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UNIVERSITE BADJI MOKHTAR

Faculté De Médecine d’Annaba


Département De Médecine Dentaire
Service De Pathologie Et Chirurgie Buccales

La prise en charge des patients à risque


Les cardiopathies

Dr TAGUIA

Année universitaire 2018/2019

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INTRODUCTION :

Les pathologies cardio vasculaires représentent un risque auquel l’odonto-stomatologiste est


confronté quotidiennement.

Les attitudes préventives doivent être systématiques et modulées en fonction des différents
accidents susceptibles d’apparaitre et qui peuvent être intimement intriqués à savoir:
 Infection.
 L’hémorragie.
 La syncope.

Risque infectieux
En médecine dentaire, la prise en charge des patients présentant certaines cardiopathies est
dominée par le risque de voir apparaître, à partir des foyers dentaires évidents ou
latents, une endocardite infectieuse (EI) ou maladie d’Osler.
L'endocardite infectieuse: la greffe d'un agent pathogène bactérien (streptocoque) sur un
endocarde sain ou antérieurement lésé, et qui est provoquée par une effraction muqueuse ou
cutanée.
La bactériémie :est le passage transitoire de bactéries dans la circulation sanguine
à partir d’une porte d’entrée dont la cavité buccale est la plus fréquente. Elle peut
être :
 spontanée (mastication, brossage dentaire).
 provoquée (acte dentaire saignant : avulsion dentaire). L’endocardite
peut apparaitre 30 mn après l’acte.
1-Classification des cardiopathies en fonction du risque infectieux :

Classification
Gestes des
à risque cardiopathies à risque d’EI selon la conférence de consensus 1992 révisée en 2002
d'EI :
Selon les recommandations 2002 de la révision de l’AHA ; les actes portant sur la
cavité buccale sont classés -selon le risque d'EI- en :
a) Actes Buccodentaire contre indiqués chez les patients à haut risque :
Anesthésie infra-ligamentaire
Reprise d'un traitement endodontique
Chirurgie ;(chirurgie endodontique, implantation, chirurgie parodontale,
réimplantation/transplantation)
b) Actes bucco-dentaire invasifs
Ces interventions requièrent une antibioprophylaxie et une asepsie locale (Bain de
bouche) préopératoire immédiate:
Soins chirurgicaux; (avulsion, biopsie, freinectomie) ODF (scellement des bagues, .. .)
Soins endodontiques.
Soins parodontaux non chirurgicaux
Soins prothétiques qui risquent de provoquer un saignement
Pose de digue
c) Actes bucco-dentaires non invasifs (prophylaxie non recommandée) :
Traitement des caries superficielles

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Préparations prothétiques supra-gingivales sur dents pulpées
Anesthésie locale (sauf l'intra-ligamentaire)

Retrait des fils de suture


Prises d'empreintes et de radiographie
Traitement de fluoration

Précautions à prendre face au risque infectieux :

Elles sont basées sur la prévention et visent à réduire la bactériémie spontanée et provoquée par:

 Contact avec le médecin traitant (afin de connaître le type de cardiopathie et les médicaments
en cours) ;
 instauration d’une hygiène bucco-dentaire rigoureuse ; recherche et éradication de tout foyer infectieux.
 Chez le patient à haut risque d’endocardite infectieuse, une antibiothérapie prophylactique est
recommandée pour tous les actes impliquant une manipulation de la gencive ou de la région périapicale de
la dent, ou en cas d’effraction de la muqueuse orale, hors anesthésie locale ou locorégionale
 Précautions pour les patients à risque :
o Pour les dents présentant une atteinte parodontale : même précautions que pour les patients à haut risque;
o Les traitements endodontiques peuvent être réalisés, mais seulement pour les dents monoradiculées,
en une seule séance, sous digue et sous antibioprophylaxie;
 la chirurgie parodontale, les implants et la chirurgie péri-apicale sont contre-indiqués.

6-Modalité de l'antibioprophylaxie de l'endocardite infectieuse:

Principes d'une antibioprophylaxie :


Inhiber la croissance bactérienne avant ou dès la pénétration des germes dans la
circulation générale.
Son but est d'obtenir un taux sérique bactéricide au moment des décharges
bactérienne 30-60min afin de diminuer le nombre de germes circulants.
Sa durée d'action doit être limitée à la période dite à « risque».

Cardiopathies à haut risque :obligatoire

Cardiopathies à risque : optionnelle

Selon les recommandations de l’AFSSAPS juillet 2011

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Cas particulier : le RAA

Définition :

C’est une affection inflammatoire, due à la toxine du streptocoque bêta hémolytique du groupe A,

atteignant les articulations et pouvant secondairement toucher le cœur.

Conduite à tenir

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R.A.A sans atteinte cardiaque :

• R.A.A stabilisé biologiquement : être conservateurs.

• R.A.A évolutif : suppression des foyers infectieux

Un historique de R.A.A sans atteinte cardiaque :

• ne nécessite pas d'antibioprophylaxie d’EI

rapprocher les dates de l'acte de celle de la dernière injection de pénicilline.

R.A.A avec atteinte cardiaque :

S'il s'agit d'une péricardite ou myocardite isolée, la rareté d'une greffe


bactérienne dans ces pathologies, ne requiert aucune autre stratégie prophylactique
hormis celle du RAA
• S'il s'agit d'une péricardite ou myocardite associée à une atteinte de
l'endocarde : ces atteintes classent le malade dans la catégorie à haut risque d'EI et
la prise en charge Bucco-Dentaire se fera conformément aux recommandations
précédemment décrites.

Groupe A Groupe B
Cardiopathies à haut risque Cardiopathies à risque modéré
 Prothèses valvulaires  Cardiopathies non cyanogènes sauf
 Antécédents d'EI communication inter-auriculaire
 Cardiopathies congénitales •Valvulapathies : IA, RA, IM
cyanogènes: Tétralogie de Fallot  Dysfonctions valvulaires acquises
 Prolapsus de la valve mitrale avec IM
(insuffisance mitrale) et/ou
épaississement valvulaire
 Cardiomyopathie hypertrophique
obstructive

Le risque hémorragique :
1-Notions générales :

 La prise en charge de ce type de patients nécessite une attention particulière


notamment lors des actes chirurgicaux car des complications hémorragiques per ou
post-opératoires peuvent survenir.
 Actuellement, les moyens d’hémostase locale permettent la poursuite du traitement
anticoagulant, car en chirurgie buccale l’accès à la plaie hémorragique est direct ce
qui permet la mise en œuvre locale des procédés d’hémostase.

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2-Les anticoagulants et antiagrégants plaquettaires : Ils sont généralement
prescrits par le cardiologue en présence d’un risque thromboembolique
(thrombose veineuse, thrombose artérielle, prothèse valvulaire, infarctus récents
ou antécédents d’infarctus).

 Les anticoagulants 
    -Héparine (calciparine®, Lovenox®): administrée par voie
intraveineuse ou sous-cutanée, Son action est immédiate. Sa durée
d’action est de 8 à 12 h.
  -Anti-vitamines K (Sintrom®): par voie orale, Son action est
prolongée (Sintrom® a une durée d’action de 3j).

 Antiagrégants plaquettaires 
-     Aspirine: après son arrêt, le retour à la normale se fait au bout de 7-10 j.
- Ticlopidine (Ticlid®)plavix : antihémostatique et antiagrégant plaquettaire.
Son action est plus importante par rapport à l’aspirine.
3-les cardiopathies à risque hémorragiques :
 Les affections thromboemboliques;
 Les cardiopathies ischémiques (infarctus, angine de poitrine)
 Les antécédents de chirurgie cardio-vasculaire;
 Les troubles du rythme
 Les cardiopathies valvulaires (y compris les porteurs de prothèse valvulaire)

4-Prévention de l’hémorragie :
Avant l’acte opératoire

 Faire un bon interrogatoire afin de trouver une éventuelle prise


d’anticoagulants ;

 demander l’avis du médecin traitant pour connaître le type de cardiopathie et


la médication en cours ;

Tests biologiques des héparines:


Le TCA (Temps de Céphaline Activé) est l'examen de choix, il doit être compris entre (1.5-
3) x le temps témoin.

Tests biologiques des AVK:


Le traitement par AVK se surveille par le temps de Quick (TQ) ou TP (taux de prothrombine)
exprimé en INR.
Zones thérapeutiques de l'/NR

Zone 1 : « anticoagulation modérée» où l'INR =2-3 . TP (Taux de Prothrombine) 30 % à


45%
.Zone 2 : « forte anticoagulation ». l'INR = 3-4,5.

5-prise en charge
-Pour les patients sous aspirine ou ticlopidine :
Il faut demander le temps de saignement (TS) qui doit être inférieur à 10 min
selon la méthode Ivy.

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 L’arrêt du traitement par AAP avant des soins dentaires n’est pas justifié

En cas d’urgence, le trouble hématologique sera corrigé par un apport de


plaquettes 
 
Recommandations concernant la poursuite ou l'arrêt des AVK :
« Il est actuellement admis qu'il n'est pas nécessaire de recourir à un changement de
l'anticoagulation lorsque lïNR< 4. Cependant, la mise en place des techniques
locales d'hémostase permet la prévention des hémorragies chez les malades
nécessitant une thérapie par AVK »
Attitude concernant la poursuite ou l'arrêt des AAP :
• L'interruption de l'AAP (dose <300 mg/j) en prévision d'une chirurgie buccodentaire
n'est à l'heure actuelle pas requise, dans la mesure où le risque hémorragique n'excède pas le
risque thromboembolique associé à l'arrêt de ce médicament.
Dans les situations où un saignement per ou post-opératoire survient, les méthodes
locales d'hémostase sont en général très efficaces.
Traitements substitutifs
Réalisation du relais AVK- Héparine-AVK ;Les AVK sont arrêtés, de 1 à3j avant
l'acte chirurgicale, l'héparine est introduite. Pour réduire le risque hémorragique per
opératoire, l'injection du matin de l'acte n'est pas réalisée, le retour au traitement par
AVK va se faire progressivement 2à3j après l'intervention chirurgicale (en fonction
des résultats biologiques).
L'hospitalisation du malade est obligatoire
Planification des actes chirurgicaux Bucco-Dentaires :
- demander un INR récent (du jour ou la veille de l'intervention)
- accepter un INR entre 2 et 3
-Eviter les accidents mécaniques liés à l'intervention :
 Une blessure cutanée ou muqueuse provoquée par le dérapage d'un instrument
 Une incision mal conduite peut conduire à une déchirure tissulaire ;
 Une fracture alvéolaire et osseuse ;
 Une effraction d'artériole ou de veinule ...
- Utiliser les moyens locaux d'hémostase.
5. Moyens locaux d'hémostase
5. 1. Compression immédiate ou extrinsèque : à l'aide d'une compresse sera réalisée
systématiquement en post-opératoire jusqu'à disparition du saignement.
5.2. Compression intrinsèque
• Pansements hémostatiques résorbables ; l'utilisation de mèches non résorbables est à
proscrire étant donné le risque de saignement lors de leur retrait.
• Des colles chirurgicales ; Mais en raison de l'apparition de zones de nécrose liée à la
présence de formol, ces colles ne sont plus utilisées actuellement.
• Les colles biologiques : composées de concentrés de facteurs humains de l'hémostase,
coagulables sous l'action de la thrombine (Tissucol Duo®)
6. Surveillance postopératoire : obligatoire sachant notamment que les 3 jours qui suivent
l'acte représentent est la période postopératoire qui comporte le plus de risque de saignement
le patient doit en être averti et le moindre saignement doit le conduire à consulter.

Lors des prescriptions médicamenteuses :


 Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et l’aspirine sont
contre-indiqués chez les patients sous anticoagulants;

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 Les tétracyclines et les barbituriques sont contre-indiqués chez les
patients sous anti-vitamines K car ils potentialisent leur effet.

Le risque syncopal :

Syncope:
Définition : Perte de connaissance brève, brutale, complète et réversible, consécutive à une
diminution de l'oxygénation cérébrale.
Manifestations Cliniques :
La perte de connaissance débute brusquement et se traduit par une décontraction musculaire
complète, occasionnant dans la grande majorité des cas une chute.
On constate une pâleur, une absence de réaction aux bruits et au pincement, éventuellement,
un pouls absent.
La durée de la perte de connaissance est minime, le plus souvent inférieure à 1 min.
La reprise de conscience est spontanée, totale, très rapide et précédée d'une
recoloration du visage.

Classification des cardiopathies à risque syncopal.


- Cardiopathies à risque syncopal important :
-Trouble du rythme ou de la conduction ;
-Hypertension artérielle mal contrôlée.
-Rétrécissement aortique serré
-Cardiopathies ischémiques (Angine de poitrine et /'Infarctus du myocarde)
Autres cardiopathies :
Ce sont les cardiopathies réalisant un tableau d'insuffisance cardiaque et oùl'hémodynamique
est très perturbée :
-Myocardiopathies Obstructive (ou hypertrophique)
-Embolie pulmonaires (exp; porteurs de prothèses valvulaires)
-Cardiopathie congénitale cyanogène (Tétralogie de Fallot)
-Insuffisance cardiaque.

Prévention de la syncope :

 Interrogatoire pour déceler s’il s’agit d’un patient à risque syncopal ;


 préparation psychologique 
 préparation sédative pour réduire le stress : hydroxyzine (Atarax® 25) ou
diazépam (Valium® 5 mg : 1 cp la veille et 1cp 1h avant l’acte) 
 température ambiante modérée ;
 ne pas intervenir sur un patient est fatigué ou à jeun ;
 le patient doit être confortablement installé, en position allongée pour
favoriser la vascularisation cérébrale;
 lors de l’anesthésie : utiliser une seringue avec système d’aspiration, la
carpule doit être tiédie, l’injection doit être lente et pour les
vasoconstricteurs les utiliser sans dépasser 0,04mg (4 carpules) 
 éviter de provoquer une douleur ;
 éviter les interventions longues ;

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 surveiller le patient dans la demi-heure qui suit l’acte.
Traitement de la syncope : Face à une syncope, il faut :
 Arrêter les soins 
 appeler une équipe médicale spécialisée ;
 assurer la vacuité de la cavité buccale ;
 mettre le patient en position allongée avec la tête en hyper extension ;
 un massage cardiaque externe sera accompagné d’une ventilation artificielle
par bouche à bouche ou en utilisant un appareil spécial,
 Procéder parfois à une injection sous-cutanée d’atropine à raison de 0,5 mg.

-L’hypertension artérielle (HTA) :

L’hypertension artérielle (HTA) est une pathologie cardiovasculaire définie par une pression


artérielle trop élevée. On parle communément d'hypertension artérielle pour une pression
artérielle systolique supérieure à 140 mmHg et une pression artérielle diastolique supérieure
à 90 mmHg.

La conduite à tenir :
 Intervenir avec des chiffres tensionnels inférieurs à 14 ,8 ;
 collaborer avec le médecin traitant et le cardiologue

 prévoir une hémostase locale, chez ces patients le saignement est allongé du fait
du manque d’élasticité vasculaire 

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