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SESSION DE 1993
L'ENTREPRISE INDIVIDUELLE
AVIS
présenté
L'ENTREPRISE INDIVIDUELLE
Avis adopté par le Conseil économique et social
au cours de sa séance du 28 avril 1993.
Par lettre en date du 26 octobre 1992, Monsieur le Premier ministre saisi le Conseil
a
économique et social de l'examen de la situation actuelle de l'entreprise individuelle en France
dans les domaines économique, social, juridique et fiscal, en demandant
que cet examen soit
accompagné de propositions pour donner à ces entreprises les moyens de contribuer pleinement
au développement économique et social de notre pays.
La préparation de l'avis a été confiée à la section des problèmes économiques généraux
la conjoncture qui a désigné M. Jacques BARTHELEMY comme rapporteur (1). et de
PREMIÈRE PARTIE
Le thème de l'avis est susceptible de comporter ambiguïté. On peut estimer que les
une
entreprises dont il convient d'analyser la situation et pour lesquelles il est utile de proposer
statut sont celles qui sont exploitées en nom personnel, par opposition, donc, à celles qui le sont un
en société, quelle qu en soit la forme juridique. La lettre de saisine de M. le Premier ministre à
M. le Président du Conseil économique et social incline à adopter cette interprétation. Il fait
référence, en effet, a la forme d'exploitation. y est
peut aussi avoir la tentation de considérer qu'il s'agit des entreprises possédées
effectivement par une seule personne physique, auquel cas sont aussi concernées, seulement
les EURL (entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée), authentiques sociétés non
unipersonnelles, mais également les sociétés fictives, dont le capital est détenu, plus du
en
dirigeant réel, par des prête-noms. Cette situation est fréquente en raison des avantages qu'offre
société. Même si, ten principe, cette seconde définition n'est
pas celle de la saisine, il est
difficile de nf pas aborder les problèmes sous cet angle, ne serait-ce que pour marquer les
>U demeurant, malgré l'existence d'une société, il peut y avoir exploitation
individuelle . c est le cas de la societé en commandite.
On peut d'autant plus s'interroger sur l'opportunité du choix de l'une l'autre de ces
ou
conceptions que la tentation est grande de traiter, au travers de cette saisine, du cas des petites
entreprises dont la quasi totalité est en nom personnel. Si l'on entend s'interroger sur la place des
entreprises individuelles dans le tissu économique français, il serait aberrant d'utiliser la barrière
exploitation, qui est alors artificielle. Mais, la forme juridique a une incidence
l'efficacité économique en raison de ses caractéristiques, notamment au plan fiscal. sur
Enfin, les éléments statistiques dont on dispose en fonction de la forme d'exploitation
sont pas significatifs. Par exemple, lorsque sont indiqués les effectifs des entreprises individuelles, ne
cela comprend nécessairement l'entreprise en société en commandite.
Ces remarques préliminaires démontrent
que, si l'objet du présent avis concerne
naturellement le statut de l'entreprise exploitée en nom personnel, il n'est pas possible de faire
i économie de développements intéressant les sociétés qui n'ont, de fait de droit, qu'un seul
ou
associé et les petites entreprises. En conséquence, il convient, afin d'éclairer le lecteur
sur le sens
l
exact de certaines expressions, de préciser que :
entreprise en nom personnel est celle exploitée par une personne physique,
constitution de société. sans qu'il y ait
l- entreprise peut être exploitée par une société de personnes (et non de capitaux). Ce sont
essentiellement les sociétés en nom collectif (SNC) et, dans les professions libérales et agricoles
surtout, les sociétés civiles professionnelles.
- les sociétés de capitaux sont les sociétés anonymes, en commandite (simple ou par actions),
a responsabilité limitée. La loi permet à une sociéte à responsabilité limitée de n'avoir qu'un seul
associe : c est 1 entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL).
- par société unipersonnelle, il y a lieu d'entendre, ici, toute société, quelle qu'en soit la
*?rn\e juridique qui, de fait ou de droit, n'a qu'un seul associé, donc de fait, un seul propriétaire.
De droit, il s agit de 1 EURL ; de fait, c'est le cas de la société, anonyme ou à responsabilité
limitée, dont les associés ou porteurs de parts sont, à l'exception du dirigeant, des prête-noms.
(1) L'ensemble de cet avis a été adopté par un vote au scrutin public
par 114 voix, contre 14 et 53 abstentions (voir le
résultat de ce scrutin en annexe - scrutin sur l'ensemble).
A. - CONSTAT
Le nombre très élevé d'entreprises exploitées en nom personnel tant en valeur absolue qu'en
valeur relative eu égard au nombre de sociétés d'une part, leur poids économique apprécié tant
par leur chiffre d'affaires, leur valeur ajoutée et leur excédent brut d'exploitation que par leur
dynamisme ou leur positionnement favorable en matière d'emploi d'autre part, rendent
indispensable une réflexion fondamentale sur la situation de l'entrepreneur individuel dans les
domaines fiscal, social, économique et juridique.
Selon le fichier SIRENE, le nombre de ces entreprises s'élève, au 31 janvier 1993, à 1 713 725,
ce qui représente 50,30 % des 3 408 404 entreprises françaises, publiques et privées confondues,
mais aussi plus du double de celui des sociétés, qui s'élève à 871 339. L'intérêt d'une réflexion
sur statut
le de l'entreprise en nom personnel ressort déjà de ces seuls chiffres. Il ne s'agit pas de
situations marginales, en effet, loin s'en faut. Cette statistique, comme celles qui suivent,
concerne l'ensemble des activités, à l'exception des exploitations agricoles non imposées au
bénéfice réel agricole ou non assujetties au régime de la TVA agricole simplifié. Il convient donc
d'ajouter à ce chiffre quelque 725.000 exploitations agricoles sur les 924.000 qui existent au total,
selon l'estimation 1992 du ministère de l'agriculture et de la forêt.
Cet intérêt est encore plus grand si l'on prend en compte leur situation économique. Les
comptes de la Nation pour 1991 font apparaître que la production totale de ces entreprises était
de 1 345,4 milliards de francs (soit 11 % de la production française) et leur valeur ajoutée brute
de 925,7 milliards (15 % de la VAB française). Leur excédent brut d'exploitation dégagé pour la
même année s'élève à 718,6 milliards de francs (30 % de l'excédent brut d'exploitation total).
Enfin, la formation brute de capital fixe s'est élevée à 93,4 milliards de francs. Les entreprises en
nom personnel représentent donc, au total, une activité économique importante, non seulement
en volume d'activité mais aussi, ce qui est sans doute plus important, en valeur ajoutée et en
résultats. Un tel constat est important dans la mesure où, à la fois en raison de leur taille
modeste -qui recèle un potentiel de croissance plus élevé- et de l'absence de rigidité dans la
gestion qui en découle -facteur d'une plus grande adaptabilité aux évolutions-, ces montants sont
non seulement significatifs mais peuvent aisément être améliorés si une politique générale
contribue davantage au développement de ce type d'exploitations.
En raison de leur taille généralement modeste, leur poids en matière d'emploi est
nécessairement plus faible. Elles ne représentent, toujours selon cette dernière source, que 8 %
de l'emploi total en France (hormis les agents de l'Etat et des collectivités locales) contre 68 %
sociétés. Cependant, valeur absolue, elles procurent un travail à 1 450 495 salariés, ce
pour les en
qui est un chiffre important, surtout si l'on prend en compte le fait qu'environ 1.200.000 de ces
entreprises n'en ont aucun. Cela signifie que le nombre moyen de salariés, pour les entreprises
exploitées en nom personnel qui en ont, est de trois. Ainsi et au total, hors secteur agricole, les
entreprises individuelles occupent globalement plus de trois millions d'actifs.
Il y a là un gisement d'emplois sans doute élevé, d'autant que les résultats tant globaux que
bénéficiaires de ces entreprises doivent pouvoir, avec une politique adéquate, être améliorés.
Nombreux sont, en effet, ceux de ces employeurs qui préfèrent limiter leur activité plutôt que
s'exposer aux rigidités, réelles ou supposées, de la réglementation du travail, aux complications
administratives, bien réelles, liées à la gestion du personnel, aux charges, tant fiscales que sociales,
regard du chiffre supplémentaire qu'ils peuvent attendre de l'embauche d 'un salarié ou, pour
au angle, n'est inutile de souligner
ceux qui en ont un, de salariés supplémentaires. Sous cet il pas
que les entreprises exploitées en nom personnel ont, lorsqu'elles emploient du personnel, en
trois salariés. Ce sont donc de petites entreprises. Au cas particulier, la notion
moyenne
d'effectifs est ambiguë. Elle recouvre en effet l'entrepreneur lui-même et, assez souvent, son
conjoint. En outre, dans un certain nombre de situations (franchise -
sous-traitance), la différence
salarié est faible, sous la réserve importante que le risque de perte d'emploi n'est pas pris
avec un collectivité s'y ajoute le risque de la perte de
en charge pour l'entrepreneur par la et que ses
biens.
Enfin, 15 % des entreprises individuelles sont implantées en région parisienne (soit 85 % en
province dont 3 % dans les DOM). La répartition géographique des emplois générés est identique.
2°/ - La réalité économique et juridique de l'entreprise individuelle.
La réflexion qui doit être menée ne peut que concerner l'ensemble des activités, tant
commerciales, industrielles, artisanales, libérales qu'agricoles ; certes des différences existent entre
elles, liées aux politiques tant interne qu'européenne et aux contraintes juridiques ou de marché
auxquelles elles sont soumises. Cependant les spécificités des types d'activité de chacune des
catégories s'effacent devant ce qui leur est commun, la forme d'exploitation et indirectement la
taille. Ceci conduit nécessairement à écarter, dans le cadre du présent avis, tout développement
concernant les spécificités de chacune de ces catégories pour concentrer l'analyse sur la forme
d'exploitation et la taille.
Une réflexion sur la situation de l'exploitation individuelle se justifie alors d'autant plus que,
contrairement à ce qui vaut lorsqu'à été constituée une personne morale dont l'objet est une
activité économique, l'entreprise ne se distingue pas de celui qui la gère. Cela tient d'abord à ce
que l'entreprise, essentiellement entité économique, n'a pas d'existence juridique malgré les
citations de plus en plus fréquentes du législateur et les conséquences qui peuvent être tirées de
l'objectif de certaines lois -telles celles sur la prévention, l'alerte, le règlement des difficultés des
entreprises- qui visent à privilégier la fonction sociale de l'entreprise. Cela tient aussi à ce que, en
raison du principe du droit civil de l'unicité du patrimoine, l'absence de personne morale ayant
pour objet la gestion de l'entreprise a pour conséquence la confusion des biens affectés à cette
gestion et les autres. Mais, là encore, l'objet précis de certaines disciplines juridiques permet, en
utilisant le droit comme instrument de la finalité économique, de donner une définition
fonctionnelle de l'entreprise.
Tout en ayant par ailleurs une dimension humaine et sociale, l'entreprise est une entité
économique dont la finalité est de satisfaire les besoins réels et potentiels des consommateurs,
individuels ou collectifs, privés ou publics. Elle doit, à cet effet, disposer de capitaux, du
personnel nécessaire ainsi que d'une capacité de concevoir et de réaliser des profits. Elle a
vocation naturelle à prospérer et ce, indépendamment de ceux qui ont la responsabilité de la
gérer. Sa santé, qui assure sa pérennité, dépend en partie de l'état de la concurrence dans laquelle
elle développe ses activités. Elle dépend aussi de l'aptitude de celui qui la gère à assumer ses
responsabilités. La différence de situation juridique entre l'exploitation en nom personnel ou en
société est source de distorsion de concurrence. Cela tient à ce que l'entreprise en société peut
plus aisément développer une stratégie fondée sur le long terme. Le droit fiscal applicable aux
sociétés facilite en effet la constitution de fonds propres. Au contraire, il y a confusion entre
l'intérêt de l'entreprise et de celui qui la gère lorsqu'elle est individuelle. Encore faut-il prendre
en compte le degre d'autonomie économique : par exemple, la situation du franchisé ou du sous-
traitant n'est pas strictement identique à celle des autres entrepreneurs individuels. Mais, pour
tous, la rigueur de gestion s'impose.
Cette différence de statut transforme en zone à risque, notamment en raison d'une fiscalité
différente, les instants de la transmission, particulièrement au moment du départ en retraite. S'y
ajoute une fragilité particulière, à défaut d'être spécifique, en matière de trésorerie. Tout cela
explique sans doute la plus grande vulnérabilité des entreprises en nom personnel. Celle-ci se
traduit par le nombre des défaillances. Encore faut-il faire la part des choses : est-ce parce que
l'entreprise est jeune ou petite qu'elle est fragile ou parce que, du fait de cette taille et de cette
jeunesse, elle est souvent en nom personnel, le recours à la technique sociétaire ne se justifiant
pas ? Il est, en tout cas, prudent de se méfier d'une incitation purement mécanique, sous la
forme d'une aide financière d'autant que, si celle-ci se situe au niveau du capital social, le
créateur est déresponsabilisé. En outre, cette incitation ne correspond pas nécessairement aux
besoins réels du marché.
B. - REFLEXIONS
1 °/
- Critique du choix exclusif de la technique sociétaire.
La société est un contrat passé entre associés qui définit leurs droits et obligations
réciproques pour la mise en oeuvre de l'objet social dont ils ont doté leur commune entreprise.
Cette réalité fondamentale ne doit pas être oubliée. Mais la société devient, sitôt créée, une
institution, ce qui explique que sa naissance soit différée jusqu'à une décision des pouvoirs
publics matérialisée par 1 enregistrement au registre du commerce ou des métiers. Surtout - cela
a été amplement démontré par l'École de Rennes, les professeurs PAILLUSSEAU et CHAMPEAU
tout spécialement - la technique sociétaire est une technique d'organisation de l'entreprise. C'est
ce qui explique non seulement le nombre de sociétés de capitaux mais aussi la création de la
société unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL).
Enfin, les enjeux fiscal et social d'une stratégie visant ou non à favoriser la transformation
-
systématique en sociétés de capitaux des entreprises à partir d'un certain seuil d'activité sont
importants :
en termes de libre-concurrence ; où sont l'éthique et l'état de droit si la seule manière,
pour un entrepreneur, d'être dans une situation de concurrence normale est l'indépendance
. d'abandonner les
principes sur lesquels il a construit son existence professionnelle, en particulier et
le fait de travailler seul ?
au plan de la protection sociale. Deux logiques s'affrontent : celle de la société impliquant
.
l'affectation prioritaire des profits à l'expansion de l'entreprise mais justifiant, par le salariat, un
régime de retraite et de prévoyance assurant des revenus de substitution suffisants en cas d'aléas
de la vie ; celle, diamétralement opposée, de la conservation de tous les profits à la
consommation personnelle, mais rendant nécessaire de trouver, dans les plus values des cessions
du patrimoine professionnel, les moyens de subvenir aux besoins lors de la cessation de l'activité,
qu'elle qu'en soit la cause ;
J
au plan de la sécurité des régimes de protection sociale. Celle-ci, en fonction de l'économie
générale de notre droit, repose sur un principe de solidarité, lui-même matérialisé par la
technique de répartition. La transformation systématique en société a pour effet -et même
souvent pour cause- le bénéfice, pour le dirigeant, du régime des salaries. Elle est source de
difficultés aux régimes des non salariés, que les règles de compensation ne corrigent
qu'imparfaitement. Ceci est d'autant plus important que la qualité de salarié, au plan social, des
dirigeants de sociétés s'écarte des principes généraux qui gouvernent le droit de la sécurité
sociale. Ceux-ci ne sont pas dans la situation d'employé à l'égard d'un employeur (L. 311-2 du
code de la sécurité sociale) et il a fallu, pour les faire relever du régime général, qu'ils soient
visés par l'article L. 311-3, établissant la liste de ceux qui, normalement non assujettis, y sont
affiliés néanmoins en application d'une disposition légale spéciale. Leur rattachement au régime
de retraite des cadres est encore plus étrange puisque ce régime résulte d'une convention
collective qui, par définition, ne peut normalement bénéficier qu'à des personnes disposant d'un
contrat de travail, ce qui n'est pas leur cas.
La réussite de l'entreprise unipersonnelle suppose d'abord ambition, goût du risque,
créativité de la part de son exploitant. Elle dépend aussi, en raison de ces enjeux fondamentaux,
,stenc.e distincte de celui qui la gère, peu important l'absence de morale. Cela
personne
passe nécessairement par une capacité d'organisation de l'entreprise. La simplification des
procédures administratives de toutes sortes s'impose pour éviter que de telles contraintes soient
un obstacle a la création et à l'expansion d'entités économiques. Toutefois cette politique nrdok
pas,aucontraire, de
? e techniques comptables et de gestion qui contribuent à la
personnalisationl'entreprise. On ne peut, alors, que préconiser un effort important de
formation a la gestion. Compte tenu de l'importance des petites entreprises pour l'équilibre
de
économiquefiscales. soc de la Nation, cet effort doit être favorisé par des aides ou des incitations
4°/ - Conclusion.
ConseilC'est en considération et de
ces différents objectifs que vont s'articuler les propositions du
Smp iifr°miquetet social. Ces propositions s'ordonnent autour d'un principe général, lui-
même lié a un constat. Le constat est que l'entreprise est une entité économique, laquelle doit
préservée : en effet, de la prospérité des entreprises dépendent largement les
grands équilibres économiques et sociaux. L'entreprise a ainsi une fonction sociale dans le
monde moderne, l entreprise n'est pas seulement
une source de profits pour son ou ses
propriétaires. principe général que l'entreprise doit exister, au plan juridique!
indépendamment de la personne, morale ou physique, qui la gère. Ce principe général implique
un effort important de rationalisation des droits fiscal, social, patrimonial, de la responsabilité
pour assurer une égalité totale de statut entre l'entreprise en nom personnel ou en société et
pour éviter des conséquences fâcheuses, sur ces différents plans, des vicissitudes juridiques
économiques qu est susceptible de connaître l'entité économique. Il y va de la capacité à ou
a celle-ci une expansion harmonieuse, mais aussi de l'intérêt des différents partenaires de assurer
entreprise, clients, fournisseurs, salariés, Etat. Tout particulièrement, le dynanisme des petites
entreprises, pour la plupart en nom personnel, est un facteur important de résorption du
chômage. Elles sont un gisement d'emplois si, en particulier, leur existence
et leur capacité
d expansion ne sont pas menacées par l'absence de fonds propres et de trésorerie.
Le Conseil économique et social ne peut que renouveler la
remarque qu'il formulait, dans le
cadre de son avis adopté sur le rapport de M. Pierre DELMON le 2 juillet 1975 concernant «la
réforme de l entreprise», à savoir : «Il est anormal que le choix du statut juridique de l'entreprise
soit dicté par des considérations étrangères à l'activité ou à la taille de l'entreprise. Cela conduit à
recommander la poursuite de l'effort en direction d'une égalité totale aux plans fiscal soda!». A
et
toutlemoins, ? entrepreneurs ne doivent pas être contraints au choix de la forme sociétaire par
des différences trop importantes dans les domaines fiscal et social, ce qui est aujourd'hui le
On pourrait ajouter aux critères déterminants de la constitution d'une société, la volonté de cas.
s associer que 1 on a tendance a oublier en suggérant l'émergence de sociétés fictives.
Les propositions ci-après ont été conçues pour être cohérentes
avec ce principe général et,
par voie de conséquence, entre elles. Elles visent à assurer l'identité et la pérennité de
l'entreprise et a promouvoir l'intérêt des tiers. De ce fait, bien que l'objet de cet avis soit relatif
au, statut de 1 entreprise individuelle, certaines des propositions concernent les sociétés si le
:
mérite du droit des sociétés est d'être devenu une technique d'organisation de l'entreprise, encore
faut-il que cet objet ne soit pas dilué, ce qui est le cas d'une part lorsque la société est fictive,
d autre part, dans la société unipersonnelle à responsabilité limitée, dès lors que, contrairement à
la société anonyme, la SARL ne prend pas en compte réellement l'entreprise. Il faut donc
envisager des moyens qui dissuadent l'utilisation excessive de la technique sociétaire. Ces moyens
s ordonnent autour du patrimoine affecté d'une part, de la recherche, sinon de l'égalité, du
moins de la neutralité aux plans fiscal et social entre exploitation en nom personnel et en société
d autre part. En dépend notre capacité à constituer le tissu important de petites entreprises dont
nous avons besoin, tissu menacé aujourd'hui par le nombre des défaillances et les risques
encourus à l'occasion des transmissions.
DEUXIÈME PARTIE
PROPOSITIONS
malgré
ou 1
l' eux est plus déterminant. Toutefois, la distinction de l'entreorise
absence de personne morale, de celui qui la gère ne peut qu'avoir pour effet l'entreprise,-sinonpour
réductionLesde la
responsabilité de l'entrepreneur, phénomène qui peut être préjudiciable
causela
aux iiers..Les intérêts de ceux-ci doivent être préservés.
doute pas nécessaire, pour consacrer cette séparation, de modifier profondément
™!LnltS;iSarnTS
le code civil. Une conception instrumentaliste du droit permet d'obtenir le résultat souhaité
Iln'est
sans
doute
à
laseul e solution des problèmes découlant de la reconnaissance de l'entreprise. C'est ainsi queparle
droit fiscal et, a un degré moindre, le droit social ainsi que la technique comptable
oar
d' isoler le patrimoine consacré à l'entreprise. C'est ainsi également permettent
fiducie,permettentdont
que la
introduction, dans notre droit, est sans doute imminente, consacre la divisibilité du
patrimoine.
économique, rendla in^s^ns^We^ue^oienlfaffinées ?es mesuresdedestinées à
favoriserfacteursa d'expansionpérennité,
nonobstantlatransformation éventuelle
de sa forme juridique, principalement celles permettant
1 °/
- Identification de l'entreprise individuelle.
Le droit des sociétés à responsabilité limitée ne prend pas réellement en compte l'entreprise
comme peut le faire le droit des sociétés anonymes. En outre, lorsque la société n'a qu'un seul
associé -donc de fait, un seul propriétaire-, la limitation de la responsabilité ne se traduit pas en
limitation de pouvoirs, qui garantit les tiers, puisque la décision n'y est pas négociée, mais
unilatérale. Ceci vaut naturellement pour l'EURL, mais aussi pour la SARL lorsqu'elle est fictive.
Deux mesures permettraient de corriger les effets d'un tel état de fait. Il conviendrait :
- d'augmenter significativement le capital social ainsi que la dotation à la réserve.
- de raccourcir les délais de régularisation lorsque la moitié du capital est perdue du fait de
résultats négatifs. Il est rappelé que, à défaut de remise d'argent dans ce délai, l'exploitation doit
cesser.
Cette sécurité est, par ailleurs, assurée au travers de la pérennité garantie de l'entreprise dès
lors que, en cas de decès du gérant unique de l'EURL, celle-ci se poursuit automatiquement
comme SARL classique entre les mains des héritiers.
La taille des entreprises comme la forme d'exploitation en nom personnel les exclut du
bénéfice d'un certain nombre des moyens de prévention que le législateur, inspiré des
conclusions du rapport SUDREAU, a imaginés, par la loi du 1er mars 1984, pour réduire les
risques de disparition.
L'absence de commissaire aux comptes du fait de la forme juridique, l'absence habituelle de
comité d'entreprise du fait de la taille, placent naturellement l'entreprise en nom personnel en
dehors des moyens permanents d'alerte. L'alerte est, en effet, déclenchée soit par le commissaire
aux comptes, soit par le comité d'entreprise. Les conditions qui permettent a l'un ou à l'autre
d'engager la procédure sont certes différentes. Elles n'en témoignent pas moins, les unes comme
les autres, d'une situation préoccupante nécessitant une stratégie de prévention. Or, la mise en
place de commissaires aux comptes et/ou de comité d'entreprise en dehors des cas où la loi
prévoit actuellement leur présence ne se justifie pas. Par ailleurs, la concentration de tous les
pouvoirs sur une seule personne physique empêche la mise en oeuvre des techniques destinées
aussi bien à l'analyse et la critique de la gestion qu'à une prise de conscience de la faiblesse des
comportements.
Il convient donc de relancer les groupements de prévention agréés, qui doivent demeurer
facultatifs mais dont l'intérêt et l'efficacité doivent être tels qu'ils deviennent un outil habituel de
la prévention des difficultés, notamment grâce à des mesures incitatives à y avoir recours. Dans
cette perspective, l'adhésion à un groupement doit avoir pour effet, en cas d'exécution conforme
du plan proposé, une diminution de la responsabilité de l'entrepreneur et la constitution de fonds
propres (par exemple par l'accès à des prêts bancaires à long terme) ; en cas, au contraire,
d'inexécution du plan, une sanction plus dure doit être organisée. La création, envisagée, d'une
fédération des groupements de prévention peut, de même, contribuer à leur dynamisation et à
accroître leur efficacité.
L'animation des groupements de prévention agréés doit être, de préférence, confiée à des
professionnels spécialisés ayant individuellement manifesté un goût pour une oeuvre d'intérêt
général et à la réalisation de laquelle ils consacreront du temps et manifesteront de
l'enthousiasme. Le recours direct aux conseils spécialisés est aussi un moyen de prévention, qui
doit être favorisé. Pour les mêmes raisons, le recours aux stages de formation à la gestion doit
être augmenté grâce à des mesures incitatives.
Quelle que soit l'assistance apportée au chef d'entreprise, celle-ci doit se concrétiser
essentiellement sous la forme de conseils et de réflexions, les groupements n'ayant pas à
substituer à celui-ci dans ses décisions. L'action tant des groupements de prévention agréés que se
des conseils extérieurs doit cependant avoir pour effet la mise en place d'une gestion
prévisionnelle.
Par ailleurs, et dans le même esprit, l'accès à des prêts à moyen et à long termes,
conséquence naturelle de l'adoption et du suivi du plan de prévention, ne doit pas avoir pour
effet, compte tenu de l'évolution récente de la jurisprudence, de transformer le banquier en
dirigeant de fait. Un tel risque peut avoir, en effet, comme effet indirect de le rendre plus
prudent que nécessaire.
Enfin, les comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises
(CODEFI) et les comités régionaux de restructuration de l'industrie (CORRI), qui réunissent les
responsables des principales administrations concernées par les difficultés des entreprises
(tresoriers payeurs géneraux, services fiscaux, travail et emploi, etc.) apportent des aides
temporaires (délais de paiement, aides financières temporaires) aux seules entreprises industrielles
lesquelles sont en majorité constituées par des sociétés. Leur compétence devrait être élargie à
l'ensemble des entreprises individuelles.
L'entreprise vit dans un univers formaliste dont le respect nécessite du temps et de l'argent.
Le nombre et la complexité des contraintes purement administratives -plus particulièrement
celles à caractère déclaratif- pèsent sur les comportements du chef de la petite entreprise. Au
surplus, les changements fréquents qu'introduit le législateur qui, à certains égards, apparaissent
comme des transferts de responsabilité, compliquent la tâche du gestionnaire, même si
l'informatique aide à résoudre certaines difficultes techniques. Un tel constat milite en faveur de
la simplification des tâches administratives.
Une distinction doit cependant être faite entre ce qui ressort strictement de la technique
comptable d'une part, des bordereaux liés aux obligations de toutes sortes d'autre part :
- Un minimum de connaissance comptable est indispensable à un chef d'entreprise, faute de
quoi la qualité de la gestion en est altérée. Il vaut mieux favoriser, en ce domaine, l'acquisition de
savoir, y compris par des mesures incitatives à la formation, voire par la possibilité ouverte de
recours à des conseils et assistance extérieurs favorisée au travers d'opération du type des Fonds
régionaux d'aide au Conseil (FRAC). Par ailleurs, doivent être développées, en sus de la
comptabilité financière, dont l'intérêt est limité à l'information sur le passe et à des fins surtout
fiscales, des techniques comptables de gestion qui contribuent à l'organisation de l'entreprise par
leur contribution à la prévision.
- Un effort important de rationalisation des bordereaux doit être entrepris, par la recherche
d'une matrice universelle, de sorte que, sans remettre en cause l'autonomie des partenaires
sociaux, les recouvrements des contributions destinées à la protection sociale légale,
complémentaire, interprofessionnelle ou professionnelle puissent se réaliser dans le cadre de
documents simplifiés, normalisés et en nombre réduit. Le gouvernement, conscient des problèmes
posés, a demandé à M. ARRIGHI de CASANOVA un rapport sur ce sujet, qui a été déposé en février
1992 ; parmi les solutions proposées les plus significatives, on peut citer pour les entreprises de
moins de dix salariés, l'instauration des URSSAF comme interlocuteur unique, la refonte et la
simplification des bulletins de salaire, l'extension du bénéfice de la déclaration annuelle de
salaire, la suppression du bordereau trimestriel récapitulatif de cotisations, la simplification des
aides à l'emploi liées à l'embauche d'un premier salarié.
Il a été créé, par ailleurs, la commission pour la simplification des formalités incombant aux
entreprises (COSIFORME) dont les travaux ont permis des améliorations. De son côté, la
profession comptable a formulé un certain nombre de propositions visant ainsi à la simplification
de la gestion.
Pour sa part, le Conseil économique et social suggère quelques pistes, parmi les très
nombreuses mesures qui peuvent être envisagées.
-
Imprimé unique pour les divers organismes sociaux.
Plusieurs imprimés sont remplis, parfois aux mêmes dates, le plus souvent avec des bases
identiques, à destination de différents organismes sociaux. Un effort important doit être fait en
vue de simplifier les déclarations et d'en réduire le nombre, si possible à l'unité. Le principe
d'acomptes, mensuels ou trimestriels, dont le montant serait contractualisé sur la base des
montants des années précédentes pourrait aisément être la règle, non seulement pour les
cotisations des régimes légaux, mais aussi pour les régimes complémentaires, y compris de
salariés. Il conviendra, sans doute, de conserver la distinction entre :
- Régimes concernant le travailleur indépendant lui-même, à savoir :
assurance-maladie, allocations familiales, retraite tant de base que, éventuellement
complémentaire, formation. '
. Le bulletin de paye.
Il faut sérieusement travailler sur la réalisation technique du bulletin de
d une très grande complexité. Le problème n'est toutefois pas simple, dans la paye qui est devenu
mesure où ce
document assume une fonction importante d'information, tant du salarié que des différentes
administrations et organismes sociaux et, même, des tiers.
-
Mesures diverses.
En raison de ses faibles moyens financiers, la petite entreprise ne peut généralement pas
faire appel aux organismes de conseil. Le Conseil économique et social renouvelle sa suggestion
formulée dans son avis adopté sur le rapport de M. Jean PAQUET, déjà cité, de créer un système de
«subvention à ^ aide», à l'instar de ce qui existe dans de nombreux pays européens. En
Allemagne, les petites entreprises ont droit à trois fois deux jours de conseil gratuit pendant les
cinq premières années. Au-delà, elles reçoivent chaque année une subvention partielle
pour
rémunérer cinq jours de conseil d'intervenants préalablement agréés. De telles mesures
nécessitent qu'au préalable soient tirés tous les enseignements des mesures FRAC. De même, la
formule du chèque-conseil aux créateurs d'entreprise doit faire l'objet d'un bilan afin de pouvoir,
ensuite, corriger ses imperfections. Des accords de partenariat doivent, à cet égard, être
recherchés entre les organisations professionnelles et les professions de conseil, notamment dans
le cadre des missions d'intérêt public que celles-ci assument lorsqu'elles sont réglementées (par
exemple, dans le cadre de l'aide juridique légale incombant à la profession d'avocat). Si des
mesures inspirées du droit allemand devaient etre introduites en France, il faudrait les étendre,
dans les mêmes conditions, aux repreneurs, acheteurs ou héritiers.
a) Remarques préliminaires.
On ne peut aborder cet aspect, important, du statut de l'entrepreneur en nom personnel sans
rappeler que la réflexion fondamentale qui a été menée au lendemain de la guerre, à l'initiative
du Gouvernement, par le Président Pierre LAROQUE visait à instaurer un régime de sécurité
sociale pour tous les Français, dont, en outre, l'une des pièces centrales aurait été l'assurance
chômage.
1.- L'assurance chômage n'a pas été retenue par le Gouvernement comme devant figurer
parmi les prestations couvertes par le régime légal de protection sociale au motif que, à cette
époque, parce qu'il fallait reconstruire la France, le risque de perte d'emploi était réduit et parce
que les organisations professionnelles intéressées s'y sont opposées. Voilà qui explique que cette
prestation, aujourd'hui fondamentale pour l'équilibre économique et social du pays, relève du
domaine conventionnel, au contraire de ce qui existe dans d'autres Etats de la Communauté.
C'est aussi ce qui explique que, bien qu'étant d'origine conventionnelle, le régime UNEDIC (Union
nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce) ait été intégré dans les règles de
coordination des régimes légaux de sécurité sociale telles qu'elles résultent, au nom de la libre
circulation des travailleurs, de l'article 51 du Traité de Rome et du règlement 1408.71. De ce fait,
les non salariés qui, par définition, ne peuvent pas être bénéficiaires d'une convention collective,
ne sont pas protegés contre le chômage. La question mérite cependant d'être posée : doit-on ou
non instaurer un système de revenus de remplacement en cas de cessation subie d'emploi pour
un commerçant, un industriel, un artisan, un professionnel libéral, un agriculteur ? Si, à première
vue, on est tenté de répondre par la négative dès lors que l'entrepreneur est un travailleur qui
assume pleinement le risque économique, deux éléments peuvent inciter à adopter une solution
différente :
D'une part, des contrats d'assurances ont été construits à cet effet ce qui témoigne d'une
-
demande ; mais, en raison du caractère volontaire de la souscription du contrat, la cotisation
n'est pas déductible de la base des revenus professionnels imposables, ce qui ne serait pas le cas
s'il s'agissait d'un élément du régime obligatoire de sécurité sociale.
D'autre part, si, dans la situation de droit commun, les mandataires sociaux, bien que
-
salariés au plan du droit de la sécurité sociale, ne bénéficient pas du régime d'assurance chômage,
n'étant pas liés à la société par un contrat de travail, il n'en est pas de même en cas de cumul du
mandat et d'un contrat de travail ou lorsque le mandat auprès d'une société filiale est le moyen
d'exécuter un contrat de travail conclu avec la société mère. Il y a donc des «patrons» qui
bénéficient de l'assurance chômage.
2.- La loi du 17 juin 1948 a donné naissance à des régimes spécifiques pour les commerçants,
industriels (Caisse de compensation de l'organisation autonome nationale de l'industrie et du
commerce : ORGANIC), pour les artisans (Caisse autonome nationale de compensation de
l'assurance vieillesse artisanale : CANCAVA) et pour les professions libérales (Caisse nationale
d'assurance vieillesse des professions libérales : CNAVPL), sauf en ce qui concerne les avocats qui
disposent, par la Caisse nationale des barreaux français (CNBF), d'un régime autonome. Les
exploitants agricoles disposent, de leur côté, de régimes particuliers (Caisse nationale d'assurance
vieillesse mutuelle agricole : CNAVMA).
Les caisses gèrent avant tout un régime de retraite, mais y a été intégrée la couverture, à des
niveaux forts différents, de prestations décès, invalidité, parfois incapacité de longue durée. Au
plan de la retraite, le régime des commerçants-industriels et celui des artisans ont été alignés sur
le régime général. Ce n'est par contre pas le cas du régime des professions libérales.
Au plan de la maladie, le régime mis en place au profit des travailleurs non salariés géré par
la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions
agricoles alloue des prestations en nature, similaires mais un peu inferieures de
non (CANAM)
celles allouées aux salariés. Par contre, aucune prestation en espèce n'est allouée au titre de
l'incapacité temporaire. En outre, les affections résultant de maladie professionnelle ou
d'accident du travail ne font pas, comme c'est le cas pour les salariés, l'objet d un traitement plus
favorable. Le régime des accidents du travail s'étant éloigné de la notion de réparation d'un
préjudice résultant d'une faute (sauf lorsqu'il y a faute inexcusable) de l'employeur, rien ne
s'oppose, pourtant, à ce que soit instauré un régime particulier également pour les non salariés.
Malgré la volonté d'alignement du régime des travailleurs non salariés (de celui des
commerçants et industriels et de celui des artisans, en fait) sur celui des salariés, le niveau réel de
protection sociale des exploitants en nom personnel demeure nettement inférieur à celui du
dirigeant salarié en raison d'une part des régimes complémentaires d'origine conventionnelle,
d'autre part des systèmes supplémentaires dont les cotisations bénéficient aussi, au plan fiscal, de
la qualification de charges pour les salariés, avantage dont sont exclus les travailleurs
non salariés.
C'est la raison pour laquelle, l'un des objectifs du présent avis étant la recherche de l'égalité
au plan social, sont présentées ci-après des propositions tendant successivement aux régimes de
protection sociale proprement dites ainsi qu'au traitement fiscal de l'assurance retraite et
prévoyance.
b) Propositions.
^ 3.- Les caisses de retraite de non salariés ont mis en place des régimes complémentaires
delà du régime de base ayant une vocation équivalente à celle du régime général, mais ils sont au-
soit insuffisants soit facultatifs sauf pour les professions libérales pour lesquelles, par contre, le
régime de base alloue des prestations qui ne représentent que de l'ordre de 50 à 60 % de ce que
verse le régime général :
Lorsqu'ils sont à adhésion facultative, le souci de pérennité des droits justifierait que l'on y
-
constitue les capitaux correspondant aux rentes à servir dès lors que la solidarité des genérations
n'est pas garantie par l'obligation de cotiser. Le régime facultatif des commerçants n'a que peu
de succès.
- Lorsqu'ils sont à adhésion obligatoire, le but devrait être d'obtenir un revenu de
substitution similaire à celui dont bénéficient les salariés par la conjonction des régimes de base
et complémentaires ce qui doit conduire à calculer partout les cotisations non pas forfaitairement
mais sur les revenus et si possible de l'année en cours. Cet objectif peut, pour les anciens, être
atteint s'il y a reconstitution de carrière gratuite, comme cela a été le cas dans le régime des
artisans. En outre, se pose ici la question de la compensation entre les régimes complémentaires
qui, s'ils restent autonomes, sont fragiles.
4.- La différence essentielle, en matière de retraite et de prévoyance, entre le statut du
dirigeant salarié d'une société et celui de l'entrepreneur en nom personnel tient aujourd'hui à ce
que, pour le second, ne sont déductibles de l'assiette des revenus professionnels que les
cotisations aux seuls régimes légaux de retraite et de maladie, tandis que, pour le premier, toutes
les contributions destinées au financement de la retraite et de la prévoyance, y compris celles des
systèmes supplémentaires versées à des compagnies d'assurance, des mutuelles, des institutions de
prévoyance, sont fiscalement des charges tant qu'elles n'excèdent pas 19 % de huit fois le plafond
annuel des cotisations de sécurité sociale.
La nécessité de parvenir à une égalité sociale authentique justifie la mise à l'étude de
l'extension aux non salariés de cet avantage consenti aux salariés, malgré l'argument toujours
avancé pour s'y opposer, à savoir que, pour les salariés, le caractère obligatoire peut venir d'un
accord collectif ou d'une décision unilatérale de l'employeur, tandis que, pour les non salariés, il
ne peut résulter que de la loi. Au demeurant, l'extension de la déductibilité aux systèmes
facultatifs a été consentie aux fonctionnaires (PREFON) et, plus récemment aux agriculteurs. Dans
certaines caisses de non salariés existent, au demeurant, des régimes professionnels (par exemple :
ORGANIC des commerçants ou CNBF des avocats) dont les cotisations sont déductibles fiscalement
des revenus professionnels. Par contre, cela rend indispensable de bien marquer la différence
entre systèmes de retraite et de prévoyance d'un côté, système d'épargne de l'autre de sorte que
ne soient déductibles de l'assiette des revenus imposables que les contributions destinées au
financement de contrats de retraite (prévoyant le versement d'une rente à l'exclusion de tout
capital et ne permettant pas le rachat) et de contrats de prévoyance collective (assurant des
garanties temporaires déces, incapacité, invalidité, prestations en nature) complémentaires aux
prestations des régimes légaux. Les autres types de contrats ne peuvent bénéficier d'une
déduction que dans le cadre des dispositions spécifiques à l'assurance-vie.
a) Considérations générales.
La notion même de régime de retraite (voir à ce sujet le Droit de la Sécurité sociale - Précis
DALLOZ - 12ème édition - J.J. DUPEYROUX) -qui implique l'autonomie financière, même si celle-ci
est nuancée par les techniques de compensation- exige, par souci de sécurité, la solidarité d'une
part du plus grand nombre pour éviter les effets négatifs des récessions économiques catégorielles
ou des rapports démographiques atypiques, d'autre part des générations sans laquelle le volume
des contributions nécessaires à la fourniture des prestations n'est pas suffisant. De ce fait, la
transformation dans la situation juridique de l'entreprise menace la pérennité des régimes des
non salariés si elle a pour effet, suite à cette transformation, que le dirigeant relève du régime des
salariés.
Voilà pourquoi les responsables des caisses de non salariés souhaitent le maintien de ces
dirigeants dans le régime des non salariés. Il est, de fait, qu'entre le président directeur général
d'une société anonyme fictive et l'exploitant en nom personnel, il n'y a pas de différence telle qui
justifie cette différence de statut, ceci d'autant que la définition de l'assujettissement au régime
général repose sur une situation de dépendance qui n'existe pas pour ce président. Au
demeurant, il a fallu que le code de la sécurité sociale soit complété par une référence expresse
pour que ces dirigeants relèvent du régime général. En outre, si on a procédé à cette extension
du domaine naturel de compétence du régime général, c'est pour donner un attrait certain, grâce
à l'avantage social, à la société de capitaux pour inciter à la transformation. Si égalité au plan de
la protection sociale il y a entre salariés et non salariés, cette mesure incitative ne se justifie plus.
1.- L'article L-651.1 du code de la sécurité sociale oblige les sociétés de capitaux à verser
0,10 % de leur chiffre d'affaires (lorsque celui-ci est supérieur à un seuil) aux régimes de non
salariés. Le caractère indemnitaire de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés
(dite «C3S»), évident à l'origine, a été remis en cause par la loi de finances de 1992. Les réserves
accumulées à ce titre ont été affectées au rééquilibrage du régime des agriculteurs. Non
seulement, ce texte a privé les régimes des non salariés du moyen de compenser les effets négatifs
pour eux de la constitution d'une société, mais encore, perdant son caractère indemnitaire, cette
contribution devient, de fait, un élément de la compensation inter-régimes, ce qui réduit sa
portée réelle d'indemnité destinée à réparer un préjudice lié à la fracture de la solidarité.
donc revenir sur cette disposition de pure opportunité, qui aura pour effet que, fin
1993, il n'y aura plus aucune réserve. Cette situation, de droit et de fait, constitue une menace
pour l'équilibre de ces régimes si le flux des constitutions de sociétés s'accentue. Ce n'est pas, au
demeurant, aux sociétés de capitaux de l'industrie et du commerce, de l'artisanat ou des
professions libérales à financer le déséquilibre du régime des agriculteurs, mais à la solidarité
nationale.
Par ailleurs, on peut s'interroger sur la justification du paiement de cette cotisation par les
SARL à gérance majoritaire dont les dirigeants continuent à relever du régime des non salariés.
2.- Le code de la sécurité sociale permet, en outre, que, si un régime supplémentaire existe
dans une profession, la société nouvellement constituée qui fait sortir le dirigeant de l'entreprise
du régime soit tenue d'acquitter une cotisation subséquente qui est en fait un capital étale sur
plusieurs années. La seule expérience de ce type de cotisation subséquente, qui, bien sûr, n'ouvre
droit à aucun avantage de retraite puisqu'elle est destinée à réparer le préjudice subi par le
régime du fait du changement de statut social du dirigeant de l'entreprise, concerne la profession
du bâtiment. Elle n'est pas, loin s'en faut, convaincante.
Le principe en est cependant intéressant, d'autant qu'il est tiré de la technique actuarielle. La
menace que fait courir, dans un régime par répartition, la sortie d'un béneficiaire en cours
d'acquisition de droit est écartée si, au moment de la sortie du régime, est versé le capital
destiné à consolider les droits au titre de la période validable. Une telle contribution, appliquée
aux régimes de base, serait, en outre, un moyen de dissuader le recours excessif à la sociéte de
capitaux. Elle doit, au minimum, être généralisée à tous les régimes complémentaires
obligatoires.
3.- L'indemnisation n'étant pas, à elle seule, suffisante pour maintenir attractifs les régimes
de non salariés, dès lors que les effectifs risquent de diminuer, il serait sans doute souhaitable de
procéder à une étude de la faisabilité, au plan tant technique que juridique, de l'instauration du
choix, pour un ancien entrepreneur devenant salarié par suite de la transformation de la situation
juridique de l'entreprise, d'opter soit pour le régime général soit pour le maintien du régime des
non salariés. En raison du caractère d'ordre public attaché à la notion de régime par la
jurisprudence, il est considéré par le ministère de la Sécurité sociale qu'un tel choix n'est pas
possible. Il est cependant à noter que cette notion ne relève pas de la Constitution. Dans cette
perspective, le choix devrait porter sur l'ensemble des risques.
Selon l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale, relève du régime général de la sécurité
sociale la personne physique qui se trouve en situation d'employé à l'égard d'un employeur, quel
que soit son statut. La redaction de cet article autorise une définition plus large du salarié au
plan du droit de la sécurité sociale que celle qui prévaut pour la notion de contrat de travail, au
plan du droit du travail. Elle ne justifie pas pour autant l'interprétation très extensive, mais qui
régresse depuis peu, de la Cour de Cassation pour laquelle seule suffit, pour relever du régime
général, la participation à un service organisé, ce qui conduit à l'assujettissement de personnes
liées par un contrat d'entreprise, tels que franchisés ou sous-traitants qui ont, cependant, choisi
déliberément le statut de non salarié.
Cette situation doit cesser :
- d'une part la requalification en salaire n'a plus socialement d'intérêt dès lors que le niveau
de la protection sociale légale des non salariés est similaire à celui des salariés ;
- d'autre part l'impossibilité, en cas de contrôle, de faire rétroagir les effets de la
requalification au niveau des prestataires a conduit la Cour de Cassation à n'appliquer le régime
des salariés que pour le futur. Cette solution méconnaît le caractère d'ordre public des régimes
de protection sociale, ordre public qui justifierait la rétroactivité dans la limite des délais de
prescription.
On ne peut, en conséquence, qu'inviter le législateur à écrire autrement l'article L-311.2
pour rapprocher davantage la notion de salarié en droit de la sécurité sociale de celle qui prévaut
en droit du travail, même si, par l'article L-311.3, les dirigeants de sociétés de capitaux doivent
continuer à relever du régime général.
III. - LE RENFORCEMENT
DE LA CAPACITE FINANCIERE DE L'ENTREPRISE
Quelle que soit sa forme juridique, la petite entreprise manque de fonds propres. Sa fragilité,
qui en découle, est aggravée dans des périodes de grandes difficultés économiques, comme celles
que nous connaissons actuellement. Par voie de conséquence, elles ne peuvent que difficilement
résister aux difficultés de leurs clients, que celles-ci se traduisent par l'augmentation des délais de
paiement ou par leur dépôt de bilan. Il faut donc sérieusement s'inquiéter du renforcement de
leur capacité financière. Mais il faut ici nécessairement distinguer les entreprises exploitées en
nom personnel et celles qui, bien qu'unipersonnelles, sont constituées en sociétés.
Le taux de mortalité des entreprises nouvellement créées est très élevé au cours des trois
premières années. Il est d'autant plus indispensable d'inciter à affecter un montant suffisant -sous
forme de biens affectés ou de numéraire- à l'entreprise que les aides extérieures s'élèvent à plus
de quarante mille francs. Un créateur doit engager sa responsabilité personnelle, ce qui justifie un
«capital» nettement supérieur à ce seuil. Il convient, toutefois, de souligner que la nécessité de
disposer de fonds propres ne se pose pas de manière identique pour tous les types d'activités. Les
accords sur l'essaimage -il s'agit de dispositifs mis en place, la plupart du temps, dans le cadre de
plans sociaux à l'occasion d'une procédure de licenciement économique et pour en atténuer les
effets ; ils visent à favoriser le départ volontaire de certains salariés en facilitant la création
d'entreprises sous forme d'aide financière- gagneraient en efficacité si était organisé un suivi
pendant la période délicate des premières années, grâce à la formation et au conseil. Les actions
des chambres, tant de commerce que des métiers, dans ce domaine sont à souligner, de même
que les mesures -d'ordre fiscal et autres- prises par l'Etat, qui doivent être, par souci de plus
d'efficacité, organisées dans un ensemble cohérent en fonction d'un objectif général précis.
Le dispositif CIFA (contrat installation formation artisanale) qui s'adresse à des demandeurs
d'emplois jeunes repose sur :
- un conseil au niveau du projet,
- une formation pratique en entreprise, de gestion (200 heures minimum) et d'initiation aux
nouvelles technologies, le cas échéant.
La formation est de 1.000 heures maximum au total.
- un suivi.
Le taux de survie des entreprises bénéficiant de ce dispositif est nettement supérieur au taux
moyen de survie des entreprises.
Limité à l'origine (1980) à la zone pyrénéenne, le dispositif a été élargi progressivement. Il
concerne la France entiere depuis 1987.
Même si leur nombre est modeste, en raison d'une faible publicité et de quelques lourdeurs
en voie de correction, les CIFA démontrent qu'une installation bien mûrie et une formation, dont
200 heures minimum de gestion, sont une garantie.
Les entreprises individuelles n'ont pas de capital au sens du droit des sociétés, mais dans une
entreprise individuelle le capital engagé dans l'entreprise est à tout moment égal au solde
créditeur du compte personnel de l'exploitant. La difficulté essentielle posée par la jurisprudence
et la doctrine administrative concerne donc les charges financières afférentes à des prêts ou
avances non assimilables à des découverts, par exemple des emprunts bancaires nécessités par le
développement de l'entreprise dont les frais financiers pourront être réintégrés. La conséquence
pratique de cette réintégration est la sanction des entrepreneurs qui effectuent des
investissements financés par des emprunts pour accroître le potentiel économique de leur
entreprise, créer des emplois, alors que les entrepreneurs ayant recours au crédit-bail ne sont pas
sanctionnés par cette réintégration !
Afin de ne pas freiner le développement des entreprises individuelles, notamment par une
distorsion selon les modes de financement effectués, il est proposé, lorsque le compte personnel
de l'exploitant présente un solde débiteur, la réintégration d'intérêts calculés à un taux égal à la
moyenne annuelle du taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées.
Par ailleurs, il conviendrait de rendre plus exceptionnel le recours aux cautions du conjoint,
dont l'autonomie de volonté est réduite pour des considérations aussi bien d'ordre moral que de
dépendance économique.
d) Une autre voie possible consisterait à étendre les mécanismes de déduction pour
investissement, tel que celui autorisé par l'article 72 D du code général des impôts, aux
conditions d'objet (notamment pour favoriser l'innovation technologique), de durée et de
plafond, sous peine de réintégration, similaires à celles instaurées depuis le 1er janvier 1986 dans
le secteur agricole.
Toutefois, la phase de développement étant très gourmande en fonds propres, il serait
souhaitable de prévoir un aménagement de la fiscalité frappant l'apport en numéraire.
e) La séparation du patrimoine correspondant à l'entreprise ne peut enfin qu'inciter
fortement à accorder à l'exploitant individuel la possibilité d'opter pour l'assujettisement à
l'impôt sur les sociétés du bénéfice de celle-ci. Cette proposition figure, au demeurant, dans les
conclusions du comité de réflexion, présidé par M. RUDING ; elle a été approuvée par la section
des affaires économiques, financières et monétaires du Comité économique et social des
Communautés européennes (ECO/159 du 19 novembre 1992). L'effet d'une telle mesure serait
triple :
. Les sociétés de capital risque n'ont jusqu'ici pas apporté de solution à ce problème. Les
informations recueillies indiquent que l'offre de capitaux est supérieure à la demande. Les raisons
en sont simples : la réticence des chefs d'entreprise à ouvrir leur capital parce qu'ils craignent de
perdre leur indépendance ; l'importance du risque qui a pour conséquence un rendement
dérisoire quand il n'est pas négatif. C'est donc en fonction d'autres motivations que se
déterminent ceux qui s'intéressent à ce type d'activités, en particulier en considération de
l'intérêt général, matérialisé par la fonction sociale de l'entreprise en général, des petites en
particulier.
Les sociétés de capital risque sont, cependant, l'un des moyens de donner aux entreprises
en
nom personnel les fonds propres qui leur font défaut. La collecte de l'épargne de proximité
-qu'elles permettent- n'est cependant possible que si :
- l'entrepreneur est suffisamment et clairement informé ;
- l'épargnant y trouve un intérêt réel. A défaut d'un rendement suffisant de l'argent placé,
totalement exclu dès lors que les entreprises bénéficiaires sont un tissu économique à risque, cet
intérêt doit se trouver dans l'incitation fiscale. Celle-ci se justifie pleinement dès lors qu'est
constaté que ces entreprises petites sont un gisement d'expansion économique et d'emploi. Le
Conseil économique et social recommande, en conséquence, que soit accorde un crédit d'impôt
correspondant à tout ou partie de l'investissement réalisé sous cette forme. Celui-ci doit
également être conditionné à une durée relativement longue de maintien de l'argent dans
l'entreprise ;
- des méthodes de protection de l'investisseur sont instaurées. Elles pourraient prendre la
forme d'un système d'information sur la marche de l'entreprise, les prévisions et les résultats de
l'exploitation, ainsi que sur la réalité du patrimoine affecté, actualisé. Un tel système
d information aurait, en outre, l'immense mérite d'avoir un effet pédagogique en obligeant le
dirigeant à dissocier son intérêt personnel de celui de l'entreprise ;
- une garantie ou un cautionnement mutuel sont mobilisés en faveur des apporteurs de
capitaux. Il convient en outre que le retour d'investissement se fasse sur une période
suffisamment longue et d'éviter les réalisations de plus-values trop rapides afin de préserver
l'équilibre financier de l'entreprise qui se crée ou qui se développe.
Pour donner plus de fluidité aux participations, on pourrait envisager, pour les PME,
d'émettre des titres participatifs -réservés aux sociétés par actions du secteur public et aux
sociétés anonymes coopératives- ou, pour les entreprises en création, des actions à dividende
prioritaire. Le régime fiscal pour les titres participatifs pourrait être assimilé à celui des
obligations (déductibilité pour l'entreprise, prélèvement libératoire de 16 % pour le bénéficiaire).
•
On observe que les fonds de cautionnement mutuel professionnels sont moins que dans le
passé en mesure de jouer le rôle important de mutualisation des risques qu'ils avaient assumés
avec succès jusqu'à ces dernières années. Dès lors, il conviendrait que l'Etat renforce encore de
façon substantielle les moyens d'intervention de la SOFARIS et surtout en élargisse les conditions
d'éligibilité encore trop restrictives.
. Une solution alternative serait de mettre en place un système du type de celui en vigueur
en Belgique pour compenser le manque de garanties. Il faut instaurer un fonds légal de garantie
sous forme de cautionnement destiné à se substituer aux sociétés classiques et octroyé en fonction
de l'honorabilité du travailleur indépendant et de son projet d'entreprise. C'est, au demeurant,
un moyen de valoriser le concept d'ethique de la fonction entrepreneuriale.
Le jour où l'entrepreneur individuel cède son exploitation, il est fait l'inventaire des plus
values réalisées. Celles-ci sont taxées au taux de droit commun de l'impôt sur le revenu pour
toute la part de leur montant qui correspond aux amortissements antérieurement déduits. Tout
au plus existe-t-il une exonération en faveur des exploitants dont le chiffre d'affaires n'excède pas
le double de la limite d'application du forfait (soit un million de francs environ). La neutralité
fiscale a existé, toutefois, jusqu'en 1980. Elle a été supprimée le jour où a été inventée la
neutralité en cas d'apport en société des actifs de l'entité économique. Il s'agit, là encore, d'une
incitation à passer en société, nonobstant le caractère positif de la mesure.
La logique de l'entreprise distincte de celui qui la gère, appliquée aussi bien à l'exploitation
individuelle qu'à la société, justifie que l'on privilégie la permanence de l'entreprise comme fait
juridique déterminant. Le droit du travail, au travers de l'article L. 122-12, 2ème alinéa du code
du travail, véritable définition de l'entreprise dans le temps, prend en compte cette permanence.
Par exemple le décès de l'exploitant n'est pas, compte-tenu de cette logique, un cas de force
majeure susceptible d'imposer la rupture de plein droit des contrats de travail.
Le principe de permanence de l'entreprise exige alors la neutralité intégrale des plus values
-et le report de leur taxation chez le nouvel exploitant- lorsque l'entreprise en nom personnel est
cédée. Une telle disposition, outre qu'elle contribuera à l'égalité fiscale, ne pourra que réduire les
difficultés importantes rencontrées par les entreprises au moment de leur transmission, difficultés
qui peuvent conduire à leur perte. Pour éviter tout dévoiement, cette absence d'imposition
pourrait être subordonnée à l'assurance de la continuation de l'entreprise, par exemple à une
exigence d'exploitation pendant une certaine durée.
a) En cas de vente.
Les cessions d'actions de sociétés anonymes peuvent échapper à tout droit de mutation et
celles de parts de SARL sont soumises à un droit de 4,8 %. Au contraire, le prix de vente d'une
entreprise en nom personnel est taxé à 14,20 % (certes avec un abattement) et même à 16,60 %
pour les biens immeubles.
Il y a, là encore, une incitation forte à la constitution de sociétés, de préférence lourdes
(sociétes anonymes), même si, par la nature de l'activité, la taille de l'entreprise ou le niveau des
résultats, les lourdeurs nées d'un formalisme inadapté et les coûts indirects en découlant sont
susceptibles de compromettre ensuite l'efficacité de la gestion.
La seule solution équitable est l'extension de celle en vigueur pour les sociétés anonymes à
toutes les formes d'exploitation. A tout le moins, les entreprises en nom personnel devraient
pouvoir prétendre à un alignement de leur situation sur celle des SARL (droit de 4,80 %), au
besoin moyennant l'engagement des successeurs de poursuivre l'exploitation pendant un certain
temps.
b) En cas de succession.
La cession de l'entreprise à la date à laquelle son dirigeant part en retraite est souvent
dramatique par manque de préparation. Des mesures ont été adoptées, dans les sociétés, qui
permettent d'inciter à une préparation de la succession suffisamment tôt. Ce sont, au plan de la
transmission du capital, les offres de souscription ou d'achat d'actions (dites «stock options») et
le régime de rachat de l'entreprise par ses salariés (RES). C'est aussi, au plan juridique, la société
à directoire, qui permet au fondateur de quitter la direction de l'affaire tout en la contrôlant
poste de président du conseil de surveillance. Rien de semblable pour les entreprises individuellesau
et pour cause puisqu'on ne considère pas l'entité économique autrement que comme une partie
des biens du patrimoine indivisible de la personne qui l'exploite. Et, pourtant, ce type
d'entreprises, en raison notamment de l'intuitu personae très grand, est encore plus fragile
qu'une société à l'occasion d'un changement de dirigeant. Il faut donc trouver des méthodes qui
incitent à anticiper la décision de transmission et qui la préparent, tout spécialement la
formation des hommes et des femmes appelés à assumer ultérieurement la responsabilité de par
l'entrepreneur, et par la préservation des fonds propres et de la trésorerie susceptibles d'être
menacés par le rachat de l'entreprise.
Il serait intéressant d'explorer l'idée d'un pacte, conclu quelque cinq années avant la date
prévue pour le départ (en retraite la plupart du temps), par exemple dans le cadre d'une
association en participation. Aux termes de cette convention, l'exploitant serait tenu de former
son successeur, notamment sous la forme de la transmission de son savoir-faire, de le rémunérer
pour son travail dans le cadre d'une répartition des bénéfices et le moment venu de lui céder
l'exploitation.
En contrepartie, le successeur pressenti s'engagerait à garantir, moyennant une réduction,
voire la suppression du prix normal de vente de l'affaire, une rente viagère sur une ou deux têtes,
laquelle pourrait être gagée par la constitution d'un capital sous forme de primes versées
franchise d impôt pendant les années précédant la date de cession dans le cadre d'un contrat en
d 'assurance. Ainsi, l'entreprise, considérée comme une entité distincte de celui qui la gère
malgré l'exploitation en nom personnel, acquitterait le prix de la cession, permettant ainsi
au
successeur de ne pas obérer ses chances de réussite par une impossibilité d'investir en raison du
poids financier en résultant. Pour éviter tout abus, on peut concevoir que cet avantage fiscal
serait définitivement acquis que si le successeur exploite le fonds pendant une durée minimale. ne
De même, il serait intéressant de s'inspirer des propositions du rapport présenté
M. CORMORECHE dès 1987 sur la transmission des exploitations agricoles,
par
en reprenant
notamment l'idée du plan de transmission.
Par la négociation collective de branche, il est dès lors possible d'apporter des solutions à la
nécessaire adaptation du statut collectif et individuel des salariés dans les petites entreprises.
D'une façon générale, le Conseil économique et social souhaite que dans les petites
entreprises, l'attention soit portée :
- sur l'application des conventions et accords collectifs,
- sur un effort de dialogue et de concertation avec les représentants du personnel,
- sur un intéressement des salariés aux résultats.
CONCLUSION
L'ÉTHIQUE DE LA FONCTION DE CHEF D'ENTREPRISE
Considérer que l'entreprise a une fonction sociale en même temps qu'elle est source de
revenus pour l'exploitant rend indispensable qu'en conclusion de cette étude, soit développée une
réflexion sur le comportement de chef d'entreprise. Celle-ci s'impose, en effet, puisque
l'entreprise assume une mission d'intérêt général et que son activité conditionne les équilibres
économiques et sociaux. Cela rend indispensable que soit privilégié l'intérêt de l'entreprise sur
celui, personnel, du dirigeant. La séparation du patrimoine affecté à l'activité économique ne
peut qu'y contribuer.
La notion d'intérêt général de l'entreprise implique que la décision de gestion soit arrêtée en
considération des intérêts catégoriels, non pour déboucher sur un compromis mais pour une
meilleure information de l'entrepreneur sur la situation et les enjeux susceptibles d'optimiser les
choix. Dans cette perspective, ce qui est essentiel à la valorisation de la fonction sociale de
l'entreprise, c'est la recherche prioritaire de sa pérennité. La création de l'entreprise a, en effet,
un cout pour la collectivité, lequel n'est amorti que grâce à sa longévité. Les vicissitudes
juridiques ou économiques de l'entreprise s'accompagnent, certes, de traumatismes, mais le
préjudice n'est pas immense si l'entreprise continue à vivre car elle a vocation naturelle à
prospérer. Au contraire, sa disparition est à la fois source de désordres en chaîne et d'un coût
irréversible pour la société.
Privilégier l'intérêt de l'entreprise est affaire d'abord de culture, donc d'éducation. Doit-on,
en fonction d'un tel constat, subordonner l'exercice de la fonction de chef d'entreprise à une
formation ? Certains le pensent et espèrent y trouver la réponse au nombre trop élevé de
défaillances au cours des premières années qui suivent la création de l'entreprise. Cette voie, si
séduisante soit elle, doit être explorée, cependant, avec circonspection. Dans un pays de liberté,
l'accès à la fonction de chef d'entreprise doit demeurer libre d'autant que, dans les civilisations
modernes, les activités de l'homme sont de plus en plus conditionnées à la possession d'un
diplôme. L'exigence de diplôme est incompatible avec la liberté d'entreprendre. Mais la société
doit cependant veiller à la compétence de celui qui crée une entreprise, eu égard à la fonction
sociale de celle-ci. C'est alors en suscitant le réflexe du besoin de connaissance que doit être
développée la formation.
Les différentes disciplines qui constituent le droit de l'entreprise contribuent au
développement d'un comportement irréprochable de l'entrepreneur ; les normes qu'elles édictent
ne sauraient, en effet, être transgressées sans sanction. Privilégier, en toute circonstance,
l'entreprise va, toutefois, bien au-delà. Il s'agit non seulement de respecter des textes impératifs
mais de se conformer à une morale fondée sur la fonction sociale de l'entreprise. Il s'agit donc
d'éthique. Peut-on, sans risque d'être poursuivi pour discrimination ou atteinte à la libre
entreprise, écarter, au nom de celle-ci, un membre d'une organisation patronale ? Peut-on
interdire l'accès à la création d'entreprise à celui qui aura trébuché sans que ce soit pour des
motifs frauduleux ? Le souci de la qualité professionnelle relève sans aucun doute de l'éthique.
Peut-on, pour autant, interdire de création d'entreprise pour incapacité ? Mais, à l'inverse, n'est-
il pas souhaitable que les tiers puissent disposer d'informations sur les débiteurs faillis, au moins
sur ceux ayant fait l'objet d'une interdiction de gérer ou de sanctions patrimoniales ? L'adhésion
des groupements patronaux à «Info-greffe» est, sans doute, un moyen de gérer cette information
sans pour autant porter atteinte aux libertés individuelles.
Aussi, si le principe du recours à une éthique de la fonction d'entrepreneur ne souffre pas de
difficultés, sa mise en oeuvre est beaucoup plus malaisée. Ce n'est pas une raison pour s'en
désintéresser. C'est d'abord aux organisations syndicales et institutionnelles de chefs d'entreprise
qu'incombe la responsabilité de s'en préoccuper.
ANNEXE A L'AVIS
SCRUTIN
-
GROUPE DE LA C.F.E.C.G.C. - MM. Cambus, Cros, Mlle Cumunel, MM. Insa, Marchelli,
deSantis.
-
GROUPE DE L'U.N.A.F. - MM. Bichot, Billet, Bordereau, Brin, Burnel, de Crépy,
Duffaure, Jacquet, Niol.
-
GROUPE DE L'AGRICULTURE. - MM. Amis, Bordeaux-Montrieux, Bouche, Cazalé,
Cazals, Compiègne, Cormorèche, Didierjean, Droulin, Fauconnet, Guézou, Guyau, Hamel,
Hervieu, Lapeze, Lapie, Ledru, Munet, Rigaud, Schaeffer.
-
GROUPE DES DEPARTEMENTS, DES TERRITOIRES ET DES COLLECTIVITES
TERRITORIALES A STATUT PARTICULIER D'OUTRE-MER. MM. Barrat, Hmeun, Jarnac,
-
Reux.
-
GROUPE DES ENTREPRISES PRIVEES. - MM. Bernasconi, Bocquet, Brana, Breuil-
Jarrige, Brunaud, Brunet, Brunier, Cambournac,1 Cerruti, Chesnaud, Chotard, Clément,
Dermagne, Fabre Jacques, Gauthier, Gilson, Lepâtre, Moreaud, Netter, P~rrotin, Périgot, Pinet,
Rebuffel, Salvanès.
- GROUPE DES ENTREPRISES PUBLIQUES. - MM. Aubert, Bidegain, Calandra, Mme
Chassagne, MM. Descoutures, Pecqueur, Rolant, Teillac.
-
GROUPE DE L'ARTISANAT. - MM. Bidaud, Buguet, Cabut, Delmas, Huet, Millet,
Paquet, Seassari.
-
GROUPE DES PERSONNALITES QUALIFIEES. - MM. Arrighi de Casanova, Castagnet,
Chaigneau, Delarue, Deleplace, Dubois, Mmes Frachon, Gadioux, MM. Lair, Legatte, Poujade,
Steg, Vandier, Vignau.
-
GROUPE DE LA COOPERATION. - MM. Ballé, Chambaud, Courtois, Espagne, Marchai,
Morel, Pétrequin, Remaury, Verdier, Zaegel.
-
GROUPE DES REPRESENTANTS DES FRANCAIS DE L'ETRANGER, DE L'EPARGNE
ET DU LOGEMENT. - M. Lefort.
-
GROUPE DES ASSOCIATIONS. -
MM. Bastide, Coursin, Guénée, Mme Mengin, M.
Paillou.
-
GROUPE DES PROFESSIONS LIBERALES. - MM. Barthélémy, Beaupère, Legros.
-
GROUPE DE LA MUTUALITE. - MM. Mandinaud, Radelet.
GROUPE DE LA C.G.T. MM. Alezard, Pierre Blanchard, Decisier, Mme Duchesne, MM.
- -
Le Duigou, Lomet, Moulin, Obadia, Parrot, Potavin, Mme Rey, MM. Scat, Tournebise.
GROUPE DES PERSONNALITES QUALIFIEES. - M. Le Guen.
-
SE SONT ABSTENUS : 53
GROUPE DE LA C.F.D.T. Mlle Andreux, MM. Bury, Caries, Delaby, Dezeure, Hureau,
- -
Le Boterff, Lobjeois, Mennecier, Mme Ouin , Mlle Piazza, MM. Rabardel, Rougemont,
Rousselot.
GROUPE DE LA C.G.T.F.O. MM. Bouchet, David, Desrousseaux, Duffaud, Fabre
- -
Marcel, Gendre, MmeHofman, MM. Lamarque, Largeron, Lefebvre, Mertz, Raignoux, Roulet,
Vacherie.
GROUPE DE LA C.F.T.C. MM. Bergamini, Bornard, Drilleaud, Faki, Walter.
- -
GROUPE DE LA F.E.N. Mme Laroche-Brion, MM. Laxalt, Lecertua, Mme Morand.
- -
-
GROUPE DE L'AGRICULTURE. - M. Lemasle.
GROUPE DES PERSONNALITES QUALIFIEES. - MM. Andrieu, Beauchamp, Buard,
-
Charzat, Mme Delorme, MM. Delouvrier, Garcia, Girard, Henninot, Méraud, Raymond,
Schapira, Schwartz.
GROUPE DES REPRESENTANTS DES FRANCAIS DE L'ETRANGER, DE L'EPARGNE
-
ET DU LOGEMENT. - M. Courbey, Mme Nivoit-Cathala.
DÉCLARATIONS DES GROUPES
GROUPE DE L'AGRICULTURE
La crise économique aura eu au moins ceci de bon qu'elle nous aura fait découvrir que le
gigantisme a ses limites, que les millions d'entreprises individuelles constituent la toile de fond de
nos activités productives, le maillage économique de notre territoire, et une réserve d'emplois
inestimable à l'heure des grandes reconversions industrielles.
Mais si la réhabilitation de l'entreprise individuelle a déjà commencé dans les esprits, au
niveau de son statut juridique, social et fiscal, tout reste encore à faire.
Dans ce type d'entreprise, il existe, en effet, une étroite imbrication entre l'exploitation et
l'exploitant qui conduit à confondre les revenus du travail et les revenus du capital, à mélanger le
bénéfice réinvesti et le bénéfice disponible.
Le groupe de l'artisanat est satisfait de voir que le sujet dont il a maintes fois saisi le
gouvernement ait été porté à la réflexion du Conseil économique et social, estimant urgent de
faire le point sur le statut le plus adapté à ces millions d'entreprises qui représentent près de
50 % des entreprises françaises.
Outre cette importance numérique, le groupe de l'artisanat a apprécié le rappel de leur rôle
économique et social à travers la notion d'éthique.
En effet l'artisanat repose sur une logique d'entreprise qui apporte produits et services à
proximité des usagers dans l'indépendance, mais également sur une logique de métiers attachant
beaucoup d'importance au savoir-faire et à la qualification professionnelle.
A ce titre, il est effectivement juste de dire qu'il participe à l'équilibre de la société, à
l'aménagement du territoire et à l'emploi.
Leur taille, leur structure de type familial et surtout leur désir de ne pas partager leur
reponsabilité sont incompatibles avec le fonctionnement et la gestion en société. C'est ce qui
explique sans doute le peu de recours à la technique sociétaire dans le secteur artisanal. Les 20 %
qui l'ont choisie l'ont fait la plupart du temps pour l'intérêt fiscal et social qu'ils pouvaient en
retirer et non pour des raisons économiques.
C'est pourquoi d'ailleurs tant de sociétés montées fictivement constituent le gros bataillon
des disparitions annuelles d'entreprises nouvellement créées, entraînant de ce fait préjudice à la
collectivité au regard des créances dues, et aux salariés par le jeu de primes interposees.
L'ensemble des mesures proposées alliant les spécificités des petites entreprises, les garanties
vis-à-vis des tiers et l'égalité de traitement des entrepreneurs vont dans le bon sens.
En échange, le groupe de l'artisanat reconnaît la nécessité de transparence comptable, de
techniques prévisonnelles, d'information et de formation.
Le groupe de l'artisanat estime que ce dispositif, loin de réprimer, contraindre, ou contrôler,
va au contraire, favoriser, faciliter, inciter au développement, à l'embauche, à l'investissement, du
fait d'une confiance retrouvée et surtout de l'attrait de la fonction de chef d'entreprise
individuelle.
Enfin, le groupe de l'artisanat souhaite que l'ensemble des propositions soit transcrit dans un
texte de loi, afin d'assurer la reconnaissance officielle de l'entité économique et sociale des
entreprises individuelles.
Aucun amendement n'ayant modifié le sens de l'avis, le groupe de l'artisanat l'a voté.
Les entreprises individuelles constituent un secteur très important appelé à jouer un rôle
déterminant dans le développement, la diversification de l'économie française et dans
l'aménagement du territoire.
Le groupe des associations regrette que sur un sujet de cette envergure un rapport n'ait pas
accompagné la présentation de l'avis. Il aurait permis le renforcement de l'argumentaire d'un
avis dont le point de vue est essentiellement de nature juridique, et une analyse plus exhaustive
d'un certain nombre d'interrogations :
les raisons de la disparition massive de ces entreprises dans les premières années de leur
-
création,
les causes du manque de succès de l'EURL, qui dans son principe répondait au souci de
-
réduire certaines distorsions de concurrence et d'apporter à l'entrepreneur individuel plus de
sécurité personnelle,
le niveau de leurs fonds propres et les moyens à mettre en oeuvre pour l'amélioration de
-
leur rentabilité.
Le groupe émet également des réserves sur un certain nombre de propositions, par ailleurs
non chiffrées, en matière d'allègements fiscaux.
En revanche, le groupe des associations adhère au principe qui a guidé le travail du
rapporteur : celui de la recherche d'identité et de pérennité de l'entreprise, mettant en valeur
notamment sa fonction sociale. Il soutient en particulier la proposition d'isoler, dans le
patrimoine de la personne, la part consacrée à l'entreprise. En outre, il approuve la distinction
entre revenu disponible et celui réinjecté dans l'entreprise, mais il se demande si celle-ci ne
risque pas d'avoir une conséquence négative. En effet, les banquiers n'hésiteront-ils pas à
abandonner la garantie de l'unicité du patrimoine s'il n'est pas prévu un moyen substitutif ?
En ce qui concerne les opérations de capital-risque, le groupe pense que mieux vaudrait se
montrer plus exigeant sur les compétences et sur les motivations des entrepreneurs individuels.
Le rapporteur souligne avec raison l'importance de l'information et de la formation des
dirigeants des entreprises individuelles. Notre groupe, tout en s'interdisant de créer des barrières
qui limiteraient l'initiative en matière de création d'entreprise, souhaite que soient renforcées et
mieux diffusées les possibilités de formation pour tout créateur potentiel.
Sous ces quelques réserves, le groupe des associations a voté l'avis.
GROUPE DE LA C.F.D.T.
- L'imprécision du champ de la saisine n'a été que partiellement levée par l'avis du Conseil
économique et social. Celui-ci traite en principe des entreprises exploitées en nom personnel,
sans toutefois exclure les entreprises possédées par une seule personne, mais à forme sociétaire.
- Les domaines juridique et fiscal occupent une large place dans l'avis, au détriment des
aspects économiques et sociaux, excepté dans ce dernier domaine, la suggestion d'une
représentation collective interentreprises des salariés, sur une base professionnelle, que partage la
CFDT.
- Cependant, les propositions formulées dans l'avis appellent trois réserves principales :
1.- Garantir la pérennité de l'entreprise, éviter la création de sociétés fictives sont des
objectifs dignes d'intérêt. Un moyen existe : l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée
créée par le législateur en 1985. Ce moyen paraît rejeté par l'avis, sans bilan ni analyse des
raisons de son peu d'attrait. Une autre voie est préconisée : l'affectation de patrimoine, laissant
penser à une recherche d'avantages par les sociétes, sans en accepter les contraintes.
2.- Des progrès ont été accomplis ces dernières années pour tendre à la neutralité fiscale
entre entreprises individuelles et entreprises en société. La soumission des entreprises
individuelles à l'impôt sur le revenu est bénéfique pour 96 % d'entre elles. Par ailleurs la CFDT
est opposée à l'instauration d'un impôt progressif sur les sociétés, dont le taux : 33 1/3 % est
inférieur à celui de la tranche haute de l'impôt sur le revenu. Les inégalités entre entreprises
tiennent moins à leur taille ou à leur statut qu'à leur type d'activité (entreprises de
main-d'oeuvre notamment). Cet aspect n'est pas traité.
3.- La revendication d'une égalité de couverture sociale, entre salariés et non salariés peut
s'admettre si cette égalité concerne les prestations et les cotisations (taux-assiette). La
déductibilité de la cotisation du revenu, ou du bénéfice imposable, doit être liée au caractère
obligatoire du système concerné. Certaines propositions de l'avis ne respectent pas ce principe
d'équité.
Pour toutes ces raisons, le groupe CFDT s'est abstenu dans le vote sur l'avis.
GROUPE DE LA C.F.E.-C.G.C.
Le groupe de la CFE-CGC a remarqué la qualité et l'intérêt de l'avis, notamment dans ses
propositions, pour organiser un statut juridique adapté à la situation spécifique des entreprises
individuelles.
Le principal problème qui se pose à cet égard est la confusion du patrimoine de
l'entrepreneur et de l'entreprise, et celle de la responsabilité qui en découle. La solution réside
dans une clarification des actifs d'exploitation de l'entreprise et des biens propres de
l'entrepreneur, l'amélioration de l'information des tiers et le renforcement des techniques de
prévention des difficultés.
Le groupe de la CFE-CGC a apprécié l'effort du rapporteur pour initier une réflexion et
amorcer des propositions en matière de représentation des salariés dans les entreprises se situant
en-deçà des seuils légaux.
Les propositions visant à améliorer les dispositifs d'aides à la création et à la pérennité de la
très petite entreprise, à simplifier certaines procédures, sans en méconnaître la nécessité, et à
renforcer les fonds propres et les actifs de l'entreprise individuelle, sont de bonne qualité.
La réflexion engagée sur l'éthique du chef d'entreprise et la responsabilité sociale qui doit
s'établir au même niveau que la responsabilité économique, mais de manière différente, est fort
proche de celle actuellement menée par la Confédération française de l'encadrement CGC, qui a
approuvé l'avis.
GROUPE DE LA C.F.T.C.
L'analyse de la situation des entreprises individuelles est claire et souvent pertinente mais
l'aspect social reste insuffisamment traité, même si la dimension sociale et humaine, et l'attention
à porter sur l'application des conventions et accords collectifs, ainsi que la nécessité de la
concertation et de l'intéressement ont été mentionnées. Ces questions auraient mérité des
développements substantiels.
Nombre de propositions recueillent l'assentiment du groupe de la CFTC, mais :
il faut mesurer la proposition visant à distinguer revenu disponible et revenu réinvesti qui,
-
dans sa formulation actuelle, conduirait à la déduction fiscale de tout l'autofinancement ;
la limitation du recours aux cautions des conjoints ne doit pas conduire à l'utilisation
-
abusive du droit des faillites ;
pour la transmission d'entreprise, comment ne pas envisager, au regard des avantages
-
fiscaux consentis aux héritiers, qu'une part des plus-values soit attribuée aux salariés qui y ont
contribué.
D'autres propositions ne peuvent que susciter des interrogations pour le groupe de la
CFTC:
- la séparation du patrimoine consacré à l'entreprise paraît bien difficile à mettre en oeuvre
alors qu'un grand nombre d'entreprises individuelles vivent sur une tradition d'indivisibilité du
patrimoine. Si cette séparation etait décidée, des garde-fous seraient nécessaires, tels que
l'engagement de tout le patrimoine en cas de faute lourde, ou l'interdiction de créer une
entreprise après des faillites répétées ;
le principe d'égalité, sur le plan social, entre les salariés et les non-salariés, s'il paraît
-
équitable, implique l'egalité des devoirs et donc une compensation, elle aussi équitable, entre les
régimes ;
- quant à la déductibilité des cotisations de toute nature, elle aurait dû être assortie de
l'obligation d'adhésion au régime ;
- il est regrettable que le coût des mesures proposées ne soit même pas esquissé, et l'idée de
l'impôt progressif laisse dubitatif, il ne permettra pas de supprimer l'inégalité de traitement entre
le dirigeant d'une société et l'artisan, à l'avantage du premier ;
- les diverses incitations fiscales proposées ne semblent pas pouvoir être toutes retenues en
raison de leur effet cumulatif.
La CFTC mesure bien l'apport irremplaçable des entreprises individuelles à la préservation
de l'espace rural, à la formation technique des jeunes en liaison avec l'école et à la création
d'emploi ; cependant, en raison de ses réserves et interrogation, le groupe de la CFTC s'est
abstenu.
GROUPE DE LA C.G.T.
Les petites entreprises et singulièrement les plus petites d'entre elles sont confrontées à des
problèmes très graves. Ces problemes sont trop absents du projet d'avis, au profit du discours
comme sur les fonds propres, sur les aides publiques et sur les appuis fiscaux.
Ni les causes réelles de ces difficultés, ni les exigences de réponses garantissant et la vie de
l'entreprise et le développement de l'activité et de l'emploi, ne sont traitées.
En revanche, les propositions concernant le renforcement de la capacité financière et une
démarche du «moins disant fiscal» sont d'autant plus discutables que l'expérience des dernières
années a montré leur coût et leur inefficacité pour l'emploi notamment.
Aujourd'hui, les faillites flambent. Dettes à l'URSSAF, dettes fiscales, dettes auprès des
banques sont souvent à l'origine de ces disparitions. Mais on ne peut confondre les effets et les
causes structurelles des difficultés. Ces entreprises subissent avant tout les reculs du pouvoir
d'achat des ménages et les contraintes imposées par les choix des grandes entreprises et des
organismes bancaires et financiers. Elles ne souffrent pas de trop de salaires ni de trop de charges
sociales, mais d'un manque de débouchés, de rémunérations de leurs activités et d'autonomie.
Il y a urgence à redéfinir les relations entre les petites entreprises et l'ensemble du tissu
économique. Les grandes entreprises ont eu tendance à transférer leur difficultés ou à peser
toujours plus sur les PME.
Il s'agit d'infléchir cette tendance pour soustraire les petites entreprises aux choix
stratégiques qui leur sont extérieurs. Pourquoi ne pas examiner par exemple la constitution de
fonds départementaux de créations d'activités et d'emplois financés sur les profits et les réserves
des grands groupes industriels et financiers ?
De même, pour favoriser l'emploi, de nouveaux rapports avec les banques sont
indispensables. Le cercle vicieux du crédit est en effet redoutable. Le surcoût serait justifié par
des risques spécifiques supplémentaires. Mais si risque il y a, il vient le plus souvent de la relation
de l'entreprise avec une ou des sociétés donneuses et repreneuses de marchés. Pourquoi ne pas
imaginer des contrats de moyen terme assurant les débouchés et servant de garantie auprès des
établissements financiers.
Par ailleurs, toutes les formes de mutualisation des risques et des charges des entreprises
indivuelles seraient à développer, notamment centres de gestion communs, outils de formation,
centres technologiques, permettant d'abaisser le coût d'accès à un certain nombre de services
indispensables tout en réduisant les contraintes déclaratives.
Le groupe de la CGT ne refuse pas certains traitements fiscaux spécifiques. Mais
contrairement au dispositif proposé dans l'avis, à l'opposé des mesures des dernières années et
des dispositions prévues aujourd'hui par le gouvernement, l'aide publique directe ou indirecte ne
saurait être accordée qu'assortie d'exigences de résultats en matière d'emploi et d'un contrôle
public et social réel.
Tout en approuvant certaines propositions notamment celles relatives au statut ou à la
transmission de l'entreprise, c'est pour ces raisons essentielles que le groupe de la CGT votera
contre l'avis soumis au Conseil économique et social.
GROUPE DE LA C.G.T.F.O.
Nous considérons que l'entreprise individuelle est une composante essentielle de notre
économie. Tout doit donc être fait pour que ce secteur productif soit encore plus dynamique et
renforce, notamment, ses capacités très réelles en matière de création d'emplois.
C'est pourquoi nous sommes d'accord avec les diverses propositions relatives à une
rationalisation et à une amélioration de la gestion de ce type d'entreprise. De même, nous
approuvons l'idée d'un renforcement de la protection des tiers par une meilleure identification
de l'entreprise et aussi par l'adoption de mesures d'alerte adaptées aux petites entreprises.
Nous sommes aussi d'accord avec le développement du recours à la procédure de règlement
amiable même si le formalisme comptable, qui doit l'accompagner, risque de lui enlever
beaucoup d'attrait. Quant aux simplifications administratives souhaitées par le projet d'avis, nous
en sommes partisans tout en observant que les résistances éventuelles des administrations,
d'ailleurs seulement chargées de faire appliquer la loi, tiennent à des raisons plus fondamentales,
inhérentes aux régimes sociaux et à la nature des diverses obligations fiscales.
Nous souscrivons naturellement aux quelques développements consacrés aux droits des
salariés. On sait, en effet, que dans les petites entreprises, ceux-ci ont beaucoup de mal à
exprimer leurs droits et que le fait syndical y est largement ignoré.
Dans un autre ordre d'idées, sans rejeter la solution préconisée du patrimoine affecté dans le
cadre du statut juridique de l'entreprise, nous sommes plus circonspects que le rapporteur,
considérant qu'il paraît difficile d'introduire en droit une telle exception au dogme de
l'indivisibilité du patrimoine.
Nous aurions, pour notre part, préféré que les possibilités offertes par l'EURL fussent mieux
approfondies et que le recours à la forme sociétaire fût facilité par une révision du statut des
SARL et la mise au point d'une SA simplifiée. Mais, c'est sur la partie fiscale du projet d'avis
que portent nos véritables désaccords. Le texte succombe à la fâcheuse tendance d'accompagner
les propositions d'incitations fiscales. A Force Ouvrière, nous pensons que la fiscalité a ses limites
et le principe républicain d'égalité devant l'impôt doit être respecté.
En outre, nous relevons une grave ambiguïté dans le texte. On ne peut, d'une part réclamer
un statut voisin de celui du salarié et continuer, d'autre part, à bénéficier des avantages fiscaux
réservés aux sociétés. A ce titre, la proposition d'introduire un impôt progressif pour les PME
exploitées en société est tout à fait hors de propos, la philosophie de l'avis etant d'inviter à rester
en entreprise individuelle, pour qui l'impôt progressif existe déjà : c'est l'impôt sur le revenu.
GROUPE DE LA COOPERATION
Le groupe de la coopération approuve dans son ensemble les propositions qui représentent
un intérêt pour favoriser le développement de l'entreprise individuelle tout en insistant sur les
points suivants :
1% Pour assurer leur pérennité, les entreprises individuelles ainsi que les petites entreprises,
exclues du fait de leur taille notamment, d'un certain nombre de moyens de prévention des
difficultés prévus par le législateur, doivent être incitées à s'inscrire dans une stratégie de
prévention. L'incitation à la formation de l'entrepreneur et à la mise en place d'outils de gestion
prévisionnelle sont deux éléments clés de la prévention des difficultés.
La simplification des procédures administratives est indispensable pour éviter toute perte de
temps ou surcoût et simplifier la tâche du gestionnaire.
2% Concernant le conjoint salarié exerçant une activité aux côtés du chef d'entreprise, il
doit être doté d'un statut bénéficiaire d'un traitement fiscal équitable et encourageant l'accession
à un régime de retraite volontaire. La nécessité d'un statut pour le conjoint est d'autant plus
renforcée si, du fait de l'affectation du patrimoine, l'entreprise est distinguée de celui qui la gère.
3°/- Quelle que soit la forme juridique, la petite entreprise manque de fonds propres. Le
renforcement de la capacité financière est un point extrêmement important pour la survie de bon
nombre de petites entreprises.
Pour les entreprises exploitées en nom personnel, il faut distinguer revenu disponible et
revenu réinvesti permettant le développement de l'entreprise, ce dernier faisant l'objet d'un
traitement fiscal par le biais d'une déduction pour auto-financement.
La mobilisation de l'épargne de proximité est un moyen de donner aux entreprises les fonds
propres qui leur font défaut. Il faut donc encourager cette mobilisation par le développement de
société de proximité à capital-risque et renforcer les moyens de garantie.
4°/- Le projet d'avis traite d'une question fondamentale particulièrement pour l'entreprise
individuelle, celle de la transmission pour laquelle il convient de traiter les inégalités fiscales qui
pénalisent les entreprises.
Ainsi, la neutralité des plus-values au moment de la cession nous paraît fondamentale pour
faciliter la transmission dans de meilleures conditions. Il convient d'inciter à la transmission
progressive, permettant de préparer la décision tout spécialement par la formation des repreneurs
et de préserver les fonds propres et la trésorerie. Il conviendrait d'inciter les cédants à laisser des
fonds propres dans l'entreprise par une fiscalité équitable par rapport à la fiscalité sur l'épargne.
Enfin le groupe de la coopération approuve les conclusions du rapporteur sur la mission
d'intérêt général de l'entreprise qui exige de la part du dirigeant, de privilégier en toute
circonstance, la pérennité de celle-ci, ce qui implique le respect d'une certaine éthique.
Cet avis est une importante contribution à l'esprit d'initiative et de responsabilité destinée
aux chefs d'entreprise les plus exposés, ceux qui gèrent ou créent seuls une entreprise. Il leur
propose des solutions équitables.
Plus de trois millions de personnes, entrepreneurs et salariés, exercent une activité dans ce
cadre juridique ; les potentialités d'emploi sont certaines. Les entraves actuelles doivent être
levées.
L'incohérence du système est clairement démontrée : pour une même activité, la fiscalité, les
prélèvements, les responsabilités financières sont inégales, selon le régime juridique et le chiffre
d'affaires. D'où un nombre tout à fait excessif de sociétés anonymes, à coût de gestion élevé,
mais créées uniquement pour des raisons fiscales ou sociales -qu'il s'agisse des règles concernant
le gérant majoritaire de la SARL, du souhait légitime de limiter les risques financiers de la
famille, ou d'une préférence pour le régime des salariés-.
GROUPE DE LA F.E.N.
GROUPE DE LA MUTUALITE
Pour expédition par voie aérienne, outre-mer et à l'étranger, paiement d'un supplément modulé selon la zone de destination
Direction, 26, rue Desaix, Paris (ISe). - Le Préfet, Directeur des Journaux officiels, BERNARD SARAZIN I
11193005 000593I
-