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QUELLE JUSTICE POUR L'AUTRE ?

LA DIFFÉRENCE FÉMININE DANS


L'ÉGALITÉ

Janine Elkouby

In Press | « Pardès »

2013/2 N° 54 | pages 169 à 188


ISSN 0295-5652
ISBN 9782848352800
DOI 10.3917/parde.054.0169
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-pardes-2013-2-page-169.htm
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Quelle justice pour l’autre ?
La différence féminine dans l’égalité
Janine Elkouby

J ustice, égalité, différence : trois notions cardinales, indissociables de


la modernité, mais trois notions qui se trouvent aussi, déjà, de manière
insistante et répétitive, au cœur des textes fondateurs du peuple juif. Trois
notions, enfin, qui fondent le sentiment de mal-être, l’amertume et les
revendications de nombreuses femmes juives de notre époque.

JUSTICE, ÉGALITÉ, DIFFÉRENCE :


trois notions cardinales, indissociables de la modernité
C’est dans le souci de justice que s’enracine l’affirmation de l’égalité
entre les êtres humains : toutes deux sont au fondement même de la moder-
nité en Occident et trouvent leur origine dans la révolution française qui,
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il y a plus de deux siècles, renversa l’ordre politique et social en vigueur,
fondé sur une structure inégalitaire de la société, en abolissant les privilèges
et en posant le principe que les hommes naissent égaux en droits.
La notion d’égalité s’oppose à celles de supériorité et d’infériorité : le
signe = indique que deux personnes ont la même valeur, que l’une ne vaut
pas plus ou moins que l’autre, que toutes deux doivent être traitées de la
même manière et que l’une ne jouit d’aucun privilège par rapport à l’autre.
Postuler que les êtres humains sont égaux, c’est dire qu’ils ont les mêmes
droits et les mêmes devoirs, quels que soient la couleur de leur peau, leur
religion, leur nationalité, leur sexe, leur statut social, leurs choix ou leurs
convictions.
Le postulat de l’égalité entre les êtres humains constitue, incontesta-
blement, une avancée majeure de l’humanité et fonde la possibilité de la
justice.

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Janine Elkouby

Or la notion d’égalité semble se heurter à celle de différence : comment


envisager sur le mode de l’égalité une relation entre « objets » différents ?
Quel sens donner à l’égalité dans le contexte de la différence ? Comment
concilier ou réconcilier égalité et différence ? Comment concevoir que
les hommes et les femmes puissent être égaux tout en étant différents ?
Jusqu’ici, il faut le dire, égalité et différence ont toujours été appréhen-
dées comme des notions antinomiques Et en effet, traditionnellement, toutes
les sociétés à travers le temps et l’espace ont perçu et vécu la relation entre
les hommes et les femmes sur le mode de l’inégalité : partout et toujours,
les femmes sont « les autres », secondes et secondaires, reléguées dans une
infériorité « naturelle », qui est de l’ordre de l’évidence, et que personne
ne songerait à remettre en question, pas même les intéressées. La Chine
ancienne, le monde grec, Rome, le monde chrétien, le monde musulman
ont en commun ce postulat : il est « naturel » que les femmes soient dans
une relation de dépendance ou de soumission à l’égard des hommes. Et
le mythe grec des Amazones, ces guerrières féroces qui s’amputaient du
sein droit et tuaient leurs enfants mâles, ne fait que souligner en creux
cette misogynie et la crainte dans laquelle elle s’enracine.
La différence a été assimilée de manière si totale et si « évidente »
à l’inégalité, que nombre de féministes, aujourd’hui encore, se méfient
du « droit à la différence », depuis Simone de Beauvoir, qui s’exclamait,
dans une interview donnée au Nouvel Observateur « Ne me parlez pas de
différence ! » jusqu’aux courants essentialistes, qui récusent toute différence
autre qu’anatomique entre les sexes et qui revendiquent une similitude et
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une interchangeabilité totales entre les hommes et les femmes. Certains
partisans du « mariage pour tous » et certains idéologues radicaux de la
théorie des genres défendent l’idée que les prétendues différences entre les
sexes, loin d’être innées, seraient au contraire le résultat d’une éducation
et d’un conditionnement arbitraires et contestables, qu’ils travaillent
à détruire.
À l’inverse, des mouvances idéologiques diverses se sont saisies du « droit
à la différence » pour s’avancer, masquées, dans une lutte acharnée contre
l’aspiration à l’égalité : « la nouvelle droite », il y a quelques décennies, avait
eu recours à cet argument pour défendre l’inégalité entre les êtres humains,
sous couleur de militer pour « le droit à la différence ». Aujourd’hui, l’isla-
misme radical, soutenu par toutes sortes de mouvances postmodernes et
par une extrême-gauche visiblement en mal de repères, ne se fait pas faute
d’instrumentaliser ce même « droit à la différence » pour faire pièce à la
légitime revendication d’égalité entre les hommes et les femmes.

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Quelle justice pour l’autre ? La différence féminine dans l’égalité

Mais la justice peut-elle faire l’économie de l’égalité ? Est-il honnête


et sérieux de prétendre qu’elle puisse s’édifier sur le socle de l’inégalité ?
C’est une chose, en effet, de discuter sur un plan philosophique ou
purement théorique du bien-fondé de l’égalité, de la remettre en question
au motif qu’elle méconnaîtrait et mettrait en péril la différence, de s’offrir
le luxe intellectuel de déceler, au cœur de la revendication d’égalité, la
source d’une autre injustice, celle qui prétendrait réduire les différences
et niveler l’humain ; c’en est une autre, en revanche, de prendre appui
sur ces considérations théoriques pour justifier le maintien ou le retour
à l’inégalité.

JUSTICE, ÉGALITÉ, DIFFÉRENCE :


trois notions cardinales, indissociables du judaïsme
Si justice, égalité, différence ont partie liée avec la modernité, de
nombreux exemples semblent montrer qu’elles sont aussi au centre de la
pensée et du vécu des Juifs, de l’idée qu’ils se font du monde et d’eux-
mêmes, de la place et du rôle qu’ils assignent aux êtres humains, du
partenariat qui caractérise leur relation avec Dieu.
Est-il nécessaire de rappeler avec quelle insistance ces trois clefs de
lecture et de comportement ponctuent les textes juifs, que ce soit dans les
récits fondateurs ou dans les mitsvot, les commandements auxquels la
halakha soumet les Juifs ?
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Aux racines mêmes de la vocation juive, se trouve inscrite irrévoca-
blement l’obligation de pratiquer le droit et la justice, tsedaqa oumichpat,
signifiée sans équivoque à Abraham, le père du monothéisme et le premier
Hébreu et « à ses enfants après lui » 1.
L’histoire même du peuple d’Israël s’inaugure avec la sortie d’Égypte 2,
la libération des esclaves hébreux qui, s’émancipant de l’oppression et de
l’injustice dont les accable le pouvoir tyrannique du pharaon, proclament
du même coup l’exigence impérative de justice qui fonde leur existence
collective et individuelle. Une libération qui se lit aussi comme l’affirmation
solennelle que personne n’est prisonnier à tout jamais de quelque carcan
que ce soit, que les déterminismes peuvent – et doivent – être vaincus,
qu’il n’y a pas de fatalité et que le changement est possible. Une libération
emblématique de celle que chacun se doit à lui-même, car la liberté et la
responsabilité qui lui sont attachées le définissent comme un être humain
digne de ce nom.

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Janine Elkouby

Tsedeq, tsedeq tirdof, est-il prescrit 3 aux Juifs, tandis que l’interdiction
d’utiliser des poids et mesures falsifiés 4, ou de mettre un obstacle sur
le chemin d’un aveugle 5 ou de privilégier le riche ou le pauvre dans
un procès 6 ou de léser l’étranger, la veuve ou l’orphelin 7, ne sont que
quelques-unes des injonctions inlassablement répétées par le texte biblique
pour incarner l’exigence de justice.
L’égalité entre les êtres humains est inscrite d’emblée dans le récit de la
création : si l’adam a été créé unique, nous disent les rabbins du Talmud,
c’est afin que nul ne puisse dire : mon père était plus grand que le tien 8.
Les non-Juifs ont part au monde futur, pourvu qu’ils se soumettent aux
sept lois noachides 9. Si les sept peuples cananéens sont durement fustigés,
c’est en raison des abominations qu’ils commettent en sacrifiant leurs enfants
aux Baal 10, des divinités cruelles, et en pratiquant la prostitution sacrée.
L’idée messianique, qui inscrit dans la conscience des Juifs la possibilité
et le devoir de parfaire la création divine en la débarrassant de la violence
et de l’injustice, et en y instituant un ordre qui le rende habitable, ne
concerne pas seulement les Juifs mais la totalité de l’humanité : « Dieu
régnera sur des peuples nombreux et sera l’arbitre de nations puissantes.
Ils briseront leurs épées pour en faire des socs et leurs lances pour en faire
des serpes. On ne lèvera plus l’épée nation contre nation, on n’apprendra
plus à faire la guerre 11. » Car Dieu est le « Dieu de toute chair », comme
le dit le prophète Jérémie 12.
Quant au concept de différence, il hante littéralement les textes
bibliques : la Création s’accomplit par une série de séparations, de diffé-
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renciations, qui lui donnent forme et consistance en répudiant le magma
de la confusion originelle 13.
L’épisode fondateur, et si souvent mal compris, de la tour de Babel,
donne à lire, en contrepoint à la massification à l’œuvre dans le récit – « une
langue unique et des paroles uniques » – la bénédiction que représente la
pulvérisation de la « langue unique » en des langues diverses, et la chance
insigne de rencontre et de dialogue qu’elle autorise 14.
La notion de « peuple élu », elle aussi source de graves contresens,
signifie, comme nombre d’auteurs 15 l’ont fait remarquer, un surcroît de
responsabilités : le peuple juif se voit soumis, et souvent cela lui pèse, et
combien de fois a-t-il cherché à y échapper, à l’obligation de l’exemplarité
sur le plan éthique. Jonathan Sacks y voit la volonté divine d’introduire la
différence comme une valeur fondamentale de l’humanité 16.
Sur le plan de la Loi, il est interdit d’atteler ensemble un âne et un
bœuf 17, de tisser ensemble la laine et le lin 18, d’ensemencer un champ

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Quelle justice pour l’autre ? La différence féminine dans l’égalité

avec des espèces différentes 19. Un homme ne doit pas s’habiller comme


une femme et vice versa 20.

JUSTICE, ÉGALITÉ, DIFFÉRENCE :


trois notions cardinales indissociables de la conscience
féminine d’aujourd’hui
Elles sont, en effet, au cœur de l’amertume, de la protestation et des
revendications exprimées de nos jours par tant de femmes juives, qui
vivent comme une profonde et révoltante injustice de nombreux aspects
du statut qui leur est assigné. Un statut qui pourrait trouver une illustration
significative, par exemple, dans la formulation même du sujet que je suis
chargée de traiter aujourd’hui : « Quelle justice pour l’autre ? La différence
féminine dans l’égalité. »
Car le titre, centré sur ces trois notions de justice, d’égalité et de
différence, fait intervenir un quatrième terme, « l’autre » : au travers de ce
terme, qui désigne clairement et unilatéralement les femmes, se dessine
en toute logique la toile de fond d’une humanité perçue comme masculine
dans son essence, une humanité par rapport à laquelle la femme est, en
effet, l’autre, l’extérieure, l’étrangère, la non semblable.
Cette amertume, ce sentiment d’injustice et d’exclusion, ont pour toile
de fond le décalage patent, incontestable, entre le statut des femmes dans
la société d’aujourd’hui et celui qui reste le leur dans la société juive.
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Car le xxe siècle a révolutionné la vie des femmes : elles ont vu, pour
la première fois, le monde s’ouvrir à elles. La modernité leur a offert
des possibilités inespérées : l’accès aux études, au monde du travail,
l’indépendance économique, la libre disposition d’elles-mêmes les ont
libérées de la dépendance qui, dans tous les domaines, les soumettait à
l’autorité de leur mari et les ont fait passer du statut d’éternelles mineures
à celui de personnes à part entière. La modernité leur a apporté l’égalité
avec les hommes dans les domaines juridique, universitaire, professionnel,
politique, même si la théorie n’est pas toujours passée dans la pratique,
ainsi que le droit à l’épanouissement et à la réalisation personnelle.
Le libre choix a remplacé la détermination du modèle ou du moule
collectif dans lequel il fallait jusqu’ici impérativement entrer. La perception
que les femmes ont d’elles-mêmes a changé.
Les femmes juives, comme toutes les autres, ont bénéficié de ces
avancées inédites. Elles mesurent à sa juste valeur la chance qu’elles ont

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Janine Elkouby

de vivre à une époque où elles sont libres de leurs options ; et au moment


où, sous les auspices d’un islamisme radical inquiétant et offensif, parfois
naïvement relayé par des courants libertaires, et au nom du « droit à la
différence » habilement instrumentalisé, les droits des femmes semblent
pouvoir être relativisés, elles se sentent concernées au premier chef et
n’entendent renoncer à aucune de ces libertés si chèrement acquises.

LE DÉCALAGE DE STATUT
Cependant, au sein de la société juive, le statut des femmes accuse
un retard certain par rapport à celui dont elles bénéficient dans la société
globale ; il est resté, dans certains domaines en tout cas, archaïque. Elles
sont confrontées à une inégalité réelle sur le plan juridique et légal, elles
se heurtent à des pratiques, des comportements, des traditions qui les
entravent, les freinent dans la quête de ce que leur permet la modernité ;
elles sont confrontées à des problèmes parfois douloureux, qui les mettent
en porte-à-faux avec le monde dans lequel elles évoluent. Ce décalage est
sensible dans quatre domaines : la vie religieuse, la vie publique, l’accès
à l’étude et le droit familial.
−− Dans les communautés orthodoxes, majoritaires en France, il est
impossible pour une femme d’assumer une fonction cultuelle : elle ne
compte pas dans le minyan, le quorum de dix hommes requis pour faire
un office, elle ne peut témoigner en justice, elle ne peut pas conduire
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publiquement la prière, ni être appelée à la Torah. Tous les matins,
les hommes juifs récitent une bénédiction que beaucoup de femmes
jugent insultante et dans laquelle ils remercient Dieu de ne pas les avoir
faites femmes. Sur un registre social, autant les garçons sont valorisés
au moment de la naissance ou de la Bar Mitsva, autant les moments
importants de la vie des filles sont peu célébrés rituellement.
Récemment, la création à Paris d’un groupe de prière féminin, avec
lecture de la Torah pour et par des femmes, a rencontré une virulente
opposition du rabbinat, qui a interdit la poursuite de l’expérience, privant
ainsi d’autorité des femmes, qui se définissent comme des orthodoxes,
d’une expérience religieuse que rien, pourtant, n’interdit légalement.
−− La vie publique est elle aussi marquée par des discriminations : le
nombre de femmes dans les instances dirigeantes du judaïsme est peu
élevé ; elles rencontrent des obstacles plus ou moins francs dans leur
volonté d’accéder à des postes de responsabilité dans la communauté.

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Quelle justice pour l’autre ? La différence féminine dans l’égalité

Bien peu nombreuses en France sont les présidentes de communautés


ou de consistoires et il n’est pas rare d’entendre encore des affirmations
péremptoires selon lesquelles la loi juive interdirait aux femmes
d’occuper de tels postes. En témoigne le combat anachronique que
les femmes ont dû mener pendant un an pour pouvoir être éligibles
aux Consistoire Israélites 21 en Alsace-Lorraine, alors même que la
loi française exigeait cette éligibilité. Les résistances des hommes au
changement dans ce domaine sont énormes.
−− L’accès au savoir, alors même que l’étude, si centrale et constitutive de
l’être juif, est le premier devoir qui incombe aux hommes, demeure
limité pour les femmes, en France tout au moins : dans la plupart des
écoles juives, l’étude du Talmud reste exclusivement réservée aux
garçons. Or, rappelons-le clairement et sans ambiguïté, nulle part l’étude
féminine n’est interdite : les femmes en sont simplement dispensées,
comme elles le sont des mitsvot 22 positives dont l’accomplissement est
lié à un moment précis du temps 23. Les décisionnaires contemporains,
pour la plupart d’entre eux, insistent sur la nécessité pour les femmes
de s’impliquer dans l’étude, conscients que celle-ci constitue un facteur
incontournable d’identité 24. Mais les habitudes sont tenaces et la France
a, dans ce domaine, un retard considérable : alors qu’en Israël et aux
États-Unis, nombreux sont les instituts qui, comme Matan à Jérusalem,
offrent un enseignement de très haut niveau aux femmes, il n’existait
jusqu’ici dans notre pays aucun lieu qui dispense un enseignement
du Talmud à ces dernières ; cependant, un centre d’étude destiné aux
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femmes, le Bet Midrach Lenachim, a été créé en 2012 par Joëlle
Bernheim ; il s’adresse aux femmes quel que soit leur niveau de départ,
et a pour ambition de leur donner les outils linguistiques et culturels
nécessaires pour leur permettre d’étudier ; il assure pour la deuxième
année des cours quotidiens de langue, de Torah, de Michna et de
Guemara suivis par quatre-vingts élèves.
−− Le droit familial est le domaine où les problèmes qui se posent aux
femmes restent les plus graves et les plus douloureux : le divorce
religieux ou guet est, à l’origine, un acte de répudiation unilatéral. Ce
n’est que vers l’an 1000 que le consentement de la femme est devenu
obligatoire 25. Cette caractéristique peut entraîner des conséquences
dramatiques pour l’épouse : lorsque le mari disparaît sans laisser de
traces, tant que sa mort n’est pas avérée, la femme est considérée comme
mariée et il lui est interdit de refaire sa vie. Elle est une agouna, une
femme « ancrée » dans un mariage qui n’a plus aucune effectivité. Si elle

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Janine Elkouby

passe outre, les enfants qu’elle mettrait au monde seraient des mamzérim,
des enfants adultérins qui, à leur tour, seraient interdits de mariage. Mais
ces dernières décennies ont vu se développer un phénomène nouveau,
celui des messoravot guet : certains maris, par dépit ou par désir de
vengeance, refusent d’accorder le guet à leur femme, même dans des
cas où ils ont accepté de divorcer civilement, la condamnant ainsi à
rester prisonnière d’un mariage qui n’a plus aucune réalité, alors même
qu’il n’est pas rare qu’eux-mêmes refassent leur vie ; précisons que,
dans ce cas de figure, même si leur démarche est réprouvée, les enfants
qu’ils auraient ne sont pas des mamzérim. Certains rabbins prennent
conscience de l’ampleur grandissante du problème et dénoncent le
comportement odieux d’hommes qui exploitent cyniquement l’avantage
que leur donne, croient-ils, la halakhah, la loi juive, pour briser la vie
de femmes avec lesquelles ils ne vivent plus ou, autre nouveauté, pour
leur extorquer d’énormes sommes d’argent en échange du guet. Il serait
possible et nécessaire que les rabbins décident, d’un commun accord,
de prendre des sanctions contre ces hommes, en leur interdisant par
exemple de monter à la Torah, ou en publiant leurs noms : l’expérience
prouve que ces méthodes sont souvent payantes, car le scandale public
effarouche et fait peur. Mais force est de reconnaître qu’un certain
nombre de juges rabbiniques font preuve d’un surprenant laxisme face
au cynisme de tels maris.

L’évolution actuelle dans les communautés juives est marquée par un


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double phénomène : d’une part une assimilation galopante consécutive
à une perte du sentiment d’appartenance à la communauté, d’autre part
une recherche identitaire qui se traduit par un retour aux sources et à
l’étude, un accroissement de la pratique religieuse mais aussi par une
radicalisation de certains comportements, parmi lesquels une méfiance
à l’égard des femmes et une extension de la non mixité : la me’hitsa
qui sépare les hommes des femmes dans les synagogues orthodoxes
devient de plus en plus haute et de plus en plus opaque, au point que
les femmes ont souvent le sentiment d’être exclues ou niées. Dans les
activités extra synagogales, la non mixité devient plus fréquente, et
même quand il y a mixité, il n’est pas rare qu’une séparation spontanée
s’instaure entre hommes et femmes, dictée par une certaine crainte ou
fruit de l’habitude. Il n’est pas rare, non plus, qu’un homme pieux salue
dans la rue un homme de sa connaissance mais ignore superbement la
femme de ce dernier comme si elle était transparente. Les femmes se

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Quelle justice pour l’autre ? La différence féminine dans l’égalité

sentent irritées, blessées et même insultées par de tels comportements


qui les frappent d’inexistence.
Dans le catalogue hétéroclite et incomplet que je viens de dresser, il faut
bien entendu distinguer entre ce qui relève effectivement de la loi et ce qui
relève des habitudes plus ou moins ancrées et des codes sociaux. Mais la
distinction n’est pas toujours si facile à établir, car les coutumes, même si
elles n’ont pas force de loi, pèsent cependant d’un poids non négligeable
sur les comportements et il n’est pas aisé de nager à contre-courant.

LES RÉACTIONS
Comment les femmes réagissent-elles à ce décalage entre leur situation
dans la société en général et celle qui est la leur au sein de la société juive ?
La plupart d’entre elles éprouvent, à des degrés divers et de façon plus
ou moins consciente, un sentiment de malaise, une difficulté à recoudre
les perceptions différentes de leur place de femme dans leurs deux
ancrages identitaires. Elles vivent dans un contexte qui récuse les modèles
patriarcaux, même si ces derniers sont plus tenaces qu’il n’y paraît ; elles
se réfèrent à un modèle de couple égalitaire et complémentaire, non à un
modèle dominant-dominé.
Les recherches des féministes juives 26, essentiellement aux États-Unis
et en Israël, ont mis en mots ce malaise et l’ont analysé, en même temps
qu’elles lui ont donné un retentissement plus grand. Appliquant au fait
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juif le constat de Simone de Beauvoir 27, elles ont mis en évidence le
caractère patriarcal de la société juive et souligné cette réalité indiscu-
table que toute la littérature juive a été produite exclusivement par des
hommes et que la voix des femmes en est presque totalement absente.
Lorsqu’il est question des femmes, c’est toujours la représentation
forgée par les hommes, non la parole des femmes que l’on entend 28.
Le judaïsme, comme la quasi-totalité des civilisations, est le fait d’une
société patriarcale, pour laquelle l’humain se confond avec le masculin
et où le féminin est extérieur, autre, hors norme, défini non en lui-même
mais uniquement par rapport au masculin. Certains chercheurs affirment
que la tradition juive se préoccupe de la formation éthique et spirituelle
des hommes, de leurs possibilités d’approcher la réalité divine, mais que
ces mêmes potentialités ne sont guère cultivées chez les femmes. Ces
dernières, disent-ils, s’appuyant sur des textes du Talmud 29, ne sont que
les instruments de la réalisation masculine ; leur mérite, c’est de permettre

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Janine Elkouby

à leurs maris d’étudier et d’attendre leurs enfants – mâles ! – au seuil des


maisons d’étude 30. La aggada 31 est élogieuse pour elles dans le cadre
de cette définition ; mais cette même aggada, dans de nombreux textes,
témoigne d’une grande méfiance et même, parfois, exprime des jugements
méprisants ou peut-être empreints de crainte : « Il vaut mieux marcher
derrière un lion que derrière une femme 32 » ; « Il ne faut pas marcher
entre deux femmes, entre deux porcs, entre deux chiens 33. » Les femmes,
dans la plus pure tradition misogyne, ont d’innombrables défauts : elles
sont bavardes, curieuses, gourmandes, frivoles, peu intelligentes 34. La
démarche féministe en arrive souvent à refuser le statut de révélation
divine à un texte qui, si visiblement à ses yeux, établit et consolide les
normes injustes et datées d’une société patriarcale.
Ces critiques ne sont pas l’apanage des féministes américaines. De
nombreuses femmes mettent en question de façon plus ou moins radicale
ce qu’elles perçoivent comme une exclusion, et qu’elles vivent d’autant
plus mal que leur condition de femmes dans la société civile ne fait que
souligner a contrario les limites et les freins qui leur sont opposés en
tant que juives dans leur communauté. Certaines, au prix d’un grand
écart périlleux, cherchent un difficile équilibre ; d’autres exaspérées et
désespérées finissent par choisir le parti de la table rase et jettent par-dessus
bord un peu, beaucoup ou passionnément ce qui leur apparaît comme un
tissu vieillot de fils à la patte, mais toujours dans la douleur et avec le
sentiment inconsolé d’une perte. D’autres encore, prises de vertige devant
l’ampleur de la remise en question et des risques que celle-ci implique, et
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sentant vaciller dangereusement leur monde familier et les certitudes qui
le sous-tendaient, se replient, angoissées et nostalgiques, sur la position
d’une tradition refuge sécurisante où les places de chacun sont fixées et
reconnues une fois pour toutes.

L’IMMOBILISME
Force est de constater que, concernant la place des femmes, l’immobi-
lisme est roi dans la société juive d’aujourd’hui. On peut s’en étonner car,
dans le passé, la halakha – terme issu de la racine qui signifie marcher –
a su efficacement composer avec les changements sociaux et politiques,
et est ainsi restée vivante.
Quelles sont les raisons de l’immobilisme et du maintien têtu du statu
quo quand il s’agit des femmes ? Il n’est pas question, bien entendu, de

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Quelle justice pour l’autre ? La différence féminine dans l’égalité

procéder dans un temps si restreint à une analyse exhaustive. On peut


cependant risquer plusieurs types d’explications.
1) Les rabbins eux-mêmes, et ils sont sincères, font valoir l’impossibilité
de changer quoi que ce soit aux prescriptions bibliques, puisqu’elles sont
l’expression de la parole divine : ainsi, disent-ils, le divorce est dans la
Torah un acte unilatéral initié par le mari de son propre gré, il est donc
impossible que qui que ce soit se substitue au mari ou fasse pression sur
lui. Telle est bien la règle générale, en effet, mais l’application pratique
prend en compte de nombreux facteurs et il existe bel et bien des cas où
le tribunal rabbinique peut contraindre l’époux récalcitrant à donner le
guet. D’ailleurs la loi juive a évolué dans le temps et on voit bien, à suivre
le fil de cette évolution, que la marge de manœuvre des rabbins et aussi
leur audace ont été bien plus larges qu’ils ne le pensent de nos jours 35.
2) Une des raisons qui me semblent incontournables, c’est la crainte :
crainte précise ou diffuse, consciente ou inconsciente, justifiée ou irra-
tionnelle. J’en identifierai trois, les deux premières fantasmatiques, la
dernière plus fondée.
−− Crainte du changement, tout d’abord. Car le changement fait peur,
il vous expose à de l’inconnu, de l’imprévisible, il vous déstabilise ;
mieux vaut rester en terrain connu, s’en tenir au monde tel qu’il va, et
ne prendre aucun risque.
−− Crainte des femmes, aussi : voilà que les femmes, ces autres mysté-
rieuses, ces mères en puissance, douées de ce privilège démesuré de
porter la vie, voilà que les femmes prétendent sortir de leur domaine
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traditionnel, conquérir un monde jusque là réservé aux hommes, le
monde de la connaissance, le monde du pouvoir. Où sera donc désor-
mais la place des hommes ? Nombreux sont ceux qui, en effet, sont
angoissés face à l’ébranlement des modèles traditionnels, car ils ont le
sentiment de ne plus avoir de place, ils se sentent menacés dans leur
être même, se demandant plus ou moins consciemment qui ils sont et
quel est leur rôle à présent ?
−− Crainte de la modernité, enfin, ou plus précisément, des impasses
auxquelles elle risque de mener : retour en force de l’idolâtrie, culte
du pouvoir, de l’argent, de la force, massification, empire du vide,
aliénation et violence.
3) Autre raison de l’immobilisme : la décadence du pouvoir rabbinique.
Autrefois reconnu par la quasi-totalité de la communauté, il est aujourd’hui
battu en brèche et contesté ou tout simplement ignoré par une communauté
divisée, sécularisée, qui ne reconnaît plus son autorité, et la reconnaît

PA R D È S N °  5 4  179
Janine Elkouby

d’autant moins que les modèles qu’on lui propose lui semblent trop souvent
anachroniques et en rupture avec le monde réel ; par ailleurs, le rabbin,
qui était jadis, conformément à son nom, d’abord un maître, celui qui
enseignait et introduisait chacun dans le monde de la connaissance, a
le plus souvent été réduit dans le monde d’aujourd’hui, à un ministre du
culte et de la foi, à une figure cléricale, qui n’est plus en phase avec la vie
et qui doute de lui-même.
4) Enfin, dernière raison, la démission généralisée : démission de
tant de rabbins qui se réfugient dans un monde virtuel, vivant dans la
tour d’ivoire de leurs spéculations talmudiques et refusant de considérer
le monde tel qu’il est, démission de tant de « religieux » qui préfèrent le
confort d’une société fermée de gens semblables à eux, démission de tant
de non religieux qui sont, sans même en avoir honte, des analphabètes,
pire, des illettrés dans le domaine du savoir juif, démission de tant de baalé
techouva, ceux qui sont « revenus » au judaïsme et qui, par leur manque
d’exigence intellectuelle et leur docilité sont prêts à avaler n’importe quoi
en fait de judaïsme, démission des femmes, qui, en France, sont d’une
passivité et d’une docilité navrantes, et qui, piégées par l’ignorance et la
routine, prennent des vessies pour des lanternes et la surenchère pour la loi.

Voilà un constat peu optimiste, qui pourrait nous mener tout droit à
une remise en question radicale, à l’instar de certaines féministes et de
tant de femmes anonymes, qui sont venues me trouver à l’issue de l’une
ou l’autre de mes interventions pour me dire leur découragement et leur
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décision triste de claquer la porte.

ET POURTANT…
Et pourtant… La place des femmes, telle qu’elle apparaît dans le
récit biblique, est susceptible d’ouvrir d’autres perspectives, pour peu
qu’on se donne la peine d’examiner ce texte avec le sérieux et l’attention
qu’il requiert, et en tenant compte d’une dimension originale et propre
au judaïsme, une dimension susceptible d’ouvrir des issues là où tout
semblait bloqué : je veux parler de la centralité, dans le commentaire, du
questionnement et de l’interprétation.
Il est nécessaire de rappeler ici ce qu’est une lecture juive des textes
bibliques. La lecture juive se distingue de la lecture historico-critique :
celle-ci s’attache avant tout à l’historicité des textes, à leur datation, à leur

180 PA R D È S N °   5 4
Quelle justice pour l’autre ? La différence féminine dans l’égalité

authenticité, aux influences qu’on peut y déceler ; celle-là est une lecture
existentielle, qui interroge le texte tel qu’il est, dans son donné global. C’est
une étude attentive à chaque mot, à chaque silence, à chaque blanc du texte,
à sa structure, à ses anomalies, qui tous font sens ; elle utilise largement
l’intertextualité, faisant résonner entre elles les différentes significations
d’un même terme dans des contextes divers, les échos d’un terme à l’autre,
les associations d’idées ou de sens. Enfin c’est une étude qui saisit en bloc
les différentes strates d’interprétation qui se sont superposées et entrelacées
au texte écrit et qui forment la Torah orale, Michna et Guemara, elle-même
consignée par écrit entre 200 et 600. Pour la mémoire et l’imaginaire
juifs, Esaü et Moïse sont définis non seulement par les récits proprement
bibliques qui les mettent en scène, mais aussi par tous les enseignements,
les paraboles, les légendes qui viennent expliciter, éclairer, élargir ou
orienter les textes et les ouvrir ainsi à l’interprétation.

L’originalité de la Bible ne réside pas dans la description d’un statut


de rêve pour les femmes – et pour les hommes. La société biblique, c’est
incontestable, est une société patriarcale, dans laquelle le pouvoir et la
parole sont l’apanage des hommes, comme l’est la société de l’époque
du Talmud, comme l’ont été toutes les sociétés jusqu’à nos jours 36. Il est
tout à fait normal que ce soit cette société-là, et non celle de notre époque,
qui apparaisse dans les récits bibliques. Et il serait parfaitement puéril et
anachronique d’attendre d’un texte vieux de plusieurs milliers d’années,
qu’il décrive une société et des individus animés des préoccupations et
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des idées qui sont les nôtres aujourd’hui.
Mais rien n’interdit de considérer cette société patriarcale non comme
un idéal, mais comme un point de départ. Elle constitue un cadre, non
un modèle. Il y a une erreur de perspective qui me semble commune
aux fondamentalistes inconditionnels et aux détracteurs modernes de la
Bible : c’est précisément de considérer que la société patriarcale au sein
de laquelle évoluent les personnages bibliques est un modèle. Les uns
voudraient réhabiliter ce modèle, les autres jugent caduque la tradition
juive sous prétexte que la société qu’elle décrit n’est pas la nôtre.
L’originalité de la Bible, c’est d’offrir au lecteur un « texte à trous », qui,
loin de l’emprisonner dans un sens préétabli et clos, l’incite au contraire à
creuser sous la surface du texte et à le décrypter, à y frayer son chemin en
suivant un « fléchage », des « panneaux indicateurs » susceptibles d’orienter
le parcours historique, individuel et collectif, en direction d’un changement.
L’originalité de la Bible, c’est de laisser entrevoir, au-delà ou en deçà des

PA R D È S N °  5 4  181
Janine Elkouby

événements qu’elle relate, des personnages qu’elle met en scène, des repères
sociologiques qu’elle laisse transparaître, un projet, un objectif à atteindre.
Rien n’est figé, bien au contraire, les hommes sont invités à construire
un type de société meilleur, plus juste, à partir des données réelles, et en
projetant sur le réel les catégories du souhaitable. La Bible fustige avec une
inlassable virulence toutes les idolâtries, c’est-à-dire tous les systèmes qui
prétendent prendre la nature pour modèle, qui, se pliant aux diktats du réel,
réduisent l’aventure de la liberté humaine à l’enfermement dans un destin.
Pour la pensée biblique, prolongée et amplifiée par la lecture rabbinique,
l’homme est capable de se libérer, et par conséquent, il doit se libérer,
de l’Égypte, et de façon plus générale, de tous les déterminismes, qu’ils
soient naturels, politiques, sociaux, idéologiques, personnels ; ce devoir
de libération est en même temps une promesse, un espoir, une lueur dans
les ténèbres de l’histoire personnelle et collective : il y a quelque chose à
faire, on peut en sortir.
Cette promesse peut se lire, en particulier, à propos du couple, de la
relation entre l’homme et la femme : tout se passe comme si les récits
bibliques étaient traversés de part en part par un projet, celui du couple
à construire. Ce projet, nous en noterons l’émergence à un moment clef,
au début de la Genèse, où l’épisode de la création du premier couple en
montre l’échec.

LE PREMIER COUPLE
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Le récit de la création du premier couple, transmis de manière univoque
à travers la tradition chrétienne, puis laïque, raconte, chacun le sait,
comment Ève, prise de la côte d’Adam, a incité ce dernier à transgresser
l’interdit de consommer le fruit défendu et est, ainsi, responsable du péché
originel, dans tous les sens du terme.
Si l’on se donne la peine de scruter attentivement le texte, on a tôt fait
de s’apercevoir que cette histoire universellement connue n’est que la
traduction très imparfaite, très appauvrie et, somme toute, très erronée
de ce qui se laisse lire dans l’original hébraïque.
L’humanité qui apparaît en Genèse 1, 26, nous est, d’emblée, présentée
comme la conjugaison du masculin et du féminin :
« Dieu créa l’adam à son image, à l’image de Dieu il le créa, masculin et
féminin il les créa 37. »

182 PA R D È S N °   5 4
Quelle justice pour l’autre ? La différence féminine dans l’égalité

La tradition du Midrach 38 reprise par Rachi, commente ce verset, et


plus précisément la rupture syntaxique dans l’emploi du pronom personnel
tantôt au singulier tantôt au pluriel, en posant une humanité androgyne
à son origine :
« Au moment où le Saint béni soit-il créa le premier être humain, il le créa
androgyne 39. »

La perspective dégagée par cette piste de lecture permet de poser


comme fondement de l’humain non pas le masculin seul, position univer-
sellement adoptée par les sociétés patriarcales de tous les temps et de tous
les lieux, mais le masculin plus le féminin, et affirme l’égalité de principe
entre l’homme et la femme.
Le couple apparaît dans un premier stade à l’état de projet, le projet
conçu par Dieu pour cette humanité bisexuée dans son principe :
« L’Éternel Dieu dit : « il n’est pas bon que l’être humain soit seul, je vais lui
faire un Ezer Kenegdo » 40. »

L’expression Ezer Kenegdo, couramment et platement traduite par « une


aide en face de lui », recouvre en fait un réseau de significations beaucoup
plus riche : le terme Ezer désigne un allié 41, l’un des deux partenaires
d’une alliance ; Kenegdo signifie à la fois « en face de lui » et « contre
lui » 42. L’ambivalence de la formule fait aussi sa richesse ; en fait, c’est
à la notion fondamentale, et ambiguë à la fois, du dialogue qu’elle fait
référence : la confrontation peut devenir affrontement et la formule, en
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deux mots, résume l’essence et les risques du dialogue. Quoi qu’il en soit,
le texte nous fournit l’indication capitale que la fonction première des deux
partenaires du couple, dans le projet divin, est le dialogue ; l’être humain,
primitivement androgyne et seul va être coupé en deux par une fonction
de dialogue homme-femme.
Le projet va être réalisé dans un deuxième temps, lorsque l’être
humain prend conscience de sa solitude, par la séparation en deux moitiés
sexuellement distinctes de l’androgyne primitif :
« L’Éternel Dieu fit tomber une torpeur sur l’adam qui s’endormit ; il prit un
de ses côtés et il ferma la chair à la place. Et l’Éternel Dieu construisit le côté
qu’il avait pris à l’adam, en femme, et il l’amena devant l’adam 43. »

Dans ce récit, le mot tsela’ peut avoir deux sens : celui de côte, certes,
– c’est le sens qui a traversé les siècles et qui a permis de donner de ce
texte fondateur une lecture passablement misogyne – mais aussi, comme

PA R D È S N °  5 4  183
Janine Elkouby

le souligne Rachi, celui de côté 44. La femme, selon cette lecture, n’est pas
issue de la côte de l’homme, elle est un côté de l’humain.
Une fois la coupure effectuée, le Créateur commence par « fermer la
chair à la place » du côté manquant : c’est dire que le masculin se définit,
très littéralement, par la blessure, en d’autres termes par la castration.
L’adam ne peut devenir ich, accéder à la masculinité, que par la prise de
conscience qu’il n’épuise pas la totalité de l’humain ; d’ailleurs, le terme
de ich, qui devrait le désigner désormais, n’apparaît dans le verset, et dans
son discours, qu’après celui de icha 45.
Mais ce beau projet d’un couple défini par sa capacité de dialogue,
échoue à l’orée même de sa naissance : car voilà qu’il prend la parole, cet
adam qui est déjà presque un ich, poussant une exclamation de soulagement
en reconnaissant enfin, devant lui, sa semblable :
« Celle-ci, cette fois-ci, est os de mes os et chair de ma chair ; celle-ci
s’appellera icha car c’est de ich qu’elle a été prise 46. »

Mais voilà précisément, qu’emporté par son élan, il ne voit plus en


elle que sa semblable, et gomme toute différence, tentant de récupérer à
son profit, par le mensonge et la mauvaise foi, la créature semblable et
pourtant différente qu’il a en face de lui : en effet, il fait dériver icha de
ich, et la femme de l’homme, alors qu’en vérité, icha, comme ich, a été
prise de adam 47 !
Tentative de falsifier l’histoire, dès le départ, de piper les dés : en se
posant comme origine et comme référence, l’homme a refusé la leçon
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essentielle de la Création ; au lieu de se considérer comme une moitié de
l’humain face à une autre moitié de l’humain, il a préféré se revendiquer
comme la totalité qu’il était auparavant, ne pas reconnaître la blessure qui
a fait de lui un ich, et donc, conséquence inévitable, ne pas reconnaître
à la femme sa place kenegdo, en face de lui. D’ailleurs le texte, sauf
dans le verset 24 qui établit l’institution du mariage, continue à désigner
l’homme masculin sous le vocable de adam, comme pour confirmer que
ce dernier n’a a pas su accéder à l’identité de ich, qu’il a préféré la sécurité
illusoire et close de la solitude et de la totalité à l’aventure enrichissante
et féconde du dialogue et de l’ouverture à autrui. Désireux d’accaparer à
lui seul l’humanité, il dénie du même coup ce caractère à sa partenaire,
il cherche à se l’annexer, à en faire son émanation. Mais en refusant la
différence de sa compagne, il refuse la sienne propre, il ne peut devenir
ich. Il est incapable d’entamer le dialogue avec elle : il ne lui parle pas,
il parle d’elle, faisant d’elle non pas une interlocutrice, mais un objet. Face

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Quelle justice pour l’autre ? La différence féminine dans l’égalité

à cette parole récupératrice, inauthentique, la femme s’est tout simplement


tue, n’essayant pas de rectifier les erreurs ou les mensonges, refusant donc
elle aussi, d’une certaine façon, sa place de ezer kenegdo, et acceptant au
contraire, implicitement, la place subalterne que l’homme lui assignait
pour préserver son pouvoir.
Un ich avorté, un dialogue raté : l’échec du couple ne fera que
se confirmer et s’amplifier lorsque, ayant transgressé l’interdit de
consommer le fruit défendu, l’homme et la femme se révéleront inca-
pables d’assumer leur acte et esquiveront à la fois leur responsabilité
et la solidarité inscrite dans la définition même du couple. La fuite
sera désormais le maître mot de leur comportement, l’homme se
déchargeant sur la femme et celle-ci sur le serpent. Chacun des deux
est resté prisonnier de son propre univers, la rencontre n’a pas eu lieu,
le face-à-face est resté lettre morte.
Rien d’étonnant donc si l’échec de l’alliance aboutit en fin de compte au
constat de l’inégalité que dressent les versets 14 à 19. Versets qui ont été
lus, traditionnellement, sur le mode normatif, comme des « châtiments »
ou des « malédictions ». Ils ne font en fait que décrire la vie telle qu’elle
est : tout est placé sous le signe de l’effort et de la difficulté.
Pour être un humain à part entière dans le monde spatio-temporel, réel,
où vivra désormais l’humanité, il faudra, d’abord, fouler aux pieds l’animal
en soi, « écraser la tête » de la bête, au prix d’une lutte perpétuelle, toujours
à recommencer. C’est là une première définition de l’humain.
Il faudra ensuite assumer avec le monde et avec autrui des relations qui
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s’inscriront dans un rapport de force : la procréation, le désir, le pouvoir,
la nourriture, la mort, tous ces thèmes sont évoqués et rassemblés sous le
signe de la difficulté et de la lutte ; partout l’humanité se heurtera à une
résistance qu’il lui faudra vaincre, résistance de son propre corps, de la
douleur, de l’autre, de la terre… Cependant si le récit biblique fait état,
avec franchise, de la violence et des rapports de force qui caractérisent
le monde réel dans lequel évoluent les êtres humains, il n’en fait ni une
norme, ni une fatalité indépassable ; bien au contraire, face à l’ordre du
réel, imparfait, se dresse l’ordre du souhaitable, le projet divin, qui reste
à édifier : être un humain consistera, dans le domaine des relations avec
autrui, à dépasser l’ordre de la violence inscrit dans le réel pour accéder à
l’ordre du dialogue inscrit dans le projet divin. Voilà la seconde définition
de l’être humain.
La troisième précisera ses rapports au monde : « la terre est maudite »,
en d’autres termes, la nature n’est pas bonne, elle ne doit pas être érigée en

PA R D È S N °  5 4  185
Janine Elkouby

modèle ou en divinité. Être humain, c’est non pas se fondre dans la nature,
c’est au contraire prendre ses distances par rapport à elle, la soumettre,
y inscrire la marque de la culture.
On le voit, la naissance du couple est marquée par l’échec, mais c’est
un échec provisoire : l’humanité est invitée, individuellement et collecti-
vement, à faire naître le couple authentique, celui dans lequel la violence
naturelle cédera la place à l’échange de paroles. Cet avènement est une
entreprise de longue haleine, un programme à l’échelle d’une vie humaine
et en même temps un objectif à l’échelle de l’humanité. Les patriarches
s’attellent à la tâche : c’est avec Abraham et Sarah que s’instaure, après son
absence criante dans les débuts de l’humanité, la circulation de la parole ;
celle-ci se poursuivra avec les autres couples bibliques, en un cheminement
patient, discontinu, mais obstiné. Un cheminement dont l’objectif ultime se
dessine à l’horizon messianique, dans la magnifique prophétie d’Osée 2,
18 : « À cette époque, dit l’Éternel, tu m’appelleras mon époux (ichi), tu
ne m’appelleras plus mon maître (baali) ».

Un constat s’impose : le divorce entre les pistes ouvertes au niveau du


sens des textes, porteuses d’espoir er d’avenir et les réalités du quotidien,
hic et nunc, qui semblent, pour certaines d’entre elles, en tout cas, être
singulièrement bloquées. Pour le dire en d’autres termes, la Aggada et la
Halakha ne s’accordent pas.
Les problèmes les plus graves concernent, bien entendu, le divorce
et, par voie de conséquence, le mariage. Car l’accès au savoir, le rôle des
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femmes dans la communauté sont en passe de trouver des solutions, en
particulier grâce à une prise de conscience des femmes et des hommes
décidés à venir à bout d’anachronismes qui ne sont dictés que par la crainte.
En revanche, le blocage de la situation en ce qui concerne le divorce et
le pouvoir exorbitant qui est devenu de facto celui des maris, a fait de la
ketouba, jadis protection des femmes, une prison potentielle.
Je considère donc comme un devoir moral de mettre en cause,
solennellement :
−− l’indifférence du rabbinat, qui confine à la cruauté, face à la souffrance
scandaleuse de femmes qui attendent pendant des années leur guet,
soumises sans recours au bon plaisir de maris devenus tout puissants ;
−− sa frilosité et sa peur panique d’être taxé de laxisme s’il intervenait de
façon plus énergique auprès de ces mêmes maris ;
−− son incapacité à envisager des solutions halakhiques susceptibles de
répondre à un phénomène de société qui ne fait que s’amplifier – je

186 PA R D È S N °   5 4
Quelle justice pour l’autre ? La différence féminine dans l’égalité

veux parler de l’abus de pouvoir et du chantage financier intolérable


exercés de plus en plus souvent à l’encontre des femmes ;
−− l’incroyable régression qui conduit certains juges rabbiniques à justifier
en privé la possibilité théorique de la polygamie ou à faire écrire un guet
en urgence, sur la demande de maris non encore divorcés civilement
mais pressés de régulariser leur situation religieuse par rapport à une
autre femme, en se passant purement et simplement du consentement
de l’épouse ;
−− l’aveuglement de nos autorités rabbiniques face au double danger que
fait peser leur attitude sur la société juive tout entière : la désaffection de
toutes celles et tous ceux que révulse une telle situation, la multiplication
des mamzérim.
Faut-il espérer, pour finir sur une note moins pessimiste, que nos rabbins
prendront enfin la mesure des enjeux et auront le courage de prendre de
vraies mesures ?

NOTES

1. Genèse, 18,2.
2. Exode, 1 à 18.
3. Deutéronome 16, 20.
4. Deutéronome 25, 15.
5. Lévitique 19, 14.
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6. Exode 23, 6 ; Deutéronome 1 ; 7.
7. Exode 23, 9 ; Lévitique 19, 34 ; Deutéronome 10, 18.
8. Traité Sanhédrin 37 a.
9. Traité Sanhédrin 56 a.
10. Jérémie 19, 5 ; 32, 35.
11. Michée 4, 3.
12. Jérémie 32, 27.
13. Genèse 1, 1-12.
14. Genèse 11.
15. Cf. Emmanuel Lévinas, Difficile liberté, André Neher.
16. Cf. Jonathan Sacks, The dignity of difference, Continuum, Londres, 2002, p. 53.
17. Deutéronome 22, 10.
18. Deutéronome 22, 11.
19. Deutéronome 22, 9.
20. Deutéronome 22, 5.
21. Cf. Sonia Sarah Lipsyc, « Le combat emblématique de l’éligibilité des femmes au
Consistoire israélite du Bas-Rhin », Les cahiers du Judaïsme, 24, 2008.
22. Commandements.
23. Traité Kidouchin 29 a.

PA R D È S N °  5 4  187
Janine Elkouby

24. Cf. Rabbi Israël Méir Kogan, connu sous le nom de ‘Hafets ‘Hayim (1838-1933).
25. Cf. infra, n. 37.
26. Voir par exemple On being a Jewish Feminist, edited by Susannah Heschel, New York,
1995.
27. Le deuxième sexe, paru en 1949.
28. Cf. le principe talmudique bien connu (Traités Yevamot 118b, Ketouvot 75 a) selon
lequel une femme préfère être mariée à n’importe qui plutôt que de rester seule, principe
dont des centaines de femmes religieuses se sont désolidarisées dans une pétition
adressée au Grand Rabbinat d’Israël en 1999 (cité par Tamar Ross dans « Quelques
incidences du féminisme sur la réalité de la loi juive », in Quand les femmes lisent la
Bible, Éditions In Press, Pardès, 43, 2007, sous la direction de Janine Elkouby et Sonia
Sarah Lipsyc).
29. Le Talmud est constitué par la Michna et la Guemara, ensemble des commentaires
rabbiniques sur le texte biblique, d’abord transmis oralement puis mis par écrit
respectivement au ii e siècle et au vie siècle.
30. TB (Talmud de Babylone) Traité Berakhot 17a.
31. Aggada : parties non législatives du Talmud.
32. Traité Berakhot 61 a.
33. Choulhan Aroukh 1.
34. Traité Chabbat 72 a.
35. Ainsi, la polygamie a été supprimée en l’an 1000 par Rabbenou Guerchom Meor Hagola
qui a par ailleurs rendu le consentement de la femme obligatoire pour que le divorce
soit valide. Mais on assiste aujourd’hui à d’inquiétants revirements, quand certains
rabbins remettent en question la validité de cette décision…
36. En France, il est bon de le rappeler, l’émancipation des femmes n’a qu’un demi-siècle
d’âge : droit de vote en 1946, droit à la contraception en 1967, droit d’ouvrir un compte
en banque ou de signer un chèque sans l’autorisation du mari en 1965.
37. Le terme adam est d’évidence un nom commun ici, précédé de l’article, ha-adam.
Cf. Genèse 5, 12.
© In Press | Téléchargé le 18/02/2022 sur www.cairn.info (IP: 196.238.125.82)

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38. Midrach : le terme désigne à la fois l’ensemble des commentaires rabbiniques du texte
biblique et la démarche interprétative mise en œuvre dans ces derniers.
39. Midrach Genèse Rabba 8, 1.
40. Genèse 2, 18.
41. Terme fort qui caractérise les relations entre Dieu et Israël, cf. Psaumes 89, 20 et 146, 5.
42. Le commentaire de Rachi souligne la responsabilité masculine dans l’avènement ou
l’échec du dialogue.
43. Genèse 2, 21-22.
44. Dans Exode 26, 20, le même terme de tsela’ est utilisé pour désigner le côté… du
Tabernacle comme le rapporte Rachi sur Genèse 2, 21.
45. Genèse 2, 23.
46. Ibid. Dieu.
47. Genèse 3, 15.

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