Le clown

Mitzi Vougier, Emilie Rojtman

C'était la sonnerie de la porte qui m'avait réveillée.

Quand je vins l'ouvrir, les rayons du soleil m'éblouirent. Il y avait un
colis que le facteur avait déposé sur mon palier, mais il avait filé sans
m’attendre. Je l'emportai pour l’ouvrir dans ma chambre parée de
papier sombre.

C'était une boîte, une petite boîte à musique. Quand je l'ouvris,

un clown en jaiilit, et une mélodie se déclencha.

Une sensation étrange m'envahit le dos. Il y avait quelque chose

d'anormal, mais je ne cernais pas vraiment quoi. En réalité, je n'étais
pas habituée à recevoir des colis... surtout d'un expéditeur anonyme.
Cela m'intriguait.
Cette journée passa dans une impression de malaise bizarre que
je n'arrivais pas à identifier. J'avais refermée soigneusement la boîte,
car cette mélodie me glaçait le sang. Pourtant, elle aurait pu paraître
joyeuse, mais je ne sais pas pourquoi, je la ressentais comme une
musique maléfique.

Le clown et son sourire bizarre me faisaient le même effet. La

boîte était soigneusement verrouillée, je l'avais rangée sur le meuble
de la cuisine, et chaque fois que je passais par là et que mon regard
tombait dessus,mon malaise devenait plus intense.
Le soir, j'allai me coucher épuisée après cette pénible journée.
Je m'endormis aussitôt assommée de fatigue.

Mais, au milieu de la nuit, je me réveillai soudain, comme un

moment d'insomnie. Le froid me glaçait, un froid inhabituel... Et
quand j'entendis la petite mélodie lugubre, je bondis de mon lit.
Elle provenait de la cuisine.
 Je m'avançai doucement dans l'appartement silencieux où cette
mélodie résonnait comme dans une église. J'arrivais à la porte de la
cuisine, à pas de loup, je poussais la porte.
La boite s'était ouverte. Le clown semblait me fixer dans la
lumière du néon. La mélodie s'était mise en route.

D'un seul coup, la peur tomba sur moi et me serra la poitrine. Je

sentais une présence, pourtant il n'y avait personne.
J’étais sûre d'avoir soigneusement verrouillé la boite avec son
petit crochet de fer.
Dans la journée chaque fois que j'étais passée prèsde cette
maudite boîte, je l'avais vérifié : le crochet était bien fermé, j'en étais
parfaitement sûre.

Je tentai de m'endormir mais je n'y arrivai pas, cette boite était

entrée dans ma vie je ne sais trop comment, et elle refusait d’en sortir.
J'essayai donc par tous les moyens de m'en débarrasser: je la
mis tout au fond de mon armoire, mais elle en sortit. Et la nuit uivante,
elle était revenue dans ma cuisine et jouait sa musique; je la jetais à la
poubelle, elle revint encore. La nuit suivante, toujours cette maudite
musique dans ma cuisine ; je la donnai à un inconnu qui passait dans
la rue, elle revint encore... et à chaque fois, c'était pareil.

Puis un jour, je décidai de la détruire en la jetant au feu.

Mais ce fut une très mauvaise idée...
Le clown en sortit dans un grand éclair de lumière.
La marionnette devint immédiatement un vrai clown maléfique.
Et ma vie, un cauchemar sans fin.

(Extrait de 11 Nouvelles fantastiques)

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