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Emily Nagoski, est sexothérapeute et diplômée en sciences

comportementales. Ses TED Talks sur la sexualité heureuse totalisent des


millions de vues à travers le monde et Je jouis comme je suis, véritable
best-seller international, a été traduit en 17 langues.

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Édition originale :
© 2015, 2021 by Emily Nagoski, Ph.D.
Tous droits réservés pour la reproduction partielle ou intégrale.
La présente édition a été publiée avec l’accord de l’éditeur original
Simon and Schuster, Inc., New York.

Édition française :
Conseil éditorial : Katharina Loix van Hooff
Édition : Élodie Ther
Illustrations maquette : Erika Moen
Design couverture : Nadine & Roger
Illustration couverture : Shutterstock

© 2021 Éditions Leduc (ISBN : 979-10-285-2123-3) édition numérique de


l’édition imprimée © 2021 Éditions Leduc (ISBN : 979-10-285-2034-2).

Rendez-vous en fin d’ouvrage pour en savoir plus sur les éditions Leduc
À mes étudiantes
INTRODUCTION

Oui, vous êtes normale

Être sexothérapeute, c’est se voir poser beaucoup de questions. Je me suis


déjà retrouvée au milieu de cafétérias universitaires, une assiette à la main,
à répondre à des questions sur l’orgasme. On m’a accostée dans des halls
d’hôtel lors de conférences professionnelles pour des renseignements sur les
vibromasseurs. Une fois, j’étais assise sur un banc dans un parc, occupée à
consulter mes réseaux sociaux, et je suis tombée sur une question d’une
inconnue au sujet de son asymétrie génitale. J’ai reçu des emails
d’étudiantes, d’amies, d’amies de mes amies, de parfaites inconnues, au
sujet du désir sexuel, de l’excitation sexuelle, du plaisir sexuel, de la
douleur pendant les rapports sexuels, des orgasmes, des fétichismes sexuels,
des fantasmes, des liquides organiques, et de bien d’autres choses.
Des questions comme…
« Une fois que mon partenaire a fait le premier pas, je suis partante, mais c’est comme
s’il ne me venait jamais à l’idée d’initier un rapprochement. Pourquoi donc ? »

«  Mon petit ami me disait toujours  : “Tu n’es pas prête, tu es toujours sèche.” Mais
j’étais vraiment prête ! Alors pourquoi n’étais-je pas lubrifiée ? »

«  J’ai vu un truc sur des femmes qui ne profitent pas des relations sexuelles, car elles
s’inquiètent tout le temps de leur corps. Je suis comme ça. Comment changer ? »

«  J’ai lu quelque part que certaines femmes n’ont plus envie de faire l’amour au bout
d’un certain temps dans une relation, même si elles aiment toujours leur partenaire. C’est
mon cas. Comment faire pour avoir de nouveau envie de mon compagnon ? »

« Je crois que j’ai peut-être fait pipi pendant mon orgasme ? »

« Je crois que je n’ai peut-être jamais eu d’orgasme ? »

Toutes ces questions différentes n’en cachent en fait qu’une seule :

« Suis-je normale ? »

(La réponse est quasiment toujours : oui.)


Ce livre est un recueil de réponses. Je l’ai vu de mes yeux : ce sont des
réponses qui ont changé la vie de bien des femmes, qui s’appuient sur les
connaissances scientifiques les plus pertinentes et sur les témoignages
personnels de femmes pour qui une compréhension grandissante de la
sexualité a transformé le rapport à leur propre corps.
Ces femmes sont mes héroïnes, et j’espère que, en racontant leurs
histoires, je vous donnerai la force de suivre votre propre voie, d’atteindre
votre propre potentiel sexuel unique et profond, et de vous y épanouir.

La véritable histoire du sexe


Après tous les livres déjà écrits sur le sexe, tous les podcasts, les émissions
de télévision, les articles de magazines et les questions-réponses à la radio,
comment se fait-il que nous ayons toutes encore autant de questions ?
Comment dire ? La triste et fâcheuse réalité, c’est qu’on nous a menti –
pas délibérément, ce n’est la faute de personne, mais quand même. On nous
a raconté la mauvaise histoire.
Pendant très, très longtemps, en science et en médecine occidentales, la
sexualité féminine a été présentée comme une sexualité masculine allégée –
fondamentalement la même, mais pas aussi satisfaisante.
Par exemple, on supposait simplement que, puisque les hommes avaient
des orgasmes pendant les rapports sexuels avec leur pénis dans le vagin
(pénétration), les femmes devaient aussi avoir des orgasmes pendant ces
rapports sexuels, et que si elles n’en avaient pas, c’est parce qu’elles étaient
cassées.
En réalité, environ un quart des femmes ont des orgasmes réguliers
pendant la pénétration. Les 75  % restants ont parfois, rarement ou jamais
d’orgasme lors d’une pénétration, et elles sont pourtant toutes en bonne
santé et normales. Une femme peut avoir un orgasme de bien d’autres
façons – grâce à la masturbation, au sexe oral, à un vibromasseur, à la
stimulation des seins, à la succion des orteils, ou à peu près de n’importe
quelle façon imaginable – et jamais d’orgasme pendant la pénétration. C’est
normal.
On pensait aussi que, puisque les organes génitaux des hommes
reflètent généralement ce qui se passe dans leur esprit – si un pénis est en
érection, la personne qui y est attachée est excitée –, les organes génitaux
des femmes devraient de la même manière traduire leur expérience
émotionnelle.
Et encore une fois, si c’est le cas pour certaines femmes, pour
beaucoup, ça ne l’est pas. Une femme peut être parfaitement normale et en
bonne santé et connaître une « non-concordance d’excitation », c’est-à-dire
que le comportement de ses organes génitaux (qu’ils soient lubrifiés ou
secs) peut ne pas correspondre à son expérience mentale (se sentir excitée
ou non).
On supposait également que, puisque les hommes éprouvent un désir
sexuel spontané et inopiné, les femmes devraient également avoir envie de
relations sexuelles spontanées.
Là encore, c’est parfois vrai, mais pas toujours. Une femme peut être
parfaitement normale et en bonne santé et ne jamais éprouver de désir
sexuel spontané. Elle peut au contraire éprouver un désir «  réactif  », qui
n’émerge que dans un contexte hautement érotique.
En réalité, les femmes et les hommes sont différents.
Mais attendez un peu. Les femmes et les hommes connaissent tous deux
l’orgasme, le désir et l’excitation, et les hommes peuvent eux aussi
connaître le désir réactif, la non-concordance de l’excitation et l’absence
d’orgasme avec la pénétration. Les femmes et les hommes peuvent tous
deux tomber amoureux, fantasmer, se masturber, être intrigués par le sexe
ou éprouver un plaisir extatique. Ils peuvent tous deux exsuder des fluides,
emprunter les chemins interdits de l’imagination sexuelle, croiser toutes les
manifestations inattendues et surprenantes de la sexualité dans tous les
domaines de la vie – et se confronter, parfois aussi, au refus inattendu et
surprenant de la sexualité à se manifester, poliment ou non.
Donc… les femmes et les hommes sont-ils vraiment si différents ?
Le problème ici, c’est qu’on nous a appris à penser au sexe en termes de
comportement, plutôt qu’en matière de processus biologiques,
psychologiques et sociaux sous-tendant le comportement. Nous pensons à
notre comportement physiologique – afflux sanguin, sécrétions génitales et
rythme cardiaque. Nous pensons à notre comportement social – ce que nous
faisons au lit, avec qui nous le faisons et à quelle fréquence. De nombreux
livres sur le sexe mettent l’accent sur ces questions ; ils expliquent combien
de fois par semaine le couple moyen a des rapports sexuels ou donnent des
instructions pour avoir un orgasme, et ils peuvent tout à fait être utiles.
Mais si vous voulez vraiment comprendre la sexualité humaine, le
comportement seul ne vous donnera pas toutes les réponses. Essayer de
comprendre la sexualité en observant le comportement, c’est comme
essayer de comprendre l’amour en regardant le portrait de mariage d’un
couple… et les papiers du divorce. Pouvoir décrire ce qui s’est passé – deux
personnes se sont mariées puis ont divorcé – ne nous aide pas vraiment à
comprendre. Ce que nous voulons savoir, c’est pourquoi et comment ça
s’est passé. Ce couple a-t-il arrêté de s’aimer après leur mariage, et est-ce
pour cette raison qu’ils ont divorcé ? Ou bien n’ont-ils jamais été amoureux
mais, forcés de se marier, et le divorce les a libérés  ? En l’absence de
preuves tangibles, nous ne pouvons que faire des hypothèses.
Jusqu’à très récemment, il en allait de même pour le sexe –
principalement des suppositions. Mais nous sommes à un tournant crucial
dans la science du sexe car, après des décennies de recherche décrivant les
mécanismes de la réponse sexuelle humaine, nous comprenons enfin le
pourquoi et le comment – le processus sous-tendant le comportement.
Au cours de la dernière décennie du XXe  siècle, les chercheurs de
l’Institut Kinsey pour la recherche sur le sexe, le genre et la reproduction,
Erick Janssen et John Bancroft, ont développé un modèle de réponse
sexuelle humaine qui présente un principe d’organisation pour comprendre
la véritable histoire du sexe. Selon leur «  modèle à double contrôle  », le
mécanisme de réponse sexuelle dans notre cerveau est composé de deux
éléments universels – à savoir un accélérateur sexuel et un frein sexuel – et
ces éléments réagissent à de vastes catégories de stimuli sexuels, y compris
les sensations génitales, les stimuli visuels et le contexte émotionnel. Et la
sensibilité de chaque composant varie d’une personne à l’autre.
Il en résulte que l’excitation sexuelle, le désir et l’orgasme sont des
expériences presque universelles, mais le moment et la manière dont nous
les vivons dépendent largement de la sensibilité de nos «  frein  » et
« accélérateur » et du type de stimulation qu’ils reçoivent.
C’est là le mécanisme qui sous-tend le comportement – le pourquoi et le
comment. Et c’est la règle qui gouverne l’histoire que je vais raconter dans
ce livre : nous sommes tous constitués des mêmes éléments, mais en chacun
de nous, ceux-ci sont organisés d’une manière unique qui peut évoluer au
cours de notre vie.
Aucune organisation n’est meilleure ou pire qu’une autre, et aucune
phase de notre vie n’est meilleure ou pire qu’une autre  ; elles sont
simplement différentes. Un pommier peut être en bonne santé, quelle que
soit la variété de pommes qu’il produit, bien qu’une variété puisse avoir
besoin d’un ensoleillement direct constant et qu’une autre préfère un peu
d’ombre. Et un pommier peut être en bonne santé lorsqu’il est une graine,
lorsqu’il est un semis, lorsqu’il pousse et perd ses feuilles à la fin de la
saison, ainsi que lorsqu’il est chargé de fruits à la fin de l’été. Mais il a des
besoins différents à chacune de ces étapes de sa vie.
Vous aussi, vous êtes en bonne santé et normale au début de votre
développement sexuel, à mesure que vous grandissez et que vous portez les
fruits de la vie avec confiance et joie à l’intérieur de votre corps. Vous êtes
en bonne santé lorsque vous avez besoin de beaucoup de soleil, et vous êtes
en bonne santé lorsque vous profitez d’un peu d’ombre. Voilà la véritable
histoire. Nous sommes toutes pareilles. Nous sommes toutes différentes.
Nous sommes toutes normales.

Le déroulé de ce livre
Le livre est divisé en quatre parties : (1) Les bases (pas si basiques) ; (2) Le
sexe en contexte ; (3) Le sexe en action ; et (4) Extase pour toutes.
 
Les trois chapitres de la première partie décrivent le dispositif de base
avec lequel vous êtes née : un corps, un cerveau et un contexte.
Dans le premier chapitre, je parle des organes génitaux – leurs parties,
la signification que nous leur donnons, et les données scientifiques qui
prouvent définitivement que oui, vos organes génitaux sont parfaitement
sains et beaux tels qu’ils sont.
Le chapitre 2 détaille le mécanisme de réponse sexuelle dans le cerveau
– le modèle à double contrôle de l’inhibition et de l’excitation,
autrement dit : le frein et l’accélérateur.
Puis, dans le chapitre 3, je présente la manière dont votre accélérateur et
votre frein sexuels interagissent avec les nombreux autres systèmes
dans votre cerveau et votre environnement, pour déterminer si une
sensation ou une personne particulière vous excite, à cet instant précis.

Dans la deuxième partie, «  Le sexe en contexte  », nous analysons le


fonctionnement de tous les éléments de base dans la réalité de votre vie
actuelle – vos émotions, votre relation, vos sentiments à l’égard de votre
corps et vos attitudes envers le sexe.
Le chapitre  4 se concentre sur deux systèmes émotionnels primaires,
l’amour et le stress, et comment ils peuvent influencer votre réactivité
sexuelle, de manière aussi surprenante que contradictoire.
Le chapitre  5 décrit ensuite les forces culturelles qui façonnent et
limitent le fonctionnement sexuel, et comment vous pouvez maximiser
les aspects positifs de ce processus et surmonter les côtés négatifs. Nous
apprendrons que le contexte – vos circonstances extérieures et votre état
mental actuel  – est aussi déterminant pour votre bien-être sexuel que
votre corps et votre cerveau.

Maîtrisez le contenu de ces chapitres et votre vie sexuelle en sera


transformée – tout comme, très probablement, le reste de votre vie.
 
La troisième partie du livre, «  Le sexe en action  », aborde la réponse
sexuelle elle-même, et j’y démolis deux très vieux mythes bien dangereux.
Le chapitre 6 démontre que le plaisir et le désir sexuels peuvent ou non
avoir un rapport avec ce qui se passe au niveau des organes génitaux.
Nous y apprenons pourquoi la non-concordance de l’excitation, que j’ai
déjà mentionnée, est normale et saine.
Et après avoir lu le chapitre 7, vous n’entendrez plus jamais quelqu’un
dire « pulsion sexuelle » sans penser : « Ah, mais le sexe n’est pas une
pulsion.  » Dans ce chapitre, j’explique comment fonctionne le «  désir
réactif  ». Si vous (ou votre partenaire) avez déjà constaté un
changement dans votre intérêt pour le sexe –  augmentation ou
diminution –, c’est un chapitre important pour vous.

La quatrième partie du livre, « Extase pour toutes », explique comment


faire pour vous approprier entièrement la sexualité, c’est-à-dire comment
créer une extase sexuelle maximale dans votre vie.
Le chapitre 8 traite des orgasmes – ce qu’ils sont, ce qu’ils ne sont pas,
comment en avoir, et comment les rendre aussi fous que ceux dont vous
avez entendu parler, et qui transforment les étoiles en arc-en-ciel.
Enfin, dans le chapitre  9, je décris le point le plus important pour
améliorer votre vie sexuelle. Mais je vais vous le confier tout de suite :
ce qui compte le plus, ce ne sont pas les parties qui vous composent ou
la manière dont elles sont organisées, mais ce que vous ressentez vis-à-
vis de ces parties. Lorsque vous embrassez votre sexualité exactement
comme elle est à cet instant, c’est le contexte qui crée le plus grand
potentiel de plaisir extatique.

Plusieurs chapitres incluent des fiches de travail ou d’autres activités et


exercices interactifs. La plupart sont amusants – comme dans le chapitre 3,
où je vous demande de repenser à ces fois où vous avez eu une expérience
sexuelle géniale et d’identifier ce qui, dans le contexte d’alors, a contribué à
faire de cette expérience un succès. Toutes ces activités changent la science
en un travail pratique qui peut réellement transformer votre vie sexuelle.
Tout au long du livre, vous suivrez l’histoire de quatre femmes : Olivia,
Merritt, Camilla et Laurie. Ces femmes n’existent pas en tant qu’individus ;
elles sont des personnages composites, intégrant les histoires réelles des
nombreuses femmes à qui j’ai enseigné, avec qui j’ai parlé ou échangé des
courriels, et que j’ai soutenues au cours de mes vingt années d’expérience
en tant que sexothérapeute. Imaginez chaque femme comme un collage
façon pêle-mêle : le visage provenant d’une photo, les bras d’une autre, les
pieds d’une troisième… Chaque partie représente quelqu’un de réel, et
l’ensemble a un sens logique, mais j’ai inventé les relations que les parties
ont entre elles.
J’ai choisi de construire ces composites plutôt que de raconter l’histoire
de femmes en particulier pour deux raisons. Premièrement, les gens me
racontent leur histoire en toute confiance et je veux protéger leur identité,
c’est pourquoi j’ai modifié des détails pour que leur histoire reste
confidentielle. Et deuxièmement, je crois pouvoir décrire une bien plus
grande variété d’expériences sexuelles des femmes en me concentrant non
pas sur les récits spécifiques d’une femme en particulier, mais sur ceux,
plus larges, qui partagent les thèmes communs que j’ai croisés dans la vie
de centaines de femmes.
Et enfin, à la fin de chaque chapitre, vous trouverez une rubrique « En
résumé  » dans laquelle sont brièvement cités les messages les plus
importants du chapitre. Si vous vous dites : « Mon amie Alice devrait lire ce
chapitre  » ou «  J’aimerais vraiment que mon partenaire sache ça  », vous
pouvez commencer par leur montrer cette rubrique. Ou, si vous êtes comme
moi et que vous êtes trop emballée par ces idées pour les garder pour vous,
vous pouvez suivre votre partenaire partout dans la maison, en lisant le
contenu de cette rubrique à voix haute et en ajoutant : « Tu vois, chéri, la
non-concordance de l’excitation, c’est bien réel ! » ou « Figure-toi que j’ai
un désir réactif ! » ou « Tu me donnes un excellent contexte, chéri ! ».

Quelques avertissements
Tout d’abord, quand je parle de ce que le sexologue transsexuel S.  Bear
Bergman appelle les « pièces montées en usine » – les détails anatomiques
qui font que les médecins déclarent un bébé « fille » ou « garçon » –, par
souci de clarté et de simplicité, lorsque je parle de ces parties, j’utiliserai les
mots « féminin » ou « masculin », en référence aux catégories biologiques
qui peuvent décrire de nombreuses espèces se reproduisant sexuellement, et
pas seulement les humains. Lorsque je parle d’une personne entière,
j’utiliserai les mots « femme » ou « homme », qui font référence à l’identité
et au rôle social de la personne.
Une autre mise en garde concernant le genre : comme ce livre est fondé
sur la science actuellement disponible, la plupart du temps quand je dis
«  femmes  » dans ce livre, je veux dire des femmes cisgenres, c’est-à-dire
des personnes qui sont nées dans des corps qui ont fait que les adultes
autour d’elles ont déclaré «  C’est une fille  », puis qui ont été élevées
comme des filles et qui se sentent maintenant à l’aise dans le rôle social et
l’identité psychologique de « femme ». Il y a beaucoup de femmes qui ne
possèdent pas une ou plusieurs de ces caractéristiques, et il y a beaucoup de
personnes qui ne s’identifient pas comme « femme » qui répondent à une ou
plusieurs de ces caractéristiques. Les personnes trans et non binaires
méritent également une excellente éducation sexuelle, basée sur la science
et tournée vers le plaisir… et il y a encore trop peu (encore aujourd’hui !)
de recherches sur le fonctionnement sexuel des personnes trans pour que je
puisse dire avec certitude si ce qui est vrai pour le bien-être sexuel des
femmes cisgenres l’est également pour les personnes trans. Je pense que
c’est probablement le cas, et à mesure que la recherche progressera au cours
des prochaines décennies, nous le saurons avec certitude, et je suis
totalement sûre que les personnes de tout sexe, y compris les hommes
cisgenres, peuvent apprendre beaucoup des données scientifiques
existantes, même si elles sont incomplètes. En attendant des recherches plus
nombreuses et de meilleure qualité, je tiens à reconnaître que ce livre repose
sur une science qui est presque entièrement basée sur les personnes
cisgenres.
Troisièmement, je suis passionnée par le rôle de la science dans la
promotion du bien-être sexuel des femmes, et j’ai travaillé dur tout au long
de ce livre pour résumer les recherches afin d’apprendre aux femmes à
vivre en confiance et avec joie dans leur corps. Mais j’ai été très
intentionnelle quant aux détails empiriques que j’ai inclus ou exclus. Je me
suis demandé  : «  Ce fait aide-t-il les femmes à avoir une meilleure vie
sexuelle, ou s’agit-il simplement d’une énigme empirique totalement
fascinante et importante ? »
Et j’ai viré les énigmes.
Je n’ai gardé que la science qui est la plus immédiatement pertinente
dans la vie quotidienne des femmes. Au fil de ces pages, vous ne lirez donc
pas l’histoire exhaustive de la sexualité féminine – je ne suis même pas sûre
qu’elle puisse tenir dans un seul livre. J’ai plutôt intégré les parties de
l’histoire que j’ai trouvées les plus intéressantes dans mon travail de
sexothérapeute, qui consiste à promouvoir le bien-être, l’autonomie et le
plaisir sexuels des femmes.
L’objectif de cet ouvrage est de proposer une nouvelle façon de penser
le bien-être sexuel des femmes, fondée sur la science. Comme toutes les
nouvelles approches, ces pages soulèvent un grand nombre de questions et
bousculent de nombreuses connaissances déjà existantes. Si vous souhaitez
approfondir le sujet, vous trouverez des références dans les notes, ainsi que
des détails sur mon processus de synthèse d’un ensemble complexe et
pluridisciplinaire de recherches pour en obtenir un résultat plus concret.
Si vous vous sentez cassée,
ou connaissez quelqu’un dans
cette situation
Une dernière chose avant de nous lancer dans le chapitre  1. Vous vous
souvenez que j’ai dit qu’on nous a tous menti, mais que ce n’est la faute de
personne  ? Je veux prendre un instant pour reconnaître les dommages
causés par ce mensonge.
Tant de femmes viennent à mes ateliers, à mes cours ou à mes
conférences publiques, convaincues qu’elles sont sexuellement brisées.
Elles se sentent dysfonctionnelles. Anormales. Et en plus de cela, elles sont
anxieuses, frustrées et désespérées par le manque d’information et de
soutien de la part des professionnels de santé, des thérapeutes, de leurs
partenaires, proches et amis.
« Détends-toi, leur a-t-on dit. Prends un verre de vin. »
Ou encore : « Les femmes ont simplement moins envie de sexe. Passez
à autre chose. »
Ou : « Parfois, le sexe fait mal, vous ne pouvez pas passer outre ? »
Je comprends la frustration de ces femmes et leur désespoir. Dans la
seconde moitié du livre, je parle du processus neurologique qui piège les
gens dans la frustration et le désespoir, les coupant de l’espoir et de la joie,
et je décris des moyens scientifiques pour sortir de ce piège.
Voici ce que vous devez savoir dès maintenant  : les informations
contenues dans ce livre vous montreront que tout ce que vous vivez dans
votre sexualité – qu’il s’agisse de défis liés à l’excitation, au désir, à
l’orgasme, à la douleur, à l’absence de sensations sexuelles, ou autre – est le
résultat d’un mécanisme de réponse sexuelle qui fonctionne de manière
adéquate… dans un monde inadéquat.

Vous êtes normale : c’est le monde qui vous entoure qui est cassé.


Et ça, c’est la mauvaise nouvelle.
La bonne nouvelle, c’est que, lorsque vous comprenez comment
fonctionne votre mécanisme de réponse sexuelle, vous pouvez commencer
à reprendre le contrôle de votre environnement et de votre cerveau afin de
maximiser votre potentiel sexuel, même dans un monde brisé. Et lorsque
vous modifiez votre environnement et votre cerveau, vous pouvez changer
– et guérir – votre fonctionnement sexuel.
J’en ai été témoin  : cet ouvrage contient des informations qui ont
transformé le bien-être sexuel de nombreuses femmes. Je l’ai vu
transformer la compréhension qu’ont les hommes de leurs partenaires
féminines. J’ai vu des couples de même sexe se regarder et se dire : « Oh,
mais alors c’est ça qui se passait. » Des étudiants, des amis, des lecteurs de
blogs et même des collègues sexothérapeutes ont lu ce livre ou m’ont
entendue lors d’une conférence et se sont exclamés : « Pourquoi personne
ne m’a dit ça avant ? Ça explique tout ! »
Je suis sûre que ce que j’ai écrit dans ce livre peut vous aider. Il ne
suffira peut-être pas à guérir toutes les blessures infligées à votre sexualité
par une culture dans laquelle il semble parfois presque impossible pour une
femme de vivre sa sexualité correctement, mais il vous fournira des outils
puissants pour vous aider à guérir.
Comment puis-je en être certaine ?
J’ai des preuves, bien sûr !
À la fin d’un semestre de fac, j’ai demandé à mes 187  étudiantes de
noter une information vraiment importante apprise dans mon cours. Voici
un petit échantillon :
« Je suis normale ! »

« JE SUIS NORMALE »

«  J’ai appris que tout est NORMAL, ce qui permet d’avancer dans ma vie avec
confiance et joie. »

«  J’ai appris que je suis normale  ! Et j’ai appris que certaines personnes ont un désir
spontané et d’autres un désir réactif, et ça m’a aidée à vraiment comprendre ma vie
sexuelle. »

« Les femmes varient ! Et ce n’est pas parce que je ne vis pas ma sexualité de la même
manière que plein d’autres femmes que je suis anormale. Le désir sexuel, l’excitation, la
réponse, etc. des femmes sont incroyablement variables. »

« La seule chose sûre en matière de sexualité, c’est que les gens sont très différents les
uns des autres. »

« Que tout le monde est différent et que tout est normal, qu’il n’y a pas deux personnes
identiques. Il n’y en a pas deux pareils ! »

Et bien d’autres encore. Plus de la moitié de mes élèves ont écrit une
version personnelle de « Je suis normale ».
Je me suis assise dans mon bureau et j’ai lu ces réponses les larmes aux
yeux. Il était urgent que mes élèves se sentent «  normales  » et, d’une
certaine manière, mon cours avait ouvert la voie à cette idée.
La science du bien-être sexuel des femmes est récente, et il y a encore
beaucoup à apprendre. Mais cette jeune science a déjà découvert des vérités
sur la sexualité des femmes qui ont transformé la relation de mes élèves à
leur corps – et elle a certainement transformé la mienne.

J’ai écrit ce livre pour partager la science, les histoires et les idées
positives sur la sexualité qui nous prouvent que, malgré tous les
efforts de notre culture pour nous faire sentir cassées,
dysfonctionnelles, mal-aimées et peu dignes d’être aimées, nous
sommes en fait absolument capables d’avoir des relations sexuelles
confiantes et joyeuses.

Je vous fais la promesse suivante  : peu importe où vous en êtes dans


votre parcours sexuel en cet instant, que vous ayez une vie sexuelle géniale
et que vous souhaitiez accroître encore cette génialité, ou que vous galériez
et que vous souhaitiez trouver des solutions, vous apprendrez au fil de ces
pages quelque chose qui améliorera votre vie sexuelle et vous permettra de
comprendre ce que signifie être un être sexuel. Et vous découvrirez que,
même si vous ne le ressentez pas encore, vous êtes déjà sexuellement
entière et en bonne santé.
C’est ce que dit la science. Je peux le prouver.
PREMIÈRE PARTIE

LES BASES
(PAS SI BASIQUES)
CHAPITRE 1

Anatomie
Pas deux pareilles
Olivia aime se regarder dans la glace quand elle se masturbe.
Comme beaucoup d’autres femmes, Olivia se touche allongée sur le dos, et caresse son
clitoris de la main. Contrairement à beaucoup d’autres femmes, elle se relève sur un coude
devant son miroir en pied et observe ses doigts bouger dans les replis de sa vulve.
«  J’ai commencé à l’adolescence, m’a-t-elle confié. J’avais vu du porno sur Internet, et
j’étais curieuse de savoir à quoi je ressemblais, alors j’ai pris un miroir et j’ai écarté mes lèvres
pour pouvoir voir mon clitoris, et comment dire ? Ça m’a fait du bien, alors j’ai commencé à me
masturber. »
Elle ne se masturbe pas seulement ainsi. Elle aime aussi le spray « en jet » du pommeau de
douche, elle a une petite armée de vibromasseurs à sa disposition, et a passé plusieurs mois à
apprendre toute seule à avoir des orgasmes «  respiratoires  »  : jouir sans toucher du tout son
corps.
C’est le genre de choses que les femmes vous racontent quand vous êtes sexothérapeute.
Elle m’a également dit que l’observation de sa vulve l’avait convaincue que sa sexualité
ressemblait davantage à celle d’un homme, parce que son clitoris était relativement gros –
« comme une mini carotte, ou presque » – ce qui, a-t-elle conclu, la rendait plus masculine. S’il
était plus gros, c’est parce qu’elle avait plus de testostérone, ce qui faisait d’elle une femme
excitée.
Je lui ai dit :
« En fait, il n’existe aucune preuve d’un lien entre les niveaux d’hormones d’une femme
adulte, la forme ou la taille de ses organes génitaux et son désir sexuel.
– Tu es sûre de ça ? m’a-t-elle demandé.
– Eh bien, certaines femmes ont un désir “dose-dépendant de la testostérone”, ai-je ajouté
en y réfléchissant, ce qui signifie qu’elles ont besoin d’avoir un minimum de T mais ce n’est pas
la même chose qu’un taux de testostérone élevé. Et la distance entre le clitoris et l’urètre permet
de prédire de manière fiable l’orgasme d’une femme pendant les rapports sexuels, mais c’est
1
une tout autre chose . Je serais fascinée de lire une étude qui poserait directement cette
question, mais les preuves disponibles suggèrent que la variation des formes, tailles et couleurs
des organes génitaux des femmes ne prédit en rien son niveau d’intérêt sexuel.
– Oh », a-t-elle répondu.
Et cette seule syllabe m’a fait comprendre que je n’avais pas compris ce qu’elle voulait
dire.
Olivia est une étudiante diplômée en psychologie – une de mes anciennes étudiantes, une
activiste qui s’intéresse aux questions de santé reproductive des femmes, et qui fait maintenant
ses propres recherches, c’est d’ailleurs ainsi que nous avons commencé cette conversation –
alors je me suis emballée et laissée aller à parler science. Mais avec son «  oh  » réservé, j’ai
réalisé que, pour Olivia, ce n’était pas une question de science. Pour elle, il s’agissait d’un
combat personnel pour accepter son corps et sa sexualité tels qu’ils sont, alors qu’une immense
partie de sa culture essaie de la convaincre que quelque chose ne va pas chez elle.
Alors je lui ai dit :
«  Tu sais, ton clitoris est tout à fait normal. Les parties génitales de chacune sont
composées des mêmes éléments, mais organisées de manière différente. Les différences n’ont
pas forcément un sens quelconque, ce ne sont que des variations du beau et du sain. En fait, ai-
je poursuivi, ça pourrait bien être le point le plus fondamental à apprendre sur la sexualité
humaine.
– Vraiment ? a-t-elle demandé. Pourquoi ? »
Ce chapitre répond à cette question.

Les anatomistes médiévaux appelaient les organes génitaux externes des


femmes « pudendum », un mot dérivé du latin pudere, qui signifie « avoir
honte ». Nos organes génitaux ont ainsi été nommés « à cause de la honte
éprouvée par les femmes à les montrer 2 ».
Attendez : Quoi ?
Le raisonnement a été le suivant : les organes génitaux des femmes sont
enfouis entre leurs jambes, comme s’ils voulaient être cachés, alors que les
organes génitaux des hommes sont tournés vers l’avant, pour que tout le
monde puisse les voir. Et pourquoi les organes génitaux des hommes et des
femmes seraient-ils ainsi différents  ? Si vous êtes anatomiste médiéval,
imprégné d’une éthique sexuelle de la pureté, c’est à cause de la honte.
Maintenant, si nous supposons que la «  honte  » n’est pas vraiment la
raison pour laquelle les organes génitaux des femmes sont tournés vers
l’intérieur du corps – et j’espère que c’est évident pour tout le monde que la
honte n’est pas la vraie raison – pourquoi, biologiquement, les organes
génitaux masculins sont-ils devant et les organes génitaux féminins en
dessous ?
La réponse est : ce n’est pas le cas ! L’équivalent féminin du pénis – le
clitoris – est bien placé juste devant, à l’endroit où se trouve le pénis. C’est
seulement moins évident que pour le pénis parce qu’il est plus petit – et il
est plus petit non pas parce qu’il est timide ou honteux, mais parce que les
femmes n’ont pas à transporter d’ADN de l’intérieur de leur corps jusqu’à
l’intérieur du corps de quelqu’un d’autre. Et l’équivalent féminin du
scrotum – les grandes lèvres – est également situé à peu près au même
endroit que le scrotum, mais parce que les gonades féminines (les ovaires)
sont internes, plutôt qu’externes comme les testicules, les lèvres ne
dépassent pas beaucoup du corps, et sont donc moins visibles. Là encore,
les ovaires ne sont pas internes par honte, mais parce que c’est nous les
femmes qui portons les futurs bébés.
En résumé, les organes génitaux féminins n’apparaissent « cachés » que
si vous les regardez à travers le prisme d’hypothèses culturelles plutôt
qu’avec les yeux de la biologie.
Nous le verrons encore et encore tout au long du livre  : la culture
s’empare d’un fait biologique quelconque et tente de lui donner un Sens,
avec un S majuscule. Nous créons des métaphores avec les organes
génitaux, nous cherchons à quoi ils ressemblent plutôt que ce qu’ils sont
vraiment, nous leur ajoutons un sens culturel, comme Olivia a superposé le
sens de « masculin » sur son grand clitoris, pour conclure que son anatomie
disait d’elle une chose importante, la définissant comme sexuellement
masculine.
Lorsque vous serez capable de voir votre corps tel qu’il est, plutôt que
tel que la culture le décrit, et lui donne un Sens, vous constaterez à quel
point il est plus facile de vivre et d’aimer vos organes génitaux, ainsi que le
reste de votre sexualité, tels qu’ils sont.
Dans ce chapitre, nous allons donc étudier nos organes génitaux en
gardant une approche biologique, sans tenir compte de la culture. Tout
d’abord, je vais vous expliquer comment les organes génitaux masculins et
féminins sont constitués des mêmes parties, mais organisés de manière
différente. Je vous montrerai à quel sujet la biologie dit une chose, et la
culture une autre, et vous pourrez décider ce qui vous semble le plus sensé.
Je montrerai comment l’idée de parties identiques, organisées de différentes
façons, dépasse largement notre anatomie pour s’étendre à tous les aspects
de la réponse sexuelle humaine, et je ferai valoir que c’est peut-être la chose
la plus importante que vous apprendrez de toute votre vie au sujet de votre
sexualité.
Enfin, je proposerai une nouvelle métaphore centrale pour remplacer
toutes celles, farfelues, partiales ou absurdes, que la culture a essayé
d’imposer au corps des femmes. Mon objectif au fil de ce chapitre est de
présenter une autre façon de considérer votre corps et votre sexualité, afin
que vous puissiez vous identifier à votre corps selon vos propres termes,
plutôt que ceux imposés par autrui.

Au commencement
Imaginez deux ovules fécondés qui viennent de s’implanter dans un utérus.
L’un est XX (génétiquement féminin) et l’autre est XY (génétiquement
masculin). Des faux jumeaux, une sœur et un frère. Visages, doigts et pieds
– les frères et sœurs développeront tous les mêmes parties du corps, mais
ces parties seront organisées différemment, pour leur donner des corps
individuels qui les distingueront instantanément l’un de l’autre en
grandissant. Et tout comme leurs visages auront chacun deux yeux, un nez
et une bouche, tous disposés plus ou moins aux mêmes endroits, leurs
organes génitaux auront tous les mêmes éléments de base, organisés à peu
près de la même manière. Mais contrairement à leurs visages, leurs doigts et
leurs pieds, leurs organes génitaux se développeront avant la naissance dans
des configurations que leurs parents décriront spontanément comme étant
de sexe masculin ou féminin.
Voici comment ça se passe. Environ six semaines après l’implantation
de l’ovule fécondé dans l’utérus, on assiste à une vague d’hormones
masculinisantes.
Ce sont exactement les mêmes parties, organisées de manière différente. Les parties
génitales de chaque corps sont les mêmes jusqu’à la sixième semaine de gestation, lorsque
le matériel génital universel commence à s’organiser selon une configuration féminine ou
masculine.

Le blastocyste masculin (un groupe de cellules qui deviendra


l’embryon) réagit à cette vague en développant son matériel génital
universel « préfabriqué » dans la configuration masculine avec un pénis,
des testicules et un scrotum.
Le blastocyste femelle ne réagit pas du tout à cette avalanche
hormonale, et développe plutôt son matériel génital universel
préfabriqué dans la configuration féminine avec un clitoris, des ovaires
et des lèvres.

BIENVENUE DANS LE MONDE


MERVEILLEUX DE L’HOMOLOGIE
BIOLOGIQUE !
Les homologues sont des traits qui ont les mêmes origines biologiques, mais qui peuvent
avoir des fonctions différentes. Chaque partie des organes génitaux externes trouve son
homologue chez l’autre sexe. J’ai déjà mentionné deux d’entre eux : les organes génitaux
masculins et féminins ont tous deux un organe rond, très sensible, à plusieurs chambres,
vers lequel le sang afflue pendant l’excitation sexuelle. Sur les corps féminins, c’est le
clitoris ; sur les corps masculins, le pénis. Et chacun possède un organe doux, extensible et
dont les poils grossiers poussent après la puberté. Sur les corps féminins, ce sont les lèvres
externes (grandes lèvres)  ; sur les corps masculins, le scrotum. Ces parties ne se
ressemblent pas seulement superficiellement, elles sont aussi développées à partir du même
tissu fœtal. Si vous regardez de près un scrotum, vous remarquerez une ligne qui le traverse
en son centre, le raphé scrotal. C’est là que le scrotum se serait divisé en lèvres si la chimie
ou les chromosomes avaient été un peu différents.
L’homologie est aussi la raison pour laquelle le frère et la sœur auront tous deux des
mamelons. Les mamelons des femelles sont vitaux pour la survie de presque toutes les
espèces de mammifères, y compris les humains (bien qu’une poignée de vieux
mammifères, comme l’ornithorynque, n’aient pas de mamelons, et se contentent de laisser
suinter le lait de leur abdomen), de sorte que l’évolution a développé les mamelons dès le
tout début de notre développement fœtal. Ça demande bien moins d’énergie de les laisser
là que de faire l’effort de les supprimer – l’évolution est aussi paresseuse que possible – de
sorte que les mâles et les femelles ont des mamelons. Mêmes origines biologiques –
fonctions différentes.

Le clito, tout le clito, rien que le clito


Le clitoris et le pénis sont les organes génitaux externes les plus riches en
terminaisons nerveuses. La partie visible du clitoris, le gland clitoridien, est
située tout en haut des organes génitaux, à une certaine distance de l’orifice
vaginal, comme vous le remarquerez. (Cette information sera fondamentale
lorsque je parlerai de l’orgasme, au chapitre 8.)
Le clitoris est fondamental dans la sexualité.
C’est votre Aéroport international de la sensation érotique. En
moyenne, il mesure un huitième de la taille d’un pénis, mais avec des
terminaisons nerveuses presque deux fois plus longues. Il peut avoir la taille
d’un petit pois à peine visible ou d’un cornichon de taille moyenne, ou
n’importe où entre les deux, et c’est tout à fait normal, et parfaitement
splendide.
Contrairement au pénis, le clitoris n’a qu’une fonction : la sensation. Le
pénis a quant à lui quatre fonctions  : la sensation, la pénétration,
l’éjaculation et la miction.
Deux modes de fonctionnement différents, une origine biologique
commune.
La partie visible du clitoris – le gland – n’est en fait que la tête du
clitoris, tout comme le gland – le capuchon vaguement en forme de gland
(le fruit du chêne) situé à l’extrémité du pénis – n’en est que la tête. Mais il
y a bien plus que ce simple gland. Le corps du pénis est largement connu et
constitué de trois chambres : deux corps caverneux (corpora cavernosa) et
un corps spongieux (corpus spongiosum) parcouru sur sa longueur par
l’urètre. Ces trois chambres s’étendent toutes trois profondément dans le
corps. Le corps spongieux se termine dans le bulbe du pénis, au cœur du
bassin. Les corps caverneux se séparent en s’étendant et se fixant à l’os
pelvien.
Communément, le clitoris est considéré comme «  le petit bout au
sommet de la vulve  ». Mais d’un point de vue biologique, le clitoris
ressemble plus à «  une structure anatomique interne de grande envergure
avec une tête qui émerge au sommet de la vulve  ». Comme le pénis, le
clitoris est composé de trois chambres  : une paire de piliers (crura) qui
s’étendent profondément dans les tissus de la vulve, homologues au corps
caverneux, et les bulbes du vestibule, homologues aux corps spongieux,
notamment au bulbe du pénis. Le vestibule est l’orifice du vagin ; les bulbes
partent de la tête du clitoris pour s’étendre profondément à l’intérieur du
tissu de la vulve, puis se séparent pour chevaucher l’urètre (dont l’orifice
est le méat urinaire) et le vagin. Vous avez bien lu  : le clitoris s’étend
jusqu’à l’ouverture du vagin.
Le capuchon clitoridien recouvre la tête du clitoris, tout comme son
homologue, le prépuce, recouvre la tête du pénis. Et le frenulum masculin –
le «  point Y  » près du gland, où le prépuce s’attache à la tige – est
l’homologue de la fourchette féminine, la cambrure des tissus sur le bord
inférieur du vagin. C’est sur tous les corps un élément très sensible et
largement sous-estimé.

La définition culturelle du « clitoris » est souvent limitée à sa partie externe, le gland. La


définition biologique comprend une vaste panoplie de tissus érectiles internes qui
s’étendent jusqu’à l’ouverture vaginale.
Comme pour le clitoris, la définition culturelle du « pénis » se limite à la partie externe, le
gland et le corps long. Or, comme le clitoris, le pénis a des tissus érectiles internes. Toutes
les mêmes parties, organisées de manière différente.

Faites connaissance avec votre clitoris


Si vous n’avez jamais rencontré votre clitoris «  en personne  », c’est le
moment. (Même si vous avez déjà eu de bonnes discussions avec votre
clitoris par le passé, n’hésitez pas à profiter de cette occasion pour faire à
nouveau plus ample connaissance.) Vous pouvez le retrouver avec les yeux
ou la main. Après avoir lu les deux paragraphes suivants, posez ce livre et
essayez l’une ou l’autre méthode.
Pour le trouver des yeux, prenez un miroir, écartez vos lèvres (les
grandes lèvres extérieures, douces et poilues de votre vulve), et
regardez-les réellement. Vous verrez un renflement au sommet de votre
vulve.
Vous pouvez aussi le trouver avec les doigts. Commencez par glisser le
bout du majeur jusqu’à la fente où se divisent vos lèvres. Appuyez
doucement, bougez d’avant en arrière et faites glisser le bout de votre
doigt lentement entre vos lèvres jusqu’à ce que vous sentiez un petit
bouton caoutchouteux sous la peau. Il peut être utile d’étirer votre peau
en tirant la peau du pubis vers le haut avec votre autre main. Il peut
également être utile de lubrifier votre doigt avec de la salive, un
lubrifiant commercial, une crème pour les mains sans allergènes ou
même un peu d’huile de coco.

Si je vous invite à regarder votre clitoris, c’est pour une raison bien
précise : une étudiante est venue me voir un soir à la fin de mon cours et
m’a dit qu’elle avait fait un Skype avec sa mère, et qu’elles avaient parlé
des cours qu’elle suivait ce semestre-là, parmi lesquels mon cours intitulé
«  La sexualité des femmes  ». L’étudiante a mentionné à sa mère que mes
diapositives de cours comprenaient des photos réelles de vulves, ainsi que
des diagrammes et des illustrations. Et sa mère lui a confié une chose des
plus étonnantes : « Je ne sais pas où se trouve le clitoris. »
Sa mère avait 54 ans.
Alors mon étudiante a envoyé par e-mail à sa mère mes diapositives de
cours.
C’est pour cette raison que le premier chapitre de ce livre est consacré à
l’anatomie. Cette histoire me donne envie d’imprimer des T-shirts avec le
dessin d’une vulve et une flèche pointant vers le clitoris, en indiquant  :
«  C’EST JUSTE ICI.  » Elle me donne envie de distribuer des brochures aux
coins des rues avec des instructions pour localiser son propre clitoris, à la
fois manuellement et visuellement. Je veux un GIF animé d’une femme
pointant son clitoris et qu’il devienne viral sur Internet. Je veux un panneau
d’affichage à Times Square. Je veux que tout le monde le sache.
Mais plus encore, je veux que toutes les femmes qui lisent ces pages
s’arrêtent immédiatement et regardent directement leur clitoris. Savoir où se
trouve le clitoris est important, mais savoir où se trouve votre clitoris… là
réside le pouvoir. Prenez un miroir et regardez votre clitoris, en l’honneur
de cette étudiante et de sa courageuse et incroyable mère.
Quand j’ai regardé mon clitoris pour la première fois, pendant ma
première formation de sexothérapeute, j’ai pleuré pour de vrai. J’avais
18 ans, j’étais dans une relation difficile et je cherchais des réponses. Et ma
prof m’avait dit : « Quand tu rentreras chez toi ce soir, prends un miroir et
trouve ton clitoris. » Alors c’est ce que j’ai fait. Et j’ai été sidérée jusqu’aux
larmes de découvrir qu’il n’y avait rien de dégoûtant ou de bizarre, c’était
juste… une partie de mon corps. Qui m’appartenait.
Ce moment a préparé le terrain pour une décennie de découvertes et de
redécouvertes d’une simple vérité  : ma meilleure source de connaissance
sur ma sexualité, c’était mon propre corps.
Alors, allez voir votre clitoris.
Et tant que vous êtes dans le coin, regardez aussi le reste de votre
vulve !
J’adore avoir des élèves non traditionnels dans ma classe – ceux qui ne sont pas dans cette
tranche d’âge allant de 18 à 22 ans – et Merritt était aussi non traditionnelle que possible : une
lesbienne périménopausée autrice d’un livre érotique gay, mère d’une fille adolescente qu’elle
élevait avec sa partenaire depuis près de vingt ans. J’étais suffisamment mal informée lorsque je
l’ai rencontrée pour être surprise lorsqu’elle m’a avoué que ses parents coréens étaient des
chrétiens fondamentalistes et qu’elle avait grandi dans un milieu social conservateur par
excellence. Ce qui avait rendu d’autant plus remarquable son coming  out, son écriture et sa
présence dans ma classe.
À 42 ans, Merritt n’avait jamais songé à examiner son clitoris. Ça ne lui avait même pas
effleuré l’esprit avant que je le lui suggère lors de mon premier cours magistral, comme je le
fais chaque année. Elle est venue me voir après le cours et m’a demandé :
« Est-ce vraiment une bonne idée de suggérer à des enfants aussi jeunes de regarder leur
corps ? Et s’ils… se renferment ?
– C’est une question vraiment importante, lui ai-je répondu. Personne ne m’a jamais parlé
d’une telle expérience, mais ce n’est pas une obligation, alors peut-être que les personnes les
plus susceptibles d’avoir cette expérience ne la tentent pas. C’est quand même une chose que je
recommande, surtout pour les étudiantes qui prévoient de continuer dans le domaine de la santé
publique ou de la médecine, mais c’est à chacune de décider si elle veut essayer ou non. »
Merritt a choisi de ne pas le faire.
Au lieu de cela, elle a demandé à sa partenaire, Carol, de la regarder, ce qui, d’une certaine
manière, est encore plus courageux que de le faire soi-même, et elle a regardé le clitoris de sa
partenaire. Puis elles ont discuté de ce qu’elles avaient vu et du fait qu’elles n’avaient jamais
pris le temps de regarder délibérément leur corps sexuel et d’en parler. Et Merritt a appris un
truc remarquable, qu’elle m’a confié la semaine suivante :
«  Carol m’a dit qu’elle avait déjà regardé sa vulve  ! Elle faisait partie d’un groupe de
conscientisation féministe dans les années 1980, et elles s’étaient toutes réunies en cercle avec
leur miroir à main.
– Ouah ! » me suis-je écriée, et je le pensais vraiment.
Elle a tendu les mains, les paumes vers le haut, soupesant ses sentiments.
« Je ne sais pas pourquoi ce genre de choses est beaucoup plus difficile pour moi que pour
elle. En matière de sexe, j’ai toujours l’impression d’être au bord d’une falaise, à mouliner dans
le vide avec mes bras. »
L’ambivalence dont Merritt a fait l’expérience est tout à fait normale pour toute personne
dont la famille d’origine lui a appris que le sexe doit s’inscrire dans un certain lieu défini de la
vie et nulle part ailleurs. Mais pour Merritt, cela avait aussi un sens pour d’autres raisons, liées à
la configuration de son cerveau. J’en parlerai au chapitre 2.

Les lèvres, grandes et petites


Les lèvres intérieures des femmes (labia minora ou « petites lèvres »)
peuvent ne pas être vraiment « intérieures », mais s’étendre au-delà des
grandes lèvres – ou elles peuvent se replier, rester cachées à l’intérieur
de la vulve jusqu’à ce que vous décidiez de les débusquer. Les petites
lèvres peuvent être d’une seule couleur homogène ou présenter un
dégradé de couleur, s’assombrissant vers les extrémités. Toutes ces
variations sont normales, saines et belles. Longues, courtes, roses,
beiges, brunes – tout cela est normal.
Les lèvres externes ou grandes lèvres varient également d’une personne
à l’autre. Certaines sont densément poilues, les poils s’étendant sur la
cuisse et autour de l’anus, tandis que d’autres ont une faible pilosité.
Certaines grandes lèvres sont assez boursouflées, tandis que d’autres
sont relativement au ras du corps. Certaines sont de la même couleur
que la peau tout autour, tandis que d’autres sont plus foncées ou plus
claires. Toutes sont normales, toutes sont belles.

Comme pour le clitoris, la vision culturelle des lèvres ne correspond pas


à leur réalité biologique. Les vulves dans le porno soft peuvent être
modifiées numériquement pour se conformer à une norme spécifique de
lèvres « serrées » et de couleurs homogènes, pour être « moins définies » 3.
Cela signifie que les représentations culturelles des vulves sont limitées à
une gamme assez restreinte. En réalité, il existe une grande variété de
parties génitales – et aucune condition médicale n’est associée à la quasi-
totalité de cette diversité. Mais ces représentations limitées du corps des
femmes peuvent réellement modifier la perception qu’ont les femmes de ce
à quoi ressemble une vulve « normale » 4.
Ainsi, si vous décidez d’examiner la vulve de quelqu’un d’autre –  ce
que je recommande vivement, soit dit en passant, mais seulement avec son
consentement enthousiaste  –, vous remarquerez à quel point elles sont
toutes très, très différentes les unes des autres. Il est rare de trouver les
vulves bien lisses et soignées qui figurent dans Playboy.
À moins que vous ne ressentiez des douleurs (et si c’est le cas,
consultez votre médecin !), vos organes génitaux sont parfaits tels
qu’ils sont.

Toutes les vérités sur l’hymen


Vous pouvez avoir ou non un hymen, cette fine membrane située le long du
bord inférieur de votre ouverture vaginale. Que vous en ayez un ou non, je
vous garantis que pratiquement tout ce que vous avez appris sur l’hymen est
faux 5.
Voici ce qui se rapproche le plus de la vérité  : pendant les rapports
sexuels, l’hymen peut être douloureux s’il n’est pas habitué à être étiré –
c’est l’une des nombreuses sources potentielles de douleur lors de la
pénétration, mais ce n’est pas la plus courante. (La plus fréquente, c’est le
manque de lubrification.)
Mais l’hymen ne se rompt pas et ne reste pas déchiré à jamais, comme
une sorte de sceau de fraîcheur. Si un hymen se déchire ou se meurtrit, il
guérit. Et la taille de l’hymen ne varie pas selon que le vagin a été pénétré
ou non 6. En outre, il ne saigne généralement pas. Le sang qui coule
éventuellement lors de la première pénétration est plus probablement dû à
une déchirure vaginale consécutive à un manque de lubrification qu’à une
lésion de l’hymen.
Ce qui change lorsqu’un vagin commence à avoir son hymen étiré
régulièrement, c’est que celui-ci gagne en souplesse. Et comme les
hormones changent après la fin de l’adolescence (vers 25 ans), l’hymen est
alors susceptible de s’atrophier et de devenir beaucoup moins visible – s’il
l’avait jamais été.
L’hymen est un autre exemple de l’immense variabilité des organes
génitaux féminins. Certaines d’entre nous naissent sans hymen. D’autres
ont des hymens non perforés (une membrane mince mais solide couvrant
toute l’ouverture vaginale) ou des hymens microperforés (de nombreux
petits trous dans une membrane par ailleurs solide). Certaines ont des
hymens à pont, qui ressemblent à un lambeau de peau s’étirant de part et
d’autre du vagin. Certains hymens sont durables, d’autres sont fragiles.
Certains disparaissent au début de l’adolescence, et d’autres sont encore
visibles une fois la ménopause atteinte.
Les hymens varient car, pour autant que la science ait pu le constater, il
n’a pas été spécialement sélectionné au cours de l’évolution. Il n’a aucune
fonction reproductive ou autre. C’est un accessoire, un petit bonus oublié là
par la force irrépressible de la sélection par l’évolution, comme les tétons
mâles. C’est en fait l’homologue du colliculus séminal, un monticule dans
la paroi de l’urètre, où l’urètre masculin traverse la prostate et rejoint les
canaux séminaux.
L’hymen est un exemple éloquent de la manière dont l’homme
métaphorise l’anatomie. Voici un organe qui n’a aucune fonction
biologique, et pourtant la culture occidentale a inventé une histoire
puissante autour de l’hymen il y a fort longtemps. Cette histoire n’a rien à
voir avec la biologie et tout à voir avec le contrôle des femmes. La culture a
vu une « barrière » à l’entrée du vagin et a décidé que c’était un marqueur
de la «  virginité  » (elle-même une idée biologiquement dénuée de sens).
Une idée aussi étrange n’aurait pu être inventée que dans une société où les
femmes étaient littéralement des possessions, et leur vagin leur bien
immobilier le plus précieux – un quartier sécurisé.
Même si l’hymen ne remplit aucune fonction physique ou biologique,
de nombreuses cultures ont créé des mythes autour de lui, si bien qu’il
existe même aujourd’hui des opérations chirurgicales pour « reconstruire »
l’hymen, comme s’il s’agissait d’une nécessité médicale. (Quid de la
chirurgie pour parfaire les mamelons des hommes ?)
D’une certaine manière, l’hymen peut être important pour la santé des
femmes  : certaines sont battues, voire tuées, parce qu’elles n’en ont pas.
D’autres entendent qu’elles «  n’ont pas pu être violées  » parce que leur
hymen est intact. Pour elles, l’hymen a un réel impact sur leur bien-être
physique, non pas à cause de leur anatomie mais à cause de ce que leur
culture suppose de cette anatomie…

Un mot sur les mots
Une dernière chose au sujet des organes génitaux externes  : le mot
désignant l’ensemble des organes génitaux externes féminins est « vulve ».
«  Vagin  » fait référence au canal de reproduction interne qui mène à
l’utérus. Les gens utilisent souvent le terme «  vagin  » pour désigner la
vulve, mais maintenant vous ne ferez plus cette erreur. Et si vous vous tenez
nue devant un miroir et que vous voyez le triangle classique  : c’est votre
mont du pubis ou mont de Vénus.
C’est bon pour tout le monde ?
Vagin = canal de reproduction
Vulve = organes génitaux externes
Mont = zone au-dessus de l’os pubien où poussent les poils

Je ne vous recommande pas de corriger les gens qui utilisent les


mauvais mots ni de vous pointer à une représentation des Monologues du
vagin avec des pancartes disant : « En fait, il faut dire Les monologues de la
vulve  », mais vous savez maintenant quels mots vous devez utiliser. Vous
n’appelleriez pas votre visage ou votre front votre gorge, n’est-ce pas  ?
Alors, n’appelons pas la vulve ou le mont «  vagin  ». Rendons le monde
meilleur pour les vulves !

Tout sur les fluides
Les vulves possèdent un ensemble de glandes situées de part et d’autre de
l’orifice du vagin, appelées glandes de Bartholin, qui libèrent des fluides
pendant l’excitation sexuelle – peut-être pour réduire la friction de la
pénétration vaginale, peut-être pour créer une odeur qui communique l’état
de santé et de fertilité. Lorsque les organes génitaux féminins « mouillent »,
c’est ce qui se passe. Et il s’avère que les corps masculins et féminins
« mouillent ». L’homologue masculin, la glande de Cowper, située juste en
dessous de la prostate, produit le liquide pré-éjaculatoire autrement plus
connu sous le nom de liquide préséminal.
Pourquoi dit-on que le pénis «  durcit  » et le vagin «  mouille  » (ou se
lubrifie), alors que, d’un point de vue biologique, les organes génitaux
masculins et féminins durcissent et se lubrifient aussi bien l’un que l’autre ?
C’est encore une fois une question de culture. La « dureté » (l’érection) de
l’homme est une condition préalable nécessaire aux rapports sexuels, et la
«  lubrification  » est considérée comme une indication qu’une femme est
« prête » à avoir des rapports sexuels (même si au chapitre 6, nous verrons à
quel point cela peut être faux). Comme la pénétration est supposée être le
centre de l’univers sexuel, nous avons métaphoriquement défini la dureté
masculine et la lubrification féminine comme les indicateurs ultimes de
l’excitation. Mais comme pour nos anatomies, nos physiologies sont toutes
les deux constituées des mêmes composants  : modifications de l’afflux
sanguin, production de sécrétions génitales, etc. Nous mettons l’accent sur
la dureté masculine et sur la lubrification féminine, mais la lubrification
masculine se produit également, tout comme la dureté féminine.
Les vulves possèdent également un ensemble de glandes situées à
l’embouchure de l’urètre, l’orifice par lequel nous urinons, appelé glandes
de Skene (ou para-urétrales). Ce sont les homologues de la prostate
masculine. La prostate a deux fonctions : elle gonfle autour de l’urètre, de
sorte qu’il est difficile, voire impossible, d’uriner pendant l’excitation
sexuelle, et elle produit environ la moitié du liquide séminal qui sert au
transport des spermatozoïdes. En d’autres termes, elle fait éjaculer. Les
glandes de Skene gonflent également autour de l’urètre, ce qui rend difficile
la miction lorsque vous êtes très excitée. Si vous avez déjà essayé de faire
pipi juste après avoir eu un orgasme, vous avez été directement confrontée à
ce problème  : vous devez prendre plusieurs respirations profondes et
relaxantes pour donner à vos organes génitaux le temps de se détendre.
Parfois, les glandes de Skene produisent un fluide, qui est probablement
une source d’« éjaculation féminine ». L’éjaculation féminine – on entend
parfois le terme squirt, ou « gicler » – a attiré l’attention ces derniers temps,
en partie parce que des recherches plus poussées ont été menées à ce sujet,
et en partie parce qu’elle a été mise en avant dans les films pornos. Résultat,
on me pose assez régulièrement des questions à ce sujet. En fait, un jour, il
y a quelques années, je me suis rendue dans une résidence étudiante pour
répondre à des questions anonymes, et j’ai découvert qu’une étudiante avait
posé la question «  Comment apprendre à gicler  ?  » et qu’une autre avait
écrit « Comment arrêter de gicler ? » 7.
Il va sans dire que notre culture envoie des messages contradictoires
aux femmes sur leurs fluides génitaux… ou leur manque de fluides
génitaux. D’une part, l’éjaculation est considérée comme un événement
typiquement masculin et les organes génitaux des femmes sont, vous savez,
honteux, de sorte qu’il est inacceptable qu’un corps féminin fasse une chose
aussi impétueuse et mouillée. D’autre part, c’est un phénomène
relativement rare, et la recherche perpétuelle de la nouveauté, associée à
une dynamique de base de l’offre et de la demande, fait que la rareté d’un
corps féminin qui éjacule est prisée et mise en valeur. Ainsi, si elles prêtent
attention aux messages culturels sur l’éjaculation, les femmes se trouvent
naturellement déconcertées.
Le message biologique est simple  : l’éjaculation féminine est un
phénomène secondaire, comme les tétons masculins et l’hymen. Peu
importe l’importance que la culture lui accorde, les gens sont différents les
uns des autres. Une femme que je connais n’a jamais éjaculé de sa vie
jusqu’à peu de temps après la ménopause, lorsqu’elle a trouvé un nouveau
partenaire. Tout d’un coup, elle éjaculait 60  ml de liquide à chaque
orgasme. Était-ce le changement de partenaire  ? Était-ce le changement
hormonal de la ménopause  ? Rien de tout cela  ? Je n’en ai aucune idée.
Certaines recherches ont montré que le nombre d’orifices des glandes de
Skene (c’est-à-dire le nombre de trous sortant des glandes de Skene) permet
de prédire si une personne  éjacule 8. La présence d’un plus grand nombre
d’orifices augmente-t-elle la probabilité d’éjaculation  ? L’éjaculation
entraîne-t-elle le développement d’un plus grand nombre d’orifices  ? Là
encore, aucune idée.
Mais cela m’amène à un point important concernant les organes
génitaux  : ils sont parfois mouillés et ils ont une odeur. Un parfum. Un
bouquet riche et terreux, rappelant l’herbe et l’ambre, avec un soupçon de
musc boisé. Les parties génitales sont parfois aromatiques et parfois aussi
visqueuses. Ellen Støkken Dahl et Nina Brochmann, autrices du livre sur la
sexualité féminine Les joies d’en bas (Actes Sud), ont introduit l’expression
« minette de discothèque » pour décrire la vulve après une longue journée
de transpiration. Vos sécrétions génitales sont probablement différentes
selon les phases de votre cycle menstruel, et elles changent avec l’âge et
selon l’alimentation – les femmes varient.
Si vous ne trouvez pas que l’odeur ou la sensation de lubrification
génitale soit vraiment belle et envoûtante, cela n’est pas surprenant étant
donné comment nous apprenons aux gens à considérer leurs parties
génitales. Mais on peut apprendre à mieux estimer ses organes génitaux et
leurs sécrétions. Aimer son corps tel qu’il est vous procurera un plaisir et un
désir plus intenses et des orgasmes plus forts et meilleurs. Pour en savoir
plus, rendez-vous au chapitre 5.

Les parties intersexuées
Les personnes  intersexuées 9, dont les organes génitaux ne sont pas
explicitement masculins ou féminins à la naissance, ont également toutes
les mêmes parties  ; il se trouve juste qu’elles ont une disposition
intermédiaire entre la configuration féminine standard et la configuration
masculine standard. La taille du phallus, l’emplacement de l’ouverture
urétrale ou la division du tissu labioscrotal peuvent «  se situer n’importe
où », entre ces deux configurations.
L’homologie explique dans une large mesure comment les organes
génitaux se développent dans un cas d’intersexuation. Les personnes dont
les organes génitaux se situent «  quelque part entre les deux  » ont connu
une légère variation dans la cascade extrêmement complexe d’événements
biochimiques impliqués dans la croissance d’un fœtus, depuis la
fécondation de l’œuf jusqu’au développement embryonnaire et à la
gestation. Cette petite variation se traduit par des organes génitaux
légèrement différents chez environ un nouveau-né sur soixante 10. Il n’y a
aucun problème avec leurs organes génitaux, pas plus qu’avec une personne
dont les lèvres sont particulièrement grandes ou petites 11. Ce sont toujours
les mêmes parties, mais organisées d’une manière différente. Par exemple,
l’ouverture urétrale masculine peut se trouver n’importe où sur la tête du
pénis ; rarement, elle se trouve quelque part le long du corps du pénis, mais
ça aussi, c’est très bien, tant que cela n’empêche pas d’uriner ou ne
provoque pas d’infection chronique (ce qui n’est généralement pas le cas).
Tant que les organes génitaux ne causent pas de douleur et ne sont pas
sujets à des infections ou autres problèmes médicaux, ils sont en bonne
santé et ne nécessitent aucune intervention médicale. Nous sommes tous
faits des mêmes parties, mais organisées de manière différente.
Et c’est pourquoi je n’ai pas besoin de voir vos organes génitaux pour
vous dire qu’ils sont normaux et en bonne santé. Vous avez toutes les
mêmes parties, mais organisées à votre manière.
Comme beaucoup de sexothérapeutes, j’inclus des photos de diverses vulves dans les
diapositives de mon cours d’anatomie.
Où est-ce que je trouve ces photos ? Sur Internet, évidemment.
La seule difficulté, c’est d’obtenir une collection variée – je trouve surtout des images de
vulves jeunes, minces, blanches, complètement rasées. Je dois faire des recherches minutieuses
pour trouver des images sexuellement positives de vulves plus âgées, de vulves de personnes de
couleur ou en surpoids, de vulves construites par chirurgie et de vulves avec tous leurs poils
pubiens.
Un jour, je me trouvais à une convention de comics très fréquentée et je parlais de ce
problème avec Camilla qui, comme moi, est une intello et une ancienne sexothérapeute de
l’université. Contrairement à moi, elle est diplômée en études sur les genres et en arts
plastiques, elle est afro-américaine et gagne sa vie comme illustratrice – ce qui lui a permis de
comprendre mes recherches.
Elle m’a dit :
« Sérieusement, Emily ? Tu fais des recherches sur Google, tu tapes quoi, “vulve noire” ?
Au travail ? »
J’ai haussé les épaules, un peu honteuse.
« Les saucisses, les lois, et les cours d’éducation sexuelle : trois choses dont tu ne veux pas
connaître les secrets de fabrication. »
Et Camilla a répondu :
« Laisse-moi deviner : tu ne trouves que des images pornos, rien d’artistique, de puissant
ou de positif pour l’image du corps ?
– Des images pornos ou médicales, ai-je admis. J’ai essayé de chercher des “vulves
féministes racisées”, mais tout ce que j’ai trouvé, ce sont des projets de broderie de Pinterest et
Etsy. »
Camilla a ri en entendant ça, mais a repris :
«  Bon, imagine que tu sois une jeune femme qui essaie de savoir à quoi ressemble une
vulve normale et saine. Si tu es blanche, pas de souci, Tumblr en est plein. Mais si t’es noire,
asiatique ou latino, qu’est-ce que tu as ? Des photos pornos et médicales. Et qu’est-ce que tu en
déduis ? »
J’ai répliqué :
« Mais je ne peux pas dire : “Hé, femmes racisées, mettez plus de photos de vos vulves sur
le Web, pour que les autres femmes sachent qu’elles sont normales.
– Non, mais quand même, a dit Camilla, les images que nous voyons – ou ne voyons pas –
sont importantes. Tu connais les filles d’Escher ?
– Non, c’est quoi une fille d’Escher ?
– Ce sont les personnages féminins des bandes dessinées avec des abdominaux si plats
qu’il n’y a pas de place pour leurs organes internes, et leurs colonnes vertébrales sont
incroyablement tordues pour qu’on puisse voir les deux seins et les deux fesses en même temps.
Leurs poses sont si anatomiquement absurdes qu’elles portent le nom d’un artiste connu pour
ses illusions impossibles.
– On dirait des mauvais pornos que j’ai vus, ai-je lancé.
– C’est vrai, a affirmé Camilla. J’ai vu ce genre de films quand j’étais ado et j’ai eu
l’impression que ça disait tout ce qu’une “femme” était censée être, et parce que ce n’était pas
ce qu’être une femme signifiait pour moi, j’ai décidé que ma première identité serait “geek”.
Pas femme, pas noire : geek. Joueuse, gameuse. Il m’a fallu beaucoup de temps pour intégrer les
autres parties de mon identité, parce que je ne voyais pas comment elles pouvaient réussir à
s’imbriquer. Les images comptent. Elles nous disent ce qui est possible, ce qui va ensemble, ce
qui a sa place et ce qui ne l’a pas. Et nous essayons tous de trouver notre place quelque part. »
Cette déclaration a été un véritable cadeau pour moi. Je reviens sans cesse sur cette idée, à
mesure que j’écris mes cours. Je passe des heures à chercher sur Internet des images
sexuellement positives d’une grande variété de vulves, parce que mes étudiantes sont toutes
différentes – pas deux pareilles – et je veux qu’elles sachent que leur corps est normal et
qu’elles ont toutes leur place dans ma classe.

Pourquoi c’est important


Pourquoi le fait en apparence si simple que tous les organes génitaux
humains sont constitués des mêmes parties, organisées de différentes
façons, pourrait bien être l’information la plus importante que vous
n’apprendrez jamais sur la sexualité humaine ?
Pour deux raisons :
Premièrement, parce que ça veut dire que vos organes génitaux sont
normaux – et pas simplement normaux, mais admirables, beaux,
captivants, délicieux et étonnants, et tout le reste de l’alphabet, en
passant par génial – peu importe à quoi ils ressemblent. Ils vous sont
uniques. L’immense diversité est normale. Magnifique. Parfaite.
Et deuxièmement, parce que c’est vrai pour chacune des facettes de
l’expression sexuelle humaine. Comme nous le verrons dans les
chapitres suivants, depuis la réponse génitale jusqu’à la fessée, notre
physiologie sexuelle, notre psychologie et nos désirs sont tous
composés des mêmes parties, juste organisées de différentes façons.
Si nous adoptons cette idée simple et fondamentale – toutes les mêmes
parties organisées de différentes façons – elle répond à cette question
toujours d’actualité : les sexualités des hommes et des femmes sont-elles les
mêmes ou non ?
Réponse : Oui.
Elles sont faites des mêmes parties, organisées de manière différente.
Si nous pouvons constater des différences évidentes entre les groupes
lorsque nous examinons les populations – les corps masculins et féminins –,
il y a au moins autant de variations au sein de chacun des groupes qu’entre
eux.
Permettez-moi d’illustrer mon propos par un exemple non sexuel. La
taille moyenne des femmes adultes est de 1,62  m et celle des hommes
adultes est de 1,77 m, soit une différence de 15 cm entre les moyennes des
deux groupes. Mais la taille varie davantage à l’intérieur de chaque groupe
qu’entre les groupes. Si vous mesuriez la taille de 1  000  personnes au
hasard – 500 hommes et 500 femmes – vous constateriez que presque toutes
les femmes mesurent entre 1,52 et 1,72 m – soit une différence de 20 cm au
sein du groupe – et que presque tous les hommes mesurent entre 1,63 et
1,93 m – soit une différence de 30 cm. Remarquez trois choses : il y a une
plus grande différence à l’intérieur de chaque groupe (entre 20 et 30  cm)
qu’entre les deux groupes (15 cm) ; il y a près de 10 cm de chevauchement
entre les groupes  ; et entre 100 et 200  personnes parmi les mille se
trouveraient en dehors de ces larges fourchettes 12 !
Il en va de même pour le sexe. Dans chaque groupe, nous trouvons une
vaste gamme de diversité – et pas uniquement en matière d’anatomie. Je
parle de l’orientation sexuelle, de préférences sexuelles, de l’identité et de
l’expression du genre, et – sujet du reste de ce livre  – du fonctionnement
sexuel : excitation, désir, plaisir et orgasme. Nous constatons également un
chevauchement entre les deux groupes, et nous trouvons des personnes qui
s’écartent fortement de la « moyenne » tout en étant parfaitement normales
et en bonne santé.
Certains auteurs estiment que les différences entre hommes et femmes
sont plus importantes que les similitudes. D’autres que les similitudes sont
plus importantes que les différences. Selon moi, le concept fondamental
d’homologie – exactement les mêmes parties, organisées de manière
différente – est plus important que l’une ou l’autre de ces affirmations.
Et la variation est peut-être la seule et unique caractéristique
véritablement universelle de la sexualité humaine.

Entre notre corps, nos désirs et nos comportements, il y a autant de


« sexualités » qu’il y a d’êtres humains vivants sur Terre.

Pas deux pareilles.


Voici le genre de conversation qu’on a autour d’un verre avec des amies, lorsqu’on est
sexothérapeute :
LAURIE : « Une femme que je connais m’a dit que si elle avait un jour des enfants, elle
demanderait une chirurgie plastique de ses parties intimes juste après avoir accouché, parce
qu’elle pense que ça ne sera plus beau à voir. »
CAMILLA  : «  J’espère que tu lui as dit que le secteur médico-industriel cosmétique
dépensait un paquet d’argent pour qu’elle se sente si mal dans son corps, afin de profiter de son
autocritique inutile, malgré le fait qu’il n’y ait aucune preuve indiscutable qu’une telle chirurgie
13
améliore le fonctionnement sexuel  ? »
LAURIE  : «  Non, je lui ai dit qu’une fois qu’on a des enfants, son partenaire est juste
content d’avoir accès à ces parties, quelle que soit leur apparence ! »
MOI  : «  Inventons un rituel pour que les femmes célèbrent la transition vers leur corps
post-partum. Ce n’est pas seulement son apparence qui change, c’est aussi ce que le corps
signifie, pour soi et pour le monde. »
Laurie était la seule mère de la bande, et la seule à ne pas me regarder comme si j’étais
droguée. Elle a répondu :
«  Je veux absolument un rituel. N’importe quoi pour faciliter la vie dans un corps qui
ressemble à un ballon désarticulé.
– Mais tu es si belle ! » s’est écrié tout le monde aussitôt.
Les compliments sur la beauté indiscutable de Laurie ont coulé encore plus vite que le vin,
mais quelques jours plus tard, Laurie m’a confié que c’était le contraire de ce dont elle avait
besoin.
« Ce dont j’ai besoin, c’est d’entendre que j’ai le droit d’être triste que mon corps ne soit
plus jamais ce qu’il était. J’ai fait beaucoup d’efforts pour apprendre à aimer ce corps, et
maintenant je dois tout recommencer en apprenant à aimer celui-ci. »
Alors j’ai déclaré : « Tu as le droit d’être triste que ton corps ait changé irréversiblement. »
Laurie a éclaté en sanglots – ce qu’elle fait souvent ces derniers temps –, des petites
tempêtes soudaines et silencieuses qui la traversent chaque fois qu’elle se trouve du côté de
ceux qui reçoivent l’affection et l’attention qu’elle offre en temps normal aux autres.
« Il ne devrait même pas s’agir de savoir si j’aime mon corps ou non, a-t-elle commenté en
reniflant. C’est vraiment ce qui a changé après que j’ai eu Trev. Maintenant, il devrait vraiment
s’agir de savoir si oui ou non mon corps fait ce que j’ai besoin qu’il fasse. »
Par «  ce qu’elle a besoin qu’il fasse  », Laurie entend accoucher à la maison, s’accroupir
dans la baignoire, comme une reine, allaiter pendant plus d’un an, et ne jamais dormir plus de
quatre heures d’affilée pendant près de trois ans – la phrase « Trevor est un petit dormeur » ne
suffit pas à expliquer les cernes sous les yeux de Laurie. Le corps de Laurie est incroyable.
Mais elle ne se sent pas comme ça.
L’idée de ces « mêmes parties, organisées de différentes façons » est aussi vraie pour les
changements que subit le corps d’une femme au cours de sa vie que pour les variations des
organes génitaux des gens. Et tout comme les parties génitales de chacun sont normales et
belles, le corps de toutes les femmes est normal et beau.
Mais ce n’est généralement pas ce qu’on inculque aux femmes. On nous apprend surtout
que notre corps est censé avoir une forme spécifique. Autrement, c’est qu’il y a quelque chose
qui ne va pas chez nous. Je reviendrai sur ce sujet – et sur la manière de le surmonter – au
chapitre 5.

Changez votre façon de voir 14


Je suis bien consciente que le simple fait de dire «  Vos organes génitaux
sont beaux et parfaits » ne changera rien si vous êtes mal à l’aise avec ceux-
ci mais, si c’est difficile pour vous de parvenir à voir la beauté de vos
organes génitaux uniques et sains, il y a deux choses que j’aimerais que
vous fassiez :
1. Attrapez un miroir et observez votre vulve, comme je l’ai décrit plus
haut dans le chapitre. (Parfois, les gens utilisent leur téléphone portable
avec l’appareil photo en mode selfie. Ça fonctionne très bien aussi.)
Pendant que vous regardez, notez tout ce que vous aimez dans ce que vous
voyez. Notez chaque point. Vous remarquerez que votre cerveau essaie de
lister toutes les choses que vous n’aimez pas, mais ne les intégrez pas dans
votre liste. Refaites cet exercice toutes les semaines. Ou deux fois par
semaine. Ou plus. Chaque fois, les aspects que vous aimez deviendront un
peu plus visibles et le bruit négatif de fond se fera un peu plus discret. Peut-
être même envisagerez-vous de parler à quelqu’un de ce que vous voyez et
de ce que vous aimez. Mieux encore, parlez-en à quelqu’un qui a également
fait l’exercice  ! Cette activité est appelée «  dissonance cognitive  » parce
qu’elle nous oblige à prendre conscience des qualités positives, alors que
nous avons surtout tendance à ne faire attention qu’aux aspects « négatifs ».
Essayez !
2. Demandez à votre partenaire, si vous en avez un, de regarder de près
votre vulve. Allumez la lumière, déshabillez-vous, mettez-vous sur le dos et
laissez-le (ou la) vous détailler. Demandez-lui de décrire ce qu’il (ou elle)
voit, ressent à cette vue, quels souvenirs il (ou elle) a de votre vulve. Faites
savoir à votre partenaire ce qui vous inquiète et demandez-lui de vous aider
à voir ce qu’il (ou elle) voit. Écoutez ce qu’il (ou elle) dit – écoutez avec
votre cœur, pas avec votre peur.

Une meilleure métaphore : un jardin


Au début de ce chapitre, nous avons réfléchi à la façon dont nous
métaphorisons l’anatomie, en créant un sens à partir de phénomènes
biologiques aléatoires qui finissent par nous rendre mal à l’aise avec notre
corps. Pour aider à déconstruire tout ça, j’aime utiliser une autre
métaphore  : un jardin. C’est une image que j’utilise souvent – souvenez-
vous du pommier dans l’introduction – parce qu’elle offre une approche
sans jugement de la façon dont le matériel sexuel avec lequel nous sommes
nées (notre corps et notre cerveau) et les familles et la culture dans
lesquelles nous avons grandi interagissent pour engendrer le moi sexuel
individuel qui émerge à l’âge adulte.
C’est ainsi que ça se passe : le jour de votre naissance, on vous attribue
une petite parcelle de terre riche et fertile, légèrement différente de celle des
autres. Et tout de suite, votre famille et votre culture commencent à planter
des trucs et à s’occuper du jardin pour vous, jusqu’à ce que vous soyez en
âge d’en prendre soin vous-même. Ils plantent le langage, les attitudes et les
connaissances sur l’amour et la sécurité, le corps et le plaisir. Et ils vous
apprennent comment entretenir votre jardin, car lorsque vous passez de
l’adolescence à l’âge adulte, vous endossez l’entière responsabilité de son
entretien.
Et vous n’avez rien choisi de tout ça. Vous n’avez pas choisi votre
terrain, les graines qui ont été plantées, ni comment votre jardin a été
entretenu au cours des premières années de votre existence.
Lorsque vous atteignez l’adolescence, vous commencez à prendre soin
de votre jardin par vous-même. Et vous découvrez peut-être que votre
famille et votre culture ont planté de belles choses saines qui prospèrent
dans un jardin bien entretenu. Ou vous remarquez peut-être certaines choses
que vous souhaitez changer. Les techniques d’entretien du jardin qui vous
ont été enseignées sont peut-être efficaces, et vous devez donc trouver
d’autres moyens d’en prendre soin pour qu’il prospère (voir le chapitre 3).
Peut-être que les graines qui ont été plantées n’étaient pas adaptées à votre
jardin, vous devez donc trouver quelque chose qui vous convienne mieux
(voir les chapitres 4 et 5).
Certaines d’entre nous ont de la chance avec leur terre et ce qui est
planté. Nous avons des jardins sains et florissants dès les prémices de notre
prise de conscience. Pour d’autres, nous nous retrouvons avec des déchets
toxiques dans leur jardin, et il faut alors déraciner toutes ces saletés et les
remplacer par quelque chose de plus sain, que nous choisissons nous-
mêmes.
Votre corps physique – y compris vos parties génitales – est une partie
du matériel de base de votre sexualité, la parcelle de terre. Votre cerveau et
votre environnement sont le reste du système, et sont au cœur des
chapitres 2 et 3.

Ce que c’est, pas ce que ça signifie
Olivia a utilisé l’idée qu’elle se faisait de ses hormones, ses organes génitaux « masculins » et
de son intérêt sexuel élevé comme d’un bouclier contre les critiques culturelles qui disaient
qu’elle était… eh bien, toutes sortes de choses dont elle «  devrait avoir honte  ». Une salope.
Une nymphomane. Qu’elle essayait d’«  attirer l’attention  », «  de choper un mec  » ou «  de
contrôler les gens » avec son corps – ce qui n’était pas vrai, mais qui lui avait été reproché à
différentes étapes de sa vie. Le monde avait essayé de la convaincre que sa sexualité était
toxique, dangereuse pour elle-même et pour son entourage.
Elle a lutté avec acharnement contre ces messages, pour défendre son propre bien-être
sexuel. Son bouclier « Ce sont mes hormones, donc c’est naturel » était un élément majeur de sa
défense.
Mais à mesure qu’elle absorbait l’idée de «  exactement les mêmes parties, organisées de
manière différente », elle n’a plus eu besoin de ce bouclier. Elle a alors compris que le bouclier
l’empêchait de voir les autres, tandis que la phrase « exactement les mêmes parties » la reliait
activement aux autres, ce qui signifiait qu’elle n’était ni différente ni séparée. Elle était la même
– unique, mais toujours inscrite dans le continuum de la sexualité humaine.
C’est ce que la science peut faire pour nous, si nous l’autorisons. Elle nous offre une
chance d’abaisser nos défenses et de découvrir les liens qui nous unissent tous.

Je sais pertinemment qu’Olivia n’est pas née avec un sentiment de


malaise par rapport à ses organes génitaux ou à sa sexualité, et vous non
plus. Quand vous êtes née, vous étiez profondément, magnifiquement
satisfaite (et curieuse) de chaque partie de votre corps. Mais des décennies
de culture sexuellement négative ont laissé pénétrer les mauvaises herbes de
l’insatisfaction. Les chapitres  3 et  4 expliquent précisément comment ce
phénomène peut influencer votre bien-être sexuel, et le chapitre  5 décrit
comment déconstruire ce processus, réussir de nouveau à vivre pleinement
à l’intérieur de votre corps et retrouver cet état originel, de profonde et
chaleureuse affection pour votre corps, et de curiosité à son égard.
Mais avant d’en arriver là, passons un chapitre à étudier le plus
important de tous vos organes sexuels, et la façon dont lui aussi est
constitué des mêmes parties chez tout le monde, mais organisées de manière
unique.
Évidemment, je parle de votre cerveau.
En résumé

Les organes génitaux de tout le monde sont constitués des mêmes


parties, organisées de manière différente. Il n’y a pas deux
personnes pareilles.

Vous avez mal ? Si oui, consultez un médecin. Sinon, vos organes


génitaux sont normaux, sains, beaux et parfaits tels qu’ils sont.

Les parties génitales que vous voyez dans des pornos soft peuvent
avoir été modifiées numériquement pour apparaître «  mieux
rangées » ; ne vous laissez pas berner : n’allez pas croire que toutes
les vulves ressemblent à ça.

Trouvez un miroir (ou utilisez l’appareil photo de votre portable en


mode selfie) et examinez réellement votre clitoris. Savoir où se
trouve le clitoris en théorie est important, mais savoir où se trouve
votre clitoris, ça c’est un vrai pouvoir.
CHAPITRE 2

Le modèle à double contrôle


Votre personnalité sexuelle
La dernière fois que Laurie avait voulu faire l’amour avec son mari, Johnny – et je veux dire,
qu’elle avait vraiment envie – leur fils Trev n’était pas encore né. Au début, elle s’était dit que
c’était à cause de la grossesse. Puis que c’était une conséquence du post-partum.
Enfin, elle a pensé qu’elle était juste trop fatiguée.
Ou déprimée.
Ou peut-être n’aimait-elle pas vraiment son mari.
Ou peut-être était-elle cassée.
Ou peut-être les êtres humains n’étaient-ils simplement pas faits pour rester liés
érotiquement après des mois à nettoyer du vomi de bébé sur le T-shirt de l’autre.
Laurie et Johnny avaient bien vécu. Jusqu’à ce qu’elle tombe enceinte, leur vie sexuelle
ressemblait à celles des romans d’amour – chaude, avide, passionnée, douce, aimante et juste
assez coquine pour leur donner une raison de rougir quand leurs regards se croisaient par-dessus
la table de ses parents à Noël.
Alors peut-être que c’était tout ce à quoi ils avaient eu droit. Peut-être que le reste de leur
vie se déroulerait sans sexe.
Pourtant, ils avaient essayé. Ils avaient acheté des accessoires et de l’huile de massage.
Ils avaient essayé de l’attacher elle, de l’attacher lui, d’utiliser du lubrifiant aromatisé, de se
filmer, de faire des jeux… et parfois ça marchait, toute cette exploration.
Mais la plupart du temps, ça ne marchait pas. Laurie se sentait triste et seule parce qu’elle
aimait Johnny, l’aimait tellement que ça lui faisait mal, mais elle n’arrivait pas à le désirer,
e
malgré toute la créativité et les innovations rendues disponibles dans un monde du XXI  siècle
fait de technologie, de fantasmes et de permissivité.
Avantage secondaire de toute cette situation  : Laurie avait découvert qu’elle pouvait
atteindre l’orgasme en cinq minutes environ grâce à son vibromasseur, ce qui lui permettait de
s’endormir plus facilement. Elle se couchait donc tôt et se laissait vibrer jusqu’à s’endormir.
Mais elle le cachait à Johnny, car elle était presque sûre qu’il serait triste d’apprendre qu’elle
avait des orgasmes toute seule, mais pas avec lui. Cet intérêt pour l’orgasme solitaire la rendait
perplexe, quand rien ou presque ne parvenait à l’inciter à vouloir faire l’amour avec son mari.
Elle se sentait donc piégée, confuse et folle à notre première rencontre.
Sa perception de la situation – et son sentiment de désespoir – a complètement changé
lorsqu’elle a appris le contenu de ce chapitre : votre cerveau sexuel a un « accélérateur » qui
répond à la stimulation sexuelle, mais il a aussi des « freins », qui réagissent à toutes les très
bonnes raisons de ne pas être excitée à cet instant-là.

Imaginez : nous sommes en 1964 et vous travaillez dans le laboratoire


de William Masters et Virginia Johnson, deux pionniers de la recherche sur
le sexe, à l’université de Washington à Saint-Louis. Vous êtes à la pointe de
la science, vous efforçant de comprendre ce qui n’a jamais été étudié
auparavant, et vous passez beaucoup de temps à publier des offres d’emploi
dans la presse locale. Vous recherchez des gens, des gens ordinaires, qui
sont non seulement désireux mais aussi capables d’avoir un orgasme dans
un laboratoire («  département de recherche  ») en étant connectés à des
machines qui mesurent avec précision leur rythme cardiaque, leur pression
artérielle, leur débit sanguin et leur réponse génitale, tandis que vous et
l’équipe de scientifiques vous trouvez dans la pièce et observez la scène.
Lorsqu’une femme répond à l’annonce, vous l’invitez au laboratoire, où
vous établissez ses antécédents médicaux et sexuels en détail, effectuez un
examen physique pour dépister tout problème de santé et lui présentez le
département de recherche et les équipements. La fois suivante, elle s’exerce
à avoir un orgasme dans les locaux, d’abord seule, puis avec l’équipe de
recherche qui se trouve dans la même pièce qu’elle.
Elle sera alors observée, mesurée et évaluée pendant qu’elle se stimule
avec l’équipement au sein du laboratoire, et ce jusqu’à l’orgasme. Pour la
science.
Voici ce que vous allez observer 1 :
L’excitation. Lorsque la stimulation démarre, son rythme cardiaque, sa
pression sanguine et sa fréquence respiratoire augmentent, et ses petites
lèvres ainsi que le clitoris se colorent et gonflent, séparant les grandes
lèvres, externes. Les parois du vagin commencent à se lubrifier, puis
s’allongent. Ses seins gonflent et les mamelons se redressent et pointent.
Après un certain temps d’excitation, elle peut se mettre à transpirer.
Le plateau. La lubrification commence à l’entrée du vagin, au niveau
des glandes de Bartholin. Ses seins continuent de gonfler, à tel point que
les mamelons semblent se rétracter vers l’intérieur des seins. La femme
peut ressentir des «  bouffées de chaleur  », un rougissement concentré
sur la poitrine. Ses petites lèvres ont doublé de volume par rapport à
leur état au repos. Les structures internes du clitoris se soulèvent,
redressant la partie externe vers le haut et l’intérieur, de sorte qu’il se
rétracte de la surface du corps. Le vagin lui-même « se déploie » autour
du col de l’utérus, ouvert et large à l’intérieur du corps. La femme
ressent des contractions musculaires involontaires connues sous le nom
de myotonies, notamment des spasmes carpopédiens (contraction des
muscles des mains et des pieds). Elle peut commencer à haleter ou à
retenir sa respiration, car les diaphragmes thoracique et pelvien se
contractent à l’unisson.
L’orgasme. Tous les sphincters de son diaphragme pelvien (le muscle
dit de «  Kegel  ») se contractent simultanément  : l’urètre, le vagin et
l’anus. Elle respire rapidement, son cœur bat vite et sa pression
artérielle augmente. Son pelvis peut osciller, divers groupes de muscles
peuvent se contracter involontairement. Elle ressent une libération
soudaine de la tension qui s’est accumulée dans les muscles de tout son
corps.
La résolution. Les seins reprennent leur état habituel, de même que le
clitoris, les lèvres, le rythme cardiaque, le rythme respiratoire et la
pression artérielle.

Ce modèle de réponse sexuelle en quatre phases est rapidement devenu


la base de la compréhension de la réponse sexuelle humaine par les
sexothérapeutes, sexologues et chercheurs. C’était la première description
scientifique de la physiologie de la réponse sexuelle, qui a servi de
référence pour définir la santé sexuelle et les troubles sexuels.
Imaginez maintenant que vous êtes sexothérapeute dans les années 1970
et que vous utilisez ce modèle en quatre phases pour comprendre et traiter
des clients souffrant de dysfonctionnement sexuel. Vous pouvez aider
certains d’entre eux. Ceux qui souffrent d’anorgasmie (absence d’orgasme)
peuvent apprendre à avoir des orgasmes, ceux qui ont une éjaculation
précoce peuvent apprendre à contrôler l’orgasme, celles qui ont un
vaginisme (spasmes vaginaux) peuvent apprendre à détendre ces muscles.
Cependant, il y a un groupe de clients qui ne semble pas répondre aux
thérapies fondées sur le modèle en quatre phases.
C’est ce qui est arrivé à la psychothérapeute Helen Singer Kaplan. En
examinant de nouveau les échecs des traitements chez ses propres patients
et ceux de ses collègues, elle a constaté que les clients qui réussissaient le
moins étaient aussi ceux qui se désintéressaient du sexe. Kaplan s’est rendu
compte qu’il manquait quelque chose d’important dans le modèle en quatre
phases  : le désir. Le concept de désir sexuel était totalement absent de la
théorie dominante de la réponse sexuelle humaine.
Rétrospectivement, ça semble être un oubli flagrant – mais bien sûr
qu’il manquait un élément  : les gens qui viennent se masturber dans un
laboratoire pour la science n’ont pas besoin d’avoir envie de sexe pour se
lancer ; ils doivent juste s’exciter dans le cadre de l’expérience.
Kaplan a donc sorti le modèle en quatre phases du laboratoire et l’a
adapté à l’expérience vécue de ses clients. Son modèle « triphasique  » du
cycle de réponse sexuelle commence par le désir, qu’elle a conceptualisé
comme «  l’intérêt pour  » ou «  l’appétit pour  » le sexe, un peu comme la
faim ou la soif 2. La deuxième phase est l’excitation, qui combine
l’excitation et le plateau en une seule phase, et la troisième phase
correspond à l’orgasme.
Pendant des décennies, le nouveau modèle triphasique de réponse
sexuelle de Kaplan a servi de base aux critères de diagnostic dans le Manuel
diagnostique et statistique de l’Association de psychiatrie américaine. Vous
pouviez avoir un désir normal ou problématique, une excitation normale ou
problématique, et un orgasme normal ou problématique. Un certain nombre
de ces diagnostics bénéficient aujourd’hui de traitements efficaces, parmi
lesquels la thérapie cognitivo-comportementale, la pleine conscience, les
thérapies sensorimotrices et les médicaments.
Avance rapide de deux décennies encore. Aujourd’hui, le déficit et
l’écart de désir sont les raisons les plus courantes de consultation en
thérapie sexuelle, tandis que d’autres clients connaissent une
«  hypersexualité  », caractérisée par un sentiment de perte de contrôle de
leur désir et de leur comportement. Que se passe-t-il  ? Comment tant de
personnes en viennent-elles à combattre un manque de désir, alors que
d’autres souffrent d’en éprouver trop ? Pourquoi le niveau de désir change-
t-il ? Qu’est-ce qui détermine si et quand on s’intéresse au sexe ? Quelle est
exactement la « bonne quantité » de désir ?
Au début du XXIe  siècle, deux chercheurs de l’Institut Kinsey ont
proposé un modèle de réponse sexuelle qui abordait ces questions. Il ne
s’agissait plus seulement d’une description de ce qui se passe dans le corps,
comme dans les travaux de Masters et Johnson, ni même d’une description
de ce qui se passe dans une relation sexuelle, comme dans ceux de Kaplan.
C’était une description du mécanisme cérébral qui régit la réponse sexuelle.
Et c’est le sujet de ce chapitre.
Dans la première partie du chapitre, je décrirai la théorie de base du
«  modèle à double contrôle  » de la réponse sexuelle, qui repose sur un
« accélérateur » et un « frein » sexuels. Et comme dans le cas du désir, une
fois que quelqu’un en parle, ça devient évident… et ça change toute votre
compréhension de la façon dont le sexe fonctionne.
Dans la deuxième partie de ce chapitre, je parlerai des différences
individuelles dans la sensibilité du frein et de l’accélérateur. Cette variation
a un impact sur la manière dont une personne réagit au monde sexuel. Nous
constaterons que si, comme vous vous en doutez, les hommes ont souvent
des accélérateurs plus sensibles et les femmes des freins plus sensibles, il y
a beaucoup plus de variations au sein de chacun de ces groupes qu’entre
eux. Ce qui est plus intéressant que la sensibilité des mécanismes, c’est la
relation de ces mécanismes avec votre humeur et votre environnement.
Et c’est le sujet de la troisième section : ce à quoi réagissent le frein et
l’accélérateur. Mais que diable signifie «  stimulus lié au sexe  »  ? Quelle
sorte de « menace potentielle » pousse notre cerveau à freiner ? Comment
notre cerveau sait-il à quoi réagir et à quoi ne pas réagir ? Et pouvons-nous
changer cela ?
Je parie que, avant de lire ce livre, vous saviez déjà que les organes
génitaux féminins comprennent un vagin et un clitoris, et vous saviez déjà
que l’excitation, le désir et l’orgasme sont des phénomènes que les gens
ressentent généralement dans le cadre d’une réponse sexuelle. Une fois que
vous aurez lu ce chapitre, je veux que vous sentiez que votre accélérateur et
vos freins sont aussi fondamentaux, aussi indissociables de votre
fonctionnement sexuel, que votre clitoris et votre désir. Si je fais bien mon
boulot dans les pages suivantes, vous raconterez à tous vos proches : « Oh
mon Dieu, eh tout le monde, il y a un frein ! »

Appuyer sur l’accélérateur et relâcher


le frein
Permettez-moi de vous présenter le modèle à double contrôle.
Développé à la fin des années 1990 par Erick Janssen et John Bancroft
de l’Institut Kinsey, le modèle à double contrôle va bien au-delà des
modèles antérieurs de la sexualité humaine, en décrivant non seulement
« ce qui se passe » pendant l’excitation – érection, lubrification, etc. – mais
aussi le mécanisme central qui régit l’excitation sexuelle, qui contrôle
comment et quand vous réagissez aux images, sons, sensations et idées liés
au sexe 3.
Plus j’en apprenais sur le modèle à double contrôle lors de mes études
supérieures, plus je sentais les lumières s’allumer dans ma compréhension
de la sexualité humaine. Je l’enseigne depuis des décennies maintenant, et
plus je l’enseigne, plus je vois à quel point il aide les gens à comprendre
leur propre fonctionnement sexuel.
Comment ça marche ?
Votre système nerveux central (votre cerveau et votre moelle épinière)
est composé d’une série d’associations d’accélérateurs et de freins, comme
la combinaison formée par votre système nerveux sympathique
(«  accélérateur  ») et votre système nerveux parasympathique («  freins  »).
Au cœur du modèle de double contrôle se trouve l’idée que ce qui est
valable pour d’autres aspects du système nerveux doit l’être aussi pour le
système cérébral qui coordonne le sexe  : un accélérateur et des freins
sexuels. (Daniel Kahneman a écrit à propos de ses propres recherches en
économie, récompensées par un prix Nobel  : «  Vous savez que vous avez
fait un progrès théorique lorsque vous ne parvenez plus à reconstituer la
raison pour laquelle vous avez échoué pendant si longtemps à voir ce qui
était évident.  » Il en a été de même pour la théorie des perspectives de
Kahneman, et il en va de même pour le modèle à double contrôle. Je me
tiens prête à envoyer un énorme bouquet de fleurs à Erick et John le jour où
le comité Nobel se réunira et reconnaîtra l’importance de leur perspicacité.)
Donc, le modèle à double contrôle de la réponse sexuelle, comme son nom
l’indique, se compose de deux parties :
le système d’excitation sexuelle. C’est l’accélérateur de votre réponse
sexuelle. Il reçoit des informations relatives aux stimuli liés à la
sexualité dans l’environnement – ce que vous voyez, entendez, sentez,
touchez, goûtez ou imaginez – et envoie des signaux du cerveau aux
organes génitaux pour leur dire  : «  Allumez-vous  !  » Le système
d’excitation sexuelle scrute constamment votre contexte (y compris vos
propres pensées et sentiments) à la recherche d’éléments associés à la
sexualité. Il est toujours à l’œuvre, bien en deçà du niveau de
conscience. Vous ne vous rendez même pas compte qu’il est là jusqu’à
ce que vous vous trouviez excitée et que vous recherchiez le plaisir
sexuel ;
le système d’inhibition sexuelle. Ce sont vos freins sexuels. Le terme
«  inhibition  » ne signifie pas ici «  timidité  » mais plutôt les signaux
neurologiques «  interrupteur éteint  ». Des recherches ont montré qu’il
existe en fait deux freins, qui correspondent aux différentes fonctions
d’un système d’inhibition. Un des freins fonctionne à peu près de la
même manière que l’accélérateur. Il détecte toutes les menaces
potentielles dans l’environnement – tout ce que vous voyez, entendez,
sentez, touchez, goûtez ou imaginez – et envoie des signaux disant  :
« Éteignez tout ! » C’est comme le frein à pied d’une voiture, qui réagit
aux stimuli sur le moment. Tout comme l’accélérateur balaie
l’environnement à la recherche d’une bonne raison de s’allumer, le frein
balaie tout ce que votre cerveau interprète comme une bonne raison de
rester éteint à cet instant – risque de transmission d’IST, de grossesse
non désirée, conséquences sociales, etc. Et tout au long de la journée, il
envoie un flot continu de messages «  Éteignez tout  !  » Ainsi, ce frein
nous évite d’être excités de manière inappropriée au milieu d’une
réunion de travail ou lors d’un dîner de famille. C’est aussi le système
qui éteint l’interrupteur si, par exemple, au milieu d’une partie de
jambes en l’air, votre grand-mère entre dans la pièce. Le second frein
est un peu différent. Il ressemble davantage au frein à main d’une
voiture, un signal chronique à bas bruit qui dirait « Non merci ». Si vous
essayez de conduire avec le frein à main serré, vous arriverez peut-être
à destination, mais ça prendra plus de temps et vous consommerez
beaucoup plus d’essence. Lorsque le frein à pédale est associé à la
«  peur des conséquences de la performance  », le frein à main est, lui,
associé à la « peur de l’échec de la performance », comme la crainte de
ne pas avoir d’orgasme.

Tout au long du livre, je ferai référence aux freins en général, sans faire
de différence entre ces deux types, puisque, jusqu’à ce jour, les stratégies
efficaces pour désactiver les freins ne diffèrent pas selon le frein concerné.
À mesure que la science progresse, nous pourrions développer des
stratégies comportementales ou même des médicaments qui ciblent un
système spécifique, mais en attendant, il n’est pas nécessaire de savoir avec
certitude quel frein est touché pour savoir comment arrêter de l’actionner.

NA = noyau arqué
APOM = aire préoptique médiane
NAcc = noyau accumbens
CPF = cortex préfrontal
PV = pallidum ventral
ATV = aire tegmentale ventrale
Remarquez comme les signaux du NA sont à la fois excitateurs et inhibiteurs.

C’est en gros tout ce que recouvre le modèle à double contrôle  : des


freins et un accélérateur. Et ce n’est pas une métaphore, c’est une
description littérale de l’activité excitatrice et inhibitrice du système
nerveux central 4. Les détails sont évidemment plus complexes, mais les
implications de ce principe de base sont considérables, car on peut
immédiatement conceptualiser tout le fonctionnement sexuel – et tout le
dysfonctionnement sexuel – comme un équilibre entre freins et accélérateur.
Si vous avez des difficultés avec une phase ou une autre de votre
réponse sexuelle, est-ce parce que l’accélérateur n’est pas
suffisamment activé ? Ou parce que les freins sont trop sollicités ?

En effet, une erreur courante commise par les personnes qui ont du mal
à avoir un orgasme ou du désir, c’est de supposer que le problème vient
d’un manque d’accélérateur, quand il est plus probable que le souci vienne
d’un excès de freins (voir les chapitres 7 et 8 pour plus de détails). Une fois
que vous savez si c’est un problème d’accélérateur ou de freins, vous
pouvez alors déterminer comment changer la donne.
Quand Olivia (l’exubérante masturbatrice du chapitre  1) a répondu à mes questions sur les
«  excitateurs  » [dans les fiches de travail ici] par «  je peux me sentir excitée en faisant la
vaisselle », j’ai eu une idée assez précise du fonctionnement de son cerveau sexuel.
Elle m’a dit : « J’aime le sexe. J’aime mon partenaire. J’aime essayer de nouvelles choses,
de nouveaux lieux, de nouvelles positions, de nouveaux jouets, de nouveaux pornos, de
nouvelles choses. Je suis un Grand Oui. »
Et je le voyais sur son visage  : la joie, la confiance d’une femme vivant pleinement à
l’intérieur de son corps.
Je lui ai demandé :
« Vous est-il déjà arrivé de faire des choses et de vous demander ensuite : “Pourquoi donc
ai-je fait ça ?” »
Elle a grimacé et hoché la tête.
«  Ça m’est arrivé. Pas souvent, mais… quand je suis super stressée, je sors et je me dis
juste : “Allez, on s’en fout, fonce.” J’ai fait des conneries.
– Et y a-t-il des périodes où vous ressentez le besoin de vous masturber plusieurs fois par
jour ? ai-je poursuivi, et elle m’a fixé avec des yeux ronds, comme si elle se demandait si j’avais
placé une caméra dans sa chambre.
– En général, j’arrive à ignorer ce besoin, a-t-elle répondu. Mais de temps en temps, ça me
rend folle. C’est comme une démangeaison qu’aucun grattage ne pourrait calmer. J’ai ce
sentiment de perte de contrôle.
– Je vois bien. Un accélérateur très sensible peut pousser à prendre des risques et à être
impulsif – c’est ce fameux sentiment de “perte de contrôle”.
– C’est à cause de ça  ? D’un accélérateur très sensible  ? Je n’ai pas un niveau élevé de
testostérone, mais j’ai un système d’excitation sexuelle élevé ?
– Ça expliquerait à la fois votre “Grand Oui” et ce sentiment ponctuel de perte de
contrôle. »
C’est facile de supposer qu’avoir un accélérateur sensible est un plaisir – et ça peut l’être,
dans le bon contexte. Olivia a un partenaire qu’elle apprécie et une grande ouverture d’esprit qui
lui permet d’explorer sa sexualité sans peur ni inquiétude. Elle fonce droit dedans. Et puis
parfois, m’a-t-elle raconté, surtout lorsqu’elle est stressée ou anxieuse : « J’ai l’impression que
mon désir sexuel monopolise toute mon attention et refuse de me laisser tranquille. »
Par ailleurs, un accélérateur sensible peut présenter un autre niveau de risque. Parce qu’elle
a parfois l’impression que sa propre sexualité la gouverne, Olivia s’inquiète de donner à son
tour des ordres à son partenaire, de se montrer trop exigeante, trop sexuelle, juste « trop ».
« Je dois manier ma puissante sexualité avec précaution, pour le bien de l’humanité », m’a-
t-elle confié, sur le ton de la blague.
Enfin… Pas complètement.

Votre tempérament sexuel


Selon le modèle à double contrôle, l’excitation sexuelle se compose en
réalité de deux processus : l’activation de l’accélérateur et la désactivation
des freins. Ainsi, votre niveau d’excitation sexuelle à un moment donné est
le produit de la stimulation de l’accélérateur et du relâchement des freins.
Mais elle dépend aussi du degré de sensibilité de vos freins et de votre
accélérateur à cette stimulation.
Les freins et l’accélérateur sont des traits de caractère. Nous en avons
tous et ils sont plus ou moins stables dans le temps, mais, au même titre que
l’introversion/extraversion, ils sont variables d’un individu à l’autre 5. De la
même manière que nous avons tous des phallus et des urètres, comme nous
l’avons vu au chapitre  1, nous avons tous un accélérateur et des freins
sexuels dans notre système nerveux central (nous sommes tous les
mêmes !). Mais nous avons tous des sensibilités différentes aux freins et à
l’accélérateur (nous sommes tous différents  !), ce qui entraîne des
tempéraments ou des personnalités sexuelles différentes.
Certaines personnes ont une sensibilité élevée aux freins et à
l’accélérateur, d’autres ont une sensibilité faible aux deux éléments,
d’autres encore ont une sensibilité élevée aux freins mais une sensibilité
faible à l’accélérateur, et d’autres encore ont une sensibilité élevée à
l’accélérateur mais une sensibilité faible aux freins. Et la plupart d’entre
nous sont dans la moyenne. La répartition de la variation dessine une belle
courbe en cloche  : la majorité des gens s’entassent au milieu et quelques
personnes se situent aux extrémités.
Intéressons-nous à ce qui se passe lorsque les freins ou l’accélérateur
sont très sensibles (ou très peu).
Supposons que vous êtes en haut de la courbe ES (excitation
sexuelle) et en bas de la courbe IS (inhibition sexuelle) : un accélérateur
sensible et pratiquement aucun frein. Quel type de réponse sexuelle
auriez-vous ?
Vous réagiriez facilement aux stimuli sexuels, mais pas aux menaces
potentielles, et seriez donc facilement excitée et auriez du mal à vous
arrêter. Ce qui n’est pas toujours aussi amusant qu’on pourrait le croire, et
peut même, dans certaines situations, entraîner une utilisation irrégulière du
préservatif, un plus grand nombre de partenaires, plus d’aventures d’un soir,
et un sentiment de « perte de contrôle » de votre sexualité, ce qui augmente
le risque de complications indésirables 6.
La combinaison d’un accélérateur sensible et de freins pas vraiment
sensibles concerne environ 2 à 6 % des femmes et elle est associée à la prise
de risques et à la compulsion  sexuelle 7. Comme le mécanisme cérébral
responsable de la détection des stimuli sexuels est très sensible, vous avez
très envie d’avoir des rapports sexuels et comme le mécanisme cérébral
chargé de vous empêcher de faire quoi que ce soit de risqué est moins
réactif, vous pouvez parfois ressentir une «  perte de contrôle  » de votre
sexualité, surtout en cas de stress. Vous aurez probablement plus de
partenaires, utiliserez moins de protection contre les IST ou les grossesses
non désirées et vous vous sentirez moins «  en contrôle  ». Vous êtes
également plus susceptible de vouloir avoir des relations sexuelles lorsque
vous êtes stressée (redliners en anglais, les personnes plus excitées si
stressées), alors que d’autres constateront plutôt que leur intérêt pour le
sexe s’effondre dans une telle situation (flatliners, ce qui fait écho au tracé
plat d’un électrocardiogramme : sans aucune excitation si stressées).
Que se passe-t-il si vous avez la combinaison inverse  : des freins
sensibles et un accélérateur assez peu sensible ?
Ce phénomène, qui concerne environ 1 à 4 % des femmes, est associé à
des problèmes d’excitation, de manque d’intérêt ou de désir et de difficultés
à atteindre l’orgasme. Si vous avez des freins sensibles, vous êtes très
sensible à toutes les bonnes raisons de ne pas être excitée, et si vous avez
un accélérateur relativement insensible, il faut beaucoup de concentration et
d’attention consciente pour être d’humeur sexuelle.
Les freins sensibles, quel que soit le niveau de l’accélérateur, sont le
meilleur prédicteur de problèmes sexuels de toutes sortes. Dans une enquête
réalisée en 2008 auprès de 226  femmes âgées de 18 à 81  ans, le faible
intérêt pour le sexe, les difficultés d’excitation et d’orgasme ont été
significativement corrélés avec des facteurs d’inhibition, en particulier la
« contingence de l’excitation » (« À moins que tout soit “parfait”, il m’est
difficile d’être excitée sexuellement ») et les préoccupations concernant la
fonction sexuelle (« Si je crains de mettre trop de temps à être excitée ou à
atteindre l’orgasme, cela peut interférer avec mon excitation ») 8.
Vous pouvez remplir le questionnaire sur le tempérament sexuel qui suit
pour avoir une idée de la sensibilité de vos propres freins et accélérateur.
Mais n’allez pas croire que c’est de la vraie science  ! Il s’agit d’une
adaptation scientifique des quiz des magazines féminins, destinée à vous
guider dans votre compréhension de la manière dont votre mécanisme
interne de réponse sexuelle peut influencer votre réponse à la stimulation
sexuelle, mais ce n’est que pure approximation 9. Rappelez-vous notamment
qu’il existe en fait deux freins différents. L’excitation de certaines
personnes est davantage bloquée par des angoisses internes (par exemple,
prendre trop de temps pour être excitée), et d’autres sont plus affectées par
des craintes liées à des facteurs externes (par exemple, contracter une IST
ou se faire surprendre en pleins ébats). Ces deux freins peuvent diminuer
votre excitation, ou vous empêcher d’enclencher le processus d’excitation.

Les inhibiteurs

1. Parfois, j’ai tellement de soucis que je ne parviens pas à être excitée. Ça


me ressemble :
0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement
2. À moins que tout soit «  parfait  », il m’est difficile d’être excitée
sexuellement. Ça me ressemble :
0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement

3. Si je ne suis pas sûre de ce que mon partenaire ressent pour moi, il m’est
plus difficile d’être excitée. Ça me ressemble :
0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement

4. Si je crains de mettre trop de temps à être excitée ou à atteindre


l’orgasme, cela peut interférer avec mon excitation. Ça me ressemble :
0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement

5. Parfois, je me sens tellement «  timide  » ou gênée pendant les rapports


sexuels que je n’arrive pas à être pleinement excitée. Ça me ressemble :
0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement

Total (sur 20) ____

Les excitateurs

1. Voir un partenaire faire quelque chose qui prouve son talent ou son
intelligence, ou le voir interagir correctement avec les autres est susceptible
de beaucoup m’exciter sexuellement. Ça me ressemble :
0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement
2. Lorsque je pense à quelqu’un que je trouve sexuellement attirant ou que
je fantasme sur le sexe, je suis facilement excitée sexuellement. Ça me
ressemble :
0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement

3. S’il y a un risque qu’on nous voie ou qu’on nous entende faire l’amour,
j’ai plus de mal à être excitée. Ça me ressemble :
0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement

4. Certaines odeurs particulières sont très excitantes pour moi. Ça me


ressemble :
0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement

5. Je pense beaucoup au sexe quand je m’ennuie. Ça me ressemble :


0 1 2 3 4
Pas du tout Pas vraiment À peu près Beaucoup Complètement

Total (sur 20) ____

Vos résultats au questionnaire
de tempérament sexuel

Inhibition sexuelle basse (0–6) 


Vous n’êtes pas vraiment sensible à toutes les raisons qui pourraient vous
empêcher d’être sexuellement excitée. Vous n’avez pas tendance à vous
préoccuper de votre propre fonctionnement sexuel, et la question des
complexes physiques n’interfère pas trop avec votre sexualité. Quand vous
êtes occupée par une relation sexuelle, vous ne vous laissez pas distraire, et
vous ne vous décririez pas comme « sexuellement timide ». La plupart des
situations peuvent être sexuelles pour vous. Il se peut que votre principal
défi en matière de fonctionnement sexuel soit de vous retenir, de vous
refréner. Rester consciente des conséquences potentielles peut vous aider à
y remédier. Environ 15 % des femmes que j’ai interrogées se situent dans
cette fourchette.

Inhibition sexuelle moyenne (7–13)


Vous êtes pile dans la moyenne, comme plus de la moitié des femmes
interrogées. Cela signifie que le déclenchement ou non de vos freins
dépendra en grande partie du contexte. Les situations risquées ou inédites,
comme un nouveau partenaire, peuvent accentuer vos inquiétudes quant à
votre propre fonctionnement sexuel, votre timidité ou votre tendance à la
distraction pendant la relation sexuelle. Les contextes qui vous excitent
facilement sont probablement à faible risque et plus familiers, et chaque
fois que votre stress –  notamment l’anxiété, la dépression, le sentiment
d’être débordée ou épuisée – augmente, vos freins réduiront votre intérêt et
votre réponse aux signaux sexuels.

Inhibition sexuelle élevée (14–20)


Vous êtes assez sensible à toutes les raisons qui pourraient vous empêcher
d’être sexuellement excitée. Vous avez besoin d’un cadre de confiance et de
détente pour être excitée, et il est préférable de ne pas vous sentir bousculée
ou contrainte d’une quelconque manière. Vous pourriez facilement vous
laisser distraire pendant les rapports sexuels. Un système d’inhibition
sexuelle élevé, indépendamment du système d’excitation sexuelle, est le
facteur le plus fortement lié aux problèmes sexuels. Si cela vous
correspond, lisez attentivement les fiches de travail sur les «  contextes
sexy  » dans les chapitres suivants. Environ un quart des femmes que j’ai
interrogées se situent dans cette fourchette.

Excitation sexuelle basse (0–6)


Vous n’êtes pas très sensible aux stimuli sexuels et vous devez faire un
effort plus délibéré pour vous concentrer sur ce type d’activités. Les
situations nouvelles sont moins susceptibles d’être attrayantes pour vous
que les situations familières. Votre fonctionnement sexuel bénéficiera de
l’ajout d’une plus grande intensité de stimulation (comme un vibromasseur)
et d’une pratique quotidienne consistant à prêter attention aux sensations.
Un niveau plutôt bas d’excitation sexuelle est également associé à
l’asexualité, donc si vous avez un très faible niveau d’excitation sexuelle,
vous pourriez posséder certains traits de l’identité asexuée. Les femmes que
j’ai interrogées ont probablement un niveau d’excitation sexuelle plus élevé
que l’ensemble de la population – ce sont des femmes qui s’intéressent
suffisamment au sexe pour suivre un cours, assister à un atelier ou lire un
blog sur le sexe – mais environ 8  % d’entre elles se situent dans cette
fourchette.

Excitation sexuelle moyenne (7–13)


Vous êtes pile dans la moyenne, donc votre sensibilité ou non aux stimuli
sexuels dépend probablement du contexte. Dans les situations très
romantiques ou érotiques, vous êtes très sensible aux stimuli sexuels  ; et
dans les situations peu romantiques ou érotiques, il peut être assez difficile
de diriger votre attention sur les activités sexuelles. Reconnaissez le rôle
que joue le contexte dans votre excitation et votre plaisir, et prenez des
mesures pour augmenter le potentiel sexuel des contextes de votre vie. 70 %
des femmes à qui j’ai posé la question se situent dans cette fourchette.

Excitation sexuelle élevée (14–20)


Vous êtes assez sensible aux stimuli liés au sexe, peut-être même à des
choses auxquelles les humains ne sont généralement pas très sensibles,
comme les odeurs et les goûts. Un éventail assez large de contextes peut se
révéler sexuel pour vous, et la nouveauté vraiment excitante. Vous êtes
peut-être une personne qui aime le sexe comme moyen d’évacuer le stress –
une plus grande excitation sexuelle est corrélée à un plus grand risque de
compulsion sexuelle, et il peut donc être utile d’être attentive à vos
mécanismes de gestion du stress. Votre fonctionnement sexuel peut gagner
en qualité si vous veillez à laisser beaucoup de temps et d’espace à votre
partenaire ; parce que vous êtes sensible, vous pouvez tirer une satisfaction
intense du plaisir de votre partenaire, donc vous en profiterez tous les
deux ! Environ 16 % des femmes interrogées appartiennent à ce groupe.

Ce que veut dire « moyenne »


Avez-vous obtenu un résultat dans la moyenne pour les deux
questionnaires  ? C’est le cas pour plus de la moitié des gens. Il est
relativement rare d’obtenir un score très élevé ou très faible pour ces
caractéristiques, donc pour la majorité des répondants, l’intérêt du modèle à
double contrôle ne réside pas dans une découverte du genre : « Ouah, mon
cerveau est très sensible/insensible à ça, donc je dois y faire attention  !  »
Non, l’intérêt réside plutôt dans cette info : les freins et l’accélérateur sont
deux systèmes distincts. Certains facteurs enclenchent l’accélérateur.
D’autres appuient sur vos freins. Et d’autres phénomènes encore activent
les deux en même temps ! Une lectrice de blog m’a envoyé un e-mail disant
que l’expression «  freins et accélérateur en même temps  » décrivait
exactement son expérience à la lecture du roman sexuellement explicite et à
succès Cinquante nuances de Grey.
Le mot « moyenne » signifie que vous pouvez vous dire « Hé, je suis
normale » et commencer à réfléchir à ce qui vous fait freiner ou accélérer, et
à comment recalibrer votre vie pour l’adapter à votre cerveau. J’expliquerai
comment faire dans les chapitres 3, 4 et 5.
Si vous avez obtenu un score élevé ou faible dans l’un ou l’autre des
questionnaires – surtout si votre score se situe à une des extrémités – vous
pouvez vous dire  : «  Hé, je suis normale et en plus, relativement
exceptionnelle ! » Et à mesure que vous réfléchirez à ce qui déclenche vos
freins et votre accélérateur, vous constaterez que vous entretenez avec le
monde sexuel qui vous entoure une relation que la plupart des autres ne
connaissent pas.
Camilla, l’artiste, est intelligente – et curieuse. Le sexe est l’un des sujets qui l’intriguent. Elle
ne se contente pas de lire des livres sur cette question  ; elle lit les travaux de recherche
originaux.
Et elle avait du mal à réconcilier sa soif intellectuelle de connaissances sur le sexe avec son
désir très faible, au contraire, d’avoir des relations sexuelles. Ce jour-là, tandis que nous
parlions d’images de femmes, elle a évoqué cette énigme, remarquant en particulier qu’elle ne
semblait jamais éprouver de désir « spontané ».
Je me suis demandé si elle pouvait avoir des freins sensibles, alors je lui ai posé des
questions sur ses « inhibiteurs » : faut-il que la situation soit « parfaite » pour que vous soyez
excitée  ? Ressentez-vous le besoin d’avoir une confiance totale dans votre partenaire  ? Vous
préoccupez-vous du sexe pendant la relation sexuelle ?
Pas vraiment, pas vraiment, et pas vraiment.
Ensuite, j’ai posé les questions sur ses «  excitateurs  ». Vous arrive-t-il d’être excitée
simplement en regardant votre partenaire faire quelque chose (de non sexuel) qu’il sait bien
faire, ou par son odeur, ou lorsque vous vous sentez «  désirée  » sexuellement  ? Êtes-vous
excitée par de nouvelles situations ? Vous sentez-vous excitée par des fantasmes ?
Pas vraiment, non, et… quels fantasmes ?
Camilla a un système d’excitation sexuelle faible. Cela ne signifie pas qu’elle ne
s’intéresse pas à l’idée de la sexualité, mais que son cerveau a besoin d’un tas de stimulations
pour franchir le seuil du désir actif de sexe.
Je l’ai interrogée au sujet de l’orgasme.
«  Rares et lents à monter, a-t-elle répondu. Et souvent, ils ne valent pas la peine de se
donner tant de mal. »
Elle trouve son vibromasseur bien plus fiable pour atteindre l’orgasme, et c’est tout à fait
logique – la vibration mécanique peut fournir une intensité de stimulation qu’aucune stimulation
organique ne peut égaler. Mais pour elle, l’orgasme est parfois plus une distraction qu’un
objectif du rapport sexuel. Elle aime être avec son partenaire, elle aime jouer et explorer. Mais
parfois, elle est tout aussi satisfaite de faire la cuisine avec lui que l’amour.
« Henry n’est pas le mec le plus porté sur le sexe au monde, a-t-elle déclaré. (Henry est son
mari. C’est un mec super sympa.) Mais il aimerait que je prenne plus d’initiatives un peu plus
souvent. Est-ce le genre de chose qu’une personne peut changer ? »
Oui, complètement.
Une partie de la solution de Camilla se trouve dans le chapitre  3, mais nous devrons
attendre le chapitre 7 pour en connaître le fond.

Différent pour les filles… parfois


Si vous deviez deviner quel groupe, hommes ou femmes, a un niveau
d’excitation sexuelle plus élevé en moyenne – c’est-à-dire un accélérateur
plus sensible –, sur lequel parieriez-vous ?
Les hommes, n’est-ce pas ? Et vous auriez raison. Dans la population,
en moyenne, les hommes ont des accélérateurs plus sensibles 10.
Et quel groupe a un niveau d’inhibition sexuelle plus élevé –, c’est-à-
dire des freins plus sensibles ?
Eh oui. Les femmes, en moyenne, dans la population générale, ont
tendance à avoir des freins plus sensibles.
Mais vous vous souvenez au chapitre 1 quand j’expliquais que la taille
varie entre hommes et femmes, mais qu’elle varie davantage au sein de
chaque groupe qu’entre les groupes ? Les femmes, en particulier, diffèrent
les unes des autres en matière de freins et d’accélérateur. Énormément.
Demandez à un millier de femmes à quelle fréquence elles aimeraient
idéalement avoir des relations sexuelles et leurs réponses iront de
«  jamais  » à «  plusieurs fois par jour  », et toutes ces réponses sont
normales.
Une différence plus significative que la simple sensibilité de
l’accélérateur et des freins des hommes et des femmes : la relation de ces
deux mécanismes avec d’autres aspects de la psychologie des hommes et
des femmes – en particulier l’humeur et l’anxiété.
Par exemple, environ 10 à 20 % des hommes et des femmes signalent
une augmentation de leur intérêt sexuel lorsqu’ils sont anxieux ou
déprimés 11. Mais un gars qui a envie de plus de sexe quand il est anxieux ou
déprimé a probablement des freins moins sensibles.
En revanche, une femme qui a envie de plus de sexe lorsqu’elle est
anxieuse ou déprimée a probablement un accélérateur plus sensible.
Ce que cela nous montre, c’est qu’il y a plus qu’une simple différence
entre hommes et femmes en matière de sensibilités moyennes des freins et
de l’accélérateur. Il semble également y avoir une différence dans la relation
entre ces deux systèmes et les autres systèmes de motivation du cerveau, en
particulier le système de réponse au stress. (Nous reviendrons sur ce point
au chapitre 4.)
Mais bon, écoutez : c’est bien trop facile de métaphoriser les différences
de freins et d’accélérateurs au niveau de la population, comme nos aïeux
l’ont fait pour nos organes génitaux. Par exemple : « Les femmes s’excitent
difficilement et se détournent facilement du sexe.  » Ou encore  : «  Les
femmes ont moins d’envies sexuelles que les hommes.  » Comme nous le
verrons dans les prochains chapitres, cela ne correspond pas du tout à la
réalité – pour la plupart des gens, la réponse sexuelle dépend autant du
contexte que des mécanismes cérébraux.

Vos propres freins et accélérateur, et leur relation avec votre humeur


ou votre anxiété, sont uniques et personnels. Comprendre vos freins
et votre accélérateur ne sert pas à comprendre « le fonctionnement
des hommes » en opposition au « fonctionnement des femmes »,
mais à prendre conscience de votre propre fonctionnement, de ce
que vous êtes. Unique, avec un grand potentiel de génialité.

Qu’est-ce qui vous excite ?

Une magnifique énorme baignoire dans un gîte.

Regarder un partenaire mettre les enfants au lit.

Une histoire d’amour parallèle entre Harry Potter et Drago Malefoy.

Fantasmer d’avoir des relations sexuelles en public.

Avoir vraiment des relations sexuelles en public.


Personne ne naît déjà réceptif sexuellement à de telles situations, mais
ce sont des exemples de circonstances excitantes cités par les femmes. Le
modèle à double contrôle explique clairement comment le cerveau réagit
aux stimuli, pour augmenter ou diminuer votre excitation. Le cerveau
remarque les stimuli liés au sexe (comme les fantasmes ou un partenaire
attirant) et les menaces potentielles (comme un public qui n’aimerait pas
vous voir), et envoie des signaux en conséquence ; l’excitation sexuelle est
ce processus parallèle d’allumage des stimuli et d’extinction des menaces.
Mais cela ne nous dit rien de la manière dont votre cerveau détermine ce
qu’il considère comme un stimulus sexuel ou comme une menace
potentielle.
Le processus d’apprentissage de ce qui est associé au sexe et de ce qui
s’apparente à une menace ressemble en quelque sorte à l’apprentissage
d’une langue. Nous sommes tous nés avec la capacité innée à apprendre
n’importe quelle langue humaine, mais nous n’apprenons pas une langue au
hasard, n’est-ce pas  ? Si vous grandissez entourée de personnes qui ne
parlent que l’anglais, vous n’arriverez jamais en maternelle en sachant
parler français. Vous apprenez la langue dans laquelle vous baignez.
De même, vous apprenez la langue sexuelle dans laquelle vous baignez.
Tout comme il n’y a pas de vocabulaire inné, il semble qu’il n’y ait presque
pas de stimuli sexuels innés. Ce qui nous excite (ou nous dégoûte) émane
de la culture, de la même manière que les enfants apprennent le vocabulaire
et les accents au sein de leur culture.
Je vais illustrer mon propos avec trois études sur les rats réalisées dans
le laboratoire du chercheur Jim Pfaus.
Imaginons que vous soyez un rat de laboratoire mâle. Votre mère vous
élève en vous offrant tout ce dont un jeune rat a besoin pour être normal et
en bonne santé. En plus de ce développement normal et sain, les chercheurs
vous entraînent à associer l’odeur du citron à l’activité sexuelle 12. En temps
normal, le citron signifie autant pour la sexualité des rats que pour la
sexualité humaine  : rien du tout. Mais vous avez été formé à associer les
citrons et la sexualité au niveau de votre cerveau. Ainsi, lorsqu’on vous
présente deux rattes réceptives, dont l’une sent la ratte réceptive en bonne
santé et l’autre la ratte réceptive en bonne santé et le citron, vous préférerez
celle qui sent le citron – et par «  préférerez  », je veux dire que vous
copulerez avec les deux femelles, mais 80 % de vos éjaculations se feront
avec la partenaire citronnée, et seulement 20 % environ avec la partenaire
non citronnée. Votre accélérateur sexuel de rat a appris que le citron est lié
au sexe, donc la partenaire citronnée appuie plus fort sur votre accélérateur.
Penchons-nous sur une autre expérience. Cette fois, imaginons que
votre frère a été élevé comme un rat normal et en bonne santé, sans le truc
du citron. Mais lors de sa première possibilité de copulation avec une
femelle réceptive, les chercheurs lui ont enfilé un harnais pour rongeurs,
une petite veste bien confortable 13.
Si votre frère porte sa petite veste de rat la première fois qu’il copule
avec une femelle réceptive, alors la fois suivante, s’il ne porte pas de veste,
il s’inhibera lui-même. Ses freins resteront en place parce que lors de cette
toute première expérience, son cerveau a appris que «  veste + femelle en
chaleur =  moments coquins  ». Il n’a pas simplement appris «  femelle en
chaleur = moments coquins ».
Ce que ces deux expériences nous révèlent, c’est que l’accélérateur et
les freins apprennent tous deux à réagir en fonction de l’expérience vécue.
Ni les citrons ni les vestes ne sont innés, ces deux éléments ont été appris.
Maintenant, imaginons une fois de plus que vous êtes un rat de
laboratoire mâle, élevé par votre mère, en bonne santé et heureux. Puis,
lorsque vous arrivez à la fin de l’adolescence et que vous êtes encore
«  sexuellement naïf  » (c’est-à-dire vierge), les expérimentateurs vous
présentent une ratte en chaleur. On ne pourrait pas faire plus érotique pour
votre première aventure  ! Mais les chercheurs ne vous donnent pas la
chance de copuler avec elle 14. Vous n’aurez jamais l’occasion d’avoir des
relations sexuelles avec cette femelle prête et consentante.
Résultat  : vous ne développez pas une préférence pour l’odeur d’une
femelle fertile, par rapport à l’odeur d’une femelle infertile ou même d’un
autre mâle. Il faut que le rat mâle vive une expérience coquine (c’est-à-dire
une copulation) pour apprendre à son cerveau qu’une femelle en chaleur est
« associée au sexe ». L’instinct de copulation est présent et le rat tentera de
copuler avec tout le monde, mais s’il n’a pas l’expérience adéquate, il ne
peut pas apprendre à transformer cet instinct en action réussie.
Ce qui est inné, c’est le mécanisme par lequel cet apprentissage a lieu :
la présence d’un accélérateur et des freins, et la capacité d’apprendre par
l’expérience et l’association. Mais le rat a besoin d’expérience pour
apprendre à ses freins et à son accélérateur ce qui est une menace et ce qui
est lié au sexe.
Dans l’environnement naturel d’un rat, en dehors du laboratoire, il
n’aurait jamais besoin d’une veste pour se sentir sexy, et l’odeur du citron
ne le ferait pas éjaculer. Les rats ont appris ça parce que les humains ont
créé un environnement dans lequel ces éléments étaient des caractéristiques
marquantes de leur environnement sexuel. Mais même ce qu’on considère
comme inné – les rattes fertiles – doit être appris par l’expérience.
« Des années de lutte. »
C’est ainsi que Merritt a décrit sa vie sexuelle. Après l’obtention de son diplôme, nous
sommes devenues amies, et c’est à ce moment-là qu’elle m’a dit que la leçon la plus importante
qu’elle avait tirée de mon cours était qu’il existait des freins et un accélérateur. Cette info l’a
aidée à comprendre pourquoi elle ressentait un désir sexuel… mais qu’il était comme piégé.
Elle s’est rendu compte qu’elle avait des freins sensibles  : il fallait que les choses soient
«  parfaites  » pour qu’elle soit excitée, et elle avait besoin d’une confiance totale en sa
partenaire. Et elle se prenait la tête sur le sexe pendant ses rapports. Elle a appelé ce phénomène
son « cerveau bruyant ».
« Ouais : une inhibition sexuelle super élevée. Le bruit, c’est tes freins sexuels qui grincent
métaphoriquement, lui ai-je dit. Ça expliquerait la sensation de “moulin à vent au bord d’une
falaise” que tu m’as décrite il y a bien longtemps  : l’accélérateur et les freins sont activés en
même temps. »
En raison de la sensibilité de ses freins, le système de motivation sexuelle de Merritt est le
plus à risque de connaître des problèmes de désir, d’excitation et d’orgasme – et elle a eu des
difficultés avec ces trois phénomènes à un moment ou un autre de sa vie, m’a-t-elle confié.
Dernièrement, c’était l’orgasme.
« Je peux vraiment m’en approcher, tout près, et puis c’est comme s’il y avait tout ce bruit
dans ma tête. »
Elle a une excellente relation, elle et sa partenaire ont des relations sexuelles amoureuses et
ludiques assez régulières, mais son excitation se bloque à l’intérieur, et l’orgasme semble hors
de portée, ce qui la frustre et fait du sexe un problème plutôt qu’un plaisir. Nous en apprendrons
davantage sur la cause des soucis de Merritt au chapitre 4, et nous en apprendrons beaucoup sur
leur solution au chapitre 8.

Pouvez-vous changer votre cerveau ?


Si une femme éprouve des difficultés sexuelles, le modèle à double contrôle
exige que l’on pose quatre questions :
À quel point son accélérateur est-il sensible ?
Qu’est-ce qui l’active ?
À quel point ses freins sont-ils sensibles ?
Qu’est-ce qui les actionne ?

Jusqu’à maintenant, dans ce chapitre, vous avez été chercheuse en


sexologie dans les années  1960 et  1970, et vous avez été un rat de
laboratoire mâle fétichiste du citron. Maintenant, imaginons que vous soyez
sexothérapeute, et que vous connaissiez bien le modèle à double contrôle,
capable d’aider les gens à comprendre comment fonctionne leur sexualité.
Les gens vous posent des questions remplies de frustration, ils sont
insatisfaits de leur mécanisme de réponse sexuelle – celui-ci ne se comporte
pas comme ils voudraient ou comme ils s’y attendent, et ils veulent le
changer. Est-ce possible ?
La réponse comporte deux parties, toutes deux aussi importantes l’une
que l’autre.
Tout d’abord, l’accélérateur et les freins sont des traits dont vous êtes
dotée à la naissance et qui restent plus ou moins stables dans le temps, et
jusqu’à présent, seules les caractéristiques du partenaire semblent
constituer une variable avec un effet possible (voir chapitre 3) 15. En général,
cependant, il semble que nous ne puissions pas faire grand-chose pour
modifier délibérément le mécanisme cérébral.
De toute façon, la sensibilité de l’accélérateur et des freins de la plupart
des gens est « moyenne » – ni trop sensible, ni trop peu sensible. Changer
l’accélérateur et les freins si vous êtes dans la moyenne ne serait même pas
une bonne idée.
Mais il y a aussi une deuxième partie à la réponse : vous n’êtes peut-être
pas capable de changer le mécanisme lui-même, mais vous pouvez
probablement changer ce à quoi le mécanisme réagit. Vous pouvez souvent
modifier ce que vos freins considèrent comme une menace potentielle, et
vous pouvez réduire ces menaces, telles que les grossesses non désirées, les
IST, le stress, etc.
Vous pouvez également changer ce que votre accélérateur considère
comme associé au sexe, et vous pouvez augmenter les éléments en lien avec
le sexe dans votre vie quotidienne. En d’autres termes, vous pouvez changer
le contexte – vos circonstances extérieures et votre état d’esprit. Le
pourquoi et le comment de ces changements est le sujet principal des trois
prochains chapitres, mais voici la version courte : vous savez que presque
rien de ce à quoi votre accélérateur et vos freins réagissent n’est inné ; votre
cerveau a appris à associer des stimuli particuliers à une excitation ou à une
inhibition.

Grâce à un processus de « réglage » de votre contexte – à la fois


dans votre cerveau et votre environnement –, vous pouvez
maximiser votre potentiel sexuel.
J’ai pensé que Laurie, en raison de son faible désir, pourrait être à Inhibition sexuelle élevée.
Nous avons rédigé une liste de trucs qui activent ses freins : son enfant, son travail à plein temps
avec un patron pourri, ses parents – sans parler des transformations de son corps depuis sa
grossesse, qui la rendent malheureuse, et elle se sent aussi malheureuse de se sentir
malheureuse, puisque la féministe en elle se critique elle-même de ne pas réussir à se libérer de
l’idéal culturel arbitraire, pour tout simplement aimer son corps. Oh, et aussi ? Elle retournait à
la fac pour préparer un master. Donc, rien de bien méchant.
Elle n’avait pas de freins particulièrement sensibles – elle avait juste une avalanche de
trucs qui mettaient constamment de la pression sur des freins très ordinaires.
« Rien que de voir tout ça écrit, j’ai besoin d’un massage, a-t-elle gémi.
– Alors, demande à Johnny de te faire un massage, lui ai-je suggéré.
– Bien sûr, et ensuite je me sens coupable si on ne fait pas l’amour après ça.
– Oooh, bien vu  ! Ajoutez ça à la liste des sujets qui activent vos freins  : vous avez
l’impression qu’on attend de vous que vous fassiez l’amour. »
Elle l’a noté. Et c’est là que j’ai vu la lumière s’allumer pour elle – eurêka !
«  Donc tous les jouets et les jeux appuyaient sur l’accélérateur, mais en même temps,
toutes ces choses dans ma vie appuyaient sur les freins dans mon cerveau… et peu importe la
force avec laquelle vous écrasez l’accélérateur, si le frein est au plancher. Ah.
– Bien.
– Alors comment je fais pour arrêter de freiner ? »
La question à un million de dollars.
La réponse courte : réduisez votre stress, aimez votre corps et oubliez les idées fausses qui
disent comment le sexe est « censé » fonctionner, afin de créer un espace dans votre vie pour la
manière dont le sexe fonctionne réellement.
La réponse complète est… le reste de ce livre.
J’ai suggéré à Laurie d’arrêter de se forcer à avoir envie de faire l’amour pendant quelque
temps. Pour lui ôter toute pression de performance.
Elle n’a pas suivi mon conseil – pas immédiatement, en tout cas. Ce qu’elle a essayé à la
place, c’est un changement intelligent de contexte, ce dont traite le chapitre suivant.

Pour reprendre la métaphore du jardin que j’ai utilisée au chapitre  1,


l’accélérateur et les freins sont des caractéristiques du sol de votre jardin. Il
en va de même pour vos organes génitaux et le reste de votre corps et de
votre cerveau. La sensibilité innée de votre accélérateur et de vos freins
influence le mode de croissance de votre jardin – les espèces de plantes qui
pousseront, la densité des plantations – mais d’autres facteurs peuvent avoir
au moins autant d’influence. L’eau, le soleil, le choix des plantes, et même
l’ajout d’engrais, en d’autres termes, tout, du stress à l’amour en passant par
la confiance et le vibromasseur, peut influencer le foisonnement de votre
jardin. Vous ne pouvez pas changer le sol à proprement parler, mais vous
pouvez le renforcer et prendre des décisions intelligentes pour mieux le
gérer.
Et c’est de cette question que traite le chapitre 3.
En résumé

Votre cerveau possède un «  accélérateur  » sexuel qui réagit à la


stimulation « associée au sexe » – tout ce que vous voyez, entendez,
sentez, touchez, goûtez ou imaginez, et que votre cerveau a appris à
associer à l’excitation sexuelle.

Votre cerveau a également des « freins » sexuels qui réagissent aux


« menaces potentielles » – tout ce que vous voyez, entendez, sentez,
touchez, goûtez, ou imaginez, et que votre cerveau interprète
comme une excellente raison de ne pas être excitée dans l’immédiat.
Il peut s’agir d’IST, de grossesse non désirée, de problèmes
relationnels ou de réputation.

Il n’y a pratiquement aucun stimulus ou aucune menace « innée »


liée au sexe ; nos accélérateurs et nos freins apprennent à réagir en
fonction de nos expériences.

La sensibilité des freins et des accélérateurs varie d’une personne à


l’autre. Répondez au petit quiz de la page 74 pour découvrir à quel
point les vôtres sont sensibles – et rappelez-vous que la plupart des
gens obtiennent un score moyen, et que tous les scores sont
normaux.
CHAPITRE 3

Le contexte
Et « l’anneau unique » (pour les gouverner tous)
dans votre cerveau émotionnel
Vous aimeriez bien Henry si vous le rencontriez : il est poli, beau, un peu vieux jeu, avec un joli
sourire et une voix douce. Il se lève lorsqu’une femme entre dans la pièce. Henry est presque
aussi geek que Camilla, sa femme. Leur vendredi soir idéal ? Une partie de Colons de Catane,
de Blanc-Manger Coco ou n’importe quel film de George Lucas – voire les trois.
Et ils ont une bonne vie sexuelle, lui et Camilla. Henry est presque toujours l’initiateur, et
même s’il aimerait certainement être l’objet des avances sexuelles de sa femme, c’est un gars
facile à vivre qui se sent chanceux d’avoir une partenaire de vie qui partage à la fois son sens de
l’humour et son besoin de garder la salle de bains bien rangée en permanence. Ce sont des
amoureux prévenants, attentifs et introvertis.
Lorsqu’ils se sont rencontrés pour la première fois – je veux dire, leur vraie première
rencontre en personne, sans compter les semaines de flirt en ligne – leurs regards se sont croisés
et tous deux ont ressenti tout à coup la même chose : « Oui, te voilà. Tu es pour moi. »
Mais ce sont des gens prudents et réfléchis, et ils ont pris leur temps.
Ils se sont dit  : «  Je ne suis pas vraiment prêt(e) pour une relation. On devrait juste être
amis. »
Et ils ont partagé un hochement de tête solennel. Et ils sont devenus amis.
Ça a duré un an.
Petit à petit, Henry a commencé à lui faire la cour. Il lui a offert des fleurs… en Lego. Il a
commandé à son dessinateur de webcomics préféré un portrait d’elle. Il lui a écrit des scénarios
de jeux vidéo de rôle. Il a porté des cravates. Il lui a tenu la main.
Quand ils se sont embrassés, ils étaient tous les deux amoureux – bien qu’aucun des deux
ne l’ait jamais dit. Et quand ils ont fait l’amour pour la première fois, ils avaient déjà décidé de
consacrer leur vie l’un à l’autre, et ils se le sont dit encore et encore, comme autant de
murmures urgents dans l’obscurité.
Camilla, vous vous en souvenez, est une femme avec une excitation sexuelle basse – elle
fait partie des 4 à 8 % de femmes, environ, dont la sensibilité aux stimuli liés au sexe est assez
1
faible . Et pourtant, le jour où elle s’est mariée, oh, elle était sensible.
Cinq ans plus tard… plus tant que ça.
Elle m’a dit  : «  Avant, quand j’étais dans la cuisine et qu’il venait derrière moi et
commençait à m’embrasser dans le cou, je fondais instantanément. Mais maintenant, s’il fait ça
je vais dire  : “J’essaie de préparer le dîner.” Je ne comprends pas ce qui ne va pas chez moi
maintenant.
– Tout va bien, le contexte est juste différent, ai-je dit.
– En quoi est-il différent ? Je l’aime toujours autant que le jour de notre mariage ; il semble
que j’ai vidé mon “réservoir de désir”. Est-ce que les gens ont un “réservoir de désir” qui peut
être vide ?
– Non… enfin… en quelque sorte  ? Non, pas vraiment. Ce n’est pas tant un réservoir
que… une… une douche. Une douche qui parfois laisse échapper des tonnes d’eau chaude, et la
pression de l’eau et le pommeau sont parfaits, et d’autres fois il n’y a presque pas de pression,
ou le pommeau est entartré. Vous pouvez toujours prendre une douche, mais tous ces facteurs
contextuels feront que cette douche sera soit fantastique, soit frustrante.
– Des facteurs contextuels. Qu’est-ce que ça veut dire, dans la vie réelle ? Des bougies et
des fleurs ? » Elle a grimacé. « Qu’il m’arrache mes vêtements ?
– Ça, ce sont des circonstances. Des situations. Ça en fait partie, mais quand je parle de
“contexte”, je veux aussi dire “états cérébraux”.
– Oh ! s’est-elle exclamée, et son visage s’est éclairé. Ça a l’air bien plus intéressant que
les bougies. »
En effet. Et c’est le sujet de ce chapitre  : comment obtenir de l’eau bien chaude et
augmenter la pression de l’eau.

Les signaux des facteurs de désir sexuel


Dans leur étude sur les «  signaux des facteurs de désir sexuel  », Katie
McCall et Cindy Meston ont demandé aux femmes ce qui les excitait, et ont
constaté que les résultats se répartissaient en quatre grandes catégories 2.

Les signaux de connexion amoureuse/émotionnelle


Ce sont des signaux tels que le sentiment d’amour, la sécurité,
l’engagement, l’intimité émotionnelle, la protection et le soutien dans votre
relation, et la perception d’une sorte d’« attention particulière  » de la part
du partenaire. Par exemple  : une femme m’a raconté l’histoire
extraordinairement romantique d’un petit ami qui a parcouru la moitié du
globe pour la surprendre à l’occasion du deuxième anniversaire de leur
rencontre. Ça, c’est de la proximité, de l’engagement et de l’attention
particulière. Oui, elle a laissé cet homme se glisser dans son lit.

Les signaux explicites/érotiques
Ce sont des signaux tels que regarder un film sexy, lire une histoire
érotique, regarder ou entendre d’autres personnes faire l’amour, anticiper
une relation sexuelle, savoir que votre partenaire vous désire, ou remarquer
votre propre réaction sexuelle ou celle de votre partenaire. Par exemple  :
une femme d’une vingtaine d’années m’a raconté qu’elle s’était réveillée au
milieu de la nuit dans l’appartement de son petit ami, au son des voisins du
dessus qui faisaient l’amour. Les grincements et les grognements rythmés
l’ont immédiatement excitée. Elle a embrassé son petit ami pour le réveiller
et ils ont écouté ensemble, puis ont eu des rapports sexuels aussi brefs
qu’intenses.

Les signaux visuels/de proximité

Il s’agit par exemple du fait de voir un partenaire potentiel attirant et bien


habillé, avec un corps bien musclé et beaucoup de confiance en lui,
d’intelligence et d’élégance. Par exemple : une amie m’a posé un jour une
question rhétorique : « Pourquoi on laisse les poignets blancs d’une chemise
ressortir de la veste d’un costume ? » J’ai suggéré : « Peut-être un signe de
statut social ? » Et elle a ajouté : « Ça, et du soin qu’il porte à son hygiène.
Un homme avec des manchettes d’un blanc immaculé est un homme dont la
peau sera délicieuse. »

Les signaux romantiques/implicites

Ils désignent des comportements intimes comme le fait de danser collés, de


partager un jacuzzi ou des massages ou tout autre contact intime (comme se
toucher le visage ou les cheveux), d’observer ensemble un coucher de
soleil, de rire ou de chuchoter en tête à tête, ou de sentir bon. Par exemple :
une femme d’une trentaine d’années m’a dit qu’elle et son mari
économisaient pour rénover leur salle de bains, après avoir pris conscience
que si elle était si désireuse de sexe lorsqu’ils partaient en vacances, c’était
notamment qu’ils prenaient de longs bains très chauds (dans tous les sens
du terme) ensemble dans les baignoires géantes de l’hôtel où ils
séjournaient. Plus de bains = plus de sexe.
Rien de bien surprenant, mais c’est toujours intéressant d’avoir des
données précises pour étayer nos intuitions  : un cocktail de signaux
érotiques et romantiques augmente le désir chez les femmes. Les travaux de
McCall et Meston nous révèlent ce qui active l’accélérateur.

Accélérateur vs freins
Dans une séquence de neuf groupes de discussion réunissant quatre-
vingts femmes, Cynthia Graham, Stephanie Sanders, Robin Milhausen et
Kimberly McBride ont répertorié les réflexions des participantes sur ce qui
les excite et ce qui « garde les freins à fond 3 ». Ces quatre chercheuses ont
découvert des thèmes présentant des parallèles pertinents avec les travaux
de McCall et Meston. Voici ces thèmes, accompagnés chacun d’une citation
des participantes à l’étude, en guise d’illustration :
Les sentiments à l’égard de son propre corps. «  C’est beaucoup plus
facile pour moi de me sentir excitée quand je me sens vraiment à l’aise
avec moi-même… Ce n’est pas aussi facile de me sentir excitée quand
je ne me sens pas bien dans ma peau et dans mon corps. »
Les préoccupations relatives à la réputation. « Quand tu es célibataire,
et que tu as envie d’avoir des relations sexuelles avec une autre
personne, tu te demandes “bon, est-ce que je vais en faire trop” ou “est-
ce que je ne vais pas en faire assez” ou “qu’est-ce qu’il va penser de
moi si je fais ça”… »
Appuyer sur les freins. « Je pense que c’est comme si tu avais envie et
que tu te disais alors : “Attends une minute, tu ne peux pas faire ça”, tu
es en couple ou ce type est un raté… et tout d’un coup, tu te dis : “Bon,
d’accord, oublie ça, je ne peux pas. C’est une mauvaise idée” et tu t’en
vas. »
Grossesse non désirée/contraception. «  Une grossesse non désirée est
un grand bouleversement et si tu es avec un partenaire qui ne semble
pas s’en inquiéter, alors tu te sens vraiment en danger. »
Se sentir désirée vs se sentir utilisée par son partenaire. « J’aime quand
[les hommes] caressent non seulement les parties de mon corps qui sont
sexuellement excitées, mais aussi mes bras… j’ai l’impression qu’ils
m’entourent et qu’ils apprécient mon corps dans son ensemble. »
Le sentiment d’être «  acceptée  » par son partenaire. «  Même mon
deuxième mari, alors que nous étions ensemble depuis seize ans,
n’acceptait pas mes réactions sexuelles… Je fais beaucoup de bruit ou
[avec] ma façon préférée d’atteindre l’orgasme, il se sentait exclu… Ça
a été le début de notre fin. »
Le style d’approche/comment la personne nous aborde et le timing.
«  Son “jeu”. Tu sais, comment l’homme t’a approchée, comment il a
fait pour que tu lui parles plus longtemps que cinq minutes ? Comment
il s’y est pris. »
L’humeur négative. « Si tu es très contrariée par ton partenaire sexuel, à
propos de quelque chose, aucune chance d’être excitée. »

Qu’est-ce qui nous met d’humeur ?


Ces deux études nous aident à mieux comprendre que l’intérêt sexuel des
femmes dépend d’un grand nombre de facteurs. Lorsque nous leur
demandons  : «  Qu’est-ce qui vous met d’humeur à avoir des relations
sexuelles ? », elles nous répondent :
Avoir un partenaire attirant qui les respecte et les accepte telles qu’elles sont.

Se sentir en confiance et affectueuses dans leur relation.

Avoir confiance en soi et être en bonne santé, tant émotionnellement que physiquement.

Se sentir désirées par leur partenaire, être approchées d’une manière qui les fait se sentir
spéciales.

Des signaux érotiques explicites, comme l’érotisme ou le porno, ou entendre/voir d’autres


personnes avoir des relations sexuelles.

Mais ce que ces réponses nous disent aussi, c’est que ça dépend. Une
femme qui a confiance en elle, et qui entretient une excellente relation avec
un partenaire qu’elle aime, en qui elle a confiance et qui l’attire, peut ne pas
avoir envie de sexe si elle a la grippe, si elle a travaillé soixante-dix heures
dans la semaine, ou si elle préfère que son partenaire et elle soient
fraîchement douchés avant de faire l’amour, et que là, ils viennent juste de
terminer de jardiner ensemble.
Ce que ces réponses nous apprennent aussi, c’est que ce que les femmes
racontent dans les études et les groupes de discussion ne dit pas tout ce qui
se passe dans la vie réelle. Dans The Science of Trust (non traduit en
français), le chercheur John Gottman raconte l’histoire de femmes prises
dans des relations abusives, habituellement des cibles de violences
physiques 4. Ces femmes les ont étonnés, son collègue de recherche et lui,
en leur racontant que certaines des meilleures relations sexuelles qu’elles
avaient eu de leur vie avaient immédiatement suivi des actes de violence. Et
dans Que veulent les femmes  ? (Hugo Doc), Daniel Bergner décrit Isabel,
qui n’arrivait pas à s’exciter ou même à s’intéresser sexuellement à son
petit ami respectueux et aimant, alors même qu’elle s’était sentie
magnétiquement attirée par un abruti qui prenait les femmes pour des
objets, qui voulait qu’elle s’habille comme une prostituée et qui, elle le
savait pertinemment, ne voudrait jamais s’engager dans une relation avec
elle 5. J’ai entendu des histoires similaires de la part de nombreuses femmes,
et rien dans cette étude ne l’explique. Rien ne nous dit pourquoi les
relations sexuelles de rupture ou de réconciliation ont gagné la réputation
d’être si intenses.
Alors que se passe-t-il ?
Ce qui se passe, c’est la relation du mécanisme à double contrôle avec
vos nombreux autres systèmes de motivation. Ce qui se passe, c’est le
contexte.

Le contexte : les circonstances et votre


état mental
Le contexte est constitué de deux choses  : les circonstances de l’instant
donné (avec qui vous êtes, où vous êtes, si la situation est nouvelle ou
familière, risquée ou sûre,  etc.) et votre état mental à cet instant (si vous
êtes détendue ou stressée, si vous faites confiance en votre partenaire ou
non, à ce moment précis). Il est de plus en plus établi que la réponse
sexuelle des femmes est plus sensible que celle des hommes au contexte, y
compris aux facteurs liés à l’humeur et à la relation, et que les femmes
varient davantage les unes par rapport aux autres pour ce qui concerne
l’influence de ces facteurs sur leur réponse sexuelle 6.

Parlons du contexte : comment vos circonstances extérieures et


votre état mental interne peuvent influencer votre réceptivité
sexuelle ?
Nous commencerons par l’idée que votre expérience ou votre
perception de toutes sortes de sensations varie en fonction d’un certain
nombre de facteurs, notamment les circonstances extérieures, l’humeur, la
confiance et vos antécédents de vie. Puis, nous examinerons en détail
pourquoi ce principe est vrai et immuable : lorsque votre cerveau est soumis
au stress, presque tout est perçu comme une menace. Ensuite, je vous
montrerai le mécanisme cérébral spécifique qui régit ce processus. La
compréhension de ce mécanisme – que j’appelle votre «  anneau unique  »
émotionnel – est essentielle pour cerner comment le contexte affecte votre
réceptivité sexuelle.
Une mise en garde s’impose avant de commencer : il s’agit du chapitre
le plus ardu intellectuellement et le plus scientifique de ce livre.
Dépoussiérez votre cerveau, promis, ça en vaut la peine. En retour, chaque
fois que vous entendrez quelqu’un se plaindre  : «  Les femmes sont si
compliquées – hier, elle aimait ceci, aujourd’hui elle veut quelque chose de
complètement différent  », ou se demander  : «  Pourquoi je ne réagis pas
comme avant ? », vous pourrez répondre : « C’est le contexte ! Ce que vous
voulez et aimez change en fonction de vos circonstances extérieures et de
votre état intérieur.  » Ce chapitre vous explique comment déchiffrer cette
énigme et donner un sens à tout ça.
L’insatisfaction de Laurie à l’égard de sa vie sexuelle n’est pas due à un accélérateur et des
freins difficiles, mais à un contexte difficile. Pour autant, elle n’a pas apprécié ma suggestion
d’accepter de ne pas avoir envie de sexe pendant quelque temps. Pour elle, c’était synonyme
d’abandon. Elle voulait du sexe et, bon sang, elle allait tout faire pour y arriver.
Elle a donc repensé aux moments où elle avait eu des relations sexuelles agréables et s’est
souvenue d’un excellent séjour pour fêter leur anniversaire de mariage, avant la naissance du
bébé, dans un hôtel chic à la montagne.
« Aha ! Le contexte ! » s’est-elle écrié, et elle et Johnny ont réservé et organisé un voyage
là-bas, pour faire rejaillir la passion.
Son plan s’est avéré un échec total. Le trajet a été long et épuisant, ils se sont disputés en
chemin, et avant la fin du dîner, la pression suscitée par leurs attentes était devenue écrasante.
Laurie s’est sentie se renfermer, et elle a dit non, non à tout. Elle a pris un bain chaud, bu un
verre de vin et s’est endormie. Johnny a regardé un film.
Et puis le lendemain matin, elle s’est sentie trop coupable de ce qui s’était passé la veille
pour réessayer.
Alors un après-midi, peu après, Laurie et Johnny se sont assis et ont essayé de comprendre
ce qui avait fonctionné lors du premier voyage, et qui avait manqué la deuxième fois.
Leur vie entière était désormais différente : ils étaient parents, elle avait un travail frustrant,
elle faisait des études en parallèle. Ils avaient copié les circonstances extérieures, mais pas le
contexte.
«  Super, alors tout ce que tu as à faire, c’est de quitter ton travail, arrêter tes études et
vendre Trevor au cirque. Problème résolu  », l’a taquinée Johnny. Pour être un peu plus
constructif, il a ajouté : « Peut-être que nous n’y pensons pas de la bonne façon. Peut-être qu’il
s’agit de ce que l’on ressent, plutôt que de l’endroit où l’on se trouve ou de ce que l’on fait.
Quand on pense aux relations sexuelles exceptionnelles qu’on a eues lors de cet anniversaire,
qu’est-ce qu’on a ressenti alors ? »
Elle y a réfléchi une bonne minute.
Et puis elle a éclaté en sanglots.
Elle s’est mise à raconter combien elle l’aimait, à quel point il était essentiel à sa santé
mentale dans une vie qui semblait spécialement conçue pour la rendre folle, comment elle
voulait lui montrer, et pas seulement lui dire, combien il était important pour elle, mais chaque
fois qu’elle envisageait de commencer à faire l’amour, elle se sentait simplement submergée et
accablée et son corps se refermait sur lui-même.
Un chagrin diffus l’a envahie alors qu’elle parlait –  pour sa sexualité perdue, mais aussi
tout ce qu’elle avait perdu d’autre  : sa tranquillité d’esprit, sa conscience d’elle-même,
indépendamment de ses rôles de mère, fille, épouse, cheffe, employée, étudiante.
Et puis, quand la marée de son chagrin s’est calmée, ils ont fait l’amour, et c’était bien.
Après cet épisode, Laurie est venue me voir :
« Mais qu’est-ce que c’est que ce bordel ? On part en escapade romantique, et rien – rien
de rien ! Mais quand je pleure à chaudes larmes en parlant de l’amour que j’ai pour lui et de ma
vie épuisante, on s’envoie en l’air. Cette histoire de contexte n’a aucun sens ! »
Alors, je lui ai expliqué.

Les sensations en contexte
Supposons que vous flirtiez avec une personne spéciale, et qu’elle
commence à vous chatouiller. Vous pouvez imaginer que ce soit amusant,
non ? Sexy. Du genre à mener à une partie de jambes en l’air.
Maintenant, imaginez que vous soyez en colère contre cette même
personne spéciale et qu’elle essaie de vous chatouiller.
Ça vous agace, n’est-ce pas  ? Vous avez peut-être même envie de
frapper cette personne au visage.
C’est la même sensation, mais comme le contexte est différent, votre
perception de cette sensation est différente.
C’est vrai pour tous nos domaines sensoriels. Une odeur qui semble
agréable lorsqu’elle est étiquetée « fromage » sent mauvais lorsqu’elle est
étiquetée «  odeur corporelle  » 7. Même odeur + contexte différent
=  perception différente. L’humeur modifie également votre perception du
goût  : quand on se sent triste, comme à la fin d’un film tire-larmes, notre
capacité à sentir le goût gras des aliments diminue 8.
C’est vrai aussi pour tous vos autres sens, et pas seulement les cinq sens
de base qu’on apprend à l’école. Nous l’avons tous vécu avec le phénomène
de thermoception : imaginez que votre voiture tombe en panne d’essence à
un kilomètre de la station-service, par une journée caniculaire, aussi humide
qu’un sauna. Vous parcourez le kilomètre en question, dans un air étouffant.
Vous arrivez à la station-service climatisée, refroidie à 18  °C, et vous
ressentez comme un souffle glacé, un puissant soulagement après la chaleur.
Imaginez maintenant que votre voiture tombe en panne d’essence au même
endroit six mois plus tard, qu’il fait un froid glacial, qu’il y a un vent
mordant et que vous parcourez le même kilomètre jusqu’à la station-
service. Ce même 18  °C vous donne maintenant l’impression de vous
retrouver dans un four bien chaud, et vous ressentez un puissant
soulagement après le froid mordant. C’est le contexte.
C’est également vrai pour l’équilibroception (sens de l’équilibre)  :
quiconque a déjà débarqué d’un navire après une semaine de croisière sait
que notre cerveau s’adapte aux mouvements – on passe deux jours à se
demander pourquoi le sol bouge sous nos pieds. La nociception (perception
de la douleur)  : les personnes qui ont ressenti une douleur intense
développent une plus grande tolérance à la douleur à venir 9. La
chronoception (perception du temps)  : le temps semble en effet s’envoler
quand on s’amuse – ou plutôt, quand on est dans un état de « flow », pris
par l’inspiration, dans sa bulle 10.
Ces changements de perception ne se produisent pas « juste dans votre
tête ». Les personnes à qui l’on donne un médicament relaxant et à qui on
annonce : « C’est un médicament qui va vous détendre », non seulement se
sentent plus détendues que celles qui ont reçu le même produit, mais pas
l’information, mais elles ont aussi une plus grande quantité de cette
substance dans leur plasma sanguin 11. Le contexte change plus que
simplement comment vous vous sentez : il peut modifier la chimie de votre
sang.
C’est le même processus pour les stimuli sexuels. Au chapitre  2, j’ai
décrit comment le mécanisme à double contrôle réagit aux stimuli qui sont
soit associés au sexe, soit perçus comme une menace, et comment nous
apprenons quels stimuli entrent dans quelle catégorie (vous vous souvenez
du rat fétichiste du citron  ?). Mais tout comme l’odeur du fromage ou le
goût de la graisse sont influencés par notre état mental et les circonstances
extérieures, le fait qu’un stimulus particulier soit interprété comme étant
associé au sexe ou une menace dépend du contexte dans lequel nous le
percevons.
Les chatouilles en sont un exemple. Regarder son partenaire faire des
tâches ménagères en est un autre. Si vous vous sentez globalement soutenue
et complice dans votre relation, alors voir votre partenaire faire la lessive
peut devenir un signal pour des pensées érotiques. Mais si vous éprouvez du
ressentiment parce que vous faites une part disproportionnée des corvées
ces derniers temps, voir votre partenaire faire la lessive peut vous réjouir –
« Il était temps ! » – sans pour autant vous donner des idées coquines.
Il en va de même pour les phénomènes susceptibles d’activer les freins.
Le degré d’enclenchement des freins d’une personne par crainte d’une IST
change en fonction de la probabilité perçue d’une infection et de l’effet
perçu de cette IST. Vous utilisez un préservatif  ? Vous connaissez les
antécédents médicaux et sexuels de votre partenaire ? Vous avez confiance
en votre monogamie mutuelle  ? Moins de menaces. Pas de préservatif  ?
Vous ne savez rien de ses antécédents  ? Risque de tromperie  ? Beaucoup
plus de menaces. C’est pareil avec les conséquences sociales  : les
préjudices potentiels à votre statut social, à votre réputation ou à votre
relation sont autant de menaces, selon leur probabilité de survenance, et leur
degré de gravité le cas échéant.

Apprendre à reconnaître quels sont les contextes qui augmentent la


perception du monde comme un endroit sexy par votre cerveau, et
avoir les compétences nécessaires pour maximiser ces contextes :
voilà la clé pour augmenter votre satisfaction sexuelle.

À la fin de ce chapitre, vous trouverez des fiches de travail pour vous


aider à réfléchir aux aspects du contexte qui influencent votre perception
des sensations. Pour ces feuilles de travail, vous devrez vous remémorer
trois expériences sexuelles merveilleuses que vous avez vécues et trois
expériences sexuelles bien moins merveilleuses, et réfléchir concrètement et
spécifiquement à ce qui a fait de ces expériences ce qu’elles étaient, tant en
ce qui concerne les circonstances externes que votre état interne. Prenez le
temps de faire ces travaux pratiques. Réfléchir ne serait-ce qu’à une seule
expérience incroyable et à une expérience pas si géniale peut vous donner
une idée de quels contextes augmentent ou réduisent la tendance de votre
cerveau à interpréter le monde comme étant sexy.

DOULOUREUX OU ÉROTIQUE ?
Si votre partenaire vous donne une fessée alors que vous êtes en train d’enfiler les
chaussures de votre enfant, c’est agaçant. Mais s’il le fait en plein milieu d’un rapport
sexuel, ce geste peut être très, très sexy. Le contexte peut rendre érotiques des sensations
qui sont généralement perçues comme douloureuses, comme la fessée ou le fouet. La
« soumission » sexuelle exige de faire suffisamment confiance pour se détendre (relâcher
les freins), et de laisser son partenaire prendre le contrôle. Dans ce contexte explicitement
érotique, hautement complice et consentant, votre cerveau est ouvert et réceptif, prêt à
interpréter toutes les sensations comme étant érotiques. Et dans une culture où les femmes
doivent passer tellement de temps avec les freins serrés, à dire non, il n’est pas étonnant
que nous ayons des fantasmes d’abandon de tout contrôle, de détente en confiance absolue
(relâcher les freins), nous laissant aller à éprouver des sensations.

Sexe, rats & rock n’roll


Quelle est la preuve scientifique absolue de la capacité qu’a le contexte à
influencer la perception cérébrale d’une sensation ? Regardez ce qui arrive
aux cerveaux de rats quand on leur passe du Iggy Pop !
Imaginons que vous soyez un rat de laboratoire, dans une boîte à trois
compartiments 12. Les chercheurs ont implanté de manière indolore une
minuscule sonde dans votre cerveau afin de pouvoir allumer ou éteindre
votre noyau accumbens (NAcc), cette minuscule zone située au cœur de
votre cerveau. Son rôle  : vous indiquer la direction à prendre pour vous
éloigner ou vous rapprocher d’un objet. Dans le premier compartiment,
vous êtes immergé dans l’environnement ordinaire que vous connaissez
bien dans le laboratoire : les lumières sont allumées, mais c’est assez calme.
Ici, si le chercheur active la zone supérieure de votre NAcc, vous adoptez
des comportements d’approche, comme le reniflement et l’exploration. Le
psychologue John Gottman appelle ces comportements des comportements
«  Qu’est-ce que c’est  ?  » 13. Vous êtes curieux. Vous explorez. Allez de
l’avant. Et lorsque les chercheurs stimulent la région inférieure de votre
NAcc, vous adoptez des comportements d’évitement – des comportements
«  Mais qu’est-ce que c’est que ce truc  ?!  », comme piétiner le sol et
détourner la tête. Vous avez peur. Vous fuyez. Vous vous éloignez. Et tout
ceci est normal et correspond exactement à ce à quoi vous vous attendez,
étant un genre de rat bionique, à moitié contrôlé à distance.
Ensuite, vous entrez dans le compartiment voisin, où les lumières sont
éteintes, où tout est calme et tranquille, et l’odeur est la même que chez
vous. Vous aimez cet endroit, c’est comme un spa pour les rats. Dans ce
contexte, lorsque le chercheur active votre NAcc supérieur, la même chose
se produit – des comportements d’approche. Mais c’est là que ça devient
intéressant : quand le chercheur stimule votre NAcc inférieur… encore des
comportements d’approche  ! Dans un environnement sûr et relaxant, la
quasi-totalité du NAcc active la motivation d’approche !
Dès que vous entrez dans le troisième compartiment, des lumières très
vives s’allument et, soudain, Iggy Pop passe à fond –  imaginez le Live at
the King Biscuit Flower Hour, joué à des volumes aléatoires, sans que vous
ayez le temps de vous y habituer. Tout dans cet environnement vous stresse.
Vous êtes comme un rat de bibliothèque introverti piégé dans une horrible
boîte de nuit. Maintenant, lorsque les chercheurs allument votre NAcc
supérieur, ça n’active pas la curiosité ou les comportements d’approche,
comme c’était le cas dans les environnements précédents. Non, dans ce
nouvel environnement stressant, la stimulation de pratiquement n’importe
quelle zone du NAcc provoque des comportements d’évitement, appelés
« Mais qu’est-ce que c’est que ce truc ?! ».
Quand je dis que la perception de la sensation dépend du contexte, je
parle dans son sens le plus profond. Je veux dire que les zones les plus
primitives de votre cerveau (votre « cerveau de singe ») peuvent réagir de
manière opposée, privilégiant le rapprochement ou l’évitement, selon les
circonstances du moment 14. Dans un environnement sûr et accueillant, la
zone de stimulation importe peu  : vous activerez le rapprochement, la
curiosité, le désir. Tandis que dans un environnement stressant et
dangereux, peu importe où vous stimulez, vous activerez l’évitement,
l’anxiété, la peur.
«  Le contexte modifie la façon dont votre cerveau réagit au sexe  » ne
signifie pas seulement « Il faut créer la bonne ambiance », comme avec des
bougies, de la lingerie et une porte de chambre fermée à clé. Cela implique
aussi que, lorsque vous êtes dans un contexte sexuellement favorable,
presque tout peut activer votre approche curieuse et avide du sexe, avec un
comportement «  Qu’est-ce que c’est  ?  ». Et lorsque vous êtes dans un
contexte moins propice au sexe, que ce soit à cause de circonstances
externes ou internes, peu importe que votre partenaire soit sexy, que vous
l’aimiez ou que vos sous-vêtements soient attrayants : presque rien ne peut
activer cette expérience curieuse, réjouissante et pleine de désir.
Il est parfaitement normal que le contexte modifie votre perception des
sensations. C’est exactement comme ça que le cerveau fonctionne.
Voici une énigme.
Merritt, avec ses freins sensibles, a énormément bataillé avec le sexe dans la vie réelle.
Pourtant, elle avait une imagination sexuelle débordante, à la fois lectrice et autrice de fiction
érotique depuis une décennie. Ce qu’elle préférait lire et écrire  ? Des histoires de BDSM
masculin gay – style qu’elle appelait en plaisantant «  Cinquante nuances de Gay  ». Quelque
chose dans l’idée de deux hommes empêtrés dans une dynamique de pouvoir intense semblait
exciter complètement son imagination érotique.
« Être excitée par des histoires d’hommes qui font l’amour comme des pervers, mais me
renfermer si facilement pendant l’amour avec la femme que j’aime  ? Où est la logique là-
dedans ? Un bruit. Le contact d’un ongle quand je ne m’y attends pas. Une pensée vagabonde,
même. Et pourtant, je passe des heures chaque jour à écrire sur des hommes qui font l’amour en
public, sur un comptoir ou attachés à des arbres. »
En apprendre davantage sur ses freins sexuels l’avait quelque peu aidée, mais c’est quand
Carol et elle ont abordé le sujet du contexte (Quel contexte vous excite ?) qu’elles ont découvert
que les fantasmes marchaient très bien pour Merritt, alors que la vie réelle était… un vrai défi.
Ce qui est tout à fait logique pour une femme aux freins sensibles. Le contexte – les
circonstances externes et les conditions internes du cerveau – d’un fantasme est très différent du
contexte de la vie réelle. Lorsque vous êtes seule au lit et que vous fantasmez d’être dominée
par cinq grands hommes inconnus, vous êtes en fait en sécurité, aucune menace ne vient activer
votre réponse au stress, et la nouveauté du fantasme fait encore monter la température. Super
contexte !
Mais si, dans la vie réelle, vous étiez entourée de cinq grands hommes inconnus, votre
cerveau réagirait probablement par une réponse au stress – Fuyez ! Combattez ! Restez figée ! –
et cette réaction se manifesterait très probablement par l’activation de vos freins sexuels.
Vraiment pas le contexte idéal.
« Alors, qu’est-ce qu’on peut y faire ? m’a demandé Merritt.
– Tout est une question de confiance, lui ai-je répondu. Pour relâcher les freins, il faut avoir
confiance. »
Merritt a secoué la tête puis regardé Carol.
« Je te fais entièrement confiance. Je sauterais d’une falaise les yeux fermés si tu me disais
qu’un matelas de sauvetage m’attendait en bas, sans hésitation. »
Et puis Carol a lancé :
« Il ne reste qu’une autre personne à qui tu dois faire confiance, non ? »
Merritt a cligné des yeux.
« Moi. Je n’ai pas confiance en moi. Est-ce que c’est ce que tu veux dire ? »
Je suis intervenue :
« Te fais-tu confiance ?
– Je me fais confiance pour payer les factures en temps voulu. J’ai confiance en moi en tant
que parent. En tant qu’écrivaine. Oui, je… enfin… euh. »
Elle s’est arrêtée et a froncé les sourcils, l’air pensif.
«  Tu as confiance en ton intellect, a dit Carol, et en ton cœur. Mais est-ce que tu fais
confiance à ton corps ? »
Merritt s’est frotté le front d’un revers de main et a admis :
« Honnêtement ? Non. Et pour une bonne raison. »
Nous avons ensuite discuté de cette bonne raison.

J’aimerais qu’on s’intéresse un peu au cortex mésolimbique. C’est la


partie un peu ardue que je vous ai annoncée  : si on devait reprendre la
métaphore du jardin, les deux prochaines sections décriraient comment le
sol transforme une graine en semis. Le jardinier ne maîtrise pas vraiment
cette étape, et elle se produit bien en dessous de la surface de la terre, au-
delà de notre capacité d’observation directe. Mais les pages suivantes
pourraient vraiment enrichir votre compréhension de ce qui se passe dans
les parties profondes et subconscientes de votre réponse sexuelle, en
particulier si vous avez eu du mal à cultiver votre sexualité (ou celle de
votre partenaire).
Vous êtes prête ? C’est parti.

Appréciation, motivation
et apprentissage
Vous avez probablement entendu parler de ces résultats de recherche
passionnants au sujet des « centres du plaisir dans le cerveau ». Placez un
aliment dans votre bouche, et ces systèmes se mettent au travail. Buvez de
l’eau, ils réagissent. Écoutez de la musique, admirez une œuvre d’art,
prenez de l’héroïne ou lisez un roman, et votre cortex mésolimbique
s’active pour évaluer, apprendre et motiver. Regardez du porno, entendez
vos voisins faire l’amour ou sentez la main de votre partenaire tirer
légèrement sur vos cheveux, et ces systèmes cérébraux réagissent en
évaluant, en planifiant et en vous encourageant à vous rapprocher… ou
vous éloigner.
Pour celles d’entre vous qui ont une carte du mésencéphale accrochée
au mur et voudraient suivre cette explication visuelle à la maison, les
organes impliqués dans ces systèmes sont le pallidum ventral, le corps et
l’enveloppe du noyau accumbens (c’est la région observée dans l’étude
avec Iggy Pop), l’amygdale, et le noyau parabrachial du tronc cérébral,
entre autres. (Super sujet d’approche en soirée : rien de tel que l’expression
« noyau parabrachial du tronc cérébral » pour impressionner de séduisants
célibataires autour d’un dirty martini.)
Mais la vérité, c’est que ces zones-là ne sont pas vraiment des « centres
du plaisir » – ou plutôt, pas seulement des centres du plaisir.
Ce que nous décrivons souvent comme les « centres du plaisir » ou les
« centres de récompense » du cerveau sont en fait beaucoup plus subtils et
fascinants que ça. Réduire leur rôle à la « récompense » ou au « plaisir »,
c’est comme dire « vagin » à la place de « vulve » : le plaisir en fait partie,
certes, mais seulement partie, et nier les autres aspects de leur nom revient à
nier leur signification et à mal comprendre la nature de cette créature aux
multiples facettes.
Il y a en fait trois fonctions imbriquées, mais séparables dans ces aires
profondes et primitives du cerveau  : l’appréciation, la motivation et
l’apprentissage. Ces trois mécanismes constituent le matériau physique
universel des mammifères qui forme, comme le disent Kent Berridge et
Morten Kringelbach, avec une petite touche geek, «  un système cérébral
hédonique unique pour les concilier tous 15 ».
Cette expression fait référence à l’Anneau Unique dans la mythologie
du Seigneur des Anneaux. Dans le contexte original, l’Anneau Unique a le
pouvoir de contrôler tous les autres Anneaux de Pouvoir. Dans le contexte
de votre cerveau émotionnel, l’Anneau Unique contrôle tous vos systèmes
émotionnels/motivationnels, y compris les réponses au stress (peur,
agression et repli), le dégoût, toutes les formes de plaisir, du plus physique
au plus artistique, l’amour et le lien social, et bien sûr le sexe 16. Toutes ces
émotions fonctionnent en même temps et au même endroit  : dans votre
Anneau Unique émotionnel.
Ne soyez donc pas trop impressionnée si vous lisez un article de
vulgarisation scientifique expliquant que «  les mêmes parties de votre
cerveau s’activent lorsque vous faites l’amour ou prenez de la cocaïne  ».
Bien sûr que c’est le cas. C’est votre Anneau Unique, il les concilie tous.
Quand je parlerai de «  l’Anneau Unique  » au fil de ce livre, il s’agit
bien de cette zone d’appréciation, de motivation et d’apprentissage, où
toutes vos réponses émotionnelles – sexe, stress, amour, dégoût,  etc. –
interagissent, rivalisent et s’influencent les unes les autres.
Comment fonctionnent ces trois systèmes ?

L’appréciation

L’appréciation est peut-être ce qui se rapproche le plus de ce que nous


considérons généralement comme la «  récompense  ». Le mécanisme
d’appréciation, c’est le «  Oui  !  » ou le «  Non  !  » dans votre cerveau –  il
évalue « l’influence hédonique » d’un stimulus : est-ce que ça fait du bien ?
À quel point ? Est-ce que ça fait mal ? À quel point ? Lorsque vous mettez
une goutte d’eau sucrée sur la langue d’un nouveau-né, son système
d’appréciation s’emballe complètement : le sucre est une récompense innée
–  nous sommes nés déjà programmés pour apprécier les goûts sucrés.
Contrairement au salé. Ce système gère à lui seul toutes les formes de
plaisir, y compris les goûts sucrés, les sensations sexuelles, la perception de
la beauté, la joie de l’amour et le frisson de la victoire.

L’apprentissage

L’apprentissage est le processus qui consiste à relier ce qui se passe


actuellement avec ce qui devrait se passer par la suite. Les chiens de Pavlov
salivaient en entendant une cloche tinter parce que leur système
d’apprentissage associait le son de la cloche à la nourriture. Les rats du
chapitre 2 avaient associé le citron ou les vestes avec le sexe à cause de ce
système d’apprentissage. Il s’agit d’un apprentissage implicite –  une
expérience différente de l’apprentissage explicite. L’apprentissage explicite,
c’est la manière dont vous mémorisez un poème en le répétant à intervalles
réguliers et en faisant un effort conscient. L’apprentissage implicite est (en
partie) le système d’apprentissage qui établit des liens entre les stimuli à
travers le temps et l’espace. Nous n’avons pas besoin de travailler ou de
mémoriser quoi que ce soit pour apprendre quels aliments sont délicieux ou
quelles personnes sont méchantes. Nous apprenons implicitement ce genre
de phénomènes émotionnels.

La motivation

La motivation –  plus connue techniquement sous le nom de «  saillance


incitative  » – est l’accélérateur universel du cerveau émotionnel. Elle
alimente le désir de s’approcher d’une chose ou de s’en éloigner. Lorsque
cette motivation est activée par le mécanisme de réponse au stress, nous
recherchons la sécurité. Lorsqu’elle est activée par le mécanisme
d’attachement (voir le chapitre suivant), nous recherchons l’affection. Et
bien sûr, lorsque la motivation (désir) est activée par notre accélérateur
sexuel, nous recherchons la stimulation sexuelle.
Lorsque la motivation est activée, nous vivons ce que Kent Berridge
appelle « un instant de tentation particulière 17 ». L’expérience d’un besoin
urgent ou d’un désir ardent est générée par le système de motivation.
Et tout dépend du contexte. Vous vous souvenez du rat dans
l’environnement digne d’un spa par rapport à celui d’une boîte de nuit ? Les
comportements « Qu’est-ce que c’est ? » et « Mais qu’est-ce que c’est que
ce truc  ?!  » déclenchés par la stimulation du NAcc étaient des
comportements de motivation – le désir de s’approcher… ou de s’éloigner.
L’apparition d’un comportement plutôt que l’autre dépendait du degré de
sérénité ou de stress du rat.

Comment ces systèmes fonctionnent-ils


dans la sexualité humaine ?

Si une situation active votre accélérateur sexuel –  disons, votre partenaire


qui vous embrasse  – alors l’apprentissage a fait son travail. C’est comme
pour les rats avec leur petite veste : votre accélérateur a appris que le baiser
était associé au sexe.
Cependant l’apprentissage est neutre, ni gentil ni méchant, juste…
pertinent. Or lorsque le signal qui active l’apprentissage n’est pas
seulement lié au sexe, mais qu’il est également agréable (ce qui dépend du
contexte), alors il active aussi l’appréciation. Et quand l’expérience est
suffisamment agréable, elle suscite la motivation.
Le processus se déroule ainsi : un phénomène lié au sexe se produit, et
votre cerveau se dit  : «  Eh, c’est associé au sexe, ça.  » C’est
l’apprentissage. Et si le contexte est favorable, votre cerveau s’écrit aussi :
«  Eh, c’est agréable  !  » C’est l’appréciation. Et si le stimulus est
suffisamment agréable, votre cerveau s’exclame  : «  Oh oh, va donc en
trouver encore ! » C’est la motivation.
Vous avez suivi ? Ouf ! C’était la partie difficile. Bien joué. Je vais faire
référence à l’Anneau Unique de l’appréciation, de la motivation et de
l’apprentissage tout au long du livre. Par exemple, au chapitre  6, nous
verrons que la réaction génitale, c’est de l’apprentissage tandis que
l’expérience consciente d’être «  excitée  », c’est de l’apprentissage + de
l’appréciation. Et au chapitre  8, nous apprendrons comment le fait de
concentrer son Anneau Unique sur le plaisir sexuel et de le libérer de toutes
les autres motivations est la voie qui mène aux orgasmes et à l’extase.
Les recherches visant à évaluer le fonctionnement de ces trois systèmes
au sein de la sexualité humaine en sont encore à leurs balbutiements. Je les
mentionne ici non pas parce que j’ai déjà eu la preuve irréfutable de leur
influence sur le bien-être sexuel, mais parce que lorsque je donne des cours
sur ce sujet, je vois à quel point mes élèves trouvent utile de savoir que le
désir, le plaisir et la réponse génitale ne sont pas la même chose. Votre
cerveau peut apprécier quelque chose sans être motivé à chercher
davantage. Il peut apprendre qu’un certain type de stimulation peut
conduire à l’acte sexuel, et l’apprentissage peut activer le désir (mouvement
de rapprochement) – mais aussi la peur (mouvement d’éloignement), selon
le contexte. Votre cerveau peut même vouloir une chose sans
particulièrement l’apprécier, comme nous le constaterons avec Olivia.

Des systèmes qui dépendent du contexte

Et ces trois systèmes sont dépendants du contexte  : si vos substrats de


motivation, d’appréciation et d’apprentissage sont occupés à gérer des
problèmes de stress ou d’attachement (qui font l’objet du chapitre suivant),
alors les stimuli liés au sexe peuvent ne pas être perçus comme sexy du
tout.
Comprendre que ces systèmes sont dissociables est aussi percutant que
d’apprendre qu’il y a des freins  ! Examinons ces trois systèmes dans des
contextes différents pour observer comment ils peuvent modifier la
réactivité sexuelle.
Contexte 1 : Avant de tomber enceinte. Votre partenaire s’allonge dans
le lit à côté de vous et vous profitez de ce câlin habituel de fin de
journée tout en discutant de vos projets pour le lendemain. Les mains de
votre partenaire commencent à se balader sur votre corps, ce qui active
l’apprentissage et l’appréciation, puisque vous êtes dans un état
d’esprit détendu et affectueux, et très vite, le désir (motivation) se joint
à la fête. Vous commencez donc à vous embrasser et à laisser vos mains
vagabonder aussi, une chose en entraînant une autre.
Contexte  2  : Deux mois après l’accouchement. Votre partenaire
s’allonge dans le lit à côté de vous, vous sortant d’un sommeil profond
et trop rare, il a envie de vous faire des câlins et de vous parler des
projets pour le lendemain. Vous vous tournez vers lui et parlez pendant
un moment, et ses mains commencent à parcourir votre corps –  votre
corps privé de sommeil, en lactation, aux courbes différentes, avec son
vagin qui se remet encore de la naissance du bébé, et ses pieds une
pointure plus grande qu’il y a un an, un corps tripoté en permanence par
de petites mains de bébé. Le toucher de votre partenaire sur ce corps
étrange que vous ne reconnaissez pas active l’apprentissage… qui vous
remplit de crainte – l’envie (motivation) à éviter toute relation sexuelle.
Alors vous vous retournez et dites : « Pas ce soir, chéri. »

Et votre partenaire se dit alors –  et peut-être que vous aussi  – «  Je ne


comprends pas. C’était génial avant. »
Même stimulation, mais contexte différent. Une réponse différente de
votre Anneau Unique émotionnel, conduisant à des résultats différents.
Nous pourrions remplacer « accoucher » dans cet exemple par « mettre
votre parent en EHPAD », « apprendre que votre partenaire vous trompe »
ou «  perdre votre emploi  », et obtenir un résultat assez similaire. D’autre
part, nous pourrions le remplacer par «  décider d’essayer de tomber
enceinte  », «  renouveler vos vœux  » ou «  gagner au loto  », et obtenir un
résultat complètement différent.
Comme nous l’avons vu avec les rats à qui on balance du Iggy Pop,
lorsque notre niveau de stress est élevé, pratiquement n’importe quoi peut
pousser votre motivation à se mettre en mode évitant « Mais qu’est-ce que
c’est que ce truc ?! »…
Au contraire, si vous êtes dans un contexte sexuellement favorable,
presque tout peut activer votre motivation en mode curieux, ou « Qu’est-ce
que c’est ? ».
Le genre précis de contexte considéré comme sexuellement favorable
varie d’une femme à l’autre, mais aussi au cours de la vie, mais en général,
c’est un contexte :
avec un faible niveau de stress ;
avec une grande affection ;
explicitement érotique.

Souvenez-vous des études sur ce que les femmes déclarent comme étant
excitant, au tout début du chapitre. Tout ça, et bien plus encore. Grâce à
l’Anneau Unique, qui sert de médiateur entre toutes vos différentes
émotions simultanément, et les lie entre elles.
Olivia et Patrick sont fabuleux ensemble – hilarants, charmants, le genre de couple dont l’amour
est contagieux ; quand on les voit, on tombe un peu amoureux soi-même. Ils se prennent dans
les bras et rient affectueusement, même lorsqu’ils se disputent. Même s’ils n’ont qu’une
vingtaine d’années, on sait déjà que ces deux-là s’embrasseront encore comme des adolescents à
103 ans.
Leur principal sujet de friction est le sexe : Patrick, comme environ 80 à 90 % des gens,
trouve que le stress le freine et l’empêche de s’intéresser au sexe – c’est un flatliner, la courbe
de désir s’aplatit en cas de stress (voir chapitre 4). Pour Olivia, en revanche, c’est le contraire : à
cause de son accélérateur sensible, le stress est source d’énergie. C’est une redliner, elle carbure
au stress. Et comme ils sont tous les deux étudiants, ils sont stressés en même temps pendant le
semestre (en période de partiels), ce qui signifie que juste au moment où Olivia a le plus envie
de sexe, Patrick s’en détourne complètement.
Même contexte – expériences opposées.
Et lorsque vous le placez dans le contexte d’une relation, la situation empire, car leurs deux
modes de fonctionnement différents se renforcent l’un l’autre. Lorsque Patrick est stressé par le
fait qu’Olivia veut avoir des relations sexuelles et lui non, ça augmente son stress, ce qui le
freine encore plus. Et quand Olivia se sent stressée par le fait qu’elle veut des relations sexuelles
et Patrick non, ça augmente son stress, ce qui appuie encore plus sur son accélérateur. J’appelle
cela « la dynamique de poursuite » (plus d’informations à ce sujet au chapitre 7), mais Olivia a
ses propres mots pour en parler : « Un bordel absolu. »
Patrick a ajouté : « Et ça nous arrive à une période dans le semestre où nous sommes à la
fois déjà trop à bout, à peine capables de nous nourrir, et encore moins de parler de ce qu’on
ressent. Comment y remédier ? »
J’ai haussé les épaules.
«  Facile. Élaborez un plan quand vous êtes tous les deux calmes, puis mettez ce plan en
application quand vous êtes stressés.
– Oh », a répondu Olivia.
Il était de retour – cet énorme drapeau rouge qui signalait sa déception face à quelque
chose… d’émotionnel. La dernière fois, j’avais raté le coche. Cette fois, je l’ai saisi.
« Tu attendais une autre réponse ? lui ai-je demandé.
– J’espérais qu’on puisse me réparer.
– Te réparer ? Tu es cassée ?
– Je suppose que non, a-t-elle dit. C’est juste que… ce n’est pas très agréable, cette perte de
contrôle. J’espérais réussir à maîtriser cette facette de moi, à la fois pour mon propre bien et
pour ne pas rendre Patrick complètement dingue. »
Ce qui est normal. Le contexte de « stress + sexe » ne se traduit pas par une augmentation
du plaisir. Au contraire, comme Olivia l’a dit, lorsqu’elle est stressée, anxieuse ou débordée  :
«  Je ressens cette poussée vers l’orgasme, mais c’est une poussée qui me déconnecte de mon
corps et de Patrick. Je déteste ça. C’est comme si j’étais une étrangère dans mon propre corps.
Sans aucun contrôle. »
C’est un exemple typique de motivation sans appréciation.
« Ah, donc c’est difficile pour votre couple, mais aussi gênant pour toi, personnellement,
ai-je dit. C’est assez simple de changer – simple, mais pas toujours facile.
– Comment ? » m’ont-ils demandé en chœur.

Vous ne pouvez pas les forcer


Je mets des italiques lorsque je décris les notions de motivation,
d’appréciation et d’apprentissage afin de bien montrer que je ne parle pas
de motivation, d’appréciation ou d’apprentissage dans le sens habituel de
« Hé, motivé pour aller au ciné ? » ou de « Tu as apprécié le dîner ? ». Il n’y
a aucune intention délibérée – et souvent même aucune conscience – qui
accompagne l’activation de ces systèmes cérébraux 18.
Au contraire, même. Dans une étude menée auprès de cocaïnomanes,
les aires mésolimbiques des participants ont réagi à des images associées à
la cocaïne très rapidement affichées sur un écran pendant trente-trois
millisecondes. Si vous demandiez à ces personnes ce qu’elles ont vu, elles
ne seraient pas en mesure de vous répondre, car les images passent trop vite
pour être «  vues  » consciemment, mais assez longtemps pour activer le
centre de motivation des cocaïnomanes 19. Les participants n’étaient pas
conscients d’avoir vu les images, pourtant leur cerveau émotionnel a réagi.
Si on reprend la métaphore du jardin, cette idée se traduit par la
différence entre ce que le jardinier accomplit dans son jardin… et ce que le
jardin accomplit tout seul. Le jardinier peut désherber, arroser et mettre de
l’engrais, mais il ne fait pas vraiment pousser les plantes lui-même. Ce sont
vos systèmes de motivation, d’appréciation et d’apprentissage qui font
pousser les plantes.
Toutes sortes de phénomènes les influencent, y compris la façon dont
vous en prenez soin, la météo (c’est-à-dire les circonstances extérieures de
votre vie) et l’adaptabilité de vos plantes à votre sol particulier (votre corps
et vos freins et accélérateurs). Mais le jardinier ne peut pas juste serrer les
dents et faire pousser les plantes du jardin ; il ne peut que créer le meilleur
environnement possible pour que son jardin s’épanouisse, puis le laisser
faire son œuvre. Les chapitres 4, 5 et 9 portent sur les moyens de créer ce
contexte propice au sexe.

« Quelque chose cloche chez moi ? »


(Réponse : non)
L’excitation sexuelle, le désir et l’orgasme évoluent sans cesse. Parfois, ces
changements nous réjouissent, parfois ils nous rendent perplexes ou nous
inquiètent. Parfois, ces fluctuations sont le résultat d’un changement de
notre matériel sexuel, c’est-à-dire de nos organes génitaux et de notre
système à double contrôle. Mais le plus souvent, c’est en réponse à une
modification de notre contexte  : notre environnement et notre état mental.
Notre humeur. Nos relations. Notre vie.
C’est peut-être la conséquence primordiale de la compréhension de la
manière dont le contexte influence le traitement par votre cerveau des
stimuli liés au sexe : quand le sexe ne fait pas de bien, cela ne veut pas dire
que quelque chose cloche chez vous. Il se peut qu’un changement dans vos
circonstances extérieures ou dans vos autres systèmes de motivation
(comme le stress) ait une influence sur votre réponse sexuelle. Ce qui
signifie que vous pouvez créer un changement positif sans vous changer
vous-même.
Une autre conséquence importante de la compréhension du concept de
contexte, c’est qu’elle nous aide à réaliser pourquoi les femmes sont si
différentes les unes des autres. Pour de nombreuses femmes, les contextes
les plus positifs sur le plan sexuel ne sont pas forcément ceux qui sont
culturellement autorisés ou facilement accessibles – comme des coups d’un
soir à l’université ou toujours le même rapport sexuel pour la 1287e  fois,
avec la même personne avec qui vous êtes mariée depuis dix  ans. Pour
certaines femmes, il s’agit de contextes favorables, mais pour d’autres, un
contexte propice au sexe sera peut-être une rencontre anonyme d’une nuit
contre un mur de manteaux dans le placard d’entrée d’un inconnu lors
d’une fête. Pour d’autres, c’est une relation sexuelle complice née d’une
relation sérieuse à long terme. Pour certaines, c’est un large éventail de
contextes, et pour d’autres, c’est un choix restreint. Du moment qu’une
femme prend soin de son bien-être et de celui de son partenaire, le contexte
n’a pas d’importance, tant qu’il lui procure du plaisir.
Mais si nous ignorons le contexte, alors toute personne qui trouve le
sexe désagréable ou dont le désir diminue pourrait être tentée de conclure
qu’elle est cassée ou qu’elle n’aime pas le sexe… alors qu’en réalité, tout ce
dont elle a besoin, c’est d’un meilleur contexte.
Dans le bon contexte, le comportement sexuel est sans doute
l’expérience la plus agréable qu’un être humain puisse avoir. Il peut nous
lier à notre partenaire, nous inonder d’hormones du bonheur, satisfaire de
profondes pulsions biologiques et nous transporter vers des sommets
spirituels. Dans le mauvais contexte, cependant, il peut littéralement sentir
la mort. Selon le contexte, le sexe peut varier presque à l’infini, allant du
délicieux au dégoûtant, du ludique au douloureux – et à cause du
mécanisme à double contrôle, il est parfois ces deux expériences
contradictoires à la fois.
Après avoir appris la relation entre le contexte et son accélérateur insensible, Camilla a décidé
d’imaginer son accélérateur peu sensible en utilisant la métaphore de la douche – la métaphore
du jardin n’a jamais vraiment fonctionné pour elle, mais quelque chose dans la métaphore de la
douche semblait bien lui parler. Elle a remarqué que les contextes romantiques et affectueux, les
contextes excitants et inédits, et les contextes peu stressants augmentaient la sensibilité de son
cerveau aux signaux sexuels.
Ou, comme elle le dit elle-même : « Ils chauffent l’eau et augmentent la pression. »
Et le meilleur contexte, selon elle, était quand elle se sentait courtisée. La très longue
période de séduction qui avait caractérisé la première partie de sa relation avec Henry pourrait
avoir été spécifiquement articulée autour des facteurs contextuels favorisant sa motivation
sexuelle.
Henry et elle en ont discuté et ont décidé de tenter une expérience  : il organiserait des
soirées entières où il courtiserait Camilla, la séduirait et, finalement, la conquerrait. Et ils ont
fait une découverte qui les a étonnés tous les deux  : ce n’était pas la séduction qui l’excitait,
c’était l’anticipation.
La première fois qu’ils ont essayé, elle était un peu mal à l’aise parce qu’elle savait ce qui
allait arriver, et faisait en sorte de faire avancer les choses, pour lui montrer qu’elle était
d’accord avec ce qui était prévu. Lorsqu’il lui a pris la main en rentrant du ciné, elle a essayé de
l’embrasser. Mais Henry l’a arrêtée, l’a ralentie. Lorsqu’il l’a embrassée, elle a essayé
d’approfondir le baiser, mais il l’a encore ralentie.
«  Je te courtise, tu te souviens  ? a-t-il commenté. Je ne peux pas t’attirer à moi si tu te
rapproches toute seule. »
Et là, tout s’est éclairé.
Elle a pris conscience qu’elle avait besoin de temps pour que son appréciation grandisse et
se développe jusqu’à activer sa motivation, son envie. Ils étaient partis du principe que c’était le
fait de se sentir courtisée qui lui faisait ressentir du désir, mais en réalité, c’était le niveau
d’activation de son accélérateur, qui s’élève quand ils y vont doucement, retardant ainsi le
moment de satisfaction. Pour elle, le processus qui consiste à passer de l’appréciation à la
motivation ressemble un peu au tic-tic-tic de la veilleuse d’une cuisinière à gaz – pas assez de
gaz, pas assez, pas assez, jusqu’à ce que, pam  ! ça s’enflamme, et qu’elle passe de
l’appréciation à la motivation.
Ou, pour revenir à l’analogie de la douche, son accélérateur était comme un chauffe-eau
qui mettait beaucoup de temps à chauffer toute l’eau du réservoir. Il fonctionnait très bien,
exigeait juste un peu plus de patience, mais ça valait vraiment la peine d’attendre.
Camilla et Henry sont tous deux des personnes prudentes, réfléchies, méthodiques et
posées, et cette approche les séduit profondément. Pour autant, ça ne fonctionnerait pas pour
tout le monde. Mais avoir une super sexualité, ce n’est pas faire ce qui marche pour tout le
monde, mais plutôt ce qui marche pour vous et votre partenaire.
Dans cette première partie du livre, nous avons examiné comment votre
matériel sexuel – votre corps, votre cerveau et le contexte – influe sur votre
bien-être sexuel global. Nous avons appris que ces trois éléments sont
constitués des mêmes parties fondamentales chez tout le monde, mais que
le cerveau, le corps et le contexte de chaque personne sont uniques. En
d’autres termes, nous avons chacun un « jardin » unique dans lequel nous
cultivons notre bien-être sexuel.
La partie suivante du livre s’intéresse aux facteurs spécifiques qui
influencent votre contexte, au niveau de votre environnement et de votre
état cérébral. Ces facteurs sont comme le soleil et la pluie et, parfois, le
compost de votre jardin. Certains sont maîtrisables, d’autres non, et tous
influencent la façon dont votre jardin grandit. Dans le chapitre  4,
j’aborderai les deux systèmes de motivation principaux – le stress et
l’amour – et comment ils peuvent étonnamment affecter la réponse
sexuelle. Et dans le chapitre 5, je montrerai comment les facteurs culturels
dans l’environnement – comme la pression sociale ressentie pour paraître
ou agir d’une certaine manière, ou les messages moraux et médiatiques sur
ce qui est «  bien  » ou «  mal  » sexuellement – peuvent peser sur le
fonctionnement sexuel, et comment démêler les nœuds qu’une culture
sexuellement négative crée dans notre psychologie sexuelle.
En résumé

La perception d’une sensation par votre cerveau dépend du


contexte. Prenez les chatouilles : si votre partenaire vous chatouille
alors que vous êtes déjà excitée, ça peut être amusant. Mais s’il vous
chatouille quand vous êtes en colère, c’est juste agaçant. Même
sensation, contexte différent – donc perception différente.

Quand vous êtes stressée, votre cerveau interprète à peu près tout
comme une menace potentielle. Quand vous êtes excitée, votre
cerveau peut interpréter à peu près tout comme étant associé au
sexe. Tout simplement parce que… c’est le contexte !

La motivation (le désir), l’appréciation et l’apprentissage sont des


fonctions distinctes dans votre cerveau. Vous pouvez désirer sans
apprécier (envie), anticiper sans désirer (peur), ou toute autre
combinaison.

Pour la plupart des gens, le meilleur contexte pour la sexualité doit


être peu stressant + très affectueux + explicitement érotique.
Réfléchissez à vos contextes avec les fiches de travail suivantes.
Contextes sexy
Rappelez-vous une expérience sexuelle positive de votre passé. Décrivez-la
ici, avec autant de détails pertinents que possible :

 
 
 
 

Réfléchissez maintenant aux caractéristiques qui en ont fait une expérience


positive :

Catégories Description
Bien-être physique et mental
Santé mentale
Image du corps
Humeur
Anxiété
Distractivité
Inquiétude quant au
fonctionnement sexuel
Autre
Caractéristiques du partenaire
Apparence physique
Santé physique
Odeur
État mental
Autre

Caractéristiques de la relation
Confiance
Dynamique de pouvoir
Complicité émotionnelle
Sentiment d’être désirée
Fréquence des rapports sexuels

Conditions extérieures
En public ou en privé (à la maison,
au travail, en vacances, etc.)
Sexe à distance (téléphone,
messages instantanés, etc.)
Voir le partenaire faire quelque
chose de positif, comme une
interaction avec la famille ou du
travail
Autres circonstances de vie
Stress lié au travail
Stress lié à la famille
Vacances, anniversaire de
mariage/rencontre/etc., occasion
spéciale

Facteurs ludiques / Jeu


Fantasmes personnels et autonomes
Fantasmes orientés par le partenaire
(« mots cochons » ou autres)
Parties du corps touchées ou non
Sexe oral sur vous/votre partenaire
Rapport sexuel, etc.

Autre
 
 
 

Contextes sexy
Rappelez-vous une expérience sexuelle positive de votre passé. Décrivez-la
ici, avec autant de détails pertinents que possible :
 
 
 
 

Réfléchissez maintenant aux caractéristiques qui en ont fait une expérience


positive :

Catégories Description
Bien-être physique et mental
Santé mentale
Image du corps
Humeur
Anxiété
Distractivité
Inquiétude quant au
fonctionnement sexuel
Autre

Caractéristiques du partenaire
Apparence physique
Santé physique
Odeur
État mental
Autre
Caractéristiques de la relation
Confiance
Dynamique de pouvoir
Complicité émotionnelle
Sentiment d’être désirée
Fréquence des rapports sexuels

Conditions extérieures
En public ou en privé (à la maison,
au travail, en vacances, etc.)
Sexe à distance (téléphone,
messages instantanés, etc.)
Voir le partenaire faire quelque
chose de positif, comme une
interaction avec la famille ou du
travail

Autres circonstances de vie


Stress lié au travail
Stress lié à la famille
Vacances, anniversaire de
mariage/rencontre/etc., occasion
spéciale
Facteurs ludiques / Jeu
Fantasmes personnels et autonomes
Fantasmes orientés par le partenaire
(« mots cochons » ou autres)
Parties du corps touchées ou non
Sexe oral sur vous/votre partenaire
Rapport sexuel, etc.

Autre
 
 
 

Contextes sexy
Rappelez-vous une expérience sexuelle positive de votre passé. Décrivez-la
ici, avec autant de détails pertinents que possible :

 
 
 
 

Réfléchissez maintenant aux caractéristiques qui en ont fait une expérience


positive :
Catégories Description
Bien-être physique et mental
Santé mentale
Image du corps
Humeur
Anxiété
Distractivité
Inquiétude quant au
fonctionnement sexuel
Autre

Caractéristiques du partenaire
Apparence physique
Santé physique
Odeur
État mental
Autre

Caractéristiques de la relation
Confiance
Dynamique de pouvoir
Complicité émotionnelle
Sentiment d’être désirée
Fréquence des rapports sexuels
Conditions extérieures
En public ou en privé (à la maison,
au travail, en vacances, etc.)
Sexe à distance (téléphone,
messages instantanés, etc.)
Voir le partenaire faire quelque
chose de positif, comme une
interaction avec la famille ou du
travail

Autres circonstances de vie


Stress lié au travail
Stress lié à la famille
Vacances, anniversaire de
mariage/rencontre/etc., occasion
spéciale

Facteurs ludiques / Jeu


Fantasmes personnels et autonomes
Fantasmes orientés par le partenaire
(« mots cochons » ou autres)
Parties du corps touchées ou non
Sexe oral sur vous/votre partenaire
Rapport sexuel, etc.

Autre
 
 
 
Contextes pas-très-sexy
Rappelez-vous une expérience sexuelle pas géniale de votre passé – pas
forcément horrible, juste pas géniale. Décrivez-la ici, avec autant de détails
pertinents que possible :

 
 
 
 

Réfléchissez maintenant aux caractéristiques qui en ont fait une expérience


pas si géniale :

Catégories Description
Bien-être physique et mental
Santé mentale
Image du corps
Humeur
Anxiété
Distractivité
Inquiétude quant au
fonctionnement sexuel
Autre
Caractéristiques du partenaire
Apparence physique
Santé physique
Odeur
État mental
Autre

Caractéristiques de la relation
Confiance
Dynamique de pouvoir
Complicité émotionnelle
Sentiment d’être désirée
Fréquence des rapports sexuels

Conditions extérieures
En public ou en privé (à la maison,
au travail, en vacances, etc.)
Sexe à distance (téléphone,
messages instantanés, etc.)
Voir le partenaire faire quelque
chose de positif, comme une
interaction avec la famille ou du
travail
Autres circonstances de vie
Stress lié au travail
Stress lié à la famille
Vacances, anniversaire de
mariage/rencontre/etc., occasion
spéciale

Facteurs ludiques / Jeu


Fantasmes personnels et autonomes
Fantasmes orientés par le partenaire
(« mots cochons » ou autres)
Parties du corps touchées ou non
Sexe oral sur vous/votre partenaire
Rapport sexuel, etc.

Autre
 
 
 

Contextes pas-très-sexy
Rappelez-vous une expérience sexuelle pas géniale de votre passé – pas
forcément horrible, juste pas géniale. Décrivez-la ici, avec autant de détails
pertinents que possible :
 
 
 
 

Réfléchissez maintenant aux caractéristiques qui en ont fait une expérience


pas si géniale :

Catégories Description
Bien-être physique et mental
Santé mentale
Image du corps
Humeur
Anxiété
Distractivité
Inquiétude quant au
fonctionnement sexuel
Autre

Caractéristiques du partenaire
Apparence physique
Santé physique
Odeur
État mental
Autre
Caractéristiques de la relation
Confiance
Dynamique de pouvoir
Complicité émotionnelle
Sentiment d’être désirée
Fréquence des rapports sexuels

Conditions extérieures
En public ou en privé (à la maison,
au travail, en vacances, etc.)
Sexe à distance (téléphone,
messages instantanés, etc.)
Voir le partenaire faire quelque
chose de positif, comme une
interaction avec la famille ou du
travail

Autres circonstances de vie


Stress lié au travail
Stress lié à la famille
Vacances, anniversaire de
mariage/rencontre/etc., occasion
spéciale
Facteurs ludiques / Jeu
Fantasmes personnels et autonomes
Fantasmes orientés par le partenaire
(« mots cochons » ou autres)
Parties du corps touchées ou non
Sexe oral sur vous/votre partenaire
Rapport sexuel, etc.

Autre
 
 
 

Contextes pas-très-sexy
Rappelez-vous une expérience sexuelle pas géniale de votre passé – pas
forcément horrible, juste pas géniale. Décrivez-la ici, avec autant de détails
pertinents que possible :

 
 
 
 

Réfléchissez maintenant aux caractéristiques qui en ont fait une expérience


pas si géniale :
Catégories Description
Bien-être physique et mental
Santé mentale
Image du corps
Humeur
Anxiété
Distractivité
Inquiétude quant au
fonctionnement sexuel
Autre

Caractéristiques du partenaire
Apparence physique
Santé physique
Odeur
État mental
Autre

Caractéristiques de la relation
Confiance
Dynamique de pouvoir
Complicité émotionnelle
Sentiment d’être désirée
Fréquence des rapports sexuels
Conditions extérieures
En public ou en privé (à la maison,
au travail, en vacances, etc.)
Sexe à distance (téléphone,
messages instantanés, etc.)
Voir le partenaire faire quelque
chose de positif, comme une
interaction avec la famille ou du
travail

Autres circonstances de vie


Stress lié au travail
Stress lié à la famille
Vacances, anniversaire de
mariage/rencontre/etc., occasion
spéciale

Facteurs ludiques / Jeu


Fantasmes personnels et autonomes
Fantasmes orientés par le partenaire
(« mots cochons » ou autres)
Parties du corps touchées ou non
Sexe oral sur vous/votre partenaire
Rapport sexuel, etc.

Autre
 
 
 
Évaluation des signaux sexuels
Examinez tous vos contextes sexy et pas-très-sexy. Quels sont, selon vous,
les contextes qui permettent à coup sûr de vivre un rapport sexuel génial ou,
au contraire, à coup sûr un rapport pas si génial ?

Des contextes qui


Les contextes qui
rendent le sexe pas si
rendent le sexe génial
génial
   
   
   
   

Identifiez cinq actions que vous et/ou votre partenaire pourriez entreprendre
si vous décidiez d’avancer vers un recours plus fréquent et plus facile aux
contextes qui améliorent votre fonctionnement sexuel.
Quand au
Actions à Quel degré À quel point plus tôt
entreprendre d’impact ? est-ce facile ? pouvez-vous
le faire ?
1. ……… ……… ……… ………
……… ……… ……… ………
2. ……… ……… ……… ………
……… ……… ……… ………
3. ……… ……… ……… ………
……… ……… ……… ………
4. ……… ……… ……… ………
……… ……… ……… ………
5. ……… ……… ……… ………
……… ……… ……… ………

Sélectionnez maintenant les deux ou trois éléments qui vous semblent être
la bonne combinaison d’impact, de facilité et d’immédiateté, et listez tout
ce qui devrait se passer pour que ce changement se produise. Soyez aussi
CONCRÈTE ET PRÉCISE que possible. Il doit s’agir d’ACTIONS plutôt que de

notions abstraites, d’idées ou de comportements. Posez-vous la question


suivante  : «  Si nous décidons de créer ce changement, qu’est-ce qui doit
être inscrit sur notre liste de choses à faire ? »
o
Changement n  1

 
 
 
 
Changement no 2

 
 
 
 

Changement no 3

 
 
 
 

Enfin, sélectionnez seulement un changement que vous allez effectivement


concrétiser. Choisissez ensemble une date de lancement qui vous semble
pertinente. Idéalement, au cours du mois suivant. Établissez votre plan. ET
METTEZ-LE EN APPLICATION !
DEUXIÈME PARTIE

LE SEXE EN CONTEXTE
CHAPITRE 4

Le contexte émotionnel
Le sexe dans notre cerveau de singe

Les femmes me posent des questions, puis me racontent leurs histoires. J’ai une bibliothèque
mentale remplie de ces histoires – des anecdotes hilarantes d’aventures sexuelles qui ont mal
tourné, des témoignages tristes de relations qui n’ont pas pu être réparées, des histoires de
survie et de transcendance qui suscitent l’admiration. Chacune d’entre elles est une histoire de
découverte.
Celle de Merritt parle de survie.
« Pourquoi devrais-je faire confiance à mon corps ? a-t-elle déclaré. Toute ma vie d’adulte,
je n’ai pas pu compter sur mon corps et il s’est cassé. Quand je suis stressée, il arrête de
fonctionner. Je tombe malade, je me blesse, aucun de mes systèmes ne marche plus. Et cela vaut
aussi pour le sexe. »
Il y avait une certaine logique là-dedans, étant donné la sensibilité de ses freins, mais il me
semblait surtout y avoir plus encore en dessous.
« Il semble que ton corps choisisse de “se figer” en réaction au stress, et s’arrête au lieu
d’essayer de fuir ou de combattre, lui ai-je dit. C’est ce qui se passe lorsqu’une personne subit
un stress de longue durée et de forte intensité, ou lorsqu’elle est en train de guérir après un
traumatisme. Est-ce que l’une de ces situations vous semble familière ?
– Les deux, ont répondu Carol et Merritt en chœur.
– Tu penses que le stress explique pourquoi j’ai du mal à faire confiance à mon corps ? »
m’a demandé Merritt.
Je le pense vraiment.
Ce chapitre traite du stress et de l’amour et de la façon dont ils influencent le plaisir sexuel.
Faire confiance à son corps
Faites confiance à votre corps. Écoutez-le – non pas les circonstances
spécifiques du moment, mais les messages profonds et primitifs issus de
votre héritage évolutif :

Je suis en danger / Je suis en sécurité


Je suis brisée / Je suis entière
Je suis perdue / Je suis à la maison

Si vous êtes déjà capable d’écouter ces messages dans votre corps,
n’hésitez pas à sauter ce chapitre. Mais si, comme la plupart d’entre nous,
vous avez besoin d’aide pour traduire les signaux que votre corps envoie,
vous trouverez ce chapitre très instructif. Car ce ne sont pas seulement les
aspects sexuels d’un contexte qui influencent votre excitation. Ce sont tous
les autres paramètres émotionnels, y compris votre état émotionnel
préexistant.

Le stress et l’amour
Et parmi tous les systèmes émotionnels gérés par votre Anneau Unique
émotionnel, les deux qui peuvent avoir un effet le plus immédiat sur le
plaisir sexuel sont le stress et l’amour.
Le stress est le processus physiologique et neurologique qui vous aide à
faire face aux menaces.
L’amour est le processus physiologique et neurologique qui vous pousse
vers votre tribu.

Le stress sous-tend l’inquiétude, l’anxiété, la peur, la terreur, toutes les


variantes de « Fuyez ! ». Mais il sous-tend également la colère – l’irritation,
l’agacement, la frustration, la rage. Et dans une large mesure, l’isolement
qui caractérise la dépression. Dans la première partie de ce chapitre, je vais
vous présenter une conception du stress différente de celles que vous avez
pu croiser auparavant : la clé de la gestion du stress (afin qu’il ne perturbe
pas votre vie sexuelle) n’est pas simplement de « se détendre » ou de « se
calmer ». Il faut permettre au cycle de réponse au stress d’aller au bout, de
finir sa course. Permettez-lui de se vider complètement. Laissez votre corps
passer de « je suis en danger » à « je suis en sécurité ».
Dans la deuxième partie de ce chapitre, je parlerai de l’amour. L’amour,
dans le contexte qui est le nôtre, c’est l’attachement, le mécanisme
biologique inné qui lie les humains entre eux. Il sous-tend la passion, la
romance et la joie de trouver un partenaire avec lequel on peut être
complice. Mais il sous-tend également le chagrin, la jalousie et les peines
de cœur. Parfois, c’est joyeux, comme quand on tombe amoureux. Parfois,
c’est déchirant, comme lors d’une rupture. Mais l’attachement nous pousse
toujours à passer de « je suis brisée » à « je suis entière ».
Et enfin, dans la troisième partie de ce chapitre, je parlerai de l’endroit
où le stress, l’attachement et le sexe se chevauchent –  l’endroit où nous
éprouvons à la fois la joie passionnée et exubérante d’un amour intense et
aussi l’agonie de la pire des querelles interpersonnelles. Lorsque le stress,
l’attachement et le sexe s’activent ensemble dans notre anneau émotionnel,
ils appellent « je suis perdue », pour nous motiver à chercher et à chercher
encore jusqu’à ce que nous nous retrouvions dans un nouvel endroit : « je
suis à la maison.  » Je décrirai le sexe alimenté par la détresse de
l’attachement sous le nom de «  sexe qui fait avancer l’intrigue  », et
j’évoquerai comment nous pouvons utiliser cette dynamique à notre
avantage.
L’objectif est de vous aider à reconnaître comment le cycle de réponse
au stress et le mécanisme d’attachement font partie intégrante de votre
réactivité sexuelle, et de vous proposer des stratégies pour leur permettre
d’accroître le plaisir sexuel, ainsi que des options lorsqu’ils nuisent au
plaisir.

À RETENIR
Nous ne pouvons comprendre le bien-être sexuel des femmes que si nous prenons en
compte le contexte, et la majeure partie de ce contexte n’a rien à voir avec le sexe
proprement dit. Ce qui signifie que nous pouvons améliorer notre bien-être sexuel et
augmenter notre plaisir sexuel sans changer directement quoi que ce soit à notre vie
sexuelle ! Ce dont je parle dans ce chapitre et le suivant, ce sont les facteurs contextuels
systématiquement associés aux changements dans le bien-être sexuel des femmes, d’après
les études menées. Améliorez votre contexte, et votre plaisir sexuel s’accroîtra de lui-
même.

Le cycle de la réponse au stress :


combattre, fuir et se figer
Commençons par séparer vos facteurs de votre stress.
Vos facteurs de stress sont les éléments qui activent la réponse de stress
– les factures, la famille, le travail, les inquiétudes concernant votre vie
sexuelle, tout ça.
Votre stress est le système de changements activé dans votre cerveau et
votre corps en réponse à ces facteurs de stress. C’est un mécanisme
d’adaptation évolutive qui vous permet de réagir aux menaces perçues.
Ou du moins, c’était un mécanisme d’adaptation évolutive, à l’époque
où nos facteurs de stress avaient des griffes et des dents et pouvaient
courir à 50  km/h. De nos jours, nous ne sommes presque jamais
poursuivis par des lions, et pourtant, la réponse de notre corps à,
mettons, un chef incompétent, est en grande partie la même que celle
qu’il aurait face à un lion. Votre physiologie ne fait pas vraiment la
différence. Ce constat aura des implications importantes sur votre vie
sexuelle, comme nous le verrons bientôt.

On parle souvent du stress comme étant la réponse combat-fuite, mais


tout comme le «  centre du plaisir  » ne s’occupe pas que du plaisir, la
réponse combat-fuite, ce n’est pas seulement une question de combat ou de
fuite. Appelons-la plutôt combat/fuite/paralysie (aussi appelée inhibition ou
« figement », notamment dans la traduction de Levine).
Comment ça marche ?
Lorsque votre cerveau perçoit une menace dans l’environnement, vous
éprouvez une transformation biochimique massive  : de larges quantités
d’adrénaline et de cortisol affluent dans votre sang et une cascade
d’événements physiologiques se produit, parmi lesquels une augmentation
du rythme cardiaque, de la fréquence respiratoire et de la pression
artérielle  ; votre système immunitaire et digestif se met en pause  ; vos
pupilles se dilatent et votre attention se modifie, vous êtes en état d’alerte,
concentrée sur l’ici et le maintenant. Tous ces changements, c’est comme
faire chauffer le moteur avant une course, ou prendre une grande inspiration
avant de plonger la tête sous l’eau : ça vous prépare à l’action à venir.
Le choix de l’action entreprise dépend de la nature de la menace perçue,
c’est-à-dire du contexte.
Supposons que la menace soit un lion – le type de menace auquel nous
étions confrontés dans l’environnement quand ce mécanisme a évolué chez
nos ancêtres les plus primitifs. Le cycle de réponse au stress remarque le
lion et crie  : «  Je suis en danger  ! Qu’est-ce que je dois faire  ?  » Votre
cerveau vous informe alors en moins d’une seconde qu’un lion, c’est le
genre de menace à laquelle vous avez le plus de chances de survivre en
tentant de fuir.
Alors que faites-vous lorsque vous voyez un lion vous poursuivre ?
Vous ressentez de la peur, et vous fuyez.
Et ensuite, que se passe-t-il ?
Il n’y a que deux issues possibles, n’est-ce pas ? Soit vous êtes tuée par
le lion, auquel cas tout le reste n’a plus d’importance, soit vous vous
échappez et survivez. Imaginez donc que vous réussissiez à rentrer jusqu’au
village en criant à l’aide, que tout le monde vous aide à tuer le lion, puis
que vous le mangiez tous ensemble pour le dîner, et que le lendemain matin
vous teniez un service funéraire respectueux pour les parties de la carcasse
inutiles, en remerciant humblement le lion pour son sacrifice.
Et comment vous sentez-vous maintenant ?
Soulagée ! Reconnaissante d’être en vie ! Vous aimez vos amis et votre
famille ! Et ça, c’est le cycle complet de la réponse au stress, avec un début
(«  je suis en danger  !  »), un milieu (l’action) et une fin («  je suis en
sécurité ! »).
Ou supposons que la menace devant vous soit une personne visiblement
très en colère, qui se faufile dans le dos de votre meilleur ami, un petit
couteau à la main  ? Votre cerveau peut décider qu’il s’agit d’une menace
plus facilement surmontable en vous battant.
Vous ressentez de la colère («  je suis en danger  !  » – comme nous le
verrons dans la partie suivante, les personnes que nous aimons sont
considérées comme « nous-même ») et vous passez en mode combat.
Et ici encore, vous pouvez vous battre et mourir ou vous pouvez vous
battre et survivre. Dans les deux cas, vous allez au bout du cycle de réponse
au stress en adoptant un comportement qui élimine le facteur de stress et le
stress.
Ces deux réponses, le combat et la fuite, sont toutes les deux des
accélérateurs de stress – le système nerveux sympathique, le «  C’EST
PARTI ! » de la réponse au stress. Le combat survient lorsque votre Anneau
Unique émotionnel détermine qu’un facteur de stress doit être vaincu. La
fuite, elle, lorsque votre Anneau Unique estime que vous devez échapper à
un facteur de stress.
Mais supposons que le facteur de stress soit de telle nature que
votre cerveau estime que vous ne pourrez survivre ni en vous enfuyant
ni en vous battant – vous sentez les dents du lion vous mordre par-derrière.
C’est alors que survient la réponse au stress par le freinage  : le système
nerveux parasympathique, le « STOP ! » activé par la plus extrême détresse.
Votre corps se ferme  ; vous pouvez même ressentir une «  immobilité
tonique  », c’est-à-dire que vous n’arrivez pas à bouger, ou seulement très
lentement. Dans la nature, les animaux se figent et se laissent tomber au sol
dans un ultime effort pour convaincre un prédateur qu’ils sont déjà morts ;
Stephen Porges a émis l’hypothèse que la paralysie entraîne une mort sans
douleur 1.
Si un animal parvient à survivre à une telle menace, si intense, alors il
fait une chose extraordinaire : il tremble. Il se secoue, ses pattes frémissent
dans l’air. Il pousse un grand soupir. Puis il se lève, remue un peu et
s’éloigne en trottinant.
Dans ce cas, la paralysie a interrompu la réponse au stress par le combat
ou la fuite, la réaction « C’EST PARTI ! », laissant tout ce stress causé par
l’adrénaline stagner dans le corps de l’animal. Lorsque l’animal tremble, se
secoue et soupire, son corps relâche les freins et va au bout du processus
d’activation déclenché par la réponse combat-fuite, et se débarrasse des
résidus. Le cycle s’achève. C’est ce qu’on appelle la «  résolution à son
propre rythme 2 ».
Une amie m’a offert l’exemple de son fils qui se réveillait d’une
anesthésie, après avoir attendu aux urgences pendant cinq heures pour une
intervention chirurgicale bénigne du doigt :
« Il s’est réveillé de son anesthésie “très angoissé”, ont déclaré les infirmières. Je traduis
cette expression par “pétage de câble complet” : il s’est mis à hurler comme un fou, s’est
débattu, secouant ses bras et ses jambes dans tous les sens, a crié qu’il me détestait et
détestait tout le monde, et a pédalé des jambes en l’air en braillant : “Je veux juste courir,
je veux juste courir !” »

Pédaler en l’air et crier « Je veux juste courir ! », c’est la fuite. Détester
tout le monde, c’est le combat. L’anesthésie est une paralysie médicalement
induite : les animaux dans la nature qui sont anesthésiés par des chercheurs
vivent la même chose que le fils de mon amie. J’appelle ça «  les
Sensations », car c’est juste un truc qui se produit dans le corps sans aucune
cause environnementale évidente. Le gamin n’était pas vraiment en danger,
mais il a éprouvé beaucoup de Sensations qui devaient être réglées. Et sa
mère a fait exactement ce qu’il fallait :

« Je l’ai serré dans mes bras, je suis restée calme, je répétais en boucle que je l’aimais et
que j’étais là pour le protéger, et il a fini par se calmer suffisamment pour pouvoir enfiler
ses vêtements (il les avait littéralement arrachés) et partir avec moi. Au moment où nous
sommes arrivés dans le parking, il m’a dit calmement qu’il m’aimait beaucoup, et quand
nous sommes arrivés à la maison, il s’est endormi profondément. »

Il a achevé son cycle et a atteint la relaxation à la fin – l’affection et le


sommeil.
Dans notre vie quotidienne, la sortie de paralysie ne prend que très
rarement une forme aussi dramatique. Mais même à plus petite échelle,
c’est ainsi que fonctionne le cycle de réponse au stress, avec un début, un
milieu et une fin, toutes ces étapes intrinsèquement inscrites dans le
système nerveux et pleinement fonctionnelles dans le bon contexte.
Stress et sexe
Compte tenu de tout ce que vous avez déjà lu, vous ne serez pas étonnée
que je dise : « Pour avoir une sexualité plus fréquente et meilleure qualité,
réduisez votre niveau de stress.  » Je pourrais tout aussi bien dire  :
«  L’activité physique, c’est bon pour vous  » ou «  Le sommeil est
important ». Bien sûr. Vous savez cela.
En fait, plus de la moitié des femmes déclarent que le stress, la
dépression et l’anxiété diminuent leur intérêt pour le sexe ; ces phénomènes
réduisent également l’excitation sexuelle et peuvent interférer avec
l’orgasme 3. Le stress chronique perturbe ou supprime également le cycle
menstruel, diminue la fertilité et la lactation, et augmente les fausses
couches, tout en diminuant la réponse génitale et en augmentant à la fois la
distractivité et la douleur lors des rapports sexuels 4.
Comment les hormones et les substances neurochimiques du stress
interagissent-elles avec les hormones et les substances neurochimiques de la
réponse sexuelle, pour supprimer ou stimuler le comportement sexuel  ?
Personne ne le sait précisément, mais nous savons tout de même certaines
choses.
Nous savons que les humains stressés interprètent plus facilement tous
les stimuli comme des menaces, tout comme les rats qui sont exposés à
des lumières vives et à Iggy Pop.
Nous savons également que le cerveau ne peut gérer qu’une quantité
limitée d’informations à la fois. Plus simplement  : nous pouvons
considérer le stress comme une surcharge d’informations, et lorsqu’il se
passe trop de choses, le cerveau commence à faire le tri, à établir des
priorités, à simplifier et même à ignorer complètement certains
éléments.
Et nous savons que le cerveau établit des priorités en fonction des
besoins de survie : respirer, échapper aux prédateurs, se maintenir à la
bonne température, rester hydraté et nourri, et ne pas quitter son groupe
social sont toutes des priorités de premier plan – et bien sûr, ces
priorités se classent d’elles-mêmes en fonction du contexte. Si vous êtes
affamé, vous serez plus disposé à voler du pain à votre voisin, même si
cela risque de compromettre votre appartenance à un groupe social. Si
vous ne pouvez pas respirer, peu importe depuis combien de temps vous
n’avez pas mangé, vous n’aurez pas faim. Et si vous êtes globalement
dépassé par la vie du XXIe siècle, pratiquement tout le reste prime sur le
sexe ; pour votre cerveau, tout est un lion qui vous fonce dessus. Et si
vous êtes poursuivi par un lion, est-ce vraiment le bon moment pour
faire l’amour ?

Pour résumer…
L’inquiétude, l’anxiété, la peur et la terreur font partie
de la catégorie de stress : « Il y a un lion ! Cours ! »
Pour l’irritation, l’agacement, la frustration, la colère et la rage,
c’est la catégorie : « Il y a un lion ! Tue-le ! »
Enfin, la torpeur émotionnelle, le repli sur soi, la dépression et le
désespoir : « Il y a un lion ! Fais le mort ! »
Et rien de tout ça ne nous porte à croire que c’est le bon moment
pour s’envoyer en l’air.

Le stress est une question de survie. Et même si le sexe sert à beaucoup


de choses, la survie n’en fait pas partie (sauf quand le sexe est bien une
question de survie – rendez-vous à la partie sur l’attachement). Ainsi, pour
la plupart des gens, le stress freine et fait baisser l’intérêt sexuel, hormis
pour les 10 à 20  % comme Olivia chez qui le stress appuie sur
l’accélérateur. (Toutes les mêmes parties, organisées de manière différente.)
Mais même pour ces personnes, le stress bloque le plaisir sexuel
(l’appréciation) tout en augmentant l’intérêt sexuel (la motivation, le désir).
Le sexe stressé est différent du sexe heureux – vous savez, à cause du
contexte.
Pour réduire l’effet du stress sur votre plaisir et votre intérêt sexuel,
pour avoir des relations sexuelles plus joyeuses et plus agréables, il suffit
d’apprendre à gérer son stress.
Ce qui est, je vous l’accorde, plus facile à dire qu’à faire.
Lorsque Olivia était stressée, son intérêt pour le sexe augmentait – et c’était une source de
conflit dans sa relation avec Patrick, car lorsque lui était stressé, son intérêt pour le sexe
diminuait. Et pire encore, parfois l’intérêt sexuel résultant de son stress donnait à Olivia
l’impression de ne pas être capable de se contrôler.
Comment peut-elle gérer cette impression ?
En s’entraînant à aller au bout du cycle, jusqu’à sa résolution complète.
Voici ma description technique de l’expérience de perte de contrôle d’Olivia :
«  Comportement inadapté pour gérer les affects négatifs  » – ce qui signifie simplement
tenter de faire face à des émotions inconfortables (stress, dépression, anxiété, solitude, rage) en
faisant des choses qui comportent un risque élevé d’enchaînements indésirables. Le
comportement sexuel compulsif en est un exemple.
 
En voici d’autres :
la consommation d’alcool ou d’autres drogues dans des conditions risquées ;
les relations dysfonctionnelles – par exemple, essayer d’affronter ses propres sentiments en
s’occupant de ceux de quelqu’un d’autre ;
s’évader dans des distractions, comme regarder un film quand d’autres choses doivent être
faites ;
des troubles de l’alimentation – restriction, frénésie ou vomissements.

Bien sûr, beaucoup de ces comportements peuvent survenir dans un contexte sain. C’est
lorsque nous les accomplissons au lieu de nous occuper de ce que nous ressentons, c’est-à-dire
au lieu de laisser le cycle s’achever, qu’ils risquent d’entraîner des conséquences indésirables.
Certaines d’entre elles sont relativement bénignes… et d’autres sont potentiellement
dangereuses. Tous ces comportements n’ont qu’un seul but : gérer les sentiments sous-jacents. Il
nous arrive de faire ce genre de choses lorsque nous ne savons pas comment aller au bout du
cycle ou lorsque les sentiments sont trop douloureux.
Quand elle était adolescente, Olivia a adopté un mécanisme inadapté pour faire face à ce
qu’elle ressentait  : les troubles alimentaires. Elle mangeait à l’excès puis faisait du sport, et
répétait ce cycle. Au fil de sa guérison pour sortir de son trouble alimentaire, elle a pris
conscience que son comportement n’était pas vraiment lié à sa silhouette : « J’avais besoin d’un
coupable à blâmer pour mon anxiété, et le lavage de cerveau culturel a juste fait que mon corps
semblait la cible idéale  », a-t-elle déclaré. Son comportement compulsif était plutôt une
tentative pour gérer des sentiments qui semblaient trop intenses pour elle.
Elle ne présente plus de symptômes depuis plusieurs années. Pourtant, elle m’a confié :
« Il m’arrive de franchir des portes en me mettant de profil, parce que je crains d’être trop
grosse pour passer autrement. Quand je me surprends à faire ça, je me force à franchir le seuil
de face, parce que ce que j’ai appris, c’est que ce n’est pas la taille de mon corps qui m’inquiète,
mais bien celle de mon anxiété. »
Aujourd’hui, elle court, à la fois pour gérer son stress et comme un exutoire constructif
pour libérer son intensité et son énergie – et elle se limite à un marathon par an car elle le
reconnaît elle-même : « J’ai tendance à en faire trop, et ça m’aide si je me fixe des limites. »
« Je crois que tu fais là quelque chose de plus profond que juste te fixer des limites, lui ai-
je dit. Je pense que tu t’autorises à faire du sport pour t’aider à aller au bout de ton cycle plutôt
que d’appuyer sur les freins. Et tu peux faire pareil avec le sexe.
– C’est vrai ?
– Bien sûr. »
Elle s’est mordu la lèvre et a hoché la tête avant d’ajouter : « Je ne suis pas sûre. »
Elle en sera sûre au chapitre 5.

Culture brisée → Cycles de réponse


au stress brisés
Le secret pour bien gérer son stress, c’est de s’efforcer à aller au bout du
cycle  : sortir de la paralysie, échapper au prédateur, tuer l’ennemi, se
réjouir.
Mais le stress est plus complexe chez l’humain moderne que chez les
gazelles et les gorilles, et ce, pour de nombreuses raisons.
Premièrement, dans la vie moderne, nous ne sommes, comme je l’ai
déjà dit, presque jamais poursuivis par des lions. Nos facteurs de stress
sont moins intenses, mais durent plus longtemps – on les appelle
« facteurs de stress chroniques », par opposition aux « facteurs de stress
aigus  », comme lors d’une simple poursuite prédateur-proie. Les
facteurs de stress aigus ont un début, un milieu et une fin bien définis ;
la résolution complète du cycle – courir, survivre, célébrer – est
inhérente. En revanche, il n’en va pas de même pour les facteurs de
stress chroniques. Si notre stress est chronique et que nous ne prenons
pas de mesures délibérées pour terminer le cycle, tout ce stress généré
stagne tout simplement à l’intérieur de nous, nous rend malades,
fatigués et incapables d’éprouver du plaisir lors de relations sexuelles
(ou dans à peu près n’importe quelle situation).
Deuxièmement, notre culture fondée sur le rejet des émotions est mal à
l’aise avec les Sensations. Notre culture nous dit que si le facteur de
stress n’est pas là, juste devant nous, alors nous n’avons aucune raison
de nous sentir stressés et qu’il faut vraiment qu’on arrête notre char,
c’est bon maintenant. C’est pourquoi la plupart des gens pensent que la
« gestion du stress » consiste soit à éliminer tous les facteurs de stress,
soit à « se détendre », comme si le stress pouvait être éteint comme un
interrupteur. Notre culture est tellement mal à l’aise avec les Sensations
que nous offrons même de donner des sédatifs à des personnes qui
viennent d’avoir un accident de voiture, empêchant ainsi leur corps de
vivre ce processus naturel  ; cette intervention médicale bien
intentionnée a pour conséquence indésirable de paralyser les survivants
de blessures traumatiques, ce qui permet au syndrome de stress post-
traumatique (SSPT) de s’installer dans le cerveau d’un survivant 5.
Mais troisièmement, même sans parler de médicaments et d’une culture
de rejet des émotions, notre cerveau humain ultrasocial est très doué
pour l’auto-inhibition, interrompant la réponse au stress au beau milieu
du cycle parce que « ce n’est vraiment pas le moment de ressentir des
Sensations  ». Nous utilisons cette auto-inhibition pour faciliter la
coopération sociale, c’est-à-dire pour ne pas faire flipper tout le monde.
Malheureusement, notre culture a éliminé tous les moments appropriés
pour les Sensations. Nous nous sommes enfermés, culturellement, dans
nos propres peur, rage et désespoir. Nous devons trouver du temps, de
l’espace et définir des stratégies pour nous délivrer de nos cycles de
réaction au stress.

Allez au bout du cycle !


Mais comment ?
Tout comme vous ne pouvez pas juste serrer les dents et forcer votre
jardin à pousser, vous ne pouvez pas forcer la résolution complète d’un
cycle de réponse au stress. Pour aller au bout d’un cycle, au lieu d’appuyer
sur les freins de notre stress, nous devons lever doucement le pied à la fois
de l’accélérateur et des freins et nous laisser porter jusqu’à l’arrêt complet 6.
Et pour y parvenir avec succès, il faut créer le bon contexte et laisser son
corps faire ce qu’il a à faire.
Alors, c’est quoi le bon contexte ?
Pensez à ce que votre corps perçoit comme étant les comportements
susceptibles de vous sauver de l’attaque d’un lion. Lorsque vous êtes
poursuivi par un lion, que faites-vous ?
Vous courez.
Donc, lorsque vous êtes stressé par votre travail (ou par votre vie
sexuelle), que faites-vous ?
Vous courez… ou vous marchez, grimpez sur votre vélo elliptique ou
sortez danser, ou dansez tout simplement dans votre chambre. L’activité
physique est la stratégie la plus efficace pour aller au bout du cycle de
réponse au stress et pour réinitialiser votre système nerveux central, afin
qu’il retrouve son calme. Lorsque les gens disent : « Bouger, c’est bon pour
le stress », c’est tout à fait vrai 7.
La science nous apprend que d’autres phénomènes peuvent réellement
nous aider non seulement à nous «  sentir mieux  », mais aussi à faciliter
l’achèvement du cycle de réponse au stress : le sommeil, l’affection (nous y
reviendrons plus loin dans le chapitre), toute forme de méditation, y
compris la pleine conscience, le yoga, le tai-chi, la méditation «  body
scan », etc.
Aussi, on peut s’autoriser à pleurer un bon coup ou à pousser un cri
primal – même s’il faut vraiment faire attention avec ça : parfois, les gens
se complaisent dans leur stress quand ils pleurent, plutôt que de laisser leurs
larmes évacuer leur stress.
Si vous vous êtes déjà enfermée dans votre chambre pour pleurer
pendant dix minutes, avant de pousser un grand soupir et de vous sentir
profondément soulagée à la fin, alors vous savez à quel point une crise peut
vous faire passer de « je suis en danger » à « je suis en sécurité ».
L’art, s’il est utilisé dans le même esprit, peut être utile. Lorsque les
professionnels de la santé mentale vous suggèrent de tenir un journal ou de
prendre soin de vous en vous exprimant, ce n’est pas parce que la
construction de phrases ou le fait de dessiner est intrinsèquement
thérapeutique. Non, ils vous encouragent plutôt à trouver des contextes
positifs pour évacuer votre stress, par le biais du processus créatif.
J’aurais tendance à ajouter à cette liste tout ce qui concerne les soins de
beauté et corporels. Même si je n’ai pas connaissance de recherches
spécifiques sur ce sujet, j’ai parlé avec de nombreuses femmes pour qui la
douche et les rituels, à la fois sociaux et méditatifs, qui consistent à se
vernir les ongles, se coiffer ou se maquiller – ce qu’on résume souvent par
« se préparer » à sortir (ou à rester à la maison) – les aident à passer d’un
état d’esprit stressé à un état d’esprit social et chaleureux. Ces anecdotes ne
sont pas des données chiffrées, mais j’aime à les considérer comme des
preuves et à dire : oui, prenez du temps pour vous, et prenez soin de vous
avec amour.
Une de mes théories préférées argue que ces rituels et comportements
sont liés à la «  bonté envers soi-même  », dont je parlerai au chapitre  5,
mais, à ma connaissance, personne ne l’a jamais spécifiquement évaluée 8.
Quoi qu’il en soit, nos cousins primates s’épouillent les uns les autres, alors
peut-être que les bombes de bain et les lotions pailletées pour le corps en
sont l’équivalent chez l’humain moderne ?!
Il y a forcément un truc qui marche pour vous, et la stratégie de chacune
est différente. Quelle que soit celle que vous choisissez, prenez des mesures
délibérées pour clore le cycle. Laissez-vous aller jusqu’au bout sans freiner.
Les émotions sont des tunnels  : vous devez les traverser dans l’obscurité
pour atteindre la lumière tout au bout. Je répète cette phrase si souvent que
mes élèves roulent parfois des yeux : « Pas encore l’histoire des tunnels. »
Si, si, encore les tunnels. Parce que c’est vrai.
Pendant que vous essayez de déterminer quelles stratégies vous sont
utiles, restez attentive à vos tendances d’auto-inhibition, et identifiez les
lieux et personnes qui créent l’espace nécessaire pour que vous puissiez
vivre vos Sensations. Certains de ces comportements typiques d’auto-
inhibition sont importants et immuables – par exemple, réfléchissez bien à
tout projet qui impliquerait de pleurer au travail. Mais certains d’entre eux
seront voués à l’échec, et tout le monde a besoin d’au moins une bulle dans
sa vie pour simplement ressentir toutes les Sensations sans se soucier d’être
jugé ou de faire peur aux gens. Trouvez cet endroit et ces gens.
Une dernière mise en garde : trop souvent, nous confondons la gestion
des facteurs de stress avec la gestion du stress. Il y a quelques années, les
jeunes qui géraient l’association d’éducation sexuelle entre étudiants de
mon campus sont venus me voir dans mon bureau pour me dire à quel point
le grand événement annuel Sextravaganza s’était bien déroulé. Ils avaient
travaillé pendant des mois et leurs efforts avaient été récompensés par un
succès spectaculaire, mais ils avaient l’air à la fois épuisés et abasourdis :
«  La Sextravaganza est terminée  ! Comment se fait-il que nous nous
sentions toujours aussi stressés que le jour où elle a commencé ?
– Parce que vous avez géré le facteur de stress, ai-je répondu, mais pas
le stress. Votre corps pense toujours qu’il est poursuivi par un lion. »
Une solution peut être de faire un truc qui aidera votre corps à
comprendre : « Tu t’es échappée et tu as survécu ! » Il peut s’agir :
d’une activité physique ;
d’un moment d’affection partagé ;
d’un cri primal ou d’une bonne crise de larmes ;
de la relaxation musculaire progressive, ou de toute autre méditation
sensorimotrice ;
des soins du corps, de se faire « chouchouter », d’un massage ou d’une
manucure.

Celle qui étudiait la danse a opté pour l’activité physique, et celle qui
suivait le cours sur les femmes et le genre a organisé un grand cri primal
collectif.
N’AYEZ PAS PEUR DU NOIR
Au fil des ans, un certain nombre de personnes, et en particulier des jeunes femmes, m’ont
envoyé des courriels ou m’ont approchée durant une pause lors d’un atelier pour me
demander si elles pouvaient me parler en privé. Sans jamais me regarder dans les yeux,
elles m’avouent souffrir d’anxiété depuis l’enfance. Elles me disent suivre une thérapie
depuis le lycée. Et qu’elles n’ont jamais pu parler à un thérapeute des pensées sexuelles
grotesques, dérangeantes et parfois violentes qui envahissent leur esprit. Une jeune femme
m’a confié que ses pensées secrètes avaient perturbé ses relations avec les membres de sa
famille proche, à qui elle estimait devoir les cacher à tout prix – même si pour ça, elle ne
devait plus jamais voir les membres tant aimés de son entourage immédiat.

Les personnes ayant des pensées aussi intrusives espèrent que je puisse leur expliquer que
ces pensées ne font pas d’elles de mauvaises personnes. Et je peux le faire !

De telles pensées intrusives sont généralement considérées comme une sorte de trouble
obsessionnel compulsif, l’anxiété se manifestant non par des comportements répétitifs,
mais par des pensées répétitives. Certaines personnes souffrent de pensées intrusives
violentes, d’autres sexuelles, d’autres encore dégoûtantes, religieuses ou immorales. Elles
ne veulent pas faire dans la réalité les choses auxquelles elles pensent ; au contraire, leur
détresse surgit du fait même qu’elles ne veulent absolument pas faire ces choses, et elles
s’inquiètent que ces pensées puissent se réaliser, ou que celles-ci signifient qu’une partie
cachée, horrible, au fond d’elles, le souhaite.

J’en ai appris beaucoup sur les pensées intrusives grâce à la comédienne Maria Bamford,
qui a produit un spectacle sur Internet avec une chanson intitulée « Don’t Be Afraid of the
Dark » (« N’ayez pas peur du noir », en anglais), une petite chanson joyeuse qui célèbre à
quel point il est normal d’avoir des trucs sombres et non désirés dans notre esprit. En effet,
des recherches ont montré que presque tout le monde a parfois des pensées intrusives ou
non désirées, et qu’environ un tiers des personnes atteintes de TOC ont des pensées
intrusives à caractère sexuel. C’est l’anxiété qui se manifeste par là, déguisée en toutes les
9
choses qu’on nous a apprises à craindre à propos du sexe .

Et il existe des interventions efficaces. Une recherche rapide sur Internet permet de
découvrir un certain nombre d’approches différentes qui consistent généralement à réduire
progressivement le niveau d’anxiété ressenti par les personnes en réaction à ces pensées, ce
qui réduit alors la fréquence, l’intensité et l’importance donnée à ces pensées. Si vous avez
des pensées sexuelles non désirées, intrusives ou obsessionnelles, sachez que vous pouvez
les révéler à un thérapeute qualifié et bénéficier d’un traitement adapté basé sur des
preuves.
Quand le sexe devient lion
Au-delà des facteurs de stress du quotidien, il existe des blessures
profondes que la vie inflige sans leur laisser une chance de guérir. Compte
tenu de la prévalence des traumatismes de toutes sortes, en particulier les
traumatismes sexuels – on estime qu’au moins une femme sur cinq sera
agressée sexuellement au cours de son existence, et ce chiffre pourrait en
réalité être plus proche d’une sur trois 10 –, il est impossible de parler de la
santé sexuelle des femmes sans prendre le temps d’évoquer les
traumatismes. De l’abus sexuel des enfants à l’agression sexuelle, en
passant par toutes les formes de violence interpersonnelle, les femmes sont
systématiquement ciblées, et de manière complètement disproportionnée.
Par conséquent, elles introduisent dans leur fonctionnement sexuel les
caractéristiques émotionnelles, physiques et cognitives des survivantes d’un
traumatisme. En d’autres termes, si les femmes ont plus de « problèmes »
que les hommes en matière de sexualité, eh bien, il y a une bonne raison à
ça.

Si vous êtes une survivante et que vous vous efforcez encore de


vous remettre de votre traumatisme, vous préférerez peut-être sauter
cette partie.

Un traumatisme se produit lorsqu’une personne se voit retirer le


contrôle de son corps, qu’elle se fige et qu’elle ne peut plus sortir de cette
paralysie. Que la cause de son traumatisme soit un accident de voiture ou
une violence sexuelle, le même mécanisme de survie s’enclenche  : la
paralysie, cette inhibition pétrifiée caractérisée par un engourdissement et
parfois une immobilité tonique (catalepsie) ou un sentiment de dissociation
(se sentir à l’extérieur de son propre corps). Certains décrivent ça comme
un «  état de choc  ». Il s’agit de la réaction de stress face à une menace
potentiellement mortelle, qui s’active lorsque votre cerveau décide que vous
n’avez aucun moyen d’échapper à un facteur de stress ni le combattre. Cette
réponse est réservée aux contextes les plus dangereux et les plus violents.
Le viol a été décrit par Tom Tremblay, défenseur des victimes et ancien
policier, comme «  le crime le plus violent auquel une personne puisse
survivre 11  ». Les personnes qui n’ont jamais été agressées sexuellement
comprendront peut-être plus clairement ce que vit une survivante si elles
imaginent qu’elle a survécu à une tentative de meurtre dont l’arme était le
sexe.
Souvent, la violence sexuelle ne ressemble pas à de la « violence » telle
que nous nous la représentons habituellement – il est rare qu’il y ait une
arme à feu ou un couteau impliqué  ; souvent, il n’y a même pas
d’«  agression  » telle que nous la concevons typiquement. Il y a une
coercition et une privation du choix de la personne ciblée sur ce qui va lui
arriver ensuite. Les survivantes ne « combattent » pas parce que la menace
est trop immédiate et inéluctable  ; leur corps choisit de «  se figer  » parce
que c’est la réaction au stress qui maximise leurs chances de rester en vie…
ou de mourir sans douleur.
Le traumatisme n’est pas toujours provoqué par un événement
spécifique. Il peut aussi surgir en réaction à une détresse persistante ou à un
abus récurrent, comme une relation dans laquelle les relations sexuelles ne
sont pas souhaitées même si en apparence, elles semblent « consensuelles »,
parce que la personne en question préfère dire oui pour éviter d’être blessée,
ou qu’elle se sent piégée dans cette relation, ou se trouve contrainte d’une
autre manière. Dans un tel contexte, le corps de la survivante apprend
progressivement qu’il ne peut ni fuir, ni se battre. La paralysie devient alors
la réaction de stress par défaut, car le schéma acquis de repli sur soi
constitue le meilleur espoir de survie.
L’expérience de survie de chaque personne est unique, mais souvent, on
y retrouve une sorte d’irréalité détachée. Et par la suite, cette illusion
d’irréalité se dégrade progressivement, se désintégrant sous le poids
accablant de l’existence physique et de la mémoire. La reconnaissance
hésitante de la réalité de cet événement débloque progressivement la
panique et la rage qui n’avaient pu trouver leur chemin jusqu’à la surface
jusqu’alors, ensevelies comme elles l’étaient sous l’exigence prédominante
de survie.
Mais survivre, ça ne veut pas dire guérir  : la survivance se produit
automatiquement, parfois même contre la volonté de la survivante. La
guérison, le rétablissement après un traumatisme, exige un environnement
relativement sûr et la capacité à séparer la physiologie de la paralysie de
l’expérience de la peur, afin que la panique et la rage puissent se libérer,
permettant ainsi au cycle d’arriver enfin à son terme.
Ni Camilla ni Henry n’avaient personnellement traversé de traumatisme, mais Henry – vous
savez, le mec sympa, le type bien – avait eu une petite amie, agressée sexuellement alors qu’ils
sortaient ensemble.
Nous ne parlons pas suffisamment de la survivance aux traumatismes, et encore moins de
la cosurvivance : la charge émotionnelle de soutien au survivant. Dans notre monde occidental,
assez peu d’hommes – les études parlent de seulement 5  % environ – sont coupables de
12
l’immense majorité des agressions , mais de très nombreux hommes ont des partenaires qui
ont survécu à une agression. Pourtant, presque rien n’est fait pour apprendre aux hommes à
soutenir les survivantes qui sont leurs partenaires intimes, ou à prendre soin d’eux-mêmes en
tant que cosurvivants.
Henry ne se rendait pas vraiment compte que le traumatisme de son ancienne partenaire
avait perturbé son approche du sexe, jusqu’à ce que lui et Camilla élaborent leur plan pour qu’il
la « courtise ». Il se sentait mal à l’aise parce qu’il aimait plus que tout ce désir enthousiaste
qu’elle affichait, mais souvenez-vous de la veilleuse de la cuisinière un peu longue à s’allumer :
Camilla avait besoin de beaucoup de temps pour faire monter en elle ce désir enthousiaste.
Comment pouvait-il savoir qu’elle était partante  ? Est-ce vraiment du désir et un
consentement si elle « veut avoir envie » de sexe, plutôt que simplement avoir envie ?
Camilla l’a aidé en parlant des freins et de l’accélérateur :
«  Mes freins ne sont pas sensibles, j’ai un accélérateur têtu. Je suis comme un camion
chargé au maximum, au point mort en bas d’une côte et qui accélère pour la franchir. Mais
avancer lentement, ce n’est pas la même chose que de vouloir s’arrêter, non ? Tout ce dont j’ai
besoin, c’est qu’un truc vraiment génial m’attende au sommet de la colline. Et tu sais déjà que
je te le dirai quand quelque chose me plaira vraiment. J’espère que tu me fais confiance pour te
dire si quelque chose me freine.
– Bien sûr. Eh bien, allons-y. »
Entre eux, le silence s’est installé – vous savez, comme quand le cerveau d’une des
personnes tourne et retourne une idée dans sa tête, comme une pièce de puzzle, pour trouver sa
place dans l’image d’ensemble.
« Avancer lentement, ce n’est pas la même chose que de vouloir s’arrêter, a-t-il répété. Tu
as une chaudière lente, une veilleuse qui fait tic-tic-tic.
– C’est ça.
– Et tu me le diras si tu veux arrêter.
– Sacré Henry ! »
Henry le type bien, Henry le geek, a hoché la tête lentement.
« Je crois que j’ai pigé. »
(Il se trompe légèrement au chapitre 6, mais je vous promets que tout finit bien pour eux.)

Le sexe et la survivante
La survivance à un traumatisme sexuel a des conséquences sur le traitement
de l’information, tant pour l’accélérateur que pour les freins. Les sensations,
contextes et idées qui étaient autrefois interprétés comme associés au sexe
peuvent désormais être interprétés par votre cerveau comme des menaces,
de sorte que même les contextes sexy activent les freins. De plus, un niveau
chroniquement élevé d’activité du stress dans le cerveau d’une survivante
en convalescence peut bloquer les stimuli sexuels et les considérer comme
peu prioritaires.
Parfois aussi, les survivantes se retrouvent prisonnières d’un schéma de
comportement sexuel. Leur cerveau a l’envie impérieuse d’effacer le
traumatisme, de le revivre différemment ou simplement de le comprendre.
Comme lorsqu’on mordille une lèvre abîmée, ou qu’on éclate un bouton, le
cerveau est incapable de laisser le traumatisme tranquille, même s’il sait
qu’il guérirait plus vite s’il le faisait. Résultat  : la survivante a plusieurs
partenaires, qui suivent souvent un modèle habituel, sans jamais avoir
l’impression de contrôler parfaitement la décision d’avoir ces partenaires.
Si vous avez survécu à un traumatisme, il y a de fortes chances que
vous ayez fait un travail émotionnel pour surmonter ce traumatisme, ou que
vous ayez encore du travail en perspective. Si votre traumatisme est récent
ou semble non résolu (par exemple, si la lecture de la partie précédente a
fait battre votre cœur un peu plus fort), vous aurez probablement besoin de
plus de soutien que ce livre ne peut vous en offrir. Une thérapie serait
certainement très utile. Il existe d’excellents livres sur les traumatismes et la
guérison, dont le meilleur, à mon avis, est Le corps n’oublie rien de Bessel
van der Kolk (Albin Michel). Chaque survivante et chaque personne qui
aime une survivante apprendra quelque chose d’important à la lecture de cet
ouvrage.
Si votre traumatisme n’est pas récent et qu’il est plus ou moins résolu, il
est normal que vous ressentiez des effets résiduels sur votre fonctionnement
sexuel, même si vous êtes globalement guérie. Le traumatisme sexuel a
tendance à enrouler ses tentacules autour de si nombreuses parties de votre
expérience émotionnelle que vous le croisez inopinément, comme une
mauvaise herbe envahissante et persistante qu’il faut arracher encore et
encore.
Il existe trois grandes approches pour faire face à ces fragments
résiduels de traumatisme. On pourrait les appeler « descendante », c’est-à-
dire une approche cognitive basée sur la pensée  ; «  ascendante  », une
approche somatique basée sur le corps  ; et «  transversale  », une approche
basée sur la pleine conscience 13.
Approche descendante : traiter le traumatisme. Il existe plusieurs types
de thérapies cognitives  : cognitivo-comportementale (TCC), du
processus cognitif (TPC), comportementale dialectique (TCD),  etc.
Elles impliquent toutes un certain degré de reconnaissance du sens que
vous avez créé autour du traumatisme, puis une remise en question des
schémas de croyance à l’intérieur de ce sens, ou la reconnaissance des
habitudes comportementales que vous avez vous-même acquises depuis
le traumatisme et la remise en question de ces comportements.
Quels sont les prérequis à ces thérapies  ? Vous devez d’abord
prendre conscience des schémas, qu’il s’agisse de pensées ou de
comportements, et ensuite développer des compétences pour remplacer
ces schémas par de nouveaux. Donnez-vous l’autorisation d’éprouver
ces anciens sentiments, mais à présent, au lieu de recourir aux
mécanismes d’autodéfense habituels, commencez à appliquer de
nouveaux comportements. C’est en changeant les schémas de
fonctionnement que votre traumatisme résiduel apparaîtra. Sachez que
vous pouvez ressentir tous vos sentiments tout en étant en sécurité.
Sachez aussi que vous avez fait tout ce qui était en votre pouvoir à ce
moment-là pour vous protéger ; pardonnez-vous pour ce que vous vous
reprochez peut-être encore, en reconnaissant que le traumatisme est la
responsabilité de l’auteur uniquement. Et imaginez-vous telle que vous
êtes aujourd’hui, en sécurité et entière, installée tranquillement – ou
imaginez que celle que vous êtes maintenant serre dans ses bras celle
que vous étiez alors, vous offrant à vous-même le réconfort et la
sécurité dont vous aviez besoin à l’époque, avec l’assurance que vous
avez survécu, que votre vie s’est améliorée. C’est votre nouveau
schéma : laissez les sentiments vous traverser.
Approche ascendante  : traiter le corps. Si l’idée d’analyser vos
schémas de pensée et de comportement ne vous attire pas, vous
préférerez peut-être une thérapie corporelle, comme la thérapie
sensorimotrice ou l’Expérience Somatique 14. Ces approches peuvent
constituer à elles seules un moyen puissant de réparer votre relation
avec votre corps et votre sexualité après un traumatisme, et peuvent
également compléter d’autres approches.
Quand j’ai discuté avec Kristen Chamberlin, praticienne de
l’Expérience Somatique, elle m’a fait remarquer que les thérapies
basées sur le corps se développent peu à peu dans la pratique courante
parce que nous n’avons pas de cadre culturel pour le processus naturel
de gestion du stress physiologique par le corps (ce que j’appelle « aller
au bout du cycle »). Dans notre culture, nous ne faisons pas confiance à
notre corps, alors nous le supplantons, ce qui nous rend vulnérables à
des stratégies d’adaptation inappropriées, comme Olivia l’a constaté.
La question centrale de sa pratique, m’a expliqué Mme Chamberlin,
est la suivante : « Comment travailler avec l’intelligence organique du
corps pour guérir  ? Au lieu de gérer ce qui émane du corps, nous
travaillons avec lui, en faisant confiance à son objectif et son
orientation, tout en gardant un cadre de guérison très particulier. Le
résultat, c’est que le stress physiologique peut évoluer et se libérer.  »
C’est une bonne nouvelle, car de nombreux obstacles dans nos relations
sexuelles sont les symptômes d’un stress physiologique au processus
inachevé. Lorsque nous libérons ces anciennes réponses au stress,
incomplètes, nous faisons de la place pour bouger à nouveau là où nous
nous sentions autrefois bloquée.
Et quand vous trouvez le blocage, accordez-lui simplement une
attention douce, patiente et gentille. Ce blocage se transformera sous la
douceur de votre attention, et fondra comme neige au soleil. Laissez-le
faire. Les émotions sont des cascades physiologiques qui veulent
achever leurs cycles, et elles iront au bout si vous le leur permettez  ;
elles veulent être nomades, pas sédentaires. Elles veulent aller de
l’avant. Laissez-les faire. Vous allez peut-être trembler, vous agiter,
pleurer ou vous recroqueviller sur vous-même. Vous remarquerez peut-
être que votre corps accomplit ces mouvements sans que vous le vouliez
consciemment. Votre corps sait ce qu’il a à faire, et il le fera à condition
que vous restiez calme auprès de lui, comme vous le feriez aux côtés
d’un enfant malade ou en deuil.
Approche transversale : la pleine conscience. Peut-être que l’approche
la plus douce est la plus indirecte. Sans jamais affronter directement le
traumatisme, vous pouvez simplement commencer à pratiquer la pleine
conscience, et progressivement le traumatisme remontera à la surface,
comme un éclat de balle d’une vieille blessure. Il existe des livres
remarquables sur la pratique de la pleine conscience. L’un de mes
préférés est Méditer pour ne plus déprimer, de Mark Williams, John
Teasdale, Zindel Segal et Jon Kabat-Zinn (Odile Jacob). Ne laissez pas
la partie « pour ne plus déprimer » vous décourager : c’est en réalité un
guide pratique pour gérer toute expérience émotionnelle inconfortable.
Comment pratiquer la pleine conscience ?
1. Commencez par des séances de deux minutes. Deux minutes par
jour, portez votre attention sur votre respiration : comment l’air pénètre
dans votre corps, et votre poitrine et votre ventre se dilatent, et comment
l’air quitte votre corps, et votre poitrine et votre ventre se dégonflent.
2. Au début, votre esprit va vagabonder. C’est normal. C’est sain.
C’est en fait le but. Remarquez comme votre esprit s’égare, laissez ces
pensées extérieures passer – vous pourrez y revenir dès que les deux
minutes seront écoulées – et autorisez votre attention à revenir à votre
respiration.
Remarquer comme l’esprit vagabonde puis ramener son attention
sur sa respiration, c’est ça, le vrai travail de la pleine conscience. Il ne
s’agit pas tant de prêter attention à votre respiration que de remarquer ce
à quoi vous prêtez attention sans porter de jugement, et de choisir si
vous souhaitez y prêter attention ou non. Vous êtes «  pleinement
consciente  » à la fois de votre respiration et de l’attention que vous
portez à votre respiration. En vous entraînant à remarquer ce à quoi
vous faites attention, vous vous apprenez à avoir le contrôle de votre
cerveau, de sorte que celui-ci ne vous contrôle pas.
Peu à peu, cette pratique régulière de deux minutes donnera lieu à
des moments ponctuels tout au long de la journée où vous remarquerez
ce à quoi vous prêtez attention et déciderez alors si c’est à cela que vous
voulez prêter attention en ce moment, ou si vous préférez prêter
attention à autre chose. Ce à quoi vous prêtez attention importe moins
que la manière dont vous y prêtez attention.
Il s’agit d’une stratégie transversale pour arracher les mauvaises
herbes traumatiques de votre jardin : il faut simplement remarquer une
mauvaise herbe et décider ensuite si vous souhaitez ou non l’arroser,
l’arracher, la couvrir d’engrais ou encore l’ignorer. Les mauvaises
herbes du traumatisme disparaîtront progressivement à condition que
vous choisissiez la plupart du temps de ne pas les nourrir. Et plus vous
choisirez de cesser de protéger le traumatisme, plus il fanera et mourra
rapidement.
La pleine conscience est bonne pour tout le monde. C’est
l’équivalent pour votre esprit de l’activité physique et des légumes verts
pour votre corps. Si vous ne deviez changer qu’une seule chose dans
votre vie à la suite de la lecture de ce livre, faites-en sorte que ce soit
cette séance quotidienne de deux minutes. Cette pratique vous permettra
de «  cultiver un profond respect pour les émotions  », en distinguant
leurs causes de leurs effets et en vous donnant le choix de la réponse
que vous souhaitez leur apporter 15.

L’origine de l’amour
Le personnage nommé Aristophane, dans Le Banquet de Platon (et pour
celles d’entre vous qui viennent tout juste de piquer du nez, et je comprends
très bien, remplacez cela par la chanson « The Origin of Love » de Hedwig
and the Angry Inch de John Cameron Mitchell) propose cette parabole sur
la raison pour laquelle les humains aiment  : autrefois, les êtres humains
étaient ronds, avaient deux visages, quatre bras, quatre jambes et deux jeux
d’organes génitaux. Certains d’entre nous étaient deux hommes, d’autres
deux femmes, et d’autres encore un homme et une femme. Mais les dieux
voulaient avoir plus de contrôle sur nous, alors Zeus nous a coupés en deux
à coups d’éclair, et depuis ce jour, nous sommes exposés à une souffrance
qui nous déchire, ou comme le chante Hedwig, « une ligne droite à travers
le cœur » (« a straight line/down through the heart 16 »).
Selon cette parabole, l’amour est la poursuite de notre propre entièreté :
nous errons sur la terre à la recherche de notre moitié perdue. Et lorsque
deux moitiés se retrouvent, comme le dit Aristophane :

« Ainsi, lorsque les amants ont rencontré justement la moitié qui est
la leur, c’est miracle comme ils sont empoignés par la tendresse, le
sentiment de parenté, et l’amour ; ils ne consentent plus à se diviser
l’un de l’autre, pour ainsi dire, même un instant. Et tels sont bien
ceux qui demeurent ensemble jusqu’au terme de leur vie, et qui
ne pourraient même pas définir ce qu’ils attendent l’un de l’autre ! »

Ce n’est pas vraiment pour ça que nous tombons amoureux, mais c’est
plus proche de la vérité que vous ne le pensez. Si nous tombons amoureux,
c’est à cause de l’attachement, une sorte de recherche biologique
d’entièreté.
L’attachement est le mécanisme émotionnel adaptatif issu de
l’évolution, qui lie les nourrissons aux adultes qui s’occupent d’eux. Je
pense que l’accouchement humain correspond parfaitement à la description
d’une douleur qui vous donne l’impression d’être séparée d’une partie de
vous-même. Et puis, comme Christopher Hitchens le dit, quand vous êtes
17
parent, « votre cœur bat dans le corps de quelqu’un d’autre  ».
Les bébés s’attachent aussi, cherchant toujours à se rapprocher des
adultes qui s’occupent d’eux. Dès la naissance, l’attachement est la quête de
notre propre entièreté : être en sécurité, et garder en sécurité cette partie de
nous-même qui vit dans le corps d’une autre personne. L’attachement, c’est
l’amour.
Lorsque nous atteignons l’adolescence, notre mécanisme d’attachement
passe de l’attachement parental à l’attachement entre pairs, puis à des
relations romantiques. Certains comportements d’attachement que nous
adoptons activent naturellement le mécanisme d’attachement, que ce soit
entre un nourrisson et une personne qui s’occupe de lui ou entre deux
adultes qui tombent amoureux  : contact visuel, sourire, caresse du visage,
câlin, ce genre de choses. Mais avec le passage à l’adolescence, le
comportement sexuel s’ajoute au répertoire des comportements
d’attachement.
Les recherches en imagerie cérébrale ont montré que l’activité des
systèmes mésolimbiques (motivation / appréciation / apprentissage du
chapitre 3) lors d’une expérience d’attachement parental sans souffrance est
extrêmement similaire à celle d’un attachement romantique – et ils sont
particulièrement sensibles à l’activation de l’appréciation, plutôt que sur
celle de la motivation (désir 18). En même temps, c’est à cause de
l’attachement que nous ressentons des «  chagrins d’amour  ». Quand nous
sommes tout bébés, notre vie dépend littéralement de l’arrivée d’adultes qui
s’occupent de nous quand nous en avons besoin. En tant qu’adultes, ce n’est
plus vrai, mais ça, notre corps ne le sait pas. Notre corps est pratiquement
sûr que si notre objet d’attachement ne revient pas, nous allons mourir.
Alors oui, l’amour fait du bien – « Je suis entière ».
Sauf quand ça fait si mal que vous avez l’impression de mourir – « Je
suis brisée. »
Tout ça à cause de quoi ? De l’attachement.

Tomber amoureuse : la science


qui explique ce phénomène
En pratique, les humains tissent des liens sociaux significatifs avec de
nombreuses personnes, et notre sentiment d’entièreté, de plénitude, émerge
à la fois de notre propre sentiment intérieur de plénitude et de nos liens avec
nos amis et notre famille, ainsi qu’avec notre partenaire principal. Mais
l’expérience particulière de «  tomber amoureux  » ou de «  se lier  » à une
personne spécifique est devenue typique dans notre culture de ce qui est
considéré comme «  l’amour  ». Si vous avez déjà eu un enfant ou êtes
tombée amoureuse, vous reconnaîtrez la description de l’attachement, cette
suite de marqueurs comportementaux qui caractérisent le processus
d’attachement.

La quête de proximité
Vous vous sentez liée à l’autre personne, au point de vous sentir bien avec
elle (appréciation) et de désirer (motivation) être aussi proche d’elle que
possible. La plupart des parents ont fait l’expérience de cette recherche de
proximité, notamment sous la forme de petits doigts d’enfant qui glissent
sous la porte des toilettes, alors que vous essayez juste de passer
trente  secondes consécutives tranquille à faire pipi. Dans les relations
amoureuses, la proximité peut se traduire par l’utilisation de réseaux
sociaux, de SMS, d’appels téléphoniques et d’e-mails, mais aussi par le fait
de passer devant leur casier six fois par jour pour voir si la personne est là,
ou de quitter le travail plus tôt pour rentrer à la maison très vite.

Un refuge

Quand les choses tournent mal dans votre vie, vous voulez tout raconter à
votre objet d’attachement ; vous le sollicitez pour obtenir un soutien. Dans
les relations entre adultes, c’est le coup de téléphone à votre partenaire
après une longue et dure journée de travail. Lorsque votre réponse au stress
est activée, votre mécanisme d’attachement vous dit : « Apaisez votre stress
en vous liant à votre objet d’attachement.  » Il s’agit de la dynamique
« soigne et montre-toi ami », dont je parlerai plus tard.

L’anxiété de séparation

Lorsque la personne s’en va, vous ressentez de la douleur – elle vous


manque. Pour les adultes, c’est la solitude éprouvante lorsque votre
partenaire s’absente pour une conférence. Ça va aller pendant un certain
temps. et puis c’est trop, trop long, trop loin.

Une base sûre
Où que se trouve cette personne, c’est votre chez-vous émotionnel. Tout
adulte qui est déjà rentré chez lui après un voyage d’affaires et s’est vautré
sur le canapé à côté de son partenaire, pour lui tenir la main et établir un
contact visuel pendant qu’il parle de ce qui s’est passé pendant son absence,
en a fait l’expérience.

Un exemple concret

Le mari de ma sœur Amelia était professeur de musique au lycée, et tous les


deux ans, il accompagnait sa chorale en Europe pendant une semaine ou
deux. Et à chaque fois, pendant cette période, elle se traînait et éprouvait
une émotion qu’elle appelait « mal du pays », quand bien même c’était elle
qui était à la maison. Parce que son mari est son foyer émotionnel, sa base
sûre. Elle a donc ressenti une anxiété de séparation.
Le livre préféré d’Amelia est Jane Eyre. M. Rochester, le héros de cette
histoire, exprime son attachement et son anxiété de séparation lorsqu’il
s’adresse à Jane :

« J’éprouve quelquefois pour vous un étrange sentiment, surtout


lorsque vous êtes près de moi, comme maintenant : il me semble
que j’ai dans le cœur une corde invisible, fortement attachée à une
corde toute semblable et placée dans votre cœur ; si un bras de mer
et soixante lieues de terre doivent nous séparer, j’ai peur que cette
corde sympathique ne se brise et que la blessure ne saigne
intérieurement 19. »

L’attachement et le sexe : le côté obscur


Les mots de M.  Rochester font allusion au point de chevauchement de
l’attachement et du stress : les relations malheureuses.
Dans le chapitre précédent, j’ai mentionné les témoignages recueillis
par John Gottman auprès de femmes vivant dans des relations abusives, et
qui ont déclaré que certaines des meilleures relations sexuelles avaient
immédiatement suivi des actes de violence, ainsi qu’Isabel, citée dans Que
veulent les femmes  ?, et qui avait envie d’avoir des relations avec un ex
allergique à l’engagement, mais qui n’avait pas envie de son petit ami
actuel. Ces deux énigmes prennent tout leur sens lorsque nous comprenons
le sexe motivé par l’attachement, lorsque celui-ci est menacé.
L’attachement est une question de survie  ; les relations sont une
question de survie. Lorsqu’elles sont menacées, nous faisons tout ce qu’il
faut pour nous y raccrocher, car il n’y a pas d’enjeux plus grands que notre
lien avec nos objets d’attachement.
Je vais illustrer cette idée avec une des études scientifiques parmi les
plus sordides et troublantes que j’aie jamais lues – elle est troublante
précisément parce qu’elle nous montre à quel point l’attachement affecte le
bien-être émotionnel de mammifères comme nous. Dans le cadre de la série
d’études de Harry Harlow sur les «  mères monstrueuses  », menées au
milieu du XXe  siècle, son équipe de recherche a inventé des «  mères  »
mécaniques auxquelles s’attachaient les bébés macaques rhésus. Une fois
que les nourrissons étaient émotionnellement attachés aux mères
monstrueuses, les dispositifs mécaniques secouaient les nourrissons, les
piquaient ou leur jetaient de l’air froid pour les éloigner.
Et que faisaient les bébés singes lorsque leurs «  mères  » les
maltraitaient, les secouaient, les rejetaient ?
Ils couraient vers elles.
Dans un épisode de l’émission de radio This American Life, Deborah
Blum, autrice d’une biographie de Harlow, Love at Goon Park, résume
ainsi la situation :
Les bébés [macaques rhésus] sont revenus vers leurs mères et ont
fait tout leur possible pour que celles-ci les aiment à nouveau. Et ils
gazouillaient, ils caressaient, ils les épouillaient, et leur faisaient du
charme, exactement comme les bébés humains font avec leurs
mères. Et ils abandonnaient leurs amis. Ils avaient besoin de réparer
cette relation. C’était fondamental pour eux 20.

Leur réaction n’est pas surprenante. Lorsque nous nous sentons en


détresse, notre objet d’attachement est notre refuge. Même – ou peut-être
surtout – si notre objet d’attachement est la source de notre détresse. Et tout
comme les bébés macaques rhésus utilisaient des comportements
d’attachement pour réparer leurs relations avec leurs mères monstrueuses,
les femmes dans des relations instables peuvent utiliser le sexe comme un
comportement d’attachement pour construire ou réparer l’attachement.
Ainsi, ce qu’Isabel « voulait », pour répondre à la question posée par le titre
du livre de Bergner, c’était la proximité avec son objet d’attachement, face
à l’anxiété de séparation. Les hormones dopamine et ocytocine se sont
comportées en chipies avec son système de motivation, la poussant vers
l’objet d’attachement qui ne s’engagerait jamais envers elle et qui, par
conséquent, activait de façon chronique le besoin de refuge de son système
d’attachement 21. C’est le côté sombre de l’association du stress et de
l’attachement : le sentiment « je suis perdue », qui nous motive à stabiliser
notre lien avec notre objet d’attachement – «  je suis à la maison  ». La
thérapeute et autrice Sue Johnson appelle cela le « sexe réconfortant », un
22
rapport sexuel motivé par votre désir de prouver que vous êtes aimée .
Dans une relation avec un homme gentil, attentif et engagé, le feu du
«  je suis perdue  » d’Isabel ne brûle pas – ce qui est une bonne chose  ! –
mais ne peut donc pas enflammer le désir. Ce qui n’est pas très agréable.
La solution ? Isabel doit faire avancer l’intrigue.
L’attachement et le sexe : le sexe qui fait
avancer l’intrigue
Nous ne voyons jamais Jane Eyre et M.  Rochester faire l’amour, mais
j’imagine que ce serait comme les scènes de sexe dans les romans d’amour
modernes, qui métaphorisent les relations pénis-vagin en termes de « quête
de la plénitude ». Comme si le pénis d’Edward Rochester était la clé de la
serrure du vagin de Jane, qui ouvre la porte de son cœur. Les romans
d’amour modernes regorgent de ce genre de trucs.
Je suis une lectrice de romans d’amour et de romances. Je travaille
beaucoup sur la question de la violence sexuelle, donc j’ai besoin de happy
ends et de « et ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants » dans ma
vie, et c’est grâce aux romances que je peux en lire. C’est un genre écrit
principalement par des femmes, pour des femmes, et qui s’intéresse à la
satisfaction sexuelle et relationnelle des femmes. C’est pourquoi de
nombreux romans d’amour du XXIe  siècle ne ressemblent en rien à Jane
Eyre ou Orgueil et préjugés. Ils contiennent des scènes de sexe. Beaucoup
de sexe. Certains ont tellement de sexe qu’ils sont en fait du « Porno pour
Dames ». Mais les meilleurs romans d’amour sont ceux où le sexe n’est pas
seulement gratuit, juste pour le plaisir. Dans les meilleures romances, le
sexe fait avancer l’intrigue, aidant le héros et l’héroïne à progresser, contre
toute attente et face à de nombreux obstacles, grâce à l’un des marqueurs
comportementaux de l’attachement.
Pour ne citer qu’un exemple, l’héroïne Des fleurs dans la tourmente de
Laura Kinsale, ne cesse de tenter de quitter le héros et de retourner auprès
de son père, mais à mesure qu’elle s’éloigne, elle se sent «  plus mal à
chaque kilomètre  » (anxiété de séparation) «  jusqu’à ce qu’elle tourne le
dos à son père et retourne auprès du héros (quête de proximité) et le
retrouve, avec, hum, « une vigueur brute 23 ».
Les romans d’amour racontent l’histoire d’un attachement stressé,
passant de « je suis perdue » à « je suis à la maison », et le sexe joue un rôle
prépondérant en tant que comportement d’attachement.
J’ai discuté à plusieurs occasions de cette notion du sexe qui fait
avancer l’intrigue avec mes amies, et chaque fois, leurs yeux s’arrondissent
et elles disent un truc du genre : « Et une fois mariée, l’histoire est terminée.
Fin heureuse, plus d’intrigue. Oh. »
Eh bien… oui. Mais ça rend la solution évidente  : il faut ajouter de
l’intrigue !
Donc, si vous vous dites  : «  Oh, merde, ça veut dire que seules les
relations nouvelles ou dysfonctionnelles rendront le sexe excitant  », il y a
une bonne nouvelle – et aussi une mauvaise nouvelle, puis une autre bonne
nouvelle.
La première bonne nouvelle, c’est que le sexe dont vous avez souvent
envie n’est pas un sexe qui vous fait du bien – souvenez-vous, aimer
(l’appréciation) et vouloir (la motivation) ne sont pas la même chose. Il
s’agit de «  sexe réconfortant  », «  apaisant, mais non érotique  », par
opposition au «  sexe scellé  », qui est «  érotique, mais vide 24  ». Le sexe
réconfortant peut être ressenti comme un soulagement, car il atténue votre
peur. Mais ne confondons pas soulagement et plaisir.
Par exemple, imaginez que vous ayez besoin de faire pipi, vraiment,
vraiment très envie, et que vous deviez attendre et attendre, et que vous
fassiez enfin pipi, et que l’expérience soit presque agréable parce que c’est
un soulagement vraiment intense. Le sexe pour faire avancer l’intrigue dans
des relations instables, c’est comme ça. On n’est pas à l’aise quand on
éprouve de la peur et de l’instabilité dans sa relation, tout comme on n’est
pas à l’aise quand on a super envie de faire pipi. On ne se sent soulagée que
lorsque l’on peut enfin faire quelque chose pour y remédier.
Et ne voulons-nous pas que nos relations et notre vie sexuelle soient
plus qu’un simple… soulagement ?
La bonne nouvelle, c’est donc que si vous n’avez plus ce genre d’envie
intense de sexe dans votre relation, ce n’est pas une grande perte.
La mauvaise nouvelle, c’est que, oui, pour la plupart, nous aurons plus
facilement envie de sexe, pour ce que cela vaut, lorsque nos relations sont
instables – nouvelles ou menacées, dans la réalité ou votre imagination.
Mais la deuxième bonne nouvelle, c’est qu’il existe un tas d’études
impressionnantes menées sur les personnes qui ont relations sexuelles
réussies ensemble durant plusieurs décennies. La clé consiste à être « juste
assez en sécurité  ». Je parlerai de ces recherches au chapitre  7, mais
intéressons-nous d’abord aux différences individuelles qui influencent notre
gestion de l’attachement dans nos relations.
Quand Laurie m’a parlé du fiasco pendant ses vacances et de sa terrible crise de larmes, j’ai
demandé :
« Que s’est-il passé après votre partie de jambes en l’air enflammée ? »
Elle m’a répondu :
« J’ai dormi pendant trois heures. Ce qui était presque aussi bien que le sexe. J’aurais aimé
ne pas avoir à pleurer pour que ça arrive.
– J’ai l’impression que pleurer t’a permis d’évacuer le stress accumulé et qui appuyait sur
tes freins, ce qui a libéré l’accélérateur.
– Hum. Donc tu dis que pour avoir davantage de relations sexuelles, je devrais pleurer
encore plus que je ne le fais déjà ?
– On dirait bien que tu as besoin de plus d’occasions de décharger davantage de stress, ai-je
nuancé. D’autant plus que tu n’as pas beaucoup de marge de manœuvre pour te débarrasser de
tes facteurs de stress. Et Johnny est l’objet d’attachement, n’est-ce pas ? C’est vers lui que tu te
tournes quand tu es stressée, et ton corps veut totalement donner et recevoir de l’affection avec
lui, pas vrai ?
– Complètement.
– Alors, puis-je faire une suggestion ?
– Oui, je t’en prie. Je ferais n’importe quoi.
– Arrêtez. D’avoir. Des. Relations. Sexuelles. Faites-en une règle : pas de sexe pendant…
oh, quoi, un mois  ? Tu as clairement envie de donner et recevoir de l’affection de ton objet
d’attachement, mais le stress de ton quotidien te freine, et le fait même de t’inquiéter de savoir
si tu ne devrais pas plutôt être en train de faire l’amour ne fait qu’empirer les choses. Alors, en
attendant de trouver des stratégies plus efficaces pour gérer ton stress, arrêtez tout contact
physique sexuel.
– Ça n’a pas de sens. Comment vais-je améliorer notre vie sexuelle en mettant fin à notre
vie sexuelle ?
– Tu n’y mets pas fin. Tu modifies le contexte.
– Ce qui n’a toujours aucun sens pour moi. On part en vacances ensemble et on se fâche ;
je pleure sur l’épaule de Johnny et on s’envoie en l’air.
– Ma chère amie, je ne suis pas responsable du contexte qui te convient – et toi non plus.
Mais le dénominateur commun ici, c’est le stress sous toutes ses formes, y compris – et surtout
– le stress qui appuie sur tes freins. Alors, arrête de stresser en pensant que ton stress est en train
de te freiner. Accepte-le. Accueille-le. C’est tout à fait normal. Tu es juste dans un contexte
pourri, alors change le contexte et vois ce qui se passe. »
Elle a soupiré, puis est rentrée chez elle et en a parlé à Johnny. Ils ont tenté le coup. Je
raconterai ce qui s’est passé au chapitre  5. Pour l’instant, je dirai simplement qu’un moyen
efficace de changer le contexte consiste à éliminer le stress de l’anxiété de performance qui
surgit quand on se sent obligée de faire l’amour.
Le style d’attachement
Les personnes auxquelles nous nous attachons à l’âge adulte et la manière
dont nous nous y attachons – notre style d’attachement – sont déterminées
par la manière dont nous avons été élevés. Au sens le plus large, nous
pouvons décrire les styles d’attachement comme étant soit sécures, soit non
sécures. Rappelez-vous que la vie des nourrissons dépend littéralement des
adultes qui s’occupent d’eux, et devoir gérer efficacement un éventuel
abandon est donc un sérieux problème pour les bébés. Nous nous attachons
en toute sécurité lorsque les adultes qui s’occupent de nous (généralement
nos parents) sont là pour nous quand nous avons besoin d’eux. Nous
pleurons, ils rappliquent. Nous nous retournons, ils sont là. Aucun adulte
n’est toujours là de manière infaillible, ou quoi qu’il arrive, mais lorsqu’ils
sont là de manière suffisamment fiable, nous nous attachons en toute
sécurité. Dans ces conditions, notre cerveau apprend que ces adultes qui
prennent soin de nous reviendront après leur départ  ; ils ne nous
abandonneront pas.
Les enfants qui ont un attachement sécure avec les adultes qui
s’occupent d’eux s’attacheront probablement de manière sécure aussi, à
l’âge adulte, à leur partenaire romantique, tandis que les enfants qui ne
développent pas d’attachement sécure avec les adultes qui s’occupent d’eux
s’attacheront probablement de manière non sécure, à l’âge adulte, à leur
partenaire romantique.
Mais si les parents sont soumis à un stress extrême, ont beaucoup
d’autres enfants à charge, ont une dépendance prononcée à la drogue ou à
l’alcool, ou souffrent d’un trouble de l’humeur ou de la personnalité, alors
ils ne seront pas nécessairement présents, physiquement ou
émotionnellement, lorsque l’enfant aura besoin d’eux. Lorsque les adultes
qui s’occupent de l’enfant sont moins fiables, nous nous attachons à eux de
manière peu sécure. Environ la moitié des personnes aux États-Unis
développent un style d’attachement sécure, et l’autre moitié un style
d’attachement non sécure 25.
L’attachement non sécure peut être envisagé comme relevant de deux
stratégies différentes  : l’anxiété et l’évitement. Dans le cas d’un
attachement anxieux, une personne gère le risque de voir l’objet de son
attachement l’abandonner en s’accrochant désespérément à lui. Les enfants
anxieux deviennent jaloux et ressentent une détresse profonde lors de la
séparation, tout comme les adultes anxieux. Les personnes ayant un style
d’attachement évitant (ou « détaché ») gèrent le risque que l’objet de leur
attachement les abandonne en ne s’attachant pas véritablement à quiconque
en particulier. Les enfants évitants n’ont pas de préférence pour leurs
parents par rapport à d’autres adultes  ; les adultes évitants, selon les
recherches, sont plus susceptibles d’approuver les relations sexuelles
anonymes et de s’y livrer.
Pour vous donner une idée plus précise de ces différents styles, listons
les types d’affirmations que les chercheurs utilisent pour évaluer le style
d’attachement chez les adultes 26.

Attachement sécure

Je suis à l’aise pour partager mes pensées et sentiments intimes avec


mon partenaire.
Je redoute rarement que mon partenaire ne me quitte.
Je suis vraiment à l’aise dans une relation étroite avec des partenaires
romantiques.
Ça m’aide de me tourner vers mon partenaire romantique en cas de
besoin.

Attachement anxieux

J’ai peur de perdre l’amour de mon partenaire.


Je redoute souvent que mon partenaire ne veuille pas rester avec moi.
Je crains souvent que mon partenaire ne m’aime pas vraiment.
J’angoisse souvent à l’idée que mes partenaires romantiques ne se
soucient pas de moi autant que je me soucie d’eux.

Attachement évitant

Je préfère ne pas montrer à un partenaire ce que je ressens au fond de


moi.
Je trouve difficile de me laisser aller à dépendre de partenaires
romantiques.
Je ne suis pas à l’aise pour m’ouvrir à des partenaires romantiques.
Je préfère ne pas être trop intime avec des partenaires romantiques.

Bon, si vous deviez deviner qui mène une vie sexuelle plus épanouie,
parieriez-vous sur les personnes qui ont un style d’attachement sécure, ou
non sécure  ? Bien entendu, les personnes ayant un attachement sécure. Et
de loin.
Une étude réalisée en 2012 sur la relation entre le sexe et l’attachement
révèle que l’attachement sécure est associé à toutes les dimensions
imaginables du bien-être sexuel.
Les personnes ayant un attachement sécure éprouvent davantage
d’émotions positives pendant les rapports sexuels, qui sont plus fréquents,
jouissent de niveaux d’excitation et d’orgasme plus élevés et partagent une
meilleure communication au sujet des rapports sexuels 27. Elles sont en outre
plus susceptibles de donner et de recevoir leur consentement et d’adopter
des pratiques sexuelles plus sûres, notamment le recours à la contraception ;
elles apprécient davantage les rapports sexuels, sont plus attentives aux
besoins de leurs partenaires, ressentent un lien entre le sexe et l’amour, sont
plus disposées à avoir des rapports sexuels dans le cadre d’une relation
sérieuse et ont davantage confiance en elles sur le plan sexuel. Les
personnes qui ont un attachement sécure ont la vie sexuelle la plus saine et
la plus agréable qui soit.
Les personnes ayant un style d’attachement anxieux sont les plus
susceptibles d’avoir des relations sexuelles « réconfortantes » (c’est-à-dire
d’utiliser le sexe comme comportement d’attachement), où le sexe peut être
intense sans pour autant être agréable. Les personnes anxieuses se
préoccupent davantage du sexe, mais elles associent également la qualité
des relations sexuelles à la qualité de la relation dans son ensemble. Elles
sont plus susceptibles de ressentir de la douleur lors des rapports sexuels, en
particulier dans les relations les moins intimes. Un tel style d’attachement
se traduit également par des difficultés à adopter des pratiques sexuelles
plus sûres  : elles sont moins disposées à utiliser des préservatifs, plus
susceptibles de consommer de l’alcool ou d’autres stupéfiants avant les
rapports sexuels et, sans surprise, présentent des taux plus élevés d’IST et
de grossesses non désirées. Les personnes avec un attachement anxieux
ressentent plus de douleur, d’anxiété et s’exposent à plus de risques pour
leur santé.
Les personnes ayant un style d’attachement non sécure, qu’il soit
anxieux ou évitant, sont plus susceptibles d’être impliquées dans un des
deux rôles d’une relation sexuelle coercitive. Les personnes ayant un
attachement évitant commencent à avoir des relations sexuelles plus tard
dans la vie, ont des relations sexuelles moins fréquentes, avec moins de
comportements non sexuels. Elles ont une attitude plus positive à l’égard du
sexe en dehors des relations sérieuses, multiplient facilement les coups d’un
soir et sont plus susceptibles d’avoir des relations sexuelles uniquement
pour répondre à une attente sociale plutôt que parce qu’elles en ont
vraiment envie. Les personnes qui ont un attachement évitant considèrent le
sexe comme étant moins intégré à leur vie et à leurs relations.
En un mot : un attachement non sécure appuie sur les freins. Nous ne
pouvons pas comprendre le bien-être sexuel sans comprendre l’attachement,
et nous ne pouvons pas maximiser notre propre bien-être sexuel sans
apprendre à gérer l’attachement dans nos relations.

Gestion de l’attachement :
vos sentiments tels un hérisson endormi
Le style d’attachement est un facteur incontournable de la réponse sexuelle
et de la satisfaction au sein de la relation – et il varie non seulement d’une
personne à l’autre, mais aussi d’une relation à l’autre 28. Et il peut évoluer 29.
Toutefois, ces schémas émotionnels profonds ne sont pas toujours bien
malléables, et peuvent nécessiter une thérapie. De nombreuses personnes
peuvent néanmoins faire beaucoup de progrès en prenant mieux conscience,
et sans jugement, de leurs propres réactions émotionnelles et en lisant
d’excellents ouvrages sur le sujet. Par exemple, Love Sense  : The
Revolutionary New Science of Romantic Relationships de Sue Johnson (non
traduit à ce jour), qui a développé l’EFT pour les couples, la «  thérapie
centrée sur les émotions  » (Emotionally Focused Therapy), aborde
ouvertement la relation de l’attachement et au sexe. Mais les couples
semblent avoir du mal à discuter des difficultés sexuelles de manière
concrète. Nous sommes tous si sensibles et susceptibles à ce sujet, si
effrayés à la fois de blesser l’autre et de ne pas répondre à ses attentes, que
nous avons besoin d’un ensemble de compétences particulières pour nous
aider à être aussi tendres et bienveillants l’un envers l’autre que nécessaire
pour surmonter cette susceptibilité.
J’en suis venue à imaginer la communication autour du sexe et de
l’amour comme un modèle de gestion des émotions de type «  hérisson
endormi  ». Voici comment cela se passe  : considérez vos sentiments
difficiles à l’égard du sexe comme des hérissons endormis que vous
découvrez dans des endroits inopportuns de votre maison. Si vous trouvez
un hérisson endormi sur le fauteuil dans lequel vous alliez vous asseoir, il
convient de :
1. Découvrir le nom du hérisson. « En ce moment, je me sens… jalouse
/ en colère / blessée / etc. » C’est simple, même s’il y a en général plusieurs
sentiments simultanément. Ce qui est normal.
2.  L’accueillir sereinement. Ne le fuyez pas, ne le jugez pas, ne le
couvrez pas de honte et ne vous fâchez pas contre lui. Restez tranquille
avec lui, comme s’il était un invité bienvenu.
3. Écouter ses besoins. La question à poser est la suivante : « Qu’est-ce
qui va être utile ? » Si vous ressentez de la peur ou de la colère, comment
pourriez-vous gérer la menace perçue ? Si vous ressentez de la tristesse, de
la douleur ou du chagrin, comment pourriez-vous guérir de cette
souffrance ? Il n’y aura pas toujours une action concrète que vous pourrez
entreprendre, mis à part laisser ce sentiment s’exprimer et aller jusqu’au
bout de son cycle. Et n’oubliez pas que ce n’est ni la faute ni l’obligation de
votre partenaire  ; son aide est entièrement volontaire et vous donne la
chance d’exprimer votre gratitude pour son soutien.
4.  Exprimer le sentiment et le besoin. Présentez ce sentiment à votre
partenaire. «  Je ressens x, lui dites-vous, et je pense que ce qui aiderait,
c’est y. » Par exemple : « Je me sens menacée par le temps que tu passes
avec ta collègue, et j’aurais besoin d’une sorte de stratégie qui me
rassurerait. » Ou encore : « Je souffre toujours à cause de cette fois où tu as
fait x, et ce dont j’ai besoin, c’est de temps pour traverser ce tunnel
émotionnel afin de pouvoir parvenir à la lumière tout au bout. »
Se mettre en colère contre le hérisson ou en avoir peur ne vous aidera
pas, ni vous, ni le hérisson, et vous ne pouvez pas vous contenter de le
balancer sur les genoux de votre partenaire en criant «  HÉRISSON
ENDORMI ! » et vous attendre à ce qu’il gère toutes ses épines piquantes.
C’est votre hérisson. Plus vous resterez calme lorsque vous le manipulerez,
moins vous risquerez de vous blesser ou de blesser autrui.
L’image du hérisson illustre également l’importance de faire des
difficultés un vrai sujet de partage et de coopération pour votre partenaire et
vous-même, plutôt qu’un problème que l’un de vous doit «  régler  » seul
afin que l’autre puisse être satisfait. Vous devez faire face ensemble à cette
difficulté partagée avec gentillesse et compassion.

CHOISISSEZ DE GUÉRIR
Une amie à moi a décidé de mettre fin à une relation désastreuse et a déclaré (sur
Facebook) : « Je choisis de ne plus souffrir. [Ex-partenaire] ne peut plus me faire de mal. »
La deuxième phrase est 100 % vraie et mérite d’être célébrée. Mais la première phrase n’a
aucun sens du point de vue de l’attachement et de la résolution complète du cycle. Lorsque
vous quittez une mauvaise relation, vous avez toute cette souffrance, cette rage, ce chagrin
et même cette peur accumulés en vous, et il faut pouvoir les évacuer en toute sécurité.

Il est plus logique de dire  : «  Je choisis de laisser cette blessure guérir.  » La guérison
implique toujours de la douleur  : si vous vous cassez le doigt, vous avez mal, mais de
moins en moins à mesure que vous guérissez. Il en va de même pour la guérison d’une
blessure émotionnelle. Vous ne pouvez pas décider que votre cœur brisé ne vous fera pas
mal, pas plus que vous ne pouvez décider qu’un os brisé ne vous fera pas mal. Mais vous
pouvez reconnaître que la douleur fait partie du processus de guérison, et vous pouvez faire
confiance à votre cœur pour guérir, tout comme vous faites confiance à vos os pour guérir,
en sachant qu’il vous fera progressivement de moins en moins mal au fil de votre
rétablissement.

Survie de l’être social


Ce qui m’amène à une autre réponse au stress appelée « soigne et montre-
toi ami  », que l’on peut considérer comme le mariage du stress et de
l’attachement 30. En tant qu’espèce ultrasociale, notre survie dépend non
seulement de notre capacité individuelle à nous battre, fuir ou nous figer,
mais aussi à coopérer avec notre tribu, afin que nous puissions tous nous
protéger mutuellement. Les femmes sont peut-être plus susceptibles que les
hommes de faire appel à cette réponse au stress «  d’affiliation  », en
réagissant aux menaces potentielles par l’établissement de relations
affectueuses avec autrui. Comme toujours, on ne sait pas précisément dans
quelle mesure cette différence est innée ou acquise, mais l’écart commence
à se creuser tôt : les fillettes de 18 mois étant déjà plus susceptibles que les
garçons du même âge d’approcher, plutôt que d’éviter, un parent qui fait des
choses effrayantes 31.
Là où le stress et l’attachement se chevauchent, le message de votre
Anneau Unique émotionnel est « je suis perdue ! » et lorsque vous échappez
au lion et courez vers votre objet d’attachement, le message est « je suis à la
maison  ». Si vous vous êtes déjà retrouvée à consulter de manière
obsessionnelle vos e-mails lorsque vous êtes stressée, à faire défiler sans fin
vos réseaux sociaux, à envoyer des SMS à votre partenaire juste pour lui
dire « Salut », à appeler tous vos amis les uns après les autres, ou, comme
Elle dans La revanche d’une blonde, à courir faire une manucure d’urgence,
vous avez peut-être alors fait l’expérience de la réponse au stress « soigne et
montre-toi ami  ». Se sentir entourée et s’occuper des autres sont deux
comportements qui s’inscrivent dans votre réponse au stress comme
« éléments d’achèvement du cycle ».
Mais dans notre culture moderne, il y a une contradiction inhérente aux
remèdes sociaux contre le stress. D’une part, le fait d’être entouré d’autres
personnes est souvent un élément essentiel pour permettre à notre réponse
au stress d’aller au bout de son cycle. D’autre part, nous mettons un frein à
notre réaction au stress, en l’inhibant nous-même, afin de garder un
comportement socialement acceptable et approprié, et ne pas mettre les
autres mal à l’aise. Nous nous accrochons à notre réponse incomplète au
stress afin de continuer de nous sentir en sécurité au sein de notre tribu.
Et, bien sûr, cette contradiction est plus prononcée pour les femmes, qui
sont traditionnellement nommées, dans notre culture, «  gestionnaires de
relations  ». Lorsque les choses se compliquent dans une relation
hétérosexuelle, il incombe souvent à la femme de maîtriser sa propre
réponse au stress, afin de créer un espace pour que l’homme puisse
éprouver pleinement ses Sensations. En d’autres termes, s’il y a du stress
dans une relation, les règles culturelles rendent la femme plus vulnérable
que l’homme, et il est probable que cette situation ait un impact sur son
intérêt et sa réponse sexuelle. Et comme elle doit retenir son stress, pour
que son partenaire puisse libérer le sien, elle risque davantage de rester
bloquée dans son stress, alors que lui traverse le sien du début à la fin.
Pour moi, le coupable, c’est Charles Dickens. Prenez le personnage de
Mme  Cratchit dans Un conte de Noël. Son fils, Tiny Tim, meurt, et elle
raconte à ses autres enfants qu’elle pleure à cause de « la couleur de cette
étoffe » qui lui « fait mal aux yeux », et qu’elle ne veut pas « laisser voir »
que ses « yeux sont fatigués » à son mari. Quand j’étais petite, je pensais,
comme Dickens voulait que je le fasse, que Mme  Cratchit était si
courageuse. Mais aujourd’hui, j’en sais bien plus au sujet du cycle de
réponse au stress, et j’ai envie de hurler : « Mais Madame ! Votre fils vient
de mourir, ce n’est pas être faible que de pleurer  ! Et vos autres enfants
méritent de savoir que c’est normal d’être triste ! »
Faire partie de la tribu ne remplace pas les Sensations qui
accompagnent la résolution complète du cycle. Nous devons libérer la
réponse au stress, boucler le cycle, afin que notre corps puisse aller de
l’avant. La «  maison  » est l’endroit –  physique et émotionnel  – où nous
pouvons évacuer le stress sans être jugés, ni humiliés, ni entendre que nous
devrions simplement nous détendre ou penser à autre chose. La « maison »,
c’est l’endroit où nous jouissons de la «  présence aimante  » de notre
partenaire. Les personnes qui écoutent avec une présence aimante sont
calmes, attentives et en harmonie avec l’autre personne. Dans les plus belles
relations, nous sommes autorisés à vivre toutes les formes de stress –
  colère, peur, repli sur soi  – et à ressentir la présence aimante de notre
partenaire qui reste tranquille et calme à travers la tempête.
Chaque culture a ses propres règles fixant le degré d’émotions approprié
à chaque situation. Mais notre culture a créé un monde social dans lequel il
n’y a presque aucun endroit où nous pouvons nous relier aux autres tout en
éprouvant toute la palette de notre intensité émotionnelle. Nombre d’entre
nous préfèrent parfois partager une présence aimante grâce à des pratiques
spirituelles ou en compagnie de nos animaux domestiques plutôt qu’avec
nos partenaires, qui sont englués dans leur propre stress. Dieu et votre chien
ne vous jugent pas et ne vous en veulent jamais d’avoir des sentiments,
mais aucun d’entre eux ne peut faire l’amour avec vous.
Le sexe est un comportement d’attachement adulte. Lorsque votre
attachement est menacé ou lorsque vous et votre partenaire partagez un
facteur de stress, le sexe peut être un moyen puissant et agréable de vous
rapprocher face aux signaux «  je suis perdu(e)  », afin que vous puissiez
retrouver le chemin de la maison. Ensemble. Mais une telle expérience ne
sera agréable que si vous pouvez vous donner l’un l’autre du temps et de
l’espace pour vos Sensations.

L’eau de la vie

Je suis en danger / Je suis en sécurité


Je suis brisée / Je suis entière
Je suis perdue / Je suis à la maison

À mesure que vous avancez dans ces processus biologiques, votre état
mental évolue, ce qui, à son tour, modifie la manière dont votre cerveau
réagit ou non à des contextes en les considérant comme liés au sexe ou à
des sensations comme étant sexuellement agréables.
Chez la plupart des gens, le stress appuie sur le frein, mais chez
d’autres, il active l’accélérateur – tout le monde est différent. Mais
pour tout le monde, le stress modifie le contexte dans lequel vous
vivez votre réponse sexuelle, ce qui change votre perception des
sensations sexuelles.

La clé pour gérer le stress de sorte qu’il n’interfère pas avec le plaisir
sexuel, c’est d’apprendre à aller jusqu’au bout du cycle – sortir de sa
paralysie, fuir le prédateur, vaincre l’ennemi. Puis célébrer votre réussite,
comme les paillettes qui retombent doucement au fond d’une boule à neige.
Le sexe est un comportement d’attachement qui renforce le lien social
entre adultes. Il prend parfois la forme d’une relation sexuelle passionnée et
joyeuse entre deux personnes qui tombent amoureuses l’une de l’autre. Il
peut parfois prendre la forme d’une relation sexuelle désespérée et
passionnée entre deux personnes dont l’attachement est menacé. De façon
contre-intuitive, c’est lorsque l’attachement est le plus sécure et le plus
stable – lorsque votre relation n’est que satisfaction sans aucun souci ou
«  intrigue  » – que votre excitation sexuelle peut être reléguée au second
plan.
Le stress et l’amour (sous forme d’attachement) peuvent être complices
du sexe. Le sexe renforce les liens entre les partenaires, aide chacun à se
sentir protégé, aimé et soutenu dans un monde où nous ne sommes pas
toujours en sécurité, où parfois notre seul bouclier contre le chaos et la
terreur est la famille que nous avons choisie.
Les femmes me racontent leurs histoires, et je garde ces histoires dans une bibliothèque
mentale. Une étagère de cette bibliothèque déborde  : celle qui abrite les histoires de violence
sexuelle. Comme toutes les autres, ce sont des histoires de découverte impressionnantes, mais
ce sont les plus sombres, celles qui révèlent à quel point le monde peut être cruellement
indifférent à l’autonomie sexuelle des femmes.
L’histoire de Merritt est l’une d’entre elles. La version courte  : elle était présidente de
l’alliance homo-hétéro universitaire, très fière, et lui, elle l’apprendra plus tard, avait parié avec
ses amis qu’il réussirait à la « convertir aux mecs ».
C’est écœurant, je sais. J’aimerais que personne n’ait d’histoires pareilles à raconter. Mais
ça arrive bel et bien.
Pendant l’agression, son corps est passé en mode survie – elle s’est figée. Et jusqu’à ce
qu’elle entende parler de la réaction au stress de ses freins, elle n’avait pas compris pourquoi
elle ne s’était pas battue, ne s’était pas enfuie ou n’avait pas donné un coup de pied dans les
couilles du type. Depuis ce jour, elle peine à faire confiance à son corps, et son corps peine à
fonctionner sainement, privé de sa confiance.
Lorsqu’une personne subit un traumatisme, c’est comme si un individu se glissait dans son
jardin et arrachait toutes les plantes qu’elle avait fait pousser avec tant de soin et d’attention. On
ressent de la rage. Du chagrin pour le jardin tel qu’il était avant. Et la crainte qu’il ne refleurisse
jamais.
Mais il va refleurir. C’est ce que font les jardins.
Cette métaphore du jardin parlait à Merritt. Un jour, elle m’a arrêtée dans la rue, téléphone
à la main, pour me dire :
« Je pensais au jardin, et il fallait que je te lise ce truc que ma compagne a trouvé ! »
Le texte disait :
« L’eau de la vie est ici.
32
Je la bois. Mais il m’a fallu faire ce long chemin pour le savoir  ! »
« “L’eau de la vie”, m’a-t-elle dit. C’est un poème de Rûmî sur ce type qui perd tout et part
accomplir une quête et comme pour Dorothy dans Le Magicien d’Oz, il avait le pouvoir depuis
le début. Et tu sais ce qu’est l’eau de la vie ?
– Dis-moi. »
(C’était loin d’être le truc le plus bizarre pour lequel on m’ait jamais arrêtée en pleine rue !)
Elle s’est exclamée :
33
« L’amour est l’eau de la vie  ! »

Je pense que c’est vrai. Si la sexualité des femmes est un jardin, je vois
l’amour comme la pluie et le stress comme le soleil, ce qui fait pousser le
jardin, à la fois en le nourrissant et en le stimulant. Il ne serait pas
souhaitable d’avoir trop de l’un ou de l’autre, mais avec le bon équilibre –
quand nous sommes « juste assez en sécurité » –, le jardin s’épanouit.
Certaines plantes ont besoin de beaucoup d’eau, d’autres moins  :
certains jardins sont ombragés, d’autres ensoleillés toute la journée.
Olivia, avec son accélérateur sensible, a un jardin baigné de soleil,
rempli de plantes qui se délectent de ses rayons – elle est presque un désert,
avec des arbres de Josué et des melampodium leucanthum, ces petites fleurs
sauvages qui s’épanouissent sous un ciel chaud et sans nuages. Mais même
pour elle, trop de bonnes choses peuvent faire flétrir et faner son jardin.
Camilla, en revanche, avec son accélérateur relativement insensible, a
une forêt montagnarde de fougères à larges feuilles et de mousse qui ont
besoin de moins de lumière et de plus de temps pour pousser en abondance.
Quant à Merritt, ses freins sensibles font flétrir son jardin sous la plus
légère des sécheresses.
Et Laurie a l’impression que son jardin a été soumis au réchauffement
climatique, privé de son climat naturel plus vite que ses plantes et elle-
même ne peuvent s’adapter, et elle craint que tout le jardin ne meure. Et elle
a peur qu’en perdant son jardin, elle perde aussi son partenaire.
Il est essentiel d’écouter et de respecter les messages fondamentaux que
votre corps essaie de vous envoyer – « je suis en danger », « je suis brisée »,
« je suis perdue » – pour créer le contexte favorable à l’épanouissement du
plaisir sexuel. Laisser du temps et de l’espace à votre corps pour qu’il
puisse traverser tout le cycle, évacuer le stress et se connecter entièrement
avec votre partenaire, c’est là une étape primordiale pour créer un contexte
qui vous assure un accès optimal au plaisir.
La culture occidentale ne rend pas ce travail facile, car elle construit des
murs de honte et de doute entre nous et notre moi profond, entre «  en
danger » et « en sécurité », entre « brisée » et « entière », entre « perdue » et
« à la maison ».
Dans la métaphore du jardin, les messages culturels sur la sexualité des
femmes sont très souvent les mauvaises herbes, envahissantes contre notre
propre volonté, mais que tout le monde doit affronter.
Et c’est le sujet du chapitre 5.
En résumé

Le stress réduit l’intérêt sexuel chez 80 à 90 % des personnes et le


plaisir sexuel chez tout le monde – même chez les 10 à 20  % de
personnes chez qui il augmente l’intérêt. Pour faire face à un stress,
il faut permettre à son corps d’aller au bout du cycle de réponse au
stress.

Le cerveau des survivantes de traumatismes apprend parfois à


traiter les stimuli « associés au sexe » comme des menaces, de sorte
que chaque fois que l’accélérateur est activé, les freins sont
également enfoncés. La pratique de la pleine conscience est une
stratégie basée sur des preuves scientifiques pour dissocier les freins
et l’accélérateur.

Dans le bon contexte, le sexe peut nous attacher émotionnellement


à de nouveaux partenaires ou renforcer les liens affectifs dans les
relations instables. En d’autres termes, le sexe et l’amour sont
étroitement liés dans notre cerveau – mais seulement dans le bon
contexte.

Le sexe qui vous rapproche de votre partenaire «  fait avancer


l’intrigue », par opposition au sexe gratuit, pour aucune autre raison
que le fait de pouvoir le faire. Pour avoir plus de sexe, de meilleure
qualité, donnez-vous une raison impérieuse de faire l’amour, un
objectif important vers lequel tendre.
CHAPITRE 5

Le contexte culturel
Une vie sexuellement positive dans un monde
sexuellement négatif
Quand Johnny et Laurie ont suivi mon conseil et ont cessé de faire l’amour, une chose
inattendue a éclos en Laurie.
Chaque soir, ils se câlinaient et se pelotonnaient quelques minutes avant de dormir, sans
l’angoisse gênante de se demander s’ils allaient avoir des relations sexuelles ce soir-là.
Un soir, dans ce silence, Laurie a demandé à Johnny pourquoi il aimait faire l’amour avec
elle.
Il a donné une réponse absolument excellente. Il a dit :
« Parce que tu es belle. »
Il n’a pas dit : « Parce que tu me plais » ou « Parce que tu es ma femme » ou « Parce que le
sexe est agréable » ou même « Parce que je t’aime ». Il a dit : « Tu es belle. » C’est une chose
parfaite à dire, notamment parce qu’il le pensait vraiment, complètement.
Laurie étant Laurie, elle a éclaté en sanglots. Jusqu’à ce moment, elle n’avait pas pris
conscience à quel point elle était critique envers elle-même au quotidien, à quel point elle avait
honte de ce corps qui avait changé depuis la naissance du bébé, comme si ces changements
reflétaient une faille morale de sa part, comme si une personne vraiment « bonne » ne laisserait
jamais son corps être altéré par un événement aussi dérisoire que d’avoir un bébé. Elle a
commencé à énumérer tout ce qui la complexait – ses seins tombants, son ventre mou, ses
cuisses couvertes de cellulite, les rides qui se creusaient dans sa bouche – une bouche qui
semblait râler en permanence maintenant. Et Johnny s’est mis à caresser chacune de ces parties
« imparfaites » de son corps, en disant : « J’adore ça, pourtant » et « mais c’est magnifique ».
À la fin, il l’a regardée dans les yeux et lui a dit :
«  Tu ne le vois vraiment pas. Tu crois vraiment que ces trucs te rendent moins belle.
Chérie, ton corps devient plus sexy chaque jour, simplement parce que c’est le corps de la
femme avec qui je partage ma vie. Ton ventre est notre ventre. J’en ai un aussi. Est-ce que tu
m’aimes moins pour ça ?
– Bien sûr que non.
– Exactement ! Bien sûr que non. »
Évidemment, ce qui s’est passé ensuite, c’est une relation sexuelle époustouflante – rendue
encore plus époustouflante par ces chuchotements qui répétaient : « On n’est pas censés faire
ça ! » Il s’avère que la pression de ce qu’elle est « censée » faire marche dans les deux sens.
Quand Laurie m’a parlé de ça, elle a commencé par me demander s’il était vrai que les
hommes n’étaient pas aussi gênés par les transformations du corps que les femmes le pensent.
« Oui, j’ai entendu cela à maintes reprises dans la bouche des hommes, lui ai-je répondu,
mais surtout de la part des hommes coparents. Ils ne remarquent pas les changements que nous
remarquons, ou ils les remarquent, mais ça ne change rien à ce qu’ils ressentent, ou ils les
remarquent et ils aiment sincèrement ça. Nous sous-estimons les hommes. »
Elle m’a donc raconté son histoire de «  tu es belle  », en soulignant que pendant toute la
durée de leur rapport sexuel, elle n’a jamais eu l’impression que c’était lui qui menait la danse.
Elle avait juste l’impression qu’il lui donnait de l’amour à un moment où elle en avait besoin.
Eh oui, être sexothérapeute, c’est vraiment le plus beau métier du monde quand on vous
raconte des histoires comme celle-ci.
Ce chapitre est consacré aux obstacles qui se dressaient sur le chemin de Laurie, sans
qu’elle en soit pleinement consciente, et à comment elle et Johnny ont réussi à les faire tomber.

Revenons à la métaphore du jardin : on naît avec une petite parcelle de


terre riche et fertile, unique en son genre. Votre cerveau et votre corps sont
le sol de ce jardin, et les différences individuelles au niveau de
l’accélérateur et des freins sont des caractéristiques importantes de votre
jardin inné, constitué des mêmes parties que celui de tout un chacun, mais
organisées différemment.
Votre famille et votre culture plantent les graines et s’occupent du
jardin, et vous apprennent à l’entretenir. Elles plantent les graines du
langage, des attitudes, des connaissances et des habitudes en matière
d’amour et de sécurité, de corps et de sexe. Et petit à petit, à l’adolescence,
vous commencez à assumer la responsabilité de l’entretien de votre propre
jardin.
En vous attelant à cette tâche, vous constatez peut-être que votre famille
et votre culture ont planté de belles espèces nourrissantes. Vous risquez
aussi de découvrir que votre famille et votre culture ont planté de sacrées
merdes toxiques dans votre jardin. Et tout le monde – même les familles qui
ont planté de belles plantes – devra faire face aux mauvaises herbes
envahissantes d’une culture sexuellement négative, marquée par la honte du
corps et la stigmatisation sexuelle. Ces mauvaises herbes ne se propagent
pas via les graines plantées par les familles, mais sous terre, par les racines
qui passent sous les clôtures, ou par-dessus les murs, comme des lianes de
sumac vénéneux, de jardin en jardin. Personne ne choisit de les voir, mais
elles sont pourtant bien présentes.
Donc, si vous voulez avoir un jardin sain, un jardin que vous choisissez,
vous devez avancer rangée par rangée et décider de ce que vous voulez
garder et nourrir… et ce que vous voulez arracher et remplacer par une
plante plus saine.
Ce n’est pas juste que vous deviez faire tout ce travail supplémentaire.
Après tout, vous n’avez pas choisi ce que votre famille et votre culture ont
fait pousser. Personne n’a demandé votre accord avant de commencer à
planter ces merdes toxiques. Personne n’a attendu que vous soyez en âge de
donner votre consentement pour demander : « Est-ce que tu serais d’accord
pour qu’on plante les graines de l’autocritique du corps et de la honte du
sexe  ?  » Il est fort probable qu’ils aient simplement planté les mêmes
espèces que celles de leur jardin à eux, et qu’il ne leur soit même pas venu à
l’esprit de planter autre chose.
Un soir d’octobre, devant une poutine et une bière, je discutais de ce
sujet avec Robin Milhausen, chercheuse canadienne sur le sexe, et elle m’a
dit cette phrase brillante : « Nous élevons les femmes pour qu’elles soient
sexuellement dysfonctionnelles, avec tous les messages à base de “non” que
nous leur adressons au sujet des maladies, de la honte et de la peur. Et puis
dès qu’elles ont 18  ans, elles sont censées être des stars du sexe,
multiorgasmiques et totalement désinhibées. Ça n’a aucun sens. Rien de ce
que nous faisons au sein de notre société ne prépare les femmes à ça. »
C’est exactement ça.
Le chapitre  4 abordait la manière dont le contexte du moment –  votre
sentiment de sécurité dans votre vie et de plénitude dans votre relation –
influe sur votre plaisir sexuel. Ce chapitre-ci traite du contexte à grande
échelle et à long terme – les années de messages à base de « non » – et des
schémas profonds de pensée et de ressenti qu’ils induisent, schémas qui
sont consolidés et réitérés au cours de plusieurs décennies de vie. Ces
modèles ne sont absolument pas innés, mais ils sont acquis très tôt. Vous
avez commencé à apprendre ces leçons bien avant d’être capable de faire
preuve d’esprit critique et de décider si vous en vouliez ou non. Et tout
comme vous les avez apprises, vous pouvez les désapprendre, si vous le
souhaitez, et les remplacer par de nouveaux modèles plus sains qui
renforcent la confiance en soi, la joie, la satisfaction et même l’extase.
Nous commencerons par les trois principaux messages culturels sur la
sexualité des femmes auxquels mes élèves se heurtent lorsque leurs idées
préconçues sur la sexualité sont remises en question par la science :
le Message Moral (vous êtes mauvaise) ;
le Message Médical (vous êtes malade) ;
le Message Médiatique (vous êtes inadaptée).

Rares sont ceux qui adhèrent pleinement à ces messages. Pourtant ils
sont là, empiétant sur nos jardins, et plus nous serons à même de voir ce
qu’ils sont vraiment, plus nous serons capables de les éliminer.
Ensuite, je parlerai de l’autocritique du corps. Cette question est
tellement ancrée dans la culture occidentale que la plupart des femmes
remarquent à peine à quel point elle est omniprésente et toxique. Elle est
tellement bien implantée, en fait, que beaucoup de femmes la jugent
réellement importante et bénéfique. Je vous parlerai des recherches qui
affirment le contraire. Si le seul changement que vous faites après avoir lu
ce livre, c’est de réduire votre autocritique physique, rien que cette mesure
révolutionnera votre bien-être sexuel.
Ensuite, je parlerai d’une autre émotion fondamentale, au même titre
que le stress et l’attachement : le dégoût. Comme l’autocritique corporelle,
le dégoût est tellement ancré dans la culture sexuelle qu’il est difficile de
savoir ce que serait notre bien-être sexuel sans lui. Les études sont
cependant de plus en plus nombreuses à conclure que le dégoût nuit à notre
bien-être sexuel, tout comme la critique de son propre corps, mais il existe
des moyens de l’éliminer, si vous le souhaitez.
Et ce sera le sujet de la dernière partie de ce chapitre. Je décrirai des
stratégies basées sur la recherche scientifique qui visent à créer un
changement positif à la fois en matière d’autocritique et de dégoût  :
l’autocompassion, la dissonance cognitive et l’éducation élémentaire aux
médias. L’objectif, c’est de vous aider à reconnaître ce que vous avez
appris, volontairement ou non, afin de vous aider à choisir si vous voulez
continuer à croire en tout cela. Vous pouvez très bien choisir de conserver
une grande partie de ce que vous avez appris – ce qui importe, c’est que
vous le choisissiez, au lieu de laisser ces croyances au sujet de votre corps
et de votre sexe être déterminées à votre place par le hasard de la culture et
de la famille dans lesquelles vous êtes née. Lorsque vous prenez le temps de
prendre conscience de vos croyances non choisies, et de décider si oui ou
non vous voulez garder ces croyances, vous vous donnez le pouvoir de vous
assurer le bien-être sexuel qui vous convient, sur mesure.

Trois messages
Nombre de mes étudiantes pensent s’y connaître pas mal en sexualité,
jusqu’au moment où elles découvrent, à peu près à la moitié du premier
cours, qu’en fait, ce n’est pas franchement le cas…
Le sujet qu’elles maîtrisent – et elles s’y connaissent vraiment à fond –
ce n’est pas la sexualité elle-même, mais plutôt ce que leur culture croit du
sexe. Elles, nous – tout le monde est entouré de ces messages qui illustrent
ces croyances, et ils ne sont pas seulement un peu légers sur les faits
prouvés, mais carrément en contradiction avec eux-mêmes.
Jusqu’à ce que je commence à lire de vieux manuels sur la sexualité, les
fausses croyances que mes élèves rapportaient en cours me laissaient
perplexe. Elles étaient là, noir sur blanc, écrites il y a parfois plus d’un
siècle – ces mêmes idées fausses que mes élèves croyaient. Les élèves ont
intériorisé ces idées dans leurs familles et leurs cultures, sans qu’aucune
n’ait jamais lu ces livres.
Un jour en classe, j’ai lu à haute voix quelques définitions du « sexe ».
D’abord, un extrait de Ideal Marriage  : Its Physiology and Technique de
T. H. van de Velde, daté de 1926. Il y écrit que :
« les “rapports sexuels normaux” sont les rapports qui ont lieu entre
deux individus sexuellement mûrs de sexes opposés ; qui excluent la
cruauté et l’utilisation de moyens artificiels pour produire des
sensations voluptueuses ; qui visent directement ou indirectement à
aboutir à la satisfaction sexuelle, et qui, ayant atteint un certain
degré de stimulation, se terminent par l’éjaculation – ou l’émission
– du sperme dans le vagin, à l’apogée presque simultanée de la
sensation – ou de l’orgasme – pour les deux partenaires 1. »

J’ai lu ensuite un extrait du Rapport Hite, publié pour la première fois


en 1976, au chapitre intitulé « Redéfinir le sexe » :

« Le sexe est un contact physique intime pour le plaisir, pour


partager le plaisir avec une autre personne (ou tout seul). Vous
pouvez avoir des relations sexuelles pour atteindre l’orgasme ou
non, des relations sexuelles génitales ou simplement une intimité
physique – tout ce qui vous convient. Il n’y a jamais de raison de
penser que le “but” doit être le rapport sexuel, et d’essayer de faire
en sorte que ce que vous ressentez soit conforme à ce contexte. Il
n’existe pas de norme de performance sexuelle “dans le monde” à
laquelle vous devez vous comparer ; vous n’êtes pas régi par les
“hormones” ou la “biologie”. Vous êtes libre d’explorer et de
découvrir votre propre sexualité, d’apprendre ou de désapprendre
tout ce que vous voulez, et d’avoir des relations physiques avec
d’autres personnes, de l’un ou l’autre sexe, comme bon vous
semble 2. »

Ensuite, j’ai demandé à mes étudiantes  : «  Lequel de ces extraits


correspond le plus à ce que vous avez appris en grandissant ? »
Sans hésitation. Le premier, le « mariage idéal ».
Nous sommes nombreuses à avoir assimilé des idées sur le sexe qui
auraient leur place dans un manuel de sexualité centenaire, même si toutes
les recherches et les changements politiques qui ont eu lieu depuis ont
déconstruit chaque facette de ces vieilles idées. D’une certaine manière, la
culture n’a pas intégré les idées les plus inclusives et fondées sur la science
de ces dernières décennies.
Ces idées obsolètes sont composées de trois messages culturels
entrelacés de socialisation sexuelle que les femmes croisent dans
l’Amérique moderne. Ce sont les trois messages que j’ai mentionnés
précédemment. Je les appelle Message Moral, Message Médical et Message
Médiatique, envoyés par trois messagers séparés, mais imbriqués. À des
degrés divers, chacun d’eux contient des éléments de vérité et de sagesse, et
à des degrés divers, chacun a un objectif personnel intéressé. Nous avons
tous assimilé au moins un peu de chacun d’eux, et ils façonnent l’histoire
que nous racontons sur notre propre sexualité et celle des autres.

Le Message Moral : « Vous êtes un produit


défectueux. »

Si vous avez envie ou aimez le sexe, vous êtes une salope. Votre virginité
est votre atout le plus précieux. Si vous avez eu trop de partenaires (« trop »
=  plus que votre partenaire masculin), vous devriez avoir honte. Il n’y a
qu’une seule bonne manière de se comporter et une seule bonne manière de
ressentir le sexe  : ne rien ressentir du tout, mais satisfaire l’homme à qui
appartient votre corps. Le sexe ne fait pas partie de ce qui rend une femme
digne d’être aimée ; il ne peut être qu’une partie de ce qui rend une femme
indigne d’être aimée. Il peut la rendre «  désirable  » – et beaucoup de
femmes tentent d’être désirables, mais seulement à défaut d’être digne
d’amour. Si vous êtes sexuellement désirable, vous êtes, par définition,
impossible à aimer.
Et une salope.
C’est le plus vieux message, il n’a changé que superficiellement au
cours des trois derniers siècles. Les exemples sont presque trop nombreux
pour n’en choisir qu’un, mais prenons un paragraphe de questions
rhétoriques tiré des Sermons pour les jeunes dames de James Fordyce,
publiés en 1766 et lus à haute voix par M. Collins aux dames dans le roman
de Jane Austen, Orgueil et préjugés. Le message principal de cet ouvrage
est le suivant  : «  les femmes sont attirantes quand elles sont douces,
ignorantes et pures  ». Dans ce passage, Fordyce parle de «  diversions
publiques » impliquant « des serments, des imprécations, des doubles sens,
tout ce qui est obscène » (il parle d’aller au théâtre) :

« N’y a-t-il point de degrés entre l’état de pureté qui convient aux
Vierges, & une prostitution décidée ? N’est-ce rien d’avoir l’âme
fouillée, l’imagination déréglée, les passions en fermentation ? […]
Vous direz en vain qu’il ne peut y avoir, pour le plus grand nombre,
de danger dans le goût des assemblées publiques. »

Traduction  : si vous aimez les divertissements en public, vous allez


perdre votre virginité mentale, ce qui fait de vous l’équivalent d’une
prostituée. Ce qui, à son tour, il va sans dire, vous rendrait indigne d’être
aimée.
Et une salope.
Jane Austen savait que c’était délirant. Vous savez que c’est délirant.
Pourtant, c’est bien là, ancré dans la culture où vous avez grandi, et ça se
faufile sous la clôture pour envahir votre jardin comme du lierre.

Le Message Médical : « Vous êtes malade. »


Le sexe provoque des maladies et des grossesses, ce qui le rend dangereux.
Mais si vous êtes prête à prendre ce risque, le fonctionnement sexuel doit se
dérouler dans un certain ordre  : désir, puis excitation, puis orgasme, de
préférence pendant le rapport sexuel, simultanément avec votre partenaire,
et si ce n’est pas le cas, vous avez un problème médical à régler. Sur le plan
médical. Avec des médicaments. Ou éventuellement une intervention
chirurgicale. Dans la mesure où la réponse sexuelle d’une femme diffère de
celle d’un homme, elle est malade – sauf pour la grossesse, qui est la raison
d’être du sexe. Une femme m’a même raconté que son médecin (homme)
lui avait déclaré que son faible désir sexuel était dû au fait que son corps
interrompait sa pulsion sexuelle pour l’empêcher de tomber enceinte. Elle
m’a demandé si c’était vrai. Réponse brève  : Non. Réponse longue  : Bien
sûr que non, et j’espère que ce médecin lira le chapitre 7.
C’est un message apparu plus récemment, à peu près au milieu du
e
XIX  siècle, ou plus tard. Par exemple, l’ouvrage classique de Marie Stopes,

paru en 1918, intitulé Married Love, dit ceci des relations sexuelles :

« Quand [l’homme et la femme] sont parfaitement adaptés l’un à


l’autre, la femme atteint simultanément le pic de réactions nerveuses
et de convulsions musculaires que l’homme. Cet orgasme mutuel est
extrêmement important… et c’est un plaisir mutuel, pas égoïste,
calibré plus que tout pour faire ressortir une indicible tendresse et
compréhension chez les deux participants à ce sacrement. »

L’orgasme simultané peut être très agréable. Mais vous savez aussi bien
que moi que ce n’est pas le signe d’une expérience sexuelle « parfaitement
adaptée  ». Et pourtant, près de cent ans plus tard, l’idée de l’orgasme
simultané pendant les rapports sexuels persiste comme un faux marqueur
culturel de « l’excellence sexuelle ».
Le Message Médiatique : « Vous êtes inadaptée. »

La fessée, les jeux avec de la nourriture, les ménages à trois… vous avez
déjà fait tout ça, n’est-ce pas ? Allez, vous avez au moins eu des orgasmes
clitoridiens, vaginaux, utérins, énergétiques, prolongés, multiples ? Et vous
maîtrisez au moins trente-cinq positions sexuelles différentes  ? Si vous
n’essayez pas toutes ces trucs, vous êtes frigide. Si vous avez eu trop peu de
partenaires, si vous ne regardez pas de porno et si vous n’avez pas une
collection de vibromasseurs dans votre table de chevet, vous êtes prude.
Aussi : vous êtes trop grosse et trop mince ; vos seins sont trop gros et trop
petits. Votre corps n’est pas comme il faut. Si vous ne faites rien pour le
changer, vous êtes paresseuse. Si vous vous plaisez telle que vous êtes, vous
vous contentez de peu. Et si vous osez vous aimer activement, vous êtes
une pétasse vaniteuse. En bref, vous faites tout n’importe comment. Faites
donc les choses autrement. Non, pas comme ça non plus, essayez autre
chose. Tous les jours, toute la vie.
C’est le message le plus récent, qui suit de près l’arrivée de la télévision
et de la pilule contraceptive, au milieu du XXe siècle environ. Pour en avoir
un exemple, il suffit de regarder derrière le comptoir de la caisse de
n’importe quel kiosque, où des revues annoncent en caractères brillants sans
empattement toutes les choses passionnantes que vous pourriez (et, bien sûr,
devriez) faire au lit.
Vous savez que c’est juste pour rire. Vous n’essayez pas vraiment d’être
à la hauteur des personnages d’une émission de télévision. Mais c’est là,
perturbant votre jardin, que vous le souhaitiez ou non.
Camilla avait dit : « Les images que nous voyons – ou ne voyons pas – sont importantes. Elles
nous disent ce qui est possible. »
Et c’est tout aussi vrai pour les histoires que nous racontons que pour les images qu’ont les
personnages dans ces histoires.
Camilla a passé une grande partie de son adolescence à lire de vieux romans policiers des
années 1970 et 1980. Ces histoires l’ont tellement marquée qu’elle a même écrit son mémoire
de licence sur les politiques de genre et de race dans l’art éphémère.
Mais après avoir compris le principe du contexte et le modèle à double contrôle, elle a relu
une collection de romans d’amour, en analysant les contextes que les récits ont créés autour de
la sexualité des femmes.
Et ces contextes étaient bizarres.
Elle nous a dit, à Henry et à moi :
« Voici donc la trame universelle : l’héroïne est une Fille Bien, qui n’a pas d’accélérateur et
des freins sensibles, qui n’a jamais eu la moindre sensation sexuelle jusqu’à ce qu’elle rencontre
le héros. On sait que c’est le héros parce que soudain, l’accélérateur de Fille Bien s’emballe
complètement. Mais Fille Bien doit garder les freins serrés parce que le sexe est
intrinsèquement mauvais et dangereux, et donc bien sûr le Héros couche quand même avec
elle… »
Henry a haussé un sourcil et secoué la tête en entendant ça. Je me suis passé la main sur le
visage.
«  Mais peu à peu, la pureté et la bonté de son vagin immaculé “apprivoise” le héros, ils
tombent amoureux et se marient. »
C’est à la fois hilarant et tragique, car ce n’est pas ainsi que la sexualité des femmes
fonctionne réellement.
Mais elle y a réfléchi encore un peu plus et a ajouté :
«  Je me demande donc… et si la représentation du désir sexuel, des émotions et des
relations des femmes dans les médias était tout aussi déformée que la représentation du corps
des femmes ? Et si tout ce qui concerne le fonctionnement du sexe était aussi mal dessiné que
les filles dans les mangas  ? Et si tout ce que la culture dit sur le sexe était faux, et que mon
accélérateur très lent était en fait tout à fait normal ? »
Évidemment. Elle est faite des mêmes parties que tout le monde, organisées d’une manière
unique.

Vous êtes belle


Le jour de votre naissance, qu’avez-vous ressenti en voyant la graisse au
dos de vos cuisses ? Qu’en pensaient les adultes qui vous entouraient ?
Tout bébé a besoin que ses parents le prennent dans leurs bras avec
affection et joie, et la plupart du temps, ces parents sont très désireux de
répondre à ce besoin. Le jour de notre naissance, la plupart d’entre nous
sont célébrés et félicités – que nous sommes beaux !
Mais quelque chose se passe entre ce jour joyeux où chaque centimètre,
chaque gramme, chaque bourrelet et chaque rondeur du corps d’une fille est
fêté, jugé parfait et aimable tel quel… et le jour où elle atteint la puberté.
Ce qui se passe, c’est qu’elle intègre des messages expliquant ce qui est
ou n’est pas digne d’être aimé chez elle. Les graines de l’autocritique
physique sont plantées et entretenues, et la confiance en soi et la
compassion envers son propre corps sont négligées, punies et arrachées.
Les étudiantes rient comme si c’était une blague quand je leur
demande  : «  Que se passerait-il si vous dîniez avec vos amis et que vous
leur disiez : “Je me sens si belle aujourd’hui !” ? »
Alors j’insiste : « Non, mais vraiment, que se passerait-il ?
– Personne ne ferait ça, me répondent-elles.
– Et… est-ce que ça arrive qu’une personne dîne avec ses amis et
s’exclame : “Je me sens si grosse aujourd’hui” ?
– Tout le temps. »
Tout le temps 3.
Les femmes ont la permission culturelle de se critiquer elles-mêmes,
mais elles sont punies si elles se félicitent ou si elles osent dire qu’elles
s’aiment comme elles sont 4.
Et ça, ça perturbe nos orgasmes, notre plaisir, notre désir et notre
satisfaction sexuelle. Il y a un conflit direct entre le bien-être sexuel et les
pensées autocritiques sur votre corps. Une revue de cinquante-sept études
réalisée en 2012, couvrant deux décennies de recherche, a révélé des liens
importants entre l’image corporelle et à peu près tous les domaines de
comportement sexuel imaginables  : excitation, désir, orgasme, fréquence
des rapports sexuels, nombre de partenaires, affirmation de soi sur le plan
sexuel, estime de soi sur le plan sexuel, consommation d’alcool ou d’autres
drogues pendant les rapports sexuels, rapports sexuels non protégés 5,  etc.
Les résultats varient légèrement selon les groupes d’âge, les différentes
identités sexuelles et les groupes ethniques, mais le résultat global est le
même pour toutes  : les femmes qui se sentent moins bien dans leur corps
ont des rapports sexuels moins satisfaisants et plus à risque, avec moins de
plaisir, plus de conséquences non désirées et plus de douleur 6.
Je pense que personne ne sera surpris d’apprendre que se sentir bien
dans son corps améliore sa vie sexuelle. C’est évident une fois quand on y
pense, n’est-ce pas  ? Imaginez simplement que vous ayez des relations
sexuelles si vous vous sentez complexée et peu attirante. Qu’éprouveriez-
vous si une personne qui vous est chère vous touchait et vous regardait,
alors que l’idée même de votre corps vous met mal à l’aise  ? Seriez-vous
attentive aux sensations de votre corps et de celui de votre partenaire, ou à
tout ce que vous vous sentez obligée de cacher ?
Et est-ce que ça appuie sur votre accélérateur, ou sur vos freins ?
Vos freins, bien sûr 7.
Maintenant, imaginez que vous faites l’amour, et que vous vous sentez
extrêmement sûre de vous et belle. Imaginez ce que l’on ressent lorsqu’une
personne qui vous est chère touche votre peau avec ses mains et son regard,
lorsque vous aimez chaque centimètre de vous-même et que vous pouvez
sentir votre partenaire apprécier votre beauté.
Dans les deux cas, le mécanisme de motivation est totalement enclenché
– mais dans le premier cas, il est partagé entre la volonté d’avancer dans
l’expérience sexuelle et celle de s’éloigner de votre propre corps. Dans le
second cas, lorsque vous vous sentez bien dans votre peau, le mécanisme
s’enclenche dans le même sens pour le sexe et vous-même, sans conflit.
Donc, évidemment, l’autocritique corporelle interfère avec le bien-être
sexuel. On ne peut pas comprendre la satisfaction sexuelle des femmes sans
penser à la satisfaction physique, tout comme on ne peut pas comprendre le
plaisir sexuel des femmes sans penser à l’attachement et au stress. Et les
femmes ne seront pas pleinement et béatement satisfaites de leur vie
sexuelle tant qu’elles ne seront pas pleinement et béatement satisfaites de
leur propre corps.
Donc, pour avoir plus de sexe et de meilleure qualité, vous devez aimer
votre corps.
Précisément le genre de conseils qui vous fait dire : « Ouais !…. Mais…
comment ? »
C’est difficile, parce que vous n’avez jamais choisi de ne pas aimer
votre corps. Vous n’avez pas choisi ce qui vous est arrivé entre le jour de
votre naissance et celui de votre puberté, alors que c’est à cette période
justement que l’autocritique du corps a pris racine. Vous n’avez même pas
eu le loisir de dire oui ou non à l’autocritique plantée dans votre jardin.
Au bout du compte, nombre de femmes font moins confiance à leur
propre corps qu’à ce qu’on leur a appris, dans leur culture, au sujet de leur
propre corps.
Mais la culture vous a enseigné des idées qui sont à la fois erronées et
tout simplement fausses. Blessantes. Je voudrais aborder deux leçons qui
vous ont été enseignées et qui sont définitivement fausses et mauvaises,
puis vous offrir une leçon de vérité à la place : premièrement, l’autocritique
est bonne pour vous et deuxièmement, que le gras est mauvais pour vous.
Ces deux affirmations sont fausses.
Voici pourquoi…

Se critiquer soi-même = du stress


= un plaisir sexuel diminué
Les femmes ont été entraînées à s’autoflageller dès qu’elles ne sont pas à la
hauteur. Nous nous critiquons nous-mêmes – «  Je suis si bête / grosse /
folle », « Je suis nulle », « Je suis une ratée » – c’est un réflexe quand la
situation n’est pas celle que nous souhaitons. Et notre cerveau traite cette
autocritique dans des régions cérébrales liées à l’inhibition
comportementale – les freins 8. Il n’est donc pas surprenant que
l’autocritique soit directement liée à la dépression 9 – et est-ce que la
dépression améliore votre bien-être sexuel ? Pas du tout.
Comment ça marche ?
Au fond, l’autocritique est une juste une énième forme de stress 10. Au
chapitre 4, j’ai décrit le stress comme un mécanisme adaptatif développé au
fil de l’évolution pour nous aider à échapper aux menaces  : «  Je suis en
danger. » Lorsque nous pensons « Je suis inadaptée », c’est comme si nous
disions « Je suis le lion » ! Littéralement, notre niveau d’hormone du stress
augmente 11. Le corps réagit aux évaluations négatives de soi-même comme
s’il était attaqué de l’extérieur.
La solution consiste à s’entraîner à remplacer l’autocritique par la
bienveillance envers soi-même.
Les femmes ont tendance à réagir à cette idée en deux temps. D’abord,
elles aiment instinctivement l’idée de s’accepter davantage et de ne pas
culpabiliser lorsque la vie n’est pas parfaite. La recherche confirme aux
femmes ce qu’elles savent déjà intuitivement : l’autocritique est associée à
une moins bonne santé, tant mentale que physique, et à une plus grande
solitude 12. Vous avez bien lu : l’autocritique est l’un des indicateurs les plus
fiables de la solitude. Il ne s’agit donc pas seulement de « je suis à risque »,
mais aussi de « je suis perdue ».
Mais ensuite, lorsque les femmes commencent à y réfléchir
concrètement, elles se rendent compte qu’elles ont besoin de leur
autocritique pour rester motivées. On considère que ça fait du bien de se
torturer, au moins un peu. Comme si on se disait  : «  Si j’arrête de me
torturer en pensant à tous mes défauts, c’est comme si j’admettais au monde
– et à moi-même – que je ne serai jamais parfaite, que je suis définitivement
inadaptée  ! J’ai besoin de mon autocritique pour garder espoir et me
motiver à toujours m’améliorer. »
Quand on se dit  : «  Je ne peux pas m’arrêter de me critiquer, sinon
j’échouerai toute ma vie  !  », c’est comme si on disait  : «  Je ne peux pas
m’arrêter de courir, de me battre, de faire la morte, sinon le lion va me
manger ! » C’est très précisément ce que notre culture nous a appris, et il
est donc logique que beaucoup d’entre nous y croient. C’est tellement ancré
dans notre culture que cette logique semble… raisonnable. Rationnelle,
même.
Mais ce n’est pas du tout le cas.
Pensez-y quelques instants : que se passerait-il vraiment si vous arrêtiez
de vous fuir ou de vous battre contre vous-même ? Qu’arriverait-il si vous
lâchiez le fouet avec lequel vous vous flagellez depuis des décennies ?
Quand on cesse de se châtier soi-même, quand on cesse de se blesser
encore et encore, ce qui se passe, eh bien… c’est qu’on commence à guérir.
L’autocritique est une mauvaise herbe envahissante du jardin, mais de
trop nombreuses femmes ont appris à la traiter comme une fleur prisée,
alors même qu’elle étrangle les plantes endémiques de leur sexualité. Au
lieu de nous motiver à aller mieux, l’autocritique nous rend encore plus
malades.
Plus loin dans ce chapitre, je décrirai trois approches basées sur des
preuves pour changer les schémas d’autocritique, mais pour le moment,
laissez-moi simplement vous faire remarquer que vous ne pouvez pas
arrêter de vous critiquer en vous culpabilisant à chaque fois que vous vous
critiquez. Si vous remarquez que vous êtes en train de penser : « Argh, je
suis trop nulle  », et réagissez en vous disant  : «  Bon sang, Emily m’a dit
d’arrêter de faire ça  ! Je suis vraiment nulle  !  », ça ne vous aidera pas,
hein  ? Donc quand vous vous apercevez que vous pensez «  Argh, je suis
trop nulle  », ou tout autre reproche que vous vous faites quand tout ne se
passe pas comme vous le souhaitez, faites-y attention. Remarquez
simplement que c’est une mauvaise herbe. Vous ne l’avez pas plantée là,
elle s’est glissée sous la clôture. Et profitez de cette occasion pour planter
une graine positive. Par exemple, quand vous pensez «  Argh, je suis trop
nulle  », plantez la pensée «  Je vais bien  ». Comme dans «  je suis en
sécurité », « je suis entière » ou « je suis à la maison ». Vous allez bien.
Et le changement se produit – il se produit tout le temps !
Permettez-moi de vous parler de mon amie Ruth. Nous étions ensemble
un après-midi, à discuter sexualité (un sujet inévitable, si vous me parlez
assez longtemps), et elle m’a dit  : «  Tu sais, j’ai vécu pas mal de choses,
mais ma sexualité s’est vraiment ouverte et s’est beaucoup améliorée ces
derniers temps.
– Génial ! ai-je répondu. Qu’est-ce qui a changé ?
– J’ai juste beaucoup plus confiance en moi, en mon corps  ! Je sais
maintenant que je suis de très bonne compagnie, et je m’en réjouis.
– C’est génial ! Comment as-tu réussi cette évolution ?
– C’est comme si un jour j’avais décidé que tout ça, c’était des
conneries. Qui sont ces gens pour me dire que je ne suis pas géniale telle
que je suis ? »
Ouaip. Carrément.

La santé à toutes les tailles


Le poids n’est qu’un des nombreux sujets d’autocritique, surtout chez les
femmes, mais c’est peut-être le plus universel  : la moitié des fillettes de
3 ans à peine s’inquiètent d’être « grosses » 13 – et c’est certainement l’un
des plus dangereux et des plus inutiles.
Les gens veulent perdre du poids pour deux raisons  : la santé et la
beauté. Je ne sais pas si on peut évaluer la beauté sur une balance 14, mais je
sais qu’on ne peut pas mesurer la santé comme ça, et je veux vraiment
démolir ce mythe maintenant, une fois pour toutes.
Voici ce mythe, dans les termes les plus simples possibles  : si je sais
combien vous pesez, je sais aussi quelque chose de votre santé.
Et c’est faux. Le fait est que le poids seul ne nous dit presque rien de
l’état de santé. La recherche est cruellement claire, même si beaucoup de
gens ont du mal à l’accepter – ces découvertes récentes ont suscité une
controverse dans les médias grand public, et même parmi les universitaires,
parce qu’elles vont à l’encontre de ce qu’on nous a toujours dit et qu’il
semble dangereux de donner aux gens la permission de ne pas détester leur
corps (quand bien même les études citées dans la section précédente
prouvent que les gens sont en meilleure santé lorsqu’ils ne se détestent pas).
Mais si vous y réfléchissez en toute logique pendant deux secondes, vous
verrez à quel point il est incontestablement vrai que le poids n’est rien
d’autre qu’une mesure de la gravité. Lisez donc :
Envie de perdre 5 kilos sans régime ni sport ? Coupez-vous une jambe
au niveau du genou  ! Je vous garantis que la prochaine fois que vous
monterez sur une balance, vous pèserez moins.
Eh ! Vous voulez perdre 1,5 kg de gras ? Faites-vous enlever le cerveau
– il est presque constitué à 100 % de graisse !
Vous savez qui est toujours mince  ? Les gens qui ont vécu dans des
camps de prisonniers !
Une perte de poids rapide et facile : prenez l’avion ! Mieux encore, allez
dans l’espace : tellement légère que vous flotterez !

Si vous trouvez que c’est un peu facile, parfait. Je trouve stupide et


destructeur que des « experts » nous disent que nous pouvons évaluer notre
santé en mesurant un élément que nous pouvons changer en nous amputant
d’un membre, en nous torturant, ou en prenant l’avion et en le mesurant là-
haut plutôt. Vous pouvez atteindre votre « poids idéal » défini médicalement
sans améliorer du tout votre santé  ; ça pourrait même lui nuire
considérablement !
Au cas où cette démonstration ne serait pas assez convaincante et/ou
vous souhaiteriez obtenir un avis médical, laissez-moi vous raconter cette
histoire. Un soir, pendant la convention au cours de laquelle j’ai appris
l’existence de Health at Every Size (HAES), j’ai eu un rendez-vous galant
avec un cardiologue. Je lui ai parlé de la convention et posé des questions
sur ce chiffre précis qu’un conférencier avait mentionné :
«  Dr. Rendez-Vous, est-il vrai qu’on peut être en meilleure santé en
pesant 30 kg de plus que de son “poids idéal” médicalement défini, qu’en
étant seulement 2 kg en dessous ? »
Et le Dr. Rendez-vous a répondu  : «  Je ne sais pas si j’utiliserais ces
chiffres précis, mais l’idée est la bonne. Pour différentes raisons, être
légèrement en sous-poids comporte plus de risques que d’être obèse. »
Ce rendez-vous galant n’a pas été une franche réussite, et deux ans plus
tard, j’ai épousé un dessinateur et ses deux chats. Je garde le souvenir d’une
bonne soirée avec ce cardiologue qui m’a donc confirmé que ce n’est pas le
poids qui compte, mais les comportements sains.
Mon amie Kelly Coffey pesait plus de 130 kg quand elle a obtenu son
diplôme du Smith College. Elle était parfaitement malheureuse et pensait
que son poids en était la cause. Elle a donc subi une chirurgie bariatrique et
perdu la moitié de son poids.
Et elle m’a dit  : «  Je me suis sentie heureuse pendant quelques
semaines, puis la dépression, la haine de moi-même, tout est revenu au
galop. »
Alors quand est-ce que la situation a basculé pour elle ?
« Quand j’ai compris que ce n’était pas une question de poids. Il fallait
que j’apprenne à me respecter et à respecter mon corps et à le traiter avec
amour. »
Ce n’est pas une question de poids, de corpulence ou de gras – le poids
est une mesure de la gravité et rien d’autre – mais de joie de vivre dans son
corps, tel qu’il est, aujourd’hui.
Ce qui m’amène à l’hypothèse La Santé à Toutes les Tailles (en anglais :
Health at Every Size, ou HAES). Comme son nom l’indique, le concept
HAES est une approche de la vie à l’intérieur de votre corps basée sur la
santé plutôt que sur le poids. Lindo Bacon a littéralement écrit le livre sur le
thème de HAES – Health at Every Size : The Surprising Truth about Your
Weight, qui repose sur des décennies de recherche sur la nutrition, l’activité
physique et la santé. Il y a quatre grands principes, selon le «  Manifeste
HAES  »  : (1) accepter sa corpulence  ; (2) avoir confiance en soi  ; (3)
adopter des habitudes de vie saines, y compris une activité physique
épanouie et une alimentation nourrissante ; et (4) accepter la diversité des
corpulences 15.
C’est presque trop simple : accueillez votre corps tel qu’il est, écoutez
vos propres besoins intérieurs et faites des choix sains en matière
d’alimentation et d’activité physique. Vous perdrez peut-être du poids (vous
n’en perdrez probablement pas), mais vous serez certainement en meilleure
santé et plus heureuse.
Est-il possible d’être heureuse et en bonne santé sans perdre de poids ?
Oui, c’est possible.
Voulez-vous que ce soit vrai ?
Ça, c’est une autre histoire.
En fin de compte, tout dépend si vous êtes prête à accepter la possibilité
que vous êtes déjà belle et si vous êtes disposée à donner la priorité à la
santé réelle plutôt qu’à la conformité à une norme culturelle relative à
l’apparence « supposée » de votre corps.
Je sais que la prise de conscience intellectuelle des effets négatifs de
l’autocritique et de l’absence complète de rapport entre la santé et le poids
ne saurait effacer instantanément les décennies de honte que tant de femmes
ont assimilées. D’après mon expérience, les femmes répugnent à se défaire
de leurs pensées autocritiques et de leur idéal culturel de minceur même
lorsqu’elles sont convaincues que c’est une absurdité – ce qui est le cas – et
elles rechignent encore plus à admettre qu’elles sont déjà belles –  ce
qu’elles sont.
Plus loin dans ce chapitre, je décrirai trois stratégies fondées sur des
données avérées pour passer d’une approche autocritique de la vie dans son
propre corps à une approche compatissante et saine. Mais au bout du
compte, ce sera à vous de décider d’arrêter de cultiver les mauvaises herbes
de l’autocritique et de nourrir plutôt les fleurs de la confiance en vous
aujourd’hui… et de reprendre cette décision chaque jour.

« Sale »
Depuis que j’ai mon propre cabinet, je mets à disposition un panier de doses
de lubrifiants à usage unique. De couleurs différentes, elles ressemblent un
peu à des bonbons ou à des brillants à lèvres. Généralement, lors de sa
première visite à mon bureau, une étudiante plongeait son doigt dans le
panier, attirée par les couleurs, et demandait : « Qu’est-ce que c’est ?
– Différentes sortes de lubrifiants, répondais-je à chaque fois. N’hésitez
pas à en prendre autant que vous voulez. »
Environ la moitié des étudiantes répondaient : « Cool ! » et fouillaient
pour en trouver quelques-unes qu’elles aimaient. Et l’autre moitié retirait sa
main comme si je venais de leur dire que c’étaient des sachets de crottes de
nez.
Cette réaction de retrait acquise qui survient face à des choses
« dégoûtantes » est du dégoût sexuel.

Tout le monde a un truc qui le dégoûte sexuellement, et les


« beurk » de chacun sont différents.
Et personne n’a jamais besoin d’utiliser de lubrifiant du commerce
(même si je le recommande  ; vous verrez pourquoi au chapitre  6) –  nous
nous en sommes bien passés pendant quelques centaines de millénaires  –
donc peu importe que le lubrifiant figure sur votre liste de « beurk ».
Mais que se passe-t-il lorsque ce même dégoût sexuel est activé par son
propre corps ?
« Mon partenaire veut… »
Bien des conversations dans mon cabinet commencent ainsi, la phrase
mourant dans un silence gêné. Un jour, une étudiante a poursuivi  : «… Il
veut me faire un cunnilingus », et elle a viré au rouge vif. J’ai dit :
« D’accord. »
Et j’ai attendu.
Elle a finalement repris :
« Eh bien… Je veux dire… » et elle s’est tue, sans me regarder dans les
yeux.
« Veux-tu qu’il te fasse un cunnilingus ? ai-je demandé.
– Je… a-t-elle balbutié en grimaçant. Je veux dire… N’est-ce pas…
sale ? En bas ? Les poils ? Les… fluides… ? »
J’aimerais tant qu’il soit utile de répondre à cette question par : « Bien
sûr que non, c’est merveilleux en bas  ! Félicitations à vous d’avoir un
partenaire qui apprécie ça  !  » Parfois, c’est utile. Mais souvent, il y a un
énorme nœud de croyances résistantes qui doit d’abord être démêlé avant
que la personne puisse arriver à l’entendre.
Heureusement, la recherche m’a fourni un couteau scientifique conçu
pour couper ce nœud particulier  : la théorie des fondements moraux.
Jonathan Haidt et son équipe ont découvert qu’il existe six «  fondements
moraux  » dans le cerveau humain, dont chacun est une solution à un
problème d’évolution particulier auquel notre espèce a été confrontée 16.
Parmi eux, c’est le fondement moral « sainteté/déchéance » que je trouve le
plus pertinent concernant le sexe.
Le fondement de la sainteté repose sur l’évitement des contaminants, et
il est guidé par le dégoût. Les humains ont généralisé l’évitement des
contaminants physiques (nous sommes intrinsèquement dégoûtés par les
cadavres en décomposition) à l’évitement des contaminants abstraits (nous
pouvons nous sentir dégoûtés rien que par les mots «  cadavres en
décomposition »). Vous pouvez visualiser la sainteté comme un axe vertical,
avec des comportements stigmatisés et tabous décrits comme « en bas » et
« sales », et des comportements socialement réputés comme « en haut » et
«  purs  ». Nous jugeons comme mauvais tout ce qui est associé en bas de
l’axe.
Dans la morale judéo-chrétienne, les corps sont en bas et l’esprit en
haut, les instincts animaux sont en bas et la raison humaine est en haut, et
très souvent les femmes sont en bas et les hommes en haut. Le sexe attire
l’attention tout en bas  : l’animal, le méprisable, et il déclenche donc la
réaction de dégoût.
Cela n’est pas vrai dans toutes les cultures ou tous les systèmes de
croyances, bien au contraire 17. Et même les traditions religieuses
notoirement « sexuellement négatives » peuvent considérer le sexe comme
sacré dans certaines conditions «  réglementées  ». Une amie de fac,
fondamentaliste religieuse, m’a surprise une fois mariée avec son désir
d’apprendre à connaître le plaisir et l’exploration, pour partager son savoir
avec son mari. Elle a dû apprendre à penser différemment son corps dans ce
nouveau contexte, mais une fois ce tournant pris, toute son expérience s’en
est trouvée bouleversée.
Dans le bon contexte, le sexe et les corps ne sont pas «  en bas  » ou
« déchus », ils peuvent être sanctifiés et glorieux.
Mais nombre d’entre nous ont été élevées dans des cultures affirmant
que notre propre corps sexuel est dégoûtant et dégradant, tout comme les
fluides, les bruits et les odeurs que ce corps produit, ainsi qu’un large
éventail d’activités que nous pouvons faire avec notre propre corps et celui
de notre partenaire. «  Évitez le sexe  ! Le sexe est dégoûtant, mais aussi
dangereux ! »
Si un comportement sexuel ou une partie de votre corps est considéré
comme « en bas », pensez-vous que cela active l’accélérateur ?
Non. Le dégoût appuie sur les freins.
Le dégoût est physiologiquement distinct de la réponse au stress, mais il
ressemble plus à un « figement » parasympathique qu’à un « combat ou une
fuite » sympathique. Le dégoût appuie sur les freins dans l’Anneau Unique
émotionnel  : il ralentit votre rythme cardiaque, arrête la digestion et vous
serre la gorge. Peu importe qu’il soit activé par la puanteur d’un putois ou
celle de l’hypocrisie, la vue du sang ou celle de la cruauté, la physiologie
est fondamentalement la même 18.
Après avoir réfléchi encore un peu plus à ses freins et à son manque de confiance en son propre
corps, Merritt en est venue à cette conclusion  : «  Je veux apprendre à faire confiance à mon
corps. »
Cela a été une révélation, tandis qu’elle et Carol discutaient ensemble de ce qu’elles
devaient inculquer à leur fille adolescente, et de quelle manière, en matière de sexualité. Elles
ont dressé une liste de toutes les choses qu’elles voulaient que leur fille croie et vive,
notamment :
– Reconnaître sa propre beauté de corps et d’esprit.
– Se sentir pleinement libre de décider qui touche son corps, comment et quand.
– Savoir comment se protéger contre les conséquences, comme les risques d’infection et de
grossesse.
Lorsque Carol (qui faisait partie du groupe de sensibilisation féministe dans les années
1980) a demandé  : «  Et le plaisir  ? J’aimerais qu’elle sache comment se donner du plaisir et
apprécier son corps », ça a été difficile pour Merritt. Ce n’est pas qu’elle ne le voulait pas, c’est
juste qu’elle… ne pouvait pas… enfin…
Un parent américain qui se sent à l’aise pour parler à son enfant de plaisir sexuel, c’est rare
– rare, mais pas inexistant. Mon histoire préférée de parent sexuellement positif me vient d’un
type qui m’a dit que la première fois qu’il a éjaculé (en frottant son bassin contre son matelas),
il a couru voir sa mère, terrifié à l’idée de s’être cassé quelque chose. « Maman ! Maman ! Tout
ce truc blanc est sorti de mon pénis pendant que je le frottais ! » Et la mère a été incroyable. Elle
lui a calmement expliqué ce qui s’était passé, que c’était normal, et comment réagir à l’avenir.
Quand j’ai raconté cette histoire à Merritt et Carol, Carol a ri et a dit  : «  J’aime cette
maman ! », mais Merritt est devenue pâle.
« Si j’avais été ce garçon, a-t-elle dit, j’aurais brûlé mes draps avant de le dire à ma mère. »
Merritt, souvenez-vous, n’a pas grandi dans un environnement sexuellement positif. Mais
en Amérique, chaque génération renverse rapidement les vieilles idées en matière de contrôle
social et de sexe. Elle est la première de sa famille à aller à l’université, et seulement la
deuxième génération à gagner sa vie autrement que par l’agriculture. Outre la révolution sociale
et économique qu’elle représente, elle est également la première lesbienne à être sortie diplômée
de l’université et la première de sa famille à se disputer avec sa conjointe sur la manière
d’enseigner le plaisir sexuel à leur enfant.
« Mes parents m’ont appris beaucoup de choses précieuses au sujet de l’engagement et de
la loyauté, ainsi que sur l’importance d’être une personne gentille et aimante. Mais ils m’ont
aussi dit que si je faisais l’amour hors mariage, j’irais en enfer, et même aujourd’hui, alors que
ça fait presque vingt ans que Carol vient fêter Noël à la maison avec moi, ils ne peuvent
toujours pas la regarder dans les yeux.
– On dirait bien qu’ils n’ont pas essayé de t’inculquer la honte, et que c’est pourtant ce que
tu as appris, ai-je dit.
– Et quand tu leur as annoncé ton homosexualité, ils t’ont attaquée, a rappelé Carol.
– Alors pas étonnant que tu ne te sentes pas capable de faire entièrement confiance à ton
propre corps », ai-je conclu.
Merritt a fermé les yeux et secoué la tête.
« Jamais je ne voudrais que Julia ait l’impression qu’une partie de son corps cloche. Je ne
suis vraiment pas un modèle pour elle, là. »
Et donc, bien sûr, elle a commencé à faire évoluer toute sa relation avec son corps et à se
faire confiance –  à se détendre dans le plaisir et à nager dans l’eau de la vie. Je décrirai
comment au chapitre 8.

Quand quelqu’un trouve « beurk »


votre « miam »
Le dégoût peut fonctionner comme une émotion sociale, c’est-à-dire que
nous apprenons quels aspects du monde (notre propre corps y compris) sont
dégoûtants en observant les réactions des personnes qui nous entourent. Par
exemple, les nourrissons éviteront un jouet que leur adulte de référence
regardera avec une expression de dégoût 19.
Comme on peut s’y attendre, l’expérience du dégoût dépend du
contexte : nous sommes moins dégoûtés par les choses liées au sexe lorsque
nous sommes excités sexuellement 20. Et les femmes ont tendance à être plus
sensibles que les hommes au dégoût acquis, en particulier dans le domaine
sexuel 21, bien que l’on ne sache pas encore pourquoi 22.
Nous pouvons comprendre comment le processus d’apprentissage du
dégoût peut se dérouler, étape par étape, dans la vie d’une personne si nous
imaginons, pour les besoins de cette hypothèse, une paire de jumelles
identiques séparées à la naissance. Appelons-les Jessica et Theresa.
Imaginons que Jessica et Theresa, lorsqu’elles ont peut-être 5 ou 6 ans,
ont l’habitude de se masturber dans leur chambre à l’heure de la sieste. (Si
vous venez de percevoir en vous-même une réaction de dégoût et de repli
sur soi à l’idée qu’une fillette se masturbe, vous venez d’expérimenter ce
que je m’apprête à décrire !).
Et donc un jour, alors que Jessica se masturbe dans sa chambre à l’heure
de la sieste, l’adulte qui prend soin d’elle entre et la voit avec la main dans
la culotte. Le parent recule, pris d’une réaction de dégoût involontaire, et
s’exclame : « Arrête ça ! »
Le même jour, dans une autre maison, Theresa se masturbe elle aussi, et
l’adulte qui s’occupe d’elle entre dans la pièce et la voit avec la main dans
la culotte. Mais ce parent lui dit calmement : « Nous partons chez ta tante
dans quelques minutes. Mets tes chaussures. »
Le cerveau de Jessica apprend à associer la honte et la détresse (freins)
transmises par son parent à l’excitation sexuelle (accélérateur) qu’elle
ressentait au moment où son parent l’a grondée.
Le cerveau de Theresa, en revanche, n’apprend pas cette association.
Ce seul incident pourrait ne pas avoir de répercussions durables. Si
aucun autre incident ne vient renforcer celui-ci, l’association dans le
cerveau de Jessica sera déconnectée.
Mais imaginez que vingt ans se soient écoulés, et que les expériences de
vie de Jessica et Theresa aient régulièrement renforcé ces schémas
différents. Le cerveau de Jessica a appris à associer l’excitation sexuelle au
stress, à la honte, au dégoût et à la culpabilité. Le cerveau de Theresa a
appris à associer l’excitation sexuelle au plaisir, à la confiance, à la joie et à
la satisfaction.
Laquelle d’entre elles a une meilleure vie sexuelle ?
Jessica se sentira en conflit avec ses sensations sexuelles –  elles sont
agréables… et en même temps, elles ne le sont pas. Et elle n’aura pas une
idée claire des raisons pour lesquelles elle se sent coupable, honteuse,
déprimée ou même pourquoi elle ressent une douleur physique lorsqu’elle
est excitée sexuellement.
Si une fille a un frein particulièrement sensible, un incident peut suffire
à créer un nœud dans son processus d’excitation. Pour de nombreuses
femmes, cependant, il faut un renforcement constant d’un message négatif
pour qu’il soit intégré dans la réponse sexuelle, et un renforcement constant
nécessite une culture sexuellement négative.
En d’autres termes, ça arrive tout le temps.
Souvent, le dégoût est renforcé de manière subtile, mais parfois nous
nous souvenons du moment précis qui a rendu le message limpide. J’ai
discuté avec une grand-mère – une super grand-mère sexologue du Sud des
États-Unis, pour être précise – et elle m’a confié avoir vécu un tel moment
alors qu’elle était adolescente. Elle était alors assise sous le porche et
embrassait son petit ami, mais lorsqu’elle est rentrée, sa mère s’est
approchée d’elle, avec une expression absolument dégoûtée sur le visage et
lui a demandé : « Mais qu’est-ce que tu faisais dehors ? C’est du sexe ! »
Et cette grand-mère d’une soixantaine d’années m’a confié  : «  Il m’a
fallu beaucoup, beaucoup de temps pour comprendre pourquoi j’étais si
angoissée par le sexe avec mon mari – et je veux dire angoissée jusqu’à la
nausée  – et quand j’ai finalement compris, j’ai été en colère pendant
environ dix secondes, puis j’ai juste été tellement triste pour ma mère. »
Elle a ajouté  : «  Maintenant, quand je fais de l’éducation à la santé
sexuelle dans ma paroisse, je dis tout haut : “J’aime le sexe ! Je veux que
tout le monde sache que c’est bien et que c’est normal !” »
J’adore cette femme.
Les sexothérapeutes ont une règle d’or  : «  Ne dis jamais “beurk” au
“miam” d’autrui. » Et comme on ne sait jamais ce que les « miams » des
autres sont, on ne crie « beurk » à rien. Nous savons que le dégoût est une
émotion sociale et que nos étudiants ont déjà été exposés à trop de gens qui
communiquent leur dégoût en matière de sexe.
C’est pourquoi les conseillers en éducation sexuelle et les
sexothérapeutes suivent une formation d’exposition intensive, délibérément
conçue pour minimiser nos propres réactions de jugement, de honte et de
dégoût, afin que nous puissions répondre avec une neutralité ouverte à tout
ce que nos étudiants ou clients évoquent en notre présence. Cette formation
prend souvent la forme d’une «  Réévaluation de l’attitude sexuelle  », une
formation de plusieurs jours qui comprend des exercices de clarification des
valeurs, des panels d’invités et des conférenciers, ainsi que (selon mon
expérience) une large sélection de pornographie qui surprendrait la plupart
des gens par sa variété, son intensité et sa créativité, suivie d’une réflexion
et d’un traitement de nos réactions à tout ceci.
À moins que vous ne souhaitiez devenir sexologue, vous n’avez pas
besoin de traverser un tel processus. Tout ce que vous avez à faire, c’est de
commencer à déterminer en quoi votre réaction de dégoût acquise interfère
avec votre propre plaisir sexuel, et de décider si vous préférez vous en
débarrasser. Vos organes génitaux et ceux de vos partenaires, vos liquides
organiques et ceux de vos partenaires, votre peau, votre sueur et les odeurs
de votre corps : ce sont des éléments sains et beaux, et bien sûr normaux, de
l’expérience sexuelle humaine. C’est à vous de choisir si vous vous sentez
dégoûtée par ces caractéristiques.
Il ressort des recherches que le dégoût, en tant que réaction acquise au
sexe, perturbe le fonctionnement sexuel des femmes et qu’il est
particulièrement associé aux troubles liés à la douleur sexuelle 23.
Dans la section suivante, je décrirai trois stratégies pour faire vos
propres choix et décider ce qui est ou n’est pas dégoûtant –  ce sont les
mêmes stratégies que vous utilisez pour faire vos propres choix en matière
d’autocritique. Mais la première étape consiste à remarquer quand vous
ressentez un retrait involontaire des choses liées au sexe, puis à envisager la
possibilité que la vue, les odeurs, les bruits, le caractère collant de votre
propre organisme sexuel sont autant de qualités splendides et magnifiques
de l’être humain.
En effet : et si tout ça était réellement magnifique et splendide  ? Et si
votre corps était un prétexte à la fête ?
(NB : il l’est complètement.)
Notre culture sexuellement négative nous a appris à faire notre
autocritique et à porter des jugements sur notre corps et notre sexualité, ce
qui interfère avec notre bien-être sexuel. Alors, soyons pragmatiques.
Comment créer une bulle de positivité sexuelle pour nous-même, où nous
pouvons explorer, célébrer et maximiser notre propre potentiel sexuel  ?
Comment maximiser le «  miam  », dans un monde qui essaie de nous
convaincre que nous sommes « beurk » ? Voici trois stratégies fondées sur
les données de la science, et qui peuvent véritablement créer un changement
positif.

Maximiser le « miam »… grâce


à la science : l’autocompassion
Parfois, nous nous accrochons à notre autocritique. Nous nous disons : « Si
j’arrête de me morfondre, je vais me contenter de ce que je suis et devenir
paresseuse, et alors je ne changerai jamais ! »
Et nous nous accrochons encore plus fort aux jugements que nous
portons sur nous-même – après tout, il s’agit de questions morales, à
savoir  : êtes-vous une personne bonne, décente et digne ou une personne
mauvaise, dégoûtante et sans valeur  ? Nous pensons  : «  M’accepter telle
que je suis, ce serait accepter d’être une personne imparfaite, mauvaise,
brisée, et renoncer à tout espoir de pouvoir un jour être assez bonne pour
mériter d’être aimée. »
N’oubliez pas que vous autoflageller revient pour l’Anneau Unique
émotionnel à vous considérer comme votre propre lion intérieur, c’est-à-
dire une menace à laquelle il faut échapper (ce qui est impossible), que l’on
doit conquérir (ce qui est littéralement autodestructeur), ou que l’on doit
éviter par le repli sur soi (ce qui est contre-productif, pour le moins).
Et c’est pourquoi nous avons besoin de l’autocompassion.
L’autocompassion est le contraire de l’autocritique et du jugement de
soi. Dans son livre S’aimer – Comment se réconcilier avec soi-même, la
chercheuse et enseignante Kristin Neff décrit les trois éléments clés de
l’autocompassion :
La bienveillance envers soi est notre capacité à nous traiter avec
douceur et gentillesse. Sur l’échelle de l’autocompassion (SCS en
anglais), une enquête utilisée pour évaluer l’autocompassion, la
bienveillance envers soi est définie par des éléments tels que « Lorsque
je traverse une période très difficile, je prends soin de moi et je me
donne la tendresse dont j’ai besoin  ». À l’opposé, son contraire, le
jugement de soi, est décrit comme suit  : «  Je me montre intolérant et
impatient envers les aspects de ma personnalité que je n’aime pas. »
L’humanité commune considère notre souffrance comme un phénomène
qui nous relie aux autres, plutôt que de nous en séparer. Elle est évaluée
sur l’échelle SCS au moyen d’éléments tels que « Lorsque je me sens
inadapté d’une manière ou d’une autre, j’essaie de me rappeler que le
sentiment d’inadéquation est partagé par la plupart des gens  ». Son
contraire, l’isolement, est correspond à  : «  Lorsque j’échoue dans une
tâche importante pour moi, j’ai tendance à me sentir seul face à mon
échec. »
Être en pleine conscience, c’est ne pas juger ce qui se passe dans le
moment présent. J’ai parlé de la pleine conscience au chapitre 4, et j’y
reviendrai au chapitre  9. La pleine conscience est essentielle. Sur
l’échelle SCS, elle est évaluée à l’aide d’éléments tels que : « Lorsqu’un
événement douloureux se produit, j’essaie d’avoir une vision équilibrée
de la situation.  » Son contraire est la suridentification, c’est-à-dire
s’identifier à ses propres échecs et souffrances à l’excès, s’accrocher à
la douleur et être incapable de lâcher prise. Elle est évaluée à l’aide
d’éléments tels que : « Quand je me sens déprimé, j’ai tendance à être
obsédé et à faire une fixation sur tout ce qui ne va pas. »

Le jugement de soi, l’isolement et la suridentification font de vous votre


propre lion, votre propre menace – «  Je suis en danger.  » Et ce sont des
réactions normales – nous en faisons tous l’expérience. Avoir de
l’autocompassion ne signifie pas ne jamais les ressentir, mais être
bienveillant envers soi-même quand on les ressent.
J’aime imaginer le lion de l’autocritique corporelle comme un gentil
petit chaton qui a été maltraité et qui a besoin que je lui donne de l’affection
et de la tendresse. C’est ce qui m’aide à pardonner à ma culture de m’avoir
inculqué de telles conneries. Une femme que je connais préfère l’imaginer
comme une ennemie, et elle imagine lui mettre une raclée. Elle trouve le
chemin du pardon de sa culture (et d’elle-même, pour avoir cru à sa culture)
à travers ce sentiment de victoire sur l’ennemi. Il en faut pour tous les
goûts !
Elle et moi allons au bout de notre cycle de réponse au stress par
l’activité physique, l’affection, les pleurs, le chouchoutage ou toute autre
stratégie qui traite du stress lui-même, comme décrit au chapitre  4. Nous
faisons savoir à notre corps que nous avons réussi à échapper au lion – « Je
suis en sécurité. Je suis entière. Je suis à la maison. »
L’autocompassion, ce n’est absolument pas pareil que l’estime de soi, et
j’insiste sur ce point. L’estime de soi est une question d’auto-évaluation, de
votre valeur perçue en tant qu’être humain, qui dépend souvent de votre
sentiment de réussite personnelle par rapport aux autres. L’autocompassion,
en revanche, est inconditionnelle et n’implique pas d’évaluation. Nous
pouvons avoir de l’autocompassion lorsque nous nous en sortons bien ou
quand tout va mal – parce que la vie nous a traité cruellement ou parce que
nous avons fait une erreur 24.
L’autocompassion n’est pas non plus synonyme d’autocomplaisance. La
complaisance, c’est ce que l’on fait pour endormir la douleur émotionnelle
plutôt que de la laisser terminer son cycle. Les périodes de sexualité
compulsive d’Olivia en sont un exemple extrême, mais chez la plupart
d’entre nous, l’autocomplaisance prend la forme d’un marathon Netflix ou
d’un pot entier de Ben  &  Jerry’s en une soirée parce que  : trop de
Sensations, au lieu de ressentir nos sentiments. L’autocomplaisance est une
forme de paralysie, qui endort le lion au lieu de le fuir ou de le vaincre.
La douleur émotionnelle est épuisante, et il est parfois nécessaire de
faire une pause, de s’engourdir un certain temps. Souvenez-vous de ce qui
se passe lorsque le lion sous sédatif sort de son anesthésie. Le cycle doit se
terminer, il veut se terminer. L’autocompassion consiste à être patient avec
soi-même tout au long de ce processus – et à être patient avec soi-même
quand on a besoin de faire une pause.

25
Voici un exercice qui vous aidera à développer votre autocompassion .

1. Mettez par écrit une description de la situation qui vous tourmente – il peut s’agir d’une
question liée à votre fonctionnement sexuel, votre relation amoureuse (ou manque de
relation amoureuse), votre travail ou votre corps, ou tout autre chose. Veillez à inclure les
pensées autocritiques qui vous minent.

2. Ensuite, écrivez le nom d’une bonne amie en haut de la page et imaginez que c’est cette
personne qui décrit ce problème. Imaginez qu’elle vous demande de l’aide et écrivez ce
que vous lui répondriez. Imaginez que vous êtes dans le meilleur état d’esprit possible, très
empathique, calme et d’un grand soutien, et dites-lui tout ce qu’elle a besoin d’entendre.

3. Relisez maintenant ce que vous avez écrit. C’est pour vous.

La version courte de cet exercice, c’est  : «  Ne vous dites jamais rien à vous-même que
vous ne voudriez pas dire à votre meilleure amie ou à votre fille. »
Olivia m’a confié cette histoire : la façon dont elle a compris comment arrêter d’appuyer
sur l’accélérateur quand elle était stressée.
Un soir pendant la semaine des partiels, à l’heure du coucher, Olivia a essayé de faire
l’amour avec son petit ami. Patrick, comme on pouvait s’y attendre, était trop fatigué, et l’a dit
tout haut.
Suite à son doux refus, Olivia s’est mise à douter d’elle comme une rivière en crue. Et si sa
libido n’était ni cool, ni sexy, ni amusante, ni puissante  ? Et si elle essayait désespérément –
pathétiquement – d’attirer l’attention de la seule façon qu’elle connaissait ? Et si, en fait, elle
essayait simplement de contrôler les gens avec sa sexualité  ? Et si… et son cœur battait
tellement la chamade qu’elle avait l’impression de ne pas pouvoir respirer.
Dans l’obscurité, elle a tendu la main à son partenaire. « Patrick ?
– Ouais.
– Je suis en train de craquer complètement.
– C’est la semaine des examens. Ça arrive. Respire profondément.
– Non, je suis en train de craquer à propos du sexe.
– Bébé, je suis vraiment crevé…
– Non, non, je sais, ce n’est pas ce que je veux dire ! »
Elle s’est mise à expliquer, dans une panique haletante, le flot de ses doutes, se souvenant
tout à coup que sa théorie sur la testostérone, ses organes génitaux et sa sexualité était fausse.
« Et si tout ce que je me suis jamais raconté sur ma propre sexualité n’était qu’une invention
pour masquer la vérité, à savoir qu’en fait, je ne suis qu’une brute qui utilise ma sexualité pour
te manipuler  ? Et si j’étais hors de contrôle et, en gros, un danger pour moi-même et les
autres ? »
Patrick a allumé la lumière et l’a observée. « Ouah, je ne savais pas que tu subissais encore
autant ce lavage de cerveau culturel au fond de ta tête. C’est comme si la partie anxieuse de ton
cerveau croyait sérieusement à tous ces trucs genre “les femmes qui aiment le sexe sont des
sorcières” et quand tu es stressée, toutes ces croyances remontent avec ton stress – même si la
version calme de ton cerveau sait parfaitement à quel point tu es géniale. Continue de respirer,
bébé, tu retiens ta respiration, là. »
Et voilà.
Lorsqu’elle était heureuse et détendue, elle n’avait qu’une seule opinion d’elle-même : elle
avait confiance en elle, et ressentait de l’autocompassion. Lorsqu’elle était débordée, elle avait
une tout autre opinion d’elle-même : autocritique et même maltraitante envers elle-même.
Et les opinions négatives qu’elle avait lorsqu’elle était stressée ne faisaient qu’ajouter un
niveau de stress supplémentaire et aggraver la situation, ce qui la rendait d’autant plus
autocritique, provoquant en fin de compte l’activation de ses stratégies de gestion les moins
adaptées. C’était comme essayer d’éteindre un feu en versant de l’huile dessus.
La solution ?
Arrêtez de jeter de l’huile sur le feu. Remarquez que vous êtes en train de le faire, et faites
autre chose. Laissez le feu s’éteindre de lui-même.
Olivia avait déjà compris que cet exercice l’aidait à aller jusqu’au bout du cycle de stress
biologique sans avoir à freiner ou à accélérer. Dans le chapitre suivant, elle va apprendre à faire
la même chose avec le sexe.

Maximiser le « miam »… grâce


à la science : la dissonance cognitive
Au chapitre  1, je vous ai recommandé de bien observer vos organes
génitaux et de noter ce que vous aimez. Maintenant, je vous propose d’ôter
tous vos vêtements – ou autant que vous puissiez vous résoudre à en ôter –
et d’observer votre corps en entier dans un miroir. Et faites une liste de tout
ce que vous voyez… et que vous aimez 26.
Bien sûr, dans un premier temps, votre cerveau va être rempli de toute
l’autocritique et le dégoût auxquels vous vous accrochez depuis des années.
Souvenez-vous  : le jour de votre naissance, votre corps était un motif de
célébration, d’amour inconditionnel, et c’est tout aussi vrai aujourd’hui qu’à
l’époque. Libérez-vous de ces pensées autocritiques, laissez tomber les
jugements et ne remarquez que ce qui vous plaît.
Faites cet exercice encore et encore – chaque jour si possible. Ce sera
difficile au début, et vous ressentirez beaucoup d’émotions compliquées et
contradictoires. Il y a du bruit dans votre tête. Même à l’heure actuelle,
alors que vous envisagez de le faire, vous remarquez peut-être beaucoup de
« Mais Emily ! » qui crient dans votre tête. Ce n’est pas grave. Comme je le
décrirai au chapitre 9, abandonner ses vieilles idées sur son corps implique
inévitablement un processus de deuil. Ça vous fera mal comme quand vos
mains vous font mal en sortant du froid – peu à peu, elles se réchauffent et
puis vous vous sentez bien. Le psychologue et auteur Christopher Germer
appelle ce phénomène la «  contre-explosion  », en référence à l’explosion
qui se produit lorsque vous ajoutez de l’air à un feu privé d’oxygène 27. Vous
devez autoriser la douleur à traverser le processus, la laisser achever son
cycle.
Entraînez-vous à ignorer les pensées autocritiques et de jugement et à
vous concentrer sur les pensées d’autoappréciation. Progressivement, vous
aurez plus de facilité à célébrer votre corps comme il le mérite, à le traiter
avec le respect et l’affection qu’il mérite, et à aborder le sexe avec
confiance en vous et joie. Et c’est là tout l’intérêt de cet exercice !

Maximiser le « miam »… grâce


à la science : modifier son rapport
aux médias
S’exposer à des médias qui renforcent l’autocritique physique, c’est
accroître l’insatisfaction corporelle, la mauvaise humeur, le manque
d’estime de soi et même les troubles de l’alimentation 28. Une étude
pluriannuelle sur l’impact des médias occidentaux – en particulier la
télévision – sur les jeunes femmes des Fidji illustre peut-être le mieux cette
situation 29. Dans une culture où il y avait autrefois «  une nette préférence
pour les silhouettes fortes 30  », après trois ans d’exposition à la télévision
américaine à la fin des années 1990 (pensez à Melrose Place et Beverly
Hills), les troubles de l’alimentation chez les adolescentes sont passés de 13
à 29  %, et 74  % d’entre elles déclarent se sentir «  trop fortes ou trop
grosses », en contraste flagrant avec la culture pré-télévision. Et ce n’était
pas un simple effet de mode éphémère  : dix ans plus tard, les troubles de
l’alimentation oscillaient encore autour de 25 à 30 % 31.

S’il y avait un aliment en particulier qui vous rendait à chaque fois


malade, vous cesseriez de le consommer. Donc, si certains médias
vous font vous sentir plus critique envers vous-même, il faut arrêter
de les regarder.

Lorsque vous êtes devant un film, la télé, un film porno, un magazine


ou un réseau social, demandez-vous : « Après avoir vu ça, est-ce que je vais
me sentir mieux dans mon corps tel qu’il est aujourd’hui, ou bien pire ? » Si
la réponse est « mieux », alors continuez ! Augmentez votre exposition aux
médias qui vous aident à célébrer votre corps ! Mais si la réponse est « bien
pire », alors dites stop. Vous n’avez pas besoin de vous mettre en colère et
d’écrire une lettre au producteur ou quoi que ce soit (mais si vous avez
envie, n’hésitez pas !), faites simplement attention à ce que les magazines,
les émissions de télévision et les clips vidéo vous font ressentir, et arrêtez
d’acheter tout ce qui vous fait vous sentir plus mal. Vous n’avez pas besoin
d’avoir reçu une éducation aux médias et à l’art de la manipulation par
l’altération numérique des images pour savoir quand quelque chose
participe à votre bien-être ou à votre mal-être.
Et si vous souffrez, les données suggèrent que cette situation interfère
avec votre bien-être sexuel – même si vous avez appris à croire que se
sentir moins bien dans son corps « motive » à « améliorer » celui-ci. C’est
un piège psychologique dans lequel vous ne devez plus jamais tomber.
Arrêtez d’arroser les mauvaises herbes.
En limitant votre exposition aux médias qui vous rendent plus
malheureuse, vous améliorez non seulement votre propre vie sexuelle, mais
vous votez aussi avec vos yeux, vos oreilles et votre argent. Vous rejoignez
un public qui ne s’intéressera désormais plus qu’à ce qui aide les femmes à
se sentir mieux dans leur peau. Ne serait-il pas étonnant de vivre dans un
monde où les artistes et les médias se font concurrence pour permettre au
plus grand nombre de femmes de se sentir bien dans leur corps tel qu’il est
à cet instant ? Au nom des femmes du monde entier, merci pour tout ce que
vous ferez pour concrétiser ce rêve !
Soyez vous-même !
Nous avons ouvert ce chapitre avec trois messages culturels auxquels nous
avons toutes été exposées d’une manière ou d’une autre au cours de notre
vie : le Message Moral, le Message Médical et le Message Médiatique. Ces
trois messages se confondent dans notre psychisme individuel ; aucune de
nous ne vit avec un seul, et aucune d’entre nous ne croit totalement à l’un
d’entre eux. Ils se sont superposés dans notre culture, chacun d’entre eux
intégrant en partie les autres. Les contradictions inhérentes à ces trois
messages sont une source de confusion pour les femmes, qui ne savent plus
comment le sexe est censé fonctionner 32. Votre communauté religieuse vous
dit une chose, la culture médiatique vous en dit une autre, et votre médecin
semble avoir une attitude diamétralement opposée.
Alors, qui croire ? À quels messages se fier pour améliorer son propre
bien-être sexuel ?
Réponse : vous-même.
Écoutez votre propre voix intérieure, qui entend tous ces messages et
qui, quelque part au fond de vous, sonnera l’alarme lorsqu’elle détectera des
conneries. Nous sommes toutes différentes, donc ce qui semble vrai pour
l’une peut sembler absurde pour l’autre. La seule réponse possible est la
suivante  : choisissez ce qui vous paraît juste et ignorez ce qui vous paraît
faux.
Une telle sélection d’informations est une mauvaise idée en science et
en morale. Les systèmes scientifiques et moraux, bien que différents les uns
des autres dans presque tous les domaines, ont en commun de développer
des structures cohérentes de sens dans lesquelles une idée s’accroche aux
autres, comme les maillons métalliques qui maintiennent ensemble les
cottes de mailles. Lorsque vous travaillez dans un cadre scientifique ou
moral, une idée doit tenir sa place dans le contexte au sein duquel elle a
été conçue.
Mais pour la plupart d’entre nous, nous essayons juste de vivre notre vie
du mieux possible. Lorsqu’il s’agit d’étudier et de comprendre votre propre
sexualité, faites le tri, sélectionnez – je vous en prie. Les opinions morales
peuvent être sincères, les médias passionnants, les médecins apparemment
experts, mais vous n’avez pas besoin d’adhérer à un système quelconque
pour créer un récit cohérent de votre propre sexualité. Vous n’avez pas
besoin de croire que vous irez en enfer si vous avez des relations sexuelles
avant le mariage pour décider si attendre pour avoir des relations sexuelles
est un bon choix pour vous. Vous n’avez pas besoin de croire que vous êtes
malade ou brisée pour souhaiter pouvoir prendre une pilule et avoir des
rapports sexuels impromptus. Et vous n’avez pas besoin de croire que la clé
d’un bon rapport sexuel est un lubrifiant aromatisé, un vibromasseur géant
ou la capacité à faire des gorges profondes pour avoir envie d’explorer,
d’essayer de nouveaux jouets, de nouvelles techniques et de nouveaux
partenaires.
Et même si j’aimerais que vous trouviez un sens à chaque page, à
chaque paragraphe de ce livre, faites votre sélection personnelle ici aussi.
Nous sommes toutes différentes, donc ce qui vous parlera ne sera pas
forcément pertinent pour moi, ni pour aucune des centaines de femmes à
qui j’ai enseigné. Prenez ce qui est pertinent pour vous. Ignorez ce qui ne
l’est pas ; c’est là pour celles qui en auraient besoin.
Traitez les messages culturels sur le sexe et votre corps comme un
buffet d’entrées. Ne prenez que les plats qui vous plaisent et ignorez le
reste. Nous finirons tous par avoir des assiettes différentes, et c’est comme
ça que c’est censé se passer.
La situation ne tourne mal que si vous essayez d’appliquer à la sexualité
de quelqu’un d’autre ce que vous avez choisi comme étant le mieux pout
votre sexualité.
«  Elle ne devrait pas manger ces betteraves  ; les betteraves c’est
dégoûtant. »
Elles sont peut-être dégoûtantes pour vous, mais cette femme aime
peut-être les betteraves. Certaines personnes aiment ça. Et on ne sait jamais,
peut-être qu’un jour vous goûterez et vous aimerez aussi. Ou pas, aucun
souci. Soyez vous-même.
«  Elle n’aurait pas dû prendre autant d’aliments frits et panés, elle va
finir par avoir une crise cardiaque ! »
Peut-être que oui, peut-être que non, mais dans les deux cas, c’est son
cœur et son choix. Soyez vous-même. Acceptez ce qui semble bon pour
vous et rejetez ce qui ne l’est pas. Laissez les autres faire ce qu’elles
veulent, en prenant ce qui leur convient et en écartant ce qui ne leur
convient pas.

L’histoire de Laurie et Johnny à propos du « Tu es belle » ressemble à une histoire sur l’image
du corps ou le dégoût, mais en réalité, elle parle d’amour. La honte physique que ressent Laurie
n’est pas seulement due aux modifications de son corps. Elle avait absorbé les croyances
culturelles relatives à la signification de ces altérations pour elle, en tant que personne. Et parce
qu’elle croyait que son corps était la preuve qu’elle était devenue une personne moins bien, elle
s’est cachée derrière un mur émotionnel, afin que personne ne puisse voir les parties d’elle dont
elle avait honte. Mais ce mur se dressait aussi entre elle et l’amour dont elle avait besoin.
Nous construisons des murs pour de nombreuses raisons. Pour protéger les parties
vulnérables de nous-même. Pour cacher ce que nous ne voulons pas que les autres voient. Pour
empêcher les gens d’entrer. Pour nous empêcher de sortir.
Mais un mur, c’est juste un mur : une barrière qui ne fait pas la différence, et s’érige de la
même manière pour tout. Si vous vous cachez derrière un mur pour vous protéger de la douleur
du rejet, alors vous bloquez aussi la joie. Si vous ne laissez jamais les autres voir les parties que
vous voulez cacher, alors ils ne verront jamais les parties que vous voulez qu’ils connaissent.
Quand Laurie a fait tomber son mur, l’amour s’est déversé sans retenue.

Aucune fille ne déteste son corps ou n’a honte de sa sexualité à la


naissance. Il fallait que vous appreniez ceci. Aucune fille ne craint à la
naissance d’être jugée si quelqu’un découvre le type de sexualité qui lui
plaît. Il fallait que vous appreniez cela aussi. Vous devez aussi apprendre
que vous pouvez être aimée, être vous-même ou avoir des relations
sexuelles en toute sécurité, ou même que vous pouvez être seule en toute
sécurité.
Certaines femmes apprennent ces vérités dans leur famille d’origine.
Mais même si on vous a inculqué des notions destructrices, vous pouvez
apprendre autre chose maintenant. Peu importe ce qui a été planté dans
votre jardin, peu importe comment vous l’avez entretenu, vous êtes la
jardinière. Vous n’avez pas pu choisir votre petite parcelle de terrain – votre
accélérateur, vos freins et votre corps – et vous n’avez pas pu choisir votre
famille ou votre culture, mais vous choisissez tout le reste. C’est vous qui
décidez quelles plantes restent et quelles plantes partent, quelles plantes
attirent l’attention et l’amour et quelles plantes sont ignorées, élaguées
jusqu’à disparaître, ou encore arrachées et jetées sur le tas de compost,
bonnes pour pourrir.

À vous de choisir.

Dans cette deuxième partie, j’ai décrit comment le contexte –  vos


circonstances extérieures et votre état intérieur – influence votre bien-être
sexuel. J’ai parlé de stress, d’amour, d’image corporelle et de dégoût sexuel,
et expliqué quelques stratégies fondées sur la science pour gérer tout ceci de
manière à maximiser votre potentiel sexuel.
La partie suivante de ce livre se concentre sur le déboulonnage de
certains mythes anciens et destructeurs sur le fonctionnement du sexe. Ces
mythes font partie du contexte dans lequel fonctionne le bien-être sexuel
des femmes. En les démantelant, mon objectif est de vous permettre de
prendre le contrôle total de votre contexte et d’embrasser votre sexualité
telle qu’elle est, parfaite et entière, à cet instant précis. Même si vous ne
croyez pas encore tout à fait que ce soit bien vrai.
En résumé

Nous grandissons toutes au contact de messages contradictoires


sur le sexe, et c’est pourquoi nous sommes nombreuses à éprouver
de l’ambivalence à ce sujet. C’est normal. Plus vous serez
consciente de ces messages contradictoires, plus vous aurez le choix
d’y croire ou non.

Parfois, les gens rechignent à se défaire de leur autocritique – « Je


suis nulle  !  » – parce qu’ils ont l’impression de perdre l’espoir de
devenir une meilleure personne, mais c’est le contraire qui se
produit. En réalité, lorsque vous cessez de vous en vouloir, vous
commencez à guérir, puis vous grandissez comme jamais
auparavant.

Sans blague  : votre santé n’est pas déterminée par votre poids.
Vous pouvez être en bonne santé – et belle – quelle que soit la taille
de vos vêtements. Et lorsque vous prenez plaisir à vivre dans votre
corps à l’instant précis, et que vous vous traitez avec bienveillance
et compassion, votre vie sexuelle s’améliore.

Le dégoût sexuel appuie sur les freins. Or le dégoût sexuel


s’apprend – il n’est pas inné – et peut être déconstruit. Commencez
à remarquer vos réactions «  beurk  » et demandez-vous si elles
rendent votre vie sexuelle pire ou meilleure. Envisagez
d’abandonner les «  beurk  » qui nuisent à votre plaisir sexuel –
 rendez-vous au chapitre 9 pour découvrir comment.
TROISIÈME PARTIE

LE SEXE EN ACTION
CHAPITRE 6

L’excitation
Lubrification ne veut pas dire excitation

Quand on est sexothérapeute, on reçoit des appels de ce genre :


« Salut, c’est Camilla. Je peux te poser une question sur le sexe ?
– Bien sûr.
– Tu ne seras pas dégoûtée ?
– Bien sûr que non.
– OK, donc Henry et moi on batifolait et je lui ai dit, “Je suis prête, je te veux”, et il a
répondu, “Non, tu ne mouilles pas, tu dis juste ça pour me faire plaisir.” Et j’ai dit : “Non, je
suis totalement prête !” Et il ne m’a pas crue parce que je n’étais pas mouillée. Alors… est-ce
que je dois voir un médecin ? C’est hormonal ? Qu’est-ce qui ne va pas ?
– Si tu as mal, tu devrais voir un médecin, mais sinon tu vas probablement bien. Parfois, le
corps ne réagit pas avec une excitation génitale correspondant à l’expérience mentale. Dis-lui de
faire attention à ce que tu dis, et pas à tes fluides, et d’acheter aussi du lubrifiant.
– C’est tout  ? La réponse génitale ne coïncide pas toujours avec l’expérience, alors on
achète du lubrifiant ?
– Oui. C’est ce qu’on appelle la non-concordance.
– Mais ce n’est pas ce que… Je veux dire, c’est une nouvelle découverte scientifique ?
– Mmmm… plus ou moins ? Les premières recherches psychophysiologiques que j’ai lues
et qui mesurent explicitement la non-concordance de l’excitation sexuelle datent de la fin des
années 1970, début des années 1980, bien que…
– Les années 1980 ? Pourquoi personne ne m’en a parlé plus tôt ? »
Ce chapitre répond à cette question, et à bien d’autres encore.
L’idée que la réponse génitale ne correspond pas nécessairement à
l’expérience d’excitation d’une personne va à l’encontre du «  scénario
type  » du sexe. Dans la plupart des films pornographiques, des romans
d’amour et même des ouvrages d’éducation sexuelle, la réponse génitale et
l’excitation sexuelle sont un seul et même phénomène.
Pendant longtemps, j’ai pensé que le scénario type était vrai –
évidemment, après tout je croyais ce qu’on m’enseignait. Nous y croyons
tous. Je n’ai donc pas su quoi penser quand, dans les années 1990, à
l’université, une amie m’a raconté ses premières expériences de jeu de
pouvoir dans une relation sexuelle :

« Je l’ai laissé m’attacher les poignets au-dessus de la tête alors que
j’étais debout, et il m’a positionnée de manière à ce que je
chevauche cette barre qui s’appuie sur ma vulve, tu sais, comme un
manche à balai. Et puis il est parti ! Il est juste parti, et c’était
totalement ennuyeux, et quand il est revenu, je lui ai dit : “Ça ne me
branche pas.” Il a regardé la barre et il m’a regardée et il a dit,
“Alors pourquoi tu mouilles ?” Et j’étais complètement confuse
parce que ça ne me branchait pas du tout, mais mon corps, lui,
réagissait clairement. »

Comme toute personne ayant déjà lu un roman d’amour sexy, j’étais


persuadée qu’être mouillée, c’était être excitée. Pleine de désir. Vouloir le
faire. Être «  prête  » pour le sexe. Alors comment était-il possible que les
organes génitaux de mon amie réagissent, alors qu’elle ne se sentait pas
vraiment excitée ou pleine de désir ?
Que se passait-il ?
La non-concordance, voilà ce qui se passait.
Dans ce chapitre, je vais décrire les recherches sur la non-concordance,
et répondre notamment à des questions telles que « Qui est confronté à la
non-concordance  ?  » (Tout le monde, en fait.) «  Comment savoir si votre
partenaire est excité, si vous ne pouvez pas utiliser ses organes génitaux
comme indicateur ? » (Soyez plus attentive !) « Et comment peut-on aider
son partenaire à comprendre sa non-concordance  ?  » Je vais également
aborder trois mythes erronés mais fascinants sur la non-concordance. Ces
mythes ne sont pas seulement erronés, ils sont dangereusement faux.
Je veux que toutes les personnes qui lisent ce chapitre s’empressent de
dire au monde entier que la non-concordance est normale, que tout le
monde en fait l’expérience et que vous devez écouter ce que dit votre
partenaire, et non ses organes génitaux.

Mesurer et définir la non-concordance


Remettez votre casquette de chercheuse en sexualité et imaginez que vous
menez l’expérience suivante 1.
Un type se présente au laboratoire. Vous l’emmenez dans une pièce
tranquille, vous le faites s’asseoir dans un fauteuil confortable et vous le
laissez seul devant la télévision. Il s’attache une « jauge de déformation »
(c’est exactement ce que ça semble être, et on appelle ça aussi
«  extensomètre  ») autour du pénis, pose un plateau sur ses genoux et
s’empare d’un curseur qu’il peut régler de haut en bas pour enregistrer son
niveau d’excitation (« Je me sens un peu excité », « Je me sens beaucoup
excité  »,  etc.). Il commence alors à regarder plusieurs extraits de films
pornographiques. Certaines scènes sont romantiques, d’autres violentes,
certaines correspondent à son orientation sexuelle, d’autres non. Certaines
ne sont même pas humaines, ce sont des bonobos qui copulent. Il évalue
son niveau d’excitation sur le cadran pendant qu’il regarde, et l’appareil sur
son pénis mesure son érection. Ensuite, vous regardez les données pour voir
s’il y a une correspondance entre son niveau d’excitation – son « excitation
subjective » – et son niveau d’érection – sa « réponse génitale ».
Résultat : il y aura une correspondance à hauteur d’environ 50 % entre
sa réponse génitale et son excitation subjective. C’est loin d’être une
corrélation parfaite, mais, en science comportementale, il est fascinant de
trouver une association aussi forte. C’est très significatif d’un point de vue
statistique.
Dans la plupart des cas, notre sujet de recherche et son pénis sont plus
susceptibles de réagir à un porno qui correspond à son orientation sexuelle :
les parties génitales d’un homosexuel réagissent davantage à un porno
mettant en scène deux hommes, et c’est en réaction à ce porno qu’il
signalera le plus haut niveau d’excitation  ; les parties génitales d’un
hétérosexuel réagissent davantage à un porno mettant en scène un homme et
une femme ou deux femmes, et c’est en réaction à ce porno qu’il signalera
le plus haut niveau d’excitation, etc.
Maintenant, faisons la même expérience avec une femme. Mettons-la
dans cette pièce calme, dans ce fauteuil confortable, et laissons-la s’insérer
un photopléthysmographe vaginal (en gros, une minuscule lampe de poche
de la taille d’un tampon qui mesure le flux sanguin génital), et donnons-lui
le plateau et le curseur ainsi que toute une gamme de pornographie.
Résultat : Il y aura une correspondance de seulement environ 10 % entre
ce que font ses parties génitales et ce qu’elle évalue sur le curseur comme
étant son niveau d’excitation.
10 %.
Il s’avère donc qu’il n’y a pas de relation prédictive entre l’excitation
ressentie et la réaction de ses organes génitaux – insignifiante d’un point de
vue statistique. Sa réponse génitale sera à peu près la même quel que soit le
type de porno qu’elle regarde, et sa réponse génitale correspondra peut-être
à ses préférences sexuelles… ou pas 2.
C’est ce qu’on appelle la « non-concordance de l’excitation 3 ».
Ces recherches ont été largement relayées dans les médias. Par exemple,
les recherches de Meredith Chivers sur la non-concordance ont été décrites
dans le New York Times et dans un certain nombre d’ouvrages populaires 4.
Le travail de Chivers s’appuie notamment sur les recherches d’Ellen Laan,
dont les études sur la non-concordance ont également été reprises dans le
New York Times une décennie plus tôt 5. Chivers a reproduit les conclusions
de Laan concernant la plus grande non-concordance de l’excitation chez les
femmes par rapport aux hommes, avec une nouveauté  : montrer aux
participants à la recherche non seulement une variété de vidéos
pornographiques et non sexuelles, mais aussi des vidéos de primates non
humains – les bonobos, pour être précis – en pleine copulation. Il s’avère
que les organes génitaux des femmes réagissent également aux relations
sexuelles avec les bonobos, mais pas autant que devant un porno.
Ce que les médias n’ont pas réussi à faire comprendre au public, c’est
que la réponse génitale des femmes est en fait très discriminatoire, par
rapport à d’autres réponses physiologiques automatiques. Par exemple, le
réflexe du tendon d’Achille, le rythme cardiaque et la conductance cutanée
(transpiration) augmentent après avoir regardé un passage effrayant du film
Cujo et après avoir regardé un film porno. Mais vos organes génitaux ne
s’intéressent pas à Cujo 6. En fait, les organes génitaux des femmes ne
réagissent à aucune des vidéos suivantes : les vagues qui s’écrasent sur une
plage, la scène avec la chanson «  Ain’t No Mountain High Enough  » du
film Ma meilleure ennemie, la scène de livraison du télégramme dans Une
équipe hors du commun, ou une vue comme si vous y étiez des montagnes
russes 7. La réaction des organes génitaux est spécifique aux stimuli liés au
sexe – que ces stimuli soient ou non sexuellement attirants.
Il y a un chevauchement d’environ 50 % entre ce à quoi les organes génitaux d’un homme
réagissent comme étant «  lié au sexe  » et ce à quoi son cerveau répond comme étant
«  sexuellement attirant  ». Et il y a environ 10  % de chevauchement entre ce à quoi les
organes génitaux d’une femme réagissent comme étant «  lié au sexe  » et ce à quoi son
cerveau répond comme étant « sexuellement attirant ». Les organes génitaux des hommes
sont relativement spécifiques dans leurs réactions, tout comme leur cerveau. Les organes
génitaux des femmes sont relativement généraux dans ce à quoi ils réagissent, tandis que
leur cerveau est plus sensible au contexte. Notez qu’un stimulus peut être « lié au sexe »
sans être attirant.

Les organes génitaux disent : « C’est lié au sexe. »


La personne dit  : «  Ça m’excite  », ou «  J’aime ça  », ou «  J’en veux
davantage, merci ».
Pour les femmes, il y a un chevauchement d’environ 10 % entre ce qui
est considéré comme « lié au sexe » et le « sexuellement attirant ». Pour les
hommes, il y a environ 50 % de chevauchement.
Un stimulus peut être lié au sexe et pourtant être sexuellement peu
attirant, comme l’a constaté mon amie de fac au début du chapitre. Un
stimulus peut même être lié au sexe et être activement détesté. Vous vous
souvenez de la personne du chapitre 2, qui m’a envoyé un e-mail disant que
« les freins et l’accélérateur en même temps » décrivait son expérience en
lisant Cinquante nuances de Grey ? Ses parties génitales ont répondu, mais
elle ne s’est pas sentie « excitée » ; le livre contenait du sexe explicite, donc
c’était lié au sexe, mais elle a freiné en même temps parce qu’elle n’aimait
ni les personnages ni l’intrigue.
Ce que nous observons dans la non-concordance, c’est la différence
entre apprentissage et appréciation, telle que décrite au chapitre  3. La
réponse génitale est la réponse automatique et entraînée à un phénomène lié
au sexe. Les chiens de Pavlov salivaient lorsqu’une cloche tintait, non parce
qu’ils avaient envie de manger la cloche, mais parce que leur système
d’apprentissage avait associé la cloche à la nourriture. De même, votre
Anneau Unique émotionnel a appris ce qui est lié au sexe (vous vous
souvenez des rats qui portent une veste ?), et votre système d’apprentissage
active des réponses physiologiques à tout ce qu’il a appris comme étant lié
au sexe.
Les femmes sont différentes les unes des autres, mais leur niveau de
concordance semble assez constant 8. Le degré exact de réaction des organes
génitaux d’une femme aux stimuli liés au sexe semble varier en fonction de
la sensibilité de ses freins et de son accélérateur. Des freins peu sensibles et
un accélérateur très sensible entraînent une augmentation de la circulation
sanguine, tandis que des freins et un accélérateur tous très sensibles
entraînent plutôt une diminution de la circulation sanguine, par rapport aux
autres femmes 9. Mais c’est compliqué 10. Encore une fois, nous sommes
toutes faites des mêmes parties, organisées de manière différente.

Que se passe-t-il lorsqu’un homme prend un traitement contre les troubles de l’érection ?
Le médicament augmente l’afflux sanguin vers les organes génitaux pendant la stimulation
sexuelle.
Que se passe-t-il lorsqu’une femme prend un traitement contre les troubles de l’érection ?
La même chose.
Et que se passe-t-il lorsque vous augmentez l’afflux sanguin vers les parties génitales d’une
femme ?
Pas grand-chose. Pourquoi ? Parce que : non- concordance.
Olivia et Patrick en ont fait l’expérience : ils ont pris simultanément un comprimé contre
les troubles de l’érection pour tenter de renverser la dynamique de la poursuite – et aussi, parce
que, pourquoi pas ? (À noter : « Pourquoi pas ? » inclut l’absence de bénéfice médical connu et
un risque médical inconnu. Prendre un médicament sur ordonnance sans la surveillance et l’avis
d’un médecin est toujours risqué. Mais soyons réalistes. Les gens le font. Mais ne le faites pas.
Ce médicament ne fait pas ce que vous voudriez qu’il fasse, comme nous allons le voir.)
Les lèvres d’Olivia – celles de son visage  – ont viré au rouge foncé, écarlate, de sorte
qu’elle avait l’air de porter du rouge à lèvres. À part ça, elle n’a remarqué aucun effet
particulier. Pour une fois, Olivia a vécu la même expérience que la plupart des femmes.
Patrick, en revanche, avait l’impression d’avoir pris un aphrodisiaque. Olivia lui paraissait
irrésistiblement belle. Il ressentait tellement chaque centimètre de sa peau que c’était comme si
le volume de ses terminaisons nerveuses avait augmenté, de sorte que chaque sensation était
amplifiée, magnifiée. Après avoir pris ce médicament, ils sont sortis manger une glace, pour
s’occuper en attendant qu’il fasse effet, et ils ont dû faire demi-tour parce que Patrick avait hâte
de déshabiller Olivia.
Les traitements contre les troubles de l’érection ne sont pas responsables de ces effets : ils
ne font qu’augmenter le flux sanguin vers les organes génitaux. En revanche, puissant est le
pouvoir du placebo. Le même phénomène se produisait parfois lorsque Patrick buvait un peu
trop lors de mariages et qu’Olivia était la conductrice désignée.
Pour une fois, Olivia était celle qui éprouvait le moins d’intérêt sexuel, et cette rare
expérience fut une révélation. En tant que femme qui s’est toujours sentie portée par son intérêt
sexuel, traînant son partenaire par la main, se trouver enfin dans la position de celle qui ne
bougeait pas et se faisait entraîner, a constitué, pour ainsi dire, une expérience inspirante. Elle
s’est autorisée à recevoir l’attention érotique de Patrick. Elle a laissé son excitation monter aussi
lentement qu’elle le voulait.
Elle a laissé les choses se passer, au lieu d’avoir l’impression de subir son propre intérêt
qui l’entraînait vers l’avant.
Toutes les mêmes parties, organisées
de manière différente :
« c’est un restaurant ici »
La non-concordance renvoie à la relation entre le système périphérique – les
organes génitaux – et le système central – le cerveau  : deux systèmes
distincts, mais interconnectés. Et la relation entre ces systèmes varie d’une
personne à l’autre et d’un contexte à l’autre.
Par exemple, imaginez qu’un cerveau et une vulve sont un couple
d’amis en vacances ensemble, déambulant dans la rue en essayant de
décider où dîner.
La vulve remarque tous les restaurants qu’ils croisent, depuis le
thaïlandais jusqu’au pub, en passant par le fast-food ou le restaurant
gastronomique (tout en ignorant tous les musées et les magasins), et
déclare  : «  C’est un restaurant ici. On pourrait y manger.  » Elle n’a pas
d’opinion tranchée, elle est juste douée pour repérer les restaurants. Pendant
ce temps, le cerveau, lui, évalue tous les facteurs contextuels que j’ai décrits
aux chapitres 4 et 5 pour décider s’il veut essayer un établissement. « Cet
endroit ne sent pas assez bon », ou « Cet endroit n’est pas assez propre »,
ou «  Je ne suis pas d’humeur à manger une pizza ». La vulve peut même
remarquer une animalerie et dire : « Il y a de la nourriture pour animaux ici,
donc bon… » et le cerveau lève les yeux au ciel et continue à marcher.
Ils passent devant un musée, et le cerveau dit : « J’ai entendu dire qu’il
y avait un super bistrot dans ce musée », et la vulve rétorque : « Ce n’est
pas un restaurant.  » Mais le cerveau dispose de bien plus d’informations
que les parties génitales. Supposons donc que les deux amis entrent dans le
musée et que la vulve voie le petit bistrot à côté de la boutique de cadeaux.
Elle dit alors : « Oh, je vois, c’est un restaurant. On pourrait manger ici », et
le cerveau dit : « Oui, ça a l’air super. » À la fois pertinent et attirant !
Mais ça ne se passe pas toujours comme ça. Chez les femmes
lesbiennes, c’est plutôt 11 : les organes génitaux ne remarquent que certains
restaurants (disons, les brasseries), et ne remarquent aucun autre type de
restaurant. Une fois qu’ils ont trouvé un restaurant, le cerveau leur dit  :
« Une brasserie ! J’adore les brasseries », et la vulve est d’accord : « C’est
un restaurant ici, on pourrait y manger », à moins qu’il n’y ait une raison
assez valable de ne pas le faire, comme une bande d’ivrognes qui se battent
devant. Et même dans ce cas, si nos amis en vacances tombaient sur cette
brasserie avec la bagarre dehors, les organes génitaux pourraient toujours
dire : « C’est un restaurant », tandis que le cerveau l’entraînerait au loin en
criant : « On se tire d’ici ! Appelez les flics ! »
Vous devriez maintenant être capable de le réciter en dormant  : nous
sommes toutes faites des mêmes parties, organisées de manières différentes.
La relation entre le cerveau et les organes génitaux suit le même principe.
Ainsi, les parties génitales peuvent apprendre à associer certains stimuli
à certaines réponses physiologiques qui n’ont parfois aucun rapport avec le
désir ou même le plaisir. La pression exercée sur la vulve de mon amie de
fac – la barre entre ses jambes lorsqu’elle était attachée – a déclenché une
réponse génitale automatique sans déclencher de plaisir ou de désir. « C’est
un restaurant », a dit sa vulve, mais son cerveau, lui, n’était pas intéressé.

La non-concordance dans
les autres émotions
La non-concordance n’est pas réservée aux questions de sexualité. Elle se
manifeste dans toutes sortes d’expériences émotionnelles, et c’est un casse-
tête pour de nombreux chercheurs dans le domaine des émotions 12.
Par exemple, dans une étude menée sur les «  frissons  » que nous
ressentons lorsque nous entendons de la musique émouvante, les
participants ont écouté « My Heart Will Go On » de Céline Dion. La moitié
d’entre eux ont déclaré avoir eu des frissons – expérience subjective – et
14  % ont présenté une piloérection (la chair de poule) – réaction
physiologique. Parmi ceux qui ont écouté «  Bittersweet Symphony  », de
The Verve, 60 % ont eu des frissons – expérience subjective – mais aucun
n’a présenté de piloérection – réponse physiologique 13.
D’un point de vue scientifique, c’est une grossière simplification que de
dire que les émotions se décomposent en «  trois niveaux  », mais dans le
cadre d’une vulgarisation entre personnes ordinaires, c’est un raccourci
utile.
Tout d’abord, on a la réponse physiologique involontaire – le rythme
cardiaque et la pression artérielle, la dilatation des pupilles, la digestion,
la transpiration, le fonctionnement du système immunitaire. La réponse
génitale entre dans cette catégorie, et mon amie de fac qui a mouillé
alors qu’elle s’ennuyait ferme, attachée en attendant le retour de son
partenaire, a connu ce genre de réponse… et rien de plus.
Avec la physiologie vient la réaction expressive involontaire à un
sentiment  : le langage corporel, ou, plus précisément, le
« paralangage », des éléments tels que l’inflexion de la voix, la posture
et l’expression du visage, tous les indices que nous utilisons pour
déduire l’état intérieur d’une autre personne. Un dîner romantique réussi
regorgera de changements physiologiques et de postures, de gestes et
d’expressions inconscientes  : vous vous surprenez à poser votre main
sur le bras de votre ami, à le regarder dans les yeux et à lui sourire. Ces
altérations sont souvent influencées par la culture, mais ont un caractère
très universel et peuvent être contrôlées intentionnellement dans une
certaine mesure, bien que pas autant que vous pourriez le penser. Avez-
vous choisi l’expression sur votre visage à cet instant ?
Enfin, il y a l’expérience subjective d’un sentiment. Si quelqu’un vous
demande comment vous vous sentez et que vous vous mettez à votre
propre écoute afin de trouver la réponse, ce que vous remarquez est une
expérience subjective. Il s’agit de l’excitation subjective – l’expérience
consciente du « J’ai tellement envie de toi que c’est insupportable  » –
qui peut ou non être accompagnée d’une réponse génitale ou d’un
contact visuel.

Il se peut même qu’il existe des différences stables entre les deux sexes
en ce qui concerne la non-concordance entre la réaction physiologique et
l’expérience subjective d’émotions autres que l’excitation sexuelle. Quelle
qu’en soit la raison – culturelle, biologique ou les deux (probablement les
deux)  –, les femmes présentent davantage de chevauchements entre leurs
expressions faciales et leur expérience subjective, tandis que les hommes
présentent davantage de chevauchements entre la conductance cutanée
(physiologie) et leur expérience subjective 14. Ce que ces recherches tendent
à montrer, c’est que les expériences émotionnelles des femmes sont plus
susceptibles de correspondre à leurs expressions faciales et leurs inflexions
vocales, tandis que les expériences émotionnelles des hommes sont plus
susceptibles de correspondre à leur rythme cardiaque et leur circulation
sanguine.
Qu’il y ait ou non une différence entre les sexes, il est raisonnable de
penser que ce que vous vivez sur le plan émotionnel ne correspond pas
nécessairement à ce que font votre cerveau et votre corps. Ça ne fait pas de
vous une menteuse ou une folle, et ça ne signifie pas que vous êtes dans le
déni. Ça veut simplement dire que vous êtes un être humain, dont les
réactions émotionnelles et motivationnelles peuvent être plus complexes
que celles de n’importe quelle autre espèce. La non-concordance se
manifeste dans de nombreux types d’expériences émotionnelles, et les
hommes et les femmes vivent la non-concordance différemment dans ces
émotions. Ce n’est pas une question de sexualité, c’est une question
d’humanité.
Il faut pouvoir se détendre avant de pouvoir faire confiance. Mais les femmes qui mettent du
temps à faire confiance, comme Merritt, ne réussissent pas à se détendre tant qu’elles n’ont pas
confiance. C’est un problème.
La solution est venue alors qu’elle tentait de résoudre un autre problème.
Merritt était une femme dans la quarantaine, au seuil de la ménopause, et le manque de
lubrification semblait tout simplement faire partie de son quotidien. Elle se préoccupait
davantage de sa partenaire. Carol était la mère biologique de leur fille adolescente, et souffrait
encore de douleurs génitales intermittentes depuis son accouchement. Je lui ai recommandé
d’utiliser du lubrifiant pour rendre les rapports sexuels manuels plus confortables.
Merritt était partante. Tout ce que j’ai eu à dire, c’était  : «  Il y a un tas de types de
lubrifiants différents, donc tu pourrais… » et elle était sur son ordinateur, à la recherche d’un
assortiment disponible en ligne.
La boîte est arrivée au courrier. Elles se sont donné rendez-vous – vendredi soir, leur ado
étant alors partie faire du camping – et quand le soir est tombé, elles ont partagé une demi-
bouteille de vin et se sont mises au travail.
Elles ont pris au sérieux l’importance du contexte et ont commencé par un film
15
romantique, puis se sont raconté à tour de rôle leur « Notre histoire » . C’est un truc qu’elles
ont adapté de la recherche sur les relations menée par John Gottman  : elles se racontent
comment elles se sont rencontrées et sont tombées amoureuses, pour se rappeler l’une à l’autre
(et à elles-mêmes) le sens de leur vie commune, leur affection et leur admiration l’une pour
l’autre. Cette méthode fonctionne différemment pour chacune  : elle active l’accélérateur de
Carol en la faisant se sentir amoureuse, et elle désactive les freins de Merritt en lui faisant sentir
qu’elle fait confiance à sa compagne.
Or le problème de Merritt n’était pas de faire confiance à sa partenaire, mais à elle-même.
Et ce qu’elle a appris ce soir-là, c’est qu’il est plus facile de se faire confiance quand elle est en
mesure de constater que son corps apporte du plaisir à sa compagne.
En essayant les différents types de lubrifiants, le sexe est devenu un jeu, au lieu d’un souci,
ce qui lui a permis de passer de ce qu’elle appelle un «  cerveau bruyant  », où tout est perçu
comme une menace, à un «  cerveau calme  », où chaque chose est perçue avec curiosité et
plaisir. (Vous vous souvenez du rat qui n’aimait pas Iggy Pop ?)
Elle a fait très attention à la manière dont Carol percevait chaque type de lubrifiant.
Elle s’est détendue en observant le plaisir de sa partenaire, et a découvert que lorsqu’elle se
connectait à l’expérience de donner du plaisir, son propre plaisir pouvait se répandre en elle,
sans tous les freins, inquiétudes et tracas.
Comme un poisson dans l’eau.
Cette libération a été rendue possible lorsqu’elle s’est détournée de ses propres soucis pour
se concentrer sur une mission : procurer plus de plaisir à sa compagne.
L’étape suivante, bien sûr, a été de pouvoir profiter de son propre plaisir. Mais avant d’y
parvenir, elle a dû abattre un mur dans sa propre tête. Elle le fera au chapitre 7.
Erreur de lubrification no 1 : penser que
réponse génitale = désir
J’ai remarqué trois erreurs au sujet de la non-concordance, et qui perpétuent
de dangereux mythes culturels sur la sexualité des femmes. Finissons-en
avec elles, d’accord ?
La première erreur dangereuse liée à la non-concordance, c’est de ne
pas reconnaître qu’elle existe au départ. Appelons-la  : erreur de
lubrification no 1.
La non-concordance n’est pas une nouveauté – ou ne devrait pas l’être.
Depuis une ou deux décennies, les chercheurs dans le domaine du sexe ont
une idée de plus en plus claire de l’existence même du phénomène de non-
concordance. Elle a fait la une des journaux, elle a été décrite dans des
livres sur la sexualité… et pourtant mes étudiantes et les lectrices de mon
blog sont régulièrement surprises de l’apprendre, et tant le porno que la
culture dominante continuent de perpétuer le mythe selon lequel réponse
génitale =  désir et plaisir. Maintenant que vous savez ce qu’est la non-
concordance, vous verrez des gens se tromper partout.
Alors, pourquoi une telle erreur  ? Pourquoi est-ce que ce concept
semble si nouveau, alors qu’un livre sur le sujet paraît tous les deux ans ?
Quand j’ai posé cette question lors de mon cours, une élève a levé la
main et a dit avec une aigreur assez comique : « Le patriarcat. »
Absolument.
Pendant des siècles, la sexualité des hommes a été la sexualité «  par
défaut  », «  de référence  », de sorte que là où les femmes diffèrent des
hommes, les femmes sont étiquetées comme « brisées », « cassées ». Même
les hommes qui diffèrent du scénario traditionnel sont étiquetés comme
« brisés ». Les hommes ont, en moyenne, un chevauchement de 50 % entre
leur réponse génitale et leur excitation subjective, et donc, selon le mythe
patriarcal, tout le monde devrait avoir un chevauchement de 50 %.
Mais les femmes ne sont pas des versions cassées des hommes : ce sont
des femmes.
Si les hommes n’étaient pas toujours le point de référence «  par
défaut », nous nous demanderions tout aussi bien : « Qu’est-ce qui se passe
chez les hommes pour qu’ils aient un tel chevauchement  ?  » et pas
seulement : « Qu’est-ce qui se passe chez les femmes pour qu’elles aient si
peu de chevauchement  ?  » Mais personne ne se pose la question pour les
hommes. Aucune étudiante, aucune lectrice de blog, aucune collègue
sexothérapeute, personne, nulle part, ne m’a jamais demandé : « Pourquoi
les hommes sont-ils aussi concordants  ? Est-ce que ce n’est pas un…  ?  »
Les seules personnes qui se posent cette question sont les chercheurs en
sexualité.
Quand nous aurons surmonté ce mythe de l’homme par défaut, nous
cesserons de confondre « varier » et « être cassé ». Nous nous souviendrons
que, comme pour la taille à l’âge adulte que j’ai décrit au chapitre  1, les
gens peuvent varier davantage les uns par rapport aux autres dans le même
groupe, que d’un groupe à l’autre.
Mais d’ici là, je vais combattre le patriarcat par le patriarcat. Faisons en
sorte que la non-concordance soit universellement reconnue, en comprenant
les conséquences qu’elle a sur les hommes.
Tous les mecs, à un moment donné de leur vie, font cette expérience :
ils ont envie de sexe, veulent avoir une érection, et l’érection reste tout
simplement absente. À cet instant, l’érection (ou l’absence d’érection) n’est
pas une mesure de son intérêt – il peut même se réveiller le lendemain
matin avec une érection, et à ce moment-là, ce n’est rien d’autre qu’un
désagrément.
Les gars se réveillent parfois avec des érections, non parce qu’ils sont
excités, mais parce qu’ils sortent d’un sommeil paradoxal, phase pendant
laquelle les mouvements oculaires sont rapides (REM), et l’un des
phénomènes qui se produit pendant le sommeil paradoxal, c’est la
«  tumescence nocturne du pénis  ». Les érections vont et viennent tout au
long du cycle de sommeil, que l’homme rêve de sexe ou non. Ça ne veut
rien dire, c’est juste une érection : c’est non concordant.
La plupart des garçons, vers l’adolescence, font l’expérience d’une
réponse génitale indésirable. Quand ils sont assis au fond du bus, qu’ils
aperçoivent la silhouette d’une prof, que leur propre pantalon est mal ajusté,
ou même quand ils sont excités par des activités non sexuelles (conduire
une voiture, manger un beignet, n’importe quoi)  : tout ça peut activer les
voies sexuelles et générer une réaction physiologique chez un adolescent.
Or la réponse génitale n’est pas un désir ; la réponse n’est même pas un
plaisir. Il s’agit simplement d’une réponse. Pour tout le monde,
indépendamment de ses organes génitaux. Ce n’est pas parce qu’un pénis
réagit à une idée, à une scène ou à une histoire particulière que le garçon
propriétaire dudit pénis l’aime ou la désire forcément. Ça veut simplement
dire que cette idée, cette scène ou cette histoire a activé les voies
appropriées – c’est de l’apprentissage. « C’est un restaurant. » (Rappelez-
vous : le chevauchement de 50 % des hommes entre la réponse génitale et
l’excitation est très significatif statistiquement… mais ça reste 50  %
seulement, et les gens varient).
Parfois, les hommes remarquent que leur corps réagit à un truc, même
quand leur cerveau leur dit : « C’est pas bien. » Et ils se sentent déchirés,
parce que d’un côté, c’est clairement sexuel, mais de l’autre, ce n’est Pas
Bien.
Je vais vous donner un exemple (et n’hésitez pas à sauter les deux
paragraphes suivants si les agressions sexuelles sont un sujet sensible pour
vous).
Quand j’étais à la fac, je traînais avec un groupe d’amis garçons, et l’un
d’entre eux – appelons-le Paul – m’a raconté une histoire sur un de ses
potes. À la fin d’une soirée, alors que tous les invités étaient soit endormis,
soit fortement alcoolisés aux quatre coins de la maison, Paul a découvert
son pote en plein rapport sexuel avec une jeune femme évanouie,
passablement ivre, sans aucune réaction, et clairement inconsciente de ce
qui se passait. Je dis «  rapport sexuel  », mais le terme technique est bien
« viol ». Et le pote lui dit : « Eh, tu veux essayer toi aussi ? » et mon ami
qui raconte l’histoire lui a répliqué : « Non, il faut qu’on y aille. »
Paul nous a expliqué que s’il n’a osé répondre que cette phrase, et pas
un truc comme «  Qu’est-ce que tu fous, abruti  ? Dégage de là, laisse-la
tranquille  !  », c’était parce qu’il était déchiré entre ce que ses tripes lui
disaient, son instinct qui criait que ce que son pote faisait là n’était
Clairement Pas Bien, et la réponse de son corps à la vue de ce rapport
sexuel. Il a eu une érection. Il était horrifié par sa réaction, à l’idée qu’une
quelconque partie de lui puisse interpréter cette scène Clairement Pas Bien
comme érotique.
Lorsque j’ai entendu cette histoire, je n’avais aucune idée de ce qui se
passait. Je pensais que la réponse génitale c’était le désir et le plaisir. C’était
comme dans le cas de mon amie qui disait qu’elle était mouillée même si
elle s’ennuyait – mais dans ce cas, le gars ne s’ennuyait pas, il était au
contraire absolument horrifié !
Que se passait-il ?
Ce qui se passait, c’était l’apprentissage, sans motivation ni
appréciation. Le corps de Paul a reconnu que la scène qui se déroulait
devant lui était liée au sexe et, soit parce qu’il était désinhibé par l’alcool,
soit parce qu’il avait des freins assez faibles, ceux-ci n’ont pas empêché son
corps de réagir à la stimulation liée au sexe. « C’est un restaurant », lui a dit
son pénis, même s’il y avait une bagarre sur le trottoir.
Imaginons une autre histoire, dans un monde où chacun connaît le
concept de non-concordance.
Parce que Paul sait que ce que font ses parties génitales désigne
uniquement ce qui est lié au sexe, et non ce qui est sexuellement attirant,
non seulement il n’a pas honte ou ne se demande pas s’il pourrait lui aussi
être un violeur, mais l’absence de toute honte créée dans son cerveau lui
laisse l’espace nécessaire pour être plus proactif et intervenir  ! Il pourrait
dire à son ami d’arrêter parce que ce qu’il fait est un acte de violence, un
crime. Ou appeler les flics et faire arrêter son ami, et emmener la fille aux
urgences pour que des preuves soient recueillies, qu’une thérapie anti-VIH
soit administrée et qu’une contraception d’urgence lui soit proposée. Ou,
tout au moins, aller chercher quelqu’un pour l’aider. Il pourrait être un
héros.
La réponse génitale ne signifie rien d’autre que « lié au sexe » : c’est un
apprentissage, par essence un réflexe conditionné – pas une appréciation.
Elle n’indique ni le désir, ni le plaisir, ni rien d’autre. Et en donnant de la
place, une fois pour toutes, à la non-concordance, nous rendrons ce monde
bien meilleur pour tout le monde.
En fin de compte, l’erreur de lubrification no  1 – penser que réponse
génitale =  désir – n’est qu’une métaphorisation vieillotte, comme les
anatomistes médiévaux du chapitre 1 (pudendum, parce que la honte !), sans
le Message Moral peut-être.
Vous savez que la taille du phallus (clitoris ou pénis) d’une personne ne
dit rien de la honte qu’il ou elle a (ou devrait avoir) de ses organes génitaux.
Tout au plus, la taille du phallus permet souvent – et encore, pas toujours –
de prédire si une personne a des ovaires ou des testicules. De même,
l’afflux sanguin vers les parties génitales ne dit rien sur ce que la personne
veut ou aime (ou devrait vouloir ou aimer). Non. Tout au plus, l’afflux
sanguin vers les parties génitales est souvent – et encore, pas toujours – une
simple information indiquant qu’une personne a été exposée à un
phénomène que son cerveau a interprété comme étant lié au sexe – sans rien
dire pour autant de son niveau d’envie.
Erreur de lubrification no 2 : penser que
réponse génitale = plaisir
La deuxième possibilité, un peu plus scientifique, de se tromper
dangereusement sur la non-concordance consiste à prêter attention à la
science puis à en donner une version erronée, à décider que les organes
génitaux des femmes sont «  le véritable indicateur  » de ce qui les excite
vraiment, et que les femmes mentent, sont dans le déni ou qu’elles refoulent
simplement leurs propres désirs profonds. Appelons ça  : erreur de
lubrification no 2.
Cette explication tentante – mais erronée – de la non-concordance est en
parfaite adéquation avec diverses idées culturelles fausses sur la sexualité
des femmes, comme les trois messages (Moral, Médical et Médiatique) que
j’ai décrits au chapitre 5 ou comme le mythe de l’homme comme point de
référence par défaut. Par exemple  : «  les femmes ont été socialement
programmées pour ne pas admettre qu’elles sont réellement excitées par
certaines choses (comme le sexe violent ou le porno lesbien), donc quand
elles font part de leur excitation perçue, soit elles mentent, soit elles nient
leurs désirs cachés, ou peut-être les deux. Mais ce que font leurs organes
génitaux, ça, c’est la vérité. »
L’ouvrage de Daniel Bergner Que veulent les femmes ? commence par
un état des lieux de la recherche sur la non-concordance, suivi d’un état des
lieux de la recherche sur la détection du mensonge. La conclusion que les
lecteurs sont contraints de tirer est la suivante  : les femmes mentent – ou
sont peut-être juste dans le déni – de leur propre excitation. Voici comment
Amanda Hess l’a résumé dans sa chronique parue sur Slate.com  : «  Les
femmes hétérosexuelles déclaraient réagir aux images de sexualité
hétérosexuelle plus qu’elles ne le faisaient dans la réalité, et les femmes
lesbiennes soutenaient réagir aux images de sexualité hétérosexuelle moins
qu’elles ne le faisaient dans la réalité. Personne n’a admis avoir une
réaction face à la sexualité des bonobos 16. »
Remarquez bien les mots «  déclaraient  », les «  dans la réalité  » et le
« admis ».
Bien sûr, vous savez que les organes génitaux des femmes réagissent
automatiquement à un signal lié au sexe – « C’est un restaurant ici » – qui
ne connaît que de très loin ce qu’une femme aime ou veut « vraiment ». Les
lecteurs de Que veulent les femmes  ? n’ont toutefois pas eu droit à cette
leçon, mais à l’erreur de lubrification no 2.
Les féministes qui promeuvent une sexualité positive acceptent
pleinement l’idée que le corps des femmes pourrait être en contradiction
avec les récits culturels obsolètes et fondés sur la moralité, selon lesquels
les femmes seraient « moins sexuelles » que les hommes : regardez comme
nos organes génitaux réagissent à tout ça ! Regardez comme nous sommes
vraiment sexuelles  ! Pas vrai  ? C’est une histoire séduisante – comme si
notre corps nous dévoilait un moi secret, sauvagement sexuel, qui pourrait
être branché par n’importe quoi si seulement nous nous donnions cette
permission que notre culture nous refuse depuis des siècles !
Après tout, les femmes ont été soumises à un système culturel oppressif
qui les a poussées à avoir honte de connaître leur propre sexualité et d’y
accorder une attention affectueuse – sujet traité au chapitre 5. En fait, tout
cet ouvrage est consacré à l’attention que vous portez à votre propre
expérience intérieure et à la confiance envers votre corps. Et qu’est-ce qui
sonne plus «  confiance envers son corps  » que de dire «  Vos organes
génitaux vous disent ce que vous appréciez, même si vous ne le savez
pas » ?
Ah.  C’est ce mot «  apprécier  » qui pose problème. «  Apprécier.  »
Comme dans « appréciation ».
Car la réaction des organes génitaux, ce n’est pas de l’appréciation  :
c’est de l’apprentissage.
Vos organes génitaux vous disent quelque chose, et vous pouvez leur
faire confiance.
Ils vous disent que quelque chose est lié au sexe, sur la base de leur
expérience du conditionnement pavlovien. « C’est un restaurant ici. » Mais
ça ne veut pas dire que c’est sexuellement attirant.
Faites confiance à votre corps, vraiment. Mais interprétez ses signaux
correctement.
Nous voyons ce mythe – selon lequel les organes génitaux d’une femme
peuvent nous en dire plus sur ce qu’elle ressent qu’elle-même – absolument
partout. Par exemple, dans le cadre de mes recherches pour ce livre, j’ai lu
le roman à succès Cinquante nuances de Grey de E. L. James. Et ce mythe
était bien présent. La non-concordance de l’excitation dans la première
scène de fessée. Bon, en tant que lectrice de ce genre de romans, je sais ce
qui est censé se passer dans la première scène de fessée d’un roman
d’amour. Notre héroïne devrait commencer la scène hésitante, mais excitée,
et à la fin elle devrait s’exclamer un truc comme : « Je sais que je ne devrais
pas aimer ça, pourtant j’aime tellement ça ! »
Ce n’est pas ce qui se passe ici. Notre héroïne, Anastasia, consent à la
fessée, mais elle ne la veut pas et ne l’apprécie pas. Pendant la fessée, elle
essaie de se détourner, elle crie de douleur, et elle a «  mal au visage,
tellement [elle] le crispe 17 ». Pas un mot sur le fait qu’elle apprécie la fessée
au moment de son administration.
Ensuite, Christian Grey, héros et distributeur de fessées, met ses doigts
dans le vagin d’Ana. Sachant ce que vous savez maintenant sur la non-
concordance, lisez donc ce que Grey lui dit : « Sens ça. Ton corps aime ça,
Anastasia. Tu es trempée, rien que pour moi  » (c’est moi qui insiste avec
l’italique) 18.
Et ça devient encore pire  : au lieu de croire sa propre expérience
intérieure, qu’elle décrit comme «  méprisée, avilie, maltraitée  », Ana le
croit, lui 19.
Ce moment semble vrai pour de nombreuses lectrices, car beaucoup
d’entre nous ont été éduquées à donner plus de crédit aux opinions des
autres sur notre propre corps, qu’à nos propres expériences personnelles. Il
y a certainement des femmes qui sont excitées par le fait d’être avilies de
manière consensuelle, mais toute l’intrigue repose sur le fait qu’Ana n’est
pas l’une d’entre elles.
Alors, E.  L. James, si vous lisez ceci  : la lubrification signifie que le
geste était lié au sexe, mais ne dit absolument pas si c’était sexuellement
attirant ou non. Aussi, je vous prie humblement de faire en sorte que, dans
la prochaine réédition, Christian dise à Ana : « Sens ça. Vois comment ton
corps considère le contact physique avec tes fesses et tes organes génitaux
comme étant lié au sexe, Anastasia. Ça ne me dit pas si tu as apprécié ou
non. As-tu apprécié  ? Non  ? Bordel de merde, laisse-moi me rattraper en
lisant le livre d’Emily Nagoski sur la science du bien-être sexuel des
femmes, pour que je me débrouille mieux la prochaine fois. »
Je vous remercie.
 
Si jamais vous doutez que la réponse génitale soit une question
d’apprentissage, sans nécessairement être liée à une motivation ou une
appréciation, souvenez-vous simplement de ceci  : l’erreur de lubrification
no 2 prétend que nous pouvons savoir ce qui excite vraiment les femmes en
observant la réaction de leurs organes génitaux. Autrement dit, les femmes
dont les organes génitaux réagissent aux images de bonobos copulant sont,
au fond, presque aussi intéressées par l’observation de primates non
humains copulant qu’elles le sont par le porno.
Vraiment ? Allons ! Un peu de sérieux.
Même mis en face de telles absurdités, ce mythe est incroyablement
tenace. Dans Comment mieux penser au sexe, Alain de Botton va jusqu’à
décrire les vagins lubrifiés et les pénis tumescents comme des « agents de
sincérité sans équivoque », car ils sont automatiques plutôt qu’intentionnels,
ce qui signifie qu’ils ne peuvent pas être « simulés ».
Si c’est vrai, alors lorsque votre médecin tape sur le tendon rotulien de
votre genou et que votre jambe se met à bouger, ça doit signifier que vous
avez réellement envie de donner un coup de pied à votre médecin.
Ou bien alors, si vous avez une réaction allergique au pollen, c’est que
vous devez détester les fleurs.
Ou quand vous avez l’eau à la bouche devant une pêche moisie et
abîmée, vous devez la trouver délicieuse.
Ne vous méprenez pas : vous pourriez tout à fait avoir envie de donner
un coup de pied à votre médecin, détester les fleurs et apprécier les pêches
moisies et abîmées. Mais ce ne sont pas vos processus physiologiques
automatiques qui nous permettent de le savoir. Non. Les processus
physiologiques automatiques sont… eh bien, automatiques, pas sincères.
Et pensez-y en vous mettant à la place de Céline Dion. A-t-elle envie
que son public ait la chair de poule ou qu’ils s’exclament  : «  J’ai des
frissons ! » même si leurs poils sont restés aplatis ? L’expérience l’emporte
sur la physiologie à chaque fois.
Mais il y a encore pire : et là, ça devient beaucoup moins drôle et bien
plus dangereux.
Si nous persistons à croire à tort que la réaction des organes génitaux
des femmes reflète ce qu’elles veulent ou aiment « vraiment », alors nous
devons conclure que si leurs organes génitaux réagissent lors d’une
agression sexuelle, ça signifie qu’elles ont «  vraiment  » voulu ou aimé
l’agression.
Ce n’est pas seulement fou : c’est dangereux.
«  Vous avez dit non, mais votre corps a dit oui  » est une idée qui
apparaît à la fois dans les paroles des chansons pop et dans les images du
Projet Unbreakable, une galerie en ligne de survivantes d’agressions
sexuelles tenant des pancartes avec des phrases prononcées par leurs
violeurs, leurs familles, ou même par les policiers 20. Mais vous savez
maintenant que les corps ne disent pas oui ou non, ils disent seulement
«  C’est lié au sexe  », sans aucun commentaire sur l’appréciation de
l’agression, et encore moins sur le fait qu’elle ait été voulue ou consentie.
Un pénis dans un vagin est lié au sexe, bien qu’il puisse être repoussant,
non désiré et inopportun. Aucun désir, plaisir ou consentement n’est
nécessaire pour avoir une réponse génitale. C’est juste une situation qui dit
« C’est un restaurant ici », sans jamais préciser si c’est un bon endroit pour
dîner.
C’est un raisonnement erroné ancien, cette idée que la physiologie peut
prouver qu’une personne aime quelque chose sur le plan sexuel. Jusqu’aux
années 1700, les gens croyaient que la conception était la partie agréable du
sexe pour une femme, et que si une femme tombait enceinte, c’est qu’elle
devait éprouver du plaisir, et si elle éprouvait du plaisir, alors le sexe ne
pouvait pas être non désiré 21. Parce que : « Elle a dit non, mais ses ovaires
ont dit oui. »
Ce mythe se perpétue toujours, apparaissant dans le discours public lors
de la course au Sénat de 2012 dans le Missouri, lorsque le candidat
républicain Todd Akin a déclaré  : «  Si c’est un véritable viol, le corps
féminin a des moyens d’essayer de mettre fin à cet acte », ce que même le
candidat mormon à la présidence Mitt Romney a décrit comme « insultant,
inexcusable et, franchement, immoral 22. »
La chercheuse en sexualité Meredith Chivers répète souvent  : «  La
réponse génitale n’est pas un consentement.  » Ajoutons à cela  : «  Et la
grossesse non plus. »
La réponse génitale n’est pas plus l’expression d’un plaisir, d’un désir
ou d’un consentement que ne l’est la fécondation d’un ovule. J’espère que
c’est pour vous une évidence maintenant.
Nous métaphorisons notre corps  ; nous utilisons des descriptions de
notre physiologie à la place de descriptions de notre état d’esprit. « Je suis
tellement mouillée  » et «  Je suis tellement dur  » visent à dire «  Je suis
partant(e)  ». Ces métaphores sont tellement ancrées dans les mentalités
qu’elles sont considérées comme littérales. En effet, certaines personnes
veulent en fait nous faire croire que les femmes mentent – que ce soit
délibérément ou parce que nous avons été culturellement empêchées de
reconnaître nos propres désirs – lorsque nos organes génitaux réagissent,
mais que nous affirmons ne pas être excitées.
J’espère que désormais, au bout de six chapitres de ce livre, vous êtes
plus avisée. Vous savez que la sexualité des hommes et celle des femmes
sont constituées des mêmes parties, mais organisées de manières
différentes, et vous savez qu’il n’y a pas deux personnes pareilles. Vous
savez que ce qui active l’accélérateur ou les freins dépend du contexte.
Vous savez que la sexualité des femmes est encore plus sensible au contexte
que celle des hommes, que les facteurs liés au développement, à la culture
et à l’histoire de vie déterminent tous profondément comment et quand
notre corps réagit. Vous savez que la sexualité et l’attirance sexuelle ne sont
pas la même chose.
Les femmes ne sont pas des menteuses, dans le déni ou cassées d’une
quelconque manière. Ce sont des femmes, et non des hommes, dans un
monde qui veut faire croire aux femmes qu’elles ne sont pas capables de
comprendre leur propre expérience intérieure.

Erreur de lubrification no 3 : penser que


la non-concordance est un problème
La troisième manière de se tromper dangereusement au sujet de la non-
concordance, c’est de décider qu’elle est le symptôme de quelque chose.
Supposons que vous reconnaissiez que la non-concordance existe, que
vous admettiez qu’elle est un apprentissage sans nécessairement indiquer
une appréciation ou une motivation, et que vous lisiez ensuite des
recherches qui montrent une corrélation entre la non-concordance et le
dysfonctionnement  sexuel 23. Et donc vous décidez que, à cause de ces
informations, parce que la non-concordance est associée à un trouble, alors
elle doit être un problème.
Ce qui m’amène à une phrase que tout étudiant qui suit un cours de
méthodologie devra connaître : « Corrélation n’est pas causalité. » Elle fait
référence au sophisme cum hoc ergo propter hoc – « à la suite de cela, donc
à cause de cela » – ce qui signifie que ce n’est pas parce que deux choses se
produisent conjointement que l’une a causé l’autre.
L’exemple par excellence au XXIe siècle est la relation entre les pirates et
le réchauffement climatique 24. C’est une blague de Bobby Henderson, dans
le cadre du système de croyances du pastafarisme. Henderson a voulu
mettre en évidence la différence entre causalité et corrélation, et a donc
dessiné un graphique qui semble indiquer que l’augmentation de la
température mondiale s’accompagne d’une chute brutale du nombre de
pirates des mers.
La disparition des pirates a-t-elle provoqué le réchauffement
climatique ?
Bien sûr que non. C’est absurde, n’est-ce pas ? C’est le but.
En fait, nous pouvons émettre l’hypothèse d’une troisième variable qui
a influencé à la fois la réduction du nombre de pirates et le changement du
climat mondial : la révolution industrielle.
Comme cette corrélation supposée entre les pirates et la température
mondiale, il existe également une corrélation entre la non-concordance et le
dysfonctionnement sexuel. Cette corrélation pousse facilement à croire que
la non-concordance est à l’origine du dysfonctionnement sexuel, ou que le
dysfonctionnement est à l’origine de la non-concordance.
Mais tout comme les pirates et la température mondiale peuvent être
liés par la révolution industrielle, la non-concordance et le
dysfonctionnement sexuel sont liés par une troisième variable : le contexte.
Comment le contexte lie-t-il le fonctionnement sexuel et la
concordance ?
Les femmes sexuellement actives ont des freins qui sont sensibles au
contexte, et les désactivent lorsqu’elles se trouvent dans le bon contexte –
ce qui, rappelons-le, implique à la fois des circonstances extérieures et un
état mental intérieur. Les freins des femmes sexuellement dysfonctionnelles
restent appuyés, même dans des contextes où l’on s’attendrait à ce qu’ils se
relâchent.
Je vais illustrer mon propos par une étude extraordinairement
intelligente publiée en 2010. Des chercheurs néerlandais ont construit un
« laboratoire ambulatoire » – un kit à emporter à la maison comprenant un
pléthysmographe, un ordinateur portable et une unité de contrôle portable 25.
Les participantes ont subi des tests en laboratoire semblables à ceux
effectués dans le cadre d’autres recherches sur la non-concordance –
observation de stimuli érotiques et mesure de diverses réponses
automatiques et conscientes – et ont emporté le laboratoire ambulatoire
chez elles, où elles se sont également testées elles-mêmes. Les chercheurs
ont ainsi pu mesurer l’influence de leur présence dans le laboratoire sur les
résultats, par rapport à leur présence à la maison. En d’autres termes, ils ont
mesuré l’effet du contexte. Ils ont étudié deux groupes : huit femmes ayant
un fonctionnement sexuel sain (le groupe témoin) et huit femmes qui
répondaient aux critères diagnostiques du «  trouble du désir sexuel
hypoactif » (le groupe « à faible désir »).
Résultat : la réponse génitale et l’excitation subjective du groupe témoin
ont plus que doublé lors des tests effectués à la maison, par rapport à ceux
effectués en laboratoire. De plus, les participantes de ce groupe ont déclaré
se sentir «  moins inhibées  » et «  plus à l’aise  » à la maison. La réponse
génitale du groupe à faible désir a également doublé à la maison… mais
leur excitation subjective n’a pas doublé, et les participantes de ce groupe
n’ont pas non plus déclaré se sentir moins inhibées ou plus à l’aise. Ce qui
veut dire qu’elles étaient moins concordantes parce que leurs freins ne se
désactivaient pas. Le simple fait d’être à la maison n’a pas suffi à couper les
freins des femmes à faible désir.
Les femmes sexuellement satisfaites étaient plus sensibles que les
femmes à faible désir au changement de contexte du laboratoire à la
maison. Plus précisément, des recherches récentes ont montré que les
femmes jouissant d’une sexualité saine ont une meilleure concordance si
leurs freins sont moins sensibles 26.
Que ce soient les circonstances extérieures ou l’expérience intérieure
qui appuient sur les freins, le contexte est fondamental pour le bien-être
sexuel de la plupart des femmes. Le contexte est à la fois le point central et
la clé. Le contexte est la cause.
Voici un truc qui m’arrive parfois  : une femme arrive dans mon cabinet, traînant son mari
derrière elle, et me lance : « Dites-lui ce que vous m’avez dit. »
Laurie l’a fait avec Johnny lors d’un buffet organisé pour un déjeuner.
« Dis-lui ce que tu m’as dit, Emily. Le truc sur l’excitation. Dis-lui, s’il te plaît.
– Il ne t’a pas crue ?
– Il pense que j’ai dû “mal comprendre”. »
Alors je lui ai dit : « D’accord, Johnny. Je sais que c’est le contraire de tout ce que tu as
appris sur le sexe, mais c’est vrai : l’état du vagin de Laurie ne révèle pas nécessairement son
état d’esprit. »
Elle lui a alors donné une tape sur le bras du revers de la main et a haussé les sourcils,
comme pour dire : « Tu vois ? »
Il s’est tourné vers moi, puis vers elle, puis vers moi de nouveau, et il a ouvert la bouche
pour poser une question, puis il l’a refermée.
Puis il a dit à Laurie : « Va faire un tour, chérie. »
Elle s’est éloignée, non sans m’avoir jeté un regard complice avant.
Il m’a murmuré sur le ton de la confidence :
« Si je ne peux pas me fier à sa vulve… Alors comment savoir si elle a vraiment envie de
moi ? Parce qu’elle pourrait tout simplement dire ça juste pour en finir. »
Johnny est un type viril, le genre un peu brut qui aime réparer des trucs. Je l’aime
beaucoup, et souvent mon rôle consiste à lui traduire la science du bien-être sexuel féminin en
langage compréhensible. Je commence donc par lui expliquer :
« Penses-y en ces termes : l’excitation n’a pas lieu dans ses organes génitaux, mais dans
son cerveau. »
Ensuite, je lui ai décrit le mécanisme de réponse sexuelle comme une série d’interrupteurs
On et Off, chacun associé à un certain type de données (les sensations génitales, la satisfaction
au sein de la relation, le stress, l’attachement,  etc.) qui va allumer ou éteindre un des
interrupteurs.
Les mécanismes de réponse sexuelle des hommes et des femmes ont le même ensemble de
curseurs et d’interrupteurs, mais qui ont tendance à être réglés à des niveaux de sensibilité
différents, de sorte qu’un peu de stimulation génitale suffit à activer l’interrupteur pour les
hommes, tandis qu’un peu de stress suffit à le désactiver chez les femmes. J’ai expliqué que la
vie de Laurie causait l’extinction de tous ses interrupteurs.
Il m’a dit :
« Tu dis que la plus grosse influence que je ressens vient de mon corps, mais que sa plus
forte influence vient de sa… vie ?
– Tout à fait !
–  Donc pour pirater le système, je dois faire attention à ce qui active ses freins, parce
qu’une fois qu’ils sont relâchés, l’accélérateur prend le relais. J’ai bien compris ?
– Oui, complètement. Je pense qu’elle a écrit une liste de trucs qui activent ses freins…
– Elle l’a fait. Je l’ai vue. Je ne savais pas quoi en faire, mais maintenant… »
Il m’a dévisagée pendant un moment, avant de secouer la tête et d’ajouter :
« Ça change vraiment tout. Ce que ça veut dire, c’est que le truc le plus sexy que je puisse
faire, ce n’est pas un genre de folie érotique. Le truc le plus sexy que je puisse faire, c’est de
couper autant de freins que possible, ce qui est… Je veux dire, je peux faire ça. Mais…
pourquoi personne ne m’a dit ça avant ? »

« Chéri… Je suis non concordante ! »


Si vous avez un corps qui n’est pas toujours en phase avec votre esprit,
alors votre corps défie la sagesse conventionnelle (et erronée), et vous
pourriez vous retrouver obligée de corriger la compréhension de votre
partenaire. Il y a trois points à retenir, qui peuvent résoudre tout problème
que votre non-concordance peut générer.
Premièrement, n’oubliez pas que vous êtes en bonne santé,
fonctionnelle et entière. Votre corps n’est pas cassé et vous n’êtes pas folle.
Votre corps fait ce que les corps font, et c’est magnifique. Hourra ! Sachez
que vous êtes normale. Dites à votre partenaire que vous êtes normale.
Dites-lui ça calmement, joyeusement et avec confiance. Pas besoin d’être
sur la défensive ou agressive : ce n’est pas de sa faute s’il n’y connaît rien à
la non-concordance. En fait, c’est plutôt ma faute et celle de tous les autres
sexothérapeutes et chercheurs en sexualité. Nous n’avons pas réussi à
communiquer correctement ce concept au monde entier, et vous êtes
maintenant obligée de réparer notre erreur. Je suis désolée. Alors, présentez-
lui toutes mes excuses, au nom de tous les sexothérapeutes et chercheurs du
monde, puis exposez-lui les faits :

« Emily Nagoski est désolée que tu ne saches pas déjà que la


réaction génitale n’est pas un indicateur fiable du plaisir ou du désir.
Néanmoins, c’est vrai. Ce que font mes organes génitaux ne
correspond pas nécessairement à ce que je ressens. Trente ans de
recherches le confirment. Alors s’il te plaît, fais attention à mes
mots, pas à mon vagin. »

Vous n’avez pas vraiment besoin de vous excuser de ma part, vous


pouvez aussi m’envoyer un e-mail et me demander  : «  Pourriez-vous s’il
vous plaît envoyer à mon partenaire un e-mail d’excuse concernant le fait
qu’il n’était pas au courant de la non-concordance  ?  » et je le ferai moi-
même. Sérieusement, je le ferai.
Voici d’autres éléments auxquels votre partenaire peut être attentif si
vos organes génitaux ne le renseignent que sur votre apprentissage, et pas
votre appréciation :
votre respiration. Le rythme de la respiration et le pouls accélèrent avec
l’excitation. Vous commencez aussi à retenir votre souffle lorsque vous
atteignez le niveau d’excitation le plus élevé, votre diaphragme et votre
plancher pelvien se contractent ;
la tension musculaire, en particulier dans l’abdomen, les fesses et les
cuisses, mais aussi dans les poignets, les mollets et les pieds. Lorsque la
tension vous traverse par vagues, votre corps se cambre dans un sens et
dans l’autre. Chez certaines femmes, dans certains contextes, c’est
flagrant. Pour d’autres, ou dans d’autres contextes, c’est plus subtil ;
et, le plus important, vos paroles. Vous seule pouvez dire à votre
partenaire ce que vous voulez et ce que vous ressentez. Toutes les
femmes ne sont pas aussi à l’aise pour parler de leur désir et de leur
excitation, mais vous pouvez résumer avec un « oui » ou un « encore ».

Deuxièmement  : il ne faut pas se préoccuper d’une réponse


physiologique, d’un comportement ou de tout autre indice en particulier. Il
convient de faire preuve d’une vigilance d’ensemble large et réceptive.
Proposez à votre partenaire de vous observer non pas à la loupe, mais avec
le mauvais bout d’un télescope, ou comme un maître d’échecs observe un
échiquier, à la recherche de schémas et de dynamiques à grande échelle.
Votre partenaire devrait faire attention comme un chef cuisinier goûte ses
plats, non seulement pour leurs saveurs individuelles, mais aussi pour
prendre conscience de la manière dont les saveurs se combinent et créent un
mets unique, nouveau et délicieux.
 
Troisième et dernier point  : remédiez à tout manque de lubrification
ponctuelle en utilisant le liquide de votre choix. Il peut s’agir de votre salive
ou de celle de votre partenaire (lorsqu’il n’y a pas de risque de transmission
d’infection), des fluides génitaux de votre partenaire (idem), de lubrifiant
acheté en magasin – n’importe.
À quoi sert le lubrifiant ? À réduire la friction, ce qui peut accroître le
plaisir, et à toujours diminuer le risque de déchirure et de douleur. Par
ailleurs, ajoutez toujours du lubrifiant si vous utilisez des barrières de
protection comme les préservatifs ou les digues. Le lubrifiant augmente leur
efficacité et les rend plus agréables. Le lubrifiant est votre ami. Le lubrifiant
améliorera votre vie sexuelle 27.
Parfois, les gens sont mal à l’aise avec l’idée de recourir à des sources
extérieures de lubrifiant dans leurs relations sexuelles. Cette hésitation peut
être due à un certain nombre d’événements de la vie ou à une simple
inexpérience en la matière, ou encore au sentiment que l’utilisation de
lubrifiant signifie que vous êtes en quelque sorte inadaptée. Souvenez-vous
du fondement moral de la sainteté  : les choses liées au sexe sont classées
comme « sales », même si c’est un flacon rempli du même produit que l’on
retrouve dans de nombreux cosmétiques capillaires.
Mais vous savez maintenant que l’afflux sanguin génital a sa propre
manière d’être dans le monde, qui peut ou non avoir un rapport avec votre
plaisir ou votre désir sexuel. Vous savez que le lubrifiant est important, car
il réduit les frottements, ce qui améliore à la fois la santé et le plaisir. Et
vous savez que vous pouvez choisir les croyances que vous entretenez et
celles dont vous vous débarrassez.
Si vous décidez de vous servir de lubrifiant, voici quelques conseils
pour en parler avec votre partenaire :
Batifolage, curiosité et humour. Il est littéralement impossible d’être
stressée ou anxieuse vis-à-vis d’un sujet lorsque votre approche est
ludique, curieuse et amusante. Laissez-vous aller à la sottise, laissez-
vous aller au plaisir. C’est une question de plaisir, vous vous souvenez ?
Faites en sorte que votre partenaire se sente comme un superhéros.
Communiquer sur la sexualité est parfois risqué, car, par-dessus tout,
vous ne voulez pas froisser votre partenaire. Le raccourci le plus simple
pour éviter de blesser votre partenaire, c’est de lui parler de tout ce qu’il
fait bien, de tout ce qu’il peut faire pour augmenter votre plaisir au-delà
de ce qu’il fait déjà, et de tout le plaisir que vous espérez atteindre en
intégrant ce nouvel élément à votre relation sexuelle.
Choisissez soigneusement votre lubrifiant. Tous les lubrifiants ne sont
pas créés égaux. Souvent, il est préférable de choisir un lubrifiant avec
votre partenaire : allez en magasin ensemble et choisissez un produit qui
vous plaît à tous les deux, afin de vous y investir sur un pied d’égalité.

Camilla a expliqué la non-concordance à Henry. Pour elle, la non-concordance était un parfait


exemple démontrant que le discours culturel ne lui avait pas dit la vérité, et elle était plutôt
contente de constater qu’elle était, une fois de plus, totalement normale.
Ça a été un peu plus compliqué pour Henry, parce qu’il tentait encore de comprendre tout
le truc du désir et de la motivation. Il essayait de se familiariser avec l’idée d’une différence
entre la version «  freins  » du non-désir – «  Je veux que ça s’arrête  » – et la version
« accélérateur » du non-désir – « J’aime ça, mais je n’ai pas envie d’en avoir plus ».
Il a déclaré :
« Je comprends que la réaction des organes génitaux ne me dit rien de ce qui t’excite. Tu
me dis ce qui t’excite, et je te crois. Mais ce que je ne comprends pas, c’est comment tu deviens
excitée sans d’abord avoir envie de ce qui t’excite. »
Ce qui est peut-être l’élément le plus complexe – et le plus controversé – du bien-être
sexuel.
La réponse à la question de Henry est la suivante  : le plaisir vient
d’abord – avant le désir.
Et le désir est le sujet du chapitre 7.
En résumé

L’afflux sanguin vers les organes génitaux est une réponse à des
stimuli liés au sexe (apprentissage), ce qui n’est pas pareil que
l’appréciation ou la motivation, et encore moins que le
consentement.

Les hommes et les femmes semblent être différents dans la


concordance de leur réponse génitale et de leur excitation
subjective. Mais, comme dans tous les autres chapitres, cette
différence entre les femmes et les hommes ne signifie pas que les
femmes sont cassées ; ça veut juste dire que ce sont des femmes.

La non-concordance de l’excitation n’est pas un symptôme de quoi


que ce soit  ; c’est juste une partie normale du fonctionnement du
sexe, parfois. Si vous avez besoin de lubrifiant, utilisez du
lubrifiant !

La meilleure façon de savoir si une personne est excitée n’est pas


d’étudier ce que font ses organes génitaux, mais d’écouter ce qu’elle
dit.
CHAPITRE 7

Le désir
Spontané, réactif et fantastique
C’est un constat de base de leur relation  : Olivia a plus souvent envie de faire l’amour que
Patrick, et c’est donc elle qui prend l’initiative la plupart du temps. Mais ce qu’Olivia a vécu, le
soir où elle a été la cible de la convoitise effrénée de Patrick nourrie par un placebo, lui a fait
prendre conscience qu’elle aimait être ouverte au sexe, sans se sentir animée par une envie
irrépressible. Ça lui a bien plu de laisser le désir sexuel l’attirer progressivement et délicatement
vers le sexe, plutôt que d’avoir l’impression qu’il la pousse. Alors, comme étape suivante de
leur expérience, ils ont essayé d’inverser complètement leur dynamique habituelle. Ils se sont
fixé un « rendez-vous d’un soir » et n’ont rien fait pour s’y préparer ; ils se sont juste présentés
dans leur état d’esprit habituel — Olivia prête à se lancer, Patrick pas désintéressé, mais pas
activement intéressé non plus.
Et ils ont fait en sorte qu’Olivia suive la danse, et que Patrick la mène, en commençant à
explorer ce qui activait son intérêt sexuel. Ils ont passé beaucoup de temps à « préchauffer le
four » : ils se sont embrassés, ont discuté, se sont massés et, fait surprenant, ont même fait une
petite escapade en passant de la chambre à coucher à la cuisine pour se nourrir mutuellement.
Lorsque Patrick était aux commandes avec la pleine permission de faire tout ce qui lui venait à
l’esprit, ils ont essayé de nouvelles choses et joué ensemble. Ils ont beaucoup appris sur le
contexte qui fonctionnait pour Patrick, car il devait créer ce contexte et oser demander ce qui lui
plaisait.
Ils ont aussi appris un détail surprenant à propos d’Olivia  : si elle reste assez longtemps
tranquille afin d’avancer au rythme de Patrick plutôt qu’au sien, naturellement plus rapide, la
montée en puissance progressive, l’excitation prolongée et la nécessité de se retenir créent un
contexte qui n’est pas aussi bien que celui qui fonctionnait pour elle. Il est incroyablement
meilleur.
Olivia m’a confié :
«  L’une de nos règles stipulait que je devais demander la permission avant d’avoir un
orgasme. Et il ne répondait pas toujours oui. Et, euh, ça on va le refaire.
– Qu’est-ce qui t’a plu là-dedans ? »
Olivia est devenue sérieuse, mais rayonnait en même temps. Elle a expliqué :
« C’était comme… quand on réussissait à se synchroniser et qu’on montait tous les deux
vers l’orgasme au même rythme, délibérément, et qu’on, comme… c’était comme si je pouvais
sentir son plaisir dans mon corps. Je pouvais même sentir mon propre plaisir dans son corps.
Est-ce que ça semble fou ?
– Pas le moins du monde », ai-je déclaré.
Créer un contexte sexuellement positif pour le partenaire qui a un faible désir a donné lieu
à un contexte époustouflant, presque douloureusement érotique pour le partenaire au désir plus
élevé.
Ce chapitre explique pourquoi et comment ça marche.

Imaginez un monde où tout le monde a des plantes du désert dans son


jardin – des aloe vera et des dragonniers des Canaries, des amsinckias et des
yuccas – et où tout le monde sait comment les entretenir  : beaucoup de
soleil, très peu d’eau.
Imaginez ensuite que vous, dans votre jardin, vous ayez un plant de
tomate.
Tout le monde «  sait  », dans ce monde désertique, que les plantes ont
besoin de très peu d’eau, alors vous arrosez votre plant de tomate avec
modération… et il meurt lentement. Vous vous demandez : « Peut-être que
je l’arrose trop souvent ? Peut-être qu’il n’y a pas assez de soleil ? » Et vous
continuez à arroser et à surveiller, et vous vous demandez : « Pourquoi ma
plante meurt-elle ? Je fais ce que je suis censée faire ! »
Un petit glissement dans les connaissances (le simple fait que les plants
de tomates sont plus adaptés à un climat subtropical qu’à un désert, et qu’ils
poussent donc mieux avec plus d’eau) peut changer votre méthode de
culture… ce qui peut redonner vie à votre plant de tomate.
Bien sûr, si quelqu’un vient vous présenter cette information, certains
affirmeront : « Les plantes n’ont pas besoin de beaucoup d’eau, c’est aussi
ce qui en fait une plante en bonne santé. » D’autres diront : « Les plants de
tomates sont fous – cassés ! – d’avoir besoin de toute cette eau ! » D’autres
encore chercheront un remède pour le plant de tomate, pour le faire
ressembler davantage à un aloe vera. Et il y aura des jardiniers spécialisés
dans la culture de la tomate qui ne pourront tout simplement pas se défaire
de l’idée qu’ils sont supposés être capables de produire des fruits abondants
avec presque pas d’eau du tout, et qui feront tout pour avoir un plant de
tomate qui prospère dans le désert.
Mais vous, vous essayez  : vous donnez plus d’eau à votre plant de
tomate.
Et vous passez de «  Pourquoi est-ce que ma plante meurt  ?  » à
« Ouah ! », parce que vous êtes récompensée par une profusion de tomates
et de belles feuilles luxuriantes et odorantes. Tout ça grâce à un minuscule
virage dans les connaissances.
Ce chapitre traite d’un de ces minuscules changements de
connaissances, qui peut faire passer votre relation avec votre bien-être
sexuel de « Pourquoi est-ce qu’elle meurt ? » à « Ouah ! ».
Le discours traditionnel sur le désir sexuel se résume à dire qu’il
apparaît, tout simplement : vous êtes assise pour manger, ou vous marchez
dans la rue, vous voyez peut-être une personne sexy ou vous avez une
pensée sexy, et paf ! vous vous dites : « J’aimerais faire l’amour ! » C’est le
fonctionnement habituel d’Olivia. On appelle ça le désir « spontané ».
Mais certaines personnes constatent qu’elles ne commencent à avoir
envie de sexe qu’après que des choses sexy se sont déjà produites. Plutôt
que d’anticiper le sexe avec avidité, elles ont peut-être une motivation tout à
fait pragmatique pour se présenter à 19 heures le samedi soir, parce que leur
rendez-vous galant est inscrit à l’agenda. Elles mettent leur corps dans le lit,
laissent leur peau toucher celle de leur partenaire… et là, leur corps se
réveille et s’exclame : « Oh, c’est vrai ! J’aime bien cette personne ! J’aime
ça ! » C’est le désir réactif.

Là où le désir spontané apparaît en anticipation du plaisir, le désir


réactif émerge en réponse au plaisir.

Et c’est normal. Les personnes qui ont un désir réactif n’ont pas de désir
« faible », elles ne souffrent d’aucun trouble, elles n’ont même pas envie de
prendre les devants, et ont de toute façon l’impression qu’on ne leur en
donne pas le droit. Leur corps a juste besoin d’une raison plus convaincante
que simplement « le sexe est généralement sympa » ou « c’est une personne
attirante juste devant toi  » pour avoir envie de sexe. Elles peuvent être
sexuellement satisfaites et avoir des relations saines, mais ne jamais avoir
envie de sexe à l’improviste. Camilla est comme ça. L’absence de désir
sexuel spontané n’est pas, en soi, dysfonctionnelle ou problématique ! Je le
répète : le désir réactif est normal et sain.
Mais, pour être honnête, il s’avère que le désir sexuel de tout le monde
est réactif. Il est juste ressenti comme plus spontané chez certains et plus
réactif chez d’autres, parce que même si nous sommes tous faits des mêmes
parties, l’organisation unique de ces parties donne lieu à des expériences
différentes. Les études sur le sujet semblent indiquer qu’environ la moitié
des femmes pourraient être classées dans l’une ou l’autre catégorie : désir
spontané ou réactif 1. Le style de désir de la plupart des gens est
probablement – roulements de tambour – dépendant du contexte. C’est le
cas de Merritt et Laurie. Et elles sont normales, elles aussi. Ce sont des
femmes qui, dans la phase torride et passionnée d’une relation, vont avoir
envie de sexe n’importe quand, mais qui dix ans et quelques enfants plus
tard, ont besoin d’un effort un peu plus délibéré pour s’intéresser au sexe.
Aussi, dans ce chapitre, j’expliquerai ce qu’est le désir, comment il
fonctionne, comment en profiter au maximum et ce qu’il faut faire si votre
partenaire et vous avez des styles de désir différents.
Nous commencerons par l’origine du désir : le désir, c’est le plaisir en
contexte 2. Nous nous attarderons sur ce qui est le moins susceptible de
causer des problèmes de désir – les hormones et la monogamie – et sur ce
qui est beaucoup plus susceptible d’en provoquer : la culture sexuellement
négative et la dynamique de poursuite. Nous conclurons ce chapitre par un
virage à gauche, en nous éloignant du simple «  désir  » pour nous diriger
vers ce qui importe vraiment : le sexe qui vaut la peine d’être désiré.

Le désir = le plaisir en contexte


Même si les détails varient d’une personne à l’autre, nous pouvons éprouver
du désir de bien des manières, selon le contexte et la sensibilité de nos
freins et de notre accélérateur. Pour illustrer cette idée, prenons trois
scénarios différents, chacun présentant la même stimulation, les mêmes
freins et le même accélérateur, mais des contextes différents.
Scénario 1

Vous vous sentez très calme, heureuse et en confiance, vous ne faites rien
de particulier et votre partenaire s’approche et vous caresse le bras, très
affectueusement. Cette sensation tactile remonte de votre bras à votre
colonne vertébrale et jusqu’à votre cerveau. Compte tenu de votre état
d’esprit, le trafic dans votre système nerveux central est très tranquille, et la
sensation de la peau de votre partenaire dit : « Alors, ce toucher est en train
de se produire. Qu’en penses-tu ? » et votre cerveau répond : « L’affection,
c’est agréable. »
La stimulation se poursuit, votre partenaire bien-aimé vous touche
affectueusement le bras, et la sensation remonte jusqu’à votre cerveau et
vous dit  : «  Ça recommence. Qu’en penses-tu  ?  » Et votre cerveau vous
répond : « L’affection, ça fait vraiment du bien  », et il accorde davantage
d’attention à cette sensation. Ensuite, votre partenaire commence à vous
embrasser le cou, et cette sensation fait son chemin jusqu’à votre cerveau
émotionnel et dit : « Maintenant, ça aussi, ça se passe. Qu’est-ce que tu en
penses ? Et à ce moment-là, le cerveau dit : “C’est fantastique ! Essaie d’en
avoir plus !” » Dans ce contexte, le désir sexuel est réactif.

Scénario 2
Vous êtes stressée, épuisée ou débordée, votre cerveau est très bruyant, le
trafic y est dense, vous subissez les nombreux cris et coups de Klaxon liés à
tous les facteurs de stress. La caresse affectueuse de votre partenaire part de
votre bras, remonte votre colonne vertébrale jusqu’au cerveau, et dit  :
« Ceci est en train de se produire. Qu’est-ce que tu en penses ? » Et votre
cerveau vous répond  : «  QUOI  ? JE N’ARRIVE PAS À T’ENTENDRE PAR-DESSUS
TOUT CE RAFFUT ! » Et à cet instant, la sensation cesse. (Les sensations sont
un peu comme sur les stories d’Instagram.) Si votre partenaire continue de
vous toucher, la sensation continue de demander à votre cerveau  : «  Ça
continue de se produire. Qu’est-ce que tu en penses ? » Et ça peut en fin de
compte attirer l’attention de votre cerveau, qui peut alors vous rétorquer  :
« TU TE MOQUES DE MOI ? J’AI TOUT CE BRUIT À GÉRER ! » Et si la sensation est
suffisamment remarquée pour sortir de l’Anneau Unique émotionnel de
votre cerveau, elle se manifeste sous la forme « Pas maintenant, chéri ».

Scénario 3
Votre partenaire super sexy est absent depuis deux semaines, mais vous
vous envoyez fréquemment des SMS, juste un peu coquins au début, mais
dont l’intensité et le caractère explicite augmentent à mesure que vous vous
taquinez et vous cherchez l’un l’autre. Au bout de ces deux semaines, le
bruit de votre téléphone à la réception d’un texto suffit à vous faire
tressaillir et retenir votre respiration. Il y a du bruit dans votre cerveau, mais
il est entièrement occupé à scander : « Partenaire sexy, sexy ! » Le temps
que votre partenaire rentre chez vous et vous touche affectueusement le
bras, vous êtes prête à décoller comme une fusée. Dans ce contexte, le désir
sexuel est ressenti comme spontané 3.
Dans les trois scénarios, la stimulation vient en premier, qu’il s’agisse
de la caresse de votre partenaire ou simplement de l’idée de la caresse de
votre partenaire. Si le contexte est favorable, la stimulation procure une
sensation de bien-être et suscite le désir. Ces trois scénarios sont tous trois
normaux, et reflètent une sexualité saine. Parfois, la stimulation peut ne pas
être agréable, mais elle peut quand même conduire au désir – l’envie sans le
plaisir. Ceci aussi peut être signe d’une sexualité normale et saine, mais
comme nous le verrons vers la fin du chapitre, le désir sans plaisir n’illustre
pas la sexualité des personnes qui ont une bonne ou une excellente relation
sexuelle.
Tout ça pour dire que si vous souhaitez élargir votre accès au désir
spontané, il vous suffit de rechercher les contextes qui le facilitent.
Retournez aux fiches de travail du chapitre 3 et examinez quelles sont les
caractéristiques de votre partenaire, de votre relation, du contexte, les
facteurs ludiques et autres circonstances de la vie qui créent un plaisir
menant à un désir ardent. Voyez ensuite lesquelles de ces caractéristiques
vous pouvez modifier dans votre vie pour créer un désir spontané. Et si
votre vie ne permet pas actuellement d’aménager un contexte qui facilite le
désir spontané, vous savez que vous êtes normale. Vous pouvez profiter
d’un désir réactif jusqu’à ce que vous trouviez le chemin d’une vie
quotidienne qui permette le désir spontané.
Ainsi, le désir sexuel émerge en réaction au plaisir.
Quand il fonctionne.
Ce qui n’est pas toujours le cas.
Qu’est-ce qui fait que le désir se comporte mal, et que faites-vous le cas
échéant  ? Selon leurs propres déclarations, qui vous sembleront
probablement familières, si les femmes voient leur désir diminuer, c’est à
cause de  : l’épuisement, des problèmes de santé mentale et physique, des
changements dans l’image corporelle, le sentiment d’être débordée par leurs
nombreux rôles et obligations, et une anxiété et une inquiétude par rapport
au sexe lui-même – des préoccupations allant d’une grossesse non désirée à
la crainte « de mettre trop de temps » à être excitée, en passant par le fait de
ne pas répondre aux attentes du partenaire 4.
Dans les sections suivantes, je parlerai des coupables peu crédibles des
problèmes de désir (les hormones et la monogamie) et des coupables les
plus vraisemblables  : les messages culturels qui activent les freins et le
problème relationnel que j’appelle «  la dynamique de poursuite  ». Je
parlerai ensuite de la recherche innovante menée sur les personnes qui ont
une vie sexuelle extraordinaire et qui entretiennent des relations sexuelles
pendant de nombreuses années.
Camilla et Henry avaient accepté son « préchauffage érotique lent » et œuvraient ensemble pour
trouver les contextes qui activaient son accélérateur. Mais Henry ressentait toujours un malaise
lancinant, car il avait l’impression d’imposer des choses à Camilla pour l’exciter alors qu’elle
n’était pas encore « d’humeur ». Cela semblait quelque peu contre-nature.
Parfois, vous pouvez voir l’instant précis où la personne en face de vous comprend une
information que vous lui donnez : une lueur s’allume dans son regard. C’est ce qui s’est produit
lorsque j’ai expliqué à Camilla et à Henry qu’en fait, son style de désir était tout à fait normal.
«  Le plaisir vient en premier, avant le désir, pour tout le monde, pas seulement pour
Camilla, ai-je déclaré.
– Le plaisir vient en premier ? s’est étonné Henry.
–  Oui. Le désir émerge quand le plaisir franchit le seuil individuel de chaque personne.
Camilla, il se trouve que tu as un seuil élevé, mais c’est le même processus de base pour tout le
monde.
– Tu te moques de moi, a dit Camilla. Sérieusement, la culture pop a-t-elle réussi à faire un
truc bien en matière de sexe ? »
Henry ne m’a pas laissé le temps de répondre – pour lui, c’était important pour lui d’avoir
enfin la solution à son dilemme « exciter-ou-pas-Camilla-quand-elle- ne-veut-pas-encore ».
« Tu veux dire que nous avons juste des seuils différents, c’est bien ça ?
– C’est bien ça. »
Pour Henry, parfois, le simple plaisir de voir Camilla se balader nue après la douche
suffisait à faire naître son désir. Il a expliqué :
« Et j’aime ça ! J’aime la voir se promener tout humide et nue. Je ne veux pas qu’elle arrête
de le faire juste parce que je n’étais pas excité avant d’assister à cette scène. Alors… si
l’équivalent est vrai pour toi, a-t-il ajouté en se tournant vers Camilla, je n’ai pas à me sentir
mal à l’aise de créer des contextes similaires pour toi, n’est-ce pas ?
– Je veux que tu le fasses ! s’est exclamée Camilla. Taquine ma veilleuse qui fait tic-tic-
tic ! Augmente la pression de l’eau ! »
C’est donc ce qu’ils ont décidé de faire. Henry a transformé tous leurs échanges en
préliminaires discrets, sans pression et sans attente, comme ses balades après la douche sont en
quelque sorte des préliminaires basiques pour lui. Câlins et caresses. Baisers doux. Fleurs.
Attention affectueuse. Comme quand ils sont tombés amoureux pour la première fois – un flot
constant et régulier de rappels que « Ce type est incroyable ! ».
Henry aime le désir enthousiaste de Camilla, et tout ce qu’il faut pour qu’elle y arrive, c’est
suffisamment de plaisir, accumulé petit à petit.
Ce n’est pas une histoire que l’on voit très souvent dans la culture pop, car il n’y a ici ni
tension ni ambivalence. Mais il s’avère que c’est ainsi que ça se passe pour de nombreux
couples qui entretiennent une relation sexuelle solide sur le long terme.
Bonne nouvelle ! Ce n’est probablement
pas dû à vos hormones
Si vous ressentez des douleurs lors des rapports sexuels, consultez un
médecin. Il se peut que des problèmes hormonaux, ou divers facteurs
neurologiques et physiologiques, en soient à l’origine. Mais si vous
éprouvez un faible désir, les hormones sont les moins susceptibles d’en être
responsables 5. Lori Brotto et ses collègues ont testé six facteurs hormonaux
pour déterminer lequel prédisait plus ou moins de perturbations chez les
femmes ayant un faible désir, et aucun d’entre eux n’était significativement
prédictif de faible désir 6. Donc, si ce ne sont pas vos hormones, qu’est-ce
qui pourrait être un facteur prédictif du manque de désir, selon les
chercheurs  ? Pour Brotto  : «  Les antécédents psychiatrique,
développemental et psychosexuel.  » En d’autres termes, tous les éléments
évoqués aux chapitres  4 et  5 – le stress, la dépression, l’anxiété, les
traumatismes, l’attachement, etc.
Les gens sont parfois plus à l’aise avec l’idée que leur désir sexuel est
lié à leur chimie et pas du tout à leur vie. Après tout, de nos jours, il est
facile de modifier sa chimie  ! Mais les hormones sont une partie limitée,
souvent négligeable, du contexte qui façonne le bien-être sexuel d’une
femme, de sorte que les changer ne pourrait avoir qu’un effet limité,
souvent négligeable.

Le stress, l’autocompassion, les antécédents traumatiques, la


satisfaction dans la relation et les autres facteurs émotionnels ont
bien plus d’influence sur le désir sexuel d’une femme qu’une
quelconque hormone.

Si vous éprouvez parfois un faible désir, à moins qu’un problème


médical ne s’immisce, il y a de fortes chances que vous n’ayez pas besoin
de vous réparer (vous n’êtes pas cassée)  : vous devez seulement changer
votre contexte.
LE SEXE N’EST PAS UNE PULSION
La plupart d’entre nous ont l’habitude de voir le désir sexuel comme une pulsion, comme
la faim. Une pulsion est une expérience interne inconfortable qui vous pousse à agir pour
résoudre un problème. Et que se passe-t-il si vous n’y parvenez pas ? Au bout du compte,
vous mourrez. La faim est une pulsion. Tout comme la soif. La  thermorégulation. Le
sommeil – vous pouvez littéralement mourir en cas de privation de sommeil.
Pendant des siècles, les scientifiques ont cru que le sexe était une pulsion. C’est
probablement comme ça que vous le considérez aussi. C’est comme ça que je l’ai vu
pendant longtemps.
Il s’avère que non.
C’est facile de prouver que le sexe n’est pas une pulsion  : comme l’a dit Frank Beach,
comportementaliste animalier, en 1956, «  Personne n’a jamais souffert de lésions
7
tissulaires par manque de sexe   ». En termes plus simples, personne n’est jamais mort
parce qu’il ne pouvait pas s’envoyer en l’air. Peut-être le voulaient-ils, mais il s’agit alors
8
de frustration, et les gens ne meurent pas littéralement de frustration .
Si ce n’est pas une pulsion, qu’est-ce que c’est  ? Il s’agit d’une «  saillance incitative
9
motivationnelle  ».
La plupart des gens associent le mot « incitation » à l’idée d’une récompense, d’une chose
pour laquelle il vaut la peine de travailler. La signification biologique est similaire. Alors
que les pulsions sont poussées par une sensation de gêne interne, les saillances incitatives
désignent le fait d’être attiré par un stimulus externe attirant. La curiosité est l’exemple
parfait d’une saillance motivationnelle : elle est aussi naturelle pour nous que la faim, mais
10
sans le risque de mourir .
Lorsque vous entendez « pulsion », pensez « survie ».
Lorsque vous entendez « saillance incitative », pensez « épanouissement ». C’est important
pour au moins deux raisons :
Premièrement, si le sexe était une pulsion, comme la faim, les personnes qui éprouvent
rarement ou jamais de désir spontané pour le sexe seraient… eh bien, comment
qualifierions-nous une personne qui n’a jamais éprouvé de faim spontanée pour la
nourriture, même lorsqu’elle n’a pas mangé depuis des jours, des semaines ou des mois ?
Une personne clairement malade  ! Et quand on est malade, la réponse au stress entre en
jeu. Et nous savons à quel point le stress est formidable pour le plaisir et le désir sexuels,
n’est-ce pas ?
Le mythe selon lequel le sexe est une pulsion est mauvais pour la vie sexuelle.
Mais s’il est vraiment fondamental que le sexe soit comme la curiosité et pas comme la
faim, c’est parce que si une personne vole un morceau pain, car elle meurt de faim, nous
pouvons avoir de la compassion et de la pitié pour elle. Même si voler est mal, nous
acceptons le fait que les gens font ce qu’ils peuvent pour survivre. Mais si une personne
vole un morceau de pain uniquement parce qu’il est curieux de connaître le goût de la
baguette de son voisin… a-t-on alors pour elle la même compassion, la même pitié ?
Et comme le sexe n’est pas une pulsion, ce n’est pas un «  besoin  » biologique, et donc
personne n’a le droit de le considérer comme dû, et personne n’a le droit d’en voler à
quiconque, sous aucun prétexte.

Encore une bonne nouvelle !


Ce n’est pas la monogamie non plus
On a beaucoup parlé récemment du caractère «  contre-nature  » de la
monogamie et de la mort du lien érotique dans une relation à long terme,
sexuellement exclusive. Avec tout ce que vous avez déjà appris, vous
pouvez probablement deviner mon avis sur le sujet  : c’est le contexte qui
compte, et il n’y a pas deux personnes pareilles. Certains couples
monogames créent un contexte qui entretient et ravive le désir, et certains
couples… non. Il en va de même pour celles et ceux qui vivent une relation
ouverte. En aucun cas la monogamie ou le polyamour ne sont
intrinsèquement bons ou mauvais pour le désir, c’est bien la manière dont
les gens pratiquent la monogamie ou le polyamour qui peut tuer le désir. Si
la monogamie est la structure de relation que vous préférez, cette section est
pour vous.
Il existe actuellement deux grandes écoles de pensée en ce qui concerne
les stratégies d’entretien du désir dans les relations monogames à long
terme. Je vais en parler ici en les nommant «  école d’Esther Perel  » et
« école de John Gottman », bien que ce ne soit que la version courte d’une
question beaucoup plus riche et complexe.
Dans son livre L’intelligence érotique, Esther Perel présente une
contradiction au cœur des relations modernes  : l’opposition entre le
familier et l’inédit, entre le stable et le mystérieux. Nous voulons
l’amour, qui offre sécurité et de stabilité, mais nous voulons aussi la
passion, et tout ce qu’elle garantit d’aventure, de risque et de nouveauté.
L’amour, c’est avoir, le désir, c’est vouloir, et on ne peut vouloir que ce
que l’on a déjà, selon ce raisonnement. Si le problème est que l’amour
durable s’oppose à la passion durable, alors la solution, selon Perel, est
de conserver l’autonomie, un espace d’érotisme à l’intérieur de soi,
comme moyen de garder la distance nécessaire permettant au désir
d’émerger. Comme le dit Perel, « dans le désir, nous voulons un pont à
franchir 11 ». Ce qui implique d’ajouter intentionnellement une distance
source d’instabilité ou d’incertitude, telle une insatisfaction légère et
agréable.
À l’opposé, John Gottman affirme dans The Science of Trust que le
problème n’est pas le manque de distance et de mystère, mais le
manque d’approfondissement de l’intimité. De ce point de vue, la
conversation intime, l’affection et l’amitié sont au cœur de la vie
érotique d’une relation à long terme. Gottman évoque les résultats d’une
étude portant sur cent couples, tous âgés de 45  ans ou plus, dont la
moitié a une bonne vie sexuelle et l’autre moitié une mauvaise vie
sexuelle. Ceux qui ont déclaré avoir une bonne vie sexuelle, écrit-il,
«  ont systématiquement mentionné  : (1) conserver une amitié forte,
complice et pleine de confiance ; et (2) faire du sexe une priorité dans
leur vie 12. » En d’autres termes, entretenir le désir, ce n’est pas avoir un
pont à franchir, mais avoir un pont à construire ensemble.

« Que chacun se tourne vers les désirs de l’autre », dit Gottman.


« Que chacun garde une distance confortable », dit Perel.
Vous vous demandez qui des deux a raison ? Les deux –
tout dépend, je crois, de la manière dont vous conceptualisez le
« désir ».
Vous vous rappelez, au chapitre  3, la distinction entre motivation et
appréciation ? Pour Perel, le désir est la motivation. L’envie. La quête. La
faim. La poursuite d’un objectif qui réduira l’écart, pour utiliser une
expression romantique 13.
Tandis que pour Gottman et les couples dans l’étude qu’il cite, le
« désir » a plus à voir avec l’appréciation. L’appartenance. La dégustation.
La permission. L’exploration de ce moment ensemble, l’observation et
l’appréciation de ce qu’il est. Le style de désir décrit dans L’intelligence
érotique présente un plus haut degré d’adrénaline  : il est intrinsèquement
excitant. Nous nous délectons de ce genre de cycle perpétuel
démangeaison-grattage-soulagement-démangeaison. Nous aimons avoir
envie, à tel point que nous ne sommes plus en mesure de séparer
l’expérience du désir (la motivation) de celle de l’appréciation. Ce concept
correspond assez bien au récit existant qui dit que le désir spontané est la
seule bonne manière d’éprouver du désir. Le style de désir évoqué par
Gottman décrit quant à lui un niveau d’adrénaline plus bas, et tient
davantage d’une célébration de la sensation dans son contexte, une
célébration de l’unité à deux.
L’approche de Perel parle de la faim comme d’une sauce secrète qui
rend un repas délicieux. Celle de Gottman consiste à rentrer du travail et à
préparer le dîner avec votre partenaire, à boire un verre de vin pendant que
vous cuisinez, à se régaler mutuellement de toutes ces fraises que vous
aviez l’intention de garder pour le dessert, puis à s’asseoir ensemble et à
savourer chaque bouchée. Chez Perel, vous arrivez chez votre partenaire
avec votre feu déjà allumé, et chez Gottman, vous allumez le feu de l’autre.
Personnellement, je penche plutôt pour le style de Gottman, tandis que
ma sœur jumelle a dit  : «  Pourquoi la promiscuité entraînerait-elle la
recherche d’encore plus de promiscuité ? De l’air !  » Je connais des gens
qui ne jurent que par l’un ou l’autre. Je connais des gens qui sont trop
épuisés pour essayer l’un ou l’autre. Je connais des gens qui sont
convaincus que l’un est la Vraie Voie du désir, même si je pense qu’ils
gagneraient à essayer l’autre. Tout dépend de ce qui convient le mieux à
chacun. Et je pense qu’en fin de compte, les deux sont des stratégies pour
atteindre le même objectif global : augmenter la pression sur l’accélérateur
et relâcher les freins.
Les deux approches se ressemblent plus qu’elles ne le laissent paraître à
première vue, et c’est dans leurs similitudes que l’on trouve la vérité la plus
profonde  : toutes deux montrent clairement que la passion n’est pas
automatique dans une relation monogame durable. Mais il est également
évident que la passion existe, à condition que le couple prenne délibérément
le contrôle du contexte. Pour certains couples, ce contexte a l’air de créer
une intimité. Pour d’autres, il donne l’impression de créer de l’espace.
Après que Johnny a tout à coup compris l’existence des curseurs et interrupteurs et de ce à quoi
Laurie est sensible, ils ont décidé d’essayer un de ces « box » auxquelles on s’abonne. Tous les
deux ou trois mois, une boîte était envoyée par la Poste, comme un panier de produits de saison,
mais au lieu de fruits ou légumes, ils recevaient des kits avec un quelconque fantasme sexy
préfabriqué. Ils ont tous les deux craint que ce soit un peu ridicule, mais ont aussi décidé que
cela valait la peine d’essayer. Ils ont continué de prêter attention au contexte, et même si le
contexte de Johnny était  : «  Donne-moi deux minutes pour me brosser les dents  », celui de
Laurie ressemblait plutôt à : « Sors-moi du mode mère de famille ou je ne passerai jamais en
mode femme torride ».
Ainsi, le premier colis est arrivé et ils l’ont ouvert ensemble.
Leur première impression a été… eh bien, de la déception.
« Ça faisait un paquet d’argent pour des fournitures de loisirs créatifs, comme Laurie l’a
expliqué.
– Nous avons déjà un vibromasseur », a rétorqué Johnny.
Mais ils se sont dit : « Et puis zut ! On a payé pour ces fournitures. On a demandé à ta
mère de faire du baby-sitting. On a même réservé une chambre d’hôtel. Alors, faisons-le, et ce
qui doit arriver (ou pas) arrivera (ou pas). »
La boîte contenait des instructions, présentant le déroulement de leur soirée et quelques
règles, mais ils n’ont pas suivi les règles. Ils en ont parlé dans la voiture en allant à l’hôtel, en
riant tout le temps.
Ils se sont fait livrer une pizza et n’ont pas cessé d’en parler, et de parler d’autres choses,
du travail, des enfants, de la famille. Ils ont discuté de tout et n’importe quoi, et se sont
souvenus à quel point ils s’aimaient. Puis Laurie a pris un bain moussant, accompagnée d’un
livre d’histoires érotiques.
Je vais faire avance rapide sur le reste de la soirée en vous suggérant simplement de
fredonner « Can You Feel the Love Tonight ? » d’Elton John pendant quelques minutes.
À quel moment de la soirée Laurie a-t-elle commencé à ressentir quelque chose qu’elle
décrirait comme un véritable « désir » ? À peu près à mi-chemin du massage que Johnny lui a
fait lorsqu’elle est sortie de la baignoire et s’est installée dans le lit seulement vêtue d’un
soutien-gorge en dentelle et d’une lotion parfumée pour le corps.
À quel moment Johnny a-t-il commencé à ressentir du désir ? Dans la voiture, en venant à
l’hôtel.
Mais ça s’est très bien passé.
C’était une nuit très coûteuse, nécessitant beaucoup de préparation, mais elle a permis à
Laurie de sortir complètement de son rôle de mère, de patronne, d’étudiante complètement
débordée et de se mettre dans un état d’esprit « Un moment sexy pour Johnny et moi » qui a
permis à ses facteurs de stress de glisser dans l’ombre de son attention pendant quelques heures,
tandis que la « femme torride » était sous les projecteurs.
Et tout ce qu’ils avaient changé, c’était le contexte.
« Pourquoi est-ce que je ne pourrais
pas simplement prendre
un médicament ? »
Lorsque vous pensez que quelque chose cloche chez vous, votre réponse au
stress se déclenche. Et lorsque votre réponse au stress se déclenche, votre
intérêt pour le sexe s’évapore (pour la plupart des gens). Insister sur le fait
que le désir spontané est le seul désir « normal », ça revient à dire qu’une
personne saine qui a un désir réactif est malade. Répétez-le assez souvent et
elle finira par vous croire. Et quand elle vous croit, tout à coup, ça devient
vrai. Le mythe rend les gens malades.
C’est exactement ce qui s’est passé lors de l’approbation par la FDA,
l’agence américaine en charge de la mise sur le marché des médicaments,
de la flibansérine, une molécule destinée à traiter le «  désir sexuel
hypoactif  ». C’est une pilule à gober tous les jours. Pour quel bénéfice  ?
D’après l’analyse des données effectuée par la FDA, les femmes qui suivent
ce traitement ont eu moins d’un «  événement sexuel satisfaisant  »
supplémentaire par mois, par rapport à celles sous placebo  ; dans
l’ensemble, environ 12  % des participantes à l’étude ont connu une
«  amélioration au moins minime  » par rapport au placebo, ce qui signifie
qu’environ 88  % des participantes n’ont même pas ressenti de bénéfice
minime par rapport au placebo 14. (Sans surprise, ce n’était pas la panacée.)
Un deuxième traitement, autorisé sur le marché en 2019, consiste en
une injection abdominale que l’on s’administre environ une heure avant le
rapport sexuel. Lors d’essais cliniques, il n’a pas augmenté la fréquence des
rapports sexuels ni la satiété sexuelle déclarée des participantes. Il a en
revanche augmenté les résultats des participantes dans le cadre d’une
enquête globale sur le fonctionnement sexuel – une enquête développée par
l’industrie pharmaceutique 15. (Ce médicament n’était pas non plus la
panacée, toujours sans surprise.)
Mais le véritable problème avec ces médicaments, ce n’est pas
simplement qu’ils ne « marchent » pas, c’est-à-dire qu’ils n’augmentent pas
le désir spontané ou la fréquence sexuelle, sauf peut-être chez une faible
minorité de femmes. Le vrai souci, c’est que même les femmes pour
lesquelles ces substances « marchent » n’étaient à la base pas cassées.
Une femme qui a largement utilisé la flibansérine pendant la phase
d’essai a raconté à Cosmo comment était sa vie sexuelle avant de
commencer à prendre ce médicament 16. Elle dit  : «  Une fois que j’étais
lancée, tout allait bien. Le problème, c’était de me faire démarrer. »
Cela vous rappelle un truc ? C’est le désir réactif. Sain et normal.
Une autre participante a eu une remarque similaire : « Ça me manque de
vouloir vraiment avoir des relations sexuelles. Je déteste devoir me
“motiver” à le faire. Ça me donne l’impression d’être brisée. Ça me
demande un véritable effort pour y parvenir, physiquement et
mentalement 17. »
Les participantes à l’étude ont décrit à maintes reprises dans les médias
grand public un désir réactif parfaitement intact 18. Ce qui est sain et
normal ! Leurs relations étaient solides et leur santé était bonne – les deux
conditions nécessaires pour que les femmes puissent participer à l’essai –
mais elles croyaient que leur désir réactif était une maladie. Et donc, elles se
sentaient brisées.
Bien sûr qu’elles se sentaient brisées. On leur a inculqué la même chose
qu’à nous autres, et même qu’à leurs médecins, à propos du désir sexuel :
qu’il « devrait » être spontané. Qu’une personne qui n’a pas un simple désir
sexuel spontané est malade.
Est-ce que le fait de se sentir malade et brisée appuie sur
l’accélérateur ?
Commençons-nous à réaliser que dire aux femmes qu’elles sont brisées
est un excellent moyen de les briser ?
Pour moi, l’exemple le plus frappant de tout ça s’est produit lors de
l’audience devant la FDA pour la mise sur le marché de la flibansérine. Le
docteur Phil Hanno, membre du comité de la FDA et urologue, a demandé
pourquoi les femmes participant à l’étude avaient, en moyenne, deux à trois
«  événements sexuels satisfaisants  » (ESS) par mois avant le début de
l’essai du médicament 19. Si elles manquaient de désir, pourquoi avaient-
elles des rapports sexuels ?
Ce qui… d’accord, docteur Hanno. Je peux vous appeler Phil  ? Phil.
Parfois, les femmes ont des rapports sexuels parce qu’elles s’ennuient.
Parfois, elles font l’amour parce que leur partenaire en a envie et qu’elles
aiment leur partenaire, alors, bien sûr, chéri, allons-y.  Parfois, c’est pour
mettre fin à une dispute. Parfois, c’est parce qu’elles ressentent tellement
d’amour qu’elles veulent exprimer cet amour, et peut-être que le sexe est un
moyen de le faire 20.
Mais voici ce qu’un représentant du laboratoire pharmaceutique a
répondu  : «  Une fois qu’elles commencent à avoir une relation sexuelle,
alors celle-ci est agréable. »
Les bras m’en tombent. Ce que le fabricant disait là (explicitement ! en
regardant la FDA dans les yeux !), c’est qu’ils essayaient de « soigner » des
femmes en bonne santé. Parce que si vous éprouvez du plaisir dans le cadre
d’un «  événement sexuel  » mutuellement consenti, c’est une vie sexuelle
normale et saine. Point final.
Pas étonnant que les médicaments soient inefficaces. Ils essaient de
réparer quelque chose qui n’est pas cassé. Le seul truc cassé, c’est notre
culture qui dit aux femmes qu’elles ont une maladie.
Permettez-moi de le dire catégoriquement  : les laboratoires
pharmaceutiques aimeraient beaucoup que vous croyiez que le désir réactif
est une maladie. Ce n’est pas vrai. Lorsqu’ils essaient de soigner une
personne qui affirme  : «  Une fois qu’on a commencé, tout va bien  ; c’est
juste le début qui demande pas mal d’efforts », alors ils essaient de soigner
une personne normale et en bonne santé.
Malheureusement, seuls trois des vingt-quatre membres du comité de la
FDA étaient des chercheurs, des thérapeutes ou des éducateurs spécialisés
dans la sexualité, si bien que le comité a cru à ce vieux mythe avec lequel la
plupart d’entre nous avons grandi et qui dit : le désir doit être « spontané ».
Ils ont tort.
Je travaille à aider les thérapeutes, éducateurs et autres professionnels
de santé à cesser de croire que le désir doit être spontané. Si votre
professionnel de santé ou votre thérapeute pense que le désir doit être
spontané, n’hésitez pas à leur suggérer de lire ce livre  ; beaucoup de
cliniciens renvoient en fait leurs patients et clients à ce livre une fois qu’ils
ont eux aussi appris que le désir n’a pas besoin d’être spontané. Certaines
facultés de médecine l’intègrent même dans leurs listes de lecture, et
j’espère que vous aurez la chance de croiser un des médecins formés là-bas.
Mais d’ici là, vous risquez de rencontrer des professionnels aidants qui
n’ont pas intégré le désir réactif dans leur compréhension du désir normal et
sain 21. (Les laboratoires pharmaceutiques ont un budget relations publiques
beaucoup plus conséquent que les chercheurs, les thérapeutes et les
éducateurs spécialisés dans la sexualité.)
Alors, je vous en prie, dites-le à toutes les femmes que vous
connaissez  : si vous avez un désir réceptif, vous êtes déjà normale.
Personne n’a besoin « d’avoir soif » de sexe n’importe quand pour être en
bonne santé.
Si vous voulez éprouver un désir plus spontané, juste pour le plaisir,
vous n’avez pas besoin de vous changer, vous pouvez simplement changer
votre contexte, ce que vous avez appris à faire il y a longtemps, au
chapitre 3. Mais vous n’avez pas besoin d’éprouver un désir spontané pour
être en bonne santé et normale.
C’est peut-être la dynamique
de poursuite
Souvenez-vous des tomates et des aloe vera  : s’attendre à ce que les gens
soient tous d’une certaine façon ne fera que rendre certaines personnes
«  bonnes  » et d’autres «  mauvaises  », alors qu’il n’y a rien de mauvais
qu’un contexte différent ne puisse régler – et rien de bon que le mauvais
contexte ne puisse briser.
Ce qui nous amène au motif de consultation le plus fréquent pour les
couples : le faible désir. Le faible désir est, par définition, un problème de
relation. Le partenaire qui a un «  faible  » désir est celui qui ne veut pas
avoir de relations sexuelles assez fréquentes pour satisfaire l’autre
partenaire. Ce n’est pas que le désir sexuel d’une personne soit
intrinsèquement « trop faible » ou que celui de l’autre soit « trop élevé ». Ils
sont simplement différents… du moins, dans le contexte actuel.
Mais ce n’est pas le décalage lui-même qui pose souci, c’est la manière
dont le couple le gère. Des dynamiques problématiques apparaissent
lorsque les partenaires ont des niveaux de désir différents et qu’ils pensent
que le niveau de désir d’une personne est « meilleur » que celui de l’autre.
Par exemple, disons que le partenaire A a un désir plus spontané et que le
partenaire B est plus réactif. Dans ce scénario, le partenaire A peut se sentir
rejeté et peu désirable parce qu’il est presque toujours l’initiateur, et le
partenaire  B peut alors commencer à se sentir poussé et jugé et résistera
donc davantage. Le partenaire A demande et demande et demande encore et
se sent rejeté, blessé, et développe une rancœur parce que le partenaire B
continue de dire non, non, non  ; et le partenaire  B se sent lui sur la
défensive, mais aussi coupable et blessé parce que le simple fait que son
partenaire doive lui demander lui donne le sentiment qu’il doit y avoir
quelque chose qui cloche chez lui. Pendant ce temps, le partenaire A peut
même commencer à se demander  : «  Suis-je cassé  ? Est-ce que j’ai trop
envie de sexe  ? Suis-je sexuellement obsédé ou compulsif  ?  » C’est le
bordel.
J’appelle ce phénomène la « dynamique de poursuite ». Alors, comment
« réparer » la dynamique de poursuite ?
Nous connaissons la réponse maintenant : le problème n’est pas le désir
lui-même, mais le contexte. Vous avez besoin que plus de stimuli liés au
sexe activent l’accélérateur et que moins de trucs appuient sur les freins. La
dynamique de poursuite appuie sur les freins.
Pour interrompre cette dynamique, il faut supprimer la poursuite.
Enlevez complètement le sexe de l’équation. Pas de sexe – quelle que soit
la signification du mot « sexe » dans votre relation, mais généralement pas
de contact génital et pas d’orgasme avec l’autre personne présente.
L’objectif est d’éliminer toute trace d’attente ou d’exigence qu’un
contact physique entre vous puisse donner lieu à des rapports sexuels. Vous
pouvez vous interdire d’autres activités – tout ce à quoi le partenaire B,
dont le désir est plus faible, résiste parce qu’il se sent contraint. Sans avoir à
craindre du type « oh, et si ce baiser parfaitement agréable se transformait
en une attente de sexe dont je ne veux toujours pas ? », vous pourrez tous
les deux vous détendre et profiter de l’intimité physique que vous partagez.
Pour combien de temps  ? Un mois. Ou deux semaines, ou trois mois.
Assez longtemps pour sentir qu’il y a un obstacle important.
Lorsque vous retirez le sexe de l’équation afin de briser la dynamique
de poursuite, les deux partenaires doivent être pleinement d’accord et sur un
pied d’égalité, conscients qu’ils créent la dynamique ensemble. Aucun des
deux partenaires n’est le problème  ; c’est la dynamique dans laquelle ils
sont coincés qui est le problème.
Après votre phase d’abstinence sexuelle, vous pouvez augmenter en
douceur l’intimité de votre contact physique, mais en fin de compte, la
solution tient à l’attitude plutôt qu’au comportement. L’impression que
quelque chose cloche chez vous (ou chez votre partenaire) ou que votre
partenaire pense que quelque chose cloche chez vous, voilà des contextes
qui tuent le désir, à chaque fois.
Alors, écoutez, j’ai un message pour le partenaire B, celui qui se sent
poursuivi. Je vais dire quelque chose, et vous allez me croire parce que
toutes les preuves scientifiques sont de mon côté. En fait, vous me croirez
parce que ce que je vais dire est vrai. Parce que dans le recoin patient de
votre cœur, vous avez toujours su que c’était vrai. Voici ce que j’ai à vous
dire :
Vous n’êtes pas brisée. Vous êtes entière. Et il y a de l’espoir.
Vous vous sentez peut-être coincée. Ou épuisée. Déprimée, anxieuse,
exténuée de devoir prendre soin des autres, avec ce besoin désespéré et
urgent de renouveau. Fatiguée de vous sentir obligée de vous défendre, et
de souhaiter que votre corps agisse différemment. Vous souhaitez peut-être
que, pour quelque temps, quelqu’un d’autre vous défende afin que vous
puissiez baisser votre garde et être simplement vous-même. Juste quelque
temps.
Tout ça, ce sont des circonstances ; ce n’est pas vous. Vous allez bien.
Vous êtes entière. Il existe en vous une sexualité qui vous protège en vous
mettant en retrait jusqu’à ce que le moment soit propice.
Je comprends parfaitement à quel point il peut être frustrant que le corps
de votre partenaire donne l’impression que ce moment propice est arrivé,
alors que votre corps à vous est encore méfiant. Et c’est encore pire parce
que plus le corps de votre partenaire semble prêt, plus votre corps se méfie.
Ça craint, pour vous deux.
Mais elle est quelque part là-dedans, votre sexualité. Elle fait partie de
vous, tout autant que votre peau, votre rythme cardiaque et votre
vocabulaire. Elle est là. Elle attend. Ce n’est pas parce que vous n’avez pas
eu l’occasion d’utiliser les mots « calorifiant » ou « torride » dernièrement
qu’ils ne vous sont plus accessibles ou utilisables. Si l’occasion se présente,
ils seront là, prêts, à vous attendre. Comme votre meilleur ami, votre désir
sexuel attend que votre vie lui permette de se manifester et de s’exprimer.
Laissez-le faire, dès que vous vous sentirez suffisamment en sécurité.
Et un court message à l’attention du partenaire A – celui qui veut du
sexe et ne cesse de demander : je sais que vous pouvez avoir l’impression
que le partenaire B se retient et que ça peut être vraiment terrible à vivre.
Votre rôle dans le démêlage des nœuds de votre relation est très difficile, car
il vous faut oublier vos blessures et aimer la personne qui, comme on peut
le croire parfois, est la source même de ces blessures. C’est vraiment très,
très difficile.
Je sais aussi que parfois vous pourriez être inquiet  : est-ce que vous
voulez du sexe trop souvent  ? Est-ce que vos exigences sont
déraisonnables ? Ou ne seriez-vous pas malade d’avoir autant envie de sexe
que ça  ? Non, vous avez juste un niveau d’intérêt sexuel plus élevé que
votre partenaire – vos parties sont organisées différemment. C’est normal.
Aucun de vous n’est brisé, vous devez juste collaborer pour trouver un
contexte qui vous convienne à tous les deux.
Donnez au partenaire B du temps et de l’espace loin du sexe. Laissez le
sexe s’éloigner de votre relation pendant un certain temps et soyez là,
pleinement présent, émotionnellement et physiquement. Offrez à votre
partenaire de l’affection, étant entendu que l’affection n’est en aucun cas un
préambule au sexe. Soyez chaleureux et généreux avec votre amour. Vous
n’en manquerez pas.
Pour le dire simplement, la meilleure façon de gérer le différentiel de
désir est : soyez bienveillants l’un envers l’autre.
Souvenez-vous du hérisson endormi. Démêler les nœuds de la
dynamique sexuelle dans une relation demande du temps, de la patience et
du travail.
L’outil le plus efficace à utiliser pendant votre abstinence sexuelle
consiste à poser cette question, à vous-même et à l’autre : « Quel genre de
sexe vaut la peine d’être désiré ? »
Le plus grand défi de Merritt, ce sont ses freins. Elle a donc essayé un truc appris à l’époque où
elle organisait des manifestations politiques : reliez un comportement à votre identité.
« Ne te contente pas de courir, sois une coureuse, m’a-t-elle dit. Si tu cours parce que tu
dois le faire ou parce que tu as l’impression que tu dois le faire, plutôt que parce que ça fait
partie de ton identité, alors tu ne courras pas très loin ou pas très souvent, et tu ne prendras
probablement pas beaucoup de plaisir à le faire. Idem si je fais l’amour parce que j’ai
l’impression que je suis censée le faire. Et si j’essayais d’endosser l’identité d’une femme qui
aime le sexe ?
– Ça vaut le coup d’essayer ! » ai-je répondu.
Alors elle a tenté le coup. Et sa première réaction a été… une vive colère.
«  Pourquoi devrais-je aimer le sexe  ? a-t-elle lancé à Carol. Pourquoi ne puis-je pas être
une femme qui ne veut pas de sexe  ? Je suis fatiguée de toute cette pression pour vouloir du
sexe plus que je n’en veux, et à être une personne que je ne suis pas ! »
Elle a donc fait une chose remarquable. Pendant quelque temps, elle en a fait son identité :
«  Je suis une femme qui ne veut pas de sexe.  » Pendant quelque temps, elle a construit son
identité sur ce non. Avec colère.
Vous vous souvenez sûrement du chapitre  4, où j’expliquais que la colère est la réponse
« combat » au stress, et que les réponses au stress sont des cycles qui veulent aller à leur terme.
La vie de Merritt lui avait offert de nombreuses occasions de commencer ces cycles, mais
pas assez de les achever. Elle se mettait simplement en colère, puis s’enfermait, se remettait en
colère et se renfermait, en freinant au milieu du cycle. Elle avait une énorme accumulation de
cycles de réponse au stress incomplets.
Gloria Steinem a dit : « La vérité vous libérera. Mais d’abord, elle vous mettra en colère. »
Ce qu’elle n’a pas dit, c’est comment passer de la colère à la liberté. La solution, c’est de
terminer le cycle, de traverser le tunnel.
Merritt s’est donc laissée aller à vivre sa colère, car pour la première fois, elle avait moins
peur de cette colère elle-même que de ce qui pourrait lui arriver si elle la gardait enfermée en
elle pour toujours. Elle a tout laissé sortir.
Et elle a choisi de déverser toute cette colère non spécifique d’une manière fantastique  :
elle l’a canalisée dans son écriture, permettant à son personnage principal de tuer brutalement
un ennemi – et elle a tremblé et pleuré, les mâchoires serrées, tout en écrivant. Elle aurait
également pu canaliser cette rage dans sa marche du matin, en se laissant aller à grimper avec
agressivité ces immenses collines… ou elle aurait pu la canaliser de manière inappropriée vers
sa famille, en prenant sa colère non spécifique et en essayant de la diriger spécifiquement sur
eux, en utilisant sa colère comme une arme contre les autres. Mais elle est plus intelligente que
ça. Elle a fait de l’écriture son exutoire.
Et la colère a fait ce que la colère fait quand vous la laissez vous traverser comme un vent
fort : elle s’est éteinte toute seule. Il a fallu un certain temps, et c’était gênant à vivre. Elle avait
plusieurs décennies de choses accumulées à terminer, et même quelques semaines de « Non ! »
ne représentaient qu’un début. Mais le plus important, c’est que Merritt s’était autorisée à
ressentir la colère et qu’elle apprenait à laisser cette émotion la traverser, au lieu de s’y
accrocher. Elle n’en a rien fait, elle ne l’a pas dirigée vers qui que ce soit, elle l’a simplement
libérée dans le monde ; elle l’a juste autorisée. Merritt a fait confiance à son corps pour libérer
toute cette rage refoulée. Elle l’a imaginée s’installer dans le trou de la couche d’ozone.
Puis un jour, sa colère s’est transformée en silence, et au milieu de ce silence, elle a pu
demander : « Alors si je ne veux pas de sexe, qu’est-ce que je veux ? »
Elle s’est rappelé la nuit du lubrifiant, combien il était bon de donner du plaisir, et les
réponses sont arrivées rapidement et furieusement. Elle voulait donner du plaisir, se connecter,
recevoir du plaisir et le partager avec l’amour de sa vie. Elle voulait éprouver du plaisir – toutes
sortes de plaisir, mais surtout les plaisirs de son propre corps – sans les défenses qui l’avaient
protégée dans un monde dangereux.
Ce n’est pas qu’elle n’avait jamais éprouvé de plaisir dans sa vie, mais il était tellement
emmuré dans sa propre volonté de protection qu’il ne pouvait pas déborder au-delà d’un petit
territoire clos en elle.
Lorsqu’elle se concentrait sur le plaisir de sa partenaire, ses freins n’étaient pas actionnés.
Elle le savait. Comment allait-elle réussir à lâcher prise et éprouver du plaisir pour elle-même ?
Par l’orgasme.
Mais ça, c’est au chapitre 8.

« Le sexe qui vaut la peine


d’être désiré »
Lorsque je fais mon cours sur le désir réactif, de nombreuses étudiantes se
sentent soudainement soulagées et optimistes. Elles cessent de culpabiliser
de ne pas avoir « envie » de sexe et s’emploient plutôt à créer des contextes
qui permettent à leur cerveau d’accéder à suffisamment de plaisir pour que
le désir émerge en réponse.
Mais un soir, je suis sortie avec des amis et ils m’ont demandé, avec
beaucoup de nonchalance : « Alors, Emily… comment les couples peuvent-
ils maintenir un lien fort sur le long terme ? » C’était un jeune couple avec
deux enfants en bas âge, et tous deux travaillaient à plein temps.
J’ai répondu ce que je réponds toujours. J’ai parlé du désir réceptif et
conclu par : « Alors, vous vous pointez tous les deux. Vous placez vos corps
dans le lit, vous laissez votre peau toucher celle de votre partenaire, et… »
Mais quand j’ai prononcé ces mots, la partenaire au désir le plus faible
s’est reculée avec une grimace de dégoût.
« OK, d’accord, ai-je dit doucement. Donc le problème n’est pas que tu
ne désires pas avoir de relations sexuelles. Le problème, c’est que tu
n’aimes pas le sexe. Dis-moi ce que tu n’aimes pas dans le sexe. »
Et elle a raconté comment elle se sentait ignorée depuis des années.
Ignorée !
Depuis des années !
Bien sûr qu’elle n’aimait pas le sexe ! Et si elle n’aimait pas ça, bien sûr
qu’elle n’en désirait pas ! Au cours de toutes mes années passées à lire des
études sur le désir sexuel et à discuter avec des couples, des thérapeutes, des
scientifiques et des professionnels de santé, je n’ai jamais vu d’outil plus
puissant pour traiter les « problèmes » liés au désir que de comprendre qu’il
est normal de ne pas avoir envie d’un type de sexe que l’on n’aime pas.
Comme l’écrivent Peggy Kleinplatz et son équipe, «  Peut-être qu’une
grande partie de ce qui est actuellement diagnostiqué comme étant des
troubles du désir sexuel peut être plus justement considérée comme une
réponse saine à des relations sexuelles tristes et décevantes 22 ».
Lorsque des couples à faible désir consultent Kleinplatz, sexothérapeute
et chercheuse, elle leur demande : « Quel genre de sexe vaut la peine d’être
désiré ? »
Vous vous souvenez du chapitre  4, «  Le sexe qui fait avancer
l’intrigue » ? C’est le sexe qui vous fait avancer vers un plus grand objectif,
alimenté par plus que le simple cycle de réponse sexuelle. C’est le genre de
sexe que les clients de Kleinplatz décrivent comme «  qui vaut la peine
d’être désiré  ». Les gens ne veulent pas seulement l’orgasme, ils veulent
plus.
Et elle les aide à trouver le chemin vers ce plus.
 
 
Elle est à la tête d’une équipe de chercheurs qui ont étudié pendant des
années les personnes se considérant comme ayant une vie sexuelle
extraordinaire. Ces personnes viennent de tous les horizons imaginables, de
toutes les orientations sexuelles et de toutes les identités de genre ; certaines
sont coquines, d’autres sont plutôt prudes, certaines sont monogames,
d’autres non. Elles ont des âges différents, des états de santé et des corps
différents. Ce qu’elles ont en commun, c’est une capacité inspirante à
accéder à un sentiment de connexion et de plaisir grâce à la sexualité. Les
résultats de la recherche sont décrits dans le livre Magnificent Sex (« Sexe
magnifique  ») coécrit par Peggy Kleinplatz et Dana Ménard. Elles
constatent que les personnes qui ont ces «  Expériences sexuelles
optimales » les définissent selon ces huit composantes principales :
le fait d’être présent, concentré et pleinement dans son corps. C’est
l’expérience du ralentissement, du lâcher-prise des distractions et des
inhibitions, et de l’attention portée à ce qui se passe à l’instant présent, à
l’exclusion de tout le reste ;
la connexion, la synchronisation, la fusion, la symbiose. Se sentir en
harmonie avec son partenaire a été décrit par de nombreux participants
comme essentiel à une sexualité extraordinaire ;
une intimité sexuelle et érotique profonde. Non seulement pendant les
rapports sexuels, mais dans toute la relation, ces personnes ont ressenti
un profond respect mutuel, une acceptation et une attention sincères,
ainsi qu’une confiance profonde et intense avec leurs partenaires ;
une communication extraordinaire, une empathie accrue. Les amants
extraordinaires sont aussi, nécessairement, des communicants
extraordinaires, ce qui signifie qu’ils sont extraordinairement
empathiques, en phase avec les mondes intérieurs de leurs partenaires ;
l’authenticité, le fait d’être vrai, sans inhibition, la transparence. Le
sexe extraordinaire implique une nudité émotionnelle et l’expression
sans honte des plaisirs et des désirs sexuels, ce qui nécessite
généralement de passer par un processus de rejet des scénarios et des
« ça devrait être comme ça » en matière de sexualité avec lesquels nous
avons été élevés ;
la transcendance, la béatitude, la paix, la transformation, la guérison.
Oui, le sexe extraordinaire peut vous donner l’impression de vous
fondre dans l’univers et de vous relier au divin d’une manière qui vous
transfigure, vous guérit et améliore vraiment votre vie et votre relation.
Alors que notre vie quotidienne exige de fixer de nombreuses limites,
notre vie sexuelle évolue lorsque nous sommes prêts et capables de faire
disparaître nos limites avec un partenaire de confiance ;
l’exploration, la prise de risque interpersonnelle, le plaisir. Ça
ressemble beaucoup aux «  facteurs ludiques  » du chapitre  3 – le
contexte du jeu, de l’investigation curieuse, de la découverte, de
l’expérimentation, de la créativité et du rire ;
la vulnérabilité et la reddition. Le sexe extraordinaire est également
caractérisé par une confiance profonde, sans aucune retenue envers le
partenaire, dans laquelle votre moi authentique est reçu par quelqu’un
d’autre comme un cadeau précieux.

Les expériences vécues par ces participants nous montrent que le sexe
génial ne dépend pas de ce que vous faites avec votre partenaire, ni de
quelles parties du corps vont où, combien de fois, ou pendant combien de
temps, mais bien de la façon dont vous partagez des sensations dans un
contexte de confiance et de connexion profondes. Étonnant, n’est-ce pas ?
Ces recherches n’ont pas pour but de fixer une barre impossible à atteindre
pour nous autres, mais de reconnaître la différence entre ce qu’est vraiment
le sexe génial et ce que la plupart d’entre nous estiment être du sexe génial.
Par exemple, avez-vous remarqué qu’il manque un élément à cette
liste ?
Qu’en est-il du désir ?
Il s’avère que le désir n’est pas un aspect important du sexe
extraordinaire. Il n’est pas cité par la majorité des participants, et n’a été
que rarement souligné comme étant nécessaire pour vivre des relations
sexuelles géniales. Ce qu’on appelle «  envie sexuelle, désir, alchimie,
attraction  » n’était, tout au plus, qu’un élément mineur du sexe optimal.
Même chez les personnes qui ont des rapports sexuels extraordinaires, le
désir réactif est normal.
Et ils ne sont pas seuls. Le sexe «  optimal  » est remarquablement
analogue au «  bon sexe  » décrit par les survivants de violences sexuelles
dans l’enfance, y compris concernant les qualités identifiées par les
chercheurs comme tenant de la « communication », de « l’ouverture, de la
vulnérabilité », être « présent dans le moment » et un « participant actif et
assertif 23 ».
Dans une autre étude pour laquelle vingt femmes ont reçu la consigne
de décrire le «  bon sexe  », seules trois participantes ont mentionné «  être
d’humeur » ou « en avoir envie » comme étant typiques du sexe « heureux
et joyeux 24 ». On retrouvait plus fréquemment dans ces témoignages sur le
sexe heureux et réussi les questions de confort et de naturel, de plaisir de
base et, par-dessus tout, de connexion émotionnelle.
Mais le sexe magnifique va plus loin et plus en profondeur. Comme le
disent Kleinplatz et Ménard, «  le sexe magnifique exige de dépasser les
scénarios conventionnels que la plupart des gens apprennent dans leur
jeunesse. Une vie sexuelle décevante peut changer. L’objectif ici n’est pas
seulement de se débarrasser de la culpabilité, de la honte et de l’inhibition
sexuelles, mais aussi de l’ensemble des attentes et aspirations liées au sexe
préfabriqué 25 ». Les personnes qui ont des rapports sexuels magnifiques ne
se contentent pas de se pointer et de placer leur corps dans un lit – ce qui est
un exemple du bon sexe. Ils cultivent délibérément un contexte « juste assez
en sécurité  » pour oser les sauts dans l’inconnu des contrées sauvages de
leur âme. Ça, c’est du sexe magnifique. Et le désir spontané n’a presque
rien à voir avec ça. Quand les gens qui ont une sexualité magnifique ont
envie de sexe, ils ne veulent pas seulement de sexe tel que nous en voyons
dans les médias grand public ou les pornos.  Ils veulent se connaître et
connaître leur partenaire plus entièrement, et ils veulent être vus et connus
plus en détail, ressentis plus profondément, tenus plus serrés. C’est ce que
j’appelle le « désir magnifique ».
 
Comme l’ont observé Gottman et ses collègues, les couples qui
entretiennent une relation sexuelle forte et durable font du sexe une priorité
– mais il est également normal qu’à certains moments, le sexe ne figure
plus sur la liste des priorités. Lorsque vous venez d’avoir un bébé, que vous
vous occupez d’un parent mourant, que vous êtes tous les deux débordés
par le travail, il arrive parfois que vous n’ayez vraiment pas le temps ou
l’énergie pour faire une pause et vous tourner l’un vers l’autre avec une
intention érotique. Vous pouvez l’admettre, sachant qu’il s’agit d’une phase
de la vie que vous traverserez ensemble, et que vous retrouverez votre
chemin l’un vers l’autre de l’autre côté.
Et il vaut la peine de réfléchir à ce que vous trouverez chacun de l’autre
côté de cette période d’abstinence commune. Du jeu, de la connexion, de
l’exploration ou de la paix  ? Ou plutôt une corvée, une obligation ou un
effort à consentir ? Si vous redoutez l’idée de vous pointer et de placer votre
corps dans le lit, le manque de désir n’est pas le problème. C’est le manque
de plaisir qui pose problème.
Avoir envie de sexe, ça peut vouloir dire avoir envie des plaisirs
ordinaires du corps et du jeu. Mais parfois, c’est aussi vouloir quelque
chose de plus. La nature exacte de ce « plus » varie d’une personne à l’autre
et évolue au fil de notre vie, mais les personnes qui ont des relations
sexuelles magnifiques disent que celles-ci leur procurent bien plus que du
plaisir. Elles les mettent en contact avec leur partenaire à un niveau
physiologique profond. Elles leur révèlent leurs propres désirs à elles-
mêmes, et les mettent au défi de révéler ces désirs à un partenaire. Elles les
amènent à pénétrer plus profondément dans leur propre personnalité, voire
dans leur propre divinité, ainsi que dans l’expérience intérieure de leur
partenaire.
Posez-vous la question : quel genre de sexe vaut la peine d’être désiré ?
Et jusqu’où iriez-vous pour le créer dans votre vie ?

Partager votre jardin


Tout comme on apprend souvent aux femmes à faire davantage confiance
aux messages culturels relatifs à leur corps qu’à leur propre sens personnel
de ce qui est sain, nous faisons souvent plus confiance aux opinions et aux
idées de notre partenaire sur notre sexualité qu’aux nôtres. Et si la sexualité
de notre partenaire correspond mieux au discours traditionnel sur comment
le sexe est «  censé  » fonctionner, alors nous sommes particulièrement
disposées à croire que nous sommes brisées.
Mais maintenant, vous êtes bien mieux informée sur ces questions, et
vous savez comment tirer le meilleur parti de n’importe quel style de désir.
Acceptez le désir réactif. Adorez-le. Il demande à votre partenaire de vous
aider à créer de bonnes raisons afin que vous soyez excitée.
Les couples qui entretiennent une forte connexion sexuelle pendant
plusieurs décennies ont deux choses en commun  : ce sont des amis qui
donnent la priorité au sexe. Soyons clairs : il est normal que, par moments,
dans votre relation, le sexe ne soit pas une priorité, et dans certaines
relations, il n’est même jamais une priorité.
Mais lorsque le contexte est favorable, vous avez envie d’accueillir
quelqu’un dans votre jardin. Ce jour-là, rappelez-vous que la personne est
habituée à travailler dans son propre jardin, et qu’il est différent du vôtre.
Son corps, ses freins et son accélérateur, les graines que sa famille et sa
culture ont plantées, la méthode de jardinage qu’on lui a apprise peuvent
être similaires aux vôtres, ou totalement opposés. Si votre partenaire et vous
êtes différents l’un de l’autre, souvenez-vous qu’aucun de vous n’est
meilleur ou pire, même si l’un de vous se conforme davantage à la norme
culturelle. Un cultivateur de pommes de terre aurait tout simplement tort de
prétendre que vos roses pousseraient bien mieux sous terre. Ce qui
fonctionne pour l’aloe vera ne fonctionnera pas pour la tomate.
J’espère que les personnes que vous aimez et respectez suffisamment
pour les inviter dans votre jardin vous aiment et vous respectent aussi. Tout
comme vous voudriez contribuer à l’épanouissement de leur jardin, ils
devraient avoir envie de contribuer à l’épanouissement du vôtre. Il est
possible qu’ils ne sachent tout simplement pas comment s’y prendre.
Vous devez donc enseigner à votre partenaire le désir réceptif. Vous
n’êtes pas brisée, vous êtes un plant de tomate dans un monde qui attend de
vous que vous soyez un aloe vera. Si vous vous épanouissez avec plus
d’eau, dites-le à votre partenaire et célébrez cette expérience ensemble.
Racontez-vous l’un l’autre les contextes qui activent vos accélérateurs et
ceux qui appuient sur vos freins. Parlez du sexe le plus sexy que vous ayez
eu ensemble et de ce que vous pourriez faire pour qu’il se reproduise.

De belles choses surviennent lorsque vous créez de l’espace dans votre relation pour un désir
réceptif. Quand Olivia et Patrick ont complètement inversé leurs styles de désir en faisant de
Patrick, avec son style de désir sensible au contexte, l’initiateur des relations, il a été contraint
de trouver quels étaient les éléments excitants qui le feraient basculer de l’indifférence à
l’intérêt. Olivia a patiemment laissé à Patrick l’espace et le temps d’explorer son propre désir, et
elle a été récompensée par une expérience érotique d’une telle intensité que son style spontané à
elle lui permettait rarement de vivre.
Ce niveau d’acceptation de soi et réciproque est en lui-même une caractéristique spécifique
et vitale du contexte le plus exubérant de la sexualité positive. Il faut non seulement être
conscient du fonctionnement de la sexualité de chacun, mais aussi accepter et accueillir ces
sexualités telles qu’elles sont. Ce n’est pas le fonctionnement de votre sexualité qui importe,
mais ce que vous ressentez par rapport à votre sexualité. Ce que votre partenaire ressent par
rapport à la sienne. Et ce que vous ressentez tous les deux par rapport à la sexualité de l’autre.
C’est là que se trouve le contexte sexuel positif ultime. Et c’est ce dont traite le chapitre 9.

Mais avant d’y arriver, nous devons d’abord parler de l’orgasme.


En résumé

Certaines personnes ont un style de désir spontané – elles veulent


du sexe de manière imprévue. D’autres ont un style de désir réactif :
elles ne veulent faire l’amour que lorsque la situation est déjà assez
érotique. Les autres, soit environ la moitié des femmes, vivent un
mélange des deux, selon le contexte.

Si les deux partenaires ont des niveaux de désir sexuel différents,


celui qui a le plus de désir n’a pas la « bonne » quantité de désir et
l’autre qui en a le moins n’a pas la « mauvaise » quantité de désir, et
vice versa. Les gens sont uniques.

Si le désir spontané disparaît, c’est parce que le contexte a changé,


et non parce que quelqu’un est « brisé ». Pour faire revenir le désir
spontané, il faut modifier le contexte.

La chose la plus importante à savoir sur le désir, c’est que ce n’est


pas ce qui compte. Ce qui compte, c’est le plaisir. Si vous créez un
contexte qui permet à votre cerveau d’interpréter le monde comme
un endroit sûr, amusant, sexy et agréable, vous créerez du sexe qui
vaut la peine d’être désiré.
QUATRIÈME PARTIE

EXTASE POUR TOUTES
CHAPITRE 8

L’orgasme
Le plaisir est l’unité de mesure
Être spectateur (ou spectatrice), c’est l’art de se préoccuper de son corps et de son
fonctionnement sexuel pendant qu’on fait l’amour, et Merritt était passée maître en la matière.
Plutôt que de prêter attention aux sensations agréables et excitantes dans son corps, elle avait la
tête remplie de pensées anxieuses  : elle songeait aux mouvements de ses seins, se souvenait
qu’elle n’avait pas eu d’orgasme la dernière fois qu’elle avait eu un rapport sexuel ou
s’inquiétait de ce que révélait d’elle son incapacité à se concentrer sur le plaisir, en tant que
personne sexuelle. Elle se souciait de la relation sexuelle qu’elle avait, au lieu de l’apprécier. Et
l’inquiétude est l’ennemie du plaisir. L’inquiétude appuie sur les freins.
Or quand les freins sont enclenchés, l’orgasme ne survient pas.
C’est pourquoi elle pouvait compter sur les doigts d’une main le nombre d’orgasmes
qu’elle avait eus avec Carol au cours de leurs deux décennies de vie commune.
Et c’est aussi pourquoi elle a décidé que l’orgasme était le moyen parfait de pratiquer le
plaisir – et la confiance en elle que ce plaisir exigeait – qu’elle voulait développer dans sa vie.
«  OK, alors dis-moi comment, m’a-t-elle demandé. Comment je fais pour que l’orgasme
survienne ?
– Ah, tu ne peux faire en sorte que l’orgasme survienne. Tu dois lui permettre de
survenir », lui ai-je dit.
Elle a hoché la tête, puis elle l’a secouée.
« Je ne sais pas ce que ça veut dire. »
Je lui ai recommandé de lire Becoming Orgasmic de Julia Heiman et Joseph LoPiccolo.
Bien qu’il soit écrit pour les femmes qui n’ont jamais eu d’orgasme, c’est vraiment le guide par
excellence pour toutes les femmes qui luttent pour atteindre l’orgasme. Merritt a reçu le livre,
l’a lu et a fait quelques exercices… puis elle a fait autre chose de remarquable. Elle a décidé de
ne pas essayer d’avoir des orgasmes avec Carol après tout.
« Pour moi, faire l’amour jusqu’à ce que j’aie un orgasme serait comme courir jusqu’à ce
que je perde du poids. Ça ne marche pas comme ça, et ce n’est même pas le but. Alors je vais
arrêter d’essayer. »
Une fois par semaine, elle et Carol échangeaient des massages, des baisers et du sexe oral.
Elles se contentaient de jouer, et elles faisaient attention à ce que chacune ressentait, sans aucun
objectif précis.
Et devinez ce qui s’est passé.
Ouaip.
Ce chapitre traite de l’orgasme, de toute la panoplie des expériences orgasmiques offertes
aux femmes et des obstacles qui se dressent entre les femmes et le plaisir extatique. Les freins
sensibles de Merritt lui rendaient l’orgasme – en particulier l’orgasme avec une autre personne –
inaccessible. Elle s’est servie de la science que je décris dans ce chapitre pour désactiver ses
freins et trouver le chemin d’une expérience de l’orgasme plus profonde qu’elle ne l’aurait
jamais imaginée possible.
Il y a quelques années, j’ai soutenu une amie qui débutait sa première
relation amoureuse et sexuelle, qui ne s’était même jamais masturbée de sa
vie, et avait encore moins joui. Elle me posait de temps en temps des
questions, parmi lesquelles : « Comment saurai-je si j’ai eu un orgasme ? »
Je lui ai répondu que les orgasmes sont différents pour chacune et qu’ils
peuvent varier selon le mode de stimulation, le fait d’avoir un partenaire ou
non, si on a ses règles – bref, ils dépendent d’un certain nombre de facteurs.
Parfois, on ressent une pulsation rythmique du muscle qui entoure le vagin,
parfois non. La plupart du temps, la sensation principale décrite par les
femmes est celle de «  l’accomplissement  », c’est-à-dire un sentiment
d’avoir franchi un seuil et d’avoir achevé quelque chose. La pression
artérielle atteint souvent un pic quand vos muscles se contractent et que
votre cœur bat à tout rompre.
«  Un orgasme, c’est comme une œuvre d’art, lui ai-je dit. On le
reconnaît quand on le voit. Ce n’est peut-être pas ce à quoi tu t’attends,
mais ce sera différent de tout ce que tu connais. »
Elle a acquiescé, enthousiaste, et a répondu :
« Je crois que j’ai compris ! »
Et puis un jour, elle s’est approchée de moi, un immense sourire aux
lèvres, et m’a dit :
«  Ce n’est pas ce à quoi je m’attendais, mais tu avais raison. C’était
incomparable. »
Cette grande variété et cette variabilité rendent l’orgasme presque
impossible à définir – quand bien même les scientifiques consacrent des
milliers de mots à ce casse-tête. Mais quand on le résume à son essence
universelle, voici ce que l’on obtient : l’orgasme est la libération soudaine
et involontaire de la tension sexuelle 1.
Remarquez tout ce qui manque à cette définition : les organes génitaux,
les contractions musculaires, le comportement sexuel, le plaisir, ou tout ce
qui indique ce que l’on ressent ou comment ça s’est produit. Les orgasmes
varient d’une personne à l’autre et d’un contexte à l’autre. Ils se produisent
lorsque vous faites l’amour – et parfois non. Ils se produisent lorsque vous
vous masturbez –  et parfois non. Ils peuvent se produire lors de la
stimulation du clitoris, du vagin, des cuisses, de l’anus, des seins, du lobe
de l’oreille ou de l’esprit sans aucun contact physique – ou pas du tout. Ils
peuvent se déclencher pendant votre sommeil, une activité sportive ou dans
diverses autres situations totalement non sexuelles. Ils peuvent être
délicieux, monotones, spirituels, agaçants, extatiques, plaisants ou
frustrants. Parfois, ils sont fantastiques. Parfois, ils ne le sont pas. Parfois,
vous en voulez. Parfois, non.
Dans ce chapitre, nous partons à la recherche du panorama complet de
l’expérience orgasmique, afin de trouver notre chemin vers le jardin secret
au cœur de tout ça. Pour commencer, je vais vous dire ce que l’orgasme
n’est pas : une réponse génitale, un « plaisir », un phénomène hiérarchisé.
Je vais vous dérouler un tapis rouge de statistiques et une ribambelle
d’histoires de femmes pour normaliser votre expérience (ou votre absence
d’expérience) de l’orgasme. Je décrirai ensuite ce qu’il faut faire pour
surmonter les obstacles à l’orgasme, qu’il s’agisse d’apprendre à avoir ce
premier orgasme ou à jouir dans différents contextes. Et je vous dirai
comment trouver en vous le type d’orgasme qui fera exploser les étoiles en
arc-en-ciel.
Je veux vous prouver que vos orgasmes, peu importe comment ils sont
(ou ne sont pas), sont normaux, et je veux vous donner les outils nécessaires
pour avoir les orgasmes les plus profonds et les plus intenses dont vous êtes
capable, des orgasmes qui bouleverseront votre univers. C’est possible pour
tout le monde, je crois, mais seulement si vous vous libérez de tout ce que
l’orgasme n’est pas.
QUE FAIRE SI VOUS VOUS SURPRENEZ
À ÊTRE SPECTATRICE ?
Contrairement à toutes les autres espèces, l’humain peut contrôler son cerveau, plutôt
qu’être contrôlé par son cerveau. Nous sommes capables de remarquer nos pensées ou nos
sentiments, et nous pouvons agir en conséquence. C’est la clé de la gestion de toute forme
d’anxiété liée à la performance, y compris celle qui consiste à devenir spectateur  :
remarquez ce à quoi vous prêtez attention, puis détournez votre attention vers ce à quoi
vous voulez prêter attention.

C’est plus facile à dire qu’à faire au début, mais avec un peu de pratique, ça devient plus
facile à faire qu’à dire. Voici comment…

Imaginez que vous faites la queue au supermarché ou que vous êtes assise dans le bus.
Laissez-vous aller à remarquer votre respiration. Inspiration. Pause. Expiration. Pause.
Inspiration. Pause. Expiration. Pause. Deux respirations, juste comme ça. Remarquez, et
souriez. Remarquez cinq à dix fois par jour.

Et surtout, remarquez quand votre attention vagabonde pendant ces deux respirations – ce
qui est normal. Quand vous remarquez que votre esprit se met à errer, souriez à ces autres
pensées, laissez-les passer, et ramenez doucement votre attention là où vous voulez qu’elle
soit. Cette compétence, là ? C’est la pleine conscience. Remarquer quand votre attention
s’éloigne de ce que vous essayez de remarquer, c’est la compétence qui vous aidera à
cesser d’être spectatrice, parce que vous apprendrez à remarquer quand vous êtes
spectatrice et à rediriger votre attention vers les sensations de votre corps.

La non-concordance : maintenant avec


des orgasmes !
Le premier truc que l’orgasme n’est pas, c’est une « réponse génitale ».
Au chapitre  2, j’ai décrit les recherches de Masters et Johnson pour
mesurer la physiologie du cycle de réponse sexuelle. Les recherches ont
utilisé certains signaux pour repérer le moment de l’orgasme, en particulier
les contractions des muscles du périnée, au niveau de l’orifice vaginal.
Mais… ce n’est pas si simple.
Souvenez-vous de la non-concordance au chapitre  6  : ce que font vos
organes génitaux ne correspond pas nécessairement à ce que vous ressentez.
Il est prouvé que c’est également vrai pour l’orgasme – du moins chez les
femmes qui sont en mesure d’atteindre l’orgasme en laboratoire alors que
leur réponse génitale est mesurée en parallèle.
Par exemple, dans le cadre d’une étude, on a demandé aux participantes
de se masturber pour atteindre l’orgasme en laboratoire, puis de «  noter  »
leur orgasme sur une échelle de 1 (« faible ou médiocre ») à 5 (« vraiment
puissant ou excellent ») 2. Résultat ? Aucun lien n’a pu être établi entre les
notes attribuées par les femmes à leurs orgasmes et les réponses génitales
traditionnellement considérées comme des « marqueurs » de l’orgasme, en
particulier le nombre de contractions du périnée.
Ces contractions rythmiques et involontaires sont peut-être le marqueur
physiologique le plus universel possible de l’orgasme, mais on ne peut pas
pour autant s’y fier systématiquement. Dans une étude, deux femmes sur
onze n’ont présenté aucune contraction musculaire vaginale au moment de
l’orgasme 3 et dans une autre, certaines femmes ont présenté des
contractions musculaires sans orgasme 4.
En d’autres termes, les marqueurs physiologiques génitaux de l’orgasme
ne sont pas toujours prédictifs de l’expérience subjective de l’orgasme chez
une femme. Ce qui est parfaitement logique quand on admet que l’orgasme
– comme le plaisir – ne dépend pas de ce qui se passe dans les parties
génitales, mais dans le cerveau 5.

Pas deux pareilles
Ce qui nous amène au deuxième truc que l’orgasme n’est pas  : «  le
paroxysme du plaisir ».
L’orgasme, c’est un peu comme être chatouillé. Parfois, c’est amusant,
d’autres fois, c’est énervant, et enfin, de temps à autre, on ne ressent
presque rien. Le plaisir est la perception d’une sensation, et cette perception
dépend du contexte. Ce qui est vrai pour les chatouilles l’est pour
l’orgasme. Mais personne ne me demande jamais : « Pourquoi est-ce que la
plupart du temps, lorsque mon partenaire me chatouille, c’est amusant et
agréable, alors que d’autres fois, pas du tout  ?  » Nous savons tous
intuitivement que la perception des sensations de chatouilles dépend du
contexte. Il y a un temps et un lieu pour les chatouilles.
Et pourtant, les gens me demandent tout le temps : « Comment se fait-il
que parfois mes orgasmes sont géniaux et que d’autres fois, pas du tout ? »
C’est comme si nous pensions que les orgasmes sont en quelque sorte
différents des autres sensations, qu’ils doivent être ressentis d’une certaine
manière, quel que soit le contexte.
Tous les orgasmes sont la libération soudaine d’une tension sexuelle. La
manière dont cette libération est ressentie dépend du contexte. C’est
pourquoi certains orgasmes sont incroyables et d’autres… vraiment,
vraiment pas. Quelques exemples :
Une femme m’a avoué, le visage écarlate, qu’elle avait eu un orgasme
pendant sa séance de sport. Elle était trop gênée pour ressentir un
quelconque plaisir, et elle était troublée à la fois par l’orgasme et le
manque de plaisir 6.
Une amie souffrant de dépression sévère m’a dit qu’elle pouvait avoir
des orgasmes mais qu’elle n’en éprouvait aucun plaisir. Je lui ai dit que
c’était normal, que le plaisir venait du contexte, et que son contexte était
gris et plat. C’est normal pour une personne dépressive.
Une étudiante de premier cycle pâlissait à vue d’œil pendant ma
conférence sur les agressions sexuelles. J’avais mentionné au passage
que parfois les femmes ont des orgasmes pendant le viol et que c’est en
gros juste un réflexe, que ça ne veut pas dire plaisir ou consentement.
Elle est venue me voir après et m’a dit que j’avais changé sa vie avec
cette seule phrase 7.
Une femme avait périodiquement des orgasmes dans son sommeil et se
réveillait en plein orgasme, parfois à la suite d’un rêve, parfois pas, mais
toujours perplexe devant la sensation de chaleur et les pulsations qui
n’étaient pas nécessairement accompagnées d’un plaisir particulier 8.

Les orgasmes fluctuent les uns par rapport aux autres parce que le
contexte de chaque orgasme est unique. La qualité d’un orgasme est
fonction non pas de l’orgasme lui-même, mais du contexte dans lequel il se
produit.

Les mêmes parties…
Le troisième truc que l’orgasme n’est pas : un phénomène hiérarchisé. Tous
les orgasmes sont différents, et il n’y a pas de «  bon  » type ou de
«  meilleur  » type d’orgasme. Il est même difficile de dire qu’il existe
différents types d’orgasmes car ils sont tous constitués des mêmes éléments
de base (libération soudaine de la tension sexuelle) organisés de différentes
manières.
Au lieu de penser à des «  types  » d’orgasme, nous pouvons penser à
différentes façons d’avoir un orgasme. Voici un petit échantillon des
orgasmes très agréables que les femmes m’ont décrits :
orgasme résultant de la stimulation du clitoris ;
orgasme résultant de la stimulation vaginale ;
orgasme résultant d’une simple stimulation des seins ;
orgasme résultant de la succion de ses orteils ;
orgasme consécutif à la pénétration par son partenaire dans son anus
(bien lubrifié) avec un doigt, tout en l’épinglant au lit par les cheveux.
La sensation la plus érotique, précise-t-elle, était sa paume tiède
reposant doucement sur ses fesses ;
orgasme lorsque son partenaire caresse lentement et doucement du bout
des doigts ses grandes lèvres… encore… et encore… et encore. Elle
dit : « Ce qui a commencé comme une mise en bouche s’est transformé
en plat principal ! » ;
orgasme sans aucune stimulation génitale, alors qu’elle faisait une
fellation à son partenaire. Elle était si attentive à son excitation que
lorsqu’il a joui, elle aussi.

S’agit-il d’orgasmes clitoridiens, vaginaux, mammaires, podologiques,


fessiers, labiaux et oraux ?
Non. Malgré les efforts acharnés des magazines féminins et même des
chercheurs pour identifier et étiqueter les différents types d’orgasmes que
nous pourrions avoir – orgasmes du point G, mixtes, utérins, vulvaires, et
ainsi de suite 9 – il ne peut y en avoir qu’un seul (comme dans le film
Highlander). Il y a juste la libération soudaine de la tension sexuelle,
générée de différentes manières. Anatomiquement, physiologiquement et
même du point de vue de l’évolution, il n’est pas très logique de parler de
types d’orgasmes basés sur les parties du corps qui sont stimulées 10.
Il est vrai que les orgasmes procurés par stimulation clitoridienne sont
souvent différents des orgasmes procurés par stimulation vaginale. Mais il
est également vrai que les orgasmes stimulés vaginalement sont différents
les uns des autres, et que les orgasmes stimulés par le clitoris sont différents
les uns des autres. Les orgasmes avec un partenaire peuvent être différents
des orgasmes sans partenaire, et les orgasmes avec un partenaire particulier
peuvent être différents des orgasmes avec un partenaire différent, et les
orgasmes avec un partenaire peuvent être différents d’un rapport sexuel à
l’autre. Si nous devions classer les orgasmes en fonction de la sensation
qu’ils procurent, il nous faudrait une nouvelle catégorie pour chaque
orgasme que connaît une femme.
De même que toutes les vulves sont normales et saines comme elles le
sont, tous les orgasmes sont normaux et sains, quel que soit le type de
stimulation qui les a provoqués ou la manière dont ils sont ressentis. La
valeur d’un orgasme ne dépend pas de son origine ou de la satisfaction de
certains critères arbitraires, mais de savoir si vous l’avez apprécié et si vous
l’avez voulu.
Ça se résume ainsi : le plaisir est l’unité de mesure. Le plaisir est l’unité
de mesure de votre orgasme – et pas le type de stimulation qui l’a suscité, ni
le temps qu’il faut pour l’atteindre, ni sa durée, ni la force avec laquelle les
muscles de votre périnée se contractent. La seule unité de mesure de votre
orgasme, c’est le plaisir que vous en tirez.
Les orgasmes n’étaient pas un problème pour Laurie. Une fois qu’elle était lancée, elle trouvait
l’orgasme assez facile à atteindre. Non, le problème de Laurie, c’était que le stress de sa vie
avait dressé un mur de pierre entre elle et le plaisir sexuel, de tout type. Elle et Johnny
apprenaient à abattre ce mur en changeant le contexte… mais à la suite de leur succès de « Can
You Feel the Love Tonight  ?  », Johnny est devenu présomptueux. Il a tiré sur la corde. Il a
commencé à lui faire des avances, à la solliciter et à lui courir après, et Laurie s’est sentie de
plus en plus sous pression. Elle a vite commencé à lui en vouloir de demander, d’autant plus
qu’il savait – il savait – que lorsqu’elle se sentait sous pression, son intérêt s’évaporait. C’était
comme s’il essayait de tout gâcher.
Pour Laurie, une approche parfaitement normale et très tentante de la situation aurait été de
dire : « Écoute, ma vie est complètement chamboulée, donc mon intérêt sexuel est chamboulé.
Qu’il en soit ainsi. Merci mais pas de sexe pour moi. » Beaucoup de femmes se disent la même
chose chaque jour et se contentent, à juste titre, d’attendre que leur vie s’améliore avant
d’essayer de remettre leur vie sexuelle en ordre. C’est une question de priorités. Et en vérité, si
Laurie a continué de vouloir faire l’amour, ce n’était pas qu’elle en avait envie, mais surtout
parce que Johnny voulait qu’elle en ait envie.
Frustrée, elle finissait par le chasser de la maison pour la journée, et l’envoyait avec Trevor
à la bibliothèque pour qu’elle ait le luxe de la maison pour elle seule, pour faire la lessive,
travailler et peut-être, si elle avait vraiment de la chance, faire une sieste.
Et une fois qu’ils étaient partis… ils lui manquaient.
Souvent, la meilleure partie de sa journée était le bain de son fils – loin d’être une corvée
ou un fardeau, elle aimait s’éclabousser et jouer avec lui. Et maintenant, voilà qu’elle avait hâte
qu’ils reviennent, parce que… l’heure du bain !
Et puis elle a comparé ses impressions sur le plaisir sexy à ses impressions sur le plaisir
maternel. Elle s’est dit : « Ce n’est pas égoïste de ma part de prendre du plaisir à être avec mon
enfant – y prendre plaisir fait de moi un meilleur parent ! Alors comment se fait-il que je puisse
me donner la permission d’avoir ce plaisir, mais que je ne puisse pas me donner la permission
de profiter d’autres types de plaisir ? »
Quelque chose a fait tilt. Elle a compris qu’on lui avait enseigné qu’être mère était la
meilleure chose qu’une femme puisse vivre, mais que le sexe n’était pas acceptable, que le
plaisir d’un bon plat était bloqué par la culpabilité à l’égard de son corps… beaucoup de choses.
Mais au final, un déclic s’est produit, et elle s’est libérée d’un tas de choses. Elle a commencé à
se demander si le sexe pouvait être pour son plaisir à elle aussi, et non pas « pour Johnny ».
Laurie s’est souvenue que Johnny disait : « Peut-être que c’est une question de sensations,
pas d’endroit où nous sommes ou de ce que nous faisons. » Peut-être pourrait-elle essayer ça,
essayer de faire attention à ce qu’elle ressent, indépendamment de ce qui se passe.
Votre vagin va très bien,
quoi qu’il en soit
On me pose beaucoup de questions sur l’orgasme pendant les rapports
pénito-vaginaux, alors attardons-nous un peu sur ce sujet. Comme nous
l’avons vu dans le chapitre 1, le clitoris est votre Aéroport international de
la sensation érotique. La prédominance du clitoris dans les orgasmes
féminins explique pourquoi 80 à 90 % des femmes qui se masturbent le font
généralement avec peu ou pas de pénétration vaginale, y compris
lorsqu’elles utilisent des vibromasseurs 11.
Mais vous avez entendu le proverbe  : «  Ce n’est pas la taille qui
compte, mais la façon dont on s’en sert. »
La sagesse que ces propos tentent de transmettre est la suivante  : ce
n’est pas la taille du pénis pénétrant dans le vagin qui compte, mais la
stimulation conjointe entre les partenaires (ou éventuellement l’habileté de
l’un ou l’autre) qui crée le plaisir et l’orgasme pour une femme lors d’un
rapport sexuel.
Mais la vérité, c’est que ce n’est ni la taille, ni la manière dont on s’en
sert, qui compte. Les femmes sont juste différentes les unes des autres.
Malgré ce que vous ont appris les films, les romans d’amour ou le porno, en
réalité, moins d’un tiers des femmes ont un orgasme assuré avec la seule
pénétration vaginale, tandis que les deux tiers restants, voire plus, ont un
orgasme parfois, rarement ou jamais avec la seule pénétration 12.
Pourtant, les femmes me demandent tout le temps : « Pourquoi ne puis-
je pas avoir d’orgasme pendant un rapport sexuel ? » L’explication est alors
très probablement la même que pour la plupart des femmes  : les rapports
sexuels ne sont pas un moyen très efficace de stimuler le clitoris, et la
stimulation du clitoris est le moyen le plus efficace pour atteindre
l’orgasme. En fait, des recherches ont montré que si les femmes ne
parviennent pas à l’orgasme par pénétration avec la même fiabilité, c’est
notamment en raison de la distance entre le clitoris et l’urètre 13.
Finalement, la question n’est pas tant de savoir pourquoi certaines
femmes n’atteignent pas l’orgasme par pénétration vaginale, que pourquoi
certaines femmes y parviennent. Il y a plusieurs hypothèses, mais les deux
candidates les plus intéressantes sont probablement les suivantes  : (a) la
stimulation par la paroi frontale du vagin de l’éponge para-urétrale
(l’homologue féminin de la prostate et l’origine supposée du point G) ; ou
(b) les bulbes vestibulaires, qui s’étendent jusqu’à l’orifice du vagin à partir
du sommet du clitoris. Mais en fin de compte, la réponse est la suivante : les
gens varient 14. Les gens varient dans la disposition de leurs organes
génitaux et la sensibilité de leurs tissus. Je pense que ces deux hypothèses
sont fondées, mais vous pouvez imaginer à quel point il est difficile de lever
des fonds pour faire de la recherche sur l’orgasme féminin, donc il faudra
peut-être un certain temps avant d’en être sûr.
Mais alors, si les orgasmes par pénétration sont relativement peu
fréquents, pourquoi les femmes posent-elles si souvent des questions à ce
sujet  ? Pourquoi la pénétration est-elle si souvent considérée comme «  la
voie royale vers l’orgasme » ?
Et la réponse est, bien sûr : « Pfff, le patriarcat. » Les hommes comme
point de référence par défaut, encore une fois. Des siècles de médecins et de
scientifiques hommes (Freud est souvent pointé du doigt comme l’un des
principaux coupables, et à juste titre) ont affirmé que les orgasmes obtenus
par stimulation vaginale sont de bons orgasmes, normaux et appropriés, et
que les orgasmes clitoridiens sont « immatures ».
Mais cette approche de l’homme par défaut est encore différente de
celle qui concernait l’excitation et le désir. La culture consacre le désir
spontané comme type de désir «  attendu  » parce que c’est ainsi que les
hommes ressentent le désir (bien que ça ne soit pas le cas pour tous les
hommes, bien sûr), et la culture consacre l’excitation concordante comme
type d’excitation attendu parce que c’est ainsi que les hommes ressentent
l’excitation (bien que, là encore, tous ne le vivent pas ainsi)… mais si le
type d’orgasme attendu chez les femmes est analogue à celui que les
hommes ressentent, alors il devrait s’agir d’orgasmes dus à la stimulation
du clitoris, puisque, anatomiquement, le clitoris est l’homologue du pénis.
Dire que les femmes devraient avoir des orgasmes par pénétration vaginale
équivaut anatomiquement à dire que les hommes devraient avoir des
orgasmes par stimulation de la prostate ou du périnée. Il est certain que de
nombreux hommes peuvent avoir des orgasmes grâce à ce type de
stimulation, mais nous ne les jugeons pas s’ils n’en ont pas, et ils ne se
demandent généralement pas s’ils sont brisés quand ils ne connaissent pas
de tels orgasmes.
Apparemment, selon le mythe culturel, les femmes devraient être
comme les hommes – avec une excitation et un désir spontané concordants
– jusqu’à ce que nous commencions à avoir des relations sexuelles, et
ensuite nous sommes supposées fonctionner de manière exclusivement
féminine, en atteignant l’orgasme grâce à un comportement qui se trouve
également être une source de jouissance très fiable pour les hommes. Le
plaisir vécu par les hommes est le plaisir par défaut.
Camilla, avec son accélérateur sexuel relativement insensible, avait toujours mis du temps à
atteindre l’orgasme et n’était pas du tout intéressée par la possibilité d’en avoir davantage. La
plupart du temps, ils lui demandaient beaucoup d’efforts, et n’étaient pas assez satisfaisants
pour qu’elle se donne autant de mal. Elle ne s’était masturbée que très rarement dans sa vie, et
plutôt par curiosité que par désir. Et souvent, elle n’était pas très intéressée par l’idée d’avoir un
orgasme quand elle couchait avec Henry.
Henry, en type bien qu’il était, avait du mal à accepter cette idée.
« Si tu n’as pas d’orgasme, comment puis-je savoir si je t’ai satisfait ? demandait-il.
– Tu peux le savoir parce que je te dis que je suis satisfaite ! Si je mange moins de pizza
que toi et que je te dis que je suis rassasiée, tu vas douter de moi ? Si je prends deux verres de
vin et que je suis aussi pompette que je souhaite me sentir, suis-je censée essayer d’augmenter
ma tolérance à l’alcool ? Si je lis un roman mais que je ne me sens pas obligée de lire le tome 2,
y a-t-il quelque chose de mal à ça ?
– Bien sûr que non, répondait-il aux trois questions.
– Alors pourquoi as-tu besoin que je fasse l’expérience d’un réflexe physiologique pour
avoir l’impression que j’ai passé un bon moment ?
– Parce que c’est grâce à ce réflexe que je sais que tu es satisfaite ! »
C’était l’une de ces disputes où chacun a un point de vue qui lui semble tellement évident,
mais qui est si étranger à l’autre, que personne ne sait plus comment s’en sortir. La solution
qu’ils ont trouvée était d’une telle intelligence que je suis certaine qu’ils resteront ensemble
pendant des décennies. Ils ont littéralement échangé leurs places – chacun a pris le fauteuil de
l’autre – et ont adopté le point de vue de l’autre. Camilla a plaidé pour Henry, et il a plaidé pour
elle. Camilla s’est lancée :
«  Si tu n’as pas d’orgasme, alors je ne peux pas être certain que tu as vraiment aimé et
voulu le rapport sexuel que nous avons eu. »
Henry a répliqué :
« Si je n’ai pas d’orgasme, cela veut dire que j’ai mangé autant de pizza que je le voulais,
que c’était génial, et que maintenant je n’ai plus faim. »
Et puis il a ajouté :
« Oh. »
Camilla a poursuivi :
« Mais la pizza ce n’est pas pareil que le sexe. Le sexe a une destination, un but, un “Boss
Final”, et si tu ne l’atteins pas, alors je ne suis pas à la hauteur ! »
Et puis elle a ajouté :
« Oh. »
Henry a dit :
« Le seul moment où tu n’es pas à la hauteur, c’est si tu ne peux pas m’accepter tel que je
suis. »
Camilla a répliqué :
« Ton orgasme me dit que tu m’acceptes telle que je suis. »
Et ils ont ajouté en même temps :
« Oh. »
Et puis elle s’est levée du fauteuil de Henry pour venir s’asseoir près de lui, sa tête sur son
épaule.
« Mon orgasme est-il vraiment si important pour toi ? »
Henry a répondu :
« Si je te fais une pizza spéciale et que tu n’en manges qu’une part, comment ne pas me
demander si tu n’as pas aimé ?
– Mmmm. Il va falloir qu’on trouve une solution logique », a conclu Camilla.
Et ils la trouvent, au chapitre 9.

Les difficultés à atteindre l’orgasme


Peu de temps après la rentrée, deux copines de fac et moi nous sommes
assises ensemble avant les cours un après-midi d’automne, pour parler de…
sexe (quoi d’autre  ?!). L’une d’elles venait de se marier mais n’avait pas
encore eu d’orgasme avec son nouveau mari. «  Je peux avoir un orgasme
toute seule, mais quand il est avec moi, je n’y arrive pas, a-t-elle confié, les
sourcils froncés en signe de tristesse, et une grimace confuse aux lèvres. Je
sais qu’il se sent rejeté et le prend personnellement, mais je l’aime, je veux
avoir un orgasme avec lui. Je n’y arrive tout simplement pas. »
Elle s’en voulait. Son mari s’en voulait. Tous deux se sentaient honteux,
brisés et anxieux de ne jamais avoir de relations sexuelles « normales ».
À l’époque, je n’avais aucune idée de ce qui pouvait bien se passer,
mais peu de temps après, j’ai commencé un stage clinique où j’ai appris que
de telles difficultés sont à la fois courantes et éminemment surmontables.
Le désarroi lié à l’orgasme est le deuxième motif le plus fréquent de
consultation pour des problèmes sexuels (après le désir), et concerne
environ 5 à 15 % des femmes 15. La difficulté ou l’absence d’orgasme dans
certains contextes sont très courants. Par exemple, seulement 11  % des
étudiantes déclarent avoir eu un orgasme la première fois qu’elles couchent
avec un nouveau partenaire, contre 67  % des étudiantes ayant eu des
relations sexuelles dans le cadre d’une relation de plus de six mois 16.
Environ 12 % des femmes n’ont jamais eu d’orgasme, ou ne sont pas sûres
d’en avoir eu un, à l’âge de 28  ans 17. Et il y a probablement un certain
nombre de femmes qui n’ont jamais d’orgasme – les études estiment ce
chiffre entre 5 et 10  % 18. J’ai rencontré une femme à Boston qui m’a dit
qu’elle avait eu le premier orgasme de toute sa vie à plus de 70 ans, je suis
donc convaincue que tout le monde peut avoir un orgasme, même si, pour
certaines personnes, il faut vraiment un contexte approprié pour qu’il se
produise.

L’orgasme, c’est un peu comme faire du vélo : ça vient plus


naturellement pour certains que pour d’autres, et si vous n’êtes pas
assez motivée pour continuer à essayer jusqu’à ce que vous y
parveniez, vous n’apprendrez jamais.

Et il est rare qu’une personne ait vraiment besoin d’apprendre à faire de


la bicyclette.
La plupart des problèmes liés à l’orgasme sont dus à une stimulation
trop forte des freins – trop de soucis, trop de stress, d’anxiété, de honte ou
de dépression, y compris le stress, l’anxiété, la honte ou la dépression liés à
l’orgasme 19. Si vous avez suffisamment envie d’avoir un orgasme, il y a de
fortes chances que vous y arriviez, à condition d’être stimulée correctement
et dans un contexte qui vous permette de relâcher vos freins. Et si vous
pouvez avoir un orgasme maintenant dans un contexte idéal, il y a de fortes
chances que vous puissiez en avoir un dans un contexte positif inédit et
différent, comme avec votre partenaire.
JAMAIS EU D’ORGASME…
À SA CONNAISSANCE
Les étudiantes rigolent quand j’ajoute « à sa connaissance », mais j’ai évoqué à plusieurs
reprises la masturbation jusqu’à l’orgasme dans l’enfance – serrer les jambes autour d’un
poteau de balançoire ou se frotter la vulve contre une peluche, ainsi que se toucher les
parties génitales avec les mains ou appuyer le bassin contre le matelas – et toutes se sont
alors exclamées  : «  Oh  ! C’est donc ce que je faisais  !  » Les souvenirs d’orgasmes
infantiles ressemblent souvent davantage à des orgasmes de sommeil ou de sport  : ils ne
sont pas particulièrement érotiques. Vous n’avez pas de fantasmes sexuels pour alimenter
votre accélérateur, mais vous n’avez pas non plus une décennie ou plus de honte culturelle
pour vous freiner.

Le mot le plus souvent utilisé par les femmes pour décrire leur difficulté
à atteindre l’orgasme est « frustrée » 20.
Comment fonctionne la frustration ?
Imaginez une petite surveillante, comme un arbitre ou une contrôleuse,
assise à côté de votre Anneau Unique émotionnel 21. Elle a deux fonctions :
1. Elle veille à ce que le monde se comporte conformément à ses
attentes (attentes établies par toutes ses expériences antérieures avec le
monde).
2. Elle dirige l’enquête en cas de divergence entre le monde et ses
attentes.
Lorsque le monde répond à ses attentes, la surveillante se sent satisfaite.
Rien ne manque. Mais il y a parfois un décalage entre le monde et ses
attentes  : il faut alors résoudre certaines ambiguïtés, explorer certaines
nouveautés pour déterminer leur place dans l’ordre attendu des choses, ou
encore aborder et obtenir un stimulus très attirant 22.
Lorsque cela se produit, elle passe en mode commandante, et fait de la
réduction de l’écart sa raison d’être. Son monde entier est composé de ces
trois choses :
l’objectif de réduction du décalage, ce qui peut signifier résoudre
l’ambiguïté, explorer la nouveauté, aborder ce qui motive, ou
simplement accomplir la tâche ;
l’effort que vous fournissez dans la poursuite de cet objectif, c’est-à-dire
l’attention, les ressources et le temps que vous y consacrez ;
les progrès que vous réalisez en avançant vers cet objectif.

La petite surveillante permet donc de suivre les progrès que vous faites
par rapport à l’effort que vous investissez. Elle calcule votre ratio
effort/progrès, et elle a une opinion bien arrêtée de ce que devrait être ce
ratio. Cette opinion s’appelle «  vitesse du critère 23  ». Et c’est là que ça
devient vraiment intéressant.
Lorsque la surveillante estime que vous faites de bons progrès – lorsque
vous atteignez ou dépassez la vitesse du critère –, elle est satisfaite,
motivée, enthousiaste. Mais lorsqu’elle estime que vous ne progressez pas
assez, elle devient frustrée et vous incite à redoubler d’efforts pour vous
rapprocher de votre objectif. Si vous ne faites toujours pas assez de progrès
pour la satisfaire, elle commence à se mettre en colère… puis enrage  ! Et
finalement, si vous persistez à ne pas être à la hauteur, à un certain moment,
la petite surveillante abandonne et vous pousse du haut d’une falaise
émotionnelle dans le «  gouffre du désespoir  », puisqu’elle est convaincue
que l’objectif est inaccessible. Vous laissez tomber, noyée dans une
désolation sans espoir.
Lorsque vous « échouez » continuellement à atteindre l’orgasme, votre
petite surveillante devient frustrée, puis furieuse et finalement désespérée.
Quand je fais mon cours sur la petite surveillante, les yeux de mes
étudiantes s’écarquillent et elles se trouvent bouche bée. La petite
surveillante est un élément crucial de votre bien-être sexuel, mais elle
intervient aussi dans presque tous les domaines de la vie. Si vous avez déjà
ressenti le frisson de gagner une course ou un jeu, c’est parce qu’elle a été
satisfaite de son critère de vitesse – le ratio effort/progrès a été atteint, voire
dépassé ! Si vous avez déjà pété un câble au volant, c’est à cause du critère
de vitesse fixé par votre surveillante et qui n’est pas respecté, elle se
demande combien temps devrait prendre ce trajet : le ratio effort-progrès est
beaucoup trop élevé ! Si vous vous êtes déjà effondrée, désespérée, face à
un échec, c’est votre petite surveillante qui réévalue l’état d’un objectif et le
juge inaccessible, incontrôlable. La petite surveillante et ses opinions sur
l’effort à fournir sont à la base d’un large éventail de frustrations et de
satisfactions, le désir sexuel n’étant qu’un élément parmi d’autres.

Impatientes petites surveillantes


Notre culture nous apprend complètement à avoir de petites surveillantes
impatientes, avec des vitesses de critères réglées au niveau le plus bas
possible, ce qui signifie que beaucoup d’entre nous sont facilement
frustrées, enragées et finalement désespérées lorsque nous n’atteignons pas
aisément nos objectifs – y compris les orgasmes. Si vous avez l’impression
que vous devriez déjà avoir un orgasme, mais qu’il n’est pas encore là, vous
commencerez à être frustrée… et cette frustration va-t-elle favoriser le
relâchement des freins ?
Bien au contraire.
La petite surveillante est une diablotine bourrée d’ironie.
Contrairement à l’Anneau Unique, aux freins et à l’accélérateur, nous
pouvons créer un changement intentionnel chez la petite surveillante. En
fait, l’humain est peut-être la seule espèce capable de faire un geste délibéré
face à ce genre de frustration, et je parie que si vous y réfléchissez
sérieusement pendant une minute, vous trouverez comment. Il y a trois
cibles potentielles pour ce changement, n’est-ce pas 24 ?
Est-ce le bon objectif pour moi ?
Est-ce que je fournis le bon type d’effort, et en bonne quantité ?
Suis-je réaliste dans mes attentes vis-à-vis de l’effort à fournir pour
atteindre cet objectif ?

Supposons que l’objectif soit de parvenir à l’orgasme en dix minutes ou


au cours d’un rapport vaginal. Si l’orgasme ne survient pas aussi
rapidement ou suite à ce type de stimulation – ce qui serait courant pour la
plupart des femmes –, votre surveillante commencera à être frustrée.
Et la frustration active-t-elle votre accélérateur… ou vos freins  ? Oui,
vos freins.
L’approche principale face aux difficultés de l’orgasme consiste à
modifier l’objectif : faire du plaisir le but, et non l’orgasme. Lorsque vous
commencez à vous sentir frustrée, rappelez-vous que c’est votre petite
surveillante qui vous donne l’impression de ne pas progresser vers l’objectif
qu’est l’orgasme. C’est le moment de vous rappeler que vous avez déjà
atteint votre objectif tant que vous éprouvez du plaisir.

L’orgasme n’est pas l’objectif. Le plaisir est l’objectif.

Pour les femmes qui ont parfois (ou toujours) des difficultés à atteindre
l’orgasme, j’ai inclus des instructions détaillées pour s’entraîner à prêter
attention au plaisir et à lâcher prise sur l’objectif, et notamment pour
adapter cette compétence à atteindre l’orgasme avec votre partenaire (voir
annexe 1).
LES VIBROMASSEURS
Au moins la moitié des femmes vivant aux États-Unis ont déjà utilisé un vibromasseur, et
ces femmes sont plus susceptibles de faire part d’un meilleur niveau d’excitation, de désir
25
et d’orgasme . Entre 80 et 90 % de ces femmes n’ont rapporté aucun effet secondaire, et
parmi celles qui en ont rapporté, notamment un engourdissement ou une irritation, presque
toutes ont ajouté que le désagrément durait moins d’une journée.

Une étude limitée sur des femmes utilisant des vibromasseurs dans le cadre d’une thérapie
sexuelle a révélé que les femmes réagissaient de manière très variable au vibromasseur et
26
exprimaient un large éventail de ressentis quant à cette expérience . La résistance initiale
(«  Je devrais pouvoir atteindre l’orgasme sans avoir à utiliser un “outil”  ») et les
préoccupations relatives aux perturbations éventuelles causées par l’utilisation du
vibromasseur dans la connexion sexuelle avec un partenaire («  Est-ce que vibrer, c’est
tromper  ?  ») ont souvent fait place à un sentiment de liberté et de découverte. Si
l’expérience a été très hétérogène, même au sein d’un échantillon de dix-sept femmes
seulement, elle a néanmoins constitué un nouveau type de plaisir et a ouvert les horizons
des participantes sur l’idée d’autonomie sexuelle.

Vous reconnaîtrez la crainte que ça ne soit pas « naturel » comme le fondement moral de la
« sainteté » décrit au chapitre  5. L’idée qu’il existe une manière pure, bonne et naturelle
d’avoir un orgasme et une manière impropre, malsaine et non naturelle d’avoir un orgasme
est une catégorisation culturelle classique de l’expérience façonnée par les trois messages –
Moral, Médical et Médiatique – du chapitre 5. La peur la plus fréquente dont les gens me
font part au sujet des vibromasseurs, c’est de devenir «  accro  » à ces appareils, mais ça
n’arrive pas. Voici ce qui se passe  : l’orgasme avec un vibromasseur se produit
relativement rapidement pour de nombreuses femmes parce qu’un vibromasseur procure
une stimulation très intense. Et certaines femmes se sentent très à l’aise avec la rapidité de
leur orgasme avec l’appareil, ce qui les amène à oublier le temps nécessaire sans
vibromasseur. Et lorsqu’elles sont frustrées par le temps que ça prend, la frustration fait
que ça prend encore plus de temps. Mais à ce stade du chapitre, vous connaissez
probablement la réponse à ce problème : frustration = petite surveillante impatiente. Alors
changez d’objectif, changez d’effort, changez de critère de vitesse. Le plaisir, et non
l’orgasme, est la finalité. S’il faut cinq minutes, c’est cinq minutes de plaisir. Hourra ! Et si
c’est trente minutes, c’est trente minutes de plaisir ! Hourra aussi !
L’orgasme extatique : vous êtes
une nuée d’oiseaux !
Les orgasmes peuvent certainement se produire dans des contextes pas
exactement idéaux, voire défavorables, mais le type d’orgasme qui fait
fondre le cerveau, serrer les poings, voir des étoiles en arc-en-ciel, ne se
produit que dans un contexte spectaculairement positif.
Et c’est quoi exactement ce contexte ?
La réponse à cette question est la même que la réponse à celle-ci  :
pourquoi le port de chaussettes faciliterait-il l’orgasme ?
Certaines étudiantes m’ont posé cette question pendant que je déjeunais
et que je discutais avec elles. Brittany, Tiffany et moi parlions de la science
du sexe, comme d’habitude.
« Hein ? ai-je lancé entre deux bouchées de salade.
– J’ai lu ça sur Internet. Les chaussettes facilitent l’orgasme, a déclaré
Brittany.
– Oh ! Eh bien, si tu as lu ça sur Internet, c’est que ça doit être vrai, ai-
je plaisanté.
– Non, je l’ai lu aussi  ! a confirmé Tiffany. Je pense que c’était un
article sérieux. Je vais le trouver et t’envoyer le lien. »
Elle l’a fait, et c’était vrai… d’une certaine manière. Il s’est avéré que le
fait de mettre des chaussettes permettait aux participantes d’atteindre plus
facilement l’orgasme tout en se masturbant dans une machine d’imagerie
cérébrale.
Il faut se demander pourquoi. Toutes les participantes à des recherches
IRM sur le sexe sont-elles des fétichistes des pieds en secret ? Cela a-t-il un
rapport avec la réorientation du flux sanguin  ? Rien d’aussi mystérieux.
Gert Holstege, le chercheur en chef de l’étude, a déclaré que les
participantes à la recherche « étaient mal à l’aise, car elles avaient les pieds
froids 27 ».
Mettez des chaussettes, réchauffez vos pieds et jouissez plus facilement.
Même dans le cadre non érotique d’un laboratoire de recherche, un
changement aussi minime peut faire la différence.
Et ce type de glissement est la clé qui permet de passer d’un orgasme
très agréable à un orgasme qui mériterait un trophée. La science vous
explique comment  : tous vos états intérieurs, aussi bien votre confort
physique, la faim, la soif, la somnolence, la solitude, la frustration,  etc.,
interagissent au plus profond de votre Anneau Émotionnel cérébral, et
s’influencent mutuellement dans le cadre d’un processus appelé
« intégration 28 ». Ainsi, lorsqu’un état – comme les pieds froids – interfère
avec un autre état – comme l’excitation sexuelle –, on appelle ça
« l’intégration soustractive ». Et quand un état renforce activement un autre
état, c’est une «  intégration additive  ». C’est ce que Laurie et Johnny ont
vécu lorsqu’ils essayaient de ne pas faire l’amour et que Johnny lui a
également dit pourquoi il aimait faire l’amour avec elle. La quête de
proximité de leur mécanisme d’attachement s’est mêlée à leur motivation
sexuelle, et les deux se sont renforcées.
L’intégration additive peut être un atout incontestable dans votre
expérience sexuelle… mais parfois l’intégration additive peut aussi vous
entraîner vers une dynamique malsaine. La tendance d’Olivia à se sentir
« poussée » jusqu’à l’orgasme lorsqu’elle est stressée en est un exemple. Le
stress renforce sa motivation sexuelle mais de manière malsaine. Et les
femmes ayant participé aux recherches de John Gottman, celles qui ont eu
des relations sexuelles intenses après un acte de violence de leur partenaire,
ont aussi connu une intégration additive  : la menace qui pèse sur leur
attachement leur fait sentir qu’il est important de se lier avec ce partenaire.
Le sexe est un comportement d’attachement crucial pour les adultes
humains, de sorte que les deux états – l’anxiété de séparation et la
stimulation sexuelle – se sont renforcés l’un l’autre, pour créer une
expérience sexuelle intense mais en définitive dangereuse et malsaine.
Vous pouvez visualiser l’effet de l’intégration si vous imaginez votre
cerveau sous la forme d’une nuée d’oiseaux.
Savez-vous comment fonctionne une nuée  ? Il n’y a pas de chef, pas
d’individu qui contrôle le groupe et qui crie : « Hé, tout le monde, volons
dans cette direction ! » Au contraire, chaque oiseau suit individuellement un
ensemble de règles, du genre  : «  Évitez les prédateurs, volez vers le pôle
magnétique, et restez aussi à proximité de vos voisins.  » Lorsque tous les
oiseaux suivent ces règles, la nuée se forme sans qu’aucun de ses membres
n’en soit responsable.

Si vous considérez votre cerveau comme une nuée d’oiseaux, alors


chaque « oiseau » est un système de motivation ou une pulsion
différente – stress, attachement et appartenance sociale, appétit
alimentaire, curiosité et exploration, soif, sommeil, projets d’avenir,
bagage émotionnel du passé –, et tous les rôles et identités en
concurrence au sein de votre vie y sont présents. Vous pouvez aussi
considérer votre accélérateur et vos freins sexuels comme des
oiseaux dans cette nuée.

Au bout du compte, le « vous » qui a conscience d’être un « moi », un


individu distinct des autres, est un être composite, un hologramme composé
de ces multiples processus motivationnels et cognitifs qui interagissent tous
avec l’environnement et les uns avec les autres, dans une compétition
acharnée, bruyante, désordonnée et multidirectionnelle. En tant que
personne capable de désirer plusieurs choses à la fois (manger, dormir, faire
l’amour, se réchauffer, être laissée seule,  etc.), vous êtes une communauté
de motivations. Une nuée.
Des phénomènes complexes peuvent se produire au sein d’une nuée
justement parce qu’il n’y a pas de chef. Si un oiseau remarque un prédateur,
il s’éloignera (en suivant la règle «  évitez les prédateurs  »), puis tous les
oiseaux autour de lui le suivront, attirés comme par une force magnétique,
non pas à cause du prédateur mais parce qu’eux vont suivre la règle « restez
à proximité de vos voisins ».
Et si votre cerveau est une nuée, alors l’orgasme est une destination vers
laquelle elle peut voler – un pôle magnétique – et le plaisir sexuel est la
nuée elle-même. Le plaisir sexuel naît, tout comme le comportement
collectif d’une nuée, de l’interaction de tous ces différents oiseaux.
Plus il y a d’oiseaux qui volent vers l’orgasme, plus le plaisir sexuel est
grand. Si certains oiseaux volent vers l’orgasme, mais que d’autres essaient
d’atteindre un autre objectif – comme lorsque vous essayez de vous
masturber pour atteindre l’orgasme, mais que vos pieds sont froids – la
« nuée », c’est-à-dire votre cerveau, ne se déplacera pas simultanément dans
la même direction. Certains oiseaux peuvent arriver jusqu’à l’orgasme, mais
l’expérience ne sera pas la même que si tous les oiseaux y parvenaient.
L’« intégration soustractive » se produit lorsque les oiseaux qui volent
vers le réchauffement des pieds attirent vivement les oiseaux qui, sans cela,
voleraient vers l’orgasme. Mettez des chaussettes, et ces oiseaux sont
libérés et peuvent s’envoler vers l’orgasme. L’«  intégration additive  » se
produit lorsque les oiseaux qui volent vers un objet d’attachement (votre
partenaire sexuel) attirent leurs voisins et les poussent à voler plus vite et
avec plus d’enthousiasme. Si vous tombez follement amoureuse, votre nuée
peut se précipiter vers l’orgasme à la moindre sollicitation.
Le langage technique de ce que je décris ici est le suivant  : le plaisir
sexuel est une propriété émergente d’un système dynamique complexe.
Mais il suffit de se rappeler que le plaisir sexuel atteint son apogée lorsque
l’ensemble du collectif travaille ensemble, lorsque tous les oiseaux volent
dans la même direction, que tous vos systèmes de motivation sont
coordonnés et en harmonie avec l’environnement de manière à ce que
chaque système évolue aux côtés des autres vers l’orgasme. Activez
l’accélérateur et relâchez les freins. Débarrassez-vous de tous les prédateurs
et amassez différents types de motivations au pôle magnétique  :
attachement, curiosité, plaisir expansif – toutes les motivations que
l’orgasme peut combler. Plus le système dans son ensemble évolue dans la
même direction, plus l’orgasme prend le dessus sur votre conscience,
chaque cellule de votre corps étant concentrée sur le même sujet : le plaisir.
Le pic de plaisir sexuel exige votre implication totale.

Les orgasmes les plus agréables surviennent lorsque chaque partie


de vous est présente et coopère à la poursuite d’un objectif
commun : l’extase.
Vous l’avez sans doute déjà compris : Olivia – la marathonienne, la femme intense, passionnée,
à l’accélérateur sensible – est une perfectionniste. Voici ce qu’elle a déclaré quand elle a appris
l’existence de la petite surveillante :
« Ça explique… tu sais, toute ma vie. »
Les perfectionnistes se fixent des objectifs impossibles à atteindre et, s’ils parviennent
malgré tout à l’atteindre, ils partent du principe que cet objectif ne vaut rien et en définissent un
autre, encore plus impossible. Ce qui les enferme dans un état d’insatisfaction perpétuelle.
«  Et alors, je suis mon propre lion, genre, tout le temps, a analysé Olivia. Quand on y
ajoute le lavage de cerveau culturel, ça me met dans cette situation incontrôlable avec le sexe.
Mon Dieu », a-t-elle conclu.
L’expérience qu’elle a vécue en avançant au rythme plus lent de Patrick lui a montré
l’intérêt qu’il y a à ralentir et à s’aligner davantage sur l’objectif d’éprouver du plaisir sexuel – à
prendre le contrôle de la petite surveillante, afin que celle-ci ne prenne pas le contrôle sur elle.
Un samedi après-midi, Olivia a tenté une expérience  : elle a essayé de méditer tout en
prodiguant à Patrick un massage érotique. Elle s’est entraînée à garder son esprit tranquille et à
se concentrer sur le présent. Chaque fois qu’une pensée vagabonde lui venait à l’esprit, elle la
reconnaissait brièvement puis la laissait passer, en ramenant son attention sur la sensation de la
peau de son partenaire sous ses mains. Elle s’est retrouvée excitée et a remarqué que ses
pensées se tournaient de plus en plus vers l’orgasme, alors que sa petite surveillante interne
s’impatientait, pressée d’atteindre son but. Mais à chaque fois qu’elle se sentait attirée vers
l’orgasme, elle prenait une profonde et lente inspiration et reportait son attention sur Patrick.
Elle n’a pas freiné, elle a juste retiré son pied de l’accélérateur.
Après l’orgasme de Patrick, ils ont échangé leur place, et Olivia a gardé son attention sur
les sensations de son corps. À mesure que son excitation augmentait, elle continuait à respirer
profondément et lentement, ne permettant pas à ses muscles abdominaux de trop se contracter.
Le résultat fut un orgasme qui dura plusieurs minutes, pendant lequel son corps a tremblé
et ondulé, et Patrick est resté avec elle, la tenant et l’embrassant, les doigts pressés contre sa
vulve. Ce moment s’est terminé par des larmes de joie et une sorte de bavardage joyeux bien
différent du comportement normal d’Olivia après un orgasme. Elle se sentait ouverte, à fleur de
peau et tendre.
Elle m’a expliqué plus tard :
« C’était comme si j’étais au milieu de l’océan, alors que d’habitude, je ne fais que surfer
sur le rivage. C’était plus grand et plus lent… et plus effrayant aussi, d’une certaine manière.
J’étais totalement ouverte. J’ai dû lâcher tout contrôle. Je pensais que j’étais une grande
puissance érotique parce que je pouvais avoir beaucoup d’orgasmes et parce que je voulais faire
l’amour souvent. Mais il s’est avéré que mon grand pouvoir érotique n’a émergé que lorsque
j’ai cessé de chercher à atteindre l’orgasme et que j’ai simplement laissé le plaisir demeurer en
moi. »
Toutes les femmes ne souhaitent pas vivre ce genre de vulnérabilité radicale dans leur
sexualité. Toutes les femmes ne font pas assez confiance à leur partenaire pour se permettre de
se laisser aller aussi complètement. Toutes les femmes n’ont pas une vie qui leur laisse le temps
– une heure, en général, pour la plupart des gens – et la détente nécessaires pour y parvenir.
Mais si le contexte est favorable, je crois que chaque femme en est capable et, à mon avis,
chaque femme mérite d’avoir la chance d’essayer. Même si vous ne vivez pas plusieurs minutes
d’extase océanique, ce sera quand même une heure bien utilisée !

Impossible de traiter une nuée avec des


médicaments !
Le film culte kitsch de 1968, Barbarella, imagine un quarante et unième
siècle dans lequel les gens prennent des « pilules de transfert d’exaltation »
pour avoir des orgasmes, pour s’épargner le trouble et l’effort d’un rapport
sexuel. Vous prenez ce comprimé, vous vous asseyez paume contre paume
avec votre partenaire, et en une minute votre corps palpite et vos poils se
hérissent. Bam ! Fini.
On comprend bien l’intérêt du truc. Je veux aussi que l’extase soit facile
et instantanée, comme si je prenais une pilule. Beaucoup d’entre nous
vivent une vie de tensions constantes, de doutes, de contraintes et d’efforts.
Le plaisir, tout particulièrement, ne pourrait-il pas survenir sans que nous
ayons besoin d’y œuvrer ?
Au XXIe siècle, le vibromasseur est ce qui se rapproche le plus de cette
pilule à orgasme. Un bon vibromasseur fournit à votre accélérateur une
intensité de stimulation impossible à obtenir avec une stimulation non
mécanique. Même si vos freins sont toujours activés – vous êtes stressée,
anxieuse, triste ou frustrée –, un vibromasseur est souvent suffisamment
intense pour déclencher un orgasme beaucoup plus rapidement qu’une
stimulation manuelle.
Un vibromasseur ne persuadera pas nécessairement tous les oiseaux de
voler dans la même direction. Il fournit une stimulation de haute intensité
aux parties de votre cerveau qui réagissent aux stimuli sexuels  ; il peut
appuyer sur l’accélérateur comme personne, mais il ne relâche pas les
freins.
L’idée du plaisir comme propriété émergente des interactions d’un
collectif de désirs (c’est-à-dire une nuée) est ce qui rend si difficile la
médication du plaisir, de l’excitation, du désir et/ou de l’orgasme. Un
médicament devrait agir non seulement sur l’accélérateur et les freins, mais
aussi sur le stress, l’amour, l’image corporelle, les traumatismes, la
confiance dans la relation et tous les autres éléments qui ont une incidence
sur le bien-être sexuel des femmes. Attirer un oiseau vers l’orgasme ne vous
aidera pas si les autres oiseaux sont occupés à éviter les prédateurs.
Le plaisir est une propriété émergente de l’interaction de plusieurs
systèmes – c’est un processus, pas un état, une interaction, pas une région
spécifique du cerveau ou du corps. Le plaisir, c’est la nuée dans son
ensemble. Le plaisir, c’est vous tout entière.

Voler vers l’extase


Voici ce que la science nous offre : pour avoir des orgasmes plus nombreux
et de meilleure qualité, il faut relâcher tous les freins et ralentir l’activation
de l’accélérateur. Donnez à votre cerveau dans son ensemble le temps de
grimper à bord du train de l’orgasme.
Mais ce que la science ne peut pas vous offrir, c’est la permission
d’éprouver un plaisir extatique. Car au bout du compte, là se trouve la clé
des orgasmes spectaculaires. Et vous seule pouvez vous faire ce cadeau. La
science ne peut pas vous dire comment ressentir vos orgasmes. La science
peut seulement vous dire que ce que vous éprouvez vis-à-vis de vos
orgasmes les modifie. La science peut vous dire que le sentiment de honte,
le jugement, la frustration et la peur de l’orgasme diminuent votre
expérience orgasmique, tandis que l’acceptation, l’accueil, la confiance et la
joie augmentent votre expérience orgasmique. La science peut vous dire
que votre cerveau est comme un collectif de désirs, et que plus ce collectif
coopère, plus vous pouvez vous avancer vers l’extase.
Mais rien dans cette science ne vous donne plus ou moins droit d’office
au plaisir de votre propre peau, de votre esprit et de votre cœur. Vos
orgasmes vous appartiennent, et toute la science du monde ne peut vous
rendre plus heureuse, plus craintive ou plus curieuse à leur sujet. La science
ne peut pas faire ça. Vous seule le pouvez.

Vous êtes née avec ce droit inné à tout le plaisir que votre corps peut
ressentir. Vous êtes née avec le droit au plaisir, quelle que soit la
façon dont votre corps l’accueille, dans tout contexte qui le favorise,
et selon la quantité que vous souhaitez. Votre plaisir vous appartient,
à partager ou à garder pour vous, à votre convenance, à explorer
ou non à votre convenance, à accepter ou à éviter
à votre convenance.

Alors, si vous le vouliez, comment trouveriez-vous votre chemin vers


l’extase ? Comment feriez-vous pour que tous les oiseaux volent ensemble
dans la même direction ?
Il faut de la patience, de la pratique et un contexte sexuellement positif.
Vous savez déjà comment créer un contexte sexuellement positif. Et
vous savez comment faire preuve de patience – en formant votre petite
surveillante pour être sûre d’avoir le bon objectif, le bon type et la bonne
quantité d’effort, et la bonne vitesse de critère.
Il nous reste donc la partie « pratique ».
De la pratique pour quoi ?
Pour relâcher les freins. Comment faire ?
Les états cérébraux qui éloignent des éléments de votre nuée de
l’orgasme – le stress, l’inquiétude, le fait d’être spectatrice, de se demander
en permanence si votre enfant va toquer à la porte, ou même simplement
d’avoir les pieds froids ou tout autre inconfort physique – doivent être pris
au sérieux et leurs besoins satisfaits. Ils doivent être respectés et traités
comme le hérisson endormi du chapitre 4.
Soyez gentille et douce avec chacun de ces éléments freinants, écoutez
ce dont ils ont besoin afin de les combler, et comblez-les. Retournez à vos
fiches de travail sur le contexte  : Qu’est-ce qui vous freine  ? Prenez en
compte les éléments de votre environnement, ainsi que vos propres pensées
et sentiments. Quel est le contexte dont vous avez besoin pour relâcher ces
freins ?
La plupart des éléments freinants ressentis par les femmes n’ont rien à
voir avec le sexe, et beaucoup d’entre elles ont des solutions simples et
pragmatiques.
Vous souffrez de stress chronique ? Allez au bout du cycle grâce à une
bonne crise de larmes, un peu de marche rapide, un cri primal ou
n’importe quel type de libération physique, comme décrit au chapitre 4.
Accordez-vous vingt à soixante minutes pour laisser le stress de la
journée s’évacuer avec des rituels ou des pratiques qui vous aideront.
Bains, promenades, exercices, cuisine, méditation, yoga, un verre de
vin, bref, ce qui fonctionne pour vous.
Vous passez votre temps à guetter les bruits de pas dans le couloir  ?
Prévoyez un moment où il n’y a personne d’autre à la maison.
Fatiguée ? Faites une sieste, ou reposez-vous juste vingt minutes.
Révulsée par la saleté des draps ? Changez-les !
Vous avez froid aux pieds ? Mettez des chaussettes !

Parfois, c’est vraiment aussi simple que ça.


D’autres freins sont plus complexes et appellent des solutions à plus
long terme, comme ceux dont j’ai parlé plus tôt : les pensées autocritiques
ou autres problèmes d’image corporelle, le manque de confiance dans votre
relation, les antécédents de traumatisme, le dégoût sexuel. Votre jardin a
mis plusieurs décennies de plantation et d’entretien pour devenir ce qu’il est
aujourd’hui. Il ne changera pas du jour au lendemain.

Donnez-vous la permission de progresser lentement, et célébrez


toutes les étapes successives que vous franchirez, entre votre
situation actuelle et celle que vous aimeriez atteindre.

La pratique la plus importante pour relâcher les freins n’est autre que la
bienveillance envers soi-même. Trop souvent, les femmes sont bloquées
dans leur épanouissement sexuel parce qu’elles n’arrivent pas à dépasser
cette conviction qu’un élément «  ne devrait pas  » les freiner. La lumière
allumée, ça ne devrait pas les freiner, elles ne devraient pas être aussi
obsédées par leur corps. Le mot «  devrait  » se rapporte à ce que vous
« faites mal ».
Question surprise : est-ce que croire que vous faites mal un truc pendant
l’amour a un effet sur l’accélérateur… ou sur les freins ?
Eh oui.
Alors, quand un élément appuie sur les freins, que faites-vous ? Vous le
prenez au sérieux. Vous l’écoutez. Vous agissez avec douceur, comme avec
un hérisson endormi. Même si vous aimeriez bien qu’un truc comme les
lumières allumées ne vous freine pas, le fait est que c’est possible, et c’est
normal. Il est également normal de souhaiter que ça ne soit pas le cas. Mais
croire qu’une telle chose «  ne devrait pas  » freiner ne fait que freiner
davantage. Reconnaître cette vérité, c’est vous autoriser à réagir, comme en
choisissant de faire l’amour avec des bougies éteintes dans la pièce pendant
une semaine ou deux, puis avec une bougie chauffe-plat allumée, puis deux,
puis trois…

Vous voyez, le sexe n’est pas dépendant du contexte – le sexe peut


avoir lieu plus ou moins n’importe où. C’est le plaisir qui dépend du
contexte. Créez un contexte dans lequel vous pouvez éprouver du
plaisir, et l’extase sexuelle suivra, à condition d’avoir le temps, la
pratique et de véritables solutions pour relâcher les freins.

L’annexe 2 donne des instructions pour parvenir à l’extase. Essayez ! Et


n’oubliez pas  : chaque membre de votre nuée a ses propres besoins et
motivations. Relâchez tous les freins, et appuyez sur l’accélérateur.
Toute sa vie, Merritt avait cru que l’orgasme était censé être facile, et que ses difficultés à
l’atteindre faisaient d’elle une bête de foire. Elle croyait qu’il était censé procurer une certaine
sensation et avoir un certain effet. Mais elle voulait apprendre à se faire confiance, pour pouvoir
ouvrir grand la porte au plaisir. Elle a donc cessé de comparer son expérience avec ses attentes
et a simplement laissé son expérience être ce qu’elle était. Elle a simplement apprécié la
sexualité qu’elle avait au lieu de se soucier de celle qu’elle «  devrait  » avoir. Elle a créé un
environnement d’acceptation, dans lequel les parties de son esprit qui ressentaient le besoin de
s’inquiéter et d’éviter que quelque chose de terrible ne se produise, pouvaient au contraire
s’intéresser à quelque chose de positif. Ça lui a demandé du temps. Et de la pratique. Et une
attitude positive sans aucun jugement.
Et est-ce que ça a marché ? Pour elle, oui.
Merritt est écrivaine et elle a été élevée dans la religion, ce qui pourrait expliquer le
courriel qu’elle m’a envoyé vers la fin de son expérience «  pas d’orgasme avec Carol  ». Ou
peut-être pas. Beaucoup de gens commencent à mentionner Dieu et des expériences spirituelles
lorsqu’ils trouvent leur chemin vers l’extase. Le langage de l’expérience humaine banale, de
l’anatomie, de la physiologie et même des relations ne semble pas assez vaste pour l’illustrer.
Quoi qu’il en soit, voici ce qu’elle m’a écrit :
No storm can shake my inmost calm
While to that rock I’m clinging.
Since Love is lord of heaven and Earth,
How can I keep from singing ?
(Aucune tempête ne peut ébranler mon calme si profond
Tandis qu’à ce rocher, je m’agrippe.
Puisque l’amour est seigneur du ciel et de la Terre,
Comment puis-je m’empêcher de chanter ?)
C’est tiré d’un hymne intitulé « How Can I Keep from Singing ? » et plein d’artistes, parmi
lesquels Pete Seeger ou Enya, en ont enregistré une version. Cette chanson parle de ce qui se
passe quand vous touchez la paix au centre et au cœur de vous-même, la même paix qui se
trouve au centre et au cœur de l’univers, et qu’elle résonne à travers vous, comme si vous étiez
une cloche qui sonne.
C’est ce qui se passe lorsque vous relâchez tous les freins et que vous permettez à tout ce
qui appuie sur votre accélérateur de se concentrer sur un objectif commun : le plaisir.
En résumé

L’orgasme se produit dans votre cerveau, pas dans vos parties


génitales.

Moins d’un tiers des femmes ont un orgasme garanti par la seule
pénétration vaginale. Les 70  % restants au moins ont parfois,
rarement ou jamais un orgasme dû à la seule pénétration vaginale.
La stimulation du clitoris est le moyen le plus fréquent pour les
femmes d’atteindre l’orgasme. Et nous sommes toutes normales.

Tous les orgasmes sont créés égaux. Peu importe la stimulation qui
les déclenche. La qualité d’un orgasme ne peut être déterminée que
par le plaisir que l’on en tire.

Pour avoir des orgasmes plus intenses et de meilleure qualité, il


faut relâcher plus de freins et appuyer sur l’accélérateur, mais petit à
petit.
CHAPITRE 9

Aimez ce qui est vrai
Le contexte sexuellement positif ultime

Laurie et Johnny avaient tout essayé. Mais finalement, ce qui a été déterminant, c’est quand
Laurie a choisi le plaisir – pour elle-même.
Armée de cette décision de commencer à faire attention à ce qu’elle ressentait, Laurie s’est
rendue à une retraite de pleine conscience le temps d’un week-end, avec un nom comme
« L’Éveil du Divin Féminin ». Elle y a pratiqué le yoga et dormi neuf heures par nuit. Elle a
mangé en pleine conscience. Elle a respiré en pleine conscience. Elle a partagé ce qu’elle
éprouvait avec des inconnues, s’est fait de nouvelles amies et a retrouvé le sentiment qu’elle
n’était pas seule à se débattre. Et, laissez-moi juste souligner à nouveau ceci, parce que Laurie
le souhaiterait : elle a dormi neuf heures par nuit.
Pendant vingt et une heures (le temps passé là-bas éveillée), elle s’est concentrée sur ce que
ça lui faisait d’être en vie et de parcourir le monde. Quand elle est revenue, c’était une nouvelle
femme.
« Je ne peux pas être une source de joie dans la vie des gens que j’aime si je n’arrive même
pas à en être une pour moi-même, a-t-elle annoncé. Et ce que je veux, plus que tout, c’est être
une source de joie dans la vie de ceux que j’aime.
– Attends une seconde, Johnny et moi et tous ceux qui t’aiment, nous te répétons ça depuis
des mois, ai-je dit. Qu’est-ce qu’ils t’ont fait à cette retraite ?
– Je me tenais dans le regard divin de Lakshmi, déesse de l’auspiciosité, et j’ai ressenti ma
propre puissance et beauté  », a-t-elle récité sérieusement. Puis elle a éclaté de rire et ajouté  :
« Vous me direz probablement que ce n’est qu’une métaphore pour activer un truc ou autre dans
mon machin mésolimbique, mais je me fous de la science. Ça a marché, bordel. »
Ce chapitre traite de la science dont Laurie se fout complètement. Et ça marche, bordel.
Nous voici arrivées au dernier chapitre. Jusqu’à présent, nous avons
appris que, à certains égards majeurs, votre réponse sexuelle peut ne pas
suivre le « récit type » du fonctionnement sexuel :
Vous pouvez avoir des freins plus ou moins sensibles et un accélérateur
plus ou moins sensible.
Votre réponse génitale peut ne pas prédire votre expérience subjective
d’être « excitée ».
Votre désir sexuel peut émerger en réponse au plaisir, plutôt qu’en
anticipation du plaisir.

Tout cela peut vous surprendre si vous faites partie des 10 à 20  % de
femmes dont la réponse sexuelle est conforme au «  récit type  ». (Nous
avons également appris que les gens, en particulier les femmes, sont très
différents les uns des autres et évoluent considérablement au cours de leur
vie.)
Ce qui m’amène à la confiance en soi et à la joie.
«  Confiance en soi et joie  » est une expression que j’utilise beaucoup
depuis de nombreuses années, mais elle n’est devenue centrale à mon
travail que lorsque, pendant un semestre, une étudiante a levé la main en
plein cours et a demandé : « Attends, Emily. Pourrais-tu définir ces termes ?
Qu’est-ce que la confiance en soi et la joie ?
– Euh… ai-je répondu. Laisse-moi y réfléchir et on en reparle. »
Je suis rentrée chez moi et j’y ai pensé toute une semaine. J’ai lu
beaucoup de littérature scientifique. J’ai relu beaucoup de mes propres
articles de blog. J’ai regardé mes chiens gambader dans la cour. Et quand je
suis arrivée en cours la semaine suivante, voilà en substance ce que j’ai dit à
mes étudiantes :
La confiance en soi, c’est savoir ce qui est vrai au sujet de son propre
corps, de son esprit, de sa sexualité et de sa vie. Savoir que ses organes
génitaux sont constitués des mêmes parties que ceux des autres, organisés
de manière unique. Savoir que les freins et l’accélérateur existent.
Connaître la notion de contexte et la différence entre l’appréciation, la
motivation et l’apprentissage. Connaître le concept de non-concordance de
l’excitation et celui de désir réactif. Savoir ce qui est vraiment vrai, même si
ce n’est pas ce qui a été enseigné comme ce qui « devrait » être vrai. Savoir
ce qui est vrai, même si ce n’est pas ce que l’on souhaite être vrai.
La joie, c’est aimer ce qui est vrai dans son corps, son esprit, sa
sexualité et sa vie. Aimer ses organes génitaux, ses freins et son
accélérateur, et la manière dont son cerveau réagit au contexte. Aimer le
contexte lui-même. Aimer l’excitation, la non-concordance et le désir
réactif. Aimer ce qui est vrai, même si ce n’est pas ce qui a été enseigné
comme ce qui « devrait » être vrai. Aimer ce qui est vrai, même si ce n’est
pas ce que l’on souhaite être vrai.
J’ai déclaré ça devant ma classe, et l’étudiante qui m’avait demandé la
semaine passée de définir mes termes a encore levé la main.
Elle a commenté : « La joie, c’est la partie difficile. »
Depuis ce jour, les étudiantes et les participantes aux ateliers sont toutes
d’accord : la joie est la partie la plus difficile.
Heureusement, la recherche nous révèle une pratique qui peut nous
apprendre, eh bien… à connaître la joie. Ce chapitre traite de cette pratique.
D’abord, j’expliquerai pourquoi la confiance en soi seule ne suffit pas, puis
je décrirai le processus de «  confrontation avec la réalité  », un véritable
retour à la réalité, qui permet de passer de la confiance en soi à la joie. Nous
conclurons par une exploration de la notion de «  non-jugement  », la
compétence clé qui permet de passer de la joie… à un accès durable à
l’extase.

Pourquoi la confiance
en soi ne suffit pas
Prenons l’exemple de « Mme B. », dont l’histoire sert d’introduction à un
article du New York Times sur la médecine sexuelle des femmes. L’article
commence ainsi : « Depuis que Mme B. a passé le cap des 45 ans, dit-elle,
le sexe tient davantage de la poudre aux yeux que du septième ciel. Elle est
rarement, voire jamais suffisamment intéressée pour initier un rapport avec
son partenaire d’une décennie, et elle n’atteint pas l’orgasme pendant l’acte.
Elle souhaite qu’il en soit autrement 1. »
Comme vous avez déjà lu une bonne partie de ce livre, vous remarquez
que le style de désir de Mme B. est réactif plutôt que spontané, et il semble
qu’elle n’atteigne pas l’orgasme régulièrement lors de rapports sexuels avec
pénétration. Ces deux éléments la placent clairement dans la majorité.
Pourtant, elle aimerait qu’il en soit autrement.
Ce qui est parfaitement compréhensible. J’imagine qu’elle a appris
(comme la plupart d’entre nous) que le désir spontané et les orgasmes par
pénétration sont normaux, et comme ce n’est pas ce qu’elle vit, elle pense
qu’elle est anormale. Cassée. Si je pensais être cassée, moi aussi je
souhaiterais qu’il en soit autrement.
Mais elle n’est pas cassée, elle est normale – en fait, elle est même
typique, standard. Et quel effet ce rêve d’une autre sexualité a-t-il sur son
bien-être sexuel ? Est-ce que ça active l’accélérateur ou les freins ?
Résultat : elle se décrit elle-même comme « sexuellement morte ». Et il
n’y a rien de pire que ça.
Pour une personne qui se sent si mal dans une sexualité normale, la
connaissance seule (et la confiance en soi qui en découle) est souvent
insuffisante.
J’ai vu la confiance en soi être insuffisante d’au moins trois façons
différentes. Premièrement, vous savez peut-être que quelque chose est vrai,
mais vous croyez quand même que c’est un défaut. Une lectrice de mon
blog a appris ce qu’était le désir réactif, mais a laissé le commentaire
suivant  : «  Je pense que vous oubliez que le “désir réactif” est un désir
moindre que le désir [spontané]. »
La plupart des femmes ont « un désir moindre » ? Dur.
La construction d’un désir réactif comme «  moindre  » n’est pas un
« fait », bien sûr : c’est un jugement de valeur, une opinion. « Je ne devrais
pas avoir à faire tous ces efforts, pensez-vous. Le désir devrait juste se
manifester. » Et derrière cette idée, il y a le sentiment : « Je ne devrais pas
être comme ça. Je ne suis pas adaptée. »
Et le sentiment «  je suis inadaptée  » va-t-il activer l’accélérateur ou
appuyer sur les freins ?
Évidemment.
Un deuxième cas où la confiance en soi seule ne suffit pas : parfois, la
confiance en soi sur le plan sexuel rejoint l’idée d’acceptation du corps. On
l’accueille avec enthousiasme au début, puis on essaie de la mettre en
pratique. Vous regardez votre corps dans le miroir et vous écrivez tout ce
que vous voyez et qui vous plaît… mais ensuite vous vous aventurez dans
le monde et un connard misogyne vous fait une réflexion désobligeante et
vous murmure quelques mots grossiers. Même si vous vous entraînez à
aborder votre corps avec bienveillance et compassion, une partie du monde
continuera de vous dire que vous êtes cassée. Et cette partie du monde, ça
peut être votre partenaire, vos amis, votre famille ou même vos soignants.
C’est difficile de s’accrocher à ce qu’on sait lorsque tout le monde autour
répète que c’est faux.
Et un troisième cas qui prouve que la confiance en soi ne suffit pas : ce
ne sont pas seulement les voix extérieures qui clament que vous êtes
toujours cassée. Vous avez passé des décennies à intérioriser des messages
– Moral, Médiatique et Médical – répétant à quel point vous êtes
défectueuse, inadaptée et malade. Une partie de vous a peut-être acquis la
conviction que vous êtes un lamentable échec qui ne devra jamais montrer
son vrai visage sexuel à personne. Vous « savez » peut-être que ce n’est pas
vrai, mais cette petite voix en vous, qui se cache dans un recoin de votre
psyché, ne se laissera convaincre par aucune information scientifique.
Quand on sait qu’une chose est vraie, mais qu’on éprouve du
ressentiment vis-à-vis de cette vérité, qu’on la juge, qu’on la déteste ou
qu’on en a honte, elle ne peut pas accroître son bien-être sexuel. Si on sait
que c’est vrai, mais que des personnes importantes dans la vie ne sont pas
d’accord, la confiance en soi peut glisser entre les doigts comme un savon
dans le bain. Et si on sait que quelque chose est vrai, mais qu’une partie de
soi a été tellement blessée que la connaissance seule ne peut pas la guérir,
alors la confiance en soi ne peut pas être la porte d’accès à l’extase. Il faut
aussi de la joie. Il faut aimer ce qui est vrai.
La première étape pour passer de la connaissance de la vérité à l’amour
de la vérité consiste à élargir le sens de « savoir la vérité ».

Première étape : vos sentiments


sont toujours vrais
Au-delà des faits concernant votre sexualité, il y a les faits concernant vos
sentiments à l’égard de votre sexualité.
Remarquez ce que vous ressentez.
Lorsque le simple fait de savoir que quelque chose est vrai ne suffit pas
à vous libérer des mythes et des mensonges, vous pouvez vous tourner vers
la petite surveillante chargée de votre frustration ou de votre satisfaction.
Lorsque vous vivez votre sexualité de la manière prévue par la surveillante,
elle se sent bien. Lorsque vous vivez votre sexualité d’une manière qui crée
un décalage entre votre expérience et les attentes de la surveillante, celle-ci
se sent de plus en plus frustrée… puis en colère. Elle finit par vous pousser
d’une falaise émotionnelle dans le gouffre du désespoir, à l’instant où elle
renonce et décide que vous ne pourrez pas atteindre votre objectif.
Nous avons vu au chapitre  8 qu’il existe trois méthodes pour combler
l’écart entre la situation actuelle et celle que vous espérez. Vous pouvez
vous demander : « Est-ce le bon objectif pour moi ? » ou « Est-ce que j’y
mets la bonne quantité du bon type d’effort ? » ou enfin « Est-ce que mes
attentes quant à la quantité d’efforts nécessaires pour atteindre cet objectif
particulier sont réalistes ? » Ces trois questions sont des confrontations avec
la réalité.
Nous avons observé ces confrontations en action tout au long du livre :
au chapitre 5, lorsque Laurie a décidé d’arrêter d’essayer de vouloir coucher
avec Johnny et s’est simplement autorisée à ne rien faire, elle a comblé le
fossé entre ce qu’elle était et ce qu’elle voulait être, ce qui a ouvert la porte
à l’affection sans exigence de performance. Au chapitre  8, quand Olivia
méditait pour avancer vers un orgasme prolongé, elle s’entraînait à être
présente telle qu’elle était, plutôt que de se laisser pousser vers un but
quelconque. Elle a gardé le même objectif – l’extase – mais elle a changé le
type d’effort qu’elle investissait. Et au chapitre  7, lorsque Merritt, au lieu
d’endosser l’identité ambitieuse d’une femme qui aime le sexe, a embrassé
l’identité d’une femme qui ne veut pas de sexe, elle a changé le type
d’effort qu’elle investissait, pour atteindre son objectif de confiance en elle.
Le résultat n’a pas été une chute irréversible vers un refus du sexe, bien au
contraire  ! S’autoriser à être là où elle était a permis à Merritt d’ouvrir la
porte vers là où elle voulait aller.
A contrario, la petite surveillante de Mme  B.  est profondément
insatisfaite, convaincue qu’il existe un énorme fossé entre l’endroit où elle
se trouve et celui où elle devrait être – et en plus, elle se sent totalement
impuissante et incapable d’y remédier. Elle se trouve dans le gouffre du
désespoir. Elle est tombée dans le deuil désespéré qui survient lorsque la
petite surveillante est convaincue qu’un état cible particulier est
inaccessible. A-t-elle essayé de créer le changement et échoué, essayé et
échoué encore, ou, lorsque sa sexualité a raté sa cible (une cible fixée par
des normes culturelles qui n’ont rien à voir avec la réalité), son corps s’est-
il refermé sur lui-même  ? Je ne sais pas. Mais je sais que sa petite
surveillante peut apprendre, et que Mme  B.  peut lui enseigner – si elle le
souhaite. Elle peut changer son objectif, ses efforts ou ses attentes.

Par exemple, supposons que vous n’ayez pas un orgasme régulier


lors d’un rapport sexuel avec pénétration.

Parce que vous avez lu le chapitre 8, vous savez que vous êtes normale
et vous avez appris d’autres méthodes pour avoir des orgasmes, notamment
par la stimulation du clitoris. C’est la connaissance ! Mais que faire si vous
vous sentez toujours frustrée de ne pas avoir d’orgasmes lors de vos
rapports sexuels  ? Ou si vous avez honte  ? Ou si vous êtes triste  ? Ou si
vous vous jugez  ? Une telle approche rendra-t-elle plus facile ou plus
difficile toute tentative d’accéder au plaisir et à l’orgasme autrement  ?
Exactement. C’est le moment de vous confronter à la réalité. Quel est votre
objectif  ? Quels sont les efforts que vous investissez  ? Quelles sont vos
attentes quant à l’effort qu’il faudra fournir pour atteindre cet objectif ?
Pour la plupart d’entre nous, les états cibles que nous avons en tête –
comme le désir spontané ou l’orgasme lors de rapports sexuels – ne sont pas
des objectifs que nous avons choisis consciemment pour nous-mêmes.
Notre culture nous les a transmis sous forme de scénarios sexuels. Ces
scénarios fournissent la structure des croyances par lesquelles nous
interprétons le monde sexuel. Trop souvent, ces scénarios sont des barrières
entre nous et la joie.
Au cours des dernières décennies, des recherches ont suivi l’évolution
des scénarios sexuels dans la culture occidentale. Parmi les scénarios
culturels récents, on peut citer  : «  La sexualité des hommes est simple et
celle des femmes est complexe », ou « Les femmes n’ont pas une pulsion
sexuelle aussi forte que les hommes », ou encore « L’orgasme est essentiel à
une relation sexuelle réussie 2 ».
Les scénarios sont gravés dans votre cerveau très tôt, par votre famille
et votre culture – souvenez-vous du Message Moral, du Message Médical et
du Message Médiatique du chapitre 5 !
Mais les scénarios ne concernent pas ce que nous tenons pour vrai sur le
plan intellectuel. Ils servent de référence à notre Anneau Unique émotionnel
et à notre petite surveillante pour filtrer et organiser l’information. Vous
pouvez être en désaccord avec un scénario tout en vous y pliant, et en
interprétant votre expérience par rapport à celui-ci.
Le terme technique pour ce processus d’organisation de votre
expérience selon un schéma préexistant est «  modèle génératif
probabiliste  ». Ça signifie que les informations – tout ce que vous voyez,
entendez, sentez, touchez ou goûtez – parviennent d’abord à votre cerveau
émotionnel, où vos apprentissages antérieurs (éventuellement liés au citron
ou aux petites vestes pour rat, ou à l’image du corps ou au dégoût sexuel) et
votre état cérébral actuel (stress, amour, autocritique, dégoût,  etc.) se
combinent pour façonner les décisions initiales que votre cerveau prend
pour se rapprocher ou s’éloigner de ces informations. Cette décision initiale
déclenche une série d’attentes sur ce qui pourrait aussi être vrai, et sur ce
qui pourrait se passer ensuite.
Pour comprendre ce phénomène plus facilement, prenons la métaphore
des cartes et des terrains.

La carte et le terrain : un outil


de confrontation avec la réalité
Une carte est une représentation abstraite d’une chose qui existe dans la
réalité. C’est une image simplifiée d’un lieu réel qui existe. Un lieu qui ne
ressemble pas à la carte. Si nous envisageons nos scénarios sexuels comme
une « carte », nous pouvons commencer à la comparer au terrain, la chose
réelle qui existe véritablement, et que la carte est censée représenter. On
essaie de naviguer dans le monde sexuel en suivant la carte.
Si la carte ne correspond pas au terrain, est-ce que le terrain a tort ?
Non. Le problème, c’est la carte. Les cartographes se sont trompés ou
ont basé la carte sur une autre carte qu’ils avaient vue plutôt que sur le
terrain lui-même, ou ont peut-être cherché à vous induire en erreur
délibérément. Les cartes peuvent être erronées, et quand nos yeux passent
du terrain à la carte, reviennent au terrain, puis à la carte, on a juste
l’impression d’être complètement perdu.
Malheureusement, les cartes sexuelles de la plupart des gens sont
largement obsolètes. Nous sommes comme le personnage de Brendan
Fraser dans le film Première sortie. Ses parents l’élèvent dans un abri
antiatomique, croyant à tort qu’il y a eu une attaque nucléaire en 1962, et
quand il émerge enfin trente-cinq ans plus tard, il navigue dans un univers
qui n’a pratiquement rien à voir avec ce qu’on lui a appris. Comme lui,
nous avons cette carte dans la tête et nous avançons sur le terrain en
espérant trouver un certain chemin à un certain endroit, et au lieu de ça nous
sommes aussitôt perdus.
Et ainsi que nous l’avons vu au chapitre 5, nos cartes peuvent indiquer
des endroits qui ont bien plus de trente-cinq ans de retard.
Mais le plus gros obstacle, c’est peut-être que, lorsque la carte et le
terrain ne coïncident pas, notre cerveau essaie de rendre la carte vraie, en
forçant notre expérience à se conformer à la carte. « Non, non, c’est bien le
sentier, dit-on alors qu’on trébuche dans un fourré. C’est ce qui est écrit sur
la carte. »
Il y a quelques années, j’ai discuté avec une jeune femme qui avait appris presque tout ce
qu’elle savait – ou plutôt, ce qu’elle pensait savoir – sur le sexe en regardant du porno.
Elle a été véritablement surprise quand, lors de ses premières rencontres sexuelles, rien ne
s’est passé comme elle s’y attendait. Elle pensait que les orgasmes arriveraient facilement
et souvent, ou que la stimulation directe du clitoris lui ferait toujours voir des étoiles. Elle
se trompait. Mais elle a continué à essayer de faire correspondre son expérience à la carte.
Elle a continué de se comporter comme les acteurs dans les vidéos, tout en se disant que,
puisqu’elle faisait ce qu’elle était censée faire, le sentiment qu’elle éprouvait devait être du
plaisir.

Ça a pris des mois avant que la dissonance entre ce qu’elle s’attendait à vivre et ce qu’elle
vivait réellement ne devienne une évidence pour elle. C’est alors qu’elle est venue me
voir, convaincue qu’elle devait être cassée.

Quand je lui ai dit que les femmes ont plus de chances d’avoir des orgasmes plus tard dans
une relation que lors de leur premier rapport sexuel avec un nouveau partenaire, elle a
refusé de me croire, tant elle était convaincue que la carte était bonne et que le terrain –
c’est-à-dire son corps – était mauvais.

Je lui ai également expliqué que le plaisir dépendait du contexte, de sorte que même la
stimulation du clitoris n’était pas agréable si elle n’est pas réalisée dans le bon contexte.
« C’est comme pour les chatouilles, lui ai-je dit. Si ça ne fait pas du bien, c’est juste que
vous n’avez pas encore le bon contexte. Quand la stimulation du clitoris n’est pas bonne,
ce n’est pas parce que votre clitoris ne fonctionne pas, c’est généralement parce que vous
n’êtes pas encore assez excitée. »

Le premier pas vers la joie, c’est de reconnaître ce décalage entre la


carte et le terrain, et savoir que le terrain a toujours raison.
Quand il s’agit de sexe, Olivia est un Grand Oui, ce qui a le potentiel de déclencher une
profonde extase… ou un profond doute de soi et de l’anxiété, sans parler de la dynamique de
poursuite. Et tout dépend de son ressenti vis-à-vis de son aptitude au Oui.
Au début du premier chapitre, Olivia a découvert que sa «  carte  » n’était pas vraie –
l’histoire qu’elle s’est racontée, comme quoi elle avait envie de sexe à cause de ses hormones,
n’était qu’une métaphorisation qui la protégeait des messages culturels susceptibles de la décrire
comme une brute.
Mais elle a dessiné une nouvelle carte, fondée sur la science et en faisant attention, sans
porter de jugement, à sa propre expérience intérieure. Elle a réalisé que son accélérateur
sensible pouvait s’associer à sa petite surveillante pour créer ce sentiment de perte de contrôle,
et qu’ils pouvaient également s’associer pour créer un plaisir joyeux. Elle ressentait cette perte
de contrôle lorsqu’elle laissait la spirale stress-autocritique-stress s’intensifier. Elle a éprouvé un
plaisir joyeux lorsqu’elle a appris à désamorcer la spirale en laissant le stress aller au bout de ce
cycle, sans appuyer sur les freins ou l’accélérateur.
« Ralentissez. Restez tranquilles. » C’est le conseil d’Olivia à tous les couples qui veulent
atteindre un plaisir supérieur. «  Ne rentrez pas dans une dynamique de poursuite, ne poussez
pas, ne tirez pas. Soyez comme celui qui tient le balai dans une équipe de curling. Dégagez le
chemin du sexe. »
Lorsqu’il ne ressent aucune pression de performance, Patrick est créatif, curieux, enjoué et
résolument ouvert aux nouvelles expériences. Il sait à quel point l’accélérateur sensible d’Olivia
peut être un cadeau, et il est conscient des défis qu’il représente.
Donc. Quand Olivia a eu sa maîtrise, il a organisé pour elle une sorte de chasse au trésor
sensuelle, impliquant une bonne partie de sa collection de jouets, deux sortes de lubrifiants, au
moins une scène où elle a été portée, nue, menottée et les yeux bandés, dans le couloir de leur
immeuble vers un autre appartement, et plusieurs de leurs très bons amis. (Ce qui est peut-être
la meilleure histoire au monde illustrant la phrase «  Comment la science a amélioré ma vie
sexuelle »).
À la fin, autour d’un repas géant, Olivia, inondée d’endorphines et d’ocytocine, a demandé
à Patrick de l’épouser – en grande partie pour rire.
En grande partie.
Certaines personnes ne me croient pas quand je raconte cette histoire, que je partage avec
leur autorisation. Bizarrement, c’est la seule histoire à laquelle ils ne croient pas, comme si une
célébration du plaisir aussi peu conventionnelle mais tellement ouverte était la seule véritable
cause de scepticisme à l’égard de la sexualité des femmes. Mais ça existe bien, le plaisir,
l’exploration indisciplinée et les partenaires qui adorent tout l’être sexuel d’une femme, depuis
les blessures de son passé jusqu’aux confins de son imagination. Des histoires comme celle-ci
me donnent l’espoir que de plus en plus de femmes vont guérir de leur honte et trouver un
amour qui accueille et accepte tout leur être, leur érotisme et tout le reste.
Olivia est un Grand Oui. C’est un cadeau. C’est un défi. Elle maximise son potentiel sexuel
lorsqu’elle laisse sa réponse sexuelle se développer à pleine capacité, sans pousser dans une
direction précise.
Ralentissez. Restez tranquilles. Ne poussez pas, ne tirez pas. Laissez les sensations prendre
le dessus.

Votre meilleure source de connaissance quant à votre sexualité est votre


propre expérience intérieure. Lorsque vous constatez un désaccord entre
votre expérience et vos attentes sur ce que vous « devriez » vivre – et tout le
monde le fait, à un moment donné –, partez toujours du principe que votre
expérience a raison.
Vous pouvez également présumer que l’expérience de chacun est
différente de la vôtre – comme le sont les idées de chacun sur ce que leur
expérience « devrait  » être. Le terrain et la carte de chaque personne sont
différents de ceux des autres. Lorsque la carte ne correspond pas au terrain,
c’est la carte qui est fausse, pas le terrain.
J’ai cité à plusieurs reprises des jumeaux hypothétiques tout au long du
livre, mais cette fois, je voudrais utiliser des jumeaux réels pour illustrer
mon propos. Ma sœur Amelia et moi sommes des jumelles identiques. Nous
avons le même ADN, nous sommes nées à quelques minutes d’intervalle,
nous avons grandi dans la même maison, nous sommes allées dans les
mêmes écoles, nous avons regardé les mêmes émissions de télévision et
nous avons lu les mêmes livres, ou presque. Et pourtant, au moment où
nous avons commencé notre vie sexuelle, nous avions des cartes très
différentes dans notre esprit.
J’avais en tête ma propre version du Message Médiatique. Je croyais
que la Femme Sexuelle Idéale était une femme aventureuse et bruyante que
les hommes convoitaient pour ses compétences et son enthousiasme. Elle
jouissait bien sûr facilement grâce à la pénétration, éprouvait un désir
spontané et son vagin se lubrifiait abondamment. Toute femme qui ne
voulait pas essayer de nouvelles choses était prude, désespérément coincée
et névrosée.
Remarquez que la Femme Sexuelle Idéale ne ressent pas
nécessairement beaucoup de plaisir  ; elle donne juste l’impression
d’éprouver du plaisir. C’est ce que devrait être une femme sexuelle,
conformément à ce que ma culture m’avait appris, et c’est donc ce rôle que
j’ai endossé. Lorsque j’ai entamé ma première relation sexuelle, j’étais un
produit sexuel, préparée et conditionnée pour le plaisir des autres.
Cette carte était si puissante et persuasive que j’étais incapable de
séparer ce que je croyais devoir vivre de ce que je vivais réellement. À dix-
huit ans, alors que je vivais ma première relation amoureuse –  avec un
homme qui allait devenir mon harceleur et irait jusqu’à menacer de me
tuer –, je rêvais souvent que mon partenaire me faisait du mal, et dans mon
rêve, je riais. Je riais jusqu’à ce que je ne sache plus si j’aimais qu’on me
fasse du mal.
À l’époque, je ne savais pas à quel point c’était tordu.
C’est vers la fin de cette relation (qui s’est terminée lorsque j’ai appelé
la police) que j’ai commencé à regarder ma vulve et à pleurer.
J’ai eu la chance improbable de commencer ma formation de
sexothérapeute au cours du même semestre où je me suis lancée dans cette
relation violente. Alors que je me vendais comme un produit sexuel,
conformément aux instructions reçues des magazines féminins, romans
d’amour et films porno, j’apprenais la vérité sur le bien-être sexuel. Au
cours de la décennie suivante, j’ai acquis un vaste ensemble de
connaissances, mais surtout une attitude radicalement plus saine : le corps
d’une femme et son plaisir lui appartiennent et n’appartiennent à personne
d’autre ; il est possible de dire non à une relation sexuelle sans dire non à
tout ce qui l’accompagne – l’amour, l’affection, le plaisir et le jeu ; et ma
propre expérience intérieure est un guide légitime pour savoir si je veux ou
non essayer quelque chose.
J’ai compris, et c’est sûrement le point le plus marquant, qu’il est
normal que mon expérience personnelle soit parfois contradictoire (je suis
une nuée  !), et plus je fais attention, avec douceur et patience, à toute la
profondeur de ma propre expérience intérieure (surtout si je suis douce et
patiente avec mes sentiments inconfortables), plus j’éprouve de la confiance
en moi et de la joie.
Amelia, en revanche, avait en tête sa propre version du Message Moral
lorsque nous avons atteint l’adolescence. Les femmes intelligentes
n’avaient pas envie de sexe, croyait-elle. Les filles intelligentes
s’intéressaient à l’esprit, pas au corps  ; seules les filles stupides étaient
gouvernées par leur «  instinct animal  ». C’est une attitude victorienne
classique de la classe moyenne. Elle estimait que la Femme Sexuelle Idéale
était plus ou moins asexuée, et elle prenait son propre manque d’intérêt
pour le sexe comme preuve de son intelligence.
Et puis elle a commencé à faire l’amour, et elle a fini par aimer ça ! Elle
a donc découvert une nouvelle zone de la carte, exploré de nouveaux
territoires. Elle a créé un espace pour l’idée du sexe comme divertissement,
un truc amusant à faire le vendredi soir, tant qu’il n’y a pas de rediff de X-
Files à la télé. Elle a redessiné la carte pour qu’elle l’autorise à la fois à être
intelligente et à profiter du sexe comme source de plaisir, mais elle
naviguait toujours sur une bande de terre assez étroite.
Ce n’est que lorsqu’elle a rencontré l’homme qu’elle allait finalement
épouser qu’elle a commencé à vivre le sexe comme un moyen de découvrir
une connexion et un plaisir plus profond que le simple divertissement, un
plaisir lié à sa propre identité 3. Il s’agissait d’une toute nouvelle carte, qui
représentait un terrain dont elle ignorait l’existence – alors qu’il avait
toujours été là, inexploré.
Elle vit avec le même partenaire depuis des décennies et a connu les
mêmes plaisirs et les mêmes difficultés que nombre de femmes dans des
relations durables. Et si j’ai eu la grande chance de devenir sexothérapeute,
elle a eu celle d’avoir une sœur sexothérapeute, de sorte qu’elle a pu faire
partie de ces femmes qui m’ont appelée ou écrit pour me demander  :
« C’est normal, ça ? » Elle est comme beaucoup de femmes : désir sensible
au contexte et excitation non concordante. Et donc, comme beaucoup de
femmes, elle a envoyé mes articles de blog à son mari en lui disant : « C’est
ça ! Tu vois ? »
Nous sommes à nous deux la preuve que même des jardins
génétiquement identiques, plantés avec des graines très similaires, peuvent
pousser sur des terrains très différents. Il s’avère qu’elle a des freins un peu
plus sensibles que moi, et que j’ai un accélérateur un peu plus sensible. Le
Message Médiatique était peut-être un peu plus adapté à ma sexualité
originelle et le Message Moral un peu plus adapté à celle d’Amelia, et c’est
ainsi que des idées différentes ont pris racine et se sont développées.
Pour nous deux, avant même de commencer à avoir des relations
sexuelles, nous avions déjà quelques idées sur ce à quoi cette expérience
était censée ressembler. Et nous avons toutes les deux, comme presque
toutes les femmes, traversé une période de prise de conscience de notre
manque de préparation, puis nous avons réappris ce que signifiait être une
femme sexuelle.
Pour nous deux, l’éducation à la science du bien-être sexuel nous a
aidées à dessiner des cartes qui représentent mieux nos terrains sexuels, ce
qui nous a permis de communiquer plus efficacement sur notre bien-être
sexuel avec nos partenaires. Cet apprentissage nous a également permis de
ne plus juger les autres femmes vivant des expériences en contradiction
avec les nôtres, car c’est un fait : tout le monde est vraiment unique. C’est
parce que nous voulions croire en notre propre expérience intérieure, même
si celle-ci ne correspondait pas à ce que nous pensions « devoir » vivre, que
nous avons pu accepter et adhérer à cette science – celle-là même présentée
dans ce livre.
Mais apprendre ce qui est vrai, redessiner la carte, n’a pas été la partie
la plus difficile, pour aucune de nous, ni pour la femme qui a découvert le
sexe via le porno, ni pour la plupart des femmes avec lesquelles je discute.
Lorsqu’elles apprennent qu’elles sont normales, de nombreuses femmes
se sentent instantanément libérées et satisfaites de leur sexualité, comme
jamais auparavant. La lumière s’allume et elles s’exclament  : «  Ma carte
était fausse depuis le début et en fait, je suis normale  !  » Mais certaines
femmes, même si elles peuvent admettre que leur désir réactif ou leurs
orgasmes sans pénétration sont normaux, ne parviennent pas à accepter
qu’il soit intéressant de vivre ce nouveau type de normalité. Il est important
de savoir comment fonctionne votre sexualité. Mais il est plus important
encore d’accueillir votre sexualité telle qu’elle est, sans jugement ni honte.
Et c’est ça, la partie la plus difficile pour beaucoup de femmes.
Et quand ça arrive, c’est là qu’intervient le non-jugement.

Deuxième étape : la partie difficile


(aussi appelée : comment ne pas juger)
Si votre sexualité vous angoisse, si vous vous en voulez de vous sentir (ou
de ne pas vous sentir) de telle ou telle manière, ou si vous avez honte, vous
allez souvent mettre ce sentiment dans une boîte et la cacher au plus
profond de vous. Et ce sentiment reste dans cette boîte, en attendant de
terminer son cycle. Vous ne vous en êtes pas débarrassée, vous l’avez juste
mis en attente. Pour autant, il faut bien qu’il finisse par aller au bout de son
cycle.
Supposons que, au lieu de le mettre dans une boîte, vous soyez
consciente de vos sentiments à l’égard de votre sexualité et que vous en
soyez curieuse, ou que vous fassiez preuve d’une bienveillance affectueuse
envers eux, comme vous le feriez devant un nouveau-né en larmes ou un
chaton triste et tout timide. Ou encore, supposons que vous les observiez
simplement en toute neutralité, en restant en marge de votre propre
expérience intérieure. Ce genre de conscience de soi compatissante crée un
contexte qui ne freine pas et qui, au contraire, permet à votre état intérieur
d’achever son cycle.
Avant, je pensais que c’était la conscience de l’état intérieur qui
comptait, mais je me suis rendu compte, étude après étude, que
«  l’observation  » de l’état intérieur n’est pas un prédicteur significatif de
bien-être. En effet, la variable la plus importante est le « non-jugement 4 ».
Les personnes qui obtiennent des résultats faibles aux évaluations de
pleine conscience, qui mesurent le degré de non-jugement, sont d’accord
avec des déclarations telles que «  Je me dis que je ne devrais pas penser
comme je pense » et « Lorsque j’ai des pensées ou des images désagréables,
je me juge bonne ou mauvaise, selon le sujet de la pensée ou de l’image ».
Les personnes qui sont très douées en non-jugement répondent le contraire :
lorsqu’elles ont des pensées désagréables, elles acceptent simplement que
c’est ce qui se passe, sans juger cela comme bon ou mauvais, vrai ou faux.
En d’autres termes, ne pas juger permet de ressentir ce qu’on ressent, que ça
ait un sens pour soi ou non, que ce soit confortable ou non, que ce soit ce
que l’on croit devoir ressentir ou non. Ne pas juger, c’est remarquer en toute
neutralité ses propres états intérieurs.

Grâce à l’absence de jugement, peu importe ce qu’on ressent ; ce


qui compte, c’est ce qu’on ressent vis-à-vis de ce qu’on ressent. Et
l’approche de ressenti la plus favorable au bien-être est… la
neutralité.

Permettez-moi d’illustrer mon propos avec l’article de recherche que je


préfère à ce sujet, une petite étude qui a examiné le rôle de la pleine
conscience dans les expériences des personnes souffrant de troubles
anxieux généralisés 5. Les chercheurs ont mesuré, entre autres, les
symptômes d’anxiété des participants et le degré d’interférence avec leur
vie quotidienne que ces symptômes provoquaient, ainsi que les réponses des
participants au Questionnaire Cinq Facettes de la pleine conscience (parfois
nommé Five Facet Mindfulness Questionnaire ou FFMQ, en anglais). Parmi
les cinq facettes, deux concernent « l’observation » – le fait de remarquer
son expérience intérieure – et «  le non-jugement  » – le fait de ne pas
qualifier son expérience intérieure de bonne ou mauvaise.
Lisez attentivement : les participants qui étaient les moins affectés par
leurs symptômes n’en avaient pas des moins fréquents ou moins graves, et
n’étaient pas non plus davantage conscients de leur état intérieur – le
facteur « observation ». Non. Les personnes qui étaient moins affectées par
leurs symptômes étaient celles qui jugeaient le moins ! En d’autres termes,
ce ne sont pas les symptômes qui prédisent à quel point l’anxiété va
perturber la vie d’une personne, mais ce qu’elle ressent vis-à-vis de ces
symptômes. Le prédicteur, ce n’est pas ce que l’on ressent, c’est le fait de
ne pas être conscient de ce que l’on ressent. C’est ce que vous éprouvez à
l’égard de ce que vous éprouvez.

Et les personnes qui ne portent pas de jugement sur leurs sentiments


s’en sortent mieux.

Le corpus évaluant spécifiquement l’absence de jugement dans le


domaine du fonctionnement sexuel est en constante croissance. Dans une
première étude minuscule sur la thérapie sexuelle sensorimotrice, les
femmes dans le groupe bénéficiant d’un traitement ont indiqué que la
thérapie les aidait à moins avoir l’impression de «  devoir  » vivre quelque
chose en particulier et à être plus enclines à faire preuve de douceur et
d’indulgence envers elles-mêmes 6. (Ça rappelle un truc du, disons,
chapitre 5 ? Vous vous souvenez de l’autocompassion ?)
Mais la véritable percée de la recherche récente sur l’absence de
jugement et le sexe est le développement de la Mesure de la Pleine
Conscience Sexuelle, qui s’appuie sur le FFMQ. Il en ressort que la pleine
conscience sexuelle – la prise de conscience sans jugement – permet de
prédire la satisfaction sexuelle, en particulier chez les femmes 7. Remarquez,
cependant, que ce n’est pas la prise de conscience en soi qui fait la
différence. Par exemple, la prise de conscience globale du corps ne joue pas
sur la non-concordance de l’excitation – le problème, ce n’est pas que les
gens « sont inconscients » que leur corps fait des trucs 8. C’est que les gens
peuvent être conscients et ne pas juger, ou ils peuvent être conscients et
juger, avoir peur, honte, être frustrés, avoir du ressentiment ou être
désespérés. C’est l’absence de jugement qui fait la différence 9.
Intéressons-nous à cinq situations où l’absence de jugement peut être
utile :
les sentiments qui surviennent « sans raison valable » ;
guérir d’un traumatisme ;
dissiper la douleur ;
augmenter le plaisir ;
faire le deuil des « je devrais ».
Qu’est-ce qui dit « Tu es incroyable au lit ! » plus clairement que l’orgasme de son partenaire ?
Votre partenaire incapable de s’empêcher d’avoir un orgasme, surtout s’il a un accélérateur
légèrement têtu.
Camilla a réfléchi en toute logique au problème «  Si je te fais une pizza et que tu n’en
manges qu’une seule part, comment je me sens à ton avis  ?  », et elle est parvenue à une
conclusion intelligente : ils ont posé une règle qui l’empêche d’avoir un orgasme.
Ils pouvaient faire tout ce qu’ils voulaient, mais Camilla n’était pas autorisée à avoir
d’orgasme. C’est une astuce de psychologie inversée qu’on ne s’attendrait pas à voir marcher
dans la vie réelle : « Tu ne veux pas avoir d’orgasme ? Très bien. Tu n’as pas le droit d’avoir un
orgasme », et pourtant, ça marche.
Cette règle a eu deux effets. D’abord, elle a véritablement supprimé la pression de
performance pour Camilla et les attentes frustrées pour Henry. Ils pouvaient tous les deux se
détendre et tout oublier, ce qui les faisait se sentir mieux.
Elle a aussi eu une autre conséquence  : Henry avait déjà fait évoluer sa conception des
préliminaires et considérait désormais l’ensemble de leur relation comme une occasion de
titiller la veilleuse tic-tic-tic de Camilla. La nouvelle règle a poussé la situation à un autre
niveau.
Vous voyez, enlever l’orgasme de l’équation a mis la petite surveillante de Camilla dans
une situation déroutante. Si Henry, par exemple, lui faisait un cunnilingus et qu’elle se sentait si
excitée qu’elle craignait de jouir, elle devait se rappeler qu’elle n’était pas censée avoir
d’orgasme, et la petite surveillante continuait de vérifier son niveau d’excitation et de le
comparer avec son état cible « ne pas avoir d’orgasme », et donc sa petite surveillante ne cessait
de penser à l’orgasme et combien elle en était proche.
L’idée « atteins l’orgasme » est intégrée dans « n’atteins pas l’orgasme ». Et si je vous dis :
« Ne pensez pas à un ours », que se passe-t-il aussitôt ?
Les orgasmes ne sont pas aussi automatiques que les pensées, mais dans le bon contexte
sexuellement positif, si vous interdisez l’orgasme, et que vous donnez ensuite à la personne tout
le temps nécessaire pour essayer de ne pas avoir d’orgasme… Je dirai simplement que c’est un
jeu amusant et que vous voudrez peut-être y goûter un jour.
Ce qui m’amène à l’orgasme que votre partenaire ne peut pas s’empêcher d’avoir.
Henry est à peu près aussi intelligent que Camilla. Je le sais parce qu’un jour, elle m’a
appelée pour me dire qu’il avait mieux respecté leur accord qu’elle – il utilisait un vibromasseur
sur elle et elle avait été si proche et voulait vraiment avoir un orgasme, mais il s’était arrêté
avant qu’elle n’y parvienne.
Elle était frustrée. Et même un peu énervée. Mais bon, la règle, c’était son idée. Et lui,
c’était un type bien.
Il l’a fait deux fois encore – il l’a amenée au bord de l’orgasme, puis s’est éloigné. Parce
que c’est un type vraiment bien.
Et finalement, il l’a tellement rapprochée qu’elle n’a simplement plus pu s’empêcher
d’avoir un orgasme. C’est une bonne astuce : les femmes n’ont pas de « point de non-retour »
pour l’orgasme comme les hommes pour l’éjaculation. Pour qu’une femme soit incapable de
s’empêcher de jouir, il faut un niveau élevé d’excitation soutenue.
Eh oui, encore une fois, être sexothérapeute est le meilleur métier du monde quand on vous
raconte des histoires comme celle-ci.

L’absence de jugement 1 : « sans raison


valable »
Voici un truc que j’entends souvent  : «  S’il n’y a pas de solution à un
sentiment inconfortable, ça ne sert à rien de le ressentir. »
Mais bien sûr que si, ça sert !
Le but de ressentir un sentiment auquel on ne peut rien, c’est de le
laisser se libérer, d’aller au bout de son cycle, pour qu’il puisse prendre fin.
Je parlais de la recherche sur le non-jugement avec ma collègue Jan, et
elle m’a dit qu’elle avait eu une expérience intéressante pendant le week-
end. Elle avait remarqué qu’elle s’était mise en colère de façon
disproportionnée à propos d’un rien – la perte d’un timbre alors qu’elle
voulait poster une lettre – et elle a compris plus tard que sa colère n’était
pas vraiment liée au timbre. Sa colère avait été déclenchée la veille au soir,
lorsqu’elle avait regardé un film sur un crétin misogyne, ce qui avait
réveillé sa propre histoire avec un crétin misogyne, deux décennies plus tôt.
« Alors, qu’as-tu fait de cette colère ? lui ai-je demandé.
– Je me suis dit que je n’avais pas besoin d’être en colère, parce que ce
connard n’est plus dans ma vie maintenant.
– Tu as jugé ? Tu as appuyé sur tes freins ?
– Qu’est-ce que je pouvais faire d’autre ? Me mettre en colère contre un
mec que je n’ai pas vu depuis vingt ans ? »
La menace – le connard misogyne – n’était plus là pour qu’elle le
combatte ou le fuie… et pourtant, elle ressentait toujours ces sentiments.
Alors, que pouvait-elle en faire ?
Elle aurait pu laisser le cycle s’achever. Les Sensations existent dans
son corps, sans référence à l’abruti qu’elle a réussi à laisser derrière elle.
Mais ce n’est pas l’habitude que la plupart d’entre nous apprennent dès
l’enfance, et il faut la mettre en pratique. Lorsque nous avons des
sentiments auxquels nous ne pouvons pas vraiment rien et que nous ne
savons pas comment nous laisser aller à ressentir sans agir, notre cerveau va
chercher une situation dans laquelle il peut agir, et va essayer de superposer
les sentiments à cette situation.
Alors, ne soyez pas en colère contre ce mec qui a quitté votre vie depuis
longtemps. Laissez simplement la colère vous envahir. Peu importe de quoi
il s’agit, ce sont juste des Sensations aléatoires, des restes du passé, qui
doivent se résoudre d’elles-mêmes. N’appuyez pas sur l’accélérateur, mais
n’appuyez pas non plus sur les freins. Remarquez la colère et laissez-la
s’exprimer. Restez tranquille, et elle vous traversera comme un vent chaud
dans le désert ou un typhon.

L’absence de jugement 2 :
guérir d’un traumatisme
Lorsqu’une personne subit un traumatisme, c’est comme si un individu
s’était glissé dans son jardin et avait arraché toutes les plantes qu’elle avait
fait pousser avec tant de soin et d’attention. C’est particulièrement terrible
lorsque cet individu n’est pas un étranger, mais quelqu’un en qui le
propriétaire du jardin avait confiance. Il y a alors de la rage et de la
trahison, du chagrin pour le jardin tel qu’il était, et la crainte qu’il ne
repousse jamais.
Mais il va repousser. C’est ce que font les jardins.
Et vous facilitez cette renaissance en laissant le jardin être ce qu’il est,
inachevé et en développement, et non ce qu’il était ou ce que vous
souhaitez qu’il soit. Comment  ? Par l’autocompassion  : la bienveillance
envers soi-même, l’humanité commune et la pleine conscience. La patience.
Accepter l’idée de ne pas aller bien.
Le processus de guérison est douloureux. Si vous vous cassez la jambe,
à aucun moment pendant la cicatrisation vous ne vous sentirez mieux
qu’après guérison complète.
Il y a la douleur, les démangeaisons et une diminution de la force
musculaire. À partir du moment où votre jambe est cassée, elle fait mal
constamment… jusqu’à ce que, progressivement, elle commence à faire
moins mal. La douleur est normale.

Si vous engourdissez la douleur physique, la guérison peut quand


même avoir lieu. Malheureusement, si nous essayons
« d’engourdir » la douleur émotionnelle, nous mettons la douleur en
pause… mais la guérison aussi. Les personnes plus évoluées que
moi peuvent traverser des émotions comme le chagrin et la panique
sans souffrir, mais pour la plupart d’entre nous, la guérison du cœur
ne se fait pas sans souffrance. Je suis désolée.

J’ai travaillé avec une survivante de violences sexuelles au tout début de


son processus de guérison. Elle était tour à tour en colère, désespérée et
figée, et elle avait peur tout le temps. Même si elle pratiquait la méditation
depuis longtemps, l’intensité de ses émotions lui semblait trop forte pour
qu’elle puisse les laisser la traverser ; elles s’accumulaient en elle. Elle se
sentait paniquée et prisonnière de la douleur. Elle voulait savoir quoi faire
de tous ces sentiments, comment les réparer. Elle voulait savoir comment
arrêter de souffrir et quand la douleur cesserait.
« Tout ce que je peux vous dire, ai-je déclaré, c’est que tout ce que vous
vivez, tous ces sentiments contradictoires et toute cette douleur, c’est une
étape normale du processus de guérison. Tout le monde vit cette expérience
différemment, et il n’y a aucun moyen de savoir combien de temps elle
durera. C’est dur un certain temps, puis ça s’améliore peu à peu. Mais je
peux vous dire avec certitude que toutes les survivantes que j’ai connues
ont réussi à s’en sortir. »
Nous sommes restées assises en silence pendant qu’elle intégrait l’idée
de ne pas savoir quand la douleur prendrait fin et de devoir simplement
faire confiance à son corps et à son cœur pour guérir à leur propre rythme.
Enfin, elle a dit  : «  C’est comme si… C’est comme si j’avais un oiseau
inconscient dans la paume de ma main. Si je me crispe et que j’essaie de le
brusquer, il restera figé. Mais si je suis tranquille et patiente suffisamment
longtemps, l’oiseau réussira à se réveiller et s’envolera. »
Oui. C’est tout à fait ça.

L’absence de jugement 3 : la douleur


Il n’y a que deux expériences sexuelles que je qualifie volontiers
d’« anormales » : l’absence de consentement et la douleur non désirée. Si
toutes les personnes impliquées sont heureuses d’être là et libres de partir
quand elles le souhaitent, alors tout ce qu’elles font est normal. Et si tout le
monde éprouve des sensations désirées et appréciées, alors tout ce qui se
passe est normal. Mais une douleur non désirée lors d’une relation sexuelle
–  douleur lors de la pénétration, lors d’un contact génital, bref, toute
douleur non désirée – n’est pas normale.
Et la clé pour soigner ces douleurs est de ne pas porter de jugement sur
ces sensations.
C’est un sujet délicat parce que, d’une part, la prise de conscience sans
jugement est la clé pour guérir de la douleur sexuelle, mais d’autre part, de
nombreuses femmes s’entendent dire toute leur vie que la douleur lors des
rapports sexuels est normale, qu’elle fait partie de la vie, qu’il suffit de
prendre un verre de vin, et de quoi tu te plains, prends un peu sur toi.
Pouvons-nous reconnaître notre douleur sans la juger, et la prendre plus au
sérieux que ce que notre culture nous a inculqué  ? Plus au sérieux que ce
que nous « devrions » ?
J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec Caroline Pukall, co-autrice de
When Sex Hurts  : A Woman’s Guide to Banishing Sexual Pain. Elle a
souligné que certaines femmes tolèrent la douleur lors des rapports sexuels
«  simplement parce qu’elles se disent  : “je suppose qu’il faut s’attendre à
une certaine douleur”. »
Elle a ajouté : « Certaines femmes supportent la douleur plus longtemps
que nécessaire », aussi bien dans divers domaines de leur vie que dans leur
vie sexuelle. Elles tolèrent la douleur parce qu’elles pensent que c’est leur
seule option, que des traitements efficaces ne sont pas disponibles (mais
si !), ou que les inconvénients liés à la recherche d’un traitement ne valent
pas les avantages potentiels (mais si  !). Et les professionnels de santé
renforcent parfois cette attitude en ne prenant pas la douleur au sérieux ou
en supposant que, s’il n’y a pas d’infection ou de lésion, alors la douleur est
« juste dans leur tête ».
Si les femmes (et leurs professionnels de santé) avaient la même vitesse
de critère concernant les douleurs génitales que les hommes avec leurs
propres douleurs génitales, les femmes n’hésiteraient jamais à se faire
soigner. Notre disposition à tolérer un effort plus important – dans ce cas, la
douleur – est apprise. Et elle peut être modifiée, simplement en la
reconnaissant, et en se laissant aller à la possibilité qu’elle puisse être
différente.
Voici le genre d’histoire qui me remplit d’une colère moralement
justifiée : une femme en fauteuil roulant s’est approchée de moi après une
conférence publique et m’a dit que c’était la première fois qu’elle entendait
parler de traitements efficaces contre le vaginisme, une tension chronique
du muscle du périnée, et qui rend la pénétration du vagin impossible ou très
douloureuse. Ses médecins ne lui avaient jamais dit que son vaginisme
pouvait être traité.
Pourquoi ne lui ont-ils rien dit  ? Parce que les médecins ne savaient
pas  ? Parce qu’ils hésitaient à parler de sexe avec une femme d’une
vingtaine d’années  ? Parce qu’il ne leur est pas venu à l’esprit qu’une
femme en fauteuil roulant avait autant droit à une vie sexuelle satisfaisante
que n’importe quelle autre femme  ? Je ne sais pas. Mais je ne peux pas
m’empêcher de me demander si ces médecins auraient ignoré les questions
d’un homme du même âge en fauteuil au sujet de son dysfonctionnement
sexuel et de ses douleurs.
Voici un bref résumé de ce qu’est la douleur :
Toute douleur naît dans le cerveau, en réponse aux signaux du corps
indiquant une forme de menace 10.
La douleur est un signal indiquant que le cerveau perçoit une menace, et
que vous pourriez avoir besoin d’aide. Si vous prenez votre propre
expérience intérieure, et non des vitesses de critères culturellement
imposées, comme point de référence le plus précis possible en matière de
connaissance sexuelle, vous serez en mesure d’entendre le signal de votre
cerveau indiquant que vous avez besoin d’aide, et vous le prendrez au
sérieux.
Une partie de ce qui complique notre compréhension de la douleur
sexuelle des femmes est qu’il y a tant de «  menaces  » potentielles
différentes, allant des lésions tissulaires bien connues, telles que les
déchirures de l’accouchement ou la dermatite de contact allergique, à des
changements hormonaux moins connus et qui accompagnent la ménopause,
entraînant la sécheresse et l’atrophie, en passant par des domaines d’étude
plus récents, comme l’hypersensibilité du système nerveux central en
réponse à un historique d’abus ou de négligence dans l’enfance 11.
On ne peut pas faire plus littéral que ça : la question, ce n’est pas ce
que vous ressentez (la douleur) mais ce que vous ressentez (une
tolérance ou non) vis-à-vis de ce que vous ressentez. Ne pas juger,
ça ne signifie pas se résigner, mais se tourner vers ce qui est vrai
avec bienveillance, sans autocritique. En ne jugeant pas, vous vous
offrez la possibilité de demander de l’aide.

L’absence de jugement 4 : le plaisir


Nous avons parlé de la pratique du non-jugement en cas de frustration, de
douleur et de traumatisme. Mais pour certains d’entre nous, l’expérience la
plus difficile à accepter est le plaisir – et plus le plaisir est grand, plus nous
le bloquons avec des « je devrais ».
Vous vous souvenez de la métaphore du buffet au chapitre 5 ? Comme
quoi vous pouvez choisir ce que vous voulez et laisser le reste, et tout le
monde se mettra à table avec une assiette différente ? Trop de femmes font
leurs choix non pas en fonction de ce qu’elles aiment, mais de ce qu’elles
croient que leur partenaire aime ou de ce qu’on leur a dit qu’elles
«  devraient  » aimer. Vous êtes censée avoir envie de chou frisé et de
vinaigrette sans matière grasse, mais pas de noix de pécan caramélisées, et
si vous venez à table avec une assiette remplie d’aliments tabous, vous
serez jugée. Vous vous privez donc par anticipation, par prévention, de tout
ce qui vous procure du plaisir. Et si ça vous fait souffrir, eh bien… levez la
main si votre famille ou votre culture vous a appris que la souffrance est en
fait une vertu ?

La souffrance n’est pas une vertu et le plaisir n’est pas un péché. On


nous a menti toute notre vie.
D’après mon expérience, les femmes ont plus de mal à éprouver un
plaisir sans jugement qu’un mal-être sans jugement. Nous bloquons le
plaisir si intuitivement que nous ne remarquons même pas notre geste. Il y a
plusieurs années, j’ai eu une étudiante qui sortait de plusieurs mois de
dépression et qui commençait à revivre des instants de plaisir au soleil, avec
ses amis et à la fac.
« Ça me semble si immoral, disait-elle. Ça paraît tellement déplacé de
se sentir bien quand une telle majorité du monde est dans un état aussi
déplorable. »
Je lui ai rappelé les conversations que nous avions eues sur l’importance
du non-jugement pour faire face à la dépression.
« Cette compétence s’applique aussi au plaisir. Ne le juge pas. Ce n’est
ni bien ni mal, c’est juste ce qui se passe dans ton corps en ce moment. Tu
n’as pas à en avoir honte, tu n’as pas à avoir peur qu’une fois passé, il ne
revienne jamais, tu ne dois rien faire d’autre que le saluer et le laisser être
ce qu’il est. »
Elle m’a dévisagée, sceptique, et quand nous avons reparlé quelques
semaines plus tard, elle m’a dit :
« Alors j’ai essayé de faire ce truc de plaisir et de joie sans jugement et,
euh… »
Elle s’est mordu la lèvre et ses yeux se sont remplis de larmes.
J’ai attendu.
Après un long silence, elle a reniflé et a dit :
« Si tu ne juges pas, le plaisir et la joie grandissent. »
C’est une étrange vérité sur le non-jugement. Lorsque vous observez la
souffrance sans jugement, elle diminue à mesure que les blessures
cicatrisent. Lorsque vous observez le plaisir sans jugement, il se dilate pour
remplir l’espace que le jugement remplissait auparavant. Je ne sais pas
pourquoi c’est vrai, mais c’est un fait crucial concernant le non-jugement.
« Tu ne m’avais pas prévenue que ça ferait ça, m’a-t-elle reproché.
– Si je t’avais prévenue, aurais-tu essayé ?
– Oh, mon Dieu non, a-t-elle admis. Mais… J’aime ça, en même temps.
– Et que ressens-tu vis-à-vis du fait que tu aimes le plaisir ? » lui ai-je
demandé.
Elle a levé les yeux au ciel – à cause de moi ou d’elle-même, je ne sais
toujours pas – et a dit :
« Eh bien, quand tu le dis comme ça, ça semble assez normal. »
C’est normal. Mais cela ne veut pas dire que c’est simple ou facile.
Beaucoup d’entre nous ont appris que le plaisir est égoïste, coupable, une
perte de temps ou un motif de honte. Comment osons-nous nous préoccuper
de ce qui nous fait du bien, alors que nous devrions plutôt répondre aux
besoins des autres ou de notre partenaire, ou encore veiller à répondre aux
attentes des autres ?
Mais voilà la vérité  : le plaisir est une porte d’entrée pour accéder à
votre pleine et véritable identité – votre moi profond. Le plaisir est le seul
moyen d’établir un lien sans contrainte avec soi-même et avec ceux que
l’on aime le plus. Pourquoi ? Parce que le plaisir ne se produit que dans un
contexte où votre cerveau se sent suffisamment en sécurité pour être
complètement et entièrement vous-même, sans honte ni performance
sociale ni «  je devrais  ». L’extase nous vient quand nous laissons derrière
nous tout ce qui ne nous réjouit pas ou n’éveille pas notre curiosité.
L’extase nous vient lorsque nous nous abandonnons au plaisir sans retenue.
Vous avez le droit d’aimer le plaisir. Et le premier pas vers cet état, c’est
simplement de remarquer le plaisir sans le juger.
Merritt est la reine quand il s’agit de ne pas faire les choses comme on l’attend d’elle. Elle a
commencé à se faire confiance non pas quand elle pouvait se donner du plaisir, mais quand elle
pouvait donner du plaisir à sa partenaire. Elle s’est considérée comme une femme sexuelle…
lorsqu’elle s’est autorisée à ne pas être sexuelle. Elle s’est plongée dans la lumière d’un plaisir
intense… quand elle a renoncé à essayer d’éprouver du plaisir.
« C’est comme ce qu’on ressent aux doigts quand on rentre au chaud après avoir été dans le
froid. Au début ça fait mal, mais ensuite ils sont tièdes. »
C’est ainsi qu’elle a décrit son expérience de lâcher-prise d’une sexualité qu’elle pensait
être censée avoir, et de la création d’un espace pour la sexualité qu’elle avait bien.
« On pourrait penser qu’une lesbienne d’âge moyen ne se ferait pas avoir, et n’accepterait
pas ce que le monde dit du fonctionnement de la sexualité féminine. Mais c’est difficile de se
défaire de tout ça.
– Tu as des freins sensibles, ai-je dit, et tu as probablement ces freins depuis bien plus
longtemps que tu n’es féministe. »
Une dernière anecdote :
Merritt et Carol se sont mariées peu de temps après que leur fille a eu son bac. Cette
dernière – qui participait à informer ses camarades sur la sexualité dans son lycée – a organisé
un enterrement de vies de jeunes filles pour ses mères avec, au milieu d’autres cadeaux plus
pragmatiques comme des cartes cadeaux de magasins de jardinage ou de nouvelles serviettes de
bain, un kit de sa part à elle, contenant du vin pétillant, des bougies parfumées et de l’huile de
massage, le tout dans un joli panier avec un nœud.
«  Je n’arrive pas à croire que ma fille offre à ses parents une panoplie pour soirée
romantique, a déclaré Merritt.
– Oh, je t’en prie. Ce n’est pas comme si je vous donnais un gode et un fouet ! »
Merritt et Carol, écarlates et mortes de rire, ont bien essayé de l’envoyer à la cuisine pour
faire la vaisselle.
Mais leur fille a continué :
e
« Je veux dire, allez, on est au XXI  siècle. Vous êtes là, vous êtes lesbiennes, vous vous
mettez nues ensemble parfois parce que vous vous aimez. Faut vous en remettre. »
Et c’est précisément ce que Merritt fait depuis, aux côtés de Carol.

L’absence de jugement 5 : faire le deuil


des « je devrais »
Pour certaines personnes, savoir ce qui est vrai suffit à les libérer des vieux
mythes oppressifs. D’autres ont besoin de savoir ce qui est vrai et de
remarquer également leurs sentiments de jugement sur ce qui est vrai. Et
lorsqu’elles remarquent qu’elles portent un jugement sur elles-mêmes, elles
peuvent se libérer de ces comportements et adopter des sentiments plus
neutres ou même positifs sur ce qui est vrai.
Enfin, pour certaines personnes, il n’est pas si simple de se débarrasser
de ces attitudes. Elles savent ce qui est vrai. Elles remarquent leur jugement
sur ce qui est vrai. Pour autant, leur corps, leur esprit et leur cœur semblent
s’accrocher de toutes leurs forces à ce jugement, refusant d’abandonner ces
vieilles idées et d’accepter à la place ce qui est vrai.
Pourquoi ?
Nos scénarios ou nos cartes présentent des idées claires sur ce que
l’objectif, l’effort et les échéances de notre sexualité « devraient » être – un
orgasme facile, un désir spontané, tous ces mythes. Et qu’est-ce que ça veut
dire si nous ne fonctionnons pas comme nous «  devrions  » le faire  ? Que
nous sommes cassées. Parfois, pour certaines femmes, avoir une sexualité
qui ne correspond pas à la carte ne signifie pas seulement être différente,
mais aussi être un échec. Une aberration. «  Anormale.  » Malade,
dégoûtante, inappropriée, tous ces mots terribles qui signifient que nous ne
sommes pas normales. Nous lions nos identités à notre sexualité, à notre
idée de ce qu’est une « bonne femme » ou une « bonne fille ».
Si vous vous reconnaissez dans ces mots, alors vous défaire de ces
mythes peut vous rappeler l’effort pour se défaire de l’autocritique, décrit
au chapitre 5. À un certain niveau, nous avons l’impression que renoncer à
ces objectifs, c’est renoncer à l’espoir  ; on le vit comme un échec. C’est
aussi vrai pour les objectifs liés à la sexualité, comme le style de désir,
l’orgasme et le plaisir, que pour les objectifs de vie en général : mettre fin à
une relation, décider de ne pas aller au bout d’un cursus ou de ne pas faire
d’études, ou encore accepter que sa morphologie ne corresponde pas à
l’idéal culturel.
Pour renoncer à tous les « je devrais » – ces sentiments ou pensées tels
que « je ne devrais pas être comme ça » ou « j’aimerais que ma sexualité
soit différente » –, il faut que votre petite surveillante reconnaisse que votre
objectif précédent est irréalisable et qu’elle… tombe dans le gouffre du
désespoir auquel nous faisons face lorsque notre surveillante décide qu’un
objectif n’est pas atteignable. En bref, il faut une sorte d’« échec », il faut
accepter que vous ne serez probablement jamais la personne sexuelle qu’on
vous a appris à être toute votre vie.
C’est ce qui peut rendre tout changement sur la carte si difficile, et c’est
peut-être le plus grand obstacle qui se dresse entre les femmes et leur propre
bien-être sexuel optimal. Pour atteindre le plaisir, il peut être nécessaire de
reconnaître les désirs, curiosités et sensations qu’on nous a appris depuis
toujours à considérer comme honteux. Le désir réceptif peut exiger que
nous abandonnions tout espoir de nous conformer un jour au modèle de
relations sexuelles que nous avons toujours cru être le seul et unique
« bon » type de relations sexuelles.
Une fois que vous savez ce qui est vrai, pouvez-vous renoncer à ce qui
est faux ? Pouvez-vous abandonner les objectifs auxquels vous avez attaché
certaines facettes de votre identité  ? Cette transformation suppose un
voyage à travers le gouffre du désespoir, le deuil de la carte qui était fausse
et de tous les endroits que vous avez ratés à cause de ces erreurs de
cartographie.
Comment les gens peuvent-ils survivre à ce genre «  d’échec  »
apparent ? Et où vont-ils, une fois au fond du gouffre ?
Pour s’en sortir, il faut rester très tranquille, remarquer toutes les
facettes de votre identité qui étaient liées aux mensonges qu’on vous a
racontés, remarquer toute la tristesse que vous ressentez en abandonnant ce
« moi » que vous avez passé votre vie à essayer d’être. Remarquez aussi la
colère que vous éprouvez en comprenant qu’on vous a menti pendant si
longtemps. Remarquez tous ces sentiments sans les juger. Laissez-les être
vrais.
Comme nous l’avons vu au chapitre 4, les émotions sont des tunnels :
vous devez traverser l’obscurité pour atteindre la lumière au bout. Parfois
c’est assez facile ; d’autres fois, ça fait un mal de chien. Parfois, renoncer à
un objectif particulier donne l’impression de devoir renoncer à toute votre
identité. Ce n’est pas un processus facile ; certaines étapes sont carrément
désagréables. Mais ça en vaut tellement, tellement la peine, parce qu’au
bout du tunnel se trouve la récompense ultime : vous.

« Se sentir normale »


Revenons à Mme B. que nous avons rencontrée au début du chapitre. Quel
est son objectif, selon vous  ? Est-ce le plaisir  ? La connexion avec son
partenaire ? La découverte de soi ?
D’après le peu que nous savons d’elle (et d’après ce que nous savons de
la manière dont les femmes sont socialisées autour du sexe), il semble
probable que son objectif inconscient soit de se conformer à l’idéal attendu.
De ressentir du désir spontanément, d’avoir des orgasmes lors d’une
pénétration. Bref, de se sentir « normale ».
Nous savons maintenant que la normalité n’existe pas, ou plutôt que
nous sommes toutes normales. Nous sommes toutes faites des mêmes
parties, organisées d’une manière unique. Pas deux pareilles.
Et pourtant, ce que la plupart d’entre nous souhaitent, c’est se sentir
normales.
(En fait, l’un des aspects normaux de la sexualité, c’est de se demander
parfois si on est normale. Oui, s’inquiéter d’être normale est… normal.)
Mais pourquoi « normale  » est-il l’objectif ? Que veulent les femmes,
quand elles veulent être normales ?
Je n’ai pas de preuves scientifiques directes de ce que je vais avancer (je
ne sais même pas vraiment ce que ces preuves pourraient être), mais je vais
vous dire ce que je sais grâce à des décennies d’interactions avec des
étudiantes, des cliniciens, des journalistes et des inconnus du monde entier :
je pense que se sentir normal, c’est se sentir à sa place. Rappelez-vous ce
que Camilla a dit au chapitre  1  : «  Nous essayons tous de trouver notre
place quelque part.  » Nous voulons savoir que nous sommes en sécurité,
protégés par cette expérience humaine partagée, et que ce qui se trouve sur
notre carte est identique à ce qui se trouve sur les cartes des autres.
Si nous nous trouvons dans un endroit que nous n’arrivons pas à trouver
sur notre carte – c’est-à-dire si nous vivons une expérience pour laquelle
nous n’avons aucun cadre de référence, aucun scénario –, nous nous sentons
perdus. Un territoire inconnu est risqué, dangereux (souvenez-vous du
chapitre 4 : « Je suis perdue/je suis à la maison »). En territoire inconnu, on
se sent « en danger » ! Notre réponse au stress se déclenche et nous sommes
comme ce rat qui écoute Iggy Pop  : tout ressemble à une menace
potentielle.
Mais si quelqu’un intervient et dit : « Tout va bien – regardez, j’ai cet
endroit sur ma carte. Ça fait clairement partie du territoire  », on peut se
détendre. Nous savons que nous sommes toujours à la maison, en sécurité
dans les limites du territoire. Nous sommes à notre place ici.
Quand les femmes me demandent «  Suis-je normale  ?  », elles me
demandent : « Est-ce que je suis à ma place ? »
La réponse est : oui. Vous êtes à votre place dans votre corps. À votre
place dans le monde. À votre place depuis le jour de votre naissance ; votre
maison est ici. Vous n’avez pas à la mériter ou à la gagner en vous
conformant à des standards sexuels imposés de l’extérieur.
Si vous changez votre objectif de « normal » à « là où est ma place »,
alors vous l’atteindrez toujours, car vous y êtes déjà.
Pendant pas mal d’années, j’ai gardé collée à ma porte de bureau une
petite bande dessinée. Elle montre un vieux moine bouddhiste assis à côté
d’un jeune moine bouddhiste. Le vieux dit  : «  Rien n’arrive après. C’est
tout ce qu’il y a. »
Étant plus intello que nonne, j’y lis un commentaire sur la boucle de
rétroaction qui réduit le décalage et la vitesse de critères, sur l’importance
de former votre petite surveillante à apprécier le présent plutôt qu’à tendre
constamment vers l’avenir. Et si… c’est une idée radicale, mais lisez donc :
et si vous ressentiez ça – «  C’est tout ce qu’il y a  » – à propos de votre
fonctionnement sexuel ? Et si la sexualité que vous avez actuellement est la
seule que vous aurez pour toujours ? Et si c’était le cas ?
Lorsque je pose cette question, les femmes ont un éventail de réponses
extrêmement large, allant de sourires rayonnants à des vagues soudaines de
désespoir sanglotant.
Si vous rayonnez à l’idée que votre sexualité, telle qu’elle est
aujourd’hui, est tout ce qu’il y a, alors c’est génial. J’espère que la science
présentée dans ce livre vous aidera à développer et à stimuler votre bien-
être sexuel.
Si vous deviez ressentir du chagrin, de la honte, du désespoir, de la rage,
de l’incertitude, de la frustration ou de la peur si la sexualité que vous avez
aujourd’hui devait être celle que vous aurez toujours, il se pourrait qu’avant
de pouvoir explorer votre propre sexualité avec joie, vous deviez traverser
la peur, la rage ou le chagrin qui se dressent entre vous et la douce lumière
de la compassion. Et ce n’est pas facile. Mais c’est possible – et je suis
convaincue que cela en vaut la peine. N’oubliez jamais ceci  : le jour de
votre naissance, le monde avait le choix de ce qu’il voulait vous enseigner
au sujet de votre corps. Il aurait pu vous apprendre à vivre avec confiance et
joie à l’intérieur de votre corps. Il aurait pu vous apprendre que votre corps
et votre sexualité sont de beaux cadeaux. Mais non, le monde vous a appris
à vous critiquer et à être insatisfaite de votre sexualité et de votre corps. On
vous a appris à espérer de votre sexualité une chose qui ne correspond pas à
ce qu’elle est réellement, et à donner de la valeur à cette chose éloignée de
la réalité. On vous a raconté une histoire pour expliquer ce qui allait se
passer dans votre vie sexuelle, et cette histoire était fausse. On vous a
menti. Je suis furieuse, pour vous, contre le monde entier pour ce
mensonge. Et je travaille à créer un monde qui ne ment plus aux femmes au
sujet de leur corps.
Je ne peux pas changer la blessure que le monde vous a infligée, et vous
non plus.
Ce que vous pouvez faire, c’est guérir.
Comme vos parties génitales, votre sexualité est parfaitement splendide
telle qu’elle est. Vous êtes normale. Belle. Alors, lorsque vous remarquez
que vous n’êtes pas satisfaite de votre sexualité, que vous ressentez de la
honte, de la frustration ou du chagrin, permettez-vous d’éloigner ces
sentiments de vous et de les orienter plutôt vers la culture qui vous a
raconté la mauvaise histoire. Ne vous mettez pas en colère contre vous-
même, mais contre la culture qui vous a menti. Ne soyez pas triste de vous
être écartée d’un « idéal » fictif qui est au mieux arbitraire et au pire un acte
d’oppression et de violence ; soyez triste du monde compatissant que vous
avez mérité à la naissance… et que vous n’avez pas reçu.
Certes, en vous autorisant à ressentir toutes ces Sensations, vous ne
changez rien au monde. Mais vous leur permettez de se décharger, de se
libérer et de créer de l’espace pour accueillir une nouvelle expérience à
l’intérieur de vous. Lorsque vous laissez ce chagrin vous traverser, vous
renoncez à la personne sexuelle que l’on vous a dit « devoir être », un moi
fantôme qui a pris trop de place dans votre esprit pendant trop longtemps.
Le fait de laisser disparaître ce fantôme libère de l’espace pour la personne
sexuelle que vous êtes. Et lorsque nous mettons tous cette méthode en
pratique, alors le monde change, individu par individu.

La sexualité que vous avez à l’instant présent, c’est tout ce qu’il y


a. Et elle est magnifique, même – et surtout ! – si elle n’est pas
comme on vous dit qu’elle devrait être.
Je ne sais pas si vous êtes plutôt comme Olivia, Camilla, Merritt ou
Laurie, ou bien différente de toutes les femmes que j’ai rencontrées. Je ne
sais pas avec quelle facilité vous découvrez et créez des contextes qui
génèrent du plaisir et du désir. Je ne sais pas comment vous vous sentez
chez vous dans votre sexualité, dans votre propre jardin privé. Mais je sais
que vous en êtes la jardinière. Et je sais que, plus vous exploitez les
caractéristiques innées de votre jardin, plus il sera sain et luxuriant. Je sais
que vous êtes belle telle que vous êtes, parfaitement capable d’avoir des
relations sexuelles avec confiance et joie. Je sais que vous êtes normale.
Laurie et Johnny vécurent heureux pour toujours – ou presque. La vie est compliquée et Laurie
traverse encore des moments où elle se trouve épuisée et débordée, où son corps semble bloquer
toutes les sources potentielles de plaisir. Mais trois points ont changé définitivement.
D’abord, elle s’est entraînée à remarquer ses sensations sans les juger, ce qui lui a appris à
être aussi bienveillante et généreuse envers elle-même qu’envers tous ceux qu’elle aimait. Elle a
appris à remarquer et à célébrer le plaisir et la joie, en s’autorisant à se sentir bien.
Deuxièmement, même si elle ne pouvait pas faire grand-chose pour réduire les facteurs de
stress réels dans son quotidien, elle a réduit son stress en faisant un effort plus délibéré pour
décompresser et aller au bout des cycles de réponse au stress que la vie a déclenchés. Elle s’est
autorisée à pleurer. Elle a pris son temps sous la douche, a fait attention à la sensation de l’eau
sur sa peau, et au lieu de se tartiner le corps de lotion comme si elle graissait un moule à gâteau,
elle a appris à faire attention aux sensations de bien-être que ce geste lui procurait et à la bonne
santé de sa peau. Pendant ses séances de sport, elle imaginait que son stress était ce monstre
orange du dessin animé Bugs Bunny – celui à qui Bugs fait une manucure – et qu’elle le fuyait,
par sa porte d’entrée, jusque dans les bras de Johnny. Elle a commencé à ressentir la décharge
de stress comme un plaisir – ou du moins pas comme une source de souffrance.
Et enfin, elle est devenue beaucoup plus tendre avec elle-même lorsqu’elle se surprenait en
train de critiquer son corps ou de se sentir coupable d’éprouver du plaisir. Elle ne se disait plus :
«  Arrête  !  » mais seulement  : «  Ouais, voilà encore ces pensées autocritiques.  » Elle s’est
entraînée à ne pas juger.
Peut-être que ces trois changements n’auraient pas aussi bien duré si Johnny n’avait pas
reconnu l’opportunité de tout ceci.
Une fois qu’il a pigé le concept de désactivation des freins, il a commencé à remarquer de
plus en plus de trucs qu’il pouvait faire pour aider Laurie à les relâcher. Parfois, c’était simple,
comme de faire la vaisselle et d’essuyer les plans de travail de la cuisine. Parfois, c’était : « Ce
soir, ne nous préoccupons pas de savoir si nous allons faire l’amour ou non, contentons-nous de
nous allonger et de discuter.  » Parfois, il s’agissait d’organiser une soirée romantique avec
beaucoup de temps devant eux pour qu’elle puisse se détendre.
Les partenaires qui ont un désir plus intense peuvent penser  : «  Elle devrait être capable
d’en avoir envie autant que moi ! » Ils éprouvent des sentiments négatifs au sujet des sentiments
sexuels de leur partenaire. Mais Johnny a compris qu’il ne s’agissait pas seulement d’avoir
envie de sexe, mais aussi de créer un contexte (en fait, carrément une vie) qui laisse de la place
pour les besoins des deux personnes.
Il a apporté à l’équation un sentiment de curiosité face au casse-tête de la désactivation des
freins. Il a apporté un sentiment d’émerveillement devant la manière surprenante dont la
sexualité de Laurie peut jaillir et s’épanouir sur un terrain en jachère hivernale. Il a ajouté de
l’admiration à l’extase avec laquelle sa passion déborde des murs du jardin, sous la pluie chaude
et le soleil aimant du bon contexte.
La joie, c’est la partie difficile. À vrai dire, même la rédaction de ce
chapitre sur la joie a été la partie la plus difficile de l’écriture de ce livre. La
joie n’est ni évidente ni simple. Ce n’est pas une destination à laquelle on
arrive et ce n’est pas « le voyage ». C’est ce que vous ressentez vis-à-vis de
votre voyage vers votre moi érotique le plus authentique. Vous êtes
autorisée à aimer votre sexualité telle qu’elle est en ce moment, même – et
surtout – si elle n’est pas ce qu’autrui estime qu’elle « devrait » être.
Je suis un être de preuves et de méthode  ; je veux comprendre le
mécanisme cérébral qui sous-tend la joie – et j’ai bien trouvé quelques
données scientifiques à ce sujet, ne vous méprenez pas. Si vous aussi avez
besoin de preuves, j’ai fait tout mon possible pour vous les offrir ici. Mais
la science ne peut nous mener au-delà de la frontière de ce qui est connu.
Ce que j’ai appris en un quart de siècle en tant que sexothérapeute, c’est que
la joie est ce qui se passe quand on saute de cette falaise, à la frontière du
monde connu, dans l’aventure de ce qui est vrai.
Je l’ai dit et répété au fil de cet ouvrage : faites confiance à votre corps.
Faites-lui confiance si pleinement que vous êtes prête à sauter avec lui dans
l’inconnu. Ce saut, c’est la joie.
En résumé

La chose la plus importante que vous puissiez faire pour avoir une
super vie sexuelle, c’est d’accueillir votre sexualité telle qu’elle est,
en ce moment même – même si elle n’est pas celle que vous vouliez
ou attendiez.

Renoncer aux vieilles normes culturelles fallacieuses passe par un


processus de deuil, qui traverse le gouffre du désespoir de votre
petite surveillante.

Pour faciliter ce renoncement, il faut développer sa capacité à « ne


pas juger ».

Lorsque vous vous donnez la permission d’être ce que vous êtes et


de ressentir ce que vous ressentez, votre corps peut aller au bout du
cycle, traverser tout le tunnel et sortir au bout dans la lumière.
CONCLUSION

Vous êtes l’ingrédient secret

Alors, qu’avons-nous appris ?


Nous avons appris que nous sommes toutes faites des mêmes parties,
organisées de différentes façons – il n’y en a pas deux pareilles. Que la
réponse sexuelle est le processus qui consiste à activer l’accélérateur et
relâcher les freins. Que le contexte – votre environnement et votre état
mental – détermine comment et quand les freins ou l’accélérateur
s’enclenchent.
Nous avons appris que réponse génitale et excitation ne coïncident pas
toujours. Que le désir peut être spontané ou réactif, et que les deux sont
normaux. Que certaines femmes jouissent régulièrement pendant un rapport
avec pénétration, mais que ce n’est pas le cas pour la plupart, que les deux
situations sont normales, et qu’aucune n’est plus grave que ce que vous en
faites.
Par-dessus tout, nous avons appris que ce n’est pas la façon dont votre
sexualité fonctionne qui détermine si votre vie sexuelle est caractérisée par
l’inquiétude et la détresse… ou par la confiance en soi et la joie. C’est votre
capacité à accueillir votre sexualité telle qu’elle est à l’instant présent.
Pour y parvenir, nous avons abordé l’anatomie, la physiologie, la
psychologie comparative et comportementale, la psychologie de
l’évolution, de la santé, morale, les études de genre, les études sur les
médias, etc. J’ai utilisé des métaphores, des anecdotes, mon quart de siècle
d’expérience en tant que sexothérapeute, et un siècle ou plus de science.
La profondeur et la complexité de la sexualité des femmes exigent tout
cela, et plus encore.

Pourquoi avoir écrit ce livre ?


Comme beaucoup d’entre vous, j’ai appris toutes les mauvaises choses en
grandissant. Puis, à l’âge adulte, j’ai fait toutes les erreurs possibles. Et j’ai
passé pas mal d’années à bringuebaler avec une chance inouïe dans des
environnements où je pouvais apprendre à rectifier tout ça – des lieux
comme l’Institut Kinsey et l’un des rares programmes de doctorat qui se
consacre officiellement à la sexualité humaine.
J’ai écrit ce livre pour partager ce que j’ai appris – ce qui m’a aidée et
ce qui a aidé d’autres femmes, d’après ce que j’ai vu. Je l’ai écrit pour ma
sœur et ma mère, pour les belles-filles de ma sœur, pour ma nièce et surtout
pour mes étudiantes. Je l’ai écrit pour partager la science qui m’a appris que
ma sœur, ma mère, mes amies et moi sommes toutes normales et en bonne
santé. Je l’ai écrit pour nous donner à toutes la permission d’être différentes
les unes des autres.
Je l’ai écrit parce que j’en ai ras le bol de vivre dans un monde où l’on
ment aux femmes au sujet de leur corps, où les femmes sont des objets de
désir sexuel plutôt que des sujets de plaisir sexuel, où le sexe est utilisé
comme une arme contre les femmes et où les femmes croient que leur corps
est cassé, simplement parce qu’il n’est pas masculin. Et j’en ai ras le bol de
vivre dans un monde où on apprend aux femmes, dès leur naissance, à
traiter leur corps comme un ennemi.
J’ai écrit ce livre pour apprendre aux femmes à vivre dans la confiance
et la joie.
Si vous retenez ne serait-ce qu’une seule des idées de ce livre (pas deux
pareilles, les freins et l’accélérateur, le contexte, l’excitation non
concordante, le désir réactif, n’importe laquelle) et que vous l’utilisez pour
améliorer votre relation avec votre propre sexualité, alors vous m’aiderez à
atteindre cet objectif. Et si vous partagez l’une de ces idées avec ne serait-
ce qu’une autre femme, vous élargirez l’espace mondial dans lequel les
femmes peuvent vivre dans la confiance et la joie.
Dans un sens, c’est un objectif modeste. Je n’essaie pas de prévenir le
cancer, de résoudre la crise climatique ou de faire régner la paix au Moyen-
Orient. J’essaie simplement d’aider les femmes à vivre avec confiance et
joie dans leur corps et peut-être, juste peut-être, si suffisamment de femmes
apprennent à vivre avec confiance et joie, nous pourrons au bout du compte
vivre dans un monde où l’autonomie sexuelle de chacune est respectée. Est-
ce que je pense que vivre avec confiance et joie et respecter l’autonomie
sexuelle de chacune pourrait jouer un rôle dans la prévention du cancer, la
résolution de la crise climatique ou la consolidation de la paix dans le
monde ? Eh bien, oui. Mais ça, c’est une autre histoire.

Où trouver encore plus de réponses ?


Je ne possède pas toutes les réponses – je n’en ai même pas la moitié. La
science ne cesse de progresser et de s’étendre, si bien que l’on gagnera en
perspicacité et en clarté. Dans ce livre, j’ai présenté certaines des réponses
qui, j’en ai été témoin, aident les femmes, et j’espère l’avoir fait d’une
manière qui guérit votre sexualité, la renouvelle et l’enrichit.
Nous sommes toutes engagées dans un processus continu de culture de
nos jardins, arrachant les mauvaises herbes et entretenant les plantes qui,
nous l’espérons, s’épanouiront. C’est souvent une expérience joyeuse,
parfois douloureuse, toujours profondément personnelle. Et lorsque nous
prenons soin de notre jardin, nous regardons toutes au-delà de nous-mêmes
pour obtenir la confirmation que ce que nous vivons est bien normal. Nous
nous tournons vers notre communauté pour trouver du réconfort lorsque
nous sommes en détresse. Nous nous tournons vers les experts pour obtenir
des réponses que nous ne pouvons pas trouver par nous-mêmes. Tout le
monde le fait, du bambin qui tombe quand il apprend à marcher à la
talentueuse praticienne de la méditation qui se remet d’une agression
sexuelle. Nous prenons du recul sur notre propre expérience, nous levons
les yeux sur le monde et nous disons : « Ça m’a fait mal. Est-ce que je vais
bien ? Est-ce que je fais ça correctement ? »
(Vous faites ça correctement. Vous allez bien. Et quand vous avez eu
mal, vous guérissez.)
De la même manière que la physiologie de notre réponse au stress était
parfaitement logique à l’époque où nos facteurs de stress usuels avaient des
dents et des griffes acérées, cette approche consistant à chercher à
l’extérieur de nous-mêmes la confirmation que nous allons bien avait peut-
être plus de sens à l’époque où « à l’extérieur de nous-mêmes » signifiait
dans notre communauté locale, et auprès de personnes que nous
connaissions dans la vie réelle, plutôt que des personnes que nous ne
connaissons que via les médias grand public.
Nous vivons dans un monde regorgeant de «  Tops des 5  meilleurs
conseils  », où on découvre douze nouvelles techniques de fellation
époustouflantes chaque mois, suivies de six nouvelles positions sexy qu’il a
toujours voulu essayer. Ce monde est rempli de trucs amusants, excitants et
divertissants qui attirent et retiennent notre attention.
Mais la structure de la vérité est plus discrète, plus lente, plus
personnelle et tellement plus intéressante que le simple divertissement. Et
elle vit exclusivement en vous, dans les moments de joie tranquilles, dans
les moments d’inquiétude bouleversants, dans les moments de déchirement
où la nuée que vous êtes tente simultanément de s’éloigner d’une menace et
de voler vers un plaisir.
Alors, lorsque vous remarquez un élément inattendu en vous et que
vous voulez vous tourner vers l’extérieur pour vérifier si c’est normal, si
vous allez bien, souvenez-vous que je vous ai dit ceci : vous allez bien.
Faites de ce livre un miroir : quand vous levez les yeux, regardez-vous.
Et vous êtes belle.
Faites confiance à votre corps.
Écoutez la petite voix calme en vous qui dit : « Oui. Oui, encore » ou
«  Non. Stop.  » Écoutez surtout quand cette voix dit les deux en même
temps. Lorsque cela se produit, soyez compatissante envers vous-même.
Allez-y lentement.
Lorsque vous regarderez «  à l’extérieur  », vous trouverez de
l’inspiration et du divertissement, ainsi qu’une science et un soutien
extraordinaires. Mais vous ne trouverez pas la vérité sur votre propre bien-
être sexuel – ce que vous voulez, ce que vous appréciez, ce dont vous avez
besoin. Pour trouver ça, il faut regarder à l’intérieur de vous.
Je pense que très souvent, les gens assistent à des ateliers comme ceux
que j’anime, ou lisent un livre comme celui-ci, dans l’espoir de trouver
«  l’ingrédient secret  », le truc mystérieux et tout-puissant qui remettra de
l’ordre dans le chaos apparent de leur vie sexuelle.
Alors, quel est cet ingrédient secret ?
Eh bien… Avez-vous le film d’animation Kung Fu Panda ?
Il raconte l’histoire d’un panda appelé Po, qui devient maître de kung-fu
grâce à ses efforts acharnés, au soutien de son maître et à la sagesse du
Rouleau du Dragon, qui contient « la clé d’un pouvoir infini », autrement
dit, le fameux ingrédient secret.
Lorsque Po regarde le parchemin pour la première fois, il est déçu de
constater qu’il n’y a rien d’écrit dessus. C’est un miroir  : il reflète son
propre visage.
Et puis vient sa révélation  : «  Il n’y a pas d’ingrédient secret. Il n’y a
que moi. »
Donc. Encore une fois, pour mémoire : oui, vous êtes normale. En fait,
vous n’êtes pas seulement normale. Vous êtes admirable, belle, captivante,
délicieuse et étonnante, et tout le reste de l’alphabet, en passant par géniale.
Votre corps est beau et vos désirs sont parfaits, tels qu’ils sont.
L’ingrédient secret, c’est vous. C’est ce que dit la science.
Et maintenant, vous pouvez le prouver.
Remerciements

Merci, tout d’abord, à toutes les femmes qui m’ont parlé de leur vie
sexuelle, dont les expériences sont entrelacées dans les récits de Camilla,
Olivia, Merritt et Laurie, et tout au long du livre. J’espère que j’ai fait
honneur à vos histoires.
Je remercie les chercheurs, sexologues et les conseillers qui se sont
entretenus avec moi, qui ont lu des extraits du livre, qui m’ont dit que je
n’avais pas l’air complètement folle, qui m’ont dit que j’avais l’air
complètement folle, et/ou qui m’ont fait un petit signe de tête compatissant
quand je me suis excusée du décalage entre écrire de la science et écrire au
sujet de la science pour le grand public. Par ordre alphabétique  : Kent
Berridge, Charles Carver, Kristen Chamberlin, Meredith Chivers, Cynthia
Graham, Robin Milhausen, Caroline Pukall, et Kelly Suchinsky. Veuillez
noter que toute erreur scientifique est de ma seule responsabilité, malgré les
commentaires précis et clairs fournis par ces professionnels bienveillants.
Merci à Mme Erika Moen, qui a si bien dessiné les schémas d’appareils
génitaux.
Merci à mes bêta-lecteurs, en particulier Andrew Wilson et Sabrina
Golonka, Patrick Kinsman, Ruth Cohen, Anna Cook et Jan Morris.
Merci aux lectrices de mon blog, qui ont lu les premières ébauches du
livre, ont commenté mes articles pendant quatre ans, m’ont aidée à rester
honnête autant intellectuellement qu’émotionnellement, et m’ont fait
remettre en question ce que je pensais savoir, afin que je puisse devenir une
meilleure écrivaine.
Je remercie mes étudiantes du Smith College, qui m’ont posé des
questions auxquelles je n’avais jamais pensé («  Quelle est l’origine
évolutive de l’hymen ? ») et qui m’ont poussée à comprendre toujours plus
en détail ce que j’enseignais, afin de devenir une meilleure enseignante.
À vous tous et toutes : je vous remercie.
Enfin, vient la gratitude pour laquelle il n’y a plus de mots, mais
seulement une impression de cœur qui va bientôt exploser impossible à
expliquer. Vous connaissez cette sensation ? Celle qui pousse à avancer vers
la personne, à se mettre à genoux, et à se couvrir le visage de ses mains,
reconnaissante, humble, liée.
Je suis presque sûre que chaque personne pour qui j’éprouve ce
sentiment trouverait tout ça très, très gênant si je le faisais pour de vrai.
Alors, je me contenterai d’écrire une liste.
Voici, dans un ordre chronologique approximatif, les personnes qui
m’ont tant aidée que je n’ai pas de mots pour le décrire :
Nancy Nutt-Chase
Cynthia Graham et John Bancroft
Erick Janssen
David Lohrmann
Richard Stevens
Lindsay Edgecombe
Sarah Knight
Julie Ohotnicky
Amelia Nagoski
Stephen Crowley
Reconnaissante. Humble. Liée. Merci.
ANNEXES
ANNEXE 1

La masturbation
thérapeutique

Si vous ressentez de la frustration au sujet de l’orgasme – que vous soyez en


train d’apprendre à jouir seule, avec un partenaire ou à mieux contrôler vos
orgasmes –, je vous propose ces quelques consignes.
 
1. Repérez votre clitoris (instructions au chapitre 1).
 
2.  Créez un super bon contexte. Vous pouvez utiliser votre feuille de
travail du chapitre  3 pour vous aider sur ce point. En général, ce sera un
contexte dans lequel vous n’aurez pas peur d’être interrompue durant une
trentaine de minutes, où vous vous sentirez en sécurité et en privé et où
vous ne serez pas distraite par des préoccupations extérieures.
 
3. Touchez votre corps et remarquez ce que vous ressentez. Touchez vos
pieds, vos jambes, vos bras, vos mains, votre cou et votre cuir chevelu. Au
début, lorsque vous apprendrez à avoir un orgasme, arrêtez-vous à cette
étape. Passez vos trente minutes à faire simplement ça. Faites-le plusieurs
fois par semaine pendant deux semaines. Intégrez progressivement vos
seins, le bas de votre abdomen, l’intérieur de vos cuisses.
 
4.  Maintenant, stimulez votre clitoris indirectement. La stimulation la
plus indirecte consiste simplement à penser à votre clitoris. Offrez-lui une
attention calme et affectueuse. Essayez de basculer ou de faire pivoter vos
hanches, pour attirer votre attention sur votre pelvis. Vous pouvez ou non
remarquer certaines émotions qui émergent lorsque vous vous intéressez à
votre clitoris. C’est normal. Laissez-vous aller à ces sentiments et pratiquez
la bienveillance et la compassion envers vous-même, vos organes génitaux
et tous ces sentiments.
 
Lorsque vous vous sentez prête (et vous pouvez ne pas vous sentir prête
avant des jours, voire des semaines – ce n’est pas grave), passez à la
stimulation « distale », ce qui signifie indirecte et circulaire. Essayez l’une
de ces approches, ou toute autre méthode qui vous convient :
Pincez doucement vos lèvres entre vos pouces et index, écartez-les puis
étirez-les d’un côté vers l’autre. Ce geste exercera une pression très
indirecte sur le clitoris et fera bouger la peau qui recouvre le clitoris (le
capuchon clitoridien).
La paume de la main posée sur votre pubis, appuyez légèrement et tirez
vers le haut, vers l’abdomen. Là encore, cela exercera une légère
pression sur le clitoris et fera bouger la peau autour de celui-ci. Essayez
différentes pressions, différentes vitesses d’étirement (par exemple, un
long geste lent, ou plusieurs gestes rapides à la suite), ou dessinez un
mouvement circulaire avec la paume de votre main.
Placez vos paumes contre la face interne de vos cuisses, de sorte que les
bords extérieurs de vos pouces appuient sur vos lèvres, voire les serrent
l’une contre l’autre. Bougez vos hanches en appuyant contre vos mains.

Certaines femmes préfèrent la stimulation indirecte à la stimulation


directe. En essayant ces techniques, vous remarquerez peut-être que les
muscles de vos bras, de vos jambes, de vos fesses et/ou de votre abdomen
se contractent. C’est une étape normale du processus d’excitation du corps.
Vous aurez peut-être même l’impression que vous n’avez pas envie
d’arrêter un type de stimulation en particulier. Je vous suggère humblement
de suivre votre instinct ; ne vous arrêtez pas. Continuez aussi longtemps que
vous vous sentez bien, continuez simplement à vous concentrer sur les
sensations agréables sans essayer de les changer ou même de les
comprendre.
 
5. Essayez la stimulation directe. Pour la plupart des femmes, cela n’est
agréable que lorsque l’excitation a déjà commencé à monter ; donc une fois
que vous ressentez suffisamment de plaisir et de chaleur, tentez l’une de ces
approches :
Du bout d’un, deux ou trois doigts, touchez légèrement la tête du clitoris
dans un mouvement de va-et-vient régulier. Essayez de faire des
mouvements lents ou rapides, ou tout ce qui pourrait vous faire du bien,
et avec un léger effleurement, une légère pression, une pression plus
marquée… essayez différentes combinaisons de vitesses et de pressions.
Du bout des doigts, frottez directement sur votre clitoris en faisant des
cercles, rapides ou lents, en exerçant une pression légère ou intense, ou
n’importe quelle combinaison intermédiaire.
Là encore, en variant le nombre de doigts, les pressions et les vitesses,
tirez sur le clitoris vers le haut, en partant du capuchon clitoridien.
Avec n’importe quelle combinaison de doigts, de vitesse et de pression
que vous voulez, tirez vers le haut en partant de juste en dessous de la
tête du clitoris.

À mesure que votre niveau d’excitation augmente, remarquez et


observez ce qui arrive à votre corps. N’essayez pas de changer quoi que ce
soit. Si vous remarquez que votre cerveau se met à tourbillonner à cause
d’anxiétés ou de peurs, remarquez ces pensées aussi, sachez que vous
pouvez vous inquiéter de tout ça une autre fois, laissez partir ces pensées et
reportez votre attention sur les sensations à l’intérieur de votre corps.
 
6. Continuez de respirer. Lorsque vous éprouvez du plaisir sexuel, vos
muscles se contractent et souvent les femmes se retrouvent à retenir leur
souffle ou à respirer plus superficiellement. Vérifiez régulièrement votre
respiration, relâchez vos muscles abdominaux et laissez-vous aller à de
grandes respirations.
 
N’essayez pas de forcer quoi que ce soit à se produire, mais autorisez-
vous simplement à remarquer ce que vous ressentez et laissez votre corps
faire ce qu’il veut. Si vous avez peur de perdre le contrôle de votre corps,
laissez tranquillement partir cette peur, rassurez-vous, sachez que vous
pouvez arrêter à tout moment. Et bien sûr, si vous en faites trop, n’hésitez
pas à vous arrêter quand vous le souhaitez. Plus vous continuerez, plus le
plaisir et la tension envahiront votre corps, qui franchira un seuil intense et
finira par… exploser.
Si vous apprenez à jouir avec un partenaire, commencez par réaliser ces
étapes toute seule pendant une semaine (ou trois, si besoin), puis refaites-les
avec une photo de votre partenaire à côté de vous. Faites-le pendant une
semaine (ou trois). Ensuite, faites-le avec lui, peut-être au téléphone ou
dans la pièce d’à côté. Ensuite, avec lui dans la pièce, mais à distance, dans
le noir, les yeux bandés et dos à vous. Augmentez progressivement sa
proximité et même la lumière.
Une fois que vous atteignez l’orgasme avec votre partenaire sur le lit
avec vous, commencez à lui montrer ce qui vous fait du bien. Faites bouger
les mains de votre partenaire sur votre corps pour lui montrer ce que vous
aimez.
Et toujours, remarquez si vous êtes frustrée et rappelez-vous que vous
êtes déjà arrivée à votre état cible : le plaisir.
ANNEXE 2

L’orgasme prolongé

Prolonger et étendre ses orgasmes est une sorte de méditation. Si vous


n’avez jamais médité de manière non sexuelle, le mieux serait de
commencer par vous entraîner en dehors du contexte de la sexualité. Voici
comment faire.
Commencez par un simple exercice de respiration comme celui que je
décris dans la section sur le fait d’être spectatrice, au chapitre 8.
Inspirez par le nez pendant cinq secondes.
Puis expirez par la bouche pendant dix secondes.
Répétez huit fois, pour un total de deux minutes.
Pendant que vous respirez, votre esprit va s’égarer vers d’autres
horizons. C’est normal et sain ! Le but n’est pas d’empêcher votre esprit de
s’égarer, mais de remarquer quand ça arrive, de laisser ces pensées passer
pour le moment, et de réorienter doucement votre attention vers votre
respiration.
La respiration est bénéfique pour vous, mais la double capacité à
remarquer que votre esprit a vagabondé et à ramener votre attention sur
votre respiration est essentielle.
Faites cet exercice tous les jours, et progressivement vous vous
apercevrez que vous remarquez ce à quoi vous faites attention tout le temps.
Une fois que ce phénomène se produit spontanément, vous êtes prête à vous
consacrer à l’orgasme prolongé.
Quand vous êtes prête, créez un contexte dans lequel vous avez
beaucoup de temps seule (ou avec un partenaire en qui vous avez
confiance), sans interruption ni distraction. Vous aurez besoin d’une heure
ou deux – et si vous vous dites : « Je n’ai pas une heure ou deux pour avoir
un orgasme », je comprends parfaitement ! L’orgasme prolongé est au sexe
ce que le marathon est à la course à pied. Vous pouvez être en aussi bonne
santé que n’importe qui, et ne jamais courir de marathon. Un peu de jogging
quelques fois par semaine, c’est génial ! Mais parfois, vous avez l’occasion
de vous fixer un objectif ambitieux et d’y consacrer du temps et de
l’attention. Qu’il s’agisse d’un marathon ou de l’extase, c’est toujours un
choix que vous faites, en fonction de ce qui vous convient.
Donc. Créez un contexte. Et commencez par un exercice de respiration
pendant deux minutes, en vous exerçant à vous concentrer sur votre
respiration lorsque votre esprit vagabonde.
Ensuite, commencez une petite exploration sensorielle, en prêtant
attention à ce que votre corps ressent, en utilisant toutes les techniques de
l’approche thérapeutique de la masturbation (annexe 1).
Imaginez que votre excitation s’inscrive sur une échelle de 0 à 10, où 0
correspond à une absence d’excitation et 10 à l’orgasme. Commencez à 0 et
laissez votre excitation monter jusqu’à 5, ce qui est clairement excitée,
clairement intéressée.
Puis redescendez à 1. Laissez la tension dans vos muscles se dissiper.
Montez jusqu’à 6, puis redescendez à 2.
Bien sûr, au cours de ce processus, remarquez quand votre attention
s’égare vers des pensées extérieures, laissez ces pensées passer, et reportez
votre attention sur les sensations de votre corps. Et n’oubliez pas de
respirer.
Montez jusqu’à 7, puis redescendez à 3.
7, c’est pas mal excitée. Lorsque vous atteignez le 7, votre corps peut
rechigner à arrêter d’avancer vers l’orgasme. C’est là qu’intervient la
compétence cruciale qui consiste à retirer le pied de l’accélérateur sans pour
autant appuyer sur les freins. Il suffit de couper l’accélération, sans activer
le freinage. Laissez vos muscles se détendre, laissez l’excitation se dissiper
doucement.
Montez jusqu’à 8, redescendez à 4.
Montez jusqu’à 9, redescendez à 5.
9 est un niveau d’excitation très, très élevé, et votre corps est à ce
moment-là embarqué à bord du train vers l’orgasme. Il veut progresser
jusqu’à sa destination. Il peut donc être difficile, lors de vos premiers essais,
de détendre suffisamment les muscles de l’abdomen, des cuisses et des
fesses pour atténuer votre excitation. Si vous réussissez, vous ressentirez
peut-être une sorte de chaleur diffuse ou des picotements. Alors que les
orgasmes rapides sont généralement concentrés dans les parties génitales,
les orgasmes plus lents se propagent dans tout le corps. Laissez ce
phénomène se produire.
Remarquez quand même quand vos pensées s’égarent et reconcentrez-
vous sur les sensations dans votre corps.
Montez jusqu’à 9,5, puis redescendez jusqu’à 6.
9,5, c’est la pointe douce-amère et vertigineuse juste avant l’orgasme.
Au début, il peut être difficile de relâcher la pression exercée sur
l’accélérateur. N’hésitez pas à vous laisser aller les premières fois que vous
essayez, à ne pas relâcher – le pire qui puisse vous arriver, ce serait d’avoir
un orgasme !
Mais une fois que vous aurez compris le truc, laissez votre excitation
descendre à 6, remonter à 9,5, puis redescendre à 7.
Vous devrez faire un effort délibéré pour relâcher la tension dans votre
abdomen, vos fesses et les muscles de vos cuisses, car cette tension peut
vous faire basculer. En vous détendant, vous sentirez l’excitation se
répandre depuis vos parties génitales, et irradier dans le reste de votre corps.
Remontez à 9,5, redescendez à 8.
Remontez à 9,5, redescendez à 9. À présent, vous oscillez constamment
aux limites de l’orgasme, vous maintenant au pic de la tension sexuelle que
votre corps peut contenir. C’est ça, l’orgasme prolongé. Félicitations ! Avec
de la pratique, vous pourrez y rester aussi longtemps que vous le souhaitez,
aussi longtemps que votre corps peut le supporter, en remarquant toujours
ce à quoi vous prêtez attention et en attirant doucement votre attention vers
vos sensations corporelles. Vous êtes un peu comme une baignoire à cette
étape, où la tension vous remplit au même rythme qu’elle s’évacue. Si elle
commence à se remplir un peu plus vite qu’elle ne s’évacue, vous
franchissez le seuil et vous débordez. Si la tension commence à s’évacuer
un peu plus vite qu’elle ne vous remplit, vous vous écarterez du pic. Ici, pas
d’échec, mais seulement différentes sortes de succès, car c’est surtout un
plaisir intense.
Tout ce processus peut prendre quarante-cinq minutes ou une heure, et il
y aura des Sensations, ne vous y trompez pas. Et même si vous n’avez pas
un orgasme prolongé, vous aurez quand même beaucoup de plaisir !
Ce qui est formidable avec le plaisir extatique, c’est qu’il ne peut
coexister avec la honte, le stress, la peur, la colère, l’amertume, la rage ou
l’épuisement. Pratiquer l’extase, c’est s’entraîner à vivre en dehors de tous
ces sentiments, c’est apprendre à les libérer. C’est aussi bon pour vous que
les légumes, le jogging, le sommeil et l’oxygène.
Notes

Note de la traductrice et des éditrices :


Pour une simplification de la lecture de ces notes, les titres des articles,
rapports ou études ont été traduits en français. Néanmoins, ces travaux ne
sont pas disponibles en langue française, sauf exception stipulée.
Les titres des revues ou magazines restent en version originale, de
même que les titres des ouvrages publiés, sauf s’ils ont bénéficié d’une
traduction en français par une maison d’édition (indiquée, le cas échéant).
Toutes les notes sont des notes de l’auteur, sauf mention contraire.

Première partie : Les bases (pas si basiques)


Chapitre 1 : Anatomie
1. Wallen et Lloyd, «  Excitation sexuelle féminine  ». Voir également
Emhardt, Siegel et Hoffman, «  Variation anatomique et orgasme  », et
Mazloomdoost et Pauls, « Revue complète du clitoris ». C’est un domaine
de recherche fascinant et essentiel, mais j’en parle rarement dans mes cours,
car nombre de ces études (pas toutes), y compris la deuxième que j’ai citée,
tombent dans le piège de la conversion d’un récit mythique du
fonctionnement sexuel –  par exemple, l’orgasme provenant de la
stimulation vaginale est un «  succès orgasmique  » – en descriptions
réductionnistes de la taille, de la forme et de la position anatomiques. En
effet, en 2014, un rédacteur en chef a publié un commentaire  : «  alors,
qu’est-ce qui est “mieux” ? Une plus grande distance ou une plus petite ? »,
ce qui est exactement le genre de question que j’essaie d’aider les gens à ne
pas se poser. Bien loin d’aider les femmes à vivre dans la confiance et la
joie, une telle analyse mal orientée ne sert qu’à faire craindre aux gens que
leurs organes génitaux ont un truc qui cloche. Ils ont déjà assez entendu de
jugements sur leurs organes génitaux. Mon objectif en relatant cette
conversation ici, au début du livre, est de me montrer en train de faire
l’erreur de m’intéresser trop à la science et pas assez à la personne en face
de moi. Le thème de ce chapitre et de l’ensemble du livre est «  Nous
sommes toutes faites des mêmes parties, organisées de manière différente ».
Aucune de ces organisations n’est meilleure ou pire : elles sont simplement
différentes. Mais si même la science tente parfois de définir certaines
formes génitales comme étant « meilleures » que d’autres, alors on ne peut
qu’être pardonnée d’échouer à ne pas juger et critiquer nos propres organes
génitaux.
2. Aristote, Chef d’œuvre.
3. Drysdale, Russell et Glover, « Labiaplastie ».
4. Moran et Lee, « Qu’est-ce qui est normal ? ».
5. La réalité de l’hymen commence enfin à être discutée au sein du grand
public grâce à des documentaires tels que Comment perdre sa virginité et la
couverture médiatique associée (Feeney, «  Mythes persistants sur la
virginité  »), et à un passage dans la série télévisée américaine éducative
Adam Ruins Everything (Adam Gâche Tout).
6. Hegazy et Al-Rukban, « Hymen : faits et concepts ».
7. C’était à Talbot House au cours du semestre d’automne 2012. Salut,
Talbot !
8. Wickman, « Plasticité de la glande de Skene ».
9. Le terme « intersexué » ne plaît pas à tout le monde. Certaines personnes
préfèrent «  organes génitaux ambigus  » et d’autres «  troubles du
développement sexuel  » ou «  DSD  » en anglais (Dreger, «  Pourquoi
“troubles du développement sexuel”  ?  »). J’utilise ici le terme
« intersexué » parce qu’il me semble le plus approprié dans ce contexte non
médical.
10. Fausto-Sterling, Corps en tous genres : la dualité des sexes à l’épreuve
de la science, 2000.
11. Aussi évidente que cette idée puisse paraître, compte tenu du principe
«  toutes les mêmes parties  », il s’agit en fait d’une idée radicale que les
militants intersexes défendent avec acharnement depuis plusieurs
décennies. C’est la seule position qui ait un sens biologique, et encore une
fois, ce n’est que d’un point de vue culturel que l’on pourrait penser
autrement. Et pourtant, dans de trop nombreux endroits, la pratique
médicale standard consiste à pratiquer des interventions chirurgicales pour
«  normaliser  » les organes génitaux (Association Intersex, «  Déclaration
publique »). Notez qu’en 2013, le rapporteur spécial des Nations unies sur
la torture a inclus ces opérations chirurgicales dans son rapport «  sur la
torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ». Le
rapport condamne les opérations de «  normalisation  » médicalement
inutiles, car «  elles peuvent laisser des cicatrices, provoquer une perte de
sensation sexuelle, des douleurs, une incontinence et une dépression durable
et ont également été critiquées comme étant sans bases scientifiques,
potentiellement préjudiciables et contribuant à la stigmatisation » (Conseil
des droits de l’homme des Nations unies, Rapport du rapporteur spécial,
18).
12. McDowell et al., « Données anthropométriques de référence. »
13. Elle a raison, selon la Société internationale pour l’étude des maladies
vulvovaginales. Vieira-Baptista et autres, « Recommandations de la Société
internationale pour l’étude des maladies vulvovaginales ».
14. C’est à Operation Beautiful qu’on doit cette superbe expression,
www.operationbeautiful.com

Chapitre 2 : Le modèle à double contrôle


1. Masters et Johnson, Réponse sexuelle humaine.
2. Kaplan, « Désir sexuel hypoactif ».
3. Janssen et Bancroft, « Modèle à double contrôle », 197.
4. Goldstein et al., « Désir sexuel hypoactif », 117.
5. Velten et al., « Stabilité temporelle de l’excitation sexuelle ».
6. Velten et al., «  Excitation sexuelle et inhibition sexuelle  », et
Rettenberger, Verena Klein, et Briken, « Relations entre les comportements
hypersexuels  ». Voir également Granados, Carvalho et Sierra, «  Comment
le modèle à double contrôle prédit la réponse sexuelle féminine ».
7. En revanche, un accélérateur pas très sensible, indépendamment des
freins, est un indicateur d’asexualité : les personnes concernées ne désirent
pas de contact sexuel (pas des « morceaux de marbre » – des personnes qui
veulent seulement toucher leur partenaire, mais ne veulent pas être touchées
elles-mêmes). Dans les rares études sur les personnes qui s’identifient
comme asexuées, il ressort qu’elles ont nettement moins d’accélérateur que
leurs homologues sexuelles (Prause et Graham, «  Asexualité  »). Il n’y a
cependant aucune différence au niveau de leurs freins. Ainsi, une partie de
la cause de l’asexualité en tant qu’orientation sexuelle est peut-être que le
cerveau de ces femmes n’est pas enclin à remarquer des stimuli
sexuellement pertinents. Bien sûr, ce n’est qu’une partie de l’histoire,
puisque les asexués ne représentent qu’environ 1  % de la population
générale et qu’environ 5 à 10 % des femmes ont un score ES faible. Encore
une fois, il n’y a rien de cassé ou de mal là-dedans. Les mécanismes de
réponse sexuelle des personnes asexuées sont constitués des mêmes
éléments que ceux des personnes sexuelles ; ils sont juste organisés d’une
manière différente.
8. Carpenter et al., « Women’s Scores » ; Carpenter et al., « Dual Control
Model ».
9. Adapté de Milhausen et al., «  Validation de l’inventaire de
l’excitation/inhibition sexuelle  » et Janssen et al., «  Échelles
d’inhibition/excitation sexuelle – Formulaire abrégé ».
10. Carpenter et al., « Modèle à double contrôle ».
11. Influence de l’état mental sur l’intérêt sexuel :

Pas de changement
Augmentation (%) Diminution (%)
(%)
Hommes 10 55 35
Dépression
Femmes 9,5 40 50,5
Hommes 25 58 18
Anxiété
Femmes 23 43 34

D’après Lykins, Janssen et Graham, «  La relation entre humeur négative et sexualité  ». Voir
également Janssen, Macapagal et Mustanski, « Effets de l’humeur sur la sexualité ».

12. Pfaus, « Neurobiologie du comportement sexuel ».


13. Pfaus, Kippin, et Coria-Avila, « Modèles animaliers ».
14. Pfaus et Wilkins, « Environnement inédit ».
15. Velten et al., « Stabilité temporelle de l’excitation sexuelle ».

Chapitre 3 : Le contexte
1. 4 % chez Carpenter et al., « Modèle à double contrôle », et 8 % dans mon
expérience beaucoup moins scientifique sur mon blog et dans mes cours.
2. McCall et Meston, « Signaux provoquant le désir » et « Différences entre
les femmes pré- et postménopausées ».
3. Graham et al., « Exciter et inhiber ».
4. Gottman, The Science of Trust, 254 (non traduit).
5. Bergner, Que veulent les femmes ? (Hugo Doc).
6. Graham, Sanders, et Milhausen, «  Inventaire de l’excitation/inhibition
sexuelle. »
7. BBC News, « Les mots peuvent changer ce que nous sentons ».
8. Aubrey, « Avoir un peu le cafard ».
9. Ariely, C’est (vraiment  ?) moi qui décide  : les raisons cachées de nos
choix (La clé des champs).
10. Nakamura et Csikszentmihalyi, « Flow : théorie et recherches », 195–
206.
11. Flaten, Simonsen, et Olsen, « Informations liées aux drogues ». Je lève
mon chapeau à Goldacre pour son intervention à « Nerdstock ».
12. Reynolds et Berridge, « Environnements émotionnels ».
13. Gottman, Science of Trust, 192 (ibid).
14. De plus en plus d’éléments indiquent que, de diverses manières, tant
chez les rats que chez les humains, le contexte modifie la façon dont le
mésencéphale réagit aux stimuli. Des études d’imagerie cérébrale humaine
ont montré que l’incertitude et le risque peuvent influencer la réponse du
NAcc (Abler et al., « Erreur de prédiction ») et que le NAcc des personnes
souffrant de douleurs dorsales chroniques réagit différemment à une
«  stimulation thermique nocive  » (c’est-à-dire une brûlure) que celui des
personnes qui ne vivent pas avec la douleur (Baliki et al., «  Valeur
prédictive de la douleur »). L’étude du fonctionnement du cerveau chez les
personnes souffrant de douleurs dorsales chroniques est particulièrement
intéressante : lorsqu’ils ont porté leur attention sur la sensation de brûlure
sur la peau de leur dos, ils ont indiqué que la chaleur leur faisait mal  ;
lorsqu’ils ont porté leur attention sur la douleur dans les muscles de leur
dos, ils ont indiqué que la chaleur leur faisait du bien. Le contexte englobe
aussi ce sur quoi nous portons notre attention.
15. Berridge et Kringelbach, « Neuroscience de l’affect », 295.
16. Jaak Panksepp et Lucy Bevin (Archaeology of Mind) incluent dans leur
taxonomie du cerveau limbique  : la recherche, la rage, la peur, la luxure,
l’attention, la panique/le deuil et le jeu. Frederick Toates inclut, outre le
stress et le sexe, le comportement social, l’agressivité et l’exploration
(Biological Psychology). Paul Ekman, à partir de recherches sur les
expressions faciales universelles, théorise les catégories émotionnelles
élémentaires que sont la colère, le dégoût, la peur, le bonheur, la tristesse et
la surprise (Emotions Revealed). Le fait qu’il n’existe pas encore de
système universellement reconnu pour comprendre l’organisation de nos
émotions les plus fondamentales est éloquent. Il n’existe pas non plus de
définition universellement acceptée de ce qu’est une émotion ou une
motivation ni de consensus permettant de statuer sur la similitude ou la
différence entre ces deux notions, bien que mes références révèlent mes
préférences (Berridge and Winkielman, «  Qu’est-ce qu’une émotion
inconsciente ? » et Panksepp, « Qu’est-ce qu’un sentiment émotionnel ? »).
17. Berridge, «  Mécanismes de maîtrise de soi  ». Le psychologue de
Harvard Daniel Gilbert a décrit Berridge comme «  l’un des meilleurs
neuroscientifiques du monde  » (Berridge et al., Neuroscience of
Happiness), mais je le différencierais ainsi des autres neuroscientifiques : en
tant qu’auteur de l’étude sur les rats et Iggy Pop et créateur de la métaphore
de l’Anneau Unique, il est le seul et unique auteur de recherches sur le
cerveau des rats qui m’a déjà fait éclater de rire.
18. Les auteurs utilisent des guillemets (la «  motivation  » et
«  l’appréciation  » de Berridge) et des majuscules (le système de
recherche, etc. de Panksepp et Bevin, dans leur Archaeology of Mind) afin
de renforcer la distinction entre l’appréciation, la motivation et
l’apprentissage conscients et l’appréciation, la motivation et
l’apprentissage mésolimbiques. Pour faire cette distinction dans ce livre,
j’utilise tout au long une métaphore simplifiée  : lorsque je parle de
l’expérience d’une personne en matière de motivation, d’apprentissage et de
plaisir ou de souffrance (ce que les gens utilisent pour décrire ce qu’ils
veulent, savent ou ressentent), je dis « tu veux/tu sais/tu ressens ». Lorsque
je parle de la motivation affective, de l’apprentissage et des sentiments
(vouloir/désirer, apprécier, apprendre), je dis «  votre cerveau veut
(désire)/connaît/ressent ».
19. Childress et al., « Prélude à la Passion ».

Deuxième partie : Le sexe en contexte


Chapitre 4 : Le contexte émotionnel
1. Porges, « Influences réciproques entre le corps et le cerveau ».
2. Levine, In an Unspoken Voice, 55–56.
3. Lykins, Janssen, et Graham, «  Relations entre humeur négative et
sexualité » ; ter Kuile, Vigeveno et Laan, « Stress psychologique quotidien
aigu et chronique » ; Laumann et al., « Problèmes sexuels chez les femmes
et les hommes ».
4. Hamilton et Meston, « Stress chronique et fonction sexuelle ».
5. Levine, In an Unspoken Voice, 8.
6. Forcément, c’est plus compliqué que ça. Il existe un frein qui, dans un
système nerveux sain, est relié à l’accélérateur autonome, de sorte que
lorsque la vie appuie sur la pédale de l’accélérateur, le frein se désengage, et
lorsque la vie relâche l’accélérateur, le frein se réengage – le « nerf vague
néomammifère  », ou «  frein vagal  » comme le décrit Stephen Porges. Il
contraste avec le nerf vague reptilien, qui ralentit le cœur et constitue le
frein de « l’inhibition/paralysie » (Porges, Polyvagal Theory, 92–93).
7. On le voit à maintes reprises, tant dans la réalité que dans la fiction,
comme le «  J’ai juste envie de courir  » de Forrest Gump et, de façon
mémorable, dans Performing Flea de P.  G. Wodehouse (non traduit en
français) : « Le chiot a été écrasé par une moto l’autre jour et en est ressorti
parfaitement indemne, si ce n’est un peu ému. Nous avons dû le poursuivre
à travers la moitié de Londres avant qu’il ne se calme. Il s’est mis à courir
et a continué à courir jusqu’à ce qu’il se sente mieux. » (NDLT : traduction
libre).
8. Si vous avez connaissance d’études sur ce sujet, envoyez-moi un
courriel ! enagoski@gmail.com
9. Presque tout le monde en a (Radomsky et al., « 1re partie, Vous pouvez
courir, mais vous ne pouvez pas vous cacher », et Berry et Laskey, « Revue
des pensées intrusives obsessionnelles »). Un quart des personnes souffrant
de TOC ont fait état de pensées intrusives à caractère sexuel (Grant et al.,
« Obsessions sexuelles et corrélats cliniques »), y compris chez les enfants
et les jeunes souffrant de TOC (Fernández de la Cruz et al., « Obsessions
sexuelles chez les enfants  »). La réticence des gens à révéler de telles
intrusions sexuelles est hélas fondée sur une véritable stigmatisation et un
rejet social en réaction à une telle révélation (Cathey et Wetterneck,
« Stigmatisation et révélation de pensées intrusives »).
10. L’Organisation mondiale de la santé indique que, dans le monde, « 35 %
des femmes indiquent avoir été exposées à des violences physiques de la
part de leur partenaire intime ou de quelqu’un d’autre au cours de leur vie »
(fiche «  Violence à l’encontre des femmes  »). Les services nationaux de
référence en matière de justice pénale aux États-Unis indiquent qu’environ
18 % des femmes américaines seront violées au cours de leur vie ; environ
25 % violées, agressées ou physiquement maltraitées par leur partenaire au
cours de leur vie, contre 8  % des hommes (ministère américain de la
Justice, rapport complet).
11. Département américain de l’éducation, Bureau des droits civils, Boston,
« Article IX et agressions sexuelles : Exploration de nouveaux paradigmes
pour la prévention et l’intervention », 24-25 mars 2011.
12. Lisak et Miller, « Viols à répétition et récidives ».
13. Pour une version clinique de cette catégorisation, voir Gaffney,
« Traitements éprouvés et en développement du SSPT ».
14. Thérapie sensorimotrice  : Ogden, Minton, et Pain, Trauma and the
Body. Expérience somatique : Levine, Réveiller le tigre and In an Unspoken
Voice.
15. Siew et Khong, « Pleine conscience ».
16. Mitchell et Trask, chanson « Origin of Love ».
17. Hitchens, Hitch-22.
18. Acevedo et al., « Corrélats neuronaux ».
19. Traduction de Mme  Lesbazeilles Souvestre, Librairie Hachette, 1890,
NdT.
20. Glass et Blum, « 317 : Unconditional Love ».
21. Pour une étude complète du lien entre le sexe et l’attachement, voir
Dewitte, «  Différentes perspectives sur le lien entre le sexe et
l’attachement  », et Dunkley et al., «  Le fonctionnement sexuel chez les
jeunes femmes et les jeunes hommes ».
22. Johnson, Serre-moi fort.
23. Kinsale, Des fleurs dans la tourmente.
24. Johnson, Love Sense, 121.
25. Feeney et Noller, « Le style d’attachement » ; Bifulco et al., « Le style
d’attachement chez l’adulte ».
26. Éléments tirés, avec l’autorisation des auteurs, du questionnaire
«  Expériences dans les relations intimes  » (Fraley, Waller et Brennan,
« Mesures d’auto-évaluation de l’attachement des adultes »).
27. Warber et Emmers-Sommer, «  Relations entre le sexe, le genre et
l’attachement  », et Dunkley et al., «  Le fonctionnement sexuel chez les
jeunes femmes et les jeunes hommes ».
28. Stefanou et McCabe, «  Attachement à l’adulte et fonctionnement
sexuel  »  ; voir aussi Birnbaum et al., «  Quand le sexe est plus que du
sexe  », Cooper et al., «  Styles d’attachement, motivations sexuelles et
comportement sexuel », et La Guardia et al., « Variation intrapersonnelle de
la sécurité de l’attachement ».
29. Davila, Burge, et Hammen, « Pourquoi le style d’attachement change-t-
il ? ».
30. Taylor et Master, « Réactions sociales au stress ».
31. David et Lyons-Ruth, « Réactions d’attachement différentielles ».
32. Rûmî, poèmes (traduction libre).
33. Ibid.

Chapitre 5 : Le contexte culturel


1. van de Velde, Ideal Marriage, 145.
2. Hite, Le rapport Hite.
3. Britton et al., « Se trouver grosse ».
4. Est-ce que ça pourrait commencer à changer  ? Dans une étude, des
étudiantes (blanches pour la plupart) ont déclaré qu’elles aimeraient
davantage une femme si elle parlait positivement de son corps que si elle le
critiquait – même si elles ont également déclaré qu’elles s’attendaient à ce
que les autres femmes préfèrent une femme qui s’autocritique (Tompkins et
al., « Capacité sociale à être aimée »).
5. Woertman et van den Brink, « Image corporelle ».
6. Pazmany et al., « Image corporelle et image génitale de soi ».
7. Kilimnik et Meston, « Rôle de l’estime de soi physique ».
8. Longe et al., «  Se parler à soi-même  : corrélats neuronaux entre
autocritique et auto-réassurance ».
9. Powers, Zuroff, et Topciu, «  Expressions secrètes et directes de
l’autocritique ».
10. Gruen et al., « Vulnérabilité au stress ».
11. Dickerson et Kemeny, «  Facteurs de stress aigus et réaction au
cortisol ».
12. Besser, Flett, et Davis, « L’autocritique, la dépendance » ; Cantazaro et
Wei, «  Attachement adulte, Dépendance  »  ; Reichl, Schneider, et Spinath,
« Relation entre la fréquence du monologue intérieur et la solitude ».
13. Hayes et Tantleff-Dunn, «  Suis-je trop grosse pour être une
princesse ? ».
14. Lors d’une conférence sur les troubles alimentaires en 2009, j’ai assisté
à une conférence sur les origines culturelles de l’« idéal minceur » (Gans,
« What’s It All About ? »), et voilà ce que j’ai appris : c’est une question de
statut social – le statut social des hommes. L’«  idéal minceur  » dans la
culture occidentale trouve son origine dans l’idée que la femme est un
symbole de propriété et de statut. Au XVIIe  siècle, une femme plus
moelleuse, plus ronde et plus dodue était l’idéal, car seules les femmes
riches pouvaient se permettre de manger des aliments à base de beurre ou
de farine et s’offrir le mode de vie sédentaire indispensable pour développer
les courbes généreuses des femmes dans les tableaux de Rubens. Vers le
milieu du XIXe  siècle, en même temps que la révolution industrielle et la
montée de la classe moyenne, il est devenu à la mode pour un homme
d’annoncer sa richesse en épousant une femme trop faible pour travailler.
C’était un symbole de statut d’avoir une femme petite, mince et faible, à
peine capable de se dandiner avec délicatesse dans la maison, qui non
seulement ne contribuait pas, mais ne pouvait en aucun cas contribuer au
revenu du ménage. C’est en contradiction avec tout ce que l’évolution
aurait voulu qu’une femme soit  : robuste, en bonne santé, forte, grande,
capable de concevoir, de porter pendant neuf mois, de mettre au monde et
d’allaiter des enfants nombreux en bonne santé. Au XXIe siècle, la forme du
corps est encore un marqueur du statut social : les femmes riches peuvent se
permettre de manger de la vraie nourriture (plutôt que de la merde
ultratransformée) et ont le temps de faire de l’exercice. Mais ces modes
autour de la silhouette que «  devrait  » avoir le corps d’une femme sont
toujours une question de classe sociale. Elles n’ont rien à voir avec la
fertilité (au contraire), rien à voir avec une «  préférence de l’évolution  »,
sauf dans la mesure où nous avons une évolution qui préfère un statut social
plus élevé, et rien à voir avec la promotion de la santé des femmes. Pouvez-
vous donc vous fier à ce que votre culture dit de l’idéal de votre corps ?
15. Bacon, manifeste du mouvement HAES (Health At Every Size – La
santé à toutes les tailles).
16. Le site Web de Haidt, moralfoundations.org, décrit ces fondements plus
en détail. Mais pour une critique importante, voir l’article de Suhler et
Churchland «  Les “fondements” innés et modulaires peuvent-ils expliquer
la moralité ? ».
17. Voir, pour commencer, Yeshe, Introduction to Tantra.
18. Ce n’est cependant pas pareil. Il existe différentes catégories de stimuli,
telles que les «  violations des limites du corps  », qui concernent les
dommages causés à l’enveloppe corporelle et qui sont souvent liés au sang
et à la douleur physique, et le «  dégoût profond  », lié à la digestion. Ces
deux types de dégoût produisent des réactions distinctes (Shenhav and
Mendes, « Viser l’estomac »).
19. Mesquita, « Expression des émotions : Un processus contextualisé ».
20. Borg et de Jong, « Les sentiments de dégoût ».
21. Tybur, Lieberman, et Griskevicius, «  Microbes, accouplement et
moralité ».
22. Graham, Sanders, et Milhausen, «  Inventaire excitations/inhibitions
sexuelles ».
23. de Jong et al., «  Dégoût et sensibilité à la contamination  »  ; Borg, de
Jong, et Schultz, «  Vaginisme et Dyspareunie  » pour une revue complète,
voir de Jong, Overveld, et Borg, « Céder à l’excitation ».
24. Neff, « Autocompassion, estime de soi et bien-être ».
25. Inspiré de www.self-compassion.org/self_compassion_exercise.pdf
26. Stice, Rohde, et Shaw, Body Project, 95.
27. Germer, L’Autocompassion.
28. Hawkins et al., « L’image de l’idéal minceur des médias ».
29. Becker et al., « Comportements et attitudes alimentaires ».
30. Becker, Body, Self, and Society, 56.
31. Dans Becker et al., «  Validité et fiabilité  », 35  % des participants ont
déclaré s’être purgés au cours des vingt-huit derniers jours, en utilisant un
purgatif traditionnel à base de plantes, mais Thomas et al., dans « Analyse
de profil latent  », précisent que seules 74  % des personnes utilisant le
purgatif traditionnel ont déclaré le faire spécifiquement pour perdre du
poids, par opposition à des raisons médicales, par exemple.
32. La force des pressions simultanées du modèle moral et du modèle
médiatique en particulier est observable dans la perpétuation de la
construction « Madone-Putain » de la sexualité féminine. Pour comprendre
comment cette construction est mise en œuvre dans la sexualité des jeunes
femmes, je recommande Dilemmas of Desire de Tolman.
Troisième partie : Le sexe en action
Chapitre 6 : L’excitation
1. Suschinsky, Lalumière, et Chivers, «  Schémas d’excitation sexuelle
génitale » ; Both, Everaerd, et Laan, « Impact de l’anxiété sur l’excitation
sexuelle ».
2. Peterson, Janssen, et Laan, « Réponses sexuelles des femmes à l’érotisme
hétérosexuel et lesbien  ». Pourquoi les hommes et les femmes sont-ils
différents  ? La meilleure hypothèse disponible, bien qu’elle ne soit pas
encore prouvée, est l’«  hypothèse de la préparation », qui suggère que les
organes génitaux féminins répondent à plus ou moins n’importe quel
stimulus lié au sexe afin de se préparer à l’activité sexuelle, ce qui évite les
blessures, tandis que l’érection pénienne est plus efficace en réponse à des
stimuli plus spécifiques (Lalumière et al., « Hypothèse de la préparation »).
3. Si vous faites la même expérience, mais que vous utilisez une
thermistance (un petit clip qui s’attache aux petites lèvres et détecte la
température comme indicateur du flux sanguin) au lieu du
photopléthysmographe, vous obtiendrez un chevauchement légèrement plus
important (Henson, Rubin, et Henson, «  Cohérence des mesures
objectives »). Si vous utilisez l’imagerie par résonance magnétique (IRM)
pour obtenir des mesures très précises des modifications du flux sanguin
vers le bassin, vous obtiendrez un chevauchement légèrement inférieur
(Hall, Binik et Di  Tomasso, «  Concordance entre les mesures
physiologiques et subjectives »). Si vous utilisez une technologie de pointe
et mesurez non seulement le flux sanguin vaginal et l’excitation subjective,
mais aussi l’activité cérébrale à l’aide de l’imagerie par résonance
magnétique fonctionnelle (IRMf), vous constaterez que la réponse génitale
ne chevauche pas l’activité cérébrale des femmes (Arnow et al., «  Les
femmes souffrant de troubles du désir sexuel hypoactif »).
4. Bergner, « Les femmes qui veulent vouloir » ; Bergner, Que veulent les
femmes  ? Ryan et Jethá, Sex at Dawn, 272–273, 278  ; Magnanti, The Sex
Myth, 14.
5. Angier, « Conversations / Ellen T. M. Laan ».
6. Both, Everaerd, et Laan, «  Modulation des réflexes spinaux  »  ; Laan,
Everaerd, et Evers, « Évaluation de l’excitation sexuelle féminine ».
7. Suschinsky, Lalumière et Chivers, «  Schémas d’excitation sexuelle
génitale l ». Un grand merci à Kelly Suchinsky et Meredith Chivers qui se
sont littéralement assises près de moi et m’ont permis de voir les clips.
8. Velten, Chivers, et Brotto, « Les tests répétés ».
9. Velten et al., « Enquête sur la concordance sexuelle féminine ».
10. Suschinsky, Dawson, et Chivers, « Évaluation de la relation ».
11. Il est de plus en plus évident que les femmes classées comme ayant un
degré quelconque de «  gynophilie  » – soit celles qui s’identifient comme
étant autre chose qu’hétérosexuelles  – présentent une plus grande
concordance que les femmes hétérosexuelles (ibid.).
12. Un numéro spécial de la revue Biological Psychology a été consacré à la
recherche sur la concordance, et aucune de ces études n’était menée dans le
domaine de la sexualité (Hollenstein et Lanteigne, « Modèles et méthodes
de concordance émotionnelle »).
13. Benedek et Kaernbach, « Corrélats physiologiques »
14. Kring et Gordon, « Différences d’émotion entre les sexes » ; Schwartz,
Brown, et Ahern, « Structuration des muscles du visage ».
15. Gottman et Silver, What Makes Love Last ?
16. Hess, « Les femmes veulent du sexe ».
17. James, Cinquante nuances de Grey.
18. Ibid.
19. Ibid.
20. Koehler, « De la bouche des violeurs ».
21. Toulalan, Imagining Sex.
22. Moore, «  Représentant Todd Akin  ». Todd Akin s’est d’abord excusé
pour cette déclaration, mais en 2014, il a écrit qu’il regrettait ces excuses
parce que le stress – que le viol provoque certainement – interfère avec la
fertilité et c’est ce qu’il voulait dire par «  arrêter la machine  »
(Eichelberger, « Todd Akin n’est pas désolé pour ses commentaires insensés
sur le viol  »). Pour être clair, donc  : son opinion en tant qu’ancien (et
potentiellement futur) législateur est que si une femme ne fait pas de fausse
couche, elle ne peut pas avoir été « légitimement » violée.
23. Ce phénomène a été reproduit au cours des deux dernières décennies,
mais la première preuve en a été apportée par Morokoff et Heiman, « Effets
des stimuli érotiques sur les femmes sexuellement fonctionnelles et
dysfonctionnelles  ». Le phénomène a ensuite été étudié plus en détail par
Velten et Brotto, « Intéroception et réponse sexuelle ». Pour un complément
essentiel, voir Meston et Stanton, «  Diachronie entre Excitation Sexuelle
Subjective  ». En outre, dans une population non médicale, la détresse
sexuelle prédisait une plus grande concordance (Suschinsky et al., «  La
relation entre le fonctionnement sexuel et la concordance sexuelle »).
24. Bobby Henderson, fondateur de l’Église du pastafarisme, «  Lettre
ouverte au conseil d’administration scolaire du Kansas  »
www.venganza.org/about/open-letter/.
25. Bloemers et al., «  Déclenchement de l’excitation sexuelle chez les
femmes ».
26. Velten et al., « Enquête sur la concordance sexuelle féminine ».
27. Jozkowski et al., « Perceptions des femmes concernant l’utilisation de
lubrifiants ».

Chapitre 7 : Le désir
1. Quelle proportion de la population a tel ou tel style de désir  ? Il est
possible qu’une minorité de personnes – par exemple, environ 6  % des
femmes, dans une étude (Hendrickx, Gijs et Enzlin, «  Taux de prévalence
des difficultés sexuelles  ») – n’aient pas de désir spontané ou réactif. Au-
delà de ce chiffre, je n’ai pas encore trouvé de statistiques utiles sur le style
de désir selon les personnes. Ce serait une information utile, car les gens
trouvent rassurant d’entendre « X % des gens ont un désir réactif », mais,
malgré de nombreuses études, menées sur de nombreuses populations
différentes, utilisant toute une variété de méthodologies, sur plusieurs
décennies, la science n’a pas de réponse (Garde et Lunde, « Comportement
sexuel féminin  »  ; Michael et al., Sex in America  ; Beck, Bozman et
Qualtrough, «  L’expérience du désir sexuel  »  ; Bancroft, Loftus et Long,
«  Détresse quant au sexe  »  ; Cain et al., «  Fonctionnement et pratiques
sexuelles » ; Carvalheira, Brotto et Leal, « Motivations des femmes pour le
sexe  »  ; Štulhofer, Carvalheira et Træen, «  Aperçu d’une étude sur deux
pays  »). Sur la base des données disponibles, je ne peux que supposer
qu’environ un tiers des femmes éprouvent un désir principalement ou
exclusivement réactif.
Deux nouveaux axes de recherche dont j’ai entendu parler pourraient
déboucher sur une mesure formelle du désir réactif. Le premier (Velten
et al., « Développement et validation ») est, malheureusement, une révision
d’une échelle mise au point pour étudier les changements dans les
« tactiques » d’accouplement des femmes tout au long du cycle menstruel
(Gangestead, Thornhill et Garver, « Changements dans les intérêts sexuels
des femmes  »), un essai qui a été rejeté en primatologie, en faveur d’un
modèle basé sur la proceptivité, la réceptivité et l’attraction sexuelles
(Dixson, Sexual Selection, chapitre  6). Fondée sur une compréhension
erronée du fonctionnement sexuel féminin humain, cette ligne de recherche
semble donc peu susceptible d’aboutir à une compréhension claire.
Le deuxième axe de recherche (Mark et Lasslo, «  Conserver le désir
sexuel  ») est plus orienté vers l’aspect clinique et propose non pas des
statistiques sur les expériences des personnes qui ont tel ou tel style de
désir, mais plutôt un cadre permettant de comprendre les prédicteurs d’un
désir sexuel satisfaisant dans les relations à long terme. Cela constitue la
base d’une réflexion en cours sur les approches des couples pour faire face
aux différences de désir (Vowels et Mark, «  Stratégies pour atténuer le
décalage »).
Mais quelles que soient les lacunes des recherches évaluant le désir réactif,
plus je lis d’études et plus je parle aux gens du désir, plus je pense que le
concept de base du désir devrait être, sinon totalement écarté, du moins
certainement mis de côté en tant que facteur marginal dans la
compréhension et le développement de la confiance et de la joie sexuelles
chez les individus, et dans les relations. Mes objectifs sont de normaliser la
variété des expériences du désir sexuel et d’accroître la motivation des
lectrices à donner la priorité au plaisir, plutôt qu’au désir en tant que tel.
Ces objectifs semblent mieux correspondre à une approche européenne que
nord-américaine du désir sexuel. La déclaration de position de la Société
européenne de médecine sexuelle (ESSM) sur la disparité des désirs sexuels
suggère, entre autres, de normaliser et de dépathologiser la variation du
désir sexuel, de remettre en question le mythe du désir sexuel spontané et
de traiter les problèmes relationnels et les besoins relationnels non satisfaits
(Dewitte et al., « Disparités dans le désir sexuel »).
En résumé  : Quelle proportion de personnes possède quel style de désir  ?
Qui ça intéresse  ? C’est comme demander quelle proportion de femmes a
des petites lèvres qui dépassent les grandes lèvres : ça n’est prédicteur pour
aucun domaine de satisfaction sexuelle, ça montre seulement qui
correspond à l’idéal culturellement construit.
2. Dans cette étude, vous trouverez cette idée décrite comme « l’excitation
d’abord, le désir ensuite », et la première édition de mon livre a utilisé ce
vocabulaire. Mais de nombreux journalistes ont été troublés et déroutés par
l’expression «  l’excitation d’abord, le désir ensuite  », car ces mots se
rapprochent dangereusement du mythe du viol, qui existe depuis longtemps,
selon lequel si vous commencez à avoir des relations sexuelles avec une
femme, elle ne pourra pas s’empêcher de prendre du plaisir, et du conseil
selon lequel les femmes devraient « simplement se lancer », en partant de
l’hypothèse (erronée) que ça ne sera pas « juste » avoir une relation sexuelle
qu’elle ne veut pas ou n’aime pas. Une lectrice m’a dit que son mari avait
compris le passage « l’excitation d’abord » comme une invitation à glisser
ses mains dans sa culotte à l’improviste, et quand elle a dit « Non, je ne suis
pas excitée », il a répondu « Mais tu le seras ». Ce qui est à l’opposé de ce
que j’essaie d’enseigner.
En raison de ces malentendus, dans les mois qui ont suivi la publication de
la première édition de ce livre, j’ai changé ma façon d’enseigner, passant de
«  l’excitation d’abord, le désir ensuite  » à «  le plaisir d’abord, le désir
ensuite ». Des cliniciens motivés par la recherche m’ont demandé pourquoi
j’utilisais une expression alternative, alors voilà. En fait, c’est plus précis et
c’est moins facile de l’interpréter au travers du prisme de la culture du viol.
3. Bien entendu, cela varie également d’un individu à l’autre. Le scénario 1
peut sembler spontané pour une personne dont le frein est moins sensible au
stress, et le scénario  3 peut sembler réactif pour une personne dont
l’accélérateur nécessite une plus grande stimulation avant que l’excitation
attisée à distance ne produise enfin des étincelles de désir. Mais le processus
général est le même pour tout le monde. Le plaisir + le contexte approprié
(les bonnes circonstances externes et l’état interne) = le désir.
4. Ryan, «  Expériences de vie des femmes cherchant et utilisant des
stratégies d’adaptation ».
5. Dans certains cas, les hormones peuvent être impliquées dans des
problèmes de désir, mais ce sont le plus souvent des questions médicales.
Par exemple, certaines femmes qui subissent une double ovariectomie
(ablation des ovaires) avant l’âge de 45 ans peuvent être plus susceptibles
d’éprouver un faible désir. Et il peut y avoir un sous-groupe de femmes –
environ 15  % – chez qui l’excitation sexuelle dépend de la testostérone,
principalement lorsqu’elles prennent des contraceptifs hormonaux  ; plus
précisément, leur mécanisme de réponse sexuelle peut être peu sensible à la
testostérone, ce qui fait qu’elles ont besoin d’une plus grande quantité de
cette hormone avant que leur intérêt sexuel ne s’éveille (Bancroft et
Graham, « La nature variée de la sexualité des femmes »). Environ un tiers
des femmes voient leur intérêt sexuel diminuer lorsqu’elles prennent une
pilule contraceptive, environ un cinquième des femmes voient leur intérêt
sexuel augmenter, et la moitié restante ne ressent aucune fluctuation
particulière (Sanders et al., «  Une étude prospective  »). Ainsi, si votre
intérêt pour le sexe a baissé lorsque vous avez commencé à prendre des
contraceptifs hormonaux et que vous souhaitez le retrouver, passez à une
autre pilule ou essayez l’anneau vaginal, le dispositif intra-utérin, l’implant
ou n’importe quelle autre méthode de contraception hormonale. Le corps de
chaque femme réagit différemment aux différentes combinaisons
d’hormones. On a également constaté que la diminution tant soulignée de
l’intérêt des femmes pour le sexe au fil des années est associée à l’âge lui-
même, et non aux hormones (Erekson et  al., «  Fonction sexuelle chez les
femmes âgées  »). C’est compliqué, et il y a des exceptions bien sûr, mais
voici une bonne règle de base  : les hormones peuvent résoudre les
problèmes génitaux/périphériques – douleur, sécheresse, sensation,  etc. –
mais pas les problèmes cérébraux/centraux, et le désir est un problème
cérébral (Basson, « Hormones et sexualité »).
6. Basson, «  Modèles biopsychosociaux de la réponse sexuelle des
femmes » ; Brotto et al., « Prédicteurs des troubles du désir sexuel ».
7. Beach, « Caractéristiques de la “pulsion sexuelle” masculine » pour une
présentation succincte de l’histoire de la conceptualisation du sexe comme
pulsion, voir Heiman et Pfaff, « Excitation sexuelle et concepts connexes ».
8. Ce n’est pas la pulsion sexuelle qui fait paniquer les gens lorsqu’ils sont
«  privés  » de sexe. C’est plutôt, au moins en partie, la solitude. La
connexion est une pulsion (Nagoski, «  Je suis désolée que tu te sentes
seul »).
9. Toates, How Sexual Desire Works, chapitre 4.
10. Notez que la curiosité et le jeu sont aussi innés chez l’humain (et chez
les autres mammifères sociaux) que la faim ou la soif (Toates, Biological
Psychology). Ce point est important, car la position consistant à dire « vous
n’avez pas besoin de sexe  » dans l’éducation sexuelle, avancée dans
l’espoir louable de protéger les femmes contre ce que les hommes
considèrent comment un dû sexuel (voir Manne, Down Girl et Entitled), a
parfois malheureusement basculé dans l’extrême opposé, prônant
l’abstinence absolue (Duffey, Relations of the Sexes  ; Foster, Social
Emergency). Le sexe est une motivation innée chez l’humain et, à mon avis,
les seules conditions préalables sont le consentement mutuel et libre et
l’absence de douleur non désirée. C’est plus facile à dire qu’à faire,
précisément en raison de ce droit au sexe que les hommes estiment avoir.
11. Perel, « Le secret du désir dans une relation durable ».
12. Gottman, Science of Trust, 257.
13. Charles Carver a suggéré que le plaisir pourrait être un signal indiquant
que nous pouvons cesser de prêter attention à une chose et porter notre
attention vers une autre plus insatisfaisante («  Le plaisir comme signe  »).
Voir la boucle de témoignages sur la réduction des écarts, chapitre 8 de ce
livre, note 21.
14. Dwyer et Sobhan, «  Examen statistique et évaluation,  » consulté le
11 septembre 2020.
15. Ng, « Évaluation des risques et examen(s) de l’atténuation des risques ».
Le nombre d’«  événements sexuels satisfaisants  » est le paramètre clé
secondaire et il « n’a pas atteint la signification statistique entre les groupes
de traitement » (p. 8).
16. Filipovic, « Une petite pilule peut-elle sauver le désir féminin ? ».
17. Sole-Smith, «  Le plaisir en pilule.  » (Remarquez comme le titre de
l’article associe plaisir et désir.)
18. Par exemple, chez Stein, «  La pilule pour la libido féminine  », et
Adams, « Pour les troubles sexuels, “les hommes prennent un comprimé et
les femmes ont besoin d’une thérapie”.  » (Notez que le deuxième titre
associe les difficultés de désir sexuel des femmes aux difficultés
érectiles/d’excitation chez les hommes.)
19. Nagoski, « La Coupe du Monde du désir sexuel féminin ».
20. Meston et Buss, « Pourquoi les humains ont des relations sexuelles ».
21. Par exemple, Clayton et al., « La Société internationale pour l’étude des
processus de soins de santé sexuelle des femmes,  », mais pour un contre-
exemple voir Tiefer, «  La thérapie sexuelle en tant que démarche
humaniste ».
22. Kleinplatz et al., « Les composantes d’une sexualité optimale ».
23. Rosen, « Comment les femmes survivantes ».
24. Fahs et Plante, « Sur le “bon sexe” et autres idées dangereuses ».
25. Kleinplatz et Ménard, Magnificent Sex, 185.

Quatrième partie : Extase pour toutes


Chapitre 8 : L’orgasme
1. Kinsey, Pomeroy et Martin (Sexual Behavior in the Human Male, p. 158)
ont défini l’orgasme comme «  une libération soudaine qui produit des
spasmes locaux ou des convulsions plus étendues ou plus intenses  ». La
«  phase orgasmique  » de Masters et Johnson (Human Sexual Response,
p.  6) correspond aux «  quelques secondes pendant lesquelles la
vasoconcentration [constriction des vaisseaux sanguins] et la myotonie
[constriction musculaire] résultant des stimuli sexuels sont libérées. Ce
point culminant involontaire est atteint à tout niveau qui représente
l’augmentation maximale de la tension sexuelle de ce moment particulier ».
Vous remarquerez que ces définitions sont plus inclusives que le
« consensus selon lequel l’orgasme d’une femme implique un pic transitoire
de plaisir sexuel intense associé à des contractions rythmiques de la
musculature pelvienne circonvaginale, souvent avec des contractions
utérines et anales concomitantes  » du XXIe  siècle (Bianchi-Demicheli et
Ortigue, «  Vers une compréhension des substrats cérébraux de l’orgasme
féminin  »). Cette définition «  consensuelle  » est en contradiction avec les
recherches sur la non-concordance et sur l’absence contextuelle de plaisir
avec l’orgasme.
2. Levin et Wagner, « Orgasme chez les femmes en laboratoire ».
3. Bohlen et al., «  L’orgasme féminin  ». La chercheuse Nicole Prause a
mesuré l’orgasme en laboratoire et a découvert que la moitié des femmes
qui déclarent avoir atteint l’orgasme ne présentent pas de signes
physiologiques. Elle a déclaré dans une interview  : «  C’est la réalité  :
beaucoup de femmes pensent qu’elles ont des orgasmes alors que ce n’est
pas le cas » (Rowland, The Pleasure Gap, chapitre 2). Je dirais que, plutôt
que de tourner les femmes en dérision et de leur dire qu’elles ne connaissent
pas leur propre corps, demandons-nous ce qu’est l’orgasme, puisque ce
n’est manifestement pas ce que nous mesurons. Ma propre conclusion est
que l’orgasme est la libération spontanée et involontaire de la tension
sexuelle (voir la note 1 de ce chapitre).
4. Alzate, Useche, et Villegas, « Les fluctuations du rythme cardiaque ».
5. Et il se passe beaucoup de choses dans votre cerveau. Pour une revue,
voir Georgiadis et al., « Le tabou le plus doux ».
6. Herbenick et Fortenberry, «  Orgasme et plaisir induits par l’activité
sportive ».
7. Levin et van Berlo, « Excitation et orgasme sexuels ». Cette conférence a
été le point de départ de ma conférence TED (Emily Nagoski, « The Truth
about Unwanted Arousal » [La vérité sur l’excitation non voulue], filmée le
13  avril 2018 à Vancouver, Ontario, vidéo TED, 15:08,
http://go.ted.com/emilynagoski).
8. Des recherches ont montré qu’environ 30 % des femmes connaissent des
orgasmes nocturnes (Mah and Binik, « Nature de l’orgasme humain »).
9. LoPiccolo et LoPiccolo (eds.), Handbook of Sex Therapy.
10. Il est par ailleurs vrai que les parties du cerveau qui « s’activent » lors
de la stimulation vaginale sont différentes de celles qui s’activent lors de la
stimulation clitoridienne (Komisaruk et al., « Le clitoris, le vagin et le col
de l’utérus  »). Différentes parties de votre cerveau correspondent à
différentes parties de votre corps. Mais nous ne les appelons pas « orgasmes
du cortex somatosensoriel vaginal  » et «  orgasmes du cortex
somatosensoriel clitoridien ». Les femmes souffrant de lésions de la moelle
épinière peuvent même contourner la colonne vertébrale et atteindre
l’orgasme grâce à la stimulation d’un nerf crânien qui relie directement le
col de l’utérus au cerveau (Komisaruk et al., « Activation du cerveau »). Et
ce ne sont pas des « orgasmes du nerf crânien » ; ce sont des orgasmes, sans
aucun qualificatif nécessaire.
11. Ce résultat a été reproduit plusieurs fois, en utilisant de multiples
méthodologies, dans de multiples études, y compris le volume féminin des
Rapports Kinsey et dans Le Rapport Hite. Le taux de pénétration le plus
élevé lors de la masturbation et que j’ai observé provient d’une étude de
2007 où les femmes ont répondu à l’affirmation «  J’utilise des
vibromasseurs ou j’introduis certains objets dans mon vagin » ; 21,4 % ont
répondu oui au moins parfois (Carvalheira et Leal, « Masturbation chez les
femmes  »). Il est important de noter que les vibromasseurs sont
généralement réservés à l’usage externe ; Davis et al., « Caractéristiques de
l’utilisation de vibromasseurs  », ont constaté que 3  % (3 sur 115) des
femmes se masturbaient avec un vibromasseur «  principalement  » dans le
vagin et 24  % (36 sur 115) avec le vibromasseur sur «  divers sites
génitaux », qui peuvent inclure le vagin ; 14 % (11 sur 79) ont déclaré un
« mouvement de va-et-vient » dans le vagin et 79 % des femmes ont déclaré
que la stimulation clitoridienne avec le vibromasseur pendant la
masturbation en solo « entraînait habituellement ou toujours l’orgasme » et
30  % ont déclaré que la stimulation du vibrateur vaginal entraînait
l’orgasme.
En outre, selon Hite (1976), 1,5  % des femmes se masturbent
exclusivement par pénétration vaginale  ; 5  % des femmes pénètrent
toujours leur vagin pendant la masturbation ; 1 % pénètre dans le vagin au
moment de l’orgasme, une main stimulant aussi la vulve ; 1 % pénètre dans
le vagin pour assurer la lubrification. Kinsey et ses collaborateurs (1953,
161) notent une distinction anatomique entre le vagin et l’orifice du vagin :
beaucoup de celles qui ont signalé des « pénétrations vaginales » lors de la
masturbation n’ont pas réussi à distinguer le vestibule du vagin (qui est bien
pourvu de terminaisons nerveuses) du vagin lui-même (qui est mal pourvu
ou dépourvu de terminaisons nerveuses). Dans de nombreux cas, les doigts
de la femme avaient été insérés juste assez loin au-delà de l’anneau
musculaire qui se trouve à l’entrée du vagin (l’introïtus) pour assurer une
prise ferme pour le reste de sa main pendant qu’elle stimulait les parties
externes de ses organes génitaux.
12. Il s’agit d’un autre résultat reproduit en utilisant de multiples
méthodologies pendant la majeure partie du siècle. Pour une analyse
approfondie, voir Lloyd, Case of the Female Orgasm, et Levin, « Orgasme
chez les femmes ».
13. Wallen et Lloyd, «  Excitation sexuelle féminine,  » mais voir aussi la
note  1 du chapitre  1. Ce genre d’études peut nous aider à comprendre un
peu, petit à petit, l’histoire de l’évolution de la sexualité humaine, mais elles
n’offrent absolument aucun aperçu de la façon dont nous « devrions » vivre
notre sexualité dans notre vie quotidienne. Wallen et Lloyd ne commettent
pas cette erreur, mais d’autres chercheurs si. Lorsque vous lisez des études
sur la morphologie anatomique, méfiez-vous du langage qui assimile une
morphologie anatomique particulière à la «  santé  », au
« dysfonctionnement » ou à la « réussite », à moins que le sujet ne soit une
infection ou une douleur non désirée.
14. Nagoski, « La réponse définitive ».
15. Graham, « Les critères diagnostiques du DSM ». Dans une étude menée
auprès d’un échantillon aléatoire de femmes australiennes, 8 % ont déclaré
avoir des «  difficultés et de la détresse  » (Hayes et al., «  La “véritable”
prévalence des dysfonctionnements sexuels ») ; dans une étude portant sur
un vaste échantillon de population, 10 % des femmes ont déclaré avoir des
« difficultés et de la détresse » (Witting et al., « Des influences génétiques
corrélées et environnementales non partagées  »)  ; sur 17  000  femmes
flamandes, 6,5  % ont fait état d’un «  dysfonctionnement de l’orgasme  »
(Hendrickx, Gijs et Enzlin, «  Taux de prévalence des difficultés
sexuelles »).
16. Armstrong, England, et Fogarty, « Bilan des orgasmes féminins ». Quel
était le meilleur type de stimulation pour l’orgasme avec un nouveau
partenaire ? Stimuler son clitoris avec sa propre main.
17. Stroupe, « À quel moment le difficile est-il trop difficile ? ».
18. Read, King et Watson («  Dysfonctionnement sexuel dans les soins
médicaux de bas  ») ont découvert un taux de 7  % dans un échantillon
clinique simple.
19. Simons et Carey («  Prévalence du dysfonctionnement sexuel  ») ont
trouvé 7 à 10  % dans leur examen de la recherche. Notez que 80  % des
femmes souffrant d’anorgasmie « à vie » sont traitées efficacement par des
interventions psychologiques (Heiman, « Traitements psychologiques pour
les troubles sexuels féminins  »), ce qui est l’une des nombreuses raisons
pour lesquelles je soupçonne que le nombre de femmes souffrant
d’anorgasmie vraiment à vie est sensiblement inférieur à 5-10 %.
20. Kingsberg et al., « Caractérisation des difficultés orgasmiques ».
21. Pour une description plus précise et scientifique de la petite surveillante
(par exemple, le fait qu’il n’y ait pas vraiment de petite surveillante), voir
Carver et Scheier, «  Autorégulation de l’Action et de l’Affect  ». En
psychologie comparée, le phénomène de la curiosité est étudié sous le nom
d’«  exploration  », selon Toates, Biological Psychology, 404–406, ou la
« quête » selon Panksepp et Bevin, Archaeology of Mind, chapitre 3.
22. Il pourrait aussi s’agir d’éviter quelque chose – ce sont des «  anti-
objectifs » et la cible de divergences qui élargissent, plutôt que de réduire,
les boucles de rétroaction. (Carver et Scheier, « Les processus de contrôle
cybernétique »).
23. Schwarzer et Frensch (eds.), Personality, Human Development, and
Culture, chapitre 1.
24. Wrosch et al., «  L’importance du désengagement vis-à-vis des
objectifs  ». Ceci rejoint les trois stratégies d’adaptation présentées dans
l’ouvrage de Mitchell et al. intitulé «  Gestion des difficultés sexuelles  »  :
modifier les objectifs en fonction des circonstances, modifier les
circonstances en fonction des objectifs et vivre avec un écart entre les
objectifs et les circonstances.
25. Herbenick et al., «  Prévalence et caractéristiques de l’utilisation des
vibromasseurs ».
26. Marcus, « Changements dans l’expérience et les attentes sexuelles ».
27. Haller, «  Les cinq  études sexuelles les plus folles  ». La moitié des
participantes à l’étude qui ne portaient pas de chaussettes ont atteint
l’orgasme, mais ce chiffre est passé à 80  % lorsqu’elles gardaient leurs
chaussettes.
28. Toates, Motivational Systems, 151–152.

Chapitre 9 : Aimez ce qui est vrai


1. Ellin, « Plus de femmes se tournent vers les produits sans ordonnance ».
2. Sakaluk et al., « Scripts sexuels hétérosexuels dominants ».
3. Les différentes voies disponibles pour accueillir notre sexualité telle
qu’elle est se trouvent être parallèles aux différentes «  voies vers le sexe
magnifique  » esquissées par Kleinplatz et Ménard (Magnificent Sex,
chapitre 12).
4. Baer, «  Validité de construction du Questionnaire Cinq Facettes de la
pleine conscience  »  ; Van Dam, Earleywine, et Danoff-Burg, «  Fonction
différentielle des items  »  ; Baer et al., «  Utiliser les méthodes d’auto-
évaluation  »  ; Silverstein et al., «  Effets de l’entraînement à la pleine
conscience  ». (Ce dernier article conclut, de manière inexplicable, que
l’interception – la conscience de son corps – est ce qui fait la différence,
même si le facteur « observation » n’a pas changé de manière significative
et que le facteur « non-jugement » a changé le plus significativement.)
5. Hoge et al., «  Pleine conscience et autocompassion dans le trouble
anxieux généralisé ». Dans une étude similaire portant à la fois sur l’anxiété
et la dépression, celle-ci comparant l’échelle MAAS (Échelle d’attention et
de pleine conscience) et l’échelle d’autocompassion mentionnée au
chapitre  5, l’autocompassion était un meilleur prédicteur que la pleine
conscience (prise de conscience seule), de la qualité de vie (Van Dam et al.,
« L’autocompassion est un meilleur prédicteur »).
6. Mize et Iantaffi, « La place de la pleine conscience dans une intervention
de psychothérapie sensorimotrice ».
7. Leavitt, Lefkowitz, et Waterman, «  Le rôle de la pleine conscience
sexuelle ».
8. Suschinsky et Lalumière, « La concordance sexuelle est-elle liée ».
9. Le pouvoir de non-jugement dans le fonctionnement sexuel m’aide
également à comprendre la relation entre les troubles du désir sexuel et la
non-concordance de l’excitation. Les chercheurs ont suggéré que les
femmes plus préoccupées par leur fonctionnement sexuel pourraient
s’inquiéter davantage de leurs sensations génitales, ce qui pourrait réduire à
la fois leur excitation subjective et leur flux sanguin génital, tout en
augmentant leur attention portée sur leur flux sanguin génital (Velten et al.,
«  Enquête sur la concordance sexuelle féminine  »). Si cette hypothèse est
vraie, alors la conscience elle-même n’est ni bonne ni mauvaise  ; c’est la
qualité de la conscience qui compte. Il semble qu’une prise de conscience
inquiète peut activer les freins. On ne peut pas changer la sensibilité des
freins, mais on peut changer le contexte. Nous pouvons transformer la
conscience inquiète en une conscience qui ne juge pas. Cela expliquerait
également pourquoi une plus grande prise de conscience de l’excitation
génitale chez les femmes en détresse sexuelle est liée à une plus grande
concordance de l’excitation, comme mentionné au chapitre  6, note  23
(Suschinsky et al., «  La relation entre le fonctionnement sexuel et la
concordance sexuelle »).
10. Moseley et Butler, Explain Pain Supercharged ; Tracey, « Ressentir la
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Index
Affirmation de soi 1

Agression sexuelle 1
Voir Viol

Akin, Todd 1, 2
Anorgasmie 1, 2

Anticipation 1, 2, 3

Anus 1, 2, 3, 4

Anxiété 1, 2

Approche ascendante de gestion du traumatisme 1

Approche descendante de gestion du traumatisme 1

Aristophane 1

Asexualité 1, 2, 3

Attachement anxieux 1, 2, 3

Attachement évitant 1, 2, 3
Attachement non sécure 1

Attachement sécure 1, 2, 3

Austen, Jane 1

Autocompassion 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7

Autocomplaisance 1
Bacon, Lindo 1

Bancroft, John 1, 2

Barbarella 1

Bartholin, glandes de 1, 2

Base sûre 1
Beach, Frank 1

Becoming Orgasmic 1

Bergman, S. Bear 1

Bergner, Daniel 1, 2, 3

Berridge, Kent 1, 2, 3, 4

Bienveillance 1, 2

Blastocyste 1
Blum, Deborah 1

Body scan 1

Bonheur 1

Bonobos 1, 2, 3, 4

Botton de, Alain 1

Bouffées de chaleur 1

Brotto, Lori 1

Bulbe du pénis 1
Canaux séminaux 1

Capuchon clitoridien 1, 2, 3, 4
Centres du plaisir du cerveau 1

Chamberlin, Kristen 1
Chatouilles 1, 2, 3, 4, 5
Chaussettes et orgasme 1, 2, 3

Chivers, Meredith 1, 2
Cinquante nuances de Grey 1, 2, 3

Cisgenre 1
Clitoris 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20
Cocaïne 1, 2
Colère 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22

Colliculus séminal 1
Comment mieux penser au sexe 1

Comportements \« Qu’est-ce que c’est ? \» 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7


Conductance cutanée 1, 2
Corps caverneux 1

Corps spongieux 1
Cowper, glande de 1

Cri primal 1, 2, 3
Cujo 1

Cum hoc ergo propter hoc 1

Cycle menstruel 1, 2
Dégoût 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21

Dépression 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11
Des fleurs dans la tourmente 1

Désir réactif 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24

Désir spontané 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19,
20
Diaphragme pelvien 1

Dickens, Charles 1
Digue dentaire 1

Dissonance cognitive 1, 2, 3

Dopamine 1
Douche, métaphore de la 1, 2, 3

Douleurs 1, 2, 3, 4, 5, 6
Éjaculation féminine 1
Émotions élémentaires 1

Envie 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34
Enya 1

Estime de soi 1

Être spectatrice 1, 2, 3, 4
Expérience Somatique 1

Fausse couche 1

Fertilité 1

Filles d’Escher 1

Flatliners 1, 2
Fondement moral de la sainteté 1, 2, 3

Fondements moraux, théorie des 1

Fordyce, James 1

Freud, Sigmund 1

Gottman, John 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
Graham, Cynthia 1

Grossesse 1, 2, 3, 4

Grossesse non désirée 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9

Haidt, Jonathan 1

Harlow, Harry 1
Health at Every Size : The Surprising Truth about Your Weight 1

Hedwig and the Angry Inch 1

Heiman, Julia 1

Henderson, Bobby 1

Hite, rapport 1

Honte 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13


Hormones masculinisantes 1

Humanité commune 1, 2
Hymen 1, 2

Hymen microperforé 1

Ideal Marriage : Its Physiology and Technique 1

Iggy Pop, étude d’ 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8

Incontinence 1
Institut Kinsey 1, 2, 3, 4

Intégration additive 1

Intégration soustractive 1

Intersexué 1, 2

Isolement 1, 2, 3
Jane Eyre 1, 2

Janssen, Erick 1, 2

Jardin, métaphore du 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18,
19, 20, 21, 22, 23

Jauge de déformation 1

Johnson, Sue 1, 2

Johnson, Virginia 1, 2, 3

Kabat-Zinn, Jon 1
Kahneman, Daniel 1

Kaplan, Helen Singer 1

Kegel, muscle de 1

Kinsale, Laura 1

Kringelbach, Morten 1
Kung Fu Panda 1

Laan, Ellen 1
Lactation 1, 2

Le Banquet 1

Les joies d’en bas 1


Liquide séminal 1, 2
LoPiccolo, Joseph 1
Love at Goon Park 1

Lubrifiant 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10

Lubrification 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16

Ma meilleure ennemie 1

Married Love 1
Masters, William 1, 2, 3

Masturbation 1, 2, 3, 4, 5

McBride, Kimberly 1

McCall, Katie 1, 2

Méditation 1, 2, 3, 4, 5
Mères monstrueuses, étude 1

Meston, Cindy 1, 2

Mesure de la Pleine Conscience Sexuelle 1

Milhausen, Robin 1, 2

Modèle génératif probabiliste 1

Modèle triphasique de réponse sexuelle 1


Monologues du vagin 1

Mont 1
Myotonies 1, 2

N’ayez pas peur du noir 1

Nagoski, Amelia 1, 2, 3, 4
Neff, Kristin 1

New York Times 1, 2


Noyau accumbens 1, 2

Noyau parabrachial du tronc cérébral 1

Ocytocine 1, 2
Orgasmes de sommeil 1, 2

Orgasmes en faisant du sport 1, 2


Orgueil et préjugés 1, 2

Orientation sexuelle 1, 2, 3, 4

Ovaires 1, 2, 3

Pallidum ventral 1, 2
Paralangage 1

Pastafarisme 1

Patriarcat 1, 2, 3

Pavloviens, réflexes 1, 2, 3

Pénétration 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21

Pénis 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10

Pensées intrusives 1

Pensées sexuelles 1

Perel, Esther 1, 2

Périnée 1, 2, 3, 4

Petite surveillante 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15


Peur 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17

Pfaus, Jim 1

Plancher pelvien 1

Pleine conscience 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15

Pleurer 1, 2, 3, 4, 5, 6

Poids et santé 1

Point G 1, 2

Point Y 1

Porges, Stephen 1

Porno 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22, 23, 24
lesbien 1

Première sortie 1

Prépuce 1
Préservatif 1, 2, 3, 4

Prostate 1, 2, 3, 4, 5

Pudendum 1, 2

Pukall, Caroline 1

Pulsion sexuelle 1, 2, 3

Que veulent les femmes ? 1, 2

Redliners 1, 2

Réévaluation de l’attitude sexuelle 1

Résolution 1
Résolution à son propre rythme 1

Rûmî 1

Saillance incitative 1, 2, 3

Sanders, Stephanie 1

Scénarios sexuels 1, 2

Scrotum 1, 2, 3

Seeger, Pete 1

Segal, Zindel 1

Sermons pour les jeunes dames 1

Sexe oral 1, 2

Sexe réconfortant 1, 2
Sexe scellé 1

Skene, glandes de 1, 2

Soigne et montre-toi ami 1, 2, 3

Solitude 1

Sommeil 1, 2, 3

Sommeil paradoxal 1

Spasmes carpopédiens 1

SSPT 1
Voir Traumatisme
Steinem, Gloria 1
Stopes, Marie 1

Stress chronique 1, 2, 3

Suridentification 1, 2

Surprise 1

Système d’excitation sexuelle 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7

Système d’inhibition sexuelle 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8

Système nerveux central 1, 2, 3, 4, 5, 6

Système nerveux parasympathique (freins) 1, 2

Système nerveux sympathique (accélérateur) 1, 2

Tai-chi 1
Teasdale, John 1

Testicules 1, 2, 3

Testostérone 1, 2, 3

Thérapies cognitives 1, 2

This American Life 1

Trans 1, 2

Traumatisme 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18


Approche ascendante de gestion du 1
Approche descendante de gestion du 1

Tristesse 1, 2, 3

Troubles de l’alimentation 1, 2

Tumescence nocturne du pénis 1

Tunnel, métaphore du 1, 2, 3, 4, 5

Un conte de Noël 1

Unbreakable, projet 1

Une équipe hors du commun 1

Vagin 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16


Vaginisme 1, 2
van de Velde 1

Vibromasseur 1, 2, 3, 4, 5
Viol 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9

Virginité 1, 2
Vitesse du critère 1

Vulve 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18

Williams, Mark 1

XX (génétiquement femelle) 1

XY (génétiquement mâle) 1

Yoga 1, 2, 3
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