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Richard

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Parole
voilée
FRANC-MAÇONNERIE ET ALCHIMIE
© Éditions Le Mercure Dauphinois, 2001

4, rue de Paris 38000 Grenoble - France

Tél. 04 76 96 80 51

E-maillemercuredauphinois@wanadoo.fr

Site lemercuredauphinois.fr

ISBN : 978-2-913826-15-1
Alors que faut-il en conclure?

On a émis l'hypothèse selon laquelle l'Ordre aurait été infesté par


une quelconque hérésie, qu'il aurait subie des influences musul-
manes. Il est plus probable qu'il se doubla d'un cercle intérieur. Des
statuts secrets auraient été découverts au sein de la bibliothèque du
Vatican au XVIIIe siècle par un chercheur, pour être aussitôt
reperdus. Même si le conditionnel s'impose, la piste n'est pas à
négliger.

En 1780, Frédéric Munter, évêque de Copenhague, découvrit dans


les archives du Vatican un document capital. Ce document, couvert
d'une écriture romane, était orné de la croix pattée du Temple. La
première partie du document était constituée de la règle officielle de
l'Ordre, copiée de la main d'un certain Mathieu de Tramlay, le jour
de la saint Félix de l'an 1205. Cette règle est conservée, aujourd'hui,
à la bibliothèque Corsini de Rome. Les seconde et troisième parties
du document étaient signées du copiste: Robert de Samfort, lequel
fut effectivement procureur du Temple, en Angleterre, et sont datées
de 1240. Elles comportaient respective-ment trente et vingt articles,
groupés sous l' inscription: « Ici commence le livre du Baptême du
Feu ou des Statuts secrets rédigés pour les Frères par le Maître
Roncelinus ». La quatrième partie du document était intitulée: « Ici
commence la liste des signes secrets que Maître Roncelinus a réunis.
» Elle donnait des indications relatives à un système
cryptographlque. L'Évêque Munter ne resta pas longtemps en
possession de sa découverte. Dans une lettre, adressée à son ami
Wilke, qui préparait une Histoire des Templiers, il confia que la
majeure partie des documents avait disparu. En 1877, le savant
allemand Mertzdorff publia les trois dernières parties du document
découvert par Munter, qu'il avait retrouvées dans une liasse
d'archives privées à Hambourg.

Certains des articles de ces statuts secrets témoignaient d'idées


hardies et hétérodoxes: « Sachez que Dieu ne fait point de
différence entre les personnes, Chrétiens, Sarrasins, Juifs, Grecs,
Romains, Francs ou Bulgares, parce que tout homme qui prie Dieu
est sauvé. » (2 e partie, article 5). Naturellement, les historiens
patentés ou non s'empressèrent de nier l'existence, voire
l'authenticité, desdits statuts. Et, d'ailleurs, qui était ce mystérieux
Roncelinus ? Il se pourrait qu'il se soit agi de Roncelin de Fos, dit
Maître Roncelin, lequel tenait seigneurie au petit port de Fos-sur-
Mer. Il était vassal des rois de Majorque, lesquels relevaient des rois
d'Aragon, défenseurs de « l'hérésie cathare », au combat de Muret,
en 1213.

Le titre de la règle secrète, qui aurait été rédigée par Maître


Roncelin, est extrêmement parlant puisqu'il emploie l'expression «
Baptême de Feu ». Le Baptême de Feu, ou d'Esprit, opposé au
baptême d'eau pratiqué par la chrétienté, était en vigueur chez les
gnostiques, notamment puis chez les Cathares. Indéniablement, il
véhicule un sens hermétique, s'agissant du baptême de Métis, dont
Fulcanelli disait qu'il fallait y voir l'étymologie du « Baphomet »
des Templiers, un résumé de l'Alchimie. Ceci semble devoir être
rapproché des troublants articles 7 et 19 des statuts de Maître
Roncelin : « Ayez dans vos maisons des lieux de réunion vastes et
cachés auxquels on accédera par des couloirs souterrains pour que
les frères puissent se rendre aux réunions sans risque d'être
inquiétés ... Il est interdit dans les maisons où tous les frères ne sont
pas des Élus de travailler certaines matières par la science
philosophique et donc de transmuter les métaux vils en argent et en
or. Ceci ne sera jamais entrepris que dans les lieux cachés et en
secret. »

Les Templiers pratiquèrent-ils l'Alchimie? L'énorme quantité de


métal argentifère en leur possession ne saurait s'expliquer par
l'exploitation minière. En effet, jusqu'à l'an 1100, l 'argent est rare,
puis il devient assez courant vers la fin du moyen âge et durant la
Renaissance. D'où venait-il? Les mines d'Allemagne sont encore
inconnues, celles de Gaule épuisées ou perdues et celles de Russie
pas encore prospectées. Et là réside, peut-être la clef du mystère qui
entoure l'érection des cathédrales d'Europe. Comment et par qui les
travaux furent-ils financés? À cette double question, il n'existe
qu'une seule réponse possible : par le Temple. Concernant la
cathédrale de Chartres, le fait est à peu près certain. Or, on peut
justement y voir un roi couronné tenant contre son cœur, dans un
pan de son manteau, le matras au long col. Naturellement, la
transmutation des métaux vils en or ou en argent n'est aucunement
une finalité et l'on sait que ce n'est pas le but essentiel recherché par
les alchimistes. Pour autant, on ne peut exclure que l'Ordre du
Temple ait eu recours à de l'argent philosophique.

Nous savons que l'Alchimie repose sur le principe des permu-


tations opérées par la lumière, ou plutôt l'Esprit. Selon Fulcanelli,
Baphomet, équivalent du baptême de Métis, doit s'entendre Bapheus
mété : les Teinturiers de la Lune, expression désignant ceux qui sont
capables de transmuter l'argent (la lune) en or (le soleil). La grande
fête templière avait lieu le jour de la Pentecôte, c'est-à-dire le jour
où le Saint-Esprit descendit sur les apôtres sous forme de langues de
feu. Quoi de plus normal, puisque c'est en cette période que la
pleine lune dispense le maximum d'influx.

L'Ordre du Temple connut-il une perversion ainsi que le suppu-


tent les historiens? La simple logique oblige à répondre par la néga-
tive ; la perversion exista à l'origine, c'est du moins ce que donne à
entendre la légende, précédemment rapportée, ayant trait à saint
Bernard. Il semble établi que la règle exotérique du Temple se soit
doublée d'une activité ésotérique, s'accordant plutôt mal avec le
sacro-saint dogme catholique. Cette assertion ne pourra révulser que
ceux ne s'étant jamais avisés du caractère hermétique qui se décèle
de façon sous-jacente lorsqu'on analyse l'histoire de la Chevalerie.
Vu sous cet éclairage particulier, les deux Templiers partageant la
même monture pourraient bien se montrer allusifs du langage des
initiés: la cabale (de cheval) phonétique, dénommée Langue des
Oiseaux, ou Langue du Cheval chez Jonathan Swift. Ainsi, toujours
selon Fulcanelli, le cri Dieu le veut aurait été l'expression profane de
Dieu le Feu.

Au temps jadis, la chevalerie se ralliait au cri de Montjoye-Saint-


Denis. L'origine de cette expression demeure bien ténébreuse, du
moins à en croire les historiens, lesquels se montrent étonnamment
muets à ce sujet. Cela est d' autant plus surprenant que la simple et
rigoureuse analyse de l'Oriflamme - étendard et bannière des Rois
de France - suffit à nous renseigner. D'après la légende, cette
bannière avait été envoyée par le ciel à Clovis, personnage dont le
nom est forgé sur la racine lOVIS, tout comme le prénom LOUIS, à
ceci près qu'il est précédé d'un C fortement évocateur du croissant
lunaire. De même, personne ne semble s'être avisé que la France
compta dix-huit rois, ou prétendants, ayant porté ce prénom. Il y a
là, sans conteste, un étrange fait qui ne saurait s'expliquer par le seul
engouement et encore moins par un caprice du hasard.

Cela nécessite quelques explications. On le sait - et ici nous ne


nous plaçons pas sur le plan politique mais uniquement
traditionnel -les Rois étaient dits de « droit divin » , et considérés
comme représentants de Dieu sur terre. Il y a là, sans que l'on s'en
doute, un secret de nature hermétique. En France, les monarques
portaient le manteau azuré (bleu) fleurdelysé or. Chez les Grecs,
comme plus tard chez les romains, le bleu était la couleur réservée à
Zeus et Jupiter. Cette correspondance est confirmée par la kabbale
hébraïque. En effet, si nous regardons l'arbre des Sephiroth, sur le
pilier de la Sagesse, situé à droite (en réalité à gauche car, ainsi
qu'on le fait pour un écu, il faut tenir compte de l'effet miroir), se
tient la Sephira Chesed : la Grâce. Cette même Sephira est attribuée
à Zeus, le Jupiter (IOVIS) des latins; lui sont attribués l' étain, métal
de Zeus et la couleur bleue. On peut rapprocher ceci du dieu
Krishna, équivalent du Christ chez les hindouistes, lequel est
toujours figuré en bleu. Un chapitre supplémentaire ne sera pas de
trop si nous souhaitons que la lumière sorte de dessous le boisseau.
Il est intéressant de noter aussi, qu'en sanscrit, la racine krish
signifie poisson.

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