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Département de Droit public


Mémoire de fin d’études pour l’obtention du Master :
« Constitution et Gouvernance Financière »
Sous le thème :

La sincérité des prévisions et des


comptes et l’impératif de la
gouvernance des finances publiques

Préparé par l’étudiante: Dirigé par le professeur


ARICHE AOUATTEF A. MANSOUR

Année universitaire
2017-2018
Introduction générale

« Qu’est-ce que la sincérité ? Il est peu d’idées plus confuses », écrivait en


1944 Yvon Belaval1. Ce constat, émis par un philosophe, peut sans aucun doute
être transposé aujourd'hui au domaine juridique, tant la sincérité y paraît
difficilement saisissable. Notion politique, notion en pleine expansion en droit
positif, la sincérité demeure en effet nimbée d’un certain flou2. Or, le concept
de sincérité peut être moins flou, dès lors qu’on le limite dans le domaine des
finances publiques.

Pour Gaston Jèze, les finances publiques sont l’étude des moyens par
lesquels l’Etat se procure les ressources nécessaires à la couverture des
dépenses publiques et en réparti la charge entre tous les citoyens. C’est une
définition qui considère les finances publiques comme un instrument pour
permettre la réalisation de l’activité publique. C’est plutôt une approche
libérale puisque le budget n’est pas censé perturber les activités économiques
privées.3

Pour Pierre LaLumière, les finances publiques sont l’étude des moyens par
lesquels l’Etat cherche à réaliser des interventions dans le domaine
économique et social. Dans cette approche, les finances publiques ne sont pas
neutres, mais agissent dans la vie des citoyens. On n’est plus dans l’Etat
gendarme, mais bien dans l’Etat providence. Les néo-libéraux justifient
l’extension de l’intervention de l’Etat parce que l’Etat est vu comme le garant
de la bonne marche du marché. C’est à l’Etat d’assurer que les conditions sont
réunies pour que la concurrence puisse s’exercer de la meilleure façon

1 Yvon BELAVAL, le souci de sincérité, coll. La jeune philosophie, Paris, Gallimard, 1944, In « Olivier LE BOT, la
sincérité, une exigence juridique en diffusion, Larcier, 2011, P.9 ».
2 Olivier LE BOT, la sincérité, une exigence juridique en diffusion, Ibid, P.9
3 Gaston JÈZE, cours de finances publiques, librairie de droit et de jurisprudence, Paris, 1936, In « cours de

finances publiques, http://www.cours-de-droit.net », le 10/06/2018 à 16h00 ».

1
possible. On va estimer que l’Etat doit être le garant de liberté d’entreprendre,
de la libre circulation, etc.1

Face à cette pensée libérale et néo-libérale, certains économistes qui


estiment que la main invisible ne justifie pas, il faut des mécanismes
d’ajustement du marché. En gros il appartient à l’Etat de soutenir l’économie,
de soutenir l’emploi, ce qui se traduit par des politiques de relance, et donc par
l’engagement de dépenses publiques. A la sortie de la Seconde Guerre
mondiale, on a parlé d’Etat providence parce qu’il y a eu une extension des
missions de l’Etat.

Les finances publiques sont au cœur de l’action politique, elles sont les
leviers de l’action publique, elles sont également l’expression de choix de
société que ce soit par les recettes ou les dépenses, les finances publiques vont
permettre aux acteurs d’avoir un poids sur la croissance économique, de
répartir les ressources, et de développer certains secteurs. En effet, l’Etat va
être soit un acteur de la vie économique, soit il va agir sur les activités privées
économiques. Les finances publiques agissent également sur la répartition des
ressources, les réformes fiscales quelles qu’elles soient ambitionnent de
trouver un moyen juste de répartir le poids des prélèvements obligatoires par
des mesures fiscales.

L’évolution du droit des finances publiques est très souvent le reflet de


l’histoire politique. Un exemple ; En France sous la IIIème république l’on avait
une procédure budgétaire qui est extrêmement favorable au parlement qui lui
laisse une grande marge de manœuvre. A l’inverse l’on a aujourd’hui une
certaine méfiance à l’égard du Parlement, et donc l’ordonnance du 2 janvier

1Pierre LALUMIÈRE, les finances publiques, A. Colin, édition 6, Paris, 1971, In « cours de finances publiques,
op.cit,

2
1959 qui encadre le droit budgétaire au début de la Ve république, est plutôt
favorable à l’exécutif.

Cette tendance se justifie, en effet, la souveraineté budgétaire est à


l’ordre du jour des préoccupations de tous les Etats développés ou en voie de
développement. Les choix budgétaires sont de plus en plus utilisés comme
stimulateurs de la croissance économique, des intrants des politiques
publiques sociales ou outils des réformes structurelles.

Dans ce Droit budgétaire, certains principes remontent à l’Ancien Régime ;


surtout, le principe du consentement à l’impôt, la fiscalité…etc.
Progressivement, il a été connu aux représentants de la nation, le droit
d’autoriser périodiquement les recettes et les dépenses de l’Etat… Le droit
budgétaire, lui-même découle de règles anciennes, ainsi que les institutions
budgétaires.

Le principe du consentement à l’impôt était déjà connu en Angleterre,


puisque dès 1214 avec la Grande Charte, les barrons anglais ont imposé au roi
leur consentement aux prélèvements royaux. « Aucun tribut ne pourra être levé
sans le consentement des peuples ». De la même façon, dans le Bill of Rights, un
article consacre le principe du consentement à l’impôt par le Parlement. Les
textes anglais ont consacré ce principe, cette notion de consentement à l’impôt
on va la retrouver cette fois-ci aux Etats-Unis, chez les insurgés américains, face
au Parlement anglais. En effet, la déclaration d’indépendance du 4 juillet 1776,
proclame l’obligation d’obtenir le consentement des citoyens pour prélever des
taxes. Cette revendication va être à l’origine de la révolution américaine, et de
la formation des Etats-Unis. 1

1 Éric DEVAUX, finances publiques, Edition Bréal, Paris, 2002, PP 8-9

3
Sous le premier empire, peu d’avancées ont été réalisées, et il n’est pas
question de consacrer des droits et des pouvoirs, on n’a pas pensé à organiser
un droit budgétaire. En revanche la Cour des comptes est née, puisqu’elle date
de 1807. Cette cour des comptes est une institution au service du pouvoir
exécutif, c’est-à-dire au service de l’empereur. L’institution a une certaine
méfiance à l’égard des juridictions, du pouvoir juridictionnel et judiciaire.

Ainsi la cour des comptes, en 1807 n’a qu’une attribution limitée au


jugement des comptes des comptables principaux. Elle ne peut juger les
représentants de l’exécutif, et elle ne peut profiter du jugement des comptes
pour critiquer leurs décisions. Elle rend également un rapport à l’empereur
pour mettre en évidence des défaillances des différents comptables. C’est une
institution financière qui a déjà certaines caractéristiques.

Sous la restauration, le principe du consentement à l’impôt est inscrit dans


la Charte de 1814, le plus important c’est qu’avec la Restauration l’on va avoir
des règles de procédures budgétaires qui vont se mettre en place ; que les
finances publiques soient gérées, en bon père de famille, que l’usage des
deniers publics soient suivi. Les règles de procédure qui vont être mises en
place vont reconnaitre des prérogatives au Parlement et notamment à partir de
1816, avec le premier budget voté. L’adoption de ce budget, et son exécution
vont être encadrés par ce qu’on appelle les « principes budgétaires ».

En 1818, le baron Louis, (ministre des Finances) faisait remarquer que :


«l’administration des finances doit être tellement transparente que chaque
contribuable puisse la juger comme ses propres affaires et observer en quelque
sorte, la marche de ses impôts jusqu’à la destination pour laquelle il les avait
payés ». La toute-puissance des chambres a progressivement commandé que
celles-ci puissent disposer d’informations précises et justes afin de mieux

4
contrôler le pouvoir exécutif. La transparence des Finances publiques est
assurée par la consécration des principes budgétaires et le développement
des règles de la comptabilité publique. Les grands principes du droit
budgétaire apparaissent pendant cette période : Le principe d’unité a été posé
pendant la Révolution en 1794 ; Le principe d’universalité apparaît en 1822 ; Le
principe de spécialité est issu d’une loi de 1817, en même temps que la règle
du caractère limitatif des crédits ; Le principe d’annualité est consacré dès la
Constitution. La sincérité est tellement évidente, à l’époque, qu’elle n’a jamais
été posée par les textes !1

Il est à remarquer que ces principes favorisent l’accroissement du pouvoir


du Parlement, c’est donc assez logiquement que sous la Restauration il y avait
parallèlement la volonté de faire émerger le droit budgétaire et l’accroissement
des pouvoirs du Parlement. Du point de vue institutionnel, c’est à cette époque
qu’on voit apparaître une administration des finances moderne et puissante en
France.

En revanche, au Maroc, Le système des finances publiques n’a été mis en


place que pendant la période du protectorat ; avant cette période, il n’existait
pas, au sens moderne du terme, de notions de finances publiques ou de budget
d’Etat. Il existait, néanmoins, des semblants de finances publiques basées sur
l’interprétation du Coran et de la Tradition (deux sources du droit musulman).
Le protectorat, institué dès 1912, a cherché à inscrire les finances publiques du
Maroc dans le cadre du droit positif en s’inspirant des textes de droit français.
De 1956 à 1963, les lois de finances sont élaborées, adoptées et mises en
œuvre.

1 Éric OLIVA, finances publiques, Dalloz, 3ème édition, Paris, 2015, P.10

5
Depuis 1956, le Maroc tente de fonder son propre ordre juridique des
finances publiques, qui fut couronné dans un premier temps par la
promulgation du texte constitutionnel en 1962, la constitutionnalisation du
droit des finances publiques, bien que datant de la première Constitution
entrée en vigueur en 1962, ne cesse d’évoluer à travers les différentes révisions
constitutionnelles, les lois organiques relatives aux lois de finance…Cependant,
son acception moderne, n’a vu le jour qu’après la promulgation de la première
constitution le 17 Rajab 1382 (14 décembre 1962). L’histoire du droit et des
institutions au Maroc, atteste de l’existence d’une corrélation systématique
entre les révisions constitutionnelles et la refonte des lois organiques régissant
le budget de l’Etat. En fait, cette corrélation est tributaire de l’effet d’impulsion
qu’exercent les mutations et les changements des contextes politique,
économique et social sur l’évolution des lois organiques relatives à la loi de
finances.

Dans un monde désormais régi par la gouvernance, l’État perd son statut
particulier. Il est de plus en plus assimilé à l’entreprise. Gouverner n’est donc
plus le monopole de l’État, mais il s’agit d’une fonction qui appartient à toute la
collectivité. À l’instar des pays de l’OCDE qui, dès les années 1980 et 1990, ont
mis en place selon des rythmes différenciés, une ampleur plus ou moins grande
et des voies diverses, un système de gestion de la performance dans le secteur
public notamment la gestion budgétaire, le Maroc a amorcé depuis presque
plus d’une décennie un processus de réforme de son système financier public
et il s’inscrit dans un vaste mouvement international de modernisation.

L’Etat marocain, avec tout le débat qui l’anime aujourd'hui, à besoin de


procéder à une refonte de l’action publique pour la rendre plus performante et
plus efficiente. C’est ce qui traduit les tentatives encourageantes d’adaptation
de la gestion privée au secteur public à l’instar de ce qui se passe partout dans
6
le monde dans le cadre de la bonne gouvernance financière. Ainsi des
réformes sont entamées dans divers secteurs notamment la réforme fiscale, la
modernisation de la gestion du budget de l’État et la mise en place de la
protection sociale. Ces réformes portent essentiellement sur les modes les plus
efficaces et les plus efficients du management du secteur public. 1

Le Maroc s’est engagé, donc, depuis quelques années, dans un vaste


processus de réforme des finances publiques. Ainsi, La Constitution de 2011 a
instauré le principe d’équilibre budgétaire et a apporté une meilleure
clarification des pouvoirs législatif et exécutif en matière budgétaire.

Dans le même cadre, la Constitution a consacré le rôle de la Cour des


comptes dans la consolidation et la protection des principes et valeurs de
bonne gouvernance, de transparence et de reddition des comptes publics.
L’adoption en 2011 de la nouvelle constitution2 a rendu nécessaire la refonte
de la loi organique n°7-98 relative à la loi de finances3 afin de prendre en
compte les nouveaux principes constitutionnels encadrant les finances
publiques. Conséquemment à ces exigences, la nouvelle loi organique n°130-
13 relative à la loi de finances4 fournit un cadre législatif pour consacrer les
différentes mesures entreprises au cours de ces dernières années dans le cadre
de la modernisation de la gestion des finances publiques.

La LOLF 130-13 de 2015 qui définit de nouvelles règles budgétaires et


comptables consacre les principes de reddition des comptes et d’évaluation,

1 Abderrahim TADA, audit et contrôle des comptes de l'Etat : vers un modèle de consolidation et de
certification des comptes publics au Maroc, thèse pour l’obtention du Doctorat en droit public, faculté des
sciences juridiques, économiques et sociales, Fès, 2016-2017, P.7
2 Dahir n° 1-11-91 du 21 chaabane 1432 (29 juillet 2011), portant promulgation du texte de la constitution,

Bulletin officiel n° 5964 bis du 28 chaabane 1432 (30/07/2011).


3 Dahir n° 1-98-138 du 7 chaabane 1419 (26 novembre 1998) portant promulgation de la loi organique n°7-98

relative à la loi de finances, Bulletin Officiel n° : 4644 du 03/12/1998, P. 853


4 Dahir n° 1-15-62 du 14 chaabane 1436 (2 juin 2015) portant promulgation de la loi organique n° 130-13

relative à la loi de finances, Bulletin Officiel n° : 6370 du 18/06/2015, P. 3109.

7
élargit le droit d’amendement parlementaire et participe au renforcement de la
transparence budgétaire. Elle représente donc une mutation des processus de
la gestion financière publique et une évolution importante dans les pratiques
budgétaires de l’administration publique marocaine, non seulement en raison
des changements des règles législatives mais aussi parce que la mise en œuvre
de la LOLF modifie profondément les pratiques et les comportements.

Cette loi organique a érigé le budget de l’Etat comme principal outil de


mise en œuvre des politiques publiques et a institué l’obligation de certification
des comptes de l’Etat par la Cour. A travers cette loi organique, le législateur
s’est assigné comme objectif stratégique une plus grande efficacité dans la
gestion des finances publiques et le renforcement de la transparence dans la
gestion publique1. Et cela, en parallèle à l’obligation de la sincérité des
prévisions et des comptes de l’Etat.

En Droit, l’exigence de sincérité se déploie dans tous les domaines :


budgétaire, fiscal, électoral, processuel, économique, administratif,
répressif…etc., la notion, incontestablement, est dans l’air du temps.

Deux phénomènes paraissent en être à l’origine. Le premier correspond à


la montée en puissance d’une exigence de transparence. Il s’agit de mettre à
nu : mettre à nu les processus, mettre à nu les actes, mettre à nu les situations.
La transparence procède de l’idée de ne pas s’arrêter à l’aspect extérieur des
choses mais au contraire de pénétrer, sinon l’intime, du moins, le cœur ou
l’intérieur de celle-ci pour y découvrir la réalité profonde, pour voir si la réalité
n’a pas été dissimulée ou déformée. La sincérité participe de cette logique
consistant à vérifier si ce que l’on montre correspond à la réalité.

1 Mohammed BASTAOUI, la cour des comptes : acteur clé de la souveraineté budgétaire des États,2017, P.1
www.tgr.gov.ma/wps/wcm/connect/433ade0e-a308-4bfe-a67f-2bba31214c80/Bastaoui-
fondafip2017.pdf%3FMOD%3DAJPERES%26ContentCache%3DNONE&ved=2ahUKEwiutbnOg4_cAhXBBywKHdZ
XAngQFjAGegQIARAB&usg=AOvVaw0PRUFk2Ym-7XAhpU34WL4O

8
Un second phénomène peut expliquer le développement de la notion
juridique de sincérité : il résulte de l’influence d’un courant, certes minoritaire
mais néanmoins réel, qui vise à promouvoir la place des valeurs dans le droit et
à instiller, par ce biais, une plus grande moralité dans les relations juridiques. La
sincérité s’inscrit dans cette démarche en cherchant à imposer une certaine
droiture chez les opérateurs et dans les opérations juridiques. On attend de
cette notion qu’elle soit un facteur d’honnêteté des actes et des procédures.

Ces deux phénomènes (recherche de transparence et volonté de


moralisation) agissent de concert dans le sens d’une promotion, en droit, de la
notion de sincérité.1

Fondamentalement adaptée à l’esprit et aux institutions de son temps, la


sincérité en finances publiques est présentée comme un principe nouveau.
Certes, politiquement, l’affirmation de la nécessaire sincérité des préparations
du budget ou de leurs évaluations date essentiellement de la seconde moitié
du XIXème siècle. Mais juridiquement, cette règle n’est apparue que
récemment.2

Ce principe, qui a été initialement dégagé par la jurisprudence du


Conseil constitutionnel, repose sur l’idée que la sincérité des prévisions
budgétaires conditionne le respect du principe du consentement à l’impôt.3
C’est à compter de 1993 que le Conseil constitutionnel (CC) Français a été saisi
par les parlementaires requérants d’arguments tirés de l’insincérité des lois de
finances.

La loi organique des lois de finances (LOLF) française de 2001, à son tour,
applique la sincérité aux comptes de l’État et aux lois de finances . Elle a

1 Olivier LE BOT, op.cit, P.11


2 Laurent PANCRAZI, le principe de sincérité budgétaire, l’Harmattan, 2012, P.21
3 Jean-Claude ZARKA, finances publiques, Gualino, France, 2018, P. 18

9
consacré le principe de sincérité au travers de deux articles (art. 32 et33) réunis
au sein d’un chapitre intitulé : « Du principe de sincérité ». Aux termes de ces
dispositions, « les lois de finances présentent de façon sincère l’ensemble des
ressources et des charges de l’État. Leur sincérité s’apprécie compte tenu des
informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en
découler. »1

En outre, « les comptes de l’État doivent être réguliers, sincères et donner


une image fidèle de son patrimoine et de sa situation financière » 2. Le juge
constitutionnel pourra ne pas avoir la même conception de la sincérité que la
Cour des comptes.

C’est ensuite la Constitution française avec son nouvel article 47-2,


introduit à la faveur de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, que le
principe budgétaire de sincérité a bénéficié d’un fondement constitutionnel.
Aux termes de ces dispositions, les comptes des administrations sont publics et
sincères, ils donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur
patrimoine et de leur situation financière. Ainsi consacré, ce principe de
sincérité permet d’envisager qu’une loi de finances puisse être censurée dès
lors que peut être établie l’intention du Gouvernement de fausser les grandes
lignes de l’équilibre budgétaire.3

En suivant son homologue français, le législateur organique marocain a


consacré le principe de sincérité des prévisions et des comptes de l'Etat
presque de la même exigence française, à travers les articles 10 et 31 de la
LOLF 130-13 qui reprennent les mêmes phrases des articles 32 et 33 de la LOLF

1 Article 32 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), JORF n° 177
du 2 août 2001, P. 12480
2 Article 33 de la LOLF française, pré -citée.
3 Stéphanie DAMAREY, l’essentiel des finances publiques, Gualino, 6ème édition, France, 2018, p.56

10
française, sans oublier aussi le rôle du Conseil constitutionnel marocain dans la
confirmation de ce principe avant même son consécration.

Mais avant sa consécration et sa reconnaissance comme principe, la


sincérité, qualifiée de concept, est une idée, en tant qu’abstraite et générale,
ou du moins, susceptible de généralisation.

Étymologiquement, l’expression nous vient du latin (d’époque impériale)


sincéritas, qui signifie pureté ou intégrité, au propre et au figuré. Il est un
dérivé de sincerus (qui a donné le mot sincère) qui signifie pur, intact, non
fardé ou encore non corrompu. On retient de cette origine latine l’idée de
pureté, d’intégrité. 1

Le terme sincerus aurait désigné le miel pur, puis par extension, tout ce
qui est « sans mélange d’éléments suspects. Être sincère c’est refléter l’image
naturelle de la vérité toute simple et toute nue ». En partant de cette origine,
on peut considérer qu’être sincère « c’est se montrer tel qu’on est, sans fard et
non pas avec une figure d’emprunt. Sous son aspect subjectif, la sincérité est
une manière d’être, en vertu de laquelle, nous portons à notre connaissance
personnelle comme à celle d’autrui des représentations adéquates de nos
réalités intérieures. L’homme d’une sincérité idéale, ce serait l’homme qui
reflèterait, dans sa propre conscience d’abord et dans ses modes d’expressions
ensuite, tout le contenu et rien que le contenu de ses idées et de ses
sentiments ; ce serait l’homme qui traduirait tout ce qu’il sent et tout ce qu’il
conçoit, fidèlement et intégralement, par- devant ses semblables aussi bien que
par-devant lui-même »2.

1 Olivier LE BOT, op.cit. P.9


2 Laurent PANCRAZI, op.cit. P.27

11
On le voit, à travers ces sens, la sincérité peut porter sur deux objets. Elle
a trait, soit à ce que la personne est, soit à ce qu’elle fait. Mais lorsque le droit
consacre une obligation de sincérité, il ne vise jamais les personnes mais
uniquement leurs actions.

En matière budgétaire, la sincérité, tout particulièrement, irrigue sous des


formes diverses et encore imparfaitement définie par le droit, l’ensemble des
documents budgétaires1. Celle-ci intervient dans un contexte de changement
rapide qui affecte tant le droit budgétaire que les finances publiques elles-
mêmes dans leurs rapports avec d’autres disciplines.

Mais à partir de la LOLF le principe de sincérité est une norme de contrôle,


relative à l’ensemble des lois de finances et non seulement au budget de
l’État : c’est la sincérité budgétaire au sens large ou la sincérité des prévisions
et des comptes de l'Etat

En tant qu’état de prévisions, le budget est un devis d’administration dans


lequel le gouvernement cherche à prévoir le montant des sommes dont il a
besoin pour assurer le fonctionnement des services publics dans la période
envisagée. Il s’applique à l’estimation des recettes et des dépenses probables
dans une certaine période à venir. La sincérité budgétaire, au sens strict, exclut
donc la loi de règlement qui est un instrument de reddition des comptes et qui
clôture l’exercice. La sincérité budgétaire se distingue aussi des comptes qui ne
sont pas prévisionnels et donc de la comptabilité publique qui vise à enregistrer
les opérations d’exécution et à s’assurer de la régularité de celle-ci.2

La consécration du principe, au Maroc, peut apporter, à l’instar de


l’expérience française, une amélioration de la transparence des finances

1 Dominique LANBECK, les principes budgétaires locaux, presse universitaire d’Aix-Marseille,(PUAM),France,


2001, p.19
2 Laurent PANCRAZI, op. cit. , pp 39-40

12
publiques et de leurs gouvernance, et le renforcement de la performance de la
gestion publique, à quoi s’ajoute l’accroissement du rôle du parlement dans le
domaine budgétaire, dans le contrôle des finances publiques et dans
l’évaluation des politiques publiques pour en instaurer une véritable culture de
la corrélation entre la responsabilité et la reddition des comptes.

Ce travail qui vise, en fait, à approfondir les principales idées traitées dans
cette introduction et bien d’autres concernant le principe de sincérité des
prévisions et des comptes de l'Etat au Maroc et en France, pourrait constituer
un pas dans la carrière de la science juridique, en éclaircissant les notions et les
conceptions théoriques et en découvrant les contraintes limitant l’application
du nouveau principe en finances publiques pour les combattre et ainsi
améliorer la transparence des finances publiques en particulier la
gouvernance financière en général.

Cette logique de transparence et de gouvernance nous amène à poser la


problématique suivante :

Quelle place pour le principe de sincérité budgétaire et comptable comme


outil de transparence et de crédibilité dans la rationalisation et la
gouvernance des finances publiques ?

Partant de cette problématique principale, la logique exige, au sein des


analyses qui suivent, d’apporter des éléments de réponse à quelques questions
secondaires:

• Quels sont les fondements du principe de sincérité en finances publiques ?


• Quels sont les aspects et les dimensions de ce principe ?
• Comment se matérialise le principe de sincérité par rapport aux autres
principes budgétaires ?

13
• Quels sont les principales contraintes qui limitent l’application du principe
de sincérité et qui entravent le contrôle de celle-ci ? Et quelles sont les
procédures pour lutter contre ces obstacles ?
• Et quel lien de son application avec la gouvernance financière ?

Théoriquement, l’hypothèse de recherche de ce travail est la


confirmation que le principe de sincérité budgétaire et comptable à un impact
positif et un rôle primordial dans la rationalisation et la gouvernance des
finances publiques.

Force donc, est de vérifier cette hypothèse à travers ce travail; et pour y


procéder, l’étude opte pour des méthodes variées mais complémentaires.
Ainsi, il est fait appel à l’approche juridique, et en adoptant plusieurs méthodes
d’analyse à savoir : la méthode normative, la méthode comparée, la méthode
historique, la méthode analytique et descriptive, ainsi que quelques
techniques, en particulier statistique.

En vue de la rédaction et la présentation de ce travail, une structure


binaire est adoptée. Un cadre rédactionnel en deux parties, la première partie
théorique est ainsi réservée aux notions et implications du principe de sincérité
en finances publiques, alors que la seconde fera l’objet d’une analyse de
vérification de l’effectivité opérationnelle et du contrôle de sincérité. Et ce
selon le plan suivant :

Première partie : la sincérité des finances publiques : les implications du


principe.

Partie deuxième: l’effectivité opérationnelle du principe de sincérité et


gouvernance financière.

14
Première partie : la sincérité des finances publiques : les implications du
principe

D’une reconnaissance récente dans la littérature des finances publiques, le


principe de sincérité budgétaire renferme une notion à dimensions multiples,
sa mise en place s’inscrit progressivement au fil de l’histoire politique et
institutionnelle des pays, et à l’issu de grands mouvements sociétaux de droits
de l’Homme et de la démocratisation.

Si la jurisprudence du conseil constitutionnel français a remarquablement


contribué à l’inscription de la sincérité dans l’ordre juridique financier, le
dernier né des principes budgétaires est explicitement consacré par la loi
organique relative à la loi de finances en France et au Maroc plus tard.

De nos jours, ce principe devient un critère majeur de la transparence, de


gouvernance, et surtout de la crédibilité du travail gouvernemental et de
l’effectivité des contrôles parlementaire et constitutionnel.

Vu cette importance l’analyse porte dans cette partie sur les origines et
implications du principe (chapitre I), puis sur sa complémentarité et sa
corrélation avec les autres principes budgétaires classiques (chapitre II).

Chapitre I: la sincérité en finances publiques : les implications du principe

La sincérité budgétaire est un principe majeur en finances publiques.


Comparé à d’autres principes, sa consécration juridique est récente, aussi bien
au Maroc qu’ailleurs. Pourtant la doctrine des finances publiques a insisté sur
son importance depuis longtemps. Cela veut dire que la sincérité en tant que
norme de référence a des racines lointaines et dont l’élaboration était
progressive (section I).

15
Ceci étant, la question de la sincérité en soi est typiquement une question
philosophique désincarnée et discutable à l’infini. Cependant dès que l’on
ajoute budgétaire et comptable (section II), il semble que la connotation
philosophique disparaisse et que l’on entre dans le concret, le solide et le
certain.

Section I : l’élaboration progressive d’un nouveau principe budgétaire

L’apparition de l’exigence de sincérité en matière de finances publiques


est intimement liée à la prise de conscience par le pouvoir législatif de ses
intérêts distincts du pouvoir exécutif. Cette notion lui a été utile comme moyen
d’affirmer ses prérogatives et de contrôler l’action de l’administration.

Il ressort de ce qui précède que la sincérité avait ses profondes racines


historiques en tant que norme de référence en finances publiques (§1) avant
d’être consacrée juridiquement (§2).

§1- la conceptualisation de la sincérité en tant que norme : les racines

Si l’affirmation du principe de sincérité en finances publiques est


relativement récente (B) car la codification de ce principe n’intervient qu’au
début des années 2000, les racines de la notion même sont beaucoup plus
anciennes (A). Elles découlent d’un certain nombre de circonstances et de
mouvements d’histoire sociale et politique.

A- les origines plus anciennes

Les finances publiques sont issues d’une longue histoire traversée


notamment par une préoccupation fondamentale, celle de la transparence
financière; le point de départ de long processus remonte à la « Magna
Carta »(1215), le « Bill of right »(1668) et bien évidemment « la déclaration des
droits de l’homme et du citoyen »(1789).

16
En effet l’article 15 de cette dernière annonce sans équivoque que la
« société a le droit de demander compte à tout agent public de son
administration…par l’obtention de renseignements exacts et sincères »1

C’est alors dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen que se


trouvent les premières manifestations de l’exigence de sincérité budgétaire2.
En plus de l’article 15, les articles 13 et 14 de ladite déclaration consacrent
l’idée que la nation, par sa représentation parlementaire, a le droit de consentir
les impôts, d’en constater la nécessité et d’en suivre l’emploi, ainsi que de
demander des comptes à son administration3.

Sur le plan historique, le rôle du parlement est fondamental. C’est à partir


du début du XIIIème siècle, que l’idée du consentement à l’impôt devient le
support des premières ébauches d’organes parlementaires ; et avec
l’institutionnalisation définitive du parlement, les règles de droit budgétaire
vont s’établir et se stabiliser, les parlementaires, en gagnant le droit de voter
les autorisations de dépenses, vont jouer un grand rôle dans le contrôle de la
sincérité des comptes4.

C’est avec l’institutionnalisation définitive du parlement (au XIXème siècle


dans le cas français) que la sincérité budgétaire va prendre place. Ainsi, elle
trouve ses fondements historiques à une époque de rupture avec un système
préexistant ayant montré ses limites.

En France, la période révolutionnaire va, en effet, en réaction à l’ancien


droit, dégager des concepts tels que le consentement à l’impôt ou le contrôle

1 Assou Mansour, la sincérité des prévisions et des comptes budgétaires : une exigence démocratique, revue
marocaine des finances publics (REMAFIP), n°3, 2013, PP.10-11
2 Laurent Pancrazi, op.cit, P. 51
3 Franck Waserman, les finances publiques, 8ème édition, direction de l’information légale et administrative,

paris 2016, p.24


4 Ibid, p.23

17
de la dépense publique, concepts qui vont permettre l’épanouissement du
principe de sincérité1.

Sous l’ancien régime, l’administration des finances de l’Etat royal


appartenait au monarque lui-même et il n’était question ni de rendre publiques
les dépenses et les recettes étatiques, ni de déléguer à d’autres institutions
l’adoption des impôts et la fixation des dépenses du royaume. Le trait majeur
de l’histoire politique des XVIème et XVIIème siècle en Europe a été, en effet, la
construction d’appareils étatiques centralisés.

Sous le règne de Philippe V le Long, l’ordonnance du 18 juillet 1318


organise une véritable « chambre des comptes », afin de voir chaque année
son état de fortune établi par des gens des comptes.2

Le souci de sincérité des comptes n’est pas non plus totalement absent
comme en atteste l’édit de septembre 1522 par lequel Henri II avait ordonné à
tout receveur général de bailler état en entier et au vrai à son trésorier, de
toute la recette et de la dépense de chaque année expirée et de lui exhiber les
pièces justificatives de ses opérations3.

De même, la question du contrôle de l’exécution budgétaire n’est pas


totalement occultée non plus. Les chambres des comptes exercent sur les
ministres et les agents d’exécution un contrôle dont elles puisent les éléments
dans l’examen des comptes présentés par les comptables. Mais c’est au
souverain seul que sont destinés les résultats de ce contrôle. Il convient aussi
de relever que le développement de la comptabilité ne sert pas uniquement à
contrôler les ministres et les agents, il apparait également le souci de
préserver le domaine de la couronne contre la propre prodigalité du roi. Mais la
1 Laurent PANCRAZI, op.cit. , p.53
2 Ibid, p.54
3 Idem, p.55

18
question de la sincérité se limite à une transparence à usage interne : la
couronne n’est inaliénable que parce que le roi a fait le serment qu’il en ira
ainsi. Les comptes fournis lui permettent de se discipliner1.

Mais le royaume du France paraît avoir surtout anticipé ce mouvement


dans la mesure où les rois de France, plus que tous les autres souverains, ont
pu construire des budgets considérables qui reposaient entièrement sur les
contributions financières de leurs sujets. Ceux-ci étaient censés les avoir
consenties. Le principe dit du « consentement à l’impôt » est né au moyen âge
au moment de la guerre de cent ans, lorsque le roi, ne pouvant plus vivre du
sien comme n’importe quel seigneur de son royaume, doit trouver des
ressources financières nouvelles et importantes pour suppléer aux revenus de
son domaine. La gestion comptable se perfectionne et fait apparaître les
manques constants de ressources avec pour effets paradoxal de justifier le
recours à l’impôt.2

Dans un climat de défiance à l’égard des gouvernements, les principes


révolutionnaires tentent de restaurer la confiance et la clarté dans les comptes
publics, en d’autres termes « l’ordre et la lumière ». Les cahiers des baillages et
sénéchaussées en 1789 sont unanimes à réclamer le vote des contributions par
les élus du pays et ils s’accordent, en grand nombre, sur la nécessité de
soumettre annuellement à l’assemblée nationale le compte public des recettes
et des dépenses de l’État.3 La clarté des comptes et le consentement à l’impôt
sont ainsi consacrée.

Les apports constitutionnels de la période révolutionnaire qui s’œuvre en


1789 sont majeurs. Ils résident d’une part dans la reconnaissance de la liaison

1 Idem, p. 55-56
2 J-M THIVEAUD, histoire de la finance en France, T.1, édition PAU, 1995, p.135.
3 LAURENT PANCRAZI, op.cit., p.58

19
entre le consentement à l’impôt et le vote de la dépense, qui sont
expressément prévues dans les articles 13 et 14 de la déclaration de 1789 et,
d’autre part, dans la reconnaissance du contrôle nécessaire de l’usage des
deniers publics qui se matérialise par la mise en place d’une organisation
comptable aboutissant à une reddition des comptes publics.1

A la révolution l’on envisagea un contrôle global des crédits avec


l’imbrication croissante de la sphère publique dans l’économie, les simulacres
de comptes ne pouvaient perdurer. A cette époque plusieurs juristes français
[Nicker (1781), Calonne(1787), Loménie de Brienne(1788) ou Cambon(1792)]
ont tour à tour proposés leur vision « sincère » des comptes. En parallèle, les
discussions portaient sur la régularité du rendez-vous budgétaire qui est une
mise en application de la sincérité car l’on sait que la prévision budgétaire tout
comme le contrôle des exécutions ne sont satisfaisants que dans un laps de
temps ni trop long ni trop court.2

Mais il faudra attendre la restauration pour que la sincérité requière les


dimensions plus larges. C’est à cette période du temps qu’apparaître l’exigence
de la clarté qui, alliée à la spécialité budgétaire, est une condition de la
sincérité. « c’est sous la restauration qu’une étape a été franchise dans le sens
de la sincérité avec la règle de la spécialité laquelle constitue un ensemble de
jalonnements qui permettra d’arriver plus sûrement et plus rapidement au but
qui est l’administration sincère, claire et consciencieuse des finances de
l’État…le principe de sincérité, et avant lui la transparence a été avancé tel un

1Ibid, p.60
2JEAN-FRANCOIS JOYE, la sincérité premier principe financier, revue française de finances publiques (RFFP),
n°11-2010, p.19

20
prétexte (justifié) au renforcement des contrôles. C’est encore vrai, seuls les
modalités et l’époque changent »1.

C’est ainsi qu’à partir de 1814, l’exigence de transparence des comptes


publics se double, d’une volonté clairement affichée d’un contrôle éclairé de
l’exécution budgétaire2.

Officiellement, en France, le principe de sincérité n’apparaîtrait pas avant


la fin du XXème siècle en droit financier public. Or le baron Louis dans son
rapport présenté au Roi sur la situation des finances publiques au 1er avril 1814
critiquait déjà le fait que « jamais il n’avait été présenté au corps législatif un
budget sincère et complet »…chez les grands auteurs, la notion de sincérité
était déjà utilisée quoique peu mise en avant, René Stourn avait notamment
inscrit la sincérité dans sa liste des qualités nécessaires que doit posséder tout
budget. On trouve toutefois les racines du terme dans le traité de commerce de
Luca Pacioli de 1494 pour qui les biens de l’entreprise devaient être décrits en
prenant la « vérité pour guide »3.

Il semble alors que la sincérité, bien que non reconnu explicitement en


tant que telle par les textes budgétaires et comptables de l’époque classique,
n’est pas un concept ignoré puisqu’elle est une exigence, plus morale que
juridique, tant sous sa dimension objective, étroitement liée aux droits de
parlement- consentement et contrôles éclairés- qu’objective-en tant que règle
relative à l’établissement et à la présentation du budget. 4

Mais force est de constater que l’exigence de sincérité se double d’un


siècle à l’autre, d’où l’apparition des origines récentes de la sincérité.

1 Ibid, p.20
2 Laurent PANCRAZI, op.cit. , p.62
3 JEAN-FRANCOIS JOYE, op.cit, pp.18-19.
4 Laurent PANCRAZI, op.cit, p.129.

21
B- les origines récentes

L’histoire récente est faite de nombreuses « affaires » dans lesquels la


sincérité a été mise en cause. En fait, un budget peut constituer, pour un
gouvernement, un formidable outil de communication politique. En
surévaluant les prévisions de recettes et en sous estimant les prévisions de
dépenses, il pourra ainsi alléger le déficit et chercher à bénéficier d’un effet
cométique. A l’inverse, il pourra bénéficier d’un effet d’affichage en
surévaluant les dépenses dans les secteurs politiquement stratégiques tels la
santé et l’environnement. Si le cas grec est revenu tragiquement sous les feux
de l’actualité (la Grèce aurait fourni des données financières fallacieuses aux
autorités européennes), on peut également faire référence à l’affaire de
la « cagnotte fiscale » qui en 1999, avait sérieusement perturbés le
gouvernement de Lionel Jospin1.

On sait que le prolongement des principes budgétaires jusqu’au terme de


leurs logique inclut au moins implicitement une référence à la sincérité ; par la
recherche de clarté des comptes publiques qu’ils conduisent, et que la faible
référence aux principes budgétaires susceptibles d’impliquer la sincérité des
documents budgétaires , ce qui conduit à se demander si l’exigence et plus
encore la pratique d’une sincérité budgétaire, ne relève pas de l’expression
d’un phénomène d’ordre culturel. D’autant que cela se double généralement
d’une situation beaucoup plus avancée en termes d’adoption de normes
comptables où apparait, de façon prioritaire, l’exigence de sincérité des
comptes. Ainsi la Finlande a mis en place dès 1992 un système de management
par les résultats et a introduit un modèle comptable inspiré de la comptabilité
commerciale, d’où notamment le recours à la règle des droits constatés, le

1François BARQUE, la sincérité des budgets et comptes publics, Dir. Olivier LE Bot, édition Larcier, Belgique,
2011, p.61

22
développement des audits, la contractualisation entre ministères et agences.
Même chose pour la Suède à compter de 1996 où la discipline budgétaire
prend souvent la forme d’une sorte de pacte de stabilité national. Ce qui tend à
confirmer l’existence d’une optique de plus grande sincérité1.

Déjà, en 2000, le sénat français soulignait à quel point le Royaume-Uni ou


la Nouvelle-Zélande comptait la sincérité comme principe d’appréciation de la
valeur de leurs comptes jusqu’à la certification des comptes de tous les
ministères par le national audit office et la mise en place d’une comptabilité en
droits constatés et patrimoniale2.

L’OCDE, le FMI ou la banque africaine de développement encouragent les


Etats à développer le principe de la transparence budgétaire, qui peut avoir un
effet équivalent à la sincérité budgétaire.

La transparence suppose que le budget contienne des informations


complètes et publiques. Les organisations internationales incitent donc les
Etats à élaborer des budgets exhaustifs. Mais ces organisations insistent
surtout sur l’importance des hypothèses macro-économiques retenus par les
Etats .le FMI considère ainsi que « le budget annuel doit être réaliste » et les
principales hypothèses sur l’évolution de la situation et des politiques
économiques doivent être réalistes et clairement énoncés. En ce sens, l’OCDE
recommande que les Etats explicitent et publient la méthode retenue pour
établir ces hypothèses. On retrouve les mêmes règles proposés par la banque
mondiale…3.

En fait ces organisations hésitent moins à employer le terme de sincérité.


Or, Certaines de leurs recommandations se réfèrent clairement au principe de
1 GILBERT ORSONI, le principe de sincérité à l’étranger, RFFP, n°111, 2010, p.45
2 Ibid, p.46
3 Caroline CHAMARD-HEIM, la sincérité et les organisations internationales, RFFP, n°111,2010, pp.65-66

23
sincérité des comptes, mettant en évidence les difficultés qu’elles rencontrent
sur le terrain des questions financières nationales. Pratiquement, ces
organisations incitent les Etats à faire voter leur budget par une entité
indépendante. Ils insistent également, pour certains pays, sur la nature du
contrôle qu’il convient de confier à l’institution supérieur du contrôle 1.

Si à l’étranger, la sincérité a des racines profondes et lointaines, au Maroc,


le terme a une histoire très récente qui ne dépasse pas la période de
protectorat.

En fait, avant le protectorat, régnait un système classique des finances


publiques. Les autorités françaises ont cherché, après 1912, à inscrire les
finances du Maroc dans le cadre du droit positif, ainsi, le 1er fondement des
finances publiques, en général, et du principe de sincérité, en particulier,
repose sur le consentement à l’impôt qui consacre la légalité de la charge
publique. Vu que le contrôle des finances publiques est un élément central du
régime démocratique, le système marocain du contrôle de la sincérité des
prévisions et des comptes est régi par un cadre juridique en voie
d’achèvement.2

Toutefois, il faut souligner que le Maroc, et avant de confirmer le principe


de sincérité par la loi organique des lois de finances (LOLF), a entrepris, dès le
milieu de 1990, un ensemble d’initiatives qui consacrent la sincérité et la
transparence du budget de l’Etat :

• L’inclusion des coûts totaux de certaines opérations qui n’étaient que


partiellement incluses dans les budgets. Ce qui se traduit par une

1Ibid, p.67
2ELHARCHAOUI ABDELOUAFI, la constitutionnalisation des finances publiques au Maroc, Revista Electronica do
mestrado em direito da UFAL.v.6, n°2,2015, p.90
www.seer.ufal.br/index.php/rmdufal/article/download/2104/1582 , consulté le 02/05/2018 à 11h00.

24
réduction des dépenses immédiates et la création de dettes futures sous
forme de d’emprunts ou d’arriérés ; tel la prise en compte des coûts
annuels totaux envisagés pour les projets et programmes financés par
des prêts étrangers, au lieu d’enregistrer seulement les crédits
nécessaires pour couvrir les dépenses non financées ; et le paiement de
l’ensemble de la part de l’Etat –comme opérateur- au profit du fond de
pension marocaine, au lieu de payer seulement le solde d’une
subvention d’équilibre ; et aussi par l’enregistrement du cout total de
l’eau, de l’électricité, de transport, des charges postales, à la place de se
limiter à l’ouverture des enveloppes forfaitaires qui ne traduit pas le
niveau de consommation réel, ce qui entraine l’accumulation d’arriérés.
• L’inclusion de nouveaux éléments dans la loi de finances tout au-delà de
sa portée tels que les bons du trésor pour une période de cinq ans, qui
ont été considérés comme étant dans les opérations du trésor
seulement, ainsi que les budgets des SEGMA qui ne sont liés au budget
de l’Etat que par leurs solde débiteur ou créditeur.1

Plusieurs étapes ont été alors franchises dans le processus d’élaboration


du concept de sincérité en fiances publiques aussi bien au Maroc qu’à
l’étranger. Néanmoins Il fallait attendre plusieurs années pour la consécration
de norme de sincérité comme le 5ème principe de prévision et d’exécution
budgétaire.

§2- la consécration de la sincérité en tant que principe : Cadre juridique

Dans l’ordre juridique francophone, l’on peut admettre que le conseil


constitutionnel français est à l’origine du principe de sincérité des lois de
finances. C’est à travers ses décisions qu’il ne s’est pas contenté seulement de

.94.‫ ص‬، 2017 ، ‫الطبعة االولى‬، ‫الرباط‬، ‫ مطبعة المعارف الجديدة‬، ‫قانون الميزانية العامة ورهان الحكامة المالية الجيدة‬،‫عسو منصور‬ 1

25
faire émerger durablement le principe de sincérité mais il a contribué à lui
donné un réel contenu. Il s’est attaché prudemment à adosser la sincérité aux
principes traditionnels (annualité, unité, universalité, spécialité, équilibre).

Affirmé par la jurisprudence du conseil constitutionnel (A), le principe de


la sincérité budgétaire a été confirmé par les textes (B).

A- la sincérité consacrée par le conseil constitutionnel

C’est à partir de l’année 1993 que le principe de sincérité, en France, va


acquérir une visibilité incontestable dans le contentieux des lois de finances
prévisionnelles. Le contentieux relatif à la loi de finances pour 1994 va, pour la
première fois, donner l’occasion au juge de s’appuyer sur le principe de
sincérité afin de rendre sa décision1 ; la question était de connaitre la nature de
l’opération consistant pour l’Etat à reprendre une dette de l’agence centrale
des organismes de sécurité sociale. Selon les requérants, ce transfert de dette
aurait dû s’analyser comme une opération budgétaire ; en ne l’intégrant pas
dans la loi de finances, au titre des dépenses de l’Etat, le législateur aurait
entaché d’insincérité le texte. Au contraire le juge constitutionnel qualifie cette
reprise d’opération de trésorerie et conclut que « le grief des saisissantes ne
peut qu’être écarté ». Depuis, les parlementaires de l’opposition l’invoqueront
quasi systématiquement.

Et logiquement, ce moyen, stratégiquement utile pour ces représentants –


avant tout homme politique – fera l’objet d’un examen par le conseil
constitutionnel (CC). La visibilité de la règle de sincérité en sort renforcée,
d’autant plus que le conseil va jusqu’à la faire figurer dans les intitulés
précédant les considérants de sa décision2. Le conseil est, ensuite, allé plus loin

1 FRANÇOIS BARQUE, la sincérité devant le juge constitutionnel, RFFP, n°111, 2010, P.97
2 Ibid. P.63

26
puisqu’il a également rendu le principe applicable aux lois de financement de la
sécurité sociale1.

Ainsi le principe de sincérité fut posé par la jurisprudence du CC français,


puisque ce dernier a accepté, par ladite décision (du 29 décembre 1994)2 , de
contrôler la sincérité de la présentation des lois de finances3.

Ce principe s’affirme aussi par d’autres décisions du CC français. Ainsi le 29


décembre 1998, le conseil a considéré que les prélèvements sur les recettes de
l’Etat au profit de l’union européen (UE) ne méconnaissent pas les principes
d’universalité et de sincérité.4

Beaucoup sont les décisions du CC français qui affirment le principe de


sincérité dont :

• La décision n° 2001-448DC du 25juillet 2001 concernant la loi


organique relative à la loi de finances.
• La décision n° 2001-456 DC du 27 décembre 2001 relative à la loi
de finances rectificative de 2001.
• La décision n°2001-464 DC du 27 décembre 2001 relative à la loi de
finances 2002.

En parallèle, la rigueur de la sincérité des comptes budgétaires a été


renforcée par la décision du CC du 6 Août 2009 5.

Malgré les limites de l’intégration de la jurisprudence du CC dans la loi


organique du fait de l’étendue de la compétence du législateur, on peut voir
une continuité de cette jurisprudence dans l’élaboration de la loi organique. Le

1 Idem. P. 97
2 Décision n° 94-351 DC du 29 décembre 1994, JORF du 30 décembre 1994, P.18930
3 ASSOU MANSOUR, op.cit. p.11
4 RAYMOND MUZELLEC, MATHIEU CONAN, finances publiques, Dalloz, 16 ème édition, Paris, 2013, p.225.
5 Assou MANSOUR, op.cit, p.11

27
législateur a véritablement repris à son compte, dans un certain nombre de cas,
des approches adoptées antérieurement par le CC. Cette réalité est notamment
visible dans sa décision du 29 décembre 1999 dans laquelle « le juge avait
précisé que serait irrégulière une erreur manifeste dans l’évaluation des
recettes »1.

Alors, le conseil constitutionnel doit être considéré comme « le bâtisseur »


du principe de sincérité. Avant qu’il ne l’évoque très explicitement dans ses
décisions, les références demeuraient peu significatives.

Au fil des années, la méconnaissance de principe de sincérité a été de plus


en plus fréquemment invoquée par les requérants et a amené le juge
constitutionnel à sanctionner un certain nombre de comportements. De
nombreux auteurs ont distingué deux étapes dans cette « reconnaissance » du
principe par le juge constitutionnel. La première avant 1993 et la seconde à
partir de la décision du CC du 29 décembre 1993 [qui] marque l’émergence de
la sincérité budgétaire dans le contrôle de constitutionnalité des lois de
finances. En effet, le juge constitutionnel s’est référé de manière explicite au
concept de sincérité. Même s’il n’a jamais censuré explicitement une loi de
finances pour défaut de sincérité, le conseil a progressivement élaboré une
jurisprudence tendant à consacrer le principe de sincérité des lois de finances.

Cette émergence est confirmée à partir de la décision (précitée) n° 94-351


DC du 29 décembre 1994, dans laquelle le conseil n’a pas dénié au principe de
sincérité le rang de principe constitutionnel que les auteurs de la saisine
souhaitaient lui voir conférer, laissant ainsi sous-entendre que la sincérité des
lois de finances constituait une exigence constitutionnelle. On a donc pu
considérer que le CC a contrôlé et sanctionné clairement la sincérité des

1 Laurent PANCRAZI, op.cit, p.230

28
inscriptions budgétaires. La sincérité devient alors un principe général du droit
budgétaire. De manière plus générale, il permet au CC d’examiner la validité
des prévisions de recettes, de contrôler les évaluations chiffrées des projets de
lois de finances, de vérifier que les lois de finances ne font pas l’objet d’artifices
comptables et de s’assurer de la lisibilité des opérations financières de l’État.1

Au Maroc, comme en France, le principe de sincérité, et avant d’être


exprimé clairement en vertu de la LOLF, a été consacré par le CC. Ce dernier
assure la conformité des lois de finances à la constitution et à la loi organique,
depuis la révision constitutionnelle de 1996, les parlementaires peuvent le
saisir. « Le contrôle de constitutionnalité est une garantie de fiabilité et de
régularité des lois de finances et leur conformité à la loi organique ; il est de
nature à garantir contre toute débudgétisation ou autre opération affectant la
sincérité du budget»2.

Pour plus de lisibilité et de clarté, le conseil constitutionnel marocain a eu


l’occasion de censurer l’insincérité des prévisions budgétaires dans plusieurs
décisions. Ainsi dans sa décision n°386/2000 portant sur la loi de finances
1999/2000, le conseil juge non conforme la loi n° 00-24 modifiant l’article 20 de
la loi de finances 1999/2000, parce qu’elle prévoit de prolonger au premier
juillet 2000 au lieu du premier janvier 2000 la date de remboursement des
crédits accordés aux jeunes entrepreneurs. Ce qui constitue à la fois une baisse
des ressources et une aggravation de la charge publique. Par conséquent cette
disposition méconnait tant le principe de l’équilibre que de la sincérité des
prévisions budgétaires3.

1 Laurent PANCRAZI, op.cit, p.227


2 Banque mondiale, Maroc-étude de l’évaluation de la gestion des finances publiques, groupe de travail
national du ministère des finances et de la privatisation au Maroc, 2003, rapport N° 28067, publié le
1/07/2010, p.9
3 ABDELOUAFI ELHARCHAOUI, op.cit, pp.99-100

29
En 2002, le CC a été appelé à se prononcer sur la conformité de l’article 15
de la loi de finances pour 2002. Cet article constitue, selon les députés auteurs
de la saisine, le prolongement d’une opération par laquelle le gouvernement a
ouvert des crédits supplémentaires dans le cadre de l’article 17 de la loi de
finances pour 2001, par un décret du 26 Mars 2001 et ce en vertu d’une
habilitation législative accordée par l’article 30 de la loi de finances pour
l’année budgétaire 2001, conformément à l’article 45 de la constitution, tel que
rappelé par l’article 43 de la loi organique des lois de finances. Dès lors qu’il
appartenait au gouvernement d’ouvrir des crédits supplémentaires par décret,
il lui incombait de soumettre le dit décret au parlement pour ratification.
Toutefois, en ne soumettant pas ledit décret à la procédure de ratification, le
gouvernement a contrevenu aux dispositions de l'article 45, de l’article 43 de la
LOLF, et de l’article 30 de la loi de finances pour l’année 2001. 1

En bref, du fait que les montants prévisionnels du produit des


privatisations à percevoir au titre de la loi de finances pour l’année budgétaire
2002, ne sont pas compris en totalité dans le budget général de l’État comme
l’indique l’article 15, et en conséquence les montants dont la répartition est
envisagée entre le budget général et le fond Hassan II pour le développement
économique et social, ce qui porte atteinte au principe de la sincérité de la loi
des finances et des chiffres qui y sont apportés 2.
Malgré que le CC décide, par conséquent, que le décret visé à l’article 15 relève
du domaine réglementaire et qu’il n’est pas compétent pour l’examiner, mais
les moyens utilisés par les auteurs de la saisine étaient largement suffisants
pour attirer l’attention que la sincérité de la loi de finances fait défaut3.

1 ABDELLATIF EL KESRI, la jurisprudence budgétaire et financière du conseil constitutionnel entre logique


juridique et considérations politiques, REMALD, 2004, pp. 48-49
2 Ibid, p.
3 Idem, p, 55.

30
En général, le volontarisme du CC doit donc être, pleinement souligné,
tout spécialement, pour ce qui concerne la sincérité des lois de finances. Ce qui
poussera sans doute par la suite la consécration de ce principe par la LOLF et
par d’autres textes.

B- la sincérité finalement consacrée par les textes

Apres avoir été longtemps principe général de droit et de bonne foi, la


sincérité a pris la place dans l’ordonnancement juridique des pays.

Ainsi en Allemagne, la grande réforme budgétaire de 1969 découle d’une


loi sur les principes budgétaires entrée en vigueur au 1er janvier 1970 et
aménagé en 1997, dont l’affirmation de la sincérité était explicite au travers
des principes de vérité et de clarté du budget. Aussi, en Italie, la
reconnaissance de la sincérité (véridicità) était explicite et posée par l’article 25
de la loi n°559 de 19931.

En droit Européen (Union Européenne), les aspects comptables de la


sincérité figurent depuis longtemps dans les textes financiers. Le droit
budgétaire du l’union européenne affirme le principe de sincérité, comme c’est
le cas en droit français, mais un principe de vérité budgétaire, et ce depuis le
règlement financier de 2002, Si la terminologie employée n’est pas identique,
le contenu du principe, en revanche, est largement similaire. La cour des
comptes européenne a pu constater, à plusieurs reprises, des entorses à la
sincérité /vérité budgétaire.2

Dans le même cadre historique, le principe de sincérité n’est pas


opératoire avant 2001 en France, en raison de son caractère purement

1GILBERT ORSONI, op.cit. , pp.41-42


2CORINNE DELON-DESMOULIN, la sincérité en droit budgétaire de l’union européen : à la recherche de la
vérité budgétaire, RFFP, n°111, 2010, p.75

31
jurisprudentiel. A partir de la loi organique 2001, il a reçu un fondement
constitutionnel.

Mais si le principe a été consacré par la LOLF, il ne s’agit, en fait, que de


codification. La contribution d’autres textes antérieurs doit être pleinement
soulignée. En effet, à l’origine, certains textes ont une large portée en ce qu’ils
s’appliquent à la quasi-totalité des personnes publiques.la sincérité des
comptes publiques a, ainsi, pu être largement consacrée. Le décret du 5 février
1979 dispose notamment que « les comptes des organismes publics, rendus
par les comptables publics, doivent être affirmés, sincères et véritables sous les
peines de droit et être signés personnellement par les comptables dont ils
relatent la gestion ».1

L’ordonnance du 2 janvier 1959 valant loi organique relative aux lois de


finances, abrogée à compter du 1er août 2005, par la LOLF, avait été l’un des
fondements de certains principes fondamentaux du droit financier et, bien sûr,
celui de la sincérité budgétaire.

D’autres textes ont une portée plus limitée et ne s’imposent qu’à certain
catégories de personnes publiques. C’est notamment le cas de l’article R-6145-
11 du code de la santé publique qui consacre la sincérité de l’Etat des
prévisions de recettes et des dépenses des établissements publiques
hospitalières. Il en est de même du code général des collectivités territoriales
(CT) qui impose le principe à l’ensemble des budgets locaux. Aux termes de la
loi du 02 Mars 1982, ceux-ci doivent être en équilibre réel. Ainsi la section
d’investissement et la section de fonctionnement devant être votés toutes les
deux en équilibre, les recettes et les dépenses doivent être évaluées
sincèrement. Cette obligation concerne les budgets primitifs, les décisions

1 François BARQUE, la sincérité des budgets et comptes publics, op.cit. , P.64

32
modificatives et les budgets supplémentaires des CT. La loi du 22 Juillet 1994 a
étendu ce principe aux comptes administratifs.1

Il semble donc que le législateur ordinaire français est venu consacrer la


sincérité des prévisions et des comptes budgétaires avant le législateur
organique ; c’est-à-dire avant que la loi organique 2001-692 du 1er Août 2001
relative aux lois de finances (LOLF) ne vienne expressément disposer que « les
comptes de l’Etat doivent être réguliers et sincères et donner une image fidèle
de son patrimoine et de sa situation financière »(article 27), que les comptables
publics « s’assurent notamment de la sincérité des enregistrements comptables
et du respect des procédures » (article 31), que les lois de finances présentent
de façon sincère l’ensemble des ressources et des charges de l’État […] »
(article 32), et que la mission d’assistance de la cour des comptes au parlement
comporte notamment « la certification de la régularité, de la sincérité et de la
fidélité des comptes de l’Etat », cette « certification (étant) annexée au projet
de loi de règlement (article 58, 5°)2.

Ainsi, en France, la LOLF 2001 est un levier de réforme, et une nouvelle


page dans l’histoire du budget de la 5ème république, en plus, c’est un
engagement de la maturité démocratique. Celui-ci a renforcé le pouvoir des
présidents et des rapporteurs des commissions financières des deux chambres
parlementaires, en renforçant leurs droits d’accès à l’information.3

Quant au Maroc, le droit des finances publiques impose qu’une loi de


finances doit présenter un document budgétaire exhaustif, englobant toutes
les dépenses et les recettes en spécifiant la désignation des crédits pour plus de

1 Ibid, P. 64
2 LUC SAÏDJ, enjeux autour d’un principe controversé, RFFP, n° 111, 2010, p.5
،‫ مطبعة األمنية‬،‫ منشورات مجلة الحقوق‬، ‫ تنزيل الدستور المالي بالمغرب بين ضرورة اإلصالح ورهان الحكامة المالية‬،‫ نجيب جيري‬3
164.‫ ص‬،2013 ،‫ اإلصدار السابع‬،‫الرباط‬

33
clarté et de lisibilité, et ce en respectant les principes budgétaires y compris la
sincérité1.

La doctrine des finances publiques a insisté sur l’importance de cette


dernière depuis longtemps. Un vœu qui sera traduit dans la LOLF 130-13 très
récemment.

Si ce principe a été consacré par une décision du CC pourtant sur la loi de


finances pour 2002, c’est bien la LOLF de 2015 qui l’exprime clairement en
vertu de l’article 10 qui prévoit la sincérité des lois de finances quand il énonce
que « les lois de finances présentent de façon sincère l’ensemble des charges et
des ressources de l’Etat ». Dans cette logique, la LOLF exprime également la
sincérité comptable prévue dans son article 31 (correspondant quasiment à
l’article 32 de la LOLF français) qui prévoit que les comptes de l'Etat doivent
être réguliers, sincères et donner une image fidèle de son patrimoine et de sa
situation financière »2
En plus de la consécration de sincérité budgétaire (article 10) et celle
comptable (article 31), le législateur a attribué à la cour des comptes la
certification de la régularité et de la sincérité des comptes de l'Etat (article 31,
5°). Comme il a confié aux comptables publics « de veiller au respect des
principes et des règles comptables en s’assurant notamment de la sincérité des
enregistrements comptables et du respect des procédures et de la qualité des
comptes publics »(article 33)3.

Ceci étant, la LOLF consacre le 5ème principe budgétaire. Principe qui


implique l’exhaustivité, la cohérence et l’exactitude des informations
financières fournies par l’État. Les lois de finances rectificatives et la loi de

1 ABDELOUAFI ELHARCHAOUI, op.cit, p.97


2 ABDELOUAFI ELHARCHAOUI, op.cit, p.100
93.‫ ص‬،‫ مرجع سابق‬،‫ قانون الميزانية العامة ورهان الحكامة المالية الحيدة‬،‫ عسو منصور‬3

34
règlement permettent d’assurer l’effectivité de ce principe et de réduire les
écarts en cours d’exécution compte tenu de la nature prévisionnelle de chaque
loi de finances initiale. 1

En parallèle, au niveau territorial, les lois organiques des CT prévoient le


principe de sincérité des budgets locaux. Ainsi l’article 165 de la loi organique
111-14 relative aux régions2 stipule que « le budget de la région présente une
image sincère de l’ensemble de ses recettes et charges. L’évaluation de la
sincérité des recettes et charges se fait selon les données disponibles au
moment de la préparation du budget et les prévisions qui en résultaient ». Les
mêmes exigences se trouvent dans la loi organique des provinces et
préfectures 112-143 (selon l’article 144) et la loi organique des communes 113-
144 (selon l’article 152).

Le principe de sincérité trouve aussi son fondement dans l’article 27 de la


constitution marocaine 2011, qui stipule dans son premier alinéa que « les
citoyennes et les citoyens ont le droit d’accéder à l’information détenue par
l’administration publique ; les institutions élues et les organismes investis d’une
mission de service public … »bien que cette disposition ne prévoit pas
explicitement que le parlement a le droit à l’information, et puisque le
législateur est le représentant légitime du citoyen, il détient tacitement le droit
d’accès à l’information. Droit qui est consacré par la loi 31-13. Même si cette

1 JEAN-MARIE RAYNAUT, DELPHINE SOULT, LOLF à l’usage des associations (guide), ministère des droits des
femmes, de la ville de la jeunesse et du sport, 2014, p.8
2 Dahir n° 1-15-83 du 20 ramadan 1436 (7 juillet 2015) portant promulgation de la loi organique n° 111-14

relative aux régions, BO 6440 du 9 joumada I 1436 (18-02-2016).


3 Dahir n° 1-15-84 du 20 ramadan 1436 (7 juillet 2015) portant promulgation de la loi organique n° 112-14

relative aux préfectures et provinces, BO 6440 du 9 joumada I 1436 (18-02-2016).


4 Dahir n° 1-15-85 du 20 ramadan 1436 (7 juillet 2015) portant promulgation de la loi organique n° 113-14

relative aux communes, BO 6440 du 9 joumada I 1436 (18-02-2016).

35
loi est au-dessous des attentes par rapport à l’article 27 de la constitution
selon certains auteurs. 1

Le principe est donc consacré, explicitement, comme l’on a remarqué, par


des dispositions très récentes et très limitées. Mais implicitement par des
clauses multiples et diversifiées ;comme entre autres, les articles 48 et 66 de la
LOLF qui déterminent respectivement les documents qui doivent être
présentés au parlement en parallèle avec le projet de loi de finances et les
documents présentés au parlement en parallèle avec la loi de règlement, dont
les mêmes exigences sont contenues dans la loi 62-99 (articles 93, 94 et 95)
modifiée et complétée par la loi 55-16 (article 2) et ce conformément aux
articles 147 et 148 de la constitution de 2011.

Il s’avère, ainsi, que le principe de sincérité, comme une exigence nouvelle


de la gouvernance moderne des finances publiques, a connu un
développement progressif, depuis les racines lointaines jusqu’à la consécration
définitive.

Avant la LOLF 130-13, dont les dispositions n’entrent en vigueur qu’à


partir de l’exercice 2016, aucune définition n’a été donnée à la sincérité en
finances publiques au Maroc. C’est avec cette loi organique que la notion de
sincérité est précisée clairement et aussi doublement. En fait, le principe
recouvre des exigences et des implications différentes selon qu’il s’agit du
budget ou des comptes.

،9 ‫ العدد‬édition EMALIV ، ‫ ونصوصه التطبيقية‬130-13 ‫ قانون ميزانية الدولة على ضوء القانون التنظيمي للمالية‬، ‫ عبد النبي أضريف‬1
62- 61 ‫ ص ص‬،2015

36
Section II : les aspects du principe de sincérité en finances publiques

Le concept de sincérité, bien que désormais affirmé, reste parfois difficile


à cerner, s’agissant tant de ce qu’il recouvre que de ce qu’il implique.

Dérivé du latin « sincerus » qui signifie pur, l’apparition d’un tel principe
en finances publiques renvoie ainsi à l’idée d’une norme de pureté s’imposant
aux acteurs financiers. D’un point de vue juridique, la notion de pureté est
nettement moins évidente. La règle de droit se caractérise essentiellement par
l’existence d’une norme et d’une sanction juridictionnelle dont elle tiré sa
spécificité. Or, le principe de sincérité est une norme indéterminée dont la
sanction est de plus limitée1.

Appliqué aux finances publiques, présenter un budget ou un compte


sincère c’est marquer son respect pour les représentants du peuple et par là
pour les citoyens. C’est la bonne foi des auteurs couplée avec la justesse des
informations fournies car malgré la bonne foi de l’auteur il peut y avoir des
erreurs. La sincérité c’est donc le respect que va satisfaire la transparence plus
la vérité2.

Elle recouvre deux aspects : la fiabilité des prévisions inscrites dans la loi
de finances (les recettes ne doivent pas avoir été artificiellement gonflées ni
les dépenses minorées) ; et l’exactitude dans la tenue des comptes à l’occasion
de son exécution.3

Si l’on prend La LOLF marocaine, on se rend compte qu’il consacre cette


notion avec deux aspects, son article 10 érige la sincérité en principe
budgétaire (§1), tandis que l’article 31 consacre la sincérité comptable (§2).

1 ALEXANDRE GUIGUE, du besoin à l’obligation de sincérité, RFFP, N°111, 2010, p.28


2 JEAN-FRANÇOIS JOYE, op.cit, p.22
3 ANDRE LEGRAND, CELINE WIENER, le droit public, Dila, Paris, 2017, p.164

37
§1- la sincérité budgétaire

Le principe de sincérité budgétaire est annoncé par le chapitre 1er du titre


(I) de la LOLF. Une telle place suggère une importance supérieure à celle d’une
simple norme mais s’agissant d’un principe, son contenu est indéterminé. En
droit, l’indétermination se manifeste par un contenu vague et imprécis et par la
nécessité de nombreuses règles d’application concrète. Le principe de sincérité
ne fait pas exception. En dépit d’une portée juridique bien réelle, son caractère
subjectif accentue son indétermination et le rend singulier dans le paysage
financier. Lorsque l’article 32 de la LOLF 2001 française indique que « les lois
de finances présentent de façon sincère l’ensemble des ressources et des
charges de l’État », on n’apprend rien sur le contenu juridique du principe. Le
législateur organique a laissé au juge le soin de préciser.

Le CC français a donné des éléments de réponse dans sa décision n°448DC


du 27 Juillet 2001 lorsqu'il a indiqué que le principe de sincérité « se caractérise
par l’absence d’intention de fausser les grandes lignes de l’équilibre déterminé
par la loi de finances ». Outre la méthode d’une définition par défaut. Cette
précision maintient la subjectivité initiale. Il était déjà délicat de déduire
l’insincérité de l’auteur de l’acte à partir des données budgétaire et de censurer
le texte en retour. Il l’est encore plus lorsqu’il s’agit de rechercher l’intention
ou l’absence d’intention, à partir de ces seules données. Cela implique au juge
qu’il assume une forme de contrôle politique, en lieu et place des
parlementaires.

Donc la sincérité budgétaire, ou plus précisément pour l'Etat , la sincérité


de la loi de finances, est de l’avis général, relative et subjective ; relative parce
qu’elle concerne des prévisions et ne peut donc être appréciée que « compte
tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent

38
raisonnablement en découler », pour reprendre les termes de l’article 32f de la
LOLF 2001-traduit notamment dans l’exigence « d’erreur manifeste
d’appréciation » posée par la jurisprudence du CC (et dans l’exigence posée par
cette jurisprudence de lois de finances rectificatives en cas de changement
significatif de circonstances en cours d’exercice : par exemple la décision n°
2007-555-DC du 16 Aout 2007) . S’agissant au moins de l’État, cette sincérité
est, au surplus, « subjective », puisqu'elle se caractérise également
par « l’absence d’intention de fausser les grandes lignes de l’équilibre, selon la
jurisprudence du CC, qui introduit ainsi un « vice du but » rendant encore plus
relatifs les contours, déjà flous de la notion de sincérité (« peut-on, par
exemple, faire de la soutenabilité un élément de la sincérité budgétaire ? »)1.

Comme l’a rappelé la cour des comptes française « il faut préciser le


champ de la sincérité. Comprendrait-il la construction même du budget
(périmètre et architecture de la loi de finances), l’adéquation de moyens, des
crédits et des effectifs aux missions, les hypothèses économiques, financières,
fiscales et sociales du gouvernement qui visent not89amment les recettes ? »2.

Le contenu de la sincérité budgétaire permettait, en théorie, de


déterminer si cette sincérité est une notion nouvelle, donc spécifique, ou
simplement un vocabulaire nouveau, plaque sur des principes anciens. Mais ce
contenu est variable et, en conséquence, la réponse est malaisée.
A s’en tenir au seul droit français, on peut, en effet trouver au moins trois
aspects (ou trois acceptions) de la sincérité :

• Il peut s’agir de la sincérité du périmètre budgétaire-ou pour l’État, de la


loi de finances- ainsi que semble notamment l’impliquer la partie de

1 LUC SAÏDJ, op.cit, pp.7-8


2 RAYMOND MUZELLIC, Mathieu CONAN, op.cit, p.226

39
l’article 32 de la LOLF, qui oblige à présenter « de façon sincère
l’ensemble des ressources et des charges de l’État ». Mais dans ce cas,
quoi de bien nouveau par apport à la règle classique de totalité (ou de
globalité), incluse dans les principes d’unité et/ou d’universalité
budgétaire ?
• Il peut s’agir de la sincérité de présentation, mais quel progrès
significatif, notamment par apport à la règle classique de non
compensation ?on peut, certes, invoquer « la charte de budgétisation »
imposée par l’article 51-2 de la LOLF1, ou encore plus
fondamentalement, la présentation du budget par programme, mais il
s’agit alors là beaucoup plus de clarté que de sincérité.
• Il peut s’agir de la sincérité des évaluations des éléments portés au
budget (ou en lois de finances), ainsi que semble, notamment et
également, l’impliquer la partie de l’article 32 de la LOLF précisant que
« la sincérité s’apprécie compte tenu des informations disponibles et des
prévisions qui peuvent raisonnablement en découler ». c’est peut-être là
que réside la véritable nouveauté mais il ne concerne qu’un des
éléments généralement pris en compte par la jurisprudence. 2

De sa part, la LOLF marocaine 130-13 dispose, dans l’article 10, que « les
lois de finances présentent de façon sincère l’ensemble des ressources et des
charges de l’État. La sincérité des ressources et des charges s’apprécie compte
tenu des informations disponibles au moment de leur établissement et des
prévisions qui peuvent en découler ». Il résulte de cette exigence que les
moyens pour lesquels est sollicitée une autorisation parlementaire doivent

1 En vertu de cette disposition, est jointe au projet de la loi de finances de l’année « une analyse des
changements de la présentation budgétaire, faisant connaitre leurs effets sur les recettes, les dépenses et le
solde budgétaire de l’année concernée.
2 LUC SAÏDJ, op.cit, p.9

40
correspondre aux charges prévisibles et doivent être à la fois suffisants pour
permettre à l’État d’honorer ses dettes et calculer au plus juste les besoins.

En outre, si en cours d’examen de la loi de finances parvenaient au


gouvernement des informations nouvelles susceptibles de remettre en cause
les grands lignes de l’équilibre, l’obligation de sincérité lui imposerait, sans
doute, de porter ces informations à la connaissance du parlement.1

Par conséquent, la sincérité budgétaire exige la pertinence des hypothèses


qui président à la préparation de la loi de finances, et la présentation sincère au
niveau de la loi de finances de l’ensemble des ressources et des charges de
l’État. Dans le même sens la sincérité budgétaire sollicite l’engagement de
procéder à la présentation des lois de finances rectificatives en cas de
modification significatives des priorités et des hypothèses de la loi de finances.

Comme il découle de l’article 10 de la LOLF, la sincérité budgétaire est un


principe qui gouverne la préparation et l’adoption des projets de lois de
finances (PLF) (A). Cette dernière est en fait, de nature prévisionnelle calculée
sur la base des hypothèses financière (B).

A- la sincérité des prévisions : la préparation et l’adoption des PLF

La sincérité budgétaire implique alors, la sincérité des prévisions, en


recettes comme en dépenses, et conditionne le respect du principe primordial
et classique du consentement à l'impôt.

Selon l’article 3 de la LOLF 130-13 (1er alinéa), « la loi de finances prévoit,


évalue, énonce et autorise pour chaque année budgétaire, l’ensemble des
ressources et des charges de l’État … » ce qui fait que le projet de loi de
finances est la prévision de l’ensemble des ressources et des charges de l’État,

1 FRANÇOIS CHOUVEL, finances publiques, Gualino, 19ème édition, France, 2016, pp.55-56

41
et selon l’article 8 (2ème alinéa) toutes les recettes et toutes les dépenses sont
imputés au budget général ». Le budget apparait alors comme une description
des ressources et des charges de l’État.

Quant à la différence entre budget et lois de finances, c’est la LOLF


française de 2001 qui la met en lumière. Conformément à l’article 1er et à
l’article 6 de cette loi, la loi de finances détermine les ressources et les charges
de l’État, le budget se contente de retracer celle de ces ressources et de ces
charges qui sont de nature budgétaire, sous forme de recettes et de dépenses.

La précision des périmètres respectifs des lois de finances et du budget


permet de redéfinir l’objet de principe de sincérité. Si le principe de sincérité
s’applique bien, en vertu de l’article 10 de la LOLF 130-13, à l’ensemble des
ressources et des charges de l’État, et si aussi, les recettes et les dépenses
budgétaires de l’État sont sincères, ce n’est que parce que la sincérité
s’applique aux ressources et aux charges budgétaires de l'Etat1.

La détermination des recettes et des dépenses de l’Etat est un processus


pragmatique évoluant selon les circonstances. L’initiative du projet de loi de
finances initiale est gouvernementale. Un gros travail est réalisé à l’avance et
en amont du parlement.

Elaborer un budget, c’est avant tout faire un choix. C’est le ministre des
finances qui se trouve au centre de la procédure d’élaboration de la loi de
finances. Sur le plan pratique, le processus d’élaboration peut être divisé en
deux étapes : la détermination du cadre général et la mise au point du contenu
des budgets ministériels ; la stratégie du gouvernement s’appuie sur un cadre
de référence qui définit les orientations, les objectifs et les modalités de sa
mise en œuvre. La détermination du cadre général passe par plusieurs étapes
1 Laurent PANCRAZI, op.cit, pp.282-283

42
dont leur respect et leur conformité à la réalité contribuent au renforcement
de la sincérité des prévisions budgétaires. Ces étapes sont les suivantes :

• Le choix de la stratégie budgétaire

Il s’agit de proposer au chef du gouvernement les grandes options


possibles en matière des dépenses, de fiscalité et de déficit. C’est une tâche
difficile qui peut générer deux dangers opposés : soit favoriser une
présentation optimiste afin de limiter le déficit budgétaire prévisionnel, soit au
contraire tenter d’obtenir plus facilement un effort fiscal par une évaluation
volontairement pessimiste.1

• L’envoi de la lettre de cadrage

Le chef du gouvernement envoie à chaque ministre une lettre de cadrage


sous forme de circulaire qui explique les orientations retenues par le
gouvernement et résume les directives générales que les ministres devront
respecter pour l’élaboration de leurs budget.

• La fixation des plafonds ministériels

Une fois le budget de reconduction déterminé, s’engage une phase de


négociation purement technique entre les ministères dépensiers et la direction
du budget (ministère des finances). Une partie importante des négociations
porte sur les économies budgétaires envisagées. En cas de désaccord, les
discussions sont traitées à l’échelon ministériel. Et si les désaccords subsistent
encore à propos du contenu ou des plafonds arrêtés, l’arbitrage du chef du

1MOHAMED HARAKAT, finances publiques et fragilité : de la réforme de l’État par le budget et l’évaluation des
politiques publiques, tome 1, Rabat, 2017, p.293

43
gouvernement est sollicité. Si aucun accord n’est théoriquement convenu, on
fait recours à l’arbitrage royal dans le cas marocain1.

• La mise au point du contenu des budgets ministériels

Une fois le plafond des dépenses arrêtées en accord avec la direction du


budget, on procède à l’établissement de la morasse budgétaire tout en tenant
compte des réajustements et modifications demandés. La morasse budgétaire
ainsi revue est transmise à la direction du budget.

S’agissant de la détermination des recettes, cette tâche constitue un


exercice bilatéral entre le chef du gouvernement et le ministère des finances
qui leur incombent de stabiliser le solde du budget et de lancer le processus
d’élaboration du projet de loi de finances qui sera adopté en conseil des
ministres avant sa présentation au parlement pour vote.

• l’adoption de PLF par le parlement et l’exigence de la sincérité de


l’information

La sincérité budgétaire résulte de la nécessité d'une information aussi


complète et fiable que possible du Parlement. Le Conseil constitutionnel, en
effet, en ayant à se prononcer sur le respect de la procédure budgétaire, a
progressivement insisté, notamment, sur le caractère étendu, large ou encore
sincère de l'information du Parlement.
En vertu de l’article 48 de la LOLF le projet de loi de finances est déposé sur le
bureau de la chambre des représentants, au plus tard le 20 octobre de l’année
budgétaire en cours. Et dans le cadre de la sincérité budgétaire, Il est
accompagné de plusieurs documents tels, le rapport sur la dette publique; le
rapport sur les dépenses fiscales ; une note de présentation du projet de loi de

1 Ibid, P.296

44
finances comportant des données concernant les investissements du budget
général ainsi que les impacts financiers et économiques des dispositions
fiscales et douanières proposées…

En fait, le principe de sincérité budgétaire implique notamment que les


documents financiers prévus soient fournis dans les temps aux parlementaires
et qu’ils comportent des informations fiables afin qu’ils puissent les éclairer
dans l’analyse des budgets. Le refus de les communiquer ou le retard
sciemment orchestré dans la communication pourraient être perçu comme un
refus de collaborer de nature à méconnaître le principe de sincérité, s’il en
ressortait que les élus n’auraient pas été totalement éclairés pour se prononcer
convenablement sur le texte. En 2006, saisi de la loi de finances pour 2006, le
juge constitutionnel français a contrôlé la sincérité des indicateurs de
performance. L’article 51 de la LOLF précise les documents qui doivent être
joints au PLF initiale. Doivent notamment être annexés des projets annuels de
performance présentant les objectifs associés aux crédits des différents
programmes et permettant de mesurer, par le billet d’indicateurs précis,
l’efficacité de la dépense publique. Il est indispensable que de telles données
soient convenablement évaluées, l’objectif étant de permettre au parlement
de se prononcer en connaissance de cause sur le PLF de l’année et, par la suite,
de contrôler à postériori l’utilisation des autorisations qu’il a accordées. 1

Bref, la prévision et la présentation des ressources et des charges de


l’État, et par conséquent, l’élaboration de la loi de finances résulte d'une
collaboration entre le parlement et le gouvernement dont la sincérité
budgétaire impose fiabilité et fidélité tant des procédures de préparation des
PLF que de leurs présentation et de l’information du parlement.

1 François BARQUE, la sincérité des budgets et comptes publics, op.cit, pp.66-67

45
Le tableau ci-après illustre synthétiquement le processus de préparation et
d’adoption de projet de loi de finances(prévision des recettes et des dépenses)

Phase de Phase de Phase Phase des Phase de


préparation consultation d’arbitrage délibérations publicité

et de et d’orientation et d’élaboration et d’adoption


programmation

Janvier- Juillet de Septembre - Octobre de 31 décembre


15juillet de l’année n-1 octobre de l’année n-1 de l’année n-1
l’année n-1 l’année n-1

Programmation Consultation Commissions Adoption après Publication de


budgétaire du parlement budgétaires délibération du la loi de
triennale conseil des finances au
Lettre Elaboration du
ministres sur les bulletin officiel
Exposé du d’orientation budget de
orientations
ministre des l’année
générales du
finances en
budget
conseil du
gouvernement Adoption après
délibération du
conseil de
gouvernement
sur le budget

Dépôt du projet
au bureau de la
chambre des
représentants

46
B- la réconciliation entre le principe de sincérité et les hypothèses financières

La sincérité du budget n’est pas absolue et constante, puisque son


évaluation dépend des variables accompagnant l’établissement des hypothèses
et donc la programmation qui en résulte. Par conséquent, la question de
l’évaluation de la sincérité du budget, c’est-à-dire celle des recettes et des
dépenses, est relative et dépendant des données et des circonstances qui ont
accompagné la préparation de la loi de finances.

Les hypothèses financières sont un préalable pour l’élaboration d’une loi


de finances équilibrée, compte tenu de sa nature prévisionnelle et de ses
programmes prospectifs. Ces hypothèses économiques et financières doivent
être réalistes, non artificielles et justifiées, ce qui va permettre de les corriger
et de les réformer, ce qui a été confirmé par la jurisprudence du CC français.
Deux articles de la LOLF confirment l’adoption des hypothèses dans la
préparation de la loi de finances annuelle :

• article 9 de la LOLF qui a signalé que la préparation du PLF doit être


basée sur des hypothèses « le solde budgétaire prévisionnel est fixé
notamment sur la base des hypothèses selon lesquels le PLF de l’année
a été élaboré ».
• Aussi, le 2ème alinéa de l'article 5 a mentionné que la programmation
budgétaire annuelle vise principalement à définir l’évolution sur trois
ans de l’ensemble des ressources et des charges de l’État, en fonction
d’hypothèses économiques et financières réalistes et justifiées.

A titre d’illustration, les hypothèses du projet de lois de finances de 2017


affichent les données ci-après :

❖ Déficit budgétaire : 3% du PIB

47
❖ Taux de croissance : 4,5%
❖ Taux d’inflation : 1,7%1

En France, la sincérité des hypothèses d’évaluation était l’un des points


sur lesquelles la loi de finances 2016 était contestée où la saisine du CC était
basée sur le non-respect de la sincérité des hypothèses économiques
(l’hypothèse du taux d’inflation était élevé). Mais le CC français a conclu, en
reconnaissant la loi de finances 2016 malgré l’hypothèse d’inflation élevée, vu
l’absence d’intention d’erreur manifeste, rappelant sa confirmation de cette
règle lors de son examen de loi de finances 2013. 2

Applicable aux budgets prévisionnels, la sincérité budgétaire est un


principe au contenu substantiel. Bien que l’art de la prévision soit
particulièrement délicat, tant il dépend de nombreux aléas et notamment de la
conjoncture économique, il doit faire l’objet d’un encadrement juridique. La
sincérité impose logiquement le réalisme des prévisions des recettes et des
dépenses. Une collectivité publique ne saurait, par exemple, inscrire en
prévision de recettes des subventions dont l’attribution n’est pas certaine ou
encore des emprunts dont la conclusion n’est pas sûre ou prévoir des dépenses
insuffisamment évaluées. Le juge constitutionnel est allé plus loin dans la
définition du principe de sincérité des lois de finances prévisionnelles. Il y a
ajouté expressément une dimension morale, la sincérité postulait l’absence
d’intention de fausser les grandes lignes de l’équilibre déterminée par la loi de
finances.3
En exigeant le réalisme des prévisions, la sincérité budgétaire impose la
pertinence des hypothèses qui président à la préparation de la loi de finances

1 Mohamed HARAKAT, op.cit, p.293


39- 38 ‫ص‬.‫ ص‬،2017 ، 32 ‫ عدد‬،‫ مجلة المالية‬،‫ الصدق الموازني والصدق المحاسبي‬،‫ محمد البقالي‬2
3 François BARQUE, la sincérité des budgets et comptes publics, op.cit, p.66

48
et sollicite l’engagement de procéder à la présentation des lois de finances
rectificatives en cas de modification significatives des priorités et des
hypothèses de la loi de finances

Si le principe de sincérité budgétaire concerne en effet, les budgets


prévisionnels, le principe de sincérité comptable est applicable aux textes
arrêtant les comptes publics et devant être approuvés par les élus (il s’agit de
la loi de règlement pour l’État).

§2- la sincérité comptable

La sincérité comptable ne doit pas être confondue avec la sincérité


budgétaire, dont le fondement a longtemps été beaucoup moins solide : les
budgets publics ayant essentiellement un caractère de prévision et
d'autorisation (consentement à l'impôt et autorisation de dépenser), la priorité
était portée sur le respect de la procédure. Le principe de sincérité budgétaire
se confondait alors presque avec celui de régularité, d'autant plus que la
logique de moyens prévalait sur la logique de résultats. Alors que la sincérité
comptable en exigeant l’exactitude des comptes, se concentre sur les résultats
plus que les moyens.

L’article 31 (4ème alinéa) de la LOLF marocaine 130-13 et l’article 27


(3ème alinéa) de la LOLF française 2001 prévoient que les comptes de l'Etat
doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle de son patrimoine
et de sa situation financière.

Applicable, depuis 2006, en France, la sincérité est comprise ici dans le


sens traditionnel donné par la doctrine comptable d’exactitude des comptes
approuvée surtout par la loi de règlement (A). Mais il faut souligner que le

49
contenu de la sincérité comptable, en dehors de la spécificité de la comptabilité
publique (B), ne pose pas de problèmes.

A- la loi de règlement et l’impératif de sincérité

La loi de règlement (LR) est l’un des trois types de lois de finances avec les
lois de finances initiale (LFI) et rectificative (LFR). Elle constitue un document
comptable soumis à l’approbation du Parlement. Avec la LOLF, elle retrouve
une relative importance car elle comprend :

o un tableau de financement montrant la manière dont l’État finance


son activité au cours de l’année,
o un compte de résultat,
o le bilan de l’État,
o une évaluation des engagements de l’Etat hors bilan.

La LOLF précise que « conformément à l’article 76 de la constitution, le


projet de loi de règlement de loi de finances est déposé, annuellement, en
priorité, sur le bureau de la chambre des représentants, au plus tard, à la fin du
premier trimestre du deuxième exercice qui suit celui de l’exécution de la loi de
la loi de finances concernée ».

Le projet de LR s’accompagne de nombreuses annexes, notamment


le rapport annuel de performance (RAP) élaboré par le ministre chargé de
finances qui constitue la synthèse et la consolidation des rapports de
performance élaboré par les départements ministériels et institutions; ce
rapport précise les résultats atteints par programme et permettent ainsi une
évaluation de l’utilisation des crédits au regard des objectifs fixés...en plus la
cour des comptes communique au parlement le rapport sur l’exécution de la loi
de finances et la déclaration générale de conformité entre les comptes

50
individuels des comptables et le compte général du royaume1. A chaque fin
d’année budgétaire, la loi de règlement2 :

o Arrête le montant définitif des dépenses et des recettes de l’État ;


o Approuve le compte de résultat de l’exercice de l’année concernée…et
affecte au bilan le résultat comptable de l’exercice ;
o Ratifie les opérations réglementaires ayant affecté l’exécution du
budget;
o Fixe le résultat budgétaire ;
o Constate et autorise à titre de régulation les dépassements des crédits
ouverts et ouvre les crédits nécessaires pour les régulariser tout en
donnant les justificatifs nécessaires ;
o constate l’annulation des crédits n’ayant pas été consommés ;

Enfin, comme toutes les lois de finances, la loi de règlement peut


comporter des dispositions relatives à l’information et au contrôle du
parlement ainsi que celles relatives à la comptabilité de l’État et au régime de
la responsabilité pécuniaire des agents des services publics3.

La mission essentielle de la loi règlement est de permettre aux


parlementaires de se prononcer sur les opérations budgétaires effectuées au
cours d’un exercice. C’est grâce à cette loi que se concrétise l’autorisation
parlementaire, puisqu’il ne permet pas seulement de vérifier la concrétisation
des prévisions budgétaires et l’exactitude des comptes mais grâce à cette loi
que se confirme la sincérité des indicateurs et des données adoptés par le
gouvernement pour l’élaboration de la loi de finances de l’année, ainsi que le
contrôle de la légalité de l’ensemble des initiatives prises par le chef ou les
1 L’article 66 de la LOLF 130-13 précitée
2 L’article 64 de la LOLF 130-13 précitée.
3 Laurent PANCRAZI, op.cit, p.336

51
membres du gouvernement, au cour de l’exécution de la loi de finances de
l’année, pour le rectifier.1
La sincérité de loi de règlement est un concept plus exigeant que celui de
la loi de finances de l’année, de la loi de finances rectificative ou de la loi
particulière (prise selon des procédures d’urgence), puisqu'elle s’entend de
l’exactitude des comptes. Le risque est donc plus grand de voir, à l’avenir, une
loi de règlement déclarée non conforme pour insincérité qu’une autre loi de
finances. 2
Désormais celle-ci doit, entre autre, approuver le compte de résultat de
l’exercice, établi selon la règle des droits constatés, affecter au bilan de l’État le
résultat comptable de l’exercice et approuver ce bilan 3. A priori, la sincérité
devrait être entendue de façon plus exigeante dès lors que ces documents ont
essentiellement une fonction de constatation des opérations comptables
précédemment effectuées. Pour ce qui est des opérations budgétaires, il
importe que l’ensemble des recettes et des dépenses afférentes à l’exercice
concerné figurent dans le texte.
C’est certainement pour cela que le juge constitutionnel a précisé que la
sincérité de la loi de règlement postulait l’exactitude des comptes, Se
démarquant de la conception du CC, la cour des comptes (CDC) à, à plusieurs
reprises, estimé que des comptes exacts pouvaient fort bien être insincères,
notamment en raison de manœuvres, de montages comptables
artificielles…dès lors, à côté de la définition donnée par le CC, il existerait une
définition de la sincérité de la loi de règlement implicitement suggérée par la

345.‫ص‬، ‫ مرجع سابق‬، ‫ قانون الميزانية العامة ورهان الحكامة المالية الجيدة‬،‫ عسو منصور‬1
2 FRANÇOIS CHOUVEL, op.cit, p.56
3 Article 37 de la LOLF française du 1er août 2001 précitée.

52
CDC selon laquelle la sincérité de loi de règlement exige que cette dernière
retrace avec vérité l’ensemble des opérations 1.

L’assimilation de la sincérité comptable à l’exactitude des comptes


aboutirait à un appauvrissement de la première notion ; Pourtant cette
définition arithmétique peut surprendre. Certains données comptables sont,
tout d’abord, insusceptibles d’évaluation exacte. C’est spécialement le cas de
la comptabilité patrimoniale qui se nourrit d’estimation, d’approximations et
de calculs qui, tous, cherchent à approcher l’exacte valeur des actifs et des
passifs inscrits au bilan.

B- la comptabilité publique et l’exigence de la sincérité

Historiquement cantonné au contrôle de la régularité des opérations de


dépenses et de recettes ainsi qu’au maniement des fonds publics, le comptable
public de l’État se voit reconnaître, depuis l’entrée en vigueur de la LOLF, un
rôle majeur dans la tenue des comptabilités publiques et la qualité de
l’information financière. L’article 31 de la loi organique du 1er août 2001 ,ainsi
que l’article 33 de la LOLF marocaine 130-13, confèrent , à cet égard, au
comptable public de l’État un rôle de garant du respect des principes et règles
de tenue des comptabilités en lui confiant la charge de veiller notamment à la
sincérité des enregistrements comptables et à la bonne application des
procédures et de la qualité des comptes publics .

La comptabilité générale devient une comptabilité d’exercice fondée sur


« le principe de la constatation des droits et obligations. Les opérations sont
prises en compte au titre de l’exercice au cours duquel elles se rattachent,
indépendamment de leur date de paiement ou d’encaissement ». La
comptabilité de gestion est possible grâce à la comptabilité générale. En effet,
1 François BARQUE, la sincérité des budgets et comptes publics, op.cit, p.67

53
la comptabilité générale constitue un système d’information au service d’une
analyse des coûts des différentes actions engagées dans le cadre de
programmes destinés à remplir une mission. La référence à la comptabilité
générale garantit une cohérence dans les calculs de coûts et d’indicateurs de
performance en aval dans les différents ministères. 1

En dehors de la spécificité de la comptabilité publique et mêmes des


comptabilités publiques, par apport à la comptabilité privée (et aux normes
internationales), le contenu de la sincérité comptable ne pose pas de
problèmes doctrinaux majeurs ; on sait, en ce domaine, la tendance (consacré
par le règlement général de la comptabilité publique) est l’alignement sur la
comptabilité privée (et ses normes internationales), sous réserve de spécificité
de l’action publique.2

L’article 30 (2ème alinéa) de la LOLF française 2001 aligne les règles


applicables à la comptabilité générale de l’État sur celle des autres, sous la
réserve de spécificité de l’État , certes non négligeable, mais encore faudrait- il
savoir comment leur espace pourrait se voir interprété, et il est reconnue pour
l’ensemble du secteur public par les instances comptables internationales
elles- même (normes IPSAS) de maintenir une image fidèle des activités et de
la situation de l’organisme public en cause.3

Mais l’élaboration de ce référentiel comptable public n’a pas manqué de


soulever plus d’une difficulté théorique et pratiques, et continue d’ailleurs d’en
soulever, comme en témoignent notamment les différences qui subsistent
encore, d’une part entre les comptabilités publiques, d’autre part entre les
comptabilités nationales et les normes internationales. Quant à la mise de ce
1 Monique CALVI-REVEYRON, L’adaptation de la comptabilité publique à l’exigence de sincérité, RFFP, n°111,
2010, P.118
2 François BARQUE, la sincérité des budgets et comptes publics, op.cit, p.67
3 Ibid., P.67

54
référentiel, permettant une qualité comptable indispensable pour toute
certification, elle laisse encore beaucoup à désirer.1

La LOLF française du 1er Août 2001 a transposé à la sphère budgétaire de


l’État une vision de la sincérité qui est très largement démarqué de celle du
code du commerce ainsi que du plan comptable général et qui concerne la
sincérité des comptes.

Dans les pays anglo-saxon, on accorde, depuis longtemps, une attention


toute particulière à la façon dont l’information concernant les comptes publics
est présentée à l’opinion publique, pour qu’elle soit réellement
compréhensible. Se manifeste, désormais, l’existence d’un modèle
public/privé, par installation progressive du privé au public, de transparence
financière mondiale, même si la diffusion du modèle, en fait anglo-saxon, puis
repris par l’union européenne, est encore très inégale selon les pays. Et dans
les normes posées figure la sincérité comptable.2

Une des spécificités de la comptabilité publique eu égard au principe de


sincérité réside dans la double et même- dans le cadre de la réforme- de la
triple composante de ce système comptable, à savoir une comptabilité
budgétaire, une comptabilité générale et une comptabilité de gestion. La LOLF
fixe les principes d’enregistrement de la comptabilité budgétaire qui doit
retracer l’exécution des titres et mandats émis par l’ordonnateur, cette
comptabilité budgétaire conserve une logique de caisse. 3

Les principes de régularité, de sincérité et d’image fidèle sont largement


imbriqués voire indissociables puisque une comptabilité régulière est une
comptabilité qui est conforme aux règles et procédures en vigueur, les règles
1 Luc SAÏDJ, op.cit. , pp. 8-9
2 Gilbert ORSONI, op.cit. pp.38
3 Monique CALVI-REVEYRON, op.cit. , P.117

55
et procédures en vigueur sont appliquées de manière à traduire avec sincérité
la connaissance que les responsables de l’établissement des comptes ont de la
réalité et de l’importance relative des évènements enregistrés.

La Cour des Comptes est chargée de la certification de la régularité, de la


sincérité et de l’image fidèle des comptes établis par la Comptabilité générale
de l’Etat. Elle peut certifier, refuser de certifier ou certifier avec réserves les
comptes de l’Etat. Beaucoup des réserves de la Cour des Comptes porte sur le
défaut de sincérité des actifs de l’Etat, tels qu’ils sont recensés dans sa
comptabilité patrimoniale, dû à un défaut d’exhaustivité des recensements
mais aussi à des méthodes d’évaluation non-conformes aux normes
comptables.

La prétention, donc, du principe de sincérité pour les Comptes Publics


exige leur exactitude dans le respect des règles et procédures. Nous avons
montré que les normes comptables mises en place à partir de 2006, ainsi que
l’évolution de certaines règles budgétaires vont dans le sens d’une meilleure
information, améliorant ainsi la fiabilité des comptabilités budgétaire et
générale. Cependant le caractère prévisionnel des lois de finances atténue
l’atteinte de la sincérité, une sincérité de « moyens » pouvant être respectée
sans qu’une sincérité de « résultat » ne soit réalisable.

La notion de sincérité a, en donc, des implications sur le développement


et la gouvernance des finances publiques et de multitude d’aspect selon la
vocation et l’utilisation d’un terme assez riche en sens et interprétations, et qui
a progressivement pris place comme norme juridique, ce résultat nous amène
alors à déceler les apports existant entre les principes budgétaires classiques et
l’effectivité d’un principe assez récent celui de la sincérité.

56
Chapitre II : la sincérité et les autres principes

L’importance croissante du budget comme outil puissant de l’intervention


étatique impose une grande attention de la part de différents intervenants
institutionnels ou civiles, cet intérêt requiert donc une rigueur aussi stricte que
possible dans la pratique financière publique.

Cette rigueur a permis d’assoir les principes budgétaires classiques, dans


le but de mieux encadrer les opérations budgétaires. Au fil des temps ces
principes ont joué un rôle dans la simplification et la crédibilité des procédures
budgétaire et leur contrôle. Ils ont même été adoptés comme principes
constitutionnels des finances publiques dans plusieurs pays.

Le développement des méthodes et la diversité des intervenants ont


donné lieu ensuite à l’apparition du nouveau principe, celui de la sincérité pour
compléter et renforcer le contenu de l’ensemble des règles et garantir une
grande crédibilité financière.

Il est utile alors de s’interroger à ce niveau sur le rapport entre le principe


de la sincérité et les autres principes classiques (section I) ainsi que sur le rôle
de la théorie de l’équilibre dans sa consécration (section II).

Section I : les principes classiques support de la sincérité

Il est évident que le budget de l’Etat, obéit à des principes juridiques de


base et se conforme à des règles techniques qui sont réaffirmées dans les
différents textes et constituent une modernisation du droit budgétaire.

Ces principes ne concernent pas seulement le budget général mais aussi


des collectivités territoriales, ils ont à la fois une signification technique et
politique ; considérés obligatoires pour une bonne gestion financière, ils ont en
plus une vocation de faciliter le contrôle parlementaire.

57
En effet, dans un souci de précision, une définition des concepts s’impose
(§ 1) avant de déterminer comment la sincérité s’aperçoive comme résultat des
règles classiques (§ 2).

§1- aperçu des principes budgétaires classiques

Il s’agit en particulier de l’unité, de l’universalité de, l’annualité, et de la


spécialisation des crédits.

A- Les principes de la globalité

On désigne par les principes de globalité les deux premiers à savoir,


l’unité et l’universalité.

-L’unité : Elle s’énonce simplement : toutes les dépenses et toutes les


recettes de l’Etat doivent figurer dans un document unique soumis à
l’approbation du parlement. Pour que la règle soit respectée, il faut donc que
deux conditions soient remplies : le budget doit recenser l’ensemble des
recettes et des dépenses de l’Etat, sans exclusion d’aucune sorte ; celles-ci
doivent être rassemblées dans un projet de loi unique, sur lequel le parlement
devra se prononcer. Il doit y avoir une unité de la prévision et de l’autorisation
financière, ce qui n’exclut pas d’ailleurs la possibilité de scinder le projet de loi
de finances en plusieurs parties ou plusieurs documents.

Cette règle traditionnelle a une double justification. une justification


politique, car il s’agit pour le parlement d’être en mesure d’assurer son
arbitrage, ce qui ne serait pas le cas si on lui soumettait successivement une
série de plans financiers partiels, ou si l’on excluait du budget des éléments de
dépenses ou de recettes qui devrait y figurer1.

1MICHEL BOUVIER, MARIE-CHRISTINE ESCLASSAN, JEAN-PIERRE LASSALE, finances publiques, LGDJ, 15ème
édition 2016-2017, p.288.

58
Les dérogations les plus importantes sont représentées par les comptes
spéciaux de trésor CST, les budgets annexes BA, et les budgets des SEGMA.

L’universalité : elle complète le principe d’unité. L’article 8 de la LOLF


organique 130-13 dispose : « Il est fait recette du montant intégral des produits,
sans contraction entre les recettes et les dépenses ».En d’autres termes, les
recettes et les dépenses doivent être présentées dans leur intégralité, de façon
à permettre un contrôle exhaustif du Parlement à la fois sur la masse des
dépenses et sur la masse des recettes. Selon le Conseil constitutionnel français
(29 déc.1982, no 82-154 DC, LF pour 1983), le principe d’universalité « répond
au double souci d’assurer la clarté des comptes de l’État et de permettre, par là
même, un contrôle efficace du Parlement ; ...il a pour conséquence que les
recettes et les dépenses doivent figurer au budget pour leur montant brut sans
être contractées et qu’est interdite l’affectation d’une recette déterminée à la
couverture d’une dépense déterminée ». Le principe d’universalité se
décompose en deux règles (produit brut et non-affectation).

o La règle du produit brut : Cette règle (encore appelée règle de non-


contraction des recettes et des dépenses ou règle de non-compensation)
impose que toutes les dépenses et les recettes soient inscrites au budget
pour leur montant brut, et non pour leur montant net qui implique la
contraction des dépenses et des recettes pour aboutir à un solde. À titre
d’exemple, il est interdit d’inscrire les recettes d’impôts pour leur montant
net, qui impliquerait que soient déduits les frais nécessités pour leur
recouvrement (traitements des personnels, frais engendrés par
l’occupation des locaux de ces mêmes personnels...).
o La règle de non-affectation des recettes à une dépense : Cette règle
interdit qu’une recette déterminée soit affectée à une dépense

59
particulière. Cette interdiction se justifie par des raisons théoriques
(l’affectation serait source de gaspillage et remettrait en cause la
solidarité nationale, en permettant à des services de l’État de disposer de
fonds supérieurs à leurs besoins) et pratiques (risque de constitution de «
caisses noires »)1.

Les deux règles, elles-mêmes susceptibles en pratique de divers


assouplissements, en particulier, plusieurs catégories des comptes spéciaux où
des recettes sont affectées à des dépenses déterminées.

B- l’annualité et la spécialité

Ces deux principes se justifient, en particulier par le renforcement du


rôle et des compétences du parlement.

L’annualité : ce principe encadre dans le temps la procédure budgétaire, il vise


à obliger le gouvernement à présenter et à exécuter le projet de la loi de
finances dans une durée n’excédant pas l’année civile et rendre les comptes y
rattachés. Énoncé à l’article premier de la LOLF français : “les lois de finances,
déterminent pour un exercice, la nature, le montant et l’affectation des
ressources et des charges de l’Etat”, en précisant que “l’exercice s’étend sur
une année civile”. Il est aussi prévu par la LOLF marocaine de 2015 en
particulier son article 3 « La loi de finances de l'année prévoit, évalue, énonce
et autorise, pour chaque année budgétaire, l'ensemble des ressources-et des
charges de l'Etat, par référence à la programmation budgétaire prévue à
l'article 5 ci-dessous. ».

L'année budgétaire commence le 1er janvier et se termine le 31 décembre


de la même année ».

1 JACQUES BUISSON, Finances publiques, 15ème édition, Dalloz, 2015,2012, p.23.

60
Trois séries de justifications peuvent être avancées :

– des raisons politiques : la règle de l’annualité permet un contrôle


régulier des finances publiques, « c’est un rendez-vous » ;
– des raisons techniques : elle oblige l’administration à produire avec
une périodicité assez rapprochée ses comptes ;
– des raisons économiques : elle correspond au rythme de vie sociale,
l’agriculture est soumise au rythme annuel (éléments déterminants
dans le cadre d’une économie agricole du XIXe siècle).

Dans son application, le principe d’annualité budgétaire rencontre des


limites qui ont nécessité des aménagements permettant notamment de
dépasser le cadre annuel fixé à l’exécution des opérations de dépenses et de
recettes, ce sont les cas suivants par exp :

• La période complémentaire d’exécution du budget


• Les engagements par anticipation
• Les autorisations d’engagement et crédits de paiement
• Les reports de crédits
La spécialité des crédits: La spécialisation des crédits votés en loi de finances
conduit à lier le gouvernement en termes d’exécution budgétaire. En effet, le
vote du budget par le Parlement suppose que la répartition des crédits telle
qu’elle apparaît en loi de finances ne puisse être modifiée qu’avec
l’autorisation du Parlement.

Cependant, et afin de faciliter l’exécution de la loi de finances, des


aménagements ont été apportés au principe de spécialité budgétaire. Ces
exceptions permettent d’opérer, au sein de la loi de finances, des mouvements
de crédits au moyen des techniques de transfert et de virement.

61
Ces aménagements sont apparus nécessaires pour éviter une consommation
désordonnée des crédits. Les plus importants sont ;

▪ Les transferts de crédits ;


▪ Les virements de crédits ;
▪ Les dotations pour provisions ;
▪ Les fonds et comptes spéciaux.
Ces règles et principes annoncent donc le cadre des lois de finances et
obligent les intervenants à une meilleure présentation des documents
budgétaires en termes de transparence et de simplicité. Ce qui aura
certainement un effet sur la crédibilité et la sincérité de toute la procédure
budgétaires publique.

§2- La sincérité matérialisée par les autres principes

En droit budgétaire, le principe de sincérité est généralement présenté et


enseigné comme le dernier né des principes financiers. Or, en réalité, le
principe a un fondement ancien même si le terme n'était guère utilisé par le
passé. Ce principe mérite d'être hissé à sa juste place, c'est à-dire au faîte des
règles ou principes importants du droit financier. C'est un principe cardinal,
peut-être le plus fondamental en tant qu'il couronne l'édifice juridique
financier et lui assure une unité conceptuelle, que ce soit au niveau de contrôle
(A) qu’au niveau d’application matérielle (B).

A- Les principes classiques : base de contrôle de sincérité

Lorsque le Conseil constitutionnel a déclaré certaines dispositions


financières contraires à la Constitution, alors qu'elles auraient pu être
considérées comme appartenant à la famille des insincérités, ce sont d'autres
règles budgétaires qui servirent d'assise à la censure car leur contenu en droit

62
est plus tangible (universalité, spécialité...). Ces règles sont opérationnelles et
offrent une base plus solide à l'argumentation juridique que ne le permet
directement le principe de sincérité. Dans nombre de décisions, il n'y eut pas
officiellement constat d'insincérité mais au final, c'est la sincérité qui produit
ses effets1.

Dans sa décision n° 82-154 DC, le Conseil constitutionnel français, appelé à


se prononcer sur la conformité à la Constitution de dispositions de la loi de
finances pour 1983 concernant le mécanisme des prélèvements sur recettes au
profit des collectivités territoriales et des Communautés européennes, a
considéré que « le principe de l'universalité budgétaire [...] répond au double
souci d'assurer la clarté des comptes de l'Etat et de permettre, par là même, un
contrôle efficace du Parlement ; qu'il a pour conséquence que les recettes et les
dépenses doivent figurer au budget pour leur montant brut sans être
contractées et qu'est interdite l'affectation d'une recette déterminée à la
couverture d'une dépense déterminée, sous réserve des exceptions prévues au
second alinéa de l'article 18 de l'ordonnance de 1959». Le Conseil a également
précisé que le mécanisme des prélèvements sur recettes « satisfait aux
objectifs de clarté des comptes et d'efficacité du contrôle parlementaire qui ont
inspiré ces dispositions ainsi que celles de l'ensemble de l'ordonnance du 2
janvier 1959, dès lors que ces prélèvements sont, dans leur montant et leur
destination, définis de façon distincte et précise dans la loi de finances, qu'ils
sont assortis, tout comme les chapitres budgétaires, de justifications
appropriées, enfin qu'il n'y est pas recouru pour la couverture de charges de
l'Etat telles qu'elles sont énumérées à l'article 6 de l'ordonnance du 2 janvier
1959 ».

1 JEAN-FRANCOIS JOY, op.cit, pp.17- 21.

63
En outre, Dans sa décision n° 94-351 DC, le Conseil constitutionnel juge
que, « en prévoyant la prise en compte dans les dépenses du fonds de solidarité
vieillesse d'une dépense à caractère permanent incombant au budget annexe
des prestations sociales agricoles [notamment les versements destinés au
paiement par les caisses des prestations de l'assurance vieillesse des non-
salariés agricoles], l'article 34 de la loi déférée [la loi de finances pour 1995] a
méconnu le principe d'universalité ».

Saisi de la loi de finances pour 1999, le Conseil constitutionnel ne fonde


plus seulement la conformité à la Constitution des prélèvements sur recettes
sur le principe d'universalité mais également sur celui de sincérité : « les
concours apportés par l'Etat aux collectivités locales en compensation
d'exonérations, de réductions ou de plafonnements d'impôts locaux [...] peuvent
néanmoins, sans méconnaître les principes d'universalité et de sincérité
budgétaires, donner lieu à un mécanisme de prélèvement sur recettes, dès lors
que celui-ci est, dans son montant et sa destination, défini de façon distincte et
précise dans la loi de finances, et qu'il est assorti, tout comme les chapitres
budgétaires, de justifications appropriées » (décision n° 98-405 DC).

Ainsi, le Conseil constitutionnel, pour fonder ses décisions relatives à la


mise en œuvre du principe d'universalité, recourt au principe de sincérité qui
permet de mieux apprécier la lisibilité des opérations dont la constitutionnalité
est contestée par les requérants.

Le Conseil constitutionnel adopte la même méthode s'agissant du principe


d'unité budgétaire lorsque les requérants défèrent fréquemment des
dispositions qui leur semblent méconnaître le principe d'unité budgétaire, et
donc de sincérité, en particulier sous deux aspects :

64
- les non budgétisations : reprise par l'Etat de la dette de l'Agence centrale des
organismes de sécurité sociale (ACOSS) à l'égard de la Caisse des dépôts et
consignations, qualifiée par le Conseil d'opération de trésorerie intervenant en
dehors du budget (décision n° 93-330 DC), rattachement par voie de fonds de
concours de certains prélèvements au budget des services financiers (décision
n° 97-395 DC) ou encore absence de certains emplois publics dans la loi de
finances (décision n° 99-424 DC) ;

- les débudgétisations : dépenses présentant par nature un caractère


permanent non prises en charge par le budget de l'Etat (décision n° 94-351 DC)
ou transfert de recettes fiscales au bénéfice de la sécurité sociale (décision n°
99-422DC)1.
Les décisions dégagent ainsi le contenu de l'exigence de sincérité par
ricochet (vraisemblance des évaluations, cohérence du périmètre budgétaire,
critique des astuces de débudgétisation ou de reports de crédits, etc.) Il ne faut
donc pas se contenter de regarder la seule jurisprudence portant expressément
sur la censure d'insincérités ou appréciant directement la sincérité de
dispositions financières pour mesurer le degré d'influence du principe d'autant
que certaines autres décisions ne sont guère encourageantes quant à voir le
Conseil opérer le contrôle du respect du principe de sincérité de manière
intransigeante.
B- Principes classiques : matérialisation de la sincérité
La jurisprudence concourt donc à rendre plus effective la sincérité sans pour
autant s’appuyer expressément ou systématiquement sur un principe érigé en
« exigence de valeur constitutionnelle » du principe en l’entrelaçant aux règles

1LES DOCUMENTS DE TRAVAIL DU SÉNAT, Série ÉTUDES JURIDIQUES, « LE PRINCIPE DE SINCÉRITÉ DES LOIS DE
FINANCES ET DES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE » n° EJ 1 Octobre 2006,
https://www.senat.fr/ej/ej01/ej010.html. consulté le 13/05/2018. pour plus de précisions voir la jurisprudence
du conseil constitutionnel relative au principe de sincérité budgétaire sur http://www.conseil-
constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/les-decisions.95486.html , ainsi que l’annexe.

65
classiques plus préhensibles. Toutes y convergent et en somme le matérialisent
afin de satisfaire d’innombrable besoins financiers (informer, autoriser,
justifier, unifier, etc..).
Du fait l’entrelacement entre la sincérité et ses règles d’application est en
train de passer du statut d’intuitif ou d’implicite à celui de formel. On dit aussi à
propos de la règle d’unité qu’elle donne plus de clarté et plus de sincérité aux
documents ; il en va également de l’universalité qui est le corollaire du principe
d’unité en ce qu’il exige que le document présenté soit sincère et global. Cet
entrelacement devient donc patent dans les textes et les définitions.

Le principe de sincérité assure ainsi une unité conceptuelle à un écheveau


de règles financières consubstantielles apparaissant comme ses propres
techniques d’application1.

En d’autres termes, c’est l’annualité dans sa conception initiale, en visant


la répartition des charges et des recettes sur la base d’un rattachement sincère
à l’exercice, et qui s’est vue récemment renforcée dans cette mission
spécifique, au moyen non seulement de l’affirmation de ce rattachement mais
aussi par l’intérêt croissant porté au taux de réalisation des prévisions,
constitue le support temporel de la sincérité, tandis que les autres principes
apparaissent comme un complément nécessaire pour une bonne
appréciation … il s’agit, en l’occurrence, au moyen d’une visualisation
exhaustive des flux financiers de s’assurer de la sincérité. A cet égard, ils jouent
leur rôle de support matériel de celle-ci2.

Si ces principes qui sont classiques servent alors comme préalable


nécessaire à la sincérité budgétaire, qu’en est-il alors pour le principe ou la

1JEAN-FRANCOIS JOY, La sincérité, premier principe financier, op.cit, p.20


2DOMINIQUE LANDBECK, les principes budgétaires locaux, presse universitaire d’Aix-Marseille(PUAM),
collection collectivités locales, 2001, pp.178- 184

66
règle de l’équilibre budgétaire et financier dont le sens et le contour sont un
peu variables selon les situations, les nécessités et même les idéologies des
gouvernements et des décideurs en général ? Quels liens entre l’exigence d’un
équilibre comme condition de la soutenabilité des finances publiques, les
dérogations et exceptions pour des raisons politiques et économiques, et les
impératifs de la présentation et de l’exécution sincères des documents et des
autorisations budgétaires ?

Section II : Sincérité et la nouvelle notion d’équilibre

Longtemps délaissé, et considéré comme simple aménagement non


contraignant en particulier depuis les grands plans de relance après la
deuxième guerre mondiale et en harmonie avec les théories keynésienne,
l’équilibre budgétaire dont les notions et les aspects sont multiples
(paragraphe1), marque un retour de plus en plus pesant sur la scène et les
politiques budgétaires, et constituent par ses implications certaine
représentation du principe de la sincérité (paragraphe 2).

§1- Notions de l’équilibre budgétaire

L’équilibre budgétaire renvoie à la nécessité d’équilibrer les comptes de


manière à éviter la présence de déficit dans le budget de l’Etat. Il n’est pas
vraiment une règle technique traditionnelle comme le principe d’annualité ou
d’universalité…, car il est très rarement respecté, comme le montre la situation
des finances publiques actuelles dans le monde, Il faut ajouter que la politique
budgétaire fait partie d’une possibilité proposée par le courant keynésien de la
théorie économique, la question de l’équilibre ou de déficit sous ses deux types
est donc, en outre, un enjeu politique sensible (A).

67
A- Déficit public et politiques budgétaires

La règle de l’équilibre tend à prendre une place de plus en plus importante


du fait de la construction européenne et de la mise en place de l’euro.
Introduite par le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de
l’union économique et monétaire,

Le non-respect de cette règle ou déséquilibre ou souvent synonyme du


déficit (et non pas l’excèdent) budgétaire peut entrainer des conséquences
importantes sur la situation des finances publique à moyen et à long terme.
Mais, il faut au préalable faire la distinction entre le déficit conjoncturel et le
déficit structurel. Un déficit, que l’on nommerait découvert si l’on parlait de
son propre compte en banque, n’est rien d’autre qu’un solde négatif, c’est-à-
dire la différence négative enregistrée au cours d’une année entre les recettes
et les dépenses. Comme son nom l’indique, le déficit conjoncturel est dû à une
mauvaise conjoncture, c’est-à-dire, si l’on s’en rapporte aux administrations
publiques, à l’effondrement temporaire des recettes fiscales et aux dépenses
supplémentaires de soutien à l’économie ou à la protection sociale qu’il
engendre. Ce déficit disparaît normalement lorsque la croissance revient et il
n’est en rien un danger lorsqu’il est proportionné aux difficultés économiques
traversées. Le déficit structurel, vient d’une tendance durable à ce que les
recettes soient inférieures aux dépenses et ce, quelle que soit la conjoncture
économique. Comme le mauvais cholestérol, ce déficit- là ronge la bonne santé,
sans qu’on s’en aperçoive. Le danger est qu’en période de crise conjoncturelle,
chacun oublie la différence entre le solde conjoncturel et le solde structurel et se
rassure, au motif erroné que la crise passée, le déficit se résorbera tout seul. Un
peu à l’instar de celui qui aurait perdu temporairement une partie de son salaire

68
et qui penserait que le simple rétablissement de celui-ci au niveau antérieur
suffirait à effacer le découvert qu’il a creusé1.

A titre d’exemple, le déficit budgétaire peut être considéré comme


structurel au Maroc, car il a tend à marquer durablement la situation des
finances publiques, comme le montre le graphique suivant :

Evolution du solde budgétaire au Maroc2

Le même constat pour la France, qui, depuis les années 80 enregistre un déficit
de manière quasi-régulière, (Comme le montre le graphique suivant).

1LAMBERT ALAIN, Déficits publics : La démocratie en danger, Armand Colin, 2013, p.48
2Ministère de l’économie et de finances, direction des études et des prévisions financières, Synthèse du
Rapport Economique et Financier 2018, Rabat, 5 janvier 2018, p.9

69
Évolution du déficit public en France (pourcentage du PIB)1

B- Les grandes théories de l’équilibre

Si la plupart des pays qu’ils soient développés ou en voie de


développement connaît ce problème de déficit c’est parce que ce dernier
dépend non seulement des niveaux de dépenses et de recettes, mais il est aussi
résultante des politiques budgétaires volontaires des gouvernements.

Ainsi, Dans une perspective keynésienne, un certain niveau de déficit et de


dette publics est nécessaire pour équilibrer la demande et la production
potentielle. Les déficits publics sont des conséquences de la situation macro-
économique et non la cause de celle-ci.

En outre, les déficits exercent un impact positif sur la croissance, mais que
cet effet peut se retourner et devenir négatif lorsque la dette publique dépasse
un certain seuil, que les économistes chiffrent, sur la base des données

1Données de l’institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), www.insee.fr consulté le
10/05/2018.

70
utilisées, entre 69 % et 79 % du PIB selon les modèles estimés. Une réduction
des dépenses publiques produit une chute amplifiée de l’activité, par l’effet
multiplicateur dû à la chute associée de la consommation1.

Alors que le modèle classique et Selon leurs partisans, les règles


budgétaires (l’équilibre en particulier) seraient nécessaires, car les
gouvernements ne sont pas bienveillants ; les politiciens n’ont pas le souci
d’optimiser le bien public, mais celui de se faire réélire. Par ailleurs, chaque
génération, égoïste, ne se soucie guère de la situation des générations futures.
Enfin, il faut rassurer les marchés financiers sur la capacité à assurer le service
de la dette publique. Chacune de ces préoccupations induit une règle
différente.
Selon la théorie de l’État-Léviathan ou du Public Choice, chaque groupe social
demande des augmentations de dépenses publiques en sa faveur, en ne tenant
pas compte du fait qu’il faille augmenter les impôts pour les financer.
L’équilibre non-coopératif comporte ainsi trop de dépenses publiques. Les
gouvernements ont tendance à faire trop de dépenses pour satisfaire leurs
électorats, sans augmenter les impôts en contrepartie. Ils utilisent la politique
budgétaire à des fins électoralistes et non à des fins de régulation. Ils ne font
pas les efforts nécessaires en période de bonne conjoncture. Le choix social
dépenses/impôts est faussé par la possibilité de s’endetter. Chaque branche de
l’administration se donne comme objectif d’augmenter ses effectifs et ses
moyens, sans souci d’efficacité et de productivité. Aucun mécanisme social ou
économique ne garantit l’optimalité du niveau des dépenses publiques ou du

1ALEXANDRA POPESCU et PATRICK VILLIEU, « déficit budgétaire, dette publique et croissance dans les pays
d’Europe centrale et orientale », Mondes en développement, n° 167, 2014/3, p.56

71
déficit. Aussi, le déficit public est-il en permanence trop élevé, conduisant à
une trop forte accumulation de dette1.

En rapport avec la sincérité, à ce niveau relatif à l’appréciation subjective


et politique de l’équilibre, l’examen porte donc sur les motivations, la
crédibilité et l’efficacité des politiques budgétaires et économiques et non
seulement sur le degré de l’équilibre qu’elles produisent (d’où l’importance de
l’évaluation des politiques publiques).

§2-La sincérité source de l’équilibre budgétaire

L’utilité de l’équilibre réside dans les sources mêmes qui l’ont fondées à
savoir assurer une gestion efficaces des ressources de l’Etat en permettant aux
citoyens qui sont les principaux pourvoyeurs financier de l’Etat d’avoir un œil
sur la gestion de ces ressources par le biais de mécanismes tel que la
traçabilité, et surtout le principe de l’équilibre budgétaire vise à protéger le
citoyen pourvoyeur des revenus de l’Etat contre toute injustice 2 , et ce en
garantissant une certaine équité intergénérationnelle (A), ce qui va faire
imposer cette « règle d’or » dans l’ordonnancement juridique (B).

A- Equilibre et traçabilité financière au service de l’équité

La traçabilité renvoie au fait que l’on puisse être en mesure de remonter à la


source même de chaque dépense publiques ou de chaque recettes publiques.
Le but visé ici est d’empêcher les décideurs politiques de faire un usage
discrétionnaire de la politique budgétaire de l’Etat. De plus, la traçabilité
permet de renforcer les engagements de l’Etat en faveur d’objectifs
budgétaires clairs et précis. Le but visé par la traçabilité en matière de finances

1 CATHERINE MATHIEU, HENRI STERDYNIAK, « faut-il des règles de politique budgétaire ? », Revue de l'OFCE, N°
126, 2012/7, p.302
2 Equilibre budgétaire, https://tematio.blogspot.com/2012/03/equilibre-budgetaire.html, consulté le

25/05/2018 à 16h.

72
publiques tel que mise en place par le biais du principe de l’équilibre
budgétaire est en fait une forme d’obligation implicite faite à l’ordonnateur
d’effectuer la recette à la dépense pour laquelle cette recette a été
effectivement recouvrée. La traçabilité en matière de finance publique grâce au
principe de l’équilibre budgétaire s’effectue à tous les niveaux du processus
budgétaire.

Si le principe de l’équilibre budgétaire en matière de finances publiques


permet au citoyen d’exercer un contrôle efficace et permanent sur la gestion
de la chose publique, il est surtout un instrument de protection du dit citoyen.

Le principe de l’équilibre budgétaire en matière de finances publiques


répond en priorité à un souci d’équité. En effet, il vise à mettre en place non
seulement la neutralité de l’Etat dans le jeu économique, mais surtout une
certaine éthique dans la pratique de la gestion de la chose publique, ceci
implique qu’il ne faudrait pas léguer des dettes à nos successeurs car le risque
que l’on court avec un budget non équilibré est le déficit budgétaire. Dans
l’optique de protéger les contribuables de tous abus possibles, il vaudrait mieux
comme le souligne l’adage qui fonde le moralisme des finances publiques
classique, administrer en «bon père de famille»1.

La sincérité résidant quelque part dans La bonne gestion, la clarté, la


rigueur budgétaire la traçabilité et l’équité intergénérationnelle constituent
sans doute la source et l’inspiration de la règle d’équilibre, ce qui d’ailleurs
explique l’adoption croissante et de plus en plus diffuse de celle-ci.

1 Ibid.

73
B- Equilibre budgétaire une confirmation progressive

Les considérations de sincérité parmi d’autres conduisent à l’adoption


avec rigueur de la règle de l’équilibre dans l’ordre juridique financier des pays
et des entités économiques (communautaire en particulier).

En Europe

La règle fait son apparition réelle avec le traité sur la stabilité, la


coordination et la gouvernance de l’Union économique et monétaire, signé en
mars 2012 par les chefs d'État de l'Union européenne, à l’exception du
Royaume-Uni et de la République tchèque. C’est un accord
intergouvernemental régi par le droit international qui contient une série
d’engagements pris par les États contractants, l’article 3 dudit traité stipule
que :

« 1 - Outre leurs obligations au titre du droit de L’union européenne et sans


préjudice de celles-ci, les parties contractantes appliquent les règles énoncées
au présent paragraphe:

A- la situation budgétaire des administrations publiques d'une partie


contractante est en équilibre ou en excédent;
B- la règle énoncée au point (A) est considérée comme respectée si Ie solde
structurel annuel des administrations publiques correspond à l'objectif à
moyen terme spécifique à chaque pays, tel que défini dans le pacte de
stabilité et de croissance révisé, avec une limite inférieure de déficit
structurel de 0,5 % du produit intérieur brut aux prix du marché…..

D- lorsque le rapport entre la dette publique et le produit intérieur brut aux


prix du marché est sensiblement inférieur à 60 % et lorsque les risques pour
la soutenabilité à long terme des finances publiques sont faibles, la limite

74
inférieure de l'objectif à moyen terme telle que définie au point b) peut être
relevée pour atteindre un déficit structurel d'au maximum 1,0 % du produit
intérieur brut aux prix du marché;… ».

Ce traité vise à renforcer le pilier économique de l'Union économique et


monétaire en adoptant un ensemble de règles destinées à favoriser la
discipline budgétaire (…), à renforcer la coordination de leurs politiques
économiques et à améliorer la gouvernance de la zone euro. Il prévoit
l’introduction par les États membres dans leur droit national de procédures
garantissant le respect d’une "règle d'or", définie comme une règle d’équilibre
structurel. Le traité, qui s’appuie sur la notion de solde structurel annuel des
administrations publiques, et exclut donc les « variations conjoncturelles » et
les « mesures ponctuelles et temporaires », limite ainsi les effets des
fluctuations cycliques de l’économie sur le respect des règles.

Le TSCG a été transposé en droit français par la loi organique relative à la


programmation et à la gouvernance des finances publiques du 17 décembre
2012. Instituant une obligation d’équilibre comptable pour l’ensemble des
budgets publics, la règle modifie notablement la conception traditionnelle du
droit budgétaire français parce que ce dernier n’a jamais comporté une règle
d’équilibre budgétaire commune à l’ensemble des budgets publics. L’approche
qui prévalait antérieurement était différente ; ainsi sous l’empire de
l’ordonnance du 2 janvier 1959, cette approche était celle d’un équilibre
économique et financier, énoncé à l’article 1er du texte, qui relevait d’une
inspiration clairement keynésienne et n’interdit pas le déficit. La conception
s’est faite il est vrai plus ambigu avec la LOLF du 1er août 2001. D’un côté la
notion d’équilibre économique et financier a été remplacée à l’article 1 er du
texte par la notion d’équilibre budgétaire et financier. D’un autre côté, deux

75
éléments ont atténué la portée du changement de cap ainsi opéré. En premier
lieu, l’exigence d’équilibre dans la LOLF ne concerne que la prévision
budgétaire, non l’exécution. En seconde lieu, elle n’a avec la LOLF qu’une
valeur indicative non un caractère contraignant 1.

Au Maroc

Avant 2011, aucune indication de l’équilibre n’était présente dans les


textes constitutionnels. Toutefois la loi organique relative à la loi de finances
7-98 prévoyait l’équilibre économique et financier dès son premier article
premier.

Dans un contexte politique marqué par la volonté de réforme, de


gouvernance, et de la transparence, la consécration constitutionnelle de
l’équilibre intervient alors avec la constitution de 29 juillet 2011, l’article 77
insiste sur le respect de l’équilibre « le parlement et le gouvernement veillent à
la préservation de l’équilibre des finances de l’Etat ».

C’est la loi organique relative à la loi de finance 130-13 qui a donné le


sens à cette règle. Ainsi dans l’article premier « La loi de finances détermine,
pour chaque année budgétaire, la nature, le montant et l'affectation de
l'ensemble des ressources et des charges de l'Etat, ainsi que l'équilibre
budgétaire et financier qui en résulte. Elle tient compte de la conjoncture
économique et sociale qui prévaut au moment de sa préparation, ainsi que des
objectifs et des résultats des programmes qu'elle détermine ».
Elle a encore prévu et avec précision les méthodes de calcul du solde
budgétaire et la règle d’or « Le solde budgétaire prévisionnel est calculé sur la
base de la différence entre les ressources hors produits des emprunts, et les

1 MICHEL BOUVIER, MARIE-CHRISTINE ESCLASSAN et JEAN-PIERRE LASSALE, op.cit, p.322

76
charges hors dépenses relatives aux amortissements de la dette à moyen et
long terme ». Article 9.

En plus de ces dispositions directes, d’autres règles prévues par la LOLF


assurent la sincérité de l’équilibre des finances publiques :

• Interdiction d’inscrire les dépenses de fonctionnement dans le budget


d’investissement ;

• Définition de la nature des dépenses relatives aux charges communes ;

• Limitation des reports des crédits d’investissement reportés par


l’introduction du seuil de 30% des crédits de paiement ;

• Consécration du caractère limitatif au chapitre des dépenses de


personnel et intégration des cotisations de l’Etat au titre de la
prévoyance sociale et de la retraite dans les dépenses de personnel ;

• Consécration de la loi de règlement en tant que loi de finances.

En outre, il est clair que cet intérêt pour l’adoption de la règle de


l’équilibre est nettement plus présent dans le droit budgétaire local.

L’équilibre budgétaire lié à une prévision sincère des recettes et des


dépenses locales présente, encore plus, une certaine antériorité sur la sincérité
des finances étatique, il existait tant dans la pratique que dans les textes alors
même que la jurisprudence constitutionnel n’en faisait pas encore usage. En
effet la méfiance de l’Etat dans la préparation et l’exécution des budgets locaux
a pour conséquence une exigence extrêmement marquée d’équilibre réel1.

1 Laurent Pancrazi, op.cit, p.237

77
Ce constat est confirmé dans les textes de décentralisation au Maroc, où
l’équilibre était toujours une constante de la règlementation financière locale.
Ainsi, la loi 45-08 relative à l’organisation des finances des collectivités locales
dans son article 6 (parmi d’autres) prévoyait que « …le budget doit être
équilibré dans chacune de ses parties… un état consolidé retraçant les
équilibres du budget, des budgets annexes et des comptes spéciaux est établi
selon les modalités fixées par voie règlementaire », de son côté l’article 24
soumet l’approbation du budget au respect de l’équilibre.

Les lois organiques relatives aux collectivités territoriales de 2015


continuent dans la même rigueur et en particulier la loi 11-14 relative aux
régions, qui sous le titre V (du régime financier de la région et de l’origine de
ses ressources financières) stipule que « le budget doit être équilibré dans
chacune de ses parties…. Un état consolidé retraçant les équilibres du budget»
(article 167), aussi le visa de l’autorité gouvernementale chargée de l’intérieur
est soumis à la condition du respect de l’équilibre du budget sur la base de la
sincérité des prévisions des recettes et des dépenses. (Article 202).

Cette exigence d’équilibre au niveau local est tellement donc forte que
certains auteurs ont même pu considérer que la sincérité du budget et des
comptes se trouve au sommet de la hiérarchie des principes budgétaires des
finances locales, et l’équilibre est une notion d’autant plus contraignant que
l’autonomie dont jouissent les collectivités territoriales.

Ainsi au niveau local, la notion de sincérité présente vis-à-vis des principes


budgétaires deux caractéristiques principales ; l’équilibre réel marque ainsi un
rattachement particulier à la sincérité puisqu’elle présente s’agissant de
l’évaluation des recettes et des dépenses un élément de sa définition ;
parallèlement les principes budgétaires sont par leurs caractéristiques

78
spécifiques, à l’instar, du niveau central, les supports de la sincérité. Aussi cet
égard, participent-ils une seconde fois à la réalisation de l’objectif d’équilibre1.

Consacré, le principe connaît alors une extension fulgurante, au point de


soumettre, en plus des lois de finances, la quasi-totalité du contenu de
l’information et de la procédure budgétaire au contrôle de sincérité. Le succès
de la sincérité, reconnue comme un principe cardinal des finances publiques,
ne fait pas oublier la question qui l’on pose à toute norme juridique, celle de
son effectivité.

1 DOMINIQUE LANDBECK, op.cit, P.178

79
Conclusion de la première partie

Le principe de sincérité budgétaire est, certes, d'apparition plus récente,


mais ses origines sont apparues avec le développement progressif des finances
publiques. Il repose sur l'idée que la sincérité des prévisions budgétaires, en
recettes comme en dépenses, conditionne le respect du principe du
consentement à l'impôt inscrit à l'article XIV de la Déclaration des droits de
l'Homme et du citoyen de 17893. Sa méconnaissance pourrait donc fonder une
censure de la loi de finances. Le concept de sincérité, bien que désormais
affirmé, demeure parfois difficile à cerner, s'agissant tant de ce qu'il recouvre
que de ce qu'il implique.

Les lois organiques relatives à la loi de finances marocaine et française


consacrent doublement la notion de sincérité : la sincérité budgétaire et la
sincérité comptable, comme elles l’érigent en principe budgétaire. Elles
donnent également aux parlementaires les moyens de mieux détecter
d'éventuelles insincérités, en particulier grâce à l'amélioration substantielle de
l'information qui leur est délivrée.

S’il est le dernier dans le droit budgétaire, le principe de sincérité ne peut


être conçu isolé des autres principes classiques, ils le servent comme support
matériel, en particulier lors du contrôle.

Ainsi, un principe confirmé, quel effectivité alors pour son contrôle et son
respect, qui demeurent, en outre, tributaires de plusieurs déterminants ;
politiques, institutionnels, et même culturels.

80
Partie deuxième: l’effectivité opérationnelle du principe de sincérité et
gouvernance financière

Exigence au service de la démocratie et de la saine gestion des deniers


publics, le principe de sincérité est indispensable et consacre la bonne
gouvernance des finances publiques. Or la portée pratique de cette sincérité
dépend naturellement de l’effectivité et de la qualité des contrôles ayant pour
objet de s’assurer de sa prise en compte.

Le contrôle constitue dans la doctrine classique des finances publiques,


qui tend à schématiser le processus budgétaire en cycle, la quatrième phase
après la préparation, décision, et l’exécution, successivement. Si la procédure
actuelle reprend bien ces quatre phases, la distribution entre les acteurs a été
peu altérée. De même, la grande distinction réside, d’une part, dans les règles
budgétaires à caractère nettement politique et, d’autre part, dans l’exécution
du budget fortement liée à une comptabilité publique au caractère beaucoup
plus technique.1

Le principe de sincérité traditionnellement appliqué au budget et dont le


champ d’application s’en trouve profondément modifié, ne se contente pas
d’embrasser le budget considéré au sens strict d’acte de prévision et
d’autorisation. Il irrigue l’ensemble de la procédure financière, de l’élaboration
à l’application des lois de finances prévisionnelles à l’examen de la loi de
règlement.

Dans le processus d’élaboration des lois de finances prévisionnelles (loi de


finances de l’année et loi de finances rectificative), en particulier, et dans
l’ensemble des procédures budgétaires, en général, la sincérité budgétaire a
une effectivité limitée -comme il a été démontré plus haut- elle est soumise à
1 LAURENT PANCRAZI, op. cit, PP 356-357

81
un contrôle jugé comme restreint et limité, (chapitre I). Cependant de larges
perspectives et d’opportunités sont ouvertes pour une plus grande
concrétisation de ce principe avec les réformes budgétaires entreprises ces
dernières années (chapitre II).

Chapitre I : Effectivité limitée du principe de sincérité : contrôle restreint

La pratique financière, qui ne peut être séparée du champ politique


régnant dans la société et des rapports constitutionnels entre les pouvoirs,
attribue la préparation et l’exécution du budget à l’exécutif, le vote et le
contrôle au parlement. Au XXème siècle le droit budgétaire s’est écarté de la
règle en raison du glissement du rapport de force exécutif/législatif. Toute
amélioration du contrôle politique implique de le prendre en compte, même si
la règle est déjà doublement altérée

• La première altération porte sur le contrôle. On parle d’ailleurs de


contrôle d’exécution, puisque les deux phases interviennent en parallèle.
aujourd'hui, le contrôle est largement partagé entre le parlement
(contrôle politique), l’administration elle-même (contrôle administratif)
et le juge (contrôle juridictionnel) ;
• La deuxième altération porte sur l’adoption. Au XXème siècle, le
gouvernement a privé les parlementaires d’une grande partie de leurs
pouvoirs. Ce phénomène qui résulte de la rationalisation, impose la
présence du gouvernement lors de chaque phase budgétaire. De
manière générale l’affaiblissement du parlement.
Le contrôle de la sincérité du gouvernement et des actes préparés par lui,
qui passe par un partage des cycles, ne fait pas exception de ces altérations. En
effet les difficultés que rencontre le contrôle de la sincérité en finances
publiques pour se concrétiser sont liées à un certains nombres d’obstacles. Les

82
uns sont d’ordre institutionnels (section I); les autres sont d’ordre techniques,
politiques et juridiques (section II).

Section I : les limites institutionnelles du contrôle

Si les constitutions et la LOLF ont pour ambition d’adapter les modalités


de préparation du budget aux normes démocratiques, elles maintiennent,
cependant, la prépondérance gouvernementale en matière de préparation du
budget.

Le CC reconnaît ainsi que son contrôle de constitutionnalité portant sur


la sincérité sanctionne bien le pouvoir discrétionnaire du parlement en matière
de vote des lois de finances, mais il ne peut remettre en cause une réalité, à
savoir la prééminence gouvernementale (§1) en matière de préparation du
budget. Ce contrôle constitutionnel reste restreint et affaibli et n’offre pas
suffisamment d’effectivité à la sincérité, en raison de son recours à l’erreur
manifeste (§ 2).

§1- la prééminence gouvernementale

Le contrôle exercé par le parlement sur l’activité financière du


gouvernement est un contrôle politique multidimensionnel qui ne se limite pas
seulement à contrôler les choix budgétaires et le suivi de leur exécution, il
s'étend aussi à une évaluation des résultats de l'exercice. Cependant, la
pratique d'une telle censure entre en conflit avec de multiples contraintes
limitant son efficacité, à savoir : La domination par le pouvoir exécutif des
sources de connaissances et de l’information financières et comptables,
rendant ainsi le contrôle parlementaire formel, symbolique et inefficace1.

103 .‫ ص‬،2005 ،‫ الطبعة األولى‬، ‫ الدار البيضاء‬،‫ مطبعة دار النشر المغربية‬،‫ قانون الميزانية العامة‬،‫عسو منصور‬ 1

83
Ainsi, cette prééminence n’est pas seulement la résultante d’un pouvoir
de législation croissant du gouvernement (A), mais aussi de la multitude de
techniques exceptionnelles de budgétisation (B).

A- Des limites de l’autorisation parlementaire


L’article 38 de la LOLF française 2001 rappelle la responsabilité première
du gouvernement en matière d’élaboration des prévisions budgétaires. Face à
son obligation de sincérité, le gouvernement dispose d’une liberté quant au
choix des moyens, en fixant les phases de la procédure de préparation
gouvernementale mais il est limité par l’objectif central qui est la maîtrise de la
dépense et la préservation de l’équilibre. Le gouvernement dispose alors d’une
certaine marge de liberté pour fixer la procédure d’élaboration des lois de
finances1.

Le pouvoir financier des parlements a considérablement diminué dans les


systèmes parlementaires rationalisés. Et cela apparait clairement au niveau des
pouvoirs restrictifs du Parlement de modifier le document du budget dont
l’élaboration a été initialement mise en place par le gouvernement. Ce dernier
a des prérogatives juridiques importantes pour faire face aux amendements
parlementaires afin de maintenir la cohérence et l'homogénéité de ses
orientations et ses objectifs2

En outre, la constitution, par ses dispositions générales, et la LOLF, par ses


dispositions particulières, limitent notablement les prérogatives parlementaires
en matière d’autorisation budgétaire : qu’elles soient liées au contenu même
de la loi de finances, qu’elles tiennent aux règles spécifiques de la procédure
budgétaire, ou qu’elles résultent des multiples prérogatives détenus par le
1 Laurent PANCRAZI, op. cit. P.378

‫ كلية العلوم القانونية واالقتصادية‬،‫ أطروحة لنيل الدكتوراه في القانون العام‬، ‫ وظيفة تشريعية أن تنفيذية؟‬:‫ قانون المالية بالمغرب‬،‫ مراد فارسي‬2
135.‫ ص‬،2017/2016 ،‫ فاس‬،‫واالجتماعية‬

84
gouvernement dans le cadre de la procédure législative. Ces restrictions qui
visent apparemment une préservation de l’équilibre financier que les
parlementaires pourraient être tentés de malmener1, limitent la compétence
financière du parlement au profit du gouvernement.

Ainsi la LOLF vient consacrer la prééminence du gouvernement dans la


matière financière, plusieurs attributions confirment donc cette
prédominance2:

• L'exécution du budget par un décret sans l’autorisation du Parlement :


Cette disposition peut affecter la sincérité du budget : l’article 50 de la
LOLF, et en vertu de l’article 75 de la constitution, dispose que « …si au 31
décembre, la loi de finances de l’année n’est pas votée ou n’est pas promulguée
en raison de sa soumission à la cour constitutionnelle, le gouvernement ouvre
par décret, les crédits nécessaires à la marche des services publics et à l’exercice
de leurs missions, en fonction des propositions budgétaires soumises à
approbation ». Cet article semble alors affaiblir le contrôle parlementaire
exercé sur le pouvoir exécutif, qui est, à l'origine, axé sur la sincérité du
budget, de sorte que le gouvernement trouve l'occasion favorable, pour passer
toutes les dispositions contenues dans le projet de loi de finances, sans un
grand souci du contrôle de sincérité, cela consacra la faiblesse du contrôle
parlementaire, et son incapacité à vérifier instantanément ce principe Prévu
dans la Loi organique.
• Intervenir dans le processus législatif par des décrets- lois est une
atteinte à l'autorisation parlementaire:
Lorsque le pouvoir législatif approuve le projet de loi finance, le
gouvernement doit se conformer à ce qui a été proposé par lui et approuvé par

1 FRANÇOIS CHOUVEL, op.cit, P.97


106- 102 ‫ ص ص‬،‫ مرجع سابق‬، ‫ عبد النبي أضريف‬2

85
le parlement. C’est pour cela le fait de légiférer par des décrets- lois même
exceptionnels constitue un risque majeur d’échapper au contrôle du principe
de sincérité ; l’article 81 de la constitution qui offre au gouvernement un
privilège constitutionnel de prendre, avec l’accord des commissions concernées
des deux chambres, entre les sessions, des décrets-lois qui doivent être ratifiés
au cours de la session ordinaire suivante du parlement ;Ce privilège est
consacré par l’article 60 de la LOLF 130-13 qui dispose « en cas de nécessité
impérieuse et imprévue d’intérêt national, des crédits supplémentaires peuvent
être ouverts par décret en cours d’année conformément à l’article 70 de la
constitution… », Encore plus que les expressions « nécessité impérieuse et
imprévue d’intérêt national » donnent au gouvernement un large pouvoir
discrétionnaire pour s’approprier des pouvoirs du parlement.
D’autres dispositions consacrent la prééminence du gouvernement de
légiférer à la place du parlement et de relativiser ainsi le contrôle de sincérité,
tels l’article 67 de la LOLF 130-13 qui attribue au gouvernement la possibilité
d’imposer des taxes parafiscales par décret ; l’article 42 de la LOLF 130-13 qui
stipule à son 3ème alinéa, que des prélèvements peuvent être opérés en cours
d’année sur le chapitre des dépenses imprévues et des dotations
provisionnelles, pour assurer la couverture de besoins urgents ou non prévus
lors de l’établissement du budget ; l’article 11 qui dispose au dernier alinéa
que « la rémunération des services rendus par l’État est instituée par décret
pris sur proposition du ministre intéressé et du ministre chargé du finances » ;
l’article 68 de la LOLF qui stipule que « les taxes parafiscales, perçus dans un
intérêt économique ou sociales au profit d’une personne morale de droit public
autre que l’État et les collectivités territoriales, ou d’une personne morale de
droit privé chargée des missions de service, sont établies par décret, pris sur
proposition du ministre intéressé et du ministre chargé des finances ».

86
En plus, L’article 48 de la LOLF 130-13 dispose que « le projet de loi de
finances de l’année est déposé sur le bureau de la chambre des représentants,
au plus tard le 20 octobre de l’année budgétaire en cours ». Et selon le même
article (2ème alinéa) ce projet est accompagné de 14 documents, dont la loi de
règlement, qui évalue la réalisation des prévisions, ne fait pas partie de ces
documents. Ainsi le PLF de l’année n’est pas accompagné du plus important
document, qui pourrait refléter une image fidèle de la sincérité budgétaire de
l’année précédente. Sachant que l’élaboration de la loi de finances de l’année
est basée sur une programmation budgétaire triennale actualisée chaque
année, l’accompagnement de PLF de l’année par la loi de règlement pourrait
refléter une image fidèle de la sincérité des prévisions du gouvernement pour
les années ultérieures et même pour le budget en discussion.1

Ensuite, selon l’article 49 de la LOLF, le parlement (les deux chambres) se


prononce sur le PLF de l’année dans un délai qui ne dépasse pas 58 jours au
lieu de 67 jours qui lui y était offert par la loi organique 7-98. Ainsi la durée est
diminuée de 9 jours, pourtant le délai de 67 jours lui-même n’était pas
suffisant pour l’étude de PLF vu la largeur de ses dispositions, sa technicité et
son illisibilité. Autrement dit est ce que cette durée est suffisante pour
l’examen de du PLF et des 14 documents qui l’accompagnent? En plus, parfois
le gouvernement ne respecte même pas ce délai. A plusieurs occasions, le
gouvernement dépose très tardivement le PLF de l’année au parlement ; cela
est dû en partie à l’absence des moyens de contrainte qui l’oblige à respecter le
délai réservé au parlement pour se prononcer.2

Ces différentes dispositions vont au-delà des exceptions et ont diminué


de manière significative la fonction législative du Parlement dans le domaine

99.‫ ص‬،‫ مرجع سابق‬،‫عبد النبي أضريف‬ 1

.‫نفس المرجع والصفحة‬ 2

87
financier, et ne sont pas sans conséquences pour la séparation des attributions
du pouvoir législatif et exécutif, ce qui rend l’autorisation parlementaire sans
sens et vide de son contenu1.

Ainsi, il paraît que les moyens de diminuer l’importance des pouvoirs du


parlement sont multiples et réaménagés par la Constitution financière même,
et le pouvoir exécutif devient le principal législateur du pays dans le domaine
financier.

En plus du pouvoir législatif, le gouvernement dispose des prérogatives


importantes en termes de techniques budgétaires exceptionnelles.
B- Des procédures budgétaires exceptionnelles
Plusieurs possibilités sont ouvertes devant le gouvernement pour
proposer ses choix budgétaires et les faire accepter et approuvés par le
parlement.

• Les comptes spéciaux du trésor et la question d’exhaustivité et de


sincérité :
Le lien commun entre le principe de la sincérité du budget et le principe
de l'unité budgétaire réside dans la mesure où les deux visent à donner une
image réelle de la situation financière, les budgets multiples affectent la
sincérité du budget et ouvre la porte aux déséquilibres et aux illisibilités
financières. La question d'autoriser le gouvernement à ouvrir des comptes
spéciaux de trésor (CST) par décret, et loin du contrôle minutieux du
Parlement constitue la plus importante des exceptions qui affectent le principe
de la sincérité du budget, car il s’agit d’un grand nombre de comptes et de
budgets qui donnent une image non réelle sur la situation financière de l'Etat,

145- 144 ‫ ص ص‬،‫ مرجع سابق‬،‫ قانون الميزانية العامة ورهان الحكامة المالية الجيدة‬،‫ عسو منصور‬1

88
et donne la possibilité au gouvernement d'imposer des charges et des
ressources incompatibles avec le principe de sincérité.
Les CST sont encadrés par les articles 25- 26- 27- 28 -29 -30 de la LOLF
130-13, toutefois le 3ème alinéa de l’article 26 constitue la principale exception
menaçant l’évaluation de la sincérité budgétaire, il dispose que « en cas
d’urgence et de nécessité impérieuse et imprévue, des comptes spéciaux de
trésor peuvent être créés, en cours d’année budgétaire, par décret,
conformément à l’article 70 de la constitution… » Cela néglige l’importance du
contrôle et d’autorisation parlementaire et, au final, le principe de sincérité,
puisque le gouvernement peut dissimuler certaines mesures lors de la
discussion du PLF pour accélérer et faciliter l’adoption de la loi de finances par
exemple.

• le gouvernement dispose de la possibilité de surseoir à l’exécution de


certaines dépenses d'investissement :
En vertu de l’article 62 de la LOLF « lorsque la conjoncture économique et
financière l’exige, le gouvernement peut, en cours d’année budgétaire, surseoir
à l’exécution de certains dépenses d’investissement. Les commissions
parlementaires chargés des finances en sont préalablement informées ». Le
gouvernement a la possibilité alors pour se libérer de ses engagements lors de
la discussion du PLF, d'autant plus que la partie contenant des dépenses de
l'investissement est la question qui provoque des grands débats au sein du
parlement compte tenu de leur impact sur le développement économique et
social. Ceci remet en question la portée de l’autorisation budgétaire et la limite
du contrôle de principe de sincérité.
• La loi de finances rectificative :
Selon l’article 51 de la LOLF, le gouvernement peut déposer au parlement,
un PLF rectificative, au cours de l’année, pour son approbation. Cette question
89
atteint au principe de la sincérité des autorisations du budget, car à travers la
loi de finances rectificative, le gouvernement peut modifier certains
engagements, en particulier, avec la durée réduite de discussion et de vote
parlementaires.
A ces procédures s’ajoute encore la création des SEGMA et d’autres
techniques de débudgétisation…
Quel intérêt alors, de l’autorisation parlementaire, puisque le
gouvernement est autorisé à légiférer à la place du parlement ? Dans ce cas
l’effectivité de principe de sincérité demeure limitée en raison du contrôle
restreint du parlement. Qu’on est alors du contrôle du CC ?

§2- L’exigence de l’erreur manifeste dans l’appréciation de l’insincérité


A travers La lecture de la jurisprudence du CC au sujet du contrôle de la
sincérité, il ressort une tendance générale d’adopter la notion de L’erreur
manifeste (A) comme notion générale en droit pour censurer les insincérités
des lois de finances (B)

A- Erreur manifeste : définition et origines


En général, L’erreur manifeste est une « erreur qui saute aux yeux sans
qu’il soit besoin d’être un expert très averti », elle consacre «une
méconnaissance de la logique ou du bon sens ». C’est une erreur qui « ne fait
aucun doute pour un esprit éclairé ».1

L’utilisation de l’erreur manifeste d’appréciation n’est pas propre à la


sincérité des lois de finances, son contrôle s’exerce aujourd’hui dans
l’ensemble des domaines du contentieux constitutionnels des lois dont les
origines sont directement tirés des contentieux administratifs. Pourtant, et

1 Laurent PANCRAZI, op.cit, PP, 417-418

90
malgré la généralisation de son emplois, ce contrôle est d’une nature ambiguë.
On le définit souvent comme un contrôle minimum ou restreint de la
qualification juridique des faits.

Si le contrôle de l’erreur manifeste a été transposée du contentieux


administratif au contrôle de constitutionnalité de la loi, la situation n’est donc
pas la même devant le juge constitutionnel qui doit répondre à des
préoccupations qui lui sont propres. Cela explique notamment que, loin d’être
circonscrit à la notion d’erreur manifeste d’appréciation, le recours à cette
technique de contrôle apparaît sous d’autres termes dont la formule est moins
désobligeante à l’endroit des parlementaires et qui sous-entendent un contrôle
de constitutionnalité limité à la censure des erreurs les plus grossières, mises
en évidence par leur caractère déraisonnable. C’est notamment le cas du
contrôle de la disproportion manifeste, qui accentue le lien entre erreur
manifeste d’appréciation, contrôle de proportionnalité, et conciliation entre
exigences constitutionnelles ; du contrôle de la dénaturation, qui renvoie à la
sanction des atteintes – et donc des erreurs – les plus graves et excessives
concernant certains droits fondamentaux.

Étant traditionnellement liée au contrôle restreint de la qualification


juridique des faits devant le juge administratif, l’erreur manifeste
d’appréciation dans le cadre du contentieux constitutionnel vient occuper une
dimension transversale en se rattachant plus largement au contrôle des motifs
et au contrôle de proportionnalité, qui est lui-même un élément essentiel du
contrôle de constitutionnalité de la loi. Elle vient toucher notamment à
l’appréciation des moyens mis en place et des objectifs poursuivis par le
législateur ainsi que des atteintes portées aux droits constitutionnellement
garantis. Par ailleurs, la notion même d’erreur manifeste peut poser problème

91
en contentieux constitutionnel eu égard à la nature de l’acte contrôlé : il ne
s’agit plus de sanctionner un acte règlementaire mais une loi, expression de la
volonté générale et adoptée par les chambres du Parlement qui tiennent leur
légitimité du suffrage universel. Censurer une loi pour erreur manifeste
d’appréciation dans ces conditions ne va donc pas sans difficulté puisque c’est
admettre explicitement qu’un tel organe puisse commettre des erreurs graves
et évidentes.1

B- L’erreur manifeste dans les lois de finances


L’introduction de l’erreur manifeste d’appréciation dans le contentieux
de sincérité des lois de finances a eu une double finalité. Tout d’abord, elle a
joué un rôle traditionnel de légitimation du contrôle constitutionnel dans le
domaine très politique des lois de finances, ensuite, elle a, toutefois, offert une
grande liberté au CC dans l’application du principe de sincérité.2

Même si l’erreur manifeste d’appréciation a servi à légitimer l’intervention


du conseil dans le contrôle de sincérité des lois de finances, force est, toutefois,
de constater que ce contrôle est entravé par un ensemble de difficultés. En fait,
décider objectivement de la non-conformité d’une loi de finances, c’est aussi
pour le CC, s’opposer à la volonté du parlement (précisément la majorité
parlementaire), ainsi qu’au gouvernement, ce qui consacre la dépossession de
ces dernier au profit du juge d’une part, et d’autre part, limite la liberté
d’action de la majorité au bénéfice de l’opposition ; face à ces problèmes, le
conseil doit parfois freiner ses audaces pour éviter les conflits frontaux avec la
majorité, et subit, en effet, une contrainte politique. Vue sous cet angle,

1 THIBAULT CAFFOZ, le contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation dans la procédure de la question


prioritaire de constitutionnalité, ILF-GERGC, Aix-Marseille université, PP 2-4
https://www.google.com/search?q=Thibault+CAFFOZ+le+contrôle+de+l%27erreur+manifeste&oq consulté le
19/06/18 à 13h30
2 Laurent PANCRAZI, op. cit., P.419

92
l’erreur manifeste d’appréciation tient de la stratégie d'évitement des conflits
politiques. Elle objectivise le contrôle en faisant appel à un standard qui
permet d’éviter partiellement la critique de la subjectivité du juge 1.

Or, en matière de loi de finances, l’erreur manifeste n’apparaîtrait que


tardivement avec la célèbre affaire de la « cagnotte »qui a amené à la saisine
du CC français, portant sur la loi de finances pour 2000. Celle-ci était critiquée,
notamment, parce qu’elle aurait comporté une minoration volontaire des
recettes fiscales. La décision du conseil bien que n’aboutissant pas à une
censure, a marqué une rupture. Dans cette décision 2, le CC a considéré « qu’il
ne ressort pas des éléments fournis au conseil constitutionnel que les
évaluations de recettes pour 2000 prises en compte à l’article d’équilibre
soient, eu égard à l’amplitude de la sous-estimation alléguée rapportée aux
masses budgétaires, entachées d’une erreur manifeste ».

Le Conseil constitutionnel a jugé dans le même sens s'agissant de


l'insincérité évoquée de la deuxième loi de finances rectificative pour 2000 :
« Considérant que les ressources de l'Etat retracées dans les lois de finances
présentent un caractère prévisionnel et sont prises en compte sous forme
d'évaluations ; qu'il ne ressort pas des éléments fournis au Conseil
constitutionnel que les évaluations prises en compte dans l'article d'équilibre
soient, eu égard au montant de la sous-estimation alléguée rapporté aux
masses budgétaires, entachées d'une erreur manifeste »3.
Le CC exerce un contrôle plus fréquent sur la sincérité dès lors qu’il est
saisi systématiquement des lois de finances. Son intervention devrait avoir, en
toute hypothèse, plus d’enjeu que les contrôles à postériori menés par la cour

1 Laurent PANCRAZI, op.cit, P.420


2 Décision n° 99-424 DC du 29 décembre 1999 du CC Français
3 Décision n°2000-441 DC du 28 décembre 2000 du CC Français

93
des comptes. Le juge constitutionnel aurait, en effet, le pouvoir de censurer
une loi de finances insincère et donc d’empêcher sa promulgation. Pourtant sa
timidité est patente. Le juge effectue un contrôle extrêmement limité du
principe en se bornant à repérer les erreurs manifestes d’appréciation
éventuellement commises par le gouvernement, à l’origine de projet de loi.
Contrôlant la constitutionnalité du texte organique, le juge en a profité
pour définir la sincérité comme « l’absence d’intention de fausser les grandes
lignes de l’équilibre déterminé par la loi de finances ». Le couplage de l’erreur
manifeste et de la référence aux grandes lignes de l’équilibre est tellement fort
que, parfois, le conseil ne recours pas explicitement à la première expression,
se contentant de constater que les prévisions retenus par le législateur n’ont
pas altéré les grandes lignes de l’équilibre. L’étroitesse de ce lien permet de
voir une consécration implicite de l’erreur manifeste comme moyen de
contrôle de sincérité de prévisions de recettes et de dépenses. L’erreur
manifeste d’appréciation est, pour le juge constitutionnel, un réel outil de
desserrements de contraintes. Il n’en demeure pas moins que l’effectivité du
contrôle de la sincérité en sort considérablement affaiblie.1
Le Conseil rejette de façon laconique l'argumentation des requérants
lorsque ceux-ci dénoncent l'insincérité de la loi de finances sur le terrain de
l'erreur manifeste d'appréciation : « il ne ressort pas des éléments fournis au
Conseil constitutionnel que les prévisions de recettes et les objectifs de
dépenses, présentés pour 2002, soient entachées d'une erreur manifeste,
compte tenu des aléas inhérents à leur évaluation et des incertitudes
particulières relatives à l'évolution de l'économie en 2002 » 2.
Comme le note M. Jean-Pierre Camby, à propos de la décision du Conseil
constitutionnel n° 2002-464 DC, « on mesure bien, ici encore, toute l'ambiguïté
1 François BARQUE, la sincérité des budgets et comptes publics, op.cit, PP, 78-79
2 Décision 2001-453 DC du CC Français

94
juridique de la notion de sincérité : les moyens de contestation des données
chiffrées sont largement extra-juridiques : comme en ce qui concerne le taux de
croissance ou les prévisions de recettes, ils doivent se fonder sur des éléments
qui ne font pas partie des dispositions adoptées mais consistent à en nier les
fondements ». [...] On mesure bien le paradoxe de la notion de sincérité : les
intentions ou les prévisions n'ont pas en elles-mêmes de consistance
juridique. [...] La sincérité comporte une composante d'intentionnalité : de ce
fait, des éléments subjectifs entrent nécessairement dans le raisonnement du
juge »1.
En introduisant l’erreur manifeste d’appréciation (EMA), le conseil a ainsi
marqué qu’il entendait réellement contrôler la sincérité des lois de finances,
tout en rappelant qu’il effectuerait ce contrôle avec modération que certains
qualifieront de « restreint ». De ce fait, il pratique, alors une autolimitation de
son contrôle.

Le contrôle est tout d’abord restreint par le recours à l’erreur manifeste,


le CC français a précisé qu’il ne recherchera qu’une insincérité manifeste des
prévisions de recettes et de dépenses2. Il a accepté de systématiser le recours à
l’erreur manifeste, en l’utilisant, même, en dehors de tout contentieux relatif
aux prévisions budgétaires. L’erreur manifeste commise par le gouvernement
serait alors un précieux indice présomptif de nature à faire avancer cette
recherche.

Chargé de contrôler la sincérité des lois de finances prévisionnelles, le CC


doit établir la volonté du législateur de fausser les grandes lignes de l’équilibre.
Le contrôle restreint s’explique également et parfois exclusivement, par la

1 Sénat, Service des études juridiques, le principe de sincérité des lois de finances et des lois de financement de
la sécurité sociale, 2018, www.Senat.fr/https://www.senat.fr/ej/ej01/ej011.html
2 Décision n° 2001-453 DC du 18 décembre 2001 du CC Français

95
volonté du juge de ne systématiser les censures du texte1. Il pourrait s’analyser
comme un moyen de préserver la continuité de la vie nationale et d’éviter que
ne réapparaissent les reproches formulés à l’égard du CC à la suite de la
censure intégrale de la loi de finances pour 1980 2.

L’effectivité du principe de sincérité est limitée aussi par des obstacles


d’ordre techniques qui rendent le contrôle affaibli et inefficient.

Section II : les obstacles techniques, politiques et juridiques : une censure


quasi-impossible

La sincérité budgétaire est étroitement liée à la qualité des prévisions


budgétaires des dépenses et des recettes. Or l’analyse des prévisions et des
réalisations révèle des écarts parfois importants dont les principales causes
sont aux nombres de deux :
• Les erreurs purement techniques : il s’agit essentiellement des
distorsions résultant de l’instabilité de la conjoncture économique et
des aléas de l’environnement politique.
• Les manipulations budgétaires : les prévisions budgétaires de dépenses
et de recettes ne sont pas uniquement le résultat d’une évaluation
technique neutre, elles intègrent des considérations politiques qui
conduisent parfois à des réajustements en fonction des objectifs
poursuivis par le gouvernement (par exemple le recours à la
débudgétisation ou la surestimation des recettes pour réduire
artificiellement le déficit budgétaire3.

1 François BARQUE, la sincérité devant le juge constitutionnel, op. cit. , P.100


2 Décision n°79-110 DC, LF 1980, P.36
3 ERIC DEVAUX, Dir. CLAUDE LAMBOIS, finances publiques, édition Bréal, 2002, P.122

96
Malgré son rôle central dans la LOLF, le principe de sincérité des lois de
finances semble bénéficier d’une faible protection si l’on se réfère à l’absence
d’une obligation de résultat, limitant le contrôle des erreurs de prévisions.

Cette limitation du contrôle s’explique par la technicité de l’art


prévisionnel, les prévisions étant inévitablement affectées des aléas (§1)
inhérents à de telles estimations et des incertitudes relatives à l’évolution de
l’économie. D’autres difficultés proviennent des considérations d’ordre
politiques (§2).

§1- la reconnaissance de l’aléa et l’incidence sur les prévisions

Si la jurisprudence constitutionnelle a limité la sincérité budgétaire à une


obligation de moyens en ce qui concerne la loi de finances initiale et la loi de
finances rectificative, cela s’explique par l’impossibilité de poser pour des
évaluations prévisionnelles une obligation de résultat.

A- L’aléa économique obstacle aux prévisions


Et si l’on retient le critère de l’aléa, il y a obligation de résultat lorsque le
résultat doit normalement être atteint par la mise en œuvre de techniques
dont dispose le débiteur. En revanche, si le résultat est aléatoire, le débiteur
est soumis à une simple obligation de moyens. En l’espèce, le caractère
prévisionnel des évaluations qui figurent dans les lois de finances autres que les
lois de règlement les empêche de décrire avec exactitude la réalité future1.

La loi de finances étant construite sur des hypothèses


macroéconomiques et financières, la gestion budgétaire peut faire face à des
imprévus au cours de l’exécution : divers aléas peuvent survenir en gestion sur
les dépenses comme des catastrophes naturelles, des crises sanitaires, des

1 Laurent PANCRAZI, op.cit., P.372

97
besoins nouveaux imprévus etc. La direction du budget doit par conséquent
anticiper, tout au long de l’année, ce que seront les dépenses en fin d’année, et
proposer, le cas échéant, des mesures correctrices lorsque la prévision tend à
s’écarter de la loi de finances initiale et du respect de la norme de dépenses. 1

En pratique, les Lois de Finances votées sont rarement réalisées à 100%.


Des écarts plus au moins importants sont enregistrés en raison, soit des
changements de l’activité économique, soit de problèmes administratifs, soit
d’évaluation non précise du comportement des variables financières.

Les prévisions des dépenses et des recettes du budget général, inscrites


en lois de finances initiales, s'avèrent ne jamais correspondre aux résultats
constatés par les lois de règlement. Cette constance dans l'erreur de prévision
amène à constater l'existence d'une marge d'imprécision, plus ou moins
importante selon qu'il s'agit des dépenses ou des recettes.

Il est à préciser que les recettes non fiscales sont très difficilement
prévisibles car elles sont composées d’éléments très disparates (redevances et
recettes assimilées, prélèvements négociés avec les organismes publics,
privatisation…). 2

Les erreurs de prévision peuvent être des erreurs involontaires ou


volontaires. Tout d'abord, l'erreur de prévision peut être une erreur
involontaire ; Dans ce cas, l'imprécision des prévisions peut, d'une part, être
liée à des éléments internes à la préparation du budget. Les techniques
d'évaluation des prévisions budgétaires sont faillibles et des aléas génèrent des
erreurs.

1 Direction du budget (France), Forum de la performance, « la prévision et le suivi de l’exécution du budget »,


https://www.performance-publique.budget.gouv.fr/budget-comptes-etat/execution-budget-etat/essentiel/s-
informer/prevision-suivi-execution-budget#.Wy9y2svjLqA. Consulté le 23/6/2018 à 11h30
2 Direction de la politique économique générale, Note relative à l’évaluation de la qualité des prévisions des

recettes fiscales, 2001, P. 2, disponible sur le site www.finances.gov.ma

98
B- Quelques figures des écarts de prévisions
La loi de finances pour l’année 2016 est la première adoptée sous l’égide
de la loi organique n° 130-13 relative à la loi de finances publiée le 18 Juin
2015. Le budget adopté par le Parlement a prévu des ressources d’un total de
364,8 MMDH et des dépenses arrêtées à 388,9 MMDH.

En termes de réalisations, selon les données communiquées par le


Ministère de l’économie et des finances, l’exécution du budget de l’année 2016
a dégagé un déficit de 40,6 MMDH, représentant 4,1 % du PIB contre 3,5 %
prévus. Les recettes ordinaires recouvrées ont totalisé 218,9 MMDH. Quant aux
dépenses, elles se sont établies à 263,8 MMDH.1

Le déficit dégagé de l’exécution de budget de l’exercice 2016 s’explique


comme suit :

Au niveau des réalisations, les recettes ordinaires ont été inférieures de


3,2 MMDH par rapport aux prévisions, s’expliquant essentiellement par les
facteurs suivants :

- Les recettes fiscales réalisées ont été en dessous des prévisions d’un
montant de 2,1 MMDH ;

- Les droits de douane ont dépassé les prévisions de 1,2 MMDH,


performance imputée aux recettes réalisées suite aux opérations de contrôle et
de redressement engagées par l’ADII ayant procuré au Trésor un montant
supplémentaire de 2,8 MMDH ;

- Les recettes réalisées suite aux contrôles menés par la Direction


générale des impôts ont totalisé 12 MMDH. Il en découle que les recettes

1 Cour des comptes, rapport préliminaire sur l’exécution du budget de l’Etat-exercice 2016, , 2018, P.1,
http://www.courdescomptes.ma/fr/Page-42/actualites/avis/rapport-preliminaire-sur-lexecution-du-budget-
de-letat-pour-lannee-2016/15-214/

99
réalisées suite aux actions de contrôle et de vérification s’élèvent à près de 15
MMDH, soit 7,9 % du total des recettes fiscales réalisées en 2016 ;

- Les remboursements et restitutions effectués ont totalisé 9,4 MMDH ;

- Les recettes non fiscales ont été en deçà des prévisions, écart dû
essentiellement aux dons provenant de certains pays du Conseil de
Coopération du Golfe qui ont atteint 7,2 MMDH, contre 13 MMDH inscrits au
budget.

Concernant les dépenses ordinaires, elles ont été inférieures aux


prévisions pour un montant total de 11,1 MMDH 1.

Les résultats de l’exécution du budget de 2016, comparativement à ceux


de 2015 et aux prévisions de la loi de finances et à l’exercice 2015, se
présentent comme suit :

En 2016, les recettes ordinaires réalisées ont totalisé un montant de


218.922 MDH, réparties comme suit :2

- Recettes fiscales : 189.639 MDH

- Recettes non fiscales : 25.961 MDH

- Recettes de certains CST6 : 3.322 MDH

- Quant aux dépenses, elles ont été d’un total de 263.823 MDH se
présentent comme suit :

- Dépenses de personnel : 104.320 MDH

- Dépenses d’investissement : 63.242 MDH

1 Ibid, P.1
2 Idem, P.9

100
- Dépenses de biens et services : 55.064 MDH

- Charges de la compensation : 14.097 MDH

- Intérêts et commissions de la dette : 27.100 MDH7.

Par rapport à 2015, le déficit global de l’année 2016 a enregistré une


amélioration de 563 MDH. En effet, à fin 2016, le déficit budgétaire s’élève à
40.562 MDH, soit 4,1 % du PIB. Ce déficit a dépassé les prévisions de la loi de
finances de 4.000 MDH, soit une différence de 10,8 %. Ces réalisations
montrent des écarts avec les hypothèses retenues au moment de l’élaboration
du projet de la loi de finances. 1 Cela montre aussi la grosseur des erreurs de
prévisions commises au moment de l’élaboration de la loi de finances.

En France, le caractère prévisionnel des lois de finances initiales et


rectificatives a souvent été utilisé dans la jurisprudence constitutionnelle,
depuis plusieurs années, pour justifier les erreurs de prévisions par des aléas
inhérents à l’évaluation des dépenses et des recettes et des incertitudes
relatives à l’évolution de l’économie.

Dans sa décision n°2009-599 du 29 décembre 2009 portant sur la loi de


finances pour 2010, le CC français fait application du critère de l’aléa aux
députés et sénateurs requérants qui soutiennent que les hypothèses
économiques de croissance qui fondent la loi de finances ont été sous-
évaluées. Le conseil répond « qu’il ne ressort pas des éléments soumis au CC
que les évaluations de recettes pour 2010 soient entachées d’une volonté
délibérée de les sous-estimer, compte tenu des aléas inhérents à leur
évaluation et des incertitudes particulières relatives à l’évolution de l’économie
en 2010 ». Dans les décisions des 16 et 29 décembre 2004, le conseil a

1 Idem, p.9

101
considéré que la sincérité des lois de finances doit être appréciée au regard des
aléas qui affectent toute estimation.1

En plus de ces limites, la procédure de préparation des lois de finances


souffre aussi des contraintes techniques, politiques et juridiques dont la
manipulation gouvernementale des prévisions budgétaires entrave le contrôle
de la sincérité budgétaire.

§2- la manipulation budgétaires par le gouvernement : quel contrôle avec


quelle sanction ?

Les techniques d'élaboration des prévisions diffèrent selon qu'il s'agit


d'évaluer les dépenses ou les recettes budgétaires. L'erreur dans l'évaluation
des dépenses peut être liée à l'utilisation de techniques budgétaires telles que
la procédure des reports de crédits, des fonds de concours ou le
fonctionnement des comptes d'avances. Quant à l'erreur dans l'évaluation des
recettes, elle semble pouvoir être consécutive aux modifications de la
législation fiscale et aux nombreux aléas de la prévision économique. En effet,
les prévisions des recettes budgétaires dépendent, en grande partie, des
prévisions économiques, qui, elles-mêmes, semblent trouver leurs propres
limites. L'imprécision des prévisions peut résulter, d'autre part, d'éléments
externes au budget. Ainsi, l'erreur dans la prévision des agrégats (taux
d'inflation, croissance,) ou dans l'élaboration des modèles économiques
permettant d'évaluer les prévisions budgétaires, peut expliquer certaines
erreurs de prévision. L'erreur de prévision peut, également, apparaitre comme
une erreur volontaire. Certaines techniques budgétaires comme les

1 Laurent PANCRAZI, op.cit, P.376

102
débudgétisations1 (A), mais d’autres outils (B); comme les reports de crédits,
les privatisations ou la régulation budgétaire…, peuvent, si elles sont
détournées, être à l'origine d'erreur dans la prévision budgétaire initiale2.

A- Les débudgétisations source d’incertitude


Certaines formes de dépenses qui sont connus sous le nom de dépenses
hors budget- tels les dépenses fiscales3 qui sont financées par des impôts- qui
ne figurent pas au budget n’échappent pas aux erreurs de prévisions. Ces
dépenses peuvent se substituer aux dépenses budgétaires directes, mais leurs
impacts sur le budget passent souvent sous silence et restent moins visibles
que celui des dépenses normales.

Au Maroc la présentation des dépenses fiscales ne respecte pas le


principe de sincérité. Le rapport des dépenses fiscales fait état, au titre de
2012, de 118 mesures dérogatoires qui ne sont pas du tout évaluées. D’où la
nécessité de l’exhaustivité et l’exactitude des évaluations financières proposées
au vote.4

1
La débudgétisation est une technique qui consiste à alléger le budget général de l'État en reportant certaines
des dépenses qu'il supportait jusque-là vers les budgets annexes et les comptes spéciaux du Trésor. Dans ce
cas, le contrôle parlementaire est toujours possible car les dépenses restent dans les comptes publics. Une
autre solution consiste à reporter certaines dépenses vers des personnes morales privées ou publiques pour
échapper au contrôle parlementaire. La débudgétisation va parfois encore plus loin. En effet, il arrive que l'État
fasse peser sur d'autres personnes morales que lui le financement de certaines dépenses qu'il avait coutume
d'assurer. Il s'agit notamment de la question des fonds.

2 ANNABELLE JAULIN, Dir. JEAN CLAUDE MARTINEZ, les limites des prévisions budgétaires, thèse pour
l’obtention de doctorat en droit public, université Panthéon-Assas, Paris, 1999, résumé disponible sur le site
http://www.theses.fr/1999PA020096 consulté le 23/06/2018 à 13h30.
3 La méthode d’évaluation des dépenses fiscales porte essentiellement sur les pertes fiscales directes, en

mesurant ex-post le coût de « l’écart à la norme » et en supposant inchangé le comportement des agents qui
en bénéficient. voir Mohammed NMILI, quel contrôle des dépenses publiques non budgétisées ? cas des
dépenses fiscales, RMFF, n°3, 2013, P.118.
4 Ibid, PP 119-120.

103
En effet, définie comme l’intention de fausser les grandes lignes du
budget, donc de produire des prévisions économiques fantasques, l’insincérité
du Gouvernement serait un hypothétique mensonge sur l’avenir, qui ne saurait
se prouver, sauf à mettre au jour des manœuvres frauduleuses.

Or, l’examen de ces éventuelles manœuvres frauduleuses laisse apparaître


une alternative dont chacun des termes représente une condamnation du
principe de sincérité budgétaire : soit les manœuvres frauduleuses sont de
celles qui modifient la présentation du budget; soit les manœuvres
frauduleuses sont de véritables falsifications, auquel cas la preuve serait
éminemment difficile à révéler (si tant est qu’elle puisse l’être : après tout, la
modification d’un rapport de la direction de la Prévision pourrait être analysée
comme un ordre hiérarchique prenant la forme d’une simple note de service)
et sa sanction ne relèverait certainement pas de l’office du juge
constitutionnel.

Face à un Gouvernement diseuse de bonne aventure, le Conseil


constitutionnel, qui chercherait à retenir l’insincérité, ne pourrait donc que se
fonder sur des éléments matériels, des manœuvres frauduleuses au nombre
desquels certaines pourraient être sanctionnées sur le fondement des principes
budgétaires classiques tandis que d’autres, trop graves sans doute,
échapperaient à son office.1

B- Autres techniques affectant la transparence


Certaines techniques par lesquelles le Gouvernement pourrait fausser un
budget sont alors censurées sur d’autres fondements que celui du principe de
sincérité. Il en va ainsi, tout d’abord, des mises en réserve de crédits : dans leur
mémoire, les requérants français évoquent régulièrement l’annonce faite par
1 Benoît MONTAY, la morale saisie par le droit : principe de sincérité et dol budgétaire, revue française de
théorie, de philosophie et de culture juridique « Droits», presse universitaire de France, n° 58, 2013, P.234

104
le Gouvernement, avant même le vote définitif de la loi de finances, de geler
certains crédits. Selon eux, couplée à une surestimation des hypothèses
économiques, cette mise en réserve des crédits altère la sincérité du budget : il
suffit au Gouvernement de présenter de nouvelles mesures fortes, de les
budgéter grâce à un taux de croissance et à des recettes surestimées, puis de
les annuler en cours d’exercice.1

C’est le cas également des reports de crédits : il est loisible au


Gouvernement de reporter certains crédits non utilisés sur le budget de l’année
suivante (les crédits passés devant majorer à due concurrence les nouveaux
crédits), ce qui peut le conduire à demander une autorisation budgétaire plus
faible (les crédits de l’année passée venant compenser la faible ouverture de
nouveaux crédits afin de financer pleinement tel ou tel programme). Les
requérants ont vu dans cette technique une « manipulation » créant « un écart
artificiel entre les crédits ouverts dans le budget, les crédits disponibles et les
crédits exécutés », donc un « cas avéré d’insincérité ».2

A l’occasion du contentieux constitutionnel relatif à la loi de finances


rectificative française pour 19933 , l’opposition reprochait au gouvernement
d’avoir surestimé les recettes attendues des privatisations d’entreprises
publiques. La lettre de saisine a été jugée audacieuse, pourtant le CC s’est bien
gardé de suivre le raisonnement des parlementaires qui demandaient de
censurer le défaut de sincérité du gouvernement. Puis le CC a clarifié la
situation dans la décision relative à la loi de finances pour 1995 par une
jurisprudence très équilibrée : d’un côté le gouvernement était sanctionné
pour violation des principes budgétaires ; d’un autre coté l’opposition était

1 Ibid, PP 221-222
2 Idem, P.223
3 Décision n°93-320 DC du 21 juin 1993, LFR pour 1993 du CC Français

105
sanctionnée par le caractère inopérant du moyen tiré de la violation du
principe de sincérité budgétaire. Au fond, le CC corrigeait à la fois le
gouvernement et l’opposition. La correction de l’opposition consistant à
considérer qu’on ne pouvait pas demander au gouvernement de préparer le
projet de loi de finances en évaluant les recettes et les dépenses sans le laisser
libre de ce travail qui lui appartient en propre. Ce raisonnement revenait à
faire bénéficier le gouvernement d’une présomption de sincérité dans le
chiffrage des ressources et des charges de l’État dans le PLF. Il s'agissait d’une
jurisprudence très intéressante, le CC ne souhaitait pas remettre en cause la
confiance faite au gouvernement pour évaluer de façon sincère les recettes et
les dépenses.1

Après cette décision, le CC français a été saisi systématiquement par les


parlementaires qui soulevaient des moyens tirés de la violation du principe de
sincérité. C’est d’ailleurs à propos du jugement de la sincérité de la pratique
des fonds de concours par assimilation que le CC a inventé la technique de la
double « détente par anticipation ». Il s’agit de la décision portant sur la loi de
finances pour 1997. Dans un premier temps le conseil va constater que le
gouvernement viole ouvertement les règles des fonds de concours, ce qui
constitue une atteinte à la sincérité des lois de finances. Mais dans un
deuxième temps, le CC va décider de ne pas gêner le gouvernement qui a
promis de régulariser la situation d’ici un an.2 Par conséquent, le CC va
anticiper la régularisation, ce qui va le conduire à refuser de sanctionner le
gouvernement. En effet à quoi sert-il de saisir un juge s’il décide que même si le
principe de sincérité est violé, on ne sanctionnera pas le gouvernement ? À

1 Décision n°94-351 DC du 29 décembre 1994, loi de finances pour 1995 du CC Français


2 Décision n°96-395 DC du 30 décembre 1997, loi de finances pour 1998 du CC Français

106
aucun moment, le conseil n’a censuré le gouvernement pour le motif de défaut
de sincérité.1

Pour les lois de finances prévisionnelles (lois de finances initiale et loi de


finances rectificative), il existe une présomption de sincérité qui bénéficie au
gouvernement ce qui signifie qu’il est supposé être sincère dans les évaluations
des recettes et des dépenses de l’État. mais le conseil constitutionnel précise
bien que cette présomption n’est valable que sous réserve de l’absence d’une
intention de fausser les grandes lignes de l’équilibre du budget déterminé par
la loi de finances. Si cela devait jouer, il faudrait que l’opposition parvienne à
établir, preuve à l’appui, que le gouvernement avait l’intention de frauder ce
qui sera extrêmement difficile2.

Ainsi apparait-il que le contrôle de la sincérité budgétaire qu’il soit


parlementaire ou constitutionnel demeure dans tous les cas limité et restreint,
à cause d’une part de l’affaiblissement du rôle du parlement en général, et
dans la matière financière plus précisément, et l’exigence de l’erreur manifeste
par le conseil constitutionnel dans la censure de l’insincérité d’autre part.

Devant cette réalité, l’attention se dirige alors aux réformes de


l’organisation, des procédures, et des rôles des différents intervenants dans les
finances publiques, dans l’attente d’un renouveau et d’une confirmation plus
formelle du principe de sincérité.

1 ÉTIENNE DOUAT, contre le principe de sincérité budgétaire, RFFP, PP, 152-153


2 Ibid, P.154

107
Chapitre II : Sincérité et perspectives de la réforme budgétaire

Devant l’affaiblissement du contrôle de la sincérité que ce soit


constitutionnel ou parlementaire en particulier, de nouvelles perspectives
s’ouvrent pour le renforcement de ce principe avec la réforme budgétaire
entamée depuis plusieurs années et concrétisée au Maroc par l’adoption d’un
nouvelle loi organique relative aux lois de finances en 2015.

En effet, cette réforme vise à substituer une approche des résultats et de


performance à l’approche des moyens dans la gestion publique, et par
conséquent de nombreux dispositifs et outils vont permettre une meilleure
transparence et efficacité financière.

Ainsi dans cette quête de gouvernance, la sincérité budgétaire se présente


comme objectif majeur de l’intervention financière publique, et ce par
plusieurs moyens à savoir le renforcement des pouvoirs du parlement
(section I), et d’autres mesures comptables (section II).

Section I : le renforcement du rôle du parlement

Parmi les apports les plus importants de la réforme budgétaire,


l’amélioration du contrôle parlementaire, la loi organique a consacré une place
importante à ce volet, et renforcera alors ses compétences dans le contrôle
et le rétablissement de la sincérité des finances publiques.

En effet ce renforcement touchera les relations avec le gouvernement, et


s’articule autour de la production et de la présentation d’une information
budgétaire de qualité (§1), et une meilleure efficacité de contrôle et
d’évaluation (§2).

108
§1- La qualité de l’information garantie de transparence et de sincérité

Les compétences financières exercées par le Parlement doivent conduire


ce dernier à apprécier dans quelle mesure le gouvernement a exécuté les
dispositions financières adoptées par le Parlement conformément à
l’autorisation budgétaire initialement accordée. Il s’agit d’un contrôle
budgétaire portant sur la régularité et la sincérité de l’exécution de la loi de
finances ainsi que sur le bon usage des deniers publics et l’adéquation des
moyens aux objectifs.

La réforme de la loi organique relative à la loi de finances constitue


l’occasion pour renforcer davantage la transparence budgétaire à travers, en
particulier, l’information fournie, et sa présentation (A), et les débats
budgétaires accompagnant la préparation et le vote de la loi de finances (B).

A- La présentation de l’information budgétaire

Le niveau ainsi que la structure du budget représentent un instrument


précieux permettant de repérer, d’identifier et d’apprécier correctement
l’action de l’Etat.

La nomenclature classique même suffisamment descriptive et explicative


demeurait uniquement informative sur les moyens et non opérante pour
informer sur les performances. La présentation des crédits dans les lois de
finances et les documents budgétaires qui leur étaient associés n’opérait donc
pas un rattachement satisfaisant de ces crédits aux objectifs poursuivis et
encore moins, aux résultats attendus. A cet effet, le parlement et l’opinion
publique étaient donc appelés à apprécier les dépenses sans connaitre avec un
niveau de précision suffisant leur usage ni a fortiori leur utilité1. D’où une

1 EL ARAFI HASSANE, gestion des finances de l’Etat, REJJES, Rabat, 1er édition, 2006, P.266

109
nouvelle nomenclature liant les moyen aux objectifs suivis, c’est dans ce cadre
qu’intervient la nouvelle LOLF marocaine.

Ainsi, l’article 38 de la LOLF de 2015 prévoit une nouvelle classification


pour les dépenses prévues dans les lois de finances, il stipule ainsi que « Les
dépenses du budget général sont groupées sous trois titres:

Titre I : dépenses de fonctionnement;

Titre II : dépenses d'investissement;

Titre III : dépenses relatives au service de la dette publique.

Les dépenses du budget général sont présentées, à l'intérieur des titres,


par chapitres, subdivisés en programmes, régions et projets ou actions.

Les dépenses des services de l'Etat gérés de manière autonomes sont


présentées, à J'intérieur de chaque chapitre, dans un programme et, le cas
échéant, dans des programmes subdivisés en régions et projets ou actions.

Les dépenses des comptes d'affectation spéciale sont présentées dans un


programme et, le cas échéant, dans des programmes subdivisés en régions
et projets ou actions ».

Ainsi, ce mode de classification peut-il être justifié par trois avantages :


premièrement, il rationalise davantage la prise de décision, en établissant une
corrélation entre le niveau des moyens et les objectifs. Deuxièmement, il
pourrait assurer un meilleur contrôle de l’efficacité de la dépense en prenant
compte des résultats. Troisièmement, il contribuerait à l’amélioration de la
gestion des services par l’affirmation de leurs responsabilités en matière de
résultats et de coûts de leurs activités1.

1 ARAFI HASSANE, op.cit, P.266

110
Par conséquent, l’on est amené à la gestion par la performance et la
transparence financière dans la mesure où il est établit un équilibre entre la
liberté du gestionnaire- qui dispose d’une enveloppe globale (fongibilité de
crédits) sur les programmes dont il est responsable-, et le contrôle/évaluation
de ses résultats par rapport aux objectifs mesurés par indicateurs définis dans
son projet annuel de performance (PAP).

Peu différente de la nomenclature française -où Depuis la mise en œuvre


de la LOLF, le budget général de l’État est présenté en missions, qui identifient
les grandes politiques publiques, elles-mêmes scindées en programmes,
concourant à cette politique déclinée en actions, et assortis d’objectifs et
d’indicateurs de performance.

La notion de programme est donc au cœur de la nouvelle architecture


budgétaire, les programmes sont l’unité de spécialité des crédits sur laquelle
repose l’autorisation budgétaire donnée par le Parlement ; ils constituent par
conséquent des enveloppes globales et limitatives de crédits mis à disposition
d’un ministre ou selon l’article 39 de la LOLF « Un programme est un ensemble
cohérent de projets ou actions relevant d'un même département ministériel ou
d'une même institution et auquel sont associés des objectifs définis en fonction
des finalités d'intérêt général ainsi que des indicateurs chiffrés permettant de
mesurer les résultats escomptés et faisant l'objet d'une évaluation qui vise à
s'assurer des conditions d'efficacité, d'efficience et de qualité liées aux
réalisations.

En réalité, La notion de programme au sens de la Nouvelle gestion


publique est cependant plus exigeante. Un programme idéal se caractérise par:
la définition d'une priorité, dont le sens est clair, la durée définie, les publics
concernés identifiés, les stratégies de mise en œuvre débattues avec le

111
ministre, l'implémentation définie par des plans d'action aux responsables
précis, pour obtenir des résultats concrets, mesurables, vérifiables et faisant
l'objet d'une consultation des citoyens la plus large possible

En d'autres termes, le programme vise à inscrire l'action publique dans un


triple formalisme : un schéma objectifs-moyens explicite et validé, un
mécanisme de responsabilité sur la réalisation des résultats attendus et un
cadre temporel (un début et une fin)1.

Cette architecture est en harmonie avec la programmation pluriannuelle


du budget et qui est un apport important de cette réforme. En effet, La loi
organique relative à la loi de finances prévoit l'élaboration de la loi de finances
de l'année par référence à une programmation budgétaire triennale
(PBT). Cette PBT a pour objectifs de:

- Soutenir la pérennité des politiques publiques en s'assurant de la


compatibilité de leur impact budgétaire futur avec les possibilités
financières de l’Etat et le cadre macro-économique;
- Accroître l'efficacité de l'allocation des ressources budgétaires en
renforçant le lien entre les stratégies sectorielles et le budget annuel;
- Améliorer les conditions de préparation de la loi de finances en l’inscrivant
dans un horizon de trois ans glissant tout en tenant compte des impératifs
de maitrise des équilibres fondamentaux;
- Octroyer une meilleure visibilité aux gestionnaires pour gérer leurs
programmes en fournissant un outil à moyen terme pour le suivi de la
performance des politiques publiques.
La programmation budgétaire triennale telle qu’institutionnalisée par la
nouvelle LOLF est glissante actualisée chaque année. Ainsi, les données de la
1SYLVIE TROSA et BERNARD PERRET, Vers une nouvelle gouvernance publique? La nouvelle loi budgétaire, la
culture administrative et les pratiques décisionnelles, Esprit, No. 312 (2) (Février 2005), P.69.

112
première année de cette programmation budgétaire triennale sont celles du
projet de loi de finances et les données afférentes aux deux années suivantes
sont indicatives mais doivent être réalistes. La programmation budgétaire
triennale fera l’objet d’une actualisation annuelle faisant ressortir les écarts par
rapport aux prévisions initiales.

Cette programmation budgétaire triennale concerne aussi bien les


budgets des ministères ainsi que les établissements et entreprises publics
soumis à leur tutelle et bénéficiant de ressources affectées ou de subventions
de l'Etat. Les prévisions triennales des dépenses issues de la programmation
budgétaire triennale figurent au niveau des projets de performance afin
d’assurer leurs cohérence avec les objectifs de performance et limiter ainsi la
multiplication des documents budgétaires.

Le parlement se voit ainsi le travail aménagé et facilité, on lui conférant


des attributions de contrôle et de suivi durant la période des programmes, en
votant chaque année leur reliquats, et en s’assurant de l’état d’avancement.
Ces dispositions améliorent sensiblement l’implication du parlement et son
contrôle de la sincérité budgétaire.

D’autre part la LOLF prévoit l’enrichissement de la documentation


budgétaire, transmise au Parlement, qui comprend (comme souligné plus haut)
en plus des projets des lois de finances, les rapports qui les accompagnent :

- note de présentation de la loi de finances comportant des données


concernant les investissements du budget général ainsi que les impacts
financiers et économiques des dispositions fiscales et douanières
proposées;

- rapport économique et financier;

113
- rapport sur les établissements et entreprises publics ;

- rapport sur les services de l'Etat gérés de manière autonome;

- rapport sur les comptes spéciaux du Trésor;

- rapport sur les dépenses fiscales ;

- rapport sur la dette publique;

- rapport sur le budget axé sur les résultats tenant compte de l'aspect
genre;

- rapport sur les ressources humaines ;

- rapport sur la compensation ;

- note sur les dépenses relatives aux charges communes ;

- rapport sur le foncier public mobilisé pour l'investissement ;

- note sur la répartition régionale de l'investissement.

Le projet de loi de finances de l'année peut être également accompagné


d'un rapport sur les comptes consolidés du secteur public.

Il est immédiatement soumis à l'examen de la commission chargée des


finances de la Chambre des représentants.

De son côté l’article 66 prévoit les documents communiqués au parlement lors


du dépôt du projet de loi de règlement de la loi de finances, il s’agit
principalement de:

- compte général de l'Etat appuyé du bilan et des autres états financiers


ainsi que d'une évaluation des engagements hors bilan;

- une annexe relative aux crédits supplémentaires ouverts, accompagnée


de tous les justificatifs nécessaires, le cas échéant;

114
- rapport annuel de performance élaboré par le ministère chargé des
finances. Ce rapport constitue la synthèse et la consolidation des rapports
de performance élaborés par les départements ministériels et institutions;

- rapport sur les ressources affectées aux collectivités territoriales ;

- et un rapport d'audit de performance.

Le rapport sur l'exécution de la loi de finances et la déclaration générale


de conformité entre les comptes individuels des comptables et le compte
général du Royaume sont communiqués par la Cour des comptes au Parlement.
Copie en est transmise au Gouvernement.

B- L’enrichissement des débats budgétaires


La LOLF renforce le rôle du parlement en matière de contrôle et de suivi
de la gestion des deniers publics dans le débat budgétaire en introduisant une
phase de concertation et d'information du parlement au cours de la
préparation de la loi de finances. Le Ministre chargé des finances expose aux
commissions des finances du parlement, avant le 31 juillet, le cadre général de
préparation de la loi de finances de l’année suivante. Cet exposé comporte :
- L’évolution de l’économie nationale ;
- L’état d’avancement de l’exécution de la loi de finances en cours à la date du
30 juin ;
- Les données relatives à la politique économique et financière ;
- La programmation budgétaire triennale globale (article 47)...
Cette disposition va consolider le droit des parlementaires à l’information au
sujet de la gestion des finances publiques et renforcer leurs attributions en
matière de contrôle de l’action du gouvernement.
En France, le débat d’orientation budgétaire (DOB) a été instauré dans la
pratique en mai 1996 (après une première expérience en avril 1990) et a lieu

115
chaque année depuis, sauf certaines années d’élections (1997 et 2002). Il a
pour objet d’associer le parlement à l’élaboration du projet de loi de finances.
Ce débat a été consacré par la loi organique du 1eraoût 2001 en son article 48 :
« le Gouvernement présente, au cours du dernier trimestre de la session
ordinaire, un rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les
orientations des finances publiques comportant outre une description des
grandes orientations de sa politique économique et budgétaire, la liste des
missions, des programmes et des indicateurs de performances associés à
chacun de ces programmes, envisagés pour le projet de loi de finances de
l’année suivante. Le débat d’orientation budgétaire peut avoir lieu sur la base
de ce rapport (qui lui seul est obligatoire). Facultatif, il n’en demeure pas moins
de pratique constante depuis la mise en œuvre de la LOLF. Dès 2006, sa place
dans le cycle budgétaire est par ailleurs revalorisée par l’extension du chaînage
vertueux (art. 41, LOLF), le vote sur la loi de règlement, imposée par la LOLF
avant la mise en discussion de la loi de finances, aura lieu en pratique avant le
DOB.
le DOB, purement informatif (aucun vote n’est possible à l’issue du débat)
peine à s’imposer comme un moment clef du cycle budgétaire aux yeux des
parlementaires. Il reste surtout un débat général, politique, et non un débat
technique notamment concernant les nouveaux outils de la LOLF qui n’y sont
jamais abordés (missions, programmes, objectifs et indicateurs). Son couplage
avec le débat d’orientation sur les finances sociales en 2007, s’il vient étendre
son champ d’application, renforce néanmoins sensiblement cette tendance1.
A cela s’ajoute l’information par le gouvernement des rectifications et
modifications des autorisations initiales. En effet informer le Parlement avant
de procéder à une quelconque modification du contenu ou de l’emploi des

1 DAMIEN CATTEAU, finances publiques, Gualino, éditions LEXTENSO, 2014, P. 85

116
crédits prévus en loi de finances, constitue indéniablement un préliminaire
démocratique essentiel. Le respect des compétences financières du Parlement
exige qu’un minimum d’informations lui soit adressé avant qu’une quelconque
procédure ne soit engagée. Cette information est exigée par la LOLF, en
matière d’annulations de crédits Conformément aux dispositions de l’article 14
LOLF, « tout décret d’annulation doit être transmis pour information aux
commissions chargées des finances de l’Assemblé e nationale et du Sénat ainsi
qu’aux autres commissions concernées. Cette information doit être effectuée
avant toute publication du décret. », D’ouvertures de crédits supplémentaires
« Dans l’hypothèse d’un décret d’avance adopté sous condition d’urgence,
l’ouverture de crédits supplémentaires ne peut s’opérer qu’après avis des
commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat (LOLF
française, art. 13) et de transferts mais également virements de crédits « Les
virements et transferts sont effectués par décret pris sur le rapport du ministre
chargé des Finances, après information des commissions de l’Assemblée
nationale et du Sénat chargées des finances et des autres commissions
concernées (LOLF, art. 12). Les mêmes constats sont valables pour la LOLF
marocaine, en particulier les articles 58, 59, 60.

les parlementaires ont entendu ainsi se doter de moyens d’informations


considérables: information au stade de l’élaboration du projet de loi de
finances, dans l’ adoption des lois de finances initiale et rectificative, en cours
d’exécution budgétaire à raison des mouvements de crédits affectant
l’autorisation budgétaire accordée par le Parlement mais également dans
l’adoption des lois de règlement. Ce souci d’information s’inscrit dans un
contexte de transparence mais également de sincérité qui doit conduire les
parlementaires à exercer un contrôle effectif sur l’exécution des lois de
finances. Pour ce faire, le rôle des commissions parlementaires chargées des
117
finances a été renforcé et la mission d’assistance confiée à la Cour des comptes
a également été précisée1.

Cette mission d’assistance est prévue dans la constitution marocaine, et


précisément dans l’article 148 « La Cour des Comptes assiste le Parlement dans
les domaines de contrôle des finances publiques. Elle répond aux questions et
consultations en rapport avec les fonctions de législation, de contrôle et
d'évaluation, exercées par le Parlement et relatives aux finances publiques. »,
Elle permet aussi l’évaluation des politiques publiques, une attribution
nouvellement dévolue au parlement.

§2- La mission parlementaire d’évaluation à la quête de sincérité

Depuis plusieurs années, au-delà du contrôle de l’action du


Gouvernement, les parlements ont cherché à se doter de moyens d’évaluer
des politiques publiques.

Généralement, la recherche évaluative distingue trois types de critères


pour apprécier les effets d’une politique publique ; L’effectivité : analyse si les
impacts sont induits comme prévus par le PPA, les plans d’action et les outputs
produits. L’efficacité : met en rapport les outcomes observables avec les
objectifs visés. Finalement, l’efficience allocative : compare les outcomes avec
les ressources engagées.

En règle générale, les évaluations sont cependant réalisées avec un


objectif politique ou administratif concret : initier une mesure, légitimer une
décision, améliorer la mise en œuvre, contrôler, réduire des subventions, etc.

1 STEPHANIE DAMAREY, Finances publiques : élaboration exécution contrôle, 5e édition 2017-2018, GUALINO,
P.161

118
Les évaluations sont censées préparer les fondements des décisions à venir ou
légitimer les mesures déjà adoptées1.

Des contextes différents de l’évaluation des politiques publiques sont à


noter ici, suivant les pouvoirs détenus par les représentants, et l’ancrage de la
culture d’évaluation dans la gestion publique, ainsi le cas marocain (A) connaît
des initiations à partir de 2011, par contre des pratiques étrangères (B)
prouvent d’un certain progrès dans la matière.

A- Le parlement marocain et l’enjeu de la pratique d’évaluation


L’évaluation des politiques publiques est une pratique très récente au
Maroc. En effet, les premières évaluations suivant des approches scientifiques
fondées remontent au milieu des années quatre-vingt-dix, effectuées surtout
par les institutions internationales, notamment la Banque mondiale qui a
procédé à une évaluation globale (plus précisément une méta-évaluation) dans
plusieurs secteurs, à savoir l’éducation, la santé, la justice… et qui a permis de
relever les grandes faiblesses structurelles dans ces systèmes. Cette même
période a été marquée par l’exigence des bailleurs de fonds internationaux de
réaliser un suivi/évaluation ou des audits pour les projets financés dans le
cadre de la coopération internationale et des partenariats avec les institutions
internationales.

Ce n’est qu’au début du XXIe siècle que les notions de l’efficacité et de


l’efficience commencent à prendre place parmi les principales préoccupations
des décideurs publics. L’action des autorités publiques n’est plus à l’abri du
contrôle et de l’analyse approfondis. Au contraire, elle est appelée à s’inscrire

1PETER KNOEPFEL, CORINNE LARRUE, FRÉDÉRIC VARONE et JEAN-FRANÇOIS SAVARD, analyse et pilotage des
politiques publiques, presse de l’université du Québec, 2015, P.303

119
dans un cadre de modernisation et d’efficacité faisant de l’évaluation une
composante indispensable de son système1.

Avec l’adoption de la constitution de 2011, les premiers pas dans le sens


de l’évaluation de l’action publique ont été effectués, ainsi l’article 70 précise
que : « le parlement exerce le pouvoir législatif. Il vote les lois, contrôle l’action
du gouvernement et évalue les politiques publiques ».

Les dispositions constitutionnelles en relation avec le volet « évaluation »


sont nombreuses et constituent l’unique horizon de mise en œuvre de la
reddition des comptes dans sa dimension politique2.

Par contre, la LOLF ne comporte pas des dispositions franches et explicites


relative à l’EPP, certes, mais prévoit- comme indiqué plus haut- l’évaluation des
programmes par l’outil des « indicateurs chiffrés permettant de mesurer les
résultats escomptés et faisant l’objet d’une évaluation qui vise à s’assurer des
conditions d’efficacité, d’efficience, et de qualité liées aux réalisations » (article
39).

En général, le rôle du parlement dans l’EPP est considérablement


renforcé, par les compétences qui lui sont dévolues et encore par
l’aménagement et l’importance que revêt dorénavant la loi de règlement, et
encore plus par la constitutionnalisation de l’assistance de la cour des comptes,
ce qui permettra un contrôle plus important de la sincérité.

1 ANASS ABOULAAGUIG, L’évaluation des politiques publiques au Maroc : Etat des lieux et perspectives,
Cahiers de Recherche du LERES N°3 – 2015, FSJES Meknès, P.4
2 Mohammed MESMOUDI, la gouvernance publique au Maroc, du contrôle des finances publique à l’évaluation

des politiques publiques, thèse pour l’obtention du doctorat en Droit public, FSJES-Fès, 2016-2017, p.41

120
B- Les assemblés et l’EPP en France
La proposition de loi adoptée en juillet 1995 par l'Assemblée nationale,
tendant à élargir les pouvoirs d'information du Parlement et à créer un Office
parlementaire d'évaluation des politiques publiques, attribue à ce dernier une
double mission :

- d'une part, une mission d'évaluation rétrospective en le chargeant "


d'informer le Parlement sur l'adéquation entre les moyens juridiques,
administratifs ou financiers consacrés à toute politique publique (...) " ;

- d'autre part, une mission d'évaluation prospective en lui demandant de "


fournir également au Parlement des études sur les moyens juridiques,
administratifs ou financiers qui seront nécessaires pour atteindre les objectifs
assignés " aux politiques financées grâce à des ressources publiques 1.

Cependant, la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 est sans conteste la


plus importante révision de la Constitution depuis 1962 (plus de la moitié des
articles de la Constitution de 1958 sont modifiés) elle a renforcé le parlement,
particulièrement dans sa fonction de contrôle.

Jusqu’alors axé sur l’activité gouvernementale proprement dite, le


contrôle tend à prendre du champ, pour s’intéresser à l’efficacité des politiques
publiques, ce qui peut conduire le parlement à s’interroger sur les projets de loi
qui lui sont proposés : au contrôle classique s’ajoute aujourd’hui une mission
d’évaluation, que l’on pourrait appeler « contrôle extraordinaire ».

En effet, au contrôle classique du parlement sur l’exécutif, la révision


constitutionnelle du 23 juillet 2008 a ajouté solennellement un contrôle sur
l’efficacité des politiques publiques, autrement dit le parlement se trouve

1 Site officiel du Senat français https://www.senat.fr/lc/lc8/lc8_mono.html, consulté le 20/05/2018 à 10h00.

121
dorénavant doté d’un pouvoir d’évaluation. C’est l’apport le plus important et
innovant de cette dernière révision constitutionnelle dont il est un peu
prématuré de juger les conséquences. Toutefois on peut dire que ce pouvoir
d’évaluation était en germe dès avant la dernière révision constitutionnelle 1.

De sa part, l’Assemblée nationale a mis en place depuis plusieurs années,


dans le cadre de ses prérogatives de contrôle financier, deux missions
permanentes dont l’objectif est de veiller à l’efficience de la dépense publique.

L’une, la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) est chargée de


contrôler l’utilisation des deniers publics ; l’autre, la mission d’évaluation et de
contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) a pour but de
vérifier l’application des lois de financement de la sécurité sociale et de
procéder à l’évaluation de toute question relative aux finances de la sécurité
sociale.

En outre, créé par la réforme du Règlement du 27 mai 2009, le comité


d’évaluation et de contrôle (CEC) permet à l’Assemblée nationale de mettre en
œuvre la fonction d’évaluation qui lui est désormais explicitement reconnue
par l’article 24 de la Constitution2.

Il est évident alors que plusieurs nouveautés et reformes d’ordre juridique


institutionnel ont été entreprise dernièrement au Maroc et ailleurs dans le but
d’accroitre les pouvoirs et les compétences du contrôle du parlement sur
l’action gouvernementale. Cette tendance est une opportunité et une garantie
démocratique et politique pour un meilleur contrôle de sincérité des finances
publiques, particulièrement, lorsque ce contrôle intervient dans un contexte de

1 HOUILLON PHILIPPE, Le contrôle extraordinaire du parlement, revue « Pouvoirs », 2010/3 (n° 134), P.61
2 Site officiel de l’assemblé nationale française, http://www2.assemblee-nationale.fr, Fiche de synthèse n°50 :
L’évaluation des politiques publiques, 6 juin 2017, consulté le 20/805/2018 à 10h00.

122
rénovation et d’aménagement des instruments et des règles de transparence
budgétaires et surtout comptables.

Section II : les nouveaux outils comptables un gage de la sincérité

Le volet comptable constitue la pierre angulaire de la sincérité, il permet


une meilleure lecture et un suivi rigoureux de l’ensemble des opérations et des
mouvements des fonds et décrit le degré de transparence et fiabilité de leur
utilisation.

Au Maroc, le dispositif en matière de règlement du budget de l’Etat a


connu une avancé durant les dernières années sans pour autant atteindre le
niveau édicté par les standards internationaux en la matière. En effet ce
système était évoluait spécialement dans un cadre de déclaration de
conformité entre le compte général de l’Etat et les comptes individuels des
comptables.

Cette approche reposait sur un réceptacle budgétaire et comptable


encore limité dans sa conception, n’ayant pas permis d’atteindre les objectifs
escomptés en matière de sincérité, de fiabilité et de performance.

En ce qui concerne le rôle de la cour des comptes en matière de


vérification de sincérité des comptes publics, il est évident qu’il demeurait
tributaire de la qualité de l’information fournie par les services gestionnaires
ainsi que les conditions de reddition des comptes publics1.

Il est vrai qu’un certain progrès a été accompli dans les procédures
budgétaires et comptables à partir des années 2000, ainsi après une
orientation vers la gestion axée sur les résultats, viennent ensuite la réforme du

1 SERHANE ABDELLAH, la sincérité et la fiabilité au niveau des comptes publics : de la logique de conformité à la
démarche de certification, la cohérence des finances publiques au Maroc et en France, acte du 5ème colloque
international de finances publiques-Rabat, LGDJ, Paris, 2012, P. 141

123
contrôle de la dépense par la TGR, et l’adoption du système GID- GIR qui ont
transformé le système d’information et comptable à une plus grande
transparence. Cependant les vrais réformes et chantiers de modernisation dans
les comptes publics sont apportés par la LOLF de 2015.

En effet, la sincérité comptable constitue un levier majeur de réforme


recherché par cette loi organique.

Une lecture de ce texte laisse dégager deux grandes préoccupations


ambitieuses du législateur organique pour assoir une certaine sincérité
comptable à savoir la tenue d’une comptabilité moderne (§1) et le rôle de la
cour des comptes en matière de certification, en plus cette sincérité ne peut
être entendue sans la notion de consolidation (§2).

§1- La réforme de la comptabilité de l’Etat

L’article 31 de la LOLF dispose que « l’Etat tient une comptabilité


budgétaire des recettes et des dépenses.

Il tient une comptabilité générale de l’ensemble de ses opérations.

Il peut tenir une comptabilité destinée à analyser les couts des différents
projets engagés dans le cadre des programmes.

Les comptes de l’Etat doivent être réguliers sincère, et donner une image
fidèle de son patrimoine et de sa situation financière.

La cour des comptes certifie la régularité et la sincérité des comptes de


l’Etat. »

De la lecture de cet article se dégage d’abord l’entrée en vigueur de la


comptabilité d’exercice (A) et puis l’impératif de la certification (B) par la cour
des comptes.

124
A- La comptabilité d’exercice et analytique clé de la rénovation
Entre les considérations juridiques et les considérations comptables
ressort deux systèmes de rattachement des opérations budgétaires ; le
système d’exercice et le système de gestion1, mais la réforme finit par
combiner entre les deux.

En effet, et selon l’article 33, « la comptabilité générale de l'État est


fondée sur le principe de la constatation des droits et obligations. Les
opérations sont prises en compte au titre de l'exercice auquel elles se
rattachent, indépendamment de leur date de paiement ou d'encaissement… »

Ce système de rattachement des opérations budgétaires à l’exercice


semble objectif dans sa logique dans la mesure où les actes d’exécution de la
loi de finances doivent politiquement et juridiquement, être rattachés à
l’autorisation qui en a donné la naissance. D’une part, les encaissements sont la
conséquence des décisions d’exigibilité des recettes, en rattachant les recettes
à l’année de l’émission et non à l’année de recouvrement, on s’assure que
toutes les recettes prévues et autorisées ont bien été recouvrées. D’autre part,
les paiements sont la conséquence des décisions d’engagements des
dépenses ; en rattachant les paiements à l’année d’engagement, on s’assure
que les engagements sont bien restés dans la limite des crédits, et on évite de
faire peser des arriérés sur exercices ultérieurs2.

En France, L’article 30 de la LOLF précise, aussi, que la comptabilité


générale est fondée sur la constatation des droits et obligations et que toutes
les opérations sont rattachées à l’exercice au sein duquel la décision a été
prise, indépendamment de la date de paiement ou d’encaissement.

1 EL ARAFI HASSANE, op.cit, P.155


2 Ibid.P.155

125
Pour que les choses soient claires, cet article dispose que « les règles
applicables à la comptabilité de l’État ne se distinguent de celles applicables
aux entreprises qu’en raison des spécificités de son action ». La nouvelle
comptabilité publique n’est donc plus fondamentalement différente de celle
des entreprises ; cela étant, le comptable public dont le rôle est reconnu dans
la LOLF conserve un statut très différent de celui des comptables privés. Il est
fondé sur sa « responsabilité » personnelle et pécuniaire. Les conditions dans
lesquelles la comptabilité générale de l’État doit être tenue ont été précisées
dans treize « normes comptables » dont le recueil a été publié en 2004 puis en
2007. Ces normes, destinées naturellement à évoluer, tiennent largement
compte des normes IFRS dont le règlement du 19 juillet 2002 impose
l’utilisation. D’inspiration anglo-saxonne, ces normes font une place importante
à la « juste valeur », c’est-à-dire à la valeur de marché à un instant donné; elles
s’intéressent plus aux réalités économiques qu’aux structures juridiques ; la
notion de contrôle prévaut sur celle de propriété. Cette dernière règle a été
appliquée lors de l’établissement du premier bilan d’ouverture de l’État1;

La mise en place d’une véritable comptabilité d’exercice privilégiant la


constatation des droits et des obligations de l’Etat offre, alors, une opportunité
à tous ceux qui veulent connaitre les prestations rendues par l’appareil
productif de l’Etat de se faire une idée précise sur la réalité financière de l’Etat.

Elle offre une opportunité à tous ceux qui veulent connaître les
prestations rendues par l’appareil productif de l’Etat qu’ils soient décideurs,
corps de contrôle, bailleurs de fonds, représentants de la nation ou juges
financiers, de se faire une idée précise sur l’enrichissement ou
l’appauvrissement de l’Etat.

1MICHEL COTTEN, SYLVIE TROSA, Les réformes comptables dans les pays de l'OCDE et en France : des outils
pour la performance et la transparence », Revue française d'administration publique 2007/3 (n° 123), P. 297

126
Cette dimension de transparence se trouve consolidée à travers le large
spectre d’informations financières que la nouvelle comptabilité permet de
dégager, dès lors qu’il ne s’agit plus seulement de savoir ce que l’Etat a dans
ses caisses, logique qui prévaut dans l’ancien système, mais d’apprécier ce que
sont ses richesses, ses dettes et les engagements qu’il peut être amené à
honorer afin de mieux appréhender les résultats dégagés et la situation
financière à moyen et à long termes des finances publiques.

Elle se trouve également fortement renforcée par la prise en compte des


éléments d’actifs enrichis au niveau du recensement et de l’évaluation des
immobilisations corporelles, incorporelles et financières et par la prise en
considération des stocks, aspects totalement absents dans le système
comptable actuel1.

En outre, la comptabilité destinée à l’analyse des coûts, permet d’avoir


une idée claire sur l’utilisation des moyens, le coût des services publics et in
fine, permet une meilleure évaluation des actions publiques en termes
d’efficacité et de performance.

La comptabilité ainsi rénovée de l’Etat, au-delà de son caractère


technique, constitue, en réalité un outil de modernisation de l’Etat en raison
des changements et des mutations profondes qu’elle implique en matière
d’amélioration de la bonne gouvernance dans la sphère publique. Le nouveau
système régissant la comptabilité de l’Etat constitue à ce titre, un véritable pari
de l’innovation/créativité au sein de l’administration publique, et participe à la
création d’un nouvel état d’esprit devant dès lors, animer les différents
intervenants dans le processus de préparation, d’exécution et de contrôle des
finances publiques.
1 GUIRI ABDELKRIM, La réforme de la comptabilité de l’Etat : Des enjeux au cœur de la réforme de
l’administration, AL KHAZINA Revue de la Trésorerie Générale du Royaume - N° 8, Août 2011, P. 4

127
En final, Tous ces apports n’ont que consolider et améliorer la crédibilité
et la sincérité budgétaire dans son aspect comptable.

B- La certification des comptes et l’enjeu de responsabilisation


La certification des comptes publics est une attribution désormais de la
cour des comptes (l’article 31de la LOLF), sans tarder sur le côté juridique et
théorique de la certification et de la loi de règlement (traité au premier
chapitre de la première partie), l’accent se met ici sur l’utilité technique et
politique de ladite certification et son rôle dans la transparence et la sincérité.

En effet, la certification porte sur le compte général de l’Etat, joint au


projet de la loi de règlement et comprenant la balance générale des comptes,
le compte de résultat, le bilan et ses annexes ainsi qu’une évaluation des
engagements hors bilan. La mission de certification confiée à la cour des
comptes a uniquement pour objet la constatation de la conformité des états
financiers aux règles qui leurs sont applicables 1.

En général, et partout l’enjeu lié à la mise en place de la certification des


comptes de l’Etat est lié à la qualité des comptes à produire. En effet,
l’information que contiennent ces comptes doit permettre en premier lieu au
parlement et en second à tous les partenaires de l’Etat de mieux apprécier le
patrimoine et la situation financière de l’Etat.

La certification n’est pas et ne doit pas être une fin en soi, car elle est
appelée à devenir un véritable levier de pilotage de l’action publique, à travers
le renforcement du système du contrôle interne, l’amélioration du système
d’information et la dissémination des valeurs de transparence.

1 TADA ABDERRAHIM, audit et contrôle des comptes de l’Etat : vers un modèle de consolidation et de
certification des comptes publics au Maroc, op.cit, P.223

128
Elle est aussi conçue pour assurer une meilleure prévention et gestion des
risques auxquels les organismes publics sont exposés.

A cet égard, la certification des comptes de l’Etat est engagée dans


plusieurs pays dans le monde. Elle s’inscrit dans un mouvement initié par les
pays anglo-saxons (Etats-Unis, Canada, Royaume uni, Nouvelle-Zélande…) et
pris ces dernières années par d’autre pays, notamment la France, la suisse,
la Norvège, les Pays- bas… l’étude comparée des expériences édifiantes
démontre que le point de départ de la reforme comptable de l’Etat repose
sur les points suivants1 :

- La transparence, par l’application de nouvelles normes comptables plus


riche et plus lisible;
- La sincérité qui se traduit en pratique par la certification des comptes de
l’Etat par l’institution supérieure de contrôle, en auditant les comptes de
l’Etat selon les principes admis et qui est matérialisé par une opinion
rendue par la cour des comptes ;
- La fiabilité du système d’information ;
Ces expériences constituent une source d’information et d’inspiration
pour mener à bien cette réforme complexe. Ainsi le benchmark réalisé à ce
niveau permet d’identifier les principales tendances suivantes :

- La généralisation de la certification des comptes des Etats par les


institutions supérieures de contrôle. A ce niveau, le partenariat continu et
transparent entre les organes chargés de la comptabilité et de la gestion
et les institutions supérieures de contrôle tout au long de la transition
comptable constitue un facteur de succès pour garantir la sincérité et la
fiabilité des comptes publics.

1 SERHANE ABDELLAH, op.cit, P.143

129
- L’adoption par les institutions supérieures de contrôle d’une approche
basée sur les normes d’audit tendant vers des référentiels admis sur le
plan international ;
- Le renforcement du dispositif de contrôle interne ainsi que l’implication des
corps d’inspection et de l’audit interne comme prérequis de la mise en
place du nouveau plan comptable de l’Etat et la maitrise de la qualité
comptable.
- Il convient de rappeler que la plupart des pays qui ont déjà adopté la
certification présentent des réserves et rencontrent encore des difficultés.
Les principales difficultés évoquées à ce niveau sont liées principalement :
- à la difficulté d’évaluation de certaine actifs publics ;
- aux principes de comptabilisation des actifs relevant des domaines
confidentiels ;
- aux faiblesses constatées au niveau de la piste d’audit (traçabilité des
opérations) ;
- aux efforts nécessaires pour l’adaptation des systèmes informatiques et de
gestion ;
- aux modifications des régimes de responsabilités entre les différents
intervenants dans la gestion des finances publiques pour l’application des
nouvelles normes comptables ;
- aux insuffisances de preuve et de documentation pour certaines opérations
comptables ;
- aux résistances au changement manifesté au niveau des différents niveaux
de gestion opérationnelle, budgétaire et comptable 1.

1 SERHANE ABDELLAH, op.cit, P.144

130
Ainsi ces expériences peuvent servir de base de réflexion pour surmonter
ces difficultés et rendre la certification un moment fort dans le processus de
reddition de compte et de transparence.

L’application de ces nouvelles règles nécessitera un effort de stabilisation


du processus pour mieux atteindre les objectifs fixés en termes de
transparence et de sincérité des comptes.

Il est évident que ces instruments comptables concrétisent certainement


une sincérité comptable et en particulier si des mécanismes de consolidation
des comptes publics seront mis en place.

§2- La consolidation des comptes publics et la bonne gouvernance

La consolidation des comptes publics était toujours une recommandation


majeure pour améliorer l’état de transparence et sincérité.

La nécessité de présenter des comptes publics consolidés peut être


motivée par plusieurs considérations ; parmi les plus importants l’on peut citer
celles qui visent à renforcer la capacité de l’opinion publique, du législateur,
des marchés ainsi que des partenaires internationaux, à mieux évaluer et
suivre les politiques économiques et sociales menées par les autorités
nationales. Or, ces politiques sont menées par le biais de plusieurs entités
publiques. En effet, pour atteindre des objectifs spécifiques en matière de
politique publique, plusieurs pays à travers le monde recourent à la création
d’entités dotées de budgets et de comptes autonomes mais qui échappe
totalement ou partiellement au contrôle de l’appareil législatif alors que très

131
souvent elles sont financées par des prélèvements obligatoires sur la
collectivité1.

Avant de traiter l’utilité et l’intérêt de la consolidation (B), il est utile de


dresser une précision terminologique de la notion (A).

A- Consolidation : notions et objectifs


Selon la norme 6 du référentiel IPSAS, relative aux états financiers
consolidés et individuels, les états financiers consolidés sont définis comme
étant les états financiers d’un ensemble d’entités économiques présentés à
l’identique de ceux d’une entité unique.

Il découle de cette définition que la consolidation des comptes publics


consiste à regrouper les comptes financiers de diverses entités publiques, afin
de produire des états financiers agrégés, permettant de présenter la situation
financière pour l’ensemble des structures du secteur public, comme si elles ne
formaient qu’une seule structure ou entité.

Selon le manuel de statistiques des finances publiques 2001 du Fonds


Monétaire International, « consolider revient à présenter les statistiques se
rapportant à un ensemble d’unités comme si cet ensemble constituait une
seule unité ».

Il y a lieu de souligner que tout système de consolidation des comptes doit


nécessairement prendre en compte la délimitation du périmètre, c’est-à-dire,
le choix des entités qui composent le secteur public et dont les comptes
devraient être consolidés. Il doit en outre définir les règles et méthodes
comptables devant être utilisées pour l’élaboration des comptes consolidés

1HAJOUB AHMED, peut-il y avoir un seul budget public ?, la cohérence des finances publiques au Maroc et en
France, acte du 5ème colloque international de finances publiques-Rabat, LGDJ, Paris, 2012, P. 107

132
notamment, l’indentification et l’élimination des transactions entre les entités
du périmètre1.

En outre, il est à signaler qu’au moins deux sortes de consolidation sont


concevables dans le domaine des finances publiques : une consolidation
comptable ou une consolidation budgétaire.

Si la consolidation comptable qui a pour objectif de consolider les comptes


et s’opérant ainsi a posteriori, la consolidation budgétaire concerne les
budgets publics, c’est-à-dire que la présentation consolidée porte sur l’acte
d’autorisation budgétaire voté par les élus. Dans l’absolu, la consolidation ainsi
envisagée offre l’avantage de pouvoir recourir à ce procédé tant a priori qu’a
posteriori, même pour l’instant la mise en place d’un tel document a priori
semble plus difficile2.

L’objectif ultime alors de la consolidation est de donner une image


complète, fidèle et sincère de l’ensemble des comptes des entités consolidés.

B- Consolidation : exigence de la fiabilité de l’information comptable


La consolidation des comptes du secteur public n’est ni une finalité en soi,
ni une préoccupation exclusive de la profession des comptables publics. Elle
est destinée en réalité à la satisfaction des attentes et besoins d’une multitude
d’utilisateurs de l’information financière et comptable.

Cette exigence va du citoyen normal, qui à la lumière du nouveau contexte


régional et international exige un retour d’information clair et intelligible sur
l’utilisation des ressources de financement du secteur public, à la

1 Association pour la Fondation Internationale de Finances Publiques, la consolidation des comptes publics au
Maroc : un levier de cohérence des finances publiques et d’’optimisation des politiques publiques, Rabat,
février 2012. www.fondafip.org consulté le 10/05/2018 à 15h00.
2 WILLIAM GILLES, la présentation consolidée des finances publiques : quels enjeux ?, réforme des finances

publiques : démocratie et bonne gouvernance, Acte de la 1er université de printemps de finances publiques du
Groupement Européen de Recherche en Finances Publiques (GERFP), LGDJ, P.72

133
représentation nationale qui, lors des débats parlementaires sur la loi de
finances, demande la communication par le gouvernement de l’ensemble des
informations financières en relation avec l’Etat, les collectivités territoriales et
leurs opérateurs publics, en passant par les organismes financiers
internationaux pour pouvoir agir efficacement sur le marché financier et les
agences de notation pour l’appréciation du risque pays.

La consolidation des comptes publics et la communication de


l’information y afférente répondrait ainsi à une finalité plurielle, d’ordre
démocratique, politique, financière et économique.

C’est d’abord, une finalité démocratique découlant de l’obligation de


transparence, de reddition des comptes et de responsabilité édictée par
l’article 154 de la constitution et du droit d’accès des citoyens édicté par
l’article 27 du même texte.

C’est ensuite, une finalité politique, destinée à renforcer les pouvoirs de


contrôle du parlement, en mettant à la disposition de la représentation
nationale les informations financières et comptables de chacune des
composantes du secteur public et l’information financière et comptable
consolidée de ce secteur.

A ce titre, les dispositions des articles 70 et 75 de la constitution prévoient


respectivement, que le pouvoir législatif évalue les politiques publiques et que
la loi organique des finances détermine les informations, documents et
données nécessaires pour enrichir les débats parlementaires sur le projet de
loi de finances.

C’est également, une finalité financière liée à des considérations en


relation avec l’amélioration des règles de contrôle, de lisibilité des comptes

134
publics, de robustesse et de fiabilité des dispositifs de production, de
communication et de valorisation de l’information financière et comptable,
dans le sens de l’optimisation du processus de conception, de réalisation et
d’évaluation des politiques publiques.

C’est enfin, une finalité économique liée notamment, aux préoccupations


de soutenabilité budgétaire, de préservation des équilibres macro-
économiques fondamentaux et de protection des bas de cycles économiques
et financiers1.

En outre, La cohérence des finances publiques au Maroc et l’amélioration


du cadre de performance des politiques publiques demeurent tributaires de la
mise en place de modes opératoires, à même d’en concrétiser le contenu et la
consistance, dont notamment, la construction d’un modèle national de
consolidation des comptes du secteur public, qui peut constituer à ce titre, l’un
des leviers fondamentaux de cette cohérence.

1Association pour la Fondation Internationale de Finances Publiques, la consolidation des comptes publics au
Maroc : un levier de cohérence des finances publiques et d’optimisation des politiques publiques, op.cit, P. 12

135
Conclusion de la deuxième partie :

Le principe de sincérité en finances publiques, juridiquement reconnu,


constitue alors un élément essentiel de la gouvernance financière.

Son respect, son effectivité, et les modalités de son contrôle posent


plusieurs questions et suscitent des vifs débats aussi bien budgétaires que
politiques ; d’une part, la notion dont les contours ne sont pas bien tracés pour
un meilleur contrôle par la justice constitutionnelle, fait appel aux autres
règles matérielles pour la vérification.

D’autre part, la concrétisation, le renforcement et l’efficacité de son


contrôle souffrent de l’affaiblissement du rôle du parlement et l’élargissement
des pouvoirs de l’exécutif dans la matière financière et législatif.

La sincérité rencontre, certes, pour sa mise en place dans la pratique


financière des limites et obstacles d’ordre politique, institutionnel, et
technique, cependant, le contexte de réformes et de modernisations tant
politiques que budgétaires annonce des réelles opportunités d’application et
du respect de ce principe.

En effet, la réforme constitutionnelle et celle de la loi organique relative


aux lois de finances ont apporté les bases d’une nouvelle ère dans la gestion
publique en général, et la gestion financière en particulier en introduisant des
principes de transparence, de responsabilisation, et de reddition des comptes.

136
Conclusion générale :

Il s’avère alors que le principe de sincérité des prévisions et des comptes


publics, et malgré son rôle important dans la rationalisation, la transparence, la
performance et la bonne gouvernance des finances publiques, demeure
entravé par un ensemble des obstacles qui rend son effectivité et son contrôle
quasi-impossibles.

Le parlement et le conseil constitutionnel pourraient exercer un contrôle


pertinent de l’application dudit principe, en l’absence des contraintes qui
limitent ce contrôle, à l’instar de leurs homologues français.

Théoriquement le principe, même s’il est nouveau, au Maroc, est bien


encadré juridiquement. La LOLF 130-13 précise évidemment ce que veut dire la
sincérité en finances publiques, que soit budgétaire, ou comptable. Or
l’effectivité du principe reste limitée puisque ladite LOLF n’a été mis en œuvre
qu’en 2016 et quelques de ses dispositions ne sont prévues à s’appliquer
qu’ultérieurement telle la certification des comptes qui ne commencera qu’à
partir de 2020. Donc la cour des comptes marocaine reste loin du contrôle de
l’application de la sincérité comptable jusqu'à 2020.

Reconnu comme norme de référence, le principe de sincérité des lois de


finances irrigue l'ensemble du processus budgétaire et financier. Appliqué à
l'équilibre des lois de finances et à l'information, il modernise le cycle
budgétaire et financier, adaptant les lois de finances aux exigences posées par
la LOLF, avec sa logique de performance. Il accorde une plus grande liberté de
gestion et le pilotage global des finances publiques tout en renforçant le cadre
de contrôle, d'évaluation et d'audit des politiques publiques.

137
Contrairement aux principes budgétaires classiques, tels que l’unité ou
l’universalité qui ne sont pas toujours respectées, le principe de sincérité
pouvait s’appliquer aux nouveaux documents d’information mis à la disposition
du parlement afin de lui permettre d’exercer ses nouvelles prérogatives dans le
cadre de la constitution financière. Ce principe redonne ainsi du sens à
l’ensemble du processus budgétaire

L’impératif de sincérité permet au conseil constitutionnel de revaloriser le


rôle du parlement dans le cadre de l’examen des lois de finances en
garantissant les conditions d’un débat éclairé. Ainsi, en France, la revalorisation
du droit d’amendement ainsi que les nouveaux principes de budgétisation
permettent à la représentation nationale de faire un plein usage de ses
nouveaux pouvoirs en matière d’autorisation budgétaire.

La sincérité à elle seule ne fait cependant pas disparaître les « mauvais »


comportements financiers tant qu'elle ne s'accompagne pas d'une
responsabilité accrue de tous les acteurs de la chaîne financière sans exception.
En finances publiques cette responsabilité devrait être collective et sans
réciprocité. Sinon que de bons mots et de slogans n'aurons-nous pas
éternellement prononcés. Le devoir de sincérité a des effets utiles s'il est le
préalable à ce que doit être un contrôle politique ou juridictionnel de qualité,
et donc une application stricte du principe constitutionnel de la corrélation
entre le responsabilité et la reddition des comptes qui est une nécessité au
cœur de la réforme et de modernisation.

En d’autres termes, le principe de sincérité budgétaire, sans mesures


d’accompagnement est un principe condamné à l’échec et ne saurait, pour des
raisons juridiques et politiques, servir de fondement à la censure d’une loi de
finances ; cet échec ne s’explique pas uniquement par des considérations

138
techniques seulement, mais aussi par des considérations plus culturelles et
juridique.

Le principe de sincérité en finances publiques apparaît donc comme un


point d'ancrage, un repère plus important que d'autres règles combien même
elles seraient plus cernables en droit. Il a des racines ontologiques profondes
inscrites dans la conscience collective. Mais il lui reste à acquérir un plein statut
pour entrer dans la catégorie du sacré et gagner une portée immense de force.
Il lui faut trouver un appui politique voire juridique indiscutable. Le droit ne
peut cependant pas cristalliser toutes nos émotions. Sa rationalité n'est pas
forcément celle de l'Homme placé devant ses propres turpitudes.

L’efficacité et la pertinence du contrôle exercé par le parlement en


matière des finances publiques dépendent largement de la sincérité des
prévisions et des comptes élaborés par le gouvernement. Le renforcement de
ce contrôle exige de législateur marocain, en bénéficiant de l’expérience
française, l’instauration d’un débat d’orientation budgétaire et d’autres outils
de participation parlementaire qui vise à impliquer tous les représentants de la
nation à l’élaboration et à la discussion des choix budgétaires.

Le parlement doit également se doter d’une technostructure disposant de


moyens humains et matériels lui permettant de mettre à la disposition du
parlement les informations nécessaires à l’exercice de son pouvoir de contrôle
budgétaire.

La relation réciproque de sincérité et de gouvernance financière laisse, en


outre, désirer un renforcement de ce principe, si les réformes entreprises avec
d’autres mesures à venir sont généralisées, appliquées, et bien sûr évaluées.

139
En d’autres termes, si la sincérité est une composante essentielle de la
gouvernance financière, et pour renforcer ce principe et consolider les acquis,
plusieurs axes de la gestion financière doivent être améliorés, selon les
institutions internationales de gouvernance, (les recommandations de l’OCDE
en particulier) :

- Le budget doit être exhaustif, et couvrir l’ensemble des dépenses et


des recettes de l’État,

- Le projet de budget du gouvernement doit être soumis suffisamment


à l’avance au Parlement pour lui permettre un meilleur examen. Le
délai ne peut être moins de 3 mois avant le début de l’exercice.

- Le budget, ou les documents qui l’accompagnent, doivent inclure un


commentaire détaillé de chaque programme de recettes et de
dépenses.

- Le budget doit comporter une perspective à moyen terme illustrant la


façon dont les recettes et les dépenses publiques vont évoluer
pendant au moins les deux années situées au-delà de la prochaine
année budgétaire. De même il faut veiller à ce que le projet actuel de
budget soit cohérent avec les prévisions figurant dans les précédents
rapports budgétaires relatifs à la même période ; les écarts
significatifs doivent être expliqués.

- Les hypothèses économiques qui sous-tendent le rapport doivent être


établies en accord avec la Meilleure pratique.

- Le budget doit comporter une analyse des dépenses fiscales


conformément à la Meilleure pratique….

140
Bibliographie
En français
I- Ouvrages
• ABDELLATIF EL KESRI, la jurisprudence budgétaire et financière du conseil
constitutionnel entre logique juridique et considérations politiques,
REMALD, 2004.
• ANASS ABOULAAGUIG, L’évaluation des politiques publiques au Maroc:
Etat des lieux et perspectives, Cahiers de Recherche du LERES N°3 –2015,
FSJES Meknès.
• ANDRE LEGRAND, CELINE WIENER, le droit public, Dila, Paris, 2017.
• DAMIEN CATTEAU, finances publiques, Gualino, éditions LEXTENSO, 2014.
• DOMINIQUE LANDBECK, les principes budgétaires locaux, presse
universitaire d’Aix-Marseille(PUAM), collection collectivités locales, 2001.
• EL ARAFI HASSANE, gestion des finances de l’Etat, REJJES, Rabat, 1ère
édition, 2006.
• ERIC DEVAUX, finances publiques, Edition Bréal, 2002.
• Éric OLIVA, finances publiques, Dalloz, 3ème édition, Paris, 2015.
• Franck Waserman, les finances publiques, 8ème édition, direction de
l’information légale et administrative, paris 2016.
• François BARQUE, la sincérité des budgets et comptes publics, Dir. Olivier
LE Bot, édition Larcier, Belgique, 2011.
• FRANÇOIS CHOUVEL, finances publiques, Gualino, 19ème édition, France,
2016.
• Gaston JÈZE, cours de finances publiques, librairie de droit et de
jurisprudence, Paris, 1936.
• HAJOUB AHMED, peut-il y avoir un seul budget public ?, la cohérence des
finances publiques au Maroc et en France, acte du 5ème colloque
international de finances publiques-Rabat, LGDJ, Paris, 2012.
• JACQUES BUISSON, Finances publiques, 15ème édition, Dalloz, 2015,2012.
• Jean-Claude ZARKA, finances publiques, Gualino, France, 2018.
• JEAN-MARIE RAYNAUT, DELPHINE SOULT, LOLF à l’usage des associations
(guide), ministère des droits des femmes, de la ville de la jeunesse et du
sport, 2014.

141
• J-M THIVEAUD, histoire de la finance en France, T.1, édition PAU, 1995.
• LAMBERT ALAIN, Déficits publics : La démocratie en danger, Armand Colin,
2013.
• Laurent PANCRAZI, le principe de sincérité budgétaire, l’Harmattan, 2012.
• MICHEL BOUVIER, MARIE-CHRISTINE ESCLASSAN, JEAN-PIERRE LASSALE,
finances publiques, LGDJ, 15ème édition 2016-2017.
• MOHAMED HARAKAT, finances publiques et fragilité : de la réforme de
l’État par le budget et l’évaluation des politiques publiques, tome 1, Rabat,
2017.
• Olivier LE BOT, la sincérité, une exigence juridique en diffusion, Larcier,
2011, Belgique.
• PETER KNOEPFEL, CORINNE LARRUE, FRÉDÉRIC VARONE et JEAN-
FRANÇOIS SAVARD, analyse et pilotage des politiques publiques, presse
de l’université du Québec, 2015.
• Pierre LALUMIÈRE, les finances publiques, A. Colin, édition 6, Paris, 1971.
• RAYMOND MUZELLEC, MATHIEU CONAN, finances publiques, Dalloz,
16ème édition, Paris, 2013.
• SERHANE ABDELLAH, la sincérité et la fiabilité au niveau des comptes
publics : de la logique de conformité à la démarche de certification, la
cohérence des finances publiques au Maroc et en France, acte du 5ème
colloque international de finances publiques-Rabat, LGDJ, Paris, 2012.
• STEPHANIE DAMAREY, Finances publiques : élaboration exécution
contrôle, GUALINO, 5e édition 2017-2018.
• WILLIAM GILLES, la présentation consolidée des finances publiques : quels
enjeux ?, réforme des finances publiques : démocratie et bonne
gouvernance, Acte de la 1er université de printemps de finances publiques
du Groupement Européen de Recherche en Finances Publiques (GERFP),
LGDJ.
• Yvon BELAVAL, le souci de sincérité, coll. La jeune philosophie, Paris,
Gallimard, 1944.

142
II- Articles
• ALEXANDRA POPESCU et PATRICK VILLIEU, « déficit budgétaire, dette
publique et croissance dans les pays d’Europe centrale et orientale »,
Mondes en développement, n° 167, 2014/3.
• ALEXANDRE GUIGUE, du besoin à l’obligation de sincérité, RFFP, N°111,
2010.
• Assou Mansour, la sincérité des prévisions et des comptes budgétaires :
une exigence démocratique, revue marocaine des finances publics
(REMAFIP), n°3, 2013.
• Benoît MONTAY, la morale saisie par le droit : principe de sincérité et dol
budgétaire, revue française de théorie, de philosophie et de culture
juridique « Droits», presse universitaire de France, n° 58, 2013.
• Caroline CHAMARD-HEIM, la sincérité et les organisations internationales,
RFFP, n°111,2010.
• CATHERINE MATHIEU, HENRI STERDYNIAK, « faut-il des règles de politique
budgétaire?», Revue de l'OFCE, N° 126, 2012/7.
• CORINNE DELON-DESMOULIN, la sincérité en droit budgétaire de l’union
européen : à la recherche de la vérité budgétaire, RFFP, n°111, 2010.
• ÉTIENNE DOUAT, contre le principe de sincérité budgétaire, RFFP, n° 111,
2010.
• FRANÇOIS BARQUE, la sincérité devant le juge constitutionnel, RFFP,
n°111, 2010.
• GILBERT ORSONI, le principe de sincérité à l’étranger, RFFP, n°111, 2010.
• GUIRI ABDELKRIM, La réforme de la comptabilité de l’Etat : Des enjeux au
cœur de la réforme de l’administration, AL KHAZINA, Revue de la
Trésorerie Générale du Royaume, N° 8, Août 2011.
• HOUILLON PHILIPPE, Le contrôle extraordinaire du parlement, Revue
« Pouvoirs », 2010/3 (n° 134).
• JEAN-FRANCOIS JOYE, la sincérité premier principe financier, revue
française de finances publiques (RFFP), n°11-2010.
• LUC SAÏDJ, enjeux autour d’un principe controversé, RFFP, n° 111, 2010.
• Marie-Christine ESCALASSAN, sincérité et gouvernance financière publique
: Y a-t-il une sincérité financière publique spécifique ?, RFFP, n° 111, 2010.

143
• MICHEL COTTEN, SYLVIE TROSA, Les réformes comptables dans les pays de
l'OCDE et en France : des outils pour la performance et la transparence »,
Revue française d'administration publique 2007/3 (n° 123).
• Mohammed NMILI, quel contrôle des dépenses publiques non
budgétisées ? cas des dépenses fiscales, RMFF, n° 3, 2013.
• Monique CALVI-REVEYRON, L’adaptation de la comptabilité publique à
l’exigence de sincérité, RFFP, n°111, 2010.
• SYLVIE TROSA et BERNARD PERRET, Vers une nouvelle gouvernance
publique? La nouvelle loi budgétaire, la culture administrative et les
pratiques décisionnelles, Esprit, No. 312 (2) (Février 2005).

III- Thèses et mémoires


• Abderrahim TADA, audit et contrôle des comptes de l'Etat : vers un
modèle de consolidation et de certification des comptes publics au Maroc,
thèse pour l’obtention du Doctorat en droit public, faculté des sciences
juridiques, économiques et sociales, Fès, 2016-2017.
• ANNABELLE JAULIN, Dir. JEAN CLAUDE MARTINEZ, les limites des
prévisions budgétaires, thèse pour l’obtention de doctorat en droit public,
université Panthéon-Assas, Paris, 1999, résumé disponible sur le site :
http://www.theses.fr/1999PA020096

• Mohammed MESMOUDI, la gouvernance publique au Maroc, du contrôle


des finances publique à l’évaluation des politiques publiques, thèse pour
l’obtention du doctorat en Droit public, FSJES-Fès, 2016-2017.

IV- Textes juridiques


• Dahir n° 1-11-91 du 21 chaabane 1432 (29 juillet 2011), portant
promulgation du texte de la constitution, Bulletin officiel n° 5964 bis du
28 chaabane 1432 (30/07/2011).
• Dahir n° 1-98-138 du 7 chaabane 1419 (26 novembre 1998) portant
promulgation de la loi organique n°7-98 relative à la loi de finances,
Bulletin Officiel n° : 4644 du 03/12/1998, P. 853
• Dahir n° 1-15-62 du 14 chaabane 1436 (2 juin 2015) portant promulgation
de la loi organique n° 130-13 relative à la loi de finances, Bulletin Officiel
n° : 6370 du 18/06/2015, P. 3109.
144
• loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances
(LOLF), JORF n° 177 du 2 août 2001, P. 12480. France.
• Dahir n° 1-15-83 du 20 ramadan 1436 (7 juillet 2015) portant
promulgation de la loi organique n° 111-14 relative aux régions, BO 6440
du 9 joumada I 1436 (18-02-2016).
• Dahir n° 1-15-84 du 20 ramadan 1436 (7 juillet 2015) portant
promulgation de la loi organique n° 112-14 relative aux préfectures et
provinces, BO 6440 du 9 joumada I 1436 (18-02-2016).
• Dahir n° 1-15-85 du 20 ramadan 1436 (7 juillet 2015) portant
promulgation de la loi organique n° 113-14 relative aux communes, BO
6440 du 9 joumada I 1436 (18-02-2016).

V- Rapports et documentation officiels


• Ministère de l’économie et de finances, direction des études et des
prévisions financières, Synthèse du Rapport Economique et Financier
2018, Rabat, 5 janvier 2018.
• Données de l’institut national de la statistique et des études économiques
(INSEE), www.insee.fr
• Décision n° 2001-453 DC du 18 décembre 2001 du CC Français
• Décision n°79-110 DC, LF 1980.
• Décision n°93-320 DC du 21 juin 1993, LFR pour 1993 du CC Français
• Décision n°94-351 DC du 29 décembre 1994, loi de finances pour 1995 du
CC Français
• Décision n°96-395 DC du 30 décembre 1997, loi de finances pour 1998 du
CC Français
• Direction du budget (France), Forum de la performance, « la prévision et
le suivi de l’exécution du budget », sur :
https://www.performance-publique.budget.gouv.fr/
• Note relative à l’évaluation de la qualité des prévisions des recettes
fiscales, 2001, Direction de la politique économique générale, disponible
sur :
www.finances.gov.ma
• Rapport préliminaire sur l’exécution du budget de l’Etat-exercice 2016,
cour des comptes, 2018.

145
• Fiche de synthèse n° 50 : L’évaluation des politiques publiques, 6 juin
2017. Disponible sur :
http://www.assemblee-nationale.fr/

• Banque mondiale, Maroc-étude de l’évaluation de la gestion des


finances publiques, groupe de travail national du ministère des finances
et de la privatisation au Maroc, 2003, rapport N° 28067, publié le
1/07/2010.

VI- Webographie
• Mohammed BASTAOUI, la cour des comptes : acteur clé de la
souveraineté budgétaire des États, 2017, disponible sur :
www.tgr.gov.ma
• Association pour la Fondation Internationale de Finances Publiques, la
consolidation des comptes publics au Maroc : un levier de cohérence des
finances publiques et d’’optimisation des politiques publiques, Rabat,
février 2012, disponible sur :
www.fondafip.org
• ELHARCHAOUI ABDELOUAFI, la constitutionnalisation des finances
publiques au Maroc, Revista Electronica do mestrado em direito da
UFAL.v.6, n°2,2015, disponible sur :
www.seer.ufal.br/index.php/rmdufal/article/download/2104/1582

• les documents de travail du sénat, serie études juridiques, « le principe


de sincérité des lois de finances et des lois de financement de la sécurité
sociale » n° EJ 1 Octobre 2006, disponible sur :
https://www.senat.fr/ej/ej01/ej010.html

• La jurisprudence du conseil constitutionnel relative au principe de


sincérité budgétaire sur : http://www.conseilconstitutionnel.fr

• Equilibre budgétaire, document disponible sur :


https://tematio.blogspot.com/2012/03/equilibrebudgetaire.html

146
‫‪• THIBAULT CAFFOZ, le contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation dans la‬‬
‫‪procédure de la question prioritaire de constitutionnalité, ILF-GERGC, Aix-‬‬
‫‪Marseille université, disponible sur :‬‬
‫‪https://www.google.com/search?q=Thibault+CAFFOZ+le+contrôle+de+l‬‬
‫‪%27erreur+manifeste&oq‬‬

‫‪• Sénat, Service des études juridiques, le principe de sincérité des lois de‬‬
‫‪finances et des lois de financement de la sécurité sociale, 2018, disponible‬‬
‫‪sur :‬‬
‫‪www.Senat.fr/https://www.senat.fr/ej/ej01/ej011.html‬‬
‫‪• Site officiel du Senat français : https://www.senat.fr‬‬
‫‪• cours de finances publiques, http://www.cours-de-droit.net,‬‬
‫‪• Site officiel de l’assemblée nationale française, http://www2.assemblee-‬‬
‫‪nationale.fr‬‬

‫المراجع باللغة العربية‬


‫المؤلفات‬
‫عبد النبي أضريف ‪ ،‬قانون ميزانية الدولة على ضوء القانون التنظيمي للمالية ‪ 130-13‬ونصوصه التطبيقية ‪،‬‬ ‫•‬
‫‪ édition EMALIV‬العدد ‪.2015 ،9‬‬
‫عسو منصور‪ ،‬قانون الميزانية العامة‪ ،‬مطبعة دار النشر المغربية‪ ،‬الدار البيضاء ‪ ،‬الطبعة األولى‪.2005 ،‬‬ ‫•‬
‫عسو منصور‪،‬قانون الميزانية العامة ورهان الحكامة المالية الجيدة ‪ ،‬مطبعة المعارف الجديدة‪ ،‬الرباط‪ ،‬الطبعة‬ ‫•‬
‫االولى ‪.2017 ،‬‬
‫نجيب جيري‪ ،‬تنزيل الدستور المالي بالمغرب بين ضرورة اإلصالح ورهان الحكامة المالية ‪ ،‬منشورات مجلة‬ ‫•‬
‫الحقوق‪ ،‬مطبعة األمنية‪ ،‬الرباط‪ ،‬اإلصدار السابع‪.2013 ،‬‬

‫المقاالت‬
‫محمد البقالي‪ ،‬الصدق الموازني والصدق المحاسبي‪ ،‬مجلة المالية‪ ،‬عدد ‪2017 ، 32‬‬ ‫•‬

‫االطروحات‬
‫• فارسي مراد‪ ،‬قانون المالية بالمغرب‪ :‬وظيفة تشريعية أم تنفيذية؟ ‪ ،‬أطروحة لنيل الدكتوراه في القانون العام‪ ،‬كلية‬
‫العلوم القانونية واالقتصادية واالجتماعية‪ ،‬فاس‪.2017/2016 ،‬‬

‫‪147‬‬
Table des matières

Introduction ………..……………………………………………………………………01
Première partie : la sincérité des finances publiques :
les implications du principe ..…………………………………...………………. 15
Chapitre I: la sincérité en finances publiques : les implications du principe…15

Section I : l’élaboration progressive d’un nouveau principe budgétaire………….16

§1- la conceptualisation de la sincérité en tant que norme : les racines ….....16

A- les origines plus anciennes …………………………………………………………….……16

B- les origines récentes ……………………………………………………………………………22

§2- la consécration de la sincérité en tant que principe : Cadre juridique …… 25

A- la sincérité consacrée par le conseil constitutionnel ……………….…………. 26


B- la sincérité finalement consacrée par les textes ……………………………….… 31
Section II : les aspects du principe de sincérité en finances publiques ……….…. 37

§1- la sincérité budgétaire …………………………………………………………………………. 38

A- la sincérité des prévisions : la préparation et l’adoption des PLF ………... 41


B- la réconciliation entre le principe de sincérité et les hypothèses
financières ……………………………………………………………………………………………….47
§2- la sincérité comptable……………………………………………………………………………49

A- la loi de règlement et l’impératif de sincérité ……………….…………………… 50


B- la comptabilité publique et l’exigence de la sincérité ………………………….53

148
Chapitre II : la sincérité et les autres principes ……………………………………………57

Section I : les principes classiques support de la sincérité……………………………….57

§1- Aperçu des principes budgétaires classiques …………..……….…………………..58

A- Les principes de la globalité ………………………………………………………………..58


B- l’annualité et la spécialité ……………………………………………………………………60
§2- La sincérité matérialisée par les autres principes .………………………..……….62

A- Les principes classiques : base de contrôle de sincérité ………………………62


B- Les Principes classiques : matérialisation de la sincérité ………………..……65
Section II : sincérité et la nouvelle notion d’équilibre …………………………..………..67

§1- Notions de l’équilibre …………………………………………………………………………….67

A- Déficit public et politiques budgétaires ……………………………………………….68


B- Les grandes théories de l’équilibre ……………………………………………………..70
§2-La sincérité source de l’équilibre budgétaire …………………………………………..72

A- Equilibre et traçabilité financière au service de l’équité ……………………… 72


B- Equilibre budgétaire une confirmation progressive ……………………………..74
Conclusion de la première partie ………………………………………………..…….…………. 80

Partie deuxième: l’effectivité opérationnelle du principe de sincérité


et gouvernance financière …..………………………….………………….……….81

Chapitre I : Effectivité limitée du principe de sincérité : contrôle restreint….82

Section I : les limites institutionnelles du contrôle ..………………………………………83

§1- la prééminence gouvernementale…………………………………………………………83

C- Des limites de l’autorisation parlementaire………………………………………….84


D- Des procédures budgétaires exceptionnelles …………………….…………………88

149
§2- L’exigence de l’erreur manifeste dans l’appréciation de l’insincérité ……. 90
A- Erreur manifeste : définition et origines ……………………………..………..…….90
B- L’erreur manifeste dans les lois de finances ..………………………………………92
Section II : les obstacles techniques, politiques et juridiques : une censure
quasi-impossible ………………….………………………………………………………………………..96

§1- la reconnaissance de l’aléa et l’incidence sur les prévisions ………..……….. 97

C- L’aléa économique obstacle aux prévisions ………………………………………….97


D- Quelques figures des écarts de prévisions…………………………………………….99
§2- la manipulation budgétaires par le gouvernement : quel contrôle avec
quelle sanction ?.............................................................................................102

C- Les débudgétisations source d’incertitude ..…………………………..…………. 103


D- Autres techniques affectant la transparence ………………....………………… 104
Chapitre II : Sincérité et perspectives de la réforme budgétaire …………….…108

Section I : le renforcement du rôle du parlement ……………………..……………….. 108

§1- La qualité de l’information garantie de transparence et de sincérité …..109

C- La présentation de l’information budgétaire ………………….………………… 109


D- L’enrichissement des débats budgétaires …………………………………………..115

§2- La mission parlementaire d’évaluation à la quête de sincérité ……….…. 118

C- Le parlement marocain et l’enjeu de la pratique d’évaluation…………….119


D- Les assemblés et l’EPP en France ……………………………………………………… 121

Section II : les nouveaux outils comptables un gage de la sincérité ……………. 123

§1- La réforme de la comptabilité de l’Etat …………………………………..……………124

C- La comptabilité d’exercice et analytique clé de la rénovation ……..…… 125


D- La certification des comptes et l’enjeu de responsabilisation …………… 128
§2- La consolidation des comptes publics et la bonne gouvernance …………. 131

150
C- Consolidation : notions et objectifs …………………………………..……………… 132
D- Consolidation : exigence de la fiabilité de l’information comptable ……133
Conclusion de la deuxième partie ……………………………………………………….……... 136
Conclusion générale …………………………………………………………………………………137
Bibliographie …………………………………………………………………………………………… 141
Table des matières ……………………………………………………………………………………148
ANNEXES ………………………………………………………………………………………………….152

151
ANNEXE
Liste des décisions du Conseil constitutionnel relatives à la sincérité des lois
de finances et des lois de financement de la sécurité sociale

DÉCISION DATE LOI GRIEFS TERMES UTILISÉS CONFORMITÉ


DÉFÉRÉE SOULEVÉS PAR DANS LA DÉCISION AU REGARD
LES DU CONSEIL DES GRIEFS
REQUÉRANTS CONSTITUTIONNEL SOULEVÉS
82-154 DC
29 Loi de - Clarté des comptes de oui
décembre finances l'Etat
1982 pour 1983
Contrôle efficace du
Parlement

83-164 DC
29 Loi de Atteinte au droit Elément de sincérité [de oui
décembre finances de contrôle du l'article et de l'état
1983 pour 1984 Parlement déférés]

93-320 DC
21 juin Loi de Sincérité des - oui
1993 finances chiffres contenus
rectificative dans le collectif
pour 1993

93-330 DC
29 Loi de Altération de la - oui
décembre finances sincérité du budget
1993 pour 1994

94-351 DC
29 Loi de Nécessaire Sincérité de la oui
décembre finances sincérité présentation générale de
1994 pour 1995 budgétaire, la loi de finances
entendue comme
garantie
fondamentale du
respect des
attributions du
Parlement
Insincérité de la
présentation des
recettes et de
l'équilibre général
du budget
Insincérité des
tableaux d'effectifs

95-369 DC
29 Loi de - Principe de sincérité du oui
décembre finances budget
1995 pour 1996

95-371 DC
29 Loi de Principe de Sincérité de la oui

152
décembre finances sincérité présentation d'une loi de
1995 rectificative budgétaire finances
pour 1995
Sincérité de la
présentation des
comptes et de
l'information du
Parlement

96-385 DC
30 Loi de Exigence de Principe de sincérité oui
décembre finances sincérité budgétaire
1996 pour 1997 budgétaire
Principe de
sincérité
budgétaire

97-395 DC
30 Loi de Sincérité de la Atteinte portée à la oui
décembre finances présentation et de sincérité de la loi de
1997 pour 1998 l'équilibre de la loi finances
de finances

98-405 DC
29 Loi de Motifs de Principe de sincérité oui
décembre finances procédure budgétaire
1998 pour 1999 entachant la
sincérité de la loi Exigence de sincérité
de finances budgétaire

Insincérité
budgétaire

98-406 DC
29 Loi de Obligation de Exigences oui
décembre finances sincérité constitutionnelles
1998 rectificative invoquées par les
pour 1998 Principe requérants
fondamental de la
sincérité
budgétaire

99-422 DC
21 Loi de Sincérité de Sincérité des prévisions oui
décembre financement l'engagement de recettes
1999 de la sécurité social de la Nation
sociale pour Défaut de sincérité
2000 Sincérité des
prévisions
financières dans le
domaine de la
sécurité sociale
Insincérité des
prévisions de
recettes
Manque général de
sincérité
Principe de

153
sincérité
budgétaire

99-424 DC
29 Loi de Absence manifeste Sincérité de la loi de oui
décembre finances de sincérité (en finances
1999 pour 2000 particulier,
absence de Défaut de sincérité
prévisions
budgétaires)
Principe de
sincérité
budgétaire
Principe
fondamental de
sincérité de la loi
de finances
Principe
constitutionnel de
sincérité
budgétaire
Obligation de
sincérité du budget
et des comptes
Principe de
sincérité
budgétaire

99-425 DC
29 Loi de Principe de Sincérité des évaluations oui
décembre finances sincérité de recettes fiscales
1999 rectificative budgétaire
pour 1999

2000-437
DC 19 Loi de Sincérité des oui
décembre financement prévisions de
2000 de la sécurité recettes
sociale pour
2001

2000-441
DC 28 Loi de Principe de Sincérité de la loi de oui
décembre finances sincérité finances rectificative
2000 rectificative budgétaire
pour 2000

2000-442
DC 28 Loi de Défaut de sincérité Sincérité des plafonds de oui
décembre finances charges
2000 pour 2001

2001-448
DC 25 juillet Loi Saisine au titre de Sincérité des comptes de oui
2001 organique l'article 1, alinéa 1 l'Etat
relative aux de la Constitution
lois de

154
finances Principe de sincérité
Impératif de sincérité

2001-453
DC 18 Loi de Sincérité des Principe de sincérité oui
décembre financement prévisions et de la
2001 de la sécurité loi de financement
sociale pour
2002 Exigence
constitutionnelle
de sincérité
Sincérité de
l'engagement
social de la Nation
Principe de
sincérité des
comptes sociaux

2001-456
DC 27 Loi de Principe de Sincérité de la loi de oui
décembre finances sincérité finances
2001 pour 2002 budgétaire
Principe de sincérité
Défaut de sincérité
budgétaire
Principe de
sincérité des lois
de finances

2002-463
DC 12 Loi de Principe Sincérité des prévisions oui
décembre financement constitutionnel de de recettes
2002 de la sécurité sincérité
sociale pour Exigence de sincérité
2003 Principe de
sincérité Sincérité des objectifs de
dépenses d'assurance
maladie
Défaut de sincérité

2002-464
DC 27 Loi de Principe de Principe de sincérité oui
décembre finances sincérité
2002 pour 2003 budgétaire
Principe de
sincérité des lois
de finances
Insincérité
manifeste
Exigence de
sincérité

2003-486
DC 11 Loi de Principe Sincérité des prévisions oui
décembre financement constitutionnel de de recettes et des
de la sécurité objectifs de dépenses

155
2003 sociale pour sincérité d'assurance maladie
2004
Principe de Défaut de sincérité
sincérité
Principe de
sincérité
budgétaire

2003-488
DC 29 Loi de Exigence de Défaut de sincérité oui
décembre finances sincérité
2003 rectificative budgétaire
pour 2003
Principe de
sincérité

2003-489
DC 29 Loi de Principe Principe de sincérité oui
décembre finances constitutionnel de
2003 pour 2004 sincérité Défaut de sincérité

Principe de
sincérité
Exigence de
sincérité
Contrôle de
sincérité

2004-508
DC 16 Loi de Principe - oui
décembre financement constitutionnel de
2004 de la sécurité sincérité
sociale pour
2005 Défaut de sincérité
Principe de
sincérité

2004-511
DC 29 Loi de Principe de Absence de sincérité oui
décembre finances sincérité
2004 pour 2005
Exigence de
sincérité
Contrôle de
sincérité

2005-519
DC 29 juillet Loi Saisine au titre de Impératif de sincérité oui
2005 organique l'article 61,
relative aux alinéa 1 de la
lois de Constitution
financement
de la sécurité
sociale

2005-528
DC 15 Loi de Principe Sincérité de l'ONDAM oui
décembre financement constitutionnel de
de la sécurité

156
2005 sociale pour sincérité
2006
Exigence
constitutionnelle
de sincérité
Absence de
sincérité manifeste

2005-530
DC 29 Loi de - Principe de sincérité oui
décembre finances budgétaire
2005 pour 2006

2006-538
DC 13 juillet Loi portant Principe de Principe de sincérité oui
2006 règlement sincérité
définitif du
budget de Sincérité des
2005 comptes de l'État
Sincérité des lois
de règlement
Exigence de
sincérité
Principe général
de sincérité
budgétaire

157

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