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DOI: 10.22278/2318-2660.2016.v40.n0.

a2667

ARTICLE ORIGINAL THEME LIBRE

LA GESTION DES DÉCHETS À L’HÔPITAL: DU DISCOURS AUX RÉSULTATSa

Loic Regazzettib

Résumé
Comme le rappelle l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur la scène
internationale ou encore la Haute Autorité de Santé (HAS) en France, une gestion rigoureuse
des déchets hospitaliers permet de : participer à la lutte contre les infections nosocomiales et
la dissémination des bactéries multi résistantes ; prévenir les accidents d’exposition au sang,
ou encore la réutilisation et la revente illégales de matériels infectés (limitant ainsi les risques
de transmission du VIH, VHB, VHC) ; limiter les dépenses inutiles de traitement des déchets;
éviter les effets néfastes sur l’environnement. Dans un tel contexte, le Centre Hospitalier
Universitaire de Nice est engagé depuis 2011 dans un vaste projet d’amélioration répondant
à la fois aux recommandations de la HAS et autres exigences réglementaires, mais également
à une démarche plus générale inscrite dans sa politique qualité. Par conséquent, une nouvelle
gouvernance a été définie, les règles internes ont été révisées (protocoles de tri et de gestion),
et une importante campagne de communication a été menée. Si aujourd’hui les résultats sont
encourageants, il est toutefois indispensable de maintenir l’établissement dans une dynamique
d’amélioration cohérente avec les évolutions nationales et internationales. Le présent article
a donc pour objectif de présenter de manière synthétique la stratégie appliquée au CHU de
NICE. Au travers d’une politique, d’une méthode, d’un nombre de données chiffrées, il sera
possible de mieux appréhender ce que représente le potentiel d’une gestion des déchets
en établissement de santé. Ces données sont à considérer pour la plupart comme reflétant
la situation à son état de commencement, c’est-à-dire en 2011, avec une évolution allant
jusqu’en 2014.
Mots-clefs: Déchets. Développement durable. Qualité. Sécurité.

a

Séminaire International autour de la Qualité, l’Accréditation et la Sécurité Patient organisé à Salvador de Bahia où le
CHU de NICE a eu l’occasion de participer dans le cadre d’un partage d’expérience entre la France et le Brésil, avec
soutien financier des Coordenação de Aperfeiçoamento de Pessoal de Nível Superior, Fundação de Amparo à Pesquisa
do Estado da Bahia, Núcleo de Pós-graduação em Administração da Universidade Federal da Bahia.
b
Ingénieur hospitalier. Évaluation des risques et gestion de la qualité - Pôle Parcours Patient, Centre Hospitalier
Universitaire de NICE - Hôpital de Cimiez
Adresse: 4 Avenue Reine Victoria, CS 91179 – 06003 Nice Cedex 1, France. E-mail: regazzetti.l@chu-nice.fr

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Revista Baiana A GESTÃO DE RESÍDUOS HOSPITALARES: DO DISCURSO AOS RESULTADOS
de Saúde Pública

Resumo
Como reporta a Organização Mundial de Saúde sobre o cenário internacional ou
a Alta Autoridade para a Saúde (HAS) na França, enfatiza que uma gestão rigorosa de resíduos
hospitalares pode: participar na luta contra as infecções nosocomiais e propagação de multi
bactérias resistente; evitar acidentes de exposição de sangue, ou reutilização e revenda ilegal de
materiais infectados (limitando assim os riscos de transmissão de HIV, HBV, HCV); limitar gastos
desnecessários no tratamento de resíduos; evitar os efeitos adversos sobre o ambiente. Neste
contexto, o Hospital Universitário de Nice está empenhado, desde 2011, em um vasto projeto
de melhoria abordando tanto as recomendações governamentais como atendento às exigências
regulamentares, mas também adotando uma abordagem mais geral referente Política de Qualidade.
Portanto, uma nova governança foi definida, as regras internas foram revistas (tipos de protocolos
e de gestão), e uma grande campanha de comunicação foi realizada. Se hoje os resultados são
animadores, no entanto, é essencial para manter as instalações em uma dinâmica melhor e
consistente com os desenvolvimentos nacionais e internacionais. Assim, o presente artigo tem como
objetivo apresentar sinteticamente a estratégia adotada pelo Complexo Hospitalar Universitário de
Nice, por meio de descrição de uma política e da metodologia de gestão de resíduos de serviços
de saúde. Os dados aqui apresentados devem ser considerados principalmente como reflexo da
situação no seu estado inicial, isto é, em 2011, com uma evolução até 2014.
Palavras-chave: Resíduos. Desenvolvimento sustentável. Qualidade. Segurança.

THE WASTE MANAGEMENT AT THE HOSPITAL: FROM SPEECH TO THE RESULTS

Abstract
As the World Health Organization on the international scene or still the High
Authority of Health (HAS) on France report, a rigorous management of the hospital waste
allows: to participate in the fight against the hospital-borne infections and the scattering of the
resistant multi-bacteria; to prevent the accidents of exposure in the blood, or still the illegal re-
use and the resale of infected materials (so limiting the risks of transmission of the HIV, VHB,
VHC); to limit the unnecessary expenses with waste treatment; to avoid the fatal effects to
the environment. In this context, the CHU of Nice is committed since 2011 to a vast project
of improvement, answering at the same time to the recommendations of the HAS and other

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statutory requirements, but also applying a more general approach which concerns its Quality
Policy. Therefore, a new governance was defined, the internal rules were revised (protocols and
management) and an important advertising campaign was led. If the results are encouraging
today, it is however essential to maintain the establishment in a dynamic of coherent improvement
with the national and international evolutions. This article aims to present in a synthetic way
the strategy applied to the CHU of NICE, by describing a politics, and the method of a waste
management in establishment of health. These data are meant to be considered as a reflection
of the situation in its early stage, in 2011, with an evolution until 2014.
Keywords: Waste. Sustainable development. Quality. Safety.

INTRODUCTION
Aujourd’hui, le Brésil et la France diffèrent en de nombreux points: leur superficie
(8 514 877 km2 pour le premier contre 670 922 km2 pour le second), leur population (201
millions pour le Brésil contre 65 millions pour la France) ou encore leur Produit Intérieur Brut
(respectivement 1499 Milliards d’euros contre 2059.9 Milliards d’euros)1. Si des différences
géographiques, démographiques ou économiques sont celles qui viennent en priorité dans
l’esprit du plus grand nombre lorsqu’on évoque ces deux pays, il apparaît aussi que de nombreux
enjeux restent communs et engagent un esprit de collaboration et de partage. Le “Seminário
Internacional de Gestão Contemporânea de Sistemas de Saúde: 22 e 23 de outubro de 2015”2
en a d’ailleurs fait l’objet principal.
En effet, parmi les grands enjeux qui concourent à des objectifs communs, se retrouve
la gestion – au sens le plus large soit-il – des établissements de santé. Ces derniers, constitutifs d’un
système de santé complexe et soumis à une évolution législative et économique, sans oublier une
pression médiatique, sont incités à développer une nouvelle approche dite de “performance”.
Les nombreuses initiatives d’ores et déjà entreprises, visant la performance, sont essentiellement
centrées, et ce sous une approche verticale, sur la qualité, la gestion des risques et les coûts. Or
la véritable performance, telle qu’elle est visée de nos jours, recherche aussi un équilibre entre
les enjeux économique, social, et environnemental et place au centre de ses préoccupations les
parties prenantes. Nous entrons alors dans un concept non très ancien et qui se veut comme
un recours et un moyen indispensables de restructuration de notre société: le Développement
Durable. A l’origine, celui-ci a été défini comme “un développement qui répond aux besoins du
présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs”3. Devenant
au fil des années, incontournable, le Développement Durable se démocratise et se positionne

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Revista Baiana comme un véritable ”remède” qui n’échappe pas aux établissements de santé. Ces derniers, qui
de Saúde Pública
représentent un poids économique important et qui ont pour vocation de faire de la prévention et
de veiller à la santé des populations (selon le Ministère de la Santé Français, la France compte par
exemple en 2012, 2694 établissements de santé (publics et privés); a accueilli toujours en 2012,
13.5 millions de patients; et représente en 2015, 76.9 milliards d’euros de financement (soit 4.2%
du PIB)4, ne peuvent faire l’impasse de s’en préoccuper et par conséquent de revoir leur mode
de gestion. En France d’ailleurs, les hôpitaux publics et le Développement Durable partagent des
valeurs communes. Prendre soin, améliorer la qualité de vie, préserver le lendemain, s’occuper
de tous sans discrimination, font partie des missions du service public et animent les fondements
d’une politique socialement responsable. Dans un tel contexte, la gestion des déchets hospitaliers
se présente comme une véritable opportunité dans ce domaine.
Tous s’accordent à dire que les déchets, quel que soit leur nature, constituent un
réel enjeu économique, écologique, et sécuritaire pour la population dans son ensemble. Cela
est d’autant plus vrai quand on estime la production de déchets par an et par habitant pour la
France et le Brésil: respectivement 532 kg pour l’un et 382 kg pour le second5. Concernant plus
spécifiquement les établissements de santé qui sont un lieu où un grand nombre d’activités se
déroulent, il n’est pas surprenant d’y trouver de nombreux déchets. Ceux-ci se caractérisent en
deux grandes familles: les déchets non dangereux (inertes, industriels banals) qui représentent
environ 80% de la production et les déchets dangereux (spéciaux, à risque infectieux) qui
comblent les 20% restants6. Cette catégorisation n’étant en aucun cas exclusive, elle permet
toutefois de montrer le potentiel qu’il peut y avoir quand on sait que la plupart des déchets non
dangereux se recyclent, se réutilisent ou se valorisent. Les déchets dangereux qui représentent
0.5 Kg par jour et par lit d’hospitalisation pour les pays à revenu élevé et 0.2 Kg par jour et par
lit d’hospitalisation pour les pays à revenu faible7, ont eux souvent été écartés pour leur risque.
Aujourd’hui, avec l’évolution des technologies, et compte tenu des enjeux environnementaux
économiques et sociétaux, ils se voient progressivement proposer des solutions d’élimination
plus ”propre” tout en conservant l’attention sécuritaire indiscutable.
Ces dernières années, les priorités concernant la gestion des déchets ont été
clairement réaffirmées: sécurisation des hommes et de l’environnement, réduction de la quantité
et valorisation. Aujourd’hui, la société assiste à une réelle prise de conscience de la part des
acteurs économiques, dont font partie intégrante les établissements de santé. Il convient alors de se
questionner sur la stratégie possible pour répondre à ces enjeux. Si une seule réponse est impossible
tant la stratégie dépend de nombreux facteurs intrinsèques, il va être essayé dans cette publication
de présenter le retour d’expérience du CHU de Nice, établissement public de santé français.

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CONTEXTE ET FAITS STYLISÉS

Image 1 – Présentation du Centre Hospitalier Universitaire de Nice: principaux


chiffres

Source: Plaquette CHIFFRES CLES 2014 – CHU de NICE8

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Revista Baiana PROBLÉMATIQUE
de Saúde Pública
Conformément à la règlementation française et à la gouvernance du système de
santé, chaque établissement de santé intègre le dispositif de surveillance (voire d’une tutelle)
porté par les autorités et autres organismes indépendants “experts”. En effet, au-delà du procédé
de veille et de vigilances davantage axé sur les risques sanitaires, il existe aussi un dispositif de
maitrise autour des risques économiques, sociaux et sur la gestion d’une manière plus générale.
Ainsi, selon un calendrier prédéfini, mais également suite à des évènements ponctuels, les
autorités et autres organismes sont amenés à intervenir dans l’ensemble des établissements pour
évaluer les pratiques professionnelles, les organisations et le respect de la règlementation. Ce
type de démarche obligatoire n’est pas sans conséquence pour les établissements. En effet, suite
à un processus de décision territorial et/ou national, il peut y avoir des effets pour l’établissement
visité tant en terme financier, qu’en terme d’attractivité ou d’autorisation d’exercer.
Dans ce contexte, le CHU de NICE a fait l’objet en 2011 de deux évaluations
externes planifiées qui ont amené à une observation sur sa gestion des déchets.

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Image 2 – Autorités

Qui

Autorité publique indépendante qui contribue à Etablissement public administratif de l’État


la régulation du système de santé par la qualité. français, chargé de la mise en œuvre de la
Elle exerce ses missions dans les champs de politique de santé dans chaque région. Elle a
Quoi
l’évaluation des produits de santé, des pratiques pour but d’assurer un pilotage unifié de la santé
professionnelles, de l’organisation des soins et de en région, de mieux répondre aux besoins de la
la santé publique. population et d’accroître l’efficacité du système.

Contexte des évaluations

Visite dans le cadre de la Certification des


Etablissements de Santé.
Visite ciblée s’inscrivant dans le
Cette dernière est une procédure d’évaluation externe
cadre d’un programme régional
obligatoire et indépendante de l’établissement et de
d’inspection des unités de préparation
Cadre des ses organismes de tutelle. Des professionnels de santé
des chimiothérapies conduite par un
évaluations mandatés par la HAS réalisent les visites de certification
pharmacien inspecteur sur les conditions
sur la base d’un manuel à minima tous les 4 ans.
de réalisation des préparations de
Ce référentiel permet d’évaluer le fonctionnement
chimiothérapie.
global de l’établissement de santé et de porter une
appréciation sur la qualité des prestations.
Période des
Février 2011 Décembre 2011
évaluations

Rapport

Autorisation d’exercer avec quelques


Certification du CHU de NICE avec points de non-conformité notamment
Décision
recommandation sur la gestion des déchets. sur l’élimination des préparations de
chimiothérapie.
Sources: sites”Haute Autorité de la Santé” – “Agence Régionale de la Santé” 9-10.

Si ces 2 évaluations ont permis de relever des écarts, elles ont aussi été un véritable
levier pour l’établissement dans son processus d’amélioration et ont permis en conséquence
d’avoir un regard externe sur les organisations. C’est d’ailleurs l’effet attendu par les autorités en
instaurant ce type de démarche qui poursuit un objectif qualitatif et sécuritaire au sein même
des établissements de santé français. A cette issue, et dans un contexte nouveau autour de la
gestion des déchets, la Direction du CHU de NICE, de concert avec la Commission Médicale
de l’Etablissement, a décidé de s’engager dans un vaste projet d’amélioration, en instaurant une
véritable prise de conscience, allant au-delà de l’unique aspect règlementaire.

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Revista Baiana MÉTHODES
de Saúde Pública
ETAPE 1: ANALYSE DES CAUSES
Avant même d’entreprendre un quelconque plan d’action, il est essentiel
d’effectuer un état des lieux. Dans la présente situation, les autorités (HAS et ARS) ont assuré
cette mission. Tout l’enjeu pour le CHU de NICE, a été de se saisir de ces observations externes
pour en effectuer l’analyse des causes et en tirer des conclusions qui sont venues orienter le plan
interne d’amélioration.
Pour illustrer cette analyse, il a été choisi d’utiliser la méthode des 5M qui est
un outil d’analyse permettant de rechercher et de représenter de manière synthétique les
différentes causes possibles d’un problème. Cette méthode, souvent utilisée en qualité, fut
créée par le professeur Kaoru Ishikawa (1915-1989) d’où son appellation d’origine “Méthode
d’Ishikawa”.

Image 3 – Mise en perspective de la gestion des déchets du CHU de NICE selon


le diagramme Ishikawa

Milieu Méthode
Absence de filière
d’élimination spécifique
Manque de (médicaments anti-
collaboration et de cancéreux)
Suivi insuffisant Non optimisation
partenariat avec
de la quantité de de l’élimination des
les parties
déchets produits déchets
prenantes externes

Non-respect des règles de Absence de portique de (Non-respect de la


Absence de politique Défaut de règlementation,
tri et d’élimination par le détection pour les
institutionnelle protection
personnel déchets radio perte financière,
adaptée (gants impacts
contaminés
Reconnaissance Absence de renforcés,
Absence de environnementaux)
institutionnelle formation gouvernance chaussures de
partielle spécifique sécurité)
Main d’œuvre Matiére Moyen

Source: Plaquette CHIFFRES CLES 2014 – CHU de NICE8.

Une fois les causes décelées, il convient ensuite de définir une stratégie globale,
pour planifier et mettre en œuvre les actions correctives appropriées.

ETAPE 2: CHOIX DE LA STRATÉGIE GLOBALE


D’après la norme ISO 9000, la qualité se définit comme “l’aptitude d’un produit
ou d’un service à satisfaire les attentes des clients”. A cet effet, la satisfaction du client est au
centre même de cette définition, tout comme le principe d’amélioration continue.

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L’orientation première souhaitée par le CHU de NICE : engager un processus
d’amélioration autour de la gestion des déchets et ce dans une dynamique de Développement
Durable.
La définition du Développement Durable est en réalité une déclinaison de la
définition de la qualité, dans laquelle les clients sont en fait les générations présentes et futures,
et où les besoins se substituent aux attentes. Malgré ces différences de termes, le sens reste le
même, le Développement Durable apparaît donc comme une forme particulière de la qualité.
Par conséquent, les outils et démarches de la qualité doivent pouvoir être employés pour la
mise en place d’une telle démarche.
A l’étude de certaines grandes normes pour l’intégration du Développement
Durable dans les organismes, toutes suivent un schéma similaire, qui n’est autre que celui de
l’amélioration continue, concept de base de la démarche qualité. On retrouve là, le principe
même de la fameuse roue de Deming : Plan Do Check Act (PDCA).
C’est donc à partir de ce schéma d’amélioration que va se construire le projet de
gestion des déchets afin d’assurer une certaine cohérence, efficacité et pérennité. L’esprit de
Shortell (stratégie, structure, technique, culture) est venu compléter la stratégie globale.

ETAPE 3: DÉFINITION D’UNE POLITIQUE AFFIRMÉE


a) Enjeux de la gestion des déchets.
Tous s’accordent à dire que les déchets, quel que soit leur nature, font partie
intégrante du Développement Durable en établissement de santé. En effet, la gestion des
déchets constitue un réel enjeu écologique, économique, et sécuritaire pour les professionnels
de santé et plus largement le grand public.
Tout d’abord, l’enjeu environnemental se caractérise par la dangerosité des
déchets générés par l’activité hospitalière comme les Déchets d’Activité de Soins à Risques
Infectieux (DASRI) ou encore les effluents rejetés dans les nappes phréatiques. A ces derniers
s’ajoutent également, les déchets jugés moins ou non dangereux comme les Déchets Assimilés
aux Ordures Ménagères (DAOM), qui ont aussi un impact environnemental avec leur transport
et leur traitement.
Si l’enjeu environnemental est celui auquel nous pouvons penser en premier
lorsque l’on évoque les déchets à l’hôpital, l’enjeu économique n’est pas moindre. A titre
d’exemple, en 2010, le CHU de Nice produisait 1200 tonnes de DASRI, ce qui élevait
la dépense annuelle à plus de 700 000 € pour leur traitement incluant le transport et
l’incinération.

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Revista Baiana Enfin, le troisième pilier social existe également en matière de déchets d’activité
de Saúde Pública
de soins, puisque la maîtrise de l’hygiène dans les unités de soins et celle de la sécurité des
personnes entrant en contact avec ces déchets, tout au long de la filière, y sont étroitement liés.
L’Agence Nationale d’Appui à la Performance (ANAP), instituée par la loi du 21
juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, est
venue confirmer et compléter ces enjeux:
Enjeux de mise en conformité
Enjeux économiques
Enjeux de maitrise du volume des déchets
Enjeux de réduction de l’empreinte de l’établissement
Enjeux managériaux

b) Orientations institutionnelles prises par le CHU de NICE.


Inscrire l’hôpital dans les stratégies nationale et locale
Mettre en conformité les circuits déchets
Eviter la contamination des patients, des personnels et de l’environnement
Prévenir la production de déchet, et le cas échéant valoriser les déchets par réemploi, recyclage
Optimiser les coû ts d’élimination

c) Priorités 2011 définies par le CHU de NICE.


1. Définir une gouvernance
2. Prendre connaissance des dernières évolutions règlementaires, réviser les procédures
3. Sensibiliser, former, informer, communiquer
4. Déployer un dispositif d’évaluation
5. Se concentrer prioritairement sur les déchets dangereux (infectieux, radio contaminés, chimiques)

ETAPE 4: INSTAURATION D’UNE STRUCTURE COORDONNEE


La dimension structurelle, telle qu’elle est définie dans le guide de l’Agence
Nationale d’Accréditation en Etablissement de Santé (ANAES), aujourd’hui HAS, correspond à
la mise en place de structures de coordination nécessaires à la démarche. Celles-ci sont en effet
un “facteur clé pour assurer la cohérence et éviter que les multiples efforts des acteurs ne se
dispersent et ne permettent pas d’aboutir à des améliorations significatives”.
L’hôpital reste encore un lieu très hiérarchique et sectoriel avec un fonctionnement
vertical malgré les nombreuses réformes et orientations visant à instaurer une nouvelle
Gouvernance. Ceci rend donc toujours plus complexe l’animation, le pilotage et la réalisation de
projets transversaux. Tel est le cas de la gestion des déchets vue sous l’angle du Développement

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Durable, compte tenu de la diversité des sujets qu’elle comprend, impliquant de nombreux
professionnels à différents niveaux.
La gestion des déchets est donc un sujet transversal et institutionnel et ne peut
faire l’impasse d’une gouvernance partagée. Le CHU de NICE a donc fait le choix d’instaurer
une coordination reposant sur 4 niveaux interfaces :

Image 4 – Structuration de la gouvernance Développement Durable – gestion des


déchets du CHU de NICE
QUI COMPOSITION QUOI

Direction Générale Directeur Général Définissent la politique et


Comission Médicale Président de la CME valident le programme

Directeur Qualité
Directeur Ressources Matérielles
Assure la cohérence du
Comission Développement Référent institutionnel déchets
Durable programme et le suit
Référents autres thématiques
(eau, air, énergie, etc.)

Référent institutionnel déchets


Responsables des marchés publics
Propose un programme et
Comité déchets Responsables logistiques
assure sa mise en œuvre
Cadres de santé (Direction des Soins,
Hygiène)

Experts filières Ambassadeurs, réseau hygiène


(Détiennent une expertise (Sont les interlocuteurs privilégiés dans
sur certains déchets au vu les unités de soins. Ils participent ainsi à
de leurs fonctions.Ils sont la mise en œuvre dans les secteurs
les interlocuteurs des cliniques et médicotechniques et sont
organisations force de proposition au niveau
opérationnelles) institutionnel)

Source: Direction Qualité Risques Evaluation – CHU de NICE

ETAPE 5: RÉVISION DE LA RÈGLEMENTATION ET DES PRINCIPES GÉNÉRAUX


EN VUE DES NOUVELLES ORGANISATIONS
La règlementation relative à la gestion des déchets n’a eu de cesse d’évoluer
en France et dans de nombreux autres pays. Si tout d’abord le déchet n’était que très peu
considéré, il est devenu au fil du temps une réelle préoccupation. Les enjeux d’ordre sanitaires
ont animé les orientations réglementaires au XXème siècle, et c’est ensuite que les questions
économiques et environnementales sont apparues. Le déchet devient peu à peu une ressource
potentielle.

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Revista Baiana Tableau 2 – Principales références réglementaires applicables à la gestion des
de Saúde Pública
déchets
Rappel des “fondamentaux” applicables aujourd’hui en France
Convention de Bâle Convention de Londres
Institutions Dispositions Mots clés
Prévention; Principe
• Directive cadre Déchet 2008/98
“pollueur payeur”;
Organismes Européens • Règlement transfert 1013/2006,
Responsabilité producteur;
etc.
Contrôle transport
• Loi 15 juillet 1975
Définition déchet; Responsabilités
Gouvernement Français; • Loi 13 juillet 1992
collectivités locales; Principe de
• Ministère Développement Durable • Grenelle environnement
proximité, Prévention, réduction
• Ministère de la Santé • Plan national déchets 2014 2020,
valorisation; Economie circulaire
etc.
• Plan régional
Collectivités; • Agenda 21 métropolitain
• Arrêté municipal, etc.
• Politiques et programmes locaux
Entreprises;
d’application
Source: Élaboration prope.

La gouvernance énoncée précédemment, à forte connotation “Développement


Durable montre clairement l’orientation maîtresse que prend la gestion des déchets en France
et en Europe. Si celle-ci devient clairement un enjeu prioritaire, le CHU de NICE (et les autres
établissements sanitaires) ne doit pas oublier pour autant la réglementation de base en matière
de gestion des déchets (à forte connotation sécuritaire) et les particularités qui l’animent. Sont
produits à l’hôpital de nombreux déchets liés aux activités de soins et qui prennent un caractère
“dangereux” pour le personnel, l’usager (et l’environnement):

• Déchets à Risques Infectieux (DASRI);


• Pièces Anatomiques d’origine Humaine (PAOH);
• Déchets chimiques et toxiques;
• Déchets radio contaminés.

Ces déchets, produits en grandes quantités et concernant de nombreux secteurs,


sont assujettis à une règlementation stricte pour laquelle le CHU de NICE a dû poursuivre sa
vigilance et son assurance de mise en conformité.

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Schéma 1 – Principaux circuits d’élimination applicables au CHU de NICE

Production et tri à la source

Déchets non dangereux Déchets dangereux

Ordures ménagères, emballages, etc. Déchets d’activités de soins à Déchets toxiques


risque infectieux

Stockage Stockage Stockage


- Sac - Collecteur - Fut sécurisé
- Bac - Sac
- Banne - Bac sécurisé
- Compacteur, etc.

Transport autorisé Transport conforme à I’ADR Transport conforme à I’ADR

Centre de stockage des


déchets II ou III Centre de tri Réutilisation Valorisation énergétique Déchets dangereux

Source: Direction Qualité Risques Evaluation – CHU de NICE

C’est ainsi, qu’une fois la réglementation étudiée, les circuits révisés, le CHU de
NICE a mis à jour les protocoles et procédures relatifs à ses principaux déchets. La procédure
des déchets d’activités de soins a donc fait l’objet d’une lecture pluridisciplinaire et fut adaptée
aux contraintes et organisations.

ETAPE 6: ENGAGEMENT DU CHU DE NICE DANS UNE ECO-CAMPAGNE


Une fois les orientations politiques définies, la réglementation révisée, les
protocoles mis à jour, le changement de culture était la priorité. C’est en ce sens qu’une grande
campagne a été menée et est devenue l’un des éléments clés dans l’amélioration des pratiques.
“Trier juste les déchets, c’est protéger”, c’est le slogan qui avait été utilisé pour
l’Eco-campagne 2011 / 2012 entreprise par le CHU de Nice. Ce slogan annonçait la couleur
et la mobilisation générale mise en place pour une gestion durable des déchets hospitaliers. Le
CHU est l’une des plus grande entreprise de Nice et de fait, aussi l’un des plus grand producteur
de déchets des environs : 1 200 tonnes de DASRI, 17 tonnes de déchets verts ou encore 24
tonnes de déchets dangereux pour l’année 2010.

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Revista Baiana La tournure principale de cette campagne était d’évaluer le niveau de
de Saúde Pública
connaissances et de former les personnels sur la gestion des déchets au sein de l’hôpital
multi-site, tout en rendant ludique une problématique très pesante. Il s’agissait d’une
nouvelle formule de communication, de formation et de sensibilisation indispensable et
prioritaire.

DÉCOUVERTE DE L’ECO-CAMPAGNE “MADE IN” CHU DE NICE

ETAPE 1: UNE APPROCHE MARKETING


En premier lieu, les objectifs généraux avaient été exposés à la Direction de
la Communication pour envisager l’accompagnement de l’opération. Le Directeur de
la Communication du CHU, s’était alors emparé du sujet et avait souhaité le “packager”
sous l’appellation Eco-Campagne, dotée d’une identité visuelle propre (logo + graphisme
d’ambiance) destinée à tous les supports ou toutes les prises de paroles sur ce thème : articles
dans le journal interne, site internet, site intranet, relations presse, outils déclinés, etc.
L’objectif de la communication sur ce dossier était double : d’une part être attractif
et impactant auprès des différentes cibles professionnelles dont on attend un changement de
pratiques durable et une appropriation du concept, d’autre part, renforcer l’action des acteurs
de la Direction Qualité Risques Evaluation, dont la tâche était importante et devait être soutenue
par une dynamique créative et des moyens évènementiels. Le comportemental dans ce type de
problématique est ce qu’il y a de plus compliqué et de plus long. Il avait donc été décidé de
soutenir fortement la démarche.

ETAPE 2: L’ECO-JOURNÉE, OU COMMENT SENSIBILISER LES PROFESSIONNELS


À UNE NOUVELLE PROBLÉMATIQUE
Investir les lieux stratégiques comme les selfs et les points annexes du CHU avait
permis de toucher plus de 2000 personnes qui y mangent chaque jour. Avec à l’appui: un
repas “vert”, un totem trois faces spécialement conçu pour l’opération, agencé par six posters
institutionnels sur les déchets et le développement durable, un Eco-jeu sur papier autour du tri
des déchets, et le tout dans une ambiance “zen et naturelle”.
Cette Eco-journée avait notamment permis de faire connaître l’identité visuelle de
la campagne, et son logo créé spécifiquement.

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jan./mar. 2016 73
ETAPE 3: L’ECO-QUIZZ, OU COMMENT ÉVALUER LES CONNAISSANCES
Des questionnaires avaient aussi été distribués en parallèle des bulletins de salaire
et collectés grâce à des Eco-urnes installées dans et devant les réfectoires de restauration du
CHU. Une tombola avait été organisée et quelques 90 lots, dont un vélo, récompensaient
les participants à l’Eco-quizz “tri des déchets à l’hôpital”. Pour s’inscrire dans une démarche
cohérente, tous ces lots émanaient de dons sollicités auprès de diverses entreprises niçoises
engagées elles-mêmes dans une démarche plus durable.

ETAPE 4: L’ECO-CODE OU COMMENT FORMER AUTREMENT


Pour sensibiliser et former ses équipes au tri des déchets, le CHU avait opté
pour une nouvelle approche plus présente, plus pratique, participative et co-construite.
D’abord, une équipe photo avait retracé le parcours du déchet pendant deux jours pour
rendre visible la partie invisible de la gestion des déchets. Le résultat de cette investigation
avait été mutualisé grâce à un “Eco-code” informatisé projeté dans les pôles. Puis, différents
personnels de différentes catégories professionnelles avaient été formés aux bonnes pratiques
du tri des déchets hospitaliers, une plaquette “Eco-guide” avait aussi été distribuée aux
participants. Ces derniers ont à leur tour formé les équipes de pôle. Du 18 novembre 2011 au
30 octobre 2012, près de 3 000 agents ont été formés et de réelles améliorations de pratiques
ont été constatées par les différents audits. L’évaluation de la formation s’est faite grâce à un
questionnaire final appelé “Eco-éva” permettant notamment aux formateurs de tenir compte
des différentes remarques émises par les personnels formés.

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Revista Baiana Image 5 − Flash de l’Eco-campagne “gestion des déchets” engagée par le CHU
de Saúde Pública
de NICE

Source : Direction de la Communication – CHU de NICE.

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ETAPE 5: MISE EN PLACE D’UN DISPOSITIF D’ÉVALUATION
Un projet d’amélioration à court, moyen et long terme s’articule autour
de nombreuses actions. Dès lors, il est nécessaire de disposer d’indicateurs de pilotage et de
mise en œuvre durant cette période d’application, mais également au-delà, dans un souci
de pérennisation de la démarche entreprise.
Nous entrons ainsi dans le domaine de l’évaluation. Évaluer… De quoi parle-t-on?
Quels en sont les enjeux? Voici bien des questions pour lesquelles nous allons tenter une
réponse “synthèse”. Définir l’évaluation n’est pas tâche facile tant elle s’inscrit généralement
dans un contexte et s’opère autant sur des objets, des finalités, des disciplines, ou encore sur la
nature même de l’exercice. L’on recense aujourd’hui autant de définitions que de théoriciens
qui, jonglant avec quelques mots-clés, se sont confrontés à l’exercice. D’une manière générale,
l’évaluation se veut comme “une démarche ou un processus conduisant à formuler un jugement
sur une action. C’est un jugement qualitatif ou quantitatif sur la valeur d’un processus, d’une
situation ou d’une organisation, en comparant les caractéristiques observables à des normes
établies à partir de critères et d’indicateurs explicites, en vue de fournir des données utiles à
la prise de décision dans la poursuite d’un but ou d’un objectif. En définitive, évaluer, c’est
comprendre, éclairer l’action de façon à pouvoir juger de son efficacité et disposer d’éléments
pour décider de la suite qu’il convient de lui donner.”11
D’importants outils ont ainsi été développés au CHU de NICE en ce sens et ont
permis d’induire, entre autre, les impacts de la dynamique générale instaurée autour de la
gestion des déchets. Selon le périmètre défini, l’évaluation s’est donc portée sur une ou plusieurs
actions, à un ou plusieurs projets, à la mise en application du programme, de la stratégie, de
la gouvernance instaurée. Ci-après, le listing des principaux indicateurs développés, et encore
utilisés en 2015.

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Revista Baiana Tableau 3 – Liste des principaux indicateurs développés en parallèle du projet
de Saúde Pública
Niveau de
Designation de l’indicateur Objectif de l’indicateur
l’indicateur
S’assurer que l’hôpital bénéficie d’une organisation
Gouvernance structurée et connue structurelle, fonctionnelle et connue, chargée de
mettre en œuvre le programme
Avoir connaissance des incidents relatifs à la gestion
Evènements Indésirables déclarés et
des déchets afin qu’ils soient traités et pris en compte
suivis
dans les orientations annuelles
Suivre l’échantillon des unités auditées afin qu’il
Unités de soins, médicotechniques et
soit suffisamment représentatif pour l’analyse des
logistiques auditées
résultats
Pilotage du
Processus Conformité institutionnelle relative aux S’assurer que les bonnes pratiques soient respectées
bonnes pratiques au sein des différents secteurs
Connaître le type de déchets produits et leur donner
Filières développées
un niveau de priorité
Connaître l’impact économiques de chaque filière
Charges financières liées aux
afin d’envisager des mesures répondant aux enjeux
prestations d’élimination des déchets
de “Développement Durable”
Connaitre le niveau de maturité du processus de
Maturité du processus
gestion des déchets au sein de l’établissement
S’assurer que l’établissement détient toutes les
Exhaustivité du répertoire administratif
informations administratives et règlementaires
des déchets
relatives à l’ensemble des filières développées
S’assurer que les professionnels aient pris
Agents formés à l’Eco-code gestion des
connaissance des règles de tri, de stockage et de
déchets
Mise en Œuvre transport des déchets
Operationnelle Documentation de référence mise à S’assurer que les professionnels de santé disposent
disposition pour l’ensemble des filières de la documentation de référence pour respecter les
développées bonnes pratiques
Recenser les projets opérationnels et transversaux
Evolution des organisations et des
mis en œuvre en faveur d’une meilleure gestion des
investissements
déchets

Source: Direction Qualité Risques Evaluation – CHU de NICE

Ce récapitualtif ne se veut en aucun cas exhaustif, d’autres indicateurs peuvent être priorisés en fonction des enjeux et des facteurs de
risques.

RÉSULTATS & DISCUSSION


La gestion des déchets répond à des règles qui lui permettent d’atteindre des
objectifs déterminés. Ci-après, l’évolution d’un panel de résultats issu d’un ensemble d’évaluations
et d’indicateurs que le CHU de NICE a mis en place afin d’apprécier la réalisation de ses actions.
Tous les indicateurs suivis ne sont pas présentés, mais seuls les principaux font
l’objet d’une discussion afin de démontrer la concrétisation et la tendance des principales
mesures structurelles entreprises.

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jan./mar. 2016 77
Indicateur 1 – Gouvernance structurée et connue

Unité: qualitative (OUI / PARTIELLEMENT / NON)


2010 2011 2012 2013 2014
Non Partiellement Oui Oui Oui

Comme démontré précédemment, la gouvernance est essentielle dans ce


projet et doit répondre à certaines caractéristiques. En 2010, la gestion des déchets ne faisait
l’objet d’aucune structuration interne, ce qui a notamment participé à la recommandation
prononcée par la HAS. A compter de 2011, un comité de pilotage a été instauré pour élaborer
un premier projet d’amélioration autour du sujet et a été officialisé dès 2012. Ce comité de
pilotage s’est ensuite développé et diversifié afin de répondre à de nouveaux enjeux. C’est à
compter de 2015 qu’il s’est inscrit dans une véritable gouvernance Développement Durable
conformément au nouveau projet d’Etablissement. La gestion des déchets est aujourd’hui
intégrée.

Indicateur 2 – Evènements Indésirables déclarés

Unité: quantitative (NOMBRE)


2010 2011 2012 2013 2014
Non quantifié Non quantifié Non quantifié 34 11

Dans le cadre du projet d’amélioration entrepris, transmis à la HAS en 2012, il


est apparu indispensable d’inclure dans le pilotage de la thématique le suivi des Evènements
Indésirables relatifs aux déchets. C’est pourquoi, dès 2013, ceux-ci ont été comptabilisés et
classés par référence (management, matériel, etc.). Cette action a permis d’agir à 2 niveaux:
niveau opérationnel, où des actions ont été apportées systématiquement à chaque déclaration
afin de répondre aux problématiques rencontrées et de favoriser une culture de la déclaration;
niveau institutionnel, où les évènements indésirables répertoriés et classés par référence ont
permis de participer annuellement à l’identification des orientations stratégiques.
A noter que l’évolution constatée entre 2013 et 2014 ne signifie aucunement qu’il
y a moins d’évènements indésirables en 2014. Cela peut aussi vouloir dire qu’une seule partie
a réellement été déclarée. Cette tendance montre tout l’enjeu actuel pour les établissements
de santé, dans lesquels il est nécessaire de convaincre le personnel à l’utilité de déclarer des
dysfonctionnements en vue d’une amélioration globale.

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Revista Baiana Indicateur 3 – Conformité institutionnelle relative aux bonnes pratiques
de Saúde Pública
Unité: quantitative (POURCENTAGE)
2010 2011 2012 2013 2014
Pas d’évaluation 79 85 81 81
Cible annuelle 2011-2012-2013-2014: 80% - 2015: 85%

Dès l’automne 2011, des évaluations de pratiques ont débuté sur l’établissement.
La méthode générale, toujours appliquée en 2015, consiste à effectuer de manière inopinée,
et en présence de l’encadrement de l’unité, une observation à partir d’une grille d’audit.
Cette dernière est d’ailleurs révisée chaque année afin de répondre aux nouvelles priorités et
maintenir un système dynamique.
Le pourcentage ainsi donné s’apprécie chaque année au regard des objectifs.
En matière d’organisation, la Direction Qualité programme ces audits et sollicite le service
d’hygiène pour effectuer leur mise en œuvre.
Au-delà de l’aspect “contrôle de conformité”, le CHU de NICE utilise cette
démarche pour communiquer et partager avec les équipes opérationnelles en vue de les
sensibiliser le plus largement possible. L’évaluation des pratiques doit être considérée comme
un moyen d’amélioration et non comme un simple contrôle (autoritaire).
Enfin, et décision importante tant en matière de portage institutionnel que de
reconnaissance des améliorations fournies, le score de conformité est également calculé par
pôle cliniques et médicotechniques, et donne lieu à un intéressement financier annuel.

Indicateur 4 – Filières développées

Unité: quantitative (NOMBRE)


2010 2011 2012 2013 2014
Non quantifié 21 24 26 27

Le CHU de NICE, comme tout hôpital, compte un grand nombre d’activités. Ces
dernières favorisant la production d’une grande quantité de déchets, il est utile de les recenser
au niveau institutionnel tant les enjeux sont importants. Aujourd’hui, compte tenu de l’incitation
générale qui s’installe en faveur d’un Développement Durable, les établissements ne peuvent
qu’être encouragés à développer des filières de recyclage et de valorisation. A titre d’exemple, le
CHU de NICE a dernièrement été soumis à une redevance spéciale “incitative”. Cette dernière,
s’inscrivant dans la règlementation française, consiste à facturer à toute entreprise ou toute

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jan./mar. 2016 79
administration du territoire métropolitain, une redevance “évolutive” à la quantité de déchets
qu’elle produit. Ainsi, si la quantité de déchets diminue, ou si l’établissement développe des
filières recyclables, alors les coûts appliqués seront moins importants. Il est donc dans l’intérêt
de l’institution de sortir des “ordures ménagères” les déchets “recyclables” (création de nouvelles
filières) en vue de diminuer les impacts financiers mais aussi les impacts environnementaux. La
quantité globale croissante de filières développées au CHU de NICE témoigne de cette dynamique.

Indicateur 5 – Production de déchets d’activité de soins à risques infectieux (DASRI)

Unité: quantitative (TONNE)


2010 2011 2012 2013 2014
1195 1008 815 799 813

En sus du suivi du nombre de filières au plan institutionnel, l’établissement analyse


aussi ses quantités pour chaque catégorie de déchets. Cette action permet alors de mettre un
niveau de priorité dans les mesures à entreprendre.
Selon l’OMS, les DASRI représentent environ 16% des déchets dangereux. Or,
si l’on étudie la question au niveau local, il apparait en réalité que les chiffres soient bien
plus importants. En effet, pour des questions de sécurité, les professionnels de santé ont
encore tendance à éliminer au travers de la filière infectieuse bien plus de déchets qu’ils
ne devraient. Au vu des tarifs liés à l’élimination de ces déchets, qui sont bien souvent très
importants, les établissements de santé ont intérêt à effectuer un tri rigoureux. Le CHU de
NICE l’a bien compris. Au travers de son Ecocampagne, les DASRI ont fait l’objet d’une
attention particulière, qui a permis de diminuer conséquemment les quantités. Si aujourd’hui
les résultats à la baisse sont satisfaisants, ils restent insuffisants. Le tri peut encore être amélioré
et fait l’objet d’un axe prioritaire dans le nouveau projet d’Etablissement.

Indicateur 5’: Production de déchets film radio

Unité: quantitative (KILOGRAMME)


2010 2011 2012 2013 2014
Non récupéré Non récupéré Non récupéré 535 10400

Depuis 2013, le CHU de NICE a fait un pas de plus en faveur de l’environnement.


En effet, l’établissement a organisé la collecte gratuite et confidentielle de toutes les radiographies
argentiques (encore en circulation). Une organisation pérenne s’est alors mise en place.

80
Revista Baiana Après un premier tri effectué localement, une société partenaire s’occupe de récupérer les
de Saúde Pública
films et les valorise de façon règlementée : les radiographies sont traitées selon un procédé
enzymatique sans rejet, permettant une valorisation de l’argent et un recyclage du plastique.
Cette récupération accessible à l’ensemble des professionnels et des usagers permet en plus du
respect de l’environnement, une valorisation financière qui permet au CHU de NICE de financer
l’élimination d’une autre filière (les archives papiers). Cet exemple, permet de démontrer que
le déchet peut concrètement devenir une réelle ressource financière, qui va au-delà du simple
objet dont il faut absolument se débarrasser.

Indicateur 6 – Charge financière relative au traitement des déchets

Unité: quantitative (EURO)


2010 2011 2012 2013 2014
Non quantifié Non quantifié 781 000 771 000 906 000

Si, pendant de nombreuses années, les déchets ont été trop peu considérés,
le contexte économique actuel oblige toute entreprise, tout établissement, à s’intéresser à
l’ensemble de ses processus et aux coûts associés. Un tableau de bord financier a ainsi été
développé au CHU de NICE et répertorie aujourd’hui l’ensemble des charges financières
relatives à l’élimination des déchets. L’on peut ainsi interpréter à la lecture des chiffres généraux
cités ci-dessus, que, si les charges ont entamé une légère diminution entre 2012 et 2013
conformément à une politique d’optimisation de tri, l’imposition de la redevance spéciale à
compter de 2014, qui jusque-là n’était pas appliquée, a changé la donne. Ainsi, tout l’enjeu
pour les mois et les années à venir sera de diminuer les coûts par la réduction même des
productions et l’instauration de nouvelles filières recyclables dont les coûts sont potentiellement
moins élevés. En conséquence, l’enjeu environnemental est intégré de facto.

Indicateur 6’ – Charge financière relative au traitement des déchets d’activité de


soins à risques infectieux

Unité: quantitative (EURO)


2010 2011 2012 2013 2014
715 000 654 000 562 000 549 000 530 000

De par le caractère dangereux des DASRI, l’élimination se fait dans des conditions
de sécurisation optimales, qui engendrent en conséquence des coûts importants. Ainsi et

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jan./mar. 2016 81
dans le contexte énoncé précédemment, l’objectif fixé par la Direction Générale en 2011 a
été de diminuer pour la fin de 2014, d’au moins 25% sans écart sécuritaire, les coûts relatifs
à l’élimination des DASRI. Avec 530 000€ en 2014, l’on constate alors une baisse de 26%.
L’objectif ayant été atteint, les économies engendrées ont été en partie réinvesties dans du
matériel utile à la gestion des déchets et à l’amélioration de son processus.

Indicateur 7 – Cumul des professionnels formés à l’Eco-code gestion des déchets

Unité: quantitative (EURO)


2010 2011 2012 2013 2014
Pas de formation 92 2659 3797 4160

Enfin, un des principe fondamental dans ce type de démarche est sans nul doute
l’information et la formation des professionnels de santé. Celles-ci participent indéniablement
à l’apport de connaissances et au changement culturel. En observant d’un peu plus près les
données exprimées ci-dessus, et outre 2011 qui fut l’année de lancement, une importante
mobilisation est observée dès 2012. La dynamique se poursuit en 2013 (+42% par rapport à
2012) et 2014 (+10% par rapport à 2013). Cependant, est observé un ralentissement notable
en 2014 malgré les 3500 professionnels restant encore à former. L’analyse qui émane de ce
phénomène, est la nécessité de rénover et d’actualiser en permanence le contenu du dispositif
afin de maintenir une dynamique progressive.

CONCLUSION
Les établissements de santé sont des structures très complexes avec des risques
très divers. D’ordre général, l’on entend par risque hospitalier, le risque encouru par le patient.
Cela dit, cette définition reste probablement très restrictive, car les hôpitaux accueillent en
leur sein un grand nombre d’acteurs qui bénéficient évidemment des services, mais s’ajoutent
à ceux-ci les acteurs qui produisent eux-mêmes ces dits services. Usagers, professionnels et
même visiteurs sont ainsi tous exposés à différents risques. Apparaît alors la notion de gestion
des risques en milieu de santé.
Cette situation, variée au possible, intègre la problématique des déchets
hospitaliers, génératrice de phénomènes majeurs. Ainsi, plusieurs changements fondamentaux
internationaux ont impacté les politiques générales des déchets au cours de la dernière
décennie. Ceci se démontre notamment au travers du déploiement de différentes politiques
des déchets liées à la santé publique. L’Organisation Mondiale de la Santé, mais pas que, joue

82
Revista Baiana un rôle important dans ce domaine, en proposant notamment la mise en œuvre de systèmes
de Saúde Pública
d’élimination des déchets liés aux soins, la mise au point d’une base de données, principalement
destinée aux pays en développement, l’élaboration de recommandations pour l’évacuation du
sang et des poches à sang ou encore une approche visant à promouvoir des activités de soins
produisant moins de déchets ou des déchets moins nuisibles.
Au-delà de ces orientations internationales, influençant sans nul doute les
politiques nationales et locales des Etats, les établissements de santé sont responsables des
actions entreprises. Ainsi, effectuer une gestion optimisée des déchets hospitaliers ne peut se
faire qu’avec l’intégration d’un certain nombre de préalables culturels et structurels au plus près
des problématiques:

• une ambition affichée du leader de l’établissement, se traduisant notamment


par une politique claire et affirmée;
• une gouvernance structurée, coordonnée et responsabilisée au service de la
gestion des déchets;
• un programme ordonnancé avec des objectifs opérationnels, mesurables et
cohérent avec le contexte;
• une culture d’adhésion par l’ensemble des professionnels sensibilisés aux
intérêts d’entreprendre une telle démarche d’amélioration.

Apparaît alors le modèle de management proposé par Stephen M.Shortell,


professeur à l’Université de Californie qui proposa un raisonnement autour de quatre
dimensions: stratégie, structure, technique et culture.
Au travers des éléments présentés précédemment, il convient par évidence de
mentionner la croissante tendance consistant à relier l’environnement à la politique de sécurité
et de prévention. Comme nous l’avons vu, les déchets hospitaliers sont très divers et peuvent
émaner de la prise en charge de patients mais également être générés par des activités supports
et transverses. La problématique alors mise en évidence se caractérise par une difficulté de tri à
la source, une logistique à améliorer et un environnement interne et externe à respecter. Ainsi,
la gestion des déchets devient incontournable pour la sécurité de tous, mais également pour
la protection de notre environnement permettant la préservation de notre qualité de vie. Se
dessinent alors les contours du Développement Durable.
En entreprenant une démarche Développement Durable, l’hôpital, qu’il soit
Brésilien ou Français, s’affiche progressivement comme responsable et bénéficie d’un avantage

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remarquable aux yeux des autorités et de la société. Si les premiers principes s’articulent autour
de la réduction des risques environnementaux et sociaux, ils deviennent à terme vecteurs
d’économie. S’engager dans un tel projet, permet ainsi à tout établissement de santé de devenir
encore plus efficace, plus performant et, de ce fait, de se positionner davantage au sein d’un
territoire. Ainsi l’établissement tend vers une offre novatrice, qui favorise la satisfaction de ses
parties prenantes, internes, comme externes, et limite l’émergence de risques. Une démarche
Développement Durable peut toutefois se heurter à certains freins : contexte économique,
déficit de culture ou encore résistance au changement. Ces difficultés sont bien présentes, mais
ne sont pas des obstacles incontournables.
Ce qui a été mené au CHU de NICE est reproductible à tout autre établissement,
quel que soit son domaine, quel que soit son pays de rattachement. Une forte volonté des
décideurs, un peu de méthode, et des professionnels convaincus sont les clés d’une réussite.

RÉFÉRENCES
1. Ambassade de France du Brésil. Le France et le Bresil en Chiffres [Internet].
Brasília; 2014 août [cité 2015 oct 25]. Disponible en: https://br.ambafrance.
org/Le-Bresil-et-la-France-en-chiffres

2. Séminaire International autour de la Qualité, l’Accréditation et la Sécurité


Patient organisé à Salvador de Bahia où le CHU de NICE a eu l’occasion
de participer dans le cadre d’un partage d’expérience entre la France
et le Brésil

3. France. Ministère de la Santé. Direction Générale de l’Offre de Soins. Chiffres


clés de l’offre de soins français; 2015.

4. Waste Atlas. Waste generation per capita [Internet]; Athens 2015 [cité 2015
oct 25]. Disponible en: http://www.atlas.d-waste.com/2015

5. Organisation Mondiale de la Santé. Les déchets liés aux soins de santé –


aide-mémoire n. 253 [Internet]. Genebra; 2015 nov [cité 2015 nov 20].
Disponible en: http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs253/fr/

6. Direction de la Communication Culture et Documentation du CHU de NICE.


Ciffres cles 2014. Nice; 2015.

7. Haute Autorité de Santé. La HAS [Internet]. Paris; 2015 [cité 2015 dez 01].
Disponible en: http://www.has-sante.fr/portail/jcms/fc_1249599/fr/la-has

8. Agence Régionale de Santé. Qu’est-ce que l’ARS [Internet]. Paris; 2015


[cité 2015 dez 01]. Disponible en: http://www.ars.sante.fr/Qu-est-ce-que-l-
ARS.89783.0.html

84
9. France. Ministère de l’écologie, du Développement Durable et de l’Energie.
Revista Baiana
de Saúde Pública L’évaluation: définitions [Internet]. Paris; 2015 [cité 2015 dez 01]. Disponible
en: http://www.cedip.equipement.gouv.fr/l-evaluation-definitions-a38.html

Reçu: 15.2.2016. Approuvé: 21.3.2016. Publié: 14.9.2017.

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