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Le journal « Le Mémorial Artésien » Saint Omer Pas de Calais 17 janvier

1839. France. Page 6


On connait les effets de la chambre noire , et la netteté avec laquelle les
objets extérieurs viennent se peindre en miniature sur le papier blanc disposé
pour en recevoir l'image fugitive. Eh bien ! M.Daguerre est parvenu à force de
recherches chimiques sur les propriétés de la lumière et des couleurs, à fixer,
presque instantanément cette image sur le papier qui la reçoit , et qui a reçu
pour cet effet, une préparation chimique. Certaines substances, telles que le
chlorure d'argent, oui la propriété de changer de couleur au simple contact de
la lumière. C'est par une combinaison de cette nature que M. Daguerre est
parvenu à fixer, en clair et en ombre, l'image reproduite par le procédé de la
chambre noire. Dans celte gravure singulière , les formes sont de l'exactitude
la plus parfaite , et les Couleurs sont indiquées par les nuances des ombres
et par une dégradation insensible comme dans l’aquatinta. Une vue
quelconque , un paysage , un portrait , sont obtenus en quelques minutes,
sans qu'il soit besoin de la main de l’artiste, et avec une vérité ( moins la
couleur) que l'art ne saurait atteindre ; c'est le plus parfait de tous les
dessins,
M. Daguerre , il y a quelques années , n'avait pas encore trouvé le moyen de
xer durablement celle miraculeuse empreinte; l'action de l'air la faisait peu à
peu disparaître; il parait que ses travaux chimiques, dont les résultats sont
tout-à fait surprenants, lui ont donné la puissance de rendre durable cette
image qui n'était qu'éphémère. 

Il y a là une révolution dans l'art du dessin et dans celui de la gravure , dont
l'art souffrira grandement, peut-être..., puisque , par le procédé dont il s'agit,
la nature elle-même sera reproduite en un clin d'oeil sans le secours de la
main de l’homme. Constatons seulement aujourd'hui la réalité de la
miraculeuse découverte de M. Daguerre.

( Moniteur Parisien) 


Journal « Le Mémorial Artésien » 11 juillet 1839 Saint Omer Pas de Calais
France page 5

M. Daguerre a exposé , dans une des salles de la chambre des députés,


plusieurs produits du Daguerréotype. On remarquait trois rues de Paris,
l'intérieur de l'atelier de M. Daguerre et un groupe de bustes du Musée des
Antiques. On admirait la prodigieuse nesse des détails si multipliés dont
sont chargés les tableaux représentant les rues de Paris et notamment la vue
du pont Marie. 

Les plus petits accidents du sol ou des bâtiments, les marchandises qui sont
entreposées sur la berge, les objets les plus délicat, les petits cailloux sous
l'eau près du bord, et les différents degrés de transparence qu'ils donnent à
l’eau, tout est reproduit avec une incroyable exactitude. Mais l’étonnement
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redouble lorsque en prenant la loupe, on découvre, principalement dans le
feuillage des arbres, une immense quantité de détails d'une ténuité telle que
la meilleure vue ne saurait les saisir à l'œil nu. Dans le tableau de l'intérieur
de l'atelier de M. Daguerre , tous les plis du rideau et les effets d'ombre et de
lumière qu'ils produisent sont rendus avec une vérité merveilleuse. La têle
d'Homère . qui forme le principal morceau du tableau représentant plusieurs
sujets antiques, a conservé un très beau caractère ; aucun des mérites
qu'elle a dans la sculpture n'est perdu dans cette reproduction , malgré la
différence considérable de grandeur.

L'enduit sur lequel la lumière agit par le procédé de M, Daguerre est étendu
sur une planche de cuivre. Les tableaux exposés à la chambre des députés
ont neuf ou dix pouces de haut sur six ou sept pouces de large. M. Daguerre
évalue à 3 fr. 5o c la planche d'un tableau de cette grandeur. Il estime que
l'appareil nécessaire pour faire des tableaux de celle même dimension
devra , dans le principe, coûter environ 400 fr. : mais , il ne doute pas que le
perfectionnement des moyens de fabrication ne réduise bientôt ce prix d'une
manière sensible.










Journal « Le Mémorial Artésien » 22 septembre 1839 France page 6


— Le bruit court de nouveau que M. le baron Rothschild est en instance pour


l'acquisition de la Palestine. L'instant ne pouvait être mieux choisi, en effet,
pour songer au rétablissement du royaume de Jérusalem et rendre en n une
patrie aux hébreux disséminés sur la surface du globe.

— Le Daguerréotype est en ce moment l'objet des spéculations les plus


actives; du Nord au Midi on n'entend parler que d'élèves de M. Daguerre qui
vont au loin, à Londres, à Madrid, à Mexico, prendre la nature sur le fait et
exploiter le soleil. Pendant que ces expériences lointaines portent à l'étranger
la connaissance des merveilleuses créations du génie de M. Daguerre , la
foule assiège les salons de Giroux , chargé de l'exécution des appareils. Les
mécaniciens, opticiens, etc., travaillent sans relâche a perfectionner et à
imiter , et déjà l'on annonce rue de la Harpe, dans le quartier des Ecoles, un
fi
Daguerréotype à 10 francs. 


Journal « Le Mémorial Artésien » 17 octobre 1839 France page 5

Deux élèves de M. Daguerre sont à Boulogne depuis quelques jours , et font,


chaque jour à la bibliothèque publique , une exposition de plusieurs vues
obtenues par le moyen du Daguerréotype. Aussi nos concitoyens af uent à la
bibliothèque pour voir les résultats dé cette belle découverte. C'est surtout
pour la reproduction des monuments , des rues, des lieux importants des
grandes cités que le Daguerréotype est précieux , car on sait que l'immobilité
est nécessaire pour obtenir un parfait résultat. Aussi faut il dire, pour être vrai,
que les ciels, les eaux, les arbres , tout ce qui a du mouvement, ne sont pas
toujours rendus avec perfection. Sans doute cette grande invention n'est pas
arrivée encore à son dernier développement , mais telle qu'elle est, elle n'en
n’est pas moins une des plus belles conquêtes de l'esprit humain

Le Mémorial Artésien, 24 oct. 1839 France p5

Daguerréotype - Nous avons la satisfaction d’annoncer aux habitants de St


Omer que deux élèves de M.Daguerre sont arrivés hier dans notre ville, jeudi,
vendredi, samedi et dimanche, ils exposeront chez M.Ferru, rue Royale,
plusieurs vues obtenues par le daguerréotype . Le prix d’entrée est fixé à 1 fr
par personne et l’exposition est ouverte de 11 à 4 heures.
Il est inutile sans doute de stimuler la curiosité de nos lecteurs, vraiment
chacun d’eux sera jaloux de juger par lui-même si cette miraculeuse
découverte mérite tous les éloges qu’on lui a prodigués.
Nous aussi nous attendons d’avoir vu avant d’en parler plus longuement.
Jeudi, à 3 heures précises de l’après-midi, séance publique au salon de la
conciergerie sur la Grand-place.
Le prix d’entrée est fixé à 2fr. Chaque billet portera un numéro et à la fin de la
séance le numéro sortant gagnera la vue du nouvel Hotel de Ville faite
pendant cette séance. Comme ce monument est d’un blanc éclatant il est à
croire qu’il viendra même privé de soleil. Cependant si cette vue ne
satisfaisait pas les élèves de M.Daguerre ils remettraient au gagnant une de
leurs vues de Boulogne, du Havre, ou de Paris.

Dimanche 27 octobre, « Le Mémorial Artésien » pages 9-10

Enfin, nous avons pu juger par nous-mêmes la découverte de Monsieur


Daguerre, et, comme Orgon, nous pouvons dire que nous avons vu, de nos
propres yeux, vu, ce qu'on appelle vu. Jeudi dernier à 15h., les élèves de












fl

Monsieur Daguerre, ont ioduré leur plaque, exposé cet enduit sensible à la
lumière, et forcé le dessin à ressortir en le soumettant à la vapeur du
mercure; c'est-à-dire, sans périphrase, qu'ils ont fait une vue, devant une
douzaine de personnes qui seules à Saint-Omer, avaient répondu à leur
appel. Nous en serions honteux pour les habitants de notre ville, si nous
n'avions pénétré la cause de cette indifférence apparente. Eh ! quoi, nous
écrierions-nous, cette découverte qui a mérité un honneur qu'on a refusé à
Montgol er , à Jacquard et à Papin , cette découverte que toute l'Europe
nous envie, dont on nous entretient depuis six mois , n'a pu chez nous piquer
la curiosité de plus de douze personnes , quand les souverains étrangers
supplient M. Daguerre de leur envoyer une ou deux de ses miniatures , en lui
offrant en échange des croix et des diamants ; nous , Français, nous ne
pouvons nous déranger un peu , non-seulement pour en voir les produits
mais encore pour apprendre à nous servir de ce merveilleux appareil, pour
nous familiariser avec ses plus minutieux détails.

Mais nous l'avons dit , cette indifférence n'est qu'apparente et en voici


l'explication. C'est le soleil qui dessine , et partant l'on s'est imaginé qu'à
moins d'un soleil éclatant l'opération ne pouvait avoir lieu ; erreur : jeudi le
soleil était loin d'éblouir , et cependant le Daguerréotvpe a produit un dessin
admirable des ruines de St. Bertin ; ce dessin nous l'avons vu , et nous
pouvons assurer que devant lui pâliront les gravures les plus savantes et les
mieux venues. Pour l'architecture, cette invention ne laisse rien à désirer.
Durant la séance , le nouvel hôtel de-ville a été reproduit, et si le bas de cet
édi ce n'était pas aussi admirablement reproduit que le haut, c'est seulement
à l'heure avancée qu'il faut en attribuer la cause. Mais pour suivre l'opération
dans toutes ses parties, pour apprendre en un mot à se servir du
Daguerréotype le temps n'y fait rien; d'ailleurs n'oublions pas que malgré le
plus grand sang-froid il est impossible d'opérer en public comme avec la
tranquillité et l'aisance du laboratoire. Puisque ces messieurs remplacent
toujours les vues défectueuses par des vues parfaites ( et personne
assurément n'est plus exigeant qu'eux) le gagnant n'a aucun reproche à leur
faire, et les autres assistants , qui sont surtout venus pour prendre une
connaissance exacte de la nouvelle découverte , n'ont rien à désirer. En effet,
pas un de nous qui ne puisse actuellement reproduire avec cet instrument
tous les dessins qui lui plairaient , et celui qui a reçu les ruines de St. Bertin
n'a bien certainement rien à regretter. Que le public se rassure donc, quelque
temps qu'il fasse , nous lui certi ons que son attente ne sera point trompée.

Qu'il vienne , car dimanche aura lieu la seconde et dernière séance. Quel
que soit le temps l'opération se fera comme par un beau soleil . et si
l'épreuve manquait de vigueur, eh bien ! il ne connaîtrait pas moins ce qu'il
désire apprendre , la manipulation du Daguerréotype. et celui que le sort
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favorisera est assuré de remporter un chef- d'œuvre ; l'heure du reste offre
beaucoup plus de chances ; à onze heures et demie il est impossible , malgré
la brume qui nous enveloppe depuis plusieurs jours, que le bâtiment blanc du
nouvel hôtel de-ville ne donne pas quelque chose de satisfaisant. Tant pis
pour ceux qui exigeront la lumière éclatante de juin, ils seront forcés
d'attendre huit mois encore.

Qu'on nous pardonne cette digression. Mais nous la devions et à nos


abonnés, pour les préserver d'une erreur généralement accréditée, et aux
élèves propagateurs pour les engager à persévérer dans leur tâche sans se
laisser rebuter par une froideur, qui nous le répétons, ne peut être réelle.
Passons maintenant à notre compte-rendu.

La collection se composait de six vues de Paris, d'une vue du Havre , d'une


vue des ruines de St.-Bertin et d'un tableau contenant des essais du procédé
anglais de M. Fox Talbot, de Londres. Impossible de dire quelle vérité de
perspective et quelle richesse de détails , quelle profusion d'objets in niment
petits enrichissent les moindres de ces miniatures où rien n'est oublié ; non
rien , depuis les proportions les plus grandioses jusqu'au mouchetures et aux
plis soyeux des rideaux garnissant des fenêtres de 2 ou 3 lignes. On pourrait
compter les tuiles d'un toit et les clous d'une jalousie. Tous ces détails,
s’harmonisent si bien avec l'ensemble, les proportions sont si bien
conservées que ces minuties ne sont point choquantes ; il semble que ces
tableaux soient l'œuvre des Djinns, des Péris, tant il désespèreraient la
patience de l'artiste le plus habile qui tenterait en vain de les imiter. 

Parmi tous, ces chefs-d'œuvre, ceux qui nous ont le plus frappé, c'est d'abord
la vue de la butte Montmartre, véritable sépia, qui a sur tous les autres
l'avantage de réunir, des tons aussi chauds que ceux des meilleurs dessins
de ce genre. Vient ensuite le boulevard Bonne-nouvelle ; nos ruines de
Saint Bertin sont dignes d'occuper la troisième place.

Le procédé anglais a l'avantage d'être sur papier, et de ne coûter presque
rien ; mais il est loin d'être aussi parfait que celui de Monsieur Daguerre, et
c'est bien comme le disait Herschel, un véritable jeu d'enfant, en
comparaison de la découverte française.

Après avoir admiré les tableaux, nous avons suivi l'opération avec un soin
scrupuleux ; en voici l'analyse : on polit la plaque destiné à devenir la toile sur
laquelle doit dessiner la lumière, avec de l'huile, de la ponce et de l'acide
nitrique ; puis, ensuite, on l'expose à de la vapeur diode, qui se dégage, sans
autre calorique, que celui de l'air environnant, d'une capsule placée au fond
d'une boîte. Quand la plaque est ainsi chargé de vapeur, et qu'elle a pris une
teinte d'un beau jaune d'or, on l'expose à la lumière. La durée de cette
exposition varie selon l'éclat du soleil ; les ruines de Saint Bertin ont été faite
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après trois quarts d'heure d'exposition. Ensuite, dans un appareil ad hoc,
cette plaque est soumise à la vapeur du mercure ; dès que le thermomètre
marque 75°, on cesse de chauffer, et on aperçoit alors le dessin se former
peut à peu; la température du mercure, redescendue à 45°, l'opération est
achevée ; il ne reste plus qu'à xer l'image, ce que l'on obtient en trempant la
plaque dans une solution d’hyposul te de soude, et en la lavant avec de l'eau
distillée.

Eh bien ! nous le demandons au plus incrédule, quand nous , qui ne
connaissions pas les moyens employés par M. Daguerre, nous pouvons,
après une seule séance, en donner ainsi l'analyse, a-t-on quelque chose à
désirer, et les nuages nous ont- ils empêché d'apprendre tout ce qu'il nous
était important de savoir ; aussi nous sommes convaincu que Dimanche, à
onze heures et demie, le salon de la Conciergerie réunira une société aussi
nombreuse que choisie et que chacun se retirera pleinement satisfait. Peu de
spectacles sont aussi instructifs et intéressants; on croirait assister aux
laborieux travaux de l'inventeur ; on est agité par l'anxiété qu'il a du ressentir
plus d'une fois durant ses nombreux essais et l’on partage ensuite la
satisfaction qu'il éprouva le jour où toutes ses tentatives furent couronnées
d'un succès éclatant on a une parcelle de ce bonheur qui a en n été sa
récompense après quinze années de veilles et de soucis. 

J.D.

Le « Mémorial Artésien » du 17 novembre 1839 France p5

A Saint Omer, un cafetier offre un Daguerréotype comme lot de jeu de billard:



Café de Belle-Vue.
le sieur LEFEBVRE, limonadier, aura l'honneur d'offrir le lundi 18 novembre
1839 , à six heures et demie du soir , à messieurs les amateurs de billard,
une POULE consistant en un service en argent. 

La mise sera xée selon le nombre des joueurs.

Après la poule , si toutefois les amateurs se trouvent en nombre , il leur sera
offert, pour nouvelle poule , un tableau fait par le procédé de M Daguerre et
représentant une vue du Pont-Neuf, du Louvre et des Tuileries; ce qui a fait
l'admiration de toutes les personnes qui ont été à même de la voir et de la
juger. Le billard sur lequel sera jouée la poule vient d'être remis à neuf par un
billardier de Paris. 

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