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Introduction:

Dire la figure du tzar, c'est essayer de dresser son portrait. Hors, cette mission ne saurait
être évidente. Dans un contexte moyenâgeux marqué par la domination de l'église, les trouble,
l'instabilité sociale et politique, le Tzar ne saurait, par conséquence, se satisfaire d'une seule
apparence. Il se doit de s'adapter et de changer de couleur suivant les circonstance et les
imprévus. Ainsi, saisir cette figure dans un état figé, constant s'avère être une illusion. Du
parcours ascensionnel au pouvoir aux aléas de son exercice, la figure du Tzar se construit, se
met à nu avant de se déconstruire. Dans Boris Godounov de Pouchkine, deux Tzar se
rencontrent offrant ainsi une image quasi complète de l'ascension à l'exercice avant de chuter.
A partir de Ces deux figures Tsarine, Boris en exercice et le faux Dimtri en ascension, nous allons
essayer de saisir la figure du tsar dans ses divers états. les deux politiciens nous serviront donc
de guides. Leurs portraits sera décelé d'après les interactions qu’ ils entretiennent avec les
principaux acteurs qui participent au pouvoir: le peuple, les boyards dans le contexte russe,
l'église, mais surtout à partir de l'introspection rendue possible grâce aux monologues auxquels
ils se divrent dans les moments intimes. l'on pourrait ainsi interroger le caractère ambivalent
et ambigu de la figure du tsar, chose qui lui confère son statut tragique.

I/ La figure du Tzar aux yeux des autres:

Le portrait du Tsar, sa figure, soit en exercice ou en ascension, se construit d'abord à


travers les dires de ceux qui participent décisivement au pouvoir. Dans notre pièces, les
boyards, le peuple et l'histoire incarnée dans la figure du père Pimène offrent une première
esquisse des deux Tsars.

1/ aux yeux des boyards:

Dans la Russie moyenâgeuse, les boyards, cette classe sociale noble, participent
activement à l’exercice du pouvoir. Ils sont en effet très proche de la cour. Dans la plupart des
cas, ils occupent la fonction de conseillers du tzar, ils octroient une certaine légitimité à ce
dernier. Dans ce sens, il très significatif que la pièce s'ouvre sur une scène entre deux boyards
avant l'intronisation de Boris: Vorotynski et Chouiski dans les salles du Kremlin. C'est à travers le
dialogue entre eux que se dessine aux yeux des lecteurs les premiers germes du portrait du
nouveau Tzar Boris, qui est sur le point d'être couronné, avant qu'il monte sur scène. Le portrait
initial de Godounov est fait essentiellement par Chouiski qui tente de convaincre son
interlocuteur et par ricochet le le lecteur ( la double énonciation) de la monstruosité du Tzar. Le
tzar nous est donc présenté sous l'image d'un tyran, un diable qui aurait été derrière
l'assassinat du tsarévitch: " Que le sang de l'enfant du Tsarévitch aura été versé pour rien; le
petit aurait pu vivre. Toutefois et malgré le récit bien ficelé de Chouski, ses arguments ne sont
peu convaincants: J'arrivais sur les traces toutes chaudes.... P 9. Ce qui installe déjà un certain
doute quant à la véracité des faits historiques. Boris, toujours selon les dires de Chouiski, nous
est décrit comme un assassin capable de toutes les atrocité et les manigances pour accéder au
pouvoir:" il montera -il a du coeur au ventre" P10. Il est un monstre dépourvu de toute
émotion. De ce fait, il est déjà pris comme cible par les boyards pour le dévaloriser aux yeux du
peuple qui serait charmé de ce meurtrier cruel, ce qui annonce donc un autre aspect de la
figure de Boris avant l'ascension au pouvoir: sa capacité à jouer sur les sentiments du peuple
par l'amour et la crainte.

Du côté du faux Dimtri, bien qu’il soit déjà mis en scène, les boyards, à travers la voix de
Pouchkine, à la page 46, dressent plutôt un portrait séduisant de cet usurpateur comme le
surnomme chouiski. Le faux Dimitri est décrit par Pouchkine comme intelligent, sympathique et
drôle à la page 46. Cette image du faux Dimtri contraste avec celle attribuée à Boris. Une image
qui en dit long sur les intention des boyards qui voient en Dimitri certes un usurpateur mais,
pour eux, le plus important c'est qu’il incarne la main de la délivrance:" évidemment, c'est un
usurpateur mais, je l'avoue, le danger est réel. Grande nouvelle! qu'elle arrive au peuple, elle
est porteuse d'un terrible orage, dit Chouiski à la page 47.

2/ aux yeux du peuple:

la fondation de tout pouvoir politique ne serait faite si elle ne repose pas sur la voix du peuple
au moins en apparence. Les acteurs politiques accordent grande importance à l'opinion du
peuple quoique ces derniers soient conscients de la versalité de ce dernier. Dans le cas de Boris
Godounov, le peuple, avant l'intronisation de Boris, paraît aspirant et soupirant. Il est à l'image
du peuple dans Richard III qui est cet amant qui cherche à séduire à tout prix le Tzar pour qu'il
le gouverne: " Oh mon dieu, mais qui régnera sur nous Malheur à nous à la page 13 . C'est
cette image permet de dire que le Tzar est légitimité par le peuple en apparence. En fait le
peuple est conscient de ce qui se joue et il participe de sa part au jeu politique d'où son
caractère de victime complice :" mais quoi?il faut pleurer, lui, rien du tout! que je te... ! hou,
le coup! pleure, mignon! P16 cette scène d'une commère qui oblige son enfant à pleurer
traduit le caractère comédien du peuple. Toutefois, construire la figure du Tzar en suivant le
point de vue du peuple laisse voir une portrait contradictoire qui en dit long sur le caractère
changeant du peuple. Si le Tzar au début de la pièce est à l'image de la vierge sollicitée, vers la
fin, il devient un assassin qui aurait tué le tzarévitch et de fait ses enfants méritent d'être
assassinés: liez-le! noyez-le! A mort, à mort le sang des Godounov. La voix du peuple dans
cette scène rejoint donc celle de l'innocent, l'unique personnage qui a osé affronter Boris et
l'accuser d'avoir tué le Tzarévitch:" les petits enfants à Nikolka... fais-les égorger comme tu as
égorgé le tzarévitch: P 90 . Et la dessus nous pouvons nous demander si la voix de l'innocent ne
reflète pas celle de l'auteur. L'attitude passive du Tzar suite à cette scène rejette encore de
l'ombre sur la figure de ce dernier.

Lors de son parcours ascensionnel, le Faux Dimitri est vu par le peuple comme un sauveur. Il est
devenu le Tzar légitime envoyé par Dieu pour les délivrer de la tyrannie de Boris. le privilège
octroyé à Boris au début de la pièce s'achemine vers Dimitri, il est acclamé et légitimé:" On
attend quoi? le boyard a dit vrai. Vive Dimitri, notre père et monarque"P 111. Nous
constatons donc cette opposition entre les deux figure Tzarine. la figure construite par le
peuple de Dmitri en ascension rappelle celle attribuée à Boris en ascension. Ce caractère
cyclique semble être entériné par la dernière didascalie de la pièce après l'intronisation de
Dimitri " le peuple fait silence" qui suggère déjà le mécontentement du peuple après cette
ascension acquise dans le sang.

3/ aux yeux de l'histoire:

L'histoire est représentée sur scène par la figure du Père Pimène. Ce chroniqueur s'adonne un
jeu de déchiffrement dans une sorte de mise en abyme de l'écriture théâtrale de l'histoire. A
Travers un récit de mémorialiste, le Père Pimène revient sur l'assassinat violente du Tzarévitch.
De ce récit surgit une volonté affichée de vouloir responsabiliser Boris. Le récit de Pimène, à
l'instar d'ailleurs de celui du boyard chouiski, diabolise Boris et fait de lui l'assassin des enfants:
L'ire de Dieu tombe sur nous, pécheur- nous nous sommes choisi un régicide Pour souverain
P26. Ce portrait sombre d'un Boris assassin semble être consigné, par la figure de Pimène, dans
l'histoire. Il sera désormais transmis d'une génération à une autre par d'autres moines.
Pouchkine par ce récit n’affirme t il pas la mission véritable de l'écrivain: dire la vérité quand
tout le monde reste muet. Pimène est la voix de l'histoire qui condamne irrévocablement la
figure de Boris aux yeux des générations à venir. L'image du tsarévitch égorgée telle peinte par
Pimène accompagnera désormais la figure de Boris:" et là miracle! le défunut frisonne:
"repentez vous " leur crie la foule, et eux épouvantés, avant le coup de hache, ils se
repentent- désiganant Boris P27. Si il est vrai que l'intrusion du père Pimène, comme porte
parole de l'histoire permet d'éclaircir les zones d'ombre quant à l'assassinat du Tzarévitch,
toutefois, les historiens s'accordent en grande partie à dire que Boris n'est pas responsable de
la mort du petit Dimitri.

Quant au faux Dimitri, il serait difficile de lui dresser un portrait qui se base sur l'histoire sans
revenir sur Les Esquisses de la préface à Boris Godounov écrite par Pouchkine. Dimitri y est
présenté comme un brave, généreux et gascon. Il est proche à Henri IV dans son indifférence à
la religion; tous deux abjurant leur foi pour cause politique, tous deux aimant le plaisir et la
guerre, tous deux se donnent dans des projet chimérique- tous deux en butte aux conspiration"
p122.

IL s'agissait donc dans cette première partie d'essayer de faire une esquisse du portrait
des deux figure tzarine de la pièce selon un point de vue extérieur ( les dires des boyards, du
peuple et de l'histoire). L'analyse de ces deux portraits, nous a permis de constater une forte
opposition entre la figure d'un Boris en exercice et celle du faux Dimitri en ascension. Il serait
donc nécessaire d'appréhender les personnage en scène pour mieux saisir l'essence qui les
construit. Ce deuxième moment d'analyse aura donc pour objet d'affirmer ou d'infirmer le
portrait attribué aux deux personnages par des forces extérieure.

Deuxième partie: le Tsar en scène: ambiguïté et ambivalence:

la figure des deux tzar s'avère en réalité très compliquée à analyser. Elle insaisissable,
changeante, floue, voire contradictoire et ambivalente. Elle change au gré des situation: sphère
privée/ Sphère publique...

1/ De la maîtrise de l'art oratoire au langage creux:

L'apparition tardive de Boris sur scène suscite la curiosité du lecteur. Cette apparition est donc
censée affirmer ou infirmer le portrait qu'on a brossé de lui dans la scènes précédentes. Il
apparaît au milieu des boyards au moment de son intronisation. L'on assiste donc à un Tzar qui
maîtrise à merveille l'art oratoire qui permet de séduire à la fois la foule, les courtisans de la
cour et les hommes de l'église. Il incarne par excellence la figure du prince chrétien insoucieux
du trône et du pouvoir terrestre:" O père patriarche, et vous, boyards, mon âme devant vous
s'est mise à nu: vous l'avez vu, je monte sur le trône immense le coeur humble, empli de
crainte. O l'écrasante charge du devoir! P18. Son discours, organisé rhétoriquement, fait
preuve d'une maîtrise parfaite de l'art oratoire. Il est censé légitimer son ascension au trône.
Une légitimité qui prend racine de la volonté du peuple et de la bénédiction de l'église:" envoie
à celui que tu aimes ta bénédiction sainte sur le trône". Son pouvoir, contrairement aux dires
de Chouisky, n'émane pas d'une volonté obsessionnelle du pouvoir, mais de la volonté divine.
Dieu l'a choisi pour le représenter sur terre. Il se présente le pouvoir comme un fardeau qu'il
est obligé de porter. Cette attitude rappelle celle de Richard III. La figure qu'essaie de
transmettre Boris dans cette première apparition sur scène est bien celle d'un souverain
légitime espéré par le peuple et non celle d'un tyran, farceur et comédien véhiculée par
Chouiski. Si Boris au début de la pièce apparait plutôt dominant, force est de constater que
cette maîtrise de l'autre qui passe par le langage tend à de se dissiper au fur au mesure que le
Tzar est confronté aux aléas du pouvoir. Ainsi, à la première épreuve, quand l'assaut du faux
Dimitri s'approche, il se trouve dépourvu de ses atouts. Son langage devient creux, peu
performatif et dépourvu de toute valeur et efficacité, rempli de doute et d'hésitation: "je ne
montrerai plus de peur- mais mépriser serait une autre faute, oh qu'elle est lourde, la
couronne russe: P 57.

De la même façon, le faux Dimitri, lors de ses discussions avec les différentes composante de la
cour polonaise, fait preuve lui aussi d'une grande malléabilité. Il sait jouer et porter des
masques, il est un véritable comédien protéiforme. L'usurpateur adapte son discours en
fonction de son interlocuteur. Il est le prince chrétien avec le pater:" Nous changerons, mon
père ces pratiques- Mon peuple n'a aucun secret pour moi. P 58, il est le poète capable de
savourer les beaux vers et d'en produire quand il s'adresse au poète:" j'aime la voix de la muse
latine et ces fleurs du parnasse m'ont touché. P63. Toutefois, le discours du faux Dimitri se
trouve fragilisé marqué par l'hésitation et le doute tout comme celui de Boris quand il se trouve
à la frontière lituanienne: vous levez les armes pour le tsar, vous êtes purs. mais je vous mène
moi, contre vos frère; j'ouvre la Russie ..... 78.

2/ De l'affection à la tyrannie

S'il est vrai que le tsar est un acteur politique, mais il est avant tout un acteur dramatique. Dans
ce sens la figure paternelle d'un tzar, affectueux et sensible aux souffrances de sa fille, veuve
avant son mariage, participe à le rendre sympathique aux yeux des spectateurs. Cette autre
face permet de l'humaniser: " Eh bien Xénia?eh bien, ma chère enfant ?........ pourquoi toi qui
est pure souffres tu ? P 50. Cette scène nous dévoile un Boris méconnu, il est comme
métamorphosé. Il s'accuse et se retrouve incapable de rendre sa fille heureuse. Il se rend
compte que son pouvoir de tsar ne lui permet pas de rendre ses siens heureux, d'où les limites
du pouvoir politique, chose qui confère à la scène son caractère tragique. Cette image d'un père
affectueux extraite d'une scène intime contraste visiblement et dans la même scène avec celle
d'un Tsar qui reprend les ficelles du pouvoir et se montre tyrannique tortionnaire face à
Chouisky: Réflechis bien. je te promet la grâce .... P56. Boris, en rage, se prend pour Ivan le
terrible et se propose même de le dépasser en terme d'atrocités. Il se révèle capable d'infliger à
Chouisky les châtiments corporels les plus affreux pour garder son pouvoir. Cette image d'un
souverain tyran, si à première vue pourrait corroborer les dires de Chouisky , c'est en réalité
tout à fait légitime vu son statut de monarque. Le tzar est conscient du double jeu dont ce
comédien de Chouisky est capable.

Dans la même perspective, le faux Dimitri s'avère être capable de réaliser ce passage de la
tyrannie à l'affection et ves versa. Dans la scène, qu'on pourrait assimilée à une rencontre
amoureuse avec Marine, l'usurpateur se montre pris au piège de l'amour. Il devient affectueux,
romantique et capable de tous les sacrifice pour prévaloir son amour. Son discours amoureux,
dans une scène parodique, le rend aux yeux des spectateurs un véritable héros romantique,
fragile qui fait passer l'amour au dessus de tout. Toutefois cette image contraste avec la figure
d'un Dimitri tyran, prêt à commettre des crime pour accéder au pouvoir:" courage, vous,
victime innocents- laissez-moi parvenir jusqu'à Moscou et là , Boris devra rendre des comptes
P 62.

3/ du fin stratège à un souverain dépassé par les événements:

Si Boris Godounov parvient à accéder au pouvoir c'est en grande partie grâce à son habilité et à
sa capacité à rallier les boyards, le peuple, et l'église à sa cause quoique en apparence. Il est
donc intelligent, ambitieux et connaisseur des affaires publiques et des coulisses politiques. Il
sait feindre, il est protéiforme, et capable de manipuler les forces qui pourraient lui accorder le
pouvoir. Après son intronisation, il se présente aux peuple comme étant la rassembleur, et celui
qui garantit l'unicité de la Russie:" Puis invitons tout le peuple au banquet, des dignitaires aux
mendiants aveugles, l'entée est libre- à tous, la bienvenueP 19. Ces déclaration rendent la
figure du tzar encore plus ambiguë, le lecteur hésite, il ne sait pas si le Boris est sincère ou s'il
s'agit uniquement d'un discours théâtral maîtrisé pour asseoir son pouvoir. Ce qui est certain
c'est que cette scène présente un tsar soucieux des intérêts de ses sujets. Or, force est de
constater qu'une fois sur le trône et confronté au premier danger, le Tzar se révèle être
incapable de gérer la situation. Il est dépassé par les événements, et il est le dernier à s'être
informé de l'approche de l'assaut du l'usurpateur. La scène avec Chouisky est très révélatrice
dans ce sens. L'attitude inférieure qu'adpote le tzar face à son interlocuteur le trahit, il ne cesse
de poser des questions: cet usurpateur qui est ce ? Est ce un danger? De Dimitri!comment? de
cet enfant! ... P54 . Boris se montrer détaché de la réalité de ce qui se passe. Son attitude est
marquée par l'hésitation, la perturbation: il donne des ordre à tort et travers , rappelle celle de
Richard dans la scène qui précède la bataille de Broswoth face à Richmond.

Dans le même , le Faux Dimitri, lors de son ascension au trône, se donne de lui l'image d'un
rusé, un fin calculateur qui ne laisse rien au hasard. Lors de sa rencontre avec la cour polonaise,
il montre qu'il connait ses interlocuteurs, il connait leur passé, leurs descendanP60 Sa
discussion avec Kourbski est illustrative:" A Kourobski: es tu parent du héros de kazan... P60.
cette brève scène avec Kourobski est censée légitimer ce futur Tzar et confirmer le personnage
qu'il joue " le tzarévitche. La scène de la ruse dans l'auberge avec les gendarme où l'usurpateur
a fait peuve d'une grande capacité d'improvisation: un vrai comédien, contribue aussi a
confirmer ce statut. Néanmoins, au fur et mesure que les choses deviennent sérieuses, le faux
Dimitri semble perdu et entrainé par les événements. Il s'endort lors du combat et paraît peu
soucieux de la mort de son cheval plutôt que d'être préoccupé par la défaite de ses troupes: ce
qu'il regrette ? Son cheval! notre armée, pendant ce temps, est en déroite. P96 . Si Boris
semble être dépassé par les événements malgré lui, Le faux Dimitri agit en réalité selon sa
fantaisie.

Nous avons donc essayé de montrer tout au long de ce deuxième moment d'analyse
que la figure des deux Tzar, Boris en exercice et Dimitri en ascension, est marqué par
l'ambiguïté et l'ambivalence. Lesquelles confèrent aux deux personnages leur caractère
tragique.

Troisième partie: héros ou anti-héros tragique?

la solitude, les tourments de la conscience permettent d'attribuer aux deux personnages leur
caractère tragique, ce qui les rendent sympathique aux yeux des lecteurs.

1/ Une solitude tragique:

Avant son ascension au pouvoir, Chouisky reconnaît que Boris a su séduire le peuple: par la
peur et l'amour et la gloire à la page 12. Cependant, une fois sur le trône, le Tsar se trouve
délaissé par tout le monde sauf quelques courtisans sournois qui excellent dans l'art de la
flatterie courtisane: Chouisky: ton pouvoir est fort. Par tes grâces, ton zéle, tes largesses, tu as
conquis le coeur de tes esclaves P54. Au moment où Chouisky prononce ses mots, il est
parfaitement conscient que le pouvoir de Boris est en danger comme ile le dit lui même à la
page 47: " évidemment, c'est un usurpateur mais, je l'avoue, le danger est réel. Chouisky
maîtrise l'art de la simulation, il sait ce que Boris a besoin d'entendre et il le lui fait entendre,
c'est véritable comédien qui imite avec talent le sentiment de l'amitié: " ce n'est pas le supplice
qui fait peur c'est ton rejet"P56. Si le tsar se sent seul c'est surtout qu'il se voit abondonné par
le peuple. Lors de son monologue qui nous a permis de pénétrer dans son esprit, Boris fait le
constat amèr d'un peuple ingrat, changeant. Il a longtemps couru derrière l'amour de cette
canaille, comme il le qualifie lui même, sans résultat. Il est accusé de tout par de tous les
malheurs: " je leur fais construire ...... va, chercher son amour" P32. Cette situation révèle que
Boris n'a pas réellement été aimé ni par le peuple ni par son entourage, il s'agissait tout
simplement de rapport de soumission et d'intérêt. Tout comme Boris, le faux Dimitri qui, au
début de sa campagne, ne semble pas manquer d'amis ni de la solidarité du peuple: Pouchkine:
on dit qu'il est ..... le couvre de bienfaits et veut l'aider P46. Toutefois, il se rend compte qu'il
n'est entouré que de personnes obsédées par leur intérêts personnels, ce qui exclut tout toute
amitié sincère et affecte Grigori, personnage romantique par excellence. La scène avec Marine
est démonstrative dans ce sens.

2/ Des conscience tourmentées:

Le monologue de Boris godounov, juste après son ascension au pouvoir, le montre un


monarque tourmenté, déchiré. Le bonheur, que devrait lui conférer la conquête du pouvoir,
laisse place à un sentiment de tristesse et d'amertume. Le monologue nous brosse le portrait
d'un monarque en crise de conscience: «pauvre est celui dont la conscience est lourde"P33. La
désillusion face au pouvoir vient de la prise de conscience de Boris du caractère vaniteux de ce
dernier, c'est une leçon politique sur la tragédie du pouvoir. Toutefois, si le souverain se trouve
tourmenté, la cause de cette crise de conscience reste ambiguë. L'on ne sait pas si Boris est
derrière l'assassinat du Tsarévitch ou non. La conscience de Boris le châtie, c'est une punition
divine qui s'abbat sur lui. Boris se trouve pris au piège d'un pouvoir tentateur qui l'entraîne à la
violence. Boris avoue avoir commis des crimes d'où les tourments de sa conscience:" mais
qu'un seule tâche s'y découvre; rien qu'une seule, une tâche fortuite, malheur à vous . Si
Auguste parvient à se réconcilier avec sa conscience par sa maîtrise de soi qui permet la
maîtrise de l'univers, Boris meurt sans se repentir. Sa mort ressemble à une punition divine: " il
est tombé de son trône, il est mort". Son crime quoique non identifié semble être à l'origine
de tous ses malheurs.

Tout comme Boris, l'imposteur connaît, lui aussi, les remords de la conscience. Ainsi, en
dirigeant vers la frontière moscovite, alors qu'il se prend pour la main de dieu pour venger le
peuple de Boris, l'usurpateur se trouve pris d'une crise de conscience:" il avance lentement,
tête baissée" P77. l'usurpateur se voit doublement traître: il a trahi sa patrie contre laquelle il
marche à la tête d'une armée étrangère, et il a trahi sa confession en se convertissant au
catholicisme d'une part et en concluant un pacte avec le Pater polonais qui le contrait à
convertir tout le pays. L'imposteur se trouve pris dans une double identité ce qui lui tourmente
la conscience: " le sang russe, Kourbski..... pourtant mon péché ne tombe pas sur moi, mais
sur Boris le régicide"P78.

la conscience déchirée des deux personnages suscite la pitié et la compassion des spectateurs
participant ainsi à renforcer leur caractère tragique.

3/Cathérsis et identification: des personnage qui suscitent la compassion du lecteur

Le monologue de Boris Godounov mis à nu le personnage devant le spectateur, ce qui permet


de l'humaniser. Il se dévoile, confesse ses crimes et déclare son impuissance face aux aléas du
pouvoir. C'est un personnage qui place l'amour au dessus de tout. Le lecteur ne peut qu'être
ébloui et éprouver de la pitié pour ce personnage isolé et abandonné à son sort tragique. la
tranquillité de l'âme et de l'esprit le fuit. Ce qui rend encore plus le tsar sympathique aux yeux
du lecteur, c'est son caractère antimachiavélique. Il se montre dans la posture d'un monarque
qui croit encore au pacte sacré entre lui et le peuple d'où son caractère romantique. Il se trouve
déçu par la versalité du peuple:" j'ai ouvert nos greniers.... va chercher son amour". P32.
Même dans la sphère privée, le bonheur lui échappe, et il est impuissant de le garantir à sa fille,
il est accusé de tous part.

Boris, tout comme l'imposteur, se trouve pris au piège du pouvoir. Il ne peut pas se défaire de
ce fardeau qui le suit et le tourmente. En effet, l'usurpateur, lors de la scène amoureuse avec
Marine, tente en vain de se démasquer, d'ôter le masque du futur tsar pour se faire valoir pour
ce qu'il est, toutefois, il se rend compte que c'est ce masque qui le fait et qui le vaut de l'estime.
Cette scène révèle, d'une part, le pouvoir de l'amour qui fragilise et pousse l'usurpateur à
renoncer aux privilège que lui attribue son statut du futur tsar, et d'autre part, elle met en
scène l'autre face du personnage. Un Grigori romantique et sentimental, chose qui lui garantit
la sympathie des lecteurs.

Conclusion:

En somme, l'analyse de la figure du tsar dans l'oeuvre de Pouchkine, nous a révélé l'amibuité et
l'ambivalence qui constituent l'image centrale des deux tsar de la pièce. Saisir la figure du Tsar
dans un portrait figé et constat s'avère être une illusion. Ainsi, l'image qu'on donne des deux
tsar dans les discours des autres personnages est à la fois vraie et fausse. Les deux personnages
semblent être en lutte contre un destin qui les dépasse. Le destin de Boris est incarné dans
Gigori. L'on ne sait pas si il s'agissait de deux héros ou deux antihéros. Boris est il un criminel ou
un souverain exemplaire? Grigori incarne t il la main de dieu ou est il un simple personnage
romantique, improvisateur se laisse entraîner par ses caprices? les deux personnages ne sont ils
pas un prétexte pour montrer la dangerosité du pouvoir et son caratère vaniteux? Il dans ce
sens parlant que les deux ne sont jamais rencontrés dans la pièce.

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