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LES TENDANCES CONTEMPORAINES DU FEDERALISME

 Le fédéralisme est un équilibre précaire entre deux objectifs contradictoires : l’autonomie des Etats fédérés et l’intégration
des Etats fédérés. Par conséquent, il est susceptible d’évoluer dans deux directions opposées : la domination de l’Etat
fédéral (vers l’Etat unitaire) (1) ou la domination des Etats fédérés (la désagrégation) (2).

 1 - L’intégration des Etats fédérés


 Situation dans laquelle l’Etat fédéral va développer sa suprématie à l’égard des Etats fédérés. Pour cela, il va accroître ses
pouvoirs (a) et placer les Etats fédérés dans une situation de dépendance financière (b).
 a) L’accroissement des pouvoirs de l’Etat fédéral. L’Etat fédéral accroît et centralise ses compétences au détriment des
Etats fédérés. L’accroissement est parfois explicite : on révise la constitution pour transférer des compétences des Etats
fédérés vers l’Etat fédéral (16ème amendement à la constitution américaine qui permet aux autorités fédérales de percevoir
des impôts). L’accroissement peut aussi être implicite : les autorités fédérales vont interpréter de manière très large les
textes juridiques. Aux Etats-Unis, la constitution attribue à l’Etat fédéral des compétences financières et monétaires. Dès
lors, le pouvoir fédéral va s’accorder le droit de créer des institutions qu’il juge sous-entendues par le texte constitutionnel,
par exemple une Banque fédérale (théorie des pouvoirs implicites). Dans les deux cas, l’autorité juridictionnelle chargé
d’arbitrer les conflits entre Etat fédéral et Etats fédérés, a abondé dans le sens de la centralisation (elle partage
généralement la culture juridique et politique fédérale).
 b) La dépendance financière des Etats fédérés. L’Etat fédéral peut augmenter sa participation financière au
développement économique et sociale des Etats fédérés et créer ainsi une dépendance. Le système est très efficace
quand il s’agit de subventions conditionnelles. L’Etat fédéral redistribue le produit des impôts aux Etats fédérés à condition
que ceux-ci mettent en oeuvre la politique définie par les autorités fédérales. Aux Etats-Unis, on a subordonné l’octroi de
ces aides financières à l’instauration d’un système de sécurité sociale à l’intérieur des Etats fédérés (programme fédéral
Medicaid destiné aux plus défavorisés).
 Avec ce phénomène d’intégration des Etats fédérés, le fédéralisme change de perspective : l’Etat fédéral n’est plus un
instrument au service des Etats fédérés, il devient une fin en soi. La formule de Tocqueville doit alors être inversée : le
pouvoir de l’Etat fédéral est devenu la règle, celui des Etats fédérés n’est qu’une exception. L’Etat fédéral tend à se
rapprocher de l’Etat unitaire fortement décentralisé, même si, d’un point de vue strictement juridique, les différences
demeurent.

 2 - L’autonomie des Etats fédérés


 Le mouvement d’intégration des Etats fédérés a engendré une réaction en sens inverse. Certains Etats fédérés tentent
d’obtenir une redistribution des pouvoirs au sein du système fédéral (a). D’autres en sont purement et simplement sortis,
provoquant ainsi la désagrégation de l’Etat fédéral (b).
 
a) La redistribution des pouvoirs. Aux Etats-Unis, la tendance à la sujétion des Etats fédérés a été remise en cause avec le
new federalism prôné, puis appliqué par R. Reagan après son élection en 1980. Volonté de désengagement financier de
l’Etat fédéral pour alléger les contraintes budgétaires (jugées anormales devant la prospérité économique des Etats
fédérés) et réduire un déficit particulièrement difficile à contrôler. À l’heure actuelle, réduction de l’assistance financière
fédérale. La tendance centralisatrice a donc marqué un léger recul depuis quelques années aux Etats-Unis. Mais il s’agit
surtout d’une redistribution économique, non d’un relâchement de l’Etat fédéral.
Le seul Etat fédéral occidental a résister réellement au schéma de centralisation est l’Etat allemand. Cela résulte de son
système de répartition des compétences. En effet, dans le domaine de la législation concurrente, la coopération du Bund et
des Länder est obligatoire. En pratique, le Bund fixe les principes généraux et les Länder déterminent les conditions
d’application. Si par souci d’uniformité, le Bund veut légiférer dans le détail, il lui faut obtenir un accord exprès des Länder.
On constate donc une résistance fréquente des Länder à la politique fédérale. Plusieurs réformes constitutionnelles ont
encore augmenté les pouvoirs des Länder. En 1974, une réforme essentielle a posé le principe de la parité entre la
fédération et les Länder. Ceux-ci ont désormais le droit de signer des traités entre Etats-membres. C’était la base d’un
fédéralisme coopératif. Une étape supplémentaire a eu lieu entre 1983 et 1990. Plusieurs transferts de compétence ont été
réalisés en faveur des Länder. Ceux-ci disposent maintenant d’une souveraineté nationale limitée qui leur permet de signer
des accords internationaux.
 
b) La désagrégation. Dans les pays de l’Est, le fédéralisme a abouti à l’éclatement des ensembles fédéraux. De manière
spectaculaire, l’Union soviétique a implosé sous l’effet de la montée des nationalismes et de l’intégrisme islamiste dans les
républiques d’Asie centrale. Au terme de la politique de glasnost (transparence) menée par le dernier dirigeant de l’URSS,
Mikhaïl Gorbatchev, et en raison de l’érosion de l’idéologie marxiste, la dislocation de l’empire soviétique s’est réalisée de
manière pacifique entre 1989 et 1991. L’U.R.S.S. a donné naissance à 15 nouveaux Etats qui se sont les uns après les
autres proclamés indépendants. La Russie a conservé le modèle fédéral sur un territoire qui reste très étendu. Le
fédéralisme a également éclaté de manière pacifique en Tchécoslovaquie par la démission des dirigeants (1989), de
manière violente en Yougoslavie par le déclenchement de la guerre civile en 1991.
 

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