Vous êtes sur la page 1sur 4

Textes de conquistadors

Tableau : CHRONOLOGIE des CONQUISTADORS et des EXILES du nouveau monde

Qui voyage ? Quelle Quand ? Où ? Quelle forme de récit ?


nationalité ?
Christophe Colomb Italien au XVème Cuba, Hispaniola Journal de bord
service du roi Saint Domingue
d'Espagne

Hernan Cortès Espagnol XVème - XVIème Mexique Lettre au roi d'Espagne

Bernal Diaz Del Castillo Espagnol XVIème Mexique Chronique, relation de voyage

Francisco Pizarro Espagnol XVIème Pérou Chronique, relation de voyage

Bartolomé de Las Casas Espagnol XVIème Cuba Pamphlet, dénonciation

Jean de Léry Français XVIème Brésil Recueil de souvenirs et de réflexions

Carte : CIVILISATIONS PRECOLOMBIENNES et VOYAGEURS DU NOUVEAU MONDE

Les Aztèques avaient construit leur capitale,


Tenochtitlan (14e - 16e siècle), à l’emplacement de
l’actuelle Mexico. C’était l’une des plus grandes villes
du monde, avec plus de 200 000 habitants.
Les Mayas étaient organisés, dans le sud de l'actuel
Mexique et au nord de l'Amérique central, en cités États
indépendantes, gouvernées par des familles nobles.
Leurs plus grandes cités étaient Tikal et Calakmul (3e -
9e siècle), puis Chichén Itzá (10e siècle - 11e siècle) et
Uxmal (10e siècle - 13e siècle).
Les Incas vivaient le long de la cordillère des Andes
(chaîne de montagnes longeant la côte ouest de
l’Amérique du Sud). L’empire inca (13e - 16e siècle)
avait pour capitale Cuzco, située au sud. Au 16e siècle,
Quito devint la capitale du nord de l’empire.

Texte 0 : L’arrivée en Amérique, Extrait de Œuvres de Christophe Colomb, Paris, Gallimard, 1961
On avait aperçu la terre vers 2 heures après minuit, à une distance d’environ 2 lieues. Tous les navires amenèrent les voiles
et restèrent seulement avec le tréou, qui est la grande voile sans bonnette. Ils se mirent ainsi en panne et restèrent sur
place jusqu’à vendredi matin: ils arrivèrent alors à une petite île des Lucayes, qui s’appelle Guanahani dans la langue des
Indiens. Ils y aperçurent tout de suite des hommes nus.
L’amiral sauta à terre avec une barque armée, en même temps que Martin Alonso Pinzónet son frère Vincent Yañez, qui
était capitaine de la Nina. L’amiral déploya la bannière du Roi, et les deux capitaines, les deux bannières de la Croix Verte,
que l’amiral avait prises pour signe distinctif de chaque navire, et qui portaient un F et un Y, avec une couronne au-dessus
de chaque lettre et le signe de la croix entre les deux initiales couronnées. Une fois à terre, ils virent des arbres d’un vert
très fort, et des cours d’eau et des fruits de toutes sortes. L’amiral appela les deux capitaines, ainsi que les autres hommes
qui avaient sauté à terre, avec Rodrigo de Escoveda, notaire de l’expédition, et Rodrigo Sanchez de Ségovie. Il demanda à
ces derniers de lui rendre foi et témoignage légal de la prise de possession de cette île, en présence de tout le monde ; et
il en prit possession effectivement, au nom du Roi et de la Reine ses seigneurs, avec toutes les formes de rigueur en pareille
occasion, comme on peut le voir de façon plus détaillée par les documents qui furent établis à ce propos. Bientôt, les
indigènes accoururent de toutes parts autour d’eux.
Texte 1 : Christophe Colomb, Journal de bord de 1492, cité dans Œuvres de Christophe Colomb, Paris, Gallimard, 1961
« On les voyait venir à la nage jusqu'aux barques des navires, dans lesquelles nous nous trouvions, pour nous apporter
des perroquets et des fils de coton en pelote. […] Ils prenaient tout ce qu'on leur offrait, et donnaient en échange, sans
aucune hésitation, tout ce qu'ils possédaient. […] C'était des gens très pauvres et démunis de tout. Ils allaient tous
complètement nus, tels que leurs mères les avaient mis au monde, les hommes aussi bien que les femmes. […] Ils étaient
bien faits, bien bâtis de corps et d'aspect agréable.
Leurs cheveux étaient aussi gros que les soies d'une queue de cheval. Ils les coupaient courts et les laissaient retomber
par devant jusqu'au dessus des sourcils ; mais par derrière, ils portaient des mèches, qu'ils laissaient pousser sans jamais
les couper. Certains d'entre eux se peignaient en brun, […] d'autres en blanc ou en rouge ou dans d'autres couleurs, selon
ce qu'ils peuvent trouver. Il y en a qui se peignent le visage, et d'autres tout le corps, ou les yeux seulement, ou bien le
nez. […]
Ils sont tous, sans exception, de grande taille et de bonne figure, et très bien faits de leur personne. J’en avisai quelques-
uns qui portaient sur le corps des traces de blessures, et je leur demandai par signes quelle en était l’explication. Ils me
firent alors comprendre qu’il y avait des hommes qui venaient jusque chez eux de certaines îles voisines, dans le but de
les faire prisonniers, et que ces gens-là leur faisaient la guerre. Je crus alors, et je le pense encore, que c’était des gens du
continent, afin de les réduire en esclavage.
On doit pouvoir en faire des hommes de peine excellents, et ils ont l’esprit éveillé, car je vois qu’ils répètent tout de suite
ce que je leur dis. Je pense donc qu’il sera facile de les convertir, d’autant plus qu’il me semble comprendre qu’ils n’avaient
aucune croyance particulière. Si Notre-Seigneur le permet, j’en prendrai cinq ou six avec moi, au moment de partir d’ici,
afin de les présenter à Vos Altesses, et pour qu’ils apprennent notre langue. Dans cette île-ci, je n’ai vu aucune espèce
d’animal, à part des perroquets.»
Telles sont, jusqu’ici, les propres paroles de l’amiral.

Texte 2 : Lettre de Pedro Vaz de Caminha au roi Dom Manuel 1492, cité dans La Découverte du Brésil. Les premiers
témoignages choisis et présentés par Ilda Mendes dos Santos (1500-1530), 2000

Ils me paraissent des gens t’une telle innocence que si on pouvait les comprendre et qu’ils nous comprissent, ils seraient
bientôt chrétiens car ils n’ont pas de croyance et n’en connaissent aucune, à ce qu’il semble. Et par conséquent si les
proscrits qui doivent demeurer ici apprennent bien leur langage et les comprennent, je ne doute pas que, selon les
intentions de Votre Altesse, ils se fassent chrétiens et embrassent notre sainte foi : qu’il plaise à Notre Seigneur de les y
amener. Car il est certain que ces gens sont d’une bonté et d’une simplicité entière et tout sceau dont on voudra les
marquer s’imprimera bien vite en eux ; et si Notre Seigneur leur a donné de beaux corps et de beaux visages comme à des
hommes accomplis, et s’il nous a conduits ici, je crois que ce n’était pas sans raison […]

Et cette terre est si plaisante que si l’ont veut en tirer profit tout pourra y être cultivé grâce à la quantité d’eau qu’elle
possède. Mais le meilleur fruit qu’on puisse en tirer, à mon avis, ce sera de faire le salut de ces gens et telle doit être la
première graine que Votre Altesse doit semer. Et quand bien même il n’y aurait ici que cette possibilité d’étape pour la
traversée vers Calicut, cela serait suffisant : à plus forte raison si l’on peut y accomplir et y réaliser ce que Votre Altesse
désire tant, à savoir la propagation de notre sainte foi. […]

Texte 3 : Jean de Léry, Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil, 1578
Les hommes comme les femmes et les enfants, non seulement sans cacher aucune partie de leur corps, mais aussi sans
en montrer aucun signe d'en avoir honte ni vergogne, demeurent et vont habituellement aussi nus qu'ils sortent du ventre
de leur mère. […] Je soutiens que les toilettes, les fards, les fausses perruques, les cheveux tressés, les cols fraisés, les
jupons, les robes sur robes et autres infinies bagatelles avec lesquelles les femmes et les filles de chez nous se déguisent
et dont elles n'ont jamais assez, sont, sans comparaison, cause de plus de maux que n'est la nudité habituelle des femmes
sauvages, qui cependant ne sont pas moins belles que les autres.
Texte 4 : Hernan Cortès, La Conquête du Mexique, 1519
Ce même jour, dans la soirée, deux Indiens nous arrivèrent, paraissant des chefs : ils dirent qu'ils se repentaient de ce qui
était arrivé, que les caciques demandaient que nous ne leurs fissions plus de mal, que nous avions tué plus de deux cents
hommes et que le passé fût oublié ; que désormais ils se reconnaissaient pour vassaux des princes dont nous leur avions
parlé ; qu'ils le déclaraient de bonne foi et se soumettraient à tous les services qu'on réclamerait en leur nom. La paix fut
donc conclue […].
Vos Majestés peuvent tenir pour certain que cette bataille fut gagnée par la volonté de Dieu plutôt que par notre courage,
puisque nous comptions à peine quatre cents hommes contre quarante mille.

Texte 5 : Bernal Diaz del Castillo, La Conquête du Mexique, écrit au XVIème siècle, publié en 1632
Tandis que nous sortions de ces villages, que nous laissâmes pacifiés, en route pour Cempoal, le cacique gros et d'autres
personnages nous attendaient dans des cabanes avec des vivres. […]
Cortès les reçut allègrement, disant qu'il leur savait gré [de leurs présents], mais que, pour les accepter de manière que
leurs parents deviennent nos frères, il faut accepter qu'ils n'aient plus ces idoles en lesquelles ils croient, qu'ils adorent et
qui les trompent ; qu'il ne veut pas qu'on leur sacrifie désormais, et que, dès lors qu'il ne sera plus témoin de leur vilaines
pratiques et de leurs sacrifices, il les tiendra bien plus sûrement pour frères ; qu'il est, du reste, nécessaire que ces femmes
deviennent chrétiennes avant qu'on les reçoive. Il ajouta […] que d'ailleurs on sacrifiait chaque jour sous nos yeux quatre
ou cinq Indiens dont on offrait le cœur aux idoles, lançant le sang sur les murailles, coupant les jambes, les cuisses et les
bras pour les manger comme viande qui sortirait de nos boucheries (je crois même qu'on les vendait en détail dans les
tiangues, qui sont leurs marchés) ; et finalement, pourvu qu'ils abandonnassent leur mauvaises habitudes et ces usages,
non seulement nous serions leurs alliés, mais nous ferions en sorte de les rendre seigneurs d'autres provinces.

Cérémonie sacrificielle aztèque (Codex Magliabechiano, f.70r), XVIème siècle

Texte 6 : Pedro Pizarro, La Conquête du Pérou, écrit en 1571


Dès notre arrivée à Cuzco, nous avons été impressionnés par ses innombrables richesses, par la quantité d'entrepôt
remplis de mobilier, de vivres, de coca, et surtout de vêtements, des plus simples aux plus délicats.
Le plus étonnant était la réserve de plumes, notamment des plumes tornasol, pareilles à de l'or fin, quelquefois mordorées,
et rangées dans une multitude de malles. […]
Plus loin, dans une grotte, on trouva douze flambeaux d'or et d'argent de la facture et à la mesure de ces lieux. Il fallait
voir leur beauté brute, tout comme l'habileté avec laquelle les artisans avaient ajusté la moitié d'or et la moitié d'argent
de leurs jarres, de telle sorte que, remplies d'eau, elles n'en laissaient pas filtrer la moindre goutte. […] Il y avait aussi des
brodequins d'or comme en portent les femmes. Et des langoustes d'or pareilles à celles que produit la mer, et des coupes
d'or, et, sculptées dans l'or brut, des oiseaux, des couleuvres, des araignées, des lézards, bref toutes les petites bêtes qu'ils
connaissaient taillées dans la masse. Toutes ces pièces d'une orfèvrerie très délicate étaient donc entreposées dans une
grotte spacieuse dissimulées sous les rochers, non loin de Cuzco.
Texte 7 : Jean de Léry, Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil, 1578
Jean de Léry rapporte une conversation qu'il a eue avec un Indien du Brésil.
- Que signifie le fait que vous autres Mairs et Peros, c'est-à-dire Français et Portugais, vous veniez de si loin chercher du
bois pour vous chauffer ? N'y en a-t-il point dans votre pays ?
A quoi lui ayant répondu que si, et en grande quantité, mais pas des mêmes espèces que les leurs, ni surtout de
bois du Brésil […], il me réplique immédiatement :
- Soit, mais vous en faut-il tant ?
- Oui, dis-je (pour le persuader) car comme il y a tel marchand dans notre pays qui a plus d'étoffe et de drapes rouges […]
que vous n'en avez jamais vu ici, un tel marchand, à lui seul, achètera tout le bois du Brésil dont plusieurs navires s'en
retournent chargés, de ton pays.
- Ha,ha, dit mon sauvage, tu me racontes des choses étonnantes.
Puis, ayant bien retenu ce que je venais de lui dire, m'interrogeant plus avant, il dit :
- Mais cet homme si riche dont tu parles, ne meurt-il point ?
- Si fait, si fait, lui dis-je, aussi bien que les autres.
Sur quoi, comme ils sont aussi de grands discoureurs, et qu'ils poursuivent fort bien un propos jusqu'au
bout, il me demanda de nouveau :
- Et quand donc il est mort, à qui est tout le bien qu'il laisse ?
- A ses enfants s'il en a, et, à défaut, à ses frères, ses sœurs ou ses plus proches parents.
- Vraiment, dit alors mon vieillard (qui, comme vous le jugerez, n'était nullement lourdaud), maintenant je sais que vous
autres Français vous êtes de grands fous ; car vous faut-il tant vous tourmenter à passer la mer, sur laquelle (comme vous
le dîtes en arrivant ici) vous endurez tant de maux, pour amasser des richesses ou pour vos enfants ou pour ceux qui
survivent après vous ? La terre qui vous a nourris n'est-elle pas suffisante pour les nourrir ?

« Travaux forcés des indiens et des indiennes», gravure de Théodore de Bry, Francfort, 1592.

Texte 8 : Bartholomé de Las Casas, Très Brève relation de la destruction des Indes, 1542
Pour en terminer avec cette infamie et cette férocité, je dirai seulement que depuis que ces tyrans [espagnols] ont pénétré
dans ce royaume jusqu'à maintenant, c'est-à-dire en seize ans, ils ont envoyé de nombreux navires remplis d'Indiens à
Santa Maria, à l'île Espagnole [Hispaniola, aujourd'hui Haïti], à la Jamaïque et à l'île de San Juan pour les vendre comme
esclaves : plus d'un million d'Indiens.
Aujourd'hui même, en cette année 1542, ils continuent, et le tribunal royal de l'île Espagnole, en faisant semblant de ne
rien voir, favorise ce trafic, comme tous les autres actes tyranniques et corrompus qu'il aurait pu entraver et empêcher.
[…] Il n'y a pas eu d'autre raison pour réduire ces Indiens à l'esclavage que la volonté perverse, aveugle et obstinée de ces
tyrans avides de satisfaire une curiosité insatiable. Comme tous les autres, toujours, dans toutes les Indes, ils ont enlevé
ces agneaux et ces brebis à leurs maisons, ils ont pris leurs femmes et leurs enfants avec des procédés cruels et
abominables déjà mentionnés et les ont marqués du fer du roi pour les vendre comme esclaves.

Vous aimerez peut-être aussi