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Du même auteur :
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Ou la problématique foncière
en Afrique : le cas du Cameroun
Suivi de « L’Exécrable lexique »
ISBN : 978-9956-37-480-9
© Editions Mǎn Mbenda, 2022
Douala
BP : 12 661 Yaoundé-Cameroun
Tél. (237) 6 53 53 95 41/6 99 58 52 62/ 6 95 13 14 52/ 6 70 68 43 75
« […] Ici, on confond la vérité avec la violence : dénoncer les abus n’est
pas un acte de violence. »
Um Nyobe Mpodol in Le problème National Kamerunais, p. 69.
« Il n’est plus nécessaire, pour exprimer ses opinions, de prendre le
maquis, de vivre en exil ou de quitter sa famille ».
Paul BIYA au Congrès du parti à Bamenda, mars 1985.
Cet Essai n’est pas le travail d’un juriste, ni d’un économiste, ni,
moins encore, d’un expert en matière foncière. Cet ouvrage exprime le cri
d’un citoyen qui subit et observe, s’offre le droit et assume le devoir, non
seulement de dénoncer, mais de s’indigner, de s’insurger contre l’injustice,
la haine gratuite, la voracité, le crime gratuit, le mensonge, l’insatiabilité,
les abus, la volonté de puissance, la mesquinerie, mais aussi et surtout
contre la bêtise et la perversité de certains dirigeants ou de certains Etats.
La répudiation de ces maux se traduit par un seul mot : T ! Aita ! Non !
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« Dire non maintenant, ce n’est pas être contre Paul Biya. Dire
non aujourd’hui, c’est reprendre le chemin de la dignité, de la prospérité
et de la liberté. Dire non, c’est concevoir nous mêmes, les stratégies de
notre développement1. »
En effet, un seul combat compte aujourd’hui pour sauver l’Homme.
C’est le combat pour la vérité, l’humilité, la sobriété.
Le ton, quand je parle de la France, peut paraître un peu vif, sévère.
Le Français ordinaire peut trouver cette attitude injuste ou excessive.
Mais ce Français ordinaire doit savoir que, victime malgré lui du men-
songe quasi institutionnel et de la désinformation permanente de la part
d’une certaine presse, d’une littérature complexée et des officiels français
-religieux et autres colons- sur le Noir et l’Afrique, il est totalement in-
capable, dans le fond, d’appréhender et d’apprécier à sa juste mesure, la
situation réelle que nous vivons, que dis-je, que nous endurons, depuis un
peu plus d’un siècle au Cameroun, -et malheureusement, depuis plusieurs
siècles pour d’autres pays africains : Hìnùni hi cεεlàk, wἑɛ hi ye i nǎŋ ɓε
-si ou quand un oiseau se plaint, c’est qu’il est dans un mauvais lit-. Ce
Français qui, lors d’une élection, jette son bulletin de vote, objectivement,
sans arrière-pensée, dans l’urne au profit d’un candidat, ignore presque
toujours qu’il remet à ce candidat une arme et/ou des moyens pour truci-
der allègrement des Africains, au nom de la France, quitte à l’élu, de se
réfugier après coup, derrière la légitimité. Je parle donc de la France que
je connais en Afrique, de la France qui vit, sévit, s’active en Afrique, pille
et détruit le continent noir. En fait ce n’est pas nouveau. Il s’agit surtout de
la France des affaires et de la France politique. Cette France donc, depuis
toujours, commet impunément des crimes odieux en Afrique, au nom des
Français. Elle en est d’ailleurs très fière, d’où la ferme devise de certains
1
Cf. BILOA AYISSI, « Lettre ouverte aux intellectuels camerounais », in Nouvelle Afrique,
n°164, du 10 novembre 2005, p. 5.
13
de ses hommes politiques, répétée à satiété : « Pas de repentance » ! « Pas
de présentations d’excuses ! ». La réparation, encore moins. Normal : la
déontologie des assassins et des brigands ne prévoit pas la repentance. Ni
la réparation de l’abus ou du mal commis. D’ailleurs, depuis des siècles,
la France célèbre avec véhémence, zèle et ostentation, ses plus grands
criminels contre la race noire. Elle s’accroche de toutes ses forces à cette
héroïque, mais odieuse et abjecte pratique. Tout récemment, suite à l’as-
sassinat de George Floyd et à la mobilisation antiraciste qui s’en est suivie
sur l’ensemble de la planète, le sieur Macron Emmanuel a exulté et ponti-
fié avec outrecuidance, très fier des crimes de la France à travers le monde,
et plus particulièrement contre la race noire : « La République n’effacera
aucune phrase ni aucun nom de son histoire »2. La France, depuis des
siècles et en toute souveraineté, tue, à travers le monde, des personnes
innocentes qu’elle ne connaît pas, car elle n’a de compte à rendre à per-
sonne. Même pas à Dieu le Père. C’est sa mission civilisatrice. Et cela
s’appelle la suprématie lisotanienne3.
Le Français ordinaire doit savoir que la France politique et la
France des affaires ont créé, renforcent, entretiennent, perpétuent la haine,
surtout le mépris de la France, du Français et même, malheureusement, de
l’homme blanc en général, en Afrique Noire, d’une part ; d’autre part, que
cette France bidimensionnelle endort les populations françaises, surtout
fausse sciemment le jugement du Français ordinaire sur son rôle néfaste
sur le continent noir, par la calomnie, par exemple « les Africains sont
pauvres », ou le mensonge du genre, « nous aidons l’Afrique, nous aidons
les Africains »4. Heureusement, Mitterrand François, en son temps le plus
illustre fils de la fille aînée de l’Eglise, et à cet effet, probablement très
souvent touché par l’Esprit, avait levé toute équivoque à Naples en 1994.
Cette France à deux dimensions fait partie intégrante de la bande
des pays dits « puissants » qui ont fait le très sinistre et très cynique choix
de semer la zizanie, la souffrance et la mort parmi de paisibles populations
d’une large partie de la planète, d’assujettir, pour dire le moins, ces
populations, dans le but de s’emparer de leurs terres et d’en devenir les
seuls propriétaires désormais. Ces pays ont pour boussole et mobile
dans leur aventure criminelle, la haine gratuite de l’autre et l’obsession
de faire gratuitement du mal à autrui, tandis que le mensonge reste leur
bouclier prétendument indestructible : ils partagent la civilisation et leurs
très enviables cultures. Ils civilisent, parce que, semble-t-il, ils sont, eux-
mêmes, civilisés.
Accaparement des terres et autres biens d’autrui, tuerie et insatia-
bilité, sont trois caractéristiques d’une haute civilisation, n’est-ce pas ?
2
Cf. France 24, le 30 juin 2020. Mémoire citée.
3
Consulter le glossaire, p. 333.
4
On lira avec beaucoup de gaîté, l’excellente dissertation de Balladur Edouard : halluci-
nant ! Cf., infra p. 204.
14
Mpèènà à tà ɓe -Nul ne (le) conteste. Les Blancs et les Jaunes ordinaires
doivent savoir que, de façon générale, leurs « frères et sœurs » avec les-
quels nous les Noirs sommes en contact à travers la religion, les affaires
et/ou la politique, pour la plupart, se présentent à nous et en permanence,
curieusement, comme des gens qui, par leur comportement de haineux, de
prédateurs insatiables, impitoyables et impénitents, nous veulent du mal,
ne veulent et ne souhaitent que notre ruine. A la limite, notre disparition
de la planète terre ne leur ferait pas couler une larme. Trois à quatre pays,
aujourd’hui, excellent et s’illustrent dans la pratique de cette philosophie
de la haine gratuite agissante, de la malveillance à notre endroit. Il ne
faut donc pas attendre des Noirs -de la très grande majorité du moins-
qu’ils encensent et embrassent des assassins, des criminels, des sinistres
individus sans foi ni loi, des brigands, des « puissants » qui se nourrissent
de sadisme, des voleurs qui avouent, reconnaissent, revendiquent, pro-
clament fièrement, à la face du monde, leur abject crime. Mitterrand
François5, digne, authentique et emblématique témoin de l’Occident chré-
tien et altruiste devant l’Eternel.
Ce que les prétendus « impuissants » ne comprennent pas, c’est
le fait que les « puissants » autoproclamés passent le plus clair de leur
temps à geindre, à exprimer en tremblant comme la fourmis mboɓa6 leur
peur pour leur sécurité menacée par on ne sait qui et pourquoi ; l’assassin
et le voleur ne dorment donc pas en paix, même quand ils se vautrent
et se prélassent sur des tapis de billets de banque sous la protection des
montagnes d’armes absolues ? C’est ridicule, mais on les félicite quand
même : ces esclaves de la chose le comprendront-ils un jour ? Peut-être
la menace vient-elle des « impuissants » qui, soit dit en passant, n’en-
vient nullement leur mode de vie ni les paradis que seraient leurs pays
respectifs. Bien plus, plusieurs « impuissants » ignorent même comment
les puissants vivent et même ne veulent pas le savoir. L’essence de la
puissance des « puissants » se réduit à leur capacité de détruire la nature,
de tuer des êtres humains innocents pour assurer leur luxe et leur confort,
pour établir leur illusoire suprématie ! Un pays puissant, c’est d’abord
et surtout un pays belliciste, interventionniste, rompu à l’ingérence, à la
déstabilisation et à la subversion, buveur du sang des sans défense : sa
vocation est de tuer des innocents et des inconnus à travers la planète, de
détruire des nations entières. Toujours pour devenir riche et garantir son
luxe et son confort ! Et assurer ainsi l’immortalité à ses ressortissants
-semble-t-il. Un grand président d’un pays puissant, c’est surtout et avant
tout un excellent assassin qui protège « le monde libre et civilisé » contre
l’espèce humaine.
5
Cf., infra Mitterrand François, p. 134.
6
Une espèce de fourmi jaunâtre qui tremble toujours quand elle est fixée sur la branche
d’un arbre.
15
D’ailleurs dans les pays des « puissants » du « monde libre et
civilisé », on met un point d’honneur à inculquer le goût et à apprendre
l’art de tuer gratuitement aux enfants à partir du berceau, si ce n’est depuis
le sein maternel. Il s’agit probablement de préparer les jeunes à défendre,
à temps et à contre temps, les « puissants » du « monde libre ». Défense
contre qui ? Contre quoi ? Pour dire vrai, les fruits, les résultats de cette
politique sont très encourageants et cette politique doit être maintenue,
doit se poursuivre : très régulièrement, de très jeunes enfants, des gamins
-comme des adultes d’ailleurs-, pour s’exercer, n’hésitent pas, dans les
cours de récréation ou devant le Saint Sacrement, à loger des balles réelles
dans le thorax ou la tête de leurs jeunes compatriotes. Tuer gratuitement,
de préférence un inconnu, un sans défense ou un innocent est un signe de
puissance : il faut bien marquer sa suprématie ! Si on peut tuer gratuitement
un être humain juste pour se faire plaisir, qu’est-ce qui empêcherait de tuer
pour voler le bien d’autrui, pour s’accaparer la terre, le pétrole, l’uranium,
le cobalt, les terres rares d’autrui ?
La sagesse ɓàsàa enseigne que la capacité de nuire, de détruire,
de tuer, n’est ni un signe particulier, ni un privilège, ni l’apanage des
« puissants » ; nul en fait n’a le monopole de faire le mal, de la violence ;
même un « présumé impuissant » peut aussi tuer, et tuer même avec
une élégance certaine. Cette philosophie est énoncée sobrement dans ce
proverbe : Kùùnjàŋ7 i nɔl njɔk -la fourmi Kùùnjàŋ a tué l’éléphant. Il
est donc ridicule et même puéril de justifier sa puissance par sa capacité
de tuer autrui, de tuer celui qui refuse de se laisser asservir, celui qui
s’oppose à l’humiliation, celui qui refuse de se laisser arracher ou voler
son bien qui pourrait être, par exemple, sa terre, son pétrole, son diamant,
ses terres rares, son coltan, son or, son sable, ses grillons et autres
perroquets, son kuŋ ni kuŋ8 ou son kùgnjɔk9 (qui sont deux essences de la
forêt camerounaise), etc. Surtout que le fait de tuer l’autre ne détruit pas,
n’annihile pas la folle envie de tuer, ni l’avidité, ni l’insatiabilité, ni le
sadisme du tueur, de l’assassin, et moins encore ne procure ni ne garantit
au tueur ou à l’assassin l’éternité qui lui permettrait de jouir ad vitam
aeternam, par exemple, du pétrole qu’il aura arraché par les armes à son
légitime propriétaire.
Quand on pense, que celui qui jeta gaiement et triomphalement
la bombe sur Hiroshima a fini sa vie, semble-t-il, dans un asile de fous,
avec probablement une joie égale et le même triomphalisme, et que celui
7
Une espèce de fourmi noire, plus grosse que la précédente et qui dégage une odeur
très désagréable.
8
Un arbre de la forêt du Cameroun.
9
Ibid.
16
qui, sur la base d’un racisme primaire démentiel10 et totalement désho-
norant, ordonna cet exploit qui permit aux « puissants » chrétiens d’ôter
chrétiennement la vie à des innocents sans défense -femmes, vieillards,
enfants, malades, handicapés et même fœtus dont les géniteurs virtuels
n’avaient pas vu le visage- ne jouit pas aujourd’hui du succulent fruit
de son labeur, on est tenté de se poser cette petite question : arme de
destruction massive des « puissants » où est ta puissance ? Les illusions
des « puissants » sont connues, visibles ; mais où est leur victoire ?
Dieu est puissant parce qu’Il donne la vie qu’Il retire aussi quand
Il veut, comme Il veut : Il en est en fait, l’unique et vrai propriétaire. Mais
celui qui quitte son pays avec des bombes, traverse mers et océans pour
aller tuer, trucider, exécuter froidement, à travers la planète et en masse
des vieillards, des enfants, des femmes enceintes, des foetus, des sans
défense, qu’il ne connaît ni d’Eve ni d’Adam et à qui il ne reproche rien,
juste pour la gloriole, pour montrer sa puissance et sa suprématie, pour se
faire plaisir et surtout pour voler le pétrole, le diamant, l’uranium, la terre,
etc., choses qu’il va du reste abandonner quelque temps après son misé-
rable forfait, son pitoyable exploit, parce qu’il aura été rappelé au Père à
son tour, celui-là n’est qu’un vulgaire, méprisable et immature, oui très
immature assassin, un très pitoyable barbare, non pas « un puissant ».
Suite à la mémorable prouesse humanitaire des « puissants » sur le Japon
en 1945, un officier général yankee fit courageusement cette horrible, ter-
rifiante, mais très instructive confession : l’ami du président Roosevelt,
l’amiral Leahy, écrivait alors : « Les Japonais étaient déjà vaincus et prêts
à se rendre… En étant le premier pays à utiliser la bombe atomique, nous
avons adopté la règle éthique des barbares »11. Le jugement d’Albert
Einstein, homme adulé Outre-Atlantique, sur les Etats-Unis, n’était guère
différent. L’homme disait bien : « Les Etats-Unis d’Amérique forment un
pays qui est passé directement de la barbarie à la décadence sans jamais
passer par la civilisation12. » Le fantôme de cet éminent savant devrait
faire un tour en Côte-d’Ivoire, en Libye et en Irak…
Pour sa part, Pierre Mariel, évoquant la très glorieuse époque du Ku
Klux Klan dans les années 20 du siècle dernier, écrit : « La cagoule, autant
que l’aveuglement de la police, autorisant toutes les exactions, tous les
crimes, il se propagea du nord au sud, une épidémie de goudronnages, de
10
MORIN (E.), « Autour d’Hiroshima », in Transversales Science/Culture, n°35, sep-
tembre-octobre 1995, p. 19 ; « Ce fut Truman qui décida pour des raisons supra et infra
militaires. Dans sa décision, il y eut, comme le note l’auteur d’un article, les résidus d’un
racisme qu’il exprimait à 20 ans dans une lettre à sa fiancée où il disait que noirs et
jaunes étaient d’une humanité inférieure et devaient être relégués les uns en Afrique,
les autres en Asie.»
11
Amiral Leahy, cité par Edgar MORIN, op. cit., p. 19.
12
Jeune Afrique, n°1258, du 13 février 1985, p. 61.
17
lynchages, de viols, de pillages. Constamment on découvrait des cadavres
mutilés, des demeures isolées incendiées, des femmes noires violentées.
Menés avec cynisme, les procès se termineront soit par des non-lieux,
soit par des acquittements s’achevant en apothéose. Malgré d’hypocrites
protestations de démocratie et de vertu, les Etats-Unis retournaient à leur
barbarie initiale, celle qui avait été marquée par les fièvres de l’or, la ruée
vers l’Ouest, le massacre des Indiens13.» Ah ! Tulsa 1921 : mémorable
joyeux festival des barbares et petits adultes : 300 Noirs exécutés à la
gloire de la suprématie blanche et de l’illusoire puissance ! Mais bien
avant, en décembre 1890, 300 indiens furent gaiement massacrés aux
Etats-Unis14. Probablement pour célébrer la suprématie de l’homme blanc.
Pour être puissant, il faut d’abord et surtout être odieusement barbare, un
être ostensiblement vil, minable.
En veillant à rester plus concret et plus direct, le Maréchal Hermann
Goering, qui connaissait parfaitement la mentalité et le type d’éducation
de « ses frères blancs » outre atlantique, la moralité des fondateurs de ce
pays, eut cette douce définition, très pertinente, de ce pays super puissant
: « Ce pays de bandits… cette nation de gangsters !»15 En fait, cette dé-
finition n’a jamais été démentie au cours des siècles, de l’extermination
des Indiens, en toute charité chrétienne, par les bons chrétiens venus de
l’Europe chrétienne, aux dernières prouesses en Irak, en Lybie, en passant
par la traite négrière, l’esclavage, le Japon et même le tout récent accapa-
rement des terres au Sud-Ouest du Cameroun par Héraklès. La situation
aujourd’hui, si on se réfère à l’actualité, n’a guère changé. Les fièvres sont
toujours là, plus violentes, plus virulentes, plus immorales, plus abjectes.
Les « hypocrites protestations » aussi. La barbarie est l’âme des puissants,
elle est inhérente et indispensable à leur nature, à leur existence, ils ne
peuvent s’en défaire. Dans ces conditions, des barbares peuvent-ils être la
lumière du monde et dispenser des leçons ? T ! Assurément !
‘
Le beau slogan « je suis puissant parce que je tue des enfants,
même dans leur sommeil, et m’empare des biens de leurs parents », en
fait, n’impressionne plus personne parce que dans leur quête de la raison
d’être de l’homme sur terre, nos ancêtres ont repéré et dénoncé, dans
une brève formule, l’inanité de l’insatiabilité et de l’assassinat aux fins
d’accaparement du bien d’autrui : Gwɔm bi hisi, ù gweé, ù kɔp ; ù wɔ,
ù yek -les choses de la terre , tu nais, tu trouves ; tu meurs, tu laisses. Et
ce n’est pas le roi Salomon, ni la Reine Marie Antoinette, la douce et
tendre moitié de Louis XVI, ni même Alexandre VI Borgia -avec « […]
ses étoffes brodées de soie et d’or, […] ses somptueux ciels de lit […] [et]
13
MARIEL (P.), in La revanche des nazis, Editions J’ai lu l’aventure aujourd’hui, 1971, p.
131. Texte mis en gras par l’auteur.
14
Cf. RFI, ce 18/04/1992, à 14h15. Mémoire citée.
15
SHIRER (W., L.), Le Troisième Reich-des origines à la chute, Tome 1, Editions Stock, 1970, p. 574.
18
l’immense quantité de pièces d’or qu’il [possédait]16. »- qui démentiront
la sagesse ɓàsàa. Et ce pauvre Crésus ne connut-il pas finalement un sort
identique ? Mais où est donc Léopold II, le très magnanime roi belge,
avec ses innombrables tonnes de caoutchouc, sa grande bienveillance
à l’endroit des Noirs et ses immenses camions-citernes pleins de sang
des Congolais ? Pourtant des Congolais naissent toujours, des hévéas
poussent toujours en République Démocratique du Congo, alias ex-Congo
Léopoldville !
Il importe d’ailleurs de signaler ici que le bon Saint François
d’Assise, qui avait connu, adopté et parfaitement assimilé la sagesse
ɓàsàa au Moyen Age, veilla également à l’appliquer dans toute sa rigueur
à l’heure de son retour au Père : au lieu d’exiger ou d’enfiler une tunique
ou une soutane brodée d’or et sertie de diamant pour se présenter à Dieu,
l’homme fit un choix qui surprit et -peut-être- dérouta plus d’un : « […]
sur son lit de mort, il se dévêtit entièrement afin de mourir sans posséder
rien.17 » Malheureusement, l’Histoire ne nous dit pas si, après avoir
vaillamment obtenu le visa de Saint Pierre et fait irruption au paradis
en arborant la tenue de la première femme, Eve, l’oint du Seigneur
n’effaroucha pas une autre femme, Marie, qui, elle, avait eu la chance,
plutôt rarissime, de n’avoir pas connu d’homme...
Contrairement à ce fainéant de François d’Assise, si, par comble
de malchance, il arrive à un « puissant » d’aller au Père en sautant sur les
cadavres de ses victimes en guise de plots et en agitant triomphalement
son drapeau rouge-sang, combien de tonnes d’or, de tonnes de diamant,
de barils de pétrole, de tonnes d’uranium, de tonnes de terres rares, de
tonnes de cobalt, de billes de bois, obtenus après avoir froidement assassi-
né les innocents et légitimes propriétaires de ces choses, combien de sacs
d’euros, de yens, de yuans ou de dollars emportera-il dans son baluchon ?
Secret défense ! Surtout ne rien révéler sur le nombre de bombes qui lui
permettent de tenir en respect des agités, et qu’il montrerait volontiers
au Père : il faut protéger le « monde libre et civilisé ». Contre l’espèce
humaine ! Oui, la sécurité, semble-t-il, garantit l’immortalité! Les bar-
bares sont décidés à détruire, par tous les moyens, toute autre vie que la
leur sur la planète terre, pour jouir, seuls, sans encombre et éternellement
de ce qu’ils auront pris aux autres par les armes. Les puissants-barbares
travaillent à détruire la paix à travers la planète pour instaurer, que dis-je,
imposer, à la place, le règne de la chose, c’est-à-dire le règne de l’argent,
du vice et des bombes. Pour, maintenir, protéger et renforcer les inégali-
tés. Pour assurer la sécurité, le luxe, le confort de l’Occident chrétien, du
monde libre et civilisé et pourquoi pas, pour garantir l’éternité à ses ha-
16
CHAMBERLIN (E.R.), Les Mauvais Papes, Editions Stock, Paris, 1970, p. 170.
LEA (H.-C.), Histoire de l’Inquisition au Moyen Age, Tomes I et II Editions Jérôme Millon,
17
18
Le Canard Enchainé, n°4510, du 4 avril 2007, p. 6. Texte mis en gras par l’auteur.
20
INTRODUCTION
1
La Voix du Paysan, n°33, octobre 1994, p. 12.
2
Ibid.
3
Cameroon Tribune, n° du 25 février 2013.
21
22
CHAPITRE I
I- Les camerounais
Deux apophtegmes, bien connus éclairent le comportement de
l’Etat, tel que défini ci-dessus, au Cameroun.
« A tout seigneur, tout honneur », et encore : « on n’est jamais
mieux servi que par soi-même ». Ces deux maximes nous introduisent
pleinement dans la gestion et la jouissance de la terre et des ressources
naturelles par le pouvoir politico-administratif, qui seul est l’Etat.
Le 16 avril 1957 naît l’Etat du Cameroun de la volonté non pas des
Camerounais, mais de la volonté des Français à travers un décret5. Bien
entendu, les contours, le contenu, le mode de fonctionnement et les ob-
jectifs de cet Etat restent inconnus des Camerounais et même, à la limite,
sont contre les Camerounais. Le 18 février 1958, le même colon fran-
çais confie le pouvoir institutionnalisé et la gestion totale du Cameroun
à Babatoura Ahmadou Ahidjo. Dès lors, ce dernier qui ne voulait pas en-
tendre le mot indépendance -qui combattait l’idée même d’indépendance-
découvre subitement qu’il est l’Etat, étant le seul parmi les Camerounais
à être préféré des Français ; et toujours bien conseillé par ses maîtres
français justement, Ahidjo fait de la terre des Camerounais sa chose, sa
propriété privée. Il ne se prive pas d’en jouir avec une certaine arrogance
–feu Ateba Yene Théodore raconte par le menu comment le « grand cama-
rade » a magistralement joui de « sa terre » en spoliant ignominieusement
toute une famille : « Dans le chapitre III de cet ouvrage, a été évoquée la
4
Le Messager, n°5369, du mardi 27 août 2019, p. 4.
5
Le décret français créant l’Etat du Cameroun n°57-51 du 16 avril 1957, cf. Cameroon
Tribune, n° du 7 décembre 2007, p. 5.
24
politique de spoliation des terrains par l’administration coloniale fran-
çaise sous le vocable de « terrain vacant sans maître ». Ahidjo avait été
à bonne école, et ne manqua pas d’imagination. Il trouva, lui, pour s’ap-
proprier les terrains des pauvres Ewondos originaires de la capitale, le
vocable « utilité publique ». S’ensuivit ensuite la grande braderie entre
les El Hadj, les anciens condisciples de l’Ecole [primaire] Supérieure, les
concubines, les anciens camarades du Bloc démocratique camerounais
d’Aujoulat et les dignitaires de l’Union camerounaise. L’exemple du ter-
rain d’Ekoudou, dit « cité de l’OCAM » ayant appartenu à la famille
Essono Ela, dont les cordons ombilicaux se trouvent enterrés sous les
fondations de l’ancien palais présidentiel est très éloquent pour étayer
cette thèse. En effet, cette pauvre famille de plus de 15 000 personnes en
était à sa cinquième expropriation. Ahidjo avec ses appétits de rapace
prit en 1964 [déjà !] un décret faisant passer ce terrain du domaine pri-
vé au domaine public, dernier vestige de cette infortunée famille, pour y
construire le CUSS (Centre Universitaire des Sciences de la Santé). La
famille Essono Ela fut chassée manu militari au prix d’une maigre in-
demnité d’expropriation. Les pauvres se retrouvèrent dans la rue, errant,
mendiant, privés de tout subside, crevant d’inanition, puisque spoliés de
leur patrimoine grâce auquel ils se nourrissaient en cultivant les terres et
en faisant de l’élevage. Ils furent éparpillés au gré du vent, manquant de
la chaleur humaine inhérente aux regroupements. Devant les jérémiades
et les complaintes, concernant ce cas précis, Ahidjo resta de marbre et
détourna ce terrain de l’usage primitif du décret et après un lotissement
minutieusement suivi à la loupe par lui-même, il le distribua à son entou-
rage. Cette cité est le quartier résidentiel–pilote de Yaoundé, où des villas
somptueuses louées à prix d’or et de diamant, jouxtent les ambassades
des Emirats du golfe Persiques et autres…
Commis-télégraphiste de son état, Ahidjo s’était improvisé ex-
pert-géomètre et spécialiste des affaires domaniales ; une simple vocation
tardive…6» De toute évidence, Ahidjo n’avait pas reconduit l’ordonnance
allemande, à sa manière, pour perdre : « Ahidjo était un homme riche.
Bien ou mal acquis, il avait de multiples biens. Pour les seules provinces
du Nord, de l’Extrême-Nord et de l’Adamaoua, on fait état pour les biens
immobiliers de 20 millions de m2. Sur ces terrains, Ahidjo avait édifié 38
villas et un ranch qui en 1994 ne comptait plus que 2 200 têtes de bétail7.
» Yowàà !
6
ATEBA YENE (T.), Cameroun mémoire d’un colonisé, Edi on L’Harma an, 1988, pp.
133-134. Ahidjo n’a jamais démen cet auteur.
7
Cf. Le Messager, n°855, du vendredi 18 décembre 1998, p. 6. L’Avenir, n°085, du 25 au
31 mai 2020, pp. 1, 6 et 9.
25
Voilà donc une première et parfaite illustration, en période néoco-
loniale, de ce que veut dire, au Cameroun, le dogme, « la terre appartient
à l’Etat ». En effet, jusqu’à son mémorable licenciement comme un vul-
gaire laquais8 par ses maîtres français en 1982, Ahidjo et ses copains lo-
caux et/ou étrangers étaient l’Etat comme on vient de le voir plus haut. Il
faut retenir que cette technique de spoliation des terres initiée par Ahidjo
est toujours, aujourd’hui appliquée, et avec rigueur, par la dynastie qu’il a
si intelligemment et si généreusement créée.
Le Cameroun, depuis 1958, est gouverné par la pègre qui se com-
pose, rigoureusement, d’antipatriotes avérés et irréductibles, de traitres
endurcis, de mercenaires déterminés et obstinés, de femmes et d’hommes
sans dignité, d’hédonistes invétérés et de pitoyables incompétents no-
toires. Ces gens sont l’Etat et exploitent gaiement les Camerounais. En
1994, un éminent professeur de droit des blancs a fait la brillante déclara-
tion suivante, au cours d’une conférence-débat, en réaction à une question
du sociologue Jean Marc Ela, sur la totale impunité dont jouissent cer-
tains Camerounais : « Il faut des gens qui exploitent et ceux qui doivent
être exploités »9. En réalité, ce ponte et pilier du régime, probablement
touché par l’Esprit, a patriotiquement révélé aux Camerounais, tout en
les laissant étrangement médusés, la féroce philosophie qui est à la base
de l’œuvre de la pègre gouvernante. Et d’ailleurs, pour plus de sécurité,
ceux qui exploitent le peuple travaillent en étroite complicité avec des
brigands venus d’ailleurs. Et tout marche à merveille10. Cela nous rappelle
la déclaration faite en 1959 à Rome… La virile et historique déclaration
du professeur de droit faite avec outrecuidance et triomphalisme, a pro-
fondément marqué les Camerounais ; compte tenu des circonstances, de
la stature et de la position de celui qui l’a faite, à l’avenir, inéluctablement,
cette déclaration formera, justifiera et orientera leurs choix, et ce, sur plu-
sieurs générations.
La pègre gouvernante
Il faut que cela soit clair : dire que le Cameroun est gouverné par
la pègre n’est pas un écart de langage, une erreur, une calomnie, une dif-
famation, un mensonge ou une injure. Tout part d’un constat irrécusable,
des faits qui militent en faveur de cette thèse ou de ce constat vraiment
général. Quelques témoignages qui, d’ailleurs, sont la très petite partie
8
Cf. ENOH MEYOMESSE, « La désigna on des dirigeants camerounais par la France :
d’hier à aujourd’hui », in Le Messager, n°4221, du 5 décembre 2014, pp. 6-7.
9
Cf. Galaxie, n°111, op. cit., p. 2.
10
Cf. Culture de la banane à Njombé, pillage de l’or à l’Est -Le Messager, n°5221, du
mardi 15 janvier 2019, pp. 6 et 7-, entre autres.
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visible de l’iceberg :
1- La presse nationale dénonce quotidiennement et nommément
des femmes et des hommes qui, occupant des hautes fonc-
tions dans l’appareil d’Etat ou dans les entreprises et autres
structures à fonds publics, passent le plus clair de leur temps
à voler, à détourner l’argent et les biens publics, et à en jouir
de façon ostentatoire, arrogante, dans une totale impunité. La
prévarication et la corruption font la loi : à titre d’illustration
: Repères, n°438 du 2 septembre 2015 et n°342 du 1er octobre
2013. Emergence n°1459 du jeudi 23 mai 2019. p.5. Le Procès
International n°1004 du 20 décembre 2017 qui titre : La
République des voleurs. Le Messager n°5221 du mardi 15
janvier 2019. A la une des trois journaux ci-après : Aurore
Plus n°969 du 11 septembre 2007. La fin d’un pourri. Abah
Abah au Sed. L’Anecdote n°248- Mardi 25 octobre 2005,
Zacharie Perevet chef de gang. Le Front n°282 du 3 jullet
2008, Le « Motazegate » commence… Tome I. Comment
Motaze a pillé la Cnps. Une de Aurore Plus n°1017 du 3 avril
2008 : Abah Abah, le brigand à l’hôpital Central. Une de
Zenith, n°324 du 14 septembre 2020 ; La force supérieure
des militaires : « Ministère de la défense, De hauts gra-
dés croquent impunément 6 milliards [de Francs CFA].
« Assemblée Nationale. On pille... A la tête de la maffia, le pré-
sident du comité de recasement l’Honorable Théodore Datouo,
vice-président de l’Assemblée nationale…Jamais scandale fi-
nancier n’aura été aussi grand et grotesque que ce qui se passe
à la chambre basse du parlement depuis 2018 », confie le Point
Hebdo n°325 du mardi 26 mai 2020, p. 11. La Tornade n°008
du mardi 21 juillet 2015 révèle quelques comptes bancaires de
certains sobres, probes et intègres citoyennes et citoyens fonc-
tionnaires. Ecœurant ! Renversant. Tout simplement. Parlant
du pillage dans les sociétés publiques et parapubliques, feu
Pius Njawe s’étranglait de colère in Le Messager n°74 du 25
au 30 novembre 1985, p. 2 : « […] il est déplorable, voire
inadmissible, que des compatriotes qui, parce que la Nation
leur a fait confiance à travers son chef, continuent à piller
sans foi ni loi les sociétés et organismes placés sous leur ges-
tion. Mais que dis-je ! Il est révoltant que des camerounais,
à l’ère du renouveau, continuent à gérer le patrimoine de la
Nation comme s’il s’agissait des plantations de leurs pères ou
des beignets de leurs mères.
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Table des matières
Remerciements .................................................................. 11
Prologue ............................................................................. 13
Introduction ...................................................................... 21