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SAINT THOMAS D’AQUIN

« Le Docteur commun »

Méditation 1
Chers Pèlerins,
« Il est meilleur de donner la lumière que de briller seulement ». Avec cette
image de la lumière, saint Thomas d’Aquin exprime tout l’idéal de sa vie de
frère prêcheur ; et l’histoire de son influence sur la pensée philosophique et
théologique montre combien la lumière de son enseignement a éclairé
l’Église.
Mais, au-delà de la doctrine, qui est cet homme, ce saint du XIIIe siècle, qui a
pu ainsi rayonner bien au-delà de son époque ?
En vérité, ce docteur est aussi un témoin de vie spirituelle, il nous enseigne par
sa parole et par sa vie.
I. LA FORMATION
1. La jeunesse
On peut placer sa naissance en 1224 ou 1225 dans la famille noble des comtes
d’Aquin, d’origine lombarde, probablement au château de Roccasecca, dans
l’Italie du sud.
D’une famille nombreuse (au moins neuf enfants), Thomas, qui est le plus
jeune des fils, est destinée à une carrière ecclésiastique et, dès l’âge de 5-6 ans,
rejoint comme oblat l’abbaye toute proche du Mont-Cassin où, avec d’autres
enfants de son âge, il est initié à la vie bénédictine et commence sa formation
intellectuelle. Il gardera toujours une grande estime pour l'ordre de saint
Benoît.
2. L’arrivée à Naples et l’entrée dans l’ordre de saint Dominique
Mais, en 1236, le Père Abbé conseille aux parents de Thomas d’envoyer plutôt
leur filsAssociation
à Naples, car des troubles ont repris dans la région.
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C’est là qu’il fait connaissance avec les dominicains, dont l’implantation
datait de 1231. Le jeune Thomas, soutenu par le frère Jean de San Giuliano,
décide alors d’entrer chez les prêcheurs, et reçoit l’habit des mains du prieur
au début de 1244.
Ce qui le pousse vers les dominicains, c'est sans doute son aptitude pour
l'étude, et aussi son attrait pour une vie de pauvreté.
Craignant les réactions de sa famille devant ce changement d’orientation, les
dominicains le font partir pour Rome ; à cette nouvelle, sa mère l’y poursuit et
le fait intercepter par ses frères afin qu’il lui soit ramené.
Il est alors enfermé dans un château de famille où on essaie de mettre à
l’épreuve sa chasteté. Sa réaction est des plus énergiques, ce qui lui vaudra
du Seigneur la grâce de ne plus être importuné par les tentations grossières.
Il tâche de tirer le meilleur parti de sa semi réclusion : il lit toute le Bible, il
étudie les « Sentences » de Pierre Lombard, le manuel de théologie utilisé
alors dans toutes les écoles. Il peut aussi encourager la vocation religieuse de
sa sœur aînée, Marotta.
Finalement, au bout d'environ un an et demi, vaincue par sa constance, sa
famille lui permet de regagner le couvent de Naples.
Malgré cet épisode fâcheux, le frère Thomas restera toujours très attaché à sa
famille.
3. Les études à Paris et à Cologne
Rendu à son Ordre, le frère Thomas est alors envoyé à Paris, où il passe trois
ans (1245-1248), pour perfectionner, à la faculté des arts, les connaissances
acquises à Naples. Il sert aussi de secrétaire bénévole à saint Albert, qui
enseigne à Paris en ces années.
Mais, en 1248, le chapitre général décide d'ouvrir un studium generale à
Cologne, confié à Maître Albert, qui prend avec lui le frère Thomas. Durant
quatre ans, celui-ci a le loisir de s'imprégner de la pensée de son maître. Ce fut
très probablement le moment de son ordination sacerdotale, sur laquelle nous
ne savons rien.
Une collaboration fraternelle s'instaure entre le maître et le disciple, qui,
d'élève, passe à la fonction d'assistant, achevant sa formation et commençant à
enseigner.
II. L’ENSEIGNEMENT
1. Les premiers cours
Au début de 1252, le Maître général des prêcheurs demande à Maître Albert
de lui désigner un frère qui pût être bachelier pour enseigner à Paris ; ce
dernier propose le frère Thomas, qui, malgré son âge (il n’a que vingt-sept
ans), vientAssociation
assister le maître dominicain Elie Brunet de Bergerac.
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À Paris, le frère Thomas suit le cursus qui doit le mener à la maîtrise : À ce
travail universitaire intense s'ajoute un certain nombre de travaux, écrits par
charité, pour répondre à des demandes de ses frères, ou à des consultations
officielles.
Cette charité intellectuelle est un des aspects de la sainteté du frère Thomas,
et Maritain a pu parler de « sainteté de l'intelligence ». Soulignons qu’il
recevait beaucoup de lumières sur les mystères qu’il étudiait, grâce à la prière
et à une vie profonde d’union avec Dieu.
2. Le maître en théologie
Dans les premiers mois de 1256, le frère Thomas est appelé à se préparer pour
sa leçon inaugurale, première étape de sa réception comme maître de
l'université, bien qu’il n’ait pas les trente-cinq ans requis.
Dès l'automne 1256, il publie un petit ouvrage pour défendre l'idéal religieux
des franciscains et des dominicains. Dans plusieurs écrits, il illustre, avec
fermeté et parfois ironie, la vocation des prêcheurs pour laquelle il a souffert
durant sa jeunesse. Ainsi apparaît un frère Thomas polémiste.
En analysant ses manuscrits autographes, on s'aperçoit vite de ce
tempérament ardent ; sa plume peine à suivre l'impétuosité de sa pensé, ce
qui entraîne des lapsus, des incorrections, des oublis. Ainsi doit-on reconnaître
que la modération et la clarté, universellement louées chez lui, sont le fruit
d'une patiente conquête, et non des dons innés : il lui a fallu discipliner son
génie pour pouvoir transmettre au mieux la lumière.
3. Naples, Orvieto, Rome
La vie du frère Thomas, depuis son entrée chez les prêcheurs, a été menée par
l'obéissance, et nous le voyons partir pour l'Italie, en 1260, à la demande de
ses supérieurs. Après un séjour à Naples dans son couvent d'origine, où il
travaille à la Somme contre les Gentils, il est nommé lecteur conventuel à
Orvieto.
À la demande du pape Urbain IV, il compose un office pour la fête du Saint-
Sacrement, et on rapporte qu'en écoutant sa lecture, saint Bonaventure
renonça au texte qu'il avait lui-même préparé. Dans ces textes, l'auteur livre un
écho de son âme : le thème de la présence du Christ « qui nous joint à lui
dans ce sacrement », et celui de l'espérance réconfortée par cette union si
intime, révèlent « la tension de son âme vers la vision de Dieu ».
Parmi les nombreux travaux de cette période se trouve la Catena aurea,
commentaire des quatre évangiles à partir de citations des Pères de l'Église,
entreprise à la demande d'Urbain IV.
En septembre 1265, le Chapitre provincial envoie le frère Thomas à Rome
pour y établir un studium, en vue de former les étudiants de la province
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dominicaine de Rome. Désirant donner une solide assise théologique à leur
formation, il commence à mettre en œuvre la Somme de Théologie, « pour
instruire les commençants », avec le souci très pédagogique de bâtir une
synthèse claire et ordonnée. Ce grand œuvre, commencé à Rome, sera
poursuivi à Paris puis à Naples jusqu'en décembre 1273.
En parallèle, il compose pour lui-même un « commentaire du traité de
l'Âme » d'Aristote. Cet approfondissement de la doctrine d'Aristote lui parait
nécessaire, au moment où il rédige les questions de la Première partie de la
Somme consacrées à l'âme humaine (questions 75 à 89).
4. Nouveau séjour à Paris
Mais après la fin de l'année scolaire, il est rappelé brusquement à Paris, où il
parvient vers la mi-septembre 1268.
À Paris, le frère Thomas d’Aquin poursuit la rédaction de la Somme, continu
ses commentaires personnels sur Aristote, commente l'Écriture, et donne
fidèlement les « questions disputées » prévues. Son intense travail lui permet
une immense production littéraire (il pouvait dicter en même temps à trois
et parfois quatre secrétaires). Cela souligne sa puissance d'abstraction, et en
même temps dénote une véritable rationalisation du travail, avec confection
de fiches, d'index, etc.
III. LE RETOUR EN ITALIE ET LA MORT
Mais bientôt, après environ quatre ans à Paris, il lui faut à nouveau quitter
cette ville, après le Carême 1272, pour rejoindre Naples où il doit fonder un
studium generale de théologie.
Cette dernière année d'enseignement est consacrée à un cours sur saint Paul
et à la rédaction d’un commentaire sur les psaumes qui restera inachevé
(seuls les psaumes 1 à 54 furent traités).
C’est à cette époque que le frère Thomas eut une expérience mystique, alors
qu'il célébrait la sainte messe dans la chapelle de Saint-Nicolas. Il n’en parla
pas, mais il cessa d'écrire après cette messe, et se sépara de ses plumes et de
ses parchemins. « Je ne peux plus écrire », répondit-il à Raynald de Piperno,
son compagnon, à qui il confiera plus tard, peu avant de mourir : « Tout ce que
j'ai écrit me semble de la paille en comparaison de ce que j'ai vu ».
Fin février 1274, il dut s'aliter et demanda qu'on le transportât à l'abbaye
cistercienne toute proche de Fossanova, où il mourut le 7 mars suivant,
rejoignant enfin Celui dont il avait si bien scruté les mystères.
Chers pèlerins,
Quand saint Thomas mourut, il n’avait qu’à peine cinquante ans. C’est court
pour une vie d’homme, mais quelle vie bien remplie et quelle œuvre
magnifique il nous laissait !
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Selon l’enseignement du Magistère, Saint Thomas est présenté à tous comme
un maître de sagesse qui n’enseigne pas une doctrine particulière, mais
expose la vérité en tant que Docteur commun.
Comme l’écrivait, en 1923, le pape Pie XI, dans l’encyclique Studiorum
ducem, il est « celui dont l’Église a faite sienne la doctrine ».
Dans une prière silencieuse, invoquons ce grand Saint ; et, par son
intercession, demandons au Saint Esprit qu’il éclaire notre intelligence pour
nous aider, au cours de cette première journée de pèlerinage, à mieux
comprendre ces vérités que nous allons méditer, que Dieu nous a révélées et
que l’Église nous enseigne.
Prière à l’Esprit Saint (que les pèlerins trouveront dans leur livret)
« Venez Esprit Saint, remplissez le cœur de vos fidèles, et allumez en eux le
feu de votre amour. Envoyez votre Esprit, Seigneur, et il se fera une création
nouvelle, et vous renouvellerez la face de la terre.
Prions : Ô Dieu qui avez instruit le cœur de vos fidèles, par la lumière du
Saint-Esprit, donnez-nous, par ce même Esprit, de comprendre et d’aimer ce
qui est bien, et de jouir sans cesse de ses divines consolations, par Jésus-
Christ notre Seigneur. Ainsi soit-il. »
Bibliographie
- « Initiation à saint Thomas d’Aquin, sa personne et son œuvre » Jean-Pierre
Torrell, 3e édition (2008), Cerf, Paris.
- « Lire saint Thomas », T. D Humbrecht, Ellipses, 2009.
- « Saint Thomas du Créateur », G. K. Chesterton.
- « Le Docteur angélique », Jacques Maritain
- Encyclique « Aeterni Patris », Léon XIII : 1879.
- Encyclique « Studiorum ducem », Pie XI : 1923.
- Encyclique « Fides et ratio », Bx Jean-Paul II : 1998.

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