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Journal officiel de la

République française. Avis et


rapports du Conseil
économique et social

Source gallica.bnf.fr / Conseil économique


France. Conseil économique. Journal officiel de la République
française. Avis et rapports du Conseil économique et social.
1993/04/27-1993/04/28.

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JOURNAL OFFICIEL
DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AVIS ET RAPPORTS DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

SESSION DE 1993

Séances des 27 et 28 avril 1993

L'ENTREPRISE INDIVIDUELLE

AVIS

présenté

AU NOM DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

par Monsieur Jacques BARTHÉLÉMY

(Question dont le Conseil économique et social a été saisi par lettre


du Premier ministre en date du 26 octobre 1992.)
Séances des 27 et 28 avril 1993

L'ENTREPRISE INDIVIDUELLE
Avis adopté par le Conseil économique et social
au cours de sa séance du 28 avril 1993.

Par lettre en date du 26 octobre 1992, Monsieur le Premier ministre saisi le Conseil
a
économique et social de l'examen de la situation actuelle de l'entreprise individuelle en France
dans les domaines économique, social, juridique et fiscal, en demandant
que cet examen soit
accompagné de propositions pour donner à ces entreprises les moyens de contribuer pleinement
au développement économique et social de notre pays.
La préparation de l'avis a été confiée à la section des problèmes économiques généraux
la conjoncture qui a désigné M. Jacques BARTHELEMY comme rapporteur (1). et de

PREMIÈRE PARTIE

Le thème de l'avis est susceptible de comporter ambiguïté. On peut estimer que les
une
entreprises dont il convient d'analyser la situation et pour lesquelles il est utile de proposer
statut sont celles qui sont exploitées en nom personnel, par opposition, donc, à celles qui le sont un
en société, quelle qu en soit la forme juridique. La lettre de saisine de M. le Premier ministre à
M. le Président du Conseil économique et social incline à adopter cette interprétation. Il fait
référence, en effet, a la forme d'exploitation. y est
peut aussi avoir la tentation de considérer qu'il s'agit des entreprises possédées
effectivement par une seule personne physique, auquel cas sont aussi concernées, seulement
les EURL (entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée), authentiques sociétés non
unipersonnelles, mais également les sociétés fictives, dont le capital est détenu, plus du
en
dirigeant réel, par des prête-noms. Cette situation est fréquente en raison des avantages qu'offre
société. Même si, ten principe, cette seconde définition n'est
pas celle de la saisine, il est
difficile de nf pas aborder les problèmes sous cet angle, ne serait-ce que pour marquer les
>U demeurant, malgré l'existence d'une société, il peut y avoir exploitation
individuelle . c est le cas de la societé en commandite.
On peut d'autant plus s'interroger sur l'opportunité du choix de l'une l'autre de ces
ou
conceptions que la tentation est grande de traiter, au travers de cette saisine, du cas des petites
entreprises dont la quasi totalité est en nom personnel. Si l'on entend s'interroger sur la place des
entreprises individuelles dans le tissu économique français, il serait aberrant d'utiliser la barrière
exploitation, qui est alors artificielle. Mais, la forme juridique a une incidence
l'efficacité économique en raison de ses caractéristiques, notamment au plan fiscal. sur
Enfin, les éléments statistiques dont on dispose en fonction de la forme d'exploitation
sont pas significatifs. Par exemple, lorsque sont indiqués les effectifs des entreprises individuelles, ne
cela comprend nécessairement l'entreprise en société en commandite.
Ces remarques préliminaires démontrent
que, si l'objet du présent avis concerne
naturellement le statut de l'entreprise exploitée en nom personnel, il n'est pas possible de faire
i économie de développements intéressant les sociétés qui n'ont, de fait de droit, qu'un seul
ou
associé et les petites entreprises. En conséquence, il convient, afin d'éclairer le lecteur
sur le sens
l
exact de certaines expressions, de préciser que :
entreprise en nom personnel est celle exploitée par une personne physique,
constitution de société. sans qu'il y ait
l- entreprise peut être exploitée par une société de personnes (et non de capitaux). Ce sont
essentiellement les sociétés en nom collectif (SNC) et, dans les professions libérales et agricoles
surtout, les sociétés civiles professionnelles.
- les sociétés de capitaux sont les sociétés anonymes, en commandite (simple ou par actions),
a responsabilité limitée. La loi permet à une sociéte à responsabilité limitée de n'avoir qu'un seul
associe : c est 1 entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL).
- par société unipersonnelle, il y a lieu d'entendre, ici, toute société, quelle qu'en soit la
*?rn\e juridique qui, de fait ou de droit, n'a qu'un seul associé, donc de fait, un seul propriétaire.
De droit, il s agit de 1 EURL ; de fait, c'est le cas de la société, anonyme ou à responsabilité
limitée, dont les associés ou porteurs de parts sont, à l'exception du dirigeant, des prête-noms.

(1) L'ensemble de cet avis a été adopté par un vote au scrutin public
par 114 voix, contre 14 et 53 abstentions (voir le
résultat de ce scrutin en annexe - scrutin sur l'ensemble).
A. - CONSTAT

1 °/ Les entreprises individuelles dans le tissu économique français.


-

Le nombre très élevé d'entreprises exploitées en nom personnel tant en valeur absolue qu'en
valeur relative eu égard au nombre de sociétés d'une part, leur poids économique apprécié tant
par leur chiffre d'affaires, leur valeur ajoutée et leur excédent brut d'exploitation que par leur
dynamisme ou leur positionnement favorable en matière d'emploi d'autre part, rendent
indispensable une réflexion fondamentale sur la situation de l'entrepreneur individuel dans les
domaines fiscal, social, économique et juridique.
Selon le fichier SIRENE, le nombre de ces entreprises s'élève, au 31 janvier 1993, à 1 713 725,
ce qui représente 50,30 % des 3 408 404 entreprises françaises, publiques et privées confondues,
mais aussi plus du double de celui des sociétés, qui s'élève à 871 339. L'intérêt d'une réflexion
sur statut
le de l'entreprise en nom personnel ressort déjà de ces seuls chiffres. Il ne s'agit pas de
situations marginales, en effet, loin s'en faut. Cette statistique, comme celles qui suivent,
concerne l'ensemble des activités, à l'exception des exploitations agricoles non imposées au
bénéfice réel agricole ou non assujetties au régime de la TVA agricole simplifié. Il convient donc
d'ajouter à ce chiffre quelque 725.000 exploitations agricoles sur les 924.000 qui existent au total,
selon l'estimation 1992 du ministère de l'agriculture et de la forêt.
Cet intérêt est encore plus grand si l'on prend en compte leur situation économique. Les
comptes de la Nation pour 1991 font apparaître que la production totale de ces entreprises était
de 1 345,4 milliards de francs (soit 11 % de la production française) et leur valeur ajoutée brute
de 925,7 milliards (15 % de la VAB française). Leur excédent brut d'exploitation dégagé pour la
même année s'élève à 718,6 milliards de francs (30 % de l'excédent brut d'exploitation total).
Enfin, la formation brute de capital fixe s'est élevée à 93,4 milliards de francs. Les entreprises en
nom personnel représentent donc, au total, une activité économique importante, non seulement
en volume d'activité mais aussi, ce qui est sans doute plus important, en valeur ajoutée et en
résultats. Un tel constat est important dans la mesure où, à la fois en raison de leur taille
modeste -qui recèle un potentiel de croissance plus élevé- et de l'absence de rigidité dans la
gestion qui en découle -facteur d'une plus grande adaptabilité aux évolutions-, ces montants sont
non seulement significatifs mais peuvent aisément être améliorés si une politique générale
contribue davantage au développement de ce type d'exploitations.
En raison de leur taille généralement modeste, leur poids en matière d'emploi est
nécessairement plus faible. Elles ne représentent, toujours selon cette dernière source, que 8 %
de l'emploi total en France (hormis les agents de l'Etat et des collectivités locales) contre 68 %
sociétés. Cependant, valeur absolue, elles procurent un travail à 1 450 495 salariés, ce
pour les en
qui est un chiffre important, surtout si l'on prend en compte le fait qu'environ 1.200.000 de ces
entreprises n'en ont aucun. Cela signifie que le nombre moyen de salariés, pour les entreprises
exploitées en nom personnel qui en ont, est de trois. Ainsi et au total, hors secteur agricole, les
entreprises individuelles occupent globalement plus de trois millions d'actifs.
Il y a là un gisement d'emplois sans doute élevé, d'autant que les résultats tant globaux que
bénéficiaires de ces entreprises doivent pouvoir, avec une politique adéquate, être améliorés.
Nombreux sont, en effet, ceux de ces employeurs qui préfèrent limiter leur activité plutôt que
s'exposer aux rigidités, réelles ou supposées, de la réglementation du travail, aux complications
administratives, bien réelles, liées à la gestion du personnel, aux charges, tant fiscales que sociales,
regard du chiffre supplémentaire qu'ils peuvent attendre de l'embauche d 'un salarié ou, pour
au angle, n'est inutile de souligner
ceux qui en ont un, de salariés supplémentaires. Sous cet il pas
que les entreprises exploitées en nom personnel ont, lorsqu'elles emploient du personnel, en
trois salariés. Ce sont donc de petites entreprises. Au cas particulier, la notion
moyenne
d'effectifs est ambiguë. Elle recouvre en effet l'entrepreneur lui-même et, assez souvent, son
conjoint. En outre, dans un certain nombre de situations (franchise -
sous-traitance), la différence
salarié est faible, sous la réserve importante que le risque de perte d'emploi n'est pas pris
avec un collectivité s'y ajoute le risque de la perte de
en charge pour l'entrepreneur par la et que ses
biens.
Enfin, 15 % des entreprises individuelles sont implantées en région parisienne (soit 85 % en
province dont 3 % dans les DOM). La répartition géographique des emplois générés est identique.
2°/ - La réalité économique et juridique de l'entreprise individuelle.

La réflexion qui doit être menée ne peut que concerner l'ensemble des activités, tant
commerciales, industrielles, artisanales, libérales qu'agricoles ; certes des différences existent entre
elles, liées aux politiques tant interne qu'européenne et aux contraintes juridiques ou de marché
auxquelles elles sont soumises. Cependant les spécificités des types d'activité de chacune des
catégories s'effacent devant ce qui leur est commun, la forme d'exploitation et indirectement la
taille. Ceci conduit nécessairement à écarter, dans le cadre du présent avis, tout développement
concernant les spécificités de chacune de ces catégories pour concentrer l'analyse sur la forme
d'exploitation et la taille.
Une réflexion sur la situation de l'exploitation individuelle se justifie alors d'autant plus que,
contrairement à ce qui vaut lorsqu'à été constituée une personne morale dont l'objet est une
activité économique, l'entreprise ne se distingue pas de celui qui la gère. Cela tient d'abord à ce
que l'entreprise, essentiellement entité économique, n'a pas d'existence juridique malgré les
citations de plus en plus fréquentes du législateur et les conséquences qui peuvent être tirées de
l'objectif de certaines lois -telles celles sur la prévention, l'alerte, le règlement des difficultés des
entreprises- qui visent à privilégier la fonction sociale de l'entreprise. Cela tient aussi à ce que, en
raison du principe du droit civil de l'unicité du patrimoine, l'absence de personne morale ayant
pour objet la gestion de l'entreprise a pour conséquence la confusion des biens affectés à cette
gestion et les autres. Mais, là encore, l'objet précis de certaines disciplines juridiques permet, en
utilisant le droit comme instrument de la finalité économique, de donner une définition
fonctionnelle de l'entreprise.
Tout en ayant par ailleurs une dimension humaine et sociale, l'entreprise est une entité
économique dont la finalité est de satisfaire les besoins réels et potentiels des consommateurs,
individuels ou collectifs, privés ou publics. Elle doit, à cet effet, disposer de capitaux, du
personnel nécessaire ainsi que d'une capacité de concevoir et de réaliser des profits. Elle a
vocation naturelle à prospérer et ce, indépendamment de ceux qui ont la responsabilité de la
gérer. Sa santé, qui assure sa pérennité, dépend en partie de l'état de la concurrence dans laquelle
elle développe ses activités. Elle dépend aussi de l'aptitude de celui qui la gère à assumer ses
responsabilités. La différence de situation juridique entre l'exploitation en nom personnel ou en
société est source de distorsion de concurrence. Cela tient à ce que l'entreprise en société peut
plus aisément développer une stratégie fondée sur le long terme. Le droit fiscal applicable aux
sociétés facilite en effet la constitution de fonds propres. Au contraire, il y a confusion entre
l'intérêt de l'entreprise et de celui qui la gère lorsqu'elle est individuelle. Encore faut-il prendre
en compte le degre d'autonomie économique : par exemple, la situation du franchisé ou du sous-
traitant n'est pas strictement identique à celle des autres entrepreneurs individuels. Mais, pour
tous, la rigueur de gestion s'impose.
Cette différence de statut transforme en zone à risque, notamment en raison d'une fiscalité
différente, les instants de la transmission, particulièrement au moment du départ en retraite. S'y
ajoute une fragilité particulière, à défaut d'être spécifique, en matière de trésorerie. Tout cela
explique sans doute la plus grande vulnérabilité des entreprises en nom personnel. Celle-ci se
traduit par le nombre des défaillances. Encore faut-il faire la part des choses : est-ce parce que
l'entreprise est jeune ou petite qu'elle est fragile ou parce que, du fait de cette taille et de cette
jeunesse, elle est souvent en nom personnel, le recours à la technique sociétaire ne se justifiant
pas ? Il est, en tout cas, prudent de se méfier d'une incitation purement mécanique, sous la
forme d'une aide financière d'autant que, si celle-ci se situe au niveau du capital social, le
créateur est déresponsabilisé. En outre, cette incitation ne correspond pas nécessairement aux
besoins réels du marché.

B. - REFLEXIONS

Ce constat tend à démontrer que la limitation des réflexions au strict périmètre de


l'entreprise exploitée en nom personnel risque de déboucher sur une analyse abstraite. Le fait
que la majorité des petites entreprises soient en nom personnel d'une part, que le recours à la
forme sociétaire ne soit pas toujours justifié par une véritable association de partenaires d'autre
part, oblige à explorer les moyens qui permettent une identification de l'entreprise distincte de
celui qui la gère. La personnalisation de l'entreprise est un objectif en soi. Elle conditionne la
capacité à pérenniser l'entité économique.
En outre, l'absence de personnalité juridique propre présente l'inconvénient grave de
l'absence de règles d'organisation de l'entreprise qui peut expliquer, pour une partie non
négligeable, le nombre des défaillances d'entreprises en nom personnel, particulièrement
nouvellement créées ou à l'occasion de leur transmission.
Enfin, le niveau de responsabilité de l'exploitant individuel et celui du dirigeant d'une
société de capitaux ne sont pas identiques tandis que le premier est responsable sur tous ses
:
biens, le second ne l'est que sur la part des biens affectés à l'entreprise. Pour les tiers, cette
responsabilité totale est sans doute souhaitable. Elle nuit, en revanche, à la création, et au
développement des entreprises individuelles en raison de l'importance du risque couru par
l'exploitant. Sans qu'on puisse évaluer le phénomène, il ne fait aucun doute que celui-ci fait
hésiter certains à se lancer dans la création d'entreprise. De même, ce risque freine, sans aucun
doute, les initiatives visant à accroître l'activité. Il est vraisemblable que l'insuffisance de
prévision en matière de transmission de l'entreprise trouve ici l'une de ses causes les plus
significatives. Concilier la protection des intérêts des tiers et la limitation de la responsabilite est
cependant possible. Peuvent y contribuer une plus grande exigence dans le domaine comptable,
un système d'information des tiers, en particulier sur le passé professionnel du dirigeant et sur la
situation annuelle ainsi que, sous réserve d'aménagements -par exemple la «sofarisation»-, la
mutualisation du risque d'insolvabilité.
A défaut d'exister au plan juridique, c'est au travers de la constitution de sociétés que
l'identification de l'entreprise, distinctement de celui qui la gère, est réalisée. D'où la
prolifération de sociétés fictives et la création de l'EURL. Une autre voie, plus efficace et plus
simple bien que complémentaire, mérite d'être explorée : le patrimoine affecté. Enfin, il n'est pas
vain de souligner l'intérêt des simplifications administratives pour ce type d'entreprises. Dans
tous les cas, l'efficacité dépend d'une démarche entrepreneuriale qui suppose créativité et rigueur
de gestion.

1 °/
- Critique du choix exclusif de la technique sociétaire.

La société est un contrat passé entre associés qui définit leurs droits et obligations
réciproques pour la mise en oeuvre de l'objet social dont ils ont doté leur commune entreprise.
Cette réalité fondamentale ne doit pas être oubliée. Mais la société devient, sitôt créée, une
institution, ce qui explique que sa naissance soit différée jusqu'à une décision des pouvoirs
publics matérialisée par 1 enregistrement au registre du commerce ou des métiers. Surtout - cela
a été amplement démontré par l'École de Rennes, les professeurs PAILLUSSEAU et CHAMPEAU
tout spécialement - la technique sociétaire est une technique d'organisation de l'entreprise. C'est
ce qui explique non seulement le nombre de sociétés de capitaux mais aussi la création de la
société unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL).

Ces deux moyens ne sont pas, toutefois, pleinement satisfaisants :


a) La société n'a de sens que si elle résulte de la volonté de plusieurs personnes de s'associer.
Si elle n'est utilisée qu'en raison de ses vertus dans le domaine de l'organisation de l'entreprise et
pour assurer la séparation du patrimoine affecté à l'exploitation, la société devient fictive. Elle
n'est, en effet, malgré l'apparence, composée que d'un seul associé, les autres étant des prête-
noms. Les risques que cette fiction est susceptible de faire courir - notamment la disparition pure
et simple de l'entreprise, malgré les dispositions légales subordonnant la cessation d'existence au
respect d'un certain formalisme - n'empêchent pas la prolifération de ces sociétés anonymes dont
six des actionnaires n'ont qu'une existence artificielle. Mieux, la création de ce type de sociétés
est fortement incitée par le droit fiscal et le droit de la protection sociale. S'il est exact, en effet,
que les mesures prises depuis 1985 en matière fiscale visent à ne pas rendre plus lourde
l'imposition de l'exploitant en nom personnel que celle des sociétés de capitaux, ceci n'est vrai
que dans une certaine limite de bénéfices, variable suivant la situation familiale. Au-delà de ce
seuil, le droit fiscal incite à la transformation en société. Il est vrai qu'il est difficile de comparer
un système d'imposition des sociétés, qui, par définition, ne tient compte des résultats que de la
seule personne morale avec celui des exploitants individuels pour lesquels les résultats de
l'activité économique vont être confondus avec d'autres ressources de l'exploitant, voire de son
conjoint.
Par ailleurs, même si un effort non négligeable a été entrepris en vue d'assurer aux non
salariés un niveau de protection sociale comparable à celui des salariés, cet effet n'a de réelle
portée que sur une partie du premier étage de cette protection - c'est à dire les régimes légaux -
ne serait-ce qu'en raison du traitement fiscal moins favorable des cotisations versées aux régimes
complémentaires. Le dirigeant de société, qui bénéficie, notamment, du régime de retraite des
cadres, peut espérer une retraite et un système de prévoyance bien plus confortables le non
que
salarié ; ces régimes complémentaires sont des facteurs d'incitation à la constitution de sociétés.
b) Tirant toutes les leçons de la doctrine qui voit, dans la société, technique
d organisation de l'entreprise au-delà du contrat entre associés, le législateur une
en est venu à
donner naissance à la société unipersonnelle, l'EURL. Pour la doctrine, il ne peut pas y avoir
société, c'est-à-dire personne morale, s'il n'y a pas au moins deux associés. Le législateur fait fi
de cette condamnation. Il justifie sa position par le souci de mettre le droit en conformité a la
réalité en évitant le recours aux sociétés fictives, composées majoritairement de prête-noms. avec
L objectif est clair : garantir la pérennité de l'entreprise grâce à des règles, qu'impose le droit
des sociétés, qui permettent d'organiser l'entreprise conçue comme un être distinct de celui,
singulier ici, qui la gère. Toutefois, cette société unipersonnelle s'apparente non pas à une au
société anonyme mais à une société à responsabilité, dont les règles ne peuvent être
considérées comme organisant l'entreprise. Par exemple, les dispositions concernant les pas
de direction ne permettent pas, comme c'est le cas dans les sociétés anonymes, une prise en organes
compte aussi nette des intérêts des tiers. Ce n'est, par exemple, que dans les sociétés anonymes
que sont présents, au conseil d'administration ou au directoire, des représentants du personnel
désignés par le comité d'entreprise. Plus généralement, si la loi du 28 octobre 1982, relative
institutions représentatives du personnel, ou, surtout, celles du 1er mars 1984, relative à la aux
prévention et à l'alerte des difficultés des entreprises et du 25 janvier 1985, qui concerne le
traitement de ces mêmes difficultés, ont contribué à une certaine uniformité d'organisation de
l'entreprise, peu important sa forme juridique, la SARL conserve comme objectif essentiel les
relations entre associés. Il en est donc forcément de même de l'EURL qui en est inspirée. Cette
tendance à ne pas prendre en compte l'organisation de l'entreprise au travers des règles statuaires
est même renforcée dans l'EURL dès lors que les actes retraçant le constat du passé ou
matérialisant les décisions de gestion pour le futur ne sont plus négociés, discutés, mais ne sont,
par la force des choses, qu'une simple décision unilatérale d'un gérant qui n'est de fait qu'un
exploitant individuel. En d'autres termes, la limitation des pouvoirs née de l'organisation
collective des décisions dans la société, justifiée par la limitation de la responsabilité du gérant au
regard de celle de l'exploitant individuel, est purement fictive. Elle ne peut pas servir, en tant
qu instrument pédagogique, à une rationalisation de la gestion de l'entreprise.
L'une des raisons majeures qui incite à la transformation en société est l'intérêt du statut
social réservé aux salariés, matérialisé surtout par les regimes complémentaires des cadres et la
déductibilité des cotisations correspondant aux régimes supplémentaires, tant de retraite que de
prévoyance. Or, dans une SARL, seuls les gérants minoritaires ou égalitaires sont salariés sociaux.
Par définition, le gérant de l'EURL qui détient tout le capital, reste assujetti aux régimes des non
salariés.
Conclure, en conséquence, que l'EURL sert, par excellence, à organiser l'entreprise
individuelle, puisque, en tant que société, elle est une technique d'organisation de l'entreprise et
que, composée d'un associé unique, elle est destinée à une exploitation individuelle est, dans ces
conditions, quelque peu excessif. Le monde économique ne s'y est, du reste, pas trompé puisque
l'EURL n'a pas eu un très grand succès. Au total, 30 000 EURL seulement ont été créees. Un
certain nombre d'entre elles ont été conçues en tant que «holding», dans le cadre de grands
groupes, notamment étrangers. Cette utilisation inattendue tend à démontrer que c'est dans les
grandes entreprises que la technique sociétaire joue pleinement son rôle d'instrument
d'organisation de l'entreprise.
La société anonyme a, bien sûr, été conçue comme instrument de règlement des relations
entre actionnaires. Mais, si le poids d'un de ceux-ci est réel dans une petite société, y compris
anonyme, l'actionnaire ou le groupe d'actionnaires devient une abstraction dans les groupes plus
importants. Ceci conduit la societé, personne morale autonome, à avoir une vie propre plus
affirmée, distincte des intérêts de ses actionnaires, quelquefois opposée même à ceux-ci. Les
règles légales et statutaires deviennent alors, tout naturellement, entre les mains des dirigeants
dont la société s'est^ dotée, des moyens d'organiser l'entreprise, dont ils sont des acteurs
opérationnels. Ce schéma ne peut concerner une petite entreprise composée, malgré l'apparence,
d'un seul propriétaire. Si, cependant, sont constituées des sociétés anonymes malgré une activité
qui n'est pas importante et l'unicité, de fait, d'actionnaire, c'est en raison des avantages fiscaux
qu'autorisent le droit des sociétés et le statut social de salarié qui s'applique, en pareil cas, quel
que soit le pourcentage du capital possédé par le dirigeant.

2°/ - Nécessité d'un statut pour l'entreprise individuelle.

La société à responsabilité limitée -qu'elle soit ou non unipersonnelle-,


ne peut pas avoir, en
conséquence, pour vocation -comme pourrait permettre de le laisser supposer l'exemple de la
société anonyme, lorsqu'elle n'est pas fictive- l'organisation de l'entreprise. Passer de
l'exploitation individuelle à la société, même unipersonnelle, ne peut pas, dès lors, être considéré
comme le moyen de garantir, par une meilleure gestion née de l'identification de l'entreprise
distinctement de celui qui la gère, la pérennité de l'entité économique. L'effort récent visant à
harmoniser les statuts fiscal et social rend par ailleurs moins attrayant que par le passé le statut
de salarié pour le dirigeant, lequel statut constituait un intérêt non négligeable pour le recours à
la technique sociétaire. Au demeurant, rien ne s'oppose à ce que cet effort d'harmonisation soit
poursuivi, y compris en ce qui concerne le droit fiscal des cotisations aux régimes
supplémentaires de retraite et de prévoyance.
Mieux vaut donc abandonner l'idée que la société est la seule technique d'organisation de
l'entreprise, ceci d'autant qu'il est impensable que toute entité économique soit gérée de cette
manière. Il en résulterait, pour les petites unités, un coût de gestion excessif, né en particulier du
formalisme juridique et comptable propre aux sociétés. Celui-ci, non seulement n'est pas justifié
en raison de la taille de l'entreprise et de l'unicité de propriétaire, mais encore ne peut que
décourager celui qui se sent une vocation de créateur, lequel doit être encouragé dans cette
aspiration dès qu'il en a les compétences, acquises par la formation.
Il faut, cependant, mettre en oeuvre une technique d'organisation de l'entreprise qui
s'impose d'autant plus à une entreprise individuelle que, celle-ci étant la plupart du temps
modeste, son dirigeant n'a pas été nécessairement formé dans le domaine de la gestion. Il n'a pas,
non plus, toujours une distance suffisante face à l'argent pour réserver ce qui est nécessaire à
assurer l'expansion et à promouvoir la pérennité de l'entité économique. Ces observations
invitent à deux conclusions : d'une part il est nécessaire que tout chef d'entreprise individuelle
acquière, par un moyen ou par un autre, la formation nécessaire à l'exercice de ses
responsabilités de gestionnaire ; d'autre part il faut que le statut de l'entreprise individuelle
favorise le plus possible une organisation de cette entreprise qui assure mieux qu'aujourd'hui sa
pérennité.
Sur ce dernier point, il apparaît que le droit des sociétés n'est pas une technique
d'organisation nécessairement adaptée aux petites entreprises ; la technique de l'affectation du
patrimoine offre de ce point de vue une solution alternative. L'idée de l'indivisibilité du
patrimoine d'une personne physique est ancrée dans notre droit comme un dogme. La doctrine
admet pourtant l'idée de l'affectation d'une partie du patrimoine à un objet déterminé. Au
demeurant, le droit civil n'autorise-t-il pas, au travers des différents contrats de mariage par
exemple, la remise en cause de l'indivisibilité ? Et la fiducie, si le projet de loi en préparation est
adopté, n'aura-t-elle pas un tel effet ? Le pacte fiduciaire est un contrat, fondé sur la confiance,
par lequel une partie du patrimoine d'un constituant est transférée à une personne distincte (le
fiduciaire ou, en droit anglais, le TRUST) pour la réalisation d'un objectif au profit d'un
bénéficiaire et pendant le temps nécessaire à cette réalisation.
Si le droit des sociétés permet d'atteindre des effets similaires, c'est par la création d une
personne morale qui risque d'être fictive si elle est constituée pour une activité économique
modeste. Cela réduit alors la technique juridique à des règles de forme qui ne seront plus un
-celui d'équilibrer les pouvoirs donc de préserver les libertés- mais une fin en soi, ce qui
moyen
est malsain d'un point de vue éthique.
Affecter le patrimoine à un objet qui est de créer et d'animer une activité économique est
d'autant plus aisé les biens affectés sont aisément identifiables en raison de leur référence
que comptables -tout
aux éléments du fonds de commerce. Par ailleurs, les techniques fiscales et en
s'appuyant sur une définition strictement économique (et non juridique) de entreprise-, 1

contribuent, en raison du réalisme du droit fiscal et de la finalité de la comptabilité, a la


séparation de ce qui appartient à l'entreprise. Notamment, le droit fiscal n hésite pas, maigre
l'unicité du patrimoine, à définir les revenus de l'activité professionnelle. Au plan comptable
apparaît, au passif de l'entreprise, un compte de l'exploitant qui est l'équivalent du compte
capital dans une société. Ce n'est, au demeurant, pas pour rien qu ont été conçues des incitations
d'ordre fiscal à adhérer à des centres de gestion agréés qui permettent, en fait, par des règles de
technique comptable, d'organiser l'entreprise en dissociant, comptablement et fiscalement
parlant, le patrimoine correspondant à l'activité économique. On a considéré, à juste titre, que le
respect de ces règles était de nature à faciliter l'émergence d'un comportement plus soucieux du
développement de celle-ci que de celui personnel de celui qui la gère. Reconnaître l 'entreprise,
c'est prendre en compte davantage les intérêts des tiers et le souci de pérennité de l'entité
économique.
Sans pour autant relativiser l'importance de la technique sociétaire, il convient d'organiser,
plan juridique, l'affectation du patrimoine nécessaire à l'exploitation de l'entreprise
au
individuelle. La réalisation peut être simple : l'inscription au registre du commerce ou des
métiers devrait contenir alors la déclaration d'affectation, acte unilatéral certes, contrairement au
pacte statutaire qui est un contrat, mais qui a un contenu similaire à celui-ci. La nature du bien
affecté et sa destination par l'objet de l'activité permettraient l'identification du patrimoine de
l'entreprise. Ainsi le createur d'entreprise pourrait opter entre limiter sa responsabilité en
déclarant le patrimoine affecté à l'entreprise ou au contraire, y consacrer l'ensemble de ses biens.
Dans le premier cas, ses droits seraient nécessairement limités par les procédures, tout
spécialement d'information, visant à garantir les tiers -comme c'est le cas du fait du droit des
sociétés- tandis que, dans le second, sa liberté d'action resterait totale.
En effet, la limitation de la responsabilité de l'entrepreneur aux seuls biens ainsi affectés à
l'exploitation exige, en contrepartie, une réduction de ses pouvoirs. En particulier, elle exige une
information suffisante des tiers, tout spécialement des créanciers, sur le volume et la nature du
patrimoine affecté ainsi que sur les resultats de l'exploitation. On notera, sur ce dernier point,
que, à la suite des réflexions conduites dans le cadre du rapport remis au Premier Ministre par
M. SUDREAU le 7 juillet 1975, puis du rapport de M. AUROUX, le droit social a réduit de maniere
importante les différences existant, en matière d'information du personnel, au travers des
attributions du comité d'entreprise notamment, entre les sociétés et les entreprises individuelles.
Mieux, lorsque l'entreprise est en difficulté, le personnel bénéficie, quelle que soit sa taille et sa
forme juridique d'exploitation, de droits spécifiques en matière d'information et même
d'intervention dans le processus judiciaire. Il a ainsi pu être tiré des lois du 1er mars 1984 et du
25 janvier 1985 qu'elles consacraient une amorce de reconnaissance de la personnalité juridique
de l'entreprise, ce qui témoigne, en raison de l'objectif de ces textes, de l'intérêt de cette
identification pour la pérennité de l'entité économique. Toujours en matière sociale, les textes
relatifs à la participation -qui peuvent s'appliquer à toute entreprise, même s'ils ne s'imposent
qu'à partir de cinquante salaries- consacrent bien l'entreprise en isolant les résultats fiscaux de
l'exploitation et même, pour déterminer la part de ceux-ci revenant aux salariés, le «salaire» du
dirigeant. Les accords d'intéressement peuvent avoir le même effet par leur valeur pédagogique
surtout lorsque la prime est assise sur les résultats économiques. Il n'est pas inutile de souligner
que 50 % des accords conclus l'ont été dans des entreprises de moins de dix salariés.
Ce n'est du reste pas tellement étonnant que le droit du travail contribue à identifier
l'entreprise au plan juridique. En raison de sa finalité, qui est la prise en compte des intérêts des
salariés, il a dû se démarquer du droit des sociétés. A défaut d'une définition légale de
l'entreprise qui aurait alors une portée universelle, la définition qu'en donnent les juristes ne
peut qu'être fonctionnelle : c'est au regard d'un objectif précis et particulier que la notion sera
utilisée. Pour le spécialiste du droit des sociétés, la société a d'abord comme objet d'organiser les
relations entre les associés ou porteurs de parts. Pour le spécialiste du droit du travail, ce qui
compte, c'est l'intérêt de la collectivité organisée du personnel. Voilà pourquoi la Cour de
Cassation a donné naissance à une définition prétorienne de la notion d'entreprise propre au
droit du travail, l'unité économique et sociale, «qui réunifie ce que le droit des sociétés divise»
pour reprendre la très belle expression de Monsieur le Professeur DESPAX. Dans cette
perspective, la connaissance, par l'entrepreneur, des mécanismes du droit du travail est un moyen
de mieux gérer l'entreprise car cette discipline contribue, comme le droit fiscal ou la technique
comptable, à l'identifier distinctement de celui qui la gère.
Dès lors, les difficultés liées aux contraintes de gestion du personnel, que les dirigeants des
petites entreprises redoutent -et qui peuvent expliquer en partie, la réticence à engager du
personnel- justifient, d'une part la recherche de moyens de les décharger partiellement de
contraintes administratives liees à cette gestion, d'autre part l'information et la formation des
employeurs à la gestion des relations de travail. La création de services collectifs interentreprises,
aptes a traiter certains aspects de cette gestion, souhaitée par le Conseil economique et social
dans l'avis adopté sur le rapport de M. Jean PAQUET sur «l'avenir de l'artisanat face aux
changements technologiques», le 27 avril 1983 obéit au premier de ces objectifs. L'incitation à la
formation, en vigueur, au demeurant, dans l'artisanat, est une réponse à la seconde. Enfin, les
partenaires sociaux doivent réfléchir à l'adaptation des statuts collectifs qu'ils édifient aux
caractéristiques particulières des petites entreprises.

3°/ - Les enjeux fondamentaux du statut de l'entreprise en nom personnel.

En application de ces considérations générales sur le statut de l'entreprise individuelle, il


convient de cerner les principaux objectifs qui doivent être respectés si l'on entend procéder à
une réforme globale de ce statut.
- En premier lieu, toute réflexion sur ce thème doit partir de l'idée essentielle que toute
entreprise, quelle que soit la forme juridique de l'exploitation, est une entité économique et
sociale. Celle-ci doit pouvoir, après être née de la volonté d'une ou plusieurs personnes,
prospérer sans autres limites que celles inhérentes au jeu économique et à la volonté de ses
dirigeants dans le respect des obligations légales, réglementaires et, plus généralement,
contractuelles. Les vicissitudes juridiques imposées, directement par une législation contraignante,
indirectement par les répercussions d'une situation donnée aux plans fiscal et social, sont des
obstacles à cette croissance harmonieuse.
La technique du patrimoine affecté est susceptible de créer les conditions et les
comportements qui favorisent l'accumulation de fonds propres ; la technique sociétaire
également; mais la société malgré l'allègement du coût fiscal de sa constitution n'est pas une
solution efficace en raison des rigidités liées à son formalisme, qui ne se justifie pas dans les
petites entreprises unipersonnelles.
- Il faut ensuite admettre que la confusion de patrimoine et le pouvoir sans limite de
l'exploitant individuel, corollaire de sa responsabilité sur l'ensemble de ses biens, ont, dans un
certain nombre de cas, comme conséquence, à la fois un manque de rigueur de gestion et une
absence totale de comportement prévisionnel qui se traduisent par la consommation immédiate et
à des fins personnelles de la totalité des résultats positifs dégagés. Il ne peut qu'en découler une
fragilisation de l'entreprise face aux difficultés qu'elle rencontre, ce qui explique, entre autres, le
taux très élevé de mortalité au cours des premières années suivant la création d'une entreprise
individuelle. Que ce soit par la technique sociétaire ou par la technique du patrimoine affecté, il
est indispensable d'identifier l'entreprise distinctement de celui qui la gère et ceci quel que soit le
volume d'activité déployé ou la nature de celle-ci. En dépend, en effet, la capacité à mettre en
place des normes d'organisation de l'entreprise elle-même, à laquelle peuvent etre fixés alors des
objectifs spécifiques, distincts de celui ou de ceux qui ont la responsabilité de sa gestion ou des
associés ou porteurs de parts ayant à y affecter une partie de leurs biens.
- Il est encore à souligner que le recours systématique à la technique sociétaire dès que sont
constatées, en l'état de notre droit, des inégalités aux plans fiscal et social et dès que le niveau des
responsabiltés encourues est susceptible d'engloutir tous les biens personnels, n'est ni sage ni
salutaire. Les sociétés fictives de capitaux, qui sont pourtant très nombreuses, ne sont pas qu'une
technique froide. Elles dénaturent l'objet même du pacte sociétaire et réduisent les règles du
droit des sociétés à un simple formalisme. Il en découle à la fois un coût d'exploitation injustifié
et une désacralisation du droit. La société unipersonnelle à responsabilité limitée a, au moins,
l'avantage de ne pas être hypocrite, mais elle met en oeuvre, au service d'un^ acte unilatéral, des
techniques construites pour le contrat. Elle ne contribue pas, de ce fait, à réaliser ce pour quoi
elle a été imaginée, c'est-à-dire l'organisation de l'entreprise.

Enfin, les enjeux fiscal et social d'une stratégie visant ou non à favoriser la transformation
-
systématique en sociétés de capitaux des entreprises à partir d'un certain seuil d'activité sont
importants :
en termes de libre-concurrence ; où sont l'éthique et l'état de droit si la seule manière,
pour un entrepreneur, d'être dans une situation de concurrence normale est l'indépendance
. d'abandonner les
principes sur lesquels il a construit son existence professionnelle, en particulier et
le fait de travailler seul ?
au plan de la protection sociale. Deux logiques s'affrontent : celle de la société impliquant
.
l'affectation prioritaire des profits à l'expansion de l'entreprise mais justifiant, par le salariat, un
régime de retraite et de prévoyance assurant des revenus de substitution suffisants en cas d'aléas
de la vie ; celle, diamétralement opposée, de la conservation de tous les profits à la
consommation personnelle, mais rendant nécessaire de trouver, dans les plus values des cessions
du patrimoine professionnel, les moyens de subvenir aux besoins lors de la cessation de l'activité,
qu'elle qu'en soit la cause ;
J
au plan de la sécurité des régimes de protection sociale. Celle-ci, en fonction de l'économie
générale de notre droit, repose sur un principe de solidarité, lui-même matérialisé par la
technique de répartition. La transformation systématique en société a pour effet -et même
souvent pour cause- le bénéfice, pour le dirigeant, du régime des salaries. Elle est source de
difficultés aux régimes des non salariés, que les règles de compensation ne corrigent
qu'imparfaitement. Ceci est d'autant plus important que la qualité de salarié, au plan social, des
dirigeants de sociétés s'écarte des principes généraux qui gouvernent le droit de la sécurité
sociale. Ceux-ci ne sont pas dans la situation d'employé à l'égard d'un employeur (L. 311-2 du
code de la sécurité sociale) et il a fallu, pour les faire relever du régime général, qu'ils soient
visés par l'article L. 311-3, établissant la liste de ceux qui, normalement non assujettis, y sont
affiliés néanmoins en application d'une disposition légale spéciale. Leur rattachement au régime
de retraite des cadres est encore plus étrange puisque ce régime résulte d'une convention
collective qui, par définition, ne peut normalement bénéficier qu'à des personnes disposant d'un
contrat de travail, ce qui n'est pas leur cas.
La réussite de l'entreprise unipersonnelle suppose d'abord ambition, goût du risque,
créativité de la part de son exploitant. Elle dépend aussi, en raison de ces enjeux fondamentaux,
,stenc.e distincte de celui qui la gère, peu important l'absence de morale. Cela
personne
passe nécessairement par une capacité d'organisation de l'entreprise. La simplification des
procédures administratives de toutes sortes s'impose pour éviter que de telles contraintes soient
un obstacle a la création et à l'expansion d'entités économiques. Toutefois cette politique nrdok
pas,aucontraire, de
? e techniques comptables et de gestion qui contribuent à la
personnalisationl'entreprise. On ne peut, alors, que préconiser un effort important de
formation a la gestion. Compte tenu de l'importance des petites entreprises pour l'équilibre
de

économiquefiscales. soc de la Nation, cet effort doit être favorisé par des aides ou des incitations

4°/ - Conclusion.

ConseilC'est en considération et de
ces différents objectifs que vont s'articuler les propositions du
Smp iifr°miquetet social. Ces propositions s'ordonnent autour d'un principe général, lui-
même lié a un constat. Le constat est que l'entreprise est une entité économique, laquelle doit
préservée : en effet, de la prospérité des entreprises dépendent largement les
grands équilibres économiques et sociaux. L'entreprise a ainsi une fonction sociale dans le
monde moderne, l entreprise n'est pas seulement
une source de profits pour son ou ses
propriétaires. principe général que l'entreprise doit exister, au plan juridique!
indépendamment de la personne, morale ou physique, qui la gère. Ce principe général implique
un effort important de rationalisation des droits fiscal, social, patrimonial, de la responsabilité
pour assurer une égalité totale de statut entre l'entreprise en nom personnel ou en société et
pour éviter des conséquences fâcheuses, sur ces différents plans, des vicissitudes juridiques
économiques qu est susceptible de connaître l'entité économique. Il y va de la capacité à ou
a celle-ci une expansion harmonieuse, mais aussi de l'intérêt des différents partenaires de assurer
entreprise, clients, fournisseurs, salariés, Etat. Tout particulièrement, le dynanisme des petites
entreprises, pour la plupart en nom personnel, est un facteur important de résorption du
chômage. Elles sont un gisement d'emplois si, en particulier, leur existence
et leur capacité
d expansion ne sont pas menacées par l'absence de fonds propres et de trésorerie.
Le Conseil économique et social ne peut que renouveler la
remarque qu'il formulait, dans le
cadre de son avis adopté sur le rapport de M. Pierre DELMON le 2 juillet 1975 concernant «la
réforme de l entreprise», à savoir : «Il est anormal que le choix du statut juridique de l'entreprise
soit dicté par des considérations étrangères à l'activité ou à la taille de l'entreprise. Cela conduit à
recommander la poursuite de l'effort en direction d'une égalité totale aux plans fiscal soda!». A
et
toutlemoins, ? entrepreneurs ne doivent pas être contraints au choix de la forme sociétaire par
des différences trop importantes dans les domaines fiscal et social, ce qui est aujourd'hui le
On pourrait ajouter aux critères déterminants de la constitution d'une société, la volonté de cas.
s associer que 1 on a tendance a oublier en suggérant l'émergence de sociétés fictives.
Les propositions ci-après ont été conçues pour être cohérentes
avec ce principe général et,
par voie de conséquence, entre elles. Elles visent à assurer l'identité et la pérennité de
l'entreprise et a promouvoir l'intérêt des tiers. De ce fait, bien que l'objet de cet avis soit relatif
au, statut de 1 entreprise individuelle, certaines des propositions concernent les sociétés si le
:
mérite du droit des sociétés est d'être devenu une technique d'organisation de l'entreprise, encore
faut-il que cet objet ne soit pas dilué, ce qui est le cas d'une part lorsque la société est fictive,
d autre part, dans la société unipersonnelle à responsabilité limitée, dès lors que, contrairement à
la société anonyme, la SARL ne prend pas en compte réellement l'entreprise. Il faut donc
envisager des moyens qui dissuadent l'utilisation excessive de la technique sociétaire. Ces moyens
s ordonnent autour du patrimoine affecté d'une part, de la recherche, sinon de l'égalité, du
moins de la neutralité aux plans fiscal et social entre exploitation en nom personnel et en société
d autre part. En dépend notre capacité à constituer le tissu important de petites entreprises dont
nous avons besoin, tissu menacé aujourd'hui par le nombre des défaillances et les risques
encourus à l'occasion des transmissions.
DEUXIÈME PARTIE

PROPOSITIONS

propositions que le Conseil économique et social est amené à formuler,


..
statut lfepremïlrerTartfdeUrite'aS9nt inspirées du constat et, surtout, des réflexions
dans
relatives au
contenues
successivementpartie cet Ces propositions sont rassemblées en cinq thèmes qui
concernent :

- l'organisation juridique de l'entreprise individuelle,


- la couverture sociale de l'entrepreneur en nom personnel,
- le renforcement de la capacité financière,
- la transmission de l'entreprise individuelle,
- les relations de travail dans les petites entreprises.
gestion.Cespropositions impliquent la nécessaire formation
de
du chef d'entreprise aux responsabilités

I. - L'ORGANISATION JURIDIQUE DE L'ENTREPRISE


INDIVIDUELLE

La séparation du patrimoine consacré à l'entreprise


est un moyen d'éviter la généralisation
du recours a la technique sociétaire, qui n'a pas grand sens en dessous d'une certaine taille.
celuides effectifs,soitsoit par chiffre d'affaires, soit par le niveau des
en uï^u l'antL HVnf16 conjugaison d^ces différents facteurs ; suivant le type d'activités,
Celle-
bénéfl^
effet, l' autre d entre
eneffet,l'un

malgré
ou 1
l' eux est plus déterminant. Toutefois, la distinction de l'entreorise
absence de personne morale, de celui qui la gère ne peut qu'avoir pour effet l'entreprise,-sinonpour
réductionLesde la
responsabilité de l'entrepreneur, phénomène qui peut être préjudiciable
causela
aux iiers..Les intérêts de ceux-ci doivent être préservés.
doute pas nécessaire, pour consacrer cette séparation, de modifier profondément
™!LnltS;iSarnTS
le code civil. Une conception instrumentaliste du droit permet d'obtenir le résultat souhaité
Iln'est
sans
doute

à
laseul e solution des problèmes découlant de la reconnaissance de l'entreprise. C'est ainsi queparle
droit fiscal et, a un degré moindre, le droit social ainsi que la technique comptable
oar
d' isoler le patrimoine consacré à l'entreprise. C'est ainsi également permettent
fiducie,permettentdont
que la
introduction, dans notre droit, est sans doute imminente, consacre la divisibilité du
patrimoine.
économique, rendla in^s^ns^We^ue^oienlfaffinées ?es mesuresdedestinées à
favoriserfacteursa d'expansionpérennité,
nonobstantlatransformation éventuelle
de sa forme juridique, principalement celles permettant

Ce double constat justifie une série de propositions.

1 °/
- Identification de l'entreprise individuelle.

Pour concrétiser le principe de l'affectation d'un patrimoine à l'identification


de l'entreprise,
ilest la de
indispensableque déclarationd'existence de celle-ci s'accompagne de la constitution d'un
capital gagé par l affectation d immobilisations pour un montant équivalent à celui actuel de la
SARL, lequel, au demeurant, gagnerait à être augmenté
pour améliorer solidité dé
l'entreprise. la
En dotant ainsi l'entreprise à sa création de fonds propres suffisants, elle devient moins
vulnérable aux difficultes de toutes sortes. La valeur actualisée du patrimoine serait ensuite
publiée chaque année, suivant une technique d'information inspirée des obligations imposées aux
sociétés. Le Conseil économique et social s'étonne que cette recommandation qui avait déjà été
faite dans son avis du 14 mars 1984 adopté sur le rapport de M. Jean MENU sur «la maîtrise de la
croissance des entreprises nouvellement créées», n'ait pas fait l'objet de suites.
Ce patrimoine affecté serait soit investi soit en attente d'investissement, les actifs
correspondants faisant partie des actifs de l'entreprise, donc étant inscrits au bilan. La fraction
non investie devrait alors être inscrite dans un compte bancaire ouvert au nom de l'entreprise, les
produits financiers devenant des produits de l'entreprise, clairement identifiables tant par les tiers
que par l'administration fiscale.

2°/ - Le renforcement des sécurités dans les sociétés à responsabilité limitée.

Le droit des sociétés à responsabilité limitée ne prend pas réellement en compte l'entreprise
comme peut le faire le droit des sociétés anonymes. En outre, lorsque la société n'a qu'un seul
associé -donc de fait, un seul propriétaire-, la limitation de la responsabilité ne se traduit pas en
limitation de pouvoirs, qui garantit les tiers, puisque la décision n'y est pas négociée, mais
unilatérale. Ceci vaut naturellement pour l'EURL, mais aussi pour la SARL lorsqu'elle est fictive.
Deux mesures permettraient de corriger les effets d'un tel état de fait. Il conviendrait :
- d'augmenter significativement le capital social ainsi que la dotation à la réserve.
- de raccourcir les délais de régularisation lorsque la moitié du capital est perdue du fait de
résultats négatifs. Il est rappelé que, à défaut de remise d'argent dans ce délai, l'exploitation doit
cesser.
Cette sécurité est, par ailleurs, assurée au travers de la pérennité garantie de l'entreprise dès
lors que, en cas de decès du gérant unique de l'EURL, celle-ci se poursuit automatiquement
comme SARL classique entre les mains des héritiers.

3°/ - L'adoption de mesures d'alerte adaptées aux petites entreprises.

La taille des entreprises comme la forme d'exploitation en nom personnel les exclut du
bénéfice d'un certain nombre des moyens de prévention que le législateur, inspiré des
conclusions du rapport SUDREAU, a imaginés, par la loi du 1er mars 1984, pour réduire les
risques de disparition.
L'absence de commissaire aux comptes du fait de la forme juridique, l'absence habituelle de
comité d'entreprise du fait de la taille, placent naturellement l'entreprise en nom personnel en
dehors des moyens permanents d'alerte. L'alerte est, en effet, déclenchée soit par le commissaire
aux comptes, soit par le comité d'entreprise. Les conditions qui permettent a l'un ou à l'autre
d'engager la procédure sont certes différentes. Elles n'en témoignent pas moins, les unes comme
les autres, d'une situation préoccupante nécessitant une stratégie de prévention. Or, la mise en
place de commissaires aux comptes et/ou de comité d'entreprise en dehors des cas où la loi
prévoit actuellement leur présence ne se justifie pas. Par ailleurs, la concentration de tous les
pouvoirs sur une seule personne physique empêche la mise en oeuvre des techniques destinées
aussi bien à l'analyse et la critique de la gestion qu'à une prise de conscience de la faiblesse des
comportements.
Il convient donc de relancer les groupements de prévention agréés, qui doivent demeurer
facultatifs mais dont l'intérêt et l'efficacité doivent être tels qu'ils deviennent un outil habituel de
la prévention des difficultés, notamment grâce à des mesures incitatives à y avoir recours. Dans
cette perspective, l'adhésion à un groupement doit avoir pour effet, en cas d'exécution conforme
du plan proposé, une diminution de la responsabilité de l'entrepreneur et la constitution de fonds
propres (par exemple par l'accès à des prêts bancaires à long terme) ; en cas, au contraire,
d'inexécution du plan, une sanction plus dure doit être organisée. La création, envisagée, d'une
fédération des groupements de prévention peut, de même, contribuer à leur dynamisation et à
accroître leur efficacité.
L'animation des groupements de prévention agréés doit être, de préférence, confiée à des
professionnels spécialisés ayant individuellement manifesté un goût pour une oeuvre d'intérêt
général et à la réalisation de laquelle ils consacreront du temps et manifesteront de
l'enthousiasme. Le recours direct aux conseils spécialisés est aussi un moyen de prévention, qui
doit être favorisé. Pour les mêmes raisons, le recours aux stages de formation à la gestion doit
être augmenté grâce à des mesures incitatives.
Quelle que soit l'assistance apportée au chef d'entreprise, celle-ci doit se concrétiser
essentiellement sous la forme de conseils et de réflexions, les groupements n'ayant pas à
substituer à celui-ci dans ses décisions. L'action tant des groupements de prévention agréés que se
des conseils extérieurs doit cependant avoir pour effet la mise en place d'une gestion
prévisionnelle.
Par ailleurs, et dans le même esprit, l'accès à des prêts à moyen et à long termes,
conséquence naturelle de l'adoption et du suivi du plan de prévention, ne doit pas avoir pour
effet, compte tenu de l'évolution récente de la jurisprudence, de transformer le banquier en
dirigeant de fait. Un tel risque peut avoir, en effet, comme effet indirect de le rendre plus
prudent que nécessaire.
Enfin, les comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises
(CODEFI) et les comités régionaux de restructuration de l'industrie (CORRI), qui réunissent les
responsables des principales administrations concernées par les difficultés des entreprises
(tresoriers payeurs géneraux, services fiscaux, travail et emploi, etc.) apportent des aides
temporaires (délais de paiement, aides financières temporaires) aux seules entreprises industrielles
lesquelles sont en majorité constituées par des sociétés. Leur compétence devrait être élargie à
l'ensemble des entreprises individuelles.

4°/ - Le développement de la procédure de règlement amiable.

Le caractère consulaire de la juridiction commerciale, d'une part permet à la procédure de


réglement des litiges d'être moins traumatisante puisque les juges sont des pairs, d'autre part
favorise l'émergence de solutions plus sensibles à l'équité qu'à la règle de droit. En agriculture,
les entreprises en difficulté relèvent des tribunaux de grande instance et non d'une juridiction
consulaire. Il en est de même, entre autre, pour les professions libérales sauf, mais de manière
non systématique, lorsque le cabinet est constitué en société d'exercice libéral. Ces situations
constituent une anomalie. Il est souhaitable que les professionnels puissent être jugés par leurs
pairs. Malgré cette double caractéristique, il est souhaitable que se développe la conciliation
amiable, moyen de résoudre les problèmes à la fois plus rapide et plus direct, dans le cadre d'un
compromis entre toutes les parties intéressées et par le biais du contrat. Dans cette perspective
et quelle que puisse être la qualité de la juridiction consulaire-, il est préférable d'éviter une-
implication trop directe du tribunal de commerce sur les plans de prévention.
Ce règlement amiable repose sur une stratégie impliquant une comptabilité prévisionnelle à
laquelle l'entreprise en nom personnel n'est pas tenue légalement. La jurisprudence n'en admet
pas moins la possibilité du recours au règlement amiable dans ce type d'entreprise dès lors que,
c'est logique, l'entrepreneur est à même de produire une comptabilité prévisionnelle, même
rudimentaire (Chambéry - 3 novembre 1976). Le recours au règlement amiable doit donc être
facilité par la qualité des instruments comptables.

Deux moyens permettraient d'améliorer la procédure de réglement amiable :


- l'instauration d'une courte période de suspension des poursuites lors de la préparation de
l'accord ;
- la reconnaissance aux créanciers ayant participé au réglement, d'un rang plus favorable,
hormis les privilégiés, si l'entreprise dépose ensuite son bilan pendant l'exécution de l'accord.
Il devrait pouvoir être aussi admis, pour privilégier cette procédure, plus simple et moins
traumatisante, que le concordat - qui est plus facile à mettre en place s'il prévoit l'adhésion à un
groupement de prévention qui crédibilise le plan - s'accompagne d'une aggravation du risque si
ne sont pas concrètement prises en compte les propositions du plan.
La limitation des droits de l'ensemble des créanciers sur les seuls biens affectés à l'entreprise
rend encore plus nécessaire la réflexion que suggérait déjà le Conseil économique et social -dans
son avis adopté le 23 février 1983 sur le rapport de M. Jean CESSELIN sur «Le projet de loi relatif
à la prévention et au réglement amiable des difficultés des entreprises»- : la remise sous conditions
des pénalités fiscales dans le cadre du réglement amiable permet de compenser l'effort accompli
par les créanciers privés.
5°/ - La simplification des procédures.

L'entreprise vit dans un univers formaliste dont le respect nécessite du temps et de l'argent.
Le nombre et la complexité des contraintes purement administratives -plus particulièrement
celles à caractère déclaratif- pèsent sur les comportements du chef de la petite entreprise. Au
surplus, les changements fréquents qu'introduit le législateur qui, à certains égards, apparaissent
comme des transferts de responsabilité, compliquent la tâche du gestionnaire, même si
l'informatique aide à résoudre certaines difficultes techniques. Un tel constat milite en faveur de
la simplification des tâches administratives.

Une distinction doit cependant être faite entre ce qui ressort strictement de la technique
comptable d'une part, des bordereaux liés aux obligations de toutes sortes d'autre part :
- Un minimum de connaissance comptable est indispensable à un chef d'entreprise, faute de
quoi la qualité de la gestion en est altérée. Il vaut mieux favoriser, en ce domaine, l'acquisition de
savoir, y compris par des mesures incitatives à la formation, voire par la possibilité ouverte de
recours à des conseils et assistance extérieurs favorisée au travers d'opération du type des Fonds
régionaux d'aide au Conseil (FRAC). Par ailleurs, doivent être développées, en sus de la
comptabilité financière, dont l'intérêt est limité à l'information sur le passe et à des fins surtout
fiscales, des techniques comptables de gestion qui contribuent à l'organisation de l'entreprise par
leur contribution à la prévision.
- Un effort important de rationalisation des bordereaux doit être entrepris, par la recherche
d'une matrice universelle, de sorte que, sans remettre en cause l'autonomie des partenaires
sociaux, les recouvrements des contributions destinées à la protection sociale légale,
complémentaire, interprofessionnelle ou professionnelle puissent se réaliser dans le cadre de
documents simplifiés, normalisés et en nombre réduit. Le gouvernement, conscient des problèmes
posés, a demandé à M. ARRIGHI de CASANOVA un rapport sur ce sujet, qui a été déposé en février
1992 ; parmi les solutions proposées les plus significatives, on peut citer pour les entreprises de
moins de dix salariés, l'instauration des URSSAF comme interlocuteur unique, la refonte et la
simplification des bulletins de salaire, l'extension du bénéfice de la déclaration annuelle de
salaire, la suppression du bordereau trimestriel récapitulatif de cotisations, la simplification des
aides à l'emploi liées à l'embauche d'un premier salarié.

Il a été créé, par ailleurs, la commission pour la simplification des formalités incombant aux
entreprises (COSIFORME) dont les travaux ont permis des améliorations. De son côté, la
profession comptable a formulé un certain nombre de propositions visant ainsi à la simplification
de la gestion.
Pour sa part, le Conseil économique et social suggère quelques pistes, parmi les très
nombreuses mesures qui peuvent être envisagées.

. Aménagement en matière de TVA.


En matière de déclarations de TVA, même les entreprises relevant du régime simplifié
d'imposition ont l'obligation mensuelle ou trimestrielle de remplir un imprimé déclaratif. Toute
obligation déclarative, même si elle est simple, est mal perçue par les petites entreprises. Afin
d'alléger ces obligations en cours d'exercice en matière de TVA, un système d'acomptes mensuels
prélevés automatiquement (type impôt sur le revenu) pourrait être retenu. Une liquidation
annuelle serait effectuée pour régularisation. Cette formule doit revêtir un caractère optionnel
pour tenir compte de la spécificité de certaines activités.
Dans cette perspective il conviendrait, dans le secteur agricole, de faire coïncider l'exercice
applicable en matière de TVA avec celui pris en compte pour la détermination du bénéfice réel.

-
Imprimé unique pour les divers organismes sociaux.
Plusieurs imprimés sont remplis, parfois aux mêmes dates, le plus souvent avec des bases
identiques, à destination de différents organismes sociaux. Un effort important doit être fait en
vue de simplifier les déclarations et d'en réduire le nombre, si possible à l'unité. Le principe
d'acomptes, mensuels ou trimestriels, dont le montant serait contractualisé sur la base des
montants des années précédentes pourrait aisément être la règle, non seulement pour les
cotisations des régimes légaux, mais aussi pour les régimes complémentaires, y compris de
salariés. Il conviendra, sans doute, de conserver la distinction entre :
- Régimes concernant le travailleur indépendant lui-même, à savoir :
assurance-maladie, allocations familiales, retraite tant de base que, éventuellement
complémentaire, formation. '

- Régimes concernant le personnel salarié de l'entreprise, à savoir :


cotisations correspondant au régime général, déjà rassemblées du fait de l'existence de
l'URSSAF, retraite complémentaire, y compris, s'il y a lieu, régime des cadres, prévoyance
collective, assurance chômage, financement mutualisé de la formation. La situation des
régimes complémentaires de retraite est difficile à résoudre dès lors que,
l'application de l'accord du 8 décembre 1961 existent différents régimes et même à pour
1 intérieur de ceux-ci
un certain nombre de caisses.
Rien n'interdit, toutefois, qu'un effort soit entrepris en vue d'une déclaration seul
sur
bordereau de ces deux types de cotisations, malgré la triple difficulté que représentent leurun
finalité différente (régime de non salariés et de salariés), la nature juridique différente de
ces
régimes (régime légal d'un côté, régimes conventionnels de l'autre) et les spécificités appliquées
dans certaines branches d'activité du fait d'obligations réglementaires ou conventionnelles.
Stratégiquement, il est préférable de régler d'abord la question des déclarations et de
n examiner qu'ensuite celui des versements, plus délicat à résoudre.
^

Au demeurant, s'agissant des déclarations d'existence, un progrès a été réalisé le


.
formulaire unique rempli au Centre de formalités des entreprises. par

. Le bulletin de paye.
Il faut sérieusement travailler sur la réalisation technique du bulletin de
d une très grande complexité. Le problème n'est toutefois pas simple, dans la paye qui est devenu
mesure où ce
document assume une fonction importante d'information, tant du salarié que des différentes
administrations et organismes sociaux et, même, des tiers.

-
Mesures diverses.
En raison de ses faibles moyens financiers, la petite entreprise ne peut généralement pas
faire appel aux organismes de conseil. Le Conseil économique et social renouvelle sa suggestion
formulée dans son avis adopté sur le rapport de M. Jean PAQUET, déjà cité, de créer un système de
«subvention à ^ aide», à l'instar de ce qui existe dans de nombreux pays européens. En
Allemagne, les petites entreprises ont droit à trois fois deux jours de conseil gratuit pendant les
cinq premières années. Au-delà, elles reçoivent chaque année une subvention partielle
pour
rémunérer cinq jours de conseil d'intervenants préalablement agréés. De telles mesures
nécessitent qu'au préalable soient tirés tous les enseignements des mesures FRAC. De même, la
formule du chèque-conseil aux créateurs d'entreprise doit faire l'objet d'un bilan afin de pouvoir,
ensuite, corriger ses imperfections. Des accords de partenariat doivent, à cet égard, être
recherchés entre les organisations professionnelles et les professions de conseil, notamment dans
le cadre des missions d'intérêt public que celles-ci assument lorsqu'elles sont réglementées (par
exemple, dans le cadre de l'aide juridique légale incombant à la profession d'avocat). Si des
mesures inspirées du droit allemand devaient etre introduites en France, il faudrait les étendre,
dans les mêmes conditions, aux repreneurs, acheteurs ou héritiers.

II. - LA COUVERTURE SOCIALE DE L'ENTREPRISE INDIVIDUELLE

Au plan de la protection sociale, les propositions doivent répondre à trois sortes de


préoccupations : assurer l'égalité de traitement entre non salariés et salariés, protéger les régimes
des non salariés contre les conséquences du changement de statut du dirigeant, éviter les
requalifications abusives de statut. Par ailleurs, une réflexion doit être menée sur le statut du
conjoint collaborateur.
1 °/ - Assurer l'égalité de traitement des non salariés et des salariés.

a) Remarques préliminaires.

On ne peut aborder cet aspect, important, du statut de l'entrepreneur en nom personnel sans
rappeler que la réflexion fondamentale qui a été menée au lendemain de la guerre, à l'initiative
du Gouvernement, par le Président Pierre LAROQUE visait à instaurer un régime de sécurité
sociale pour tous les Français, dont, en outre, l'une des pièces centrales aurait été l'assurance
chômage.

1.- L'assurance chômage n'a pas été retenue par le Gouvernement comme devant figurer
parmi les prestations couvertes par le régime légal de protection sociale au motif que, à cette
époque, parce qu'il fallait reconstruire la France, le risque de perte d'emploi était réduit et parce
que les organisations professionnelles intéressées s'y sont opposées. Voilà qui explique que cette
prestation, aujourd'hui fondamentale pour l'équilibre économique et social du pays, relève du
domaine conventionnel, au contraire de ce qui existe dans d'autres Etats de la Communauté.
C'est aussi ce qui explique que, bien qu'étant d'origine conventionnelle, le régime UNEDIC (Union
nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce) ait été intégré dans les règles de
coordination des régimes légaux de sécurité sociale telles qu'elles résultent, au nom de la libre
circulation des travailleurs, de l'article 51 du Traité de Rome et du règlement 1408.71. De ce fait,
les non salariés qui, par définition, ne peuvent pas être bénéficiaires d'une convention collective,
ne sont pas protegés contre le chômage. La question mérite cependant d'être posée : doit-on ou
non instaurer un système de revenus de remplacement en cas de cessation subie d'emploi pour
un commerçant, un industriel, un artisan, un professionnel libéral, un agriculteur ? Si, à première
vue, on est tenté de répondre par la négative dès lors que l'entrepreneur est un travailleur qui
assume pleinement le risque économique, deux éléments peuvent inciter à adopter une solution
différente :
D'une part, des contrats d'assurances ont été construits à cet effet ce qui témoigne d'une
-
demande ; mais, en raison du caractère volontaire de la souscription du contrat, la cotisation
n'est pas déductible de la base des revenus professionnels imposables, ce qui ne serait pas le cas
s'il s'agissait d'un élément du régime obligatoire de sécurité sociale.
D'autre part, si, dans la situation de droit commun, les mandataires sociaux, bien que
-
salariés au plan du droit de la sécurité sociale, ne bénéficient pas du régime d'assurance chômage,
n'étant pas liés à la société par un contrat de travail, il n'en est pas de même en cas de cumul du
mandat et d'un contrat de travail ou lorsque le mandat auprès d'une société filiale est le moyen
d'exécuter un contrat de travail conclu avec la société mère. Il y a donc des «patrons» qui
bénéficient de l'assurance chômage.

2.- La loi du 17 juin 1948 a donné naissance à des régimes spécifiques pour les commerçants,
industriels (Caisse de compensation de l'organisation autonome nationale de l'industrie et du
commerce : ORGANIC), pour les artisans (Caisse autonome nationale de compensation de
l'assurance vieillesse artisanale : CANCAVA) et pour les professions libérales (Caisse nationale
d'assurance vieillesse des professions libérales : CNAVPL), sauf en ce qui concerne les avocats qui
disposent, par la Caisse nationale des barreaux français (CNBF), d'un régime autonome. Les
exploitants agricoles disposent, de leur côté, de régimes particuliers (Caisse nationale d'assurance
vieillesse mutuelle agricole : CNAVMA).
Les caisses gèrent avant tout un régime de retraite, mais y a été intégrée la couverture, à des
niveaux forts différents, de prestations décès, invalidité, parfois incapacité de longue durée. Au
plan de la retraite, le régime des commerçants-industriels et celui des artisans ont été alignés sur
le régime général. Ce n'est par contre pas le cas du régime des professions libérales.
Au plan de la maladie, le régime mis en place au profit des travailleurs non salariés géré par
la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions
agricoles alloue des prestations en nature, similaires mais un peu inferieures de
non (CANAM)
celles allouées aux salariés. Par contre, aucune prestation en espèce n'est allouée au titre de
l'incapacité temporaire. En outre, les affections résultant de maladie professionnelle ou
d'accident du travail ne font pas, comme c'est le cas pour les salariés, l'objet d un traitement plus
favorable. Le régime des accidents du travail s'étant éloigné de la notion de réparation d'un
préjudice résultant d'une faute (sauf lorsqu'il y a faute inexcusable) de l'employeur, rien ne
s'oppose, pourtant, à ce que soit instauré un régime particulier également pour les non salariés.
Malgré la volonté d'alignement du régime des travailleurs non salariés (de celui des
commerçants et industriels et de celui des artisans, en fait) sur celui des salariés, le niveau réel de
protection sociale des exploitants en nom personnel demeure nettement inférieur à celui du
dirigeant salarié en raison d'une part des régimes complémentaires d'origine conventionnelle,
d'autre part des systèmes supplémentaires dont les cotisations bénéficient aussi, au plan fiscal, de
la qualification de charges pour les salariés, avantage dont sont exclus les travailleurs
non salariés.
C'est la raison pour laquelle, l'un des objectifs du présent avis étant la recherche de l'égalité
au plan social, sont présentées ci-après des propositions tendant successivement aux régimes de
protection sociale proprement dites ainsi qu'au traitement fiscal de l'assurance retraite et
prévoyance.

b) Propositions.

1.- L'idée de faire bénéficier les


entrepreneurs non salariés d'un revenu de remplacement en
cas de perte subie d'emploi (essentiellement en cas de faillite de l'exploitation donc) mérite
d'autant plus d'être étudiée si, par l'adoption du patrimoine d'affectation, leur responsabilité,
donc leur pouvoir, diminuent. Cet avantage pourrait prendre tout simplement la forme d'une
incitation, de caractère fiscal, les prestations étant alors imposables. Dans cette perspective, il est
important que soient adoptées des mesures visant à dispenser largement l'information sur le
contrat «garantie sociale des chefs d'entreprise» (GSC), conçu par les organisations
professionnelles, auxquels n'adhèrent environ que 15.000 employeurs en nom personnel.
2.- Un certain nombre d'organisations professionnelles -essentiellement celles représentant
les artisans- souhaitent voir s'instaurer un régime obligatoire d'indemnités journalières. Bien
la majorité ad hoc au sein de la CANAM ne se soit pas manifestée en ce sens au printemps 1992, que
le problème reste cependant posé. Une solution devrait y être apportée soit voie legislative
par
pour l'obligation soit dans le cadre d'un régime facultatif avec cotisations déductibles de l'impôt
sur les revenus professionnels comme cela existe pour les agriculteurs, les prestations étant alors
imposables.

^ 3.- Les caisses de retraite de non salariés ont mis en place des régimes complémentaires
delà du régime de base ayant une vocation équivalente à celle du régime général, mais ils sont au-
soit insuffisants soit facultatifs sauf pour les professions libérales pour lesquelles, par contre, le
régime de base alloue des prestations qui ne représentent que de l'ordre de 50 à 60 % de ce que
verse le régime général :
Lorsqu'ils sont à adhésion facultative, le souci de pérennité des droits justifierait que l'on y
-
constitue les capitaux correspondant aux rentes à servir dès lors que la solidarité des genérations
n'est pas garantie par l'obligation de cotiser. Le régime facultatif des commerçants n'a que peu
de succès.
- Lorsqu'ils sont à adhésion obligatoire, le but devrait être d'obtenir un revenu de
substitution similaire à celui dont bénéficient les salariés par la conjonction des régimes de base
et complémentaires ce qui doit conduire à calculer partout les cotisations non pas forfaitairement
mais sur les revenus et si possible de l'année en cours. Cet objectif peut, pour les anciens, être
atteint s'il y a reconstitution de carrière gratuite, comme cela a été le cas dans le régime des
artisans. En outre, se pose ici la question de la compensation entre les régimes complémentaires
qui, s'ils restent autonomes, sont fragiles.
4.- La différence essentielle, en matière de retraite et de prévoyance, entre le statut du
dirigeant salarié d'une société et celui de l'entrepreneur en nom personnel tient aujourd'hui à ce
que, pour le second, ne sont déductibles de l'assiette des revenus professionnels que les
cotisations aux seuls régimes légaux de retraite et de maladie, tandis que, pour le premier, toutes
les contributions destinées au financement de la retraite et de la prévoyance, y compris celles des
systèmes supplémentaires versées à des compagnies d'assurance, des mutuelles, des institutions de
prévoyance, sont fiscalement des charges tant qu'elles n'excèdent pas 19 % de huit fois le plafond
annuel des cotisations de sécurité sociale.
La nécessité de parvenir à une égalité sociale authentique justifie la mise à l'étude de
l'extension aux non salariés de cet avantage consenti aux salariés, malgré l'argument toujours
avancé pour s'y opposer, à savoir que, pour les salariés, le caractère obligatoire peut venir d'un
accord collectif ou d'une décision unilatérale de l'employeur, tandis que, pour les non salariés, il
ne peut résulter que de la loi. Au demeurant, l'extension de la déductibilité aux systèmes
facultatifs a été consentie aux fonctionnaires (PREFON) et, plus récemment aux agriculteurs. Dans
certaines caisses de non salariés existent, au demeurant, des régimes professionnels (par exemple :
ORGANIC des commerçants ou CNBF des avocats) dont les cotisations sont déductibles fiscalement
des revenus professionnels. Par contre, cela rend indispensable de bien marquer la différence
entre systèmes de retraite et de prévoyance d'un côté, système d'épargne de l'autre de sorte que
ne soient déductibles de l'assiette des revenus imposables que les contributions destinées au
financement de contrats de retraite (prévoyant le versement d'une rente à l'exclusion de tout
capital et ne permettant pas le rachat) et de contrats de prévoyance collective (assurant des
garanties temporaires déces, incapacité, invalidité, prestations en nature) complémentaires aux
prestations des régimes légaux. Les autres types de contrats ne peuvent bénéficier d'une
déduction que dans le cadre des dispositions spécifiques à l'assurance-vie.

2°/ - Protéger les régimes des non salariés.

a) Considérations générales.

La notion même de régime de retraite (voir à ce sujet le Droit de la Sécurité sociale - Précis
DALLOZ - 12ème édition - J.J. DUPEYROUX) -qui implique l'autonomie financière, même si celle-ci
est nuancée par les techniques de compensation- exige, par souci de sécurité, la solidarité d'une
part du plus grand nombre pour éviter les effets négatifs des récessions économiques catégorielles
ou des rapports démographiques atypiques, d'autre part des générations sans laquelle le volume
des contributions nécessaires à la fourniture des prestations n'est pas suffisant. De ce fait, la
transformation dans la situation juridique de l'entreprise menace la pérennité des régimes des
non salariés si elle a pour effet, suite à cette transformation, que le dirigeant relève du régime des
salariés.
Voilà pourquoi les responsables des caisses de non salariés souhaitent le maintien de ces
dirigeants dans le régime des non salariés. Il est, de fait, qu'entre le président directeur général
d'une société anonyme fictive et l'exploitant en nom personnel, il n'y a pas de différence telle qui
justifie cette différence de statut, ceci d'autant que la définition de l'assujettissement au régime
général repose sur une situation de dépendance qui n'existe pas pour ce président. Au
demeurant, il a fallu que le code de la sécurité sociale soit complété par une référence expresse
pour que ces dirigeants relèvent du régime général. En outre, si on a procédé à cette extension
du domaine naturel de compétence du régime général, c'est pour donner un attrait certain, grâce
à l'avantage social, à la société de capitaux pour inciter à la transformation. Si égalité au plan de
la protection sociale il y a entre salariés et non salariés, cette mesure incitative ne se justifie plus.

Deux raisons concordantes justifient cependant le statu quo :


- Nombre de mandataires dans les sociétés anonymes, particulièrement dans les grandes
entreprises, sont d'authentiques salariés. Tout au plus peut-on admettre le caractère artificiel,
dans une SARL, de la distinction entre gérance majoritaire ou minoritaire, d'autant que la Cour
de Cassation en est venue à considérer qu'un gérant minoritaire non rémunéré ne relève d'aucun
régime. Le Conseil économique et social a déjà eu l'occasion de souligner le caractère incohérent
de l'appréciation de la situation sociale, non au niveau de chaque gérant, mais sur l'ensemble de
la gérance.
- Il est impossible de donner un statut social différent aux associés travaillant dans la même
société suivant qu'ils sont ou non mandataires sociaux, ce qui rendrait difficile le changement de
dirigeants. Un associé non mandataire d'une société de capitaux ne peut, en effet, s'il travaille
pour l'entreprise, être rémunéré qu'au titre d'un contrat de travail.
La protection des régimes de non salariés peut aussi être assurée par le versement d'une
indemnité destinée à réparer le préjudice subi par le régime du fait du changement de statut ou
(on peut le présenter de l'une ou l'autre des manières) à constituer les capitaux correspondant à
la rente acquise qui ne sera plus assurée par une cotisation. On peut imaginer que cette
indemnisation soit ponctuelle et événementielle ou qu'elle soit générale et permanente. Le code
de la sécurité sociale connaît les deux. Il y a toutefois une limite à ce raisonnement, liée au
volume des effectifs résiduels du régime des non salariés : l'indemnisation sera insuffisante s'il
n'y a plus d'actifs. Mais, justement, le patrimoine d'affectation peut faire refluer le nombre des
constitutions de sociétés.
b) Propositions.

1.- L'article L-651.1 du code de la sécurité sociale oblige les sociétés de capitaux à verser
0,10 % de leur chiffre d'affaires (lorsque celui-ci est supérieur à un seuil) aux régimes de non
salariés. Le caractère indemnitaire de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés
(dite «C3S»), évident à l'origine, a été remis en cause par la loi de finances de 1992. Les réserves
accumulées à ce titre ont été affectées au rééquilibrage du régime des agriculteurs. Non
seulement, ce texte a privé les régimes des non salariés du moyen de compenser les effets négatifs
pour eux de la constitution d'une société, mais encore, perdant son caractère indemnitaire, cette
contribution devient, de fait, un élément de la compensation inter-régimes, ce qui réduit sa
portée réelle d'indemnité destinée à réparer un préjudice lié à la fracture de la solidarité.
donc revenir sur cette disposition de pure opportunité, qui aura pour effet que, fin
1993, il n'y aura plus aucune réserve. Cette situation, de droit et de fait, constitue une menace
pour l'équilibre de ces régimes si le flux des constitutions de sociétés s'accentue. Ce n'est pas, au
demeurant, aux sociétés de capitaux de l'industrie et du commerce, de l'artisanat ou des
professions libérales à financer le déséquilibre du régime des agriculteurs, mais à la solidarité
nationale.
Par ailleurs, on peut s'interroger sur la justification du paiement de cette cotisation par les
SARL à gérance majoritaire dont les dirigeants continuent à relever du régime des non salariés.

2.- Le code de la sécurité sociale permet, en outre, que, si un régime supplémentaire existe
dans une profession, la société nouvellement constituée qui fait sortir le dirigeant de l'entreprise
du régime soit tenue d'acquitter une cotisation subséquente qui est en fait un capital étale sur
plusieurs années. La seule expérience de ce type de cotisation subséquente, qui, bien sûr, n'ouvre
droit à aucun avantage de retraite puisqu'elle est destinée à réparer le préjudice subi par le
régime du fait du changement de statut social du dirigeant de l'entreprise, concerne la profession
du bâtiment. Elle n'est pas, loin s'en faut, convaincante.
Le principe en est cependant intéressant, d'autant qu'il est tiré de la technique actuarielle. La
menace que fait courir, dans un régime par répartition, la sortie d'un béneficiaire en cours
d'acquisition de droit est écartée si, au moment de la sortie du régime, est versé le capital
destiné à consolider les droits au titre de la période validable. Une telle contribution, appliquée
aux régimes de base, serait, en outre, un moyen de dissuader le recours excessif à la sociéte de
capitaux. Elle doit, au minimum, être généralisée à tous les régimes complémentaires
obligatoires.

3.- L'indemnisation n'étant pas, à elle seule, suffisante pour maintenir attractifs les régimes
de non salariés, dès lors que les effectifs risquent de diminuer, il serait sans doute souhaitable de
procéder à une étude de la faisabilité, au plan tant technique que juridique, de l'instauration du
choix, pour un ancien entrepreneur devenant salarié par suite de la transformation de la situation
juridique de l'entreprise, d'opter soit pour le régime général soit pour le maintien du régime des
non salariés. En raison du caractère d'ordre public attaché à la notion de régime par la
jurisprudence, il est considéré par le ministère de la Sécurité sociale qu'un tel choix n'est pas
possible. Il est cependant à noter que cette notion ne relève pas de la Constitution. Dans cette
perspective, le choix devrait porter sur l'ensemble des risques.

3°/ - Eviter les requalifications abusives.

Selon l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale, relève du régime général de la sécurité
sociale la personne physique qui se trouve en situation d'employé à l'égard d'un employeur, quel
que soit son statut. La redaction de cet article autorise une définition plus large du salarié au
plan du droit de la sécurité sociale que celle qui prévaut pour la notion de contrat de travail, au
plan du droit du travail. Elle ne justifie pas pour autant l'interprétation très extensive, mais qui
régresse depuis peu, de la Cour de Cassation pour laquelle seule suffit, pour relever du régime
général, la participation à un service organisé, ce qui conduit à l'assujettissement de personnes
liées par un contrat d'entreprise, tels que franchisés ou sous-traitants qui ont, cependant, choisi
déliberément le statut de non salarié.
Cette situation doit cesser :
- d'une part la requalification en salaire n'a plus socialement d'intérêt dès lors que le niveau
de la protection sociale légale des non salariés est similaire à celui des salariés ;
- d'autre part l'impossibilité, en cas de contrôle, de faire rétroagir les effets de la
requalification au niveau des prestataires a conduit la Cour de Cassation à n'appliquer le régime
des salariés que pour le futur. Cette solution méconnaît le caractère d'ordre public des régimes
de protection sociale, ordre public qui justifierait la rétroactivité dans la limite des délais de
prescription.
On ne peut, en conséquence, qu'inviter le législateur à écrire autrement l'article L-311.2
pour rapprocher davantage la notion de salarié en droit de la sécurité sociale de celle qui prévaut
en droit du travail, même si, par l'article L-311.3, les dirigeants de sociétés de capitaux doivent
continuer à relever du régime général.

4°/ - Le statut du conjoint.

La taille, généralement modeste, des entreprises individuelles comme l'unicité de patrimoine


ont pour conséquence que, très souvent, le conjoint exerce une activité aux côtés du chef
d'entreprise. Son statut mérite d'autant plus d'être affiné que, en cas de dissolution des liens du
mariage, il est susceptible de se trouver en difficultés et, notamment, de ne pas bénéficier, dans le
domaine de la protection sociale, des fruits de son travail au profit de l'entreprise. La nécessité
de doter le conjoint d'un statut est encore renforcée si, du fait de l'affectation du patrimoine,
l'entreprise est distinguée de celui qui la gère.
a) On voit mal, en conséquence, ce qui justifie un traitement fiscal différent au regard des
charges déductibles de l'exploitation, des salaires du conjoint lorsque celui-ci est titulaire d'un
contrat de travail entre la situation de droit commun -pour laquelle la déductibilité est limitée à
17.000 F par an- et le cas de l'adhésion à un centre agréé où celui-ci est limité à vingt quatre fois
le SMIC. Dès que la réalité du contrat de travail est indiscutable, la seule solution équitable est
l'imputation de la totalité de la rémunération dans les charges normales d'exploitation, solution
en vigueur si l'entreprise est en société ou en cas de séparation de biens. A tout le moins, doit
être généralisée la solution applicable lorsque le chef d'entreprise a adhéré à un centre de gestion
agrée, le plafond actuel (136.200 F en 1992) devant, en tous cas, être augmenté.
b) L'instauration, dans le code de la sécurité sociale, d'un régime de retraite auquel peut
accéder, à titre volontaire, le conjoint est une initiative qui ne peut qu'être approuvée. Outre
qu'elle permet, en raison de l'assistance bénévole apportée au chef d'entreprise, une amélioration
du niveau de protection sociale du couple, l'existence d'un droit autonome du conjoint lui
permet de conserver le bénéfice de prestations retraite quelle que soit sa situation familiale, y
compris si les liens du mariage sont rompus par décès ou divorce. Une information rationnelle
sur ce régime doit être mise en oeuvre, en raison du nombre très faible de conjoints y ayant
souscrit.

III. - LE RENFORCEMENT
DE LA CAPACITE FINANCIERE DE L'ENTREPRISE

Quelle que soit sa forme juridique, la petite entreprise manque de fonds propres. Sa fragilité,
qui en découle, est aggravée dans des périodes de grandes difficultés économiques, comme celles
que nous connaissons actuellement. Par voie de conséquence, elles ne peuvent que difficilement
résister aux difficultés de leurs clients, que celles-ci se traduisent par l'augmentation des délais de
paiement ou par leur dépôt de bilan. Il faut donc sérieusement s'inquiéter du renforcement de
leur capacité financière. Mais il faut ici nécessairement distinguer les entreprises exploitées en
nom personnel et celles qui, bien qu'unipersonnelles, sont constituées en sociétés.

1°/ - Les entreprises exploitées en nom personnel.

Les difficultés financières de l'entreprise individuelle sont liées à un faisceau de causes :


l'absence de distinction entre l'entreprise et celui qui la gère en est une, en raison des
comportement qu'elle induit ; le système d'imposition également qui ne facilite pas la
conservation d'une partie des bénéfices pour les affecter à la pérennisation de l'entreprise ; la
relation avec les banques, souvent réticentes, pour ce type d'entreprises, à accorder des crédits à
long et moyen termes, sauf en cas d'intervention d'une société de cautionnement mutuel. Si les
investissements nécessaires sont financés par de la trésorerie ou du crédit à court terme, leur coût
pèse trop lourdement sur l'exploitation et toute déviation par rapport aux prévisions devient
fatale. Au demeurant, les petites entreprises ne disposent pas suffisamment de trésorerie non
plus, autre source de défaillances. C'est particulièrement net en période de récession économique
par les effets des allongements des délais de paiement. Les facilités nées de la loi DAILLY ne sont
sans doute bénéfiques que lorsqu'elles sont utilisées de façon événementielle ou temporaire. Il
serait souhaitable de mener une réflexion sur le «bordereau Dailly» dont le formalisme simplifié
facilite les multiples mobilisations et rend délicate l'identification des créances cédées.

a) Améliorer le dispositif d'aide à la création.

Le taux de mortalité des entreprises nouvellement créées est très élevé au cours des trois
premières années. Il est d'autant plus indispensable d'inciter à affecter un montant suffisant -sous
forme de biens affectés ou de numéraire- à l'entreprise que les aides extérieures s'élèvent à plus
de quarante mille francs. Un créateur doit engager sa responsabilité personnelle, ce qui justifie un
«capital» nettement supérieur à ce seuil. Il convient, toutefois, de souligner que la nécessité de
disposer de fonds propres ne se pose pas de manière identique pour tous les types d'activités. Les
accords sur l'essaimage -il s'agit de dispositifs mis en place, la plupart du temps, dans le cadre de
plans sociaux à l'occasion d'une procédure de licenciement économique et pour en atténuer les
effets ; ils visent à favoriser le départ volontaire de certains salariés en facilitant la création
d'entreprises sous forme d'aide financière- gagneraient en efficacité si était organisé un suivi
pendant la période délicate des premières années, grâce à la formation et au conseil. Les actions
des chambres, tant de commerce que des métiers, dans ce domaine sont à souligner, de même
que les mesures -d'ordre fiscal et autres- prises par l'Etat, qui doivent être, par souci de plus
d'efficacité, organisées dans un ensemble cohérent en fonction d'un objectif général précis.

Le dispositif CIFA (contrat installation formation artisanale) qui s'adresse à des demandeurs
d'emplois jeunes repose sur :
- un conseil au niveau du projet,
- une formation pratique en entreprise, de gestion (200 heures minimum) et d'initiation aux
nouvelles technologies, le cas échéant.
La formation est de 1.000 heures maximum au total.
- un suivi.
Le taux de survie des entreprises bénéficiant de ce dispositif est nettement supérieur au taux
moyen de survie des entreprises.
Limité à l'origine (1980) à la zone pyrénéenne, le dispositif a été élargi progressivement. Il
concerne la France entiere depuis 1987.
Même si leur nombre est modeste, en raison d'une faible publicité et de quelques lourdeurs
en voie de correction, les CIFA démontrent qu'une installation bien mûrie et une formation, dont
200 heures minimum de gestion, sont une garantie.

b) Distinguer le revenu disponible du revenu réinvesti.

Il conviendrait d'explorer la voie consistant à distinguer la partie du bénéfice consommé


(revenus disponibles) de celle qui est réinjectée dans l'entreprise pour assurer sa pérennité et son
développement (renouvellement de matériel, investissements nouveaux, financement des stocks).
La première serait imposée à l'impôt sur le revenu dans des conditions ordinaires ; la seconde
ferait l'objet d'un traitement fiscal -et donc social- par le biais d'une déduction pour
autofinancement qui pourrait prendre la forme d'un amortissement accéléré. Un mécanisme de
cette nature existe déjà en agriculture. Il conviendrait de lui donner une plus grande ampleur.
Ces mesures doivent, en particulier, contribuer au renforcement des entreprises en milieu rural,
de sorte qu'il n'y ait pas de discordance entre ces entreprises et celles relevant du statut de
l'entreprise agricole.
c) Les fonds propres.

Les entreprises individuelles n'ont pas de capital au sens du droit des sociétés, mais dans une
entreprise individuelle le capital engagé dans l'entreprise est à tout moment égal au solde
créditeur du compte personnel de l'exploitant. La difficulté essentielle posée par la jurisprudence
et la doctrine administrative concerne donc les charges financières afférentes à des prêts ou
avances non assimilables à des découverts, par exemple des emprunts bancaires nécessités par le
développement de l'entreprise dont les frais financiers pourront être réintégrés. La conséquence
pratique de cette réintégration est la sanction des entrepreneurs qui effectuent des
investissements financés par des emprunts pour accroître le potentiel économique de leur
entreprise, créer des emplois, alors que les entrepreneurs ayant recours au crédit-bail ne sont pas
sanctionnés par cette réintégration !
Afin de ne pas freiner le développement des entreprises individuelles, notamment par une
distorsion selon les modes de financement effectués, il est proposé, lorsque le compte personnel
de l'exploitant présente un solde débiteur, la réintégration d'intérêts calculés à un taux égal à la
moyenne annuelle du taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées.
Par ailleurs, il conviendrait de rendre plus exceptionnel le recours aux cautions du conjoint,
dont l'autonomie de volonté est réduite pour des considérations aussi bien d'ordre moral que de
dépendance économique.

d) Une autre voie possible consisterait à étendre les mécanismes de déduction pour
investissement, tel que celui autorisé par l'article 72 D du code général des impôts, aux
conditions d'objet (notamment pour favoriser l'innovation technologique), de durée et de
plafond, sous peine de réintégration, similaires à celles instaurées depuis le 1er janvier 1986 dans
le secteur agricole.
Toutefois, la phase de développement étant très gourmande en fonds propres, il serait
souhaitable de prévoir un aménagement de la fiscalité frappant l'apport en numéraire.
e) La séparation du patrimoine correspondant à l'entreprise ne peut enfin qu'inciter
fortement à accorder à l'exploitant individuel la possibilité d'opter pour l'assujettisement à
l'impôt sur les sociétés du bénéfice de celle-ci. Cette proposition figure, au demeurant, dans les
conclusions du comité de réflexion, présidé par M. RUDING ; elle a été approuvée par la section
des affaires économiques, financières et monétaires du Comité économique et social des
Communautés européennes (ECO/159 du 19 novembre 1992). L'effet d'une telle mesure serait
triple :

- elle contribuerait à la personnalisation juridique de l'entreprise, mettant ainsi à parité les


différentes formes d'exploitation ;
- elle satisferait à la revendication du salaire fiscal de l'exploitant individuel ;

- elle faciliterait la constitution de fonds propres, donc la pérennité de l'entreprise.

2°/ - En cas de transformation en société.

a) L'augmentation substantielle du capital social de la SARL et, par voie de conséquence, de


la SA est de nature, d'une part à éviter le recours à la technique sociétaire lorsqu'elle ne se
justifie pas fondamentalement, d'autre part à créer des fonds propres suffisants. Il ne s'agit plus
d'une mesure dissuasive à la création d'entreprise dés lors que, grâce au patrimoine affecté,
l'entreprise en nom personnel se distingue aussi de celui qui la gère.
Dans cette perspective, il serait sans doute souhaitable de revoir le droit des SARL pour le
rendre plus attrayant (en particulier en ce qui concerne le statut social des gérants), d'autre part
d'explorer la voie d'une société anonyme simplifiée, à propos de laquelle des travaux sont en
cours au sein de la Communauté.
b) La double nécessité d'améliorer la trésorerie et d'investir oblige à rechercher une
alternative au recours onéreux au système bancaire par l'incitation à laisser une partie des
bénéfices d'exploitation dans l'entreprise. Cette proposition s'inscrit dans la logique de la
réflexion amorcée par le Conseil économique et social -dans son avis adopté le 26 février 1986
sur le rapport de M. Jean-Pierre AUBERT relatif aux prêts et aides aux entreprises-, sur la réduction
des différences des régimes d'imposition des charges financières relatives à des emprunts d'une
part, des dividendes d'autre part.
- La
quasi-impossibilité des entreprises, petites et moyennes en général, en nom personnel en
particulier, de recourir aux emprunts obligataires rend indispensable que, d'une part la fiscalité
des comptes d'associés de sociétés soit rapprochée de celle desdits emprunts, d'autre part les
revenus des sommes laissées dans l'entreprise en nom personnel pour améliorer leur trésorerie
soient soumis à une taxation privilégiée. Une proposition allant dans le même sens a déjà été
formulée par le Conseil économique et social dans le cadre du rapport de M. Jean-Marie ROBERT
sur l'entreprise en création ou en croissance, adopté le 11 janvier 1989.
. Il faudrait, surtout, explorer les voies d'un impôt progressif permettant un développement
plus harmonieux des PME, à l'image de ce qui se passe ailleurs, notamment dans différents pays
voisins dans la Communauté Européenne. On ne peut que rappeler, à ce sujet, l'avis du Conseil
National des Impôts dans son neuvième rapport (de 1987) lequel souligne : «La France est le seul
des pays examinés à utiliser un taux unique d'impôt sur les sociétés quels que soient la taille de
l'entreprise et le montant de son bénéfice». Compte tenu de l'avoir fiscal à 100 %, l'impôt
inférieur à 33 1/3 % serait un facteur important d'incitation à l'autofinancement, donc un moyen
de valorisation de l'entreprise plutôt que de profit pour son dirigeant. Il conviendrait de procéder
a des simulations sur les modalités, l'impact et le coût d'un tel système.
c) Mieux mobiliser l'épargne de proximité

. Les sociétés de capital risque n'ont jusqu'ici pas apporté de solution à ce problème. Les
informations recueillies indiquent que l'offre de capitaux est supérieure à la demande. Les raisons
en sont simples : la réticence des chefs d'entreprise à ouvrir leur capital parce qu'ils craignent de
perdre leur indépendance ; l'importance du risque qui a pour conséquence un rendement
dérisoire quand il n'est pas négatif. C'est donc en fonction d'autres motivations que se
déterminent ceux qui s'intéressent à ce type d'activités, en particulier en considération de
l'intérêt général, matérialisé par la fonction sociale de l'entreprise en général, des petites en
particulier.
Les sociétés de capital risque sont, cependant, l'un des moyens de donner aux entreprises
en
nom personnel les fonds propres qui leur font défaut. La collecte de l'épargne de proximité
-qu'elles permettent- n'est cependant possible que si :
- l'entrepreneur est suffisamment et clairement informé ;
- l'épargnant y trouve un intérêt réel. A défaut d'un rendement suffisant de l'argent placé,
totalement exclu dès lors que les entreprises bénéficiaires sont un tissu économique à risque, cet
intérêt doit se trouver dans l'incitation fiscale. Celle-ci se justifie pleinement dès lors qu'est
constaté que ces entreprises petites sont un gisement d'expansion économique et d'emploi. Le
Conseil économique et social recommande, en conséquence, que soit accorde un crédit d'impôt
correspondant à tout ou partie de l'investissement réalisé sous cette forme. Celui-ci doit
également être conditionné à une durée relativement longue de maintien de l'argent dans
l'entreprise ;
- des méthodes de protection de l'investisseur sont instaurées. Elles pourraient prendre la
forme d'un système d'information sur la marche de l'entreprise, les prévisions et les résultats de
l'exploitation, ainsi que sur la réalité du patrimoine affecté, actualisé. Un tel système
d information aurait, en outre, l'immense mérite d'avoir un effet pédagogique en obligeant le
dirigeant à dissocier son intérêt personnel de celui de l'entreprise ;
- une garantie ou un cautionnement mutuel sont mobilisés en faveur des apporteurs de
capitaux. Il convient en outre que le retour d'investissement se fasse sur une période
suffisamment longue et d'éviter les réalisations de plus-values trop rapides afin de préserver
l'équilibre financier de l'entreprise qui se crée ou qui se développe.
Pour donner plus de fluidité aux participations, on pourrait envisager, pour les PME,
d'émettre des titres participatifs -réservés aux sociétés par actions du secteur public et aux
sociétés anonymes coopératives- ou, pour les entreprises en création, des actions à dividende
prioritaire. Le régime fiscal pour les titres participatifs pourrait être assimilé à celui des
obligations (déductibilité pour l'entreprise, prélèvement libératoire de 16 % pour le bénéficiaire).

On observe que les fonds de cautionnement mutuel professionnels sont moins que dans le
passé en mesure de jouer le rôle important de mutualisation des risques qu'ils avaient assumés
avec succès jusqu'à ces dernières années. Dès lors, il conviendrait que l'Etat renforce encore de
façon substantielle les moyens d'intervention de la SOFARIS et surtout en élargisse les conditions
d'éligibilité encore trop restrictives.
. Une solution alternative serait de mettre en place un système du type de celui en vigueur
en Belgique pour compenser le manque de garanties. Il faut instaurer un fonds légal de garantie
sous forme de cautionnement destiné à se substituer aux sociétés classiques et octroyé en fonction
de l'honorabilité du travailleur indépendant et de son projet d'entreprise. C'est, au demeurant,
un moyen de valoriser le concept d'ethique de la fonction entrepreneuriale.

3°/ - Protéger l'entreprise contre les aléas.

L'incapacité de travail du dirigeant -qu'elle soit temporaire et de durée moyenne ou longue


ou qu'elle soit permanente- fait courir de graves dangers à l'entreprise unipersonnelle en raison
du très fort intuitu personae du management. Il faut largement développer les contrats
d'assurance communément appelés «hommes clefs», dont les primes sont une charge déductible
du Bic (bénéfice industriel et commercial) ou de l'impôt sur les sociétés et dont, de ce fait, les
rentes allouées en cas d'arrêt de travail sont un produit fiscalisable, mais qui permettent de
garantir la survivance de l'entreprise.
On ne peut, de même, que déplorer le pourcentage modeste d'entreprises ayant souscrit un
contrat de pertes d'exploitation dont la conclusion doit être considérée comme un acte normal de
gestion.

IV. - LA TRANSMISSION DE L'ENTREPRISE INDIVIDUELLE

Le choix de n'admettre la distinction de l'entreprise de celui qui la gère qu'au travers de la


technique sociétaire et non par celle du patrimoine d'affectation est aussi un facteur d'inégalité
fiscale en cas de transmission de l'entreprise individuelle. En effet, celle-ci n'est pas alors
considérée en tant qu'entité économique, intéressant, à ce titre, des tiers, des créanciers,
notamment le personnel, ayant vocation à avoir une vie propre avec des objectifs particuliers qui
concernent tous les partenaires, mais seulement comme un bien, élément d'un patrimoine
indivisible. De même, l'impossibilité de distinguer le patrimoine privé et celui de l'entreprise
interdit la mise en oeuvre de moyens de financement adaptés à l'acquisition ou la transmission de
l'outil de travail.
La transmission de l'entreprise est un cap difficile, non point tellement parce que les
difficultés d'ordre juridique ou fiscal changent de nature par rapport à celles que l'entreprise doit
affronter au cours de son activité, mais parce qu'il s'agit d'un moment spécifique qui n'est pas
toujours perçu, et c'est dommage, comme un acte normal de gestion, tant par les chefs
d'entreprise eux-mêmes que par les pouvoirs publics.
La nécessité de prendre, en ce domaine, une décision rapide est renforcée au constat que,
d'une part une partie significative des défaillances des entreprises est liée à un problème de
transmission, d'autre part un nombre élevé d'entreprises fera l'objet, dans les prochaines années,
de transferts. L'enjeu est important en matière d'emploi. Le coût de la transmission, déjà
anormalement élevé en soi, peut -seule l'entreprise assurant, de fait, le paiement de l'impôt qui la
frappe-, fragiliser sa situation financière et, par voie de conséquence, amputer sa substance. La
solution du patrimoine affecté, pièce centrale du présent avis, permet, parce qu'elle distingue
l'entreprise au nom personnel de celui qui la gère, d'ouvrir des pistes intéressantes au niveau des
moyens de financement de la transmission.
Le coût de la transmission est près de trois fois plus élevé en France qu'au Royaume-Uni et
pas loin de quatre fois plus élevé qu'en Allemagne, sans oublier la donation qui peut aboutir à un
coût nul en Angleterre et en Belgique dans le cas du don manuel. Le coût de la succession
représente ainsi une fraction très minoritaire des profits en Allemagne et au Royaume-Uni, alors
qu'en France il ressort qu'il en accapare la majorité.

1°/ - La taxation des plus values.

Le jour où l'entrepreneur individuel cède son exploitation, il est fait l'inventaire des plus
values réalisées. Celles-ci sont taxées au taux de droit commun de l'impôt sur le revenu pour
toute la part de leur montant qui correspond aux amortissements antérieurement déduits. Tout
au plus existe-t-il une exonération en faveur des exploitants dont le chiffre d'affaires n'excède pas
le double de la limite d'application du forfait (soit un million de francs environ). La neutralité
fiscale a existé, toutefois, jusqu'en 1980. Elle a été supprimée le jour où a été inventée la
neutralité en cas d'apport en société des actifs de l'entité économique. Il s'agit, là encore, d'une
incitation à passer en société, nonobstant le caractère positif de la mesure.
La logique de l'entreprise distincte de celui qui la gère, appliquée aussi bien à l'exploitation
individuelle qu'à la société, justifie que l'on privilégie la permanence de l'entreprise comme fait
juridique déterminant. Le droit du travail, au travers de l'article L. 122-12, 2ème alinéa du code
du travail, véritable définition de l'entreprise dans le temps, prend en compte cette permanence.
Par exemple le décès de l'exploitant n'est pas, compte-tenu de cette logique, un cas de force
majeure susceptible d'imposer la rupture de plein droit des contrats de travail.
Le principe de permanence de l'entreprise exige alors la neutralité intégrale des plus values
-et le report de leur taxation chez le nouvel exploitant- lorsque l'entreprise en nom personnel est
cédée. Une telle disposition, outre qu'elle contribuera à l'égalité fiscale, ne pourra que réduire les
difficultés importantes rencontrées par les entreprises au moment de leur transmission, difficultés
qui peuvent conduire à leur perte. Pour éviter tout dévoiement, cette absence d'imposition
pourrait être subordonnée à l'assurance de la continuation de l'entreprise, par exemple à une
exigence d'exploitation pendant une certaine durée.

27 - Le régime des droits de mutation.

a) En cas de vente.

Les cessions d'actions de sociétés anonymes peuvent échapper à tout droit de mutation et
celles de parts de SARL sont soumises à un droit de 4,8 %. Au contraire, le prix de vente d'une
entreprise en nom personnel est taxé à 14,20 % (certes avec un abattement) et même à 16,60 %
pour les biens immeubles.
Il y a, là encore, une incitation forte à la constitution de sociétés, de préférence lourdes
(sociétes anonymes), même si, par la nature de l'activité, la taille de l'entreprise ou le niveau des
résultats, les lourdeurs nées d'un formalisme inadapté et les coûts indirects en découlant sont
susceptibles de compromettre ensuite l'efficacité de la gestion.
La seule solution équitable est l'extension de celle en vigueur pour les sociétés anonymes à
toutes les formes d'exploitation. A tout le moins, les entreprises en nom personnel devraient
pouvoir prétendre à un alignement de leur situation sur celle des SARL (droit de 4,80 %), au
besoin moyennant l'engagement des successeurs de poursuivre l'exploitation pendant un certain
temps.

b) En cas de succession.

La donation-partage française n'apporte pas un véritable remède aux différences constatées


avec les solutions en vigueur dans les autres pays, puisqu'elle ne remet pas en cause les ordres de
grandeur. Elle est néanmoins une solution à exploiter, ceci d'autant que des dispositions
spécifiques ont été adoptées pour la donation-partage de l'entreprise. Celles-ci s'appliquent
notamment aux entreprises individuelles malgré le principe de l'unicité du patrimoine. L'intérêt
de la formule est accru par son extension récente, pour les entreprises individuelles, au cas de
donation à d'autres personnes que les enfants. En pareil cas, la soulte versée aux enfants
n'entraîne pas l'exigibilité des droits de mutation à titre onéreux.
Il faut donc informer les entrepreneurs, largement et suffisamment tôt, de ces possibilités
ainsi que du rôle efficace que peut avoir, en ce domaine, l'assurance-vie, dès lors que les
capitaux-décès, parce qu'ils entrent dans le patrimoine du bénéficiaire dès la conclusion du
contrat, ne sont pas taxes.
En cas de décès sans préparation de la succession, la transmission aux héritiers est souvent
compromise par le coût fiscal de la succession qui incite au recours à la société de capitaux ou à
l'abandon de l'exploitation. Quelles que soient les conditions de l'exploitation future, celle-ci sera
compromise par l'impréparation des successeurs, aggravée par l'insuffisance des investissements
et de fonds propres liée au coût de la transmission et à la réticence des fournisseurs, des clients,
des banquiers. Il faut donc considérer les contrats d'assurances temporaires prévoyant un capital
en cas de décès, comme étant liés à la perte d'exploitation. Le sinistre n'est plus, ici, celui des
biens comme en cas d'incendie, mais liés aux aléas de la vie humaine. Dès lors que, en
conséquence, les capitaux sont affectés à l'exploitation de l'entreprise -ce qui peut aisément faire
l'objet d'une clause du contrat-, les primes destinées à les financer doivent être considérées
comme une charge venant alors en déduction, pour le paiement de l'impôt, de l'assiette des
revenus professionnels. L'affectation du patrimoine permettra aisément de désigner l'entreprise
comme bénéficiaire, même en l'absence de personne morale, d'autant que l'incidence principale
de cette désignation sera d'ordre fiscal, le droit connaissant ici l'entreprise, même en nom
personnel.

3°/ - L'incitation à une meilleure transmission.

La cession de l'entreprise à la date à laquelle son dirigeant part en retraite est souvent
dramatique par manque de préparation. Des mesures ont été adoptées, dans les sociétés, qui
permettent d'inciter à une préparation de la succession suffisamment tôt. Ce sont, au plan de la
transmission du capital, les offres de souscription ou d'achat d'actions (dites «stock options») et
le régime de rachat de l'entreprise par ses salariés (RES). C'est aussi, au plan juridique, la société
à directoire, qui permet au fondateur de quitter la direction de l'affaire tout en la contrôlant
poste de président du conseil de surveillance. Rien de semblable pour les entreprises individuellesau
et pour cause puisqu'on ne considère pas l'entité économique autrement que comme une partie
des biens du patrimoine indivisible de la personne qui l'exploite. Et, pourtant, ce type
d'entreprises, en raison notamment de l'intuitu personae très grand, est encore plus fragile
qu'une société à l'occasion d'un changement de dirigeant. Il faut donc trouver des méthodes qui
incitent à anticiper la décision de transmission et qui la préparent, tout spécialement la
formation des hommes et des femmes appelés à assumer ultérieurement la responsabilité de par
l'entrepreneur, et par la préservation des fonds propres et de la trésorerie susceptibles d'être
menacés par le rachat de l'entreprise.
Il serait intéressant d'explorer l'idée d'un pacte, conclu quelque cinq années avant la date
prévue pour le départ (en retraite la plupart du temps), par exemple dans le cadre d'une
association en participation. Aux termes de cette convention, l'exploitant serait tenu de former
son successeur, notamment sous la forme de la transmission de son savoir-faire, de le rémunérer
pour son travail dans le cadre d'une répartition des bénéfices et le moment venu de lui céder
l'exploitation.
En contrepartie, le successeur pressenti s'engagerait à garantir, moyennant une réduction,
voire la suppression du prix normal de vente de l'affaire, une rente viagère sur une ou deux têtes,
laquelle pourrait être gagée par la constitution d'un capital sous forme de primes versées
franchise d impôt pendant les années précédant la date de cession dans le cadre d'un contrat en
d 'assurance. Ainsi, l'entreprise, considérée comme une entité distincte de celui qui la gère
malgré l'exploitation en nom personnel, acquitterait le prix de la cession, permettant ainsi
au
successeur de ne pas obérer ses chances de réussite par une impossibilité d'investir en raison du
poids financier en résultant. Pour éviter tout abus, on peut concevoir que cet avantage fiscal
serait définitivement acquis que si le successeur exploite le fonds pendant une durée minimale. ne
De même, il serait intéressant de s'inspirer des propositions du rapport présenté
M. CORMORECHE dès 1987 sur la transmission des exploitations agricoles,
par
en reprenant
notamment l'idée du plan de transmission.

4°/ - Les facilités de retour à l'exploitation individuelle.

L'adoption de la technique du patrimoine affecté aux côtés de la technique sociétaire pour


séparer
^ l'entreprise de celui qui la gère et comme technique d'organisation de l'entreprise est une
manière d'éviter, pour le futur, la constitution de sociétés fictives de capitaux. Au moins pendant
une période limitee dans le temps, il serait logique que soit alors favorisé le retour de sociétés à
responsabilité, dont l'utilité ne serait pas prouvée par la taille, la nature de l'activité ou la
presence effective de plusieurs associés, à la forme d'exploitation en nom personnel, notamment
par l'absence totale de plus values à l'occasion de l'opération juridique de liquidation de la
société. Cette orientation a déjà été suggérée par le Conseil économique et social dans son avis
adopté le 4 juillet 1984 sur le rapport de M. LE BAUD sur «La transmission de l'entreprise en cas
de succession».

V. - AU PLAN DES DROITS DU PERSONNEL

Il n'y a pas, en ce domaine, de spécificité de l'entreprise individuelle, hormis en qui


ce
concerne la représentation du personnel. Cependant, la quasi totalité des exploitations en nom
personnel sont des petites et même de très petites entreprises. Or, par les effets de seuils
notamment, les droits des salariés -essentiellement les droits collectifs- sont différents dans une
petite entreprise.
Deux sortes de réflexions s'imposent en la matière :
- La taille, généralement inférieure à onze salariés, ne permet pas au personnel de ces
entreprises de bénéficier d'une représentation collective dans l'entreprise. Les délégués de site,
créés par la loi du 28 octobre 1982, n'ont connu aucun succès, sans doute en raison de leur
compétence interprofessionnelle. C'est vraisemblablement dans le cadre professionnel, donc
le support conventionnel de branche, que doivent être imaginées les solutions permettant de par
pallier cet état de fait. Il faut alors prendre en compte que dans ce type d'entreprises, si la
position du délégué est plus vulnérable, le contact peut cependant devenir plus facile et qu'enfin
le problème du rôle des délégués ne s'y pose pas dans les mêmes conditions. Les commissions,
qui doivent obligatoirement etre créées par toute convention collective, d'interprétation et de
reglement des conflits collectifs peuvent, à conditions d'être aménagées, remplir une telle
mission. Au demeurant, cela existe dans certaines conventions collectives. L'avis adopté par le
Conseil économique et social sur le rapport de M. CALANDRA le 25 novembre 1992, preconise en
outre une information annuelle sur l'activité économique, dans un cadre informel, des salariés de
ce type d'entreprise.
- La loi n'autorise pas, tout au moins pour une convention susceptible d'extension, la
limitation de son champ d'application en fonction de la taille. Même si le niveau des avantages
conventionnels peut difficilement être conditionné par le volume des effectifs, certaines
dispositions relatives aux conditions de travail et aux garanties sociales pèsent plus lourdement
sur les petites entreprises dès lors que le poids effectif en est doublement aggravé par l'incidence
des normes sur l'organisation du travail et par l'impact plus grand des situations événementielles
créatrices de ces avantages. Par exemple, 1 application d'un accord de mensualisation a un coût
relatif plus élevé pour une petite entreprise en cas de maladie d'un salarié. C'est alors dans la
mutualisation que doivent être trouvées les solutions qui permettent de réguler sur l'ensemble de
la profession le coût effectif des avantages conventionnels, que ceux-ci consacrent l'ancienneté ou
une situation événementielle (indemnisation de la maladie, indemnités de départ en retraite, droit
à la formation, etc.).

Par la négociation collective de branche, il est dès lors possible d'apporter des solutions à la
nécessaire adaptation du statut collectif et individuel des salariés dans les petites entreprises.

D'une façon générale, le Conseil économique et social souhaite que dans les petites
entreprises, l'attention soit portée :
- sur l'application des conventions et accords collectifs,
- sur un effort de dialogue et de concertation avec les représentants du personnel,
- sur un intéressement des salariés aux résultats.
CONCLUSION
L'ÉTHIQUE DE LA FONCTION DE CHEF D'ENTREPRISE

Considérer que l'entreprise a une fonction sociale en même temps qu'elle est source de
revenus pour l'exploitant rend indispensable qu'en conclusion de cette étude, soit développée une
réflexion sur le comportement de chef d'entreprise. Celle-ci s'impose, en effet, puisque
l'entreprise assume une mission d'intérêt général et que son activité conditionne les équilibres
économiques et sociaux. Cela rend indispensable que soit privilégié l'intérêt de l'entreprise sur
celui, personnel, du dirigeant. La séparation du patrimoine affecté à l'activité économique ne
peut qu'y contribuer.
La notion d'intérêt général de l'entreprise implique que la décision de gestion soit arrêtée en
considération des intérêts catégoriels, non pour déboucher sur un compromis mais pour une
meilleure information de l'entrepreneur sur la situation et les enjeux susceptibles d'optimiser les
choix. Dans cette perspective, ce qui est essentiel à la valorisation de la fonction sociale de
l'entreprise, c'est la recherche prioritaire de sa pérennité. La création de l'entreprise a, en effet,
un cout pour la collectivité, lequel n'est amorti que grâce à sa longévité. Les vicissitudes
juridiques ou économiques de l'entreprise s'accompagnent, certes, de traumatismes, mais le
préjudice n'est pas immense si l'entreprise continue à vivre car elle a vocation naturelle à
prospérer. Au contraire, sa disparition est à la fois source de désordres en chaîne et d'un coût
irréversible pour la société.
Privilégier l'intérêt de l'entreprise est affaire d'abord de culture, donc d'éducation. Doit-on,
en fonction d'un tel constat, subordonner l'exercice de la fonction de chef d'entreprise à une
formation ? Certains le pensent et espèrent y trouver la réponse au nombre trop élevé de
défaillances au cours des premières années qui suivent la création de l'entreprise. Cette voie, si
séduisante soit elle, doit être explorée, cependant, avec circonspection. Dans un pays de liberté,
l'accès à la fonction de chef d'entreprise doit demeurer libre d'autant que, dans les civilisations
modernes, les activités de l'homme sont de plus en plus conditionnées à la possession d'un
diplôme. L'exigence de diplôme est incompatible avec la liberté d'entreprendre. Mais la société
doit cependant veiller à la compétence de celui qui crée une entreprise, eu égard à la fonction
sociale de celle-ci. C'est alors en suscitant le réflexe du besoin de connaissance que doit être
développée la formation.
Les différentes disciplines qui constituent le droit de l'entreprise contribuent au
développement d'un comportement irréprochable de l'entrepreneur ; les normes qu'elles édictent
ne sauraient, en effet, être transgressées sans sanction. Privilégier, en toute circonstance,
l'entreprise va, toutefois, bien au-delà. Il s'agit non seulement de respecter des textes impératifs
mais de se conformer à une morale fondée sur la fonction sociale de l'entreprise. Il s'agit donc
d'éthique. Peut-on, sans risque d'être poursuivi pour discrimination ou atteinte à la libre
entreprise, écarter, au nom de celle-ci, un membre d'une organisation patronale ? Peut-on
interdire l'accès à la création d'entreprise à celui qui aura trébuché sans que ce soit pour des
motifs frauduleux ? Le souci de la qualité professionnelle relève sans aucun doute de l'éthique.
Peut-on, pour autant, interdire de création d'entreprise pour incapacité ? Mais, à l'inverse, n'est-
il pas souhaitable que les tiers puissent disposer d'informations sur les débiteurs faillis, au moins
sur ceux ayant fait l'objet d'une interdiction de gérer ou de sanctions patrimoniales ? L'adhésion
des groupements patronaux à «Info-greffe» est, sans doute, un moyen de gérer cette information
sans pour autant porter atteinte aux libertés individuelles.
Aussi, si le principe du recours à une éthique de la fonction d'entrepreneur ne souffre pas de
difficultés, sa mise en oeuvre est beaucoup plus malaisée. Ce n'est pas une raison pour s'en
désintéresser. C'est d'abord aux organisations syndicales et institutionnelles de chefs d'entreprise
qu'incombe la responsabilité de s'en préoccuper.
ANNEXE A L'AVIS

SCRUTIN

SCRUTIN SUR L'ENSEMBLE DU PROJET D'AVIS

Nombre de votants 181


Ont voté pour
Ont voté contre
.............................................. 114
14
Se sont abstenus 53

Le Conseil économique et social a adopté.

ONT VOTE POUR : 114

-
GROUPE DE LA C.F.E.C.G.C. - MM. Cambus, Cros, Mlle Cumunel, MM. Insa, Marchelli,
deSantis.
-
GROUPE DE L'U.N.A.F. - MM. Bichot, Billet, Bordereau, Brin, Burnel, de Crépy,
Duffaure, Jacquet, Niol.
-
GROUPE DE L'AGRICULTURE. - MM. Amis, Bordeaux-Montrieux, Bouche, Cazalé,
Cazals, Compiègne, Cormorèche, Didierjean, Droulin, Fauconnet, Guézou, Guyau, Hamel,
Hervieu, Lapeze, Lapie, Ledru, Munet, Rigaud, Schaeffer.
-
GROUPE DES DEPARTEMENTS, DES TERRITOIRES ET DES COLLECTIVITES
TERRITORIALES A STATUT PARTICULIER D'OUTRE-MER. MM. Barrat, Hmeun, Jarnac,
-
Reux.
-
GROUPE DES ENTREPRISES PRIVEES. - MM. Bernasconi, Bocquet, Brana, Breuil-
Jarrige, Brunaud, Brunet, Brunier, Cambournac,1 Cerruti, Chesnaud, Chotard, Clément,
Dermagne, Fabre Jacques, Gauthier, Gilson, Lepâtre, Moreaud, Netter, P~rrotin, Périgot, Pinet,
Rebuffel, Salvanès.
- GROUPE DES ENTREPRISES PUBLIQUES. - MM. Aubert, Bidegain, Calandra, Mme
Chassagne, MM. Descoutures, Pecqueur, Rolant, Teillac.
-
GROUPE DE L'ARTISANAT. - MM. Bidaud, Buguet, Cabut, Delmas, Huet, Millet,
Paquet, Seassari.
-
GROUPE DES PERSONNALITES QUALIFIEES. - MM. Arrighi de Casanova, Castagnet,
Chaigneau, Delarue, Deleplace, Dubois, Mmes Frachon, Gadioux, MM. Lair, Legatte, Poujade,
Steg, Vandier, Vignau.
-
GROUPE DE LA COOPERATION. - MM. Ballé, Chambaud, Courtois, Espagne, Marchai,
Morel, Pétrequin, Remaury, Verdier, Zaegel.
-
GROUPE DES REPRESENTANTS DES FRANCAIS DE L'ETRANGER, DE L'EPARGNE
ET DU LOGEMENT. - M. Lefort.
-
GROUPE DES ASSOCIATIONS. -
MM. Bastide, Coursin, Guénée, Mme Mengin, M.
Paillou.
-
GROUPE DES PROFESSIONS LIBERALES. - MM. Barthélémy, Beaupère, Legros.
-
GROUPE DE LA MUTUALITE. - MM. Mandinaud, Radelet.

ONT VOTE CONTRE : 14

GROUPE DE LA C.G.T. MM. Alezard, Pierre Blanchard, Decisier, Mme Duchesne, MM.
- -
Le Duigou, Lomet, Moulin, Obadia, Parrot, Potavin, Mme Rey, MM. Scat, Tournebise.
GROUPE DES PERSONNALITES QUALIFIEES. - M. Le Guen.
-

SE SONT ABSTENUS : 53

GROUPE DE LA C.F.D.T. Mlle Andreux, MM. Bury, Caries, Delaby, Dezeure, Hureau,
- -
Le Boterff, Lobjeois, Mennecier, Mme Ouin , Mlle Piazza, MM. Rabardel, Rougemont,
Rousselot.
GROUPE DE LA C.G.T.F.O. MM. Bouchet, David, Desrousseaux, Duffaud, Fabre
- -
Marcel, Gendre, MmeHofman, MM. Lamarque, Largeron, Lefebvre, Mertz, Raignoux, Roulet,
Vacherie.
GROUPE DE LA C.F.T.C. MM. Bergamini, Bornard, Drilleaud, Faki, Walter.
- -
GROUPE DE LA F.E.N. Mme Laroche-Brion, MM. Laxalt, Lecertua, Mme Morand.
- -
-
GROUPE DE L'AGRICULTURE. - M. Lemasle.
GROUPE DES PERSONNALITES QUALIFIEES. - MM. Andrieu, Beauchamp, Buard,
-
Charzat, Mme Delorme, MM. Delouvrier, Garcia, Girard, Henninot, Méraud, Raymond,
Schapira, Schwartz.
GROUPE DES REPRESENTANTS DES FRANCAIS DE L'ETRANGER, DE L'EPARGNE
-
ET DU LOGEMENT. - M. Courbey, Mme Nivoit-Cathala.
DÉCLARATIONS DES GROUPES

GROUPE DE L'AGRICULTURE
La crise économique aura eu au moins ceci de bon qu'elle nous aura fait découvrir que le
gigantisme a ses limites, que les millions d'entreprises individuelles constituent la toile de fond de
nos activités productives, le maillage économique de notre territoire, et une réserve d'emplois
inestimable à l'heure des grandes reconversions industrielles.
Mais si la réhabilitation de l'entreprise individuelle a déjà commencé dans les esprits, au
niveau de son statut juridique, social et fiscal, tout reste encore à faire.
Dans ce type d'entreprise, il existe, en effet, une étroite imbrication entre l'exploitation et
l'exploitant qui conduit à confondre les revenus du travail et les revenus du capital, à mélanger le
bénéfice réinvesti et le bénéfice disponible.

Cette situation est doublement dommageable :


* Il est néfaste pour l'économie d'un pays que les prélèvements fiscaux et sociaux frappent
indistinctement et uniformément la partie du bénéfice qui est consommée et la partie qui est
réinvestie. C'est une contre-incitation à la création de richesses et d'emplois.
a Il n'est pas acceptable que les entreprises soumises à l'impôt sur le revenu supportent des
prélèvements obligatoires plus importants que les sociétés de capitaux. Essentiellement parce que
les premières acquittent des cotisations sociales sur l'ensemble de leurs résultats, y compris les
revenus réinvestis, alors que les secondes supportent un prélèvement social sur les seuls revenus
du travail.
Cette situation précipite un grand nombre d'exploitants vers des formules sociétaires, lourdes
et coûteuses.
Quel type de solution peut-on préconiser afin que l'assiette fiscale et sociale des entreprises
personnelles soit un peu plus équitable ?
Il conviendrait d'opérer une distinction entre le revenu disponible et le revenu investi. La
partie du bénéfice laissee dans l'entreprise ferait l'objet d'un traitement fiscal et social spécifique.
Cette solution offre au moins deux avantages :
* on n'est pas dans le domaine du subjectif : la comptabilité permet de mesurer avec
précision l'effort d'investissement ou l'augmentation de valeur des stocks ;
* on peut s'appuyer sur un mécanisme qui existe : l'aide à l'investissement qui s'applique en
agriculture depuis 1987.
- Si nous réunissons nos efforts pour obtenir qu'un dispositif de cette nature soit étendu à
l'ensemble des entreprises personnelles,
- si nous obtenons que le mécanisme soit déplafonné,
- si nous obtenons enfin que la défiscalisation soit définitive dès lors qu'elle a pour
contrepartie un effort d'investissement,
Si nous avançons sur ces trois points, à défaut d'être spectaculaires, nous aurons été
efficaces, et un grand pas sera fait vers la définition d'un statut juridique et social adapté à la
situation de l'immense majorité des entreprises individuelles.
GROUPE DE L'ARTISANAT

Le groupe de l'artisanat est satisfait de voir que le sujet dont il a maintes fois saisi le
gouvernement ait été porté à la réflexion du Conseil économique et social, estimant urgent de
faire le point sur le statut le plus adapté à ces millions d'entreprises qui représentent près de
50 % des entreprises françaises.
Outre cette importance numérique, le groupe de l'artisanat a apprécié le rappel de leur rôle
économique et social à travers la notion d'éthique.
En effet l'artisanat repose sur une logique d'entreprise qui apporte produits et services à
proximité des usagers dans l'indépendance, mais également sur une logique de métiers attachant
beaucoup d'importance au savoir-faire et à la qualification professionnelle.
A ce titre, il est effectivement juste de dire qu'il participe à l'équilibre de la société, à
l'aménagement du territoire et à l'emploi.
Leur taille, leur structure de type familial et surtout leur désir de ne pas partager leur
reponsabilité sont incompatibles avec le fonctionnement et la gestion en société. C'est ce qui
explique sans doute le peu de recours à la technique sociétaire dans le secteur artisanal. Les 20 %
qui l'ont choisie l'ont fait la plupart du temps pour l'intérêt fiscal et social qu'ils pouvaient en
retirer et non pour des raisons économiques.
C'est pourquoi d'ailleurs tant de sociétés montées fictivement constituent le gros bataillon
des disparitions annuelles d'entreprises nouvellement créées, entraînant de ce fait préjudice à la
collectivité au regard des créances dues, et aux salariés par le jeu de primes interposees.
L'ensemble des mesures proposées alliant les spécificités des petites entreprises, les garanties
vis-à-vis des tiers et l'égalité de traitement des entrepreneurs vont dans le bon sens.
En échange, le groupe de l'artisanat reconnaît la nécessité de transparence comptable, de
techniques prévisonnelles, d'information et de formation.
Le groupe de l'artisanat estime que ce dispositif, loin de réprimer, contraindre, ou contrôler,
va au contraire, favoriser, faciliter, inciter au développement, à l'embauche, à l'investissement, du
fait d'une confiance retrouvée et surtout de l'attrait de la fonction de chef d'entreprise
individuelle.
Enfin, le groupe de l'artisanat souhaite que l'ensemble des propositions soit transcrit dans un
texte de loi, afin d'assurer la reconnaissance officielle de l'entité économique et sociale des
entreprises individuelles.
Aucun amendement n'ayant modifié le sens de l'avis, le groupe de l'artisanat l'a voté.

GROUPE DES ASSOCIATIONS

Les entreprises individuelles constituent un secteur très important appelé à jouer un rôle
déterminant dans le développement, la diversification de l'économie française et dans
l'aménagement du territoire.
Le groupe des associations regrette que sur un sujet de cette envergure un rapport n'ait pas
accompagné la présentation de l'avis. Il aurait permis le renforcement de l'argumentaire d'un
avis dont le point de vue est essentiellement de nature juridique, et une analyse plus exhaustive
d'un certain nombre d'interrogations :
les raisons de la disparition massive de ces entreprises dans les premières années de leur
-
création,
les causes du manque de succès de l'EURL, qui dans son principe répondait au souci de
-
réduire certaines distorsions de concurrence et d'apporter à l'entrepreneur individuel plus de
sécurité personnelle,
le niveau de leurs fonds propres et les moyens à mettre en oeuvre pour l'amélioration de
-
leur rentabilité.
Le groupe émet également des réserves sur un certain nombre de propositions, par ailleurs
non chiffrées, en matière d'allègements fiscaux.
En revanche, le groupe des associations adhère au principe qui a guidé le travail du
rapporteur : celui de la recherche d'identité et de pérennité de l'entreprise, mettant en valeur
notamment sa fonction sociale. Il soutient en particulier la proposition d'isoler, dans le
patrimoine de la personne, la part consacrée à l'entreprise. En outre, il approuve la distinction
entre revenu disponible et celui réinjecté dans l'entreprise, mais il se demande si celle-ci ne
risque pas d'avoir une conséquence négative. En effet, les banquiers n'hésiteront-ils pas à
abandonner la garantie de l'unicité du patrimoine s'il n'est pas prévu un moyen substitutif ?
En ce qui concerne les opérations de capital-risque, le groupe pense que mieux vaudrait se
montrer plus exigeant sur les compétences et sur les motivations des entrepreneurs individuels.
Le rapporteur souligne avec raison l'importance de l'information et de la formation des
dirigeants des entreprises individuelles. Notre groupe, tout en s'interdisant de créer des barrières
qui limiteraient l'initiative en matière de création d'entreprise, souhaite que soient renforcées et
mieux diffusées les possibilités de formation pour tout créateur potentiel.
Sous ces quelques réserves, le groupe des associations a voté l'avis.

GROUPE DE LA C.F.D.T.

- L'imprécision du champ de la saisine n'a été que partiellement levée par l'avis du Conseil
économique et social. Celui-ci traite en principe des entreprises exploitées en nom personnel,
sans toutefois exclure les entreprises possédées par une seule personne, mais à forme sociétaire.
- Les domaines juridique et fiscal occupent une large place dans l'avis, au détriment des
aspects économiques et sociaux, excepté dans ce dernier domaine, la suggestion d'une
représentation collective interentreprises des salariés, sur une base professionnelle, que partage la
CFDT.
- Cependant, les propositions formulées dans l'avis appellent trois réserves principales :

1.- Garantir la pérennité de l'entreprise, éviter la création de sociétés fictives sont des
objectifs dignes d'intérêt. Un moyen existe : l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée
créée par le législateur en 1985. Ce moyen paraît rejeté par l'avis, sans bilan ni analyse des
raisons de son peu d'attrait. Une autre voie est préconisée : l'affectation de patrimoine, laissant
penser à une recherche d'avantages par les sociétes, sans en accepter les contraintes.
2.- Des progrès ont été accomplis ces dernières années pour tendre à la neutralité fiscale
entre entreprises individuelles et entreprises en société. La soumission des entreprises
individuelles à l'impôt sur le revenu est bénéfique pour 96 % d'entre elles. Par ailleurs la CFDT
est opposée à l'instauration d'un impôt progressif sur les sociétés, dont le taux : 33 1/3 % est
inférieur à celui de la tranche haute de l'impôt sur le revenu. Les inégalités entre entreprises
tiennent moins à leur taille ou à leur statut qu'à leur type d'activité (entreprises de
main-d'oeuvre notamment). Cet aspect n'est pas traité.
3.- La revendication d'une égalité de couverture sociale, entre salariés et non salariés peut
s'admettre si cette égalité concerne les prestations et les cotisations (taux-assiette). La
déductibilité de la cotisation du revenu, ou du bénéfice imposable, doit être liée au caractère
obligatoire du système concerné. Certaines propositions de l'avis ne respectent pas ce principe
d'équité.
Pour toutes ces raisons, le groupe CFDT s'est abstenu dans le vote sur l'avis.

GROUPE DE LA C.F.E.-C.G.C.
Le groupe de la CFE-CGC a remarqué la qualité et l'intérêt de l'avis, notamment dans ses
propositions, pour organiser un statut juridique adapté à la situation spécifique des entreprises
individuelles.
Le principal problème qui se pose à cet égard est la confusion du patrimoine de
l'entrepreneur et de l'entreprise, et celle de la responsabilité qui en découle. La solution réside
dans une clarification des actifs d'exploitation de l'entreprise et des biens propres de
l'entrepreneur, l'amélioration de l'information des tiers et le renforcement des techniques de
prévention des difficultés.
Le groupe de la CFE-CGC a apprécié l'effort du rapporteur pour initier une réflexion et
amorcer des propositions en matière de représentation des salariés dans les entreprises se situant
en-deçà des seuils légaux.
Les propositions visant à améliorer les dispositifs d'aides à la création et à la pérennité de la
très petite entreprise, à simplifier certaines procédures, sans en méconnaître la nécessité, et à
renforcer les fonds propres et les actifs de l'entreprise individuelle, sont de bonne qualité.
La réflexion engagée sur l'éthique du chef d'entreprise et la responsabilité sociale qui doit
s'établir au même niveau que la responsabilité économique, mais de manière différente, est fort
proche de celle actuellement menée par la Confédération française de l'encadrement CGC, qui a
approuvé l'avis.

GROUPE DE LA C.F.T.C.

L'analyse de la situation des entreprises individuelles est claire et souvent pertinente mais
l'aspect social reste insuffisamment traité, même si la dimension sociale et humaine, et l'attention
à porter sur l'application des conventions et accords collectifs, ainsi que la nécessité de la
concertation et de l'intéressement ont été mentionnées. Ces questions auraient mérité des
développements substantiels.
Nombre de propositions recueillent l'assentiment du groupe de la CFTC, mais :
il faut mesurer la proposition visant à distinguer revenu disponible et revenu réinvesti qui,
-
dans sa formulation actuelle, conduirait à la déduction fiscale de tout l'autofinancement ;
la limitation du recours aux cautions des conjoints ne doit pas conduire à l'utilisation
-
abusive du droit des faillites ;
pour la transmission d'entreprise, comment ne pas envisager, au regard des avantages
-
fiscaux consentis aux héritiers, qu'une part des plus-values soit attribuée aux salariés qui y ont
contribué.
D'autres propositions ne peuvent que susciter des interrogations pour le groupe de la
CFTC:
- la séparation du patrimoine consacré à l'entreprise paraît bien difficile à mettre en oeuvre
alors qu'un grand nombre d'entreprises individuelles vivent sur une tradition d'indivisibilité du
patrimoine. Si cette séparation etait décidée, des garde-fous seraient nécessaires, tels que
l'engagement de tout le patrimoine en cas de faute lourde, ou l'interdiction de créer une
entreprise après des faillites répétées ;
le principe d'égalité, sur le plan social, entre les salariés et les non-salariés, s'il paraît
-
équitable, implique l'egalité des devoirs et donc une compensation, elle aussi équitable, entre les
régimes ;
- quant à la déductibilité des cotisations de toute nature, elle aurait dû être assortie de
l'obligation d'adhésion au régime ;
- il est regrettable que le coût des mesures proposées ne soit même pas esquissé, et l'idée de
l'impôt progressif laisse dubitatif, il ne permettra pas de supprimer l'inégalité de traitement entre
le dirigeant d'une société et l'artisan, à l'avantage du premier ;
- les diverses incitations fiscales proposées ne semblent pas pouvoir être toutes retenues en
raison de leur effet cumulatif.
La CFTC mesure bien l'apport irremplaçable des entreprises individuelles à la préservation
de l'espace rural, à la formation technique des jeunes en liaison avec l'école et à la création
d'emploi ; cependant, en raison de ses réserves et interrogation, le groupe de la CFTC s'est
abstenu.

GROUPE DE LA C.G.T.

Les petites entreprises et singulièrement les plus petites d'entre elles sont confrontées à des
problèmes très graves. Ces problemes sont trop absents du projet d'avis, au profit du discours
comme sur les fonds propres, sur les aides publiques et sur les appuis fiscaux.
Ni les causes réelles de ces difficultés, ni les exigences de réponses garantissant et la vie de
l'entreprise et le développement de l'activité et de l'emploi, ne sont traitées.
En revanche, les propositions concernant le renforcement de la capacité financière et une
démarche du «moins disant fiscal» sont d'autant plus discutables que l'expérience des dernières
années a montré leur coût et leur inefficacité pour l'emploi notamment.
Aujourd'hui, les faillites flambent. Dettes à l'URSSAF, dettes fiscales, dettes auprès des
banques sont souvent à l'origine de ces disparitions. Mais on ne peut confondre les effets et les
causes structurelles des difficultés. Ces entreprises subissent avant tout les reculs du pouvoir
d'achat des ménages et les contraintes imposées par les choix des grandes entreprises et des
organismes bancaires et financiers. Elles ne souffrent pas de trop de salaires ni de trop de charges
sociales, mais d'un manque de débouchés, de rémunérations de leurs activités et d'autonomie.
Il y a urgence à redéfinir les relations entre les petites entreprises et l'ensemble du tissu
économique. Les grandes entreprises ont eu tendance à transférer leur difficultés ou à peser
toujours plus sur les PME.
Il s'agit d'infléchir cette tendance pour soustraire les petites entreprises aux choix
stratégiques qui leur sont extérieurs. Pourquoi ne pas examiner par exemple la constitution de
fonds départementaux de créations d'activités et d'emplois financés sur les profits et les réserves
des grands groupes industriels et financiers ?
De même, pour favoriser l'emploi, de nouveaux rapports avec les banques sont
indispensables. Le cercle vicieux du crédit est en effet redoutable. Le surcoût serait justifié par
des risques spécifiques supplémentaires. Mais si risque il y a, il vient le plus souvent de la relation
de l'entreprise avec une ou des sociétés donneuses et repreneuses de marchés. Pourquoi ne pas
imaginer des contrats de moyen terme assurant les débouchés et servant de garantie auprès des
établissements financiers.
Par ailleurs, toutes les formes de mutualisation des risques et des charges des entreprises
indivuelles seraient à développer, notamment centres de gestion communs, outils de formation,
centres technologiques, permettant d'abaisser le coût d'accès à un certain nombre de services
indispensables tout en réduisant les contraintes déclaratives.
Le groupe de la CGT ne refuse pas certains traitements fiscaux spécifiques. Mais
contrairement au dispositif proposé dans l'avis, à l'opposé des mesures des dernières années et
des dispositions prévues aujourd'hui par le gouvernement, l'aide publique directe ou indirecte ne
saurait être accordée qu'assortie d'exigences de résultats en matière d'emploi et d'un contrôle
public et social réel.
Tout en approuvant certaines propositions notamment celles relatives au statut ou à la
transmission de l'entreprise, c'est pour ces raisons essentielles que le groupe de la CGT votera
contre l'avis soumis au Conseil économique et social.

GROUPE DE LA C.G.T.F.O.
Nous considérons que l'entreprise individuelle est une composante essentielle de notre
économie. Tout doit donc être fait pour que ce secteur productif soit encore plus dynamique et
renforce, notamment, ses capacités très réelles en matière de création d'emplois.
C'est pourquoi nous sommes d'accord avec les diverses propositions relatives à une
rationalisation et à une amélioration de la gestion de ce type d'entreprise. De même, nous
approuvons l'idée d'un renforcement de la protection des tiers par une meilleure identification
de l'entreprise et aussi par l'adoption de mesures d'alerte adaptées aux petites entreprises.
Nous sommes aussi d'accord avec le développement du recours à la procédure de règlement
amiable même si le formalisme comptable, qui doit l'accompagner, risque de lui enlever
beaucoup d'attrait. Quant aux simplifications administratives souhaitées par le projet d'avis, nous
en sommes partisans tout en observant que les résistances éventuelles des administrations,
d'ailleurs seulement chargées de faire appliquer la loi, tiennent à des raisons plus fondamentales,
inhérentes aux régimes sociaux et à la nature des diverses obligations fiscales.
Nous souscrivons naturellement aux quelques développements consacrés aux droits des
salariés. On sait, en effet, que dans les petites entreprises, ceux-ci ont beaucoup de mal à
exprimer leurs droits et que le fait syndical y est largement ignoré.
Dans un autre ordre d'idées, sans rejeter la solution préconisée du patrimoine affecté dans le
cadre du statut juridique de l'entreprise, nous sommes plus circonspects que le rapporteur,
considérant qu'il paraît difficile d'introduire en droit une telle exception au dogme de
l'indivisibilité du patrimoine.
Nous aurions, pour notre part, préféré que les possibilités offertes par l'EURL fussent mieux
approfondies et que le recours à la forme sociétaire fût facilité par une révision du statut des
SARL et la mise au point d'une SA simplifiée. Mais, c'est sur la partie fiscale du projet d'avis
que portent nos véritables désaccords. Le texte succombe à la fâcheuse tendance d'accompagner
les propositions d'incitations fiscales. A Force Ouvrière, nous pensons que la fiscalité a ses limites
et le principe républicain d'égalité devant l'impôt doit être respecté.
En outre, nous relevons une grave ambiguïté dans le texte. On ne peut, d'une part réclamer
un statut voisin de celui du salarié et continuer, d'autre part, à bénéficier des avantages fiscaux
réservés aux sociétés. A ce titre, la proposition d'introduire un impôt progressif pour les PME
exploitées en société est tout à fait hors de propos, la philosophie de l'avis etant d'inviter à rester
en entreprise individuelle, pour qui l'impôt progressif existe déjà : c'est l'impôt sur le revenu.

GROUPE DE LA COOPERATION

Le groupe de la coopération approuve dans son ensemble les propositions qui représentent
un intérêt pour favoriser le développement de l'entreprise individuelle tout en insistant sur les
points suivants :
1% Pour assurer leur pérennité, les entreprises individuelles ainsi que les petites entreprises,
exclues du fait de leur taille notamment, d'un certain nombre de moyens de prévention des
difficultés prévus par le législateur, doivent être incitées à s'inscrire dans une stratégie de
prévention. L'incitation à la formation de l'entrepreneur et à la mise en place d'outils de gestion
prévisionnelle sont deux éléments clés de la prévention des difficultés.
La simplification des procédures administratives est indispensable pour éviter toute perte de
temps ou surcoût et simplifier la tâche du gestionnaire.
2% Concernant le conjoint salarié exerçant une activité aux côtés du chef d'entreprise, il
doit être doté d'un statut bénéficiaire d'un traitement fiscal équitable et encourageant l'accession
à un régime de retraite volontaire. La nécessité d'un statut pour le conjoint est d'autant plus
renforcée si, du fait de l'affectation du patrimoine, l'entreprise est distinguée de celui qui la gère.
3°/- Quelle que soit la forme juridique, la petite entreprise manque de fonds propres. Le
renforcement de la capacité financière est un point extrêmement important pour la survie de bon
nombre de petites entreprises.
Pour les entreprises exploitées en nom personnel, il faut distinguer revenu disponible et
revenu réinvesti permettant le développement de l'entreprise, ce dernier faisant l'objet d'un
traitement fiscal par le biais d'une déduction pour auto-financement.
La mobilisation de l'épargne de proximité est un moyen de donner aux entreprises les fonds
propres qui leur font défaut. Il faut donc encourager cette mobilisation par le développement de
société de proximité à capital-risque et renforcer les moyens de garantie.
4°/- Le projet d'avis traite d'une question fondamentale particulièrement pour l'entreprise
individuelle, celle de la transmission pour laquelle il convient de traiter les inégalités fiscales qui
pénalisent les entreprises.
Ainsi, la neutralité des plus-values au moment de la cession nous paraît fondamentale pour
faciliter la transmission dans de meilleures conditions. Il convient d'inciter à la transmission
progressive, permettant de préparer la décision tout spécialement par la formation des repreneurs
et de préserver les fonds propres et la trésorerie. Il conviendrait d'inciter les cédants à laisser des
fonds propres dans l'entreprise par une fiscalité équitable par rapport à la fiscalité sur l'épargne.
Enfin le groupe de la coopération approuve les conclusions du rapporteur sur la mission
d'intérêt général de l'entreprise qui exige de la part du dirigeant, de privilégier en toute
circonstance, la pérennité de celle-ci, ce qui implique le respect d'une certaine éthique.

GROUPE DES DEPARTEMENTS, TERRITOIRES ET COLLECTIVITES TERRITORIALES


A STATUT PARTICULIER D'OUTRE-MER

Le groupe des départements, territoires et collectivités territoriales à statut particulier


d'Outre-Mer partage les analyses et les propositions du présent avis.
Et ceci d'autant plus que la taille restreinte des économies des collectivités d'outre-mer, au
sens large du terme, fait que l'entreprise individuelle y occupe une place plus importante que
dans les départements français métropolitains.
Ainsi, la part de l'emploi créé Outre-Mer par les entreprises individuelles n'est pas de 8 %
comme en métropole mais de près de 25 % en moyenne, de l'emploi total. Dans ces
départements, territoires ou collectivités d'Outre-Mer, où le chômage atteint entre 20 et 38 % de
la population active, c'est dire l'importance de l'entreprise individuelle dans le domaine de
l'emploi.
Plus qu'ailleurs il faut assurer en Outre-Mer la pérennité de celle-ci, d'une part, en séparant
réellement le patrimoine personnel de l'entrepeneur de celui de l'entreprise tout en rassurant les
partenaires de cette dernière que sont les banquiers et les fournisseurs par la mutualisation des
risques notamment et, d'autre part, en adaptant les systèmes de formation actuellement mis en
oeuvre à leur taille. Par ailleurs, en dehors des incitations fiscales propres à l'Outre-Mer à
affiner, et des règles d'un nouveau droit du travail à inventer, la simplification des formalités
s'impose ainsi que l'abandon de l'esprit tatillon qui caractérise, là-bas, trop souvent, une
administration méconnaissant les conditions locales d'exploitation car issue de l'extérieur et donc
plus soucieuse de la lettre de la réglementation que de son esprit.
Ceci dit, dans l'ensemble, les propositions formulées dans l'avis, notamment celles touchant
aux dispositions concernant la transmission des entreprises individuelles, sont soutenues par le
groupe DOM-TOM. Il le votera donc, y voyant un cadre nouveau pouvant permettre la
libération des énergies et du dynamisme des entreprises individuelles et favoriser la création de
richesses et d'emplois notamment dans les régions ultramarines de la France.

GROUPE DES ENTREPRISES PRIVEES

Cet avis est une importante contribution à l'esprit d'initiative et de responsabilité destinée
aux chefs d'entreprise les plus exposés, ceux qui gèrent ou créent seuls une entreprise. Il leur
propose des solutions équitables.
Plus de trois millions de personnes, entrepreneurs et salariés, exercent une activité dans ce
cadre juridique ; les potentialités d'emploi sont certaines. Les entraves actuelles doivent être
levées.
L'incohérence du système est clairement démontrée : pour une même activité, la fiscalité, les
prélèvements, les responsabilités financières sont inégales, selon le régime juridique et le chiffre
d'affaires. D'où un nombre tout à fait excessif de sociétés anonymes, à coût de gestion élevé,
mais créées uniquement pour des raisons fiscales ou sociales -qu'il s'agisse des règles concernant
le gérant majoritaire de la SARL, du souhait légitime de limiter les risques financiers de la
famille, ou d'une préférence pour le régime des salariés-.

Le groupe soutient les trois principes essentiels défendus par ce texte :


la séparation des biens de l'entreprise, des biens qui n'y sont pas affectés par
-
l'entrepreneur,
l'égalité de traitement fiscal, juridique et social de toutes les entreprises et de leurs
-
responsables -entreprises personnelles, SARL ou SA-,
et un régime de succession et de mutation qui ne conduise pas, comme trop souvent
-
actuellement, l'entreprise à sa disparition lors de la mort de son créateur, ou ne la handicape pas,
lors d'une cession.

Ces trois principes devraient servir de base à une modification de la législation et de la


réglementation.
Le groupe des entreprises privées, très favorable au principe de l'égalité de charges de tous
les acteurs économiques, souhaite que les contraintes inutiles et les incohérences frappant les
entreprises, et notamment les plus petites d'entre elles, soient levées.
Cet avis va dans ce sens. C'est pourquoi le groupe l'a adopté à l'unanimité.

GROUPE DE LA F.E.N.

Le groupe de la FEN tient à souligner la qualité technique de l'avis sur l'entreprise


individuelle.
Le rapporteur a souhaité favoriser la recherche d'une identité adaptée à ce type d'entreprises
et les moyens d'assurer leur pérennité, ce qui est important compte tenu de la place qu'elles
occupent dans le tissu économique et social du pays.
Le groupe de la FEN approuve donc les propositions concernant le statut de ces entreprises
et notamment la distinction du patrimoine personnel du patrimoine de l'entreprise.
Il apprécie le souhait de l'avis que dans les petites entreprises l'attention soit portée sur
l'application des conventions, sur la necessaire concertation avec les représentants du personnel.
Le groupe dit également son accord sur les propositions qui préconisent une meilleure
formation des chefs d'entreprise, l'adoption de mesures d'alerte adaptées aux petites entreprises,
le développement de la procédure de reglement amiable et les simplifications de procédure.
Par contre, la FEN émet des réserves sur la partie fiscale et la partie protection sociale de
l'avis.
L'avis se prononce en faveur de mesures d'accompagnement sous forme d'allègements
fiscaux qui ne sont pas chiffrés et qui tendent à garder aux entreprises leurs avantages propres
tout en leur accordant le bénéfice des avantages fiscaux des salariés.
Le recours à la fiscalité a ses limites et des conséquences budgétaires qui ne doivent pas être
négligées en cette période de crise.
En ce qui concerne la protection sociale, s'il est judicieux de rechercher à mieux garantir le
conjoint du chef d'entreprise, l'égalité de traitement pour les salariés et les non-salariés n'est
valable que dans la mesure où elle se traduit par une égalité des droits et des devoirs, c'est-à-dire
des prestations et des cotisations.
Compte tenu de ces réserves, le groupe de la FEN décide de s'abstenir.

GROUPE DE LA MUTUALITE

Le groupe de la mutualité approuve l'axe général de réflexion du projet d'avis sur


l'entreprise individuelle. Il constate en effet les dérives de la technique societaire qui est une
technique d'organisation des entreprises -surtout des grandes- et qui est fortement incitée par le
droit fiscal et celui de la protection sociale. Pour le groupe de la mutualité, il n'est pas normal
que l'on utilise les règles de protection sociale que l'histoire a rendu compliquées et parfois
incohérentes, pour encourager telle ou telle formule d'entreprise. Car l'on aboutit, avec ces
dévoiements, à des injustices, dénoncées déjà en 1975 par le Conseil économique et social, et
reprises par l'actuel projet d'avis, où un dirigeant d'une grande entreprise, relevant du régime des
salariés, se trouve être mieux couvert pour sa maladie, sa retraite, sa suspension d'activité ou
pour son conjoint, que le petit entrepreneur individuel qui, de surcroît, accepte et assume pour
lui-même des risques économiques plus importants.
Notre groupe approuve la conclusion du rapport sur la nécessité d'un statut de l'entreprise
individuelle dont la clef de voûte serait constituee par l'affectation du patrimoine nécessaire à
l'exploitation d'une telle entreprise, ceci par exception au dogme français de l'indivisibilité du
patrimoine.
Le groupe de la mutualité approuve donc tout particulièrement les mesures -certes un peu
timides- préconisées par le projet d'avis pour assurer l'égalité de traitement des non salariés et
des salariés, notamment en matière de cessation subie d'emploi.
Il estime que toutes les études nécessaires doivent être engagées pour aboutir à corriger le
régime actuel tendant à la gestion des indemnités journalières, à la déductibilité des cotisations
retraite et maladie, à la protection enfin des régimes des non salariés qui voient leur effectif
s'amenuiser par la perversité du système, mettant ainsi en danger la solidarité de l'ensemble. Le
groupe de la mutualité approuve enfin la nécessité de doter d'un statut le conjoint du chef
d'entreprise afin de pallier les difficultés qu'il pourrait rencontrer en cas de dissolution des liens
du mariage.
Le groupe de la mutualité a voté en faveur de cet avis.
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