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L'entreprise algérienne face à quel genre d'environnement ?

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L’entreprise algérienne face à quel genre


d’environnement ?

Leila Melbouci
Enseignante Université Mouloud Mammeri Tizi-ouzou, Faculté des Sciences Économiques et des Sciences
de Gestion, (Algérie)

L’entreprise existe dans un environnement dont elle fait partie intégrante. Elle n’est 1

donc pas indépendante et ne suffit pas à elle-même. Par ailleurs, les activités de
l’entreprise se développent en interdépendance étroite avec l’environnement qui lui
impose des contraintes. Les structures internes de l’entreprise, en vue de faire face
aux incertitudes, s’adaptent aux types et aux conditions de l’environnement, qui
n’est ni statique, ni homogène. En Algérie, plusieurs tentatives d’adaptation
élaborées et mises en œuvre par le propriétaire de l’entreprise publique de
production ont été un échec. Ce constat nous a motivée pour essayer de déterminer
le niveau pertinent de l’environnement de cette entreprise et d’étudier sa nature.
Nous pensons que la principale raison de l’échec des stratégies d’adaptation est la
non prise en compte d’une variable primordiale, à savoir l’environnement.

Pour ce faire, il est essentiel d’évoquer l’approche économique de l’environnement à 2

trois niveaux. Elle met en évidence les implications de la prise en compte


environnementale sur la gestion de l’entreprise et plus particulièrement son impact
sur les méthodes et procédures managériales. L’analyse de l’environnement est un
passage obligé pour les responsables d’entreprise dans la mesure où les macro-
tendances ont une influence profonde sur le méso-environnement et, de ce fait, sur
le micro - environnement. Changer de stratégie, adapter le produit, modifier les
procédés de production, flexibiliser l’organisation… sont autant d’actes imposés à
l’entreprise par son environnement. Il est à préciser que si les débats sur la relation
des entreprises des pays industrialisés avec leur environnement sont déjà

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consommés, ils restent d’actualité en Algérie qui n’a entamé sa transition vers
l’économie de marché qu’en 1990. Les entreprises algériennes ont augmenté leur
taille, diversifié leurs produits puis, elles se sont restructurées organiquement et à
partir de 1997, elles se sont recentrées sur leur métier de base. Ces actions étaient-
elles une réponse environnementale ? Quel est l’environnement pertinent de
l’entreprise algérienne ? Et quelle est sa nature ? La recherche des réponses à ces
questions doit se faire en passant par la définition de l’environnement et de ses
variantes. Ce point nous aidera à discuter le cas de l’entreprise algérienne.

1. L’analyse de l’environnement dans l’étude des


entreprises

L’entreprise est soumise à de nombreuses contraintes provenant de son milieu 3

qu’elle ne maîtrise pas. « Son objectif est de réduire cette incertitude ; par
conséquent, elle se doit d’analyser et de comprendre son environnement » (J.R.
Edighoffer 1996, p. 22). Pour analyser et comprendre celui de l’entreprise
algérienne, nous jugeons essentiel de passer par les définitions de l’environnement.

1.1. Notion de l’environnement et ses variantes

« L’environnement de l’entreprise est défini par rapport à tout ce qui est situé en 4

dehors : la technologie, la nature des produits, les clients et les concurrents, les
autres organisations, le climat politique et économique, etc. » R. De Bruecker
(1995, p. 26).

Certains auteurs ont défini l’environnement comme l’ensemble de facteurs 5

physiques et sociaux potentiellement pertinents pour l’établissement de la


réalisation des objectifs de l’entreprise. Les chercheurs ont mis en évidence l’impact
de l’environnement sur les organisations et l’ont défini en termes de texture
causale. Ils distinguent quatre types d’environnement :

environnement placide aléatoire : les éléments de cet environnement, qui 6

peuvent avoir un impact négatif ou positif sur l’organisation, sont stables et


organisés de façon aléatoire. Dans cet environnement, l’incertitude est très
faible ;
environnement placide regroupé : cet environnement est toujours assez stable. Il
ne change que lentement, mais ses éléments positifs ou négatifs sont distribués

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selon certaines formes précises assez stables et non plus au hasard et, sa
croissance est indispensable.
environnement turbulent : il est plus complexe, plus dynamique et plus incertain.
Dans cet environnement, les éléments interagissent de façon multiple. L’origine
de turbulence provient des organisations qui sont fortes et s’imposent par leur
comportement stratégique.

A. Desreumeaux (1992, p. 115-116) a procédé à une typologie de l’environnement de 7

l’entreprise en citant quatre variantes :

environnement stable et aléatoire qui fait appel aux petites entreprises ; 8

environnement stable et structuré qui fait appel aux grandes entreprises ;


environnement instable qui fait appel à des entreprises flexibles et
décentralisées ;
environnement turbulent, hautement complexe qui fait appel à des entreprises
de niveau de complexité analogue.

Bien avant, A.E. Emery et E.L. Trist (1965) ont distingué des types 9

d’environnement allant de très calmes à très perturbés. Pour eux, le plus complexe
est l’environnement turbulent où seule une politique d’institutionnalisation peut
permettre l’émergence d’une solution.

Jusqu’aux années soixante, les organisations étaient considérées comme des 10

systèmes fermés. L’intensification des relations entre les entreprises a changé la


donne. Ainsi l’évolution de l’environnement des entreprises est inéluctable. S.
Terreberry (1968) pense que l’environnement organisationnel devient de plus en
plus turbulent. K.S. Cameron, M.U. Kim et D.A. Wheffer  [1] (1987) définissent la
turbulence par les changements auxquels est confrontée l’organisation. Ces
changements sont significatifs, rapides et discontinus. I. Ansoff (1979) a estimé que
les turbulences stratégiques font arriver des événements singuliers et inattendus
qui résistent aux réponses de succès traditionnelles et qui, au résultat final, ont un
impact majeur sur les profits de l’entreprise. La turbulence dans l’environnement
développe l’incertitude et rend difficile une démarche de type prévisionnel. Une
planification stratégique particulièrement adaptée à l’environnement de type réactif
et adaptatif devient difficile. Ainsi, l’objectif de flexibilité que définit I. Ansoff
(1979) est ressenti comme une nécessité. En plus, l’accroissement de l’incertitude
exige naturellement une démarche d’information en qualité et en quantité
suffisante pour la prise de décision. Enfin, cet environnement se généralise, d’après
les chercheurs, pour les trois raisons suivantes :

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les conséquences des efforts des entreprises pour faire face aux conditions de 11

l’environnement mouvant réactif compliquent elles-mêmes ce dernier ;


l’interdépendance accrue entre les aspects économiques et les autres aspects de
la société ;
le rôle accru de la recherche et du développement pour faire face à la
concurrence.

La conceptualisation avancée de l’environnement de l’entreprise permet de faire 12

une double classification des facteurs physiques et sociaux pouvant influer sur le
fonctionnement de l’entreprise. Ils peuvent être classés selon leur origine, interne
ou externe. La taille et la technologie de l’entreprise sont des exemples de
l’environnement interne ; les caractéristiques socio-culturelles de l’environnement
de l’entreprise et les caractéristiques de la branche industrielle sont des exemples
de l’environnement externe. La turbulence entraînera des modifications dans
l’environnement qui auront un impact important sur l’entreprise. Elle modifie son
but, ses ressources et remet en cause ses capacités. Les transformations internes
ont engendré, à leur tour, une augmentation des turbulences.

Finalement, l’environnement est un ensemble des actions que les entreprises 13

doivent mettre en œuvre afin de réduire les menaces. Ceci ne peut se faire sans la
connaissance de l’environnement « spécifique » de l’entreprise. L’environnement
« spécifique » diffère de l’environnement général. Il est constitué des éléments en
réelle interaction avec l’entreprise. Selon M.E. Porter (1985), « l’entreprise est au
centre des forces concurrentielles (clients, fournisseurs, entrants potentiels et les
substituts possibles pour l’activité de l’entreprise) ». Dans ce cas, l’environnement
« spécifique » représente l’environnement pertinent. Ainsi, l’étude de la relation
entre l’entreprise algérienne et son environnement ne peut être appréciée sans la
détermination de son contexte pertinent. C’est ce que nous allons développer dans
le point suivant. C’est-à-dire que, nous allons tenter de définir l’environnement
pertinent.

1.2. Détermination de l’environnement pertinent

Les incertitudes proviennent de l’instabilité et de la perpétuelle évolution de 14

l’environnement. L’entreprise est obligée donc d’anticiper, de prévoir et de


s’adapter pour rester performante. Pour corroborer ce qui précède nous
rappellerons que l’environnement de l’entreprise est abordé à trois niveaux :

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Le macro-environnement représente le cadre juridique, la conjoncture 15

économique, le contexte sociologique, le cadre international et les évolutions


techniques. Le macro-environnement s’impose à l’entreprise et détermine le
cadre de son activité. Certains auteurs appellent ce niveau l’environnement
général et le définissent comme un ensemble de facteurs externes à la firme qui
ont une influence sur ses opérations mais sur lesquels la firme exerce un faible
contrôle (J.D. Thompson, 1967). Il concerne généralement les aspects suivants :
politique, juridique, économique et socio-culturelle. Ces facteurs
environnementaux conditionnent le niveau macro et le niveau méso-
environnement.
Le micro-environnement est constitué de catégories d’acheteurs avec lesquelles
l’entreprise entretient des relations directes. Il constitue un moyen d’action sur
lequel l’entreprise peut agir par sa stratégie. Il est composé des clients, des
réseaux de distribution, des concurrents, des fournisseurs et des partenaires.

En effet, depuis quelques décennies, nous assistons à des profondes mutations du 16

système industriel et de nouveaux paradigmes se révèlent : montée des services,


information en réseaux, mondialisation de l’industrie, complexification des
processus technologiques. Ces évolutions ont fait naître une nouvelle approche : le
méso-environnement.

Le méso-environnement représente les caractéristiques du jeu concurrentiel 17

dans le secteur. Un secteur d’activité ne se trouve pas dans le même état selon les
pays où l’on peut observer des différences au niveau de l’intensité de la
demande  [2] . De ce point de vue, dans une perspective d’internationalisation de
son activité, l’entreprise ne peut se soustraire à l’analyse du méso-environnement
caractéristique du pays dans lequel elle envisage d’étendre son activité.
Le méso-environnement met en exergue les interrelations entre les chaînes
transactionnelles : des modifications peuvent entraîner des transformations dans
d’autres secteurs tout en obligeant les entreprises qui y opèrent à adapter leur
comportement  [3] .

L’objectif de la méso-analyse est d’expliquer le fonctionnement du système 18

productif à partir d’une méthode propre à elle, différente de celle de la micro-


économie et de la macro-économie. Il s’agira d’expliquer le comportement des
agents du système productif et de comprendre la stratégie des pouvoirs publics. La
méso-analyse intègre mieux les « structures » et les « stratégies » puisqu’inspirée
par l’analyse de système, elle suppose des effets de « feect backs » continuels. Les

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structures ne sont pas de simples caractéristiques posées ex-ante, ce sont des sous-
ensembles d’un système regroupant plusieurs agents en fonction des relations
technologiques contraignantes ou de structures propres. Ces dernières conduisent
des stratégies qui deviennent cause et effet des stratégies, selon la séquence :
stratégie – structures – stratégies. Au début des années 1980, certains auteurs
(J.M. Chevalier) se proclament de la nouvelle « économie industrielle » et une
nouvelle méso-analyse se singularise par les nouvelles tendances :

l’hostilité à l’intervention des Pouvoirs Publics dans la vie économique ; 19

l’utilisation des nouveaux outils : déréglementation ;


les marchés contestables qui rendent mieux compte de la complexité des
structures industrielles.

Il faut retenir, à travers cette vision de l’environnement, que ce ne sont pas les effets 20

directs ou indirects qui importent. Après tout, une variable du macro-


environnement peut avoir un effet direct sur l’organisation. Il faudra considérer
l’importance de l’impact et la capacité de modification de l’organisation. En fait,
nous pouvons supposer que, plus l’environnement sera proche de l’organisation,
plus l’organisation aura du pourvoir sur les éléments de cet environnement (c’est la
notion de l’environnement pertinent). Le pouvoir étant la capacité à amener un
élément à adopter un comportement qu’il n’aurait pas choisi spontanément.

Sur cette optique, l’environnement de l’entreprise est donc l’ensemble des éléments 21

externes susceptibles d’influencer son activité et son équilibre. Le cadre


géographique qui comprend les infrastructures et la population ; la structure de
l’économie (économie de marché) et sa conjoncture, l’évolution de la technologie,
les attentes des salariés, les valeurs morales, les modes de vie ; les politiques
économiques et financières et les règles dictées par le droit pourraient menacer
l’existence de l’entreprise ou au contraire constituer des opportunités qu’elle se doit
de saisir pour agir.

En somme et en sciences de gestion, « l’environnement est l’ensemble de facteur 22

socio – économiques qui influent sur la vie de l’entreprise : la concurrence, l’État, la


législation sociale, financière et commerciale ; les groupes de pression : lobbies,
syndicats, associations de consommateurs, etc. (A. Silem, 1999, p. 265). En d’autres
termes, ces composantes ne sont pas isolées, elles s’imbriquent et forment un
environnement à trois variables : domaines, acteurs, forces comme l’indique le
schéma ci-après (figure n° 1).

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Figure n° 1 - Les trois composantes de l’environnement.

proposée et composée par l’auteur.

1.3. La nature de l’environnement de l’entreprise

L’environnement de l’entreprise que nous venons de définir change de nature : il 23

est turbulent. La turbulence entraînera des modifications dans l’environnement qui


auront un impact sur l’organisation de l’entreprise. Les causes des turbulences,
généralement relevées dans la littérature sont : la complexité, l’incertitude et le
dynamisme.

La complexité correspond à l’hétérogénéité et à l’étendue des activités d’une 24

organisation (G.G. Dess et D.W. Beart, 1984). L’incertitude est le manque


d’information sur des facteurs environnementaux rendant impossible la prévision
de l’impact d’une décision spécifique sur l’organisation.

Quant au dynamisme, il entraîne l’absence de modèles en renforçant le caractère 25

imprédictible de variations des facteurs constituant l’environnement (L.J.


Bourgeois 1985). Le dynamisme peut se trouver représenté par la croissance du
marché, la modification de la structure concurrentielle ou l’amélioration des
technologies.

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De nombreux auteurs vont estimer que : 26

1. la turbulence est fonction de la complexité et du dynamisme (S. Terreberry, 27

1968) ; R.L. Daft et Al (1988) et R.B. Duncan (1972) ;


2. l’association complexité et dynamisme va produire de l’incertitude, mais
pour R.B. Duncan, le dynamisme est un facteur explicatif de l’incertitude
perçue plus fort que la complexité ;
3. I. Ansoff et Al (1979) estiment que la turbulence est liée à l’incertitude et au
dynamisme ;
4. P.R. Lawrence et J.W. Lorsch (1967) ; leur incertitude, se caractérisant par
la complexité et le dynamisme, ressemble fort à la turbulence, crée de
l’incertitude.

De ces études de corrélation, il ressort que la turbulence (T) est fonction de la 28

complexité (C) et du dynamisme (D), ainsi que de l’incertitude (I) :

en fonction de (1) : T = f (C ; D) 29

en fonction de (2) : I = f (C ; D)
en fonction de (3) : T = f (I ; D)
en fonction de (4) : I = f (T) confirmé par (2) ??> T = I

À partir de ces relations trouvées, il ressort que T = f (C ; D ; I) en ayant I = f (C ; D ; 30

T) (5)

Les turbulences sont issues de l’association des caractéristiques de complexité, de 31

dynamisme et d’incertitude de l’environnement. Nous pouvons raisonnablement


imaginer qu’il existe différentes sortes de turbulences qui se distingueront par la
présence plus ou moins forte, de ces combinaisons.

Par rapport aux différents points cités plus haut sur l’environnement, la relation qui 32

lie l’entreprise algérienne à son environnement a connu une évolution différente de


celle vécue par les entreprises des pays industrialisés ; mais l’objet de cet article
n’est pas l’étude de cette relation car nous pensons judicieux de préciser, en
premier, le niveau pertinent de l’entreprise publique de production et, en second,
d’étudier sa nature.

2. L’étude de l’environnement de l’entreprise publique de


production en Algérie

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L’entreprise a vécu très largement dans une situation confortable de monopole et 33

ce, depuis sa création jusqu’à 1990. Elle choisissait ses clients et pratiquait souvent
la discrimination pour répondre à une demande de plus en plus forte puisqu’elle
jouissait d’un monopole quasi-absolu dans les domaines de la production, de
l’importation et de la distribution des biens et services relevant de sa nomenclature.

De ce point de vue, pouvons-nous dire qu’elle maîtrisait son environnement ? Ou 34

plutôt, quel est son environnement pertinent ? Parce que la maîtrise de celui-ci
passe par la proximité de l’environnement pertinent et par sa connaissance.

Donc, il faut tenter d’aller plus en détail pour répondre à ces interrogations, quitte à 35

reprendre çà et là quelques constatations déjà formulées dans les développements


précédents. Nous jugeons qu’il est temps de déterminer l’environnement pertinent
de l’entreprise algérienne et d’étudier sa nature.

2.1. Détermination de l’environnement pertinent de l’entreprise


publique de production

L’environnement de l’entreprise est approché à trois niveaux : le macro- 36

environnement, le méso-environnement et enfin le micro-environnement. Le plus


important dans cette distinction est de déterminer l’environnement pertinent.
Celui-ci est appelé aussi environnement des affaires. Pour le cas algérien, nous
commençons par vérifier l’existence de deux niveaux, à savoir le méso-
environnement, et le micro-environnement. Quand au macro-environnement, son
existence est évidente.

2.1.1. Le méso-environnement : de 1963 à 2007

L’étude de la création, de la croissance et du développement des entreprises 37

algériennes donne déjà une idée de l’environnement pertinent de l’entreprise.


De 1963 à 1990, toutes les décisions de création ou de croissance des entreprises
algériennes sont prises en dehors d’elles. Certaines décisions tactiques et
opérationnelles sont arrêtées par les différentes tutelles.

La relation de ces entreprises avec les autres agents économiques était déterminée 38

par l’État. Il est aussi le propriétaire des autres agents économiques (banques,
administration, marché). Dans cette vue des choses, l’analyse méso-
environnementale ne peut trouver sa place pour étudier les entreprises algériennes.
Cette analyse procède à une étude sectorielle de la concurrence afin de déterminer
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le comportement des entreprises qui pérennise leur performance. L’absence de la


concurrence durant la période dirigée fait que l’environnement pertinent de
l’entreprise algérienne est bien l’environnement général. Il est représenté par l’État
parti, l’État administration et l’État entrepreneur et investisseur. Celui-ci renforce,
en effet, sa position par la monopolisation progressive de toutes les activités
politiques, sociales, mais surtout économiques, en utilisant la nationalisation des
moyens de production des biens et services, la centralisation de la propriété et de la
décision économique et l’instauration du contrôle hiérarchique. L’État est
l’organisation économique et sociale presque exclusive de tout le pays. L’Algérie
organise une allocation centralisée des ressources. Contrairement au système
soviétique, les ministères fonctionnels (Plan, Finance, Commerce en particulier) ne
sont pas associés à la prise de décision. Ils n’interviennent qu’une fois la stratégie et
le plan arrêtés, au niveau du Conseil de la Révolution et des Ministres. Ils sont alors
chargés de faire exécuter ces décisions, ce qui n’exclut pas les divergences entre les
ministères fonctionnels et les ministères de tutelle au cours de la mise en œuvre par
les entreprises. Les objectifs et le fonctionnement de l’entreprise publique
algérienne obéissent, d’après S. Goumeziane (1994, p. 47), en premier lieu à des
considérations macro – économiques. L’État a tendance à privilégier le qualitatif
« publique » et à négliger la notion « d’entreprise ». L’entreprise algérienne fait
face à un environnement politique, juridique et économique large.

Un autre jugement qui montre l’absence, durant la période 1963-1990, d’un méso- 39

environnement de l’entreprise publique de production, réside dans le secteur privé.


En effet, le méso-environnement est l’étude de la concurrence sectorielle. Sans la
présence importante des entreprises privées, il est difficile de parler d’un marché
concurrentiel. Le privé algérien était encadré par le propriétaire des entreprises
publiques : la loi 63-277 du 27 juin 1963 portant code des investissements, était
limitée en capital étranger. Le capital privé national ne pouvait bénéficier de
certains avantages que dans le cadre de la société mixte. Par la suite,
l’ordonnance 66-284 du 15 septembre 1966 portant code des investissements a
défini une série de conditions économiques liée à l’initiative privée (avantages
fiscaux, subventions et indemnités…). Néanmoins, l’investissement de l’épargne
privée ne doit pas toucher les secteurs « vitaux » de l’économie nationale.

Ce code des investissements s’adresse aux détenteurs de capitaux nationaux et fixe 40

les principes régissant l’investissement du secteur, lorsque celui-ci demande


l’agrément de l’État. La promulgation de ce nouveau code des investissements
fixant un certain nombre de garanties à toute entreprise privée industrielle en

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Algérie, n’a d’autre but que d’encourager l’implantation de ce type d’entreprises


malgré les limites que ce même code impose aux investissements privés. Cet acquis,
quant au maintien du secteur privé en Algérie, semble trouver sa justification dans
l’effort de mobilisation de l’épargne disponible dans le pays, ce qui est une
participation à l’effort de construction de l’économie nationale en vue de
l’investissement et dans l’aide que pourraient apporter les investisseurs privés à la
solution des différents problèmes économiques et sociaux du pays, à condition de
les soumettre à un contrôle strict et effectif. Après l’encadrement du privé, vient le
renforcement de l’État par la nouvelle constitution (1976) ; il s’agit de donner une
légitimité nouvelle au régime établi depuis le 19 juin 1965. La nouvelle Constitution
cherche à « concilier démocratie et révolution ». En somme, la Constitution de 1976
rétablit des pratiques de « contrôle démocratique » dans un schéma institutionnel
qui change peu par rapport au régime instauré en 1965 : un parti unique, un régime
présidentiel, totalitaire, sans séparation des pouvoirs.

En 1976, les entreprises privées étaient limitées par leur environnement : « en 41

Algérie, la propriété privée ne doit pas constituer la base des rapports d’exploitation
entre le propriétaire privé et les travailleurs » proclament les rédacteurs de la lettre
dite Charte nationale. Dans le domaine industriel, le secteur privé national
n’intervient donc que dans la sphère des activités qui relève de la petite entreprise
et qui porte le dernier stade de la transformation industrielle.

La charte nationale de 1976 confirme cette tendance en condamnant « la propriété 42

exploiteuse », c’est-à-dire le secteur « privé capitaliste ». Alors que le secteur public


réalise près de 45 milliards de dinars d’investissements entre 1967 et 1973, le
secteur privé n’est autorisé à investir qu’à la hauteur de 650 millions de dinars, soit
moins de 2 % des investissements du pays. L’environnement juridique a encadré
l’activité du secteur privé afin qu’il ne concurrence pas le secteur public.

Les épargnants algériens sont obligés d’investir dans la transformation finale des 43

produits du secteur d’État, notamment dans la branche des industries légères


textiles, alimentaires, cuirs et peaux et d’autre part, dans les industries
métallurgiques, mécaniques et électriques, mécanique générale, articles en métal,
boulonnerie, visserie, quincaillerie, ainsi que vers la sous-traitance de pièces
détachées. Néanmoins le secteur privé s’adonne surtout aux activités les plus
rentables à court terme tels que les textiles, les confiseries et les chaussures, etc.

Les liens unissant le secteur d’État et le secteur privé sont les effets d’une 44

dépendance institutionnelle mise en place en même temps que se constituaient les

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unités de production du secteur d’État. En outre, celui-ci intervient de plus en plus


dans des objectifs économiques comme l’élévation de la productivité, la
rentabilisation du capital et d’autres objectifs sociaux ainsi les œuvres sociales, la
création d’emplois et la décentralisation. Après l’indépendance, progressivement, le
secteur public prenait de plus en plus d’importance dans un marché national neutre
ou sans concurrence (tableau n° 67). Toutefois la dynamique de l’environnement a
orienté la décision du propriétaire des entreprises publiques : la contraction des
ressources pétrolières entraînant une baisse relative des investissements à partir de
1980 et une évolution de détenteurs des capitaux privés. Cette situation a mené vers
la loi 82-11 relative à l’investissement économique privé national plus stimulante,
mais n’a pas permis la constitution d’un méso-environnement.

De 1990 à 2007, plusieurs changements imposés par la mouvance de 45

l’environnement ont été mis en place mais sans une réelle création d’un
environnement concurrentiel (L. Melbouci, 2007, a). Le code des investissements
de 1993 offre plusieurs avantages au secteur privé, le nombre des institutions d’aide
à la création et au développement des petites et moyennes entreprises privées se
multiplie sans pouvoir déclencher les forces concurrentielles.

2.1.2 Le micro-environnement : de 1963 à 2007

Durant la période de l’économie planifiée, l’État alloue aux entreprises créées les 46

ressources nécessaires, le capital, le travail, les matières premières… Et lui trace le


plan ainsi que les objectifs à atteindre.

Après la confirmation du choix socialiste pour le développement, la charte socialiste 47

a simplement remplacé la direction de ces entreprises. Si nous citons l’ordonnance


N° 71-74 du 16-11-1971 relative à la gestion socialiste des entreprises, nous pouvons
confondre gestion d’entreprise et son environnement juridique. En effet, à titre
d’exemple, ces différents articles montrent l’encadrement de l’activité de
l’entreprise par un aspect juridique.

article 5 : « l’entreprise socialiste est créée par décret à l’exception de celles 48

d’importance nationale, lesquelles doivent être créées par loi ».


article 6 : « la dénomination de l’entreprise, son siège, la nature et l’étendue de
ses activités ainsi que le patrimoine initial qui lui est affecté sont définis dans
l’acte constitutif qui doit en outre, déterminer la tutelle ».
article 61 : « le directeur général de l’entreprise agit sous l’autorité de la tutelle et

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est responsable du fonctionnement général de l’entreprise dans le cadre de ses


attributions fixées par les textes législatifs et réglementaires et dans le respect
des prérogatives confiées à l’ensemble des travailleurs ».
article 62 : « Le directeur général est nommé par décret sur proposition de
l’autorité de tutelle. Il est mis fin à ses fonctions dans les mêmes formes. Il est
assisté, dans l’entreprise d’importance nationale, du directeur adjoint et d’un ou
plusieurs directeurs ».
article 73 : « les programmes d’investissement de l’entreprise ou de l’unité sont
soumis par le conseil de direction à l’autorité de tutelle, après avis de l’assemblée
des travailleurs. Le programme d’investissement de l’entreprise est décidé par le
gouvernement ».
article 75 : « le fonds de roulement déterminé selon la nature de l’activité de
l’entreprise, doit être consacré exclusivement au financement des
approvisionnements et aux charges courantes d’exploitation, à l’exception des
dépenses d’immobilisation et des amortissements ».
article 78 : « la politique du crédit, notamment en matière d’approvisionnement
et dans le domaine de la commercialisation, fera l’objet de dispositions légales et
réglementaires, par branche d’activité ».

Les opérations commerciales des entreprises algériennes étaient aussi encadrées 49

par un système juridique. Ces opérations ne prennent pas compte des variables
plutôt universelles (coûts, temps, pouvoir de négociation…). Pour acquérir des
ressources, l’entreprise algérienne a vécu plusieurs étapes. Chaque étape était un
ensemble de décrets et de lois régissant les relations de l’entreprise avec l’extérieur.
Nous distinguons deux périodes :

La première période allant de 1963 à 1970, où l’État opère un contrôle limité sur 50

les relations commerciales de l’Algérie avec l’extérieur.


À partir de 1970, s’ouvre une deuxième période où la nationalisation du
commerce extérieur se substitue au simple contrôle exercé par l’État. Cette
nationalisation va prendre de plus en plus la forme d’un monopole de l’État sur
le commerce extérieur. L’AGI (Autorisation Globale d’Importation) est un titre
annuel d’importation délivré par l’État à l’entreprise couvrant la totalité des
importations à réaliser. Il existe trois types d’AGI dans l’organisation du
monopole de l’État sur les importations :
1. L’AGI monopole qui est un organe du secteur public, principalement des
entreprises publiques détentrices du monopole à l’importation.
2. L’AGI de fonctionnement qui est accordée aux entreprises de production

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et de services du secteur public pour la réalisation de leurs programmes


de production et de maintenance.
3. L’AGI des objectifs planifiés qui est accordée aux entreprises publiques de
production et de services dans le but de leur permettre de disposer
rapidement des biens dont elles ont besoin pour la réalisation des projets
planifiés qui leur sont confiés.

Ainsi l’entreprise bénéficiaire d’AGI doit être domiciliée auprès d’une banque 51

nationale et doit obtenir l’accord de celle-ci, avant toute exécution, pour les contrats
qu’elle aurait signés avec ses fournisseurs étrangers. Les délais moyens pour
obtenir l’exécution d’une opération d’importation sont de dix-huit à vingt-quatre
mois. Selon S. Goumeziane (1994, p. 56), « ce délai ne prend en compte que la
période finale depuis la formulation du besoin d’importation à la réception du bien
ou service ».

L’État propriétaire a mis en place trois institutions financières spécialisées : 52

la BNA (Banque Nationale d’Algérie) chargée notamment du financement du 53

secteur agricole des entreprises socialistes, des établissements publics et des


importations ;
le CPA qui accorde des prêts aux petites entreprises communales et de wilaya
ainsi qu’aux sociétés privées ;
la BEA qui a pour mission de développer les échanges économiques et
commerciaux de l’Algérie avec les autres pays.

En plus de la BCA qui fait aussi office d’institut d’émission, la loi de finances 54

de 1971 fait du trésor public, l’organisme centralisateur, transformateur et


répartiteur de l’épargne publique nationale. Une autre institution financière, la
BAD est chargée de financer les investissements productifs des secteurs industriel
et commercial de même que ceux de la CNEP qui a pour mission de collecter
l’épargne utilisée principalement pour le financement des projets.

À partir de 1988, le propriétaire de l’entreprise publique de production, voulant 55

rendre autonome cette entreprise en tant qu’agent microéconomique, a séparé la


propriété de la gestion en déléguant celle-ci d’abord à un agent fiduciaire appelé
Fonds de participation (1988-1994) ensuite aux Holdings publics (1995-2000) et
enfin aux Sociétés de Gestion des Participations (2001-2007). Tous ces
changements n’ont pu rendre autonome l’entreprise algérienne (L. Melbouci,
2007 b).

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2.2. Caractéristiques de l’environnement pertinent de l’entreprise


publique de production

L’étude faite jusqu’à présent donne déjà une idée de l’environnement pertinent de 56

l’entreprise publique de production. Mais pour argumenter nos résultats sur cette
détermination, nous reprenons les définitions citées plus haut en commentant
chaque définition pour l’entreprise publique algérienne.

L’environnement de l’entreprise est étudié à trois niveaux : Le macro- 57

environnement, le micro-environnement et le méso-environnement.

Le macro-environnement s’impose à l’entreprise et détermine le cadre de son 58

activité. Pour l’entreprise publique de production, cette définition est valable. Est-
ce le cas pour les autres niveaux ?

2.2.1. Caractéristiques du niveau micro-environnement

Le micro-environnement est composé de clients, des réseaux de distribution, des 59

concurrents, des fournisseurs, des banques… il constitue un moyen d’action sur


lequel l’entreprise peut agir.

Pour l’entreprise algérienne : 60

les clients sont des entreprises publiques, propriétés d’État ; 61

les réseaux de distribution sont des entreprises publiques, propriétés d’État ;


les fournisseurs sont des entreprises publiques, propriétés d’État ; (les
fournisseurs étrangers sont encadrés par l’État) ;
les banques sont des entreprises publiques, propriétés d’État ;
les concurrents sont absents comme nous l’avons expliqué plus haut ; leur
présence, avec l’ouverture économique décrétée à partir de 1990, n’a pas
encouragé la concurrence ou du moins une concurrence loyale.
ce niveau ne permet pas à l’entreprise publique de production d’agir.

Il y a, donc, absence de micro-environnement au sens propre. 62

2.2.2. Caractéristiques du niveau méso-environnement

Le méso-environnement est l’analyse de la concurrence sectorielle. 63

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Pour l’entreprise algérienne, elle ouvrait dans une structure monopolistique (non- 64

concurrence) et actuellement (2008) son environnement est loin d’être


concurrentiel.

D’après la figure N° 1, les trois composants de l’environnement de l’entreprise en 65

Algérie sont regroupés en une composante : l’État. Donc l’environnement pertinent


est représenté par l’État ; il est au niveau macro et il est général.

L’entreprise algérienne fonctionne dans une logique macro-économique qui, dès 66

l’origine, avait rompu avec le principe de valorisation du capital tant au niveau


global qu’au niveau de l’entreprise ; ceci a fait que la mobilisation des forces de
travail résultantes étaient, de ce point de vue, nettement supérieures à celles
qu’aurait exigé le fonctionnement des procédés de travail en tant que procédé
normé par le capital.

En réalité, cette logique a non seulement été intériorisée par les entreprises 67

publiques au cours de la période de 1967-1990, mais elle a également été prise en


charge par celles-ci de façon plus dynamique à la faveur du climat social général et
de celui régnant en leur sein.

De plus, l’entreprise est tenue d’adresser chaque année un rapport d’activité aussi 68

bien à la tutelle qu’au ministère des finances et au ministère de la planification.


Parallèlement, le ministère de tutelle reçoit chaque année un rapport de
l’Assemblée des Travailleurs de l’entreprise sur la gestion. Enfin, l’absence de
normes permettant de juger la situation réelle des entreprises fait que ce contrôle se
trouve « miné » dans son efficacité comme dans sa légitimité par l’organisation
bureaucratique de l’État. Cette asymétrie d’information a fait que les
bouleversements de l’environnement de l’entreprise n’ont pas été suivis d’une
réponse adéquate de la part de l’entreprise. En revanche, la nouveauté est dans
l’utilisation des nouveaux concepts et valeurs qui ont triomphé dans l’entreprise, à
savoir : faibles productions, minimum de travail, aucun respect des normes de
qualité, aucun respect du temps de fabrication, aucune qualité de travail ; alors
qu’avant le changement, ces valeurs n’étaient pas répertoriées dans le jargon de la
gestion des entreprises algériennes. La question que nous soulevons, dans ce sens,
est de savoir si la rigidité des entreprises algériennes face à ces bouleversements est
due à la turbulence de son environnement plutôt qu’à la nature des actes entrepris
pour le changement ?

Figure 2 - environnement de l’entreprise publique de production : de

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1963 à 1990.environnement de l’entreprise publique de production : de


1963 à 1990.

Pour répondre, il est essentiel de puiser dans la littérature (point I) les critères d’un 69

environnement turbulent pour en caractériser celui des entreprises algériennes.

Durant la période 1979-1990, une réalité s’impose : la faiblesse de la planification, 70

en tant que système soutenant la promotion de développement et la gestion macro-


économique, est due à la nature de l’économie algérienne largement extravertie.
Elle subit avec amplitude les fluctuations de l’économie mondiale. À cet effet,
l’environnement économique de l’entreprise a subi une modification structurelle.
Elle s’est caractérisée par une désindustrialisation. L’industrie n’est plus
encouragée, mais freinée et ce à partir de 1996. Le changement structurel
correspond à un affaiblissement de capacité d’accumulation de l’Algérie. Pour les
entreprises, ce changement est très significatif, rapide et imprévisible et c’est ce qui
caractérise la turbulence d’un environnement. L’entreprise algérienne depuis sa

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création a géré toute une branche comportant des produits très diversifiés et
utilisant des technologies complètement différentes les unes des autres. Ces
éléments ont engendré la complexité des entreprises. Pour M. Marchesnay (1993),
un système deviendra complexe quand le nombre d’acteurs est important et quand
les relations entre ces acteurs sont fortes et interactives. C’est le cas pour les
entreprises algériennes. En effet, la multiplicité des organes constitutifs de
l’environnement de l’entreprise s’explique par des textes et réglementations qui en
résulte (voir figure N° 2).

Les cadres dirigeants ont manifestement des difficultés à se situer face aux 71

nombreux organes et réglementations influençant la vie des entreprises.

La faiblesse de la planification est liée au manque, en qualité et en quantité, des 72

informations alors qu’un système planifié se base sur la maîtrise des informations
économiques et des moyens statistiques solides. Ce manque d’information est dû à
l’absence du contrôle de l’exécution du plan au niveau macro-économique et à son
inefficacité au niveau sectoriel. Le manque d’information a poussé l’Algérie, durant
la période 80 à utiliser un type de crédit jugé par le premier ministre français
« d’inutile et dangereux ». Il s’agit de crédits bilatéraux d’origine publique et
destinés à la promotion des exportations, à la conquête de nouveaux marchés et
l’élimination des concurrents. Ils sont inutiles, si le pays prêteur est le fournisseur
naturel de l’emprunteur ou si sa devise est rare parce que dans les deux cas, les
emprunteurs ne songeront pas à l’utiliser sur des marchés tiers. Ils sont dangereux,
si le pays prêteur entend en accordant des crédits, détourner vers lui des courants
commerciaux qui auraient normalement une autre orientation.

Durant la décennie 80, et peut-être toute la période de l’économie administrée, 73

l’environnement de l’entreprise algérienne se caractérisait par la turbulence car il


était incertain, complexe et dynamique. Cette turbulence de l’environnement s’est
accentuée durant la période allant de 1990 à 2007 à cause, entre autre, de l’entrée
en vigueur de l’accord d’association avec l’Union Européenne en septembre 2005 et
la mise en place de plusieurs politiques encourageant l’investissement national
privé et étranger. Ces adaptations ont augmenté la complexité, l’incertitude et le
dynamisme de l’entreprise publique de production (L. Melbouci, 2007 b).

Conclusion

Dans cet article, nous venons de décrire l’environnement pertinent de l’entreprise 74

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algérienne ainsi que sa nature et ce, depuis sa création en 1963 jusqu’à 2007.
Pendant la période du socialisme, l’entreprise algérienne représente le dernier
niveau de la ligne hiérarchique. Elle subit un contrôle de plusieurs organes. Le
système de contrôle hiérarchique est composé du centre au sommet de la pyramide.
C’est le premier niveau de décision en matière législative, exécutive et judiciaire. Il
est représenté par les institutions de directions de l’État, de ses appareils et de ses
assemblées. Après 1977, s’ajoutent à ces organes, l’assemblée populaire nationale
(APN) puis le Bureau politique du FLN et son comité central ; jusqu’aux réformes
de la fin des années 1980. Le pouvoir judiciaire est placé sous la dépendance étroite
du pouvoir exécutif. Le deuxième niveau de décision est représenté par les
administrations centrales de l’État, essentiellement les ministères fonctionnels et
les ministères de tutelle, ainsi que la banque centrale. Ces administrations mettent
en œuvre les objectifs arrêtés au plan politique par le centre et ainsi elles
centralisent l’information, normalisent la gestion et contrôlent a priori et a
posteriori l’ensemble des opérations d’investissement et d’exploitation. Le
troisième niveau de décision est constitué par les entreprises et les banques. Les
mutations causées par les réformes économiques, déclenchées en 1990, pour
l’instauration d’une économie de marché si elles ont changé les formes, le fond,
quant à lui, est resté presque le même. Ces mouvements n’ont eu pour effet que
l’accentuation de la turbulence de l’environnement pertinent de l’entreprise
algérienne parce que, et avec les séquelles du colonialisme, il était déjà incertain,
complexe et dynamique ; autrement dit, turbulent. Ce n’est qu’avec cette précision
qu’il serait intéressant d’étudier la relation liant l’entreprise algérienne à son
environnement.

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[1] Ces turbulences ont fait leur apparition d’un point de vue conceptuel dans les années soixante avec
A.E. Emery et E.L. Trist (1965) et S. Terreberry (1968). Par la suite, elles furent popularisées par des
auteurs tels que P. Drucker (1969) ou A. Toffler (1981). Ils les qualifieront de « défis majeurs ».

[2] « Ces différences font apparaître comme l’a montré R. Vernon, un cycle international des produits et
des services qui se trouveront à maturité ou en déclin dans certaines régions du monde, alors qu’ils ne
sont qu’à un stade de démarrage ou de croissance dans l’autre ».

[3] La diminution de la natalité influence à court terme le secteur des vêtements ; le développement de la
restauration hors foyer a conduit les entreprises de la distribution alimentaire à s’adapter à cette
nouvelle donnée.

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