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Anesthésie pour chirurgie thoracique


M. Le Guen, J. Fessler

Résumé : L’anesthésie pour chirurgie thoracique recouvre un certain nombre de spécificités qu’il convient
de connaître pour adapter la prise en charge des patients tout au long du périopératoire. Tout d’abord,
la réduction de la fonction respiratoire consécutive à une réduction du parenchyme requiert une évalua-
tion préopératoire de qualité pour déterminer l’opérabilité (évaluation du risque cardiaque, explorations
fonctionnelles respiratoires...) et pour limiter la morbimortalité postopératoire. Afin de faciliter le geste chi-
rurgical, une « immobilité » du parenchyme est obtenue par un contrôle des voies aériennes reposant sur
des techniques d’exclusion pulmonaire dont les modalités (sonde d’intubation double lumière, bloqueur
bronchique) seront adaptées au patient et au geste prévu. Dans tous les cas, un examen par fibroscopie
permet de qualifier la qualité du positionnement du dispositif choisi. Par ailleurs, un des objectifs majeurs
peropératoire est d’éviter la survenue de lésions alvéolaires par le recours à une stratégie ventilatoire pro-
tectrice, à la fois en ventilation bipulmonaire et en ventilation unipulmonaire, lors de la chirurgie. Enfin, la
phase postopératoire doit viser un retour à l’autonomie du patient rapide, et cela passe par une stratégie
de contrôle de la douleur optimale reposant principalement sur l’analgésie régionale périmédullaire ou
interfasciale ainsi que par la mise en œuvre de programmes de réhabilitation accélérée en postopératoire
ou d’optimisation multimodale préopératoire – « préhabilitation ». Cet article peut concerner d’autres
interventions (œsophagectomie, gestion d’hémoptysie) et est donc utile à tout praticien.
© 2022 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Anesthésie ; Ventilation unipulmonaire ; Intubation sélective ; Analgésie péridurale ;


Fonction respiratoire ; Réhabilitation postopératoire

Plan  Introduction
■ Introduction 1 La principale cause de résection pulmonaire est le cancer bron-
■ Évaluation préopératoire en chirurgie thoracique 2 chopulmonaire, qui représente aujourd’hui près de 25 % des décès
Critères d’opérabilité 2 par cancer chez les femmes et plus de 30 % chez les hommes,
Éléments spécifiques de la consultation préopératoire 3 avec une survie à 5 ans globale inférieure à 15 %. Les can-
Éléments d’information à fournir 3 cers du poumon sont classés en deux grandes catégories : les
■ Conduite de l’anesthésie 4 carcinomes dits « non à petites cellules » (non-small cell lung
Monitorage 4 carcinomas), qui dérivent des cellules souches épithéliales de la
Agents anesthésiques 4 muqueuse bronchopulmonaire, et les carcinomes dits « à petites
Prophylaxie 4 cellules » (small cell lung carcinoma), qui regroupent plusieurs
Installation chirurgicale 4 catégories de cancers présentant des caractéristiques morpho-
Développement de la chirurgie vidéo et robot-assistée en logiques, histologiques et ultrastructurales communes, dont la
thoracique 5 présence de granules neurosécréteurs et une importante activité
mitotique. La prise en charge de ces carcinomes à petites cellules
■ Spécificités de l’anesthésie en chirurgie thoracique – exclusion
est plutôt chirurgicale, tandis que les carcinomes non à petites cel-
pulmonaire 5
lules sont traités par chimiothérapie en première intention. Ces
Rappel anatomique 5
derniers représentent 80 % des cas et incluent notamment les
Technique d’exclusion ou d’isolation pulmonaire 5
carcinomes épidermoïdes, les adénocarcinomes (structure glan-
Ventilation unipulmonaire 7
dulaire) ou les carcinomes indifférenciés (carcinome à grandes
■ Gestion de la période postopératoire de chirurgie thoracique 8 cellules [1] . Si le tabac est le principal facteur de risque de can-
« Postopératoire » immédiat en salle de surveillance cer, d’autres facteurs ont été plus récemment impliqués (amiante,
postinterventionnelle 8 métaux lourds, pollution...). L’allongement de l’espérance de vie
Complications postopératoires retardées 11 et le tabagisme féminin laissent désormais envisager une augmen-
■ Réhabilitation postopératoire et préhabilitation 12 tation de l’incidence de cancer, tandis que la part de patients
Réhabilitation postopératoire 12 opérés ayant plus de 70 ans atteint déjà un tiers des cas [2, 3] . La
Préhabilitation 12 chirurgie thoracique est possible chez environ 10 % des diagnos-

tics de cancers bronchopulmonaires. Cette chirurgie est associée
Conclusion 13
à une mortalité postopératoire (> 2 % pour une lobectomie et

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Volume 43 > n◦ 2 > avril 2023
36-570-A-10  Anesthésie pour chirurgie thoracique

Risque cardiaque

Oui Non
2 > 80 %
Négative
Exploration cardiaque VEMS, DLCO

Risque
Positive 1 < 80 %
contrôlé

> 75 % (> 20 ml min-1)


Traitement d’épreuve Pic VO2 Résection

35–75 %
(10–20 ml min-1)

Risque < 35 %
VEMSppo, DLCOppo
persistant (< 10 ml min-1)

< 30 %

> 35 %
Pic VO2ppo

< 35 %

Sujets à haut risque postopératoire : traitements non chirurgicaux

Figure 1. Proposition de stratégie préopératoire de chirurgie d’exérèse pulmonaire (d’après Brunelli et al. [10] et modifiée). VEMS (ppo) : volume expiratoire
maximal par seconde (prédictif postopératoire) ; DLCO (ppo) : capacité de diffusion du monoxyde de carbone (prédictive postopératoire) ; VO2 (ppo) :
volume d’oxygène que l’organisme peut consommer (prédictif postopératioire).

davantage pour une pneumonectomie) et une morbidité (40 %) charge (douleur, transfusion et surveillance postopératoire). La
élevées. Par conséquent, ces risques doivent être anticipés dès la publication de recommandations autour du modèle de lobecto-
phase préopératoire [4, 5] . mie et le développement parallèle de « chirurgie moins invasive »
Au cours des dernières années, les pratiques ont évolué rapi- ont modifié la prise en charge préopératoire [8, 9] . L’anesthésiste-
dement, avec d’importants changements, aussi bien techniques réanimateur doit donc connaître les éléments de cette évaluation
que stratégiques. Ainsi, le développement de la chirurgie vidéo- pour éventuellement la compléter.
assistée (voire de la robot-chirurgie) réduit l’agression tissulaire
via des résections pulmonaires limitées pour préserver la capacité
respiratoire fonctionnelle. Enfin, d’un point de vue stratégique, la Critères d’opérabilité
place de la chimiothérapie néoadjuvante et la préparation préopé-
L’évaluation préopératoire d’opérabilité a été largement simpli-
ratoire des patients sont des axes de travail forts. Ces éléments ont
fiée, avec la publication d’un algorithme de décision européen,
conduit à modifier en partie la réflexion anesthésique pour pro-
qu’il convient d’adapter localement, en fonction des ressources
mouvoir cette chirurgie mini-invasive via une réhabilitation du
disponibles (Fig. 1) [10] . Le premier élément d’orientation est
patient la plus rapide possible [6, 7] , un meilleur contrôle de la dou-
la fonction cardiovasculaire stratifiée selon le Revised Cardiac
leur, et permet de s’intéresser à des populations à plus haut risque
Risk Index (RCRI) ou désormais le Thoracic Revised Cardiac Risk
(sujets avec comorbidités majeures ou sujets âgés) pour lesquelles
Index (Th-RCRI) [11] (Tableau 1). Ils évaluent le risque de compli-
la chirurgie n’est plus contre-indiquée. D’autres domaines plus
cation majeure postopératoire (infarctus du myocarde, œdème
techniques évoluent, comme le choix des dispositifs d’exclusion
pulmonaire, fibrillation ventriculaire, arrêt cardiaque, bloc auricu-
pulmonaire, la gestion des événements per- et postopératoires, et
loventriculaire) (Tableau 2) et déterminent la nécessité éventuelle
la place éventuelle des assistances extracorporelles (non abordée
de recourir à des explorations cardiologiques complémentaires
dans cet article) ou de l’habilitation pré-chirurgicale (« préhabili-
lorsque l’index est supérieur à 2 pour le RCRI ou 1,5 pour le
tation »).
Th-RCRI.
En cas de risque cardiaque faible, le deuxième temps de
 Évaluation préopératoire l’évaluation s’intéresse à la fonction respiratoire. Idéalement, il
s’agit d’examiner conjointement la mesure du volume expiratoire
en chirurgie thoracique maximal par seconde (VEMS) par la technique de spirométrie for-
cée directe et la mesure de la capacité de diffusion du monoxyde
L’évaluation préopératoire doit permettre de situer le patient de carbone (DLCO). La première évalue les limitations de débits
entre deux risques : le risque à court terme de complications post- (obstruction et réserve musculaire), tandis que la seconde éva-
opératoires (morbimortalité hospitalière) et le risque à long terme lue la diffusion alvéolocapillaire et donc le système respiratoire
d’une insuffisance respiratoire avec limitation fonctionnelle. Dans dans sa globalité (ventilation, diffusion, circulation, hémoglo-
ce contexte, les consultations chirurgicales et d’anesthésie pré- bine) [12] . Des valeurs élevées (> 80 %) pour les deux composantes
opératoire interviennent généralement à la suite des réunions de permettent d’envisager n’importe quel type de résection chi-
concertation pluridisciplinaires, une fois le bilan tumoral local rurgicale (de résection atypique à pneumonectomie). En cas de
et d’extension réalisé, et elles sont un moment clé pour préci- valeur inférieure à 80 %, c’est l’épreuve d’effort avec mesure de
ser l’opérabilité et expliciter au patient la stratégie de prise en la consommation d’oxygène (VO2 max) qui permet d’avancer

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Tableau 1.
Critères du (Thoracic) Revised Cardiac Risk Index (RCRI) (d’après Thomas et al. [11] ).
Paramètres RCRI Points Paramètres Th-RCRI Points
Chirurgie à haut risque : chirurgie intrathoracique, 1 Pneumonectomie 1,5
intrapéritonéale, vasculaire ou supra-inguinale.
Antécédent de maladie coronarienne : IDM, ECG, 1 Antécédent de maladie coronarienne : IDM, ECG, 1,5
effort positif, angor, dérivés nitrés, onde Q à l’ECG effort positif, angor, dérivés nitrés, onde Q à l’ECG
Antécédent d’insuffisance cardiaque 1 -
Antécédent d’AVC ou d’AIT 1 Antécédent d’AVC ou d’AIT 1,5
Traitement par insuline 1 -
Créatinine > 2 mg/dl ou 177 ␮mol/l 1 Créatinine > 2 mg/dl ou 177 ␮mol/l 1

RCRI : revised cardiac risk index. Le score final est la somme des points obtenus ; Th-RCRI : thoracic revised cardiac risk index ; IDM : infarctus du myocarde ; ECG :
électrocardiogramme ; AVC : accident vasculaire cérébral ; AIT : accident ischémique transitoire.

Tableau 2. • des critères prédictifs d’intubation difficile. En effet, le recours à


Risque de complications majeures après chirurgie thoracique en fonction une sonde d’intubation double lumière requiert une exposition
du Th-RCRI. glottique satisfaisante.
Valeur de Th-RCRI % de complications majeures Une alternative dans les techniques d’exclusion pulmonaire
doit être anticipée dès la consultation (bloqueur bronchique ou
0 1,5 intubation orotrachéale vigile par fibroscopie avec sonde simple
0-1,5 5,8 puis échange sur guide pour une sonde double lumière...).
2-2,5 19 Les points clés de la consultation sont principalement la
> 2,5 23
recherche à l’anamnèse de l’existence de désordres spontanés
ou acquis de la coagulation, afin de préciser les explorations
Th-RCRI : thoracic revised cardiac risk index. complémentaires et les techniques d’analgésie (périmédullaire...).
On peut citer dans ce contexte un questionnaire simple de dépis-
dans la décision d’opérabilité [13] . Une VO2 max inférieure à tage de type HEMSTOP [18] .
10 ml.kg−1 .min−1 est considérée aujourd’hui comme limitante Le second point est l’évaluation nutritionnelle, car le BMI
et doit conduire à une préparation optimale du patient, afin (body mass index, ou indice de masse corporelle [IMC]) est for-
d’améliorer sa réserve fonctionnelle. La VO2 max reste la référence tement associé à la survenue de complications postopératoires,
pour déterminer la réserve cardiorespiratoire du patient, mais elle qu’il s’agisse de l’obésité (BMI > 35) mais aussi et surtout de la
peut être testée plus simplement : test de montée de marches ou « dénutrition », avec un doublement des complications postopé-
test de la navette [14] . Ils possèdent une bonne valeur prédictive ratoires lorsque le BMI est inférieur à 17. Enfin, la consultation
négative, en distinguant notamment les patients à bas risque res- d’anesthésie doit aborder la question du tabagisme [19] . L’arrêt
piratoire : une distance parcourue supérieure à 400 mètres en du tabac a généralement été obtenu dès le diagnostic de tumeur
6 minutes et un dénivelé de plus de 22 mètres (5 étages) cor- pulmonaire posé. Si un sevrage d’au moins 4 semaines semble
respondent à une VO2 max > 15 ml.kg−1 .min−1 . Dans certaines intéressant à obtenir, ce délai ne doit pas retarder la chirurgie. En
situations, il est possible de se guider par des valeurs prédictives de effet, il n’y a pas d’argument pour penser qu’un sevrage du tabac
DLCO ou de VEMS, en fonction de la taille de la résection estimée de moins d’un mois génère davantage de complications postopé-
(approche anatomique). Différentes méthodes de calcul existent, ratoires que la poursuite d’un tabagisme actif. Les études sont le
avec toutefois un risque d’erreur lié à la part fonctionnelle du plus souvent de mauvaise qualité méthodologique, comparant le
segment considéré. En effet, il arrive que ces estimations sures- sevrage court à l’absence de tabagisme actif. Une méta-analyse
timent l’incapacité fonctionnelle, car la zone de résection est déjà ainsi que des éditoriaux défendent le sevrage, quel que soit le
non fonctionnelle en préopératoire. C’est notamment le cas chez délai de la chirurgie [20] . Ainsi, une des missions des pneumo-
le patient BPCO [15] . Aussi, pour affiner ces estimations, se déve- logues et des anesthésistes est de vérifier la mise en œuvre du
loppent les outils d’imagerie fonctionnelle, tels que le scanner sevrage tabagique ou de la proposer au patient en son absence,
thoracique fonctionnel ou plus traditionnellement la scintigra- voire d’accompagner ce sevrage par une orientation vers des pra-
phie ventilation-perfusion, qui permettent de quantifier l’impact ticiens spécialisés en addictologie ou de proposer des substituts
prévisible de la résection opératoire. Le risque d’une complica- nicotiniques et autres traitements substitutifs [21] .
tion grave est très faible si le VEMS prédictif postopératoire est
supérieur à 40 %, il est quasi constant en deçà de 30 %, justifiant
alors une abstention chirurgicale (Fig. 1). Il convient de préciser
que l’absence d’opérabilité ne signifie pas contre-indication à la
Éléments d’information à fournir
chirurgie. En effet, il est possible de proposer, soit une technique Analgésie postopératoire
alternative (radiofréquence), soit un programme de préparation
physique permettant d’améliorer les performances respiratoires Un syndrome douloureux postopératoire est défini comme la
dans un délai court (6-8 semaines). Ce reconditionnement pré- récurrence ou la persistance d’une douleur plus de deux mois
opératoire (préhabilitation) a démontré un effet positif sur les après une chirurgie, en l’absence de récidive de la maladie [22] . La
sensations de dyspnée, sur la capacité d’effort et sur la qualité prévalence de ce syndrome reste une préoccupation majeure en
de vie. Toutefois, l’absence d’études randomisées sur la question chirurgie thoracique, avec des taux compris entre 30 et 50 %, selon
ne permet pas de conclure de façon certaine [16, 17] . les études [23] ,et un impact fonctionnel important à long terme. La
pathogénie de la douleur après une thoracotomie est plurifacto-
rielle et conduit à l’apparition de douleurs de type neuropathique
Éléments spécifiques de la consultation dans plus de 10 % des cas [23] . L’incision chirurgicale avec trau-
préopératoire matisme nerveux (section de rameaux sensitifs, compression de
nerfs intercostaux par les écarteurs), la distension ligamentaire
Comme toute consultation d’anesthésie, l’anamnèse recher- par l’écartement intercostal et l’irritation de la plèvre pariétale
chera particulièrement : sont des événements traumatiques qui entraînent une réponse
• l’existence d’allergie ou d’intolérance alimentaire et médica- inflammatoire aiguë pouvant conduire à une hypersensibilisa-
menteuse ; tion du système nerveux central responsable d’une hyperalgésie
• une fragilité dentaire préexistante ; secondaire. Ces douleurs chroniques postopératoires ont été
• un syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) ; réduites par le développement de la chirurgie mini-invasive

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vidéo ou robot-assistée (VATS ou RATS). Ces nouvelles méthodes • la mesure continue de la SpO2 peut être faussement surestimée
chirurgicales ont conduit à proposer des nouvelles techniques par la présence de carboxyhémoglobine si l’opéré a fumé peu
analgésiques, souvent multimodale, associant largement anesthé- de temps avant l’intervention ;
sie locorégionale, recours aux anti-inflammatoires non stéroïdiens • la capnométrie nécessite une analyse critique. En effet, le
(en l’absence de défaillance rénale préexistante et de désordres gradient entre pression télé-expiratoire de CO2 (PetCO2 ) et pres-
de l’hémostase), et de la low opioid anesthesia (anesthésie a faible sion artérielle CO2 (PaCO2 ) peut être supérieur à 10 mmHg
recours aux opioïdes) [24] . L’analgésie péridurale ou le bloc para- lorsqu’il existe une bronchopneumopathie chronique obstruc-
vertébral étagés sont les techniques analgésiques de première tive. De plus, le gradient varie durant l’intervention en fonction
ligne en cas de thoracotomie [9, 25] . En pratique, le cathéter est du mode de ventilation (ventilation bi- ou unipulmonaire), de
inséré avant l’induction de l’anesthésie générale, par voie médiane l’état hémodynamique, voire de l’état fonctionnel du paren-
ou paramédiane, au plus proche du niveau métamérique de chyme, comme le démontre l’expérience de la transplantation
l’incision (généralement entre T5 et T6). L’administration d’une pulmonaire. Il ne faut donc pas modifier les constantes venti-
combinaison d’un anesthésique local avec un morphinique assure latoires à partir de la seule capnographie, même si on utilise la
l’analgésie la plus efficace [26] . Les effets indésirables sont classi- FeCO2 mesurée après une expiration prolongée ;
quement la survenue d’une rétention aiguë d’urine, d’un prurit et • le monitorage de la profondeur d’anesthésie doit être recom-
d’une hypotension orthostatique. La surveillance et l’adaptation mandé dans le cadre de ces chirurgies majeures chez des
quotidienne du débit de l’administration sont impératives pour patients âgés présentant de nombreuses comorbidités ;
limiter la survenue de ces événements et pour détecter éven- • les indications de mise en place d’un cathéter artériel sys-
tuellement des complications plus sévères, telles que l’abcès ou témique ou d’un cathéter artériel pulmonaire doivent être
l’hématome péridural [27] . L’incidence sur une série historique de discutées de la même façon que pour les autres types de chirur-
près de 8 000 patients pour toutes chirurgies confondues retrouve gie (risque hémorragique, insuffisance coronarienne, altération
40 événements totaux et plus particulièrement 5 événements en de la fonction ventriculaire). Le clampage artériel pulmonaire
chirurgie thoracique (3 infections systémiques et 2 abcès épidu- entraîne des conséquences hémodynamiques modestes qui ne
raux sur 999 cathéters). Dans ce contexte, tout trouble moteur rendent pas nécessaire la mise en place d’un monitorage invasif
nouveau doit conduire sans retard à la pratique d’une imagerie du pour cette seule raison.
rachis thoracique, au mieux l’IRM. En cas de contre-indication à
l’analgésie péridurale ou en cas d’abord chirurgical réduit (scopie,
voire vidé-assisté), certaines équipes proposent le bloc paraver- Agents anesthésiques
tébral dans ces situations, avec un profil de tolérance supérieur
(moins d’hypotensions artérielles, de nausées-vomissements et de Une anesthésie avec des agents de courte durée d’action est pra-
rétentions aiguës d’urine) [25] . La pose du cathéter se fait par un tiquée en général pour permettre une extubation « sur table » en
abord postérieur, sous contrôle échographique, au niveau du liga- fin d’intervention. Le protoxyde d’azote est à éviter, quelle que soit
ment costotransverse supérieur. Le cathéter peut également être la chirurgie, et particulièrement en cas de chirurgie thoracique, en
mis en place par le chirurgien juste avant la fermeture de la paroi raison de bulles parenchymateuses ou de pneumothorax non/mal
thoracique, sous contrôle de la vue complété d’une injection au drainé dont le volume et la pression vont augmenter. Le propo-
bleu de méthylène. Pour être efficace, il convient que la plèvre soit fol n’a aucun effet sur la vasoconstriction pulmonaire hypoxique
respectée au cours de l’acte chirurgical et que les concentrations (VPH), à l’inverse des halogénés. Toutefois, l’oxygénation est simi-
d’anesthésiques locaux soit élevées. Dans ce cas, le risque prin- laire en ventilation unipulmonaire, que l’entretien de l’anesthésie
cipal est la résorption systémique d’anesthésique local [28] . Ainsi, comprenne du propofol ou du sévoflurane, si ces deux agents sont
en cas d’une analgésie locorégionale, une surveillance spécifique administrés à un niveau similaire de profondeur d’anesthésie [29] .
à la recherche d’un bloc moteur ou d’une toxicité systémique est L’effet bronchodilatateur des halogénés est un argument en faveur
nécessaire et implique la formation régulière du personnel infir- de leur emploi, associé à un profil pro-inflammatoire moindre que
mier. Le retrait des cathéters d’analgésie doit être envisagé dès J3 le propofol, au cours de la ventilation unipulmonaire [30] . Toute-
pour limiter les perfusions de longue durée. En ce qui concerne fois, la mesure des concentrations expirées des agents volatiles est
l’analgésie péridurale, l’examen du point de ponction est quoti- nécessaire pour s’assurer du passage transalvéolaire, lequel peut
dien, du fait du risque d’abcès sous-cutané « évoluant » en abcès être pertubé en cas d’atteinte parenchymateuse et de ventilation
péridural, et un examen neurologique biquotidien est recom- unipulmonaire.
mandé, à la recherche d’un bloc moteur qui n’a pas de raison La myorelaxation est indispensable pour éviter tout mou-
d’exister dans l’entretien de l’analgésie. vement diaphragmatique lors de la dissection et en cas de
vidéothoracoscopie.
Risque de transfusion
La chirurgie thoracique fait partie des interventions à risque
hémorragique, du fait de la présence des gros vaisseaux (veines
Prophylaxie
caves et pulmonaires, artères pulmonaires ou aorte), et par consé- La chirurgie d’exérèse pulmonaire est considérée comme une
quent le patient doit en être informé. Cette information orale sera chirurgie propre contaminée (classe 2 d’Altemeier), du fait de
complétée d’une information écrite, conformément aux recom- l’ouverture des bronches ou de la trachée. L’antibioprophylaxie
mandations. repose sur les céphalosporines de première génération, en
l’absence d’allergie. La prophylaxie de la maladie thromboem-
Stratégie postopératoire bolique est classique, avec pour seule particularité une fenêtre
Il convient, dès la consultation d’anesthésie préopératoire, thérapeutique lors de l’ablation d’un cathéter péridural.
d’informer le patient de la stratégie postopératoire envisagée. En
effet, s’agissant d’une chirurgie qualifiée de majeure, de la spé-
cificité du drainage thoracique ou des modalités d’analgésie, le Installation chirurgicale
parcours postopératoire immédiat passe souvent par un service
de soins intermédiaires (soins continus ou intensifs). La plupart des interventions sont réalisées en décubitus latéral
sur un billot thoracique, ce qui procure une très bonne exposi-
tion du hile. La vérification des différentes zones d’appui, de la
 Conduite de l’anesthésie position des bras (étirement du plexus brachial), des perfusions et
de la pression artérielle sont primordiales avant l’incision, tout
Monitorage comme l’installation d’un coussin placé sous la tête pour pré-
venir l’étirement des racines cervicales, l’occlusion des yeux. Il
Il est le plus souvent non invasif, sauf risque cardiovasculaire faut enfin vérifier la symétrie des pouls radiaux pour dépister la
particulier. Quelques particularités doivent être rappelées : compression d’une artère axillaire.

4 EMC - Anesthésie-Réanimation
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Tableau 3. Tableau 4.
Indications absolues ou relatives de l’exclusion pulmonaire (d’après Merli Proposition de choix d’une taille de sonde à double lumière en fonction
et al. [31] ). des critères anthropométriques en unité French.
Indications peropératoires Sexe Taille (cm) Taille du tube double lumière
Indications absolues Indications relatives Femmes < 150 32
Vidéo-thoracoscopie, robot Chirurgie œsophagienne > 150 et < 160 35
chirurgie Anévrysme de l’aorte thoracique
> 160 37
Emphysème bulleux descendante
Lavage pulmonaire pour Chirurgie du rachis thoracique Hommes < 160 37
protéinose alvéolaire > 160 et < 170 39
Indications peropératoires ou en réanimation > 170 41
Indications absolues Indications relatives
Aucune Hémoptysie
Abcès controlatéral situe à environ 24 cm des arcades dentaires et donne les bronches
→ Protéger d’une pathologie souches droite (avec une angulation faible, de l’ordre de 30◦ ) et
controlatérale gauche (angulation plus marquée). La bronche souche gauche est
Rupture bronchique plus longue que la bronche souche droite, sans corrélation à la
Fistule bronchopleurale taille de l’individu [32] . Les considérations anatomiques amènent
→ Permettre la ventilation/limiter à plusieurs conséquences, si on choisit de mettre en place un tube
les fuites à double lumière (TDL) :
• privilégier la mise en place d’un tube à double lumière gauche,
car la « marge de sécurité » est plus importante à gauche qu’à
droite. Dès lors, un tube à double lumière gauche comporte peu
Développement de la chirurgie vidéo de risque d’obstruer l’orifice lobaire supérieur gauche, compa-
et robot-assistée en thoracique rativement à un tube à double lumière droit envers la bronche
lobaire supérieure droite ;
Au cours des dernières années, l’utilisation du robot pour • savoir qu’il y a une grande variabilité interindividuelle des dia-
assister la chirurgie mini-invasive est devenue de plus en plus mètres bronchiques expliquant les échecs de choix du diamètre
fréquente. Bien que le niveau de preuve soit insuffisant pour du tube en fonction du sexe et de la taille du patient. Les don-
défendre une supériorité de la thoracoscopie robot-assistée (RATS) nées figurant sur le Tableau 4 ne sont qu’indicatives ;
vis à vis de la vidéothoracoscopie (VATS), elle permet une plus • il existe une variabilité interindividuelle quant à la naissance de
grande précision des gestes dans des espaces plus étroits, grâce à la bronche lobaire supérieure droite. Dans près de 10 % des cas,
une vision en 3D et à la mobilisation des instruments à 360◦ . Alors elle peut naître au niveau de la carène (carène dite trifurquée) ;
que le chirurgien principal se trouve sur une console à distance • il faut insister sur la nécessité d’une lecture préalable du
du champ opératoire, un deuxième chirurgien se trouve habillé compte rendu de fibroscopie (existence d’une bronche tra-
pour le changement des instruments et pour intervenir immédia- chéale) et du scanner thoracique avant de faire le choix du mode
tement en cas d’incident nécessitant le déverrouillage des bras du d’intubation. Dans l’avenir, les possibilités de reconstruction
robot et une conversion. L’anesthésie s’adapte à cette nouvelle 3D vont permettre de réaliser « facilement » une fibroscopie vir-
technique, et des précautions spécifiques doivent être connues. tuelle, avec la possibilité de mesurer les diamètres bronchiques
En effet, l’encombrement du robot limite l’accès au patient, par- et donc de prévoir le mode d’intubation idéal pour chaque
ticulièrement l’accès aux voies d’abord vasculaires et aux voies patient [33] .
aériennes. Celles-ci doivent être minutieusement contrôlées après
l’installation définitive du patient. Une exclusion pulmonaire
médiocre ne pourrait pas être corrigée par la suite. Contraire- Technique d’exclusion ou d’isolation
ment à la VATS, où la cavité pleurale est égale à la pression
atmosphérique, la RATS crée une pression intrathoracique posi-
pulmonaire
tive (5-10 cmH2 O) qui peut écraser les vaisseaux médiastinaux et Tubes à double lumière
réduire le retour veineux ou augmenter la postcharge du ventri-
cule droit. Ce pneumothorax est obtenu par l’insufflation de gaz Présentation
carbonique, qui peut artificiellement augmenter la capnie. Une Ces sondes sont constituées par l’accolement de deux canaux,
dernière précaution est l’immobilité parfaite du patient pendant l’un bronchique (code couleur bleu), incurvé au niveau dis-
la chirurgie, afin d’éviter toute lésion causée par un mouvement tal, et l’autre trachéal (de couleur blanche), plus court. Chacun
involontaire du patient contre les instruments fixes du robot. des canaux est muni d’un ballonnet d’étanchéité. Les sondes
possèdent un mandrin facilitant leur passage dans la filière
pharyngolaryngée jusqu’aux cordes vocales. Un raccord double
spécifique et une pièce en Y permettent l’adaptation au respira-
 Spécificités de l’anesthésie teur. Il existe des sondes à double lumière droites ou gauches,
en chirurgie thoracique – munies ou non d’un ergot qui vient se positionner sur la carène.
Les critères de choix vont prendre en compte le type de chirur-
exclusion pulmonaire gie, la taille du patient et les préférences locales, le plus souvent
pour ce qui est de l’ergot (Tableau 5).
Les indications et la réalisation de l’exclusion pulmonaire
Critères de choix
nécessaires à la ventilation unipulmonaire constituent les princi-
paux enjeux de l’intubation en chirurgie thoracique. Le contrôle Le choix de la sonde double lumière se porte habituellement
des voies aériennes nécessite ainsi la mise en place de sondes sur un tube à double lumière gauche. En effet, le tube à double
d’intubation spécifiques pour permettre l’exclusion ou encore lumière droit présente l’inconvénient du placement délicat de la
« l’isolation » du poumon (Tableau 3). fenêtre du ballonnet bronchique en face de l’orifice de la bronche
lobaire supérieure droite, avec une marge de sécurité faible. La
mise en place d’un tube à double lumière droit est donc effectuée
Rappel anatomique en cas de lésion proximale de la bronche souche gauche et en
cas d’anomalie de la crosse aortique. Dans les autres cas, le TDL
La trachée, d’une longueur moyenne comprise entre 11 et gauche sera préféré.
13 cm, et d’un diamètre moyen de 2 cm, est orientée selon un Le choix de la taille de la sonde est très important : un tube
axe dirigé en bas et en arrière. La carène, en forme d’éperon fin, se à double lumière de taille optimale est une sonde qui passe les

EMC - Anesthésie-Réanimation 5
36-570-A-10  Anesthésie pour chirurgie thoracique

Tableau 5. née avec surveillance. Ces lésions peuvent être favorisées par le
Résumé des indications de bloqueurs bronchiques. terrain fragile de certains patients (cachexie, diabète, infection
Situation programmée Situation non programmée préexistante, prise de corticoïdes au long cours, trachéomalacie).
Les lésions se répartissent pour environ deux tiers au niveau de
Enfants avec taille < 140 cm Intubation difficile non prévue en l’arbre bronchique et pour un tiers au niveau de la trachée. Le
chirurgie thoracique diagnostic repose sur la fibroscopie bronchique.
Intubation par fibroscopie pour Patient de réanimation déjà
critères de difficulté connus intubé nécessitant une exclusion Bloqueurs bronchiques
pulmonaire
Il s’agit de dispositifs munis d’un ou de deux ballonnets venant
Sympathectomie bilatérale (EZ Extubation prévue à risque faisant
se positionner dans la bronche à exclure. Le plus souvent, la mise
blocker) préférer une sonde monolumière
en place ou le contrôle de la bonne position requiert un fibro-
Exclusion hypersélective d’un scope. Nous décrirons les principaux bloqueurs bronchiques, mais
lobe ou d’un segment cette liste n’est pas exhaustive.
Chirurgie de l’œsophage Pour accélérer l’affaissement du poumon, il faut dégonfler le
ballonnet du bloqueur, arrêter de ventiler le patient puis regonfler
le ballonnet avant de reprendre la ventilation [37] .
cordes vocales de manière non traumatique, qui progresse facile- Bloqueur libre d’Arndt
ment au cours de son insertion dans la trachée, qui entre dans Le bloqueur d’Arndt est le plus utilisé et le plus ancien des
la bronche souche sans difficulté et qui permet un léger passage
bloqueurs libres. À l’extrémité proximale de la sonde monolu-
d’air dans la trachée à ballonnet dégonflé. Les tubes trop larges
mière, on ajoute un raccord original avec 3 lumières : la première
sont traumatiques (rupture bronchique) et entraînent le risque
pour la ventilation, la deuxième pour l’introduction du bloqueur
d’une intubation trop proximale (par hernie du ballonnet bron-
et la troisième pour l’introduction du fibroscope. Un lasso situé
chique dans la trachée entravant la ventilation de la bronche
au niveau du ballonnet du bloqueur permet de le solidariser
souche opposée). Les tubes trop petits diminuent la qualité de
au fibroscope à l’extrémité distale du raccord. Le bloqueur et le
l’aspiration bronchique, comportent un risque barotraumatique
fibroscope progressent dans les voies aériennes jusqu’à l’endroit
par surdistension du ballonnet bronchique, sont susceptibles de
souhaité, par la lumière de la sonde, après adaptation du raccord.
se déplacer accidentellement et vont accroître l’auto-PEEP (positive
Il convient donc que la sonde d’intubation en place possède le
end expiratory pressure, ou pression expiratoire positive).
diamètre adéquat pour permettre le passage du fibroscope accom-
Contrôle du bon positionnement de la sonde double lumière pagné du bloqueur, tout en persistant un espace libre endoluminal
Le contrôle du bon positionnement de la sonde par fibro- pour permettre une ventilation minimale [38] . Après libération du
scopie bronchique doit être réalisé après l’intubation puis une fibroscope, le ballonnet est gonflé pour permettre l’exclusion, et
seconde fois après le positionnement en décubitus latéral, après le volume nécessaire au gonflement adéquat est déterminé sous
la mise en place du billot. L’extension de la tête peut entraîner contrôle fibroscopique.
le recul de la sonde d’intubation et la flexion son avancement. Bloqueur de Cohen
Cette pratique est préconisée dans les recommandations de socié- Sa spécificité est d’avoir une extrémité distale qui est bec-
tés savantes [34–36] . Depuis peu est commercialisé un tube double quée et rotative, par le biais d’une mollette. Ainsi, la mise en
lumière équipé d’une fibre optique à l’extrémité du tube trachéal place s’effectue sous contrôle fibroscopique mais de manière indé-
(VivaSight DLTM ). Ainsi, par un écran déporté, on peut confir- pendante aux manœuvres de fibroscopie. La disposition dans la
mer au moment du geste le passage entre les cordes vocales et bronche souche droite ou gauche se fait par une rotation à 180◦
par conséquent limiter le retard diagnostique d’une intubation du bloqueur. L’inflation sous contrôle visuel du ballon confirme
œsophagienne. Par ailleurs, la vidéo permet « d’accompagner » le la bonne position.
tube bronchique jusqu’à la carène et de le diriger vers la bronche
Bloqueur UniventTM
souche souhaitée. La limite principale du système est l’absence
de visibilité du canal bronchique et du positionnement du tube Le bloqueur UniventTM est une sonde d’intubation monolu-
en distalité (contact avec la division bronchique...). Toutefois, il mière particulière, car elle comprend un canal supplémentaire
permet d’introduire largement la vidéo pour le positionnement dans la paroi de sa petite courbure qui permet d’y faire coulisser
de cette sonde en dehors d’un équipement spécifique dédié à la un bloqueur bronchique. L’extrémité du bloqueur peut être avan-
fibroscopie. cée jusqu’à 8 cm au-delà de l’extrémité distale de la sonde. Une
fois passé les cordes vocales, la sonde est tournée vers la bronche
Complications des tubes à double lumière souche à exclure. Le fibroscope et la sonde progressent vers la
L’utilisation de sondes double-lumière au bloc opératoire est carène, puis le bloqueur bronchique est avancé sous contrôle
associée à un risque de lésions mécaniques des voies aériennes fibroscopique dans la bronche souche désirée.
supérieures. Les lésions du larynx sont habituellement la consé- EZ-blocker
quence du diamètre externe important des TDL. Les dysphonies
L’EZ-blocker se compose d’un tube souple dont l’extrémité dis-
et les douleurs laryngées sont fréquentes après une intubation
tale en forme de Y dispose d’un ballon bronchique sur chaque
avec un TDL. Une étude randomisée comparant l’incidence de ces
branche [39] . Ce dispositif est simple de mise en œuvre, puisqu’il
complications postopératoires par fibroscopie selon le dispositif
s’insère dans une sonde orotrachéale classique, qu’il se déploie
utilisé (TDL, ou sonde simple lumière, ou bloqueur bronchique) a
à la sortie de la sonde et vient théoriquement se fixer sur la
montré une incidence doublée de dysphonie et de douleurs laryn-
carène. Les avantages sont de permettre facilement une ven-
gées en cas de TDL. L’administration de corticoïdes intraveineux
tilation alternative droite et gauche dans certaines chirurgies
diminue l’incidence de ces phénomènes. D’autre part, on peut
(résections atypiques bilatérales ou sympathectomie thoracique).
observer une malposition de la sonde responsable d’une exclu-
Toutefois, la qualité de l’exclusion n’est pas supérieure à celle d’un
sion incomplète de la ventilation, rendant le geste chirurgical
tube double lumière.
difficile ou impossible. La malposition est également responsable
d’un risque d’hypoxémie lors de la ventilation unipulmonaire ou Indications des bloqueurs bronchiques [31, 34, 40, 41]
d’une pneumopathie infectieuse postopératoire. Ces risques sont Parmi les avantages des bloqueurs bronchiques, on retrouve le
diminués par l’utilisation du fibroscope systématique en contrôle fait qu’ils puissent être insérés en cours d’intervention, en décu-
de la bonne position du tube. Enfin, la complication iatrogène la bitus dorsal ou en décubitus latéral. Leur utilisation est possible
plus grave avec une TDL est la rupture ou la déchirure partielle de après intubation par séquence rapide ou intubation nasotrachéale
la trachée ou d’une bronche souche diagnostiquée par pneumo- sous fibroscopie. Le maintien de la ventilation est possible lors de
médiastin ou pneumothorax homolatéral. Son incidence est rare leur insertion. Le bloqueur permet l’exclusion sélective d’un seul
(moins de 1 %). La prise en charge se discute entre un traitement lobe. Le changement de sonde d’intubation en fin d’intervention
chirurgical et un traitement conservateur en ventilation sponta- n’est pas nécessaire chez les patients qui ne seront pas extubés en

6 EMC - Anesthésie-Réanimation
Anesthésie pour chirurgie thoracique  36-570-A-10

Tableau 6.
Modalités de réglages de la ventilation en chirurgie thoracique.
Paramètres ATS 2017 Sfar 2019
Volume courant 6-8 ml/kg de poids idéal 5-6 ml/kg de poids idéal
(class IIa, level B).
Pression expiratoire positive ≥ 5 cmH2 O 5-10 cmH2 O
Pression moyenne des voies aériennes < 30 cmH2 0 < 30 cmH2 0
Ratio I:E 1:2
Manœuvre de recrutement Possible pendant la VUP Possible pendant la VUP
Objectifs de SpO2 > 92 %
Modalité de ventilation VPC > VVC
(class IIa, level B)

Ratio I:E : ratio entre la durée de la phase inspiratoire et celle de la phase expiratoire ; VUP : ventilation unipulmonaire ; VPC : ventilation en pression contrôlée ; VVC :
ventilation en volume contrôlé.

postopératoire immédiat. Ils sont utilisables en pédiatrie chez le traumatisme pulmonaire pouvait avoir un bénéfice clinique, et ce
petit enfant (Tableau 5). Cependant, le temps nécessaire à la mise concept reste vrai et s’est adapté aux données récentes. Dans une
en place d’un bloqueur est plus long que celui qui est nécessaire à large cohorte de près de 1 100 patients opérés de chirurgie tho-
la mise en place d’une sonde à double lumière. Le temps nécessaire racique, les auteurs ont observé une diminution de la mortalité
à l’affaissement pulmonaire est également plus long qu’avec un (2,8 versus 2,3 %, p = 0,002) et du taux de complications respi-
tube à double lumière, quelle que soit la technique d’exsufflation ratoires (14 % versus 10 %, p = 0,018) avec l’application d’une
utilisée. L’aspiration bronchique du côté exclu se révèle également ventilation protectrice. Petit à petit, les différentes équipes ont
plus difficile. La qualité d’exclusion n’est pas toujours parfaite. démarré une ventilation protectrice en VUP, comme démontré
Par ailleurs, il existe un risque de déplacement lors de la mise en par Colqhoun sur plus de 5 000 patients, entre 2009 et 2014, dans
décubitus latéral du patient puis en peropératoire, ce qui néces- 4 grands hôpitaux américains [45] . Une vigilance toute particulière
site la disponibilité du fibroscope durant toute l’intervention. est recommandée en présence des facteurs suivants : sexe féminin,
Enfin, il est nécessaire de posséder une bonne connaissance de taille < 165 cm et obésité. Dans ces populations, la tendance reste
l’endoscopie bronchique. l’application d’un VT « corrigé » élevé [45] .
À l’inverse, il convient de ne pas trop baisser le volume courant.
Cas spécifiques des patients trachéotomisés
Ainsi, l’administration en VUP d’un volume entre 4 et 5 ml/kg
Des canules de trachéotomie à double lumière existent. Elles induit per se un dérecrutement alvéolaire et doit être associé à un
peuvent être indiquées pour des patients nécessitant une ventila- niveau de PEEP adéquat souvent élevé.
tion unipulmonaire (VUP), en raison du risque de contamination
du poumon sain (pneumopathie, hémoptysie, fistule bron- Détermination de la PEEP
chique). Sinon, on utilisera aisément un bloqueur via la canule La détermination de la PEEP a été débattue en VUP. Plusieurs
de trachéotomie. études bien conduites ont testé, soit différents niveaux de PEEP,
soit une personnalisation de la valeur. Dans l’étude de Spadaro
et al. 3 niveaux différents de PEEP (0,5 et 10 cmH2 O) étaient
Ventilation unipulmonaire appliqués, et les auteurs montraient que la PEEP optimale était
de 10 cmH2 O pour optimiser l’oxygénation, réduire le shunt
Ventilation protectrice intrapulmonaire et améliorer la driving pressure. Toutefois, une
Plusieurs revues de la littérature concordent pour recommander PEEP systématique à 10 cmH2 O reste considérée comme élevée,
une ventilation protectrice lors de la ventilation unipulmonaire. et c’est la valeur pour laquelle un retentissement échocardio-
Longtemps, la stratégie a été l’administration d’un volume cou- graphique, sur le ventricule droit notamment, est démontré [46] .
rant élevé sans PEP reposant sur des travaux ayant montré un L’implémentation de cette valeur passera par la démonstration
moindre risque d’hypoxémie en peropératoire. Cependant, les d’une amélioration des suites à moyen terme. Dans ce contexte, la
effets délétères d’une ventilation avec des volumes supraphy- recherche d’une PEEP personnalisée s’est développée, avec la réa-
siologiques ont été depuis identifiés, et les sociétés savantes lisation d’un PEEP-trial. Au terme d’une étude bien conduite sur
préconisent désormais l’application d’une ventilation protectrice 24 cas avec manœuvre de recrutement en unipulmonaire, avec
également en VUP : petits volumes courants (5-7 ml/kg de poids PEEP à 15 cmH2 O, les auteurs concluent que la PEEP optimale
idéal), PEEP ≥ 5 cmH2 O, contrôle de la pression de plateau et est de 6 ± 0,8 (5-8) cmH2 0 [47] . La différence de PEEP entre les
réalisation de manœuvres de recrutement [9] (Tableau 6). deux études pourrait s’expliquer par des designs distincts. Cette
dernière étude a appliqué une vraie manœuvre de recrutement,
Volume courant
tandis que l’étude de Spadaro appliquait simplement un niveau
Le choix d’un volume courant restreint a été longtemps cri- fixe de PEEP.
tiqué. En effet, appliqué de façon isolée, il n’est pas protecteur,
du fait de l’apparition d’atélectasies, du phénomène de shear- Modalité de ventilation
stress alvéolaire (alternance fermeture/ouverture des alvéoles) et Des travaux se sont également intéressés aux modalités de
de l’utilisation conjointe d’une fraction en oxygène élevée pro- ventilation, avec un intérêt particulier pour le régime en pres-
voquant des atélectasies de dénitrogénation. Ainsi, un volume sion contrôlée qui permet théoriquement de réduire les pressions
courant restreint s’entend en association avec d’autres stratégies, de pics et moyenne générés, même si une moindre capa-
telles qu’une PEEP adéquate et/ou de manœuvre de recrutement. cité d’oxygénation est le corollaire de cette technique. Deux
Une étude chez des patients recevant un haut (10 ml/kg) ou un méta-analyses publiées récemment montraient une différence
bas volume courant (6 ml/kg) avec une PEEP faible (5 cmH2 O) significative dans les pressions inspiratoires mais non sur les pres-
n’a pas montré de différence sur la fonction respiratoire post- sions de plateau et moyenne des voies aériennes entre les régimes
opératoire. Cependant, l’association faible VT et faible PEEP ventilation volume contrôlé et pression contrôlée, tandis que les
(< 5 cmH2 O) était identifiée comme un facteur de risque de volumes courants sont identiques. Les capacités d’oxygénation se
mortalité et de complications respiratoires postopératoires [42, 43] . révèlent similaires, et l’incidence de complications respiratoires
La littérature tend à recommander une ventilation protectrice postopératoires aussi. De fait, les auteurs préconisent plutôt ce
en VUP associant un volume courant faible et une PEEP suffi- mode ventilatoire en pression contrôlée en VUP [48] . Ce résultat est
samment haute pour prévenir la survenue d’atélectasies. Licker à mettre en perspective avec une méta-analyse de 2012 qui mon-
et al. [44] ont montré qu’une approche multimodale limitant le trait une forte fluctuation du volume administré en ventilation

EMC - Anesthésie-Réanimation 7
36-570-A-10  Anesthésie pour chirurgie thoracique

en pression contrôlée (VPC), avec une inflammation pulmonaire • un shunt droit-gauche lié à un foramen ovale perméable.
induite.
Les recommandations de l’ATS en 2017 [49] et de la SFAR en Gestion de l’hypoxémie en pratique
2019 [9] proposent donc l’application d’une stratégie de ventila- La première étape consiste à lever les atélectasies en tenant
tion protectrice en cas de VUP. compte de l’étape chirurgicale. Il est important de s’assurer que
le chirurgien ne se trouve pas dans une étape délicate de la dis-
Manœuvres de recrutement section pouvant léser un gros vaisseau. Toutefois, ces manœuvres
Les manœuvres de recrutement alvéolaire, notamment après ne sont pas sans risque et peuvent être responsables d’instabilité
intubation et réexpansion pulmonaire en fin d’intervention, sont hémodynamique en cas d’hypovolémie ou d’un barotraumatisme
aujourd’hui possibles. En effet, pour être réellement efficace, chez les patients emphysémateux, provoquant un pneumothorax
l’application d’une PEEP doit être associée aux manœuvres de controlatéral de diagnostic difficile et de traitement urgent. C’est
recrutement alvéolaire [50] . Elles sont d’ailleurs présentes dans pourquoi, le recrutement alvéolaire doit surtout être employé à
le groupe « ventilation protectrice » de différents essais rando- titre préventif dès la fin de l’induction anesthésique et lors de la
misés [51] . Une autre méthode est l’application d’une pression reventilation bipulmonaire en fin d’intervention. Enfin, en cas
intrathoracique (ou pression moyenne) de 30 cmH2 O pen- de fuite ou de modification des pressions, une fibroscopie per-
dant 30 secondes, de manière répétée, compte tenu d’un effet met d’éliminer tout déplacement de la sonde d’intubation et toute
d’épuisement au cours du temps du recrutement obtenu initiale- sécrétion obstructive [55] .
ment. Toutefois, l’application de ces manœuvres de recrutement Une baisse de la SpO2 isolée (pas de modification des pressions
doit être prudente, du fait du risque de barotraumatisme (patients dans les voies aériennes) en cours de ventilation unipulmonaire
emphysémateux) et d’hypotension artérielle transitoire (patients conduit tout d’abord à augmenter la FiO2 jusque 100 %.
hypovolémiques ou cardiopathie droite). Cela justifie particu- Ensuite, si l’acte chirurgical le permet, cas le plus fréquent, et
lièrement la surveillance de la pression artérielle lors de leur en concertation avec le chirurgien, l’action la plus simple et rapi-
réalisation et l’anticipation des situations d’hypovolémie. Toute- dement efficace est la reventilation du poumon opéré pendant
fois, ces manœuvres participent à la prévention des hypoxémies 2 à 3 cycles avec de l’oxygène pur puis à l’exclure de nouveau ;
peropératoires [52] . une telle manœuvre corrige l’hypoxémie pendant une dizaine de
minutes. Cette manœuvre peut être répétée si nécessaire et suffit
Hypoxémie : physiopathologie à régler le problème de l’hypoxémie dans la plupart des cas.
L’administration d’un faible débit d’oxygène ou le maintien
Le principal événement indésirable au cours de la ventilation
d’une pression permanente (CPAP) dans le poumon exclu est
unipulmonaire est la survenue d’une hypoxémie, avec désatu-
possible. Dans certains cas, il est impossible de reventiler le pou-
ration significative (< 90 %). Cet événement s’explique par la
mon opéré (dissection du hile pulmonaire en cours, thoracoscopie
situation de shunt intrapulmonaire (ou shunt vrai) reproduite
complexe comme lors des interventions portant sur le rachis dor-
artificiellement lors de l’exclusion complète, liée à la perfusion
sal, chirurgie de l’œsophage...).
résiduelle du poumon non ventilé. La baisse de la PaO2 est rapide
En cas d’échec de ces différentes manœuvres, on peut recou-
et atteint un plateau après environ 15 minutes de VUP, se situant
rir à des thérapeutiques pharmacologiques. Ainsi, la perfusion
aux environs de 150 mmHg. L’importance de cette baisse et son
d’almitrine qui réduit la perfusion du poumon non ventilé (bolus
plateau dépendent des facteurs suivants :
de 6 à 8 ␮g/kg/min suivie d’un entretien de 4 ␮g/kg/min jusqu’à la
• la gravité, qui influence les rapports régionaux de ventila-
reventilation) seule [56] ou associée de principe à l’administration
tion/perfusion. Ainsi, la baisse de la PaO2 est moins importante
de NO. Malheureusement, l’almitrine n’est plus produite par
lors du passage en ventilation unipulmonaire chez un patient
l’industrie depuis son retrait des recommandations du SDRA. Dans
en décubitus latéral avec le poumon inférieur ventilé que chez
de rares situations, il faudra envisager le clampage en règle partiel
un patient en décubitus dorsal ;
de l’artère pulmonaire du côté non ventilé. En dernier recours,
• la répartition préopératoire de la perfusion, qui joue un rôle
la pose d’une ECMO veinoveineuse ou veinoartérielle peut être
évident. Ainsi, une thrombose vasculaire pulmonaire limitera
nécessaire.
la perfusion du poumon non ventilé ;
• la qualité de l’hématose réalisée par le poumon inférieur (até-
lectasies, hyperinflation dynamique). Ce point est trop souvent
oublié ;
 Gestion de la période
• la perfusion résiduelle du poumon supérieur. Une hypoxé- postopératoire de chirurgie
mie témoigne en partie d’une vasoconsriction pulmonaire
hypoxique (VPH) régionale défaillante. La VPH est un « méca- thoracique
nisme de défense contre l’hypoxie » retrouvé chez la plupart des
mammifères, et notamment chez l’homme sain. Découverte
« Postopératoire » immédiat en salle
par Von Euler et Liljestrand en 1946 [53] , cette vasoconstric- de surveillance postinterventionnelle
tion locale n’intéresse que les artères pulmonaires distales, de
calibre inférieur à 300 ␮m, situées au niveau des bronchioles ter- Cette période vise notamment à assurer une analgésie satisfai-
minales, et intervient avec un effet maximal pour des valeurs sante avant la sortie, à détecter précocement une complication
de PaO2 comprises entre 30 et 50 mmHg. Il faut noter que postopératoire et à surveiller régulièrement différents paramètres,
cette vasoconstriction régionale ne s’accompagne pas d’une élé- dont l’ensemble des critères de sortie. Sauf exception, les patients
vation de la pression artérielle pulmonaire, compte tenu de arrivent extubés en salle de surveillance post-interventionnelle
la compliance élevée du lit vasculaire pulmonaire. Au cours (SSPI) et bénéficient d’une prise en charge standardisée :
d’une anesthésie générale, de nombreux agents ou conditions • installation en position semi-assise ;
vont altérer cette réponse vasoconstrictive [54] . Par ailleurs, • apport systématique d’oxygène par voie nasale adapté aux
les patients atteints d’une bronchopneumopathie obstructive objectifs de SpO2 ;
ont une réponse très variable à l’hypoxie aiguë, ils se répar- • mise en aspiration des drains thoraciques immédiate, ou déca-
tissent à peu près également en « répondeurs » et « faibles lée en cas d’avivement pleural (hors pneumonectomie), avec
répondeurs » ou « non-répondeurs » à l’hypoxie. Cela pour- utilisation plus fréquente de systèmes électroniques de drai-
rait s’expliquer par l’existence de modifications structurelles nage ;
des vaisseaux pulmonaires : hypertrophie de la média des • imagerie de contrôle précoce ;
petites artères pulmonaires, muscularisation des artérioles pul- • éventuellement, lever précoce.
monaires normalement dépourvues de tissu musculaire lisse et,
à un stade avancé, fibrose de l’intima. Enfin, les variations du Éléments généraux
débit cardiaque modifient le débit sanguin du poumon supé- Les éléments importants du traitement postopératoire
rieur non ventilé, et le shunt ; comportent la reprise de la thromboprophylaxie, la poursuite

8 EMC - Anesthésie-Réanimation
Anesthésie pour chirurgie thoracique  36-570-A-10

Tableau 7.
Type de chirurgie et principaux abords en chirurgie thoracique.
Exemples principaux Types d’abord chirurgical
Chirurgie de la plèvre Pneumothorax, épanchement pleural Vidéoscopie
Chirurgie parenchymateuse Résection atypique, wedge, Vidéoscopie (VATS) ou thoracotomie
(bi)lobectomie, pneumonectomie
Chirurgie pariétale Pancoast Thoracotomie
Chirurgie médiastinale Thymome Sternotomie
Chirurgie trachée/bronches Résection anastomose de trachée Cervicotomie
Chirurgie vasculaire Endartériectomie de l’artère pulmonaire Sternotomie, thoracotomie

d’une analgésie de qualité et la surveillance du drainage pleural.


La thromboprophylaxie fait l’objet de recommandations et Mer Mr Mt Msa
dépend principalement du risque patient. L’analgésie est un
élément crucial pour permettre une réhabilitation précoce et fait
l’objet d’un chapitre particulier. Quant au drainage pleural, il
requiert une surveillance régulière spécifique : bullage et oscilla-
tions de la colonne d’eau, radiographie de thorax. Un drainage
peu abondant, l’absence de bullage et un poumon à la paroi font
décider l’ablation des drains, qui est réalisée de plus en plus tôt
dans les programmes de réhabilitation rapide postopératoire [9] . 6
2 3
Les résultats aboutissent à une réduction significative de la durée 7
médiane de séjour. 1 4 5 8
9
Analgésie postopératoire
10
La prise en charge analgésique repose principalement sur
l’analgésie locorégionale du thorax, avec mise en place d’un cathé-
ter d’infiltration. Elle permet un contrôle de la douleur, aussi bien 11
au mouvement (respiration profonde, toux, kinésithérapie res-
piratoire, drainage postural...) qu’au repos. Traditionnellement, 12
l’analgésie péridurale était considérée comme l’ALR de choix, par
la qualité de l’analgésie assurée mais aussi du fait du blocage des At Mgp Mpp 13
centres sympathiques qui réduit les réponses neurohumorale et
cardiovasculaire liées au stress chirurgical [57] . Toutefois, la fré-
quence de l’hypotension orthostatique et des rétentions aigües
d’urine handicape la mobilisation précoce et l’autonomisation
des patients, et elle n’est donc aujourd’hui plus réservée qu’aux
16
chirurgies majeures considérées comme hautement douloureuses
15 14
(thoracotomies, pariétectomies, abrasion pleurale chez le jeune)
ou chez des sujets extrêmement fragiles chez qui la moindre Figure 2. Schéma de la paroi thoracique. 1. Bloc rétrolaminaire ; 2. nerf
hypoventilation doit être évitée. L’évolution vers des techniques intercostal ; 3. branche cutanée postérieure du nerf intercostal ;4. bloc
chirurgicales mini-invasives a conduit l’anesthésie à proposer une des érecteurs du rachis ; 5. bloc des plans paraspinaux et intercostaux ;
ALR adaptée à la réhabilitation précoce (Tableau 7). Actuelle- 6. muscle intercostal externe ; 7. muscle intercostal interne ; 8. muscle
ment, la meilleure compréhension de la sonoanatomie de la paroi intercostal intime ; 9. branche cutanée latérale du muscle intercostal ; 10.
thoracique et le développement de l’anesthésie locorégionale bloc du plan serratus profond ; 11. bloc du plan serratus superficiel ; 12.
échoguidée ont permis la publication de plusieurs alternatives à bloc pectoral de type I ; 13. nerf thoracique long ; 14. bloc paraternal
l’analgésie péridurale. Leur place par rapport au bloc paravertébral (superficiel) ; 15. bloc paraternal (profond) ; 16. branche cutanée anté-
reste à déterminer. Plusieurs stratégies sont proposées (Fig. 2, 3) : rieure du nerf intercostal. Mer : muscles érecteurs du rachis ; Mr : muscle
• le bloc paravertébral est l’ALR de référence pour la chirurgie rhomboïde ; Mt : muscle trapèze ; Msa : muscle serratus antérieur ; Mpp :
thoracique [58] ; muscle petit pectoral ; Pgp : muscle grand pectoral ; At : aponévrose
• actuellement, les études qui évaluent la place des nouvelles transverse.
techniques d’ALR en chirurgie thoracique les comparent au bloc
paravertébral. Il peut être échoguidé ou réalisé sous contrôle
direct de la vue. Sa faible étendue métamérique conduit à le réa-
liser le plus souvent sur deux étages [59] . Son risque principal est opératoire) [62] . Son inconvénient majeur est l’intensité de la
l’échec, particulièrement chez les patients pour lesquels l’espace résorption vasculaire qui limite sa durée d’action et majore le
est à plus de 4 cm de profondeur et chez les patients peu écho- risque d’intoxication aux anesthésiques locaux. Hutchins & al.
gènes, avec le risque de passage intrathécal du cathéter [60] . Une ont comparé le bloc paravertébral associé à un cathéter incision-
étude récente suggère une meilleure efficacité d’administration nel au bloc intercostal étagé sur 48 patients subissant une VATS.
sur cathéter par bolus intermittent programmé par rapport à Ils observaient une différence significative, en termes de score
une infusion continue, tout comme pour les péridurales obsté- douloureux et consommation d’opioïde après la 24e heure, en
tricales [61] ; faveur du bloc paravertébral [62] . Une étude menée par Hotta
• l’infiltration intercostale est une technique oubliée qui est et al. comparant le bloc intercostal à l’analgésie péridurale pen-
réapparue avec le développement de la VATS. Un anesthé- dant les 48 heures postopératoires d’une VATS ne montrait pas
sique local est injecté par le chirurgien après l’incision, au de différences de consommation d’antalgiques, des scores dou-
contact de la racine nerveuse intercostale, à son émergence loureux, ni d’effets secondaires [63] ;
des trous de conjugaison. Elle permet de couvrir la zone • le bloc serratus est issu de la déclinaison des blocs pecto-
métamérique correspondant à la zone chirurgicale (orifices de raux décrits par Blanco [64] , initialement pour la chirurgie du
trocart ± minithoracotomie permettant la sortie de la pièce cadran latéral du thorax. Biswas & al. ont étudié sur cadavre la

EMC - Anesthésie-Réanimation 9
36-570-A-10  Anesthésie pour chirurgie thoracique

1 2 3 4 5 6

Pression pleurale Contraction du muscle


négative érecteur du rachis
Pression
négative
4

12
8 Contraction
1 musculaire
Pression
positive

Pression 7
négative

2 11 10 9
Anesthésique Anesthésique
local 9 local
Figure 3. Mécanisme de diffusion de l’anesthésie locale lors du bloc érecteur du rachis. 1. Poumon ; 2. plèvre viscérale ; 3. processus transverse ; 4. muscle
érecteur du rachis ; 5. muscle rhomboïde ; 6. muscle trapèze ; 7. ligament intertransversal ; 8. espace paravertébral ; 9. ligament costotransverse latéral ; 10.
ligament costotransverse supérieur ; 11. membrane endothoracique ; 12. plèvre pariétale.

diffusion de 4 méthodes d’infiltration [65] . Ils ont observé une Complications précoces en salle de surveillance
diffusion similaire lors de l’injection unique de 20 ml à la postinterventionnelle
5e côte, que ce soit en superficie ou en profondeur du muscle
serratus antérieur (41-42 cm2 ). En revanche, ils ont observé une La surveillance postopératoire immédiate vise à détecter préco-
meilleure diffusion lors de deux injections de 20 ml à la 3e et cement la survenue d’une complication chirurgicale ou médicale.
à la 5e côte. La diffusion est encore optimisée lorsque ces deux Par ordre de fréquence, on peut déceler la survenue d’une atélec-
injections sont réalisées en profondeur du muscle serratus anté- tasie sur l’imagerie de contrôle, la présence d’un pneumothorax
rieur (93 vs 103 cm2 ). L’intérêt est sa relative facilité, en termes résiduel et la survenue d’une hémorragie du site opératoire pro-
de réalisation, et sa sécurité, puisque l’espace de diffusion est voquant par exemple un hémothorax (5 %).
assez restreint, sans communication avec l’espace paraverté- Plusieurs mécanismes peuvent expliquer la survenue d’une até-
bral. L’inconvénient principal est que le site se confond avec lectasie pulmonaire [1] , dont la localisation dépend du côté opéré.
le champ opératoire et ne permet l’insertion d’un cathéter qu’à D’abord une obstruction mécanique par des sécrétions (patient
la fin de la chirurgie [65] . De plus, l’étendue analgésique de ce BPCO). Du sang provenant de l’arbre bronchique opéré est la
bloc ne couvre pas le cadran postérieur. Dans une méta-analyse cause la plus fréquente, qui peut être prévenue par des actions
récente, De Cassai et al. ont relevé 7 études randomisées contrô- précédant l’extubation (aspiration trachéobronchique, fibrosco-
lées contre placebo incluant 489 patients. Le bloc serratus pie de contrôle puis manœuvre de recrutement alvéolaire...).
diminuait les scores EVA pendant 24 heures, avec une diminu- Ensuite, dans quelques cas, une atélectasie par dénitrogéna-
tion de la consommation d’opioïdes postopératoires (différence tion peut survenir. Ce mécanisme physique s’associe à une
moyenne de 4,81 mg d’équivalent de morphine intraveineuse, obstruction mécanique partielle. Il s’agit en fait d’une dimi-
IC 95 % 8,41 à 1,22 ; p < 0,03) [66] ; nution de la pression partielle des gaz alvéolaires par passage
• les blocs paravertébral-like sont un ensemble de techniques de l’oxygène dans le secteur capillaire via la barrière alvéo-
intéressant la paroi thoracoabdominale postérieure et qui locapillaire, en cas d’obstruction bronchique partielle (suture,
bloquent les nerfs à la sortie de l’espace paravertébral. Ils matériel intrabronchique...). Dès lors, les alvéoles se collabent
couvrent donc les 3 cadrans du thorax (postérieur, laté- et créent une atélectasie. Enfin, une mauvaise posture dans le
ral et antérieur). Il existe une multitude de nom pour des lit, une parésie ou une paralysie phrénique peuvent concourir
blocs similaires qui peuvent être considérés comme des blocs à la survenue d’atélectasies. Les conséquences physiopatholo-
paravertébral-like [67] . Le plus connu est le bloc érecteur giques de l’atélectasie sont l’apparition d’une hypoxémie parfois
du rachis [68] . Leur réalisation est très aisée, et la courbe sévère, en rapport avec un effet shunt secondaire à une vaso-
d’apprentissage est très rapide, ce qui présente un intérêt majeur constriction régionale hypoxique peu efficace (« mismatching »
par rapport au bloc paravertébral classique. L’injection est réa- ventilation/perfusion avec un shunt droit-gauche intrapulmo-
lisée dans une zone de haubans musculaire sous tension, à naire). Le traitement de cette atélectasie requiert le plus souvent
proximité des articulations costotransverses, qui permet une une fibroaspiration bronchique, la kinésithérapie et la ventilation
extension crâniocaudale importante. De plus, il faut voir cette non invasive (VNI), qui trouve une place de plus en plus impor-
zone comme un mille-feuilles dans lequel les anesthésiques tante avec une mise en place facilitée par des ventilateurs dédiés
locaux vont diffuser progressivement vers l’espace paraverté- et des interfaces performantes et mieux tolérées [71] . Ainsi, une
bral [67] . Gaballah et al. ont comparé le bloc des érecteurs avec séance de ventilation non invasive précoce et bien conduite pour-
le bloc serratus chez 60 patients opérés par VATS. Ils ont observé rait permettre de passer un cap aigu en évitant une réintubation,
un score douloureux inférieur au repos et au mouvement souvent de mauvais pronostic en cas de détresse respiratoire [72] .
(p < 0,001) dans le groupe érecteur, jusqu’à 20 heures post- Toutefois, une étude récente multicentrique réalisée en postopé-
opératoires, une moindre sédation ainsi qu’un recours retardé ratoire de chirurgie thoracique chez des patient BPCO ne montre
à la prise d’antalgiques [69] . Finnerty et al. ont observé une pas d’intérêt à la VNI systématique postopératoire préventive [73] .
amélioration de la qualité de récupération postopératoire pour La présence d’un pneumothorax résiduel est une complication
les patients ayant eu un bloc érecteur (QoR-15 : 114 ± 16 vs précoce qui ne requiert en général pas de traitement immédiat.
102 ± 22 ; p = 0,02), avec une douleur diminuée au mouvement Elle s’observe en cas de résection sur poumon pathologique,
par rapport au bloc serratus [70] . de geste bronchique et en cas de drainage non aspiratif. Cette

10 EMC - Anesthésie-Réanimation
Anesthésie pour chirurgie thoracique  36-570-A-10

complication a posé la question du drainage en postopératoire. Cet événement s’accompagne d’une morbidité qui peut être
Deux méta-analyses ne montrent pas de différences sur les suites lourde, avec notamment un séjour imprévu en réanimation,
postopératoires, hormis une tendance à la persistance de pneu- la survenue d’accidents thromboemboliques... Certaines situa-
mothorax dans le cas d’un drainage non aspiratif [74] . tions à haut risque peuvent bénéficier d’un traitement préventif
Enfin, la surveillance postopératoire immédiate porte particu- reposant sur l’amiodarone, tandis que le traitement d’un accès
lièrement sur la quantification du saignement, d’origine veineuse paroxystique repose davantage sur le recours aux bêtabloquants
ou lié à une lésion d’une artère intercostale, qui peut être évident (métoprolol) ou aux inhibiteurs calciques [78] . Il convient de
(drainage hémorragique abondant > 150 ml/h) mais qui peut aussi préciser que l’institution d’un traitement par bêtabloquants sys-
être sous-estimé malgré un drainage en cas d’obturation des drains tématique en préopératoire d’une chirurgie non cardiaque n’a
par des caillots au niveau des orifices intrapleuraux. Les para- actuellement pas d’indication, dans la mesure où ce traitement
mètres vitaux et l’examen clinique sont des éléments essentiels débuté peu de temps avant l’intervention est associé à un accrois-
dans ce contexte particulier. Une réintervention est recommandée sement de la mortalité de 27 %, selon l’étude DECREASE [79] .
lorsque le débit du saignement est supérieur à 200-300 ml/3-4 h, Récemment, le dosage du BNP, marqueur de dysfonction ventri-
si le malade devient instable du point de vue hémodynamique ou, culaire gauche, a été proposé en préopératoire comme marqueur
dans un deuxième temps, pour un décaillotage, afin d’éviter une de risque de survenue de fibrillation auriculaire.
évolution vers la surinfection de l’hémothorax. Il convient de sou- Les autres événements cardiovasculaires sont non spécifiques
ligner qu’une réintervention en urgence est une situation à haut de la chirurgie thoracique mais dépendent des comorbidités du
risque anesthésique, compte tenu de l’hypovolémie au moment patient :
de l’induction, du risque majoré de difficultés d’intubation ou de • infarctus postopératoire ;
contrôle fibroscopique avec du sang dans l’ensemble de l’arbre • thrombose veineuse profonde ou embolie pulmonaire ;
trachéobronchique et enfin du risque d’hypoxémie par une vaso- • accident vasculaire cérébral.
constriction régionale hypoxique devenue inefficiente. Il convient de noter également la fréquence élevée
d’événements neurologiques.

Complications postopératoires retardées Complications pulmonaires postopératoires


Classification de Dindo et Clavien et registre Pneumopathies
EPITHOR Le tableau clinique des pneumopathies postopératoires, 6 %
après lobectomie, est non spécifique, et la documentation bacté-
Les complications postopératoires distinguent les riologique indispensable, en sachant qu’il s’agit plutôt des germes
complications majeures nécessitant, soit un traitement interven- de la flore oro-pharyngée (H. influenzae, S. pneumoniae et autres
tionnel (radiologique, endoscopique, chirurgical), soit une prise Streptococcus). Leur particularité après pneumonectomie est d’être
en charge en soins intensifs, du fait d’une menace du pronostic associée à une mortalité élevée. Les principaux facteurs de risque
vital et les complications mineures [75] . sont :
Le registre EPITHOR est une base de données nationale qui • l’âge supérieur à 70 ans ;
inclut à ce jour plus de 10 000 patients opérés dans des centres • le tabagisme actif ;
de référence de chirurgie thoracique (www.sfctcv.net/pages/ • les maladies respiratoires associées, telles que les bronchites
accueil.htm). La mortalité hospitalière, définie comme « tout chroniques ou BPCO ;
décès survenant dans les 30 jours après la résection pulmo- • l’état nutritionnel [76] .
naire ou au cours de la même hospitalisation », est de 3,3 %
après lobectomie et de 6,7 % après pneumonectomie. Les dif- Bullage prolongé
férentes incidences ci-après des complications postopératoires Le bullage prolongé est défini, selon les équipes, comme per-
proviennent également de cette série de référence. Le taux de sistant au-delà de 3 jours ou de 7 jours. En prenant la définition
complications postopératoires, quelles qu’elles soient, est très à 7 jours, l’incidence en France est estimée à environ 7 % après
élevé, puisqu’il atteint environ 33 % [1] . Un certain nombre de résection pulmonaire (en excluant les pneumonectomies) [80] . L’air
facteurs de risque ont été identifiés comme influençant significa- provient, soit du parenchyme pulmonaire (atteinte de la plèvre
tivement la mortalité postopératoire à 30 jours : viscérale et du parenchyme), soit des structures bronchiques. En
• le sexe ; postopératoire, la radiographie du thorax peut montrer la per-
• l’âge ; sistance d’un pneumothorax, d’un pneumomédiastin ou d’un
• l’ASA ; emphysème sous-cutané malgré le drainage.
• le VEMS ; Le traitement consiste généralement à maintenir de façon
• l’indice de masse corporelle (bas ou élevé) ; prolongée les drains thoraciques, en attendant que les brèches
• l’insuffisance cardiaque ; parenchymateuses ou la fistule bronchique se ferment. Plus de
• l’insuffisance rénale chronique ; 90 % des brèches se ferment en quelques semaines. Toutefois,
• l’artériopathie des membres inférieurs ; cette fuite augmente le taux de complications postopératoires
• l’hypertension artérielle pulmonaire ; (atélectasie, pneumopathie et empyème) et double la durée du
• le type de résection pulmonaire ; séjour hospitalier. Des traitements plus récents visent à traiter
• la durée d’intervention chirurgicale et le stade TNM ; rapidement ces fuites. Une autre option non chirurgicale est la
• plus récemment, le statut nutritionnel [76] . réalisation d’un « blood patch » par instillation de sang autologue
dans l’espace pleural à travers le drain pleural, suivie de clam-
page du drain. C’est une méthode simple, relativement indolore
Complications cardiovasculaires
et souvent efficace.
La survenue d’une fibrillation auriculaire est l’événement le plus
fréquent dans la période postopératoire, que ce soit au stade pré- Fistule bronchopleurale
coce ou tardif, avec une incidence comprise entre 11 et 38 % et L’évolution péjorative est la fistule bronchopleurale, qui se ren-
un pic de survenue à J2. Une méta-analyse publiée récemment contre le plus souvent après pneumonectomie (4 % des cas).
montre que les facteurs de risque de survenue d’une arythmie Lorsqu’elle survient tardivement, elle s’associe souvent à un
postopératoire sont : empyème ou à une récidive tumorale. Elle sera suspectée devant
• l’âge supérieur à 70 ans ; une majoration des fuites aériques ou l’apparition d’une pleuré-
• la coronaropathie avec stent (et toute dysfonction ventriculaire sie purulente. Sur la radiographie pulmonaire, le développement
gauche ou de l’oreillette droite) ; d’un nouveau niveau hydroaérique ou le changement d’un niveau
• la chirurgie par thoracotomie ou la conversion en chirurgie hydroaérique préexistant sont des signes très suggestifs de fis-
ouverte ; tule. De façon exceptionnelle, le tableau peut se compliquer d’une
• un grade IV pour la tumeur réséquée [77] . hémoptysie massive par rupture de l’artère pulmonaire.

EMC - Anesthésie-Réanimation 11
36-570-A-10  Anesthésie pour chirurgie thoracique

Chylothorax L’implication et l’acceptation par le patient, et éventuellement


Par définition, le chylothorax représente la présence de lymphe sa famille, sont garantes du succès. De la même façon, l’équipe
au niveau de l’espace pleural, suite à l’effraction du canal thora- de Kehlet a pu montrer que les patients avec des comorbidités
cique ou d’une de ses collatérales. La prévalence après la chirurgie devaient aussi être inclus dans de tels programmes, à condition de
cardio-thoracique varie entre 0,25 et 0,5 %. La plus fréquente l’adapter à celles-ci [82] . Cette stratégie est aujourd’hui largement
cause iatrogène est l’œsophagectomie [81] . Son diagnostic cli- soutenue par les autorités de santé et applicable également dans
nique est aisé, par la prise orale de crème fraîche dont des les centres de chirurgie thoracique en France [83] .
particules se retrouvent rapidement dans le système de drainage
thoracique.
Le traitement est en principe conservateur, car 50 % des Préhabilitation
plaies du canal thoracique se ferment spontanément. Le trai- La préhabilitation regroupe l’ensemble des démarches appli-
tement chirurgical est indiqué en cas de fuite > 1l/j pendant quées en préopératoire dans le but « d’améliorer » l’état d’un
5 jours consécutifs, ou fuite persistant plus de 2 semaines mal- futur opéré avant qu’il ne subisse l’acte chirurgical. Ce proces-
gré le traitement conservateur, complications nutritionnelles ou sus comprend un entraînement physique à 80 % de la capacité
métaboliques, chylothorax compliqué localement et celui postœ- maximale du patient, une prise en charge nutritionnelle et psy-
sophagectomie. chologique pour lutter contre l’anxiété. Ainsi, on retrouve dans la
plupart des études l’association de différentes modalités d’actions
Complications autres préopératoires [84] :
• exercices aérobies d’intensité modérée et exercices en résis-
Douleurs postopératoires aiguës
tance. Ces séances doivent avoir lieu au moins trois jours par
L’enjeu en postopératoire est d’assurer une analgésie de repos semaine. Ces exercices en résistance ont pour but d’améliorer
mais surtout à la mobilisation, satisfaisante pour permettre la la réserve fonctionnelle (VO2 max) et de renforcer le système
reprise précoce d’actes de la vie quotidienne. Le développement musculosquelettique ;
de la chirurgie mini-invasive ou par vidéothoracoscopie a per- • conseils diététiques avec supplémentation protéique (sur la base
mis la réduction de la taille des cicatrices. Toutefois, peu d’études de 1,2 g de protéines/kg) [85] ;
ont comparé les niveaux de douleur à la mobilisation entre ces • un apprentissage avec une psychologue des stratégies
techniques. d’adaptation/coping permettant de réduire l’anxiété.
Douleurs chroniques postopératoires Il existe encore une incertitude sur l’efficacité d’un programme
de préhabilitation concernant la morbimortalité en chirurgie
Il est important de signaler l’incidence élevée de douleurs chro-
thoracique. Toutefois, cette voie permettrait de maintenir une tro-
niques postopératoires (48 % des patients à 1 an), avec une
phicité musculaire correcte et par là-même de prévenir la survenue
limitation fonctionnelle invalidante. Les facteurs de risque iden-
de certaines complications : cicatrisation.
tifiés sont l’anxiété préopératoire, un âge plus jeune, un score
ASA plus faible et la présence de plusieurs drains [23] . Le recours
à une analgésie postopératoire multimodale tient compte de ces
constatations pour tenter de réduire cette prévalence. Peu d’études
permettent de définir une stratégie analgésique idéale, et dans ce
contexte, il convient de proposer aux patients un bilan de douleur
“ Points essentiels
avant leur sortie, à partir notamment de l’échelle d’évaluation de
douleur neuropathique DN4 [22] , qui explore en quelques ques- • L’opérabilité d’un patient pour résection pulmonaire
tions et avec un examen clinique très simple la composante repose sur une évaluation de la fonction cardiovasculaire
neuropathique. Un suivi en consultation douleur peut être pro- (score de RCRI, MVO2 ) associée à une évaluation de la
posé en cas de score d’emblée élevé. fonction ventilatoire (VEMS, DLCO).
• Une valeur de VEMS prédictif postopératoire < 30 % de
la valeur théorique est considérée habituellement comme
 Réhabilitation postopératoire contre-indiquant toute exérèse pulmonaire.
• Des valeurs prédites postopératoires de VEMS et
et préhabilitation de DLCO > 60 % ne requièrent pas d’examens
complémentaires respiratoires avant la chirurgie.
Réhabilitation postopératoire • Ne pas pouvoir monter plus de 2 étages correspond
Les techniques de prise en charge anesthésique et chirurgi- à une VO2 max < 12 ml/kg/min, tandis que la capacité
cale sont en pleine évolution pour notamment diminuer les de monter 5 étages au moins correspond à une VO2 max
conséquences de l’agression opératoire : développement de la chi- > 20 ml/kg/min.
rurgie mini-invasive et amélioration de la prise en charge de la • L’exclusion pulmonaire du côté opéré par une sonde
douleur postopératoire. Ces éléments ont été intégrés dans des double lumière ou un ballon bloqueur permet d’obtenir
programmes de prise en charge multidisciplinaire regroupés sous
une déflation et une immobilité du poumon facilitant l’acte
le terme générique de fast-track ou de réhabilitation précoce post-
opératoire. Cette approche, qui associe des mesures pré-, per- chirurgical.
et postopératoires, a pour objectif de limiter les complications
• Une stratégie ventilatoire dite « protectrice » est néces-
postopératoires, permettant ainsi un rétablissement rapide des saire tout au long de l’intervention pour éviter tout volo et
capacités physiques et psychiques du patient, et par conséquent barotraumatisme du poumon non opéré.
une diminution de la durée de séjour hospitalier. En ce qui • La survenue d’une hypoxémie peropératoire est un évé-
concerne la chirurgie pulmonaire, la référence de la réhabilitation nement fréquent, et sa gestion repose sur un algorithme
postopératoire est le Dr Cerfolio, depuis sa publication princeps décisionnel.
en 2001, avec des résultats impressionnants : durée médiane de • Les complications postopératoires en chirurgie thora-
séjour postopératoire de 5 jours (extrêmes de 2 et de 119 jours) cique sont principalement cardiovasculaires (trouble du
pour un groupe de 500 patients, dont 39 % avaient subi une lobec-
rythme en premier lieu) puis respiratoires (atélectasie,
tomie [6] . D’autres équipes ont depuis montré les facteurs de succès
de programmes de réhabilitation : pneumothorax, bullage prolongé).
• extubation immédiate au bloc ;
• La stratégie analgésique est multimodale, associant en
• analgésie péridurale contrôlée par le patient ; particulier à des antalgiques de type 1 ou 2 une anesthésie
• absence de benzodiazépines préopératoire ; locorégionale.
• réalimentation précoce.

12 EMC - Anesthésie-Réanimation
Anesthésie pour chirurgie thoracique  36-570-A-10

 Conclusion [18] Bonhomme F, Boehlen F, Clergue F, de Moerloose. Preoperative hemosta-


tic assessment: a new and simple bleeding questionnaire. Can J Anaesth
2016;63:1007–15.
En conclusion, l’anesthésie en chirurgie thoracique connaît [19] Pierre S, Rivera C, Le Maître B, Ruppert AM, Bouaziz H, Wirth N,
des évolutions récentes, marquées notamment par l’abord moins et al. Guidelines on smoking management during the perioperative period.
invasif de la chirurgie. Cette tendance a peu d’influence sur le Anaesth Crit Care Pain Med 2017;36:195–200.
choix et le placement d’un tube orotrachéal double-lumière et [20] Frieden TR. Tobacco control progress and potential. JAMA 2014;311:
son contrôle par fibroscopie. En revanche, elle intervient dans la 133–4.
stratégie analgésique postopératoire, dans la possibilité plus aisée [21] Drummond MB, Upson D. Electronic cigarettes. Potential harms and
de réhabilitation afin de limiter toute perte de fonction et de benefits. Ann Am Thorac Soc 2014;11:236–42.
survenue d’événements indésirables postopératoires. [22] Martinez V, Baudic S, Fletcher D. Chronic postsurgical pain. Ann Fr
Anesth Reanim 2013;32:422–35.
[23] Mongardon N, Pinton-Gonnet C, Szekely B, Michel-Cherqui M, Dreyfus
JF, Fischler M. Assessment of chronic pain after thoracotomy: a 1-year
Déclaration de liens d’intérêts : Le docteur Julien Fessler déclare ne pas avoir
prevalence study. Clin J Pain 2011;27:677–81.
de liens d’intérêts en relation avec cet article.
[24] Bendixen M, Jørgensen OD, Kronborg C, Andersen C, Licht PB. Post-
Le docteur Morgan Le Guen a réalisé des essais cliniques en qualité operative pain and quality of life after lobectomy via video-assisted
d’investigateur principal, coordonnateur ou expérimentateur principal pour Ven- thoracoscopic surgery or anterolateral thoracotomy for early-stage lung
tinova, Improve 2, Help VDL, Eu-MultiNOL. cancer: a randomised controlled trial. Lancet Oncol 2016;17:836–44.
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M. Le Guen (m.leguen@hopital-foch.com).
J. Fessler.
Service d’anesthésie, hôpital Foch, Université Versailles – Saint-Quentin, 40, rue Worth, 92150 Suresnes, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Le Guen M, Fessler J. Anesthésie pour chirurgie thoracique. EMC - Anesthésie-Réanimation 2023;43(2):1-
14 [Article 36-570-A-10].

14 EMC - Anesthésie-Réanimation
 36-375-A-05

Consultation d’anesthésie et visite


préanesthésique
V. Reubrecht

Résumé : La consultation d’anesthésie est une obligation légale en France depuis 1994. Elle a permis de
diminuer la morbimortalité périopératoire en optimisant et en anticipant la prise en charge. Son contenu
est défini par la Société française d’anesthésie et de réanimation. La Haute Autorité de santé a émis
des critères de bonne qualité pour la tenue du dossier d’anesthésie. La consultation, à l’aide d’un recueil
exhaustif des antécédents et d’un examen clinique rigoureux, doit aboutir à une évaluation préopératoire
motivant, selon les recommandations, la demande d’examens complémentaires. À l’issue de celle-ci,
l’anesthésiste-réanimateur doit délivrer au patient une information appropriée sur l’acte anesthésique et
ses différents risques. Ces dernières années ont vu évoluer les modalités de la consultation (informatisation
du dossier, téléconsultation) nécessitant une adaptation de nos pratiques.
© 2022 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Médecine périopératoire ; Anesthésie ; Information ; Téléconsultation ; Dossier informatisé

Plan  Historique, cadre réglementaire


■ Historique, cadre réglementaire 1 Depuis plusieurs décennies, les textes réglementaires [1–3]
■ Contenu de la consultation d’anesthésie 2 affirment la nécessité d’une consultation d’anesthésie avant tout
acte chirurgical afin de prévenir les complications. La consultation
■ Évaluations complémentaires 3 d’anesthésie est devenue une obligation médicolégale en France
Examens biologiques 3 depuis le décret du 5 septembre 1994 [4] . Ce décret porte sur la
Évaluation du risque cardiovasculaire 4 sécurité anesthésique ; il explicite le cadre réglementaire et défi-
Évaluation du risque respiratoire 5 nit les prérogatives de la consultation : « c’est un document écrit
Dépistage des populations à risque 6 qui doit être réalisé par un médecin anesthésiste-réanimateur et
Dépistage du risque allergique 6 qui fait partie intégrante du dossier médical ».
■ Stratégies de prises en charge spécifiques 7 La Société européenne d’anesthésie a émis en 2018 des recom-
Gestion des voies aériennes supérieures 7 mandations relatives à l’évaluation préopératoire des patients,
Stratégie d’épargne transfusionnelle ou patient blood stipulant que le dossier devait être validé par un médecin anes-
management (PBM) 7 thésiste [5] .
Prévention des nausées–vomissements postopératoires (NVPO) 7 Les intérêts de la consultation sont multiples : évaluer le
Prise en charge du patient diabétique 8 patient (antécédents, risque d’intubation ou de perfusion diffi-
Prise en charge du patient avec IMC supérieur à 30 kg/m2 9 cile) ; demander si nécessaire des avis spécialisés (consultation de
Prise en charge de la douleur chronique 10 cardiologie, de pneumologie) ou des examens complémentaires ;
Sevrage tabagique 10 informer sur les risques et les techniques anesthésiques ; définir
■ Gestion des traitements en périopératoire 10 une stratégie anesthésique incluant les contraintes chirurgicales,
Antiagrégants plaquettaires 10 les antécédents et les préférences du patient. Le but est de définir
Anticoagulants 11 la prise en charge la mieux adaptée selon le risque chirurgical et
Traitements antihypertenseurs 11 les comorbidités du patient, et ainsi de diminuer la morbidité et
Antidiabétiques 11 la mortalité per- et postopératoires. Une étude publiée en 2016 [6]

suggère qu’une évaluation préopératoire est associée à une réduc-
Différents modes et formes de consultation 12
tion de la mortalité.
Organisation de la consultation 12
Cette consultation est obligatoire, même en cas d’urgence,
Consultations d’anesthésies itératives, délocalisées 12
et doit être réalisée pour une chirurgie programmée au moins
Téléconsultation 13
48 heures avant l’acte opératoire.
Spécificités selon le parcours du patient 13
L’information du patient et le recueil de son consentement sont
Spécificité due à la pandémie de Covid-19 13
une obligation médicolégale, régie par la loi du 4 mars 2002 [7] .
Dossier informatisé et partagé 13
Les recommandations de décembre 2001 [8] concernant les
■ Visite préanesthésique 14 relations entre anesthésistes-réanimateurs, chirurgiens et autres
■ Conclusion 14 professionnels de santé rappellent l’obligation d’informer le
patient sur les différentes stratégies et les risques inhérents à

EMC - Anesthésie-Réanimation 1
Volume 43 ◦2 avril 2023
36-375-A-05  Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique

Critère 1 - 97 % (n° = 54467 ; évalués : 56104)


100
Critère 13 - 76 % (n° = 42386 ; évalués : 56104) Critère 2 - 73 % (n° = 41121 ; évalués : 56104)
80

Critère 12 - 75 % (n° = 31756 ; évalués : 42069) 60 Critère 3 - 67 % (n° = 32231 ; évalués : 48316)

40

20
Critère 11 - 91 % (n° = 45627 ; évalués : 50133) Critère 4 - 96 % (n° = 52267 ; évalués : 54538)

Critère 10 - 92 % (n° = 46308 ; évalués : 50133) Critère 5 - 96 % (n° = 53396 ; évalués : 55590)

Critère 9 - 92 % (n° = 32961 ; évalués : 35691) Critère 6 - 96 % (n° = 53468 ; évalués : 55590)

Critère 8 - 97 % (n° = 54201 ; évalués : 56104) Critère 7 - 91 % (n° = 50405 ; évalués : 55590)
Figure 1. Résultat de l’enquête sur la tenue du dossier d’après l’indicateur de qualité et de sécurité des soins (secteur anesthésie, Haute Autorité de santé,
2018) [10] .

l’anesthésie en rapport avec le type de chirurgie et les comorbidités


associées.
 Contenu de la consultation
L’information peut être délivrée de multiples manières, en d’anesthésie
amont ou lors de la consultation : fiche d’information rédigée
par la structure ou la Société française d’anesthésie et de réani- Une fiche informative sur l’anesthésie peut être remise au préa-
mation (SFAR), information spécifique sur la transfusion, sur les lable au patient afin de fournir un ensemble d’informations qui
techniques anesthésiques choisies. pourra être complété et adapté lors de la consultation.
Il est nécessaire de tracer par écrit la délivrance de l’information La consultation peut être faite par écrit ou par informatique ;
et sa compréhension par le patient, la famille ou le représentant elle se déroule en présentiel ou sous forme de téléconsultation.
légal. Elle permet de recueillir les antécédents et les traitements,
Le rapport du Haut Comité de la santé publique sur la sécurité de faire une évaluation clinique, de préciser les examens
anesthésique de 1993 [9] rapporte qu’une préparation inadéquate complémentaires, les techniques et les risques lié à l’anesthésie,
et un choix de technique anesthésique inadaptée à l’état du et de fournir une information adaptée [12] .
patient font partis des principaux facteurs liés au décès au cours Les antécédents reprennent les antécédents médicaux, chirurgi-
d’une procédure chirurgicale. caux, anesthésiques, obstétricaux, familiaux, ainsi que les allergies
Le rapport MACSF/Sou médical pour l’année 2021 [10] place ou les intolérances.
l’anesthésie-réanimation dans les trois premières spécialités mises L’évaluation clinique comporte le poids, la taille, l’indice de
en cause au tribunal civil. masse corporelle (IMC), l’auscultation cardiopulmonaire, la pres-
On comprend d’autant mieux l’utilité d’une évaluation opti- sion artérielle, la fréquence cardiaque, la saturation en oxygène,
male préopératoire afin de diminuer les morbimortalités. l’état buccodentaire, et du capital veineux.
La consultation a également un rôle économique essentiel en Le risque septique ou le risque de colonisation (bactérie hau-
anticipant au maximum les déprogrammations. tement résistante émergente, bactérie multirésistante, bactérie
La Haute Autorité de santé (HAS) [11] a défini une dizaine de productrice de bêtalactamase à spectre élargi) doit être mentionné.
critères dans les procédures de certification afin de s’assurer de la Les différents traitements doivent être listés ; leur gestion pério-
qualité de la tenue du dossier d’anesthésie, allant de la consulta- pératoire doit suivre les recommandations et tenir compte des
tion d’anesthésie à la phase postopératoire en salle de surveillance antécédents et du type de chirurgie. Les consignes d’arrêt, de
postinterventionnelle (SSPI) (Fig. 1), démontrant ainsi que le dos- maintien ou de relai doivent être fournies de manière claire et
sier d’anesthésie est un élément primordial du dossier de soins. précise au patient et figurer dans le dossier.
Ces critères sont les suivants : Différents scores cliniques sont utilisés lors de la consultation
• l’identification du patient sur toutes les pièces du dossier ; d’anesthésie afin de dépister les risques liés au patient, d’orienter
• l’identification du médecin anesthésiste à chaque étape : vers des investigations complémentaires ou d’adapter les straté-
consultation, bloc, SSPI ; gies anesthésiques. Les scores les plus utilisés permettent d’évaluer
• le traitement habituel du patient ; soit un risque spécifique : score de Lee [13] (risque cardiovascu-
• le type d’anesthésie proposée ; laire), Stop Bang [14] (syndrome d’apnées du sommeil), score MET
• l’évaluation du risque anesthésique ; (metabolic equivalent of task) (tolérance à l’effort) [15] , soit un risque
• les conditions d’abord des voies aériennes supérieures et du global : score ASA [16] , score de fragilité clinique [17] .
risque de bris dentaires ; Le score ASA (American Society of Anesthesiologists) ou physical
• la trace écrite de la visite préanesthésique (VPA) ; status score a été créé en 1941 et modifié depuis ; il permet de
• la mention de la technique d’abord des voies aériennes supé- classer le patient selon ses antécédents de 1 à 6 (Tableau 1). Un
rieures ; score ASA 1 signifie que le patient n’a pas d’antécédent ou de
• l’autorisation de sortie du patient de SSPI validée par un méde- comorbidité associée, un score ASA 4 indique que le patient, par
cin anesthésiste-réanimateur ; sa pathologie, a une menace vitale permanente.
• la trace écrite des prescriptions médicamenteuses postopéra- Le score est subjectif, il ne tient pas compte du type de chirur-
toires. gie, de l’âge du patient ainsi que de la stabilité de la pathologie

2 EMC - Anesthésie-Réanimation
Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique  36-375-A-05

Tableau 1.
Score de classification ASA (American Society of Anesthesiologists) [16] .
ASAPhysical Status Classification System Description
1 Patient normal
2 Patient avec anomalie systémique modérée
3 Patient avec anomalie systémique sévère
4 Patient avec anomalie systémique sévère représentant une menace vitale constante
5 Patient moribond dont la survie est improbable sans l’intervention

Tableau 2.
Questionnaire HEMSTOP de dépistage du risque hémorragique [21] .
Les items suivants peuvent évoquer la possibilité d’un trouble de l’hémostase Non Oui Situation jamais rencontrée
Avez-vous déjà consulté un médecin ou reçu un traitement pour un saignement prolongé ou
inhabituel, par exemple un saignement de nez ou une petite coupure ?
Avez-vous tendance à faire des bleus de plus de 2 cm ou des hématomes importants sans choc ou
traumatisme, ou bien après un choc ou un traumatisme sans importance ?
Avez-vous reconsulté votre dentiste pour saignement après une extraction dentaire ?
Avez-vous saigné de manière anormale après une intervention chirurgicale, par exemple une opération
pour les végétations ou les amygdales, ou après une circoncision ?
Y a-t-il des membres de votre famille proche suivis pour une maladie de la coagulation responsable de
saignements importants, par exemple la maladie de Willebrand, l’hémophilie ?
Pour les femmes
Avez-vous consulté un médecin ou reçu un traitement pour des règles trop abondantes, par exemple
une contraception orale (« pilule »), un traitement par fer, un médicament pour coaguler le sang
comme l’Exacyl® ?
Avez-vous saigné de façon anormale après un accouchement ?
Score établi sur le nombre de oui obtenus sur ces 6 questions

HEMSTOP : hematoma, hemorrhage, menorrhagia, surgery, tooth extraction, obstetrics, parents.

chronique ; néanmoins de nombreuses études [18] ont démontré Elle précise les monitorages non invasifs et invasifs (cathéter
une corrélation entre un score ASA 3, une chirurgie urgente et un artériel, mesure du débit cardiaque), la gestion de l’abord veineux
risque de morbimortalité élevé. (voie veineuse périphérique ou centrale, le recours à une échogui-
La durée d’une consultation d’anesthésie est aléatoire et dépend dage) et les équipements (sonde urinaire, sonde gastrique).
d’un bon nombre de paramètres : organisation locale, prise en
charge à risque, score ASA, demande d’examens complémentaires,
rédaction d’ordonnance.  Évaluations complémentaires
Le patient doit recevoir une information précise complète, L’analyse des antécédents, la classification du patient à l’aide
orale ou écrite adaptée à ses antécédents et à la chirurgie. Ces de score clinique et le type de chirurgie orientent vers la demande
informations sont nombreuses et variées, l’anesthésiste peut d’examens complémentaires ; bilan biologique, évaluation cardio-
s’appuyer sur différents supports afin d’optimiser la transmission logique, respiratoire, afin d’optimiser la prise en charge.
de l’information et de s’assurer de sa compréhension.
Ces informations portent sur les risques de l’anesthésie générale
ou locorégionale, le risque transfusionnel, le risque cardiaque, res- Examens biologiques
piratoire, neurologique, septique, d’intubation difficile ou de bris Les recommandations de la SFAR de 2012 font une synthèse des
dentaires. différents examens biologiques nécessaires avant une chirurgie
L’anesthésiste-réanimateur présente les différentes techniques selon le risque lié au patient et lié à la chirurgie [20] .
anesthésiques et analgésiques adaptées à la chirurgie et au patient : Leurs prescriptions doivent être justifiées et le résultat doit
anesthésie générale, locorégionale, sédation, analgésie multimo- permettre d’améliorer la prise de décision quant au choix de la
dale, en mettant en balance le bénéfice–risque. stratégie anesthésique, d’optimiser la prise en charge du patient,
Il doit informer sur les risques et les complications postopéra- et de permettre une évaluation du risque périopératoire.
toires liés au tabagisme actif et délivrer au patient des conseils Les chirurgies hémorragiques sont à risque de transfusion ;
permettant le sevrage tabagique. Son rôle est d’expliquer les il est donc nécessaire d’évaluer les pertes sanguines autorisées,
consignes sur le respect du jeûne : six heures pour les solides (lait, d’évaluer le risque périopératoire en dépistant une anémie pré-
jus de fruit avec pulpe, alimentation solide), deux heures pour opératoire et d’élaborer une stratégie d’épargne transfusionnelle
les liquides clairs (café, thé et eau) [19] . Il informe sur les moda- (prescription EPO, supplémentation ferrique). La numération for-
lités d’hospitalisation et les différents circuits (accompagnant et mule sanguine et les examens immunohématologiques doivent
ambulatoire, accueil le jour même de la chirurgie). être prescrits pour des chirurgies à risque hémorragique et pour des
Différentes ordonnances et fiches informatives peuvent être patients présentant une probabilité significative de transfusion.
remises : antalgique, bilan biologique, consultation spécialisée. Le bilan d’hémostase (taux de prothrombine, temps de cépha-
Une conclusion en fin de consultation permet de définir la line activé [TCA]) a une mauvaise capacité de prédiction du
stratégie anesthésique (anesthésie générale, induction séquence risque hémorragique. Il doit être prescrit lorsque le question-
rapide, anesthésie intraveineuse à objectif de concentration, anes- naire clinique HEMSTOP (hematoma, hemorrhage, menorrhagia,
thésie locorégionale), la prise en charge analgésique (analgésie surgery, tooth extraction, obstetrics, parents) identifie [21] plus de deux
contrôlée par le patient de type pompe à morphine, analgésie par réponses positives, chez l’adulte interrogeable, ou en cas de patho-
péridurale ou cathéter périnerveux, anesthésie sans opiacé (opioïd logie interférant avec l’hémostase, ou en cas de besoin de valeur
free anesthesia–OFA), la stratégie d’épargne transfusionnelle (éry- de référence (Tableau 2).
thropoïétine [EPO], injection de fer, récupérateur de sang) et la Tout élément faisant suggérer une diathèse hémorragique doit
gestion des voies aériennes (fibroscopie vigile, vidéolaryngosco- conduire à une consultation auprès d’un médecin spécialisé en
pie). hémostase.

EMC - Anesthésie-Réanimation 3
36-375-A-05  Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique

Tableau 3.
Score MET [15] –estimation de la capacité à l’effort (adapté de l’échelle de Dukes).
Aptitude physique (échelle de MET VO2 estimée Activité physique réalisable sans symptôme Risque chirurgical estimé
Dukes) (ml/kg/min)
Excellente > 10 > 35 Natation Faible
Tennis en simple
Ski de fond
Basketball
Très bonne à bonne 7–10 24,5–35,0 Jouer au tennis en double, au football Faible
Danser
Gros travaux d’entretien dans la maison
Courir sur une courte distance
Monter 2 étages ou plus
Marcher rapidement sur terrain plat
Modérée 4–7 14,0–24,5 Monter 1 à 2 étages Faible
Faire du ménage
Faible <4 < 14 Marcher sur terrain plat à 3–5 km/h Intermédiaire à élevé
Marcher à l’intérieur de son domicile
Faire sa toilette, s’habiller, manger
Non évaluable ? ? Aucune Intermédiaire à élevé

MET : metabolic equivalent of task.

Tableau 4.
Score de Lee [13] .
Calcul du score de Facteur de risque Calcul du score de
Lee classique Lee clinique
1 point Chirurgie à haut risque définie par une chirurgie vasculaire supra- inguinale, intrathoracique ou 0 point
intrapéritonéale
1 point Coronaropathie définie par un antécédent d’infarctus du myocarde, un angor clinique, une utilisation de 1 point
nitrés, une onde q sur l’ECG ou un test non invasif de la circulation coronaire positif
1 point Insuffisance cardiaque définie par un antécédent d’insuffisance cardiaque congestive, d’œdème pulmonaire, 1 point
une dyspnée nocturne paroxystique, des crépitants bilatéraux ou un galop B3, ou une redistribution vasculaire
radiologique.
1 point Antécédent d’accident vasculaire cérébral ischémique ou d’accident cérébral ischémique transitoire 1 point
1 point Diabète avec insulinothérapie 1 point
1 point Insuffisance rénale chronique définie par une créatinine > 2,0 mg/dl (177 ␮mol/l) 1 point

ECG : électrocardiogramme.

Certains patients sont à risque d’insuffisance rénale ou de tion des activités physiques quotidiennes (Tableau 3). Un MET
désordre hydroélectrolytique en postopératoire et un iono- inférieur à 4 indique une capacité faible du patient à supporter
gramme sanguin peut être demandé en fonction du risque une chirurgie définie comme majeure.
chirurgical et des antécédents (diabète, insuffisance rénale chro- Le score de Lee clinique analyse le risque cardiaque postopé-
nique, traitement diurétique). ratoire. Chaque antécédent de type coronaropathie, insuffisance
La prescription des bilans infectieux doit suivre les recom- cardiaque, accident vasculaire cérébral, diabète sous insulinothé-
mandations des différentes sociétés savantes anesthésique, rapie et insuffisance rénale chronique compte pour un point. Le
chirurgicales et infectieuses ; elles ne sont pas toutes consensuelles patient est considéré à risque élevé lorsque le score est supérieur
mises à part certaines indications strictes (signes fonctionnels ou égal à 2. Dans le score de Lee classique, un point supplémen-
urinaires, chirurgie urologique). Un examen cytobactériologique taire est octroyé en cas de chirurgie à haut risque définie par une
des urines (ECBU) doit être prescrit pour des chirurgies à haut chirurgie vasculaire supra-inguinale, intrathoracique ou intrapé-
risque chez les patients ayant un risque élevé d’infection urinaire ritonéale (Tableau 4).
ou de colonisation urinaire (symptomatologie urinaire, diabète, L’électrocardiogramme (ECG) n’est pas recommandé pour les
cathéter vésical prolongé, âge physiologique avancé, séjour en patients de moins de 50 ans, sans antécédent cardiovasculaire et
institution) et pour des chirurgies urinaires. Il n’est pas recom- sans facteur de risque (score de Lee inférieur à 1) ; il doit être
mandé en chirurgie prothétique orthopédique de réaliser un bilan discuté en fonction du risque lié à l’intervention [24] (Tableau 5).
infectieux : ECBU, bilan dentaire en dehors de points d’appels En l’absence de modification clinique et s’il date de moins d’un
infectieux [22] . an, il n’est pas recommandé de demander un nouvel ECG.
La prescription des examens complémentaires doit être justifiée
par une demande précise (recherche d’une valvulopathie, évalua-
Évaluation du risque cardiovasculaire tion de la fonction d’éjection ventriculaire gauche, évaluation du
risque ischémique), à l’issue d’un examen clinique mettant en
L’évaluation cardiaque doit tenir compte des antécédents du évidence des anomalies.
patient coronarien [23] , non coronarien et du type de chirurgie L’échographie cardiaque de repos, l’épreuve de stress (scintigra-
vasculaire, non vasculaire. phie myocardique ou échographie–dobutamine) et les épreuves
Le risque cardiaque postopératoire est très souvent évalué par d’effort doivent être demandées en fonction de l’état du patient
le MET et le score de Lee qui sont simples d’utilisation. et du risque chirurgical.
Le MET correspond à « équivalent métabolique » ; il évalue la Il n’est pas recommandé de prescrire un examen qui ne modi-
tolérance du patient à l’effort, c’est-à-dire la capacité du patient fiera pas la stratégie de prise en charge.
à supporter une chirurgie définie comme majeure en évaluant la De nombreuses sociétés savantes ont proposé des algorithmes
présence d’une symptomatologie à type d’essoufflement en fonc- chez les patients coronariens (Fig. 2) permettant d’orienter la

4 EMC - Anesthésie-Réanimation
Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique  36-375-A-05

Tableau 5.
Risque lié à la chirurgie [22, 25] .
Risque faible (< 1 %) Risque intermédiaire (1–5 %) Risque élevé (> 5 %)
Chirurgie sénologique Chirurgie intrapéritonéale (splénectomie, hernie Chirurgie aortique et vasculaire majeure
Chirurgie ophtalmologique hiatale, cholécystectomie) Chirurgie vasculaire périphérique de
Chirurgie reconstructive et superficielle Chirurgie urologique ou gynécologique majeure revascularisation à ciel ouvert pour amputation ou
Chirurgie urologique mineure (résection Transplantation rénale ischémie aiguë
transurétrale de prostate) Chirurgie ORL tête et cou Chirurgie carotidienne symptomatique (pose de
Chirurgie orthopédique (ménisectomie genou) Neurochirurgie ou chirurgie orthopédique majeure stent)
Chirurgie dentaire (rachis et hanche) Chirurgie duodénale, pancréatique, œsophagienne
Chirurgie endocrinienne (thyroïde) Angioplastie artérielle périphérique et surrénalienne
Chirurgie gynécologique mineure Traitement endovasculaire d’un anévrisme Chirurgie hépatique et des voies biliaires
Chirurgie thoracique mineure (résection Chirurgie carotidienne asymptomatique Perforation abdominale
pulmonaire par thoracoscopie) (endartériectomie carotidienne ou pose de stent) Transplantation pulmonaire ou hépatique
Chirurgie carotidienne symptomatique Cystectomie
(endartériectomie carotidienne) Pneumonectomie par thoracoscopie ou par
thoracotomie

ORL : oto-rhino-laryngologique.

Chirurgie urgente Chirurgie non urgente

Chirurgie à risque Chirurgie


intermédiaire ou élevé à bas risque

Patient Patient Patient


stable instable stable

Retarder la chirurgie
Score de Lee clinique 0–1 (vasculaire) Score de Lee ≥ 2 (vasculaire) Discussion collégiale
ou 0–2 (non vasculaire) ou ≥ 3 (non vasculaire) Traitements spécifiques

Capacité fonctionnelle (MET)

Bonne Mauvaise

Test d’ischémie
Positif

Discuter l’opportunité d’une éventuelle revascularisation


Traitement médical optimisé
Négatif
Surveillances peropératoire et postopératoire
rapprochées

Chirurgie sans examen spécialisé


Optimisation du traitement médical préopératoire

Figure 2. Arbre décisionnel. Prise en charge du patient coronarien avant chirurgie non cardiaque [23] . MET : metabolic equivalent of task.

demande d’examens complémentaires en prenant en compte les


scores de Lee et MET.
Évaluation du risque respiratoire
L’évaluation d’un patient coronarien pour une chirurgie non Le dépistage d’une insuffisance respiratoire chronique est pri-
cardiaque tient compte des risques liés à son état cardiaque mordial car ces patients présentent un risque plus important de
de base, du risque chirurgical et de sa capacité à effectuer un complications postopératoires, ce d’autant plus que la chirurgie
effort. altère la fonction respiratoire.
Un score de Lee supérieur à 2 et un MET inférieur à 4 nécessitent L’anamnèse doit pouvoir recueillir les éléments suivants : la
des évaluations complémentaires coronariennes quel que soit le présence d’une déformation thoracolombaire, l’existence d’un
type de chirurgie. tabagisme actif, les antécédents de décompensation et de pas-
Un score de Lee égal à 2 nécessite de stratifier le risque en fonc- sage en réanimation, les traitements de fond, l’IMC à la recherche
tion du type de chirurgie ; une chirurgie vasculaire étant à risque d’une dénutrition.
majeur, il est indispensable de réaliser des examens à la recherche L’examen clinique repose sur la mesure de la saturation en air
d’une ischémie. ambiant, la recherche d’une toux chronique, d’une cyanose, d’une

EMC - Anesthésie-Réanimation 5
36-375-A-05  Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique

Tableau 6.
Échelle de dyspnée du Medical Research Council (MRC) traduite en français et modifiée (mMRC) [28] .
Stade Importance de la dyspnée selon les activités
0 Dyspnée pour des efforts soutenus (montée deux étages)
1 Dyspnée lors de la marche rapide ou en pente
2 Dyspnée à la marche sur terrain plat en suivant quelqu’un de son âge
3 Dyspnée obligeant à s’arrêter pour reprendre son souffle après quelques minutes ou une centaine de mètres sur terrain plat
4 Dyspnée au moindre effort

respiration superficielle, d’un encombrement bronchique, d’une


polypnée et d’un retentissement de la dyspnée au repos ou à
l’effort [26] .
Différentes évaluations existent afin de quantifier la dyspnée au
“ Point fort
repos ou à l’effort [27] .
SAOS
L’échelle du Medical Research Council est utilisée dans la clas-
• Le dépistage du SAOS permet de diminuer les
sification GOLD des patients atteints de bronchopneumopathie
chronique obstructive [28] (Tableau 6). complications postopératoires.
Afin d’évaluer la sévérité et l’origine de la pathologie sous- • La présence d’un SAOS est liée à un risque de prise en
jacente, des examens complémentaires peuvent être prescrits charge difficile des voies aériennes.
selon le type d’intervention (gaz du sang, radiographie de tho- • Le Stop Bang est un score simple d’utilisation, il détecte
rax ou scanner thoracique, exploration fonctionnelle respiratoire les SAOS sévères avec une valeur prédictive positive et
[EFR]). une sensibilité meilleures au-delà de la présence de trois
Le patient doit être informé de la prise en charge périopératoire critères.
(kinésithérapie, bronchodilatateur, ventilation non invasive) et • Son diagnostic repose sur la polysomnographie.
du risque de complication pouvant mener à une hospitalisation • En cas de SAOS sévère non appareillé, le circuit ambu-
en soins intensifs, en réanimation et à une ventilation prolongée.
Une stratégie doit être établie avec le patient et, si besoin, latoire peut ne pas être validé.
avec les différents intervenants (pneumologue, chirurgien) afin
de définir l’anesthésie la mieux adaptée. Peu d’études récentes ont
mis en évidence la supériorité d’une technique [29] ; l’anesthésie
locorégionale présente également des effets secondaires non Le mini mental state examination permet une évaluation globale
négligeables (dysfonction diaphragmatique, paralysie des muscles des fonctions cognitives et un score inférieur à 10 indique une
respiratoires accessoires). démence sévère.
D’autres tests de repérage (test de l’horloge) ou test de mémoire
(rappel de 5 mots) peuvent être utilisés en pratique courante.
Dépistage des populations à risque Le score de fragilité clinique [36] permet de repérer les patients
les plus à risque de dépendance et d’évolution défavorable pour
Dépistage du syndrome d’apnée obstructive lesquels une vigilance plus soutenue semble nécessaire.
du sommeil (SAOS) Le retentissement des troubles cognitifs peut être évalué par
l’échelle instrumental activities of daily living pour les activités de la
Un SAOS est défini par l’association d’une somnolence diurne vie quotidienne.
et d’un indice apnée/hypopnée (IAH) supérieur à 5.h−1 . Un SAOS L’état de confusion pré- ou postopératoire peut être diagnosti-
sévère a un IAH supérieur à 30.h−1 . qué par la CAM (confusion assesment méthod), le DMS V (diagnostic
Le patient porteur d’un SAOS est à risque d’intubation diffi- and statical mental disorders, 5e édition).
cile et différentes méta-analyses ont montré une augmentation Les facteurs de risque susceptibles d’augmenter le risque de
de la morbidité en postopératoire : réintubation, transfert en soins confusion postopératoire doivent être recherchés : prise de ben-
intensifs, complication cardiaque et respiratoire [30] . zodiazépine, trouble visuel ou de l’audition, trouble cognitif
Son diagnostic repose sur un interrogatoire précis et l’utilisation préexistant.
de différents scores cliniques afin de définir un risque de SAOS qui
devra alors être confirmé par une polysomnographie nocturne.
En pratique, il faut utiliser en consultation un score reproductible Patient à risque de décompensation rénale
et rapide. La présence de trois critères sur huit au Stop Bang [31] LA SFAR a émis des recommandations [37] pour la protec-
oriente vers un risque probable de SAOS (Tableau 7). Le score tion rénale périopératoire. Les facteurs de risques [38] favorisant
d’Epworth [32] permet d’évaluer la présence d’une somnolence l’apparition d’une altération de la fonction rénale en postopé-
diurne en utilisant un questionnaire pour le patient et pour le ratoire doivent être dépistés. Certaines populations (diabète,
conjoint. hypertension artérielle, insuffisance rénale chronique, âge supé-
Une étude observationnelle rapporte une diminution des rieur à 65 ans) ou situations (sepsis, reprise chirurgicale,
complications lorsque le patient est appareillé en préopératoire déshydratation, chirurgie vasculaire majeure) sont à risque de
en cas de SAOS sévère [33] . décompensation.
Le but est d’anticiper une stratégie anesthésique en monitorant
en peropératoire le débit cardiaque et le volume d’éjection systo-
Patient à risque de dysfonction cognitive
lique afin d’optimiser le remplissage [39] et la pression de perfusion
Le risque de dysfonction cognitive ainsi que la mortalité rénale, et d’éviter les médicaments néphrotoxiques.
postopératoire sont plus importants lorsque l’âge augmente [34] ,
d’autant plus qu’il existe déjà des troubles cognitifs préalables
(pathologie neurodégénérative) et des facteurs de risques associés Dépistage du risque allergique
(pathologie neurovasculaire, endocrinienne, cardiovasculaire,
respiratoire ou rénale). L’évaluation des fonctions cognitives La SFAR [40] a émis des recommandations concernant la préven-
préopératoires, du risque de confusion postopératoire [35] et le tion du risque allergique peranesthésique et a défini un groupe de
dépistage de la dénutrition sont indispensables ; il est recom- patients susceptibles de présenter une réaction d’hypersensibilité
mandé de prendre si nécessaire des avis auprès des gériatres et et pour lequel un bilan allergologique préanesthésique semble
des nutritionnistes pour avoir une approche globale. indiqué :

6 EMC - Anesthésie-Réanimation
Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique  36-375-A-05

Tableau 7.
Stop bang [31] .
Ronflement Avez-vous un ronflement sonore (parole, porte close) ?
Fatigue Êtes-vous fatigué, somnolent pendant la journée ?
Observation A-t-on observé des pauses respiratoires pendant votre sommeil ?
Pression artérielle Avez- vous une HTA, traitée ou non ?
Indice de masse corporelle Supérieur à 35 kg/m2
Âge Supérieur à 50 ans
Tour de cou Supérieur à 40 cm
Genre Sexe masculin

HTA : hypertension artérielle.

• patient ayant manifesté des signes cliniques évocateurs d’une choix anesthésiques et la présence d’un risque de ventilation au
allergie lors d’une précédente anesthésie ; masque impossible (Fig. 3).
• patient à risque d’allergie au latex : Dès lors qu’une intubation difficile est prévisible, diverses ques-
◦ patient ayant présenté des manifestations cliniques d’allergie tions doivent être posées orientant le choix de la technique : la
lors d’une exposition au latex, ventilation au masque est-elle prévue comme étant difficile ? Peut-
◦ patient ayant présenté des manifestations cliniques lors de on maintenir une oxygénation efficace (masque laryngé, abord
l’ingestion d’aliments (avocat, kiwi, banane, châtaigne) ou trachéal) ? Choisit-on de maintenir une ventilation spontanée
d’exposition à des plantes (Ficus benjamina) croisant avec le (fibroscopie vigile ou anesthésie générale) ? Il est recommandé
latex, d’utiliser le vidéolaryngoscope si deux critères d’intubation diffi-
◦ patient en contact répété avec le latex (contact professionnel cile sont présents ; à chaque étape de la stratégie il est nécessaire de
ou multiples chirurgies, ou malformations urinaires (spina réévaluer les techniques utilisées et d’adapter la prise en charge en
bifida, vessie neurologique). conséquence : utilisation de la fibroscopie ou du masque laryngé,
réveil du patient.

 Stratégies de prises en charge Stratégie d’épargne transfusionnelle


spécifiques ou patient blood management (PBM)
L’anémie préopératoire est liée à une augmentation de la morbi-
Gestion des voies aériennes supérieures mortalité postopératoire et de la durée moyenne de séjour. L’étude
PREPARE [44] réalisée dans six pays européens et 17 centres a
Afin d’optimiser la prise en charge des voies aériennes retrouvé dans les chirurgies orthopédiques majeures (prothèse
supérieures (fibroscope vigile, vidéolaryngoscope) et de guider de genou, de hanche, ou chirurgie rachidienne) un taux de
la stratégie anesthésique (technique d’anesthésie locorégionale complications plus important dans le groupe ayant une anémie
selon le geste chirurgical), il est essentiel de rechercher des cri- préopératoire (taux d’hémoglobine inférieur à 12 g/dl chez la
tères de ventilation au masque difficile ou impossible, pouvant femme et 13 g/dl chez l’homme) : 36,9 versus 22,2 % avec un
faire craindre une intubation difficile. Le risque d’intubation dif- p égal à 0,009.
ficile est multiplié par 4 chez les patients ayant une ventilation au Une méta-analyse [45] datant de 2015 a montré que l’anémie
masque difficile. préopératoire était liée à une augmentation significative du
La SFAR a émis des recommandations d’experts sur l’évaluation risque relatif de mortalité à 30 jours (odds ratio [OR] : 2,90),
et la gestion de l’intubation [41] . d’insuffisance rénale aigue¨ (OR : 3,75), d’infection (OR : 1,93)
L’âge supérieur à 55 ans, un IMC supérieur à 26 kg/m2 , et de transfusion en culot globulaire (OR : 5,04).
l’édendation, la limitation de la protrusion mandibulaire, la pré- Il est important de dépister les patients [46] et les chirurgies à
sence d’un ronflement et d’une barbe ont été retrouvés comme risque, de prescrire une numération formule sanguine et un bilan
facteurs prédictifs d’une ventilation au masque difficile. Une dis- martial avec ferritine et coefficient de saturation de la transfer-
tance thyromentonnière inférieure à 6 cm et la présence d’un rine [47] . Les résultats orientent la prise en charge : injection d’EPO
ronflement sont des critères prédictifs d’une ventilation impos- selon les protocoles établis, supplémentation en fer par voie orale
sible. ou intraveineuse et épargne sanguine peropératoire (Fig. 4).
Les antécédents d’intubation difficile, le score de Mallampati La HAS a émis en 2020 [48] des recommandations de bonnes
coté à 2, la distance thyromentonnière de moins de 6 cm et pratiques pour les différents intervenants de la médecine pério-
l’ouverture de bouche inférieure à 35 mm sont des critères pré- pératoire afin de les inciter à mettre en place une stratégie PBM
dictifs d’intubation difficile. et un livret blanc [49] a été édité en collaboration avec différentes
La raideur du rachis cervical, la mobilité mandibulaire (test de sociétés savantes.
morsure de lèvre), un IMC supérieur à 35 kg/m2 , un SAOS avec Dans le cadre de la réhabilitation améliorée en chirurgie
un tour de cou supérieur à 45,6 cm et une pathologie cervicofa- orthopédique lourde [50] , les experts émettent des accords forts
ciale sont également des éléments à rechercher qui augmentent concernant l’utilisation d’EPO en préopératoire et d’acide tranexa-
le risque d’intubation difficile. mique en postopératoire [51] . Différents algorithmes [52] peuvent
La conférence d’expert [42] définit ainsi les critères suivants : une être utilisés (Fig. 5).
intubation est difficile si elle nécessite plus de deux laryngoscopies
et/ou la mise en œuvre d’une technique alternative après optimi-
sation de la position de la tête, avec ou sans manipulation laryngée Prévention des nausées–vomissements
externe. Une ventilation au masque est dite difficile, s’il est impos-
sible d’obtenir une ampliation thoracique suffisante, un volume
postopératoires (NVPO)
courant supérieur à l’espace mort (3 ml/kg) ou un tracé capnogra- Il est établi que la présence de NVPO est corrélée à un risque de
phique identifiable, s’il est impossible de maintenir une saturation complications et d’allongement de la durée moyenne de séjour.
en oxygène supérieur à 92 %, s’il est nécessaire d’utiliser l’oxygène Le score d’APFEL simplifié [53] (Tableau 8) permet de dépister les
rapide à plusieurs reprises, ou d’appeler un autre opérateur ou si patients à fort risque de NVPO et d’adapter leur prise en charge
la pression d’insufflation est supérieure à 25 cmH2 O. (privilégier une anesthésie intraveineuse ou une anesthésie loco-
Les nouvelles recommandations [43] présentent les stratégies de régionale, diminuer l’utilisation des morphiniques, instaurer une
prise en charge en cas de risque d’intubation difficile selon les prévention médicamenteuse [54] , optimiser l’hydratation).

EMC - Anesthésie-Réanimation 7
36-375-A-05  Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique

Intubation
Appeler aide si besoin Ventilation au masque efficace

Apnée possible Ventilation


spontanée

Un critère ID : laryngoscopie Échec


Au moins 2 critères ID : vidéolaryngoscopie
Dans tous les cas :
– 2 essais au maximum
– exposition glottique optimisée Masque laryngé
– possibilité long mandrin béquillé Échec
pour l’intubation

Réveil Intubation Intubation ± fibroscopie Réveil Fibroscopie

Intubation Échec

Réveil
Abord trachéal si réveil
impossible

Figure 3. Arbre décisionnel. Prise en charge d’une intubation difficile (ID) prévue en anesthésie chez l’adulte [43] .

Anémie préopératoire : Hb < 13 g.dl–1


(chez la femme Hb < 12 g.dl–1)

Bilan martial

Ferritine < 30 μg/l et/ou Ferritine > 30-70 μg/l et/ou Ferritine > 70 μg/l et/ou Clairance
CST < 15-20 % CST > 20 % CST > 20 % de la créatinine

Carence martiale
Anémie Vitamine B12
associée à un syndrome Basse Normale
ferriprive et ou folate
inflammatoire ?

Insuffisance rénale
Consultation Normale Basse
gastroentérologie
Consultation
gastroentérologie
Pas de Anémie Vitamine B12
carence inflammatoire et ou folate

Traitement martial per os


Intraveineux si intolérance, malabsorption EPO + fer ?
sévère

Figure 4. Détection de l’anémie par carence martiale [47] . CST : coefficient de saturation de la transferrine ; EPO : érythropoiétine ; Fe : fer.

Différents algorithmes de prises en charge [55] (Fig. 6) existent. Prise en charge du patient diabétique
Les patients ayant au minimum deux critères doivent bénéficier
d’une prévention médicamenteuse [56] et les patients à fort risque, La dysautonomie nerveuse diabétique est responsable d’une
au-delà de trois critères, d’une prévention multimodale. augmentation du risque cardiovasculaire (ischémie cardiaque et

8 EMC - Anesthésie-Réanimation
Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique  36-375-A-05

Consultation préopératoire :
– idéalement 3 à 4 semaines
avant la chirurgie
– NFS + bilan fer « conditionnel »
(ordonnance : prélever 2 tubes Traitement anémie préopératoire
et faire dosage de ferritine et CST Hb < 13 g.dl–1
si Hb < 13 g.dl–1

En chirurgie orthopédique Si autre chirurgie : fer intraveineux si


fer intraveineux + EPO ferritine < 100 μg/l et ou CST < 20 %

Fer intraveineux (en préopératoire) :


j21 j14 j7 – carboxymaltose ferrique : 1 g ± 0,5 à 1 g
à 1 semaine si Hb < 10 g.dl–1 et ou poids >
EPO EPO EPO 70 kg
sous-cutané sous-cutané sous-cutané – fer sucrose (dose calculée)
40 000 UI 40 000 UI 40 000 UI 3-5 injections de 300 mg puis 200 mg/48 h
pendant 2 semaines

Fer intraveineux Si Hb < 13,5 g.dl–1

Figure 5. Algorithme de traitement par fer et érythropoiétine (EPO) en préopératoire [52] . CST : coefficient de saturation de la transferrine ; EPO :
érythropoïétine ; Hb : hémoglobine ; NFS : numération formule sanguine.

80 %
Risque NVPO

Score de risque Apfel


60 %
Sexe féminin : 1 point
40 %
Non fumeur : 1 point
20 %
Antécédents : 1 point
< 10 %
Morphine postopératoire : 1 point
Total : de 0 à 4 0 1 2 3 4
Si possible, réduction
N facteurs de risque du risque de base
(ALR, éviter halogéné
Faible Moyen Élevé et morphinique
peropératoire)

Pas Dexaméthasone Anesthésie générale intraveineuse


Prophylaxie de prévention + un autre + dexaméthasone
systématique antiémétique + un autre antiémétique

AR-5 HT3 Antiémétique


Secours Autre antiémétique validé de classe différente

Figure 6. Prévention des nausées–vomissements postopératoires (NVPO) [54] . ALR : anesthésie locorégionale.

Tableau 8. Un taux d’HbA1c compris entre 6 et 8 % signe un diabète équi-


Score simplifié d’Apfel et al. [54] . libré. Un taux supérieur à 8 % requiert une prise en charge par
Facteurs de risque Score d’Apfel et al. un diabétologue ou un médecin traitant afin d’optimiser le traite-
ment. Un taux supérieur à 9 % nécessite un report de la chirurgie
Sexe féminin 1 point (en l’absence d’urgence) en attendant une prise en charge spéci-
Antécédent NVPO/mal des transports 1 point fique et une adaptation des traitements.
Non-fumeur La prise en charge anesthésique [58] doit tenir compte des risques
Morphiniques postopératoire 1 point liés au diabète et à ses complications. La présence d’une hypo-
1 point
tension orthostatique va de pair avec une gastroparésie et pose
NVPO : nausées–vomissements postopératoires. l’indication d’une induction en séquence rapide. Le « signe du
prieur » est un facteur prédictif d’intubation difficile. L’anesthésie
locorégionale n’est pas contre-indiquée mais il faut évaluer la neu-
accident vasculaire cérébral). L’hyperglycémie postopératoire [57] ropathie préexistante. Le risque de dysfonction rénale doit limiter
est corrélée à un risque infectieux et à une morbidité plus impor- l’utilisation des médicaments néphrotoxiques.
tante.
Il est dont important d’évaluer le retentissement cardiaque et
rénal, et de définir une stratégie anesthésique afin de limiter le
déséquilibre glycémique en périopératoire. Prise en charge du patient avec IMC
La consultation d’anesthésie doit donc rechercher les supérieur à 30 kg/m2
complications à l’aide d’un interrogatoire rigoureux (hypoten-
sion orthostatique, évaluation du MET) et d’un bilan biologique Certaines études ont mis en évidence un risque accru de
(dosage de l’hémoglobine glyquée [HbA1c], créatininémie) et complications de type thromboemboliques [59] respiratoires ou
ainsi orienter la demande d’examens complémentaires (Fig. 7) septiques [60] .

EMC - Anesthésie-Réanimation 9
36-375-A-05  Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique

Bilan minimal:
– interrogatoire Gastroparésie à suspecter si douleurs
– tension en position allongée et debout abdominales, ballonnements,
– ECG de repos vomissements
– bandelette urinaire Intubation estomac plein
– créatininémie

Atteinte coronaire Neuropathie autonome cardiaque (NAC)


Symptomatique si: Asymptomatique Symptomatique ou compliquée Asymptomatique
– antécédent À suspecter si: si 1 des signes suivants: À rechercher si microangiopathie
cardiovasculaire – autres atteintes artérielles – tachycardie permanente diabétique NAC confirmée si 2 tests
– signes ECG: ischémie – protéinurie à la BU – signes ECG: QTc > 440ms, anormaux:
ou IDM silencieux – Insuffisance rénale ischémie ou IDM silencieux – test de variabilité de la fréquence
– patient symptomatique – score calcique coronaire > 400 – hypotension orthostatique cardiaque en respiration profonde
– hypotension postprandiale – test de variabilité de la fréquence
– hypoglycémie grave non ressentie cardiaque à l’orthostatisme
Si chirurgie majeure et score – pas de diminution nocturne
de Lee ≥ 2 et MET < 4 de la tension artérielle (Holter)

Risque d’ischémie myocardique silencieuse Risque hémodynamique et de troubles du rythmes graves


Prévoir évaluation coronarienne et test d’ischémie Monitorages per- et postopératoire
Figure 7. Spécificités de la consultation d’anesthésie pour un patient diabétique [58] . BU : bande urinaire ; ECG : électrocardiogramme ; IDM : infarctus du
myocarde ; MET : metabolic equivalent of task.

et l’amélioration de la qualité, l’utilisation des morphiniques

“ Point fort et des antalgiques non morphiniques, l’infiltration chirurgicale,


l’utilisation des techniques d’anesthésie locorégionale, les antihy-
peralgésiques, la douleur chronique postchirurgicale et l’analgésie
en chirurgie ambulatoire.
PBM
L’évaluation de la douleur chronique doit être une démarche
• L’anémie périopératoire et les complications hémorra-
institutionnelle et multidisciplinaire. Elle doit débuter le plus
giques aggravent le risque de morbimortalité postopéra- précocement possible dans le parcours du patient. Le but de la
toire. consultation d’anesthésie est de dépister les patients douloureux
• La HAS a émis des recommandations et a incité les chroniques ainsi que les patients à risque de douleur chronique
différents acteurs à mettre en place des programmes de postopératoire, d’orienter ces patients vers des équipes spécialisées
patient blood management au sein de leur institution afin et de proposer une démarche et une stratégie d’analgésie adaptées :
d’optimiser le dépistage et la prise en charge. analgésie multimodale, anesthésie locorégionale.
• Les stratégies d’épargne transfusionnelle sont multiples L’anesthésie de type OFA est une technique qui suscite un inté-
et englobent toute la période péri-opératoire, et per- rêt croissant, le but étant de limiter l’utilisation de morphine et ses
effets indésirables en périopératoire. De nombreuses études sont
mettent de limiter le taux de transfusion.
en cours afin de définir les molécules les plus adaptées et d’évaluer
• Il faut dépister l’anémie ferriprive, débuter une
le bénéfice de ce type d’anesthésie [63] .
supplémentation ferrique et prescrire des injections
d’érythropoïétine et d’acide tranexamique pour les chi-
rurgies à risque hémorragique selon les recommandations Sevrage tabagique
d’experts en absence de contre-indication.
Le tabagisme augmente les risques respiratoires, cardiovascu-
laires, infectieux et de reprise chirurgicale ainsi que la durée
moyenne de séjour [64] . Tout arrêt du tabac dans la période pério-
pératoire, quelle que soit la durée, diminue ces risques.
Dans le cadre d’une prise en charge pour une chirurgie baria- Lors de la consultation d’anesthésie, il est recommandé
trique, le patient suit un programme bien spécifique permettant d’informer le patient sur la nécessité d’arrêter sa consommation,
une évaluation optimale : évaluation nutritionnelle et psycho- sur les risques postopératoires en cas de poursuite du tabagisme et
logique, éducation thérapeutique. Il est nécessaire d’être aussi de l’orienter vers une prise en charge spécifique.
rigoureux pour une chirurgie non bariatrique. Il faut prévoir en consultation la prescription de substituts nico-
Il faut dépister des facteurs de comorbidités associées : un tiniques postopératoires pour éviter le sevrage si besoin.
SAOS [32] , un diabète, un reflux gastroœsophagien, une insuffi-
sance respiratoire ou cardiaque, une maladie thromboembolique
veineuse, et compléter si nécessaire par des examens : un électro-
cardiogramme, un test d’effort, des EFR, un dépistage du SAOS,
 Gestion des traitements
un bilan sanguin. en périopératoire [13, 25, 65–71]

La consultation doit anticiper les difficultés techniques (pose de


voie veineuse sous échographie) et dépister les risques de ventila- Un certain nombre de traitements peuvent être maintenus en
tion et d’intubation difficiles afin de choisir la meilleure stratégie préopératoire ; le patient doit recevoir des consignes précises pour
anesthésique. Le repérage anatomique en anesthésie locorégio- la gestion de ces traitements sinon il y a un risque de report en
nale peut également s’avérer difficile. cas de non-respect des consignes (date et heure de dernière prise,
modalités des relais).

Prise en charge de la douleur chronique


Antiagrégants plaquettaires
La SFAR a émis des recommandations formalisées d’expert sur la
prise en charge de la douleur chronique [61] . Les groupes d’experts La gestion des antiagrégants plaquettaires a fait l’objet de
se sont penchés sur différents axes de réflexion afin d’améliorer recommandations [65] par le Groupe d’intérêt en hémostase pério-
cette prise en charge [62] : l’état des lieux des pratiques, l’évaluation pératoire et la SFAR (Tableau 9).

10 EMC - Anesthésie-Réanimation
Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique  36-375-A-05

Tableau 9.
Proposition de gestion des antiagrégants plaquettaires [65] .
Risque hémorragique de la chirurgie
Faible Intermédiaire Élevé
Aspirine en prévention Aspirine en Arrêt ou poursuite Arrêt Arrêt
primaire monothérapie

Risque AAP en prévention Aspirine en Poursuite Poursuite Arrêt


thrombotique du secondaire monothérapie
patient
Clopidorel en Poursuite Arrêt et relais aspirine Arrêt
monothérapie

Bithérapie Stent < 1 mois Différer la procédure Différer la procédure Différer la procédure
antiplaquettaire pour Stent < 6 mois à haut Si impossible Si impossible Si impossible,
stent coronaire risque thrombotique poursuivre les 2 AAP poursuivre aspirine et interrompre les 2 AAP
IDM < 6 mois interrompre anti-P2Y12

Aucun des critères Poursuivre les 2 AAP Poursuivre l’aspirine et Interrompre les 2 AAP
interrompre anti-P2Y12

AAP : antiagrégant plaquettaire ; IDM : infarctus du myocarde.

Tableau 10.
Gestion des anticoagulants oraux directs selon le risque hémorragique [67] .
Risque hémorragique faible Risque hémorragique élevé
Avant le geste (pas de relai, Pas de prise la veille au soir Rivaroxaban Cockroft ≥ 30 ml/min Dernière prise j–3
pas de dosage) ni le matin de l’acte invasif Apixaban
Édoxaban
Dabigatran Cockroft ≥ 50 ml/min Dernière prise j–3
Cockroft 30–49 ml/min Dernière prise j–4

Il faut distinguer la prévention primaire à titre préventif et la Il n’est pas nécessaire de réaliser un dosage de l’activité anti-
prévention secondaire pour laquelle l’arrêt des traitements en Xa ou la mesure du TCA mais il est recommandé de prélever
périopératoire est corrélé à un risque plus important de décom- un INR la veille de l’intervention et d’administrer 5 mg de vita-
pensation de la pathologie sous-jacente. mine K si l’INR est supérieur à 1,5 puis de le recontrôler le matin
Pour les chirurgies à risque mineur définies par la HAS [66] (chi- de l’intervention.
rurgie cutanée, chirurgie de la cataracte, actes de rhumatologie Les héparines doivent être stoppées selon le schéma suivant :
à faible risque hémorragique, certains actes de chirurgie bucco- • héparine non fractionnée (HNF) intraveineuse à la seringue
dentaire, certains actes d’endoscopie digestive), les antiagrégants électrique : arrêt quatre à six heures avant la chirurgie ;
peuvent être maintenus quelle que soit la molécule. • HNF sous-cutanée : arrêt huit à 12 heures avant la chirurgie,
Tous les traitements en prévention primaire doivent être stop- • héparine de bas poids moléculaire : dernière dose 24 heures
pés trois à sept jours avant la chirurgie selon la molécule. avant l’intervention.
En prévention secondaire, certains antiagrégants (Plavix® ,
Brilique® , Efient® ) doivent être suspendus et remplacés par de Traitements antihypertenseurs
l’aspirine ou un équivalent.
En cas de bithérapie antiagrégante plaquettaire, il est préférable Il est recommandé de ne pas arrêter les bêtabloquants et de
de différer la procédure jusqu’à la fin de la bithérapie prescrite par poursuivre les inhibiteurs calciques et les dérivés nitrés [69] .
le cardiologue (stent de moins de 1 mois, stent de moins de 6 mois Les diurétiques ne doivent pas être pris le matin de
à haut risque thrombotique et infarctus de moins de 6 mois). l’intervention (risque d’hypovolémie et de trouble ionique) et la
kaliémie doit être contrôlée.
Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les antago-
Anticoagulants nistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARA2) prescrits à visée
antihypertensive doivent être arrêtés au moins 12 heures avant la
Les anticoagulants oraux directs pour une chirurgie program- chirurgie. Il est en revanche recommandé de les poursuivre s’ils
mée doivent être stoppés sans relais [67] ; il n’est pas nécessaire de sont prescrits pour une insuffisance cardiaque.
réaliser un dosage en préopératoire (Tableau 10). Il faut anticiper et adapter l’anesthésie en cas de risque
Selon les propositions de la HAS [68] , les anticoagulants de type d’hypovolémie importante (chirurgie hémorragique, décubitus
antivitamine K (AVK) doivent être relayés dans les cas suivants : ventral).
• patient porteur d’une valve mécanique ; Il est recommandé d’arrêter pendant 24 heures les antiaryth-
• arythmie complète par fibrillation auriculaire emboligène : miques de classe 1 de type Flécaïne® .
antécédent d’embolie pulmonaire, thrombose veineuse pro-
fonde, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral ;
• antécédent d’embolie pulmonaire ou de thrombose veineuse
Antidiabétiques
profonde de moins de trois mois ou récidivante. Des recommandations sont regroupées au sein des fiches simpli-
Il est également recommandé de réaliser un dosage de fiées de la SFAR [25] portant sur la gestion des patients diabétiques
l’international normalized ratio (INR) sept jours avant. S’il est en (Tableau 11).
zone thérapeutique, l’AVK doit être arrêter quatre à cinq jours En cas de chirurgie ambulatoire, il n’est pas recommandé de
avant l’intervention et il faut débuter l’héparine à dose curative stopper les traitements.
48 heures après la dernière prise de fluindione (Previscan® ) ou En ce qui concerne les autres types de chirurgies, il ne faut
de warfarine (Coumadine® ) ou 24 heures après la dernière prise pas prendre de metformine la veille au soir et le matin de
d’acénocoumarol (Sintrom® ). l’intervention, ni le matin pour tous les autres traitements.

EMC - Anesthésie-Réanimation 11
36-375-A-05  Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique

Tableau 11.
Gestion des antidiabétiques [25] .
Chirurgie ambulatoire Chirurgie mineure ou majeure
Metformine Pas d’arrêt Pas de prise la veille au soir et le matin
Sulfamides Pas d’arrêt Pas de prise le matin
Glinides Pas d’arrêt Pas de prise le matin
Inhibiteurs alphaglucosidases Pas d’arrêt Pas de prise le matin
Inhibiteurs DPP-4 (dipeptidyl peptidase 4) Pas d’arrêt Pas de prise le matin
Inhibiteurs SGLT2 (sodium glucose cotransporteur 2) Pas d’arrêt Pas de prise le matin selon SFAR (attention au risque d’acidose,
cétose euglycémique, recommandation de la Société européenne de
cardiologie, grade IIa, dernière prise j–3)
Analogues GLP-1 (glucagon-like peptide 1) Pas d’arrêt Pas de prise le matin
Insulines sous-cutanées Pas d’arrêt Pas d’injection le matin sauf dans le diabète de type 1
Pompe insuline Pas d’arrêt Arrêt de la pompe à l’arrivée du bloc

SFAR : Société française d’anesthésie et de réanimation.

La pompe à insuline doit être maintenue jusqu’au bloc opéra- Le patient doit avoir au préalable été contacté par l’équipe
toire. d’anesthésie pour préciser les documents à apporter et les éven-
Les nouveaux antidiabétiques de type inhibiteurs SGLT-2 tuels bilans ou consultations spécialisées à réaliser en amont.
peuvent entraîner en périopératoire un risque accru d’acidocétose Une convocation, une fiche d’information sur l’anesthésie et
euglycémique et cela nécessite une vigilance particulière [70] des ordonnances doivent être données au patient afin de se pré-
parer.
Selon l’organisation propre au service, l’équipe peut se compo-
ser d’agents administratifs, de secrétaires, d’aides-soignantes ou
“ À retenir d’infirmières permettant l’accueil et la réalisation de prélèvements
sanguins ou d’ECG.
Les salles de consultation [72] doivent préserver le secret pro-
Nouvelles recommandations de la Société euro- fessionnel, être équipées pour la prise des paramètres vitaux et
péenne de cardiologie d’un chariot d’urgence vital. Les locaux doivent pouvoir accueillir
• Les recommandations utilisent un score d’évaluation du un accompagnant et être adaptés aux personnes en situation de
risque préopératoire : RCRI (revised cardiac risk index). handicap.
• La stratégie de prescription des examens Le circuit pour la demande de consultation doit être établi en
collaboration avec les services ayant recours à ce type de consul-
complémentaires tient compte du MET, d’un âge
tations.
limite fixé à 65 ans, de la présence de facteurs de risques La prise de rendez-vous peut se faire via des services informatisés
ou d’antécédents cardiovasculaires (cardiopathie isché- ou par téléphone, il peut être proposé des téléconsultations selon
mique, maladie cérébrovasculaire, insuffisance cardiaque les modalités établis au sein du service.
congestive, insuffisance rénale (créatinine supérieure à Il faut anticiper la réalisation de la consultation pour des chi-
176 ␮mol/l) et diabète insulinorequérant). rurgies à haut risque et des patients avec des comorbidités afin
• Pour les chirurgies à haut risque ou à risque intermé- de pouvoir réaliser les évaluations nécessaires en amont et éviter
diaire, le dosage de la troponine est recommandé pour les ainsi une déprogrammation.
patients dont l’âge est supérieur ou égal à 65 ans.
• L’échographie cardiaque est recommandée en cas Consultations d’anesthésies itératives,
d’examen clinique ou biologique anormal.
• Les tests d’ischémie doivent être prescrits en tenant délocalisées
compte de l’évaluation clinique, des facteurs de risque, Depuis plusieurs années, les mêmes questions reviennent au
des antécédents et de la capacité fonctionnelle. sein des équipes d’anesthésie : doit-on refaire une consultation
• Un taux d’Hba1c supérieure à 8,5 % doit faire reporter si le patient est de nouveau opéré dans un délai proche ? Quel
la chirurgie. est le délai envisagé entre la consultation d’anesthésie et l’acte
• Il est recommandé de reporter une chirurgie program- d’anesthésie ? Comment réaliser une consultation pour un acte
délocalisé ?
mée six mois après un stent actif et un mois après un La SFAR a éclairci en 2017 plusieurs points de réglementa-
syndrome coronarien aigu. tion [73] :
• Il est probablement recommandé d’arrêter trois jours • la sélection des patients éligibles aux consultations itératives est
avant une chirurgie à haut risque ou à risque intermédiaire primordiale. Les actes de chirurgie mineure ou intermédiaire
les antidiabétiques type inhibiteur SGLT-2 (recommanda- chez un patient défini comme à faible risque sont éligibles à ces
tion de grade IIA). modalités de consultation ;
• le délai entre la consultation et l’acte chirurgical est fixé à un
mois ; au-delà d’un mois l’anesthésiste ayant réalisé la consul-
tation doit donner un avis sur la nécessité de revoir le patient
pour remettre à jour la consultation ;
• il est envisageable que pour un même acte endoscopique ou chi-
 Différents modes et formes rurgical sans modification de la technique anesthésique ou du
mode d’hospitalisation, ou pour deux actes complémentaires
de consultation dans un délai rapproché, de ne pas convoquer en présentiel le
patient. Le terme « convoquer » est important car il indique
Organisation de la consultation non pas de ne pas faire une consultation mais bien d’envisager
Le lieu de la consultation d’anesthésie doit être géographique- des alternatives à une consultation présentielle :
ment identifié, idéalement proche des services de chirurgie ou au ◦ réaliser une consultation d’anesthésie avant la sortie du
sein d’un service de consultation pluridisciplinaire. malade si l’acte est programmé avant un mois,

12 EMC - Anesthésie-Réanimation
Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique  36-375-A-05

◦ réaliser une consultation par téléphone ou une téléconsulta- Les nouveaux circuits « patient debout » permettent
tion, d’autonomiser le patient.
◦ programmer une consultation délocalisée ; La réhabilitation améliorée après chirurgie (RAC) est mise en
• une consultation délocalisée est envisageable si plusieurs condi- place en amont depuis la consultation de chirurgie, et suit un
tions sont réunies : acceptation entre les équipes d’anesthésie programme précis d’information et de formation multidiscipli-
réalisant la consultation et réalisant l’acte anesthésique de ce naire tout au long du parcours. Le patient devient l’acteur majeur
mode de fonctionnement ; il importe de tracer l’information de sa prise en charge et la consultation d’anesthésie est un point
remise au patient lors de la consultation, de compléter essentiel au sein de ce parcours.
l’information lors de la VPA et de valider la consultation faite La consultation d’anesthésie, passage indispensable
par l’autre équipe ; pour l’évaluation du patient, devient également un point
• la VPA est d’autant plus indispensable afin de confirmer d’information et de réassurance dans le cadre de la médecine
l’absence de modification pathologique ou thérapeutique per- périopératoire et de la RAC.
mettant de valider la réalisation de l’anesthésie au risque
d’annuler tardivement le patient en cas de modification.
Spécificité due à la pandémie de Covid-19
Téléconsultation La pandémie de Covid-19 a entraîné une réorganisation au sein
de la consultation.
L’apparition de la télémédecine, la crise sanitaire (maintien de la La SFAR, au moyen de recommandations [79] , a émis des sugges-
distanciation physique), l’évolution démographique (population tions pour adapter la consultation, préconisations qui évoluent
vieillissante) et la réorganisation de l’offre de soins (éloigne- rapidement en fonction de l’avancée de l’épidémie, de la vaccina-
ment géographique) ont redéfini les modalités de réalisation de tion et des directives gouvernementales.
la consultation d’anesthésie. Un questionnaire peut être préalablement envoyé afin de
Une mise au point [74] sur la téléconsultation reprend les don- s’assurer de l’absence de symptôme évocateur d’infection au virus
nées de la littérature et les bénéfices et inconvénients de la de la Covid-19 et pouvant conduire à l’annulation de la consulta-
téléconsultation. tion en présentiel.
Les assurances des professionnels de santé (MACSF et Sou La SFAR suggère de privilégier la téléconsultation. La consul-
médical) ont émis des recommandations afin de réaliser la télé- tation en « présentiel » doit se faire en respectant les mesures
consultation dans les meilleures conditions : interrompre une barrières : port du masque, désinfection des bureaux après chaque
téléconsultation lorsqu’un examen clinique s’avère nécessaire, patient, solution hydroalcoolique.
évaluer la capacité du patient à communiquer à distance, recueillir
son consentement, utiliser la vidéo avec une connexion et une
image de qualité. Dossier informatisé et partagé
Au vu de la crise sanitaire, cette forme de consultation a été
autorisée et privilégiée quand cela était possible. Une déroga- L’extension des outils informatiques au sein du monde médical
tion à l’avenant 6 a permis de recourir à la téléconsultation pour a rendu possible l’informatisation des dossiers médicaux.
l’anesthésie–réanimation, spécialité n’entrant pas initialement La consultation d’anesthésie [12] fait partie du dossier
dans le parcours éligible au remboursement [75] mais pouvant se d’anesthésie dont les éléments ont été précisés par la SFAR ;
faire dans le cadre de la télémédecine. l’informatisation doit respecter et s’adapter à ces recommanda-
La SFAR suggère de privilégier la téléconsultation en sélection- tions.
nant les patients éligibles et en s’assurant de leur adhésion. Le L’amélioration des transmissions au sein des équipes
chirurgien peut également, lors de sa demande de consultation, d’anesthésie [80] , la disparition des écrits et par conséquent
confirmer ou infirmer la possibilité de ce mode de consultation. des difficultés de relecture des dossiers manuscrits, l’accessibilité
La téléconsultation nécessite un matériel informatique per- et le partage de l’information quelle que soit l’heure sont des
formant avec une bonne connexion ; elle doit se faire par outils indispensables à l’optimisation et à la sécurité de la prise
visioconférence, garantir la protection des données (envoi de en charge du patient.
document et d’ordonnance) et respecter les modalités et les L’outil informatisé doit répondre à différents critères, être acces-
contraintes habituelles. sible à chaque étape (consultation, chambre du patient, bloc
Les études portant sur des patients ASA 1 et 2, toute chirurgie opératoire) et s’adapter à la pratique au sein de chaque établis-
confondue, retrouvaient un taux de satisfaction variable [76, 77] . sement.
L’évaluation clinique lors d’une téléconsultation est difficile- La saisie des données doit être simple, intuitive, rapide et per-
ment réalisable, la visite préanesthésique est primordiale. sonnalisée. La connexion au réseau doit être de bonne qualité.
En cas d’échec à la réalisation d’une téléconsulta- Les antécédents, les analyses biologiques ou autres informations
tion, d’incompréhension de l’information, d’impossibilité du dossier médical doivent pouvoir être intégrés directement au
d’évaluation du risque anesthésique, de mauvaise connexion, il sein de la consultation.
faut envisager de programmer une consultation en présentiel. Les informations doivent pouvoir être complétées, modifiées et
reprises lors des consultations ultérieures.
Des ordonnances de prescriptions ainsi que des consignes ou
Spécificités selon le parcours du patient des informations doivent pouvoir être transmises au patient au
terme de la consultation via la saisie informatique.
Les nouveaux parcours de patient de type ambulatoire et accueil La HAS et la SFAR [8] ont relevé 15 points essentiels à une bonne
le jour même ainsi que les nouvelles modalités de prise en coopération entre anesthésiste et chirurgien. Le dossier médical,
charge « patient debout » et la réhabilitation améliorée doivent la consultation d’anesthésie, le partage de l’information sont au
faire l’objet d’une information précise lors de la consultation cœur de cette collaboration.
d’anesthésie, le but étant de rassurer le patient sur ces modifi- À l’issue de la consultation, il est primordial de tenir informé
cations de prise en charge. le chirurgien de certains éléments pouvant interférer avec
La consultation d’anesthésie [78] pour une chirurgie ambula- l’intervention ou entraîner un report de programmation : gestion
toire doit vérifier les critères d’éligibilité, s’assurer de la présence des traitements, évaluation complémentaire. L’informatisation de
d’un accompagnant au retour, informer le patient sur le res- la transmission et l’accessibilité des données à l’ensemble des
pect du jeûne et délivrer les ordonnances d’antalgiques ou intervenants sont essentiels à l’amélioration de la communication
d’anticoagulant pour anticiper le retour à domicile. au sein des équipes et de la prise en charge du patient.
Le circuit dit « j0 » permet l’arrivée le matin de la chirurgie selon L’informatisation peut néanmoins montrer des limites [81] en
les mêmes modalités que l’ambulatoire, même pour des chirurgies cas de dysfonction informatique (panne du réseau, inaccessibilité
ou des patients non éligibles à un acte ambulatoire. du logiciel), de manque de moyen (absence de tablette pour les

EMC - Anesthésie-Réanimation 13
36-375-A-05  Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique

être consignée par écrit et réalisée par un médecin anesthésiste-

“ Point fort réanimateur.


Elle permet de valider le dossier d’anesthésie et de confirmer la
programmation de l’intervention.
Elle doit permettre d’informer le patient et de faire le point sur
Outil informatique
d’éventuelles modifications de son état, des traitements ou de la
• La téléconsultation est autorisée en anesthésie depuis la
prise en charge anesthésique.
pandémie de Covid-19. L’anesthésiste-réanimateur doit s’assurer que les arrêts des trai-
• Les différentes études montrent un taux de satisfaction tements ont bien été respectés ; il doit redonner les consignes sur
des patients importants. le jeûne.
• Elle n’est pas obligatoire et doit être interrompue si la Des bilans complémentaires peuvent être prescrits : ECG de
consultation d’anesthésie ne peut être effectuée dans les référence, troponine, INR.
meilleures conditions (incompréhension du patient, outil La VPA peut, dans certains cas, conduire au report de la chi-
informatique défectueux) ou s’il est indispensable de réa- rurgie si l’anesthésiste juge qu’il y a une contre-indication à
liser un examen clinique. l’Intervention : non-respect des consignes, évaluation cardiaque
• La visite préanesthésique devient alors un élément indis- non faite, apparition d’un syndrome infectieux. Il doit en infor-
mer l’équipe chirurgicale.
pensable à la validation de la consultation. La VPA fait Le rapport de 2018 de la HAS montrait que seulement 75 % de
partie des indicateurs de la HAS de bonne qualité de tenue VPA était réalisée pour 100 % de consultations et seulement 67 %
du dossier d’anesthésie mais sa réalisation est largement indiquait la date et un contenu adéquat.
oubliée.
• Le dossier informatisé est un outil indispensable au
partage des informations et à l’amélioration de la commu-
nication et de la coopération anesthésique  Conclusion
La consultation d’anesthésie est obligatoire en France ; c’est un
élément essentiel du dossier médical et un indicateur de qualité
consultations délocalisées ou au lit du patient) ou de multiplica-
(pour l’HAS) ; elle réduit les risques périanesthésiques en antici-
tion des supports. Il faut donc rester vigilant.
pant et en optimisant la prise en charge. Elle permet de définir
une stratégie de prise en charge anesthésique adaptée au patient
et au risque chirurgical.
 Visite préanesthésique Devant les modifications des pratiques (téléconsultation, dos-
sier informatisé, consultation délocalisée, multiplication des
La VPA est obligatoire [82] dans les heures précédant la chirur- intervenants), il est primordial actuellement d’améliorer les outils
gie sans qu’il soit précisé le lieu ou l’horaire (la veille, le matin permettant la consultation et la tenue du dossier d’anesthésie qui
ou au bloc opératoire). Tout comme la consultation, elle est doit reste encore insuffisante.

Déclaration de liens d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts

“ Points essentiels en relation avec cet article.

• La consultation d’anesthésie est une obligation médico-  Références


légale et doit être réalisée plus de 48 heures avant une
chirurgie programmée. Elle contribue à la diminution de [1] Ministère de la Santé publique et de la Sécurité sociale. Circulaire no 394
la morbimortalité périopératoire. du 30 avril 1974 relative à la sécurité des malades anesthésiés.
• Son contenu est standardisé et fait partie des indicateurs [2] Ministère de la Santé publique et de la Sécurité sociale. Circulaire no 340
DGS/POS 3A du 23 mars 1982 relative à la sécurité des malades anes-
de bonne tenue du dossier.
thésiés.
• Une information claire et appropriée doit être délivrée
[3] Nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des
au patient. chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux.
• Le dépistage du diabète et du SAOS permettent de dimi- Journal officiel de la République française, 29 décembre 1982, N.C.
nuer les complications postopératoires. 11663.
• La stratégie patient blood management est une recom- [4] Décret no 94-1050 du 5 décembre 1994 relatif aux conditions techniques
mandation de bonnes pratiques de la HAS et doit être de fonctionnement des établissements de santé en ce qui concerne la
pratique de l’anesthésie et modifiant le Code de la santé publique (troi-
établie dans chaque structure hospitalière. sième partie : Décrets). Dernière mise à jour des données de ce texte :
• Les examens prescrits à l’issue de la consultation doivent 26 juillet 2005. NOR:SPSH9403474D. https://www.legifrance.gouv.fr/
être justifiés soit par le risque anesthésique lié au patient, loda/id/JORFTEXT000000549818/.
soit par celui lié à la chirurgie. [5] De Hert S, Staender S, Fritsch G, Hinkelbein J, Afshari A, Bettelli G, et al.
• La consultation d’anesthésie permet de définir la Pre-operative evaluation of adults undergoing elective noncardiac sur-
meilleure stratégie anesthésique en prenant en compte les gery: updated guideline from the European Society of Anaesthesiology.
Eur J Anaesthesiol 2018;35(6):407–65.
antécédents, le type de chirurgie et le souhait du patient.
[6] Blitz JD, Kendale SM, Jain SK, Cuff GE, Kim JT, Rosenberg AD.
• L’informatisation du dossier permet d’optimiser la prise Preoperative evaluation clinic visit is associated with decreased risk of
en charge et d’améliorer la sécurité du patient en ren- in-hospital postoperative mortality. Anesthesiology 2016;125(2):280–94.
dant accessible les informations entre équipes au sein d’un [7] Loi no 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la
dossier partagé. qualité du système de santé. NOR : MESX0100092L. JORF du 5 mars
• La possibilité de réaliser des téléconsultations en anes- 2002. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT0000002270
15/.
thésie depuis la pandémie de Covid-19 a entraîné une
[8] Haute Autorité de santé. Coopération entre anesthésistes-réanimateurs
modification de nos pratiques ; elle fait l’objet d’une régle- et chirurgien : mieux travailler en équipe. Outil d’amélioration des pra-
mentation et doit être un outil d’amélioration et non un tiques professionnelles; 2016, https://www.has-sante.fr/jcms/c 2587220/
frein à la réalisation d’une consultation. fr/cooperation-entre-anesthesistes-reanimateurs-et-chirurgiens-mieux-
travailler-en-equipe.

14 EMC - Anesthésie-Réanimation
Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique  36-375-A-05

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V. Reubrecht (vanessa.reubrecht@aphp.fr).
Département d’anesthésie réanimation, Hôpital Pitié-Salpétrière AP–HP ; Sorbonne Université, 47–83, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Reubrecht V. Consultation d’anesthésie et visite préanesthésique. EMC - Anesthésie-Réanimation
2023;43(2):1-16 [Article 36-375-A-05].

16 EMC - Anesthésie-Réanimation
 36-860-D-10

Nutrition en réanimation
E. Pardo, F. Verdonk

Résumé : La nutrition artificielle en réanimation permet d’apporter des nutriments aux patients inca-
pables de s’alimenter ou dont les apports sont insuffisants. La constitution d’une dette énergétique et,
surtout, protidique favorise le développement de séquelles fonctionnelles qui peuvent perdurer au-delà du
séjour à l’hôpital. Une évaluation précise du statut nutritionnel doit être réalisée à l’admission en soins
critiques à l’aide d’outils tels que les critères de la Global Leadership Initiative on Malnutrition (GLIM)
et les scores Nutrition Risk Screening 2002 (NRS-2002) et Nutrition Risk in the Critically ill (NUTRIC).
Les besoins énergétiques quotidiens doivent être mesurés par calorimétrie indirecte pour déterminer la
dépense énergétique de repos (DER). Les apports sont inférieurs à 70 % de la DER à la phase aiguë puis
atteignent 100 % à partir de J4. En l’absence de cette technologie, les cibles calorique et protidique sont
estimées respectivement à 12-25 kcal/kg/j et 1,3 g/kg/j. Chez le sujet obèse, une nutrition isocalorique
et hyperprotidique est prescrite à partir du poids ajusté. En cas d’apports oraux impossibles, une nutrition
entérale précoce (< 48 heures) doit être instaurée en première intention. S’il existe une contre-indication
à l’entérale, une parentérale précoce peut être prescrite chez les patients à risque nutritionnel (NUTRIC
> 5). En cas d’intolérance digestive haute, l’introduction d’un traitement prokinétique est indiquée après
vérification de l’intervalle QT. En cas d’apports insuffisants (< 60 % de la cible), une nutrition parentérale
complémentaire est administrée entre J4-J7. Enfin, un apport protidique adéquat associé à de l’exercice
physique permet d’améliorer le pronostic fonctionnel des patients à la sortie de réanimation.
© 2022 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Nutrition artificielle ; Entérale ; Parentérale ; Syndrome de renutrition ; Faiblesse musculaire

Plan s’intègre à part entière dans le parcours patient dans le cadre


d’une médecine individualisée. En effet, les besoins énergétiques
■ Introduction 1 et protidiques sont propres à chaque patient selon son âge,
sa morphologie, ses antécédents et la sévérité de l’atteinte le
■ Physiopathologie de l’agression 1 menant en réanimation. La non-atteinte des besoins énergé-
■ Évaluation nutritionnelle initiale 2 tiques est associée, dans de multiples études rétrospectives, à une
■ Apports caloriques et protidiques 2 morbi-mortalité plus élevée [1, 2] . Au-delà du pronostic assombri,
Apport calorique 2 un apport protidique insuffisant participe à la perte de masse
Apport protidique 3 musculaire en réanimation et à la constitution de séquelles fonc-

tionnelles invalidantes pouvant perdurer au long cours [3–5] . La
Voies et protocoles d’administration 4
surnutrition semble tout autant délétère pour les patients, avec
Nutrition orale 4
une augmentation des complications infectieuses et métabo-
Nutrition entérale 4
liques [6] . La prescription nutritionnelle en réanimation repose
Nutrition parentérale 4
sur la maîtrise de la physiologie d’adaptation à l’agression, sur
■ Vitamines et éléments traces 5 l’évaluation préalable de l’état nutritionnel du patient, sur le
■ Gestion des intolérances digestives 5 choix des modalités pratiques (délai, voie, quantité et type)
■ Syndrome de renutrition inappropriée 6 d’administration et sur la gestion des complications.
■ Situations spécifiques 6
Pancréatite aiguë
Insuffisance rénale et épuration extrarénale
6
7  Physiopathologie de l’agression
Covid-19 7
L’organisme agressé réorganise ses priorités métaboliques pour
■ Conclusion 7 maintenir les fonctions vitales. Ce mécanisme de défense
inclut une réponse neurohormonale associée à une circula-
tion systémique de cytokines pro-inflammatoires déclenchée par
l’activation cellulaire des macrophages, monocytes et neutro-
 Introduction philes.
L’état d’hypercatabolisme systémique va nécessiter la
La nutrition artificielle en soins critiques permet d’apporter mobilisation rapide de substrats endogènes pour subvenir à
des nutriments aux patients incapables de s’alimenter ou dont l’augmentation de la dépense énergétique. Les réserves de gly-
les apports caloriques sont insuffisants. Cette thérapeutique cogène s’épuisent en quelques heures sous la stimulation des

EMC - Anesthésie-Réanimation 1
Volume 43 > n◦ 2 > avril 2023
36-860-D-10  Nutrition en réanimation

Réponse neuroendocrine Figure 1. Physiopathologie de l’agression. TNF-


 Glucagon
Agression
Réponse inflammatoire ␣ : tumor necrosis factor α ; IL-1, 2, 6 : interleukine
 Catécholamines
(trauma, brûlure,
TNF-α, IL-1, 2, 6, IFN-γ 1, 2, 6 ; IFN-␥ : interféron ␥ ; AA : acides aminés.
sepsis, chirurgie)
 Cortisol

Lactate

Tissu adipeux Foie Muscle

 Protéolyse

 Lipolyse

 Glycogénolyse AA glucoformateurs
(alanine, glutamine)
Glycérol Néoglucogenèse
AA cétogènes
Acides gras  Cétogenèse
(leucine, lysine)

Production
CORPS CÉTONIQUES énergétique GLUCOSE Hyperglycémie
endogène
Insulinorésistance

hormones cataboliques comme le glucagon, les catécholamines • Score Nutritional Risk Screening-2002 développé par Kondrup
endogènes et le cortisol. De plus, il est fréquent d’observer et al. [13] . Un score supérieur ou égal à 3 traduit un haut risque
chez les patients en soins critiques la survenue d’une insuli- nutritionnel. Cependant, la limite majeure réside dans le fait
norésistance et d’une hyperglycémie ; une situation obligeant que la seule présence d’un score APACHE II supérieur à 10
l’organisme à puiser dans ses réserves lipidiques et musculaires (majorité des patients de réanimation) rende le patient à risque
via la néoglucogenèse (Fig. 1). Le catabolisme musculaire intensif (Tableau 1) ;
va rapidement dépasser les capacités anaboliques de synthèse • le score Nutrition Risk in the Critically ill (NUTRIC) déve-
protéiques et provoquer une altération quantitative et qualitative loppé par Heyland et al. [14] . Sa version modifiée, n’incluant
de la masse musculaire. Associé à une immobilisation prolongée pas le dosage de l’interleukine 6 (IL-6), définit un haut risque
et à l’administration de drogues de réanimation, ce phénomène se nutritionnel chez les patients ayant un score supérieur à 4
traduit par le développement d’une faiblesse musculaire acquise (Tableau 2).
en réanimation [7–9] . Les techniques d’imagerie et de bio-impédancemétrie per-
Dans ce contexte d’hypercatabolisme exacerbé, il semble mettent d’estimer la masse musculaire du patient de réani-
donc essentiel d’instaurer précocement un support nutritionnel, mation [15] . Ces informations participent à la définition de
notamment protidique, pour répondre aux besoins énergétiques dénutrition par les critères GLIM. L’analyse des coupes tomodensi-
et optimiser la récupération fonctionnelle des patients agressés [10] . tométriques transversales abdominales au niveau de la 3e vertèbre
lombaire est un outil reconnu pour identifier quantitativement
la masse musculaire [16] . L’utilisation répétée de l’échographie
musculaire, au niveau du quadriceps, offre l’avantage d’être dis-
 Évaluation nutritionnelle ponible au lit du malade sans aucun effet irradiant [7, 17] . Encore
majoritairement réservées à la recherche clinique, ces outils pour-
initiale raient voir leur utilisation s’étendre dans le futur, pour guider les
apports nutritionnels, notamment protidiques, chez les patients
L’évaluation de l’état nutritionnel à l’admission en réanimation à risque nutritionnel.
permet de cibler les patients à risque pouvant bénéficier d’une
nutrition artificielle optimisée.

 Apports caloriques
L’indice de masse corporelle (IMC) constitue un moyen simple
et rapide de dépistage d’un état de dénutrition. Les recomman-
dations de la Haute Autorité de santé (HAS) (2019) définissent la
dénutrition par l’association :
et protidiques
• d’un critère phénotypique : IMC inférieur à 18,5 kg/m2 (infé- Apport calorique
rieur à 21 kg/m2 chez le sujet de plus de 70 ans), réduction de
la masse ou fonction musculaire, perte de poids supérieure ou Pour s’adapter aux variations quotidiennes des besoins éner-
égale à 5 % en 1 mois, ou supérieure ou égale à 10 % en 6 mois ; gétiques durant le séjour en réanimation, les groupes d’experts
• d’un critère étiologique : réduction de la prise alimentaire, recommandent d’utiliser la calorimétrie [18] . Ce gold standard éva-
absorption réduite ou situation d’agression liée à une patho- lue la dépense énergétique (DE) de repos grâce à l’analyse des
logie aiguë ou chronique [11] . échanges gazeux (consommation d’oxygène [VO2 ] et production
Ces critères s’inspirent de ceux énoncés par la Global Leader- de dioxyde de carbone [VCO2 ]) via une application simplifiée de
ship Initiative on Malnutrition (GLIM) regroupant les principales la formule de Weir [19] . Cette technique présente toutefois plu-
sociétés savantes de nutrition [12] . sieurs limites relatives à son utilisation (la mesure doit s’effectuer
Les sociétés savantes recommandent l’utilisation de scores pour dans les conditions suivantes : fraction inspirée en oxygène [FiO2 ]
évaluer la sévérité du risque nutritionnel : inférieure à 60 %, patient en état « stable », pas de variation

2 EMC - Anesthésie-Réanimation
Nutrition en réanimation  36-860-D-10

Tableau 1.
Score Nutrition Risk Screening-2002 (d’après [13] ).
Altération du statut nutritionnel Sévérité de la maladie
Absent État nutritionnel normal Absent
Score 0 Score 0
Légère Perte de poids > 5 % en 3 mois Mineur Fracture du fémur
Score 1 Ingesta < à 50-75 % des besoins habituels Score 1 BPCO
Diabète
REE
Modérée Perte de poids > 5 % en 2 mois Modéré Pneumonie sévère
Score 2 IMC entre 18,5 et 20,5 + ingesta : 25 et Score 2 Chirurgie digestive majeure
60 % des besoins habituels Hémopathie maligne
Sévère Perte de poids > 5 % en 1 mois Sévère Patient de réanimation (APACHE > 10)
Score 3 Score 3

IMC : indice de masse corporelle ; BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive ; REE : resting energy expenditure.

du stock de CO2 ) et un coût élevé qui restreignent sa diffu- Tableau 2.


sion en pratique clinique courante. En absence de module de Score Nutrition Risk in the Critically ill (d’après [14] ).
calorimétrie, la dépense énergétique peut être estimée à partir Variable Intervalle Points
de la VCO2 : resting energy expenditure (REE) = 8,2 × VCO2 . Cette
formule simplifiée permettait une estimation plus précise que Âge < 50 0
l’utilisation d’équations prédictives, connues pour leurs précisions 50 à < 75 1
médiocres [20, 21] . ≥ 75 2
À partir de l’estimation de la dépense énergétique (DE), APACHE II < 15 0
L’European Society Parenteral Enteral Nutrition (ESPEN) recom-
15 à < 20 1
mande l’administration d’une nutrition hypocalorique dans la
phase précoce après admission en réanimation (< 70 % de 20 à 28 2
la DE) puis d’augmenter progressivement jusqu’à 100 % après ≥ 28 3
3 jours [18, 22] . SOFA <6 0
L’utilisation de la calorimétrie indirecte pour guider la pres- 6 à < 10 1
cription nutritionnelle en réanimation a fait l’objet de plusieurs
≥ 10 2
essais cliniques ces dernières années. L’étude princeps TICACOS
publiée en 2011 mettait en évidence une tendance forte mais Nombre de comorbidités 0à1 0
non significative de l’utilisation du calorimètre sur la réduction ≥2 1
de la mortalité hospitalière et une diminution significative de Nombre de jours d’hospitalisation 0 à <1 0
la durée de séjour et de ventilation mécanique [23] . Ces résultats avant admission en réanimation ≥1 1
encourageants n’étaient toutefois pas retrouvés dans deux essais
randomisés contrôlés récents [24, 25] . Une méta-analyse publiée SOFA : Sepsis-related Organ Failure Assessment.
en 2021, incluant huit essais cliniques et 991 patients de réani-
mation, objectivait un effet significatif sur la mortalité à court
(Na3 C6 H5 O7 ) pour assurer une anticoagulation régionale des
terme [26] .
circuits de dialyse correspond à un apport de 0,59 kcal/mmol,
Récemment, le bénéfice d’une nutrition dite « trophique » ou
soit 3 kcal/g. Cet apport représentait une proportion de l’apport
« permissive » a été évalué dans des essais randomisés contrôlés.
calorique total mesuré entre 6 et 18 % dans une étude par Bousie
Aucune différence n’était retrouvée entre les patients recevant une
et al. incluant 146 patients ventilés [37] .
nutrition normocalorique comparée à une hypocalorique [27, 28] .
Un effet délétère sur la mortalité d’un apport calorique ini-
tial plus élevé était même objectivé dans deux études [29, 30] . Apport protidique
Ces données ont encouragé la société américaine de nutrition
à diminuer, en 2021, la cible énergétique en réanimation à 12- Les sociétés savantes s’accordent sur une cible protéique à
25 kcal/kg/j pendant la première semaine de réanimation plutôt 1,3 g/kg/j à atteindre progressivement [18] . Le patient de réani-
que 25-30 kcal/kg/j auparavant [31, 32] . Cette cible peut augmen- mation présente un métabolisme protidique altéré comparé aux
ter à 25-30 kcal/kg/j après stabilisation de l’état clinique et début adultes sains ; malgré une digestion et une absorption conservées
de la phase de réhabilitation [33, 34] . Afin de faciliter l’atteinte des des acides aminés, la capacité de l’organisme à métaboliser ces sub-
cibles énergétiques chez les patients de réanimation, l’utilisation strats pour la synthèse musculaire est altérée [38] . C’est pourquoi
de solutions entérales concentrées (hypercaloriques et hyperpro- les apports protidiques doivent être instaurés progressivement et
tidiques) a montré un avantage significatif sur la quantité de les cibles doivent être adaptées au fil du séjour en réanimation.
calories administrées dans un essai randomisé contrôlé récent sans Le bénéfice de l’atteinte des objectifs protidiques fait encore
toutefois montrer un effet sur la mortalité [35] . l’objet de résultats contradictoires dans la littérature. Plusieurs
Concernant les sujets obèses, les experts suggèrent, en l’absence études observationnelles ont rapporté un meilleur devenir chez les
de calorimétrie indirecte, de prescrire un régime isocalorique et patients dont les objectifs protéiques étaient atteints [39–41] . Cepen-
hyperprotidique en calculant les apports à partir du poids ajusté dant, ces résultats n’étaient pas retrouvés dans la majorité des
(incluant le poids idéal pour un IMC à 25 kg/m2 ) [18, 36] . essais randomisés contrôlés réalisés sur ce sujet. Une méta-analyse
Poids idéal = 2,2 × IMC + 3,5 × IMC × (taille (m)–1,5). publiée en 2021, incluant 19 essais et 1731 patients, ne retrouvait
Poids idéal (IMC = 25) = 55 + 87,5 × (taille (m)–1,5). aucun bénéfice significatif d’un régime hyperprotidique sur la sur-
Poids ajusté = poids idéal + (0,33 × (poids réel–poids idéal). vie, la durée de séjour ou de ventilation mécanique des patients
Une attention toute particulière doit être portée sur de réanimation. Toutefois, ce régime était associé de manière
l’administration de calories non liées à la nutrition artifi- significative à une diminution de la perte musculaire chez les
cielle. En effet, l’administration de propofol, stabilisé au sein patients de cinq essais cliniques évaluant ce critère [42, 43] . Ce signal
d’une émulsion lipidique à base d’huile de soja, correspond à un positif pourrait faire évaluer les pratiques méthodologiques en
apport de 1,1 kcal/ml. De même, l’utilisation de citrate trisodique faveur de l’utilisation de critères de jugement fonctionnels (force

EMC - Anesthésie-Réanimation 3
36-860-D-10  Nutrition en réanimation

musculaire, test de marche, reprise de l’autonomie, qualité de vie) Concernant les patients en choc, l’étude NUTRIREA ne retrou-
pour les études évaluant une intervention nutritionnelle [44] . vait pas de différence significative entre les patients recevant
Une des hypothèses pouvant expliquer l’absence d’effet sur une entérale ou une parentérale précoce. Toutefois, il était
la morbi-mortalité pourrait être l’importance de la cinétique reporté davantage de complications digestives (vomissements,
d’introduction de la supplémentation protidique. En effet, diarrhées, ischémies mésentériques et pseudo-obstruction colique
l’administration trop précoce d’acides aminés pourrait inhiber aiguë idiopathique) dans le groupe recevant une nutrition enté-
les capacités d’autophagie, phénomène physiologique de défense rale [64, 65] . Dans une étude multicentrique internationale publiée
garantissant l’intégrité cellulaire via l’élimination des protéines et en 2022 conduite chez 626 patients ventilés sous amines, aucun
organelles endommagées [45] . C’est ce que l’étude PROTINVENT, bénéfice de l’entérale précoce n’était retrouvé dans une analyse
publiée par Koekkoek et al., semblait indiquer : les patients multivariée ajustée sur la gravité initiale [66] . Confronté à ces
évoluant le plus favorablement étaient ceux recevant moins données, il semble adapté de reporter l’instauration d’entérale pré-
de 0,8 g/kg/j avant J3 et plus de 0,8 g/kg/j par la suite [46] . coce durant les phases d’instabilité hémodynamique majeure ou
L’essai randomisé contrôlé EFFORT, qui a pour objectif d’inclure lorsque les doses d’amines sont croissantes (> 0,3-0,4 ␮g/kg/min)
4000 patients de réanimation, devrait permettre d’avancer sur la et d’administrer progressivement une entérale hypocalorique
question [47] . chez les patients stabilisés en surveillant quotidiennement la pré-
Un apport protidique adéquat doit être associé à une mobili- sence de signes évocateurs de complications digestives [67, 68] .
sation précoce et à de l’exercice physique. Cet effet synergique L’administration continue de nutrition entérale constitue la
est connu depuis plusieurs dizaines d’années chez les volontaires forme d’administration la plus répandue et celle soutenue par les
sains [48] . En réanimation, il a été montré qu’une mobilisation sociétés savantes [18] . Elle est garantie par une pompe électrique
et un exercice physique précoce permettait de réduire la durée et son objectif est fixé sur 24 heures. Cependant, la sécurité d’une
de séjour en réanimation, d’améliorer l’autonomie fonctionnelle administration intermittente ou séquentielle a été démontrée
à la sortie de l’hôpital et de préserver la masse musculaire des dans la littérature [69–71] . Son bénéfice sur la synthèse musculaire
patients [49, 50] . Un essai randomisé contrôlé publié en 2021 étu- par activation séquentielle de la voie de signalisation anabolique
diait l’association d’un régime hyperprotidique à un exercice mammalian target of rapamycin (mTOR) fait l’objet d’une piste de
physique précoce comparé à des soins standard chez 181 patients. recherche pertinente [72, 73] . Un essai randomisé contrôlé récent,
Il était observé, dans le groupe intervention, une augmentation conduit chez 121 patients ventilés, n’objectivait aucun bénéfice
significative de la composante physique du score de qualité de vie de l’entérale intermittente sur la masse musculaire, mais notait
Short Form-36 (SF-36) et une meilleure survie [51] . Ces observa- toutefois une meilleure atteinte des cibles caloriques et proti-
tions vont devoir être confirmées par l’essai NEXIS, présentant un diques [74] .
design similaire, actuellement dans la phase de recrutement [52] . Par ailleurs, le recours à des solutions de nutrition entérale
concentrées (1,5-2 kcal/ml) peut améliorer l’atteinte des cibles
énergétiques tout en limitant les volumes administrés. En effet,
 Voies et protocoles les patients recevant une solution concentrée (1,5 kcal/ml versus
d’administration 1 kcal/ml) présentaient des apports caloriques moyens significa-
tivement supérieurs dans un essai randomisé contrôlé publié en
Nutrition orale 2018 [35] .

La voie orale, lorsqu’elle est disponible, doit être utilisée en


première intention en réanimation [18] . Il est essentiel, en cas
Nutrition parentérale
de dénutrition préalable, d’évaluer les ingesta pour s’assurer de En cas de contre-indication à l’entérale, une nutrition parenté-
l’atteinte des cibles caloriques et protidiques. L’implication des rale peut être instaurée entre 3 et 7 jours après l’admission, sauf
diététiciens en réanimation est cruciale pour améliorer les pra- en cas de dénutrition sévère où elle est introduite précocement
tiques nutritionnelles [53, 54] . Avant l’initiation d’apports oraux, et progressivement. La prescription de nutrition parentérale chez
l’évaluation de la présence de troubles de la déglutition est néces- des patients présentant une contre-indication à l’entérale n’avait
saire. Une dysphagie après extubation peut atteindre 20 % des pas d’effet significatif sur la morbi-mortalité et, possiblement, un
patients de réanimation et est associée à une surmortalité à effet bénéfique sur la durée de ventilation mécanique dans une
1 an [55, 56] . L’adaptation des apports et des textures doit être réa- étude de Doig et al. [75] . Deux essais randomisés contrôlés ont per-
lisée en fonction des capacités de mastication/déglutition et de la mis de démontrer que la nutrition parentérale en soins critiques,
tolérance digestive des patients. En cas d’apports apports oraux lorsqu’elle était prescrite selon les recommandations, ne présen-
insuffisants, l’administration d’une nutrition enrichie et de com- tait pas un surrisque infectieux ou une surmortalité [64, 76] . Devant
pléments nutritionnels oraux est conseillée [57] . ces données, les recommandations américaines, mises à jour en
2022, autorisent la prescription parentérale, au même titre que
Nutrition entérale l’entérale, en première intention pendant la première semaine de
réanimation [31] .
La nutrition entérale est la voie recommandée en première Les micronutriments sont essentiels pour le métabolisme des
intention quand les apports nutritionnels oraux sont insuffisants macronutriments, le maintien des fonctions immunitaires, anti-
ou impossibles. Cette voie considérée comme plus physiologique oxydantes et endocriniennes. Pour des raisons de stabilité, les
permettrait de lutter contre l’atrophie villositaire, de maintenir solutions commerciales de nutrition parentérale sont dépour-
la fonction immunitaire intestinale et de lutter contre la surve- vues de micronutriments. C’est pourquoi, en cas de nutrition
nue de translocation bactérienne [58, 59] . L’absence de nutriments parentérale totale, la prescription complémentaire de vitamines
intraluminaux provoque une atrophie villositaire majeure liée à et d’éléments traces est indispensable [18] .
l’inhibition de la prolifération cellulaire et l’expression diminuée Lorsque les cibles énergétiques et protidiques ne sont pas
de E-cadhérine [60] . L’altération des cellules de Paneth et du tissu atteintes (< 60 %) avec la nutrition entérale, une parentérale
lymphoïde associé au tube digestif (GALT), essentiels à la fonction complémentaire peut être administrée entre J4 et J7 du séjour en
immunitaire du tube digestif, majore le risque de translocation réanimation [18, 34] . Une administration plus précoce de parenté-
bactérienne [61] . De plus, la nutrition entérale a montré son béné- rale complémentaire n’a pas démontré de bénéfice [77] . Une des
fice sur le maintien de la motilité, sur la prévention de la dysbiose études les plus récentes sur le sujet, publiée par Berger et al., obser-
et de l’inflammation intestinale [62] . vait, dans le groupe nutrition parentérale complémentaire, un
Selon les dernières recommandations internationales, elle doit bénéfice sur la fonction immunitaire et la régulation de la réponse
être mise en place précocement, dans les premières 48 heures après inflammatoire systémique [78] .
admission en réanimation, en l’absence de contre-indications : Les émulsions lipidiques contenues dans les poches de nutri-
fistule digestive de haut débit, occlusion intestinale, ischémie tion parentérale permettent une provision calorique élevée dans
digestive, hémorragie digestive active, choc/hypoxémie/acidose un volume de perfusion faible et un apport en acides gras essen-
incontrôlé(e), syndrome du compartiment abdominal [63] . tiels non synthétisés par l’organisme. Malgré un niveau de preuve

4 EMC - Anesthésie-Réanimation
Nutrition en réanimation  36-860-D-10

Phase aiguë Phase post-aiguë Réhabilitation


J1-J4 J5-J7 > J7

< 70 % DER (calorimétrie) Protéines : 1,5-2 g/kg/jour


12-25 kcal/kg/jour Protéines : 1,3 g/kg/jour
Mobilisation précoce
100 % DER
10 kcal/kg si risque SRI Exercice physique

Nutrition entérale NE Nutrition parentérale

Glucose

Lipide
HP/HC

AA
2kcal/ml
Parentérale précoce possible
En 1re intention
si dénutrition préalable
Dans les 24-48 heures après admission
Parentérale complémentaire
Fibres (gomme guar ) si diarrhées à J4-J7 si cible < 60 %
HP/HC pour atteinte des cibles
Supplémentation vitaminique
Semi-élémentaire (malabsorption) (B1+++, B6, PP)
Prokinétiques si intolérance digestive Émulsions lipidiques
(érythromycine) (huile de poisson)
SNG en 1re intention Glutamine si pancréatite
SNJ si intolérance malgré prokinétiques aiguë

CONTRE-INDICATIONS NE PRÉVENIR LE SRI

Fistule digestive de haut débit,


Supplémentation P, Mg, K
occlusion intestinale, ischémie
vitamine B1
digestive, hémorragie digestive active,
Augmentation progressive
choc/hypoxémie/acidose incontrôlé(e),
Surveillance ionogramme + ECG
syndrome du compartiment abdominal

Figure 2. Synthèse de la prise en charge nutritionnelle en réanimation. DER : dépense énergétique au repos ; SRI : syndrome de renutrition inappropriée ;
HP/HC : heures pleines/heures creuses ; SNG : sonde nasogastrique ; SNJ : sonde nasojéjunale ; NE : nutrition entérale ; K : potassium ; Mg : magnésium ;
P : phosphore ; ECG : électrocardiogramme ; AA : acides aminés (adaptée d’après une figure Servier medical Art par Servier, sous licence Creative Commons
Attribution 3.0 Unported License).

limité, on peut résumer schématiquement les différentes émul- ments (zinc, sélénium et cuivre) et aux vitamines hydrosolubles
sions selon leur type d’acide gras : les oméga 6 (huile de soja) (vitamines C, B1 , B9 ) [81] .
sont plutôt pro-inflammatoire, les oméga 9 (huile d’olive) plus La vitamine B1 ou thiamine est essentielle au métabolisme
neutres sur le plan immunitaire et les oméga 3 (huile de poisson) des carbohydrates. Les carences en B1 sont fréquentes en réani-
possèdent probablement un effet intrinsèque anti-inflammatoire. mation, notamment chez les patients alcooliques, cancéreux ou
Chez les patients recevant une nutrition parentérale, la prescrip- lors de syndromes de renutrition inappropriée. Elles peuvent être
tion d’une émulsion lipidique à base d’huile de poisson, comparée responsables de symptômes neurologiques allant d’une confu-
à une émulsion de première génération de type soja, semble sion à la constitution d’encéphalopathies sévères. Chez tous les
présenter un bénéfice sur la morbi-mortalité des patients de réani- patients admis en réanimation, une dose en intraveineuse de 100
mation [79] . Son administration est d’ailleurs recommandée par à 300 mg/j doit être administrée pour au moins 4 jours.
l’ESPEN [39] (Fig. 2).

 Gestion des intolérances


 Vitamines et éléments traces
digestives
Pour assurer un métabolisme adéquat des macronutriments,
l’organisme a besoin d’apports suffisants en vitamines et La survenue de dysfonction gastro-intestinale est fréquente en
d’éléments traces, souvent regroupés sous le terme de micronu- réanimation et associée à une morbi-mortalité plus élevée [82, 83] .
triments. La prescription quotidienne en micronutriments doit Au quotidien, elle peut se traduire par la survenue d’intolérance
prendre en compte les déficits préexistants liés au statut nutri- digestive haute qui limite l’atteinte des cibles énergétiques et
tionnel du patient et/ou de ses comorbidités, la sévérité de protidiques. Dans ce cas, la prise en charge initiale consiste
l’inflammation associée à la pathologie aiguë en cours, ainsi que le en l’administration de prokinétiques, tels que l’érythromycine
type et la quantité de nutrition artificielle prescrite. La plupart des (100-250 mg × 3 par jour), le métoclopramide (10 mg × 2-3
solutions commerciales proposant des associations de vitamines par jour) ou l’association des deux [18] . Cette prescription doit
et d’éléments traces permettent d’atteindre les cibles quotidiennes être réalisée après évaluation de l’intervalle QT afin d’éviter la
des patients hospitalisés. Toutefois, des situations cliniques spé- survenue de complications rythmiques. En cas d’intolérance
cifiques (brûlés, dialyse, malabsorption) peuvent nécessiter des digestive résistante à l’administration de prokinétiques, le site
apports individuels spécifiques. de délivrance post-pylorique par l’intermédiaire d’une sonde
Des recommandations européennes publiées en 2022 per- naso-jéjunale peut permettre de délivrer la nutrition entérale
mettent de guider nos prescriptions quotidiennes [80] . Pour des au-delà de l’angle de Treitz.
raisons de stabilité, les poches de nutrition parentérale sont Le monitoring des volumes résiduels gastriques ne fait plus
dépourvues de micronutriments ; un apport quotidien doit donc partie des pratiques recommandées depuis un essai randomisé
être administré en complément des solutions commerciales. De de non-infériorité rapportant l’absence d’augmentation de pneu-
plus, chez les patients de réanimation dialysés, en raison des pertes mopathies acquises sous ventilation mécanique lorsque cette
dans l’effluent, une attention doit être portée aux micronutri- surveillance n’était pas réalisée [33, 84] . Des approches non invasives

EMC - Anesthésie-Réanimation 5
36-860-D-10  Nutrition en réanimation

Tableau 3.
Critères identifiant les patients à risque de développer un syndrome de renutrition inappropriée [90] .
Risque modéré : 2 critères de risque Risque important : 1 critère de risque
nécessaires nécessaire
IMC 16-18,5 kg/m2 < 16 kg/m2
Perte de poids 5 % en 1 mois 7,5 % en 3 mois ou >10 % en 6 mois
Apport calorique Prise orale nulle ou négligeable pendant Prise orale nulle ou négligeable pendant
5-6 jours plus de 7 jours
Ou < 75 % des besoins énergétiques estimés Ou < 50 % des besoins énergétiques
pendant plus de 7 jours au cours d’une estimés pendant plus de 5 jours au cours
pathologie aiguë d’une pathologie aiguë
Ou < 75 % des besoins énergétiques estimés Ou < 50 % des besoins énergétiques
pendant plus de 1 mois estimés pendant plus de 1 mois
Concentrations sériques anormales Concentration basse ou supplémentation Concentration très basse ou
(K, Mg, P) avant renutrition modérée récente supplémentation récente importante ou
répétée
Perte de graisse sous-cutanée Perte modérée Perte grave
Perte de la masse musculaire Perte légère ou modérée Perte grave
Comorbidités à risque élevé Maladie modérée Maladie grave
Sida, alcoolisme chronique, toxicomanie,
dysphagie et dysmotilité œsophagienne,
troubles du comportement alimentaire,
hyperemesis gravidarum ou vomissements
prolongés, stress important, contexte
périopératoire, malabsorption, cancer,
pathologie neurologique avancée, chirurgie
bariatrique, jeûne prolongé, malnutrition
protéique, contexte social (SDF, réfugiés)

IMC : indice de masse corporelle ; K : potassium ; Mg : magnésium ; P : phosphore ; sida : syndrome d’immunodéficience acquise ; SDF : sans domicile fixe.

font actuellement l’objet de travaux de recherche [85, 86] . La mesure magnésium) est obligatoire, de même que la réalisation régulière
échographique de l’aire antrale constitue une pratique reconnue d’électrocardiogrammes [90] .
pour évaluer la vidange gastrique en anesthésie [87] . Une aire supé-
rieure à 710 mm2 pourrait prédire la survenue de régurgitation en
réanimation [88] .
La survenue d’une diarrhée (2-3 selles liquides/j ou > 250 g/j)
 Situations spécifiques
chez le patient de réanimation est fréquente, entre 15 et 38 %,
mais ne constitue pas une contre-indication au maintien de la
Pancréatite aiguë
nutrition entérale. Après avoir éliminé une cause organique (colite Les patients de réanimation admis pour pancréatite aiguë sévère
à Clostridium difficile, fécalome, ischémie mésentérique), il est sont à haut risque nutritionnel compte tenu du catabolisme exa-
recommandé d’utiliser une solution enrichie en fibres contenant cerbé lié à cette pathologie et à la symptomatologie digestive
de la gomme de guar, fibre végétale soluble et acalorique [33, 34] . majeure limitant les apports. De plus, une atteinte spécifique de la
barrière intestinale est décrite dans la littérature et expose les sujets
à des translocations bactériennes et/ou à des infections de coulées
 Syndrome de renutrition de nécrose [91] . Des recommandations nutritionnelles françaises
et européennes concernant la pancréatite aiguë permettent de
inappropriée guider nos pratiques [92, 93] .
Allant à l’encontre des croyances anciennes encourageant la
Le syndrome de renutrition est défini par la survenue de mise à jeun de tous les patients souffrant de cette pathologie,
perturbations métaboliques et électrolytiques sévères (hypophos- les recommandations actuelles suggèrent une réintroduction pré-
phatémie, hypokaliémie, hypomagnésémie) à la suite de la coce d’une nutrition orale, pauvre en lipides, dès que celle-ci est
réintroduction et/ou de l’augmentation des apports caloriques cliniquement tolérée [92] . En cas d’impossibilité d’introduire une
(oraux, entéraux ou parentéraux) après une période de diminu- nutrition orale, une nutrition entérale peut être instaurée entre
tion ou d’absence d’apport calorique. Cette entité peut conduire 24 et 72 heures après l’admission [94] . Plusieurs méta-analyses ont
à des manifestations cliniques (insuffisance cardiaque, aryth- démontré un bénéfice de l’entérale comparé à la parentérale sur
mie, insuffisance respiratoire) pouvant aller jusqu’à un tableau la mortalité globale, la survenue de complications infectieuses
de défaillance multiviscérale. En effet, une hypophosphatémie ou sur la sévérité des défaillances d’organe [95, 96] . Une formule
après introduction de nutrition entérale survenait chez 40 % des entérale polymérique standard administrée par sonde nasogas-
patients dans une cohorte de 213 patients de réanimation chirur- trique est privilégiée en première intention, il n’existe pas de
gicale [89] . bénéfice démontré des formules semi-élémentaires. La voie naso-
Le Tableau 3 résume les critères prédictifs de la survenue jéjunale peut être une alternative en cas d’intolérance digestive
d’un syndrome de renutrition inappropriée (SRI). Chez ces sévère ou lors de la prise en charge mini-invasive des coulées de
patients, il convient d’administrer une supplémentation préa- nécrose. La pression abdominale fait partie des éléments de sur-
lable en magnésium, phosphore et potassium en fonction de veillance quotidienne dans cette pathologie. En cas de syndrome
leurs taux à l’admission. La nutrition artificielle doit être débu- du compartiment abdominal avéré, l’entérale est suspendue au
tée à 10 kcal/kg/j et être majorée par paliers de 30 % tous les 1 à profit d’une nutrition parentérale.
2 jours. En cas de troubles ioniques réfractaires à des recharges En cas d’intolérance à l’entérale, une parentérale est instau-
fréquentes, il peut être décidé de diminuer les apports ou de rée pour atteindre les cibles caloriques et protidiques. Lorsqu’une
les suspendre temporairement. L’administration de calories non nutrition parentérale totale est prescrite, la prescription de L-
nutritionnelles (glucose, propofol) est à prendre en compte. Une glutamine par voie intraveineuse, à la dose de 0,20 g/kg/j, est
surveillance quotidienne du ionogramme (avec phosphore et conseillée [97] .

6 EMC - Anesthésie-Réanimation
Nutrition en réanimation  36-860-D-10

Insuffisance rénale et épuration extrarénale en salle de médecine ou de chirurgie. La protocolisation de la prise


en charge nutritionnelle, la réalisation de transmissions nutri-
En réanimation, l’insuffisance rénale aiguë affecte jusqu’à 60 % tionnelles ciblées et l’implication des diététiciens dans les services
des patients [98] . Celle-ci provoque des modifications physiolo- sont des aspects essentiels garantissant la réussite de l’intervention
giques comme l’induction d’un état pro-inflammatoire exacerbé nutritionnelle jusqu’au retour à domicile des patients [112] .
associé à une altération profonde de la régulation hormonale
et à une inhibition du système antioxydant. De plus, la dia-
lyse expose les patients à des pertes majeures d’acides aminés, Déclaration de liens d’intérêts : E. Pardo : Nestle Health Science (Bourse de
d’oligoéléments et des vitamines hydrosolubles. Ces changements recherche SFNCM), Fresenius Kabi (Formations, Congrès), Nutricia (Congrès).
cliniques et métaboliques sont regroupés sous l’entité spécifique F. Verdonk n’a pas transmis de déclaration de liens d’intérêts en relation avec
intitulée « dénutrition protéino-énergétique » [99] . La prise en cet article.
charge nutritionnelle de ces patients requiert l’atteinte précise
des cibles caloriques et protidiques ainsi que la prévention des
carences sévères liées à l’épuration extrarénale. Les recommanda-  Références
tions européennes de l’ESPEN encadrent cette prise en charge [81] .
Dans ce contexte hypercatabolique, il est d’autant plus suggéré [1] Villet S, Chiolero RL, Bollmann MD, Revelly JP, Cayeux RNMC, Delarue
d’utiliser la calorimétrie indirecte pour guider les apports calo- J, et al. Negative impact of hypocaloric feeding and energy balance on
riques. Une attention particulière est attribuée à l’administration clinical outcome in ICU patients. Clin Nutr 2005;24:502–9.
de calories non nutritionnelles, notamment liées au citrate [2] Lew CCH, Yandell R, Fraser RJL, Chua AP, Chong MFF, Miller M. Asso-
(3 kcal/g), utilisé dans le cadre d’une anticoagulation régionale ciation between malnutrition and clinical outcomes in the intensive care
du circuit. L’apport protidique ne doit pas être limité chez le unit: A systematic review. JPEN J Parenter Enteral Nutr 2017;41:744–58.
patient insuffisant rénal dans la crainte d’aggraver son atteinte. [3] Mayer KP, Thompson Bastin ML, Montgomery-Yates AA, Pastva AM,
Dupont-Versteegden EE, Parry SM, et al. Acute skeletal muscle wasting
Au contraire, l’absence d’apport protidique pourrait aggraver la
and dysfunction predict physical disability at hospital discharge in patients
perte musculaire chez ces patients à risque. Par ailleurs, en raison with critical illness. Crit Care 2020;24:637.
de la perte de protéine liée à l’épuration extrarénale, estimée à 10- [4] Schefold JC, Wollersheim T, Grunow JJ, Luedi MM, Z’Graggen WJ,
15 g/j, les cibles protidiques sont majorées à 1,3-1,5 g/kg/j pour Weber-Carstens S. Muscular weakness and muscle wasting in the critically
la dialyse conventionnelle intermittente et à 1,5-1,7 g/kg/j pour ill. J Cachexia Sarcopenia Muscle 2020;11:1399–412.
l’hémodialyse continue [81] . [5] Van Aerde N, Meersseman P, Debaveye Y, Wilmer A, Casaer MP, Gunst
Les pertes en éléments traces et en vitamines liées à la dialyse J, et al. Aerobic exercise capacity in long-term survivors of critical illness:
doivent être surveillées et compensées. Elles concernent le sélé- secondary analysis of the post-EPaNIC follow-up study. Intensive Care
nium, le zinc et le cuivre, ainsi que la vitamine C, le folate (B9 ) et Med 2021;47:1462–71.
la thiamine (B1 ) [100] . [6] Braunschweig CA, Sheean PM, Peterson SJ, Gomez Perez S, Freels S,
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(Covid-19) présentent un haut risque nutritionnel compte tenu de [8] Puthucheary ZA, Phadke R, Rawal J, McPhail MJ, Sidhu PS, Rowlerson
A, et al. Qualitative ultrasound in acute critical illness muscle wasting.
leur immobilisation prolongée et de la réaction inflammatoire sys-
Crit Care Med 2015;43:1603–11.
témique exacerbée qu’ils subissent. Les critères du GLIM ainsi que
[9] De Jonghe B, Sharshar T, Lefaucheur JP, Authier FJ, Durand-Zaleski I,
les scores Nutrition Risk Screening-2002 (NRS-2002) et NUTRIC Boussarsar M, et al. Paresis acquired in the intensive care unit: A prospec-
ont été validés chez ces patients [101–103] . Un risque nutritionnel tive multicenter study. JAMA 2002;288:2859–67.
élevé était diagnostiqué chez plus de 60 % des patients admis [10] Preiser JC, Ichai C, Orban JC, Groeneveld ABJ. Metabolic response to the
en soins critiques [102] . Une dénutrition sévère persistait jusqu’à stress of critical illness. Br J Anaesth 2014;113:945–54.
3 mois après la sortie de réanimation chez plus d’un tiers des [11] Haute Autorité de Santé. Diagnostic de la dénutrition de l’enfant et
survivants à une forme de Covid-19 grave [104] . de l’adulte. 2019. https://has-sante.fr/jcms/p 3118872/fr/diagnostic-de-
Les recommandations internationales suggèrent l’utilisation de la-denutrition-de-l-enfant-et-de-l-adulte.
la voie entérale en première intention, y compris chez les patients [12] Cederholm T, Jensen GL, Correia MITD, Gonzalez MC, Fukushima R,
curarisés ou bénéficiant de séances de décubitus ventral [105–108] . En Higashiguchi T, et al. GLIM criteria for the diagnosis of malnutrition – A
effet, l’administration d’une entérale précoce chez des patients consensus report from the global clinical nutrition community. Clin Nutr
2019;38:1–9.
Covid-19 ventilés était associée à une durée de ventilation et
[13] Kondrup J, Ramussen HH, Hamberg O, Stanga Z, Ad Hoc ESPEN Wor-
de séjour plus basse [109] . La survenue d’une hypophosphatémie king Group. Nutritional risk screening (NRS 2002): A new method based
de renutrition doit être surveillée chez ces patients ayant eu des on an analysis of controlled clinical trials. Clin Nutr 2003;22:321–36.
apports très limités les jours précédents l’hospitalisation. [14] Heyland DK, Dhaliwal R, Jiang X, Day AG. Identifying critically ill
patients who benefit the most from nutrition therapy: the development
and initial validation of a novel risk assessment tool. Crit Care 2011;15.
 Conclusion [15]
R268.
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Les pratiques nutritionnelles en réanimation ont été l’objet in intensive care unit patients: the international prospective observational
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cibles caloriques (12-25 kcal/kg/j) et protidiques (1,3 g/kg/j) doit [17] Pardo E, El Behi H, Boizeau P, Verdonk F, Alberti C, Lescot T. Reliability
être surveillée quotidiennement. L’organisation de la prise en of ultrasound measurements of quadriceps muscle thickness in critically
charge nutritionnelle doit être pluridisciplinaire et impliquer ill patients. BMC Anesthesiol 2018;18:205.
les soignants, les diététiciens, les pharmaciens et les kinésithé- [18] Singer P, Blaser AR, Berger MM, Alhazzani W, Calder PC, Casaer MP,
et al. ESPEN guideline on clinical nutrition in the intensive care unit. Clin
rapeutes [110, 111] . Les essais cliniques nutritionnels futurs vont
Nutr 2019;38:48–79.
devoir se focaliser sur l’amélioration du pronostic fonctionnel, [19] Weir JB. New methods for calculating metabolic rate with special reference
de l’autonomie et de la qualité de vie à la sortie de réanimation to protein metabolism. J Physiol 1949;109:1–9.
et de l’hôpital [112] . Dans l’objectif d’optimiser globalement le par- [20] Stapel SN, de Grooth HJS, Alimohamad H, Elbers PW, Girbes AR,
cours du patient, le suivi nutritionnel doit se prolonger au-delà Weijs PJ, et al. Ventilator-derived carbon dioxide production to assess
de l’hospitalisation en soins critiques. En effet, il est fréquent energy expenditure in critically ill patients: Proof of concept. Crit Care
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EMC - Anesthésie-Réanimation 7
36-860-D-10  Nutrition en réanimation

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EMC - Anesthésie-Réanimation 9
36-860-D-10  Nutrition en réanimation

E. Pardo (emmanuel.pardo@aphp.fr).
F. Verdonk.
Service d’anesthésie-réanimation, Hôpital Saint-Antoine, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75012 Paris, France.
Sorbonne université, GRC 29, AP–HP, DMU DREAM, Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Pardo E, Verdonk F. Nutrition en réanimation. EMC - Anesthésie-Réanimation 2023;43(2):1-10 [Article
36-860-D-10].

10 EMC - Anesthésie-Réanimation
 36-971-A-10

Pneumonies communautaires graves


de l’adulte immunocompétent, hors
Covid-19
P. Joly, M. Tran, C. Bruel, B. Pilmis, F. Philippart

Résumé : Les pneumonies aiguës communautaires (PAC) sont des pathologies infectieuses respiratoires
fréquentes et potentiellement graves, à la fois du fait de la virulence de l’agent pathogène responsable,
mais également par la fragilité du terrain du patient. L’évaluation de la gravité de l’atteinte doit être sys-
tématique afin de permettre l’orientation et la prise en charge la plus appropriée. La mortalité hospitalière
des pneumonies aiguës communautaires grave demeure élevée et peut dépasser 25 % en réanimation.
Un retard de prise en charge étant associé à une augmentation de cette mortalité, de nombreux sys-
tèmes de scores ont été développés afin d’aider au mieux à l’orientation du patient. Streptococcus
pneumoniae demeure l’agent pathogène le plus souvent responsable des PAC graves d’origine bacté-
rienne. Plus récemment, le développement de techniques de PCR (polymerase chain reaction) multiplex
a permis d’identifier l’émergence de nombreux virus pathogènes responsables de PAC potentiellement
graves. L’antibiothérapie est une urgence et doit systématiquement couvrir S. pneumoniae et Legionella
pneumophila. L’antibiotique de choix dans ce contexte est une céphalosporine de troisième génération,
le second antibiotique pouvant être un macrolide. Il faut cependant noter l’augmentation du nombre
de PAC (environ 6 %) causées par des agents pathogènes résistant aux antibiotiques, regroupés sous le
terme PES (Pseudomonas aeruginosa, entérobactérales productrices de bêtalactamases à spectre élargi
[BLSE], Staphylococcus aureus résistant à la méticilline), nécessitant ainsi des considérations précises
sur le choix de l’antibiothérapie appropriée.
© 2023 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Pneumonie aiguë communautaire ; Détresse respiratoire ; Infection grave ; Sepsis sévère ;
Choc septique ; Streptococcus pneumoniae

Plan  Introduction
■ Introduction 1 La pneumonie aiguë communautaire (PAC) du patient immu-
■ Définition 1 nocompétent est une pathologie d’une grande fréquence,

extrêmement protéiforme. La mortalité de cette affection reste
Diagnostic 2
considérable. L’évaluation de la gravité de la PAC est essentielle
Diagnostic clinique 2
car elle détermine l’orientation du patient, mais guide également
Imagerie diagnostique 2
la réalisation d’examens complémentaires et la stratégie de prise
Évaluation de la gravité 2
en charge thérapeutique.
■ Épidémiologie 4
Épidémiologie clinique 4
Épidémiologie microbiologique 4
Prélèvements microbiologiques 5  Définition
■ Prise en charge thérapeutique 5
Émergence de résistances 5 La pneumonie constitue une entité nosologique dont la défi-
Antibiothérapie 6 nition est anatomopathologique, l’infection du parenchyme
Traitements adjuvants 7 pulmonaire étant la résultante d’une invasion des espaces alvéo-
Mise en place des traitements 9 laires par des agents pathogènes et de la réponse inflammatoire se
soldant par une infiltration de cellules immunitaires, en grande
■ Conclusion 9 majorité des polynucléaires neutrophiles. Ce diagnostic de cer-
■ Annexe A. Scores d’évaluation de la gravité titude ne pouvant être réalisé en clinique quotidienne, une
des pneumonies aiguës communautaires 9 définition clinique et radiologique est généralement utilisée [1, 2] .
■ Annexe B. Cas clinique : une diarrhée fébrile 9 En pratique, le diagnostic de pneumonie est porté par l’association
de signes fonctionnels respiratoires,d’une fièvre, et d’une opacité

EMC - Anesthésie-Réanimation 1
Volume 43 > n◦ 2 > avril 2023
36-971-A-10  Pneumonies communautaires graves de l’adulte immunocompétent, hors Covid-19

Tableau 1.
Facteurs associés à une mortalité accrue.
Facteurs liés au patient Pathogène en cause Sévérité de l’atteinte Prise en charge
- Âge > 65 ans - S. pneumoniae - Leucopénie/hyperleucocytose - Antibiothérapie inadaptée
- Comorbidités - P. aeruginosa - Hypercapnie/hypocapnie - Retard d’admission en soins intensifs
- Absence de fièvre à l’admission - Entérobactérales BLSE - Hyperurémie ≥ 19,6 mg dl−1 - Retard de recours à la ventilation mécanique
- Fréquence respiratoire > 30/min - SARM - Atteinte multilobaire sur la RxT
- Bactériémie
- État de choc septique
- pH < 7,35
- Hypoalbuminémie
BLSE : bêtalactamase à spectre élargi ; RxT : radiographie thoracique ; SARM : Staphylococcus aureus résistant à la méticilline.

récente sur la radiographie de thorax [2–4] . La place des examens éléments cliniques et biologiques, immédiatement disponibles, et
biologiques à la recherche d’un syndrome inflammatoire reste en les scores.
revanche moins claire [5, 6] . Il n’existe pas de définition consensuelle de la gravité des
PAC [2–4] . On considère généralement que la sévérité de la patho-
logie correspond au risque pour le patient d’avoir une évolution
 Diagnostic péjorative ou de développer des complications de la pneumonie.
La gravité peut être considérée comme étant de trois ordres : la
Diagnostic clinique défaillance respiratoire, la défaillance viscérale liée à la sévérité
du sepsis, et la gravité liée au terrain, notamment à la présence
Les symptômes cliniques de la PAC associent souvent une de comorbidités [12] . Parmi ces éléments de gravité, les comor-
fièvre d’intensité variable, une dyspnée, une toux, éventuellement bidités occupent une place centrale, en particulier les affections
associée à une bronchorrhée purulente, ainsi qu’à une douleur neurologiques, cardiaques et rénales qui sont associées à une mor-
thoracique latéralisée.L’auscultation retrouve un foyer de crépi- talité accrue [1] . L’âge joue également un rôle important, même
tants ou un souffle tubaire dans les formes les plus franches. si son implication exacte reste incertaine [13] . D’autres défini-
Les formes atypiques peuvent être fréquentes, notamment chez tions de la gravité des PAC existent, qui prennent en compte la
les sujets âgés chez lesquels des troubles du comportement, nécessité de transfert en soins intensifs, éventuellement associée à
une confusion ou encore la décompensation d’une affection l’introduction de catécholamines ou de ventilation mécanique [7] .
sous-jacente (insuffisance cardiaque, déséquilibre d’un diabète) Enfin, la sévérité de la PAC peut être définie par la valeur élevée
doivent faire évoquer le diagnostic. d’un score de gravité, bien que, pris isolément, ce seul paramètre
soit d’intérêt discutable.
La pneumonie grave peut donc, en fonction des études et des
Imagerie diagnostique circonstances, être définie par la présence de signes de gravité
(gravité immédiate), d’éléments de gravité (gravité potentielle),
Si la radiographie thoracique reste l’examen de référence de de scores de gravité ou, plus généralement, par l’orientation du
la confirmation diagnostique de pneumonie, d’autres moyens patient (lieu de sa prise en charge). Ce dernier élément est sous la
d’imagerie sont à notre disposition pour préciser l’état du paren- dépendance de la décision du clinicien, et donc sous-tendu par la
chyme pulmonaire, notamment le scanner thoracique. Sa place synthèse des éléments précédents.
dans la prise en charge diagnostique des PAC est cependant incer-
taine. À ce jour, il ne semble pas y avoir de place pour un
usage systématique du scanner dans le diagnostic [2–4] , ni dans Paramètres cliniques
l’évaluation de la gravité [3, 4, 7] de la PAC du patient immuno- Les indicateurs cliniques permettent de mettre en évidence une
compétent. Cet examen pourrait cependant être intéressant pour sévérité immédiate, voire de prédire l’hospitalisation en réani-
améliorer la sensibilité diagnostique en cas de doute sur l’origine mation au cours de l’évolution. Ainsi, la présence d’éléments
du tableau respiratoire [2] , notamment chez les patients pour de détresse respiratoire (tout particulièrement la fréquence res-
lesquels le cliché thoracique est non contributif et l’impression cli- piratoire) [14] , de défaillance hémodynamique [14] , rénale [14] ou
nique forte [2] . Ainsi, les recommandations françaises soulignent neurologiques (troubles de la vigilance) rend indiscutable la néces-
que le scanner sans injection « trouve sa place dans les situa- sité d’une prise en charge immédiate et intensive. De même,
tions difficiles » [5] . Il est aussi intéressant dans la recherche de l’existence d’arguments en faveur d’un sepsis permet de conclure
diagnostics différentiels [5] et, en absence d’amélioration rapide, à la sévérité du tableau [3, 4] .
dans la recherche de la cause de la persistance du tableau inflam- La recherche d’éléments associés à une augmentation de la
matoire [8] . Enfin, une situation particulière qui n’est pas traitée probabilité de mortalité doit être systématique. Une analyse
ici est représentée par les infections respiratoires basses chez les exhaustive de la littérature retrouve parmi ces facteurs une associa-
patients immunodéprimés où la réalisation d’un scanner a une tion de facteurs liés au patient, spécifiques du pathogène en cause
place beaucoup mieux définie [2] . de la PAC, liés à la sévérité de l’atteinte, et enfin liés à la prise
L’échographie pulmonaire, de développement plus récent, en charge thérapeutique [15] . Ces différents facteurs de risque de
semble être une alternative intéressante pour la confirmation mortalité sont résumés dans le Tableau 1.
du diagnostic de pneumonie lorsque la radiographie n’est pas La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO)
contributive, avec une excellente sensibilité et spécificité [9] et occupe une place particulière dans ce contexte. Les PAC sur BPCO
une performance diagnostique comparable à celle du scanner nécessitant une hospitalisation surviennent principalement chez
thoracique [10] . Son intérêt réside notamment dans sa facilité de les sujets plus âgés, les patients fumeurs, ou ayant une insuffisance
réalisation, au lit du patient, son faible coût et son innocuité cardiaque connue [16] . La BPCO est associée à une augmentation de
(absence d’irradiation). nécessité de ventilation mécanique [16] , d’antibiothérapie proba-
biliste inadaptée mais également à une hausse de mortalité [16] .
D’autres éléments anamnestiques doivent également être pris
Évaluation de la gravité en compte, parmi lesquels l’adaptation de l’environnement du
La gravité des PAC nécessite d’être rapidement reconnue, afin patient (domicile, autonomie) et son observance thérapeutique
de permettre une prise en charge thérapeutique la plus précoce probable [3, 4] , ces deux éléments pouvant motiver l’hospitalisation
possible [11] . Un certain nombre de paramètres permettent au clini- dans l’objectif d’améliorer la qualité de la prise en charge théra-
cien d’orienter le patient. Ces indicateurs sont de deux ordres : les peutique.

2 EMC - Anesthésie-Réanimation
Pneumonies communautaires graves de l’adulte immunocompétent, hors Covid-19  36-971-A-10

Paramètres biologiques en ne gardant que les paramètres cliniques dans l’évaluation des
[17] patients. L’intérêt de cette dernière démarche est de rendre ce score
L’existence d’altérations importantes de l’hématose , la pré-
utilisable en ville sans qu’il soit nécessaire de réaliser un bilan
sence d’une leucopénie [17] , d’une hyperlactatémie ou d’autres
biologique avant de déterminer l’intérêt ou non d’un transfert en
arguments en faveur d’une défaillance viscérale aiguë signent la
hospitalisation.
sévérité du tableau [3, 4] .
Le score de l’ATS/IDSA est constitué de critères mineurs
L’intérêt des biomarqueurs de l’inflammation s’amenuise au
(cliniques : neurologiques, hémodynamiques ; biologiques : alté-
cours des années. Leur pertinence dans le diagnostic des infections
ration de l’hématose, de l’hémostase, de la fonction rénale ;
est écartée depuis plusieurs années dans les infections commu-
radiologiques : étendue des lésions radiographiques) et de critères
nautaires [6, 18] . La valeur pronostique des marqueurs biologiques
majeurs (nécessité d’intubation trachéale, présence d’un choc sep-
d’inflammation a également été évaluée. La mesure initiale de la
tique) [8, 14] .
procalcitonine (PCT) permettrait d’évaluer le risque de compli-
Plus récemment, d’autres scores ont été développés. Contrai-
cation, voire de mortalité chez les patients en réanimation [19] .
rement aux scores PSI ou CURB, leur objectif est de déterminer
Néanmoins, dans une étude du Genetic and Inflammatory Markers
la nécessité d’hospitalisation en réanimation ou de suppléance
of Sepsis (GenIMS), l’usage de la PCT seule avait très peu d’effet
d’organe et non plus la possibilité de traitement en ville. España
sur la détermination pronostique [20] . Le taux de C reactive protein
et al. ont construit un score inspiré du CURB, qui comprend
(CRP) pourrait également être corrélé à la nécessité d’introduction
des paramètres cliniques, des éléments du gaz du sang et des
des catécholamines [21] . Enfin, il a été retrouvé une association
éléments radiologiques [26] . Le score SMART-COP comprend des
entre lymphopénie (< 724 mm−3 ) et un risque accru de mortalité
paramètres respiratoires (saturation pulsée en oxygène [SpO2 ], gaz
à 30 jours [22] .
du sang) [27] . Le pronostic des patients admis en réanimation a éga-
En dehors de biomarqueurs sanguins, d’autres biomarqueurs
lement été étudié, sous la forme d’un score (PIRO) s’appuyant sur
peuvent être mesurés à la fois dans la circulation et dans le
le modèle suivant : prédisposition, infection, réponse et dysfonc-
liquide de lavage alvéolaire. On retrouve en particulier le high-
tion d’organe [28] .
mobility group box 1 (HMGB-1), le receptor of advanced glycation
end-products (RAGE), le soluble triggering receptor expressed on mye-
loid cells 1 (sTREM-1), la provasopressine, la proadrénomédulline Qualité du classement
ou le pro-atrial natriuretic peptide (pro-ANP) [23] . Ces marqueurs Dans l’objectif d’identifier les patients les moins graves, pour
gardent un intérêt pronostique très incertain. L’acide désoxyribo- lesquels une prise en charge en ville est licite, l’usage des scores
nucléique (ADN) bactérien circulant pourrait constituer un autre PSI ou CURB-65 semble tout à fait satisfaisant [7] . En revanche,
biomarqueur. Dans les pneumonies à Streptococcus pneumoniae, leur définition des patients pouvant nécessiter une admission en
une corrélation a été retrouvée entre la quantité de copies d’ADN réanimation est d’intérêt moindre [7] . D’autres travaux ont égale-
bactérien et le pronostic, à la fois en termes de nécessité de ventila- ment souligné la faible performance de la classification de Fine,
tion mécanique, de choc septique et d’incidence de mortalité [23] . du fait de la sous-estimation [14] ou de la surestimation de la gra-
Ces facteurs individuels ont une mauvaise valeur prédictive vité [27] . Cela s’explique probablement au moins partiellement par
négative (VPN) de la nécessité d’admission en soins intensifs. les paramètres pris en compte. Le score est grandement influencé
par l’âge du patient [7] , alors que certaines comorbidités telles que
Scores d’évaluation la présence d’une BPCO [29] , d’un diabète [29] ou d’une immunodé-
pression (toujours associée à une forme grave de pneumonie) [24]
L’évaluation clinique permet souvent de déterminer la gravité
n’apparaissent pas.
de l’infection respiratoire basse, mais peut être prise en défaut. De
En revanche, les études s’intéressant aux scores PSI, CURB-65 et
nombreux scores ont été développés dans l’objectif d’évaluer la
CRB-65 retrouvent généralement une capacité intéressante à défi-
sévérité de l’infection respiratoire basse et donc le lieu de leur prise
nir la faible probabilité de mortalité, avec des VPN élevées [12] . Les
en charge. Les scores les plus fréquemment utilisés sont le score
recommandations actuelles de l’ATS soulignent ainsi l’intérêt de
de Fine ou PSI (pneumonia severity index), le CURB-65 (confusion,
l’utilisation du PSI en parallèle de l’examen clinique pour décider
urea, respiratory rate, blood pressure, 65 years), le score de l’American
de l’admission à l’hôpital ou de la prise en charge ambulatoire des
Thoracic Society/Infectious Diseases Society of America (ATS/IDSA),
patients avec une PAC [7] .
le SMART-COP (systolic blood pressure, multilobar chest radiography
Le score de l’ATS/IDSA semble être plus pertinent dans la pré-
involvement, albumin level, respiratory rate, tachycardia, confusion,
diction de la nécessité de transfert en réanimation (c’est dans cette
oxygenation, and arterial pH) et le CAP-PIRO (community-acquired
intention qu’il a été mis au point) [14] , ainsi que dans la prédic-
pneumonia – predisposition, insult, response, and organ dysfunction)
tion de la mortalité [30] . Persiste cependant un grand nombre de
(Annexe A).
faux positifs. Néanmoins, Brown et al. ont retrouvé une efficacité
Ces scores sont fondés sur deux types d’informations : le terrain
satisfaisante du score de l’ATS/IDSA dans la discrimination des
du patient et son état clinique au moment de la prise en charge.
PAC sévères nécessitant l’hospitalisation en soins intensifs avec
Le terrain est avant tout centré sur les comorbidités susceptibles
une AUC ROC (area under the receiving operative characteristic curve)
d’être décompensées en faveur de la pneumonie et sur les facteurs
de 0,88 [31] . L’efficacité du score augmentait avec le nombre de
pouvant favoriser une forme grave. L’état clinique repose quant
critères mineurs présents [31] .
à lui sur trois types de paramètres : ceux liés à l’atteinte respi-
La capacité du SMART-COP de prédire la nécessité
ratoire (hypoxémie et ses conséquences), ceux liés à l’infection
d’intensification et la mortalité semble intéressante [26] . Mais son
elle-même ainsi qu’à sa gravité (sepsis, choc septique), et ceux
utilité reste modérée dans la mesure où il ne prédit pas l’ensemble
liés à l’extension radiologique de l’atteinte parenchymateuse pul-
des indications à une hospitalisation en réanimation [27] . De plus,
monaire (gravité liée à l’importance quantitative de l’agression
l’évaluation de la mortalité par le SMART-COP est sensiblement
pulmonaire).
identique à celle obtenue par le PSI ou le CURB-65 [32] .
Types de scores Les scores sont cependant associés à de nombreuses limites.
Le score de Fine ou pneumonia severity index (PSI) comprend Le poids de l’âge dans les scores est probablement trop impor-
20 paramètres : trois paramètres démographiques, cinq para- tant, expliquant qu’il existe une meilleure détermination du
mètres de comorbidités, cinq paramètres cliniques et sept pronostic chez les patients plus jeunes. À l’inverse, le terrain du
éléments paracliniques, biologiques et radiologiques. Il permet la patient est négligé dans nombre d’entre eux, ce qui sous-estime
distinction des patients de classe I (les moins graves) sur la cli- probablement la gravité, notamment en cas d’atteinte respira-
nique, sans avoir besoin de recourir aux examens biologiques, ce toire chronique ou encore chez les immunodéprimés, voire dans
qui représente un gain de temps, de coût et améliore l’applicabilité les situations pouvant conduire à un défaut d’observance ou à
du score en clinique extrahospitalière [24] . une augmentation de décompensation d’une comorbidité [21] . Si
Le score CURB a été modifié pour devenir le CURB-65 [25] , l’intérêt des scores dans l’évaluation et l’orientation des patients
incluant l’âge (> 65 ans) comme facteur pronostique puis le CRB- est une aide précieuse, il convient de garder en mémoire qu’ils ne
65, dont l’intérêt principal est de s’amender du bilan biologique doivent pas se substituer au jugement clinique du médecin [3, 4, 7] .

EMC - Anesthésie-Réanimation 3
36-971-A-10  Pneumonies communautaires graves de l’adulte immunocompétent, hors Covid-19

Critères de classement à venir pour les patients hospitalisés, mais de 25–30 % pour les patients
Un élément plus récent qui devrait être pris en compte dans nécessitant une prise en charge réanimatoire et de près de 50 %
la détermination du pronostic des infections respiratoires basses chez les patients en choc septique [14, 29] .
comme dans toutes les pathologies infectieuses est la variabilité Les décès au cours des CAP sont liés à la survenue d’une
génique [33] . Il a été clairement mis en évidence que certains poly- hypoxémie réfractaire [16, 46] , nécessitant la ventilation méca-
morphismes pouvaient favoriser la survenue d’une pathologie nique invasive [46, 47] , d’une atteinte multilobaire [48] , d’un état
infectieuse ou en aggraver l’évolution. Dans les PAC, de tels poly- de choc [16, 49] , d’une insuffisance rénale aiguë [47, 50, 51] , voire
morphismes ont été décrits. Il a ainsi été montré qu’un allèle A d’une défaillance multiviscérale [46] . L’agent pathogène pourrait
en position +1267 de la heat shock protein-70-2 (HSP-70-2) en également être un facteur important [51] , bien qu’il ne soit pas
remplacement d’une guanine est associé à un risque d’évolution systématiquement retrouvé [46, 52] . De manière intéressante, la sur-
vers un choc septique [34] . La présence d’un haplotype HSP-70- venue d’une bactériémie ne semble pas modifier le pronostic de
2 +1267A/lymphotoxin-␣ +250A était dans cette étude le profil la pneumonie, en absence d’immunodépression [53] .
génomique le plus associé à la survenue d’un état de choc sep- Le terrain joue également un rôle important dans le risque
tique [34] . La présence d’un polymorphisme du promoteur du gène d’évolution péjorative [16, 47, 49, 51] , notamment l’âge [47, 49] , l’état
de l’interleukine-10 (IL-10) pourrait également jouer un rôle dans nutritionnel [47, 49] et les comorbidités [47] . Parmi ces comorbidités,
la gravité des PAC [35] . L’haplotype –592C/+734G/+3367G du gène la présence d’une BPCO tient une place tout à fait singulière [47, 51] .
de l’IL-10 serait également associé à une augmentation de dysfonc- En effet, cette pathologie peut à la fois favoriser la survenue d’une
tion d’organes et de mortalité [36] . Dans d’autres situations, c’est PAC et en aggraver le pronostic [47, 54] , notamment en cas de bacté-
l’évolution à moyen terme qui est modifiée. La présence d’un poly- riémie associée [55] . La cinétique d’évolution de la pathologie joue
morphisme de macrophage migration inhibitory factor (MIF) pourrait également un rôle pronostique évident [29] . La mortalité dépend,
modifier la mortalité à 90 jours. Outre les cytokines, les mutations enfin, de la qualité de la prise en charge, en particulier de sa
de la première ligne de défense, notamment les protéines A et D précocité. Si l’importance de la célérité de l’antibiothérapie est
du surfactant alvéolaire, pourraient être associées à une augmen- indéniable [56] , il a été récemment rappelé que la difficulté de
tation de l’incidence et de la gravité des PAC [37] . diagnostic positif de l’infection, notamment respiratoire [57] , rend
Certains polymorphismes sont au contraire protecteurs. Ainsi, impérative la structuration de l’intervention diagnostique dans les
le génotype G/G en position –174 du promoteur de l’IL-6 est formes les plus graves de PAC comme dans toute infection [56, 58, 59] .
associé à une réduction de survenue d’un syndrome de détresse
respiratoire ou de choc septique, voire de la mortalité dans les
PAC graves [38] . Un polymorphisme de la pentraxine 3, protéine Épidémiologie microbiologique
jouant un rôle de médiateur inflammatoire à la phase précoce
d’une infection, serait associé à une incidence moindre de PAC Comme toutes les infections graves, les PAC sévères doivent
sévère [39] . bénéficier d’une recherche de l’agent pathogène responsable la
À ce jour, l’étude des polymorphismes se cantonne à la plus précise possible. Si la documentation microbiologique des
recherche concernant le pronostic des patients souffrant PAC sévères est plus fréquente que celle des formes les moins
d’infection respiratoire basse sévère, et plus généralement de graves [52] , il n’existe en revanche que peu de différence en
sepsis [40] , sans qu’elle n’ait encore d’implication en clinique termes d’agent pathogène responsable [52] . La fréquence de cer-
quotidienne. Le rôle de ces polymorphismes dans la sévérité tains germes associés aux formes graves de pneumonie, tels
clinique est très variable d’une situation à l’autre et ne doit pas que S. pneumoniae ou l’association de Pseudomonas aeruginosa et
faire oublier que l’évolution et la gravité sont avant tout centrées d’entérobactérales, peut cependant être augmentée dans cette
sur l’agent pathogène et sa virulence, le terrain du patient, et la population [52] .
célérité du diagnostic et de la prise en charge thérapeutique. Cela Plus récemment, la généralisation de l’utilisation de tests diag-
pourrait expliquer que nombre d’études ne retrouvant aucun lien nostiques moléculaires (PCR : polymerase chain reaction) a permis
entre les gènes étudiés (IL, CRP, etc.) et le pronostic ou l’évolution de mettre en évidence de nombreux virus pathogènes respon-
des patients. sables de PAC [60] . Ces techniques de diagnostic moléculaire
ont une sensibilité de 70 à 80 % et une excellente spécificité
(99–100 %). Leur utilisation a permis d’améliorer le diagnostic
 Épidémiologie étiologique des PAC en comparaison avec les techniques non
moléculaires (examen direct et culture), et ce d’autant plus chez
Épidémiologie clinique les patients récemment traités par antibiotiques [61] .
La documentation microbiologique reste cependant impar-
Aux États-Unis, les pneumonies communautaires sont respon- faite. Ainsi, dans l’étude EPIC, sur 428 patients hospitalisés en
sables de l’hospitalisation de 1 500 000 patients et d’environ réanimation pour PAC grave, un agent pathogène était mis en
100 000 décès chaque année. La mortalité hospitalière est de évidence dans seulement 38 % des cas, avec 22 % d’infections
6,5 %. La mortalité à 30 jours, 6 mois et 1 an est respectivement de d’origine virale, 19 % d’infections bactériennes et 4 % d’infections
l’ordre de 13, 23 et 30 % [41] . Les formes graves de PAC constituent mixtes [61] . On retrouve parmi les principaux virus respon-
6 à 16 % des cas de pneumonies communautaires [42] . Les PAC sables : Influenzae, Para-influenzae, virus du groupe coronavirus
sont la première cause d’hospitalisation en réanimation avec une (SARS [severe acute respiratory syndrome] et Mer-CoV), adénovi-
mortalité considérable [43] . Elles représentent la sixième cause de rus, virus respiratoire syncytial, rhinovirus, métapneumovirus
mortalité globale et la première cause de mortalité d’origine infec- humain [62, 63] . Ils s’accompagnent d’une forte morbidité et d’une
tieuse [2] . Elles sont également la première cause de décès d’origine mortalité redoutable. Plus récemment, le SARS-CoV2 (2e coronavi-
infectieuse dans l’ensemble des pays industrialisés [13] . rus responsable du syndrome respiratoire aigu sévère) est devenu
Les pneumonies sont intrinsèquement graves, comme l’a très la première cause de pneumonie communautaire, responsable de
bien montré l’étude de Kaplan et al. [44] . Dans ce travail, l’évolution formes sévères et d’une mortalité majeure.
de patients admis pour une pneumonie était significativement La bactérie dont l’incidence demeure la plus élevée est
plus péjorative que celle des patients admis pour d’autres motifs, S. pneumoniae [15, 52] . Elle est présente dans 6,5 à 42,8 % des
ce résultat n’étant pas expliqué par les comorbidités du patient cas [2, 52, 54] , son incidence atteignant parfois plus des deux tiers
ou la gravité du tableau [44] . D’autres facteurs sont associés à une des bactéries détectées [64] . Sont également présents Hemophilus
augmentation d’agents pathogènes particuliers [2, 8] . Par ailleurs, influenzae (1–5 %) [2, 52] , Klebsiella pneumoniae, Legionella pneu-
en dépit de l’amélioration de la prise en charge thérapeutique mophila (8–16 %) [2, 52] ou encore Staphylococcus aureus (environ
des patients, la sévérité du pronostic des pneumonies communau- 5 %) [2, 13, 52] , et Moraxella catarrhalis [52] . L’incidence de P. aerugi-
taires reste constante et pourrait même s’aggraver pour les formes nosa semble plus élevée dans les formes graves chez les patients
les plus sévères, nécessitant l’admission en réanimation [45] . atteints de BPCO [65] . Même si elles sont décrites, les entérobacté-
La mortalité est fonction de la gravité du patient et donc impli- rales [52, 62] sont plus rarement responsables d’une hospitalisation.
citement de son lieu d’hospitalisation. Ainsi, elle est d’environ 5 % Leur incidence augmente dans les populations de patients ayant

4 EMC - Anesthésie-Réanimation
Pneumonies communautaires graves de l’adulte immunocompétent, hors Covid-19  36-971-A-10

une comorbidité respiratoire, en cas de suspicion de pneumonie Prélèvements microbiologiques


d’inhalation, d’hospitalisation antérieure ou d’antibiothérapie
préalable (dans le mois précédent). Parmi ces agents pathogènes, La documentation microbiologique des PAC est impérative. Si
ceux qui sont le plus associés à la mortalité sont S. pneumoniae, les prélèvements ne permettent pas systématiquement de mettre
P. aeruginosa, L. pneumophila et S. aureus communautaire résistant en évidence un agent pathogène responsable de l’épisode infec-
à la méticilline [66] . tieux, sa recherche doit cependant être systématique [5, 77] . La mise
D’autres bactéries peuvent également être mises en évidence en évidence du pathogène responsable de la pneumonie permet
dans les PAC nécessitant une hospitalisation, notamment les bac- l’adaptation thérapeutique et notamment la désescalade antibio-
téries responsables de tableaux atypiques, telles que Mycoplasma tique. En absence d’intubation, un examen cytobactériologique
pneumoniae, Chlamydia psittaci, Coxiella burnettii [52, 67] . Les germes des crachats peut être réalisé, mais sa sensibilité reste faible (de
« atypiques » qui étaient considérés comme rares jusqu’à récem- l’ordre de 40 %). En cas d’intubation trachéale, le prélèvement
ment voient leur importance croître considérablement depuis est généralement une aspiration trachéale ou un prélèvement tra-
l’avènement des techniques de détection microbiologiques ne chéal voire bronchique non protégé.
nécessitant pas de culture. Dans un travail récent de Cillóniz et Outre les prélèvements respiratoires des voies aériennes, la pré-
al., les germes atypiques représentent jusqu’à plus de 11 % des sence d’un épanchement pleural doit faire discuter la réalisation
agents responsables de pneumonies communautaires et plus de d’une ponction pleurale, permettant de distinguer les transsudats
7,5 % des agents responsables de PAC nécessitant une admission des exsudats parapneumoniques, voire des pleurésies purulentes
en réanimation [52] . associées aux pneumonies. Ces dernières nécessitent un drainage
Il est à noter que les formes les plus graves de PAC sont associées pleural systématique. Le prélèvement microbiologique doit être
à une plus grande incidence de bactériémies. Les bactéries pour précoce, l’administration d’antibiotique pouvant conduire à une
lesquelles la bactériémie est associée à une plus grande gravité négativité des cultures.
sont S. pneumoniae, S. aureus et P. aeruginosa ainsi que les entéro- La place des antigénuries dépend de la situation clinique.
bactérales [7, 62, 68] . La présence d’une positivité des hémocultures L’antigénurie Streptococcus pneumoniae n’a que très peu d’intérêt,
serait de l’ordre de 10 à 25 % dans les pneumonies graves [2] et n’étant ni sensible ni spécifique [2] . L’antigénurie Legionella
cette positivité peut même atteindre 65 % dans les pneumonies pneumophila peut être plus intéressante. Ne détectant que les
à S. pneumoniae [53] . Une association entre un temps de pousse sérogroupes 1, elle n’est pertinente que dans les régions où ce
court des hémocultures (< 10 heures) et la nécessité de ventilation sérogroupe est prédominant. Dans les infections à L. pneumophila
invasive, la mortalité hospitalière et la mortalité à 30 jours a été de sérogroupe 1, la sensibilité de l’antigénurie est de l’ordre de
démontrée [68] . 85 % et sa spécificité supérieure à 90 % [2, 5] .
Une situation particulière est représentée par S. aureus porteur En dehors des prélèvements respiratoires, il est recommandé de
du plasmide de résistance incluant la toxine de Panton et Valen- réaliser une paire d’hémocultures lors de la prise en charge initiale
tine (leucocidine de Panton-Valentine [LPV]). Ces souches ont de la suspicion de PAC [5, 77] .
la particularité d’être résistantes à la méticilline, le plus souvent La place des sérologies est faible en clinique du fait des
du fait de la présence d’une cassette chromosomique staphylo- délais d’obtention du résultat et de l’absence de conséquence
coccique de résistance, mec de type IV (SCCmec IV). SCCmec IV thérapeutique. De ce fait, leur usage est réservé aux études épidé-
est dans ce contexte portée par le même plasmide que le gène miologiques. La réalisation de PCR multiples (FilmArray) permet
de la LPV. S. aureus résistant à la méticilline (SARM) porteur la mise en évidence de pathogènes bactériens [78] et viraux [79] par
de la LPV touche généralement une population plus jeune que amplification de gènes. Ces tests réalisés à partir de prélèvements
le SARM « classique » [69] . Les premières épidémies ont tou- respiratoires nasopharyngés ou respiratoires profonds permettent
ché des « groupes » [70] , puis des populations plus à risque ont de documenter les pneumonies à germes atypiques ou sous anti-
secondairement été isolées, telles que les patients sans domicile, biothérapie préalable. Si les résultats des études actuelles sont
les toxicomanes, les homosexuels ou encore les infirmiers [71] . encourageants, les faibles conséquences thérapeutiques et le coût
Certaines de ces souches ont été isolées en France métropoli- de ces techniques rendent leur place encore très incertaine dans
taine [72] ainsi qu’à la Réunion [73] . L’incidence de ces souches la prise en charge usuelle des PAC.
reste cependant très faible en Europe, représentant entre moins
de 0,1 et 1,5 % en Grande-Bretagne [71] . Elle est moindre encore
dans les études françaises [69] et reste rare aux États-Unis [70] . Le
 Prise en charge thérapeutique
tableau de cette infection commence par un syndrome pseudo- Tout retard à l’intervention thérapeutique est associé à une
grippal, très évocateur, qui est souvent le fait d’une infection évolution péjorative [62, 80] . Le degré d’urgence reste cependant
grippale vraie [74] . Il se poursuit par celui d’une pneumonie sévère, incertain et il est recommandé d’introduire une antibiothérapie
à la fois localement, avec possibilité de nécroses parenchyma- dans les 6 [62, 81] à 8 heures [62, 80, 81] . Un délai plus précoce, et
teuses pulmonaires et d’hémoptysies, et sur le plan systémique notamment une introduction de l’antibiothérapie dans les 4 pre-
avec possibilité de sepsis sévère, voire de choc septique [74, 75] . mières heures, ne semble à ce jour pas soutenu par les données
Une leucopénie [74, 75] , voire une thrombopénie [74] sont sou- scientifiques [82] . Le premier élément de cette intervention est
vent mises en évidence. L’atteinte est généralement multilobaire, donc l’orientation du patient, ou au moins la détermination de
voire bilatérale, avec la présence d’opacités alvéolaires et la pos- l’intensité thérapeutique qui doit être entreprise.
sibilité de cavernes sur le cliché thoracique [74] . Si l’atteinte
pulmonaire est particulièrement grave [75] , elle reste cependant
exceptionnelle, à la fois du fait de la faible fréquence de l’agent Émergence de résistances
pathogène et du faible tropisme respiratoire des infections par le
SARM [70, 71] . Le recours à des antibiotiques tels que les bêtalactamines, les
Les infections polymicrobiennes représentent moins de 10 % macrolides ou les fluoroquinolones dans les semaines précédant
des cas, y compris chez les patients les plus graves [65] . La co- l’hospitalisation des patients en soins intensifs est un facteur
infection impliquant un virus atteint environ 20 % des cas [62] . prédisposant de résistance à ces mêmes classes d’antibiotiques,
Il faut cependant noter que la détection systématique des agents notamment dans les cas d’infection à pneumocoque [15] .
pathogènes dits « atypiques » conduit à des infections polymicro- Des pathogènes résistants regroupés sous l’acronyme « PES »
biennes beaucoup plus fréquentes, pouvant atteindre 5 à 40 % (Pseudomonas aeruginosa, entérobactérales productrices de bêta-
des cas [65] . Ces infections polymicrobiennes peuvent également lactamases à spectre élargi [BLSE], Staphylococcus aureus résistant
combiner bactérie et virus, cette combinaison étant associée à la à la méticilline) dans la cohorte de patients de Prina et al.
probabilité de pneumonie plus sévère qu’avec l’un de ces deux (1 597 patients atteints de PAC avec un diagnostic microbiolo-
agents pris séparément [76] . gique) sont responsables d’environ 6 % des pneumonies avec une
Malgré les efforts réalisés, une absence de documentation n’est surmortalité associée [83] .
pas rare. Aucun agent pathogène n’est mis en évidence dans 19 à Les facteurs de risque d’infection à ces pathogènes sont regrou-
70 % des cas en fonction des situations [16, 52] . pés dans le Tableau 2. La présence de plusieurs de ces facteurs

EMC - Anesthésie-Réanimation 5
36-971-A-10  Pneumonies communautaires graves de l’adulte immunocompétent, hors Covid-19

Tableau 2. thérapie, comprenant un aminoside ainsi qu’un traitement actif


Facteurs de risque des pneumonies aiguës communautaires à germes type sur les germes intracellulaires (au choix une fluoroquinolone ou
« PES » (d’après [84] ). un macrolide) [7] . Un spectre antibiotique si large doit cependant
- Âge > 65 ans
faire l’objet d’une réflexion importante et dans tous les cas être
revu à 48 heures en fonction de la documentation effectivement
- Sexe masculin
mise en évidence afin de limiter l’usage excessif d’antibiotiques et
- Traitement antibiotique dans le mois précédant l’hospitalisation de sélection secondaire de souches de sensibilité diminuée.
- Maladie respiratoire chronique (atteinte obstructive avec Lors des pneumonies de sévérité extrême, conduisant le
bronchectasies) patient en réanimation et faisant suite à une infection grippale,
- Insuffisance rénale chronique l’antibiothérapie associe une céphalosporine de troisième généra-
- Démence tion (C3G) au linézolide ou un glycopeptide et de la clindamycine,
du fait du risque d’infection par un S. aureus producteur de la
- Température > 37,8 ◦ C
toxine de Panton-Valentine [5] .
PES : Pseudomonas aeruginosa, entérobactérales productrices de bêtalactamases à En cas de suspicion de pneumonie d’inhalation, il n’est pas
spectre élargi (BLSE), Staphylococcus aureus résistant à la méticilline. recommandé de couvrir systématiquement les germes anaérobies
sauf en cas de suspicion d’abcès pulmonaire ou d’empyème, du
fait d’une faible incidence de ces germes [7] .
devrait alerter le clinicien sur la possibilité d’infection à l’un de ces Les PAC virales documentées à Influenza doivent être traitées
pathogènes résistants qui nécessitent une antibiothérapie adap- par traitement antiviral de type inhibiteur de neuraminidase
tée. (oseltamivir), et ce, quels que soient la durée entre les premiers
symptômes et le diagnostic. En effet, un bénéfice peut être attendu
sur la diminution de la durée des symptômes ainsi que de la
Antibiothérapie mortalité jusqu’à 5 jours après l’apparition des premiers symp-
L’antibiothérapie est l’élément central de la prise en charge tômes, avec cependant un meilleur bénéfice si l’administration est
thérapeutique des PAC, en particulier dans les formes les plus effectuée dans les premières 48 heures [86] . En cas de pneumonie
sévères. Le retard à l’introduction de l’antibiothérapie est associé post-grippale, il faut tenir compte de la possibilité d’une infec-
à une augmentation de la mortalité [5, 84] . Il convient cependant tion à H. influenzae, à un streptocoque du groupe A ou à S. aureus.
de garder en mémoire que si la célérité de mise en œuvre de La possibilité d’un S. aureus porteur de la LPV est évoquée en cas
l’antibiothérapie est d’une importance indiscutable, son choix et de forme grave d’infection respiratoire basse dans les suites de la
plus généralement la confirmation diagnostique sont tout aussi grippe [5] , sa fréquence reste néanmoins très rare en Europe (cf.
importants. La précipitation vers l’antibiothérapie en absence de supra), rendant sa couverture systématique peu pertinente.
certitude diagnostique est associée à un risque d’erreur [59] , à la fois Une situation particulière est représentée par la pneumonie
au cours des PAC [62, 82] et plus généralement des infections graves à S. pneumoniae. Au contraire de la grande majorité des germes
tels que le sepsis et le choc septique [56, 57, 59] . Une antibiothérapie responsables de PAC, il a été mis en évidence un possible béné-
probabiliste inadaptée est également un facteur de mauvais pro- fice de survie par l’usage d’une bithérapie antibiotique, incluant
nostic [55] . Le respect des recommandations concernant le choix de un macrolide, notamment chez les patients bactériémiques [87] .
l’antibiothérapie serait de ce fait associé à une amélioration de la L’intérêt des macrolides dans les pneumonies bactériémiques
probabilité de survie parmi les patients hospitalisés pour PAC [85] . pourrait même dépasser le champ des infections à S. pneumo-
La décision pratique du choix de l’antibiothérapie à mettre en niae [88] . Certains travaux ont mis en évidence, chez des patients
place est résumée dans le Tableau 3 [5, 7, 80] . Il est recommandé de en sepsis, une réduction de la mortalité en réanimation [89] ,
prendre systématiquement en compte S. pneumoniae et de mettre à 30 et 90 jours [66] , par l’usage d’une bithérapie incluant un
en œuvre une biantibiothérapie, incluant un macrolide ou une macrolide. Ce résultat est d’autant plus intéressant qu’il prend
fluoroquinolone antipneumococcique (FQAP) [7, 80] . Le choix du en compte d’autres agents pathogènes que S. pneumoniae et
second antibiotique est laissé à la discrétion du clinicien, mais H. influenzae [89] . L’équipe de Michael Fine concluait ainsi une
la FQAP n’est pas retenue en cas d’usage d’une autre quinolone vaste méta-analyse des travaux réalisés jusqu’au milieu des années
dans les 3 mois précédents ainsi que chez les personnes âgées sous 2010, en confirmant le bénéfice de survie associée à une bithéra-
corticothérapie systémique [5] . pie incluant un macrolide [90] . Une large étude suisse randomisée
S’il existe des facteurs associés à une infection par P. aeruginosa, ne retrouve cependant pas ce gain de survie, mais confirme
l’antibiothérapie doit prendre en compte ce germe, sans négliger l’amélioration de l’évolution plus souvent favorable lors de l’usage
S. pneumoniae, raison pour laquelle, à la ceftazidime, sont préférés d’une biantibiothérapie chez des patients de gravité initialement
l’association pipéracilline/tazobactam ou un carbapénème, voire plus modérée [91] . Ce travail n’est cependant pas confirmé par une
le céfépime [5] . Les recommandations américaines proposent une autre étude randomisée, hollandaise [92] .
stratégie de traitement qui peut reposer au choix sur une bianti- Dans les états de choc septique, la mise en place d’une
biothérapie comprenant un des antibiotiques précédemment cités bithérapie est également associée à un gain de survie, indépen-
auquel est associée une fluoroquinolone, ou sur une triple antibio- damment du type de second antibiotique [93] . Cependant, la classe

Tableau 3.
Stratégie de traitement initial chez les patients atteints de pneumonie aiguë communautaire grave.
Contexte Traitement initial
Régime standard C3G (céfotaxime/ceftriaxone)
+ macrolide (azithromycine/clarithromycine) ou fluoroquinolone (lévofloxacine/moxifloxacine)
Suspicion de pneumonie à SARM toxinique Régime standard
+ linézolide
ou + clindamycine + vancomycine
Risque d’infection à Pseudomonas aeruginosa ␤-lactamine antipyocianique active sur Ou
- Antécédent de prélèvement pulmonaire positif à S. pneumoniae (tazocilline, céfépime, imipénem, ␤-lactamine antipyocianique
P. aeruginosa méropénem) + fluoroquinolone
- Bronchectasie + macrolide ou fluoroquinolone (couverture de
Legionella et autres intracellulaires)
+ aminoside antipyocyanique
(amikacine/tobramycine)

C3G : céphalosporine de troisième génération ; SARM : Staphylococcus aureus résistant à la méticilline.

6 EMC - Anesthésie-Réanimation
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antibiotique semble jouer un rôle puisque l’association d’un tend à décroître significativement [7, 62, 80] , pouvant être réduite
macrolide avec une ß-lactamine est liée à une amélioration de à environ 3 jours en cas d’évolution favorable [103] , les délais
la survie en comparaison avec une bithérapie utilisant une fluo- recommandés pour les formes plus sévères restent de l’ordre de
roquinolone. Ces dernières observations ont été confirmées par 5 à 7 jours [5, 7, 62, 80] . L’élément majeur est d’adapter la durée
les méta-analyses des résultats de travaux cliniques, mettant en d’antibiothérapie à l’évolution de la maladie et de la réduire autant
évidence une absence de bénéfice de survie par l’usage de fluo- que possible pour prévenir la sélection ultérieure des pathogènes.
roquinolones chez des patients de gravité modérée à sévère [94] .
Un autre travail a confirmé l’absence d’intérêt des fluoroquino-
lones ainsi que des cyclines dans ce contexte [88] . L’intérêt observé Traitements adjuvants
des macrolides ne semble curieusement pas lié à la sensibilité
des germes à cet antibiotique [88] . Il semble que ce bénéfice soit Les formes graves de PAC peuvent s’associer à deux types de
secondaire aux propriétés anti-inflammatoires des macrolides [95] complications : une défaillance de l’organe infecté, conduisant
plus qu’à leurs effets antibiotiques [62] . L’absence de bénéfice de la à une détresse respiratoire, et/ou une défaillance secondaire à la
bithérapie par macrolide est d’ailleurs parfois corrélée à l’absence gravité du processus infectieux (sepsis ou choc septique avec pré-
de bénéfice d’un traitement anti-inflammatoire stéroïdien dans la sence d’altérations fonctionnelles d’un ou de plusieurs organes
prise en charges des PAC sévères, associées à une réponse inflam- ou fonctions). Dans ces conditions, un traitement spécifique de
matoire systémique marquée [96] . chaque situation doit être entrepris.
En dépit de ces éléments d’intérêt indéniable, le bénéfice de
la biantibiothérapie par ␤-lactamine et macrolide au cours de Assistance ventilatoire
la PAC reste incertain [97] . La grande hétérogénéité des tableaux La survenue d’une défaillance respiratoire compliquant le pro-
cliniques, de leur sévérité, des pathogènes responsables, de cessus infectieux évolutif peut nécessiter la mise en place d’une
leur profil de sensibilité et la variabilité des travaux cliniques ventilation mécanique. La correction de l’hypoxémie est une
rendent toute conclusion définitive délicate [80] . Les derniers tra- urgence, son retard étant associé à un retard à l’antibiothérapie
vaux méta-analytiques réalisés restent néanmoins favorables à mais également à une augmentation de la mortalité [54] . Cette ven-
l’hypothèse d’un bénéfice d’efficacité sans modification de la sur- tilation est le plus souvent invasive, à l’exception des situations
vie de la bithérapie [98] . Dans ce contexte, et malgré l’absence de où le patient est immunodéprimé [104, 105] .
recommandations, il semble pertinent de poursuivre la biantibio- L’usage de la ventilation non invasive (VNI) au cours de
thérapie initiale pour une durée de 3 jours lors de la prise en charge pneumonies communautaires hypoxémiantes chez les patients
initiale des PAC sévères. immunocompétents reste incertain [105] , mais tend à s’étendre [106] .
La durée de l’association du macrolide au traitement par ␤- Une méta-analyse récente a mis en évidence que l’usage de la
lactamine n’est pas clairement établie. Dans l’étude de Metersky VNI en cas de PAC grave chez des patients sans antécédent de
et al., l’effet de ce traitement devient statistiquement significa- BPCO permettrait de diminuer le recours à l’intubation orotra-
tif pour une double antibiothérapie d’au moins 96 heures [88] . chéale ainsi que la mortalité en réanimation [106] . Cependant,
L’importance d’un tel délai est cependant incertaine dans la les dernières recommandations européennes ne préconisent pas
mesure où une amélioration de la survie a également été objecti- l’usage de la VNI systématique dans le cadre des détresses res-
vée avec des durées de traitement beaucoup plus courtes [66] . La piratoires de novo, dont font partie la vaste majorité des PAC
durée de la bithérapie est néanmoins considérée comme devant graves [107] . En effet, les difficultés de contrôle strict des volumes
être supérieure à 2 jours. pulmonaires sous VNI peuvent conduire à l’apparition de lésions
L’antibiothérapie des S. aureus porteurs de LPV est avant tout induites par le ventilateur [108] . Dans une étude publiée par Anto-
celle d’une souche résistante à la méticilline. Comme toutes les nelli et al., s’intéressant aux facteurs d’échec de la VNI chez des
infections respiratoires, tout retard à la mise en place d’une anti- patients en détresse respiratoire, un des facteurs mis en évidence
biothérapie adaptée est grevé d’une surmortalité [62, 80, 99] . Ces est l’existence d’une pneumonie aiguë communautaire [109] . Le
S. aureus porteurs de LPV sont sensibles au linézolide et à la recours à la VNI dans ce contexte devrait ainsi être limité chez des
vancomycine [71, 74] mais, contrairement à la plupart des souches patients sélectionnés, bénéficiant d’une surveillance rapprochée,
résistantes à la méticilline qui portent également des résistances à dans des services rompus à cette technique, et avec une réévalua-
d’autres classes antibiotiques, la souche porteuse de LPV est sen- tion précoce (en général après une heure de VNI) pour décider de
sible à la clindamycine, au cotrimoxazole, aux fluoroquinolones, la poursuite de la technique ou au contraire de l’intubation oro-
aux tétracyclines ou encore à la gentamicine [71] , même si certaines trachéale. D’autre part, l’absence de bénéfice précoce de la VNI est
souches sont résistantes aux quinolones [71] . un argument fort en défaveur de sa poursuite [110] .
Une réévaluation de l’efficacité de l’antibiothérapie doit être La réduction des lésions parenchymateuses pulmonaires secon-
systématiquement réalisée dans les 48 à 72 heures suivant daires à la ventilation mécanique doit également être prise en
l’introduction du traitement probabiliste, afin de confirmer la compte dans les infections respiratoires les plus graves. Les spé-
validité de l’antibiothérapie en cours, à la fois par le contrôle de cificités de la prise en charge ventilatoire du syndrome de détresse
l’évolution clinique et par une étude de l’antibiogramme (en cas respiratoire aiguë sortent du cadre de cet article, mais des recom-
de positivité des prélèvements) [5, 7, 59, 80] . Il semble qu’un relais mandations internationales ont été établies sur ce sujet. Enfin,
précoce par voie orale (J3 à condition que le patient soit sta- si l’oxygénation nasale à haut débit (ONHD) n’est pas spéci-
bilisé) ne soit pas associé à une modification du pronostic [100] . fiquement recommandée dans ce cadre, elle pourrait devenir
Des critères objectifs autorisant le passage à la voie orale ont été un support ventilatoire intéressant chez les patients présentant
validés dans le cadre d’une démarche plus large d’optimisation une PAC grave hypoxémique en première intention afin d’éviter
de la prise en charge thérapeutique des patients souffrant de l’intubation orotrachéale.
PAC et nécessitant une hospitalisation [101] . Dans cette étude,
l’amélioration clinique avec réduction de la fièvre, de la fré-
quence respiratoire, stabilisation hémodynamique, absence de
Médicaments adjuvants
décompensation sévère d’une comorbidité, réduction et absence Dans les formes graves d’infections, certaines interventions ont
de localisation infectieuse secondaire autorisait le passage à la voie été proposées.
orale [101] . Cette attitude était associée à une réduction de la durée La protéine C activée (drotrécogine alfa activée, Xigris® ) a été
d’antibiothérapie intraveineuse (2 vs 4 jours en médiane) [101] . porteuse d’espoir pendant près d’une décennie, même s’il semble
Ces éléments, bien qu’anciens, restent d’actualité du fait de la que son effet soit faible ou absent [13] , du moins dans les conditions
difficulté de passage à la voie orale [102] . actuelles de son utilisation, raison pour laquelle elle n’est plus
L’antibiothérapie peut être interrompue précocement en cas disponible.
d’amélioration clinique (normalisation des constantes vitales, L’introduction d’une corticothérapie à visée d’opothérapie sub-
reprise de l’alimentation, absence de confusion), tout en conser- stitutive a également été étudiée dans le contexte du choc
vant une durée minimale de 5 jours de traitement antibiotique [7] . septique, mettant en évidence des résultats favorables [111] . Les
Si la durée de l’antibiothérapie des formes les moins sévères corticoïdes pourraient également favoriser la correction de l’état

EMC - Anesthésie-Réanimation 7
36-971-A-10  Pneumonies communautaires graves de l’adulte immunocompétent, hors Covid-19

Pneumonie aiguë
communautaire (PAC)
PAC :
• Signes fonctionnels respiratoires
+
• Fièvre
+
• Opacité récente sur la RxT/échographie

PAC grave ?
Prise en charge ambulatoire • Terrain : âge, comorbidités, vie en institution
ou hospitalière ? Non • Paramètres clinico-biologiques : hypoxémie,
— Terrain polypnée, hypotension, IRA
— Scores Fine/CURB-65 • Scores : ATS (1 critère majeur ou 3 critères
mineurs)

Oui

Hospitalisation
± admission en soins critiques

Examens Traitement Traitements adjuvants Support ventilatoire


complémentaires — Antibiotique Corticoïdes — VNI
— Hémocultures C3G + macrolide ou FQAP — Infection SARS-CoV2 À discuter en 1re intention
— ECBC/prélèvement profond Discuter couverture — Choc septique réfractaire si BPCO sous-jacente
si ventilation invasive P.Aeruginosa ou SARM — ONHD
— Antigénuries L.pneumophila/ si contexte évocateur Oxygénorequérance
S.pneumoniae — Antiviral importante, absence
— PCR nasopharyngée Oseltamivir si grippe de troubles de conscience
(dont grippe/Covid si période — IOT
épidémique) D’emblée si troubles
de conscience/hypoxémie
sévère
En 2e intention si échec
des autres techniques

Figure 1. Algorithme d’orientation et prise en charge des pneumonies aiguës communautaires. ATS : l’American Thoracic Society ; BPCO : bronchopneu-
mopathie chronique obstructive ; C3G : céphalosporines de troisième génération ; CURB : confusion, urea, respiratory rate, blood pressure, 65 years ; ECBC :
examen cytobactériologique des crachats ; FQAP : fluoroquinolone antipneumococcique ; IOT : intubation orotrachéale ; IRA : insuffisance rénale aiguë ;
ONHD : oxygénation nasale à haut débit ; PCR : polymerase chain reaction ; RxT : radiographie thoracique ; SARM : Staphylococcus aureus résistant à la
méticilline ; SARS : severe acute respiratory syndrome ; VNI : ventilation non invasive.

de choc et réduire la durée de l’hospitalisation en réanima- l’hétérogénéité des essais inclus et des qualités méthodologiques
tion [111, 112] . variables. La variabilité des résultats des différentes études menées
Outre la possibilité d’une suppléance partielle de la fonc- est donc probablement pour partie liée à la dose et à la durée de
tion surrénalienne, la corticothérapie systémique pourrait avoir la corticothérapie, l’excès de réduction de l’inflammation étant
une autre indication dans le cadre des infections respiratoires probablement aussi délétère que l’excès de la réponse inflamma-
basses [113] , en permettant de réduire l’intensité de la réponse toire [113, 116, 117] .
inflammatoire [114] , qui est majeure au cours de la pneumo- L’absence d’étude prospective claire dans ce contexte rend toute
nie [113] . Malgré un rationnel indiscutable, le bénéfice clinique conclusion définitive impossible et l’usage d’une corticothéra-
de la corticothérapie systématique au cours des PAC reste incer- pie systémique au cours des PAC sévères doit être évalué au cas
tain. Dans une étude randomisée italienne, en double aveugle par cas en fonction du contexte. L’intérêt potentiel des statines
et multicentrique, Confalonieri et al. ont mis en évidence une dans la prise en charge des PAC sévères a également été évo-
réduction de la gravité, de la durée de suppléance d’organe, qué, du fait de son bénéfice potentiel au cours des processus
d’hospitalisation ainsi qu’une amélioration de la survie des infectieux graves. Les résultats initiaux étaient encourageants [119] .
patients au cours des PAC sévères nécessitant l’hospitalisation Malheureusement, si leur bénéfice sur l’efficacité du système pha-
en réanimation [115] . D’autres travaux ont retrouvé des résul- gocytaire et notamment des fonctions des neutrophiles au cours
tats identiques [113] . Chez des patients de gravité moindre, une des pneumonies semble établi [120] , leur intérêt clinique reste
accélération de la stabilisation clinique a été mise en évidence, incertain [121] , notamment du fait de l’absence d’effet clinique-
mais au prix des complications, notamment métaboliques, de la ment significatif sur la réponse inflammatoire au cours des PAC
corticothérapie par prednisone [116, 117] . Plusieurs méta-analyses sévères [121] .
tendent à confirmer le bénéfice sur la mortalité [118] . Ces résul- D’autres traitements immunomodulateurs restent à l’essai, sans
tats doivent cependant être interprétés avec précaution, au vu de bénéfice notable à ce jour [122] .

8 EMC - Anesthésie-Réanimation
Pneumonies communautaires graves de l’adulte immunocompétent, hors Covid-19  36-971-A-10

Les immunoglobulines polyvalentes par voie veineuse ont éga- Tableau A.1.
lement été étudiées, montrant un bénéfice à une période où Score de Fine (d’après [24] ).
l’antibiothérapie n’était pas systématique. Les essais récents, en Critères Points
revanche, ne retrouvent pas de bénéfice de ces immunoglobu-
lines au cours des PAC, y compris lors de l’usage de préparations Facteurs démographiques
spécifiques [123] . Leur intérêt actuel semble plus improbable, à - Âge 1 année−1
l’exception des situations où aucun antibiotique n’est utilisable - Sexe féminin –10
du fait du profil de résistance de l’agent pathogène [124] .
- Vie en institution 10
Comorbidités
Mise en place des traitements - Néoplasie 30
Une synthèse de la prise en charge thérapeutique est réali- - Hépatopathie 20
sée dans la Figure 1. Chacune des interventions thérapeutiques - Insuffisance cardiaque 10
est associée à une amélioration de la prise en charge. Par - Maladie neurovasculaire 10
ailleurs, la rapidité d’introduction de ces thérapeutiques est éga-
- Maladie rénale 10
lement majeure, notamment celle de l’antibiothérapie. Malgré
l’importance de ces notions, l’application pratique de ces inter- Examen clinique
ventions est le plus souvent très limitée au lit du patient. On - Confusion 20
retrouve notamment un délai important dans l’introduction - FR > 30 min−1 20
de l’antibiothérapie et la correction de troubles hémodyna- - PAS < 90 mmHg 20
miques est souvent imparfaite dans les premières heures, qui
- T◦ : < 35 ◦ C ou ≥ 40 ◦ C 15
sont pourtant cruciales. Ces notions ont conduit de nombreuses
équipes à mettre en place une prise en charge structurée sous la - Tachycardie ≥ 125 min−1 10
forme de filières et de recommandations locales formalisées [125] . Examens complémentaires
L’implémentation de ces interventions permet de réduire le délai - pH < 7,35 30
d’intervention diagnostique [125] et d’améliorer la réalisation de - Urée ≥ 11 mmol l−1 20
prélèvements microbiologiques [126] . La précocité de l’intervention
- Natrémie < 130 mmol l−1 20
se traduit par une rapidité d’introduction de l’antibiothérapie [126] ,
qui est plus souvent adaptée [125, 127] avec une meilleure couver- - Glycémie ≥ 14 mmol l−1 10
ture des germes atypiques [125, 127] . Outre l’antibiothérapie, ces - Hématocrite < 30 % 10
études montrent une amélioration de la mise en œuvre d’un - Épanchement pleural 10
panel de mesures thérapeutiques [62, 80] . Si la constitution exacte - PaO2 < 60 mmHg 10
de ce groupe de mesures reste à définir, un certain nombre de fac-
Interprétation
teurs doivent y figurer. On retrouve en particulier l’évaluation de
l’altération de l’hématose [7, 62, 80] , la réalisation de prélèvements Nombre de points Classe Mortalité (%) Prise en charge
microbiologiques, la vitesse d’administration de la première < 50 I 0,1 Ambulatoire
dose d’antibiotique efficace [128, 129] , l’évaluation de la gravité de 51–70 II 0,6
l’atteinte pulmonaire et la notion de vaccination dans les situa- 71–90 III 2,8 Selon les cas
tions où elle devrait être réalisée [66] . Enfin, la prévention de la
91–130 IV 8,2 Hospitalisation
récidive de pneumonie doit être réalisée aussi souvent que pos-
sible, notamment par les vaccinations antipneumococcique et > 130 V 29,2
antigrippale dans les situations qui les requièrent. FR : fréquence respiratoire ; PaO2 : pression partielle artérielle en oxygène ; PAS :
Un cas clinique (Annexe B) vient compléter cette synthèse de pression artérielle systolique.
la prise en charge thérapeutique.

Un diagnostic précoce, une orientation adaptée et une antibiothé-


 Conclusion rapie dirigée contre les germes les plus probables sont les éléments
centraux de la prise en charge des patients hospitalisés pour une
Les pneumonies aiguës graves sont des affections fréquentes, PAC grave.
dont la morbidité et la mortalité restent à ce jour très importantes.

Déclaration de liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens


d’intérêts en relation avec cet article.
“ Points essentiels
 Annexe A. Scores d’évaluation
• Les PAC graves sont associées à une mortalité élevée.
• La gravité des PAC est avant tout évaluée par la clinique. de la gravité des pneumonies
• La gravité des PAC peut être approchée par des scores aiguës communautaires
(ATS/SMART-COP).
• La bactérie la plus fréquemment retrouvée est S. pneu- Voir le contenu des TableauxA.1 à A.5.
moniae.
• De nombreux virus pathogènes sont responsables de
PAC graves.  Annexe B. Cas clinique :
• L’urgence repose sur l’administration la plus pré- une diarrhée fébrile
coce possible d’une antibiothérapie probabiliste couvrant
S. pneumoniae. Une patiente de 65 ans souffre d’altération progressive de
• La pandémie à SARS-CoV2 a considérablement modifié l’état général sur moins d’une semaine. Il existe une notion ini-
l’épidémiologie des PAC pour une durée indéterminée. tiale de diarrhée, transitoire. Il apparaît ensuite une sensation
• Il existe une émergence de germes résistants aux anti- de fièvre (non mesurée à domicile), une dyspnée, puis une toux
biotiques (de type PES) responsables de PAC. initialement non productive et secondairement associée à une
bronchorrhée muqueuse, puis purulente. À J5, la patiente consulte
aux urgences devant la dégradation respiratoire et l’impossibilité

EMC - Anesthésie-Réanimation 9
36-971-A-10  Pneumonies communautaires graves de l’adulte immunocompétent, hors Covid-19

Tableau A.2.
Score CURB-65 (d’après [25] ).
Critères Points
C Confusion 1
U Urée > 7 mmol l−1 1
R FR ≥ 30 min−1 1
B PAS ≤ 90 mmHg ou PAD ≤ 60 mmHg 1
65 Âge > 65 ans 1
Interprétation
Nombre de points Stratification Mortalité à J30 (%)
0–1 1 1,5
2 2 9,2
3–5 3 22,0

FR : fréquence respiratoire ; PAD : pression artérielle diastolique ; PAS : pression artérielle systolique.

Tableau A.3.
Score de l’American Thoracic Society (d’après [8] ).
Critères majeurs Critères mineurs
- Nécessité de ventilation invasive - FR ≥ 30 min−1
- Choc septique - Rapport PaO2 /FiO2 ≤ 50
- Infiltrat multilobaire
- Confusion/désorientation
- Urée > 7 mmol l−1
- Leucopénie (<-4 G l−1 )
- Thrombopénie (< 100 G l−1 )
- Hypothermie (< 36 ◦ C)
- Hypotension (PAS < 90 mmHg)
La pneumonie est dite sévère s’il existe un critère majeur ou au moins 3 critères mineurs

FiO2 : fraction inspirée en oxygène ; FR : fréquence respiratoire ; PaO2 : pression partielle artérielle en oxygène ; PAS : pression artérielle systolique.

Tableau A.4.
Score SMART-COP (d’après [27] ).
Critères Points
- PAS < 90 mmHg 1
- Atteinte mutilobaire sur la radiographie thoracique 1
- Hypoalbuminémie 1
- Fréquence respiratoire : 1
≤ 50 ans : ≥ 25 min−1
> 50 ans : ≥ 30 min−1
- Tachycardie ≥ 125 min−1 1
- Confusion 1
- Hypoxémie : 2
≤ 50 ans : PaO2 < 60 mmHg ou SpO2 < 90 % ou rapport PaO2 /FiO2
< 250
> 50 ans : PaO2 < 70 mmHg ou SpO2 < 93 % ou rapport PaO2 /FiO2
< 333
- pH < 7,35 2
Interprétation
Nombre de points Risque de support vasopresseur ou ventilation invasive
0–2 Faible
3–4 Modéré
5–6 Élevé
≥7 Très élevé

FiO2 : fraction inspirée en oxygène ; PaO2 : pression partielle artérielle en oxygène ; PAS : pression artérielle systolique ; SMART-COP : systolic blood pressure, multilobar chest
radiography involvement, albumin level, respiratory rate, tachycardia, confusion, oxygenation, and arterial pH ; SpO2 : saturation pulsée en oxygène.

de réalisation des gestes de la vie quotidienne. À l’arrivée, on mie. Le bilan hépatique est normal, de même que l’hémostase.
note des signes de mauvaise tolérance clinique avec détresse Dans le contexte pandémique, il est décidé de réaliser une PCR
respiratoire (usage des muscles respiratoires accessoires, tirage SARS-CoV2 qui revient positive. Deux paires d’hémocultures
sus-claviculaire), une obnubilation (Glasgow : 13) et des mar- sont prélevées devant la fièvre et la sévérité du tableau
brures des genoux sans altération de la macrocirculation. La clinique.
biologie réalisée objective la présence d’une hypoxémie (PaO2 : La prise en charge initiale est celle d’une Covid-19 sévère, avec
64,9 mmHg en air ambiant), une hyperleucocytose (13 100 mm−3 ) introduction d’une corticothérapie systémique par dexamétha-
à polynucléaires neutrophiles (86,2 %), et l’absence de dysnatré- sone et d’une anticoagulation préventive renforcée.

10 EMC - Anesthésie-Réanimation
Pneumonies communautaires graves de l’adulte immunocompétent, hors Covid-19  36-971-A-10

Tableau A.5. [8] Mandell LA, Wunderink RG, Anzueto A, Bartlett JG, Camp-
Score CAP-PIRO (d’après [28] ). bell GD, Dean NC, et al. Infectious Diseases Society of
America/American Thoracic Society consensus guidelines on the
Critères Points attribués à chaque
management of community-acquired pneumonia in adults. Clin Infect
variable présente dans les
Dis 2007;44(Suppl. 2):S27–72.
24 heures de l’admission
[9] Tierney DM, Huelster JS, Overgaard JD, Plunkett MB, Boland LL,
- Comorbidités (BPCO, 1 St Hill CA, et al. Comparative performance of pulmonary ultrasound,
immunosuppression) chest radiograph, and CT among patients with acute respiratory failure.
- Âge > 70 ans 1 Crit Care Med 2020;48:151–7.
[10] Smit JM, Haaksma ME, Winkler MH, Heldeweg MLA, Arts L, Lust
- Bactériémie 1
EJ, et al. Lung ultrasound in a tertiary intensive care unit population:
- Opacités multilobaires sur la 1 a diagnostic accuracy study. Crit Care 2021;25:339.
radiographie thoracique [11] Renaud B, Santin A, Coma E, Camus N, Van Pelt D, Hayon J, et al.
- Hypoxémie sévère 1 Association between timing of intensive care unit admission and out-
- État de choc 1
comes for emergency department patients with community-acquired
pneumonia. Crit Care Med 2009;37:2867–74.
- Insuffisance rénale aiguë 1 [12] Ewig S, Woodhead M, Torres A. Towards a sensible comprehen-
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Interprétation [13] Brown SM, Dean NC. Defining and predicting severe community-
acquired pneumonia. Curr Opin Infect Dis 2010;23:158–64.
Nombre de points Stratification selon 4 niveaux de
[14] Angus DC, Marrie TJ, Obrosky DS, Clermont G, Dremsizov TT, Coley
risque
C, et al. Severe community-acquired pneumonia: use of intensive care
0–2 Faible services and evaluation of American and British Thoracic Society
3 Moyen Diagnostic criteria. Am J Respir Crit Care Med 2002;166:717–23.
4 Élevé [15] Nair GB, Niederman MS. Updates on community acquired pneumonia
management in the ICU. Pharmacol Ther 2021;217:107663.
5–8 Très élevé [16] Rello J, Rodriguez A, Torres A, Roig J, Sole-Violan J, Garnacho-
BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive. CAP-PIRO : community- Montero J, et al. Implications of COPD in patients admitted to the
acquired pneumonia – predisposition, insult, response, and organ dysfunction. intensive care unit by community-acquired pneumonia. Eur Respir J
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Le tableau clinique se complète dans les heures suivantes, avec [17] Lim WS, Baudouin SV, George RC, Hill AT, Jamieson C, Le Jeune
apparition d’un foyer de crépitants de base droite. Le cliché thora- I, et al. BTS guidelines for the management of community acquired
cique retrouve la présence d’une volumineuse opacité alvéolaire pneumonia in adults: update 2009. Thorax 2009;64(Suppl. 3):iii1–55.
[18] Ito A, Ishida T. Diagnostic markers for community-acquired pneumo-
de base droite, associée à un bronchogramme alvéolaire. Le carac-
nia. Ann Transl Med 2020;8:609.
tère très peu évocateur de Covid-19 devant ces éléments conduit
[19] Boussekey N, Leroy O, Georges H, Devos P, d’Escrivan T, Guery B.
à un prélèvement respiratoire microbiologique et à l’introduction Diagnostic and prognostic values of admission procalcitonin levels in
d’une antibiothérapie probabiliste par ceftriaxone (Rocéphine® ) community-acquired pneumonia in an intensive care unit. Infection
et spiramycine (Rovamycine® ) et au transfert en réanimation. 2005;33:257–63.
La dégradation respiratoire rapide nécessite l’intubation tra- [20] Huang DT, Weissfeld LA, Kellum JA, Yealy DM, Kong L, Mar-
chéale et la ventilation mécanique ainsi que la poursuite de tino M, et al. Risk prediction with procalcitonin and clinical
l’antibiothérapie. À J3 de l’hospitalisation en réanimation, la rules in community-acquired pneumonia. Ann Emerg Med 2008;52:
pneumonie bactérienne communautaire sévère à Streptococcus 48e2–58e2.
pneumoniae est confirmée, responsable de la surinfection d’une [21] Bui HN, Vargas F, Gruson D, Hilbert G. Where to manage commu-
Covid-19 peu symptomatique. Le prélèvement respiratoire et nity acquired pneumonia? The assessment of severity. Rev Mal Respir
deux hémocultures initiales sont positifs. L’évolution est fina- 2011;28:240–53.
lement favorable, permettant l’extubation et le transfert de la [22] Bermejo-Martin JF, Cilloniz C, Mendez R, Almansa R, Gabarrus A,
patiente en pneumologie. Ceccato A, et al. Lymphopenic community acquired pneumonia (L-
En conclusion, il s’agit d’une Covid-19, surinfectée, responsable CAP), an immunological phenotype associated with higher risk of
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P. Joly.
M. Tran.
C. Bruel.
Service de réanimation & Soins critiques, Groupe hospitalier Paris-Saint-Joseph, 185, rue Raymond Losserand, 75014 Paris, France.
B. Pilmis.
Unité mobile de microbiologie clinique, Groupe hospitalier Paris-Saint-Joseph, 75014 Paris, France.
F. Philippart (fphilippart@ghpsj.fr).
Service de réanimation & Soins critiques, Groupe hospitalier Paris-Saint-Joseph, 185, rue Raymond Losserand, 75014 Paris, France.
Endotoxines, structures et réponse de l’hôte, Département de microbiologie, Institut de biologie intégrative de la cellule, UMR 9891 CNRS-CEA-Paris-Saclay
Université, 1, avenue de la Terrasse, 98190 Gif-sur-Yvette, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Joly P, Tran M, Bruel C, Pilmis B, Philippart F. Pneumonies communautaires graves de l’adulte
immunocompétent, hors Covid-19. EMC - Anesthésie-Réanimation 2023;43(2):1-14 [Article 36-971-A-10].

14 EMC - Anesthésie-Réanimation

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