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Chapitre 1
Vingt ans de commerce électronique :
bilan et perspectives
Objectifs pédagogiques
•• Appréhender la réalité du commerce électronique et ses développements futurs
•• Définir le commerce électronique et ses variantes
•• Comprendre les évolutions actuelles du commerce électronique
•• Décrire les différentes formes du commerce électronique
•• Décrire les principaux modèles d’affaires dans le commerce électronique
•• Comprendre pourquoi les entreprises et les consommateurs adoptent le commerce
électronique
Depuis le lancement de son premier site Web, dont l’objectif est de venir en aide aux petits
exportateurs, fabricants et entrepreneurs chinois pour vendre à l’international, Alibaba
Group est devenu un leader mondial du commerce en ligne et sur mobile. Il est présent sur
plusieurs segments de marché : à la fois la vente en gros pour les professionnels et la vente
au détail pour les particuliers au niveau national (1688.com) et international (Alibaba.com,
Aliexpress.com).
La progression du groupe a été constante de 1999 à aujourd’hui, les acquisitions et les chiffres
qu’il engendre étant remarquables. Faisons ici un point sur ces différentes évolutions :
- En 2004, Alipay, solution de paiement dématérialisée, est déployée sur les plateformes
d’Alibaba. Il constitue un véritable concurrent de PayPal.
- En 2008, Taobao Mall est lancé. Il offre la possibilité aux marques internationales de vendre
directement aux consommateurs chinois (B2B2C).
- En 2009, Alibaba acquiert un fournisseur d’accès chinois (HiChina) et lance son activité de
cloud computing : Alibaba Cloud.
- À partir de 2014, Alibaba ouvre des centres de distribution dans l’ensemble de la Chine afin
de développer ses ventes dans les zones rurales. Le groupe vise 3 000 centres logistiques
intermédiaires et 100 000 centres logistiques en zones rurales, au niveau des villages. La
même année, le groupe entre en Bourse aux États-Unis.
- La valeur des biens échangés sur Tmall, site du groupe présent sur le segment du B2C,
s’élève en 2015 à 166 milliards de dollars (soit 2,5 fois le total du commerce électronique fran-
çais dans son ensemble), dont 75 % est réalisé sur mobile. Tmall devient ainsi la première
entreprise au monde en termes de chiffre d’affaires sur mobile.
Le groupe est désormais présent dans de très nombreuses activités liées aux médias digitaux
avec Youku Tudou (plateforme de vidéo en ligne), China Morning Post (informations), et la
vidéo en ligne, avec un accord de distribution avec Disney pour la diffusion du catalogue en
Chine. Le groupe Alibaba a également créé le système d’exploitation mobile Aliyun.
Lors de l’édition 2016 de la conférence « Alibaba’s Taobao Maker’s Fair », Alibaba a donné la
possibilité aux visiteurs de tester une expérience d’achat en réalité virtuelle. Pas moins de
70 environnements 3D simulant des boutiques étaient ainsi accessibles, ce qui préfigure le
futur service d’achat en réalité virtuelle Alibaba Buy+.
Pour compléter sa stratégie, Alibaba investit depuis 2016 dans le commerce physique, en
acquérant des participations dans plusieurs groupes de distribution, dont par exemple 32 %
de Sanjiang Shopping Club, chaîne d’épiceries locales. Début 2017, il prend une participation
dans Intime Retail Group, un opérateur de grands magasins en Chine qui possède 29 grands
magasins et 17 centres commerciaux.
Sources : alibabagroup.com ; fr.wikipedia.org ; fr.finance.yahoo.com ; sec.gov
Questions :
Quels sont les différents modèles d’affaires du groupe Alibaba ?
Qu’est-ce qui conduit Alibaba à penser que nous achèterons des biens ou des services en
réalité virtuelle ?
Depuis l’ouverture au grand public du réseau au début des années 1990, Internet s’est
progressivement transformé en un canal de distribution électronique au sein duquel les
entreprises et les consommateurs échangent et commercialisent des biens et des services.
Conçu à des fins militaires puis universitaires, le réseau Internet n’avait pas pour vocation
initiale de permettre la réalisation de transactions commerciales, encore moins de se subs-
tituer à des canaux de distribution existants. Cette transformation d’Internet en un espace
ainsi désormais aussi bien depuis un téléphone mobile ou une tablette, que depuis d’autres
objets connectés à Internet comme par exemple la cafetière Nespresso dans sa version B2B
pour la recommande automatique de capsules, la Renault Zoé intégrant des services connectés
ou encore un bouton connecté comme celui d’Amazon (Amazon Dash). Par ailleurs le déve-
loppement des ventes en ligne avec retrait en magasin, en point de retrait ou en drive rend
la tâche encore plus difficile lorsque l’on souhaite apprécier finement la part des ventes en
ligne dans l’ensemble des transactions marchandes.
Le poids du commerce électronique dans l’économie reste donc délicat à évaluer. Les statis-
tiques officielles des États l’appréhendent difficilement. La réalité du commerce électro-
nique est également très différente selon les régions du monde, tout comme elle l’est selon
les secteurs dans lesquels il se déploie. En outre, pour certaines industries, ce nouvel espace
économique n’est pas toujours appréhendé comme une opportunité de développement.
1.1.1. Une réalité statistique encore mal définie
Les entreprises n’ont pas attendu la disponibilité d’Internet pour réaliser des transactions
électroniques. Depuis la fin des années 1980, elles utilisent l’échange de données informa-
tisé, ou EDI, comme infrastructure d’échanges électroniques. En 2015, les ventes par EDI
continuent de représenter une part susbantantielle du commerce électronique en France
puisque 6 % des entreprises réalisent en moyenne 12 % de leur chiffre d’affaires par ce biais3.
L’appareil statistique des États peine encore souvent à identifier avec exactitude cette forme
de commerce4.
Ainsi, les statistiques américaines ont longtemps inclus le commerce électronique dans une
catégorie regroupant les ventes par correspondance et les échanges EDI. Les statistiques
françaises englobent également dans une même catégorie la vente à distance et le commerce
électronique. Au niveau européen, des difficultés semblables existent, même si l’Union
européenne a désormais standardisé des indicateurs qui permettent d’établir de meilleures
comparaisons entre les pays membres. Toutefois, les indicateurs européens ne résolvent pas
l’épineuse question du périmètre. Il existe bien des tentatives, tant aux États-Unis5 qu’en
France6, pour mieux définir le périmètre du commerce électronique et préciser la nature des
transactions prises en considération, mais elles n’ont pas abouti à ce jour. Les estimations
du volume des transactions électroniques sont en effet délicates à effectuer avec précision,
du fait de la nature internationale du réseau et de la possibilité de réaliser des transactions
dans le monde entier depuis un pays comme la France. Ainsi, en 2016, 18 % des Européens
ont acheté des produits en ligne en provenance d’un autre pays7.
Ni les données de paiement en ligne par cartes bancaires, ni les données douanières ne
permettent de reconstituer le volume exact de transactions. Ces éléments permettent juste
de mesurer approximativement l’ampleur de cet espace économique. Par conséquent, il
convient d’être prudent sur les différentes estimations du volume des transactions et leur
progression.
3. Voir « Chiffres clés du numérique édition 2016 », DGE, ministère de l’Économie et des Finances, janvier
2017.
4 Voir par exemple le débat aux États-Unis, http://www.census.gov/newsroom/press-releases/2016/
cb16-rtq03.html.
5. Pour les États-Unis, voir https://www.census.gov/programs-surveys/e-stats.html.
6. Voir « Rapport du groupe de travail sur le commerce électronique », Direction des Statistiques d’Entre-
prises, Insee, document de travail, septembre 2008, disponible à l’adresse http://www.insee.fr/fr/
themes/document.asp?reg_id=0&id=2323.
7. Eurostat, http://ec.europa.eu/eurostat/data/database.
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progression du format « drive » (voir chapitre 8) en France au cours des dernières années,
avec actuellement plus de 2 800 drives.
1.1.4. Une réalité d’usages variable
Même si l’on assiste à une homogénéisation progressive des comportements d’usages d’In-
ternet pour des transactions marchandes, son utilisation pour effectuer des achats n’est pas
encore totalement répandue au sein de la population. Ainsi, sur 46,4 millions d’internautes
en France, 35,5 millions achètent en ligne18. Si l’on observe les comportements d’achat en
ligne, les différences entre les générations ont tendance à s’estomper au fur et à mesure des
années. Il n’en demeure pas moins que, en 2016, les plus réfractaires à ce type d’achat se
trouvent encore chez les plus de 65 ans, avec 13,3 % de cette catégorie qui n’achètent jamais
en ligne contre seulement 1,1 % chez les 35-44 ans19.
1.1.5. Une réalité financière et commerciale difficile
Souvent présenté comme un eldorado, le secteur du commerce électronique connaît depuis
ses débuts une réalité plus contrastée :
• Les chiffres d’affaires progressent régulièrement d’environ 20 à 30 % par an, mais après
vingt ans de développement, le commerce électronique (particuliers et entreprises) ne
représente encore qu’une faible proportion des échanges marchands.
• Sur 200 000 sites marchands français, 95 % ont un chiffre d’affaires annuel inférieur
à 1 million d’euros et seuls 0,6 % réalisent un chiffre d’affaires mensuel supérieur à
10 millions d’euros20. Par ailleurs, 78 % des sites réalisent moins de 1 000 transactions
par mois21.
• En 2016, moins de la moitié (45 %) des personnes interrogées dans les 28 pays de l’Union
européenne ont effectué un achat en ligne au cours des trois derniers mois.
• Les entreprises présentes sur Internet existent en grand nombre et sont parfois profita-
bles… mais un leader comme Vente-privée ne réalise en France que le chiffre d’affaires
d’une dizaine d’hypermarchés (Leclerc en compte près de 500 sur le sol français). La
distribution en ligne, même lorsqu’elle constitue une indéniable réussite, reste modeste
dans une problématique plus vaste de distribution dans laquelle des entreprises de taille
mondiale opèrent depuis de nombreuses années.
• Au fur et à mesure de la croissance d’Internet, le nombre de sites marchands augmente.
Début 2017, on l’estime à 200 000 en France, soit dix fois plus qu’il y a dix ans22. Attirer
des clients sur un site dans un tel univers concurrentiel devient de plus en plus coûteux
et complexe (voir chapitre 6), ce qui rend difficile l’équilibre économique de nombreux
sites.
• La généralisation de la connectivité a fait émerger des plateformes de taille mondiale,
comme Airbnb, Uber ou Netflix. Celles-ci déstabilisent très rapidement des secteurs
entiers très établis, grâce à une réingéniérie des transactions (souvent à partir d’un
modèle de place de marché, voir section 3.2.7), accroissant d’autant la pression concur-
rentielle dans ces secteurs.
• Les transactions électroniques sont nombreuses, mais le réseau permet aussi de
contourner les logiques marchandes et ne conduit donc pas nécessairement à la création
de valeur économique (échange peer-to-peer de musique ou de vidéos entre particuliers,
18. Voir « Observatoire des usages d’Internet », Médiamétrie, 2016, Chiffres clés Fevad, 2016.
19. Voir « Les nouvelles générations de l’e-commerce en France », PwC, 2016, http://www.pwc.fr/fr/
assets/files/pdf/2016/06/pwc_ecommerce_en_france_2016.pdf.
20. Chiffres clés Fevad, 2016.
21. Chiffres clés Fevad, 2016.
22. Voir « Bilan 2016 du e-commerce en France : le cap des 70 milliards a été franchi », Fevad, http://www.
fevad.com.
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• L’encastrement des transactions directement dans des objets. L’Internet des objets (en
anglais, Internet of Things ou IoT) ajoute à de nombreux objets une connectivité qui les
transforme en interfaces marchandes comme la voiture, la cafetière, la montre et bien
d’autres objets à venir. Avec ses boutons connectés (Amazon Dash) et son terminal intel-
ligent à interface vocale (Amazon Echo), Amazon est largement en avance dans ce déve-
loppement et simplifie encore plus l’expérience de l’achat depuis le domicile.
• La poursuite de la croissance du commerce entre particuliers. Le succès du site fran-
çais Leboncoin.fr en atteste (leboncoin.fr/). Sur le marché français, il dépasse en
audience un leader mondial comme eBay. Cette tendance se poursuivra grâce aux sites
de l’économie collaborative, qui se développe dans de nombreux domaines : location
d’appartements (airbnb.com), de voitures (drivy.com) et de tous types d’objets (zilok.
com), site de covoiturage (blablacar.fr).
• Le développement du social commerce par l’imbrication croissante des offres marchandes
dans les réseaux sociaux comme Facebook, Pinterest, Twitter ou Instagram. Plus encore,
l’arrivée à maturité des applications de messageries instantanées et des technologies
d’intelligence artificielle facilitera le développement des transactions par ce canal,
comme c’est déjà le cas dans l’application Messenger de Facebook ou WeChat en Chine.
Une partie des transactions marchandes (commande de billets, réservation, etc.) sera
prise en charge par des robots de conversation (chatbots) dans ces canaux.
• L’hybridation croissante du commerce physique et du commerce électronique, qui fera
du site marchand un élément parmi d’autres du commerce connecté.
• La diversification des sources de revenus, avec des modèles d’affaires (business models)
hybrides (marge commerciale, commissions sur les ventes, prestations de service, etc.).
• Le développement de dispositifs de réalité augmentée et de réalité virtuelle (comme les
lunettes holographiques Hololens de Microsoft ou les Google Glass qui n’ont pas à ce jour
rencontré un succès d’usage) permettra d’accroître l’expérience d’achat en combinant des
données numériques à un achat dans le monde physique.
• Dans le commerce entre organisations, la substitution progressive de l’EDI par d’autres
technologies comme les Web Services ou les Application Programming Interface (API).
1.2.1. Évolution des technologies vs celle des usages
L’environnement des activités de e-business est sensiblement plus instable que les autres
secteurs, les technologies évoluant à grande vitesse. En revanche, il faut bien garder à l’es-
prit que les usages évoluent nécessairement moins vite que les technologies. Par exemple,
si le m-commerce est technologiquement possible depuis plusieurs années, on constate que
les usages n’ont réellement décollé que très récemment en Europe. Il en va de même pour
la SVOD (Subscription Video On Demand) : la technologie est commercialement prête depuis
2005, mais, en 2016, seuls 35,7 % des internautes français avaient déjà payé pour visionner
un programme en vidéo à la demande en paiement à l’acte (VOD) et 10,7 % en abonnement
(SVOD)23.
L’exercice de prospective est donc particulièrement complexe en matière de commerce élec-
tronique. Qui aurait pensé, il y a dix ans, que la publicité prendrait la forme dominante de
liens promotionnels sur des moteurs de recherche (SEA, Search Engine Advertising) ? Qui
aurait pensé que le commerce entre particuliers (C2C, Customer to Customer) allait devenir
l’une des formes les plus dynamiques du commerce moderne ? Qui aurait parié sur le succès
des boutons connectés Amazon Dash ?
24. Voir « Le baromètre du numérique 2016 », CGE, ANN, ARCEP, CREDOC, 244 p., octobre 2016.
25. op. cit.
26. op. cit.
27. op. cit.
28. Voir CNNum, « Citoyens d’une société numérique – Accès, Littératie, Médiations, Pouvoir d’agir : pour
une nouvelle politique d’inclusion ».
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Chapitre 1 Vingt ans de commerce électronique : bilan et perspectives 19
29. Règlement (UE) n° 330/2010, Journal officiel de l’Union européenne, 23 avril 2010.
30. Voir https://ec.europa.eu/priorities/digital-single-market_fr.
31. Voir https://en.wikipedia.org/wiki/Internet_Tax_Freedom_Act.
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Chapitre 1 Vingt ans de commerce électronique : bilan et perspectives 21
En Europe, aucun État membre n’a souhaité soustraire les ventes en ligne à la TVA. En
outre, des taxes européennes sur certains produits numériques, telles que la taxe pour la
copie privée en Belgique, en France ou en Allemagne sur les supports numériques, qui s’ap-
pliquent aussi aux ventes en ligne, n’existent pas aux États-Unis. La problématique réside
désormais dans la taxation des bénéfices des entreprises extra-européennes qui, grâce à une
optimisation fiscale poussée, échappent presque à l’impôt sur les sociétés en Europe. L’OCDE
travaille sur un cadre fiscal international renouvelé qui modifiera à terme sensiblement cette
problématique32.
2. Du e-business au e-commerce
Le développement rapide d’Internet a conduit à une multiplication des services disponibles
sur le réseau. De l’apprentissage des langues aux services financiers en passant par l’achat
de vidéo ou de musique en ligne, de l’impression de livre à la demande au paiement en ligne
des impôts, des formulaires administratifs en ligne au e-learning, les activités sur Internet
sont extrêmement nombreuses et variées. Des services marchands et non marchands s’y
côtoient, tout comme des services illégaux (téléchargement de musique, de films, de livres
ou de logiciels).
Le terme générique de e-business désigne ainsi toute activité économique réalisée sur
Internet. Le commerce électronique n’est qu’une partie de cet ensemble plus vaste d’acti-
vités qu’est le e-business. Mais de nombreuses personnes utilisent indifféremment les deux
termes.
Aussi, il n’est pas toujours aisé de cerner avec justesse ce que l’on entend par « commerce
électronique ». Afin de clarifier cette notion, le recours à des catégorisations met en évidence
les caractéristiques majeures des différentes variantes et permet de préciser la notion de
commerce électronique retenue dans cet ouvrage.
la loi du 21 juin 2004, dite « loi pour la confiance dans l’économie numérique » (LCEN), qui
précise qu’il n’est pas possible de priver un consommateur « ayant sa résidence habituelle
sur le territoire national de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la
loi française relative aux obligations contractuelles, conformément aux engagements inter-
nationaux souscrits par la France ».
La LCEN définit les règles à respecter pour les consommateurs, mais aussi pour les profes-
sionnels.
L’article 1369-1 du Code civil prévoit désormais que « quiconque propose à titre profes-
sionnel, par voie électronique, la fourniture de biens ou la prestation de services met à dispo-
sition les conditions contractuelles applicables d’une manière qui permette leur conserva-
tion et leur reproduction… ».
Il est indiqué que les mêmes dispositions du Code civil (article 1369-3) précisent les condi-
tions dans lesquelles, entre professionnels, il peut être dérogé à certaines règles en matière
de contrat électronique.
nistration. En France, l’État a par exemple développé un portail d’accès à de très nombreux
services pour les citoyens, accessible à cette adresse : http://www.service-public.fr.
2.1.4. Le commerce G2B (Government to Business)
Il s’agit des solutions électroniques mises en place par les structures publiques (adminis-
trations, collectivités territoriales) pour gérer les relations et les démarches des entreprises
avec ces institutions. Ce sont des sites qui centralisent les appels d’offres publics des adminis-
trations, comme le site http://www.achatpublic.com/. Mais cette catégorie inclut égale-
ment les systèmes de dématérialisation de certaines déclarations (liasses fiscales, déclara-
tion de TVA, déclarations douanières), qui ont depuis plusieurs années été dématérialisées
grâce à l’EDI et migrent pour certaines sur Internet, comme la déclaration de TVA (http://
www.impots.gouv.fr).
2.1.5. Le commerce C2C (Consumer to Consumer)
Ce type de commerce existait avant Internet (petites annonces entre particuliers). Internet
lui donne une nouvelle dimension puisqu’il démultiplie les possibilités d’échanges et facilite
la recherche d’un bien selon de nombreux critères portant sur le produit, le vendeur ou sa
localisation. Un site d’enchères comme http://www.ebay.com a su très tôt mettre en place
une structure fiable et robuste pour ce genre de commerce en offrant de nombreux services à
valeur ajoutée comme l’évaluation des vendeurs et des acheteurs, des outils marketing et des
solutions de paiement. Un site comme http://www.leboncoin.fr/ est un exemple de site de
type C2C fondé sur la simplicité et la proximité géographique des acheteurs et des vendeurs.
L’ouvrage se focalise sur les deux premières formes de commerce électronique (B2C et B2B)
et, dans une moindre mesure, sur la dernière (C2C). Ce choix repose sur l’existence d’une
transaction fondée sur le transfert de propriété d’un bien ou d’un service.
e-commerce
pur
Dimension produit
Produit numérique
Dimension process
Numérique Physique Physique Commerce tradi- Achat d’un jeu vidéo sur
tionnel CD-ROM dans un magasin
Micromania
Physique Physique Numérique Commerce élec- Achat d’un livre sur Fnac.
tronique classique com
Cette typologie met en avant le fait que les technologies mobilisées dans ces différentes
configurations ne sont pas identiques.
Ainsi, dans une opération « un acheteur/un vendeur », très représentative du commerce
B2B, les relations électroniques entre entreprises reposent encore massivement sur des tech-
nologies EDI. Dans ce cadre, les besoins de sécurisation et d’authentification des transac-
tions nécessitent l’utilisation de technologies différentes de celles employées dans d’autres
types de transactions électroniques, notamment les transactions B2C.
Les transactions « un vendeur/plusieurs acheteurs » correspondent à celles des sites de
commerce électronique orientés vers le grand public ou des publics ciblés. Cette catégorie
est la plus développée actuellement sur Internet.
Les transactions « plusieurs acheteurs/plusieurs vendeurs » correspondent à la logique des
places de marché et sont plutôt destinées aux entreprises. Ces places de marché sont initiale-
ment conçues pour gérer les achats et l’approvisionnement des entreprises, même si la plus
belle réussite de place de marché électronique est un modèle C2C : eBay.com. Il faut égale-
ment garder à l’esprit que les plus grandes places de marché électroniques sont les Bourses
comme le NASDAQ.
Enfin, les transactions « un acheteur/plusieurs vendeurs » correspondent à la logique des
centrales d’achat. Peu de sites de cette nature ont vu le jour. Ils offrent généralement un
ensemble de services qui facilitent les relations entre fournisseurs et distributeurs (voir
section 3).
L’ouvrage aborde à la fois les technologies génériques du commerce électronique et les
problématiques techniques spécifiques aux relations entre entreprises lorsque celles-ci
s’éloignent fortement de celles utilisées dans le commerce B2C.
La multitude des formes de commerce ne saurait se résumer à ces trois typologies. En
effet, au sein même de ces diverses formes de commerce électronique, on retrouve diffé-
rents modèles d’organisation des transactions et de génération des revenus. Dans le cadre
du commerce électronique, de nombreux modèles d’affaires coexistent. La section suivante
synthétise l’ensemble des modèles d’affaires répertoriés à ce jour.
constitués de briques et de ciment) qui ont complété leur activité de vente en magasin par
un site marchand. On parle alors de distributeurs click and mortar, comme la Fnac (avec
Fnac.com), Auchan (avec Auchandirect.fr), etc. Des distributeurs par catalogue, comme
La Redoute, ont également développé des activités de vente en ligne. On parle alors de
distributeurs click and paper. Les vépécistes d’antan se sont transformés en « VADistes », en
passant de la vente par correspondance à la vente à distance.
Le commerce en ligne est particulièrement pertinent quand il s’agit de produits numériques
comme l’information ou la musique, pour lesquels toute la chaîne est numérisée, y compris
la livraison. Les Anglo-Saxons donnent le nom de « bits vendors » à ces entreprises entiè-
rement numériques, comme Telecharger.com de 01.net ou iTunes Music Store d’Apple.
Le marché des biens virtuels est également en forte croissance, qu’il s’agisse de mondes
virtuels, de jeux massivement multijoueurs (MMORPG) comme World of Warcraft, de jeux
sur les réseaux sociaux comme Farmville (social gaming), mais aussi d’enseignement avec les
MOOC (Massive Open Online Courses).
D’autres modèles de marchands en ligne ont émergé durant ces dernières années, comme les
sites de déstockage (la frontière avec les sites de vente privée, dont nous parlons ci-dessous,
est parfois mince). On trouve également des sites « horizontaux » qui rassemblent les acteurs
d’une profession, par exemple les libraires (ici la frontière avec les galeries marchandes,
dont nous parlons aussi ci-dessous, est également ténue). Les cybermarchés font également
partie de cette catégorie de sites, dont le volume d’affaires est appelé à se développer.
Exemples de sites : amazon.fr, overstock.com, lastminute.com, cdiscount.com, mistergooddeal.
com, houra.fr, woot.com, playfish.com
Ce modèle d’affaires repose sur un flux de revenus liés à la mise en ligne des produits à la
vente (montant fixe et/ou pourcentage de la transaction). Au-delà de ce modèle, le site est
désormais utilisé comme canal de vente par les professionnels, à la manière d’une galerie
marchande (le site perçoit un abonnement spécifique pour l’hébergement de la boutique).
Pour la plupart, il s’agit de petites entreprises, mais certaines réalisent un chiffre d’affaires
supérieur à 5 millions d’euros. Le développement d’eBay s’accompagne d’une diversification
liée dans les systèmes de paiement (PayPal). Derrière eBay, d’autres acteurs se pressent pour
tirer profit également de cette nouvelle façon d’acheter et de consommer. Ainsi, en France,
PriceMinister.fr et Leboncoin.fr concurrencent fortement le leader. Néanmoins, l’un des
facteurs clés de succès dans ce modèle d’affaires repose sur le nombre d’objets en vente (et
corrélativement le nombre d’acheteurs), ce qui induit une forte concentration du marché et
limite naturellement le nombre de concurrents.
Le C2C marchand inclut également les sites de l’économie collaborative dont le modèle
consiste à mettre en relation des individus qui mettent un bien (véhicule, logement, objet)
ou un service (livraison, travaux domestiques, prestation intellectuelle) à disposition
d’autres individus. Ces sites connaissent un très grand succès et perturbent fortement les
marchés sur lesquels ils se déploient, grâce à un modèle d’intermédiation qui nécessite peu
d’investissements au-delà de la plateforme technologique.
Exemples de sites : ebay.fr, priceminister.com, leboncoin.fr, placedesventes.com, taobao.com
La place de marché électronique se rémunère à partir des droits d’entrée, des commissions
fixes (par exemple pour la mise en ligne d’un appel d’offres) et des commissions variables, en
fonction des transactions réalisées. Les modèles d’affaires ont fortement évolué en quelques
années et la plupart des entreprises survivantes vendent désormais des prestations intel-
lectuelles et technologiques. La frontière entre le commerce et le conseil est parfois mince.
Exemple : Covisint était un projet très ambitieux de l’industrie automobile qui a fini en simple
prestataire technologique après un échec retentissant. Conçue pour être une plateforme
mondiale de gestion électronique des approvisionnements, de la chaîne logistique et, à terme,
du client final, elle n’a jamais percé, confrontée à l’existence de multiples autres places de marché
concurrentes et à des stratégies des constructeurs automobiles pas toujours très claires à son
égard. Devant le très faible volume de transactions et les pertes importantes, Covisint a cédé la
partie enchères inversées à Freemarkets, elle-même rachetée par Ariba. Covisint est aujourd’hui
une SSII spécialisée dans les transactions électroniques.
Sources : http://www.01net.com, 2006 ; Howard M., Vidgen R., Powell P., 2006, http:/www.covisint.com
Exemple : Kalidea est une plateforme de produits et de services qui s’adresse aux comités
d’entreprise (CE). Elle fonctionne soit sur le modèle de l’achat/revente (marge commerciale
prélevée sur les ventes), soit sur celui de l’intermédiation (commission prélevée sur les ventes).
La société propose environ 60 000 offres, « de l’assistance juridique à l’organisation d’événements
pour les CE, en passant par les chèques-cadeaux et les voyages pour les salariés ». La société a
cinq agences physiques à partir desquelles elle démarche les CE avec une force de vente. Elle vise
également les TPE, qui n’ont pas d’obligation d’avoir de CE.
Sources : Le Journal du Net ; http://www.kalidea.com/
Avec quelques années de recul, on constate que les places de marché électroniques s’ins-
crivent dans un mouvement plus général de e-sourcing, qui consiste à utiliser les nouvelles
technologies de l’information pour identifier les fournisseurs, gérer les appels d’offres et
négocier afin d’abaisser le coût des achats.
Les applications de sourcing permettent de gérer les catégories d’achat, de standardiser
et de préparer les demandes de devis (Requests For Quotation, RFQ) et les appels d’offres
(bids), de gérer la base de fournisseurs, de prendre en charge le workflow (du brouillon de
demande jusqu’au contrat final), de partager un espace de travail avec les fournisseurs et
d’échanger des informations, de suivre les achats dans le temps, etc. Ces applications de
sourcing s’adressent aux professionnels des achats, y compris des achats de production.
En prolongement du e-sourcing, on trouve la démarche de e-procurement, qui vise à réduire
les coûts administratifs liés aux achats (essentiellement pour les achats hors production,
comme l’informatique, les fournitures de bureau, les consommables, la formation, etc.).
Cette démarche s’appuie sur des solutions applicatives qui permettent aux grandes entre-
prises de créer des catalogues sur mesure incluant leurs fournisseurs, puis d’y donner accès
à leurs collaborateurs (parfois plusieurs milliers) afin qu’ils puissent les consulter, passer
commande en ligne, obtenir les autorisations d’achat et, éventuellement, payer en ligne. Les
systèmes comptables sont liés à ces applications via les applications ERP (Enterprise Resource
Planning).
Exemple : 123industries permet la diffusion et la consultation d’appels d’offres dans le domaine
industriel (métal, plasturgie, électricité et électronique, emballage, transport et logistique),
appels d’offres qui peuvent venir du secteur privé ou du secteur public. Le site permet égale-
ment la recherche de fournisseurs nationaux ou régionaux. Il propose la diffusion de communi-
qués de presse, ainsi que des offres d’emploi. Les informations sont disponibles sur le site, mais
sont également diffusées par newsletter sectorielle. Le site organise également des journées de
rencontres avec les fournisseurs, édite des guides sur les achats industriels et réalise des obser-
vatoires professionnels (observatoire de la machine-outil, par exemple).
Source : http://www.123industries.com
Face à ces échecs et au développement du e-sourcing, on constate que les modèles d’affaires
des places de marché électroniques ont évolué d’un côté vers le référencement (plus ou
moins sophistiqué) de fournisseurs et, de l’autre, vers la vente de prestations intellectuelles
(conseil) et technologiques (applications). Au sein de ce marché, on distingue plusieurs
types d’activités :
• Les annuaires, guides d’achat et comparateurs qui aident les acheteurs à s’orienter et à
choisir les meilleures prestations. Certains guides s’adressent plutôt à des structures de
petite taille, alors que d’autres concernent également les grands comptes, comme Bobex
(Buyers Online Business Exchange). La plupart sont généralistes, mais d’autres tentent
une spécialisation sectorielle pour se différencier. L’un des facteurs clés de succès de ce
Exemples de sites : 123industries.com (site diffusant des appels d’offres), Hubwoo.com (e-procu-
rement), companeo.fr (place de marché généraliste), bobex.fr (place de marché de devis)
35. Ces deux sociétés fournissent des solutions logicielles pour ajouter les fonctionnalités de place de
marché, voir chapitre 4.
36. D. S. Evans ( 2011), Platform economics: Essays on multi-sided businesses, Createspace ; D. S. Evans et
R. Schmalensee (2016), Matchmakers: The new economics of multisided platforms, Harvard Business
Review Press ; G. G. Parker, M. W. Van Alstyne et S. P Choudary ( 2016), Platform revolution: How
networked markets are transforming the economy – And how to make them work for you, WW Norton & Co.
37. S. P. Choudary, (2015), Platform scale: How an emerging business model helps startups build large empires
with minimum investment (2015), Platform Thinking Labs ; Renaissance numérique, Plateformes et dyna-
miques concurrentielles.
©2017 Pearson France - E-commerce - Henri Isaac
36 Partie I Concevoir le commerce électronique
mateur envers le commerce électronique, mais également par la qualité des services offerts
et par le plaisir pris à acheter en ligne (Ha et Stoel, 2009).
4.1.2. Les motifs de non-adoption du canal électronique
L’achat en ligne présente aussi pour de nombreux consommateurs un risque élevé qui inhibe
leur intention d’achat (Gutiérrez et al., 2010). Au-delà du risque perçu, les enquêtes et
recherches sur les raisons de la non-utilisation d’Internet pour effectuer des achats mettent
en évidence trois arguments majeurs.
La dématérialisation de l’interaction avec le produit
L’absence de possibilité d’interaction avec l’objet acheté constitue le premier frein à l’utilisa-
tion du commerce électronique. Nombreux sont encore les consommateurs qui souhaitent
appréhender de visu le produit, le manipuler avant l’achat. C’est d’autant plus vrai que le
produit constitue un achat impliquant.
L’absence de confiance dans le paiement en ligne
Cet obstacle au développement du commerce électronique, bien qu’en diminution, constitue
toujours une raison majeure au refus d’effectuer un achat sur un site marchand. Les
problèmes de piratage des données de carte bancaire effraient certains consommateurs. Les
efforts pour améliorer la sécurité des transactions en ligne semblent encore insuffisants aux
yeux d’une catégorie de consommateurs (voir chapitre 4). La possibilité de payer à réception
de la marchandise est peu utilisée par les sites marchands et peu mise en avant par les sites
qui proposent cette modalité de paiement.
Le service après-vente et le retour des produits
Bien qu’étant encadrée par les obligations liées à la vente à distance, la vente par Internet
comporte un risque lié à la gestion des retours de produits en cas d’insatisfaction du client.
Certains consommateurs craignent un manque de fiabilité dans la gestion des processus
de retour de produits défectueux ou insatisfaisants. Comment s’effectuera le traitement
d’un litige en cas de produit défectueux ? Comment s’organisera le retour de celui-ci ? Qui
prendra en charge les frais de retour ? Est-ce qu’un service après-vente existe réellement
chez un marchand en ligne ? Ces interrogations sont suffisamment fortes chez certains
consommateurs pour les dissuader d’effectuer un achat en ligne. Avec le développement des
achats en ligne, la livraison elle-même devient un obstacle à l’achat en ligne. Sans prise de
rendez-vous, la livraison peut être compliquée et contraindre fortement le client en termes
de temps, puis conduire à un fort mécontentement qui aboutira à un abandon du canal élec-
tronique.
4.1.3. L’influence des caractéristiques personnelles et des situations d’achat
L’achat en ligne est un comportement qui n’est pas sans rapport avec les caractéristiques
personnelles de l’individu. Des recherches ont notamment montré que certains traits de
personnalité favorisent l’usage d’Internet, l’achat ou la vente en ligne (McElroy et al., 2007).
Les consommateurs impulsifs sont ainsi plus susceptibles que les autres d’adopter le canal
électronique, de même que les consommateurs les plus autonomes, ceux qui décident par
eux-mêmes (Domina et al., 2012).
Les traits culturels ne sont pas non plus sans rapport avec l’adoption du canal électronique,
notamment dans sa version mobile. Ainsi, les individus issus de cultures qui ne craignent pas
l’incertitude sont plus susceptibles que les autres d’acheter en ligne (Tengti, 2009). Il faut se
méfier des généralisations car certains facteurs expliquent l’adoption du e-commerce dans
certains pays, mais pas dans d’autres. Ainsi, la facilité d’usage perçue explique l’achat en
ligne aux États-Unis, mais non en Allemagne (Smith et al., 2013).
L’achat en ligne est aussi un comportement fortement marqué par la situation économique
et sociale de l’individu. Plus l’individu dispose de ressources (revenus, éducation, etc.), plus
la probabilité qu’il achète en ligne est élevée. Cette probabilité dépend également des situa-
tions concrètes auxquelles font face les consommateurs. S’agit-il d’un achat pour soi ou d’un
cadeau ? Le consommateur dispose-t-il de plusieurs jours ou de quelques heures ?
Finalement, les motivations des consommateurs à acheter en ligne varient également en
fonction des phases du cycle de vie et selon certains événements. Ainsi, la survenance d’une
maladie ou l’arrivée d’un enfant peuvent inciter les consommateurs à acheter en ligne (Hand
et al., 2009).
Dans de nombreux pays, un écart se creuse entre ceux qui utilisent communément les tech-
nologies d’Internet et les autres. Sous peine de voir cet écart se creuser dangereusement
(on parle de fracture numérique ou de « digital divide »), la question de l’accès à tous aux
nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) devrait certaine-
ment faire l’objet d’actions vigoureuses de la part des gouvernements. En plus d’un effort
général pour démocratiser et généraliser l’usage des technologies, développer l’achat en
ligne passe aussi par le ciblage de populations spécifiques, comme les personnes âgées ou
les populations adolescentes.
tivement à la sécurité des données, à la fiabilité des réseaux ou à la flexibilité des dispositifs
de e-commerce (scalability). Ce dernier facteur est de loin le plus déterminant.
L’EDI comme alternative
Nombreux sont les industriels qui ne vendent pas via Internet à un grand nombre de clients
finaux, mais qui réalisent néanmoins des échanges électroniques avec une cible réduite
d’intermédiaires (parfois une poignée) de clients industriels, grossistes ou grands distribu-
teurs. Ces transactions électroniques sont antérieures à l’arrivée des technologies Internet.
Techniquement, ces échanges électroniques prennent la forme de messages EDI ou Web-EDI
(voir chapitre 4) pour les PME, car ce dernier système est moins coûteux pour les petites
structures.
De telles configurations d’échanges sont dénommées « systèmes d’information interorga-
nisations » (SIIO). Elles impliquent des contacts récurrents entre acteurs économiques, ce
qui est le cas dans les chaînes d’approvisionnement. On se trouve toutefois à la frontière de
la notion de commerce, car il s’agit plutôt d’une collaboration entre partenaires dans une
chaîne logistique qui doit être optimisée pour éviter les ruptures d’approvisionnement, dimi-
nuer les stocks, etc. On parle de gestion partagée des approvisionnements (GPA) ou encore
de Collaborative Planning Forecasting & Replenishment (CPFR) lorsque cette collaboration
dépasse l’échange d’informations sur les stocks et englobe un partage d’informations sur les
prévisions de production, de vente, les actions marketing.
Dans le secteur des produits de grande consommation (PGC), 44 % des entreprises utilisent
l’EDI ou le Web-EDI avec distributeurs39. Dans la plupart des cas, ces industriels ont été
fortement incités – voire contraints – par leurs clients (grands distributeurs, notamment)
à basculer vers ces systèmes, pour pouvoir tout simplement continuer à travailler avec eux.
Ces échanges électroniques permettent cependant de réduire les délais et de diminuer le
coût de gestion des transactions (saisie, contrôle, etc.), en apportant une grande fiabilité
à l’ensemble des opérations. Dans ce contexte, le commerce électronique via l’EDI est une
source de productivité importante, normalement pour les deux parties.
Pour les produits basiques, l’usage des technologies d’échange de données permet de dimi-
nuer le nombre de fournisseurs, entraînant ainsi des gains de productivité substantiels
(Dedrick, Xu et Zhu, 2008). Pour les produits plus sophistiqués, notamment ceux réalisés
à partir de spécifications sur mesure, ces technologies conduisent à augmenter le nombre
de fournisseurs, à moins de mieux intégrer les systèmes d’information des partenaires.
Autrement dit, les technologies d’échanges de données permettent des gains de productivité
même dans le cas de produits sur mesure (sous réserve, pour ces derniers, d’intégrer les
systèmes d’information entre partenaires de l’échange).
Sur les enchères inversées
Le développement d’Internet a également permis la multiplication des pratiques d’enchères
inversées entre les industriels et leurs fournisseurs. Des recherches montrent que la pratique
des enchères permet de réduire les prix. Cependant, ces baisses de prix se font aux dépens
de la qualité de la relation entre les partenaires (Jap et Haruvy, 2008). L’agressivité éven-
tuelle des pratiques commerciales sur Internet doit donc être équilibrée avec d’autres objec-
tifs à plus long terme, comme la nécessaire coopération entre les acteurs d’une même chaîne
de valeur. Ce point est d’autant plus complexe que l’échange de données n’apporte pas en
soi une performance additionnelle notable, s’il se limite à une connexion automatique entre
clients et fournisseurs. La vraie valeur de l’Internet marchand pour un acteur du B2B est
Résumé
Apparu à la fin des années 1990 sur Internet, le commerce électronique constitue un canal de
vente toujours en forte progression. Malgré cette croissance, il reste encore secondaire par
rapport au commerce de détail, ne représentant, selon les pays entre 7 à 13 % des ventes de
détail. Cette progression masque des réalités très variables selon les secteurs économiques.
Plus généralement, le développement du commerce électronique nécessite que plusieurs
facteurs favorables à son essor soient réunis : un environnement technologique proposant
des outils informatiques qui facilitent l’usage d’Internet en général ; des infrastructures
publiques fiables ; un taux d’équipement des ménages en informatique élevé ; des services
financiers adaptés au commerce électronique ; un environnement juridique et fiscal facili-
tant l’achat en ligne. Mais il est nécessaire de bien préciser ce que l’expression « commerce
électronique » signifie. En effet, les utilisations d’Internet sont nombreuses et les confusions
le sont aussi entre e-business et e-commerce.
Plusieurs typologies permettent de mieux comprendre les différentes formes d’utilisation
d’Internet dans le cadre d’une activité économique marchande ou non. Enfin, il est impor-
tant de comprendre tous les modèles d’affaires possibles dans le cadre du commerce élec-
tronique. L’analyse des différentes variantes met en évidence l’existence de deux grandes
catégories de modèles d’affaires en ligne : les modèles transactionnels et les modèles rela-
tionnels.
De plus en plus de consommateurs et d’entreprises adoptent le commerce électronique.
L’achat ou la vente en ligne sont cependant loin de représenter des comportements généra-
lisés. Plusieurs facteurs peuvent expliquer pourquoi l’adoption du commerce électronique
n’est pas plus rapide, comme la personnalité ou les ressources (pour les consommateurs), ou
encore la maturité informationnelle (pour les entreprises). Cela dit, à terme, il est probable
que le commerce électronique ne remplace pas le commerce traditionnel, mais que l’on
assiste plutôt à une convergence des modalités d’échange. Dès lors, il est plus juste de parler
de « commerce connecté ».
Bibliographie
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http://www.entreprises.gouv.fr/economie-numerique
http://www.journaldunet.com
Activités
Questions de révision
1. Quels sont les facteurs qui favorisent le développement du commerce électronique dans
un pays donné ?
2. Quels sont les avantages pour un industriel de vendre en direct par Internet ?
3. Quelles sont les raisons qui expliquent que certains distributeurs ne souhaitent pas déve-
lopper leurs ventes en ligne ?
4. Pourquoi certains consommateurs n’utilisent-ils pas Internet pour effectuer leurs achats ?
5. Donnez un exemple de site reposant sur le modèle transactionnel. Justifiez votre réponse.
6. À quel type de modèle peut-on rattacher un site Internet comme Kelkoo.fr ?
7. Pourquoi les sites d’achat groupé n’ont-ils pas rencontré le succès escompté ?
8. Qu’est-ce qu’une place de marché ?
9. Donnez un exemple d’objet connecté permettant de réaliser des transactions marchandes.
10. Définissez une enchère inversée en ligne.
Exercices de synthèse
Visitez le site http://www.eBay.fr. À quel modèle d’affaires se rattache ce site ? Se limite-t-il
aux seules transactions entre particuliers ? Qu’en concluez-vous par rapport à la précédente
question ? Décrivez les différentes sources de revenus d’eBay. Qu’en concluez-vous quant aux
sources de revenus des sites de commerce électronique ?
Visitez le site http://www.zazzle.com. À quel modèle d’affaires se rattache ce site ? Quelles sont
les sources de revenus de ce site ? Qu’en concluez-vous sur son modèle d’affaires ? Quelle est la
valeur apportée au consommateur final ?
Questions à débattre
1. En quoi les infrastructures publiques d’un pays contribuent-elles au développement du
commerce électronique ?
2. Pourquoi le commerce électronique ne s’est-il pas développé aussi vite que les prévisions
des années 2000 l’annonçaient ?
3. Pourquoi existe-t-il des différences sectorielles importantes dans l’utilisation du commerce
électronique ?
4. Quelles sont les raisons qui expliquent la quasi-disparition des places de marché électro-
niques en B2B ?
5. Est-il pertinent pour une petite entreprise s’adressant à un marché strictement local de
développer un site marchand ?
6. Les enchères inversées en ligne sont-elles une modalité de vente pertinente pour toutes
les entreprises ?
7. Le commerce mobile est-il l’avenir du e-commerce ? Argumentez.
8. À votre avis, existe-t-il une différence entre les formes de commerce électronique B2C et
B2B ?
9. À partir des différentes typologies du commerce électronique présentées dans ce chapitre,
discutez de leur pertinence respective, notamment dans la perspective d’une analyse de
positionnement stratégique.