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Les clitoris de nos amies et des femmes de l’atelier que nous avons
organisé, pour leurs maintes révélations.
www.youtube.com/watch?v=J_3OA_VZVkY
Aux clitoris
Sommaire
Introduction
Clitoridienne ou clitoridienne
2 Il s’en va et il revient
La découverte du clitoris
Cher Freud
Le mythe de l'orgasme vaginal
L'arrivée du point G
Tout va mieux (ou presque)
7 À chacune sa vérité
8 Dire oui au plaisir
Trop comme ci ou trop comme ça
Deux ou trois papillons dans le ventre
Trouver le temps du plaisir
Le lâcher-prise, un concept fourre-tout ?
Quand on pense un peu trop
9 Se connecter à son corps
Je t'observe et te respire
Les vertus du massage sensuel
Fermer les yeux et…
Le plombier et sa tuyauterie
Les étonnantes révélations du clitoris
Mais pourquoi écrire un livre sur le clitoris, si ce n’est parce qu’il sort de
sa cachette et nous fait des révélations stupéfiantes ? Notre but n’est pas
seulement d’être focalisées sur cet organe et de déterminer quel est son
meilleur profil, mais d’inviter chacune à se balader au fil des pages à la
rencontre de son « Moi sexuel ».
Car oui, le clitoris était perçu comme le meilleur jouet des préliminaires,
le petit coup de pouce, l’organe idéal pour se mettre dans l’ambiance. Le
clitoris, c’était le premier verre du vendredi soir, la gorgée rafraîchissante
qui ouvre les vannes, l’interrupteur que l’on actionne avant de crier «
Surprise ! » et de lancer les festivités. Aujourd’hui encore, le clitoris est
parfois défini comme une zone érogène que l’on active avant que le coït
ne démarre vraiment. Un petit apéritif dont on ne se prive pas, mais qui
ne rassasie pas (assez).
Nous étions tellement persuadées qu’il existait deux bords qu’il nous
arrivait de partager nos ressentis entre copines pour « comparer », avec
plus ou moins de pudeur. Histoire de voir si le vaginal était vraiment plus
dingue, si le clitoridien était vraiment plus bref et piquant (ou plus simple
et ridicule). Et quand une clitoridienne éprouvait un orgasme plus long,
elle se demandait alors si (enfin) elle avait touché le Graal (fiesta). Tout le
souci était là, on ne pouvait pas réellement savoir à quoi ressemblait l’un
ou l’autre de ces orgasmes, ni comment ils étaient susceptibles de
s’exprimer dans notre corps. Personne ne fait l’amour de la même façon,
et si une position et une caresse procuraient un plaisir inouï à l’une, il
n’était pas certain que cela fonctionnât pour l’autre. Question
d’habitudes, de préférences, de fantasmes, de sentiments amoureux,
d’expériences, de morphologie aussi. Mais on ne le savait pas. On
imaginait qu’il existait une série de techniques à appliquer pour mordre
l’oreiller à coup sûr pendant de longues minutes. Car oui, l’orgasme
vaginal était décrit comme très long.
Ce tour d’horizon n’incrimine pas la presse féminine qui vivait avec son
temps et a su véhiculer, au fil des découvertes sur le clitoris, de nouvelles
révélations. Elle était notre principale source d’informations, et elle nous
aidait, mine de rien, à en savoir plus sur le plaisir, notre corps, nos désirs
et nos relations. Avec le temps, elle a fait passer de nouveaux messages
: stop à la distinction entre orgasme clitoridien et vaginal – ce dernier
n’existerait peut-être pas. Stop au point G, il prend la tête et ne serait
qu’une réplique du plaisir clitoridien. Mollo sur la pénétration, elle n’est
pas la condition sine qua non de la jouissance. Le rôle des médias
féminins nous semble primordial. Ils permettent d’informer les femmes,
mais aussi de les accompagner et de les aider à mettre des mots sur ce
qu’elles ressentent, malgré leur apparence injustement futile et
superficielle. Certes, certains articles surfent sur les clichés et souffrent
parfois de n’être pas assez documentés, mais qui d’autre aurait pu nous
en dire autant sur le plaisir ? Sur le clitoris ? Ou du moins nous inviter à
nous poser les bonnes questions en faisant le tri ?
Malgré cela, malgré le nombre d’articles publiés par les plus grands
magazines au sujet de l’orgasme et de l’accès à la volupté, la dichotomie
vaginale/clitoridienne a survécu. Si, aujourd’hui, on tend à affirmer qu’il
n’existe qu’un orgasme, qui naît du clitoris, cette rectification fait bien
moins de bruit que l’orgasme vaginal n’a pu en faire à l’époque.
Détricoter ce qui a si longtemps été tricoté va demander patience et peut-
être bien un brin d’acharnement…
La découverte du clitoris
Mais mollo quand même : que la femme ait du plaisir est une chose,
mais qu’elle en ait « pour le plaisir » en est une autre. La masturbation
est prohibée, il est inenvisageable qu’une femme assouvisse ses
pulsions à des fins non procréatrices, surtout qu’elle risque de mettre en
péril ses capacités reproductrices – genre « Je gâche mon sperme ».
Résultat, la femme qui ressent un trop gros désir sexuel peut devenir
hystérique si elle ne s’en décharge pas. En d’autres mots, l’hystérie est
considérée comme la pathologie de la frustrée. Elle peut entraîner
nervosité, insomnie, manque d’appétit… Alors comment libérer la femme
de son « trop-plein » ? Depuis Hippocrate et jusqu’au XXe siècle, les
médecins prodiguent des « massages » de la vulve, méthode qui
contraste avec la clitoridectomie (ablation partielle ou totale du clitoris),
remède du XIXe siècle, qui vise à empêcher la masturbation4. Le
traitement par massages a pour but de soulager les femmes et de calmer
leurs tensions. Et puis l’électricité fut : les premiers vibromasseurs
débarquent, de quoi faciliter le travail. Ce que cette pratique démontre,
c’est que le clitoris suscitait de l’intérêt. On ne pénétrait pas les femmes
chez le docteur, on leur caressait l’organe magique. Mais si les femmes
n’étaient pas satisfaites sexuellement, ce n’était pas tant de ne pas faire
l’amour, c’était de vivre une sexualité axée sur le coït. Plutôt que de
s’intéresser au plaisir féminin, et de se questionner sur la satisfaction
sexuelle des femmes et leur soi-disant hystérie, on préférait les calmer
sur une table d’examen.
Cher Freud
Sigmund Freud réveille le clitoris au début du XXe siècle, mais par une
douche froide. Il avance que les femmes qui jouissent du clitoris sont
immatures, voire névrosées. Si le clitoris fait de nouveau parler de lui,
c’est avec médisance. Selon le célèbre psychanalyste, l’orgasme
clitoridien est inférieur à l’orgasme vaginal. Les femmes sont donc
invitées à découvrir ce dernier afin de devenir des vraies femmes. Ses
réflexions reflétaient la société de l’époque qui définissait la sexualité
sous un prisme phallocentrique. Le vagin avait donc pour rôle d’accueillir
le partenaire, ainsi que le sperme de ce dernier. Le clitoris, quant à lui,
n’était qu’un organe superflu. « La transformation de la petite fille en
femme est caractérisée principalement par le fait que cette sensibilité
[clitoridienne] se déplace en temps voulu et totalement du clitoris à
l’entrée du vagin6 », écrit Freud en 1917. Mais sur la fin de sa vie, il
remet en question ses théories et donne soin à ses compères
psychanalystes d’explorer ce qu’il appelle « le continent noir », à savoir le
sexe féminin. Sacrée mission.
Le clitoris revient sur le devant de la scène dans les années 1950 avec
Kinsey, Masters et Johnson, célèbres sexologues américains, pionniers
de la sexualité moderne. Tous trois font le pari d’observer le
comportement sexuel humain. En 1953, Alfred Kinsey énonce dans un
rapport8 la supériorité du clitoris, organe qu’il décrit comme
hypersensible, contrairement aux parois vaginales. Dix ans plus tard,
c’est au tour de William Howell Masters et Virginia Johnson9 de remettre
le clitoris au cœur du plaisir. Après avoir examiné des milliers d’orgasmes
chez près de 700 sujets – en couple ou lors de la masturbation –, ils
estiment qu’il n’existe qu’un orgasme et que ce dernier naît du clitoris et
se propage dans le vagin.
L'arrivée du point G
Et ça se fête. Parce qu’il n’est pas trop tard et qu’il ne sera jamais trop
tard. Parce que toutes les adolescentes de demain grandiront – on
l’espère – avec un nouveau regard sur leur sexualité. Parce qu’elles
tomberont nez à nez avec un schéma du clitoris avant même d’étudier
les plaques tectoniques. Parce qu’elles ne chercheront plus à découvrir
un orgasme vaginal, vanté de toutes parts, mais simplement le plaisir.
Parce qu’elles se diront qu’elles possèdent un organe fou, capable de
leur ouvrir la porte de l’extase. Parce qu’elles se découvriront seules ou à
deux en prenant des initiatives, sans penser que l’homme est le driver.
Elles ne feront aucun test féminin dans la presse (« Êtes-vous plutôt
clitoridienne ou vaginale ? »), d’ailleurs ils ne seront plus disponibles en
ligne. Elles nous mettront un sacré coup de vieux.
À en lire ces données, chacun est tenté de conclure que le clitoris est le
grand absent de l’acte sexuel et que la pénétration est omniprésente,
comme si nous étions bloqués dans le passé, victimes d’une
représentation phallocentrique tenace. Elles nous donnent le sentiment
que les hommes sont focalisés sur la pénétration et que les femmes
n’orientent pas et ne dirigent pas leurs désirs sexuels. Est-ce que le
silence que le clitoris a subi (et qui subsiste encore dans une moindre
mesure) l’empêche à ce point de s’exprimer dans certaines vies intimes ?
Nous nous sommes interrogées sur la place du clitoris dans nos lits
actuellement. Est-il aussi piétiné qu’il en a l’air depuis tout ce temps ?
Nous avons d’abord questionné notre passé. Il y a vingt ans, lors de nos
premières expériences sexuelles, on cherchait l’orgasme vaginal, le point
G et la meilleure façon de jouir. Et on manipulait notre clitoris… et nos
amoureux aussi. On lui faisait une place, simplement parce que les
sensations procurées étaient ravissantes et mélodieuses. Il aurait été
difficile de se passer d’une telle extase. Les femmes que nous avons
rencontrées, dans le cadre privé ou professionnel, confient assez
fréquemment combien le clitoris fait partie intégrante de leurs rapports,
alors même qu’il y a pénétration (et pas qu’un peu). D’autres encore
révèlent que leur clitoris fait partie du jeu, mais pas comme elles
l’espéreraient : trop peu de caresses, trop peu de douceur…
Quand nous étions jeunes, les garçons aussi cherchaient à relever le défi
de l’orgasme vaginal, plus précieux que son petit frère. Le plaisir féminin
étant un monde obscur : le jeune homme qui parvenait à faire jouir une
fille se sentait tout-puissant. Nous n’avons jamais voulu (ou osé) remettre
en cause la performance des hommes, au risque de leur faire mal à
l’ego, au risque aussi de passer pour des capricieuses insatisfaites. On
avait tendance à entretenir cette idée selon laquelle les hommes y
étaient pour beaucoup dans notre capacité à prendre notre pied ou pas.
Et même si l’on les accusait de rouler des mécaniques – le fameux «
Alors, heureuse ? » –, rappelons qu’à l’aube de la vie sexuelle, les
jeunes hommes se sentent tenus d’un devoir de performance. Ils
craignent de débander en enfilant une capote, de jouir trop vite et de ne
pas offrir d’orgasme à leur partenaire. Derrière ce prétendu cadeau se
cache une part d’ego, c’est vrai, surtout à l’adolescence. Mais certains
hommes souffrent encore de cette pression et ça ne les amuse guère. Ils
ont le sentiment que les femmes leur refilent le bébé en matière de
plaisir, comme s’ils étaient responsables de leurs orgasmes. Nous
n’avons rien demandé, tout ça n’est qu’une question d’idée reçue : le bon
amant serait celui qui fait jouir sa compagne. Mais apaisons les esprits.
Si certains s’angoissent à l’idée de ne pas satisfaire leur partenaire,
d’autres ont réussi à trouver la sérénité. Avec le temps et l’expérience, la
plupart ne font plus de l’orgasme féminin un défi, non plus une mission
qui leur appartient. Cela ne signifie pas qu’ils ne cherchent pas à (et ne
doivent pas) s’appliquer : le sexe est une question d’écoute et de
partage. Mais les hommes découvrent, au fil des rencontres, que
l’orgasme féminin dépend tout autant de la femme elle-même, du rapport
qu’elle entretient avec son corps, de la connaissance qu’elle a de ce
dernier, de son état d’esprit du moment. Et ce, parce qu’ils vivent la
même chose, tout simplement. Si une femme ne jouit pas sous leurs
yeux, beaucoup témoignent l’accepter : ils ne prétendent pas que c’est
de sa faute à elle, mais ne se disent pas non qu’ils ont tout foiré.
Atteindre l’orgasme est une rencontre entre deux corps, à un moment
précis, dans des circonstances précises. Quand ça fonctionne, c’est à
deux ; quand ça plante aussi.
Nous aussi, les femmes, ressentons cette obligation à jouir. Est-ce pour
leurs beaux yeux ? Ou pour rejoindre le mouvement d’un plaisir féminin
émancipé ? Si l’on regarde attentivement les raisons pour lesquelles les
femmes simulent, on note qu’elles ne veulent pas vexer leur partenaire et
qu’elles veulent avoir l’air « normales ». Le sexe est encore aujourd’hui
soumis à la réussite, tout sexe confondu. Nous vivons dans une société
hyper-sexualisée qui nous oblige constamment à avoir des orgasmes
plus forts.
Ce que le clitoris nous offre est déjà énorme. Tant mieux si, au fil du
temps, des découvertes scientifiques et de nos explorations individuelles,
nous sommes toujours plus époustouflées et toujours plus enclines à
ressentir un plaisir plus intense. Mais pour mieux l’appréhender, il faut se
défaire de cette foutue pression. Si l’on cherche à tout prix le top du top,
on risque de se prendre les pieds dans le tapis. Le clitoris s’accueille à
bras ouverts, sourire aux lèvres, esprit détendu et corps réceptif. Et
auprès des hommes, il n’impose pas une quelconque supériorité
féminine. Il remet, disons, les compteurs à zéro, lui qui a des années de
retard face au plaisir masculin considéré et analysé depuis bien
longtemps.
Oui, avoir un orgasme, c’est bien. On aime ça. Mais ne pas décrocher les
rideaux, ce n’est pas grave : sur la route qui mène à la troisième tringle
se trouvent des milliers de sensations plus agréables les unes que les
autres, auxquelles se connecter tout au long de la promenade.
Volontairement, dans ce livre, nous parlerons des caresses qui soulèvent
le plaisir, sans jamais évoquer de caresses qui garantissent l’orgasme.
Parce que l’un attise l’autre, et que s’affranchir de tout objectif est le
meilleur moyen de se laisser surprendre par un feu d’artifice.
La seule chose que l’on désire souligner, c’est que l’on entend depuis
quelque temps que la recherche de l’orgasme est inutile (car éprouvante)
et qu’il est préférable de se détendre sans guetter le septième ciel : c’est
vrai. Mais il est important d’ajouter un élément : ce n’est pas parce que
l’orgasme n’est pas une obligation que l’on doit se contenter d’un rapport
qui nous plaît moyennement (car position compliquée à maintenir, car
maladresses dans les préliminaires, car tout va trop vite, etc.). En
d’autres mots, si l’orgasme n’est pas la clé, il en reste qu’on ne doit pas
mettre notre satisfaction sexuelle entre parenthèses.
Pour autant, votre sexe est beau et sent bon, même s’il ne ressemble
pas à celui de la dernière actrice porno en vogue. Nous accueillons en
permanence des images qui nous soumettent au diktat du corps parfait
et du sexe parfait, si bien que se sentir à côté de la plaque est facile.
Rapidement, on se trouve difforme et peu présentable. Notre corps et
notre sexe, soudainement, ne procureront aucun plaisir à notre
partenaire.
Aimeriez-vous tomber toujours sur les mêmes pénis ? Tous les sexes
sont différents – et physiquement et dans leur fonctionnement – et
découvrir le vôtre, juste le vôtre, voilà une mission qui s’avère excitante
et qui l’est également pour les hommes ou les femmes avec qui vous
partagez des moments intimes.
Quant aux articles de presse féminine, ils continuent de faire leur job.
Notamment parce que la sexualité féminine manque d’être racontée. Ils
nous encouragent à mieux nous connaître, ils nous donnent des billes et
nous aident également à déculpabiliser, à ce que chacune se sente tout
à fait normale d’être simplement différente.
Une chose est sûre en ce qui concerne le clitoris, c’est plutôt bien de
savoir qu’il s’étend à l’intérieur du corps, qu’il est bien plus surprenant
qu’il en a l’air sous son petit capuchon, qu’il est un organe dédié
uniquement au plaisir. Ça revient à posséder un gros trousseau de clés
pour s’aventurer vers de nouvelles caresses, pratiques, et donc
sensations. Mieux comprendre le clitoris, prendre conscience de qui il
est, de son anatomie, de sa physiologie, c’est trouver confiance en soi et
en sa propre capacité à fondre de plaisir. Et à ce jour, cet organe
demeure trop rarement décrit et raconté.
1. ISAPS International Survey on Aesthetic/Cosmetic, Procedures Performed in 2015.
5
Le clitoris sur les bancs de l’école
On s’est mis à la place des jeunes qui répondaient à des quiz sur les
organes sexuels. C’est vrai, nous aussi, on aurait sans doute eu une
grande facilité à dessiner des pénis. Faut dire qu’à chaque fois qu’on se
rendait aux toilettes entre le cours de sciences naturelles et celui de géo,
on en avait trente autour de nous, parfaitement dessinés, et sous toutes
les formes. La vulve, elle, n’était pas (et n’est toujours pas) représentée.
Le clitoris non plus. Mais si la verge et les testicules sont partout, c’est
bien parce qu’ils se voient. Si notre clitoris nous pendait entre les jambes
(et savait faire l’hélicoptère), peut-être qu’on disposerait d’un modèle plus
évident.
Éduquer mieux
Et pourquoi pas non plus un schéma de la vulve et clitoris ? Dès son plus
jeune âge, l’enfant part à la découverte de son corps et de ses zones
génitales. Il s’aperçoit que les sensations sont différentes, il ressent ses
premiers émois. Il est curieux et c’est normal. Puis la petite fille ou le petit
garçon grandit et continue de s’explorer, aussi parce qu’il (elle) se
compare : il (elle) a vu papa et maman sous la douche (ensemble ou
séparément, cela ne nous regarde pas) et cherche à savoir s’il (elle) est
constitué(e) de la même façon.
Tous les parents ne sont pas à l’aise à l’idée que leurs enfants
apprennent à l’école (ou dans les livres) ce qu’est une vulve, un vagin et
un clitoris (et c’est aussi vrai pour le pénis, d’ailleurs). Comme si ces
informations pouvaient les éveiller prématurément à la sexualité. On
pourrait comparer cette crainte à celle de glisser des préservatifs dans la
valise des ados avant leur départ en colonie : est-ce qu’une capote va les
inciter à faire l’amour ? Oui, mais en même temps s’ils se lancent,
auront-ils conscience de la nécessité de se protéger ?
Bien entendu, l’idée n’est pas d’aller réveiller ses enfants demain en leur
disant : « Et si l’on parlait de papa dans maman ? Et du clitoris, tu veux ?
» Il n’y a pas de moment à définir. Au quotidien, les conversations
émergent naturellement, d’abord parce que l’enfant est observateur et
curieux, ensuite parce que maintes situations sont propices : la couche
de la petite sœur que l’on change, la publicité à la télé, tonton Jojo qui
pince allègrement les fesses de tata Simone… L’enfant pose des
questions spontanément, il cherche à comprendre. Il est important de lui
répondre sans gêne et de rester positif (c’est la vie) face à ce qui le
turlupine afin de lui transmettre une image saine de la sexualité. Si l’on
commence à changer de sujet, parce que nous sommes mal à l’aise ou
choqués, l’enfant pense alors (simple raccourci) que la sexualité est
taboue. Pris au dépourvu, nous ne sommes pas obligés de répondre
instantanément (si nous avons besoin de préparer notre réponse ou que
la question tombe très mal) mais alors on propose (et on s’y tient) d’en
reparler dans les heures qui suivent.
Si l’on raconte que les bébés naissent dans les choux, c’est mignon,
mais on alimente de fausses croyances qui pourront créer des
confusions dans la construction des représentations mentales de l’enfant.
Ou entraîner des moqueries si ses copains sont mieux informés, ce qui
n’est pas agréable pour lui. Parler de sexualité, ce n’est pas non plus
mettre en garde à tout-va. Sinon, de la même façon, l’enfant aura le
sentiment que le sexe est dangereux.
Facile à dire, mais comment on fait ? Selon nous, utiliser les mots que
l’enfant entend à l’école, tout en donnant nos « mots de grands » est une
option réaliste. Alors oui à la zézette, qui est le sexe féminin : il y a le
pubis, les lèvres, le clitoris et le vagin, ce sont les termes qu’emploient
les grandes personnes. Mais pas d’inquiétude, il n’est pas question de se
prendre le chou (encore lui) avec un vocabulaire pointilleux. Les enfants
apportent bien souvent leurs propres mots. Les parents mal à l’aise
remarqueront qu’en renvoyant la question à l’enfant, ce dernier
collaborera et partagera ce qu’il ressent, mais aussi la façon dont il
perçoit les choses à son âge. Dans certains cas, il suffira de confirmer,
dans d’autres, de nuancer.
Nous vous répétons qu’il est impressionnant, alors forcément, vous avez
envie de le découvrir, ce clitoris. Votre clitoris. Il est assez compliqué de
relayer des mesures exactes concernant son anatomie. D’abord parce
qu’il existe des particularités individuelles (on n’a pas le même clitoris
que sa voisine). Ensuite, parce que les résultats divergent sensiblement
selon les techniques de mesures utilisées. Enfin, les chercheurs ne
dénomment pas tous de la même façon chaque partie du clitoris. Par
exemple, certains incluent le gland dans le tronc, d’autres non. En gros,
c’est comme si l’on ne s’était pas encore mis d’accord sur le fait que le
mollet appartient à la jambe ou que Nantes est bretonne.
Évelyne
Gland émergent : il sort comme un mini-pénis.
Sandra
Gland en perle, que l’on appellera « bouton » : il forme un petit rond.
Lou
Gland discret : on ne le voit presque pas. Le capuchon, comme un « U à
l’envers » le renferme.
Antonia
Gland enfoui ou caché, on ne voit que le capuchon.
Noémie
Gland avec piercing hood.
Le clitoris en perspective
Anatomie du clitoris
1. Pauls R.N., « Anatomy of the clitoris and the female Sexual Response », Clinical Anatomy,
2015, 18, 376-384. Ginger V.A., Cold C.J. & Yang C.C., « Surgical anatomy of the dorsal nerve of
the clitoris », Neurourol Urodyn, 2011, 30 (3), 412-416.
Pour autant, notre kiné nous fait parfois de l’effet. Nous l’avons déjà
vécu. Si une légère tension sexuelle nous parcourt le corps, c’est parce
que notre imaginaire érotique s’active (la table de massage, ses grandes
mains…) et que nos kinés (les vôtres, on ne sait pas) ne ressemblent
pas à des tampons. Un véritable contact humain, au sens propre comme
au figuré, s’installe. Mais si nous conversons avec nos fantasmes tandis
que nous recevons un massage à la limite du sensuel, c’est toujours
avec une certaine retenue : nous ne sommes pas là pour déshabiller
Jean-Pierre le kiné mais pour notre pauvre hernie discale. Maintenant,
prenons l’exemple d’une soirée avec notre partenaire : on a dîné, c’était
sympa, on a bien ri, et puis on est rentrés à pied, on a traversé la ville de
nuit, c’était charmant (que d’émotions). On est arrivés à la maison, on a
senti le désir sexuel monter au fil des marches de la cage d’escalier… Et
on a fait l’amour. Et on a aimé ça. Et peut-être bien qu’on a joui. Si c’était
bon, agréable, si le rapport sexuel rimait avec partage et bienveillance,
plaisir et extase, c’est parce qu’on avait la tête à ça, tout simplement. On
était dans le bon état d’esprit et on voulait que ça dure toujours.
Pour le sexe, même topo : il y a des jours où nous n’avons pas vraiment
envie, d’autres où les circonstances ne sont pas réunies, d’autres encore
où nous avons l’esprit ailleurs (des trucs pénibles : boulot, administration,
contrariétés diverses, tâches à accomplir). À ce moment-là, se connecter
à son plaisir sexuel demande beaucoup d’efforts. On a beau connaître
toutes les ficelles pour stimuler notre corps et plus spécifiquement notre
clitoris, rien n’y fera (et même quand on est sexologue et journaliste sexo
!), il nous manquera ce petit quelque chose. Le clitoris, pour réagir aux
papouilles, aime savoir que l’on est contente d’être là. En somme, il
choisit son moment, le lieu et le comment, selon ce qu’il entrevoit de
nous et de notre disponibilité à l’accueillir : on ne va pas frapper chez un
ami avec une bouteille de champagne si l’on pense déranger.
7
À chacune sa vérité
Il est impératif d’être dans le bon état d’esprit et dans une bonne
disposition physique afin de ressentir positivement l’effet des caresses.
Pour cela, il y a une forme de préparation qui se fait sans même qu’on en
ait conscience ou que l’on peut volontairement mettre en place pour
s’offrir la possibilité d’aller plus loin.
Se réconcilier avec son corps, en dehors du lit, c’est plus simple. Vous
avez déjà remarqué qu’après une séance de sport, vous vous sentez
mieux, un peu comme si vous aviez pris du muscle et que ça se voyait
déjà. Cela peut fonctionner après un bain ou lorsqu’on porte un nouveau
jean. Ce ne sont pas des parades. Simplement, des terrains de
réconciliation avec son corps. Oui, il ne suffit pas d’un jean pour se sentir
mieux durablement, mais c’est un pas que l’on fait, qui nous aide à vivre
quelques jours sans se scruter ni se démolir. De quoi, à terme, gagner en
estime de soi et se moquer des diktats. Car là est aussi la source de nos
complexes. Les corps parfaits sont brandis un peu partout, on se
demande comment avoir le même et, à part se « photoshoper » en plein
missionnaire, on n’a pas trouvé la solution. On est comme on est, des
êtres humains avec des défauts, et ces défauts aussi font l’amour, parce
que le plus important dans l’échange de plaisir sexuel, c’est d’être soi,
d’être quelqu’un, d’offrir sa personnalité, ses particularités, d’être différent
de la voisine ou du mannequin en couverture, tout comme on aime
découvrir l’autre, ses petits trucs à lui ou à elle. C’est ce que l’on dégage
qui nous constitue. Un « tout » qui, s’il garde le sourire et s’en fiche pas
mal d’avoir oublié un poil au nombril, s’éclate dans les bras de son
partenaire en ne pensant à rien. Enfin si : au bonheur d’être là, en fusion,
stores tirés et collants gardés.
« L’autre » (pas Cyril, votre partenaire), si l’on peut l’appeler ainsi, joue
un rôle primordial dans notre capacité à nous abandonner sexuellement
– à lui, mais à nous surtout. On ne dit pas qu’il doit être parfait, non plus
que notre plaisir sexuel repose sur ses épaules, loin de là ! Il est
simplement nécessaire que l’on se sente bien, juste bien, avec lui.
Trouver le temps, c’est aussi arrêter de croire qu’un rapport sexuel dure
deux heures. On a souvent l’impression qu’on est à l’aube d’une séance
de natation : prendre la voiture, enfiler son maillot, s’arroser sous la
douche gelée, nager, sortir, reprendre une douche, faire son brushing et
replacer ses cheveux… Entre le quickly (cinq minutes) et le film porno
(cinq heures), il y a un monde réaliste. Ce n’est pas parce qu’on va faire
l’amour que l’on va décaler tout notre emploi du temps, notre semaine et
les dix ans à venir.
Et puis, enfin, prendre le temps, c’est également s’écouter. Parfois, une
simple caresse sur notre bras va nous titiller. L’envie de faire l’amour
nous gagne mais on ne l’écoute pas. On étouffe notre désir parce que le
moment nous semble inopportun. Il l’est peut-être si l’on se trouve dans
la queue du supermarché, mais parfois, il tombe à pic. On peut saisir
l’occasion, se dire qu’on se fiche du film ou du boulot. La Terre ne va
s’arrêter de tourner si l’on bouscule notre programme.
Le lâcher-prise est une notion qui nous a donné du fil à retordre à toutes
les deux. Vous avez certainement entendu mille fois ce conseil. Et mille
fois, vous vous êtes fait la réflexion que ça ne voulait rien dire, que c’était
un concept de développement personnel aussi indigeste et inexploitable
que « Prends du recul, ça ira mieux » (oui, et alors ?). Mais avec le
temps, nous avons appris à comprendre ce que dissimule cette notion
bien plus facile à dire qu’à mettre en œuvre.
Quand nous avons travaillé sur le livre (celui que vous tenez entre les
mains) pendant une semaine entière, ensemble, nous nous sommes
aperçues que le premier jour, nous étions dans la précipitation. Le matin,
au réveil, on pensait à un tas de choses à la fois : le quatrième chapitre,
le café qui coule, la prochaine étude à décortiquer, la prochaine bouteille
de vin à acheter (récompense). Le soir venu, nous étions fatiguées (mais
hydratées), avec le sentiment de nous être dispersées et d’avoir deux
cerveaux prêts à exploser. Pourtant, on savait très bien qu’il nous suffirait
de relâcher et d’avancer pas à pas pour avancer efficacement. Dès le
lendemain, nous avons bossé par petites tranches : d’abord, on se
concentre sur ce point, ensuite on verra. Chaque chose en son temps.
Même si l’on lâche prise et que l’on vit au milieu d’une carte routière
bourrée de panneaux stop, on ne parvient pas toujours à se connecter
aux sensations qui nous envahissent. Disons qu’il y a une différence
entre ne plus penser à l’ours blanc et ressentir mille frissons dans son
corps (les frissons étant l’équivalent de la voiture rouge). Établir des
ponts entre sa tête et son corps, se connecter à lui et savourer plus
amplement ce qu’il dessine en nous, c’est possible. Imaginons que le
clitoris soit bavard mais légèrement aphone : comment l’entendre ? On
pourrait lui filer un petit sirop. Mais tendre l’oreille, c’est plus simple (aux
dernières nouvelles).
Je t 'observe et te respire
Au lit, nos cinq sens sont plus ou moins en action, toujours selon nos
préférences. Se connaître est une clé pour mieux se connecter aux
sensations qui se trament durant le rapport sexuel. Chez certaines
personnes, la vue jouera un rôle : contempler un corps et observer l’acte
sexuel les excite. D’autres aimeront s’attarder sur les sons, qu’il s’agisse
d’une respiration haletante, d’un mot cochon, d’un claquement de
fesse… D’autres encore sont attachés aux odeurs, qu’il s’agisse de la
transpiration, de la crème solaire… Une fois que l’on connaît les sens qui
nous font davantage voyager, on peut en profiter pour se poser les
questions suivantes : « Je vois quoi (son sexe ou son ombre) ? J’entends
quoi (sa respiration ou un fond de télé) ? Quelle odeur chatouille mes
narines (sa transpiration ou son parfum) ? »
C’était donc la journée des dix clitoris – avec nous, douze. Dix clitoris
assis autour d’une grande table, aussi différents les uns que les autres
(en théorie). Dix clitoris de tous âges confondus, avec plus ou moins
d’expérience, d’appétit, de caractère. Il nous a paru indispensable de
donner la parole aux femmes, mais surtout de créer un échange. Le but
n’était pas d’en tirer une étude (mini) et d’en extraire des chiffres. Nous
désirions simplement créer une effervescence autour de l’organe sexuel
féminin en laissant chaque femme s’exprimer. À chaque fois, le principe
était clair : on leur posait une question et elles répondaient sur papier.
Puis, nous les mélangions et les lisions toutes ensemble. Parfois, une
femme révélait qu’il s’agissait de sa réponse, enthousiasmée par les
différents commentaires que suscitait son point de vue. Cette méthode a
permis à chacune de se sentir à l’aise, si bien qu’au bout de deux
heures, l’anonymat est tombé et les confidences ont jailli.
Sous les caresses, le clitoris réagit, dès lors qu’on est disposée au plaisir.
Cela engendre non seulement des réactions physiologiques, mais
également une panoplie de ressentis que les femmes décrivent via des
expressions et métaphores différentes. Chacune ses mots pour raconter
l’extase.
Lors de notre atelier, nous avons commencé par discuter des ressentis
et, il n’y a pas à dire, le clitoris est un organe inspirant. Il fait tellement
envie qu’on aimerait en avoir deux, trois, douze.
Bien entendu, la question qui brûle les lèvres est la suivante : les
sensations sont-elles identiques lors de l’autoérotisme ? La plupart des
femmes répondent que non. C’est autre chose, c’est plus direct, plus
automatique. En couple, le partage apporte aux sensations une note de
volupté et même de poésie. Le plaisir prend ses lettres de noblesse lors
d’un échange à deux. Pour d’autres, la masturbation est le meilleur accès
au plaisir. Enfin, certaines femmes ont su dire que les sensations étaient
parfois très proches seule ou à deux. Selon elles, tout dépend de la
façon dont elles s’abandonnent au plaisir. Plus elles lâchent prise, plus
elles perdent le contrôle et rencontrent un plaisir exquis.
Une fois que les hommes ont éjaculé, ils ont besoin d’un temps de repos
avant d’observer une nouvelle érection. On parle alors de période
réfractaire. Une pause physiologique indispensable, plus ou moins
longue selon les hommes, qui dure de plus en plus longtemps avec l’âge,
la condition physique, l’état de santé et notre motivation (et la sienne) a
re-réveiller la « bête » après un premier round. Et le clitoris, qu’en est-il ?
Si ce dernier connaît, au même titre que le pénis, une érection, est-il
également soumis à une phase de repos (« Ciao, je prends des
vacances ») ? Les témoignages n’ont pas manqué à ce sujet lors de
l’atelier que nous avons animé. Certaines femmes, après l’orgasme,
ressentent une grande sensibilité au niveau du clitoris. Elles ne veulent
plus être caressées et désirent un temps d’arrêt. Il est possible qu’elles
puissent cependant prendre du plaisir pendant la pénétration, ou d’autres
caresses. Mais le gland du clitoris doit être épargné un instant. D’autres
ne ressentent pas le besoin de s’arrêter, ou simplement quelques
minutes, et rencontrent de nouveau une grande excitation. Trois parmi
nos invitées ne ressentaient pas le besoin de s’arrêter et ont déjà connu
des orgasmes multiples, même si cela ne survient pas à chaque rapport.
C’est donc du cas par cas. Inutile de se dire que certaines peuvent
enchaîner les orgasmes et qu’il faut essayer de faire pareil. Inutile aussi
de se sentir étrange parce qu’on les multiplie alors que d’autres ferment
les jambes. À chacune de découvrir sa particularité et son besoin en
termes de pause, qu’elle s’étende sur dix secondes, trois heures ou une
semaine. En tout cas, la science est plutôt muette à ce propos.
Des milliers de lignes sur la taille du pénis et son rôle dans le plaisir ont
été écrites. Mais la taille du clitoris aurait-elle une influence sur le plaisir ?
Et sa position ? Pour étudier la question (et ça manque), des chercheurs
ont recruté trente femmes : dix qui présentaient des symptômes
d’anorgasmie, vingt autres qui jouissaient sans difficulté1. Une IRM plus
loin et une fois les mesures prises, ces femmes ont répondu à un
questionnaire sur leur vie sexuelle. Conclusion : celles qui avaient un
gland plus gros et plus proche de l’entrée du vagin (l’obsession de Marie
Bonaparte) jouiraient plus facilement, notamment car les frottements
seraient facilités. Les chercheurs sont restés prudents quant à leurs
résultats (et on est bien d’accord), étant donné la petitesse de
l’échantillon et le fait que les femmes témoignant elles-mêmes de leur
jouissance, tout est relatif. On aimerait aujourd’hui que d’autres études à
ce sujet soient réalisées.
1. Oakley S.H., Vaccaro C.M., Crisp C.C., et al., « Clitoral size and location in relation to sexual
function using pelvic MRI », The Journal of Sexual Medicine, 2014, 11 (4), 1013-1022.
2. Unger A. & Walters M.D., « Female clitoral priapism : an over-the-counter option for
management », The Journal of Sexual Medicine, 2014, 11 (9) : 2354-2356.
11
Le vagin, voisin intime du clitoris
Savoir que le clitoris est une source inouïe de plaisir et connaître ses
promesses ne demande pas d’être exclusivement concentrée sur cet
organe. Le plaisir féminin est une symphonie et le corps entier
l’interprète. Nous l’avons vu, il s’exprime dans un contexte particulier,
avec un cerveau disponible et d’autres organes alentours dans la course.
Le vagin fait partie de ceux-là et on a envie de vous en parler plus
longuement de par sa position si intimement liée avec le clitoris.
Le vagin est moins innervé que le clitoris, autrement dit bien plus pauvre
en terminaisons nerveuses1. Cependant, le vagin n’en est pas moins
utile au plaisir. Ce n’est pas parce que le clitoris en est le cœur que le
vagin doit être abandonné sur le bas-côté de la route. Non, il n’y aurait
pas d’orgasme purement vaginal (en tout cas, c’est ce que tentent de
démontrer la plupart des études), mais c’est un tort de penser que la
pénétration, c’est rasoir – déjà parce que le clitoris peut être titillé par nos
voies internes, ensuite parce qu’elle demeure un acte sexuel, un acte
d’union et d’amour. Les femmes aiment la pénétration (oui !) aussi pour
ce qu’elle représente, pour cette idée de ne faire qu’un, de se posséder
l’un l’autre. Quelque part, malgré l’héritage d’une sexualité coïtale, la
pénétration est un acte d’amour qui a appris, avec le temps, à ne pas
délaisser le clitoris. Puisque ce dernier travaille de concert avec le vagin,
puisque tous dansent ensemble, alors tout le monde est ravi : la
pénétration, c’est bien, la stimulation externe, aussi.
De nombreuses études ont déjà montré par le passé le lien évident entre
périnée et orgasme. Les travaux récents viennent donc accentuer l’idée
selon laquelle un périnée qui se « porte bien » s’avère une clé de
l’épanouissement sexuel. Ne serait-ce au moins que parce qu’un périnée
qui manque de tonicité a une influence négative sur la confiance des
femmes. Après l’accouchement, elles craignent parfois le retour de la vie
intime, le manque de plaisir mais aussi celui de leur partenaire. Mais le
blocage n’est pas seulement psychologique, et un périnée en manque de
tonus pourrait éventuellement expliquer un manque de sensations
internes et des difficultés à jouir. La rééducation du périnée pourrait être
une option pour traiter des troubles de l’orgasme chez les femmes. Elle
se pratique chez un kiné ou une sage-femme.
La zone C
La taille du vagin est-elle importante ?
Anatomie du vagin
À la rencontre du plaisir vaginal
Alors oui, parfois, ce n’est « pas de bol », nos morphologies ne sont pas
assorties, mais avec le temps, on compense. Il n’y a pas de recette
magique, mais bien une série de comportements qui nous mènent sur le
chemin de la compatibilité. Puisque le vagin est aussi intelligent… qu’une
paire de collants et qu’on est loin d’être bête non plus.
Il est nécessaire de préciser que tous ceux qui emploient le terme d’«
orgasme vaginal » encore aujourd’hui ne sont pas nécessairement
divisés entre deux types de jouissance (mais certains si). Généralement,
ils nomment « orgasme vaginal » un orgasme qui naît certes du clitoris,
mais par voie interne. Autrement dit, la stimulation du clitoris par le vagin
entraîne parfois la jouissance et cette jouissance est nommée selon son
lieu de naissance, pas selon ses origines. Mais personne ne s’est mis
d’accord. On pourrait parler d’orgasme par voie vaginale, par stimulation
vaginale, par pénétration, sans que le gland du clitoris, donc sa partie
externe, ne soit titillé. Ce n’est qu’une question de terminologie. Et on
pourrait même aller plus loin : tandis que l’orgasme « vaginal » continue
d’être décrit comme différent au niveau des sensations, cela pourrait
s’expliquer par le fait qu’en stimulant le vagin, donc la partie interne du
clitoris, on ne réveillerait pas la même zone du clitoris, donc on ne vivrait
pas le même plaisir. Cette partie-là réagirait autrement, différemment,
peut-être plus lentement. Mais cela est-il prouvé ? Il y a autant
d’orgasmes qu’il y a de femmes, donc pour résumer, on pourrait dire qu’il
n’existe que des orgasmes intimes, et que chaque femme rencontre son
propre plaisir.
Le clitoris apprécie qu’on stimule par voie externe (le gland du clitoris et
ses alentours) ou par voie interne (le vagin). La stimulation peut
également être indirecte, car la contraction d’une partie des muscles du
périnée se répercute sur les piliers du clitoris et les bulbes. En somme,
pendant la pénétration, la structure interne du clitoris s’enflamme. Un
plaisir certainement moins évident à rencontrer, parce que le vagin n’est
pas une zone que l’on investit fréquemment en solo, notamment durant
nos premiers émois masturbatoires. Disons que les sensations internes
demandent de l’exploration, voire un peu d’exercice, seule ou à deux.
Parmi nos invitées, certaines apprécient les caresses du bout des doigts,
d’autres préfèrent au contraire jouer avec plusieurs doigts serrés, posés
bien à plat sur la zone entière du gland du clitoris. Et puis il y a celles qui
préfèrent fermer leurs jambes, d’autres au contraire qui ont besoin de les
ouvrir… Toutes ne sont pas attachées aux caresses de la vulve dans son
ensemble et toutes ne ressentent pas le besoin d’une stimulation
vaginale en parallèle. Mais pour certaines, c’est cette double stimulation
qui est grandiose, ainsi elles s’arrangent toujours pour frotter ou caresser
leur clitoris pendant la pénétration.
Mais on peut aussi oser une rencontre d’un autre type, un peu comme si
l’on repartait à zéro, en découvrant du bout des doigts (humides,
toujours) la sensibilité du clitoris. Comme si l’on y allait avec des
pincettes, pas à pas, pour accueillir les sensations qui s’invitent en
chemin. On l’effleure tranquillement, sans se brusquer et sans le
brusquer, afin d’éveiller notre conscience au clitoris. Un premier rendez-
vous en douceur, presque timide.
L’une de nous a testé cela depuis chez elle, en suivant les conseils d’une
vidéo, et s’est formellement ennuyée. Le caractère téléguidé et
mécanique s’est avéré castrateur : aucune place à la créativité et à la
surprise. Le format n’était peut-être pas le bon, qui sait ? Une autre a osé
débarquer à un cours (avec son partenaire, tant qu’à faire, parce que le
côté « inconnu qui pose son doigt », ça fait légèrement trembler notre
pudeur). Ce qu’elle a retenu : d’abord le fou rire. La gêne fait partie du
jeu quand on se retrouve à une dizaine de couples à parler de clitoris.
L’expérience du « réel » s’avère enrichissante. La présence d’un coach
qui oriente pas à pas, d’une voix calme et presque langoureuse, permet
l’abandon. On se déconnecte, mais notons que tout le monde n’est pas
réceptif. À la base, il s’agit quand même d’une méditation, et nous
n’avons pas tous la capacité de nous connecter à notre corps, en faisant
le vide. C’est un peu comme la sophrologie : chez certaines personnes,
ça fonctionne, chez d’autres, des a priori négatifs (c’est quoi ce truc ?)
freinent le relâchement. Nous ne pouvons pas vous inciter à cette
pratique, ni vous la déconseiller. Il s’agit d’une expérience extrêmement
intime.
Mais cette approche est étonnante et on peut tout à fait (seule ou à deux)
créer sa propre méditation orgasmique. Certes, cela ne s’improvise pas,
mais se connecter au clitoris grâce à notre doigt ou à celui de notre
partenaire, pour se (re)découvrir est très excitant et instructif. On décide
simplement d’y aller en douceur, de se concentrer sur le gland du clitoris
et de discuter ensemble de ce qui nous passe par la tête et le corps.
Les baisers tendres, les caresses externes et le sexe oral seraient le trio
gagnant des pratiques pour atteindre la jouissance. Si le cunnilingus est
source de plaisir – hormis son caractère intime –, c’est notamment parce
que la langue, humide par définition, stimule le gland du clitoris mais
aussi l’ensemble de la vulve avec sensualité et de la pression, juste ce
qu’il faut.
Et puis il arrive que le cunnilingus soit tellement vanté que les femmes
craignent de ne pas parvenir à l’orgasme et de vexer leur partenaire, ou
encore d’avoir à constater que « Non, ça ne fonctionne pas ». L’orgasme
n’a rien d’automatique, il dépend d’un tas de facteurs et ne pas jouir une
fois d’un cunnilingus ne nous condamne pas à ne rien ressentir de la
sorte à vie. Les caresses sur le clitoris avec la langue peuvent être
délicieuses et offrir, avec le temps, des sensations nouvelles et
inattendues.
Les sextoys ont une autre qualité, celle de proposer une exploration du
vagin. Une exploration moins instinctive que celle du clitoris lors des
premières autocaresses. Le vagin est mystérieux, car il n’est pas visible.
Et si parfois, on aventure un doigt, on n’est pas toujours à l’aise, on se
dirige vers l’inconnu et on préserve l’étrange sensation que le vagin est le
« territoire » de notre compagnon. Par ce que lui, il en a vu, des vagins !
Enfin tâté. À ce moment-là, on peut voir le sextoy comme une béquille,
comme un allié qui va nous accompagner dans cette balade que l’on
connaît peut-être mal. Et c’est seule, avec notre jouet, que l’on va la
baliser. Que l’on va explorer des sensations internes, nouvelles,
étonnantes. Bien entendu, il sera plus aisé (et c’est même recommandé)
de démarrer sa « masturbation » par ce que l’on aime et maîtrise (pas de
coups de banane précipités, disons). On débute notamment la
stimulation externe, avec laquelle les femmes sont généralement plus
familières. D’une part, le clitoris est un « tout », un organe qui s’étend du
gland jusqu’à l’intérieur de notre corps, donc il est logique de l’éveiller «
de partout ». D’autre part, l’excitation que l’un déclenche (le gland, cet
ami) permet de se fondre dans un état excitatoire tel que l’on se sent
prête à accueillir les ressentis qui nous sont encore inconnus.
Toutes les positions sexuelles sont susceptibles de nous offrir une double
stimulation du clitoris et des sensations ravissantes. À l’exception peut-
être des positions acrobatiques qui nous empêchent de respirer et de
nous détendre. Inutile de vouloir innover à tout prix, en faisant l’amour la
tête en bas, les doigts de pieds flex et le pouce en l’air : c’est compliqué
et intenable (enfin pour beaucoup). Le but n’est pas de se restreindre si
l’on cherche à perdre le nord au sens propre. Mais un minimum de
confort est conseillé pour mieux accueillir son plaisir et en profiter sans
craindre de se casser le nez.
Mais nous pouvons orienter notre plaisir dans toutes les positions. Le
missionnaire est à tort associé à la position de la parfaite étoile de mer
qui compte les algues et ne se sert pas de ses dix branches. Est-ce que
cette étoile de mer s’ennuie ? Pas forcément. Elle caresse son
partenaire, elle lui dit des mots cochons, elle le dévore des yeux ou lui
raconte sa journée (au pire). On peut toujours être active, toujours
donner, toujours s’occuper de notre clitoris. Comment ? Grâce à la
technique dite du « coital alignment » (CAT, comme un petit chat, facile à
retenir). Il s’agit d’une variante du missionnaire qui intensifie la pression
exercée sur le clitoris. Les corps se confondent : le but est d’être collés-
serrés, l’homme étant allongé (presque étalé, mais avec un peu de
retenue) sur sa compagne. Pour toujours plus de fusion, la femme peut
enrouler ses jambes autour de son partenaire. Ensemble, et en rythme,
ils opèrent des mouvements de bassins qui accentuent les sensations
sur le gland du clitoris. Ce n’est donc pas le mouvement de va-et-vient
qui est mis à l’honneur (il n’y a pas d’entrée et sortie au sens propre,
façon marteau piqueur) mais bien un glissement calme et répété des
deux bassins. La technique a été étudiée pour la première fois par
Edward Eichel2. Ensuite, d’autres recherches ont suivi pour attester de
son efficacité (Kaplan, 19923 ; Hurlbert, 19954 ; Pierce, 20005). Elle
permet une stimulation accrue du clitoris, sans négliger les sensations
internes : puisque tout se joue en douceur, le pénis se déplace
tranquillement contre les parois vaginales pour éveiller le bonheur qui s’y
cache. Après ça, rien n’empêche de retrouver un rythme plus effréné,
voire plus brutal.
Pendant le missionnaire (façon CAT ou pas), l’étoile de mer contracte
également son périnée en relevant son bassin (pendant le « va ») puis le
relâche pendant le « vient » en laissant son bassin s’affaisser (si le va et
le vient sont discrets, tout doux, tranquilles et sensuels). Ainsi, elle
contrôle la pénétration, s’offre des sensations internes très sympathiques
et en offre aussi à son partenaire qui se sent plus enserré quand il « va »
(et qui a le droit d’être libéré quand il « vient »).
Lever les jambes, alors même qu’on est allongée sur le dos demande un
peu de souplesse (mais pas tant que de faire l’amour sur une table) et
permet de changer l’angle de la pénétration. Et c’est valable dans toutes
les positions. Formez un cercle avec votre pouce et votre index (main
gauche) et entrez votre index droit dedans (le fameux jeu de main qui
veut dire que papa entre dans maman). Ensuite, bougez votre cercle
(c’est votre vagin, au fait) en laissant votre index droit (le pénis) dans la
même direction. Vous voyez qu’il frotte un coup le haut de votre vagin, un
coup le bas, les côtés… Bref, toutes les parois peuvent être parcourues
et ainsi l’angle de pénétration change. Bien sûr, pas de panique, le pénis
suit tout de même le mouvement (il ne voudrait pas se tordre et vous
ressortir par le nombril). Les inclinaisons sont infimes et à peine
perceptibles, mais à l’intérieur, ça peut s’avérer surprenant.
Pour rappel, la zone C (là où le clitoris est susceptible d’être titillé par «
l’intérieur ») se situe sur la paroi antérieure du vagin, c’est-à-dire à
l’avant, comprenez côté pubis (pas côté anus). Il n’existe pas de repère
précis, mais orienter le pénis vers cette zone afin d’observer les
sensations et réactions de notre corps peut être exaltant. Si l’on veut
vraiment partir en recherche (sans pression, on n’est plus à l’époque du
point G, l’endroit le plus incontournable de la Terre), les doigts (les siens
ou ceux du voisin) sont une bonne option pour un toucher plus précis.
Les sextoys ou tout ce que l’on voudra (de la courgette à la carotte) sont
aussi des accompagnateurs potentiels.
On adore le clitoris. Il est la star de nos zones érogènes. Mais une zone
érogène aussi déterminante que le clitoris prend tout son sens quand on
la stimule alors même que l’ensemble du corps est en éveil. Essayez de
passer la cinquième sans avoir mis le contact dans la voiture, c’est
moyen pour démarrer. Autre exemple plus sympa : essayez d’ambiancer
une soirée avec un seul invité… C’est un peu nul. À la fête du slip et du
sexe, le clitoris est content d’être là, il se la joue, on ne regarde que lui,
ses paillettes et sa coupe de champagne, mais il se demande où sont
passés les autres, ses copains d’aventure. Entendez la nuque, les
fesses, les seins, les pieds, le creux des reins, le nombril, votre dix-
septième cheveu, vos cils et votre grain de beauté dans le dos.
Parmi nos zones érogènes, il y a celles qui nous réveillent à coup sûr (le
clitoris et les seins généralement) et les autres, qui sont moins innervées
mais qui peuvent offrir des sensations très agréables. Elles sont très
personnelles et s’expriment selon le contexte, le partenaire, nos
croyances aussi… Si le clitoris fait l’unanimité, c’est moins le cas du
poignet. La nuque non plus (peut-être un peu plus ?). Bien entendu, ces
zones se découvrent avec le temps. Il suffit par exemple d’un amant qui
adorait nous embrasser les paupières et nous laisse un souvenir
extraordinaire pour que nos paupières deviennent une zone très sensible
(c’est génial de se frotter les yeux tranquillement quand on s’ennuie en
réunion).
Pour revenir à la fête du slip, le clitoris aime être entouré. Stimuler ces «
autres zones » (que l’on appelle « zones érogènes secondaires » dans le
jargon sexuel) en même temps que les zones érogènes dites « primaires
» contribue à faire grimper le plaisir et prépare le corps à l’acte sexuel.
Et peut-on jouir des seins à cette petite fête ? Seulement des seins ? Le
phénomène est connu, bien qu’il se fasse rare. Mais c’est complètement
possible. Il se déclenche surtout via les caresses des mamelons – que
l’on peut frôler du bout des doigts, lécher ou mordiller –, bien que la
poitrine entière soit source d’excitation, qu’elle soit empoignée
fermement ou touchée avec délicatesse et sensualité.
1. Ifop, « Les Français et les sextoys : la grande enquête », 9 février 2017.
2. Eichel E. & Nobile P., The Perfect Fit : How to Achieve Mutual Fulfillment and Mono-gamous
Passion Through the New Intercourse, Dutton Books, 1992.
3. Kaplan H.S., « Does the CAT technique enhance female orgasm ? », J Sex Marital Ther, 1992,
18 (4), 285-291.
4. Hurlbert D.F. & Apt C., « The coital alignment technique and directed masturbation : a
comparative study on female orgasm », J Sex Marital Ther, 1995, 21 (1), 21-29.
5. Pierce A.P., « The coital alignment technique (CAT) : an overview of studies », J Sex Marital
Ther, 2000, 26 (3), 257-268.
13
Parfois, on aimerait dire à notre partenaire que cette caresse n’est pas
terrible, que cette position ne convient pas, que la pénétration survient
trop rapidement… Il arrive qu’on ne soit pas en accord et qu’une pratique
ne nous convienne pas. Sauf qu’on tourne sa langue sept fois dans sa
bouche et que rien ne sort pour autant. C’est normal, nous sommes
toutes et tous fragiles quand il s’agit d’évoquer nos « compétences »
sexuelles, notre façon de faire, d’être, de donner et de recevoir. Pour
s’exprimer sans froisser son partenaire, la bienveillance est de mise. On
n’est pas là pour déblatérer une série de reproches et jouer les
maîtresses d’école sévères, mais pour échanger positivement et nourrir
notre amour et notre sexualité. Si l’on désire faire passer un message (au
hasard : « Tu oublies mon clitoris »), on peut engager la conversation en
se concentrant d’abord sur ce qui va (« J’adore nos levrettes »). Le piège
serait de penser que ce qui ne pose pas problème ne mérite pas d’être
dit. Plus on consacre du temps à exprimer ce que l’on aime, plus il sera
aisé d’aborder ce qui tourne moins bien. Dans un couple qui ne
communique que pour aborder les difficultés, le risque de voir le
partenaire critiqué adopter une position défensive est plus élevé.
Mais le langage a ses limites, c’est vrai. D’une part, malgré des mots
positifs, notre partenaire peut tout de même se braquer (il sent poindre
un semblant de manipulation…). D’autre part, les mots valident notre
position et peuvent figer notre sexualité. Un peu comme si, en discutant,
on faisait l’inventaire de ce qu’on aimait et de ce qu’on n’aimait pas. Or,
les fantasmes évoluent, notre curiosité aussi. On peut aimer faire l’amour
dans le noir en janvier, plus tellement en juin. Bien sûr, on trouvera
toujours le chemin de l’interrupteur pour faire changer les choses, mais «
trop parler » inscrit parfois nos rapports sexuels dans un contrat et nous
impose des limites. Le risque, c’est de perdre en spontanéité une fois au
lit : notre partenaire peut hésiter quant aux caresses à nous offrir
puisqu’on a dressé nos préférences. Il n’ose pas et essaie de s’en tenir à
ce qui a été dit, aux mots énoncés, souvent très précis et sources
d’inhibition. Or, les corps peuvent parler d’eux-mêmes pendant l’acte
sexuel et répondre ainsi à nos besoins au présent.
Puis, montrer ce que l’on attend est également possible avec un langage
non verbal. Saisir sa main, la placer différemment, ailleurs… est une
façon de guider l’autre vers nos volcans. Et cela n’est pas du tout vexant
: notre partenaire veut savoir ce que l’on aime, il veut nous faire du bien,
non ?
Le langage érotique
Deux types d’échanges au lit ont été distingués par des chercheurs1.
Ceux qui sont centrés sur soi (dits « individualistes ») et ceux qui sont
dédiés au partage (dits « mutualistes »). Les uns ont pour but de
s’autoexciter, les autres sont tournés vers le partenaire dans le but de
l’exciter.
Et la simulation ?
Par exemple, on peut vouloir en finir et non, ce n’est pas méchant. Peut-
être qu’on n’est pas dedans, qu’on aurait pu le dire, remonter d’un cran
dans la chaîne pour s’éviter une déconvenue, mais on n’a pas osé. Et
puis on n’était pas bien sûre, on cherchait l’abandon, on espérait le
trouver. Alors on feint l’orgasme pour conclure le moment. On envoie un
signal de fin, parce que c’est poli. Quand votre belle-mère ne décolle pas
ses fesses de votre chaise avec un dîner ennuyeux à se pendre, vous ne
la foutez pas dehors à coup de balai, mais vous bâillez en annonçant
qu’il est temps d’aller faire la vaisselle parce que demain vous vous levez
tôt (pas vous, Martine ?). En agissant de la sorte, on s’évite ensuite de
parler pour « rien » : ce n’est pas parce qu’on n’a pas apprécié le rapport
ce soir qu’on doit en faire des caisses et prendre le risque d’ouvrir une
discussion stressante qui pourrait nous perturber et perturber notre
partenaire qui va se mettre à douter.
Le clitoris est là, ça y est, sur les bancs de l’école et dans les toilettes
d’un bar : du moins, un dans Paris.
Se sentir frustrée par rapport à ce que l’on n’a pas encore fait au lit, par
rapport aux sensations que l’on n’a pas encore approchées, c’est non !
Au contraire, sourions face à ce que l’on ne connaît pas encore et face
aux secrets que le clitoris ne nous a pas encore révélés : ce n’est que du
bonheur (et peut-être l’objet d’un tome 2).
Caroline Michel est née le 27 juin 1987. Elle s’appelle Michel comme
tout le monde mais parle de sexe comme personne. Elle est journaliste
freelance pour la presse féminine, spécialisée en psycho et sexo.
Passionnée d’écriture et aussi drôle que la plus drôle de vos copines, elle
est également l’auteur de nombreux guides pratiques autour des mêmes
thématiques, du blog ovary.fr et d’un premier roman, 89 mois, paru en
2016 aux éditions Préludes.
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