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OBJECTIF, PREREQUIS ET PREAQUIS DU COURS

L’objectif de ce cours est de définir les outils de base de la géochimie et leurs principes, et
de présenter quelques exemples concrets d'application aux Sciences de la Terre.

Compétences : Savoir manipuler et interpréter les données géochimiques, les appliquer à


quelques grands domaines de la géodynamique interne.

Sa compréhension exige des prérequis de connaissances en chimie minérale, physique et


en diverses disciplines de géologie, notamment en minéralogie, cristallographie,
pétrographie, etc. Préaquis, elle facilite de son côté la compréhension de disciplines comme
la pétrologie, la volcanologie qui est une discipline de la pétrologie, la prospection
géochimique, la métallogénie et la gitologie, etc.

Plan du cours
Introduction
I. La Terre dans le Système Solaire.
II. Présentation des données géochimiques, processus géologiques et leurs signatures
géochimiques
III. Affinités et Classifications géochimiques des éléments.
IV. Eléments majeurs et composition chimique des grands réservoirs de la Terre solide
V. Eléments en traces dans les processus magmatiques.
VI. Les isotopes et leur utilisation en géologie.

Références Bibliographiques

Allègre, C.-J. & Michard, G.1973 : Introduction à la géochimie, P.U.F, 220 p.


Albarède, F., 2001 : La géochimie. Ed. Gordon and Breach, Collection Géosciences, 190 p.
Jambon A. & Thomas A., 2009 : Géochimie : géodynamique et cycles. Dunod, 406 p.
Mason, B. 1966: Principles of Geochemistry, John Willey & sons, Inc., 3th Edit. New York,
329
Provost, A. & Langlois, C. 2004: Mini Manuel de Géologie-Roches et géochimie, Dunod,
227p.

Richardson, Steven M. , Uhle Maria E. 2004 & McSween Harry Y.: Geochemistry :


Pathways and Processes, Columbia University Press, 2nd Ed., 381p.
Rollinson, R.H. 1995: Using geochemical data: evaluation, presentation, interpretation.
Pearson Education Limited, Harlow, 532 p.

Steinberg, M., Touray, J.-C., Treuil, M. & Massard, P. 1979: Géochimie: Principe et
méthodes, Doin, 2 tomes.
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Vidal, Ph., 1998 : Géochimie, Dunod, 190 p.
INTRODUCTION

Définition
La géochimie est, au sens large, la discipline de la géologie qui s’intéresse à la composition
chimique et isotopique des matériaux terrestres (roches, minéraux, eaux naturelles, gaz) et
aux aspects chimiques des phénomènes géologiques (magmatisme, métamorphisme,
processus sédimentaires…).

Elle offre une vision globale de l’abondance, de la distribution et du


comportement des éléments chimiques dans la plupart des processus géologiques qui
marquent l’évolution de notre planète.

D'un point de vue applicatif et pour résumer, les buts de la géochimie sont, entre autres :
• la détermination de la composition des différentes enveloppes terrestres et de leur
évolution, depuis les hautes couches de l'atmosphère jusqu’à la graine ;

• la quantification des transferts de matière et d'énergie au sein de la Terre ; la


quantification des interactions entre ses différentes enveloppes ;
• la détermination de l'âge des roches et des événements géologiques (p.ex. la
tectonique ou le métamorphisme) ayant affecté la Terre, par le biais de la
géochronologie ;

• l'étude des conditions environnementales actuelles et anciennes.

Toutefois les deux plus grands domaines en restent toutefois l'étude des roches sur Terre ou
dans les autres systèmes planétaires et la géochronologie.

On doit en définitive savoir que la géochimie est la discipline géologique qui apporte la
lumière sur l’intérieur inaccessible de la Terre, pourvoit les bases de mesures de temps
géologique, aide dans l’exploration des ressources économiques et à comprendre comment
nous sommes en train d’altérer notre environnement, etc.

Bref Historique

Le mot géochimie a été introduit en 1838 par C.F.Schönbein, un chimiste suisse qui
découvrit l’ozone. Déjà les premiers chimistes, comme Lavoisier, tentèrent de comprendre
l’histoire des éléments. Mais ce sont surtout des minéralogistes qui furent à la source de plus
grands progrès.

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L’américain Clarke publia, en 1908, les premières études sur la composition de l’écorce
terrestre. Le Russe V.I. Vernadski proposa en 1917 une classification géochimique des
éléments qui ne fut pas retenue car, fondée sur divers critères, et donc difficilement
utilisable. La classification moderne est celle de V.M. Goldschmidt (1888-1947) qui, en
relation avec le système périodique, s’appuie sur les affinités que présentent les éléments
pour les différents matériaux qui constituent l’écorce terrestre.

La recherche des minerais fut un des moteurs de la géochimie. Elle s’applique notamment à
de disciplines telles que la pédologie ou la prospection (pétrole, éléments radioactifs, etc.).

Les outils de la géochimie.


La géochimie utilise les techniques analytiques de la chimie minérale. C’est pourquoi son
essor à la fin du XXe Siècle est lié au développement d’outils performants pour le dosage et
l’analyse quantitative des éléments chimiques et de leurs isotopes.

Pour l’analyse de la composition chimique des matériaux géologiques, la géochimie utilise


certes les techniques d’analyse chimique et isotopique développées en physique et en
chimie, mais la complexité des objets étudiés et la grande précision requise par les modèles
géochimiques ont nécessité l’adaptation de ces techniques à la nature spécifique des objets
étudiés.

C’est ainsi que les développements actuels concernent l’utilisation de lasers et de faisceaux
d’électrons ou d’ions pour l’analyse directe des échantillons géologiques. La difficulté pour
ces techniques d’analyses consiste à analyser une très petite quantité de matière vaporisée
par le faisceau, ce qui nécessite des appareils d’une très grande sensibilité.

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CHAPITRE I : LA TERRE DANS LE SYSTEME SOLAIRE.

I.1. Création du système solaire.


On distingue classiquement trois étapes ou phases dans la formation du système solaire. Il
s’agit de :
- phase de condensation,
- phase d’accrétion,
- phase de différenciation.
A. Phase de condensation
Le système solaire s’est formé à partir d’un nuage originel de gaz et de poussières appelé
nébuleuse gazeuse, large de 50 milliards de km, dont la composition était identique à celle
du soleil. Cette nébuleuse protosolaire a dû subir une concentration gravitaire qui
provoqua une différence thermique entre bordures froides et centre chaud ; ce centre devint
le soleil contenant presque la totalité des poussières et gaz (99,8%).

La matière en bordure se disposa en forme de disque, animé d’un mouvement de rotation


autour de ce centre. Pendant que le centre de la nébuleuse protosolaire se réchauffait, le
disque au contraire, se refroidissait en rayonnant de l’énergie dans l’espace.

Comme la pression était très faible, le refroidissement des molécules de gaz provoqua leur
condensation directement en solides, c.à.d. en grains ou particules que l’on nomme
condensats. Cette étape est dite phase de condensation qui aurait duré moins de 2 Ma.

B. Phase d’accrétion.
Les mouvements mis en œuvre dans la nébuleuse ont favorisé la rencontre et l’agrégation
des condensats, produisant ainsi des noyaux de plus en plus massifs. L’agrégation fut
d’abord et principalement causée par des forces magnétiques et électrostatiques ; ensuite à
mesure que la masse des noyaux s’accroissait, ils étaient devenus eux-mêmes des
attracteurs gravitationnels importants c.à.d. des météorites puis des planétoïdes, attirant
vers eux de plus en plus de matière.

Après quelques dizaines de Ma, un certain nombre de gros noyaux ou protoplanètes,


réchauffés par leur gravité s’étaient formés et avaient achevé d’attirer le reste de
poussières, roches et autres débris qui trainaient dans le disque nébulaire. C’est le
processus de la formation des planètes par accrétion.

Cette phase a naturellement été ponctuée de nombreuses collisions cataclysmiques et


d’une forte activité météoritique dont certains corps célestes, comme la lune ou le
mercure, conservent encore la trace. Cette phase dura quelques dix millions d’années !

C. Phase de différenciation des planètes et composition prégéologique de la Terre


L’accrétion des planètes s’était produite selon une séquence qui dépendait de :
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 la quantité de matière disponible et de
 la température, et donc de la distance des planètes au soleil.

Cela a eu pour conséquence l’apparition très tôt d’une hétérogénéité initiale dans la
nébuleuse, une hétérogénéité qui se traduit par la différenciation de deux cortèges de
planètes : (1) les planètes telluriques ou intérieures et (2) les planètes joviennes ou
externes.

- La Terre est l’une des planètes du système solaire qui constitue avec Vénus, Mars et
Mercure des planètes intérieures ou telluriques. Il s’agit des planètes rocheuses
structurées en couches de nature et d’épaisseur différentes. Elles présentent une
surface solide et une densité moyenne allant de 3,3 à 5,5.
- Par contre, les planètes externes dites joviennes (Jupiter, Saturne, Uranus et
Neptune) sont des planètes géantes, gazeuses, de faible densité (0,7 à 1,5) et
entourées d’anneaux et de nombreux satellites. Pluton, très éloigné du soleil,
constitue un gros planétoïde.

Ensuite, les astéroïdes et les planètes, portés à température élevée par des collisions ont dû
fondre et se différencier par refroidissement, c’est la deuxième différenciation. Un rôle
important est désormais accordé aux collisions. Ainsi de violents bombardements par de
blocs et de planétésimaux se sont poursuivis pendant un milliard d’années, entre 4450 et
4350 Ma.

Quant à la Terre primitive, qui s’était formée par accrétion de poussières, blocs et
planétésimaux dont les collisions et la désintégration des éléments radioactifs (U, Th)
libéraient de l’énergie, elle a vu sa température s’élevait fortement (2000°C) et un important
volcanisme qui a permis le dégazage d’une partie de son manteau supérieur.

La structure de la Terre est donc passée par un stade prégéologique (étape dont on ne
dispose d’aucune trace dans les roches ou matériaux géologiques, entre 4.55 et 3.8Ga) où
l’on trouvait, de la périphérie vers le centre :

- 500 km de péridotite liquide ;


- 2000 km de péridotite solide dans laquelle transitait et percolait du fer
liquide ;

- Un noyau de fer liquide qui grossissait avec les apports venant de la surface.

On estime que la formation de ce noyau interne liquide a dû être terminée en moins de 60


Ma. Le refroidissement de ce noyau est très lent et sa cristallisation donne la graine ou
noyau interne.

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Cette cristallisation libère de l’énergie qui est à l’origine du champ magnétique terrestre :
c’est en fait le flux turbulent de la partie liquide du noyau externe qui a dû engendrer ce
champ magnétique.

I.2. Abondance cosmique et Nucléosynthèse.


A. Abondance cosmique
La composition chimique du système solaire nous est donnée par (1) l’analyse des
météorites considérées comme inaltérées depuis la naissance du système solaire, (2) les
analyses réalisées sur les échantillons prélevés dans le vent solaire lors des vols
spatiaux et (3) l’analyse spectroscopique de la lumière émise par le soleil.

Comme celui-ci constitue 99,8% de masse du système solaire, on pense que sa composition
est représentative de l’ensemble du système, d’où l’expression de l’abondance cosmique
pour désigner sa composition. En effet, comme la matière des couches supérieures du
Soleil, qui est en général considérée comme une référence, n'est pas transformée par les
réactions nucléaires qui n'ont lieu que dans le noyau, on peut considérer que sa composition
n'a guère varié pendant l'histoire du Soleil, et qu'elle est assez semblable à celle de la
nébuleuse qui a formé le Système Solaire il y a plus de 4 milliards d'années.

La figure ci-après montre une excellente correspondance entre les abondances des
éléments dans une météorite chondritique et celles de la photosphère solaire qui montre que
les chondrites ont approximativement une composition cosmique, à l’exception des éléments
gazeux (H, He, N, O et gaz nobles).

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Le tableau ci-après donne l'abondance des principaux éléments de la photosphère solaire.
On voit que l'Hydrogène et l'Hélium en sont les constituants essentiels, et que les 4 éléments
les plus abondants représentent plus de 99 % de la masse, soit encore plus en nombre
d'atomes, il s'agit d'éléments légers.

Elément Symbole Numéro atomique Proportion en Proportion en masse


nombre d'atomes
Hydrogène H 1 94 % 73 %
Hélium He 2 5,9 % 25 %
Oxygène O 8 0,06 % 0,8 %
Carbone C 6 0,04 % 0,3 %
Néon Ne 10 - 0,1 %
Azote N 7 - 0,1 %
Silicium Si 14 - 0,07 %
Magnésium Mg 12 - 0,05 %
Soufre S 16 - 0,04 %

Cette composition chimique du système solaire a été normée à 106 atomes de Si (Si étant
l’élément métallique le plus abondant du système solaire après les gaz) (Tableau ci-après) et
présentée en fonction du numéro atomique (Z) des éléments : c’est le Diagramme de
l’abondance cosmique des éléments.

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La composition chimique du système solaire à un million d’atomes de Si. On remarquera les
pics de stabilité (par exemple Fe, Pb) et l’abondance plus faible des éléments à numéro
atomique impair par rapport à celle de leurs voisins pairs, dont le noyau est plus stable. Le
déficit des atomes légers Li, Be, B est dû à la destruction de ces éléments dans le cœur des
étoiles.

L’examen du diagramme de l’abondance cosmique (figure ci-après) montre que :

• l’abondance relative d’un élément chimique dans l’univers est essentiellement


fonction de sa masse atomique : elle décroit en général lorsque celle-ci augmente.
• On peut noter l’extrême abondance de l’hydrogène et de l’hélium.
• La faible abondance de certains éléments légers : lithium, béryllium, bore, scandium
moins abondants que les suivants immédiats : C, N, O.
• On observe une décroissance non régulière depuis l’hydrogène (Z=1) jusqu’au
Scandium (Z=45), puis une augmentation des abondances relatives avec un
« »
maximum constituant le pic du fer (masse 56). Au-delà de ce pic, l’abondance
relative des éléments plus lourds diminue moins rapidement, et est marquée par
quelques irrégularités.
• L’allure en zigzag de la courbe qui traduit l’abondance systématique plus élevée des
éléments de Z pair par rapport à ceux de Z impair : c’est la loi d’Oddo-Harkins. Ceci
reflète une grande stabilité des noyaux dont les nucléons sont appariés, et indique

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que l’abondance des éléments dépend de la constitution de leur noyau et non de
leurs propriétés chimiques qui, elles, sont liées à leur configuration électronique.

B. Nucléosynthèse
L’abondance des éléments dans l’Univers résulte d’un ensemble de processus physiques,
marqués par une série des réactions thermonucléaires, nommé « Nucléosynthèse » qui a
conduit à la synthèse des noyaux atomiques. On distingue :
a) Une nucléosynthèse primordiale, qui a lieu durant les premières minutes de
l’univers, et qui est responsable de la formation des noyaux légers tels que H, He,
Li…

b) Une nucléosynthèse stellaire qui a lieu dans les étoiles, elle crée une grande partie
des éléments compris entre Li et Fe.

c) Une nucléosynthèse dans les supernovæ produit la plupart des éléments plus
lourds que Fe ;

d) Une nucléosynthèse interstellaire ou spallation cosmique responsable de la


réduction des éléments légers tels que : Li, Be, B,… lors de bombardement de
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matière par rayons cosmiques, notamment par des noyaux C et O issus de
l’explosion d’une supernova.

Les processus nucléosynthétiques sont :


 la fusion. Elle a lieu au cœur des étoiles de petite taille come le soleil ; ainsi : 
 Lorsqu’au centre du soleil, la To dépasse 2x107°C et la densité 100 g/cm 3, les
noyaux d’hydrogène fusionnent pour aboutir à la formation d’hélium
(4x1H=4He).
 La production d’He s’accompagne d’une augmentation de T et de densité.
C’est ainsi qu’à la To de l’ordre de 2x108°C et à la densité de 105g/cm3, Il y a la
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formation de C par fusion d’hélium (3x4He), puis celle de l’oxygène
(4x4He=16O).
 A la To de 2x109°C, il y a formation de Mg, S, Ca et Si par coalescence ou
fusion d’atomes d’He. Puis, par fusion de deux atomes de Si, on aboutit à la
formation du fer (2x28Si=56Fe).
Comme le passage par fusion à l’élément suivant, encore plus lourd, requiert chaque fois
plus d’énergie pour vaincre la répulsion des noyaux de plus en plus lourds, l’abondance
des éléments diminue quand croît leur numéro atomique. Une exception concerne
cependant le fer dont le pic s’explique par une particulière stabilité de son noyau : en
effet, comme l’augmentation de la To n’est plus capable, à ce niveau, de créer de
nouveaux éléments, tout arrangement plus lourd devient instable et transmute (se

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désintègre) en éléments de la famille de fer, d’où l’abondance exceptionnelle de ce
dernier.
• l’addition ou l’absorption des neutrons par des noyaux.
On distingue :
1) le processus d’addition lente des neutrons ou processus « s » (de slow ou lent) qui
intervient concurremment à la production du fer dans le cœur de l’étoile au cours de
la phase dite « Géante rouge ». Il rend compte de la production des éléments
jusqu’au 209Bi (dernier isotope stable).
2) le processus « r » (de rapide) permet l’apparition des éléments radioactifs lourds
tels que Th, U, 244Po.
 les réactions de spallation surviennent lorsque la matière est bombardée par les atomes
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de C et O issus de l’explosion d’une supernova. C’est un cas particulier de
nucléosynthèse qui concerne et explique surtout la faible abondance de Li, Be, B.

I.3. Séquence de condensation des minéraux du système solaire.


Pour expliquer comment des corps planétaires à chimisme varié ont pu se former ou se
différencier, à partir d’une nébuleuse protosolaire globalement homogène, on invoque la
théorie de la séquence de condensation. Ainsi la séquence de condensation pour un gaz
de composition solaire à 10-4 atmosphères calculée par Larry Grossman et John Larimer
(1974) est présentée ici.

On doit noter que quelques phases se condensent directement à partir de la vapeur, d’autres
se forment par réaction de la vapeur avec des phases condensées précédemment. Ainsi :

• le corindon (Al2O3) est la première phase solide qui se forme et qui contient un
élément majeur réfractaire, bien que des éléments traces tels que Os, Zr et Re
peuvent condenser même à haute température.

• La pérovskite (CaTiO3) qui contient U, Th, Nb et REE en solution solide est la


deuxième phase.

• Le corindon réagit avec la vapeur pour donner le spinelle (MgAl2O4) et la mélilite


(Ca2[MgSiAl2]SiO7) qui réagit au retour pour produire le diopside à basse
température.

• Fe° métallique contenant Ni, et Co condense à 1375K.

• La forstérite apparait peu après ; elle réagit avec la vapeur pour former l’enstatite.

• L’anorthite se forme par réaction avec la vapeur des phases précédemment


formées.

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Toutes ces phases réfractaires apparaissent à des températures au-dessus de
1250K.

• A de températures inférieures, Fe métallique réagit avec la vapeur et s’enrichit en Ge,


Ga et Cu. De même, anorthite réagit pour former des solutions solides avec des Na
alcalins K, et Rb. La condensation de ces phases modérément volatiles se fait entre
1200 et 600K. Ces éléments sont déprimés dans les chondrites par rapport aux
valeurs cosmiques, ce sont donc des éléments dits « éléments normalement
déprimés ».
• En dessous de 750K, Fe s’oxyde et la teneur en Fe de l’olivine et du pyroxène
augmente rapidement. On peut donc conclure que l’état d’oxydation varie durant la
condensation. Fer n’apparait à l’état Fe° métallique qu’à haute température, et à l’état
oxydé à la fin de la séquence de condensation.
• Fe° métallique réagit aussi avec le sulfure dans la vapeur pour former la troïlite (FeS)
en dessous de 700K.
• Les éléments fortement volatiles fortement déprimés dans les chondrites se
condensent entre 600 et 400K. C’est le cas de Pb, Bs et Th.
• La magnétite ne devient stable qu’à 405K, l’olivine et le pyroxène réagissent avec la
vapeur pour former les phyllosilicates hydratés à basse température.

Les différences de composition globale des planètes peuvent être expliquées grâce à cette
théorie. En effet, suivant leur contexte de refroidissement, les corps planétaires sont peu ou
pas différenciés par rapport à la nébuleuse initiale, ou au contraire s’en écartent
sensiblement. C’est ainsi que :

- Les planètes telluriques, les plus proches du soleil, sont globalement appauvries en
éléments et composés volatils, mais enrichis en éléments réfractaires et ce, à de
degrés variables.
- Au contraire, les planètes géantes joviennes correspondent aux lieux de l’espace où
les volatils (H, He, eau,…), chassés des zones les plus internes, se sont rassemblés.
Leur composition est restée proche de celle de la nébuleuse initiale.

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CHAPITRE II. PRESENTATION DES DONNEES GEOCHIMIQUES, PROCESSUS
GEOLOGIQUES ET LEURS SIGNATURES GEOCHIMIQUES

II.1. Présentation des données géochimiques

Les données d’analyse chimique des échantillons de roches et minéraux sont


conventionnellement subdivisées en 4 catégories :

1. Eléments majeurs,
2. Eléments en trace (ou éléments traces),
3. Isotopes radioactifs et radiogéniques,
4. Isotopes stables.

A. Eléments majeurs

Par « éléments majeurs», on désigne normalement les éléments qui constituent et


déterminent les structures des minéraux d’une roche, c.à.d. les éléments à concentration
supérieure à 1%, et qui règlent la structure des phases minérales solides.

Toutefois, quelques centièmes de % de Zr ou de P permettent la cristallisation de zircon ou


d’apatite. Par contre, certains minéraux renferment plus de 1% de Li, Rb ou Cs sans pour
autant que ces éléments soient considérés comme des majeurs.

Les éléments majeurs sont ceux qui prédominent dans l’analyse de toute roche. Il s’agit de :
Si, Ti, Al, Fe, Mn, Mg, Ca, Na, K et P. Leur concentration est exprimée en :

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• % du poids de leurs oxydes,

• % du poids d’éléments ou

• % du poids de l’atome.

Les fractions massiques d’oxydes sont, par tradition, de loin les plus répandues dans toute la
littérature géologique. Cette façon d’exprimer la teneur de l’élément répond au souci de
l’électroneutralité des matériaux de la croûte, l’oxygène étant par ailleurs l’anion le plus
abondant dans ce contexte.

Si on connaît la teneur d’un élément X exprimé en son oxyde, on peut calculer sa teneur en
% du métal en multipliant la teneur en oxyde par la fraction de masse que présente cet
élément dans l’oxyde. Soit par exemple 4% la teneur moyenne de MgO dans la croûte, la
masse molaire de MgO = 40g/mole. Le % de Mg dans MgO = α MgO x %MgO, Or,
α MgO = 24/40 = 0,6 ; d’où %Mg = %MgO x α MgO, c.à.d. 0,04 x 0,6 = 2,4%. De même si A
est le poids en % de l’oxyde de l’élément X, on peut calculer le poids en % de l’atome de cet
élément. Soit une teneur de 66,95% SiO2, l’atome-g de Si = 66,95/60 = 1,12.

La somme des éléments majeurs doit boucler à 100%, ce qui témoigne de la bonne qualité
ou non des analyses. Il convient de noter que le fer est exprimé comme FeO ou Fe 2O3 et
souvent comme FeTot sous forme de FeOTot ou Fe2O3Tot.

Les composés volatils tels H2O, CO2 et S sont normalement inclus dans les éléments
majeurs. On distingue H2O+ qui correspond à l’eau combinée dans le réseau des silicates
pouvant s’évaporer à 110°C, et H 2O- ou l’eau d’humidité de la roche qui s’en va à moins de
110°C. Le contenu total des volatils d’une roche est déterminé par chauffage à 1000°C et
exprimé comme perte au feu (PF).

La composition des roches, généralement présentée en % d’oxydes, peut être recalculée


en cations. Ceci est particulièrement utilisé pour la classification des roches volcaniques
(subalcalines). On calcule la composition de la roche en cations en procédant de la manière
suivante :

 le % de l’oxyde est divisé par le poids moléculaire de l’oxyde ;


 le résultat est multiplié par le nombre de cations dans la formule de l’oxyde ;

Exemple : %SiO2 est divisé par 60,09 ; %Al2O3 est divisé par 101,96 et multiplié par 2

Parfois les proportions cationiques sont multipliées par 1000 et on parle de millications.

Oxydes %oxydes Poids Molécul. N de cations Prop. cations Millications % cations


SiO2 61.52 60.09 1 1.0238 1023.8 58.03
TiO2 0.73 79.9 1 0.0091 9.14 0.52
Al2O3 16.48 101.96 2 0.3233 323.26 18.32

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Fe2O3 1.83 159.69 2 0.0229 22.92 1.30
FeO 3.82 71.85 1 0.0532 53.17 3.01
MnO 0.08 70.94 1 0.0011 1.13 0.06
MgO 2.80 40.3 1 0.0695 69.48 3.94
CaO 5.42 56.08 1 0.0966 96.65 5.48
Na2O 3.63 61.98 2 0.1171 117.13 6.64
K2O 2.07 94.2 2 0.0439 43.95 2.49
P2O5 0.25 141.95 2 0.0035 3.52 0.20
Somme 1.7649 99.99

Les éléments majeurs sont utilisés notamment pour :

 La caractérisation des roches ;


 L’identification de différents processus géologiques;
 La détermination des contextes géotectoniques des roches magmatiques ou
sédimentaires.

B. Eléments en trace
Ils sont définis comme des éléments présents en faibles concentrations, inférieures à 0,1%
(1000ppm). Leurs concentrations sont exprimées sous forme de partie par million
(ppm = 10-6) ou rarement en partie par milliard (ppb = 10-9) de l’élément.

Il existe toutefois des éléments qui se comportent comme éléments majeurs dans certaines
roches, et comme traces dans d’autres. C‘est le cas par exemple de K qui est un élément
majeur dans les rhyolites et granites alcalins (faisant près de 4% de la roche et formant
l’essentiel de la structure des minéraux tels que les feldspaths alcalins et la biotite) et qui par
contre, montre dans les basaltes la teneur très faible, avec une absence totale de phase
minérale porteuse (de K), il se comporte donc ici comme élément trace.

C. Les isotopes

 Isotopes radioactifs et radiogéniques : ce sont ceux qui se désintègrent


spontanément par leur radioactivité naturelle ou qui dérivent de cette désintégration
spontanée. On a donc la paire Père-Fils (P-F). Exemple : U-Pb, Th-Pb, K-Ar, Rb-Sr
ou Sm-Nd, etc.
 Isotopes stables : ce sont des isotopes naturels d’éléments légers tels que H, O, C
et S qui fractionnent sur base des différences de masse entre eux. Exemple : 18O est
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12,5% plus lourd que O ; ces deux isotopes fractionnent lors de l’évaporation de
l’eau.

II.2. Processus géologiques et leurs signatures géochimiques

Les données géochimiques peuvent être utilisées pour l’identification des processus
géologiques suivants :

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a) Processus géologiques contrôlant la composition chimique des roches
magmatiques :

La composition en éléments majeurs et traces d’un magma est déterminée par le type et
le degré de fusion partielle (FP), même si elle peut être modifiée lors de la montée du
magma en surface par cristallisation fractionnée (CF).

La région source du magma est, elle, mieux caractérisée par sa composition isotopique
car les rapports isotopiques ne sont modifiés ni par la fusion partielle (FP) ni par la
cristallisation fractionnée (CF).

Dans la chambre magmatique les principaux processus sont : la CF, le mélange


magmatique, la contamination, etc. Suivant le lieu de leur emplacement ou de leur
éruption, la composition des roches magmatiques peut être chimiquement modifiée :

- soit par le dégazage,


- soit par l’interaction avec un fluide.

Le dégazage affecte surtout la chimie des isotopes stables, tandis que l’interaction avec
un fluide affecte tous les aspects de la chimie de roches. C’est pourquoi les échantillons
des roches magmatiques sélectionnés pour l’analyse chimique doivent être suffisamment
frais, car même les échantillons de basaltes du fond océanique sont souvent affectés par
une halmyrolyse ou par une altération hydrothermale (de l’eau de mer). Les roches
métamorphiques sont elles aussi l’objet de l’altération par l’interaction avec une phase
fluide.

b) Processus géologiques contrôlant la composition chimique des roches


sédimentaires
La composition chimique des matériaux sources constitue le contrôle majeur de la
composition chimique des roches sédimentaires surtout détritiques. Toutefois des
processus subséquents comme l’altération, le transport, le dépôt et la diagenèse jouent
chacun un rôle plus ou moins important. C’est ainsi que :
 La composition de matériaux sources (provenance) est fonction du cadre
tectonique ;
 Les conditions d’altération météorique peuvent marquer leur signature sur les
sédiments qui en résultent ; par exemple le trend (une tendance directionnelle)
dans un diagramme de variation peut résulter d’un mélange des composés
chimiquement différents dans un sédiment.
 Durant le transport des sédiments, on peut noter des variations notables de la
composition chimique des éléments traces :

17
- certains de ces éléments se concentrent dans la fraction argileuse,
- d’autres dans les minéraux lourds,
- alors que d’autres sont déprimés ou dilués dans les fractions riches en
quartz ;

Tout ceci étant fonction du laps de temps entre le moment de l’érosion et celui du
dépôt.

 Lors du dépôt, les variations des teneurs des éléments chimiques sont fonction de
l’environnement de ce dépôt qui est contrôlé par la vitesse de subsidence. Les
processus chimiques et biochimiques contrôlent la solubilité et donc la mobilité
des éléments dans l’eau de mer. L’altération sous-marine (halmyrolyse) et les
conditions d’oxydo-réduction jouent aussi un rôle important pour certains types de
sédiments.
 Les processus post-dépôt (diagénétiques) sont bien étudiés en utilisant les
isotopes stables.
c) Processus géologiques contrôlant la composition chimique des roches
métamorphiques
Le principal contrôle sur la composition chimique des roches métamorphiques est la
composition du protolithe. Souvent la recristallisation métamorphique est
isochimique, mais il y a aussi des changements chimiques de la roche formée dus au
mouvement des fluides et aux conditions thermiques durant le métamorphisme.

Comme le métamorphisme est fréquemment accompagné de déformations, surtout


pour le métamorphisme de haute intensité, il peut y avoir aussi un mélange des
résidus de différents protolithes de composition différente conduisant à une roche
métamorphique d’origine mélangée.

L’eau expulsée durant le métamorphisme par les réactions de l’hydratation et de


déshydratation peut conduire au changement dans la composition de la roche mère
(protolithe) pour des éléments particulièrement mobiles dans les fluides. A hauts
degrés de métamorphisme, il y a fusion des roches et formation du liquide
magmatique. La ségrégation de ce magma conduit à la différenciation de la roche-
mère en deux composants : le restite (ou résidu) d’un côté et le magma de l’autre. Le
changement de composition chimique est ici lié au processus de fusion et à son
degré.
A l’absence de phase fluide, la variation de la composition chimique des roches
métamorphiques est fonction de la diffusion des ions à l’état solide.

18
II.3. Evaluation et traitement des données géochimiques

Les informations recueillies sont alignées sous une forme brute dans les tableaux. Ces
données brutes devront être ordonnées de façon à les apprêter à l’analyse.
La mise en ordre des données brutes implique leur codage numérique. Le tableau ci-
dessous illustre le mode de codage.
Pour les données quantitatives, il s’agit d’examiner chaque tableau de compilation pour
chaque variable. Dès qu’une anomalie y est repérée, on en recherche la source. L’erreur
peut provenir principalement des opérations de transfert, du tri, des instruments utilisés ou
d’une catégorisation inadéquate.

Tableau : Exemple de codage numérique des données récoltées in situ

Localisation Teneur en Au Teneur en


N° échantillon Nature
(m) (ppm) Ag (ppm)
1 5 Filon de quartz 100 55
2 10 Shale 75 35
La préparation des données consiste à les organiser sous forme de :
1) Tableau à une entrée : représente la distribution d’une seule variable.
Numéro ou Catégorie Variable (ppm, %) Cu
CMN 3%
SD 4%
Ce tableau devient un tableau en classes si les catégories ou les valeurs de la
variable ont dû être regroupées pour en faciliter la lecture :
Catégorie Numéro Variable (ppm, %) Cu
CMN 1 2.5
2 2.7
3 3
SD 1 4.5
2 3.8
Ces tableaux à une entrée donnent la fréquence de chaque catégorie de la variable
en nombre absolu et en pourcentage.
2) Tableau à 2 entrées : 2 variables sont reliées. On évalue leur corrélation éventuelle.
Roche Matière organique (%) Cu (ppm)
SD ……………………………….. ……………………………..

RAT ............................................. ……………………………...

Le traitement des données peut aboutir aux graphiques :


 Diagramme en bâtons est composé de bandes habituellement verticales,
représentant chacune une catégorie de la variable (fig. 3). La hauteur des bandes est
en rapport avec la fréquence de la catégorie. Les bandes sont espacées.

90%

80%

70%

60%

50%
FREQUENCE
40%
19
30%

20%

10%

0%
 Histogramme présente des rectangles verticaux placés côte à côte. Le polygone de
fréquences rejoint, par des lignes droites, les milieux des sommets des rectangles de
l’histogramme. La courbe de fréquence arrondit les lignes du polygone de fréquence.
Elle est plus souvent utilisée que le polygone de fréquence.
70%
60%

60%
50%

50%
40%
40%
30%
Fréquence
30% Fréquence
20%
20%
10%
10%
0%
0%  Le diagramme circulaire : ressemble
à une tarte découpée en pointes et
chaque secteur indique la valeur absolue ou relative d’une catégorie.
Chart Title

0 ,3 6 nourr iture 1 9% 25 %

20%

 Le diagramme triangulaire:

Les mesures descriptives


 Les données en % : les données compilées peuvent être exprimées en %.
 Les mesures de tendance centrale :
Le mode précise la catégorie de la variable ayant la plus haute fréquence.
La médiane : la catégorie qui divise les données en deux parties égales
La moyenne : fournit une sorte de résumé de toutes les données :

20
n
1
X= ∑ Xi
 Moyenne arithmétique :
n i= 1 a vec comme variable
Xi
n
1
log G = ∑ log X i
 Moyenne géométrique :
n i =1
Les mesures de dispersion
Permettent d’apprécier dans quelle mesure les diverses observations d’une série
s’écartent les unes des autres et, par conséquent, d e la valeur centrale adoptée :

 Intervalle de variation I = X max − X min


 Ecart – type (déviation standard) : tient compte des écarts de toutes les valeurs
observées par rapport à la moyenne. C’est une mesure de dispersion
la plus utilisée.
1
 σ=
√ n−1
∑ (xi−x )2

σ
V=
 Coefficient de variation : x
C’est un paramètre sans dimension qui permet de comparer la dispersion de deux séries. Il
ne tient pas compte de l’ordre de grandeur des variables.

Les mesures de position


Concernent la place relative d’un certain nombre d’éléments dans une population ou un
échantillon. On établit des quartiles, des quintiles ou des déciles qui divisent la population en
4, 5 ou 10 parties. Les courbes cumulatives permettent de tirer facilement les quartiles,
quintiles, etc.

L’analyse factorielle en composantes principales


Projection des variables et des individus séparément ou ensemble de façon à voir leur
relation mutuelle :
L’analyse factorielle (A.F.) s’utilise dans différents domaines, autres qu’en géochimie que
nous illustrons ici. D’après Herbosch (1974), «  le principal but de l’analyse factorielle est
d’expliquer les relations observées entre un grand nombre de variables en termes de
relations plus simples et surtout plus fondamentales : les facteurs. Par l’interprétation de
ceux-ci, on peut obtenir une explication plausible des phénomènes : dans un domaine
connu, l’analyse factorielle apparaît donc comme une méthode d’exploration créatrice
d’hypothèses ». Le point de départ de toute analyse factorielle est une matrice de corrélation

21
à partir de laquelle on essaie d’extraire sous forme condensée la plus grande part possible
de l’information. L’A.F. est une méthode de traitement objective qui accorde à chaque
variable ou à tout individu les valeurs que prennent les facteurs. Ces valeurs sont dites
« poids des facteurs sur les éléments » ou scores. Plusieurs éléments associés au même
facteur sont liés. Un élément pour lequel les poids de deux facteurs sont voisins est
considéré comme partagé entre les facteurs. On choisit le plus souvent un petit nombre de
facteurs, les plus significatifs.
L’A.F. propose, sous forme graphique, une projection de points représentatifs des variables
et des individus sur des plans factoriels. Cela permet une interprétation statistique :
- dans un plan factoriel donné, une variable est d’autant mieux expliquée qu’elle
est proche de l’extrémité de l’axe factoriel, d’autant moins bien qu’elle est près du
centre ;
- deux variables bien expliquées dont les représentations sont proches l’une de
l’autre sont en relation normale ;
- deux variables bien expliquées dont les représentations se déduisent l’une de
l’autre par une symétrie par rapport à l’origine sont en relation inverse ;
- deux variables bien expliquées dont les représentations se déduisent l’une de
l’autre par une rotation de 90 ° sont indépendantes.
Tests statistiques
On peut se référer à certains logiciels (dont STATISTICA) pour les calculs qui montrent la
relation éventuelle entre deux variables et l’intensité de cette relation et particulièrement au
cours de Probabilités et statistiques qui est plus complet.
Les tests statistiques sont de deux sortes :
 Les tests d’hypothèse: ici le terme hypothèse ne renvoie pas à l’hypothèse que le
chercheur a formulée à la première étape de sa recherche, même si l’hypothèse
statistique lui servira à vérifier l’hypothèse de recherche.
L’hypothèse nulle en statistique prédit qu’il n’y a pas de relation entre deux variables.
 Les tests d’association ou de corrélation : visent à mesurer l’intensité de la relation
entre deux variables. Le plus souvent connu est le r ou le coefficient de corrélation
qui varie entre zéro (0) et un (1).
Pour connaître l’intensité de ce rapport, on compare r 0 théorique trouvé dans des abaques et
pour un degré de liberté donné au r calculé. Toutefois le graphique de dispersion permet de
critiquer le r calculé et l’intensité de signifiance.

22
CHAPITRE III : AFFINITES ET CLASSIFICATIONS GEOCHIMIQUES DES ELEMENTS

III.1. Classification périodique ou de Mendeleïev

Mendeleïev a démontré, en 1871, le caractère périodique des propriétés des éléments


lorsqu’ils sont ordonnés par numéro atomique. Ainsi la température de fusion (T f), l’énergie
de formation de Gibbs (ΔG), le rayon atomique, l’énergie d’ionisation, par exemple, varient
tous de façon cyclique lorsqu’on balaye le tableau de Mendeleïev dans l’ordre croissant de
Z.

De même les propriétés géochimiques des éléments sont fortement influencées par leurs
positions dans ce tableau. Ainsi, les familles que forment les éléments alcalins (Li, Na, K,
Rb, Cs, …), les alcalino-terreux (Be, Mg, Ca, Ba) ; la famille de titane (Ti, Zr, Hf) ; les
halogènes (F, Cl, Br, I) ; les gaz rares (He, Ne, Ar, Kr, Xe), les lanthanides ou terres
rares ; les actinides ou famille de l’Uranium, sont reconnaissables par leurs propriétés
proches, parfois si proches que leur séparation chimique fut un défi ; c’est le cas
particulièrement de Zr et Hf.
Dans la classification périodique :

- les colonnes Ia, IIa correspondent au remplissage des orbitales s,


- les colonnes III et VI correspondent au remplissage de p;
- dans les colonnes intermédiaires, les éléments de transition diffèrent les uns des
autres par le remplissage des orbitales d. Il faut noter que lors de leur remplissage,
les orbitales d se trouvent normalement à l’intérieur par rapport à l’orbitale s d’ordre
supérieur.

III.2.Classification géochimique de Goldschmidt.


Les éléments ont donc été classés en fonction de leur affinité pour les phases minérales qui
composent les météorites: silicates, sulfures, fer, etc.

a) Les éléments lithophiles : Sont ceux qui présentent une affinité avec les silicates :
H, Li, O, F, Na, Mg, K, Si, Al, Ti, Ca, V, Cr, Mn, Fe, Co, Ni, Zn, Ge, As, Rb, Sr, Y, Nb,
Cs, Ba, Pb, Terres rares, Zr, U, et Th appartiennent à cette catégorie. C’est la famille
de loin la plus importante. Ces éléments se retrouvent dans la croûte et le manteau
supérieur.
b) Les éléments sidérophiles : Ont une affinité avec le fer métallique. On distingue
des éléments fortement sidérophiles tels que Ru, Rh, Pd, Os, Ir, Pt, et Au, et des
éléments à tendance sidérophile comme Mn, Fe, Co, Ni, Mo, Te, Ag, Cd, In, Sn, Sb,
W, Re, Hg, Pb. Les sidérophiles se retrouvent dans le noyau.

23
c) Les éléments chalcophiles : Ce sont des éléments trouvés généralement dans la
nature sous forme de sulfures ; ils présentent des affinités pour le soufre. On a des
éléments fortement chalcophiles tels Cu et Ag et des éléments à tendance
chalcophile (V, Cr, Mn, Fe, Co, Ni, Mo, Tc, Ru, Rh, Pd, Cd, In, Sb, W, Te, Tl, Os, Ir,
Pt, Au, Hg, Pb, Bi). Ils se retrouvent dans le manteau inférieur.
d) Les éléments atmophiles : Ce sont des éléments qui ont de l’affinité avec
l’atmosphère. Ce sont : O, N, H, gaz rares (He, Ne, Ar, Kr, Xe).
e) Les éléments hydrophiles : sont ceux qui ont une forte affinité pour les fluides
magmatiques hydratés. Ce sont Li, Be, Cl, Nb, Mo, Sn, Au. Ils sont liés aux minéraux
les plus fréquents tels les aluminosilicates de Fe, Ca, Na, K et les oxydes de Mg et
Fe.
f) Certains éléments bien que pondéralement moins bien représentés tels C, F, P, S et
Cl ont une importance considérable, car ils participent aux cycles organiques et aux
minéraux qui en proviennent plus ou moins directement tels que les carbonates, les
sulfates, les chlorures et les phosphates par exemple.

Ces affinités ne doivent cependant pas être prises à la lettre. En effet, les éléments tels que :
• le thallium, classé comme chalcophile, est communément en substitution de K dans
les feldspaths ; le germanium et l'étain, essentiellement chalcophiles, ont également
des comportements sidérophiles, voire lithophiles.
 Le fer est de nature à la fois chalcophile et lithophile en même temps que sidérophile,
ce qui explique son abondance dans la croûte terrestre.
 L'état d'oxydation peut faire varier le comportement d'un élément, à l'exemple du
chrome: Cr3+ est chalcophile (lié aux sulfures), mais Cr6+ est lithophile (silicates).

Par ailleurs, la position des éléments dans le tableau périodique n’est pas quelconque. Les
lithophiles se distribuent entre les deux extrémités du tableau, les sidérophiles sont dans les
éléments de transition, les chalcophiles au centre droit, les gaz rares dans la dernière
colonne.

24
III.3. Classification des éléments en fonction de la température de condensation

Ce type de classification rend surtout compte de différences géochimiques globales que


peuvent présenter les planètes en fonction du contexte de refroidissement. Ici on
distingue :

1. Les éléments réfractaires : Ce sont les éléments à haute T° de condensation comme


Ca, Al, U, Mg, O, Terres Rares (lanthanides), Th, Cr, etc. Ces éléments ont tendance à
se concentrer dans les résidus solides après la fusion magmatique ou dans les tout
premiers minéraux de la différenciation magmatique après cristallisation fractionnée.

2. Les éléments volatils ou fusibles: Ce sont les éléments à basse T° de condensation,


ils cristallisent dans le liquide magmatique tardif. C’est le cas des alcalins, Pb...

III.4. Classification fondée sur le rayon et la charge ioniques


Cette classification concerne le comportement des éléments en processus magmatiques. On
distingue :

(1) Les éléments compatibles

Sont ceux qui s’accommodent avec les minéraux essentiels ; ils sont appauvris dans les
liquides magmatiques résiduels ou de fusion partielle. C’est le cas de Mg, Ca, Ti, Ni, Cr, etc.

(2) Les éléments incompatibles.


Ce sont :
• soit des éléments à gros rayon ionique et faible charge qui se concentrent dans
les liquides résiduels lors de la cristallisation des minéraux essentiels dont la
structure est trop compacte pour qu’ils s’y engagent ou préfèrent se mobiliser dans
les liquides résultant de la fusion des roches. On les appelle LILE (acronyme anglais

25
qui veut dire « Large Ion Lithophile Elements ») ; ce sont K, Rb, Ba, Sr, les Terres
Rares, U, Th, etc.

• soit des éléments caractérisés par le rapport z/r (ou potentiel ionique) élevé>2, et
présentant une aptitude à former des ions complexes de grande taille, stables
dans les liquides silicatés. Ce comportement explique pourquoi des éléments à rayon
ionique faible, mais à fort potentiel ionique (ou à fort champ électrostatique) comme
Ti, Zr, Nb, Ta, Hf se comportent comme des éléments incompatibles. Ce sont des
HFSE (High Field Strength Elements).

LILE et HFSE constituent les éléments hygromagmaphiles, concept créé par Treuil (1973)
et qui généralise celui d’éléments incompatibles, est basé notamment sur le potentiel
ionique.

Le degré d’incompatibilité est fonction du contexte de fusion partielle ou de cristallisation


fractionnée. Par exemple, Zr est incompatible dans la composition du manteau, mais
compatible dans la croûte acide où il entre dans la structure du zircon.

26
III.5. Classification basée sur la solubilité des éléments dans des fluides.
Cette classification prend en compte la solubilité des éléments dans les fluides ; elle prévoit
le comportement des éléments dans l’hydrosphère, depuis l’altération jusqu’à la
sédimentation et la diagenèse, en les classant en fonction de leur rayon hydraté càd de leur
potentiel ionique (z/r). On distingue donc :

Des éléments à faible potentiel ionique z/ri < 3

Ils se font entourer de moins de dipôles d’eau et ont donc le plus petit rayon hydraté. Parmi
eux on distingue :

• Des ions à z/r<1 : leur taille est trop grande par rapport à leur charge, ils présentent
ainsi peu d’attirance pour la molécule d’H2O, ils ne sont pas fortement hydratés lors
de la mise en solution. C’est le cas de K, Rb, Cs.

• Des ions à z/r>1: sont très hydratés et donnent des solutions alcalines (basiques).

Des ions à potentiel moyenne (3<z/r<10)

Ils sont insolubles. Ces ions réagissent avec les molécules d’eau pour former les hydroxydes
peu stables en solution. Ce sont des hydrolysats ; c’est le cas de Al3+, Fe3+ et Si4+ qui
donnent respectivement des hydroxydes Al (OH)3, Fe (OH)3 ou Si(OH)4.

Les éléments à fort potentiel ionique z/r > 10

C’est le domaine des oxyanions solubles. Ces ions de petits diamètres et de charge élevée
(C’est le cas des ions B3+, P5+, C4+, S6+,…) développent un champ électrique élevé ; l’ion H+
27
des oxhydryles (OH-) est libéré et l’oxygène annexé au cation pour former des anions
complexes en milieux acides.

Les cations du 1e groupe et les oxyanions solubles sont évacués (lessivés) par les
circulations d’eaux, ils constituent la phase migratrice, ils se recombinent plus tard dans le
milieu marin ou lacustre pour donner les principales roches sédimentaires (calcaire : Ca et
CO3, gypse : Ca et SO4, phosphate : Ca et PO4). Les hydrolysats insolubles restent eux sur
place et forment la phase résiduelle (argiles, latérites s.l.).

Dans les fluides crustaux, la solubilité des éléments peut jouer un rôle majeur dans la
composition des roches à travers lesquelles ces fluides percolent, ainsi que dans la
composition des dépôts minéraux ou métalliques qui peuvent en résulter. Ici la solubilité est
fonction des paramètres physico-chimiques tels que T, P, pH,…

Exercice :
1. Prédire le comportement de Li+ (rayon ionique : 0.78Ǻ) et Cs+ (rayon ionique :

1.67Ǻ) dans l’eau de mer.


2. Expliquer pourquoi l’eau de mer est-elle plus enrichie en Na + (ri = 1,10 Ǻ) qu’en K+
(ri = 1,46 Ǻ) alors qu’il s’agit tous deux des alcalins.
III.6. Règles de substitution ionique dans les minéraux

Quant aux règles de substitution énoncées par V. Goldschmidt en 1937, elles ont pour
critères principaux valence et rayon ioniques. Ce sont des règles relatives à l’intégrabilité
des éléments chimiques dans un cristal qui croit dans un liquide silicaté (magma).

1ère règle : Deux ions diadochiques de même charge et de rayons ioniques semblables,
différant en taille de moins de 15 % par rapport au plus petit, s’intègrent dans un cristal dans
les proportions du liquide initial.

Exemple 1 : série des olivines ; soit un liquide de composition Fe xMg2-xSiO4 (composition de
l’olivine), l’application de cette 1ère règle indique que le cristal d’olivine résultant de la
cristallisation complète du liquide sera une olivine FexMg2-x[SiO4] ayant les mêmes teneurs en
2+¿=0.74 Å , ¿
Fe et Mg que le liquide initial. En effet, dans l’olivine r i Fe celui de Mg2+ = 0.66 Å. La
différence de rayons ioniques est de 12 % < 15 %.

2ème règle : Lorsque deux ions ont la même charge mais des rayons ioniques différents, le
plus petit est incorporé de préférence dans le cristal si la différence de deux rayons n’excède
pas 15 % du plus petit d’entre eux. Cette règle montre que Mg 2+ s’intègre plus facilement que
Fe2+. En effet, lors de la cristallisation des olivines, avant d’atteindre le cristal final répondant
aux mêmes proportions Fe/Mg que le liquide initial, on passe d’abord par des cristaux plus

28
riches en Mg2+ que le cristal final. Le retour à la composition initiale Fe/Mg se fait par
2+¿ ¿
échange d’ions Mg 2+¿↔ Fe ¿
entre cristaux et liquides intermédiaires.

3ème règle : Deux ions de rayons ioniques semblables, le plus chargé s’intègre
préférentiellement dans le cristal. En prenant l’exemple des plagioclases, cette règle suggère
une intégration préférentielle de Ca2+ par rapport à Na+. En effet, lors de la cristallisation à T°
décroissante d’un mélange [albite-anorthite], on note que Ca2+ s’intègre dès le début de la
cristallisation du mélange fondu. Avant d’atteindre le cristal final qui répond à la composition
du liquide initial, on passe continûment par des cristaux successifs, lors de la chute de T°, de
teneur décroissante en Ca2+ (et croissante en Na+). Ces passages successifs aboutissant à
un cristal ayant la composition du liquide de départ s’effectuent par un échange d’ions Ca 2+,
Na+ entre cristaux et liquides intermédiaires. Cet échange s’accompagne de celui de Si4+, Al3+
qui respecte l’équilibre des charges du milieu.

Exemple 3 : feldspaths alcalins (orthoclases) : L’albite NaAlSi3O8 et l’orthose KAlSi3O8, bien
que caractérisées par les mêmes teneurs en Si et Al, diffèrent par les rayons ioniques K +
(1.63 Å) et Na+ (1.40 Å) ; Δri = 16.5 %. Les règles de Goldschmidt ne s’appliquent pas :
l’orthose et l’albite croissent donc indépendamment.

A HT lorsque les réseaux cristallins sont plus simples, plus extensibles, du fait de l’agitation
thermique, les ions K+ et Na+ s’intègrent indifféremment dans la structure, donnant un cristal,
mélange d’Or et d’Ab du type (K, Na)[AlSi3O8].

 Si ce cristal dont la structure n’est stable qu’à HT subit un abaissement brutal de T° (càd
une trempe), la structure de HT peut être conservée ou fossilisée à BT. Ce minéral est
appelé la sanidine. Elle est présente dans les roches volcaniques trempées ; elle est
métastable à la T° ambiante.
 Si le refroidissement est très lent, il y a contraction du réseau de manière ordonnée : les
ions K+ et Na+ se regroupent en très fines plages homogènes, juxtaposées à l’échelle
micrométrique, d’Or et d’Ab : ce sont des perthites (voir figure ci-dessous).

29
Il existe toutefois des cas d’exception (ou entorses) à l’application des règles de
Goldschmidt, c’est notamment le cas de :

- Ca2+ s’intègre plus facilement aux cristaux que Mn2+ bien que de taille plus forte ;
- Ca2+ s’intègre plus facilement que Sm 3+ bien que ce dernier ait la même taille et soit
plus chargé !

Quant aux éléments en trace, trois règles empiriques ont été définies :
- Règle de camouflage : les ions (majeur et trace qui remplace) ont même rayon
ionique, même charge et même électronégativité ; c’est le cas de Hf qui se substitue
au Zr dans le zircon.

- Règle de capture : l’élément en trace a un plus fort potentiel ionique (rapport


charge/rayon ionique) que le majeur qu’il remplace. Exemple : Ba +, Sr2+ se
substituent au K+ dans les feldspaths.

- Règle d’admission : l’élément en trace a, au contraire, un faible potentiel ionique


que le majeur qu’il remplace ; cas de Rb+ et K+ dans les feldspaths et les micas.

On peut aussi bénéfiquement utiliser le concept de polyèdre de coordination pour


répondre au problème de substitution diadochique. Par exemple, on peut démontrer en
utilisant la notion du polyèdre de coordination que dans le rubis, Cr 3+(ri = 0,70) n’est pas une
impureté, mais bien en substitution à Al3+ (ri = 0,61), sachant que le rayon standard de
l’oxygène ri = 1.46A.

Coordinence ri C+/ri A- Polyèdres Exemple


3 [0,155 - 0,225[ Triangle [CO3]2-
4 [0,225 – 0,441[ Tétraèdre [SiO4]4-
6 [0,441 – 0,732[ Octaèdre [Na+Cl-]
8 [0,732 – 1,000[ Cube [Cs+Cl-]

Le problème de substitution des ions est toutefois aujourd’hui appréhendé ou quantifié à


l’aide du concept de coefficient de partage D : le rapport de concentration de l’élément
chimique à l’équilibre, entre deux phases solides, ou généralement entre une phase solide et
un liquide.

La similarité de structures et d’échelles conduit souvent à des solutions solides. Un minéral


n’est qu’exceptionnellement une substance pure, la plupart des minéraux présentent des
variations dans leur composition chimique qui résultent de substitution, dans une structure
donnée, d’un ion ou d’un groupe d’ions par un ion ou un groupe d’ions. Ce processus est
connu sous le nom de substitution ionique ou solution solide.

Plusieurs facteurs déterminent l’étendue de la solution solide ; il s’agit de :

30
- La taille relative des ions ou des atomes : si la différence des tailles des ions ou
atomes n’est pas supérieure à 15%, le taux de substitution est important ; il est limité
si la différence est comprise entre 15 et 30% et très faible si elle est supérieure à
30%.
- La charge des ions : l’édifice cristallin est électriquement neutre si les charges sont
identiques, si elles sont différentes, des substitutions d’autres ions sont nécessaires
pour équilibrer la structure ; c’est le cas de Al3+ se substituant à Si4+.
- La température de substitution : à HT la tolérance de substitution est relativement
élevée parce que les vibrations thermiques de la structure cristallines sont plus fortes.

Parmi les différents types de solutions solides existent les Solutions solides par
substitution. Par exemple, la substitution de Rb + à K+ dans la biotite. De même une
substitution complète binaire càd d’un élément par un autre sur la totalité du domaine de
composition défini par deux pôles purs extrêmes est fournie par l’olivine (Mg, Fe) 2SiO4. Mg2+
peut être partiellement ou totalement remplacé par Fe2+

D’une manière générale, dans une structure de type A2+X2-, un cation B3+ peut se substituer à
Al2+, la neutralité électrique étant maintenue par l’adjonction d’un autre cation C +, ce qui peut
se représenter par : 2 A2+↔ 1 B3+ + 1 C+. C’est donc une substitution couplée ou jumelée.
Exemple : la solution solide complète entre les deux pôles purs, albite NaAlSiO 8 et anorthite
CaAl2O8, de la série de plagioclases est un exemple de substitution couplée : Na+ Si4+ ↔
Ca2+ Al3+ : pour chaque Ca2+ remplacé par Na+, un Si4+ est remplacé par un Al3+ dans le
réseau Si-O. La substitution couplée peut être limitée et non complète, c’est le cas par
exemple de deux pyroxènes diopside CaMgSi2O6 et jadéite NaAlSi2O6 : Ca2+ Mg2+ ↔ Na+ Al3+ 

Dans les silicates, les ions fréquemment substituables sont : Mn2+↔ Fe2+ ↔ Mg2+ et
Ca2+ Al3+↔Na+Si4+.
Les autres substitutions classiques sont :

K – Rb Zr - Hf Al - Ga La - Ce
Pt - Ru - Rh - Pd - Os –
Ca - Sr Nb - Ta Si - Ge
Ir

En dehors du réseau cristallin, un élément trace peut se trouver sous la forme


d’inclusions au sein d’une phase minérale, c’est le cas de :
 Groupe du Platine souvent en inclusions dans les chromites (péridotites) ;
 Or associé à l’Arsénopyrite.

31
En formations secondaires ou supergènes, les éléments traces métalliques comme Cu, Zn,
Co, Ni, Au sont sous forme adsorbée à la surface des phases minérales néoformées
(argiles, oxyhydroxydes de Fe, de Mn).

CHAPITRE IV : ELEMENTS MAJEURS ET COMPOSITION CHIMIQUE DES GRANDS


RESERVOIRS DE LA TERRE

IV.1. Utilisation des éléments majeurs.

Les éléments majeurs sont principalement utilisés pour :

1. La classification et la nomenclature des roches à l’aide de diagrammes appropriés


comme celui de Le Maître et al 1989 pour la classification et la nomenclature des
roches volcaniques : Na2O + K2O vs SiO2 (diagramme TAS). Il est toutefois
inapproprié pour les roches riches en K, les roches fortement magnésiennes ainsi
que pour les roches volcaniques altérées ou métamorphisées pour lesquelles K est
remobilisé. Le deuxième diagramme a été conçu pour tenir compte des roches
plutoniques.

Diagramme TAS

32
D’une manière générale les roches magmatiques sont subdivisées sur base de leur
teneur en SiO2 en roches ultrabasiques (SiO2<45%), basiques (45%<SiO2<52%),
intermédiaires (52%<SiO2<63%) et acides (SiO2>63%).

La classification des grès permet plutôt de différencier les sédiments matures et les
sédiments immatures. Les critères géochimiques communément utilisés pour évaluer la
maturité de grès sont :

 la teneur en SiO2 et le rapport SiO2/Al2O3 qui reflètent l’abondance de quartz et la


teneur d’argiles et/ou de feldspaths, minéraux porteurs d’alumine (Al2O3) ;
 La teneur en alcalins (Na2O + K2O) qui est aussi une mesure de la teneur en
feldspaths.

L’utilisation de l’indice de la maturité chimique (Na 2O + K2O) et du rapport Na2O/K2O a


permis d’établir la classification des arénites suivant le diagramme  log(Na2O/K2O) vs
log(SiO2/Al2O3) ci-après. C’est un diagramme qui montre surtout les relations entre la
composition élémentaire, la minéralogie et le type de roches.

33
Ce diagramme a été modifié par Herron (1988) qui utilise le diagramme log (Fe 2O3/K2O) vs
log (SiO2/Al2O3) permettant de tenir compte également des shales.

2. L’identification des processus géochimiques ou pétrogénétiques, ou encore la


discrimination des environnements géotectoniques par la construction des
diagrammes de variation. Ces diagrammes sont :

- soit ternaires, comme par exemple le diagramme A.F.M [(Na2O + K2O) –


(FeO+Fe2O3) - MgO] où F= (FeO+0,8998 Fe 2O3) ; ils sont dans ce cas utilisés
surtout pour montrer les tendances nécessaires pour identifier les séries de
roches (ex. série tholéiitique versus série subalcaline);

34
Diagramme A-F-M

- Soit rectangulaires, dans ce cas la variable explicative, placée sur l’axe des
abscisses, doit présenter le maximum de variabilité entre les échantillons, ou
illustrer un processus particulier. Généralement on choisit SiO2, mais aussi MgO
pour les roches basiques ou encore Al2O3 pour les sédiments argileux. Parmi ces
diagrammes, on distingue :
 Le diagramme de Harker qui utilise SiO2 comme variable explicative de la
variation des oxydes. La SiO2 est choisie à cause de sa forte variabilité tant
pour les roches magmatiques que sédimentaires. Ce diagramme aide à
comprendre le comportement des éléments lors de la différenciation
magmatique par cristallisation fractionnée. On constate que lors de la C.F. du
magma :
 Si, Na, K ont des teneurs plus élevés au pôle
acide ;
 Fe, Mg, Ca Ti, Mn ont des teneurs plus élevés
au pôle basique ;
 Al, P ont des tendances variables.

35
 Le diagramme de variation en fonction de MgO (dit diagramme de Bowen)
est approprié pour les séries de roches à termes basiques dont la variation de
SiO2 est faible. Dans ces roches, MgO est un composant des phases solides
(minéraux) en équilibre avec les magmas basiques.
 Le diagramme de variation en fonction de « Mg-value » : Mg-value est le
rapport : 100 × [MgO/(MgO + FeO)] ou 100 × [MgO/(MgO + Fe 2O3)] ou encore
100 × [Mg2+/(Mg2+ + Fe2+)].

IV.2. Composition chimique des grands réservoirs de la Terre.

On appelle « réservoir » un volume suffisamment grand pour que les apports ou les départs
d’éléments n’affectent pas la composition globale. Il s’agit en général de l’atmosphère, de
l’hydrosphère, de la croute, du manteau et du noyau.

La composition chimique de différents réservoirs de la Terre solide peut être estimée à partir
des échantillons terrestres par comparaison avec les échantillons extra-terrestres. A ce
sujet, les météorites donnent des indications intéressantes; car elles ont suivi une évolution
voisine de celle des différentes couches ou réservoirs terrestres.

IV.2.1. Les météorites.


Ce sont des roches extra- terrestres qui tombent sur la terre quand leur trajectoire elliptique
recoupe celle de la terre. Leur dimension varie du µm à 700 km. En traversant l’atmosphère,
elles s’échauffent jusqu’à se volatiliser en surface. La partie interne peut être préservée et
recueillie pour examen. Il existe une grande variété de météorites, parmi lesquelles on
distingue trois groupes :

• Les sidérites ou météorites métalliques (4,5% des météorites),

36
• Les lithosidérites ou sidérolites ou encore météorites métallo – pierreuses, elles
sont extrêmement rares (1,2%),

• Les météorites pierreuses sont très abondantes (94,3% du total).

1. Les sidérites
Elles sont constituées d’un peu de soufre et d’un alliage de Fe et de Ni sous trois types
principaux : Hexahédrites : 5 à 6 % Ni ; Octaédrites : 7 à 15% Ni et Ataxites : Ni ˃ 16%.

L’examen au microscope montre une structure de Weidmanstätten due aux phénomènes


d’exsolution de kamacite et taenite (figure ci-dessous, les taches sombres correspondent à
la troilite); c’est donc une structure qui se forme à l’état solide lors du refroidissement de
l’alliage Fe-Ni (voir figure –dessous).

Cette structure indique que l’alliage a été porté à des températures élevées (500-750°C) et a
subi un refroidissement lent (1°C/Ma). Les sidérites ont la composition du noyau de la terre.

2. Les lithosidérites ou sidérolites


Elles sont constituées des cristaux d’olivine, de pyroxène ou de plagioclase isolés dans une
matrice de fer et de nickel natifs. On distingue également ici trois types :

• Pallasites : on y distingue de l’olivine gemme dans une matrice FeNi ;


• Mésosidérites : FeNi, pyroxène et plagioclase ;

• Lodranites : FeNi, olivine, pyroxène.

Ces types de météorites proviendraient de l’interaction entre le noyau métallique liquide et le


manteau cristallisé riche en olivine. Elles correspondent donc à la composition de l’interface
noyau/manteau qu’on appelle discontinuité de Gutenberg.

3. Les météorites pierreuses.


Ce sont les corps les moins différenciés qui comprennent :
Les chondrites (85,4%) :
Ce sont des météorites contenant des sphérules vitreuses nommées chondrules ou
chondres de taille voisine du mm. Ces chondres représentent des gouttes de liquides

37
formés lors des premières collisions. La composition chimique des chondrites est identique à
celle de l’ensemble de toutes les météorites.

Parmi les chondrites, on distingue :


• les chondrites carbonées (4,7% des météorites) formées d’un matériau ayant subi
un réchauffement tellement léger que plus de 20% d’eau, de carbone et d’autres
éléments et composés volatils y sont encore présents. Ce sont les seules météorites
qui contiennent des argiles dans leur fine matrice ainsi que de magnétite, graphite
mal cristallisé, polymères organiques et troïlite FeS, avec accessoirement de
l’olivine et de pyroxène, du verre et des inclusions métalliques. Leur densité est
faible (2,2). La composition chimique en éléments majeurs des chondrites carbonées
(après soustraction de 30% de volatils) est donnée ci-après (Taylor & McLennan,
1985).
SiO2 TiO2 Al2O3 FeO MgO CaO Na2O K2O P2O5
34,2 0,11% 2,44% 35,8% 23,7% 1,89% 0,98% 0,1% 0,41%
%

• L e s c h o
(80,6%) sont constituées par de la péridotite ferreuse (à olivine, pyroxène et un
alliage Fe-Ni) de composition très différente des péridotites qui constituent l’actuel
manteau terrestre.

Il convient de noter que toutes les chondrites ont un âge de cristallisation de 4,55 Ga qui
correspond pratiquement à l’âge radiométrique de la Terre. La composition chimique des
chondrites est la même que celle de la Terre entière si l’on mélange toutes ses enveloppes
(croûtes, manteau, noyau). On peut donc conclure que tout le système solaire a le même
âge de 4550 Ma, que Soleil, Terre et chondrites ont la même origine : un gaz de composition
solaire.

Les Achondrites (8,9%)


Ne contiennent pas de chondres ; la taille de leurs cristaux généralement plus grosse que
dans les chondrites, est due à un refroidissement lent à partir du matériel fondu. Elles
ressemblent aux roches magmatiques terrestres. On distingue :

• Les achondrites riches en Ca parmi lesquelles on distingue les Angrites, les Eucrites
et les Howardites ; elles seraient l’équivalent de la croûte terrestre ;

• Les achondrites pauvres en Ca, sont de composition péridotitique et comprennent


les Digénites, les Urélites et les Aubrites ; elles sont pauvres en fer et
représenteraient le manteau.

En résumé, par rapport aux chondrites les achondrites, les sidérites et les lithosidérites ont :

1. Un âge plus récent de 20 à 50 Ma que celui des chondrites ;

38
2. Une composition chimique différenciée par rapport à celle du soleil, de la Terre et des
chondrites ; Que leur différenciation peut être obtenue par fusion d’une chondrite : le
fer, dense, tombe au fond ; les éléments légers silicatés montent en surface donnant
du basalte par association avec le pyroxène. La Terre serait donc une gigantesque
chondrite qui aurait fondu et qui se serait complètement différentiée.
3. Une composition qui est pour chaque catégorie équivalente à l’une des enveloppes
de la Terre ;

IV.2.2. La composition de la croûte terrestre

La croûte est lithologiquement hétérogène et constituée par les types pétrographiques


essentiels suivants :

• Le granite, le granodiorite, la diorite et leurs équivalents métamorphiques (gneiss)


constituant 45% de la croûte et l’essentiel des continents ;

• Le basalte, le gabbro et leurs équivalents métamorphiques (amphibolites, éclogites)


constituant 43% de la croûte, et forment le plancher océanique ;

• Les roches sédimentaires et leurs équivalents métamorphiques (schistes, marbres,


etc.) constituant le reste, soit 12%, et se répartissant aussi bien dans les océans que
sur les continents.

Cette hétérogénéité de la croûte se marque aussi dans la composition minéralogique. En


effet, les silicates sont plus prépondérants (96% du volume) ; et parmi eux les tectosilicates
(63%) dont les feldspaths (aluminosilicates) forment, à eux seuls, 51% justifiant ainsi
l’appellation ancienne de SIAL donnée à la croûte. Les minéraux hydratés (amphiboles,
micas, argiles) forment environ 15% du total, et servent à stocker l’eau nécessaire dans les
phénomènes pétrogénétiques.

Le calcul de la composition chimique moyenne de la croûte passe par la connaissance :

1° des volumes relatifs des roches estimés à partir des affleurements présentés sur les
cartes géologiques et
2° des épaisseurs mesurées sur le terrain. Pour les roches situées en profondeur, les
résultats géophysiques peuvent prendre le relais et indiquer les formes et les
volumes.

La croûte est mieux connue, et les estimations de sa composition sont nombreuses. Les
premières estimations sont l’œuvre de Clarke et Washington (1924). Leurs analyses,
regroupées par aires géographiques, ne concernaient que les continents émergés de sorte
que la composition obtenue ressemble à celle de la croûte continentale. Elle ne correspond
à aucune roche magmatique spécifique, mais se situe entre la composition de granite et
celle de basalte.
39
SiO2 Al2O3 Fe2O3 FeO MgO CaO Na2O K2O TiO2 P2O5 Total
60.18 15.61 3.14 3.88 3.56 5.17 3.91 3.19 1.06 0.30 100.00
A la différence de Clarke et Washington, les estimations de Ronov et Yaroshevsky
concernent les différentes couches qui constituent la croûte terrestre :

- Croûte continentale subdivisée en deux couches : supérieure dite granitique, et


inférieure improprement appelée basaltique et qui serait plutôt dioritique à
granodioritique ;

- Croûte océanique à chimisme basique prononcé.


Couche Couche Croûte continent. Croûte
granitique basaltique globale océanique
SiO2 63.90 % 58.20 % 57, 3% 48.7 %
TiO2 0.6 0.90 0,9 1.4
Al2O3 15.2 15.5 15,9 16.5
Cr2O3 - - - -
FeO 4.9 7.7 9,1 8.5
MnO 0.1 0.2 - 0.2
MgO 2.2 3.9 5,3 6.8
NiO - - - -
CaO 4.0 6.1 7,4 12.3
Na2O 3.1 3.1 3,1 2.6
K2O 3.3 2.6 1,1 0.4
P2O5 0.2 0.3 0,2 0.2
H2O+ 1.5 1.0 - 1.1
Total 100.1 100.1 100.1

Par ailleurs, le tableau ci-après donne la composition moyenne de la croûte d’après Taylor et
McLennan (1985) qu’il faut comparer à la composition établie par Ronov et Yaroshevsky
(1969) et à la composition des andésites des arcs insulaires. Dans l’ensemble la croûte a
pratiquement la composition andésitique.

(1): Moyenne de 89 andésites des arcs insulaires compilées par McBurney (1969).

IV.2.3. Composition du Manteau


40
Le manteau est constitué des roches magmatiques de type péridotite. En effet, les roches
basaltiques issues des magmas ayant pris naissance dans le manteau contiennent souvent
des enclaves mantelliques sous forme de nodules de péridotites. Ces roches sont riches
en olivine et contiennent également des pyroxènes (monocliniques et calciques, ou
orthorhombiques et non calciques) et un minéral alumineux en quantité mineure qui peut
être soit un plagioclase, soit un spinelle ou un grenat.

Le manteau est donc péridotitique, et est la source de magmas basaltiques. Selon


Ringwood, il existe :

- Un manteau primitif, défini par sa capacité de donner, par fusion partielle, un magma
basaltique et un résidu enrichi en olivine appelé dunite. Ce manteau primitif a été nommé
« pyrolite » (roche à pyroxène et olivine).

- Un manteau résiduel qui est le résidu réfractaire de la FP.


Les compositions chimiques du manteau primitif et du manteau résiduel proviennent des
moyennes des échantillons terrestres, en l’occurrence les roches du massif du Lizard
(Cornouaille) pour le manteau primitif et les nodules de dunite pour le manteau résiduel.

SiO2 TiO2 Al2O3 Cr2O3 FeO MnO MgO NiO CaO Na2O K 2O Total

44,77 0,19 4,16 0,40 8,21 0,11 39,22 0,24 2,42 0,22 0,05 99,99 (1)
41,10 0,08 0,56 0,35 10,55 0,15 46,33 0,44 0.17 2,60 0,03 99,99 (2)
(1) : composition chimique du manteau primitif ; (2) : composition chimique du manteau résiduel ;

Le manteau primitif (1) se distingue particulièrement du manteau résiduel (2) par :

- ses fortes teneurs en Al2O3 et en CaO,


- et ses faibles teneurs en Na2O.

Les estimations de pyrolites se fondent sur un mélange au laboratoire de basalte et de


dunite en proportion de 3 :1. Voici par ailleurs l’estimation de la composition moyenne du
manteau :

41
IV.2.4. La composition du Noyau
Aucun échantillon du noyau terrestre n’a pu être observé ; cependant, les fortes densités
calculées (10 à 13) par rapport à celles de la croûte (2.7 à 2.9) et du manteau (3.3), et la
présence du champ magnétique terrestre laissent supposer que le noyau est constitué
essentiellement d’un alliage de fer et de nickel, avec peu d’éléments légers ; soit 82% Fe,
5% Ni, 7% Si, 2% S et 4% O, plus 8000 ppm Cr, 5800 ppm Mn, 3700 ppm P et 2500 ppm
Co.

Cette composition peut être estimée de différentes manières, en assumant par exemple que
les éléments sidérophiles accompagnent le fer en proportions cosmiques et en incluant un
élément majeur léger afin de tenir compte de la densité du noyau externe, cet élément ne
peut pas être en proportion cosmique par rapport au fer.

Si on suppose une teneur de 9% de soufre dans le noyau en se basant sur l’abondance de


sulfure à partir des contraintes de la densité, la première étape est de déterminer quelle
teneur de fer peut être combinée au soufre pour former FeS, c’est 9.0/32.05g/mole =
x/55.85g/mole, d’où x = 15.68% Fe.

Le pourcentage de FeS dans le noyau est donc : 15.68+9 = 24.68%. Par différence, le noyau
doit contenir 100-24.68 = 75.32% du métal. Cette phase métallique contient aussi d’autres
éléments sidérophiles en plus du fer tel que Ni, Co et P prédominants dans les météorites
ferreuses. L’équation de la balance de masse (bilan) pour la phase métal est :
Femétal + Ni + Co +P = 75.32% ou Femétal = 75.32 – Ni – Co – P.

Ni peut être déterminé à partir du rapport cosmique de Ni et Fe : Ni = (Nicosm/Fecosm) x Fenoyau,


soit Ni = (4.93x104/58.77g/mol) / (55.85g/mol/9x105)Fenoyau = 0.0521x Fe noyau dans lequel
Fenoyau = abondance totale de Fe dans le noyau = Fe métal + 15.68. De même,
Co = 0.0024 x Fenoyau et P = 0.0208 x Fenoyau. En substituant ces valeurs dans l’équation
Femétal = 75.32 – Ni – Co – P précédente, on obtient :

42
Femétal = 75.32 – 0.0521 Fenoyau – 0.0024 Fenoyau –0.0208 Fenoyau = 68.94%. Ainsi la somme
totale de Fe dans le noyau est 68.94 + 15.68 = 84.62%. Les % de Ni, Co, P sont obtenus en
multipliant leurs rapports cosmiques respectif par 84.62, ce qui donne : 4.41% Ni, 0.20% Co
et 1.76% P.

IV.2.5. La composition de la Terre globale


La composition chimique de la Terre globale représente la composition qu’avait la Terre à la
fin de son accrétion et avant que le noyau ne s’individualise du manteau primitif. Pour
déterminer cette composition, on fait l’hypothèse que la Terre a une composition
globalement chondritique.

Rapport massique sidérophile/lithophile dans la Terre globale Teneurs massiques de la Terre globale
Fe/Al = 18.8 Si/Al = 12 O = 32.22% Mn = 0,3%
Mg/Al = 10,52 Si = 17.15% Cr = 0,27%
Fe/Mg = 1.82 Ca/Al = 1,07 Al = 1.48% Na = 0,25%
Mg = 15.60% Ti = 0,07%
Si/Mg = 1.10 Fe = 28.39% K = 0,02%
Ca = 1.58%
Ni/Al = 1.10 Ni = 1.63%

La composition chimique, minéralogique, pétrographique et les principales propriétés


physicochimiques de différentes couches du globe terrestre sont synthétisées à la figure ci-
dessous :

43
IV.3. Distribution des éléments majeurs dans les roches et les minéraux
Pour comprendre la distribution des éléments chimiques dans chacun des réservoirs
terrestres ainsi définis, il faut avoir une idée des minéraux essentiels gros-porteurs de ces
éléments :

(1) l’oxygène est présent à peu près partout ;


(2) le silicium se trouve cantonné aux silicates qui sont les minéraux de loin les plus
abondants. La teneur en Si est un paramètre particulièrement important puisque la
concentration en Si mesure l’acidité des roches. Elle augmente dans les minéraux
depuis les olivines, les pyroxènes, les amphiboles et les minéraux en feuillets (biotite,
chlorite, serpentine) des roches métamorphiques. Dans l’orthose par exemple, il y a 3 Si,
1 Al et 1 K, et l’acidité en % est : 3 / (3+1+1) x100 = 60%>50% : l’orthose est un minéral
acide.

Une roche acide comme le granite ou la rhyolite est riche en silice et pauvre en Mg et
Fe. Par contre, une roche basique, tel que le basalte, est riche en Mg et Fe.

44
(3) Le calcium se rencontre surtout dans les pyroxènes et les plagioclases dans les roches
magmatiques, dans les carbonates sédimentaires et dans les amphiboles
métamorphiques.
(4) Le magnésium et le fer se rencontrent surtout dans les olivines, les pyroxènes et les
amphiboles des roches magmatiques, dans les phyllites des roches métamorphiques du
moins pour Mg et dans quelques carbonates des roches sédimentaires ; Fe apparait en
plus dans les oxydes.

(5) L’aluminium a de nombreux porteurs :


- Dans les roches magmatiques, il se localise par ordre de pression (concentration)
croissante dans les plagioclases, les spinelles (oxydes) et les grenats ;

- Il se rencontre dans les minéraux argileux des roches sédimentaires ;


- Dans les roches métamorphiques, Al est porté par les micas (biotite, muscovite).
(6) Potassium et sodium : ils ne sont guère présents que dans les micas et les feldspaths.

Le tableau ci-après donne une approximation de la composition chimique des minéraux


communs, le tableau qui le suit la composition chimique de quelques grands types de
roches. La composition chimique des différents minéraux peut être présentée sous forme
des rapports ou proportions cationiques : Mg/(Mg+Fe) pour les minéraux ferromagnésiens
par exemple, Ca/(Ca+Na) pour les plagioclases, etc.

Minéraux Fe-Mg SiO2 TiO2 Al2O3 Fe2O3 FeO MnO MgO CaO Na2O K2O
Olivines (1) 37.3 0.09 0.18 1.60 21.6 0.27 38.1 0.38 0.03 0.05
Orthopyroxène (2) 52.2 0.22 1.50 0.84 11.9 0.28 28.1 1.93 - -
Augite (3) 51.8 0.49 3.07 1.38 7.21 0.17 16.0 19.2 0.27 0.02
Hornblende 48.7 0.32 9.48 2.33 9.12 0.23 14.4 11.9 1.16 0.15
Biotite 38.1 3.60 14.0 3.98 20.2 0.09 7.96 0.9 0.50 8.31
Les plagioclases SiO2 TiO2 Al2O3 Fe2O3 FeO MnO MgO CaO Na2O K2O
Calciques (An70) 51.1 0.05 31.0 0.28 0.12 0.01 0.27 14.0 3.30 0.13
Feldspaths –K
(orthose) 64.0 - 19.6 0.32 - - 0.16 0.33 3.02 12.1
Feldspathoïdes
Néphéline 42 - 36 - - - - - 22
Leucites 55 - 23 - - - - - 22
Minéraux de silice
Quartz 100

45
(1) Olivine commune des roches basiques (Fo76) : = 76% (2) Orthopyroxène
(En77) ; (3) augite (Wo40 En46) ; (4) hornblende (Mg69) ; (5) biotite (Phl31).

Voici la composition chimique de quelques roches magmatiques communes (en % de poids).


Granite Granodiorite Tonalite Syénite Diorite Gabbro Péridotite
(rhyolite) (rhyodacite) (dacite) (trachyte) (Andésite) (basalte) (basanite)
SiO2 71.3 66.1 61.5 58.6 57.5 50.1 42.3
(72.8) (65.6) (65.0) (61.2) (57.9) (49.2) (44.3)
TiO2 0.31 0.54 0.73 0.84 0.95 1.12 0.63
0.28 0.60 0.58 0.70 (0.87) (1.84) (2.51)
Al2O3 14.3 15.7 16.5 16.6 16.7 15.5 4.23
13.3 15.0 15.9 17.0 (17.0) (15.7) (14.7)
FeO3 1.21 1.38 1.83 3.04 2.50 3.01 3.61
1.48 2.13 2.43 2.99 3.27 (3.79) (3.94)
FeO 1.64 2.73 3.82 3.13 4.92 7.62 6.58
1.11 2.03 2.30 2.29 4.04 (7.13) (7.50)
MnO 0.05 0.08 0.08 0.13 0.12 0.12 0.41
0.06 0.09 0.09 0.15 0.14 (0.20) (0.16)
MgO 0.71 1.74 2.80 1.87 3.71 7.59 31.2
0.39 2.09 1.78 0.93 3.33 (6.73) (8.54)
CaO 1.84 3.83 5.42 3.53 6.58 9.58 5.05
1.14 3.62 4.32 2.34 6.79 (9.47) (10.2)
Na2O 3.68 3.75 3.63 5.24 3.54 2.39 0.49
3.55 3.67 3.79 5.47 3.48 (2.91) (3.55)
K2 O 4.07 2.73 2.07 4.95 1.76 0.93 0.34
4.30 3.0 2.17 4.98 1.62 (1.10) (1.96)
P2 O5 0.12 0.18 0.25 0.29 0.29 0.24 0.10
0.07 0.25 0.15 0.21 0.21 (0.35) (0.74)

La composition minéralogique d’une roche magmatique dépend notamment de sa


composition chimique (puisque la roche résulte de la cristallisation du magma) et
inversement, la composition chimique d’une roche dépend de sa composition minéralogique
(puisque la roche est le mélange des minéraux). On peut donc aborder de deux manières la
description d’une roche magmatique : soit minéralogiquement, soit chimiquement.

IV.4. Fractionnement des éléments majeurs dans les principaux réservoirs terrestres.

IV.4.1. Fractionnement lors des processus de fusion partielle


Lors de la fusion partielle des roches, les éléments présentent soit un caractère fusible,
c’est le cas de Na, K, Al, Si ; soit un caractère réfractaire (Mg, et à moindre degré, Fe Ca,
Ti). Ce processus aide au fractionnement ou à la différenciation géochimique entre différents
réservoirs.

Une comparaison de la composition du manteau par rapport à celle de la Terre totale, par
exemple, permet de constater que le manteau est enrichi en éléments réfractaires comme

46
Mg et Cr, et appauvri par contre en éléments fusibles tels que Na, K, Al, Ca, Si. Ceci
démontre le caractère résiduel du manteau lors de la fusion. De même, l’olivine et le
pyroxène prédominent dans la minéralogie du manteau supérieur alors que la croûte
continentale est, elle, enrichie en éléments fusibles portés par les minéraux tels que les
feldspaths, le quartz et les argiles ; ce qui montre que la croûte constitue un « liquide » de
fusion par rapport au manteau qui, lui, est un résidu de la fusion.
Le liquide produit lors de la fusion d’une zone du manteau n’a donc pas la même
composition que la roche-source, il est notamment enrichi en Na, K et Si, et appauvri en Mg,
Fe, Ca, Ti.

IV.4.2. Fractionnement lors des processus sédimentaires


Pour ce qui est des processus sédimentaires, les éléments tels que Na, K, Ca et Mg, plus
solubles que les autres, induisent un fractionnement géochimique entre l’eau de mer et les
roches sédimentaires argileuses ou shales au fond de l’océan. En effet, l’océan se trouve
enrichi en cations et en anions solubles (Na, K, Ca, Cl -, SO42-) alors que les éléments à la
fois insolubles et fusibles comme Si, Al, Fe s’accumulent dans les roches sédimentaires
détritiques (argiles ou shales) au fond.

IV.4.3. Comportement des éléments majeurs au cours de la cristallisation fractionnée


Quand les magmas refroidissent en système clos (p.ex. chambres magmatiques), la nature
et la proportion des phases minérales qui cristallisent sont fonction de la composition des
magmas et des conditions de pression et température.

La cristallisation fractionnée suppose que les minéraux X1 puissent sortir du système


magmatique soit en montant à la surface par flottation, soit en descendant au fond de la
chambre magmatique par gravité, soit en étant expulsés par tout autre moyen ; dans tous les
cas, les minéraux formés ne réagissent pas avec le liquide résiduel.

Ainsi, le liquide M1 produit le liquide M2 par départ de minéraux ou cristaux X1. D’où on écrit :
M2 (= liquide résiduel) = M1 (= liquide primaire) - X1 (= minéraux cristallisés). Si la
température baisse lentement et passe de t 1 à t2, M2 se trouve placé dans des conditions
propices à la cristallisation d’autres minéraux X2. Si les minéraux X2 peuvent sortir du
système sans réagir avec le liquide résiduel, on a comme à l’étape précédente : liquide M 2
produit le liquide M3 par départ des minéraux X2, et on peut donc écrire M3 = M2-X2.

Le mécanisme de passage de M1 à M2, de M2 à M3, avec extraction des minéraux X1 et X2,


correspond à la cristallisation fractionnée qui est tel que :

• La composition des cristaux formés est différente de celle du liquide ;


• au fur et à mesure que la cristallisation avance le liquide résiduel s’enrichit et
s’appauvrit dans les mêmes éléments mais pas dans les mêmes proportions, la
pression étant différente.
47
La cristallisation fractionnée a pour résultat de produire des séquences de roches dont la
teneur en SiO2 augmente lorsque la température s’abaisse. La composition chimique globale
de la dernière fraction résiduelle est ainsi fort différente de celle du liquide initial. C’est
pourquoi la teneur en SiO2 d’une suite des roches magmatiques est considérée comme un
indice de différenciation.

Le modèle de Wright et Doherty (1974) permet de soustraire par calcul un ou plusieurs


minéraux (%) à un liquide de départ et d’obtenir ainsi la composition du liquide résiduel. Ce
modèle suppose cependant que :

• La composition des liquides de départ est connue ;


• La composition des minéraux cristallisant supposés identiques aux phénocristaux
contenus dans la première lave est aussi connue.

Exercice : soit un magma basaltique (initiale) dont la composition est donnée ci-dessous:
SiO2 TiO2 Al2O3 FeO MnO MgO CaO Na2O K2 O Total
48.09% 2.29% 16.13% 11.06% 0.17% 6.74% 10.04% 3.77% 1.71% 100%

De ce magma cristallise l’olivine en phénocristal dont la teneur est de 15% en poids et de


composition chimique suivante :
SiO2 TiO2 Al2O3 FeO MnO MgO CaO Na2O K2 O Total
38.05% 0% 0.11% 20.54% 0.56% 40.52% 0.22% 0% 0% 100%

Calculer la composition du magma résiduel.


NB : De la cristallisation de 15% en poids de l’olivine aux dépens du magma basaltique
initial, résulte la formation de 85% de magma résiduel, d’où : magma initial = olivine +
magma résiduel, autrement dit 0,85M2 = M1-0,15X1, avec M2 = magma résiduel et M 1 =
magma initial, X1 = olivine.

IV.5. Compositions modales et normatives


Pour préciser la composition minéralogique des roches ignées, on fait appel à deux types
d’analyses : le mode et la norme.

1. Le mode correspond à la composition minéralogique d’une roche magmatique,


déterminée par analyse macroscopique et/ou microscopique. Il consiste à identifier les
différents minéraux de la roche et à exprimer la part relative de chacun en pourcentage
du volume occupé.

2. La norme exprime la composition minéralogique théorique (virtuelle) d’une roche


magmatique. Pour déterminer la norme d’une roche, on doit d’abord déterminer sa
composition chimique en % du poids en oxydes. La teneur en % de chacun de ces
oxydes étant obtenue, on repartit ceux-ci suivant une procédure de calcul appelée norme

48
(cas de la Norme CIPW (Cross, Iddings, Pirsson, Washington)) afin d’exprimer au mieux
la composition minéralogique de la roche comme si elle avait cristallisé complètement.
Les minéraux ainsi définis par calcul sont qualifiés de minéraux normatifs. L’intérêt de
connaître la norme d’une roche tient dans le fait qu’il devient dès lors possible de
comparer des roches magmatiques effusives, non cristallisées, avec des roches
intrusives cristallisées d’une même lignée, et d’établir des similitudes ou des différences
qui, autrement, passeraient inaperçues.

Les résultats de ces analyses sont graphiquement traduits sur des diagrammes
triangulaires de variation (diagramme de Streckeisen) ou rectangulaires qui permettent
ainsi de comparer le caractère géochimique des roches magmatiques.

49
CHAPITRE V : ELEMENTS EN TRACE DANS LES PROCESSUS MAGMATIQUES

V. 1. Répartition dans les roches et utilisations des éléments en trace en Géologie


De par leur très faible concentration, les éléments en traces ne peuvent pas contrôler la
structure cristallochimique des minéraux. Ils se trouvent dans ces derniers en solution solide
par substitution. Leurs concentrations peuvent ainsi être décrites en termes d’équilibre
thermodynamique : ils se mélangent dans les minéraux hôtes soit de façon idéale, soit de
façon non-idéale.

Leurs très faibles teneurs conduisent donc à des relations relativement simples entre la
concentration et l’activité.

Ainsi, si la solution est idéale (suffisamment diluée), la relation entre activité et concentration
est donnée par la loi de Raoult : ai = Xi où ai = activité de l’élément i en trace dans le
minéral-hôte et Xi = sa concentration. En d’autres termes, dans ce cas concentration =
activité.

S’il y a interaction entre élément en trace et les composants majeurs du minéral-hôte, la


solution est non idéale, l’activité s’écarte de la concentration. Dans ce cas, la relation
activité-concentration obéit à la loi de Henry qui stipule qu’à l’équilibre, l’activité d’un
élément en trace est directement proportionnelle à sa concentration : aij= kijXij où kij =
constante de la loi de Henry qui est une constante de proportionnalité, càd un coefficient
d’activité de l’élément i dans le minéral j.

La loi de Henry s’applique à une large gamme de concentrations d’éléments en trace ;


toutefois, à très faible concentration (<10 ppm), il y a déviation par rapport à cette loi. De
même, la loi n’est pas d’application à de très fortes concentrations. En plus, dans le cas où
l’élément en trace est le constituant structurel essentiel d’une phase minérale mineure (cas
de Zr dans les zircons), la loi de Henry n’est pas applicable.

Leur répartition dans les roches magmatiques est fonction de : l’état (càd T°, P) et de la
composition des régions-sources du manteau, et des processus magmatiques.

On doit noter que les éléments en trace contrastent avec les éléments majeurs par :

- leur spectre des variations de concentration plus large que celui des éléments
majeurs suivant les types de roches ;
- leur importante quantité d’éléments (180 contre une dizaine des majeurs) ;
- leur sensibilité à des processus géologiques auxquels les majeurs sont insensibles.

Tout ceci fait que ces éléments sont a priori beaucoup plus discriminants que les éléments
majeurs. Ils sont particulièrement utilisés pour :

50
1) caractériser ou identifier les roches volcaniques (modernes) dont l’identification par
l’étude pétrographique reste généralement insuffisante,
2) assigner une affinité géodynamique à des séries magmatiques anciennes que
tectonique et métamorphisme empêchent de reconnaître. Pour cela plusieurs
diagrammes géotectoniques discriminants, dans lesquels les magmas de sites
géodynamiques distincts occupent des champs particuliers aux recouvrements
minimes, sont utilisés (cf. Rollinson, 2005); c’est le cas par exemple des diagrammes
triangulaires de Pearce et Cann (1973) : Ti/100-Zr-Yx3 (figure ci-après).

D=basaltes intraplaques, A=tholéiites d’arc insulaire, B=MORB ± tholéiites d’arc ±


basaltes calco-alcalins, et C = basaltes calco-alcalins.

Ces diagrammes utilisent généralement des éléments réputés immobiles ou


réfractaires aux processus d’altération et de métamorphisme. Il s’agit
particulièrement de REE, P, Cr, Co, Ni, V et surtout Ti, Y, Zr, Nb, Hf, Ta, Th qui sont
également utilisés dans les diagrammes de Terres rares ou de Terres rares étendus
(spiderdiagrams).

3) la modélisation ou formalisation mathématique des processus magmatiques.

V.2. Coefficient de partage

1. Définition et concept de compatibilité


La distribution des éléments en trace entre les phases peut être décrite par un coefficient de
distribution ou coefficient de partage. Il s’agit du coefficient de Nernst qui décrit la
distribution en équilibre d’un élément en trace entre un minéral et un liquide, il est défini par :
51
où Kd = coefficient de distribution de Nernst, et C i = la concentration de
l’élément en trace i en ppm ou en %. Par exemple, pour un phénocristal de plagioclase
titrant 500 ppm de Sr et contenu dans une mésostase (verre) de lave titrant 125 ppm, le

coefficient de partage

Un coefficient de partage minéral-liquide = 1 montre que l’élément est équitablement réparti


entre le minéral et le liquide. Une valeur > 1 implique que l’élément en trace a une
préférence pour la phase minérale. Une valeur < 1 montre que l’élément a de préférence
pour le liquide magmatique.

Lorsqu’un élément en trace se substitue à un élément majeur connu dans un minéral-hôte, le


coefficient de partage Kd est défini par l’expression : KD(i/j)= [Xi/Xj]solide / [Xi/Xj]liquide où

- i = l’élément en trace et j = l’élément majeur remplacé par i dans le minéral-hôte,


- Xi= concentration en % de poids ou en % molaire de l’élément i. C’est le cas de Ni se
substituant à Mg dans l’olivine.

Un coefficient de partage global est un coefficient de partage calculé pour une roche et
pour un élément spécifique à partir des coefficients de partage de Nernst de différents
minéraux en fonction de leurs proportions respectives dans la roche. Il est défini par
l’expression : Di = x1Kd1 + x2Kd2 + x3Kd3+… où Di = coefficient de répartition
pour l’élément i ; x 1, x2 …= proportions en % du minéral 1, 2… dans
la roche ; Kd1, Kd2,…= coefficient de répartition de l’élément i dans le minéral 1, 2, …

Un élément i dont la valeur de :

 Di>1 est dit compatible (sous-entendu, avec les minéraux présents) : il est
préférentiellement incorporé dans l’assemblage minéral.
 Un élément est dit incompatible ou hygromagmaphile si la valeur de son Di <1.
 faiblement incompatible si 0,1<Di < 1 ;
 si Di <<1 l’élément est dit fortement incompatible.

Lors de la fusion partielle, les éléments incompatibles sont préférentiellement enrichis


(concentrés) dans les tout premiers liquides formés, alors que les compatibles restent dans
le matériau non fondu.

- Les cations compatibles sont normalement divalents, 6-coordonnées, avec un rayon


ionique relativement faible (<1.0), à ces cations s’ajoutent aussi des ions trivalents
de taille similaire comme Ce3+. Ces éléments sont incorporés dans les sites de
structure des minéraux stables dans le manteau supérieur tels que l’olivine et les
pyroxènes ;
52
- par contre, les cations incompatibles sont ceux à large rayon ionique et qui se
concentrent dans les liquides primaires.

Par exemple, Rb, Sr et Ba sont généralement considérés comme incompatibles dans la


plupart des minéraux des roches magmatiques alors que Cr et Ni sont compatibles vis-à-vis
de plusieurs minéraux. Toutefois, Rb et Ba sont compatibles dans la biotite, Sr et Ba dans
les feldspaths potassiques, Sr également dans les plagioclases ; par contre Cr et Ni sont
incompatibles dans les plagioclases. Quant aux Terres Rares, elles sont communément
incompatibles, excepté Yb qui est compatible dans le grenat.

Il faut noter qu’un élément compatible dans certaines conditions peut être incompatible dans
d’autres. Ainsi :

- si les plagioclases sont stables dans le manteau supérieur, Sr se substitue au Ca


dans leur structure et est donc compatible ; dans les minéraux les plus profonds du
manteau supérieur où le liquide est plus stable que le plagioclase, Sr peut être
incompatible.
- De même si la phlogopite est stable, les éléments tels que K, Rb, Cs et Ba,
généralement fortement incompatibles, deviennent compatibles.

Les coefficients de partage dépendent de T, de P et de la composition en éléments majeurs


des deux phases, mais pas de la concentration de l’élément trace considéré.

Coefficients de partage minéral/liquide de quelques éléments-traces pour des compositions


basaltiques et basaltiques-andésitiques

2. Détermination des coefficients de partage

53
Les coefficients de partage D peuvent être déterminés de deux manières :

1° En isolant les phénocristaux dans les roches volcaniques et en comparant leurs teneurs à
celles des mésostases (liquides magmatiques) qui les renferment. Faiblesse de la méthode :
elle suppose qu’il y a eu équilibre entre mésostase et phénocristaux alors que ces derniers
peuvent être des xénocristaux (cristaux étrangers hérités) ; en plus, on observe
fréquemment dans les cristaux des zonation qui peuvent être causées par les effets de
déséquilibre ou de diffusion.

2° En passant par les techniques de la pétrologie expérimentale, c.à.d. par le dopage en un


élément donné. Cette façon de procéder semble être avantageuse puisqu’elle permet le
contrôle de variations de T° et de P qu’on ne peut pas faire dans le système naturel.

3. Quelques applications des coefficients de partage


• Problème de substitution diadochique : le concept de coefficient de partage
permet de répondre à la question de savoir lequel des deux éléments diadochiques i
et j, en compétition lors de la croissance ou cristallisation d’un minéral α à partir d’un
liquide magmatique β, sera préférentiellement incorporé. Il suffit de comparer les
coefficients de partage Diα/β et Djα/β ; celui qui a le coefficient de partage le plus élevé
est celui qui entrera préférentiellement dans le minéral α.

• Test d’équilibre : Pour une série des roches cogénétiques (appartenant à une
même série ou suite magmatique), formées dans les conditions de T et P identiques,
mais de compositions chimiques différentes ; si leurs minéraux α et β peuvent
satisfaire à la relation : Ciα/Ciβ=Diα/β où (Ci/Cj)α /(Ci/Cj)β = K, alors l′équilibre a été
réalisé dans les deux phases.

Exemple : Le partage des rapports Fe/Mg entre Opx et Cpx se traduit dans le
diagramme (Fe/Mg)Opx=f(Fe/Mg)cpx par des points se disposant selon une droite si ces
deux phases minérales ont cristallisé en équilibre l’une par rapport à l’autre dans la
même roche.
(Fe/Mg)cpx
1
0 ,8
0 ,6
0 ,4
0 ,2
0 (Fe/Mg) Opx
0 0,2 0,4 0 ,6 0 ,8

54
 Géothermomètre (et géobaromètre) :
La relation mise en évidence dans le test précédent peut être utilisé comme thermomètre ou
baromètre géologiques. En effet, Kd ou D dépend de la T et de la P. La dépendance avec la
T est beaucoup plus importante que celle avec la pression. Ainsi à P constante et à égalité
de composition chimique des phases, Kd varie linéairement en fonction de 1/T suivant la
relation ln Kd = A/T +B, A et B étant des constantes. Comme la substitution isomorphe
n’introduit que de très faibles variations de volume, Kd variera très peu avec la P.
Exemples de géothermomètre :
Les géothermomètres sont généralement formulés en termes de coefficient de distribution
Kd, défini comme Kd = (a/b)C / (a/b)D où a et b sont les fractions molaires des composants
chimiques dans les phases C et D.

A. Le Géothermomètre d’équilibre grenat-biotite (Ferry et Spear, 1978). Il est basé sur


l’équilibre: KMg3Si3AlO10(OH)2 + Fe3Al2Si3O12 = KFe3Si3Al10(OH)2 + Mg3Al2Si3O12

Phlogopite almandin annite pyrope

T°(K) = 12
. 454+0,057 p
) bars) où Kd = (Mg/Fe)grt / (Mg/Fe)biot et R = -1,987
4 662 + 3 R ln Kd
Soit la composition chimique du couple grenat – biotite présumés être en équilibre :

SiO2 TiO2 Al2O3 FeO MnO MgO CaO Na2O K2O H2O
Grenat 37.73 0.10 21.46 31.23 0.50 2.26 7.76 0.05 0.02 -
Biotite 36.64 1.53 19.95 17.85 0.13 10.51 - 0.15 9.39 3.54
Pour calculer la température de cet équilibre, on procède de la manière suivante :

1°) Calcul de la formule structurale du grenat sur base de 12 oxygènes :

(1) (2) (3) (4) (5) (6)


SiO2 37.31 60.09 0.628 0.628 1.256 2.98
TiO2: 0.10 79.90 0.001 0.001 0.003 0.01
Al2O3: 21.22 101.94 0.211 0.421 0.632 1.99
FeO: 30, 89 71.85 0.435 0.435 0.435 2.06
MnO: 0.49 70.94 0.007 0.007 0.007 0.03
MgO: 2.24 40.32 0.056 0.056 0.056 0.27
CaO: 7.67 56.08 0.138 0.138 0.138 0.66
Na2O: 0.05 61.98 0.001 0.002 0.001 0.01
K2O: 0.02 94.20 2.110-4 4.210-4 2.110-4 -

(1) Pourcentage poids des différents oxydes ;


(2) Poids moléculaires des oxydes ;
(3) Nombre des moles d’oxydes c'est-à-dire (1)/(2) ;
(4) Nombre des cations ;

55
(5) Nombre d’oxygènes, la somme de nombre total d’oxygène pour les différents oxydes
est ici 2 528
(6) Nombre de cations pour 12 oxygènes en effectuant : (4).12/2.528

2°) Calcul de la formule structurale de la biotite sur base de 11 oxygènes (formule anhydre):
On obtient :
Si Al Ti Fe Mn Mg Ca Na K OH
2.73 1.75 0.08 1.11 0.01 1.17 - 0.02 0.89 2.00
Kd = 1,17/1,11 = 1,05/0,13 = 0,123

3°) On tire immédiatement Kd = (Mg/Fe)grt / (Mg/Fe)biot = 0.123

4°) La température à une pression fixée à 5kbars par exemple

est :

B. Géothermomètre de l’équilibre feldspath alcalin-plagioclase (Barth, 1951)


L’association feldspath alcalin-feldspath plagioclase est très courante dans de nombreuses
roches, la répartition de l’albite dans ces deux phases feldspathiques peut être utilisée
comme géothermomètre en supposant que les feldspaths sont des solutions solides

1400
Ab Ab x1
parfaites. On a donc l’équation : T°C = x 1 avec x1= et x2 = ;( )
0,8−ln( ) Ab+¿ Ab+ An x 2
x2
= Kd

Soit la composition chimique en % de masse d’un feldspath alcalin et un plagioclase en


équilibre dans un granitoïde, calculer la température de cet équilibre :

SiO2 TiO2 Al2O3 FeO MnO MgO CaO Na2O K2O Tot
Felds-K : 63,37 0.00 20,99 0,00 0,00 0,00 1,97 3,98 9,71 99,97
Plagio :  57,68 0,00 26,81 0,00 0,00 0,00 8,49 6,32 0,06 99,44
Formules structurales:
Felds-K: Si: 2,881 Aliv : 0,119 AlVI : 1,006 Ca: 0,094 Na: 0.351 K: 0,563
Plagio :  Si : 2,591 Aliv : 0,409 AlVI : 1,011 Ca : 0,409 Na : 0,550 K : 0,003
0,351 0,550 x 1 0,384
x1 = = 0,384 et x2 = = 0,574 Kd = = = 0,66899
0,351+ 0,563 0,550+0,409 x 2 0,574

1400
1400
T°C = x1 = = 1164,7°C
0,8−ln( ) 0,8−ln 0,66899
x2

56
V.3. Fractionnements géochimiques d’un groupe des traces : les Terres Rares
Le groupe des Terres Rares ou REE (Rare Earth Elements) ou Lanthanides comprend 15
éléments dont 14 sont naturels, de numéro atomique Z allant de 57 à 71 c.à.d. de La au Lu,
auxquels on ajoute souvent Yttrium (Y) et même scandium (Sc). Ces éléments occupent une
place privilégiée en Géochimie endogène et exogène, car leurs propriétés géochimiques
sont très voisines du fait qu’ils ont en commun leurs deux couches électroniques externes.

Les REE sont trivalentes dans les conditions naturelles, à l’exception de cérium (Ce) et de
l’europium (Eu) ; le premier peut être tétravalent (Ce 4+) en conditions oxydantes, le second
bivalent (Eu2+) en conditions réductrices. Elles sont en outre caractérisées par une
diminution régulière de leur rayon ionique, depuis La jusqu’au Lu : c’est le phénomène
appelé « contraction lanthanique » : le remplissage de l’orbite
électronique interne au lieu de l’addition d’une nouvelle orbite est tel que l’accroissement de
la charge nucléaire produit une forte attraction des électrons même les plus externes, ce qui
conduit ainsi à la diminution du rayon ionique. Cette diminution de rayon ionique correspond
à la diminution du degré d’incompatibilité. Ainsi, l’échelle d’incompatibilité diminue dans le
sens : La>Ce>Pr>Nd>…>Lu.

Les REE sont en principe subdivisées en 3 sous-groupes : TR légères (LREE) : La, Ce, Pr,
Nd, Pm (qui n’existe plus dans la nature) ; Les TR moyennes (MREE) : Sm, Eu, Gd ; Les TR
lourdes (HREE) : Tb, Dy, Ho, Er, Tm, Yb, Lu et Y &Sc

Z Nom Symbole Rayon ionique en coordinance 8  Groupe


3+
57 Lanthane La La 1,160
3+
58 Cérium Ce Ce , 143 et Ce4+ 0,970
3+
59 Praséodyme Pr Pr 1,126
3+
60 Néodyme Nd Nd 1,109

61 Prométhium Pm N'existe plus dans la nature LREE


3+
62 Samarium Sm Sm 1,079

63 Europium Eu Eu3+ 1,066 et Eu2+ 1,250

64 Gadolinium Gd Gd3+ 1,053 MREE

65 Terbium Tb Tb3+ 1,040

66 Dysprosium Dy Dy3+ 1,027


3+
67 Holmium Ho Ho 1,015
3+
68 Erbium Er Er 1,004
3+
69 Thulium Tm Tm 0,994
3+
70 Ytterbium Yb Yb 0,985
3+
71 Lutétium Lu Lu 0,77
3+
39 yttrium Y Y 1,019 HREE

Représentation graphique des abondances des REE ou diagramme de Coryell et al.

57
Les concentrations des TR dans les roches sont habituellement normalisées par rapport à
leurs valeurs respectives dans les chondrites. Cela permet de :

1. Eliminer la variation en zigzag ou en dents de scie entre les éléments à Z pair et ceux
à Z impair (loi de Oddo-Harkins) ;
2. Identifier tout fractionnement d’un groupe des TR par rapport aux chondrites.

Les terres rares sont représentées sur un diagramme d’abondance en fonction du nombre
atomique, qu’on appelle Spectre des Terre Rares. Les concentrations normalisées à des
valeurs de chondrites et exprimées en logarithmes sont plotées en fonction de TR
respectives classées par ordre croissant de leur Z.

La forme du spectre des TR a un intérêt considérable en géochimie. Généralement la trace


de la position de l’Eu et de Ce définit une anomalie. Ces anomalies en Eu ou en Ce peuvent
être quantifiées en comparant les concentrations mesurées avec les abondances obtenues
par extrapolation entre les valeurs normalisées des éléments voisins, Sm et Gd pour Eu :
Eu/Eu*=EuN/(SmN x Gd N)1/2 , Eu* est le milieu du segment joignant Gd et Sm. Pour cérium,
La et Pr sont les éléments voisins, on a : Ce/Ce*=CeN/(LaN x PrN)1/2 ; de même Ce*
correspond au milieu du segment qui joint Pr et La

58
Lorsque Eu/Eu* ou Ce/Ce* calculés sont > 1, on parle d’anomalie positive ; et quand Eu/Eu*
ou Ce/Ce* < 1, il y a anomalie négative.

Le degré de fractionnement d’un spectre des TR peut être exprimé par le rapport d’une terre
rare légère (La ou Ce) à une terre rare lourde (Yb ou Y) ; tous ces éléments étant au
préalable normalisés par rapport aux chondrites.

Si par exemple le rapport (La/Yb)N < 1, l’échantillon est appauvri (sous- entendu, en
éléments incompatibles par rapport aux chondrites).

Des diagrammes où le rapport (La/Yb) N est porté en fonction de Ce N ou YbN constituent


également la mesure du degré de fractionnement des terres rares. Pour le degré du
fractionnement des TR légères on peut utiliser le diagramme : (La/Sm)N vs LaN ; pour les TR
lourdes (Gd/Yb)N vs YbN. De même le degré de l’anomalie de l’Eu est mesuré sur le
diagramme : (La/Sm)N vs (Eu/Eu*).

Pour les roches sédimentaires et les eaux naturelles, les abondances en TR peuvent être
normalisées par rapport à des valeurs référentielles des shales. Les valeurs généralement
utilisées sont celles de :

59
1. North American shale composite (NASC), notamment les valeurs de Gromet et al,
1984 ;
2. Composite European shale (ES) ;
3. Post-Archean average Australian sedimentary rocks (PAAS);
4. Valeurs moyennes d’abondance de TR dans la croûte continentale supérieure.

Il faut noter que les NASC présentent une abondance en LREE de plus de 100 fois que les
chondrites, de 10 fois plus en HREE et une faible anomalie en Eu. Par ailleurs, le spectre
des TR de NASC et ES sont à quelques différences près similaires comme le montre la
figure ci-dessous, il n’y a donc pas de zonalité régionale significative.

60
En conséquence, la normalisation par rapport aux NASC permet mieux d’identifier le type de
sédiment et les enrichissements ou les déficiences subtiles en certains éléments.

Interprétation des spectres de Terres Rares

Les Terres Rares sont des éléments moins solubles et relativement immobiles au cours de
processus de faible métamorphisme et d’altération météorique ou hydrothermale. Elles ne
présentent pas de fractionnement important (ou séparation) par rapport aux roches primaires
dont elles dérivent. Elles peuvent de ce fait être utilisées comme marqueurs géochimiques
pour la caractérisation des divers processus géologiques. C’est ainsi que :

1. Dans les roches magmatiques

Le spectre des REE est contrôlé par la chimie des roches sources des REE et par l’équilibre
entre le minéral et le liquide magmatique au moment de l’évolution de la roche.

Les anomalies en Eu sont contrôlées par les feldspaths. En effet, toute anomalie en Eu
marque le partage des éléments traces entre un magma et un solide comportant du
plagioclase (Eu est la seule TR à pouvoir se substituer au Ca dans le plagioclase).

En effet, Eu2+ étant compatible dans les plagioclases où il se substitue partiellement à Ca 2+


ou Sr2+; la soustraction de plagioclases du liquide magmatique par cristallisation fractionnée,
par exemple, appauvrit ce liquide (lave) en Eu 2+, qui en présentera une anomalie négative ;
par contre leur accumulation par précipitation crée une anomalie positive dans la roche
formée.

La figure suivante montre la distribution des coefficients de partage des REE ayant
fractionné entre les principaux minéraux et un liquide basaltique :

- L’olivine présente des valeurs de D< 0,1 pour toutes les REE : => la cristallisation de
l’olivine provoque un fort enrichissement du liquide en REE.

- Les LREE sont plus incompatibles vis-à-vis des orthopyroxènes que les HREE, d’où
on a un enrichissement relatif du liquide en LREE. Seules les REE les plus légères
sont incompatibles vis-à-vis de l’augite (cpx) dont la cristallisation entraîne un
enrichissement du liquide en La, Ce et Nd.
- Les plagioclases ont un faible coefficient de partage pour toutes les REE, hormis
l’Eu+2 qui se substitue à Ca2+ d’autant plus facilement que les conditions sont
réductrices. L’Eu étant ainsi retenu dans les plagioclases de la source (le plagioclase
présente toujours une anomalie positive pour Eu), le liquide extrait présente une
anomalie négative dite « anomalie de l’Eu2+ ».

61
- Les grenats présentent de faibles valeurs de D pour les LREE et de fortes valeurs D
pour les HREE. Des grenats en équilibre avec un magma provoquent un
appauvrissement du liquide en REE lourdes.

Distribution des coefficients de partage des REE ayant fractionné entre les principaux minéraux et un liquide
basaltique

De même :
- Zircon déprime le magma en HREE,
- Sphène et apatite fractionnent les MREE par rapport aux LREE et HREE ;
- Monazite et allanite causent la dépression des LREE dans le liquide.

62
2. Dans le manteau supérieur :

Les concentrations en éléments incompatibles en général et en REE en particulier aident à


comprendre l’évolution chimique du manteau supérieur. En effet,

- Par rapport aux chondrites, les basaltes des plateaux et des îles océaniques
(OIB) sont très enrichis en REE, plus nettement encore en LREE qu’en
HREE. Ce fort enrichissement des LREE s’explique par un faible degré de
fusion, tandis que le moindre enrichissement des HREE serait dû à la
présence de grenat dans les roches-sources, et donc d’une fusion à haute
pression càd à grande profondeur (≥60km).
- Les basaltes des dorsales océaniques (MORB) sont aussi enrichis en REE
mais relativement moins en LREE qu’en HREE : les roches-sources des
MORB sont encore plus pauvres que les MORB en LREE. Le spectre des TR
des MORB constitue la signature géochimique de la source mantellique.
- Les zones du manteau dont la fusion partielle conduit aux MORB ont été
appauvries en REE surtout en LREE à la suite d’innombrables épisodes
d’extraction de liquide magmatique au fil de centaines de Ma ; la péridotite
ophiolique en est un exemple.

Spidergramme représentant la concentration des éléments en trace dans les types essentiels de
basaltes normalisée à un modèle de concentration du manteau primitif. L’incompatibilité des
éléments, càd la propension des cristaux à les rejeter dans le liquide, diminue vers la droite. Les
MORB sont « appauvris » en éléments incompatibles, les OIB sont « enrichis ».

- Les éléments extraits du manteau appauvri sont allés dans la croûte


continentale, effectivement enrichie en REE surtout en LREE.

63
- Les roches-sources des OIB, plus profondes, n’ont pas subi la même
extraction de liquide que le manteau appauvri.

3. Dans les roches sédimentaires, il faut distinguer :


 Les sédiments détritiques pour lesquelles le facteur le plus important qui explique
la teneur en REE (dans ces sédiments) est la source même de ces sédiments ; les
REE sont fixées à l’état particulaire sur les particules minérales fines comme les
argiles, et reflètent la chimie de leur source. Le spectre des REE de la roche source
est de ce fait plus clairement représenté dans les roches argileuses telles que les
shales.
 Les sédiments de précipitation chimique et/ou biochimique tels que les calcaires
représentent, par contre, la composition de l’eau de mer dont ils ont été précipités.
Or, normalisées aux shales, les eaux marines montrent un graduel enrichissement en
REE, allant des LREE aux HREE et une importante anomalie négative en Ce comme
l’indique la figure ci-dessous. Ce comportement est la réponse à l’oxydation de Ce3+
en Ce4+ qui précipite ainsi de la solution sous forme de CeO 2. C’est ainsi que les
nodules ferromanganifères qui fixent cet élément au fond de l’océan présentent un
spectre caractérisé, contrairement à l’eau de mer, par un enrichissement en LREE et
une anomalie positive en Ce.

Exercice

Le tableau ci-après donne la composition chimique de différents types de roches en REE ;


on vous demande d’établir les diagrammes de REE normalisées à des valeurs appropriées

64
et de calculer les anomalies de Ce et Eu, le degré de fractionnement de LREE par rapport
aux HREE, le degré de fractionnement des LREE et celui des HREE.

Esquisser une interprétation quant à l’allure du spectre et la nature de l’anomalie.

N°E La Ce Pr Nd Sm Eu Gd Dy Ho Er Yb Lu Roche
S105 38 68 8.5 32 5.6 1.32 5.6 5.4 1.15 3.1 2.8 0.4 Pyroc
A06 4.81 5.37 0.4 1.44 0.24 0.25 0.24 0.13 0.03 0.10 0.0 0.03 BIF
6 5
K31 80.97 65.1 6.3 18.46 2.42 2.11 2.29 1.01 0.16 0.44 0.3 0.05 BIF
0 2 3
B54 10.9 21 2.6 9.7 2.2 0.36 2.9 4.1 1.02 3.0 3.2 0.47 Shale
SH2 80 169 18. 68 13.2 3.2 13.3 10.4 2.21 6.2 6.2 0.94 Shale
5
SH6 15.3 31 3.6 13.4 3.4 0.85 5.1 7.2 1.73 4.61 3.7 0.50 ShaleC
S183 0.93 3.10 0.4 2.43 1.13 0.46 1.30 0.89 0.15 0.35 0.3 0.03 Dolom
4 0

V.4. Modélisation des principaux processus magmatiques à l’aide des éléments traces
La modélisation constitue l’une des plus grandes utilisations des éléments en trace en
géochimie. Elle permet de prévoir le comportement géochimique des éléments lors des
différents processus magmatiques.

1° La fusion partielle à l’équilibre

La fusion partielle à l’équilibre signifie que le liquide magmatique est maintenu en contact
avec la roche résiduelle (celle affectée par la fusion). Le modèle ou l’équation qui décrit la

CL 1
fusion partielle à l’équilibre est la suivante :  = où
CO D+ F (1−D)

CL = concentration de l’élément dans le liquide de fusion, C O = concentration du même


élément dans la roche avant sa fusion, D = coefficient global de distribution de l’élément et F
= taux de fusion ou fraction massique de liquide de fusion (variant de 0 à 100%
théoriquement).

65
La lecture de ce diagramme montre que :

- plus un élément est incompatible (hygromagmaphile, D<<1), plus sa teneur


augmente dans le liquide (magma) de fusion, cela d’autant plus que le degré de
fusion (F) est faible ;
- plus le degré de fusion augmente, plus la teneur diminue et tend à devenir égale à

CL
celle de la roche-source, et le rapport devient égal = 1.
CO

Dans le cas où D = 0 (élément fortement hygromagmaphile), on a : CL/Co = 1/F ; le spectre


de la roche en étude est identique à celui de la source d’autant plus que le degré F de fusion
est faible. Ainsi deux liquides formés par deux fractions de fusion F1 et F2 à partir de la
même roche source auront des spectres identiques quel que soit l’élément de la série des
TR considéré.

2° Modèle de fusion partielle fractionnée

Le liquide produit est extrait du système au fur et à mesure de sa formation et aucune


réaction n’est alors possible avec le solide résiduel. La composition du système varie
continûment, la composition du liquide évoluant de manière discontinue, celle du solide de
façon continue.

CL 1 1
L’équation qui décrit ce modèle est :  ¿ (1-F) ( -1) où F= fraction du liquide produit. Ce
Co Di D
modèle parait naturellement peu réaliste.

3° La cristallisation fractionnée (CF) (figure ci-après) : 

66
Nous considérons ici le cas de la cristallisation fractionnée dans une chambre magmatique,
à savoir dans un réservoir fermé. Dans le modèle de chambre magmatique, les minéraux
cristallisés se déposent soit sur le plancher, soit sur les bords et même au toit de la chambre.
Ces minéraux sont ainsi retirés du liquide magmatique et ne sont plus en contact avec celui-
ci ; il n’y a plus d’échange chimique entre ces cristaux et le liquide. L’équation ou le modèle

CL
qui décrit la cristallisation fractionnée est : = F(D −1) où
CO

F=fraction massique de liquide restant après cristallisation (100% à 0%),


D=coefficient global de partage,
CL = concentration de l’élément dans le liquide résiduel après cristallisation,
Co = concentration de l’élément dans le liquide initial avant sa cristallisation.

Le digramme ci-dessus montre que aux forts degrés de cristallisation, la faible quantité de
liquide résiduel (magma) apparait fortement enrichie en éléments incompatibles et appauvrie
naturellement en éléments compatibles (D>1).

La concentration CL d’un élément incompatible (dont D = 0) dans un liquide résiduel après


cristallisation fractionnée est donnée par la relation : CL/Co = 1/F. Les spectres des TR par
exemple reflètent ceux des roches sources et ne sont pas affectés de façon significative par
les processus de fusion et de cristallisation ; c’est le cas des MORB dont les spectres
caractérisent la source mantellique.

67
Eléments en trac Propriétés dans l’Interprétation des processus pétrogénétiques
utiles e
Ni, Co, Cr Teneurs élevées (Ni=250-300, Cr=500-600ppm) pour ces éléments sont de
bons indicateurs de l’origine de magma parental à partir de la source
mantellique péridotitique ; la décroissance de Ni (et Co en partie) à travers les
roches d’une série magmatique suggère le fractionnement (séparation) de
l’olivine.
V, Ti
Ces éléments ont un comportement parallèle lors des processus de CF et de
FP ; ce sont de traceurs du fractionnement des oxydes de Fe-Ti (ilménite ou
titanomagnétite). Lorsque V et Ti montrent un comportement divergent, cela
indique généralement une substitution du Ti dans les phases accessoires
Zr, Hf telles que sphène ou rutile.

Ce sont des éléments incompatibles, qui ne se substituent pas facilement aux


éléments majeurs mantéliques ; ils peuvent néanmoins se substituer au Ti
Ba dans les phases accessoires comme sphène et rutile.

Il se substitue au K dans les feldspaths-K, la hornblende et la biotite. La


Rb variation en teneur de Ba ou du rapport K/Ba peut indiquer le rôle de l’une de
ces phases.

Sr Il se substitue au K dans les feldspaths-K, la hornblende et la biotite. Les


rapports
K/Rb sont les possibles indicateurs du rôle de ces phases en pétrogenèse ;

Se substitue facilement au Ca dans les plagioclases et au K dans les


feldspaths-K ; Sr ou rapports Ca/Sr est un indicateur utile de l’implication de
plagioclases dans des niveaux inférieurs. Sr se comporte beaucoup plus
comme éléments incompatible dans les conditions mantéliques.

REE
Grenat et probablement hornblende s’accommodent facilement avec les
HREE et fractionnent ainsi les LREE. Sphène accommode elle les LREE, CPX
fractionnent légèrement les REE ; Eu est fortement fractionné dans les
feldspaths et l’anomalie en Eu reflète l’implication de feldspath.

3. Exercices

1° Soit la cristallisation à partir d’un liquide basaltique d’une tholéiite à olivine constituée de
58% de plagioclase, 25% d’olivine et 17% de verre ; sachant que D Sr est respectivement de
2 dans le plagioclase, de 0.005 dans l’olivine et de 1 dans le verre volcanique. Calculer sa
teneur dans le liquide résiduel après 60% de cristallisation du liquide contenant initialement
200 ppm de Sr.

2° Soit la fusion partielle d’une lherzolite en trois bains successifs de 5% chacun. Si cette
roche titre 10 ppm de Sr et comprend 40% d’olivine, 30% de Cpx, 20% d’Opx et 10% de
grenat. Calculer la concentration en Sr dans les 3 liquides successifs sachant que D Srol =
0.05, DSrcpx = 0.1, DSropx = 0.01 et DSrgrt = 0.001

Solution : DSr = (0.4x 0.005) + (0.3 x 0.1) + (0.2 x 0.01) + (0.1 x 0.001) = 0.034. Le calcul de
la concentration de Sr dans les liquides successifs exige de connaître le Cs, c.à.d. la
composition de l’élément Sr dans le résidu laissé après la fusion partielle à l’équilibre. Ainsi :

68
Pour le premier bain : C = 112 ppm Sr et Cs = = 4 ppm
Sr

Pour le deuxième bain : = 49 ppm Sr et Cs = = 2 ppm


Sr

Pour le troisième bain : C = 24 ppm Sr et Cs = = 1 ppm


Sr
3° Deux basaltes contiennent respectivement 1 ppm en Rb et 100 ppm en Sr et 11 ppm en
Rb et 80 ppm en Sr. Calculer leurs rapports Rb/Sr et dire lequel dérive de la fusion
partielle d’une péridotite à plagioclase. Si le basalte choisi représente un liquide issu de
15% de fusion partielle de cette péridotite, calculer le rapport originel (dans la péridotite)
sachant que le coefficient global DRb = 0.085 et DSr = 0.272.

Solution : Basalte 1 : Rb/Sr = 1/100 = 0.01, Basalte 2 : Rb/Sr = 11/80 = 0.14. Sr 2+ étant
compagnon diadochique de Ca2+, il se substitue en partie au Ca2+ dans les plagioclases-
Ca ; dans ces conditions, Sr est compatible, ce qui signifie que le liquide formé en sera
appauvri car il sera attaché au résidu solide. Par conséquent c’est le basalte qui est
relativement pauvre en Sr et donc à rapport Rb/Sr élevé qui est celui dérivant de la fusion
de péridotite à plagioclase, c.à.d. le basalte 2.

CoRb = CLRb [D + F (1 – D)] = 11[0.085 + 0.15(1 – 0.085)] = 2 ppm


CoSr = CLSr [D + F (1 – D)] = 1[0.272 + 0.15(1 – 0.272)] = 30 ppm
D’où le rapport (Rb/Sr)o = 2/30 = 0.067
4. Exercice à résoudre :Calculer la teneur en La, Ce, Nd, Sm, Eu, Gd, Dy, Er, Yb et Lu
dans le liquide résiduel après 10%, 30%, 50%, 70% et 90% de CF de l’olivine à partir d’un
magma komatiitique à partir des données du tableau ci-après :

Magma Valeurs de Coefficient F=10% F =30% F =50% F =70% F =90%


komatiitique normalisation 𝐾𝐿𝑖𝑞𝑂𝑙
La : 2,79 ppm 0,3290 0,0067
Ce : 7,93 0,8650 0,0060
Nd : 4,73 0,6300 0,0059
Sm : 1,40 0,2030 0,0070
Eu : 0,63 0,0770 0,0074
Gd : 2,01 0,2760 0,0100
Dy : 2,46 0,3430 0,0130
Er : 1,61 0,2250 0,0256
Yb : 1,41 0,2200 0,0491
Lu : 0,24 0,0339 0,0454

Expliquer comment évoluent les abondances en fonction de F


V.5. Identification des processus magmatiques

69
Pour une suite des roches magmatiques (différentes couches de lave par exemple), les
différences des teneurs en éléments en traces dans les différents termes sont dues aux
effets superposés de : (1) la fusion partielle, (2) la cristallisation fractionnée, (3) des
hétérogénéités de sources et (4) d’assimilation de l’encaissant. La démarche du géochimiste
pour identifier le processus pétrogénétique en cause consiste :

- à déterminer les rapports d’isotopes radiogéniques (de Sr, Nd,…) et stables (O,…).
- S’il y a identité de ces rapports entre les différents termes d’une suite magmatique,
les processus d’hétérogénéité de sources et d’assimilation d’encaissants sont
écartés ; dans ce cas, on utilise la modélisation suivante :
En comparant les éléments fortement hygromagmaphiles (C +) tels que Ta, La, et faiblement
hygromagmaphiles (C-) comme Sm, Tb, on a sur les diagrammes C+/C- = f(C+) :
 Pour la fusion partielle des droites passant par l’origine,
 Pour la cristallisation fractionnée des droites parallèles à l’axe des abscisses.

Recherche de l’origine comagmatique d’une suite des laves superposées

Une série magmatique se traduit sur le terrain par une succession ordonnée de laves de
plus en plus différenciées vers le haut. Cette différenciation est la manifestation en surface
de l’évolution profonde d’une chambre magmatique qui cristallise peu à peu de manière
fractionnée.

La procédure consiste à choisir deux éléments au comportement antagoniste, un élément A


compatible (DA>>1) et un élément B incompatible et fortement hygromagmaphile (DB<<1).

Pour chacun de ces deux éléments, on a : Cliq = Co x F(D-1), et pour chaque élément on écrit :
A
- Cliq = ACo x F(D-1) (1)
B
- Cliq = BCo x F(D-1) (2)

Comme DB<<1, on peut écrire BCliq = BCo x F-1 d’où F = BCo/ BCliq. (3).

En remplaçant F par sa valeur dans (1) on obtient : ACliq = ACo x [BCo/ BCliq] (DA-1) (4),

Soit en terme logarithmique : log ACliq = (1- DA) log BCliq + [log ACo + (DA-1) log BCo], c’est-à-
dire une relation de forme linéaire y = a x + b.

70
Cette équation linéaire exprime une corrélation entre les éléments antagonistes A et B, leurs
concentrations initiales Co et leurs concentrations Cliq dans les liquides (laves) et leurs
coefficients de distribution D.

Si dans une série des roches effusives on peut démontrer que les concentrations de deux
éléments antagonistes montrent une corrélation de type (4), alors il y a une forte probabilité
que ces laves soient issues de la même chambre magmatique affectée par la cristallisation
fractionnée.

Exemple : soient les teneurs en Ni et Th de 7 laves émises dans la chaîne de Puys (Massif
central français) :
N° Lave Ni en ppm Th en ppm ln Ni ln Th
1 68 5,2 4,2 1,7
2 30 6,9 3,4 1,9
3 3 9 1,1 2,2
4 4 11,5 1,4 2,4
5 <1 13,5 0 2,6
6 4 16,7 1,4 2,8
7 <1 22,6 0 3,1
3.5

2.5 f(x) = − 0.27 x + 2.83


R² = 0.75
2
ln Thl

1.5

0.5

0
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5
ln Ni

CHAPITRE VI : LES ISOTOPES ET LEUR UTILISATION EN GEOLOGIE

VI.1. Introduction

Chaque élément chimique est caractérisé par son numéro atomique Z qui est égal au
nombre de protons dans son noyau. Pour un même élément, il peut exister plusieurs
isotopes qui diffèrent entre eux par leur masse atomique A, égale au nombre de protons et
de neutrons du noyau.

71
Chacun des éléments du tableau de Mendeleïev possède au moins un isotope. Certains de
ces isotopes sont naturels, c'est à dire qu’ils ont été formés soit lors du Big Bang, soit lors
de la nucléosynthèse dans les étoiles, soit encore sous l'effet des rayonnements cosmiques
(isotopes dits cosmogéniques). D'autres ne sont connus que par leur synthèse dans les
laboratoires de physique nucléaire et sont donc artificiels. C’est le cas par exemple du
prométhéum 61Pm.

Les isotopes d’un élément sont caractérisés par des mêmes propriétés chimiques mais des
masses différentes : il en résulte des différences subtiles dans leurs propriétés physiques
telles que la diffusibilité, la densité, la volatilité, la fusion, etc.

La plupart des isotopes ne sont pas observables dans les échantillons naturels car ils sont
radioactifs et ont donc une durée de vie extrêmement courte. Parmi les isotopes radioactifs
peu seulement ont une période de désintégration de plus de un an (c'est à dire une durée
de vie de 10 ans environ). Seuls quelques isotopes sont stables, c'est à dire qu'ils ne
subissent aucune désintégration radioactive spontanée.

Les abondances isotopiques sont les proportions entre les différents isotopes d'un même
élément. Ces abondances sont plus ou moins variables dans les différents matériaux
terrestres.

En effet, les différences de composition isotopique observées entre les différents réservoirs
et matériaux terrestres renseignent sur les processus qui sont à l'origine de cette variabilité.
Ces variations de compositions isotopiques pour un élément donné peuvent avoir plusieurs
origines telles que :

87
1) Une production radiogénique : les rapports isotopiques Sr/86Sr par exemple
87
dépendent de la désintégration radioactive de Rb, ils varient donc en fonction de
l’abondance des parents radioactifs.
2) Un fractionnement lié aux différences de masse des isotopes. Dans les processus
naturels, seuls les éléments légers présentent des fractionnements suffisamment
importants pour être mesurables. Par exemple, les fractionnements entre les
isotopes de l'hydrogène (ΔM/M = (2-1)/1=1 entre 1H et 2H) seront plus forts que les
86
fractionnements entre les isotopes du Sr (ΔM/M = (88-86)/86 = 2/86 = 1/43 entre Sr
88
et le Sr).

VI. 2. Isotopes radioactifs et radiogéniques et utilisations en géologie

72
VI.2.1. Principes de la désintégration radioactive

Soit un isotope P (isotope père ou parent), naturellement radioactif, contenu dans un minéral
au moment de sa cristallisation. Cet isotope se désintègre progressivement en un isotope F
(isotope fils) d’autant plus abondant qu’il s’est écoulé plus de temps depuis la cristallisation
initiale.

Chaque isotope radioactif est caractérisé par sa période T dite demi-vie ou par sa constante
de désintégration λ qui est le coefficient de proportionnalité de désintégration radioactive en
fonction du temps : T= ln2/λ. Par exemple λ87Rb = 1,42.10-11/an, d’où T = 48,8 Ga. Cette
désintégration suit la loi exprimée par l’équation : dp/dt = - λp.

Quand on intègre cette équation de t=0 à t, on a : Pt=P0e-λt ; comme P0 = Pt + Ft, cette
équation devient : Ft = Pt (eλt-1). Si à t=0, il y a déjà une certaine quantité d’isotope fils (F 0)
présente dans le système, alors l’équation devient finalement : Ft = F0 + Pt (eλt-1) où t =
temps actuel, to = temps initial.

Les couples P/F les plus utilisés en radiochronologie sont : 235U/207Pb (T=7,04.108), 238
U/206Pb
(4,47.109), 232
Th/208Pb (T=1,405.1010), 176
Lu/176Hf, 147
Sm/143Nd, 87Rb/87Sr (T=4,88.1010), 40K/40Ar
(T=1,25.109).

Tous ces systèmes permettent d’accéder au temps depuis lequel le système chronométrique
a démarré, càd le temps depuis lequel le système s’est fermé.

73
VI.2.2. Applications :

1° Radiochronologie : la méthode d’isochrone, exemple du couple Rb/Sr

Principe et équation fondamentale du système


85 87 87
Le Rb37 possède 2 isotopes : Rb (72,15% de Rb total) et Rb (27,85%). Seul le Rb est
87 87 87
radioactif et se transforme en Sr radiogénique par émission de ß: Rb---> Sr (radioactivité
ß). Sa période de désintégration est très grande (~50 Ga, soit λ = 1,42.10-11/an). Selon
l’équation fondamentale de désintégration: F = P (e λt - 1) + Fo, 87
Rb (éléments-père
87
radioactif, P) se désintègre en Sr (élément-fils radiogénique, F), on peut donc écrire :
(87Sr) = (87Rb) (eλ t - 1) + (87Sr)o

87 87
Sr38 possède 4 isotopes: 84-86-87-88. Seul Sr est radiogénique. Dans l'équation, Sr et
87 87
Rb peuvent être mesurés et sont donc connus. Par contre, la quantité de ( Sr)o est une
86
inconnue. Par ailleurs, le Sr est un isotope stable non radiogénique, non radioactif. Sa
quantité dans le système est donc une constante, c’est pourquoi l’équation fondamentale
est rapportée à 86Sr.

Age et rapport isotopique

Dans l'équation (87Sr) = (87Rb) (eλ t


- 1) + (87Sr)o, on rapporte (on divise) donc les
concentrations de (87Sr) actuel , (87Rb) actuel et (87Sr)originel à cette isotope stable ( 86Sr); d’où

l’équation: actuel initial . Cette équation est de forme linéaire :


λt
y = ax + b, avec la pente a = (e -1) pouvant être assimilé à λt à cause de la très faible
valeur de λRb (=1,42.10-11/an), et l’ordonnée à l’origine b = (87Sr/86Sr)o, d’où :

actuel initial ; connaissant λRb=1,42.10-11/an, on peut trouver l’âge t.

On travaille sur plusieurs échantillons cogénétiques appartenant à la même formation


supposée isochrone ou sur différents minéraux d’une même roche. Les points représentatifs
de ces échantillons doivent s'aligner sur une droite dans un diagramme ( 87Sr/86Sr) -
(87Rb/86Sr), dénommée isochrone, dont la pente (λt) est fonction de l'âge du système ; cette
pente est d’autant plus forte que les roches sont plus anciennes.

La qualité d’une isochrone dépend du nombre d’échantillons analysés, de leur répartition les
uns par rapport aux autres, càd avec des rapports Rb/Sr (et donc 87Rb/87Sr) le plus différents

74
possibles et la plus ou moins grande rigueur de l’alignement des différents points
représentant les échantillons. Quant à l'ordonnée à l'origine, elle permet de connaître le
rapport isotopique initial (87Sr/86Sr)0. Dans le cas d’une roche magmatique ce rapport
initial renseigne sur la source magmatique càd il permet de déterminer l’origine soit crustale,
soit mantellique d’un granite par exemple.

Tracé d’une isochrone dans le système radiochronologique Rb-Sr

2° Traçage isotopique
C’est l’identification de la source des matériaux géologiques par leur composition isotopique.
Les isotopes radiogéniques peuvent être utilisés comme traceurs (indicateurs) des
échanges entre les différents réservoirs à l’intérieur du globe. En particulier, ils permettent de
comprendre les mécanismes de formation des continents en explicitant les processus de
différenciation de la croûte continentale (granitoïdes et sédiments qui en dérivent) à partir du
manteau dont sont issus les basaltes des fonds océaniques (MORB) et les basaltes des
plateaux et des îles océaniques (OIB).
L’intérêt des isotopes radiogéniques est que lors de la formation d’une roche les rapports
isotopiques qu’elle enregistre, càd les rapports initiaux, sont identiques à ceux de la source.
87
Par exemple : Sr/86Sr d’un basalte est identique à celui de la zone du manteau dont il
provient, quelles que soient le degré de fusion conduisant au liquide primaire et ses
différenciations par cristallisation fractionnée.

Caractéristiques isotopiques du manteau : manteau primitif, manteau appauvri et


croûte

Comme les rapports isotopiques des laves ne sont modifiés ni par la fusion partielle ni par la
cristallisation fractionnée, ils fournissent de ce fait des informations directes sur les

75
hétérogénéités des « régions-sources ». La distinction entre origine et source de magma
est très importante. L’origine fait référence au lieu d’où vient le magma, par exemple le
manteau supérieur, la croûte inférieure ou la croûte supérieure. La source fait, elle, référence
au matériel qui va être fondu pour donner le magma, par exemple la péridotite à grenat,
péridotite à plagioclase, etc.

Les isotopes radiogéniques particulièrement utilisés sont ceux du strontium (87Sr/86Sr) et du


néodyme (143Nd/144Nd). Le 87Sr est un isotope radiogénique qui provient de la désintégration
du 87Rb alors que le 143
Nd provient de la désintégration du 147
Sm.Ces couples père-fils Rb-Sr
87
et Sm-Nd sont classiquement utilisés en radiochronologie ; les rapports Sr/86Sr et
143
Nd/144Nd sont également utilisés comme traceurs (indicateurs) des réservoirs
géochimiques terrestres.

87
Lors d’une fusion partielle, le Rb (contenant l’isotope-père Rb) a un comportement plus
87
incompatible que le Sr (contenant l’isotope-fils Sr), ce qui favorise l’augmentation du
rapport Rb/Sr dans le liquide magmatique formé et une diminution de ce rapport dans le
87
résidu solide de fusion. Ceci implique qu'au cours du temps le rapport Sr/86Sr va fortement
augmenter dans les roches formées par cristallisation des liquides de fusion partielle (car
87
Rb→87Sr) alors que le rapport 87Sr/86Sr va faiblement augmenter au cours du temps dans la
roche représentant le résidu de fusion.

Le modèle de différenciation terrestre le plus classiquement admis consiste à considérer


que la croûte primitive avait la composition du manteau primitif, et que la croûte
continentale s’est formée par fusion partielle de ce manteau, vraisemblablement en deux
étapes. Le manteau appauvri représente le résidu de cette fusion partielle du manteau
primitif.

Ce sont les mesures des chondrites qui permettent d’accéder aux rapports isotopiques de la
87
Terre primitive : ainsi à partir d’un rapport Sr/86Sr = 0,699 dans les chondrites, on peut
calculer la valeur actuelle du manteau primitif (0,705) pour un âge de 5,55Ga en utilisant la
constante de désintégration λRb de 1,42.10-11/an selon l’équation suivante :

1) Manteau appauvri: 87Sr/86Sr = (87Sr/86Sr)o + 87Rb/86Sr (e-λt – 1) ou


2) Manteau primitif ou croûte continentale : 87Sr/86Sr = (87Sr/86Sr)o + 87Rb/86Sr. (e-λt – 1).

Le rapport des chondrites (0,699) permet d’estimer celui du manteau primitif actuel à 0,705 ;
Les MORB présentent un rapport actuel de l’ordre de 0,702 ; et la croûte continentale a un
rapport moyen de l’ordre de 0,710.

76
Diagramme schématique de l’évolution isotopique du Sr dans un volume de roche du manteau supérieur et de la
croûte continentale avant et après la formation du magma par fusion partielle

 Le rapport 87Sr/86Sr augmente de 0.699 à 4.55Ga jusqu’à 0.701 à 2.7Ga lorsque le


magma se forme,
 Le rapport 87Sr/86Sr du solide résiduel (le manteau appauvri) augmente plus lentement
qu’avant l’épisode de fusion parce que le rapport Rb/Sr est plus faible dans le solide
résiduel que dans le liquide silicaté.
 Si le liquide silicaté enrichi cristallise sans incorporer du Sr de la croûte continentale,
son rapport 87Sr/86Sr actuel sera de 0.7040, il sera supérieur dans le cas contraire.

Les basaltes sont produits par la fusion partielle du manteau ; les rapports isotopiques lors
de la fusion partielle et des autres processus pétrogénétiques ne varient pas car aux
températures magmatiques (très élevées), le fractionnement isotopique entre liquide et
solide est négligeable. Par conséquent, un basalte a la composition isotopique du manteau
source contemporain de sa formation.

Les MORB ou basaltes de dorsales océaniques sont considérés comme issus des parties
supérieures du manteau alors que les OIB ou basaltes des îles et plateaux océaniques mis
87
en place au niveau des points chauds ont une origine profonde. Le rapport Sr/86Sr des
MORB est égal à 0,702, celui des OIB est intermédiaire entre celui des MORB et celui du
manteau primitif (0,705). Ceci constitue l’argument en faveur de l’existence d’un manteau
convectif à deux couches dont les signatures isotopiques sont bien différentes :

- un manteau primitif profond, proche du manteau inférieur, source des OIB et


- un manteau supérieur dit manteau appauvri, source des MORB.

77
78
Genèse de la croûte continentale (ou des continents)

L’extraction de la croûte continentale fut un processus lent et continu aujourd’hui stabilisé.


L’âge théorique ou modèle pour cette extraction est calculé à partir d’un système de deux
équations de la géochronologie du manteau appauvri et du manteau primitif ou croûte
continentale à deux inconnues d’où l’on déduit le temps càd l’âge de l’extraction de la croûte
87
continentale, sachant que les rapports Sr/86Sr sont respectivement de 0,51 pour la croûte
continentale et de 0,09 pour le manteau appauvri. Que l’on prenne le système Rb-Sr ou
Sm-Nd, l’âge calculé est de 2Ga (càd que la croûte continentale s’est formée il y a 2Ga).

Au sein même de la grande famille très homogène des MORB, certains basaltes ont des
ressemblances chimiques avec les OIB : on parle alors de MORB enrichis (MORB-E) qu’on
oppose aux MORB normaux (MORB-N).

La grande variabilité des rapports isotopiques initiaux de la croûte continentale confirme sa


grande hétérogénéité sur le plan tant lithologique que minéralogique, et montre que les
granites dont elle est principalement constituée peuvent provenir de deux sources
différentes :

- Soit par différentiation de liquides issus du manteau par fusion partielle,


dans ce cas les rapports 87Sr/86Sr sont relativement bas (0,705) ;
- Soit par recyclage (fusion) des matériaux déjà présents dans la croûte
continentale depuis de centaines ou de milliers de Ma ; les rapports sont ici
élevés (0,850).
- Les rapports intermédiaires peuvent s’expliquer par l’assimilation des roches
crustales par des magmas d’origine mantellique.

VI.2.3. Exercices :
1° Voici les résultats de 6 roches :

87
Echantillon Rb/86Sr 87
Sr/86Sr
1 0,12 0,7130
2 0,95 0,7187
3 1,75 0,7245
4 2,00 0,7262
5 2,50 0,7250
6 2,70 0,7310

• Tracer la droite isochrone passant par au moins 5 de ces 6 points ;

79
• Calculer la pente de l’isochrone et déterminer ainsi l’âge de ces échantillons sachant
que λ pour 87Rb = 1,42.10-11 an-1
• Mesurer le rapport (87Sr/86Sr)o et donnez-en une interprétation quant à l’origine de
matériau-source.
• Quelle est, à votre avis, la ou les raison(s) pour laquelle ou lesquelles l’un des
échantillons ne s’aligne pas sur isochrone ?

Solution :

0.74

0.73

0.73
_87Sr/86Sr

0.72

0.72

0.71

0.71

0.7
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3
87Rb/86Sr

0.74
0.73 f(x) = 0.01 x + 0.71
0.73
_87Sr/86Sr

0.72
0.72
0.71
0.71
0.7
0 0.5 1 1.5 2 2.5 3
87Rb/86Sr

La pente : a = 0.007 ;
L’âge : 0.007 = 1,42.10-11 an-1 x t, d’où t = 493Ma

(87Sr/86Sr)o = 0.7121 : le magma à l’origine de ce granite est d’origine crustale.

L’échantillon n° 5 ne s’aligne pas sur l’isochrone à cause probablement du fait que :

- Soit l’échantillon était altéré (le système s’est ouvert à un moment donné),
- Soit il ne fait pas partie du même massif que les autres, donc n’a pas le même
âge,
- Soit qu’il y a eu une mauvaise manipulation technique lors de l’analyse.

80
3° Les données suivantes (roche totale et minéraux séparés) proviennent du gneiss de
Baltimore 

Isochrone des minéraux


2.5
Isochrone des roches totales
0.82 2
0.8 f(x) = 0 x + 0.76
0.78 f(x) = 0.01 x + 0.71 1.5 R² = 1
R² = 1
0.76
0.74 1
0.72
0.7 0.5
0.68
0.66 0
0 1 2 3 4 5 6 7 0 50 100 150 200 250 300 350

a) Roche totale : âge : 1,02Ga b) Minéraux : âge : 289 Ma (Permien inférieur)


origine : différentiation mantellique âge de l’épisode
métamorphique
(87Sr/86Sr)o = 0,705
3° Soient les données isotopiques Rb-Sr des échantillons de roche totale d’un pluton
granitique, déterminer le rapport isotopique 87Sr/86Sr initial et l’âge du pluton.
87
N° Rb/86Sr 87
Sr/86Sr
Echantillon
1 11,86 0,7718

2 7,66 0,7481

3 6,95 0,7436

4 9,68 0,7587

81
5 6,54 0,7413

16 9,69 0,7599

7 3,74 0,7259

a) La pente de l’isochrone = 0,0057 ; si λRb = 1,14. 10-11/an, on a λt = 0,0057 d’où

0,0057
t= x 1011ans = 401 Ma (Dévonien inférieur).
1,42
b) (87Sr/86Sr)0 = 0,7045 suggérant une origine par différenciation du magma
mantellique à l’origine de ce granite.
0.78
0.77
f(x) = 0.01 x + 0.7
0.76 R² = 1

0.75
87Sr/86Sr

0.74
0.73
0.72
0.71
0.7
3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
87Rb/86Sr

VI.3. Isotopes stables (ou des éléments légers)

VI.3.1. Généralités

En sciences de la Terre, les éléments pour lesquels l’analyse isotopique est fréquemment
mise en œuvre sont : hydrogène (1H, 2H=deutérium), carbone (12C, 13
C), azote (14N, 15
N),
16 17 18 32 33 34 36
oxygène ( O, O, O) et soufre ( S, S, S, S). Ce sont des éléments légers et aucun
n’a une origine radiogénique.

Les compositions isotopiques sont obtenues sous forme de rapport à l’isotope le plus
1 12 14 16
abondant, soit respectivement H=99,985%, C=98,89%, N=99,64%, O=99,759%,
32
S=95,0%.

Le degré de fractionnement isotopique peut s’évaluer de trois manières différentes ;


Distribution des isotopes stables entre deux phases A et B (minéraux) coexistantes en
utilisant :

82
 le facteur de fractionnement αA-B = RA/RB où R = rapport de l’isotope lourd sur
18 16
l’isotope léger dans une phase. Par exemple le fractionnement de O et O entre
quartz et magnétite s’écrit αqz-mt = (18O/16O)qz / (18O/16O)mt. Les valeurs αA-B sont
généralement comprises entre1.0000 et 1.0040 pour les processus inorganiques et
sont plus élevées pour les processus biologiques. Elles diffèrent seulement de 3e et
4e décimales. Le fractionnement de l’oxygène entre le quartz (SiO 2) et la magnétite
(Fe3O4) à 600°C, déterminé au Laboratoire est : αQz-Mt = (18O/16O)Qz /(18O/16O)Mt =
1,007.
 Notation δ (delta) : δ = 1000 x (R échant . – R standard ) / R standard . C’est la mesure de
déviation de R en ‰ entre l’échantillon et le standard. Les échantillons ayant des
valeurs positives de δ sont dits « isotopiquement lourds », càd enrichis en isotope
lourd par rapport au standard ; ceux avec des valeurs négatives sont
« isotopiquement légers ». Les principaux standards sont :
- Pour H et O : SMOW (Standard Mean Ocean Water),
- Pour C : PDB (Pee Dee Bélemnite),
- Pour N (15N/14N) : dans l’air,
- Pour S (34S/32S) : troilite FeS
18
Par exemple, le rapport naturel O/16O = 2,04.10-3, si le standard a un rapport
18
O/16O= 2,040.10-3 et notre échantillon A un rapport 2,050.10-3, alors
δA‰ = [(2,050/2,040) - 1] x 1000 = 4,9‰.
 Le symbole Δ : il est aussi utilisé pour comparer les valeurs δ des substances
coexistantes. Par définition, αA-B – 1 = (RA – RB) / RB,
δA = 1000 x (R . – R standard) / R
échant stand , et δB = 1000 x (R .–R
échant standard )/R standard .
Soit 1000 (αA-B – 1) ~ δA - δB.
Pour les pairs d’isotopes stables légers avec des facteurs de fractionnement de
l’ordre de 1.000 à 1.004 (excepté la paire D-H), on écrit : ln αA-B ~ αA- B – 1,
Soit : 1000 ln αA- B ~ δA - δB = ΔA- B

VI.3.2. Fractionnements isotopiques et applications en géologie

a) Fractionnement d’équilibre

Lors d’un équilibre entre deux phases, les différences d’énergies entre les deux isotopes ne
seront pas les mêmes dans les deux phases à cause de liaisons chimiques différentes, ce
qui conduit au fractionnement isotopique. En général, deux phases en équilibre n’ont pas la
même composition isotopique, toutefois cela n’est mesurable que si la différence est
suffisamment importante.

83
Par exemple pour l'équilibre isotopique entre les carbonates et l'eau exprimé pour l'oxygène.

18
- On peut écrire une réaction d'échange entre les O et les 16O de l'eau et du
carbonate comme on le fait en thermodynamique pour les réactions
chimiques : H218O + 1/3 Ca C16O3 = H216O + 1/3 CaC18O3
- A cause des différences de masse, l'énergie des produits de la réaction
d'échange est différente de celle des réactifs. On calcule la constante K,
comme en thermodynamique :

ou encore :

Cette constante, qui fixe le rapport entre la composition isotopique de l'eau et celle de la
calcite, dépend de la température, et donc les fractionnements isotopiques dépendent de la
température ; d’où son utilisation pour la thermométrie.

Application : la thermométrie
Comme la constante d'équilibre K, les fractionnements isotopiques dépendent aussi de la
température suivant la relation de type ln αA-B = a + b/T2 avec souvent a = 0.
Si αA-B = 1, lnαA-B = ΔA-B ; or ΔA-B= 1000lnαA-B donc 1000 ln α =a+b/T2 où a et b dépendent
du système isotopique considéré et des matériaux entre lesquels on estime le
fractionnement.

On voit que le fractionnement dépend inversement de la température, autrement dit, les


fractionnements sont plus forts à basse température qu'à haute température. Si on connaît
précisément la relation entre la constante d'équilibre et la température, alors, la mesure des
fractionnements isotopiques peut être utilisée comme thermomètre.

C’est ainsi que les fractionnements isotopiques de l'oxygène entre l'eau et les carbonates
sont à la base de la paléothermométrie et de la reconstitution des paléoclimats (ou des
paléoaltitudes). La calcite des tests de foraminifères (protozoaires apparus au Cambrien)
présente un fractionnement Δ18OCalc-Eau fonction de la température selon la relation:
T (°C) = 0,13 (δcalcite- δH2O)2 – 4,2 (δcalcite – δH2O) + 16,9

Les fractionnements isotopiques de l'oxygène sont également des thermomètres utilisés en


pétrologie magmatique et métamorphique ; en voici un exemple pratique.

84
Dans une métapélite de faciès granulite coexistent quartz et orthopyroxène formés au même
moment : δ18O quartz = 10,2‰ et δ18O orthopyroxène = 7,9‰. Calculer la température de formation.

Solution : La température de fractionnement isotopique de 18O entre quartz et pyroxène est


donnée par la formule : 1000 ln αqz-px = 2,75 x 106/T2 (Chiba et al. 1989) ;

on sait que soit ici αqz-px = 1010,2/1007,9 = 1,00228

1000 ln α = 1000 ln 1,00228 = 2,2774


D’où : 2,2774 = 2,75.106/T2

T
T = 1099K = 825°C

b) Fractionnements cinétiques 

Ce sont des fractionnements dus au fait que pour un même élément chimique les isotopes
légers réagissent plus vite que les isotopes lourds. Exemple : lors de l'évaporation de l'eau,
l'évaporation d'H218O est plus lente que celle d'H216O de sorte que si l'évaporation est
continue, la vapeur sera plus enrichie en H216O que l'eau liquide.

Application : le traçage isotopique

Les fractionnements cinétiques ont pour principale application le traçage isotopique càd
l’identification de la source des matériaux géologiques par leur composition isotopique.

La distinction entre origine et source de magma est très importante. L’origine fait référence
au lieu d’où vient le magma, par exemple le manteau supérieur, la croûte inférieure ou la
croûte supérieure. La source fait, elle, référence au matériel qui va être fondu pour donner le
magma, par exemple pour une source péridotitique, on précisera péridotite à grenat ou à
plagioclase.

Ainsi, une eau douce n'a pas la même composition isotopique de l'oxygène qu'une eau de
mer ou une eau constitutrice des silicates hydratés, ce qui permet d'identifier l'origine de
différentes eaux d'altération de roches : eaux météoriques, eaux hydrothermales, etc.

La géochimie des isotopes stables s'avère également utile dans le traçage des pollutions:
par exemple, les nitrates naturels des aquifères n'ont pas la même composition isotopique
que les nitrates apportés par les engrais. Les isotopes stables sont également fort utiles en
cosmochimie où ils donnent des indications sur l'origine des matériaux extra-terrestres.

85
Exemples de composition isotopique de quelques matériaux géologiques
1. Oxygène-Hydrogène

Les chondrites ordinaires et les achondrites ont des compositions isotopiques homogènes
de l’oxygène et comparables à celle de la Terre globale ; les chondrites carbonées
16
témoignent de la présence d’un composant nucléosynthétique anormal riche en O ; elles
présentent des valeurs de δD excessivement élevées, jusqu’à 6500‰.

Les sédiments détritiques marins ou continentaux ont des compositions isotopiques


variables. Par exemple :

- les shales : 15< δ18O<20‰ ; -73< δD<-33‰


- les carbonates marins récents : +27< δ18O<+31‰ pour une moyenne de +29‰ ;
- les cherts : δ18O ~44‰ à cause du fort fractionnement entre le quartz et l’eau.

Les fractionnements entre les minéraux en équilibre sont plus faibles dans les roches
volcaniques que dans leurs équivalents plutoniques ; ils sont particulièrement plus forts
dans les roches métamorphiques et maxima dans les roches sédimentaires.

18
Lors de la cristallisation fractionnée, O se concentre dans les minéraux fortement
polymérisés (à l’exception des minéraux hydroxylés). Comme les liquides magmatiques
18
s’enrichissent en O au cours de CF, les minéraux basiques (premiers formés) possèdent
des δ18O plus faibles que ceux de leur roche-hôte.

Les variations de coefficients de fractionnement au sein d’une même série magmatique sont
très limitées (à cause de la faible valeur des coefficients de fractionnement à HT) de sorte
que des variations plus importantes que 1‰ s’expliquent par l’intervention des processus
tels que le mélange magmatique, la contamination crustale, les interactions roches-eaux,
etc.

- Les MORB (basaltes des rides médio-océaniques) : +5,5 < δ 18O < 6,1‰ avec une
moyenne de +5,8‰ ;

- Les OIB (basaltes alcalins des îles et des plateaux océaniques) : la gamme est
légèrement plus forte d’environ 0,5‰.

- Le manteau subocéanique ne diffère pas de météorites ordinaires ; mais les océans


(δ18O = 0) n’ont pas le même δ18O que l’ensemble de la Terre du fait qu’une grande
18
partie O issu de l’altération des continents est piégé dans les argiles ou dans les
carbonates et cherts.

- Les granites : -6,3< δ18O < +17‰ ; la plupart des valeurs étant comprises entre +6
et +14‰ ; les valeurs très positives correspondent à une forte contamination crustale

86
; les valeurs < +6‰, et a fortiori < 0, sont indicatrices d’interaction avec des roches
crustales appauvries en 18O ou avec des eaux météoriques ou hydrothermales.

Les fractionnements dans le métamorphisme sont tels qu’on observe ici une forte
hétérogénéité des valeurs qui reflètent la complexité lithologique initiale où le rôle des fluides
postmétamorphiques peut être considérable, car des rééquilibrations isotopiques peuvent se
produire pendant le refroidissement.

Fractionnement durant le cycle hydrologique :

Comme il y a deux isotopes d’hydrogène (1H et 2D) et trois d’oxygène (16O, 17O et 18O), il y a
donc neuf différentes manières de former les molécules d’eau isotopiquement distinctes.

La masse de ces molécules varie de 18 pour1H2O la plus légère à 22 pour 2D2O la plus
lourde. Les molécules d’ « eau légère » s’évaporent plus rapidement de la masse d’eau vers
l’atmosphère que les molécules d’eau « lourde ». Lorsque l’eau s’évapore de la surface de
l’océan, elle a une valeur de δD d’environ -8‰ et δ18O d’~ -9‰ ; le degré de fractionnement
étant fonction de la température. En n’importe quel endroit de la Terre, la vapeur d’eau
atmosphérique a toujours des valeurs négatives de δD et δ18O par rapport au SMOW.

Le processus inverse se passe lorsque l’eau se condense dans l’atmosphère. La


condensation est presque un processus d’équilibre qui favorise les molécules d’eau sous
forme de pluie ou neige. La première pluie qui tombe d’un « nouveau nuage » au-dessus de
l’océan a donc des valeurs de δD et δ18O d’~ 0‰. La vapeur d’eau restante dans
18
l’atmosphère est systématiquement appauvrie en D et O par ce processus. La vapeur
d’eau subséquente dérivant d’un réservoir de vapeur a des valeurs δ plus négatives que
l’eau de mer fraichement évaporée.

Le rapport isotopique R dans la vapeur restante est donnée par : R = R0 f(α – 1), avec R0 la
18
valeur O/16O initiale dans la vapeur, f = fraction de la vapeur restante et α = facteur de
fractionnement.

Par exemple, supposons que la pluie commence à tomber à partir d’une masse d’air dont la
valeur initiale de δ18O est -9.00‰ ; en assumant que le facteur de fractionnement est 1.0092
à la température de condensation, quelle peut être la composition isotopique de la masse
d’air après que 50%, 75% ou 90% de la vapeur ont respectivement condensé ? Quelle est la
valeur de δ18O de la masse d’air tombée sous forme de pluie après sa totale humidification ?

87
Solution : Premièrement, il faut convertir les valeurs R en notation δ équivalente :
(δ +1000) = 1000 (R/Rsmow). Ensuite, écrire l’équation R = R0 f(α-1) sous la forme
R/ R0 = (δ18O + 1000) / ([δ18O]0 + 1000) = f(α – 1) ou δ18O = [(δ18O)0 + 1000] x f(α – 1) – 1000.
Ainsi :

- après 50% de condensation, δ18O = [-9.0‰ + 1000] (0.5)0.0092 – 1000 = -15.3‰ ;


- après 75% de condensation, δ18O = [-9.0‰ + 1000] (0.25)0.0092 – 1000 = -21.6‰ ;
0.0092
- après 90% de condensation, [-9.0‰ + 1000] (0.1) – 1000 = -29.8‰.
La composition isotopique de l’eau de pluie :

α = R pluie / R vapeur = (δ18Opluie + 1000) / (δ18Ovapeur + 1000), soit δ18Opluie = α (δ18Ovapeur + 1000) – 1000.

Ainsi : - après 50% de condensation, δ 18Opluie = 1.0092 (-15.3 + 1000) – 1000 = - 6.2‰ ;
- après 75% de condensation, δ18Opluie = - 12.69‰ ;
- après 90% de condensation, δ18Opluie = - 20.9‰

On constate qu’avec une précipitation continue, l’eau de pluie devient (de plus en plus)
légère. Les analyses de δ18O et δD des eaux sont généralement présentées sur le
diagramme comme celui de la figure ci-dessous. Les valeurs de δ 18O et δD de l’eau
météorique sont fonction de la température (climat) et de la latitude. Les eaux météoriques
plotent le long d’une droite : δD = δ18O + 10.

Sur ce diagramme :

- Les eaux de nappes superficielles gardent le modèle isotopique hérité des eaux de
pluie,
- La position des eaux de nappes profondes s’éloigne par rapport à la position des
eaux de pluie locales.

88
- Les variations climatiques sont telles que la composition isotopique de l’eau de pluie
moderne peut significativement être différente de celle de pluie tombée il y a
quelques centaines de Ma et enfouie dans des aquifères profonds.

Quant aux compositions des eaux thermales, si elles ne convergent pas vers la composition
de l’eau juvénile (dérivée du manteau) et qu’elles montrent de trends parallèles (figure ci-
après) elles indiquent qu’elles dérivent entièrement des précipitations météoriques locales.

Exercice
Calculer la composition isotopique de l’eau en équilibre avec la muscovite du gisement de
molybdène (Colorado) sachant que δ18Omuscovite = +7.4% et δDmuscovite = - 91% à la
température de 500°C;

A) Données :
δ18Omuscovite = +7.4% ;
δDmuscovite = - 91% ;
la température = 500°C
B) Calcul de la composition isotopique d’oxygène de l’eau :
L’équation de l’équilibre muscovite-l’eau utilisée est celle de O’ Neil-Taylor (1967) :
1000lnα = - 3.89 + 2.38 x (106/T2).
A T° = 500°C, 1000lnα = 0.0931,
Comme Δmuscovite - eau = 1000 lnα,
δ18Omuscovite - δ18Oeau = 0.0931 ;
+7.4 - δ18Oeau = 0.0931,
δ18O eau = 7.3‰
C) Calcul de la composition isotopique d’hydrogène de l’eau :
L’équation de l’équilibre muscovite-l’ eau utilisée est celle de Suzuoki et Epstein (1976):
1000 lnα = 19.1 – 22.1 x (106/T2).
89
A T° = 500°C,
1000 lnα = - 17.89,
Comme Δmuscovite - eau = 1000 lnα,
δDmuscovite - δD eau = - 17.89 ;
-91 - δD eau = - 17.89 ;
δD eau = - 73.1‰.

2. Carbone
12 13
Les deux isotopes stables du carbone sont : C (98,89%) et C (1,11%). Les deux
principaux réservoirs de carbone sont la matière organique et les carbonates
13
sédimentaires. Comme la teneur en C est fonction du degré d’oxydation du C, elle est
donc plus faible dans la matière organique que dans des carbonates.

 Pour la MO, tous les processus biologiques (respiration, action bactérienne)


12
provoquent des fractionnements ± importants; la photosynthèse concentre le C
dans la MO.
- Les plantes terrestres ont δ13C compris entre -10 et -30‰ ;
- les plantes marines sont plus lourdes de 10‰ que les plantes terrestres ;
- le pétrole, le charbon et le gaz naturel sont très appauvris en 13C ;
 Les composés du système CO2-bicarbonate-carbonate sont enrichis en 13
C par
13 13
rapport au CO2 atmosphérique (dont δ C = -7‰) ; le δ C des carbonates marins
est ~0
13
Dans l’eau de mer, la teneur en C est fonction de la présence de la MO ; le δ 13C des
carbonates pélagiques semble être fonction de la profondeur de sorte que les périodes de
haut niveau eustatique correspondent à un fort δ 13C. C’est donc un traceur de la
température et du niveau eustatique fortement appliqué aux études paléoclimatiques du
Quaternaire récent.

Dans les roches ignées continentales, le δ13C est de -23‰ en moyenne, mais il est en
général fonction de l’état du carbone ; ainsi pour le graphite (C réduit), le δ 13C est compris
entre -20 et -32‰ alors que pour les carbonates et les inclusions fluides de CO 2 (C oxydé),
les valeurs de δ13C sont comprises entre -18 et +3‰.

La composition isotopique du manteau est difficile à atteindre, néanmoins le δ 13C de


kimberlites, carbonatites, diamants et inclusions de CO 2 dans les MORB, compris entre -2 et
-8‰, en donne une estimation qui est en accord avec celle de la Terre globale, à -7‰.
Dans les météorites, les carbonates des chondrites carbonées sont le matériel le plus lourd
(δ13C = +60‰), leur carbone réduit étant plus léger (-7< δ13C< -30‰).
Exercice :

90
Le CO2 atmosphérique a un δ13C de -7‰. Si HCO3- dans un échantillon d’eau de rivière en
équilibre avec l’atmosphère a une valeur δ13C mesuré de +1.24‰, quelles sont les valeurs
équivalentes de Δ et le facteur de fractionnement αHCO3-CO2 ?

Solution : sachant que 1000lnαA-B = δA – δB = ΔA - ΔB, on a :

1) δHCO3 – δCO2 = +1.24‰ – (-7‰) = +8.24‰ et


2) α HCO3 – CO2 = exp. (ΔHCO3 – CO2 /1000) = 1.00827

3. Le soufre

Le soufre possède 4 isotopes tous stables : 32S (95,02%), 33S (0,75%), 34S (4,21%) et 36S
(0,02%). Dans la pratique, on ne s’intéresse qu’aux variations du rapport 34S/32S. Ainsi :
- Dans le processus d’oxydoréduction, le passage à l’état sulfate (oxydation)
augmente le δ34S et la réduction à l’état sulfure le diminue.

- Dans des processus biologiques, les fractionnements sont les plus forts car
l’isotope léger (32S) est préférentiellement absorbé par les organismes vivants. La
précipitation de S dans l’eau à partir de l’ion sulfate produit de δ 34S plus forts si la
précipitation est purement chimique, et plus faible si elle se fait sous l’action
biochimique (comme celle des bactéries anaérobies).

- Dans les sulfures des météorites, le soufre (S) a une composition isotopique
presque constante avec δ34S~0 de même que dans les MORB, alors qu’il va
jusque +8 dans les basaltes aériens (il y a probablement fractionnement lors du
dégazage de la phase vapeur).

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