Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
TP2: Interaction Rayons X - Matière, Spectres de Fluorescence
TP2: Interaction Rayons X - Matière, Spectres de Fluorescence
1. Objectif du TP
Le but de ce TP est d’analyser le spectre de fluorescence de différents échantillons afin de
déterminer leur composition chimique. L’émission de photons de fluorescence accompagne les
transitions électroniques faisant suite à l’effet photoélectrique, lesquelles se font entre niveaux
d’énergie parfaitement déterminés et dépendants de la nature chimique de l’atome. On verra que
les spectres de fluorescence peuvent également porter les traces de deux autres types d’interaction
rayons X - matière : les diffusions Thomson et Compton.
1. Les photons peuvent être diffusés élastiquement, c’est-à-dire déviés de leur trajectoire initiale
sans perte d’énergie.
2. Les photons peuvent subir une diffusion inélastique. Il existe deux types de diffusion inélastique :
- Diffusion inélastique avec création/annihilation de phonons : dans ce cas, le transfert d’énergie
E permet de modifier l’état vibratoire de la matière. L’énergie des modes propres de
vibration étant de quelques meV, celle des photons X étant de quelques keV, on constate que
le changement relatif en énergie E/E est très petit, de l’ordre de 10-6. Les instruments utilisés
dans ce cycle de TP n’atteignant pas cette résolution, nous ne pourrons pas en pratique
différencier ce type de diffusion de la diffusion élastique.
- Diffusion Compton : dans ce cas, il y a un transfert d’énergie depuis le photon X vers un
électron libre ou faiblement lié.
3. Les photons peuvent être absorbés par les atomes (effet photoélectrique). Cet effet donne lieu à
la fluorescence et à l’effet Auger.
ei ( k .r t )
Ediff r , , E0 r0 sin u .
r
1/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
Fig.1 - Illustration du processus de diffusion Thomson par un électron. Seuls les fronts d’onde sont schématisés :
il s’agit des points de l’espace pour lesquels la phase de l’onde électromagnétique est constante. La phase est
donnée par le terme kx t pour l’onde plane incidente se propageant suivant z, et par kr t pour
l’onde diffusée. Les repères de coordonnées cartésiennes et sphériques utilisés dans le texte sont définis sur
cette figure.
Les ondes diffusées élastiquement par les électrons dans la matière ont toutes la même longueur
d’onde, et peuvent donc interférer entre elles. Au niveau atomique, l’amplitude du champ associé
aux ondes diffusées va s’écrire :
i ( k .r t )
Eat r , , E0 r0 f sin
e
sin u .
r
Le facteur de diffusion atomique f (sin ) est le reflet des interférences entre les ondes diffusées
élastiquement par chaque électron d’un atome. L’arrangement des électrons en couches à symétrie
sphérique se traduit par une dépendance de f selon l’angle de diffusion 2, qui dans les repères
définis en Fig. 1 se définit comme l’angle entre les directions de u x et u r . Le facteur de diffusion
atomique augmente avec le numéro atomique Z (Fig. 2). Dans le cas particulier de la diffusion vers
l’avant (2 = 0), f (sin ) = Z. L’intensité diffusée se calcule comme le module au carré de
l’amplitude de diffusion.
2/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
55
50
30
25
20
15
10
0
0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0
-1
sin/ (Å )
Fig.2 – Facteurs de diffusion atomique des atomes de fer (Fe) et d’étain (Sn).
Il est à noter que dans les cristaux, l’arrangement périodique des atomes se traduit par des
conditions d’interférences constructives dans un nombre limité de directions : la diffusion Thomson
est ainsi à l’origine des pics de Bragg. On parle alors de diffraction.
Fig.3 - Schéma illustrant le processus de diffusion Compton. Le photon incident et l’électron au repos sont
représentés à gauche de la figure ( x 0 ). La partie droite de la figure représente la situation après collision : le
photon est dévié et a subi une perte d’énergie ( ' 0 ), tandis que l’électron est mis en mouvement. A côté de
chaque représentation d’une particule, on indique le couple (énergie, quantité de mouvement) qui la
caractérise.
3/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
Le transfert d’énergie du photon vers l’électron peut être calculé dans le cas d’un électron libre
initialement au repos (Fig. 3). En exprimant dans un cadre relativiste la conservation de l’énergie et
de la quantité de mouvement, on trouve la loi de variation de la longueur d’onde « Compton » en
fonction de l’angle de diffusion du photon incident :
c 0
h
1 cos 0.0242 1 cos .
mec
Dans la matière, l’effet Compton concerne majoritairement des électrons faiblement liés. L’électron
ne se trouvant pas initialement au repos, la longueur d’onde du photon diffusé n’est pas
rigoureusement égale à la valeur calculée ci-dessus : il faut dans ce cas tenir compte de l’effet
Doppler lié à la quantité de mouvement initiale de l’électron. En pratique, la longueur d’onde des
photons diffusés Compton à l’angle est distribuée sur une certaine largeur autour de la valeur
calculée pour l’électron initialement au repos.
50
Intensité de la diffusion Compton (u.a.)
45
40
35
30
25
20
15
Fe (Z = 26)
10
Sn (Z = 50)
5
0
0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 5.0
-1
sin(/2) / (Å )
Fig.4 – Intensité de la diffusion Compton calculée pour le fer (Fe) et l’étain (Sn). Les données numériques ont été
tirées de l’article « Atomic form factors, incoherent scattering functions, and photon scattering cross sections »,
J. Phys. Chem. Ref. Data 4, 471 (1975).
4/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
L’atome ionisé se trouve dans un état excité et instable. Le retour à l’état fondamental se fait par des
transitions électroniques depuis les niveaux d’énergie supérieure vers le niveau vacant, en suivant
soit un processus radiatif (fluorescence), soit un processus non radiatif (effet Auger) [Fig. 5].
Fig.5 – Représentation du processus d’absorption par effet photoélectrique (« ionisation », à gauche), et des
processus de désexcitation qui en découlent : fluorescence et effet Auger.
→ Fluorescence
La fluorescence est un processus radiatif de désexcitation de l’atome ionisé. Lorsqu’un électron vient
combler le niveau vacant depuis un état lié d’énergie supérieure, un photon est émis hors de l’atome
avec une énergie h correspondant à la différence d’énergie des états de départ et d’arrivée de la
transition (Fig. 5b). Noter que l’émission du photon de fluorescence se fait avec la même probabilité
dans toutes les directions de l’espace (émission isotrope).
5/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
correspond aux énergies de liaison des électrons de coeur. L’effet photoélectrique dû aux rayons X va
donc conduire à l’ionisation des couches K et/ou L, et par suite à des transitions des niveaux L et M
vers K, et M vers L. Ces transitions entre niveaux de coeur sont accompagnées de l’émission de
photons de fluorescence à des énergies parfaitement déterminées, qui ne dépendent que de la
nature de l’atome ionisé [cf. Annexe II], quel que soit le type de liaisons formées avec les atomes
voisins. L’analyse en énergie du rayonnement fluorescé par un échantillon permet donc en principe
de déterminer sa composition chimique.
Les transitions électroniques couplées avec l’émission d’un photon sont soumises à des règles de
sélection. La figure 6 ci-dessous rappelle la nomenclature des transitions autorisées lorsqu’il y a un
trou dans la couche K, L1, L2, ou L3.
Fig.6 – Schéma des niveaux d’énergie électronique dans un atome. L’énergie d’ionisation d’un niveau (notée EK,
ELj, EMj …) représente l’énergie à apporter pour expulser un électron de ce niveau hors de l’atome. La
nomenclature des désexcitations par fluorescence est donnée pour les séries K et L, observées après l’expulsion
d’électrons K et L, respectivement.
→ Effet Auger
Un atome excité par ionisation, dans la couche K par exemple, n’émet pas nécessairement un
photon de la série K hors de l’atome. En effet, le photon émis peut être absorbé par l’atome lui-
même et servir à l’expulsion d’un second électron des couches supérieures (L, M, ... dans notre
exemple). Ce phénomène s’appelle l’effet Auger et constitue une transition non radiative ou
conversion interne.
6/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
Un atome qui est le siège d’une telle conversion se trouve dans un état doublement ionisé, LL dans
notre exemple, c’est-à-dire avec deux trous dans la couche L : l’un des trous provient de la transition
électronique L → K, l’autre provient de l’expulsion d’un électron dit « électron Auger ». La figure 7
schématise ce phénomène. Si un électron de la couche M subit une transition vers un état vacant de
la couche L, un photon de la série L sera émis, et l’atome sera alors dans un état doublement
ionisé LM.
Pour un atome donné il y a compétition entre le phénomène de fluorescence X, qui donne lieu à
l’émission d’un photon hors de l’atome, et l’effet Auger, qui donne lieu à l’émission d’électrons hors
de l’atome. Il est bien évident que, dans un seul atome, les deux phénomènes ne peuvent avoir lieu
simultanément : l’effet Auger va donc limiter le rendement de fluorescence X (Fig. 8).
Fig.8 – Probabilité de désexcitation par effet Auger après ionisation d’une couche K, L ou M, en fonction du
numéro atomique Z. La probabilité de désexcitation par fluorescence est le complément à 1 des probabilités
d’effet Auger. Figure tirée du livre « Encyclopedia of Materials Characterization: Surfaces, Interfaces, Thin
Films », par C. R. Brundle, C. A. Evans, et S. Wilson (1992).
7/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
Fig.9 – Atténuation d’un faisceau X par une épaisseur de matériau e. Noter qu’en toute rigueur, l’air devrait
également contribuer à l’atténuation du faisceau (cf. partie 4b).
Le faisceau incident présente une section droite S délimitée par un collimateur. L’intensité du
faisceau I(x) est définie comme le nombre de photons incidents par seconde sur la surface S. Lors de
la traversée d’une tranche d’épaisseur dx d’un matériau monoatomique, l’intensité du faisceau varie
de la quantité dI x I ( x) dx , où est le coefficient d’absorption linéique (en cm-1) désignant
la probabilité qu’un photon interagisse avec la matière dans l’épaisseur de matériau dx. On peut ainsi
dI
écrire : I (x) .
dx
La fonction exponentielle est solution de cette équation différentielle sur I (x) . En effet, on vérifie
C e aC e . On trouve ainsi I x C e
ax
ax x
. En x = 0, on peut poser I(0) = I0, ce qui permet
dx
de retrouver la loi de Beer-Lambert :
I x I 0 e x
8/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
Cas d’un matériau polyatomique : le coefficient d’absorption massique d’un matériau homogène
contenant N éléments est la moyenne des coefficients d’absorption massiques de chacun des
N
constituants : cim , où cim désigne la concentration massique de l’élément i dans
i 1 i
N
le matériau traversé (on doit vérifier c
i 1
m
i 1 ).
Fig.10 – Schéma du montage utilisé pour ce TP. « E » échantillon, « C » cristal analyseur, « Se » fentes de Sollers
d’entrée, « Ss » fentes de Sollers de sortie.
Le montage est optimisé pour activer la fluorescence de l’échantillon et l’analyser en énergie, afin
d’identifier les espèces chimiques présentes.
Les atomes de l’échantillon sont initialement ionisés par effet photoélectrique. Le rayonnement
excitateur provient soit d’un tube à anode de Molybdène (Mo) [montage situé à gauche en entrant
dans la salle 216], soit d’un tube à anode de Or (Ar) [montage à situé à droite en entrant dans la salle
216]. Des photons de fluorescence sont alors émis dans toutes les directions de l’espace par
l’échantillon.
Des fentes de Sollers (fines lames de cuivre parallèles) permettent de fixer une direction suivant
laquelle on a un faisceau de fluorescence X de très faible ouverture angulaire. Ce faisceau irradie un
cristal analyseur solidarisé à un axe de rotation d’angle . Le cristal analyseur est un cristal de
métrique connue, dont la surface est taillée parallèlement à une famille de plans réticulaires. Les
9/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
deux appareils de la salle 216 fonctionnent avec un cristal analyseur de LiF taillé parallèlement à la
famille de plans (0 0 2) [paramètres de maille du LiF : a b c 4.027 Å, 90°]. Les
différentes composantes du rayonnement polychromatique de fluorescence sont séparées par
diffraction sur le cristal analyseur. Pour un angle d’incidence sur le cristal, on observera de la
diffraction à l’angle 2 pour la composante du rayonnement de longueur d’onde vérifiant la loi de
Bragg 2d002 sin n .
- d 002 est la distance interréticulaire des plans (0 0 2) parallèles à la surface du cristal analyseur. On
ne mesure que la diffraction par ces plans, puisque le montage maintient une géométrie de
réflexion entre faisceaux incident et mesuré par rapport à la surface du cristal analyseur.
- n est l’ordre de diffraction. Une même composante du rayonnement du tube peut générer de la
diffraction à plusieurs angles n, tant que n 90 .
Le mouvement de l’ensemble cristal analyseur / détecteur est tel que le détecteur tourne à vitesse
angulaire rigoureusement double de celle du cristal analyseur. Ainsi, chaque fois que la relation de
Bragg est satisfaite pour une longueur d’onde i présente dans le rayonnement de fluorescence de
l’échantillon, il y aura diffraction dans la direction 2i et le détecteur sera exactement à la bonne
position pour capter le rayonnement diffracté.
Le montage utilisé pour ce TP permet donc d’analyser les unes après les autres les raies de
fluorescence émises par l’échantillon et donc d’obtenir son spectre de fluorescence X.
4. Manipulations et analyse
10/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
composition chimique ? Proposer une expérience qui permettrait de lever le doute quant-à
l’existence de Molybdène (si le tube utilisé est au Mo) dans l’échantillon.
→ En tenant compte du point 3) et également du point 4), indiquez qualitativement pour quels
éléments du tableau de Mendeleiev la détection des raies de fluorescence peut s'avérer délicate.
Dans cette partie on se propose dans un premier temps d’étudier l’interaction des RX avec un
polymère : du Plexiglas® (Polyméthacrylate de méthyle) :
Manipulation 2 :
1- Réglez les paramètres du tube pour l’acquisition du spectre de fluorescence : tension
40 kV, courant d’électrons 20 mA.
2- Lancez une acquisition balayant l’angle 2 entre 5 et 105° par pas de 0.05°, avec un temps
de comptage de 3 s par pas.
3- Calculez la durée de l’acquisition afin de pouvoir arrêter le balayage d’angle avant la butée
mécanique.
→ Tracez le spectre obtenu en fonction de la longueur d’onde en Å. Pour ce faire, faîtes l’hypothèse
(fausse) que l’on n’observe que de la diffraction à l’ordre 1 sur le cristal analyseur.
→ Peut-on observer la fluorescence des éléments du polymère ? Quelle est alors l’origine des pics
observés ? Qu’observe-t-on en plus des pics et pourquoi ? Peut-on déterminer la tension du
générateur à partir du spectre ?
11/11
L3 de Physique– Université Paris-Sud XI TP2 : Interaction rayons X – matière, spectres de fluorescence
TP « Physique des Rayons X »
→ Distinguer les pics dus à la diffusion élastique (Thomson) de ceux associés aux processus de
diffusion inélastique (Compton) . Pourquoi les pics de diffusion inélastique sont-ils plus larges ?
→ Calculer l’angle de diffusion inélastique des photons aux différents ordres. Comparer la valeur
obtenue avec l’angle du montage expérimental.
On reprend la même expérience avec le matériau des fenêtres protectrices qui entourent les
diffractomètres. Celles-ci sont constituées d’une matrice polymère (Plexiglas) englobant des atomes
lourds (appelés charges) que nous nous proposons d’identifier.
12/11