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SMA

Introduction à la théorie des catégories et aux


lemmes de diagrammes

Rafael G UGLIELMETTI et Dimitri Z AGANIDIS


2ème année bachelor

Sous la direction de Caroline L ASSUEUR, doctorante (chaire du prof. Thévenaz)

Dernière modication le 24 mai 2009


2
TABLE DES MATIÈRES 3

Table des matières


1 Introduction 5

2 Introduction aux catégories 5


2.1 Fondation logique pour la théorie des catégories . . . . . . . . . . . . . . . . 5
2.2 Catégories et premiers exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
2.3 Principe de dualité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
2.4 Propriétés des morphismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
2.4.1 Monomorphismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
2.4.2 Epimorphismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
2.4.3 Isomorphismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
2.5 Quelques exemples de propriétés universelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
2.5.1 Diagrammes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
2.5.2 Produits et coproduits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
2.5.3 Egaliseurs et coégaliseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
2.5.4 Images . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
2.5.5 Pullbacks et pushouts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

3 Catégories abéliennes 19
3.1 Prérequis aux catégories abéliennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
3.1.1 Objets et morphismes zéros . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
3.1.2 Noyaux et conoyaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
3.2 Dénition et premiers exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
3.3 Premiers résultats pour les catégories abéliennes . . . . . . . . . . . . . . . . 22
3.4 Existence de l'image . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
3.5 Suite exacte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
3.6 Préliminaires à la chasse dans les diagrammes . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
3.6.1 Pseudo-éléments . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
3.6.2 Propriétés des pseudo-éléments et de la pseudo-égalité . . . . . . . . 30

4 Lemmes de Diagrammes 34
4.1 Lemme des 5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
4.2 Lemme du serpent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

5 Bibliographie 39
4 TABLE DES FIGURES

Table des gures


1 Produit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
2 Unicité du produit à isomorphisme près . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
3 Coproduit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
4 Egaliseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
5 Un égaliseur est un monomorphisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
6 Coégaliseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
7 Exemple de coégaliseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
8 Image . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
9 Pullback . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
10 Le pullback d'un monomorphisme est un monomorphisme . . . . . . . . . . 19
11 Noyau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
12 Pullback (1) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
13 Pullback (2) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
14 Factorisation par l'image . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
15 Factorisation par l'image : Preuve que m est un monomorphisme . . . . . . 26
16 Lemme des 5 (première version) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
17 Pseudo-égalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
18 Transitivité de la relation de pseudo-égalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
19 Pseudo-éléments et épimorphismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
20 Pseudo-éléments et suites exactes (1) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
21 Pseudo-éléments et suites exactes (2) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
22 Lemme des 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
23 Lemme des 5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
24 Lemme du noyau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
25 Lemme du serpent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
26 Lemme du serpent : construction du morphisme de connexion (1) . . . . . . 37
27 Lemme du serpent : construction du morphisme de connexion (2) . . . . . . 38
28 Lemme du serpent : action de ω̃ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
5

Résumé
Dans ce travail, nous présentons une introduction à la théorie des catégories, notion
unicatrice des structures algébriques et outil puissant des mathématiques modernes.
Nous exposons un développement ne nécessitant aucun prérequis et conduisant à des
lemmes de diagrammes utiles et ô combien sympathiques.

1 Introduction
La théorie des catégories est une branche des mathématiques qui a été dévelop-
pée dans les années 1940 par les mathématiciens Samuel Eilenberg et Saunders Mac
Lane, puis propagée par Alexander Grothendieck durant les années 1960. Elle permet
de généraliser le concept de structures algébriques et d'applications conservant cette
structure, qu'il s'agisse d'espaces vectoriels et d'applications linéaires ou de groupes et
de leurs homomorphismes. Cette théorie abstraite est devenue un outil indispensable
dans les mathématiques théoriques modernes, notamment en algèbre, en géométrie
algébrique, en topologie algébrique, etc.
L'objectif de ce travail est de présenter une introduction à la théorie des catégories
dans le but d'introduire la technique de  chasse dans les diagrammes  ainsi que deux
résultats importants : le lemme des 5 et le lemme du serpent.
Nous avons choisi de faire une présentation complète des concepts nécessaires pour
démontrer les lemmes de diagrammes, raison pour laquelle ils apparaissent tard dans
l'exposé.
Après avoir présenté les fondations logiques nécessaires, nous présentons la dénition
de catégories et quelques exemples. Par la suite, nous exposons certaines propriétés de
base des morphismes ainsi que des exemples de propriétés universelles. Nous pouvons
alors introduire le concept de catégorie abélienne et de suites exactes an de parler de
la chasse dans les diagrammes et des lemmes correspondants.

2 Introduction aux catégories


2.1 Fondation logique pour la théorie des catégories
An de parler de catégories des ensembles, nous aimerions dénir un ensemble U
qui vérierait S ∈ U si et seulement si S est un ensemble. Malheureusement, il est
bien connu qu'un tel ensemble n'existe pas. Nous allons donc devoir contourner cette
diculté en introduisant l'univers de Grothendieck. Pour cela, on utilise les axiomes
ZFC comme contexte pour la théorie des ensembles (voir [4] pour la dénition, [1]
pour l'axiome d'existence). Intuitivement, l'univers sera un ensemble qui contient les
ensembles  susamment petits  pour ne pas poser de problèmes et de telle sorte
qu'il soit susamment riche pour ce que nous voulons en faire.
Dénition 2.1 (Univers)
Un univers U est un ensemble vériant les axiomes suivants :
(U1) x ∈ y et y ∈ U ⇒ x ∈ U ;
(U2) x, y ∈ U ⇒ {x, y} ∈ U ;
(U3) (I ∈ U et xi ∈ U , ∀ i ∈ I) ⇒ i∈I xi ∈ U ;
S

(U4) x ∈ U ⇒ P (x) ∈ U où P (x) est l'ensemble des parties de x.


Cette dénition correspond à l'intuition qu'un univers soit susamment riche,
comme le montre la proposition suivante.
Proposition 2.2
(i ) X ∈ U ⇒ {X} ∈ U ;
(ii ) X, Y ∈ U ⇒ (X, Y ) ∈ U ;
6 2 INTRODUCTION AUX CATÉGORIES

(iii ) X, Y ∈ U ⇒ X × Y ∈ U ;
(iv ) X, Y ∈ U ⇒ F(X, Y ) ∈ U où F(X, Y ) est l'ensemble des applications de X
dans Y ;
(v ) (I ∈ U et xi ∈ U , ∀ i ∈ I) ⇒ i∈I xi ∈ U ;
F

(vi ) (I ∈ U et xi ∈ U , ∀ i ∈ I) ⇒ i∈I xi ∈ U .
Q

Démonstration.
(i) C'est un cas particulier de (U2) avec x = y .
(ii) La dénition du couple en termes d'ensembles est (x, y) = {x}, {x, y} . Par


conséquent, il sut d'appliquer deux fois (U2), pour x, y puis pour {x}, {x, y}.
(iii) Pour tout x ∈ X , on a x ∈ U (U1). Soit y ∈ Y , on a de même y ∈ U .
Par conséquent, (x, y) ∈ U , ∀x ∈ X (par (ii)) et donc {(x, y)} ∈ U , ∀x ∈ X .
Utilisant l'axiome (U3) sur la famille d'indices X ∈ U et les éléments ax = (x, y)
de U , on obtient [
ax = {(x, y) | x ∈ X} ∈ U .
x∈X
Ceci est vrai pour tout y ∈ Y et utilisant de la même façon (U3) sur la famille
d'indices Y ∈ U et les éléments ay = {(x, y) | x ∈ X} de U . On obtient alors le
résultat : [
ay = {(x, y) | x ∈ X, y ∈ Y } = X × Y ∈ U .
y∈Y

(iv) Le fait que F(X, Y ) ∈ P (X × Y ) et (U4) puis (U1) nous fournissent le résultat.
(v) Posons ai = xi × {i} pour tout i ∈ I . D'après (ii) et (iii), ai ∈ U pour tout
i ∈ I . Alors par l'axiome (U3) appliqué a la famille I et aux éléments ai de U ,
il vient [ [ G
ai = xi × {i} = xi ∈ U .
i∈I i∈I i∈I

(vi) Par dénition,


( ! )
Y [
xi = f ∈F I, xi | f (i) ∈ xi ∀i ∈ I .
i∈I i∈I

Par conséquent, !
Y [
xi ⊆ F I, xi .
i∈I i∈I

Or, par (U3), i∈I xi ∈ U et donc par (iv), F I, xi ∈ U , puis par (U4)
S S 
i∈I
et (U1), on obtient le résultat.
u
t
Pour continuer à travailler avec les univers, nous avons besoin de l'axiome suivant.

Axiome 2.3
Tout ensemble est contenu dans un univers.
On peut maintenant choisir U tel que N ∈ U . On voit qu'un tel univers est  assez
grand , puisque presque toutes les constuctions mathématiques que l'on peut vouloir
faire seront dans cet univers. On va donc se xer cet univers et le noter U par la suite.
Nous allons maintenant dénir ce qu'est une classe et un petit-ensemble, pour pouvoir
énoncer la dénition de catégorie.
Dénition 2.4 (Classe et petit-ensemble)
(i ) On appellera classe les sous-ensembles de U .
(ii ) On appellera petit-ensemble les éléments de U .
Par la suite, nous utiliserons le terme ensemble à la place de petit-ensemble pour
ne pas alourdir les énoncés. Maintenant, la classe U vérie S ∈ U si et seulement si S
est un ensemble. On peut donc dénir les catégories.
2.2 Catégories et premiers exemples 7

2.2 Catégories et premiers exemples


Dans cette partie et les suivantes, nous suivrons globalement l'approche de Francis
Borceux [1].
Dénition 2.5 (Catégorie)
Une catégorie C comporte les éléments suivants :
(i ) Une classe |C | dont les éléments sont appelés les objets de la catégorie.
(ii ) A chaque couple d'objets (A, B), est associé un ensemble C (A, B), dont les élé-
ments sont appelés morphismes de A vers B . On appelle A le domaine et B le
codomaine d'un morphisme de C (A, B).
(iii ) A chaque triple d'objets (A, B, C), est associé une loi de composition
C (A, B) × C (B, C) −→ C (A, C)
(f, g) 7→ g ◦ f.

La catégorie vérie de plus les axiomes suivants :


(Associativité) Si f ∈ C (A, B), g ∈ C (B, C), h ∈ C (C, D), alors
h ◦ (g ◦ f ) = (h ◦ g) ◦ f.

(Identité) Pour tout objet A de C , il existe un morphisme 1A ∈ C (A, A) tel que


pour tous objets A, B de C et pour tous f ∈ C (A, B), g ∈ C (B, C), on a :
1B ◦ f = f, g ◦ 1B = g.

On appelle 1A l'identité sur A.


Notation 2.6
(i) On notera souvent f ∈ C (A, B) par f : A −→ B et g ◦ f par gf .
(ii) On notera la proposition  A est un objet de C  par A ∈ C .
(iii) On notera aussi respectivement le domaine et le codomaine de f par dom(f ) et
codom(f ).
(iv) Lorsque nous ne voudrons pas spécier explicitement le domaine ou le codomaine
d'un morphisme f , on le notera •.
Remarque 2.7
(i) L'identité sur un objet A d'une catégorie est unique. En eet, si eA et 1A sont
des identités sur A, on obtient
eA = eA ◦ 1A = 1A ,

où l'on a utilisé l'axiome d'identité pour 1A puis pour eA .


(ii) Il faut comprendre que C (A, B) peut être un ensemble absolument quelconque.
Dans la plupart des exemples, il s'agira d'applications de domaine A et de co-
domaine B qui préservent la structure commune aux objets de la catégorie. Ces
catégories sont appelées catégories concrètes. Il existe aussi des catégories abs-
traites, où les morphismes ne sont pas des fonctions. Nous allons le voir dans les
exemples suivants.
Exemples 2.8
(i) La catégorie des groupes Grp a pour classe
|Grp| = {(A, +) ∈ U | (A, +) est un groupe}

et pour ensemble de morphismes, pour tout couple d'objets A, B ∈ Grp,


Grp(A, B) = {f ∈ F(A, B) | f est un homomorphisme de groupes}.
8 2 INTRODUCTION AUX CATÉGORIES

L'associativité pour la composition d'homomorphismes découle de l'associativité


de la composition d'applications. L'application idA : A −→ A est clairement un
homomorphisme et nous fournit le morphisme 1A , pour tout groupe (A, +). Dans
cet exemple, on voit que les morphismes sont eectivement les applications qui
préservent la structure de groupe.
(ii) Nous pouvons aussi voir un monoïde (groupe sans inverses) (M, ∗) comme une
catégorie C , en la dénissant de la façon suivante : |C | = {?}, C (?, ?) = M où
? est un élément arbitraire et en prenant pour loi de composition

C (?, ?) × C (?, ?) −→ C (?, ?),

la loi de composition de (M, ∗). En eet, dénie de cette façon, les axiomes
d'associativité et d'identité pour la catégorie sont fournis par ceux du monoïde.
Ainsi, cette catégorie nous donne un exemple où les morphismes ne sont pas des
applications.
On introduit maintenant le principe de dualité, qui sera un outil puissant dans les
démonstrations.

2.3 Principe de dualité


Dénition 2.9 (Catégorie duale)
Soit A une catégorie. On dénit la catégorie duale A ∗ de A de la façon suivante :
(i ) |A ∗ | = |A |.
(ii ) Pour tout couple d'objets A et B de A , A ∗ (A, B) = A (B, A) (autrement dit,
le sens des morphismes est inversé). Pour éviter toute confusion, on écrira
f ∗ : B −→ A pour désigner le morphisme associé à f : A −→ B .
(iii ) La loi de composition sur A ∗ est dénie de la manière suivante :

f ∗ ◦ g ∗ = (g ◦ f ) .

Remarque 2.10
(i) La catégorie duale de la catégorie duale est la catégorie elle même, c'est-à-dire
(A ∗ )∗ = A .
(ii) L'identité sur A dans A ∗ est (1A )∗ . En eet, soit f : A −→ B et g : B −→ A.
On obtient
∗ ∗
f ∗ ◦ (1A )∗ = (1A ◦ f ) = f ∗ , (1A )∗ ◦ g ∗ = (g ◦ 1A ) = g ∗ .

Dénition 2.11 (Proposition duale)


A partir d'une proposition, on dénit la proposition duale en inversant la direction de
chaque morphisme et en remplaçant chaque composition g ◦ f par f ◦ g .
Dénition 2.12 (Proposition auto-duale)
On dit qu'une proposition est auto-duale si elle est sa propre proposition duale.
Théorème 2.13 (Principe de dualité)
Supposons qu'une proposition exprimant l'existence d'objets, de morphismes ou in-
diquant l'égalité de composition entre eux soit valide dans toute catégorie. Alors, la
proposition duale est aussi valide dans toute catégorie.
Démonstration.
Soit P une telle proposition et P ∗ sa proposition duale. Pour prouver P ∗ dans toute
catégorie A , il sut de prouver P dans toute catégorie A ∗ . Mais, par hypothèse, P
est censée être vraie dans toute catégorie. u
t

Pour un exemple détaillé d'utilisation du principe de dualité, voir la preuve de la


proposition 2.24 page 11.
2.4 Propriétés des morphismes 9

2.4 Propriétés des morphismes


Lorsque l'on se donne une loi de composition dans une structure mathématique,
on s'intéresse souvent aux éléments  simpliables  ou  inversibles  par rapport à
cette loi. C'est ce que nous allons faire dans cette partie. Dans la plupart des catégo-
ries concrètes, il s'agit d'une généralisation des concepts d'injection, de surjection et
d'isomorphisme.

2.4.1 Monomorphismes

Dénition 2.14 (Monomorphisme)


Un morphisme f : A −→ B d'une catégorie C est appelé un monomorphisme lorsque
/
pour tout objet C de C et tout couple de morphismes g, h : C / A , on a

f ◦ g = f ◦ h ⇒ g = h.

On dit aussi que f est simpliable à gauche.


Notation 2.15 
On notera souvent f : A  / B pour indiquer que f est un monomorphisme.

Exemples 2.16
(i) Introduisons la catégorie des ensembles Set. La classe de ses objets est |Set| = U
et pour tout couple d'objets A, B ∈ Set, son ensemble de morphismes est
Set(A, B) = F(A, B). Les monomorphismes de cette catégorie correspondent
exactement aux applications injectives.

En eet, soit f : A  / B et a, b ∈ A tels que f (a) = f (b) ainsi que I ∈ Set,
/
I 6= ∅. Soit maintenant g, h : I / A dénies par g(i) = a et h(i) = b pour
tout i ∈ I . Alors on a
I6=∅
f ◦ g = f ◦ h ⇒ g = h =⇒ a = b.

Ceci prouve l'injectivité de f .


Réciproquement, soit f : A −→ B une application injective et g, h : I // A .
On voit que
f ◦ g = f ◦ h ⇒ f (g(i)) = f (h(i)) ∀i ∈ I ⇒ g(i) = h(i) ∀i ∈ I ⇒ g = h,

où l'on a utilisé l'injectivité de f pour la deuxième implication. Ceci prouve que


f est un monomorphisme.
(ii) Cette preuve s'applique aussi dans le cadre de la catégorie des espaces topolo-
giques Top. Cette catégorie a pour classe
|Top| = {(X, T ) ∈ U | (X, T ) est un espace topologique}

et pour ensemble de morphismes, pour tout couple d'objets A, B ∈ Top,


Top(A, B) = {f ∈ F(A, B) | f est continue}.

Les monomorphismes sont alors exactement les applications continues injectives.


En eet, dans la preuve de la remarque précédente, il sut de munir l'ensemble I
de la topologie discrète pour s'assurer que les applications f et g sont continues.
Remarque 2.17
Au vu des deux exemples précédents, on voit que la notion de monomorphisme dans les
catégories concrètes est souvent une généralisation du concept d'injection. On pour-
rait penser que dans tous ces exemples, les monomorphismes sont exactement les
morphismes injectifs. Cela s'avère faux en général. Un exemple dual sera fourni par la
suite.
10 2 INTRODUCTION AUX CATÉGORIES

2.4.2 Epimorphismes

Dénition 2.18 (Epimorphisme)


Un morphisme f : A −→ B d'une catégorie C est appelé un épimorphisme lorsque
/
pour tout objet C de C et tout couple de morphismes g, h : B / C on a

g ◦ f = h ◦ f ⇒ g = h.

On dit aussi que f est simpliable à droite.


Notation 2.19
On notera souvent f : A / / B pour indiquer que f est un épimorphisme.

Remarque 2.20 
On peut voir que la proposition duale de  f : A  / B  est  f ∗ : B / / A .
En eet, si f ◦ g = f ◦ h ⇒ g = h, alors

g ∗ ◦ f ∗ = h∗ ◦ f ∗ ⇒ (f ◦ g)∗ = (f ◦ h)∗ ⇒ f ◦ g = f ◦ h ⇒ g = h ⇒ g ∗ = h∗ .

Par conséquent, f ∗ est un épimorphisme.

La notion d'épimorphisme est dans certains cas une généralisation du concept de


surjection, comme on va le voir dans les exemples suivants.
Exemples 2.21
(i) Les épimorphismes de la catégorie Set correspondent exactement aux applica-
tions surjectives.
/ / B et g, h : B /
En eet, soit f : A / {0, 1} dénies par

si b ∈ im(f ),

1
g(b) =
0 sinon,

et h(b) = 1, pour tout b ∈ B . Alors par construction on a g ◦ f = h ◦ f et donc


g = h. Par conséquent, im(f ) = B et f est surjective.
/
Réciproquement, soit f : A −→ B une application surjective et g, h : B /C
ainsi que b ∈ B . La surjectivité de f implique l'existence de a ∈ A tel que
f (a) = b. Le fait que g ◦f = h◦f implique g(f (a)) = h(f (a)) et donc g(b) = h(b).
b ayant été choisi de façon arbitraire dans B , on obtient que g = h et donc que
f est un épimorphisme.
(ii) Comme pour les monomorphismes, on pourrait penser que dans les exemples de
catégories concrètes, les épimorphismes sont exactement les morphismes surjec-
tifs. Cela s'avère faux en général comme on va le montrer dans l'exemple suivant.
Considérons la catégorie des anneaux associatifs et unitaires Rng. Cette caté-
gorie a pour classe

|Rng| = {(A, +, ∗) ∈ U } | (A, +, ∗) est un anneau associatif et unitaire}

et pour ensemble de morphismes, pour tout couple d'objets A, B ∈ Rng,

Rng(A, B) = {f ∈ F(A, B) | f est un homomorphisme d'anneaux}.

Soit f : Z −→ Q l'injection canonique de Z dans Q. On va prouver que f est un


/
épimorphisme. Pour cela, soit g, h : Q / A deux homomorphismes d'anneaux
tels que g ◦ f = h ◦ f . On doit montrer que g = h. Soit encore z ∈ Z, z 6= 0.
Alors z est inversible dans Q d'inverse z −1 . Par conséquent, g(z) et h(z) sont
inversibles : g(z)−1 = g(z −1 ) et h(z)−1 = h(z −1 ). De plus

g ◦ f = h ◦ f ⇒ g(z 0 ) = h(z 0 ) ∀ z 0 ∈ Z.
2.4 Propriétés des morphismes 11

On conclut donc que pour tous z, z 0 ∈ Z,


g(z 0 · z −1 ) = g(z 0 ) · g(z)−1 = h(z 0 ) · h(z)−1 = h(z 0 · z −1 ).

Ainsi, g = h et f est un épimorphisme. On voit facilement que f n'est pas une


surjection, ce qui montre que surjections et épimophismes ne coïncident pas en
général.
Proposition 2.22
Soient f et g des morphismes d'une catégorie tels que f ◦g est un épimorphisme. Alors
f est un épimorphisme.
Démonstration.
Soient k et k0 des morphismes tels que k ◦ f = k0 ◦ f . On a alors k ◦ f ◦ g = k0 ◦ f ◦ g ,
et donc k = k0 , puisque f ◦ g est un épimorphisme. u
t

2.4.3 Isomorphismes

Dénition 2.23 (Isomorphisme)


Dans une catégorie C , un isomorphisme entre A et B est un morphisme f : A −→ B
tel qu'il existe g : B −→ A vériant
g ◦ f = 1A , f ◦ g = 1B .

Un tel morphisme est appelé inverse de f .


On dit alors que A et B sont isomorphes dans C , et on note A ∼
= B.
Remarque 2.24
(i) L'inverse d'un morphisme est unique s'il existe. En eet, si g et g̃ sont deux
inverses de f : A −→ B , alors on a
g = g ◦ 1B = g ◦ (f ◦ g̃) = (g ◦ f ) ◦ g̃ = 1A ◦ g̃ = g̃.

On notera f −1 l'inverse de f .
(ii) La notion d'isomorphisme est auto-duale. En eet, si f : A −→ B vérie la
dénition, on a
∗ ∗
f ∗ ◦ f −1 = (1B )∗ , f −1 ◦ f ∗ = (1A )∗ .
Par conséquent f ∗ : B −→ A est un isomorphisme par la remarque 2.10.
(iii) Si f : A −→ B est un isomorphisme, alors f est un monomorphisme et un
/
épimorphisme. En eet, soient g, h : I / A . Alors, on obtient

f ◦ g = f ◦ h ⇒ f −1 ◦ f ◦ g = f −1 ◦ f ◦ h ⇒ g = h.

Ceci prouve que f est un monomorphisme. Par le principe de dualité, f est


un épimorphisme. En eet, dans la catégorie C ∗ , duale de C , f ∗ est encore un
isomorphisme. Puisque la première partie de la preuve s'applique dans C ∗ , f ∗ est
un monomorphisme dans C ∗ . Par conséquent, (f ∗ )∗ = f est un épimorphisme
dans (C ∗ )∗ = C .
La réciproque de la dernière remarque est fausse en général, comme le montre
l'exemple suivant.
Exemples 2.25
(i) Dans la catégorie Top, les isomorphismes sont les applications continues bijec-
tives, à inverse continue. Un morphisme qui est à la fois un monomorphisme
et un épimorphisme est seulement une application continue bijective, mais son
inverse n'est pas nécessairement continu.
(ii) On peut maintenant voir un groupe comme une catégorie. Reprenant l'exemple
2.8 (ii), on peut dénir un groupe de la meme façon en exigeant en plus que tous
les morphismes soient des isomorphismes.
12 2 INTRODUCTION AUX CATÉGORIES

2.5 Quelques exemples de propriétés universelles


Nous ne dénissons pas formellement la notion de propriété universelle, car cela
nous entraînerait trop loin. De façon intuitive, il s'agit typiquement d'une construction
telle que certaines circonstances assurent l'existence et l'unicité d'un morphisme. Ce
chapitre donne quelques exemples de ces propriétés dont nous aurons besoin par la
suite. Le lecteur qui voudrait une dénition formelle trouvera ce qu'il recherche dans
le livre de Saunders Mac Lane [3], à la page 55.
Avant de présenter ces constructions, nous devons dénir la notion de diagramme
commutatif. Cela sera l'objet des deux dénitions suivantes.

2.5.1 Diagrammes

Dénition 2.26 (Diagramme)


Un diagramme d'une catégorie C est un multigraphe orienté D = (V, E) où :
(i ) V ⊆ C et V est de cardinal ni ;
(ii ) les arêtes d'un objet A vers un objet B sont des morphismes de A vers B et sont
en nombre ni.
Dénition 2.27 (Diagramme commutatif)
(i ) Dans un diagramme, on appelle chemin d'un objet A à un objet B , une suite
de morphisme ai , 1 ≤ i ≤ n telle que
dom(a1 ) = A, ∀ 1 ≤ i < n, codom(ai ) = dom(ai+1 ), codom(an ) = B.
(ii ) Un diagramme D d'une catégorie C est dit commutatif si pour toute paire d'ob-
jets A, B ∈ C et toute paire de chemins ai , bj , 1 ≤ i ≤ n, 1 ≤ j ≤ m, de A à B
dans D, on a :
n−1
Y m−1
Y
an−i = bm−j .
i=0 j=0

2.5.2 Produits et coproduits

Dénition 2.28 (Produit)


Soit C une catégorie ainsi que A, B ∈ C . Un produit de A et de B est un triple
(P, pA , pB ) satisfaisant :
(i ) P ∈ C ,
(ii ) pA ∈ C (P, A) et pB ∈ C (P, B),
et tel que pour tout triple (Q, qA , qB ), où
(i ) Q ∈ C ,
(ii ) qA ∈ C (Q, A) et qB ∈ C (Q, B),
il existe un unique morphisme r : Q → P tel que le diagramme suivant commute :

Q
 +++
 ++
  r +++
 ++
qA  ++qB
   ++
  ~ P @@ +++
 ~~~ @@ +
@
  ~~~ pA pB @@ ++
A B

Diagramme 1: Produit
2.5 Quelques exemples de propriétés universelles 13

Exemples 2.29
(i) Dans la catégorie Set, le produit de deux objets est leur produit cartésien.
(ii) Dans les catégories Grp, Ab et Rng le produit de plusieurs objets est leur pro-
duit cartésien, et les lois de composition sont dénies composante par composante
par les lois initiales. Par exemple, si (G1 , ∗1 ), . . . (Gn , ∗n ) sont des groupes avec
leur loi de composition, la loi ∗ du produit sera dénie de la manière suivante :
(a1 , . . . , an ) ∗ (b1 , . . . , bn ) = (a1 ∗1 b1 , . . . , an ∗n bn ), ∀ai , bi ∈ Gi .

(iii) Dans le catégorie Top, le produit d'une famille d'espaces topologiques (Xi , Ti )i∈I ,
est l'espace topologique (Xπ , Tπ ), déni de la manière suivante. L'ensemble Xπ
est le produit cartésien des ensembles Xi , i ∈ I . Dénissons
nY o
B= Ui : Ui ∈ Ti , Ui 6= Xi sur un sous-ensemble ni de I .
i∈I

La topologie Tπ est celle engendrée par la base B.


(iv) Soit P = (X, ≤) un ensemble partiellement ordonné. On peut voir P comme
une catégorie X dont les objets sont les éléments de X . Pour deux éléments
a, b ∈ X , on dénit

si a ≤P b,

{?}
X (a, b) =
∅ sinon,
où ? est un élément quelconque. L'associativité de la composition de morphismes
est assurée par la transitivité de la relation d'ordre ; les morphismes identités
sont donnés par la réexivité et l'unicité du morphisme entre deux éléments est
assurée par l'anti-symétrie.
Dans ce cas, le produit d'une famille d'objets est leur inmum, s'il existe. On va
le montrer pour deux objets a et b. Supposons que leur inmum i, existe. Par
dénition de l'inmum, la situation est la suivante :

i<
 <<<
 <<
 <<
 
a b

Supposons maintenant que l'on ait un autre objet i0 ∈ X et deux autres mor-
phismes comme dans le diagramme suivant :

i0
 ...
 ..
..
   .
 
i >> ..
>> .
 >> ..
>>.
 
a b

Alors, on a i0 ≤P a et i0 ≤P b et donc i0 ≤ inf{a, b}. Par conséquent, il existe un


morphisme de i0 vers i. Puisque entre deux éléments de X , il ne peut y avoir
qu'un seul morphisme, celui-ci est unique. Grâce à la transitivité, le diagramme
commute, ce qui achève la preuve.
Proposition 2.30
Si le produit de deux objets existe, il est unique à isomorphisme près.
14 2 INTRODUCTION AUX CATÉGORIES

Démonstration.
Les notations de la proposition 2.28 seront utilisées.
Etape 1. Si on prend Q = P dans la dénition du produit, on obtient l'existence
d'un unique morphisme t : P −→ P tel que le diagramme 1 commute. Puisque
1P est un morphisme faisant commuter le diagramme, il est le seul.

Etape 2. En voyant d'abord (P, pA , pB ) comme un produit et (Q, qA , qB ) comme un


deuxième produit on obtient l'existence d'un unique morphisme q : Q −→ P tel
que pA ◦ q = qA et pB ◦ q = qB . En inversant le rôle de P et de Q, on a l'existence
d'un unique morphisme p : P −→ Q tel que pA = qA ◦ p et pB = qB ◦ p. La
situation est la suivante :

QS /
  ///
 //
 q p //
 //
  //
  //
qA 
 P @ //qB
  @@ //
  @@ /
   @@ //
  @@ //
pB @@ /
   pA @@ //
 @@ /
  @ /
A B

Diagramme 2: Unicité du produit à isomorphisme près

Regardons maintenant,

pA = qA ◦ p = pA ◦ q ◦ p,
pB = qB ◦ p = pB ◦ q ◦ p.

On a que q ◦ p : P −→ P est un morphisme comme mentionné dans l'étape 1.


Par unicité, on a q ◦ p = 1P .
De la même manière, on montre que p ◦ q = 1Q . Ainsi, on a bien P ∼
= Q.
u
t

Dénition 2.31 (Coproduit)


Soit C une catégorie ainsi que A, B ∈ C .
Un coproduit de A et de B est un triple (S, sA , sB ) satisfaisant :
(i ) S ∈ C ,
(ii ) sA ∈ C (A, S) et sB ∈ C (B, S),
et tel que pour tout triple (T, tA , tB ), où
(i ) T ∈ C ,
(ii ) tA ∈ C (A, T ) et tB ∈ C (B, T ),
il existe un unique morphisme r : S → T tel que le diagramme suivant commute :
2.5 Quelques exemples de propriétés universelles 15

TI O U+
 +++
 +
 r +++
 ++
tA 
 ++tB
 ++
? S _ @ +
  @@ ++
  @@ ++
s sB @@ +
  A
A B

Diagramme 3: Coproduit

Exemples 2.32
(i) Dans la catégorie Set, le coproduit d'une famille d'objets (Ci )i∈I est leur union
disjointe. C'est-à-dire que puisque pour tout i ∈ I , on a Ci0 = Ci ∪ {i} est en
bijection avec Ci , on peut donc faire simplement l'union sur les Ci0 :
a [
Ci = Ci0 = {(x, i) : i ∈ I, c ∈ Ci } .
i∈I i∈I

(ii) Dans la catégorie Ab, le coproduit d'une famille d'objets est aussi leur produit.
(iii) Soit (Xi , Ti )i∈I une famille d'espaces topologiques. Leur coproduit (X, T ) est la
somme topologique habituelle :
• X est l'union disjointe des ensembles comme dénie au point (i).
• T est dénie de la manière suivante :
a
T = Ui , Ui ∈ Ti ∀i ∈ I,
i∈I

où, à nouveau, le coproduit est celui déni pour les ensembles.


Remarque 2.33
En utilisant le principe de dualité et la proposition 2.30, on déduit que le coproduit
d'un couple d'objets, s'il existe, est unique à isomorphisme près.

2.5.3 Egaliseurs et coégaliseurs

Dénition 2.34 (Egaliseur) /


Soient A, B deux objets d'une catégorie C ainsi que f, g : A / B . L' égaliseur
( equalizer  en anglais) de f, g est une paire (K, k) où
(i ) K ∈ C ,
(ii ) le morphisme k ∈ C (K, A) est tel que f ◦ k = g ◦ k,
telle que pour toute paire (M, m) où
(i ) M ∈ C ,
(ii ) le morphisme m ∈ C (K, A) est tel que f ◦ m = g ◦ m,
il existe un unique morphisme r : M → K tel que le diagramme suivant commute :

MA
AA
AAm
AA
A f
/
A /B
}>
∃! r
k }}}
g

}}
 }}
K

Diagramme 4: Egaliseur
16 2 INTRODUCTION AUX CATÉGORIES

Remarque
Si on prend M = K , on aura que r = 1K .
Proposition 2.35
Si l'égaliseur de deux morphismes existe, il est unique à isomomorphisme près.
Démonstration.
Reprenons les notations de la dénition précédente et supposons que (M, m) et (K, k)
sont deux égaliseurs de (f, g). Puisque (M, m) est un égaliseur, il existe s : K → M tel
que m◦s = k. En combinant cette équation avec k◦r = m, on a que k◦r◦s = k = k◦1K .
En utilisant le fait que le morphisme induit est unique et la remarque précédente, on
obtient que r ◦ s = 1K . De la même manière, on peut montrer que s ◦ r = 1M . u
t

Puisque l'égaliseur est essentiellement unique, on peut écrire ker(f, g) pour désigner
l'égaliseur de f et de g .
Exemple 2.36
Dans les catégories Set, Grp et Rng, l'égaliseur de deux morphismes f, g : A // B
est le sous ensemble de A où les deux morphismes coïncident :
ker(f, g) = {a ∈ A : f (a) = g(a)},

et le morphisme est l'injection.


Il est facile de vérier que dans le cas de Grp, ce sous-ensemble est bien un sous-
groupe, il est de plus égal au noyau (au sens usuel) du morphisme f − g .
Proposition 2.37 (Un égaliseur est un monomorphisme)
/
Soit (K, k) l'égaliseur de deux morphismes g, h : A / B . Alors k est un monomor-
phisme.
Démonstration.
Soient K, k, g, h comme dans l'énoncé du théorème ainsi que f, f˜ : C −→ K deux
morphismes tels que k ◦ f = k ◦ f˜. On aimerait montrer que f = f˜. Rappelons que
puisque k est un égaliseur, on a k ◦ g = k ◦ f , et donc l'égalité suivante
g ◦ k ◦ f = h ◦ k ◦ f.

Ceci implique que f et f˜ sont des morphismes faisant commuter le diagramme suivant :

C@
@@ k◦f
@@
f˜ f @
  k @
// B
g
K /A
h

Diagramme 5: Un égaliseur est un monomorphisme

Par dénition de l'égaliseur, il existe un et un seul morphisme entre C et K , ce qui


implique que f = f˜, comme désiré. u
t

Dénition 2.38 (Coégaliseur)


Soient A, B deux objets d'une catégorie C ainsi que f, g : A // B . Le coégaliseur
( coequalizer  en anglais) de f, g est une paire (K, k) où
(i ) K ∈ C ,
(ii ) le morphisme k ∈ C (K, A) est tel que k ◦ f = k ◦ g ,
telle que pour toute paire (M, m) où
2.5 Quelques exemples de propriétés universelles 17

(i ) M ∈ C ,
(ii ) le morphisme m ∈ C (K, M ) est tel que m ◦ f = m ◦ g ,
il existe un unique morphisme r : K → M tel que le diagramme suivant commute :

MO `A
AA
AA
m AAA
o g
∃!r Bo A
}} f
}}}
}
}~ } k
K

Diagramme 6: Coégaliseur

Exemple 2.39
Soit f : A −→ B un morphisme de la catégorie Ab. Alors le coégaliseur de (f, 0), où
0 est l'homomorphisme de groupe qui envoie chaque objet sur l'élément neutre, est le
couple (B/f (A), π), où π est l'homomorphisme canonique.
En eet, pour a ∈ A, on a π (f (a)) = 0, puisque f (a) ∈ f (A), et donc π ◦f = π ◦0 = 0.
Soit maintenant q : B −→ Q un homomorphisme de groupe tel que q ◦ f = q ◦ 0 = 0,
ce qui revient à dire que f (A) ⊂ ker(q). Par la propriété universelle du quotient de
groupes, on sait qu'il existe un unique homomorphisme de groupe q̄ tel que q̄ ◦ π = q .

f
/ q
/Q
/B
A
0 x;
x
x
π
x
 x ∃! q̄

B/f (A)

Diagramme 7: Exemple de coégaliseur

De manière plus générale, f, g ∈ Ab(A, B), le coégaliseur de (f, g) est le coégaliseur


de (f − g, 0).

Proposition 2.40 (Un coégaliseur est un épimorphisme)


/
Soit (K, k) le coégaliseur de deux morphismes g, h : A / B . Alors k est un épimor-
phisme.

Démonstration.
Découle de la proposition 2.37 et du principe de dualité. u
t

2.5.4 Images

Dénition 2.41 (Image)


Soit f : A −→ B un morphisme

d'une catégorie C . L' image de f , si elle existe, est
un monomorphisme h : I  / Y qui satisfait les propriétés suivantes :

(i ) Il existe un morphisme g : A −→ I de C tel que f = h ◦ g .


(ii ) Pour tout triple (C, k, l) où C est un objet de C , k un morphisme de A vers
C et l un monomorphisme de C vers B tel que f = l ◦ k , il existe un unique
morphisme m : I −→ C tel que le diagramme suivant soit commutatif :
18 2 INTRODUCTION AUX CATÉGORIES

A+ @
f
/B
@
++ @@ g ~ ~? I
h ~ 
++ @@@ ~~ 
++ @ /~ ~ 
++ I 
++ 
k + m
l
++
++ 
++ 
++ 
   6
C

Diagramme 8: Image

Exemple 2.42
Dans les catégories Set, Ab, Grp, par exemple, l'image d'un morphisme f : A −→ B
est l'inclusion depuis l'ensemble {f (a) : a ∈ A} dans B .

2.5.5 Pullbacks et pushouts

Dénition 2.43 (Pullback)


Soit C une catégorie ainsi que deux morphismes f : A → C et g : B → C dans C . Un
pullback de (f, g) est un triple (P, f 0 , g 0 ), où
(i ) P ∈ C ;
(ii ) f 0 , g 0 sont des morphismes de C tels que f ◦ g 0 = g ◦ f 0 ,
et tel que pour tout autre triple (Q, f 00 , g 00 ), où
(i ) Q ∈ C ;
(ii ) f 00 , g 00 sont des morphismes de C tels que f ◦ g 00 = g ◦ f 00 ,
il existe un unique morphisme q : Q → P telsa que le diagramme suivant commute :

Q
f 00

 
g 00 P /B
0
f
g0 g

(  /C

A f

Diagramme 9: Pullback

Remarque 2.44
Lorsque l'on parle du pullback d'un morphisme f : A → C , on parle en fait du
morphisme f 0 dans le pullback de (f, g), où g est un morphisme de codomaine C .
Proposition 2.45
Le pullback d'un monomorphisme est un monomorphisme.
Démonstration.
Soit f : A −→ C un monomorphisme, g : B −→ C un autre morphisme et (f 0 , g 0 )
leur pullback. Supposons maintenant qu'il existe k et k0 des morphismes tels que
f 0 ◦ k = f 0 ◦ k 0 . On pose ensuite h = f 0 ◦ k et h0 = g 0 ◦ k . La situation est alors celle
représentée sur la diagramme 10.
19

Remarquons tout d'abord que par choix de h, h0 , les triangles (I) et (II) commutent.
On a de plus l'égalité suivante : g ◦ h = g ◦ f 0 ◦ k = f ◦ g 0 ◦ k = f ◦ h0 , où l'on a utilisé
la commutativité du carré. Ainsi, par dénition du pullback, k est l'unique morphisme
de X vers Y ayant ces propriétés. On va montrer que k0 les satisfait aussi, ce qui
entraînera k = k0 .
La commutativité du triangle (II) provient du fait que, par hypothèse, f 0 ◦ k0 = f 0 ◦ k,
le membre de droite étant égal à h. Pour établir la commutativité du triangle (I),
regardons : f ◦ g 0 ◦ k0 = g ◦ f 0 ◦ k0 = g ◦ h = f ◦ h0 et donc, puisque f est un mono-
morphisme, g 0 ◦ k0 = h0 . Il s'ensuit que k = k0 .

X@ h
@@
@@k (II)
@@

Y /B
(I) 0
h0 f
g0 g
#   
/ C.
A f

Diagramme 10: Le pullback d'un monomorphisme est un monomorphisme

u
t
Dénition 2.46 (Pushout)
Le pushout de deux morphismes est déni de manière duale à partir du pullback.

3 Catégories abéliennes
La dénition de catégorie abélienne, que nous présentons plus bas, assure l'exis-
tence de constructions telles que les images et noyaux. Elle présente de plus une
structure supplémentaire, notamment sur l'ensemble des morphismes entre deux ob-
jets. Ces propriétés des catégories abéliennes sont essentielles pour dénir les suites
exactes et généraliser la chasse d'éléments dans les diagrammes. Pour la dénition de
catégorie, nous suivons à quelques nuances près l'approche de Saunders Mac Lane [3].

3.1 Prérequis aux catégories abéliennes


Avant de pouvoir dénir ce qu'est une catégorie abélienne, nous devons introduire
quelques nouvelles notions, en particulier celle de noyau. Dans ce but, nous allons
commencer par dénir les notions d'objets et morphismes zéros.

3.1.1 Objets et morphismes zéros

Dénition 3.1 (Objet initial et terminal)


Un objet S ∈ A est dit initial si pour tout objet A ∈ A il existe un et un seul
morphisme S → A. Si S est un objet initial, l'unique morphisme S → S est l'identité.
De manière duale, on dit qu'un objet T est terminal si pour tout objet A ∈ A il existe
un et un seul morphisme A → T . Si T est un objet terminal, l'unique morphisme
S → S est l'identité.
Proposition 3.2
Si une catégorie possède un objet terminal, il est unique à isomorphisme près.
Démonstration.
Soient T et T 0 deux objets terminaux d'une catégorie C . Remarquons tout d'abord
que par dénition, tout objet A de C possède un morphisme identité 1A : A → A. Par
conséquent, par dénition d'un objet terminal, le seul morphisme de T vers lui-même
20 3 CATÉGORIES ABÉLIENNES

est 1T , de même pour T 0 .


Puique T est un objet terminal, il existe un et un seul morphisme r : T 0 → T . De
même, puisque T est terminal, il existe un et un seul morphisme s : T → T 0 . Ainsi,
r ◦ s est un morphisme de T vers T et donc r ◦ s = 1T . On déduit de la même manière
que s ◦ r = 1T 0 , ce qui conclut la preuve. u
t
Proposition 3.3
Si une catégorie possède un objet initial, il est unique à isomorphisme près.
Démonstration.
Cette proposition découle de la précédente et du principe de dualité. u
t
Dénition 3.4 (Objet zéro)
Un objet qui est à la fois initial et terminal est appelé objet zéro, on le note 0.
Remarque 3.5
(i) Puisque les objets initiaux et terminaux sont uniques à isomorphisme près, l'objet
zéro l'est aussi.
(ii) La notion d'objet zéro est auto-duale, par dénition.
Exemples 3.6
(i) Dans la catégorie Set, l'objet initial est l'ensemble vide. Tout singleton est un
objet terminal. Par conséquent, il n'y a pas d'objet zéro dans Set.
(ii) Dans la catégorie Grp, le groupe trivial est un objet zéro, puisqu'il est à la fois
initial et terminal.
(iii) Dans la catégorie Rng, l'objet terminal est l'anneau A à un seul élément pour
lequel 1A = 0A . Puisque pour tout anneau A, il existe un et une seul homomor-
phisme d'anneau f : Z → A, Z est un objet initial. Puisque les objets initiaux et
terminaux ne coïncident pas, cette catégorie ne possède pas d'objet zéro.
Dénition 3.7 (Morphisme zéro)
Dans une catégorie A possédant un objet zéro, un morphisme f : A → B est appelé
morphisme zéro s'il existe g : A → 0 et h : 0 → B tels que f = h ◦ g .
Exemple 3.8
Un morphisme f : G → H de la catégorie Grp est zéro s'il envoie tous les éléments
de G sur l'élément neutre de H .
Remarque 3.9
La notion de morphisme zéro est auto-duale.
Maintenant que la notion de morphisme zéro est dénie, on peut introduire la
notion de noyau, et par dualité, de conoyau.

3.1.2 Noyaux et conoyaux

Dénition 3.10 (Noyau, conoyau)


(i ) Dans une catégorie possédant un élément 0, le noyau d'un morphisme f : A → B
est déni comme l'égaliseur, s'il existe, de f et du morphisme 0 : A → B .
Autrement dit, k : K → A est le noyau de f si f ◦ k = 0 ◦ k = 0 et si pour tout
couple (M, m) avec la propriété f ◦ m = 0, il existe un unique morphisme r tel
que le diagramme suivant commute :

MA
AA
AAm
∃!r AA
 A
k /A
f
//
K B
0

Diagramme 11: Noyau


3.2 Dénition et premiers exemples 21

(ii ) Le conoyau d'un morphisme est déni de manière duale.


Proposition 3.11/
Soit f, g : A / B deux morphismes d'une catégorie C . On a alors
h i
(i ) f ◦ t = 0 ⇔ g ◦ t = 0 ∀X ∈ C , ∀t : B −→ X ⇒ ker(f ) = ker(g) ;
h i
(ii ) t̃ ◦ f = 0 ⇔ t̃ ◦ g = 0 ∀X̃ ∈ C , ∀t̃ : X̃ −→ A ⇒ coker(f ) = coker(g).

Démonstration.
(i) Notons (K, k) = ker(f ) et (Q, q) = ker(g). On a alors par dénition, f ◦ k = 0,
ainsi g ◦ k = 0 et donc, il existe un morphisme c : Q −→ K tel que k ◦ c = q . De
même, en inversant le rôle de k et de q , on obtient l'existence de c̃ : K −→ Q tel
que q ◦ c̃ = k. On a alors
q ◦ c̃ ◦ c = k ◦ c = q, k ◦ c ◦ c̃ = q ◦ c̃ = k.
Or, k, q sont des monomorphismes car ce sont des égaliseurs. Par conséquent
= Q, ce qui donne ker(f ) = ker(g).
c−1 = c̃ et donc K ∼
(ii) Découle de (i) et de la dualité.
u
t

3.2 Dénition et premiers exemples


Nous continuons notre chemin vers la dénition de catégorie abélienne en introdui-
sant maintenant les catégories pré-additives, qui possèdent une structure de groupe
abélien sur les ensembles de morphismes.
Dénition 3.12 (Catégorie pré-additive)
Une catégorie pré-additive est une catégorie A telle que :
• (A1) pour tous X, Y ∈ A , A (X, Y ) possède une structure de groupe abélien ;
• (A2) pour tous X, Y, Z ∈ A , A (X, Y ) × A (Y, Z) −→ A (X, Z) est bilinéaire,
c'est à dire, si f, g ∈ A (X, Y ), h, k ∈ A (Y, Z), on a :
(f + g) ◦ h = f ◦ h + g ◦ h, f ◦ (h + k) = f ◦ h + f ◦ k.
Autrement dit, la loi de compostion est un homomorphisme de groupes dans chaque
variable.
Remarque 3.13
Par dénition, la notion de catégorie pré-additive est auto-duale. Ainsi, la catégorie
duale d'une catégorie préadditive est elle-même préadditive.
Exemple 3.14
La catégorie Ab des groupes abéliens est une catégorie pré-additive. En eet, pour
tout X, Y ∈ Ab, on peut dénir une structure de groupe abélien sur Ab(X, Y ) de la
façon suivante : si f, g ∈ Ab(X, Y ),
(f + g)(x) = f (x) + g(x).
De plus, si h ∈ Ab(Z, X),
 
(f + g) ◦ h (z) = f (h(z)) + g(h(z)), ∀z ∈ Z,
et donc
(f + g) ◦ h = f ◦ h + g ◦ h.
Enn, si h ∈ Ab(X, Z),
 
h ◦ (f + g) (x) = h(f (x) + g(x)) = h(f (x)) + h(g(x)), ∀x ∈ X,
car h est un homomorphisme, et donc h ◦ (f + g) = h ◦ f + h ◦ g , ce qui prouve le
résultat.
22 3 CATÉGORIES ABÉLIENNES

Dénition 3.15 (Catégorie abélienne)


Une catégorie abélienne est une catégorie pré-additive A vériant les axiomes supplé-
mentaires suivants :
• (A3) il existe un objet zéro 0 ∈ A ;
• (A4) les produits et coproduits existent dans A ;
• (A5) tous les morphismes de A ont un noyau et un conoyau ;
• (A6) tous les monomorphismes de A sont des noyaux, tous les épimorphismes
sont des conoyaux.
Remarque 3.16
La notion de catégorie abélienne est auto-duale. Par conséquent, le principe de dualité
s'applique aussi dans les catégories abéliennes.
Exemples 3.17
(i) La catégorie Ab est une catégorie abélienne. En eet elle est pré-additive (voir
exemple 3.14). Vérions les axiomes :
• (A3) L' objet zéro est le groupe trivial.
• (A4) Les produits et coproduits de groupes abéliens existent toujours (ils sont
donnés dans les exemples 2.29 et 2.32).
• (A5) Le noyau d'un morphisme f : X −→ Y est exactement (ker(f ), i) où
ker(f ) est pris au sens de la théorie des groupes et i est l'injection canonique
de celui-ci dans X (voir exemple 2.36), le conoyau d'un homomorphisme f :
X −→ Y est exactement (Y /f (X),  π) (voir exemple 2.39).
• (A6) Tout monomorphisme f : X  / Y est le noyau de π : Y −→ Y /f (X),
tout épimorphisme g : X / / Y est le conoyau de l'injection de son noyau
(au sens de la théorie des groupes) dans son domaine.
(ii) Construisons la catégorie B de la façon suivante : |B| = N. Pour tout couple d'en-
tiers non nuls (n, m), B(n, m) = Mat(m, n, K), où Mat(m, n, K) est l'ensemble
des matrices à coecients dans un corps K. Si m ou n est nul, B(n, m) = {0}.
On dénit la composition par multiplication de matrices, et dans le cas de la
composition avec 0, l'image est l'élément neutre du groupe de matrice. Cette
catégorie est abélienne. En eet, par dénition, les axiomes (A1), (A2) et (A3)
sont vériés.
Le produit et le coproduit de deux entiers coïncident et sont la somme des deux
entiers, pour des projections bien choisies.
De même, le noyau d'une matrice A est dim ker(A), son conoyau est dim ker(At ).
Vérier le dernier axiome s'avère un peu technique et nous ne le ferons pas ici.
Les résultats d'algèbre linéaire nous disent que l'on peut voir cette catégorie
comme celle des espaces vectoriels de dimension nie sur un corps K, quotienté
par la relation d'équivalence sur les objets isomorphes. On remarque que cette
catégorie abélienne est abstraite.
La proposition suivante justie l'appelation des morphismes zéros, en montrant
qu'ils sont les éléments neutres de groupes abéliens.
Proposition 3.18
Le morphisme zéro d'un objet X vers un objet Y d'une catégorie abélienne A est
l'élément neutre du groupe abélien A (X, Y ).
Démonstration.
Soit 0 : A −→ B le morphisme zéro de A (X, Y ). On a 0 = g ◦ h où g ∈ A (0, Y ),
h ∈ A (X, 0) et |A (0, Y )| = |A (X, 0)| = 1 par dénition de l'objet 0. Par conséquent
on a que g est l'élément neutre de A (0, Y ). Par conséquent, puisque la loi de compo-
sition est bilinéaire, 0 : A −→ B est l'élément neutre de A (X, Y ). u
t

3.3 Premiers résultats pour les catégories abéliennes


On va d'abord s'intéresser aux implications des axiomes des catégories sur les
propriétés des morphismes présentés dans la section 2.4.
3.3 Premiers résultats pour les catégories abéliennes 23

Proposition 3.19
Soit A une catégorie abélienne X, Y ∈ A et f : X −→ Y . Alors,
(i ) f est un monomorphisme si et seulement si ker(f ) = 0.
(ii ) f est un monomorphisme si et seulement si pour tout Z dans A , pour tout
morphisme g : Z −→ X tel que f ◦ g = 0, on a g = 0.
(iii ) f est un épimorphisme si et seulement si coker(f ) = 0.
(iv ) f est un isomorphisme si et seulement si f est un monomorphisme et un épi-
morphisme.
Démonstration.
/
(i) Soit f : X −→ Y et g, h : Q / X tels que ker(f ) = 0 et f ◦ g = f ◦ h. Alors
f ◦ (g − h) = 0. Par conséquent f ◦ (g − h) = 0 ◦ (g − h) et donc par dénition du
noyau, il existe un unique morphisme de Q vers 0 qui fait commuter le diagramme
suivant :

Q@
@@ g−h
@@
0 @@
  f
/
0 0 /X /Y
0

Ainsi, g − h = 0, ce qui implique que g = h et, nalement, que f est un mono-


morphisme.
Réciproquement, si f est un monomorphisme, alors si g : Q −→ X vérie
f ◦ g = 0 ◦ g = 0 = f ◦ 0, alors g = 0 et donc 0 vérie la dénition de noyau,
puisqu'il existe un unique morphisme 0 : Q −→ 0 et qu'alors le diagramme du
noyau commute, c'est-à-dire 0 ◦ 0 = 0 = g .
(ii) Supposons que pour tout Z dans A , pour tout morphisme g : Z −→ X tel que
f ◦ g = 0, on ait g = 0. Alors par dénition, (0, 0) vérie les propriétés du noyau
et donc par (i) f est un monomorphisme.
Réciproquement, supposons que f soit un monomorphisme et soit g : Z −→ X
soit tel que f ◦ g = 0 = f ◦ 0, alors g = 0.
(iii) Découle de (i) et du principe de dualité.
(iv) Le fait qu'un isomorphisme soit un épimorphisme et un monomorphisme est
assuré par la remarque 2.24.
L'axiome (A6), implique que si f : Z −→ X est un monomorphisme, il existe
g : X −→ Y tel que f = ker g . Par conséquent,

g ◦ f = 0 ◦ f ⇒ g = 0,

où l'on a utilisé le fait que f est un épimorphisme. Or, le noyau d'un morphisme
0 : X −→ Y est un isomorphisme. En eet, (X, 1X ) vérie la dénition, puisque
pour tout g : X −→ A, g est l'unique morphisme vériant 1A ◦ g = g . Puisque
le noyau est unique à isomorphisme près (voir proposition 2.35, page 16), on
obtient l'existence de f 0 ∈ A (X, Z) un isomorphisme tel que le diagramme
suivant commute :

ZT @o
@@
@@
@@
@@f
f 0−1 f0 @@
@@
@@
 @
/X
0 //
X 1
Y
X 0
24 3 CATÉGORIES ABÉLIENNES

Par conséquent f = f 0 −1 ◦ 1X = f 0 −1 et donc f est l'inverse de f 0 et réciproque-


ment, et donc f est un isomorphisme.
u
t
La proposition suivante assure l'existence des pullback dans une catégorie abé-
lienne. Elle complète aussi, dans le cas des catégorie abélienne, la proposition 2.45
page 18. Elle sera très utile pour construire les outils de la chasse dans les diagrammes.
Proposition 3.20
(i ) Le pullback de deux morphismes existe toujours dans une catégorie abélienne.
(ii ) Le pullback d'un épimorphisme est un épimorphisme
Démonstration.
(i) Dans une catégorie abélienne, les produits existent toujours et chaque morphisme
possède un noyau. Ce dernier point implique que l'égaliseur de deux morphismes
f et g existe toujours : il sut de prendre le noyau de f − g . On va ainsi pouvoir
construire le pullback à partir de ces éléments, en utilisant l'approche fournie
par John Armstrong (voir [5]).
Durant la preuve nous utiliserons les diagrammes 12 et 13. Soient f : B −→ C
et g : D −→ C deux morphismes d'une catégorie abélienne, ainsi que (P, πf , πg )
le produit de B et D. Les morphismes f ◦ πf et g ◦ πg sont deux morphismes
de P vers C , desquels on va prendre l'égaliseur m : S −→ P . On pose main-
tenant f 0 = πg ◦m et g 0 = πf ◦m et on arme que (f 0 , g 0 ) est le pullback de (f, g).

X
β

X+ y

  +++
 +  !
  x +++ S 0
/D
 ++ α f =πg ◦m
α 
 ++β
 ++
 P + g 0 =πf ◦m g
A AA ++
  ~~~ AA +
 ~~π πg AA++   
 ~~~ f  B /C
B D f

Diagramme 12: Pullback (1) Diagramme 13: Pullback (2)

Le fait que g ◦ f 0 = f ◦ g 0 est évident, par construction des morphismes f 0 et


g 0 . On aimerait montrer que pour tout couple de morphismes α : X −→ B
et β : X −→ D, tels que g ◦ β = f ◦ α, il existe un unique morphisme
y : X −→ S faisant commuter le diagramme 13. Une fois donné un couple
(α, β), par dénition du produit, il existe un unique morphisme x faisant com-
muter le diagramme 12. Nous allons montrer que le morphisme x est tel que
f ◦ πf ◦ x = g ◦ πg ◦ x :
f ◦ πf ◦ x = f ◦ α
= g◦β
= g ◦ πg ◦ x,
où nous avons utilisé la commutativité des deux diagrammes ci-dessus. Ainsi,
par dénition de l'égaliseur, il existe un unique morphisme y : X −→ S tel que
m ◦ y = x. On a donc πg ◦ m ◦ y = πg ◦ x = β et, de même, πf ◦ m ◦ y = πf ◦ x = α,
ce qui implique que y fait bien commuter le diagramme 13.
3.4 Existence de l'image 25

(ii) La preuve de cette assertion est donnée dans le livre de Francis Borceux (voir [2]),
à la page 29 (il s'agit de la proposition 1.7.6). Pour utiliser cette démonstration,
iI faudra préalablement dénir et obtenir l'existence du biproduit, ceci est fait
dans le même livre à la page 4, proposition 1.7.6.
u
t

3.4 Existence de l'image


Les résultats suivants nous permettent de montrer que dans une catégorie abé-
lienne, chaque morphisme possède une image. Cette existence, associée au fait que le
noyau de chaque morphisme existe, est nécessaire pour la dénition de suite exacte,
concept essentiel utilisé dans un grand nombre de lemmes de diagrammes, dont quelques-
uns sont présentés plus bas. L'existence de ces constructions (produit, pullback, image,
égaliseur, etc.) justie à elle seule l'utilisation de catégories abéliennes. Par la suite,
nous suivons de nouveau l'approche de Francis Borceux [2].

Lemme 3.21
Si le morphisme x est un noyau, alors ker(coker(x)) = x.
Démonstration.
Montrons que, pour tout morphisme u : A −→ B , ker(coker(ker(u))) = ker(u).
On se réfère au diagramme ci-dessous. Soit (K, k) = ker(u), (Q, q) = coker(k) et
(K 0 , k 0 ) = ker(q). On a alors q ◦k = 0 et donc l'existence d'un morphisme c : K −→ K 0
tel que k0 ◦ c = k. Par ailleurs, u ◦ k = 0 et donc il existe s : Q −→ B tel que s ◦ q = u.
Ainsi, u ◦ k = s ◦ q ◦ k = 0. Or (K, k) = ker(u), ce qui implique l'existence d'un
morphisme c0 : K 0 −→ K tel que k ◦ c0 = k0 .

QO A
AA
AAs
q AA
A
Kh
k /A u /B
0
c
O
k0
c
'
K0

Par conséquent,
k 0 ◦ c ◦ c0 = k ◦ c0 = k 0 , k ◦ c0 ◦ c = k 0 ◦ c = k.
Or, par la proposition 2.37 page 16, k et k0 sont des monomorphismes et donc c0 = c−1 ,
K∼= K 0 et ainsi ker(coker(ker(u))) = ker(u).
Maintenant, x = ker(u) pour un certain u et donc le résultat s'en suit. u
t
Proposition 3.22
(i ) Dans une catégorie abélienne A pour toute morphisme f : A −→ B il existe

C ∈A, m: C / B un monomorphisme et e : A / / C un épimorphisme,
tel que f = m ◦ e. On appelle cette décomposition factorisation par l'image. De
plus m = ker(coker(f )) et e = coker(ker(f )).
(ii ) Soit f : A −→ B , f 0 : D −→ E , g : A −→ D, h : B −→ E tels que h ◦ f = f 0 ◦ g .
Autrement dit, f, f 0 , g et h sont tels que le diagramme suivant est commutatif :

A
f
/B
g h
 
D /E
f0
26 3 CATÉGORIES ABÉLIENNES

Soit f 0 = m0 ◦ e0 une factorisation de f 0 où m0 est un monomorphisme et e0 un


épimorphisme, alors il existe un unique k tel que le diagramme 14 est commuta-
tif :

#
A
e / / C  m /B
s k h
  
D / / •  /; E
e0 m0

f0

Diagramme 14: Factorisation par l'image

Démonstration.
Pour cette preuve, nous nous sommes inspirés du livre de Saunders Mac Lane [3].
(i) On se réfère au diagramme 15. Notons (K, k) = ker(f ) et (E, e) = coker(ker(f )).
On a que f ◦ k = 0 et la dénition de e implique l'existence et l'unicité de
m : E −→ B tel que m ◦ e = f .
On doit maintenant prouver que m est un monomorphisme. Pour cela considérons
x : X −→ E tel que m◦x = 0. On veut montrer que x = 0. On a par dénition du
conoyau que m se factorise à travers (Q, q) = coker(x), On note r le morphisme
tel que m = r ◦ q . Or, par la proposition 2.40 page 17, on a que e, q sont des
épimorphismes, et donc, on voit facilement que q ◦ e l'est aussi. Par conséquent,
par l'axiome (A6), il existe h tel que (Q, q ◦ e) = coker(h). De plus
f ◦ h = r ◦ (q ◦ e) ◦ h = r ◦ 0 = 0.

Il existe donc un morphisme l : H −→ K tel que k ◦ l = h, puisque (K, k) =


ker(f ). Par conséquent, e ◦ h = e ◦ k ◦ l = 0 ◦ l = 0. Or, (Q, q ◦ e) = coker(h) et
il existe donc s : Q −→ E tel que s ◦ e = s ◦ q ◦ e. Or, e est un épimorphisme et
donc s ◦ q = 1E . On obtient donc que q est un monomorphisme. De plus q ◦ x = 0
et donc x = 0.
Ainsi, m est un monomorphisme. On a donc prouvé que f = m ◦ e avec m
monomorphisme et e = coker(ker(f )). Il reste à montrer que m = ker(coker(f )).

H
}}
}
s
}} h
~}} 
K k /A /B
f
~~? O
~ r
e ~~
 ~~~s m
X /Eo //Q
x q

Diagramme 15: Factorisation par l'image : Preuve que m est un monomorphisme

Maintenant, e est un épimorphisme et donc pour tout t : B −→ N , t ◦ f = 0 si


et seulement si t ◦ m = 0. Par la proposition 3.11 page 21, on obtient
coker(f ) = coker(m).
Or, m est un monomorphisme donc un noyau par l'axiome (A6), et par le
lemme 3.21,
m = ker(coker(m)) = ker(coker(f )).
3.4 Existence de l'image 27

(ii) Soit q = coker(f 0 ). On a alors 0 = q ◦ f 0 ◦ s = q ◦ h ◦ m ◦ e et donc q ◦ h ◦ m = 0.


Par conséquent, il existe un unique k tel que h ◦ m = ker(q) ◦ k. Or, comme dans
la partie (i),
ker(coker(f 0 )) = ker(coker(m0 )) = m0 .
Il reste à montrer que le diagramme commute, c'est à dire que e0 ◦ s = k ◦ e. Or,
on a que h ◦ m ◦ e = m0 ◦ e0 ◦ s et donc h ◦ m = ker(q) ◦ k = m0 ◦ k implique
m0 ◦ k ◦ e = m0 ◦ e0 ◦ s, et on a le résultat du fait que m0 est un monomorphisme.
u
t
Proposition 3.23 
Soit f : A −→ B un morphisme, I ∈ A , m : I  /B , e : A / / I tel que m ◦ e
soit la factorisation de f par l'image, et r : J  / B , s : A −→ J tel que r ◦ s soit
une autre factorisation de f . Alors il existe un unique morphisme h : I −→ J telle
que le diagramme suivant commute :

A
e //I
_
h
s m
  
J r
/B

Démonstration.
Reprenons les mêmes notations que dans l'énoncé et appliquons la proposition 3.22
(ii) au diagramme ci-dessous. On obtient ainsi l'existence d'un unique morphisme
h : I −→ J tel que le diagramme commute.

A
e / / I  m /B
g h 1B
  
J / / J  /B
1J m0

Le résultat s'ensuit alors par composition avec les identités. u


t

Proposition 3.24
Soit f : A −→ B un morphisme d'une catégorie abélienne A . Par la proposition

3.22
page 25, il existe un objet C ∈ A ainsi qu'un monomorphisme m : I  / B et un
épimorphisme e : A / / I . Alors m est l'image de f .

Démonstration.
Soit un triple (J, v, u) où J est un objet de C , v un morphisme de A vers J et u un
monomorphisme de J vers B tel que f = u ◦ v . Il faut montrer qu'il existe un unique
morphisme h : I −→ J faisant commuter le diagramme suivant :

A* ?
f
/B
?
** ?? e  ? I
m  
** ???  
** ?  / 
** I 
*
v ** u
** 
** 
** 
**  
 7
J
28 3 CATÉGORIES ABÉLIENNES

En appliquant la proposition 3.23, page 3.23, on obtient l'existence et l'unicité du


morphisme h voulu. u
t

Corollaire 3.25
Dans une catégorie abélienne, l'image d'un morphisme existe toujours.
Démonstration.
Découle directement de la proposition 3.22 et de la proposition précédente. u
t

3.5 Suite exacte


Le concept de suite exacte, essentiel dans les lemmes de diagrammes, est bien
déni dans les catégories abéliennes, où l'existence de l'image et du noyau de chaque
morphisme est assurée.
Dénition 3.26 (Suite exacte)
(i ) Soit C une catégorie abélienne et deux morphismes composables f et g . Alors

A
f
/B g
/C

est appelée suite exacte si imf = ker g .


(ii ) De manière plus générale, une suite de morphismes, nie ou innie,
fi+1
··· / Ai fi
/ Ai+1 / Ai+2 . . .

est dite exacte si chaque paire de morphismes consécutifs est exacte.


Proposition 3.27
Dans une catégorie abélienne, soit le diagramme commutatif suivant :

A>
g
/B h /C
>> @ ?? ?
>> ?? 
e >>
? 
>  / m f ??   /  n
I J,

où (e, m) et (f, n) sont les factorisations en image de g et h, respectivement. Alors,


on a l'équivalence suivante :
(i ) (g, h) est une suite exacte ;
(ii ) (m, f ) est une suite exacte.
Démonstration.
Remarquons d'abord que puisque n est un monomorphisme, ker(h) = ker(f ) (propo-
sition 3.11 page 21). On a aussi que im(f ) = i = im(i). Ainsi, l'égalité ker(g) = im(f )
est équivalente à l'égalité ker(q) = im(f ) = im(i). u
t

Proposition 3.28 (Autodualité de la notion de suite exacte)


Dans une catégorie abélienne, la notion de suite exacte est autoduale, c'est-à-dire que
si (f, g) est une suite exacte dans une catégorie abélienne, alors (g ∗ , f ∗ ) est exacte
dans A ∗ , et réciproquement.
Démonstration.
Dans une catégorie abélienne A , reprenons les morphismes f et g ainsi que leur décom-
position comme dans la proposition 3.27. Supposons que la suite (h∗ , g ∗ ) soit exacte
dans A ∗ . Par la proposition précédente, cela implique que l'image de h∗ , qui est f ∗
soit égale à ker(m) dans A , et donc que f = coker(m) dans A . Par conséquent,
3.6 Préliminaires à la chasse dans les diagrammes 29

ker(f ) = ker coker(m) . Puisque, dans une catégorie abélienne, tous les monomor-


phismes sont des noyaux, on obtient, par le lemme 3.21, que ker coker(m) = m, et


donc que ker(f ) = m, ce qui implique que la suite (g, h) est exacte dans A .
Réciproquement, si la suite (g, h) est exacte dans A , la suite (h∗ , g ∗ ) est exacte dans
A ∗ par ce que l'on a fait avant et le principe de dualité. u
t

Proposition 3.29
On a les équivalences suivantes :

(i ) 0 /A f
/ B est une suite exacte si et seulement si f est un monomor-
phisme ;
(ii ) B
f
/A / 0 est une suite exacte si et seulement si f est un épimorphisme.

Démonstration.
(i) On sait que (0, f ) est une suite exacte si et seulement si ker(f ) = im(0) = 0, ce
qui est le cas si et seulement si f est un monomorphisme (voir point (i) de la
proposition 3.19).
(ii) Découle du point précédent et du principe de dualité.
u
t

3.6 Préliminaires à la chasse dans les diagrammes


3.6.1 Pseudo-éléments

Considérons la proposition suivante :


Lemme 3.30 (Lemme des 5 (première version))
Dans la catégorie Ab, considérons le diagramme commutatif suivant, dans lequel les
deux lignes sont des suites exactes. Si , ζ, θ et λ sont des isomorphismes de groupes,
alors η est un isomorphisme de groupe :

β γ
A
α /B /C /D δ /E

 ζ η θ λ
 µ   ξ  
F /G ν /H /I π / J.

Diagramme 16: Lemme des 5 (première version)

Pour prouver, dans un premier temps, que η est injectif, on pourrait se donner un
élément x ∈ C tel que η(x) = 0 et montrer ensuite que x = 0. Cette manière de
procéder fonctionne si les objets de la catégorie sont des ensembles dans lesquels
on peut choisir des éléments, par exemple dans les groupes, les espaces vectoriels, les
modules. . . Puisque l'on ne peut pas garantir cette propriété dans toute catégorie abé-
lienne, on va travailler avec des pseudo-éléments, introduits dans la dénition suivante.

Dénition 3.31 (Pseudo-élément, pseudo-égalité et pseudo-image)


Soit C une catégorie abélienne, A ∈ C et un morphisme f : A → B .
(i ) Un pseudo-élément de A est un morphisme • −→ A (avec codomaine A), où •
a

est un objet quelconque. On écrit alors a ∈∗ A.


a0
(ii ) Deux pseudo-éléments X −→ A et X 0 −→ A sont dits pseudo-égaux s'il existe
a

des épimorphismes p et p0 tels que le diagramme suivant commute :


30 3 CATÉGORIES ABÉLIENNES

Y
p
//X

p0 a
 
a0 /A
X0

Diagramme 17: Pseudo-égalité

(iii ) La pseudo-image d'un pseudo-élément • −→ A par f est la composition f ◦ a,


a

que l'on notera aussi f (a).


Exemple 3.32
Dans certains cas, il est facile de mettre en relation les éléments d'un groupe abélien
avec ceux d'un ensemble de morphismes. C'est notamment le cas si le domaine de
ces morphismes est Z. En eet, un homomorphisme f de Z dans un groupe abélien
G = (A, ?) est entièrement déterminé par l'image de 1 : si on pose, pour a ∈ G,
f (1) = a, on a :
 
f (m) ? f (n) = | ? a ?{z. . . ? a} ? a
a | ? a ?{z. . . ? a}
m n

| ? a ?{z. . . ? a} = f (m + n),
= a
m+n

et donc f est bien un homomorphisme de groupes. En fait, il est facile de montrer que
A est isomorphe (en tant qu'ensemble) à hom(Z, A) : à chaque élément du groupe on
assigne l'homomorphisme déni ci-dessus.

3.6.2 Propriétés des pseudo-éléments et de la pseudo-égalité

Proposition 3.33
La pseudo-égalité est une relation d'équivalence sur les pseudo-éléments d'un objet A.

Démonstration.
Nous utiliserons ici les notations de la dénition 3.31.
(i) La réexivité et la symétrie sont immédiates.
(ii) Montrons maintenant la transitivité. Soient a, a0 , a00 ∈∗ A tels que a =∗ a0 et
a0 =∗ a00 . Par dénition de la pseudo-égalité, il existe des épimorphismes p, p0 , p00
et p000 tels que le diagramme suivant commute :

q • q0

p0 p00 
• //•oo •
p a0 p000
  
• /Ao •
a a00

Diagramme 18: Transitivité de la relation de pseudo-égalité

En prenant le pullback, qui existe toujours dans une catégorie abélienne, des
morphismes p0 et p00 , on a l'existence de morphismes q et q 0 tels que p0 ◦q = p00 ◦q 0 .
Puisque, dans une catégorie abélienne, le pullback d'un épimorphisme est un
épimorphisme (voir 3.20 page 24), on a que q et q 0 sont des épimorphismes.
Ainsi, p ◦ q et p000 ◦ q 0 sont des épimorphismes tels que a ◦ p ◦ q = a00 ◦ p000 ◦ q 0 , ce
qui implique que a =∗ a00 .
3.6 Préliminaires à la chasse dans les diagrammes 31

u
t

Pour un objet A d'une catégorie abélienne, il peut exister plusieurs morphismes


0 ∈∗ A, chacun avec un domaine diérent. La proposition suivante montre que ces
diérents pseudo-éléments sont tous pseudo-égaux entre eux. Pour un morphisme f
ayant pour domaine A, cela permettra de faire le lien entre f = 0 et f (a) =∗ 0 pour
tout a ∈∗ A.
Proposition 3.34
Soit A un objet d'une catégorie abélienne. Alors il existe une classe d'équivalence pour
la relation de pseudo-égalité établie sur les pseudo-éléments de A constituée d'exacte-
ment tous les morphismes 0 avec codomaine A.
Démonstration.
Soit a ∈∗ A et un morphisme zéro 0(B,A) : B −→ A tels que a =∗ 0(B,A) . Alors il
existe un objet C et des épimorphismes c1 : C −→ B , c2 : C −→ codom(a) tels que
0 = 0(B,A) ◦ c1 = a ◦ c2 . Ainsi, puisque c2 est un épimorphisme, a = 0.
Par conséquent, la classe d'un morphisme zéro de codomaine A ne contient que des
morphismes zéro de codomaine A.
Montrons maintenant que les morphismes zéros de même codomaine sont pseudo-
égaux. Soient donc deux morphismes zéros, 0(B,A) : B −→ A et 0(C,A) : C −→ A.
Utilisons l'axiome (A4) pour constuire (B × C, pB , pC ) le produit de B et de C . Pour
montrer que pB et pC sont des épimorphismes, il sut de montrer le résultat pour
pB , puisque la situation est symétrique. Considérons le triple (B, 1B , 0(B,C) ) Alors la
dénition de produit nous donne l'existence d'un morphisme d : B −→ B × C tel que
pB ◦ d = 1B . Par conséquent pB ◦ d est un épimorphisme, et par la proposition 2.22
page 11, on obtient que pB est en aussi un. Ainsi, le couple d'épimorphismes (pB , pC )
donne la pseudo-égalité recherchée. u
t

Proposition 3.35 (Pseudo-éléments et morphisme zéro)


Dans toute catégorie abélienne C , on a les équivalences suivantes :
(i ) f : A −→ B est un morphisme zéro ;
(ii ) pour tout a ∈∗ A, f (a) =∗ 0 ;

Démonstration.
Supposons que f = 0. Alors f (a) = f ◦ a = 0, et donc, par la proposition précédente,
f (a) =∗ 0.
Réciproquement, supposons que f (a) = 0 pour tout a ∈∗ A, on a donc f = f (1A ) =∗ 0,
ce qui implique, à nouveau par la proposition précédente, que f = 0. u
t

Proposition 3.36 (Pseudo-éléments et monomorphismes)


Dans toute catégorie abélienne C , on a les équivalences suivantes :
(i ) f : A −→ B est un monomorphisme ;
(ii ) pour tous a, a0 ∈∗ A, f (a) =∗ f (a0 ) ⇒ a =∗ a0 ;
(iii ) pour tout a ∈∗ A, f (a) =∗ 0 ⇒ a =∗ 0.

Démonstration.
(i) ⇒ (ii) Supposons que f soit un monomorphisme et soient a, a0 ∈∗ A tels que
f (a) =∗ f (a0 ). Ainsi, par dénition, il existe p et p0 , des épimorphismes, tels que
f ◦ a ◦ p = f ◦ a0 ◦ p0 . Puisque f est un monomorphisme, on a a ◦ p = a0 ◦ p0 , et
donc a =∗ a0 .
(ii) ⇒ (iii) Supposons maintenant que la condition (ii) soit satisfaite. Alors, (iii) est
satisfaite comme cas particulier en prenant a0 = 0.
(iii) ⇒ (i) Cela provient du point (ii) de la proposition 3.19 et de la proposition 3.34.
u
t
32 3 CATÉGORIES ABÉLIENNES

Proposition 3.37 (Pseudo-éléments et épimorphismes)


Dans toute catégorie abélienne C , on a les équivalences suivantes :
(i ) f : A −→ B est un épimorphisme ;
(ii ) pour tout b ∈∗ B , il existe a ∈∗ A tel que f (a) =∗ b.
Démonstration.
(i) ⇒ (ii) Supposons que f soit un épimorphisme et soit b ∈∗ B . Soit maintenant
(a, f 0 ) le pullback de (b, f ). Puisque f est un épimorphisme, f 0 l'est aussi par la
proposition 3.20 page 24. On a ainsi le carré commutatif suivant :

f0
X //•
a b
 
A //B
f

Diagramme 19: Pseudo-éléments et épimorphismes

Ainsi, on a que b ◦ f 0 = f ◦ a = f ◦ a ◦ 1X , et donc que f (a) =∗ b.


(ii) ⇒ (i) Soit maintenant un morphisme f satisfaisant la condition (ii). Il existe donc
a ∈∗ A tel que f (a) =∗ 1B , ce qui implique l'existence de deux épimorphismes
p et p0 tels que f ◦ a ◦ p = 1B ◦ p0 . Par la proposition 2.22 page 11, puisque le
membre de droite est un épimorphisme, f l'est aussi.
u
t
Proposition 3.38 (Pseudo-éléments et suites exactes)
Dans toute catégorie abélienne C , on a les équivalences suivantes :
f g
(i ) A −→ B −→ C est une suite exacte ;
(ii ) pour tout a ∈∗ A, g f (a) =∗ 0 et pour tout b ∈∗ B tel que g(b) =∗ 0 il existe


a ∈∗ A tel que f (a) =∗ b.

Démonstration.
f g
(i) ⇒ (ii) Soit A −→ B −→ C une suite exacte. Soit m◦e la factorisation en image de
f donnée par la proposition 3.22. Puisque la suite est exacte, l'image m de f est
le noyau de g . Ainsi, g ◦ m = 0, ce qui implique que 0 = 0 ◦ e = g ◦ m ◦ e = g ◦ f
et donc g f (a) =∗ 0 pour tout a ∈∗ A.


Soit maintenant b ∈∗ B , tel que g(b) =∗ 0. On aimerait montrer qu'il existe


a ∈∗ A tel que f (a) =∗ b. Pour la suite, les domaines et codomaines des diérents
morphismes ne seront pas donnés explicitement, mais ils apparaissent dans le
diagramme 20. De nouveau, on va utiliser la factorisation m ◦ e de f , où, puisque
la suite est exacte, l'image m de f est égale au noyau de g . Par dénition du
noyau, puisque g ◦ b = 0, on a l'existence d'un morphisme c tel que b = m ◦ c.

Y
q
//X
@@
@@ b
@@
a c
@
   m @
A / / I /9 B / C.
e g

Diagramme 20: Pseudo-éléments et suites exactes (1)

Soit (a, q) le pullback, qui existe toujours dans une catégorie abélienne, des mor-
phismes (c, e). On a donc c ◦ q = e ◦ a, et donc, m ◦ c ◦ q = m ◦ e ◦ a, ce qui
3.6 Préliminaires à la chasse dans les diagrammes 33

implique que f ◦ a ◦ 1Y = f ◦ a = b ◦ q . Puisque e est un épimorphisme et que


le pullback d'un épimorphisme l'est aussi (voir 3.20 page 24), on a que f ◦ a =∗ b.

(ii) ⇒ (i) Pour la preuve, nous utiliserons le diagramme 21. Nous allons, à nouveau,
utiliser la factorisation en image m ◦ e de f . Il faut donc montrer que ker g = m.
Par hypothèse, on sait que pour tout a ∈∗ A, on a que g (f (a)) =∗ 0. En uti-
lisant la proposition 3.35, on déduit que g ◦ f = 0. Puisque f = m ◦ e, avec e
épimorphisme, on a que g ◦ m = 0. Pour montrer que m est eectivement le
noyau de g , il faut montrer que pour tout morphisme b tel que g ◦ b = 0, il existe
un unique morphisme r avec m ◦ r = b.

Soit donc b ∈∗ B avec g(b) =∗ 0. Par hypothèse, il existe a ∈∗ A tel que


f (a) =∗ b et donc, par dénition de la pseudo-égalité, des épimorphismes p et q
tels que m ◦ e ◦ a ◦ p = b ◦ q .
Soit maintenant le pullack (n, b0 ) de (m, b). Par dénition du pullback, puisque
m ◦ e ◦ a ◦ p = b ◦ q , il existe un unique morphisme z tel que n ◦ z = q et
b0 ◦ z = e ◦ a ◦ p. Puisque q est un épimorphisme et que n ◦ z = q , on obtient que
n est un épimorphisme (voir proposition 2.22 page 11) ; de plus, par la proposi-
tion 2.45, on sait que n est un monomorphisme et donc, par la proposition 3.19
point iv, n est un isomorphisme, il admet donc un inverse n−1 . Puisque l'on avait
b ◦ n = m ◦ b0 , on obtient que b = m ◦ b0 ◦ n−1 . Il reste à montrer l'unicité d'un tel
morphisme. Si t est un morphisme tel que b = m ◦ t, on aura m ◦ b0 ◦ n−1 = m ◦ t
et donc b0 ◦ n−1 = t, puisque m est un monomorphisme.

Z
}} AAA q
p
}} z AA
AA
~~}}}  n A
• • //•
a b0 b
  
A / / I  /B g
/C
e m

Diagramme 21: Pseudo-éléments et suites exactes (2)


u
t
Proposition 3.39
Soit f : A −→ B un morphisme. S'il existe a, a0 ∈∗ A tels que f (a) =∗ f (a0 ), alors il
existe a00 ∈∗ A tel que f (a00 ) =∗ 0 et pour tout morphisme g : A −→ C avec g(a0 ) =∗ 0,
on a g(a00 ) =∗ g(a).
Démonstration.
Soient a, a0 ∈∗ A tels que f (a) =∗ f (a0 ). Il existe donc des morphismes p et q tels que
la diagramme suivant commute :

X
}}> > AAA
}}
p AAa
}} AA
}} A
Y A A /B
AA q }> f
AA }}}
AA }
A }}} a0
X0

On pose alors a00 = a ◦ p − a0 ◦ q . En utilisant (A2), on a que f (a00 ) =∗ 0. Si g est


tel que g(a0 ) =∗ 0, on a, par le même argument, g(a00 ) = g ◦ a ◦ p − g ◦ a0 ◦ q , et donc,
puisque g(a0 ) =∗ 0, g(a00 ) = g ◦ a ◦ p, et, nalement, g(a00 ) =∗ g(a). u
t
34 4 LEMMES DE DIAGRAMMES

Avant de passer aux lemmes de diagrammes, nous aimerions souligner l'usage des
axiomes des catégories abéliennes dans les résultats obtenus. Les axiomes (A3) et
(A5) servent à assurer l'existence des noyaux et conoyaux, qui sont ensuite très lar-
gement utilisés. Par ailleurs les axiomes (A1), (A2) et (A4) sont nécéssaires pour
prouver les règles de chasse dans les diagrammes, tandis que l'axiome (A6) inter-
vient dans la preuve de l'existence de l'image, et assure le bon comportement des
isomorphismes (voir 3.19 page 23), que l'on utilise pour prouver le lemme des 5. Ainsi,
l'intégralité des axiomes sont utilisés et l'on peut donc armer que les catégories
abéliennes sont le bon contexte pour aborder les résultats qui vont suivre.

4 Lemmes de Diagrammes
Les lemmes de diagrammes sont des outils très utilisés en algèbre homologique et
en topologie algébrique, par exemple le lemme des 5, présenté ci-dessous, permet de
trouver des isomorphismes entre structures algébriques.

4.1 Lemme des 5


Lemme 4.1 (Lemme des 4)
Dans une catégorie abélienne, considérons le diagramme commutatif ci-dessous, dans
lequel les deux lignes sont des suites exactes. Si  est un épimorphisme et si ζ et θ
sont des monomorphismes, alors η est un monomorphisme.

β γ
A
α /B /C /D
_ _
 ζ η θ
   
F /G /H /I
µ ν ξ

Diagramme 22: Lemme des 4

Démonstration.
Durant la preuve, les propositions 3.35 à 3.38 seront utilisées sans mention explicite.
Pour montrer que η est un monomorphisme, on veut montrer que pour tout c ∈∗ C
tel que η(c) =∗ 0 on a c =∗ 0. Soit donc c ∈∗ C tel que η(c) =∗ 0. Composant
avec ξ , on aura que η ◦ ξ(c) =∗ 0. En utilisant la commutativité du diagramme, on
obtient que 0 =∗ ξ ◦ η(c) =∗ θ ◦ γ(c), ce qui implique que γ(c) =∗ 0, puisque θ est un
monomorphisme.
β γ
La suite B −→ C −→ D étant exacte, il existe b ∈∗ B tel que β(b) =∗ c. Grâce à
la commutativité du diagramme, on a l'égalité ν ◦ ζ(b) =∗ η ◦ β(b) =∗ η(c) =∗ 0.
µ
En utilisant le fait que la suite F −→ G −→ H est exacte, on obtient qu'il existe
ν

f ∈ F tel que µ(f ) = ζ(b). Puisque  est un épimorphisme, il existe a ∈∗ A tel que
∗ ∗

(a) =∗ f . On a donc, ζ ◦ α(a) =∗ µ ◦ (a) =∗ µ(f ) =∗ ζ(b), ce qui implique, puisque


ζ est un monomorphisme, que α(a) =∗ b.
En reprenant ce que l'on avait trouvé plus haut et en utilisant le fait que la suite
β
A −→ B −→ C est exacte, on trouve que c =∗ β(b) = β ◦ α(a) =∗ 0.
α
u
t

Lemme 4.2 (Lemme des 5)


Dans une catégorie abélienne, considérons le diagramme commutatif ci-dessous, dans
lequel les deux lignes sont des suites exactes. Si , ζ, θ et λ sont des isomorphismes,
alors η est un isomorphisme.
Démonstration.
Par la proposition 3.19 page 23, il sut de montrer que η est un monomorphisme et
un épimorphisme.
4.2 Lemme du serpent 35

β γ
A
α /B /C /D δ /E

 ζ η θ λ
    
F /G /H /I /J
µ ν ξ π

Diagramme 23: Lemme des 5

(i) En appliquant le lemme des 5 au diagramme 23, privé des objets E et J et des
morphismes correspondants, on a que η est un monomorphisme.
(ii) Grâce au principe de dualité et au lemme des 4 appliqué au diagramme 23, privé
des objets A et F , on obtient que η est un épimorphisme.
u
t

4.2 Lemme du serpent


En vue d'établir le lemme du serpent, nous allons commencer par le lemme du
noyau. Il s'avérera très utile par la suite.
Lemme 4.3 (Lemme du noyau)
Dans une catégorie abélienne, considérons le diagramme ci-dessous, dans lequel les
deux lignes (ζ, η), (0, ν, ξ) sont exactes, les carrés (1) et (2) commutent et les égalités
suivantes sont vériées :
γ = ker(θ), δ = ker(λ),  = ker(µ).

Alors, il existe des morphismes uniques α, β tels que le diagramme entier commute.
De plus, le couple (α, β) forme une suite exacte.

0 0 0

  
A
α /B β
/C
γ δ 
  
D
ζ
/E η
/F

θ (1) λ (2) µ
  
0 /G /H /I
0 ν ξ

Diagramme 24: Lemme du noyau

Démonstration.
(i) Dans un premier temps, montrons l'existence des morphismes α et β .
On commence par s'intéresser au colonnes 1 et 2. Puisque γ = ker(θ), et que le
carré (1) commute, on a λ ◦ ζ ◦ γ = ν ◦ θ ◦ γ = ν ◦ 0 = 0. Puisque δ = ker(λ),
il existe un unique morphisme α : A −→ B tel que ζ ◦ γ = δ ◦ α. On procède
de la même façon sur les colonnes 2 et 3 pour obtenir l'existence et l'unicité
de β : B −→ C qui est tel que η ◦ δ =  ◦ β . Le diagramme complet est alors
commutatif.
(ii) Il reste à montrer que (α, β) forme une suite exacte.
Pour cela, nous allons utiliser la propositon 3.38 page 32. Par la commutativité,
on a  ◦ β ◦ α = η ◦ ζ ◦ γ . Or, (ζ, η) est une suite exacte et donc η ◦ ζ = 0.
Ainsi,  ◦ β ◦ α = 0 et puisque  est un noyau, c'est un monomorphisme et donc
36 4 LEMMES DE DIAGRAMMES

β ◦ α = 0.
Il reste à montrer que pour tout b ∈∗ B tel que β(b) =∗ 0, il existe a ∈∗ A tel
que α(a) =∗ b.
Soit donc b ∈∗ B tel que β(b) =∗ 0. On a η ◦ δ(b) =  ◦ β(b) = 0. Par conséquent,
puisque (ζ, η) est une suite exacte, on obtient l'existence de d ∈∗ D tel que
ζ(d) =∗ δ(b). Par la commutativité, puisque λ◦δ = 0, il vient que 0 = λ◦δ(b) =∗
λ ◦ ζ(d) = ν ◦ θ(d), et donc ν ◦ θ(d) = 0. Or, par la proposition 3.29 page 29, ν est
un monomorphisme et donc θ(d) = 0. Si l'on note X = dom(d), le fait γ = ker(θ)
implique l'existence de a : X −→ A tel que γ ◦ a = d. Par la commutativité, on
obtient,
δ ◦ α(a) = ζ ◦ γ(a) = ζ(d) =∗ δ(b).
Puisque δ est un noyau, c'est un monomorphisme. En utilisant la proposition
3.36 page 31, on obtient α(a) =∗ b, le résultat désiré.
u
t
Lemme 4.4 (Lemme du serpent)
Dans une catégorie abélienne, considérons le diagramme ci-dessous, dans lequel les
deux lignes (ζ, η), (0, ν, ξ) sont exactes,
γ = ker(θ), δ = ker(λ),  = ker(µ),

π = coker(θ), ρ = coker(λ), σ = coker(µ),


et les carrés (1) et (2) commutent. Alors, il existe des morphismes α, β, τ, ϕ uniques
tels que le diagramme entier commute et un unique morphisme ω tel que la suite
(α, β, ω, τ, ϕ) soit exacte.

0 0 0

  
ED
A
α /B β
/ C _ω_ _ _ _


/ 0 BC
γ δ 
   
ζ
/E η
/F
?>
D
_ _ _ _ __ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 θ (1) λ (2) µ
  
 0 /G /H /I
ν ξ

89 π ρ σ
  
_ _ _ _ _/ J τ /K ϕ
/L

  
0 0 0

Diagramme 25: Lemme du serpent

Démonstration.
(i) On remarque d'abord que le lemme du noyau nous donne l'existence et l'unicité
des morphismes α, β tels que ζ ◦ γ = δ ◦ α, η ◦ δ =  ◦ β et le couple (α, β)
forme une suite exacte. Puisque le dual du noyau est le conoyau, par le dual du
lemme du noyau, on obtient l'existence et l'unicité des morphismes τ, ϕ tel que
le diagramme entier commute. On obtient aussi que (τ, ϕ) forme une suite exacte.

(ii) Construisons maintenant ω : C −→ J . Pour cela, on se réfère d'abord au dia-


gramme 26. Chacun des morphismes ζ , ξ , peut se factoriser à travers son image,
respectivement Iζ , Iξ , par la proposition 3.22 page 25. On note (ζ1 , ζ2 ), (ξ1 , ξ2 ),
4.2 Lemme du serpent 37

ces décompositions. La deuxième partie de cette même proposition nous donne


l'existence des morphismes g : Iζ −→ G et f : Iξ −→ F qui font commuter le
diagramme. Posons

(R, r) = ker(g), (R̃, r̃) = ker(f ), (Q, q) = coker(g), (Q̃, q̃) = coker(f ),

et cherchons des factorisation de α, β , τ , ϕ à travers R, R̃, Q, Q̃. On va le faire


pour α, les autres cas étant traités similairement ou dualement.
En fait il sut d'appliquer la partie existence de la preuve du lemme du noyau,
sur le sous-diagramme constitué des objets qui sont dans le carré 3 × 3 supérieur
gauche. Appelons α1 , α2 les morphismes ainsi obtenus. Par la commutativité,
on a δ ◦ α2 ◦ α1 = δ ◦ α et puisque δ est un monomorphisme, α2 ◦ α1 = α. En
utlilisant la commutativité, on remarque que α2 , β2 sont des monomorphismes
et que τ1 , ϕ1 sont des épimorphismes.
On va montrer maintenant que β2 et τ1 sont des isomorphismes, et cela nous
permettra de construire simplement un morphisme ω̃ : R̃ −→ Q (voir point iii).
Ce morphisme ω̃ nous permettra de dénir ω := τ1 −1 ◦ ω̃ ◦ β2 −1 . Nous allons
le faire uniquement pour β2 , le résultat étant déduit pour τ1 par dualité. Pour
cela, en utilisant la proposition 3.19 page 23, il sut de montrer que β2 est un
épimorphisme. Dans ce but, on va utiliser la proposition 3.37 page 32 et montrer
que pour tout c ∈∗ C , il existe u ∈∗ R̃ tel que β2 (u) =∗ c. Soit donc c ∈∗ C , on
a alors
ξ2 ◦ f ◦ (c) = µ ◦ (c) = 0,
et, puisque ξ2 est un monomorphisme et que r̃ = ker(f ), il existe u : dom(c) −→ R̃
tel que r̃(u) = (c). Or, par la commutativité, r̃(u) =  ◦ β2 (u), et donc puisque
 est un monomorphisme, on obtient β2 (u) =∗ c. Par conséquent β2 est un épi-
morphisme et donc un isomorphisme.

α β

 
/R /B / R̃ /C
A
_ α1 _ α2 _ β1 _ β2 _
γ r δ r̃ 
    
D
ζ1
/ / Iζ   ζ2
/E
η
//F o /F /0
1F 0

θ g λ f µ
    
0 /Go / G  /H / / Iξ   /I
0 1F ν ξ1 ξ2
π q ρ q̃ σ
    
J /Q /K / Q̃ /L
τ1 τ2 @ ϕ1 ϕ2 @
τ ϕ

Diagramme 26: Lemme du serpent : construction du morphisme de connexion (1)

(iii) Construisons maintenant ω̃ : R̃ −→ Q. Pour cela on se réfère au diagramme


27. Considérons (P, p, p0 ) le pullback de (η, r̃) et (S, s, s0 ) le pushout de (ν, q).
Par les propositions 2.45 page 18 et 3.20 page 24, on obtient que p, s0 sont des
épimorphismes et p0 , s sont des monomorphismes. Soit encore (Ψ, ψ) = ker(p),
(X, x) = coker(s).
Puisque η ◦ p0 ◦ ψ = r̃ ◦ p ◦ ψ = 0 et que ζ2 = ker(η), il existe un morphisme
Ξ : Ψ −→ Iζ qui fait commuter le diagramme. On construit le morphisme
Υ : Iξ −→ X de façon duale.
On remarque que puisque p est un épimorphisme, par l'axiome (A6) et le dual
38 4 LEMMES DE DIAGRAMMES

du lemme 3.21 page 25, coker(ψ) = coker(ker(p)) = p. Ainsi, puisque


s0 ◦ λ ◦ p0 ◦ ψ = s ◦ q ◦ g ◦ Ξ = s ◦ 0 ◦ Ξ = 0,

il existe un morphisme ω̃1 : R̃ −→ S tel que ω̃1 ◦ p = s0 ◦ λ ◦ p0 . Par conséquent


x ◦ ω̃1 ◦ p = x ◦ s0 ◦ λ ◦ p0 = Υ ◦ f ◦ r̃ ◦ p = Υ ◦ 0 ◦ p = 0,

et donc x ◦ ω̃1 = 0 car p est un épimorphisme. Or, par le lemme 3.21 page 25,
ker(x) = ker(coker(s)) = s, ainsi il existe un morphisme ω̃ : R̃ −→ Q, qui fait
commuter le diagramme 27. Puisque dans le diagramme 26, les trois colonnes
centrales sont exactes. Ainsi l'ajout du morphisme ω̃ laisse ce diagramme com-
mutatif.

Ψ  _ ED
/P / / R̃
ψ _ p

p0 

F BC
Ξ r̃
  ω̃
  
Iζ   /E
ζ2 η
/ /
?>
_ _ _ _ _ __ _ _ _ _ _
 g λ f
   
 G /H / / Iξ
 ν ξ1

89
 q 0
s Υ
  
/Q /S //X
s x

Diagramme 27: Lemme du serpent : construction du morphisme de connexion (2)

(iv) Montrons maintenant que ω = τ1 −1 ◦ ω̃ ◦β2 −1 est tel que les suites (β, ω) et (ω, τ )
sont exactes. Par dualité, il sut de prouver que (β, ω) est une suite exacte. Pour
cela, on va montrer que (β1 , ω̃) est une suite exacte.
Etudions l'action de ω̃ sur les pseudo-éléments de R̃. Soit donc c ∈∗ R̃. Alors
r̃(c) ∈∗ F et du fait que η est un épimorphisme et de la proposition 3.37 page
32, on obtient un morphisme e ∈∗ E tel que η(e) =∗ r̃(c). Par la proposition 3.27
page 28, on voit que (ν, ξ1 ) forme une suite exacte. On remarque de plus que
ξ1 ◦ λ(e) =∗ µ ◦ η(e) =∗ µ ◦ η ◦ r̃(c) = 0.

Ainsi, il existe g ? ∈∗ G tel que ν(g ? ) =∗ λ(e).


On veut maintenant prouver que q(g ? ) =∗ ω̃(c). Remarquons pour cela que
(p, p0 ) est le pullback de (η, r̃), et cela va nous permettre de montrer l'existence
de p? ∈∗ P tel que p(p? ) =∗ c, p0 (p? ) =? e. En eet, la pseudo-égalité et les
propriétés du pullback nous donnent la construction du diagramme commutatif
28. Ainsi, composant par 1Y qui est un épimorphisme, on obtient les pseudo-
égalités recherchées.

Y @
e1
//•
@@
@@
p∗ @@
c
 
e2 P /C
p

p0 r̃
  
• /E /F
e η

Diagramme 28: Lemme du serpent : action de ω̃ .


39

Et donc,
s ◦ ω̃(c) =∗ s ◦ ω̃ ◦ p(p? )
=∗ s0 ◦ λ ◦ p0 (p? )
=∗ s0 ◦ λ(e)
=∗ s0 ◦ ν(g ? )
=∗ s ◦ q(g ? ).

Or, s est un monomorphisme et donc q(g ? ) =∗ ω̃(c). On remarque de plus que


ce résultat ne dépend pas des morphismes choisis pour construire g ? .
Chassons maintenant dans le diagramme 26 pour montrer que (β1 , ω̃) est une
suite exacte. Dans ce but, nous allons utiliser la proposition 3.38 page 32.
Soit donc b ∈∗ B et choisissons e = δ(b) ∈∗ E . on a bien que η(e) = β1 (b)
et par conséquent le morphisme g ? donné par la construction précédente vérie
q(g ? ) =∗ ω̃(β1 (b)). Or, celui-ci vérie aussi ν(g ? ) =∗ λ(e) = λ ◦ δ(b) = 0. De plus,
ν est un monomorphisme et donc g ? =∗ 0. Par conséquent ω̃(β1 (b)) =∗ 0.
Soit maintenant c ∈∗ R̃ tel que ω̃(c) =∗ 0. Alors le morphisme g ? fourni par
la description de l'action de ω̃ est tel que q(g ? ) =∗ 0. De plus, si y = ker(z)
alors (y, z) forme une suite exacte. En eet, dans ce cas im(y) = y , par la
proposition 3.24, page 27. Par dualité, si z = coker(y), (y, z) forme aussi une
suite exacte. Ainsi (g, q) est une suite exacte et donc il existe i ∈∗ Iζ tel que
g(i) =∗ g ? . Alors

λ(e) =∗ ν ◦ g ? =∗ ν ◦ g(i) =∗ λ ◦ ζ(i).

En utilisant la proposition 3.39 page 33, on trouve l'existence de e0 ∈∗ E tel


que λ(e0 ) =∗ 0, et pour tout morphisme ϑ : E −→ Θ, ϑ(ζ(i)) =∗ 0 implique
ϑ(e0 ) = ϑ(e). En particulier, η(e0 ) = η(e). Puisque λ(e0 ) =∗ 0, on obtient l'exis-
tence de b ∈∗ B tel que δ(b) =∗ e0 . Ainsi, r̃ ◦ β1 (b) =∗ η(e0 ) =∗ η(e) =∗ r̃ ◦ c,
et donc, puisque r̃ est un monomorphisme, β1 (b) =∗ c. Par conséquent la suite
(β1 , ω̃) est exacte.
Soit β1 = m ◦ e la factorisation à travers l'image de β1 . Alors, puisque β2 est
un isomorphisme, β = (β1 ◦ m) ◦ e est la factorisation à travers l'image de β .
Ainsi im(β) = im(β1 ). De plus, ker ω̃ ◦ β2 −1 = ker(ω̃), et donc la suite (β, ω)


est exacte.

(v) Montrons enn l'unicité de ω . Pour cela factorisons le par l'image. Ainsi, il existe
m et e des morphismes tels que ω = m ◦ e. De plus, puisque la suite (β, ω, τ ) est
exacte, ker(τ ) = m et par dualité coker(β) = e. Ainsi, le choix de ω pour rendre
la suite exacte est unique.
u
t

5 Bibliographie
Références
[1] Francis Borceux, Handbook of Categorical Algebra 1, Cambridge University
Press, 1994.
[2] Francis Borceux, Handbook of Categorical Algebra 2, Cambridge University
Press, 1994.
[3] Saunders Mac Lane, Categories for the Working mathematician, Springer,
Deuxième édition (1998).
[4] Andrew Archibald, PlanetMath : universe,
http ://planetmath.org/encyclopedia/Universe.html, 24.04.2009.
40 RÉFÉRENCES

[5] The Unapologetic Mathematician, Short Exact Sequences,


http ://unapologetic.wordpress.com/2007/09/27/short-exact-sequences/, 3 mai
2009.
SMA

Théorie de Galois catégorique

Dimitri Z AGANIDIS

Sous la direction de Kathryn Hess Bellwald

Dernière modification le 7 juin 2010


2
TABLE DES MATIÈRES 3

Table des matières


1 Introduction 5

2 Quelques bases de théorie des catégories 6


2.1 Définitions élémentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
2.1.1 Catégories produits et foncteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
2.1.2 Transformations naturelles et équivalences de catégories . . . . . . . 7
2.2 Adjonction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
2.2.1 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
2.2.2 Caractérisation d’une adjonction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
2.2.3 Exemples d’adjonctions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
2.3 Monades et comonades . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
2.3.1 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
2.3.2 Monade et comonade fournis par une adjonction . . . . . . . . . . . 18
2.3.3 Algèbres sur une monade et co-algèbres sur une comonade . . . . . . 19
2.3.4 Adjonctions associées à une monade et à une comonade . . . . . . . 21
2.3.5 Foncteurs monadiques et comonadiques . . . . . . . . . . . . . . . . 23

3 Théorème de Galois catégorique 32


3.1 Enoncé du théorème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
3.1.1 Objets scindés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
3.1.2 Morphismes de descente galoisienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
3.1.3 Catégorie des préfaisceaux internes et groupoïde de Galois . . . . . . 37
3.1.4 Enoncé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
3.2 Preuve du théorème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
3.2.1 Premier foncteur monadique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
3.2.2 Deuxième foncteur monadique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
3.2.3 Isomorphisme entre les monades . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62
3.3 Correspondance de Galois explicite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

4 Applications du théorème 69
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs . . . . . . . . . . . . . . . 69
4.1.1 Pullbacks dans les catégories Ring∗ et Prof . . . . . . . . . . . . . 69
4.1.2 Adjonction relativement admissible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
4.1.3 Algèbres unitaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
4.1.4 Théorie de Galois de Grothendieck . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
4.2 Théorie de Galois pour les revêtements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88
4.2.1 Adjonction relativement admissible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88
4.2.2 Pullbacks dans la catégorie Loco . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88
4.2.3 Classification des revêtements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89

5 Conclusion 90
4 TABLE DES FIGURES

Table des figures


1 Transformation naturelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
2 Produit de Godement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
3 Réflexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
4 Coréflexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
5 Adjoint à gauche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
6 Naturalité de α et β . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
7 Associativité de µ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
8 Unité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
9 Associativité de ∆ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
10 Co-unité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
11 Définition de p∗ (g) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
12 Définition de η(A,f ) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
13 Définition de (X,φ) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
14 Définition de A1 × A1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
A0
15 Définition de ∆ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
16 Définition de c . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
17 Définition de τ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
18 Définition de A1 × I . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
A0
19 Définition de A1 × X . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
A0
20 Définition de A1 × (A1 × X) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
A0 A0
21 Naturalité de β . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
22 Correspondance de Galois explicite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
23 Naturalité de E . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
5

Résumé
Ce projet présente et démontre le théorème de Galois catégorique de Janelidze.
Beaucoup de correspondances de Galois sont en fait des conséquences de ce théorème
très général. Dans ce travail, nous appliquons ce théorème pour construire une théorie
de Galois pour les anneaux commutatifs unitaires et pour les revêtements.

1 Introduction
Dans un certain nombre de domaines, les mathématiciens ont découvert une correspon-
dance entre objets mathématiques qu’ils ont nommée galoisienne. Ces différents domaines
n’ont pourtant pas de liens directs entre eux et malgré cela, ces correspondances entre-
tiennent des similarités importantes.
On peut donc se demander quelle est la relation qui réunit toutes ces théories dites de
Galois.
L’objectif de ce travail est de répondre au moins partiellement à cette question. Pour
ce faire, nous présentons une preuve du théorème de Galois catégorique de Janelidze. Ce
théorème, comme son nom l’indique, apparait dans le contexte de la théorie des catégo-
ries. Plus précisément, le théorème est construit autour d’un couple de foncteurs adjoints.
Ce théorème très général a de nombreuses applications et nombres des correspondances
de Galois sont en fait des conséquences de ce théorème. Nous montrons donc quelques
applications pour les anneaux et les revêtements.
La première partie du document consiste en une révision des bases de théorie des caté-
gories qui sont nécessaires à la compréhension du théorème. On y aborde principalement
l’adjonction entre deux foncteurs et les monades.
La seconde partie constitue le coeur du travail, avec l’énoncé et la preuve du théorème.
Celui-ci donne une équivalence de catégorie entre les objets scindés par un morphisme dit
de descente galoisienne et les préfaisceaux internes sur le groupoïde de Galois associé au
même morphisme.
Enfin, la dernière partie montre les applications à la théorie des anneaux commutatifs
unitaires et des revêtements. La théorie de Galois pour les anneaux que l’on obtient est
en fait une généralisation de la théorie de Galois de Grothendieck pour les corps, qui elle
même étend la correspondance classique (infinie). Quant à elle, l’application à la théorie
des revêtements donne lieu au théorème classique de classification des revêtements.
6 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

2 Quelques bases de théorie des catégories


Avant de pouvoir parler de la version catégorique du théorème de Galois, il nous faut
introduire tout le vocabulaire nécessaire. C’est ce que l’on fait dans les sections suivantes.

2.1 Définitions élémentaires


Les bases logiques de la théorie des catégories, les définitions les plus élémentaires ainsi
que le principe de dualité ne sont pas détaillées dans ce travail. Un lecteur qui aurait besoin
d’en savoir plus peut consulter [1] ou bien l’ouvrage de référence sur le sujet [2].

2.1.1 Catégories produits et foncteurs


Définition 2.1 (Catégorie produit)
Soient A et B deux catégories. Leur produit est la catégorie notée A × B dont la classe
d’objets est |A × B| = |A | × |B| et dont, pour tout couple (A, B), (A0 , B 0 ) ∈ |A × B|, les
ensembles de morphismes sont donnés par

A × B (A, B), (A0 , B 0 ) = A A, A0 × B B, B 0 .


  

La composition des morphismes est définie composante par composante.

Définition 2.2 (Foncteur)


Un foncteur F d’une catégorie A vers une catégorie B est la donnée
(i) D’une application |A | −→ |B| entre les classes d’objets. L’image d’un objet G ∈ |A |
est notée F (G).
(ii) Pour tout couple d’objets G, G0 ∈ |A |, d’applications A (G, G0 ) −→ B (F (G), F (G0 )).
L’image d’un morphisme f ∈ A (G, G0 ) est notée F (f ).
Cette donnée doit vérifier de plus les propriétés suivantes :
(i) Pour tout objet G ∈ |A |, F (1G ) = 1F (G) .
(ii) Pour tout couple de morphisme f ∈ A (G, G0 ) et g ∈ A (G0 , G00 ),

F (g ◦ f ) = F (g) ◦ F (f ).

Exemples 2.3
(i) L’application Π1 : Top∗ −→ Grp est un foncteur.
(ii) Soit R : A −→ B un foncteur. On peut définir un nouveau foncteur

B (−, R(−)) : B ∗ × A −→ Set

de la façon suivante :
• pour tout objet (B, A) ∈ |B ∗ × A |, B (−, R(−))(B, A) = B (B, R(A)) ;
• pour tout morphisme (f ∗ , g) : (B, A) −→ (B 0 , A0 ), son image B (f ∗ , R(g)), est
définie par
B (f ∗ , R(g))(k) = R(g)kf, ∀k ∈ B (B, R(A)).
Puisque R est un foncteur, R(1A ) = 1R(A) et ainsi B (1B ∗ , R(1A )) = 1B(B,R(A)) .
De plus, pour tout couple de morphisme

(f ∗ , g) : (B, A) −→ (B 0 , A0 ), (f 0∗ , g 0 ) : (B 0 , A0 ) −→ (B 00 , A00 )
2.1 Définitions élémentaires 7

et pour tout k ∈ B (B, R(A)), on a

B f 0∗ , R(g 0 ) ◦ B (f ∗ , R(g)) (k) = R(g 0 )(R(g)kf )f 0


  

= R(g 0 g) ◦ k ◦ f f 0
= B f 0∗ f ∗ , R(g 0 g)


On a ainsi vérifié que B (−, R(−)) est bien un foncteur.

2.1.2 Transformations naturelles et équivalences de catégories


Définition 2.4 (Transformation naturelle)
/
Soient A , B deux catégories et F, G : A / B deux foncteurs. Une transformation
naturelle α de F vers G, notée α : F ⇒ G, est la donnée d’une classe de morphismes
αA : F (A) −→ G(A), indexée par les objets de A telle que, pour tout f ∈ A (A, A0 ) :

0
αA ◦ F (f ) = G(f ) ◦ αA .

La situation est représentée par le diagramme commutatif suivant.

Diagramme 1: Transformation naturelle


αA
A F (A) / G(A)

f F (f ) G(f )
  
A0 F (A0 ) / G(A0 )
αA0

Remarques 2.5
(i) On peut observer que l’on peut composer des transformations naturelles. En effet,
soient F, G et H trois foncteurs d’une catégorie A vers une catégorie B ainsi que
α : F ⇒ G et β : G ⇒ H deux transformations naturelles. Alors β ◦α : F ⇒ H, défini
par (β ◦ α)A = βA ◦ αA pour tout A ∈ |A |, est bien une transformation naturelle.
Cette composition est associative et possède des éléments neutres 1F : F ⇒ F définis
par (1F )A = 1F (A) . En fait, étant donné deux petites catégories A et B (c’est à dire
telles que les collections d’objets sont des ensembles), en prenant les foncteurs de A
vers B comme objets et les transformations naturelles entre eux comme morphismes,
on forme une nouvelle catégorie.
/ /
(ii) Soient F, G : A / B et H, K : B / C des foncteurs. On peut associer à deux
transformations naturelles α : F ⇒ G et β : H ⇒ K leur produit de Godement
β ? α : H ◦ F ⇒ K ◦ G, défini par l’égalité (donnée par la commutativité des faces
haut et bas du diagramme ci-dessous)

(β ? α)A = K(αA ) ◦ βF (A) = βG(A) ◦ H(αA ),

pour tout A ∈ |A |. La situation est résumée par le diagramme suivant, qui est
commutatif par la naturalité de α pour les faces droites et gauche du cube, et par la
naturalité de β pour les autres.
8 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

Diagramme 2: Produit de Godement

βG(A)
H ◦ G(A) / K ◦ G(A)
H(αA )pppp
p7 K(αA )pppp
p7
ppp ppp
ppp βF (A) ppp
H ◦ F (A) / K ◦ F (A)
H◦G(f ) K◦G(f )

H◦F (f ) K◦F (f )
 βG(A0 ) 
H◦ G(A0 ) / K ◦ G(A0 )
7 p7
H(αA0 ) K(αA0 ) ppp
pp
pp
 βF (A0 )  ppp
H ◦ F (A0 ) / K ◦ F (A0 )

Exemple 2.6
Soient R : A −→ B, L : B −→ A des foncteurs et η : 1B ⇒ R ◦ L une transformation
naturelle. Calculons les produits de Godement 1L ? η : L ⇒ LRL et η ? 1R : R ⇒ RLR :
(i) pour tout B ∈ |B|, (1L ? η)B = L(ηB ) ◦ 1L(B) = L(ηB ) ;
(ii) pour tout A ∈ |A |, (η ? 1R )A = RL(1R(A) ) ◦ ηR(A) = ηR(A) .
Proposition 2.7 (Inversion d’une transformation naturelle)
//
Soient F, G : A B des foncteurs et η : F ⇒ G une transformation naturelle. Si, pour
tout A ∈ |A |, ηA est inversible, alors η −1 : G → F est une transformation naturelle.
Démonstration.
Il suffit de constater que pout tout f : A −→ A0 ,
−1 −1 −1 −1 −1 −1
ηA 0 ◦ G(f ) = ηA0 ◦ (G(f ) ◦ ηA ) ◦ ηA = ηA0 ◦ (ηA0 ◦ F (f )) ◦ ηA = F (f ) ◦ ηA .

u
t
Proposition 2.8 (Propriétés du produit de Godement)
/ / /
(i) Soient F, G : A / B , H, K : B / C , L, M : C / D des foncteurs et des
transformations naturelles α : F ⇒ G, β : H ⇒ K, γ : L ⇒ M .
Le produit de Godement est associatif, c’est-à-dire (γ ? β) ? α = γ ? (β ? α).
(ii) On considère la situation suivante :
F / H /
G ⇓α ⇓β
A /B K /C
L ⇓γ M ⇓δ
/ /
Dans ces conditions,
(δ ? γ) ◦ (β ? α) = (δ ◦ β) ? (γ ◦ α).
Démonstration.
(i) On calcule simplement, pour tout objet A ∈ A :

(γ ? β) ? α A = (γ ? β)G(A) ◦ LH(αA )
= γKG(A) ◦ L(βG(A) ) ◦ LH(αA )
= γKG(A) ◦ L(βG(A) ◦ H(αA ))
= γKG(A) ◦ L((β ? α)A )

= γ ? (β ? α) A .
2.2 Adjonction 9

(ii) On commence par remarquer que, par la naturalité de β appliqué au morphisme


γA : G(A) −→ L(A),
K(γA ) ◦ βG(A) = βL(A) ◦ H(γA ).
Le calcul donne alors, pour tout objet A ∈ A :

(δ ? γ) ◦ (β ? α) A = (δ ? γ)A ◦ (β ? α)A
= δL(A) ◦ K(γA ) ◦ βG(A) ◦ H(αA )
= δL(A) ◦ βL(A) ◦ H(γA ) ◦ H(αA )
= (δ ◦ β)L(A) ◦ H((γ ◦ α)A )

= (δ ◦ β) ? (γ ◦ α) A .
u
t

Deux catégories sont isomorphes lorsqu’il existe un foncteur inversible entre ces catégo-
ries. Cette notion peut paraître en désaccord avec l’esprit global de la théorie qui consiste à
tout voir à isomorphisme près. La notion suivante donne une généralisation qui correspond
avec cette habitude.
Définition 2.9 (Equivalence de catégories)
Un foncteur F : A −→ B est une équivalence de catégories lorsque il existe un foncteur
G : B −→ A et des isomorphismes naturels F G ∼ = 1B , GF ∼
= 1A . On dit alors que les
catégories A et B sont équivalentes, ce que l’on note A ≈ B.
Proposition 2.10 (Transitivité de l’équivalence de catégories)
Soient A , B, C trois catégories. Si A ≈ B et B ≈ C , alors A ≈ C .

Démonstration.
Evident. u
t

2.2 Adjonction
2.2.1 Définitions
Définition 2.11 (Réflexion)
Soient R : A −→ B un foncteur et B un objet de B. Une réflexion de B le long de R est
un couple (LB , ηB ) vérifiant les propriétés suivantes :
(i) LB est un objet de A ;
(ii) ηB est un morphisme B −→ R(LB ) ;
(iii) pour tout objet A ∈ |A | et tout morphisme r : B −→ R(A), il existe un unique
morphisme s : LB −→ A tel que R(s) ◦ ηB = r.

Diagramme 3: Réflexion
ηB
LB B / R(LB )
u u
u
s r uuu
u
  uz u R(s)
A R(A)

Définition 2.12 (Coréflexion)


Soient L : B −→ A un foncteur et A un objet de A . Une coréflexion de A le long de L
est un couple (RA , A ) vérifiant les propriétés suivantes :
10 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

(i) RA est un objet de B ;


(ii) A est un morphisme L(RA ) −→ A ;
(iii) Pour tout objet B ∈ |B| et tout morphisme r : L(B) −→ A, il existe un unique
morphisme s : B −→ RA tel que A ◦ L(s) = r.

Diagramme 4: Coréflexion
A
RO A AO o L(RA )
v:
vvv
v
s r
vv
vv L(s)
B L(B)

Remarque 2.13
(i) Les propriétés universelles assurent l’unicité à isomorphisme près des réflexions et
coréflexions.
(ii) Si R : A −→ B est un foncteur, le dual de la réflexion d’un objet B ∈ |B| le long de
R est la coréflexion de B le long de R.

Définition 2.14 (Adjoint à gauche)


Soient R : A −→ B et L : B −→ A deux foncteurs. S’il existe une transformation
naturelle η : 1B ⇒ R ◦ L telle que pour tout B ∈ |B|, (L(B), ηB ) est la réflexion de B le
long de R, on dit que L est l’adjoint à gauche de R.

Diagramme 5: Adjoint à gauche


ηB
L(B) B / RL(B)

L(b) b RL(b)
  ηB 0 
L(B 0 ) B0 / RL(B 0 )
u
uu
s r uuu
u
  zuu R(s)
A R(A)

Définition 2.15 (Adjoint à droite)


Soient L : B −→ A et R : A −→ B deux foncteurs. S’il existe une transformation
naturelle  : L ◦ R ⇒ 1A telle que pour tout A ∈ |A |, (R(A), A ) est la coréflexion de A le
long de L, on dit que R est l’adjoint à droite de L.

Remarque 2.16
(i) L’unicité à isomorphisme près des réflexions et coréflexions assure l’unicité à isomor-
phisme près des adjoints à gauche et à droite.
(ii) Si R : A −→ B est un foncteur et L : B −→ A est son adjoint à gauche, alors
L∗ : B ∗ −→ A ∗ est l’adjoint à droite de R∗ : A ∗ −→ B ∗ .

Démonstration.
(i) Clair d’après les définitions.
(ii) Si R : A −→ B est un foncteur, alors R∗ : A ∗ −→ B ∗ est défini de la façon suivante :
• pour tout objet A ∈ |A |, R∗ (A) = R(A) ;
2.2 Adjonction 11

• pour tout morphisme f : A −→ A0 , R∗ (f ∗ ) = R(f )∗ .


Reprenant le diagramme 5, on a la situation suivante :
ηB ∗
L∗ (B)
O BO o R∗ L∗ (B)
O
L(b∗ ) b∗ R∗ L∗ (b∗ )
ηB 0 ∗
L∗ (B 0 )
O BO 0 o R∗ L∗ (B 0 )
r9
rrrrr
s∗ r∗ r ∗ ∗
rrr R (s )
A R∗ (A)

On vérifie facilement que η ∗ définie par ηB


∗ = η ∗ pour tout objet B est la transfor-
B
mation naturelle recherchée. u
t

2.2.2 Caractérisation d’une adjonction


Théorème 2.17
Soient R : A −→ B et L : B −→ A deux foncteurs. Les propositions suivantes sont
équivalentes :
(i) Le foncteur L est l’adjoint à gauche de R.
(ii) Il existe des transformations naturelles η : 1B ⇒ R ◦ L et  : L ◦ R ⇒ 1A telles que
• (1R ? ) ◦ (η ? 1R ) = 1R ;
• ( ? 1L ) ◦ (1L ? η) = 1L .
(iii) Il existe un isomorphisme naturel entre les foncteurs A (L(−), −) : B ∗ × A −→ Set
et B (−, R(−)) : B ∗ × A −→ Set (voir l’exemple 2.3 (ii)).
(iv ) Le foncteur R est l’adjoint à droite de L.
Démonstration.
(i) ⇒ (ii) Par définition, si L est l’adjoint à gauche de R, il existe une transformation
naturelle η : 1B ⇒ RL telle que (L(B), ηB ) est la reflexion de B le long de R pour
tout B appartenant à B. En particulier, pour tout A ∈ |A |, (LR(A), ηR(A) ) est la
reflexion de R(A) le long de R. Ainsi, considérant 1R(A) : R(A) −→ R(A), on obtient
l’existence d’un unique morphisme A : LR(A) −→ A tel que le diagramme suivant
commute :
ηR(A)
LR(A) R(A) / RLR(A)
t
tt
A 1R(A) ttt
t
  ytt R(A )
A R(A)
D’après l’exemple 2.6 et la commutativité du diagramme précédent, on obtient que
pour tout A ∈ |A |,

((1R ? ) ◦ (η ? 1R ))A = R(A ) ◦ ηR(A) = 1R(A) .

Ainsi, η et  vérifient la première égalité. Il reste donc à montrer que  est bien une
transformation naturelle et que la deuxième égalité est vérifiée.
Prouvons d’abord que  est bien une transformation naturelle en utilisant le fait que
(LR(A), ηR(A) ) est la réflexion de R(A) le long de R. Pour cela, soient A, A0 ∈ |A |
ainsi que f ∈ A (A, A0 ). La naturalité de η ? 1R entrâine que

R(f ) = (R(A0 ) ◦ ηR(A0 ) ) ◦ R(f ) = R(A0 ) ◦ RLR(f ) ◦ ηR(A) ,


12 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

et donc le diagramme ci-dessous est commutatif :


ηR(A)
A R(A) / RLR(A)

f R(f ) RLR(f )
  ηR(A0 ) 
/
A0 R(A0 ) o RLR(A0 )
R(A0 )

Ainsi, puisque R est un foncteur, l’égalité précédente donne

R(A0 ◦ LR(f )) ◦ ηR(A) = R(f ) = R(f ◦ A ) ◦ ηR(A) .

L’unicité donnée par la reflexion (LR(A), ηR(A) ) relativement au morphisme R(f )


assure que A0 ◦ LR(f ) = f ◦ A , ce que l’on voulait démontrer.
Établissons maintenant la deuxième égalité. Commençons par remarquer que pour
tout B ∈ |B|, RL(ηB )◦ηB = ηRL(B) ◦ηB par naturalité de η. Considérons maintenant
le diagramme ci-dessous :
ηB
B / RL(B)
lll
l
lll
1RL(B)
ηB
lllll RL(ηB )
 ull 
RL(B) o RLRL(B)
R(L(B) )

Or,
R(L(B) ) ◦ RL(ηB ) ◦ ηB = R(L(B) ) ◦ ηRL(B) ◦ ηB = 1RL(B) ◦ ηB ,
ce qui implique que L(B) ◦L(ηB ) = 1L(B) , en utilisant l’unicité donnée par la reflexion
(L(B), ηB ) relativement au morphisme ηB .
(ii) ⇒ (iii) Pour tout (B, A), on définit

α(B,A) : A (L(B), A) −→ B (B, R(A)) par α(B,A) (f ) = R(f ) ◦ ηB ;


β(B,A) : B (B, R(A)) −→ A (L(B), A) par β(B,A) (g) = A ◦ L(g).

Il faut maintenant voir que ces deux transformations sont naturelles et inverses l’une
de l’autre.
Pour cela, soient f ∈ A (L(B), A) et g ∈ B (B, R(A)). D’abord, on trouve que

α(B,A) ◦ β(B,A) (g) = R(A ◦ L(g)) ◦ ηB


= R(A ) ◦ (RL(g) ◦ ηB )
= R(A ) ◦ (ηR(A) ◦ g)
= g,

où l’on a utilisé la naturalité de η pour établir la troisième égalité.


De même, on voit que

β(B,A) ◦ α(B,A) (f ) = A ◦ L(R(f ) ◦ ηB )


= (A ◦ LR(f )) ◦ L(ηB )
= (f ◦ L(B) ) ◦ L(ηB )
= f.
2.2 Adjonction 13

Il reste à montrer que les transformations sont naturelles. D’après la proposition 2.4,
il suffit de vérifier que α est une transformation naturelle. La situation est représentée
par le diagramme ci-dessous :

Diagramme 6: Naturalité de α et β
α(B,A)
/
(B, A) A (L(B), A) o B (B, R(A))
β(B,A)

(φ∗ ,γ) A (L(φ∗ ),γ) B(φ∗ ,R(γ))

  α(B 0 ,A0 ) 
/
(B 0 , A0 ) A (L(B 0 ), A0 ) o B (B 0 , R(A0 ))
β(B 0 ,A0 )

On calcule, en utilisant la naturalité de η,

[B (φ∗ , R(γ)) ◦ α(B,A) ](f ) = R(γ) ◦ (R(f ) ◦ ηB ) ◦ φ


= R(γ ◦ f ) ◦ RL(φ) ◦ ηB 0
= R(γ ◦ f ◦ L(φ)) ◦ ηB 0
= α(B 0 ,A0 ) (γ ◦ f ◦ L(φ))
= α(B 0 ,A0 ) ◦ A (L(φ∗ ), γ)(f ).

(iii) ⇒ (i) Pour tout objet B ∈ |B|, on définit ηB : B −→ RL(B) par

ηB = α(B,L(B)) (1L(B) ).

Prouvons que (L(B), ηB ) est bien la reflexion de B le long de R.


Soit A ∈ |A | et f : B −→ R(A) un morphisme. Par hypothèse on obtient que le
diagramme suivant commute :

α(B,L(B))
(B, L(B)) A (L(B), L(B)) / B (B, RL(B))

(1B ,β(B,A) (f )) A (L(1B ∗ ),β(B,A) (f )) B (1B ∗ ,R(β(B,A) (f )))

  α(B,A)
/ 
(B, A) A (L(B), A) o B (B, R(A))
β(B,A)

On obtient donc que


  
R β(B,A) (f ) ◦ ηB = R β(B,A) (f ) ◦ α(B,L(B)) 1L(B) ◦ 1B
= B 1B ∗ , R β(B,A) (f ) ◦ α(B,L(B)) 1L(B)
 

= α(B,A) ◦ A L(1B ∗ ), β(B,A) (f ) 1L(B)


 

= α(B,A) (β(B,A) (f ) ◦ 1L(B) ◦ L(1B ))


= α(B,A) ◦ β(B,A) (f )
= f.
14 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

Soit maintenant un autre morphisme a : L(B) −→ A tel que R(a)◦ηB = f . Reprenant


la démarche précédente en remplaçant β(B,A) (f ) par a, on obtient que
α(B,A) (a) = f = α(B,A) (β(B,A) (f )),
et l’injectivité de α(B,A) termine de prouver que pour tout B ∈ |B|,(L(B), ηB ) est
bien la reflexion de B le long de R. La naturalité de η découle directement de ce fait.
(iii) ⇔ (iv) Dire que R est l’adjoint à droite de L est équivalent à affirmer que R∗ est
l’adjoint à gauche de L∗ , par la remarque 2.16 (ii). Par l’équivalence entre les points
(i) et (iii), cela revient à dire qu’il existe un isomorphisme β entre les foncteurs
B ∗ (R∗ (−), −) : A × B ∗ −→ Set et A ∗ (−, L∗ (−)) : A × B ∗ −→ Set.
Or, pour tout couple A ∈ |A |, B ∈ |B|,
B ∗ (R∗ (A), B) = B (B, R(A)) et A ∗ (A, L∗ (B)) = A (L(B), A).
De plus, pour tout couple de morphismes φ∗ : B −→ B 0 et γ : A −→ A0 et tout
morphisme k ∗ ∈ B ∗ (R∗ (A), B),
B ∗ (R∗ (γ), φ∗ )(k ∗ ) = φ∗ ◦ k ∗ ◦ R∗ (γ ∗ ) = (R(γ) ◦ k ◦ φ)∗ = B (φ∗ , R(γ))(k)∗ .
De même, pour tout morphisme h∗ ∈ A ∗ (A, L∗ (B)),
A ∗ (γ, L∗ (φ∗ ))(h∗ ) = γ ∗ ◦ h∗ ◦ L∗ (φ∗ ) = (L(φ) ◦ h ◦ γ)∗ = A (L(φ∗ ), γ)(h)∗ .
Ainsi, on obtient que l’inverse de l’isomorphisme β est un isomorphisme entre les
foncteurs A (L(−), −) : B ∗ × A −→ Set et B (−, R(−)) : B ∗ × A −→ Set (et
inversement), ce qui achève la preuve.

α(B,A)
/
A ∗ (A, L∗ (B)) A (L(B), A) o B (B, R(A)) B ∗ (R∗ (A), B)
β(B,A)

A ∗ (γ,L∗ (φ∗ ))= A (L(φ∗ ),γ) B(φ∗ ,R(γ)) =B ∗ (R∗ (γ),φ∗ )

  α(B 0 ,A0 )  
/
A ∗ (A0 , L∗ (B 0 )) A (L(B 0 ), A0 ) o B (B 0 , R(A0 )) B ∗ (R∗ (A0 ), B 0 )
β(B 0 ,A0 )

u
t
Notation 2.18
(i) Le théorème précédent nous permet de voir que l’adjonction fait intervenir un couple
de foncteurs, l’un étant l’adjoint de l’autre et réciproquement. On note L a R pour
indiquer que R est l’adjoint à droite de L et L est l’adjoint à gauche de R.
(ii) Les transformations naturelles du point (ii) du théorème précédent sont nommées
respectivement unité et co-unité.
Corollaire 2.19 G / L /
Soient deux adjonctions C o ⊥ Bo ⊥ A d’unités respectives η et ν ainsi
D R
que de co-unités  et ε. Alors, le foncteur LG est l’adjoint à gauche de DR. Cette adjonction
a pour unité η̄ et pour co-unité ¯, definies de la façon suivante :
pour tout C ∈ |C |, η̄C = D(νG(C) ) ◦ ηC
pour tout A ∈ |A |, ¯A = εA ◦ L(R(A) ).
2.2 Adjonction 15

Démonstration.
Cela provient directement de la composition des isomorphismes naturels donnés par la
caractérisation précédente. Soient C ∈ C et A ∈ A , on obtient alors :

A (LG(C), A) ∼
= B (G(C), R(A)) ∼
= C (C, DR(A)).

Le calcul de l’unité et de la co-unité est obtenu en combinant les éléments de la preuve


précédente, notamment l’expression des isomorphismes naturels du point (iii) de la carac-
térisation en fonction de l’unité de la co-unité de l’adjonction, et inversemment. u
t

2.2.3 Exemples d’adjonctions


Exemples 2.20
(i) Soient le foncteur oubli U : VectK −→ Set et le foncteur spanK : Set −→ VectK ,
défini, pour tout X ∈ Set, par
n o 

spanK (X) = f : X −→ K Card ({x ∈ X : f (x) 6= 0}) < ∞ , +, · ,

où +, · sont les opérations usuelles.


Soit x ∈ X. On définit fx ∈ spanK (X), par :

1 si x = x̃,
∀x̃ ∈ X, fx (x̃) =
0 sinon.

Observons que pour tout ensemble X, celui-ci s’identifie avec l’ensemble {fx : x ∈ X}
qui forme une base de spanK (X). Il faut encore définir spanK sur les morphismes.
Pour tout φ : X −→ X 0 , soit spanK (φ) : spanK (X) −→ spanK (X 0 ) l’extension li-
néaire de la fonction que φ induit sur les bases. C’est-à-dire, pourP tout f ∈ spanK (X),
il existe k ∈ N et x1 , . . . , xk ∈ X, αx1 , . . . , αxk ∈ K tels que f = ki=1 αxi fxi . On pose
alors
k k
!
X X
spanK (φ)(f ) = spanK (φ) αxi fxi = αxi fφ(xi ) .
i=1 i=1

L’isomorphisme VectK (spanK (X), V ) ∼ = Set (X, U (V )) donné par la propriété uni-
verselle des applications linéaire conduit à une adjonction spanK a U .
En effet, en définissant pour tout (X, V ) ∈ Set∗ × VectK ,

α(X,V ) : VectK (spanK (X), V ) −→ Set (X, U (V ))


β(X,V ) : Set (X, U (V )) −→ VectK (spanK (X), V )

par
α(X,V ) (T )(x)
P  = P
T (fx )
k k
β(X,V ) (t) i=1 αxi fxi = i=1 αxi t(xi ),

h  i
on obtient que α(X,V ) ◦ β(X,V ) (t) (x) = β(X,V ) )(t)(fx ) = t(x) pour tout x ∈ X.
De plus, pour tout f ∈ spanK (X), il existe k ∈ N et x1 , . . . , xk ∈ X, αx1 , . . . , αxk ∈ K
16 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

Pk
tel que f = i=1 αxi fxi . On obtient alors
k
!
h  i h  i X
β(X,V ) ◦ α(X,V ) (T ) (f ) = β(X,V ) ◦ α(X,V ) (T ) αxi fxi
i=1
k
X
= αxi α(X,V ) (T )(xi )
i=1
k
X
= αxi T (fxi )
i=1
= T (f ).

Ainsi, α(X,V ) = β(X,V ) −1 .


Montrons maintenant que les transformations sont naturelles. Soient φ : X 0 −→ X,
γ : V −→ V 0 , T ∈ VectK (spanK (X), V ) et calculons, pour tout x0 ∈ X 0 ,
h i
Set (φ∗ , U (γ)) ◦ α(X,V ) (T ) (x0 ) = γ ◦ α(X,V ) (T ) ◦ φ(x0 )
= γ ◦ T (fφ(x0 ) )
= VectK (spanK (φ∗ ), γ)(T )(fx0 )
h i
= α(X 0 ,V 0 ) ◦ VectK (spanK (φ∗ ), γ)(T ) (x0 ),

et la proposition 2.4 donne le résultat.


L’unité de l’adjonction ηX : X −→ U (spanK (X)) est donnée par ηX (x) = fx . La
co-unité de l’adjonction V : spanK (U (V )) −→ V est donnée par
k k
!
X X
V αvi fvi = αvi vi
i=1 i=1

(ii) Soit E un ensemble. On considère les foncteurs

− × E : Set −→ Set et Set (E, −) : Set −→ Set.

L’isomorphisme α(X,Y ) : Set (X × E, Y ) −→ Set (X, Set (E, Y )), défini pour tout
couple (x, e) ∈ X × E par
 
α(X,Y ) (f ) (x)(e) = f (x, e)

donne lieu à une adjonction − × E a Set (E, −).


En effet, son inverse est donné par
 
β(X,Y ) (g) (x, e) = g(x)(e)

et ce sont des transformations naturelles. Pour le vérifier, soient φ : X 0 −→ X,


γ : Y −→ Y 0 , x0 ∈ X 0 , e ∈ E, et f ∈ Set (X × E, Y ). On a alors,
h i h i
Set (φ∗ , Set (E, γ)) ◦ α(X,Y ) (f ) (x0 )(e) = γ ◦ α(X,Y ) (f ) φ(x0 ) e
 
 
= γ f φ(x0 ), e
h i
= Set (φ∗ × E, γ)(f ) (x0 , e)
h i
= α(X 0 ,Y 0 ) Set (φ ∗ ×E, γ)(f ) (x0 )(e),
2.3 Monades et comonades 17

et la proposition 2.4 donne le résultat.


L’unité de l’adjonction ηX : X −→ Set (E, X × E) est donnée par ηX (x)(e) = (x, e).
La co-unité de l’adjonction Y : Set (E, Y ) × E −→ Y est l’évalutation, c’est-à-dire
Y (f, e) = f (e).

2.3 Monades et comonades


Pour cette partie, le livre de référence est celui de Borceux [3].

2.3.1 Définitions
Définition 2.21 (Monade)
Soit C une catégorie. Une monade T sur C est un triple T = (T, µ, η) où T : C −→ C est
un foncteur, µ : T ◦ T ⇒ T et η : 1C ⇒ T sont des transformations naturelles, vérifiant les
propriétés suivantes :
(i) µ ◦ (µ ? 1T ) = µ ◦ (1T ? µ) ;
(ii) µ ◦ (η ? 1T ) = µ ◦ (1T ? η) = 1T .
La situation est représentée par les diagrammes commutatifs ci-dessous.

Diagramme 7: Associativité de µ Diagramme 8: Unité

1T ?µ 1T ?η
T3 +3 T 2 T AAA +3 T 2 ks η?1T T
AAAAAA }}}}
µ AAAA µ }}}}}}
µ?1T
AAA }}}}
 µ   }}
T2 +3 T T

On définit maitenant le dual d’une monade.


Définition 2.22 (Comonade)
Soit C une catégorie. Une comonade K sur C est un triple K = (K, ∆, ) où K : C −→ C
est un foncteur, ∆ : K ⇒ K ◦ K et  : K ⇒ 1C sont des transformations naturelles,
vérifiant les propriétés suivantes :
(i) (∆ ? 1K ) ◦ ∆ = (1K ? ∆) ◦ ∆ ;
(ii) ( ? 1K ) ◦ ∆ = (1K ? ) ◦ ∆ = 1K .
La situation est représentée par les diagrammes commutatifs ci-dessous.

Diagramme 9: Associativité de ∆ Diagramme 10: Co-unité

1K ?∆ 1K ? ?1K
KKS 3 sk KKS 2 K BksBB KSK 2 +3 K
||
BBBB |
|||
BBBB
∆?1K ∆ BBBB ∆|||||||
B |||
K 2 ks

K K

Proposition 2.23
Soient C une catégorie et T = (T, µ, η) une monade sur C . Alors T∗ = (T ∗ , µ∗ , η ∗ ) est une
comonade sur C ∗ .
18 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

Démonstration.
Il suffit de constater que µ∗ : T ∗ ⇒ (T ∗ )2 et η ∗ : T ∗ ⇒ 1C ∗ comme demandé et que les
diagrammes commutatifs pour les comonades sont exactement ceux des monades dont on
a inversé le sens des morphismes.

2.3.2 Monade et comonade fournis par une adjonction


Proposition 2.24
Soient R : A −→ B et L : B −→ A deux foncteurs tels que l’on aie une adjonction
L a R, d’unité η et de co-unité . Alors (RL, 1R ?  ? 1L , η) est une monade sur B.

Démonstration.
Montrons d’abord que le diagramme 8 de la définition 2.21 commute. On calcule, en utili-
sant le point (ii) du théorème 2.17 ainsi que la propriété 2.8 :

(1R ?  ? 1L ) ◦ (1RL ? η) = (1R ? ( ? 1L )) ◦ 1R ? (1L ? η)


= (1R ◦ 1R ) ? (( ? 1L ) ◦ (1L ? η))
= 1R ? 1L = 1RL ,

(1R ?  ? 1L ) ◦ (η ? 1RL ) = ((1R ? ) ? 1L ) ◦ ((η ? 1R ) ? 1L )


= ((1R ? ) ◦ (η ? 1R )) ? (1L ◦ 1L )
= 1R ? 1L = 1RL .

Ensuite, montrons que le diagramme 7 commute également :

(1R ?  ? 1L ) ◦ (1RL ? (1R ?  ? 1L )) = 1R ? (( ? 1L ) ◦ (1L ? 1R ?  ? 1L ))


= 1R ? ( ◦ (1LR ? )) ? 1L
= 1R ? ( ◦ ( ? 1LR )) ? 1L
= (1R ?  ? 1L ) ◦ ((1R ?  ? 1L ) ? 1RL ).

où l’on utilise la naturalité de  pour passer de la deuxième à la troisième ligne. u


t

Proposition 2.25
Soient R : A −→ B et L : B −→ A deux foncteurs tels que l’on aie une adjonction
L a R, d’unité η et de co-unité . Alors (LR, 1L ? η ? 1R , ) est une comonade sur A .

Démonstration.
On passe aux catégories duales et on obtient l’adjonction R∗ a L∗ de co-unité η ∗ et
d’unité ∗ (voir la remarque 2.16 (ii)). La proposition précédente implique que le triple
(L∗ R∗ , 1L∗ ? η ∗ ? 1R∗ , ∗ ) est une monade sur A ∗ . Par conséquent, (LR, 1L ? η ? 1R , ) est
une comonade sur A . u
t
Exemples 2.26
On reprend les exemples 2.20 et on regarde leurs monades et comonades associées.
(i) La monade sur la catégorie Set associée à l’adjonction spanK a U est le triple
(U spanK , 1U ??1spanK , η) où (1U ??1spanK )X : U spanK U spanK (X) → U spanK (X)
est explicité ci-dessous.
Pour tout w ∈ U spanK U spanK (X) il existe des Pkuniques coefficents α1 , . . . , αk ∈ K et
vecteurs v1 , . . . , vk ∈ spanK (X) tel que w = i=1 αi fvi . De même, chaque vi s’écrit
2.3 Monades et comonades 19

Pni
de façon unique comme vi = ji =1 βji fxji . On peut maintenant expliciter l’image de
w:
ni
k X
X
(1U ?  ? 1spanK )X (w) = αi βji fxji .
i=1 ji =1

La comonade sur la catégorie VectK associée à la même adjonction est le triple


(spanK U, 1spanK ?η?1U , ) où (1spanK ?η?1U )V : spanK U (V ) → spanK U spanK U (V )
est explicité ci-dessous.
Pour tout w = ki=1 αi fvi ∈ spanK U (V ),
P

k
X
(1spanK ? η ? 1U )V (w) = αi ffvi .
i=1

(ii) La monade sur la catégorie Set associée à l’adjonction − × E a Set (E, −) est le
triple (Set (E, − × E), 1Set(E,−) ?  ? 1−×E , η) où (1Set(E,−) ?  ? 1−×E )X est donné
par :

(1Set(E,−) ?  ? 1−×E )X : Set (E, Set (E, X × E) × E) −→ Set (E, X × E);

Si g = (g1 , g2 ) ∈ Set (E, Set (E, X × E) × E), alors pour tout e ∈ E,


h i h i
(1Set(E,−) ?  ? 1−×E )X (g) (e) = 1Set(E,−) (X×E )(g) (e)
h i
= X×E ◦ g (e)
= g1 (e)(g2 (e)).

La comonade sur la catégorie Set associée à l’adjonction − × E a Set (E, −) est le


triple (Set (E, −) × E, 1−×E ? η ? 1Set(E,−) , ) où (1−×E ? η ? 1Set(E,−) )X est donné
par :

(1−×E ? η ? 1Set(E,−) )X : Set (E, X) × E −→ Set (E, Set (E, X) × E) × E :

Si (g, e) ∈ Set (E, X) × E, alors

(1−×E ? η ? 1Set(E,−) )X (g, e) = (ηSet(E,X) (g), e)

où, pour tout e0 ∈ E, ηSet(E,X) (g)(e0 ) = (g, e0 ).

2.3.3 Algèbres sur une monade et co-algèbres sur une comonade


Définition 2.27 (Algèbre sur une monade)
Soient C une catégorie et T = (T, µ, η) une monade sur C . Une T-algèbre est un couple
(A, m) où A ∈ |C |, m : T (A) −→ A, vérifiant les propriétés suivantes :
(i) m ◦ µA = m ◦ T (m) ;
(ii) m ◦ ηA = 1A .
La situation est représentée par les diagrammes commutatifs ci-dessous.

µA ηA
T 2 (A) / T (A) A DDD / T (A)
DDDD
DDDD
T (m) m DDDD m
DDD 
 
T (A)
m /A A
20 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

Définition 2.28 (Morphisme de T-algèbres)


Soient C une catégorie et T = (T, µ, η) une monade sur C . Soient encore (A, m), (A0 , m0 )
deux algèbres sur T. Un morphisme f : (A, m) −→ (A0 , m0 ) est un élément de C (A, A0 )
tel que m0 ◦ T (f ) = f ◦ m. La composition de morphismes est donnée par la composition
des morphismes dans C .

Proposition 2.29
Soient C une catégorie et T = (T, µ, η) une monade sur C . La classe des T-algèbres munie
des morphismes définis ci-dessus forme la catégorie d’Eilenberg-Moore des T-algèbres, que
l’on note C T .

Démonstration.
Evident.

Définition 2.30 (Co-algèbre sur une comonade)


Soient C une catégorie et K = (K, ∆, ) une comonade sur C . Une K-co-algèbre est un
couple (A, d) où A ∈ |C |, d : A −→ K(A), vérifiant les propriétés suivantes :
(i) ∆A ◦ d = K(d) ◦ d ;
(ii) A ◦ d = 1A .
La situation est représentée par les diagrammes commutatifs ci-dessous.

∆A A
K 2 (A) o K(A)
O A Eo EE K(A)
O
O EEEE
EEEE
K(d) d EEEE d
EEE
K(A) o
d
A A

Définition 2.31 (Morphisme de K-co-algèbres)


Soient C une catégorie et K = (K, ∆, ) une comonade sur C . Soient encore (A, d), (A0 , d0 )
deux co-algèbres sur K. Un morphisme f : (A, d) −→ (A0 , d0 ) est un élément de C (A, A0 )
tel que K(f ) ◦ d = d0 ◦ f . La composition de morphismes est donnée par la composition des
morphismes dans C .

Proposition 2.32
Soient C une catégorie et K = (T, ∆, ) une comonade sur K. La classe des K-co-algèbres
munie des morphismes définis ci-dessus forme la catégorie d’Eilenberg-Moore des K-co-
algèbres, que l’on note CK .

Démonstration.
Évident.

Proposition 2.33

Soient C une catégorie et T = (T, µ, η) une monade sur C . Alors (C T ) ∼= C(T
∗ .
∗)

Démonstration (Ébauche).
Le foncteur bijectif est donné par G(A, m) = (A, m∗ ), G(f ∗ ) = f ∗ . Les détails sont laissés
au lecteur. u
t
2.3 Monades et comonades 21

2.3.4 Adjonctions associées à une monade et à une comonade


Proposition 2.34
Soient C une catégorie et T = (T, µ, η) une monade sur C . Le foncteur oubli U : C T −→ C
possède un adjoint à gauche F T : C −→ C T . On le définit, pour tout A, A0 ∈ |C | et pour
tout morphisme f ∈ C (A, A0 ), par
F T (A) = (T (A), µA )
F T (f ) = T (f ).

T est η : 1C ⇒ T = U F et la co-unité est donné par (A,m) = m


L’unité de l’adjonction T

pour tout (A, m) ∈ C .


Démonstration.
Vérifions d’abord que F T est bien défini, c’est à dire que F T (A) est bien une T-algèbre et
F T (f ) est effectivement un morphisme de T-algèbres. Par définition de monade, on a que
µA ◦ T (µA ) = µA ◦ µT (A) . Encore par définition, µA ◦ ηT (A) = 1T (A) .
Il reste à voir que F T (f ) est un morphisme de T-algèbres. Ceci est fourni par le fait que µ
est une transformation naturelle de T 2 ⇒ T .
Vérifions ensuite que F T est bien un foncteur.
Soient donc des objets A, A0 , A00 ∈ |C | et des morphismes f ∈ C (A, A0 ), f 0 ∈ C (A0 , A00 ),
F T (1A ) = T (1A ) = 1T (A) = 1F T (A) ;

F T (f 0 ◦ f ) = T (f 0 ◦ f ) = T (f 0 ) ◦ T (f ) = F T (f 0 ) ◦ F T (f ).
Soient maintenant (A, m) une T -algèbre et C ∈ |C |. On définit
 : C T F T (C), (A, m) −→ C (C, U (A, m))

α
C,(A,m)
C (C, U (A, m)) −→ C T F T (C), (A, m)

β :
C,(A,m)

par, pour tout f ∈ C T F T (C), (A, m) et g ∈ C (C, U (A, m)),




α  (f ) = f ◦ ηC
C,(A,m)
β  (g) = m ◦ T (g).
C,(A,m)

Vérifions que β est bien définie, c’est-à-dire que β  (g) est bien un morphisme de
C,(A,m)
T-algèbres, pour tout g ∈ C (C, U (A, m)) :
β  (g) ◦ µC = m ◦ T (g) ◦ µC
C,(A,m)

= m ◦ µA ◦ T 2 (g)
= m ◦ T (m) ◦ T 2 (g)
 
= m◦T β  (g) .
C,(A,m)

Le passage de la première à la deuxième ligne s’obtient par naturalité de µ et de la deuxième


à la troisième par définition de T-algèbre.
On vérifie que α et β sont inverses l’un de l’autre :
 
β  α  (f ) = m ◦ T (f ◦ ηC )
C,(A,m) C,(A,m)

= f ◦ µC ◦ T (ηC )
= f,
22 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

 
α  β  (g) = m ◦ T (g) ◦ ηC
C,(A,m) C,(A,m)
= m ◦ ηA ◦ g
= g.

Il suffit maintenant de démontrer que α est une transformation naturelle, ce qui s’ob-
tient par naturalité de η. En effet, pour tout objets C, C ∈ |C|, (A, m), (A , m ) ∈ C T et
0 0 0

tous morphismes φ∗ ∈ C ∗ (C, C 0 ), γ ∈ C T ((A, m), (A0 , m0 )),


h i
C (φ∗ , U (γ)) ◦ α  (h) = γ ◦ α  (h) ◦ φ
C,(A,m) C,(A,m)

= γ ◦ h ◦ (ηC ◦ φ)
= γ ◦ h ◦ (T (φ) ◦ ηC 0 )
h  i
= α 0 0 0  ◦ C T F T (φ∗ ), γ (h).
C ,(A ,m )

On obtient l’unité de l’adjonction en calculant α  (1


T (C) ) = ηC et la co-unité en
C,F T (C)
calculant β  (1A ) = m. u
t
U (A,m),(A,m)

Proposition 2.35
Soit K = (K, µ, ) une comonade sur une catégorie C . Le foncteur oubli U : CK −→ C
possède un adjoint à droite FK : C −→ CK . On le définit, pour tout A, A0 ∈ |C | et pour
tout morphisme f ∈ C (A, A0 ), par

FK (A) = (K(A), µA )
FK (f ) = K(f ).

La co-unité de l’adjonction est  : K = U FK ⇒ 1C et l’unité est donné par η(A,m) = m


pour tout (A, m) ∈ |CK |.

Démonstration.
∗ ∗ G
Par la proposition 2.33, on a que (C ∗ )(K ) ∼ = CK . La proposition précédente (2.34) donne
une adjonction
∗ / ∗
F (K ) : (C ∗ ) o ⊥ (C ∗ )(K ) : Ũ
Passant au dual, on obtient une adjonction
∗) ∗ / ∗) ∗
Ũ ∗ : (C ∗ )(K o ⊥ C : F (K

Grâce au corollaire 2.19, il reste seulement à contrôler que les morphismes annoncés sont
∗ ) ∗
∗ −1
bien U = Ũ ◦ G et FK = G ◦ F (K . Or, pour tout (A, d) ∈ CK , f un morphisme de
K-co-algèbres et g un morphisme de C ,

Ũ ∗ ◦ G−1 (A, d) = Ũ ∗ (A, d∗ ) = A;


Ũ ∗ ◦ G−1 (f ) = Ũ ∗ (f ) = f;
∗ ∗
G ◦ F (K ) (A) = G(K ∗ (A), ∗A ) = (K(A), A );
∗ ∗
G ◦ F (K ) (g) G (K ∗ (g))∗

= = g.
u
t
Proposition 2.36
Soient C une catégorie et T = (T, µ, η) une monade sur C . La monade associée à l’adjonc-
tion F T a U est exactement T.
2.3 Monades et comonades 23

Démonstration.
Soient η et  respectivement l’unité et la co-unité de l’adjonction F T a U . La monade
associée à l’adjonction F T a U est (U F T , 1U ?  ? 1F T , η) = (T, µ, η). u
t
Proposition 2.37
Soient C une catégorie et K = (T, ∆, ) une comonade sur C . La comonade associée à
l’adjonction U a FK est exactement K.
Démonstration.
Soient η et  respectivement l’unité et la co-unité de l’adjonction U a FK . La comonade
associée à l’adjonction U a FK est (U FK , 1U ? η ? 1FK , ) = (K, ∆, ). u
t

2.3.5 Foncteurs monadiques et comonadiques


Définition 2.38 (Foncteur de comparaison (monadicité))
Soient R : A −→ B et L : B −→ A deux foncteurs tels que l’on ait une adjonction L a R
d’unité η et de co-unité  ainsi que T = (RL, 1R ?  ? 1L , η) la monade sur B associée à
cette adjonction. Le foncteur de comparaison CanT : A −→ B T est défini par
CanT (A) = (R(A), R(A )) pour tout A ∈ |A |;
CanT (f ) = R(f ) pour tout f ∈ A (A, A0 ).
Il faut vérifier que (R(A), R(A )) est bien une T-algèbre pour tout A ∈ |A |. On a, par
naturalité de ,

R(A ) ◦ R(L(R(A)) ) = R(A ◦ LR(A) )


= R(A ◦ LR(A ))
= R(A ) ◦ RLR(A )

et, par le théorème 2.17 point (ii),

R(A ) ◦ ηR(A) = 1R(A) .

Il faut encore vérifier que R(f ) est bien un morphisme de T-algèbres, pour tout morphisme
f : A −→ A0 . Or,

R(f ) ◦ R(A ) = R(f ◦ A )


= R(A0 ◦ LR(f ))
= R(A0 ) ◦ RL(R(f )).

Ainsi, CanT est bien défini.


Définition 2.39 (Foncteur monadique)
Un foncteur R : A −→ B est dit monadique s’il admet un adjoint à gauche L : B −→ A
et que la monade T associée à cette adjonction soit telle que le foncteur de comparaison
CanT : A −→ B T donne une équivalence de catégories.
Exemple 2.40
Le foncteur U : VectK −→ Set est monadique. En effet, il possède un adjoint à gauche
spanK et la monade sur Set
Passociée à l’adjonction est T = (U spanK , µ, η) où µ est donné
k
pour tout X ∈ |Set|, w = i=1 αi f ni βj fx ∈ U spanK U spanK (X) par,
P
ji =1 i ji
 
k
X ni
X
µX (w) = αi  βji fxji  .
i=1 ji =1
24 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

Un élément de SetT est donc un couple (X, m) tels que les diagrammes suivants soient
commutatifs :

µX ηX
(U spanK )2 (X) / U span (X) X LLLLL / U spanK (X)
LLLLL
K
LLLLLL
U spanK (m) m LLLLLL m
  LL 
U spanK (X)
m /X X

Construisons un foncteur V : B T −→ VectK défini de la façon suivante :


V (X, m) = (X, +, ·) où, pour tout x1 , x2 ∈ X, α ∈ K, x1 + x2 = m(fx1 + fx2 )
α · x1 = m(αfx1 )
V (g) = g.
Il faut commencer par vérifier que V est bien défini, c’est-à-dire que V (X, m) est bien un
espace vectoriel et f est effectivement une application linéaire.
On commence par remarquer que pour tout xi , xj ∈ X, αi , αj , β, γ ∈ K,
   
m βfm(Pk αi fx ) + γfm(Pl αj fx ) = mU spanK (m) βfPk αi fx + γfPl αj fx
i=1 i j=1 j i=1 i j=1 j
 
= mµX βfPk αi fx + γfPl αj fx
i=1 i j=1 j
  
k l
!
X X
= m β αi fxi + γ  αj fxj  .
i=1 j=1

On va appliquer cette identité plusieurs fois pour vérifier les axiomes d’espace vectoriel.
Pour tout x1 , x2 , x3 ∈ X, α, β ∈ K,
Associativité
 
(x1 + x2 ) + x3 = m fm(fx1 +fx2 ) + fx3
= m((fx1 + fx2 ) + fx3 )
= m(fx1 + (fx2 + fx3 ))
 
= m fx1 + fm(fx2 +fx3 )
= x1 + (x2 + x3 );
 
α · (β · x1 ) = m αfm(βfx1 )
= m(α(βfx1 ))
= m((αβ)fx1 )
= m((αβ)fx1 )
= (αβ) · x1 .

Elément neutre Il existe 0X = m(0) vérifiant la propriété suivante :

0X + x1 = m(fm(0) + fx1 ) = m(0 + fx1 ) = x1 .

Inverse additif Il existe −x1 = m(−fx1 ) vérifiant la propriété suivante :

−x1 + x1 = m(fm(−fx1 ) + fx1 ) = m((−fx1 ) + fx1 ) = m(0) = 0X .


2.3 Monades et comonades 25

Commutativité x1 + x2 = m(fx1 + fx2 ) = m(fx2 + fx1 ) = x2 + x1 .


Normalisation 1 · x = m(1 · ηX (x)) = m ◦ ηX (x) = x.
Distributivité
 
α(x1 + x2 ) = m αfm(fx1 +fx2 )
= m(α(fx1 + fx2 ))
= m((αfx1 ) + (αfx2 ))
 
= m fm(αfx1 ) + fm(αfx2 )
= (αx1 ) + (αx2 );

(α + β)x1 = m((α + β)fx1 )


= m((αfx1 ) + (βfx1 ))
 
= m fm(αfx1 ) + fm(βfx1 )
= (αx1 ) + (βx2 ).

Ainsi, V (X, m) est bien un espace vectoriel. Vérifions maintenant que V (g) = g est une
application linéaire, pour tout morphisme de T-algèbres g : (X, m) −→ (X 0 , m0 ).
Pour tout α ∈ K, x1 , x2 ∈ X,
 
g(αx1 + x2 ) = g m(fm(αfx1 ) + fx2 )
= g(m(αfx1 + fx2 ))
= m0 (U spanK (g)(αfx1 + fx2 )
= m0 (αfg(x1 ) + fg(x2 ) )
= αg(x1 ) + g(x2 ).
−1
Il reste à montrer que V = (CanT ) .
Soient (W, +, ·) un espace vectoriel et g une application linéaire. Alors on obtient que
V (CanT (W, +, ·)) = (W, +0 , · 0 ) avec, pour tout w, w̄ ∈ W , α ∈ K,

w +0 w̄ = V (fw + fw̄ ) = w + w̄;

α · 0 w = V (αfw ) = α · w.
De plus, V (CanT (g)) = V (g) = g, donc V ◦ CanT = 1VectK .
Soient maintenant (X, m) une T-algèbre et h un morphisme de T-algèbres. Alors, posant
V (x, m) = (X, +, ·), on obtient CanT (V (X, m)) = (X, X ), où
k k k
! !
X X X
X αi fxi = αi xi = m αi fxi .
i=1 i=1 i=1

Par ailleurs, CanT (V (g)) = CanT (g) = g, donc CanT ◦ V = 1SetT .


On a donc montré que le foncteur oubli U : Vect −→ Set est monadique, et ainsi que

SetT ∼
= VectK .

u
t
26 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

Définition 2.41 (Foncteur de comparaison (comonadicité))


Soient R : A −→ B et L : B −→ A deux foncteurs tels que l’on aie une adjonction L a R
d’unité η et de co-unité  ainsi que K = (LR, 1L ? η ? 1R , ) la comonade sur A associée à
cette adjonction. Le foncteur de comparaison CanK : B −→ AK est défini par
CanK (B) = (L(B), L(ηB )) pour tout B ∈ |B|;
CanK (f ) = L(f ) pour tout f ∈ B (B, B 0 ).
Il faut vérifier que (L(B), L(B )) est bien une K-co-algèbre pour tout B ∈ |B|. On a, par
naturalité de η,
L(ηR(L(B)) ) ◦ L(ηB ) = L(ηR(L(B)) ◦ ηB )
= L(RL(ηB ) ◦ ηB )
= LR(L(ηB )) ◦ L(ηB )
et, par le théorème 2.17 point (ii),
L(B) ◦ L(ηB ) = 1L(B) .
Il faut encore vérifier que L(f ) est bien un morphisme de K-co-algèbres, pour tout mor-
phisme f : B −→ B 0 . Or,
L(ηB 0 ) ◦ L(f ) = L(ηB 0 ◦ f )
= L(RL(f ) ◦ ηB )
= LR(L(f )) ◦ L(ηB ).
Ainsi, CanK est bien défini.
Définition 2.42 (Foncteur comonadique)
Un foncteur L : B −→ A est dit comonadique s’il admet un adjoint à droite R : A −→ B
et que la comonade K associée à cette adjonction soit telle que le foncteur de comparaison
CanK : B −→ AK donne une équivalence de catégories.
Proposition 2.43
Si un foncteur R : A −→ B est monadique si et seulement si R∗ : A ∗ −→ B ∗ est
comonadique.
Démonstration.
On ne montre que le sens direct, la preuve étant la même dans le sens indirect. En utilisant
conjointement les hypothèses, la proposition 2.33, la remarque 2.16 (ii) et la démarche de
la preuve 2.35, on obtient la situation suivante :
/ /
L:Bo ⊥ A :R R∗ : A ∗ o ⊥ B ∗ : L∗

≈ CanT (CanT ) ≈
/    /
U∗ : B T ∗
FT : B o ⊥ BT : U o ⊥ B ∗ : (F T )∗
G ≈
 /
Ū : BT∗ ∗ o ⊥ B ∗ : FK
∗
La seule chose qui reste à faire est de vérifier que CanT∗ = G ◦ CanT . Or, pour tout
A ∈ |A ∗| et f ∗ ∈ C ∗ (A, A0 ),
∗
G ◦ CanT (A) = G(R(A), A ) = (R∗ (A), ∗A ) = CanT∗ (A);
∗
G ◦ CanT (f ∗ ) = G(R(f )∗ ) = R∗ (f ∗ ) = CanT∗ (f ∗ ).
u
t
2.3 Monades et comonades 27

On va maintenant donner un exemple de foncteur comonadique. Pour cela, on définit


d’abord la catégorie des morphismes au dessus d’un objet I.
Définition 2.44 (Catégorie au dessus de I)
Soit C une catégorie et I ∈ |C |. La catégorie au dessus I, notée C /I , est constituée des
collections suivantes :
n o
(i) C /I = (C, f ) : C ∈ |C |, f ∈ C (C, I) .


n o
(ii) C /I ((C, f ), (C 0 , f 0 )) = g ∈ C (C, C 0 ) : f = f 0 ◦ g .
La loi de composition est celle induite par la composition dans C .

Exemple 2.45
Le but de cet exemple est de présenter un foncteur comonadique tout en se familiarisant
avec les catégories de morphismes au dessus d’un objet. On se donne Set comme catégorie
de base et p : E −→ B un morphisme de Set. On définit les foncteurs suivants :
(i) p! : Set /E −→ Set /B , donné par

p! (A, f ) = (A, p ◦ f ) pour tout (A, f ) ∈ Set /E ;
p! (g) = g pour tout g ∈ Set /E ((A, f ), (A0 , f 0 )).

p! est clairement bien défini.


(ii) p∗ : Set /B −→ Set /E , défini de la façon suivante :
Pour tout objet (X, φ) ∈ Set /B , on considère le pullback (E × X, p1 , p2 ) de la paire
B
de morphismes (p, φ). Alors,

p∗ (X, φ) = (E × X, p1 ).
B

On rappelle que le pullback de ces deux morphismes est le sous ensemble du produit
cartésien E × X donné par E × X = {(e, x) ∈ E × X : p(e) = φ(x)}, et p1 , p2 sont les
B
projections standards.
On définit l’image d’un morphisme g : (X, φ) −→ (X 0 , φ0 ) comme l’unique morphisme
donné par la propriété universelle du pullback E × X 0 , appliquée au diagramme
B
suivant :

Diagramme 11: Définition de p∗ (g)


p2
E×X /
B g◦p2 ttX
t
p∗ (g) g ttt
tt
t
# tt
% tz t
E × X0 / X0
B p02
p1 φ
p01 φ0

   ~
E /B
p

Ce diagramme est bien commutatif puisque p ◦ p1 = φ ◦ p2 = φ0 ◦ g ◦ p2 .


28 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

Il faut encore vérifier que p∗ est bien un foncteur, ce qui est donné par la propriété
universelle. En effet, puisque 1E×X fait commuter le diagramme précédent où l’on
B
remplace (X 0 , φ0 ) par (X, φ) et g par 1X , l’unicité implique que

p∗ (1(X,φ) ) = 1E×X = 1p∗ (X,φ) .


B

De même, la propriété universelle donne que p∗ (f ◦g) = p∗ (f )◦p∗ (g) pour tout couple
de morphismes composables (f, g).
! ∗
On va maintenant montrer à une adjonction p a p .
que l’on a affaire
Soient (A, f ) ∈ Set /E , (X, φ) ∈ Set /B . On doit se donner une transformation
 
α((A,f ),(X,φ)) : Set /B p! (A, f ), (X, φ) −→ Set /E ((A, f ), p∗ (X, φ)).

On définit, pour tout morphisme g ∈ Set /B p! (A, f ), (X, φ) , l’image de g par la trans-


formation α  comme l’unique morphisme donné par la propriété universelle du


(A,f ),(X,φ)
pullback E × X dans le diagramme commutatif suivant :
B

g
A
α((A,f ),(X,φ)) (g)
" 
E×X /X
B p2

f
p1 φ

%  /B

E p

Le diagramme commute puisque par définition de g, φ ◦ g = p ◦ f . On définit maintenant


 
β((A,f ),(X,φ)) : Set /E ((A, f ), p∗ (X, φ)) −→ Set /B p! (A, f ), (X, φ) ,

où l’image d’un h ∈ Set /E ((A, f ), p∗ (X, φ)) est donné par

β((A,f ),(X,φ)) (h) = p2 ◦ h.

Il reste à voir que α = β −1 et que β est naturelle.


L’unicité du diagramme précédent indique clairement que α ◦ β = 1Set/E ((−),p∗ (−)) . Le fait
que β ◦ α = 1Set/B (p! (−),(−)) est encore plus élémentaire.
0 , f 0 ) ∈ Set / ,

On vérifie enfin que β est bien naturelle. Soient donc des objets (A, f ), (A E
(X, φ), (X 0 , φ0 ) ∈ Set /B , des morphismes ϕ : (A0 , f 0 ) → (A, f ), γ : (X, φ) → (X 0 , φ0 ) et

encore h ∈ Set /E ((A, f ), p∗ (X, φ)). On calcule alors :


h   i
Set /B p! (ϕ∗ ), (γ) ◦ β((A,f ),(X,φ)) (h) = γ ◦ (p2 ◦ h) ◦ ϕ
= p02 ◦ (p∗ (γ) ◦ h ◦ ϕ)
h i
= β((A,f ),(X,φ)) ◦ Set /E (ϕ∗ , p∗ (γ)) (h).
2.3 Monades et comonades 29

La situation est donnée par le diagramme commutatif :

p2
ϕ
/A h /E×X /
A0 tX
B γ◦p2
tt
p∗ (γ) γ ttt
t
tt
# tt
% tz t
E × X0 / X0
B p02
p1 φ
f
f0 p01 φ0

)%   /B
 ~
E p

On a donc bien l’adjonction annoncée.


On montre maintenant que le foncteur p! est comonadique. On doit donc calculer la
comonade K sur Set /B associée à cette adjonction. On sait que l’unité de l’adjonction
η : 1Set ⇒ p∗ ◦ p! est donnée, pour tout (A, f ) ∈ Set /E , par :
/E

 
η(A,f ) : (A, f ) −→ E × A, p1 ,
B


η(A,f ) = α((A,f ),p! (A,f )) 1p! (A,f ) .

La situation est la suivante :

Diagramme 12: Définition de η(A,f )

1A
A
η(A,f )
! 
E×A /A
B p2

f
p1 pf

%  /B

E p

La co-unité  : p! ◦ p∗ −→ 1Set est donnée, pour tout (X, φ) ∈ Set /E , par


/B

 
β(X,φ) : E × X, p ◦ p1 −→ (X, φ),
B


(X,φ) = β(p∗ (X,φ),(X,φ)) 1p∗ (X,φ)
= p2 .

Le diagramme suivant résume la situation :


30 2 QUELQUES BASES DE THÉORIE DES CATÉGORIES

Diagramme 13: Définition de (X,φ)


(X,φ)
E×X
B
GG 1E×X
GG B
GG
GG
# 
E×X /X
B p2

p1
p1 φ

&  /B

E p

! ∗
 associée à l’adjonction est donc (p ◦p , 1p! ?η ?1p∗ , ). On définit
La comonade (K, ∆, )
un foncteur F : Set /B K −→ Set /E par

F (X, φ), d = (X, p1 ◦ d) pour tout (X, φ), d ∈ Set /B K , 


  

pour tout γ ∈ Set /B K (X, φ), d , (X 0 , φ0 ), d0 .



F (γ) = γ

Il faut vérifier que c’est bien défini, c’est-à-dire que γ est 0bien un morphisme dans Set /E
de F (X, φ), d = (X, p1 ◦ d) vers F (X , φ ), d = (X , p1 ◦ d0 ). Le diagramme suivant
0 0 0 0

donne la réponse :

E×X o d
X
zz 
B
p∗ (γ) www
w zz 
γ z
ww
w zz 
{ww z zz 
}z 
E × X0 o d0
X0  
B
p1  φ
 
p01 φ0 
 

 p  
E /B

La face supérieure est commutative, par définition de γ comme morphisme de co-algèbres,


la face de droite aussi, par définition de γ comme morphisme de Set /B , ainsi que la face
de gauche, puisque p∗ est bien défini. Par conséquent,

p1 ◦ d = p01 ◦ p∗ (γ) ◦ d = (p01 ◦ d0 ) ◦ γ.

Il reste à montrer que (CanK )−1= F et l’on aura fini de prouver que p! est comonadique.
  
Or, puisque CanK F (X, φ), d = (X, p ◦ p1 ◦ d), η(X,p1 ◦d) = (X, φ ◦ p2 ◦ d), η(X,p1 ◦d) ,
on doit prouver que p2 ◦ d = 1X et que η(X,p1 ◦d) = d.
Puisque (X, φ), d est une K-co-algèbre, on a que (X,φ) ◦ d = p2 ◦ d = 1X . Par ailleurs,
la propriété universelle du pullback (E × X, p1 , p2 ) appliquée au triple (X, p1 ◦ d, 1X ) assure
B
que d est le seul morphisme de X −→ E × X tel que p2 ◦ d = 1X et p1 ◦ d = p1 ◦ d. Ainsi,
B
η(X,p1 ◦d) = d. 
De plus, F ◦ CanK (A, f ) = F (A, p ◦ f ), η(A,f ) = (A, p1 ◦ η(A,f ) ) = (A, f ) (voir le
diagramme 12). u
t
2.3 Monades et comonades 31

Remarque 2.46
Dans l’exemple précédent, la seule propriété de Set que nous avons utilisé est que le
pullback de deux morphismes existe toujours. Par conséquent, cet exemple se généralise
pour toute catégorie C avec pullbacks, une fois que l’on s’est fixé un choix, pour chaque
morphisme φ, d’un pullback de (p, φ).
32 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

3 Théorème de Galois catégorique


3.1 Enoncé du théorème
Cette partie est inspirée du livre de Borceux et Janelidze [4]. Avant de donner l’énoncé
du théorème, nous devons définir les objets mathématiques dont il est question dans les
hypothèses et la conclusion.

3.1.1 Objets scindés


Définition 3.1 (Classe de morphismes admissible)
Soit C une catégorie. Une classe de morphismes C de C est dite admissible lorsque :
(i) tout isomorphisme est contenu dans C ;
(ii) C est stable par composition ;
(iii) Dans le pullback

• c /•

d b
 
• /•
a

si a, b ∈ C , alors c, d ∈ C .
On note C ⊆ C pour indiquer que C est une classe de morphismes de C .

Définition 3.2
Soit C une catégorie, I ∈ |C | et C une classe de morphismes admissible de C . La catégorie
C /I est définie par
n o
(i) C /I = (C, f ) : C ∈ |C |, f ∈ C et f ∈ C (C, I) .

n o
(ii) C /I ((C, f ), (C 0 , f 0 )) = g ∈ C (C, C 0 ) : f = f 0 ◦ g .
La loi de composition est celle induite par la composition dans C .

Remarque 3.3
On remarque que C /I est une une sous-catégorie
pleine de C /I , c’est-à-dire telle que
pour tout objets (C, f ), (C 0 , f 0 ) ∈ C /I , C /I ((C, f ), (C 0 , f 0 )) = C /I ((C, f ), (C 0 , f 0 )).

Proposition 3.4
Soient C ⊆ C une classe de morphismes admissible d’une catégorie avec pullbacks et
p : E −→ B ∈ C . Alors l’adjonction
/
p ! : C /E o ⊥ C /B : p∗

(voir l’exemple 2.45 et la remarque 2.46) se restreint à une adjonction


/
p̄! : C /E o ⊥ C /B : p̄∗ .
3.1 Enoncé du théorème 33

Démonstration.
et p̄∗ = p∗

On vérifie d’abord que les foncteurs p̄! = p! sont bien définis.
C /E C /B

Pour tout objet (A, f ) ∈ C /E , p! (A, f ) = (A, p ◦ f ) ∈ C /B puisque C est stable par

composition.
Pour tout objet (X, φ) ∈ C /B , p∗ (A, f ) ∈ C /E par la condition (iii) de la définition

3.1.
Soient η et  respectivement l’unité et la co-unité de l’adjonction p! a p∗ . Posant
⇒ p̄∗ p̄! et ¯ : p̄! p̄∗ ⇒ 1

η̄ = η et ¯ =  , alors η̄ : 1 sont bien des
C /E C /B C /E C /B

transformations naturelles, par la remarque 3.3. Elle vérifient de plus les identités de la
caractérisation d’une adjonction (voir théorème 2.17 (ii)), ce qui prouve que p̄! a p̄∗ . u
t

Définition 3.5 (Adjonction relativement admissible)


Une adjonction relativement admissible consiste en
/
(i) une adjonction L : B o ⊥ A : R d’unité η et de co-unité  ;
(ii) deux classes admissibles B ⊆ B, A ⊆ A .
Elle doit de plus vérifier les conditions suivantes :
(i) pour tout morphisme b ∈ B, L(b) ∈ A ;
(ii) pour tout morphisme a ∈ A , R(a) ∈ B ;
(iii) pour tout objet B ∈ |B|, l’unité ηB : B −→ RL(B) est dans B ;
(iv ) pour tout objet A ∈ |A |, la co-unité A : LR(A) −→ A est dans A ;
/
On note L : (B, B) o ⊥ (A , A ) : R une telle adjonction.

Proposition 3.6 /
Soit L : (B, B) o ⊥ (A , A ) : R une adjonction relativement admissible, avec B
une catégorie avec pullbacks. On note η et  respectivement l’unité
. et la co-unité de l’ad-
B
B −→ A L(B) , défini par

jonction. Pour tout objet B ∈ |B|, le foncteur LB :

pour tout (B̃, b) ∈ B B ,


 
LB (B̃, b) = L(B̃), L(b)

pour tout g ∈ B B (B̃, b), (B̃ 0 , b0 ) ,


  
LB (g) = L(g)

L(B) −→ B B . On le définit de la façon sui-


.
possède un adjoint à droite RB : A

.
0 0 A
vante : Pour tout couple d’objets (A, f ), (A , f ) ∈ L(B) et pour tout morphisme

.
g ∈ A L(B) ((A, f ), (A0 , f 0 )), on considère les pullbacks dans B des couples de mor-
 
phismes ηB , R(f ) et ηB , R(f 0 ) que l’on note respectivement RB (A), RB (f ), p(A, f )
 
 
et RB (A0 ), RB (f 0 ), p(A0 , f 0 ) . Le foncteur RB est alors donné par :

RB (A, f ) = (RB (A), RB (f ))

et RB (g) est fourni par la propriété universelle du pullback comme le montre le diagramme
suivant :
34 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

p(A,f )
RB (A) / R(A)
nn
RB (g) R(g)◦p(A,f ) R(g)nnnn
nnn
n
% ' nv nn
RB (A0 ) / R(A0 )
p(A0 ,f 0 )

RB (f ) R(f )
RB (f 0 ) R(f 0 )

  {
B / RL(B)
ηB

/ .
Cette adjonction se restreint à une adjonction LB : B
 A L(B) : RB .
B o

Démonstration.
Soit R̃ : A L(B) −→ B RL(B) un foncteur définit par
. .

.
R̃(A, f ) = R(A), R(f ) pour tout (A, f ) ∈ A L(B) ,


pour tout g ∈ A L(B) ((A, f ), (A0 , f 0 )).


.
R̃(g) = R(g)

On commence par remarquer que RB = (ηB )∗ ◦ R̃ et LB = (L(B) )! ◦ LB ◦ (ηB )! . Aussi, par


l’exemple 2.45, on a une adjonction (ηB )! a (ηB )∗ . Il suffit donc de montrer l’adjonction
(L(B) )! ◦ LB a R̃, grâce au corollaire 2.19. La situation est la suivante :

(ηB )! (L(B) )! ◦LB


/ /
B
. .
B A
B o ⊥ RL(B) o ⊥ L(B)
(ηB )∗ R̃

La deuxième observation consiste à voir que voir que les isomorphismes naturels α, β entre
les foncteurs B (−, R(−)) et A (L(−), −), donnés par la preuve.du théorème  2.17,
 se
restreignent à des isomorphismes naturels entre les foncteurs B RL(B) −, R̃(−) et
.
A L(B) (L(B) )! ◦ LB , − . En effet,


.   n   o
B RL(B) (B̃, b), R̃(A, f ) = g ∈ B B̃, R(A) : b = R(f ) ◦ g

et
.   n   o
A L(B) (L(B) ) ◦ LB (B̃, b), (A, f ) = h ∈ A L(B̃), A : L(B) ◦ L(b) = f ◦ h .
!

.  
Or, pour tout h ∈ A !
L(B) (L(B) ) (B̃, b), (A, f ) , α(B̃,A) (h) := R(h) ◦ ηB̃ , et donc

b = R(L(B) ) ◦ ηRL(B) ◦ b
= R(L(B) ) ◦ RL(b) ◦ ηB̃
= R(f ◦ h) ◦ ηB̃
= R(f ) ◦ α(B̃,A) (h).
.  
Ainsi, α(B̃,A) (h) ∈ B RL(B) ( B̃, b), R̃(A, f ) .
3.1 Enoncé du théorème 35

.  
De même, pour tout g ∈ B RL(B) (B̃, b), R̃(A, f ) , β(B̃,A) (g) := A ◦ L(g) ce qui im-
plique

L(B) ◦ L(b) = L(B) ◦ LR(f ) ◦ L(g)


= f ◦ A ◦ L(g)
= f ◦ β(B̃,A) (g).
.  
Par conséquent, β(B̃,A) (g) ∈ A L(B) (L(B) )! (B̃, b), (A, f ) , ce qui achève de prouver
l’adjonction désirée.
Prouvons maitenant que cette adjonction se restreint à une adjonction
/ .
LB : B B o

⊥ A L(B) : RB .

Pour tout B ∈ |B|, ηB ∈ B, la proposition 3.4 nous donne la restriction de l’adjonction


(ηB )! a (ηB )∗ . Il suffit donc de voir que l’adjonction (L(B) )! ◦ LB ◦ LB a R̃ se restreint
aussi comme voulu. La situation est la suivante :

(ηB )! (L(B) )! ◦LB


/ /
B
. .
B o ⊥ RL(B) o ⊥ A L(B)
B
(ηB )∗ R̃

Or, les conditions (i), (i) et (iii) de la définition d’adjonction admissible assurent que les
foncteurs en question sont bien définis sur les sous-catégories considérées. Par ailleurs, le
fait qu’elles soient pleines fournit le fait que l’adjonction est conservée.
En combinant l’exemple 2.45 et ce que l’on a vu plus haut, on obtient que l’unité de
B 
cette adjonction est donné, pour tout (B̃, b) ∈ B , par la propriété universelle du
pullback du diagramme suivant :

B̃ ηB̃
ηB
(B̃,b)

$ !
RB (L(B̃)) / RL(B̃)
p(L(B̃),L(b))

b
RB (L(b)) RL(b)

&  
B / RL(B)
ηB

.
Pour tout (A, f ) ∈ A L(B) , soit (P, p1 , p2 ) le pullback de (R(f ), ηB ). La co-unité

en (A, f ) est donnée par


B
(A,f ) = A ◦ L(p2 ).
u
t
Définition 3.7 (Objet scindé)
/
Soit L : (B, B) o ⊥ (A , A ) : R une adjonction relativement admissible, où B est

une catégorie avec pullbacks. Un objet (X, b) ∈ B /B est dit scindé par un morphisme

36 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

p : E −→ B de B si l’unité η E de l’adjonction LE a RE est un isomorphisme en p∗ (X, b).


Autrement dit,
ηpE∗ (X,b) : p∗ (X, b) −→ RE LE p∗ (X, b)


est un isomorphisme.
Pour expliciter la situation, on pose (P, p0 , b0 ) le pullback de la paire (p, b), alors par défi-
nition, p∗ (X, b) = (P, b0 ). Par ailleurs, (RB (L(P )), RB (L(b0 )), p(L(P ), L(b0 )) est le pullback
de la paire (RL(b0 ), ηE ). On demande alors que η(P,b E
0 ) , donné par la propriété universelle

du second pullback, soit un isomorphisme. La situation est la suivante :

Xo p0
P E
ηP
η(P,b 0)

$ !
RB (L(P )) / RL(P )
p(L(P ),L(b0 ))

b
b0
RB (L(b0 )) RL(b0 )

$ '  
Bo p E ηE
/ RL(E)

Remarque 3.8
On notera SplitB (p) la sous-catégorie pleine de B B constituée des objets scindés par p.


On les dit scindés car ils généralisent d’une certaine manière la notion d’algèbre scindé par
une extension de corps (voir le théorème 4.25).

3.1.2 Morphismes de descente galoisienne


Définition 3.9 (Morphisme de descente effective)
Soit C ⊆ C une classe de morphismes admissible d’une catégorie avec pullbacks. Un mor-
phisme p : E −→ B est dit un morphisme de descente effective relativement à C lorsque
(i) p ∈ C ;
(ii) le foncteur p∗ : C /B −→ C /E est monadique.

Définition 3.10 (Morphisme / de descente galoisienne)


Soit L : (B, B) o ⊥ (A , A ) : R une adjonction relativement admissible, où A et
B sont des catégories avec pullbacks. Dans ce contexte, un morphisme p : E −→ B est dit
morphisme de descente galoisienne lorsque :
(i) p est un morphisme de descente effective relativement à B ;
(ii) la co-unité E de l’adjonction LE a RE est un isomorphisme ;
.
(iii) pour tout objet (X, f ) ∈ A L(E) , l’objet p! ◦ RE (X, f ) ∈ B /B est scindé par p.

Les foncteurs impliqués dans cette définition sont les suivants :

p∗ LE
/ / .
B o ⊥ B o ⊥ A L(E)
B E
p! RE
3.1 Enoncé du théorème 37

3.1.3 Catégorie des préfaisceaux internes et groupoïde de Galois


En théorie des catégories, la catégorie des ensembles joue un rôle particulier. En effet,
une petite catégorie est un ensemble d’objets et un ensemble de morphismes munis d’une
certaine structure. On peut donc définir une petite catégorie comme un couple d’objets
de la catégorie des ensembles avec une structure particulière. Cette approche se généralise
à une catégorie quelconque avec pullbacks. Pour plus de facilité, on introduit la notation
suivante.
Notation 3.11 (Pullbacks)
Dans cette partie, nous utiliserons une notation pratique pour exprimer les morphismes
induits par une propriété universelle de pullback. Etant donné un pullback (A × B, π0 , π1 ),
C

π0
A×B /A
C
π1
 
B /C

 
f
On notera l’unique morphisme suivant :
g

D   f
f
g
' $
π0
A×B /A
C
g
π1

'  /C

B

Remarque 3.12
Avec cette notation, la règle suivante s’applique :
   
h
 f◦ k
   
f h 
◦ =   .
g k  h 
g◦
k

Définition 3.13 (Catégorie interne)


Soit C une catégorie avec pullbacks. Une catégorie interne A de C est constitué de :
(i) un objet A0 de C nommé « objet des objets » ;
(ii) un objet A1 de C nommé « objet des morphismes » ;
(iii) un morphisme d0 : A1 −→ A0 nommé « source » ;
(iv ) un morphisme d1 : A1 −→ A0 nommé « cible » ;
(v ) un morphisme i : A0 −→ A1 nommé « identité » ;
(vi) un morphisme c : A1 × A1 −→ A1 nommé « composition », où A1 × A1 est le pullblack
A0 A0
de (d0 , d1 ) (voir le diagramme 14).
38 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

Diagramme 14: Définition de A1 × A1


A0

A1 × A1 π0
/ A1
A0

π1 d1
 
A1 / A0
d0

Le diagramme suivant résume les données :

d0
/
A1 × A1 c / A1 o i A0
A0 d1
/

Voici les axiomes pour les catégories internes, ainsi que leurs interprétations pour les petites
catégories :
(i)
d0 ◦ i = d1 ◦ i = 1A0 .
Cet axiome exprime le fait que le domaine et le codomaine d’une identité sur un objet
est exactement cet objet-là.
   
i ◦ d0 1A1
(ii) Soient et les morphismes de domaine A1 et de codomaine
1A1 i ◦ d1
A1 × A1 donnés par la propriété universelle du pullback du digramme 14 avec les
A0
couples de morphismes (i ◦ d0 , 1A1 ) et (1A1 , i ◦ d1 ). Alors,
   
i ◦ d0 1A1
c◦ = 1A1 = c ◦ .
1A1 i ◦ d1

Pour les petites


 catégories,
 cet axiome assure  que iretourne un morphisme identité.
i ◦ d0 1A1
En effet, : f 7→ (1dom(f ) , f ) et : f 7→ (f, 1codom(f ) ).
1A1 i ◦ d1
(iii)
d0 ◦ c = d0 ◦ π0 .
Cet axiome demande que le domaine de la composition de deux morphismes soit celui
du premier morphisme.
(iv )
d1 ◦ c = d1 ◦ π1 .
Cet axiome garantit que le codomaine de la composition de deux morphismes est celui
du second morphisme.

(v ) Soient (A1 × A1 ) × A1 , P0 , P1 le pullback de (d1 ◦ π1 , d0 ) et
A0 A0

 
π 0 ◦ P 0 
 π 1 ◦ P0  : (A1 × A1 ) × A1 −→ A1 × A1
c◦ A0 A0 A0
 P1 
c ◦ P0
: (A1 × A1 ) × A1 −→ A1 × A1
P1 A0 A0 A0
3.1 Enoncé du théorème 39

les morphismes donnés par la propriété 


universelle 
du pullback du digramme 14 avec
π1 ◦ P0
les couples de morphismes π0 ◦ P0 , c ◦ et (c ◦ P0 , P1 ). Alors,
P1
     
π0 ◦ P0  π0 ◦ P0  
c◦ c ◦ P0
c◦  π1 ◦ P0  =c◦  π1 ◦ P0  =c◦ .
c◦ P1
P1 P1

Cet axiome exprime l’associativité de la composition. En effet, pour les petites caté-
gories,
 
π 0 ◦ P 0 
c◦ π1 ◦ P0  : ((f, g), h) →
7 (f, h ◦ g) →
7 (h ◦ g) ◦ f
c◦
 P 1 
c ◦ P0
c◦ : ((f, g), h) → 7 (g ◦ f, h) → 7 h ◦ (g ◦ f )
P1

Exemples 3.14
(i) Toutes les petites catégories sont des catégories internes de Set.
(ii) Soit p : E −→ B un morphisme d’une catégorie C avec pullbacks. Soient le pullback
(E × E, d0 , d1 ) de (p, p) et le pullback (E × E) × (E × E), π0 , π1 de (d0 , d1 ). On
B B E B
pose
 
1E
∆= : E −→ E × E
1E B

et  
d0 ◦ π0
c= : (E × E) × (E × E) −→ E × E
d1 ◦ π1 B E B B

les morphismes induits par la propriété universelle du pullback. On explicite une


dernière fois les deux morphismes :

Diagramme 15: Définition de ∆ Diagramme 16: Définition de c

E (E × E) × (E × E)
1E B E B d0 ◦π0

c
!
 
E×E /E
B d0 d1 ◦π1 E×E /E
1E B d0
d1 p
d1 p
#  
  
/B
E p E /B
p

Alors les données suivantes forment une catégorie interne de C :

d0
/
(E × E) × (E × E) c /E×E o ∆ E
d1
B E B B /
40 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

En effet, l’axiome (i) est vérifié par définition de ∆ et les axiomes (iii), (iv) par
définition de c. Concernant l’axiome (ii), on doit vérifier que
! !
∆ ◦ d0 1E×E
c◦ 1E×E = 1E×E = c ◦ B .
B
B ∆◦d 1

On ne vérifie que la première égalité, la seconde se resolvant de la même manière. Il


suffit de voir que l’unicité de la propriété universelle du pullback E × E par rapport
B
aux morphismes d0 , d1 implique que
 !!
 ∆ ◦ d0
 d0 ◦ c◦ = d0

1E×E
! 
∆ ◦ d0

B
c◦ 1E×E = 1E×E ⇔ !! .
B
B  ∆ ◦ d0
 d1 ◦ c◦ = d1

1E×E


B

Or, d’une part, on a que d0 ◦ c = d0 ◦ π0 et d!1 ◦ c = d1 ◦ π1 , et d’autre part, on a que


∆ ◦ d0
 
∆ ◦ d0
π0 ◦ = ∆ ◦ d0 et π1 ◦ 1E×E = 1E×E . Ainsi,
1A1 B
B

 !!
 ∆ ◦ d0
 d0 ◦ c◦ = d0 ◦ ∆ ◦ d0 = d0

1E×E


B !! .
 ∆ ◦ d0
 d1 ◦ c◦ = d1 ◦ 1E×E = d1

1E×E


B
B

Pour l’axiome (v), il s’agit encore d’appliquer l’unicité de la propriété universelle du


même pullback avec les morphismes (d0 ◦ P0 , d1 ◦ P2 ), où P0 , P1 , P2 correspondent aux
« projections » sur les composantes. u
t

Définition 3.15 (Groupoïde interne)


Une catégorie interne A = (A0 , A1 , d0 , d1 , i, c) munie d’un morphisme m : A1 −→ A1
vérifiant de plus  
1A1
c◦ = i ◦ d0 ;
m
et  
m
c◦ = i ◦ d1 ;
1A1
est un groupoïde interne. Le morphisme m est appelé le morphisme « inverse ».

Exemples 3.16
(i) Toute petite catégorie dont tous les morphismes sont inversibles est un groupoïde
interne sur Set.
(ii) On reprend l’exemple précédent. Les données suivantes forment un groupoïde interne
de C :

d0
/
(E × E) × (E × E) c /E×E o ∆ E
d1
B E B B
L /
τ
3.1 Enoncé du théorème 41

où τ est définie par :

Diagramme 17: Définition de τ

E×E
B d1
τ
# !
E×E /E
d0 B d0
d1 p
$  
/B
E p

On va seulement vérifier la première identité, la seconde se resolvant de même. On


utilise l’unicité de la propriété universelle du pullback suivant :

E×E
B d0
∆◦d0

# !
E×E /E
d0 B d0
d1 p
$  /B

E p

On calcule :
! !
1E×E 1E×E
d0 ◦ c ◦ B = d0 ◦ π0 ◦ B
τ τ
= d0 ◦ 1E×E
B

= d0 .

Par ailleurs,
! !
1E×E 1E×E
d1 ◦ c ◦ B = d1 ◦ π1 ◦ B
τ τ
= d1 ◦ τ
= d0 .

u
t

On introduit un peu prématurement ce qu’est le groupoïde de Galois pour un mor-


phisme de descente galoisienne, pour pouvoir déja comprendre l’énoncé du théorème. On
ne prouve pas ici que c’est effectivement un groupoïde, car il nous manque un petit peu
de théorie sur les algèbres scindées. Ceci sera corrigé dans la preuve du théorème (voir le
lemme 3.35).
42 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

Définition 3.17 (Groupoïde/ de Galois)


Soient L : (B, B) o ⊥ (A , A ) : R une adjonction relativement admissible (voir
3.5) où A et B sont des catégories avec pullbacks et p : E −→ B est un morphisme de
descente galoisienne de B par rapport à ces données. Le groupoïde de Galois Gal(p) est le
groupoïde interne à A suivant :

L(d0 )
    /
L(c) L(∆)
L (E × E) × (E × E) /L E×E o L(E) ,
L(d1 )
B E B
I
B /

L(τ )


d0
/
(E × E) × (E × E) c /E×E o ∆ E
d1
B E B B
L /
τ

est défini comme dans les exemples 3.14 et 3.16.


On veut maintenant généraliser les foncteurs qui vont d’une petite catégorie vers Set.
Les préfaisceaux internes sur une catégorie interne vont jouer ce rôle.
Définition 3.18 (Préfaisceau interne)
Soient C une catégorie avec pullbacks et A = (A0 , A1 , d0 , d1 , i, c) une catégorie interne de
C . Un préfaisceau interne F sur A est constitué de :
(i) un objet I ∈ |C | ;
(ii) un morphisme FObj : I −→ A0 ;
(iii) un morphisme FMor : A1 × I −→ I, où A1 × I est le pullback de (d0 , FObj ).
A0 A0

Diagramme 18: Définition de A1 × I


A0

A1 × I /I
A0 πI
π A1 FObj
 
A1 / A0
d0

Ces données doivent de plus vérifier les axiomes suivants :


(i) FObj ◦ FMor = d1 ◦ πA1 ;
 
i ◦ FObj
(ii) FMor ◦ = 1I ;
1I

(iii) Si (A1 × A1 ) × I, P0 , P1 est le pullback de (d0 ◦ π0 , FObj ), alors on a
A0 A0
 
  π1 ◦ P0
c ◦ P0 
FMor ◦ = FMor ◦  π 0 ◦ P0 .
P1 FMor ◦
P1
3.1 Enoncé du théorème 43

Pour comprendre le sens de cette définition, regardons ce qui se passe dans la catégorie
Set.
Exemple 3.19
Soit A = (A0 , A1 , d0 , d1 , i, c) une catégorie interne de Set, c’est-à-dire correspondant à une
petite catégorie A . La notion de préfaisceau interne sur A correspond alors exactement
avec celle de foncteur de A dans Set. Pour voir ceci, donnons nous F = (I, FObj , FMor )
un préfaisceau interne et interprétons la structure et les axiomes. D’abord, on peut voir
que FObj permet de définir une application F : A −→ Set sur les objets. En effet, on
−1
peut poser, pour tout A ∈ A0 , F (A) = FObj (A). Ainsi, F associe à A l’ensemble de ces
préimages par`FObj . Réciproquement, étant donné un foncteur G : A −→ Set, on peut
définir GObj : a∈A0 G(a) −→ A0 par (x, a) 7→ a. En effet,
a a
I= G−1
Obj (a) = G(a).
a∈A0 a∈A0

Les deux associations mentionnées sont alors inverse l’une de l’autre.


Le morphisme FMor permet quant à lui de définir F sur les morphismes. En effet,
dans Set, A1 × I = {(f, x) : f ∈ A1 et x ∈ F (domf )}. Ainsi, pour tout morphisme f ,
A0
on peut définir F (f ) : F (domf ) −→ F (codomf ) par F (f )(x) = FMor (f, x). Le fait que
FMor (f, x) ∈ F (codomf ) est assuré par le premier axiome.
Le second axiome assure la compatibilité du foncteur F ainsi défini avec les identités.
Plus précisément, il assure que pour tout x ∈ F (A), F (1A )(x) = FMor (1FObj (x) , x) = x,
c’est-à-dire que F (1A ) = 1F (A) .
Le troisième axiome assure la compatibilité du foncteur F avec la composition. Plus pré-
cisément, il assure que pour tout couple de morphisme composables (f, g) et x ∈ F (domf ),
alors

F (g ◦ f )(x) = FMor (g ◦ f, x)
 
= FMor g, FMor (f, x)
= F (g)(F (f )(x)) = [F (g) ◦ F (f )](x),

et donc F (g ◦ f ) = F (g) ◦ F (f ).
Remarque 3.20
Dans le cas d’un groupoïde G sur une catégorie concrète C , on peut voir intuitivement
FMor comme une « action de groupoïde » de G sur (IF , FObj ). La proposition 4.23 peut-
être éclairante à ce sujet. Elle montre que d’une façon générale, si le groupoïde ne possède
qu’un seul objet, alors c’est un groupe, et les préfaisceaux internes sur G sont les objets
de C munis d’une action de groupe de G qui est de plus un morphisme de C .

On internalise maintenant la notion de transformation naturelle, pour obtenir la caté-


gorie des préfaisceaux internes sur une catégorie interne.
Définition 3.21 (Transformation naturelle interne entre préfaisceaux)
Une transformation naturelle interne d’un préfaisceau interne F = (IF , FObj , FMor ) vers
un autre préfaisceau interne G = (IG , GObj , GMor ) sur une catégorie interne A (d’ensemble
de morphisme A1 ) est un morphisme α : IF −→ IG tel que :
(i) GObj ◦ α = FObj ;
 
π A1
(ii) α ◦ FMor = GMor ◦ ;
α ◦ πIF
44 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

Exemple 3.22
Etudions la situation dans Set :
La première condition donne que si x ∈ F (A), c’est-à-dire FObj (x) ∈ A, alors on a que
GObj ◦ α(x) = FObj (x) ∈ A. Par conséquent, α(x) ∈ G(A).
La deuxième condition assure que pour tout morphisme f de A et tout x ∈ F (domf ),
alors

α ◦ F (f )(x) = α ◦ FMor (f, x)


 
= GMor f, α(x)
= [G(f ) ◦ α](x).
`
Par conséquent, si α : F ⇒ G est une transformation naturelle de F vers G, alors A∈A0 αA
est une transformation naturelle interne de F vers G, et vice-versa.

Proposition 3.23 (Catégorie des préfaisceaux internes)


Soient C une catégorie avec pullbacks et A une catégorie interne sur C . Alors la classe
de tous les préfaisceaux internes sur A munis des transformations naturelles comme mor-
phismes forme une catégorie.
Cette catégorie est notée C A .
Démonstration.
La composition des morphismes est donnée par la composition dans C ; si elle est bien
définie, elle est associative. Il faut vérifier que la composition de deux transformations
naturelles internes est une transformation naturelle interne. Pour cela, soient α : F ⇒ G
et β : G ⇒ H des transformations naturelles internes entre préfaisceaux internes sur A.
Alors, HObj ◦ β ◦ α = GObj ◦ α = FObj .
Par ailleurs,
 
π A1
β ◦ α ◦ FMor = β ◦ GMor ◦
α ◦ πIF
   
π A1 πA1
= HMor ◦ ◦
β ◦ πIG α ◦ π IF
 
πA1
= HMor ◦ .
β ◦ α ◦ πIF

Les identités sont trivialement des transformations naturelles, ce qui achève la preuve. u
t
Définition 3.24
Soient C une catégorie avec pullbacks, C une classe de morphismes relativement admissible
A
et A une catégorie interne sur C . La sous-catégorie pleine C de C A est définie par
n o
A
C = (IF , FObj , FMor ) ∈ C A : FObj ∈ C .

3.1.4 Enoncé
Théorème 3.25 (Théorème / de Galois catégorique)
Soit L : (B, B) o ⊥ (A , A ) : R une adjonction relativement admissible (voir 3.5)
où A et B sont des catégories avec pullbacks. Si p : E −→ B est un morphisme de descente
galoisienne de B par rapport à ces données, alors il existe une équivalence de catégorie
Gal(p)
SplitB (p) ≈ A .
3.2 Preuve du théorème 45

3.2 Preuve du théorème


Dans cette partie, on se place toujours dans les conditions de l’énoncé 3.25. Pour tout
morphisme m : X −→ Y de C = B ou A , on aimerait définir le foncteur m∗ : C /Y −→
C /X . Ceci nécéssite le choix, pour tout morphisme φ, d’un pullback de (m, φ). Fixons
nous ces choix pour définir les foncteurs RE , p∗ et L(d0 )∗ .
La stratégie générale de la preuve est de prouver qu’il existe des foncteurs monadiques
.
F1 : SplitB (p) −→ A L(E)

et .
−→ A
Gal(p)
F2 : A L(E)
ayant des monades associées isomorphes. Nous allons commencer par donner la construction
de F1 .

3.2.1 Premier foncteur monadique


Proposition 3.26
Soit (B̃, e) ∈ B /E . Les propositions suivantes sont équivalentes :

(i) (B̃, e) est scindé par 1E ;


(ii) η(EB̃,e) : (B̃, e) −→ RE ◦ LE (B̃, e) est un isomorphisme ;
.
(iii) (B̃, e) ∼ = RE (X, f ) pour un (X, f ) ∈ A L(E) .

Démonstration.
(i) ⇔ (ii) : Par définition, il suffit de constater que (1E )∗ = 1B/ . Cela vient du fait que
E
le pullback de (1E , e) est (B̃, 1E , e).
(ii) ⇒ (iii) : Evident avec (X, f ) = LE (B̃, e).
(iii) ⇒ (ii) : Par la condition (ii) de la définition 3.10,

E
(X,f ) : LE ◦ RE (X, f ) −→ (X, f )

est un isomorphisme, ce qui assure que RB (E


(X,f ) ) est un isomorphisme. Or,

RB (E E
(X,f ) ) ◦ ηRE (X,f ) = 1RE (X,f ) ,

E
ce qui implique que ηR est un isomorphisme. Nommons φ : (B̃, e) −→ RE (X, f )
E (X,f )
l’isomorphisme fourni par hypothèse. Alors η(EB̃,e) est aussi un isomorphisme, d’inverse
−1
φ−1 ◦ (ηR
E
E (X,f )
) ◦ RE LE (φ).
u
t
Remarque 3.27
La proposition précédente implique que si un objet (A, f ) ∈ B /E est isomorphe à un

objet (B̃, e) scindé par 1E ((B̃, e) ∈ B /E , par définition), alors il est aussi scindé par ce

même morphisme. En effet, puisque les isomorphismes dans B et que B est stable par
sont
B
composition (voir la définition 3.1), alors (A, f ) ∈ /E et le point (iii) de la proposition

précédente permet de conclure.
46 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

Corollaire 3.28
Soit (B̃, b) ∈ B /B . Les propositions suivantes sont équivalentes :

(i) (B̃, b) est scindé par p : E −→ B ;


(ii) ηpE∗ (B̃,b) : p∗ (B̃, b) −→ RE ◦ LE p∗ (B̃, b) est un isomorphisme ;


(iii) p∗ (B̃, b) est scindé par 1E ;


.
= RE (X, f ) pour un (X, f ) ∈ A L(E) .
(iv ) p∗ (B̃, b) ∼

Démonstration.
Découle de la définition 3.7 et de la proposition précédente. u
t

Lemme 3.29 LE
/ .
Les foncteurs SplitE (1E ) o ⊥ A L(E) donnent une équivalence de catégories
RE

.
SplitE (1E ) ≈ A L(E) .

Démonstration.
Le foncteur RE est bien tel que im(RE ) ⊆ SplitE (1E ), par la proposition 3.26. Par ailleurs,
la définition 3.10 (ii) assure que LE ◦ RE ∼
= 1A et la proposition 3.26 implique que
/L(E)

RE ◦ LE = 1Split (1 ) .
E E

Proposition 3.30
Le foncteur p∗ : SplitB (p) −→ SplitE (1E ) est monadique.

Démonstration.
On doit d’abord montrer que p∗ |SplitB (p) ⊆ SplitE (1E ), ce qui est effectivement le cas par
le corollaire 3.28 (iii). Son adjoint à gauche p! : SplitE (1E ) −→ SplitB (p) est aussi bien
défini, puisque si un objet (B̃, e) est dans SplitE (1E ), alors
. par
la proposition 3.26, on
∼ A
a que (B̃, e) = RE (X, f ) pour un certain (X, f ) ∈ L(E) . La condition (iii) de la

définition 3.10 assure que p! RE (X, f ) est scindé par p, ce qui veut dire que ηpE∗ (p! R (X,f ))
E
est un isomorphisme. Le fait que (B̃, e) ∼ = RE (X, f ) entraine que ηpE∗ (p! (B̃,e)) est aussi un
isomorphisme, et donc p! (B̃, e) ∈ |SplitB (p)|.
On a donc une adjonction entre les sous-catégories pleines :
/
p! : SplitE (1E ) o ⊥ SplitB (p) : p∗ .

Il reste à voir que le foncteur de comparaison associé à cette adjonction est une équivalence
de catégorie. D’abord, on sait que la monade T associée à l’adjonction précédente est la
/
même que celle associée à p! : B /E o ⊥ B /B : p∗ . En effet, l’unité et la co-
unité sont les mêmes. Par conséquent, le foncteur de comparaison de l’adjonction qui nous
intéresse est la restriction du foncteur de comparaison
 T
CanT : B /B −→ B /E

à SplitB (p). Par la condition (i) de la définition 3.10, on sait de plus que ce dernier foncteur
est une équivalence de catégorie, soit donc G son équivalence inverse. On doit prouver
que cette équivalence se restreint à une équivalence de catégories entre (SplitE (1E ))T et
3.2 Preuve du théorème 47


SplitB (p). On sait déja que im CanT |SplitB (p) ⊆ (SplitE (1E ))T . En effet, on a déja prouvé
que le foncteur de comparaison
 est biendéfini.

On doit voir que im G|(SplitE (1E ))T ⊆ SplitB (p). Soit ((B̃, e), m) ∈ (SplitE (1E ))T .
On a que CanT ◦ G((B̃, e), m) = ∼ ((B̃, e), m). Ceci entraîne un isomorphisme entre « les
composantes objets » de ces deux algèbres, c’est-à-dire que p∗ (G((B̃, e), m)) ∼ = (B̃, e).
Ceci implique comme précédemment le fait que p∗ (G((B̃, e), m)) ∈ |SplitE (1E )| et donc
G((B̃, e), m) ∈ |SplitB (p)|. u
t
Lemme 3.31 /
Soient G : C o B : D une équivalence de catégories et TB = (T, µ, η) une mo-
nade sur B. On nomme respectivement α et β les isomorphismes naturels GD ⇒ 1B et
1C ⇒ DG. Alors,
  
TC = (T̃ , µ̃, η̃) := DT G, 1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ? 1G , (1D ? η ? 1G ) ◦ β
est une monade sur C et les catégories des algèbres sont équivalentes, c’est-à-dire :
C TC ≈ B TB .
Démonstration.
Pour vérifier que TC est bien une monade sur C , il suffit d’utiliser les propriétés du produit
de Godement 2.8 et le fait que TB est une monade sur B. Nous allons seulement vérifier
la condition d’associativité, l’autre se résolvant de façon similaire. On calcule µ̃ ◦ (µ̃ ? 1T̃ ) :
     
1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ? 1G ◦ 1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ? 1G ? 1DT G
  
= 1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ◦ (µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ? 1GDT ) ? 1G
 
= 1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ◦ (µ ? 1GDT ) ◦ (1T ? α ? 1T GDT ) ? 1G
  
= 1D ? µ ◦ ((1T ? α) ◦ (µ ? 1GD )) ? 1T ◦ (1T ? α ? 1T GDT ) ? 1G
  
= 1D ? µ ◦ (µ ◦ (1T ? 1T ? α)) ? 1T ◦ (1T ? α ? 1T GDT ) ? 1G
 
= 1D ? µ ◦ (µ ? 1T ) ◦ (1T ? 1T ? α ? 1T ) ◦ (1T ? α ? 1T GDT ) ? 1G
 
= 1D ? µ ◦ (1T ? µ) ◦ (1T ? 1T ? α ? 1T ) ◦ (1T ? α ? 1T GDT ) ? 1G
  
= 1D ? µ ◦ (1T ? µ) ◦ 1T ? (1T ? α) ◦ (α ? 1T GD ) ? 1T ? 1G
  
= 1D ? µ ◦ (1T ? µ) ◦ 1T ? (α ? 1T ) ◦ (1GDT ? α) ? 1T ? 1G
 
= 1D ? µ ◦ (1T ? µ ◦ (α ? 1T ? 1T ) ◦ (1GDT ? α ? 1T ) ? 1G
 
= 1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ◦ (1GD ? µ) ◦ (1GDT ? α ? 1T ) ? 1G
 
= 1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ◦ (1T GD ? µ) ◦ (1T GDT ? α ? 1T ) ? 1G
     
= 1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ? 1G ◦ 1DT G ? 1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ? 1G .
L’équivalence de catégories entre les catégories des algèbres est donnée par le couple de
foncteurs DTB , GTB définis de la façon suivante :
pour tout (B, m) ∈ B TB ,

DTB (B, m) = (D(B), D(m) ◦ DT (αB )),
pour tout f ∈ B B ((B, m), (B , m )),
T 0 0 DTB (f ) = D(f ),
pour tout (C, n) ∈ C TC , G (C, n) = (G(C), G(n) ◦ αT G(C) −1 ),
T B

pour tout g ∈ C T C 0 0
((C, n), (C , n )), GTB (g) = G(g),
48 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

On doit commencer par vérifier que c’est bien défini. On ne traitera que le cas du foncteur
DTB , l’autre étant similaire. La situation est résumée par le diagramme commutatif ci-
dessous. Les carrés (1) et (3) commutent par naturalité de α, le carré (2) par naturalité
de µ et le (4) et le triangle supérieur puisque (B, m) est une TB -algèbre. Le carré (5) est
commutatif par naturalité de η, et le triangle inférieur par la proposition 3.4.3 du livre
[2][p.115], qui implique que G est l’adjoint à gauche de D, avec unité β et co-unité α.

DT (αT GD(B) ) D(µGD(B) )


/ DT 2 G D(B) / DT G D(B)
  
DT GDT G D(B)


DT G DT (αB ) (1) DT 2 (αB ) (2) DT (αB )

 DT (αT (B) )  D(µB ) 


DT GDT (B) / DT 2 (B) / DT (B)


DT G D(m) (3) DT (m) (4) D(m)

 DT (αB )  D(m) 
/ DT (B) / D(B)

DT G D(B)
O O rrr
rrrrrrr
r
rrrr
rrrrrrr
r
rr
D(ηGD(B) ) (5) D(ηB ) rrrr
rrrrrrr
r
rrrr
rrrrrrr
r
rrr
D(αB )
DGD(B) / D(B)
O nn
nnn
nnnnn
nnn
βD(B)
nnnnn
nnn
nnnnn
n
D(B)

Ainsi, l’image d’une algèbre sur TB est bien une algèbre sur TC . Par ailleurs, l’image
d’un morphisme est bien un morphisme, puisque le diagramme suivant est commutatif, par
définition et par naturalité de α :


DT G D(f )
/ DT G D(B 0 )
 
DT G D(B)
DT (αB ) DT (αB 0 )
 DT (f ) 
DT (B) / DT (B 0 )

D(m) D(m0 )
 D(f ) 
D(B) / D(B 0 )

Le foncteur DTB est donc bien défini. Il reste à montrer que c’est une équivalence de
3.2 Preuve du théorème 49

catégorie. Or,
 
GTB ◦ DTB (B, m) = GD(B), GD(m) ◦ GDT (αB ) ◦ αT G(D(B)) −1 ,
 
DTB ◦ GTB (C, n) = DG(C), DG(n) ◦ D(αT G(C) −1 ) ◦ DT (αG(C) ) .

On va donc montrer que α : GTB ◦ DTB ⇒ 1BTB est un isomorphisme et de même pour
β : 1C TC ⇒ DTB ◦ GTB . La seule chose à démontrer est que les α et les β sont bien des
morphismes d’algèbre. On commence par β et on calcule (voir diagramme) :

βDT G(C)

+
DT G(C) / DT GDG(C) / DT G(C) / DGDT G(C)
DT G(βC ) DT (αG(C) ) D(αT G(C) −1
)
n DG(n)
 
C / DG(C)
βC

DG(n) ◦ D(αT G(C) −1 ) ◦ DT (αG(C) ) ◦ DT G(βC ) = DG(n) ◦ D(αT G(C) −1 ) ◦ DT (1G(C) )


= DG(n) ◦ βDT G(C)
= βC ◦ n.

Calculons maintenant pour α−1 (l’inverse d’un isomorphisme d’algèbre est un morphisme
d’algèbre) :

αT (B) −1

+
T (B) / T GD(B) / GDT GD(A) / GDT (A)
T (αB −1 ) αT G(D(B)) −1 GDT (αB )
m GD(m)
 
B / GD(B)
αB −1

Il suffit de voir que, par naturalité, αT (B) ◦ GDT (αB ) = αT GD(B) ◦ T (αB ), et donc :

αT (B) −1 = GDT (αB ) ◦ αT GD(B) −1 ◦ T (αB −1 ).

u
t
Proposition 3.32
Soient R : A −→ B un foncteur monadique et D : B −→ C une équivalence de catégorie.
Alors DR est monadique.

Démonstration.
Soient L : B −→ A l’adjoint à gauche de R et G : C −→ B l’équivalence de catégories
inverse de D. On note η et  respectivement l’unité et la co-unité de l’adjonction L a R et
TB la monade sur B associée.
50 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

Par la proposition 3.4.3 du livre [2][p.115], G est aussi l’adjoint à gauche de D, et


donc on a LG a DR. On nomme encore β et α respectivement l’unité et la co-unité de
l’adjonction G a D. On doit montrer que le foncteur de comparaison associé à l’adjonction
LG a DR est bien une équivalence de catégorie. Soit TC la monade associée sur C à
l’adjonction LG a DR. Par la proposition 2.24, on a que

TB = (RL, 1R ?  ? 1L , η) := (T, µ, η)

et le corollaire 2.19 implique que


   
TC = DRLG, 1DR ?  ◦ (1L ? α ? 1R ) ? 1LG , 1D ? η ? 1G ◦ β
   
= DRLG, 1D ? (1R ?  ? 1L ) ◦ (1RL ? α ? 1RL ) ? 1G , 1D ? η ? 1G ◦ β
   
= DT G, 1D ? µ ◦ (1T ? α ? 1T ) ? 1G , 1D ? η ? 1G ◦ β .

On remarque que TC est associée à TB comme dans le lemme précédent. Par ailleurs, pour
tout A ∈ |A |,
 
CanTC (A) = DR(A), DR A ◦ L(αR(A) )
= DTB ◦ CanTB (A),

et pour tout morphisme f de la catégorie A ,

CanTC (f ) = DR(f )
= DTB ◦ CanTB (f ).

Pour conclure, le foncteur CanTC = DTB ◦CanTB est une équivalence de catégories, puisque
il est la composition de deux équivalences de catégories. u
t
Corollaire 3.33 .
Le foncteur F1 := LE ◦ p∗ : SplitB (p) −→ A L(E) est monadique.

Démonstration.
Résulte du lemme 3.29 ainsi que des propositions 3.30 et 3.32. u
t

3.2.2 Deuxième foncteur monadique


On va commencer par montrer que le groupoïde de Galois est bien défini.
Lemme 3.34
∗ ! n B
Les objets (p ◦ p ) (E, 1E ) ∈ /E sont scindés par 1E pour tout entier n ∈ N.

Démonstration.
On va prouver le résultat par récurence.
P0 : D’abord, 1L(E) ∈ A puisque A contient les isomorphismes. Par ailleurs, (E, ηE , 1E )
est un pullback de (ηE , 1RL(E) ), ce qui implique que RE (L(E), 1L(E) ) ∼
= (E, ηE , 1E ),
et par la proposition 3.26, (E, 1E ) ∈ |SplitE (1E )|.
Pn ⇒ Pn+1 : Par hypothèse de récurence, ∗ ! n
(p. ◦ p ) (E, 1E ) ∈ |SplitE (1E )|. La proposition
3.26 assure l’existence de (X, φ) ∈ A L(E) tel que RE (X, φ) ∼ = (p∗ ◦ p! )n (E, 1E ).

Puisque p est un morphisme de descente galoisienne, p! ◦ RE (X, φ) est scindé par p,


ce qui est implique, par le corollaire 3.28, que p∗ ◦ p! ◦ RE (X, φ) est scindé par 1E .
Ainsi, par la remarque 3.27, (p∗ ◦ p! )n+1 (E, 1E ) ∈ |SplitE (1E )|.
3.2 Preuve du théorème 51

u
t

Lemme 3.35
Le groupoïde de Galois Gal(p) est effectivement un groupoïde interne sur A .

Démonstration.  
Il suffit de prouver que L (E × E) × (E × E) est un pullback de (L(d0 ), L(d1 )) et que
 B E
 B

L (E × E) × (E × E) × (E × E) est un pullback de (L(d1 ) ◦ L(π1 ), L(d0 )). Ainsi, le
B E B E B
groupoïde de Galois est bien défini puisque L(c) a bien pour domaine un pullaback de
(L(d0 ), L(d1 )). De plus, les axiomes de groupoïde interne sur A sont vérifiés puisque L
préserve la commutativité des diagrammes.

0n commence par voir que les pullbacks (E× E)× (E× E) et (E× E)× (E× E) × (E× E)
B E B B E B E B
sont les composantes objets des pullbacks (que l’on peut aussi voir comme des produits)
dans B /E suivants.

   
(E × E) × (E × E), d1 ◦ π0 / E × E, d1
B E B π0 B

π1 d1


  
E × E, d0 / (E, 1E )
B d0

   
/ E × E, d0

(E × E) × (E × E) × (E × E), d0 ◦ P0
B E B E B P0 B

P1 d0


  
(E × E) × (E × E), d1 ◦ π1 / (E, 1E )
B E B d1 ◦π1

On va vérifier que ce sont effectivement des pullbacks. On va vérifier seulement


pour
B /E et des

le premier, car la démarcheest similaire
 pour le second.
 Soient (X,
 m) ∈
morphismes f : (X, m) −→ E × E, d1 , g : (X, m) −→ E × E, d0 tels que d1 ◦f = d0 ◦g.
B  B
f
Il faut et il suffit de vérifier que est bien un morphisme de B /E . Or,
g
 
f
d1 ◦ π0 ◦ = d1 ◦ f
g
= m,

puisque f est un morphisme de B /E .


52 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

Il faut observer que toutes les composantes de ces pullbacks sont dans SplitE (1E ). En
effet,
   
E × E, d1 ∼
= E × E, d0 ∼
=(p∗ ◦ p! )(E, 1E )
 B   B 
(E × E) × (E × E), d1 ◦ π1 = (E × E) × (E × E), d1 ◦ π0 ∼
∼ =(p∗ ◦ p! )2 (E, 1E )
B E B B E B 

=(p∗ ◦ p! )3 (E, 1E )

(E × E) × (E × E) × (E × E), d0 ◦ P0
B E B E B

et le lemme 3.34 et la remarque 3.27 permettent de conclure.


On va seulement montrer les isomorphismes des lignes 1 et 2. En effet, le dernier
isomorphisme se montre avec la même méthode et le calcul est un peu rébarbatif, nous
laissons donc la vérification au lecteur.
Les premiers isomorphismes de chaque ligne sont des permutations  de
 composantes.
 
  d0 ◦ π0
d1  d1 ◦π1
 
Pour la première ligne, c’est , tandis que pour la seconde, c’est  .
d0  d1 
◦ π1
d0
On va donc se concentrer sur les deuxièmes isomorphismes de chaque ligne. On remarque
que, par construction et quitte à changer la convention sur le choix des pullbacks dans B,
p∗ ◦ p! (E, 1E ) est exactement (E × E, d0 ). Ainsi, le deuxième isomorphisme de la première
B
ligne est vérifié.
Par conséquent, la partie objet de (p∗ ◦ p! )2 (E, 1E ) est le pullback du couple (p ◦ d0 , p),
notons le ((E × E) × E, c0 , c1 ). La partie morphisme de (p∗ ◦ p! )2 (E, 1E ) est alors c1 . On
B B
construit des morphismes entre les pullbacks grâce aux propriétés universelles. On pose :
   
d0 ◦ π0
 d1 ◦ π1  : (E × E) × (E × E) −→ (E × E) × E
B E B B B
  d1 ◦ π0  
d0 ◦ c0
  c1   :
 
(E × E) × E −→ (E × E) × (E × E)
 c1  B B B E B
d1 ◦ c0

On voit facilement que ces morphismes sont bien définis et qu’ils sont en fait dans B /E .
Il reste à vérifier qu’ils sont inverses l’un de l’autre :
 
  
d0 ◦ c0

     
    d0 ◦ c0  d0 ◦ π0 
 c1   
 
d0 ◦ π0  ◦
 ◦   c1   = 
   d1 ◦ π1  c1  
 d1 ◦ π1 
 c1   d1 ◦ c0

d1 ◦ π0    
d1 ◦ c0  d1 ◦ c0 
d1 ◦
c1
   
d0 ◦ c0
=  d1 ◦ c0 
c1
 
c0
= = 1(E×E)×E .
c1 B B
3.2 Preuve du théorème 53

   
d0 ◦ π0
 
 
    d0 ◦ c0
d0 ◦ c0      ◦ d1 ◦ π1  
d0 ◦ π0  c1 
c1      d1 ◦ π0  
   
  ◦ d1 ◦ π 1  =  
 c1     d0 ◦ π0 
d1 ◦ π0  c1 
d1 ◦ c0  ◦  d1 ◦ π1  
d1 ◦ c0
d1 ◦ π0
   
d0 ◦ π0
 d1 ◦ π0  
 
= 
 d1 ◦ π0 
d1 ◦ π1
 
 π0 
=  d0 ◦ π1 
d1 ◦ π1
 
π0
= = 1(E×E)×(E×E) .
π1 B E B

Par le lemme 3.29, puisque LE est une équivalence de catégorie, elle possède aussi un
adjoint à gauche (voir la proposition 3.4.3 du livre [2][p.115]) et préserve donc les limites
et en particulier les pullbacks, par la proposition 3.2.2 du même livre. Ainsi, puisque les
. sont en fait dans SplitE (1E ), alors leur image par L est aussi un
pullbacks considérés
pullback dans A L(E) . La situation est la suivante :

   
/ L E × E , L(d1 )
 
L (E × E) × (E × E) , L(d1 ) ◦ L(π0 )
B E B L(π0 ) B

L(π1 ) L(d1 )

   
/ (L(E), 1L(E) )

L E × E , L(d0 )
B L(d0 )

     
/ L(E × E), L(d0 )

L (E × E) × (E × E) × (E × E) , L(d0 ) ◦ L(P0 )
B E B E B L(P0 ) B

L(P1 ) L(d0 )

   
/ (L(E), 1L(E) )

L (E × E) × (E × E) , L(d1 ) ◦ L(π1 )
B E B L(d1 )◦L(π1 )

Il reste à voir que les composantes objets de ces pullbacks forment aussi des pullbacks.
On va le vérifier seulement dans le premier cas, car la méthode est la même pour le second.
Soit X ∈ |A | et des morphismes f : X −→ L(E × E), g : X −→ L(E × E) tels que
B B
54 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

L(d1 ) ◦ f = L(d0 ) ◦ g. Alors, le morphisme induit par la propriété universelle du pullback


précédent avec (X, L(d1 ) ◦ f ), f et g assure l’existence pour la propriété universelle que l’on
veut démontrer. Pour l’unicité, il faut voir que . tout morphisme m tel que f = L(π0 ) ◦ m
et g = L(π1 ) ◦ m est aussi un morphisme de A L(E) . Or,

L(d1 ) ◦ L(π0 ) ◦ m = L(d1 ) ◦ f,

ce qui achève la preuve. u


t
.
−→ A
Gal(p)
Donnons maintenant la construction de F2 : A L(E) . On pose

Gal(p)
F2 (IF , FObj , FMor ) = (IF , FObj ), pour tout (IF , FObj , FMor ) ∈ A ;
Gal(p)
F2 (α) = α, pour tout morphisme de A .
Ce foncteur est bien défini, par définition de préfaisceau et de transformation naturelle
interne. On montre dans la proposition suivante que ce foncteur est monadique.
Théorème 3.36
, i, c) une catégorie interne à une catégorie C avec pullbacks. Le
Soit A = (A0 , A1 , d0 , d1
foncteur U : C −→
A C A0 , défini par
U (IF , FObj , FMor ) = (IF , FObj ), pour tout (IF , FObj , FMor ) ∈ C A ,

U (α) = α, pour tout morphisme de C A ,


est monadique.

On va d’abord montrer qu’il possède un adjoint à gauche, c’est l’objet de la proposition


suivante.
Proposition 3.37
Soit A = (A0 , A1 , d0 , d1  C avec Apullbacks. Le
, i, c) une catégorie interne à une catégorie
foncteur U : C −→
A C A0 , possède un adjoint à gauche G : C A0 −→ C défini de la
façon suivante :
    
π A1 ◦ s 1
c◦  , pour tout (X, f ) ∈ C /E ;
G(X, f ) = d!1 ◦ d∗0 (X, f ), 

s0
πX ◦ s1
!
G(α) = d1 ◦ d0 (α), ∗ pour tout morphisme α.
Plus précisément,
 
G(X, f ) = A1 × (A1 × X), d1 ◦ πA1 , ξ(X,f ) ,
A0 A0

où (A1 × X, πA1 , πX ) et (A1 × (A1 × X), s0 , s1 ) sont les pullbacks


A0 A0 A0

Diagramme 19: Définition de A1 × X Diagramme 20: Définition de A1 × (A1 × X)


A0 A0 A0

A1 × X /X A1 × (A1 × X) / A1 × X
A0 πX A0 A0 s1 A0
π A1 f s0 d1 ◦πA1
   
A1 / A0 A1 / A0
d0 d0
3.2 Preuve du théorème 55

 
πA1 ◦ s1
et est le morphisme donné par la propriété universelle sur le pullback
s0

A1 × (A1 × X)
A0 A0 πA1 ◦s1
 
πA1 ◦ s1
s0
( &
A1 × A1 π0
/ A1
A0
s0
π1 d1
(  / A0

A1
d0

tandis que ξ(X,f ) est donné par

A1 × (A1 × X)
A0 A0 πX ◦s1

ξ(X,f )
( πX &/
A1 × X X
A0
 
πA1 ◦ s1 πA1
c◦ f
s0
(  
/ A0
A1
d0

Ce dernier diagramme est commutatif grâce à l’axiome (iii) des catégories internes.

Démonstration.
Il faut d’abord vérifier que G est bien défini. On commence par prouver que G(X, f ) est
bien un préfaisceau interne sur A.
Le premier axiome demande que d1 ◦ πA1 ◦ ξ(X,f ) = d1 ◦ s0 , ce qui est vrai puisque

 
πA1 ◦ s1
d1 ◦ πA1 ◦ ξ(X,f ) = d1 ◦ c ◦
s0
 
π A1 ◦ s 1
= d1 ◦ π1 ◦
s0
= d1 ◦ s0 ,

où l’on a utilisé l’axiome (iv) des catégories internes pour établir la deuxième égalité.
!
i ◦ d1 ◦ πA1
Le second axiome demande que ξ(X,f ) ◦ 1A1 × X = 1A1 × X . On va le prouver
A 0
A0
par unicité du morphisme faisant commuter le diagramme suivant :
56 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

A1 × X
A0 πX

$
"
A1 × X /X
πA1 A0 πX
πA1 f
$  
A1 / A0
d0

En effet, on peut voir que


! !
i ◦ d1 ◦ πA1 
π A1 ◦ s 1
 i ◦ d1 ◦ πA1
πA1 ◦ ξ(X,f ) ◦ 1A1 × X = c◦ ◦ 1A1 × X
A0
s0 A0
!
π A1 ◦ 1A1 × X
= c◦ A0

i ◦ d1 ◦ πA1
 
1A1 ◦ πA1
= c◦
i ◦ d1 ◦ πA1
 
1A1
= c◦ ◦ πA1
i ◦ d1
= πA1 ,

où l’on a utilisé l’axiome (ii) des catégories internes pour établir la dernière égalité. De
plus,
! !
i ◦ d1 ◦ πA1 i ◦ d1 ◦ πA1
πX ◦ ξ(X,f ) ◦ 1A1 × X = πX ◦ s1 ◦ 1A1 × X
A0 A0

= πX ◦ 1A1 × X
A0
= πX .

Si (A1 × A1 ) × (A1 × X), P0 , P1 est le pullback de (d0 ◦ π0 , d1 ◦ πA1 ), le troisième
A0 A0 A0
axiome demande que
 
  π1 ◦ P0
c ◦ P0 
ξ(X,f ) ◦ = ξ(X,f ) ◦  π 0 ◦ P0 .
P1 ξ(X,f ) ◦
P1

On va le prouver par unicité du morphisme faisant commuter le diagramme suivant :

(A1 × A1 ) × (A1 × X)
A0 A0 A0 πX ◦P1

(
A1 × X /% X
  A0 πX
πA1 ◦ P1
c◦ π A1 f
c ◦ P0
(  
/ A0
A1
d0
3.2 Preuve du théorème 57

En effet,

     
c ◦ P0 πA1 ◦ s1 c ◦ P0
πA1 ◦ ξ(X,f ) ◦ = c◦ ◦
P1 s0 P1
 
π A1 ◦ P1
= c◦ .
c ◦ P0

et

   
c ◦ P0 c ◦ P0
πX ◦ ξ(X,f ) ◦ = πX ◦ s1 ◦
P1 P1
= π X ◦ P1 .

Par ailleurs,

   
π1 ◦ P0   π1 ◦ P 0
 = c ◦ πA1 ◦ s1 ◦ 
  
π A1 ◦ ξ(X,f ) ◦  π 0 ◦ P0 π0 ◦ P0 
ξ(X,f ) ◦ s0 ξ(X,f ) ◦
P1 P1
   
π0 ◦ P0
πA1 ◦ ξ(X,f ) ◦
= c◦  P1 
π1 ◦ P0
     
πA1 ◦ s1 π0 ◦ P0
c◦ ◦
= c◦ s0 P1 
π1 ◦ P0
   
πA1 ◦ P1
c ◦
= c◦ π0 ◦ P0 
π1 ◦ P0
 
π A1 ◦ P1 

= c◦ π 0 ◦ P0 
c◦
π 1 ◦ P0
 
π A1 ◦ P1
= c◦ ,
c ◦ P0

où l’on a utilisé l’axiome (v) des catégories internes pour établir l’avant-dernière égalité.
Le foncteur G est donc bien défini sur les objets.
Il faut vérifier que, pour tout φ ∈ C A0 ((X, f ), (X 0 , f 0 )), G(φ) est bien une transfor-


mation naturelle interne entre G(X, f ) et G(X 0 , f 0 ).


Le premier axiome est équivalent à dire que G(φ) est un morphisme entre d!1 ◦ d∗0 (X, f )
et d!1 ◦ d∗0 (X 0 , f 0 ), ce qui est le cas puisque d!1 ◦ d∗0 est un foncteur.
 
s0
Le second axiome demande que G(φ) ◦ ξ(X,f ) = ξ(X 0 ,f 0 ) ◦ . On note les
G(φ) ◦ s1
projections des pullbacks correspondants à G(X 0 , f 0 ) avec les mêmes lettres que précédem-
ment, mais avec des primes lorsqu’il peut y avoir confusion. On va montrer l’égalité en
utilisant l’unicité du morphisme faisant commuter le diagramme suivant :
58 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

A1 × (A1 × X)
A0 A0 φ◦πX ◦s1

&
A1 × X 0 $
/X
  A0 πX 0
π A1 ◦ s 1
c◦ 0
πA f0
s0 1
&  / A0

A1
d0

 
πA1
D’abord, il faut se rappeller que G(φ) = d!1 ◦ d∗0 (φ) = d∗0 (φ) = . On calcule
φ ◦ πX
donc :
   
  π A1 ◦ s 1
πA1 c◦
G(φ) ◦ ξ(X,f ) = ◦  s0 
φ ◦ πX
πX ◦ s1
   
πA1 ◦ s1
c◦
=  s0 ,
φ ◦ πX ◦ s1

comme désiré. Pour le deuxième terme, calculons


 0
πA1 ◦ s01
    
  s 0
s0 c◦
s00
 
πX 0 ◦ ξ(X 0 ,f 0 ) ◦ = πX 0 ◦  ◦ π A1 
G(φ) ◦ s1 0 ◦ s1
πX 0 ◦ s1 φ ◦ πX
 
s0 
= πX 0 ◦ s01 ◦ 

πA1 
◦ s1
φ ◦ πX
 
π A1
= πX ◦
0 ◦ s1
φ ◦ πX
= φ ◦ πX ◦ s1 ,

et
0 ◦ s0
     
  πA 1 s0
0 s0 0 c◦ 1
s00
 
πA ◦ ξ(X 0 ,f 0 ) ◦ = πA ◦ ◦ πA1 
1 G(φ) ◦ s1 1
0 ◦ s1
πX 0 ◦ s1 φ ◦ πX
 
 0 0
 s 0
πA1 ◦ s1  
= c◦ 0 ◦ πA1 
s0 ◦ s1
φ ◦ πX
   
0 ◦ π A1
π ◦ s1 
= c ◦  A1 φ ◦ πX
s0
 
πA1 ◦ s1
= c◦ .
s0

Ceci achève de montrer que le foncteur G est bien défini.


Montrons maintenant que ces deux foncteurs sont adjoints l’un
 de l’autre. Il faut trouver
un isomorphisme naturel entre les foncteurs : C (G(−), −) et
A C A0 (−, U (−)). Pour tout
3.2 Preuve du théorème 59

(X, f ) ∈ C A0 et tout F = (IF , FObj , FMor ) ∈ C A , définissons




β((X,f ),F ) : C A0 ((X, f ), U (F )) −→ C A (G(X, f )), F )



 
π A1
, pour tout a ∈ C A0 ((X, f ), U (F )). La transfor-

par β((X,f ),F ) (a) = FMor ◦
a ◦ πX
mation β est bien définie, puisque dans un premier temps
   
π A1 π A1
FObj ◦ FMor ◦ = d1 ◦ πA1 ◦
a ◦ πX a ◦ πX
= d1 ◦ πA1
= G(X, f )Obj ,
et dans un second temps,
   
    π A1 ◦ s 1
πA1 πA1 c◦
FMor ◦ ◦ G(X, f )Mor = FMor ◦ ◦  s0 
a ◦ πX a ◦ πX
πX ◦ s1
   
π A1 ◦ s 1
c◦
= FMor ◦  s0 
a ◦ πX ◦ s1
 
 s0 
= FMor ◦  πA1 ,
FMor ◦ s1
a ◦ πX
où l’on a utilisé l’axiome (iii) des préfaisceaux internes pour obtenir la dernière égalité.
Montrons que β est naturelle (voir figure 21), pour cela soit donc φ : (X 0 , f 0 ) −→ (X, f )
et γ : F −→ F 0 des morphismes.

Diagramme 21: Naturalité de β

C A (G(X, f ), F ) o C A0 (B, R(A))


 
(X, f ), F
β(X,f ),F )

(φ∗ ,γ) C A (G(φ∗ ),γ) C A0 (φ∗ ,U (γ))




  
(X 0 , f 0 ), F 0 C A (G(X 0 , f 0 ), F 0 ) o C A0 ((X 0 , f 0 )0 , U (F 0 ))
 
β(X 0 ,f 0 ),F 0 )

On calcule alors
  
∗ ∗ πA1
C A
(G(φ ), γ) ◦ β((X,f ),F ) (a) = C A
(G(φ ), γ) FMor ◦
a ◦ πX
 
πA1
= γ ◦ FMor ◦ ◦ G(φ)
a ◦ πX
   
0 π A1 π A1
= FMor ◦ ◦
γ ◦ π IF φ ◦ πX 0
 
0 πA1
= FMor ◦
γ ◦ a ◦ φ ◦ πX 0
= β((X 0 ,f 0 ),F 0 ) (γ ◦ a ◦ φ)
β((X 0 ,f 0 ),F 0 ) ◦ C A0 (φ∗ , U (γ))(a).

=
60 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

Trouvons maintenant un inverse pour β. Posons

δ((X,f ),F ) : C A (G(X, f )), F ) −→ C A0 ((X, f ), U (F )),




 
i◦f
défini par δ((X,f ),F ) (α) = α ◦ , pour tout α ∈ C A (G(X, f ), F ). Vérifions que
1X
c’est bien défini :
   
i◦f i◦f
FObj ◦ α ◦ = d1 ◦ πA1 ◦
1X 1X
= d1 ◦ i ◦ f
= f.

Par conséquent, δ((X,f ),F ) (α) ∈ C A0 ((X, f ), U (F )), comme désiré.




Montrons que δ est l’inverse de β :


  
i◦f
β((X,f ),F ) ◦ δ((X,f ),F ) (α) = β((X,f ),F ) α ◦
1X
 
 π A 1 
= FMor ◦  i◦f 
α◦ ◦ πX
1X
 
  πA
1
s0 
= FMor ◦ ◦ i◦f 
α ◦ s1 ◦ πX
1X
     
πA1 ◦ s1 πA
c◦  1
= α◦ s0 ◦ i◦f 
◦ πX
πX ◦ s1 1X
= α.

L’avant-dernière égalité est donnée par l’axiome (ii) des transformations naturelles internes
tandis que la dernière égalité découle de la propriété universelle du pullback A1 × X.
A0
De plus,
  
π A1
δ((X,f ),F ) ◦ β((X,f ),F ) (a) = δ((X,f ),F ) FMor ◦
a ◦ πX
   
πA1 i◦f
= FMor ◦ ◦
a ◦ πX 1X
 
i◦f
= FMor ◦
a
 
i ◦ FObj ◦ a
= FMor ◦
1IF ◦ a
 
i ◦ FObj
= FMor ◦ ◦a
1IF
= a.

La dernière égalité est donnée par l’axiome (ii) des préfaisceaux internes. u
t
Démonstration (Théorème).
Par la proposition précédente, on a une adjonction
/
G : C A0 o CA : U .


3.2 Preuve du théorème 61

Calculons l’unité
 et la co-unité de cette adjonction. Dans un premier temps, pour tout
(X, f ) ∈ C A0 ,
 
i◦f
δ((X,f ),G(X,f )) (1G(X,f ) ) = 1G(X,f ) ◦
1X
 
i◦f
= .
1X

Par conséquent, l’unité η(X,f ) : (X, f ) −→ (A1 × X, d1 ◦ πA1 ) = U ◦ G(X, f ) de


  A0
i◦f
cette adjonction est donnée par η(X,f ) = . Dans un second temps, pour tout
1X
F = (IF , FObj , FMor ) ∈ C ,
A

 
πA1
β(U (F ),F ) (1U (F ) ) = FMor ◦
1U (F ) ◦ πX
= FMor .

Par conséquent, la co-unité


    
π A1 ◦ s 1
c◦
F : G ◦ U (F ) = A1 × IF , d1 ◦ πA1 ,  s0  −→ F
A0
πX ◦ s1

de cette adjonction est donnée par F = FMor .


On peut donc calculer la monade T sur C A associée à cette adjonction. Il s’agit donc
de T = (T, µ, η) = (U ◦ G, 1U ?  ? 1G , η) . Le foncteur ! ∗
  T est donc  à d1 ◦ d0 , la trans-
 égal
πA1 ◦ s1
c◦
formation naturelle µ est donnée par µ(X,f ) =  s0  et la transformation
πX ◦ s1
 
i◦f
naturelle η est donnée par η(X,f ) = .
1X
Il reste à prouver que le foncteur CanT est une équivalence de catégorie. On rapelle que
CanT (F ) = (U (F ), U (FMor )) = ((IF , FObj ), FMor ). Il suffit de poser

(CanT )−1 ((X, f ), m) = (X, f, m) (1)

de constater que les axiomes pour les algèbres sur la monade T sont les mêmes que ceux
des préfaisceaux internes. En effet, pour tout ((X, f ), m) ∈ C A0 , m est bien un
 T

morphisme entre le pullback A1 × X de (d0 , f ) et X. Le fait que m soit un morphisme de


A0
C A0 implique que m ◦ f = d1 ◦ πA1 , le premier axiome des préfaisceaux internes.


L’axiome (ii) sur les algèbres donne que m ◦ η(X,f ) = 1(X,f ) , ce qui implique que
 
i◦f
m◦ = 1X ,
1X

le deuxième axiome des préfaisceaux internes.


L’axiome (i) sur les algèbres assure que m ◦ T (m) = m ◦ µX , ce qui implique que
   
  πA1 ◦ s1
s0 c◦
m◦ =m◦ s0 ,
m ◦ s1
πX ◦ s1
62 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

le troisième et dernier axiome des préfaisceaux internes (à permutation des composantes


près).
Il reste à prouver qu’un morphisme α ∈ C A0 (((X, f ), m), ((X 0 , f 0 ), m0 )) est une
 T

transformation naturelle interne entre (X, f, m) et (X 0 , f 0 , m). Le fait que ce soit un mor-
phisme de C A0 implique que α◦f 0 = f , le premier axiome des transformations naturelles
 
0 πA1
internes. De plus, α ◦ m = m ◦ T (α) = ◦ m0 , le deuxième et dernier axiome à
m ◦ πX
vérifier. u
t

Corollaire 3.38 .
−→ A
Gal(p)
Le foncteur F2 : A L(E) est monadique.

Démonstration. .
Le théorème précédent donne que le foncteur F̃2 : A Gal(p) −→ A L(E) est monadique.
On remarque dans un premier temps que l’adjonction mentionnée dans la proposition 3.37
se restreint à l’adjonction désirée. En effet, puisque p ∈ B et que B est stable
! par prise de

Gal(p)
pullback, d0 , d1 ∈ B et donc L(d0 ), L(d1 ) ∈ A . Ainsi, im G . ⊆A et le

A L(E)
fait que les sous-catégories soient
. pleines achève l’argument.
La monade associée sur A L(E) reste donc inchangée, il suffit de contrôler que le
foncteur de comparaison et son inverse se restreignent aussi aux sous-catégories.
!
  .
Par ailleurs, im CanT Gal(p) ⊆ A L(E) et im (CanT )−1 .
Gal(p)
⊆A ,

A A L(E)
et, de nouveau, le fait que les sous-catégories soient pleines achève la preuve. u
t

3.2.3 Isomorphisme entre les monades

On va maintenant calculer explicitement les deux monades.


On reprend la partie 3.2.1 pour construire explicitement la monade associé à F1 .
La preuve de la proposition 3.30 nous apprend que l’adjonction p! a p∗ a pour monade
sur B /E :
Tp = (p∗ ◦ p! , 1p∗ ?  ? 1p! , η)

où les transformations naturelles η et  sont celle données par l’exemple 2.45. Par ailleurs,
les lemmes 3.29 et 3.31 nous donnent explicitement la monade associée à F1 en fonction
de la précédente, il s’agit de
   
TF1 = LE ◦ p∗ ◦ p! ◦ RE , 1LE ? 1p∗ E −1
?  ? 1p! ◦ 1p∗ ◦p! ? (η ) ? 1p∗ ◦p! ? 1 RE ,
  !
1LE ? η ? 1RE ◦ (E )−1 .

On reprend la partie 3.2.2 pour construire explicitement la monade associé à F2 . La


preuve du corollaire 3.38 nous assure que la monade associée à F2 est celle calculée dans la
preuve du théorème 3.36. Par conséquent, la monade associée à F2 est TF2 = (TF2 , µF2 , ηF2 )
avec TF2 = L(d1 )! ◦ L(d0 )∗ , avec (E × E, d0 , d1 ) le pullback de (p, p), et pour tout objet
B
3.2 Preuve du théorème 63

.
(A, f ) ∈ A L(E) ,

 
L(c) ◦ s0
µF2 (A,f ) =
 s1  
d0 ◦ π0
L ◦ s0 
=  d1 ◦ π1
 s1
L(∆) ◦ f
ηF2 (A,f ) = ,
1A

(c est donné par le diagramme 16 page 39) où l’on voit


   
2
TF2 (A, f ) = L(E × E) × L(E × E) × A , L(d1 ) ◦ s0
  B L(E) B

L(E) 

= L (E × E) × (E × E) × A, L(d1 ) ◦ L(π1 ) ◦ t0 .
B E B L(E)

On va expliciter maintenant la .
relation entre les deux monades. On considère l’équi-
/ .
valence de catégories LE ◦ RE : A L(E) o A L(E) : 1A L(E) . Le lemme 3.31
.

 . T F  . T̃
assure que A L(E) ≈ A L(E) , où T̃ est donné par :
2

  
T̃ = (T̃ , µ̃, η̃) := TF2 ◦ LE ◦ RE , µF2 ◦ (1TF2 ? α ? 1TF2 ) ? 1LE ◦RE , (ηF2 ? 1LE ◦RE ) ◦ β ,

avec α = β −1 = E . On va montrer que T̃ = TF1 , ce qui complète la preuve, puisque alors


 . TF  . TF
≈ A L(E) ≈ A L(E)
Gal(p) 2 1
A ≈ SplitB (p).

Montrons donc cette égalité composante par composante.

Composante fonctorielle
On introduit le lemme suivant, qui va être utile pour montrer l’égalité des monades dans
la composante fonctorielle.
Lemme 3.39
Soient (A, a) et (A0 , a0 ) deux objets de B /E scindés par 1E . Alors leur produit existe et
est aussi scindé par 1E .
Démonstration. .
Par la proposition 3.26, on a l’existence de (X, φ), (X 0 , φ0 ) ∈ A L(E) tels que l’on ait

(A, a) ∼
= RE (X, φ) et (A0 , a0 ) ∼
= RE (X 0 , φ0 ). .
Comme précédemment, on peut exprimer les produits dans B /E et A L(E) comme
des pullback dans B et A , qui existent par hypothèse. Ainsi, les produits (A, a) × (A0 , a0 )
et (X, φ) × (X 0 , φ0 ) existent.
Puisque RE possède un adjoint à gauche, par la proposition 3.2.2 du livre [2][p.106],
RE préserve les limites et en particulier les produits. Par conséquent,

(A, a) × (A0 , a0 ) ∼
= RE (X, φ) × RE (X 0 , φ0 ) ∼
= RE (X, φ) × (X 0 , φ0 )


La proposition 3.26 permet d’achever l’argument. u


t
64 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

Montrons maintenant
.l’égalité
des composantes fonctorielles.
A
Soit (A, f ) ∈ L(E) et posons (B̃, e) = RE (A, f ). On doit calculer TF1 (A, f ). On

observe d’abord que, quitte à changer le choix des pullbacks pour p∗ ,

p∗ ◦ p! ◦ RE (A, f ) = (E × E) × B̃, d1 ◦ πE×E .



B E B

En effet, on vérifie facilement que le deuxième terme est bien un pullback de (p ◦ e, p),
comme le montre le diagramme suivant.

(E × E) × B̃ /
B E πB̃ B̃
πE×E
B
e
 
E×E /E
B d0
d1 p
 
E /B
p

Par ailleurs, on remarque ensuite que le produit (E × E), d0 × (B̃, e) dans B /E est

  B

exactement (E × E) × B̃, d0 ◦ πE×E comme le montre le diagramme suivant :


B E B

(X, m)
 
g
h
g h
  
(E × E) × B̃, d0 ◦ πE×E
B E B
m NNN
mmm NNN
mmmm N
m
mm πE×E πB̃ NNN
   mv m B
NNN
N' 
(E × E), d0 (B̃, e)
B
 
g
Le fait que soit bien défini provient du fait que g et f sont des morphismes de
h
B /E , ce qui implique que d0 ◦ g = m = e ◦ h. Par ailleurs, c’est bien un morphisme de
 
B /E , puisque d0 ◦ πE×E ◦ g = d1 ◦ g = m.
B h
Le lemme 3.39 nous permet de conclure que ce produit est dans SplitE (1E ), puisque
ces deux composantes sont dedans (comme on a vu dans la preuve du lemme 3.35). Ainsi,
ce produit est préservé par l’équivalence de catégories LE , qui possède aussi un adjoint à
gauche. Par conséquent,
   

L((E × E) × B̃), L(d0 ) ◦ L(πE×E ) = LE (E × E), d0 × (B̃, e)
B E B B

= L(E × E), L(d0 ) × (L(B̃), L(e)).
B
3.2 Preuve du théorème 65

 
Ainsi, comme précédemment, L((E × E) × B̃), L(πE×E ), L(πB̃ ) est un pullback de
B E B
(L(d0 ), L(e)).
Or, T̃ (A, f ) est donné par le diagramme suivant, où le carré est un pullback et la
composante morphisme est la composition verticale.

T̃ (A, f ) / L(B̃)

L(e)
 
L(E × E) / L(E)
B L(d0 )
L(d1 )

L(E)

Par conséquent, quitte à changer le choix des pullbacks pour L(d0 )∗ , on obtient que
T̃ = TF1 .

Composante multiplicative
On va prouver dans un premier temps que 1(LE ◦p∗ ) ?  ? 1(p! ◦RE ) = µF2 ? 1(LE ◦RE ) . On se
.
A
fixe (A, f ) ∈ L(E) et on pose (B̃, e) = RE (A, f ). Le diagramme commutatif suivant

résume la situation,

s1
 
(E × E) × (E × E) × B̃ / (E × E) × B̃ /)
 
B E (B̃,p◦e) B̃
B E B E p∗ (B̃,p◦e)
s0 e
  
(E × E) × (E × E) /E×E /E
B E B π0 B d0

π1 d1 p
 /  
E×E d0 /E /B
B p
d1
d1 p
 
E /B
p

où chaque carré est un pullback (avec d0 lorsqu’il y a deux morphismes) et par définition,
   
d0 ◦ π0
  ◦ s0 
p∗ (B̃,p◦e) =  d1 ◦ π1
s1
 
c ◦ s0
= .
s1

Comme on l’a vu dans le paragraphe


 sur la composante fonctorielle, on peut écire le
pullback (E × E) × (E × E) × B̃ comme un produit dans B /E scindé par 1E , ce qui
B E B E
implique que son image par L est exactement TF22 (L(B̃), L(e)) (quitte à changer le choix
66 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

 
c ◦ s0
des pullabacks pour L(d0 )∗ ). On remarque qu’alors L = µF2 (L(B̃),◦L(e)) , ce qui
s1
termine la preuve de cette égalité.

Des arguments similaires et le fait que 1LE ? ((η E )−1 ) = E ? 1LE permettent de prouver
que
1LE ? 1p∗ ◦p! ? (η E )−1 ? 1p∗ ◦p! ? 1RE = 1TF2 ? E ? 1TF2 ? 1LE ◦RE ,
ce qui clôt la preuve de l’égalité des composantes multiplicatives des monades.

Composante unité .
A
On calcule maintenant η̃(A,f ) : (A, f ) −→ T̃ (A, f ), pour (A, f ) ∈ L(E) . On pose


comme précedemment (B̃, e) = RE (A, f ) et on obtient :

η̃(A,f ) = ηF2   ◦ (E )−1


L(B̃),L(e)
 
L(∆) ◦ L(e)
= ◦ (E )−1
1L(B̃)
 
∆◦e
= L ◦ (E )−1 .
1B̃

 
e
Par ailleurs, ηF1 (A,f ) = L(η(B̃,e) ) ◦ (E )−1 , avec η(B̃,e) = . La situation est la
1B̃
suivante :


1B̃
η(B̃,e)
'
∆◦e (E × E) × B̃ /)
B E πB̃ B̃
πE×E
B
e
e
#  
E×E /E
B d0
d1 p
  
E /B
p

 
∆◦e
Ce diagramme suggère que η(B̃,e) = , ce qui achève la preuve du théorème
1B̃
de Galois catégorique. u
t

3.3 Correspondance de Galois explicite


Remarque 3.40
On peut calculer explicitement la correspondance de Galois. On nomme T1 , T2 les monades
associées respectivement aux adjonctions p! a p∗ et G a U. On note par Π l’équivalence
inverse de CanT1 , que l’on ne peut connaître explicitement que lors des applications, puisque
p∗ est monadique seulement par hypothèse. On connait par contre toujours l’équivalence
3.3 Correspondance de Galois explicite 67

inverse de CanT2 , qui est donnée par la formule (1). C’est d’ailleurs un véritable inverse.
On a la composition suivante d’équivalences de catégories (voir la preuve de lemme 3.31) :

Diagramme 22: Correspondance de Galois explicite

(LE )T1
CanT1 / / . T F
SplitB (p) o (SplitE (1E ))T1 o A L(E)
1

Π (RE )T1 O
 T2
1A . (LE RE )T2
L(E)


CanT2 / . T2
A
Gal(p)
o A L(E)
−1
CanT2

L’équivalence qui est toujours connue est donnée par le calcul suivant, où l’on utilise
l’égalité des composantes fonctorielles (voir la partie 3.2.3) pour établir la quatrième égalité,
et le fait que la transformation E est naturelle (voir le diagramme 23). On pose, pour
alléger la notation, B̂ = (B̃, b) et X = p∗ (B̂).

−1
B̂ 7→ CanT2 ◦ (LE ◦ RE )T2 ◦ LTE1 ◦ CanT1 (B̂)
−1
CanT2 ◦ (LE ◦ RE )T2 ◦ LTE1 X, p∗ B̂

=
−1
  −1 
CanT2 ◦ (LE ◦ RE )T2 LE (X), [LE ◦ p∗ ] B̂ ◦ [LE ◦ p∗ ◦ p! ] ηX E

=

T2 −1
 −1 
LE RE LE (X), [LE RE LE ◦ p∗ ] B̂ ◦ [LE RE LE ◦ p∗ p! ] ηX
E

= Can ◦

E −1
[L(d1 )! L(d0 )∗ LE RE LE ](X)

−1
 −1 
LE RE LE (X), [LE RE LE ◦ p∗ ] B̂ ◦ [LE RE LE ◦ p∗ p! ] ηX
E

= CanT2 ◦

E −1
[LE p∗ p! RE LE ](X)
  −1  
T2 −1 E −1 ∗ ∗ ! E

= Can LE RE LE (X), [L p∗ ](B̂) ◦ [LE ◦ p ] B̂ ◦ [LE ◦ p p ] ηX
E
 
T2 −1


= Can ∗
LE (X), [LE ◦ p ] (B̂)
 
= L(E × B̃), L(πE ), [L ◦ p∗ ](πB̃ ) . (2)
B
68 3 THÉORÈME DE GALOIS CATÉGORIQUE

Diagramme 23: Naturalité de E

E −1
[LE p∗ p! RE LE ](X)
LE RE [LE p∗ p! RE LE ](X) o [LE p∗ p! RE LE ](X)
   
E −1
LE RE [LE ◦p∗ p! ] ηX E −1
[LE ◦p∗ p! ] ηX
 E
[LE p∗ p! ](X)
−1

p∗ p! ](X) o [LE p∗ p! ](X)

LE RE [LE
LE RE [LE ◦p∗ ](B̂ ) [LE ◦p∗ ](B̂ )
 E
−1

LE RE LE (X) o
 LE (X)
LE (X)
69

4 Applications du théorème
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs
Dans cette partie, on va se servir du théorème de Galois catégorique pour donner une
correspondance de Galois pour les anneaux qui sont à partir de maintenant commutatifs
et unitaires. En particulier, cela donnera lieu à la théorie de Galois de Grothendieck pour
les corps.
Cette partie est inspirée des sections 2,3,4 du livre [4].
Dans la suite, le dual de la catégorie des anneaux Ring∗ joue le rôle de la catégorie B
du chapitre précédent et la catégorie des espaces topologiques profinis Prof joue celui de
A.
Un lecteur qui a besoin d’une introduction aux espaces topologiques profinis, limites
projectives et inductives (dites aussi directes) peut consulter le projet de Rafael Gugliel-
metti [5] ou encore le livre [6]. On utilise principalement une caractérisation des espaces
topologiques profinis comme étant les espaces topologiques compacts, Hausdorff et totale-
ment discontinus.

4.1.1 Pullbacks dans les catégories Ring∗ et Prof


On doit vérifier que le pullback de deux morphismes existe toujours dans ces deux
catégories. Les deux propositions suivantes répondent au problème.
Proposition 4.1 (Caractérisation du pullback dans Ring∗ )
Soit f : A −→ B et g : A −→ C deux homomorphismes d’anneaux. Un pullback de (f ∗ , g ∗ )
dans Ring∗ est le triple (B ⊗ C, i∗B , i∗C ) où iB (b) = b ⊗ 1 pour tout b ∈ B et iC (c) = 1 ⊗ c
A
pour tout c ∈ C.
Démonstration.
Par dualité, un pullback de (f ∗ , g ∗ ) dans Ring∗ est exactement un pushout de (f, g) dans
Ring.
On doit d’abord donner du sens au produit tensoriel B ⊗ C, c’est-à-dire donner des
A
structures de A-module à B et C. On les munit de la structure de module induite par les
morphismes f et g, c’est-à-dire, pour tout a ∈ A, b ∈ B et c ∈ C, on définit

a · b = f (a) · b

et
a · c = g(a) · c.
Donnons de plus une structure d’anneau à ce produit tensoriel, par b ⊗ c · b0 ⊗ c0 = bb0 ⊗ cc0 .
On doit vérifier que c’est bien défini, c’est-à-dire que si b⊗c = b̃⊗c̃, alors bb0 ⊗cc0 = b̃b0 ⊗c̃c0 .
Or, (b, c) ∼ (b̃, c̃) si et seulement si il existe a ∈ A tel que b = a · b̃ et a · c = c̃, ce qui
implique directement que bb0 ⊗ cc0 = b̃b0 ⊗ c̃c0 . Il est clair que ce produit est associatif et
que 1 ⊗ 1 est l’unité. On l’étend à tout B ⊗ C par distributivité. On voit de plus que les
A
morphismes iB , iC sont bien des morphismes d’anneaux.
On remarque ensuite que pour tout a ∈ A,

iB ◦ f (a) = f (a) ⊗ 1 = (a · 1) ⊗ 1 = 1 · (a · 1) = 1 ⊗ g(a) = iC ◦ f (a),

et la condition de commutativité est vérifiée.


70 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

Par ailleurs, supposons que l’on ait h : B −→ D, k : C −→ D deux homomorphismes


d’anneaux tels que h ◦ f = k ◦ g. On munit comme précédemment D d’une structure de
A-module grâce au morphisme h ◦ f = k ◦ g et on pose d : B × C −→ D avec

d(b, c) = h(b) · k(c).

On remarque que d est A-bilinéaire, et la propriété universelle du produit tensoriel appli-


quée au diagramme ci-dessous donne l’existence et l’unicité de d¯ tel que id¯ = d, comme
morphisme de A-module.

B×C
d /D
=
i
 d¯
B⊗C
A

Il est facile de vérifier que d¯ est en fait aussi un morphisme d’anneaux, puisque d est
un homomorphisme d’anneau dans chaque variable et que les anneaux sont commutatifs.
Par conséquent, on obtient l’existence pour la propriété universelle du pushout. Vérifions
l’unicité : Soit m un autre morphisme tel que m ◦ iB = h et m ◦ iC = k. Puisque i = iB · iC ,
alors m ◦ i = m ◦ iB · m ◦ iC = d. u
t
Proposition 4.2
Le pullback de deux morphismes dans Prof est calculé comme dans Set.

Démonstration.
Il faut vérifier que P = {(x, y) ∈ X × Y : f (x) = g(y)} est un espace topologique profini,
lorsque f : X −→ T et g : Y −→ T sont des applications continues entre espaces topolo-
giques profinis. Puisque X et Y sont profinis, ils sont compacts, Hausdorff et totalement
discontinus. Par conséquent, X ×Y est compact, Hausdorff et totalement discontinu. Ainsi,
il suffit de voir que P est fermé dans X × Y . Or P est la pré-image de la diagonale de T
par l’application continue (f, g). Or, puisque T est Hausdorff, sa diagonale est fermée, ce
qui achève la preuve. u
t

On va maintenant construire l’adjonction sur laquelle se base la théorie.

4.1.2 Adjonction relativement admissible


Définition 4.3 (Idéal régulier)
Soit R un anneau. Un idéal de R est dit régulier s’il est généré par ses idempotents.

Exemple 4.4
Pour tout anneau R, l’idéal trivial et R sont des idéaux réguliers, car engendrés respecti-
vement par 0 et 1.
Lemme 4.5
Soit R un anneau.
(i) Un idéal I est régulier si et seulement si, pour tout i ∈ I, il existe un idempotent e
tel que i = ie.
(ii) Une intersection finie d’idéaux réguliers est un idéal régulier.
(iii) Une somme quelconque d’idéaux réguliers est un idéal régulier.
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs 71

Démonstration.
(i) Le sens indirect est évident. Montrons le sens direct. Pour tout i ∈ I, il existe
r1 , . . . rn , ∈ R et e1 , . . . , en ∈ I des idempotents tels que
n
X
i= rj ej .
j=1

Il s’agit donc de trouver un idempotent e ∈ I tel que ej e = ej pour tout 1 ≤ j ≤ n.


Par un argument de récurrence, il suffit de savoir le faire pour n = 2. On pose alors
e = e1 +e2 −e1 e2 ∈ I. Un simple calcul montre que e vérifie les conditions demandées.
(ii) Soient I, J deux idéaux réguliers. Par récurrence, il suffit de prouver que I ∩ J est
régulier. On montre qu’en fait I ∩ J = IJ. En effet, si x ∈ I ∩ J, alors il existe un
idempotent e ∈ J tel que x = xe. Alors, x = (xe)e ∈ IJ. Par ailleurs, l’inclusion
IJ ⊆ I ∩ J est P vérifiée car I et J sont des idéaux. De plus, tout élément de IJ
s’écrit comme nk=1 ik jk , avec ik ∈ I et jk ∈ J. Pour tout k, il Pexiste ek , e0k tels que
ik = ik ek et jk = ik e0k . Ainsi, tout élément de IJ s’écrit comme nk=1 ik jk · (ek e0k ), ce
qui termine la preuve.
(iii) Soit (Ij )j∈J une collectionP
d’idéaux réguliers. Alors l’union de leurs ensembles d’idem-
potents génère la somme j∈J Ij .
u
t
Définition 4.6 (Idéal régulier maximal)
Soit R un anneau. Un idéal de R régulier est dit maximal s’il est maximal dans le treillis
des idéaux réguliers.
Lemme 4.7
Soit R un anneau.
(i) Un idéal régulier I est maximal dans le treillis des idéaux réguliers propres si et
seulement si pour tout élément idempotent e, e 6∈ I ⇒ (1 − e) ∈ I.
(ii) Soient I, J deux idéaux réguliers. Si pour tout idéal régulier maximal M ,

I * M ⇒ J * M,

alors I ⊆ J.
Démonstration.
(i) Montrons le sens direct. Supposons par l’absurde qu’il existe un idempotent e tel que
e, 1 − e 6∈ I. On considère alors l’idéal régulier M engendré par les idempotents de
I plus e, et on doit montrer que c’est un idéal propre. S’il n’était pas propre,
P alors
1 − e ∈ M , et donc (1 − e) = (1 − e)e0 pour un idempotent e0 de M . Or, e0 = i∈I ri ei
avec ri ∈ R et ei = e ou ei ∈ I. Or, (1 − e)e = 0, et donc (1 − e)e0 ∈ I, une
contradiction.
Montrons le sens indirect. Supposons par l’absurde qu’il existe M un idéal régulier
propre qui contient strictement I. Alors, il existe un idempotent e ∈ M \ I, ce qui
implique par hypothèse que (1 − e) ∈ I ⊂ M , et donc 1 ∈ M , une contradiction.
(ii) Par l’absurde, supposons que I * J, ce qui implique qu’il existe un idempotent
e ∈ I ∩ J c . On considère alors l’idéal J˜ = J + h1 − ei. Puisque e 6∈ J, l’argument du
point précédent assure que J˜ est propre, soit donc M un idéal régulier maximal qui
contient J˜ (qui existe par le lemme de Zorn), alors par le point précédent, e 6∈ M , ce
qui implique que I * M , une contradiction avec la contraposée de l’hypothèse.
u
t
72 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

Définition 4.8 (Spectre de Pierce)


On va définir le foncteur Sp : Ring∗ −→ Prof qui associe à un anneau commutatif son
spectre de Pierce. On pose, pour tout anneau R,

Sp(R) = {M ( R | M idéal régulier maximal}

donné avec la topologie τ constituée des ouverts

OI = {M ∈ Sp(R) | I * M } ,

pour tout idéal régulier I de R. De plus, pour tout homomorphisme d’anneaux f : R −→ S


et tout M ∈ Sp(S), On pose Sp(f )(M ) = he ∈ R : e idempotent et f (e) ∈ M i.
Proposition 4.9
Le foncteur Sp est bien défini.

Démonstration.
Montrons d’abord que, pour tout anneau commutatif R, Sp(R) est un espace topologique
profini.
Vérifions que les ouverts mentionnés forment une topologie. D’abord, ∅ = O{0} et
Sp(R) = OR . Par ailleurs, le fait que pour tout idéaux I, J, on a que I ⊆ J ⇒ OI ⊆ OJ
et le point (ii) du lemme 4.7 implique que OI ⊆ OJ ⇒ I ⊆ J. Ainsi, l’application donnée
par O : I 7→ OI est un isomorphisme entre le treillis des idéaux et le treillis (τ, ⊆). En
particulier,
S O préserve les supremums et infimums. Par conséquent, OI ∩ OJ = OI∩J et
O
j∈J Ij = OPj∈J Ij , ce qui assure que τ est bien une topologie sur X.
Il suffit de montrer que Sp(R) est compact, Hausdorff et totalement discontinu.
On montre d’abord que l’espace Sp(R) est totalement discontinu. Supposons par l’ab-
surde que l’on a une composante connexe C avec M, M 0 ∈ C deux idéaux réguliers maxi-
maux distincts. Alors il existe un idempotent e ∈ M ∩ M 0c (par maximalité de M ), ce qui
implique par le point (i) du lemme 4.7 que 1−e ∈ M 0 . On choisit les ouverts Ohei et Oh1−ei .
On vérifie facilement que M ∈ Oh1−ei et M 0 ∈ Ohei . Par ailleurs, Ohei ∩ Oh1−ei = Ohei∩h1−ei .
Or, si x ∈ hei ∩ h1 − ei, alors il existe r, r0 ∈ R avec x = re = r0 (1 − e). En multipliant par
e, on obtient que x = re = r0 (1 − e)e = 0. Ainsi, l’intersection des deux ouverts est vide.
On prend les ouverts de C donné par U1 = Ohei ∪ C et U2 = Oh1−ei ∪ C. On sait déjà que
U1 ∩ U2 = ∅ et U1 , U2 6= ∅. Par ailleurs,

U1 ∪ U2 = C ∩ Ohei ∪ Oh1−ei = C ∩ OR = C ∩ Sp(R) = C,

ce qui implique que U1 , U2 forment une séparation de C, une contradiction.


On remarque que les ouverts Oh1−ei et Ohei séparent M et M 0 , ce qui implique que
Sp(R) est Hausdorff. 
Montrons que Sp(R) est compact. Considérons un recouvrement d’ouverts OIj j∈J de
Sp(R). Le fait que O soit un isomorphisme de treillis donne que
[
OPj∈J Ij = OIj = Sp(R),
j∈J
P
ce qui implique que j∈J Ij = R, P puisque tout idéal régulier propre est contenu dans un
idéal régulier maximal. Ainsi, 1 ∈ Pj∈J Ij , ce qui assure, puisque
S les sommes sont finies,
qu’ il existe F ⊆ J fini tel que 1 ∈ j∈F Ij . Par conséquent, j∈F OIj = Sp(R), ce qu’il
fallait démontrer.
Il faut maintenant vérifier que pour tout morphisme d’anneaux f : R −→ S, l’ap-
plication Sp(f ) est bien définie et continue. Par définition, pour tout M ∈ Sp(S), on a
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs 73

que Sp(f )(M ) est un idéal régulier de R. De plus, puisque pour tout idempotent e ∈ R,
f (e) est un idempotent de S, on a que f (e) 6∈ M ⇒ 1 − f (e) = f (1 − e) ∈ M . Ainsi,
e 6∈ Sp(f )(M ) ⇒ 1 − e ∈ Sp(f )(M ), ce qui implique que Sp(f )(M ) est maximal.
Il reste à prouver Sp(f ) est continue. Soit donc IR un idéal régulier de R. On pose IS
l’idéal régulier engendré par l’ensemble {f (e) : e idempotent de IR }. On va montrer que

Sp(f )−1 (OIR ) = OIS .

Soit M ∈ Sp(f )−1 (OIR ), c’est-à-dire tel que IR * Sp(f )(M ). Ceci assure l’existence
d’un idempotent e ∈ IR ∩ Sp(f )(M )c et donc a fortiori tel que f (e) 6∈ M . Ainsi, IS * M ,
ce qui implique que M ∈ OIS .
Soit M ∈ OIS , alors par définition, IS * M , ce qui implique l’existence d’un idempotent
e dans l’ensemble générateur de IS qui ne soit pas dans M . Par définition de IS , cela veut
dire qu’il existe un idempotent ẽ ∈ IR tel que f (ẽ) = e 6∈ M .
Supposons par l’absurde que ẽ ∈ Sp(f )(M ),Pce qui assure l’existence d’éléments ri ∈ R
et d’idempotents ei tels que f (ei ) ∈ M et ẽ = ni=1 ri ei . Alors, puisque M est un idéal et
f est un homomorphisme d’anneaux,
n n
!
X X
f (ẽ) = f ri ei = f (ri )f (ei ) ∈ M
i=1 i=1

une contradiction. Ainsi, IR * Sp(f )(M ), ce qui fini de prouver que Sp(f )−1 (OIR ) = OIS
et le fait que Sp(f ) est continue. u
t

Proposition 4.10
Le foncteur Sp : Ring∗ −→ Prof possède un adjoint à droite donné par le foncteur
Top (−, Z) : Prof −→ Ring∗ , où l’on voit Z comme un anneau topologique avec la topo-
logie discrète. Pour X un espace topologique profini, on muni l’ensemble Top (X, Z) des
opérations d’addition et de multiplication définies, pour tout c1 , c2 ∈ Top (X, Z) et pour
tout x ∈ X, par

(c1 + c2 )(x) = c1 (x) + c2 (x);


(c1 · c2 )(x) = c1 (x) · c2 (x).

Démonstration.
On doit d’abord vérifier que l’adjoint proposé est bien défini. On voit que les sommes et
produits de fonctions sont continues comme composée d’applications continues puisque
la somme et le produit sont continus dans Z. Par ailleurs, les fonctions constantes étant
toujours continues, le zéro et l’identité de l’anneau des fonctions sont bien continues.
De plus, si f : X −→ Y est un morphisme d’espaces topologiques profinis, alors
Top (f, Z) : Top (Y, Z) −→ Top (X, Z) donné par g 7→ g ◦ f , est effectivement un mor-
phisme d’anneau puisque (g + h) ◦ f = g ◦ f + h ◦ f , (g · h) ◦ f = g ◦ f · h ◦ f et 1 ◦ f = 1.
Pour prouver l’adjonction, construisons maintenant un isomorphisme naturel entre les
foncteurs Top (Sp(−), −) et Ring∗ (−, Top (−, Z)). 
Soit X ∈ |Top|. Etudions dans un premier temps la structure de Sp Top (X, Z) . Les
fonctions idempotentes sont celles dont les images de tous les éléments sont idempotentes,
c’est à dire les fonctions X −→ {0, 1}. Elles sont continues si et seulement si la fibre de 1
est un ouvert fermé. Par conséquent, la donnée d’un idéal régulier maximal de Top (X, Z)
correspond à la donnée d’un ultrafiltre sur l’ensemble des ouverts fermés de X.
En effet, on fait correspondre à une fonction continue idempotente f l’ensemble ouvert
fermé f −1 (0). On note par la suite χU la fonction caractéristique de l’ensemble U . On
74 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

obtient alors que l’ensemble EM correspondant à l’ensemble des générateurs d’un idéal
régulier maximal M est tel que pour tout ouvert fermé U , soit χU ∈ M et donc U c ∈ E,
soit χU c ∈ M et donc U ∈ E. Par ailleurs, si U, V ∈ E alors

χ(U c ∪V c ) = χU c + χV c − χU c χV c ∈ M

, ce qui implique que U ∩ V ∈ E. D’un autre coté ∅ 6∈ E, car sinon 1 = χX ∈ M , et si


U ∈ E et U ⊆ V , alors V ∈ E car sinon V c ∩ U = ∅ ∈ E.
On pose maintenant la fonction α(R,X) : Ring∗ (R, Top (X, Z)) −→ Top (Sp(R), X)
définie de la façon suivante :
\
α(R,X) (f ∗ )(M ) = U.
U ∈ESp(f )(M )

On doit vérifier que c’est bien défini, c’est à dire que l’intersection est un singleton
et que l’application est continue. Or, par compacité, l’intersection ne peut pas être vide,
car sinon il existe un nombre fini d’éléments de ESp(f )(M ) tel que leur T intersection est
vide, une contradiction avec le fait que E est un ultrafiltre. Soient x 6= y ∈ U ∈ESp(f )(M ) U .
Puisque l’espace X est totalement discontinu, ses ouverts fermés constituent une base pour
la topologie (voir proposition 1.1.3 du document [5][p.4]). Or, l’espace est de Haussodorf, ce
qui donne l’existence de deux ouverts fermés disjoints Vx , Vy qui contiennent respectivement
x et y. Ainsi, Vx et Vy ne peuvent
T appartenir simultanément à ESp(f )(M ) , ce qui fait que
x ou y n’appartient pas à U ∈ESp(f )(M ) U , une contradiction. L’intersection est donc un
singleton.
On montre maintenant que α(R,X) est continue. Soit donc U un ouvert fermé de X.
Puisque Sp(f ) est continue, il suffit de vérifier que l’ensemble
 
  \ 
Ũ = M ∈ Sp Top (X, Z) : V ∈U
 
V ∈EM

est un ouvert. En fait, Ũ = OhχU i . En effet, M 6∈ OhχU i si et seulement si χU ∈ M , c’est-à-


dire U c ∈ EM . Ce dernier fait implique que M 6∈ Ũ . Par ailleurs, si V ∈EM V 6∈ U , alors
T
U ne peut appartenir à EM par compacité (l’intersection serait vide), ce qui implique que
U c ∈ EM et M 6∈ OhχU i .
On s’intéresse maintenant à la structure de Top (Sp(R), Z). Soit donc f dans cet en-
semble. Alors G
Sp(R) = f −1 (z)
z∈Z

est un recouvrement ouvert d’un compact, on extrait donc un sous recouvrement fini, ce
qui implique qu’il existe des zi ∈ Z tel que
n
G
Sp(R) = f −1 (zi )
i=1

et que f −1 (zi ) 6= ∅. Or, on peut voir que l’ensemble Ohei : e ∈ R idempotent forme une


base d’ouverts pour la topologie, ce qui implique, par compacité du fermé f −1 (zi ), que
n
[
f −1 (zi ) = ODe E = ODe E.
ij i1 ,...eij
j=1
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs 75

Or, on a déjà vu que l’on pouvait trouver un autre idempotent ei tel que eij = eij ei pour
tout j(voir lemme 4.5 (i)). Ainsi, f −1 (zi ) = Ohei i , et

n
G n
G
Sp(R) = f −1 (zi ) = Ohei i .
i=1 i=1

On remarque hei = hẽi, alors il existe r, r0 ∈ R tels que e = rẽ et ẽ = r0 e. Ceci implique
directement que e = r2 ẽ. On trouve alors que :

e = rẽ = rr0 e
= r2 r0 ẽ = r0 e
= ẽ.

On peut définir alors


n
X
Σf = zi ei . (3)
i=1

Il faut vérifier que c’est un homomorphisme d’anneaux. On va montrer que la définition


de Σf ne dépend pas de la finesse de la partition, c’est à dire que si on a

m
G
Ohei i = O De E,
ij
j=1

Pn,m
alors Σf = i,j=1 zi eij . En effet, si l’égalité précédente est vérifiée, alors pour j 6= k,


O e ∩ Ohei i = ∅, ce qui implique que eij ∩ heik i = 0 Par conséquent eij eik = 0. Par
D E
ij k

ailleurs, le fait que hei i = m


P

j=1 eij implique que ei = (ei1 ∨ ei2 ) ∨ . . .) ∨ eim , avec
Pm e ∨ f =
e + f − ef (voir preuve Pm de lemme 4.5(i)). Ainsi, puisque e e
ij ik = 0, alors e i = j=1 eij , ce
qui fait que ri ei = j=1 ri eij . Cela assure que Σ est un homomorphisme d’anneaux. En
effet, si f, f 0 ∈ Top (Sp(R), Z), alors il existe une partition de Sp(R) constituée P d’ouverts
fermés Ohei i telle que f et f 0 sont constante sur chaque morceau. Alors, Σ(f +f 0 ) = ni=1 (f +
f 0 )(ei )ei = Σf + Σf 0 et de même, Σ(f f 0 ) = Σf Σf 0 .
On peut donc définir β(R,X) : Top (Sp(R), X) −→ Ring∗ (R, Top (X, Z)) de la façon
suivante :
β(R,X) (g)(h) = ΣTop(g,X)(h) = Σhg .

On vérifie que β est naturelle. La situation est la suivante :

β(R,X)
/
(R, X) Top (Sp(R), X) o Ring∗ (R, Top (X, Z))
α(R,X)

(φ,γ) Top(Sp(φ),γ) Ring∗ (φ,Top(γ,Z))

  β(R0 ,X 0 ) 
/
(R0 , X 0 ) Top (Sp(R0 ), X 0 ) o Ring∗ (R0 , Top (X 0 , Z))
α(R0 ,0 X)

Soient donc φ : R −→ R0 un homomorphisme d’anneaux, γ : X −→ X 0 une application


76 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

continue, c ∈ Top (Sp(R), X) et h ∈ Top (X 0 , Z). On calcule :


h i
β(R0 ,X 0 ) ◦ Top (Sp(φ), γ)(c) (h) = Σh◦Top(Sp(φ),γ)(c)
= Σh◦γ◦c◦Sp(φ)
= φ (Σh◦γ◦c )
= φ ◦ β(R,X) (c) ◦ Top (γ, Z)(h)
h i
= Ring∗ (φ, Top (γ, Z)) ◦ β(R,X) (c) (h).
Pn
La seule égalité à justifier est la troisième. On a que Σh◦γ◦c◦Sp(φ) = i=1 zi ei avec la
décomposition
−1
(zi ) = Ohei i .
Or, par définition de Sp,
n
G
Sp(R0 ) = [h ◦ γ ◦ c ◦ Sp(φ)]−1 (zi )
i=1
Gn
= Sp(φ)−1 ([h ◦ γ ◦ c]−1 (zi ))
i=1
Gn
= Ohφ(ẽi )i
i=1

où 0hẽi i = [h ◦ γ ◦ c]−1 (zi ) est une autre décomposition comme précédemment. Ainsi,
n
X n
X n
X
φ ◦ Σh◦γ◦c = φ( ri ẽi ) = φ(zi )φ(ẽi ) = zi φ(ẽi ),
i=1 i=1 i=1

puisque φ est un homomorphisme d’anneaux et que zi ∈ Z.


Il reste à vérifier que ces deux transformations sont inverses l’une de l’autre. On calcule,
pour g ∈ Top (Sp(R), X) et M ∈ Sp(R) :
\
α(R,X) ◦ β(R,X) (g)(M ) = V
V ∈ESp(β
(R,X) (g))(M )
\
= V
V ∈E
hχU ∈Sp(Top(X,Z)):β(R,X) (g)(χU )∈M i
\
= V
V ∈E
hχU ∈Sp(Top(X,Z)):ΣχU ◦g ∈M i

Or, par définition, ΣχU ◦g = eU avec g −1 (U ) = OheU i . Alors, pour tout U tel que eU ∈ M ,
g(M ) 6∈ U car sinon M ∈ OheU i , une contradiction. Par conséquent, G(M ) ∈ V pour tout
V ∈ EhχU ∈Sp(Top(X,Z)):Σχ g ∈M i , ce qui implique que
U

α(R,X) ◦ β(R,X) (g)(M ) = g(M ).

Enfin, on calcule, pour k ∈ Ring∗ (R, Top (X, Z)) et f ∈ Top (X, Z), la composition
β(R,X) ◦ α(R,X) (k)(f ).
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs 77

 −1
On s’intéresse d’abord à F = f ◦α(R,X) (k) (zi ) pour zi ∈ Z donné. Alors M ∈ Sp(R)
appartient à F si et seulement si
\
V ∈ f −1 (zi ).
V ∈Ehχ
U ∈Sp(Top(X,Z)):k(χU )∈M i

Or ceci implique que f −1 (zi )c , qui est un ouvert fermé, n’est pas dans l’ultrafiltre donné
par EhχU ∈Sp(Top(X,Z)):k(χU )∈M i et donc que f −1 (zi ) est dedans. Réciproquement, si f −1 (zi )
est dans l’ultrafiltre, l’intersection des éléments de l’ultrafiltre est dans f −1 (zi ). Ainsi,
M ∈ Sp(R) appartient à F si et seulement si k(χf −1 (zi ) ) 6∈ M , c’est-à-dire si et seulement
si M ∈ ODk(χ )
E . Par conséquent, F = OD
k(χ )
E et donc, puisque par un argument
f −1 (zi ) f −1 (zi )
de compacité, im(f ◦ α(R,X) (k)) = {z1 , . . . , zn }, alors

β(R,X) ◦ α(R,X) (k)(f ) = Σf ◦α(R,X) (k)


n
X
= zi k(χf −1 (zi ) )
i=1
n
!
X
= k zi χf −1 (zi ) )
i=1
= k(f ).

Ainsi, les deux transformations sont naturelles et inverses l’une de l’autre, ce qui conclut
la preuve. u
t

On choisit comme classes de morphismes dans chaque catégorie la classe de tous les mor-
phismes, ce qui assure le fait que l’adjonction est relativement admissible. Le théorème de
Galois catégorique (voir 3.25) nous donne le théorème suivant :
Théorème 4.11
Si p : K −→ E est un morphisme de descente galoisienne dans Ring∗ , alors il y a une
équivalence de catégorie
SplitK (p) ≈ Prof Gal(p) .
Interprétons maintenant le résultat dans le cas où p : E −→ K est une extension de
corps, pour mieux comprendre l’équivalence de catégories et sa relation avec la théorie de
Galois.

4.1.3 Algèbres unitaires


On doit interpréter la notion d’objet scindé, ce que l’on va faire à travers la notion
d’algèbre.
Définition 4.12 (Algèbre unitaire sur un anneau)
Une algèbre unitaire sur un anneau R, ou R-algèbre unitaire, est un quadruple (A, +, ., ?)
tel que
(i) (A, +, .) est un anneau unitaire ;
(ii) (A, +, ?) est un R-module ;
(iii) pour tout r ∈ R, a, a0 ∈ A, r ? (a · a0 ) = (r ? a) · a0 = a · (r ? a0 ).
Proposition 4.13

La catégorie Ring /R est isomorphe au dual de la catégorie des R-algèbres unitaires,
(AlgR )∗ .
78 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

Démonstration.

Soit (A, f ) de la catégorie Ring /R . L’anneau A possède une structure de R-module
induit par l’homomorphisme d’anneaux f : R −→ A. Elle est donnée, pour tout r ∈ R et
tout a ∈ A, par
r ? a = f (r) · a.
Par ailleurs, on a bien que

r ? (a · a0 ) = f (r) · a · a0 = (r ? a) · a0 = a · (r ? a),

ce qui fait que A possède maintenant une structure de R-algèbre. Par ailleurs, tout mor-

phisme g de Ring /R ((A0 , f 0 ), (A, f )) donne bien lieu à un morphisme de R-algèbres
g : A −→ A0 puisque alors

g(r ? a) = g(f (r) · a) = f 0 (r) · g(a) = r ? g(a).

Par ailleurs, pour toute algèbre unitaire A, il existe un morphisme d’anneaux R −→ A


induisant la structure d’algèbre à partir de A (dont on a temporairement oublié la structure
d’espace vectoriel). Celui-ci est donné par r 7→ r ? 1 et les morphismes de R-algèbres sont

en fait des morphismes de Ring /R . Par conséquent, les deux catégories sont isomorphes.
u
t

A partir de maintenant, on identifie Ring /R avec le dual de la catégorie des R-
algèbres qui seront, à partir de maintenant, toujours unitaires.
Pour K un corps, on va étendre la correspondance de Galois à certaines K-algèbres, ce
qui requiert de généraliser les notions d’extension algébrique et de polynôme minimal aux
K-algèbres.
Définition 4.14 (Algébricité et polynôme minimal)
Soit K un corps. Une K-algèbre unitaire A est dite algébrique sur K si, pour tout a ∈ A, il
existe un polynôme q ∈ K[X] tel que q(a) = 0. Le polynôme minimal de a est alors l’unique
polynôme unitaire engendrant le noyau de l’évaluation en a dans l’anneau principal K[X].

Remarque 4.15
Soient K un corps et A une K-algèbre unitaire.
(i) Le polynôme minimal de a ∈ A sur K n’est pas nécessairement irréductible puisque
l’algèbre A n’est pas supposée intègre.
(ii) L’image de eva : K[X] −→ A est notée K[a].

Définition 4.16 (Algèbre scindée par une extension de corps)


Soit p : K −→ E une extension de corps. Une K-algèbre A est dite scindée par E si et
seulement si
(i) A est algébrique sur K ;
(ii) pour tout a ∈ A, le polynôme minimal de a est séparable et scindé dans E[X] (produit
de termes de degré un distincts).

On rappelle le lemme chinois, qui va nous permettre de prouver le théorème sur les
transformations de Gelfand, qui lui même est très utile dans la suite.
Lemme 4.17
Soit K un corps et f1 , . . . fk ∈ AlgK (A, B) des morphismes surjectifs. Alors, si pour tout
1 ≤ i, j ≤ k, ker fi + ker fj = A, alors le morphisme induit f : A −→ B k est surjectif.
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs 79

Démonstration.
Voir la proposition 2.1.12 du livre [4][p.19]. u
t

Proposition 4.18
Soient E un corps et A une E-algèbre. Alors,
(i) Un sous-ensemble fini F de AlgE (A, E) induit un morphisme de AlgE A, E Card(F )


qui est surjectif.


(ii) L’ensemble AlgE (A, E) est linéairement indépendant dans VectE (A, E).

Démonstration.
Chaque morphisme f ∈ AlgE (A, E) est surjectif puisque f (e·1) = e·1 = e. Par conséquent,
A ker f ∼

= E et donc ker f est maximal. Ainsi, si f 6= g ∈ AlgE (A, E), alors ker f 6= ker g.
En effet, sinon, ḡ −1 ◦ f¯ est un E-automorphisme de E, c’est à dire l’identité. Par conséquent,
f = f¯◦ π = ḡ ◦ π = g. Le fait que ker f 6= ker g assure que ker f + ker g = A par maximalité.
Soit F = {f1 , . . . , fk } un sous-ensemble fini de AlgE (A, E). Alors le lemme chinois
assure que le morphisme induit f est surjectif.
Soit maintenant α1 , . . . αk ∈ E tels que ki=1 αi fi = 0. Si e1 , . . . , ek est la base cano-
P

nique de E k , alors pour tout a ∈ A, f (a) = ki=1 fi (a)ei et donc


P

k
( )
X
k
f (a) ∈ U = (v1 , . . . , vk ) ∈ E : αi vi = 0 .
i=1

Or, f est surjectif et donc le sous espace U est égal à E k . Alors, pour tout i, ei ∈ U ce qui
implique que αi = 0. u
t

Théorème 4.19
Soit E une extension finie de K. Alors, pour toute K-algèbre A de dimension n, les pro-
positions suivantes sont équivalentes :
(i) A est scindée par E.
(ii) Card (AlgK (A, E)) = n.
(iii) Le morphisme Gel défini par

E ⊗ A −→ E Card(AlgK (A,E))
K
e ⊗ a 7−→ (e · σ(a))σ∈AlgK (A,E)

est un isomorphisme de E-algèbres. Il est appelé transformation de Gelfand.

Démonstration.
On commence par quelques observations sur les conséquences des hypothèses.
On remarque que Card (AlgK (A, E))
 < +∞. En  effet, par la propriété universelle du
produit tensoriel, AlgK (A, E) ∼
= AlgE E ⊗ A, E . Or, la proposition précédente assure
  K  
que AlgE E ⊗ A, E est linéairement indépendant dans VectE E ⊗ A, E , qui est de
K K
dimension finie, car E ⊗ A est de dimension n sur E( la base est (1 ⊗ ai )ni=1 , où (ai )ni=1 est
K
une base de A comme K-espace vectoriel).
Par ailleurs la transformation de Gelfand est toujours surjective dans chaque variable.
La proposition précédente s’applique donc et la transformation de Gelfand est toujours
surjective dans ce contexte.
80 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

(ii) ⇒ (iii) On laisse au lecteur la vérification que le morphisme est bien défini, c’est-à-dire
que les différentes écritures possible pour un tenseur donnent lieu à une même image.
On remarque que E ⊗ A et E n ont la même dimension sur K, ce qui implique par le
K
théorème du rang que la transformation de Gelfand est un isomorphisme.
(iii) ⇒ (ii) Si la transformation de Gelfand est un isomorphisme alors
dimK (E) · Card (AlgK (A, E)) = dimK (E Card(AlgK (A,E)) )
= dimK (E ⊗ A)
K
= dimK (E) · n.
(i) ⇒ (ii) Soit (a1 , . . . an ) une base de A comme K-espace vectoriel..La sous-algèbre K[ai ]
vérifie la proposition (ii) du théorème. En effet, K[ai ] ∼
= K[X] hqi et q est séparable
donc 
Card AlgK K[ai ], K̄ = deg(q).
Par ailleurs, toutes les racines de q sont dans E, et donc
Card (AlgK (K[ai ], E)) = deg(q) = dimK (K[ai ]).
On observe maintenant que A est généré par les K[ai ]. Il suffit donc de montrer que
si des algèbres A1 et A2 vérifient la proposition (ii) du théorème, alors il en est de
même pour A1 · A2 . On définit φ : A1 ⊗ A2 −→ A1 · A2 par φ(a1 ⊗ a2 ) = a1 · a2 . On
K
obtient que
A1 · A2 ∼
= A1 ⊗ A2 ker φ .

K
Si mi = dimK (Ai ), i = 1, 2, alors, puisque le foncteur produit tensoriel possède un
adjoint à droite, il préserve les colimites et donc les quotients.
E ⊗ A1 ⊗ A2 ∼
= (⊕m ∼ m1 ∼ m1 m2 .
i=1 E) ⊗ A2 = ⊕i=1 (E ⊗ A2 ) = E
1
K K K K
m m 
Ainsi, E ⊗ (A1 · A2 ) ∼
= E 1 2 Q . Or, puisque E est un corps, les seuls idéaux de
K
E m1 m2 sont de la forme m
Q 1 m2
j=1 Ej avec Ej ∈ {0, E} . Par conséquent,

E ⊗ (A1 · A2 ) ∼
= E dimK (A1 ·A2 ) .
K

Les seuls E-homomorphismes de E k dans E sont les projections, ce qui implique que
  
Card (AlgK (A1 · A2 , E)) = Card AlgE E ⊗ A1 · A2 , E = dimK (A1 · A2 )
K

ce qu’il fallait démontrer.


(ii) ⇒ (i) Si l’algèbre A n’est pas algébrique sur K, alors elle est de dimension infinie sur
K, une contradiction. On peut donc supposer que A est algébrique sur K.
Soit a ∈ A et q son polynôme minimal de degré m. Alors, K[a] vérifie la condition
(iii) du théorème. En effet, la transformation de Gelfand pour E ⊗ A est injective et
K
donc pour tout x = ni=1 ki ei ⊗ ai 6= 0 ∈ E ⊗ K[a], Gel(x) 6= 0. Par conséquent, il
P
K
existe σ ∈ AlgK (A, E) tel que ni=1 ki ei · σ(ai ) 6= 0. Ceci implique, en restreignant
P
σ sur K[a] que la transformation de Gelfand pour K[a] est injective et donc bijective
puisque surjective. Par conséquent, K[a] vérifie la condition (ii) du théorème, c’est-
à-dire que Card (AlgK (K[a], E)) = m et ceci implique que les m racines de q sont
distinctes et dans E.
u
t
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs 81

4.1.4 Théorie de Galois de Grothendieck


Proposition 4.20
Une extension galoisienne de corps i : K −→ E est de descente galoisienne relativement à
l’adjonction Sp a Top (−, Z).

Démonstration.
Voir la proposition 4.5.4 (i) du livre [4][p.100].

Remarque 4.21
La preuve du théorème précédent n’est pas donnée, car en plus d’être technique, elle ne
construit pas explicitement l’équivalence inverse Π (voir le diagramme 22 page 67). Ce
foncteur est pourtant nécéssaire pour calculer explicitement la correspondance inverse.

Théorème 4.22
Le groupoïde de Galois d’une extension galoisienne de corps i : K −→ E est isomorphe au
groupe de Galois Gal(E, K) muni de la topologie de Krull.

Démonstration.
On remarque dans un premier temps que pour tout corps K les seuls idempotents sont 0
et 1, ce qui assure que Sp(K) = {?}. Ainsi, le groupoïde de Galois possède un seul objet
et donc c’est en fait un groupe profini, puisque la composition et la prise d’inverse sont des
morphismes de Prof .
Par le théorème 1.4.7 de [5][p.37], on sait que le groupe de Galois muni de la topologie
de Krull est un groupe profini. Plus précisément,

Gal(E, K) = lim Gal(M, K),


où l’ensemble filtrant, que l’on nomme F, est constitué des extensions galoisiennes finies
intermédiaires entre E et K.
On va montrer maintenant que dans Ring,

E ⊗ E = lim M ⊗ M.
K → K

En effet, on remarque que l’on peut munir le système inductif (dual de système projec-
tif) d’une famille de morphismes compatibles φM = (iM ⊗ iM ) : M ⊗ M −→ E ⊗ E. Soit
K K
maintenant ψM : M ⊗ M −→ S une autre famille de morphisme compatibles, et montrons
K
la propriété universelle de la limite inductive. La situation est la suivante :

? SO `

ψ̄
ψM ψM 0

E⊗E
K
; dHH
ww HH
www HH
H
ww φM 0 HH
ww φM
M ⊗M / M0 ⊗ M0
K φM 0 M K
82 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

Or, pour tout nombre fini d’éléments α1 , . . . , αn ∈ E, le corps de décomposition de


leur famille de polynômes minimaux sur K est une extension normale sur K. Elle est
finie car on n’adjoint S
qu’un nombre fini de racines et elle est séparable
S car E l’est. Par
conséquent, E ⊗ E = M ∈F M ⊗ M . Ainsi, le morphisme ψ̄ = M ∈F ψM est bien défini
K K
et fait commuter le diagramme, ce qui montre l’existence. L’unicité vient du fait que si
γ : E ⊗ E −→ S fait commuter le diagramme, alors pour tout e1 ⊗ e2 ∈ E ⊗ E il existe
K K
M ∈ F tel que e1 ⊗ e2 ∈ M ⊗ M , ce qui implique que γ(e1 ⊗ e2 ) = ψ̄(e1 ⊗ e2 ), ce qui assure
K
que γ = ψ̄.
Ainsi, dans Ring∗ ,
E ⊗ E = lim M ⊗ M.
K ← K
Or, par la proposition 4.3.7 du livre [4][p.90], Sp préserve les limites projectives, ce qui
assure que
Sp(E ⊗ E) = Sp(lim M ⊗ M ) = lim Sp(M ⊗ M ).
K → K ← K
Il suffit maintenant de voir que la proposition est vérifiée dans le cas fini, car alors le
théorème découle de l’unicité de la limite projective à isomorphisme près.
Par ailleurs, pour toute extension galoisienne finie M , Gal(M, K) et Sp(M ⊗ M ) sont
K
munis de la topologie discrète, car ce sont des groupes profinis finis. Il suffit donc de prouver
qu’ils sont isomorphes en temps que groupes. Or, par le lemme 4.19, M ⊗ M ∼ = M n où n
K
est la dimension de M comme K-espace vectoriel. De plus, on peut vérifier que

(M ⊗ M ) ⊗ (M ⊗ M ) ∼
=M ⊗M ⊗M ∼
= M ⊗ M n.
K M K K K K

Or, M n est scindée par M . En effet, le polynôme minimal de (e1 , . . . , en ) est le plus petit
commun multiple de ceux de e1 , . . . , en . Le lemme 4.19 implique que M ⊗ M n ∼
2
= Mn
K
et que Card (AlgK (M n , M )) = n2 . Or, si le groupe de Galois Gal(M, K) est numéroté
{σ1 , . . . σn }, et que πk : E n −→ E est la k-ème projection, alors σj ◦ πk ∈ AlgK (M n , M ),
ce qui implique que

AlgK (M n , M ) = {σi ◦ πj : i, j = 1, . . . n} .

Les homomorphismes de K-algèbres de M n dans M sont donc la composition d’une pro-


jection avec un membre du groupe de Galois.
2
Regardons quel est le morphisme c̃ : M n −→ M n induit par
c: M ⊗M −→ (M ⊗ M ) ⊗ (M ⊗ M ) ∼
= M ⊗ Mn
K K M K K
α ⊗ β 7−→ (α ⊗ 1) ⊗ (1 ⊗ β) 7→ α ⊗ (σi (β))ni=1 .

Pour tout (m1 , . . . , mn ) ∈ M n , on sait qu’il existe un tenseur rm=1 kn αm ⊗ βm qui est sa
P
pré-image par la transformation de Gelfand. Alors,
r
!
X
c̃(m1 , . . . , mn ) = Gel km αm ⊗ (σi (βm ))ni=1
m=1
r
!n
X
= km αm · σj ◦ πk (σi (βm ))ni=1
m=1 j,k=1
r
!n
X
= km αm · σj ◦ σk (βm ) .
m=1 j,k=1
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs 83

Puisque
n
( )
Y
n j
Sp(M ) = M = Mi : Mi = M si i 6= j et Mj = 0 , (4)
i=1

on peut établir une bijection φ entre Gal(M, K) et Sp(M n ) par φ(σj ) = M j . De plus,
 
 n 
n2
Y
Sp(M ) = M j,k = Mr,s : Mr,s = M si r 6= j, ou s 6= k et Mj,k = 0 ,
 
r,s=1

2
ce qui donne une bijection ψ : Sp(M n ) × Sp(M n ) −→ Sp(M n ) définie par

ψ(M j , M k ) = M j,k .

On obtient enfin la structure de groupe sur Sp(M n ), donnée de la façon suivante :

M j · M k = Sp(c̃)(ψ(M j , M k ))
D E
= (m1 , . . . , mn ) : mi ∈ {0, 1} et c̃(m1 , . . . , mn ) ∈ M j,k

On pose li = (m P1 , . . . mn ) avec mj = 1 si j 6= i et mi = 0. On veut connaître quand


c̃(li ) ∈ M j,k . Si rm=1 kn αm ⊗βm Pest une pré-image de li par la transformation de Gelfand,
j,k r
c̃(li ) ∈ M si et seulement si m=1 km αm σj ◦ σk (βm ) = 0, c’est-à-dire si σi = σj ◦ σk .
Par conséquent, M j · M k = φ(σj ◦ σk ). u
t

Observons maintenant à quoi correspond Prof Gal(p) .


Proposition 4.23
La catégorie Prof Gal(p) correspond à la catégorie des Gal(p)-espaces profinis, c’est-à-dire
à la classe des espaces profinis munis d’une action continue de Gal(p), avec comme mor-
phismes les fonctions continues préservant l’action.

Démonstration.
La donnée d’un préfaisceau interne sur Gal(p) est la donné d’un espace profini P ainsi que
de deux fonctions continues P −→ Sp(L) et ∗ : Gal(p) × P −→ P . On remarque déjà
Sp(L)
que puisque Sp(L) = {?}, le choix de la première fonction continue ne va jouer aucun rôle,
puisqu’il est unique. De plus, le pullback Gal(p) × P est en fait le produit Gal(p) × P .
Sp(L)
Voyons ce que les axiomes requièrent : le premier axiome est vérifié trivialement, le
deuxième demande que pour tout p ∈ P , id ∗ p = p, tandis que le dernier donne que pour
tout g, h ∈ Gal(p), (g ◦ f ) ∗ p = ◦(f, g) ∗ p = f ∗ (g ∗ p). Ainsi, un préfaisceau interne sur
Gal(p) est un espace profini muni d’une action continue de Gal(p).
Il reste à voir qu’une transformation naturelle interne correspond à une application
continue préservant l’action. Ceci vient du fait que c’est la donnée d’une application conti-
nue α entre les Gal(p)-espaces profinis, avec le premier axiome trivialement vérifié et le
second assurant que
α(f ∗ p) = f ∗ α(p).
u
t

On doit maintenant voir à quoi correspond Split(p).


84 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

Proposition 4.24
Soit i : K −→ M une extension de corps galoisienne finie. Si une K-algèbre A de dimension
n est scindée par M (au sens de la définition 4.16) alors elle est scindée (au sens de la
définition 3.7) par i.

Démonstration.
On doit voir que l’unité de l’adjonction SpM a Top (−, Z)M est un isomorphisme en la
M -algèbre i∗ (A) = M ⊗ A.
K
L’unité de cette adjonction est donnée par
   
M
ηM ⊗A : M ⊗ Top Sp M ⊗ A , Z −→ M ⊗ A
K Top(Sp(M ),Z) K K

Le diagramme est le suivant :

ηM ⊗ A
A
iA
/M ⊗Aq K
J K
T h

     
M ⊗ Top Sp M ⊗ A , Z o Top Sp(M ⊗ A), Z
K K
O O
Z
a
iM

ηM
K
i /M o Top (Sp(M ), Z) ∼
=Z

Par le lemme 4.19, il suffit de prouver que le morphisme de M -algèbres


M : M ⊗ Top (Sp(M n ), Z) −→ M n
ηM n
Z

est un isomorphisme. Or, si on définit fi ∈ Top (Sp(M n ), Z) par fi (M j ) = δij , avec M j


définit comme précédemment (voir l’équation (4) page 83), la liste (1 ⊗ fi )ni=1 forme une
base de M ⊗ Top (Sp(M n ), Z) comme M -espace vectoriel. Par le théorème du rang, il suffit
Z
donc de voir que ηMM est surjective. Par ailleurs, si (ej )n n
n j=1 est la base canonique de M ,
alors Σfi = ei (voir l’équation (3) page 75 qui donne la définition de Σ). Par conséquent,
puisque ηMM (1 ⊗ f ) = Σ , le morphisme est bien surjectif.
n i fi u
t

Théorème 4.25
Soit p : K −→ E une extension de corps galoisienne. Si une K-algèbre A est scindée par
E (au sens de la définition 4.16) alors elle est scindée (au sens de la définition 3.7) par p.

Démonstration.
On peut facilement vérifier qu’une K-algèbre A qui est algébrique sur K est la limite
inductive de ses sous-algèbres de dimension finie. En effet, la limite inductive est alors
l’union, et tout élément a ∈ A est dans K[a] qui est de dimension finie. Par conséquent,
dans Ring, lorsque B parcours l’ensemble filtrant des sous-algèbres de dimension finie,

A∼
= lim B.

4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs 85

De plus, le corps E est la limite inductive des extensions galoisiennes finies intermé-
diaires K ⊆ M ⊆ E, ce qui donne :

E⊗A∼
= (lim M ) ⊗ (lim B).
K → K →

Le produit tensoriel possède un adjoint à droite et préserve donc les colimites, ce qui assure
que
E⊗A∼ = lim lim M ⊗ B.
K → → K
Le dernier terme correspond à la limite inductive

lim M ⊗ B
→ K

sur l’ensemble filtrant F = {(M, B) : K ⊆ M ⊆ E galoisienne finie, B ⊆ A} muni de l’ordre


produit. Par la proposition 3.1.5 du livre [4][p.38], pour toute sous-algèbre B, qui est
scindée puisque incluse dans une algèbre scindée, il existe une extension galoisienne fi-
nie intermédiaire K ⊆ MB ⊆ E telle que B est scindée dans MB . Alors, l’ensemble
M = {(B, MB ) : B ⊆ A} est cofinal (voir la définition 1.3.32 de [5]) dans F, et donc

E⊗A∼
= lim MB ⊗ B.
K → K

Par conséquent, puisque Sp : Ring∗ −→ Prof et Top (−, Z) : Prof −→ Ring∗ préservent
les limites projectives (Sp par la proposition 4.3.7 du livre [4][p.90] et Top (−, Z) en tant
qu’adjoint à droite),
   
E ⊗ Top Sp(E ⊗ A), Z ∼
= E ⊗ Top Sp(lim MB ⊗ B), Z
Z K K → K
 

= E ⊗ Top lim Sp(MB ⊗ B), Z
K ← K
 

= E ⊗ lim Top Sp(MB ⊗ B), Z
K → K
 

= lim E ⊗ Top Sp(M B ⊗ B), Z
→ K K
 

= lim(lim MB ) ⊗ Top Sp(MB ⊗ B), Z
→ → K K
 

= lim M B ⊗ Top Sp(M B ⊗ B), Z .
→ K K

E
Le morphisme ηE⊗ A , puisque naturel, commute avec les injections. Il est donc exactement
K
MB
lim→ ηM B ⊗B
. Par la proposition précédente, c’est un isomorphisme composante par com-
K
posante, et par fonctorialité de la limite inductive, c’est un isomorphisme. Pour les lecteurs
qui ne connaissent pas bien les limites projectives et inductives, la lecture de la partie 1.3.5
de [5][p.31] présente la fonctorialité de la limite projective. La fonctorialité de la limite
inductive est similaire. u
t
Remarque 4.26
On admet la réciproque de ce théorème dans ce travail. Une preuve peut-être trouvée
dans le corollaire 4.7.16 du livre [4][p.114], mais elle n’est pas satisfaisante pour ce projet
dans le sens où elle demande d’avoir prouvé indépendamment le théorème de Galois de
Grothendieck, ce qui est fait dans le livre, mais pas dans ce document.
86 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

Pour résumer, une fois que les objets catégoriques sont identifiés avec des objets algé-
briques, le théorème 4.11 donne comme cas particulier le théorème suivant :
Théorème 4.27 (Théorème de Galois de Grothendieck)
Si p : K −→ E est une extension galoisienne de corps, alors il existe une équivalence de
catégories contravariante entre la catégorie des algèbres scindées par E et la catégorie des
espaces topologiques profinis munis d’une action continue de Gal(E, K). Elle est donnée
par :
A 7→ AlgK (A, E),
avec le groupe de Galois agissant par composition.
Démonstration (Ébauche).
D’après l’équation (2) page 67, l’équivalence de catégories est donnée par A 7→ Sp(E ⊗ A),
K
avec une action ?A du groupe de Galois Sp(E ⊗ E) = ∼ Gal(E, K). On a de plus que
K

Sp(E ⊗ A) ∼
= AlgK (A, E)
K

(se référer à la proposition 4.5.5 du livre [4][p.101]). On peut prouver, de façon similaire à
la preuve du théorème 4.22, que l’action de Gal(E, K) sur AlgK (A, E) induite par ?A est
bien la composition. u
t

Pour conclure cette section, on montre comment obtenir la théorie de Galois classique
à partir de ce théorème.
Proposition 4.28
Soient K, E deux corps et A une K-algèbre algébrique sur K telle que K ⊆ A ⊆ E. Alors
A est un corps.
Démonstration.
Découle du corollaire 2.1.11 de [4][p.19]. u
t
Proposition 4.29
Soit G un groupe profini. Il y a une correspondance bijective entre les quotients du G-
espace profini G et les sous-groupes de G fermés. A un sous-groupe fermé H est associé le
G-ensemble G /H .
Démonstration.
Soit H un sous groupe fermé. On doit voir que G /H muni de la topologie quotient est
profini et que l’action naturelle de G est continue. Pour cela, on commence par remarquer
que l’application naturelle de passage au quotient est continue. Ainsi, l’action est continue
comme composition d’application continues.
Maintenant, puisque G est profini, il est la limite projective d’un système projectif
(Gi , φij ) sur un ensemble filtrant I. Les Gi sont de plus finis et munis de la topologie
discrète. On peut construire un second système projectif de la façon suivante. On pose
Hi = φi (H) et si j ≥ i, alors on construit, par la propriété universelle de l’ensemble
quotient :
.
Gj / Gj Hj
φij φ̄ij
 
Gi / Gi H
i
4.1 Théorie de Galois pour les anneaux commutatifs 87

On obtient de plus un morphisme de système projectifs surjectif entre (Gi , φij ) et
Gi Hi , φ̄ij ). Par le lemme 1.1.5 de [6][p.6], ce morphisme induit une application continue
surjective c entre G et lim Gi Hi . La commutativité du diagramme


/ lim Gi H

G1
11 c >> i
11 >>
11 >>
>>
11 >>
φj 11 >>
11 φ̄j >>
11 >>
φi
 φ̄i  .
Gj / Gj H
j

φij  ss
sss
φ̄ij
 s
 sy ss
s
  
Gi / Gi H
i

assure que φ̄i c(g) = [φi (g)]Hi pour tout g ∈ G. Il reste à voir que c(g) = c(g 0 ) si et
seulement si g ∼ g 0 ou ∼ est la relation d’équivalence de passage au quotient par H. Or,
c(g) = c(g 0 ) si et seulement si [φi (g)]Hi = φ̄i c(g) = φ̄i c(g 0 ) = [φi (g 0 )]Hi pour tout i ∈ I.
Ceci est vrai si et seulement si l’on a l’existence de hi ∈ Hi tel que (φi c(g))−1 · φi c(g 0 ) = hi .
Or, dans ce cas,
φij (φj c(g))−1 · φj c(g 0 ) = φij (hj ),


ce qui implique que hi = φij (hj ). Ainsi, le point h défini par φi (h) = hi est dans lim Hi .
Or, par le corollaire 1.1.8 (b) de [6][p.7], H = lim Hi . .
On obtient donc une application continue bijective c̄ : G /H −→ lim Gi Hi ) . Puisque
.
de plus, G /H est compact et lim Gi Hi ) est Hausdorff, alors c’est un homéomorphisme.
Ainsi, G /H est profini.
Soit ∼ une relation d’équivalence sur G telle que G /∼ muni de la topologie quotient
soit un G-espace profini. Alors, puisque G /∼ est de Hausdorff, {[1]} est fermé, ce qui
assure que [1] est fermé dans G. C’est de plus un sous-groupe, puisque pour tout x, y ∈ [1],
= (xy −1 ) · [1] = (xy −1 ) · [y] = [x] = [1].
Par ailleurs, on remarque que si g, g 0 ∈ G et g1 ∼ g2 , alors 1 ∼ g1−1 g2 , ce qui veut dire
que G /∼ = G [1] . u
t

La proposition 3.4.3 du livre [2][p.115] assure qu’une équivalence de catégories est bi-
jective sur les ensembles de morphismes. Par conséquent, l’image via une équivalence de
catégories d’un épimorphisme est un épimorphisme. Ainsi, par la proposition 4.28, l’équi-
valence du théorème 4.27 met en relation les extensions intermédiaires
 / M
 /E
K
avec les quotients du groupe de Galois en tant que espace profini muni d’une action sur lui
même :
Gal(E, K) / / Alg (M, E) //1.
K

La proposition 4.29 met alors en relation ce quotient avec le sous-groupe fermé Gal(E, M )
de Gal(E, K).
Ainsi, la théorie de Galois de Grothendieck est bien une généralisation de la théorie de
Galois classique.
88 4 APPLICATIONS DU THÉORÈME

4.2 Théorie de Galois pour les revêtements


Dans cette partie, nous allons seulement donner la philosophie de l’application du
théorème de Galois catégorique pour donner une correspondance pour les revêtements.
C’est une application d’une théorie catégorique des revêtements que nous ne détaillerons
pas ici. Elle constitue le chapitre 6 du livre [4]. Le lecteur peut aussi consulter le chapitre
13 du livre [7] pour une approche classique.
Dans cette section, nous noterons Loco pour la catégorie des espaces topologiques
localement connexes avec pour morphismes les applications continues. (voir la définition
4.30). Par rapport à la correspondance de Galois, Loco joue le rôle de la catégorie B du
chapitre 3 et la catégorie des ensembles Set joue celui de A .

4.2.1 Adjonction relativement admissible


Définition 4.30 (Espace localement connexe)
Un espace topologique est dit localement connexe si pour tout ouvert U les composantes
connexes de U sont ouvertes.
Proposition 4.31 (Adjonction)
On définit le foncteur I : Loco −→ Set. On pose, pour tout T ∈ |Loco|,

I(T ) = {CT ⊆ T : CT est une composante connexe} .

Soit c : T −→ T 0 un morphisme de Loco. Puisque l’image d’un connexe par une fonction
continue est connexe, pour tout CT ∈ I(T ) il existe un unique CT 0 tel que c(CT ) ⊆ cT 0 . On
définit donc I(c)(CT ) = CT 0 .
Ce foncteur possède un adjoint à droite H : Set −→ Loco. Il est donné, pour tout
E ∈ |Set| et toute application f : E −→ E 0 par :

H(E) = (E, P (E))


H(f ) = f.

L’unité ηT : T −→ HI(T ) est donnée par ηT (t) = Ct où Ct est la composante connexe de


t.
La co-unité E est l’identité sur E.

On choisit comme classes de morphismes dans chaque catégorie la classe de tous les
morphismes, ce qui assure le fait que l’adjonction est relativement admissible.

4.2.2 Pullbacks dans la catégorie Loco


Définition 4.32 (Application étale)
Une application continue α : A −→ B est dite étale si elle est localement un homéo-
morphisme, c’est-à-dire si, pour tout a ∈ A, il existe un voisinage ouvert U de a tel que
α|U : U −→ α(U ) est un homéomorphisme.

Tous les pullbacks n’existent pas dans Loco, mais la proposition suivante nous donne
l’existence de certains pullbacks, qui seront suffisants pour développer la théorie.
Proposition 4.33
Tous les pullbacks impliquant une application étale existent dans Loco.

Démonstration.
Il suffit de combiner le lemme 6.4.6 et la proposition 6.4.3 du livre [4][p.198-200]. u
t
4.2 Théorie de Galois pour les revêtements 89

Ainsi, si on choisit p : E −→ B une application étale, alors p∗ est bien définie. On a


encore besoin que le pullback des morphismes (ηE , H(f )) existe pour tout f , pour pouvoir
définir HE . Or H(f ) est une application entre deux espaces topologiques munis de la
topologie discrète, elle est par conséquent toujours étale. Ainsi, le pullback en question
existe toujours et HE est bien défini.
Remarque 4.34
Tout revêtement est étale.

4.2.3 Classification des revêtements


Dans la suite de cette partie, B est un espace topologique connexe par arc et localement
connexe qui possède un revêtement p : E −→ B tel que E est simplement connexe et
localement connexe par arc. (voir la définition 6.8.1 p.217)
Proposition 4.35
(i) Le revêtement p : E −→ B est de descente galoisienne par rapport à l’adjonction.
(ii) La sous-catégorie SplitB (p) est exactement la catégorie des revêtements de B locale-
ment connexes.
Démonstration.
Voir le théorème 6.8.12 p.224 et la proposition 6.5.3 p.204 de [4]) pour obtenir que p est
universel au sens de la définition 6.6.5 (ii) du même livre et la proposition 6.6.6 de [4][p.211]
et le théorème 6.5.10 de [4][p.207] pour conclure. u
t

Définition 4.36 (Groupe fondamental de Chevalley)


Le groupe fondamental de Chevalley d’un revêtement p : E −→ B est

Aut(p) = f ∈ Top /B ((E, p), (E, p)) : f est un isomorphisme .




Proposition 4.37
Le groupoïde de Galois Gal(p) coïncide avec le groupe fondamental de Chevalley du revê-
tement p : E −→ B.

Démonstration.
Voir la proposition 6.7.4 de [4][p.216]. u
t

Proposition 4.38
Lorsque E est simplement connexe, le groupe fondamental de Chevalley de p : E −→ B
coïncide avec le groupe fondamental usuel Π1 (B).

Démonstration.
Voir le corollaire 81.4 du livre [7][p.489]. u
t

Théorème 4.39 (Classification des revêtements)


Soit B un espace topologique connexe par arc et localement connexe qui possède un revête-
ment p : E −→ B tel que E est simplement connexe et localement connexe par arc. Alors
il existe une équivalence de catégories entre les revêtements localement connexes de B et
les G-ensembles, où G est le groupe fondamental de B.
90 5 CONCLUSION

5 Conclusion
Le théorème de Galois catégorique de Janelidze permet donc de prouver la théorie de
Galois de Grothendieck infinie pour les corps et la théorie de Galois classique pour les
revêtements.
Ce théorème est puissant, mais il n’est pas facile à appliquer car il faut, à partir d’une
adjonction relativement admissible, identifier ce que sont les morphismes de descente ga-
loisienne, les objets scindés et les préfaisceaux sur le groupoïde de Galois. Les préfaisceaux
sont relativement faciles à identifier, car dans le cadre des catégories concrètes, ce sont
des objets (I, FObj ) munis d’une sorte d’action du groupoïde de Galois. La difficulté réside
surtout dans l’identification des deux premiers, car les hypothèses sont plus difficiles à
vérifier. Par exemple, comme on l’a vu dans le cadre de l’application à la théorie de Galois
de Grothendieck, il peut-être difficile de trouver des conditions non catégoriques qui sont
nécéssaires et suffisantes pour que l’unité de l’adjonction ηpE∗ (X,φ) soit un isomorphisme.
Par ailleurs, on pourrait s’interroger sur les relations entre la théorie de Galois de
Grothendieck dans le contexte général des schémas avec ce théorème. La lecture de la
section 5.2 du livre [4] sur les extensions centrales de groupes suggère que le théorème de
Galois catégorique s’applique à des contextes qui ne sont pas du ressort de la théorie de
Grothendieck. La théorie de Galois des extensions centrales de groupes illustre bien l’utilité
des classes de morphismes, contrairement aux exemples qui ont pu être données dans ce
travail.
Pour finir, mentionnons quelques applications du théorème de Galois catégorique qui
n’ont pas pu être traitées ici :
(i) extensions centrales de groupes (voir [4] section 5.2) ;
(ii) factorisation monotone-light (voir [4] section 5.8) ;
(iii) revêtements de complexes simpliciaux (voir [8]) ;
(iv) théorie de Galois différentielle (voir [9]).
Toutes ces applications ont lieu dans des catégories concrètes. On peut donc se deman-
der ce que donnerait l’application du théorème de Galois catégorique dans des catégories
non concrètes, comme la catégorie des automates ?
RÉFÉRENCES 91

Références
[1] Rafael Guglielmetti et Dimitri Zaganidis. Introduction à la théorie des catégories et
aux lemmes de diagramme. Disponible à l’adresse http://www.allpotes.ch/raf/
epfl/tp_categories.pdf.
[2] Francis Borceux. Handbook of categorical algebra. 1, volume 50 of Encyclopedia of
Mathematics and its Applications. Cambridge University Press, Cambridge, 1994. Basic
category theory.
[3] Francis Borceux. Handbook of categorical algebra. 2, volume 51 of Encyclopedia of
Mathematics and its Applications. Cambridge University Press, Cambridge, 1994. Ca-
tegories and structures.
[4] Francis Borceux and George Janelidze. Galois theories, volume 72 of Cambridge Studies
in Advanced Mathematics. Cambridge University Press, Cambridge, 2001.
[5] Rafael Guglielmetti. Groupes profinis et cohomologie galoisienne. Disponible à l’adresse
http://raf.allpotes.ch/epfl/groupes_profinis.pdf.
[6] Luis Ribes and Pavel Zalesskii. Profinite groups, volume 40 of Ergebnisse der Mathe-
matik und ihrer Grenzgebiete. 3. Folge. A Series of Modern Surveys in Mathematics
[Results in Mathematics and Related Areas. 3rd Series. A Series of Modern Surveys in
Mathematics]. Springer-Verlag, Berlin, second edition, 2010.
[7] James R. Munkres. Topology (second edition). Prentice-Hall Inc., 1999.
[8] Marco Grandis and George Janelidze. Galois theory of simplicial complexes. Topology
Appl., 132(3) :281–289, 2003.
[9] G. Janelidze. Galois theory in categories : the new example of differential fields. In
Categorical topology and its relation to analysis, algebra and combinatorics (Prague,
1988), pages 369–380. World Sci. Publ., Teaneck, NJ, 1989.

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