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RESUME Extrait « La dernière entrevue » La Princesse de Clèves

INTRODUCTION

La Princesse de Clèves paraît, anonymement, en 1678. On peut, pourtant, considérer que Mme de
Lafayette en est l’auteur.Lorsque le texte paraît, elle est proche du groupe de Port-Royal, haut lieu du
jansénisme qui véhicule une vision pessimiste de l’être humain et souligne que personne ne peut trouver le
salut sans la grâce de Dieu. L’amour est envisagé comme une force dévastatrice, signe de la défaite
de la raison. Mme de Chartres, mère de la princesse de Clèves, enseigne à sa fille les dangers de la
passion mais celle-ci, nourrissant estime et respect pour son mari, M de Clèves, va être déstabilisée par les
sentiments que lui inspire le duc de Nemours.
L’extrait qui fait l’objet de notre étude se trouve à la fin du roman. Pour la première fois, les deux héros,
Mme de Clèves et le duc de Nemours, se parlent en tête à tête. Elle lui avoue son amour tout en lui
déclarant que leur relation est impossible.

Problématique : Ainsi, la lecture du texte nous invite à nous demander en quoi cette dernière entrevue
est à la fois une scène d’aveu et à la fois une scène d’adieu.

Nous étudierons l’extrait selon trois mouvements :


le refus de s’engager
l’affliction de Nemours (= tristesse profonde, désarroi)
le renoncement à l’amour

I/ Le refus de s’engager

 Mme de Clèves a pleinement conscience du fait que son refus de s’engager relève du sacrifice.
hyperbole (=exagérer une idée) : « rien de plus difficile que ce que j’entreprends » annonce l’épreuve qui
l’attend.
 Pourtant, comme cela a été le cas au fil du roman, elle veut être guidée par la raison et non par la
passion
 Elle ne veut pas trahir M de Clèves.
 chiasme (structure en croix, inversion de 2 groupes de mots) : « Ce que je crois devoir à la mémoire de
M. de Clèves serait faible s’il n’était soutenu par l’intérêt de mon repos ; et les raisons de mon repos ont
besoin d’être soutenues de celles de mon devoir. »
 révèle la difficulté voire l’impossibilité de se laisser aller à son amour pour le duc car elle s’exposerait
à la possible infidélité de Nemours, à l’expérience la jalousie, déjà vécue lors de l’épisode de la
lettre.
 Cela irait aussi à l’encontre de son devoir envers son défunt mari et à l’encontre de son éducation.
Même si sa décision de renoncer à Nemours est irrévocable, le champ lexical du malheur met en
exergue la souffrance de ce choix vertueux : « malheureuse », « priverai », « quelque violence ».

Cette scène est une scène d’aveu mais également une scène d’adieu.
Mme de Clèves termine son intervention par une prière : « Je vous conjure, par tout le pouvoir que j’ai sur
vous, de ne chercher aucune occasion de me voir. »
Une fois encore, le poids de son éducation, le poids de la morale se ressent lorsqu’elle évoque les
conventions via le substantif : « bienséance »

II/ L’affliction de Nemours (=grande tristesse)


 verbe de mouvement : « M. de Nemours se jeta à ses pieds » => grande tristesse du personnage suite
à l’annonce de Mme de Clèves.
 dimension théâtrale, observée au cours de l’aveu de la princesse au prince de Clèves, est également
visible ici.
 parallélisme de construction : « il lui fit voir et par ses paroles, et par ses pleurs » => immense chagrin
du personnage => objectif : prouver la force de son amour.
 hyperbole (= exagération) : « la plus vive et la plus tendre passion dont un cœur ait jamais été touché »
=> montre la sincérité et la puissance des sentiments de Nemours.
Sa peine est si grande que Mme de Clèves est émue : modalité négative : « n’était pas insensible »

III/ Le renoncement à l’amour


 deuxième prise de parole de la princesse : trois modalités interrogatives => vive émotion.
Elle pense que l’aveu qu’elle a fait à son mari est à l’origine de sa mort, elle estime également que le duc de
Nemours est coupable de cette perte.
La première question : « Pourquoi faut-il, s’écria-t-elle, que je vous puisse accuser de la mort de M. de
Clèves ? » => elle fait peser une responsabilité, malgré elle, sur les épaules de Nemours.
La deuxième question : elle se plaint de la chronologie des événements. En effet, tout aurait été autrement
si elle avait rencontré Nemours avant son mariage ou après la mort du prince comme le met en exergue
le rythme binaire : « Que n’ai-je commencé à vous connaître depuis que je suis libre, ou pourquoi ne vous
ai-je pas connu devant que d’être engagée ? »
La troisième question : impossibilité de cet amour sur le destin, rappelant le fatum (destin irrévocable)
auquel sont confrontés les personnages tragiques au théâtre, et donc sur une volonté divine (Dieu) :
« Pourquoi la destinée nous sépare-t-elle par un obstacle si invincible ? »
=> l’éducation de Mme de Chartres continue de guider ses choix
=> le duc ne considère pas Dieu comme un opposant à leur relation.

 négation totale : « Il n’y a point d’obstacle, madame » il regrette l’entêtement de Mme Clèves.

 Il insiste grâce à un parallélisme de construction sur le fait qu’elle est l’unique personne empêchant la
concrétisation de cet amour : « Vous seule vous opposez à mon bonheur ; vous seule vous imposez une loi
que la vertu et la raison ne vous sauraient imposer. »
Étrangement, la princesse ne contredit pas l’opinion du duc. Elle partage même son sentiment comme
l’indique l’adjectif : « vrai » : « Il est vrai » (l 19) qui ouvre sa troisième et dernière prise de parole.

 verbe de sentiment : « sacrifier » et le verbe « devoir » que Mme de Chartres prononce sur son lit de
mort – : « je sacrifie beaucoup à un devoir qui ne subsiste que dans mon imagination. »
=> elle s’impose cette épreuve, qu’elle s’inflige cette punition.
Sa fidélité héroïque à M de Clèves la conduit à faire le choix du malheur.
Par la suite, nous pouvons percevoir un infime espoir laissé à Nemours via l’impératif : « Attendez ce que
le temps pourra faire » Effectivement, Mme de Clèves évoque la mort récente du prince et la présente
comme un motif de renoncement : « M de Clèves ne fait encore que d’expirer » (l 21), motif qui pourrait ne
plus être dans les mois, les années à venir.
Pourtant, l’interjection : « Adieu » est sans appel et trahit le renoncement définitif à Nemours.

 cette entrevue permet une déclaration d’amour pudique : la princesse se désigne par
une périphrase (plusieurs mots qui pourraient être désignés par un seul) qui la met à distance : « une
personne qui n’aurait rien aimé, si elle ne vous avait jamais vu »
 Par la suite, elle ne dissimule plus rien de son attachement oubliant la bienséance : « les sentiments que
j’ai pour vous seront éternels ».
L’utilisation du futur indique l’immortalité de sa passion.
Mais cet aveu va à l’encontre de son éducation et elle ne peut le supporter : « voici une conversation qui me
fait honte » ce qui explique le verbe de mouvement qui clôt notre extrait : « Elle sortit en disant ces
paroles ».

Conclusion
Cet extrait, figurant à la fin du roman, montre à quel point l’éducation de Mme de Chartres détermine la vie
de la princesse de Clèves.
Elle aime le duc de Nemours mais la vision pessimiste de la passion qui lui a été donnée l’empêche de
s’engager.
Ainsi, elle ne « tombe pas comme les autres femmes », répondant à la demande de sa mère faite sur son lit
de mort et elle suit les grands principes de son éducation.
A la lecture de la dernière phrase, elle semble s’éloigner portant le deuil de sa mère, de son mari et
finalement d’elle-même.

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