Aux Frontières

de L'E sprit
 Aux Frontières
de L'E sprit

NICOLAS DUMONT

© IDEO 2020, un département de City Éditions

Couverture : Shutterstock/Studio City
ISBN : 978-2-8246-1739-8
Code Hachette : 56 7773 6
Collection dirigée par Christian English & Frédéric Thibaud
Catalogues et manuscrits : city-editions.com/IDEO
Conformément au Code de la Propriété Intellectuelle, il est interdit
de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, et ce,
par quelque moyen que ce soit, sans l’autorisation préalable de l’éditeur.
Dépôt légal : Septembre 2020

Sommaire
À qui est destiné cet ouvrage ?................................. 9
I. Comprendre les états
modifiés de conscience
1. Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?........... 13
Définitions................................................................ 13
Quatre exemples d’états de conscience
modifiés quotidiens.................................................... 18
D’autres exemples d’états modifiés de conscience
du quotidien............................................................. 22
Cartographie des quatre grands type d’EMC................. 25
Les EMC non ordinaires............................................. 27
Les EMC : le passager clandestin
de la culture occidentale ?.......................................... 33
Fonctionnement rationnel et fonctionnement intuitif............ 36
Quels sont les effets neurologiques des EMC ?............... 39
2. Comment provoquer un EMC ?............................... 43
Principaux moyens pour modifier l’état de conscience...... 43
Modifier sa conscience : une pulsion naturelle
du monde animal ?................................................... 47
Deux modes de fonctionnement en nous........................ 48
II. Utiliser les EMC auto-provoqués
au quotidien
Introduction .......................................................... 55
1. Calmer le corps, le cœur et le mental....................... 59
Qu’est-ce que méditer ?.............................................. 59
La respiration, notre grande alliée................................ 61
La respiration consciente en cohérence cardiaque........... 63
La méditation des trois dan tien.................................... 67
2. Se dynamiser......................................................... 77
Sport et EMC .......................................................... 78
La méditation dynamique d’Osho ................................ 81
3. Régler des problèmes concrets, chercher
des solutions.......................................................... 85
Les rêves : la voie royale vers l’inconscient..................... 85
L’autohypnose........................................................... 94
4. Explorer de nouveaux territoires............................ 115
Marche consciente avec respiration circulaire................ 116
Variante avec musique.............................................. 123
 III. Les états modifiés de conscience pour aider La règle du G.C.I. ................................................... 169
Des critères d’un bon guide de groupe de transe .......... 171
et accompagner vos enfants
3. Illustration d’un groupe EMC : la respiration
1. Les états modifiés de conscience chez l’enfant......... 127 holotropique........................................................ 173
Introduction............................................................. 127 Qu’est-ce que la respiration holotropique ?................... 174
Le cas des enfants « rêveurs »..................................... 128 Comment se déroule une séance de respiration
Techniques d’hypnose pour aider vos enfants................. 131 holotropique ?......................................................... 176
Technique des trois dessins ........................................ 133 Le rôle d’accompagnant............................................ 177
Les contes thérapeutiques........................................... 137 Le déroulé de la transe.............................................. 179
Que vit-on pendant une respiration holotropique ?.......... 182
2. Les états modifiés de conscience chez l’adolescent.. 139
Adolescence : la faille initiatique................................. 139
Conclusion.......................................................... 189
Répondre à la faille initiatique.................................... 144
Gérer les problèmes de l’ado avec les EMC
au quotidien............................................................ 148

IV. Aller voir un professionnel des EMC

1. Aller voir un professionnel des EMC ?.................... 153

Différentes catégories de professionnels des EMC ......... 154
En groupe ou individuel ?.......................................... 158
Faire un chemin individuel avec un professionnel
des EMC ?............................................................. 160

2. Participer à des groupes mobilisant les états d’expansion

de conscience...................................................... 163
Quand et comment aller dans de tels groupes ?............. 163
Les types de groupes ............................................... 165
 Avant-propos

À qui est destiné

cet ouvrage ?

J e m’adresse ici à toute personne ne connaissant

rien aux états modifiés de conscience et souhai-
tant s’y repérer.

Ne cherchez pas ici un livre précis, académique,

dont chaque idée est référencée.

Mon ouvrage est celui d’un professionnel de terrain,

psychologue clinicien, psychothérapeute transperson-
nel, formateur, créateur de l’hypnothérapie érickson-
nienne transpersonnelle.

Les EMC sont mon quotidien et ma passion depuis

toujours, et professionnellement depuis presque 20
ans : pour moi-même et mes patients. Je les expéri-

9
 Aux Frontières de L'Esprit

mente, les explore, les pratique quotidiennement, et

dans différents contextes. L’intention de cet ouvrage
est de partager des repères simples et pragmatiques
pour que des personnes, non éduquées à ce champ de
connaissances, puissent s’y retrouver. Il faut pour cela
de l’éducation, l’intégration de nouveaux concepts et
surtout… expérimenter ! En réalité, la compréhension Partie I
des EMC vient à partir de l’expérience, et non l’in-
verse : cela demande de s’impliquer.
COMPRENDRE LES ÉTATS
C’est pourquoi les EMC sont une école du lâcher-
prise et du vivre pleinement. MODIFIÉS DE CONSCIENCE
L’Occident a perdu la culture de la transe depuis
le xviiie siècle environ, fonctionnant depuis sur la
base de fantasmes et d’un imaginaire culturel tronqué.
L’objectif de ce livre sera donc de restaurer des repères
simples en dessinant un plan de cette Terra Incognita
(Terra Perdida plus exactement !) que sont les états
modifiés de conscience, et de fournir les moyens pour
commencer à s’y repérer et, si le cœur vous en dit, à
les expérimenter en toute sécurité.
 1

Qu’est-ce qu’un état

modifié de conscience ?

Définitions
T

P arler d’état modifié de conscience (EMC)

nécessite d’abord de définir de quoi nous
parlons. En préliminaire, il nous faut différencier la
conscience des états de conscience.

' La conscience

Définir la conscience est un sacré défi. Je me borne-

rai dans cet ouvrage, qui se veut pratique, à une défi-

13
 Aux Frontières de L'Esprit
nition simple, simpliste également, mais pragmatique
pour notre visée :
La conscience est la présence simple et immédiate
à soi et au monde, doublée de la connaissance de
cette présence :
Je suis conscient d’être conscient =
Je sais que je suis présent.
On oppose la conscience à l’inconscience : on est
inconscient quand on perd la conscience (sommeil ou
« perte de connaissance »), ou quand une information
n’est pas accessible à notre saisie (ex : les souvenirs de
la vie intra-utérine). Sigmund Freud, le créateur de la
psychanalyse, ajoutait dans sa première théorie de la
psyché la pré-conscience : par exemple, ce que nous
avons mangé à notre dernier repas n’est pas conscient,
mais est accessible à notre conscience. La sensation du
pied droit n’est peut-être pas consciente maintenant,
pendant que vous lisez, mais vous pouvez en prendre
conscience maintenant. Cette sensation n’était peut-
être que préconsciente car elle était là, en périphérie
du faisceau de votre attention consciente.
Pour établir une métaphore, si vous êtes dans le
grenier de votre maison, que vous éclairez avec une
14
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
lampe-torche, ce qui est sous le faisceau est le contenu
accessible à votre attention consciente ; ce qui est en
périphérie du faisceau, peu éclairé mais pouvant l’être
davantage en déplaçant le faisceau, est sous l’attention
pré-consciente ; enfin, ce qui ne peut être éclairé est le
territoire inconscient.
J’ajouterai, pour filer la métaphore, que tant qu’on
reste dans la maison, nous sommes dans l’inconscient
individuel, et que ce qui est à l’extérieur (monde public,
nature, ciel, espace, etc.) correspond à ce que Jung
nommait l’inconscient collectif (également accessible
en EMC).
Dans cette image, le contenu éclairé est le contenu
de la conscience (perceptions, sensations, souvenirs,
émotions, pensées). Mais les contenus ne sont pas la
conscience. La conscience est le faisceau lui-même.
Les neurosciences portent aujourd’hui une vision
stratifiée de la conscience : plus il y a de complexité
cérébrale, plus cela suppose d’intégration. L’émergence
d’un chef d’orchestre a donc été nécessaire pour ordon-
ner cette complexité : la conscience de soi.
Ainsi, pour les neurosciences contemporaines,
le cerveau « sécrète » la conscience ; la conscience
émergerait par nécessité adaptative. Cette vision est la
vision standard et acceptée. Cependant, de nombreuses
15
 Aux Frontières de L'Esprit
observations viennent la contredire (voir 1-5) et nous
sommes peut-être à quelques pas d’une révolution
phénoménale dans notre vision du monde : celle d’une
conscience qui serait première, et indépendante du
cerveau. Nous y reviendrons plus tard.
' Les états de conscience
Les états de la conscience concernent quant à eux
les différentes formes de cette saisie du monde.
État de conscience = manière avec laquelle
je suis présent à tel ou tel moment.
Dans notre métaphore du grenier, par exemple, les
différents états de conscience sont symbolisés par la
qualité du faisceau de lumière. Imaginez-les comme
les réglages que l’on peut appliquer à ce faisceau :
j’éclaire plus large (état élargi de conscience) ; j’éclaire
plus petit, moins fort ou d’une lumière confuse (état
altéré de conscience) ; je divise le faisceau de lumière
ou en change la couleur (état modifié de conscience). La
conscience recouvre donc à la fois des états plus éveillés
que pendant notre vie ordinaire (supraconscience,
états élargis de conscience, éveils), des états où elle est
16
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
égale en intensité mais fonctionne différemment (états
modifiés de conscience), ou encore des états où elle est
amoindrie (semi-conscience, conscience altérée) voire
semble nulle (inconscience). Les contenus (émotions,
sensations, perceptions, pensées, etc.), eux, changent
en fonction de la manière dont je les éclaire.
L’ethnologue Georges Lapassade définit un état
modifié de conscience (EMC) comme rassemblant
« un certain nombre d’expériences au cours desquelles
le sujet a l’impression que le fonctionnement habituel
de sa conscience se dérègle et qu’il vit un autre rapport
au monde, à lui-même, à son corps, à son identité1 ».
Nous pouvons aussi ajouter : et à l’autre.
En somme, retenez que dès qu’il y a un écart avec
un état « normal » de conscience, alors c’est un état…
modifié. Autant dire que nous passons notre temps en
état modifié de conscience !
En effet, ce qu’on appelle un «  état normal de
conscience » est en réalité une gamme d’états très
distincts les uns des autres.
Explorons quatre exemples d’états communs et
spontanés de nos vies quotidiennes, qui nous donne-
ront chacun une illustration différente :
1. États modifiés de conscience, éd. PUF, 1987
17
 Aux Frontières de L'Esprit Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?

Quatre
T exemples d’états de
La forme de ma saisie du monde s’est modifiée
conscience modifiés quotidiens et la connaissance que j’ai de cette saisie s’est
amoindrie.
O La Somnolence : l’état dans lequel je suis quand C’est un état altéré de conscience.
je somnole en écoutant un conférencier ennuyeux
est un état un peu cotonneux ; ma conscience est
présente au monde extérieur, peut-être à 30 %, mais
O La Concentration lors d’un examen : l’état de
présente au monde intérieur à 70 %, ce curseur concentration lors d’un examen est quasiment le
bougeant en fonction de moi lorsque je m’admoneste pôle opposé à celui de l’état de somnolence : mon
attention est aiguisée, mon activité mentale est
(« Reprends-toi ! »), des coups de coude du voisin,
rapide et ma mémoire libère des flots d’informa-
des changements d’intonation du conférencier…
tions. Parfois, des liens et compréhensions nouvelles
Dans cette agréable torpeur, je suis plus focalisé
surgissent. Je suis soit dans une bulle où je n’ai plus
vers l’intérieur, mes sensations corporelles fluctuent
tellement conscience des autres, mobilisé que je suis
dans un agréable brouillard, mon activité mentale
à répondre à la tâche, ou au contraire je suis hyper
est plus lente : elle devient moins logique et plus
présent à la situation extérieure et à l’environnement
sensorielle et intuitive ; un flux lent d’impressions
(ex : tâche sportive, exposé devant un jury et une
passent, voire je suis pris par un scénario interne assemblée). Mon corps est actif, mon cœur bat plus
plus élaboré. Ma conscience des autres est amoin- rapidement, je sécrète de l’adrénaline qui modifie
drie, la voix du conférencier n’est qu’une lointaine ma conscience afin que je sois plus performant.
musique. Ma conscience du temps se modifie égale-
ment. C’est un premier état modifié de conscience.
Pourtant, je suis présent à ce qui se passe au-dehors, La forme de ma saisie du monde est plus aiguisée
et si l’orateur change de ton ou s’adresse à moi, je et sélective et la connaissance que j’ai de cette
reviens immédiatement, ce qui montre que je n’étais saisie est plus intense.
pas débranché du moment, juste dans une autre C’est un état modifié de conscience.
forme de relation avec ce moment.

18 19
 Aux Frontières de L'Esprit
O La conduite automobile sur une route habi-
tuelle : mon attention ici est fractionnée. Une partie
de mon attention gère le contrôle de la route, le
changement des vitesses, la pression sur l’accélé-
rateur, le contrôle des rétroviseurs, des clignotants,
etc. En même temps, une autre partie de mon atten-
tion, complètement dissociée de la première, est
absorbée dans mon monde interne, pris dans une
réflexion ou une rêverie. Je n’entends pas le moteur,
je ne vois pas la route, le temps se contracte, si
bien que quand j’arrive, je suis surpris que le temps
soit passé si vite et je n’ai même pas mémoire de
la route !
La forme de ma saisie du monde est fractionnée
et la connaissance que j’ai de cette saisie est
orientée.
C’est un état modifié de conscience.
O Expérience esthétique d’un lever de soleil : le
soleil se lève et enflamme l’horizon : je suis saisi par
un merveilleux sentiment de beauté, d’harmonie, et
par une tendresse infinie pour le mystère de la vie.
L’émotion esthétique monte et je suis tout à coup
20
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
présent à l’ensemble du monde. J’ai une conscience
parfaite et claire de tous les éléments du paysage
ainsi que du moment dans son ensemble. En même
temps, je suis dans une profonde présence à moi-
même et au sentiment d’amour qui est là. Il n’y a
plus de pensée, je ne suis plus à distance du monde,
je suis le Monde et à la fois je me sens moi plus que
jamais. Le soleil se lève en moi.
La forme de ma saisie du monde est plus vaste,
intense et ample, et la connaissance que j’ai de
cette saisie également.
C’est un état élargi de conscience.
En psychologie, on utilise le terme d’état modifié
de conscience comme terme généraliste pour inté-
grer toutes les formes de ces états, qu’ils soient alté-
rés, modifiés ou élargis. Ce livre garde cette défini-
tion, aussi, quand vous lirez EMC, vous saurez que
c’est le terme généraliste, mais parfois je deviendrai
plus précis en parlant d’état élargi ou d’état altéré de
conscience.
21
 Aux Frontières de L'Esprit
D’autres
T exemples d’états
modifiés de conscience du
quotidien
O les différents états du sommeil : état hypnagogique
et hypnopompique, sommeil, rêve, rêve lucide, etc.
O la passion amoureuse ;
O s’absorber dans un bon livre, un bon film, ou une
bonne musique ;
O les états de « transe érotique » (le rapport sexuel, la
masturbation, l’orgasme, etc.) ;
O être pris dans une conversation stimulante où on
refait le monde avec un ami (et les heures s’écoulent
si vite !) ;
O danser à un concert ou dans une boîte de nuit ;
O avoir bu de l’alcool ou fumé du cannabis ;
O la préoccupation maternelle primaire (état fusion-
nel de la mère lors des premiers mois du bébé) ;
22
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
O se taper le doigt avec un marteau (l’attention
est toute focalisée sur la douleur, il n’y a plus de
pensées parasites, nous sommes totalement ici et
maintenant) ;
O écouter les gouttes de pluie qui tombent sur le toit
(après un moment, chaque son de goutte produit
par exemple une sensation corporelle, ce qui s’ap-
pelle « synesthésie1 » ; le silence prend une densité
différente, l’état émotionnel s’apaise, le temps se
dilate, etc.) ;
O être saisi par une émotion forte (état réduit de
conscience) ;
O être saisi par le sentiment de l’infini en regardant le
ciel étoilé, être touché par l’esthétique d’un lever de
soleil, recevoir un enfant qui naît…
O etc.
Voilà toute une gamme d’états de conscience
différents et communs. Il y a généralement un
point commun à toutes les expériences en EMC : la
conscience du temps change, le temps se ralentit ou
s’accélère. Cinq minutes peuvent sembler durer dix
secondes ou une heure.
1. La synesthésie est une expérience, classique en EMC, mais parfois constante chez
certaines personnes, dans laquelle deux ou plusieurs sens sont associés. Par exemple les
sons se traduisent en couleurs, ou les chiffres en images symboliques, ou les goûts sont
perçus par l’ensemble du corps, etc.
23
 Aux Frontières de L'Esprit
Nos états de conscience conditionnent fortement notre
vision du monde : un dépressif saisi par la souffrance de
son monde intérieur ne vit pas dans le même monde qu’un
mystique qui fait l’expérience d’une ouverture sensible
au Divin ; un comptable concentré sur ses tableaux de
chiffres ne vit pas dans le même monde qu’un médium
qui perçoit constamment autour de lui la présence d’âmes
défuntes. Nous vivons dans un monde constitué de
multiples réalités ! Quel défi, et quelle merveille que le
vivre-ensemble ! Chacun de nous détient une pièce du
puzzle qu’est ce monde si vaste et si multiple !
Nous vivons communément une grande variété
d’états de conscience, sans jamais pour autant les
modéliser. Nous passons de la rêverie à l’activité
concentrée, fumons une cigarette puis allons sur le
portable nous absorber dans une courte vidéo, puis
revenons à l’environnement extérieur car notre voisin
nous a posé la même question trois fois…
Ces multiples états de conscience font partie d’un
spectre expérientiel qui constitue notre « continuum
normal de conscience ». C’est un flux qui change sans
cesse, mais nous y sommes habitués.
Ce spectre expérientiel « normal », « ordinaire » au
sens qu’il est « dans l’ordre des choses », nous permet
de différencier ces états normaux et attendus d’états
exceptionnels ou extraordinaires.
24
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
Ainsi, nous savons reconnaître un rêve d’une
qualité différente, ou quand nous sommes dans un
état « spécial ». Nous savons aussi reconnaître que
quelqu’un n’est pas « dans son état normal ». Nous ne
pouvons souvent être plus précis, faute de cartogra-
phie, de connaissance sur ces états qui sortent de ce
que notre culture nous enseigne ou nous donne à voir
(ce serait différent si vous étiez né tibétain et aviez reçu
un enseignement bouddhiste !), mais nous savons au
moins reconnaître qu’il sort de la normale.
D’autre part, nous pouvons rechercher ces états,
en modifiant notre conscience par différents moyens :
consommation d’alcool, de psychédéliques, visite chez
un sophrologue, spectacle d’hypnose, participation à
une cérémonie chamanique, etc.
Tout cela nous amène donc à cartographier quatre
grands types d’EMC :
Cartographie
T des quatre grands
type d’EMC
Sylvie Desthiollaz1 a proposé en 2011 une carto-
graphie simple et efficace des EMC :
1. S. Desthiollaz et C.C. Fourier, États modifiés de conscience, éd. Favre, 2011
25
 Aux Frontières de L'Esprit
1. Les EMC communs et spontanés : rêve, état
hypnopompique (état au réveil) ou hypnagogique
(état à l’endormissement), transe commune (voiture,
couture, etc.), rêverie diurne, sommeil, rêve, transe
érotique, orgasme, etc. Nous avons exploré certains
de ces états dans les paragraphes précédents.
2. Les EMC provoqués (au moyen d’une tech-
nique) : hypnose, sophrologie, relaxation, respira-
tion holotropique, méditation, transe chamanique,
danses rituelles, etc. Nous nous centrerons sur
quelques-uns de ces états dans cet ouvrage.
3. Les EMC altérés et pathologiques : délire
hallucinatoire, état crépusculaire, démence sénile,
trouble dissociatif, intoxication, forte fièvre, délire
psychotique, état d'ébriété, etc. Ils ne sont pas l’objet
du présent ouvrage.
4. Les EMC non ordinaires1 : expériences péri-
mortelles (expérience de mort imminente ou EMI,
EMI partagée, conscience accrue au moment de la
mort, etc.), expériences psycho-spirituelles (extase
mystique, ouverture du cœur, éveil de kundalini,
etc.), sorties hors du corps, phénomènes psi (télé-
pathie, clairvoyance, psychokinèse…), expérience
médiumnique, etc. Ils ne font pas vraiment l’objet du
1. Pour approfondir ces expériences, consulter : S. Allix, P. Bernstein, Manuel clinique
des expériences extraordinaires, Interéditions, 2009
26
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
présent ouvrage, mais nous allons en parler dans le
point suivant.
Cette classification est une perspective possible,
elle a bien entendu ses limites, comme toutes les
cartographies en ont.
Les
T EMC non ordinaires
Les EMC non ordinaires, appelés aussi expériences
extraordinaires (EE) ou expériences exceptionnelles
(EE), méritent un ouvrage complet tant la question est
complexe et fondamentale.
J’ai fait partie de l’équipe des cliniciens de
l’INREES (Institut de Recherche sur les Expériences
Extraordinaires) pendant plusieurs années et j’accom-
pagne depuis une dizaine d’années ce qu’on appelle
souvent des « expérienceurs » d’EE de tous genres :
expériences de mort imminente (EMI ou NDE), sorties
hors du corps, phénomènes psi (télépathie, psychoki-
nèse, clairvoyance, etc.), expériences médiumniques,
abductions et autres contacts ufologiques, etc. C’est un
domaine tant passionnant qu’essentiel ! Pourtant, il est
méconnu, nié ou caricaturé tant il dérange la vision du
monde communément partagée.
27
 Aux Frontières de L'Esprit
Le Manuel clinique des expériences1 extraordi-
naires donne un panorama de ces expériences, auquel
je renvoie le lecteur intéressé, de même que l’ouvrage
États modifiés de conscience.
Ces états et expériences nous interrogent fonda-
mentalement sur des questions essentielles :
O Quelle est la nature réelle de la conscience ?
O Quelle est la nature réelle de la réalité ?
Prenons l’exemple d’une expérience aujourd’hui
connue : l’expérience de mort imminente. Lors de cette
expérience, les personnes rapportent un vécu extra-
corporel se situant pendant la durée où le cerveau ne
fonctionnait plus (ils voient leur corps de l’extérieur,
puis montent dans un autre plan où ils voient une sorte
de tunnel lumineux, sont baignés d’un Amour infini,
retrouvent leurs proches décédés, etc.).
Cette expérience est reconnue aujourd’hui par l’en-
semble des chercheurs étudiant sérieusement la ques-
tion comme réelle (c’est-à-dire que ce n’est ni un rêve,
ni une hallucination !), au moins pour ce qui concerne
la partie de l’expérience où le sujet perçoit la scène
de sa mort vue à partir de l’extérieur de son corps.
En effet, il est facile de confronter son témoignage aux
événements réels perçus par l’équipe médicale.
1. S. Allix, P. Bernstein : Manuel clinique des Expériences extraordinaires, 2010,
InterEditions.
28
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
Cette expérience (EMI) vient à elle seule sérieuse-
ment questionner (voire exploser) la vision du monde
matérialiste de l’Occident moderne, pour qui la
conscience est émise par le cerveau. On nous apprend
depuis petit et dans les universités que la conscience
est sécrétée par le cerveau, comme le foie sécrète la
bile. Or, ces formes d’expérience nous montrent bien
que ce modèle est invalidé par les faits ! Chaque forme
d’EE nous enseigne sur la nature de la conscience et la
nature de la réalité.
Tout cela peut paraître bien étrange au lecteur de
2020, mais l’était encore plus il y a trente ans, l’était
moins il y a mille ans, et ne le sera sans doute plus
dans trente ou quarante ans, car les travaux avancent
vite et les témoignages se libèrent. Internet soutenant
la circulation d’informations, la médecine ramenant
de plus en plus de morts, la mode du chamanisme
et des états modifiés de conscience revenant sur le
devant de la scène, le paradigme matérialiste n’en a
plus pour très longtemps, n’en déplaise à ses amou-
reux défenseurs.
Le modèle qui semble le plus adapté à l’étude des
témoignages d’expériences extraordinaires est donc
simple et bouleversant : la conscience est indépendante
du cerveau. Le cerveau diffuserait donc la conscience
comme la télévision diffuse un programme. Si la télé
est endommagée, alors le programme se diffuse mal ;
29
 Aux Frontières de L'Esprit
si elle est morte, alors le programme ne s’arrête pas,
il se poursuit ailleurs (en somme, la mort n’est que le
moment où nous quittons la scène de théâtre et reti-
rons notre costume!). D’autre part, sur une télé en noir
et blanc ou sans le son, le programme se diffuse moins
bien et est filtré par les limites matérielles du télévi-
seur. Cela signifie qu’un cerveau normal et sain est de
toute façon un filtre qui restreint l’expression de notre
conscience, et que celle-ci est bien plus vaste et d’une
nature plus grande que ce dont nous faisons commu-
nément l’expérience.
On sait d’ailleurs que le cerveau d’un méditant
ou d’un pratiquant régulier de la transe fonctionne
différemment d’un cerveau ordinaire, de même qu’un
cerveau d’enfant fonctionne différemment d’un cerveau
d’adolescent, d’adulte ou de vieillard. Si le programme
est filtré et réduit par notre cerveau, alors cela signifie
bien que notre « moi » n’est pas celui que nous croyons.
Nous vivons dans un état de semi-sommeil qui nous
semble être l’état d’éveil ordinaire, mais celui-ci est en
réalité déjà un état altéré de conscience. Cela inverse
donc la perspective !
Je reviens aux EE : la conséquence de l’approche
honnête de ces expériences est merveilleuse, enthou-
siasmante et fondamentale ! La conscience est indé-
pendante du corps, et donc survivrait à celui-ci. Bien
entendu, cette affirmation n’engage que quelques
30
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
chercheurs et le consensus scientifique s’oppose
aujourd’hui à une telle vision. Mais demain ? Car ces
expériences sont encore très peu étudiées.
En somme, la position de la science se résume à :
« Comment donner une explication qui conserve à tout
prix l’idée que la conscience est le produit de l’acti-
vité chimique et électrique du cerveau ? » La tâche est
rude, car les données contraires à cet axiome s’accu-
mulent, et les explications des matérialistes sont d’un
simplisme déconcertant qui ne colle pas du tout aux
faits, mais satisfait un besoin conservateur.
Revenons à notre métaphore du faisceau de lampe
dans le grenier :
Nous avons parlé du contenu éclairé (contenu de
conscience), nous avons parlé du faisceau de lampe
et des différentes options qui s’offrent d’élargir le
faisceau, de le fractionner, etc. (états modifiés de
conscience). Avec certaines EE, nous parlons de la
lampe elle-même, et avec d’autres EE nous parlons de
celui qui tient la lampe !
Oups, nous l’avions oublié celui-là ! C’est du
porteur de la lampe dont nous parlent aussi toutes les
traditions spirituelles. Et quand le porteur de la lampe
prend conscience de lui-même (comme s’il tournait la
lampe vers lui car il avait oublié qu’il existait), alors il
31
 Aux Frontières de L'Esprit
se passe un phénomène nommé « éveil » : non seule-
ment lui-même s’éclaire, mais chaque cellule en lui
devient lumière, et l’ensemble du grenier s’éclaire, la
maison également et au-delà ; il n’y a plus de sépara-
tion entre le porteur de la lampe et le monde qu’il éclai-
rait. Tout devient unité lumineuse. Il devient le Tout.
Ce niveau d’expérience s’appelle « expérience trans-
cendantale », ou « expérience d’éveil ». Le film Matrix
(des Wachowski) donne une brillante et profonde illus-
tration des étapes du cheminement psycho-spirituel
vers l’éveil, que le psychanalyste C.G. Jung a nommé
« processus d’individuation ».
J’espère, dans cette partie sur les EE, ne pas avoir
perdu des lecteurs qui m’auront pris, à défaut d’un
éclaireur, pour un allumé ! Je ne peux qu’encourager
le lecteur curieux à se documenter sur ce pan fonda-
mental des connaissances scientifiques qui ne passe
pas la « barrière immunitaire culturelle » des médias
conventionnels.
En France, l’INREES, tout comme l’IMI (Institut
Métapsychique International), sont des organismes
sérieux (l’un journalistique et clinique, l’autre de
recherche scientifique), qui vous donneront des infor-
mations sérieuses pour vous faire une éducation rigou-
reuse sur ces sujets. Mais cela sortant du thème de
mon ouvrage, je n’irai pas plus loin ici.
32
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
Les
T EMC : le passager clandestin
de la culture occidentale ?
La culture occidentale nous conditionne à valori-
ser et à cultiver les informations issues du traitement
rationnel de la réalité, et à dévaloriser les informations
issues des états modifiés de conscience, ce qu’on ne
retrouve pas dans d’autres cultures. Certaines, même,
font l’inverse ! Une étude ethnologique de 2002 montre
que, sur 488 sociétés étudiées, 90 % avaient une forme
institutionnalisée de pratique de la transe.
Notons que pour certaines traditions rompues aux
états méditatifs, c’est l’état de conscience « normal »
qui est un état trompeur et tronqué, source de souf-
france car il nous enferme dans une vision illusoire
du monde, qui isole et sépare tout (mode rationnel).
Les EMC sont donc étudiés avec beaucoup de respect
par ces cultures, et les informations issues de ces
états sont traitées avec attention. En Occident, c’est
l’inverse, avec la science comme fer de lance de l’ap-
proche rationnelle du monde.
Pourtant, le paradoxe de notre culture, c’est que de
nombreuses grandes découvertes scientifiques, philo-
sophiques, artistiques, reposent en grande partie sur
les EMC  ! Les plus grands scientifiques témoignent
33
 Aux Frontières de L'Esprit
que l’imaginaire, les rêves, les balades, l’art et les
EMC sont des sources fondamentales pour alimenter
leur travail réflexif. Rappelons quelques faits de notre
histoire de la pensée :
O Le prix Nobel Francis Crick découvrit la double
structure de l’ADN sous LSD ;
O Deux mythes célèbres de la science nous racontent
une découverte faite dans un état d’éveil au monde
et non grâce à des calculs, qui sont venus dans
l’après-coup : le fameux « Eurêka ! » d’Archimède
et la pomme que reçoit Newton sur la tête (exemple
pouvant illustrer l’expérience de Satori dans le
bouddhisme zen) ;
O Les grands philosophes de l’Antiquité grecque
participaient régulièrement à des cérémonies des
mystères où ils consommaient un breuvage proche
du LSD ;
O René Descartes, qui est certainement à la philoso-
phie ce qu’Einstein est à la physique, a découvert sa
méthode rationnelle par révélation, en « rêve », en
pleine nuit, dans une sorte d’illumination mystique
suite à un excès de tabac (plante utilisée dans le
chamanisme) ; il a alors eu une vision qui sera la
révélation de son discours de la méthode ;
34
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
O Einstein a découvert son E=MC2 en se voyant en
rêve chevauchant un rayon de lumière ;
O Le monde artistique, cela nous apparaît plus évident,
trouve la source même de ses inspirations dans
les EMC : Gaudi et le champignon hallucinogène,
Balzac et ses surdoses de caféine, etc.
Il y a un lien entre la raison et les états modi-
fiés de conscience, un lien originel, fondateur de nos
cultures, car à la base de notre humanité même. La
raison ensemence les EMC, et les EMC nourrissent
la pensée rationnelle. Ce n’est pas monsieur Tout-
le-monde qui trouve le discours de la méthode en
rêve ! Il y a donc en nous, et dans la culture, un
va-et-vient constant entre la pensée rationnelle et la
pensée intuitive.
L’histoire des sciences, de la philosophie, de l’art,
des techniques, déborde d’exemples rangés au rang
d’anecdotes amusantes. Pourtant, ces anecdotes nous
parlent non seulement d’un pan fondamental de la
construction de la connaissance humaine, mais aussi
d’un fonctionnement en nous que nous négligeons.
Voyons cela plus précisément maintenant :
35
 Aux Frontières de L'Esprit
Fonctionnement
T rationnel
et fonctionnement intuitif
Nous oscillons sans cesse entre deux formes de
fonctionnement : le mode rationnel (digital) et le mode
intuitif (analogique).
O Le mode rationnel est un mode de traitement de
l’information qui découpe le monde en unités, et
nous permet donc aussi de nous distancier nous-
mêmes du monde que nous percevons, et de nous
penser comme individus. Le bébé, par exemple, n’est
pas capable de cela avant ses huit mois post-natals
environ. Pouvant discriminer des unités séparées,
nous pouvons ensuite penser leurs relations. Nous
pouvons aussi nous prendre nous-mêmes comme
objet d’investigation (comme en psychanalyse par
exemple). Les sciences et la philosophie sont le fer
de lance de ce mode rationnel, et Apollon sa divi-
nité grecque (dieu solaire qui met en lumière et en
ordre le chaos du monde). Ce mode de traitement de
l’information peut être linéaire (1+1=2) ou arbores-
cent (mindmaping). De fait, on peut alors partager
un chemin de pensée qui peut être critiqué par la
même méthode. Le mode rationnel est situé dans le
temps (chronos) : il faut une démarche méthodique
pour arriver à une conclusion.
36
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
O Le mode intuitif est un mode connecté, fondu
avec. Il est une saisie globale, directe, intuitive.
Il nous permet de prendre tous les éléments d’une
situation dans leur complexité, sans en décompo-
ser les éléments. Il est implicatif car nous sommes
parfois plus « animaux » : on dit alors qu'on a eu du
« flair », c'est-à-dire qu'on a flairé une piste comme
un chien. Mais nous pouvons aussi être connectés
à d’autres champs. Nous sommes donc tout entiers
impliqués dans la situation et y répondons sponta-
nément. Quand vous « scotchez » sur quelque chose,
vous êtes dans ce mode-là. Le mode implicatif est
fulgurant, situé dans le présent (cairos), émergeant
de la complexité de l’ensemble de la situation. La
plupart du temps (c’est-à-dire en état normal de
conscience), ce mode de traitement est subliminal.
Nous avons une intuition qui s’impose. En EMC,
cet état devient plus intense, plus ample et plus
conscient. La connexion avec l’ensemble de la situa-
tion peut s’étendre au-delà de toute limite, éman-
cipant même parfois de l’espace (remote viewing1)
et du temps (précognition 2). Les branchements de
cette connexion peuvent descendre dans la terre
1. Remote viewing : perception à distance. Très utilisé par la CIA pendant la guerre
froide au cours du projet Stargate pour espionner psychiquement les sites militaires
soviétiques, avec un taux de résultat positif avoisinant les 80 %. Utilisé aussi par les
chamans pour aider les chasseurs à situer les gibiers.
2. Précognition : perception d’une information du futur. Par exemple, quel événement
va se produire dans quelques secondes. Les recherches récentes montrent que c’est une
capacité qu’ont les animaux et qui présente un net avantage adaptatif pour percevoir un
prédateur quelques secondes avant qu’il n’attaque. Il n’est donc pas infaillible !
37
 Aux Frontières de L'Esprit
et se faire « animaux », ouvrir le cœur et se faire
« empathiques », ou monter vers les cieux et se faire
« angéliques ».
Ces deux modes de traitement sont parfaitement
illustrés par l’idée fausse que les femmes seraient plus
intuitives et les hommes plus rationnels. En réalité,
ces deux modes de traitement sont présents chez
chacun de nous. L’éducation et la culture fabriquent
ces différences.
Par contre, nous observons que notre société surva-
lorise le mode rationnel et dévalorise le mode intuitif.
Dans les écoles, par exemple, nous n’encourageons
pas les enfants à méditer ou à maîtriser l'autohypnose,
mais nous les éduquons à surinvestir la raison comme
seul traitement de l’information digne d’apporter des
connaissances utiles. Il n’y a pas (mis à part quelques
expériences ici ou là) de cours donnés pour explorer
et maîtriser ses EMC ! Nous sous-estimons ainsi la
richesse des EMC en survalorisant la raison. C’est
dommage. Ainsi, un enfant « rêveur » en classe est
dévalorisé et plus encouragé, sur ses bulletins de
notes, à « redescendre sur terre » qu’à ramener de ses
rêveries des idées ou des créations.
Pourtant, quelle révolution culturelle ce serait ! Et
quel espoir pour l’avenir ! En effet, différentes études
38
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
portant sur au moins trois formes d’EMC provoqués
(psychédéliques, transe chamanique, méditation)
montrent que les pratiquants développent une percep-
tion subjective plus profonde de leur connexion avec
la nature, amenant des changements spontanés de
leur comportement envers celle-ci, une augmenta-
tion du sentiment d’unité avec le reste du monde, une
conscience de l’interdépendance, un développement de
l’empathie et des conduites altruistes, etc. ; en somme,
ils se mettent à développer spontanément de hautes
valeurs spirituelles. Étant animateur de groupes de
respiration holotropique, je peux témoigner, aux côtés
de mes confrères, qu’il en est de même avec cette
pratique. Alors, imaginons que les EMC redeviennent
partie prenante de la culture occidentale : le monde
changerait en deux générations.
Quels
T sont les effets
neurologiques des EMC ?
L’hémisphère gauche est classiquement associé aux
traitements analytiques/logiques, alors que l’hémis-
phère droit est associé aux processus intuitifs et à la
39
 Aux Frontières de L'Esprit
créativité (voir chapitre 2.3). Le cortex préfrontal anté-
rieur, lui, est le siège de la conscience analytique.
Ce qu’il est important d’intégrer est que les EMC
ne sont pas qu’une expérience subjective, mais qu’elles
sont aujourd’hui également objectivées, en tant qu’états
neurologiques spécifiques. De nombreuses études sont
aujourd’hui disponibles pour le lecteur qui souhaite-
rait en savoir plus.
Chaque EMC a son fonctionnement cérébral
propre : l’état du cerveau en hypnose n’est pas celui du
cerveau en transe chamanique, ni en état de médita-
tion, ni en expérience mystique, etc.
Il serait fastidieux de faire l’inventaire des
spécificités de chaque état. Alors, qu’est-ce qui les
rassemble ?
Différents marqueurs neurophysiologiques ont été
scientifiquement identifiés dans divers EMC provo-
qués, lors de séances de yoga, de transe chamanique,
de méditation zen et transcendantale, d’expérience
psychédélique, de transe médiumnique, d’hypnose.
On observe globalement :
O une modification de l’activité des deux
hémisphères cérébraux : en transe chamanique
par exemple, l’hémisphère droit s’hyperactive
jusqu’à devenir prédominant, alors qu’en hypnose,
40
Qu’est-ce qu’un état modifié de conscience ?
on tend plus vers un équilibrage entre les deux
hémisphères (tout dépend du type de transe
hypnotique) ;
O une augmentation des échanges d’informa-
tions via le corps calleux (i.e. le réseau de fibres de
substance blanche qui relie les deux hémisphères),
ce qui signifie que la collaboration inter-hémis-
phérique est plus intense qu’à l’état ordinaire ; 
O une inhibition, faible ou intense, du cortex
préfrontal (siège de la conscience analytique),
permettant à d’autres zones plus intuitives, habituel-
lement inhibées, de s’exprimer. Cela va donc dans
le sens d’une diminution de la saisie rationnelle du
monde et de la conscience ordinaire de l’ego ;
O une augmentation de la puissance des ondes
alpha (relaxation), thêta (extases avec imageries
riches) ou gamma (conscience plus vaste et inté-
grée), selon le type d’expérience sollicitée ;
O une rapidité accrue de la transmission élec-
trique des flux synaptiques  en cas de transe
chamanique (mesurée récemment jusqu’à 6 fois
plus que dans un état normal !) ;
41
 Aux Frontières de L'Esprit

O une libération des neurotransmetteurs associés

au plaisir, comme les endorphines, et une domi-
nance du fonctionnement parasympathique ;

O une libération de certains potentiels d’explora-

tion et d’auto-guérison.

Que retenir Comment provoquer

en quelques mots ? un EMC ?
Toutes les données neuroscientifiques tendent dans
la même direction : chez un individu sain, un EMC Principaux
T moyens pour modifier
provoque la diminution de la prédominance de la
conscience rationnelle et libère un fonctionnement l’état de conscience
plus intuitif, plus rapide, plus riche, plus connecté

I
et capable d’auto-guérison. l n’y a pas plus simple que modifier son état
de conscience, et nous le faisons déjà tous par
différents moyens : fumer une cigarette, boire un
café, une bière, aller sur son téléphone portable,
faire l’amour, etc.

L’enjeu est moins de modifier sa conscience que de

savoir provoquer consciemment un EMC et de savoir
s’en servir utilement. Par exemple, vous êtes angoissé
et prisonnier de vos pensées et souhaitez changer

43
 Aux Frontières de L'Esprit
d’état rapidement  ? Un bon coup de marteau sur le
doigt devrait changer rapidement cela ! Vous voyez
que c’est facile et à la portée de tous !
Vous pensez que je plaisante ? Pas seulement :
pensez maintenant à certaines adolescentes qui se
scarifient. Que cherchent-elles  en se coupant la peau
de l’avant-bras ? La même chose : arrêter la souf-
france psychique et reprendre la main sur leur état
de conscience. Que cherchaient les Aztèques qui se
perçaient la langue ou les organes génitaux ? La même
chose : modifier leur état de conscience, cette fois dans
un but spirituel. Mais rassurez-vous, bien d’autres
moyens existent que la douleur ! L’humanité a en effet
exploré depuis la nuit des temps et partout dans le
monde un grand nombre de moyens pour modifier sa
conscience. Les animaux aussi, d’ailleurs, si bien que
modifier sa conscience peut être compris comme une
pulsion naturelle du monde vivant !
Listons ensemble les principales techniques exis-
tantes :
O l’hyperstimulation sensorielle percussions
:
rapides (rave party, etc.), danses, douleur (les
Aztèques se perçaient la langue, le pénis, etc.), satu-
ration sensorielle (encens, musiques, etc.), situations
paroxystiques (sports extrêmes, dangers), etc. ;
44
Comment provoquer un EMC ?
O l’hypostimulation sensorielle : immobilité du
corps et de l’attention, focalisation de l’attention (sur
un point, le souffle, une sensation, un mandala…),
caisson d’isolation sensorielle, induction verbale
lente et peu informative (ennui), percussions répé-
titives et lentes, isolation/retraite, répétition de
mantras, contemplation, massage, etc. ;
O la modification de l’équilibre physique, physio-
logique ou énergétique : hyper/hypoventilation,
rotation du corps jusqu’à perte de l’équilibre, reiki,
taï chi, qi gong, diète, danse, chaleur intense,
massage, prise de substance, intoxication, etc. ;
O la sidération : surprise, trauma, situation paroxys-
tique, « rupture de pattern », etc. ;
O la saturation logique : koâns, confusion, para-
doxe, réflexion intense, etc. ;
O les substances psychoactives : calmants, exci-
tants, hallucinogènes (psychédéliques) ;
O les procédés technologiques HemiSync:
(Monroe), champs magnétiques lobes temporaux
(M. Persinger), sons bi-neuraux, séquences de
rythmes (C. Sombrun), etc. ;
O l’activation symbolique ou imaginaire : rituels,
langage hypnotique, art…
45
 Aux Frontières de L'Esprit
Chacun de nous, enfant, a inventé ses moyens pour
se mettre en EMC, sans le savoir. Cela nous permet-
tait de nous mettre dans cet état agréable de rêverie
ou de contemplation (relâchement de l’attention focale
pour une attention flottante, c’est-à-dire auto-hypno-
tique) : certains en se tripotant les cheveux (focalisa-
tion de l’attention sur un point), d’autres en tournant
sur eux-mêmes comme des danseurs soufis jusqu’à
l’étourdissement, d’autres encore en s’amusant avec
les phosphènes sur leurs paupières… Pour ma part, je
m’allongeais et levais un de mes bras à la verticale. Je
cherchais le point d’équilibre pour qu’il reste debout
tout seul, puis j’attendais qu’il se mette à tourner de
lui-même. Sans le savoir, je m’induisais une catalepsie
du bras avec dissociation.
Ainsi, les enfants ont une culture spontanée de la
transe, comme les anciennes civilisations en avaient
une. Je vous invite à chercher dans vos souvenirs votre
moyen personnel de vous induire un EMC, à l’écrire
ici ci-dessous et, en face, à noter la catégorie d’induc-
tion à laquelle il appartient. Peut-être que vous l’utili-
sez encore aujourd’hui :
........................................................................ :
........................................................................
........................................................................
46
Comment provoquer un EMC ?
On trouvera souvent le nom de « transe » pour
parler notamment des états modifiés de conscience
provoqués.
Modifier
T sa conscience :
une pulsion naturelle
du monde animal ?
Le chercheur R. K. Siegel (1989) a observé qu’à
l’instar des humains, un grand nombre d’animaux
cherchent à modifier leur conscience. Des papillons
butinent des fruits fermentés, les éléphants placent
volontairement des baies dans des troncs d’arbre et les
laissent fermenter avant de les consommer, les chats
se droguent à la cataire, les dauphins avec l’alcaloïde
du poisson fugu, etc.
Modifier sa conscience est si présent dans la nature
qu’on peut se demander si ce n’est pas une pulsion
naturelle du monde animal.
N’est-ce que par recherche de plaisir ? ou par
recherche d’un rapport à la réalité différent, apportant
des informations aux animaux autrement que par la
raison ?
Toutes les hypothèses sont ouvertes.
47
 Aux Frontières de L'Esprit
Deux
T modes de fonctionnement
en nous
Nous avons globalement deux grandes formes de
relation au monde, à l’autre et à nous-mêmes :
O Conscience analytique : elle consiste à s’extraire du
monde pour le penser. C’est un mode rationnel, analy-
tique : on sépare le monde en objets, qu’on nomme
avec le langage ou les mathématiques, pour penser
leurs relations et articulations. Dans ce fonctionne-
ment, nous-mêmes nous nous séparons du monde et
pouvons devenir objet de notre propre pensée : c’est
le Cogito, ergo sum (« Je pense, donc je suis ») de
Descartes. C’est parce que je pense que je m’extrais
du monde et que je peux alors savoir que j’existe.
Je peux aussi me distancier de la sympathie
émotionnelle que j’éprouve pour l’autre, afin d’ana-
lyser froidement sa situation. On nomme parfois ce
fonctionnement « hémisphère gauche ».
Le dieu grec représentant ce mode de pensée est
Apollon, dieu solaire de la mise en lumière, de la
mise en ordre, de la culture.
O Conscience intuitive : en tant que second mode de
relation (à soi, à l’autre, au monde), elle consiste en se
fondre et être avec, comme quand nous sommes pris
dans un bon film. C’est alors une connexion empa-
48
Comment provoquer un EMC ?
thique ; nous sommes à la fois absorbés dans ce que
nous observons, et en connexion globale avec notre
environnement. C’est un mode intuitif, captateur,
direct, sans filtre, réactif, sensoriel, symbolique et
métaphorique (langages de la connexion). On peut
avoir accès à des connaissances intuitives, et même
accès à des informations incroyables pour notre
mode de pensée occidental1. Quand vous êtes dans
un rêve, vous ne vous distanciez pas de ce qui vous
arrive pour en penser l’incongruité et l’illogisme.
Vous le vivez, pleinement immergé dans un univers
symbolique dans lequel chaque élément du rêve
est un symbole qui connecte à d’autres symboles,
souvenirs, significations. Ce second mode est celui
de la complexité, du chaos. Il est ainsi un mode
vivant (et donc aussi mourant) et créateur.
Le dieu grec représentant ce mode de fonctionnement
est Dionysos, dieu du chaos créateur, de l’obscur
(comme l’humus de la forêt). Avec Dionysos se tisse
la toile de la Nature sauvage et indomptée. Les EMC
nous permettent de privilégier ce second mode de
relation au monde, à nous-mêmes et à l’autre.
1. De nombreuses cultures traditionnelles (ou « peuples racines ») ont conservé ce
mode de relation au monde et le cultivent. Elles ont accès à des savoirs qui font pâlir nos
scientifiques de toutes disciplines. Renseignez-vous par exemple sur les Indiens kogis
de Colombie, sur leurs savoirs et les rencontres qui ont eu lieu en France avec des scien-
tifiques de diverses spécialités, et vous comprendrez mieux où cela nous emmène. On
peut aussi parler des Aborigènes d’Australie, des Shipibos d’Amazonie péruvienne, des
Dogons du Mali, des Pygmées du Gabon, etc. Tous ces peuples extraient leurs savoirs des
états modifiés de conscience, chacun avec sa forme d’accès.
49
 Aux Frontières de L'Esprit
Sur l’antique temple de Delphes était gravée cette
formule devenue célèbre : « Connais-toi toi-même,
et tu connaîtras l’Univers et les Dieux.  » Ce qu’on
sait moins, c’est que le temple de Delphes réunissait
deux divinités : Apollon et Dionysos. Le « Connais-
toi toi-même » passe donc par unir en nous ces deux
fonctionnements.
Dr Jekyll et Mr Hyde illustrent ces deux polarités
extrêmes qui n’arrivent pas à trouver leur équilibre :
Dr Jekyll est l’homme des conventions, de l’ordre
établi, il est rationnel, chercheur, brillant, ordonné,
apollinien. Hyde est l’antithèse, il est animal, impulsif,
créatif, imprévisible, dionysiaque. La sortie ne peut se
faire que dans la rencontre l’un de l’autre.
La mise en relation des deux fonctionnements dans
nos quotidiens ordonnés est de faire de la place à une
dose de chaos et de désordre, à l’intuition, à l’écoute de
la vie ; sinon, tout cela risque de s’imposer tôt ou tard
par une crise : dans notre identité, dans notre couple,
dans notre travail… comme dans notre société dans
son ensemble, ce qui est le cas aujourd’hui.
L’ordre a autant besoin du chaos que le chaos
de l’ordre : du chaos naissent les étoiles, des étoiles
les planètes, des planètes la Vie, de la Vie la
conscience, et celle-ci ordonne le monde en retour.
Sans la conscience, qui saurait que le monde existe ?
50
Comment provoquer un EMC ?
La conscience ne peut advenir dans la confusion avec
l’objet. La prise de distance permet, en se séparant du
monde, de conscientiser qu’on existe en tant qu’indi-
vidus, sinon nous resterions fondus en lui. L’enfant ne
prend conscience de sa différenciation qu’à partir du
huitième mois post-natal. Mais il va garder la trace
de ce fonctionnement originel et y retourner réguliè-
rement. Plus nous grandissons et plus notre culture
nous éloigne de ce fonctionnement, mais elle nous
donne des moyens de le provoquer, et les enfants en
inventent. Les techniques d’EMC nous aident aussi à
retourner à ce fonctionnement originel et à en ramener
des informations, ou à les utiliser positivement.
Quand vous vous provoquerez ces états, vous obser-
verez que vous allez dans un autre mode de relation au
monde que la raison. Il faudra même lâcher la raison
et l’analyse pour entrer dans un mode de relation plus
direct, animal, sensitif, intuitif.
 Partie II

UTILISER LES EMC

AUTO-PROVOQUÉS AU QUOTIDIEN
 Introduction

A près la théorie, passons à la pratique. Notez

d’ailleurs que cette façon de procéder est très
occidentale. D’abord la théorie, ensuite la pratique.
On pourrait structurer tout à fait à l’inverse : d’abord
expérimenter, pour ensuite en tirer ses propres
compréhensions.

Nous allons dans ce chapitre explorer différentes

techniques. Depuis près de vingt ans, j’accompagne
des enfants, des adolescents et des adultes en psycho-
thérapie classique et transpersonnelle, en hypnothéra-
pie, en soutien psychologique…

J’expose dans ce chapitre des pratiques d’EMC

auto-provoqués que je donne à faire à mes patients
pour qu’ils intègrent la transe au quotidien. Je les

55
 Aux Frontières de L'Esprit Introduction

expose ici et vous explique comment les expérimen-
ter et les utiliser. Ce sont des techniques éprouvées et
fonctionnelles. À la différence d’un livre, dans le cadre
d’un accompagnement individuel, le psychothérapeute
transpersonnel enseigne la technique sur mesure pour
son patient, et au moment où elle lui est utile. C’est
comme une graine que l’on sème au moment où la
terre est prête à la faire germer. Mais mon conseil,
dans le cadre de cet ouvrage qui s’adresse à tous, est
que vous expérimentiez toutes ces techniques. Dans
l’ordre où cela vous fait plaisir. N’hésitez pas à prati-
quer plusieurs fois une technique pour vous l’appro-
prier et en tirer les apprentissages utiles, au moyen de
l’expérience.
Par facilité de lecture, les exercices sont expliqués
dans les encadrés. N’hésitez pas à vous enregistrer sur
votre téléphone portable, par exemple en décrivant
les étapes avec vos propres mots. Laissez-vous des
moments de silence pour avoir le temps de faire l’ex-
périence entre les consignes. Il sera ainsi plus facile de
les pratiquer, guidé par votre propre voix.
moment non propice, des périodes de l’année où on
est plus ou moins disponible. Alors, pas de conclu-
sion hâtive sur vous-même : tout peut toujours évoluer.
Il n’y a pas d’échec possible, l’exercice vous fournit
juste un miroir de vous-même à un instant T. Parfois,
pour réussir, il faudra pour certains lecteurs d’abord
se faire accompagner d’un professionnel (cf. chapitre
suivant), pour s’approprier tout cela ensuite.
L’ambition de ce chapitre est de vous transmettre
des techniques le plus simplement possible, afin de
vous introduire à l’utilisation concrète des EMC au
quotidien. Il n’est ni un guide de méditation, ni un
guide d’autohypnose, ou de transe chamanique, etc.
Chaque technique mériterait un livre à part entière. Ici,
je vous transmets ce que je transmets à mes patients au
quotidien, dans le but que vous vous appropriiez des
outils efficaces.
Pour ce qui est d’un chemin approfondi, comme
justement indiqué, il faut… approfondir le chemin !
Bonne exploration…

Pour tous les exercices exposés ici, si vous avez

du mal à les réussir car le mental et le jugement sont
trop présents, ce n’est pas grave. Notez-le, sans vous
reprocher de « ne pas y arriver ». Nous sommes qui
nous sommes et avons notre éducation, nos limites,
nos blessures ; il y a aussi le moment propice et le

56
 1
Calmer le corps,
le cœur et le mental

C almer le mental est bien souvent une première

étape. C’est le B.A.-BA de tout méditant. La
méditation du « calme mental » s’appelle shine chez
les bouddhistes tibétains, chan chez les Chinois, zen
dans le bouddhisme japonais. Il ne s’agit pas encore
à proprement parler d’un état modifié de conscience,
cependant, se calmer modifie et clarifie notre
conscience, et devrait être la pierre angulaire de toute
pratique de transe.

Qu’est-ce
T que méditer ?
Posez votre regard sur un point. Observez que vous
pouvez fixer avec intensité ce point, ou simplement

59
 Aux Frontières de L'Esprit
laisser votre regard sur ce point sans le lâcher, mais
en restant détendu. Remarquez que quand vous faites
cela, vous pouvez observer tout ce qui est dans votre
regard, jusqu’aux contours de votre champ de vision.
Si quelque chose passe dans votre vision périphérique,
vous ne quittez pas le point sur lequel votre regard
est posé, vous notez ce qui passe en le laissant passer,
sans le fixer ni le suivre du regard.
Bien. Faites cela avec tous vos sens, avec vos
émotions, avec vos pensées. Votre attention consciente,
telle une lampe, reste fixée sur un point (la respiration
par exemple) mais élargit son faisceau. Elle ne se foca-
lise sur rien et embrasse tout. Demeurez simplement
là, centré, détendu et ouvert. C’est cela, méditer.
On y ajoute une posture précise, à la fois tonique,
à la fois relâchée. Les détails de la posture sont acces-
sibles sur Internet. De nombreux livres, CD et appli-
cations existent, qui aident à l’apprentissage de la
méditation.
Le premier stade de la méditation est donc de stabi-
liser l’attention dans la présence. La seconde étape est
de tourner cette attention vers l’observateur en soi.
Qui observe ? Ici, on commence à tourner son atten-
tion vers la source de l’attention elle-même : le porteur
de la lampe… Mais c’est une autre histoire… Pour le
calme mental, nous restons à l’étape 1.
60
Calmer le corps, le cœur et le mental
La
T respiration, notre grande alliée
Utiliser sa respiration est un principe fondamental
enseigné par de nombreuses traditions spirituelles et
thérapeutiques. J’ai l’habitude de dire à mes patients
que s’ils ne retiennent qu’une seule chose de leur
parcours avec moi, j’aimerais que ce soit cela : notre
respiration est notre meilleure amie. Nous naissons
dans une inspiration, et nous rendons le « dernier
souffle  » au terme de notre vie avec une expiration.
Notre respiration respire sans nous, automatiquement :
elle est la vie en mouvement dans notre corps.
Observer son souffle
Quelle que soit votre posture, laissez votre corps
passif et décroisez bras et jambes. Fermez les
yeux et observez votre respiration qui se fait
spontanément, par le nez.
Ne faites rien. Ne la contrôlez pas, ne la modifiez
pas ; simplement, observez-la. Soyez passif,
mais attentif.
61
 Aux Frontières de L'Esprit
Écoutez votre respiration, sentez-la en parcourant
doucement différents points du corps où vous la
sentez : dans votre poitrine, votre ventre, votre
nez, vos bras, vos mains, votre bassin, vos jambes,
vos pieds, votre visage, etc. Sentez comment tout
votre corps vit le rythme de votre respiration.
Quand vous quittez un point d’observation pour un
autre, restez en contact avec le point précédent :
on élargit ainsi sa conscience.
Faites juste ceci 1 ou 2 minutes, puis revenez au
livre.
Allez-y.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
....................................................................
....................................................................
....................................................................
Qu’avez-vous appris ?
....................................................................
....................................................................
....................................................................
62
Calmer le corps, le cœur et le mental
Bien, vous avez pu observer quelque chose de très
simple : votre respiration vous ramène dans l’ici et le
maintenant, et ne rien faire suffit généralement à instal-
ler un calme et une détente. Il est possible que vous
ayez déjà ressenti des choses particulières, qu’elles
soient agréables ou désagréables. Cela est normal.
Laissez passer, restez neutre et en observation.
La respiration nous ramène à notre corps, et notre
corps est toujours dans l’ici et le maintenant. Si vous pour-
suivez cet exercice simple d’observation de votre souffle,
vous entrerez dans la pratique du « calme mental ». Mais
nous n’allons pas aller jusque-là pour ce livre.
Vous avez pu observer le simple exercice d’observer
sans agir sur sa respiration. Vous avez pu expérimen-
ter l’effet que cela a eu sur vous. Le second cadeau de
notre respiration, c’est que nous pouvons respirer avec
elle, et même prendre un contrôle volontaire dessus.
C’est ce que nous allons faire maintenant :
La
T respiration consciente
en cohérence cardiaque
Cette technique de respiration est à la fois la plus
simple et la plus efficace que je connaisse. Je l’appelle
63
 Aux Frontières de L'Esprit
le « kit d’urgence », notamment en cas de forte émotion
ou d’anxiété. Je l’ai utilisée un jour avec une personne
saisie par le vertige dans un téléphérique montant vers
le pic du Midi.
L’anxiété commençait à la déborder. Elle a pu,
grâce à cette technique, retrouver le contrôle d’elle-
même en maintenant sa concentration sur l’exercice
pendant les 10 minutes de la traversée.
Les montées d’anxiété sont un peu comme un
orchestre qui s’emballe : les tambours (cœur) battent
fort et rapidement, les instruments à vent (respiration)
accélèrent, les instruments à cordes (émotions) partent
dans tous les sens et… le chef d’orchestre est débordé
et perdu ! L’orchestre, voyant le chef d’orchestre
perdu, est encore plus affolé et se désorganise plus
fort encore… Alors le chef d’orchestre doit se montrer
ferme et fixer les instruments à vent et leur donner
le tempo, jusqu’à ce que l’orchestre soit retourné en
harmonie.
La cohérence cardiaque est une des bonnes tech-
niques pour retrouver la maîtrise de soi, mais elle
peut être utilisée à tout moment pour installer plus
de calme.
64
Calmer le corps, le cœur et le mental
Contrôler son souffle pour
retrouver ou approfondir
son calme
Vous allez caler votre respiration sur un cycle de
10 secondes : à l’inspiration, gonflez vos poumons
de manière continue pendant 5 secondes, puis,
à l’expiration, videz vos poumons pendant
5 secondes de manière continue. Répétez le cycle
jusqu’à vous sentir calme, ou pendant 3 minutes
minimum.
Chaque cycle durant 10 secondes, levez un doigt
par cycle. Au bout de 6 doigts vous serez à
1 minute. Répétez l’opération 3 fois et vous serez
à 3 minutes.
Fixez votre mental en comptant : 1, 2, 3, 4, 5…
1, 2, 3, 4, 5… 1, 2, 3, 4, 5… etc.
Votre intention est d’être à 100 % avec votre
corps : « Je calme mon corps. »
Inspirez par le nez, en laissant le ventre se gonfler
comme un ballon à l’inspiration. Puis, expirez par
la bouche lentement.
65
 Aux Frontières de L'Esprit
Allez-y.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
Qu’avez-vous appris ?
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
NB : Des vidéos existent sur YouTube pour
apprendre le rythme : vous suivez une boule se
déplaçant sur des vagues de 5 secondes. Tapez
« cohérence cardiaque » et vous trouverez.
66
Calmer le corps, le cœur et le mental
La
T méditation
des trois dan tien
Voici une technique simple et puissante. Attention,
pour les personnes sceptiques concernant l’existence
des corps énergétiques et de leurs centres, appelés
en Orient « chakras » ou dan tien, cet exercice peut
sembler aversif, car il appelle en vous des représen-
tations peut-être négatives liées à l’idée de « pseudo-
science ». Il peut être utile dans ce cas de vous faire
une culture de base sur la question, et peut-être de
réviser une posture un peu ethnocentrique (qui pense
que sa propre culture vaut mieux que celle des autres).
Cette méditation se fait en trois temps, mais chaque
temps peut se travailler indépendamment jusqu’à être
bien intégré. Vous noterez qu’ici, la frontière entre
méditation et transe se fera plus poreuse, puisqu’on
observe des voies de passage, avec les visualisations
par exemple. À mon avis, cela a peu d’importance,
car cartographier la conscience suppose l’acceptation
de zones confuses : le vent ne connaît pas plus les
frontières que la conscience, et ne s’enferme pas en
bouteille.
Les dan tien sont l’équivalent des chakras hara,
cœur et troisième œil. Le schéma ci-dessous montre la
localisation des trois dan tien :
67
 Aux Frontières de L'Esprit
Le hara est situé à trois doigts sous le nombril.
Joignez index, majeur et annulaire. Posez l’index sous
le nombril et marquez le point au niveau de l’annulaire
en enfonçant un doigt à ce niveau. En retirant le doigt,
cela laisse une empreinte de sensation à ce niveau.
Vous êtes à hauteur du hara. Mais, comme vous le
voyez sur le dessin, il est situé plus au centre du corps.
Le hara est le centre du « Je suis ». Méditer au niveau
du hara vous aidera à :
O être plus centré ;
O être plus ancré, stable émotionnellement et ferme ;
68
Calmer le corps, le cœur et le mental
O être plus confiant, plus sécurisé et solide dans votre
position ;
O être plus calme ;
O revenir à votre silence intérieur pour mieux sentir,
et même mieux penser.
Le chakra du cœur est situé à hauteur du ster-
num, au centre de la poitrine. Le chakra du cœur est
le centre de la compassion, de l’amour inconditionnel,
de la non-séparativité. Méditer sur le chakra du cœur
vous aidera à :
O augmenter votre compassion envers tous les êtres, y
compris vous-même ;
O être plus empathique et donc plus intuitif dans la
relation aux autres ;
O libérer certaines émotions bloquées correspondant
à des blessures-fermetures de votre cœur ;
O développer une confiance faite d’ouverture et de foi.
Mettre un peu de musique, douce, sans parole et
favorisant l’ouverture émotionnelle, peut faciliter la
méditation sur ce chakra.
Le troisième œil est situé au centre du front,
un peu au-dessus des sourcils. C’est l’endroit où les
69
 Aux Frontières de L'Esprit
hindouistes se marquent d’un point coloré. Il est
le siège de l’intuition et de la connexion avec des
niveaux subtils de la réalité. Méditer sur le troisième
œil permet :
O d’ouvrir ses perceptions subtiles ;
O d’avoir des intuitions et une vision claire.
Méditer sur
les trois dan tien
Soyez de préférence assis, pieds à plat sur le sol
et mains sur les jambes, le dos droit, les épaules
et la respiration relâchées. Cela peut aussi se faire
allongé. Chaque étape peut se faire en une seule
méditation ou se faire indépendamment.
1. Le hara
Posez votre attention sur le centre hara. Si cela
vous aide, mettez vos mains à cet endroit pour
stabiliser votre attention.
Votre rôle est de stabiliser votre attention là, dans
le hara. Laissez descendre votre attention comme si
70
Calmer le corps, le cœur et le mental
votre tête descendait ici, dans le hara. Demeurez
ainsi. Observez votre respiration tout en restant
dans le hara (ex. 1) puis, sur chaque expiration
naturelle, descendez un peu plus dans le hara. Il n’y
que vous et le hara, et vous vous fondez en lui.
Si vous partez dans vos pensées, ramenez-vous
dans le hara. Vous pouvez même vous imaginer
envoyer vos pensées dans le hara. Si vous entrez
dans la « mer de l’ennui » (manière poétique de
dire que vous vous ennuyez !), sachez qu’elle
est plus petite qu’il n’y paraît : traversez-la, ce
n’est en réalité qu’un petit lac. Derrière se trouve
un palier de détente supplémentaire. Quoi qu’il
arrive, restez dans le hara ! Si vous avez besoin
d’ajouter une phrase, placez sur l’expiration :
« Je suis ici. » Si vous voulez ajouter une image,
imaginez-vous devant un lac calme comme un
miroir. Cependant, je recommande de ne mettre
ni phrase, ni image. Mais expérimentez, et
observez ce qui vous aide le mieux.
Pratiquez cette méditation au moins pendant un
mois. Le plus souvent possible. À la caisse d’un
supermarché, mettez votre attention dans votre
hara. À une réunion de travail, mettez-vous dans
le hara. Amusez-vous pendant un mois à rester là,
même en marchant.
71
 Aux Frontières de L'Esprit
Vous allez être surpris des résultats : confiance en
vous, ancrage, calme, stabilité émotionnelle. Les
résultats arrivent lentement, mais en profondeur.
Face à une situation, mettez-vous dans le hara et
laissez une pensée venir de cet endroit à propos
de la situation. Apprenez à penser à partir de là !
2. Le chakra du cœur
Une fois l’attention dans le hara stabilisée,
montez au niveau du chakra du cœur. En gardant
une partie de l’attention dans le hara, respirez
doucement dans le chakra du cœur. Sur chaque
inspiration, imaginez que votre chakra du cœur
s’ouvre plus grand, comme une fleur. Laissez une
attention tendre se développer ici. Si vous avez
besoin, pensez à un bébé, un enfant, un proche
ou un jeune animal qui suscite de la tendresse
chez vous. Ressentez cette tendresse dans votre
cœur et augmentez-la en pensant à votre image.
Puis étendez cette tendresse de proche en proche.
Si c’est un enfant, étendez votre attention tendre à
tous les enfants du monde, puis songez que tous
les adultes ont été des enfants, étendez alors cette
tendresse à tout le monde. Songez à l’enfant que
vous étiez et incluez-vous. Étendez encore à tous les
enfants de la vie : aux animaux, aux végétaux, aux
éléments qui permettent la Vie. À la Vie elle-même.
72
Calmer le corps, le cœur et le mental
Embrassez tous les êtres avec votre compassion,
jusqu’à englober tout l’univers, vous compris :
l’enfant, l’ado, l’adulte que vous êtes. Étendez votre
compassion sans limite ni condition. Si vous voulez
ici mettre une phrase, ce sera : « J’autorise mon
cœur à s’ouvrir. » C’est ici ouvrir sa vulnérabilité et
découvrir la puissance de la vulnérabilité.
3. Le troisième œil 
Une fois le hara stabilisé et le cœur ouvert,
amenez votre attention vers votre troisième œil,
au centre du front. Ici, faites comme si une paille
lumineuse plongeait vers le centre de votre
crâne jusqu’à un petit cristal, au niveau de la
glande pinéale. En respirant, imaginez que l’air
est comme une lumière qui irrigue et intensifie la
lumière de ce cristal.
La phrase d’accompagnement sera : « Je me
connecte à l’Univers. » Dans le même temps,
visualisez-vous comme un cerf, dont les bois,
comme des racines, poussent à partir du cristal
et s’étendent de plus en plus vastes vers le ciel,
à chaque inspiration. Et à chaque expiration, des
informations, comme de l’électricité, descendent
dans ce système racinaire jusqu’au cristal.
73
 Aux Frontières de L'Esprit
Allez-y.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
....................................................................
....................................................................
....................................................................
Qu’avez-vous appris ?
....................................................................
....................................................................
....................................................................
' Variation de l’exercice.
De la méditation à la transe
Notez qu’avec cette méditation, on a déjà un pied
dans la transe. Pour augmenter la polarité de transe,
74
Calmer le corps, le cœur et le mental
je vous donne un petit truc, à commencer à partir du
chakra du cœur : mettez une musique qui résonne avec
chacun des dan tien et respirez doucement, sans pause
entre l’inspiration et l’expiration, mais sans changer
ni le rythme, ni l’intensité de votre souffle. Connectez
simplement inspiration et expiration et respirez dans
un des 3 dan tien, accompagné par la musique.
Pour le hara, le silence ou des bols tibétains sont
parfaits.
Pour le cœur, je recommande un chant sacré qui
ouvre le cœur, par exemple Mere Guru Dev de Krishna
Das, un Ave Maria ou un Pater Noster (Latvian Radio
Choir, Sigvards Klava & Sinfonietta Rīga), ou encore
le Mantra du Cœur, de Michel Pépé ; ou bien une
musique douce et inspirante qui évoque pour vous
l’amour universel et la compassion (par exemple : Les
Couleurs de l’Amour, de Michel Pépé).
Pour le troisième œil, recourez à une musique
éthérée ou stellaire (par exemple : Celestia, de Jaime
Heras).
 2

Se dynamiser

U ne pratique de sport ou de gymnastique est

toujours la plus appropriée pour vous dyna-
miser. Faites-la en musique, avec des percussions, cela
va soutenir votre énergie en vous mettant dans l’état
de conscience propice. Le mouvement corporel, les
étirements mettent en mouvement tous vos systèmes
corporels, énergétiques, émotionnels, psychiques.
C’est la meilleure manière de vous dynamiser.

Pratiquez par exemple une méditation assise après

avoir électrisé le corps avec un exercice physique, et
votre méditation sera de bien meilleure qualité. Mais
comme nous sommes dans les EMC, voyons les EMC
et la dynamisation corporelle :

77
 Aux Frontières de L'Esprit
Sport
T et EMC
La relation entre le sport et les EMC ne paraît peut-
être pas évidente, et pourtant elle est classique ! De
nombreux sportifs l’utilisent. Il a même été démontré
avec deux groupes de sportifs le phénomène suivant :
un des groupes pratique une heure de musculation,
l’autre groupe une heure d’hypnose, pendant laquelle
ils s’imaginent se muscler. On mesure ensuite le déve-
loppement musculaire dans les deux groupes : il est
plus important chez ceux qui ont imaginé les exer-
cices que chez ceux qui les ont réellement pratiqués !
À nouveau, le cerveau en hypnose croit que c’est réel
et répond en commandant la fabrication de muscles.
L’énergie non utilisée pour l’effort mécanique est
disponible pour la construction musculaire.
Voyons quelques moments d’utilisation des EMC
dans le sport :
' Au niveau de la préparation
Les sportifs de haut niveau cultivent les EMC pour
préparer leurs épreuves au moyen de visualisations
positives de réussite (en sophrologie ou en autohyp-
nose). C’est un point important, car le stress d’antici-
78
Se dynamiser
pation avant des épreuves ou des examens vient de la
projection inconsciente dans l’échec. On se tend car
on se voit échouer, avec les conséquences de l’échec.
Le cerveau réagit donc à cette autohypnose négative.
Ici, on retourne donc la situation et on fait visualiser
au cerveau la réussite. La réponse est alors beaucoup
plus sereine.
La pratique du contrôle et du calme mental est
associée à l’hygiène et à la nécessité du sportif. Rester
calme et concentré est en effet une qualité fonda-
mentale dans le sport, surtout à de hauts niveaux de
performance, où ce qui fait le plus la différence est le
mental plutôt que le corps.
' Lors de l’épreuve
Tout coureur connaît et recherche ce moment où
le corps se met en mode automatique  : le souffle se
trouve, le rythme se met en place et la pensée s’échappe.
Ce qu’il recherche se nomme… un état de transe auto-
hypnotique !
Les sportifs ayant préparé leur épreuve en hypnose
ou en autohypnose arriveront dans de très bonnes
conditions face à la tâche, car leur cerveau aura déjà
vécu la réussite à cette tâche.
79
 Aux Frontières de L'Esprit
La transe peut désinhiber les réflexes autogènes,
qui sont une protection du système nerveux pour
éviter aux tendons de casser les os par le recrutement
à 100 % des fibres musculaires. Ce réflexe se débloque
dans des situations exceptionnelles : par exemple, une
femme voyant son enfant sous les roues d’une voiture
est capable de soulever celle-ci. Évidemment, cela est
intéressant pour un sportif. Les pilotes de Formule 1,
par exemple, savent qu’ils ne peuvent arriver à leur
niveau de performances qu’en conduisant en état
de transe.
' La récupération physique :
De nombreux navigateurs ou aviateurs en solitaire
savent que l’autohypnose leur permet de récupérer
mieux qu’une sieste. La transe, surtout l’autohypnose,
accompagne activement et consciemment la récu-
pération naturelle du corps. Pour moi qui ne suis ni
navigateur, ni aviateur, je dois dire que c’est pratique
quand je conduis ma voiture sur de longs itinéraires :
Je témoigne que 2 minutes d’autohypnose valent bien
15 minutes de sieste !
Si l’EMC est d’un grand apport avant une épreuve
sportive, l’inverse est vrai également : faire du sport
80
Se dynamiser
avant une pratique d’EMC est une formidable prépara-
tion du corps, des émotions et du mental, qui nous met
dans des conditions idéales pour l’expérience.
La
T méditation dynamique d’Osho
Voici une pratique fort dynamisante. Osho était
un maître spirituel indien vivant aux USA, qui
préconisait aux Occidentaux de pratiquer une médi-
tation en mouvement. Selon lui, la méditation assise
et stable était adaptée aux Asiatiques, mais pas aux
Occidentaux, qui, une fois stables corporellement,
devenaient mentaux. Sans doute que des années
d’école nous ont conditionnés ainsi. Dans les faits,
cela dépend surtout des personnes. Il existe différentes
formes de méditations dynamiques créées par Osho,
ainsi qu’il existe des méditations dynamiques venant
d’autres traditions : on peut dire que le sport est en soi
une méditation dynamique, de même que le taï chi ou
le yoga.
Voici une forme simple et simplifiée de la médi-
tation dynamique d’Osho, que je fais faire ponctuel-
lement lors de mes stages. Elle est très bonne à faire
tant pour vous dynamiser que pour relâcher le mental
81
 Aux Frontières de L'Esprit
et les tensions dans le mouvement. Rien de tel que 5 à
10 minutes de cette méditation le matin avant d’aller
au travail ou pendant les pauses, ou encore en rentrant
du travail :
Le chaking
dynamique d’Osho
Osho préconisait cette pratique pendant 1 heure.
Choisissez le temps qui vous convient, selon vos
nécessités. 10 minutes sont en général suffisantes
pour vous dynamiser. Pendant tout l’exercice, vous
allez mettre une musique dynamique, sans paroles
et à bon volume pour vous soutenir. Pensez à bien
respirer. Ce qui peut aider est d’émettre une voyelle
sur chaque expiration, en l’associant à la vibration
et en jouant sur les aigus ou les graves, comme
pour envoyer le son à différents endroits du corps,
en ressentant le son qui fait du bien à telle zone du
corps. Vous pouvez le faire sans vocaliser.
Mettez-vous debout, les pieds parallèles, écartés à
largeur du bassin.
Pliez légèrement les genoux pour être souple.
Commencez à secouer vos genoux, ce qui
va générer une vibration dans tous le corps.
82
Se dynamiser
Maintenez cette vibration pendant tout l’exercice,
alternant des moments intenses et des moments
plus doux selon vos besoins.
Votre attention se balade dans votre corps pendant
que la vibration le traverse tout entier. Dès que
vous sentez une zone où la vibration ne circule
pas, faites-l’y venir en augmentant la vibration des
genoux, tout en aidant cette zone à sentir cette
vibration. La vibration vient nettoyer les crispations,
les tensions, les nœuds. Ce n’est pas vous qui les
nettoyez, vous ne faites que guider la vibration où
il faut pour qu’elle fasse le travail.
Quand le corps est fluide et bien décrispé, alors
poursuivez les vibrations dans tout le corps et
augmentez simplement l’énergie, en y prenant
plaisir.
Cette pratique de méditation vous permettra de
vous décharger dynamiquement de vos tensions
physiques et mentales.
 3

Régler des problèmes concrets,

chercher des solutions

Les
T rêves : la voie royale
vers l’inconscient

L e rêve est un état modifié de conscience spon-

tané que nous vivons toutes les nuits. Vous
pouvez simplement poser une question à vos rêves
avant de vous coucher.

Cette pratique d’oniromancie existait déjà il y a

4 000 ans en Égypte antique, dans les Temples des
Rêves.

85
 Aux Frontières de L'Esprit
Questionnez vos rêves
Notez votre question sur un cahier placé près de
votre lit. Soyez curieux de la réponse.
Endormez-vous sans plus vous occuper de rien.
Si vous vous réveillez avec un rêve, que ce soit
pendant la nuit ou le matin, notez ce qui vous en
reste dans le cahier, sous la question. Ne cherchez
pas à comprendre le lien entre la question et la
réponse. Notez le rêve, simplement.
Plus tard, relisez votre question et lisez votre rêve.
Parfois le lien sera clair, parfois non. Si cela ne
fait pas sens, ce n’est pas grave. Vous pouvez tout
à fait vous contenter de cela ; cela va travailler
spontanément en vous et alimenter un processus
intuitif. Peut-être ce processus ne vous apportera-t-il
pas une compréhension claire, mais à tout le moins
un changement spontané de votre position vis-à-
vis du problème ou de vos réponses spontanées
à celui-ci. Par exemple, vous n’avez pas plus
d’informations quant au problème mais vous vous
surprendrez peut-être à répondre différemment une
fois en face du problème.
86
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
Si vous voulez aller plus loin dans la compréhen-
sion de votre rêve, je vous livre ici une méthode simple
et puissante de traduction de vos rêves :
Traduire ses rêves et autres
EMC sans dictionnaire
Une fois votre rêve écrit, soulignez chaque
personnage du rêve. Ce que j’appelle ici
« personnage » peut être tant une personne qu’un
animal, une plante, un objet, le lieu du rêve ou une
couleur. En somme, c’est tout élément du rêve qui a
une « présence ».
Pour chaque personnage souligné, racontez
votre rêve de nouveau, comme si vous étiez ce
personnage. Commencez par dire qui vous êtes
en tant que personnage du rêve, puis racontez le
rêve de la place de ce personnage. Quand vous
racontez, ne cherchez pas le lien avec quoi que
ce soit. Lâchez prise, ne réfléchissez pas. Jouez
comme un enfant à inventer, avec plaisir. Vous
élargissez juste votre contact avec le rêve. Vous
ferez des liens à la fin. N’oubliez pas que votre
87
 Aux Frontières de L'Esprit
rêve s’est construit en vous de manière libre et
spontanée. Alors, soyez le plus libre et spontané
possible. Beaucoup d’informations vont émerger
avec cette méthode, vous faire penser à des
souvenirs, ou vous faire faire des associations
personnelles. Notez tout cela. Des clarifications
émergeront.
Une fois que vous aurez écrit le rêve vu par différents
personnages du rêve, si des commentaires vous
viennent, notez-les en dessous. Sinon, posez cela,
vous relirez dans un ou deux jours et ajouterez
d’autres commentaires. Parfois, c’est un mot ou
une tournure de phrase qui va vous faire penser à
quelque chose. Ne soyez pas logique, mais intuitif.
Voici l’exemple d’un rêve de patient :
Demande au coucher : « Je demande à mes rêves,
que faire avec ma directrice ? »
Rêve avec lequel je me réveille et que je note
dans mon cahier (les « personnages » du rêve
sont soulignés) : « J’entre dans une gare où il y
a une foule qui attend. Mais chacun est habillé
d’un manteau rouge. Le train arrive et personne
88
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
ne monte. Je veux ouvrir la porte mais elle reste
fermée. Les gens viennent poser leurs manteaux à
mes pieds et tout à coup la porte s’ouvre. »
Personnage 1 : « Je suis la Gare » :
Qui suis-je ? « Je suis un espace ouvert, ça me
fait un peu peur car en moi, c’est grand et assez
vide. »
Récit du rêve vu par la Gare : « Il y a une masse
(les gens) qui attend quelque chose à l’intérieur de
moi, elle est comme figée. Ils sont petits dans ce
grand espace. Quelqu’un entre et rejoint la foule.
Un train arrive. C’est drôle, ce train me rassure
car il comble ce grand espace vide. Je vois qu’il
est bloqué. Il attend quelque chose. Les gens se
déshabillent et ça débloque le train. »
Commentaire : « Je reconnais ce sentiment de
figement avec ma directrice, et cette sensation
d’être tout petit comme dans un grand espace.
Le train me fait penser à elle encore, car elle me
rassure, mais je n’arrive pas à ouvrir sa porte.
C’est comme avec ma mère, qui était elle aussi
froide et autoritaire.
89
 Aux Frontières de L'Esprit
Personnage 2 : « Je suis la foule qui attend » :
Qui suis-je ? « Je suis un ensemble. Figé, rouge.
Ça me fait un peu peur, ce figement. Le rouge me
fait penser à la colère. Comme si tout le monde
était tout rouge de colère, mais figé. »
Récit du rêve vu par la foule : « Quelqu’un entre
dans la gare. On l’attendait. Il veut monter dans le
train sans nous reconnaître. On va vers lui poser
notre rouge à ses pieds pour le lui donner. Il le voit
et la porte du train s’ouvre. »
Commentaire : « “Sans nous reconnaître” me
fait penser au manque de reconnaissance
de ma directrice. Ma mère non plus ne me
reconnaissait pas. »
Personnage 3 : « Je suis le manteau rouge » :
Qui suis-je ? « Je ne suis pas un manteau. Je suis
un ensemble de rouge. Chaud, épais, en laine.
Je sens des peluches à la surface, un peu usée,
comme sur un vieux manteau. »
Récit du rêve vu par les manteaux : « On fige
la foule, comme si on la contenait. Personne ne
90
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
bouge. Puis la foule se bouge et nous emporte et
nous dépose. Elle se décharge de nous. »
Commentaire : « “Je ne suis pas un manteau” me
fait penser à une défense : comme si je ne voulais
pas qu’on me prenne pour un manteau ; ça me fait
penser à une serpillère, ou à un meuble. »
Personnage 4 : « Je suis le train » :
Qui suis-je ? « Je suis imposant. Fort, lourd. Je
prends ma place. J’arrive en glissant sur les rails.
Je sens que je glisse et je sens mon poids, c’est
agréable. »
Récit du rêve vu par le train : « J’arrive et entre à
quai. Je n’ai pas conscience de mon environnement.
Tout à coup, quelque chose se passe, je ne sais pas
quoi, mais mes portes s’ouvrent ; j’ai conscience
de quelqu’un qui entre. »
Commentaire : « “Je suis imposant” s’oppose à
“Je ne suis pas un manteau”. J’ai besoin qu’elle me
reconnaisse dans ma force. Comme je voulais la
reconnaissance de ma mère.
91
 Aux Frontières de L'Esprit Régler des problèmes concrets, chercher des solutions

Synthèse des éléments du rêve : mis en lien avec la Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
question « Que faire avec ma directrice ? », le rêve
met en scène la colère (manteau rouge) contenue, ....................................................................
retenue, qui crée un figement (foule, porte fermée)
en moi. C’est la libération de ce figement qui ....................................................................
permet l’accès à une autre posture : celle du train,
qui représente la force, le corps ancré (opposé au ....................................................................
corps vide et angoissant que représente la gare).
Je dois donc assumer ma colère (la voir) et la poser ....................................................................
au sol (ne pas me laisser emporter par elle), pour
prendre ma force en main face à ma patronne. ....................................................................

Des éléments émergent aussi du transfert affectif Qu’avez-vous appris ?

envers ma directrice, que je perçois inconsciemment
comme ma mère, et de ma lutte affective pour une ....................................................................
reconnaissance de sa part.
....................................................................
Notez que vous pouvez vous amuser à faire cet
exercice à partir d’une histoire inventée ! Posez- ....................................................................
vous une question ou un problème de votre vie
actuelle. Notez-le, puis n’y pensez plus et inventez ....................................................................
une courte histoire. Alors, faites l’exercice de
traduction et voyez ce qu’il en sort... ....................................................................

Allez-y.

92 93
 Aux Frontières de L'Esprit
L’autohypnose
T imaginaire : il répond de la même façon à une
' Généralités
Trouver des techniques d’autohypnose est
aujourd’hui très facile. L’hypnose est à la mode, on
trouve des inductions sonores sur Internet très aisé-
ment. Mais nous allons apprendre à nous induire en
autohypnose sans support audio et à en faire quelque
chose d’utile.
Les seules questions importantes pour vous sont :
O Comment reconnaître que je suis en transe hypno-
tique ?
O Que faire quand j’y suis ?
O Comment la produire volontairement ?
Je vais vous proposer une technique simple et effi-
cace d’auto-induction de transe hypnotique.
Avant, quelques repères pour comprendre la spéci-
ficité de la transe hypnotique, et comment l’utiliser :
O La première particularité est que le cerveau hypno-
tisé ne distingue plus ce qui est réel de ce qui est
94
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
représentation mentale ou à une perception réelle.
Par exemple, si vous vous imaginez en hypnose sur
une plage ensoleillée, votre cerveau va sécréter de
la mélatonine (l’hormone du bronzage), comme si
vous étiez réellement au soleil ! Pratique ! Nous
allons utiliser en autohypnose cet aspect du fonc-
tionnement cérébral à notre avantage.
O Le second point qu’il est important de comprendre
en autohypnose est que vous avez deux esprits : un
esprit conscient et un esprit inconscient. Nous allons
apprendre à dialoguer activement avec notre partie
inconsciente et à utiliser ses zones de compétence.
O Il y a quatre étapes dans une séance d’autohyp-
nose : 1) induire la transe ; 2) approfondir la transe ;
3) le travail ; 4) l’intégration et le retour.
O Pour s’induire en transe, il existe une multitude
de moyens. Nous allons voir ensemble deux tech-
niques d’induction. La première utilise la mémoire
et l’imaginaire, deux fonctions simples et fortement
hypnogènes ; la seconde utilise la sensorialité, plus
accessible pour ceux qui ont du mal à visualiser.
95
 Aux Frontières de L'Esprit
' Induire une transe auto-hypnotique
Méthode 1
1. Choisissez le souvenir d’un bon moment, simple
et agréable.
2. Installez-vous : asseyez-vous, pieds à plat sur le
sol, mains sur les jambes1. Fermez les yeux.
3. Développez le bon moment : allez dans votre
bon moment. La première image, sensation ou
son qui vient est la bonne. Développez ce qui
vient. Par exemple, si c’est un son de vagues,
écoutez-le avec attention, et peu à peu laissez
revenir d’autres sons (les mouettes, le vent,
l’eau sur le sable et les rochers), les images, les
odeurs, la luminosité, les sensations. Ne vous
concentrez pas avec effort : tout revient tout seul,
sans effort, juste par le plaisir de retrouver tout
cela. Regardez tout autour de vous maintenant,
derrière vous également. Regardez le ciel, vos
pieds et vos mains.
1. Prendre toujours la même posture corporelle vous aidera car cela va ancrer la transe
hypnotique à une posture. Vous y retournerez ainsi de plus en plus facilement. Une fois
que vous maîtrisez bien l’autohypnose, pratiquez-la dans toutes les postures et situations.
96
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
4. Développez une bonne émotion : ressentez
l’émotion/sensation agréable qui est associée à
ce bon moment : où est-elle dans votre corps ?
à une échelle de combien sur 10 ? Augmentez
le volume de cette émotion/sensation agréable
comme si vous aviez un bouton de volume,
puis amusez-vous à développer cette émotion/
sensation dans tout le corps, afin qu’elle s’y
étende en superficie et en profondeur. Le fait
que vous arriviez à faire cela montre que vous
êtes en hypnose.
5. Se dédoubler : revenez à votre plage. Dédoublez-
vous comme si vous étiez la fée Clochette et
élevez-vous au-dessus de vous (ou à côté si
vous préférez). Si vous ne pouvez pas voler,
prenez un tapis magique, un nuage ou ce que
vous voulez et montez dessus pour vous élever
au-dessus de la scène. Regardez la scène de
plus haut, en gardant avec vous vos bonnes
sensations.
6. Travail  : allez maintenant vers ce que vous
souhaitez travailler…
Allez-y.
97
 Aux Frontières de L'Esprit
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
....................................................................
.................................................................... et agréable.
....................................................................
....................................................................
Qu’avez-vous appris ?
....................................................................
.................................................................... que vous sentez dans votre corps (Kinesthésique).
....................................................................
....................................................................
L’induction d’hypnose est faite et plus que faite,
car en accomplissant ces cinq étapes, vous avez aussi
approfondi votre transe et êtes maintenant prêt pour la
phase de travail. Mais avant cela, une seconde méthode
simple et efficace elle aussi :
98
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
Méthode 2
1. Choisissez le souvenir d’un bon moment, simple
2. Installez-vous : asseyez-vous, pieds à plat sur le
sol, mains sur les jambes. Posez votre regard
sur un point et ne bougez plus le regard. Vous
pourrez fermer vos yeux à tout moment.
3. Ronde sensorielle 3-2-1 :
Nommez 3 choses que vous voyez (Visuel),
3 choses que vous entendez (Auditif), 3 choses
Nommez 2 choses que vous voyez, 2 choses
que vous entendez, 2 choses que vous sentez.
Nommez 1 chose que vous voyez, 1 chose que
vous entendez, 1 chose que vous sentez.
Commencez toutes vos phrases par « et » : « Et
je vois le tapis, et je vois la couleur du mur, et
je vois la luminosité de la pièce, et j’entends le
silence, et j’entends le vent dehors, et j’entends
ma respiration, et je sens mes pieds sur le sol, et
je sens mon dos contre le fauteuil, et je sens le
mouvement de ma respiration, etc. » Poursuivez
ainsi. Dès que des perceptions de transe
99
 Aux Frontières de L'Esprit
arrivent, nommez-les, cela va approfondir votre
transe. S’il y a des douleurs, un acouphène,
un bruit gênant : nommez-le et poursuivez le
processus.
Terminez la ronde par une autosuggestion :
« Et tout cela approfondit ma transe à
l’intérieur. »
4. Approfondir – quelques options :
Moyen de transport (escalier/ascenseur,
tapis volant, etc.) : visualisez-vous en train
de descendre ou de monter (par exemple un
escalier) jusqu’à une porte. Suggérez-vous, à
chaque marche, d’aller plus loin dans votre
hypnose.
Comptage : vous pouvez compter jusqu’à 5, en
disant, au compte de 5 : « Esprit inconscient,
je te demande de m’emmener dans la bonne
profondeur de transe pour (par exemple)
développer plus de confiance en moi. »
À chaque expiration, comptez jusqu’à 5 en
ajoutant « Merci ».
Vous pouvez plonger dans un vortex, devenir
le vent, vous envoler jusqu’à votre bon moment,
vous imaginer vous enfoncer dans la terre ou
vous élever au-dessus de votre fauteuil, vous
100
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
imaginer entendre le bruit des vagues, et votre
transe devenir plus profonde à chaque vague,
etc. Soyez créatif.
En ouvrant la porte, vous débouchez sur votre
bon moment ou sur la scène à travailler.
5. Travail : transportez-vous vers ce que vous voulez
travailler (voir partie suivante).
Allez-y.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
...............................................................
...............................................................
...............................................................
...............................................................
Qu’avez-vous appris ?
...............................................................
...............................................................
...............................................................
...............................................................
101
 Aux Frontières de L'Esprit
' Que faire si je suis perturbé dans
ma transe hypnotique ?
O Si la transe est perturbée par des bruits extérieurs : c’est
qu’il y a une association mentale bruit = dérange-
ment. Remplacez cela par une nouvelle association
bruit = plus de transe. Comment ? En demandant
à votre esprit Inconscient, après une nouvelle
programmation : « À chacun de ces (bruits), ma
transe/mon confort s'approfondit », ou : « Plus j’en-
tends ce bruit, et plus ma transe (ou mon confort)
s’approfondit. »
O Si la transe est perturbée par des pensées : faites comme
si ces pensées étaient des nuages, et comme si vous
étiez un aviateur qui passe dans cette couche de
nuages. Pour en sortir, il monte plus haut ou descend
plus bas. Vous allez aller plus profond que vos
pensées : « Esprit inconscient, emmènes-moi plus
profond en hypnose s’il te plaît… et plus profond…
et plus profond… et plus profond… » Dès que c’est
suffisant, dites : «  Merci… tu peux stabiliser ma
transe à cette profondeur. »
O Autre possibilité pour les pensées : placez le
« commentateur intérieur » dans une radio, par
exemple, ou en image sur une télé, et baissez le son
102
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
ou l’image ; ou encore, placez les pensées dans un
coffre et fermez. Chaque nouvelle pensée, mettez-
la dans le coffre. Rappelez-vous : nous sommes ici
dans le royaume de l’imagination !
' Travailler sur un problème
en autohypnose
L’induction et l’approfondissement de la transe
hypnotique étant acquis, nous allons maintenant
apprendre différentes choses à travailler au travers
d’exemples concrets :
Travailler en hypnose sur une
manifestation physique (douleur,
boule dans la gorge, tension, etc.)
Allez dans votre sensation corporelle. Commencez
par bien l’explorer : taille, contours, épaisseur,
niveau d’activité (pulsatile ou stable)…
Option 1 : traduisez-la en métaphore. À quoi me fait
penser cette sensation ? à un étau qui me serre le
crâne ? Alors visualisez cet étau et commencez par
103
 Aux Frontières de L'Esprit
le serrer d’avantage. La douleur augmente ? C’est
bon signe ! Le cerveau réagit à cette réalité. Je peux
alors maintenant le desserrer. Je le desserre… la
douleur diminue. Mais imaginons que ça bloque !
Je regarde ce qui bloque : c’est rouillé. Je mets de
l’huile et je débloque. Je poursuis le desserrage
jusqu’à ce que ma sensation soit soulagée.
Option 2 : Je me transporte avec cette douleur dans
mon bon moment. J’attrape cette sensation entre
mes mains et je la regarde. Comment apparaît-
elle ? Qu’est-ce que j’ai envie de faire avec elle ?
Imaginons que c’est une boule noire. Je veux la
jeter dans la mer au loin. Je le fais mais elle revient
comme un élastique ! C’est le signe que mon
inconscient n’est pas d’accord avec cette solution.
Je la regarde bien et j’ai envie de la laver dans la
mer. J’y vais. En la lavant, le noir s’en va et cela
devient une boule de cristal. Je regarde dedans :
un souvenir apparaît… une scène de mon passé.
On passe donc au travail émotionnel…
Allez-y.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
104
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
Qu’avez-vous appris ?
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....................................................................
....................................................................
....................................................................
Travailler sur
un problème relationnel
Par exemple, je suis stressé par un collègue de
travail. À partir du bon moment, envolez-vous vers
une scène avec votre collègue. La première qui
vient est la bonne. Observez bien la scène, puis
dédoublez-vous et regardez la scène de l’extérieur.
Regardez-vous dans la scène.
Retournez dans votre bon moment et placez
cette scène sur un écran de portable. Vous allez
maintenant vous demander ce que vous pouvez
faire ou changer dans cette scène. Si vous ne
savez pas, voici quelques exemples : changer le
décor de la pièce ; changer la taille du collègue
ou votre taille à vous (devenir un géant et sentir
ce que vous voulez faire dans la scène en tant
que géant) ; faire venir des aides dans la scène
105
 Aux Frontières de L'Esprit
(ex : tous vos amis autour de vous, assis à un bar
avec votre collègue) ; habiller votre collègue d’une
manière ridicule ; aller vous-même vous réconforter
ou vous rassurer ; etc.
Vous pouvez aussi simplement regarder la scène
sans intervenir et confier le problème à votre
respiration pour que celle-ci digère les éléments
du problème. Vous regardez simplement ce qui
change dans la scène à mesure que vous respirez.
Allez-y.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
....................................................................
....................................................................
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....................................................................
Qu’avez-vous appris ?
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....................................................................
....................................................................
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106
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
Travailler sur un problème
émotionnel simple
Ressentez votre émotion dans le détail et
augmentez-la comme si vous augmentiez le volume
sonore de cette émotion.
Option 1 : Dans votre bon moment, projetez
maintenant votre émotion sur le paysage et sa
météo. Une colère peut devenir une tempête,
une tristesse un paysage triste ou mort, une
peur peut faire venir des animaux menaçants…
Laissez maintenant se développer la scène. La
tempête a besoin peut-être de faire rage et de
se déchaîner… Demandez-vous alors de quoi a
besoin ce paysage, et apportez-le-lui. Du soleil ?
Allez chercher le plus beau soleil de vos souvenirs.
De vent ? Allez chercher le vent le plus adapté
dans vos souvenirs, etc.
Option 2 : L’émotion fait remonter une scène de
votre vie ou un souvenir. Dans ce cas, travaillez-le
comme expliqué dans le « problème relationnel ».
Si c’est l’enfant en vous qui est triste, par exemple,
voyez où il est ? Regardez-le, triste dans cette scène.
Et vous, l’adulte, entrez dans la scène et aidez-le.
Réconfortez-le, ou défendez-le, ou rassurez-le…
Puis, sortez-le de la scène pour l’emmener dans
107
 Aux Frontières de L'Esprit
votre bon moment et donnez-vous le temps jusqu’à
ce que vous vous sentiez mieux, en ayant, de plus,
compris le sens de l’émotion qui était là.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
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Qu’avez-vous appris ?
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Un examen qui arrive ?
Un stress à venir ?
Ex : je vais passer un examen ou une épreuve et
cela me stresse beaucoup.
La situation est plus simple qu’il n’y paraît.
D’abord, première question pour le conscient :
suis-je suffisamment prêt ? Ai-je bien tout travaillé ?
108
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
Si la réponse est non, votre stress vient comme
moteur d’action, l’hypnose ne pourra rien pour
vous : allez travailler, ou alors lâchez prise, vous
ne ferez que votre mieux, et peut-être devez-vous
vous résigner à ne pas y arriver cette fois. Si la
réponse est « Oui, j’ai assez travaillé », alors le
chemin est simple. Votre stress vient du fait que
vous vous imaginez en train d’échouer. Nous
allons retourner le problème comme une crêpe :
Visualisez-vous dans votre examen en train de
réussir ! Si c’est une épreuve écrite, voyez-vous
écrire avec fluidité et rapidité, sourire aux lèvres
et concentré.
S’il s’agit d’une épreuve orale, visualisez-vous
en train de parler éloquemment et en confiance.
Vous pouvez, si la scène vous stresse, changer la
couleur des murs, ou les retirer pour mettre de la
forêt à la place, ou encore mettre les membres du
jury en pyjama ! Pour une jeune patiente qui faisait
du cheval, nous avons même ajouté une odeur de
crottin dans la pièce.
Voyez-vous réussir pendant l’épreuve, puis ressortir,
puis aller la raconter aux autres, puis recevoir les
résultats ; voyez votre vie après avoir réussi. Vous
devez ressortir de votre autohypnose en vous
sentant motivé !
109
 Aux Frontières de L'Esprit
Programmez-vous à réussir ! Ainsi, le jour de
l’épreuve, vous serez dans les meilleures conditions
de réussite.
Allez-y.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
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Qu’avez-vous appris ?
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' Revenir et intégrer l’autohypnose
Le travail étant réalisé, vient le temps de revenir
de transe :
110
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
Revenir
de transe hypnotique
Réintégrez toutes les parties de vous si vous vous
êtes dédoublé plusieurs fois. J’aime bien utiliser la
technique du sifflet : comme un entraîneur de foot,
sifflez fort et toutes les parties de vous reviennent
en vous. Sinon, retournez dans votre bon moment
et réintégrez-vous.
Remerciez votre Inconscient et ce lieu.
Prenez le même chemin, pour le retour, que celui
que vous avez pris à l’aller, ou, si vous le sentez
comme cela, prenez une grande respiration et
ouvrez les yeux.
Allez-y.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
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 Aux Frontières de L'Esprit
Qu’avez-vous appris ?
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Si, lors du retour, votre tête tourne un peu ou que
vous vous sentez dans du coton, ou que vos yeux ne
veulent pas s’ouvrir… c’est que vous ressortez trop
vite ! Détendez-vous, et attendez simplement. Votre
corps et votre inconscient ont leur rythme.
' Questions fréquentes sur
l’autohypnose
O Puis-je rester coincé en hypnose ? Non, c’est impossible.
Je vous rappelle que c’est un état naturel du cerveau,
certes induit volontairement, mais le cerveau sait
aller et revenir de cet état tout seul ; il le fait d’ail-
leurs sans cesse de manière spontanée.
112
Régler des problèmes concrets, chercher des solutions
O Puis-je tout faire en autohypnose  ? Non, de la même
manière qu’on ne peut pas s’extraire d’un sable
mouvant en se tirant soi-même par la main… et
qu’on ne se chatouille pas soi-même. Par exemple,
si vous avez manqué de lien affectif humain dans
votre enfance et que cela est le terrain d’un mal-être
de fond, ce n’est qu’au travers de la relation à l’autre
que cela pourra se traiter.
O Comment être sûr que je suis en autohypnose  ? Une fois
l’induction faite et l’approfondissement réalisé,
augmentez l’approfondissement, par exemple en
augmentant la taille de l’escalier. Une fois bien
profond, ouvrez les yeux délicatement et observez
si vous vous sentez comme d’habitude ou un peu
différent. Si vous percevez une différence (normale-
ment agréable, au pire « bizarre »), c’est cela votre
marqueur de la transe, qui vous permet de savoir
quand vous êtes en transe hypnotique. Fermez les
yeux de nouveau et ressentez toujours ce marqueur.
Tournez un bouton de volume imaginaire pour
augmenter cette sensation, et vous augmenterez
votre transe.
 4

Explorer de
nouveaux territoires

L a transe ne vise pas qu’à être utilisée pour nos

besoins prosaïques. Car en la vivant, nous nous
rendons compte qu’un autre rapport à la réalité existe,
et donc que de nouvelles régions de la réalité nous appa-
raissent. C’est comme si, vivant comme un borgne,
nous découvrions que nous avons un deuxième œil,
et que, l’ouvrant, nous expérimentions la 3D ! Nous
nous rendons alors compte que le monde est encore
plus vaste, plus riche et plus merveilleux. La vision du
monde des sociétés traditionnelles reprend là toute sa
valeur. Nous allons entrouvrir la porte de nouveaux
territoires. Mais pas trop loin, car pour aller plus loin,
mieux vaut le faire lors de stages encadrés.

115
 Aux Frontières de L'Esprit
Marche
T consciente avec
respiration circulaire
L’exercice suivant va vers une expansion de
conscience en relation avec la nature. La scène de la
transe sera ici le monde extérieur. Vous ouvrez main-
tenant la porte aux synchronicités1 et à une relation au
monde plus « chamanique ».
Avant de faire cet exercice, assurez-vous que vous
ne souffrez pas des contre-indications suivantes  :
épilepsie, hypertension, glaucome, troubles psycho-
tiques2, troubles dissociatifs3, troubles cardiaques,
asthme grave (si vous êtes asthmatique, prenez votre
traitement avec vous, au cas où).
La première fois que vous pratiquerez cette tech-
nique, faites-le accompagné d’un ami qui vous suivra
à environ cinq ou dix mètres derrière vous. Quand
vous serez à l’aise avec l’exercice, vous pourrez le
faire seul. Le maître mot ici est  : confiance dans le
processus. Cela veut dire que si vous vous sentez l’en-
vie de faire des choses bizarres ou grotesques, faites-
1. Synchronicité : un « hasard » qui fait sens pour celui qui la vit.
2. Troubles psychotiques : troubles chroniques (schizophrénie, psychose chronique,
paranoïa) ou antécédent de bouffée délirante aiguë, ou toute forme de psychose aiguë.
3. Troubles dissociatifs : ensemble de troubles tels que, par exemple, des sentiments de
dépersonnalisation, la sensation régulière d’être spectateur de vous-même, des moments
fréquents ou intenses pendant lesquels le quotidien perd sa familiarité, devenant étrange
ou inquiétant ; des tendances à perdre le contrôle de vous-même ou à amnésier des
moments de votre vie.
116
Explorer de nouveaux territoires
les, même si vous vous sentez ridicule. Tant que cela
ne cause aucun dommage, ni pour vous, ni pour votre
entourage ou votre environnement, tout va bien.
Le monde de la transe n’est pas un monde fait de
logique et de convenances sociales. Il est un monde
fait de relations, de symbolisme, d’animalité, de liens
avec les mondes visibles et invisibles. Poussez la porte
de ce monde et découvrez-le, explorez-le.
Cet exercice d’EMC provoqué va vers des états plus
énergétiques et élargis de conscience. On va surventi-
ler, ce qui va avoir des effets physiologiques, psycho-
logiques, énergétiques et spirituels.
Pratique de la marche consciente
avec respiration circulaire
Je vous recommande pour cet exercice de le faire
en forêt ou dans une belle nature, en plaine pour
éviter le danger de glisser dans une pente, une
rivière ou un ravin. Choisissez de préférence un
espace naturel hors des chemins. Une forêt est
parfaite, par exemple.
117
 Aux Frontières de L'Esprit
Si vous vivez en ville et que la nature est loin, alors
ne faites pas l’exercice préliminaire, et surtout
soyez prudent avec les voitures !
Avant l’exercice, demandez la permission au lieu
où vous le pratiquerez, et remerciez le lieu pour ce
qui va s’y passer.
Posez une intention pour l’exercice : cela peut être
une question, un thème sur lequel vous souhaitez
une clarification ou une aide. Posez clairement
votre intention dans une phrase courte, puis oubliez
l’intention.
Préparations préliminaires
Nous allons commencer par activer la sensorialité.
Pendant 5 minutes, partez seul un moment pour
jouer à être un animal (choisissez l’animal ou
laissez-le prendre forme peu à peu). Marchez
dans la forêt en vous sentant aux aguets : humez
l’air, sentez les arbres, plongez les mains dans
l’humus, grattez la terre, sentez-la, écoutez les
sons de la forêt, regardez les couleurs, les formes,
les lumières. Touchez, sentez, goûtez. Retrouvez
un côté sauvage et spontané. Si l’envie vous vient
de vous couvrir le visage de terre ou de vous
rouler dans les feuilles, faites-le. Posez par terre les
inhibitions et les convenances sociales et laissez
libre court à votre animalité !
118
Explorer de nouveaux territoires
Soyez au maximum libre et spontané. Si vous avez
du mal à vous lâcher car le mental et le jugement
sont trop présents, ce n’est pas grave. C’est juste
une préparation. Notez-le, sans vous reprocher de
« ne pas y arriver ». Nous sommes qui nous sommes
et avons notre éducation, nos limites, et tout cela
peut évoluer. Cela ne sert à rien de se reprocher
quoi que ce soit. Il n’y a pas d’échec possible,
juste un miroir de vous-même à un instant T. Tentez
peut-être l’humour, jouez à être un enfant qui joue
à être un animal, voyez si ce contournement vous
simplifie la vie ! Sinon, passez à l’étape suivante :
Exercice de respiration circulaire
Votre accompagnant se place derrière vous, en
silence. L’exercice va durer entre 20 et 30 minutes.
Le rôle de l’accompagnant est de veiller sur vous,
mais sans perturber votre expérience. Il reste à
distance, contrôle le temps, ne vous parle pas, et
vous ne lui parlez pas. Au bout de 20 minutes, il
tape 3 fois dans ses mains pour vous prévenir. Vous
lui faites un signe de main pour signifier « OK » si
vous avez besoin de plus de temps. Si la durée vous
convient, alors revenez vers lui et faites un feed-back
de l’expérience vécue. Puis, inversez éventuellement
les rôles et devenez son accompagnant pour qu’il
fasse l’expérience (s’il n’a pas les contre-indications
mentionnées précédemment).
119
 Aux Frontières de L'Esprit
Une fois prêt à faire l’exercice, observez maintenant
votre respiration spontanée. Supprimez toute pause
entre l’inspiration et l’expiration, de sorte à avoir un
mouvement circulaire continu inspiration-expiration,
inspiration-expiration, etc. Quand vous sentez cette
boucle respiratoire, accélérez maintenant un peu
votre rythme respiratoire, ainsi que votre amplitude
respiratoire pour prendre plus d’air que ce dont vous
avez besoin. C’est un repère assez flou que je vous
donne, mais vous ajusterez en fonction de ce que
vous ressentez : si au bout de 5 minutes environ,
vous ne ressentez rien de particulier, augmentez
l’amplitude et le rythme respiratoire. Commencez
à marcher à bonne allure, en maintenant la
respiration circulaire, toujours en respirant de
manière à prendre plus d’air que ce dont vous avez
besoin. Si votre tête se met à tourner, ou que des
fourmillements s’intensifient dans votre corps, c’est
que vous respirez trop intensément. Si la tête tourne,
faites simplement une petite pause et diminuez un
peu l’intensité de votre souffle, tout va revenir dans
l’ordre. Pour les fourmillements, ne vous arrêtez pas
de marcher, mais diminuez simplement l’intensité de
votre respiration, sinon le risque est de faire une
tétanie. La tétanie n’a rien de risqué, mais elle peut
vous impressionner, vous faire peur ou vous faire
tomber. Mieux vaut laisser l’expérience de la tétanie
pour une exploration dans un cadre sécurisé avec un
thérapeute expérimenté (respiration holotropique) !
120
Explorer de nouveaux territoires
Au bout de quelques minutes de marche, votre
conscience va changer, s’élargir. Un niveau plus
primaire et intuitif va se mettre en route. Restez
alerte à tout ce qui se présente à vous : des
synchronicités vont se produire, mais ne réfléchissez
pas pendant tout l’exercice. Restez animal, intuitif.
Si des pensées viennent, laissez-les passer, restez
dans votre souffle et continuez à marcher, présent à
votre environnement comme l’animal que vous étiez.
Pendant les 20-30 minutes de respiration circulaire,
marchez, donc, sans vous arrêter, hors du chemin
tracé, en laissant votre corps vous guider. Ne vous
arrêtez pas, sauf si vous avez quelque chose à
faire qui est dicté par la transe.
Quand vous entendez les claquements de mains
de votre accompagnant, si vous avez terminé,
revenez vers lui. Sinon, faites-lui signe de la
main, il comprendra que vous nécessitez encore
quelques minutes.
Une fois terminé, rejoignez votre accompagnant
et racontez-lui tout ce que vous avez vécu.
L’accompagnant ne dit rien et écoute.
Puis, alternez les rôles et suivez le même parcours.
À la fin de l’exercice, remerciez la forêt et sortez.
En toute fin d’exercice, rentrez à la maison. Une
fois arrivé, renommez votre intention de départ
121
 Aux Frontières de L'Esprit
et faites les liens entre ce qui s’est passé et votre
intention.
À ce moment de l’intégration de l’exercice, ne
forcez pas les compréhensions et les liens entre
les événements et votre intention. Si cela fait sens,
alors accueillez et remerciez. Sinon, laissez aller.
Le sens peut venir plus tard, ou des changements
peuvent advenir plus tard.
Allez-y.
Qu’avez-vous observé de vos ressentis ?
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
Qu’avez-vous appris ?
....................................................................
....................................................................
....................................................................
....................................................................
122
Explorer de nouveaux territoires
Vous pouvez refaire cet exercice autant de fois que
vous le souhaitez.
Variante
T avec musique
Vous pouvez le faire également en mettant un
casque sur vos oreilles avec de la musique (sur votre
téléphone par ex.).
Si vous choisissez cette option, optez pour des musiques
évocatrices. Composez une playlist de 25 minutes :
O 10 minutes de musique dynamique, avec percus-
sions ;
O 10 minutes de BO de films, telles que Avatar ou Le
Seigneur des anneaux, suivies d’un air d’opéra ou
de chants sacrés ;
O 5 minutes de musique douce, relaxante.
Lancez la musique dès que vous débutez votre
marche consciente.
Si vous faites régulièrement cet exercice, vous allez
vivre un certain nombre d’expériences riches d’ensei-
gnements, thérapeutiques, guidantes… Vous allez
également développer votre intuition et ouvrir vos
perceptions subtiles.
123
 Aux Frontières de L'Esprit

Si l’intensité de l’expérience est trop forte et vous

inquiète ou vous questionne, le mieux est d’arrêter, et,
si vous voulez poursuivre, de faire appel à un praticien
de la respiration holotropique, du rebirth, du kunda-
lini yoga ou du chamanisme par exemple. Ainsi, vous
apprendrez dans un cadre sécurisé à explorer ces états.
La transe est un espace vraiment extraordinaire de Partie III
développement transpersonnel. Elle nous autonomise
dans notre relation avec nous-mêmes et avec le monde.
Elle nous permet de sortir du territoire douillet de nos LES ÉTATS MODIFIÉS DE CONSCIENCE
certitudes et de ce que notre société moderne nous
enseigne comme conception du monde, et de mettre
POUR AIDER ET ACCOMPAGNER
tout cela à l’épreuve de notre propre expérience du VOS ENFANTS
monde. La transe n’enseigne pas de dogmes.

Elle invite à expérimenter et, à partir de là, à orga-

niser sa carte du monde, et à mettre celle-ci en contact
et en dialogue avec les autres cartes du monde.

Aujourd’hui, de nombreux stages ou retraites

existent en France et partout dans le monde pour faire
ces expériences en toute sécurité. Nous allons main-
tenant parler de ces groupes, afin de, peut-être, oser
l’aventure, avec discernement. Nous aborderons ce
territoire dans la partie 4.
 1

Les états modifiés

de conscience chez l’enfant

Introduction
T

L ’enfant est naturellement en transe. C’est son

fonctionnement de base, type hémisphère
droit : sensitif, intuitif, réactif, instinctif, global,
métaphorique. L’attention de l’enfant est typique d’une
attention de transe : plus globale que focale. Il peut
être tout à fait concentré sur son dessin et à la fois
entendre tout ce qui se dit dans la pièce et y réagir.
Il sait très bien s’absorber intensément dans quelque
chose, sans se concentrer : il est présent à, fondu dans.

L’état de base de l’enfant est donc, jusqu’à 5 ou

6 ans environ, la transe. L’éducation vise notamment

127
 Aux Frontières de L'Esprit
à ce qu’il développe un esprit conscient capable de
dessiner des frontières et des catégories entre les êtres
et les choses, à ce qu’il structure un langage pour les
nommer et penser leurs relations, et à ce qu’il ration-
nalise son rapport à son environnement, c’est-à-dire,
en somme, à ce qu’il construise une relation au monde
plus hémisphère gauche. Tout cela est essentiel et
structurant.
Le
T cas des enfants « rêveurs »
Les enfants qu’on nomme « rêveurs », ou
« planants », sont des enfants qui trouvent du plaisir à
rester dans cette forme de fonctionnement psychique,
et qui y développent des habilités. Cela est parfois le
symptôme de problématiques affectives, qui font que
l’enfant n’investit pas le monde comme source suffi-
sante de plaisir.
Mais cela peut aussi être le signe que le monde est
vaste : il y a aussi « l’autre côté du monde », comme
on le dit dans les histoires ou dans d’autres cultures,
et l’enfant prend plaisir à y retourner. Dans notre
culture, qui survalorise le fonctionnement rationnel
et le monde matériel, on entendra apposer à ce fonc-
tionnement psychique de l’enfant rêveur le terme de
128
Les états modifiés de conscience chez l’enfant
« tendance dissociative », terme clinique qui dessine
en toile de fond un paysage légèrement pathologique.
On ne traitera pas, en revanche, comme un cas clinique
un enfant qui aura des « tendances matérialistes », s’il
s’intéresse au commerce.
Je préfère pour ma part parler de « capacités disso-
ciatives », car si l’hypnose nous enseigne quelque
chose, c’est bien que ce qu’on appelle la dissociation
est une compétence naturelle du cerveau. Mais tout est
histoire d’équilibre. Avec ces « enfants-oiseaux », qui
ont cette tendance à aimer se dissocier, je conseille de
faire trois choses sur le plan éducatif :
O D’abord, explorer pour savoir si une souffrance
sous-jacente est présente : trouve-t-il sa place ? Se
sent-il suffisamment aimé ? désiré ? S’ennuie-t-il à
l’école ? S’interroge-t-il sur le sens ? Bref, s’inté-
resser à cet enfant afin de savoir si cette tendance à
partir dans le rêve n’est pas une fuite du réel où il ne
trouve pas de satisfaction suffisante, voire qu’il vit
comme source de souffrance. Quand on montre de
l’attention à cet enfant, parfois l’équilibre se remet
en place de lui-même, l’enfant est moins « rêveur »
et investit plus la vie quotidienne.
O Si ce fonctionnement persiste car il est plus
un trait de personnalité, alors je vous encourage à
129
 Aux Frontières de L'Esprit
soutenir et à valoriser cette capacité en la nommant
positivement. Il faut arrêter de connoter cela néga-
tivement avec des formules comme « Tu es dans la
lune ». Cette phrase pourrait être une formule posi-
tive car poétique, mais elle est en général formulée
sur un ton de reproche, ce qui pathologise cette belle
capacité. Au lieu de cela, accompagnez l’enfant pour
qu’il puisse apprendre à l’utiliser correctement et
utilement (par exemple, encouragez la pratique d’un
art, pour qu’il ramène et partage ses « voyages » à
travers la musique, la peinture, le chant, la danse,
la poésie, etc.). Au quotidien, observez ce que fait
l’enfant quand il est « dans la lune » : revient-il avec
une idée ? ou est-il simplement parti un instant à
l’intérieur de lui pour intégrer ce que vous venez
de lui dire en le mettant en scène dans un ailleurs ?
ou peut-être encore une idée est-elle passée dans
son esprit, bien plus intéressante et stimulante pour
lui que ce qui était en train de se dérouler devant
ses yeux (très fréquent chez les haut-potentiels,
qui s’ennuient très vite et préfèrent partir créer
dans leur « atelier intérieur ») ? En somme, il vaut
mieux en général le laisser faire et s’intéresser à
ce qu’il va ramener de son monde intérieur. Plus
grand (à partir de 10 ans), on pourra l’encourager
en soutenant directement une pratique d’EMC auto-
induit (autohypnose, sophrologie, méditation), afin
qu’il apprenne à utiliser pleinement son potentiel.
130
Les états modifiés de conscience chez l’enfant
N’encourage-t-on pas un enfant qui joue sans cesse
avec les touches du piano à rejoindre des cours de
musique ? L’art est souvent un espace satisfaisant,
mais parfois trop technique pour ces enfants qui ne
demandent qu’à ce qu’on les laisse s’envoler.
O En parallèle, on équilibrera cet enfant en l’en-
courageant à développer la tendance inverse, ici
l’ancrage : par des activités très terre à terre qui
demandent une attention concrète, comme faire du
sport, s’occuper des tâches ménagères ou du jardin,
etc. Mais l’ancrage n’est intéressant que si en paral-
lèle on nourrit la capacité à voyager en EMC.
Techniques
T d’hypnose pour
aider vos enfants
Avant 6 ans environ (parfois jusqu’à 8 ou 10 ans
selon les enfants), l’inconscient de l’enfant est à ciel
ouvert. C’est pourquoi il ne fait pas toujours bien la
différence entre l’imaginaire et le réel  : un film, un
livre ou une histoire peuvent fortement l’imprégner.
La bonne nouvelle, c’est que l’enfant est très souple
131
 Aux Frontières de L'Esprit
dans le changement, et il sécrète aussi facilement des
peurs qu’il s’en défait.
Une dame me parle un jour de sa fille, Lola, 5 ans,
qui, depuis qu’elle a vu une scène du film Gremlins, a
des angoisses la nuit et ne veut plus rester seule quelque
part. Elle dit entendre la voix des Gremlins et cela lui
fait peur. Je dis à la mère comment s’y prendre :
— Coucou, Lola : tu entends la voix des Gremlins ?
— Oui, j’ai peur.
— OK, Tu peux l’entendre maintenant ?
— Oui.
— OK, alors, comme avec une télécommande,
mets-leur une voix plus aiguë, comme une voix de
souris.
(Lola rit.)
— C’est marrant, non ? Regarde comment tu peux
changer la voix… Tu y arrives bien ? Si tu veux,
comme sur ton écran tactile, tu peux les diminuer avec
tes doigts à une taille de grains de riz et tu peux t’amu-
ser à sauter dessus, tu veux ? Tu entends comment ils
explosent sous tes pieds ?
(Lola s’amuse.)
Temps de traitement : 2 minutes. Après cela, Lola
dort à nouveau seule et joue seule dans sa chambre.
Qu’a-t-on fait ?
132
Les états modifiés de conscience chez l’enfant
L’enfant est dans un fonctionnement naturel de
transe. Son cerveau crée une image ou des sons qui
lui font peur. On va utiliser cette compétence en
l’inversant, pour déconnecter la peur. Comment ?
Exactement comme dans Harry Potter, dans la scène
avec l’épouvantard, en modifiant l’image ou le son qui
fait peur jusqu’à ce que l’enfant non seulement n’en ait
plus peur, mais s’en amuse. S’il veut mettre ce qui l’ef-
fraie à la poubelle, alors très bien. S’il veut le dessiner
sur une feuille et la brûler, alors c’est très bien aussi.
L’imaginaire, chez le jeune enfant, fonctionne
comme l’imaginaire en transe hypnotique : le cerveau
traite l’imaginaire comme un événement réel et y
réagit. Ainsi, modifier la sensorialité de la scène
change tout à coup sa couleur émotionnelle.
Même chose avec une maîtresse angoissante : on
peut s’amuser à la déguiser en poupée maquillée, avec
des couettes ou avec une sucette dans la bouche.
Technique
T des trois dessins
Chez l’enfant, le dessin, tout comme le jeu, c’est sérieux.
Un jour, une maman vient me voir en consultation pour sa
fille de 6 ans. Celle-ci ne dort pas la nuit. Les traitements
133
 Aux Frontières de L'Esprit
homéopathiques ou à base de plantes n’y changent rien.
La situation empirant, les médecins pensent à pousser
plus loin les investigations neurologiques.
Je reçois la fillette avec sa mère. C’est une petite
fille à haut potentiel, qui paraît avoir 10 ans.
Nous parlons du symptôme, qui semble isolé car la
fillette va bien dans l’ensemble, paraît épanouie dans
une famille agréable, dont les trois enfants affichent
cependant des hauts potentiels qui questionnent beau-
coup les parents.
Après l’entretien avec la mère et la fillette, je me
centre sur le symptôme, vu par l’enfant. Je donne alors
à la fillette une première feuille de papier :
— Dessine-moi ton problème, s’il te plaît.
L’enfant me dessine un grand écran de télé avec
une scène. Je la questionne sur ce qui passe à la télé :
elle y revoit toute sa journée avec ses copines, ce dont
elles ont parlé, la classe et ce qu’elle a appris, etc.
Je lui donne une seconde feuille :
— OK, dessine-moi maintenant comment ça sera
quand tout sera bien ?
L’enfant me dessine alors un écran de télé avec
une image idyllique de licornes et d’arcs-en-ciel. Elle
commente : « Je suis sur la chaîne des rêves. »
134
Les états modifiés de conscience chez l’enfant
Je lui transmets donc une dernière feuille, que je
place entre les deux premières. Je lui dis :
— OK, ici tu as ton problème. Ici, tu as ce que tu
veux. Au milieu, dessine-moi maintenant de quoi tu as
besoin pour passer de la première à la dernière image ?
L’enfant me dessine une télécommande, qu’elle
prend bien le temps de détailler, avec les boutons pour
changer de chaîne.
— Super, ferme les yeux maintenant. Tu vois la
chaîne de l’école ?
— Oui.
— Super. Tu vois ta télécommande ?
— Oui.
— Alors, change de chaîne.
L’enfant me fait un signe de tête entendu et affiche
maintenant un grand sourire détendu.
— C’est bon ?
Elle profite visiblement de la scène. Je conclus : 
— Tu as bien compris comment faire? Super, alors
ce soir, tu fais pareil.
Temps : environ 10 minutes, dessins compris.
Le soir même, elle redormait. Le symptôme n’est
jamais réapparu.
135
 Aux Frontières de L'Esprit Les états modifiés de conscience chez l’enfant

' Technique des 3 dessins : Dessin 3 : Ressource

Dessin 1 : Problème

Cette technique n’est bien entendu pas toujours aussi

magique ! Mais testez-la ! Dans le pire des cas, vous
Dessin 2 : Tout va bien !
comprendrez mieux la représentation que votre enfant
a de son problème. Dans le meilleur des cas, vous allez
le résoudre en lui faisant utiliser son imaginaire.

Les
T contes thérapeutiques

Chez l’enfant, les contes thérapeutiques fonc-

tionnent d’autant mieux que, je l’ai dit, ils sont en
hypnose naturellement jusqu’à 6-8 ans. C’est pour-
quoi ils vivent le conte avec autant d’intensité. On dit

136 137
 Aux Frontières de L'Esprit

communément qu’ils sont «  sans filtre  »  : c’est une

parfaite représentation du fonctionnement de transe.

Après 6-8 ans, l’enfant entre dans ce qu’on appelle

« l’âge de raison », qui est un nom intéressant puisque,
en effet, non seulement il investit davantage l’approche
rationnelle du monde, mais il entre aussi dans un fonc-
tionnement plus hémisphère gauche : distancié du 2
monde, séquentiel, séparatif. Le jeu y reste cet « entre-
deux-mondes » où, dans cet espace que le psychanalyste
D.W. Winnicott nommait « l’espace transitionnel », Les états modifiés de conscience
l’enfant retrouve son fonctionnement de transe. Le jeu chez l’adolescent
devient alors, comme le dessin, un espace privilégié
pour aller à la rencontre de votre enfant, afin de l’aider
à figurer ses peurs, ses problèmes, et de chercher avec Adolescence :
T la faille initiatique
lui des solutions.

Je recommande à tous les parents qui désirent aider

leur enfant à l’aide de contes ou de jeux de lire l’ou-
vrage de mon amie Lise Bartoli (2015) : L’art d’apai-
ser son enfant pour qu’il retrouve confiance, force et
confiance, éd. Payot Psy. Vous trouverez également
d’autres ouvrages de L. Bartoli centrés sur les enfants.
L ’adolescence est un processus charnière de la
vie, où se déroule le passage de l’enfance vers
l’âge adulte. Dans les cultures traditionnelles, c’est
un âge ponctué de rites de passage qui célèbrent et
symbolisent la sortie de l’enfance et l’entrée dans la
sexualité. On entre dans la communauté des femmes
ou des hommes (ou autres, dans certaines cultures qui
ont trois genres ou plus1).

1. La communauté des Zapotèques, au Mexique, compte trois genres sexuels : hommes,

femmes et muxhe. Les muxhe sont l’équivalent des homosexuels, mais reconnus comme
un genre sexuel à part entière et célébré tel quel. C’est un honneur et une joie chez les
Zapotèques d’avoir un muxhe dans la famille.

139
 Aux Frontières de L'Esprit
En France, les rites de passage de l’adolescence se
sont largement appauvris du fait de la laïcisation de la
société et de la désertification des lieux de culte, où
auparavant se déroulaient les rites de passage (commu-
nion solennelle, etc.).
Aujourd’hui, force est de constater qu’il ne reste
que des rites laïcs marqueurs de réussite sociale et
professionnelle : passer le brevet, puis le Bac, avoir
son permis de conduire, trouver un travail, sont deve-
nus les principaux rites de passage de l’adolescent et
du jeune adulte.
Mais ces rites sont insuffisants, car ils ne concernent
que la relation du jeune au monde social et profession-
nel (axe horizontal), et non à la Vie avec un grand V
(axe vertical). Ce qui manque, c’est donc l’initiation.
Cette faille initiatique en Occident moderne fabrique
en masse des adulescents, c’est-à-dire des adultes qui
ont coché toutes les cases de la réussite, mais qui,
dans le fond, ne sont pas construits. L’armée, qui était
un temps un rite de passage fort, ne joue plus ce rôle
non plus.
Face à cette faille initiatique, d’autres formes de
rituels pauvres et grotesques ont émergé, avec la télé-
réalité notamment (on passe devant un jury pour se
mettre publiquement au défi), qui fabrique de fausses
stars jetables qui, au bout de leur initiation, découvrent
140
Les états modifiés de conscience chez l’adolescent
que le rite était en carton décoré. Les marchands
repèrent rapidement les failles culturelles et s’y
engouffrent ! Et les parents se demandent comment
leurs ados peuvent se passionner pour de telles âneries.
Eh bien, parce qu’elles parlent à un besoin profond,
qu’ils croient vivre par procuration en regardant les
autres se mettre à l’épreuve.
En parallèle à cela, les adolescents en manque de
rites communautaires en ont produit eux-mêmes :
bizutages, jeux d’épreuves, consommations d’alcool
ou de drogues, rave party, jeu du foulard, jeux d’hu-
miliation publique sur les réseaux sociaux, spiritisme
(quête du contact avec le monde invisible), etc. Toutes
ces recherches sont normales dans la mesure où elles
répondent à la faille béante laissée par un monde
adulte qui ne satisfait plus les besoins fondamentaux
constitutifs de notre nature humaine, besoins, nous
l’avons vu, refoulés par l’Occident depuis au moins
deux siècles.
Parfois, l’adolescent va se cristalliser sur une
problématique particulière lors du moment de la sortie
du nid : avoir un appartement, aller à la fac, faire
son « mémoire » (terme hautement évocateur)… Il se
crispe, se bloque, développe des troubles, car il perçoit
derrière ces passages la fonction rituelle de marqueur
de fin de l’enfance et ne s’y sent pas prêt, ne se sent
pas armé, car il n’a pas bouclé les problématiques de
141
 Aux Frontières de L'Esprit
vie de l’enfance pour entrer dans le nouveau cycle de
vie. Quitter la maison familiale est comme sortir du
ventre : une seconde naissance, en somme. Ce moment
ne mobilise d’ailleurs pas seulement l’ado mais aussi
toute la famille, car un membre qui quitte la famille
fait bouger toute la famille.
Différents symptômes pathologiques spécifiques
de l’adolescence sont à mon sens des sortes de
pseudo-rites. L’hypothèse peut sembler étonnante,
mais notez que tous les symptômes de l’adolescence
énumérés ci-après trouvent leur équivalent dans les
rites traditionnels :
O conduite sexuelle à risques = rite d’initiation à la
sexualité ;
O conduite sportive à risques = rite d’épreuve symbo-
lisant la quête de la force et du courage ;
O conduite automobile à risques = rite d’épreuve ou
rite ordalique ;
O consommation de drogues = rite initiatique à base
de plantes enthéogènes (ayahuasca, iboga, etc.) ;
O scarifications, tatouages, etc. = scarifications
rituelles, marquages du corps…
142
Les états modifiés de conscience chez l’adolescent
O harcèlement d’un autre jeune = sacrifice rituel ;
O anorexie mentale = jeûne rituel
O fugue = rite initiatique avec temps d’isolement et de
retrait de la famille ;
O tentative de suicide = rite de mort et de renaissance
symboliques.
Ce qui change entre les rites et les symptômes ?
Premièrement, l’absence de passeur (aucun adulte
ne guide le rite) ; deuxièmement, l’absence de
conscience et d’intention socialement valorisée dans
le rite (la seule intention est souvent le soulagement
de la souffrance) ; troisièmement, l’absence d’ins-
cription sociale après le rite, marquant l’intégration
dans l’ordre des adultes.
Par exemple, si la scarification rituelle, dans les
cultures traditionnelles, marque l’intégration dans
le clan des adultes, la scarification «  pathologique  »,
elle, non seulement renvoie l’adolescent à sa condition
d’adolescent, mais en plus le place dans le clan des
ados à problèmes.
De nombreux rites mettent l’accent sur l’induc-
tion d’un état modifié de conscience, par exemple
143
 Aux Frontières de L'Esprit
par ingestion de plantes psychédéliques, ou par une
transe au tambour, ou le passage par une hutte de
sudation, etc.
Dans nos sociétés modernes, nous retrouvons les
adolescents dans une forte recherche d’états modifiés
de conscience.
En face, la posture du monde adulte est soit banali-
sante (« Ce n’est rien, on l’a tous fait, ça lui passera ! »),
soit dramatisante (« Il va tomber dans la drogue ! ») ;
la manière de traiter la situation pourra alors être
soit paternelle-répressive (punitions, privations), soit
maternelle-contenante (« Dis-moi ce qui ne va pas,
mon choupinet ? »).
À mon sens, toutes ces postures, qu’elles soient
utiles ou contre-productives, ont le même écueil :
elles ne soutiennent pas la quête initiatique de
l'adolescent.
Répondre
T à la faille
initiatique
J’encourage les parents à soutenir la quête initiatique
de leur adolescent, en cherchant avec lui la manière
144
Les états modifiés de conscience chez l’adolescent
rituelle de ponctuer ce moment de vie. Je donne ici
quelques exemples :
O après son diplôme (Bac, Bac pro, etc.), partir par
exemple une année en voyage pour se chercher tout
en allant à la rencontre du monde ;
O faire le chemin de Compostelle ;
O participer à des groupes de respiration holotropique
ou de chamanisme ;
O rejoindre une association humanitaire ;
O etc.
Selon ses affinités propres, il y a toujours des
chemins à tracer. Parfois, c’est l’adolescent qui le
trouve seul.
Par exemple, de nombreux jeunes veulent rejoindre
l’armée. L’accepter est un formidable moyen de soute-
nir leur recherche d’identité en valorisant leur projet
et en marquant, en tant que parents, qu’ils deviennent
ainsi des adultes.
Quand l’adolescent présente un symptôme tel que
ceux que j’ai cités auparavant, il m’apparaît néces-
145
 Aux Frontières de L'Esprit
saire, en plus d’autres moyens classiques (psychothé-
rapie, entretiens familiaux, prise en charge médicale,
etc.), de réfléchir à lui proposer des temps initiatiques
qui substituent au symptôme sa forme rituelle cultu-
rellement inscrite (ou une autre si celle-ci semble peu
indiquée pour cet ado-là).
Par exemple, un adolescent qui fugue pourrait
rejoindre un groupe d’ados pour une marche dans le
désert guidée par un éducateur ou un thérapeute.
L’important dans un rite n’est pas seulement l’acte
(ici, le voyage), mais aussi toute la structure : ainsi, la
manière dont l’ado revient du rite, en marquant qu’il
vient d’accéder à une autre place dans la famille et la
société, est fondatrice.
C’est pour cela que le rite doit idéalement mobiliser
la famille, auquel cas le jeune se trouvera un nouveau
clan d’appartenance.
Les groupes de respiration holotropique sont de
formidables espaces initiatiques pour les adolescents.
J’en parle au chapitre suivant, aussi je ne vais pas m’y
étendre davantage ici.
Cependant, ils fournissent, dans un cadre serein,
laïc et non sectaire, toute la structure et l’ouverture
146
Les états modifiés de conscience chez l’adolescent
nécessaires pour que l’adolescent ressente ce que,
dans le fond, il recherche sans cesse : lui-même et sa
nouvelle place dans le monde.
Ces groupes accueillent soit des adultes de tous
âges, incluant les ados en tant que jeunes adultes, soit
des ados et jeunes adultes spécifiquement, en général
sur une tranche allant de 15 à 25 ans.
Ainsi, on y rencontre des jeunes à différents
moments de leur processus de passage vers l’âge
adulte.
Comment rendre compte de la puissance et de la
profondeur des expériences vécues, tant sur les plans
personnel que relationnel, dans un cadre aussi sécu-
risant et respectueux de l’autonomie psychique de
chacun ?
J’encourage les parents à jouer les éclaireurs afin
d’expérimenter la séance sur eux-mêmes, afin de
constater qu’ils peuvent y envoyer leur adolescent en
toute sécurité (à condition que le professionnel soit
bien formé – cf. chapitre suivant).
147
 Aux Frontières de L'Esprit Les états modifiés de conscience chez l’adolescent

Gérer
T les problèmes de l’ado avec rence père-fils ou mère-fille, est un cadeau inestimable
à faire à chacun et à votre relation. Croiser mère-fils
les EMC au quotidien ou père-fille est aussi intéressant, mais met moins
l’accent sur le rite de passage et plus sur l’exploration
L’ado, à ce moment de sa vie, est en recherche de du lien.
deux fondamentaux : Cependant, vous l’aurez, j’espère, compris par
O l’exploration guidée par un adulte ; vous-même, chaque situation se pense dans sa singu-
larité, en fonction des liens et, bien sûr, des identités
O l’auto-exploration. sexuelles en présence.

Concernant l’auto-exploration, le chapitre sur les

adultes donnera quelques exercices intéressants pour
lui. Selon ses intérêts et besoins, d’autres techniques
pourraient s’y joindre.

Concernant l’exploration guidée par un adulte,

si vous êtes fusionnel avec votre ado, soutenez de
préférence le recours à un tiers (thérapeute des
EMC, de préférence psy transpersonnel, qui intro-
duira une dimension spirituelle – non religieuse, ni
sectaire – fondamentale pour la vie de votre jeune).
Si vous avez un lien difficile avec votre ado, il peut
être intéressant d’alterner entre d’une part son espace
personnel avec les EMC, et d’autre part des espaces où
vous vivrez ensemble cette expérience.

Par exemple, vivre une expérience en stage de

respiration holotropique ou de chamanisme, de préfé-

148
 Partie IV

ALLER VOIR
UN PROFESSIONNEL DES EMC
 1

Aller voir un professionnel

des EMC ?

L ’utilisation des états modifiés de conscience

par les professionnels est de plus en plus répan-
due. Mais c’est un champ très hétérogène et varié. Cela
dépend de votre recherche.

Je vais ici me borner aux professionnels allant de

la thérapie proprement dite jusqu’aux développements
personnel et transpersonnel. Il va de soi que l’explo-
ration des EMC peut également se faire dans des
contextes spirituels (yoga, tai chi, etc.) ou religieux
(bouddhisme, catholicisme, soufisme, etc.), qui sont
leur terreau originel.

153
 Aux Frontières de L'Esprit
Différentes
T catégories de
professionnels des EMC 
' Chez les professionnels du champ
psychologique
Les « psys1 » transpersonnels sont des profession-
nels généralement hautement qualifiés des états modi-
fiés de conscience.
Je recommande deux écoles en France : le Ceshum,
École du transpersonnel, et l’Institut des champs
limites de la psyché. Ces deux instituts forment des
psycho-praticiens et des professionnels des champs
psychologique et psychothérapeutique, qui y ont reçu
un enseignement théorique et pratique sur un large
spectre d’états modifiés de conscience, ainsi que sur
l’accompagnement des expériences dites extraor-
dinaires ou exceptionnelles. Ce sont à mon avis les
professionnels les plus compétents pour ce travail.
Chez les «  psys  » du champ classique, rares sont ceux
qui ont une connaissance à la fois large et pointue des
EMC. Certains se sont formés à une ou deux tech-
niques impliquant un EMC (hypnose, EMDR, EFT…),
1. J’écris « psys » pour résumer la nébuleuse « psychologues, psychothérapeutes,
psycho-praticiens, psychanalystes, psychiatres… »
154
Aller voir un professionnel des EMC ?
mais n’ont pas nécessairement de compétences dès
qu’ils sortent de leur protocole technique.
' Les non-psys, professionnels d’un ou
plusieurs types d’EMC : vigilance…
Les hypnothérapeutes constituent une « profession »
très inégale, puisque non règlementée à ce jour.
D’ailleurs, il est difficile de réellement parler de profes-
sion ! Quand ils sont bien formés – ce qui n’est pas
toujours le cas –, ils ne sont compétents que dans leur
technique spécifique. Mon conseil est donc de consul-
ter en priorité un hypnothérapeute qui ait un diplôme
d’État (comme psychologue, médecin, infirmier, etc.),
ou un psycho-praticien formé dans une bonne école,
pour qui l’hypnose est un outil supplémentaire au sein
d’une profession de soin ou d’accompagnement.
Les sophrologues et relaxologues, qui utilisent leurs
techniques en individuel et en groupe, sont générale-
ment des professionnels bien formés à l’approche des
EMC.
Il existe des centaines de techniques plus ou moins
standardisées d’EMC, sous des noms ou sigles très
variés. En réalité, certaines de ces techniques n’ap-
portent rien, sinon une version pauvre et bon marché
155
 Aux Frontières de L'Esprit
de quelque chose de déjà connu. Et oui, le monde de la
thérapie aussi a son low coast et sa sous-culture ! La
compétence des professionnels derrière ces techniques
n’est pas fiable, ni lisible, du fait qu’on se forme rapide-
ment à de telles techniques. Il est donc recommandé,
comme pour l’hypnose, de faire appel à un profession-
nel ayant un diplôme d’État ou à un psycho-praticien
formé dans une bonne école.
' Les praticiens en chamanisme 
Ici, tout un univers riche et varié s’ouvre à vous,
avec du bon comme du mauvais. Ce n’est pas une
profession, aussi il vaut mieux y aller au bouche à
oreille. Je recommande les stages organisés par la
FSS (Foundation for Shamanic Studies), qui est un
gage de qualité.
' Les « …-thérapeutes »  delà, développement de capacités psy, apprentissage
Ces dernières années ont vu une explosion du
champ de la thérapie. On trouve des « thérapeutes »
de tout, tout comme des « coachs » en tout… Certains
s’autoproclament ainsi, dans une auto-édification
156
Aller voir un professionnel des EMC ?
toute-puissante, alors que leurs compétences sont
difficilement lisibles, voire inexistantes. Certains
se positionnent entre le maître spirituel et le théra-
peute, et mobilisent des techniques de modification de
conscience piochées ici ou là.
Ces « thérapeutes » forment une population très
hétérogène, qui va de bien ou très bien formés à complè-
tement autoproclamés avec risque de dérive sectaire et
d’emprise mentale – même bien intentionnée – sur le
patient, tout cela dans un cadre éthique peu lisible. Ici,
prudence et discernement sont donc de mise, mais pas
de paranoïa, car on trouve aussi des joyaux.
' Les différents centres et instituts 
Ils proposent d’apprendre ou d’expérimenter un type
particulier d’EMC : sortie hors du corps, régression
vers des vies antérieures, communication avec l’au-
des langues par hypnose, etc. Ici encore, prudence et
discernement, car les EMC sont un commerce d’autant
plus juteux que les Occidentaux n’y connaissent plus
rien et sont facilement abusables. Ne sautez pas sur un
stage parce que l’affiche est jolie ou le texte séducteur.
157
 Aux Frontières de L'Esprit
Vérifiez posément qui anime le stage et vérifiez son
niveau de compétence.
Mes recommandations :
Allez voir un professionnel qualifié, de préférence
avec un diplôme d’État, ou appuyez-vous sur le
bouche-à-oreille, mais attention à l’effet de mode
du praticien récemment installé. Quelqu’un qui
pratique depuis longtemps, chez qui on va par le
bouche-à-oreille, est une bonne garantie.
En
T groupe ou individuel ?
Le suivi individuel est plus intimiste et sur mesure,
souvent plus progressif. Il convient mieux aux
personnes qui ont vécu de mauvaises expériences
en groupe pendant leur enfance ou leur adolescence.
Gardez à l’esprit, cependant, que le groupe thérapeu-
tique est une expérience collective différente de celles,
potentiellement traumatisantes, que l’on a pu vivre
158
Aller voir un professionnel des EMC ?
ailleurs : il est en effet un espace de bienveillance et
de respect où chacun est accueilli sans jugement. Ce
fait même est généralement profondément réparateur.
Le stage en groupe est plus porteur et soutenant, car
il potentialise la transe de chacun et réciproquement.
En transe, une conscience groupale se forme, qui va
travailler pour et avec chaque membre.
Ainsi, les contenus de conscience peuvent circuler
de l’un vers l’autre, et le groupe devient un contenant
psychique qui va soutenir le processus de transfor-
mation des problématiques de chaque individu. Le
groupe va aussi constituer une rampe de lancement
énergétique plus forte pour chacun et ce, quelle que
soit la technique d’EMC.
Par exemple, une séance d’hypnose individuelle
vécue en groupe est plus forte que vécue seule. Par
contre, une séance de sophrologie ou d’hypnose
collective (le même guidage pour tous) peut être moins
intense du fait que, n’étant pas personnalisée selon les
besoins de chacun, c’est donc à chacun de rejoindre la
proposition de guidage. Les lâchés en chemin doivent
alors se débrouiller seuls et peuvent se sentir en échec,
là où, en individuel, le thérapeute va s’ajuster à vous
personnellement.
159
 Aux Frontières de L'Esprit
Faire
T un chemin individuel avec
un professionnel des EMC ?
Si vous souhaitez juste un changement (dispari-
tion d’une phobie, d’un TOC, etc.), un hypnothéra-
peute, ou un praticien EMDR ou EFT, par exemple,
peut parfois suffire…
Par contre, si votre désir ou besoin est plus profond
et recouvre également une exploration de vous-même
et de la réalité, une rencontre avec votre être intérieur
ou des modifications plus fondamentales de votre
personnalité, alors mieux vaut être accompagné par
un professionnel du champ psy, transpersonnel de
préférence. Il vous guidera non seulement dans l’ex-
périence, mais aussi dans l’intégration de celle-ci,
vous permettant de faire des liens avec votre identité
personnelle et transpersonnelle.
L’accompagnement individuel est indiqué dès qu’il
s’agit de la quête d’un chemin d’exploration et d’appro-
fondissement. Ce n’est pas la somme des transes que
vous aurez vécues qui compte, mais la manière dont
vous ramenez vos expériences dans un même espace
pour les penser, les intégrer, les relier à votre histoire
et à votre identité…
Idéalement, l’individuel et le groupe devraient aller
de pair sur votre chemin.
160
Aller voir un professionnel des EMC ?
Ma recommandation pour
choisir son praticien des EMC
Le code de déontologie des professionnels des EMC
est normalement le suivant : n’utiliser l’EMC que dans
le territoire de compétence du praticien. Par exemple,
un dentiste utilisera l’hypnose pour anesthésier une
dent et ne travaillera pas sur les phobies ; une sage-
femme s’en servira pour préparer l’accouchement
mais ne soignera pas les désordres affectifs résultant
de l’enfance de la femme enceinte ; etc.
Allez voir en priorité un professionnel qualifié
du champ psy (psychologue, psycho-praticien,
psychiatre…) formé à une technique d’EMC, ou un
psy transpersonnel de préférence si vous souhaitez
une ouverture au champ spirituel.
Le courant doit passer avec le praticien, sinon
cherchez-en un autre. Le praticien doit vous
expliquer sa technique, et vous devez pouvoir
poser toutes les questions que vous voulez, et
obtenir de l’information claire sur chacune, avant
de débuter le travail.
Il est évident qu’un praticien ne touchera pas les
zones intimes ni n’aura de geste déplacé pendant
le travail thérapeutique.
 2

Participer à des groupes mobilisant

les états d’expansion de conscience

P articiper à de tels groupes est une très belle

aventure. La puissance de l’expérience varie en
fonction de votre sensibilité, du moment de votre vie
auquel elle se situe, et enfin de la technique employée
et du professionnel qui vous encadre.

Quand
T et comment aller dans de
tels groupes ?
O Si vous souhaitez entrer dans un chemin d’évolution
personnelle ou transpersonnelle grâce aux états
modifiés de conscience ;

163
 Aux Frontières de L'Esprit
O Si vous voulez vous libérer d’une souffrance, de
blocages ;
O Si vous piétinez dans votre psychothérapie ;
O Si vous piétinez dans votre chemin spirituel ;
O Par curiosité, désir d’exploration ;
O Par questionnement personnel ou désir d’ouver-
ture spirituelle, sans savoir où aller, ne vous
reconnaissant dans aucune religion et ressentant
en vous le vide de sens profond de la société au
quotidien.
Toutes ces raisons offrent un bon terreau pour vivre
une rencontre avec soi-même en EMC. Si je prends par
exemple les groupes de respiration holotropique, que
je connais bien pour en animer depuis dix ans environ,
sachez qu’ils offrent :
O la possibilité de vivre des expériences intenses d’ou-
verture et d’expansion de conscience dans un cadre
solide, sécurisé par un professionnel et laïc ;
O la possibilité d’être encadré pour intégrer ces expé-
riences, c’est-à-dire être capable non seulement de
les vivre, mais aussi d’en ramener les fruits avec soi
164
Participer à des groupes mobilisant les états d’expansion de conscience
pour les rendre porteuses dans la vie, pensables et
partageables ;
O la possibilité d’être accompagné sur un chemin
d’évolution psycho-spirituelle de manière sérieuse,
professionnelle et humaine ;
O l’existence d’un cadre sain et sérieux, hors de tout
risque d’embrigadement sectaire ou de rapt de votre
expérience pour nourrir la croyance du thérapeute
ou du groupe. C’est donc un espace où autant l’expé-
rience que la pensée sont libres, tout en étant enca-
drés et régulés (régulation par les règles de bienveil-
lance, de non-passage à l’acte, de respect de l’expé-
rience et de la pensée de chacun, etc.).
Les
T types de groupes
On va trouver, dans le monde laïc, différents
groupes sur les états modifiés de conscience. Il y a
par exemple des techniques qui provoquent des EMC
sans que ceux-ci soient explicitement nommés, car
l’accent est mis sur autre chose : ainsi, un rassemble-
ment de médiums voulant communiquer avec l’au-
delà va mobiliser un EMC, mais l’accent est mis sur le
contact, non sur l’état.
165
 Aux Frontières de L'Esprit
Une séance de tai chi va également générer un EMC,
mais celui-ci n’est pas nommé puisqu’on travaille sur
l’énergie.
Je vais donc me centrer sur les groupes explicites
avec EMC nommés et utilisés :
O les groupes de sophrologie ou d’hypnose  : le corps
est au repos et on vit des expériences encadrées
d’EMC. C’est un voyage guidé, à la manière
d’un voyage de groupe organisé, mais dans la
conscience ;
O les groupes de respiration holotropique, ou de rebirth  :
ces groupes mobilisent de puissants états élargis de
conscience. Il y a des contre-indications. Ici, il est
impératif que l’encadrant soit un psychologue clini-
cien, un psychiatre ou un psycho-praticien formé
dans une bonne école. Hélas, malgré la puissance
(et donc les dangers) de la technique, il n’y a aucun
cadre légal encadrant ces formes de travail jugées
« exotiques », si bien que tout le monde peut les
pratiquer…
O les groupes de chamanisme traditionnel  : selon la
tradition, la technique de transe varie (cf. liste des
méthodes de modification de la conscience) et est
plus ou moins puissante. Il y a depuis quelques
166
Participer à des groupes mobilisant les états d’expansion de conscience
années une mode des substances psychédéliques
(psylocybine, ayahuasca, iboga, etc.), mais il faut
être très vigilant : non seulement elles sont illé-
gales en France, mais il y a des contre-indications
sérieuses, et le suivi après coup est fondamental
pour intégrer l’expérience dans de bonnes condi-
tions. De nombreuses personnes courent chercher
l’éveil spirituel auprès de l’ayahuasca au Pérou et
reviennent plus mal qu’elles ne l’étaient au départ.
Ce type de travail n’est pas fait pour tout le monde.
D’autre part, sans préparation psychique, l’aventure
peut se transformer en calvaire. Aller prendre de
l’ayahuasca sans préparation psychique peut être
l’équivalent d’aller faire l’ascension de l’Everest en
tongs et sans préparation physique ! Il y a trop de
naïveté sur ces questions !
Par expérience, j’ai pu observer que certaines
personnes sans expérience des EMC ou de la thérapie,
venant dans les groupes en « touristes », ne bénéficient
pas toujours de la transe d’une bonne manière.
Certains vont soit être déçus de ne pas vivre
ce qu’ils « attendaient », soit vivre une expérience
qu’ils ne sauront pas forcément intégrer ensuite, la
rangeant dans le tiroir « trip » avant de cocher la
case « Ça, c’est fait ». Venir dans un groupe avec un
167
 Aux Frontières de L'Esprit
tel état d’esprit, c’est de la consommation, pas une
démarche sérieuse.
D’autres encore vont inconsciemment se bloquer
par peur de vivre l’expérience, car, qu’on soit tête
brulée ou non, il s’agit ici d’une expérience intime-
ment engageante. Des traumatismes peuvent remon-
ter, des expériences intenses se vivre. On ne peut pas
rester observateur.
Ma recommandation
Aller dans un groupe, ça se prépare. On n’y va
pas « pour le fun ». On y entre avec une intention
pour soi. On vient y vivre quelque chose, y trouver
des réponses ou du changement pour sa vie.
Commencez par des EMC plus tranquilles,
comme l’hypnose ou la sophrologie, en individuel
ou en groupe, puis évoluez progressivement vers
des états plus intenses tels que la respiration
holotropique.
Pour ceux qui voudraient aller directement à la
case intensive, commencez par la respiration
holotropique ou le rebirth.
168
Participer à des groupes mobilisant les états d’expansion de conscience
Pour ceux qui sont attirés par le chamanisme des
plantes, commencez par la respiration holotropique.
Ces techniques sont d’excellentes préparations à
ces autres formes de travail, car elles permettent
d’apprendre la transe dans un cadre occidental,
avec un accompagnement et une cartographie
occidentale. L’intégration de ces expériences avec
un psychothérapeute transpersonnel permet peu
à peu de s’approprier la transe et d’envisager
alors, si l’appel est encore là, d’expérimenter le
chamanisme, avec ou sans plantes.
La
T règle du G.C.I. 
Avant d’entrer dans un groupe mobilisant les EMC,
vous devez clarifier ces trois éléments, résumés par les
lettres G.C.I. :
O G comme Guide : qu’il soit thérapeute, chaman, psy…,
le guide est fondamental. Ne confiez pas votre
psychisme à n’importe qui ! De la même manière que
vous ne confieriez pas votre chirurgie cardiaque au
premier venu, choisissez quelqu’un dont la compé-
tence est reconnue.
169
 Aux Frontières de L'Esprit
O C comme Cadre  : le cadre est constitué de l’ensemble
des règles et de la procédure qui encadrent le
groupe. Il doit être clair et sécurisant. Il donne les
coordonnées spatio-temporelles dans lesquelles
s’inscrit le processus de transe : quand celle-ci
commence-t-elle, quand et comment se termine-
t-elle ? Comment se déroule-t-elle ? Vous n’êtes
pas obligé de tout savoir, il est bon de se confier en
sécurité, surtout si vous avez toute confiance dans
le guide du groupe.
O I comme Intention  : elle doit être claire. N’y allez pas
en touriste, ni en vous délestant de votre respon-
sabilité sur un autre. Que ce soit « Je veux décou-
vrir la transe », « Je m’abandonne en confiance dans
le processus » ou « Comment développer plus de
confiance  ?  », l’intention est une question ou un
objectif que vous exprimez en entrant dans l’état
modifié de conscience. Elle sera la clé de compré-
hension pour décoder après coup, quand c’est néces-
saire, ce qui a émergé.
Si ces trois points sont au feu vert, et en l’absence
de contre-indications à la transe : bienvenue dans
l’aventure. 
170
Participer à des groupes mobilisant les états d’expansion de conscience
Des
T critères d’un bon guide
de groupe de transe 
La recherche d’un thérapeute de transe compétent
devrait se faire avec les critères suivants :
D’abord, vous devez savoir où la personne a été
formée et vous renseigner sur le sérieux de cette
formation.
Attention à l’esthétique marketing : de belles
étiquettes ne font pas de bons vins, et de beaux sites
ou de belles vidéos sur YouTube ne font pas de bonnes
écoles, ni de bons professionnels.
Un des critères pour le sérieux de la formation est
l’appartenance à une fédération nationale ou inter-
nationale.
Par exemple, pour les centres de formation en
psychologie transpersonnelle, l’appartenance à
Eurotas, la fédération européenne du transpersonnel,
est un gage de sérieux de l’école.
Idéalement, en France, le praticien de transe a un
diplôme d’État de psychologue, de médecin, d’auxi-
liaire paramédical ou de psycho-praticien (d’une bonne
école), qui garantit chez ce professionnel la référence à
un cadre et à une déontologie stricts.
171
 Aux Frontières de L'Esprit

Pour le chamanisme, c’est plus difficile, car le

chamanisme est à la mode, avec tout ce que cela
comporte de positif et de confus. Comme partout,
beaucoup s’autoproclament chamans. Les écoles
existent, garantissant un cadre, mais là encore, il faut
bien se renseigner sur l’école.

Le chamanisme est un chemin initiatique, et non 3

un chemin de diplôme ! C’est un parcours vécu, et
non un parcours appris dans les livres ou sur les
bancs d’une école. Vous feriez plus confiance à un Illustration
marin qu’à un ingénieur nautique pour vous guider d’un groupe EMC :
dans la traversée d’une tempête, n’est-ce pas ? Il en
est de même ici, car c’est à faire une plongée en vous- la respiration holotropique
même que vous êtes invité, alors soyez prudents en
choisissant le guide.

Il ne s’agit pas de développer une méfiance ou une

paranoïa, mais du discernement. Toute personne vous
guidant dans les espaces de l’inconscient doit pouvoir
se montrer claire et explicite sur le cadre, les références
éthiques et déontologiques auxquelles elle adhère, et
pouvoir poser des contre-indications qui garantissent
que l’expérience ne vous nuira pas.
Plutôt que la peur, donc, construisez-vous une
culture de ces pratiques, informez-vous. Ce présent
livre est d’ailleurs là pour cela.
J e prends la respiration holotropique comme
illustration, car j’utilise cette technique puis-
sante depuis dix ans avec mes patients et forme des
thérapeutes à cette pratique.
Elle gagne vraiment à être connue, et même recon-
nue d’utilité publique ! J’ai vu, comme tous les prati-
ciens de cette méthode, le miracle qu’elle produit sur
des adolescents et des adultes.
Je ne peux qu’encourager toute personne se sentant
prête à faire le pas à participer à un de ces groupes.

173
 Aux Frontières de L'Esprit
Qu’est-ce
T que la respiration
holotropique ?
La respiration holotropique (RH) est une technique
psychothérapeutique de groupe utilisant la transe.
Elle est née des travaux de Stanislav Grof, qui débuta
ses recherches à l’Institut de recherches psychiatriques
de Prague dans les années 50, puis rejoignit l’univer-
sité John Hopkins, aux États-Unis, en tant que cher-
cheur et professeur en psychiatrie.
De 1967 à 1973, il fut chef de projet au Centre de
recherches psychiatriques de Baltimore (Maryland) et
dirigea un programme de recherche sur le potentiel
psychothérapeutique des états holotropiques produits
par le LSD dans un contexte de thérapie guidée.
Ce programme, qui portait sur le traitement de toxi-
comanes et de patients en phase terminale de cancer,
déboucha sur son livre La Rencontre de l’homme
avec la mort, préfacé par la célèbre E. Kubbler-Ross.
Dans les années 60, il fonda, avec Abraham Maslow
et quelques autres, la psychologie transpersonnelle,
discipline qui intègre les connaissances issues des
sciences de la conscience, de l’ethnologie, des neuros-
ciences, et aussi les savoirs expérientiels issus des
174
Illustration d’un groupe EMC : la respiration holotropique
« sociétés racines » et des traditions spirituelles et
religieuses, tout en restant dans une réflexion laïque
ouverte et rigoureuse. Dans les années 70, en pleine
vague hippie, le LSD est interdit. Grof abandonne donc
ses travaux sur cette substance et recherche d’autres
moyens d’induire des états de conscience aussi puis-
sants que ceux générés par le LSD, mais sans recourir
à aucune drogue. Il élabore alors progressivement,
avec sa femme Christina, la respiration holotropique
(1970). Celle-ci combine l’hyperventilation et la
musique.
« Holotropique » est un mot constitué de
deux termes grecs : holos signifiant «  le tout  », et
trepein signifiant « aller vers ». Ce terme renvoie à la
tendance de la conscience à s’étendre spontanément,
en transe, vers un sentiment d’unité cosmique (expé-
rience transcendantale).
Dans ce mouvement, la conscience se libère de ce
qui fait obstacle (blessures nées de l’histoire person-
nelle, blocages dans le fonctionnement psychique,
corporel ou énergétique, etc.) et élargit sa zone de
contact avec la réalité, permettant de faire de celle-ci
une expérience plus large, à la manière d’un aveugle et
sourd qui progressivement retrouve la vue et l’ouïe…
175
 Aux Frontières de L'Esprit
Comment
T se déroule une séance
de respiration holotropique ?
Il y a tout d’abord des contre-indications à cette
méthode : ainsi, sur le plan psychiatrique, les troubles
psychotiques. Sur le plan physique, les contre-indi-
cations sont liées à l’hyperventilation : insuffisance
cardiaque, antécédents d’angine de poitrine, troubles
du rythme cardiaque, maladies coronariennes,
hypertension artérielle sévère, anévrisme, glau-
come, épilepsie, asthme sévère, intervention chirur-
gicale récente (qui peut demander des adaptations),
grossesse…
Ensuite, le thérapeute référent du groupe doit être un
professionnel du champ psy (psychologue, psychiatre,
psychothérapeute, psycho-praticien, psychanalyste)
formé à la respiration holotropique (première règle du
G.C.I., chapitre précédent, point 3).
Un séminaire se déroule sur 1 ou 2 jours, parfois
plus. Le nombre de participants est variable d’un
groupe à l’autre. Le stage commence par un temps
d’information et d’échanges énonçant les règles, le
déroulement, les expériences pouvant être vécues.
Ensuite, un temps de parole permet à chaque personne
de se présenter et de clarifier son intention.
176
Illustration d’un groupe EMC : la respiration holotropique
Le cadre et l’intention étant clairs, s’ensuit un temps
d’exercices préparatoires dont la visée est double :
premièrement, créer une bonne ambiance de groupe,
faite de bienveillance, de lâcher-prise et d’accueil
inconditionnel ; deuxièmement, activer la conscience
corporelle, émotionnelle et subtile, et calmer le mental.
Puis, le groupe se met en binômes. La suite se déroule
alors en deux temps : l’un des membres du binôme
débutera le travail de RH en tant que « respirant »,
l’autre étant son accompagnant, ou sitter. Ensuite, les
rôles seront inversés. Une fois que les deux membres
des binômes auront respiré, un temps d’intégration de
la transe sera proposé, par la réalisation d’un mandala.
Celui-ci permettra une première représentation, par le
dessin, de ce qui aura été vécu, ce qui est une première
manière de ramener les informations de la transe sans
les mots. Puis, le stage se clôture par un temps de
parole où chacun pourra en toute confiance parler de
ce qu’il a vécu et être soutenu dans l’élaboration de son
expérience, en lien avec l’intention de début de stage.
Le
T rôle d’accompagnant
Le rôle de l’accompagnant est d’abord de veiller
et de prendre soin du respirant (donner une couver-
177
 Aux Frontières de L'Esprit
ture, des mouchoirs, l’accompagner aux toilettes, etc.).
Il est aussi présent affectivement pour le respirant
(pour le consoler, le rassurer, l’encourager, etc.), dans
les limites qui sont les siennes. C’est une expérience
profondément humaine et fraternelle que celle de
partager un état élargi de conscience. Avant la RH, le
binôme passe un contrat qui clarifie les besoins et défi-
nit les frontières de la relation. Par exemple : « Moi,
je ne veux pas être touché », ou : « Cette zone de mon
dos est fragile », etc. L’accompagnant sera le gardien
du contrat, et les thérapeutes viennent si besoin cadrer
et réguler le lien.
Les accompagnants, tout comme les thérapeutes,
sont aussi les témoins du processus qui est vécu, ce
qui est soutenant et validant pour l’expérience et peut
aussi fournir d’autres éclairages pour le respirant
après coup, car l’observateur apporte d’autres angles
de compréhension à ce qui a été vécu de l’intérieur par
le respirant.
L’expérience de binôme peut pour certains être très
riche et curative, surtout quand de nombreuses bles-
sures ou ruptures ont parsemé la vie du participant, ou
qu’il doute de sa place ou de son utilité dans la vie. Là,
on refait l’expérience de se sentir utile pour quelqu’un.
On peut se vivre tour à tour père, mère, frère ou sœur
pour le respirant, selon les expériences qu’il vivra.
178
Illustration d’un groupe EMC : la respiration holotropique
Le
T déroulé de la transe
Le voyageur ou « respirant » s’installe sur son mate-
las. Le matelas et l’espace proche autour deviennent
son territoire, et chacun le respectera. L’accompagnant
est le gardien du seuil : il veille sur cette frontière,
s’assure que personne n’entre et que le respirant n’en
sorte pas (ce qui est important car il est possible de se
lever, de bouger et de danser pendant la transe, mais
sur son territoire uniquement). La notion physique de
limite est d’autant plus importante dans les états holo-
tropiques : le matelas délimite le dedans et le dehors,
et offre la sécurité suffisante pour s’abandonner totale-
ment à l’expérience.
Le respirant est donc allongé sur son matelas, un
masque sur les paupières. Son accompagnant est près
de lui, le contrat est passé (G.C.I. clairs). La transe
peut débuter : le thérapeute commence par guider les
respirants pendant une relaxation de quelques minutes
pour bien relâcher le corps, puis il va les inciter à
respirer intensément et rapidement.
Une fois la respiration bien activée, un programme
musical structuré d’environ 3 heures est mis en route.
Quelques minutes d’hyperventilation suffisent en géné-
ral pour soutenir un processus de 3 heures. La musique
179
 Aux Frontières de L'Esprit
est diffusée à haut volume pour que les respirants soient
plongés dans un puissant bain musical.
Du fait de l’ouverture de conscience générée par
l’hyperventilation, la musique va être « reçue » par
le corps plus qu’écoutée, et créer ainsi une enveloppe
sonore porteuse, énergétique, contenante, reliante,
structurante, évocatrice et protectrice. Les musiques
diffusées proviennent du monde entier : percussions
tribales, techno, transe, musiques emphatiques,
musiques du monde, chants traditionnels, invoca-
tions chamaniques, musiques sacrées, chants grégo-
riens, musique classique, etc., le tout structuré dans
un programme musical basé sur une courbe, appelée
« vague », mise au point par S. Grof. Les musiques
peuvent mobiliser des émotions associées à des souve-
nirs enfouis dans l’inconscient, les amener à la surface
et faciliter leur expression. Elles ouvrent les portes de
l’inconscient, soutiennent et amplifient le processus
thérapeutique, et fournissent également un contexte
significatif à l’expérience. Le flot continu de musique
crée donc une vague porteuse qui aide le sujet à
surmonter ses défenses psychologiques, à s’abandon-
ner au lâcher-prise et à se mouvoir à travers ses expé-
riences, qu’elles soient difficiles ou extatiques.
C’est donc l’association de la respiration profonde
et de la musique qui permet le relâchement des
défenses psychologiques et conduit à la mise en route
180
Illustration d’un groupe EMC : la respiration holotropique
d’un puissant processus d’auto-guérison : la transe.
Pour certains participants, les thérapeutes sont parfois
amenés à proposer des interventions visant à faciliter
et à encourager le processus : un simple contact, des
pressions sur des endroits du corps, des massages, de
la contenance maternelle (être pris dans les bras, bercé,
etc.), un soutien à l’expression émotionnelle (rage,
fureur, larmes, joie, jouissance…), etc. Des émotions
intenses peuvent se libérer, des expériences transfor-
matrices se vivre en toute sécurité. Les interventions
corporelles sont d’autant plus permises qu’elles sont
cadrées par la règle du « Stop » (si le respirant veut
qu’un travail corporel s’arrête).
Au bout de 3 heures environ, la musique s’arrête.
Son intensité et son volume ont progressivement décru
pendant la dernière heure, avec des musiques de plus
en plus méditatives, apaisantes, douces. La conscience
de la personne se réoriente à son rythme vers l’ici et
maintenant. Elle quitte son masque et ouvre les yeux.
C’est un temps d’accueil de la personne dans son retour
à la réalité ordinaire, de premier recueil de ce qu’elle
veut partager, ou de travail, au moyen de massages, de
paroles, de nettoyages énergétiques, etc., sur les « rési-
dus » qui seraient encore présents au retour (tristesse,
tensions résiduelles, etc.).
La conclusion habituelle d’une séance de respiration
holotropique consiste donc en une libération émotion-
181
 Aux Frontières de L'Esprit
nelle, en des expériences transformatrices et en une
relaxation physique et psychique très profonde. De
nombreuses personnes ont témoigné qu’elles s’étaient
senties plus détendues qu’elles ne l’avaient jamais été
au cours de leur existence.
En cas d’expérience transpersonnelle, l’expérience
d’un contact avec un niveau non ordinaire de réalité
vient redonner du souffle à l’existence, par une expé-
rience concrète et consciente du sacré. Une seule
expérience transpersonnelle peut radicalement bous-
culer la vision qu’on avait du monde : cela a été le cas
pour moi, puisque ma première RH a complètement
changé le cours de ma vie. Pour d’autres, ce sera la
répétition des RH qui viendra opérer ce changement
graduellement. On observe également que ce travail
fait naturellement émerger des valeurs chez l’indi-
vidu, telles que la conscience écologique, l’altruisme,
la compassion et la tolérance.
Que
T vit-on pendant une
respiration holotropique ?
La nature et le contenu des séances holotropiques
varient beaucoup d’une personne à une autre, chez
182
Illustration d’un groupe EMC : la respiration holotropique
une même personne lors d’une même séance, et d’une
séance à l’autre. Toute la gamme des expériences
humaines, des plus ordinaires aux plus extraordi-
naires, peuvent se vivre de manière sécurisée et enca-
drée par les règles de non-passage à l’acte, agressif ou
sexuel (sur soi, les autres ou l’environnement). Il faut
noter en préambule que quelle que soit l’expérience
vécue et son intensité, la personne, même si elle est
absorbée profondément dans son expérience, garde
la conscience qu’elle vit une expérience. Un peu à
la manière du cinéma : vous pouvez être totalement
absorbé dans le film, une partie de vous sait toujours
que vous êtes au cinéma. En somme, l’expérience a
des bords !
Certains individus restent entièrement calmes,
presque sans aucun mouvement, voire parfois sont figés
un long moment dans une posture (j’ai vu un homme
rester trois heures durant dans une posture figée de
gisant, tout en vivant une expérience profonde et riche
dans son monde intérieur). D’autres au contraire vivent
des montées énergétiques, sont agités, effectuent des
mouvements de torsion, prennent des postures parfois
complexes (yoga, tai chi, mudras, etc.), roulent ou
s’agitent, se mettent en position fœtale, revivent le
processus d’accouchement ou se conduisent comme
des nouveaux-nés… Certains se mettent à parler des
183
 Aux Frontières de L'Esprit
langues inconnues (xénolalie), à chanter, prier… Tout
est possible.
Parfois, la personne vit une identification animale,
ou végétale, ou minérale : par exemple, si elle se trans-
forme en tigre, elle sent ses mains devenir de grosses
pattes, sent des coussinets, des griffes, son corps et
les émotions qui vont avec… Si elle se transforme en
plante, elle vit de l’intérieur des processus biologiques
comme la photosynthèse. Dans d’autres cas, elle peut
voyager dans son corps et avoir une connaissance
directe de celui-ci et de comment se soigner. Parfois
même, cette perception peut s’étendre à l’accom-
pagnant ou à d’autres personnes du groupe. Je me
souviens d’un monsieur, lors d’un de mes groupes,
qui, lors de ses RH, nommait tour à tour les différents
membres du groupe, canalisant des messages pour
chacun et pour les thérapeutes ! Son accompagnant
notait soigneusement les messages.
La qualité des émotions observées lors de sessions
holotropiques peut s’étendre à tout le spectre émotion-
nel : sentiment de paix, de béatitude, de grâce, d’unité
cosmique, d’extase, mais aussi épisodes de terreur, de
culpabilité dévorante, de colère ou de rage refoulée
qui enfin se libère, tristesse, deuil, joie, etc. Certaines
émotions transcendent tout ce qu’il est possible
d’imaginer ou d’expérimenter dans l’état ordinaire de
conscience, d’autres sont reliées à une expérience de
184
Illustration d’un groupe EMC : la respiration holotropique
l’histoire personnelle (traumatisme, carence affective,
etc.), périnatale ou psycho-généalogique ; d’autres
appartiennent au registre transpersonnel (inconscient
collectif, niveaux spirituels).
La séance peut mener à une relaxation profonde, à
un sentiment d’expansion et de bien-être, à des visions
de lumière. Le respirant peut être submergé de senti-
ments d’amour inconditionnel, d’une profonde compas-
sion universelle, ouvrir son cœur, vivre une expé-
rience mystique avec les autres, avec la nature, avec le
cosmos, avec le divin. Ces états surviennent souvent
à la fin des séances, après les diverses épreuves que
contient l’expérience. Il n’est pas rare que des expé-
riences d’amour divin viennent réparer des carences
affectives de la petite enfance. C’est alors comme si
l’inconscient, n’ayant pas dans son territoire affectif
d’expérience nourricière, allait puiser plus loin, dans
le territoire transpersonnel, l’amour qui lui manquait.
Des expériences de contact avec des consciences
spirituelles peuvent aussi avoir lieu. Un de mes patients,
tout à fait athée et matérialiste, a pu par exemple vivre
une expérience très profonde et curative de contact
avec sa mère, décédée quand il avait six ans. Il a pu
identifier clairement la puissance d’un tel contact, dans
son réalisme et sa puissance d’amour, tout en étant
rassuré par le fait qu’il était libre de croire ce qu’il
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 Aux Frontières de L'Esprit Illustration d’un groupe EMC : la respiration holotropique

voulait à propos de son expérience, car je ne le forçais
dans aucune direction interprétative, tout en soutenant
son propre questionnement. Il a d’ailleurs choisi… de
ne pas trancher sur la nature réelle ou symbolique de
ce contact.
Les expériences vécues sont en lien avec l’inten-
tion de la personne, que le lien soit direct ou indirect.
L’expérience est toujours en lien avec les nécessi-
tés profondes et inconscientes du sujet, qui parfois
n’en comprend l’intérêt que dans l’après-coup. Je me
souviens d’une dame, toute dans le contrôle, qui me
disait dans son intention vouloir être « plus ordon-
née ». La RH lui faisait évidemment peur ! La transe
lui a fait vivre une telle jouissance du chaos qu’elle a
ouvert en elle l’expérience d’un profond lâcher-prise
dans le mouvement.
de manière légère, puis dense, avant de se transformer
en vent, etc. Aucune image, seulement un monde de
sensations de son corps, et de son corps dans l’espace.
La compréhension du lien entre ses expériences et son
intention de développer plus de confiance en lui n’est
venue qu’après quatre RH : il se sentait plus « dense »,
plus incarné, et a exprimé de lui-même qu’il était
devenu absolument indifférent au regard des autres  !
Il prenait pleinement plaisir à être simplement en lui-
même : c’est comme si la transe lui avait fait vivre
différentes façons d’être à lui-même et à son corps, lui
permettant de modifier suffisamment sa propriocep-
tion pour qu’il se sente stable, incarné, solide.

Cela lui a permis de prendre conscience qu’en

réalité, son profond besoin était de lâcher prise, ce
qu’elle n’avait même pas envisagé. Elle ne pensait pas
se sentir à nouveau si vivante, si vibrante, si libre ! Son
intention était dans le sens du symptôme ; la réponse a
été dans le sens de la libération d’elle-même.

Un homme qui manquait de confiance en lui s’est

mis à vivre une série de plusieurs RH (en individuel)
où il est sorti de son corps, et ensuite a vécu son corps

186
 Conclusion

P ratiquez, et vous verrez que, de proche en

proche, ce qui pouvait vous paraître farfelu
commencera à prendre du sens. Vous deviendrez alors
peut-être un farfelu pour les autres ! Si c’est le cas,
offrez-leur mon livre, au moins vous montrerez que si
un psychologue clinicien peut soutenir cette perspec-
tive, c’est qu’elle n’est pas folle !

Pratiquer la transe pour la première fois n’est pas

découvrir : c’est se souvenir ! Nous lâchons simplement
le contrôle rationnel et faisons enfin l’expérience de nous-
mêmes, libérés de l’autocontrôle. Nous réveillons alors un
savoir ancestral, présent depuis l’aube de l’humanité.

Si vous avez lu tout l’ouvrage, je pense que vous

comprenez maintenant que l’enjeu pourrait être plus

189
 Aux Frontières de L'Esprit Conclusion

essentiel qu’il n’y paraît : grâce aux états modifiées de
conscience, nous nous éveillons à une partie de nous-
mêmes refoulée et essentielle, nous prenons conscience
d’une partie voilée de la réalité dont nous parlaient
les peuples de nos origines, et dont nous parlent
aujourd’hui encore les cultures racines. Notre savoir
d’Occidentaux modernes nous apparaît alors riche,
mais vaniteux, à la manière d’un adolescent surdoué
qui décrie et dévalorise ce que veut lui transmettre son
grand-père. Mais si nous acceptons cet éveil et cette
prise de conscience, alors nous apporterons quelques
pistes de réponses inattendues à la crise écologique,
économique et civilisationnelle que nous traversons.
J’aimerais terminer par un conte de Jodorowsky
emprunté à une BD illustrée par Bouck : Le Trésor de
l’Ombre (éd. Les Humanoïdes associés, 1999).
donnèrent l’alerte. Un robot géant repéra l’exalté
et s’abattit sur lui en quelques secondes, l’écra-
sant sous une botte de plusieurs tonnes.
Réduit en bouillie, le corps traversa la chape
protectrice et se mélangea à la terre. Des véhi-
cules spéciaux crachèrent du plastique gris pour
couvrir le trou et la fourmilière retourna à son
activité incessante.
Pourtant, dans le cadavre de l’homme, sous
la surface rigide, la graine germa. La terre fut
bientôt pleine de racines. En une invasion incon-
trôlable, les puissants végétaux firent éclater la
coquille et se répandirent dans la ville.
Les hommes retrouvèrent la mémoire.

La Dernière Graine
Le sol était couvert d’une chape de plastique
gris qui s’étendait de la cime des montagnes
jusqu’au fond des mers. Un jour, dans une malle
oubliée pendant des siècles, un citoyen trouva
une graine – la dernière sur la Planète. Il courut
à travers les rues lisses pour l’exhiber comme
s’il s’était agi d’une lanterne. Les ordinateurs

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