur
cette terre africaine, encore trop mal explorée et dont le sol,
l'eau, la faune, la flore, les ressources de toutes sortes et même tout
ce qui se rapporte à l'homme et. à son éducation sont des choses
trop insuffisamment étudiées. Je souhaite à cette partie de la terre
et à ses enfants un grand avenir. Des organismes comme l'Ifan
(Institut Fiançais d'Afrique Noire) y aideront.
M. Chevalier ne devant rentrer à Bamako qu'à la fin de mars,
— 324 —

il lui restait encore une semaine ou deux pour poursuivre ses


recherches.
Le 10 mars une voiture confortable l'emmenait à Gao en suivant
la rive gauche du Niger qu'il avait déjà visitée autrefois (en 1932).
Il passa par Sansané-Haoussa, Tîllabery, Ayerou, les rapides de
Labbezenga, Fafa et Ansongo, visitant tantôt la végétation de la
steppe, tantôt les petites cultures de bordure du fleuve, par
moments examinant la flore des rives ou des îles du Niger. Après
avoir atteint Gao il se rendit à Bourem, le point extrême qu'il put
visiter en août 1899 en partant de Tombouctou. Il revint deux jours
après à Gao où il fut reçu par M. Letourneau, ministre de la
France d'Outre-Mer rentrant en France après avoir fait une longue
visite en A.1 O. F. Il l'entretint de ses nouvelles observations.
M. Chevalier prit un autre avion le 17 mars et il arriva le même
jour à Bamako après avoir survolé la région des Monts Hombori, le
cercle de Dori et une partie du territoire dé la Haute- Volta, pays
qu'il ne fut malheureusement pas à même de visiter.
En revenant au chef-lieu du Soudan M. Chevalier y retrouva
le même excellent accueil qu'à l'aller. Le Gouverneur M. Louveau
avait repris ses fonctions et il décida, d'accord avec le Conseil
général que la cérémonie de réception par celui-ci aurait lieu le
24 mars après-midi. Ce fut une très belle cérémonie dans le stand
des réunions de Dakar à laquelle assistèrent les notabilités de
Bamako; M. le Gouverneur Louveau la présidait. Le médecin africain
M. Tidjani Traouré, président du Conseil général, entouré d'une
grande partie de ses collègues souhaita la bienvenue à M.
Chevalier et lui dit la reconnaissance des Soudanais pour ce qu'il avait
fait pour le pays, notamment à l'époque militaire il y a 51 ans. Le
sénateur Racine Mademba, également conseiller général, était venu
dire au professevir la reconnaissance qu'avait eu pour lui son père,
le fama Mademba et toute sa famille. Il se rappelait que le
Gouverneur général Roume avait chargé M. Chevalier de guider le fama
et ses enfants quand ils vinrent en France en 1906. C'est sur ses
conseils que Racine était entré à l'Institut Agronomique et que son
frère Abd-el-Kader, mort en 1932, alors commandant l'Infanterie
coloniale, était venu comme engagé volontaire en 1914 et simple
tirailleur et dont M. Chevalier fut le tuteur lors de son passage
à Menton après avoir été gravement blessé au front, et son départ
aux Dardanelles où il gagna ses galons d'officier et où il fut un
véritable, héros de la guerre. M. Chevalier a gardé ^un souvenir
ému de tous ces braves soldats africains qu'il vit à Menton en 1914-
1917 qui étaient tous très attachés à la France et dont les rares
survivants et les descendants qui vivent aujourd'hui sont des amis
de la France et leurs enfants apprennent notre langue dans les
écoles comme le moyen le plus sûr d'élever leur niveau de
civilisation. De cette réception à Bamako, M. Chevalier a gardé un
souvenir inoubliables
Du 17 au 26 mars, M. Chevalier disposa d'une dizaine de jours
pour visiter d'autres régions du Soudan qu'il n'avait pas revues
depuis de longues années. Il visita successivement les rives du
Niger, aux abords ée Bamako, Kati où il alla revoir l'emplacement de
l'ancienne station agronomique (en 1899) devenue le Jardin potager
— 325 —

des militaires du bataillon de Kati. Le hasard, qui fait parfois bien


les choses, lui procura le plaisir de rencontrer un jeune lieutenant
d'Infanterie coloniale, fils d*ABD-EL-KADER Mademba qui lui servit
de guide.
Sur l'invitation de M. Saintard, vice-président du Conseil
général et de M. Racine Mademba, sénateur, il alla passer ensuite une
journée à Koulicoro et Katibougou, emplacement de l'ancienne
station agronomique créée par M. J. Vuillet en 1900. C'est à
Katibougou qu'il revit avec grand plaisir. le nouveau collège
d'Agriculture* de Katibougou que dirige M. Saintard, station qui dispose
aujourd'hui d'un très beau terrain d'application avec collections
d'arbres fruitiers, arbres africains d'intérêt primordial comme le
Karité, le Nité, le Kapok à fleurs rouge, etc. et de nombreux arbres
fruitiers greffés d'introduction plus ou moins récente. Aux
environs existe une Ecole normale d'Instituteurs où M. Chevalier fut
invité à se rendre pour y faire une> conférence. Enfin il visita la
belle propriété de M. Racine Mademba, plantée d'arbres fruitiers
améliorés et greffés. En la remettant en état, Racine Mademba a
montré qu'il méritait le titre d'ingénieur-agronome qui lui a été
décerné à Paris et il a fait de sa plantation un verger modèle.
M. Chevalier tint aussi à visiter encore une fois, le poste de
Kita où il avait fait un court séjour fin 1898 et fin 1899, et il put
encore parcourir la route Kayes-Bamako qu'il avait suivie il y a
51 ans en voiture Lefèvre, alors que la piste n'était qu'un chemin
de caravanes très rocailleux, avec des ponts de fortune et des bacs.
Il existe aujourd'hui à sa place une route empierrée, suivie par de
nombreux autos et camions et des ponts utilisables même en saison
des pluies.
Il revit de nouveau la végétation des rives du Baoulé ( le plus
grand fleuve formant le Sénégal à partir de Bafoulabé) et son prinr
cipal affluent le Bakôy; ces deux grandes rivières avaient leur lit
presque à sec quand il revint en mars 1950 et il put ainsi trouver
sur leurs rives, sur les bancs et rochers dans les rivières mêmes
des plantes intéressantes qu'il n'avait pas observées autrefois. Le
territoire du cercle de Kita a les sols très dégradés; il a très peu
d'habitants (un ou deux au kilomètre carré). C'est sans doute pour
cela qu'une grand© partie du cercle a été érigée en parc de chasse.
Il serait grand temps qu'on fasse la prospection de la faune et
de la flore. Au point de vue botanique et forestier tout au moins,
cette région paraît très intéressante et il serait désirable qu'on
en fasse l'étude scientifique.
Enfin M. Chevalier tint à visiter aussi la Mission catholique de
Kita où il s'était arrêté en 1898 pour voir le R. P. Abivin, des Pères
du Saint-Esprit, qui s'occupait de linguistique et s'intéreissait aussi
à l'acclimatation des plantes utiles qu'il recevait du Muséum de
Paris ou des Missions des Antilles. Dès cette époque il existait
déjà à la Mission des Orangers, des Mandariniers et des Manguiers
greffés et la belle variété Julie, venue de la Martinique, était déjà
multipliée.
Les Pères Blancs ont remplacé les Pères du Saint-Esprit et ils
se sont aussi attachés à l'extension du verger qui est un des plus
remarquables du Soudan. Le Père supérieur fit visiter ses planta-
— 326 —

tions mais il expliqua qu'il fallait lutter de plus en plus contre la


sécheresse au moment de l'harmattan et contre la disparition de
l'eau superficielle. Le ruisseau permanent au bord duquel la
Mission avait été installée il y a environ 55 ans est maintenant à sec
pendant une partie dei l'année; quant au niveau de l'eau dans les
puits il a baissé d'environ 5 mètres depuis une vingtaine d'années.
Pourtant le pays est encore assez boisé, les feux de brousse ne
semblent pas avoir fait trop de dégâts dans la plaine, les rives des
rivières ont encore des galeries forestières, mais la montagne de
Kita qui était autrefois fort boisée et regardée comme montagne
sacrée a été depuis 50 ans très dénudé© et c'est peut-être une des
causes de l'assèchement de Kita; les environs du poste sont si
asséchés qu'on ne peut plus entretenir le parc-verger qui y avait été
créé il y a 15 ou 20 ans. L'arrosage des arbres en saison sèche
serait, paraît-il, si coûteux qu'il faudrait des crédits considérables
de main-d'œuvre pour faire cet arrosage. Qu'importe, il faudrait
à tout prix ne pas renoncer à cette lutte contre la stérilité et l'assé-
chement.
Le 26 mars après-midi, M. Chevalier quittait Bamako par avion
et était le soir même à Dakar (le voyage par avion dure à peine
4 h.). Il rapportait avec lui dans l'avion des graines plus ou moins
mûres; mais encore vivantes (elles ont déjà germé en France) de
Strophanthus sarmentosus, puis des boutures du beau Saule des
bords du Niger, dont la culture sera tentée au Sénégal et en France.
Il allait rester au Sénégal jusqu'au 9 avril et il put de nouveau
disposer d'une quinzaine de jours pour faire encore quelques
herborisations dans la presqu'île du Cap Vert, en compagnie de M. Pi-
tot, botaniste de l'Ifan, et aller jusqu'à Mboro, une des Niayes les
plus intéressantes et les plus septentrionales^ dont l'avenir paraît
bien compromis par l'ensablement et le déboisement, ainsi du reste
que les abords de la ville de Dakar dont la denudation par
l'abattage des arbres, des arbustes, des Palétuviers, des lianes telles que
le Strophanthus, même des Filaos si abondants autrefois dans la
région qui avaient été plantés en quantité il y a une quarantaine
d'années et qui ne subsistent plus guère que le long des routes.
Les arbres coupés ne sont pas remplacés alors que la ville de Dakar
devrait être entourée d'un .grand parc, à l'exemple de Paris, de
Rio, de Londres, de Berlin, de Leningrad et de presque toutes les
grandes villes du monde.
M. Chevalier s'embarqua le 9 avril sur le Formose de la
Compagnie des Chargeurs Réunis ramenant avec lui en France les très
riches collections botaniques qu'il avait rassemblées au cours de
son voyage, pendant lequel il avait pu consacrer environ 3 mois 1/2
aux recherches scientifiques. Le service botanique de l'Ifan avait eu
la grande amabilité d'emballer avec grand soin toutes ces
collections, de sorte qu'elles sont parvenues très vite et en parfait état
au Muséum National de Paris.
M. Chevalier débarqua au Havre le 22 avril. Accueilli par des
amis de Paris et reçu très amicalement par la Municipalité et M. le
Maire du Havre, par la Chambre de Commerce et par le Syndicat
Cotonnier, par le Directeur et les Professeurs de l'Ecole coloniale
du Havre. On lui demanda de faire une conférence sur son voyage
— 327 —

en A. 0. F. et sur les dernières observations qu'il avait faites au


point de vue pratique.
Il rendit d'abord hommage à un enfant du Havre, le Général
Archinard'
Louis dont la belle statue en bronze élevée en 1932,
deux ans après sa mort, devaitf l'entrée du port du Havre a été
enlevée par les Allemands en 1940, d'autres disent détruite par
des bombardements. C'est grâce à Archinard et à son successeur,
le général de Trentinian et à l'ancien jeune secrétaire d'Archi-
nard, le gouverneur William Ponty que le Soudan a été débarrassé
de ses despotes esclavagistes qui, à partir de 1850, bouleversèrent le
pays, le mirent à feu et à sang, déplacèrent les populations ou
vendirent les hommes et les enfants comme esclaves. Depuis 1898-
1899, date du premier voyage de M. Chevalier en Afrique
soudanaise, une grande paix s'est établie, des villes importantes se sont
créées, des chemins de fer et un réseau de routes, des écoles, des
hôpitaux ont surgi un peu partout, mais pas encore autant qu'il
en faudrait. Une classe d'évolués Noirs s'est formée, dont certains
sont très intelligents et ont le désir ardemt de se dévouer au
progrès de la civilisation de leurs pays, sous l'égide de la France.
Presque tous nous sont très attachés et M. Chevalier a été
infiniment touché de l'accueil si sincère qu'ils lui ont fait en souvenir
de ce qu'il avait fait vis-à-vis de leurs ancêtres, il y a cinquante ans.
Il y a un revers à la médaille et M. Chevalier l'a dit avec
franchise sans flatter personne. La venue des Blancs, l'improvisation
fréquente de certaines cultures dites industrielles, recommandées
par nous, la très grand© liberté laissée aux Noirs qui installent
leurs cultures où bon leur semble, ou mènent leurs troupeaux
partout Où il leur plaît, qui multiplient les feux de brousse, ces
méthodes nouvelles ont amené la dégradation des sols et
l'appauvrissement du pays. Aujourd'hui le cultivateur ne trouve plus que
difficilement des emplacements de terres cultivables dans des pays où
il n'y a pourtant en moyenne que 2 à 10 habitants au kilomètre
carré. Il est grand temps d'apporter des remèdes sérieux à cette
situation et d'intéresser tous les Africains à cette revalorisation des
sols. La chose paraît possible à M. Chevalier. Lors de son premier
voyage il y avait en Afrique des règles tributales que nul ne
pouvait enfreindre et qui avaient pour but essentiel le ménagement du
sol et de la végétation. Il y avait un peu partout chez les fétichistes
des Bois sacrés. Tout le monde n'avait pas la liberté d'abattre des
arbres, un usage voulait qu'on n'en plantât pas, mais que Ton
respectât ceux qui poussaient naturellement; n'était pas chasseur qui
voulait. Dans la technique de l'agriculture il y avait des usages impératifs
que les chefs indigènes eux-mêmes ne pouvaient bouleverser. Les
feux de brousse étaient moins répandus que de nos jours. La terre
et ses biens étaient à Dieu et non aux hommes/Beaucoup de ces
usages seraient à rétablir. Certaines méthodes de culture ou
d'exploitation des produits forestiers y compris l'abattage des
arbres ont été faites souvent à contre-sens.
M. Chevalier prend l'exemple de la culture du Coton, du Riz et
des Arachides qui intéresse particulièrement le commerce
français, notre ravitaillement et notamment le port du Havre pour
le Coton, le sisal et le café. Eh bien, pour ces cultures nous avons
— 328 —

constamment improvisé, nous avons travaillé presque toujours sans


méthode. Nous avons eu assez souvent de bons techniciens pour
l'agriculture, les forêts et l'élevage. A tout moment on a déplacé les
plus méritants d'une colonie à l'autre, sans doute parce qu'on
manquait de bons techniciens. Il en -faudrait beaucoup plus. On les
emploie à toutes les tâches; ils sont interchangeables; la
bureaucratie les accapare. Certains devraient être spécialisés en
permanence à la recherche scientifique appliquée, d'autres à
l'enseignement de l'agriculture, du reboisement, d'autres encore mais qu'il
faudrait instruire préalablement devraient s'attacher à
l'amélioration de l'élevage par les Nomades et à l'organisation d'un paysanat
africain combinant l'élevage stable et la production du fumier et du
lait à la ferme et aussi à la plantation des arbres utiles autour de
la ferme.
En un mot, une organisation sylvo-pastoro-agricole, sans des
murailles infranchissables d'un service à l'autre devrait être
l'organisation principale. Il faut par dessus tout viser à la
conservation de la fertilité des sols et au maintien de l'eau dans les
parties superficielles de la terre, lutter le plus activement possible
contre la latéritisation, l'ensablement et l'assèchement des sols
pendant la saison de lTiarmattan si dure pour les plantes et pour le
bétail pendant cette longue saison sèche dont la nocivité est encore
accrue par le dur et stérilisant vent d*E. Il faut expliquer cela aux
Africains et leur faire comprendre que leur pays va à la ruine si
on ne prend pas rapidement des mesures contre ces calamités.
C'est à eux de revenir aux techniques que pratiquaient leurs
ancêtres, tout en adaptant aussi à leur pays les méthodes agricoles
rationnelles que la recherche scientifique a déjà mises au point
pour certains pays tropicaux, méthodes qui ne sont nullement les
mêmes que celles appliquées en Europe occidentale ou aux Etats-
Unis. Chaque pays, chaque climat doivent avoir leurs techniques
et il est dès maintenant évident que le labourage profond par
exemple, pratiqué parfois à un mètre de profondeur, comme dans
les terres d'Amérique ou dans les tchernozioms de Russie (on tente
en ce moment la chose pour l'Arachide et le Riz en A. 0. F.) n'est
nullement applicable à l'Afrique occidentale. Et il est également
certain que les plantes alimentaires les meilleures pour les
Africains sont celles que leurs ancêtres ont sélectionnées il y a des
siècles pour chaque climat et ont si bien mises au point, que les
seules améliorations à apporter à leur culture doivent être faites
avec prudence et surtout sans improvisations. Nous sommes en
partie responsables de ces bouleversements qui risquent un jour
d'amener l'Afrique à des famines de plus en plus intenses. M.
Chevalier a beaucoup de confiance dans le bon sens des cultivateurs
Africains. Il faut les instruire davantage mais ne leur enseigner
que des techniques éprouvées de culture agro-forestière et
pastorale et leur apprendre — ce qu'ils savaient déjà mais moins scienti
fiquement — que le déboisement, quelle qne soit la cause qui le
provoque, entraîne la dégradation des sols et à la longue leur
stérilité et que la disparition de la végétation arborée le long des
fleuves, des rivières et des ruisseaux, des lacs et des mares
provoque l'écoulement plus rapide de l'eau tombée à la saison pluvieuse
— 329 —

et l'assèchement de plus en plus rapide du sol à la saison sèche,


saison pendant laquelle on ne peut faire aucune culture si l'on n'a
pas d'eau à discrétion et si le sol n'en a pas emmagasiné une
certaine quantité.
Telles sont les conclusions essentielles que M. Chevalier a tenu
à tirer de ce long et beau voyage.

Sur l'origine des Digitaria's cultivés.


Par Aug. CHEVALIER.

Il existe en Afrique Occidentale deux espèces de Digitaria


cultivés qui sont parmi les plus petites céréales connues.
L'une, le Fonto (Digitaria exilis Stapf), est cultivée dans presque
toute l'Afrique Occidentale mais spécialement dans les zones
soudanaise et guinéenne. L'autre est beaucoup plus localisée : C'est
le D. iburua Stapf beaucoup plus localisé. Connu par les Haoussas
sous le nom d'Iburu ou Aburo il fut décrit par Stapf en 1913 et avait
été découvert aux environs de Zaria, à l'W du Bornou; il est connu
aux environs de Kono et a été retrouvé dans le Niger français au S
de Zinder.
Ces deux plantes ne sont connues qu'à l'état cultivé et l'on s'est
livré à diverses hypothèses sur l'origine de ces espèces. On
supposa d'abord que D. exilis avait comme proche parent D. longi-
ftora (Retz) Persoon, mauvaise herbe pantropicale connue dans
l'Inde, à Maurice, à Madagascar, en Afrique pantropicale etc. et qu'il
en dérivait peut-être. Quant à D. iburua on le rapprocha de D. ternata
qui vit en Afrique tropicale notamment en Guinée, en Afrique du
Sud etc. et est aussi une mauvaise herbe dont on n'utilise pas les
graines.
Grâce à la remarquable Monographie des Digilaria que vient de
publier à Ley de le Dr J. Th. Henrard qui décrit 325 espèces dans
ce genre et 14 sous-genres on est mieux fixé sur la parenté de ces
deux espèces. D. lorigiflora et D. ternata appartiennent en réalité
à deux sections différentes et ne sont point proches des deux
espèces cultivées en Afrique Occidentale. Celles-ci appartiennent
à la section Atrofusca dont une D. atrofusca Camus est de
Madagascar. Cette section, outre les deux espèces, cultivées en contient
huit autres; celles-ci spontanées vivent en Asie, en Afrique et en
Amérique. Une espèce de ce groupe (D. caledonica Henr.) est même
endémique en Nouvelle-Calédonie.
Le Dr Henrard rapproche des D. exilis et D. iburua une nouvelle
espèce qu'il a nommée D. barbinodis Henr. et qu'il a établie
d'après des spécimens que nous avions récoltés dans la colonie du
Niger, au S de Gao en 1932, (récoltée en janvier n° 43 830) et qui
vit à l'état sauvage dans les régions subdésertiques. J'avais
communiqué ces spécimens embarrassants pour moi au DT Henrard.
Le nom spécifique rappelle que les noeuds des tiges sont barbus,
alors que les épillets du spécimen type figuré sont glabres comme

*" " ':


it I ~'tf '\
'
i
— 330 —

le sont les épillets des deux sortes cultiyées. En dériventielles?


Il n'est pas possible de rassurer mais il y a bien des probabilités
pour que la culture de ces deux petites céréales ait pris naissance
sur les confins S du Sahara, en Afrique centrale, comme ce fut le
cas de certains Pennisetum's de VOryza stapfii, de Hibiscus can-
nabinus, etc.
On rie connaît qu'une autre espèce de Digitaria qui ait été autrefois
cultivée en Asie et en Europe mais qui appartient à un tout autre
groupe. C'est le D. sanguinalis (L.) Scap. qui vit aujourd'hui dans
les moissons et jachères de la plupart des pays tempérés.
Originaire peut-être de Chine elle s'est étendue dans la zone tempérée
de l'Ancien Monde et Henrard énumère des formes qui seraient
encore cultivées. Citons les suivantes : D. sanguinalis subsp.
segyptiaca (Retz) Henr. var. frumentacea Henr. D. sang. var. es-
culenta (Gaudin) Caldési d'Italie, D. sang. var. gigantea Schur. de
Transilvanie, etc.

Contribution à la Flore d'Afrique noire.


I. Nouveautés africaines.
Par A. Aubréville et F. Pellegrin.

Les Auteurs décrivant sous ce nom plusieurs espèces d'Arbres


nouvelles spontanées en Afrique Occidentale ou en A. E. F.
A citer notamment : Dialum quinquepetaluni Pellegrin dé Pointe-
Noire près de l'Océan (A. E. F.);
Albizzia boromoensis Aubréville et Pellegrin, qui existe depuis
Boromo (Côte d'Ivoire), jusqu'à Bamalto (Soudan français). Nous
nous demandons si cette espèce n'est pas proche (ou même
identique à A. chevalieri Harms qui vit dans les mêmes régions;
Maerua de waillyi. Capparidée voisine de M. crassifolia; petit
arbuste à très petites feuilles découvert dans les îles du Niger
entre Gao et Ansongo. Nous avons trouvé récemment une forme du
même groupe dans la steppe très aride (végétation subsaharienne,
entre Gao et Bouren). Nous reviendrons sur ces plantes;
Syzygium brazzavilense Aubrév. et Pelleg. Arbre très voisin de
S. guineense DC. à feuilles lancéolées, à acumen long et aigu et à
petites fleurs.
Vit au Congo : Brazzaville (Thollon, Aubréville), env. de Bangui
(Tisserant). (Notulae systematicae, XIV, fasc. 1, février 1950, p. 56-
62).
II. Nouvelle variété de Daniellia thurifera J. Benn.
Il s'agit de D. thurifera Benn. var. chevalieri 3. Léonard (1949),
remarquable par les réceptacles, ovaires et base du style pubéru-
lents. que nous avions trouvé en 1900 à Konlaye en Casamance.
C'est un des plus grands arbres de Casamance (hauteur de l'arbre
— 331 —

40 à 50 m). Dans le même pays vivent aussi deux autres grands


arbres : Chlorophora regia Chev. et lrvingia gabonensis Bn. que nous
avons recueilli à la même époque. Cet lrvingia fut étudié vers 1901
par P. Van Tieghem qui en fit une espèce spéciale. Quant au Da-
niellia en question, le Profr L. Gmgnard en étudie l'anatomie (sous
le nom de D. oblonga auct. non Oliv.) et publia en 1902 une note
à ce sujet. (J. Léonard, Etude botanique de Capaliers du Congo
belge, publié par 17. N. E. A. C. Sie. Scientif., n° 45, 1950).

III. Un Belmontia nouveau du Fouta-Djalon.


La Société Botanique de France a publié récemment une note
décrivant un Belmontia nouveau de Guinée française :
Belmontia chevalieri H. des Abbayes et R. Schnell, vivant sur
les dalles latéritiques à Conakry, Dalaba, Benna, etc.
On sait que le genre Belmontia E. Meyer de la famille des Gen-
tianées comprend une vingtaine d'esRèces spéciales au continent
africain et à Madagascar. Ce sont de petites plantes annuelles à
fleurs ordinairement blanches ou jaunâtres. Nous avons trouvé
antérieurement au Fouta-Djalon l'espèce lutéô-alba.
L'espèce B. chevalieri nous paraît très voisine de (et même peut-
être identique) B. grandis Me*y., type du genre, très répandue en
Afrique australe et tropicale et assez variable, comme en Afrique du
Sud, en Angola, au Mozambique, dans l'Ouganda, etc.

IV. Elatine fauquei T. Monod du Soudan français.


Décrit dans une Revue peu connue des botanistes : Notes
africaines, n° 46, avril 1950, p. 37, édité à Dakar (Sénégal) par l'Institut
français d'Afrique noire.
C'est le premier Elatine connu en Afrique occidentale. Il a été
trouvé d'abord par J. Fauque à Bamako au pied des rochers de
Koulouba d'où descend un ruisseau dans lequel il vit; cette plante
que M. Fauque nous a montrée a le port d'un Ammania ou d'un
Bergia annuel, semi-aquatique.
D'après T. Monod, cette espèce a de très petites fleurs axillaires
sessiles, des feuilles ovales ou oblancéolées sessiles, le calice et la
corolle sont 5-partites mais l'ovaire est biloculaire. C'est le premier
Elatine décrit à fleurs 5-partites. M. Monod se propose de revenir
sur cette remarquable espèce.
{Bull. Soc. Bot. France, 1949, 96, p. 204-205).

Téosinte du Honduras (Résumé)


D'après Paul C. 8TANDLEY.
Parmi les plantes originaires d'Amérique l'une des plus
intriguantes et importantes du point de vue génétique est Euchlaena
— 332 —

mexicana Schrad., seule plante sauvage toute proche du Maïs. Son


statut phylogénétique a. fait l'objet d'une forte spéculation et s'il
était établi, il éclairerait le problème de l'origine du Maïs dont les
parents immédiats sont présumés disparus.
On a cru, il y a quelques années, que le Téosinte était un hybride
naturel entre le Maïs et des Graminées sauvages du genre Tripsa-
cum, mais cette théorie est contredite par des travaux récents et
l'opinion courante tend à affirmer que Euchlaena est un genre très
indépendant de Graminées étrangement similaires au Maïs quant
aux caractères superficiels mais produisant des épis réduits de
structure très différente.
Le Téosinte a été découvert dans le S du Mexique mais est connu
de peu de localités de ce pays. Plus tard on Ta trouvé au Guatemala
dans plusieurs aires basses et élevées. En 1940, P. C. Standley l'a
vu à la fin de la saison dies pluies, au voisinage de Jutiapa dans
le Guatemala oriental (autour de la ville et même dans les rues
de celle-ci; le plus souvent se reproduisant dans des champs de
céréales où avait mûri du Maïs, mais aussi se propageant par éclats
de touffes dans des terrains en friche) et aussi dans la Sierra de
los Guchumatanes du Guatemala occidental (ou Kempton et Pope-
noe l'ont trouvé absolument sauvage et couvrant de grandes
étendues).
Jusqu'à ces tout derniers temps on ignorait la provenance du
vrai Téosinte dans le S-E du Guatemala bien que l'on eût entendu
parler de son existence dans l'W du Honduras. Il y a quelques mois
seulement l'Ecole d'Agriculture panaméricaine a reçu de ces
graines provenant de Pespire, près de la côte du Pacifique; quelques-
unes germèrent dans des pots de fleurs et furent mises en pleine
terre lorsque les plantes eurent atteint 10 cm de haut. Elles
crûrent plutôt médiocrement. Les quelques plantes introduites dans
un petit bois de Citrus donnèrent des panicules lorsqu'elles eurent
à peine un mètre, chacune produisant quelques tiges dressées et
chaque tige présentant de nombreux « épis » ou inflorescences pis-
tillées. Deux plantes repiquées dans un parterre de fleurs en un
sol meilleur, sont beaucoup plus prospères mais ont un port
différent (beaucoup de tiges, et qui sont beaucoup plus courtes, se
répandant sur le sol plutôt que s'élevant à une certaine hauteur). Toutes
ces plantes ont été visitées par toute espèce d'insecte, mais aucune
n'a paru attaquée. Un plant «nun, cultivé par M. Ortega dans une
caisse peu profonde mais remplie de terre très grasse, a produit
45 branches bien développées de 3 mètres chacune ou presque.
En 1949, Paul C. Standley, visitant cette même région, à l'E du
petit village de San Antonio de Padoue, a vu le Téosinte en
abondance, à l'état sauvage, ou en tout cas aussi sauvage qu'il existe
partout ailleurs.
San Antonio est à quelque 780 à 850 m d'alt., juste au pied des
forêts de Conifères. Ce petit peuplement vit sur les pentes, dans
un creux de montagne, en face d'un précipice rocheux parcouru
par un torrent dont l'eau l'abreuve abondamment. Une petite vallée
étroite dont trois des faces se prolongent par des escarpements
cultivés sur 200 m ou plus au-dessus d'elle et plantés de Maïs et
et Canne à sucre. Ainsi l'on trouve dans un champ de Cannes, avec
— 333 —

du Maïs tout à côté, mais tout autour des Cannes, au milieu de


grands plants de Jaragua et d'autres Graminées, des centaines de
plants de Téosinte, prospères, ayant pour la plupart très peu de
troncs ou de branches, et à peu près de la même taille qu'un pied
de Maïs plutôt médiocre. L'endroit était couvert de mauvaises
herbes et de broussailles de toute sorte; quelques Avocatiers,
Manguiers et autres arbres, tous ou presque tous plantés. Le Téosinte
était ici sauvage, sans aucun doute, comme dans les colonies plus
élevées, ou du moins il n'était pas planté par l'homme et il était
capable de soutenir la concurrence avec les mauvaises herbes les
plus luxuriantes de la région, chose que ne peut pas faire le Maïs.
On peut affirmer avec certitude que le Téosinte, s'il n'est pas
indigène actuellement, doit exister ici depuis longtemps et pourrait,
continuer à croître si le terrain maintenant cultivé était laissé à
l'abandon.
Il est intéressant de constater que cette plante énigmatique
s'étend si loin vers le S. Il y a des rapports récents mais non vérifiés
sur le Téosinte des montagnes de Morazân près de Tegucicalpa,
des montagnes de Copan et même du Nicaragua.
Dans la région de Pespire, le Téosinte est bien connu mais pas
sous son nom mexicain. Il a le nom de « Maïs-café » ou « Maïs-syl-*-
vestre ». La première appellation s'emploie parce que les graines
triangulaires sont grillées et mélangées au café ordinaire ou
employées à sa place. Néanmoins il paraît que le café ordinaire est
meilleur que le Téosinte, qui est planté en maintes places aux
environs de Pespire comme plante fourragère car il a l'avantage de
persister après que le Maïs et le Maicillo (Sorghum vulgare) se sont
desséchés; on ne lui prête pas une grande importance sur place.
A Honduras, YEuchlaena ne se désigne pas par son nom nahuatl
ou mexicain de Téosinte, terme établi dans la nomenclature
étrangère. A Honduras ce nom est bien connu mais il s'applique à une
plante toute différente, une Cycadacée décrite sous le nom de Dioon
mejiae Standl. et L. Wms.
J. D.
(D'après Ceiba, Honduras, vol. I, 1950, n° 1, p. 58-61.)

Un nouvel Avocatier
trouvé dans la République Dominicaine.

Brève note sur une nouvefle variété à chair jaune, on propose


de lui donner le nom de Castillo d'après le nom de la ville près
de laquelle il est apparu comme seedling. Son fruit de
dimensions moyennes, à peau lisse, est en forme de poire, similaire au
Calavo. Sa chair est excellente, a la consistance de beurre
et un goût de noix quand il est mûr. Il a des chances de devenir
populaire en raison de son apparence flatteuse et de sa qualité.
<D'après Hort. Abstr., vol. XIX, n° 3 de sept. 1949, abstr. 2431.)

Vous aimerez peut-être aussi