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: Stéphane Chabenat
Éditrice : Coralie Delvigne
Conception graphique et mise en pages : So Office
Conception couverture : olo. éditions
Illustrations : Chris Pavone
Les éditions de l’Opportun
16, rue Dupetit-ouars
75003 Paris
www.editionsopportun.com
SOMMAIRE
Introduction
Qu’est-ce qu’un biais cognitif ?
D’où viennent-ils ?
Un biais cognitif est à différencier d’une « dissonance cognitive »
Les biais, sont-ils un problème ?
Combien y a-t-il de biais dans nos têtes ?
Plongeons dans notre cerveau, à la chasse aux biais !
Index des biais
INTRODUCTION
EN BREF
1. Trop d’informations ? Le cerveau filtre en masse et ne s’encombre que du strict
nécessaire.
2. Le manque d’information rend les choses confuses ? Le cerveau remplit les
trous tout seul.
3. Il faut agir vite ? Le cerveau saute directement aux conclusions.
1. http://amaninthearena.com/biais-cognitifs/
Plongeons
dans notre cerveau,
à la chasse
aux biais !
L’EFFET BARNUM
Vous qui lisez ce livre, je vous connais bien. J’en veux pour preuve l’examen
minutieux que je vais révéler de vous ci-dessous :
Vous avez besoin d’être aimé et apprécié, et pourtant vous savez être
critique avec vous-même. Vous avez certes des points faibles dans votre
personnalité, mais vous savez généralement les compenser. Vous avez un
potentiel considérable que vous n’avez pas encore utilisé à votre avantage.
À l’extérieur vous êtes discipliné et vous savez vous contrôler, mais à
l’intérieur vous tendez à être préoccupé et pas très sûr de vous-même.
Parfois vous vous demandez sérieusement si vous avez pris la bonne
décision ou fait ce qu’il fallait. Vous préférez une certaine dose de
changement et de variété, et devenez insatisfait si on vous entoure de
restrictions et de limitations. Vous n’acceptez l’opinion d’autrui que dûment
démontrée. Vous avez trouvé qu’il était maladroit de se révéler trop
facilement aux autres. Par moments vous êtes très extraverti, bavard et
sociable, tandis qu’à d’autres moments vous êtes introverti, circonspect et
réservé. Certaines de vos aspirations tendent à être assez irréalistes…
Alors ? À combien estimez-vous la pertinence de cette évaluation de vous-
même ?
Lorsque le psychologue américain Bartram Forer t passer ce test de
personnalité à ses étudiants en 1948, il leur demanda de noter la pertinence
de cette évaluation de leur personnalité sur une échelle de 0 à 5. La moyenne
fut de 4,26 ! Pourtant, ils avaient tous lu la même chose. Vous l’avez compris,
l’évaluation est en réalité constituée de descriptions vagues, banales, et
s’appliquant à n’importe qui. Seulement, « l’effet Barnum » tend à vous faire
adhérer à cette description et à la considérer comme très juste, précise et
parfaitement représentative de vous-même. Ce biais cognitif fait les choux
gras de bon nombre d’astrologues, cartomanciens, mais peut aussi être
utilisé par des mentalistes, des politiciens, des pseudo-thérapeutes ou encore
tout simplement par des « séducteurs en série » sans oublier les biscuitiers
qui vendent par millions ces fameux biscuits chinois à l’intérieur desquels
un message vous apprendra ces incroyables révélations comme « Vous ne
devriez pas faire con ance aux menteurs. » ou « Une porte est juste au coin
et attend que vous la trouviez pour l’ouvrir. » !
L’effet Barnum est accentué par 3 facteurs : si la description met l’accent sur
des traits positifs ; si l’auteur du descriptif est vu par le sujet testé comme
une personne quali ée et qui détient une certaine autorité en la matière ; et
si le sujet pense que le descriptif lui est propre, autrement dit qu’il ne
s’applique qu’à lui (cela entraîne une validation subjective : valider une
information ou une déclaration parce qu’elle a une signi cation qui nous
convient).
LE SAVIEZ-VOUS ?
« On convainc un esprit, on persuade un cœur ! »
C’est la différence entre ces deux termes, qui pourraient sembler identiques.
Convaincre : faire entrer un fait dans l’esprit d’une personne avec des preuves.
Persuader : obtenir l’adhésion de quelqu’un en faisant appel à ses émotions.
Les déclarations les plus efficaces pour un bon effet Barnum incluent le
mot « parfois », comme « Parfois, vous vous sentez très sûr de vous, tandis
qu’à d’autres moments, vous n’êtes pas aussi con ant. » Il est évident que cela
s’applique à tout humain sur Terre, quelle que soit sa culture, son éducation
ou sa religion. « Vous pouvez être intelligent, mais à d’autres moments, vous
pouvez être stupide. » Même Albert Einstein aurait été d’accord avec cette
autoévaluation !
Il n’y a aucun moyen d’être en désaccord avec une évaluation de type
Barnum, mais presque personne ne perçoit à quel point c’est absurde,
surtout si l’on vient de répondre à un long « test » de personnalité en 45
points qui est censé nous fournir des informations précises sur nos qualités
les plus profondes. Ce n’est que lorsque la tromperie est expliquée que la
plupart des gens se rendent compte qu’ils ont été habilement dupés.
Bien que les premiers adjectifs que nous avons envie de coller sur les
personnes tombant dans le panneau soient « crédule » ou « naïf », des
psychologues, comme le professeur britannique Adrien Furnham, avancent
que l’effet Barnum est très proche du « Principe de Pollyanna1 » : la tendance
naturelle (hors dépression ou anxiété) à se souvenir plus précisément des
choses agréables que des éléments désagréables. L’humain a, au niveau
subconscient, une inclination naturelle à se concentrer sur l’optimisme,
tandis qu’au niveau conscient, il a tendance à se concentrer sur le négatif.
Nous avons une disposition à nous souvenir des expériences passées comme
plus roses qu’elles ne se sont réellement produites. Les humains évitent les
stimuli négatifs, ils mettent plus de temps à reconnaître ce qui est
désagréable ou menaçant que ce qui est agréable et sûr. Cette sorte
d’autotromperie nous fait lire une description de nous-même
(volontairement atteuse et oue) comme agréable, valorisante, et donc…
vraie.
1. Le nom dérive du roman de 1913 d’Eleanor H. Porter, Pollyanna, décrivant une lle orpheline
envoyée vivre avec sa tante Polly, qui est une femme très dure et stricte, ce qui pousse la petite
Pollyanna à se protéger psychologiquement en jouant au « jeu heureux » : elle essaye de trouver
quelque chose dont elle se réjouira dans chaque situation, et de partager son optimisme aux autres.
L’EFFET DE HALO (OU EFFET DE NOTORIÉTÉ/EFFET DE
CONTAMINATION)
On note que tous ces présidents sont grands, très grands par rapport à la
moyenne américaine qui est passée de 1 m 71 en 1917 à 1 m 75 en 2010. Ici,
la moyenne est de 1 m 85, soit 10 cm de plus que la moyenne actuelle. Il
semble bien que leur taille ait eu un impact sur l’image qu’ils ont véhiculé
autour d’eux (les 190 centimètres revendiqués par Donald Trump pourraient
être exagérés de 2 centimètres, si on en croit son passeport).
Abraham P. Buunk, un universitaire néerlandais qui a écrit une étude en
2013 sur la taille des présidents américains, commente : « C’est largement
prouvé que les personnes grandes ont plus de chance d’avoir un poste plus
important dans une organisation ». D’après son étude, « l’avantage des
grands candidats est sans doute une affaire de perception : les présidents
plus grands sont notés par les experts comme de “meilleurs” présidents et
comme ayant plus de leadership et de talents de communication. » Buunk
explique aussi que l’idée d’étudier cet aspect de la vie des présidents
américains lui est venue quand un universitaire canadien, qui se croyait
grand lui-même, est arrivé aux Pays Bas et « s’est senti plutôt dans la
moyenne ». Il a alors décidé d’examiner les effets psychologiques de la taille
sur les relations humaines.
Gregg Murray, professeur en science politique à l’Université Augusta, en
Géorgie, explique lui aussi que selon ses recherches, pour les élections
américaines entre 1789 et 2012 (où ne se sont présentés que des hommes), le
plus grand des 2 candidats l’a emporté 58 % du temps. Et 67 % des fois, il a
remporté le vote populaire. La haute taille d’une personne déclenche chez les
autres de nombreuses associations positives subconscientes, en particulier
pour les hommes. La plupart des gens semblent voir les hommes de grande
taille comme plus persuasifs, impressionnants et capables que la moyenne.
LA TAILLE COMPTE
Une étude américaine de 2004* a montré que les personnes de grande taille
sont en moyenne mieux payées que les plus petites : 300 dollars annuels par
centimètres en moyenne !
*Judge, T. A., & Cable, D. M. (2004). The Effect of Physical Height on Workplace Success and Income:
Preliminary Test of a Theoretical Model. Journal of Applied Psychology, 89(3), 428–
441. https://psycnet.apa.org/record/2004-95165-004
Une étude de 2015 a montré qu’en politique, la majorité des électeurs n’ont
qu’une vision très partielle des candidats avant d’aller voter. Ils ont pour la
plupart regardé une seule vidéo d’un discours, ou bien n’ont lu que quelques
articles dans les médias, ni plus ni moins. Pourtant, si les électeurs trouvent
qu’un candidat est attirant, ils défendent l’idée qu’il est mieux informé que
les autres, plus compétent, et ce, même lorsqu’ils savent qu’il ne l’est pas
vraiment ! D’autres recherches de L’Indian Institute of Technology de Kanpur,
en Inde, ont démontré que les candidats politiques perçus par les votants
comme étant attirants physiquement, étaient plus susceptibles de recevoir la
majorité des voix aux élections.
Une expérience également très révélatrice consista à présenter à 2 groupes
d’individus un même texte écrit par une personne accusée, et tentant de se
défendre en argumentant pour son innocence. Les 2 groupes devaient noter
la personne avec une note située entre 1 et 5, 1 étant l’innocence totale, et 5
la culpabilité absolue. Mais le texte, bien qu’étant le même, fut donné
accompagné d’une photo d’identité différente ! L’une présentait une
personne aux traits gracieux et attrayants, l’autre une personne moins
avantagée physiquement. Comme vous le devinez, le premier groupe
attribua à la personne la note de 2,8/5 (donc plutôt innocente), l’autre
groupe 4,2/5, donc fortement coupable ! La beauté nous rend moins
coupable aux yeux des autres. On a même demandé aux 2 groupes de
décider d’une punition pour l’accusé et à nouveau, la sévérité de la peine
proposée fut plus légère pour la personne attrayante (5,6/10), et plus sévère
pour la personne disgracieuse (8/10).
1. Le terme halo, du latin halos(aire, en rapport avec l’aire circulaire du battage du grain), fait référence
à l’aire circulaire lumineuse qui apparaît autour des astres et principalement du Soleil, de la Lune et
des planètes.
2. Daniel Kahneman, Système 1 Système 2, les deux vitesses de la pensée, Flammarion, 2012.
LE BIAIS D’ANCRAGE
EXPÉRIENCE
Placez un bol vide devant une personne, et demandez-lui combien de morceaux
de sucre on pourrait placer à l’intérieur, en lui suggérant par une question
« moins de 20, ou plus de 20 ? » En lui indiquant cette précision numérique, vous
ancrez insidieusement son esprit sur le nombre 20, et sa réponse aura tendance
à tourner autour de ce nombre, elle répondra peut-être 28, alors qu’elle aurait
répondu totalement autre chose, peut-être 50 ou 60 (ce qui est peut-être la
réalité), sans que vous ne l’influenciez par ce point d’ancrage.
1. Fritz Strack et omas Mussweiler, « Expliquer l’effet d’ancrage énigmatique : Mécanismes
d’accessibilité sélective », Journal de la personnalité et de la psychologie sociale, 1997.
2. Lorsqu’on a demandé à un groupe de personnes d’estimer une belle villa californienne au bord de la
plage, en leur donnant une ancre précise (799 800 $) et une plus ronde (800 000 $), les résultats
montrèrent que l’estimation était plus élevée avec l’ancre précise (784 000 $) qu’avec l’ancre ronde
(751 000 $).
https://www.researchgate.net/publication/5579975_Precision_of_the_Anchor_In uences_the_Amou
nt_of_Adjustment
3. Daniel Kahneman, Système 1 Système 2, les deux vitesses de la pensée, Flammarion, 2012.
LE BIAIS D’ASSOCIATIONS IMPLICITES ET L’EFFET
D’AMORÇAGE
« De quelle couleur est une feuille de papier ? La chantilly ? La neige ? Les
nuages ? Que boit une vache ? »
Vous connaissez sûrement cette devinette rigolote qui, si vous y répondez
rapidement, vous pousse à faire appel à votre système 1 et à tomber dans le
panneau : si vous avez répondu « du lait » (au lieu de l’eau) c’est parce que
vous avez été victime du biais d’association implicite ! Votre cerveau a été
in uencé par la couleur blanche (par ce qu’on appelle un effet d’amorçage),
et lorsqu’il a fallu répondre à la question rapidement, il a choisi la première
chose qui lui venait à l’esprit de couleur blanche et « associé » à la vache : le
lait !
Il serait trompeur de penser que nous disposons d’une parfaite conscience
de nos croyances, autrement dit, que nous savons pourquoi nous croyons
ceci ou cela. Mais les psychologues ont montré (comme avec le petit test
bien connu de la vache plus haut) qu’une partie non négligeable de nos
croyances reposent sur des mécanismes automatiques non conscients. Nous
nourrissons, sans le savoir, des associations d’idées, ce qu’on peut appeler
également des « stéréotypes » (des croyances exagérées, des images ou des
vérités déformées au sujet d’une personne ou d’un groupe).
Lors d’entretiens de sélection par exemple, les recruteurs sont souvent
sensibles à des caractéristiques non pertinentes pour l’évaluation : une
personne âgée sera par exemple perçue comme une personne lente et
comme une personne qui ne peut pas comprendre les nouvelles
technologies. Même si c’est faux.
BIAIS DE STÉRÉOTYPE
Notre cerveau à tendance à classer rapidement les gens qui nous entourent :
connus/inconnus, homme/femme, beaux/moches, mais aussi, amis/ennemis.
Quand on croise une personne qui nous « ressemble », on se sent en confiance.
Mais face à une personne différente, nous sommes plus méfiants. Face à cela,
nous utilisons des raccourcis pour nous protéger rapidement, nous forgeant une
opinion en nous basant sur nos croyances au sujet du groupe dont elle semble
être une des représentantes, et nous tombons dans le biais de stéréotype.
Combien de blagues commencent par « C’est un Belge, un Anglais et un
Français qui… », suivies de stéréotypes pour chacun des groupes ?
Nous utilisons donc des stéréotypes parce que c’est moins fatigant mentalement
d’utiliser ces outils que d’examiner les nuances qui distinguent vraiment les
personnes. Cette « avarice cognitive » contribue vicieusement au maintien des
préjugés.
Croyez-vous que : les scientifiques sont des savants fous, les Italiens mangent
souvent des macaronis, les Grecs sont fourbes, les Écossais sont avares, les
juifs sont riches et vénaux, les Russes sont ivrognes, les musulmans sont
terroristes, les Chinois sont trop prolifiques, les étrangers sont des parasites, les
sportifs ne sont pas très intelligents, les hommes ont plus de besoins sexuels
que les femmes, les hommes sont tous des machos et ne sont pas capables de
faire plusieurs choses en même temps, les femmes conduisent mal, sont
dangereuses en voiture et n’ont aucun sens de l’orientation, les blondes sont
stupides, les brunes ont du caractère, les roux ont des défauts génétiques, les
noirs sentent plus fort que les blancs ?*
*Guy Bechtel, Délires racistes et savants fous, éditions Pocket, coll. « Agora », 2006.
FAISONS UN TEST !*
Dans la liste suivante, mettez dans une catégorie les prénoms ci-dessous selon
qu’ils appartiennent à la catégorie « Homme » ou la catégorie « Femme » :
Stéphane
Émilie
David
Éric
Anne-Laure
Ludivine
Gabriel
Sylvain
L’exercice ici était simple. Par exemple Sylvain va dans la catégorie « Homme »
et Ludivine dans la catégorie « Femme ».
Refaites maintenant l’exercice en triant les mots dans les 2 catégories suivantes :
soit la catégorie « Homme ou Carrière » soit la catégorie « Femme ou
Famille » :
Emma
Marchand
Frédérique
Gaston
Entrepreneur
Jumeaux
Parents
Sarah
Entreprise
Cuisine
Ménage
Vous avez certainement placé « Jumeaux » dans la catégorie « Femme ou
Famille » et « Entreprise » dans la catégorie « Homme ou Carrière ».
Essayez enfin de classer la liste de mots ci-dessous dans une des deux
catégories suivante : « Homme ou Famille » et « Femme ou Carrière » :
Bébé
Claire
Grands-parents
Marc
Repassage
Chef d’entreprise
Emploi
Mathieu
Femme de ménage
Travail domestique
Thomas
Jessica
Bureau
Avez-vous remarqué quelque chose ?
Il vous a sûrement été plus difficile de placer les mots « Chef d’entreprise » dans
la sous-catégorie « Carrière » parce que celle-ci est couplée avec la sous-
catégorie « Femme ». Vous avez sans doute dû réfléchir quelques secondes
alors que les 2 listes précédentes ne posaient aucun problème. Pareil pour le mot
« Repassage » car la sous-catégorie « Famille » est couplée avec « Homme ».
Cet exercice montre que nous créons des associations mentales entre les
concepts masculins et ceux liés à la carrière ou au travail, et pour les activités
familiales, elles sont davantage associées à la femme qu’à l’homme.
Ce simple test permet de mettre en relief le biais d’associations implicites, qui
peut toucher notamment le genre, la race, les orientations politiques, mais aussi
l’âge ou le poids des personnes.
*https://ecopsycho.gretha.cnrs.fr/spip.php?article78
L’effet de race est ce qui se produit lorsque l’on n’arrive pas à différencier, à
distinguer, les visages d’un groupe ethnique : « Ils ont tous la même tête ! ». Bien
entendu c’est faux, les visages des autres groupes ethniques que le nôtre sont
tout aussi différents et hétérogènes que ceux de notre groupe, seulement, des
études* tendent à montrer que le manque de familiarité, de contact, avec un
groupe ethnique, modifie la perception des visages de ce groupe. Un contact
fréquent en revanche augmente la distinction des visages.
*https://www.researchgate.net/publication
/275968451_L’effet_de_l’appartenance_ethnique_dans_la_reconnaissance_des_
visages_de_nouveaux_arguments_pour_une_perspective_psychosociale
L’EFFET DE REBOND
Lorsqu’on demande à des personnes de supprimer volontairement un
stéréotype, ce stéréotype revient en force plus tard, lorsqu’on cesse de le
supprimer. En 1994, le professeur et psychologue américain Daniel Wegner
mena l’expérience suivante* : on présenta la photo d’un skinhead à 2 groupes, et
on demanda à tous les sujets de décrire la vie quotidienne de cette personne. Au
groupe 1 on demanda de faire attention à ne pas donner de réponses
stéréotypées, tandis qu’au groupe 2, on ne donna pas cette consigne de
suppression. Dans un deuxième temps, on montra à tous les sujets la photo d’un
autre skinhead. Cette fois-ci, on demanda simplement aux 2 groupes de décrire
la vie quotidienne de cette personne (pas de consigne d’inhibition).
UNE ÉNIGME
Un homme et son fils ont un grave accident de voiture. Le père est tué sur le
coup. Son fils, lui, est conduit d’urgence à l’hôpital. Sauf qu’à son arrivée, le
docteur de permanence regarde l’enfant et s’écrie : « Cet enfant est mon fils ! »
Qui est donc ce docteur ?
Si vous ne souffrez pas ici du biais d’associations implicites, associant
inconsciemment « Docteur » et « Homme », vous aurez tout de suite compris que
ce docteur est la mère !
Voici la réponse :
Il est fort possible que vous n’ayez pas trouvé la réponse, à cause de l’effet
d’amorçage du premier exercice, qui a insidieusement conditionné votre
esprit à trouver une solution « sans déborder », sans sortir du cadre. Et
comme la solution n’existe qu’en sortant du cadre, vous étiez, sans le savoir,
bloqué par l’amorçage.
Notre comportement peut être in uencé par un signe visuel, émotionnel
ou auditif que notre mémoire a inconsciemment remarqué. L’effet
d’amorçage peut alors se manifester dans plusieurs domaines de la vie et
souvent de façon étonnante : le simple fait de vous faire vous représenter une
personne âgée, et de vous faire ré échir à un champ lexical lié à la vieillesse,
(d’après les expériences du psychologue John Bargh qui sont parfois
vivement discutées1), pourrait sans qu’on s’en rende compte, diminuer notre
vitesse de marche, ou encore, être exposé à l’image d’une bibliothèque peut
nous amener de façon inconsciente à parler à voix basse2. En 1970,
Alexandre Schauss étudia l’effet des couleurs sur le comportement : il
découvrit que regarder une certaine nuance de rose ralentit le rythme
cardiaque et rend moins agressif. Il convainquit alors la prison de Seattle de
repeindre ses cellules…
LA TRISTESSE NOUS RALENTIT !
Il fut démontré en 2019 qu’une émotion négative ralentit nos mouvements : le
traitement d’une émotion négative consomme plus de ressources, ce qui
interfère dans la phase de préparation cérébrale du geste.
LE SAVIEZ-VOUS ?
Dans la publicité et les médias en ligne, un titre avec des termes stimulants, des
verbes à la forme active et des promesses attractives fera plus facilement cliquer
un utilisateur.
Dans une autre expérience menée par John Bargh en 1996, des sujets se
sont vus exposés à un amorçage basé sur un stimulus sensoriel : on a
demandé aux sujets de tenir une boisson chaude, comme un café, ou froide,
comme un soda, dans les mains le temps de répondre à des questions posées
par une personne inconnue.
Ensuite, les participants ont laissé la boisson et se sont à nouveau
entretenus avec la personne qu’ils ne connaissaient pas. À la n de l’entrevue,
on leur a demandé s’ils embaucheraient cette personne s’ils le pouvaient. La
majorité des sujets qui ont été exposés à un « amorçage positif », avec une
boisson chaude, ont trouvé leur interlocuteur plus chaleureux et ont
répondu qu’ils l’embaucheraient. Par contre, beaucoup de ceux qui ont tenu
une boisson glacée n’ont pas trouvé cette personne très chaleureuse, et
certains ne l’auraient pas embauché !
En reproduisant ce test sur des centaines de personnes, John Bargha put
mettre en évidence que nos décisions peuvent être in uencées par des
stimuli sensoriels comme la simple chaleur d’une boisson !
1. JA. Bargh, M. Chen & L. Burrows, “Automaticity of social behavior: Direct effects of trait construct
and stereotype activation on action”, Journal of Personality and Social Psychology, 71(2), 230–244,
1996.
2. H. Aarts, A. Dijksterhuis, “e silence of the library: Environment, situational norm, and social
behavior”, Journal of Personality and Social Psychology, 84(1), 18–28, 2003.
LE BIAIS DES COÛTS IRRÉCUPÉRABLES
Ce biais est lié à l’aversion de l’être humain pour la perte, pour le gaspillage,
qui nous fait donner « plus d’importance à une perte qu’à un gain ».
Quelques exemples de situations où le biais de coûts irrécupérables
frappe de plein fouet :
1
. Un spectateur dans une salle de cinéma qui trouve le lm vraiment
mauvais et qui s’ennuie sévèrement, hésitera quand même à quitter la
salle avant la n du lm et aller faire quelque chose de plus intéressant,
« pour ne pas gâcher l’argent qu’il a dépensé pour son billet »1. Par
contre, si on lui a donné un billet gratuitement, le même spectateur
n’hésitera généralement pas à partir ! La première décision n’est pas
rationnelle car elle implique de « souffrir » 2 fois plus, plutôt que de
partir. En effet, en restant on perd de l’argent, et du temps. La seconde
option ne fait perdre que l’argent.
2
. Un étudiant peut poursuivre ses études après 2 années d’université dans
une branche dont il vient de se rendre compte qu’elle ne l’intéresse plus
du tout et ne lui correspond plus, plutôt que de changer de cursus pour
apprendre un métier qui lui plaît réellement (énergie, temps, argent
irrécupérables).
3
. Certains gardent des objets ou continuent d’utiliser du matériel qui ne
leur plaît pas ou ne sont pas vraiment adaptés à leur besoin, uniquement
parce qu’ils les ont payés cher (cela marche aussi pour un jeu en ligne ou
une série que l’on aurait payé et qui pourtant ne nous plaisent pas du
tout : on poursuivra le jeu et le visionnage de la série jusqu’au bout).
4
. Beaucoup se forceront à manger le dessert qu’ils ont commandé au
restaurant, même s’ils n’ont vraiment plus faim et quitte à être malade,
pour ne pas l’avoir payé pour rien.
Lorsqu’une entreprise en ligne (que nous ne citerons pas mais dont le nom
rappelle un euve) nous propose un abonnement mensuel pour béné cier
de « livraisons accélérées » ou d’autres avantages, elle actionne
insidieusement le levier du biais des coûts irrécupérable chez nous : en effet,
si on paye un abonnement mensuel pour des avantages, « il faut rendre cet
abonnement rentable », ce qui peut nous pousser à acheter plus de choses
que ce dont nous avons réellement besoin, juste pour ne pas posséder cet
abonnement pour rien !
LE SINGE ET LE FRUIT
Ce biais d’aversion à la perte provoque bien souvent un effet « d’escalade
irrationnelle » (ou escalade de l’engagement) : c’est la tendance à maintenir
fermement une ligne de conduite initiale malgré le fait que nos intérêts
personnels soient à perte, en n’ayant plus une analyse rationnelle de la situation,
en butte à des résultats de plus en plus négatifs, ou encore tout simplement en
ne voyant plus que la probabilité de réussite est quasi nulle. L’analogie bien
connue du singe et du fruit met cet effet en relief : un singe voit un fruit au fond
d’un vase et il y plonge la main pour le saisir. Mais en refermant sa main, son
poignet ne passe plus dans l’ouverture du vase. Ne voulant pas laisser le fruit, le
singe reste ainsi prisonnier du vase. Cela est d’ailleurs bien plus qu’une
analogie, puisque c’est réellement une technique utilisée pour capturer les
singes en Afrique. Alors lorsque vous voulez à tout prix conserver une ligne de
conduite contre vents et marées, demandez-vous si vous agissez en fin stratège
ou plutôt comme le singe avec le fruit…
Leçon :
« Dans bien des aspects de la vie, l’existence d’un investissement passé ne
signi e pas qu’il faut poursuivre dans la même voie : dans un monde
rationnel, en fait, l’investissement antérieur est hors sujet. (Et s’il a échoué,
c’est un coût irrécupérable : qu’il ait fonctionné ou pas, nous avons fait la
dépense. C’est du passé.) Le sujet, c’est plutôt la valeur que nous escomptons
dans l’avenir. Quelquefois, le mieux à faire est simplement de tourner les
yeux vers l’avenir. »2
INSOLITE !
En 2015, à l’aéroport de Pékin, une femme de 40 ans venait d’acheter une
bouteille de cognac pour une valeur de 145 euros. Seulement, on lui signala à
l’embarquement qu’elle ne pouvait pas prendre sa bouteille dans l’avion, les
liquides étant interdits dans les bagages à main. Ne pouvant plus la transférer en
soute et ne pouvant pas non plus se résigner à jeter ces 145 euros à la poubelle,
elle décida… de boire toute la bouteille ! Elle réussit à le faire, mais cela la rendit
tellement ivre, qu’il lui fut interdit de monter dans l’avion, qui partit sans elle…
1. S’ajoute à cela le fait que, en se levant, il rendrait son erreur de jugement manifeste à tous les
personnes présentes, ce qui ajoute un poids supplémentaire et une volonté de ne pas perdre la face.
2. Dan Ariely, Jeff Kreisler,L’argent à ses raisons que la raison ignore, éd. Alisio, avril 2019.
LE BIAIS D’AVERSION À LA PERTE
Imaginez le pari suivant : on lance une pièce. Si elle retombe sur pile, vous
perdez 100 euros, mais si elle tombe sur face, vous gagnez 120 euros.
Que faite vous ?
Une majorité de personnes refuseront ce pari. Pourquoi ? À cause de notre
« aversion à la perte », au fait que nous sommes plus affectés par une perte
de 100 euros que par un gain de 120 euros.
Très proche du biais des coûts irrécupérables, le biais d’aversion à la perte
est le déplaisir ressenti à la perte de quelque chose qui est plus puissant que
le plaisir ressenti lors d’un gain équivalent. Ce biais cognitif explique par
exemple pourquoi il est plus efficace, pour faire changer le comportement
des consommateurs, de leur dire :
« Si vous ne diminuez pas votre thermostat de 1 °C, vous allez perdre
300 € par an ! » que de leur dire :
« Si vous diminuez votre thermostat de 1 °C, vous allez gagner 300 €
par an ! »
Mais aussi :
« Il ne reste que 60 places pour le concert, dépêchez-vous ! » « Il ne reste
que 6 exemplaires de ce livre en stock »1. Autant d’informations que vous
connaissez bien lorsque vous naviguez sur les sites marchands en ligne, et
qu’ils réveillent en vous l’aversion à la perte : si vous ne commandez pas tout
de suite, vous pourriez perdre une opportunité, et ce sentiment augmente à
vos yeux la valeur du produit par rapport à ce qu’il peut réellement coûter.
Fixer des échéances et certaines conditions est une technique de vente qui
fait naturellement naître l’aversion à la perte chez les potentiels acheteurs.
Notre cerveau est davantage affecté par la perte que par le gain.
L’EFFET DE DOTATION
(OU AVERSION À LA DÉPOSSESSION)
Ce biais fonctionne avec les objets : une personne peut avoir plus de mal à se
convaincre de l’utilité d’un objet à acquérir, que de son inutilité le jour où elle doit
s’en séparer ! Cela est lié à l’effet de dotation : lorsque les gens entrent en
possession d’un bien, ils changent leur façon de l’évaluer, notamment par la
présence d’éléments affectifs.
Daniel Kahneman démontra cela en 2002 lors d’une expérience où il offrit une
tasse à café à un groupe de sujets, puis leur demanda à quel prix ils seraient
prêts à la vendre. Les sujets d’un autre groupe devaient, eux, indiquer à quel prix
ils étaient prêts à l’acheter. Le prix de vente était nettement plus élevé que le prix
d’achat (les vendeurs demandaient environ 7 $ pour se séparer de leur tasse
alors que les acheteurs n’étaient prêts à payer, en moyenne, qu’environ 3 $ pour
acquérir une tasse). Le fait d’être propriétaire de l’objet donne le sentiment qu’il a
plus de valeur que celle qu’on lui aurait donnée s’il ne nous appartenait pas.
L’effet de dotation se manifeste bien souvent dans la vie quotidienne, par
exemple lorsqu’on veut vendre une voiture d’occasion : on lui attribue un prix de
vente guidé non seulement par le profit éventuel, mais aussi par l’attachement
émotionnel qui nous lie à cette voiture qui fut la nôtre ; on fixe souvent un prix
plus élevé que ce qu’on aurait été prêt à dépenser pour une voiture quelconque.
Une fois qu’une personne possède un objet, y renoncer ressemble à une perte,
même si elle est payée en échange. Cela réveille le biais d’aversion à la perte
qui enclenche le biais d’aversion à la dépossession.
Les essais gratuits sont l’utilisation la plus courante de l’effet de dotation : une
fois que les utilisateurs se sont engagés avec un certain produit ou service et y
ont investi du temps, par exemple en créant leur profil, etc., il leur est plus difficile
de lâcher prise et de ne pas acquérir le produit à la fin de l’essai.
Cet effet est aussi l’une des raisons pour lesquelles les caves et les greniers de
bien des maisons sont remplis d’objets devenus pourtant complètement inutiles
(effet d’aversion à la dépossession). Pour lutter contre ce genre de biais, plutôt
que de se demander « à combien est-ce que j’évalue le prix de ce bien ? », il est
préférable de se demander « si je ne l’avais pas possédé, à quel prix serais-je
prêt à l’acheter ? » et là, ça change tout ! Ce petit exercice nous permettra de
revoir nos priorités, de faire le tri chez nous, alléger notre vie, ne plus gaspiller,
etc.
« Car la plupart des choses sont différemment appréciées par ceux qui les
possèdent et par ceux qui souhaitent les obtenir : ce qui nous appartient, et ce
que nous donnons, nous paraît toujours très précieux. »
– Aristote, L’éthique à Nicomaque, livre IX
MONNAIE DE SINGE
1. L’Effet de raretés’invite aussi dans ce cas : nous accordons une valeur supérieure à un objet rare et
une valeur inférieure à un objet hautement disponible, ce qu’Amazon a bien compris avec les
avertissements en vert sous les produits tel que « il ne reste que 2 exemplaires en stock ». La peur « de
passer à côté » nous rend plus vulnérables à la tentation et aux impulsions.
LE BIAIS DU RISQUE ZÉRO
1. Jonathan Baron, Rajeev Gowda, Howard Kunreuther, Attitudes Toward Managing Hazardous Waste:
What Should Be Cleaned Up and Who Should Pay for It?, April 1993.
https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1539-6924.1993.tb01068.x
L’EFFET D’AMBIGUÏTÉ
LE SAVIEZ-VOUS ?
Dire qu’un aliment ne contient que 10 % de colorant ou d’additifs aura moins
d’impact que de dire qu’un aliment est à 90 % sans colorant ni additifs !
Les chercheurs en psychologie Irwin Levin et Gary Gaeth ont réalisé une
étude sur les effets du cadrage des informations données à des
consommateurs, et son impact avant et après la consommation d’un produit.
Dans cette étude, ils ont découvert que dans un « cadrage » sur le bœuf, les
personnes qui mangeaient du bœuf étiqueté comme « maigre à 75 % »
l’évaluaient plus favorablement que les personnes dont le bœuf était étiqueté
à « 25 % de matières grasses » !
LE SAVIEZ-VOUS ?
Un verre peut être à moitié vide ou à moitié plein. Tout dépend du cadre dans
lequel on l’observe. Un effet parfaitement étudié par les psychologues et que l’on
peut manipuler à souhait !
É
LA PENSÉE EN NOIR ET BLANC
L’effet de cadrage peut, dans une certaine mesure, nous faire penser à ce
raisonnement fallacieux qu’on appelle « le faux dilemme », appelé aussi
« exclusion du tiers », « fausse dichotomie » ou encore « énumération
incomplète ». C’est un procédé rhétorique qui consiste à présenter 2 solutions à
un problème donné comme si elles étaient les 2 seules possibles, alors qu’en
réalité, il en existe d’autres. On simplifie un débat de manière abusive.
Le faux dilemme se trouve facilement en politique : « Allez-vous voter pour moi,
ou allez-vous laisser le chômage augmenter indéfiniment ? »
Des parents peuvent utiliser ce sophisme en s’adressant à leur enfant ainsi :
« Soit tu vas à l’université, soit tu seras balayeur ou caissière toute ta vie ! »
En psychologie, une personne qui voit le monde de façon manichéenne (en
simplifiant les rapports du monde et en ramenant tout à une simple opposition du
bien et du mal), entretient une pensée dite « en noir et blanc ». Elle catégorise
par exemple tous ceux qui l’entourent dans sa vie, ses proches, ses collègues,
ses voisins… comme étant soit tout bons, soit tout mauvais.
1. Amos Tversky et Daniel Kahneman, « e Framing of Decisions and the Psychology of Choice
[archive] », Science, 211, pp453-458, 1981.
2. Lorsqu’on leur présente un traitement décrit en termes positifs, négatifs ou neutres, les personnes
âgées sont beaucoup plus susceptibles d’accepter un traitement quand il est décrit de manière positive
qu’elles ne le sont à accepter exactement le même traitement décrit de manière neutre ou négative.
LE BIAIS D’ÉVALUATION DES PROBABILITÉS
LA LOI DE WEBER-FECHNER
Pouvant être associée au biais d’évaluation des probabilités, la loi de Weber-
Fechner est « la difficulté à distinguer et à comparer de petites différences au
sein de grandes quantités ». Par exemple, ajouter 1 kg à un objet dont le poids
est de 5 kg semble être perçu d’une manière différente par rapport à l’ajout d’un
1 kg à un objet dont le poids est de 30 kg. Il vous sera également très difficile de
faire la différence entre un objet de 10 kg et d’un objet de 10,1 kg. C’est pour cela
que beaucoup de personnes se retrouvent un jour avec plusieurs kilos en trop,
parce qu’elles n’ont pas remarqué les grammes accumulés quotidiennement !
1. Didier NAKACHE, (23 mars 2021), Semaine du cerveau 2021 Conférence biais cognitifs Didier
Nakache Inserm Ensemble saint Luc[Vidéo], YouTube. https://youtu.be/QIHSs0Qg_ew
LA NÉGLIGENCE DE LA TAILLE DE L’ÉCHANTILLON
Cela nous fait penser ici au biais de conjonction, qui nous fait baser notre
jugement sur des informations personnalisantes plutôt que statistiques.
Par exemple, les psychologues Tversky et Kahneman en 1983 créèrent ce test :
Linda a 31 ans, est célibataire, franche et très brillante. Elle possède une
maîtrise de philosophie. Étudiante, elle se montrait très préoccupée par les
questions de discrimination et de justice sociale, elle participait aussi à des
manifestations antinucléaires.
Selon vous, Linda a-t-elle plus de chance d’être :
1. Guichetière dans une banque.
2. Guichetière dans une banque et active dans le mouvement féministe.
89 % des personnes interrogées ont répondu l’option 2, alors que la probabilité
que les deux évènements se produisent (être guichetière ET activiste) est
inférieure à la probabilité qu’un seul des évènements (être guichetière) se
produise.
Tversky et Kahneman expliquent que si la majorité des personnes choisirent la
réponse 2, c’est parce qu’au lieu de construire leur réponse à partir d’un
raisonnement logique et probabiliste, la plupart procèdent à un raisonnement
basé sur les informations représentationnelles. La description faite de Linda
retient davantage l’attention que les probabilités mathématiques.
Test :
RVRRR
VRVRRR
VRRRRR
Vous avez choisi la deuxième ? VRVRRR ? C’est ce qu’ont aussi fait 65 % des
participants à ce test. Bien que la première séquence soit plus courte (et,
regardez bien, est comprise dans la seconde), et que la troisième soit tout aussi
probable statistiquement que la deuxième. La deuxième nous semble plus
« représentative » de ce que doit être, pour nous, une suite aléatoire. On fait
donc une erreur en se fiant à ce à quoi devrait « ressembler », selon nous, une
suite de lancers de dés, en oubliant de considérer les données rationnelles.
Ce qu’on appelle aussi l’illusion des séries se remarque bien dans les jeux de
hasard : la plupart des gens refusent de jouer une combinaison telle que 1-2-3-4.
Ils préfèrent croire qu’en jouant une combinaison qui semble plus aléatoire,
comme 5-19-23-37, ils ont beaucoup plus de chance de gagner, alors qu’en
réalité, ces deux combinaisons ont parfaitement la même probabilité de sortir !
*L’expression « main chaude » vient du basketball, où l’on estime que la probabilité qu’un joueur
réussisse un lancer franc est plus élevée après un succès qu’après un échec au tir précédent.
1. Extrait de l’article : « Apprenez à reconnaître vos biais cognitifs », Science & Vien° 1145 de
février 2013, page 118 : « zoom du mois » par Coralie Hancok.
2. https://www.esanum.fr/today/posts/covid-19-les-tests-et-leurs-limites
3. https://www.sciencesetavenir.fr/sante/covid-19-les-vaccines-sont-ils-plus-souvent-hospitalises-que-
les-non-vaccines_159373
LE BIAIS D’EXCÈS DE CONFIANCE (OU SURESTIMATION
DE SOI)
Le 10 avril 1912, le RMS Titanic prit la mer pour son voyage inaugural. Le
14 avril, en dépit de toutes les alertes indiquant la présence d’icebergs sur le
trajet, le commandant Smith donne l’ordre de poursuivre à vive allure,
persuadé que le navire ne pouvait pas couler ! Puis, à 23 h 40, on signala un
iceberg droit devant… Le Titanic le percuta, et le biais d’excès de con ance
coula avec le commandant Smith (entraînant 1 500 morts).
« Alors voilà donc le paquebot que l’on dit insubmersible.
– Il est insubmersible ! Dieu lui-même ne pourrait pas couler ce bateau ! »
– Rose DeWitt Bukater et Caledon Hockley, Titanic, 1997
Ce biais cognitif fut agrant durant les débuts de la Covid dans le monde,
quand plusieurs hommes d’État, comme Donald Trump, Jair Bolsonaro ou
encore Boris Johnson, étaient convaincus qu’eux-mêmes et leur peuple ne
seraient pas touchés. Le 22 janvier 2020 Donald Trump disait lors d’une
interview américaine : “We have it totally under control ! » (« Nous avons [la
situation du Covid] totalement sous contrôle !”) Les Français ne sont pas en
reste avec leur propension à penser, au début de l’année 2020, que le virus
n’arriverait pas en France ; ils continuaient de s’entasser dans les lieux publics
en dépit des recommandations sanitaires.
Ce biais est très fréquent, on le retrouve par exemple chez les fumeurs.
Tous les fumeurs sont, de nos jours, parfaitement conscients des risques
provoqués par cette pratique, mais beaucoup sont persuadés qu’il ne leur
arrivera rien, que seuls « les autres » tomberont malades.
Le biais de retenue, qui est lié, est notre tendance à surestimer nos capacités à
nous contrôler, à faire preuve de retenue ou à gérer un comportement impulsif
face à la tentation.
L’effet difficile-facile est un phénomène indiquant que les sujets sont sur-
confiants dans leurs réponses à des questions difficiles. Ils surestiment leur
capacité à accomplir des tâches ardues, et ils sont sous-confiants dans leurs
réponses à des questions faciles et à accomplir des tâches faciles.
Un test simple qui met en évidence l’excès de con ance, consiste à faire
répondre des individus à un questionnaire de culture générale puis, une fois
le questionnaire rempli, à leur demander à combien ils estiment leur niveau
de con ance dans leurs bonnes réponses. Les résultats montrent que leur
con ance dépasse toujours la réalité du test : lorsqu’ils estiment leur réussite
à 80 % par exemple, les résultats sont de seulement 60 %.
Si la capacité de l’être humain à donner son niveau de con ance dans ses
réussites était parfaitement calibrée, il saurait toujours dire avec justesse s’il a
con ance à 100 %, à 90 %, à 80 % Mais loin de là et de ce calibrage parfait, la
recherche1 nous montre que la con ance en soi dépasse largement la
précision dès qu’une personne répond à des questions difficiles sur un sujet
qu’elle ne maîtrise pas !
Une étude réalisée en 2001 par les chercheurs Brad M. Barber et Terrance
Odean de l’University of California, a montré que l’excès de con ance était
présent chez les deux sexes, mais plus marqué chez les hommes que chez les
femmes, et plus accentué chez les célibataires que chez les personnes
mariées.
L’analyse de ce biais dans différents milieux montre bien qu’il touche tout
le monde ! Par exemple : une étude2 menée auprès d’étudiants américains
avance que 93 % d’entre eux se considèrent au-dessus de la moyenne en ce
qui concerne leur habileté pour la conduite automobile. Un sondage effectué
auprès des professeurs de l’université du Nebraska révèle que 94 % des
enseignants pensent qu’ils sont plus compétents que leurs collègues de
travail ! En n, des entrevues menées auprès de prisonniers d’un pénitencier
britannique démontrent que ces derniers s’imaginent supérieurs au
prisonnier moyen en ce qui concerne des traits de personnalité comme
l’honnêteté, la générosité et la maîtrise de soi !
1. Daniel Kahneman, Paul Slovic, Amos Tversky, “Judgement under uncertainty: heuristics and biases”,
Cambridge UniversityPress, 1982.
2. Ola Svenson, “Are we all less risky and more skillfull than our fellow drivers?”, Acta Psychologica,
Volume 47, Issue 2, February 1981, Pages 143-148.
LES BIAIS D’OPTIMISME ET DE PESSIMISME
1. On parle d’anxiété lorsque l’émotion apparaît sans danger réel ou lorsque l’inquiétude,
l’appréhension, sont excessives par rapport à la situation.
L’ILLUSION DE CONTRÔLE
1. https://www.toupie.org/Biais/Illusion_controle.htm
L’EFFET SEMMELWEIS
Souffrez-vous d’ultracrépidarianisme ?
C’est le comportement qui consiste à donner son avis avec assurance sur
des sujets à propos desquels on n’a pourtant aucune compétence légitime ou
avérée.
Comme le souligne le philosophe et physicien Etienne Klein1, « nous
sommes tous pour ou contre le nucléaire, pour ou contre les nanosciences,
pour ou contre les OGM… Mais qui d’entre nous est capable de dire ce qu’on
met vraiment dans un réacteur nucléaire ? Ce qu’est une réaction de ssion ?
Ce que c’est qu’une cellule souche, un OGM ? Personne. »
Cela a amené deux scienti ques, David Dunning et Justin Kruger, à
étudier ce phénomène étrange qui pousse les personnes les moins quali ées
dans un domaine à surestimer leur compétence. Ils mirent aussi en évidence
le fait contraire : les experts ont tendance à sous-estimer leurs compétences2.
Une histoire franchement drôle, mais vraie, les passionna :
Un matin de 1995, à Pittsburgh aux États-Unis, McArthur Wheeler décide
de dévaliser deux banques à visage découvert. Seulement, grâce aux caméras
de surveillance, il se fait vite arrêter, et crie aux policiers : « Je ne comprends
pas ! J’avais pourtant mis du jus ! » Effectivement, Wheeler était persuadé
d’avoir trouvé une technique imparable pour ne pas se faire prendre : il s’était
enduit le visage de jus de citron, convaincu que, tout comme pour l’encre
invisible sur les feuilles de papier, cela le rendrait indétectable aux yeux des
caméras !
Leurs recherches, études et tests ont permis aux deux psychologues
Dunning et Kruger, d’attribuer ce biais cognitif à une difficulté
métacognitive des personnes non quali ées qui les empêche de reconnaître
exactement leur incompétence et d’évaluer leurs réelles capacités. Autrement
dit : un incompétent est incompétent pour ce qui est d’évaluer son
incompétence ! Cela est dû au fait que les connaissances et l’intelligence
nécessaire pour accomplir une tâche sont généralement les mêmes qui
servent à l’évaluer.
Combien de fois avons-nous entendu durant la pandémie de Covid 19 la
phrase : « Je ne suis pas médecin, mais je pense qu’il faudrait faire ceci ou
cela… » Autrement dit, on reconnaît être incompétent, mais en même
temps, on pense avoir la solution à un problème qui globalement nous
échappe. Dans des conversations banales autour d’un verre ou à table en
famille le dimanche, cela n’a absolument aucune espèce d’importance que
nous parlions de sujets avec une totale assurance, alors que nous ne les
maîtrisons pas du tout. Ce genre de chose est naturelle chez l’humain,
autrement nous ne parlerions pas de grand-chose. Mais lorsque notre parole
est publique ou peut avoir une in uence sur autrui à cause de notre statut ou
position dans la société, il est sage de s’assurer que nous ne sommes pas
victime de l’effet Dunning-Kruger.
Observons ce graphique (qui est une représentation satirique et inspirée
d’un premier schéma moins caricatural issu des analyses de Dunning et
Kruger) :
On note en analysant l’abscisse et l’ordonnée de ce graphique, que dès
qu’on commence à développer des connaissances sur un sujet, le niveau de
con ance grimpe en èche ! Il grimpe vers ce que Dunning et Kruger
appellent avec humour « le sommet du Mont Stupide ». Ensuite, en
continuant d’apprendre, on se retrouve à un moment où on commence à
perdre un peu pied, et on descend dans la « vallée du désespoir » (ou encore
« la vallée de l’humilité »), on a l’impression pendant un certain temps, de ne
plus vraiment maîtriser notre sujet et notre con ance en nous diminue
fortement. Mais en persévérant, en continuant le travail, on monte la « pente
de l’illumination », pour nalement atteindre le « plateau de durabilité », ou
de consolidation, nous sommes devenu un vrai expert.
On remarque bien dans le graphique que, même lorsqu’on a atteint le
plateau de durabilité, on n’est jamais aussi haut dans notre con ance en soi
qu’au tout début de notre apprentissage, lorsqu’on était au sommet du
« Mont Stupide ».
Trois facteurs additionnels peuvent augmenter l’effet de l’excès de con ance
en soi :
1
. L’illusion des compétences passées, qui nous fait croire que parce que
nous avons été compétents un jour dans un domaine, nous le sommes
toujours, alors que les choses concernant ce domaine ont peut-être
depuis largement évolué, mais sans nous.
2
. L’effet de halo peut intervenir en nous persuadant que puisque nous
excellons effectivement dans un certain domaine, nous excellons aussi
dans des tas d’autres.
3
. La pression sociale, qui nous empêche de dire humblement « je ne sais
pas ».
« Une grande partie des difficultés que connaît le monde sont dues au fait que
les ignorants sont complètement sûrs d’eux et que les personnes intelligentes
sont pleines de doutes. »
– Bertrand Russell
*Le Point N° 2463, page 81.
LE SAVIEZ-VOUS ?
L’humain ne surestime pas que sa propre compétence : une étude de 2019
montre que l’on a tendance à surestimer également l’intelligence de notre
conjoint, encore plus que la nôtre !
1. Brut, (7 septembre 2020), L’ultracrépidarianisme, l’art de parler de ce qu’on ne connaît pas[Vidéo],
YouTube. https://youtu.be/f89WVeqWe-M
2. Cela amène d’ailleurs souvent les personnes les plus quali ées à sous-estimer leur niveau de
compétence au point de penser à tort que des tâches faciles pour elles le sont aussi pour les autres.
LE BIAIS DE GROUPE
L’AVOCAT DU DIABLE
Une façon d’éviter à des groupes, dans les entreprises par exemple, de tomber
dans ce piège, est de faire nommer par le groupe un membre pour qu’il soit
responsable de trouver les faiblesses d’une décision !
Autre méthode d’évitement du biais : de temps en temps, diviser le groupe en 2
sous-groupes qui travaillent séparément et confrontent ensuite leurs résultats.
1. Présentée dans son ouvrage e Abilene Paradox and Other Meditations on Management.
LA PENSÉE DE GROUPE
Il faut donc que nous en soyons conscients : nos objectifs, nos pensées et
nos décisions trahissent souvent l’in uence subtile mais puissante de notre
entourage.
Le psychologue et chercheur américain qui a dé ni ce phénomène, Irving
Janis, a mis en évidence 8 symptômes de la pensée de groupe :
1
. L’illusion de l’invulnérabilité : le groupe se croit intouchable, ce qui le
pousse à réprimander la dissidence.
2
. La rationalisation : le groupe est davantage soudé lorsqu’il justi e
collégialement ses actions.
3
. La croyance en la supériorité morale et intellectuelle du groupe : le
groupe se sent plus moral ou plus intelligent que la moyenne, ce qui le
pousse à ignorer sa propre immoralité ou ses faiblesses.
4
. La transformation de l’opposant en stéréotype : si le groupe considère
un opposant avec partialité ou avec des préjugés, les affirmations
contradictoires envers le groupe seront ignorées.
5
. La pression de la conformité : le groupe exerce une forte pression sur
ses membres pour que les individus s’alignent sur sa volonté et ne soient
pas expulsés.
6
. L’autocensure : les membres du groupe préfèrent ne pas révéler leurs
opinions qui vont à l’encontre de celles du reste du groupe, les gardent
pour eux plutôt que de partir.
7
. L’illusion de l’unanimité : les dissensions internes sont volontairement
cachées au groupe, ce qui laisse à penser qu’elles n’existent pas.
8
. Les gardiens de la pensée : certains membres s’occupent de protéger le
groupe de toute rébellion, dissidence ou information contradictoire.
1. S. E. Asch, Effects of group pressure upon the modification and distortion of judgments. In H.
Guetzkow (ed.) Groups, leadership and men, Pittsburgh, 1951. PA: Carnegie Press.
2. Positive Leadership, (27 octobre 2021), Chasseur de biais: Biais de groupe[Vidéo], YouTube.
https://youtu.be/DXU6AX0NU1g
LE BIAIS DU SURVIVANT
1. https://www.guinnessworldrecords.com/world-records/highest-fall-survived
-without-parachute/
2. Atlas de la Première Guerre mondiale : témoignages de poilus, Evreux, Éditions Atlas, 2007, 237 p.
3. Cecil Adams, “Do cats always land unharmed on their feet, no matter how far they fall?”, e
Straight Dope, Jul. 19 1996.
4. Frédéric Fréry, (16 novembre 2018), N’imitez pas les meilleurs : le biais du survivant[Vidéo], Xer
Canal. https://www.xer canal.com/strategie-management/emission/Frederic-Frery-N-imitez-pas-les-
meilleurs-le-biais-du-survivant_3746179.html
LE BIAIS DE CORRÉLATION ILLUSOIRE (OU DE
CORRÉLATION TROMPEUSE)
Une étude scienti que annonçait en 1999 que « Les jeunes enfants qui
dorment avec une veilleuse ont plus de chance de devenir myopes plus
tard ! ». Cette étude de l’Université de Pennsylvanie fut publiée dans la revue
Nature et a fait l’objet d’une belle couverture médiatique. Cependant, une
autre étude de l’Université de l’Ohio réalisée plus tard n’a trouvé aucune
causalité entre le développement de la myopie et le fait de dormir la lumière
allumée ! Par contre, elle montra bien « un lien », une corrélation, entre la
myopie des parents et celle de leurs enfants et t remarquer que les parents
myopes ont plus tendance à laisser une lumière allumée la nuit pour leurs
enfants…
Le site Spurious Correlations recherche et publie diverses corrélations
saugrenues comme le fait que le nombre de personnes se noyant après être
tombées dans une piscine est corrélé avec les apparitions de Nicolas Cage au
cinéma, ou encore que la consommation de fromage par habitant est
corrélée avec le nombre de personnes qui meurent en s’étranglant avec leurs
draps.
Ces exemples loufoques montrent comment il est facile de créer un lien
entre deux choses qui n’ont strictement rien à voir entre elles.
Notons qu’il serait possible d’être en face d’une vraie causalité, mais le biais
serait alors de l’inverser : plutôt que ce soit A qui cause B, nous pensons que
c’est B qui cause A ! « Plus on observe que les moulins à vent tournent vite,
plus on observe de vent. Par conséquent, le vent est causé par la rotation des
moulins à vent. »
Un exemple historique intéressant est le suivant : les européens du Moyen
Âge croyaient que les poux étaient béné ques pour la santé, car il y aurait
rarement des poux sur les personnes malades4. Le raisonnement était que les
gens tombaient malades parce que les poux étaient partis. La vraie raison est
cependant que les poux sont extrêmement sensibles à la température
corporelle : une petite augmentation de la température corporelle, comme
dans le cas d’une èvre, incite les poux à chercher un autre hôte. Le
thermomètre médical n’ayant pas encore été inventé, l’augmentation de
température était rarement remarquée.
On trouve cet effet également dans la prise de médicaments sans principe
actif et la sensation d’aller mieux, ce qu’on appelle « l’effet placebo »5.
L’effet placebo (je plairai) a aussi son contraire : l’effet nocebo (je nuirai).
Par exemple, après l’installation d’un pylône de retransmission près de chez
eux, des riverains se sont plaints de maux de tête « dus aux ondes radio » !
Sauf que la station n’avait pas encore été mise en service…6
1. Expression latine qui signi e littéralement « avec ceci, donc à cause de ceci » et qui renvoie au
sophisme qui consiste à tirer une conclusion de nature causale, simplement en invoquant le fait qu’il y
a corrélation entre deux phénomènes.
2. La zététique est dé nie par son créateur Henri Broch, comme « l’art du doute ».
3. https://cortecs.org/la-zetetique/effets-cigogne-correlation-vs-causalite/
4. Emilie Willingham, “Of lice and men: An itchy history”, Scientific American, Feb. 14, 2011.
5. La réponse placebo varie en fonction de plusieurs facteurs : contexte thérapeutique, personnalité du
médecin, attentes du patient, nature de la relation médecin-patient, forme, coût et complexité du
traitement, etc. Cette réponse n’est pas uniquement psychologique mais a des réalités biochimiques.
6. https://www.silicon.fr/des-riverains-reclament-le-demontage-dantennes-relais-inactives-
35129.html#
LE PARADOXE DE BERKSON
« Ça me faisait bien peur de rater mon avion, plus que de le voir s’écraser sur
une tour. Question de probabilité. »
– Gringoland – Julien Blanc-Gras
HALLUCINATIONS AUDITIVES
Il existe aussi des paréidolies auditives, qui nous font comprendre des phrases
en français dans une chanson étrangère. Dans la célèbre chanson du groupe
The Police, Message in a Bottle, le premier couplet où le chanteur dit en
anglais :
“More loneliness
Than any man could bear”,
provoque chez certains la paréidolie auditive suivante :
« Mon opinel
a du mal couper ».
Faites l’expérience en écoutant cette chanson, vous n’entendrez plus que cela
maintenant !
1. En 2004, un toast sur lequel avait été perçue l’image d’un personnage assimilée par certains à celle
de la « Vierge Marie » a été vendu pour 28 000 dollars.
http://news.bbc.co.uk/2/hi/americas/4034787.stm
2. Le cerveau humain ne ressent d’ailleurs pas la douleur, c’est pourquoi on peut opérer un patient du
cerveau alors qu’il est éveillé.
L’EFFET POM-POM GIRL
Ce biais cognitif nous fait surestimer la valeur des produits qu’on achète si
on les a partiellement créés : comme les meubles à monter soi-même ! Notre
contribution nous rend inconsciemment très satisfait du produit, parfois,
beaucoup trop satisfait pour ce qu’il est en réalité. Cela explique aussi en
partie le succès de l’entreprise LEGO, la valeur ajoutée psychologique que
l’on apporte à l’objet en le montant soi-même étant très grande.
L’EFFET « MACGYVER »
L’effet IKEA est à ne pas confondre avec ce biais cognitif qui lui aussi, porte
bien son nom, et qui nous pousse à être satisfaits à l’excès ou porter en haute
estime les petits bricolages et ra stolages d’appoint que nous avons inventés,
sans parfois réaliser leur danger ou leur manque d’efficacité.
L’EFFET DE VÉRITÉ ILLUSOIRE
IDÉES REÇUES !
Le biais de vérité illusoire contribue à expliquer que beaucoup continuent de
croire aux idées reçues, comme :
« La langue humaine a des zones spécifiques pour les différents goûts (sucré,
salé, amère, etc.). »
Faux ! Toute la langue est active !
« On utilise que 10 % de notre cerveau. »
Faux ! On utilise toute les zones du cerveau mais chaque zone pour des
fonctions différentes !
« Un poisson rouge n’a que 3 minutes de mémoire. »
Faux ! Il reconnaît même les visages humains !
« Le riz constipe. »
Faux ! C’est le manque de fibre à côté le problème.
« L’Église catholique romaine a étouffé la recherche scientifique durant la période
du Moyen Âge. »
Faux ! Une grande partie des scientifiques de renom étaient moines, frères ou
prêtres catholiques.
« Napoléon Bonaparte compensait sa petite taille par une soif de pouvoir, de
guerres et de conquêtes. »
Faux ! Il était de taille moyenne pour l’époque.
« Le fruit défendu du livre biblique de la Genèse était une pomme. »
Faux ! On n’en sait rien.
« Le stress est un facteur de risque dans l’ulcère gastroduodénal »
Faux ! C’est la bactérie Helicobacter pylori qui est majoritairement responsable.
« Retirer les cheveux blancs en fait apparaître davantage. »
Faux !
« Faire craquer ses doigts cause de l’arthrite. »
Faux !
« On risque d’avaler sa langue durant une syncope. »
Faux ! Il est impossible d’avaler sa propre langue,
« Le Big Bang est l’origine de l’Univers. »
Faux ! Ce n’est que le début de son expansion.
« Les nuages sont faits de vapeurs d’eau. »
Faux ! Ils sont faits de minuscules gouttelettes d’eau en suspension dans l’air,
c’est d’ailleurs pour cela qu’on les voit. La vapeur, elle, est invisible.
« Le rouge énerve les taureaux. »
Faux ! Ils voient en noir et blanc, c’est le mouvement de la cape qui les excite. Si
la cape du torero est rouge, c’est pour cacher le sang.
« Les requins sont immunisés contre le cancer. »
Faux ! Des carcinomes ont déjà été trouvés chez eux.
« Les chauves-souris sont aveugles. »
Faux ! Elles ont toutes des yeux et le sens de la vue.
« Les chats voient dans le noir. »
Faux ! Aucun animal ne voit dans le noir complet.
« La citronnelle fait fuir les moustiques »
Faux !
« Les moustiques sont attirés par la lumière. »
Faux ! Ils sont attirés principalement par le CO2 émis par la respiration.
« Dormir avec des plantes vertes dans sa chambre est néfaste »
Faux ! Un autre être humain qui dort dans la pièce rejettera beaucoup plus de
CO2 que les plantes vertes.
« La Lune a une influence très importante sur le comportement humain. »
Faux ! Aucune étude n’a montré cela. Les différentes phases de la Lune n’ont
d’influence ni sur le comportement ou le métabolisme humain (tels que les
insomnies, la repousse des cheveux, les accouchements, l’énervement, les
crises d’épilepsie, etc.), ni sur la pousse des légumes !
L’effet d’influence continue est la tendance à croire une information même si
elle a été démontrée comme fausse. Par exemple des fake news reconnues
comme fake news, mais qui continuent d’être considérées comme de vraies
informations. Si une fausse déclaration s’inscrit dans les croyances qui
définissent la vision du monde d’une personne et qu’elle a une forte composante
émotionnelle pour elle, cette personne restera sur la fausse déclaration en
mettant de côté son esprit critique, quoi qu’il arrive. Un exemple remonte à
l’élection de Barak Obama comme président des États-Unis. Après que
quelques personnes ont manipulé les médias afin de faire croire que Barak
Obama est né au Kenya et est musulman, malgré le fait que ces affirmations
aient été clairement démenties (en effet, Obama ne serait pas éligible à la
présidence des États-Unis si c’était le cas, car le président doit être né en
Amérique) et la présentation de preuves écrasantes qu’il est chrétien et est né à
Hawaï, de nombreux Américains continuent de croire le contraire.
Ne croyons pas qu’en ayant persuadé un ami de changer d’avis sur un sujet, il
ne laissera pas ses anciennes opinions refaire surface et affecter ses jugements
futurs. Ne sous-estimons pas l’effet d’influence continue ! Il a été démontré que
même en ayant vu la preuve qu’une information est fausse « et en l’ayant
acceptée comme telle », cette fausse information peut continuer d’influencer nos
jugements !
Un célèbre test mettant en évidence ce biais fut réalisé dans les années 1980. Il
consistait à donner à un groupe de personnes plusieurs informations concernant
le récit d’un incendie fictif. Au début, on les informa qu’il existait sur les lieux du
drame un placard où auraient pu être entreposés des seaux de peinture et des
bonbonnes de gaz. On leur dit aussi que l’incendie provoqua une épaisse fumée
noire. Puis, à la fin du récit, une nouvelle information leur indiqua que, selon les
pompiers, le placard en question était vide. Malgré cette dernière information
claire, l’avis du groupe était formel : 90 % de ses participants étaient persuadés
que l’incendie avait été causé par « les bonbonnes et les seaux de peinture dans
le placard ». Conclusion : l’esprit s’accroche à une erreur lorsque celle-ci s’est
présentée dès le début de l’histoire, et même si par la suite elle est contredite !
L’EFFET WOOZLE
1. https://effectiviology.com/rhyme-as-reason/
L’EFFET BENJAMIN FRANKLIN
Ce biais cognitif amène les gens à aimer davantage quelqu’un après lui
avoir rendu service. Par exemple, quelqu’un qui ne vous aime pas peut
commencer à vous aimer après vous avoir fait une faveur, comme vous
prêter un livre. Quel est ce mystère ?
En général, on a tendance à rendre service aux personnes que l’on apprécie
et à se montrer moins serviable vis-à-vis des personnes que l’on n’apprécie
pas. Alors lorsque l’on n’a aucune affection pour quelqu’un mais qu’on lui
rend tout de même un service, le cerveau perçoit une forme d’incohérence,
une « dissonance cognitive ». Le cerveau va alors tout faire pour résoudre
cette dissonance et préserver une vision cohérente de la situation.
Comment ? En se convainquant soi-même que l’on aime la personne à
laquelle on vient de rendre un service1 ! Demandez donc à quelqu’un qui ne
vous aime pas trop et que vous voulez adoucir de vous rendre un petit
service !
1. Notons que l’effet ne fonctionne pas quand on passe par une tierce personne pour demander le
service.
2. Anthony M. Limperos, « “It’s Not Who You Know, but Who You Add:” An investigation into the
differential impact of friend adding and self-disclosure on interpersonal perceptions on Facebook »,
Computers in Human Behavior, Volume 35, June 2014, Pages 496-505.
L’EFFET BAADER-MAINHOF
Vous voyez des voitures rouges partout depuis que vous voulez en acheter
une. Un complot publicitaire est-il mis en place pour vous inciter à acheter
la voiture ? Vous avez entendu une chanson pour la première fois l’autre
jour, et maintenant, vous l’entendez partout où vous allez. Est-ce la chanson
qui passe plus souvent (elle n’est pourtant pas nouvelle), ou est-ce vous qui la
remarquez plus ?
Le phénomène « Baader-Meinhof », nommé ainsi en référence à un gang
terroriste ouest-allemand et également appelé « illusion de fréquence », est
un biais cognitif se produisant après avoir remarqué, expérimenté ou
entendu une nouvelle chose, lorsqu’à partir de ce moment, elle semble
apparaître plus souvent dans notre vie !
Pensez à toutes les informations diverses auxquelles vous êtes exposées en
une seule journée. Il n’est tout simplement pas possible de s’imprégner de
chaque détail. Votre cerveau a donc pour mission de décider quelles choses
nécessitent une attention particulière et lesquelles peuvent être ltrées. Mais
lorsque nous manifestons un intérêt particulier pour un objet ou un
évènement, cela incite notre cerveau à se focaliser sur ce nouvel élément.
Sans en être vraiment conscient, notre esprit va chercher autour de nous des
faits qui corroborent l’intérêt porté à telle ou telle chose. Ce qui nous
rappelle le biais de confirmation. Les publicitaires savent vous montrer des
objets que vous aurez l’impression de voir partout par la suite.
Bien qu’il soit souvent inoffensif, il y a des moments où ce biais peut être
un problème. Si une personne souffre de certains troubles de santé mentale,
tels que la schizophrénie ou la paranoïa, le biais de fréquence peut l’amener à
croire quelque chose qui n’est pas vrai et peut aggraver ses symptômes.
Ce biais doit aussi être dompté par les médecins qui, s’ils voient leur
attention captée par des symptômes ou des diagnostics d’une maladie dont
ils entendent souvent parler dans leurs revues spécialisées, pourraient en
venir à croire voir cela plus fréquemment qu’auparavant chez des patients.
LE BIAIS RÉGRESSIF
Quelle que soit leur langue, si des gens se voient présenter ces deux formes
et qu’on leur demande d’en étiqueter une « bouba » et l’autre « kiki », 95 %
étiquettent la forme épineuse « kiki » et l’arrondie « bouba » ! C’est ça, l’effet
« bouba-kiki » : le cerveau associe instinctivement formes et sons !
L’ACTUALISATION HYPERBOLIQUE (OU LE BIAIS DU
PRÉSENT)
1. Des années plus tard, Walter Mischel recontacta les enfants ayant participé à l’étude du
marshmallow ; il observa que ceux qui avaient patienté lors du test étaient ceux qui semblaient le
mieux « réussir dans leur vie ». Il attribue cela à une meilleure maîtrise de soi.
L’EFFET D’HUMOUR
L’effet d’humour peut aussi être associé à « l’effet waouh » ou « Wow » : le fait
qu’un produit, un service, une expérience ou une campagne publicitaire puisse
déclencher chez les consommateurs un effet de surprise !
Également, « l’effet de bizarrerie » rendrait les choses distinctives, étranges et
inhabituelles plus facilement mémorisables par notre cerveau, du fait que notre
cerveau ignore facilement ce avec quoi il est déjà familier et s’attarde plus sur de
nouvelles informations. Vous n’oublierez jamais cette personne qui portait des
couches et qui marchait sur les mains, place du Capitole, à Toulouse.
De même, le biais de saillance, vous fera toujours remarquer cette chose qui se
différencie des autres, de façon automatique et quasi inévitable : cette vache
mauve au milieu des marrons (vous savez, cette vache Milka que personne ne
peut rater), cet homme grand au milieu des petits, ce chauve au milieu des
chevelus, ce mot rare au milieu d’un discours, cette seule flèche qui pointe à
gauche alors que toutes les autres pointent à droite, cette maison rose au milieu
d’une rue de maisons beiges, cette dent qui manque à la personne à qui vous
parlez, cette information d’une catastrophe qui vous touche plus que les autres
informations du journal parce que vous avez déjà vécu la même chose…
L’effet von Restorff est très similaire mais s’applique au fait de mieux retenir
plutôt que juste remarquer. Par exemple, si vous lisez : lundi, jeudi, mercredi,
dragon, mardi, dimanche, samedi… et qu’on vous demande demain qu’elle était
le mot de la liste qui vous a le plus marqué, il est quasiment sûr que vous vous
rappellerez très bien de « dragon ». Si, lors d’une soirée, une des femmes
présentes a les cheveux violets, sûrement que dans les jours qui suivront, en
repensant à cette soirée vous vous souviendrez plus d’elle que de la fille brune
qui pourtant était assise plus près de vous. Ce biais attribue une meilleure
« mémorisation » aux éléments qui se distinguent des autres en étant isolés du
groupe dont ils font partie. Dans une liste de mots écrits en noir, si un seul mot
est en rouge, on le retiendra beaucoup plus facilement parce qu’il se distingue
des autres. Ce mécanisme s’applique à toute sorte d’éléments : des produits,
des messages de communication, des formes, une action, un logo, etc. Alors
profitez de ce biais, au travail ou sur la liste des courses, le bon vieux surligneur
qui vient mettre un coup de projecteur sur telle ou telle chose à faire ou à acheter
n’a pas son pareil pour vous aider à vous rappeler ce qui ne doit pas être oublié.
L’effet de contexte, lui, est le fait de se souvenir plus facilement de certaines
choses grâce aux facteurs environnementaux. Par exemple, comme la mémoire
est liée au contexte, il est plus facile de se remémorer des souvenirs d’enfance
dans la maison où l’on a grandi. Revenir sur les lieux d’un évènement fera
remonter plus de souvenirs en nous avec plus de détails et de force, que si nous
tentons l’expérience hors contexte.
L’EFFET AUTRUCHE
LE SAVIEZ-VOUS ?
Le nom de ce biais vient bien sûr de la « légende » selon laquelle les autruches
cacheraient leur tête sous le sable en cas de danger. En réalité, elles ne font que
baisser la tête vers le sol régulièrement pour diverses raisons : s’alimenter,
surveiller leurs œufs, se protéger la tête des tempêtes de sable. Si elles sont en
danger, elles s’enfuient, tout simplement !
Proche de l’effet autruche, ce biais amène les gens à nier ou à minimiser les
avertissements concernant un danger, à sous-estimer la probabilité qu’une
catastrophe arrive ou ses effets sur eux. Ce ré exe nous pousse à croire que
notre vie se déroulera comme elle s’est toujours déroulée, et à ignorer la
possibilité qu’une catastrophe ou un évènement non prévu vienne tout
chambouler.
Il est observé que les personnes cherchant un abri pour se protéger
pendant qu’une tornade ou un cyclone sévit, sont souvent retardées par des
gens effectuant des activités normales, qui refusent de croire que l’urgence se
produit. Ces personnes sont en plein biais de normalité. Environ 70 % des
personnes victimes d’une catastrophe affichent un biais de normalité. Bien
que les lms « catastrophe » montrent généralement des foules de personnes
en train de crier et de paniquer dans tous les sens, en réalité, en cas de crise
la plupart des gens se déplacent hébétés. D’après une étude1 menée en 2001
par le sociologue omas Drabek, les gens qui reçoivent un ordre
d’évacuation avant une catastrophe ont tendance à se renseigner avec au
moins quatre sources d’information avant d’obéir ! Cela peut parfois être une
bonne chose : les chercheurs constatent que les personnes qui sont dans cet
état sont plus dociles et peuvent donc être dirigées sans chaos. Elles ont
même tendance à calmer les 10 à 15 % de personnes qui paniquent !
Cependant, ce biais reste globalement dévastateur, comme dans le cas bien
connu de l’éruption du Vésuve, où les habitants de Pompéi ont assisté à la
catastrophe sans évacuer ! Ou encore lorsque sur le Titanic en train de
couler, certains passagers ont refusé d’évacuer, sous-estimant la probabilité
du pire scénario, leur mort par noyade, ou minimisant l’avertissement.
Le biais directement opposé au biais de normalité est « le biais du scénario du
pire », qui consiste à voir de légères variations par rapport à notre routine
comme des indices d’une catastrophe imminente !
1. Amanda Ripley, « How to Get Out Alive », TIME Magazine, vol. 165, no 18, 25 avril 2005, p58-62.
LE SYNDROME DE L’IMPOSTEUR
TEST
La psychologue Pauline Clance a mis au point un test psychologique qui permet
de savoir à quel point vous êtes touché par le syndrome de l’imposteur. Pour
chaque question, entourez le numéro qui indique le degré de vérité de
l’affirmation.
1. J’ai souvent réussi un test ou une tâche alors que je m’en pensais
incapable avant de commencer.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
2. Je peux donner l’impression que je suis plus compétent que je ne le suis
réellement.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
3. J’évite si possible les évaluations : j’ai peur des évaluations des autres à
mon égard.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
4. Quand quelqu’un me félicite pour quelque chose que j’ai accompli, j’ai
peur de ne pas être à la hauteur de ses futures espérances.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
5. Je pense parfois que j’ai obtenu ma position actuelle parce que j’étais là
au bon endroit au bon moment.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
6. J’ai peur que les personnes importantes à mes yeux découvrent que je
ne suis pas aussi compétent qu’ils le pensent.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
7. J’ai tendance à me remémorer les projets pour lesquels je n’ai pas donné
le meilleur de moi-même.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
8. Je réalise rarement un projet ou une tâche aussi bien que je le voudrais.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
9. Parfois, j’ai le sentiment que mon succès est le résultat de plusieurs
coïncidences.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
10. C’est difficile pour moi d’accepter les compliments qui portent sur mon
intelligence ou mes réussites.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
11. Parfois, je pense que si j’ai du succès, c’est parce que j’ai eu de la
chance.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
12. Je pense souvent que j’aurais pu faire mieux, et je suis déçu de mes
réalisations.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
13. Parfois, je redoute que les autres découvrent mes lacunes.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
14. J’ai souvent peur d’échouer dans une nouvelle tâche qui m’est confiée.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
15. Quand je réussis quelque chose qui est reconnu comme bien, j’ai peur
de ne pas pouvoir répéter cette réussite.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
16. Si je reçois des félicitations et de la reconnaissance pour quelque chose
que j’ai accompli, j’ai tendance à minimiser l’importance de ce que j’ai fait.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
17. Je compare souvent mes capacités à celles des personnes qui
m’entourent et pense qu’ils sont peut-être plus intelligents que moi.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
18. Je m’inquiète souvent de ne pas réussir alors même que tout le monde
sait que je vais briller.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
19. Lorsque je m’apprête à recevoir une récompense, j’attends le dernier
moment pour l’annoncer, au cas où cela ne se faisait finalement pas.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
20. Je me sens découragé si je ne suis pas « excellent » dans les situations
qui impliquent le fait de réussir.
1) Faux 2) Rarement 3) Parfois 4) Souvent 5) Tout à fait vrai
Additionnez les nombres associés à vos réponses.
Si votre score est inférieur à 40, vous n’avez que quelques caractéristiques de
l’imposteur.
Si votre score se situe entre 40 et 60, vous expérimentez assez souvent le
syndrome de l’imposteur.
Si votre score est supérieur à 60, le syndrome de l’imposteur interfère
fréquemment avec votre vie : il est fort possible que vous en souffriez
mentalement et physiquement.
Le biais de l’angle mort est la tendance à croire que nous voyons le monde
qui nous entoure objectivement, alors que les autres, ceux qui ne sont pas
d’accord avec nous, doivent être ignorants, irrationnels ou biaisés. On arrive
d’ailleurs à reconnaître les biais chez autrui, mais on passe complètement à
côté de l’impact des mêmes biais chez nous ! Comme les biais sont
généralement considérés comme indésirables, nous avons tendance à sous-
estimer le degré auquel nos propres actions et nos pensées sont biaisées.
LE RÉALISME NAÏF
Appelée également « réalisme direct » ou « réalisme du bon sens », c’est la
croyance selon laquelle nous voyons la réalité telle qu’elle est réellement, de
manière objective et sans parti pris. Pour nous, « les faits sont clairs, limpides et
évidents ! » Les « personnes rationnelles » sont forcément d’accord avec nous et
« toutes celles qui ne le sont pas sont de toute évidence soit irrationnelles, soit
mal informées, soit paresseuses soit, bien entendu, biaisées ! » Oui, oui…
Ce « réalisme naïf » amène les gens à exagérer les différences entre eux et
les autres. Dans une étude1 menée par Pronin, Lin et Ross en 2002, des
étudiants de Stanford ont rempli un questionnaire sur divers biais touchant
au jugement social. On leur demandait à quel point ils pensaient être affectés
par divers biais. Les chercheurs constatèrent que les étudiants étaient
systématiquement convaincus que les biais les touchaient moins eux que les
autres. Après avoir démontré aux étudiants que 70 à 80 % des gens sont
touchés par ces biais, on leur demanda de réexaminer l’exactitude de leurs
autoévaluations. Malgré cela, 63 % des étudiants ont affirmé que leurs notes
avaient été objectives, et 13 % des étudiants ont indiqué qu’ils pensaient que
leurs notes avaient été trop modestes !
Lorsque nous avons une divergence ou des perceptions des situations ou
des évènements différents des autres, nous avons tendance à estimer que les
autres sont biaisés et que nous avons le point de vue le plus rationnel. Sur
600 Américains interrogés, 85 % s’estimaient moins biaisés que l’américain
moyen.
L’illusion d’introspection est une illusion cognitive qui nous donne l’impression
d’avoir un excellent accès à nos états mentaux. Nous avons l’illusion que nous
sommes capables de savoir parfaitement qui nous sommes vraiment et ce que
nous pensons. Lorsque les gens confondent une « introspection peu fiable »
avec une « véritable connaissance de soi », le résultat est qu’ils peuvent
s’imaginer supérieur aux autres, en pensant qu’ils sont moins biaisés et moins
conformistes que le reste des gens.
Ce biais se manifeste souvent parce que nous avons tendance à croire que
nous savons « comment » et « pourquoi » nous prenons telle ou telle
décision dans la vie (illusion d’introspection). Or, beaucoup de nos décisions
sont en réalité forgées par des biais cognitifs, des préjugés et des raccourcis
mentaux. Mais comme nous concevons moralement l’idée qu’avoir des
préjugés est mal, nous en concluons qu’ils n’ont pas joué de rôle dans nos
décisions. Même lorsque nous sommes sensibilisés à l’existence de divers
biais et à leurs agissements sur notre perception, nos décisions ou nos
jugements, la recherche montre que nous sommes toujours incapables de les
contrôler ! Cela contribue à la « tache aveugle » qui nous rend incapables de
modi er notre perception biaisée.
Un individu pourrait par exemple être dur et sévère avec des personnes
chez qui il a remarqué un défaut, parce qu’il est gêné d’avoir lui-même ce
défaut, sans pouvoir se l’avouer à lui-même. Son biais d’angle mort le pousse
à affirmer que son préjugé est naturellement dû au fait qu’il a conclu que ce
défaut est mauvais.
Une expérience amusante menée en 2010 dans un supermarché proposa à
des consommateurs de choisir parmi plusieurs pots de con ture celle qu’ils
préféraient (l’expérience a été faite également avec du thé). Une fois le choix
fait, on leur demandait de continuer à la goûter tout en expliquant pourquoi
il avait fait ce choix. Sauf qu’entre-temps, le pot avait été changé et remplacé
par une des con tures qu’ils avaient préalablement rejetée. Complètement
trompés par une « cécité de choix », ils expliquèrent pourtant pourquoi leur
choix était le bon !
Ce biais peut être motivé inconsciemment par le désir de distance sociale (ne
pas vouloir se mêler à ceux qui sont « facilement influençables »), par l’estime
de soi (« Moi, on ne me la fait pas ! Je ne suis pas un mouton, donc je n’y crois
pas. ») ou encore par le sentiment que la façon dont le message est transmis est
une manipulation, qu’on cherche à utiliser un de nos biais ! (« Ah ah, j’y vois clair
dans leur jeu ! Je connais tous les biais et je m’en protège. »)
Gardons donc une attitude humble par rapport aux biais cognitifs.
Les connaître n’est pas suffisant pour nous en protéger. Et rappelons-
nous que notre vision du monde est rarement dèle à la réalité, que
nos raisonnements sont souvent distordus et que notre jugement est
rarement juste.
Voici une petite fable indienne2 appelée « Parabole des aveugles et de
l’éléphant » :
1. E. Pronin, D. Y. Lin & L. Ross, 2002 “e bias blind spot: Perceptions of bias in self versus others”,
Personality and Social Psychology Bulletin, 28(3), 369–381. https://psycnet.apa.org/record/2002-10937-
008
2. E. Bruce Goldstein,Encyclopédie de la perception, Éditions SAGE. p. 492, 2010.
LE BIAIS DE MOTIVATION EXTRINSÈQUE/INTRINSÈQUE
1. I. Maoz, A. Ward & L. Ross, « Dévaluation réactive d’une proposition de paix “israélienne” contre
“palestinienne” », Journal de résolution des conflits, 2002.
LE SYNDROME DE TRAVIS (OU LE SNOBISME
CHRONOLOGIQUE)
L’effet d’autoréférence désigne le fait que la mémoire est meilleure lorsque les
éléments à mémoriser sont traités en référence à soi. C’est la capacité à se
rappeler plus facilement des souvenirs relatifs à nous-mêmes plutôt que des
informations similaires concernant autrui. On se rappellera par exemple plus
facilement des dates d’évènements qui sont proches de notre date d’anniversaire
ou des dates anniversaires de nos proches, ou on se rappellera plus rapidement
du prénom d’une personne qui s’appelle comme un membre de notre famille
proche.
Une étude des psychologues Rogers, Kuiper et Kirker a démontré que
l’autoréférence facilite la mémorisation : des participants devaient lire et retenir le
plus de mots possible d’une liste. Les chercheurs ont demandé à un groupe de
retenir les mots grâce à leur sonorité, à un autre de faire attention à la
sémantique des mots, tandis que le dernier groupe devait se concentrer sur les
aspects autoréférentiels, en associant les mots à quelque chose les concernant.
C’est bien le dernier groupe qui a retenu le plus de mots de la liste !
L’effet de génération, lui, se caractérise par le fait que la mémoire est meilleure
pour des informations que nous avons générées nous-même que pour des
informations lues ou fournies par d’autres. Par exemple, on se souviendra mieux
de nos propres phrases et citations que de celles des autres.
Une façon d’utiliser cet effet à notre avantage pour aider à la rétention de la
mémoire est par exemple de lire une partie d’un livre, puis de le fermer et de
générer (en y répondant) des questions sur ce qu’on vient de lire.
« Une seule mort est une tragédie ; un million de morts est une statistique. »
– Citation attribuée à Joseph Staline,
ou l’écrivain allemand Kurt Tucholsky
LE SAVIEZ-VOUS ?
S’arrêter 3 fois de suite à un feu rouge au même carrefour nous pousse à croire
qu’on a la poisse à ce feu rouge et qu’on se le prend « toujours » rouge ! Ce qui
est statistiquement faux, car la durée d’un feu rouge est égale à celle du feu vert,
et quand la circulation est fluide, on a une chance sur 2 d’être interrompu par le
feu rouge.
Nous avons tendance à être plus touchés par les mauvaises nouvelles dans
les médias que par les bonnes. Le récit d’un drame s’abattant sur un
semblable à l’autre bout du monde nous touche parce qu’il est un « autre
nous-même ». Nous sommes en empathie avec les autres, grâce aux
« neurones miroirs » ou « neurones empathiques », ces neurones du cerveau
impliquées dans l’apprentissage par imitation et les processus affectifs. Le
danger ou le malheur qu’il a subi nous alerte plus, nous met plus en éveil
psychologique, que le bon moment qu’il aurait passé.
Plusieurs études ont suggéré que la négativité est « un aimant à attirer
l’attention ». Par exemple, lorsqu’ils étaient chargés de se faire une idée sur
des individus, les participants d’une expérience passaient plus de temps à
regarder des photographies mettant en scène ces personnes dans des
situations négatives qu’à regarder des photographies des mêmes personnes
dans des contextes positifs. De même, les participants ont enregistré plus de
clignements des yeux lorsqu’ils étudiaient des mots négatifs que des mots
positifs (le taux de clignement des yeux a été positivement lié à l’activité
cognitive1).
LE SAVIEZ-VOUS ?
Le biais de négativité augmente en intensité à mesure qu’une chose perçue
négativement approche temporellement ou spatialement de nous : par exemple,
un rendez-vous chez le dentiste est perçu de plus en plus négativement au fur et
à mesure que la date du rendez-vous approche. Une fois la date passée,
l’évènement perdra de son intensité négative (« Ce n’était pas si terrible. »). De
même pour un évènement jugé positif, comme une fête, le sentiment positif
augmente jusqu’au moment de la fête, puis la courbe redescend, laissant parfois
la place à quelques souvenirs négatifs en priorité (« Je n’ai pas trop aimé ceci ou
cela durant la fête. »).
Que ce soit dans les médias, sur les réseaux sociaux, sur le lieu du travail…
nous sommes tous sans arrêt confrontés à des affirmations sur toutes sortes
de sujets, et le biais de négativité nous fait prendre l’in rmation négative
comme plus vraie que les autres ! Des chercheurs en psychologie de
l’université de Bâle, en Suisse, ont mené une expérience2 auprès d’un panel
de personnes de langue allemande, à qui l’on demandait d’évaluer le
caractère « vrai » ou « faux » de certaines déclarations. La phrase « 61 % des
femmes allemandes ne sont pas satisfaites de leur apparence » a été
considérée comme plus vraie que l’expression « 39 % des femmes allemandes
sont satisfaites de leur apparence ». Et ils ont même noté que l’effet est
renforcé lorsqu’un adverbe négatif est utilisé, par exemple si l’on dit « ne sont
pas satisfaites » plutôt que « sont insatisfaites ».
1. Christine Fogarty, John A. Stern, « Mouvements oculaires et clignotements : leur relation avec les
processus cognitifs supérieurs », Journal international de psychophysiologie, 1989.
2. https://www.rtbf.be/article/psychologie-et-fake-news-pourquoi-accorde-t-on-un-plus-grand-
credit-a-des-declarations-negatives-10910526
L’EFFET ACTEUR/OBSERVATEUR ET L’ERREUR
FONDAMENTALE D’ATTRIBUTION
Le biais puritain (« puritain » se dit d’une personne qui tend à montrer une
pureté morale scrupuleuse) est la tendance à attribuer la cause d’un
comportement négatif d’un individu à une déficience morale ou à un manque de
maîtrise de soi, plutôt que de prendre en compte l’impact de déterminants
sociétaux plus larges. Par exemple, on pourrait qualifier les Américains obèses
de fainéants sans tenir compte dans notre jugement de l’impact global de la
société américaine sur eux. Ce biais peut être étroitement lié à notre capacité à
juger les choses sans évaluer pleinement les circonstances.
AU VOLEUR !
Si vous voyez une personne dans la rue en pousser une autre énergiquement,
lui prendre son sac et partir en courant, qu’en concluez-vous ? Avec ces seules
informations, vous vous dites certainement qu’elle vient de voler le sac d’une
pauvre victime. Or, il se trouve que vous apprenez plus tard qu’en réalité, elle
venait de récupérer son propre sac, que la soi-disant victime à vos yeux lui avait
volé quelques minutes plus tôt !
FAUX PROPHÈTES
Ce biais acteur/observateur pourrait mener à des prophéties auto-réalisatrices :
si en début d’année, un professeur estime qu’un élève a un faible niveau
intellectuel suite à un mauvais devoir (sans se demander si ce résultat est dû à
des causes externes), il pourrait ne pas lui apporter l’aide nécessaire et le priver
de son attention, ce qui pourrait laisser l’élève dans ses difficultés, et confirmer
l’idée du professeur que l’élève est mauvais. (Voir aussi l’effet Pygmalion.)
On peut expliquer pourquoi les premières impressions que l’on a d’une
personne sont si déterminantes parfois par le biais de correspondance, qui
est lié : un observateur fait correspondre les actions qu’il voit en premier
chez quelqu’un à celles qu’il fera par la suite. Une fois qu’une action est vue,
il est difficile pour l’observateur d’imaginer d’autres comportements
différents de l’acteur.
En ce qui concerne l’effet sur nous-même, cette tendance à trouver des
raisons externes à nos actions peut être expliquée2 par le fait qu’une
personne tente de protéger « son estime de soi » en expliquant ses
comportements négatifs par des causes qui lui sont externes, et valorise ses
comportements positifs par des causes internes, qui découleraient de ses
qualités, ou compétences. Une personne glisse et tombe sur un chemin, elle
attribue sa chute au chemin glissant (cause situationnelle). La même
personne voit une autre personne tomber sur le même chemin, elle attribue
sa chute à sa maladresse (cause interne).
Cette erreur de jugement est fortement aidée par le « biais de
complaisance » : lorsque nous évaluons nos réussites ou nos échecs, nous
avons tendance à entretenir une vision peu objective et trop positive de
nous-mêmes. Les échecs, ce n’est pas notre faute, mais les réussites, c’est
grâce à nous !
« J’ai un con it avec untel, mais c’est sa faute ! » ; « J’ai raté l’entretien, mais
le recruteur était nul. » ; « j’ai été viré, mais l’employeur ne sait pas gérer sa
boîte. » ; « Je n’arrive pas à monter ce meuble, mais la notice et le matériel
sont minables ! »
Même si ce biais semble protéger notre santé mentale sur le moment, pour
ne pas sombrer dans la négativité de soi, nier nos erreurs peut mener à de
moins bons apprentissages, en ne nous remettant pas en question sur nos
points à travailler.
Le biais peut nous jouer des tours non seulement envers une personne,
mais aussi envers tout un groupe : l’humain à tendance à voir les membres
d’un autre groupe de manière homogène, on les considère tous comme étant
pareils. Donc, si nous jugeons mal un membre d’un groupe, ce jugement
erroné se généralise souvent à tous les membres de ce groupe ! C’est l’erreur
d’attribution de groupe. La croyance partiale que les attributs et les
caractéristiques d’un membre individuel au sein d’un groupe re ètent et
représentent le groupe dans son ensemble. Ce biais peut donc renforcer nos
stéréotypes concernant des groupes, et entraîner des préjugés et de la
discrimination envers leurs membres !
1. Michael W. Ross, Dale T. Miller, “e Justice Motive in Everyday Life: Subject Index.”, 2002.
2. Olivier Rascle, Alan Traclet & Geneviève Coulomb-Cabanon, « Le biais attributionnel
acteur/observateur en contexte sportif », dans Olivier Rascle et Philippe Sarrazin (dir.), Croyances et
performances sportive(pp. 207-226), 2005.
LE BIAIS D’ATTRIBUTION HOSTILE
C’EST UN COMPLOT !
Un biais proche est le biais d’intentionnalité, qui est la tendance à surestimer
les causes intentionnelles lors de la survenue d’un évènement ou face à un
comportement humain, notamment lorsque les évènements ou les
comportements sont fréquents et négatifs. Par exemple, en se rendant sur son
lieu de travail tous les feux tricolores sont au rouge et en déduire : « Il y a
quelqu’un qui m’en veut ce matin »*.
Ce biais est l’une des principales explications des croyances favorisant les
théories du complot et le conspirationnisme. Il est plus facile pour notre cerveau
de rechercher « à qui profite le crime » en partant du principe selon lequel le
bénéficiaire d’un évènement est nécessairement celui qui l’a provoqué, que
d’analyser des situations complexes.
Quel serait votre degré d’accord avec les théories suivantes, sur une échelle
allant de 1 = « Pas du tout » à 7 = « Tout à fait » ?**
1.La mission Apollo n’a jamais atteint la Lune et les images dévoilées au grand
public étaient un trucage de la Central Intelligence Agency (CIA).
2.L’assassinat de John F. Kennedy n’était pas l’acte d’un tireur isolé, mais le
résultat d’une vaste machination.
3.La princesse Diana n’a pas péri dans un accident de voiture, elle a été
assassinée.
1. K. A. Dodge, « La science translationnelle en action : style d’attribution hostile et développement de
problèmes de comportement agressif », Développement et Psychopathologie, 2006.
2. A. Holtzworth Munroe, G. Hutchinson,Attribuer une intention négative au comportement de la
femme : les attributions des hommes violents dans le mariage par rapport aux hommes non violents,
1993.
3. Ingrid Gilles et Alain Clémence, « Attribution d’intentions hostiles et intentions comportementales
agressives dans un contexte intergroupe », Revue internationale de psychologie sociale, vol. 20, no. 4,
2007, pp. 63-88.
LE BIAIS D’AUTORITÉ
Le biais d’automatisation est le fait de faire confiance à une machine plus qu’à
sa propre réflexion. Cette tendance à surestimer et accepter trop vite la décision
d’une machine diminue notre esprit critique face à l’information fournie par celle-
ci. Combien de fois avez-vous suivi votre GPS alors que vous voyiez bien que le
chemin n’était pas à jour ? Ce biais est aussi présent chez les gens qui ne sont
pas encore expérimentés avec une tâche, que chez ceux qui sont très habitués à
une machine. Nous sommes plus tentés d’obéir aveuglément « à l’autorité »
d’une machine, car nous supposons qu’elle a été programmée spécifiquement
pour ne pas faire d’erreur !
Des études ont montré que, bien que les machines qui servent à trouver un
diagnostic médical soient très prometteuses, environ 7 à 11 % des
professionnel/les qui avaient le bon diagnostic avant de consulter une de ces
machines, changeaient d’avis pour un mauvais diagnostic ! Chez les pilotes
d’avions, qui prennent beaucoup de décisions en fonction des machines, des
études rapportent que, même s’il est vrai que peu de pilotes suivent des conseils
erronés, nombreux sont ceux qui s’abstiennent d’agir là où ce serait pourtant
nécessaire, parce que la machine omet de leur conseiller de le faire !
1. Léonard Bickman, « Le pouvoir social d’un uniforme », Journal de psychologie sociale appliquée,
1974.
LE BIAIS DE STATU QUO
1. La locution « statu quo » est une abréviation francisée de l’expression latine « in statu quo ante » qui
signi e « dans la situation où cela était auparavant ».
L’EFFET DE SIMPLE EXPOSITION
Selon des études* sur les relations parasociales, notre cerveau ne fait pas la
distinction entre les personnages télévisés et ceux de la vraie vie : voir à la télé
un présentateur, un acteur, que l’on aime, nous fait autant de bien que de voir
l’une de nos connaissances. La narration d’une série nous amène à partager les
moments clés de l’existence de ses personnages, des scènes intimes,
généralement réservées aux proches. Elle nous donne aussi accès à leurs
pensées, leurs sentiments, leurs souvenirs. Nous avons donc l’illusion de les
connaître vraiment, surtout après des mois de visionnage. La fréquentation sur
le long terme de personnages fictifs, sur lesquels nous savons des choses que
nous ignorons parfois concernant nos amis les plus proches, et auxquels nous
sommes nettement plus exposés qu’avant l’avènement de la télévision et de
l’Internet, pourrait être l’une de ces nouveautés que le cerveau ne prend pas
totalement en compte**.
*TEDxTalks, (2 mars 2015), Imaginary friends and real-world consequences: parasocial relationships |
Jennifer Barnes | TEDxOU [Vidéo], YouTube. https://youtu.be/22yoaiLYb7M
**https://fictionista.ch/sattacher-personnages-fictifs-psychologie/
1. https://www.bizzarrobazar.com/en/tag/charles-goetzinger/
L’ILLUSION DE TRANSPARENCE
LA LOI DE POE
Une de vos blagues a-t-elle déjà été prise au premier degré sur un réseau
social ? Vous avez alors compris qu’il manquait un émoji à la fin de votre
phrase ! La loi de Poe, du nom de Nathan Poe qui l’a formalisée, suppose que,
sur Internet, sans indication claire de l’intention de l’auteur, il est impossible de
distinguer les propos au second degré* !
*En 2017, le magazine technologique américain Wired a nommé la loi de Poe le phénomène internet le
plus important de l’année.
Lorsque vous expliquez un chemin à quelqu’un qui ne connaît pas du tout votre
ville, vous avez, vous, de façon très claire à l’esprit le chemin que vous êtes en
train de décrire. Mais la personne qui vous écoute ne visualise rien à part une
direction abstraite. Se souvenir de cela vous forcera à être le plus précis et visuel
possible comme si vous étiez à la place de cette personne.
Avez-vous déjà écrit une liste de tâches à effectuer, puis, quelques jours, voire
quelques semaines plus tard, en relisant la liste, vous ne savez plus à quoi
correspondent certaines des notes que vous avez écrites et ce que vous vouliez
dire ? Voilà pourquoi ce biais est nommé « malédiction », sur le moment vous
savez, mais plus tard, vous ne savez plus ce que vous saviez ! Dans le cadre
des enseignants, ils savent, mais oublient qu’avant ils ne savaient pas.
Dans la vie de tous les jours, discuter avec quelqu’un de certains sujets qu’on
maîtrise demande de toujours être conscient de cet effet et d’adapter notre
discours si nécessaire. Comme cela demande une certaine énergie et une
adaptation parfois importante, c’est pour ça qu’on préfère généralement trouver
les personnes avec lesquelles nous avons des atomes crochus, afin de pouvoir
échanger plus facilement sur un champ de connaissance commun, sans effort !
Seulement, cela est dommage car le risque est de créer une sorte de bulle de
pensée (« groupthink » en anglais), vous retrouver dans un cercle de pensée
sans contradiction.
*https://www.nngroup.com/articles/false-consensus/
Il est vrai que les personnes avec qui nous interagissons peuvent
remarquer certaines émotions chez nous par notre attitude, voix, expression
de visage, etc., mais le plus souvent, elles sont tellement accaparées par leur
propre personne, tellement occupées à gérer leur propre monde, qu’elles ne
remarquent rien du tout2. Le biais apparaît le plus souvent lorsque nous
nous savons observés par les autres, dans des contextes où l’on tente de
cacher certaines pensées ou émotions à nos observateurs. Cela s’explique par
le fait que, parce que nous avons accès directement à nos pensées et
émotions, parce que nous sommes totalement transparents à nous-mêmes,
nous surestimons la capacité des autres à « lire » notre « vie intérieure ».
Nous pensons que nos pensées sont aussi évidentes pour les autres qu’elles
ne le sont pour nous.
C’est le cas du voleur, du menteur ou du tricheur qui va se faire repérer et
se faire prendre, trahi par un comportement suspect parce qu’il scrute trop
le regard des autres, qu’il imagine savoir qui il est, au point de se faire
repérer.
LE SAVIEZ-VOUS ?
Heidi Grant Halvorson, une socio-psychologue à la Columbia Business School
(New-York), affirme que si on demande à quelqu’un de dire le mot qui le décrit le
mieux, et que l’on demande la même chose à son entourage, il y aura un fossé
important entre la réponse de l’individu et celles des proches.
1. Kenneth Savitsky, omas Gilovich, “e illusion of transparency and the alleviation of speech
anxiety”, Journal of Experimental Social Psychology, 2003.
2. https://nicolascroce.com/illusion-de-la-transparence/
3. https://www.podcastscience.fm/dossiers/2022/03/11/illusion-de-transparence/
L’EFFET DE LONGUEUR DE LISTE
1. https://scienceetonnante.com/2011/12/12/que-retient-on-de-nos-experiences-heureuses-ou-
douloureuses/
L’EFFET PELTZMAN
OU COMPENSATION DU RISQUE
1. Cet effet doit son nom à Sam Peltzman, professeur d’économie à l’Université de Chicago Booth
School of Business, qui a publié “e Effects of Automobile SafetyRegulation”dans le Journal of Political
Economyen 1975.
2. M. D. Scott et coll., « Tester l’hypothèse de compensation des risques pour les casques de sécurité en
ski alpin et en snowboard », juin 2007.
L’EFFET « LES FEMMES SONT FORMIDABLES »
1. Norman R. Brown, Lance J. Rips, Steven K. Shevell, « Les dates subjectives des évènements naturels
en mémoire à très long terme », Psychologie cognitive, 1985.
L’ÉCART D’EMPATHIE CHAUD-FROID
« On ne fait jamais les courses le ventre vide ! » Vous avez sûrement déjà
entendu ce conseil tendant à vous éviter des achats impulsifs peu rationnels
et très peu utiles pour votre ligne !
Lorsque l’on est affamé, énervé, excité, qu’on a mal quelque part, ou sous le
coup de toute autre émotion forte, on est dans ce qu’on appelle « un état
chaud » (contrairement à « l’état froid », ces moments où l’on est rationnels,
calmes, réservés, etc.). Eh bien, le biais « d’écart d’empathie » est la tendance
à sous-estimer l’in uence de ces sentiments, l’impact des « facteurs
viscéraux », sur notre cognition et nos comportements.
FLUCTUATION D’HUMEUR
Avoir faim et avoir sommeil sont les 2 principales causes des fluctuations
d’humeur dans la journée. Suivies de près par la constipation… Un mot donc sur
le biais intéroceptif : c’est la capacité à conscientiser les sensations
corporelles. L’intéroception surveille et dirige l’état interne de notre corps en
permettant de reconnaître les signaux qui régulent les fonctions vitales comme la
faim, la soif, la température corporelle et le rythme cardiaque. Appelé souvent le
« sixième sens » de l’humain, l’intéroception permet de s’assurer du bon
fonctionnement de son corps grâce à des alertes lorsqu’un déséquilibre survient.
Par exemple, lorsqu’on a trop soif, l’intéroception nous pousse à boire un verre
d’eau.
La faim et la soif représentent deux états intéroceptifs quotidiens, et la faim, en
particulier, s’est avérée influente sur la prise de décision morale dans de
nombreuses études.
Lorsqu’on est énervé, on va avoir du mal à percevoir les choses de la même
façon que lorsqu’on est calme. On risque alors de prendre des décisions qui
ne sont pas en adéquation avec nos objectifs à long terme dans la vie. De
même, dans un état « froid », on pourrait minimiser l’importance de se
préparer avant un évènement, à l’éventualité que l’on bascule dans un état
chaud et à anticiper l’impact que cela pourrait avoir sur nous. Plus tard, on
se dira qu’on ne sait pas pourquoi on a agi comme ça !
Ce biais affecte beaucoup notre capacité à nous mettre à la place des
autres : en étant dans un certain état d’esprit, on ne parvient pas toujours à
comprendre les autres, qui sont dans un état d’esprit différent. Si vous êtes
heureux, vous avez du mal à imaginer pourquoi les gens sont mécontents.
Ce biais se trouve particulièrement dans la communauté médicale qui est
souvent en « état froid », rationnelle et pragmatique, et qui interagit la
plupart du temps avec des gens en « état chaud ». C’est une des raisons pour
lesquelles on trouve souvent que les médecins manquent d’empathie.
De façon contre intuitive, on pourrait penser que des personnes ayant vécu
par le passé la même difficulté qu’une personne étant actuellement en plein
dedans, manifesteront plus d’empathie pour elle. Or, une série d’études1
montre que les individus qui vous manifesteront le plus d’empathie ne sont
pas nécessairement ceux qui ont vécu les mêmes épreuves que vous. Dans
une expérience menée sur des anciens chômeurs, on leur t lire le récit
d’une personne qui, malgré tous ses efforts, ne parvenait pas à trouver un
travail et à boucler ses ns de mois. Cette personne se décide alors à prendre
un travail pas très honnête pour s’en sortir. Le résultat montra que les
personnes qui, par le passé, avaient surmonté une période de chômage,
étaient plus critiques et avaient moins de compassion que celles qui étaient
au chômage au moment de l’expérience. La même expérience fut faite avec
un adolescent victime de harcèlement : il racontait à un groupe sa
mésaventure et disait qu’il n’arrivait pas à faire face, et disait à un autre
groupe qu’il arrivait à se défendre. Là aussi, ceux qui avaient été victimes
eux-mêmes de harcèlement, mais qui voyaient maintenant cela « à froid »,
étaient moins compatissants pour l’adolescent qui disait ne pas réussir à faire
face.
Ces expériences montrent que les personnes qui ont vécu une situation
difficile sont les plus enclines à être plus dures avec les individus confrontés
à une épreuve du même genre. Pourquoi cela ? Il semble que 2 facteurs
d’ordre psychologique entrent en jeu. Tout d’abord, ceux qui ont vécu par le
passé une expérience pénible, ont généralement du mal à se remémorer avec
précision l’ampleur du traumatisme qu’ils ont subi lorsqu’ils étaient en « état
chaud ». Même s’ils se souviennent que l’expérience était stressante ou
émotionnellement éprouvante, ils ont tendance à minimiser la souffrance
réellement ressentie sur le moment. C’est « l’écart d’empathie ». Par ailleurs,
ceux qui ont surmonté une expérience traumatisante se souviennent qu’ils
ont réussi à surmonter cette épreuve, ce qui leur donne un sentiment de
compréhension exagéré par rapport à la difficulté de la situation. Les 2
facteurs psychologiques associés : « Ils oublient combien c’était éprouvant »
et « Ils s’en sont sorti tout seul » leur donnent l’impression que l’évènement
peut être facilement surmonté, et réduit l’empathie envers ceux qui s’y
trouvent confrontés. Il n’est donc pas indispensable d’avoir vécu la même
chose que quelqu’un pour lui témoigner de l’empathie2.
1. https://www.hbrfrance.fr/chroniques-experts/2019/02/24184-il-est-plus-difficile-davoir-de-
lempathie-pour-quelquun-lorsque-vous-avez-ete-a-sa-place/
2. Faculté de s’identi er à quelqu’un, de ressentir ce qu’il ressent. Capacité de se mettre à la place des
autres, de ressentir la douleur de l’autre dans notre cœur.
LE FAUX SOUVENIR
LE SAVIEZ-VOUS ?
Nos souvenirs sont si manipulables que, en seulement 3 heures, des spécialistes
qui mélangeront nos vrais souvenirs avec de fausses informations pourront nous
persuader d’avoir commis un crime dans notre jeunesse.
La question des faux souvenirs est une question scienti que qui reste très
étudiée. En effet, dans le domaine judiciaire, les implications de ces
questions scienti ques sont graves car elles peuvent mettre en cause les
témoignages : si un témoignage est erroné, un innocent peut être accusé et
condamné sur la base de ce témoignage ; mais si on ne tient pas compte des
témoignages des victimes, un coupable potentiellement dangereux peut
demeurer en liberté.
La mémoire humaine est un processus dynamique dépendant de
nombreux processus (perception, encodage, stockage, accessibilité…), et
chaque processus est sujet à des erreurs potentielles.
La psychologue Elizabeth Lous, précurseure dans la recherche sur les
faux souvenirs, mena de nombreuses expériences dans le domaine. L’une
d’entre elles, très facile à reproduire, est la suivante : on demande à des sujets
d’examiner des photos ou des vidéos de scènes diverses et variée, on leur
pose ensuite des questions de façon à les faire chercher dans leur mémoire
ce qu’ils ont vu sur les images. Elizabeth Lous t remarquer que de
nombreuses erreurs apparaissaient, surtout si les questions étaient
volontairement biaisées. Par exemple, en montrant une photo d’une scène
particulière, puis en demandant ensuite de quelle couleur était la
camionnette garée derrière la scène (camionnette qui n’existe pas et n’a
jamais été sur la photo), beaucoup de participants, in uencés par la question
(effet de suggestibilité, c’est-à-dire être enclin à accepter une chose sur la
suggestion des autres), croient se souvenir avoir vu une camionnette et
donnent même une couleur !
LA CONFABULATION
En psychologie, la confabulation est définie comme la production de souvenirs
fabriqués, déformés ou mal interprétés sur soi-même ou sur le monde. En clair,
une production imaginaire, prise pour un souvenir, venant combler une lacune de
mémoire. La fabulation se distingue du mensonge, l’individu qui confabule n’a
pas l’intention de tromper les autres. Certaines théories proposent que les
confabulations représentent un moyen pour les personnes atteintes de troubles
de la mémoire de maintenir leur identité, qu’elles aident à maintenir un concept
de soi cohérent. Les personnes aux tendances narcissiques pourraient
confabuler, inconsciemment, pour préserver une fausse image d’eux-mêmes et
de leur vision du monde, en embellissant les récits les concernant tout en étant
persuadés qu’ils se sont bien déroulés ainsi.
LE SAVIEZ-VOUS ?
On appelle « cryptomnésie » (du grec cryptos, « caché, dissimulé, secret », et
mnesia, « mémoire ») le phénomène qui se produit lorsqu’on pense avoir une
idée nouvelle, alors que c’est en réalité un souvenir oublié qui refait surface. Le
sujet qui en est victime croit avoir généré une pensée totalement originale, alors
qu’il s’agit d’un souvenir. C’est ce qui est à l’origine de plagiat involontaire,
lorsqu’on croit être le créateur, à tort, d’une blague, d’une mélodie ou d’une idée.
L’effet de difficulté de traitement est un biais cognitif qui veut que plus il a été
difficile d’acquérir une connaissance, moins on l’oubliera par la suite. Plus la
difficulté est grande, plus l’assimilation et la mémorisation sont fortes et durables.
Un peu comme ce poème pour lequel vous avez dû tant répéter dans votre
enfance, et qui est toujours là dans votre mémoire.
L’effet Google, lui, vous fait oublier tout ce que vous cherchez sans effort : les
moteurs de recherche mettent à notre disposition des informations en quelques
secondes et le fait de savoir qu’elles sont là, à portée de clic, ne stimule plus la
mémoire. Par contre, nous retenons très bien la façon de les retrouver, leur lieu
et le moyen d’y accéder. La mémoire collective qu’est devenu l’Internet devient
progressivement, pour l’humanité et chacun d’entre nous, une mémoire
numérique externe.
1. https://apprentx.rocks/leffet-despacement-loubli-nest-pas-lennemi-de-lapprentissage
L’EFFET DE TESTING
Une célèbre étude de 2008, menée par les chercheurs Jeffrey Karpicke et
Henri Roedige, montra la valeur du fait de challenger sa mémoire en la
testant pour augmenter sa rétention des informations : les chercheurs ont
comparé les performances de plusieurs groupes d’étudiants lors de leur
partiel de n d’année. Deux groupes révisaient en se testant les uns les
autres, c’est-à-dire en se posant des questions sur les sujets appris, et 2 autres
groupes révisaient avec d’autres méthodes de travail comme simplement
relire le cours, surligner des passages, etc. Dans les groupes où les étudiants
ont révisé en se testant, les résultats aux partiels furent 2 fois meilleurs que
dans les autres groupes ! La méthode du testing est considérée aujourd’hui
comme la plus efficace pour mémoriser des informations sur le long terme1.
Aller chercher plusieurs fois une information dans sa mémoire est un des
meilleurs moyens d’améliorer la mémorisation de cette information sur le
long terme. Autrement dit, la mémorisation sera supérieure lorsqu’une
partie du temps d’apprentissage sera consacrée à retrouver de mémoire
l’information par des tests, plutôt qu’à simplement la relire. Le testing peut se
faire par des « flashcards », des cartes où des questions concernant le sujet
que l’on doit apprendre sont écrites sur une face et les réponses sur l’autre.
Ces cartes permettent à l’apprenant de comparer, pour chaque couple
question-réponse, sa réponse avec la bonne réponse : c’est ce feedback, la
rétroaction, qui est l’élément clef de la méthode.
1. https://revisionfr.my-oxford.com/blogs/infos/le-testing-effect-la-methode-dapprentissage-la-plus-
efficace
LE BIAIS RÉTROSPECTIF
« Je le savais ! »
C’est la tendance à surestimer notre capacité à prédire le résultat d’un
évènement après que celui-ci s’est produit ! Alors qu’il nous paraissait
pratiquement impossible d’évaluer le résultat d’une situation avant qu’elle ne
survienne, la même situation nous apparaît nettement plus claire avec du
recul, et on croit qu’on aurait pu prédire l’évènement avec un haut degré de
certitude. Rien n’est plus facile que de regarder dans le rétroviseur et d’en
tirer des conclusions. Le biais rétrospectif peut également provoquer des
distorsions des souvenirs de ce que l’on savait ou croyait savoir avant qu’un
évènement ne se produise, et il est à l’origine d’excès de con ance concernant
la capacité d’un individu à prédire les résultats d’évènements futurs.
1. Erin M. Harley & al., “e ‘saw-it-all-along’ effect: demonstrations of visual hindsight bias.” Journal
of experimental psychology. Learning, memory, and cognitionvol30,5, 2004.
2. Romain Gauriot, « Trompé par l’aléatoire de la performance : Chance excessive », in Review of
Economics and Statistics, vol. 101, n° 4, 2019, p. 658-666.
LE BIAIS DE CONFIRMATION
Très souvent dans l’histoire de la science, les scienti ques ont repoussé des
nouvelles découvertes en interprétant ou en ignorant des preuves qui
n’allaient pas dans leur sens. Albert Einstein lui-même ne supportait
tellement pas l’idée que l’univers puisse être en expansion plutôt que
statique, qu’il attribua une fausse équation à ses calculs pour rendre l’univers
comme lui voulait qu’il soit !
Plusieurs recherches ont montré que les scienti ques évaluent plus
favorablement les études rapportant des résultats conformes à leurs
croyances que les études rapportant des résultats incompatibles avec leurs
convictions. On soupçonne aussi le biais de con rmation pour les
techniques médicales inefficaces qui ont été utilisées pendant des siècles
avant l’arrivée de la médecine scienti que. Autrefois, si un patient guérissait,
les autorités médicales considéraient le traitement « comme un succès »,
plutôt que de chercher des « explications alternatives » telles que le fait que
la maladie avait suivi son cours naturel. Aujourd’hui encore, nombre de
médecines dites alternatives voient leurs partisans se baser sur des réussites
anecdotiques et des rares témoignages positifs pour valider leurs
préférences, et traitent les preuves scienti ques de manière très critique.
LE BIAIS DE CONGRUENCE
Ce biais est similaire au biais de confirmation, car il se traduit par la tendance à
tester différentes hypothèses sans tester des hypothèses alternatives. Les gens
comptent trop sur le test et la répétition de leur hypothèse initiale (la plus
congruente, celle qui s’applique le mieux) tout en négligeant de tester des
hypothèses alternatives qui pourraient réfuter leur croyance initiale.
LE DÉLIRE DE MASSE
Le biais peut se propager comme une épidémie chez plusieurs personnes à la
suite : en 1954, à Seattle et Bellingham, les conducteurs de voiture se mirent à
remarquer des petits trous dans leur pare-brise qu’ils n’avaient jamais vu avant.
Considéré comme un « délire de masse », le phénomène prit une ampleur
extraordinaire ! De plus en plus de personnes se mirent à signaler la même
chose aux autorités en attribuant cela à toutes sortes de causes farfelues :
certains pensaient qu’un nouvel émetteur radio d’un million de watts produisait
des ondes qui provoquaient des oscillations dans le verre, d’autres croyaient à
des rayons cosmiques, d’autres encore pensaient à des puces de sable. Après
que 3 000 pare-brise soi-disant atteints de ce qui fut appelé « l’épidémie de
piqûres de pare-brise de Seattle » furent signalés, et que le maire fit même appel
au président Dwight D. Eisenhower, le sergent Max Allison, du laboratoire du
crime de Seattle, déclara que ces rapports de piqûres étaient le fruit d’une
hystérie publique ! Et cette illusion collective cessa.
Le fait que les médias parlent de ces petits trous avait simplement poussé les
gens à prêter plus attention à leur pare-brise et à voir ce qui avait toujours été là
en réalité, et qu’ils n’avaient jamais remarqué !
Attention à l’effet réverbère : vous connaissez cette histoire drôle du policier qui
voit un homme ivre chercher son portefeuille sous un lampadaire et qui lui
demande : « C’est là que vous l’avez perdu ? », et l’ivrogne lui répond : « Non, je
l’ai perdu dans le parc, mais c’est là qu’il y a de la lumière ! » L’effet réverbère est
la tendance à chercher des choses là où il est plus facile de chercher. Quand
nous cherchons la réponse à une question, approfondissons toujours nos
recherches, la bonne réponse n’est pas toujours là où se trouve « la lumière »,
comme des sites ou magazines populaires. Certaines données ou analyses sont
plus difficiles à trouver.
L’EFFET BOOMERANG
Ces tactiques peuvent fonctionner sur une personne qui est résistante par
nature, qui a une forte réactance, et qui fera automatiquement l’inverse de ce
qu’on lui demande, mais le professeur de psychologie John Gottman1
déconseille d’utiliser la psychologie inversée à outrance sur les adolescents et
les enfants (« Reste dans le salon ! » alors qu’on veut qu’il aille dehors, « Met
tes baskets ! » alors qu’on veut qu’elle mette ses chaussures de ville),
expliquant que « de telles stratégies sont déroutantes, manipulatrices,
malhonnêtes et fonctionnent rarement à long terme ».
Vous venez de faire une longue séance de sport très éprouvante ? Et vous
vous dites que vous méritez bien un bon burger gras ou une boisson
gazeuse ? Vous êtes sous l’effet du biais de compensation morale (appelé
aussi hypocrisie morale).
C’est ce qui se produit quand une personne qui a fait quelque chose de
bien s’autorise et s’inquiète moins par la suite des conséquences d’un
comportement immoral.
Une étude du comportement des consommateurs a montré que la
consommation d’un aliment sain augmente la probabilité qu’un individu
s’autorisera un dessert trop gras et trop sucré, dont il se serait abstenu s’il
n’avait pas initialement choisi l’aliment sain.
L’effet SnackWell (du nom de biscuits américains sans gras) est un phénomène
par lequel les personnes au régime mangent plus de biscuits à faible teneur en
calories, qu’elles ne le feraient autrement pour des biscuits normaux !
Une autre étude1 de 2011 très intéressante, faite par des chercheurs de
Taïwan, montra que les personnes qui prennent des pilules multivitaminées
et qui sont persuadées d’en tirer des avantages pour la santé, sont plus
susceptibles de se livrer ultérieurement à des activités malsaines. Par
exemple, on donna à deux groupes de sujets des pilules placebo, mais l’un
fut averti que c’était un placebo, et l’autre fut informé que c’était des pilules
multivitaminiques. L’étude montra que les participants qui pensaient avoir
reçu des multivitamines étaient prédisposés à fumer plus de cigarettes et
plus susceptibles de croire qu’ils étaient davantage protégés des blessures et
des maladies par rapport aux sujets qui savaient qu’ils recevaient un placebo.
Les participants qui croyaient avoir reçu des multivitamines étaient
également moins susceptibles de faire de l’exercice et de choisir des aliments
plus sains. Les compléments alimentaires sont perçus comme conférant des
avantages pour la santé, leur utilisation peut créer un sentiment illusoire
d’invulnérabilité qui désinhibe les comportements malsains (on retrouve ici
d’autres biais comme le biais de compensation du risque et le biais d’excès
de confiance).
Une étude2 dirigée par Jessica Cascio et E. Ashby Plant en 2016 a montré
que cela fonctionne aussi par anticipation ! L’idée même d’adopter un
comportement moral à l’avenir permet aux gens de justi er un
comportement immoral dès à présent. Il s’agit en quelque sorte d’adopter un
comportement moral par « anticipation ».
Cet effet peut avoir des conséquences sociétales négatives car il a un effet
permissif sur des comportements tels que les préjugés raciaux et la
discrimination (je suis sympa avec mon cousin trisomique donc je peux me
moquer des handicapés), l’égoïsme (j’ai rendu service à la voisine hier, donc
ce week-end je ne vais pas aider mon pote à déménager), les mauvaises
habitudes alimentaires et sanitaires (j’ai fait attention pendant 2 ans à la
Covid, maintenant je vais arrêter de me laver les mains) et la consommation
excessive d’énergie (j’ai changé mon chauffe-eau pour un plus économique
donc je prends des douches plus longues).
L’économiste de l’énergie Lucas Davis a publié une étude3 très instructive
montrant qu’après avoir acheté des lave-linge censés être plus économiques,
les consommateurs ont ironiquement augmenté le lavage de leurs vêtements
de près de 6 % ! De même, les gens laissent les ampoules économiques
allumées plus longtemps que les ampoules conventionnelles, et de
nombreuses personnes qui rendent leur maison « plus économe en énergie »
en les isolant mieux par exemple, augmentent leur chauffage et ne font
nalement aucune économie énergétique.
1. Chen-Bo Zhong, Katie Liljenquist, « Laver vos péchés : moralité menacée et nettoyage physique »,
2006.
LE BIAIS PRO-INNOVATION
Ce biais repose sur notre inconscient qui nous dit par exemple que si une
entreprise sort un nouveau produit, elle l’aura forcément amélioré par rapport à
ceux qu’elle a créé auparavant. Que le simple fait d’avancer dans le temps rend
toute fabrication meilleure et naturellement supérieure aux inventions
précédentes grâce à l’expérience acquise et aux leçons tirées. Or, ce
raisonnement est défectueux pour plusieurs raisons : un produit peut être lancé
et être « moins bien » que son prédécesseur, par exemple parce qu’il a été fait
cette fois-ci de façon plus simple pour limiter les coûts de fabrication, ou avoir été
réglé avec une obsolescence programmée*, ou encore un produit peut
simplement être une ancienne idée recyclée, comme pour toutes les modes, on
croit découvrir des choses qui font en réalité partie d’un phénomène cyclique.
*Technique par laquelle le responsable de la mise sur le marché d’un produit vise à en réduire
délibérément la durée de vie.
1. Benjamin K. Sovacool, « Contester l’avenir de l’énergie nucléaire : Une évaluation mondiale critique
de l’énergie atomique » , World Scientific, p. 259, 2011.
LE BIAIS MNÉSIQUE ASSOCIÉ À L’HUMEUR (OU
CONGRUENT À L’HUMEUR)
C’est la tendance à se souvenir plus facilement des évènements qui ont une
congruence (qui coïncident) avec son humeur actuelle. Par exemple, si un
jour férié vous vous sentez heureux et détendu, cette ambiance à elle seule
peut évoquer d’autres souvenirs de vacances, de moments de plaisir, de
retrouvailles en famille, etc. L’humeur du moment optimise la mémoire et
lui fait récupérer plus facilement des informations associées à la même
émotion. Plusieurs études ont montré que les gens récupèrent mieux les
souvenirs autobiographiques anciens et récents qui correspondent à leur
humeur dominante du moment.
Si vous êtes de bonne humeur et qu’un ami évoque un souvenir heureux
qu’il a partagé avec vous, vous serez plus susceptible de vous rappeler plus de
détails de ce souvenir heureux parce que vous êtes d’humeur similaire au
moment où il vous en parle. Par contre, si l’ami évoque ce souvenir heureux
lorsque vous vous sentez triste, votre mémoire est susceptible d’être plus
oue, ou vous pourriez plutôt vous souvenir d’une chose triste qui s’est
produite quelque temps avant ou après le souvenir dont vous parle votre
ami.
Le biais mnésique associé à l’humeur pourrait plonger une personne dans
une spirale de désespoir. Puisque notre humeur affecte les souvenirs et les
évènements passés auxquels nous pensons, on comprend pourquoi les
personnes déprimées semblent bloquées sur des souvenirs et des choses
négatives. Un jour elles vivent une chose triste, puis leur humeur les fait
penser à une autre chose triste qui avait suscité en eux le même sentiment,
puis, comme sur un terrain glissant, un petit caillou en emporte un autre,
puis ils en emportent d’autres, et c’est une avalanche qui s’est nalement
formée, une dépression. Cependant, les personnes tristes peuvent échapper
au cercle vicieux consistant à se concentrer sur des informations négatives et
à s’en souvenir en utilisant délibérément ce biais : on se concentre sur des
souvenirs positifs pour qu’ils entraînent avec eux l’humeur positive qui va
avec !
Les êtres humains sont des créatures incroyablement émotionnelles. La
recherche montre que nous sommes plus susceptibles de nous souvenir de
quelque chose s’il y a une forte émotion qui s’y rattache, et bizarrement, nous
accordons plus d’attention aux stimuli négatifs – il semble que ce soit dû à
l’instinct de survie : c’est parce que vous aviez plus de chances de vivre si
vous prêtiez attention à un lion (stimulus négatif) qu’à un fruit (stimulus
positif1). Notre cerveau peut coder un souvenir important avec une émotion
a n de pouvoir le retrouver plus facilement plus tard, et plus l’émotion est
forte, plus le souvenir sera fort. C’est pourquoi certains souvenirs peuvent
sembler aussi réels que s’ils s’étaient produits la veille.
1. https://practicalpie.com/mood-congruent-memory-de nition-examples/
LE BIAIS ÉGOCENTRIQUE
Une étude de 1991 portant sur des enfants frères et sœurs qui ont
l’habitude de participer aux tâches ménagères à la maison, a montré que plus
les frères et sœurs étaient proches les uns des autres, moins le biais
d’égocentrisme était présent chez eux. Par contre, lorsqu’ils sont moins
proches, ils ont plus tendance à surévaluer leur contribution au sein du foyer
par rapport à celle de leurs frères et sœurs.
Vous voulez motiver des personnes à participer à votre projet ? Prenez en
compte le biais égocentrique. Ne cherchez pas à toujours parler et être dans
la lumière des projecteurs. Poussez plutôt les autres à se mettre en valeur et à
contribuer à la réussite. Il est important de rappeler que toute réussite d’un
projet de groupe, ou son loupé, n’est jamais l’œuvre d’une seule personne. À
l’aire des visioconférences et des réunions Zoom, sachez que ce biais a
tendance à s’ampli er avec la collaboration à distance. Avec l’éloignement,
certaines personnes résisteront moins à la tentation de fanfaronner que si
vous étiez tous présents dans une même salle (même s’il se peut que pour le
coup, leur contribution soit vraiment passée inaperçue du fait de l’écart
physique et de l’invisibilité du travail dû au contexte de télétravail). À
l’inverse, les plus introvertis, risquent, eux, d’être encore plus effacés et
silencieux derrière leurs claviers et leurs écrans.
Que ce soit « le biais égocentrique » ou « l’effet de faux consensus », ils
peuvent être tous deux le fruit de cultures individualistes qui mettent
l’accent sur l’indépendance et l’accomplissement personnel plutôt que sur le
succès lié au groupe. Des études interculturelles ont trouvé une forte
présence du biais égocentrique dans les « communautés individualistes »
américaines, sud-africaines et yougoslaves, mais ont noté l’effet opposé dans
les « sociétés collectivistes » japonaises, népalaises ou indiennes. Les
personnes issues de ces cultures ont tendance à faire preuve de plus de
modestie, le succès est attribué à des facteurs externes ou liés au groupe, et
les échecs, par contre, sont considérés comme le résultat de lacunes
personnelles.
Même si nous avons naturellement tendance à voir le monde à travers une
lentille autodirigée, et que chacun de nous est la star de son propre long
métrage, n’oublions pas que cela affecte tous les aspects de notre vie et
pratiquement toutes les décisions que nous prenons. Alors n’attachez pas
trop d’importance à votre histoire individuelle, évaluez votre point de vue
par rapport à un ensemble plus large de preuves, et « ne croyez pas tout ce
que vous pensez » !
1. L’égocentrisme est la tendance à ramener tout à soi, à ne considérer que son point de vue et ses
propres intérêts, sans être capable de comprendre profondément l’avis des autres.
2. Jerald Greenberg, « Surmonter le biais égocentriquedans l’équité perçue grâce à la conscience de
soi », 1983.
L’EFFET DE LEURRE
Comme cet effet est largement utilisé dans le commerce, il faut être
conscient que le choix par défaut proposé ne sera pas forcément celui qui
vous conviendra le mieux. Alors prenez toujours quelques minutes pour
bien comprendre les options proposées et choisir celles qui vous
conviennent.
Les scienti ques ont étudié un aspect intéressant de l’effet de choix par
défaut : ils ont réalisé des études sur la question du don d’organe et ont
découvert qu’il y a moins de donneurs dans les pays où le consentement
« n’est pas par défaut ». En effet, en France, si vous n’exprimez pas le fait que
vous ne voulez pas donner vos organes, vous êtes « donneur par défaut ». À
l’inverse, si on vous demande de choisir de façon active, vous allez davantage
ré échir à la question et peut être devenir plus impliqué émotionnellement,
dire plus facilement non, etc.
A n de faire manger moins de viande au consommateur, des restaurants
mettent sur leur carte des plats végétariens par défaut. Une étude de 2019 a
montré qu’en rendant la viande « optionnelle » sur un menu de restaurant,
non seulement on stimulait le choix de plats végétariens chez les
consommateurs, mais, en plus, on en normalisait l’existence, et cela pouvait
même inciter les gens à évoluer vers un régime exitarien !
LE BIAIS DE COHÉRENCE
Est-ce qu’il vous déjà arrivé de vous abstenir d’acheter une chose
uniquement parce que vous n’aviez que des billets et pas de monnaie ?
Les professeurs Priya Raghubir et Joydeep Srivastav mirent en évidence ce
phénomène dans un article de 2009 intitulé : « Pourquoi nous dépensons des
pièces plus rapidement que des billets ». Ils montrèrent grâce à 3 études que
posséder une même somme d’argent en billets ou en pièces a une in uence
sur nos dépenses. Les groupes de sujets étudiés dépensaient plus facilement
leur argent lorsqu’il était sous forme de pièces, mais aussi lorsque les billets
étaient de faible valeur (2 dollars, 5 dollars) plutôt que haute (50 dollars,
100 dollars). Le même montant en petites coupure sera plus facilement
dépensé qu’en un billet unique. On aura plus de mal à « casser » un gros
billet car on sait qu’on pourra plus difficilement s’empêcher de dépenser la
monnaie ensuite. Joydeep Srivastava, professeur de marketing à la Robert H.
Smith School of Business, de l’Université du Maryland, explique « qu’il y a
un coût psychologique associé à la dépense d’un billet de 100 $ qui n’existe
pas avec des dépenses plus petites comme 5 billets de 20 $. » Nous avons
tendance à isoler l’argent dans nos esprits. Chaque 20 $ est vu comme une
entité distincte, et moins précieuse que le seul billet de 100 $.
Dans les fêtes foraines par exemple, nous sommes plus enclins à engouffrer
beaucoup d’argent dans des machines à jeux si nous mettons des petites
pièces au fur et à mesure, que si nous devions insérer un billet dans la
machine. D’après les chercheurs, utiliser des pièces nous donne l’illusion que
notre action est plus économe. Mais bien souvent, la dépense est nalement
la même.
LE SAVIEZ-VOUS ?
Il est démontré par la recherche* (mais on s’en était rendu compte
naturellement), que l’on dépense plus facilement de l’argent lorsqu’il est
dématérialisé, par exemple sous forme de carte de crédit ou de chèques-
cadeaux. Cependant, lorsque nous échangeons nous-même des billets en
chèques-cadeaux, on dépensera moins facilement ces derniers.
*Priya Raghubir, Joydeep Srivastava, “Monopoly Money: The Effect of Payment Coupling and Form on
Spending Behavior”, Journal of Experimental Psychology, 2008.
L’EFFET DE CONTRASTE
EXPÉRIENCE
Remplissez un bol d’eau chaude, un autre d’eau froide, et enfin un troisième
d’eau tiède que vous placez au milieu des deux autres. Plongez la main gauche
dans l’eau froide, la droite dans l’eau chaude, patientez quelques secondes, puis
plongez les deux mains dans le troisième bol d’eau tiède au milieu. Étonnant :
l’eau paraît plus chaude pour la main gauche et plus froide pour la main droite,
alors que la température de l’eau est la même ! Eh bien, il se passe à peu près la
même chose dans notre esprit avec les mots, les idées et les faits d’actualité !
C’est limité à 80 km/h, mais comme vous êtes en retard, vous accélérez à
90 km/h. Vous vous dites que vous allez gagner du temps. Oui… une
poignée de secondes à peine !
Le biais de gain de temps nous fait surestimer le temps gagné en
augmentant la vitesse à partir d’une vitesse déjà élevée, et a contrario, il nous
fait sous-estimer le temps gagné en augmentant la vitesse à partir d’une
vitesse faible. Par exemple, on gagne plus de temps en passant de 30 km/h à
40 km/h, qu’en passant de 80 km/h à 90 km/h, mais notre cerveau conçoit
mal cela et conclut que l’on gagne beaucoup de temps dans les deux cas.
Une incapacité cognitive à comprendre les effets qu’une accélération ou un
ralentissement ponctuel aura par opposition à un déplacement à une vitesse
constante provoquera le biais de gain de temps. La recherche a montré que
lorsque les gens voyagent à une vitesse constante entre un point de départ et
un point d’arrivée, ils font généralement à peu près le même temps de trajet
que les gens qui accélèrent et ralentissent constamment.
La physique nous le démontre : lorsque vous passez de 30 à 40 km/h, le
temps nécessaire pour parcourir 16 km passe de 30 à 20 minutes, ce qui vous
fait gagner 10 minutes. Mais, la même augmentation de vitesse de 10 km/h
se traduirait par un gain de temps bien moindre si la vitesse initiale est plus
élevée : seulement 2 minutes gagnées lors d’une augmentation de 80 km/h à
90 km/h ! Et ces 2 minutes pourraient en plus facilement être perdues à
cause des feux de circulation ou des embouteillages.
C’est un biais qui se manifeste avec une sous-estimation par les voyageurs
de la durée nécessaire pour parcourir les itinéraires qu’ils fréquentent le plus
et une surestimation du temps nécessaire pour emprunter les itinéraires
inconnus. On aura l’impression que le trajet que l’on prend tous les jours
pour aller au travail est plus court et rapide que ce nouvel itinéraire que l’on
connaît moins, alors qu’ils ont tous deux la même durée. Le second a
simplement demandé plus de concentration et d’attention, ce qui nous
donne l’impression qu’il a duré plus longtemps.
L’ANTHROPOMORPHISME
(OU LA PERSONNIFICATION)
LE SAVIEZ-VOUS ?
Des études ont montré que les individus qui attribuent des caractéristiques
humaines aux animaux sont moins enclins à les manger.
1. Begh ; Munafo ; Shiffman ; Ferguson; Nicols ; Mahomet ; Titulaire ; Sutton ; Aveyard, « Recyclage
du biais attentionnel chez les fumeurs de cigarettes tentant d’arrêter de fumer », 2013.
LA CÉCITÉ D’INATTENTION
Dans une célèbre expérience menée par les psychologues Daniel Simons et
Christopher Chabris, de l’université d’Harvard, on demanda à des étudiants
de regarder une vidéo dans laquelle des personnes se déplaçaient au centre
d’une zone dé nie et jouaient à s’envoyer une balle de basket. La mission des
étudiants était de compter le nombre de passes que se faisaient les joueurs. À
la n de la vidéo, les participants donnèrent globalement un chiffre correct,
mais lorsqu’on leur demanda s’ils avaient remarqué quelque chose de bizarre
dans la vidéo, la moitié d’entre eux n’avait pas vu la personne déguisée en
gorille qui avait traversé l’écran, s’arrêtant à mi-parcours pour se frapper la
poitrine des deux poings. Victime de « cécité attentionnelle », ils devinrent
un exemple frappant de la tendance souvent spectaculaire que nous avons à
ignorer ce qui se trouve sous nos yeux quand notre attention est concentrée
sur autre chose ! C’est pourquoi beaucoup sont fascinés par les « faux
raccords » repérés au cinéma, car nous sommes étonnés une fois qu’on nous
les a fait remarquer, de ne pas les avoir vus !
Dans une étude publiée en juillet 2013, trois chercheurs en sciences
cognitives ont demandé à 24 radiologues expérimentés du Brigham and
Women’s Hospital de Boston, ainsi qu’à 24 volontaires non expérimentés, de
détecter des nodules pulmonaires présents sur une série de radiographies
des poumons. La consigne était de cliquer avec la souris sur chaque nodule,
et chaque radiographie comportait environ une dizaine de nodules.
Seulement, la photographie d’un gorille minuscule, et faisant 48 fois la taille
d’un nodule, avait été insérée en haut et à droite de la dernière image. Eh
bien tous les radiologues ont bien détecté les nodules, mais 20 sur 24 n’ont
pas vu le gorille1 !
Lorsque notre attention est concentrée sur une seule chose, il peut nous
arriver de ne pas remarquer d’autres choses, même très évidentes, dans notre
champ de vision. Et ce n’est pas par manque d’attention que nous ne voyons
pas quelque chose, c’est au contraire parce que nous sommes trop attentifs à
une chose que nous n’en voyons pas une autre. La cécité d’inattention est
bien entendu très exploitée par les illusionnistes : certains tours « de magie »
reposent sur le détournement de l’attention des spectateurs, les empêchant
de percevoir les manipulations qui ont lieu devant eux.
Dans une autre expérience impressionnante, les psychologues Daniel
Simons et Harry Levin se sont placés dans la rue. Un expérimentateur
demande alors son chemin à un piéton. Pendant qu’ils parlent tous les deux,
deux ouvriers complices de l’expérience passent entre l’expérimentateur et le
piéton en portant un grand panneau opaque. À ce moment-là, un deuxième
expérimentateur en pro te pour prendre la place du premier. Une fois les
deux ouvriers avec le panneau passés, la plupart des piétons testés
continuent à renseigner leur interlocuteur comme si ce dernier n’avait pas
changé. Incroyable ! Dans leur cas, ils ont été victime de « cécité au
changement » !
Ces expériences mettent clairement en évidence le fait que notre cerveau
n’enregistre en réalité qu’un petit nombre de détails (pour ne pas être noyé)
qui lui servent à créer sa perception de la réalité, et cela en privilégiant « des
blocs d’informations ». C’est pour ça que vuos arrievz à lrie cette prhase
fcailenmet, bein que les lerttes soeint dans le désrdore : vrote cevraeu lit
cahque mot cmmoe un tout !
Une expérience de 2009 a réuni 4 groupes différents de personnes à qui on
demanda de faire chacun une balade en faisant quelque chose de différent :
le premier groupe devait se balader en écoutant un mp3, le deuxième en
discutant avec un compagnon à leur côté, dans le troisième les individus
devaient marcher seul, et pour le quatrième, ils devaient parler au téléphone.
Dans les 4 cas, un clown très coloré et monté sur un tricycle passait près
d’eux à un moment donné de la balade. L’étude révéla que c’était ceux qui
avait une conversation téléphonique tout en marchant qui voyait le moins le
clown ! Lorsque nous parlons au téléphone, nous visualisons notre
conversation dans notre esprit, et ce qui se passe autour de nous n’attire plus
notre attention bien que nos yeux soient grand ouverts !
LE SAVIEZ-VOUS ?
On peut en réalité toujours voir notre nez, il est bien dans notre champ de vision,
mais notre cerveau le masque car cette information ne nous est pas utile. De
même, on peut toujours entendre notre cœur battre, mais là aussi notre cerveau
masque le son des battements pour se concentrer sur les bruits extérieurs (et
éviter de nous rendre fou). De plus, si dans une pièce un voyant clignote au
même rythme que notre cœur, le cerveau « effacera » de notre vue ce voyant !
« L’effet cocktail party » est la capacité à diriger son attention pour suivre un
discours ou une conversation dans une ambiance bruyante, par exemple au
milieu d’une réception ou d’un cocktail, tout en restant conscient des autres
signaux sonores (par exemple, si notre nom est prononcé dans la salle, notre
attention sera captée et désengagée de la conversation que nous étions en train
de suivre*).
*Une personne qui est incapable de focaliser son attention auditive pour suivre une conversation dans
une ambiance bruyante souffre du « syndrome du banquet ».
Avez-vous déjà cherché un objet pendant des heures pour vous apercevoir
ensuite qu’il était là, sous vos yeux ? « L’anticipation » peut jouer un rôle
majeur dans ce phénomène. C’est le fait de « s’attendre à quelque chose » qui
bloque notre perception des autres choses. Autrement dit, si vous êtes
convaincu que vous avez posé un objet à tel endroit, alors qu’en réalité il n’est
pas bien loin mais pas à cet endroit précis, le fait d’anticiper, de vous attendre
à ce qu’il soit « là » où vous êtes persuadé qu’il doit être, vous provoque une
cécité d’inattention autour de cette endroit.
1. Notons qu’aucun des observateurs non expérimenté n’a vu le gorille, et que très peu ont vu tous les
nodules !
LE BIAIS DE CÉCITÉ BOTANIQUE
Quelle relation avez-vous avec les plantes qui se trouvent dans une pièce ?
Les remarquez-vous ? Vous demandez-vous si elles sont vraies ou fausses ?
Avez-vous l’habitude de les observer ? De les sentir ? De les toucher ?
Connaissez-vous leur nom ? Si la réponse à toutes ces questions est non,
vous souffrez peut-être de cécité botanique : c’est une forme de biais cognitif,
qui est une tendance humaine, principalement dans les sociétés occidentales
actuelles, à ignorer quasi complètement les espèces végétales. À ne pas
reconnaître leur importance pour l’humain et à les considérer comme
inférieure au monde animal et à ne pas savoir apprécier leurs
caractéristiques1.
Certains experts associent ce biais au « trouble dé citaire de la nature »,
qui est l’idée que les êtres humains, en particulier les enfants, passent moins
de temps à l’extérieur qu’auparavant, et la croyance que ce changement
entraîne un large éventail de problèmes de comportement.
1. Ce biais est moins marqué chez les femmes. Il a été remarqué d’ailleurs qu’elles sont plus
nombreuses lors des sorties botaniques, alors que les sorties ornithologiques ou sur les mammifères
attirent plus d’hommes.
L’HYPNOSE DE L’AUTOROUTE
Personne n’aime avoir tort, surtout lorsque cela remet fortement en cause
l’image de soi. Lorsque la réalité s’impose à nous et que notre croyance est
détruite, on peut s’enfermer dans un biais de croyance en continuant de
sélectionner les « indices » qui viendraient renforcer notre croyance, et ignorer
totalement ceux qui la contredisent. Par exemple, une personne jalouse qui émet
l’hypothèse que son conjoint aime quelqu’un d’autre percevra les actions de son
conjoint en fonction de son biais : s’il lui offre des fleurs ou un cadeau, cela sera
perçu comme un indice de culpabilité, et s’il n’en offre pas, ce sera perçu comme
un indice de désintérêt. Sur le plan relationnel, au travail par exemple, des
croyances négatives quant à l’interprétation des intentions d’autrui créeront
immanquablement un enchaînement de réactions conduisant à des conflits. La
sagesse voudrait qu’on remette en cause nos hypothèses, qu’on remette nos
conclusions en question, et de s’assurer de leur validité, mais la plupart des
gens en sont incapables à cause des émotions et de l’ego qui prennent le
dessus. « J’ai pris de l’homéopathie toute ma vie, et aujourd’hui plus de 1 000
études* montrent qu’il n’y a pas de preuve de son efficacité et que, tout au plus,
ce traitement fonctionne comme placebo, mais je refuse d’y croire, et je
continuerai de m’accrocher aux indices assurant que ma croyance depuis des
années est la bonne ».
* https://www.has-sante.fr/jcms/p_3116594/fr/evaluation-des-medicaments-homeopathiques
L’effet inverse est nommé l’effet Golem* : il provoque une performance moindre
et des objectifs moins élevés sous l’effet d’un potentiel jugé limité par une
autorité, comme les parents ou des professeurs…
*Un golem est un terme issu de la mythologie juive : le golem est un être artificiel à l’allure humanoïde,
qui est fait d’argile, qui est incapable de parler et dépourvu de libre-arbitre, qui est façonné uniquement
afin d’assister ou défendre son créateur.
1. Parfois appelé « l’effet Rosenthal » du nom du psychologue qui l’a mis en évidence.
L’EFFET DU MOT SUR LE BOUT
DE LA LANGUE
Qui n’a pas déjà connu ça ? Vous l’avez, là… sur le bout de la langue, mais
ce mot que vous cherchez dans votre mémoire ne sort pas ! Pourtant vous le
connaissez bien, vous le savez ! Vous avez même sa première lettre, son effet
sonore, ses synonymes… mais rien n’y fait, il ne vient pas ! Frustrant, non ?
Ce phénomène, qui est universel et se retrouve chez des personnes de tous
genres, âges1 et cultures (même chez ceux parlant la langue des signes),
s’explique par le fait que les mots peu utilisés et qui ne font pas partie de
notre vocabulaire « actif », induisent une réduction de connexions entre les
réseaux lexical et syntaxique de notre cerveau. Comme si le chemin n’était
pas bien tracé et que le mot n’avait pas l’habitude de l’emprunter. De plus,
l’émotion et la force des liens émotionnels avec ce dont on essaie de se
souvenir peuvent également avoir un impact sur le phénomène : il est
constaté que plus les liens émotionnels sont forts, plus il faut de temps pour
récupérer l’élément de la mémoire2. Il semble que les mots qui font le plus
souvent défaut à notre mémoire sont des noms propres et ceux qui
caractérisent des objets.
CHACUN SA LANGUE
Il est amusant de noter que chaque langue a une expression dédiée à ce
phénomène, et la plupart sont en lien avec l’organe de la langue : en anglais, en
italien, afrikaans et estonien, on dit comme en français « sur le bout de la
langue », en irlandais on dit « sur le devant de la langue », en gaélique « sur le
dessus de la langue », en cheyenne « perdu sur la langue », et en coréen
« pétillant sur le fond de la langue » !
1. Nous avons davantage tendance à oublier des mots en vieillissant, mais selon les recherches de la
psychologue DJ Dahlgren, cela n’est pas lié à l’âge, mais à nos connaissances : comme les personnes
plus âgées ont dû retenir plus d’informations au cours de leur vie, elles sont plus sujettes au
phénomène du mot sur le bout de la langue.
2. B. L. Schwartz, « La relation entre les états du bout de la langue et le temps de récupération », 2001.
L’EFFET ZEIGARNIK
« Nos esprits oublient rapidement les tâches nies. Cependant, ils sont
programmés pour nous rappeler incessamment celles que nous ne
terminons pas. »
– Dr Bluma Zeigarnik
C’est la psychologue russe Bluma Zeigarnik qui mit en évidence cet effet
après que son professeur Kurt Lewin eut remarqué un phénomène
particulier chez les garçons de café : qu’ils étaient capables de retenir toutes
les commandes en cours, pour chaque table, et qu’une fois que les personnes
avaient payé, il leur était impossible de se souvenir des commandes déjà
réalisées.
Bluma Zeigarnik t alors une expérience : elle demande à des enfants
d’accomplir une vingtaine de petits travaux, comme modeler des animaux,
en ler des perles ou assembler les pièces d’un puzzle… La moitié des
activités sont terminées, mais les autres restent volontairement inachevées.
Plus tard, on demande aux élèves d’indiquer toutes les tâches qu’ils avaient
eu à exécuter. Résultat : celles qui n’avaient pu être terminées étaient citées
environ 2 fois plus souvent que les autres ! Comme si l’inachèvement d’une
activité entreprise créait une tension durable dans le cerveau. En effet, on
remarque que lorsqu’on donne aux élèves la possibilité d’achever leur travail,
il se produit chez eux « une détente », et il n’y a plus de différence de
mémorisation entre les tâches accomplies.
Une étude menée par F. McKinney1 suggère même que les étudiants qui
s’autorisent à arrêter d’étudier pour jouer ou faire une activité physique se
rappellent mieux de leurs sujets que ceux qui étudient d’une seule traite sans
faire de pause. D’où l’importance de savoir faire des pauses, le cerveau
mémorise mieux ce qu’il doit terminer.
Cet effet peut être très utile donc pour l’apprentissage mais attention, à
partir du moment où on se lance dans une tâche similaire sans avoir ni la
précédente, le cerveau interprète cela comme la n de l’activité, et se
consacre à la suivante, ce qui réduit l’effet. On comprend donc bien que
l’ennemi juré de l’effet Zeigarnik, c’est le multitâches ! Chaque nouvelle tâche
est une interruption de la précédente, et chaque nouvelle activité provoque
une tension supplémentaire, donc une charge mentale accrue sur le cerveau
qui n’est pas équipé pour répondre à cette complexité ! C’est ce qui explique
pourquoi on n’arrive pas réellement à tout faire en même temps.
On note également que les suivis de progression, ces petites informations qui
informent les utilisateurs de certains produits de leur proximité avec la réalisation
d’une tâche, les poussent à aller jusqu’au bout plutôt que d’abandonner. Par
exemple lorsque l’on voit un message du type « votre profil est complet à 64 % »,
nous sommes plus susceptibles de consacrer quelques minutes de plus pour
fournir tous les détails manquants et « achever la tâche ».
Nous sommes ici à la frontière avec le biais d’unité, qui est la tendance à
absolument vouloir finir à tout prix la tâche (un projet, une unité/un tout) que
nous avons commencée. Vous êtes par exemple au cinéma, le film est nul, il
reste encore deux longues heures de torture… Tant pis, vous restez jusqu’au
bout pour finir « cette tâche » (associé au biais d’aversion à la perte, vous êtes
vraiment cuit là). La logique est la même pour un livre ou un plat ! Et notons au
passage que plus l’assiette est grande (ou le bol), plus nous mangeons ! On
aura tendance à la remplir plus, et donc, comme on voudra inconsciemment tout
finir, on mangera plus ! Depuis les années 1960, notre vaisselle s’est agrandie
de 36 %, et de nombreuses études ont montré que nous mangeons 30 à 50 %
plus lorsque nous sommes devant une grande assiette.
Attention, le fait de savoir cela n’y changera pas grand-chose (un biais est très
fort) : le Dr Wansink, de l’Université Cornell aux États-Unis, donna un cours
spécialisé de 90 minutes à des étudiants de niveau universitaire sur l’effet de la
grosseur de la vaisselle sur la consommation alimentaire, et sur le biais de
l’unité. 6 semaines plus tard, il les invita à une petite fête où étaient présentés 2
grands bols (de 4 litres chacun) de grignotines salées dans une des pièces, et 4
bols d’amuse-gueule (de 2 litres chacun) dans une autre pièce. Les étudiants qui
ont pioché dans les grands bols ont pris 53 % plus d’amuse-gueule salés et ont
mangé 56 % plus que ceux qui ont pioché dans les petits bols. Lorsqu’on leur a
demandé s’ils pensaient que la grosseur des bols avait pu influencer leur
consommation, la majorité a répondu… « non, non ».
*https://www.extenso.org/article/montrez-moi-votre-vaisselle-je-vous-dirai-combien-vous-mangez/
Les façons d’éviter ce biais cognitif sont, déjà, de prendre note de nos
expériences précédentes : ces dernières nous donneront des données fiables
sur le temps réel requis pour des tâches similaires. Ensuite, lors de la
planification, il est toujours préférable de proposer une marge de temps
supplémentaire afin de faire face à d’éventuels imprévus ou contretemps. Puis,
pendant l’accomplissement de la tâche, lorsque des distractions vous
bombardent, comme les notifications de smartphone, des collègues bavards ou
autres, apprenez à les gérer en coupant le téléphone, ou en donnant rendez-
vous à une certaine heure à telle personne pour papoter. Mais n’oubliez pas
aussi que votre esprit commencera à errer quand il aura besoin d’une pause.
Donc planifiez les pauses aussi !
*Une variante plus détaillée est : « S’il existe au moins deux façons de faire quelque chose et qu’au
moins l’une de ces façons peut entraîner une catastrophe, il se trouvera forcément quelqu’un quelque
part pour emprunter cette voie. »
EN BREF
Estimation du meilleur scénario
Estimation du pire scénario
Vous aurez alors l’estimation du scénario le plus probable !
1. F. McKinney, “Studies in the retention of interrupted learning activities”, Journal of Comparative
Psychology, 19(2), 265–296, 1935. https://psycnet.apa.org/record/1935-04121-001
LA LOI DE FUTILITÉ DE PARKINSON
Le biais d’information partagée est un biais qui pourrait être confondu avec le
biais de la Loi de futilité mais qui est subtilement différent : c’est la tendance des
membres d’un groupe à consacrer plus de temps et d’énergie à discuter
d’informations que tous les membres connaissent déjà (c’est-à-dire les
informations partagées), et moins de temps et d’énergie pour discuter
d’informations dont seuls certains membres sont au courant. Selon plusieurs
études*, seules 18 % des informations « non partagées » (c’est-à-dire connues
d’une seule personne) sont évoquées lors de réunions de groupes alors que ce
taux est de 46 % pour les informations « partagées ». Cette tendance vient du
fait que bien que discuter des informations non partagées puisse être instructif,
les membres d’un groupe sont souvent motivés à discuter des informations
partagées afin de parvenir plus facilement à un consensus du groupe.
*Kenneth A. Merchant et Katharina Pick, “Blind spots, biases, and other pathologies in the Boardroom”,
Business Expert Press, 2012.
Le « paradoxe de l’âne de Buridan » nous dit qu’un âne se tenait devant un tas
d’avoine et un seau d’eau, mais il ne savait pas par quoi commencer. Il passa
tellement de temps à réfléchir et à se demander quel serait le meilleur choix qu’il
finit par mourir de faim et de soif.
Pour éviter ce biais, ne gardez que quelques options (2 ou 3 pas plus) car notre
cerveau se fermerait devant la multitude de choix et la complexité qui en
résulterait. Un peu comme les menus de restaurant surchargés qui deviennent
vite plus pénibles qu’alléchants.
La loi de Parkinson déclare que plus on se laisse de temps pour accomplir une
tâche donnée, plus on mettra de temps à accomplir cette tâche : « Tout travail
tend à se dilater pour remplir le temps disponible »*. Un peu comme la loi des
gaz : si vous diffusez un gaz dans une pièce de 50 m3, le gaz occupera les
50 m3. Mais si vous diffusiez ce même gaz dans une pièce de 5 m3, il occupera
les 5 m3. C’est le « volume du contenant » qui détermine « l’espace occupé par
le gaz ». La même chose se passe avec une tâche à accomplir : si vous vous
laissez 3 mois pour la faire, vous l’accomplirez en 3 mois. Mais si vous ne vous
laissez que 3 jours, vous l’accomplirez en 3 jours ! Et ce qui est vrai pour nos
tâches est aussi vrai pour nos décisions. Quand on ne limite pas nos décisions
dans le temps, on passe plus de temps à revoir nos options et à réfléchir encore
et encore, ce qui peut conduire à la paralysie !
*https://everlaab.com/loi-de-parkinson/
1. https://www.welcometothejungle.com/fr/articles/loi-futilite-temps-decision
LE BIAIS DE COURTOISIE
Ce biais se produit lorsque, de deux propositions, l’on préfère celle qui est a
priori la plus désavantageuse objectivement.
En 1995, la professeur Victoria Husted Medveca montra que les athlètes
qui venaient de remporter une médaille d’argent (deuxième place) avaient
tendance à être moins heureux que ceux qui venaient de remporter une
médaille de bronze (troisième place). Cela s’explique par l’idée que les
médaillés d’argent avaient l’impression d’avoir manqué une médaille d’or
« de peu », tandis que les médaillés de bronze avaient au contraire
l’impression qu’ils avaient eu de la chance d’être au moins parmi les trois
nalistes sur le podium, évitant de justesse de ne rien gagner du tout !
Au cours d’une étude1 célèbre menée en 1998 dans une grande université
du Midwest américain, 83 étudiants ont été invités à remplir un
questionnaire. On leur demandait d’imaginer qu’un ami leur avait offert un
manteau à 55 $ dans un magasin où les manteaux coûtaient entre 50 et
500 $, ou bien qu’il leur avait offert une écharpe en laine à 45 $ dans un
magasin où les écharpes coûtaient entre 5 et 50 $. Lorsqu’on leur a demandé
leurs réactions relatives aux deux scénarios, les participants ont dit qu’ils
seraient plus touchés par le cadeau de l’écharpe qu’avec celui du manteau car
l’achat de l’écharpe re éterait une plus grande générosité. On note donc que
« si les personnes qui offrent quelque chose veulent être perçues comme
généreuses, il est préférable pour elles de donner un article de relativement
grande valeur dans une catégorie de produits de faible valeur (par exemple le
foulard de 45 $ alors que le plus cher coûte 50 $) plutôt qu’un article de
faible valeur dans une catégorie de produits de grande valeur (par exemple
un manteau à 55 $ alors que le plus cher coûte 500 $). »
Il a été observé que lorsque les consommateurs évaluent les objets
isolément, ils les comparent souvent à d’autres objets de la même catégorie.
« En évaluant un cadeau, les gens ne sont donc pas vraiment sensibles au
prix réel du cadeau, ni à la catégorie de ce cadeau (un manteau ou une
écharpe), mais ils sont plus sensibles à la “position relative” du cadeau dans
sa catégorie. »
Cet effet peut avoir d’autres applications pratiques dans la vie : par
exemple, si un conférencier estime qu’une cinquantaine de personnes
assisteront à son discours, il ferait mieux de le tenir dans une petite salle,
avec 50 sièges voir moins, plutôt qu’une grande salle de plus de 100 places.
L’effet de la petite salle « où tous les sièges sont occupés » aura un effet plus
positif sur son image que le même nombre d’assistants mais avec 50 sièges
vides. Autre exemple, un chocolatier fera mieux de vendre une boîte
contenant 24 bonbons de qualité supérieure, plutôt qu’une boîte contenant
les mêmes 24 bonbons auxquels il aurait ajouté 16 bonbons de qualité
inférieure.
1. Christopher K. Hsee, « Moins c’est mieux : lorsque les options à faible valeur sont plus valorisées
que les options à valeur élevée », 1998.
LE BIAIS DE DISTINCTION
Vous écoutez les informations, et vous entendez deux infos : « Un enfant
de 11 ans est grièvement blessé après s’être fait attaquer par un requin » ;
« Un surfeur héroïque sauve un garçon de la noyade face à un requin ». Si
après cela on vous demande : « Qu’en pensez-vous, un requin est-il plus
dangereux qu’un chien ? » À cause du « biais de disponibilité », il y a de
fortes chances que vous répondiez « oui » !
En effet, ce biais cognitif est la tendance à privilégier l’information qui est
« disponible » rapidement à notre mémoire, aux dépens d’une « analyse »
plus pointu de la situation. Ce biais conduit donc les individus à confondre
« la validité » d’une idée avec « la facilité » avec laquelle cette idée leur vient
à l’esprit. Dans notre exemple du requin et du chien, comme vous venez
d’entendre deux informations qui appuient l’idée qu’un requin est
dangereux, votre esprit vous dicte qu’il est forcément plus dangereux qu’un
chien. Pourtant, selon le CDC Wonder (Centers for Disease Control and
Prevention), le chien tue en moyenne 28 Américains par an, et le requin ne
tue annuellement en moyenne qu’un seul Américain !
Le biais de disponibilité nous fait surestimer les informations
immédiatement disponibles (par facilité) à notre mémoire, en particulier
lorsqu’elles sont stéréotypées, comme dans le cas du requin dont l’image est
fortement faussée par les lms. Ce biais cognitif fait partie de ceux qui
expliquent l’existence, la persistance, la propagation et l’adhésion aux
phénomènes des « fake news ». La répétition d’une information, même
fausse, occupe la mémoire et devient la conclusion à laquelle on accède le
plus rapidement dans notre esprit.
On comprend donc que la bonne solution, la réponse la plus pertinente ou
la meilleure opinion, ne sont pas nécessairement celles qui nous viennent
toujours en premier à l’esprit ! C’est pour cela que la publicité est très
présente autour de nous et nous sursollicite en permanence, car les marques
souhaitent que l’on se souvienne facilement et rapidement d’elles au moment
où on doit choisir un produit.
Un autre cas ou le biais de disponibilité peut agir est une situation de stress
intense, ou la panique peut nous faire prendre des risques inconsidérés :
imaginons une personne dans un immeuble en feu, elle cherchera souvent à
descendre un escalier enfumé au lieu de se protéger et d’attendre les secours
dans un appartement calfeutré. Pourquoi ? Car sa « représentation mentale »
de l’escalier comme une éventuelle voie de sortie est prédominante et plus
facilement accessible dans son esprit, et elle prend le dessus sur d’autres
éléments comme le fait que la fumée soit toxique, que l’escalier peut
s’effondrer, etc.
Faites le test, et amusez-vous à demander à quelqu’un de nommer
rapidement un animal, une eur, une couleur et un outil. Les réponses
seront très souvent « chien/chat, rose/rouge ou bleu, marteau »1. Ce sont ces
éléments-là qui sont les plus rapidement disponibles dans notre esprit. Et si
vous demandez de nommer un oiseau, pratiquement personne ne nomme la
poule ! Pourquoi ? Parce que la caractéristique d’un oiseau qui prime dans
notre esprit est de voler, or, on ne pense pas de suite à ça quand on parle de
la poule qui pourtant est un oiseau.
Une autre expérience consiste à lire à des personnes une liste de 40 noms à
la suite, comportant de façon aléatoire 20 noms de femmes célèbres et 20
noms d’hommes peu connus. Si on leur demande ensuite de dire s’il y a plus
d’hommes que de femmes dans la liste, la très grande majorité répond qu’il y
a plus de femmes ! Pourtant il y en a bien 20 de chaque. Mais les noms
célèbres étant plus disponibles dans notre esprit que les noms qui le sont
moins, nous avons l’impression qu’ils sont plus présents dans la liste.
Notons que ce biais ne mène pas forcément à des conclusions erronées.
Dans de nombreux cas, il permet de mener un raisonnement efficace, et de
résoudre des problèmes complexes rapidement. Mais parfois, il est
préférable et utile d’effectuer une ou deux recherches sur la question à traiter,
a n d’avoir toutes les informations disponibles en sa possession et de ne pas
tirer de conclusion hâtive.
1. http://psychologue-adultes-couples.com/le-biais-de-disponibilite/
LA FIXITÉ FONCTIONNELLE
EXERCICE
Que voyez-vous dans une tasse à thé, à part un récipient pour boire du thé ?
Avec un peu d’imagination, elle peut devenir un presse-papiers, un chandelier,
une tirelire, un emporte-pièce, un pot de fleurs, un pot à crayons, une mangeoire
pour oiseaux et même un amplificateur de son pour téléphone !
La pratique régulière de cet exercice permet de développer notre capacité à
penser de manière créative. Elle encourage ce qu’on appelle « la pensée
divergente », terme défini en 1967 par le psychologue américain J. P. Guilford. La
pensée divergente est le contraire de « la pensée convergente », qui se
concentre sur la recherche d’une solution unique. La pensée divergente est un
processus créatif dans lequel un problème est résolu avec des méthodes qui
s’écartent de celles couramment utilisées.
1. Lorsque le test est présenté avec les punaises sorties de la boîte et posées sur la table à côté de la
boîte vide, à peu près tous les participants trouvent la solution. Mark Arkell, (2 janv. 2012), Dan Pink
on the surprising science of motivation [Vidéo], YouTube. https://youtu.be/esvaP9LehB4
LE BIAIS D’OMISSION
Il y a un chariot fou qui dévale la voie ferrée ! Plus bas, sur les rails, il y a 5
personnes ligotées et incapables de bouger. Le chariot se dirige droit sur
elles ! Vous vous tenez à une certaine distance dans la gare de triage, à côté
d’un levier. Si vous tirez sur ce levier, le chariot passera sur d’autres rails.
Mais vous remarquez qu’il y a une personne également ligotée sur celle-ci.
Vous avez alors 2 options :
1
. Ne rien faire, auquel cas le chariot tuera les 5 personnes sur la voie
principale.
2
. Tirez le levier, détournant le chariot sur l’autre voie où il tuera une
personne.
Quelle est l’option la plus éthique ?
Ce dilemme est appelé le « problème du chariot » et fait partie d’une série
d’expériences de pensée en psychologie, impliquant des dilemmes d’éthiques
tentant de savoir s’il faut sacri er une personne pour en sauver un plus
grand nombre. Le problème met aussi en évidence le biais d’omission : la
tendance à favoriser une inaction (même si elle cause du tort) plutôt qu’une
action, qui cause elle aussi du tort. Considérer qu’une inaction nuisible est
moins grave moralement qu’une action nuisible.
Prenons un exemple utilisé par les psychologues Spranca, Minsk et Baron
en 1991 dans une étude : John est un joueur de tennis qui doit affronter
demain un adversaire coriace pour un match décisif ! John est au restaurant
de l’hôtel où dîne également son adversaire, et il sait que ce dernier est
allergique aux noix. Première option, John demande au cuisinier de l’hôtel
de mettre des noix dans la soupe de son adversaire. Deuxième option, John
remarque que son adversaire est sur le point de manger des noix sans s’en
rendre compte, mais décide de ne pas le prévenir. Quelle situation est la
moins immorale ? Un grand nombre des participants à l’étude a estimé que
la deuxième option, celle où John n’intervient pas, était la moins immorale.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
LE BIAIS D’IMPACT
1. http://psycheo.fr/science-bonheur-dan-gilbert/
L’ILLUSION DE LA FIN DE L’HISTOIRE
A
Actualisation hyperbolique/biais du présent 141
Anthropomorphisme/la personni cation 283
Appel à la nouveauté 256
Aversion à la perte 55, 57, 61-64, 192, 307
B
Biais d’ancrage 34-39, 207
Biais d’associations
implicites 41
Biais d’attentes exagérées 87
Biais d’attention 17, 285-286
Biais d’attribution
de traits 178
Biais d’attribution hostile 183-184
Biais d’automatisation 189
Biais d’autorité 186, 188-189
Biais de cécité botanique 292
Biais de cohérence 270-272
Biais de compensation du risque 252
Biais de complaisance 181, 261
Biais de con rmation 137, 241-242, 244-247
Biais de congruence 246
Biais de conjonction 78
Biais de continuation
du plan 55
Biais de courtoisie 314
Biais de croyance 296
Biais de désirabilité sociale 89
Biais de disponibilité 319-320
Biais de distinction 317-318
Biais de gain de temps 280
Biais de groupe 100, 103, 105
Biais de la fausse unicité 262
Biais de l’angle mort 16, 161
Biais de l’historien 238
Biais de l’unité 307
Biais de motivation extrinsèque 166
Biais de négativité 173-176
Biais de normalité 152-153
Biais de pessimisme 87
Biais de projection 262
Biais de rationalisation 271
Biais de recul visuel 237
Biais de retenue 83
Biais de rétrospection
rose 168
Biais de saillance 147
Biais des coûts
irrécupérables 54, 61
Biais de statu quo 192
Biais de stéréotype 42
Biais de supériorité
illusoire 97
Biais d’évaluation des probabilités 75
Biais d’excès de con ance 82, 252
Biais d’ignorance
pluraliste 262
Biais d’impact 328-329
Biais d’information 311, 313
Biais d’information
partagée 311
Biais d’intentionnalité 184
Biais d’omission 326
Biais d’optimisme 87-88
Biais du risque zéro 65
Biais du scénario du pire 153
Biais du survivant 110-114
Biais égocentrique 259-261, 263-264
Biais intéroceptif 219
Biais mnésique associé à l’humeur 257
Biais pro-innovation 255
Biais puritain 179
Biais régressif 139
Biais rétrospectif 235-237
Bosse de réminiscence 169
C
Cécité d’inattention 287-289, 291
Comparaison sociale 154
Confabulation 229
Confusion des sources 225
Corrélation illusoire 115, 185
Cryptomnésie 230
D
Déclinisme 169
Déformation
professionnelle 325
Dévaluation réactive 167
Dilution de
responsabilité 101
E
Écart d’empathie 219, 221-222
Effet acteur/observateur 177
Effet autruche 149-150, 152
Effet Baader-Mainhof 137
Effet Barnum 21-24
Effet Benjamin
Franklin 135-136
Effet boomerang 248
Effet bouba-kiki 140
Effet cocktail party 290
Effet d’ambiguïté 67
Effet d’autoréférence 170
Effet de bizarrerie 147
Effet de cadrage 69-70, 72
Effet de choix par défaut 267
Effet de compensation
morale 251
Effet de contexte 148
Effet de contraste 275-278
Effet de dénomination 273
Effet de désinformation 225
Effet de difficulté de traitement 232
Effet de dissonance
cognitive 192
Effet de dotation 62-63
Effet de faux consensus 261-262, 264
Effet de focus 39-40
Effet de génération 170
Effet de halo 26-30, 34, 97, 189
Effet de la rime
comme raison 134
Effet de leurre 265-266
Effet de longueur de liste 206
Effet de modalité 207
Effet de mode 190
Effet de positivité 175
Effet de primauté 207, 209
Effet de projecteur 198
Effet de proximité 197
Effet de race 45
Effet de rareté 61
Effet de rebond 46
Effet de récence 206-207
Effet de simple exposition 194-197
Effet de singularité 171
Effet d’espacement 231
Effet de supériorité
de l’image 208
Effet de télescopage 217
Effet de testing 233
Effet de train en marche 190
Effet de train inversé 191
Effet de vérité illusoire 128-129, 133
Effet de victime identi able 171-172
Effet d’humour 145, 147
Effet difficile-facile 84
Effet d’in uence continue 131-132
Effet du chemin familier 282
Effet du mot sur le bout de la langue 303
Effet Dunning-Kruger 94-95
Effet du témoin 101
Effet Einstellung 325
Effet expérimentateur 295
Effet Golem 300
Effet Google 232
Effet IKEA 126
Effet Lady MacBeth 254
Effet « les femmes sont formidables » 214
Effet « MacGyver » 127
Effet Mandela 227
Effet moins c’est mieux 315
Effet Peltzman 212
Effet pire-que-la-moyenne 85
Effet pom-pom girl 125
Effet Pygmalion 299-300
Effet retour de amme 242
Effet réverbère 247
Effet Semmelweis 93
Effet SnackWell 251
Effet troisième personne 164
Effet von Restorff 147
Effet waouh 147
Effet Woozle 133
Effet Zeigarnik 305-306, 308
Erreur d’attribution
de groupe 182
Erreur de la main chaude 79
Erreur de l’historien 237-238
Erreur de plani cation 308
Erreur du parieur 80
Erreur fondamentale d’attribution 177, 179
Erreur ultime
d’attribution 182
Escalade irrationnelle 57
F
Fausse mémoire autobiographique 235
Faux souvenir 224, 226-228, 302
Fixité fonctionnelle 322-323
H
Hypnose de l’autoroute 293
Hypothèse du monde
juste 179
I
Illusion de connaissance asymétrique 204
Illusion de contrôle 90-92
Illusion de la n
de l’histoire 331
Illusion de récence 206
Illusion des séries 80
Illusion de transparence 198-199, 204
Illusion d’introspection 162-163
L
Loi de futilité
de Parkinson 310
Loi de l’instrument 324
Loi de Poe 199
Loi de Weber-Fechner 75
M
Malédiction de la connaissance 200
N
Négligence de la taille de l’échantillon 76
O
Oubli de la fréquence
de base 77
P
Paradoxe de Berkson 119-120
Paréidolie 122, 124
Pensée de groupe 103, 105, 107
Perception sélective 241, 285
Procrastination 143, 308
R
Réactance 248-249
Réalisme naïf 161-162
Règle pic- n 210
S
Suggestibilité 225, 301-302
Syndrome de l’imposteur 154, 156, 159
Syndrome de Travis (ou le snobisme chronologique) 168
T
Transfert illicite 160
Tunnel de réalité 243
V
Validation subjective 22
ISBN : 9782380156669
Dépôt légal : février 2022